L'art Et La Manière - Ethnographies Du Travail Artistique

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L'ART ET LA MANIÈRE : ETHNOGRAPHIES DU TRAVAIL ARTISTIQUE

Marie Buscatto

Presses Universitaires de France | « Ethnologie française »

2008/1 Vol. 38 | pages 5 à 13


ISSN 0046-2616
ISBN 2130565987
DOI 10.3917/ethn.081.0005
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-ethnologie-francaise-2008-1-page-5.htm
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Dossier : Bembo puf206986\ Fichier : Ethno_1_08 Date : 9/11/2007 Heure : 11 : 33 Page : 5

INTRODUCTION

L’art et la manière :
Marie Buscatto
ethnographies du travail artistique
Laboratoire Georges Friedmann – CNRS
Université de Paris I Panthéon-Sorbonne
[email protected]

Le travail artistique est un objet difficile à saisir, encore peu étudié malgré le fort
attrait qu’il suscite dans notre société. Souvent placé sous le registre de la « vocation »,
il échappe aux analyses classiques des sciences sociales. Empreint de sentiments pas-
sionnés et d’implications subjectives dans l’accomplissement de l’œuvre, il ne facilite
guère la distanciation. Dans la mesure où il est plutôt fluide, fuyant et parfois même
solitaire, le travail artistique rend difficile la reconstitution de ses principes collectifs
d’action, que la question soit posée en termes de « mondes de l’art » [Becker, 1982], de
« champ artistique » [Bourdieu, 1992] ou de « médiation » [Hennion, 1993].
L’usage d’un regard ethnographique nourrit l’étude du travail artistique selon des
lignes originales. Les douze contributions rassemblées ici examinent ainsi, sous des
angles nouveaux, l’activité subjective et intime de création, les pratiques de profession-
nalisation, le rapport à la vocation, la reconnaissance du « statut » d’artiste, les savoirs
artistiques ou encore les modes collectifs de production d’un son, d’un spectacle ou
d’une œuvre jugée « belle ». Consacré à des ethnographies contemporaines du travail
artistique, ce numéro donne à voir divers mondes de l’art – musique, cinéma, théâtre,
télévision, arts plastiques, cirque, Net Art. Ces textes élaborent, enfin, une discussion
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raisonnée des manières dont l’ethnographie suscite des savoirs novateurs sur l’art, au
prix d’un usage mesuré de la réflexivité 1. 1. Je tiens à remercier Anne
Monjaret et Jean-Pierre Has-
soun qui, dès l’origine, ont sou-
tenu ce projet de publication
■ L’émergence d’un nouveau regard sur le travail artistique dans la revue Ethnologie française,
et Martine Segalen qui s’est rapi-
dement jointe à eux pour en sui-
Dans un article majeur assurant un retour réflexif sur la littérature anthropologique, vre pas à pas l’élaboration. J’ai
Jean Cuisenier examinait, il y a une quinzaine d’années, tout l’intérêt épistémologique grandement bénéficié de leurs
d’une anthropologie de l’art qui, par ses seules vertus descriptives de la vie quotidienne précieuses questions, sugges-
(habillement, pratiques corporelles, arrangements architecturaux ou objets), accède tions et relectures successives.
aussi bien à l’organisation interne de pratiques artistiques qu’à leurs logiques sociales
[Cuisenier, 1989]. L’art, au même titre que les autres institutions majeures de la vie
sociale – religion, famille, organisation urbaine ou éducation –, voit ses pratiques
décrites, analysées, saisies dans leur complexité symbolique et matérielle. Sans faire du
travail artistique leur objet principal d’investigation, les recherches sur l’art abordent
de façon novatrice les manières dont sont créés, produits, interprétés, vécus, réappro-
priés les objets d’art les plus variés – masques, vases, contes, costumes, chants, sculptures
ou ouvrages tissés. La question même de leur « valeur » artistique fait également l’objet
de nombreux débats scientifiques (et politiques), notamment dans ces sociétés tradi-
tionnelles où l’art n’a pas acquis l’existence autonome que lui reconnaissent les sociétés
occidentales.
Depuis une vingtaine d’années, cette ambition guide des travaux ethnologiques
consacrés aux pratiques artistiques, et notamment à la musique qui avait d’ailleurs,
depuis longtemps déjà, fait l’objet d’un traitement particulier jusqu’à fonder l’ethno-
musicologie. La revue L’Homme a, par exemple, consacré trois de ses numéros spéciaux
à ce sujet en 2001 – « Jazz et anthropologie » –, en 2004 – « Musique et anthropolo-
gie » – et en 2006 – « Chanter, musiquer, écouter ». Un numéro spécial de la revue
Terrain de 2001 est dédié au sujet des émotions en musique. Mais si les ethnologues
ont pour habitude d’étudier l’art comme une institution socialement située, le travail

