La Finance Durable Et Les Investissements Socialement Responsables Au Maroc Défis Et Opportunités

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 15

ISSN: 2658-8455

Volume 4, Issue 6-1 (2023), pp. 208-222.


© Authors: CC BY-NC-ND

La finance durable et les investissements socialement responsables


au Maroc : défis et opportunités

Sustainable finance and socially responsible investments in


Morocco: challenges and opportunities

Marouane NAKHCHA, (Doctorant Chercheur)


Laboratoire de Recherche : science de gestion des organisations
École Nationale de Commerce et de gestion -Kenitra
Université Ibn Tofail, Maroc

Mamdouh TLATY, (Professeur Habilité)


Laboratoire de Recherche : science de gestion des organisations
École Nationale de Commerce et de gestion -Kenitra
Université Ibn Tofail, Maroc

Ecole Nationale de Commerce et de Gestion,


Campus Universitaire B.P : 1420
Université Ibn Tofail
Adresse de correspondance :
Maroc (Kénitra) -14000-
Tel : 0537329421 / 0537329422
Fax : 0537375637
Les auteurs n'ont pas connaissance de quelconque financement
Déclaration de divulgation :
qui pourrait affecter l'objectivité de cette étude.
Conflit d’intérêts : Les auteurs ne signalent aucun conflit d'intérêts.
NAKHCHA, M., & TLATY, M. (2023). La finance durable et
les investissements socialement responsables au Maroc : défis
Citer cet article et opportunités. International Journal of Accounting, Finance,
Auditing, Management and Economics, 4(6-1), 208-222.
https://doi.org/10.5281/zenodo.10292264

Cet article est publié en open Access sous licence


Licence
CC BY-NC-ND

Received: October 30, 2023 Accepted: December 06, 2023

International Journal of Accounting, Finance, Auditing, Management and Economics - IJAFAME


ISSN: 2658-8455
Volume 4, Issue 6-1 (2023)

208
www.ijafame.org
Marouane NAKHCHA & Mamdouh TLATY. La finance durable et les investissements socialement responsables au Maroc :
défis et opportunités

La finance durable et les investissements socialement responsables au


Maroc : défis et opportunités
Résumé
Ce document aborde le concept de finances durables et d’investissement socialement responsable (ISR) selon
différentes approches et à l’aide d’un examen approfondi de la littérature. La première partie résume la littérature
en la matière afin de comprendre les principaux concepts des finances durables et d’ISR. Les finances durables
sont un concept dynamique, un cadre commun basé sur certains principes issus des questions qui sous-tendent le
développement durable. Il s’agit là d’un processus, et non d’un objectif final, avec de nombreux résultats positifs.
Ces sujets sont une tendance actuelle ainsi que des outils puissants pour éduquer les marchés orientés vers le profit
tels que les finances traditionnelles.
Ensemble, ils constituent une force motrice influente vers le développement durable. L’analyse sera basée sur
l’état des lieux ; constituant la deuxième partie de cet article, elle donne un aperçu sur la façon dont les finances
durables, en tant que promoteur du développement durable, se développent dans le contexte marocain. Bien qu’il
y ait des forces et des opportunités de développement, il subsiste certains défis qui nécessitent des solutions
immédiates. La société est à la recherche de nouvelles alternatives, et les finances durables devraient être
considérées comme une véritable alternative. Néanmoins, la méfiance du public entraîne la nécessité de soutenir
et de protéger les initiatives véritablement durables au sein du secteur financier au Maroc.

Mots clés : Finance durable, développement durable, investissement socialement responsable, défis, opportunité.
Classification JEL : F3.
Type du papier : Recherche Théorique

Abstract
This paper discusses the concept of sustainable finance and socially responsible investment (SRI) from a number
of different angles, based on an in-depth review of the literature. The first part summarizes the literature in order
to understand the main concepts of sustainable finance and SRI. Sustainable finance is a dynamic concept, a
common framework based on certain principles derived from the issues underlying sustainable development. It is
a process, not an end goal, with many positive outcomes. These issues are a current trend as well as powerful tools
for educating profit-driven markets such as traditional finance.
Together, they constitute an influential driving force towards sustainable development. The second part of this
article is an analysis based on the current state of play, providing an overview of how sustainable finance, as a
promoter of sustainable development, is developing in the Moroccan context. While there are strengths and
opportunities for development, there are some challenges that require immediate solutions. Society is looking for
new alternatives, and sustainable finance should be seen as a real alternative. Nevertheless, public distrust drives
the need to support and protect truly sustainable initiatives within Morocco's financial sector.
Keywords: Sustainable finance, sustainable development, socially responsible investment, challenges,
opportunities.
JEL Classification: F3.
Type du papier : Theoretical Research

209
www.ijafame.org
ISSN: 2658-8455
Volume 4, Issue 6-1 (2023), pp. 208-222.
© Authors: CC BY-NC-ND

