Chap Ii
Chap Ii
Chap Ii
Classification
Grace à la coloration de référence de l’amibe au moyen de l’hématoxyline ferrique, il
est possible de distinguer 04 genres parmi les amibes de l’homme :
Le genre Entamoeba : noyau à petit caryosome central ou excentré et à chromatine
périphérique
Le genre Endolimax : noyau à membrane nucléaire mince sans chromatine périphérique
Le genre Pseudolimax : noyau vésiculeux à membrane nucléaire très mince avec un
caryosome central volumineux entouré de granules achromatique
Le genre Dientamoeba : 1 ou 2 noyaux vésiculeux, la membrane nucléaire mince et
caryosome formé de plusieurs granules.
I. LE GENRE ENTAMOEBA
E. histolytica est la seule espèce pathogène pour l’homme. La forme non pathogène
(appelée autrefois forme minuta) ne peut être morphologiquement différenciée d’E. dispar à
l’examen microscopique des selles, amibe commensale du tube digestif de l’homme comme
les autres espèces d’amibes retrouvées dans le tube digestif de l’homme. Les 2 espèces sont
1
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
reconnues distinctes depuis 1997. Elles ont été différenciées sur des critères biochimiques,
immunologiques et génétiques.
Sur le plan biochimique, le profil électrophorétique des isoenzymes sécrétées a permis de
définir 23 zymodèmes différents (les zymodèmes sont définis par les izoenzymes, c’est-à-dire
les enzymes ayant une activité similaire sur le même substrat mais dont les propriétés
physico-chimiques sont différentes, notamment le profil de migration électrophorétique).
Neuf zymodèmes sont toujours associés à une entamœbose clinique.
Sur le plan immunologique, il a été démontré que la lectine d’E.histolytica, qui est une
adhésine, est immunogène contrairement à celle d’E.dispar (différenciation des 2 espèces par
des tests immunologiques).
Sur le plan génétique, des différences de séquences entre les souches pathogènes et
non pathogènes ont été mises en évidence.
1. Morphologie
L’amibe est un protozoaire mobile grâce aux excroissances cytoplasmiques (ou
ectoplasmiques), appelés pseudopodes, qu’elle émet pour effectuer ses déplacements. Les
pseudopodes rétractiles donnent un aspect changeant à la morphologie cellulaire et le terme
amibe veut dire « corps qui se remplace ». On distingue trois formes : L’amibe pathogène
qui se présente sous forme végétative ou trophozoïte. Elle est fragile, sensible à la
dessiccation et ne peut être identifiée que dans les selles fraîchement émises. Elle possède des
caractéristiques morphologiques qui permettent d’en poser le diagnostic :
- Taille : 20-40µm ;
- Noyau sphérique de 4-7µm caractérisé par une couche de chromatine fine et régulière à la
périphérie avec un petit caryosome central ;
- Cytoplasme avec une zone centrale granuleuse, appelée endoplasme, au sein duquel
existent des hématies phagocytées, et une zone périphérique hyaline dénommée ectoplasme ;
- Présence de longs pseudopodes qui lui permettent d’assurer sa mobilité dite en « limace ».
Cette description est pathognomonique de la forme pathogène qui est responsable de la
dysenterie amibienne
2
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
.
Figure 2.1: Selles : Entamoeba histolytica - forme végétative hématophage contenant des
hématies (20-40μm)
3
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
Figure 2.2: Schémas morphologiques d’E. histolytica et d’E. coli
2. Habitat et Nutrition
E. histolytica se multiplie dans la paroi du côlon. Elle se présente dans la sous
muqueuse ; a un pouvoir nécrosant lytique et se nourrit de globules rouges et de matières
organiques.
La forme non pathogène se nourrit essentiellement de matières organiques. Ces
espèces peuvent essaimer en empruntant le système vasculaire et arriver au niveau du foie,
des poumons ou de la peau. Elles peuvent survivre 8 à 15 jours dans le sol humide et 5 à 15
jours dans les fosses septiques.
B. Mode de contamination
Le kyste est la forme infectante de l’amibe. L’homme se contamine par voie orale en
ingérant le kyste directement (d’homme à homme) par les mains sales (maladies des mains
sales) ou indirectement en ingérant des aliments (aliments crus, fruits) ou de l’eau souillés par
les déjections d’individus infectés ou par les pratiques sexuelles (anales). Les aliments
peuvent également être contaminés par les mouches qui jouent un rôle mécanique (rôle de
transport passif du kyste).