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artistique reste un objet peu abordé de manière autonome au sein de cette discipline
à quelques exceptions tels les travaux concernant le « showbiz » [Daphy, 1994], les
Folies-Bergère [Fourmaux, 2005], les modistes [Monjaret, 1998], les fans d’Elvis Presley
[Segré, 2002], les circassiens [Fourmaux, 2006], le cinéma [Grimaud, 2003] ou les
danses [Terrain, 2000].
Du côté des sociologues, de récents travaux scientifiques se sont intéressés à des
aspects fondamentaux du travail artistique. Ont ainsi été étudiées les trajectoires pro-
fessionnelles des comédien(ne)s [Paradeise, 1998] ou des musicien(ne)s [Coulangeon,
2004], l’émergence d’une « élite artiste » [Heinich, 2005], l’analyse des œuvres d’art
[Péquignot, 2007] ou l’intermittence dans le monde du spectacle [Menger, 2005]. Mais
du fait d’un usage sûr et bienvenu des méthodes « classiques » de la sociologie
– statistiques, entretiens, analyse de documents et archives pour l’essentiel – d’autres
questionnements sont restés dans l’ombre que révèle une pratique ethnographique
intensive.
Quelques travaux anciens avaient engagé une analyse scientifique des professionnels
de l’art basée sur des observations prolongées réalisées in situ. On pense ici aux travaux
d’Antoine Hennion sur les professionnels du disque [1981], d’Howard S. Becker sur
les musiciens de danse [1963 (1958)] ou de Raymonde Moulin [1967] sur les acteurs
du marché de la peinture. Comme l’expliquait alors cette dernière, « en définitive, la
nature particulière du milieu observé m’a imposé de procéder à la façon des ethnologues »
[Moulin, 1989 (1967) : 16]. Ces travaux précurseurs sont cependant restés longtemps
isolés, jusqu’à l’émergence récente de multiples travaux ethnographiques qui ont, en
les prolongeant, renouvelé aussi bien l’étude du travail artistique que les usages de la
méthode ethnographique.
Sociologues et ethnologues ont ainsi élaboré des recherches de type ethnographique
analysant le monde des professionnels de l’art, leurs modes de production des œuvres,
leurs processus de création, leurs pratiques artistiques quotidiennes, leurs réseaux de
collaboration, leurs sensations, émotions ou sentiments subjectifs. C’est ce renouveau,
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observé tant en France qu’aux États-Unis, qui a suscité notre envie de rassembler ici
ces textes qui recourent tous à l’empirie et à la réflexivité. Ils rendent compte de
manière vivante des usages et des apports de la méthode ethnographique dans l’étude
2. Ce numéro est directement lié du travail artistique 2.
au projet de recherche dont nous
avons assumé la responsabilité
(« Le travail artistique au croise-
ment des méthodes. Réflexions ■ Le travail artistique comme activité collective
épistémologiques autour de
l’ethnographie »), financé par le
programme Action Concertée À travers le concept de « monde de l’art », Howard S. Becker regarde l’art comme
Incitative « Jeunes chercheuses et « un travail, en [s]’intéressant plus aux formes de coopération mises en jeu par ceux qui réalisent
jeunes chercheurs 2004 » du les œuvres qu’aux œuvres elles-mêmes ou à leurs créateurs au sens traditionnel » [Becker, 1988
ministère de la Recherche. Ce (1982) : 21]. Or, du fait de son caractère éclaté, valorisant l’acte unique, faisant souvent
projet s’est conclu par l’organisa-
tion d’un colloque international l’objet de stratégies de déni de son caractère organisé, hiérarchique et parfois conflictuel,
les 21 et 22 septembre 2006 à La le travail artistique est difficile à saisir dans ses dimensions collectives. Au-delà des
Sorbonne dont sont issues la plu- apparences mystérieuses, inspirées, idéales qu’il projette au commun des mortels, il
part des contributions retenues gagne pourtant à être l’objet d’une « ethnologie du contemporain » [Althabe, 1990]. Fondée
dans ce numéro.
sur des observations menées dans la longue durée, cette démarche intègre les différents
paramètres de l’action qui participent de sa constitution.
Plusieurs articles font apparaître la capacité de l’ethnographie à faire émerger des
« mondes de l’art », à cerner les principes collectifs de construction de l’activité artistique
et la variété des façons de coopérer des nombreux acteurs aux différents moments de
la production artistique.
À partir de plusieurs recherches portant sur les professionnels de la télévision française
des années 1980 et 1990, Dominique Pasquier saisit les conflits entre professions « visi-
bles » (animateurs et comédiens) et professions « invisibles » (producteurs, techniciens
et réalisateurs). Elle dévoile les stratégies employées par ces dernières pour minimiser
l’importance des professions visibles et rétablir des principes hiérarchiques ou coopé-
ratifs souvent bafoués par les effets de popularité spécifiques au petit écran. Quand les