Introduction
Dans un monde en constante mutation, marqué par la raréfaction des ressources naturelles, des
changements démographiques significatifs, une urbanisation rapide, l’instabilité économique et
les défis du changement climatique, la nécessité de repenser nos modèles économiques et
financiers sont devenus plus impératifs que jamais. Cette transition globale a mené à une prise
de conscience accrue des inégalités sociales et environnementales, soulignant l’urgence de la
durabilité à long terme comme un impératif mondial (Brooksworth et al., 2022).
Historiquement, la sensibilisation aux enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance
(ESG) a pris racine dans les pays développés pendant la Seconde Guerre mondiale, marquant
un tournant dans la perception et la gestion des ressources et des impacts environnementaux
(Doh et al., 2015). Cependant, l’adoption et la mise en œuvre de pratiques durables dans les
pays émergents et en développement se sont heurtées à divers obstacles, notamment le risque
systémique lié à l’instabilité politique et économique, un manque de transparence, des
infrastructures juridiques et réglementaires insuffisantes, et une compréhension limitée des
enjeux ESG (Stagars, 2014 ; Doh et al., 2015).
Dans ce contexte complexe, notre étude se concentre sur le domaine de la finance durable ou
responsable, avec un accent particulier sur l’investissement socialement responsable (ISR), qui
émerge en réponse au développement durable. L’ISR constitue une approche de
l’investissement qui intègre des critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance)
au-delà des simples considérations financières, afin d’inclure les impacts sociaux et
environnementaux dans le processus de prise de décision en matière d’investissement. Cette
tendance reflète les principes de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) et a connu une
augmentation notable dans les stratégies d’investissement, témoignant ainsi d’un changement
significatif dans la conscience et les pratiques du monde financier. L’objectif de cette étude est
de fournir un aperçu détaillé de l’état actuel de la finance durable au Maroc, un pays qui a pris
des mesures proactives et innovantes en matière de politiques environnementales. Ces
initiatives, nées en réponse à des défis tels que la sécheresse et autres crises environnementales,
ont positionné le Maroc comme un leader dans le domaine de la durabilité. Ces efforts se sont
notamment manifestés dans le cadre de son plan de développement établi dans les années 1970,
intégrant la protection de l’environnement et la durabilité comme des priorités stratégiques
nationales.
Dans notre exploration de la finance durable au Maroc, nous aborderons la question suivante :
« Quels sont les défis et les opportunités de la finance durable au Maroc ? ».
Pour y répondre, nous nous plongerons d’abord dans les fondements théoriques, en examinant
les définitions et les concepts clés relatifs à la finance, au développement durable, à la finance
durable, et à l’investissement socialement responsable.
Nous étudierons ensuite le contexte spécifique du Maroc, en analysant les engagements et les
initiatives des divers acteurs, afin de comprendre la dynamique et les particularités de ce type
de financement dans le pays.
Cette analyse nous permettra d’identifier les facteurs qui favorisent le développement de la
finance durable ainsi que les obstacles qui freinent la transition vers une économie
véritablement durable et responsable.
Ainsi, notre étude vise à fournir une compréhension holistique de la manière dont la finance
durable et l’ISR s’entremêlent et évoluent dans le contexte marocain, tout en reflétant les
tendances et défis mondiaux. En se concentrant sur le Maroc, cette recherche offre un aperçu
précieux de la façon dont les concepts et pratiques de la finance durable et de l’ISR peuvent
être adaptés et mis en œuvre dans des contextes nationaux variés, soulignant leur rôle crucial
dans la promotion d’un développement économique qui est à la fois viable et éthiquement
responsable dans un monde en rapide évolution.
210
www.ijafame.org
Marouane NAKHCHA & Mamdouh TLATY. La finance durable et les investissements socialement responsables au Maroc :
défis et opportunités

1. Évolution des concepts


Au fil des années, les concepts de finance durable et de développement durable ont gagné en
popularité d’un secteur à l’autre. Une partie au moins du secteur industriel prend enfin
conscience de l’impérieuse nécessité d’intégrer une perspective à long terme tout au long des
chaînes de production. Ainsi, le secteur des services, comme le tourisme, apprend de ses erreurs
passées et des idées plus respectueuses de l’environnement voient le jour dans le monde entier ;
des idées où la conservation des écosystèmes naturels est la principale préoccupation.
Néanmoins, le développement durable demeure un processus continu qui doit continuer à se
répandre dans toutes les activités économiques. Les pionniers doivent être les plus puissants et
les plus influents. Si l’on considère le scénario actuel, le secteur financier est sans aucun doute
l’une des principales forces de l’économie. Bien que des changements doivent avoir lieu
partout, la transformation du système financier vers une approche plus durable s’avère
essentielle.
Dans les paragraphes suivants, nous définirons les principaux concepts de notre thématique.
1.1 De la finance et du développement durable à la finance durable
1.1.1 L’économie en tant que moteur du développement durable
Pesqueux (2020) souligne que « L’économie, en tant que produit de la société, est donc liée à
la morale, ainsi qu’à d’autres manifestations de la société, telles que la culture ou la religion ».
Aussi doit-elle donc être analysée dans le contexte culturel auquel elle appartient et considérée
comme un facteur de changement. Lors de l’identification des moteurs du développement
durable, il convient de prendre en considération l’économie et, par conséquent, la société et ses
cultures. Effectivement, l’économie actuelle est si exigeante que tous les secteurs d’activité sont
contraints d’intégrer immédiatement les modifications subies par les sociétés dans leurs codes
éthiques et moraux pour rester compétitifs.
À cet égard, les décisions d’achat de biens et de services reflètent l’intérêt croissant du public
pour les questions de durabilité. En outre, de nouvelles politiques environnementales sont mises
en œuvre en permanence (Pesqueux, 2020 ; International Finance Corporaton [IFC], 2021).
Ainsi, les entreprises ne cherchent plus qu’à faire des profits, mais aussi à gagner une
perspective environnementale et sociale à long terme. Elles y parviennent principalement en
atténuant les risques sociaux et environnementaux et en adoptant des stratégies commerciales
novatrices axées sur le développement durable (IFC 2021). Parallèlement à une demande
croissante, les initiatives du secteur privé en faveur de modèles d’entreprise durables se
multiplient également. Dans cet environnement, « Des consommateurs conscients, des
investisseurs éthiques, des entreprises éclairées, des organisations non gouvernementales, des
créations culturelles et des institutions internationales de premier plan s’efforcent de faire du
triple bilan (Personnes, Planète et Profit) une réalité (de Clerck, 2019).
Selon cette approche, chaque individu est responsable de l’attention portée aux besoins présents
et à venir de la société et de l’environnement lorsqu’il choisit des produits sur le marché (de
Clerck 2019). Ainsi, le système économique est donc un générateur de valeur sociale et
environnementale par le biais des différentes activités qui le composent, y compris les finances.
Bien que l’analyse du lien entre l’économie et la durabilité doive prendre en considération de
nombreuses questions, elle n’entre pas dans le contexte de notre recherche. Nous nous
intéresserons principalement au secteur financier et à d’autres parties prenantes étroitement
liées. Le système économique étant fortement lié aux finances. Tel le point de départ de notre
recherche.

