Métabolisme Du Fer

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Objectifs du cour :

1- Enumérer les sources et les besoins en Fer.


2- Enumérer les fonctions biologiques et l’homéostasie du Fer.
3- Préciser la toxicité et la carence du Fer.
4- Enumérer les pathologies du fer et leurs étiologies.
5- Préciser les mouvements du Fer dans les anémies ferriprives ou
l’hémochromatose.

Plan :

I. Introduction
II- Métabolisme du fer
1- Répartition du fer dans l’organisme
2-Cycle du fer
3- Besoins en fer de l’organisme
4- Les sources du fer
5- Absorption intestinale du fer
6- Transport plasmatique du fer et captation cellulaire
7- Métabolisme intracellulaire du fer
7-1- Utilisations métaboliques = pool fonctionnel
7-2- Stockage du fer
III. Exploration du métabolisme du fer
IV- pathologies
1- Carences en fer
2- Surcharges en fer
3- Cas des anémies inflammatoires
Exploration du Métabolisme du Fer
I. Introduction
Le fer, dont le symbole chimique : Fe, est un oligo-élément indispensable à l'organisme, grâce
à sa faculté de transport d’oxygène par le biais de l’hémoglobine et sa faculté de transfert
d’électron (pouvoir redox) il est également indispensable à diverses réactions enzymatiques
(élément constitutif de plusieurs enzymes produites au niveau des mitochondries et à la
synthèse de l’ADN).

A côté de son rôle bénéfique, le fer peut aussi représenter un danger réel pour la cellule
puisqu’il est capable, en participant à des chaines de transfert d’électrons, de générer des
radicaux libres

II- MÉTABOLISME DU FER

1. Répartition du fer dans l’organisme

Le nombre atomique de l’élément fer est 26, sa masse atomique relative est de 55,85.

Le pool de fer chez l’adulte normal est de 3 à 5 g, répartis entre le fer ferreux : Fe2+ contenu
dans des protéines à structure héminique (environ 65 %) et le fer ferrique : Fe3+, non
héminique représenté essentiellement par le fer des réserves.

Dans l’organisme, le fer n’existe pas physiologiquement sous forme libre ionisée et il est très
faiblement soluble au pH de l’organisme

2. Cycle du fer

Plus de la moitié du fer de l'organisme est contenu dans les globules rouges (GR) au sein de
l'hémoglobine (Hb).

25 à 30 mg de fer sont recyclés chaque jour à partir du fer héminique et couvrent les besoins
de l’érythropoïèse. L’hémoglobine renferme 0,34 % de fer, donc 1 ml d’hématies correspond
à environ 1 mg de fer.

Les hématies en fin de vie et quelques érythroblastes médullaires (par inefficacité


érythropoïétique) sont phagocytés par les macrophages de la rate, du foie ou de la moelle
osseuse.
Par le complexe de l’hème oxygénase, l’hémoglobine est dégradée ; la partie héminique est
transformée en bilirubine avec libération de fer ferreux Fe2+ qui est alors :

– soit stocké sous forme de ferritine ou d’hémosidérine ;

– soit, il est pris en charge dans le plasma par la transferrine (normalement saturée au tiers de
ses capacités de transport) transféré vers le plasma par la ferroportine.

Pour que le fer soit fixé à la transferrine plasmatique, interviennent :

- l’héphaestine et la céruléoplasmine, qui réoxydent le fer en Fe 3+,

- la ferroportine, qui assure le transport transmembranaire du fer vers le plasma

Le fer plasmatique est à un carrefour d’un double cycle externe (absorption/excrétion) et


interne (fer des hématies et des réserves).

Pour le cycle interne, le fer plasmatique lié à la transferrine permet les échanges permanents
entre trois tissus : moelle osseuse avec ses précurseurs érythropoïétiques et hématies,
système réticulohistiocytaire (SRH) et foie. La plus grande part est acheminée vers la moelle
osseuse pour l’érythropoïèse. Le passage direct du fer de la ferritine des macrophages de la
moelle osseuse vers les érythroblastes est un phénomène mineur.

Le fer du compartiment plasmatique est donc une plaque tournante indispensable à


l’érythropoïèse. Quantitativement très faible (20 μmol/L), le pool du fer plasmatique est
renouvelé en moyenne dix fois par jour, du fait des échanges entre les différents secteurs.

Figure : Cycle du Fer


3. Besoins en fer de l’organisme

Chez l’adulte normal, les pertes quotidiennes en fer sont compensées par un apport
alimentaire équivalent. Il n’y a pas de régulation de l’élimination : il y a donc risque de
déséquilibre vers une carence martiale lorsque les pertes sont augmentées.