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entretiens ne donnaient accès qu’à des images lisses et enjouées des relations de travail,
les observations mettent au jour le « spectacle du travail » dans ses dimensions collectives
les plus conflictuelles, dynamiques et hiérarchiques.
Menant l’enquête sur les tournages cinématographiques aux principes hiérarchiques
également très affirmés, Camille Gaudy en repère les processus sexués de répartition
du travail, des métiers et des statuts. Monde d’apparence mixte, le cinéma est en fait
très sexué : quand les hommes évoluent plutôt dans les domaines de la création, de la
technique et de l’autorité, les femmes sont cantonnées aux rôles esthétiques et d’assis-
tanat. Les observations identifient les stéréotypes qui font des « femmes » les dépositaires
« naturels » des rôles intimes, de confidence et de séduction. Si l’usage de ces ressources
« féminines » leur assure un accès à ce monde du travail, il mine aussi les stratégies
contraires qu’elles tentent parfois de mettre en place pour dépasser leur assignation
sexuée.
Les observations, effectuées ici dans des univers très hiérarchisés, ont joué un rôle
majeur dans l’identification des principes collectifs de l’activité artistique. Comme
l’affirme Paul Atkinson à propos de son étude sur l’opéra, « it is the distinctive strength
and contribution of ethnographic fieldwork that it allowed us to understand and document those
social practices that are necessary for the collective production of art culture and performance »
[Atkinson, 2004 : 97].
La valorisation de l’inspiration individuelle, de l’unicité de l’œuvre et du registre de
la « vocation » [Heinich, 2005] tend aussi à masquer ce que des recherches empiriques
identifient sans cesse : les ressorts collectifs, tendus, conflictuels de l’acte créatif. Si
Mademoiselle K, chanteuse pop-rock, apparaît dans les médias comme une artiste
solitaire, son statut d’auteure-compositeure-interprète mettant particulièrement
l’accent sur sa force créatrice individuelle, une chronique serrée de la création de son
premier album en donne une tout autre image. Croisant une analyse musicologique
précise des différentes maquettes ayant marqué la création de l’une des chansons de
son album et une description minutieuse du rôle réciproque des différents acteurs
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évoluant en la compagnie de Mademoiselle K, Catherine Rudent nous oriente en
douceur vers l’évidence d’un travail musical collectif, négocié, multiple.

