477-479 Evolution Post-Opératoire Précoce en Chirurgie Digestive en Milieu Tropical (Assouto)
477-479 Evolution Post-Opératoire Précoce en Chirurgie Digestive en Milieu Tropical (Assouto)
477-479 Evolution Post-Opératoire Précoce en Chirurgie Digestive en Milieu Tropical (Assouto)
RÉSUMÉ • Objectif. Etudier l’évolution post-opératoire précoce des pathologies chirurgicales digestives. Type d’étude. Etude rétrospective et descrip-
tive sur trois ans du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 au Bénin. Patients et méthode. 613 patients étaient suivis dans le service polyvalent d’anes-
thésie et de réanimation pour une pathologie chirurgicale digestive opérée. Les informations étaient collectées sur des fiches à partir : du registre d’hos-
pitalisation des malades dans le service ; du registre de rapport de garde et des dossiers des malades. Les données existantes, obtenues par transcription
exacte des recueils, ont été saisies dans le logiciel Epidata 3.02 et traitées grâce au logiciel Stata 8.0. Résultats. La fréquence des affections chirurgicales
digestives opérées était de 32 % des admissions du service. L’âge moyen des patients était de 30 ans avec des extrêmes de 1 jour à 85 ans. 510 patients
étaient opérés en urgence et 103 l’étaient pour une chirurgie programmée. Les pathologies les plus fréquemment rencontrées étaient les péritonites, les
occlusions intestinales aiguës et les tumeurs malignes. Le taux global de morbidité post-opératoire était de 25,8 % avec une prédominance masculine (27,6 %
pour les urgences chirurgicales digestives vs 16,5 % pour la chirurgie programmée). 74,7 % des complications survenaient avant le 4e jour post-opéra-
toire et étaient peu fréquentes au-delà du 6e jour post-opératoire. Le taux global de mortalité était de 13 % (13,3 % des patients sont décédés dans les suites
opératoires d’une urgence chirurgicale digestive et 11,6 % après une chirurgie digestive programmée. La cause de décès la plus fréquente était représentée
par le sepsis. Les décès sont survenus dans la grande majorité des cas (78,7 %) dans les 72 premières heures. Conclusion. La morbidité et la mortalité
post-opératoires dans notre unité de réanimation restent encore élevées notamment dans les suites opératoires des pathologies digestives. Si ce fait peut
s’expliquer par l’insuffisance du plateau technique et des ressources humaines, il relève surtout : d’un retard à la consultation ou d’une évacuation tar-
dive. Les malades sont admis dans un état grave pour les urgences ; dans la chirurgie programmée où prédominent les tumeurs malignes, il s’agit le plus
souvent de patients arrivant à un stade avancé et du passage chez le tradipraticien dont l’essai thérapeutique sur certains états pathologiques relève d’un
certain « empirisme » et qui aggrave l’état clinique.
ABSTRACT • Objective. The purpose of this report was to describe early outcome of surgical management of digestive disease in a tropical setting. Study
design. This retrospective, descriptive study was carried out in Benin over the three-year period from January 1, 2002 to December 31, 2004. Patients
and methods: A total of 613 patients admitted to the intensive care unit (ICU) following surgical treatment for digestive disease were studied. Data were
collected on cards from ICU patient admission records, duty register, and patient charts. The data obtained by exact transcription from cards was ente-
red into the Epidata 3.02 software package and analyzed using the Stata 8.0 software package. Results. Patients undergoing surgery for digestive disease
accounted for 32% of admissions to the ICU during the study period. Mean patient age was 30 years (range, 1 day to 85 years). Surgery was carried out
under emergency conditions in 510 patients and elective conditions in 103. The most common surgical indications were peritonitis, acute bowel occlu-
sion, and malignant tumors. Overall postoperative morbidity was 25.8% with a strong male prevalence (27.6% after emergency procedures and 16.5%
after elective procedures). Most complications (74.7%) occurred within 4 days after the procedure. Complications rare occurred after the 6th post-ope-
rative day. Overall mortality was 13% (13.3% after emergency procedures and 11.6% after elective surgery). The most frequent cause of death was sep-
sis. In the vast majority of the cases (78.7%) death occurred in the first 72 hours. Conclusion. Post-operative morbidity and mortality remain high in our
ICU especially after surgical management of digestive disease. Although this finding is correlated with inadequate technical and human resources, it is
mainly due to delayed treatment or slow evacuation time with most patients being admitted in extremely critical condition. Elective surgery was usually
performed on patients presenting advanced-stage malignancy. Delayed management with subsequent deterioration of the patient’s clinical state was fre-
quently due to prior treatment by practitioners of traditional medicine.
