Analyse Histologique Et Moleculaire Des Metastases Cerebrales 2015

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Cancer/Radiothérapie 19 (2015) 10–15

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Mise au point

Analyse histologique et moléculaire des métastases cérébrales夽


Histological and molecular analysis of brain metastases
E. Lechapt Zalcman a,∗,b , C. Bazille a , A. Rousseau c , F. Burel-Vandenbos d , J.-Y. Pierga e
a
Laboratoire d’anatomie pathologique, centre hospitalier universitaire de Caen, avenue de la Côte-de-Nacre, 14033 Caen cedex, France
b
CNRS, UMR 6301 ISTCT, CERVOxy, GIP Cyceron, boulevard Henri-Becquerel, BP 5229, 14074 Caen cedex, France
c
Département de pathologie cellulaire et tissulaire, CHU d’Angers, 4, rue Larrey, 49100 Angers, France
d
Laboratoire central d’anatomie pathologique, centre hospitalier universitaire de Nice, 06000 Nice, France
e
Département d’oncologie médicale, institut Curie, 26, rue d’Ulm, 75005 Paris, France

i n f o a r t i c l e r é s u m é

Historique de l’article : En présence d’une métastase cérébrale, les objectifs du pathologiste sont d’éliminer une tumeur primitive,
Reçu le 24 novembre 2014 et d’orienter le clinicien vers un type histologique potentiellement associé à un traitement spécifique. En
Accepté le 26 novembre 2014 complément de l’histologie standard, l’étude immunohistochimique est l’outil le plus performant pour
préciser le type histologique ou l’origine d’une métastase. Une batterie restreinte d’anticorps est utilisée,
Mots clés : en tenant compte des renseignements cliniques et du tropisme cérébral du cancer bronchique, du cancer
Métastases cérébrales du sein et du mélanome. L’arsenal thérapeutique s’est récemment enrichi de thérapies ciblées, notam-
Primitif inconnu
ment pour les patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules ou de mélanome, et porteurs
Immunohistochimie
Biopathologie
de certaines anomalies moléculaires (mutation de BRAF V600E, EGFR, etc.). Ces thérapies peuvent don-
Marqueurs théranostiques ner lieu à des réponses majeures, y compris sur des métastases cérébrales, ce qui justifie de réaliser, sans
Marqueurs prédictifs délai, le statut moléculaire d’une métastase cérébrale. Le pathologiste est au cœur du dispositif mis en
Thérapies ciblées place par l’Institut national du cancer (Inca) dans le but d’identifier des marqueurs théranostiques. Cela
implique un soin particulier à la phase préanalytique et une bonne gestion de l’échantillon tumoral afin
de combiner les différents outils, dans le but d’un rendu de résultats dans des délais optimaux. Cet article
fait le point sur la démarche diagnostique anatomopathologique pour les métastases cérébrales, à l’ère
des thérapies ciblées.
© 2015 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous
droits réservés.

a b s t r a c t

Keywords: The first step in the diagnosis of a metastatic brain lesion is to exclude a primary central nervous sytem
Brain metastases tumour, followed by verification or identification of the primary tumor site, in order to guide the clinician
Unknown primary site to specific therapy. In addition to morphological features, ancillary immunohistochemical study is most
Immunohistochemistry effective for the evaluation of a metastatic neoplasm of unknown primary. Although the main principles
Pathobiology
are same, there are slight variations in the approach to the secondary lesion in the central nervous system
Targeted therapy
versus other regions. Indeed, immunohistochemical approach focuses on the most common tumor types
associated with secondary brain colonization: lung cancer, breast cancer and melanoma. Several studies
have reported that targeted therapies are capable of reducing brain metastases in melanoma or non-
small cell lung cancer, sometimes with a high dramatic response. These results have clearly impacted
routine neuropathological practice. It is likely that molecular subtyping of central nervous system metas-
tases will play an increasing role in the future. In accordance with the recommendations of Inca (French
national cancer institute), the pathologist develops appropriate strategies for molecular and immunohis-
tochemical analysis, in order to provide results as soon as possible. This article summarizes the diagnosic
approach to brain metastases, with a focus on the recent emergence of targeted therapies.