■ Accéder au cœur de la création artistique


On peut aussi, par l’usage de la méthode ethnographique, saisir de façon compré-
hensive ces moments a priori invisibles, intimes et sociaux à la fois, qui sous-tendent
l’acte artistique. L’ethnographie révèle bien les sensations, les sentiments, les émotions
qui accompagnent le travail artistique ainsi que les dimensions plus sociales qui les
organisent – principes de justification, critères de jugement, modes de transmission
notamment. On en connaît un bel exemple à travers l’ouvrage portant sur les processus
collectifs de construction du goût des belles choses où « la question du goût comme aventure
concrète et précise, inscrite dans la quotidienneté, peut être posée aussi comme expérimentation
spécifique. Pour peu qu’on lui accorde curiosité et attention : c’est l’événement culturel et social
que constitue l’expérimentation esthétique qui est l’objet de l’ethnologue » [Nahoum-Grappe,
Vincent, 2004 : 6].
Par une observation attentive aux moments les plus simples du travail artistique, on
décrit ces pratiques indicibles, flottantes ou contradictoires en construction dans la
production d’une œuvre artistique. Serge Katz repère ainsi, au fil des répétitions, les
processus intellectuels et sensibles de l’apprentissage du métier de comédien. En regar-
dant les usages du langage aux divers moments de la mise en scène de pièces de théâtre,
Serge Katz identifie les processus d’apprentissage, par le jeune comédien, de son
« métier », de ses rôles, de ses expressions physiques et verbales. Que cet usage premier
du langage soit proclamé comme essentiel, à l’image des écoles de théâtre allemandes,
ou qu’il soit plutôt nié, comme dans les écoles françaises, il n’en reste pas moins
déterminant dans la manière dont les apprentis comédiens s’imprègnent du jeu attendu,
des expressions jugées favorables, des attitudes « pertinentes ».

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Le repérage des sensations, des ressentis ou des stratégies pour masquer les réalités
du métier peut nécessiter une expérience directe de l’activité artistique par le chercheur
[Buscatto, 2005b]. Magali Sizorn, en se mettant « dans la peau » des trapézistes, a
entendu, « vu » et ressenti les manières dont se construisent les corporéités des circas-
siens. Le trapèze évoque légèreté et grâce, image savamment entretenue par les trapé-
zistes à travers leurs sourires et leurs paroles enthousiastes. Mais son expérience directe
de la trapézie a mené l’auteure à identifier leurs stratégies pour déjouer les douleurs,
les blessures, les peurs, pour faire taire leurs sensations négatives, autrement dit pour
mettre au jour les contraintes exercées sur les corps afin de les dompter dans le sens
artistique visé.
Les processus de création artistique peuvent encore être « invisibles » au regard exté-
rieur du fait de leur grande nouveauté, de leur faible lisibilité pour les acteurs eux-mêmes
ou du caractère très éclaté de l’activité, justifiant en retour l’enquête ethnographique de
longue durée. À l’image de la vidéo qui a redéfini les modalités de réalisation, d’exposition
et d’évaluation de ce qui « fait » art, Internet transforme les manières dont certains
créateurs y vivent, y façonnent et y font reconnaître une œuvre d’art. En observant
Mouchette (1996-2006), un projet développé à l’interface d’Internet et des mondes de
l’art contemporain, Jean-Paul Fourmentraux en montre les modes spécifiques de
construction. En suivant de près la construction d’une œuvre d’art sur Internet, l’auteur
en repère les modalités ambivalentes de production, entre technologie informatique, lieu
d’échange interactif et création conceptuelle. L’ambivalence de son inscription clivée
entre le réseau et la scène artistique joue d’ailleurs dans la difficile reconnaissance de
Mouchette (1996-2006) comme œuvre dans les réseaux d’art contemporains.
De 1997 à 2002, Denis Laborde a assisté à l’élaboration et à la création de Three
Tales, un opéra vidéo du compositeur minimaliste contemporain Steve Reich et de la
vidéaste Beryl Korot. Après une description précise du contenu de Three Tales, l’auteur
examine ici le rôle créatif d’un acteur invisible de ce processus et pourtant indispen-
sable à sa mise en musique : Ernst Neisel, le régisseur de l’Ensemble Modern de
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Francfort. Si ce dernier apparaît, a priori, comme le simple exécutant d’un plan d’action
bien installé, d’une routine technique et matérielle sans imagination, une observation
quotidienne et répétée de ses actions, un relevé précis des initiatives dont il fait sans
cesse preuve dévoilent, selon l’auteur, la part créative, flexible et innovante de ses
actions. Denis Laborde attribue d’ailleurs à Ernst Neisel la posture d’auteur que ce
dernier revendique au fil des rencontres avec l’observateur.
On retrouve ainsi avec bonheur la conclusion tirée par l’ethnographe Laura Grind-
staff au sujet des travaux sur les émissions de télévision : « Yet very little of the resulting
research examines daytime talk shows ethnographically, from the “inside” perspective of producers
and guests, and with an eye towards understanding how the norms and practices of the production
process itself shape and inform the talk show as text » [Grindstaff, 2002 : 34]. Le travail
artistique est rarement regardé « de l’intérieur », du point de vue de ceux et de celles
qui s’y consacrent au quotidien, dans la durée, souvent de manière peu visible. C’est
l’enquête par observations qui permet d’y parvenir.