parmi eux, les enfants et les adultes jeunes étaient les plus touchés Détresse respiratoire 18 13 16,3
(Tableau 2). Insuffisance hépato-cellulaire 2 2 2,5
74,7 % des complications (n = 118) étaient survenues avant Insuffisance rénale 3 3 3,8
le 4e jour post-opératoire. Elles devenaient peu fréquentes au-delà Infection urinaire 2 0 0
du 6e jour post-opératoire (Tableau 3). Chez l’enfant, les appendi-
Etat de choc 37 34 42,5
cites et les malformations chirurgicales de l’enfant étaient les
Suppuration pariétale 15 0 0
grandes pourvoyeuses de complications avec respectivement 50 %
Chirurgicales
Eviscération 8 0 0
Tableau 1. Répartition des indications chirurgicales et leurs complications. Péritonite post-opératoire 17 4 5
Indications chirurgicales Effectif (%) Cas compliqués (%) Fistule stercorale 4 1 1,2
Appendicites 20 (3,2%) 10 (6,33%) Occlusion intestinale 10 2 2,5
Péritonites aigues 324 (52,8) 95 (60,13) Indéterminées 29 11 13,8
Occlusions intestinales aigues 94 (15,3) 16 (10,13) Total 163 80 100
Traumatismes abdominaux 30 (04,9) 06 (3,80)
Urgences chirurgicales de l’enfant 21 (3,4) 10 (6,33) Discussion
Autres urgences 21 (3,4) 04 (2,53)
Tumeurs bénignes 06 (01) 01 (0,63) Dans notre étude, l’âge moyen de nos patients était de
Tumeurs malignes 68 (11,1) 15 (9,49) 30 ans et conforme dans l’ensemble aux données de la littérature
Affections non tumorales programmées 29 (4,7) 01 (0,63) africaine (1) mais très bas par rapport aux données des pays déve-
Total 613 (100) 158 (100) loppés, en France et aux Etats-Unis où il est situé autour de 57 ans
Tableau 2. Répartition de la morbidité selon l’âge. (2).
Les pathologies digestives post-opératoires sont respon-
Tranche d’âge (ans) Evolution simple Complications
sables de 25,8 % de morbidité dont 89,2 % pour les urgences et
Nombre de cas (%) Nombre de cas (%)
0 à 15 120 (19,58) 51 (8,32)
10,8 % pour la chirurgie programmée. Ces taux paraissent diffi-
16 à 35 183 (29,85) 49 (7,99) ciles à comparer aux résultats obtenus dans la littérature compte
36 à 55 100 (16,31) 37 (6,04) tenu de l’hétérogénéité des différentes études (1). Celles-ci étaient
> 55 52 (8,48) 21 (3,43) faites par pathologie ou groupe de pathologies ou même intéres-
Total 455 (74,22) 158 (25,78) sant l’ensemble des activités du bloc opératoire; certaines études
ne prenant en compte que les malades opérés en urgence, d’au- opératoires (image) proposé par Gillion (4) pour évaluer le travail
tres les malades opérés « à froid ». Ainsi, Zarski et al. (3) citant médical montre un rapport encore très élevé (50,9 %) et dénote de
Sirinek et al. puis Dobernec et al., trouvent que la morbidité est l’importance des efforts de prise en charge à faire dans ce domaine.
comprise entre 28 % et 47 % ; Gillion ne relève que 28 % de
patients opérés en urgence (4).
