2022TOU30250a Cuticue Cristaux Liquides

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Polymères cristaux liquides biomimétiques reproduisant

la carapace de scarabées du genre Chrysina :


élaboration, structure et propriétés optiques
Cécilia Boyon

To cite this version:


Cécilia Boyon. Polymères cristaux liquides biomimétiques reproduisant la carapace de scarabées du
genre Chrysina : élaboration, structure et propriétés optiques. Matériaux. Université Paul Sabatier -
Toulouse III, 2022. Français. �NNT : 2022TOU30250�. �tel-04060401�

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abroad, or from public or private research centers. publics ou privés.
THÈSE
En vue de l’obtention du
DOCTORAT DE L’UNIVERSITÉ DE TOULOUSE
Délivré par l'Université Toulouse 3 - Paul Sabatier

Présentée et soutenue par


Cécilia BOYON

Le 24 novembre 2022

Polymères cristaux liquides biomimétiques reproduisant la


carapace de scarabées du genre Chrysina : élaboration, structure
et propriétés optiques

Ecole doctorale : SDM - SCIENCES DE LA MATIERE - Toulouse

Spécialité : Physique de la Matière


Unité de recherche :
CEMES - Centre d'Elaboration de Matériaux et d'Etudes Structurales

Thèse dirigée par


Michel MITOV

Jury
M. Jean-François HENNINOT, Rapporteur
M. Emmanuel BELAMIE, Rapporteur
Mme Emmanuelle LACAZE, Examinatrice
M. Michel MITOV, Directeur de thèse
M. Bernard VIGUIER, Président
Polymères cristaux liquides biomimétiques
reproduisant la carapace de scarabées du genre
Chrysina : élaboration, structure et propriétés
optiques

Cécilia Boyon
Je plie, et ne romps pas.
Jean de La Fontaine
Remerciements

Ces trois années de thèse ont été particulièrement riches en émotions (peut-être trop) !
J’ai maintenant l’occasion de remercier toutes les personnes qui m’ont donné la force
d’avancer jusqu’à la concrétisation d’un rêve de longue date : être Docteur.

Tout d’abord, je remercie mon directeur de thèse, Michel Mitov, pour sa grande dis-
ponibilité et ses conseils. Et surtout, merci de m’avoir rendue bien plus forte que je ne
l’ai jamais été.

Je souhaite aussi grandement remercier les membres de mon jury de thèse : mes rap-
porteurs, Emmanuel Belamie et Jean-François Henninot, mon examinatrice, Emmanuelle
Lacaze, et le Président de mon jury, Bernard Viguier. Merci d’avoir évalué mon travail,
ainsi que pour vos conseils et vos questions très intéressantes lors de ma soutenance.

Pour mener à bien ce travail, j’ai collaboré avec différentes personnes que je tiens à
remercier pour toute l’aide qu’ils nous ont apportée. Merci à Vanessa Soldan du Centre
de Biologie Intégrative de Toulouse qui a acquis les images MET de nos échantillons et
qui a donc énormément contribué à l’obtention des résultats structurels. J’aimerais aussi
remercier Sébastien Moyano qui nous a beaucoup aiguillés sur la réalisation des mesures
de réflectance et qui nous a épaulés dans l’acquisition de celles-ci.

J’adresse un immense merci au bureau de l’École Doctorale, en particulier à Éric


Benoist et à Joël Douin. Ma gratitude va également à la direction du CEMES, notamment
à Alain Couret et à Bénédicte Warot-Fonrose. Je vous serai éternellement reconnaissante
de vous être autant investis tous les quatre pour que je puisse aller au bout de ma thèse.
Merci de votre confiance, de votre soutien et de votre aide très précieuse. Merci Joël
d’avoir été autant présent et à l’écoute.

Je souhaite remercier le groupe NeO pour leur accueil et leur soutien. Merci à Arnaud
Arbouet, à Aurélien Cuche et bien sûr à Gonzague Agez. Merci infiniment Gonzague pour
ton implication et tes conseils avisés. Tu m’as énormément aidée, autant scientifiquement
qu’humainement, lorsque j’en ai eu le plus besoin et ce, même de manière indirecte.

Un grand merci à celles et ceux qui ont rendu ces trois années au CEMES agréables par
leur bienveillance et leur sympathie, notamment Guy Molénat, Cécile Marcelot, Aurore
Pruvost, Julien Lam, Élodie à l’accueil et Sylvie à la cantine.

5
REMERCIEMENTS

Je désire maintenant adresser mes sincères remerciements à mes amis du CEMES pour
leur présence à mes côtés et leur soutien sans faille. Vous avez été mon oxygène pendant
ces trois longues années.

Martin, merci de m’avoir toujours soutenue, écoutée et encouragée. Merci d’avoir été
là pour moi et de m’avoir prêté une oreille attentive lorsque je débarquais dans ton bureau
et que j’avais besoin de vider mon sac. Et bien sûr, merci d’avoir concrétisé ce si beau
projet qu’est l’association des doctorants. Je suis très fière de ce qu’on a bâti et ça restera
une expérience incroyable qui m’a beaucoup appris.

Benjamin, merci d’avoir été aussi bienveillant et à l’écoute depuis mon arrivée au
CEMES. Merci de m’avoir rapidement intégrée au labo, de m’avoir fait rire si souvent et
de m’avoir épaulée dans les moments difficiles. J’ai toujours passé d’agréables moments
avec toi et j’apprécie particulièrement ton empathie et ta franchise.

Sarah, merci de ton soutien et de ta gentillesse. Ta présence à mes côtés a été très
précieuse pendant ces trois longues années. J’ai adoré partager tous ces moments avec toi,
les fous rires qu’on a eus et les jeux de tarot qu’on a faits.

Clément, merci d’avoir été un véritable rayon de soleil au CEMES. Merci pour ton
enthousiasme et pour les discussions si enrichissantes que j’ai eues avec toi. J’espère qu’on
aura l’occasion de se revoir si je monte à Paris.

Paul, merci d’avoir été un super collègue de bureau sur qui j’ai pu compter. Merci de
m’avoir soutenue et merci pour les soirées inoubliables qu’on a passées tous ensemble chez
toi.

Lucas, merci de m’avoir si souvent remonté le moral, que ce soit avec des montages
délirants et géniaux ou avec des paroles réconfortantes. Je viendrai certainement te voir
au gîte un de ces jours.

Bertrand, merci pour toutes nos discussions agréables et ton entrain. Merci du soutien
que tu m’as apporté et d’avoir toujours le cœur sur la main.

Aurélien, merci pour ta gentillesse et ton humour qui m’ont bien aidée. Je te souhaite
bon courage pour la suite de ta thèse.

Un grand merci à Kilian, Julien, Laureen, Camille, Nicolas Bello et Nicolas Chery
pour leur soutien et leur bienveillance à mon égard. Je souhaite également remercier Elio,
Estefania, Loïc, Anaïs, Aïssam, Eloïse, Rémi, Romain et Leifeng, ainsi que les doctorants
fraîchement arrivés avec qui j’ai eu un très bon contact : Quentin, Afnan, Simon, Agathe,
Tom, Marine, Salomé, Hassan et Elie.

Laurene, merci de t’être montrée si disponible quand je revenais sur Marseille. Ça m’a
fait du bien de me confier à toi et de partager tous ces bons moments.

6
REMERCIEMENTS

Enfin, je tiens à remercier chaleureusement toute ma famille pour leur soutien et


j’aimerais remercier en particulier mes quatre piliers depuis toujours, mes deux petites
sœurs et mes parents.

Carla, ma sœur, merci d’être toujours disponible pour moi, même quand tu es overboo-
kée. Merci d’être dynamique, rassurante, optimiste. Merci de me compléter parfaitement
depuis qu’on est toutes petites. Tu es comme une jumelle pour moi. J’admire la formidable
jeune femme que tu es, intelligente, généreuse, honnête, déterminée et dévouée. Je suis
fière d’avoir une sœur comme toi. Tu as tout pour aller loin dans ta vie personnelle et
professionnelle, ta voie est toute tracée.

Cassandra, ma petite sœur, mon Poupou, merci d’avoir eu la maturité pour m’épauler
et être ma confidente ces dernières années. Merci d’être toujours souriante, bienveillante et
à l’écoute. Je suis très fière de la magnifique jeune femme que tu deviens. Je suis tellement
admirative de ton empathie, de ton intelligence, de ton honnêteté et de ta persévérance.
Quoi qu’il arrive, tu atteindras ton objectif d’aider et de prendre soin des autres, tu es
faite pour ça.

Maman, Papa, merci de m’avoir écoutée, comprise, rassurée, encouragée, conseillée,


aimée sans relâche depuis que je suis née. Merci de m’avoir toujours fait confiance et de
m’avoir soutenue dans tous mes choix. Merci pour vos discours motivants quand je doute,
merci de me prendre dans vos bras quand j’ai besoin d’être apaisée. Merci de trouver
les bons mots et de me parler toujours franchement, surtout quand je me trompe. Merci
d’être disponibles à toute heure du jour ou de la nuit. Merci de m’avoir donné la force de
finir cette thèse grâce à votre présence et votre soutien inconditionnel. Merci de m’avoir
appris à toujours faire le maximum et à persévérer, ça m’a bien été utile. Merci d’être des
parents exemplaires et des guides pour nous trois. Merci d’être sans cesse plein d’attention
et d’amour pour nous. Merci d’avoir fait tant de sacrifices, de toujours nous protéger et
de faire les meilleurs choix possible pour nous. Je vous aime.

Cette thèse est dédiée à toutes les personnes qui ont cru en moi et qui m’ont soutenue
durant ces trois dernières années, car elles ont grandement contribué à l’obtention de mon
Doctorat.

7
Table des matières

Liste des abréviations 13

Introduction générale 15

A Cristaux liquides, cuticules irisées et biomimétisme 19


I Les cristaux liquides 21
1 L’état cristal liquide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.1 Structure chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.2 Apparition d’une phase cristal liquide . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2 Les différentes phases . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.1 La phase nématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.2 La phase smectique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
2.3 La phase cholestérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.3.1 Chiralité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.3.2 Structure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.3.3 Pas cholestérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
2.3.4 Sens d’hélicité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
3 Propriétés optiques du cristal liquide cholestérique . . . . . . . . . . . . . . 28
3.1 Biréfringence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
3.2 Sélectivité en longueur d’onde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
3.3 Irisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
3.4 Sélectivité en polarisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
3.5 Pouvoir rotatoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
3.6 Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
4 Textures des cristaux liquides . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
4.1 Introduction aux textures optiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
4.2 Texture nématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
4.3 Textures cholestériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
4.3.1 Texture planaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
4.3.2 Texture homéotrope ou texture en empreintes digitales . . 35
4.3.3 Texture polygonale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
4.3.4 Texture en éventails . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

9
TABLE DES MATIÈRES

II Les cristaux liquides cholestériques biologiques 41


1 Structures photoniques biologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
1.1 Phénomènes optiques et couleurs dans la nature . . . . . . . . . . . 41
1.2 Couleurs structurelles dans les systèmes biologiques . . . . . . . . . 42
2 Organisation cholestérique dans la matière vivante . . . . . . . . . . . . . . 43
2.1 Composition et structure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
2.2 Propriétés physiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
2.3 Cas du fruit de Pollia condensata . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3 Étude de la cuticule des scarabées Chrysina . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
3.1 Composition de la cuticule des scarabées . . . . . . . . . . . . . . . 46
3.2 Structure cholestérique de la chitine . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
3.3 Cas de la cuticule de Chrysina gloriosa . . . . . . . . . . . . . . . . 47
3.3.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
3.3.2 Propriétés optiques de la cuticule du scarabée . . . . . . . 47
3.3.3 Textures des bandes vertes et argentées . . . . . . . . . . . 49
3.4 Cas de la cuticule de Chrysina aurigans . . . . . . . . . . . . . . . 50
3.4.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
3.4.2 Variétés de cuticules de Chrysina aurigans . . . . . . . . . 51
3.4.3 Propriétés optiques de la cuticule du scarabée . . . . . . . 51
4 Matériaux biomimétiques pour l’optique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
4.1 Définitions du biomimétisme et de la bio-inspiration . . . . . . . . . 53
4.2 Bio-inspiration des structures photoniques . . . . . . . . . . . . . . 54
4.3 Cristaux liquides biomimétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
4.3.1 Matériaux cholestériques bio-inspirés . . . . . . . . . . . . 55
4.3.2 Biomimétisme de la cuticule de Chrysina resplendens . . . 56
4.3.3 Biomimétisme de la cuticule de Chrysina gloriosa . . . . . 57

B Réplique de la cuticule du scarabée Chrysina gloriosa 59


III Choix de conception 61
1 Motivation du domaine de recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
2 Polymères cristaux liquides . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
2.1 Structures moléculaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
2.2 Caractéristiques des cyclosiloxanes cristaux liquides vitrifiables . . . 65
2.3 Caractéristiques des cyclosiloxanes cristaux liquides réticulables . . 66
2.3.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
2.3.2 Photopolymérisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
3 Élargissement de la bande de Bragg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
3.1 Empilement de couches : système multicouche . . . . . . . . . . . . 71
3.2 Diffusion thermique entre couches : système monocouche . . . . . . 72
4 Génération de motifs en surface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
4.1 Motifs de taille submillimétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
4.2 Motifs de taille millimétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
5 Bilan des choix de conception retenus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

10
TABLE DES MATIÈRES

IV Réplique hybride de la cuticule de Chrysina gloriosa 77


1 Matériaux et méthodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
1.1 Matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
1.2 Étude préliminaire du film CLC IR réticulable . . . . . . . . . . . . 77
1.2.1 Traitement du substrat en verre . . . . . . . . . . . . . . . 77
1.2.2 Conditions de photopolymérisation du film CLC IR . . . . 78
1.3 Protocole expérimental de la réplique hybride . . . . . . . . . . . . 80
1.3.1 Préparation des films CLC SG et CLC IR . . . . . . . . . 80
1.3.2 Fabrication de la réplique hybride . . . . . . . . . . . . . . 82
2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
3 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

V Réplique élastomère de la cuticule de Chrysina gloriosa 89


1 Matériaux et méthodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
1.1 Matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
1.2 Protocole expérimental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91
1.2.1 Traitement du substrat en verre . . . . . . . . . . . . . . . 91
1.2.2 Préparation des films CLC vert et CLC IR . . . . . . . . . 91
1.2.3 Fabrication de la réplique élastomère . . . . . . . . . . . . 93
2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
2.1 Film à motifs recuit pendant 15 minutes . . . . . . . . . . . . . . . 96
2.1.1 Aspect macroscopique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
2.1.2 Propriétés optiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
2.1.3 Propriétés structurelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
2.2 Film à motifs recuit pendant 4 heures . . . . . . . . . . . . . . . . . 104
2.2.1 Aspect macroscopique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104
2.2.2 Propriétés optiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104
2.2.3 Propriétés structurelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107
3 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
3.1 Anisotropie de la tension superficielle à l’origine des films à motifs . 110
3.1.1 Tension superficielle et viscosité . . . . . . . . . . . . . . . 110
3.1.2 Rapport de confinement et développement de l’hélice . . . 111
3.1.3 Caractère anisotrope de la tension superficielle . . . . . . . 113
3.2 Biomimétisme de la cuticule de Chrysina gloriosa . . . . . . . . . . 113
3.2.1 Comparaison avec la réplique vitreuse . . . . . . . . . . . 113
3.2.2 Biomimétisme de la cuticule du scarabée . . . . . . . . . . 114
3.3 Applications et perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116
4 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118

C Réplique de la cuticule du scarabée Chrysina aurigans 119


VI Réplique élastomère de la cuticule de Chrysina aurigans 121
1 Motivation du domaine de recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121
1.1 De l’observation... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121
1.2 ...à la bio-inspiration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123

11
TABLE DES MATIÈRES

2 Matériaux et méthodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124


2.1 Matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124
2.2 Étude préliminaire : interdiffusion des composés CLC or et CLN
dans le plan xy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124
2.3 Protocole expérimental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126
2.3.1 Traitement des substrats en verre . . . . . . . . . . . . . . 126
2.3.2 Préparation des films CLCs or et CLNs . . . . . . . . . . 126
2.3.3 Formation et polymérisation des films réflecteurs . . . . . 128
3 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
3.1 Propriétés optiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
3.1.1 Réflexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
3.1.2 Transmission . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134
3.2 Propriétés structurelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
3.2.1 Préparation des films pour la MET par ultramicrotomie . 136
3.2.2 Choix de l’approche pour l’analyse des images MET . . . 136
3.2.3 Régimes de structures chirales-achirales . . . . . . . . . . 140
4 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
4.1 Réflecteurs à structures chirales-achirales . . . . . . . . . . . . . . . 141
4.2 Bio-inspiration de la cuticule de Chrysina aurigans . . . . . . . . . 141
4.3 Capteurs temps-température . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143
5 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145

Conclusion générale 147

Bibliographie 151

12
Liste des abréviations

2D : Deux dimensions

3D : Trois dimensions

ADN : Acide désoxyribonucléique

AFM : Microscopie à force atomique

BHT : Butylhydroxytoluène

C : Carbone

CBI : Centre de Biologie Intégrative

CL : Cristal liquide

CLC : Cristal liquide cholestérique

CLN : Cristal liquide nématique

Cste : Constante

CVD : Dépôt chimique en phase vapeur

FIB : Sonde ionique focalisée

H : Hydrogène

IR : Infrarouge

IRG907 : Irgacure 907

MEB : Microscopie électronique à balayage

MET : Microscopie électronique à transmission

13
LISTE DES ABRÉVIATIONS

MO : Microscopie optique

N : Azote

O : Oxygène

P : Phosphore

PCL : Polymère cristaux liquides

PI : Photo-initiateur

PVA : Alcool polyvinylique

R&D : Recherche et développement

S : Soufre

SB : Silicon blue

SG : Silicon green

Si : Silicium

SN : Silicon nematic

SR : Silicon red

Tc : Température de clarification

Tf : Température de fusion

Tg : Température de transition vitreuse

TGV : Train à grande vitesse

UV : Ultraviolet

14
Introduction générale

Contexte du sujet. Les cristaux liquides (CLs), bien connus par leur utilisation dans
les écrans plats, sont en fait omniprésents dans la matière vivante. Ils désignent un état de
la matière ayant des propriétés intermédiaires entre un liquide et un solide cristallin, qui est
nécessaire pour un certain nombre de processus biologiques. Les CLs biologiques ont le plus
souvent une organisation moléculaire en hélice. Cette phase, observée pour la première fois
en 1888 par le botaniste autrichien Friedrich Reinitzer dans des dérivés du cholestérol, est
appelée cristal liquide cholestérique (CLC). Les CLCs ont la particularité d’être constitués
de molécules chirales qui induisent cet arrangement hélicoïdal. On retrouve notamment
l’organisation cholestérique dans l’ADN, dans le collagène des os ou des écailles de poisson,
dans la cellulose de la paroi cellulaire des plantes et dans la chitine des carapaces des
insectes et des crustacés [1].

Les CLCs sont à l’origine des couleurs irisées de la cuticule d’un grand nombre d’in-
sectes et de quelques fruits [2]. En effet, les cuticules mosaïquées (stries, taches, spots
ou pixels) possèdent de nombreuses propriétés optiques. La structure cholestérique de la
chitine produit notamment une réflexion sélective de la lumière, la longueur d’onde de
réflexion moyenne étant dépendante du pas hélicoïdal du CLC et de l’angle d’observation.
Les fonctions biologiques qui résultent de ces propriétés concernent la communication
optique, le camouflage ou la régulation thermique des animaux et des végétaux.

Dans ce travail, nous nous sommes particulièrement intéressés à la structure et aux


propriétés optiques de la cuticule constituée de chitine cholestérique de deux scarabées
du genre Chrysina : Chrysina gloriosa et Chrysina aurigans.

La cuticule du scarabée Chrysina gloriosa présente une alternance de bandes vertes et


de bandes argentées [3-7]. Les bandes argentées agissent comme des miroirs à large bande
qui réfléchissent toutes les longueurs d’onde de la lumière visible et du proche infrarouge
(IR). Les bandes vertes possèdent un réseau de micro-miroirs, appelés polygones, qui ré-
fléchissent également les longueurs d’onde du spectre visible au proche IR. Ces polygones
ont la particularité de focaliser la lumière en des motifs différents, spots ou anneaux, en
fonction de la longueur d’onde incidente [5]. Ces propriétés optiques des bandes de la cuti-
cule de Chrysina gloriosa proviennent de la structure cholestérique ayant une orientation
variable couplée à un gradient de pas hélicoïdal.

15
INTRODUCTION GÉNÉRALE

La cuticule du scarabée Chrysina aurigans, quant à elle, est uniformément dorée et


réfléchit les longueurs d’onde d’une partie du spectre visible et du proche IR, en raison
du gradient de pas dans l’arrangement cholestérique [8-11].

La nature semble avoir trouvé dans la structure cholestérique une voie intelligente
et économe à des questions scientifiques fondamentales et à des problèmes d’ingénierie
pour un large spectre de fonctions. Ainsi, les propriétés originales des CLCs biologiques
présents dans la cuticule de ces scarabées pourraient être une source d’inspiration pour
la fabrication de nouveaux matériaux en optique avancée.

Objectifs du travail. Ce travail de thèse consiste à élaborer par voie physique des films
minces de CLs afin de réaliser des répliques inédites de cuticules biologiques. Reposant sur
une approche biomimétique, la structure et les propriétés optiques des échantillons conçus
imitent celles de la cuticule des scarabées Chrysina gloriosa et Chrysina aurigans ou s’en
inspirent. On étudie la relation entre les voies d’élaboration des films minces de CLs, leurs
propriétés optiques et leur structure, en associant des techniques de microscopie complé-
mentaires et la spectroscopie. Ces nouveaux matériaux pourraient trouver des utilisations
pratiques en optique : communication optique, cryptographie visuelle, furtivité, guidage
de véhicules autonomes. Cette thèse est interdisciplinaire, se situant aux interfaces entre
physique de la matière molle, optique des milieux anisotropes, biologie et technologie de
matériaux avancés pour l’optique.

Pour concevoir des répliques de structures biologiques photoniques, des techniques


d’empreinte ou de moulage par voie chimique (méthodes sol-gel) ou physique (dépôt
plasma) sont typiquement utilisées [12]. Cependant, lorsque le terme de biomimétisme
est rencontré dans la littérature, il s’agit souvent de bio-analogies, de ressemblances géo-
métriques et texturales. Structurer et mettre en forme des CLs synthétiques à des fins
biomimétiques est la solution que nous choisissons pour former des répliques avec une
plus grande fidélité comparée aux voies traditionnelles. Les CLs sont tout trouvés pour
réaliser des structures multi-échelles et auto-organisées à trois dimensions (3D) [13]. En
effet, leurs propriétés physiques ne proviennent pas d’une impression de surface ou d’un
élément rapporté mais de la structuration interne et de la texturation externe du maté-
riau CL. Par cette voie, nous souhaitons produire des matériaux multifonctionnels aux
propriétés physiques inédites provenant de structures cholestériques que les approches
conventionnelles n’ont pas atteintes.

Reproduire des cuticules biologiques avec fidélité est particulièrement difficile car leurs
couleurs et leurs motifs discontinus doivent coexister dans un matériau avec une structure
cholestérique continue. Cela demande la mise en forme, dans une monocouche, de CLs à
structures torsadées complexes : à gradient de pas hélicoïdal à la place d’un pas mono-
tone et à orientation variable de l’axe hélicoïdal au lieu d’être constant dans l’espace. De
plus, l’utilisation optimale d’outils d’élaboration, d’étapes et de moyens en termes d’élé-
ments (non métalliques) est visée car nous souhaitons réaliser les versions synthétiques
des cuticules dans un esprit d’éco-conception.

16
INTRODUCTION GÉNÉRALE

Plan de la thèse. La première partie du manuscrit est dédiée à la présentation des CLs,
des CLCs biologiques et du biomimétisme. Le chapitre I est une description de l’état CL
avec ses propriétés structurelles et optiques, notamment les propriétés de la phase CLC.
Dans le chapitre II, l’organisation cholestérique dans la matière vivante et en particulier
dans les cuticules de Chrysina gloriosa et de Chrysina aurigans sera détaillée, puis on
abordera les matériaux biomimétiques pour l’optique.

La deuxième partie est consacrée à l’élaboration de la réplique de la cuticule de Chry-


sina gloriosa. Dans le chapitre III, on déterminera les différents choix de conception à
adopter, tels que les matériaux employés, les techniques d’élaboration et les paramètres à
prendre en compte. Le chapitre IV présentera l’élaboration et les propriétés d’une version
intermédiaire de la réplique, la version hybride de la cuticule avec des matériaux CLs vi-
trifiables et réticulables. Le chapitre V développera l’élaboration et les propriétés optiques
et structurelles de la version élastomère de la réplique de la cuticule dont les matériaux
CLs sont tous réticulables, leur structure étant susceptible d’être figée par photopolymé-
risation. On étudiera le rôle de la tension superficielle qui est à l’origine des motifs à la
surface de la réplique.

Enfin, la troisième partie décrira l’élaboration et les propriétés de la réplique élastomère


de la cuticule de Chrysina aurigans, ainsi que différents régimes de structures chirales-
achirales qui nous ont inspiré la fabrication de capteurs temps-température.

17
Première partie

Cristaux liquides, cuticules irisées et


biomimétisme

19
Chapitre I

Les cristaux liquides

1 L’état cristal liquide


L’état cristal liquide est un état de la matière, au même titre que les états cristallin,
liquide et gazeux. Découvert il y a à peine plus d’un siècle [14], cet état possède des
propriétés intermédiaires entre celles du solide cristallin et du liquide. On parle de cristaux
liquides (CLs), également appelés mésophases ou phases mésomorphes (du grec mesos qui
signifie intermédiaire et morphê qui signifie forme) [15].

1.1 Structure chimique


Un composé présentant une phase mésomorphe est constitué de molécules appelées
mésogènes. Ces molécules ont la particularité d’être anisotropes, c’est-à-dire que les pro-
priétés physiques du matériau qu’elles composent varient selon la direction. Au contraire,
un corps isotrope possède les mêmes propriétés dans toutes les directions : c’est le cas des
liquides.

La forme des mésogènes est le plus souvent allongée, en forme de bâtonnet. Ce sont
généralement des molécules organiques qui possèdent une région centrale rigide (la plupart
du temps composée de cycles benzéniques) et de chaînes latérales flexibles (figure I.1).
D’autres formes de mésogènes existent, notamment des molécules en forme de disque.

Figure I.1 – Structure chimique caractéristique d’un mésogène en forme de bâtonnet


avec X, un groupe central relié à deux cycles benzéniques (région centrale rigide), ainsi
que R et R’, deux groupes terminaux (chaînes latérales flexibles) [16].

21
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

1.2 Apparition d’une phase cristal liquide


L’état CL peut se manifester dans un composé selon l’un des mécanismes suivants :
• une variation de température : ce sont des CLs thermotropes ;
• une variation de concentration lors de la dilution du composé dans un solvant : ce
sont des CLs lyotropes ;
• les deux processus précédents cumulés : ce sont des CLs amphotropes.

Les CLs qui ont été utilisés pour ce travail de thèse sont thermotropes.

Dans le cas des CLs thermotropes, la phase CL apparaît entre la température de fusion
Tf et la température de clarification Tc (figure I.2). En-dessous de Tf , le composé est en
phase solide. Dans ce solide cristallin, les molécules sont arrangées de manière ordonnée :
elles présentent un ordre de position ainsi qu’un ordre d’orientation. Lorsque l’on chauffe
et que l’on dépasse Tf , le composé devient fluide avec un aspect laiteux et il présente
des couleurs irisées lorsqu’il est observé en lumière polarisée : il est en phase CL. Les
molécules présentent alors un ordre d’orientation mais un désordre de position. Si l’on
continue à chauffer, au-delà de Tc , le fluide devient complètement clair et moins visqueux.
Le composé est en phase liquide. L’arrangement des molécules est désordonné, que ce soit
en terme d’orientation ou de position.

Figure I.2 – La transition solide cristallin-cristal liquide se produit à Tf (point de fusion)


et la transition cristal liquide-liquide isotrope se produit à Tc > Tf (point de clarification).

Les CLs sont ainsi des fluides anisotropes, un état intermédiaire entre solide cristallin
et liquide. Ils ont des propriétés anisotropes comme les solides cristallins et s’écoulent
comme les liquides.

22
2. LES DIFFÉRENTES PHASES

2 Les différentes phases


Les CLs sont classés en différentes phases en fonction de l’arrangement moléculaire
[17]. Les mésogènes en forme de bâtonnet sont en effet susceptibles de s’organiser selon
trois structures :
• la phase nématique (figure I.3a) ;
• la phase smectique (figure I.3b) ;
• la phase cholestérique ou phase nématique chirale (figure I.3c).

(a) (b) (c)

Figure I.3 – Représentation de l’organisation des molécules bâtonnets dans les structures
CLs (a) nématique, (b) smectique et (c) cholestérique [18].

2.1 La phase nématique


La phase nématique est la plus désordonnée des phases CLs. Les molécules n’ont pas
de position particulière dans les cristaux liquides nématiques (CLNs).

Comme évoqué précédemment, les mésogènes se déplacent librement comme dans un


liquide mais s’orientent selon une direction privilégiée. Les molécules sont ainsi alignées
parallèlement les unes aux autres. Cet ordre d’orientation est représenté par le vecteur
directeur ⃗n qui définit la direction moyenne d’orientation préférentielle des mésogènes
(figure I.4). La phase nématique est un milieu uniaxial dont l’axe de symétrie est parallèle
au vecteur directeur ⃗n.

23
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

Figure I.4 – Représentation de l’organisation des molécules bâtonnets en phase néma-


tique et du vecteur directeur ⃗n qui indique la direction moyenne d’orientation préférentielle
des molécules [19].

2.2 La phase smectique


La phase smectique, qui s’organise en couches, est plus ordonnée que la phase néma-
tique. Il existe différents types de phases smectiques, dont les deux principaux sont :
• la phase smectique A, dans laquelle les molécules sont alignées parallèlement les
unes aux autres comme dans la phase nématique, mais les centres de gravité des
molécules sont situés dans des plans régulièrement espacés (figure I.5a) ;
• la phase smectique C, dans laquelle les molécules sont également orientées parallè-
lement et disposées en couches, mais elles sont inclinées par rapport à la direction
perpendiculaire aux couches (figure I.5b).

(a) (b)

Figure I.5 – Représentation de l’organisation des molécules bâtonnets (a) en phase


smectique A et (b) en phase smectique C et de leur vecteur directeur ⃗n qui indique la
direction moyenne d’orientation préférentielle des molécules.

24
2. LES DIFFÉRENTES PHASES

2.3 La phase cholestérique


La phase cholestérique a été découverte en 1888 par le botaniste autrichien Friedrich
Reinitzer en observant des composés dérivés du cholestérol extraits de la racine de carotte,
d’où le nom donné à cette mésophase [14]. Elle est aussi nommée phase nématique chirale
car elle correspond à la version chirale d’un CLN.