© 2015 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All
rights reserved.

夽 Travail soutenu par l’Association des neuro-oncologues d’expression française (Anocef) – groupe métastases SNC. Le référentiel Anocef métastases cérébrales est disponible
sur le site www.anocef.org.
∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (E. Lechapt Zalcman).

http://dx.doi.org/10.1016/j.canrad.2014.11.004
1278-3218/© 2015 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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1. Introduction by T-cells-1), tyrosinase, ou PLN2 est préconisée pour confirmer le


diagnostic de mélanome, potentiellement accessible à une théra-
Les métastases cérébrales représentent 15 à 25 % des tumeurs pie ciblée par inhibiteur de BRAF en cas de mutation de ce gène
intracrâniennes de l’adulte diagnostiquées dans un laboratoire [7]. La protéine S100, plus sensible (exprimée par plus de 90 % des
d’anatomie pathologique. Dans un tiers des cas, la tumeur primi- tumeurs mélanocytaires) mais peu spécifique, ne présente qu’un
tive est inconnue au moment de l’intervention en neurochirugie [1]. intérêt limité.
Le développement des thérapies ciblées a modifié la pratique des Il faut connaître les réactivités croisées d’anticorps de réfé-
pathologistes. L’objectif principal du pathologiste est la recherche rence utilisés en pathologie générale ; comme l’expression de la
d’un type histologique tumoral auquel est potentiellement asso- protéine S100 ou de CD56 par de nombreuses tumeurs du sys-
ciée une thérapie ciblée. Le transfert rapide vers une plateforme tème nerveux central, ou celles de marqueurs épithéliaux (EMA,
de génétique moléculaire des cancers, soutenu par l’Institut natio- AE1/AE3) par des tumeurs gliales [1,3,4]. Plus rarement, une tumeur
nal du cancer (Inca), est une demande pressante des oncologues germinale, une tumeur primitive neuroectodermique (PNET), un
pour une prise en charge rapide et optimale des patients atteints hémangioblastome peuvent mimer une métastase cérébrale. Une
de métastases cérébrales. vraie différenciation épithéliale est observée dans de rares tumeurs
du système nerveux central qui peuvent poser des problèmes de
diagnostic différentiel avec une métastase : le carcinome des plexus
2. Étape préanalytique : conditionnement du prélèvement
choroïdes, qui reste exceptionnel chez l’adulte, ou la tumeur papil-
laire de la région pinéale, récemment individualisée.
La prise en charge des fragments tissulaires doit répondre
aux procédures d’assurance qualité de l’Association française
3.2. Orienter vers un type histologique accessible à un traitement
d’assurance qualité en anatomie pathologique (Afaqap), publiées
spécifique
par la Haute Autorité de santé (HAS) et l’Inca [2]. Le prélèvement
doit être adressé sans délai, si possible non fixé au laboratoire
Nous n’aborderons ici que les métastases intraparenchyma-
d’anatomie pathologique, un fragment étant cryopréservé en vue
teuses, les localisations leptoméningées étant exclues. Chez les
d’une éventuelle analyse moléculaire. La cryopréservation à visée
patients atteints d’une métastase cérébrale, l’enquête diagnostique
sanitaire est recommandée mais non exigée du fait de la validation
doit rechercher en priorité un type histologique tumoral accessible
des tests moléculaires des thérapies ciblées sur les tissus fixés en
à un traitement spécifique. La corrélation anatomoclinique (âge,
formol et inclus en paraffine [2]. L’échantillon tissulaire est fixé en
imagerie, etc.) réduira le spectre des diagnostics envisageables.
