Note de Synthese - Pole Eco Conception - 2023
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LIMITES
PLANÉTAIRES
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©Pôle Eco-conception, réservé aux adhérents
Pôle Eco-conception
CCI Saint Etienne, photographie de ©Laurie Joanou
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TABLE DES MATIÈRES
RÉSUMÉ 4
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II. L’ÉCO-CONCEPTION ET SES STRATÉGIES AU SERVICE DE 13
L’ENVIRONNEMENT
12
1. L’éco-conception, une démarche bénéfique pour l’environnement 13
2. Les stratégies d’éco-conception et leurs limites
3. La question de la performance environnementale
en éco-conception 17
19
III. INTÉGRER LES LIMITES PLANÉTAIRES EN ÉCO-CONCEPTION 17
GRÂCE À L’AESA 20
Une étude de cas basée sur une robe made in France a été l’occasion de tester
une nouvelle méthode d’évaluation environnementale : l’évaluation absolue de la
soutenabilité environnementale (AESA). Ce travail a permis de dégager un scénario
d’utilisation durable pour la robe.
Malgré les limites induites par l’AESA, elle constitue une façon d’opérationnaliser le
cadre des limites planétaires, afin de disposer d’un outil permettant aux entreprises
de savoir si leur système mis sur le marché est soutenable ou non, au regard des
limites planétaires.
REMERCIEMENTS
À partir de ces résultats, une organisation peut décrire son système comme étant
« éco-conçu », ce qui lui permet de valoriser sa démarche dans le cadre de sa
politique RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) ou de sa communication
environnementale.
Dès lors, on peut se demander si ces améliorations successives sont suffisantes pour
répondre aux enjeux actuels de préservation de la biosphère pour un développement
durable. Serait-il possible d’écoconcevoir dans le but de respecter la biosphère ?
Ils peuvent être séparés en deux catégories, en fonction de la portée de leurs effets
en cas de perturbation de leurs équilibres :
• Le changement climatique
• L’appauvrissement de l’ozone stratosphérique
• L’acidification des océans
b. Les processus dont les effets sont plus localisés, mais qui exercent une
influence sur la capacité de la planète à faire face aux perturbations, réduisant
ainsi sa résilience :
La Terre fonctionne de telle façon que, même si les limites ne sont pas dépassées, il
y a quand même des signaux annonciateurs de dérèglement des équilibres naturels.
Il suffit de seulement se rapprocher de la limite, sans forcément la franchir, pour
d’ores et déjà observer des effets concrets de perturbation du système Terre.
La limite planétaire représente un point de bascule qui fait passer le système Terre
vers un état moins propice à la vie humaine. Le respect des frontières planétaires
permet donc, inévitablement, de respecter les limites planétaires, mais également
de ne pas subir les conséquences de la perturbation des équilibres des 9 processus
cités plus haut.
Pour maximiser les chances de ne pas atteindre la limite planétaire, il faut respecter
la frontière planétaire. Pour les scientifiques, la frontière planétaire est donc la
barrière entre l’espace de fonctionnement sûr et la zone à risque.
L’ensemble des seuils des frontières planétaires constitue alors ce qu’on appelle
l’espace de fonctionnement sûr et juste pour l’Humanité, le Safe Operating Space.
PROCESSUS ÉCOLOGIQUE
Régulation planétaire, avec des seuils continentaux ou planétaires
Espace opérationnel
de sécurité
Zone d’incertitude,
risque accru
( ex. 350 ppm CO2)
Niveau dangereux,
risque élevé
(ex. 550 ppm CO2)
D’une part, elle établit une base solide d’indicateurs, définissant ainsi les seuils
fondamentaux qui distinguent la zone à risque de l’espace de fonctionnement sûr.
D’autre part, cette quantification nous fournit une échelle de comparaison, nous
permettant de prendre pleinement conscience de la gravité des dépassements
pour les processus concernés. Elle joue également un rôle crucial dans la prévention
de l’aggravation de la situation pour les autres processus.
3. LA SITUATION ACTUELLE : OÙ EN
SOMMES-NOUS ?
Au fur et à mesure des années et du progrès scientifique, de nouvelles limites
planétaires ont pu être quantifiées. Le travail effectué au Pôle Eco-conception se
base sur le cadre conceptuel des limites planétaires tel que défini par Steffen et al.,
2015.
Respecter les frontières planétaires revient donc à aligner nos actions sur les
possibilités offertes par la Terre.
Le défi pour l’Humanité est donc de réussir à vivre dans les frontières planétaires.