4
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
C. Cycle biologique
L’homme est l’hôte définitif et le réservoir du parasite par le portage des kystes. Il
existe aussi un réservoir tellurique pour le kyste. Le cycle est direct chez l’homme, et l’amibe
est un parasite monoxène. Le cycle peut se dérouler selon deux modalités : un cycle non
pathogène et un cycle pathogène.
5
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
Figure 2.4: Cycle biologique d’Entamœba histolytica
D. Facteurs favorisants
Certains facteurs de l’hôte, locaux ou généraux, ou du parasite sont incriminés dans le
passage de la forme non pathogène à la forme pathogène.
- Facteurs locaux susceptibles de provoquer une irritation mécanique du côlon: alimentation
(épices, alcool), purgation, modification de la flore bactérienne intestinale (salmonelles), et
des parasites intestinaux (Giardia, helminthes).
- Facteurs généraux responsables d’une augmentation de la vulnérabilité de l’hôte : stress,
refroidissement, surmenage, corticothérapie ;
- Facteurs parasitaires : pathogénicité des souches ;
6
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
- Autres: péril fécal, utilisation de l’engrais humain (facteur agricole).
Il est probable qu’une combinaison de plusieurs facteurs, encore incomplètement élucidés,
favorisent le passage à la pathogénicité.
L’absence d’hygiène, fécale et hygiène individuelle, l’abondance des mouches, les cafards, le
climat chaud et humide favorisent la survie et le transport des kystes.
III. Physiopathologie
E. histolytica possède des protéines associées à la virulence :
- une lectine qui intervient dans l’adhérence de l’amibe aux entérocytes ;
- un peptide qui provoque la perforation de la membrane cellulaire et la destruction des
cellules hôtes ;
- des protéases sécrétées qui dégradent les tissus de l’hôte.
L’amibe envahit ainsi le tissu sous-muqueux où elle se multiplie activement. A l’aide
de ses enzymes protéolytiques, elle lyse le tissu, érode les vaisseaux capillaires, phagocyte les
débris cellulaires et les hématies. Il en résulte une inflammation locale avec œdème, une
hypersécrétion des cellules à mucus (cause des selles glaireuses), une ulcération de la
muqueuse colique, « ulcérations en coup d’ongle » avec possibilité d’hémorragie; des plages
de nécrose, des micro-abcès en « bouton de chemise », et parfois une perforation intestinale,
une irritation des plexus nerveux de Meissner et de Auerbach, une accélération du
péristaltisme intestinal. Ces mécanismes physiopathologiques sont à l’origine du syndrome
dysentérique. Au niveau du foie, la lyse centrifuge des cellules hépatiques provoque des
micro-abcès qui confluent pour constituer un abcès.
7
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
Figure 2.5: Physiopathologie, abcès amibien du côlon
8
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
guérir spontanément. A l’inverse, les volumineux abcès hépatiques ont un pronostic
généralement sombre.
Amibiase pleuro-pulmonaire : elle est presque toujours secondaire à une atteinte hépatique.
Il s’agit au début de manifestations réactionnelles non suppurées puis de lésions suppurées.
L’abcès amibien du poumon résulte généralement d’un abcès hépatique et siège presque
toujours à la base droite. Il s’évacue parfois par une vomique « chocolat».
B. Modifications séro-hématologiques
Elles sont présentes dans l’abcès hépatique.
Hémogramme : hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles, VS accélérée, peut être
supérieure à 100mm à la première heure.
C. Diagnostic parasitologique
Il permet le diagnostic de certitude de l’entamœbose intestinale.
1. Prélèvements
Crachats rectaux ou selles glairo-sanguinolentes (ou encore des selles diarrhéiques)
fraichement émises ou recueillis au décours d’une rectoscopie. Prélèvement sous coloscopie.
2. Techniques
Examen microscopique direct, entre lame et lamelle des prélèvements.
Examen des selles après coloration au MIF (merthiolate-iode-formol).
Plusieurs techniques peuvent être utilisées : la technique du Ritchie, la technique de
MIF concentration.
Culture sur milieux diphasiques : Dobell et Laidlaw.
Ponction à l’aiguille sèche en cas d’amibiase hépatique.
2. Intérêt
Porte sur le diagnostic parasitologique de l’entamœbose intestinale : simple, efficace.
9
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
3. Résultats / interprétation
Met en évidence la forme végétative : l’amibe mobile avec un pseudopode directionnel
qui se déplace comme une limace et contient des hématies. Cet aspect est pathognomonique.
Elle utile pour le diagnostic des formes invasives extra-intestinales. Elle met en
évidence les IgG sériques spécifiques.