formol tamponné pour une durée supérieure à 24 heures et dans
La plupart des cancers ont un profil métastatique bien identi-
la mesure du possible, inférieure à 48 heures, puis inclus en paraf-
fié avec une certaine spécificité d’organe. Ainsi, chez l’adulte, les
fine. Le pathologiste sélectionne le bloc le plus représentatif pour
cancers responsables de métastases cérébrales intraparenchyma-
réaliser les investigations complémentaires. L’accès aux données
teuses sont par ordre de fréquence décroissante : le cancer du
cliniques, radiologiques et biologiques est souvent indispensable
poumon (36–64 %), le cancer du sein (15–25 %) et le mélanome
pour éviter les investigations systématiques qui épuisent le maté-
(5–20 %) [8]. D’autres cancers fréquents dans la population générale
riel et peuvent déboucher sur des errances diagnostiques [3,4].
tels que ceux du côlon s’accompagnent moins souvent de méta-
La réalisation des techniques moléculaires nécessite un pourcen-
stases cérébrales [8].
tage minimal de cellules tumorales. Le seuil critique dépend de
Le diagnostic peut être orienté dès l’analyse macroscopique
l’anomalie moléculaire recherchée et de la technique utilisée. Une
(mélanome, rein) mais repose essentiellement sur l’analyse histolo-
macrodissection est parfois nécessaire afin d’enrichir l’échantillon
gique. Habituellement, la métastase reproduit l’aspect histologique
en ADN tumoral.
de la tumeur primitive avec parfois un degré de différenciation
moindre. La grande majorité des métastases cérébrales sont des
3. Stratégie spécifique selon le type histologique adénocarcinomes, identifiés par une analyse histologique stan-
dard (architecture glandulaire et mucosécrétion) qui permet de
3.1. Tumeur maligne indifférenciée primitive ou secondaire les distinguer d’un carcinome épidermoïde, d’un carcinome à
petites/grandes cellules avec différenciation neuroendocrine, ou
Trente à 40 % des métastases cérébrales sont uniques et peuvent d’un carcinome non à petites cellules sans autre spécification. En
en imposer pour une tumeur primitive du système nerveux cen- complément de l’analyse morphologique, l’étude immunohistochi-
tral. La première étape du diagnostic consiste donc à éliminer une mique adaptée aux hypothèses diagnostiques reste l’outil le plus
tumeur primitive. Par ailleurs, 11 % des patients atteints d’un cancer performant pour préciser le type histologique ou l’origine d’une
avec une lésion cérébrale unique le sont d’une lésion non métastas- métastase cérébrale. Une batterie restreinte d’anticorps est utilisée,
tique, le plus souvent un gliome de haut grade, et la connaissance en tenant compte des renseignements cliniques et selon un arbre
d’un premier cancer n’exclut pas la survenue d’une métastase céré- décisionnel inspiré de la pathologie générale (Fig. 1) [3,4,6]. Les
brale révélatrice d’un second cancer jusqu’alors inconnu [5,6]. procédures d’assurance qualité doivent garantir un examen fiable
Lorsque le diagnostic différentiel entre une tumeur primitive évitant les faux positifs et les faux négatifs. Des problèmes liés au
du système nerveux central et une localisation secondaire est dif- prélèvement peuvent survenir : nécrose, réaction inflammatoire.