■ De l’idéal artistique au travail « ordinaire »


Parce qu’elle ouvre à des pratiques sociales peu visibles, l’ethnographie construit un
regard privilégié sur leurs réalités « micro ». Mais elle fonde aussi, grâce à la multipli-
cation des « jeux d’échelle » [Revel, 1996], le repérage de phénomènes sociaux plus
larges. En d’autres termes, l’ethnographie se révèle un outil pertinent pour identifier
des mouvements de production, de reproduction et de transformation des rapports
sociaux et les décrire dans leurs réalités les plus fines. On peut ainsi multiplier les
niveaux d’analyse du social, de l’analyse micro-sociale d’une activité professionnelle
donnée au repérage d’un fonctionnement macro-social [Burawoy, 2003].
Un exemple particulier de cette capacité de l’ethnographie à articuler les différents
niveaux de construction du social serait ici la mise sous tensions du statut de l’artiste

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et de l’idéal artistique. Lors de notre enquête ethnographique dans le « monde du jazz »


français, le travail musical se présentait comme une forme aboutie d’expression de
« soi » envahissant les différentes sphères de la vie privée et professionnelle. Du fait de
cet « idéal » partagé par la grande majorité des musicien(ne)s professionnel(le)s de jazz,
leur expérience quotidienne était semée de nombreuses tensions personnelles et pro-
fessionnelles. Alors qu’une élite musicale apparaissait soumise à une forte « psychologi-
sation sociale », l’essentiel des musicien(ne)s situé(e)s aux échelons les moins élevés de
la hiérarchie musicale, sociale et économique élaborait de nombreux compromis, par-
fois résignés, parfois assumés, entre expression de « soi » et réalisation d’un métier
musical bien ordinaire [Buscatto, 2004].
Les « musiciens ordinaires » toulousains observés par Marc Perrenoud sont plus sou-
vent en activité sur les scènes de bal, lors d’animations commerciales ou dans les bars
d’ambiance que programmés dans les festivals et sur des scènes musicales reconnues.
On pense ici au chanteur de bal qu’incarne Gérard Depardieu à l’écran dans le film
Quand j’étais chanteur de Xavier Giannoli. Ces musicos « font le métier », développent
des ressources locales, des savoirs professionnels très particuliers, des réseaux faits de
solidarités réciproques. Ils (et rarement elles) s’éloignent du registre de la vocation
classiquement associé au travail artistique pour rejoindre celui du travail indépendant
et de l’artisanat local. On les rapproche d’ailleurs sans peine des musiciens de blues de
Chicago observés par David Grazian. Confrontés à une intense commercialisation des
scènes blues de Chicago, ceux-ci voient leur désir d’expression personnelle et de
créativité sérieusement mis à mal. Ils développent des stratégies rhétoriques, musicales
et spatiales pour continuer à répondre au mieux à leur imaginaire artistique, même