Les pertes d’environ 1 mg/j sont régulières : pour 35 % par desquamation cutanée, perte des
phanères et élimination urinaire (mineure), et pour 65 % par voie digestive (sécrétion et
desquamation). Il peut y être associé des pertes épisodiques par menstruations ou
hémorragies.

Les besoins quotidiens sont d’environ 1 mg chez l’homme, 2 mg chez la femme.

Ils sont augmentés au cours de la grossesse ; de 3 mg/j aux premier et deuxième trimestres
(augmentation de la masse globulaire de la mère, formation du placenta et constitution de la
masse sanguine et des réserves fœtales prioritaires), 10 à 20 mg/j deviennent nécessaires au
dernier trimestre. Une grossesse nécessite environ 500 mg de fer.

L’allaitement amène aussi une augmentation des besoins.

Chez l’enfant (surtout les trois premières années de la vie) et l’adolescent, les besoins sont
augmentés par accroissement de la masse sanguine.

4. Les sources du fer

Ce sont les macrophages et les entérocytes qui fournissent du fer à l’organisme, faisant
intervenir une multitude de protéines spécifiques.

a- Source endogène : les macrophages

éme
Environ 1/200 du fer total de l’organisme circule dans le sang, la principale source de ce
fer biodisponible circulant provient du recyclage du fer contenu dans l’hémoglobine des
hématies sénescents lors de l’érythrophagocytose par les macrophages de la rate, le foie et
la moelle osseuse, le contrôle du relargage de ce fer dans la circulation systémique, est la clé
de l’homéostasie du fer .
b- Source exogène : les entérocytes

Le fer exogène provient de l’absorption digestive du fer alimentaire héminique ou non


héminique au niveau du duodénum et la partie haute du jéjunum, cette absorption compense
la quantité de fer éliminée chaque jour (1mg) par les cellules intestinales sénescentes, les
squames de la peau, les secrétions biliaires, salivaires et urinaires.

Les nutriments apportent 10 à 20 mg de fer sous forme héminique ou non héminique dont
seulement 1mg est absorbé.

Le fer non héminique représente 9/10 ème du fer alimentaire et provient des aliments d’origine
végétale et produits laitiers.

Le fer héminique représentant 1/10ème des apports alimentaires et provient des aliments
d’origine animale : viandes, volaille, poisson.

5. Absorption intestinale du fer

Par une alimentation équilibrée, les apports quotidiens sont d’au moins 10 mg, voire jusqu’à
20 mg, dont 5 à 10 % seulement seront absorbés pour ne couvrir que les pertes, le reste étant
éliminé par les selles.

L’absorption est particulièrement intense au niveau du duodénum, mais elle est possible au
niveau du jéjunum.

La biodisponibilité du fer intestinal dépend de sa forme physicochimique et de la présence


éventuelle de substances alimentaires pouvant modifier son absorption de façon positive ou
négative.

Deux règles président : le fer ferreux est mieux absorbé que le fer ferrique ; le fer d’origine
animale est mieux absorbé que celui d’origine végétale ; donc qualité plutôt que quantité.

5.1. Facteurs modulant l’absorption

■ Fer non héminique (inorganique)

Constitué d’ions Fe3+ liés à des molécules organiques, il compose la majeure partie du fer
alimentaire ; il représente 100 % du fer des végétaux et 60 % de celui des viandes et œufs.
Il est solubilisé dans l’estomac sous forme de chlorure ferrique. Son absorption intestinale
nécessite sa réduction en Fe2+ , faisant intervenir :

1) la vitamine C (en formant un chélate soluble à pH acide),

2) les groupements thiols des peptides de digestion protéolytique (d’où la nécessité d’un
apport protéique minimum pour son assimilation),

3) une ferriréductase membranaire des entérocytes,

Cette absorption peut être modifiée par différents facteurs associés :

– toute substance alcalinisant le contenu stomacal ou susceptible de former des complexes


avec ce fer limite son absorption : ainsi tanins, phytates, phosphoprotéines du jaune d’œuf,
phosphates et oxalates (abondants dans certains végétaux) et fibres alimentaires la diminuent
en créant des chélates insolubles ;

– indirectement l’éthanol (en stimulant la sécrétion d’HCl par l’estomac) favorise l’absorption
du fer ;

– en revanche, la sécrétion de bicarbonates par le pancréas la diminue (par augmentation du


pH intestinal)

– il faut aussi noter que la cuisson des aliments diminue la quantité de vitamine C.

■ Fer héminique

Il est retrouvé exclusivement dans les aliments d’origine animale. L’effet des protéases
digestives (notamment la pepsine) aboutit à la scission de l’hémoglobine avec libération du
fer qui se complexe à des acides aminés pour favoriser son absorption.

