Popu 104 0515

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 24

Le lien de parenté dans les jeunes générations suisses :

lignées, structure et fonctions


Raphaël Hammer, Claudine Burton-Jeangros, Jean Kellerhals
Dans Population 2001/4 (Vol. 56), pages 515 à 537
Éditions Ined Éditions
ISSN 0032-4663
DOI 10.3917/popu.104.0515
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

Article disponible en ligne à l’adresse


https://www.cairn.info/revue-population-2001-4-page-515.htm

Découvrir le sommaire de ce numéro, suivre la revue par email, s’abonner...


Flashez ce QR Code pour accéder à la page de ce numéro sur Cairn.info.

Distribution électronique Cairn.info pour Ined Éditions.


La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le
cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque
forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est
précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
Le lien de parenté dans
les jeunes générations suisses :
lignées, structure et fonctions

Raphaël HAMMER*, Claudine BURTON-JEANGROS*


et Jean KELLERHALS*

Les transformations actuelles de la famille conduisent à des


analyses parfois paradoxales. D’un côté, on insiste sur le rôle
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
central de la relation de couple, sur l’autonomie croissante de
celui-ci, et donc sur l’importance de la famille nucléaire. De
l’autre, en partie à cause de l’éclatement plus fréquent des fa-
milles, on redécouvre le rôle de la parenté proche (grands-
parents, oncles et tantes, cousins et cousines). On cherche donc à
décrire de mieux en mieux la forme et l’étendue de ce réseau fa-
milial, et son évolution au cours de la vie des individus.
Raphaël HAMMER, Claudine BURTON-JEANGROS et Jean KELLERHALS
s’intéressent ici au rôle de ce réseau pour de jeunes adultes, au
moment où ils s’éloignent de leur famille nucléaire d’origine :
certains ont peu de contacts avec leur parenté proche, mais la ma-
jorité d’entre eux développent des relations suivies avec un en-
semble de parents, surtout en ligne « verticale » et du côté
maternel.

Dans l’intégration sociale – relationnelle et normative – des jeunes


adultes, on connaît mal la place qu’occupe la parenté. Quelle est l’impor-
tance subjective que revêt pour eux le réseau de parenté ? Sont-ils en
contact avec lui, y sont-ils liés, est-il source de modèles pour eux ? On sait
à ce propos qu’une interprétation abusive des thèses de Parsons sur la dif-
férenciation sociale avait amené de nombreux sociologues de la famille
des années 1960-1970 à estimer que, dans les sociétés modernes, seule la
famille nucléaire jouait un rôle, les clans, lignages et réseaux de parenté
perdant progressivement fonction et réalité (Lee, 1980). On mettait l’ac-
cent sur l’isolement et la mobilité de la famille nucléaire. Cependant, plu-
sieurs études empiriques menées dans les années 1980-1990 sur le thème
des relations de parenté et des rapports intergénérationnels ont pris le

* Département de sociologie, Université de Genève.

Population , 56 (4), 2001, 515-538


516 R. HAMMER et al.

contre-pied de cette thèse (Attias-Donfut, 1995 ; Bonvalet et al. , 1993 ;


Lee, 1980 ; Pitrou, 1992 ; Roussel, 1976). Elles aboutissent dans l’en-
semble à montrer que de nombreux liens affectifs et instrumentaux unis-
sent la famille nucléaire à son entourage et qu’à bien des égards la famille
moderne fonctionne « à la parenté ». L’aide que celle-ci apporte, sous
forme de capitaux, de services, de soutien moral, se caractérise par la
polyvalence, la rapidité et la souplesse et assure un complément indispen-
sable aux dispositifs institutionnels de solidarité sociale.
La tentation serait alors grande d’exagérer la force de ces liens et de
conclure à l’existence d’une sorte de nouvelle famille étendue (Litwak,
1960a, 1960b ; Segalen, 1981) sans détailler suffisamment la structure et la
force des relations entre ego et son réseau de parenté. Or, les récentes re-
cherches que nous avons faites sur ce thème (Coenen-Huther, Kellerhals et
von Allmen, 1994) nous montrent les limites de ce réseau d’interactions.
Dans le réservoir des liens potentiels avec les parents de premier degré,
seuls quelques-uns de ces liens sont activés, la densité des contacts ne dé-
passant guère 25 % à 30 % ; ces liens se tissent surtout en ligne verticale,
la ligne horizontale étant faiblement sollicitée ; enfin, l’ampleur des
échanges les apparente davantage à des coups de main conjoncturels
– certes essentiels – en cas de perturbation (maladie, chômage, divorce,
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
installation) qu’à une coopération structurelle (qui serait nécessaire pour
parler de nouvelle famille étendue).
Ces études récentes se sont toutefois surtout centrées sur la
génération-pivot (Attias-Donfut, 1995 ; Coenen-Huther, Kellerhals et
von Allmen, 1994 ; Gokalp, 1978), c’est-à-dire les ménages dans lesquels
les adultes sont dans la cinquantaine. Elles ont considéré au premier chef
les échanges matériels, n’accordant qu’une attention marginale au rôle de
repère symbolique que peut éventuellement jouer la parenté dans un
monde marqué par un nomadisme relationnel important et par une certaine
privatisation des référentiels idéologiques (cf. Segalen, 1991). Par
ailleurs, les recherches consacrées aux jeunes ont généralement mis l’ac-
cent sur l’analyse des relations au sein du noyau familial et non sur la pa-
renté (Blöss, 1997 ; Bozon et Villeneuve-Gokalp, 1994 ; Roussel, 1976).
C’est pourquoi l’on se propose ici d’examiner d’un peu plus près le
rapport de la jeune génération avec sa parenté au sens large. Cet examen
apparaît d’autant plus utile que cette génération a grandi après que les pro-
fondes mutations sociodémographiques – montée du divorce, baisse du
taux de nuptialité, chute de la fécondité, généralisation de la cohabitation
et des doubles carrières professionnelles – que l’Europe a connues dès les
années 1965 eurent consacré un nouveau rapport à l’institution de la fa-
mille. Cela explique aussi que l’on ait mis l’accent, dans cette analyse des
comportements des jeunes, sur le rôle affectif et normatif des aînés par
rapport aux cadets plutôt que sur les échanges instrumentaux, ceux-ci in-
tervenant davantage soit entre grands-parents et petits-enfants, soit entre
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 517

g r a n d s - p a r e n t s e t q u i n q u a g é n a i r e s ( C o e n e n - H u t h e r, Ke l l e r h a l s e t
von Allmen, 1994).
Quelle est donc la force des liens affectifs et normatifs entre les
jeunes et leur réseau de parenté ? Comment se structure ce réseau ? Quels
modèles se transmettent ? Voilà les questions que l’on aimerait débrous-
sailler ici sur la base d’une étude empirique auprès de 200 jeunes adultes
genevois.
On s’interrogera en premier lieu sur la fréquence des contacts entre
les jeunes et leurs lignées paternelle et maternelle, puis sur la force des
liens existant entre eux et celles-ci. On cherchera ensuite à quantifier les
fonctions – affective, instrumentale ou normative — que remplissent les
parents pour les jeunes concernés et à caractériser les parents particulière-
ment « actifs ». Enfin, sur la base d’une typologie empirique, nous décri-
rons trois genres de relations à la parenté repérables chez les jeunes
adultes observés.

Démarche et mesures
Les données présentées ici proviennent d’un questionnaire standar-
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
disé administré en face-à-face. L’échantillon de type quota a été constitué
sur la base de deux critères : les répondants devaient être âgés de 18 à
25 ans et le nombre des femmes devait être identique à celui des hommes.
Notre ambition était de pouvoir interroger des jeunes en phase d’autono-
misation par rapport à leur milieu familial d’origine tout en disposant
d’une population relativement homogène en termes de constitution de
l’identité individuelle. La composition de l’échantillon montre que cet ob-
jectif a été atteint (1) . Compte tenu des faibles moyens à notre disposition,
la taille de l’échantillon a été limitée à 200 personnes. Les informations
o n t é t é r e c u e i l l i e s p a r d e s é t u d i a n t s d e l ’ u n ive r s i t é d e G e n è ve e n
avril 1997 (2).
Les 195 répondants retenus sont surtout de jeunes suisses en forma-
tion (3), âgés en moyenne de 22 ans et répartis de manière équivalente entre
trois milieux sociaux d’origine (4) (34 % des pères sont cadres supérieurs,
31 % appartiennent aux catégories intermédiaires et 34 % à la catégorie
« ouvriers-employés »). Près d’un jeune sur cinq (17 %) a connu le di-
vorce de ses parents. Il est clair qu’en raison de la taille assez faible de
l’échantillon, les données permettent surtout de déterminer des grandes
tendances. La relative homogénéité de notre échantillon nous permettra de
tenir compte du poids des variables structurelles relatives au réseau de pa-
renté.