s’ils doivent sans cesse jouer ces morceaux de musique qu’ils apprécient peu et que
réclame le public, la fameuse « Set List From Hell ».
L’entrée dans le monde quotidien des artistes, réputés et « ordinaires », aide à saisir
aussi bien les manières dont les individus vivent, façonnent et affirment leur statut
d’artiste que les processus de définition d’une activité comme « artistique ». Les ambi-
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valences concernant la qualification de l’œuvre Mouchette (1996-2006) rejaillissent en
retour sur son créateur. Le caractère ambigu, changeant et peu stabilisé de la création
rend difficile sa reconnaissance comme œuvre d’art. L’anonymat de l’artiste, nécessaire
pour détacher le produit informatique de ses autres usages – journal intime, blog
d’expression ou site « voyeur » –, rend l’œuvre peu lisible dans les mondes de l’art. Les
qualifications de l’artiste, de l’œuvre d’art et du travail artistique apparaissent bien jouer
de manière réciproque. On rejoint la formulation qu’en a faite Bruno Péquignot dans
son récent ouvrage, « l’artiste n’existe pas avant l’œuvre, de même que l’œuvre n’existe pas
avant l’artiste, la production de l’un est production de l’autre » [Péquignot, 2007 : 32].
Que se passe-t-il encore pour les artistes lorsqu’ils et elles réalisent des interventions
dans des mondes aux logiques a priori étrangères aux réalités artistiques ? Selon les
observations menées par Jean-Paul Filiod, les artistes intervenant dans des écoles mater-
nelles voient leurs identités, leurs compétences, leurs savoirs se diversifier, se complexi-
fier, se brouiller par le seul contact avec ce territoire professionnel nouveau. Toujours
artistes dans leur esprit, plutôt pédagogues dans leurs actes, les trajectoires et les défi-
nitions de soi se multiplient entre investissements identitaires et renégociations des
définitions de leurs actes professionnels. On retrouve des tensions identitaires proches
dans le monde du « nouveau cirque ». Si ce dernier a bien, selon Magali Sizorn,
accompli un rapide processus d’artification sous l’impulsion des politiques publiques et
des circassiens désireux de voir reconnaître leur originalité créatrice, ces artistes sont
sans cesse soumis à des tensions et à des ambivalences difficiles à résoudre. Le « nouveau
cirque » rejette sans ambiguïté une parenté avec les pratiques gymniques ou les spectacles
commerciaux. Il est d’abord vécu comme une pratique artistique du fait de sa capacité
créative et de sa visée esthétique. En revanche, le rapprochement avec les arts « savants »
crée d’autres difficultés à ceux et à celles qui se préfèrent « artisans du spectacle » et se
sentent mis en danger par le poids et la présence d’acteurs publics très impliqués.

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■ Adopter la « voie » de la réflexivité