ficile, le pathologiste doit s’assurer du bon échantillonnage de la
tumeur qui peut nécessiter l’inclusion de l’ensemble du matériel. 3.2.1. Adénocarcinome
Les glioblastomes épithélioïdes ou rhabdoïdes peuvent à l’examen Le cancer bronchopulmonaire est la première cause de méta-
histologique en imposer pour une métastase d’un carcinome ou stase cérébrale mais également la principale étiologie de métastase
d’un mélanome [4,6]. L’expression immunohistochimique de mar- cérébrale révélatrice, y compris chez la femme non fumeuse [9]. Le
queurs de cellules gliales comme la GFAP (glial fibrillary acidic tropisme du cancer bronchique non à petites cellules pour le cer-
protein), ou OLIG2 (facteur de transcription oligodendrocyte 2) veau varie avec le sous-type histologique ; il est plus élevé pour
est un argument fort en faveur d’une tumeur cérébrale primi- les adénocarcinomes (54,8 %) et les carcinomes peu différenciés
tive. Le diagnostic de mélanome est parfois difficile, en particulier (31,7 %) que pour les carcinomes épidermoïdes [9]. Le traite-
dans les formes achromiques. L’utilisation des anticorps dirigés ment de l’adénocarcinome pulmonaire a bénéficié ces dernières
contre HMB-45, melan-A/MART-1 (melanoma antigen recognized années d’avancées thérapeutiques majeures. À l’inverse, celui du
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Fig. 1. Démarche diagnostique en présence d’une métastase cérébrale intégrant les données immunohistochimiques et la recherche de marqueurs théranostiques. IHC :
immunohistochimie ; GFAP : glial fibrillary acidic protein ; HMB45 : human melanoma black 45 ; BRAF : sérine/thréonine protéine kinase B-raf ; NRAS : GTPase N-ras ; CKIT :
mast/stem cell growth factor receptor Kit ; EGFR : epidermal growth factor receptor ; HER2 : récepteur tyrosine protéine kinase erbB-2 ; TTF : thyroid transcription factor ; ALK : ana-
plastic lymphoma kinase ; ROS1 : c-ros oncogene 1, récepteur tyrosine kinase ; RET : proto-oncogène RET, récepteur tyrosine kinase ; ADK : adénocarcinome ; CK : cytokératine ;
GATA3 : trans-acting T-cell-specific transcription factor GATA-3 ; RE : récepteur des estrogènes ; RP : récepteur de la progestérone ; PSA : antigène spécifique de la prostate ;
CA125 : ovarian cancer antigen 125, mucine 16 ; TG : thyroglobuline ; PLAP : phosphatase alcaline placentaire ; ␣fœto : alphafœtoprotéine ; ␤HCG : hormone chorionique
gonadotrope humaine ; NE : carcinome neuroendocrine.
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carcinome épidermoïde reste quasi inchangé et les thérapies faveur d’un cancer primitif colorectal. Une origine primitive colique
ciblées tardent à venir. Les cancers d’origine pulmonaire, comme implique la recherche d’une mutation activatrice des gènes Ras qui
la plupart des adénocarcinomes du sein ou d’autres origines, entraîne une activation constitutive de la voie de signalisation du
expriment la cytokératine 7 sans exprimer la cytokératine 20 récepteur de l’EGF.
(phénotype CK7+/CK20−), et d’autres marqueurs d’organe sont
nécessaires [1,3,4,6].
TTF1 (thyroid transcription factor), marqueur des tissus d’origine 3.2.2. Carcinome épidermoïde
pulmonaire et thyroïdienne (normaux ou tumoraux), est exprimé Le diagnostic de carcinome épidermoïde repose sur l’analyse
par 80 % des adénocarcinomes non mucineux primitifs du poumon. histologique classique (ponts d’union intercellulaires et kératini-
Une métastase cérébrale d’adénocarcinome exprimant TTF1, opé- sation). Si l’expression en immunohistochimie des cytokératines
rée ou biopsiée, doit faire réaliser sans délai le bilan moléculaire 5/6 ou de p40 (plus spécifique que p63, exprimé par 26 à
préconisé par l’Inca pour l’accès aux thérapies ciblées (selon leur 65 % des adénocarcinomes) peut être recherchée pour confor-
autorisation de mise sur le marché, ou en essai clinique) comme ter une différenciation épidermoïde [11,14], aucun marqueur
la recherche de mutation des gènes EGFR (epidermal growth factor ne permet d’en préciser l’origine pulmonaire ou autre. Les
receptor), KRAS, BRAF et HER2 (Human epidermal growth factor recep- marqueurs de différenciation malpighienne comportent égale-
tor 2) ou de translocation des gènes ALK (anaplastic lymphoma kinas) ment CK34E12, et desmocollin-3 ; TTF1 n’est pas exprimé par les
ou ROS1, et ce même si le cancer primitif a déjà fait l’objet d’une carcinomes épidermoïdes. La coexistence de critères morpholo-
telle recherche. En effet, il peut exister une hétérogénéité molécu- giques et/ou immunohistochimiques de carcinome épidermoïde et
laire entre la métastase et la tumeur primitive ou l’apparition de d’adénocarcinome fait évoquer la possibilité d’un carcinome adé-
mutations secondaires conférant une résistance au traitement. nosquameux d’origine pulmonaire ou gynécologique basse.