Dans notre institution, le risque de complication est Conclusion
influencé par les conditions d’intervention (absence de prise en
charge précoce des malades au bloc, dextérité du chirurgien...). Au Les pathologies chirurgicales digestives sont fréquentes,
total 158 patients ont présenté 163 complications. Parmi celles-ci, notamment dans les pays en développement. La moitié des patients
47,2 % (n=77) étaient exclusivement médicales, 30 % étaient des opérés ayant présenté une complication est décédée. La large pré-
complications chirurgicales isolées et 25,8 % étaient mixtes. Bernard dominance des complications médicales comme facteurs létaux pré-
et al. relèvent un taux global de complications de 51 % (5). En dictifs, montre bien l’amélioration importante du pronostic que peut
France, Heloury et al. (6) trouvent que les complications chirurgi- apporter une prise en charge médicalisée efficace.
cales isolées sont au premier rang. La prédominance des compli-
cations médicales dans notre série n’est pas un effet du hasard
comme partout en Afrique subsaharienne et s’expliquerait par l’état
Références
morbide des patients à l’admission, la pénurie de moyens diag- 1. Ouro-Bang’na Maman AF, Agbétra N, Egbohou P, Sama H, Chobli M. Morbidité-
nostiques et thérapeutiques, l’absence fréquente de prise en charge mortalité périopératoire dans un pays en développement : expérience du CHU de
pré et post-opératoire adéquate et l’environnement souvent septique Lomé (Togo). Ann Fr Anesth Reanim 2008 ; 27 : 1030-3
des salles d’hospitalisation (1, 7). 2. Escarce JJ, Kelley MA. Admission source to the medical intensive care unit pre-
49 % des patients (n=80) ayant présenté une complication dicts hospital death independent of APACHE II score. JAMA 1990 ; 264 : 2389- 94
sont décédés. Les complications médicales sont les plus létales et 3. Zarski JP, Bichard P, Rachail M. La chirurgie digestive extra-hépatique chez le cir-
rhotique. J Chir 1988 ; 125 : 597-600.
conformes aux données de la littérature (5, 6). Les pathologies chi-
4. Gillion JF. Le taux brut de mortalité postopératoire est-il un critère pertinent d’ef-
rurgicales digestives sont responsables de 32,5 % de décès en ficience d’une équipe chirurgicale? Etude prospective des suites opératoires de 11756
Zambie (8). Cette mortalité se situe autour de 1 à 5,8 % en France patients. Ann Chir 2005 ; 130 : 400-6.
et de 1,4 % aux Etats-Unis (4, 9, 10). Dans notre unité, le taux glo- 5. Bernard A, Gabrielle F, Cougard P, Viard H. Morbidité et mortalité post-opératoires
bal de mortalité de 13 % relevé, est plus bas que celui de Ouro- des complications infectieuses diverticulaires coliques : étude multifactorielle. Ann
Bang’na Maman et al. (16,16 %) (1) de même qu’ailleurs en Afrique Chir 1992 ; 46 : 596-600.
6. Heloury Y, Le Neel JC, Leborgne J, Chatal JF, Malvy P. Complications des appen-
mais nettement plus élevé que celui des unités de réanimation des
dicites et appendicectomies. A propos de 106 cas. J Chir 1983 ; 120 : 615-22.
pays développés. Ceci est dû en grande partie, à l’amélioration des
7 .Toure CT, Dieng M. Urgences en milieu tropical : état des lieux. L’exemple des
conditions de travail dans le service polyvalent d’anesthésie et de urgences chirurgicales au Sénégal. Med Trop 2002 ; 62 : 237-41.
réanimation du Centre national hospitalier et universitaire Hubert 8. Watters DA, Wilson IH, Sinclair JR, Ngandu N. A clinical sickness score for the
K. Maga de Cotonou et aussi à la création d’un certificat d’études critically ill in Central Africa. Intensive Care Med 1989 ; 15 : 467-70.
spéciales (CES) d’anesthésie-réanimation (recrutement de médecins 9. Cubertafond P, Cucchiaro G, Lesourd-Pontonnier F, Gainant A. Complications post-
de tout horizon) et à l’ouverture d’un service d’accueil des urgences. opératoires précoces des résections anastomoses en chirurgie colique ou colo-rec-
tale : analyse de 627 observations. Chirurgie 1992 ; 118 : 86-91.
Malgré ces moyens mis à notre disposition, le calcul de l’indice de
10. Greenburg AG, Saik RP, Farris JM, Peskin GW. Operative mortality in general sur-
mortalité abaissée par une gestion efficiente des complications post- gery. Am J Surg 1982 ; 144 : 22-8.
Sénégal © Morand A.