D’ailleurs, les glutamates et fumarates ferreux sont des formes médicamenteuses utilisées
pour le traitement des carences martiales. Lié à l’hème, il est soluble au pH de l’intestin et son
absorption n’est pas modifiée par la nature du bol alimentaire. Ce fer est mieux absorbé0

5.2. Mécanismes de l’absorption intestinale du fer

Le fer ferreux pénètre par la bordure en brosse de la cellule intestinale, par fixation sur des
récepteurs DMT1 ou Divalent Metal Transporter 1, dont le nombre varie avec les besoins en
fer de l’organisme. DMT1 fait partie de la famille des transporteurs membranaires de cations
divalents de type SLC11a2 : il est associé à DAP (DMT1 Associated Protein La traversée de la
membrane se fait selon un phénomène actif.

DMT1 voit son expression fortement inductible par une carence en fer et la quantité de DAP
est régulée de façon post-transcription elle en fonction de la concentration du fer
intracellulaire.

• Dans la cellule de la muqueuse intestinale, le fer ferreux peut suivre deux voies en fonction
des besoins de l’organisme :

– soit il se lie à l’apoferritine pour former la ferritine, forme de stockage mobilisable.


Cependant cet excès entérocytaire de fer est transitoire du fait de la desquamation des
cellules de la muqueuse intestinale ;

– soit il est pris en charge par la ferroportine (FPN) qui le transporte au pôle basal de
l’entérocyte où il est oxydé par l’héphaestine en Fe3+.

L’héphaestine est une protéine à domaine d’ancrage membranaire de la famille des oxydases
cuprodépendantes. Il passera alors dans le plasma pour être pris en charge par la transferrine.

Figure : Mécanismes d’absorption du fer


5.3. Régulation

Il n’existe pas de moyen pour l’organisme d’éliminer le fer absorbé en excès au niveau de
l’intestin ou libéré par le recyclage des macrophages et une surcharge en fer de l’organisme
ne peut être évitée que par un contrôle fin de l’absorption intestinale et du recyclage
macrophagique. Les mécanismes de régulation de l’absorption intestinale sont restés
longtemps méconnus, mais la découverte de l’hepcidine, un peptide circulant qui joue un rôle
majeur dans l’homéostasie du fer, a permis de comprendre ces mécanismes.

a. L’hepcidine : est synthétisée au niveau du foie sous forme d’un pré-pro-peptide de 84 acides
aminés. Un peptide signal permet l’adressage dans le réticulum endoplasmique où la
maturation du pro-peptide par des enzymes de la famille des furines permettra la libération
et la sécrétion du peptide mature de 25 acides aminés. Ce peptide est rapidement éliminé
dans les urines.

Elle est particulièrement synthétisée au niveau du foie, mais aussi au niveau des adipocytes,
les macrophages et les cellules rénales. C’est une hormone hyposidéremiante qui réduit la
quantité de fer dans la circulation en empêchant sa sortie des cellules, particulièrement des
entérocytes, des macrophages et des cellules hépatiques. Ainsi dans les états de carence
absolue elle est diminuée induisant ainsi une augmentation de l’absorption intestinale du fer
et la libération de ce dernier à partir des macrophages. A l’inverse dans les états
inflammatoires l’hepcidine est augmentée et inhibe l’absorption intestinale du fer et sa
libération par les macrophages.

Dans les macrophages, l’hepcidine se fixe sur la FPN et entraîne son internalisation et sa
dégradation dans les lysosomes .Dans les cellules duodénales, plusieurs travaux récents ont
fait état d’un mécanisme différent, où l’hepcidine entraînerait dans un premier temps une
diminution de l’expression de DMT1 plutôt que celle de la FPN.

b. La protéine HFE

Cette protéine a été la première impliquée dans l’absorption du fer dès 1996, suite à la
découverte d’une mutation. Le gène HFE est localisé sur le bras court du chromosome 6. Il
code pour cette glycoprotéine de 343 acides aminés de distribution ubiquitaire mais localisée
préférentiellement au niveau des villosités duodénales. La protéine HFE, molécule HLA de
classe I like, se lie à la β2microglobuline. Ce complexe peut ainsi être véhiculé à la surface
cellulaire et s’associer au récepteur de la transferrine, diminuant ainsi l’affinité du récepteur
pour son ligand.

6. Transport plasmatique du fer et captation cellulaire

Dans le plasma, le fer est transporté par une β1glycoprotéine ; la transferrine ou sidérophiline.

Sa demi-vie biologique est d’environ une semaine et sa masse moléculaire 80 kDa (679 acides
aminés).

Elle est composée d’une seule chaîne polypeptidique portant deux chaînes glycaniques
identiques, riches en acide sialique.