Soumis à une forte « ambivalence épistémologique » de leur matériau [Schwartz, 1993],
les ethnographes peuvent s’extraire de toute référence aux repères scientifiques positifs.
Certain(e)s ethnologues, notamment anglo-saxons – Norman Denzin [1999], James
Clifford et George E. Marcus [1986] ou Patricia Clough [1992] –, ont choisi la voie
« post-moderne » faisant de chaque écrit aussi bien un travail scientifique qu’une œuvre
littéraire qui met le « Je » de l’auteur(e) au cœur de la restitution menée par le ou la
chercheur(e). L’argumentation tient ici autant à la nature supposée de l’enquête, trop
subjective pour être objectivée, qu’à l’impossibilité de saisir la complexité du monde.
L’anthropologue vise à restituer la diversité de ces « voix » présentes dans les sociétés
étudiées, pouvant ainsi en retour éliminer le caractère fondamentalement inégalitaire
du travail anthropologique qui privilégierait « naturellement » les points de vue domi-
nants. « An existential ethnography offers a blueprint for cultural criticism, a criticism grounded
in the specific worlds made visible in the ethnography. It understands that there can be no
value-free, objective, dispassionate, value-neutral account of a culture and its ways » [Denzin,
1999 : 512].
Mais une autre voie possible est la construction d’une manière scientifique réflexive,
« that is, an approach to participant observation that recognizes that we are part of the world we
study » [Burawoy, 2003 : 655]. La production de résultats sociologiques et ethnolo-
giques s’appuie alors sur un long travail réflexif élaboré aux différents moments de
l’enquête [Burawoy, 2003 ; Buscatto, 2005a ; Weber, 2001]. Entre engagement et dis-
tanciation [Elias, 1956 ; Hughes, 1971], l’enquêteur transforme de nombreuses expé-
riences humaines, souvent intenses et très personnelles, en analyses raisonnées.
« Ethnography, therefore – like every non standardized type of social research, if it wishes to
meet the conditions of unequivocal basis research – must now and, above all, in the longer term
be marked by a fundamental scepticism about the quality of the data provided by others » [Honer,
2004 : 114].
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Les différents articles font apparaître quelques façons de penser la définition d’un
« modèle réflexif » dans l’étude du travail artistique autour des questions de l’engage-
ment/distanciation, de la construction de la relation d’enquête ou encore du croisement
du matériau ethnographique avec des « données » élaborées par d’autres moyens
– analyse des œuvres produites, des discours recueillis par entretien ou des réponses à
des questionnaires.
Dans leurs stratégies d’enquête, les chercheur(es) doivent savoir s’adapter aux spé-
cificités du système social étudié, composer avec les attentes des observé(e)s sous peine
de se voir exclu(e)s du terrain ou de ne pas en saisir les subtilités, les finesses, les réalités.
Gary Alan Fine et Julia Rothenberg engagent une analyse réflexive des enjeux ethno-
graphiques propres aux recherches sur les mondes de l’art. Partant d’une enquête menée
auprès de plasticien(ne)s, de collectionneurs, de commissaires d’expositions et de gale-
ristes, les auteurs discutent au plus près les manières dont certaines normes et réalités
sociales spécifiques influencent en retour les conditions d’accès au « terrain », de réa-
lisation de l’enquête et d’interprétation des « données » recueillies. Si l’ethnographe
néglige les rivalités, les hiérarchies, les incessants jeux de réputations, le caractère éclaté
de l’activité créatrice ou les enjeux esthétiques, il ou elle peut expérimenter de sérieuses
difficultés : de l’arrêt brutal d’échanges informels à l’« erreur » d’interprétation des
propos et des pratiques observés. Le travail artistique se réalisant selon des processus
éclatés, personnalisés, fluides et parfois même virtuels, les mondes de l’art étant souvent
très fermés au regard extérieur, ces enjeux méthodologiques sont particulièrement
saillants pour son observateur.
À travers l’exemple de leur dernière enquête sur les répertoires des musiciens de jazz
états-uniens, Howard S. Becker et Robert R. Faulkner reprennent, pour le déconstruire
avec élégance, le débat sur l’éventuelle supériorité de l’observation participante. Ces
sociologues-musiciens, pianiste pour le premier, trompettiste pour le second, adoptent
la posture d’insider du simple fait de leur pratique intensive du jazz. Cette position
s’avère par moments une aide précieuse dans l’identification de nouveaux savoirs,

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L’art et la manière : ethnographies du travail artistique 11

