Rapport Record12-0237 1A
Rapport Record12-0237 1A
Rapport Record12-0237 1A
RAPPORT FINAL
septembre 2014
www.record-net.org
Créée en 1989 à l’initiative du Ministère en charge de l’Environnement, l’association RECORD –
REseau COopératif de Recherche sur les Déchets et l’Environnement – est le fruit d’une triple
coopération entre industriels, pouvoirs publics et chercheurs. L’objectif principal de RECORD est le
financement et la réalisation d’études et de recherches dans le domaine des déchets et des pollutions
industrielles.
Les membres de ce réseau (groupes industriels et organismes publics) définissent collégialement des
programmes d’études et de recherche adaptés à leurs besoins. Ces programmes sont ensuite confiés
à des laboratoires publics ou privés.
Avertissement :
Les rapports ont été établis au vu des données scientifiques et techniques et d'un cadre réglementaire
et normatif en vigueur à la date de l'édition des documents.
Ces documents comprennent des propositions ou des recommandations qui n'engagent que leurs
auteurs. Sauf mention contraire, ils n'ont pas vocation à représenter l'avis des membres de RECORD.
Pour toute reprise d’informations contenues dans ce document, l’utilisateur aura l’obligation de
citer le rapport sous la référence :
RECORD, Les filières de valorisation du CO2. Etat de l'art et avis d'experts. Cas des activités
de traitement et valorisation des déchets, 2014, 246 p, n°12-0237/1A
© RECORD, 2014
Nous souhaitons tout d’abord remercier les membres du comité de suivi RECORD pour leur
disponibilité, leurs différentes contributions et leurs remarques pertinentes.
Ce comité de suivi était composé de :
Nous tenons aussi à remercier l’ensemble des experts scientifiques ayant participé à cette étude, et
notamment :
Géothermie profonde
- Nicolas TONNET, Service Recherche et Technologies avancées, ADEME (Angers)
Synthèse organique :
- Michel AZEMAR, Fédération française pour les sciences de la chimie
- Danielle BALLIVET-TKATCHENKO, CNRS-Université de Bourgogne (Dijon)
- Robert GRESSER, Solvay (Aubervilliers)
- Gérard MIGNANI, Solvay SOLVAY (Aubervilliers)
Minéralisation :
- Françoise BODENAN, BRGM
- Florent BOURGEOIS, Laboratoire de Génie Chimique, INP-ENSIACET (Toulouse)
- Michel GIMENEZ, Groupe Lafarge (Saint-Quentin)
Hydrogénation :
- Nathalie COLLIGNON, AREVA (Paris)
- Robert GRESSER, Solvay (Aubervilliers)
Méthanation :
- Pierre BAURENS, CEA (Grenoble)
- Laurent BEDEL, CEA (Grenoble)
- Boris BENSMANN, Institut Max Planck (Magdeburg)
- Vincent BOULANGER, Journaliste spécialisé en énergies renouvelables (Hambourg)
- Stephan RIEKE, ETOGAS (Stuttgart)
- Oliver STROHBACH, Audi (Ingolstadt)
- Manfred WAIDHAS, Siemens (Erlangen)
Reformage :
- Chakib BOUALLOU, Mines Paris Tech (Paris)
- Mehrdad NIKRAVECH, Laboratoire des Sciences des Procédés et des Matériaux (Paris)
Electrolyse :
- Loïc ANTOINE, ADEME (Angers)
- Pierre BAURENS, CEA (Grenoble)
- Lucas BERTRAND, ITM Power (Paris)
Culture de microalgues :
- Pierre CALLEJA, Fermentalg (Libourne)
- Jean Paul CADORET, IFREMER (Nantes)
- Thomas LASSERRE, Compagnie du Vent
- Jack LEGRAND, Laboratoire GEPEA (Saint-Nazaire)
- Christophe LOMBARD, Cimenterie Ciment Calcia (Mantes la Jolie)
- Jean-Philippe STEYER, Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement INRA (Montpellier)
Biocatalyse :
- Joel BARRAULT, Laboratoire LACCO (Poitiers)
- Frédéric MONOT, IFP Energies Nouvelles (Rueil-Malmaison)
- Denis POMPON, Laboratoire LISBP, INSA (Toulouse)
Sans oublier les aimables relecteurs de chapitres que nous remercions tout particulièrement :
Géothermie profonde
- Nicolas TONNET, Service Recherche et Technologies avancées, ADEME (Angers)
Synthèse organique :
- Danielle BALLIVET-TKATCHENKO, Institut de Chimie Moléculaire de l'Université de
Bourgogne – CNRS (Dijon)
- Robert GRESSER et Gérard MIGNANI, Solvay Research & Innovation - SOLVAY RHODIA
(Aubervilliers)
Minéralisation :
- Florent BOURGEOIS, ENSIACET - Institut National Polytechnique de Toulouse (Toulouse)
- Michel GIMENEZ, Directeur Projets CO2 & Innovation Industrielle chez Lafarge (Saint-
Quentin)
Hydrogénation :
- Robert GRESSER et Gérard MIGNANI, Solvay Research & Innovation - SOLVAY RHODIA
(Aubervilliers)
Méthanation :
- Pierre BAURENS et Laurent BEDEL, LITEN-DTBH, CEA (Grenoble),
- Vincent BOULANGER, Journaliste spécialisé en énergies renouvelables (Hambourg).
Reformage :
- Chakib BOUALLOU, Centre Energétique et Procédés (CEP), MINES ParisTech (Paris)
- Mehrdad NIKRAVECH, Laboratoire des Sciences des Procédés et des Matériaux, Université
Paris 13 - CNRS (Paris)
Electrolyse :
- Loïc ANTOINE, Direction de l'air, du bruit et de l'efficacité énergétique –ADEME (Angers)
Thermochimie
- Stéphane ABANADES, CNRS-Laboratoire PROMES
Culture de microalgues :
- Jean Paul CADORET, Laboratoire Physiologie et Biotechnologie des Algues - IFREMER
(Nantes)
- Jean-Baptiste BERARD, Laboratoire Physiologie et Biotechnologie des Algues - IFREMER
(Nantes)
Etude RECORD n° 12-0237/1A 4
PREAMBULE
La présente étude traite des différentes voies de valorisation du CO2 issu des activités de traitement et
de valorisation des déchets.
Ce rapport à été réalisé en intégrant différents avis d’experts contactés lors de journées
professionnelles ou par entretiens téléphoniques. L’ensemble des échanges est répertoriable via les
références bibliographiques.
Les retours d’experts spécifiques à un point particulier sont mentionnés en italiques dans le présent
rapport
Compte tenu de l’ensemble des sujets traités et du nombre de voies de valorisations du CO 2, les
résultats présentés ici restent non exhaustifs.
D’autres gaz à effet de serre tels que méthane (CH4) ou le protoxyde d’azote (N2O), sont émis de
façon représentative par la filière de valorisation des déchets mais ne font pas l’objet de cette étude.
En effet, l’étude s’est focalisée sur le CO2, gaz à effet de serre émis en plus grande quantité et qui
présente un large évantail de possibilités d’utilisations.
La présente étude s’appuie sur l’avis d’experts pour présenter différentes filières de valorisation du
CO2 issu des activités de traitement et de valorisation des déchets.
Emettre du CO2, principal gaz à effet de serre d’origine anthropique, est essentiellement perçu comme
une contrainte dans une activité industrielle, contrainte qui se traduit par des taxes, des
règlementations environnementales,… Pourtant, si on se place dans une logique d’économie
circulaire, il est possible de transformer la contrainte en atout grâce à la valorisation de ce produit
fatal qu’est le CO2. Actuellement, au niveau mondial, plus de 150Mt de CO2 seraient ainsi utilisées par
l’industrie. En France, les estimations d’émissions de CO 2 liées à l’activité de traitement de déchets
atteignent jusqu’à plusieurs dizaines de millions de tonnes selon les inventaires.
MOTS CLES
CO2, Déchets, valorisation, économie circulaire, Inventaire d’émission, Récupération Assistée des
Hydrocarbures, Géothermie profonde, Minéralisation ex-situ, Synthèse organique, Hydrogénation,
Méthanation, Reformage sec, Electrolyse, Thermochimie, Culture de microalgues, Biocatalyse
-------------------------------------------
SUMMARY
CO2 emitted from anthropic activities, is perceived as a weakness (e.g. taxes, environmental
regulations, impact on global warming ... ). However, in a perspective of circular economy, to re use
CO2 appears to be obvious. Currently, more than about 150 millions of tones of CO 2 are used by
industry worldwide. In France, estimates of CO2 emissions related to the activity “waste treatment” are
up to several tens of millions of tonnes according to emission inventories.
KEY WORDS
CO2 uses, waste, recycling, circular economy, emission inventory, Enhanced Oil Recovery, deep
geothermal, ex-situ mineralization, chemical synthesis, hydrogenation, méthanation, power to gas, dry
reforming, electrolysis, thermochemistry, microalgae, Biocatalysis
Le secteur de traitement des déchets ne fait pas exception à la règle puisque les divers procédés de
traitement thermique ou biologique de déchets aboutissent à la génération de CO 2. Quels que soient
en amont les efforts de réduction des quantités de déchets, d’éco conception, d’optimisation des
traitements, … du dioxyde de carbone est fatalement émis ce qui impliquera, de plus en plus, de
prendre des mesures de réduction en aval compte tenu des impacts sur le réchauffement climatique,
d’une fiscalité environnementale de plus en plus importante, etc …
Dans cette optique de limitation des émissions et dans une vision générale d’économie circulaire, le
CO2 peut être considéré comme un gaz d’intérêt industriel et/ou, comme une nouvelle source de
carbone pour l’élaboration de composés minéraux ou organiques, d’intérêt commercial. Les
débouchés et les surcoûts, associés à ces différents types de valorisations, restent, cependant, des
sujets en discussion.
L’objectif de cette étude est de réaliser, sur la base d'un état de l'art, un avis d'experts sur les voies
de valorisation du CO2, sur les procédés de transformation associés ainsi que sur le potentiel
d'émergence des différentes techniques.
Une première partie de ce rapport présente la filière déchet en termes de potentiel de production de
CO2. Plusieurs résultats d’inventaire d’émissions seront proposés et comparés à un inventaire réalisé
sur un périmètre exhaustif.
Dans la deuxième partie du rapport, les différentes voies d’utilisation du CO 2 sont décrites en
s’appuyant sur les retours de différents spécialistes du domaine. Ils mettront en lumière l’état des
connaissances actuelles sur des voies de valorisation du CO2 qui s’articulent en trois catégories : soit
directement sans transformation, soit modifié chimiquement, soit transformé biologiquement.
Enfin, la troisième partie propose succinctement un bilan sur les techniques de valorisation du CO 2 et
leurs potentiels.
En France, la production de déchets atteint selon l’ADEME près de 770 millions de tonnes en 2009
(1). Les déchets produits sont répartis en plusieurs catégories telles que les déchets ménagers et
assimilés (DMA), les déchets industriels ou d’activités, les déchets de l’agriculture et de la sylviculture
et les déchets de la construction et du secteur des bâtiments et travaux publics (BTP). La Figure 1
donne des ordres de grandeur des quantités produites par type de déchets.
Les DMA (Déchets Ménagers et Assimilés), sont composés à la fois de déchets produits par les
ménages (ordures ménagères et apports directs en déchetterie) et de déchets assimilés (de même
nature, en quantité comparable, collectés dans les mêmes conditions) produits par les
professionnels : industrie, artisans, commerçants, écoles, services publics, hôpitaux, services
tertiaires.
En 2009, les DMA représentaient 37 millions de tonnes de déchets en France.
Les déchets industriels sont ceux produits par l’industrie, le commerce, l’artisanat et les transports. Ils
se divisent en deux catégories : les déchets industriels « non dangereux » et ceux dangereux. La
première catégorie représente 98 millions de tonnes en 2009, alors que les déchets dangereux sont
de 8 millions de tonnes.
- Les déchets non dangereux sont en partie collectés avec les DMA, et ne présentent pas de toxicité
(mêmes modalités de traitement que les DMA). L’industrie agro-alimentaire (IAA) produit environ 45
millions de tonnes de déchets par an (matières organiques et terres). Le bois, les papiers et cartons
ainsi que les métaux représentent les plus gros volumes de déchets industriels après l’IAA. On
retrouve ensuite les plastiques, le verre, le caoutchouc et les textiles.
La Figure 2 présente les quantités produites par type de déchets industriels non dangereux pour les
entreprises de 20 salariés ou plus en France en 2008.
Bois 5 530
Métaux 3 960
Déchets en mélange 2 160
Papiers cartons 1 998
Plastiques 467
Verre 305
Caoutchouc 81
Textile 23
Minéraux 2 311
Déchets alimentaires (*) 34
Déchets d'espace verts 17
Equipement hors d'usage 9
Véhicule mis au rebut 1
Figure 2 : Enquête sur la production de déchets non dangereux dans l’industrie manufacturière,
établissements de 20 salariés ou plus (hors agroalimentaire) en 2008 (2)
- Les déchets dangereux sont composés d’huiles usagées, de piles, d’amiante, de produits
phytosanitaires, d’emballages ou encore de déchets toxiques. Ils nécessitent des traitements
particuliers pour éviter toute pollution de l’environnement. Environ la moitié de ces déchets est ensuite
directement traitée par le producteur.
Les déchets issus des activités d’agriculture et de sylviculture sont estimés à environ 375 millions de
tonnes par an. On retrouve différents types de déchets au sein de cette catégorie. Les principaux sont
les biodéchets (déchets verts de récoltes et déjections animales), les plastiques agricoles usagés, les
emballages vides de produits phytosanitaires ainsi que les cadavres d’animaux (3).
Le Tableau 1 présente la répartition des quantités produites par type de déchets issus de l’agriculture
et de la sylviculture (hors déchets verts). Certaines sous-catégories ne sont pas mentionnées dans ce
tableau, les données n’étant pas connues et/ou les quantités insignifiantes.
En 2008, le secteur de la construction et du BTP a produit 254 millions de tonnes de déchets, dont
38,2 millions proviennent des activités du bâtiment (4). Au sein de celles-ci, les déchets sont répartis
en trois principales catégories : les déchets inertes, les déchets non dangereux et les déchets
dangereux.
Tableau 2 présente les déchets produits par le bâtiment en France en 2008 (4).
Tableau 2 : Déchets issus des activités du bâtiment et quantités produites en 2008 (4)
Tous les déchets ne représentent pas les mêmes enjeux. Certains, produits en grande quantité
comme certains déchets agricoles ne font pas l’objet de traitement particulier ou même de transport.
D’autres, au contraire doivent être transformés afin de limiter leurs effets néfastes sur l’environnement
(1).
Les installations de traitement des déchets ménagers et assimilés (DMA) font l’objet d’un
recensement spécifique de l’ADEME, au travers des enquêtes bisannuelles « ITOM »
(Installations de Traitement des Ordures Ménagères). Les quantités de DMA traitées par filière en
2010 sont présentées dans le graphique suivant sur la base des données collectées auprès des ITOM
(5).
La part des DMA traités par filière de traitement a évolué depuis 1990 comme le montre le graphique
suivant. Le stockage a diminué passant de 65% en 1990 à 42% en 2010. La part de l’incinération est
restée stable sur la période (30% en 1990 et en 2010), l’incinération sans récupération d’énergie
disparaissant peu à peu au profit de l’incinération avec récupération d’énergie. La part des procédés
biologiques, en particulier du compostage, a augmenté régulièrement pour atteindre plus de 13% en
2010 (6).
Les cartes suivantes (figures 5 à 7) montrent la diversité de traitement des déchets en fonction de leur
type et des régions. Trois types de déchets sont considérés ci-dessous : les ordures ménagères
résiduelles, les déchets collectés en déchetterie et les déchets ménagers et assimilés. On peut
observer la complexité de cette filière de traitement des déchets.
Figure 5 : Destination des Ordures Ménagères Résiduelles (OMR) par type de traitement en 2009
(7)
Figure 6 : Destination des déchets collectés en déchetterie par type de traitement en 2009 (7)
Bilan
®
Des statistiques nationales ADEME reprises par la méthodologie Bilan Carbone proposent une
répartition des traitements de déchets par type de filière :
Déchets alimentaires
Papier
Carton
Plastique
Verre
Métaux
Total
Mélange
Bois
Textile
Caoutchouc
Papier / Carton
Plastique
Verre
Métaux
Figure 9 : Répartition des filières de traitement de fin de vie des déchets industriels (9)
La présente section a pour but de proposer différentes estimations d’émissions directes et indirectes
de CO2 provenant de l’activité de traitement des déchets en vue de potentielles valorisations.
Remarque : le CO2 est le gaz à effet de serre émis en plus grande quantité. Les autres émissions de
gaz à effet de serre tels que le méthane (CH4) ou le protoxyde d’azote (N2O) sont représentatives
mais ne font pas l’objet de cette étude. Les renseignements sur ces gaz ne sont fournis qu’à titre
informatif.
Ces émissions de CO2 peuvent être comptabilisées dans des inventaires d’émissions à partir de
règles de calcul simples faisant appel à des facteurs d’émissions caractéristiques de la quantité de
CO2 émise par type de déchet et par type de traitement.
Un inventaire « classique » évaluera la quantité de gaz à effet de serre additionnelle ajoutée dans
l’atmosphère correspondant à l’activité humaine (origine fossile). Il ne comptabilisera pas le carbone
préalablement absorbé par le vivant et rapidement ré émis sous forme de CO 2 lors d’une dégradation
(origine biogénique).
Dans le cas de cette étude, ce sont les quantités réelles de CO 2 potentiellement utilisables qui seront
estimées (Cf. Figure 10).
Autres GES
(CH4, N2O) CO2 CO2
Le carbone d’origine fossile provient de réserves formées à des échelles de temps géologiques
(plusieurs millions d’années). A la vue de la lenteur de fossilisation de ce carbone et des faibles
échanges naturels entre les réservoirs fossiles et l’atmosphère, le carbone fossile est quasiment
définitivement piégé. L’homme, de par son activité, prélève ce carbone fossile sous forme de pétrole,
gaz naturel ou charbon et le réémet, après son utilisation, dans l’atmosphère en fin de cycle, sous
forme de CO2. Ainsi, la combustion de carburants fossiles (ou de composés dont le carbone est
d’origine fossile) perturbe le cycle du carbone et contribue à l’augmentation de l’effet de serre en
déséquilibrant trop rapidement le contenu en carbone des différents réservoirs de la planète.
CO2
Atmosphère Flux rapide de carbone
« biogénique » - Bilan neutre
CO2 Atmosphère (non comptabilisé dans les
inventaires d’émission de gaz à effet
de serre car équilibre entre
l’émission de CO2 et son stockage)
Activité
Flux lent de
humaine
fossilisation
Biomasse / Vivant Océans
Re largage rapide de
Carbone fossile Calcaires carbone fossile
(comptabilisé dans les
(Pétrole, Gaz naturel, (carbonate de inventaires d’émission)
charbon) calcium)
Dans le cas de la filière de traitement des déchets, les émissions de gaz à effet de serre se
composent de dioxyde de carbone (CO2) d’origine fossile ou biogénique et d’autres gaz à effet de
serre tels que le méthane (CH4) ou le protoxyde d’azote (N2O). Ces émissions interviennent lors de
différentes étapes de fin de vie et de transformation du déchet (Cf. Figure 12).
Tri Marché de
Déchet
l’occasion Transport /
Collecte Collecte
Centre de
regroupement Fonctionnement
(construction des
Ré intégration dans le processus fabrication
Combustion Combustion de
Incinération : Combustion N2O matière organique,
Valorisation énergétique boues de STEP …
Dégradation Dégradation
Compostage / Biogaz : anaérobie : aérobie, …
Valorisation biologique Méthane, Protoxyde
d’azote …
Recyclage :
Incinération :
transformation en
Valorisation énergétique
matière 1ère
Dégradation de
Dégradation
matière organique
anaérobie :
Stockage : déchet ultime directe (CO2 émis),
méthane
ou indirecte
(captage /
combustion de CH4)
Oui Non
Comptabilisation générale dans les inventaires de Gaz à
Effet de Serre
Figure 12 : Principaux gaz à effet de serre générés par la filière de traitement de déchets
(Compilation APESA) (9) (8) (10)
1
Dans la littérature récente, un nombre croissant d’études critiquent l’utilisation de ce principe de neutralité en montrant ses
limites et les conséquences sur les résultats type ACV et les conclusions qui en découlent. Deux principaux aspects font l’objet
de ces critiques : 1) les erreurs de comptabilisation et 2) l’absence de considération pour les aspects temporels.
Emission de CO2 liée à la combustion : Lorsque des composés combustibles sont incinérés, le
carbone qu'ils contiennent est pour l’essentiel libéré par la combustion sous forme de CO2. Dans les
inventaires d’émissions, ne sont comptabilisées que les émissions de carbone d’origine fossile
(principalement du plastique). A l’inverse, les déchets non combustibles tels que les métaux, le verre,
les minéraux (pierres, gravats, etc.) n’émettent pas de CO2 lorsqu’ils sont portés à haute température
en présence d’oxygène. Ils ne contribuent donc pas aux émissions directes.
Tableau 3 : Facteurs d’émissions utilisés dans la méthode Bilan Carbone® pour l’incinération de
déchets (8)
Emission de N2O liée à la combustion : elle est estimée à 11 kgeqCO2 pour tous les déchets
combustibles et/ou fermentescibles (8).
Théoriquement, tout le carbone présent dans la matière organique va se transformer en CO2 lors de la
combustion. Cette proportion de carbone est variable selon les substrats organiques mais varie de
l’ordre de 22 % Ms (boues urbaines) à 50 % MS (bois).
En fonction de la quantité de carbone contenue dans le substrat, des ordres de grandeur de quantité
rejetée de CO2 sont proposées :
Le protoxyde d’azote (N2O) est généralement formé à hauteur de 48 kgeqCO 2/tonne de matière brute
compostée) (9) (11) (6).
Compostage
La vapeur d’eau et le dioxyde de carbone sont les principaux gaz émis, en masse. Ils proviennent
directement de la biodégradation de la matière organique. En conditions suffisamment aérobies, donc
hors production conséquente de méthane, le CO2 constitue l’essentiel des pertes en carbone de la
matière compostée, quelques pourcents des pertes pouvant être liés aux autres espèces gazeuses ou
à de la lixiviation. Le CO2 émis est donc un bon indicateur de l’étendue de la biodégradation subie au
cours du compostage, le carbone constituant une part relativement constante de la matière organique
(13). Le carbone émis sous forme de CO2, étant d’origine biogénique, n’est pas comptabilisé dans les
bilans d’émission de gaz à effet de serre provenant du compostage (9).
Etude RECORD n° 12-0237/1A 21
Les émissions de CO2 sont liées à la dégradation aérobie de la matière et donc, la majorité de dioxyde
de carbone est émis pendant les premières semaines de compostage. Des facteurs d’émission à 6-8
semaines sont, en général, des bons indicateurs de l’émission globale. Les flux émis pendant les
premières semaines, permettent de connaître la cinétique du procédé. L’émission de ce gaz est liée à
la nature du déchet et sa cinétique à la gestion du procédé. Les facteurs d’émission retenus par la
dernière étude bibliographique de l’ADEME sont recensés dans le tableau suivant.
Méthanisation
La méthanisation est basée sur la dégradation par des micro-organismes de la matière organique, en
conditions contrôlées et en l’absence d’oxygène (réaction en milieu anaérobie, contrairement au
compostage qui est une réaction aérobie). Cette dégradation aboutit à la production de biogaz,
mélange gazeux saturé en eau à la sortie du digesteur et composé d’environ 50 % à 70 % de
méthane (CH4), de 20 % à 50 % de gaz carbonique (CO2) et de quelques gaz traces (NH3, N2, H2S).
Des ordres de grandeur de quantité de CO2 potentiellement formé après méthanisation sont donnés
par type de substrat :
Tableau 7 : Ordre de grandeurs de potentiels de production de CO 2 (15)
Substrat Nombre MS MSV Corg Corg CH4 CO2 kg kg kg CO2/t
de (%PB) (%PB) (calcul) (calcul) (%) (%) CO2/t CO2/t MS
substrats (g/kg (g/kg PB MO
traités PB) MS)
Carton - Emballages 3 Moyenne 78,67% 64,83% 324 405 56% 44% 213 313 255
Ecart 28% 26% 132 35 2% 2% 116 80 74
type
Ordure ménagère 11 Moyenne 47,35% 22,29% 111 267 64% 36% 75 340 183
(procédés Divers : Tri
mécano biologique, Ecart 19,15% 8,20% 41 107 7% 7% 46 134 112
criblage, pressage ou type
absence)
Biodéchets (Déchets 35 Moyenne 42,50% 36,67% 183 445 64% 36% 190 488 433
alimentaires)
Ecart 25,76% 23,35% 117 80 7% 7% 161 134 148
type
Déchets verts, 14 Moyenne 27,78% 26,81% 134 384 63% 37% 45 216 183
tontes…
Ecart 10,73% 18,65% 93 96 6% 6% 16 91 72
type
Boues de STEP 46 Moyenne 13,23% 9,54% 48 368 72% 28% 21 192 150
industrielles (Agro
alimentaire, papeterie, Ecart 14,65% 10,59% 53 89 9% 9% 34 144 131
abattoir…) type
Boues de STEP 7 Moyenne 17,93% 13,49% 67 378 73% 27% 20 125 96
municipales (Pré
traitement par dégraissage / Ecart 6,86% 5,27% 26 22 8% 8% 15 80 64
dégrillage. Centrifugation) type
Lorsque ces matières sont enfouies, elles sont digérées par des bactéries, d’abord essentiellement
aérobies au moment de l’enfouissement (car de l’air est également enfoui avec les déchets), avec
émission de CO2, puis anaérobies ensuite, avec émissions de méthane.
Ces déchets comportent du carbone mobilisable par des bactéries (aérobies ou non). Il s’agit en
pratique essentiellement (11):
- des déchets alimentaires, déchets verts, déchets de jardin, …
- des papiers et cartons (fabriqués avec du bois, donc contenant du carbone biogénique),
- des textiles naturels.
La quantité du principal gaz à effet de serre formé, le méthane, est proportionnelle au carbone
mobilisable résiduel(10).
Le tableau ci-après résume, pour chaque type de déchet, les valeurs que l’on peut trouver dans la
littérature pour :
- la fraction de carbone biodégradable du déchet (le reste n’est donc pas disponible pour engendrer
du méthane)
- la fraction de ce carbone biodégradable qui méthanise, en moyenne.
Les données en bleu sont les hypothèses et résultats tirés des publications
Au sein de ces publications, il y a une relativement bonne concordance sur les valeurs telles que le
taux de méthane dans le biogaz (50%), la fraction de carbone biodégradable pour le papier (32% à
47%), la fraction de carbone biodégradable pour le carton (de l’ordre de 40%), la fraction de carbone
biodégradable pour les déchets alimentaires (15%).
La partie de carbone non transformée en méthane va se retrouver stockée sous terre : il s’agit d’un
puits de carbone d’origine biogénique.
Par convention, comme les inventaires d’émissions ne prennent pas en compte les émissions de CO 2
d’origine biogénique, ce stockage de carbone est considéré comme un « bénéfice » pour le bilan de
CO2 atmosphérique. Les facteurs d’émissions utilisés peuvent alors enlever aux émissions nettes de
méthane l’équivalent du carbone séquestré dans le sol. C’était le cas dans la méthodologie « Bilan
®
Carbone v6.1 » qui sous-estime les émissions physiques et réelles de méthane mais ce n’est plus le
®
cas dans la méthodologie actuelle « Bilan Carbone V7.1.041 »
Tableau 10 : Méthodologie Bilan Carbone® V6.1 - Facteurs d’émission pour les installations de
stockage sans captage (11)
Même si près de 100% des installations de stockage (ISDND) sont désormais équipées de dispositif
de captage du CO2, la proportion de méthane capté dépend de l’état d’exploitation du casier et du
type de couverture appliqué en fin d’exploitation :
2
Valeur recommandée par le GIEC et préconisée dans la méthode Bilan Carbone®
Etude RECORD n° 12-0237/1A 24
Taux de captage
de méthane dans
0 20 40 60 80 100 une ISDND
% % % % % %
35% sur un 65% sur un 70% : taux 85% sur un 90% sur un
casier en cours casier fermé moyen de casier fermé casier fermé
d’exploitation avec couverture captage en avec couverture avec couverture
temporaire France finale en argile géo membrane
Figure 13 : Taux de captage de méthane dans les ISDND équipées (16) (11)
®
Dans les inventaires d’émission comme le Bilan Carbone , la valeur moyenne de 70% est retenue.
®
Dans certains inventaires d’émission (ex : Bilan Carbone V6.1), cette quantité, transformée en
équivalent CO2 (PRG 100 ans) est réduite de la quantité d’équivalent CO 2 séquestré (*)
Des valeurs moyennes utilisées pour d’autres types de déchets fermentescibles sont synthétisées
dans le tableau ci-dessous :
Ordures
Déchets ménagères
Carton Papier
alimentaires brutes
moyenne
Contenu de carbone biodégradable (kg C / 1000 kg de déchets bruts) 400 380 150 130
(A) Carbone séquestré (kg C) 224 198 38 52
Carbone méthanisé (kg C sous forme de CH4) 88 91,2 57 39
Carbone émis sous forme de CH4 après oxydation et captage (kg C) 23,8 24,6 15,4 10,5
Cas du Bilan Carbone® v7.1.041
(B) Equivalent carbone émis sous forme de CH4 après oxydation,
captage et après prise en compte du PRG (kg eqC) 216 224 140 96
Carbone émis sous forme de CO2 après oxydation et captage (kg C) 152,2 157,8 98,6 67,5
Cas du Bilan Carbone® v6.11
Emission de carbone sous forme de CH4 comptabilisée dans les
inventaires après prise en compte du PRG et du carbone séquestré
(kg eqC ) = (B-A) -8 26 102 44
Emission de carbone sous forme de CO2 comptabilisée dans les
inventaires (kg C) - hors transport et fonctionnement de l’installation 0 0 0 0
(Hypothèses : taux d’oxydation du méthane en CO2 de 10%, taux de captage de méthane de 70%)
Plusieurs activités de traitement de déchets sont émettrices de CO 2, fossile et/ou biogénique : les
unités d’incinération, les installations de stockage de déchets non dangereux, les unités de
compostage et les unités de méthanisation.
Ces activités ne génèrent pas un effluent gazeux composé à 100% de CO 2. Nous l’avons vu, d’autres
gaz à effet de serre sont générées (CH4 ou N2O) en même temps, sans compter la présence d’autres
polluants spécifiques à la nature des déchets traités et au type de traitement appliqué (ex : CO dans le
cas de l’incinération).
Enfin ces émissions, selon le type de traitement, peuvent être diffuses et/ou canalisées.
Obtenir un ordre de grandeur à l’échelle nationale du gisement de CO 2 susceptible d’être valorisé est
complexe. Les quantités de CO2 réellement émises sont très variables selon le type de déchet, ses
caractéristiques, selon la technologie utilisée, les conditions réelles d’émission, etc. Une estimation à
l’échelle nationale des émissions de CO2, à partir de facteurs d’émissions moyens, est forcément
empreinte d’incertitudes plus ou moins conséquentes. A cela, s’ajoutent des subtilités de
comptabilisation (déduction des émissions évitées par la valorisation ou la séquestration carbone par
exemple) et de définition des périmètres de calculs spécifiques à chaque inventaire d’émissions
auxquelles il faut être attentifs afin de bien appréhender et éventuellement comparer les valeurs
publiées dans ces inventaires. .
Afin d’estimer en ordre de grandeur les émissions de CO2 liées aux activités de traitement de déchets,
un recensement de résultats d’inventaires d’émission est proposé ci-dessous. Il comprend aussi bien
les données officielles à l’échelle européenne (17), nationale (6), que les résultats issus d’organismes
indépendants (18), de la déclaration d’industriels de la filière déchet (19), ou de calculs estimatifs à
partir des informations listées dans les pages précédentes (7)(11)(2)(9).
Energie
(Industrie,
constructions); Energie
67458; 18% (Transport);
130614; 34%
Autres secteurs;
100223; 26%
Energie
(production);
60810; 16% Emissions
fugitives de
carburant;
Utilisation de 3435; 1%
solvants et Procédés
autres produits; Déchets; 1436; industriels;
1137; 0% 0% 17394; 5%
Ces 1436 kt représentatives de l’émission de CO2 de la rubrique « traitement des déchets » en France
constituent d’après l’EEA une baisse de 17% par rapport aux émissions liées aux déchets de 1990.
Figure 16 : Evolution des émissions de CO2 provenant de l’incinération des déchets en France (17)
Ces données, fournies par le CITEPA pour être agrégées au niveau européen, constituent un
inventaire « macroscopique » donnant un ordre de grandeur comparatif entre pays mais qui reste
relativement incomplet. En effet, les émissions de CO2 liées à la filière de « traitement des déchets
émissions sont réparties par convention dans différents secteurs. On ne retrouve dans la catégorie
« traitement des déchets » que les émissions de carbone fossile provenant de l’incinération … hors
valorisation énergétique !
L’ensemble des méthodologies d’inventaire utilisées par le CITEPA sont répertoriées dans le rapport
OMINEA(6). Il constitue le document de référence, d'une part, pour la description du système national
d'inventaires des émissions atmosphériques et de gaz à effet de serre et, d'autre part, pour les
méthodologies utilisées dans les différents inventaires d'émissions CEE-NU/NEC, CCNUCC, GIC,
SECTEN, etc.