Ayant été très majoritairement utilisés lors de ce travail de thèse, nous allons dévelop-
per plus en détail les caractéristiques des cristaux liquides cholestériques (CLCs).

2.3.1 Chiralité
Les molécules bâtonnets qui composent les CLCs ont la particularité d’être chirales.
Une molécule est chirale si elle n’est pas superposable à son image dans un miroir. À
l’inverse, les molécules d’une phase nématique sont achirales. Il est à noter que si une
faible quantité de dopant chiral est ajoutée à un CL en phase nématique, cette dernière
évolue facilement en phase cholestérique.

2.3.2 Structure
Dans un CLC, les molécules chirales induisent une chiralité de structure. Une torsion
s’établit alors spontanément dans l’arrangement des molécules les unes par rapport aux
autres : les molécules chirales s’organisent en hélice (figure I.6).

Figure I.6 – Représentation de l’organisation des molécules bâtonnets en phase choles-


térique et des vecteurs directeurs ⃗n qui indiquent chaque direction moyenne d’orientation
préférentielle des molécules le long de l’hélice. Une torsion partielle est représentée.

La structure cholestérique pourrait se traduire par un empilement de molécules en


phase nématique tournant d’un angle constant, comme les marches d’un escalier en coli-
maçon. Cependant, cette représentation n’est pas totalement fidèle à la réalité physique de
la structure qui est en fait continue. La phase cholestérique n’est pas un système à couches,

25
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

même si on la représente comme tel dans les schémas pour une meilleure compréhension
(figure I.7a).

La structure cholestérique est identifiable par un motif caractéristique qui consiste en


un ensemble de séries parallèles d’arcs emboîtés (figure I.7b). Ces arceaux, signature de
la structure en hélice, apparaissent dans les sections obliques de matériaux cholestériques
comme l’a montré Bouligand [20].

(a) (b)

Figure I.7 – (a) Schéma sous forme de plans successifs de la structure cholestérique.
(b) Vue d’une section d’un empilement hélicoïdal. La coupe oblique révèle les arceaux de
Bouligand dans l’arrangement des molécules [21].

2.3.3 Pas cholestérique

L’axe perpendiculaire aux plans moléculaires est appelé axe hélicoïdal et la direction
du vecteur directeur ⃗n varie le long de cet axe.

La structure cholestérique est périodique suivant l’axe hélicoïdal. Lorsque le vecteur


directeur ⃗n réalise une rotation de 360°, une longueur égale au pas de l’hélice p a été
parcourue le long de l’axe hélicoïdal (figure I.8). Les molécules étant symétriques, la
périodicité d’un CLC est définie par le demi-pas p/2 qui correspond à une rotation du
vecteur directeur ⃗n de 180°. Le pas d’un CLC varie de quelques dizaines de nanomètres à
plusieurs dizaines de micromètres.

26
2. LES DIFFÉRENTES PHASES

Figure I.8 – Définition du pas de l’hélice p (rotation du vecteur directeur ⃗n de 360° le


long de l’axe hélicoïdal), du demi-pas p/2 et de l’angle θ entre la direction de propagation
de l’onde incidente et l’axe hélicoïdal [19].

2.3.4 Sens d’hélicité


Le sens de l’hélice peut être gauche ou droit. Par convention, l’exemple de la figure
I.8 est un cholestérique droit. Actuellement, il n’existe aucun moyen de prévoir quelle
configuration moléculaire chirale favorisera une hélice de sens gauche ou droit [22].

Le pas cholestérique et le sens d’hélicité sont deux paramètres clés dont dépendent les
propriétés optiques d’un CLC.

27
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

3 Propriétés optiques du cristal liquide cholestérique


Grâce à leur structure en hélice, les CLCs présentent de nombreuses propriétés optiques
telles qu’une double sélectivité en longueur d’onde et en polarisation [22-25].

3.1 Biréfringence
Les CLs sont des matériaux biréfringents. La biréfringence ou double réfraction désigne
le dédoublement du faisceau réfracté et transmis. À partir d’un rayon incident, deux rayons
réfractés se propagent dans le CL, l’un appelé rayon ordinaire o et l’autre appelé rayon
extraordinaire e (figure I.9). Ces deux rayons sont parallèles et se propagent à des vitesses
différentes, respectivement vo et ve .

Figure I.9 – Représentation du phénomène de biréfringence. Le rayon incident est scindé


en deux rayons réfractés dans le matériau biréfringent : le rayon ordinaire o et le rayon
extraordinaire e, se propageant respectivement à des vitesses vo et ve .

L’indice de réfraction n d’un matériau est le rapport entre la vitesse de la lumière dans
le vide c et la vitesse de la lumière dans le matériau donné v :
c
n=
v
Pour un matériau biréfringent, il existe deux indices de réfraction no et ne , associés
respectivement aux ondes ordinaire et extraordinaire :
c c
no = ne =
vo ve
On définit l’indice de réfraction moyen n̄ d’un CLC par la relation :
no + ne
n̄ =
2
La différence d’indice ∆n est appelée biréfringence, tout comme la propriété :

∆n = ne − no

28
3. PROPRIÉTÉS OPTIQUES DU CRISTAL LIQUIDE CHOLESTÉRIQUE

3.2 Sélectivité en longueur d’onde


Les CLCs reflètent sélectivement la lumière. Cette réflexion résulte des effets d’in-
terférence lorsque la lumière se propage à travers le CLC. La longueur d’onde moyenne
réfléchie est notée λ0 . Elle est proportionnelle au pas hélicoïdal p d’après la loi de Bragg :

λ0 = n̄ p cos θ
n̄ étant l’indice de réfraction moyen et θ étant l’angle entre la direction de propagation
de la lumière et l’axe hélicoïdal (figure I.8).

La réflexion sélective se produit sur une largeur de bande ∆λ, qui est définie comme
étant la largeur à mi-hauteur de la bande de réflexion, aussi appelée bande de Bragg [22]
(figure I.10). ∆λ est liée à la biréfringence ∆n du CLC et à son pas p par la relation :

∆λ = ∆n p cos θ
En général, la largeur spectrale ∆λ est limitée à quelques dizaines de nanomètres dans
le spectre visible car la valeur de la biréfringence ∆n ne peut pas dépasser 0,5 [22]. Il
existe néanmoins des méthodes, sur lesquelles nous reviendrons, afin d’élargir la bande
de Bragg d’un CLC. L’élargissement de la bande de réflexion est très utile pour certaines
applications (polariseurs à large bande, vitrage intelligent, etc) [19].

Figure I.10 – Spectre de transmission d’un CLC en lumière incidente non polarisée. La
bande de réflexion est centrée sur la longueur d’onde λ0 et possède une largeur spectrale
∆λ. L’intensité réfléchie est limitée à 50 % du fait de la règle de sélectivité en polarisation.

La valeur du pas hélicoïdal p détermine la longueur d’onde que le CLC est susceptible
de réfléchir. Ainsi une onde lumineuse doit posséder une longueur d’onde λ appartenant
à l’intervalle ∆λ pour qu’elle soit réfléchie par le CLC, sinon elle sera transmise : c’est la
règle de sélectivité en longueur d’onde.

29
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

3.3 Irisation

Étant donné que la longueur d’onde réfléchie dépend aussi de l’angle θ (angle entre
la direction de propagation de la lumière et l’axe hélicoïdal), la réflexion est décalée vers
les longueurs d’onde plus courtes à incidence oblique. Par exemple, un CLC dont l’axe
hélicoïdal est perpendiculaire au plan d’observation va réfléchir dans le rouge lorsqu’on
l’observe à incidence normale et va apparaître jaune, puis vert, puis bleu lorsqu’on se dé-
place pour l’observer à incidence oblique. C’est le phénomène d’irisation (ou iridescence) :
la couleur d’un composé évolue suivant l’angle d’incidence ou d’observation [26].

3.4 Sélectivité en polarisation

La lumière est une onde électromagnétique. Sa polarisation correspond à la direction


des oscillations du champ électrique qui se produisent dans le plan d’onde (plan perpen-
diculaire à la direction de propagation de la lumière). Lorsque la direction du vecteur
champ électrique est aléatoire, la lumière est dite non polarisée. Par contre, si la direction
du vecteur champ électrique est fixe, la lumière est polarisée linéairement. Dans un autre
cas, si l’extrémité du vecteur champ électrique décrit une ellipse ou un cercle dans le plan
d’onde, il s’agit respectivement d’une polarisation elliptique ou circulaire. Ces dernières
peuvent être de sens gauche ou droit. Lorsque notre œil perçoit le faisceau lumineux, si le
vecteur se déplace dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, il s’agit d’une lumière
polarisée à gauche, tandis que s’il tourne dans le sens des aiguilles d’une montre, la lumière
est polarisée à droite.

Une onde polarisée linéairement peut être considérée comme la somme de deux com-
posantes polarisées circulairement de sens opposés, l’une gauche et l’autre droite. Dans la
largeur de la bande de réflexion et à incidence normale, un CLC réfléchit la composante
polarisée circulairement dans le même sens de rotation que son hélice, tandis qu’il trans-
met la composante polarisée circulairement dans le sens de rotation opposé. À incidence
oblique, la lumière réfléchie ou transmise est polarisée elliptiquement.

Le sens de polarisation gauche ou droit de la lumière réfléchie correspond donc au


sens d’hélicité, ce qui signifie qu’un CLC ne peut pas réfléchir plus de 50 % de l’intensité
d’une lumière incidente non polarisée : c’est la règle de sélectivité en polarisation [22].
Par exemple, un CLC dont l’hélice est de sens gauche va réfléchir 50 % d’une lumière
incidente polarisée linéairement avec une polarisation circulaire gauche et va transmettre
50 % de cette lumière incidente avec une polarisation circulaire droite (figure I.11). Les
CLCs conservent donc le sens d’hélicité de la lumière après réflexion, à l’opposé des miroirs
ordinaires qui inversent la polarisation de la lumière qu’ils réfléchissent.

Il faut mentionner le fait qu’un CLC réfléchit 0 % de la lumière si le faisceau incident


est polarisé circulairement avec un sens opposé à celui de son hélice.

30
3. PROPRIÉTÉS OPTIQUES DU CRISTAL LIQUIDE CHOLESTÉRIQUE

Figure I.11 – Phénomène de polarisation sélective de la lumière par un CLC dont l’hélice
est de sens gauche sur une lumière incidente polarisée linéairement.

3.5 Pouvoir rotatoire


Un CLC possède un pouvoir rotatoire sur la lumière, c’est-à-dire qu’il est capable de
faire tourner la direction de polarisation d’un faisceau qui le traverse. Le pouvoir rotatoire
dépend de la longueur d’onde de la lumière incidente : pour λ = λ0 la rotation optique
change de signe (figure I.12). Les régions de rotation de signes opposés sont alors séparées
par la bande de réflexion du CLC.

Cette rotation optique peut atteindre plusieurs milliers de degrés par millimètre dans
le spectre visible. Elle est exceptionnelle comparée aux valeurs fréquemment rencontrées,
comprises entre 0,01 et 100°/mm pour un liquide chiral (eau sucrée par exemple) ou un
cristal chiral (quartz par exemple).

31
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

Figure I.12 – Exemple expérimental du pouvoir rotatoire d’un CLC de sens gauche en
fonction de la longueur d’onde de la lumière incidente [27]. La longueur d’onde moyenne
réfléchie λ0 du CLC est d’environ 530 nm.

3.6 Applications
Comme évoqué précédemment, un matériau cholestérique correctement orienté agit
tel un filtre sélectif, un réflecteur, un polariseur et un rotateur optique. Cela donne lieu à
la réalisation de matériaux multifonctionnels dans le domaine de l’optique.

Parmi les applications qui ont recours aux CLCs, nous pouvons citer une grande va-
riété de capteurs [28, 29], comme les capteurs de température [30-34], de pression [35-37],
de lumière [38, 39] ou d’humidité [40-42]. Les CLCs sont aussi employés pour la fabri-
cation d’étiquettes anti-contrefaçon [43-45] et d’hologrammes de sécurité [46]. D’autres
innovations mettent à profit les propriétés optiques des CLCs comme les filtres passe-
bande ajustables [47, 48], les écrans réflecteurs sans polariseur [49-51] et les prototypes de
vitrages intelligents [52-54]. Les CLCs lyotropes sont quant à eux présents dans certains
produits cosmétiques afin d’apporter un aspect esthétique de par leurs belles couleurs
irisées [55].

32
4. TEXTURES DES CRISTAUX LIQUIDES

4 Textures des cristaux liquides

4.1 Introduction aux textures optiques

Initialement, l’image au microscope optique (MO) de l’organisation des défauts dans


un CL est appelée texture [15]. La définition de la texture d’un CL s’est ensuite élargie
pour désigner l’ensemble des caractéristiques de forme, de couleur et de contraste observées
au MO en lumière polarisée.

Il existe des dispositifs optiques, appelés polariseurs, qui sont particulièrement utilisés
pour l’observation et l’identification de textures de CLs. Un polariseur transmet seulement
la composante de la lumière dont le vecteur champ électrique est parallèle à une direction
déterminée. Si une lumière non polarisée traverse un polariseur, elle ressort polarisée
linéairement. Si l’on place à sa suite un second polariseur, tourné de 90° par rapport au
premier, la lumière polarisée linéairement s’éteint. Dans cette configuration, on dit que
les polariseurs sont croisés (figure I.13). Le second polariseur est qualifié d’analyseur car
il permet de repérer la direction de polarisation de la lumière qui l’atteint en cherchant
l’extinction.

Figure I.13 – Propagation d’une lumière non polarisée à travers des polariseurs croisés.
Le second polariseur, appelé analyseur, permet de repérer la direction de polarisation de
la lumière qui l’atteint en cherchant son extinction.

On trouve une grande diversité de textures optiques [56] car une même phase CL peut
présenter de multiples textures en fonction notamment de l’épaisseur du film de CL, des
traitements de surface ou des conditions thermiques. Nous allons à présent décrire les
caractéristiques des différentes textures que l’on retrouve dans ce travail de thèse.

33
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

4.2 Texture nématique


Dans le cas d’une phase nématique, la texture la plus fréquemment observée au MO
entre polariseurs croisés est la texture Schlieren. Elle apparaît sous la forme d’une texture
à filaments (figure I.14).

Agencés aléatoirement, les filaments noirs correspondent aux défauts dans l’alignement
moléculaire du CLN. Ils indiquent les positions d’extinction, c’est-à-dire les emplacements
où le vecteur directeur ⃗n est parallèle ou perpendiculaire aux directions des polariseurs
[15]. Les filaments sont reliés entre eux par des noyaux, qui sont des zones de défauts
topologiques ponctuels, ou plus couramment des lignes de défauts perpendiculaires au
plan d’observation.

Figure I.14 – Image de la texture Schlieren d’un CLN prise au MO Olympus BX51
entre polariseurs croisés en mode transmission. La barre d’échelle représente 100 µm.

4.3 Textures cholestériques


4.3.1 Texture planaire

La texture planaire, ou texture de Grandjean, se manifeste lorsque l’axe hélicoïdal


du CLC est perpendiculaire au plan d’observation. Cette texture est caractérisée par la
présence d’un réseau de lignes, appelées stries huileuses [17], qui correspondent aux défauts
d’alignement dans le CLC. Cela donne un aspect cellulaire à la texture (figure I.15a). La
texture planaire dépend principalement de l’ancrage de surface.

La couleur de réflexion observée au MO est liée au pas cholestérique p. Dans le cas de


la texture planaire de la figure I.15b, la couleur réfléchie est le rouge-orangé.

34
4. TEXTURES DES CRISTAUX LIQUIDES

(a) (b)

Figure I.15 – Images de la texture planaire avec stries huileuses d’un CLC prises au
MO Olympus BX51 entre polariseurs croisés (a) en mode transmission et (b) en mode
réflexion. Les barres d’échelle représentent 50 µm.

4.3.2 Texture homéotrope ou texture en empreintes digitales

Dans le cas de la texture homéotrope, l’axe hélicoïdal est parallèle au plan d’observa-
tion. Ainsi, l’orientation du vecteur directeur ⃗n est variable le long de l’hélice cholestérique
par rapport à la direction de la lumière à incidence normale, qui arrive perpendiculai-
rement à l’axe hélicoïdal. Cela engendre l’obtention de cette texture à motif avec une
alternance périodique de bandes colorées claires et sombres (figure I.16). On la nomme
communément texture en empreintes digitales car lorsque le pas hélicoïdal p est de l’ordre
du micromètre, ce motif de bandes brillantes et sombres ressemble à des empreintes digi-
tales.

Figure I.16 – Image de la texture en empreintes digitales d’un CLC dont le pas p est
de l’ordre du micromètre [56].

35
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

Entre polariseurs croisés, l’intensité de la lumière transmise est maximale lorsque le


vecteur directeur ⃗n est parallèle au plan d’observation : ce sont les bandes claires ; et elle
est minimale lorsque ⃗n est perpendiculaire : ce sont les bandes sombres (figure I.17). La
distance entre deux bandes de même contraste représente le demi-pas p/2.

Figure I.17 – Principe de la formation de la texture homéotrope d’un CLC. L’axe


hélicoïdal est perpendiculaire à la direction de propagation de la lumière incidente. Les
bandes claires apparaissent lorsque la lumière traverse les zones où le vecteur directeur ⃗n
est parallèle au plan d’observation, tandis que les bandes sombres se manifestent lorsque
la lumière traverse les zones où ⃗n est perpendiculaire. Les doubles flèches noires à gauche
indiquent l’orientation des polariseurs croisés.

Dans le cas d’un CLN, la texture homéotrope se manifeste par une texture complète-
ment noire car le vecteur directeur ⃗n est perpendiculaire au plan d’observation dans tout
le matériau.

4.3.3 Texture polygonale


Dans notre étude, la texture polygonale apparaît à l’interface avec l’air lorsque la
surface du film de CLC est libre de tout substrat. Cette texture est observée lorsque les
molécules ont un ancrage hybride, c’est-à-dire lorsqu’elles s’alignent préférentiellement
tangentiellement au substrat solide sur lequel le CLC est déposé (conditions d’ancrage
planaires) et perpendiculairement à l’interface avec l’air (conditions d’ancrage homéo-
tropes). L’axe hélicoïdal doit donc se déformer en raison de la compétition entre deux
ancrages antagonistes (planaire avec le substrat et homéotrope avec l’air). Il en résulte
une orientation variable de l’axe hélicoïdal au niveau de la surface libre du matériau cho-

36
4. TEXTURES DES CRISTAUX LIQUIDES

lestérique [57]. Cette structure spontanée, qui minimise l’énergie interne du système, est
un compromis entre contrainte élastique interne et force d’ancrage aux interfaces.

Cela se traduit par la formation d’un réseau de cônes, que l’on nomme des polygones,
à la surface du CLC. Le centre de chaque polygone correspond au sommet du cône qui
est entouré de doubles spirales [58]. Ces cônes sont une conséquence des jeux de tensions
à la surface.

En somme, la texture polygonale, constituée d’un réseau de cellules polygonales à


l’échelle micrométrique, est observée dans des films minces de CLCs lorsque l’axe hélicoïdal
à leur surface possède une orientation variable induite par un ancrage hybride.

Si la texture polygonale est observée au MO en mode transmission entre polariseurs


croisés, une croix de Malte associée à chaque polygone est visible (figure I.18a). En mode
réflexion, la couleur réfléchie en bordure des polygones est directement reliée au pas cho-
lestérique p du CLC en question. Dans le cas de la texture polygonale de la figure I.18b,
la couleur de réflexion est le vert. En effet, au niveau de la connexion entre les polygones,
la structure est localement planaire : on y observe alors un maximum d’intensité réfléchie
(dans la gamme verte dans l’image). À l’intérieur des polygones, il y a aussi réflexion
mais hors axe donc elle n’est pas collectée, à l’exception du centre. On voit d’ailleurs un
point lumineux au centre de chaque polygone (figure I.18b). Les zones qui apparaissent
brillantes sont ainsi les zones où la structure est localement planaire.

(a) (b)

Figure I.18 – Images de la texture polygonale d’un CLC prises au MO Olympus BX51
entre polariseurs croisés (a) en mode transmission et (b) en mode réflexion. Les barres
d’échelle représentent 30 µm.

Une représentation en 3D de la structure d’un CLC ayant une texture polygonale a


été réalisée en combinant des techniques d’imagerie complémentaires [59] (figure I.19).
L’imagerie par microscopie à force atomique (AFM) dévoile la forme conique des poly-
gones qui sont le lieu des motifs en doubles spirales. La hauteur des polygones est comprise

37
CHAPITRE I. LES CRISTAUX LIQUIDES

entre 20 et 100 nm. Au MO en transmission non polarisée, le sommet de chaque polygone


apparaît noir et ses bordures sont jaune brillant. Les doubles spirales observées par mi-
croscopie électronique à balayage (MEB) correspondent aux arcs imbriqués de la section
transversale obtenue par microscopie électronique à transmission (MET).

Figure I.19 – Structure en 3D de la texture polygonale d’un CLC réalisée en combinant


les techniques de microscopie suivantes : AFM, MO, MEB et MET. Les lignes en pointillé
indiquent la correspondance entre les sommets des polygones d’une image à l’autre [59].

On peut également observer la formation d’une texture polygonale à la surface libre


de films minces de CLNs [60].

4.3.4 Texture en éventails

La texture en éventails est ainsi nommée car elle présente des domaines semblables à
des éventails séparés par des lignes (figure I.20). Ces lignes de défauts en forme d’ellipses
et d’hyperboles sont appelées des coniques focales. Dans ce cas, l’axe hélicoïdal du CLC
est naturellement dévié de la perpendiculaire au plan d’observation.

38
4. TEXTURES DES CRISTAUX LIQUIDES

Figure I.20 – Image de la texture en éventails avec coniques focales d’un CLC prise
au MO Olympus BX51 entre polariseurs croisés en mode transmission. La barre d’échelle
représente 50 µm.

Il existe également une texture dite en éventails chez les CLs smectiques A, mais les
éventails affichent une apparence moins "lisse".

39
Chapitre II

Les cristaux liquides cholestériques


biologiques

1 Structures photoniques biologiques

1.1 Phénomènes optiques et couleurs dans la nature

Dans la nature, divers effets optiques peuvent être observés tels que l’absorption, la
diffraction, les interférences, la réflexion, la diffusion, le guidage d’onde et la biolumines-
cence [61]. Ces phénomènes optiques sont utilisés comme canaux de communication pour
la survie et la reproduction de nombreuses espèces animales et végétales [62-64].

Les animaux et les plantes génèrent de la couleur de trois principales manières via les
pigments, les couleurs structurelles ou la bioluminescence :
• Les pigments sont des composés qui absorbent sélectivement la lumière. Les lon-
gueurs d’onde non absorbées peuvent être réfléchies ou diffusées par le matériau, ce
qui donne lieu à des couleurs spécifiques. Une couleur pigmentaire a un aspect mat
[65].
• Les couleurs structurelles sont produites par l’interaction de la lumière avec des
structures organisées à l’échelle micrométrique ou nanométrique [66]. Ces structures
réfléchissent alors sélectivement la lumière. Une couleur structurelle a un aspect
brillant et métallique car elle est le résultat d’une réflexion partiellement spéculaire.
Dans certains cas, les couleurs structurelles sont combinées à des pigments.
• La bioluminescence désigne le phénomène de production et d’émission de lumière
lors d’une réaction chimique dans certains organismes vivants. La luciférine est
le composé chimique responsable de l’émission de photons lors de son oxydation,
convertissant ainsi l’énergie chimique en énergie lumineuse.

À présent, nous allons nous intéresser plus en détail aux couleurs structurelles visibles
chez les êtres vivants.

41
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

1.2 Couleurs structurelles dans les systèmes biologiques


Les couleurs structurelles proviennent de la réflexion sélective de la lumière par des
structures périodiques dans les organismes biologiques (figure II.1). Parmi ces structures,
on peut citer les réseaux de diffraction, les cristaux photoniques et les CLCs. Les plus
anciens réflecteurs connus, les réseaux de diffraction, ont 515 millions d’années [67]. On
retrouve notamment des motifs colorés réfléchissants sur certains fossiles (figure II.1a).

Les couleurs structurelles assurent certaines fonctions telles que le camouflage, le com-
portement reproducteur et la communication avec les congénères ou avec les prédateurs
[65].

Prenons l’exemple du papillon Morpho rhetenor (figure II.1d). Ses ailes sont recou-
vertes d’écailles constituées d’un grand nombre de crêtes nanométriques. L’aspect bleu vif
du papillon est dû aux interférences constructives de la lumière réfléchie par les crêtes qui
sont disposées périodiquement sur les écailles des ailes [61]. La morphologie des écailles
est ainsi responsable de l’apparition de couleurs structurelles utiles à la reconnaissance
des congénères et à la parade nuptiale du papillon Morpho rhetenor [68].

(a) (b)

(c) (d)

Figure II.1 – Exemples de couleurs structurelles que l’on trouve dans la nature : (a)
fossile d’un scarabée Chrysomelidae âgé de 40 millions d’années découvert à Eckfeld en
Allemagne [69], (b) coquille d’ormeau [61], (c) plume de paon [70] et (d) papillon Morpho
rhetenor [66].

42
2. ORGANISATION CHOLESTÉRIQUE DANS LA MATIÈRE VIVANTE

2 Organisation cholestérique dans la matière vivante


Les CLs jouent un rôle important en biologie car l’association de l’ordre et de la mo-
bilité est une condition très favorable à l’auto-organisation et à la formation de structures
dans les systèmes biologiques. Les CLs biologiques sont lyotropes car la stabilité de leur
état dépend de leur concentration dans l’eau. La phase cholestérique est celle qui nous
intéresse dans notre étude. Elle est omniprésente chez les animaux et les végétaux. Elle
a été découverte pour la première fois au XIXème siècle dans les composés dérivés du
cholestérol extraits de la racine de carotte [14].

2.1 Composition et structure


Les CLCs biologiques se caractérisent par l’agencement en hélice des briques élémen-
taires de la matière vivante telles que les molécules, les macromolécules et les microfibrilles
(agrégats anisotropes de macromolécules). Les biopolymères essentiels à la vie ont une
structure cholestérique, en particulier les acides nucléiques (comme l’ADN), la chroma-
tine (un complexe macromoléculaire composé d’ADN et de protéines), les polysaccharides
(par exemple la chitine et la cellulose) et les protéines (comme le collagène) [1].

Les briques élémentaires sont disposées parallèlement les unes aux autres sans ordre
de position. Une torsion continue s’établit le long de l’axe perpendiculaire aux fibres qui
s’interpénètrent pour s’assembler en une structure cholestérique [71]. Le pas de l’hélice
est défini comme étant la distance parcourue lorsqu’une rotation de 360° de l’orientation
des briques élémentaires a été effectuée.

L’organisation cholestérique optimise la compacité des molécules biologiques. Par


exemple, l’ADN qui mesure 2 m de long est compacté dans le noyau des cellules dont le
diamètre est de l’ordre de 2 µm. Toutefois, le confinement spatial de la structure hélicoïdale
dans des géométries courbes et complexes impose des restrictions sur les configurations
du paramètre d’ordre, ce qui conduit à l’apparition de défauts topologiques [72]. Cette
compaction génère une riche palette de structures de défauts comme les stries huileuses
et les domaines coniques focaux. Dans les systèmes biologiques, on peut alors observer les
différentes textures des CLCs.

2.2 Propriétés physiques


La structure cholestérique offre une grande résistance mécanique aux carapaces des
arthropodes 1 , aux écailles des poissons et aux os. Par exemple, les écailles du poisson
Arapaima gigas sont constituées de fibrilles de collagène ayant un arrangement cholesté-
rique. Elles forment une armure dermique qui permet au poisson de résister aux morsures
des piranhas [73].
1. Les arthropodes sont un embranchement d’animaux qui possède le plus d’espèces et le plus d’indi-
vidus de tout le règne animal (80 % des espèces connues), notamment les crustacés, les myriapodes, les
arachnides et les insectes. Leur corps est segmenté et recouvert d’une cuticule rigide qui constitue leur
exosquelette, composé de chitine dans la plupart des cas.

43
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

Beaucoup de couleurs structurelles sont issues de l’arrangement cholestérique des sys-


tèmes biologiques. Les propriétés optiques qui découlent de l’organisation cholestérique de
la matière vivante dépendent principalement du pas cholestérique et de l’orientation de
l’axe hélicoïdal. Plus le pas hélicoïdal est faible (hélice très vissée), plus la longueur d’onde
réfléchie est proche du bleu, voire de l’ultraviolet (UV). Plus le pas est grand (hélice peu
vissée), plus la longueur d’onde réfléchie est vers le rouge, voire l’infrarouge (IR).

L’angle d’observation a aussi son importance. En effet, lorsque l’angle augmente par
rapport à la normale, la couleur réfléchie subit un décalage vers le bleu : c’est le phénomène
d’irisation. Ainsi les interférences constructives se produisent pour des longueurs d’onde
plus courtes. Des motifs irisés dus aux CLCs sont notamment visibles sur les carapaces
d’insectes et les parois cellulaires de fruits. Ces couleurs sont utilisées par les êtres vivants
pour la communication ou le camouflage.

Dans la nature, les CLCs dont l’hélice est de sens gauche sont largement majoritaires :
la lumière est alors réfléchie avec une polarisation circulaire gauche (50 % maximum de la
lumière incidente) et transmise avec une polarisation circulaire droite. Les papillons et les
crustacés se servent notamment de la lumière polarisée comme moyen de communication
[74].

2.3 Cas du fruit de Pollia condensata


La cellulose présente dans la paroi cellulaire du fruit de Pollia condensata est un
excellent exemple de CLC biologique.

La plante Pollia condensata, qui pousse dans les régions forestières d’Afrique, se pré-
sente sous forme de grappe qui comporte jusqu’à quarante fruits (figure II.2a). Son fruit est
une baie d’environ 5 mm de diamètre. Ses étonnantes couleurs irisées font de lui l’objet le
plus brillant parmi les organismes biologiques connus. Cette coloration vive permettrait
d’attirer les oiseaux afin qu’ils dispersent ensuite facilement ses graines et assurent la
continuation de l’espèce végétale ailleurs. La couleur bleu métallique du fruit n’est pas
uniforme et présente un aspect pixélisé avec des taches vertes et rouges [75] (figure II.2b).

La partie externe de l’enveloppe du fruit, appelée épicarpe, est constituée de cellules.


La paroi de ces cellules est composée de microfibrilles de cellulose ayant une organisation
cholestérique (figure II.2c). Cette structure est à l’origine des couleurs du fruit et de ses
propriétés optiques [76].

Le pas cholestérique des microfibrilles de cellulose varie d’une cellule à l’autre. La paroi
de chaque cellule réfléchit alors une couleur différente du spectre visible, d’où l’aspect
pixélisé du fruit. Dans le même objet biologique, on observe donc la coexistence de CLCs
ayant des pas différents, donc réfléchissant diverses longueurs d’onde. La couleur bleue
demeure prédominante parmi une répartition de cellules vertes et rouges (figure II.3c).