Son gène est situé au niveau du chromosome 3. La synthèse a lieu essentiellement dans
l’hépatocyte, accessoirement dans les macrophages de la moelle osseuse ou de la rate.

La régulation de la synthèse hépatocytaire est fonction de la quantité de fer intra cellulaire


qui stimule la production des ARNm : une diminution des stocks induit une synthèse accrue
de transferrine et inversement.

Les œstrogènes naturels ou de synthèse stimulent sa synthèse.

La principale propriété de la transferrine est son aptitude à fixer le fer :

– à raison de deux atomes de fer maximum par molécule de transferrine : les deux sites de
fixation (un à chaque extrémité) sont équivalents mais diffèrent dans leur structure et leur
fonction ;

– sous forme Fe3+, cette fixation nécessitant obligatoirement la fixation d’un anion (HCO3– ou
CO-23

La transferrine peut aussi transporter le cuivre et le zinc.

Dans le plasma, la transferrine existe donc sous quatre formes :

l’apo transferrine, molécule dépourvue de fer, et trois formes de transferrine comportant 2


ou 1 atome de fer (sur le 1er ou le 2e site de fixation).

Le pool de transferrine véhicule environ 3,5 mg de fer mais dix fois plus sont nécessaires pour
la synthèse quotidienne d’hémoglobine, d’où un turn-over important.
À l’état physiologique chez l’adulte, la transferrine est saturée environ au 1/3 de sa capacité
(Capacité Totale de Fixation du Fer par la transferrine ou CTF). Les 70 % de sites demeurés
libres définissent la capacité latente de fixation (CLF).

Le rapport sidérémie/CTF, qui définit le coefficient de saturation (CS), est d’environ 30 %.

La transferrine n’est physiologiquement jamais saturée en fer, afin d’assurer sa prise en charge
et ainsi protéger les cellules contre son action toxique à l’état libre.

La captation du fer par les cellules (moelle osseuse, foie…) est médiée par un récepteur
cellulaire et se fait par endocytose du complexe (Fe 3+ - transferrine-récepteur de la
transferrine). Le pH cellulaire et la réduction du fer par une ferri-réductase entraînent la
libération du fer à partir de ce complexe. La protéine DMT1 transporte ensuite le fer vers le
cytoplasme. La vacuole d’endocytose transite vers la surface cellulaire pour permettre le
relargage de l’apotransferrine et le repositionnement des récepteurs sur la membrane

7. Métabolisme intracellulaire du fer

Dans le cytoplasme, le fer lié faiblement à des composés de faible masse moléculaire : citrate,
acides aminés ou oses, constitue le pool labile.

Il est en équilibre avec le fer entrant dans la cellule et le fer présent dans les molécules
fonctionnelles ou de stockage.

Sa concentration est contrôlée ; en effet, sous forme libre, il peut réagir avec l’eau oxygénée
cellulaire, être oxydé en Fe3+ en générant le radical hydroxyle HO très réactif et très toxique
pour la cellule. Le fer se destine à différentes utilisations selon le type cellulaire.

7.1. Utilisations métaboliques = pool fonctionnel

• 75 % du fer servent à la synthèse d’hémoglobine : dans les précurseurs médullaires


érythroblastiques, le fer entre dans les mitochondries où il peut être incorporé à la
protoporphyrine IX pour former l’hème.

Chez un adulte, pour les 7 g d’hémoglobine fabriqués par jour, 24 mg de fer sont nécessaires.
23 mg sont issus du catabolisme de l’hémoglobine dans le système réticulohistiocytaire, ce
qui explique que les besoins journaliers soient très faibles (environ 1 mg).
• une autre part du fer contenu dans le cytoplasme cellulaire est destinée à la synthèse des
autres protéines à structure héminique (myoglobine, cytochromes, catalases, peroxydases…)
et non héminique (enzymes ferrodépendantes telles la xanthine oxydase et les cyclo et lipo-
oxygénases).

7.2. Stockage du fer

Enfin dès que la concentration en fer cytoplasmique augmente, le fer est stocké afin de ne pas
être toxique. Les réserves de fer sont très variables d’un sujet à l’autre. Chez l’homme adulte,
elles sont de 0,8 g à 1,6 g mais seulement de 0,6 g à 0,9 g chez la femme.

Elles sont localisées principalement dans le foie et la rate, sous forme Fe3+, en réserve au sein
de deux protéines, la ferritine et l’hémosidérine, représentant respectivement 70 % et 30 %
du pool de stockage. La ferritine, forme de réserve prédominante dans le foie, représente la
forme rapidement mobilisable.

■ Les ferritines

La ferritine est une glycoprotéine hydrosoluble ubiquitaire constituée d’une coque protéique,
l’apoferritine délimitant une cavité centrale dans laquelle le fer se trouve sous forme d’oxydes
ferriques hydratés liés à des ions phosphate (polyhydroxyphosphate de fer ferrique). C’est une
forme hydrosoluble de stockage du fer, facilement mobilisable.