CCNUCC
La Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) comporte les
dispositions relatives à la communication des informations portant sur les émissions dans l'air ; à
savoir, les émissions de gaz à effet de serre direct (CO 2, CH4, N2O, HFC, PFC, SF6) et à effet indirect
(NOx, CO, COVNM, SO2). Le Protocole de Kyoto, adopté le 11 décembre 1997 et entré en vigueur le
16 février 2005, précise les engagements assignés à chaque état signataire. La France et l'Union
européenne l'ont approuvé le 31 mai 2002.
Un rapport national d'inventaire fournit annuellement pour la France, sur toute la période depuis 1990,
les données d'émissions des différentes substances impliquées dans l'accroissement de l'effet de
serre retenues au titre (21) :
- de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC)
d'une part,
- de la 1ère période d'engagement au Protocole de Kyoto (2008-2012), d'autre part.
SECTEN
Le format "SECTEN" (SECTeurs économiques et ENergie) a été développé par le CITEPA afin de
disposer de séries mettant en évidence les contributions des différents acteurs économiques et des
différentes énergies fossiles ou de la biomasse. Le format "SECTEN" diffère des formats "CCNUCC"
et "CEE-NU/NEC" qui sont adaptés aux besoins et exigences spécifiques des conventions relatives
respectivement aux changements climatiques et à la pollution atmosphérique transfrontière à longue
distance. Ces deux derniers formats couvrent les mêmes sources au plan national que "SECTEN"
mais ne permettent pas une identification aisée des acteurs économiques usuellement considérés.
Ainsi, les émissions du résidentiel/tertiaire, de l’industrie, de l’agriculture, etc., se trouvent souvent
disséminées parmi différentes catégories empêchant une vision directe de ces entités(20).
En 2010 les émissions de CO2 d’origine fossile liées aux déchets se retrouvent sur les postes (22):
- Industrie - Traitement des déchets dans l’industrie manufacturière : 0,5Mt
- Energie - Déchets industriels solides : 1,2 Mt
- Déchets municipaux fossiles : 5,2 Mt
- Déchets - incinération (hors incinération des déchets avec récupération d'énergie) : 1,436 Mt
Ce registre, non exhaustif, est constitué des données déclarées chaque année par les exploitants des
installations classées soumises à autorisation préfectorale (couvertes par le champ de l'annexe I de
l'arrêté du 31/01/2008 modifié) et plus particulièrement des installations relevant de la directive IPPC
(directive 96/61/CE relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution), et des stations
d'épuration urbaines de plus de 100 000 équivalents habitants.
En 2011, ce sont 175 industriels de la filière « déchets et traitement » qui ont déclarés avoir émis dans
l’atmosphère 20,627 Mt de CO2 (origine biogénique et fossile).En 2010, ce chiffre se porte à 479Mt
(suite à la déclaration de 435 Mt d’Ecoval à Guichainville (27930) dans l’Eure).
600 Mt
500
400
300
200
100
0
2 007 2008 2 009 2 010 2 011
Figure 18 : Evolution des émissions de CO2
déclarées par les industriels de la filière «
Figure 19 : Localisation des industriels de la
déchet et traitement » (19)
Version des données 2007 à 2011. - Polluant : CO2
filière « déchet et traitement » ayant déclarés
Total - Activités : Déchets et traitements avoir émis du CO2 en 2011 (19)
®
1.3.6 ESTIMATION BILAN CARBONE
®
La méthodologie Bilan Carbone comptabilise l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre
d’origine anthropique. Même si les émissions de CO 2 d’origine biogénique ne sont pas comptabilisées
directement, des facteurs d’émissions sont disponibles dans la version v7.04 (8).
En se servant de diverses informations collectées sur les quantités de déchets produites (1) (7) (2) sur
les facteurs d’émissions (9)(11) (15) et sur la répartition des filières de traitement (8), des estimations
3
ont été réalisées .
Sur un total d’émission de CO2 de 30,51 millions de tonnes (pour 39,3 Mt de déchets traités), la
quantité de CO2 d’origine biogénique représenterait approximativement 72% des émissions de CO2.
3
Détail des données utilisées et résultats en annexe 1
Figure 20 : Répartition des émissions de gaz à effet de serre de la filière « traitement des
déchets industriels» (Compilation RECORD/APESA) (1) (7) (2) (9)(11)(15) (8)
Près de 88% de cette émission totale se retrouve canalisée : 20,94 Mt pour le CO2 en sortie
d’incinérateur et 6,1 Mt pour le CO2 en sortie d’Installation de Stockage de Déchets Non Dangereux.
16000 kt eqCO2
14000
12000
10000
8000
6000
4000
2000
0
Autres GES CO2 fossile CO2 fossile CO2 Biogénique CO2 Biogénique CO2 Biogénique
indirect direct (canalisé) (canalisé / (canalisé / (diffus -
combustion) biogaz - ISDND) dégradation
microbienne)
Figure 21 : Répartition des émissions de gaz à effet de serre de la filière « traitement des
déchets industriels» (Compilation RECORD/APESA) (1) (7) (2) (9)(11)(15) (8)
Sur un total d’émission de CO2 de 4,95 millions de tonnes (pour 16,9 Mt de déchets traités), la
quantité de CO2 d’origine biogénique représenterait approximativement 80% des émissions de CO 2.
Métaux Verre
Plastique Caoutchouc
Papier Déchets alimentaires
Ordures ménagères moyenne Divers non combustible et non fermentescible
Végétaux Boues de STEP
Figure 22 : Répartition des émissions de gaz à effet de serre de la filière « traitement des
déchets ménagers et municipaux» (Compilation RECORD/APESA) (1) (7) (2) (9)(11)(15) (8)
Près de 49% de cette émission totale se retrouve canalisée : 1,99 Mt pour le CO2 en sortie
d’incinérateur et 0,42 Mt pour le CO2 en sortie d’Installation de Stockage des Déchets Non
Dangereux.
2500 kt eqCO2
2000
1500
1000
500
0
Autres GES CO2 fossile CO2 fossile CO2 CO2 CO2
indirect direct Biogénique Biogénique Biogénique
(canalisé) (canalisé / (canalisé / (diffus -
combustion) biogaz -ISDND) dégradation
microbienne)
Figure 23 : Répartition des émissions de gaz à effet de serre de la filière « traitement des
déchets ménagers et municipaux» (Compilation RECORD/APESA) (1) (7) (2) (9)(11) (15) (8)
D’après l’inventaire ADEME (1), il y a 374MT de déchets générés par les secteurs de l'agriculture /
sylviculture et 253 MT sous forme de déchets de construction et de BTP.
Malgré le fait que ces déchets vont générer du CO 2 au cours de leur décomposition ou de leur
éventuel transport, ils ne sont pas pris en compte dans cet inventaire car ils ne se retrouvent pas
aujourd’hui concernés par la filière de traitement des déchets. Il s’agit par exemple des déjections
animales (48Mt), des gravats, des déchets brulés par les particuliers, etc…
1.4 Bilan
Tableau 12 : Résultats d’inventaires d’émissions CO2 liés à la filière déchets en France proposés
par différents organismes.
Les inventaires nationaux (type SECTEN et CCNUCC du CITEPA) sont utilisés par des organismes
tels que l’EEA au niveau Européen selon un formalisme bien particulier.
Les émissions de CO2 liées à l’activité de traitement de déchets y sont réparties dans plusieurs
rubriques différentes : celle nommée « traitement de déchet » (1,4 Mt) mais aussi les afférentes telles
que « énergie » (6,4Mt) ou « industrie manufacturière » (0,5Mt).
Ces inventaires ne sont pas adaptés à la filière déchets à proprement parler dans la mesure où les
limites et la définition de la filière de « management de déchets » ne sont pas clairement harmonisées
4
Pour les ICPE, les émissions de CO2 ne sont déclarées que si elles dépassent le seuil de déclaration fixé à 10 000 t/an
(biomasse + fossile). Cf Arrêté du 31 janvier 2008 relatif au registre et à la déclaration annuelle des émissions et de transferts
de polluants et de déchets.
kt CO2
40000
35000
10%
30000 7%
25000
20000 64%
15000
10000
5000
19%
0
EEA CITEPA Bilan Carbone France IREP Bilan Carbone
(rapports estimatif incinération estimatif
SECTEN / (activité 'complet'
CCNUCC) nationale (activité
traitement nationale +
déchets) émissions
Canalisé anthropique Canalisé biogénique biogéniques)
Diffus / indirect anthropique Diffus / indirect biogénique
Canalisé indifférencié Emission indifférenciée
Figure 24 : Résultats d’inventaires d’émissions CO2 liés à la filière déchets proposés par différents
organismes.
®
Les estimations du Bilan Carbone calculées à partir des quantités de déchets produites et traitées en
France donnent des émissions de CO2 près de 25 fois supérieures aux estimations de la rubrique
« management de déchets » des inventaires officiels (EEA, CITEPA). Cet écart pourrait encore être
bien supérieur dans le cas de la prise en compte dans les inventaires de déchets non traités par la
filière professionnelle de valorisation des déchets tels que les 374Mt de déchets de l’agriculture et
sylviculture, les 253Mt de déchets de la construction et du BTP ou les 3Mt de déchets de voiries et
marchés de collectivités.
®
Comme le calcul « Bilan Carbone complet » intègre à la fois les émissions de CO2 canalisées ou pas,
d’origine anthropique ou biogénique, … et ce, sur un périmètre exhaustif, les résultats obtenus
restent cohérents avec les quantités déclarées par les industriels ICPE de la filière, et avec celles
déclarées par la CNIID pour la seule incinération des déchets.
Sur les 35Mt CO2 estimées, 74% des émissions totales sont d’origine biogénique. La revue
bibliographique RECORD de 2013 donne, pour les déchets municipaux traités par incinération, des
ordres de grandeur de contenu carbone biogénique variant de 50 à 70% (24).
De l’ordre de 83% des émissions totales sont canalisées, soit près de 30Mt de CO 2. Cette quantité de
carbone est particulièrement intéressante puisqu’elle peut faire l’objet de potentielle valorisation
directement, ou après transformation chimique ou biologique.
Actuellement, au niveau mondial, plus de 150Mt CO2 sont utilisés par l’industrie (25).
Afin d’envisager des voies de valorisation du CO 2 produit par la filière de traitement de déchets, un
état de l’art des différentes techniques est proposé dans la section suivante.
Dans cette partie vont être décrites les différentes voies généralement envisagées pour valoriser le
CO2 : Il s’agit de valorisations sans transformation, avec transformation chimique ou avec
transformation biologique (Figure 25).
Les principaux domaines d’applications concernent la chimie (ex : synthèse organique), l’énergie
(ex : amélioration de rendements d’extraction thermique ou synthèse de molécules à valeur
énergétique), ou l’alimentaire (Tableau 13).
Application principale
3- Géothermie profonde
4- Synthèse organique
5- Minéralisation
6- Hydrogénation (méthanol)
7- Méthanation
Transformation
Chimique 8- Reformage
- Sec (CO2)
- Vaporeformage (CO2+H2O)
- Trireformage (CO2+H2O+O2)
9-Electrolyse (haute T et T
ambiante)
Photoélectrolyse
10-Thermochimie
Transformation 11-Microalgues
Biologique
12-Biocatalyse
TRANSFORMATION
CHIMIQUE
Ressources
Coûts d’investissement
Coûts de fonctionnement
Intrants Technologie
CO2 (qualité, quantité, Maturité technologique / état des lieux
caractéristiques, conditionnement, (actuel, potentiel futur)
potentiel de valorisation)
Conditions opératoires Produits
Energie
Rentabilité économique
Autres intrants (eau, etc.)
Acteurs / Projets / Retour d’expériences
Besoins en recherche
Facteurs de succès, enjeux technologiques
Impacts
Bilan environnemental (bilan GES)
Efficacité énergétique
Acceptabilité sociale
Principe
La récupération Assistée des Hydrocarbures ou RAH consiste à injecter du CO2 à l’état supercritique
dans les réservoirs de pétrole ou de gaz pour améliorer leur extraction. On estime que la RAH permet
d’augmenter la récupération d’hydrocarbures de 7 à 23 %, ce qui en fait une opération rentable (26).
La RAH comprend la récupération de pétrole (EOR en anglais pour Enhanced Oil Recovery), de gaz
(EGR) et de méthane dans les veines de charbon (ECBM) ou dans les hydrates sédimentaires
(EGHR) (27).
La technologie la plus mature est la récupération assistée de pétrole (E.O.R). Cette utilisation du CO2
existe déjà depuis cinq décennies aux Etats-Unis. L’amélioration de la récupération des
hydrocarbures est due à l’injection sous pression du CO2 mais aussi aux propriétés physico-chimiques
du CO2 supercritique. Celui-ci, puissant solvant, permet de diminuer la viscosité du pétrole brut et
facilite sa récupération. Le CO2 forme une solution miscible avec le pétrole qui revient vers la surface
tandis qu’une partie du CO2 est stockée dans les « pores vidées » du gisement. Le CO2, contenu dans
le pétrole brut extrait peut être réinjectée dans le système
Figure 28).
La RAH peut donc être considérée à la fois comme une voie de stockage et de valorisation, dans la
mesure où l’hydrocarbure extrait supplémentaire est revendu (30) et où une partie du CO2 injecté
reste séquestré. Même si le stockage du CO2 n’est pas considéré comme une voie de valorisation
réelle, cela permet à la fois de diminuer les émissions de CO2 dans l’atmosphère et cela offre une
possibilité d’utilisation future du CO2 stocké.
Injection continue de CO2 : Cette méthode fonctionne mieux dans les formations homogènes
et son potentiel de stockage est presque le double que celui de la méthode WAG.
« Trapered WAG » : Le CO2 est injecté initialement en continu avant que le rapport eau/CO2
ne soit augmenté pour améliorer le rendement de production d’hydrocarbures.
La récupération assistée de gaz (EGR) est une opération analogue à la récupération assistée de
pétrole (EOR) même si certaines différences existent au niveau du mécanisme. La récupération de
gaz s’appuie sur le déplacement physique du gaz naturel avec du CO 2 sous pression. Ce
déplacement est possible puisque le gaz naturel est plus léger que le CO 2 (26).
Dans le cas de la récupération de méthane dans des gisements de charbon (ECBM), le mécanisme
de récupération est différent. Le CO2 est adsorbé préférentiellement sur le charbon à la place du CH 4,
ce qui déplace le méthane vers la surface (26).
Pour l’utilisation en EOR, les gaz utilisés ont au moins des concentrations en CO 2 de 95 % et des
concentrations en H2S inférieures à 100 ppm. Le H2S n’est pas considéré comme une impureté mais
comme un gaz acide contribuant à la diminution de la viscosité du pétrole à extraire (30).
Il existe des valeurs limites pour certains composés qui sont basées sur des recommandations et les
résultats d’unités opérationnelles d’EOR. Certaines valeurs limites dépendent de la qualité des
hydrocarbures à récupérer et d’autres sont déterminées pour des raisons de sécurité et de protection
sanitaire (31). De plus, la composition du gaz doit respecter certaines normes pour être transporté
dans un pipeline.
Aux Etats-Unis, l’US départment of Energy (NETL) propose des teneurs limites pour plus de 40
composés concernant le transport et l’EOR (extrait proposé dans le Tableau 14).
5
Exemple de sources naturelles aux Etats-Unis : McElmo Dome au Nouveau Mexique et Jackson Dome au Mississippi
Il existe toutefois des projets qui envisagent l’utilisation de gaz avec des compositions très différentes
de celles recommandées. Par exemple, pour le projet Zama à Alberta (Canada), le gaz injecté a une
composition de 80 % en CO2 et de 20 % en H2S (32).
Concernant la récupération de méthane dans les gisements de charbon (ECBM), une étude de
l’« Alberta Research Council » montre la possibilité d’utiliser des fumées industrielles (composées
principalement de CO2 et de N2) comme fluide injecté pour la récupération du méthane. Dans ce cas,
la présence d’azote dans le mélange semble améliorer l’efficacité de production de méthane par
rapport à l’utilisation d’un fluide composé exclusivement de CO2 purifié. Cette option est plus attractive
d’un point de vue économique, mais permet un stockage moindre de CO2 (26).
Conditionnement
6
Le CO2 est injecté sous forme supercritique , ce qui nécessite des pressions et températures
respectivement supérieures à 74 bars et 31°C.
La raison de l’utilisation du CO2 supercritique est que les fluides supercritiques ne présentent pas de
tension superficielle, ce qui leur permet de se déplacer plus facilement à travers les formations
géologiques. De plus, la densité et la viscosité du CO 2 supercritique sont inférieures à celles de l’eau
ce qui entraîne un pompage du CO2 facilité (33).
Le taux d’injection de CO2 nécessaire varie entre 0,24 et 0,42 tonne de CO 2 par baril récupéré, ce qui
correspond à 1,7 - 3,0 tonnes de CO2 par tonne de pétrole (34).
Actuellement, la consommation de CO2 pour la RAH est de l’ordre de 65 à 72 millions de tonnes par
an (35) (36). Environ 76 % de ce CO2 provient de ressources naturelles (36).
6
Un état supercritique est atteint lorsqu'un fluide est chauffé au-delà de sa température critique et lorsqu'il est comprimé au-
dessus de sa pression critique. Les propriétés physiques d'un fluide supercritique (densité, viscosité, diffusivité) sont
intermédiaires entre celles des liquides et celles des gaz.
Maturité technologique
Les débuts de la récupération assistée de pétrole remontent aux Etats Unis en 1960 avec une
première exploitation industrielle développée au Texas au cours des années 70 (37).
A l’heure actuelle, la récupération assistée de pétrole avec du CO2 est une technologie industrialisée.
Elle est utilisée dans plus de 129 puits dans le monde (38). La plupart de ces puits sont destinés à la
récupération de pétrole cependant il existe aussi des unités destinées à la récupération du gaz naturel
ou à la récupération conjointe de pétrole et de gaz naturel.
Futur potentiel
Le potentiel d’utilisation du CO2 en 2050 au niveau mondial est estimé entre 16 et 22 milliards de
tonnes pour la récupération de pétrole (EOR), de 160 à 390 milliards de tonnes pour la récupération
de gaz naturel (EGS). Aux Etats-Unis, le potentiel s’élève aux alentours de 60 à 117 milliards de
tonnes pour la récupération de méthane (ECBM) (39). En Chine, 29 sites ont été identifiés pour
l’ECBM ce qui représente un potentiel de stockage de CO 2 d’environ 143 milliards de tonnes
supplémentaires (26).
Il est estimé qu’avec les technologies « Next generation » décrites ci-dessous, le potentiel de
récupération de pétrole atteindra 67 à 137 milliards de barils et celui du CO2 capté et stocké de l’ordre
de 20 à 45 millions de tonnes métriques (36).
Besoin en recherche
Les besoins en recherche pour améliorer la RAH sont divers (40). Les options « Next génération »
incluent :
L’optimisation des technologies des puits et de leurs emplacements par une modification de
l’alignement des puits d’injection et de production et en les situant dans des intervalles plus
petits.
L’optimisation se traduit aussi par une application de matériels physiques ou chimiques afin
d’améliorer le contact du CO2 avec certaines zones du réservoir difficiles d’accès, une
isolation des intervalles du réservoir mal exploités avec du pétrole résiduel plus dense pour
l’injection ciblée de CO2, etc.
Le RAH avec CO2 pour les zones de gisements avec une saturation partielle en pétrole
(ROZs en anglais pour Residual Oil Zones) qui ne sont pas commercialement exploitables par
récupération directe.
Coût
Investissement
Pour un projet d’EOR en mer du Nord, l’investissement est d’environ 3,8 milliards d’euros. En prenant
en compte le captage (1,75 milliard d’euros) et le transport du CO 2 (1,3 milliard d’euros),
l’investissement total serait d’environ 7,5 milliards d’euros (42). Ce projet prévoit la récupération de
100 millions barils de pétrole supplémentaires grâce à l’injection de CO 2.
Dans d’autres projet, les investissements sont moindre comme pour le champ de pétrole léger dans le
bassin de San Joaquin en Californie (12 millions de barils de pétrole /an) qui a nécessité un
investissement de 320 millions d’euros (40).
Coût de fonctionnement
D’après les données de NETL/ESPA de 2011, le coût d’utilisation du CO2 est estimé entre 11 et 17 %
du coût du pétrole brut récupéré (39). Le coût de fonctionnement dépend du pétrole récupéré et se
situe aux alentours de 102 à 180 € par tonne de pétrole récupéré (en envisageant 60 €/tonne de CO2
stocké).
Dans le cas du champ de pétrole léger du bassin de San Joaquin, il est prévu la récupération de 381
millions de barils de pétrole pendant 31 ans d’opération de RAH avec l’injection de près de 74,22
milliards de mètres cubes de CO2. Les coûts d’approvisionnement et d’injection du CO2 sont de l’ordre
de 7 700 millions d’euros (dont 4 700 correspondent au coût d’achat) (40). Le coût global
3
d’approvisionnement et d’achat du CO2 est d’environ 0,11 €/m de CO2.
Les coûts d'exploitation et de maintenance durant 31 ans sont estimés à 1 200 millions d’euros, soit
38 millions d’euros par an. Cette quantité représente 11,9 % de l’investissement initial par année de
fonctionnement (40).
Rentabilité économique
L’ensemble des acteurs reconnaissent une rentabilité positive de |’utilisation de CO2 pour la
Récupération Assistée des Hydrocarbures. Cependant, le CO 2 n’a commencé à être utilisé qu’à partir
d’un prix du baril de pétrole supérieur à 60 $ (30).
Pour les projets qui envisagent d’utiliser du CO 2 provenant des fumées de centrales ou d’industries, le
coût de la filière complète du captage et du stockage pour la récupération assistée d’hydrocarbures
(a, b et c dans la Figure 29) est généralement évalué à 60 € par tonne de CO2 stocké, c'est-à-dire
« non émis » dans l’atmosphère.
Ce coût pourrait diminuer jusqu'à 15 € par tonne de CO2 évitée dans un scénario futur (a’, b’ et c’ dans
la Figure 29) avec l’amélioration des technologies.
Cette valeur est néanmoins extrêmement dépendante des caractéristiques du projet industriel (43).
De ce fait, plus la pureté visée est élevée, plus les coûts de captage et de traitement seront élevés.
L’objectif est donc de rechercher le meilleur compromis (24).
Figure 29 : Bilan économique actuel et futur sur le captage et stockage de CO2 pour l’EOR (43)
Bilan carbone
L’enjeu prioritaire de la RAH est de faire fonctionner le système avec un bilan CO 2 neutre. Il faut donc
consommer autant de CO2 anthropique que de CO2 émis lorsque le pétrole supplémentaire récupéré
sera brûlé (30).
Différentes études ont été menées sur le bilan carbone. Les résultats diffèrent selon le champ de
l’étude, notamment si on considère ou non les émissions causées par la combustion des
hydrocarbures récupérés.
D’après un bilan carbone réalisé par Edge Environment, 0,51 tonne de CO 2 est émise par
tonne de CO2 utilisée pendant la RAH. Cette étude ne prend pas en compte les émissions
dues à la combustion des hydrocarbures récupérés. Elle envisage le captage du CO2 dans
une centrale électrique à charbon à Dakota, le transport du CO 2 sous pression via pipeline,
l’injection du CO2 dans le champ pétrolière de Weyburn pour la RAH, la séparation du CO 2
des hydrocarbures extraits et le recyclage de ce CO2 (26).
Près de 94 % des émissions sont dues aux activités opératoires, les 6 % restants étant liés
aux équipements nécessaires. Concernant les émissions liées au fonctionnement, 66 % sont
dus à l’étape de captage et de compression (à 200 bars) du CO2. 28 % proviennent des
opérations de séparation du CO2 et du pétrole extrait ainsi que de la réinjection du CO2 (26).
Certains projets montrent un impact neutre ou positif sur le bilan carbone, comme l’exemple
de champs pétroliers au Mississipi où le CO 2 est injecté en continu (sans eau). Dans ces
champs, entre 0,52 et 0,64 tonne de CO2 sont injectés par baril de pétrole extrait. Comme un
baril relarguera 0,42 tonne métriques de CO2 lors de son utilisation, Denbury, l’exploitant,
estime qu’il est stocké entre 24 % et 52 % de plus de CO2 que le CO2 émis (44).
Figure 30 : Bilan CO2 concernant à la RAH avec captage et transport de CO2 (45)
Principales pollutions
Avec la RAH, le CO2 stocké dans le sous-sol peut s’échapper du gisement avec rejet vers
l’atmosphère ou dans la mer. Ce risque est cependant considéré comme faible (46), dès lors que les
gisements d’hydrocarbures sont bien isolés.
Un avantage de la RAH utilisant du CO2 est le non-recours aux produits toxiques, comme des
catalyseurs ou des solvants (sauf pendant la phase de captage du CO2) et la non-utilisation de
matières premières rares (30).
La consommation énergétique externe liée à l’utilisation de CO2 pour la RAH consiste à comprimer le
CO2 et à le monter en température pour atteindre l’état supercritique. Ces consommations
énergétiques sont plus faibles que pour l’injection d’air ou d’azote car les pressions nécessaires sont
moins importantes (30).
Ainsi comme pour le bilan économique, le bilan énergétique est compensé par l’énergie des
hydrocarbures supplémentaires extraits.
Unités opérationnelles
L’utilisation de CO2 pour la RAH est une technologie déjà industrialisée et rentable avec de nombreux
projets utilisant pour la majorité du CO2 de sources naturelles. Néanmoins, il existe quelques projets
utilisant le CO2 capté des fumées industrielles. Les principaux projets au niveau mondial répertoriés
de RAH avec captage de CO2 sont identifiés dans le
Tableau 15 et les projets sans captage de CO2 sont dans le Tableau 16.
Tableau 15 : Projets de RAH avec captage de CO2 issu de fumées industrielles (48)
Seuls quelques projets dans le monde envisagent l’intégration des activités de captage et stockage de
CO2 pour la RAH comme les projets Weyburn, Sleipher ou K12-B :
Ce projet d’injection de CO2 pour la RAH utilise le CO2 issu des fumées industrielles capté d’une usine
de gazéification en Dakota du Nord et transporté en état supercritique dans un pipeline jusqu'à
Weyburn à 320 km.
Entre 2000 et 2010, 17 Mt de CO2 ont été stockées à Weyburn et 2,1 Mt à Midale. Grâce à la RAH, ce
sont près de 30 Mt qui seront stockées jusqu’en 2035. Cette activité aura permis l’extraction de 220
millions de barils supplémentaires (49). De plus, le potentiel de stockage de CO2 total, une fois que la
RAH sera finie, est estimé à environ 55 millions de tonnes de CO2 (50).
Il s’agit du premier projet de captage et stockage de CO2 situé dans la mer du Nord, le gaz naturel est
extrait à 2 500 m de profondeur. Le CO2 naturellement contenu dans le gisement de gaz naturel est
séparé puis réinjecté à proximité du site. Près de 10 millions de tonnes ont été stockées depuis 1996.
Gaz de France a mené une usine pilote pour la récupération de gaz naturel dans le gisement de gaz
K12-B au la mer du Nord. Il s’agit du premier lieu depuis 2004 pour lequel le CO 2 est réinjecté dans le
même gisement que le lieu de sa production. Le contenu de CO 2 dans le gaz naturel est de 13 %. La
3
capacité d’utilisation de CO 2 est d’environ 30 000 Nm par jour et jusqu’en 2010 (51), environ 80 000
tonnes de CO2 ont été injectées (52).
Le but du programme “Centre for North Sea Enhaced Oil Recovery with CO 2” lancé en 2012 en
Écosse est de mettre en œuvre l’injection de CO 2 pour les projets de RAH en utilisant le CO 2 capté
d’usines à combustibles fossiles. L’objectif est de récupérer environ 3 millions de barils
supplémentaires de pétrole dans la mer du Nord (53).
Sur le sol français, les possibilités de réaliser la RAH sont très limitées. Néanmoins le projet Vasco
envisage l’exportation du CO2 capté pour la RAH :
Projet VASCO
Le projet VASCO (2011 à 2012) a regroupé des partenaires financeurs (Ademe, Air Liquide,
Arcelor Mittal, EDF, EON, Ciments Calcia, Grand port de Marseille, Suez, San Ouest) et des
partenaires experts (Air Liquide, Brgm, IFPEN, Ifremer). Ce projet mené par le Pôle Risques
et Geogreen a bénéficié d’un investissement de 907 000 € (212 500 € par l’ADEME). Son but
est d’étudier les différentes solutions techniques d’utilisation mutualisée de CO2 dans le
bassin industriel de la zone de Fos-Berre-Lavéra-Gardanne-Beaucaire. Ce projet envisage de
valoriser le CO2 sous forme de RAH et prévoit la création d’un terminal de liquéfaction du CO 2
à Fos pour son exportation par voie maritime (54).
Autres projets.
Par ailleurs, il existe des projets de recherche sur des technologies comparables à la RAH permettant
d’utiliser, de valoriser ou de stocker du CO2 en sous-sol tels que (non exhaustif) :
Le projet C2A2, mené par EDF et Alstom et financé en partie par l’ADEME, est un projet
démonstrateur de captage de CO2 en post combustion sur une chaudière charbon.
L’inauguration du démonstrateur a eu lieu le 11 octobre 2013.
Le projet ULCOS pour le captage, le transport et stockage de CO2 sur le site sidérurgique de
Florange a été arrêté en 2012 à cause de « difficultés techniques ». Une possible reprise du
projet est envisageable.
Des acteurs tels que le BRGM s’interessent à l’écologie microbienne des réservoirs et à la
transformation du CO2 qui peut aboutir, par génèse abiotique à des hydrocarbures et autres
molécules organiques
Maturité de la technique
Possibilité de profiter de puits de pétrole déjà existants (y compris ceux mis en « stand by »).
Inconvénients
Le risque de rejet vers l’atmosphère du CO2 lorsque celui-ci est stocké dans le sous-sol.
Toutefois, ce risque est considéré comme faible par les experts (46).
Principe
La chaleur contenue dans le sous-sol de la Terre permet une production peu carbonée de chaleur
et/ou d’électricité.
Pour les sites à moyenne et haute énergie (au-delà de 90°C), différentes applications sont
envisageables : utilisation de la chaleur pour des procédés industriels (séchage notamment),
cogénération (production simultanée de chaleur et d’électricité) et production d’électricité. Cette
dernière peut se faire soit directement comme à Bouillante en Guadeloupe, soit via une technique de
stimulation du sous-sol, comme à Soultz-sous-Forêts en Alsace, en géothermie profonde.
L’utilisation du CO2 comme fluide de travail en remplacement de l’eau pour une opération d’EGS a été
proposée pour la première fois par Brown D. du laboratoire « Los Alamos National Laboratory » aux
Etats-Unis en 2000. Depuis, cette possibilité a été étudiée par d’autres unités de recherches. Le CO2
montre une capacité supérieure, par rapport à l’eau, de récupération de chaleur géothermique des
roches chaudes et fracturées. Le CO 2 a une plus grande capacité de compressibilité et de dilatation
que l’eau, lui permettant d’augmenter les forces de flottation et de réduire la consommation de fluide.
Les aspects thermiques et hydrauliques de l’utilisation du CO 2 sont très prometteurs. Toutefois, il
existe encore des incertitudes concernant les interactions chimiques entre le fluide et les roches, qui
font l’objet de recherches (57).
Le concept de « CO2-Plum Geothermal » (CPG) par Randolph et Saar a ensuite été défini. Il est
similaire au procédé EGS, mais utilise du CO2 qui est injecté dans des formations géologiques
poreuses et perméables sans réalisation de « stimulation hydraulique ».
Le CO2 injecté est généralement capté en sortie de cheminées d’usines industrielles ou de production
d’énergie (centrales charbon en exemple).
Dans ces formations, le CO2 supercritique déplace le fluide dans le réservoir d’origine. Ensuite, une
partie du CO2 chauffé dans le sous-sol est canalisée vers la surface et sert pour la production
d’électricité ou pour l’utilisation directe de la chaleur avant d’être réinjecté dans le sous-sol. Le CO2 qui
ne remonte pas à la surface est stocké dans la structure poreuse de la formation géologique.
Dans le cas de l’unité de démonstration menée par GreenFire Energy et Enhanced Oil Resources
Joint Venture aux Etats-Unis, l’utilisation de CO2 de haute pureté d’environ 95 % est envisagée
(59).
Il existe des teneurs limites de certains constituants dans le gaz injecté dans un pipeline (Cf. Tableau
14 de la partie « Récupération Assistée d’Hydrocarbures »).
Quantité nécessaire
D’après certaines études, la capacité de stockage du CO2 serait de l’ordre de 24 tonnes par jour
et par MWe produit par EGS avec du CO2 (26). Ces quantités restent des estimations et dépendent
fortement du site considéré, aucun test pilote n’ayant été réalisé à ce jour. Le potentiel d’utilisation du
CO2 par cette technique est considéré comme important.
L’entreprise Geodynamics Ltd envisage une production d’une capacité de 500 MW d’ici 2018,
représentant un stockage potentiel de 4,4 Mt de CO2 par an (60).
Conditionnement (33)
Le CO2 utilisé comme fluide de travail pour la récupération de l’énergie géothermique est
injecté sous forme supercritique. Le stade supercritique est obtenu dans des conditions de
pressions et de températures respectivement supérieures à 74 bars et 31°C (58). Quant au stade
Les fluides supercritiques ne présentent pas de tension superficielle, leur permettant de se déplacer
plus facilement dans les formations géologiques.