De plus, les microfibrilles de cellulose peuvent s’auto-assembler dans les deux sens d’hé-

44
2. ORGANISATION CHOLESTÉRIQUE DANS LA MATIÈRE VIVANTE

licité. Ainsi chaque cellule peut réfléchir la lumière polarisée circulairement soit gauche
(figure II.3a), soit droite (figure II.3b), en fonction du sens de l’hélice. À ce jour, la coexis-
tence des deux sens d’hélicité a seulement été observée sur le fruit de Pollia condensata.

(a) (b) (c)

Figure II.2 – (a) Grappe de fruits de Pollia condensata collectée en Éthiopie. (b) Fruit
unique. (c) Image MET de la section de l’épicarpe du fruit dans laquelle les arceaux de
Bouligand, signature de la structure cholestérique, sont visibles [76]. Les lignes jaunes
soulignent la direction de torsion de l’hélice cholestérique des microfibrilles de cellulose.
La barre d’échelle représente 200 nm.

(a) (b) (c)

Figure II.3 – Images de la même région de l’épicarpe du fruit de Pollia condensata


prises au MO en réflexion à l’aide (a) d’un polariseur circulaire de sens gauche, (b) d’un
polariseur circulaire de sens droit et (c) de polariseurs croisés [76]. Les encarts montrent un
zoom des zones centrales pour visualiser les cellules. La barre d’échelle représente 250 µm.

45
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

3 Étude de la cuticule des scarabées Chrysina


Le scarabée est un insecte de la famille des Scarabaeidae qui fait partie de l’ordre
des coléoptères. Son corps est entièrement recouvert d’une cuticule rigide qui constitue
son exosquelette. La cuticule protège l’insecte des chocs, des radiations et des micro-
organismes nuisibles [77]. De plus, pour les scarabées du genre Chrysina en particulier, la
cuticule montre des couleurs irisées du fait de la structure cholestérique de la chitine.

3.1 Composition de la cuticule des scarabées


La cuticule est un matériau composite constitué principalement de chitine, un poly-
saccharide [10]. La cuticule comprend également d’autres composés tels que de l’eau, des
protéines, de l’acide urique, de la mélanine et des lipides. Elle est sécrétée par une seule
couche de cellules épidermiques [78].

La cuticule des scarabées se divise en trois parties (figure II.4) :


• L’épicuticule est la partie la plus externe de la cuticule. Cette couche a une épaisseur
de quelques centaines de nanomètres à quelques micromètres et ne possède pas de
chitine. Elle est recouverte d’une fine couche de cire qui contient des phéromones et
qui est imperméable pour protéger le scarabée contre la perte d’eau.
• L’exocuticule est la couche intermédiaire de la cuticule. Elle est rigide et a une
épaisseur de quelques dizaines de micromètres. Elle est composée de fibrilles de
chitine ayant une organisation cholestérique à l’origine des couleurs de la cuticule.
L’acide urique, incorporé entre les fibrilles de chitine, augmente la biréfringence
effective du milieu, ce qui élargit la bande de réflexion de la cuticule [79].
• L’endocuticule est la partie la plus interne et la moins rigide de la cuticule. Elle est
également constituée de fibrilles de chitine qui s’agencent en hélice. Elle a un rôle
clé au moment de la mue de l’insecte car elle se liquéfie sous l’action d’enzymes pour
que le scarabée puisse facilement se détacher de son ancienne cuticule [77].

Figure II.4 – Schéma de la section transversale de la cuticule d’un scarabée [77].

46
3. ÉTUDE DE LA CUTICULE DES SCARABÉES CHRYSINA

3.2 Structure cholestérique de la chitine


Les fibrilles de chitine dans la cuticule des scarabées ont une organisation hélicoïdale
de sens gauche [20]. Une torsion continue se produit le long de l’axe perpendiculaire aux
fibrilles [80]. La rotation de 360° de l’orientation des fibrilles de chitine définit le pas de
l’hélice.

Lorsque la section transversale de la cuticule est observée au MEB ou au MET dans une
direction perpendiculaire à l’axe hélicoïdal, une texture en empreintes digitales composée
d’une alternance de bandes claires et sombres peut apparaître. La distance entre deux
bandes consécutives de même contraste correspond alors au demi-pas cholestérique.

Les propriétés optiques de la structure en hélice des fibrilles de chitine sont similaires
à celles des CLCs. Ainsi les structures photoniques qui composent la cuticule des scara-
bées sont des systèmes optiques particulièrement sophistiqués. La cuticule possède des
propriétés de réflexion de la lumière, ce qui produit des couleurs réfléchies avec une pola-
risation circulaire gauche [77]. De plus, chez beaucoup de scarabées du genre Chrysina, on
observe une variation du pas hélicoïdal qui s’établit graduellement dans l’épaisseur de la
cuticule, ce qui provoque une réflexion sur une gamme de longueurs d’onde plus étendue.
La cuticule agit donc comme un réflecteur à large bande.

Nous allons maintenant nous pencher sur l’arrangement cholestérique présent dans la
cuticule des scarabées Chrysina gloriosa et Chrysina aurigans sur lesquels nous avons
travaillé dans cette thèse.

3.3 Cas de la cuticule de Chrysina gloriosa

3.3.1 Généralités

Le scarabée Chrysina gloriosa mesure environ 2,5 cm de long et vit dans les forêts de
pins, de chênes verts et de genévriers en Amérique centrale et au sud-ouest de l’Amérique
du Nord. Il possède une cuticule irisée à rayures vertes et argentées. Le feuillage du
genévrier étant vert avec des mouchetures blanches dues aux taches de résine, ces insectes
semblent bien camouflés dans le feuillage de cet arbre (figure II.5).

3.3.2 Propriétés optiques de la cuticule du scarabée

L’organisation hélicoïdale des fibrilles de chitine donne lieu à une réflexion sélective de
la lumière polarisée circulairement gauche [81]. La cuticule apparaît avec des bandes vertes
et argentées lorsqu’elle est éclairée par une lumière incidente non polarisée ou polarisée
circulairement gauche. Cependant le scarabée perd ses couleurs de réflexion lorsque la
lumière incidente est polarisée circulairement droite (figure II.6). La cuticule présente
alors un aspect marron en raison de la présence de mélanine [7].

47
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

Figure II.5 – Photographie d’un scarabée Chrysina gloriosa se mêlant au feuillage de


sa plante hôte, le genévrier [82].

La position spectrale de la bande de Bragg dépend de l’indice de réfraction moyen n̄ et


de la distribution du pas cholestérique des fibrilles de chitine [79]. La cuticule multibande
verte et argentée de Chrysina gloriosa est un réflecteur à large bande du début du spectre
visible jusqu’à l’IR [6]. En effet, le gradient de pas hélicoïdal des fibrilles de chitine permet
à la cuticule de réfléchir les longueurs d’onde entre 455 et 1470 nm à incidence normale
[83].

Figure II.6 – Cuticule de Chrysina gloriosa de couleur verte avec des bandes argentées
vue avec un analyseur circulaire gauche. Les couleurs n’apparaissent pas lorsqu’elle est
observée avec un analyseur circulaire droit [7].

48
3. ÉTUDE DE LA CUTICULE DES SCARABÉES CHRYSINA

3.3.3 Textures des bandes vertes et argentées

La différence de couleur macroscopique entre les deux types de rayures résulte de leurs
textures différentes, planaires ou polygonales [5] (figure II.7a). Dans les bandes vertes,
on observe une texture polygonale. Sur l’image MEB de la section transversale d’une
bande verte, on distingue clairement la variation de l’orientation de l’axe hélicoïdal sous
les polygones (figure II.7b). Les bandes argentées, quant à elles, présentent une texture
planaire et agissent ainsi comme des miroirs spéculaires à large bande. L’axe hélicoïdal
dans l’épaisseur de la cuticule reste perpendiculaire à la surface en contact avec l’air (figure
II.7c). Quelle que soit la bande, le gradient de pas des fibrilles de chitine est visible du
haut vers le bas dans la section transversale de la cuticule (figures II.7b et II.7c).

(a) (b) (c)

Figure II.7 – (a) Image de la cuticule de Chrysina gloriosa à l’interface entre une bande
verte (texture polygonale à gauche) et une bande argentée (texture planaire à droite)
prise au MO (mode réflexion, sans analyseur) [83]. La barre d’échelle représente 30 µm.
(b) et (c) Images MEB de sections transversales de la cuticule (b) dans une bande verte,
montrant des lignes concaves imbriquées sous chaque polygone et (c) dans une bande
argentée, présentant des lignes parallèles [5]. Les barres d’échelle représentent 2 µm.

Dans les bandes vertes de Chrysina gloriosa, chaque polygone mesure environ 10 µm
de diamètre et apparaît vert avec un noyau jaune vif [70] (figure II.8a). Les lignes concaves
imbriquées sur l’image MET de la section transversale marquent l’emplacement de chaque
polygone (figure II.8b). L’orientation de l’axe hélicoïdal varie près de la surface mais
devient progressivement homogène dans l’épaisseur de la cuticule [4]. La transition entre
les lignes courbes et les lignes droites est très douce [83].

49
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

(a) (b)

Figure II.8 – Texture polygonale de Chrysina gloriosa (a) Image optique en réflexion
de la texture polygonale dans une bande verte du scarabée. La barre d’échelle représente
20 µm. (b) Image MET de la section transversale d’une bande verte de la cuticule. Les
lignes noires en pointillé signalent l’emplacement du centre de deux polygones se situant
en haut de l’image. Les arceaux concaves, indiquant l’orientation de l’axe hélicoïdal, de-
viennent graduellement un réseau planaire de l’exocuticule vers l’endocuticule [4]. La barre
d’échelle représente 2 µm.

Grâce à la texture polygonale, la couleur verte des bandes est presque indépendante
de l’angle de vue à de longues distances, ce qui permettrait au scarabée de ne pas être
détecté par les prédateurs dans le feuillage vert. En effet, les deux types de courbure, que
sont la surface de la cuticule et l’orientation de l’axe hélicoïdal à l’intérieur de chaque
polygone, suppriment la dépendance angulaire de la longueur d’onde de réflexion, qui est
normalement associée à la réflexion de Bragg lorsque le matériau cholestérique est un film
plan avec une texture planaire.

3.4 Cas de la cuticule de Chrysina aurigans


3.4.1 Généralités
Le scarabée Chrysina aurigans vit principalement dans les forêts des régions monta-
gneuses du Costa Rica. Il mesure environ 2,5 cm de long et, à la différence de Chrysina
gloriosa, ne possède pas de rayures avec des textures différentes.

50
3. ÉTUDE DE LA CUTICULE DES SCARABÉES CHRYSINA

3.4.2 Variétés de cuticules de Chrysina aurigans


La cuticule de Chrysina aurigans apparaît de couleur or lorsqu’elle est éclairée par
une lumière non polarisée ou polarisée circulairement gauche, les fibrilles de chitine étant
agencées en hélice de sens gauche [84] (figure II.9a).

Toutefois, il existe une variété de scarabées Chrysina aurigans présentant une cuticule
rougeâtre dans les mêmes conditions d’éclairement (figure II.9b). Cela est probablement
lié à une répartition irrégulière de l’acide urique dans l’exocuticule [82].

(a) (b)

Figure II.9 – (a) Photographie d’un scarabée Chrysina aurigans de couleur or observé
en lumière non polarisée [8]. (b) Photographie d’un scarabée Chrysina aurigans de couleur
rougeâtre en raison de la répartition irrégulière de l’acide urique dans la cuticule [82].

3.4.3 Propriétés optiques de la cuticule du scarabée


La cuticule dorée du scarabée Chrysina aurigans dévoile une texture planaire (figure
II.10a) et se comporte comme un réflecteur à large bande du visible au proche IR [11].
Avec une lumière non polarisée sous incidence normale, son spectre de réflexion montre une
large bande de Bragg de 525 à 1000 nm avec une valeur moyenne de réflectivité d’environ
40 % [9] (figure II.10b). En effet, d’après la règle de sélectivité de la polarisation, une
lumière non polarisée ne peut être réfléchie à plus de 50 % par la cuticule du scarabée.

La section transversale observée au MEB montre un gradient de pas dans la profondeur


de la cuticule [10] (figure II.10c). Le pas cholestérique est plus faible près de l’épicuticule
et de plus en plus grand jusqu’à la fin de l’endocuticule.

51
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

(a)

(b)
(c)

Figure II.10 – (a) Image optique en réflexion de la texture planaire de la cuticule de


Chrysina aurigans. La barre d’échelle représente 20 µm. (b) Spectre de réflexion de la
cuticule mesuré avec une lumière non polarisée sous incidence normale [9]. (c) Image
MEB de la section transversale de la cuticule [8]. Le gradient de pas cholestérique s’étend
entre l’épicuticule (en haut de l’image) et la fin de l’endocuticule. Les cellules épidermiques
apparaissent en bas de l’image. La barre d’échelle représente 3 µm.

52
4. MATÉRIAUX BIOMIMÉTIQUES POUR L’OPTIQUE

4 Matériaux biomimétiques pour l’optique

4.1 Définitions du biomimétisme et de la bio-inspiration

Le biomimétisme est une approche scientifique interdisciplinaire qui consiste à imiter


la biologie ou la nature afin de développer des matériaux, des dispositifs ou des solutions
techniques [85].

Après 3,8 milliards d’années d’évolution sur Terre, le monde du vivant a optimisé un
grand nombre de mécanismes, de matériaux et de surfaces pour acquérir des propriétés et
des fonctions uniques. Par exemple, les structures génératrices de couleurs sont hautement
optimisées par plusieurs millénaires d’évolution [71]. Par conséquent, la nature est une
source inépuisable d’inspiration et offre de nombreuses solutions pour répondre à différents
enjeux.

La démarche du biomimétisme repose donc sur l’observation des systèmes vivants pour
comprendre des fonctions, des structures et des principes biologiques afin de concevoir di-
vers matériaux et dispositifs. Le concept a depuis quelques années été élargi pour s’inscrire
dans le principe de développement durable.

Il convient néanmoins de distinguer le biomimétisme de la bio-inspiration :


• l’approche biomimétique cherche à reproduire avec le plus haut degré de fidélité
possible le matériau ou le processus biologique ;
• l’approche bio-inspirée extrait de nouveaux principes des structures ou des méca-
nismes trouvés dans le monde du vivant et les met en œuvre en utilisant d’autres
matériaux et des solutions structurelles différentes [71].

Pour résumer, la première vise à copier l’œuvre originale, tandis que la seconde ne
cherche qu’à s’en inspirer.

De nombreuses propriétés rencontrées dans la nature sont intéressantes pour les scien-
tifiques [85] : hydrophobie, auto-nettoyage, réduction de la traînée dans l’écoulement des
fluides, conversion et conservation de l’énergie, adhérence élevée ou réversible, portance
aérodynamique, matériaux et fibres à haute résistance mécanique, antireflet, coloration
structurelle, isolation thermique, auto-guérison, mécanismes d’aide sensorielle, dispositifs
à l’échelle moléculaire, etc.

Un exemple notoire de bio-inspiration est le design du train à grande vitesse (TGV)


japonais qui a été réétudié en prenant modèle sur l’aérodynamisme du bec long et tran-
chant du martin-pêcheur (figure II.11). Désormais, ce TGV consomme moins d’énergie,
est moins bruyant et circule plus vite.

53
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

(a) (b)

Figure II.11 – (a) Photographie du TGV japonais bio-inspiré du bec long du martin-
pêcheur [86]. (b) Photographie d’un martin-pêcheur [87].

4.2 Bio-inspiration des structures photoniques


La diversité de motifs et de couleurs dans la nature à différentes échelles de longueur
inspire la conception de matériaux photoniques pour des applications dans la détection,
la communication optique, le traitement des données et le camouflage [88].

Certaines espèces parmi les insectes sont souvent prises pour modèles dans le domaine
des structures photoniques, en particulier les papillons [89, 90]. Les ailes d’insectes ont
notamment été répliquées grâce à de nombreuses méthodes comme la lithographie, la
sonde ionique focalisée (FIB), le procédé sol-gel, le moulage par injection-compression, la
gravure chimique, le moulage de répliques, etc [91]. Afin d’imiter la structure complexe
des ailes du papillon Morpho qui produit des interférences optiques, une combinaison de
techniques peut être utilisée. Elle comprend le dépôt chimique en phase vapeur (CVD),
la photolithographie et la gravure chimique [92].

Dans la recherche de matériaux et de dispositifs biomimétiques ou bio-inspirés, les


structures et les propriétés optiques des cuticules de scarabées sont une source d’inspira-
tion de premier ordre. Par exemple, une version discontinue de la structure cholestérique
de la cuticule a été fabriquée par assemblage Langmuir-Schaefer 2 couche par couche avec
des nanofils inorganiques colloïdaux [93].

Les succès récents dans l’utilisation de matériaux souples pour la conception de struc-
tures photoniques avancées promettent des possibilités intéressantes. Toutefois, les maté-
riaux biomimétiques développés actuellement rendent rarement compte de la complexité
structurelle observée dans les matériaux optiques naturels, comme le reconnaissent de ré-

2. Le processus d’assemblage Langmuir-Schaefer est une méthode d’alignement contrôlé de matériaux


à une dimension.

54
4. MATÉRIAUX BIOMIMÉTIQUES POUR L’OPTIQUE

centes études [88, 94]. Les procédés de fabrication cités précédemment sont souvent très
coûteux et sont limités à des étendues de quelques centaines de micromètres carrés, ce qui
ne permet pas de reproduire fidèlement les structures biologiques.

En particulier, la conception biomimétique de matériaux imitant la structure des cuti-


cules d’insectes n’en est encore qu’à ses débuts. Les difficultés résident dans la réalisation
de monocouches polyvalentes présentant des structures continues comme dans la nature
et dans le contrôle de motifs à l’échelle micrométrique, le tout couplé à une simplicité
de conception. Face à ces obstacles, les CLs offrent une issue pour le développement de
matériaux photoniques de performance.

4.3 Cristaux liquides biomimétiques


Les CLs synthétiques sont des candidats idéaux pour la conception biomimétique car
ils présentent une auto-organisation anisotrope, des architectures multi-échelles et une
diversité de matériaux, tels que des fluides, des polymères ou des gels. Ces matériaux
peuvent être insérés entre deux substrats solides ou flexibles ou être manipulés comme
des films autonomes.

Les CLCs synthétiques offrent notamment la possibilité de fabriquer de nouveaux ma-


tériaux en optique avancée en imitant les propriétés originales de la structure cholestérique
que l’on retrouve dans la nature.

4.3.1 Matériaux cholestériques bio-inspirés

Les CLCs synthétiques sont fréquemment utilisés dans le développement de matériaux


photoniques bio-inspirés pour créer une grande variété de capteurs optiques : IR, chimique,
mécanique, etc [95].

Par exemple, la structure cholestérique de la cellulose rencontrée chez certaines plantes,


comme dans le fruit de Pollia condensata, a inspiré la fabrication de capteurs optiques de
déformation [96]. Pour leur conception, un dérivé de la cellulose ayant une phase CLC a
été utilisé. Le matériau réalisé est en mesure de détecter des déformations en compression
allant jusqu’à 100 % avec une résolution de 2 % (figure II.12). Étant biocompatibles et
peu coûteux, ces capteurs de déformation pourraient être bénéfiques dans une variété
d’applications biomédicales et biomécaniques.

De la même manière, l’organisation hélicoïdale des fibrilles de chitine dans la cuticule


du crabe royal a suscité l’idée de développer des capteurs d’humidité, à base de matériaux
mésoporeux en phase cholestérique [97]. Le gonflement de ces matériaux au contact de
l’eau provoque un décalage de la bande de réflexion vers le rouge (figure II.13). Ces
prototypes reproduisent le gonflement des membranes de chitine dans l’eau observé chez
le crabe, ce qui entraîne une variation du pas hélicoïdal, donc un changement de la couleur
réfléchie.

55
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

Figure II.12 – Capteur optique de déformation par compression à base de CLCs cellu-
losiques bio-inspiré des CLCs biologiques dans certaines plantes [96].

Figure II.13 – Capteur optique d’humidité à base de matériaux CLCs mésoporeux bio-
inspiré de la structure cholestérique de la chitine dans la cuticule du crabe royal [97].

4.3.2 Biomimétisme de la cuticule de Chrysina resplendens

Dans le cas des cuticules de scarabée, les matériaux biomimétiques visant à les repro-
duire le plus fidèlement possible à l’aide de CLs restent rares. Ils se concentrent essentiel-
lement sur le scarabée doré Chrysina resplendens (figure II.14a).

56
4. MATÉRIAUX BIOMIMÉTIQUES POUR L’OPTIQUE

Les échantillons réalisés consistent en la superposition de trois couches : une couche


CLN insérée entre deux couches CLCs de sens gauche mais avec un pas hélicoïdal différent
[98] (figure II.14c). Le CLN agit comme une lame demi-onde qui permet au matériau
de réfléchir la lumière polarisée circulairement gauche et droite, comme la cuticule de
Chrysina resplendens.

Malheureusement, ce système à trois couches présente des interfaces qui ajoutent des
réflexions parasites et une diffusion de la lumière aux réflexions de Bragg recherchées. En
effet, les interfaces cholestériques-nématiques dans la cuticule du scarabée ne montrent
aucune discontinuité (figure II.14b), ce qui est particulièrement difficile à retranscrire dans
les matériaux biomimétiques [99].

(a) (b) (c)

Figure II.14 – (a) Photographie du scarabée Chrysina resplendens. (b) Image MEB de
la section transversale de la cuticule du scarabée [99]. La barre d’échelle représente 2 µm.
(c) Schéma de la structure du matériau biomimétique avec une couche CLN entre deux
couches CLCs de pas cholestériques différents [98].

4.3.3 Biomimétisme de la cuticule de Chrysina gloriosa


Comparée à la cuticule de Chrysina resplendens, la reproduction précise des bandes
irisées de Chrysina gloriosa est encore plus complexe car les motifs colorés discontinus
doivent coexister dans une seule couche dont les structures sont continues.

Récemment, une réplique de la cuticule de Chrysina gloriosa a été réalisée dans notre
équipe de recherche [83] en respectant les critères suivants :
• être une monocouche ;
• présenter un arrangement cholestérique continu dans toutes les directions ;
• avoir des bandes vertes et argentées en surface bien contrastées ;

57
CHAPITRE II. LES CRISTAUX LIQUIDES CHOLESTÉRIQUES BIOLOGIQUES

• présenter une orientation de l’axe hélicoïdal variable dans la partie supérieure des
bandes vertes et fixe dans les bandes argentées ;
• afficher un gradient de pas cholestérique dans l’épaisseur du matériau ;
• réfléchir les longueurs d’onde allant du vert au proche IR.

Ainsi les propriétés structurelles, texturales et optiques des CLCs biologiques de la


cuticule du scarabée ont été reproduites avec un très haut niveau de biomimétisme (figure
II.15).

Les matériaux qui ont été utilisés sont des oligomères CLCs vitrifiables pour imiter les
CLCs biologiques. Dans un esprit d’éco-conception, les ressources et les étapes du proto-
cole de fabrication ont été utilisées de manière optimale. L’auto-organisation des CLCs a
pu être contrôlée pendant une séquence unique de diffusion thermique : une bicouche de
CLCs de pas différents (une couche réfléchissant dans le vert, l’autre réfléchissant dans
l’IR) devient une monocouche de CLC ayant un gradient de pas. Dans le même temps,
le matériau est soumis à des changements locaux d’ancrage moléculaire en surface pour
constituer les bandes vertes et argentées.

Ce matériau biomimétique serait efficace dans certains domaines tels que la commu-
nication optique et le camouflage. Il pourrait notamment être employé afin de réaliser
des étiquettes optiques avancées dans le secteur de la cryptographie pour la fabrication
d’étiquettes anti-contrefaçon. D’ailleurs, des prototypes de laboratoire au titre de preuves
de concept ont été fabriqués [83].

(a) (b)

Figure II.15 – Photographies des échantillons biomimétiques de la cuticule de Chrysina


gloriosa [83]. Les barres d’échelle représentent 5 mm. (a) Échantillon sur un substrat en
verre. (b) Échantillon sous forme de film libre qui est comparé à la cuticule du scarabée.

Dans les chapitres suivants, nous reviendrons plus en détail sur cet échantillon biomi-
métique développé avec des oligomères CLCs vitrifiables. Il sera comparé aux répliques de
la cuticule de Chrysina gloriosa réalisées lors de ce travail de thèse à l’aide d’oligomères
CLCs polymérisables et réticulables qui nécessitent un protocole de fabrication différent
et ouvrent de nouvelles problématiques, fondamentales comme appliquées.

58
Deuxième partie

Réplique de la cuticule du scarabée


Chrysina gloriosa

59
Chapitre III

Choix de conception

1 Motivation du domaine de recherche


Comme spécifié dans le chapitre précédent, la reproduction de motifs biologiques offre
l’opportunité de concevoir de nouveaux matériaux photoniques aux propriétés multiples.
La cuticule irisée des scarabées du genre Chrysina est particulièrement prometteuse grâce
à la structure cholestérique complexe des fibrilles de chitine. Nous nous sommes intéressés
en détail au scarabée Chrysina gloriosa qui possède des bandes vertes et argentées. Notre
objectif est de réaliser des répliques de la cuticule rayée de Chrysina gloriosa sous forme
de films minces de CLCs.

Contrairement aux cuticules réfléchissantes non texturées, les motifs irisés que l’on
observe sur Chrysina gloriosa, mais aussi sur de nombreux autres insectes [70, 100] et
quelques fruits [76, 101], sont difficiles à reproduire précisément. En effet, les motifs dis-
continus et les couleurs doivent coexister dans une seule couche sans discontinuité des
structures. En outre, à l’échelle nanométrique et micrométrique, le pas cholestérique et
l’orientation de l’axe hélicoïdal doivent varier en fonction de la position dans le matériau
et, à l’échelle macroscopique, la formation de motifs périodiques en surface est simulta-
nément requise (figure III.1). Le principal défi consiste donc à trouver une méthode de
fabrication pour former un matériau CLC d’une seule pièce qui présente des propriétés
physiques variables. Cela doit s’effectuer sans avoir recours à l’accumulation de couches
et à la juxtaposition de motifs.

Il faut également considérer le fait que les cuticules à motifs sont associées au concept
de structures multi-échelles. Les matériaux biomimétiques doivent donc inclure des archi-
tectures anisotropes à l’échelle nanométrique, micrométrique et macroscopique. De plus,
la double polyvalence des couleurs et des motifs doit idéalement être obtenue par une
étape simple et unique afin de rendre le processus d’auto-organisation des CLCs plus
efficace.

Enfin, une utilisation optimale des ressources doit être visée, comme dans la nature.
On cherche donc à réduire le nombre de matériaux à mettre en œuvre puisque les orga-
nismes vivants n’utilisent que quelques éléments chimiques (généralement C, H, O, N, P

61
CHAPITRE III. CHOIX DE CONCEPTION

Figure III.1 – Structure en 3D avec deux bandes (verte et argentée) de la cuticule de


Chrysina gloriosa à reproduire [83].

et S) pour s’auto-organiser en une multitude de structures complexes. Pour adopter une


approche respectueuse de l’environnement, on veillera à éviter l’utilisation de nanopar-
ticules métalliques ou de couches métalliques. En effet, prendre ces précautions permet
d’envisager la recyclabilité des matériaux dans la perspective d’une production de masse.

En prenant en compte tous ces paramètres, nous souhaitons concevoir les répliques de
la cuticule rayée verte et argentée à l’aide d’oligomères CLCs polymérisables et réticulables
avec un squelette siloxane [102]. Seuls des oligomères vitrifiables ont été précédemment
utilisés dans notre équipe de recherche pour réaliser des répliques de la cuticule de Chry-
sina gloriosa [83].

Avec les CLCs polymérisables et réticulables, la structure et les propriétés optiques


sont fixées à l’issue de la polymérisation. L’avantage de ces matériaux est d’obtenir un
film ayant une structure thermiquement stable et non réversible. Ce n’est pas le cas de
la réplique conçue à l’aide des composés vitrifiables dont la structure n’est figée qu’en
dessous de la température de transition vitreuse Tg , donc seulement lorsque le film de
CLC est à l’état vitreux. Notre but est d’élaborer une réplique de la cuticule de Chrysina
gloriosa en adaptant le protocole de fabrication de la version vitrifiée à celui de CLCs
polymérisables et réticulables qui est à définir, avec une nouvelle prise en compte des
spécificités de ce cas.

62
2. POLYMÈRES CRISTAUX LIQUIDES

2 Polymères cristaux liquides


Un polymère, aussi appelé macromolécule, est une longue molécule constituée d’un
grand nombre de molécules plus petites liées chimiquement entre elles. Dans le cas le plus
simple, elle est obtenue par répétition d’un motif élémentaire, le monomère.

Les polymères cristaux liquides (PCLs) combinent les caractéristiques propres aux CLs
(auto-assemblage des molécules, diversité des phases, propriétés optiques, etc) à celles des
polymères (variété des architectures moléculaires, tenue mécanique, facilité de mise en
forme, etc) [15]. Dans le cas des PCLs thermotropes, l’état CL se manifeste en chauf-
fant le composé au-dessus de sa température de transition vitreuse Tg (équivalent de la
température de fusion Tf ). En-dessous de Tg , la plupart des mouvements intra et intermo-
léculaires au sein du polymère sont bloqués. Le polymère est ainsi dans un état vitreux.

2.1 Structures moléculaires


Il existe deux grandes familles de PCLs que l’on distingue suivant la position des mé-
sogènes (groupements responsables des phases CLs) par rapport à la chaîne du polymère :
les polymères à chaîne principale et les polymères à chaînes latérales (figure III.2).

Figure III.2 – Structures des différents types de PCLs [102].

Dans les PCLs à chaîne principale, les mésogènes appartiennent à la chaîne principale
et sont séparés par un groupe chimique flexible appelé espaceur. Cela permet à la ma-
cromolécule de posséder la dualité rigidité-flexibilité, caractéristique des CLs. Les chaînes
du polymère peuvent alors facilement s’arranger les unes par rapport aux autres en une
phase CL (nématique, smectique ou cholestérique) comme les CLs de petites molécules.

63
CHAPITRE III. CHOIX DE CONCEPTION

Dans les PCLs à chaînes latérales, les mésogènes se trouvent sous la forme d’unités
pendantes et sont liés au squelette macromoléculaire via des espaceurs. Le squelette peut
être une chaîne linéaire ou un cycle. La longueur de l’espaceur a un rôle important. En
effet, les mésogènes peuvent s’orienter pour former une phase CL si les espaceurs sont
suffisamment longs pour leur offrir un mouvement indépendant du squelette. D’ailleurs,
la présence de mésogènes chiraux permet de transmettre une chiralité à tout le polymère
qui aurait alors un arrangement cholestérique. La longueur de l’espaceur influe également
sur la Tg qui diminue lorsque la longueur de l’espaceur augmente [103]. Généralement,
l’espaceur est une séquence de groupes méthylènes CH2 .