(1) Seul un des répondants était marié et aucun n’avait constitué de famille de procréation.
(2) La collecte des données s’est déroulée dans le cadre d’un séminaire d’introduction aux
méthodes de recherche en sociologie. Nous remercions ici les étudiants de la promotion 1996-
1997.
(3) 81 % sont de nationalité suisse et 85 % sont étudiants.
(4) Le milieu social d’origine a été mesuré par la catégorie socioprofessionnelle du père.
518 R. HAMMER et al.

Les frontières du réseau de parenté observé ont été définies de la ma-


nière suivante : on a retenu les membres du « premier cercle » de parenté
biologique (5) d’ego, vivants au moment de l’enquête, à l’exclusion de la
famille nucléaire (6) . Il s’agit donc des grands-parents, des oncles, des
tantes et des cousins germains des deux côtés de la famille. Cette limita-
tion se justifie par le fait que les relations avec des parents plus éloignés
sont rares, d’après les éléments dont nous disposons pour la Suisse
(cf. Coenen-Huther, Kellerhals et von Allmen, 1994), et que leur prise en
compte aurait affaibli à l’excès l’appréciation portée sur les liens de pa-
renté de la jeune génération. Des investigations menées sur des parents
plus éloignés montrent que nous avons eu raison (7) . Dans ce qui suit, ces
parents du premier cercle constituent ce que l’on appellera le « réseau de
parenté » d’ego, pour lequel on fera assez systématiquement la distinction
entre lignée maternelle et lignée paternelle.
Le questionnaire utilisé s’accompagnait d’un arbre généalogique sur
lequel était reporté, en début d’entretien, chaque parent de ce premier
cercle. Il était alors plus aisé de saisir les genres de liens existant entre le
répondant et chacun de ses parents.
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
I. Ampleur et structure du réseau actif

Quatre jeunes sur cinq ont des contacts réguliers (c’est-à-dire au


moins une fois par mois) avec l’un au moins des membres de leur parenté.
Ils ont de tels contacts, en moyenne, avec 4 membres de leur réseau (en-
dehors, rappelons-le, de la famille nucléaire) (tableau 1). On ne peut donc
pas parler, à ce premier égard, d’un isolement des jeunes ou d’une évanes-
cence radicale des liens avec la parenté.
Cependant, par rapport à la taille du réservoir de parenté (19 personnes
en moyenne), on constate que les jeunes sont, en moyenne, en contact régu-
lier avec moins d’un parent sur trois ; plus précisément, la « densité » des
contacts est de 28 % (voir tableau 1). Cette densité, relativement faible,
est de surcroît inversement proportionnelle à la taille du réseau : plus ce-
lui-ci est grand, plus la densité est faible (r de Pearson : – 0,31).

(5) On a donc exclu tous les parents par alliance.


(6) Soit les père et mère et les éventuels frères et sœurs d’ego.
(7) On a en effet mesuré l’impact du reste de la parenté généalogique en demandant aux ré-
pondants de mentionner avec quels parents plus éloignés en termes généalogiques ils entrete-
naient des contacts réguliers (le terme régulier a été défini comme « en moyenne une fois par
mois » et les contacts incluent les conversations téléphoniques, lettres ou visites). On constate
que ces parents éloignés n’occupent qu’une place marginale : en effet, seulement 15 % des répon-
dants en ont mentionné au moins un du côté maternel et 14 % au moins un du côté paternel. En
termes de liens de parenté, on trouve cités le plus fréquemment des grands-tantes ou des cousins
(masculins) non germains. On peut donc en conclure que les liens avec le reste de la parenté ne
sont que très rarement activés de manière régulière et que les parents du premier cercle consti-
tuent bien le réservoir réel de parenté avec laquelle des liens sont entretenus.
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 519

TABLEAU 1.– STRUCTURE DU RÉSEAU DE PARENTÉ ET CONTACTS


Densité des
Nombre de parents Nombre de contacts(1)
contacts(2)
Effectif Moyenne Min-max Moyenne Min-max Moyenne
Ensemble du réseau 3 646 18,7 1-70 4,2 0-31 28 %
Lignée paternelle 1 924 9,9 0-50 1,7 0-13 23 %
– grands-parents 162 0,8 0-2 0,4 0-2 47 %
– oncles 298 1,6 0-8 0,3 0-4 20 %
– tantes 266 1,4 0-8 0,3 0-7 25 %
– cousins 1 198 6,1 0-41 0,7 0-21 15 %
Lignée maternelle 1 722 8,8 0-42 2,5 0-22 38 %
– grands-parents 172 0,9 0-2 0,5 0-2 59 %
– oncles 273 1,4 0-9 0,4 0-4 32 %
– tantes 257 1,3 0-8 0,5 0-5 41 %
– cousins 1 020 5,2 0-32 1,1 0-10 29 %
(1) Nombre de parents avec lesquels il y a un contact (par téléphone, lettre ou visite) au moins une fois par
mois.
(2) (Nombre de contacts/taille du réseau) × 100.
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
Ces résultats sont proches de ceux mis en évidence dans le contexte
suisse romand pour la génération-pivot, celle des 50-55 ans : à ces âges-là,
3 personnes en moyenne sont fréquentées régulièrement (c’est-à-dire
chaque quinzaine) et la densité des contacts s’élève à 29 % (Coenen-
Huther, Kellerhals et von Allmen, 1994). Comme leurs aînés, les jeunes
tendent donc à fréquenter un nombre relativement faible de proches pa-
rents. Cependant, il faudra se demander si le réseau de parenté ne remplit
pas pour autant un rôle affectif et peut-être normatif.
Qui sont donc ces parents « sélectionnés » ? Deux paramètres
marquent fortement la structure des relations : le rang des générations
d’une part et la lignée d’autre part. S’agissant des générations, on constate
clairement une prédominance des liens verticaux sur les liens collatéraux.
En effet, dans chaque lignée, la densité moyenne des contacts est plus éle-
vée avec les grands-parents qu’avec chacune des autres catégories de pa-
renté observées(8). Quant à la lignée, la densité des contacts est
sensiblement plus forte dans la lignée maternelle : globalement, elle y est
d e p l u s d ’ u n t i e r s , c o n t r e m o i n s d ’ u n q u a r t d u c ô t é d u p è r e ( vo i r
tableau 1). En outre, elle est plus élevée du côté de la mère pour toutes les
catégories de parents, ce qui traduit clairement une latéralisation des
contacts. Dans chaque lignée, ce sont les tantes avec qui l’on a le plus de
contacts (après les grands-parents), suivies successivement des oncles,
puis des cousins. Ces données recoupent tout à fait ce que l’on observe
(8) Dans notre échantillon, 56 % des jeunes ont encore leur grand-mère maternelle vivante,
57 % leur grand-mère paternelle, 38 % leur grand-père maternel, et 31 % leur grand-père pater-
nel. Ces chiffres sont assez proches de ceux observés par Attias-Donfut et Segalen (1998 : 118)
dans l’enquête qu’elles ont menée auprès d’un échantillon de la population française.
520 R. HAMMER et al.