La ferritine peut emmagasiner jusqu’à 4 500 atomes de fer.

Dans les conditions physiologiques, les formes tissulaires ne sont saturées qu’à 50 %. Les
cellules se protègent ainsi de la toxicité du fer en l’emmagasinant dans ce noyau central (12 à
13 nm).

L’apoferritine est constituée de 24 sous-unités assemblées en une structure compacte. Il


existe deux types de sous-unités H et L codées par des gènes distincts, ne présentant que 50
% d’homologies de structure avec une structure tridimensionnelle très conservée.

La sous-unité H possède une activité ferroxydase nécessaire à l’oxydation du fer ferreux


cellulaire entrant par des canaux situés entre les sous-unités de l’isoferritine.

La sous unité L catalyse la formation du noyau ferrique dans la coque protéique. Toute entrée
de fer ionisé dans la cellule stimule la synthèse des sous-unités, principalement L.
Les iso-ferritines basiques, riches en sous-unités L, prédominent dans les tissus de stockage
(foie, rate, placenta), alors que les isoferritines acides, riches en sous-unités H, se rencontrent
dans les cellules des tissus n’ayant pas de fonction de stockage mais dans lesquelles il existe
un recyclage rapide du fer (érythroblastes, cellules malignes).

Figure : Structure de la Ferritine

Le fer des iso-ferritines des macrophages est le premier mobilisé pour participer à
l’érythropoïèse (après transfert dans le compartiment vasculaire et transport par la
transferrine) ;

Le fer des hépatocytes n’est mobilisé que si le stock macrophagique est épuisé.

La libération du fer stocké dans la ferritine demande un système d’oxydoréduction de Fe3+ en


Fe2+ ; dans les macrophages, la réduction se fait par la vitamine C ; dans les hépatocytes, par
une ferriréductase ; le glutathion est aussi un excellent réducteur cellulaire.

Le fer (Fe2+) traverse la membrane cellulaire, se retrouve dans le plasma, où il doit être réoxydé
par la céruloplasmine pour être transporté par la transferrine.

■ L’hémosidérine

Elle présente de grandes analogies de structure avec la ferritine, mais s’en différencie par sa
plus grande richesse en fer (35 à 40 % de sa masse moléculaire). Elle est présente dans le
système réticulohistiocytaire et les macrophages hépatiques. Elle y est décelable
(contrairement à la ferritine) par la coloration de Perls qui correspond à la formation de bleu
de Prusse avec le ferrocyanure de potassium. Ce sont peut-être des molécules de ferritine
dégradées et agrégées.

Cette forme de réserve inerte, stable, ne libère que très lentement son fer : elle peut être
considérée plutôt comme une forme de dépôt.

III- EXPLORATION DU MÉTABOLISME DU FER

Généralement associée à une numération globulaire (concentration en hémoglobine et


indices érythrocytaires), elle peut être isolée ou en complément à des explorations d’organe

1. Dosage du fer sérique : Valeurs de référence : 12 à 30 μmol/L

2. Dosage de la transferrinémie, calcul de la CTF et du CS

• Capacité Totale de Fixation de la transferrine (CTF)

Sa dénomination anglo-saxonne est TIBC pour Total Iron Binding Capacity. Sachant qu’au
maximum deux atomes de fer sont fixés par molécule de transferrine dont la masse
moléculaire est 80 kDa,

CTF (μmol/L) = 25 × Transferrine (g/L)

• Coefficient de saturation de la transferrine (CS) = Fer sérique ∕ CTF × 100

Fer sérique et CTF exprimés en μmol/L.

Valeurs de référence

– Transferrine 2 à 4 g/L

– CTF 45 à 65 μmol/L

– Coefficient de saturation 25 à 35 %

Il n’y a pas de variation de la transferrinémie en fonction du sexe, ni au cours des cycles


nycthéméral et menstruel. Des variations de concentration sont liées à l’âge :

– à la naissance, valeur de moitié par rapport à celle de l’adulte ;

– diminution dans la première quinzaine de vie puis augmentation progressive pour atteindre
la valeur de l’adulte vers l’âge de 1 an ;
– après 60 ans, diminution progressive de la concentration.

La synthèse de la transferrine est induite sans modification de la sidérémie sous l’effet des
œstrogènes (grossesse, œstroprogestatifs).

Variations pathologiques de la transferrine

L’intérêt du dosage est double : appréciation des capacités de synthèse de transferrine par le
foie, en rapport avec les réserves en fer de l’organisme mais intérêt aussi dans les bilans
nutritionnel et inflammatoire.