Les PCLs à chaînes latérales présentent l’avantage de former des phases CLs sur une
plus large plage de température que les PCLs à chaîne principale. C’est pourquoi nous
avons choisi d’utiliser les PCLs à chaînes latérales avec un squelette siloxane cyclique qui
proviennent de Wacker-Chemie GmbH à Munich en Allemagne [102].

Ces matériaux sont appelés des cyclosiloxanes cristaux liquides. Un cyclosiloxane est
une molécule cyclique composée de la liaison Si − O − Si. Ce cycle constitue le squelette
du PCL et peut avoir une taille variable en fonction du nombre d’atomes Si − O. Dans
les cyclosiloxanes choisis pour cette étude, chaque atome de silicium est lié à un groupe
méthyle CH3 et à une chaîne latérale constituée d’un espaceur puis d’un mésogène que
l’on note R (figure III.3). Ces chaînes latérales organiques confèrent au composé des
propriétés hydrophobes alors que la chaîne principale −Si−O−Si−O− est exclusivement
inorganique. Les polysiloxanes sont connus pour avoir une grande stabilité thermique, une
faible énergie de surface et une faible Tg [104].

Figure III.3 – Structure chimique des cyclosiloxanes CLs utilisés dont les chaînes laté-
rales liées à chaque atome de silicium sont un groupe méthyle CH3 et un espaceur noté
esp suivi d’un mésogène noté R.

Nous allons nous intéresser plus en détail à deux types de cyclosiloxanes CLs issus
de Wacker-Chemie GmbH : les composés non réticulables dits vitrifiables et les composés
réticulables.

64
2. POLYMÈRES CRISTAUX LIQUIDES

2.2 Caractéristiques des cyclosiloxanes cristaux liquides vitri-


fiables
Les cyclosiloxanes vitrifiables ont un faible degré de polymérisation et sont donc consi-
dérés comme des oligomères (polymère formé d’un petit nombre de monomères). Ils pré-
sentent ainsi une faible viscosité, ce qui permet d’obtenir des films CLs ayant d’excellentes
propriétés optiques [102].

L’oligomère CLC vitrifiable est une chaîne siloxane cyclique liée, via des espaceurs,
à deux types de chaînes latérales [105] : un mésogène biphényl achiral et un mésogène
cholestérol chiral (figure III.4). Ce composé est un CLC de sens gauche et sa longueur
d’onde de réflexion est définie par le pas de la structure hélicoïdale, qui est ajustable en
fonction de la concentration du mésogène chiral. Le pourcentage molaire x en mésogène
chiral peut varier de 31 à 50 %, ce qui couvre les longueurs d’onde du rouge au bleu dans
le visible. En effet, la longueur d’onde de réflexion λ0 est inversement proportionnelle à
la concentration en mésogène chiral, d’après la relation :

Cste
λ0 =
Cchiral
où Cchiral est la concentration en mésogène chiral dans le composé.

Figure III.4 – Structure chimique du cyclosiloxane CLC vitrifiable ayant un mésogène


chiral en proportion molaire x et un mésogène achiral en proportion molaire 1-x liés au
cycle par des espaceurs (CH2 )3 − O [102]. n désigne la taille de la chaîne cyclique.

65
CHAPITRE III. CHOIX DE CONCEPTION

La Tg des CLCs vitrifiables est autour de 50 °C et la température de clarification Tc se


situe vers 180-210 °C. La phase cholestérique apparaît ainsi entre ces deux températures.

Le principe des composés vitrifiables est que l’on peut figer facilement le film CLC
dans un état solide vitreux à l’aide d’une trempe thermique sur une plaque de métal [19].
En refroidissant rapidement des échantillons en-dessous de Tg en partant d’une tempéra-
ture où le film est en phase cholestérique, la cristallisation est empêchée et la structure
cholestérique ainsi que ses propriétés optiques sont préservées, notamment à température
ambiante.

Les oligomères vitrifiables sont des systèmes stables lorsqu’ils sont figés en-dessous de
50 °C. Néanmoins, s’ils subissent des échauffements locaux ou s’ils sont à nouveau portés
à une température supérieure à la Tg , l’état solide vitreux n’est plus conservé. Les com-
posés seraient alors dans un état visqueux cholestérique ou isotrope, et la structure et
les propriétés optiques de l’échantillon pourraient être modifiées. Cette réversibilité peut
être mise à profit dans certains protocoles expérimentaux et pour certaines applications
[102]. Mais d’après nos objectifs, l’utilisation des cyclosiloxanes réticulables est plus avan-
tageuse car, après polymérisation, l’état du film CLC est maintenu sur une large plage de
température.

2.3 Caractéristiques des cyclosiloxanes cristaux liquides réticu-


lables
2.3.1 Généralités
Les cyclosiloxanes polymérisables sont aussi des oligomères, mais contrairement aux
composés vitrifiables, ils sont réticulables par voie photochimique. De plus, les CLs réti-
culables ne nécessitent pas une Tg élevée comme pour les composés vitrifiables, dont le
concept de vitrification fonctionne à température ambiante. Les composés réticulables ont
une Tg d’environ 0 °C et une Tc autour de 130-140 °C.

L’oligomère cholestérique polymérisable est constitué d’une chaîne siloxane cyclique à


laquelle deux types de chaînes latérales sont attachées via des espaceurs : un mésogène
cholestérol chiral et un mésogène achiral portant un groupe méthacrylate (figure III.5). La
structure hélicoïdale de ce composé est de sens gauche. L’oligomère nématique, quant à lui,
est composé de trois chaînes latérales différentes qui sont toutes des mésogènes achiraux
dont l’un est porteur du groupe méthacrylate (figure III.6). Ce groupe méthacrylate qui
est ajouté aux composés réticulables permet la photopolymérisation que nous détaillerons
par la suite.

Afin de faciliter l’étalement des composés sous forme de films minces, il est essentiel
que leur viscosité soit faible. Pour cela, la chaîne cyclique est de petite taille avec 4 à 7
unités de siloxanes et des monomères (figure III.7) ont été ajoutés aux oligomères par le
chimiste [102].

66
2. POLYMÈRES CRISTAUX LIQUIDES

Figure III.5 – Structure chimique du cyclosiloxane CLC réticulable ayant un mésogène


chiral et un mésogène achiral liés au cycle par des espaceurs (CH2 )3 −O [102]. Le mésogène
achiral porte une fonction méthacrylate.

Figure III.6 – Structure chimique du cyclosiloxane CLN réticulable ayant trois méso-
gènes achiraux différents dont un portant une fonction méthacrylate [102]. Ils sont liés au
cycle par des espaceurs (CH2 )3 − O.

67
CHAPITRE III. CHOIX DE CONCEPTION

(a)

(b)

Figure III.7 – Structure chimique des monomères portant la fonction méthacrylate : (a)
monomère achiral et (b) monomère chiral [102].

Lorsque l’on forme un film mince de texture planaire, la longueur d’onde de réflexion
varie en fonction du pourcentage molaire des mésogènes chiraux dans le composé polymé-
risable. Par exemple, lorsqu’il contient 31 % de mésogènes chiraux, le composé réfléchit
dans le rouge. Il est nommé Silicon Red (SR) et il est composé à 79 % d’oligomères cho-
lestériques et à 21 % de monomères achiraux. Si le composé possède 50 % de mésogènes
chiraux, il réfléchit dans le bleu. Il est appelé Silicon Blue (SB) et il est composé à 65 %
d’oligomères cholestériques, à 8 % de monomères achiraux et à 27 % de monomères chi-
raux. Pour ce qui est du composé nématique, il ne possède évidemment aucun mésogène
chiral. On le nomme Silicon Nematic (SN) et il contient 70 % d’oligomères nématiques
et 30 % de monomères achiraux. Le tableau III.1 récapitule la composition des composés
SB, SR et SN.

Les siloxanes CLs étant miscibles entre eux, les composés SB, SR et SN peuvent être
mélangés en différentes proportions pour faire varier la quantité de mésogènes chiraux
dans le mélange et ainsi modifier le pas cholestérique du matériau. En mélangeant par
exemple SB et SR, on peut former des matériaux CLCs réfléchissant dans tout le visible.
En mélangeant SR et SN, la proportion en mésogènes chiraux sera plus faible que 31 %
et on obtiendra un CLC réfléchissant dans l’IR.

68
2. POLYMÈRES CRISTAUX LIQUIDES

SB SR SN
Pourcentage molaire de 50 % 31 % 0%
mésogènes chiraux
Pourcentage molaire 65 % 79 % ⊘
d’oligomères cholestériques
Pourcentage molaire ⊘ ⊘ 70 %
d’oligomères nématiques
Pourcentage molaire de 27 % ⊘ ⊘
monomères chiraux
Pourcentage molaire de 8% 21 % 30 %
monomères achiraux

Table III.1 – Tableau récapitulant la composition des composés SB, SR et SN.

2.3.2 Photopolymérisation

Lorsque l’on utilise les cyclosiloxanes CLs réticulables, l’objectif final est de figer leur
structure par polymérisation. Avec ces composés, un réseau polymère tridimensionnel se
forme entre les macromolécules pendant la polymérisation : c’est ce que l’on appelle la
réticulation. Cette polymérisation par réticulation est effectuée par voie photochimique,
c’est-à-dire en exposant les matériaux à une irradiation UV. On parle alors de photopo-
lymérisation.

La photo-initiation est l’une des méthodes les plus efficaces pour obtenir une pho-
topolymérisation très rapide. Pour ce faire, un photo-initiateur (PI) est ajouté en faible
quantité aux cyclosiloxanes CLs réticulables. Lorsque le matériau est ensuite exposé aux
UVs, le rôle du PI est d’amorcer la réaction de polymérisation de manière homogène et
contrôlée.

La polymérisation est réalisée en trois étapes : l’initiation, la propagation et la ter-


minaison. Lors de l’étape d’initiation, le PI est excité par la lumière UV et génère alors
des radicaux libres [106]. Ces derniers réagissent ensuite avec les doubles liaisons des
groupes méthacrylates sur les oligomères et les monomères, ce qui produit de nouveaux
radicaux qui réagissent eux-mêmes, entraînant la formation de chaînes de grandes masses
molaires. Les groupes méthacrylates servent ainsi de réactifs pour la polymérisation. Ils
sont employés en raison de leur photopolymérisation rapide et de leur stabilité thermique.

Plusieurs propriétés doivent être prises en compte pour choisir le PI, notamment son
absorption (coefficient d’extinction, position en longueur d’onde) et ses caractéristiques
photophysiques (rendement quantique, durée de vie de l’état excité, cinétiques de réac-
tion) [107]. Un PI très réactif est avantageux pour en ajouter le moins possible aux cy-
closiloxanes CLs afin de ne pas induire de variations dans les températures de transition.
De plus, un PI en trop forte concentration engendrerait un profil inhomogène d’intensité

69
CHAPITRE III. CHOIX DE CONCEPTION

dans l’épaisseur de la couche à cause de sa forte absorption UV [108].

D’après les recommandations du chimiste [102], la photopolymérisation des composés


réticulables devrait s’effectuer à 90 °C en ayant ajouté moins de 2,5 % en masse de PI
Irgacure 907 (IRG907) (figure III.8). Le spectre d’absorption de IRG907 est centré sur
330 nm tandis que le pic d’émission maximale du banc UV utilisé pour les réactions de
polymérisation est environ à 365 nm. Sachant que le PI ne fonctionne que lorsqu’il est
exposé à de la lumière dans sa région d’absorption, on en déduit que le banc UV est adapté
au PI IRG907 recommandé. De plus, les groupements acrylates sont particulièrement
réactifs lorsqu’ils sont exposés à une lumière UV à 365 nm [109].

Figure III.8 – PI IRG907 générant des radicaux lors d’une irradiation UV. Ces radicaux
libres vont amorcer la réaction de polymérisation en réagissant avec les groupes métha-
crylates des oligomères et des monomères.

Après photopolymérisation, la structure d’un film mince de CL est figée irréversible-


ment : on obtient un élastomère solide, qui est un polymère réticulé ayant une grande
élasticité. Sa longueur d’onde de réflexion devient presque indépendante de la tempéra-
ture dans la plage de -196 °C (azote liquide) à 140 °C. Le film conserve ses propriétés
optiques et structurales sur une large plage de température.

Enfin, il est important de noter qu’un film CL réticulable qui est semi-libre ne peut
pas polymériser car l’oxygène de l’air inhibe la polymérisation. Le film doit alors être
couvert tout en laissant passer les UVs ou être polymérisé sous atmosphère inerte (azote
ou argon par exemple). Il nous faudra tenir compte de cette spécificité dans notre nouveau
protocole.

70
3. ÉLARGISSEMENT DE LA BANDE DE BRAGG

3 Élargissement de la bande de Bragg


Maintenant que l’on a défini les choix à faire concernant les PCLs employés pour
fabriquer les répliques, nous allons nous pencher sur la manière de réaliser un matériau
cholestérique ayant une bande de Bragg large réfléchissant toutes les longueurs du vert
au proche IR comme la cuticule de Chrysina gloriosa.

Afin d’élargir la bande de Bragg, il existe deux manières principales d’associer des
couches de CLCs :
• en empilant plusieurs couches de CLCs pour concevoir un matériau multicouche ;
• en faisant diffuser thermiquement deux couches de CLCs pour former un matériau
monocouche.

3.1 Empilement de couches : système multicouche


En superposant plusieurs couches de CLCs ayant des pas différents, les longueurs
d’onde de réflexion des couches s’additionnent pour produire une gamme de longueurs
d’onde plus étendue [110]. Par exemple, en empilant des films de CLCs réfléchissant dans
le bleu, le vert et le rouge, une large bande de réflexion est obtenue dans tout le visible
(figure III.9).

Figure III.9 – Spectre de réflexion à large bande du matériau constitué de l’empilement


de films polymères cholestériques bleu, vert et rouge [111].

Néanmoins l’empilement de couches présente des limites et des effets indésirables tels
que des réflexions internes multiples, des défauts optiques ou des pertes aux interfaces.
Pour ces raisons et pour s’inspirer de la cuticule du scarabée, nous choisissons de fabriquer
une seule couche cholestérique avec une structure continue et un gradient de pas.

71
CHAPITRE III. CHOIX DE CONCEPTION

3.2 Diffusion thermique entre couches : système monocouche


Un gradient de pas peut être généré dans une structure cholestérique à l’aide d’une
diffusion thermique entre deux couches de CLCs ayant des pas différents. Des résultats
ont été obtenus en utilisant deux films minces de CLCs vitrifiables, l’un ayant 50 % de
mésogènes chiraux (réfléchissant dans le bleu) et l’autre 31 % (réfléchissant dans le rouge)
[112-115]. Les surfaces libres des films sont mises en contact, puis cette cellule sandwich est
recuite sur une plaque chauffante à une température supérieure à la Tg qui est d’environ
50 °C (figure III.10). Enfin, le matériau subit une trempe à température ambiante et le
gradient est figé dans le film à l’état solide vitreux.

Figure III.10 – Méthode expérimentale de la diffusion thermique entre des films minces
de CLCs rouge et bleu conduisant à une monocouche ayant un gradient de pas cholesté-
rique. Les sections transversales des films sont représentées.

Lors du recuit, les deux films diffusent l’un dans l’autre, ce qui engendre un gradient de
concentration transversal donc un gradient de pas (figure III.11). Le matériau devient une
monocouche ayant une large bande de Bragg qui réfléchit les longueurs d’onde des deux
films initiaux et toutes les longueurs d’onde intermédiaires (figure III.12). Cependant, si
on laisse la diffusion thermique se dérouler plus longtemps, les deux films d’origine com-
mencent à se mélanger jusqu’à former un matériau cholestérique avec un pas monotone.
Ainsi, les caractéristiques de la bande de réflexion peuvent être facilement ajustées en
faisant varier le temps de recuit lors de l’étape de la diffusion thermique.

La diffusion thermique entre deux couches de CLs est possible si elles sont facilement
miscibles, ce qui est le cas de tous les cyclosiloxanes CLs vitrifiables et réticulables que
l’on a détaillés précédemment. En effet, les molécules de ces composés, bien que déjà assez
grandes car ce sont des oligomères, ont une structure similaire ne différant que par le taux
de chaînes latérales chirales.

Afin de reproduire le gradient de pas cholestérique réfléchissant les longueurs d’onde


du vert au proche IR de la cuticule de Chrysina gloriosa, il est pertinent d’envisager une
diffusion thermique entre deux couches de cyclosiloxanes CLCs, l’une réfléchissant dans le
vert et l’autre réfléchissant dans l’IR. Lorsque la diffusion thermique aura été effectuée, le
matériau monocouche avec une large bande de Bragg entre les longueurs d’onde du vert
et du proche IR pourra être polymérisé à l’aide d’une irradiation UV.

72
3. ÉLARGISSEMENT DE LA BANDE DE BRAGG

Figure III.11 – Image MET de la section transversale du matériau cholestérique après


25 min de diffusion thermique à 85 °C des films de CLCs vitrifiables rouge et bleu. La dis-
tance entre deux lignes claires (ou sombres) est liée au demi-pas. La texture en empreintes
digitales présente un gradient de périodicité continu dans la région où les films initiaux
ont diffusé l’un dans l’autre [22].

Figure III.12 – Spectres de transmission acquis à différents temps de recuit pendant


l’étape de diffusion thermique à 85 °C du matériau constitué initialement des films de
CLCs vitrifiables rouge et bleu. La bande de Bragg est ajustable en fonction uniquement
du temps de recuit et son évolution est irréversible [22].

73
CHAPITRE III. CHOIX DE CONCEPTION

4 Génération de motifs en surface


Il reste un autre objectif dont il faut déterminer la méthode de conception pour l’éla-
boration de la réplique de la cuticule de Chrysina gloriosa : celui de former le motif de
bandes vertes et argentées en surface. Il est possible d’utiliser différents matériaux et di-
verses solutions pratiques afin de réaliser des motifs en surface. Les motifs rapportés dans
la littérature sur les CLCs thermotropes peuvent être divisés en deux groupes que nous
allons détailler : les motifs de taille submillimétrique et ceux de taille millimétrique.

4.1 Motifs de taille submillimétrique


La plupart des études sur la génération de motifs avec des CLCs thermotropes se
sont concentrées sur la réalisation de motifs de taille submillimétrique dont l’assemblage
conduit à des réseaux [116, 117]. Ces réseaux sont principalement générés de deux ma-
nières : des molécules ou des particules étrangères sont injectées dans des CLCs en vrac
ou le CLC est conçu en forme de sphères.

Différents colorants peuvent être injectés, tels que la coumarine [118], le rouge de
méthyle [119], des molécules azoïques 1 [120, 121] ou des molécules photoactives entraî-
nant une inversion de l’hélice [122]. Ils sont ajoutés au matériau pour photo-induire une
structure périodique, typiquement une texture en empreintes digitales. De même, les na-
noparticules métalliques, telles que le platine [123] ou l’or [124], peuvent être mélangées
au CLC. Elles se séparent alors pour former un réseau de nanoparticules dont le motif est
semblable à des empreintes digitales.

La microfluidique 2 peut être utilisée pour concevoir des réflecteurs sphériques à partir
de matériaux CLCs où les sphères s’organisent pour permettre une communication optique
croisée entre les sphères à l’échelle micrométrique [125-128]. Un tel système peut encoder
des informations cachées sur une surface [128]. Les sphères de CLCs reflètent la lumière
de manière omnidirectionnelle avec une polarisation et une longueur d’onde spécifiques
[129]. Cependant, l’intensité totale de cette réflexion est faible. Pour diminuer cet effet,
plusieurs couches de sphères sont superposées [130].

Mais dans la majorité des cas, c’est un photomasque qui est utilisé pour concevoir
des motifs [43, 118, 119, 131-137]. Il consiste en un photoalignement réversible [119, 138]
ou en des réactions de photopolymérisation en une ou plusieurs étapes [43, 118, 131-
136]. L’adressage électrique peut être utilisé pour créer des motifs dans les CLCs placés
entre des électrodes métalliques et transparentes à motifs [139-141]. Pour rendre le motif
apparent, le film conducteur est gravé localement à l’aide d’un faisceau laser [139, 140] ou
la cellule est constituée d’électrodes interdigitées [141].

1. Les colorants azoïques sont des molécules organiques avec un groupe azo -N=N- qui relie deux
noyaux benzéniques.
2. La microfluidique désigne à la fois l’étude et la technique des systèmes mettant en œuvre l’écoule-
ment des fluides dans des microcanaux à l’échelle micrométrique.

74
4. GÉNÉRATION DE MOTIFS EN SURFACE

4.2 Motifs de taille millimétrique


Les motifs cholestériques visibles à l’œil nu sont rapportés dans la littérature beaucoup
moins fréquemment que ceux traitant des motifs à petite échelle.

Dans un film CLC dopé avec un colorant azoïque, le photoalignement par focalisation
d’un faisceau laser est susceptible de produire un spot vert de 8 mm de diamètre dans
un environnement de couleur rouge [121]. L’empilement de couches de CLCs de différents
pas [142, 143] et l’utilisation d’un champ électrique externe [144] ou d’un faisceau laser
[145] peuvent aussi révéler des motifs colorés.

Néanmoins, la plupart des études ont utilisé des sphères de CLCs intégrées dans une
matrice isotrope. Ces composites sont produits par microfluidique [126, 128], par émulsifi-
cation [146] ou par dispersion de gouttelettes de CLCs dans une solution d’alcool polyviny-
lique (PVA) [147]. La formation de motifs est rendue possible par l’assemblage de réseaux
de microsphères assisté par un champ magnétique [126], par un photomasque [146], par
l’impression 3D [147] ou par l’organisation manuelle des sphères de CLCs polymérisées
dans la résine [128].

Une autre méthode consiste à déposer, sur la surface libre d’un film CLC, un com-
posé qui induit une modification de l’ancrage de surface des molécules afin d’obtenir un
motif texturé. Des polymères isotropes tels que le polyimide ou le PVA sont couramment
employés sur des films de CLs pour conduire à une orientation moléculaire parallèle au
substrat, donc à un ancrage planaire [148]. Le perfluoro-polymère, quant à lui, induit
durablement une inclinaison de l’hélice cholestérique par rapport au substrat [149].

L’approche du changement d’ancrage est plus judicieuse pour notre étude car la cuti-
cule de Chrysina gloriosa possède une alternance de bandes vertes présentant une texture
polygonale et de bandes argentées avec une texture planaire. Notre objectif est de déter-
miner les conditions physiques pour l’élaboration de répliques de cette cuticule sous la
forme de monocouches polymérisées à motifs :
• sans qu’il soit nécessaire d’introduire des molécules ou des particules étrangères dans
le matériau chiral ou d’appliquer un champ externe ;
• sans l’utilisation de photomasques ou d’équipements spécifiques pour la formation
de motifs ;
• dans une procédure en une étape basée sur la modification locale et contrôlée de
l’ancrage moléculaire à la surface des films.

Pour ce faire, il est possible de former une alternance de bandes planaires et polygonales
en se servant uniquement du PVA qui favorise l’ancrage planaire. En effet, la texture d’un
film en phase CLC passe de planaire à polygonale lorsque sa surface est en contact avec
l’air [59]. Donc il suffit de déposer préalablement du PVA sur les régions de la surface
du film dont on souhaite conserver l’ancrage planaire. Lors du recuit, la couche de PVA
pourra protéger de l’air ces régions pour devenir les bandes argentées. L’évolution de la
texture de planaire à polygonale sera effective sur le reste de la surface : cela deviendra
les bandes vertes polygonales.

75
CHAPITRE III. CHOIX DE CONCEPTION

5 Bilan des choix de conception retenus


La réplique de la cuticule de Chrysina gloriosa sera formée à partir de deux films de
CLC : l’un réfléchissant dans le vert et l’autre réfléchissant dans l’IR. Le composé CLC
vert pourra être constitué à partir du mélange des composés SB et SR et le composé
CLC IR à partir du mélange des composés SR et SN. Le PI IRG907 sera ajouté en petite
quantité aux composés.

On choisira de former un film CLC vert avec une épaisseur au moins deux fois plus
élevée que le film CLC IR pour que la partie supérieure de l’échantillon finale reste verte
en surface et ne soit pas rapidement consommée par la diffusion du film CLC IR. De plus,
on déposera le film vert sur le film IR et non l’inverse pour correspondre au gradient de
pas de la cuticule du scarabée : pas induisant une réflexion dans le vert en surface et qui
croît jusqu’à réfléchir dans l’IR en profondeur.

Lorsque les deux films initiaux seront assemblés et avant leur diffusion thermique,
une solution de PVA sera déposée sur l’échantillon sous forme de bandes pour couvrir
les futures bandes argentées. Les bandes de PVA ont l’avantage de pouvoir être dissoutes
dans l’eau ultérieurement si désiré.

Pour former le motif texturé en surface, il est plus direct d’envisager des essais sur un
composé vitrifiable plutôt que sur un composé réticulable non polymérisé à ce stade de
l’élaboration. Sachant que beaucoup de paramètres expérimentaux devront être détermi-
nés (pourcentages des composés dans chaque mélange, épaisseurs des films, température
et temps de recuit, paramètres de photopolymérisation, etc), on constituera, dans un pre-
mier temps, le motif sur une surface vitrifiée pour s’affranchir de la spécificité à manipuler
une surface "molle" qui devra être polymérisée à la fin du protocole. Pour cela, on décide
de choisir des films initiaux vert vitrifiable et IR réticulable. L’intérêt est de passer pro-
gressivement à l’utilisation de composés réticulables en gardant la possibilité de former
le motif de bandes vertes et argentées en surface sur un composé vitrifié. On s’occupera
dans un deuxième temps de la réalisation de la réplique avec seulement des composés
réticulables.

Enfin, on effectuera la diffusion thermique entre les deux couches de CLC sur une
plaque chauffante. Le changement d’ancrage en surface dans les régions des futures bandes
vertes sera engendré simultanément. L’échantillon sera par la suite polymérisé sous le banc
UV.

On formera ainsi deux versions de la réplique de la cuticule de Chrysina gloriosa :


• une version hybride avec un film vert vitrifiable et un film IR réticulable ;
• une version tout élastomère avec les films vert et IR réticulables.

Nous nous intéresserons d’abord à la fabrication de la version hybride.

76
Chapitre IV

Réplique hybride de la cuticule de


Chrysina gloriosa

1 Matériaux et méthodes
1.1 Matériaux
Pour le CLC vert, nous nous servons de l’oligomère CLC vitrifiable appelé Silicon
Green (SG) qui possède 44 % de mésogènes chiraux. Il est utilisé tel que fourni par le
chimiste [102]. C’est un CLC de sens gauche dont la bande de Bragg est centrée sur
530 nm. On nomme ce composé CLC SG.

Le CLC IR utilisé pour la conception de la réplique est un mélange comportant 40 % en


masse du composé cholestérique réticulable SR et 60 % en masse du composé nématique
réticulable SN. On obtient un CLC de sens gauche réfléchissant autour de 1630 nm.

0,6 % en masse de PI IRG907 est ajouté au CLC SG et au CLC IR.

1.2 Étude préliminaire du film CLC IR réticulable


1.2.1 Traitement du substrat en verre
Une couche de solution de PVA est déposée sur la lame de verre de 1 mm d’épaisseur sur
laquelle sera formé le film CLC IR. Le film de PVA sec servira de couche d’alignement afin
de favoriser l’ancrage planaire des molécules de CLCs, mais aussi de couche sacrificielle
pour obtenir un matériau libre (détaché du substrat) à la fin du protocole en plaçant
l’échantillon dans l’eau.

Pour cela, le PVA sous forme de poudre est dissous à 4 % en masse dans de l’eau
distillée. La solution aqueuse est ensuite agitée et 0,20 mL de solution est déposé sur
la lame. En utilisant le spin-coater, le PVA est étalé lors d’un programme composé de
trois séquences avec les vitesses de rotation et les durées suivantes : 5000 tr/min pendant
20 s, puis 4000 tr/min pendant 40 s, puis 3000 tr/min pendant 60 s. Cette opération a été
répétée trois fois. L’épaisseur du film séché mesure environ 2 µm.

77
CHAPITRE IV. RÉPLIQUE HYBRIDE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

1.2.2 Conditions de photopolymérisation du film CLC IR

Plusieurs films minces de CLC IR ont été formés sur une plaque chauffante à 90 °C
entre deux lames de verre traitées au PVA.

On cherche ensuite à déterminer la température de polymérisation du film sachant


qu’on la fixe à la même température que pour la diffusion thermique qui sera effectuée
ultérieurement avec le film CLC SG. On souhaite polymériser le film CLC IR à une tem-
pérature assez élevée pour que la photopolymérisation soit effective, mais pas trop élevée
afin d’empêcher une polymérisation thermique prématurée lors de l’étape de la diffusion
thermique entre les deux films. En effet, il arrive que la polymérisation soit amorcée à
cause de l’apport de chaleur de la plaque chauffante lors de la diffusion thermique. Or on
cherche à l’éviter pour ne pas figer le film CLC IR avant qu’il ait eu le temps de diffuser
suffisamment dans le film CLC SG.

Pour savoir si un film a polymérisé, donc s’il est devenu un échantillon élastomère
solide, on vérifie que sa texture n’évolue plus lorsque la température est augmentée au-
dessus de sa Tc (autour de 135 °C). Pour cela, le film CLC IR est placé sur une platine
chauffante et est observé au MO entre polariseurs croisés en augmentant la température
de 20 °C à 170 °C.

Les premiers essais ont montré que le film CLC IR ne polymérise pas thermiquement
après l’avoir laissé sur une plaque chauffante à 85 °C pendant 2 h 30. Par contre, il polymé-
rise lorsqu’il est laissé à 120 °C pendant 30 min. On teste ensuite d’autres températures
(110, 100 et 90 °C) en vérifiant que le film ne polymérise pas thermiquement pendant
au moins 1 h 30 mais polymérise sous UV à puissance 0,25 mW/cm2 au bout de 10 min.
On privilégie une photopolymérisation qui est effective en quelques minutes pour que la
diffusion thermique entre les deux films initiaux ne se poursuive pas.

La température qui a finalement été retenue pour le processus est 90 °C. Dans ce
cas, un film CLC IR ne polymérise pas au bout de 1 h 30 sur la plaque chauffante et
il polymérise après 10 min sous le banc UV à une puissance de 0,25 mW/cm2. Après
photopolymérisation, la texture de l’ensemble du film CLC IR reste planaire entre 20 et
170 °C (figure IV.1). Seul son bord subit une transition isotrope entre 130 et 140 °C. À
170 °C, la texture planaire n’a pas changé et le contour du film est dans un état liquide
isotrope. Ainsi, le film a complètement polymérisé sauf son bord sur environ 200 µm car
l’oxygène de l’air inhibe la photopolymérisation.

