Le Vin Du Solitaire

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Ce poème se trouve dans la troisième sections du recueil “Le vin” qui envisage un

remède au spleen, “le vin du solitaire” est le 4eme poème de cette section.

Texte :

Le regard singulier d'une femme galante


Qui se glisse vers nous comme le rayon blanc
Que la lune onduleuse envoie au lac tremblant,
Quand elle y veut baigner sa beauté nonchalante ;

Le dernier sac d'écus dans les doigts d'un joueur ;


Un baiser libertin de la maigre Adeline ;
Les sons d'une musique énervante et câline,
Semblable au cri lointain de l'humaine douleur,

Tout cela ne vaut pas, ô bouteille profonde,


Les baumes pénétrants que ta panse féconde
Garde au coeur altéré du poète pieux ;

Tu lui verses l'espoir, la jeunesse et la vie,


- Et l'orgueil, ce trésor de toute gueuserie,
Qui nous rend triomphants et semblables aux Dieux !

C’est un sonnet de type classique constitué en alexandrins réguliers :


de 2 quatrains en rimes embrassées (ABBA ; et CDDC). Dans le premier quatrain,
les rimes féminines encadrent les masculines et c’est le contraire dans le deuxième
quatrain.

Les 2 tercets composés identiquement de 2 rimes féminines suivies d’une rime


masculine " suffisante "(ee, F ; et gg, F).

I. Le traitement des tentations


On remarquera que, dans la première strophe, la quasi-totalité des substantifs
reçoivent des adjectifs. On peut y voir une marque de l’éloge : la lune est «
onduleuse », le lac est « tremblant », la beauté est « nonchalante ». Baudelaire
construit ici, en trois quatre vers, un paysage idyllique, que l’on pourra dire «
romantique », caractérisé par la beauté de la nature nocturne.

Le poète compare longuement le regard d’une femme à un rayon de lune qui se


reflète dans un lac pour rendre la singularité du regard plus pesant.

Dans le premier quatrain on retrouve la sonorité nasale “AN” qui ajoute de la


lourdeur, la sonorité domine dans les 4 rimes et elle est encore alourdi par les 2
pronom relatif “qui” et “que” et la conjonctions de temps “Quand”, ces 3 sonorité
introduisent les 3 derniers vers du premier quatrains.Ils évoque la puissance du
regard féminin.
Contrairement au premier quatrain, une description très courte de la situation du
“joueur” en train de jouer son dernier “sac d’écus” et qui risque de tout perdre. La
“maigre Adeline” évoque un danger moins lourd avec son “baiser libertin” et la "
musique énervante " est encore moins dangereuse, moins présente, elle semble
venir de loin comme le " cri lointain de l’humaine douleur ". L’auteur procède ainsi à
une progression décroissante de la présence du danger.

Si, donc, la beauté mystérieuse d’une femme ne suffit pas à égaler le charme
enivrant du vin, il en est de même du jeu — « dernier sac d’écus dans les doigts d’un
joueur » –, des délices que procure la musique — « les sons d’une musique
énervante et câline » –, voire les plaisirs charnels: « Un baiser libertin de la maigre
Adeline ». Cette énumération vise à montrer que rien, pas même les plaisirs les plus
raffinés, ne sauraient égaler ceux que procure le vin. Il s’agit là d’une exagération,
qui participe du ton emphatique du poème.

II. le vin comme plaisir suprême

Les tercets synthétisent l’ensemble de l’énumération précédente dans un « tout cela


» qui se trouve balayé au profit de la « bouteille profonde ». On peut y voir une forme
d’humour, ou du moins de légèreté.

On voit qu’il a fallu attendre l’entrée dans les tercets (donc la moitié du poème) pour
que le sujet du poème soit donné : le vin.

Représentative de la tentation la plus intéressante pour le poète, la " bouteille "


devient un personnage doué d’attention et de profondeur. Nous sommes proches
d’une personnification, puisque le corps de la bouteille est comparé par métaphore à
une “panse” qui aurait la capacité de féconder, verser “l’espoir, la jeunesse, la vie”
la bouteille est placée sur un piédestal telle une déesse que l’on invoque et à qui l’on
voue un culte.

La bouteille permet au poète “au coeur altéré” de devenir “pieux”; on retrouve une
double diérèse (poè te pi eux) indispensable pour respecter le rythme de
l’alexandrin.

Le vers suivant ajoute un élément, souligné par l’emploi du tiret : « Et l’orgueil ».


L'orgueil est considéré comme un vice et est mépriser pourtant baudelaire le
compare à un “trésor de toute gueuserie”.
Baudelaire va plus loin dans l’hyperbole en faisant des buveurs (poètes) des égaux
de Dieux, l’auteur défigure la relation de tentation et de dépendance entre l’homme
et le vin et en fait une amitié chaleureuse où loin d’être esclave de son vice, l’homme
devient son égal, et bien davantage. Baudelaire nous démontre cela en dépassant et
dominant toute faiblesse humaine au moyen de “ce trésor de toute gueuserie” afin
d’égaler les Dieux.

III. Conclusion
Baudelaire explore les tentations bien qu’il n’en trouve aucune égalant le vin, comparé à une
déesse qui a le pouvoir de faire égaler les Dieux.

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