211
www.ijafame.org
ISSN: 2658-8455
Volume 4, Issue 6-1 (2023), pp. 208-222.
© Authors: CC BY-NC-ND

1.1.2 Le concept de finances durables


Le concept de finances durables étant relativement récent, il est toutefois assez difficile d’en
donner une définition universelle, largement connue et acceptée. Durant les lignes qui suivent,
nous résumerons la diversité des idées exprimées par les auteurs dans la littérature. La majorité
des universitaires s’accordent sur le dynamisme des finances durables, qui découle du concept
intrinsèque de développement durable. Pour définir ce concept, dans notre prochain paragraphe,
nous identifierons les principales différences et similitudes entre le concept et d’autres idées
connexes tirées de la littérature.
1.1.2.1 Finances durables : un concept dynamique
Depuis les toutes premières initiatives durables, de nombreux projets financiers ont intégré cette
approche innovante dans leurs propres activités. La mise en œuvre a été effectuée
principalement par le management des « risques sociaux et environnementaux dans la prise de
décision stratégique et les prêts et l’identification des opportunités de développement de
produits innovants dans de nouveaux domaines liés à la durabilité » (IFC, 2021). Il est vrai que
la littérature relative à ce sujet est répertoriée sous divers mots clés. Ainsi, « Banque et finance
sociales, éthiques, communautaires, de microfinance, alternative, environnementale, durable,
de développement et de solidarité » sont des dénominations actuellement utilisées pour
exprimer des manières particulières de travailler avec l’argent, basées sur des délibérations non
financières. (...).
Une définition précise et unifiée « de ce type de finance n’est pas disponible et n’est peut-être
pas possible en raison des différentes traditions dont sont issus les acteurs de la finance
éthique » (Fayolle, 2023). Afin de mieux comprendre les mots de Fayolle (2023), un examen
approfondi de la littérature est nécessaire. Manifestement, les « finances durables » et le
développement durable sont des concepts dont la principale caractéristique est leur dynamisme
intrinsèque. Tous deux sont davantage un processus dynamique qu’un concept statique. À ce
propos, Murfin, et Pratt (2019). Justifient ce dynamisme en affirmant que la définition évolue
dans le temps et dans l’espace. Ce que l’on entendait par développement durable a changé
depuis les premières publications scientifiques et, aujourd’hui encore, il persiste des variations
notables dans la mise en œuvre lorsque l’on compare deux endroits. Il en va de même pour les
finances durables.
Dans ce contexte, la littérature nous montre que l’important n’est pas d’élaborer une définition
fixe, mais d’identifier ce qui devrait être considéré comme des finances durables et ce qui ne
devrait pas l’être. Ainsi, Fayolle, (2023) affirme que même si elles « diffèrent en termes
d’objectifs, d’accents, de clients, de produits et de culture d’entreprise, elles ont en commun de
pratiquer la banque et l’investissement avec une mission de développement humain. Elles
apportent toutes une contribution innovante et à valeur humaine au système financier neutre
en termes de valeur » (Fayolle, 2023).
Il minimise cependant l’engagement environnemental du terme « durable ». De son côté, Le
Forum pour l’avenir1 a défini les finances durables comme « une décision de fournir des
capitaux financiers et des produits de gestion des risques uniquement à des projets qui
favorisent, ou ne nuisent pas, à la prospérité économique, à la protection de l’environnement
et à la justice sociale » (Forum pour l’avenir). En outre, la Société financière internationale
(IFC 2021) identifie quatre exigences sur la manière de mettre en œuvre la durabilité si une
entité veut être qualifiée de durable, à savoir :

1
Le Forum pour l’avenir est « un organisme indépendant à but non lucratif qui travaille à l’échelle mondiale avec
les entreprises et les gouvernements afin d’inspirer de nouvelles réflexions, de créer des partenariats créatifs et
d’élaborer des solutions pratiques » (Forum pour l’avenir 2012).
212
www.ijafame.org
Marouane NAKHCHA & Mamdouh TLATY. La finance durable et les investissements socialement responsables au Maroc :
défis et opportunités

❖ « La durabilité financière. Disponibilité de l’institution financière et de ses clients à


contribuer au développement dans une perspective à long terme ».
❖ « La durabilité économique. Viabilité économique de l’institution et des projets financés, et
donc leur contribution aux économies et aux sociétés ».
❖ « La durabilité environnementale. Préservation des écosystèmes et des ressources
naturelles. »
❖ « La durabilité sociale. Elle respecte toujours les droits de l’homme internationalement
reconnus. Elle améliore le bien-être et le niveau de vie dans la communauté où elle exerce
ses activités » (IFC, 2021).
Ipso facto, toutes ces considérations « prises ensemble, visent à saisir une gamme plus complète
de facteurs qui influencent les décisions, les activités, les produits et les services des institutions
financières, y compris les impacts sociaux et environnementaux de leur travail » (IFC, 2021).
Pour sa part, Holroyd (2020) se concentre sur deux questions principales dans sa tentative de
définir les finances durables.
• Les stratégies d’entreprise doivent avoir une attitude qui implique l’ensemble du
système d’entreprise, en tenant compte de toutes les principales parties prenantes.
• Les plans stratégiques doivent être fondés sur des systèmes de suivi durables, où
l’innovation durable occupe une place de premier plan dans le dispositif de
développement de l’entreprise.
Néanmoins, le bien-fondé du concept réside principalement dans la détermination ainsi que la
différenciation de ces initiatives par rapport aux finances courantes.
1.1.2.2 Le rôle des finances dans le développement durable
En préambule, nous citerons Jeucken (2001) qui souligne que « Le rôle des marchés financiers
dans la contribution au développement durable est cependant potentiellement énorme, en
raison de leur rôle d’intermédiaire dans l’économie. Les marchés financiers transforment
l’argent en termes de durée, d’échelle, de localisation spatiale et de risque et ont un impact
important sur le développement économique des nations. »
Figure 1 : le rôle des marchés financiers dans un système économique

Source : (JEUCKEN, 2001)


Ainsi, les finances servent d’intermédiaires entre les personnes qui ont des pénuries et des
excédents de capital (figure 1). À ce titre ils disposent des outils nécessaires pour créer et
transformer de l’argent à l’échelle spatiotemporelle de façon continue. Entre autres choses, ces