Avec un film CLC IR contenant 0,6 % de photo-initiateur et à une température de


90 °C, la polymérisation sous UV avec une puissance de 0,25 mW/cm2 est réussie en seule-
ment 10 min. Ces paramètres seront donc adoptés afin de former la réplique hybride en
couplant le film CLC SG vitrifiable avec le film CLC IR polymérisable.

78
1. MATÉRIAUX ET MÉTHODES

(a) (b)

(c) (d)

(e) (f)

Figure IV.1 – Images optiques, prises au MO Olympus BX51 en transmission entre


polariseurs croisés dont l’orientation est indiquée par les flèches noires en haut à gauche,
représentant la même région du film CLC IR polymérisé à 90 °C pendant 10 min observée
sur une platine chauffante à différentes températures : (a) 20 °C, (b) 100 °C, (c) 120 °C,
(d) 130 °C, (e) 140 °C et (f) 170 °C. La barre d’échelle représente 200 µm.

79
CHAPITRE IV. RÉPLIQUE HYBRIDE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

1.3 Protocole expérimental de la réplique hybride


1.3.1 Préparation des films CLC SG et CLC IR
Pour former les deux films initiaux CLC SG et CLC IR, la méthode des rails est utilisée.
Elle permet d’obtenir directement des films semi-libres avec une épaisseur contrôlée par
des cales.

Pour la préparation du film CLC IR, deux bandes de cales en aluminium de 20 µm


d’épaisseur sont positionnées parallèlement l’une à l’autre sur une lame de verre de 1 mm
d’épaisseur traitée au PVA. L’extrémité de chaque cale est scotchée à la lame. Cette
dernière est ensuite placée sur la plaque chauffante à 90 °C et on y dépose du CLC IR sur
le côté gauche. Puis, le CLC IR est étalé de gauche à droite à l’aide d’une autre lame de
verre qui prend appui sur les cales (figure IV.2). L’étalement doit être fait d’un geste net
et continu pour que la surface du film soit uniforme et sans stries.

Enfin, le spectre de transmission du film CLC IR est acquis. La bande de Bragg est
centrée sur 1630 nm et a une profondeur satisfaisante, soit 40 % environ (figure IV.3).

Figure IV.2 – Film CLC IR formé par la méthode des rails à 90 °C à l’aide de cales
de 20 µm d’épaisseur. La lame de verre sur laquelle le film est étalé a été préalablement
traitée au PVA.

Pour la formation du film CLC SG semi-libre, deux bandes de cales en aluminium de


50 µm d’épaisseur sont scotchées sur une lame de verre de 150 µm d’épaisseur. La lame
est placée sur la plaque chauffante à 160 °C, puis du CLC SG y est déposé sur le côté
gauche. L’étalement du film s’effectue de gauche à droite à l’aide d’une lame de verre en
appui sur les cales (figure IV.4). Enfin, dès son retrait de la plaque, le film est vitrifié à
température ambiante en le faisant coulisser sur une plaque métallique.

Le spectre de transmission du film CLC SG révèle une bande de Bragg dont la longueur
d’onde moyenne est à 530 nm et sa profondeur est d’environ 40 % (figure IV.5).

80
1. MATÉRIAUX ET MÉTHODES

La température lors de l’étalement du film vitrifiable a été choisie bien plus élevée que
celle pour l’étalement du film réticulable. Cela s’explique par la différence de Tg , donc de
viscosité, entre les deux composés qui a dû être prise en compte pour pouvoir étaler les
films de manière homogène.

Figure IV.3 – Spectre de transmission du film CLC IR.

Figure IV.4 – Film CLC SG vitrifié, formé par la méthode des rails à 160 °C à l’aide de
cales de 50 µm d’épaisseur.

81
CHAPITRE IV. RÉPLIQUE HYBRIDE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

Figure IV.5 – Spectre de transmission du film CLC SG.

1.3.2 Fabrication de la réplique hybride

La conception de la réplique hybride de la cuticule de Chrysina gloriosa est basée sur


le contrôle de la diffusion thermique entre une couche cholestérique vitrifiable réfléchissant
dans le vert et une couche cholestérique réticulable réfléchissant dans le proche IR. Cette
diffusion thermique entre les deux films est accompagnée de changements surfaciques des
conditions d’ancrage moléculaire pour imiter les bandes vertes et argentées du scarabée.
Le protocole d’élaboration comprend six étapes (figure IV.6).

Tout d’abord, la surface libre du film CLC SG est mise en contact avec celle du film
CLC IR (étape 1 figure IV.6). La cellule est fermée à température ambiante sans cales.
Elle est ensuite chauffée à 90 °C pendant 5 min pour faire adhérer les deux films (étape
2 figure IV.6). Après refroidissement de l’échantillon à température ambiante, le substrat
supérieur est vivement retiré du film à l’aide d’air pressurisé afin d’éviter la formation de
rayures à la surface du film (étape 3 figure IV.6). On vérifie au MO que la surface libre
de l’échantillon soit restée lisse après le retrait.

Il faut ensuite déposer des bandes de PVA sur le film pour la formation du motif texturé
en surface (étape 4 figure IV.6). Pour dessiner les bandes, on découpe des morceaux
allongés de ruban adhésif de 75 µm d’épaisseur (Loadpoint 6033) avec des dimensions
proches de celles des bandes vertes de Chrysina gloriosa. Puis, ils sont placés parallèlement
et de manière espacée sur la surface libre du film bicouche. Les régions situées entre les
rubans sont ensuite enduites de solution aqueuse de PVA par centrifugation.

82
1. MATÉRIAUX ET MÉTHODES

Figure IV.6 – Schéma des six étapes du protocole expérimental pour la formation de
la réplique hybride de la cuticule de Chrysina gloriosa à partir des films minces CLC SG
vitrifiable et CLC IR réticulable. Les sections transversales des films sont représentées.

Pour cela, la surface de l’échantillon avec les bandes d’adhésif est recouverte de 0,20 mL
de la solution aqueuse à 4 % en masse de PVA. Avec le spin-coater, la solution de PVA
est étalée lors d’un programme composé de trois séquences avec les vitesses de rotation
et les durées suivantes : 5000 tr/min pendant 20 s, puis 4000 tr/min pendant 40 s, puis
3000 tr/min pendant 60 s. Cette opération est répétée trois fois. Les bandes de ruban
adhésif sont délicatement retirées du film à l’aide d’une pince à épiler avant que le film de
PVA ne soit complètement sec. Après séchage, la fine pellicule de PVA protégera de l’air
ces régions, qui sont destinées à devenir des bandes argentées après recuit.

Par la suite, l’échantillon bicouche est recuit en phase cholestérique à 90 °C pendant


1 h sur une plaque chauffante (étape 5 figure IV.6). Le défi est de concilier la même tempé-
rature de recuit lors de la diffusion thermique pour les composés vitrifiable et réticulable
alors qu’ils ont des viscosités différentes.

Trois événements majeurs se produisent simultanément en raison de la diffusion ther-


mique entre les deux films dans la direction perpendiculaire à leurs surfaces :
• Un gradient physique transversal de pas est construit comme résultat du gradient
chimique des espèces chirales.
• La texture polygonale se développe dans les régions en contact avec l’air entre les

83
CHAPITRE IV. RÉPLIQUE HYBRIDE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

bandes de PVA. En effet, l’ancrage des molécules devient homéotrope dans la partie
supérieure de ces régions, tandis que la texture planaire est préservée dans les régions
en dessous des bandes de PVA car l’ancrage des molécules reste plan dans ces régions.
• Le système bicouche devient une couche unique.

Enfin, l’échantillon devenu monocouche est placé à 90 °C pendant 10 min sous le banc
UV avec une intensité maximale à 365 nm égale à 0,25 mW/cm2 (étape 6 figure IV.6).
Ainsi, les espèces réticulables polymérisent pour demeurer dans un état élastomère solide.
En retirant le film de la plaque chauffante, on vitrifie à température ambiante les espèces
vitrifiables en faisant coulisser l’échantillon sur une plaque métallique afin qu’elles soient
figées dans un état solide vitreux. Les propriétés structurelles et optiques sont maintenant
conservées dans le film.

84
2. RÉSULTATS

2 Résultats
La réplique hybride issue des films CLC SG vitrifiable et CLC IR réticulable a été
réalisée avec succès. Elle est obtenue avec un très bon contraste entre les bandes vertes et
argentées en surface (figure IV.7a).

La cinquième étape de la conception, la diffusion thermique, a été l’étape cruciale de


la réalisation de la réplique. Cette étape unique est basée sur l’auto-organisation de la
structure cholestérique à partir des deux films initiaux. Ainsi, on a pu contrôler avec une
grande précision la formation de la structure de l’échantillon composé de deux bandes
colorées différentes en surface avec un gradient de pas identique dans l’épaisseur.

De plus, l’association de bandes alternativement vertes et argentées a été facilement


atteinte en déposant des bandes espacées sur la surface libre du film avant le début de la
diffusion thermique. De nombreux motifs autres que des bandes peuvent être constitués,
ce qui offre un large choix à la demande pour concevoir des motifs réfléchissants. Par
exemple, un échantillon dont la moitié de la surface est couverte de PVA a été produit,
ce qui donne un échantillon bibande : une moitié argentée et l’autre moitié verte (figure
IV.7b).

(a) (b)

Figure IV.7 – Photographies de deux répliques hybrides de la cuticule de Chrysina


gloriosa obtenues après l’étape de photopolymérisation pour présenter le contraste entre
les bandes vertes et les bandes argentées : (a) échantillon multibande et (b) échantillon
bibande. Les deux matériaux sont des films semi-libres formés sur un substrat en verre.
Les barres d’échelle représentent 1 cm.

La texture dans les bandes argentées est restée planaire grâce au dépôt de PVA ce qui
a permis de conserver l’ancrage planaire des molécules dans ces régions pendant le recuit
(figure IV.8a). La texture dans les bandes vertes, quant à elle, est devenue polygonale
pendant la diffusion thermique car les molécules en surface étaient en contact avec l’air
ce qui a induit un changement d’ancrage (figure IV.8b).

85
CHAPITRE IV. RÉPLIQUE HYBRIDE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

(a) (b)

Figure IV.8 – Images optiques, prises au MO Olympus BX51 en réflexion entre po-
lariseurs croisés dont l’orientation est indiquée par les flèches noires en haut à gauche,
représentant les textures de la réplique hybride : (a) la texture planaire dans une bande
argentée et (b) la texture polygonale dans une bande verte. Les barres d’échelle repré-
sentent 25 µm.

Le spectre de transmission de la bande verte est identique à celui de la bande argentée


et leur bande de réflexion élargie se situe entre 540 et 1000 nm (figure IV.9). Cela indique
la présence du gradient de pas et le fait qu’il est identique dans tout l’échantillon.

Figure IV.9 – Spectres de transmission acquis dans chaque bande de la réplique hybride
de la cuticule de Chrysina gloriosa.

86
3. CONCLUSION

3 Conclusion
Nous avons réalisé la réplique hybride de la cuticule de Chrysina gloriosa à partir d’un
film CLC SG vitrifiable et d’un film IR réticulable. Nous sommes parvenus à la fabrication
d’un matériau monocouche avec un gradient de pas allant du vert au proche IR grâce à
la diffusion thermique entre les deux couches cholestériques.

De plus, à la surface du film, le dépôt de bandes de PVA a permis de conserver la


texture planaire dans ces régions pendant l’étape de recuit tandis que le reste de l’échan-
tillon est soumis à des changements des conditions d’ancrage moléculaire pour mener à la
formation de la texture polygonale. Nous obtenons ainsi un matériau avec une alternance
de bandes vertes polygonales et de bandes argentées planaires.

Les propriétés structurelles, texturales et colorées des CLs biologiques de la cuticule


du scarabée ont été reproduites à plusieurs échelles de longueur. En effet, l’architecture
anisotrope se retrouve à la fois à l’échelle nanométrique, micrométrique et macroscopique.

Nous avons utilisé de manière optimale les ressources et les étapes du protocole de
fabrication dans un esprit d’éco-conception. Les techniques de fabrication actuelles telles
que la lithographie ou le dépôt sous vide de couches métalliques sont souvent coûteuses
et ne permettent pas une économie de ressources et une grande versatilité des motifs
chiraux. Au contraire, l’étape simple et unique de diffusion thermique rend le processus
d’auto-organisation des matériaux CLCs plus efficace, générant le gradient de pas et le
motif texturé en surface.

Cette réplique a été fabriquée avec un film vitrifiable et un film réticulable pour pouvoir
réaliser le motif des bandes sur le film CLC SG vitrifié. Ainsi, cette opération a pu être
directement mise en œuvre. L’idée était de se familiariser avec les propriétés des composés
réticulables et avec la photopolymérisation en adaptant, dans un nouveau système, un
protocole décrit par l’équipe dans le cas vitrifiable [83]. À présent, nous allons passer à la
conception de la réplique tout élastomère.

87
Chapitre V

Réplique élastomère de la cuticule


de Chrysina gloriosa

1 Matériaux et méthodes

1.1 Matériaux

Pour réaliser la réplique élastomère de la cuticule de Chrysina gloriosa, on utilise


maintenant uniquement les cyclosiloxanes CLs réticulables [102] (figure V.1). Pour former
le film CLC vert, on mélange le composé SB réfléchissant dans le bleu à 60 % en masse
et le composé SR réfléchissant dans le rouge à 40 % en masse. Concernant le CLC IR, le
mélange est constitué de 15 % en masse de SR et de 85 % en masse du composé nématique
SN. Ces deux nouveaux CLCs sont de sens gauche.

On décide de mettre le composé SN en plus grande proportion dans le CLC IR de la


réplique élastomère que dans celui de la réplique hybride car la diffusion thermique sera
plus rapide avec les composés réticulables étant donné leur faible viscosité. On choisit
donc de préparer un CLC IR qui a une bande de réflexion plus éloignée de la bande de
réflexion du CLC vert pour retarder la formation d’une large bande de Bragg dans le
visible et le proche IR.

On ajoute, au CLC vert et au CLC IR, 1,0 % en masse de PI IRG907 (figure V.1e).
Cependant, ces deux mélanges sont fortement réactifs et polymérisent en température dès
90 °C en quelques minutes. En plus du PI, on décide donc d’ajouter à hauteur de 2,0 %
en masse un inhibiteur de polymérisation thermique, le butylhydroxytoluène (BHT), qui
est un antioxydant (figure V.1f). En effet, une énergie calorifique suffisante peut créer
des radicaux non désirés, issus des mésogènes réactifs. L’inhibiteur a pour rôle de réagir
rapidement avec ces radicaux afin d’arrêter la réaction de polymérisation avant qu’elle ne
prenne trop d’ampleur [106].

89
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

(a)

(b)

(c) (e)

(d) (f)

Figure V.1 – Structures chimiques des matériaux utilisés : oligomères réticulables CLs
(a) cholestériques et (b) nématiques, (c) monomère fonctionnel achiral, (d) monomère
fonctionnel chiral, (e) PI IRG907, (f) inhibiteur thermique BHT.

90
1. MATÉRIAUX ET MÉTHODES

1.2 Protocole expérimental

1.2.1 Traitement du substrat en verre

Une couche de solution de PVA est déposée sur la lame de verre sur laquelle sera formé
le film CLC IR. Elle servira de couche d’alignement pour favoriser l’ancrage planaire et
de couche sacrificielle pour obtenir des films libres de tout substrat à la fin du protocole
en plaçant les échantillons dans l’eau.

Cette fois, le PVA sous forme de poudre est dissous à 8 % en masse dans de l’eau
distillée. Cette solution est agitée, puis 0,20 mL est déposé sur la lame. À l’aide du spin-
coater, le PVA est étalé lors d’un programme composé de trois séquences avec les vitesses
de rotation et les durées suivantes : 5000 tr/min pendant 20 s, puis 4000 tr/min pendant
40 s, puis 3000 tr/min pendant 60 s. Cette opération a été répétée seulement deux fois.
L’épaisseur du film séché mesure environ 2 µm.

1.2.2 Préparation des films CLC vert et CLC IR

La méthode des rails est à nouveau utilisée pour préparer les deux films initiaux CLC
vert et CLC IR.

Pour la formation du film CLC IR, deux bandes de cales en aluminium de 20 µm


d’épaisseur sont scotchées sur la lame de verre de 1 mm d’épaisseur traitée au PVA. Les
cales contrôlent l’épaisseur du film CLC IR qui est étalé à l’aide d’une autre lame de verre
sur la plaque chauffante à 110 °C.

Pour le film CLC vert, des cales en aluminium de 50 µm d’épaisseur sont placées sur
une lame de verre de 150 µm d’épaisseur. L’étalement du film s’effectue également à 110 °C
avec une autre lame de verre en appui sur les cales.

Les spectres de transmission des films initiaux sont acquis à température ambiante
(22 °C) dès leur retrait de la plaque après leur formation. La bande de Bragg du film CLC
IR est centrée sur 3,39 µm avec une profondeur de 35 % (figure V.2) et celle du film CLC
vert a une longueur d’onde moyenne de 540 nm et a une profondeur de 45 % (figure V.3).
Sur le spectre de transmission du CLC IR, deux autres bandes apparaissent à 3,25 µm
et à 3,48 µm (figure V.2). Elles correspondent aux bandes d’absorption de la liaison C-H
qui se situent à 3080 cm-1 (3,25 µm) lorsque la liaison est associée au groupe benzène et à
2870 cm-1 (3,48 µm) lorsqu’elle est associée au groupe méthyle.

Les cales sont ensuite retirées et la surface des films est réduite à l’aide d’un rasoir
pour que les dimensions des surfaces qui seront en contact soient équivalentes (figure V.4).
On vérifie au MO que les textures soient planaires (figure V.5). Enfin, les films semi-libres
sont conservés à une température inférieure à leur Tg dans un congélateur à -19,5 °C.

91
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

Figure V.2 – Spectre de transmission du film CLC IR.

Figure V.3 – Spectre de transmission du film CLC vert.

92
1. MATÉRIAUX ET MÉTHODES

Figure V.4 – Films CLC IR et CLC vert formés par la méthode des rails à 110 °C. La
lame de verre sur laquelle le film CLC IR est étalé a été préalablement traitée au PVA.
La barre d’échelle représente 1 cm.

(a) (b)

Figure V.5 – Images optiques, prises au MO Olympus BX51 en transmission entre


polariseurs croisés dont l’orientation est indiquée par les flèches noires en haut à gauche,
représentant les textures planaires des films (a) CLC IR et (b) CLC vert. Les barres
d’échelle représentent 200 µm.

1.2.3 Fabrication de la réplique élastomère


On sort un film CLC IR et un film CLC vert du congélateur. Les surfaces libres sont
mises en contact de manière opposée et parallèle à température ambiante (22 °C). À cette
température, les interfaces sont souples, ce qui permet une adhésion des deux films sans
chauffage. Une légère pression est exercée sur la lame de verre supérieure (celle du film
CLC vert) avec un poids de 12 g pendant 10 min (figure V.6a). Le poids est ensuite retiré
et on vérifie que les surfaces se soient uniformément collées (figure V.6b).

Puis, pour enlever la lame supérieure en évitant la formation de rayures à la surface


du film, l’échantillon est placé au congélateur à -19,5 °C. La lame est rapidement retirée
du film CLC vert avec de l’air comprimé alors que la cellule est encore gelée. On obtient
un film semi-libre avec une surface bien régulière (figure V.6c).

93
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

(a) (b) (c)

Figure V.6 – Photographies de la bicouche : (a) mise en contact des films avec un poids
sur la lame supérieure, (b) cellule montrant une adhésion uniforme des surfaces des films
et (c) bicouche après le retrait de la lame supérieure.

Pour former les bandes de PVA sur la surface libre de l’échantillon, on ne peut plus
placer les bandes d’adhésif sur le film car sa surface est molle à température ambiante. À
la place, on dépose une goutte de la solution de PVA à 8 % en masse avec une seringue
sur le substrat en verre à proximité du film. On pousse ensuite la goutte sur la surface du
film avec une manipulation douce d’air comprimé. La goutte laisse la trace d’une bande
de PVA dont la largeur dépend de la taille de la goutte. La direction de la bande est
choisie en manipulant l’orientation de la buse flexible de l’air comprimé. On recommence
l’opération jusqu’à l’obtention de plusieurs bandes de PVA sur la surface (figure V.7).

Puis, l’échantillon est maintenu à température ambiante pendant 45 min pour per-
mettre l’évaporation complète de l’eau présente dans les bandes de solution de PVA.
Immédiatement après leur dépôt, les bandes ont une épaisseur d’environ 100 µm et après
séchage elles faisaient 3 µm d’épaisseur (mesurées à l’aide d’un micromètre numérique à
la fin du protocole).

Figure V.7 – Photographie du film bicouche après le dépôt des bandes de PVA formées
sur la surface libre et séchées à température ambiante.

94
1. MATÉRIAUX ET MÉTHODES

Par la suite, l’échantillon est recuit sur une plaque chauffante à 60 °C, soit pendant
une durée courte de 15 min, soit pendant une durée longue de 4 h (figure V.8). La diffusion
thermique entre les deux films a quelques conséquences majeures :
• La génération d’un gradient chimique entre les deux couches de CLC dans une
direction perpendiculaire aux surfaces des films, ce qui produit un gradient de pas
physique dans la direction transversale.
• L’induction d’une orientation homéotrope des molécules au niveau de la surface de
l’échantillon en contact avec l’air ce qui entraîne l’apparition de la texture polygonale
entre deux bandes de PVA consécutives, tout en maintenant l’orientation planaire
sous les bandes de PVA. Ce phénomène engendre l’apparition du motif en deux
dimensions (2D) sur la surface du matériau.
• La transformation du matériau bicouche en une couche unique.
• La génération de différents comportements de pas (profil, amplitude et gradient)
dans les bandes planaires et polygonales, qui coexistent dans une couche unique.
Cette quatrième conséquence inattendue sera discutée.

Avant la photopolymérisation, le film est recouvert d’une couche de 10 µm d’épaisseur


d’une solution de PVA à 20 % en masse à l’aide du spin-coater (un passage) avec le même
programme utilisé lors du traitement du substrat au début du protocole (figure V.8). Le
but de cette étape est de permettre à la polymérisation induite par les UVs de se produire
sans que l’oxygène de l’air inhibe les parties de la surface du film en contact avec l’air
(bandes polygonales).

Enfin, l’échantillon est placé à 60 °C pendant 10 min sous le banc UV avec une intensité
maximale à 365 nm égale à 1 mW/cm2 (figure V.8). Le film est ainsi polymérisé et demeure
dans un état élastomère solide, qui pourra être découpé dans une direction transversale
en tranches de 150 nm d’épaisseur pour permettre l’imagerie MET de la structure interne
afin de la comparer aux propriétés optiques du matériau.

Figure V.8 – Schéma des étapes de diffusion thermique, de dépôt uniforme de PVA
et de photopolymérisation pour former la réplique élastomère de la cuticule de Chrysina
gloriosa à partir des films minces CLC vert et CLC IR. Les sections transversales des
films sont représentées.

95
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

2 Résultats
2.1 Film à motifs recuit pendant 15 minutes
2.1.1 Aspect macroscopique
La surface de la réplique élastomère, obtenue après une durée de recuit courte, offre un
très bon contraste entre les deux couleurs. Elle comprend deux bandes qui apparaissent
argentées (nommées en référence à Chrysina gloriosa) qui ont été recouvertes de PVA et
deux régions entre les bandes qui apparaissent vertes (figure V.9a).

La fine région bleue à droite de l’échantillon (figure V.9a) correspond à une partie du
film initial CLC vert qui n’était pas en contact avec le film CLC IR. Sa couleur est passée
du vert au bleu car la texture planaire en surface s’est transformée pendant le recuit en
une texture polygonale. Ainsi, l’inclinaison de l’axe hélicoïdal a varié dans le temps, ce
qui a eu pour conséquence de changer la couleur du film [59].

Le motif formé en surface peut être modifié lors de l’étape du dépôt des bandes de
PVA pendant la conception de l’échantillon. Par exemple, une variante de la réplique
élastomère a été réalisée avec quatre bandes argentées sous forme de traits discontinus
placées aux coins de l’environnement vert (figure V.9b).

Si les applications l’exigent, le matériau peut être entièrement détaché du substrat


en verre. Pour obtenir un film libre, l’échantillon est placé dans une fiole d’eau distillée
pendant un jour. En raison de la présence d’une couche de PVA soluble dans l’eau entre
l’échantillon et le substrat, le film se détache en bloc de la lame de verre tout en conservant
des surfaces nettes. Ensuite, il est inclus dans un morceau de PVA séché pour devenir une
étiquette souple à appliquer sur un objet (figure V.9c).

(a) (b) (c)

Figure V.9 – Photographies de trois répliques élastomères de la cuticule de Chrysina


gloriosa qui ont connu 15 min de recuit pour présenter le contraste entre les régions vertes
et argentées : (a) échantillon semi-libre sur un substrat en verre avec une alternance de
bandes vertes et argentées, (b) échantillon semi-libre sur un substrat en verre avec un
motif différent et (c) échantillon libre de tout substrat avec une bande argentée entourée
de deux bandes vertes, encapsulé dans une matrice circulaire de PVA séché et maintenu
par une pince. Les barres d’échelle représentent 3 mm.

96
2. RÉSULTATS

2.1.2 Propriétés optiques

Les spectres de réflexion d’une bande verte et d’une bande argentée de la réplique
élastomère ayant eu 15 min de recuit sont présentés dans la figure V.10. La réflectance est
affichée entre 0 et 50 % en raison de la règle de sélectivité de la polarisation d’un CLC
(voir Chapitre I section 3). Les mesures s’arrêtent à 900 nm à cause des limites de la lampe
d’émission du MO. Cependant, on choisit d’utiliser la même échelle de longueur d’onde
que celle des spectres de transmission (figure V.11) pour comparaison.

Les spectres de réflexion montrent des bandes de Bragg larges (figure V.10). Les limites
λmin et λmax de chaque bande de réflexion sont déterminées à mi-hauteur. Dans la région
verte de la réplique, la réflexion se produit entre 570 et 790 nm et dans la région argentée,
elle intervient entre 530 et 780 nm.

De plus, on constate que la forme des deux bandes de réflexion (plate avec deux bosses
pour la bande argentée) et la variation de la réflectance (réflectance plus élevée pour la
bande verte) ne sont pas semblables. Ces différences de comportements optiques seront
discutées à la lumière de la distribution volumique du pas cholestérique à partir des images
MET des sections transversales du matériau.

La réflectance du spectre de la bande verte présente une augmentation soudaine de


510 à 600 nm. Ces longueurs d’onde correspondent à celles de la sensibilité maximale de
l’œil à la couleur qui se situent entre 530 et 580 nm. Ce fait, en plus des comportements
optiques rapportés ci-dessus, pourrait expliquer pourquoi les couleurs de réflexion des
bandes vertes et argentées sont perçues comme différentes par l’œil nu, qui est connu
pour être plus sensible à la lumière verte [150].

Les spectres de transmission des deux types de bandes sont exposés dans la figure
V.11. Bien qu’elles présentent des couleurs de réflexion différentes à l’œil nu, les régions
vertes et argentées possèdent des bandes de transmission similaires : entre 530 et 910 nm
à mi-hauteur des bandes de Bragg. La nature élargie des bandes spectrales, déterminée
par la transmission et la réflexion, est la même dans les deux mesures.

La figure V.12 dévoile les textures optiques de la réplique élastomère avec 15 min de
recuit. La bande argentée montre une texture planaire (figures V.12a et V.12c) et la bande
verte présente une texture polygonale (figures V.12b et V.12d). En réflexion, les polygones
apparaissent avec un diamètre qui varie de 2 à 7 µm (figure V.12b). En transmission, les
couleurs des textures sont identiques dans les deux sortes de bandes, contrairement aux
couleurs des textures visibles en mode réflexion. Cette observation est en accord avec le
comportement des spectres.

97
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

Figure V.10 – Spectres de réflexion acquis dans chaque bande de la réplique élastomère
de la cuticule de Chrysina gloriosa qui a connu 15 min de recuit. La ligne de base a été
faite à l’aide d’un miroir.

Figure V.11 – Spectres de transmission acquis dans chaque bande de la réplique élas-
tomère de la cuticule de Chrysina gloriosa qui a connu 15 min de recuit.

98
2. RÉSULTATS

(a) (b)

(c) (d)

Figure V.12 – Images optiques, prises au MO Olympus BX51 entre polariseurs croisés
dont l’orientation est indiquée par les flèches noires en haut à gauche, représentant les
textures de la réplique élastomère qui a connu 15 min de recuit : (a) la texture planaire
dans une bande argentée en réflexion, (b) la texture polygonale dans une bande verte en
réflexion, (c) la texture planaire dans une bande argentée en transmission et (d) la texture
polygonale dans une bande verte en transmission. La barre d’échelle représente 50 µm.

2.1.3 Propriétés structurelles


Afin d’étudier les propriétés structurelles de la réplique élastomère avec 15 min de
recuit, il faut tout d’abord préparer l’échantillon par ultramicrotomie avant de pouvoir
imager sa structure interne par MET.

Dans le but d’obtenir un film libre de tout substrat prêt à être inclus en résine, l’échan-
tillon est placé dans un flacon d’eau distillée pendant un jour. Ensuite, un petit morceau du
film est incorporé dans la résine EMbed-812 fabriquée par Electron Microscopy Sciences.
La résine est polymérisée à 62 °C pendant deux jours. Puis, un couteau diamant est utilisé
à température ambiante pour couper des tranches ultrafines de 150 nm d’épaisseur avec
un ultramicrotome Leica UCT. Le matériau est coupé perpendiculairement à la surface
du film (sections transversales). Les tranches sont placées sur des grilles de cuivre avant

99
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

d’être observées au JEOL JEM-1400 fonctionnant à 80 kV. Les images MET sont acquises
à l’aide d’une caméra CCD Gatan Orius SC1000B. L’inclusion des échantillons dans la
résine et leurs observations par MET ont été réalisées par Vanessa Soldan du Centre de
Biologie Intégrative (CBI) de Toulouse.

L’étude des images MET du film élastomère permet de corréler le comportement op-
tique des bandes vertes et argentées à leur structure interne. Les figures V.13 et V.14
montrent les sections transversales des deux bandes, du haut (côté air ou côté PVA) vers
le bas (côté substrat) du film avec 15 min de recuit. L’épaisseur du film, calculée à partir
des images, est égale à 16,5 ± 0,5 µm.

Les images MET révèlent la texture en empreintes digitales typique des CLCs faite
d’un contraste périodique de lignes claires et sombres [151]. Ceci est principalement dû à
la perte de masse pendant l’irradiation, qui grave sélectivement les régions dans lesquelles
les molécules allongées sont préférentiellement perpendiculaires ou parallèles à la coupe
imagée [152]. La distance entre deux lignes consécutives de même contraste (clair ou foncé)
donne une estimation du demi-pas cholestérique naturel. En effet, la structure CLC se
répète sur une distance égale au demi-pas, à condition que l’hélice puisse se développer
librement dans le matériau. Un pas croissant est visible du haut vers le bas dans les deux
bandes du film (figures V.13 et V.14). Par contre, l’orientation des lignes et le profil du
gradient de pas diffèrent d’une bande à l’autre.