enjeux et questions en raison de leur grande familiarité avec le « terrain ». Mais elle
limite aussi parfois l’enquête proprement dite et/ou l’analyse dans la mesure où elle
produit des préjugés, des convictions, des idées toutes faites liées à cette même posture.
La question n’est plus d’être, ou non, un insider. Il s’agit plutôt de savoir choisir la
posture adaptée au terrain étudié, aux questions posées, d’une part, et de réussir à créer
un bon équilibre entre engagement et distanciation d’autre part. Les débats visant à
asseoir l’une ou l’autre méthode comme « meilleure », dans l’absolu, en dehors des
objets choisis et des questions posées, apparaissent bien stériles et inutilement polémi-
ques. « Chaque méthode a ses avantages et ses inconvénients, mais affirmer que seule l’observation
participante peut rendre compte de la signification d’un univers social ou s’approcher de la “réalité”
de ses membres me semble erroné et contribuer à professer de faux principes méthodologiques »
[Duneier, 2006 : 154].
Les textes de ce numéro d’Ethnologie française exposent ainsi la palette des postures,
des stratégies et des relations d’enquête possibles dans les mondes de l’art afin d’exa-
miner des objets empiriques et des questionnements théoriques originaux. David
Grazian, dans son étude sur les musiciens de blues de Chicago, nous fait « revivre » les
stratégies qu’il s’est évertué à adopter pour construire des positions d’observation
favorables à son enquête. Avec les touristes, les habitués ou le personnel du bar, il
s’engage dans des relations sociales amicales et chaleureuses, créant des liens utiles
jusque dans l’accès aux musiciens. Afin de mieux saisir le rapport intime et social de
ces musiciens entre eux certes, mais aussi avec leur propre pratique musicale, David
Grazian s’initie au blues sur scène, soirée après soirée, découvrant les tensions, les
normes et les plaisirs de ces musiciens soumis à de nombreuses contraintes commerciales
et sociales largement dénigrées.
Magali Sizorn suit le même chemin méthodologique. Elle prend des cours de
trapéziste et cerne alors le douloureux rapport au corps de ces circassiens pourtant si
souriants, leurs stratégies de gestion de cette souffrance dans l’acte créatif visant à la
« dépasser ». Jean-Paul Filiod, lui, s’est plutôt appuyé sur un usage informé de la vidéo
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ainsi que sur des « entretiens d’autoconfrontation vidéographique » élaborés avec les artistes
observés pour saisir la multiplicité de leurs pratiques et de leurs identités. Quand Marc
Perrenoud ancre son analyse des musicos dans sa propre pratique de musicien ordinaire,
Dominique Pasquier affiche son statut de chercheure CNRS pour négocier des entrées
multiples au cœur des conflits professionnels à l’œuvre dans le monde de la télévision
des années 1990. Camille Gaudy se fait embaucher comme stagiaire sur les plateaux
de cinéma et, du fait de sa propre position de femme dans un monde d’hommes, en
perçoit et en analyse plus clairement les enjeux sexués. Jean-Paul Fourmentraux ou
Catherine Rudent multiplient plutôt les positions d’observation entre analyse technique
de l’œuvre d’art observée – Mouchette (1996-2006) pour l’un, l’album de Mademoi-
selle K pour l’autre –, collecte d’informations sur la trajectoire et le positionnement
de l’artiste en construction et rencontres répétées avec les protagonistes du milieu
observé. Denis Laborde développe une double posture d’insider, à la fois membre de
l’équipe technique de l’Ensemble Modern de Francfort qui participe à la création de
l’opéra contemporain Three Tales et ancien musicien professionnel qui a, par le passé,
dirigé des réalisations semblables en tant que chef d’orchestre. Serge Katz s’appuie
encore sur la comparaison internationale qui, en mettant en exergue les différences
entre écoles de théâtre, en révèle les similarités dans l’usage du langage comme mode
d’apprentissage des comédiens.
Ce ne sont bien sûr que quelques exemples d’une discussion plus vaste sur les
manières dont l’ethnographe réussit à « entrer » et à « rester » sur le terrain de manière
favorable et à se prémunir au mieux du « piège de la surinterprétation » [Olivier de Sardan,
1996 : 55 ; Lahire, 1996]. Le caractère à la fois collectif et éclaté, hiérarchisé et indi-
vidualiste, coopératif et concurrentiel des mondes de l’art oblige l’ethnographe au
développement de stratégies fines de réalisation, de recueil et d’interprétation de ses
observations. Mais ces spécificités empiriques ne doivent pas faire oublier que ces
questions épistémologiques se posent de manière proche dans le traitement d’objets

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aussi variés que la religion, l’économie, la parenté, les loisirs et le sport, le travail et les
organisations ou les ségrégations.
Les articles de ce numéro montrent qu’un usage réflexif de la méthode ethnogra-
phique est fécond pour l’étude du travail artistique. L’usage d’observations minutieuses,
répétées et éclatées met en relief de manière renouvelée les principes collectifs orga-
nisant le travail artistique. Sont également identifiés, analysés, interprétés de façon
neuve les tensions, les négociations, les conflits ou les compromis, intimes et sociaux,
privés et publics, qui traversent l’acte créatif, les définitions du statut et de l’identité
d’artiste, la qualification d’un objet comme œuvre ou les processus de hiérarchisation
des mondes de l’art. ■

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