pour la génération-pivot, pour laquelle la latéralisation maternelle des


échanges et le primat du vertical sur le collatéral s’observent systémati-
quement (Coenen-Huther, Kellerhals et von Allmen, 1994).
Ces contacts avec la parenté ne sont par ailleurs guère corrélés aux
caractéristiques plus individuelles des répondants. Si l’on constate que, du
côté maternel, les filles rapportent une densité de contacts plus élevée que
les garçons (75 % font état d’une forte densité de contacts contre 56 % des
garçons (9) ) (**) (10) , cet écart entre les sexes disparaît du côté paternel.
Quant au milieu social d’origine ou au divorce des parents, ils ne jouent
aucun rôle significatif sur l’ampleur des contacts avec la parenté. Une telle
absence de lien entre milieu social et densité des contacts avait déjà été
mise en évidence dans l’enquête auprès de la génération-pivot (Coenen-
Huther, Kellerhals et von Allmen, 1994).
Compte tenu de l’importance de la verticalité et de la latéralisation
des contacts, nous avons construit deux variables permettant de caractéri-
ser ces aspects du réseau de parenté. Une première variable mesure la ver-
ticalité des liens en différenciant trois genres de réseaux : ceux où tous les
grands-parents sont décédés (16 %), ceux où tous les grands-parents vi-
vants sont vus régulièrement (la densité est donc ici maximale, 35 % de
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
l’échantillon) et enfin ceux, en situation intermédiaire, où les grands-
parents ne sont pas tous rencontrés régulièrement (49 %). La « densité
verticale » est plus élevée du côté de la mère puisque 37 % des répondants
voient tous leurs grands-parents maternels contre 26 % qui voient tous
leurs grands-parents paternels.
La deuxième variable compare la « densité relative » des contacts
avec les lignées paternelle et maternelle ; les individus ayant davantage de
contacts dans la lignée maternelle que paternelle représentent plus d’un
cas sur deux (53 %) alors qu’on ne trouve qu’environ un quart des répon-
dants (23 %) dans la situation inverse. Le quart restant est caractérisé par
des densités de contacts matrilatérales et patrilatérales équivalentes mais
faibles dans l’ensemble (11).
Si la densité relative des contacts entre lignées ne varie pas en fonc-
tion du sexe des répondants, la densité des relations avec les grands-
parents est significativement plus élevée chez les filles, qui sont plus sou-
vent en contact avec tous leurs grands-parents (43 %) que les garçons
(26 %) (**). Lorsque les parents sont divorcés, cette proportion est de
15 % alors que dans les familles intactes 39 % sont en relation avec tous
leurs grands-parents (**). En revanche, l’éventuel divorce des parents
n’exerce pas un tel effet sur la densité relative des contacts entre les li-

(9) Une forte densité de contacts qualifie les répondants ayant des contacts mensuels avec
au moins 10 % des membres de leur réseau de parenté.
(10) Le symbole (**) signale les associations bivariées statistiquement significatives au
seuil de α = 5 %.
(11) Une forte majorité des répondants figurant dans cette modalité n’ont aucun contact
avec les membres de leur parenté au moins une fois par mois (ce qui ne signifie pas qu’il n’y a ja-
mais de contacts).
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 521

gnées qui varie, quant à elle, selon le milieu social d’origine : les réseaux
à densité des contacts prédominante avec la lignée maternelle se trouvent
plus souvent dans la catégorie des ouvriers-employés, alors que les ré-
seaux à densité des contacts prédominante avec la lignée paternelle sont
plus fréquents dans les catégories intermédiaires et chez les cadres supé-
rieurs (**). Enfin, les contacts avec les grands-parents sont plus systé-
matiques dans les familles d’origine sociale supérieure (49 %) que chez
les ouvriers-employés (35 %) et dans les catégories intermédiaires
(21 %) (**).
On a donc pu jusqu’ici attester d’une certaine ampleur des relations
des jeunes avec leur parenté tout en dessinant assez clairement les fron-
tières de ce réseau de contacts : celui-ci se concentre à la fois sur les géné-
rations ascendantes et sur la lignée maternelle.

II. La force des liens

La densité des contacts fournit une première image de la place que


© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
tient la parenté mais ne dit rien sur l’intensité des sentiments : une forte
activation du réseau parental correspond-elle nécessairement à de l’atta-
chement ou s’agit-il de pure convenance ? Et par ailleurs, les jeunes ont-ils
le sentiment de « compter », d’avoir une place affective reconnue dans
leur réseau de parenté ?
Une majorité de jeunes se disent attachés aux deux lignées aux-
quelles ils appartiennent (tableau 2). Toutefois, la nette latéralisation ob-
servée à propos des contacts se retrouve en matière d’attachement. En
effet, ce sont presque six répondants sur dix qui déclarent éprouver de
forts sentiments pour les parents maternels alors que ce n’est le cas que de
près de quatre sur dix envers les parents paternels. Réciproquement, les
jeunes se sentent-ils reconnus par leur parenté ? Ont-ils l’impression de
« compter » pour elle ? Évoquant la lignée maternelle, six jeunes sur dix
font état de cette « reconnaissance ». Mais cette proportion n’est que de
quatre sur dix dans la lignée paternelle. On retrouve donc en termes d’atta-
chement des relations privilégiées avec la parenté du côté de la mère.
En outre, les filles manifestent plus fréquemment un fort attachement
au côté maternel (67 %) que les garçons (48 %) (**) tandis que du côté pa-
ternel, les garçons ne sont pas plus attachés que les filles à leur parenté.
Par ailleurs, si ces dernières ont, plus souvent que les garçons, le senti-
ment de compter beaucoup, cet écart est également plus important du côté
maternel – 73 % des répondantes pensent compter beaucoup contre 50 %
des répondants (**) – que du côté paternel (où l’on passe respectivement
de 44 % à 33 %). Il apparaît donc que les filles sont systématiquement plus
liées à leur famille que les garçons, même lorsqu’il s’agit de leurs parents
522 R. HAMMER et al.

paternels. Dans chaque lignée, le sentiment de compter et l’attachement


sont fortement corrélés entre eux (12).

TABLEAU 2.– LA FORCE DES LIENS SELON LA LIGNÉE


Lignée paternelle Lignée maternelle
Sentiments du répondant envers ses parents
Attachement fort 38 % 58 %
« Dans l’ensemble, j’ai pour ces parents une affection,
un attachement assez profonds »
Attachement moyen 34 % 27 %
« Dans l’ensemble, ces parents me procurent un peu de
plaisir, de la distraction, mais sans plus »
Attachement faible 28 % 15 %
« Dans l’ensemble, ces parents me pèsent,
m’ennuient » et « Dans l’ensemble, ces parents
m’indiffèrent »
Impression du répondant quant aux sentiments
des parents à son égard
Compter beaucoup 39 % 61 %
Compter peu 61 % 39 %
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
« Compter, mais assez peu », « Ne pas compter »,
« Être plutôt un gêneur (une gêneuse) »
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

Qu’en est-il des relations entre ces différents aspects de l’attache-


ment, tel qu’il est « subjectivement perçu », et l’ampleur des contacts avec
la parenté ? L’attachement éprouvé pour la parenté comme le sentiment de
compter sont clairement associés à la densité des contacts : ces liens sont
d’autant plus forts que la densité des contacts est élevée et ils sont encore
plus marqués dans la lignée maternelle que dans la lignée paternelle
(tableau 3). On constate par ailleurs qu’une mesure de la cohésion glo-
bale (13) de chaque côté de la parenté aboutit à des résultats allant dans le
même sens (14) . L’attachement ressenti envers la lignée et le sentiment de

(12) Côté maternel : gamma = 0,82 ; côté paternel : gamma = 0,83.


(13) On demandait aux répondants de choisir, parmi les propositions suivantes, laquelle dé-
crivait le mieux les liens entre les parents de la lignée paternelle d’une part et ceux de la lignée
maternelle d’autre part : « 1) C’est une famille unie et soudée où les relations avec la parenté
tiennent une place importante ; 2) L’esprit de famille est assez fort même s’il y a quelques conflits
ou des tensions ; 3) Tout en ayant conscience de faire partie d’une même famille, les membres ne
sont pas très attachés les uns aux autres ; 4) C’est une famille marquée par de fortes divisions
entre groupes de personnes, par des conflits ; 5) ne sait pas ». La cohésion « forte » regroupe les
deux premiers items (respectivement 58 % et 72 % à l’égard des lignées paternelle et maternelle),
la cohésion « faible » les deux items suivants.
(14) Comme on pouvait s’y attendre, il existe une association significative entre cette me-
sure globale de la cohésion et la densité des contacts : lorsque la cohésion est forte, les trois
quarts des lignées maternelles se caractérisent par une forte densité des liens contre 46 % lorsque
la cohésion est faible (**). Du côté paternel, on retrouve le même effet, mais largement atténué
(53 % des réseaux très cohésifs se caractérisent par une forte densité des liens contre 32 % des ré-
seaux faiblement cohésifs).
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 523

compter pour celle-ci sont d’autant plus forts que la cohésion de la lignée
est perçue comme étant élevée (tableau 4).