Ce concept doit donc pouvoir s’intégrer dans un ensemble d’activités de
production :
Il est important de retenir ici que toute entreprise peut se lancer dans une démarche
d’éco-conception. La stratégie que la structure adoptera pourra dépendre de son
niveau d’expérience dans ce domaine et des objectifs de réduction des impacts
environnementaux, tels que définis par l’équipe projet.
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2. Les stratégies d’éco-conception
et leurs limites
Les stratégies d’éco-conception adoptées par les entreprises peuvent être
regroupées en plusieurs catégories :
Une autre limite réside dans le fait que la boucle ne peut pas être infinie sans perdre
en qualité au fil du temps. Par exemple, les cycles de recyclage successifs ont pour
conséquence la perte de qualité de la matière. Chaque étape de recyclage peut
entraîner une dégradation progressive des propriétés physiques ou chimiques des
matériaux, ce qui peut limiter leur réutilisation ou recyclage ultérieur.
Cette réalité met en évidence une tension entre la durabilité à court terme, obtenue
par la réduction de la demande de nouvelles matières premières, et la durabilité à
long terme, qui est limitée par la qualité et la durabilité des matériaux recyclés.
3. La question de la performance
environnementale en éco-conception
La question à se poser, concernant les limites des différentes stratégies, concerne
alors la notion de « système éco-conçu ». En effet, il n’existe à ce jour aucune exigence
quant à la performance environnementale attendue en sortie de processus d’éco-
conception. De plus, rien ne garantit qu’un système éco-conçu soit en phase avec
les seuils des limites planétaires.
C’est un concept qui découle du besoin de quantifier les pressions et les impacts
exercés par l’humanité sur la planète. La méthode AESA combine l’évaluation
environnementale et le cadre des limites planétaires – les limites physiques de la
planète au-delà desquelles il y a un risque de perturbation grave et irréversible
des systèmes terrestres qui soutiennent la vie – pour déterminer si l’impact d’un
système respecte les niveaux de pressions anthropiques que les systèmes naturels
peuvent supporter.
En effet, l’AESA est novatrice et pertinente dans le sens où elle permet de savoir si
un système permet de rester dans les limites planétaires, contrairement à d’autres
méthodes d’analyses qui ne permettent que de savoir si un système est relativement
plus soutenable qu’un autre système de référence. L’analyse n’est plus relative mais
absolue : soit on est soutenable soit on ne l’est pas.
Par exemple, il existe un « reste à émettre » pour des catégories telles que
l’utilisation de ressources minérales et métalliques, alors que la raréfaction des
ressources (combustibles fossiles et ressources minérales) ne fait pas partie des
limites planétaires. En effet, elle n’est pas considérée comme une menace pour la
stabilité du système Terre.
L’idée est de calculer le rapport entre les impacts et l’allocation définie par personne,
en adoptant une approche basée sur le principe égalitaire. Ensuite, cette allocation
peut être ajustée en intégrant d’autres principes de partage. Ceci permet d’adapter
le « budget écologique » pour qu’il reflète au mieux la réalité du système, en tenant
compte des enjeux spécifiques, du secteur d’activité, etc.
La seconde méthode consiste à réaliser une ACV basée sur les limites planétaires.
Cette approche vise à estimer les impacts d’un système en employant les unités
utilisées pour mesurer les variables de contrôle des limites planétaires. Cela requiert
une adaptation dans la façon de réaliser l’ACV. En effet, il faut alors déterminer la
fonction d’usage et la durée de vie du produit pour que la collecte des données
d’inventaire fournisse des résultats exploitables, pour pouvoir appliquer la méthode.
Dans le même temps, cette méthode impose d’attribuer une part de l’espace
de fonctionnement sûr au système étudié, en partant de l’échelle globale,
internationale. L’adaptation des limites planétaires à une échelle plus restreinte
s’impose. Cette descente d’échelle peut être réalisée en ayant recours aux principes
de partage mentionnés plus tôt.
Pour simplifier, la première méthode consiste à réaliser une ACV classique puis
de normaliser les résultats en utilisant des facteurs représentant la part d’espace
de fonctionnement sûr par personne, pour différentes catégories d’impacts.
La seconde méthode fait en sorte d’adapter l’ACV pour que les résultats soient
traduisibles dans les métriques des limites planétaires.
Dans le cadre d’un projet TREMPLIN, le Pôle a été sollicité pour réaliser l’Analyse de
Cycle de Vie simplifiée d’une robe de la marque Laurence Glorieux.
C’est à cette étape que les facteurs de normalisation entrent en jeu. Ces facteurs
ont été calculés grâce aux travaux d’un laboratoire de l’Union européenne (JRC) qui
a publié un ensemble de facteurs de normalisation qui sont, pour la plupart, dérivés
des limites planétaires.