L’hypertransferrinémie est la conséquence de l’augmentation de sa synthèse hépatique par


carence en fer entraînant une augmentation de la CTF et diminution du CS.

L’hypotransferrinémie se retrouve dans les situations de malnutrition, d’atteinte hépatique


grave par diminution de synthèse, de perte urinaire (syndrome néphrotique) mais aussi dans
le syndrome inflammatoire par hyper catabolisme.

L’atransferrinémie est une maladie grave qui se manifeste dès la naissance par une anémie
hypochrome grave car le fer absorbé n’est pas transporté efficacement et s’accumule dans les
organes (foie, reins, pancréas et cœur).

3. Dosage de la ferritinémie

L’étendue des zones de normalité indiquées par les laboratoires de biologie médicale varie de
façon importante. Nous pouvons donner à titre indicatif :

– Homme 30 à 300 μg/L

– Femme 20 à 200 μg/L

Les valeurs normales de ferritine pour des sujets cliniquement sains dépendent fortement de
l’âge et du sexe, sans variations circadiennes. Les valeurs sont plus faibles chez l’enfant par
rapport à l’adulte, hormis pendant le premier trimestre de vie. Chez la femme, pendant une
grossesse non supplémentée en fer, la concentration baisse de façon importante à partir du
troisième mois. La ferritinémie augmente après la ménopause ; il n’y a pas de modifications
sous traitement oestroprogestatif.
Variations pathologiques

La ferritinémie est corrélée au stock de fer ; on estime que 1 μg de ferritine correspond à 8


mg de fer de réserve. On observe donc :

– une diminution précoce dans les carences martiales ;

– une augmentation dans les surcharges en fer, mais aussi dans les syndromes inflammatoires
aigus et chroniques, les cytolyses hépatiques dont l’alcoolisme et dans l’insuffisance rénale
chronique ; cette augmentation est aussi observée lors de la maladie de Gaucher, maladie de
surcharge par déficit en glucocérébrosidase.

Dans la maladie de Still, au cours de poussées fébriles, la ferritinémie est fortement


augmentée avec une forte proportion de ferritine non glycosylée, ce qui en fait un marqueur
pathognomonique de cette maladie.

Lors du traitement martial, la ferritine est le dernier paramètre du bilan du métabolisme du


fer à se normaliser ; elle est le témoin des réserves tissulaires. L’interprétation peut être
difficile quand plusieurs pathologies coexistent. Le dosage de la ferritine érythrocytaire peut
parfois être effectué

IV- Pathologies

1- Carences en fer

Phénomène fréquent, faisant suite à des pertes supérieures aux entrées et/ou à une
consommation des réserves.

Les pertes excessives sont souvent liées à des saignements chroniques digestifs, génitaux et
urinaires.

Les besoins en fer sont accrus chez la femme lors du dernier trimestre de la grossesse, lors de
grossesses répétées et chez le jeune enfant présentant durant les premières années des
réserves faibles et recevant une alimentation lactée pauvre en fer.

Enfin une carence martiale peut s’installer suite à une malnutrition chez le sujet âgé ou par
malabsorption chez les gastrectomisés.

La carence s’installe progressivement en 3 phases :


– « anémie » latente avec seulement une ferritinémie abaissée ;

– « anémie » débutante, les autres paramètres du bilan du métabolisme du fer sont modifiés :
fer sérique abaissé, transferrinémie et CTF augmentées et CS abaissé ;

– anémie clinique et biologique : microcytaire hypochrome avec diminution de


l’hémoglobinémie, du volume globulaire moyen (VGM) et de la teneur corpusculaire moyenne
en hémoglobine (TCMH).

1-2- Diagnostic de l'anémie ferriprive

1-2-1- Clinique

L'anémie est souvent bien supportée, car elle s’installe progressivement. Elle peut parfois
avoir un retentissement plus important et révélateur : asthénie, dyspnée d'effort, tachycardie,
voire lipothymies.

La symptomatologie liée à la carence en fer elle-même est souvent modérée ou absente :


fragilité des phanères (ongle mous, cassants et concaves, cheveux secs et cassants); dans une
forme plus évoluée, peau sèche, fissure des commissures labiales (perlèche), signes
d'atrophie muqueuse digestive (glossite, dysphagie, brûlures œsophagiennes et gastriques).
Chez l'enfant surtout, la carence peut être responsable d’une tendance aux infections, d'une
fébricule, d'une splénomégalie discrète.

L'examen note la pâleur de la peau et des muqueuses et constate parfois les signes de fragilité
de la peau et des phanères.

Troubles du comportement alimentaire (la pica) induits par la carence en fer (et non le
contraire) : consommation de terre, de craie, de glaçon . . . qui disparaîtront après le
traitement martial.