La structure hélicoïdale de la texture polygonale est visible dans la section transversale


de la bande verte (figure V.13). Plusieurs cellules polygonales sont coupées à différents
endroits de leur extension. La signature texturale est l’apparition de motifs arqués près
de l’interface avec l’air, qui deviennent progressivement de plus en plus droits avec la
profondeur du film, jusqu’à environ 8,5 µm. En effet, l’interface avec l’air, où les molécules
sont spontanément perpendiculaires, est de moins en moins influente à mesure que l’on se
rapproche du substrat en verre qui induit au contraire une orientation planaire. L’évolution
de la texture de haut en bas, d’arquée à droite, est montrée en rehaussant en vert un
ensemble de lignes (figure V.13), où un polygone de la texture polygonale (figure V.12b)
est vertical au plan du film.

Dans la section transversale de la bande argentée, les lignes sont droites du haut vers
le bas (figure V.14). Il est frappant de constater que, bien que le matériau ait la même
composition sous l’air et sous le PVA, le pas cholestérique près du substrat en verre est
différent de celui observé dans la bande verte. Lorsque l’hélice est contrainte, c’est-à-dire
lorsque le pas est supérieur à l’épaisseur disponible, le pas textural s’écarte du pas naturel.
Ce phénomène sera discuté. Une autre différence avec la bande verte est que l’orientation
des lignes de la texture en empreintes digitales près du substrat en verre fluctue davantage
et comprend plus de défauts (disinclinaisons).

Ainsi, on retrouve les caractéristiques de la texture polygonale et de la texture planaire


dans la structure interne de chaque bande du film. Cependant, les images MET montrent
que le profil de diffusion entre les couches CLC vert et CLC IR est différent lorsque le
film est recouvert d’un matériau souple, tel que la bande de PVA.

100
2. RÉSULTATS

Figure V.13 – Image MET de la section transversale d’une bande verte de la réplique
élastomère qui a connu 15 min de recuit. Des motifs en arc apparaissent au niveau de
l’interface avec l’air. La courbure de ces arcs, rehaussée par des lignes vertes sur l’image,
diminue avec la profondeur de l’échantillon. Cette zone correspond à une région proche
du centre d’un polygone dans le plan du film. Trois autres sommets de polygones sont
mis en évidence par des lignes arquées jaunes. La barre d’échelle représente 5 µm.

Figure V.14 – Image MET de la section transversale d’une bande argentée de la réplique
élastomère qui a connu 15 min de recuit. Les lignes sont parallèles de haut en bas du film
(texture planaire). La barre d’échelle représente 5 µm.

101
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

Après avoir décrit les images des sections transversales de la réplique élastomère de
manière qualitative, on souhaite maintenant étudier le profil de périodicité dans chaque
bande du film afin de fournir une description quantitative. On trace alors la variation du
pas cholestérique (double de la distance entre deux lignes de même contraste) en fonction
de la profondeur du film élastomère à partir des images MET (figures V.15 et V.16).

Le pas cholestérique dans la bande verte varie de 250 à 540 nm sur toute l’épaisseur
(figure V.15). Les valeurs les plus faibles du pas (de 250 à 350 nm environ) correspondent
à la région où l’axe de l’hélice est incliné (texture polygonale). On constate que le pas dans
cette région est plus faible que lorsque l’axe de l’hélice est normal à l’interface (texture
planaire). En effet, le pas cholestérique dans la bande argentée débute à environ 300 nm.
Il évolue jusqu’à 1370 nm dans l’épaisseur du film.

Figure V.15 – Graphe de la mesure du pas cholestérique en fonction de la profondeur


du film élastomère dans chaque bande, issu de l’analyse des images MET des sections
transversales. Les courbes servent seulement de guides pour les yeux. L’abscisse zéro
correspond au côté air ou PVA du film.

La figure V.16 montre la même variation en se centrant cette fois sur les valeurs cor-
respondant aux longueurs d’onde du spectre visible. L’ajustement linéaire de la variation
du pas dans la bande verte est systématiquement légèrement supérieur à celui de la va-
riation du pas dans la bande argentée. D’après la loi de Bragg et en estimant l’indice de
réfraction moyen n̄ à 1,56 [102], l’ajustement linéaire du pas dans la bande verte varie de
320 à 500 nm, ce qui correspond à une gamme de longueurs d’onde de 499 à 780 nm (du
bleu-vert au rouge). Quant à l’ajustement linéaire du pas dans la bande argentée, il change
de 300 à 455 nm, ce qui correspond à une gamme de longueurs d’onde de 468 à 710 nm

102
2. RÉSULTATS

(du bleu-violet au rouge). Ainsi, les limites de périodicité concordent avec les couleurs de
transmission similaires pour les deux bandes dans le spectre visible (figure V.11) et les
ajustements entre ces limites sont effectivement proches en valeur et en forme.

Figure V.16 – Graphe de la mesure du pas cholestérique en fonction de la profondeur


du film élastomère dans chaque bande, issu de l’analyse des images MET des sections
transversales, lorsque l’on se limite au spectre visible. En prenant 1,56 comme indice de
réfraction moyen [102], les couleurs correspondantes sont reportées dans la partie droite
du graphe. Les courbes des deux bandes sont des ajustements linéaires.

La différence importante entre les deux types de bandes est la périodicité divergente
présente dans la bande argentée jusqu’à 1370 nm (figure V.15) qui se rapporte à des
longueurs d’onde en dehors du spectre visible. Sachant que cette divergence se produit
sur une courte distance d’environ 2-3 µm (de 13,2 à 15,9 µm), elle n’apporte pas une
contribution significative à la réflexion dans le spectre IR (figure V.10). La réflectance
dépend en effet du nombre de tours d’hélice pour un pas donné. La torsion a alors besoin
se développer dans une épaisseur minimale de film pour qu’un pic de Bragg soit détectable
dans des conditions standard de spectrophotométrie [153].

Concernant le niveau de réflectance, on remarque que l’ajustement linéaire pour la


bande argentée est interrompu à une profondeur de 12 µm, environ 2 µm avant la fin de
l’ajustement pour la bande verte (figure V.16). Ceci pourrait expliquer pourquoi le niveau
de réflectance de la bande argentée est inférieur à celui de la bande verte d’environ 10 %
(figure V.10). En effet, l’hélice dans la bande argentée a besoin d’un gain d’épaisseur pour
se développer avec un niveau de réflectance comparable à celui de la bande verte.

103
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

2.2 Film à motifs recuit pendant 4 heures


2.2.1 Aspect macroscopique
En utilisant seulement un temps de recuit plus long, les couleurs de réflexion du film
élastomère sont différentes. Le matériau à motifs qui a subi un recuit pendant 4 h révèle
deux bandes jaune-vert sous le PVA au lieu d’argentées et deux bandes rouges sous l’air
au lieu de vertes (figure V.17). Sur le côté droit de l’échantillon, la partie qui apparaît
bleue correspond à une région du film initial CLC vert qui n’était pas en contact avec
le film CLC IR. Sa couleur est passée du vert au bleu en raison de l’inclinaison de l’axe
hélicoïdal dans la texture polygonale du film en contact avec l’air [59].

La partie inférieure de l’échantillon montre que les bandes rougeâtres, en contact avec
l’air pendant le recuit, sont devenues plus longues que les bandes jaune-vert qui possèdent
une couche de PVA séchée au-dessus. Un décalage de la longueur des deux types de
bandes est donc visible. Cela peut s’expliquer par le fait que, pour la bande jaune-vert,
le matériau est confiné bilatéralement pendant le recuit entre deux substrats solides : un
souple (film de PVA) et un dur (substrat en verre). Tandis que la bande rouge est confinée
unilatéralement par le substrat en verre. Cette observation prouve que la présence du film
de PVA sur l’échantillon limite l’étalement latéral des régions concernées.

Figure V.17 – Photographie du film élastomère libre de tout substrat avec une alternance
de bandes rouges et jaune-vert qui a connu 4 h de recuit. La partie supérieure du film a
été coupée avec un rasoir et un décalage de longueur entre les deux types de bandes est
signalé par les lignes en pointillé en bas de l’image. La barre d’échelle représente 3 mm.

2.2.2 Propriétés optiques


Les spectres de réflexion d’une bande rouge et d’une bande jaune-vert du film élasto-
mère ayant eu 4 h de recuit sont présentés dans la figure V.18. La bande de réflexion dans
la région jaune-vert est large de 520 à 800 nm. Elle comprend deux niveaux de réflectance
(20 % et 9 %) avec un pic principal à 580 nm et un plateau entre 640 et 720 nm. La bande
de réflexion dans la région rouge est quant à elle réduite et atteint 30 % de réflectance
avec une longueur d’onde moyenne se situant à 685 nm.

104
2. RÉSULTATS

Figure V.18 – Spectres de réflexion acquis dans chaque bande de la réplique élastomère
de la cuticule de Chrysina gloriosa qui a connu 4 h de recuit. La ligne de base a été faite
à l’aide d’un miroir.

Figure V.19 – Spectres de transmission acquis dans chaque bande de la réplique élas-
tomère de la cuticule de Chrysina gloriosa qui a connu 4 h de recuit.

105
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

Les spectres de transmission des deux types de bandes sont exposés dans la figure
V.19. Leur bande de Bragg est désormais réduite et les longueurs d’onde moyennes des
spectres sont distinctes : 575 nm (jaune-vert) pour la bande sous le PVA et 665 nm (rouge)
pour la bande sous l’air. La nature bicolore du matériau est évidente.

La figure V.20 dévoile les textures optiques du film élastomère avec 4 h de recuit. La
bande jaune-vert présente une texture planaire (figures V.20a et V.20c) et la bande rouge
montre une texture polygonale (figures V.20b et V.20d). En réflexion, le diamètre des
polygones varie de 2 à 14 µm (figure V.20b), au lieu de 2 à 7 µm pour 15 min de recuit.
Les dimensions latérales des polygones augmentent en effet avec le temps de recuit [59].
En transmission, les couleurs des textures sont désormais distinctes dans les deux sortes de
bandes (figures V.20c et V.20d), ce qui est en accord avec le comportement des spectres.

(a) (b)

(c) (d)

Figure V.20 – Images optiques, prises au MO Olympus BX51 entre polariseurs croisés
dont l’orientation est indiquée par les flèches noires en haut à gauche, représentant les tex-
tures du film élastomère qui a connu 4 h de recuit : (a) la texture planaire dans une bande
jaune-vert en réflexion, (b) la texture polygonale dans une bande rouge en réflexion, (c) la
texture planaire dans une bande jaune-vert en transmission et (d) la texture polygonale
dans une bande rouge en transmission. La barre d’échelle représente 50 µm.

106
2. RÉSULTATS

2.2.3 Propriétés structurelles


Afin d’étudier ses propriétés structurelles, le film élastomère avec 4 h de recuit est
coupé perpendiculairement à sa surface (sections transversales) en tranches ultrafines de
150 nm d’épaisseur par ultramicrotomie avant d’imager sa structure interne par MET. La
figure V.21 montre les sections transversales des deux types de bandes, du haut (côté air
ou côté PVA) vers le bas (côté substrat) de l’échantillon. L’épaisseur du film, calculée à
partir des images, est égale à 19,0 ± 1,0 µm.

(a) (b)

Figure V.21 – Images MET des sections transversales dans chaque bande du film élas-
tomère qui a connu 4 h de recuit. (a) Dans la bande rouge, des motifs en arc apparaissent
au niveau de l’interface avec l’air (texture polygonale). La courbure de ces arcs, rehaussée
par des lignes rouges sur l’image, diminue avec la profondeur de l’échantillon. Cette zone
correspond à une région proche du centre d’un polygone dans le plan du film. Trois autres
sommets de polygones sont mis en évidence par des lignes arquées jaunes. (b) Dans la
bande jaune-vert, les lignes sont parallèles de haut en bas du film (texture planaire). Les
barres d’échelle représentent 3 µm.

La structure hélicoïdale faite de lignes arquées, typique de la texture polygonale, est


visible dans la section transversale de la bande rouge (figure V.21a). Les motifs arqués
près de l’interface avec l’air deviennent progressivement de plus en plus droits avec la
profondeur du film, jusqu’à environ 11 µm. Après plusieurs heures de recuit, l’interface
avec l’air, qui induit une orientation perpendiculaire des molécules, est influente sur une
plus grande épaisseur de film, alors que son impact est moindre pendant un recuit court
de 15 min. Cependant, quel que soit le temps de recuit, l’interface avec l’air reste en
compétition avec le substrat en verre qui induit au contraire une orientation planaire,

107
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

donc les lignes arquées finissent par devenir droites lorsqu’elles se rapprochent du substrat.
L’évolution de la texture de haut en bas, d’arquée à droite, est montrée en rehaussant en
rouge un ensemble de lignes sur l’image MET de la bande rouge (figure V.21a).

Dans la section transversale de la bande jaune-vert (figure V.21b), les lignes de la


texture en empreintes digitales sont droites du haut vers le bas, sauf près du substrat en
verre où l’orientation des lignes fluctue et comprend beaucoup de défauts (disinclinaisons).

Étant donné que la distance entre deux lignes claires (ou sombres) consécutives sur
les images MET fournit une estimation du demi-pas de la structure CLC, on peut tracer
le pas cholestérique en fonction de la profondeur du film élastomère dans chaque bande.

Un pas monotone à 435-455 nm (figures V.22 et V.23) se manifeste sur toute l’épaisseur
de la bande rouge (sous l’air). Cela signifie que les films initiaux se sont complètement
mélangés dans cette bande au bout de 4 h de recuit. Ce n’est pas le cas dans la bande
jaune-vert qui est recouverte de PVA dont le pas croît de 370 à 1890 nm (figure V.22).
La divergence commence à 12 µm d’épaisseur en s’étendant fortement sur 6 µm hors de la
plage du visible jusqu’à la fin du film (côté substrat), où des fluctuations et des défauts sont
présents dans la distribution des lignes intrinsèques à la texture en empreintes digitales
(figure V.21b).

Figure V.22 – Graphe de la mesure du pas cholestérique en fonction de la profondeur


du film élastomère dans chaque bande, issu de l’analyse des images MET des sections
transversales. Les courbes servent seulement de guides pour les yeux. L’abscisse zéro
correspond au côté air ou PVA du film.

108
2. RÉSULTATS

Figure V.23 – Graphe de la mesure du pas cholestérique en fonction de la profondeur


du film élastomère dans chaque bande, issu de l’analyse des images MET des sections
transversales, lorsque l’on se limite au spectre visible. En prenant 1,56 comme indice de
réfraction moyen [102], les couleurs correspondantes sont reportées dans la partie droite
du graphe. Les courbes des deux bandes sont des ajustements linéaires.

On remarque que l’ajustement linéaire pour la bande jaune-vert est interrompu à une
épaisseur de 11 µm, environ 8 µm avant la fin de l’ajustement pour la bande rouge (figure
V.23). Le niveau de réflectance de la bande jaune-vert étant inférieur à celui de la bande
rouge (figure V.18), l’hélice dans la bande jaune-vert nécessite une plus grande épaisseur
pour se développer avec un niveau de réflectance comparable à celui de la bande rouge,
dont le pas quasi-constant peut se développer sur une plus grande épaisseur.

En résumé, les éléments distincts entre les deux types de bandes sont :
• l’orientation des lignes près de l’interface supérieure (courbes sous l’air et droites
sous le PVA) qui se traduit par une différence de textures optiques ;
• un pas plus grand dans la gamme visible sous l’air (435-455 nm) que sous le PVA
(370 nm) qui explique la différence de couleurs macroscopiques des bandes ;
• la nature variable du pas sous le PVA uniquement, ce qui génère la large bande
de réflexion de la bande jaune-vert, alors que celle de la bande rouge est étroite en
raison de son pas monotone.

109
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

3 Discussion
Le film élastomère qui a connu 15 min de recuit a le rôle de réplique de la cuticule de
Chrysina gloriosa, tandis que le film ayant eu 4 h de recuit a servi de comparaison pour
appréhender l’évolution du comportement du matériau cholestérique.

Le film avec 4 h de recuit nous a notamment permis d’approfondir les différences


de caractéristiques entre les deux types de bandes. En effet, nous avons pu comprendre
l’impact de la couche de PVA et de l’air sur les propriétés structurelles et optiques pendant
une diffusion thermique de plusieurs heures. Il en est ressorti qu’une tension de surface
différente dans chaque bande avait un rôle déterminant sur le profil du pas cholestérique
du film.

Dans un premier temps, nous allons discuter de l’impact de la tension superficielle sur le
film élastomère, avant d’aborder le biomimétisme de la cuticule du scarabée Chrysina glo-
riosa. Enfin, nous détaillerons les applications pratiques et les perspectives envisageables
d’après les résultats de cette étude.

3.1 Anisotropie de la tension superficielle à l’origine des films à


motifs
3.1.1 Tension superficielle et viscosité

L’anisotropie des propriétés des CLs, telles que la viscosité, dépend de l’alignement
moléculaire aux interfaces [154]. Par conséquent, les tensions anisotropes aux interfaces
doivent également être prises en compte.

Il est difficile de mesurer la tension superficielle γ des milieux partiellement ordonnés à


longue portée, que sont les CLs, avec des techniques classiques telles que la méthode de la
goutte pendante [155-157]. De plus, en considérant le problème, on ne peut pas supposer
que la valeur γ d’un CL en contact avec une solution aqueuse de PVA est identique à celle
d’une interface avec de l’eau pure, bien que l’alignement planaire soit le même [157]. Les
structures cholestériques sont complexes, notamment lorsqu’il est nécessaire de connaître
γ sous différentes conditions d’alignement, ainsi que la différence de tension superficielle
∆γ entre les surfaces limitantes :

∆γ = |γ sup − γ inf|

γ sup étant la tension superficielle entre le substrat supérieur et le CL et γ inf étant la tension
superficielle entre le substrat inférieur et le CL.

La situation devient encore plus compliquée lorsque l’organisation moléculaire change


continuellement avec la profondeur dans le matériau, comme dans le cas présent où il
existe un gradient de pas dépendant du temps.

110
3. DISCUSSION

Le but est de discuter de la variation de ∆γ sous la couche de PVA, qui favorise une
orientation moléculaire tangentielle (planaire) aux surfaces, du substrat supérieur (PVA)
au substrat inférieur (lame de verre). Elle sera comparée à ce qui se passe sous l’air, qui
favorise une orientation normale (homéotrope), qui change ensuite dans l’épaisseur du
film jusqu’à atteindre une orientation tangentielle (planaire) du côté du substrat inférieur
en verre.

Pour la bande confinée uniformément planaire, nous pouvons nous attendre à ce que
la viscosité soit contrôlée par la présence de deux surfaces solides (la couche de PVA et la
lame de verre) et par l’influence de l’activité de surface du PVA. Or, l’activité de surface du
PVA aux interfaces est encore mal comprise [158]. Ainsi, effectuer une analyse quantitative
de l’impact de l’énergie de surface anisotrope sur la couleur des différents motifs du film
est actuellement irréalisable. La viscosité est un paramètre d’une importance capitale pour
contrôler la diffusion entre les films initiaux CLC vert et CLC IR.

Pour la bande confinée unilatéralement (entre l’air et le substrat en verre), nous pou-
vons raisonnablement supposer que cette partie du matériau connaît une diffusion entre
couches avec plus de degrés de liberté que dans la bande confinée bilatéralement (entre le
film de PVA et le substrat en verre) en raison de l’absence d’un substrat solide supérieur.
En effet, pour un temps de recuit de 4 h, cette bande déborde de la surface initialement
délimitée (figure V.17).

La différence de comportement de l’hélice cholestérique d’un type de bande à l’autre


pourrait provenir d’une différence de viscosité résultant d’une différence de ∆γ. Cette
situation est accentuée pour des temps de recuit plus longs. Cela signifie que la différence
de couleur et la nature des couleurs dans chaque bande peuvent être ajustées avec le temps
de recuit, alors que la composition chimique du matériau et sa nature monocouche sont
les mêmes dans les deux types de bandes.

3.1.2 Rapport de confinement et développement de l’hélice

À ce stade, il convient de faire une distinction entre le pas naturel et le pas textural.
Le pas naturel est le pas libre, déterminé avec précision en l’absence de contraintes signi-
ficatives, à savoir l’épaisseur de la couche et l’influence des surfaces. Cela signifie que la
torsion peut se développer sans frustration grâce à une épaisseur de matériau suffisante
qui permet le libre développement de l’hélice. Cette situation peut être décrite par le
rapport de confinement C, qui est défini comme le rapport entre l’épaisseur totale et le
pas naturel d/p0 , qui est bien supérieur à 1 dans ce cas.

Trois situations distinctes existent en fonction de la valeur de C [159] (figure V.24) :


• Lorsque C < Cc , une zone sombre apparaît dans la texture en empreintes digitales
où les molécules s’alignent perpendiculairement aux substrats. L’hélice est complète-
ment déroulée et le matériau présente une structure homéotrope de type nématique.
Dans les CLCs actuels, Cc est approximativement égal à 1 et correspond à une valeur
critique.

111
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

• Lorsque Cc < C < C*, on observe une texture de type empreintes digitales composée
de lignes séparées par des régions sombres de structure nématique homéotrope : c’est
ce que l’on appelle des doigts cholestériques. L’hélice est déformée et partiellement
déroulée. C* est approximativement égal à 1,5 et définit la valeur pour laquelle une
transition de motif se produit, des doigts cholestériques dans un fond sombre aux
doigts entièrement connectés.
• Lorsque C > C*, les doigts sont en contact et forment la texture en empreintes
digitales périodique et continue. L’hélice est libre de se développer et le pas textural
correspond au pas naturel.

Figure V.24 – Image prise au MO entre polariseurs croisés d’un CLC entre deux sub-
strats en verre faisant un petit angle α [159]. Trois régions sont visibles de gauche à droite
en raison de la valeur du rapport de confinement C qui augmente. L’hélice cholestérique
a ainsi de plus en plus de place pour se développer dans l’épaisseur.

Ce dernier cas se produit typiquement du côté du PVA jusqu’à environ 12 µm d’épais-


seur dans les films élastomères (figures V.14 et V.21b). Le pas textural peut donc raison-
nablement être assimilé au pas naturel. Au-delà de 12 µm, le pas textural correspond au
cas où 1 < C < 1,5 pour la partie la plus basse de l’épaisseur. La structure hélicoïdale est
déformée et l’hélice est partiellement dévissée dans les régions où la texture en empreintes
digitales apparaît noire.

Lorsque deux couches subissent une diffusion en fonction du temps, le pas textural,
déterminé en fonction de la distance entre deux lignes de même contraste dans les textures
en empreintes digitales, ne correspond pas à la valeur locale du pas naturel. Il correspond
plutôt à un compromis entre la tendance des hélices à se développer librement et l’es-
pace local contrôlant ce développement qui ne permet pas une torsion complète. Au lieu

112
3. DISCUSSION

de lignes alignées complètement parallèles, les courbures des lignes dans la texture en
empreintes digitales du côté du substrat en verre traduisent ce contexte.

3.1.3 Caractère anisotrope de la tension superficielle

L’auto-organisation d’un CLC dépend de la géométrie locale, qui est contrôlée par
l’anisotropie de la différence de tension superficielle ∆γ du haut vers le bas du film.
En effet, la différence de tension superficielle ∆γ devient anisotrope entre un site qui
reste ouvert à l’air et un site recouvert de PVA. Ainsi, l’auto-organisation de la struc-
ture cholestérique donne lieu à différentes couleurs structurelles dans les bandes confinées
unilatéralement et bilatéralement.

La différence de tension superficielle ∆γ varie conceptuellement d’un type de bande à


l’autre et d’un temps de recuit à un autre dans le même matériau. L’importance primor-
diale de son rôle dans la coexistence de différentes couleurs dans une couche unique est
révélée dans le cas d’une diffusion contrôlée avec le temps à température fixe et dirigée
transversalement entre des films minces de pas différents.

3.2 Biomimétisme de la cuticule de Chrysina gloriosa


3.2.1 Comparaison avec la réplique vitreuse

Dans un précédent article sur la physique de la cuticule de Chrysina gloriosa [83],


les recherches étaient axées sur le biomimétisme, c’est-à-dire la reproduction fidèle des
propriétés optiques, structurelles et fonctionnelles de sa carapace rayée. La version syn-
thétique a été conçue sous la forme de films polymères vitreux.

Dans cette version antérieure, la différence entre les couleurs réfléchies, verte et argen-
tée, a été déterminée uniquement par l’orientation des axes hélicoïdaux à la surface du
film ouvert. Cela a produit différents pas effectifs, allant de lignes fortement obliques à
des lignes parfaitement droites, dans la texture en empreintes digitales. Aucune différence
dans le pas textural entre les deux types de bandes n’a été observée par MET.

Les objectifs des deux études, précédente (réplique vitreuse) et actuelle (réplique élas-
tomère), sont différents. Dans la présente étude, ils consistent à :
• trouver les conditions pour la formation de motifs multicolores dans des films poly-
mérisés ;
• organiser la formation de motifs à la surface de films réticulables et non solidifiés
pour trouver des solutions spécifiques à la nature molle de la surface où un différentiel
de tension superficielle conduit à des distributions de périodicité différentes dans les
deux types de bandes ;
• poser les bases pour la préparation de films monocouches multicolores avec des
bandes de Bragg qui passent de bandes larges similaires à deux bandes étroites avec
des distributions de pas et des amplitudes différentes.

113
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

Les conditions expérimentales des deux études sont également différentes, comme par
exemple :
• la formulation des mélanges des deux CLCs initiaux (CLC vert et CLC IR) qui sont
des oligomères à base de polysiloxane ;
• leur Tg : 50 °C pour le matériau vitrifiable et 0 °C pour le matériau réticulable ;
• les moyens de solidifier le film avec des surfaces partiellement ouvertes : par trempe
thermique à température ambiante pour le matériau vitrifiable et par photopolymé-
risation à 60 °C pour le matériau réticulable.

Parmi les différences, nous devons aussi considérer la viscosité, qui est d’une impor-
tance capitale dans le rôle de l’anisotropie de la différence de tension superficielle ∆γ pour
la description des phénomènes dans le film réticulable.

Par exemple, pour le film CLC vert, le composé vitrifiable doit être chauffé à 120 °C
pour présenter un comportement filmogène similaire à celui du composé réticulable lors-
qu’il est chauffé à 60 °C (température lors de la diffusion thermique). Cette différence
considérable est en accord avec l’écart important des valeurs de Tg entre les composés.
Le matériau réticulable est moins visqueux que son homologue vitrifiable lorsque les deux
composés sont en phase cholestérique. En effet, des monomères achiraux et chiraux (fi-
gures V.1c et V.1d) ont été ajoutés par le chimiste aux oligomères réticulables pour réduire
leur viscosité [102].

Nous présumons alors que le composé vitrifiable possède une plus grande inertie par
rapport à la température et à l’environnement (surfaces, interfaces, espace cellulaire) en
raison de sa viscosité intrinsèque plus importante que celle du composé réticulable. Ainsi,
l’anisotropie de la différence de tension superficielle ∆γ ne joue pas un rôle majeur et
détectable dans l’auto-assemblage de la bicouche vitrifiable pendant le recuit thermique,
contrairement au cas réticulable.

3.2.2 Biomimétisme de la cuticule du scarabée

En s’adaptant à ces différences de propriétés entre les CLs vitrifiables et réticulables,


nous avons réussi à concevoir une réplique biomimétique de la cuticule du scarabée sous
la forme d’un film élastomère ayant eu 15 min de recuit à 60 °C.

Le tableau comparatif critère par critère de la cuticule de Chrysina gloriosa, de l’échan-


tillon vitreux antérieur [83] et de l’échantillon élastomère réalisé lors de ce travail de thèse
aide à évaluer le niveau de biomimétisme de la réplique élastomère (tableau V.1). Pour
cette dernière, huit des onze critères sont considérés comme élevés. Ils comprennent les
cinq critères issus de l’étude physique du matériau biologique et indiqués sur la figure
III.1 comme essentiels pour revendiquer le statut biomimétique de la réplique : le statut
de monocouche, la continuité structurelle 3D, la discontinuité de couleur 2D, l’orientation
alternativement variable et fixe de l’axe hélicoïdal et le gradient de pas transversal.

114
3. DISCUSSION

Néanmoins, le nombre d’atomes différents est particulièrement réduit dans la cuticule


du scarabée (4 atomes différents) et l’est moins dans la réplique élastomère (6 atomes
différents), notamment à cause de l’ajout du PI qui sert à photopolymériser le matériau
biomimétique. Enfin, deux caractéristiques sont clairement différentes :
• le profil de pas est identique dans les deux types de bandes dans la cuticule et
ne l’est pas dans l’échantillon élastomère, étant donné la nature différentielle de la
tension superficielle et la faible viscosité des composés réticulables, comme expliqué
précédemment ;
• les cellules polygonales sont concaves dans la cuticule et convexes dans les échan-
tillons biomimétiques.

Cuticule du Réplique Réplique


scarabée vitreuse élastomère
√ √ √
Monocouche
√ √ √
Continuité structurelle 3D
√ √ √
Couleurs contrastées
Orientation variable et √ √ √
fixe de l’axe hélicoïdal
suivant le type de bandes
√ √ √
Gradient de pas
Gamme de pas (nm) 280-900 300-1320 250-1370
√ √ N
Profil de pas identique
dans les deux bandes
Sens de l’hélice gauche gauche gauche
Concavité des polygones concaves convexes convexes
élevée : moyenne : élevée :
Compacité film de 15 µm film de 40 µm film de 16,5 µm
d’épaisseur d’épaisseur d’épaisseur
Nombre d’atomes 4: 4: 6:
différents C, H, O, N C, H, O, Si C, H, O, N, Si, S

Table V.1 – Tableau comparatif multicritère des caractéristiques de la cuticule de Chry-


sina gloriosa et des échantillons biomimétiques vitreux [83] et élastomère (15 min de re-
cuit). Les mentions en vert signalent une similarité, en rouge une divergence et en orange
une situation intermédiaire.

115
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

3.3 Applications et perspectives


Les applications les plus ambitieuses des monocouches multicolores, qui ont des motifs
visibles à l’échelle humaine et des propriétés polyvalentes qui dépendent de leur structure
anisotrope interne, sont restées en suspens en l’absence de solutions scientifiques et tech-
nologiques matures. Dans cette étude, nous avons proposé des solutions simples pour mo-
difier l’auto-organisation des CLCs et ainsi obtenir des matériaux monocouches à motifs
sans que cela ne nécessite de couches d’alignement bien définies, le traitement de substrats,
l’application d’un champ externe ou des technologies complexes supplémentaires. À partir
des résultats fondamentaux obtenus avec des films élastomères monocouches bicolores, di-
verses applications et perspectives peuvent être considérées. On pourrait envisager, dans
une approche de recherche et développement (R&D) qui dépasserait les objectifs de la
présente étude, d’utiliser plusieurs films polymères (tels que le PVA par exemple) avec
différentes activités de surface pour générer plus de deux couleurs dans un même film. La
fabrication de films intelligents multicolores et réfléchissants pourrait alors répondre aux
demandes de la société dans plusieurs domaines.