213
www.ijafame.org
ISSN: 2658-8455
Volume 4, Issue 6-1 (2023), pp. 208-222.
© Authors: CC BY-NC-ND

transactions répartissent également les risques. Par conséquent, les entités financières disposent
d’informations uniques grâce à leurs processus d’évaluation des risques et sont des acteurs
essentiels pour réduire le déséquilibre dans la transmission et la compréhension des
informations entre les parties impliquées dans le marché. Notons que dès la fin du siècle dernier,
les chercheurs ont commencé à considérer le potentiel du secteur financier comme une force
motrice durable (Jeucken et al., 1999 ; Marcel 2001).
Ils sont capables d’apporter des changements substantiels, même en modifiant légèrement les
stratégies commerciales. Dans ces conditions, la transparence de l’information, l’allocation
éthique et durable des actifs et les approches participatives dans les processus décisionnels sont
des initiatives qui pourraient conduire à d’autres comportements commerciaux durables. En
outre, ces initiatives auraient des effets positifs sur les parties prenantes influencées. Les
épargnants, par exemple, ne savent généralement pas ce qu’il advient de leur capital après la
signature d’un contrat où apparaissent principalement les taux d’intérêt et d’autres variables
économiques. Nul doute que la transparence renforce la conscience sociale, suivie par des
changements de comportement.
1.2 Les investissements socialement responsables
Historiquement, les investissements socialement responsables (ISR), souvent appelés
investissements éthiques (IE), ont été créés par des groupes religieux américains au cours du
19e siècle. Ces groupes limitaient leurs investissements aux entreprises qui agissaient
conformément à leur morale (Sparkes, 2001). Depuis les années 70, diverses définitions de l’IE
et l’ISR ont vu le jour. En 2002, Sparkes mentionnera que l’investissement éthique (IE) pouvait
être remplacé par « l’investissement socialement responsable » ; c’est le même type
d’investissement qu’une tendance récente tend à remplacer l’IE par l’ISR (Sparkes, 2002).
Deux ans plus tard, Sparkes et Christopher Cowton (2004) conviendront que, malgré quelque
nuance entre les deux termes, ils pouvaient les utiliser de manière similaire, car les différences
n’étaient pas suffisamment importantes pour les différencier (Sparkes et Cowton, 2004).
Un constat ; de nos jours, nous n’avons pas une définition concrète et universelle de l’ISR.
Récemment, certains chercheurs ont certes rédigé des définitions, mais aucune n’a été acceptée
comme étant la définition officielle. Cela peut être dû à l’absence de réglementation en la
matière. Afin d’être précis dans nos affirmations, nous avons regroupé ci-après les définitions.
Tableau 1 : Tableau des définitions.
AUTEURS DÉFINITIONS
« une philosophie d’investissement qui combine des objectifs
(Sparkes, 2002,)
éthiques ou environnementaux avec des objectifs financiers »
« une pratique consistant à investir dans des entreprises qui
Lewis et al. (1998) satisfont à une série de critères éthiques négatifs et à des critères
positifs »
« une discipline d’investissement qui prend en compte les critères
US SIF « Le forum pour
environnementaux, sociaux et de gouvernance d’entreprise (ESG)
l’investissement durable
pour générer des rendements financiers compétitifs à long terme
et responsable » (2019)
et un impact sociétal positif »
« ce sont ceux qui combinent les objectifs financiers des
investisseurs avec leurs préoccupations concernant les questions
Statista (2018)
environnementales, sociales et de gouvernance d’entreprise »
(ESG)
Source : Auteurs

214
www.ijafame.org
Marouane NAKHCHA & Mamdouh TLATY. La finance durable et les investissements socialement responsables au Maroc :
défis et opportunités

1.2.1 Relation entre la finance durable et les investissements


socialement responsables
1.2.2.1 L’impact de la propriété et des investisseurs sur la durabilité environnementale
Ainsi, des études comme celles de Li et Lu (2015), Wang et Jin (2007) et Vernon (1998) ont
exploré l’impact de différents types de propriété et d’investisseurs sur la durabilité
environnementale. Ces auteurs ont découvert que les actionnaires institutionnels favorisent les
entreprises publiques chinoises avec des dépenses environnementales élevées, établissant un
lien positif entre la propriété institutionnelle et la responsabilité environnementale dans le
secteur public. Cependant, cette tendance n’est pas observée dans les entreprises privées. Wang
et Jin (2007) ont révélé que la propriété étatique et familiale n’influence pas significativement
la performance environnementale, tandis que la propriété des collectivités locales et des
investisseurs étrangers peut avoir un impact négatif. Vernon (1998) va constater que les
investisseurs internationaux tendent à mener des activités polluantes dans des pays à
réglementation environnementale laxiste. Néanmoins, toutes ces études mettent en lumière la
complexité des relations entre les structures de propriété, les investissements sociaux, et la
durabilité financière, et l’importance de la régulation pour promouvoir des pratiques durables.
1.2.2.2 La finance durable et les investissements socialement responsables - une
synergie vers un avenir plus durable
Ipso facto, la relation entre la finance durable et les investissements socialement responsables
(ISR) est profondément ancrée dans l’intégration des considérations environnementales,
sociales et de gouvernance (ESG). Les ISR, en se concentrant sur des investissements qui
génèrent des impacts positifs sur la société et l’environnement, s’alignent étroitement avec les
objectifs du développement durable. Cette synergie est illustrée par des initiatives telles que la
Slow Money Alliance, mentionnée par Lagoarde-Segot (2019), qui démontre comment la
finance durable peut remodeler la relation entre l’accumulation et l’allocation de capital, en
internalisant les externalités sociales et environnementales. En outre, Faniel et Swaen (2021)
souligneront l’évolution de la finance traditionnelle vers une approche plus durable, marquée
par l’adoption de critères d’exclusion et l’intégration des aspects sociaux et environnementaux.
Ces pratiques ne se contentent pas de générer des profits, mais contribuent également de
manière positive à la société et à l’environnement, renforçant ainsi la relation intrinsèque entre
la finance durable et les ISR vers une économie plus responsable et pérenne.
Tableau 2 : synthèse de la relation entre la finance durable et l’ISR
Relation avec la finance
Auteurs Principales constatations
durable et l’ISR
Influence positive des actionnaires
Relation positive dans le
Li et Lu institutionnels sur les dépenses
secteur public, neutre dans
(2015) environnementales des entreprises publiques,
le privé.
mais pas pour les entreprises privées.
Propriété étatique et familiale sans impact
Wang et Jin significatif sur la performance Relation neutre ou négative
(2007) environnementale, impact négatif des selon le type de propriété.
collectivités locales et investisseurs étrangers.
Investisseurs internationaux exploitent des Relation négative due à
Vernon
réglementations environnementales laxistes, l’exploitation des
(1998)
délocalisant des activités polluantes. réglementations faibles.