TABLEAU 3.– LA FORCE DES LIENS SELON LA DENSITÉ DES CONTACTS, PAR LIGNÉE
Densité des contacts avec la lignée
maternelle(1)
Faible Forte
Fort attachement, lignée maternelle (**) 28% 74%
Fort sentiment de compter, lignée maternelle (**) 36% 75%
Densité des contacts avec la lignée
paternelle(1)
Faible Forte
Fort attachement, lignée paternelle (**) 23% 57%
Fort sentiment de compter, lignée paternelle (**) 24% 58%
(1)
La densité des contacts est forte si les répondants ont des contacts mensuels avec au moins 10 % des
membres de leur réseau de parenté, faible sinon.
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

TABLEAU 4.– LA FORCE DES LIENS SELON LA COHÉSION, PAR LIGNÉE


© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
Cohésion au sein de la lignée maternelle(1)
Faible Forte
Fort attachement, lignée maternelle (**) 33% 71%
Fort sentiment de compter, lignée maternelle (**) 34% 73%
Cohésion au sein de la lignée paternelle(1)
Faible Forte
Fort attachement, lignée paternelle (**) 16% 54%
Fort sentiment de compter, lignée paternelle (**) 14% 58%
(1)La cohésion au sein de la lignée est forte si le répondant a déclaré « C’est une famille unie et soudée où
les relations avec la parenté tiennent une place importante » ou « L’esprit de famille est assez fort même s’il
y a quelques conflits ou des tensions »; la cohésion est faible si le répondant a déclaré « Tout en ayant
conscience de faire partie d’une même famille, les membres ne sont pas très attachés les uns aux autres » ou
« C’est une famille marquée par de fortes divisions entre groupes de personnes, par des conflits ».
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

Bien que la densité des contacts varie selon les milieux sociaux, ce
n’est pas le cas pour l’attachement, le sentiment de compter et la cohésion
globale des lignées (15). De même, le divorce des parents qui était associé à
une moindre densité verticale des contacts n’a aucun impact sur ces trois
indicateurs des liens de parenté. Il ressort de ces analyses que les groupes
(jugés) cohésifs – donc unis affectivement – sont dotés, pour les jeunes

(15) Seul l’attachement au côté maternel varie de manière significative en fonction du mi-
lieu social (mesuré par la catégorie socioprofessionnelle du père) : il est fort dans 71 % des fa-
milles d’origine ouvrière, 62 % des familles de niveau supérieur et 42 % des familles issues de
classes intermédiaires (**).
524 R. HAMMER et al.

concernés, d’une force d’attraction qui se traduit tant au niveau des


contacts entretenus qu’à celui des sentiments éprouvés. En revanche, les
groupes éclatés, anomiques, semblent, d’après nos indicateurs, moins in-
vestis affectivement.
Voilà ce qu’il en est de la force des liens et il convient à présent de
s’interroger plus en détail sur les fonctions que les membres de la parenté
remplissent pour les jeunes.

III. Les fonctions de la parenté

Les études sur les solidarités et transmissions dans la parenté, qu’il


s’agisse d’échanges et d’aides (Coenen-Huther, Kellerhals et von Allmen,
1994 ; Pitrou, 1992 ; Segalen, 1981), de mémoire ou culture familiale
(Coenen-Huther, 1994 ; Muxel, 1996) montrent la diversité des fonctions
que peut jouer la parenté. Dans notre étude, nous avons retenu trois
grandes catégories de fonctions : expressive, instrumentale et normative,
chacune étant mesurée par deux indicateurs. Par fonction expressive, nous
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
visons des liens d’attachement profond d’ego à certains membres de sa pa-
renté. Les deux indicateurs en sont, d’une part, un sentiment de forte
proximité affective et, d’autre part, le rôle de confident que tel ou tel pa-
rent peut remplir pour ego. Pour la fonction instrumentale, un premier in-
dicateur identifie les parents considérés comme des ressources financières
potentielles, et un second ceux jouant le rôle de ressources d’expertise ou
de savoir-faire. Il s’agit donc de cerner dans quelle mesure le répondant
peut ou pourrait faire appel à son réseau familial pour des compétences
pratiques ou des ressources diverses utiles dans la vie de tous les jours. La
troisième fonction – normative – fait référence aux modèles d’action ou de
pensée que le jeune peut éventuellement trouver dans sa parenté. La pre-
mière question qui approche cette dimension porte sur la présence éven-
tuelle d’un parent qui serve ou ait servi de modèle professionnel (dans le
choix des études, d’un métier ou dans l’orientation vers un certain type
d’activité) ; la seconde cherche à savoir si un ou des membres du réseau
servent de modèle identitaire (quelqu’un dont on s’inspire ou auquel on
souhaiterait ressembler, que ce soit sur le plan des valeurs ou des modes
de conduite) (16).
Le tableau 5 résume, sur ces bases, le nombre de fonctions – ou de
rôles – que remplit la parenté pour le jeune adulte. Il confirme le fait, déjà
évoqué à propos de la force des liens, que l’implication ou l’investisse-
ment du réseau parental n’est pas négligeable. Il n’y a en effet qu’une pro-
(16) Chacun de ces six indicateurs était approché par une question ouverte : il était de-
mandé au répondant d’identifier le ou les parents remplissant le rôle en précisant le lien de pa-
renté exact (par exemple « tante », « grand-père »), la lignée (« paternelle » ou « maternelle ») et
enfin l’initiale du prénom pour être en mesure de déterminer si par exemple la tante maternelle
« confidente » était la même ou non que la tante maternelle « modèle de valeur ».
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 525

portion très marginale de répondants (moins de 5 %) pour lesquels la


parenté ne joue aucun des rôles proposés, et seulement moins d’un jeune
sur cinq n’investit sa parenté que d’une seule fonction (17) . C’est dire que
la parenté remplit des fonctions assez diversifiées pour huit jeunes sur dix
environ.
Quelles sont les fonctions les plus répandues ? 85 % des répondants
mentionnent des parents dont ils sont très proches affectivement ou qui
jouent le rôle de confident, et 79 % font part de liens significatifs avec leur
parenté sous forme d’échanges de services, de savoir-faire ou d’aide finan-
cière (18) . La fonction normative est un peu plus en retrait, mais elle est
quand même attestée par un répondant sur deux (51 %). La latéralisation
maternelle, constatée précédemment, s’observe également pour les fonc-
tions remplies par la parenté. Excepté pour la valeur de modèle profes-
sionnel qui est très peu véhiculée des deux côtés, la lignée de la mère est
davantage investie de fonctions que la lignée paternelle (tableau 6).

TABLEAU 5.– NOMBRE DE FONCTIONS REMPLIES PAR LA PARENTÉ


Fonctions(1) Effectif Répartition
Aucune fonction remplie 8 4%
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
Une fonction 35 18 %
Deux fonctions 72 37 %
Trois fonctions 80 41 %
Total 195 100 %
(1)Une fonction est remplie lorsqu’au moins un des deux indicateurs correspondants est mentionné, soit :
pour la fonction expressive, la proximité affective et le rôle de confident; pour la fonction instrumentale :
l’expertise et l’aide financière; pour la fonction normative : le modèle de valeurs et le modèle professionnel.
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

TABLEAU 6.– FONCTIONS REMPLIES SELON LA LIGNÉE


Indicateurs des fonctions Lignée paternelle Lignée maternelle
Fonction expressive
Proximité affective 42 % 64 %
Confidents 24 % 39 %
Fonction instrumentale
Ressources d’expertise 29 % 46 %
Ressources financières potentielles 23 % 40 %
Fonction normative
Modèles de valeurs 19 % 26 %
Modèles professionnels 12 % 12 %
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

(17) Lorsqu’une seule fonction est remplie, il s’agit le plus souvent de la fonction expressive
(17 cas), puis de la fonction instrumentale (13 cas), et enfin de la fonction normative (5 cas seulement).
(18) Rappelons ici qu’il s’agit de parents potentiellement pourvoyeurs de ressources matérielles.
Rien n’indique dans quelle mesure la demande d’argent pourrait être effectivement satisfaite.
526 R. HAMMER et al.

Les rôles dévolus à la parenté dépendent-ils de caractéristiques indi-


viduelles des répondants ?
i) On constate d’abord que si les fonctions expressive et instrumen-
tale sont mentionnées dans des proportions équivalentes par les personnes
des deux sexes, les garçons trouvent davantage de modèles normatifs dans
la parenté que les filles (58 % contre 45 %).
ii) Le divorce des parents ne semble pas associé à un moindre inves-
tissement fonctionnel de la parenté, quel que soit le genre de fonctions.
iii) Enfin, on observe, dans la lignée paternelle, un effet assez systé-
matique de la catégorie socioprofessionnelle du père du répondant : pour
tous les indicateurs (tableau 7), ce sont les enfants issus des catégories
ouvriers-employés qui comptent le moins de parents « fonctionnels ». On
relèvera surtout la quasi-absence de modèles normatifs (professionnels et
de valeurs) pour les fils et filles d’ouvriers et d’employés. Or, on sait que
les contenus des échanges, des transmissions et des rôles ne sont pas
uniformément répartis selon les milieux sociaux, et surtout ne représentent
pas les mêmes enjeux. C’est dans les catégories sociales supérieures, no-
tamment dans la grande bourgeoisie et l’aristocratie, que les liens inter-
générationnels sont axés autour de la transmission du patrimoine et du
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
capital symbolique, où l’héritage joue un rôle central comme caractère
emblématique dans la perpétuation de la lignée (Gotman, 1988). L’esprit
de famille se traduit alors souvent par un accent prononcé mis sur la conti-
nuation de l’identité du groupe, l’inculcation de valeurs et modèles norma-
tifs la plupart du temps incarnés par le père, ou en tout cas par une figure
masculine (Kellerhals, Ferreira et Perrenoud, 1999).