L’utilisation du CO2 comme liquide de travail pour la récupération de la chaleur géothermique est une
technologie qui se trouve encore dans une phase amont de recherche et développement. Cette
technique n’a pas encore été testée. Cependant, certains projets pilotes de démonstrateurs
envisagent la réalisation de tests d’injection de CO 2. Cette technologie pourrait atteindre le stade
industriel à l’horizon 2030.
A ce jour, la production commerciale d’énergie géothermique est limitée à l’utilisation de l’eau comme
fluide de travail. La technologie EGS avec de l’eau est une technique relativement nouvelle, qui fait
l’objet de tests au sein de différentes unités, comme en Allemagne, aux Etats-Unis, en Australie, au
Japon et en France.
Le marché potentiel d’utilisation du CO2 dépend du nombre de sites disponibles pour la géothermie
profonde. Toutefois, il est envisagé à long terme un potentiel d’utilisation mondial de CO2 de 5 à 30
millions de tonnes par an.
Besoins en recherche
Coût
Coût d’investissement
L’investissement pour une unité de géothermie profonde en utilisant l’eau comme fluide de travail est
de l’ordre de 4 millions de dollars par MW d’électricité installé (26). L’investissement en utilisant le CO2
comme fluide de travail est du même ordre de grandeur.
Coût de fonctionnement
*Solar PV : Energie solaire photovoltaïque. Wind : Energie éolienne. EGS (Enhanced Geothermal Systems) : Géothermie
profonde avec stimulation hydraulique. Coal + CCS : Energie charbon + captage et stockage du CO2. Nuclear : Energie
nucléaire. Gas CC + CCS : Energie gaz + captage et stockage du CO2. Geothermal: Energie géothermique. CO2GTM :
Géothermie profonde avec du CO2 (Technologie de GreenFire Energy)
Rentabilité économique
Que ce soit avec de l’eau ou du CO2, Pour que le process soit viable au niveau économique, il est
nécessaire d’obtenir un débit de fluide et une température suffisants suite au forage du ou des puits.
Cette inconnue, ou risque géologique, doit être prise en compte dans les études de faisabilité de
projets de géothermie profonde. D’autres facteurs sont à prendre en compte pour atteindre la
rentabilité économique comme la proximité de la source du CO 2, le coût du CO2 et la proximité du
réseau électrique (63).
Bilan carbone
D’après une étude menée par Edge Environment, 0,58 tonne de CO2 est émise par tonne de CO2
utilisée. Cette étude envisage le captage du CO2 dans une centrale électrique au charbon à SEQLD
en Australie et le transport du CO2 jusqu’au « Copper Basin », où est réalisée la géothermie profonde
7
à une distance de 970 km (26).
Pour ce procédé, 96 % des émissions correspondent aux étapes d’opération (le captage, la
compression et l’injection du CO2 à une pression de 200 bars). L’acier, le béton et les compresseurs
utilisés dans le transport du CO2 par pipeline représentent 3 % des émissions. Quant au dernier
pourcent, il s’explique par l’installation de la turbine électrique de surface et le puits (26).
Principales pollutions
Dans le cadre de la géothermie profonde avec du CO 2, une partie importante du CO2 est stockée dans
les formations géologiques. Lorsque le CO2 est stocké dans le sous-sol, un risque de rejet vers
l’atmosphère du CO2 s’échappant des gisements existe. Néanmoins, ce risque est considéré faible
par les experts (46). Il y a cependant et à l’heure actuelle nombre de projets de R&D pour suivre le
7
Résultats basés sur une unité de 500MW avec 500t/h de CO2 séquestré, et prenant en compte les besoins énergétiques
(estimés à 100 MW) nécessaires au captage, à la compression et au transport du CO2.
Efficacité énergétique
Dans le cas particulier de l’unité pilote de Geodynamics Ltd en Australie, les besoins énergétiques
pour le procédé de traitement d’une tonne de CO2 capturé sont de 108 MJ (=30kWh) sous forme de
gaz naturel pour le transport du CO2 par pipeline, de 20 kWh pour la compression et l’injection du CO 2
et 36,3 MJ (=10kWh) pour le fonctionnement d’une turbine électrique (26). Cela fait un total d’énergie
nécessaire de 60,08 kWh. Par ailleurs, la quantité d’énergie produite est de 1 000 kWh (plus de 16
fois l’énergie requise). Le rendement énergétique du procédé est supérieur à 1 600 %.
1200
Energie produite
1000
800
Energie kWh
Turbine
electrique
600
Mise en pression
400
du CO2 +
200 injection
Transport
0
Besoin énergétique Energie produite
Figure 33 : Besoin énergétique et énergie produite pour un procédé de géothermie profonde avec
du CO2 (Synthèse RECORD / APESA)
Selon Green Fire, en utilisant le CO2 comme fluide de travail, le taux de récupération de chaleur est
supérieur à celui d’utilisation de l’eau. L’énergie thermique est extraite 50 % plus rapidement qu’avec
l’eau (62). Cela s’explique par la meilleure capacité de déplacement du CO2 supercritique dans les
formations géologiques puisque les fluides supercritiques ne présentent pas de tension superficielle
(33).
Acteurs
Des laboratoires sont aussi impliqués au niveau recherche tels que le LBNL (Lawrence Berkeley
National Laboratory) et le LLNL (Lawrence Livermore National Laboratory) aux Etats-Unis.
Les premiers puits dans le site d’Ogachi ont été forés entre 1982 et 1984. En 2010, un projet pour
évaluer la faisabilité de l’utilisation du CO 2 comme fluide de travail en géothermie profonde a été mis
en place compte tenu des caractéristiques du site : haute température et faible productivité. Dans le
cadre de ce projet, des recherches sont menées sur l’injection d’un mélange de saumure et de CO 2
pour récupérer la chaleur géothermique sous des conditions de pression et température de 100 bars
et 210 °C respectivement.
Ce projet regroupe plusieurs collaborateurs tels que LBNL (Pruess), UC Berkeley (Glaser), le
« Central Research Institute of the Electric Power Industry », CRIEPI et l’Université de Kyoto. Le
laboratoire Berkeley des Etats-Unis dans la cadre du projet « CO2 as fluid » est en charge des tests
sur la capacité de récupération de chaleur du CO 2 supercritique. Le DOE finance la partie américaine
du projet avec un investissement de 246 000 dollars. Les objectifs du projet sont l’obtention de
données sur la performance de la géothermie profonde avec du CO 2 et la réalisation d’études de
modélisation des interactions chimiques entre le mélange de CO2 et saumure et les roches de la
formation géothermique.
Les entreprises GreenFire Energy et Enhaced Oil Resources Joint Venture ont reçu en 2010 une
subvention du DOE de 10 millions de dollars pour développer un projet de récupération de la chaleur
géothermique avec du CO2 supercritique (66). Le CO2 utilisé est obtenu du réservoir naturel de St.
Johns-Springerville Dome, au sein duquel 450 milliards de tonnes de CO2 sont potentiellement
récupérables de gisements peu profonds (33).
Le but de ce projet est la construction d’une unité de 1 à 2 MW nécessitant 5 millions de feet cubiques
3
(~ 141 584 m ) de CO2 d’une pureté de 95 %. Par la suite, le développement d’unités industrielles
d’un total de 50 MW est envisagé. Les prédictions tablent sur la possibilité d’installer une unité de 800
3
MW avec un potentiel d’utilisation d’environ 500 millions de feet cubiques (~14 158 423 m ) de CO2
par jour (59).
Geodynamics Ltd a mis en service en 2013 l’unité pilote de 1 MWe de l’Habanero, la première unité
productrice d’énergie par EGS en Australie (67). La réalisation de tests d’utilisation du CO 2 en stade
supercritique comme fluide de travail pour l’opération d’EGS est prévue. Il est attendu une production
de 500 MW en 2018, représentant un stockage potentiel de 4,4 Mt de CO2 par an (26).
Programmes de recherche
Ce projet de recherche démarré en 2009 pour une durée de 4 ans a un coût total d’environ 4 millions
de dollars, dont 3 millions sont un investissement du DOE. Le projet est mené par l’entreprise Symyx
en collaboration avec le LBNL (Lawrence Berkeley National Laboratory). Le but est de développer un
modèle géochimique capable de simuler le fonctionnement d’une opération de géothermie profonde
en utilisant le CO2 supercritique comme fluide de travail. Dans le cadre du projet, les interactions du
CO2 supercritique avec de l’eau et certains minéraux présents dans les formations géothermiques
sont étudiées (68).
Situation en France
Aucun projet d’utilisation du CO2 en tant que fluide de travail pour la géothermie profonde en France
n’est étudié. Toutefois, la géothermie profonde ou EGS est réfléchie depuis plus de 20 ans. En 2008,
les premiers kWh d’énergie par cette technologie ont été obtenus.
Facteurs de succès
Le CO2 est un meilleur fluide caloporteur que l’eau : l’efficacité énergétique du transfert de
chaleur est améliorée.
Le CO2 supercritique n’est pas capable de dissoudre et de transporter des espèces minérales
présentes dans le réservoir géothermique. Ceci est un point positif pour les équipements,
notamment les canalisations pour le transport du CO2 et les échangeurs de chaleur (71). De
plus, le CO2 est moins réactif que l’eau avec les roches de la formation géothermique (33).
Si le CO2 est chauffé jusqu’à 2 400 °C, il se décompose en oxygène et CO. Il est ensuite
possible de convertir ce CO en hydrocarbures via la réaction de Fischer-Tropsch (26).
Inconvénients
La durée de vie des systèmes géothermiques est un paramètre difficile à estimer (26).
Principe
Dans cette partie seront présentées les techniques de valorisation et les applications du CO2 lorsqu’il
n’est pas utilisé comme réactif. En effet, le CO2 peut être exploité pour ses propriétés physiques
(ex : à l’état supercritique) ou pour ses propriétés chimiques (ex : composé jouant le rôle d’acide).
On parle alors de « CO2 marchand ». Il est vendu par les acteurs des gaz industriels et il provient
principalement des usines de fabrication d’ammoniac ou de gisements naturels de CO2 (30).
Applications
Les applications industrielles du CO2 sont très diverses. On distingue les applications ‘’classiques’’
déjà commercialisées en relative grande quantité (millions de tonnes) des applications de niche. Ces
dernières représentent des quantités moindres à ce jour mais sont susceptibles de représenter des
volumes de CO2 valorisables plus importants à l’avenir.
La Figure 34 présente les différentes utilisations industrielles du CO 2 selon les propriétés du gaz :
Nettoyage*
Remarque : les applications du CO2 comme intermédiaire réactionnel chimique sont traitées dans les paragraphes correspondant :
synthèse organique, électrolyse, thermochimie, etc….
Le CO2 est un solvant naturel représentant une alternative aux solvants toxiques. L’état supercritique
du CO2 correspond à des conditions physiques de 74 bars et 31 °C. Ces propriétés caractéristiques
sont une faible viscosité, une grande capacité de diffusion, une absence de tension superficielle et
une densité remarquable (72). Il constitue un solvant intéressant, avec une facilité de transport et
Ce procédé de nettoyage a été établi par Wilson Denis Ray et le brevet a été déposé en 2006. Du
CO2 liquide sous haute pression est utilisé afin de nettoyer un puits de forage et la zone adjacente
souillée par la récupération d’hydrocarbures, de méthane ou de houille. Un maintien des parois du
sous-sol est aussi assuré grâce au nettoyage du cuvelage utilisé dans le puits.
Ce procédé peut se faire avec du CO2 liquide pur ou en mélange. L’étape de purification du CO 2
représente un coût souvent élevé.
D’après une étude de Wilson Denis Ray, l’utilisation de près de 86 000 litres de CO2 liquide par puits
de forage serait le meilleur compromis entre le coût et la qualité du nettoyage.
Réfrigérants
Via ses propriétés, le CO2 est un bon réfrigérant et représente une bonne alternative aux autres gaz
réfrigérants. En effet, les HFC (Hydrofluorocarbone) et CFC (chlorofluorocarbone) sont
respectivement des gaz à fort potentiel de réchauffement climatique et de dégradation de la couche
d’ozone. Le CO2 est un gaz inerte, stable, inoffensif pour la nourriture et non corrosif.
Le R404A est le fluide frigorigène utilisé pour des applications de froid négatif, il s’agit d’un mélange
de fluoroéthanes. Ce mélange présente un potentiel de réchauffement global de 3 260 kg éq CO 2.
Couplé au R404A, le CO2 permet d’obtenir un fluide réfrigérant plus efficace et moins polluant que le
mélange de fluoroéthanes pris seul (76) (30).
En Europe, la réglementation automobile impose pour tout véhicule mis sur le marché à partir de 2017
l’utilisation d’un fluide frigorigène dont le pouvoir de réchauffement global (PRG) soit inférieur à 150.
Cette nouvelle réglementation sur les fluides réfrigérants pourrait permettre d’augmenter le recours au
CO2, puisque son PRG de 1 est intéressant. Dans le secteur automobile, le CO2 paraît aujourd’hui
être une alternative intéressante (77).
Aujourd’hui, les hydrates de dioxyde de carbone (CO 2,nH2O ; n 5,75) sont étudiés afin de les utiliser
en tant que réfrigérants. Les propriétés de ces hydrates, ainsi que les points d’intérêt sont présentés
dans le paragraphe « état des lieux technologique ».
La glace composée de CO2 (-78.5°C) est envoyée via un pistolet sur la surface à nettoyer sous une
pression de 2 à 15 bars. Ce procédé est très efficace grâce à l’impact de la glace sous pression et au
phénomène de sublimation qui se produit (73). Ce type de nettoyage est favorisé dans les activités où
l’eau peut poser des problèmes d’électrocution (équipement électrique), de corrosion (machine outil),
sanitaire (agroalimentaire), etc.
Cryo-broyage (73)
Du CO2 liquide est utilisé dans les techniques de cryo-broyage. Il s’agit d’une méthode de broyage par
refroidissement de la matrice. Une poudre fine est obtenue, avec une distribution très régulière. Le
cryo-broyage est utilisé dans les secteurs alimentaire et pharmaceutique autant pour la fabrication des
produits que pour leur recyclage.
Le CO2 gaz
L’utilisation actuelle est estimée à 8 Mt/an (78). Le CO2 utilisé doit être de pureté alimentaire (pur à
99,99%).
Le CO2 peut être exploité en tant qu’agent gonflant lors de la synthèse de polystyrène expansé, de
mousses de polyoléfines ou de polyuréthane. Le moussage au CO2 présente de nombreux
avantages : faible coût, poids réduit des pièces, faible risque d’incendie et disponibilité élevée.
Le groupe allemand RWE a établi un procédé de séchage de la lignite avec du CO 2 issu de centrale. Il
s’agit d’un procédé cinq fois plus efficace que celui utilisant de l’air chauffé à 120-150 °C (30).
Certaines industries utilisent des acides forts afin de neutraliser leurs effluents basiques. Le CO 2 peut
alors être utilisé dans ce sens puisqu’il forme l’acide faible H2CO3 dans l’eau. Contrairement aux
Il s’agit dans ce cas d’un exemple d’utilisation du CO 2 en tant qu’agent neutralisant du pH. Le recours
à ce gaz simplifie les étapes de maintenance, évite des étapes de dosage et présente d’autres
intérêts en comparaison avec les techniques chimiques.
Reminéralisation de l’eau
Certaines eaux sont déminéralisées, les rendant corrosives pour les canalisations et autres
installations. Il s’agit notamment des eaux provenant des usines de dessalement d’eau de mer ou de
massifs granitiques. Afin de diminuer l’aspect corrosif de ces eaux, il est nécessaire de réaliser un
rééquilibrage calco-carbonique. Une des possibilités est donc d’utiliser la chaux et le CO 2. Les
3
quantités nécessaires de CO2 sont de l’ordre de 8,8 g par m et par degré de pureté à corriger (73).
A ce jour, plusieurs usines de dessalement sont en projet face aux problèmes d’eau potable, comme
en Vendée. Le recours au CO2 pour cette application pourrait augmenter au cours des prochaines
décennies.
Soudage
Le CO2 peut être utilisé dans les faisceaux laser pour les activités de soudage (30).
Carboxythérapie
La carboxythérapie s’adresse aux patients atteints d’arthrite, pour les pathologies vasculaires et pour
traitement de la peau du visage. La carbothérapie consiste en une injection sous-cutanée ou par
inhalation de CO2 médical et stérile (30).
Application en viticulture
Le CO2 est utilisé en viticulture pour l’inertage des cuves, et pour protéger les moûts, le raisin et les
jus lors des transferts. Cette utilisation représente par exemple en Aquitaine un volume potentiel de
1 000 à 2 000 tonnes de CO2. Ce procédé nécessite du CO2 pur pour des raisons sanitaires (73).
Dans le cadre du projet ANR PYROCAPT, une étude technico-économique a été réalisée sur les
filières de valorisation du CO2 en Aquitaine en 2011. Le total des utilisations industrielles du CO2 est
de 4 550 tonnes pour la région considérée. La Figure 35 représente les besoins en CO2 (exprimés en
pourcentages) pour les différentes applications industrielles du CO2.
Ces applications ont des obligations de traçabilité du gaz, notamment dans les secteurs
pharmaceutique et agroalimentaire. Elles utilisent donc du CO 2 pur à 99,99 %.
A ce jour, les utilisations industrielles décrites concernent 18 millions de tonnes de CO2 par an au
niveau mondial, représentant environ 0,06% des émissions de CO 2 anthropiques annuelles et 10% de
la quantité totale de CO2 valorisé (30).
Pour ces applications déjà bien développées, le potentiel de croissance est limité. De plus, les
nouvelles utilisations ne représentent qu’un faible volume de CO 2 valorisable. A l’avenir, les experts
pensent donc que les utilisations industrielles devraient permettre de capter une quantité de CO 2
sensiblement égale à celle actuelle.
Une étude réalisée aux Etats-Unis a quantifié les demandes de CO2 actuelles et prévisionnelles à
l’horizon 2020 au niveau international pour différentes utilisations industrielles (Tableau 17) (78).
Concernant les diverses applications précédemment citées, elles sont déjà bien connues et
industrialisées pour la plupart. Il y a, de ce fait, peu de laboratoires travaillant sur l’utilisation
industrielle du CO2 (30).
Quelques recherches sont réalisées pour la production de froid à partir d’hydrates de dioxyde de
carbone ainsi que les nombreuses applications du CO2 supercritique.
Un sujet d’étude important actuellement concerne les hydrates de dioxyde de carbone. Ce sont des
composés cristallins (molécules d’eau liées entre elles et entourant une molécule de CO2).
Initialement, les hydrates de dioxyde de carbone ont été étudiés dans le secteur de l’industrie
pétrolière afin de limiter leur formation dans les pipelines. Ils se forment sous des conditions de
pression de 10 à 20 bars et pour des températures positives. La valeur énergétique de ces composés
est comparable, voire supérieure à celle de la glace. Les hydrates de CO 2 se présentent sous forme
de cristaux ou sous forme de « coulis » lorsque le CO2 est dissous dans l’eau.
Il est envisagé d’utiliser les hydrates de CO2 en tant que fluides frigoporteurs sous leur forme de
coulis (80). Une autre application est celle du transport et du stockage du froid et de l’énergie, via
le piégeage de molécules au sein de la maille cristalline. L’utilisation d’hydrates en milieux aqueux à
partir d’hydrates de sels est déjà industrialisée au Japon pour le transport et le stockage du froid. De
plus, les hydrates représentent une importante source d’énergie : ils contiennent 5 fois plus d’énergie
qu’un même volume de gaz naturel (81).
L’inconvénient principal des hydrates de CO2 et impactant le bilan environnemental est leur pouvoir de
réchauffement global, 30 fois supérieur à celui du CO2 (81).
A ce jour, des recherches sont en cours afin de comprendre le mécanisme de formation des hydrates
de CO2, leur comportement, d’améliorer leur stabilité et d’optimiser les écoulements. La qualité du
CO2 entrant est aussi un point d’étude puisque les impuretés modifieraient les propriétés des hydrates
quant à leurs écoulements. Toutefois, l’utilisation de CO 2 capté de fumées industrielles est envisagée
à long terme (30).
Les recherches sont menées au sein des centres de recherche de l’industrie pétrolière et de
laboratoires principalement japonais et français. Parmi les acteurs français, on peut citer l’IRSTEA qui
étudie les écoulements des hydrates de CO 2 en milieu aqueux. Très peu d’équipes sont donc
mobilisées sur les hydrates de CO2, en comparaison avec d’autres voies de valorisation du CO 2 (80).
Coût
Les applications étant pour la plupart industrialisées, il s’agit d’un système rentable.
Concernant les hydrates de carbone, le coût de la technologie n’est pas encore connu. Toutefois, le
changement des installations existantes pour un nouveau système de fluide réfrigérant représenterait
un coût important.
L’utilisation de CO2 au niveau industriel présente un réel intérêt environnemental. En effet, le CO 2 peut
remplacer des produits toxiques.
L’utilisation de CO2 supercritique en substitution à d’autres solvants liquides permet une économie
d’énergie, et le non-recours à des solvants reconnus toxiques tels que le phosgène. Le remplacement
des solvants organiques (avec un marché mondial de l’ordre de 35 Mt/an) par du CO2 supercritique
aurait pour conséquence une réduction nette des émissions de CO 2 de l’ordre de 3 tonnes par tonne
de solvant (82).
Messer France produit et distribue des gaz industriels en France tels que l’azote, l’oxygène, le CO2,
l’argon, l’hélium et de nombreux autres gaz. En 2011, l’entreprise s’est intéressée à son bilan
carbone et plus spécifiquement aux impacts relatifs aux gaz réfrigérants utilisés.
- Un dernier point a été l’étude du maintien au froid des denrées périssables. Les techniques de
cryogénie sont toutes favorables d’un point de vue environnemental à celles utilisant des groupes
frigorifiques ou des plaques eutectiques.
Facteurs de succès
Les utilisations industrielles du CO2 sont déjà bien développées dans le monde. Les propriétés du
CO2 ont été très étudiées, permettant une bonne connaissance de cette molécule. Les filières
d’applications sont stables et les procédés sont rentables.
Toutefois, il existe quelques opportunités de développement telles que les applications de niche ou
encore les hydrates de dioxyde de carbone. Concernant ces derniers, des laboratoires étudient leurs
propriétés afin de les exploiter par la suite.
Forces Opportunités
- Nombreuses applications - Applications de niche
Inconvénients
Les applications industrielles exigent une qualité de CO 2 pur, puisque la plupart des marchés
concernés touchent le secteur agro-alimentaire.
Faiblesses Verrous
- Contrainte importante sur le CO2 entrant : pur à - Potentiel de croissance de cette voie de
99,99 % valorisation très faible
Il existe plusieurs voies permettant d’obtenir des produits chimiques à partir de CO 2 (Figure 36). Ces
voies font appel à différentes techniques qui consistent à soit insérer une molécule de CO2 dans
une chaine carbonée (carboxylation) ou une chaine minérale (minéralisation), soit au contraire à
réduire ce CO2 en y ajoutant de l’hydrogène par exemple. Ces dernières voies de réduction prennent
différentes formes selon les réactifs employés et les spécificités techniques : utilisation de très haute
température (thermochimie), d’électricité (électrolyse), de méthane (reformage), d’hydrogène
(hydrogénation)….
Alcools
-Méthanol
Méthane (CH4) -Ethanol
Acides carboxyliques
-Acide salicylique
-Acide acrylique
-Acide acétique
-Acide formique
CO2
Carbonates organiques
-Polycarbonates de propylene, de
Urée bisphénol A
-Carbonates organiques linéaires
-Carbonates organiques cycliques
Carbamates
Esters et dérivés
-Lactones, amides…
Maturité
technologique En gras : les synthèses réalisées à l’échelle industrielle,
En italique : les synthèses au stade « pilote » et ou « R&D »
Voie de
transformation Hydrogénation Reformage Synthèse Minéralisation Transformation
/ électrolyse du méthane organique Biologique
Figure 36 : Principaux produits chimiques obtenus à partir de CO2 (Source : compilation RECORD /
APESA)
Chacune de ces voies va être décrite dans les différents chapitres suivants.
Principe
Le CO2 est une ressource abondante et non toxique à l’état naturel, et notamment dans
l’atmosphère. La transformation du CO2 en produits chimiques organiques à valeur ajoutée présente
un intérêt croissant. Le CO2 utilisé en tant que matière première dans les synthèses en chimie
organique peut remplacer les ressources fossiles et rentrer dans la composition de nouveaux
matériaux tels que certains polymères (84) (85) (86).
La synthèse chimique utilisant du CO2 présente deux types de réactions : celles de réduction et celles
de carboxylation (85). Cette partie se concentre surtout sur les réactions de carboxylation tandis que
les réactions de réduction sont étudiées en détails dans les fiches « Hydrogénation », « Electrolyse »
et « Photoélectrocatalyse ».
La molécule de CO2 est stable thermodynamiquement et présente une faible réactivité. De ce fait, les
réactions de conversion du CO2 en composés organiques sont endothermiques. Il y a nécessité
d’utiliser des catalyseurs, des molécules suffisament réactives, et de travailler dans des conditions
optimales. Pour rendre possible le développement à l’échelle industrielle des procédés de synthèse
organique à partir du CO2, il faut mettre au point des catalyseurs stables, peu coûteux et facilement
régénérables (30) (85).
Toutefois, le CO2 a une forte affinité vers les nucléophiles et les donneurs d’électrons en raison de
l'électronégativité des atomes d'oxygène qui rend le carbone central électrophile. Il s’agit de l'anhydre
de l'acide carbonique attractif envers les bases. De plus, la réaction du CO2 avec des composés
insaturés et complexes métalliques à faible valence permet la formation de cycles à cinq chaînons de
type métallalactones. De ce fait, les réactions de synthèse organique à partir du CO 2 peuvent être
classées en deux groupes principaux : la formation d’un groupe carboxylique par l’attaque d’un
nucléophile (a dans la Figure 37) et la formation d’un métallacycle à cinq éléments par cycloaddition
oxydante (b dans la Figure 37).
Hydrogénation
Les utilisations du CO2 envisagées dans la synthèse organique à l’heure actuelle sont nombreuses et
leur stade de développement varie entre la recherche fondamentale et la commercialisation pour
certains produits tels que l’urée ou l’acide salicylique.
Synthèses industrialisées
Carbonates cycliques : Ils sont obtenus principalement par réaction catalytique du CO 2 avec
des époxydes (85). Ils peuvent aussi être obtenus par réaction du CO2 avec des alcools, des
oléfines ou un cétal cyclique (87). Il s’agit du carbonate d’Ethylène (EC), du Carbonate de
Propylène (PC), du Carbonate de Cyclohéxène (CC) et du Carbonate de Styrène (SC). Ces
carbonates sont utilisés comme monomères pour l’obtention de polymères, pour la synthèse
de hydroxyesters et hydroxylamines, comme composants de matériaux spéciaux et comme
solvants (85).
Carbonates linéaires : La voie la plus intéressante pour produire des carbonates linéaires
est celle de la carboxylation directe d’alcools selon la réaction suivante (85) :
2ROH + CO2 → (RO)2CO + H2O
Les carbonates linéaires sont le diméthyle carbonate (DMC), le dialkyle carbonate (DAC), le
diéthyle carbonate (DEC) et le diphényle carbonate (DPC). Les applications des carbonates
linéaires sont multiples, comme solvants, comme réactifs pour les réactions d’alkylation ou
acylation et comme additifs pour l’essence ou le diesel (85). Le DMC peut être utilisé comme
réactif en remplacement du phosgène (COCl2) pour la production de polycarbonates et
polyuréthanes.
Polycarbonates : Les carbonates cycliques peuvent être ouverts pour donner un acide
hydroxy carboxylique qui ensuite est polymérisé pour produire des polycarbonates. Les
polycarbonates sont largement utilisés comme matériaux de construction, produits de sécurité
et de protection personnelle grâce à leurs propriétés de haute résistance et de légèreté (88).
D’autres propriétés de ces matériaux sont la transparence, la résistance à la lumière,
l’isolation électrique, etc.(30).
Carbamates (uréthanes) (88) : La réaction entre certains N-nucléophiles comme les amines
et le CO2 a comme résultat la formation des composés N-carbonylés, y compris les
carbamates ou uréthanes. Les carbamates ont plusieurs applications par exemple comme
pesticides en agriculture ou comme précurseurs de la synthèse d’isocyanates qui sont utilisés
pour produire des polyuréthanes. L’ester carbamique peut remplacer le phosgène comme
réactif en synthèse organique.
Synthèses en recherche
Actuellement, la grande majorité des procédés de synthèse organique déjà industrialisés utilisent du
CO2 liquéfié ou gazeux pur à 99,99 %. Une haute pureté du CO2 est demandée, puisque certains
catalyseurs sont sensibles aux impuretés. Ces dernières peuvent impacter la cinétique de la réaction
(30) (91).
Toutefois, la possible utilisation d’une source de CO 2 de plus faible concentration est un point d’intérêt
et un axe d’amélioration de cette voie. Des études sont en cours pour étudier la faisabilité du procédé
de synthèse de carbonates cycliques à partir de fumées industrielles. Il est nécessaire de développer
8
Synthèse d’acides carboxyliques : Des chercheurs coréens ont testés l’utilisation de CO2
capté aux amines provenant de fumées de combustion sur plusieurs réactions chimiques (93).
- Pour la carboxylation de l’acétylène utilisant du CO 2 capté issu de fumées de combustion, le
rendement obtenu de 82% de conversion chimique est identique à celui obtenu avec
l’utilisation de CO2 hyper pur (>99,999%).
- Les résultats sont similaires pour la carboxylation d’autres alcynes et la synthèse de
carbonates cycliques qui ne nécessitent pas l’utilisation de CO2 hyper pur.
- Après plus de 50 utilisations de la solution de captage (MEA) recyclée, il n’y a pas eu de
baisse de rendement significative.
- l’utilisation directe de fumées de combustion (sans captage aux amines) reste par contre un
échec.
La capacité de valorisation du CO2 par les différentes voies de synthèse organique est fonction du
marché du produit obtenu et du besoin en CO2. A ce jour, la quantité de CO2 valorisé par synthèse
organique est inférieure à 140 millions de tonnes par an. La synthèse d’urée est la plus importante
consommatrice de CO2.
Dans le cas de la production d’urée, la consommation de CO2 est comprise entre 0,735 et
0,75 tonne par tonne d’urée. La capacité de production mondiale d’urée est de 184 millions
de tonnes par an, représentant une quantité de CO2 valorisé de l’ordre de 135-138 millions
de tonnes par an (26) (95) (96).
La production de carbonates nécessite 0,1 tonne de CO2 par tonne de carbonate produit.
Le marché actuel de production de polymères de carbonates est d’environ 2 millions de
tonnes, ce qui porte à une consommation de CO 2 de l’ordre de 0,2 million de tonnes par an
(95). En 2012-2013 la production de poly(carbonate de bisphénol A) est de 3,5 Mt dont 0,5 Mt
produits par un "procédé CO2"(91).
8
Institute for Basic Science, Korea Carbon Capture Sequestration R&D Center, College of Natural Sciences Seoul National
University
La production d’acide acrylique à partir de CO 2 pourrait valoriser 0,61 tonne de CO2 par
tonne d’acide acrylique (39).
Potentiel
L’utilisation future du CO2 en synthèse organique (sans considérer les produits à valeur énergétique)
pourrait atteindre 500 millions de tonnes par an (98).
La valorisation du CO2 par synthèse de produits chimiques est limitée par rapport aux produits à
valeur énergétique. En effet, seuls 6 à 7 % du pétrole extrait est utilisé pour la pétrochimie (30). Le
potentiel d’utilisation du CO2 pour le secteur chimique est estimé entre 1 à 7 % du potentiel total
d’utilisation contre 10 % pour les produits énergétiques (85) (99). Il est évident que le CO2
potentiellement valorisable par cette voie ne peut pas suffire à fournir une solution globale à la
réduction des émissions anthropiques (100).
Conditions opératoires
Les conditions de réaction sont différentes pour chaque type de synthèse et dépendent des
performances des catalyseurs (91) (Cf. Figure 41). Avec l’utilisation de catalyseurs adéquats, les
conditions d’opération sont plus modérées.
L’urée est synthétisée industriellement en deux étapes. Tout d’abord, le CO2 réagit avec
l’ammoniac pour produire le carbamate d’ammonium qui est transformé ensuite en urée par
déshydratation. Le procédé est réalisé sans catalyseur et sous forte pression (100-400 bars)
et à des températures relativement hautes (160-200 °C) (101) (102).
L’acide salicylique est synthétisé par carboxylation du phénolate de sodium sous une pression
de 10 bars et à une température de 150 °C environ (30).
Pour la synthèse des carbonates cycliques, les conditions de réaction peuvent être
extrêmement douces, voisines de la température ambiante et d’une pression de 10 bars (91).
Des synthèses à pression ambiante sont actuellement testées dans plusieurs laboratoires
(93).
Maturité technologique
L’émergence des procédés de synthèse organique dépend des produits obtenus et des besoins
identifiés (91). La maturité technologique est différente en fonction du produit envisagé. Il existe des
procédés de synthèse déjà industrialisés et d’autres en phase de développement ou de recherche.
La production d’urée à partir du CO2 et de l’ammoniac est un procédé déjà industrialisé depuis
près de 40 ans. La capacité de production mondiale d’urée est d’environ 184 millions de
tonnes par an en 2012 (96).
Les carbonates cycliques sont déjà sur le marché car les réactions sont bien connues, et les
besoins existants. Ce marché est en expansion, grâce notamment aux batteries lithium-ion
(91).