1-2-2- Biologique

- Ferritinémie : meilleur marqueur du stock martial. C'est le premier élément à diminuer


lors d'une carence et le dernier à se corriger sous traitement :
- La Transferrine : augmente (4 g/l) pour essayer de compenser une carence.
- Récepteurs soluble de la transferrine : augmente .Examen plus sensible que le dosage
de la transferrine, mais effectué dans des laboratoires spécialisés.
Faux positifs : hémolyse, carence en B12 / folates, myélodysplasie, leucémie lymphoïde
chronique, vaquez, moyélofibrose.

- Capacité de fixation de la transferrine (CTF) : La transferrine étant augmentée et le


fer diminué : la CTF est augmentée
- Coefficient de saturation de la transferrine (CS) : La transferrine est augmentée et il
existe peu de fer : le CS est abaissé (< 20 %)
- Fer sérique (FS) : sa diminution (<10 µM) apparaît lorsque l'augmentation de la
transferrine n'a pas suffi.

↓Ferritine →↑transferrine, ↑ CTF ↓CS→ ↓Fer

2- Surcharges en fer

2-1- Caractéristique cliniques

Elles résultent principalement d'un dysfonctionnement organique provoqué par une


accumulation de fer.

- La cardiomyopathie provoque des troubles du rythme et une insuffisance cardiaque