TABLEAU 7.– FONCTIONS REMPLIES DANS LA LIGNÉE PATERNELLE


SELON LA CATÉGORIE SOCIOPROFESSIONNELLE DU PÈRE

Catégorie socioprofessionnelle du père


Indicateurs des fonctions Ouvrier, Profession
Cadre supérieur
employé intermédiaire
Fonction expressive
Proximité affective (**) 29 % 49 % 49 %
Confidents 21 % 26 % 24 %
Fonction instrumentale
Ressources d’expertise (**) 15 % 39 % 33 %
Ressources financières potentielles (**) 11 % 25 % 33 %
Fonction normative
Modèles de valeurs (**) 9% 23 % 24 %
Modèles professionnels (**) 3% 20 % 14 %
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 527

Qu’en est-il des caractéristiques structurelles du réseau ? À l’instar


de ce que l’on a vu jusqu’ici, la taille du réseau n’a aucune influence sur le
nombre de fonctions mentionnées ; les grands réseaux ne sont donc pas
forcément les plus riches. On peut alors rejeter l’hypothèse d’un éventuel
effet de nombre pour rendre compte de la présence plus ou moins impor-
tante de rôles dans la parenté. En revanche, on constate un effet quasiment
systématique de la densité relative des contacts sur le nombre de fonctions
remplies : on trouve davantage de rôles joués du côté paternel lorsque la
densité de contacts est plus importante dans la lignée paternelle ; un phé-
nomène symétrique s’observe dans la lignée de la mère. De plus, on
constate que le nombre de fonctions remplies dans la lignée maternelle est
d’autant plus grand que la densité verticale des contacts est élevée (19). Ce
résultat ne vaut cependant pas pour le côté paternel.
Qui sont ces membres « fonctionnels » de la parenté ? Les 652 pa-
rents investis de l’une ou l’autre des fonctions évoquées ci-dessus repré-
sentent un membre du premier cercle de parenté sur cinq (18 %). Qui sont-
ils, en termes de statut de parenté, de lignée et de sexe ?
i) Du point de vue des générations, l’ensemble des 652 parents
« fonctionnels » se distribue apparemment de façon équivalente entre les
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
grands-parents (35 %) et la génération des oncles et tantes (38 %), alors
que les cousins et cousines sont en léger retrait (27 %). Cependant,
compte tenu du poids relatif de chaque génération dans le réseau
(tableau 8), ces chiffres signifient en réalité que deux tiers des grands-
parents remplissent une ou plusieurs fonctions, contre un quart seulement
des oncles et tantes, et qu’enfin les cousin(e)s ne jouent qu’un rôle minime
(8 %). Ces différences soulignent à nouveau la forte verticalité du réseau
actif.

TABLEAU 8.– PART DES PARENTS « FONCTIONNELS » DANS CHAQUE GÉNÉRATION


Part des parents « fonctionnels » Part de la génération dans
(n = 652) dans la génération le réseau total (n = 3 646)
Grands-parents 67 % 9%
Oncles, tantes 23 % 30 %
Cousin(e)s 8% 61 %
Ensemble 18 % 100 %
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

ii) Concernant les lignées, il apparaît que deux tiers des parents cités
comme « fonctionnels » appartiennent à la lignée maternelle (64 %). Ces
parents sont donc proportionnellement deux fois plus nombreux à être in-
vestis d’une ou plusieurs fonctions que les représentants de la lignée pa-

(19) Plus précisément, les rôles de confident, les modèles de valeurs ainsi que les res-
sources d’expertise sont d’autant plus mentionnés que la densité des contacts avec les grands-
parents est forte.
528 R. HAMMER et al.

ternelle (tableau 9). Enfin, cette prédominance du côté maternel se vérifie


à chaque génération (20).

TABLEAU 9.– PART DES PARENTS « FONCTIONNELS » DANS CHAQUE LIGNÉE


Part des parents « fonctionnels » Part de la lignée dans
(n = 652) dans la lignée le réseau total (n = 3 646)
Lignée paternelle 12 % 53 %
Lignée maternelle 24 % 47 %
Ensemble 18 % 100 %
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

Pour approfondir l’analyse, voyons quels genres de fonctions jouent


les divers parents mentionnés. Pour ce faire, on se basera sur le décompte
des mentions de fonctions attribuées plutôt que sur celui des personnes ci-
tées, une seule personne pouvant en effet être mentionnée à diverses
reprises (par exemple être citée pour son rôle de confident et pour celui de
modèle). Le nombre total de mentions – on parlera aussi de « liaisons
fonctionnelles » – est de 1 121, soit en moyenne 5,7 par jeune interrogé.
Mais on ne retiendra ici, pour chaque fonction, dans un but de simplifica-
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
tion, que l’indicateur le plus significatif de chaque dimension, à savoir la
proximité affective, l’aide financière potentielle et le modèle de valeurs.
On obtient ainsi 649 mentions pour l’ensemble des trois indicateurs. Cette
sélection ne biaise pas la distribution d’ensemble, puisque, ici aussi, la
fonction affective (57 %) se détache clairement des fonctions instrumen-
tale (24 %) et normative (19 %) et que la répartition des parents mention-
nés selon la génération, la lignée et le sexe est semblable à celles que l’on
a obtenues pour l’ensemble des mentions. Ces précisions données,
constate-t-on une sorte de spécialisation fonctionnelle des divers parents
pour le jeune adulte ?
i) Voyons en premier lieu la place relative des trois générations con-
sidérées (tableau 10). S’agissant d’expressivité, elles sont citées dans des
proportions à peu près identiques (un tiers). En revanche, la fonction ins-
trumentale est très majoritairement remplie par les grands-parents et les
oncles et tantes (presque 50 % pour chaque génération), les cousin(e)s
n’occupant ici qu’une place très marginale. Enfin, la fonction normative

(20) On mentionnera que les trois quarts des répondants ont cité plusieurs fois un même pa-
rent au moins ; c’est dire que dans une grande majorité des cas, un membre ou plus de la parenté
est crédité de plusieurs fonctions (sur un total de six indicateurs). Sur les 293 parents
« plurifonctionnels » dénombrés, on trouve en premier lieu la tante maternelle (17 %, autrement
dit, on a dénombré 49 tantes maternelles jouant des rôles multiples), la grand-mère maternelle
(13 %) et l’oncle maternel (12 %) ; viennent ensuite avec 9 % la grand-mère paternelle, le cousin
maternel et le grand-père maternel, les autres catégories de la lignée paternelle ainsi que les cou-
sines maternelles étant les moins représentées. Cet aperçu général des parents remplissant plu-
sieurs fonctions, que l’on peut assimiler aux membres qui tendent à occuper une place
particulièrement significative pour ego, confirme d’une manière complémentaire le rôle prépon-
dérant des figures féminines et matrilatérales.
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 529

différencie clairement les trois générations : dans plus de la moitié des


cas, elle est attribuée aux grands-parents, pour un tiers aux oncles et
tantes, et pour un dixième à la catégorie des cousin(e)s.

TABLEAU 10.– RÉPARTITION DES FONCTIONS REMPLIES PAR GÉNÉRATION


Catégorie de fonction
Expressive Instrumentale Normative Toutes fonctions
Génération
(proximité (ressources (modèles confondues
affective) financières) de valeurs)
Grands-parents 111 (30 %) 72 (47 %) 69 (55 %) 252 (39 %)
Oncles/Tantes 133 (36 %) 72 (47 %) 43 (34 %) 248 (38 %)
Cousin(e) s 126 (34 %) 10 (6 %) 13 (11 %) 149 (23 %)
Total 370 (100 %) 154 (100 %) 125 (100 %) 649 (100 %)
Répartition (57 %) (24 %) (19 %) (100 %)
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

Dans quelle mesure existe-t-il une spécialisation des générations


dans les diverses fonctions ? Si la proportion des cousins mentionnés n’est
respectivement que de 6 % et 11 % pour les fonctions instrumentale et
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
normative, elle passe par contre à 34 % pour la fonction affective. La caté-
gorie des oncles et tantes apparaît comme la plus polyvalente, puisqu’elle
est bien représentée dans chaque type de fonction : un peu plus d’un tiers
pour les fonctions normative et affective et pratiquement 50 % pour la
fonction instrumentale. Les grands-parents jouent proportionnellement un
rôle moindre dans la fonction affective (30 %) que dans les fonctions ins-
trumentale (47 %) et surtout normative (55 %).
ii) En second lieu, la lignée maternelle recueille dans chaque cas en-
viron deux tiers des mentions et l’emporte ainsi clairement sur la lignée
paternelle.
iii) Enfin, s’agissant de spécialisation sexuelle, on est en face d’une
répartition assez traditionnelle des rôles. En effet, 62 % des mentions de
proximité affective concernent des femmes, contre 53 % des mentions de
la fonction instrumentale. Les modèles normatifs, quant à eux, sont four-
nis à raison de 62 % par les hommes.