Dans le domaine de la sécurité de l’information, les motifs multicolores dans une seule
couche peuvent trouver des utilisations pratiques en tant qu’étiquettes anti-contrefaçon
[43-45] et hologrammes de sécurité [46]. En effet, la contrefaçon de produits allant des
produits pharmaceutiques et alimentaires aux composants d’avions et d’automobiles est
un problème moderne renforcé par la mondialisation. Par exemple, la plupart des mé-
dicaments contiennent un excipient fabriqué à partir du collagène ou d’un dérivé de la
cellulose [128], deux substances qui peuvent naturellement présenter une phase CLC selon
des mécanismes définis [1]. Les informations stockées dans les substances cholestériques
peuvent être visibles à la demande ou invisibles pour les humains ou les dispositifs de
visualisation. L’étape d’authentification permettrait de révéler un motif stocké et de ré-
tablir un comportement optique propre aux CLCs. Ces propriétés pourraient être fixées
au moment de la conception en déposant un agent polymère (comme le film de PVA)
sur une bicouche CLC analogue pour modifier la tension superficielle locale et produire
ainsi un motif chiral irisé. Des films polymères ayant des activités de surface différentes
pourraient ainsi être utilisés pour générer diverses couleurs. La relation entre l’activité
de surface d’un substrat souple recouvrant un matériau cholestérique à gradient de pas
et son rôle dans la tension superficielle anisotrope est susceptible d’ouvrir un nouveau
champ de R&D.

Dans le domaine de l’architecture, les revêtements CLCs avec des motifs de grande
taille sur les façades des infrastructures sont pertinents pour guider les véhicules auto-
nomes et les personnes vers leur destination. Ces revêtements intelligents porteraient des
informations qui peuvent être décryptées optiquement grâce à la sélectivité multiple des
CLCs (couleur, polarisation et variabilité en fonction de l’angle d’observation). Ils peuvent
être conçus sous la forme de monocouches changeant de couleurs et ayant différentes
formes (planes ou incurvées, appliquées sur un substrat solide ou flexible, libres dans une
matrice transparente). Aucun câblage vers un dispositif physique n’est nécessaire pour
afficher des informations en réfléchissant sélectivement des bandes de longueurs d’onde
et des polarisations définies, c’est-à-dire une lumière polarisée circulairement à incidence

116
3. DISCUSSION

normale ou une lumière polarisée elliptiquement à des angles d’incidence variables [129].
Les motifs réfléchissants de grande taille peuvent également être utilisés sur les panneaux
d’affichage routier pour la visibilité, les avertissements de trafic et les publicités [160].

Les revêtements optiques CLCs à motifs pourraient être employés dans les infrastruc-
tures de guidage des véhicules autonomes et sur la carrosserie de ces voitures. Ces revê-
tements optiques intelligents pour les voitures autonomes pourraient favoriser le dévelop-
pement de ces véhicules. Si la réflexion du CLC est réglée sur la gamme IR pour éviter
la pollution visuelle, un paysage riche en informations peut alors être visible uniquement
pour les machines conçues pour communiquer avec cette partie du spectre optique.

Dans le domaine des robots à structure souple [161, 162], les dispositifs à base de
polymères les plus fréquemment utilisés concernent les peaux de camouflage dans les
technologies de furtivité et les systèmes de contrôle (capteurs optiques et signalisation)
pour les robots autonomes.

En raison du lien entre la forme et la taille du film polymère (PVA par exemple) et
celles du motif coloré élaboré, le dépôt de solutions de polymères sur des films élastomères
à travers des masques à l’échelle micrométrique ou nanométrique, ou par lithographie,
produirait des motifs plus petits que ceux obtenus dans la présente étude. Cela pourrait
inspirer des applications en nanophotonique, en diffraction aux grands angles [163] ou
dans les dispositifs à réseau de réflexion-diffusion [164, 165].

117
CHAPITRE V. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA GLORIOSA

4 Conclusion
En prenant pour modèle la structure de la cuticule de Chrysina gloriosa, nous avons
élaboré des films élastomères monocouches à motifs à partir d’oligomères CLCs réticu-
lables [166]. Dans un esprit d’éco-conception, l’utilisation des ressources et le nombre
d’étapes de fabrication ont été optimisés.

L’interdiffusion transversale entre deux couches d’oligomères en phase cholestérique a


été effectuée durant un recuit d’une durée courte (15 min) et un recuit d’une durée longue
(4 h). Ces deux couches initiales réfléchissent la lumière dans des bandes de longueurs
d’onde distinctes, à savoir dans la partie verte du spectre visible et dans le spectre IR. De
fines bandes d’un film polymère de PVA ont été déposées sur la surface libre du système
bicouche. La coexistence, à la surface supérieure, de l’air et du polymère provoque un
changement local de la tension superficielle, ce qui a modifié l’auto-organisation du maté-
riau cholestérique, comme observé par MET. La tension superficielle devient anisotrope
entre un site qui reste ouvert à l’air et un site recouvert de PVA. Enfin, le système oli-
gomère à base de polysiloxane qui est devenu monocouche a été solidifié par réticulation
induite par les UVs.

Dans la structure interne de l’échantillon final, on observe deux distributions de pério-


dicité dans la structure hélicoïdale : avec ou sans gradient de pas et avec ou sans périodi-
cité dans le spectre IR. Différentes couleurs coexistent dans une monocouche à structure
continue avec une seule composition chimique. La double polyvalence des couleurs et des
motifs a été obtenue par une étape simple et unique, ce qui a rendu le processus d’auto-
organisation des CLCs plus efficace. L’impact de l’anisotropie de la tension superficielle
sur la géométrie locale a été révélé et différentes longueurs d’onde de réflexion ont été
produites en ajustant uniquement le temps de recuit du système.

Le matériau élastomère ayant connu 15 min de recuit imite la cuticule rayée du scarabée
Chrysina gloriosa. Les propriétés texturales, structurelles et colorées ont été reproduites
à plusieurs échelles de longueur et une comparaison multicritère a révélé un haut niveau
de biomimétisme. Cette réplique élastomère a l’avantage d’avoir une structure thermique-
ment stable et non réversible, contrairement à la réplique vitreuse [83].

En plus des objectifs fondamentaux actuels, des films multicolores pourraient être
créés dans un film cholestérique unique en utilisant des bandes de polymères de différentes
natures avec une activité de surface variée via des méthodes de R&D. Les utilisations pra-
tiques potentielles des résultats de cette étude concernent les revêtements réfléchissants
intelligents pour les systèmes d’autoguidage des véhicules autonomes et pour les avertis-
sements de trafic, les façades fonctionnelles en architecture, les peaux de camouflage pour
les robots et les étiquettes anti-contrefaçon pour la sécurité des informations.

118
Troisième partie

Réplique de la cuticule du scarabée


Chrysina aurigans

119
Chapitre VI

Réplique élastomère de la cuticule


de Chrysina aurigans

1 Motivation du domaine de recherche


1.1 De l’observation...
À présent, nous allons nous pencher plus en détail sur l’observation d’images MEB et
MET qui mettent en évidence la structure des cuticules des scarabées du genre Chrysina.

La continuité de la variation du pas cholestérique dans l’épaisseur des cuticules de


Chrysina gloriosa et de Chrysina aurigans a déjà été abordée, ainsi que la continuité de
l’orientation de l’axe hélicoïdal dans le cas de Chrysina gloriosa. Cependant, la nature
de l’organisation dans la zone frontière entre la fin de l’endocuticule (fin de la texture en
empreintes digitales du CLC) et les cellules épidermiques n’a jamais été discutée dans la
littérature à notre connaissance.

La continuité de la structure de la cuticule étant remarquable, on peut alors supposer


que la fin de l’arrangement cholestérique ne se produit pas brusquement, mais suit plutôt
un gradient structurel. Dans la partie la plus basse de l’endocuticule de Chrysina gloriosa,
le contraste des lignes de la texture en empreintes digitales s’estompe progressivement,
puis ces lignes disparaissent en étant submergées dans une zone sans motif repérée par
un cadre jaune (figures VI.1a et VI.1b). Le même phénomène est constaté à la fin de la
cuticule de Chrysina aurigans : une couche non texturée est visible après le gradient de
pas cholestérique et avant les cellules épidermiques (figure VI.1c).

Les lignes incomplètes noyées dans une matrice non structurée pourraient correspondre
à une structure CLC frustrée (dont l’hélice est partiellement déroulée) coexistant avec
une hélice déroulée. Ensuite, ces lignes sont suivies d’une zone sans motif sur une faible
épaisseur qui pourrait correspondre à une hélice totalement déroulée. Ainsi, cette zone
dans laquelle le pas hélicoïdal diverge, serait une structure CLN achirale forcée d’exister en
raison des conditions géométriques qui empêchent le libre développement d’une structure
hélicoïdale à grand pas. Dans ce cas, cela assurerait une fin douce à la torsion des molécules

121
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

de chitine dans la partie basse de la cuticule des scarabées.

De haut en bas, la structure transversale des fibrilles de chitine pourrait alors consister
en une structure à gradient de pas, suivie d’une structure hélicoïdale frustrée, puis d’une
hélice entièrement déroulée, l’ensemble de l’architecture étant réalisé sans interface.

(a)

(b) (c)

Figure VI.1 – Images (a) MEB et (b) MET de la section transversale de la partie
interne de la cuticule de Chrysina gloriosa. (c) Image MEB de la section transversale de
la cuticule de Chrysina aurigans [8]. Chaque cadre jaune marque la région entre la fin de
l’endocuticule et les cellules épidermiques en bas de chaque image. Les barres d’échelle
représentent (a) 3 µm, (b) 2 µm et (c) 3 µm.

122
1. MOTIVATION DU DOMAINE DE RECHERCHE

1.2 ...à la bio-inspiration


Comprendre la morphogenèse 1 de la cuticule des scarabées Chrysina serait certes
intéressant, mais notre intention est de développer de nouveaux matériaux en optique
avancée à l’aide de CLs à partir des observations que nous avons faites. L’objectif est
de nous inspirer de la structure de la cuticule pour concevoir des films réflecteurs avec
la coexistence de structures chirales et achirales sans aucune interface ou discontinuité,
comme dans la nature.

Pour ce faire, nous avons pris pour modèle la cuticule de couleur or du scarabée
Chrysina aurigans. Nous avons déterminé les conditions expérimentales conduisant à la
transcription de la structure de la cuticule en oligomères CLs. En plus de viser l’obten-
tion d’une monocouche et de nous focaliser sur la continuité des structures chirales et
achirales, nous avons fait le choix de former des matériaux avec une texture planaire et
une orientation de l’axe hélicoïdal fixe dans l’épaisseur du film, comme dans la cuticule
de Chrysina aurigans.

Nous avons ainsi mis en place une méthode pour la fabrication de matériaux réfléchis-
sants avec une bande de Bragg ajustable. Comme dans le monde du vivant, nous avons
souhaité maintenir une utilisation optimale des ressources et un nombre réduit d’étapes
lors du protocole de fabrication, dans un esprit d’éco-conception.

Les propriétés de réflexion et de transmission de ces matériaux bio-inspirés seront étu-


diées en relation étroite avec leur structure transversale, telle qu’observée par MET. Puis,
nous présenterons une utilisation concrète de ces films réflecteurs basée sur la conception
de structures hybrides chirales-achirales dans le domaine des capteurs temps-température.
Ces derniers pourraient donner des informations primordiales sur les conditions de sto-
ckage de produits médicaux ou agroalimentaires par exemple.

1. La morphogenèse est un processus biologique qui détermine la forme et la structure des tissus, des
organes et des organismes [167].

123
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

2 Matériaux et méthodes
2.1 Matériaux
Pour formuler les films cholestériques et nématiques en fonction de nos objectifs de
recherche, nous nous servons des oligomères CLs réticulables avec un squelette siloxane
[102] décrits dans les chapitres précédents (figure V.1).

Le CLC qui est utilisé pour la conception du film réflecteur est un mélange comportant
70 % en masse du composé SR et 30 % en masse du composé SB qui sont des CLCs de
sens gauche. Cette composition de mélange a été choisie pour correspondre à la couleur
jaune doré de la cuticule de Chrysina aurigans. Ce nouveau composé est donc nommé
CLC or. Cependant, le concept sous-jacent de la présente étude est indépendant du choix
de la couleur de réflexion associée au mélange cholestérique. Quant au CLN, nous avons
utilisé le composé nématique SN tel que fourni par Wacker-Chemie GmbH.

Par ailleurs, 0,6 % en masse du PI IRG907 (figure V.1e) et 2,0 % en masse de l’in-
hibiteur de polymérisation thermique BHT (figure V.1f) sont ajoutés au CLC or et au
CLN.

2.2 Étude préliminaire : interdiffusion des composés CLC or et


CLN dans le plan xy
Avant de chercher à former le film réflecteur fait de structures chirales-achirales dans
la direction z, nous avons réalisé une mise en contact du CLC or et du CLN dans le plan
xy entre deux substrats transparents. Pour ce faire, un film de CLC or d’une épaisseur de
12,0 ± 1,0 µm est formé à 60 °C entre deux lames de verre non traitées. Ensuite, le CLN
est inséré à 80 °C par capillarité dans cette cellule. L’échantillon est recuit à 73 °C pendant
15 h pour laisser le CLN se diffuser de manière régulière (figure VI.2).

Figure VI.2 – Schéma de la préparation du contact dans le plan xy entre le CLC or et


le CLN. Ce dernier est introduit dans la cellule du CLC or par capillarité à 80 °C.

124
2. MATÉRIAUX ET MÉTHODES

Cette préparation a pour but de générer un gradient de concentration entre les deux
composés qui varie progressivement et de manière homogène le long d’une direction per-
pendiculaire au front de diffusion [168]. Ainsi, cet échantillon nous permet d’obtenir un
aperçu qualitatif du gradient de structure à cibler et des textures optiques présentes dans
le mélange entre le CLC or et le CLN.

Le gradient de concentration entre les deux composés dans le plan xy des substrats est
observé au MO sur une platine chauffante à 80 °C. Des régions riches en CLC or jusqu’aux
régions riches en CLN, différentes textures ont pu être identifiées (figure VI.3) :
• la texture planaire du CLC or ;
• la texture en empreintes digitales : l’hélice est libre de se développer ;
• les doigts cholestériques, qui correspondent à une hélice frustrée car le pas devient
proche de l’épaisseur de la cellule, dans une matrice noire (hélice déroulée) ;
• la texture noire, témoignant de l’orientation homéotrope de l’hélice qui est complè-
tement déroulée (structure de type nématique) [159] ;
• la texture Schlieren du CLN.

Figure VI.3 – Image optique (mode transmission, polariseurs croisés) montrant le gra-
dient de concentration entre le CLC or et le CLN lors de leur contact en xy. Les flèches
noires en haut à gauche de l’image indiquent l’orientation des polariseurs croisés. La barre
d’échelle représente 100 µm.

125
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

L’objectif est maintenant de trouver les conditions permettant de générer un gradient


de concentration temporel entre les couches de matériaux chiraux et achiraux dans la
direction z perpendiculaire aux couches. Cet événement doit se produire sur une épaisseur
plusieurs dizaines de fois inférieure à la hauteur de la région imagée sur la figure VI.3.

2.3 Protocole expérimental


2.3.1 Traitement des substrats en verre
Une couche de solution de PVA est déposée sur les lames de verre de 150 µm d’épaisseur
entre lesquelles seront formés les films CLCs or et CLNs. Pour cela, le PVA sous forme de
poudre est dissous à 8 % en masse dans de l’eau distillée. La solution aqueuse est ensuite
agitée et 0,20 mL de solution est déposé sur chacune des lames. En utilisant le spin-
coater, le PVA est étalé lors d’un programme composé de trois séquences avec les vitesses
de rotation et les durées suivantes : 5000 tr/min pendant 20 s, puis 4000 tr/min pendant
40 s, puis 3000 tr/min pendant 60 s. Cette opération a été répétée deux fois. L’épaisseur
du film séché mesure environ 2 µm.

Finalement, le film de PVA est brossé trois fois par le passage d’un tissu de rayonne 2
provenant de Yoshikawa Chemical Company. Ce procédé de frottement est un procédé
mécanique permettant de rendre le film de PVA, formé sur les lames de verre, régulier
et finement orienté afin de favoriser l’ancrage planaire des molécules de CLs entre les
substrats.

Ce film de PVA servira de couche d’alignement pour les films de CLs, mais aussi de
couche sacrificielle pour obtenir des matériaux libres (détachés des substrats) à la fin du
protocole en plaçant chaque échantillon dans l’eau.

2.3.2 Préparation des films CLCs or et CLNs


Chaque échantillon de CLC or et de CLN a été formé entre deux lames de verre
traitées au PVA brossé. Le film de CLC or est recuit sur une plaque chauffante à 80 °C.
Il mesure 14,0 ± 1,0 µm d’épaisseur (figure VI.4). Le film de CLN est recuit à 100 °C et
mesure 7,5 ± 0,5 µm d’épaisseur (figure VI.5).

Figure VI.4 – Film CLC or d’épaisseur contrôlée formé à 80 °C entre deux substrats de
verre traités au PVA brossé.

2. La rayonne est une fibre semi-synthétique fabriquée à partir de cellulose. Elle est associée au tissu
viscose ou à la soie artificielle et elle a pour avantages d’être peu coûteuse et facile à travailler.

126
2. MATÉRIAUX ET MÉTHODES

Figure VI.5 – Film CLN d’épaisseur contrôlée formé à 100 °C entre deux substrats de
verre traités au PVA brossé.

L’épaisseur des films a été mesurée par la méthode des interférences basée sur l’interfé-
rence des ondes due à leurs réflexions entre les surfaces internes des deux substrats [169].
La dispersion en épaisseur des films CLCs or et CLNs utilisés pour la suite du protocole
a été maintenue aussi faible que possible.

Chaque film CLN présente une transmission très haute, soit au moins 90 %, et le
spectre de transmission de chaque film CLC or a une profondeur élevée, soit 40 % environ
(figure VI.6). Un soin particulier a été apporté pour que les films CLNs soient orientés
de manière homogène (figure VI.7a) et pour qu’ils aient le moins de défauts structurels
possible (figure VI.7b) grâce aux conditions d’ancrage planaires.

Pour retirer une lame de verre à chaque échantillon tout en évitant la formation de
rayures à leur surface, les films sont maintenus à -19,5 °C dans un congélateur pendant
30 min. Puis, l’une des lames est nettement retirée du film à l’aide d’un outil de prélève-
ment avec une ventouse. On vérifie au MO que la surface libre de chaque film soit restée
lisse après l’opération. On obtient ainsi des films CLCs or et CLNs semi-ouverts.

Figure VI.6 – Spectres de transmission typiques des films CLC or et CLN.

127
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

(a)

(b)

Figure VI.7 – (a) Image optique du film mince CLN en transmission entre polariseurs
croisés dont l’orientation est indiquée par les flèches noires en haut à gauche. La flèche
noire en bas à droite signale le sens de frottement de la couche d’alignement (PVA brossé).
La barre d’échelle représente 100 µm. (b) Image MET de la section transversale d’un film
CLN polymérisé de 10 µm d’épaisseur : aucun motif ou défaut n’est visible car l’alignement
est planaire dans tout le volume du film. Cette image servira de référence pour repérer
la structure nématique dans les images MET des échantillons finaux. La barre d’échelle
représente 5 µm.

2.3.3 Formation et polymérisation des films réflecteurs

La constitution des échantillons réflecteurs à structures chirales-achirales nécessite la


mise en contact dans la direction z des films CLC or et CLN (figure VI.8). La surface
libre du film CLC or est ainsi présentée face à celle du film CLN. La cellule est fermée à
température ambiante avec des cales (feuilles de Kapton fournies par Micel) de 12,5 µm
d’épaisseur insérées entre les lames de verre.

128
3. RÉSULTATS

Figure VI.8 – Schéma de la formation de la cellule expérimentale. Le film CLC or est


mis en contact avec le film CLN à température ambiante en présence de cales de 12,5 µm.

La cellule expérimentale est ensuite placée sur une plaque chauffante à 60 °C. Pour
décrire les propriétés optiques et structurelles de ce système en fonction du temps, cinq
cas sont présentés dans lesquels le temps de recuit a varié de 20 s à 50 min.

Finalement, chaque échantillon est réticulé par photopolymérisation à l’aide du banc


UV. Les films sont laissés à 60 °C sur la plaque chauffante et irradiés par de la lumière UV
pendant 10 min avec une intensité maximale à 365 nm égale à 0,50 mW/cm2. Les propriétés
du matériau réflecteur sont ainsi fixées dans une couche élastomère.

3 Résultats
3.1 Propriétés optiques
3.1.1 Réflexion
Après avoir polymérisé les cinq films qui ont connu des temps de recuit différents,
leurs propriétés de réflexion sont étudiées. Un film CLC or polymérisé sert de référence.
Les textures planaires des films ayant eu 20 s, 1 min, 2 min, 20 min et 50 min de temps
de recuit à 60 °C montrent une évolution de la couleur de réflexion en fonction du temps
(figure VI.9). L’image optique en réflexion du film CLC or apparaît jaune avec des touches
de vert et d’orange, tandis que les échantillons de 20 s, 1 min et 2 min possèdent un aspect
orange bien marqué, celui de 2 min étant même un peu plus foncé. Le film de 20 min est
de couleur rouge et enfin l’échantillon de 50 min montre un aspect rouge foncé qui semble
déborder sur l’IR.

Le présent ensemble de temps de recuit a donc permis la fabrication de différentes


cellules avec une couleur structurelle allant du jaune au proche IR pour un seul matériau
avec la même composition chimique d’un film à l’autre. La différence n’a résidé que dans
le temps de recuit.

129
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

(a) (b)

(c) (d)

(e) (f)

Figure VI.9 – Images optiques prises au MO Olympus BX51 en réflexion, du côté du


film CLC or initial, entre polariseurs croisés dont l’orientation est indiquée par les flèches
noires en haut à gauche. La barre d’échelle représente 50 µm pour les images de chacun
des films à différents temps de recuit : (a) CLC or (pour référence), (b) 20 s, (c) 1 min,
(d) 2 min, (e) 20 min et (f) 50 min.

130
3. RÉSULTATS

Les spectres de réflexion de ces films sont présentés dans la figure VI.10. La réflectance
est affichée entre 0 et 50 % compte tenu de la règle de sélectivité de la polarisation d’un
CLC (voir Chapitre I section 3). Le niveau de signal des spectres débute à 8-10 % en raison
de la réflectance des substrats en verre qui n’a pas été prise en compte dans la ligne de
base faite à l’aide d’un miroir.

D’après la loi de Bragg, la longueur d’onde moyenne réfléchie à incidence normale est
définie comme étant λ0 = n̄ p. La longueur d’onde moyenne de la bande de Bragg de
chaque échantillon est déterminée graphiquement avec les spectres de réflexion. Pour le
film CLC or qui sert de référence, λ0 = 585 nm (figure VI.10). Concernant les films de 20 s
et de 1 min, λ0 = 590 nm, tandis que pour l’échantillon de 2 min elle est de 595 nm. La
longueur d’onde moyenne de la bande de réflexion attribuée à chacun des films de 20 s,
1 min et 2 min a donc peu évolué par rapport à celle du film CLC or.

Les limites λmin et λmax de chaque bande de réflexion (figure VI.11a), déterminées à
mi-hauteur de la bande, sont de 555-620 nm pour le film CLC or, 560-620 nm pour les
échantillons de 20 s et 1 min et 560-625 nm pour celui de 2 min. Ainsi, la diffusion entre
les films CLC or et CLN jusqu’à 2 min n’est pas suffisante pour modifier de manière
significative la position et la largeur de la bande de Bragg inhérente au film CLC or.

Un déplacement net de la bande de réflexion est visible à 20 min de recuit avec une
longueur d’onde moyenne de réflexion à 650 nm qui correspond à la couleur rouge (figure
VI.10a). De plus, une certaine réflexion de la lumière est visible au-dessus de 700 nm (le
niveau du signal ne revient pas à 10 %), ce qui traduit la présence d’un gradient de pas.
Cependant, le nombre de tours d’hélice attribué à la torsion dans cette région spectrale
est trop faible pour permettre une réflexion significative au-dessus de 700 nm. En effet,
la réflectance dépend du nombre de pas, c’est-à-dire du nombre de tours d’hélice, dans le
matériau CLC. La torsion a besoin de se développer dans une épaisseur de film minimale
pour permettre l’apparition de réflexions de Bragg détectables dans des conditions de
spectrophotométrie standard [153].

Le recuit de la cellule pendant 50 min donne lieu à une bande de Bragg élargie du
rouge au proche IR avec λmin = 695 nm et λmax = 915 nm. La largeur de la bande de
réflexion ∆λ = λmax − λmin a varié de 60 à 220 nm entre le film qui a connu 20 s de recuit
et celui ayant eu 50 min (figure VI.11b).

Un CLN est généralement considéré comme un CLC avec un pas infini et le pas d’un
CLC peut être augmenté en ajoutant une quantité de CLN [170]. Dans le cadre de notre
étude, la diffusion spatialement dirigée des couches de CLC et de CLN se produit dans la
direction transversale à l’intérieur d’un seul matériau, comme le résultat de la conception
d’un matériau à gradient de structure. De 0 s à 50 min, λmax subit un gain d’amplitude
plus fort que λmin : 295 nm contre 140 nm (figure VI.11a). On peut en déduire que cet
étirement graduel de la bande de Bragg dans la partie rouge du spectre visible est la
conséquence de la diffusion graduelle entre un CLC à pas constant et un CLC à pas infini.

131
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

(a)

(b)

Figure VI.10 – Spectres de réflexion à incidence normale, du côté du film CLC or initial,
des échantillons pour différents temps de recuit : (a) CLC or (pour référence), 20 s, 20 min
et 50 min (entre 450 et 1000 nm) et (b) CLC or (pour référence), 1 min et 2 min (entre 500
et 700 nm). La ligne de base a été faite à l’aide d’un miroir. La réflectance de la lame de
verre du côté du CLC or initial est de 8 %.

132
3. RÉSULTATS

(a)

(b)

Figure VI.11 – (a) Limites λmin et λmax à mi-hauteur de la bande de Bragg des spectres
de réflexion en fonction du temps de recuit. (b) Largeur de bande ∆λ = λmax − λmin
en fonction du temps de recuit. Le film CLC or sert de référence fixée à 0 s pour les
échantillons ayant connu 20 s, 1 min, 2 min, 20 min et 50 min de recuit. Les pointillés
servent seulement de guides pour les yeux.

133
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

3.1.2 Transmission
L’étude des propriétés de transmission des films réflecteurs fournit des informations
complémentaires sur l’évolution de la transmittance avec le temps de recuit.

Les bandes interdites qui apparaissent dans les spectres de transmission sont compa-
rables à celles attribuées à la réflexion (figure VI.12). Cependant, pour les échantillons de
20 s, 1 min et 2 min, la transmittance de l’ensemble du signal (dans la bande de Bragg et
au-delà) est faible par rapport à la transmittance du film CLC or qui atteint 95 %. Cela
peut s’expliquer par le fait que les faibles temps de diffusion ne permettent pas aux films
d’obtenir une texture planaire nette après la mise en contact des deux couches CLC or
et CLN. En effet, des stries huileuses particulières sont visibles dans les textures liées aux
échantillons de 20 s, 1 min et 2 min (figures VI.13b à VI.13d), alors qu’elles sont absentes
dans la texture du film CLC or (figure VI.13a). Une diffusion due aux stries huileuses se
produit chez les films des trois premiers temps de recuit au lieu d’une réflexion spéculaire.

Une meilleure texture planaire est obtenue à 20 min et on constate un niveau de


transmittance plus élevé (figure VI.12). Cette texture présente des stries huileuses plus
fines que celles observées à 20 s, 1 min et 2 min et leur densité est plus faible (figure VI.13e).
De même, une texture planaire avec un niveau de transmittance plus proche de celui du
film CLC or se manifeste pour le film de 50 min (figure VI.13f).

Figure VI.12 – Spectres de transmission à incidence normale des échantillons pour


différents temps de recuit : CLC or (pour référence), 20 s, 1 min, 2 min, 20 min et 50 min.

134
3. RÉSULTATS

(a) (b)

(c) (d)

(e) (f)

Figure VI.13 – Images optiques prises au MO Olympus BX51 en transmission entre


polariseurs croisés dont l’orientation est indiquée par les flèches noires en haut à gauche.
La barre d’échelle représente 50 µm pour les images de chacun des films à différents temps
de recuit : (a) CLC or (pour référence), (b) 20 s, (c) 1 min, (d) 2 min, (e) 20 min et (f)
50 min.

135
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

3.2 Propriétés structurelles


Nous allons maintenant utiliser la MET afin de corréler le comportement temporel des
propriétés de réflexion et de transmission optiques avec la structure de chaque échantillon.
Mais pour étudier les propriétés structurelles des films réflecteurs, ces derniers doivent
d’abord être coupés en tranches dans une direction transversale pour pouvoir imager leur
structure interne par MET.

3.2.1 Préparation des films pour la MET par ultramicrotomie

Dans le but d’obtenir des films libres prêts à être inclus en résine, chaque échantillon
est placé dans un flacon d’eau distillée pendant un jour. En raison de la présence de
couches de PVA hydrosolubles sur les substrats, les films se sont détachés en un seul bloc
des lames de verre tout en conservant des surfaces nettes. Un petit morceau de chaque
film est incorporé dans la résine EMbed-812 fabriquée par Electron Microscopy Sciences.
Puis, la résine est polymérisée à 62 °C pendant deux jours.

Un couteau diamant est ensuite utilisé à température ambiante pour couper des
tranches ultrafines de 150 nm d’épaisseur avec un ultramicrotome Leica UCT. Le ma-
tériau est coupé perpendiculairement à la surface du film (sections transversales). Les
tranches sont placées sur des grilles de cuivre avant d’être observées au JEOL JEM-1400
fonctionnant à 80 kV. Les images MET sont acquises à l’aide d’une caméra CCD Gatan
Orius SC1000B. L’inclusion des échantillons dans la résine et leurs observations par MET
ont été réalisées par Vanessa Soldan du CBI de Toulouse.

3.2.2 Choix de l’approche pour l’analyse des images MET

La figure VI.14 montre les images MET des sections transversales des films qui ont
connu entre 20 s et 50 min de recuit. On y retrouve la texture en empreintes digitales
typique des CLCs faite d’un contraste périodique de bandes claires et sombres [151].
Le CLN est identifiable à droite sur l’image MET du film ayant eu 20 s de recuit, par
comparaison avec l’image MET du film CLN initial (figure VI.7b).