215
www.ijafame.org
ISSN: 2658-8455
Volume 4, Issue 6-1 (2023), pp. 208-222.
© Authors: CC BY-NC-ND

Hikkerova et Peu de sensibilisation aux pratiques de finance


Relation indirecte, manque
Bortolloti durable dans le secteur bancaire, indiquant un
de connexion pratique.
(2013) décalage entre théorie et pratique.
Finance durable dans l’investissement à Relation positive, réoriente
Lagoarde-
impact, relation circulaire entre épargnants, le capital vers des
Segot (2019)
entrepreneurs et investisseurs. investissements conscients.
Évolution de la finance traditionnelle vers la Relation positive, transition
Faniel et
finance durable, intégrant des critères sociaux vers une économie plus
Swaen (2021)
et environnementaux. responsable.
Source : Auteurs
Ce tableau offre une vue d’ensemble de la manière dont différents auteurs perçoivent la relation
entre la finance durable et l’ISR, en soulignant à la fois les aspects positifs, neutres et négatifs.

2. La finance durable au Maroc : état des lieux


Ainsi, environ 400 millions d’obligations durables ont été émises en 2020 (Amzil et Lazaar,
2021). Cependant, les émetteurs de ces fonds ont réagi de manière plutôt prudente depuis lors.
Indéniablement, la pandémie a affaibli les forces qui poussaient à l’émission d’obligations, et
ce malgré des conditions avantageuses sur le marché de la dette, caractérisées par des taux
d’intérêt exceptionnellement bas, une situation sans précédent. Il ne fait aucun doute que les
partenariats entre les gouvernements et les entreprises doivent être différés afin de réviser le
plan de relance et d’orienter davantage les investisseurs vers des actifs plus durables. De
manière plus générale, les gouvernements ont l’obligation de diriger les investissements vers
une économie durable et verte, en introduisant le concept de « durabilité » comme une variable
centrale dans l’équation du risque financier.
2.1 L’engagement étatique
Dans cette perspective, les pouvoirs publics ont entrepris certaines stratégies sectorielles
importantes et proactives qui intègrent les aspects environnementaux dans les secteurs clés de
l’économie nationale, et ce conformément aux engagements internationaux pris lors du
« Sommet de la Terre de Rio de Janeiro » (1992-2012) et « de Johannesburg » (2002).
De même, lors de la 2e conférence sur la mise à niveau environnementale en 2005, le souverain
a souligné que « Le développement humain et la protection de l’environnement doivent être un
critère important pour les politiques et les stratégies d’investissement et de développement
économique » (Message royal, 2005).
Ainsi, pour réaffirmer son engagement au développement durable, le Maroc a pris l’initiative
d’adopter la (loi-cadre 99-12, 2014). Selon cette loi, « le développement durable est une valeur
fondamentale » à partager par tous les membres de la société. Indépendamment de
l’engagement étatique, les entités privées sont requises d’incorporer les dimensions
environnementales et de développement durable dans les dispositifs de production, en
impliquant les parties prenantes dans des approches respectueuses de l’environnement,
d’estimer les conséquences écologiques de leurs activités, et d’établir la nécessité d’une
communication claire et accessible concernant leurs actions vis-à-vis de l’environnement.
Dans le cadre de l’investissement responsable, de nombreuses réformes politiques,
institutionnelles, juridiques et socio-économiques ont été instaurées. Celles-ci visent à
améliorer les services publics et ont encouragé les investissements. Ces réformes concernent
aussi le droit du travail, le droit de la personne grâce à l’Instance de réconciliation équitable, la
lutte contre la corruption et une initiative nationale du « développement humain ». Toutes ces
initiatives visent à encourager les investissements directs étrangers (IDE). Effectivement et
216
www.ijafame.org
Marouane NAKHCHA & Mamdouh TLATY. La finance durable et les investissements socialement responsables au Maroc :
défis et opportunités

selon les données du Rapport sur l’Investissement dans le Monde 2022 publié par la CNUCED,
les IDE à destination du Maroc ont connu une augmentation significative en 2021, atteignant
2,1 milliards de dollars américains. Cette valeur représente une augmentation de plus de 50 %
en une année2.
Concomitamment, Le Maroc n’a pas cessé de construire des infrastructures, de moderniser les
institutions et de lancer de grands projets en faveur du développement durable, comme le projet
solaire « Noor » lancée en 2015 tout en accueillant la COP22 (novembre 2016) et en soutenant
les actions entreprises à l’échelle mondiale pour faire face aux perturbations climatiques.
Néanmoins, nous constatons que certains dysfonctionnements entravent la transition vers une
économie durable par manque de coordination entre les différentes institutions, voire
l’incapacité des institutions propres au pays à entreprendre des actions de « développement
durable » (marchés publics durables, responsabilité environnementale nationale…).
Toutefois, en ce qui concerne le domaine de la gestion environnementale en entreprise, de
nombreux défis sont à surmonter. D’une part, il y a le non-respect des réglementations
existantes, notamment la législation du travail (travailleurs non déclarés, salaires minimums,
discrimination sexuelle, travail des enfants, etc.) et l’évasion fiscale et la fraude. D’autre part
perdure l’irrespect des normes environnementales et de la responsabilité sociale vis-à-vis des
normes internationales élevées. Enfin, la place de l’informalité dans l’économie contribue à
entraver davantage la création d’une économie socialement responsable.
Néanmoins, des dispositions réglementaires de la finance durable existent et ne demandent qu’à
être appliquées.
2.2 Dispositif réglementaire de la finance durable au Maroc.
Dans cette section, nous présenterons succinctement le cadre juridique et réglementaire de
l’économie circulaire verte :
❖ « la Biodiversité » Dahir du 10 octobre 1917 ; « sur la conservation et l’exploitation des
forêts »
❖ « La loi sur le recyclage des déchets » Dahir n° 1-06-153 du 22 novembre 2006 portant
promulgation de la loi n° 28-00 : « relative à la gestion des déchets et à leur élimination »
❖ « La loi sur les énergies renouvelables » Dahir n° 1-10-16 du 11 février 2010 portant
promulgation de la loi n° 13-09 : « relative aux énergies renouvelables a permis au Maroc
de mettre en place sa politique ambitieuse de production d’énergie solaire et éolienne »
❖ « La loi sur l’utilisation des sacs jetables en plastique » Dahir n° 1-10-145 du 16 juillet
2010 portant promulgation de la loi n° 22 – 10 : « relative à l’utilisation des sacs et sachets
en plastique dégradable ou biodégradable »
❖ « La loi sur les aires protégées » Dahir n° 1-10-123 du 16 juillet 2010 portant
promulgation de la loi n° 22-07 « relative aux aires protégées ».
❖ « La constitution marocaine a consacré la politique ancestrale de protection de
l’environnement en inscrivant dans son article 31 le droit à un environnement sain et au
développement durable ».
❖ « La Charte Nationale de l’Environnement et du développement Durable »
❖ « La Loi Cadre Portant Charte Nationale de l’Environnement et du développement
Durable et dont le premier texte a été élaboré en 2012 et promulgué pour contenir à ce jour
sept principes ». À savoir : « (a) l’intégration (b) la territorialité (c) la Solidarité (d) la
précaution (e) la prévention (f) la responsabilité et (g) la participation ». Ce texte consacre
« la Charte Nationale ».
Ainsi, le Maroc dispose à n’en pas douter d’un cadre législatif pour la finance durable. Mais
qu’en est-il de l’investissement durable ?