IV. Vers une synthèse :


typologie des liens avec la parenté

Nous avons jusqu’ici pu mettre en avant des tendances générales


quant à la nature des liens qui unissaient nos répondants à leur réseau de
parenté, assimilé à leur premier cercle de parents biologiques (hors famille
nucléaire). On a ainsi pu montrer que les liens avec la parenté se struc-
530 R. HAMMER et al.

turent essentiellement autour de deux axes : d’une part, les échanges se


font plus en lignée verticale qu’horizontale ; d’autre part, ils privilégient la
lignée maternelle sur la parenté du côté du père.
À partir de ces observations, est-il possible, en guise de synthèse, de
dégager différents genres de relations à la parenté dans notre échantillon
de jeunes répondants ? À cette fin, nous avons établi une typologie empi-
rique du lien de parenté en fonction des indicateurs relatifs à la force des
liens et aux fonctions examinés plus haut. Chacune des variables a été
dichotomisée et différenciée selon la lignée (paternelle et maternelle).
Nous avons utilisé la méthode de la classification hiérarchique ascendante
qui élabore des regroupements d’individus sur une base inductive. Cette
méthode statistique qui procède par itérations successives a pour principe
de composer des agrégats aussi homogènes que possible du point de vue
des variables utilisées, tout en maximisant les différences entre ces mêmes
agrégats.
Nous avons opté pour une solution en trois groupes qui aboutit à des
types clairement différenciés et interprétables et qui nous paraissait le
mieux répondre au critère d’intelligibilité (21). Il est intéressant d’observer
que cette typologie est essentiellement construite autour des lignées et que
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
les différents genres de fonctions semblent se constituer en un système ho-
mogène, comme si le lien fonctionnel au réseau, une fois attesté, ne se ma-
nifestait pas dans des attributions de rôles spécifiques. On n’observe ainsi
pas d’agrégat qui soit davantage orienté vers l’expressif, un autre plus ins-
trumental ou encore qui privilégie le côté symbolique ou normatif (22). Les
trois profils de relations à la parenté mis en évidence pour nos jeunes ré-
pondants se dessinent comme suit (tableau 11) :
— le type « matrifocal » se distingue très clairement des deux autres
par une nette domination de la lignée maternelle sur la lignée paternelle,
non seulement sur le plan de l’ampleur des rôles mais également sur celui
de l’attachement et du sentiment de compter. Ce type est ainsi marqué par
(21) Le défaut des typologies empiriques telles que la classification hiérarchique pouvant
être leur grande sensibilité aux variables qui sont prises en considération, nous avons pris la pré-
caution de vérifier que la suppression ou l’ajout de telle ou telle variable n’aboutit pas à mettre en
évidence des types radicalement différents. Il peut arriver en effet qu’une ou deux variables aient
un poids particulièrement élevé dans le processus de classification et qu’à ce titre la présence ou
l’absence d’une variable oriente très fortement l’ensemble de la solution. Tel n’a pas été le cas
ici.
(22) Il convient cependant d’être prudent quant à ce résultat et envisager deux explications
possibles différentes. Premièrement, une classification hiérarchique qui inclurait des mesures
plus fines des fonctions – soit d’un point de vue conceptuel en prenant en considération un éven-
tail plus étendu, soit d’un point de vue statistique par la prise en compte de variables ordinales ou
métriques – pourrait faire apparaître des types où ces fonctions joueraient un rôle plus grand.
Deuxièmement, on peut aussi se demander si une différenciation ou une accentuation des genres
de fonctions de la parenté n’a pas plus de « chances » d’apparaître dans une phase d’autonomie
des jeunes plus affirmée (nuptialité, fécondité, entrée dans le marché du travail) – phases de vie
durant lesquelles les liens intergénérationnels peuvent se renforcer (Pitrou, 1992, p. 27-28 ; 132).
C’est lors du passage à l’âge adulte que le besoin de la parenté a tendance à se faire sentir avec
une certaine acuité. On sait ainsi par exemple que les jeunes dotés d’un faible capital scolaire re-
courent volontiers à leur réseau familial pour faciliter leur insertion dans le monde du travail
(Blöss, 1997, p. 39).
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 531

une forte asymétrie puisque l’omniprésence de la lignée maternelle s’ac-


compagne d’une quasi-inexistence fonctionnelle et affective de la lignée
paternelle ;

TABLEAU 11.– TYPOLOGIE DES LIENS AVEC LA PARENTÉ


Type III
Type I Type II Détache-
Matrifocal Bilatéral ment Moyenne
Caractéristique V de Cramer
(en %)(1)
Part (en %) de chaque caractéristique
dans le type(2)
Proximité affective – lignée paternelle 16 65 47 42 0,39**
Proximité affective – lignée maternelle 92 82 28 64 0,61**
Confidents – lignée paternelle 8 35 30 24 0,27**
Confidents – lignée maternelle 51 63 12 39 0,46**
Ressources financières – lignée paternelle 10 39 22 23 0,27**
Ressources financières – lignée maternelle 49 54 22 40 0,30**
Ressources d’expertise – lignée paternelle 29 33 27 29 ns
Ressources d’expertise – lignée maternelle 71 48 23 46 0,41**
Modèles de valeurs – lignée paternelle 14 24 19 19 ns
Modèles de valeurs – lignée maternelle 43 33 6 26 0,37**
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
Modèles professionnels – lignée paternelle 13 13 12 12 ns
Modèles professionnels – lignée maternelle 19 13 6 12 ns
Fort attachement à la lignée paternelle 0 87 28 35 0,71**
Fort attachement à la lignée maternelle 83 89 12 56 0,73**
Fort sentiment de compter pour la lignée
paternelle 14 80 26 37 0,56**
Fort sentiment de compter pour la lignée
maternelle 91 83 17 59 0,70**
Nombre de cas 63 54 78 – –
Proportion du type dans l’échantillon 32 % 28 % 40 % – –
(1) Les légères différences entre les 4 derniers chiffres figurant dans cette colonne et les moyennes figurant au
tableau 2 sont dues à ce que l’on a ici remplacé les données manquantes par la moyenne générale pour l’indica-
teur considéré.
(2) Les pourcentages dans les cases font référence à la proportion de répondants ayant dans chaque type la carac-
téristique indiquée. Ainsi 65 % des répondants faisant partie du type II mentionnent un ou plusieurs parents con-
sidérés comme très proches affectivement dans leur lignée paternelle, contre 16 % dans le type I.
Afin de faciliter la lecture du tableau, nous avons, pour chaque ligne, signalé en gras le pourcentage le plus élevé
du comportement indiqué par la variable, et en italique le pourcentage le plus faible (les valeurs intermédiaires, le
cas échéant, ont été laissées en caractère normal).
** significatif au seuil de 5 %.
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

— le type « bilatéral » correspond à des relations caractérisées par la


plus forte activation des échanges et de la force des liens. De plus, cette
intensité se manifeste dans les deux lignées de manière relativement symé-
trique, même si en ce qui concerne les rôles, on peut déceler un investisse-
ment légèrement plus marqué du côté maternel. Dans ce type, c’est au
niveau de l’attachement et du sentiment de compter que s’exprime le
mieux le caractère égalitaire et intense des relations que le jeune entretient
avec sa parenté ;
532 R. HAMMER et al.