TTF1 est également exprimé par 90 % des carcinomes neuroen- En pratique, en présence d’une métastase cérébrale d’un carci-
docrines à petites cellules et 50 % des carcinomes neuroendocrines nome non à petites cellules, sans autre spécification, la probabilité
à grandes cellules d’origine pulmonaire. En cas de suspicion de d’une origine bronchopulmonaire est très élevée et ce, quel que
carcinome neuroendocrine, on recherchera une positivité des soit le sexe. La recherche de mucines et l’immunohistochimie avec
marqueurs neuroendocrines (CD56, chromogranine A, synapto- le couple TTF1 et p40 résout la majorité des situations. Si un can-
physine) et une expression en dot de la pancytokératine AE1/AE3. cer primitif mammaire est évoqué, le couple TTF1 et GATA3 serait
Il faut garder à l’esprit qu’il n’existe pas de marqueur absolu, le plus pertinent [11]. Le pannel CK7/CK20 est moins utile qu’en
ce d’autant que les métastases cérébrales peuvent présenter des pathologie générale, car parmi les cancers à tropisme cérébral,
phénotypes aberrants [3,4,6]. Une expression focale de TTF1 a nombreux sont ceux qui, comme les carcinomes bronchiques non à
été décrite dans des carcinomes mammaires. Enfin, l’absence petites cellules ou le cancer du sein, ont un phénotype CK7+/CK20−.
d’expression de TTF1 n’élimine pas une métastase cérébrale d’un Devant une métastase cérébrale révélatrice d’un carcinome peu dif-
carcinome bronchique non à petites cellules, car l’expression de férencié, il faut privilégier le diagnostic histologique et la recherche
TTF1 n’est pas toujours conservée entre la tumeur primitive et la du cancer primitif jusqu’à un certain point, et réaliser rapidement
métastase, et 20 % des adénocarcinomes primitifs pulmonaires ne le statut moléculaire de cette métastase cérébrale. Compte tenu
l’expriment pas. L’anti-napsin A peut aider à identifier une petite du tropisme du carcinome bronchique non à petites cellules pour
fraction de ces adénocarcinomes n’exprimant pas TTF1 [10]. le cerveau, le pathologiste doit transmettre sans délai les échan-
Si une métastase cérébrale de cancer du sein est suspectée, tillons à la plateforme de biologie moléculaire, à la recherche de
l’expression des récepteurs hormonaux (récepteurs des estrogènes biomarqueurs spécifiques du cancer du poumon même si l’origine
et récepteurs de la progestérone) est recherchée du fait des impli- bronchopulmonaire n’est pas prouvée (non-expression de TTF1).
cations thérapeutiques mais également à visée diagnostique bien
qu’elle ne soit pas spécifique (observée dans les adénocarcinomes
de l’ovaire, de l’endomètre ou bronchopulmonaires chez la femme) 4. Biopathologie moléculaire
[4,6,8]. Par ailleurs, les cancers du sein expriment fréquemment la
mammaglobine, le GCDFP15 (gross cystic disease fluid protein-15) et Le pathologiste peut être amené à prescrire la recherche des
GATA3 [11]. La surexpression en immunohistochimie de la protéine biomarqueurs moléculaires pour aider à la prise en charge thé-
HER2 (reflet d’une amplification de l’oncogène HER2/cERBB2) est rapeutique (Fig. 1). La liste des biomarqueurs à rechercher est
recherchée à visée thérapeutique et pronostique. Des discordances fonction de l’origine de la métastase, du type histologique et des
entre le statut HER2 de la tumeur primitive et de la métastase céré- thérapeutiques disponibles [15].