Pour les polymères à partir d'époxydes et de CO2, le stade industriel devrait être atteint d'ici
peu (91). A l’heure actuelle, il existe déjà des unités pilotes ou de démonstration comme celles
de Novomer ou Bayer (97) (103). Bayer envisage la construction d’une unité de production de
polyuréthane en 2015 à Dormagen en Allemagne. Cependant, la viabilité commerciale de
cette technologie va déprendre de l’acceptation des produits par le marché existant (26).
Besoins en recherche
Pour les voies de synthèse non industrialisées, l’enjeu principal est le développement et
l’amélioration des catalyseurs (30) (91) (105) (106) (107). A ce jour, les recherches sont orientées
vers le développement de catalyseurs performants, simples de conception, stables, peu coûteux
et facilement recyclables (106). L’utilisation de catalyseurs permet de diminuer l’apport d’énergie
d’activation nécessaire pour les réactions de synthèse organique à partir du CO2 (Cf. Figure 42).
Un autre point d’intérêt est la compréhension des mécanismes de nouvelles réactions dans le but de
les améliorer. Il s’agit notamment de la carboxylation directe des liaisons C-H avec du CO2 (87) et la
création des liaisons C-C (108).
En parallèle, des recherches sont menées pour utiliser les fumées industrielles comme source de
CO2. Pour cela, il est nécessaire de développer des catalyseurs performants opérant en présence
d’impuretés telles que les NOx ou les SOx et à de faibles concentrations en CO2.
Coût
Coût d’investissement
Aucune information n’a pu être trouvée sur les coûts d’investissements relatifs aux technologies en
phase de développement, les paramètres de procédés n’étant pas connus.
Le Carbon Sequestration Leadership Forum propose en 2012 une approche économique basée sur
les coûts des produits entrants et le prix des produits vendus (39). Leurs résultats sont repris dans les
deux parties ci-dessous :
Les voies déjà industrialisées (synthèse d’urée ou de certains carbonates) peuvent être utilisées pour
consommer du CO2. Dans ce cas, le seul coût des matières premières nécessaires pour traiter une
tonne de CO2 varie de 400 à 1 000 euros.
Dans le cas de la synthèse d’urée, le coût des matières premières est de 385 € par tonne de
CO2 valorisé. Cette valeur considère les coûts de 30 €/tonne de CO 2 et de 355 €/tonne
d’ammoniac.
Pour le carbonate de polyéthylène (PEC), le coût des matières premières est de 938 € par
tonne de CO2 valorisé. Ce coût comprend les prix de 30 €/tonne de CO2 et de 908 €/tonne
d’oxyde d’éthylène.
Pour la synthèse d’acide acrylique à partir de CO2 et d’éthylène, le coût des matières
premières est de 600 € par tonne de CO2 valorisé. Ce coût intègre les prix de 30 €/tonne de
CO2 et de 530 €/tonne d’éthylène.
Il faut noter que les coûts indiqués sont des estimations, ne prenant qu’en compte le coût des
matières premières. Pour avoir une estimation plus précise du coût, il faudrait considérer le coût des
catalyseurs et de leur fabrication, le coût des procédés, etc.
Les procédés déjà commercialisés depuis plusieurs années comme la synthèse d’urée ou d’acide
salicylique sont logiquement rentables.
Pour un prix de vente de l’acide acrylique de 1 690 € par tonne, sa production à partir de CO 2
et d’éthylène peut être envisagée comme un procédé rentable. Le bénéfice sur le coût des
matières premières est de 1 280 € par tonne de CO 2 valorisé. Cependant, cette réaction est
encore au stade recherche.
Ces données sur la rentabilité économique des réactions restent approximatives, ne prenant pas
compte le coût des catalyseurs, de la maintenance et de l’équipement.
Des bilans carbone sont disponibles pour certains procédés, notamment ceux de la synthèse
industrielle d’urée et de carbonate de propylène par Novomer. Une étude menée par Michele Aresta
s’est intéressée aux émissions de CO2 pendant la synthèse de carbonate d’éthylène en comparant
avec les données des voies classiques. Quant aux synthèses au stade de recherche fondamentale,
aucun bilan environnemental n’a été effectué à ce jour.
D’après une étude réalisée par Edge Environment, 2,27 tonnes de CO2 sont émises par
tonne de CO2 utilisée lors de la synthèse d’urée. Cette étude considère le captage du CO2
dans une centrale à charbon en Chine et le transport du CO2 jusqu’à une unité de production
d’urée, située à une distance de 9 km. Les résultats montrent que 68 % des émissions
correspondent à la production et la compression de l’ammoniac (à 175 bars). Le captage et la
compression du CO2 à 200 bars représentent 19 % des émissions ; les 13 % restants sont liés
à la production d’urée. Les émissions causées par les équipements et la construction de
l’unité sont considérées comme négligeables (26).
Dans le bilan carbone effectué par Edge Environment, ce sont 5,52 tonnes de CO2 qui sont
émises par tonne de CO2 valorisé lors de la synthèse de polymères par le procédé
Novomer. Cette étude prend en compte le captage du CO2 d’une centrale à charbon et le
transport du CO2 sur une distance de 9 km jusqu'à l’unité de production de carbonate de
polypropylène. L’obtention de l’oxyde de propylène comme matière première pour le procédé
est responsable de 94 % des émissions, le captage et le transport du CO2 ne comptant que
pour les 6 % restants. Les émissions causées par la construction de l’usine et incluant les
matériaux utilisés sont jugées négligeables (26).
Une ACV a été réalisée afin de comparer différents procédés de production de carbonate
d’éthylène (EC). Les émissions de CO2 par carboxylation directe de l’oxyde d’éthylène
(utilisation de CO2) sont de 0,92 tonne par tonne de produit obtenu (Cf. (a) Figure 44).
Ces émissions sont faibles par rapport aux voies classiques de production de carbonate
d’éthylène à partir de l’éthylène glycol et de phosgène (Cf. voies (b) et (c)). La production
d’EC à partir de l’époxyde (Cf. (b) Figure 44) émet 6,62 tonnes de CO2 par tonne de
carbonate et à partir de chlorhydrine d'éthylène (Cf. (c) Figure 44) 9,89 tonnes de CO2 par
tonne de carbonate (95).
Principales pollutions
Des pollutions significatives peuvent être engendrées en cas d’utilisation ou de fin de vie défaillante
de catalyseurs métalliques et de solvants. Un point positif de cette voie est la possibilité d’utiliser du
CO2 dans la synthèse organique en remplacement de certains réactifs ou solvants toxiques tels que le
phosgène (30).
Efficacité énergétique
Les réactions de carboxylation - au cours desquels le groupe carboxyle « –COO » est incorporé dans
un produit - peuvent être exothermiques. Ces réactions ne demandent pas de casser les liaisons
fortes et stables (type sigma) de la molécule de CO2.
Plusieurs réactions peuvent avoir lieu à température ambiante comme les réactions de couplage avec
des oléfines, des diènes, des amines ou des groupes hydroxyle (95). Cependant, il est parfois
nécessaire de travailler à de hautes températures pour avoir une vitesse de réaction appréciable.
Au cours des dernières années, les industriels ont montré un intérêt croissant pour la production de
polymères à partir de CO2. Il s’agit par exemple des entreprises Asahi au Japon avec la production de
polycarbonates ou Empower Materials pour le polycarbonate d’alkylène à partir de CO 2 et d’époxydes.
Ce type de synthèse est étudié dans certaines unités pilotes ou préindustrielles.
Depuis 2008, l’entreprise de Corée du Sud produit des carbonates de propylène (PPC) à partir de CO 2
et d’oxyde de propylène au sein d’une unité pilote. Cette unité est capable d’opérer en continu en
utilisant son propre catalyseur de haute activité à base de cobalt.
Une unité pilote de production de polyuréthanes à partir de CO 2 a été démarrée en 2011 par Bayer
Material Science à Leverkusen avec un investissement de 9 millions d’euros (dont 5 provenant du
gouvernement allemand). La capacité de production de l’usine est de l’ordre de quelques kilogrammes
par jour. Après 2 ans de tests, la construction d'une unité de production industrielle sur le site Bayer
de Dormagen, en Allemagne devrait permettre d’atteindre les objectifs fixés, c’est à dire « produire
dès 2015 de grandes quantités de cette matière pour des entreprises de transformation ».
Le procédé de production consiste en l’utilisation de leur propre catalyseur à base de zinc. Ce
catalyseur a été développé par le Catalytic Center (CAT) dans le cadre du projet Dream Reactions
initié en 2009. Le CAT est géré conjointement par Bayer Material Science (BMS), Bayer Technologie
Service et l’Université d’Aachen (RWTH).
Le CO2 utilisé est capté d’une centrale électrique à lignite de RWE Power à Niederaussem. Ce CO 2
est utilisé comme matière première pour produire le polycarbonate de polyéther polyols (PPPs),
précurseur de polyuréthane. Le polyuréthane est utilisé en tant qu’isolant thermique des bâtiments, et
permet des économies d’énergie.
Novomer Inc. est une entreprise pionnière dans la synthèse de produits chimiques comme les
polymères à partir de CO2. En 2013, ils ont annoncé le démarrage de la première unité mondiale à
grande échelle de production de carbonate de propylène polyol (PPC) à partir de CO 2 pouvant
provenir aussi bien de sous produit de fermentation de l’éthanol, de reformage, de puits de gaz
naturels, ou de gaz de combustion de centrales thermiques au charbon. Le PPC est produit en
collaboration avec Albemarle Corporation dans l’usine Novomer sur le site d’Orageburg S.C. Ce projet
a été financé à hauteur de 19 millions d’euros par le DOE.
Les polymères produits sont capables de remplacer certains polyéther, polyester et polycarbonates
produits à base de pétrole. Le procédé est basé sur la co-polymérisation du CO2 et des époxydes
pour obtenir des produits avec un contenu de CO 2 de plus de 40 % en poids. Un catalyseur exclusif
de Novomer permet au CO2 de réagir avec les époxydes comme l’oxyde de propylène et l’oxyde
d’éthylène sous des conditions modérées de pression et de température de manière efficace pour
obtenir le carbonate de polypropylène (PPC) et le carbonate de polyéthylène (PEC) comme produits.
L’énergie nécessaire au procédé d’obtention du carbonate de polypropylène est de 33,6 kWh par
tonne de CO2 utilisé (26).
En 2010, Cardia Bioplastics a lancé le premier sac plastique biodégradable au monde obtenu à partir
d’un mélange physique d’une résine de carbonate de polypropylène (PPC) et d’amidon. Le PPC est
obtenu par copolymérisation du CO2 (issu des fumées industrielles) et d’oxyde de propylène sur un
catalyseur à base de zinc.
Cette résine de PPC obtenue à partir du CO2 capté présente un taux important de métaux toxiques
tels que le zinc. Cela l’empêche d’obtenir l’Accréditation Internationale pour le Compostage
(« International Accreditation for Composting »). Cardia Bioplastics travaille sur cet enjeu et a annoncé
en 2013 un accord avec l’ARC (Australian Research Council) et l’Université de Sydney. L’objectif est
de développer un procédé de production de PPC à partir de CO 2 en une seule étape et avec un
contenu pauvre en métaux lourds. Si les recherches aboutissent, une résine de PPC pure et
biodégradable pourrait ouvrir de nombreuses perspectives commerciales.
Projets de recherche
- Projet CO2UTIL
Ce projet a été mené par différents organismes (Université de Bourgogne, CNRS, Université
d’Oulu,…) de 2007 à 2010, avec un investissement de 608 730 €. L’objectif était de développer des
procédés durables de production de méthanol et de carbonate de diméthyle en utilisant du CO 2
comme matière première. Ce projet a permis d’identifier des catalyseurs efficaces (112).
Ce projet a été initié en 2011 par l’ICIQ (Institut Catala d’Investigacio Quimica), avec un financement
de l’Union Européenne de 1 423 800 euros, pour une durée de 60 mois.
L’activation catalytique des liaisons chimiques C-C et du CO2 est le principal point d’intérêt du projet.
Le but est de trouver des catalyseurs performants, non toxiques et d’un faible coût capables d’activer
les liaisons chimiques C-C pour l’insertion du CO2 avec l’objectif de produire des acides carboxyliques
et ses dérivés.
Ce projet européen, démarré en 2013 et pour une durée de 4 ans, regroupe plusieurs partenaires tels
que Carbon Recycling International, TNO, l’Université de Twente, SINTEF, le RWTH d’Aachen,
Feyecon, l’Université de Newcastle et Evonic Industries AG. Il bénéfice du financement de l’Union
Européenne. L’objectif est de développer deux procédés de production de carbonates cycliques,
particulièrement le carbonate de glycérol qui est un coproduit de la production de biodiesel.
Production directe de carbonate de glycérol à partir de glycérol. Les utilisations de glycérol pur
et non pur issu de la production de biodiesel sont envisagées.
Construction d’une unité pilote pour évaluer la faisabilité de l’extension à l’échelle industrielle.
Réalisation d’une étude technico-économique des deux procédés pour prouver leur faisabilité
économique et environnementale.
Ce projet est mené par l’ICIQ (Institut Catala d’Investigacio Quimica) depuis 2013 et pour une durée
de deux ans. Il est financé par l’Union Européenne avec un investissement de 166 336 euros.
Le projet ALCO2OH est orienté vers la recherche au niveau catalytique sur la possible activation des
liaisons chimiques du type C-O et C-OH (présentes dans les époxydes et les alcools aliphatiques
simples). L’objectif est de développer des voies innovantes de production d’acides carboxyliques à
partir d’alcools et en utilisant du CO2. Les chercheurs sont confrontés au problème d’activation d’un
point de vue scientifique, tout en considérant les implications environnementales et économiques.
En France il existe différents laboratoires de recherche et entreprises chimiques qui sont intéressés
par la recherche et le développement de l’utilisation du CO 2 comme matière première pour la synthèse
de composés organiques. Les principaux acteurs dans ce domaine sont (91) :
Facteurs de succès
Les infrastructures existantes de l’industrie chimique traditionnelle peuvent être utilisées pour
certains procédés de synthèse tels que la production de polymères (26).
L’utilisation de carbone recyclé dans certains produits utilisés quotidiennement (par exemple
des produits à base de polymères tels que les sacs plastique ou les emballages alimentaires)
pourrait favoriser l’acceptabilité sociale de ce procédé (26).
Capacité de stockage du CO2 dans les polymères pendant une durée de temps élevée (26),
supérieure à celle des produits à valeur énergétique.
Inconvénients
Le volume de CO2 valorisable par synthèse organique est limité (30). Il ne peut pas fournir
une solution globale à la réduction des émissions anthropiques et reste incertain compte tenu
de la variabilité du marché du produit obtenu (100).
Principe
La réaction de minéralisation pour le cas général des oxydes de magnésium et de calcium est (M
contient du Mg, du Ca, du Fe, etc.):
Le calcium et le magnésium sont rarement disponibles sous forme d’oxydes purs dans la nature. Ils
sont contenus dans certains minéraux tels que les silicates (olivine, serpentine, wollastonite) (116).
Ces silicates sont présents sur la terre en très grande quantité (>1 000 000 milliards de tonnes) (117).
Les réactions globales de carbonatation des silicates sont, pour l’olivine et la serpentine (118) :
-1
Olivine: Mg2SiO4 + 2 CO2 → 2 MgCO3 + SiO2 + 89 KJ mol CO2
-1
Serpentine: Mg3Si2O5(OH)4 + 3 CO2 → 3 MgCO3 + 2 SiO2 + 90 KJ mol CO2
Minéralisation in-situ : Le CO2 est injecté dans des formations géologiques riches en
silicates ou dans des aquifères alcalins : la minéralisation se produit alors dans le sous-sol. La
minéralisation in-situ est plus une méthode de stockage que de valorisation du CO 2. En effet,
la minéralisation in-situ s’apparente à une opération similaire au stockage géologique
classique.
La Figure 46 présente les principales différences entre les deux types de minéralisation identifiés
précédemment.
La minéralisation ex-situ peut utiliser des réactifs solides d’origines différentes tels que des roches et
minéraux issus de gisements naturels ou des déchets industriels. Dans le cas d’utilisation de
minéraux issus des gisements naturels, la préparation des réactifs solides est nécessaire. Cette
étape comprend l’extraction minière des roches, le transport et le broyage. Une activation thermique
des roches peut s’avérer nécessaire selon les voies de minéralisation utilisées (118).
Outre la pérennité du stockage du CO2 et l’inocuité des carbonates produits, la minéralisation ex-situ
présente comme avantage la possible valorisation des déchets industriels (production de ciment,
d’acier et d’énergie) qui peuvent aussi être carbonés (118) (117). Ces déchets ont souvent l’avantage
d’être produits près de sources de CO2 et de nécessiter peu de traitement (25).
Il faut noter qu’il existe plusieurs options de mise en oeuvre de la minéralisation ex-situ. La
minéralisation peut s’effectuer en voie sèche ou aqueuse, et en une ou plusieurs étapes (117).
La principale application de la minéralisation ex-situ est la formation de calcaire obtenu par réaction
entre le CO2 et la chaux éteinte (Ca(OH)2) avec de l’eau comme coproduit. La chaux éteinte est un
déchet de l’industrie cimentière. D’autres carbonates comme le MgCO 3 sont potentiellement utilisables
comme matériaux de construction (30), mais des études demeurent nécessaires pour le
développement et la validation de matériaux de construction à partir de carbonates de magnésium.
La minéralisation ne peut être appliquée qu’aux émetteurs ponctuels de CO 2, càd les émetteurs
industriels. La qualité du CO2 varie en fonction de l’émetteur industrield’origine.
Cependant il est envisagé que le CO2 utilisé pour la carbonatation minérale puisse provenir
directement de fumées industrielles, ce qui permettrait dans les cas favorables de s’affranchir de
l’étape amont de captage et de la pénalité énergétique induite (120). Toutefois le rendement du
procédé est directement lié à la pression partielle en CO 2 (121). Des efforts de recherche et de
développement actuels portent sur l’utilisation directe de CO 2 issu de combustions industrielles avec
une composition en CO2 de l’ordre de 10-15% (39).Le verrou est essentiellement d’ordre cinétique
(temps de carbonatation très longs) (122). Selon le CO2 utilisé, le rendement du procédé et la qualité
des produits finaux diffèrent (30). Concernant les impuretés contenues dans les fumées et leur
incidence possible sur la performance de la minéralisation ex-situ, aucune donnée n'existe à ce jour
(121).
Quantité nécessaire
L’utilisation potentielle de CO2 est estimée à plus de 300 Mt par an (26). La quantité de roches
nécessaires pour la minéralisation d’une tonne de CO 2 est de 4 à 6 tonnes (123). La quantité de
CO2 nécessaire est alors de 0,17 à 0,25 tonne par tonne de roche.
Quelques données sur l’utilisation du CO2 dans différentes unités sont connues :
Le procédé Calera utilise 30 000 tonnes de CO2 par an dans une unité aux Etats-Unis. Dans
une future unité à l’échelle industrielle, il est envisagé d’utiliser 300 000 tonnes de CO2 par an
pour produire 1 million de tonnes de matériau industriel (125). Le procédé en question reste
controversé, tant sur sa réelle efficacité que sur sa capacité de transposition à grande échelle
(121).Pour ce procédé, il est annoncé une séquestration de 500 Kg de CO 2 par tonne de
ciment produite (30) (26). Il faut 0,5 tonne de CO2 par tonne de produit.
Le groupe GreenMag a prévu la construction d’un démonstrateur pour valoriser 100 000
tonnes de CO2 par an. Par la suite, une unité à l’échelle industrielle pourrait utiliser jusqu’à 20
Mt / an de CO2 à l’horizon 2020 (126).
D’après ces données, il est requis entre 0,4 et 0,5 tonne de CO2 pour produire une tonne de
produit.
Conditionnement
Les conditions d’opération de la minéralisation ex-situ sont variables en fonction du procédé envisagé.
La cinétique de la réaction étant très lente, un apport de chaleur est nécessaire pour favoriser
la réaction. Les températures sont alors comprises entre 300 et 500 °C (120).
Dans ce cas, la cinétique de la réaction est plus rapide et les conditions optimales de
température se situent entre vers 180 °C (120).
o En mono-étape :
o En multi-étapes :
Généralement, des acides forts (HCl, H2SO4, HNO3) ou faibles (acide acétique) sont
utilisés pour l’extraction du Ca ou du Mg. En effet, l’olivine (Mg,Fe)2[SiO4]et la
serpentine (Mg,Fe,Ni)3Si2O5(OH)4 sont solubles dans des solutions de pH acide à
neutre (120).
Il est ainsi possible d’utiliser de l’acide acétique pour diluer le minéral à 60 °C avant la
précipitation du carbonate à 40-80 °C (30).
Maturité technologique
Cette technologie est encore au stade pilote. Le déploiement à l’échelle industrielle n’est pas encore
prêt. (118) Cependant, la minéralisation du CO2 pourrait atteindre le stade commercial dans moins
de 5 ans (128) (26). C’est ce que prévoient les acteurs tels que le GreenMag Group ou Calera.
Potentiel
Potentiellement la capacité de stockage minérale du CO 2 est très largement supérieure aux émissions
anthropiques (121). La capacité de stockage réelle est limitée par les contraintes logistiques
(nécessité de proximité entre les minéraux et le CO , ainsi que la disponibilité de grandes quantités).
L’utilisation potentielle de CO2 à moyen terme est estimée à environ 300 Mt par an (26).
D’après Calera, la demande actuelle des produits de construction au niveau mondial est d’environ 32
milliards de tonnes par an. Théoriquement, en s’affranchissant des contraintes logistiques, le procédé
utilisant 500 kg de CO2 par tonne de ciment produit pourrait aboutir à une consommation de CO 2 de
9
16 milliards de tonnes par an (26).
Besoin en recherche
Travail en mode continu du procédé avec des fumées industrielles diluées en CO2 (flux
d’émission directe) et étude des effets des impuretés (130). Ces travaux doivent déboucher
sur une importante diminution de la consommation énergétique et donc du coût du procédé
(39). Shell a développé un procédé en plusieurs étapes pour démontrer la faisabilité technique
d’utilisation directe du gaz de combustion (10 % de CO 2 en volume) pour la minéralisation de
serpentine activée (activation thermique de la serpentine, mise en contact en suspension
entre le gaz de combustion et le minéral à température ambiante dans un broyeur et lixiviation
9
Il s’agit d’une consommation « brute de CO2 » n’intégrant pas le CO2 généré et émis lors de la production de ciment.
Enjeux
La contrainte logistique est très forte puisqu’il faut que les minéraux et le CO 2 se trouvent en très
grandes quantités sur le même site. La problématique est donc d'amener le CO 2 là où on en a besoin
et réciproquement (122). Des sites ont été repérés pour la minéralisation ex-situ dans la cadre du
projet CARMEX. Il s’agit de sites miniers déjà en exploitation, sur lesquels se trouvent de vastes
quantités de déchets miniers déjà finement broyés et pour lesquels du CO2 serait disponible à
proximité. Par ailleurs l’ouverture de nouvelles mines serait compliquée et impacterait négativement le
bilan environnemental (130).
Au niveau des coûts, les facteurs limitants sont le captage du CO2 en amont de l’opération de
minéralisation, le transport du CO2 ou le transport des minéraux carbonatables jusqu’à la source de
CO2 (122). Les principaux coûts associés au procédé de minéralisation à proprement parler, sont liés
au broyage amont des réactifs et au chauffage nécessaire du milieu réactionnel.
Coût
Coût d’investissement
Pour l’usine de Calera en Australie, le coût d’investissement est compris entre 1 100 et 1 400 € (pour
traiter le CO2 d’une centrale thermique au charbon) par MWe installé. Pour le développement de
l’usine commerciale avec une capacité de 200 MWe, l’investissement est estimé entre 225 000 et
290 000 € (26). Dans le procédé Calera, le CO2 est issu directement de fumées industrielles sans
aucun traitement préalable.
Coût de fonctionnement
Le coût de production varie entre 20 et 65 € par tonne de carbonate. Ce coût intègre le coût de
traitement de CO2 (entre 50 et 130 € par tonne de CO2 sachant qu’il faut 0,4 à 0,5 tonne de CO2 pour
produire une tonne de carbonate). Les coûts de captage et de transport du CO2 ne sont pas intégrés.
Les différents retours montrent des coûts variables selon les conditions de 20 à130 €/tCO2 traité :
Le coût minimum de la valorisation sans considérer le captage du CO2 est estimé à environ 50 € par
tonne de CO2 (132) (121). Cette estimation a été faite pour une unité à grande échelle en considérant
les coûts d’investissement et d’opération.
Une autre étude (126) estime le coût de traitement d’une tonne de CO2 hors captage entre 70 et 130 €
par tonne de CO2 valorisé. En tenant compte des coûts de captage (40 €/tCO2), le coût total de
traitement est de l’ordre de 105 à 165 €/tCO2.
Le procédé ICS est une nouvelle technique de minéralisation, pour laquelle le coût de traitement de la
tonne de CO2 est de l’ordre de 19 € la tonne (133). En intégrant les étapes de captage du CO2
(9€/tCO2) et de transport des minéraux (200km par rail depuis la carrière) (9€/tCO 2), le coût total de
traitement est estimé à 37€/tonneCO2. Ce procédé intègre les étapes de captage du CO2 et de
minéralisation mais ne comprend pas l’étape de traitement et de compression du CO 2 pur. Les détails
de ce procédé restent confidentiels et le coût du traitement devrait être confirmé par d’autres experts
La fourchette importante de coûts annoncés traduit l’état de développement dans lequel se trouve la
minéralisation à ce jour, certaines solutions étant encore à l’étude au laboratoire, avec des coûts
difficiles à appréhender, tandis que d’autres sont au stade de pilote avec des coûts en baisse.
Rentabilité économique
Le stade de développement encore non mature de la minéralisation, les inconnues qui pèsent encore
sur la valeur et l’utilisation des produits et leur acceptation dans le milieu de la construction
notamment, couplé à la stagnation mondiale du déploiement du captage et stockage du CO 2, ne
permettent pas encore de juger de la possible rentabilité économique de la minéralisation ex-situ.
Parmi les raisons évoquées comme frein au développement de la minéralisation, on trouve
notamment la faible valeur ajoutée des produits obtenus, comme par exemple le prix du calcaire de 4
à 5 € par tonne (30). De plus, il est compliqué de connaître la composition finale du produit, que l’on
ne peut pas toujours utiliser comme coproduits ou produits d’ajouts dans d’autres formulations pour
des raisons normatives et de qualité insuffisante (122).
Si le pessimisme est aujourd’hui de mise sur la minéralisation ex-situ, comme il l’est sur l’ensemble de
la chaine du captage et du stockage du CO 2, il n’en demeure pas moins que la minéralisation est la
seule solution industrielle en mesure de suppléer le stockage géologique, là où ce dernier ne pourrait
pas être mis en œuvre (121).
Le coût du procédé, même dans les cas favorables, reste élevé puisqu’il faut considérer le
prétraitement des réactifs solides et l’énergie à apporter pour accélérer la réaction de minéralisation.
Le principal facteur concernant la rentabilité économique de la minéralisation reste la valeur
économique de la tonne de CO2 (121). Pour que la minéralisation soit compétitive, il serait nécessaire
d’éviter les étapes de captage et de transport du CO2, et pour cela utiliser directement les fumées
industrielles comme intrant. Le procédé doit donc être adapté pour de faibles concentrations de CO2
(134).
Résultats d’ACV
D’après une ACV qui intègre les activités d’extraction des minéraux, de transport en bateau (entre
4000 et 7000 km) et de captage du CO2 d’une centrale électrique, la quantité de CO2 évitée est de
106,9 à 175,9 kg/MWh en comparaison aux émissions d’une centrale électrique sans captage de CO2
(380 kg/MWh) (135), soit une baisse de 28 à 46 % du bilan carbone initial.
L’efficacité de séquestration du CO2 varie entre 32,9 et 49,7 % (calculée selon le rapport suivant)
(135).
Dans le cas du procédé Calera de minéralisation en « Eastern Australia », les émissions sont
de l’ordre de 0,32 tonne de CO2 par tonne de CO2 utilisée (26). L’étude envisage le captage
du CO2 d’une centrale alimentée en lignite à Victoria (Australie) sans nécessité de transporter
les minéraux alcalins.
Dans le cas d’Alcoa, les émissions sont de l’ordre de 0,53 tonne de CO2 par tonne de
déchet de bauxite utilisée. Pour ce procédé, le CO2 doit avoir une pureté de 85 %. Il est
capté d’une centrale électrique au charbon avant d’être transporté par pipeline vers une
raffinerie d'alumine située à 9 km pour la carbonatation des déchets de bauxite. 95 % des
émissions dans ce cas correspondent au captage du CO2 et à sa compression jusqu’à 200
bars.
Principales pollutions
Dans le cas de la minéralisation en voie aqueuse, différents additifs peuvent être utilisés (acide
acétique ou HCl). Ces composés peuvent être toxiques (30).
Une attention doit être portée au chrysotile (ou amiante blanc), variété de serpentine amiantée pour
laquelle la réglementation interdit toute utilisation ou transformation (Décret n°96-1133 du 24
décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante, pris en application du code du travail et du code de
la consommation).
Efficacité énergétique
Dans le cas de la minéralisation des déchets industriels, l’avantage est que le prétraitement
ne représente qu’une petite étape dans la mesure où les déchets sont généralement finement
broyés, d’où une consommation énergétique moindre (25).
Dans les deux situations, de l’énergie est nécessaire pour les étapes de transformation chimique avec
utilisation éventuelle d’additifs (recyclage et pertes) ainsi que la séparation des carbonates et des co-
produits de réaction (118). On note que ces co-produits sont essentiellement de la silice, qui peut elle-
aussi trouver des voies de valorisation.
A l’heure actuelle, il n’existe pas encore d’unité d’échelle industrielle. Cependant le développement
d’unités pilotes ou de démonstrateurs a commencé au cours des dernières années notamment en
Australie ou aux Etats-Unis en bénéficiant d’un soutien financier au niveau de l’état. Les principaux
acteurs impliqués sont Alcoa, Calera, Skyonic et GreenMag.
Alcoa a mis en place en 2007 un procédé de carbonatation des déchets industriels dans une raffinerie
d’aluminium à Kwinana (Australie). Il s’agit d’un procédé de carbonatation des déchets de bauxite. Le
CO2 de haute pureté (85 %), capté depuis l’usine d’ammoniac CSBP, réagit avec les composants
alcalins des déchets pour produire les carbonates. La consommation de CO2 est seulement de 30 à
35 kg par tonne de déchets, ce qui permet d’utiliser à l’année un total de 70 000 tonnes de CO2 (136).
Le produit obtenu n’est pas d’une grande utilité mais est peu toxique et plus facile à stocker que les
déchets de bauxite. Le coût supplémentaire de l’opération de carbonatation (transport par pipeline
pendant 8 km du CO2) incluant le coût d’investissement, d’exploitation et de maintenance est estimé à
7 € par tonne de CO2 équivalent.
En parallèle, Alcoa a construit une unité pilote pour démontrer la faisabilité de la conversion, avec une
haute efficacité, du gaz de combustion en carbonates et bicarbonates à l’aide d’un système
d’épuration comportant un catalyseur enzymatique. Pour la construction de cette unité dans une
raffinerie d’aluminium au Texas, le département de l’énergie des Etats-Unis (DOE) a investi 12
millions de dollars.
La technologie utilisée par Calera permet de transformer le CO2 en carbonate qui peut, dans certaines
limites, rentrer dans la composition de certains ciments.
Les propriétés du ciment composé, obtenu avec ce carbonate, restent à démontrer, tout comme son
intérêt économique par rapport au ciment obtenu avec le calcaire moulu de carrière, actuellement
utilisé et bien moins cher (122).
Une plate-forme électrochimique innovante a été installée pour obtenir un produit alcalin requis
comme matière première (137).
Le procédé développé par Calera est capable de minéraliser directement le CO 2 contenu dans le gaz
de combustion en carbonates pour produire des matériaux de construction tels que du ciment en
utilisant 500 kg de CO2 par tonne de ciment produit (30) (26). Aujourd’hui, une unité de démonstration
en Californie a été installée, afin de capturer 30 000 tonnes de CO2 par an (équivalent à une centrale
de gaz de 10 MWe), pour un investissement de 13 millions d’euros par le DOE (125) (26).
En 2010, Calera a démarré un autre démonstrateur à Victoria en Australie. Il est envisagé d’utiliser
300 000 tonnes de CO2 par an, issu d’une centrale à charbon pour produire environ 1 million de
tonnes de matériaux de construction à une échelle de 200 MW (125) (26). La quantité d’eau
nécessaire au procédé de minéralisation aqueuse est de 7,5 tonnes par tonne de CO 2 utilisé et
l’énergie requise est de 0,176 MWh (26). L’investissement pour cette usine de Calera en Australie est
de 82 millions d’euros.
Le groupe Lafarge a signé avec la société américaine Solidia Technologies un accord de partenariat
qui vise à industrialiser une technique innovante pouvant réduire l'empreinte environnementale du
béton préfabriqué. Cette technique limite les émissions de CO 2 dans le processus de fabrication du
ciment mais utilise surtout le CO2 dans la production de béton préfabriqué en l'injectant dans le
matériau, apportant alors des propriétés renforcées au béton par une modification de sa
microstructure. Le bilan carbone de la filière pourrait ainsi diminuer de 70 %. L'objectif du partenariat
Ce projet de 125 millions de dollars (124) a reçu un financement de 25 millions de dollars par le DOE
et 35 millions par BP, Conoco Philips et PVS Chemicals entre autres (138) (124). Le but est de
développer une unité industrielle au Texas pour capter le CO 2 de la cimenterie Capitol Granulats Inc.