2
https://www.tradesolutions.bnpparibas.com/fr/implanter/maroc/investir

217
www.ijafame.org
ISSN: 2658-8455
Volume 4, Issue 6-1 (2023), pp. 208-222.
© Authors: CC BY-NC-ND

3. L’investissement socialement responsable au Maroc : état des lieux


3.1 Aperçu de l’ISR
Préalablement à la COP 22, les régulateurs, les superviseurs et « le Groupement Professionnel
des Banques du Maroc » (GPBM) ont fait de la banque verte une priorité. À ce titre, ils se sont
engagés s’engageant à accorder aux clients des facilités de prêt liées à l’efficacité énergétique,
à la gestion de l’eau, à des facilités de prêt pour la récupération des déchets et à l’émission
« d’obligations vertes » respectueuses de l’environnement.
Profitant de cette facilité, Masen (une société solaire marocaine, devenue une société d’énergie
durable en 2016) émettra son premier « titre d’obligation verte » sur le marché financier
marocain. Le montant s’élevait à 1,15 milliard MAD. Garantie par l’État et certifiée par « la
Climate Bond Initiative », l’obligation sera financée par la Caisse marocaine des retraites,
Atijariwafa Bank, Al Barid Bank, la Caisse marocaine des retraites et la Société centrale de la
réassurance concernera trois projets « photovoltaïques » ; notamment celui d’Ouarzazate. Elle
sera suivie d’une émission de 500 millions de dirhams (50 millions d’euros) par BMCE Bank
et bénéficiera d’une évaluation de la qualité sociale et environnementale par Vigeo.
L’émission s’adressait à des « investisseurs qualifiés » de droit marocain, à savoir ; « les
Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières (OPCVM) unifiées, les sociétés
financières, les établissements de crédit, les compagnies d’assurance et de réassurance, la
Caisse de dépôt et de gestion, les institutions de retraite »3, et des fonds dédiés à des initiatives
visant à développer des sources d’énergie renouvelable ou à améliorer l’efficacité énergétique.
Ces ressources financières seront utilisées pour soutenir des projets liés à la production
d’énergie verte.
Depuis, ce type d’émissions n’a cessé d’augmenter. Par exemple, en 2017, L’IFC (International
Finance Corporation) a alloué 100 millions d’euros à la première émission « d’obligations
vertes » libellées en euros par la Banque Centrale Populaire (BCP) pour soutenir des initiatives
durables et respectueuses de l’environnement au Maroc. Ces fonds seront utilisés pour
encourager les investissements dans des domaines tels que les énergies renouvelables,
l’efficacité énergétique, la gestion des déchets, la préservation des ressources naturelles, et
d’autres projets visant à réduire l’impact environnemental et favoriser un développement
durable. Pour sa part, Proparco (filiale de l’Agence française de Développement [AFD])
investira 35 millions d’euros. Les obligations permettent à la banque centrale populaire (BCP)
de refinancer à terme certains projets d’énergie renouvelable. Pareillement, La Caisse de dépôt
et de gestion (CDG), qui s’efforce de décarboniser son portefeuille, a lancé un projet d’efficacité
énergétique pour les bâtiments publics et l’éclairage avec « l’African Investor Network for Zero
Carbon Africa ».
3.2 La participation et l’engagement des institutions et entreprises marocaines
dans l’ISR
Dans cette perspective, plusieurs acteurs clés tels que l’Agence pour la promotion et le
développement de la région nord, l’Office national des pêches, l’Office des phosphates, le
Crédit Agricole du Maroc, l’Association des cimentiers du Maroc (ACM), Lydec et Masen
collaborent pour développer les sources d’énergie solaire, éolienne, hydraulique et la biomasse.
L’objectif est de parvenir à un « mix énergétique » sur le territoire marocain de 52 % d’ici 2030.

3
http://www.sgg.gov.ma/portals/0/AvantProjet/35/Loi_APE.pdf
218
www.ijafame.org
Marouane NAKHCHA & Mamdouh TLATY. La finance durable et les investissements socialement responsables au Maroc :
défis et opportunités

Depuis la COP 22, le secteur financier s’est activement engagé pour accompagner et assurer le
financement vers une économie davantage durable. Des stratégies d’investissement socialement
responsable (ISR) ont été développées, mettant en place des critères de filtrage positifs ou
thématiques. Toutefois, il est indéniable que des progrès sont encore nécessaires pour mesurer
l’attractivité du secteur financier envers l’ISR et que le marché financier vert au Maroc en est
encore à ses débuts et requiert une impulsion plus soutenue pour poursuivre son développement
et sa progression.
Pour rendre le secteur financier plus attractif, les initiatives prévues dans la feuille de route
devront intégrer de façon plus homogène la RSE en les engageant davantage dans le
« développement durable ». De plus, le respect de la RSE devrait devenir un critère obligatoire
pour le crédit et le financement de projets. Pareillement, la mise en œuvre de la RSE ne devrait
plus se limiter aux grandes sociétés de production ou aux multinationales. Il est nécessaire
d’encourager une implication plus uniforme d’une entreprise à l’autre. À l’heure actuelle, du
moins au moment où nous rédigeons cette étude, il n’existe aucune obligation de publier un
rapport sur « la gestion des risques sociaux et environnementaux ».
L’État devrait également montrer l’exemple en termes de RSO, notamment en assurant l’équité
et l’égalité à l’embauche, en optimisant la performance énergétique des constructions, la
responsabilisation dans la passation des marchés et la sélection de prestataires de services
responsables.