Ceci permet de répartir l’espace de fonctionnement sûr entre chaque être humain.
Ensuite, plusieurs hypothèses ont été appliquées afin d’avoir un « budget écologique
personnel » plus précis car propre à la robe.
Ce « budget personnel » doit pouvoir être utilisé pour différents usages : se loger, se
nourrir, se déplacer, etc. Il a donc été réparti de façon à estimer un budget spécifique
pour subvenir au besoin de « se vêtir », en prenant en compte les émissions passées
des différents secteurs d’activité.
Le « budget écologique » attribué à ce besoin doit ensuite être réparti entre tous les
habits d’une même garde-robe personnelle. En effet, le budget par habit dépend
du remplissage de la garde-robe.
Les résultats
L’étude AESA réalisée ici a donc permis d’effectuer le rapport entre l’impact annuel
de la robe, selon 6 catégories d’impacts, avec les budgets calculés à partir des limites
planétaires correspondantes.
Au vu des hypothèses appliquées ici, le seul facteur sur lequel il est possible d’agir
pour obtenir un rapport R égale ou inférieur à 1 est le facteur β, lié à la fréquence
d’utilisation de la robe. Avec R ≤ 1, on s’assure que les impacts de la robe sont
inférieurs ou égaux à leur « budget associé ».
L’ensemble de ces hypothèses permet de dire qu’il faut porter la robe 38 fois
par an minimum pour qu’elle soit soutenable, pour l’ensemble des catégories
d’impact étudiées.
Changement climatique
1,00E+00
(kg éq.CO2)
L’Analyse du Cycle de Vie est l’outil le plus complet actuellement pour quantifier
les impacts environnementaux d’un système avec un périmètre précis et une unité
fonctionnelle qui lui est propre. Cet aspect peut être critiqué dans la mesure où l’ACV
devient alors assez subjective et dépend grandement des hypothèses appliquées
dès la première étape. L’ACV nous donne une modélisation à l’instant t, une image
de ce que sont les impacts environnementaux en lien avec une problématique
spécifique, en fonction du contexte de l’étude. L’ACV est donc elle aussi relative car
ses résultats dépendent des situations et des données d’entrée.
L’ACV ne permet pas non plus de disposer d’une priorité sur la criticité des impacts.
D’autant plus que tous les impacts sur l’environnement ne sont pas pris en compte,
notamment sur la biodiversité qui constitue une des limites planétaires largement
dépassée.
L’ACV fait perdre de l’information sur la localisation des impacts. Or, ceci est un
critère important car certaines limites sont quantifiées à l’échelle régionale. L’impact
d’un système pourrait donc participer au dépassement des seuils écologiques sur
une région donnée et/ou un espace localisé.
Aussi, une des limites de l’ACV à prendre en compte réside dans l’accessibilité de
ce type d’outil. En effet, l’ACV n’est pas réalisable pour toutes les organisations
car elles n’ont pas forcément les connaissances ou les ressources nécessaires pour
s’approprier la méthode et maîtriser les outils d’ACV disponibles (logiciel et base de
données).
Le résultat de l’AESA est à la fois dépendant des résultats d’ACV et de ses hypothèses,
et aussi des hypothèses appliquées afin de répartir l’espace de fonctionnement sûr
à la bonne échelle.
La plupart des méthodes d’évaluation visent une réduction d’impact relative par
rapport à une référence. Il n’y a aucune garantie que cette réduction soit suffisante
pour respecter les limites planétaires.
L’AESA, quant à elle, donne une distinction entre ce qui est soutenable et ce qui
ne l’est pas, indépendamment de toute référence liée au système évalué. Le but
n’est plus de faire « mieux », mais de faire « assez bien » pour que les frontières
et les limites planétaires soient respectées. Cette qualité peut être intéressante
à exploiter lors de la comparaison de solutions d’éco-conception afin de savoir
laquelle respecte son allocation d’espace de fonctionnement sûr.
L’AESA a donc pu être appliquée dans le cadre d’un premier diagnostic en éco-
conception. Ceci ouvre la porte à des possibilités pour fusionner une approche
absolue de la soutenabilité environnementale avec une démarche d’éco-conception.
La question qui se pose alors concerne la meilleure façon d’intégrer ces limites
globales à l’échelle du système (produit, service, système), de façon pertinente et
opérationnelle.
La discussion est ouverte avec les organisations afin de déterminer les attentes
concernant la meilleure façon de tendre vers le respect des frontières planétaires
au sein des activités humaines.