à San Antonio, et de l’utiliser pour produire du bicarbonate de sodium ou de soude grâce au procédé
de minéralisation.
La construction de cette usine a démarrée en 2012 et la production commencera au cours de l’année
2014. Cette usine devrait capturer 75 000 tonnes de CO2 par an pour produire 157 000 tonnes de
bicarbonate (124). Il est aussi envisagé d’utiliser 150 000 tonnes de CO2 pour produire d’autres
produits chimiques tels que l’acide chlorhydrique (138).
Le GreenMag Group et l’Université de Newcastle (NSW) ont reçu une subvention de 3 millions de
dollars par le Coal Innovation NSW pour développer en 2012 une unité pilote de carbonatation
minérale. L’objectif est d’optimiser le procédé de carbonatation en utilisant le CO 2 capté des centrales
électriques au charbon de NSW (139).
Si les résultats du pilote sont positifs, il est prévu de développer une usine de démonstration à
l’échelle industrielle (100 000 tonnes par an de CO 2) avec un coût d’investissement d’environ 85
millions de dollars à l’horizon 2016. Il serait ensuite envisagé de construire en 2020 une usine utilisant
environ 20 Mt/an de CO2 pour un coût de 0,7 à 1,5 milliard d’euros (126).
Carbon 8 (Angleterre)
En Angleterre, au moins 2 usines de carbonatation utilisant les résidus de déchets urbains traités par
incinération fonctionnent déjà et fabriquent des granulats. Elles sont opérées par la société Carbon8
dirigée par Mme Paula Carey, adossée à l'Université de Greenwich (122).
Carbon 8 utilise une solution brevetée appelée « Accelerated Carbonation Technology (ACT) » qui
permet d’accélérer le processus naturel de carbonatation de sols et de déchets. D’après les
concepteurs, la technologie permet d’utiliser les émissions de CO 2 issus des déchets à partir de
sources locales, de capturer d'importants volumes de CO 2, et de valoriser le produit final obtenu (140).
Programmes de recherche
Ce projet, qui s’est déroulé de 2008 à 2011 à Nuremberg, avait pour objectif l’optimisation du procédé
ALCATRAP (Alcaline Carbon Traping). Les étapes du projet ont été de développer et comprendre le
procédé puis de le tester au sein d’une unité pilote. Il regroupe deux instituts de recherche
universitaire, le « Department of Hydrology » de l’Université de Bayreuth et le « Department of Clay
and Interface Mineralogy » de RWTH Aachen avec l’investissement du Ministère allemand de la
science et de la recherche (141).
Situation en France
En France les activités sur la minéralisation ex-situ sont à ce jour limitées et il n’existe pas de projets
pilotes ou de démonstration. Cependant, il existe des projets de recherche multipartenaires.
Ce projet, financé par l’ANR, entre 2009 et 2012, regroupe des partenaires industriels tels que
TOTAL, des bureaux d’études (Bio-Intelligence Service), des partenaires publics tels que le Bureau de
Recherches Géologiques et Minières (BRGM), l’Institut de Physique du Globe de Paris et des
chercheurs du Laboratoire de Génie Chimique (UMR 5503) basé à l’Institut National Polytechnique
(INP) de Toulouse (143).
Le but du projet fut d’évaluer la carbonatation minérale ex-situ dans sa globalité via la réalisation
d’une analyse de cycle de vie. L’étude s’est focalisée sur des situations favorables : la minéralisation
de résidus miniers broyés de composition appropriée et disponibles à proximité des centres
d’émission de CO2. Dans la cadre du projet, une évaluation des ressources minérales disponibles,
une évaluation et une optimisation des étapes de précipitation des carbonates et une étude des
mécanismes mis en jeu ont été effectuées. Ces études avaient pour objectif d’optimiser la
carbonatation accélérée en une étape (123).
- La réalisation d’un système d’information géographique (SIG), à l’échelle mondiale, pour croiser
les ressources en résidus miniers, de roches mafiques et ultramafiques, et les émissions de CO2.
Cela a permis d’identifier des zones favorables au développement de la filière, notamment en
Nouvelle-Calédonie.
- L’obtention de rendements très prometteurs (70-90% de conversion), à des conditions de
pression assez modérées, sans additif chimique avec le développement d’un procédé
innovant de minéralisation en mono-étape. Le procédé en question a démontré sa capacité à
traiter des roches naturelles d’origine diverse, ce que les procédés qui utilisent des additifs
chimiques ne permettent pas. Le procédé a vocation à opérer en mode continu, et sa
transposition à l’échelle industrielle, de par son principe de fonctionnement qui permet de
surmonter des freins cinétiques importants, ne fait pas de doute. Le développement du
procédé vers l’échelle pilote nécessite des développements supplémentaires. Le Centre
National de Recherche Technologique (CNRT) « Nickel et son environnement » de Nouvelle
Calédonie a alloué en 2014 un financement de 18 mois portant sur l’étude de la minéralisation
dans le contexte néo-calédonien, qui contribuera en partie au développement de la
technologie.
- Le développement d’un outil de calcul pour comparer les bilans environnementaux de scénarios
de stockage par carbonatation minérale et stockage géologique d’une centrale à charbon, en
fonction des procédés et des indicateurs d’impact étudiés. La viabilité de cette filière se situe
principalement au niveau de l’optimisation des conditions opératoires du procédé.
Ce projet, d’un montant de 860k€ financé en partie par des fonds INTERREG, est planifié sur la
période 2011 – 2015. Il regroupe des partenaires anglais (University of Greenwich, Carbon8 Systems
Ltd) et français (Université de Picardie - Jules Verne).
SAPICO2 vise à créer des éco-matériaux avec du ciment-carbonate pour réduire le volume des
déchets et favoriser la réutilisation du CO2 émis par des petites et moyennes entreprises.
Ce projet commun s’appuie sur la réaction rapide du gaz carbonique (CO 2) avec des résidus solides
conduisant à la formation de granulats carbonatés. S’intégrant dans la démarche de l’éco-
construction, SAPICO2 a pour objectif de montrer l’intérêt économique de cette technologie innovante
Autres projets.
Par ailleurs, il existe des projets sur des technologies comparables à minéralisation décrite ci-dessus,
utilisant du CO2 pour aboutir à un carbonate.
Des sociétés comme SOLVAY par exemple ont étudié la minéralisation de saumures industriels, pour
produire du carbonate de sodium (122). Le projet DECALCO (2006-2007), soutenu par l’ANR, et piloté
par le BRGM étudiait la carbonatation des saumures résiduelles issues de la production du carbonate
de soude. L’objectif était de réduire les émissions de CO 2 tout en neutralisant les résidus alcalins pour
pouvoir les recycler comme matière première secondaire.
Facteurs de succès
Voie de valorisation avec un très fort potentiel d’utilisation du CO 2 car il existe une très grande
quantité de ressources minérales nécessaires pour la carbonatation (126). Cette solution
répond à l’échelle du problème, puisque la capacité de stockage minérale du CO 2 est très
largement supérieure aux émissions anthropiques (121).
La réaction de carbonatation est un procédé exothermique qui produit de l’énergie, par la suite
valorisable (126).
Les produits issus de la carbonatation du CO2 sont très stables, il n’y a pas de risque de
réémission du CO2 sauf en cas d’exposition à de très hautes températures.
La durée de séquestration du CO2 est importante (30) (121). Comme toute solution de
stockage du CO2, son acceptation sociale est un point important à éclaircir. Compte tenu de la
pérennité et de l’inocuité des produits de réaction, la minéralisation ne devrait a priori cacher
ni coût ni risque sur le long terme. (121).
Il est possible d’utiliser des matières premières à faible coût tels que les déchets de l’industrie
minière (30).
Inconvénients
La réaction de carbonatation du CO2 est un procédé lent qui doit être accéléré pour toute
application industrielle (126) (145).
Le besoin énergétique et le coût économique sont importants dus aux étapes de préparation
des réactifs solides (exploitation des gisements, transport, broyage et activation si
nécessaire), de conditionnement et d’élimination des carbonates et des sous produits (126)
(145). Des développements en cours laissent cependant entrevoir des marges significatives
d’amélioration. Il demeure que l’apport d’énergie nécessaire ne peut qu’être très partiellement
compensé par l’énergie libérée par la réaction de carbonatation (145).
Pour chaque tonne de CO2 valorisée, 2 à 3 tonnes de carbonates sont générées ainsi que de
l’eau. Il est nécessaire de traiter cette eau par la suite (129) (146).
Le marché potentiel des produits est limité et l’acceptabilité sociale des produits n’est pas
acquise (30).
La contrainte logistique est très forte puisqu’il faut que les minéraux et le CO 2 se trouvent en
très grandes quantités sur le même site (122).
Principe
Il existe différentes voies de conversion du CO2 par addition d’hydrogène : l’hydrogénation (réaction
avec une molécule de dihydrogène), l’électrolyse (Réaction avec du H2 provenant généralement de la
dissociation électrique d’eau), l’électrocatalyse et la photoélectrolyse (réaction avec des protons et
des électrons obtenus à partir de composés hydrogénés dissociés par apport d’énergie électrique,
solaire …). . L’électrolyse, l’électrocatalyse et la photoélectrolyse seront étudiées en détails dans la
suite du rapport (§ 2.9.).
L’hydrogénation du CO2 est le procédé le plus étudié. Il consiste en l’addition d’une molécule de
dihydrogène à une molécule de CO2. Ce procédé a besoin d’une quantité d’énergie suffisante afin de
« casser » les liasons stables de la molécule de CO2, et de produire le réactif H2 de la réaction.
L’hydrogénation du CO2 sera d’autant plus intéressante commercialement que les produits obtenus
seront valorisables et que l’énergie utilisée proviendra de ressources renouvelables (énergie solaire
ou éolienne par exemple). Dans ce cas, cette réaction ne produit pas de CO 2 supplémentaire.
L’hydrogénation du CO2 permet d’obtenir plusieurs produits à valeur énergétique ainsi que des
produits chimiques. Afin d’améliorer le rendement et les conditions de réaction, différents catalyseurs
sont utilisés.
(Méthanol)
(Acide acétique)
∆, catalyseur
(Méthane)
Fischer-Tropsch
CO
Figure 49 : Hydrogénation du CO2
Méthanol : L’intérêt du méthanol est qu’il est à la fois un intermédiaire pour l’industrie chimique et un
produit à valeur énergétique (additif dans les carburants), malgré sa toxicité. De nombreux composés
dérivent du méthanol, comme les oléfines (éthylène, propylène, butène). Par ailleurs, le DME
(Diméthyle éther), est également synthétisé à partir de méthanol, et pourrait être utilisé comme diesel
de substitution (30). Pour cette transformation, un catalyseur à base de Cu/Zn/Al 2O3 est utilisé (147).
Le méthanol par hydrogénation peut être produit par les réactions suivantes :
CO2 + 2H2 → CH3OH + 1/2O2 (30)
CO2+3H2→ CH3OH+H2O (148)
Acide formique : Il s’agit du plus simple des acides carboxyliques. Il a plusieurs applications
industrielles.
CO2 + H2 → HCOOH
Des voies permettant à l’acide formique de stocker de l’hydrogène pour fournir du H 2 aux piles à
combustible via la décomposition catalytique sans émission de CO sont étudiées (149).
Monoxyde de carbone : Le CO2 est converti en CO par la réaction RWGS (Reverse Water-Gas
Shift) :
CO2 + H2 → CO + H2O
Ethanol : L’éthanol est généralement préféré au méthanol car il est plus simple à manipuler, à
transporter, pas toxique, et il se combine mieux avec le gasoil (150). Il entre par exemple dans
la composition des carburants E10 et E85. La conversion en éthanol par la réaction Fischer-
Tropsch est d’environ 25 % avec l’utilisation de catalyseurs tels que K2CO3, β-Mo2C et
K/Zr/Zn/Mn (151). Il peut aussi être obtenu par hydrogénation directe du CO 2. Il est aussi
possible de produire d’autres alcools plus complexes comme le propanol ou le butanol.
De nombreux travaux sont réalisés sur des thèmes complémentaires permettant à l’hydrogénation du
CO2 de se développer. Il s’agit principalement de la production d’hydrogène de manière décarbonée,
enjeu principal de cette voie, et la conversion du gaz de synthèse en carburant de synthèse (par
réaction Fischer-Tropsch) (30).
Les réactions d’hydrogénation du CO2 sont des réactions catalytiques sensibles à certains
composés pouvant agir comme inhibiteurs. De ce fait, le gaz de combustion utilisé doit être
purifié. Le gaz issu des cheminées de cimenterie par exemple présente une concentration en CO 2 de
l’ordre de 20%, le procédé doit alors être capable de traiter les 80% restants. Dans ce cas, les
installations seraient surdimensionnées et les investissements très lourds (152). Néanmoins les
recherches continuent pour trouver les catalyseurs capables d’opérer avec du CO 2 non purifié
présentant des impuretés industrielles (30).
Conditionnement
Dans l’usine « George Olah » dirigée par le CRI en Islande, le méthanol est produit grâce au
procédé Luigi d’hydrogénation du CO2 à une pression de 50 bars et une température
d’environ 225 °C (147).
La réaction d’hydrogénation du CO2 dans l’usine pilote à l’Université de Northern Arizona est
réalisée à 260 °C et 83 bars. De ce fait, le gaz entrant doit être préchauffé et comprimé
jusqu'à 83 bars (153).
Réaction RWGS
Synthèse Fischer-Tropsch
Le procédé « Fischer-Tropsch » pour produire des hydrocarbures est une réaction catalytique qui est
réalisée à des températures comprises entre 200 et 350 °C, et des pressions élevées de 10 à 60 bars
(156) (157). Cependant, il existe un autre procédé pour produire les cires de haute masse molaire à
des températures plus faibles (200 à 240 °C) sur un catalyseur à base de cobalt (157).
Malgré quelques cas industriels, l’hydrogénation est une technologie qui reste au stade de
développement. A l’heure actuelle la quantité de CO2 utilisé par cette voie est négligeable. Cependant,
il existe certaines données sur la production de méthanol, voie la plus avancée à ce jour. Dans l’usine
du CRI en Islande, la capacité de production envisagée est de 5 millions de litres par an pour une
consommation de CO2 de 4 500 tonnes par an (158).
D’après le procédé utilisé dans une usine pilote à l’Université de Northern Arizona, pour produire du
méthanol par hydrogénation du CO2, le rapport molaire H2/CO2 est de 3/1 (153), ce qui correspond au
ratio stœchiométrique de la réaction.
Maturité technologique
Il s’agit d’une technologie au stade de recherche. Toutefois, il existe des unités au stade
préindustriel sur la production de méthanol telles que l’usine George Olah en Islande ou celle de
Mitsui Chemicals au Japon.
En France, d’après les experts du projet VitESSE2, la production de méthanol par hydrogénation du
CO2 avec l’hydrogène obtenu par électrolyse (effectuée avec de l’énergie renouvelable) pourrait
arriver au stade industriel d’ici 10 ans (108) (152). Cette étape ne pourrait voir le jour qu’avec le
développement d’unités pilotes et de démonstrateurs (108). Actuellement en France, les conditions de
marché, les conditions règlementaires et le niveau de maturité de cette filière ne sont pas réunis pour
inciter les industriels à se lancer dans ce procédé, d’autant plus que les défis technologiques sont
encore nombreux (152).
Potentiel d’émergence
La quantité de CO2 valorisable par cette voie dépend des caractéristiques des produits obtenus. Le
potentiel d’utilisation des carburants (méthanol, DME, éthanol) est important en comparaison avec le
potentiel d’utilisation des produits chimiques comme l’acide formique (159).
Aux Etats-Unis, les quantités de CO2 requises pour la production d’un million de tonnes de produits
issus de l’hydrogénation ainsi que les potentiels d’utilisation de CO 2 par an sont présentés au sein du
Tableau 20 pour différents produits (39).
Consommation de CO2
MT CO2 / MT produit MT CO2 / an
Essence 3,14 1229*
Diesel 3,14 416*
Méthanol 1,375 11*
Acide formique 0,95 0,5
(*) Les valeurs sont spécifiques aux Etats-Unis.
Au niveau mondial, le potentiel d’utilisation de CO 2 pour produire du méthanol par hydrogénation est
estimé supérieur à 300 MT par an (26).
Besoins en recherche
L’hydrogénation du CO2 est une des voies de valorisation du CO 2 les plus étudiées. L’objectif est
d’améliorer les étapes du procédé telles que la production de dihydrogène de manière décarbonée, la
réaction RWGS, la synthèse Fischer-Tropsch ou la conversion de méthanol en oléfines.
L’hydrogénation nécessite une grande quantité de H2. La production de dihydrogène est donc
le principal verrou pour cette voie puisque la consommation énergétique représente un coût
très élevé. Il s’agit alors du principal besoin en recherche dans le but de produire du H2 de
manière décarbonée et de diminuer au maximum le coût (30) (160).
Les recherches sur les catalyseurs sont nécessaires afin d’augmenter les rendements de
conversion, et travailler avec du CO2 non pur comportant des impuretés industrielles.
Enjeux technologiques
La production d’hydrogène
La production d’hydrogène est la clé technologique et économique de cette voie car environ 80 % de
l’énergie totale requise pour l’hydrogénation du CO2 correspond à la production d’hydrogène (147).
Les coûts de production restent notamment très élevés, ce qui est un obstacle pour des utilisations à
grande échelle. De nouvelles voies prometteuses sont en cours d’élaboration (161).
Les catalyseurs
Les réactions catalytiques peuvent être affectées par des substances agissant comme inhibitrices et
réduisant les rendements de la réaction.
Dans la synthèse de Fischer-Tropsch, les catalyseurs utilisés sont très sensibles à certains
composés. Ceux-ci peuvent provoquer une désactivation du catalyseur.
C’est le cas par exemple des goudrons ou des composés azotés. Des valeurs limites ont ainsi été
définies pour ces composés ‘’poisons’’ du catalyseur au sein du gaz de synthèse (Cf. Tableau 21). Il
existe aussi des spécificités sur le rapport H2/CO dans le gaz de synthèse qui doit être égal ou
supérieur à 2. De plus, les concentrations en gaz inertes (N 2, CO2, CH4) doivent être aussi faibles que
possibles (des teneurs de l’ordre de 15 % sont acceptables d’un point de vue technique) (156).
Actuellement, des procédés de purification des gaz de combustion existent et sont accessibles
économiquement. Néanmoins, des programmes de recherche concernent les systèmes catalytiques
capables d’opérer correctement en présence d’impuretés (30).
Les catalyseurs utilisés pour la synthèse Fischer-Tropsch sont sélectifs pour la formation
d’hydrocarbures mais ne le sont pas à la longueur de la chaîne des hydrocarbures obtenus. Il est ainsi
produit un mélange de divers hydrocarbures.
Coût
Coût d’investissement
A ce jour, les informations publiques concernant le coût d’investissement sont limitées aux usines qui
produisent du méthanol.
En Islande, l’investissement total pour l’usine George Olah dirigée par le CRI, pour une
production évaluée à environ 2 millions de litres de méthanol à partir de CO 2 par an, est
d’environ 6 millions d’euros (164).
Au Japon, l’investissement d’une unité pilote de production de méthanol avec une capacité de
production de 100 tonnes par an a été de 10,3 millions d’euros (165).
Coût de fonctionnement
Dans le cas de la production de méthanol de l’usine du CRI, le coût de fonctionnement est fortement
dépendant de la source d’électricité. En utilisant une source géothermique le coût de production varie
de 948 à 1127 €/tonne de méthanol. En utilisant une source hydraulique, le coût oscille entre 610 et
724 €/tonne de méthanol.
Les coûts de production en utilisant d’autres sources d’énergie renouvelables telles que l’énergie
éolienne (1 501 à 2 492 €/tonne) et solaire (2 323 à 7 304 €/tonne) sont supérieurs (147).
Ces coûts sont aujourd’hui élevés par rapport aux coûts de production « conventionnel » de méthanol
utilisant les ressources fossiles (de 100 à 255 €/tonne de méthanol) comme le montre la Figure 50.
Figure 50 : Coûts estimés de production de méthanol par des voies renouvelables en Islande
(geothermal, hydropower) et aux Pays-Bas (PVs, wind) en comparaison avec des méthodes
conventionnelles (biomass, coal, natural gas) (147)
Le coût de l’électricité est donc l’élément le plus important. Il représente 76% des coûts de production
environ. 80% de cette électricité n’est utilisée que pour la production de dihydrogène (108).
Coût du dihydrogène
Le coût de l’hydrogénation du CO2 pour produire des carburants ou des produits chimiques dépend
fortement du coût du dihydrogène. Les coûts de production de dihydrogène à partir de charbon ou de
gaz naturel sont respectivement de 0,27-1,37 €/kg et 1,86-2,38 €/kg (159). Ces coûts sont plus faibles
que ceux pour la production à partir d’énergie éolienne qui sont d’environ 4,7 €/kg. Cependant d’après
le NREL, il est envisageable de diminuer le prix jusqu'à 4,38 €/kg grâce à l’optimisation du procédé
(166). L’objectif actuel d’après la DOE (U.S. Department of Energy) est de diminuer ce coût pour
atteindre 1,5-2,25 €/kg H2 en 2015 (167).
Dans le Tableau 22, les coûts de traitement d’une tonne de CO2 sont donnés pour chaque produit
envisagé. Ce coût est calculé en fonction des prix aux Etats-Unis et en considérant un coût de
production de H2 de 3,5 $/Kg, soit 2,6 €/kg, de la façon suivante :
Coût de traitement du CO2 ($/tonne) = Coût H2 + Coût CO2 – Bénéfice brut de la vente du produit
Tableau 22 : Coût de traitement d’une tonne de CO2 pour différents produits (39)
Coût de traitement du CO2 ($/tonne CO2)
Méthanol 190
Diesel 237
Essence 247
Urée -183
Plastique (PE, carbonate) -760
Acide formique -1 075
Acide Acrylique -1 988
Rentabilité économique
La rentabilité de l’hydrogénation dépend de plusieurs facteurs : les prix de l’électricité (pour produire
de l’hydrogène), du CO2, du baril de pétrole, de vente du produit, les subventions allouées et
l’évolution du contexte réglementaire (exemple du pourcentage de méthanol dans les carburants)
(30).
Selon une étude réalisée par le Carbon Sequestration Leadership Forum, le bilan économique est
différent selon le produit obtenu à partir de l’hydrogénation du CO 2. Le bénéfice net est plus important
pour la production de produits chimiques comme l’acide formique (d’environ 1 000 $/tonne) que pour
la production de carburants comme le méthanol (d’environ -200 $/tonne) (39).
La rentabilité économique n’a été montrée réellement pour aucun projet d’hydrogénation du CO 2.
D’après les experts consultés, la production de méthanol à partir de l’hydrogénation du CO2 en
utilisant de l’hydrogène produit de façon décarbonée n’est pas encore rentable (152).
Il existe toutefois certains projets qui envisagent la rentabilité de l’hydrogénation pour un prix du baril
de pétrole autour de 50 $, soit environ 37 euros.
Dans le cas de la production d’essence (C8H18) à partir de CO2, la rentabilité du procédé est estimée
pour un prix du pétrole autour de 150 $ par baril (169).
Bilan carbone
Le bilan carbone est fortement dépendant du mix électrique d’origine. L’électrolyse de l’eau pour
produire du H2 est la partie de l’hydrogénation la plus consommatrice d’énergie (près de 80 % de
l’énergie requise). Le graphique en Figure 51 permet d’étudier la contribution des émissions de CO 2
10
pour chaque étape de la production de méthanol dans l’usine du CRI en Islande (26).
Figure 51 : Contribution aux émissions de CO2 pour la production de méthanol renouvelable dans
l’usine du CRI (26)
L’électrolyse présente un intérêt lorsque la source d’électricité est renouvelable. Les émissions de
CO2 associées à l’électrolyse de l’eau sont beaucoup plus faibles en utilisant une source d’électricité
renouvelable qu’à partir d’un mix énergétique conventionnel (Cf. Figure 52).
20
0 5 10 15 20 25
tonne de CO2 émis / tonne de H2 produit
Dans la production de méthanol, s’il est utilisé une source d’électricité d’origine renouvelable, la
quantité de CO2 émise correspondant à la consommation électrique est inférieure à 0,5 tonne de CO 2
émise par tonne de CO2 utilisée (26). Néanmoins, si l’électricité provient du réseau électrique
traditionnel, les émissions carbone du poste « électricité » sont plus importantes.
Dans le cas particulier de l’usine CRI en Islande qui produit du méthanol, les résultats de l’étude
d’Edge Environnement estiment les émissions totales à 1,71 tonne de CO2 par tonne de CO2
valorisée (26). Ce résultat intègre le captage du CO2 d’une usine géothermique qui sert à la fois de
source de chaleur et d’électricité.
Même dans le cas où le CO2 est valorisé pour la production de carburants, ce CO2 est réémis dans
l’atmosphère lors de la combustion des carburants. Une des alternatives de cette voie pour arriver à
un bilan carbone quasi-neutre serait de réutiliser ce CO2 émis pour produire à nouveau des
combustibles. Dans le cas ou l’application visée est le transport, les émissions sont diffuses et
impossibles à réutiliser (30).
10
Remarque : le Mix électrique de l’Islandes est entièremenr renouvelable : 74% géothermie, 26% hydroélectricité (391)
L’hydrogénation du CO2 utilise des catalyseurs toxiques principalement à base de Nickel, Zinc et
Cuivre (30). Des pollutions significatives peuvent être engendrées en cas d’utilisation ou de fin de vie
défaillante de ces catalyseurs.
Efficacité énergétique
Production d’hydrogène
Las valeurs classiques de rendements pour produire l’hydrogène par électrolyse sont de l’ordre de 75
et 80 % pour les potentiels de cellules industrielles compris entre 1.7 et 2.1 V (170). Cependant, pour
l’usine George Olah en Islande, l’hydrogène est produit à une efficacité d’environ 65 % (147).
Réaction RWGS
Des simulations ont montré que l’efficacité énergétique de la réaction RWGS peut être supérieure aux
limites théoriques historiques de 66 % grâce aux innovations récentes (155). En effet, d’après les
experts, les rendements de cette réaction sont acceptables et l’efficacité énergétique est de 70 à 80 %
(30).
Réaction Fischer-Tropsch
L’efficacité de la réaction oscille entre 70 et 85 % en fonction du produit obtenu (171). Les rendements
plus élevés sont obtenus pour les alcools les plus légers tels que le méthanol et l’éthanol.
L’efficacité énergétique globale d’obtention de méthanol par hydrogénation directe de CO2 en Islande
est de 43 à 56 % en fonction de la source énergétique et de la technologie utilisée (147).
Acteurs
Les pays les plus avancés dans la production de dihydrogène sont aussi les plus impliqués dans la
technologie d’hydrogénation du CO2. C’est le cas de l’Islande et du Japon où se trouvent les
premières unités de production de méthanol aux niveaux industriel ou préindustriel (30).
Dans le monde, il y a des pays fortement actifs pour la production de carburants de synthèse par
gazéification du charbon et par synthèse de Fischer-Tropsch. Ces pays sont la Chine, les Etats-Unis,
l’Afrique du Sud et l’Australie. Cette activité permet l’optimisation de la conversion de syngaz en
biocarburants (30).
L’équipe de recherche de Los Alamos Laboratory a développé en 2008 un procédé appelé Green
Freedom. Il s’agit de produire des carburants à partir de H2 obtenu par co-électrolyse de l’eau et de
CO2 capté de l’air avec une source d’énergie nucléaire.
Le procédé consiste en une synthèse de méthanol puis en une transformation en essence à travers la
réaction MTG (methanol-to-gasoline). Cependant, il est possible d’utiliser d’autres procédés comme la
synthèse Fischer-Tropsch pour produire du jet fuel ou diesel. Ce procédé est envisagé pour produire
3
par jour 5000 tonnes de méthanol en utilisant 7 800 tonnes de CO 2 et 11 000 000 Nm de H2.
Pour le captage de CO2, Green Freedom a développé un nouveau dispositif électronique qui permet
de capturer plus de 95 % de CO2 dans l’air et de produire du dihydrogène comme sous-produit. Ainsi,
les exigences de production de H2 sont réduites.
La corporation Blue Fuel Energy a été fondée en 2008 dans le but de produire des carburants
renouvelables comme le méthanol et DME (174). Actuellement, leurs projets sont encore en attente
des autorisations nécessaires.
Le procédé de production consiste en la réaction catalytique du CO2 capté des sources industrielles et
de H2 obtenu par électrolyse avec de l’énergie renouvelable. Le méthanol produit est ensuite
déshydraté sur un catalyseur pour produire le DME, qui sera aussi déshydraté pour obtenir de
l’essence.
L’objectif est d’intégrer des unités de production de méthanol renouvelable avec des unités
« MegaMéthanol » qui sont non renouvelables. Il est attendu un meilleur rendement, une diminution
des coûts pour les deux usines et une réduction des émissions de CO 2 pour les unités MegaMéthanol.
La capacité de production de ces usines intégrées est estimée à environ 1,8 million de tonnes de
méthanol par an.
Le système réactionnel est composé d’une phase mobile (CO2 en état supercritique) et d’une phase
stationnaire (liquide ionique contenant le catalyseur métallique). La récupération d’acide formique est
faite par décompression du CO2 supercritique.
L’hydrogénation avec un catalyseur homogène est encore très peu étudiée. Une équipe de recherche
de l’Université de Aachen en Allemagne a développé un catalyseur homogène à base d’un complexe
de ruthénium et de phosphine dissous dans un solvant qui peut être le méthanol lui-même. Ce
catalyseur est mis sous pression avec le CO 2 et l’hydrogène dans une autoclave et permet d’opérer
sous des conditions plus modérées qu’en utilisant les catalyseurs hétérogènes tout en gardant une
bonne sélectivité.
Les avantages de cette méthode sont une faible température requise pour la réaction, une
amélioration de l’interaction entre le catalyseur et le CO 2 et H2 ainsi que la séparation du méthanol
pur. L’objectif de ces recherches est de produire ainsi du méthanol à grande échelle à l’horizon 2014.
Actuellement, les scientifiques du Naval Research Laboratory (NRL) aux Etats-Unis développent une
méthode pour obtenir du CO2 et du H2 à partir de l’eau de mer, pour former ensuite le carburéacteur
JP-5 (jet fuel) grâce à un procédé catalytique.
Le composant principal de la technologie est une cellule électrolytique à trois chambres. Elle utilise de
faibles quantités d’énergie pour échanger les ions d’hydrogène produits dans l’anode avec les ions de
sodium de l’eau de mer. De ce fait, l’eau de mer est acidifiée. Au niveau de la cathode, l’eau est
réduite en H2 et de la soude (NaOH) est formée. La solution basique de NaOH obtenue est combinée
avec l’eau acidifiée pour retrouver le pH d’origine. Avec cette méthode, le H 2 est produit en continu et
près de 92 % du CO2 contenu dans l’eau de mer est capté. Le procédé est développé en deux
étapes :
o L’hydrogénation est faite sur un catalyseur à base de fer et atteint une conversion de CO 2
de 60 %. La production de méthane est diminuée en faveur de la production
d’hydrocarbures à longue chaîne (oléfines).
o Les oléfines sont converties en molécules d’une masse moléculaire supérieure (entre 9 et
16 atomes de carbone). Ces molécules sont ensuite converties en carburant JP-5 sur un
catalyseur à base de nickel.
Les études envisagent un coût du carburant JP-5 compris entre 0,6 et 1,2 €/L pour cette technique.
Unités pilotes
Une unité pilote de production de méthanol a été lancée en 2009 par Mitsui Chemicals Inc. avec une
production de méthanol d’environ 100 tonnes par an à partir de CO 2 et H2 et un investissement
d’environ 10,3 millions d’euros (165).
Le CO2 est capté en sortie d’usine de production d’éthylène d’Osaka Works Petrochemical Complex, à
partir de laquelle 150 à 160 tonnes de CO 2 peuvent être obtenues. Par ailleurs, le H2 est obtenu par
photoélectrolyse de l’eau en utilisant un photocatalyseur à base de titane qui permet d’atteindre une
11
efficacité quantique de 60 % (30).
11
L‟efficacité quantique d‟un photocatalyseur représente la quantité d‟électrons que génère un photon capté (QE max = 100
%).
L’entreprise britannique Air Fuel Synthes (AFS) a développé une unité de recherche pour produire des
carburants synthétiques tels que le méthane à partir de CO 2 capté directement et de H2 obtenu par
électrolyse de l’eau. Cette unité a été mise en service en 2012 avec une production de 5 à 10 litres
d’hydrocarbures par jour (179). AFS affirme qu’il s’agit d’un carburant directement utilisable dans les
moteurs à explosion conventionnels.
L’unité a commencé à opérer à partir d’un courant électrique conventionnel mais l’objectif est
d’alimenter le procédé avec de l’électricité provenant d’énergies renouvelables. De cette manière, le
bilan carbone serait meilleur. Actuellement AFS cherche des partenaires dans le domaine des
énergies renouvelables pour développer des projets commerciaux à moyen et long termes. Le but est
de mettre en place une usine commerciale en 2015 avec une capacité de production de 1 à 10 tonnes
d’hydrocarbures par jour (179).
En 2011, les investisseurs ont décidé de stopper le financement car les risques financiers étaient
importants et l’avenir de cette technologie toujours incertain. Néanmoins, différentes options pour la
mise en service de l’usine β-plant et pour la construction d’une troisième usine d’une capacité de
production d’environ 200 000 tonnes par an ont été étudiées (180).