œdémateuse : cause de mortalité importante.
- La croissance/ le développement sexuel sont ralentis chez l'enfant : On observe
souvent un retard pubertaire, un diabète sucré, une hypothyroïdie et une
hypoparathyroïdie.
- Le foie peut être le siège d'une hémosidérose et d'une cirrhose. Une hépatomégalie
globale, lisse, ferme, sans signe d'hypertension portale
- Des manifestations articulaires douloureuses par chondrocalcinose
2-2- Signes biologiques
- une sidérémie élevée (> 36 μmol/L) ; cependant de nombreux facteurs de variations
(nycthémère, alimentation, hémolyse, cytolyse) ne permettent pas d’affirmer ces
étiologies sur la valeur de ce seul paramètre ;
- une transferrinémie et/ou une capacité totale de fixation (CTF) diminuées ou normales
- surtout un coefficient de saturation (CS) augmenté (> 45 %), voire très augmenté
(souvent > 80 %), et ce précocement au cours de l’évolution de la maladie ;
- une ferritinémie élevée, classée en excès mineur (> 500 μg/L), moyen (500-1 000 μg/L)
et sévère (> 1 000 μg/L) ; ces concentrations sont à moduler en fonction du sexe, la
femme présentant des valeurs plus faibles.
- Anomalies endocriniennes, par exemple augmentation de la glycémie
2-3-Etiologies des surcharges en fer :
Les surcharges en fer peuvent être dues à une anomalie métabolique congénitale, les
hémochromatoses héréditaires, ou à une surcharge secondaire en fer, dans certaines
atteintes hépatiques, anémies ou suite à des transfusions…
A. Les hémochromatoses héréditaires :
■ Les formes adultes : la forme principale (environ 80 % des cas) est le Type 1-HFE. C’est
une affection héréditaire autosomale récessive dont le gène est localisé sur le bras court
du chromosome 6. C’est une mutation qui concerne le gène HFE qui code pour une
glycoprotéine membranaire qui se lie à la β2 microglobuline. Ce complexe se lie alors au
récepteur de la transferrine (TFr) et l'ensemble contrôle la captation du fer. Cette mutation
empêche la formation d'un pont disulfure dont l'intégrité est nécessaire à la structure
secondaire et tertiaire du domaine d'interaction avec la β2 microglobuline et ne permet
pas l'adressage de la protéine à la membrane plasmique.
Elle touche principalement le sexe masculin, chez la femme, les signes apparaissent plus
tard du fait des pertes mensuelles. Elle atteint seulement les populations caucasiennes. La
fréquence est de 1 ‰ dans la population générale.
Elle est consécutive à un dysfonctionnement de l’absorption du fer alimentaire (absorption
non liée aux besoins et multipliée par un facteur 3) et à une affinité excessive (multipliée
par un facteur 10) de ce métal pour le SRH et les cellules parenchymateuses hépatiques.
Cette maladie grave s’installe dès l’enfance, évolue lentement et aboutit à des
modifications morphologiques et fonctionnelles des tissus hépatique, pancréatique et
cardiaque.
Dans la forme habituelle, les premiers signes d’appel sont une asthénie, des arthralgies et
l’élévation des transaminases (ALAT et ASAT) sans étiologie hépatique et/ou cytolytique
reconnue.
Les signes cliniques révélateurs apparaissent seulement vers la quarantaine par des dépôts
de fer se traduisant par une mélanodermie grisâtre surtout des régions découvertes de la
peau et des muqueuses (bouche).
Une hépatomégalie est détectée, évoluant vers une cirrhose avec risque cancéreux.
Une biopsie hépatique met en évidence des dépôts de fer.
Au cours de l’histoire naturelle de la maladie, apparaissent aussi un diabète par atteintes
pancréatique et hépatique d’apparition tardive, une insuffisance gonadique par atteinte
hypophysaire, une atteinte cardiaque jusqu’à l’insuffisance cardiaque en phase terminale
de la maladie.
Dans la forme habituelle de la maladie, la survie est de 20 à 25 ans après l’apparition de la
mélanodermie, mais seulement de 5 à 6 ans après la découverte du diabète.
■ Les formes juvéniles :
Exceptionnelles, elles ont une traduction clinique précoce (avant la dixième année), une
évolution rapide et sévère (avec un tableau complet jusqu’à l’insuffisance cardiaque).
■ La prise en charge de ces pathologies est basée en fonction du CS (> 45 %) et de la
ferritinémie, mais aussi de la qualité de vie des patients et du pronostic vital.
Les saignées ont pour but de diminuer les réserves en fer puis de les maintenir à des valeurs
normales.
Une chélation par la déferoxamine n’est envisagée que dans les cas de contre-indications
à la phlébotomie.
Un conseil nutritionnel est proposé au patient avec notamment une réduction de l’apport
en vitamine C et de la consommation d’alcool.
B. Les surcharges secondaires en fer
Les surcharges secondaires en fer peuvent se classer selon la valeur du coefficient de
saturation de la transferrine (CS) :
• Un CS normal évoque :
– l’hépatosidérose ou hyperferritinémie dysmétabolique : fréquente, elle présente les
signes biologiques d’un syndrome métabolique d’insulinoressiatence (dyslipidémie,
diabète de type 2) associée à une surcharge modérée en fer et une hyper- ferritinémie
marquée contrastant avec un CS normal. Son traitement repose sur la prise en charge du
syndrome métabolique, le nombre de saignées étant restreint ;
– l’acéruloplasminémie héréditaire, exceptionnelle associant aux troubles de
l’hémochromatose, des troubles neurologiques.
• Un CS augmenté s’observe dans :
– des surcharges par supplémentation martiale excessive ;
– les anémies hémolytiques et les dysérythropoïèses ;
– les thalassémies ;
– les transfusions mal conduites dans le cadre de traitement de maladies hématologiques
incluant les causes précédentes et les hémoglobinopathies ;
– des hépatopathies de causes diverses (alcool, virus notamment).
3. Cas des anémies inflammatoires
Dans les syndromes infectieux sévères, les syndromes inflammatoires chroniques, les
néoplasies, une anémie se développe, avec augmentation de la vitesse de sédimentation
(VS) et de la C- Réactive protéine (CRP).
Le fer provenant de l’hémolyse physiologique est mal recyclé et reste piégé dans les cellules
du SRH ; la concentration de la transferrine plasmatique diminue par exacerbation de son
catabolisme, alors que sa biosynthèse est normale voire augmentée.
Au début, l’anémie est normochrome, normocytaire légèrement hyposidérémique ; puis
elle évolue vers une anémie hypochrome microcytaire et hyposidérémique. Sidérémie et
capacité totale de fixation de la transferrine étant toutes deux abaissées, le coefficient de
saturation reste normal. La ferritinémie est souvent (modérément) augmentée et cela sans
rapport avec le fer des réserves : par sécrétion dans les contextes infectieux (tuberculose
par exemple) ou inflammatoire (lupus érythémateux disséminé ou polyarthrite
rhumatoïde) ou par cytolyse lors des pathologies tumorales. Si une carence martiale est
associée, la ferritinémie est normale, voire diminuée et la transferrinémie augmentée. Le
traitement martial est cependant inefficace, voire dangereux car le fer apporté est
détourné vers les zones inflammatoires avides de fer.
CONCLUSION
Si pendant longtemps, l’étude des carences martiales s’est limitée au dosage du fer sérique
et de la capacité totale de fixation, le dosage sanguin de la ferritine permet maintenant une
prise en charge plus précoce et meilleure de ces pathologies.
Les recherches fondamentales menées durant la dernière décennie ont permis d’élucider
les mécanismes biochimiques de l’absorption intestinale du fer et permettent de mieux
comprendre la physiopathologie des anomalies de surcharge.
Cependant de nombreuses pathologies associées générales (inflammation, syndrome
métabolique…) ou organiques (foie, rein…), peuvent modifier les paramètres du bilan
martial (fer sérique, CTF, CS et ferritinémie). Il faut donc rester vigilant dans l’interprétation
de ces paramètres de façon isolée.

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