4. Les défis et les opportunités de la finance durable et de l’ISR au Maroc


Comme nous l’avons mentionné précédemment, les préoccupations liées au développement
durable sont devenues un enjeu majeur pour le Maroc. Le royaume a mis en place de
nombreuses initiatives qui nécessitent la coopération de multiples acteurs et suscitent des
débats.
Dans un monde en constante évolution et marqués par l’incertitude, les acteurs publics
accordent une grande importance à l’innovation. Effectivement, celle-ci a permis de mieux
répondre aux besoins des populations et de la planète et de se distinguer de la concurrence en
surmontant les conséquences liées aux changements. Elle ne se limite pas à être la clé du succès
économique, mais constitue également une solution pour un monde durable. Dans ce contexte,
de nombreux produits financiers innovants ont émergé au Maroc, tels que les obligations vertes,
les portefeuilles 2.0, les fintechs, le crowdfunding, et bien d’autres. Cela témoigne du rôle
important que la place financière marocaine joue dans le domaine de la durabilité.
Manifestement, elle dispose de nombreuses opportunités pour soutenir la transition vers une
économie plus durable.
Les questions de durabilité représentent à la fois le présent et l’avenir de la société. Comme le
souligné Anthony Miller, responsable des affaires économiques à la CNUCED, « il n’est pas
possible d’avoir une entreprise prospère sur une planète qui ne l’est pas ». Même les acteurs
les plus puissants qui dominent le marché mondial, tels que les GAFAM, dépendent fortement
des matières premières et des ressources énergétiques qui sont limitées. Afin de suivre les
tendances actuelles du marché en matière de transparence environnementale, le secteur
financier marocain doit comprendre comment intégrer les enjeux de durabilité et les
changements climatiques dans le processus de prise de décision en matière d’investissement et
de décisions financières.

Actuellement, la finance durable au Maroc comprend :

219
www.ijafame.org
ISSN: 2658-8455
Volume 4, Issue 6-1 (2023), pp. 208-222.
© Authors: CC BY-NC-ND

a. La finance verte ; celle-ci englobe les opérations financières qui soutiennent activement
la transition énergétique et contribuent à atténuer les effets des perturbations
climatiques.
b. La finance solidaire : le financement d’activités socialement utiles,
c. l’investissement socialement responsable : les gestionnaires de portefeuille intègrent les
critères ESG dans le management de leurs actifs.
Nul doute que les entités financières marocaines, en adaptant leur profil d’investissement, ont
la capacité de canaliser l’investissement privé et de le réorienter vers des technologies et des
activités plus durables. Cela permettrait de favoriser la création d’une économie à empreinte
carbone réduite, résiliente face aux impacts du changement climatique et basée sur les principes
de l’économie circulaire. De plus, ces entités financières peuvent contribuer à financer la
croissance économique sur le long terme.
Dans cette perspective, l’adoption de la finance durable présente de multiples avantages pour
les entreprises marocaines engagées dans des opérations durables. Tout d’abord, elle favorise
la réduction des coûts d’exploitation en optimisant la performance énergétique, et l’emploi des
ressources naturelles et à la minimisation des déchets. Deuxièmement, elle renforce également
la réputation d’une entreprise en témoignant de son engagement envers la « responsabilité
environnementale » et sociale. Ce qui contribue à améliorer son image de marque. Enfin, la
finance durable joue un rôle actif dans la diminution des rejets de gaz à effet de serre (GES),
participant de cette façon aux efforts mondiaux de lutte contre le changement climatique.
Cependant, les entreprises doivent relever le défi du passage vers des systèmes économiques
plus durables tout en se conformant aux réglementations en vigueur et en en satisfaisant les
consommateurs et les investisseurs. Aussi, les coûts initiaux élevés peuvent-ils également
constituer un obstacle à l’adoption de pratiques durables, de même que l’insuffisance de
connaissances et de compétences requises.
Néanmoins, la réglementation de ce nouveau marché devient une priorité pour le Maroc. En ce
sens, les institutions marocaines ont mobilisé de nombreuses ressources pour élaborer tout un
environnement législatif. Des initiatives ont été prises pour fournir des critères de durabilité
environnementale applicables à toutes les activités économiques en cohérence avec les objectifs
environnementaux fixés par le Maroc, notamment la résilience face au changement du climat.
L’objectif ultime permettra aux acteurs des marchés financiers d’évaluer la durabilité
environnementale des projets ou des activités de l’entreprise dans lesquels ils investissent.
Cependant, étant donné que ces initiatives sont encore en cours, le cadre et les indicateurs de
mesure des investissements durables ne sont pas encore normalisés, ce qui contribue à créer
une certaine incertitude et affecte la confiance des investisseurs.

5. Conclusion
Notre étude a approfondi la compréhension du concept de finance durable, un phénomène qui
gagne rapidement en influence sur la scène internationale grâce à ses principes ancrés dans le
développement durable. Ces initiatives, variées dans leurs appellations, mais unifiées dans leur
vision, représentent une alternative viable et prometteuse, destinée à devenir le courant
dominant dans le domaine financier. En nous concentrant sur le Maroc, nous avons analysé la
relation entre les finances et la durabilité, et examiné les impacts positifs potentiels et le cadre
général de cette interaction.
Nous avons également discuté des principaux enjeux soulignés dans la littérature, en mettant
l’accent sur le défi de définir de manière commune et réalisable ce que sont réellement les
finances durables. Notre analyse a ainsi dressé un état des lieux de ce type de financement au
Maroc, identifiant à la fois les défis et les opportunités qui s’y présentent.
220
www.ijafame.org
Marouane NAKHCHA & Mamdouh TLATY. La finance durable et les investissements socialement responsables au Maroc :
défis et opportunités