Unités Industrielles
L’usine George Olah, mise en service en 2011 par Carbon Recycling International, permet de produire
environ 2 millions de litres de méthanol renouvelable par an. La capacité de production envisagée est
de 5 millions de litres par an pour une consommation de CO 2 de 4 500 tonnes par an (158). Ce CO2
purifié provient de la centrale géothermale de Svartsengi. L’hydrogène est obtenu par électrolyse de
l’eau à partir d’énergie renouvelable et à faibles pression et température (181).
Les futures installations à l’échelle commerciale pourront produire entre 50 et 100 millions de tonnes
de méthanol par an (158). En décembre 2010, le CRI et Landsvirkjun ont annoncé le lancement d’une
étude pour la construction d’une nouvelle usine de production de méthanol à partir de CO2, avec une
capacité de 100 millions de litres de méthanol par an et une consommation d’environ 45 000 tonnes
de CO2 par an (182).
Situation en France
Acteurs
La France est aux avant postes en termes de recherche sur la production d’hydrogène, enjeu majeur
de cette voie. Les principaux acteurs sont le CEA, le CNRS, Air Liquide, EDF, les universités et les
laboratoires associés aux écoles d’ingénieurs (30).
Le CEA est un organisme très impliqué au niveau mondial dans la production d’hydrogène par
Electrolyse de la Vapeur d’eau à Haute Température (EVHT) avec 16 brevets en 2011 (170).
L’objectif de l’installation de Blue Hydrogen lancée en 2011 par Air Liquid est la
décarbonisation de la production d’hydrogène en utilisant les sources d’énergies
renouvelables et l’électrolyse de l’eau (170).
Projets
Projet VitESSE2
Ce projet, lancé en 2010 et pour une durée de trois ans, regroupe plusieurs partenaires tels
qu’AREVA, le CNRS (LMSPC, LRGP, ENSIC), le CEA, EDF, Hélion, Air Liquide, Rhodia et Veolia
(160).
Avec un investissement de 3,9 millions d’euros (1,5 millions d’euros par AREVA), l’objectif du projet
est de développer un procédé d’hydrogénation du CO 2 émis par des industriels pour produire du
méthanol. L’hydrogène est produit par électrolyse de l’eau à partir d’électricité issue de moyens de
production faiblement émetteurs de CO2 tels que les énergies renouvelables.
Projet Gaya
Projet Biofuels
Ce projet, avec un coût total de 112,7 millions d’euros sur 7 ans, est financé par l’ADEME (30 millions
d’euros) et le Conseil régional de Picardie. Il regroupe plusieurs partenaires : Axens, CEA, IFP, Total,
Sofiproteol et Uhde GmbH (187).
Le but est de développer, à l’horizon 2017, une chaîne complète de procédés industriels pour produire
du biodiesel et du biokérosène de deuxième génération à partir de la biomasse en plusieurs étapes
successives. Ces étapes sont le prétraitement de la biomasse, la gazéification, la purification du gaz
de synthèse et la synthèse Fischer-Tropsch qui s’appuiera sur le procédé Gasel. Dans la synthèse
Fischer-Tropsch, il faudra valider les performances des catalyseurs au cobalt vis-à-vis du gaz issu de
la dépollution (188).
Facteurs de succès
Avantages
Bonne connaissance scientifique des réactions Fischer-Tropsch, Reverse Water Gas Shift et
de la voie méthanol (30).
Il y a possibilité d’utiliser les infrastructures déjà existantes pour le pétrole. Pour cela, on
suppose que les combustibles liquides produits sont comparables à l’essence ou au gasoil.
L’acide formique est une bonne manière de stocker et de transporter du dihydrogène (densité
d’hydrogène supérieure à l’hydrogène élémentaire à 350 bars) (26).
Inconvénients
Forte consommation énergétique liée à la production d’hydrogène (147).
Une faible efficacité et un coût élevé rendent difficile la commercialisation des combustibles
provenant de la transformation du CO2.
En utilisant le méthanol comme combustible liquide pour le transport, il existe alors une
concurrence avec d’autres systèmes d’énergies alternatives comme la voiture électrique, qui
montre une meilleure efficacité pour la conversion d’énergie.
12
Sous réserve que l’hydrogène ne provienne pas de la biomasse
Principe
Le procédé Power to Gas comprenant la méthanation est un procédé basé sur l’intégration de trois
technologies :
L’électrolyse de l’eau pour la production d’hydrogène (H2O → H2 + ½ O2). Sous l'action
d'une différence de potentiel et d'un catalyseur sur les électrodes, la molécule d'eau est
dissociée pour aboutir à du di-oxygène (O2) et du dihydrogène (H2).
Le captage de CO2 issu de procédés industriels (cimenterie, acierie, …) ou de centrales
thermiques ou d’unités de méthanisation.
La méthanation catalytique de l’hydrogène et du dioxyde de carbone par la réaction de
Sabatier (CO2 + 4H2 → CH4 + 2H2O). Il s’agit d’une réaction de catalyse héterogène
exothermique nécessitant une température minimum pour s’initier (environ 250°C). La réaction
est favorisée thermodynamiquement à basse température mais une température minimum est
demandée pour avoir une cinétique suffisante. Il existe donc un besoin d’utiliser des catalyseurs
pour améliorer la conversion et la sélectivité (192). Les catalyseurs utilisés sont à base de
métaux (principalement Ni mais aussi Ru, Rh ou Co) sur des oxydes métalliques
(Principalement Al2O3, mais aussi SiO2, TiO2, Al2O3, ZrO2, CeO2 ou MgO) (193) (194).
Energie
renouvelable Chaleur
Solaire / Eolien
Electrolyse Di Oxygène
de l’eau
Eau
Stockage
Di Hydrogène
P - - Catalyseur
Méthanation
Industrie, (Réaction de Sabatier)
CO2 Méthane
Incinérateur, CO2
Chaleur
canalisé
Ce procédé « Power to Gas » a besoin d’un grand apport d’énergie pour produire de l’hydrogène par
électrolyse de l’eau et pour capturer le CO2. La réaction de méthanation du dioxyde de carbone par
Nécessitant de l’énergie pour l’électrolyse de l’eau et le captage du CO2, le procédé Power to Gas
comprenant la méthanation est intéressant lorsque l’énergie requise provient d’un excès de
production électrique d’origine renouvelable. Il constitue une voie de stockage d’électricité par
conversion de celle-ci en un vecteur carboné. Son vecteur énergétique (H2), à la fois difficile à stocker
et dont le transport est contraignant, est transformé en un composé énergétique (CH4), facilement
stockable sur des longues durées, transportable et distribuable sur de courtes ou longues distances
(gazoducs, méthaniers) via un réseau d’infrastructures déjà mis en place à travers l’europe et
disposant d’une grande capacité de stockage (200 à 300 TWh) en France.
Les énergies renouvelables comme l’éolien ou le photovoltaïque sont des énergies intermittentes et
non pilotables. De ce fait, la production fluctue continuellement avec des périodes de surproduction
d’énergie quand la production d’énergie dépasse la consommation nationale d’électricité et quelque
fois dépasse les capacités de transit des réseaux. Cette énergie excédentaire qui correspondrait à
environ 10% de la production totale en France en 2050 selon le scénario NegaWatt (198) est
généralement en grande partie perdue par déconnexion du réseau électrique. Par exemple, 127 GWh
d’énergie éolienne ont été perdus en 2010 en Allemagne, pays où l’éolien et le photovoltaïque
représentent près de 54 GW de puissance installée pour une demande nationale comprise entre 40 et
80 GW (199). De ce point de vue, la méthanation est d’un intérêt certain. Ce procédé est prometteur
pour le stockage de l’énergie et constituerait une solution de réponse à l’intermittence des énergies
renouvelables. Pour cette application, la méthanation doit être réalisée de manière discontinue, par un
procédé flexible.
Le Power to Gas est aussi applicable pour le stockage de l’énergie excédentaire provenant des
centrales peu flexibles comme celles de charbon ou nucléaires (198).
Conditions opératoires
- En dépit du fait que la réaction soit exothermique et donc favorable à basse température, la
cinétique de conversion augmente avec la température (mais le rendement de conversion, lui
baisse avec la température) entrainant une température optimale de réaction. Dans la
littérature, la réaction est généralement effectuée dans une gamme de température allant de
300 à 600 °C. La réaction de Sabatier s’effectue de la pression atmosphérique à plusieurs
dizaines de bars en présence d’un catalyseur (200). L’augmentation de la pression favorise le
rendement de conversion et la sélectivité. Les réactifs, y compris le CO2, doivent entrer dans
l’étage de méthanation à une température proche ou supérieure à 250°C.
13
Il faut produire à minima 4 molécules d'hydrogène pour faire une moélcule de CH 4! Il faut 285kj/mole d'hydrogène produit
pour dissocier la molécule d'eau en hydrogène et oxygène, soit 50,84MJ pour produire 4 Nm 3 de H2 et donc un m3 de CH4 avec
un rendement de 100% (Dans 1 Nm3 il y a 44,6 moles de CH4)
- La présence d'eau ou de méthane dans le flux de réactifs a une influence très modérée
sur l'activité catalytique et n'affecte ni la stabilité ni la sélectivité du catalyseur. Par contre, la
présence de monoxyde de carbone ([CO] > 20 000ppm) empoisonne fortement la
réaction de méthanation de CO2 en s'adsorbant sur les sites métalliques. Pour pouvoir
envisager un procédé de méthanation de mélanges gazeux obtenus par vapogazéification de
la biomasse, deux options sont possibles (196)(197):
o Privilégier la méthanation du CO en CH4. Dans cette option, aujourd’hui utilisée dans
le cas de la gazéification de la biomasse, le CO 2 produit lors de l'étape de
gazéification et lors de la réaction « water gas shift » pour ajuster le ratio H2/CO à 3,
est retiré soit avant, soit après l'étape de méthanation du CO.
o Privilégier la méthanation du CO2. Dans ce cas, il serait donc impératif, au préalable,
de fortement réduire la concentration de CO dans le flux, voire de l'éliminer. Cela
pourrait être réalisé par une unité de Water Gas Shift par exemple.
- Les catalyseurs Ni-CZ (CZ : Cerine Zircone) se sont avérés très efficaces par rapport au
catalyseur de référence NiAl2O3 pour la réaction de méthanation de CO2 dans des conditions
stœchiométriques, en termes de conversion de CO 2, de sélectivité en CH4 et de stabilité.
Leurs performances catalytiques surclassent celles des systèmes Ni-silice, Ni-alumine, ou Ni-
zéolithe et rivalisent avec celles des matériaux les plus performants reportés dans la littérature
qui sont fortement chargés en nickel ou à base de métal noble (Ru). Les catalyseurs Ni-CZ
sont plus actifs et stables.
Les pressions utilisées pour les installations de méthanation de CO2 de l’entreprise allemande
ETOGAS sont de l’ordre de 8 à 12 bars (201).
Qualité du CO2
Dans l’unité de Tohoku à Japon le CO2 est capté et utilisé à une pureté minimale de 95 % (30).
Du CO2 pur est utilisé dans la plupart des projets de recherche. Cependant, les différents retours
d’expériences montrent que la réaction de méthanation peut se faire avec du CO 2 de qualité
« industrielle », qui n’a pas besoin d’être hautement purifié. Une attention doit être portée pour
éliminer les particules et les potentiels poisons de catalyseurs tels que les composés soufrés, voire
dans certains cas l’azote et l’oxygène entrant (197).
Le projet pilote de 25kW construit par Etogas (anciennement Solar Fuel) à Stuttgart, a testé le
procédé de méthanation en utilisant du CO2 de différentes qualités (CO2 extrait de l’air ambiant, CO2
provenant d’une centrale biogaz ou utilisation de biogaz lui-même, CO2 dans du syngaz) pour
démontrer que le processus fonctionnait (202) (203).
14
Des réserves sont à émettre sur ce point (196)
Dans le cas où le pilote utilise du gaz brut issu de méthanisation, de biomasse et de déchets
organiques, seuls les composés soufrés sont à éliminer (H 2S, COS, mercaptans) (201). Quelque soit
l’effluent d’entrée contenant de 12 à 20% de CO2, l’effluent de sortie contient plus de 90% de méthane
et répond à la règlementation allemande (DVGW G260, G262) en atteignant les critères requis pour
pouvoir être injecté dans le réseau de gaz : H2 < 5 vol. %, CO2 < 6 vol. %, PCS du gaz et indice de
15
Wobbe suffisant .
Dans le cas d’une unité pilote de recherche aux Etats-Unis menée par le « Desert Research
Institute », le gaz source apporté au système avait une composition de 2 % de CO2 dans un effluent
de N2 (200). Cette teneur en CO2 est plus faible que celle se trouvant dans les fumées de turbines
industrielles. La raison de cette faible concentration en CO 2 avait pour objet de minimiser
l’augmentation de température pendant la réaction. En parallèle, de l’hydrogène pur fut utilisé dans les
proportions stœchiométriques (rapport H2 / CO2 de 4 / 1) pour réaliser la réaction de méthanation
(200).
Globalement, en terme de qualité, il vaut mieux éliminer en entrée les substances soufrées, les
halogénés, les poussières et même le N2.
Même si du CO2 pur à 96% est utilisé comme intrant, il faut veiller à limiter les concentrations de
certains composés (Cf. Tableau 23) (204).
15
Remarque : en France la concentration volumique en H2 doit être inférieure à 6% et celle de CO2 à
moins de 2.5%.
Selon la stœchiométrie de la réaction de Sabatier, 2,75 kg de CO2 sont nécessaires pour obtenir 1
kg de méthane.
La production d’un TWh de méthane de synthèse consomme de l’ordre de 178 ktCO 2. Dans le
scénario 2050 de l’association NégaWatt, la production de 33 TWh de méthane de synthèse nécessite
une quantité de CO2 d’environ 5,9 Mt (198).
Maturité technologique
A ce jour, il existe quelques unités pilotes dans le but d’étudier la faisabilité du procédé de
méthanation et son développement. Par contre il n’existe pas encore de projets industriels, excepté le
16
projet commercial d’Audi qui prévoit d’alimenter en Allemagne 1 500 véhicules avec le méthane
provenant de la méthanation (206) (207).
La taille des unités de méthanation peut varier entre de petites unités de quelques dizaines de kW et
des plus grandes allant jusqu'à la 100 MW dans des scénarii de type NégaWatt (198). Il y a plusieurs
facteurs qui peuvent favoriser l’installation d’une unité de méthanation (198) : la présence du réseau
électrique et du gaz, la proximité de lieux de production avec une puissance excédentaire, la proximité
d’une source d’émissions de CO2 et la proximité d’un consommateur de chaleur.
16
Il s’agit d’Audi A3 pour 15 000km/an (197).
Par ailleurs, le scénario négaWatt identifie environ 50 TWh d’excédent d’électricité en 2050 en France
qui constituent une énergie gratuite en termes d’exploitation et qui pourraient être stockés par la
méthanation (198). Dans une thèse de l'IWES, l’estimation pour l’Allemagne est de 30 TWh en 2050
(197).
D’après certains experts, cette technologie deviendra abordable et touchera un marché de masse
d’ici 10 à 20 ans (209).
Les principaux enjeux sur la technologie Power to Gas avec méthanation sont l’amélioration du
rendement global du procédé (puisque 60 à 70 % de l’énergie est perdue), assurer la flexibilité de
l’unité et la diminution des coûts.
- Electrolyse :
- Réactions de Sabatier :
Remarque : des projets de recherche (projets ANR : CELEVA, HELEVA, HELECO2 …avec AREVA
comme chef de file) visent à réaliser la « méthanation » en une seule étape à partir d’eau et de CO 2,
dans un seul réacteur sous pression : la chaleur libérée par les réactions est réutilisée ce qui laisse
envisager des rendements énergétiques de méthanation proche des 75%.
Coût
Coût d’investissement
17
D’après Trost el al, le coût d’investissement actuel pour un pilote de démonstration est de 2500
€/kWel input. Ce coût peut diminuer jusqu'à 1250 €/kWel input à l’horizon 2030 avec le développement de
la technologie à l’échelle industrielle (212). Le plus grand investissement correspond à l’électrolyseur
qui compte actuellement pour environ 1 000 €/kW el input pour un électrolyseur alcalin. Une réduction de
ce coût jusqu'à 500 €/kW el input pour une unité à grande échelle est attendu à l’horizon 2030 (212).
Globalement, les coûts d’investissement sont très variables en fonctions de la taille de l’unité.
L’investissement pour l’usine pilote de recherche de 250 kW mené par ZSW en Allemagne est de
3,3 millions d’euros (213) dont 1 M€ correspondant aux frais de recherche et de maintenance sur 3
17
A priori hors captage du CO2.
L’installation de 6MW construite par ETOGAS (Projet Audi e-gas) en Allemagne, actuellement la
plus grande au monde, a nécessité un investissement de l’ordre de 3500 (215) (214) à 3600 €/kW
(201) installé soit de l’ordre 21 à 22 M€ (216).
ETOGAS propose depuis peu des installations de 1,2MW conçues pour utiliser le CO2 provenant
d’installations de biogaz pour un coût de 5M€ « clé en main »(201).
Le coût total pour l’installation d’un réacteur de méthanation à l’échelle de laboratoire mené par le
« Desert Research Institute » (DRI) aux Etats-Unis s’est porté à 97 884 $ (217).
Coût de fonctionnement
Concernant le projet e-gas d’Audi, les frais de fonctionnement annuel (intégrant fonctionnement
général, personnel, remplacement d’électrodes…) sont estimés à 300 000 euros, soit 50€/kW (201).
Par ailleurs, les frais de fonctionnement dépendent du prix de l’électricité et du nombre d’heures de
fonctionnement de l’installation dans l’année. Ce nombre d’heures d’une installation est estimé entre
1 000 et 4 400 h par an en fonction de la localisation et des énergies renouvelables disponibles (215)
(216).
Rentabilité économique
Il est cependant intéressant de noter que le coût de l’électricité provenant des énergies renouvelables
sera amené à diminuer avec le développement de ces technologies.
18
Une étude sur les coûts énergétiques de l’électrolyse et de la réaction de Sabatier aboutit à un coût
3
de production de méthane de 4,92 €/Nm pour du CO2 « gratuit » prélevé directement à la source et
de l’hydrogène fabriqué à partir d’énergie solaire (195). D’après Ulrich Zuberbühler (ZSW), cette
valeur est actuellement sur estimée : elle correspond à 0,5 €/kWh alors que la cible actuelle est de
0,08 à 0,10 €/kWh (214).
L’auteur, en 2011, estime que, dans le cas où le méthane est vendu au prix de rachat subventionné
3 3
du kWh solaire (1 Nm de CH4 = 9,95 kWh PCI, soit 5,67 €/m ), la production est rentable avec une
18
Les coûts énergétiques comptabilisés concernent
- l’électrolyse de l’eau douce (rendement de 50% à partir d’énergie solaire) avec un coût de production de 0,2 €/kWh photovoltaïque sur la
base des prix actuels (appelés à chuter dans l’avenir)
- la réaction de Sabatier
- … mais ils retranchent ceux du capture et de la logistique autour du CO2 (dans l’hypothèse ou on paye pour stocker le CO2 au prix de la
tonne)
Avec un rendement énergétique d’électrolyse à 70 % (cas avec de l’eau salée), la marge atteint 56 %,
voire 79 % dans le cas de subventions dédommageant la tonne de CO 2 stockée.
Remarque 1 : Ces résultats sont à pondérer car l’auteur a transposé des kwh thermiques en kwh
19
électriques sans perte de rendement . Pour une conversion de méthane en électricité avec un
rendement de 30 % et une mise à jour du tarif de rachat de l’électricité (de 7,98 à 33,85 c€/kwh dans
20 3
le cas le plus favorable) , le coût d’achat d’un Nm de CH4 varie de 0,24 € à 1 €… soit moins que le
coût de fabrication.
Remarque 2 : D’autres facteurs sont à intégrer pour rendre l’étude complète. Au niveau économique,
certains pourraient être :
- favorables tels que l’utilisation d’électricité « gratuite » d’origine renouvelable …
- défavorables tels que le coût élevé de l'amortissement de l'investissement sur 1 000 à 2 000
heures/an au lieu de 8 000 pour l’électrolyse de l’eau ne fonctionnant que par intermittence
(lors de la production en énergie renouvelable en période creuse) (221).
En tenant compte d’une certaine gratuité de l’énergie, le coût de production du méthane par
21
méthanation est d’environ 0,6 €/kWhth avec la possibilité de diminution de ce coût jusqu'à 0,12
€/kWhth à l’horizon 2030 (contre un prix moyen d’achat du gaz naturel en Europe actuel de
0,03€/kWh). Dans cette étude il est envisagé d’utiliser de l’électricité issue des surplus d’électricité
renouvelable avec un coût d’achat de 0,02 €/kWhel (212).
A l’heure actuelle, le coût de production du méthane (« renewable CH4 ») est très élevé par rapport à
d’autres types de carburants. Il n’est donc pas compétitif (Cf. Figure 57). Le coût de production du
méthane renouvelable va suivre la même tendance que le coût de l’hydrogène (« renewable H2 »),
mais restera supérieur tant que la production d’hydrogène est envisagée comme une partie de la
méthanation.
Figure 57 : Développement envisagé pour les coûts de différents carburants à l’horizon 2050 (212)
19
Correspondance énergétique méthane : 1 m3 CH4 = 35,315 BTU = 35.315 MJ = 9.8 kWhr à 100% d’efficacité de conversion =
2,9 à 3,3 kWh électrique après conversion électrique (rendement de 30% à 37%, perte 20%, chaleur 50% à 63%)(Source:
document conversion methane ; Western Engineering, 2011, Henze, et al., 2002)
20
http://www.les-energies-renouvelables.eu/tarif-de-rachat-electricite-photovoltaique-2011.html
21
1 kWh thermique est la quantité d’énergie en forme de chaleur transféré par un réchauffeur électrique de 1 kW avec une
efficience de 100 % pendant une heure.
La durée de vie d’une unité de méthanation est d’environ 20 ans, soit la durée de vie d’un
électrolyseur alcalin fonctionnant en discontinu (212). Dans certains cas, une usure prématurée des
composants peut racourcir la durée de vie. C’est le cas de l’utilisation en discontinue qui limite la
durée de vie des électrodes de 8 à 12 ans au lieu de 20 (une électrode compte pour 5-10% des frais
totaux) (201)…
Remarque : certaines hypothèses de cette analyse paraissent plutôt favorables (196). En effet,
- le coût du CO2 attendu sera au minimum celui du captage (50€/t plutôt que 0),
- le coût proposé de vente du méthane synthétisé considère que l’électricité utilisée est gratuite,
- Le prix de vente de la chaleur parait élevé,
- La vente de dioxygène considère un marché existant et suffisant pour absorber une production
supplémentaire
Coût de production
d’un MWh de gaz
(La production marginale ne prend pas en compte les coûts d’investissement, de fonctionnement, les coûts du marché des
intrants et les prix des sortants).
Figure 58 : Coûts spécifiques du méthane produit par méthanation selon différents prix
d’électricité et différentes durées annuelles de fonctionnement d’unité
- La méthanation ne pourra être rentable que si, déjà à la base, elle utilise une énergie
« gratuite » comme celle constituée par les excédents d’électricités renouvelables. Par
ailleurs, la durée de vie d’une unité de méthanation est estimée d’environ 20 ans qui est la
durée de vie d’un électrolyseur alcalin fonctionnant en mode intermittent (212). Le
fonctionnement en discontinu peut être préjudiciable économiquement notamment à cause du
coût élevé de l'amortissement de l'investissement sur 1 000 à 2 000 heures/an au lieu de
8 000 heures pour l’électrolyse de l’eau ne fonctionnant que par intermittence (lors de la
production en énergie renouvelable en période creuse) (221). D’autre part, pour assurer la
rentabilité, il est nécessaire de valoriser la chaleur produite à l’échelle d’une unité de Power to
Gas ou pour une marché local. En réduisant les frais d’investissement à 1000€/kW électrique
installé et en visant le segment « carburant », l’installation devrait être rentable (201).
- La méthanation est un procédé qui n’est pas rentable à ce jour en France : il faudrait
davantage de financements pour aider le développement de cette technique (197). A ce jour,
il est estimé que la production du méthane par méthanation représente un coût 3 fois
plus important que le prix du méthane du réseau de gaz naturel (197). Pour atteindre la
rentabilité de la méthanation, les principaux facteurs à prendre en compte sont : le prix du
CO2, l’aménagement du réseau si nécessaire, le prix de l’électricité (dont dépend le coût de
production de l’hydrogène) et le prix du méthane produit comparé avec le prix du méthane du
réseau de gaz naturel (197).
Bilan Carbone
Si l’énergie nécessaire pour synthétiser le méthane provient des énergies renouvelables et pas de
sources émettrices de CO2, l’impact sur le bilan carbone est limité. La production d’un TWh de
méthane de synthèse consomme de l’ordre de 178 ktCO2. Dans le scénario estimé par l’association
négaWatt pour la production de 33 TWh de méthane de synthèse, la quantité de CO 2 utilisée sera
d’environ 5,9 Mt (223).
Néanmoins, même si le CO2 est consommé pour la production de méthane, il restera le CO2 réémis,
mais potentiellement captable, lors de la combustion du méthane (198).
Retours d’expériences
22
Une Analyse de Cycle de Vie (ACV) à été réalisée pour évaluer les émissions dues à l’utilisation du
méthane renouvelable, obtenu par le procédé Power to Gas, comme carburant pour les véhicules en
comparaison avec l’utilisation d’autres carburants. Cette ACV comptabilise les émissions de CO2
(mesurées en g de CO2eq par km) provenant de la fabrication du véhicule (« vehicle
manufacturing » en vert dans la Figure 60), de la production et distribution du carburant (« well-to-
tank » en jaune dans la Figure 60), de l’utilisation du véhicule (« tank-to-wheel » en gris dans la
Figure 60) à l’élimination et recyclage (« disposal and recycling » en marron dans la Figure 60). Le
22
Etude réalisée en 2011 par le Fraunhofer Institute for Wind Energy and Energy System Technology de Kassel (Allemagne).
Le CO2 provient de biogaz dans cette étude.
Principaux résultats
- De façon générale, les émissions de CO2 provenant de véhicules utilisant des sources d’énergies
renouvelables sont dans tous les cas inférieures à celle des véhicules utilisant des sources d’énergie
fossile ou non renouvelables (essence, gaz naturel ou mix électrique). Globalement, le bilan carbone
est deux fois moins important au km pour un véhicule roulant au méthane synthétique que pour un
véhicule roulant au gasoil.
- En 2011, les émissions de CO2 dues à la production du méthane synthétique par le procédé de
méthanation sont de l’ordre de 65 g CO2 eq/km. Cependant, ces émissions pourraient diminuer
considérablement à l’horizon 2030 avec l’optimisation de la technologie et la production à une grande
échelle. Dans cette analyse, il est envisagé l’utilisation de CO2 provenant d’une source biologique
(gazéification de la biomasse) ne causant pas d’émissions supplémentaires (212).
- En 2013, les premières estimations du projet Audi e-gas (installation de 250kW dont le procédé date
des années 2010/2011) aboutissent à une émission de 20 g CO2/km pour une voiture fonctionnant au
méthane renouvelable contre 98g CO2/km pour une voiture fonctionnant à l’essence. Cette émission
de 20 g CO2/km est due aux constructions des installations (éoliennes, unité Audi) et à l’énergie
nécessaire à la compression du CH4.(216)
Principales pollutions
D’après une étude réalisée par Paun F. le rendement global énergétique pour la production de
méthane régénérable est de 3,72 % entre l’énergie fournie par le soleil et l’énergie du carburant
régénérable obtenu. Ce rendement est supérieur à celui des autres filières biocombustibles comme le
rendement de la photosynthèse sur le stockage du CO 2 sous forme biomasse généralement inférieur
à 3 % (195). Cependant avec l’optimisation des différentes étapes de la méthanation dans les futures
années, il est envisageable d’atteindre un rendement énergétique global d’environ 12 %.
Bien que le rendement du « Power to Gas » soit faible, il s’agit d’une technologie qui permet de
stocker de grande quantité d'énergie provenant des excédents de production électrique, afin,
idéalement, de bénéficier d’une énergie presque gratuite permettant d’amortir les investissements
(198). Le méthane contient 3 fois plus d’énergie (énergie volumique) que l’hydrogène (197).
23
Rendement maximal thermodynamique
24
Il s’agit principalement de la chaleur provenant de la partie méthanation (car T>200°C), …. La température de l’électrolyse
étant inférieure à 80°C (196)
25
Rendement énergétique total = [contenu énergétique du méthane généré + chaleur évacué] / énergie utilisée]
Remarque : Rihko - Struckmann et al. ont comparé le rendement énergétique global des procédés
produisant du méthanol et du méthane à partir de CO 2. Au niveau du périmètre, pour le méthane par
exemple, les étapes de compression, de réaction, de séparation et de purification sont incluses dans
la simulation, basées sur des données expérimentales issues de la littérature. L’étude conclut que la
réaction de méthanation présente un rendement énergétique supérieur à celui de la réaction
aboutissant au méthanol. Cependant, il apparaît que l’énergie nécessaire au stockage du méthane
constitue une part importante de la demande énergétique globale du procédé de Power to Gas. Il est
donc préférable que le méthane soit consommé rapidement après sa synthèse (ou qu’il soit injecté
dans le réseau existant de gaz naturel (197)(196)). Quant au méthanol, il s’avère plus adéquat pour
stocker l’énergie (226) (227).
Acteurs
Quelques pays sont actifs dans le développement de la technologie de méthanation avec des unités
pilotes comme au Japon ou aux Etats-Unis. La Thaïlande s’intéresse aussi à cette technique (197).
Projets pilotes
Cette unité, construite en 2003 par l’Université technologique de Tohoku et BP, permet la production
3 3
de 1 Nm /h de méthane pour 4 Nm /h d’hydrogène consommé. Un catalyseur présentant une
sélectivité pour la production de méthane supérieur à 99 % est utilisé (30).
Une unité pilote menée par le « Desert Research Institute » a démarré en 2008 pour démontrer la
faisabilité du procédé de méthanation. L’hydrogène est obtenu dans un électrolyseur Stuart KOH de 5
kW à partir d’énergie de sources éolienne et solaire. Pendant la réaction de Sabatier il est utilisé un
catalyseur (Haldor Topsoe PK-7R) à base de Nikel sur oxyde d’aluminium. Avec une température
Remarque : il s’agit ici d’une production d’hydrogène sans passer par la réaction de Sabatier pour
produire du méthane.
Ce projet démarré en 2011 est soutenu par le gouvernement allemand avec un investissement de 21
millions d’euros. Il consiste à utiliser l’excès de production d’énergie éolienne pour produire de
l’hydrogène via l’électrolyse. Il s’agit de la première centrale hybride industrielle au monde où trois
éoliennes, de 2,3 MW de puissance nominale chacune, sont directement reliées à l’électrolyseur qui
3
produit 120 Nm /h d’hydrogène. La centrale a deux unités de cogénération avec une capacité de
production d’environ 2964 MWh d’énergie électrique et 3312 MWh d’énergie thermique par an pour
chaque unité (228).
Le Center for Solar Energy and Hydrogen Research (ZSW) a mis en route fin 2012 la plus grande
3
centrale « power-to-gas » avec une puissance de 250 kW pour produire environ 300 Nm de méthane
3
par jour (=12,5 Nm /h).
Elle fonctionne à une pression inférieure à 10 bar et peut utiliser théoriquement différentes sources de
CO2 : biogaz brut, CO2 qui issu de la production de bioéthanol, CO2 de centrale thermique, CO2 de
l’industrie chimique…. Il est même envisageable d’utiliser l’air ambiant avec cependant un surcoût
conséquent lié à la concentration nécessaire de CO 2. Même si l’installation de 250kW utilise du CO2
acheté en bouteille, l’installation pilote à 25 kW a fonctionné avec du CO 2 (préalablement traité pour
enlever le H2S et concentré) d’une installation de biogaz. Les gaz provenant de l’industrie ou d’une
centrale thermique, doivent eux aussi être prétraités pour éliminer des substances qui impactent le
catalyseur (214) (201) (215).
Cette unité créée par le Ministère fédéral de l'environnement se base sur une unité de 25 kW
construite par le ZSW trois ans avant et sert de référence pour les usines industrielles en projet de 1 à
20 MW. Elle a nécessité 2,5M€ pour l’installation du pilote auxquelles s’ajoutent 1M€ de frais de
recherche sur 3 ans.
Les points forts de cette unité pilote sont :
26
Le CO2 utilisé provident d’un mélange synthétique de 2% de CO 2 dans du N2.
- Un stockage des énergies renouvelables : les énergies solaire et éolienne sont utilisées pour
l’électrolyse de l’eau. L’électrolyseur utilisé est du type alcalin et permet la production de 50
3
Nm /h d’hydrogène (230). L’hydrogène réagit ensuite avec le CO2 pour produire d’environ
3
12,5 Nm /h de méthane (230). Le méthane produit peut être stocké ou converti en électricité.
Des tests ont été prévus au sein de cette unité afin d’évaluer et de développer la technologie. Les
tests sont réalisés sur deux réacteurs de méthanation et concernent le procédé dynamique
(discontinu), le vieillissement des composants, l’essai de catalyseurs (de différents fabricants et pour
lesquels les frais et la sensibilité des catalyseurs sont assez proches). Une installation d’électrolyse de
370 kW va s’ajouter prochainement à l’installation pilote pour faire des tests supplémentaires
d’optimisation de la technologie, du rendement et des frais de l’électrolyse. L’installation devrait
permettre de recueillir des données pour un dimensionnement de 1-20 MW (214)(201)(215).