Techniques sérologiques : agglutination des particules de latex, hémagglutination indirecte,
immunofluorescence indirecte, immunoélectrophorèse, ELISA. Elles ont une sensibilité et
une spécificité proches de 100% et sont particulièrement utiles pour le diagnostic de l’abcès
amibien du foie.
E. Imagerie médicale
Tomodensitométrie, échographie (permet de repérer les abcès et aussi de racler les
parois pour le diagnostic direct).
V. Principes thérapeutiques
B. Moyens
Ils sont essentiellement médicamenteux
10
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
Amoebicides tissulaires : 5 nitro-imidazolés actifs sur les formes intra-tissulaires du Parasite
dont le chef de file est le métronidazole. Présentation : comprimés à 250mg, 500mg,
suspension, flacon injectable.
Amoebicides de contact : agissent sur les formes intraluminales (lumière colique) dans le
tube digestif ; agissent sur les formes kystiques mais pas les formes histolytica parce que ces
médicaments ne diffusent pas dans les tissus.
Autres moyens : drainage de l’abcès ou chirurgie en cas de localisation extra-colique très
volumineuse.
C. Indications thérapeutiques
1. Entamœbose intestinale aiguë :
- Métronidazole 7-10 jours, ou tinidazole 5 jours (élimine le trophozoïte)
- puis, amoebicide de contact : Tiliquinol- tilbroquinol (Intetrix®). Chez l’adulte, 600mg/ 2
fois/j, 10 j (élimine les kystes).
4. Amoebome
Le traitement sera à base de nitro-imidazolés
5. En cas de localisation secondaire (foie, poumon, cerveau)
On utilisera un nitro-imidazolé.
VI. Prévention
But : rompre la chaîne épidémiologique par les mesures de lutte contre le péril fécal.
A. Mesures individuelles
- Lavage systématique des mains, car l’entamœbose est une maladie des mains sales ;
- Hygiène des aliments à consommer : faire cuire ou laver sous fort jet d’eau ; protéger contre
les mouches ;
- Filtrer l’eau de boisson.
B. Mesures collectives
- Évacuations des excrétas : système d’égouts en ville, latrines en zone rurale ;
- Système d’approvisionnement en eau potable ;
- Traitement préalable de l’engrais humain avant usage ;
- Traitement ciblé des porteurs sains de kyste d’Entamoeba histolytica/dispar, par des
amoebicides de contact : Tiliquinol- tilbroquinol (Intétrix®) ; Communication pour le
changement de comportement (CCC).
Résumé
L’entamœbose est une affection parasitaire fréquente. Le diagnostic de l’entamœbose
intestinale reste parasitologique par l’examen direct des selles ou crachats rectaux fraîchement
émis. Les nitro-imidazolés constituent un arsenal thérapeutique efficace. La prévention passe
par l’adoption définitive des mesures d’hygiène et la lutte énergique contre le péril fécal.
Conclusion
L’entamœbose est une parasitose intestinale grave par ses formes invasives. Son
diagnostic doit être évoqué devant tout syndrome dysentérique chez un sujet vivant en zone
d’endémie.
12
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.
AUTRES AMIBES NON PATHOGENES PARASITES DU TUBE
DIGESTIF DE L’HOMME
Entamoeba coli dont la forme végétative mesure 20 à 30µm avec des pseudopodes arrondis
et larges. Le noyau est bien visible avec un caryosome épais et une chromatine périphérique
épaisse et irrégulière. Son kyste est arrondi, mesurant 15 à 25µm. Il possède 8 noyaux avec
des cristalloïdes fins.
Entamoeba hartmanni : La forme végétative mesure 5 à 10µm. Son noyau est peu visible
avec un gros caryosome irrégulier et une chromatine périphérique épaisse et irrégulière. Son
kyste mesure 3 à 8 µm avec à maturité 4 noyaux et des cristalloïdes fins.
Endolimax nana : La forme végétative mesure 5 à 12µm avec des pseudopodes en forme de
boule. Le noyau est peu visible avec un gros caryosome irrégulier et excentré. La chromatine
est rarement visible. Son kyste mesure 6 à 10µm. Il est ovoïde et présente 4 noyaux.
Entamoeba polecki : La forme végétative mesure 10 à 20µm avec des pseudopodes arrondis
et présence de 2 noyaux présentant un caryosome central en forme de granules. Le kyste
mesure 10 à 15µm avec un noyau et présence de nombreux cristalloïdes.
Dientamoeba fragilis pourrait être pathogène chez les immunodéprimés.
Pseudolimax. Manifestations cliniques : au plus une diarrhée. Traitement : amoebicide de
contact.
13
Cours rédigé par M. YOUMSSIE.D. Chercheur en biochimie Nutritionnelle, Technicien
de laboratoire.