— le type « détachement » est caractérisé par un investissement


fonctionnel systématiquement faible dans la lignée maternelle et moyen
dans la lignée paternelle, comparativement aux deux autres types. Bien
que la lignée paternelle remplisse davantage de fonctions que la lignée
maternelle, la distance à l’égard de la parenté paraît bien constituer la
norme de ce groupe puisque tant l’attachement que le sentiment de comp-
ter sont très faibles à l’égard des deux lignées.
Quel genre de liens existe-t-il entre, d’un côté, cette typologie et, de
l’autre, les caractéristiques socio-démographiques du répondant et les va-
riables structurelles du réseau de parenté ?
i) Concernant les variables relatives au répondant, on peut men-
tionner les relations suivantes dans la mesure où elles nous semblent faire
sens du point de vue sociologique bien qu’elles ne soient pas statistique-
ment significatives. Ainsi, on observe davantage le type « matrifocal »
p a r m i l e s fi l l e s ( 3 9 % c o n t r e 2 8 % p o u r l e s g a r ç o n s ) e t l e t y p e
« détachement » parmi les garçons (47 % contre 32 % pour les filles). Le
type « détachement » concerne plus les enfants de divorcés que les enfants
de non-divorcés (49 % contre 38 %) alors que le type « bilatéral » se re-
trouve davantage dans les familles intactes (30 % contre 18 % en cas de
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
divorce). Enfin, du point de vue du milieu social, le type « matrifocal »
prédomine chez les ouvriers et les employés, le type « bilatéral » chez les
cadres supérieurs et le type « détachement » dans les catégories intermé-
diaires. Cependant, dans l’ensemble, les caractéristiques individuelles des
répondants n’influent que dans une faible mesure sur le genre de rapports
qu’ils entretiennent avec leur parenté.
ii) En revanche, la densité relative des contacts et la cohésion des li-
gnées sont fortement associées à la typologie. En ce qui concerne la den-
sité des contacts, le sens de la corrélation correspond à ce que l’on pouvait
attendre : le type « matrifocal » se retrouve davantage lorsque les contacts
sont proportionnellement plus nombreux dans la lignée maternelle (50 %),
le type « bilatéral » lorsque la lignée paternelle est plus fréquentée (42 %)
et le type « détachement » dans les réseaux à faible densité (58 %)
(tableau 12) (**) (23) . S’agissant de la cohésion (tableau 13) (**), on
constate tout d’abord que le type « matrifocal » prédomine lorsque la
cohésion du réseau paternel est faible et que celle du réseau maternel est
forte. Le type « bilatéral » est également fortement sensible à la cohésion
de la lignée paternelle mais beaucoup moins à celle de la lignée mater-
nelle. Enfin le type « détachement » est très présent en cas de faible cohé-
sion maternelle alors que le degré de cohésion paternelle ne l’affecte
pas (24).

(23) Le V de Cramer s’élève à 0,30.


(24) Le V de Cramer est de 0,37 pour la lignée maternelle, et de 0,39 pour la lignée pater-
nelle.
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 533

TABLEAU 12.– TYPES DE LIENS AVEC LA PARENTÉ SELON LA DENSITÉ RELATIVE


DES CONTACTS ENTRE LIGNÉES

Densité relative des contacts


Types Densité globale faible Densité prédominante Densité prédominante
(dans les deux lignées) dans la lignée paternelle dans la lignée maternelle
I. Matrifocal 16 % 9% 50 %
II. Bilatéral 27 % 42 % 25 %
III. Détachement 58 % 49 % 26 %
Total 24 % 23 % 53 %
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

TABLEAU 13.– TYPES DE LIENS AVEC LA PARENTÉ SELON LA COHÉSION, PAR LIGNÉE
Cohésion au sein de la lignée Cohésion au sein de la lignée
Types maternelle paternelle
Faible Forte Faible Forte
I. Matrifocal 15 % 41 % 51 % 22 %
II. Bilatéral 19 % 33 % 9% 42 %
III. Détachement 65 % 27 % 40 % 36 %
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
Total 28 % 72 % 42 % 58 %
Champ : membres du premier cercle de parenté biologique, hors famille nucléaire.
Source : enquête sur le lien de parenté dans les jeunes générations suisses, 1997.

Conclusion
La structuration des liens de parenté confirme dans la jeune généra-
tion deux caractéristiques mises en évidence dans de nombreux travaux
auprès de la génération-pivot. Il s’agit en premier lieu de la prédominance
de la lignée maternelle sur celle du père dans les liens familiaux. Elle se
traduit, entre autres, dans nos résultats par le type de relations que l’on a
qualifié de « matrifocal » (qui regroupe un tiers des répondants) et par le
fait qu’un type symétrique – « patrifocal » où la lignée paternelle serait
préférentiellement activée dans les contacts et échanges – n’ait pas émergé
de nos données. Cette latéralisation maternelle paraît donc bien constituer
un trait persistant et provient sans doute du rôle moteur des femmes : elles
apparaissent clairement comme les premières artisanes de la construction
des liens et échanges familiaux (Bertaux-Wiame, 1985 ; Coenen-Huther,
Kellerhals et von Allmen, 1994 ; Déchaux, 1990 ; Pitrou, 1992).
En second lieu, on retrouve également un primat de la verticalité
dans les échanges tant dans la lignée paternelle que maternelle. Il faut se
rappeler que, historiquement, ce primat possible des grands-parents sur les
autres parents est récent : en effet, ce n’est qu’en raison des transforma-
tions démographiques que trois, voire quatre générations peuvent
aujourd’hui se côtoyer (Attias-Donfut, 1988) et ce, durant un nombre
534 R. HAMMER et al.

d’années suffisant pour que des échanges et sentiments significatifs


puissent se développer (Attias-Donfut et Segalen, 1998 ; Bawin-Legros et
Gauthier, 1991).
En raison des caractéristiques spécifiques des jeunes que nous avons
interrogés, les résultats que nous présentons ici ne peuvent prétendre don-
ner une image représentative des liens que la jeune génération entretient
avec son réseau de parenté. De plus, le genre de questionnement que nous
avons retenu ne fournit qu’une image partielle d’une réalité complexe
puisque nous ne disposons que du point de vue du répondant. Une analyse
de réseau fournissant les appréciations d’autres membres de la parenté
permettrait à la fois d’objectiver les évaluations des jeunes et de mesurer
l’éventuelle réciprocité des sentiments et échanges décrits ici. Par ailleurs,
certains travaux montrent le rôle important des père et mère qui orientent
le genre de liens entre les jeunes et leur parenté plus éloignée (cf. Attias-
Donfut et Segalen, 1998, p. 116). Ce sont des aspects qu’il faudrait consi-
dérer pour aller plus loin dans l’analyse des relations intergénération-
nelles.
Nous avons par ailleurs constaté que deux caractéristiques associées
à la famille nucléaire ne jouent qu’un très faible rôle : il s’agit du divorce
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
des parents et du milieu social d’origine. Si ces résultats peuvent sur-
prendre, il convient cependant d’être prudent quant à leur interprétation.
On peut se demander si, en raison de la catégorie d’âge des répondants,
l’éventuel effet délétère du divorce ne se fera pas sentir plus tard dans la
vie (25) . L’absence de variations claires et systématiques entre milieux so-
ciaux doit également être relativisée car nos analyses sont basées sur la ca-
tégorie socioprofessionnelle du père (26) et ne prennent en considération ni
l’éventuelle hétérogamie sociale entre les parents des répondants – donc
l’éventuel écart social entre les deux lignées (27) –, ni le milieu social des
autres parents, notamment des grands-parents. On a toutefois vu que l’ori-
gine sociale avait une influence certaine sur la fonction normative, qui est
davantage le fait des familles occupant des positions sociales privilégiées,
ce qui illustre la diversité des enjeux des transmissions familiales. Cela ne
signifie pourtant pas que la « famille » est absente dans les autres milieux
sociaux ; sa place est différente et se manifeste sous d’autres formes (voir
par exemple Muxel, 1996 ; Pitrou, 1992).
Dans l’ensemble, nos analyses confirment qu’on ne peut pas parler
aujourd’hui d’une crise de la famille étendue, puisque plus de la moitié
des répondants entretiennent des relations régulières et variées avec un
certain nombre de parents. On ne peut donc ici qu’attester l’idée selon la-
quelle la famille élargie peut fournir pour l’individu un ancrage symbo-

(25) Par ailleurs, nous ne disposions pas d’informations sur l’âge qu’avait le répondant au
moment du divorce intervenu entre son père et sa mère.
(26) Pour une critique de la seule prise en compte de cet indicateur, voir Percheron (1991,
p. 184).
(27) Pitrou (1992, p. 49 ; 99-100) montre que les « mésalliances », particulièrement pour
les filles, produisent souvent des ruptures dans les relations familiales.
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 535

lique, et ceci même dans les jeunes générations. Certains ont même
suggéré que la fonction identitaire ou subjective de la famille et de la pa-
renté est appelée à se renforcer aujourd’hui (Déchaux 1990 ; Kellerhals,
1997 ; Muxel, 1996). Cependant, on l’a vu, plus de quatre répondants sur
dix se trouvent en situation de « détachement », ce qui renvoie au fait que
des liens de parenté caractérisés par une certaine distance et froideur
constituent aussi une réalité bien présente. En fin de compte, cet éclairage
partiel auprès de la jeune génération montre qu’il convient de ne pas se
leurrer ; on ne peut indiscutablement ni parler d’un retour de la famille tra-
ditionnelle, ni d’un éclatement du groupe familial : on a bien affaire de
nos jours à une hétérogénéité des relations à la parenté et des rôles qu’elle
joue pour les individus.