Le projet e-gas mené par Audi, ETOGAS et EWE en Werlte, a pour but l’injection de méthane de
synthèse produit à partir d’énergie éolienne pour alimenter les véhicules (véhicules CNG et
électriques de Audi) dans une usine d’une puissance électrique de 6,3 MW (231) (232). Le CO2 est
fourni par la plateforme de biogaz EWE de déchets organiques, située à proximité de l’unité de
méthanisation. Le CO2 est séparé à partir du gaz brut, mais cette opération ne sera plus nécessaire
avec la nouvelle génération d’installation d’ETOGAS. La pression de methanation est de 8 à 10 bar
(201), le procédé est dynamique (en discontinu) avec un stockage intermédiaire de H 2 pour
tamponner le fonctionnement du réacteur et la chaleur récupérée est réutilisée sur la plateforme de
biogaz. Cette unité a débuté en mode essai à l’automne 2013. Sa production est estimée à environ
1100 tonnes de gaz par an avec une consommation annuelle de 3086 tonnes de CO 2 (206).
L’électrolyseur utilisé est du type alcalin et il est alimenté à partir d’énergie d’origine renouvelable
3
(éolienne) avec une capacité de production d’environ 350 Nm /h. Le nombre d’heures de
fonctionnement maximal par an est estimé par Audi à 4 400 h (216) (232).
ETOGAS propose des unités de méthanisation clé en main de 1,2MW (5M€) conçu pour utiliser le gaz
issu d’installation de biogaz. La technique d’installation est un peu plus avancée que celle du projet
Audi mais le procédé est similaire sur les grandes lignes : électrolyse alcaline et méthanation en
discontinu, catalyseurs identiques, …. Il n’est plus nécessaire de séparer le CO 2 du biogaz avant la
méthanation et les rendements énergétiques de 60% sans récupération de la chaleur peuvent
atteindre 70-80% (sous condition que 50% de la chaleur soit utilisée) (201).
Remarque : L’électrolyse PEM utilisée depuis 15 ans est un procédé avantageux pour un
fonctionnement en dynamique. En revanche, il manque de recul (possibilité de concevoir des
installations jusqu’à 1 MW) et les frais d’investissement et de fonctionnement sont actuellement 1,5
fois plus cher que le procédé alcalin (236).
D’après Siemens, l’installation industrielle de PEM (bientôt disponible sur le marché) aura très
prochainement les mêmes coûts d’investissement qu’une électrolyse alcaline, pour des coûts de
fonctionnement moindres. Ces nouveaux électrolyseurs à membranes possèdent différents
avantages : temps de réaction aux variations électriques de l’ordre de la milliseconde (contre
quelques minutes pour les membranes actuelles), surcharge temporaire possible à hauteur d’un
maximum de trois fois le niveau de la puissance nominale, possibilité de fonctionnement à des
pressions d'hydrogène de 50 à 100 bars, etc. Les essais ont prouvé que la durée de vie des éléments
de l’installation n’est pas plus impactée par une conduite dynamique par rapport à une conduite en
continue (237).
L’Alliance pour l’hydrogène éolien regroupe plusieurs partenaires comme Vattenfall, Linde, Enertrag,
Siemens ou Total pour tester différents types d’électrolyse (199).
La « Plateforme stratégique Power-to-gas » a été initiée en 2011 par la Dena (Deutsche Energie-
Agentur) avec les objectifs d’inciter les pilotes industriels, de développer des modèles économiques
adaptés et de formuler des recommandations aux politiques. Cette plateforme regroupe entre autres
EnBW, E.ON, RWE, Gazprom, GDF Suez, Siemens, Volkswagen et Viessmann (199).
Le consortium IC4 fondé en 2011 est soutenu par le gouvernement Allemand avec un budget de 6,3
millions d’euros. Le projet est mené par huit partenaires tels que l’université technique de Munich,
Situation en France
Acteurs
La méthanation est un sujet tout récent en France mais les projets de recherche voient le jour. Ceux-ci
impliquent d’importants acteurs comme GDF Suez, Solvay-Rhodia, Areva, le CEA et Air Liquide (199).
La France reste en retard en comparaison avec l’Allemagne (197).
Recherche
Le projet DEMETER démarré en 2011 pour une durée de 3 ans regroupe 6 partenaires (ARMINES,
CEA/LITEN, GEG, INERIS, ICPEES et SAIPEM) et bénéficie d’une aide de l’ANR de 766 440 euros.
L’objet de ce projet est l’étude de la faisabilité technique et économique d’une unité de stockage et
déstockage d’énergie électrique, d’origine renouvelable, à partir de méthane de synthèse par le
procédé de méthanation en utilisant un électrolyseur à haute température et à fonctionnement
réversible (SOEC/SOFC). En phase de stockage, l’électricité excédentaire sert à co-électrolyser de
l’eau et du CO2 dans un SOEC en produisant du gaz de synthèse qui est ensuite transformé en CH 4
par méthanation du CO. Le méthane produit est injecté dans le réseau de gaz naturel. Dans la phase
de déstockage, le CH4 alimente un pre reformeur suivit d' une SOFC et est transformé en électricité.
Le but de ce projet est de faire une évaluation technico-économique du coût de kWh stocké et restitué
(239).
Remarque : Il ne s’agit pas d’un projet de méthanation du CO2 à proprement parler car il est
préalablement transformé en CO dans le co-électrolyseur.
Facteurs de succès
Procédé basé en deux technologies matures : l’électrolyse d’eau et la réaction de Sabatier pour
produire le méthane (198).
Le méthane obtenu peut être mélangé ou substitué au gaz naturel (225). Ce méthane aura les
mêmes usages que le gaz naturel : chauffage, génération d’électricité et carburant (199).
Un coût des infrastructures faible car ce procédé peut s’adapter aux infrastructures existantes du
réseau de gaz naturel. En France il peut être stocké et acheminé par les réseaux actuels (225)
(197).
A l’heure de l’installation des unités de méthanation, les sites déjà existants de gazéification de
biomasse (=biométhanisation) sont idéaux avec la possibilité de recyclage du CO 2 issu de la
gazéification, la synergie entre gazéification, hydrogène d’électrolyse et méthanation et l’utilisation
du poste d’injection dans le réseau de gaz déjà installé (198).
Le coût du gaz obtenu, estimé avec les techniques connues aujourd'hui, est très élevé (205).
Rendement du procédé faible avec pertes d’énergie entre 30 et 40 % (198) (225) (240).
Principe
Le reformage du méthane est un procédé qui permet l’obtention de gaz de synthèse. Le gaz de
synthèse est un mélange de dihydrogène (H2) et de monoxyde de carbone (CO). Il est utilisé pour de
nombreuses applications telles que les synthèses de méthanol, d’hydrocarbures (par le procédé
Fischer-Tropsch), d’acide acétique, d’ammoniac (par le procédé Haber-Bosch) ou d’hydrogène. Les
différents procédés de reformage du méthane ont besoin de températures élevées et de catalyseurs
(241).
Le rapport H2/CO dans le gaz de synthèse varie en fonction de la méthode de reformage utilisée. Ce
rapport conditionne les réactions suivantes et les produits obtenus. Par exemple, pour la production
d’hydrocarbures par Fischer-Tropsch ou de méthanol, il faut un rapport H2/CO égal à 2 alors qu’il est
de 1 pour la production d’alcools à chaîne longue et d’acide acétique (242) (30) (243).
En général, ce sont des rapports H2/CO élevés qui sont recherchés. Dans ces cas, les réactions qui
abaissent le ratio H2/CO telle que la réaction RWGS (Reverse Water-Gas Shift qui transforme le H2 et
le CO2 en H2O et CO) sont évitées (244).
La Figure 65 illustre les principales voies de reformage du méthane et le ratio H 2/CO correspondant.
Ces voies sont le vaporeformage ou reformage humide (réaction avec vapeur d’eau), l’oxydation
partielle (réaction avec de l’oxygène) et le reformage sec.
Le vaporeformage est une technique déjà industrialisée. On la considère comme la voie la plus
classique de reformage du méthane. Il s’agit du procédé le plus utilisé pour la production de gaz de
synthèse et d’hydrogène (243).
Il existe d’autres possibilités de reformage de méthane avec du CO2, qui sont des combinaisons des
différents types de reformage :
Ce type de reformage peut avoir lieu par injection de CO 2 provenant de sources extérieures
ou à partir de CO2 présent naturellement dans le gaz naturel. Ce dernier cas n’est pas
considéré comme une valorisation du CO2 puisque celui-ci ne provient pas d’émissions
anthropiques (30).
Tri-reformage :
Le tri-reformage est un type de reformage mixte pour lequel un mélange d’eau, d’oxygène et
de CO2 permet la production de gaz de synthèse (30). Comme le reformage vu
précédemment, celui-ci présente pour avantages la possibilité de modifier le rapport H 2/CO en
fonction des proportions souhaitées de H2O, O2 ou CO2 et de diminuer le besoin énergétique
grâce à la réaction exothermique du CH4 avec l’O2 (250) (251). Enfin, la présence de
l’oxygène diminue la formation de coke, responsable de la désactivation des catalyseurs
(252).
Le CO2 peut également réagir avec des alcanes comme le propane pour produire des composés
aromatiques, des oléfines ou de l’acide acétique (30).
Reformage sec
En tant que matière première pour le reformage sec, différents gaz contenant du CO 2 et du CH4
peuvent être utilisés tels que le gaz « landfill » (50 % de CH4 et 50 % de CO2), le gaz naturel
majoritairement composé de méthane mais potentiellement riche en CO2 ou le gaz issu de la digestion
des eaux résiduaires industrielles (253).
La majorité des recherches sur le reformage sec a été réalisée avec du CO2 pur (30). A ce jour
l’utilisation de CO2 non purifié ne semble pas envisageable due à la difficulté des catalyseurs d’opérer
en présence des impuretés contenues dans les fumées industrielles (254). Cependant, avec
l’amélioration des catalyseurs, les recherches pourront s’orienter vers la diminution de la pureté du
CO2 entrant (30).
Exemple de gaz entrant dans un réacteur plasma de reformage sec avec des réactifs de
haute pureté : CH4 (>99,99 %), CO2 (>99,5 %), rapport CH4/CO2 de 1/2 et 60 % d’argon en
tant que gaz de dilution (253). Remarque : l'argon est utilisé pour faciliter la formation de la
décharge plasma. Des pourcentages plus faibles d'argon sont possibles (246).
Le tri-reformage semble une option très attractive grâce à la possible utilisation directe des
fumées industrielles comme gaz entrant, sans besoin de séparer le CO 2 ni de traiter les fumées (30)
(255) (252). Les mélanges de gaz de combustions industrielles (composition typique : 8-10 % de CO2,
18-20 % de H2O, 2-3 % de O2 et 60-70 % de N2) sont combinés avec du gaz naturel pour améliorer le
taux de conversion du CH4 et du CO2 en gaz de synthèse (255).
L’équipe de recherche autour de Wolan J.T. et Kuhn J. de l’université de South Florida envisage
l’utilisation du gaz issu de la gazéification de la biomasse (avec un rapport H2/CO égal à 1) comme
entrant pour un procédé de tri-reformage. L’objectif est d’atteindre un rapport H2/CO égal à 2 (252).
Conditionnement
Le gaz naturel, source de méthane, doit être désulfuré avant d’être utilisé pour le reformage afin de
protéger les catalyseurs (256).
Reformage sec
La réaction de reformage sec étant endothermique, des températures élevées sont requises. En effet,
la réaction est thermodynamiquement favorable pour des températures supérieures à 640 °C (247).
Les conditions opératoires sont généralement strictes avec des températures comprises entre 650 et
1 000 °C selon le catalyseur utilisé. Les catalyseurs sont souvent constitués d’un oxyde métallique sur
un support réfractaire stable. Par ailleurs les conditions de pression sont d’entre 1 et 20 bars (247)
(257).
Maturité technologique
La combinaison des procédés de vaporeformage et reformage sec est une technologie déjà testée et
utilisée à l’échelle industrielle depuis quelques années (258).
Potentiel
La production de molécules à valeur énergétique pourrait utiliser entre 1,5 et 3 milliards de tonnes de
CO2 (259) (260). Néanmoins, ces produits énergétiques seront formés par différentes méthodes, et
non pas uniquement à partir de gaz de synthèse obtenu par le reformage du CO2.
Le principal enjeu du reformage sec est la formation de coke (carbone solide) par les
réactions de Boudouard et de décomposition du CH4. Le dépôt de coke sur la surface des
catalyseurs est responsable de la désactivation de ces derniers.
Au cours des premières années, les recherches étaient orientées vers l’utilisation de métaux
nobles tels que Pt, Ru, Rh, Pd et Ir comme catalyseurs (261). Les conclusions ont été que les
catalyseurs à base de Rh et de Ru ont une meilleure performance catalytique (activité et
stabilité), sans présenter une forte tendance à la désactivation et la formation de coke (261)
(247).
Le coût très élevé et la faible disponibilité des métaux nobles orientent les recherches
actuelles vers le développement des catalyseurs à faible coût. Ces catalyseurs sont à base de
métaux comme Ni, Co ou Fe (261) (262).
Une autre option étudiée est l’utilisation de catalyseurs à base de carbone, alternative à
moindre coût, résistants aux hautes températures et pouvant opérer en présence de soufre
(263).
Concernant les supports, Al2O3, MgO, TiO2, SiO2 et La2O3 sont les plus cités dans la
littérature. Au cours des dernières années, un grand intérêt a été accordé aux oxydes mixtes
tels que Ce1-xZrxO2, LaBO3 (B=Co, Ni, Fe et Cr), La2NiO4, Ni/Al2O3 ou Ni/ZrO2-CeO2 (247).
D’autres avantages du reformage sec à haute pression ont aussi été identifiés tels que la diminution
de la taille du réacteur et l’amélioration des taux de conversion (262).
En revanche, pour des conditions de hautes pression et température, la formation des dépôts de coke
responsable de la désactivation des catalyseurs est favorisée.
Coût
Coût d’investissement
Reformage sec
Le coût d’investissement pour l’équipement du réacteur de reformage sec est d’environ 135 000 €.
Le coût total d’investissement incluant l’équipement, le coût des matières premières et la main
d’œuvre pour l’installation est de 1 130 000 € (258).
Dans le cas du reformage mixte avec de l’eau et du CO 2 développé par l’entreprise japonaise Chiyoda
Corporations, les coûts d’investissement sont réduits de 20 % pour obtenir un rapport H 2/CO=1 et de
40 % pour un rapport de 0,5 en comparaison avec les procédés conventionnels de production de gaz
de synthèse (249).
Coût de fonctionnement
Pour le procédé en Figure 66, les coûts de fonctionnement incluant l’eau nécessaire au
refroidissement (1 %), le gaz pour le chauffage (37 %) et l’électricité (62 %) sont de l’ordre de 4 000 €
par heure (258).
Rentabilité économique
Reformage sec
Il existe toutefois certains verrous à lever pour atteindre la rentabilité tels que le coût du CO2 utilisé et
la forte consommation énergétique de la réaction endothermique (30) (254). En cas d’augmentation
du rapport H2/CO pour certaines applications, l’apport d’hydrogène coûte cher, et impacte directement
le bilan économique de cette technique (30).
27
Ces couts correspondent à une unité traitant près de 1840 kmol/h de méthane et qui produisent 1660 kmol/h de CO et
5515kmol/h de H2
Reformage avec de l’eau et du CO2
Tri-reformage
Bilan Carbone
Dans le procédé Calcor Standard de reformage à sec, la quantité de CO 2 émise pour produire une
tonne de CO est d’environ 15 kg. Pour la technique de vaporeformage avec recyclage de la source de
CO2, les émissions sont de 1 785 kg de CO2 / tonne CO produit. Le procédé Calcor Standard
envisage la production de CO à partir du reformage du CO2 pour produire du phosgène (256).
Un bilan carbone a été réalisé sur le simulateur Aspen Plus par l’équipe de recherche du Centre
Energétique et Procédés (CEP) de MINES Paris Tech en France sur un procédé couplant une unité
de reformage sec pour produire du gaz de synthèse et une unité Fischer-Tropsch (pour l’obtention de
carburants). Les résultats de la simulation montrent que 330,1 tonnes par heure de CO2 sont
utilisées pour produire 93 tonnes par heure de carburant synthétique. Les émissions de CO2 du
procédé sont de 91 tonnes par heure en utilisant de l’électricité d’origine nucléaire et de la chaleur
provenant du gaz naturel (257) (266).
Principales pollutions
Efficacité énergétique
Reformage sec
Le principal verrou du reformage sec est l’importante quantité d’énergie à apporter puisque des
températures élevées sont nécessaires pour obtenir un bon rendement (30).
Tri-reformage
Le tri-reformage est une alternative intéressante d’un point de vue énergétique due à la possibilité de
compenser la réaction endothermique de reformage sec avec la combustion exothermique du CH 4
Les principaux acteurs qui s’intéressent au reformage avec du CO2 sont les pétroliers, les gaziers et
les producteurs de méthanol.
A ce jour, il existe quelques projets industriels qui envisagent la production de méthanol à partir de
gaz de synthèse obtenu par l’opération mixte de reformage avec de l’eau et du CO2.
Niveau industriel
Mindrex technologies
L’entreprise Mindrex est pionnière dans le monde de la production de fer par réduction directe (DRI).
Sa technologie utilise le « Mindrex Syngas System » qui est un système de reformage
stœchiométrique du gaz naturel avec du CO2 issu du procédé pour produire un gaz de composition de
10 à 20 % de CO et de 80 à 90 % de H 2. Ce gaz est ensuite utilisé pour l’obtention du fer par la
réduction d’oxyde de fer. Cette technologie utilise un reformeur tubulaire avec son propre catalyseur
breveté pour le reformage d’un mélange de gaz du procédé recyclé et de gaz naturel (268) (269).
Le but du procédé Calcor est l’obtention de CO de haute pureté pour la production de phosgène. Le
CO est obtenu par purification du gaz de synthèse, qui est produit par reformage catalytique du gaz
naturel avec du CO2 sous faible pression. Avant le reformage, le gaz naturel doit être désulfuré pour
protéger le catalyseur. Ensuite, il est mélangé avec du CO2, provenant de gaz de combustion,
préalablement chauffé. Le CO2 contenu dans le gaz de synthèse est séparé et recyclé dans le
procédé.
Dans le gaz de synthèse obtenu par ce procédé le rapport H 2/CO est de 0,42. Après la purification du
gaz de synthèse par faible température ou en utilisant des membranes, la pureté du CO obtenu est
supérieure à 99 %.
Une usine de production de méthanol à partir de gaz de synthèse a été un des premiers projets
commerciaux. La production de gaz de synthèse par vaporeformage avec injection de CO 2 a permis
d’optimiser l’efficacité énergétique du reformage. Cette unité, démarrée en 2004, produit 3 030 tonnes
métriques de méthanol par jour (248). D’après une publication de TOPSOE, le CO2 utilisé est capté
d’une usine d’ammoniac voisine.
L’entreprise japonaise Chiyoda a développé un procédé de production de gaz de synthèse par action
commune du vaporeformage et du reformage sec en utilisant son propre catalyseur breveté. Ce
catalyseur a été testé entre 2009 et 2012 dans une unité de démonstration (JAPAN GTL). Une haute
tolérance à la formation de coke a été prouvée, ainsi qu’une bonne efficacité de formation de gaz de
synthèse. De plus, des quantités moindres de vapeur de l’eau et de CO 2 ont été nécessaires par
rapport à d’autres catalyseurs plus sensibles à la formation de coke.
Le gaz de synthèse produit par ce procédé a un rapport H 2/CO égal à 2, permettant la production de
méthanol. Il est possible de modifier ce rapport en variant les proportions de vapeur d’eau et de CO 2
pour avoir un rapport proche de 1 dans le but de produire de l’acide acétique.
L’entreprise ZEEP a développé un projet de production de méthanol en Louisiane qui a pour objectif la
conversion de 163 000 millions de Btu par jour de gaz naturel pour produire 5 000 tonnes métriques
par jour de méthanol. Ce projet envisage la transformation du méthane du gaz naturel en gaz de
synthèse par l’utilisation de la technologie de vaporeformage avec injection du CO 2, méthode qui a fait
ses preuves en Trinidad depuis 2005 (271).
La construction de cette unité commerciale d’un investissement de 980 millions d’euros a commencé
en 2013 et son démarrage est attendu pour l’année 2016 (272).
Recherches en cours
Les recherches sont orientées principalement vers le développement des catalyseurs et vers
l’amélioration de l’efficience énergétique du procédé.
D’autres conclusions sont issues de ces recherches. Les performances catalytiques sont améliorées
quand la température augmente ; et les performances ont été les meilleures avec le catalyseur de
nickel supporté par l’oxyde de calcium.
Situation en France
En France, la recherche pour améliorer le procédé de reformage avec du CO 2 porte sur les
catalyseurs et les réacteurs. Les principaux acteurs sont le Centre Energétique et Procédés (CEP)
28
des MINES ParisTech, le CNRS et les laboratoires associés au CNRS comme le LSPM (unité
29 30
propre) et le LACCO ou l’ITODYS (unités mixtes).
L’équipe de recherche du LSPM-CNRS (Laboratoire des Sciences des Procédés et des Matériaux)
s’intéresse au procédé de reformage sec dans un réacteur de décharge de surface en utilisant des
catalyseurs d’oxydes mixtes.
L’objectif poursuivi est la transformation de biogaz issu de la biomasse (en sortie d’un
méthaniseur, composé à 50 % de CH4 et 50 % de CO2) en gaz de synthèse et ensuite en biodiesel
via le procédé Fischer-Tropsch. Aujourd’hui, seul du CO2 pur est utilisé afin de mieux comprendre les
mécanismes de la réaction impliquée (246).
Dans ce procédé, le gaz passe à l’intérieur du réacteur à micro-décharges, les électrons énergétiques
transforment le CH4 et le CO2 afin de produire du CO et de l’hydrogène. Avec cette technologie, les
besoins énergétiques sont réduits puisque l’énergie est apportée au cœur du système par les
décharges électriques, et il n’y a pas de perte. Cela permet le fonctionnement à froid et à pression
atmosphérique. Les taux de conversion obtenus, avec des catalyseurs à base de ruthénium, sont de
l'ordre de 60% pour le CH4 et de l'ordre de 40% pour le CO2. Au sein du même réacteur, la réaction
de Fischer-Tropsch peut avoir lieu et ainsi l’obtention de biodiesel est possible. Différentes catalyseurs
sont étudies afin d’améliorer le taux de conversion et d’obtenir des produits spécifiques (246).
Un des autres objectifs est de rechercher le couple plasma-catalyseur permettant d'abaisser le coût
énergétique de la transformation à la température proche de l'ambiante. Dans cette optique plusieurs
procédés d'élaboration de catalyseurs sont mis en oeuvre afin de produire des catalyseurs
spécifiques. Parmi les méthodes employées on peut citer le procédé Fluidized Spray Plasma mis en
oeuvre au LSPM, la technique Polyol utilisée à l'ITODYS ou la technique d'imprégnation utilisée au
LACCO. Les catalyseurs élaborés par ces techniques sont ensuite testés, dans des réacteurs de
décharge plasma en vue de reformer des mélanges CH 4+CO2 dans des conditions identiques. Les
performances chimiques et énergétiques des catalyseurs sont ensuite comparées afin de retenir les
catalyseurs qui permettent d'atteindre des taux de conversion élevés et ceux qui permettent le
contrôle de la sélectivité des produits (278) (246)
L’équipe du Centre Energétique et Procédés (CEP) des MINES ParisTech, à mis au point un procédé
combinant reformage à sec et vaporeformage afin de maximaliser la conversion de CH4 dans la
production du gaz de synthèse. Ce procédé dimensionné pour consommer 330 t/h de CO2 pour la
production de 93 t/h de carburant synthétique (72% de diesel, 26% d’essence et 2% de GNL)
présente plusieurs avantages puisque :
- Il offre la possibilité d'ajuster le rapport H2/CO selon les spécificités de Fischer-Tropsch [1,9 à
2,1] en optimisant le rapport du flux d'entrée CH 4/CO2/H2O à l'inverse du procédé
28
Laboratoire des Sciences des Procédés et des Matériaux – Univ. Paris 13 - CNRS, UPR 3407.
29
Laboratoire de Catalyse en Chimie Organique, UMR CNRS 6503 - Poitiers
30
Laboratoire Interfaces Traitements Organisation et DYnamique des Système – Univ. Paris Diderot et du CNRS (UMR 7086).
Facteurs de succès
Utilisation de deux gaz à effet de serre comme réactifs tels que le CO2 el le méthane (30)
(245) (246).
Le rapport H2/CO=1 dans le gaz de synthèse obtenu à partir du reformage sec est le plus
approprié pour la synthèse de certains composants tels que les alcools à longue chaîne, de
l’acide acétique ou la synthèse Fischer-Tropsch (279) (243).
Dans le cas du tri-reformage, il est possible d’utiliser directement les fumées industrielles sans
nécessité de capter au préalable le CO2 (30) (255) (252).
Inconvénients
Le reformage sec a besoin de températures d’opération élevées en comparaison avec
d’autres procédés de production de gaz de synthèse. De ce fait, la consommation d’énergie
est importante (280).
Les procédés les plus connus de reformage sec sont réalisés à faible pression. Cependant
dans les procédés d’utilisation du gaz de synthèse, des pressions élevées sont nécessaires et
la post-compression du gaz de synthèse à haute teneur en CO est techniquement une tache
difficile (264).
Principe
La valorisation du CO2 par électrolyse correspond à la réduction électrochimique du CO 2. Cette
technique consiste à faire réagir le CO2 avec des électrons et protons afin de produire des
hydrocarbures de synthèse et des composés oxygénés.
La figure précédente résume les étapes et présente les équations mises en jeu. Dans ce cas
d’électrolyse, l’eau et le CO2 sont tous deux électrolysés à haute température (500 – 800 °C) afin de
produire du syngaz (CO + H2). Ce syngaz permet ensuite, par réaction catalytique, la formation
d’hydrocarbures ou d’alcools.
La photoélectrocatalyse
Quelques applications
Cette technique d’électroréduction du CO2 avec transfert d’électrons permet la formation de plusieurs
composés à pH 7.
+ e-
o Formation d’acide formique : CO2 + 2H + 2 -> HCOOH (E° = -0,61 V)
+ e-
o Formation de monoxyde de carbone : CO2 + 2H + 2 -> CO + H2O (E° = -0,52 V)
+ e-
o Formation de formaldéhyde : CO2 + 4H + 4 -> HCHO + H2O (E° = -0,48 V)
+ e-
o Formation de méthanol : CO2 + 6H + 6 -> CH3OH + H2O (E° = -0,38 V)
+ e-
o Formation de méthane : CO2 + 8H + 8 -> CH4 + 2H2O (E° = -0,24 V)
A ce jour, la production d’hydrocarbures à longue chaîne est un défi puisque chaque atome de
carbone ajouté à la chaîne hydrocarbonée nécessite des protons et électrons supplémentaires (30).
Quelque soient les technologies d’électrolyse envisagées, elles nécessitent une grande quantité
d’énergie puisque les molécules de CO2 et d’eau (pourvoyeur de protons) sont très stables (196).
A ce jour, les travaux de recherches et les essais utilisent essentiellement du CO2 industriel, pur à
99,9 %. En effet, les mécanismes sont toujours à l’étude et les impuretés contenues dans le gaz
seraient néfastes aux catalyseurs employés (composés de métaux nobles). Cependant, les
recherches s’orientent vers l’exploitation de CO2 moins concentré et de qualité moins exigeante (30).
L’utilisation à long terme de CO2 issu de fumées industrielles est un des enjeux de ces technologies.
Ci-dessous, l’étude de l’électrolyse du CO2 est séparée en trois parties représentatives des
techniques présentées précédemment : l’électrolyse à haute température, l’électrolyse à température
ambiante et la photoélectrolyse du CO2.
Pour cette technique, la majorité des études réalisées le sont sur les cellules SOEC (Solid Oxid
Electrolysis Cells). A ce jour, les performances, la durabilité du système, le choix des matériaux et les
conditions optimales du procédé sont les principaux points d’étude et d’amélioration en recherche. Les
systèmes étudiés le sont majoritairement pour une température supérieure à 750 °C.
Initialement, les SOEC ont été conçus pour les milieux de vie en circuit fermé tels que les navettes
spatiales et les sous-marins. Ce procédé de co-électrolyse H2O–CO2 permettait de fournir de
l’oxygène aux personnes vivant dans ces systèmes fermés (283).
La détermination de la température optimale est importante pour ce procédé. En effet, les deux
réactions d’électrolyse mises en jeu n’ont pas les mêmes demandes énergétiques suivant les
températures de réaction appliquées (30).
Un autre obstacle lié à cette technique est la séparation difficile des espèces chimiques n’ayant pas
réagi à la fin du procédé et qui empêchent les réactions de s’effectuer correctement (30).
Une étude menée au sein des laboratoires de l’université technologique et de l’institut de recherche
sur l’énergie à Singapour ainsi que de l’université de Pékin en Chine donne un aperçu de quelques
résultats relatifs à l’énergie du système SOEC (284). Tout d’abord, le traitement d’un kilogramme de
CO2 à 800 °C nécessite 16,4 KJ. Les conditions optimales semblent définir un courant électrique de
1,37 V nécessaire. Pour de telles conditions, on obtient une réduction de 67 % de la concentration
initiale en CO2 à la sortie et un taux de conversion des matières premières de près de 60 % (284).
La teneur finale en CH4 augmente lorsque la proportion d’H2 dans le mélange est plus importante.
De plus, la production de CH4 est d’autant plus élevée que l’apport d’énergie électrique augmente
(283).
La co-électrolyse de l’eau et du CO2 à haute température est une technique émergente et en plein
développement. Les recherches sur les SOEC sont en cours. L’industrialisation de cette méthode de
valorisation du CO2 n’est pas attendue avant une dizaine d’années. D’après l’ADEME, le
développement des techniques d’électrolyse est à envisager après 2030 (285).
Le Tableau 27 synthétise les résultats de trois expériences menées sur les SOEC dans des conditions
différentes et/ou en présence de catalyseurs particuliers.
Pour la production d’hydrogène à haute température, les coûts sont d’environ 1 000 $/kW. La
production industrielle d’hydrogène n’est donc pas envisageable pour l’instant. Les objectifs de coût
pour rendre cette filière rentable sont de l’ordre de 170 $/kW (289).
Concernant l’aspect économique de la co-électrolyse du CO2 et de l’eau, les données sont encore
manquantes. En effet, cette technique de valorisation du CO2 n’est pas encore aboutie.
La technologie des SOEC pour la valorisation du CO 2 étant encore au stade recherche, un bilan
environnemental complet n’a pas encore été réalisé. Toutefois, certains impacts sont identifiables via
le procédé mis en jeu et les ressources utilisées.
Bilan environnemental
L’intérêt de cette technique repose dans l’utilisation d’énergies renouvelables pour valoriser le CO 2.
Certains experts suggèrent l’utilisation d’un four solaire ou d’un réacteur nucléaire pour atteindre de
hautes températures. Dans ce cas, l’efficacité énergétique serait améliorée (30).
Afin de diminuer la consommation énergétique, il est possible d’agir sur le potentiel des catalyseurs et
sur la technologie de l’électrolyseur (diminution des résistances indésirables) (30).
Catalyseurs et solvants
Les catalyseurs et solvants utilisés peuvent représenter de potentiels polluants.
Matériaux utilisés
L’étape de fabrication des matériaux peut être source de pollution ou de grande consommation
d’énergie. De plus, les matériaux utilisés doivent ensuite être recyclés afin de limiter la quantité de
déchets et d’éviter les pollutions.
Un bilan environnemental précis sera à réaliser lors de la mise en place d’un système type SOEC à
grande échelle. Ce bilan dépendra de plusieurs facteurs tels que le choix des matériaux, la
température de réaction ou encore la consommation d’énergie engendrée.
L’Allemagne connaît un développement important des énergies renouvelables sur son territoire, la
création de telles unités de stockage d’énergie permettra d’adapter la production d’électricité au
réseau actuel (290).
Le projet SunFire, commencé en mai 2012se déroule en Rhénanie du Nord en Allemagne. Il est
soutenu par le Ministère Fédéral de l’enseignement et de la recherche (BMBF). Ce projet vise à
améliorer et optimiser le processus de co-électrolyse du CO2 et de l’eau dans le but de produire des
hydrocarbures. Ces recherches sont menées par une équipe du Centre de recherche de Jülich
(291).
Les conditions d’opération sont une température supérieure à 800 °C, une récupération de la chaleur
dégagée et une obtention de produits finaux liquides facilement stockables. Le rendement du procédé
établi est de 70%. Le groupe de chercheurs s’intéresse notamment au développement des SOEC et à
l’adaptation de ce système pour une future échelle industrielle. L’entreprise Sunfire GmbH a mis en
place une installation afin de tester les cellules conçues dans le cadre de ce projet (291).
L’intérêt de ce projet est aussi la réalisation d’un bilan environnemental de cette technique de
valorisation du CO2, dans le but de la comparer à d’autres alternatives (291).
Acteurs
Plusieurs laboratoires et industriels travaillent sur les SOEC. La majorité de ces derniers a un
historique dans l’électrolyse de l’eau à haute température pour la production d’hydrogène (30).
A ce jour, les principaux pays concernés par le développement de cette technologie sont l’Allemagne,
la Chine, le Danemark, les Etats-Unis et la France.