À partir des images MET, on souhaite étudier le profil de périodicité de chaque échan-
tillon en traçant la variation du demi-pas cholestérique (distance entre deux bandes de
même contraste) en fonction de la profondeur dans la section transversale du film réflec-
teur (figures VI.15 à VI.19). L’abscisse de chaque graphe est le rapport de la profondeur
sur l’épaisseur totale de l’échantillon, de manière à pouvoir comparer d’un film à l’autre
la variation du demi-pas dans le volume total. L’abscisse zéro correspond au sommet du
film CLC or. La figure VI.20 rassemble les profils de périodicité de chaque échantillon sur
un même graphe.

À présent, nous allons pouvoir identifier les différents régimes structuraux lors de la
diffusion thermique entre les couches CLC or et CLN.

136
3. RÉSULTATS

Figure VI.14 – Images MET des sections transversales des films qui ont connu entre
20 s et 50 min de recuit. Le film CLC or initial se situait à gauche sur chaque image et le
film CLN initial se situait à droite. Les barres d’échelle représentent 2 µm.

137
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

Figure VI.15 – Graphe de la mesure du demi-pas cholestérique en fonction du pourcen-


tage de profondeur dans le film, issu de l’analyse de l’image MET du film de 20 s.

Figure VI.16 – Graphe de la mesure du demi-pas cholestérique en fonction du pourcen-


tage de profondeur dans le film, issu de l’analyse de l’image MET du film de 1 min.

Figure VI.17 – Graphe de la mesure du demi-pas cholestérique en fonction du pourcen-


tage de profondeur dans le film, issu de l’analyse de l’image MET du film de 2 min.

138
3. RÉSULTATS

Figure VI.18 – Graphe de la mesure du demi-pas cholestérique en fonction du pourcen-


tage de profondeur dans le film, issu de l’analyse de l’image MET du film de 20 min.

Figure VI.19 – Graphe de la mesure du demi-pas cholestérique en fonction du pourcen-


tage de profondeur dans le film, issu de l’analyse de l’image MET du film de 50 min.

Figure VI.20 – Graphe regroupant les courbes qui sont des guides pour les yeux des
figures VI.15 à VI.19. Les points de mesure ne sont pas affichés pour plus de lisibilité.

139
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

3.2.3 Régimes de structures chirales-achirales


Pour un temps de recuit de 20 s, de la couche CLC (à gauche de l’image MET) à la
couche CLN (figure VI.14), les structures suivantes apparaissent successivement :
• une texture en empreintes digitales, avec un pas constant d’environ 360 nm (figure
VI.15) ;
• une texture en empreintes digitales frustrée, qui se matérialise par des doigts cho-
lestériques clairs et sombres déformés et plus grands ;
• une hélice cholestérique déroulée, qui se matérialise par un halo brillant sans bandes ;
• le CLN pur, dont l’image MET est présentée dans la figure VI.7b pour référence.

Les doigts cholestériques témoignent de la forte frustration de la structure hélicoïdale


avec la présence de régions homéotropes entre les doigts. Cette situation correspond au
déroulement local de l’hélice avec des molécules perpendiculaires aux surfaces du film
(déroulement partiel de l’hélice) [159, 171]. L’hélice est complètement déroulée lorsque
l’épaisseur disponible dans le film est proche ou inférieure au pas cholestérique.

À 1 min, la texture en empreintes digitales avec un pas constant est suivie d’une
région correspondant à un gradient CLC-CLN dans laquelle l’hélice est frustrée (figure
VI.14). Cela se produit sur une épaisseur plus importante que la région de frustration de
l’hélice à 20 s : c’est le résultat d’une diffusion progressive (figure VI.16). Le pas augmente
graduellement et donne lieu à des structures cholestériques déformées pour lesquelles la
direction des bandes n’est plus parallèle aux surfaces du film. La couche de CLN disparaît
car elle est consommée au cours de la diffusion thermique rapide. La situation à 2 min est
assez similaire, mais la périodicité des bandes est plus faible qu’à 1 min (figure VI.17).

En outre, le fait que le niveau de transmittance des spectres des films ayant eu une
courte durée de recuit soit bas (figure VI.12) est en partie dû à la région de l’hélice frustrée
qui est responsable de phénomènes de réflexion et de diffusion hors axe de propagation.

Une troisième situation se manifeste à 20 min. L’échantillon ne comporte plus de frus-


tration de l’hélice (figure VI.14). À la place, un gradient de pas de 430 à 1000 nm apparaît
à partir d’environ 32 % de l’épaisseur jusqu’à la fin du film (figure VI.18).

Enfin, une structure cholestérique avec un pas presque constant de 540 nm est obtenue
à 50 min (figure VI.19). La valeur du pas est 1,5 fois plus grande que celle inhérente au
film CLC or, ce qui est le résultat du mélange complet des couches CLC or et CLN.

Ainsi, le processus de diffusion thermique entre les couches chirale et achirale présente
les quatre régimes structuraux suivants :
• la coexistence d’une hélice à pas constant, d’une hélice frustrée, d’une hélice déroulée
(de type nématique) et d’une structure nématique issue du composé CLN pur (20 s) ;
• la coexistence d’une hélice à pas constant et d’une hélice frustrée (1 min et 2 min) ;
• la coexistence d’une hélice à pas constant sur environ un tiers de l’épaisseur et d’une
hélice à gradient de pas (20 min) ;
• une hélice à pas quasi-constant (50 min).

140
4. DISCUSSION

4 Discussion
4.1 Réflecteurs à structures chirales-achirales
L’association de couches de CLs a été réalisée dans la littérature en utilisant des
couches cholestériques dans le but d’élargir la bande de Bragg [112]. Deux cas ont été
envisagés concernant la nature discontinue ou continue (sans interface) de l’architecture
finale du matériau :
• l’empilement de couches conduisant à un système multicouche [110, 172] ;
• la diffusion thermique entre deux couches ayant des bandes de Bragg distinctes,
afin d’élargir la bande de réflexion en couvrant les longueurs d’onde des bandes de
Bragg des couches initiales ainsi que les longueurs d’onde intermédiaires [112, 173].
Ce processus est moins sensible aux défauts optiques et aux pertes supplémentaires
par diffusion ou réflexion aux interfaces que la méthode multicouche pour élargir la
bande de Bragg.

Notre système diffère de ce deuxième cas en faisant intervenir une couche chirale
associée à une couche achirale et un processus de diffusion qui aboutit à différents cas de
réflecteurs à bande de Bragg étroite. Cette dernière caractéristique est pertinente pour
les applications inédites ciblant le domaine des capteurs temps-température que nous
aborderons par la suite.

Nous avons cherché un protocole expérimental pour lequel la bande de réflexion est
ajustable par interpénétration contrôlée de couches cholestérique et nématique. La pre-
mière couche (CLC or) définit la limite gauche de la bande de Bragg et n’est pas destinée
à rester fixe au cours du processus de recuit. Le rôle de la deuxième couche (CLN) est de
permettre différents cas de figure pour le comportement de la bande de Bragg qui ne sont
pas réalisables avec deux couches de CLCs.

Nous avons ainsi concrétisé l’augmentation du pas cholestérique jusqu’à un pas infini,
la conception d’une structure cholestérique à pas variable, et enfin la réalisation d’un
CLC à pas constant, tout cela au moyen d’un seul matériau avec la même composition
chimique.

4.2 Bio-inspiration de la cuticule de Chrysina aurigans


La combinaison d’un CL chiral et d’un CL achiral a également permis de reproduire la
structure de la cuticule du scarabée Chrysina aurigans. L’ensemble des structures chirales-
achirales bio-inspirées de cette cuticule est visible dans la section transversale de l’échan-
tillon ayant connu 20 s de recuit (figure VI.21). Ces structures, similaires aux observations
faites au MO lors du contact des films CLC or et CLN dans le plan xy (figure VI.3), ont
été générées sans interface entre elles dans un film avec une épaisseur d’une vingtaine de
micromètres, comme la cuticule du scarabée.

141
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

(a) (b)

Figure VI.21 – (a) Image MET de la section transversale de l’échantillon qui a connu 20 s
de recuit lors de la diffusion thermique entre les films CLC or et CLN. (b) Image MEB
de la section transversale de la cuticule de Chrysina aurigans [8]. Les barres d’échelle
représentent 2 µm.

Cependant, notre démarche va au-delà de la conception de ce matériau bio-inspiré. En


effet, les différents régimes acquis suivant le temps de recuit des films réflecteurs peuvent
servir de capteurs optiques temps-température.

142
4. DISCUSSION

4.3 Capteurs temps-température


Les capteurs temps-température permettent d’enregistrer l’histoire thermique [174].
Les matériaux chiraux-achiraux de notre étude nous ont donné l’idée de réaliser des dis-
positifs intelligents qui reposent sur l’évolution graduelle et irréversible de la couleur d’une
étiquette de CLs en fonction de la température et du temps. Ces étiquettes intelligentes
sont destinées à être placées sur l’emballage de produits alimentaires ou de médicaments
qui doivent être maintenus dans un intervalle précis de températures basses (comme les
vaccins qui doivent être stockés et transportés dans des conditions ultra-froides [175]).

Pour concevoir ces capteurs, les deux couches initiales de la présente étude seraient
encapsulées à basse température dans une matrice ou un support en plastique, avant
d’être étiquetées sur l’emballage des produits devant être conservés à basse température
dès leur conditionnement. La couleur du capteur à base de CLs est initialement figée car la
diffusion entre les couches est interdite. Dans notre cas, la Tg des oligomères CLs étudiés
est d’environ 0 °C. Cela signifie que tant que la température reste en-dessous de 0 °C, la
diffusion ne peut pas démarrer et la couleur de l’étiquette n’est pas modifiée. Cependant,
lorsque la température du produit dépasse cette valeur critique, la couleur de l’étiquette
change et évolue dans le temps (figure VI.22).

Figure VI.22 – Schéma du principe des capteurs temps-température à base de CLs


chiraux et achiraux dont la couleur évolue avec le temps de manière irréversible lorsqu’une
température seuil a été dépassée.

Il est bien entendu possible pour le fabricant de définir un seuil de température dif-
férent pour qu’il corresponde aux spécifications du produit en question. Il devra alors
modifier la formulation des propriétés des couches initiales de CLs (composition chimique
et épaisseur) par rapport à la variation température-couleur souhaitée.

Ces changements de couleur révèlent à l’utilisateur potentiel que la chaîne thermique


a été rompue (information qualitative). De plus, ils donneraient une indication du temps

143
CHAPITRE VI. RÉPLIQUE ÉLASTOMÈRE DE LA CUTICULE DE CHRYSINA AURIGANS

écoulé depuis que la température a dépassé la gamme de température de stockage du pro-


duit (information quantitative). Un nuancier mis à la disposition de l’utilisateur pourrait
le renseigner sur la relation entre la couleur de l’étiquette, la température et le temps
écoulé.

Le fait que l’étiquette ne reviendra jamais à sa couleur initiale repose fondamentale-


ment sur l’interdiffusion physique entre les matériaux chiraux et achiraux. L’irréversibilité
de la couleur est d’une importance capitale pour ce type d’application. Par exemple, les
thermomètres à CLs ordinaires [176], qui sont des étiquettes cholestériques dont la couleur
varie en fonction de la température, ne conviendraient pas à cette utilisation car ils ne
possèdent pas la propriété d’irréversibilité.

Un changement de température ou un choc thermique peut altérer un produit péris-


sable. Les capteurs temps-température à base de CLs chiraux et achiraux permettraient
ainsi de contrôler le conditionnement de produits alimentaires ou de médicaments. Leur
but est d’informer avec précision si la température de conservation réglementaire a été
respectée et, lorsque cela n’a pas été le cas, pendant combien de temps la chaîne de froid
a été brisée.

144
5. CONCLUSION

5 Conclusion
À partir de l’observation de la structure de la cuticule de Chrysina aurigans que
nous avons prise pour modèle, nous avons élaboré des films polymères bio-inspirés ayant
des structures chirales-achirales sans interface [177]. La diffusion thermique entre un film
mince CLC et un film mince CLN a permis l’obtention de ce matériau monocouche, avec
une utilisation des ressources et un nombre d’étapes de fabrication optimisés.

Nous avons déterminé les conditions expérimentales conduisant à un équilibre entre


les structures hélicoïdales, hélicoïdales déformées et hélicoïdales déroulées dans un même
film. Quatre cas différents ont été décrits :
• la coexistence d’une hélice à pas constant, d’une hélice frustrée, d’une hélice déroulée
(structure nématique forcée) et d’une structure nématique stable ;
• la coexistence d’une hélice à pas constant et d’une hélice frustrée ;
• une hélice à gradient de pas ;
• une hélice à pas monotone.

L’obtention d’un scénario ou d’un autre à une température constante dépendait d’un
seul paramètre : le temps.

Ces films jouent le rôle de réflecteurs cholestériques sélectifs en longueur d’onde. Dif-
férentes bandes spectrales et couleurs de réflexion allant du jaune doré au proche IR ont
été obtenues et la couleur finale est irréversible.

Au-delà de la démarche biomimétique, la combinaison de ces propriétés nous a incités à


utiliser le concept de structures hybrides chirales-achirales pour la fabrication de capteurs
temps-température. Une fois encapsulée dans l’emballage d’un produit à conserver au
froid, cette étiquette intelligente enregistre l’historique de la conservation du produit.
Deux types d’informations basés sur les changements de couleur sont accessibles :
• une information qualitative signalant que le produit a été conservé en dehors de la
température de stockage spécifiée ;
• une information quantitative donnant une indication du temps écoulé depuis le
dépassement de la température de conservation du produit.

145
Conclusion générale

Ce travail de thèse consistait à élaborer par voie physique des répliques inédites de
cuticules irisées de deux scarabées du genre Chrysina sous forme de films minces de CLs.
Cette démarche biomimétique avait pour but de concevoir des matériaux multifonction-
nels imitant la structure hélicoïdale et les propriétés optiques de la chitine qui compose les
cuticules d’insectes. La cuticule du scarabée Chrysina gloriosa présente un motif texturé
avec une alternance de bandes vertes et de bandes argentées, ainsi qu’un gradient de pas
hélicoïdal dans son épaisseur. La cuticule de Chrysina aurigans, quant à elle, est uniformé-
ment dorée et renferme aussi un gradient de pas hélicoïdal. La complexité structurelle de
ces cuticules a pu être reproduite grâce à l’utilisation de CLs synthétiques, qui ont l’avan-
tage de présenter une auto-organisation anisotrope et des architectures multi-échelles.

Pour la réalisation des répliques des cuticules, l’utilisation optimale de ressources et


d’étapes était visée afin de mener une démarche de conception respectueuse de l’environ-
nement et d’envisager le recyclage des matériaux dans la perspective d’une production de
masse. Ainsi, on a évité l’utilisation de nanoparticules métalliques ou de couches métal-
liques et on a réduit le nombre de matériaux à mettre en œuvre en n’utilisant que quelques
éléments chimiques (C, H, O, N, Si et S) comme dans la nature. En ce qui concerne les
outils d’élaboration, les techniques de fabrication actuelles telles que la lithographie ou la
CVD sont souvent coûteuses et ne permettaient pas une économie de ressources et une
grande versatilité des motifs cholestériques à réaliser.

Afin de concevoir ces répliques, on a choisi d’utiliser des oligomères CLs réticulables
à base de polysiloxane dont la structure peut être figée irréversiblement sur une large
plage de température (entre -196 °C et 140 °C) par photopolymérisation. Dans un pre-
mier temps, une version hybride de la réplique de la cuticule de Chrysina gloriosa a été
élaborée à partir d’un film mince de CLC vitrifiable réfléchissant dans le vert et d’un
film mince de CLC réticulable réfléchissant dans l’IR. L’intérêt de cette version était de
passer progressivement à l’utilisation des composés réticulables en gardant la possibilité
de former le motif de bandes vertes et argentées en surface sur un composé vitrifié.

Pour cette version hybride de la cuticule de Chrysina gloriosa, après la formation et


l’assemblage des deux films initiaux, une solution aqueuse de PVA a été déposée sous
forme de bandes à la surface du matériau pour constituer les futures bandes argentées.
Puis, l’étape de diffusion thermique entre les deux films minces de CLCs a permis d’éta-
blir le gradient de pas cholestérique en passant d’un matériau bicouche à un matériau
monocouche. Simultanément, un changement d’ancrage en surface a été engendré dans

147
CONCLUSION GÉNÉRALE

les régions en contact avec l’air pour devenir des bandes vertes, tandis que l’ancrage pla-
naire a été conservé grâce au PVA pour former des bandes argentées. Enfin, l’échantillon
a été photopolymérisé sous UV. Nous sommes alors parvenus à la fabrication d’un maté-
riau monocouche ayant un gradient de pas cholestérique qui réfléchit toutes les longueurs
d’onde du vert au proche IR, avec une alternance de bandes vertes polygonales et de
bandes argentées planaires en surface. L’étape simple et unique de diffusion thermique a
rendu le processus d’auto-organisation des matériaux CLCs plus efficace en générant à la
fois le gradient de pas dans l’épaisseur et le motif texturé en surface. Ainsi, les propriétés
structurelles, texturales et colorées des CLs biologiques ont été reproduites avec succès.

Après s’être familiarisé avec les propriétés des composés réticulables et avec la pho-
topolymérisation pour le système hybride, nous avons conçu des versions élastomères de
la réplique de la cuticule de Chrysina gloriosa en utilisant seulement les composés réticu-
lables. Deux films minces de CLCs réticulables réfléchissant la lumière dans des bandes
de longueurs d’onde distinctes (l’un dans la partie verte du spectre visible et l’autre dans
le spectre IR) ont été formés puis mis en contact. De fines bandes de PVA ont été dépo-
sées sur la surface libre de ce système bicouche afin de créer le motif en surface. L’étape
d’interdiffusion transversale entre les deux couches a été effectuée en choisissant de traiter
deux cas ayant des recuits de durées différentes : un recuit d’une durée courte (15 min) et
un recuit d’une durée longue (4 h). Les matériaux devenus monocouches ont été solidifiés
par photopolymérisation induite par les UVs.

Pour la version élastomère avec 15 min de recuit, les bandes vertes polygonales et
argentées planaires ont révélé des bandes de Bragg élargies entre les longueurs d’onde
correspondant à la couleur verte jusqu’au proche IR. Cependant, la forme de leur bande
de réflexion n’était pas semblable en raison d’un profil de gradient de pas cholestérique
différent d’un type de bande à l’autre. Ceci a été confirmé par les images MET de la section
transversale de chaque bande où un pas croissant était visible du haut vers le bas dans les
deux bandes du film mais une divergence du pas était présente uniquement dans la bande
argentée qui était confinée entre le PVA (substrat souple) et la lame de verre (substrat
rigide). Cette géométrie a induit une différence de tension superficielle donc de viscosité
effective dans la bande argentée, comparée à la bande verte qui avait plus de degrés de
liberté. En effet, la coexistence de l’air et du PVA à la surface du matériau a provoqué
un changement local de la tension superficielle, ce qui a modifié l’auto-organisation du
matériau cholestérique. La tension superficielle est devenue anisotrope entre un site qui est
resté ouvert à l’air et un site recouvert de PVA, ce qui a eu un impact sur le comportement
de l’hélice cholestérique d’un type de bande à l’autre. Cette situation a été accentuée avec
un temps de recuit plus long.

Pour la version élastomère avec 4 h de recuit, on a constaté que les couleurs de réflexion
du matériau élastomère avaient évolué par rapport à celles du matériau avec 15 min de
recuit : les bandes apparaissaient jaune-vert sous le PVA au lieu d’argentées et rouges
sous l’air au lieu de vertes. La bande de Bragg de chaque type de bande était plus réduite
et leur position bien distincte. Dans la section transversale de la bande rouge observée
au MET, la texture polygonale était visible sur une plus grande épaisseur après 4 h de

148
CONCLUSION GÉNÉRALE

recuit. De plus, le pas cholestérique était devenu monotone, ce qui signifie que les deux
films minces initiaux s’étaient complètement mélangés dans cette bande au bout de 4 h.
La divergence du pas du côté du substrat en verre dans la bande jaune-vert planaire était
à nouveau présente et elle s’était étendue sur une plus grande épaisseur par comparaison
avec le cas ayant 15 min de recuit. Ainsi, cette version ayant subi 4 h de recuit a permis
d’approfondir les différences structurelles et optiques entre les deux types de bandes et de
mieux comprendre l’impact de l’anisotropie de la tension superficielle sur le comportement
du pas cholestérique au sein du matériau élastomère.

De plus, des variantes de la version élastomère ayant connu 15 min de recuit ont été
réalisées :
• Le motif en surface a été modifié en disposant les bandes de PVA différemment, ce
qui a donné par exemple un matériau avec quatre bandes argentées sous forme de
traits discontinus placées aux coins de l’environnement vert.
• Des échantillons sous forme de films autonomes ou encapsulés dans un substrat
flexible ont été mis en oeuvre. En effet, le matériau a été entièrement détaché du
substrat en verre en déposant initialement une couche de PVA (qui est soluble dans
l’eau) entre l’échantillon et le substrat. Ainsi, le matériau élastomère final s’était
séparé en bloc de son substrat en le plaçant dans l’eau. On a obtenu un film libre de
tout substrat et on a pu l’inclure dans un morceau de PVA séché pour qu’il devienne
une étiquette souple.

En résumé, la réplique élastomère ayant connu 15 min de recuit reproduit les propriétés
texturales, structurelles et colorées de la cuticule rayée du scarabée Chrysina gloriosa avec
un haut niveau de biomimétisme. Cette réplique élaborée à partir de CLCs réticulables a
l’avantage d’avoir une structure thermiquement stable et non réversible, ce qui revêt un
caractère distinctif vis-à-vis de la réplique à base de composés vitrifiables [83]. Nous avons
donc réussi à concevoir des films monocouches présentant une structure cholestérique
continue, tout en contrôlant la formation de motifs discontinus en surface. Différentes
couleurs et longueurs d’onde de réflexion ont été produites en ajustant uniquement le
temps de recuit du système. La double polyvalence des couleurs et des motifs a été obtenue
par l’étape simple et unique de diffusion thermique qui a rendu le processus d’auto-
organisation des CLCs plus efficace.

Dans la dernière partie de ce travail, l’observation de la structure de la cuticule de Chry-


sina aurigans nous a inspiré l’idée d’élaborer des films élastomères à structures chirales-
achirales sans interface, en effectuant une diffusion thermique entre un film mince de CLC
réticulable et un film mince de CLN réticulable. Un CLN étant considéré comme un CLC
avec un pas infini, le faire diffuser dans un CLC réfléchissant dans le jaune or a permis
d’augmenter progressivement le pas cholestérique du CLC en fonction du temps de recuit
et d’obtenir différentes bandes spectrales et couleurs de réflexion allant du jaune doré au
proche IR. La couleur finale du matériau était irréversible et la structure a été fixée par
la photopolymérisation sous UV. Cinq échantillons, chacun ayant subi un temps de recuit
différent (20 s, 1 min, 2 min, 20 min et 50 min), ont été fabriqués. Ces films jouent le rôle
de réflecteurs cholestériques sélectifs en longueur d’onde. Nous avons ainsi conçu des ma-

149
CONCLUSION GÉNÉRALE

tériaux à gradient de structure grâce à la diffusion des couches de CLC et de CLN. Après
avoir observé les sections transversales de ces films au MET, nous avons décrit quatre cas
de structures qui ne dépendaient que du temps de recuit :
• la coexistence d’une hélice à pas constant, d’une hélice frustrée, d’une hélice déroulée
(structure nématique forcée) et d’une structure nématique stable à 20 s de recuit ;
• la coexistence d’une hélice à pas constant et d’une hélice frustrée à 1 min et 2 min
de recuit ;
• une hélice à gradient de pas à 20 min de recuit ;
• une hélice à pas monotone à 50 min de recuit.

Une application directe de ce concept de structures hybrides chirales-achirales serait


la fabrication de capteurs temps-température. Pour cela, les deux films initiaux CLC et
CLN seraient encapsulés dans l’emballage d’un produit à conserver au froid. Tant que la
température serait restée en-dessous de la Tg des films, la diffusion ne pourrait pas com-
mencer et la couleur du matériau serait inchangée. Si la température du produit dépassait
la Tg , la diffusion entre les films débuterait et la couleur de l’étiquette évoluerait dans le
temps. Le principe de ce dispositif intelligent reposerait donc sur l’évolution graduelle
et irréversible de la couleur d’une étiquette de CLs en fonction de la température et du
temps. Cette étiquette servirait à enregistrer l’historique de la conservation d’un produit
périssable et permettrait ainsi de contrôler son conditionnement. Le changement de cou-
leur signalerait que la chaîne de froid a été rompue, tout en donnant une indication du
temps écoulé depuis le dépassement de la température de conservation du produit.

D’autres applications peuvent être envisagées, notamment grâce aux résultats fonda-
mentaux obtenus avec les répliques de la cuticule de Chrysina gloriosa qui sont des films
élastomères monocouches à motifs. Pour générer plus de deux couleurs à la surface d’un
même film cholestérique, on pourrait utiliser des films polymères (tels que le PVA par
exemple) de différentes natures ayant des activités de surface distinctes. La fabrication de
ce type de films réfléchissants multicolores pourrait trouver des utilisations pratiques dans
des domaines variés : les systèmes d’autoguidage de véhicules autonomes, les panneaux
d’affichage routier, les façades fonctionnelles en architecture, les peaux de camouflage pour
les robots et les étiquettes anti-contrefaçon pour la sécurité des informations.

La conception biomimétique de matériaux imitant la structure et les propriétés des cu-


ticules d’insectes offre de nombreuses et nouvelles solutions pour répondre aux demandes
dans les domaines de la détection, de la communication optique, du traitement de données
et du camouflage. La diversité de motifs et de couleurs dans la nature à différentes échelles
de longueur est une véritable source d’inspiration pour la conception de matériaux photo-
niques qui n’en est encore qu’à ses débuts. Dans cet objectif, en plus de mettre en forme
des films de CLCs monocouches à gradient de pas hélicoïdal et à orientation variable de
l’axe hélicoïdal, on pourrait envisager la réalisation de répliques de cuticules biologiques
à double hélicité. En effet, la paroi cellulaire pixélisée des fruits de Pollia condensata, qui
sont les objets les plus brillants parmi les organismes biologiques connus, pourrait être
reproduite en imitant la structure cholestérique de la cellulose qui s’auto-assemble avec
les deux sens d’hélicité.

150
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163
Polymères cristaux liquides biomimétiques reproduisant la
carapace de scarabées du genre Chrysina : élaboration,
structure et propriétés optiques

RÉSUMÉ

Ayant une structure en hélice, les cristaux liquides cholestériques (CLCs) possèdent de
nombreuses propriétés optiques, notamment la réflexion sélective de la lumière. Ils sont à
l’origine des couleurs irisées de la cuticule (exosquelette) d’un grand nombre d’insectes,
comme les scarabées du genre Chrysina.

L’objectif de ce travail de thèse est d’élaborer par voie physique des films minces
de CLCs afin de réaliser des répliques inédites de cuticules biologiques. La conception
des répliques s’est effectuée à l’aide d’oligomères à base de cyclosiloxane. On a étudié la
relation entre les voies d’élaboration, les propriétés optiques et la structure des matériaux,
en associant des techniques de microscopie complémentaires et la spectroscopie.

Dans un premier temps, la structure et les propriétés optiques des films minces élaborés
imitent celles de la cuticule du scarabée Chrysina gloriosa. Deux versions de la réplique
de cette cuticule ont été conçues : une version hybride avec des oligomères vitrifiables et
réticulables et une version élastomère avec seulement des oligomères réticulables. Dans les
deux versions, le matériau CLC final est une monocouche dont la structure, à gradient de
pas de l’hélice, induit une réflexion du vert au proche infrarouge. De plus, le motif irisé
de bandes vertes et argentées a été engendré par des changements d’ancrage moléculaire
en surface.

Dans un second temps, les films minces réalisés s’inspirent de la structure et des
propriétés optiques de la cuticule du scarabée Chrysina aurigans. Ce sont des films élas-
tomères réflecteurs sélectifs en longueur d’onde (du jaune doré au proche infrarouge), avec
différents régimes de structures chirales-achirales sans interface. Ils nous ont inspiré la fa-
brication de capteurs temps-température afin d’enregistrer l’historique de la conservation
d’un produit.

La démarche employée lors de ce travail, appelée biomimétisme, repose sur la fabrica-


tion de matériaux ou de dispositifs imitant la nature pour répondre à différents enjeux. En
effet, les matériaux inédits qui ont été réalisés pourraient trouver des utilisations pratiques
en optique : communication optique, cryptographie visuelle, furtivité, guidage de véhicules
autonomes, etc. Cette thèse est donc interdisciplinaire, aux interfaces entre physique de
la matière molle, optique des milieux anisotropes, biologie et technologie de matériaux
avancés pour l’optique.

MOTS-CLÉS

Cristaux liquides cholestériques, optique, structure, chiralité, biomimétisme, scarabée


Biomimetic liquid-crystal polymers reproducing the armour of
beetles from the genus Chrysina : elaboration, structure and
optical properties

ABSTRACT

Having a helix structure, cholesteric liquid crystals (CLCs) have many optical proper-
ties, including selective reflection of light. They are at the origin of the iridescent colors
of the cuticle (exoskeleton) of a large number of insects, such as the beetles of the genus
Chrysina.

The objective of this thesis is to elaborate by physical way thin films of CLCs in order to
realize novel replicas of biological cuticles. The replicas were designed using cyclosiloxane-
based oligomers. The relationship between the elaboration pathways, optical properties
and structure of the materials was investigated by combining complementary microscopy
techniques and spectroscopy.

First, the structure and optical properties of the elaborated thin films mimic those of
the cuticle of the beetle Chrysina gloriosa. Two versions of the replica of this cuticle were
designed : a hybrid version with vitrifiable and crosslinkable oligomers and an elastomeric
version with only crosslinkable oligomers. In both versions, the final CLC material is
a monolayer with a helix pitch gradient structure that induces green to near-infrared
reflection. In addition, the iridescent pattern of green and silver bands was generated by
changes in molecular anchoring on the surface.

Secondly, the thin films realized are inspired by the structure and optical properties of
the cuticle of the beetle Chrysina aurigans. They are wavelength selective (from golden
yellow to near infrared) reflective elastomeric films, with different regimes of chiral-achiral
structures without interface. They inspired us to develop time-temperature sensors to
record the history of the conservation of a product.

The approach used in this work, called biomimicry, is based on the fabrication of ma-
terials or devices imitating nature to meet different challenges. Indeed, the novel materials
that have been realized could find practical uses in optics : optical communication, visual
cryptography, stealth, guidance of autonomous vehicles, etc. This thesis is therefore in-
terdisciplinary, at the interface between soft matter physics, optics of anisotropic media,
biology and advanced materials technology for optics.

KEYWORDS

Cholesteric liquid crystals, optics, structure, chirality, biomimicry, beetle

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