Nul doute que la finance durable au Maroc se présente comme une opportunité majeure pour
les acteurs économiques, leur permettant de concilier croissance économique et responsabilité
environnementale.
Effectivement, ses avantages sont multiples : réduction des coûts d’exploitation, amélioration
de l’image de marque, diminution des émissions de gaz à effet de serre (GES)… Cependant,
pour optimiser ces avantages, les acteurs doivent surmonter des défis tels que les coûts de
démarrage élevés et la nécessité de développer des compétences spécifiques.
Des entreprises marocaines pionnières dans le domaine de la finance durable ont déjà prouvé
qu’il était possible de maintenir la viabilité financière tout en adoptant des pratiques durables.
Ces entreprises investissant dans des initiatives telles que l’efficacité énergétique, le recyclage,
la production d’énergie propre, la construction de bâtiments écologiques et les projets de
conservation de l’environnement contribuent ainsi à améliorer leurs performances financières
et environnementales.
Face à ces enjeux, il est essentiel que les autorités marocaines, les régulateurs et les autres
parties prenantes encouragent et facilitent cette transition vers une économie durable. Cela
implique donc l’élaboration de stratégies innovantes, la mise en place d’incitations attractives
et l’adoption de cadres réglementaires adaptés. De telles mesures non seulement stimuleront
l’adoption de la finance durable, mais contribueront également à faire du Maroc un leader dans
la lutte contre le changement climatique et la promotion d’une économie durable, résiliente et
prospère.
Dans cette perspective, nous recommandons également l’élaboration de programmes de
formation et de sensibilisation pour développer les compétences nécessaires à la gestion et à
l’investissement durables. La collaboration entre les institutions financières, les entreprises, les
universités et les organismes gouvernementaux étant décisive pour diffuser les connaissances
et les meilleures pratiques en matière de finance durable.
En adoptant une telle approche, nul doute que la finance durable au Maroc peut jouer un rôle
clé dans la préservation de l’environnement et la protection de notre planète. S’inscrivant dans
cette perspective, elle représente une voie prometteuse pour un avenir où les objectifs
économiques et environnementaux ne trouvent pas en contradiction, mais plutôt en harmonie,
contribuant à un développement durable qui bénéficie à tous.

Références

(1). Amzil, A., et Lazaar, S. (2021). Proposition d’un cadre pour la gestion des facteurs clés
de succès dans les projets d’innovation organisationnelle chez les PME. International
Journal of Accounting, Finance, Auditing, Management and Economics, 2 (3), 406-420.
(2). Brooksworth, F., Mogaji, E. et Bosah, G. (2022). Marketing de la mode dans les
économies émergentes : Une introduction. In Fashion Marketing in Emerging
Economies Volume I : Brand, Consumer and Sustainability Perspectives (pp. 3-20).
Cham : Springer International Publishing.
(3). Doh, JP, Littell, B., et Quigley, NR (2015). RSE et durabilité dans les marchés
émergents : influences sociétales, institutionnelles et organisationnelles. Dynamique
organisationnelle, 2 (44), (112-120)
(4). Faniel, P., et Swaen, V. En cette période de crise Covid-19, quelles opportunités offre
la finance durable?.
(5). Fayolle, A. (2023). L’investissement responsable, une boussole pour une économie plus
durable. Servir Alumni de l’ENA et de I’INSP, 520 (1), 32-35.
(6). Hikkerova, L., & Bortolloti, J. (2013). Finance Durable et RSE : le cas de trois banques.
Gestion 2000, 30 (6), 79-98.

221
www.ijafame.org
ISSN: 2658-8455
Volume 4, Issue 6-1 (2023), pp. 208-222.
© Authors: CC BY-NC-ND

(7). Holroyd, A. (2020). Choisir une finance verte au service de l’Accord de Paris.
Évaluation des meilleures pratiques en matière de finance verte et d’organisation des
places financières dans l’Union européenne, Rapport.
(8). International Finance Corporaton (IFC) (2021). « Banking on Sustainability: Financing
Environmental and Social Opportunities in Emerging Markets ».
(9). Jeucken, M. (2001). Finance et banque durables : les start-up lentes gagnent du terrain.
Διαθέσιμο : http://www. durabilité en finance. com/ifi. pdf.
(10). Lagoarde-Segot, T. (2019). Sustainable finance. A critical realist perspective. Research
in International Business and Finance, 47, 1-9.
(11). Les investissements au Maroc—TRADE Solutions BNPParibas. (s. d.). Consulté
15 mai 2023, à l’adresse
https://www.tradesolutions.bnpparibas.com/fr/implanter/maroc/investir
(12). Lewis, A., Webley, P., Winnett, A. et Mackenzie, C. (1998). Morale et marchés :
quelques implications théoriques et politiques de l’investissement éthique. Choix et
politiques publiques : les limites des marchés sociaux, 164-182.
(13). Li W. et Lu X. (2015). « Institutional Interest, Ownership Type and Environmental
Capital Expenditures: Evidence from the Most Polluting Chinese Listed Firms »,
Journal of Business Ethics, DOI 10.1007/s10551-015-2616-2.
(14). Murfin, J., et Pratt, R. (2019). Who finances durable goods and why it matters: Captive
finance and the coase conjecture. The Journal of Finance, 74(2), 755-793.
(15). Pesqueux, Y. (2020). Culture et organisation : la référence à la notion de culture en
sciences de gestion.
(16). Sparkes, R. (2001). Investissement éthique : quelle éthique, quel investissement ?
Éthique des affaires : une revue européenne, 10 (3), 194-205.
(17). Stagars, M. (2014). Fonds d’investissement d’impact pour les marchés frontaliers en
Asie du Sud-Est : création d’une plate-forme pour le capital institutionnel, les
investissements directs étrangers de haute qualité et une politique proactive. Journal of
Asset Management, 15 (6), 347-352.
(18). Statista. (2018). Ethical Investment in Europe – Statistics & Facts. Found on Statista
https://www.statista.com/topics/3973/ethical-investments-europe/ (Consulted on
December 6th)
(19). US SIF. (2019). SRI Basics. The forum fir sustainable and responsible investment.
Found on US SIF https://www.ussif.org/sribasics (Consulted on November 16th)
(20). Wang H et Jin Y. (2007). “Industrial ownership and environmental performance:
evidence from China”, Environmental and Resource Economics, Vol. 36, N° 3, p. 255–
273. DOI : 10,100 7/s10640-006-9027-x
(21). Zsolnai, L., Boda, Z. et Fekete, L. (2019). Perspectives éthiques. Springer Pays-Bas.

222
www.ijafame.org

Vous aimerez peut-être aussi