brale étant observées dans 5 à 10 % des cas, ce statut est réévalué Comme mentionné plus haut, dans le cas de métastases
systématiquement dans les localisations secondaires [12]. Parmi cérébrales de mélanome, les patients peuvent bénéficier d’une
les différents sous-types moléculaires des cancers du sein, les recherche de mutation BRAF V600 et dans le cancer du sein, d’une
tumeurs surexprimant HER2 et les tumeurs dites « basal-like/triple recherche d’amplification du gène HER2. En présence de méta-
négatives » (définies par l’absence d’expression de HER2 et des stase cérébrale de carcinome bronchique non à petites cellules
récepteurs des estrogènes et de la progestérone) se caractérisent non épidermoïde, la recherche de mutation du gène EGFR ou de
par l’incidence la plus élevée de métastases cérébrales. Les tumeurs réarrangement des gènes ALK et ROS1 doit être réalisée du fait des
« triple négatives » de pronostic défavorable, souvent peu diffé- thérapeutiques ciblant ces altérations. De même, il est justifié de
renciées, expriment dans 80 % des cas, les cytokératines 5/6/14 réaliser le statut moléculaire de toute métastase cérébrale de carci-
(marqueurs des cellules basales/myoépithéliales des acini glandu- nome bronchique non à petites cellules non épidermoïde, prouvée
laires), également utilisées en pathologie générale pour conforter ou suspectée, mais également si le site primitif reste inconnu et
le diagnostic de carcinome épidermoïde peu différencié [13]. Le ce quels que soient le sexe, l’âge et le statut tabagique du patient.
pathologiste doit en tenir compte dans sa conclusion. Dans le cadre des programmes annuels « biomarqueurs émergents
Le diagnostic de métastase cérébrale d’adénocarcinome colo- de l’Inca », l’analyse d’autres biomarqueurs peut également être
rectal est souvent évoqué sur l’aspect histologique et conforté par réalisée de façon systématique par les plateformes de biologie
le profil immunohistochimique (CK20+/CK7−), y compris dans les moléculaire et conditionner l’accès à des essais cliniques : muta-
formes peu différenciées. CDX2, facteur de transcription spécifique tions BRAF, HER2, réarrangements de ROS1 ou RET et amplification
de l’épithélium intestinal adulte, est également un marqueur en de MET dans le cancer du poumon, mutations BRAF, NRAS et KIT
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dans le mélanome (recommandations de l’Inca). La liste des essais de 60 % des gangliogliomes et xanthoastrocytomes pléomorphes,
en cours est disponible sur le site de l’Inca [15]. 5 % des métastases cérébrales de cancers du côlon, et 1 à 4 % de
Le cerveau semble être le principal site de rechute chez les celles de carcinome bronchique non à petites cellules où elles
patients atteints de carcinome bronchique non à petites cellules pourraient constituer une cible thérapeutique [24]. Une exten-
exprimant ALK traité par crizotinib, avec un taux de progression sion du programme Acsé (Accès sécurisé aux thérapies ciblées)
cérébrale de près de 50 % rapporté dans une série rétrospective [16]. de l’Inca propose de tester différentes pathologies tumorales à la
Le pourcentage de patients atteints d’un carcinome bronchique non recherche de ces mutations et permet l’utilisation d’un anti-BRAF
à petites cellules présentant une mutation du gène EGFR en Europe [15].
est estimé à environ 15 % [17]. Ces mutations sont dites activa-
trices car elles confèrent une sensibilité aux inhibiteurs de tyrosine
5. Conclusion
kinase de EGFR et sont, de ce fait, recherchées systématiquement.