RÉFÉRENCES

ATTIAS-D ONFUT Claudine, 1988, Sociologie des générations : l’empreinte du temps, Paris, Puf.
ATTIAS-D ONFUT Claudine (éd.), 1995, Les solidarités entre générations, Paris, Nathan,
coll. « Essais et Recherches ».
ATTIAS-D ONFUT Claudine, SEGALEN Martine, 1998, Grands-parents. La famille à travers les gé-
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
nérations, Paris, Odile Jacob.
BAWIN-LEGROS Bernadette, GAUTHIER Anne, 1991, « Les grands-parents dans la dynamique
familiale », dans Bawin-Legros Bernadette, Kellerhals Jean (éds) Relations intergénéra-
tionnelles. Parentés-Transmission-Mémoire, actes du Colloque de Liège 17-18 mai 1990,
Association internationale des sociologues de langue française et Association des socio-
logues belges de langue française, p. 141-154.
BERTAUX-WIAME Isabelle, 1985, « Mémoire et récits de vie », Pénélope, n° 12.
B LÖSS Thierry, 1997, Les liens de famille. Sociologie des rapports entre générations, Paris, Puf.
B ONVALET Catherine, MAISON Dominique, LE Bras Hervé, CHARLES Lionel, 1993, « Proches et
parents », Population, 48 (1), p. 83-110.
BOZON Michel, VILLENEUVE-G OKALP Catherine, 1994, « Les enjeux des relations entre généra-
tions à la fin de l’adolescence », Population, 49 (6), p. 1527-1556.
COENEN-H UTHER Josette, KELLERHALS Jean, VON A LLMEN Malik, 1994, Les réseaux de solidarité
dans la famille, Lausanne, Éditions Réalités sociales.
COENEN-H UTHER Josette, 1994, La mémoire familiale : un travail de reconstitution du passé,
Paris, L’Harmattan.
D ÉCHAUX Jean-Hugues, 1990, « Des relations de parenté inédites ? », Esprit, juillet-août, p. 91-
105.
G OKALP Catherine, 1978, « Le réseau familial », Population, 33 (6), p. 1077-1093.
G OTMAN Anne, 1988, Hériter, Paris, Puf.
K ELLERHALS Jean, TROUTOT Pierre-Yves, LAZEGA Emmanuel, 1984, Microsociologie de la fa-
mille, Paris, Puf, coll. « Que Sais-Je ? ».
K ELLERHALS Jean, 1997, « Individu, personne, sujet : la formation de l’identité dans les familles
contemporaines », dans Streichen R., Servais P. (dir) Identification et identité dans les fa-
milles. Individu ? Personne ? Sujet ?, Bruxelles, Academia Bruylant, p. 59-77.
K ELLERHALS Jean, FERREIRA Cristina, PERRENOUD David, 1999, Les langages de parenté : une
étude exploratoire des types de construction identitaire dans la famille et la parenté,
Genève, rapport final au Fonds national suisse de la recherche scientifique, ronéo.
LEE Gary R., 1980, « Kinship in the Seventies : A Decade Review of Research and Theory »,
Journal of Marriage and the Family, 42, n˚ 1, p. 923-934.
LITWAK E., 1960a, « Occupational Mobility and Extended Family Cohesion », American Socio-
logical Review, 25, p. 9-21.
LITWAK E.,1960b, « Geographical Mobility and Extended Family Cohesion », American Socio-
logical Review, 25, p. 385-394.
M UXEL Anne, 1996, Individu et mémoire familiale, Paris, Nathan.
536 R. HAMMER et al.

P ERCHERON Annick, 1991, « La transmission des valeurs », dans de Singly François,


Commaille Jacques (éds), La famille, l’état des savoirs, Paris, La Découverte, p. 183-
193.
P ITROU Agnès, 1992, Les solidarités familiales, Toulouse, Privat, coll. « Époque » [2e édition].
ROUSSEL Louis, 1976, La famille après le mariage des enfants. Étude sur les relations entre gé-
nérations, Paris, Puf-Ined.
ROUSSEL Louis, 1989, La famille incertaine, Paris, Odile Jacob.
S EGALEN Martine, 1981, Sociologie de la famille, Paris, Armand Colin.
S EGALEN Martine, 1991, « Les relations de parenté », dans de Singly François,
Commaille Jacques (éds), La famille, l’état des savoirs, Paris, La Découverte, p. 232-
238.
S INGLY François de, 1991, La famille, l’état des savoirs, Paris, Éditions La Découverte.
S INGLY François de, 1993, Sociologie de la famille contemporaine, Paris, Nathan.
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
LE LIEN DE PARENTÉ DANS LES JEUNES GÉNÉRATIONS SUISSES 537

H AMMER Raphaël, B URTON -J EANGROS Claudine, K ELLERHALS Jean.– Le lien de parenté


dans les jeunes générations suisses : lignées, structure et fonctions
Si de récents travaux sociologiques ont étudié les relations intergénérationnelles, le
rôle et la place de la parenté pour les jeunes générations demeurent moins explorés. Nous pré-
sentons ici les résultats d’une enquête relative au mode d’intégration de jeunes adultes (18-
25 ans) dans le réseau familial. On s’intéresse, d’un point de vue relationnel et normatif, à
l’importance subjective que revêt pour eux la parenté (hors famille nucléaire). Quelle est la
nature des contacts et la qualité des liens avec le groupe de parenté ? Comment se structurent
ces échanges ? Quelles fonctions spécifiques remplissent les divers membres de la parenté ?
Telles sont les principales lignes directrices que nous avons suivies dans nos analyses, en met-
tant un accent particulier sur l’appartenance lignagère et générationnelle comme facteur de
différenciation des relations familiales. Nous proposons une synthèse à l’aide d’une classifi-
cation hiérarchique qui permet de dégager une typologie empirique des liens que les jeunes
adultes entretiennent avec leur réseau de parenté.

H AMMER Raphaël, B URTON -J EANGROS Claudine, K ELLERHALS Jean.– Kinship relationships


in the young Swiss generations: lineage, structure and function
Although intergenerational relations have been the subject of recent sociological
research, the role and significance of kinship for the young generations has received less at-
tention. This article presents the results of a survey examining the ways in which young adults
(18-25 years) are integrated in the family network. The subjective importance of kin (outside
the nuclear family) for young adults is assessed from a relational and normative perspective.
What type of contacts and quality of relationships do they have with the kinship group? How
are these exchanges structured? What are the specific functions of the different members of
the kinship group? These are the main lines of inquiry around which the analysis is organized,
with particular emphasis on lineage and generation membership as a differentiating factor in
© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)

© Ined Éditions | Téléchargé le 27/04/2024 sur www.cairn.info via Sorbonne Université (IP: 134.157.146.115)
family relations. A synthesis is made using a hierarchical classification to produce an empiri-
cal typology of the relationships between young adults and their kinship network.

H AMMER Raphaël, B URTON -J EANGROS Claudine, K ELLERHALS Jean.– Los lazos de paren-
tesco entre las jóvenes generaciones suizas: linajes, estructuras y funciones
Las relaciones inter-generacionales han sido el tema de varios trabajos sociológicos re-
cientes, pero el papel del parentesco para las generaciones jóvenes se ha explorado poco. En
este artículo presentamos los resultados de una encuesta relativa al modo de integración de los
jóvenes adultos (18-25 años) en la familia. Nos interesa analizar, tanto desde un punto de vista
relacional como desde un punto de vista normativo, la importancia subjetiva que los jóvenes
otorgan al parentesco (más allá de la familia nuclear). ¿Qué tipos de contacto se establecen y
qué calidad tienen los lazos de parentesco? ¿Cómo se estructuran estos contactos? ¿Qué
funciones específicas cumplen los distintos parientes? Estos son los temas principales de
nuestro análisis, en el cual nos interesamos especialmente por el linaje y por la generación
como factor diferenciador de las relaciones familiares. Como síntesis, proponemos una clasi-
ficación jerárquica que permite establecer una tipología empírica de los lazos que los jóvenes
adultos mantienen con sus parientes.

Raphaël HAMMER, Uni-Mail, Département de sociologie, 40, bd du Pont-d’Arve, CH-1211 GENÈVE 4,


tél. : (+41 22) 705 81 96, Fax : (+41 22) 705 83 25, e-mail : [email protected]

Vous aimerez peut-être aussi