Les carcinomes bronchiques non à petites cellules présentant une
Les thérapies ciblées sont entrées dans l’arsenal thérapeu-
mutation pour EGFR seraient associés à un risque plus élevé de
tique des métastases cérébrales. La nécessité de rechercher les
développer des métastases cérébrales que ceux non mutés, avec
biomarqueurs théranostiques a modifié les pratiques des patho-
une fréquence d’apparition de métastases cérébrales de 64 % et 31 %,
logistes. Il revient au pathologiste d’utiliser toutes les techniques
respectivement, et leur nombre serait plus élevé en cas de muta-
à sa disposition (immunohistochimie, FISH, etc.) et les plate-
tion de l’EGFR. Les mécanismes de résistance secondaire sont un
formes de génétique moléculaire de la manière la plus efficace.
peu mieux connus. La mutation T790 de l’exon 20 faisant perdre la
Cela implique notamment un soin particulier à la phase préana-
sensibilité des cellules tumorales aux inhibiteurs de tyrosine kinase
lytique (délai d’acheminement, fixation du matériel, etc.) comme
semblerait être un des mécanismes les plus fréquents de résistance
à la gestion du matériel tumoral afin de combiner les différents
(50 % des cas) [17]. D’autres mécanismes ont été mis en évidence
outils, dans le but d’un rendu de résultats dans des délais opti-
comme l’amplification de c-MET (5 %), l’amplification d’EGFR (5 %),
maux.
la mutation PIK3CA (5 %), une différenciation en cancer à petites cel-
lules, la transition épithélio-mésenchymateuse, et les mutations de
BRAF. Déclaration d’intérêts
Dans les carcinomes bronchiques non à petites cellules épider-
moïdes, certaines équipes commencent à s’intéresser à la recherche Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-
d’altérations moléculaires accessibles à un traitement ciblé, comme tion avec cet article.
l’amplification de FGFR1 (fibroblast growth factor receptor 1), qui
code pour l’un des sous-types de la famille des récepteurs FGFR à Remerciements
tyrosine kinase. La région chromosomique 8p12 portant le locus du
gène FGFR1 est amplifiée dans environ 20 % des carcinomes bron- Groupe de travail métastases SNC Anocef (par ordre alpha-
chiques non à petites cellules épidermoïdes et apparaît rare dans bétique) : Antoine Carpentier (Paris), Frédéric Dhermain (Paris),
des carcinomes bronchiques non à petites cellules d’autres histo- Le Emilie Rhun (Lille), Emmanuel Mandonnet (Paris), Philippe
logies, tels que les adénocarcinomes (moins de 2 %) [18,19]. Metellus (Marseille), Georges Noël (Strasbourg), Nicolas Reyns
Chez les patients atteints de métastase cérébrale de carcinome (Lille), Sophie Taillibert (Paris).
bronchique non à petites cellules, l’amplification de FGFR1 est Participation au référentiel (par ordre alphabétique) : Guillaume
retrouvée dans 19 % des carcinomes épidermoïdes et de façon éton- Gauchotte (Nancy), Catherine Génestie (Paris), Claude Alain
nante dans 15 % des adénocarcinomes [20]. Des modifications du Maurage (Lille), Catherine Miquel (Paris), Karima Mokhtari (Paris),
nombre de copies du gène ont été mises en évidence avec diffé- Emmanuelle Uro-Coste (Toulouse), Gabriel Viennet (Besançon),
rentes techniques, dont l’hybridation in situ fluorescente (FISH) Jean-Michel Vignaud (Nancy).
[18,20], la signification clinique des seuils de positivité des tests
reste à déterminer.
Références
Dans le cas de métastases cérébrales de mélanome, la recherche
de mutation BRAF V600 est recommandée. En effet, 50 à 60 % des [1] Drlicek M, Bodenteich A, Urbanits S, Grisold W. Immunohistochemical panel of
mélanomes cutanés ont une mutation BRAF et 15 % d’entre eux sont antibodies in the diagnosis of brain metastases of the unknown primary. Pathol
porteurs d’une mutation de NRAS [21]. Plus de 90 % des mutations Res Pract 2004;200:727–34.
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BRAF sont de type V600E (plus rarement V600K). Elles induisent
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mandations pour la pratique clinique : standards, options et recommandations
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(Tafinlar® ) sont disponibles [21]. Actuellement, l’identification des 2003;90:1071–96.
mutations BRAF repose sur des techniques de biologie molécu- [4] Becher MW, Abel TW, Thompson RC, Weaver KD, Davis LE. Immunohisto-
chemical analysis of metastatic neoplasms of the central nervous system. J
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