En France, le commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) est un acteur
incontournable (292).
Parmi les principaux organismes concernés par les recherches et/ou le développement de
l’électrolyse du CO2, on compte :
Laboratoires
- Lenfest Center for Sustainable Energy, and Department of Earth and Environmental Engineering,
Columbia University
- Fuel Cells and Solid State Chemistry Division, Riso National Laboratory for Sustainable Energy,
DTU, Danemark
- L’équipe de recherche de Chakib Bouallou, au sein du Centre Energétique et Procédés des Mines
Paris Tech, travaille sur la co-électrolyse de l’eau et du CO2. Cette équipe appartient au Département
Energétique et Procédés des Mines, qui a pour objets le développement des filières énergétiques du
futur et l’efficacité énergétique. Les chercheurs ont notamment réalisé une évaluation technico-
économique des SOEC dans l’objectif d’obtenir du gaz de synthèse (294).
Une simulation du procédé des SOEC a été effectuée, afin d’étudier la faisabilité et les coûts de cette
technologie. La simulation a été menée sous le logiciel Aspen Plus ; les aspects environnementaux et
économiques ont été étudiés. Le Tableau 28 présente les hypothèses et résultats économiques de la
simulation (294) (295).
Tableau 28 : Estimations des coûts de la technologie SOEC avec précision des hypothèses retenues ;
simulation réalisée avec le logiciel Aspen Plus (295)
Hypothèses
Production annuelle d’éthanol 165 000 tonnes
Taux de conversion du CO2 95 %
Taux de conversion de l’eau 95 %
Durée de vie de la cellule SOEC 5 ans
Durée de vie de l’unité de synthèse d’éthanol 20 ans
Coûts
Coût d’investissement de la cellule SOEC 4 000 $ / m²
Coût d’investissement de l’unité de synthèse d’éthanol 28 000 $ / tonne d’éthanol
Coût de fonctionnement de l’électricité 42 $ / MWh
Coût de captage du CO2 24 $ / tonne de CO2
Prix de l’éthanol 1,1 $ / kg
Entreprises
Programmes de recherche
Au sein du CEA, concernant l’électrolyse à haute température, les axes de recherche sont : l’étude
des matériaux et des composants, l’amélioration de la productivité, l’étude de l’empilement, la
réalisation d’une analyse technico-économique et une analyse de cycle de vie (ACV).
Facteurs de succès
L’électrolyse à haute température est un procédé bien connu pour l’électrolyse de l’eau dans le but
d’obtenir du dihydrogène. De ce fait, les connaissances scientifiques sont bonnes pour cette
technique et les cellules SOEC sont en plein développement. La co-électrolyse du CO2 et de l’eau
pourrait donc profiter de ces avancées dans le domaine.
Un autre avantage est la possibilité de coupler ce procédé avec des énergies renouvelables comme le
four solaire par exemple.
D’après le CEA, les avantages de cette technique d’électrolyse sont un rendement et une efficacité
énergétique intéressants, un couplage aisé avec d’autres procédés et des coûts de production
attendus faibles (196).
Forces Opportunités
- Etude approfondie de l’électrolyse de l’eau - Laboratoires/entreprises avec plusieurs
compétences nécessaires au
- Mécanisme bien connu par les scientifiques développement (matériaux, électrochimie,
thermomécanique, …)
- Amélioration des rendements en cours
- Utilisation d’énergie nucléaire et/ou de four
- Nombreux laboratoires d’électrochimie solaire pour la chaleur
Inconvénients
L’électrolyse à haute température présente quelques inconvénients, sur lesquels les équipes de
recherches travaillent actuellement. Tout d’abord, l’apport d’énergie (électricité et chaleur) est
important pour cette technique, impliquant une forte consommation.
De plus, les électrolyseurs ont des coûts d’investissement encore très élevés puisque la fabrication ne
se fait pas encore à grande échelle (292).
Des recherches sont actuellement en cours concernant les matériaux. Des tests sont effectués sur
différents matériaux pour déterminer le plus performant. Les matériaux choisis doivent aussi résister
aux températures élevées. Enfin, un inconvénient important est la durabilité des cellules SOEC (292).
Le principal verrou identifié par le CEA est la durabilité des matériaux. En effet, ce procédé consiste
en une réaction chimique à haute température. Le taux de remplacement des cellules d’électrolyse est
en cours d’étude. Il serait toutefois nécessaire de réaliser des essais sur de longues périodes,
plusieurs milliers d’heures, pour étudier la durabilité des matériaux (196).
Une contrainte est la disponibilité et le captage du CO2 pour ce procédé. Si le coût d’obtention de ce
gaz et celui de l’énergie électrique diminuaient, les molécules produites par co-électrolyse pourraient
alors entrer en compétition avec le gaz naturel. La quantité de CO2 valorisable par cette technologie
dépend de nombreux facteurs qui sont le coût du CO 2, la disponibilité d’énergie électrique bon
marché, la demande, le prix du gaz naturel, etc. Quant à la qualité du CO 2, celle-ci doit correspondre
aux catalyseurs présents dans le réacteur chimique (196).
A ce jour, les catalyseurs principaux utilisés pour cette technique sont à base de métaux nobles.
Des équipes de recherche travaillent sur le développement de catalyseurs à base de fer ou de
nanotubes de carbone.
Les recherches sur l’électrolyse à température ambiante sont couplées avec les recherches sur les
cellules PhotoElectroChimiques, systèmes décrits dans la partie « photoélectrolyse ».
Il existe deux voies pour cette électrolyse en phase liquide ; la conversion du CO2 peut se dérouler en
milieux aqueux ou non aqueux. Les produits obtenus sont différents selon la phase concernée, le type
de solution électrolytique et le type d’électron, ce dernier paramètre dépendant de la nature du métal
constituant l’électrode.
Les études montrent que les électrodes à base de cuivre sont celles donnant les meilleurs résultats.
L’objectif actuel est d’optimiser la production d’hydrocarbures. Les chercheurs travaillent donc sur la
densité de cuivre de la cathode. De fortes densités semblent créer un risque élevé de désactivation.
Les études sont toujours en cours.
En solution non aqueuse, la solubilité du CO 2 est beaucoup plus importante (jusqu’à 20 fois) que dans
l’eau. L’utilisation d’électrolytes non aqueux nécessite des conductivités faibles, un besoin important
en densité de courant, ces deux facteurs désactivant les catalyseurs.
L’efficacité de conversion vers l’éthane avec du CuCl immobilisé sur des électrodes de Cu-mesh est
de l’ordre de 70 %. Cependant, la désactivation de l’électrocatalyseur reste élevée.
Quant aux nanotubes d’oxydes de titane, l’efficacité est d’environ 60 % pour l’obtention de méthanol à
partir de CO2.
A température ambiante, l’électrolyse en phase liquide rencontre trois difficultés qui sont l’importante
consommation d’électricité, la difficile récupération des composés et la difficulté de produire
des hydrocarbures à longue chaîne. La récupération des produits est complexe puisqu’ils sont très
dilués et que la séparation par distillation demande beaucoup d’énergie.
En phase gazeuse, plusieurs contraintes du travail en phase liquide sont éliminées. En effet, l’étape
de récupération des produits est simplifiée et moins gourmande en énergie. Les composés formés
sont récupérés par condensation.
Le projet européen ELCAT, mené de 2004 à 2008, a montré que la synthèse d’alcools et
d’hydrocarbures est possible en phase gazeuse à température ambiante et pression ordinaire. Les
Coût
Les coûts d’investissement sont élevés à ce jour car les électrocatalyseurs sont à base de métaux
nobles. Des études sont en cours de réalisation concernant l’utilisation de catalyseurs à base de fer
ou de nanotubes de carbone. En effet, la disponibilité du fer est bien plus importante et le coût moins
élevé. Les nanotubes de carbone, quant à eux, présentent un coût d’achat encore élevé car la
production est faible.
Les apports en énergie sont limités puisque la réaction étudiée se réalise à température ambiante et
pression ordinaire.
Cependant, l’aspect négatif d’un point de vue environnemental est l’utilisation de catalyseurs et
potentiellement de solvants organiques. Les étapes de conception et de recyclage de ces catalyseurs
demandent de l’énergie.
- Le projet européen ELCAT (Electrocatalytic gas-phase conversion of CO2 in confined catalysts) qui
s’est déroulé de 2004 à 2008 s’est intéressé à la conversion du CO2 en phase gazeuse en
hydrocarbures liquides et alcools. La phase gazeuse avait été jusque là très peu étudiée. L’avantage
de cette méthode est le fait que la température ne représente pas un facteur limitant, contrairement à
la phase liquide. Ce projet a aussi concerné le développement des nanotubes de carbone comme
matériaux conducteurs. Les résultats prédisent que cette méthode de conversion électrocatalytique
serait disponible à grande échelle d’ici les années 2020, et réduirait les émissions de CO 2 de 5% dans
le monde (297).
Facteurs de succès
Forces Opportunités
- Réaction d’électrolyse à température ambiante - Etudes d’électrocatalyse grâce aux
et pression ordinaire nanotubes de carbone
Inconvénients
Les photocatalyseurs sont des systèmes pour lesquels la dissociation de l’eau et la réduction du CO 2
se déroulent simultanément. Ils agissent ainsi directement sur le CO 2 et la vapeur d’eau pour produire
des hydrocarbures de synthèse (30).
Cette technique est d’un grand intérêt puisqu’elle utilise l’énergie solaire à température ambiante et
pression atmosphérique, ce qui limite les pollutions engendrées.
Dans un tel réacteur photoélectrocatalytique, les deux électrodes sont séparées par une membrane
(laissant passer les protons), l’anode est le siège d’une réaction photocatalytique et la réaction
d’électrolyse a lieu au niveau de la cathode (Cf. Figure 71).
Les intrants nécessaires à ce système sont l’énergie solaire, l’énergie électrique, l’eau et du CO 2. Le
fonctionnement d’une cellule nécessite 1,23 V. Selon une étude des Mines Paris Tech, il serait
possible de transformer 146 000 tonnes de CO2 avec 20 000 tonnes de H2 et de produire l’équivalent
de 76 000 tonnes d’éthanol. De plus, le rendement de production de CO augmente lorsque le rapport
H2 / CO2 augmente (298).
Le problème actuellement posé concernant les cellules PhotoElectroChimiques est la durabilité des
matériaux (298).
Les recherches concernant les photocatalyseurs sont nombreuses à ce jour, afin de limiter les coûts
et d’augmenter les performances (299).
De nouveaux catalyseurs sont à l’étude et/ou en développement dans le but d’améliorer les
performances du système depuis 2010 :
- Une étude menée au laboratoire de chimie industrielle et des matériaux de Messina en Italie s’est
intéressée aux nanophotocatalyseurs stabilisés au sein de matériaux micro ou mésoporeux (301). Les
nanoparticules semi-conductrices permettraient une meilleure activation du CO 2. Avec ce type de
catalyseur, les principaux produits sont le méthane et le méthanol. L’efficacité et la sélectivité de la
réduction du CO2 ont montré de bons résultats, en comparaison avec les catalyseurs à base d’oxyde
de titane (301).
- L’utilisation de polymères semi-conducteurs à base de nitrure de carbone est une autre voie d’étude.
Ce type de polymère est particulièrement stable et facile à produire (301).
Spectre d’absorption
A chaque photocatalyseur est associé un spectre d’absorption spécifique. De ce fait, plus le spectre
est large, plus la quantité d’énergie solaire exploitée est grande et plus la productivité de la réaction
augmente (30).
Les groupes de recherche étudient des photocatalyseurs capables d’absorber le maximum d’énergie
solaire. En effet, les photocatalyseurs à base d’oxyde de titane ne sont capables d’absorber que dans
l’ultraviolet, représentant seulement 4% de l’énergie solaire potentiellement accessible.
Efficacité quantique
L’efficacité quantique se définit comme le rapport entre le nombre d’électrons formés et le nombre de
photons arrivant sur une surface photoréactive. Un photon donne un électron. Cette efficacité ne peut
donc pas être supérieure à 100%, par définition.
Les photocatalyseurs ont montré une efficacité quantique moyenne de 50 % (30). Cependant, cette
efficacité est un des points d’étude et d’amélioration des recherches actuelles. En 2010, au Japon, un
groupe de chercheurs du NIMS (National Institute for Material Science) a trouvé une efficacité
quantique de 90% pour le photocatalyseur à base de phosphate d’argent (Ag 3PO4) pour une longueur
d’onde de 420 nm. Il s’agissait de la photocatalyse de l’eau. Ce catalyseur est aujourd’hui à l’étude
afin d’étudier son adaptation pour d’autres catalyses et améliorer la récupération des produits (302).
L’efficacité quantique est donc un point d’étude important de la photocatalyse, de nettes améliorations
sont envisageables par les groupes de chercheurs.
Lors de la photocatalyse directe du CO2 et de l’eau, les réactions d’oxydation de l’eau et de réduction
du CO2 ont lieu dans les mêmes compartiments. De ce fait, une baisse de l’efficacité de la conversion
du CO2 est constatée puisque des réactions parasites ont lieu (avec les électrons et les protons
disponibles). La possibilité d’obtenir des hydrocarbures à longues chaînes carbonées est donc limitée.
La technique utilisant les cellules PEC (PhotoElectroCatalyse) est prometteuse. En effet, une
séparation physique existe entre les réactions de photolyse de l’eau et de réduction du CO 2 (Cf. Figure
71).
Ainsi, les réactions parasites sont limitées et il est plus facilement possible d’obtenir des
hydrocarbures à longues chaînes carbonées. Par ailleurs, l’association de la photolyse de l’eau et de
la réduction du CO2 en phase gazeuse est une voie prometteuse car elle permettrait une récupération
facilitée des produits (par condensation) (30).
Cette technique de valorisation du CO2 en est au tout début de son développement. Les recherches
sont concentrées sur la photolyse de l’eau, la bonne compréhension des mécanismes et l’optimisation
des conditions de la réaction.
Les besoins en recherche sont la nécessité de créer des programmes nationaux et/ou européens
regroupant les différentes compétences nécessaires et centrés sur la photoélectrocatalyse du CO2.
Coût
Cette technologie est encore au stade de la recherche. Les données économiques sont encore très
faibles et incomplètes. Cependant, il est possible d’identifier les principaux postes de dépenses.
Tout d’abord, les catalyseurs représentent un coût important. Le prix dépend du catalyseur ; certains
sont fabriqués à base de métaux peu coûteux tels que le fer ou le manganèse, et d’autres utilisent des
métaux plus rares et plus coûteux tels que le titane, métal le plus employé sous la forme d’oxyde de
titane. Aujourd’hui, le prix et l’état des recherches rendent ce procédé non rentable. A ces coûts de
matières premières s’ajoutent les coûts de formulation et de récupération. Les particules de TiO 2 sont
de l’ordre de 50 nm. Des surcoûts sont donc à prévoir pour la filtration du catalyseur (30) (303).
L’utilisation de cellules à colorant pour cette technologie semble être un réel atout économique, le coût
de conception étant inférieur à 60 $/m². Les matériaux les plus coûteux de ce système sont le colorant
et le TiO2. Les coûts de production d’électricité par cette technologie sont encore à l’étude. De plus, la
durée de vie de ces cellules est à améliorer pour assurer une meilleure rentabilité (304).
Enfin, la récupération des produits est un autre poste coûteux. Si les composés sont produits en
phase liquide, le coût sera important (cas de la photocatalyse directe du CO 2 et de la vapeur d’eau).
Quant à la réduction du CO2 en phase gazeuse, la récupération des produits par condensation sera
moins coûteuse qu’une distillation classique (30).
Bilan environnemental
Le TiO2 est à ce jour le catalyseur le plus utilisé lors de ce procédé. Il est utilisé pour de nombreux
usages : écran solaire en cosmétologie, teinture blanche des murs (pouvoir oxydant) ou en tant
qu’additif alimentaire. En 2006, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a classé le
TiO2 dans la catégorie cancérogène de type 2B. Cela signifie qu’il est susceptible d’être cancérogène
pour l’être humain, en cas de forte inhalation. Des mesures de limite d’exposition sont donc à mettre
en place lors de l’utilisation de ce catalyseur potentiellement toxique afin de contrôler les risques
sanitaires.
Efficacité énergétique
Unités pilote
A ce jour, aucune unité pilote n’a été recensée. Les études sont au stade de recherche et la création
d’un pilote ne semble pas à l’ordre du jour.
Programmes de recherches
Acteurs
Laboratoires
- Aux Etats-Unis, l’université de Princeton dans le New Jersey étudie l’efficacité quantique du
procédé afin de l’améliorer. Il s’agit de l’équipe de John A.Keith et d’Emily A.Carter qui travaille sur
ces recherches (306).
- Le groupe américain I&EC est impliqué dans la recherche concernant la photoélectrocatalyse. Plus
précisément, il s’agit de I&EC Industrial and Engineering Chemistry Research qui est en charge
d’étudier les différentes possibilités de catalyseurs. Les recherches concernent de nouveaux
catalyseurs tels que AgNbO3, PbTuO3 et CuNbO3 avec un intérêt particulier apporté aux
aluminosolicates de zéolites (306)
Facteurs de succès
Forces Opportunités
- Utilisation de l’énergie solaire (photons) - Possibilité de fédérer des groupes de travail
sur le sujet et d’associer des laboratoires
- Etudes réalisées sur la photocatalyse de l’eau
- Regrouper les recherches et travaux avec
- Bonnes connaissances en bio-engineering ceux de la photocatalyse de l’eau
Inconvénients
Les principaux inconvénients repérés à ce jour sont le coût des matériaux, la durabilité des systèmes
établis et l’utilisation de catalyseurs potentiellement polluants. De plus, un faible nombre de
programmes de recherche est consacré à cette voie.
Aucune menace n’a pour l’instant été identifiée, que ce soit au niveau réglementaire ou de
l’acceptabilité sociale d’un tel projet.
Principe
La thermolyse directe du CO2 consiste en la décomposition de la molécule par la chaleur, selon la
réaction suivante : CO2 -> CO + ½ O2 avec ∆G = 0 à 3350 K. Cette décomposition directe est
possible thermodynamiquement à très haute température, ce qui rend sa mise en œuvre difficile à
grande échelle.
Afin d’abaisser la température de façon importante, le procédé développé repose sur l’utilisation d’un
matériau intermédiaire, généralement un oxyde métallique, ayant la propriété de se réduire et libérer
un atome d’oxygène sous l’action de la chaleur, et de s’oxyder et capter un atome d’oxygène à plus
basse température.
Le procédé, cyclique, s’articule donc en deux étapes : réduction du matériau redox à haute
température, et oxydation à plus faible température de ce matériau au contact du CO 2 (ou de l’eau)
qui va alors se dissocier.
L'oxyde métallique est ensuite recyclé dans l'étape 1, donc il n'est pas consommé dans le procédé. La
source d’énergie solaire et le CO2 sont les seules entrées au procédé, CO et O2 sont les uniques
produits. La chaleur requise pour la réduction thermique est fournie par des centrales solaires à
concentration.
Une production séparée de CO et O2 est ainsi obtenue, ce qui écarte le risque de recombinaison et
évite une étape coûteuse de séparation gazeuse. En couplant ce mécanisme de dissociation du CO 2
à 2 étapes avec la dissociation de l’eau, on obtient un mélange H 2/CO, gaz de synthèse précurseur
pour la synthèse de méthanol et de différents combustibles liquides (réactions Fischer-Tropsch) (308).
Le procédé global qui convertit l’eau et le CO 2 en combustible solaire, équivaut donc à inverser le
processus de combustion habituel, autrement appelé « combustion inverse », fermant ainsi le cycle du
carbone (308) :
xCO2 + (x+1) H2O + énergie solaire -> CxH2x+2 (carburant liquide) + (1,5x + 0,5) O 2
Les installations solaires à concentration possibles pour réaliser la décomposition du CO2 sont les
fours solaires, les paraboles et les centrales à tour. Quant aux systèmes cylindro paraboliques ou
Fresnel, les températures obtenues ne sont pas assez élevées pour permettre la thermolyse du CO2
(311).
Les rayons solaires sont captés par une première série de miroirs orientables (champ d’héliostats).
Les rayons sont ensuite réfléchis vers un concentrateur parabolique à foyer fixe. Les rayons
convergent donc vers une cible circulaire au foyer (312).
Grâce à ce système, des températures supérieures à 3 000 °C peuvent être obtenues en quelques
secondes en fonction des propriétés du matériau exposé. Les réactions thermochimiques étudiées
nécessitent généralement des températures comprises entre 1000 et 1800 °C.
Les rayons solaires peuvent aussi être concentrés grâce au système des tours solaires. Dans ce cas,
le rayonnement est directement concentré sur un récepteur fixe situé en haut d’une tour par des
miroirs mobiles, les « héliostats » (Cf. Figure 74).
Comme expliqué précédemment, un cycle thermochimique consiste à utiliser un matériau qui se réduit
spontanément à hautes températures. Ce même matériau est ensuite réoxydé au contact de l’eau ou
du CO2 pour former respectivement de l’hydrogène ou du CO.
Les chercheurs s’intéressent aux différents matériaux utilisables pour cette application. Par exemple,
les cycles à base d’oxydes de zinc ou d’étain sont étudiés.
Applications
Combiné à de l'eau et moyennant un apport d'énergie solaire adéquat, le CO2 peut être converti en un
mélange de monoxyde de carbone (CO) et d'hydrogène (H 2), appelé syngas, à partir duquel il est
possible de fabriquer, grâce au procédé Fischer-Tropsch, des hydrocarbures à chaîne longue
utilisables dans les moteurs classiques. Le procédé permet un stockage de l’énergie solaire sous
forme chimique, de l’ordre de 283 kJ/mol CO2 (308).
Des études sont actuellement menées sur l'influence de la concentration en CO2. Utiliser du CO2 issu
de fumées industrielles est envisagé pour ce procédé. Les expériences sont effectuées pour des
teneurs en CO2 comprises entre 10 et 100%. Plus le gaz entrant est concentré en CO 2, plus les
réactions s’effectuent rapidement (311).
Cycles thermochimiques
Les cycles sont la voie thermochimique privilégiée, puisque les températures de réactions sont
diminuées par rapport à la thermolyse directe. De plus, ils représentent la voie idéale d'utilisation de
l'énergie solaire. En effet, il n'y a pas besoin d'apporter de l'hydrogène au procédé de conversion du
CO2, ni d’utiliser des hydrocarbures fossiles (311).
Les couples les plus étudiés pour les dissociations de l’eau et du CO2 sont ceux du zinc (ZnO/Zn), de
l'étain (SnO2/SnO), du fer (Fe3O4/FeO), et de la cérine (CeO2/CeO2-). A chaque couple sont
associées des caractéristiques spécifiques qui nécessitent le développement de technologies de
réacteurs solaires différentes (injection continue des produits, extraction des produits, modes de
transfert de l’énergie aux réactifs,…). Au niveau du site français (PROMES, Odeillo), ces différents
cycles thermochimiques sont étudiés (311) (313).
Les deux étapes (réduction de l’oxyde et ré-oxydation par CO2) doivent s’effectuer généralement dans
deux réacteurs différents (excepté pour le cas des oxydes mixtes qui présentent des réactions en
phase solide), les températures optimales n’étant pas les mêmes. La première étape se réalise en
absence d’oxygène afin de favoriser la réaction de réduction. Les températures les plus appropriées
pour ces cycles sont de l’ordre de 1200-1700 °C. Ces températures impliquent des enjeux concernant
la résistance et la durabilité des matériaux utilisés dans la construction des réacteurs solaires
(récepteur et chambre de réaction) (30).
Les cycles thermochimiques font l’objet de nombreuses recherches, présentant des opportunités de
développement à grande échelle.
Recherches actuelles
Coût
Le coût du gaz produit est en grande partie lié au coût d’investissements initiaux. Le système optique
(miroirs) représente 50 % du coût global d’investissement. Les 50 % restants sont liés aux autres
équipements et infrastructures (tour, réacteurs, pompes, compresseurs, échangeurs, etc.) (311).
Les coûts des installations sont identiques à ceux des centrales solaires à tour et le coût des
composants solaires devraient diminuer quand l'échelle augmentera (effet d’échelle et production de
masse).
La dissociation thermochimique solaire du CO2 pourrait être rentable à l’avenir car non dépendante de
l’utilisation des hydrocarbures fossiles. L'objectif est de produire des combustibles de synthèse
(molécules à haute valeur ajoutée) à partir de CO2 et H2O et d’une source d’énergie renouvelable.
Aujourd’hui, le prix de revient par thermochimie des carburants solaires est 3 à 4 fois plus cher que le
prix des combustibles actuels produits à partir d’hydrocarbures fossiles. La voie thermochimique est
économiquement compétitive par rapport à l’électrolyse utilisant une source d’électricité produite par
voie solaire (PV ou CSP).
La thermolyse du CO2 étant au stade recherche, le bilan environnemental de cette technologie n'a pas
encore été réalisé (311).
Efficacité énergétique
Le rendement énergétique global de conversion de l'énergie solaire en gaz de synthèse est d'environ
45%. On peut comparer ce rendement avec celui de l'électrolyse réalisée avec une électricité produite
avec de l'énergie solaire, qui est de l'ordre de 20% (conversion chaleur-électricité solaire 25% ×
rendement électrolyse 80%) (311).
Les principaux pays impliqués dans le développement de la thermochimie solaire sont les Etats-Unis,
la Suisse, l’Espagne, l’Allemagne et la France. Les installations solaires sont encore peu nombreuses
à travers le monde. Plusieurs projets de thermochimie concernent la production d’hydrogène.
Quelques industriels sont impliqués dans le développement de la thermochimie (311).
En France, aucun projet de construction et/ou d’agrandissement n'est prévu à ce jour. L'objectif est
d'aboutir (dès que possible) à la création d'un pilote (311).
o Centrale électrique solaire à tour PS20 du groupe espagnol Abengoa (Séville, Espagne)
(316)
En 2009, une centrale solaire à tour d’une capacité de 20 MW a été installée en Espagne près de
Séville par le groupe Abengoa. La tour d’une hauteur de 165 m est entourée de 1255 miroirs de 120
m² chacun. La puissance produite est équivalente à la consommation électrique de 10 000 logements.
Grâce à ce dispositif, la production électrique permet d’éviter le rejet 12 000 tonnes de CO2 par an.
La tour PS20 est dans la continuité d’un projet andalou et de la tour PS10 d’une capacité de 10 MW.
Principaux acteurs
- L’institut de recherche solaire (DLR) en Allemagne a construit une tour solaire pilote d’une
puissance de 100 kW destiné à la production d’hydrogène sur son site de Jülich. Les
réactions thermochimiques du CO2 ne font pas l’objet d’étude particulière à ce jour (319).
Programmes de recherche
Le projet européen « Solar Facilities for the European Research Area » (SFERA) a pour
objectif de permettre aux chercheurs européens de travailler dans les installations solaires
des pays partenaires (323).
Le projet européen SolLab consiste en une collaboration entre les principaux organismes de
recherche européens depuis octobre 2004. Les membres de SolLab sont le laboratoire
allemand DLR, le laboratoire espagnol en charge de la plateforme d’Almeria en Espagne
(Centro de Investigaciones Energéticas, Medioambientales y Tecnológicas), l’institut Paul
Scherrer en Suisse et le laboratoire français PROMES (324).
Un projet européen SOLHYCARB (2006 à 2010) coordonné par PROMES a porté sur le
craquage thermique du méthane par voie solaire pour la production d’hydrogène et de noir de
carbone (CH4C+2H2). Un réacteur pilote de démonstration (50 kW) a été développé au
cours du projet.
Facteurs de succès
La dissociation thermochimque du CO2 est un procédé utilisant l’énergie solaire comme source de
chaleur des réactions à haute température. Les émissions directes de CO 2 sont nulles, le procédé
permet de valoriser du CO2 ; le bilan carbone est donc favorable. De plus, cette technique permet de
stocker l’énergie solaire sous forme de vecteurs énergétiques (283 kJ/mol CO 2). Enfin, les cycles
thermochimiques représentent une opportunité de développer différents types de matériaux qui
demandent des températures moins élevées pour la dissociation du CO2.
Les coûts opérationnels et de maintenance sont faibles en comparaison avec d’autres techniques.
Forces Opportunités
- Utilisation de l’énergie solaire sans autre - Savoir-faire français pour la thermochimie
apport d’énergie externe
- Fours solaires d’Odeillo (de 2kW à 1MW)
- Emissions directes de CO2 nulles
- Collaboration avec d’autres laboratoires
- Nouvelle filière pour la synthèse de européens
combustibles variés
- Zones désertiques disponibles (conditions
- Coûts opérationnels faibles d’ensoleillement idéales)
Inconvénients
Les cycles thermochimiques du CO2 présentent quelques inconvénients liés aux températures
élevées du procédé et au dimensionnement de l’installation. Tout d’abord, les matériaux doivent être
stables à haute température. La durabilité des matériaux est un point de recherche actuel. De plus,
ces installations sont très grandes, et nécessitent donc de la surface disponible pour les implanter.
Les conditions d’ensoleillement sont aussi à prendre en compte.
Les risques associés à cette technologie sont faibles d’après les experts. En effet, les zones pour
implanter ces installations sont préférentiellement des endroits désertiques, ne comportant ni
habitation ni végétation. De plus, aucune nuisance n'est occasionnée (pas de bruit, pas de pollution).
Principe
Les algues et microalgues sont des organismes qui réalisent la photosynthèse pour leur croissance.
Les processus mis en jeu lors de la photosynthèse et en présence de lumière se résument via
l’équation suivante : 6 CO2 + 6 H2O ---> C6H12O6 + 6 O2.
Grâce à leur activité photosynthétique, les algues peuvent être utilisées dans le but de capter et
valoriser le CO2. La biomasse générée par ce processus est de grand intérêt pour les filières
alimentaire, pharmaceutique… mais aussi potentiellement pour celle des algocarburants. Les produits
à forte valeur ajoutée issus de la photosynthèse sont par exemple des protéines, des lipides et de la
cellulose.
Le recours aux algues s’explique par leur rendement de conversion de l’énergie solaire compris en
moyenne entre 2 et 8 %. Ce rendement est meilleur que pour la plupart des autres végétaux. La
Figure 76 illustre le bon positionnement des technologies faisant appel aux algues, en systèmes
ouverts (raceways) et en systèmes fermés dits photobioréacteurs quant à la production.
En plus d’un meilleur rendement de production, la culture d’algues a l’avantage de ne pas mobiliser
des terres agricoles et donc de ne pas rentrer en concurrence avec le secteur alimentaire. Il s’agit
d’un atout majeur par rapport aux cultures terrestres non alimentaires utilisées pour la production des
biocarburants de première génération dont le déploiement se retrouve limité et confronté à une
problématique d’acceptabilité sociale.
Dans l’algoculture, des espèces à la fois d’eau douce et d’eau de mer peuvent être exploitées. Les
cultures avec l’eau de mer ont pour avantages de ne pas consommer de l’eau douce et potable, de ne
pas concurrencer les besoins de l’agriculture et d’occuper des terres aux faibles potentialités
agricoles. De ce fait, certaines zones côtières seraient privilégiées pour la culture de microalgues
marines.
Production de microalgues
Récolte de la biomasse
Procédé de séparation
Valorisation énergétique
Biocarburant Chimie fine Création de coproduits
Utilisations industrielles Alimentation animale
Les possibilités d’exploitation des algues et les filières envisageables sont diverses. En effet, il
existerait entre 100 000 et des millions d’espèces algales. Environ 40 000 sont connues et seule une
vingtaine est exploitée à ce jour (328).
La composition de la biomasse algale (teneurs en protéines, lipides et glucides) dépend du type de
microalgues utilisées. Diverses applications de la récolte microalgale sont envisageables :
Production de biocarburants
Les microalgues peuvent servir en tant que précurseurs de biodiesel et éthanol, on parle alors de
ème
biocarburants de 3 génération. Pour cette filière, les algues produites doivent présenter un fort taux
de lipides (pour la production de biodiesel) ou de sucres (pour la production de bioéthanol). Le
potentiel de développement du marché des algocarburants est très élevé à ce jour, bien qu’éloigné, et
implique de nombreux acteurs (entreprises et laboratoires).
Les applications les plus développées sont les utilisations industrielles / chimie fine ainsi que
l’alimentation humaine et animale. Les principaux potentiels de croissance identifiés concernent la
production d’algocarburants, la production de biogaz et l’alimentation. Le Tableau 37 résume les
applications des algues et les perspectives d’évolution des différentes filières.
L’INRA a étudié les différents marchés, en distinguant les marchés de niche (petits volumes) à ceux
de masse (volumes importants) en Figure 78. Les chercheurs se sont intéressés au temps d’accès sur
le marché, c’est-à-dire la période avant la commercialisation des produits concernés (330).
Figure 78 : Présentation des différentes applications des algues en croissance et leur temps d’accès
au marché (330)
Concernant les prix des produits des différents marchés, ils sont inversement proportionnels au
volume produit. La Figure 79 illustre cette relation prix de la molécule / volume produit ainsi que le
positionnement actuel de l’algoculture.
Figure 79 : Positionnement des différents marchés, leur prix de vente et le volume produit par
filière (331)
En France, ce sont principalement les zones sud-est et ouest du pays concernées par la culture
d’algues (Cf. Figure 82).
Figure 82 : Les laboratoires de recherche et les entreprises travaillant sur la culture d'algues en
France (Source : Sophie Litzler, 2011)
Pour plus d’exhaustivité, un état de l’art de la filière algues et de ses procédés est disponible dans le
Livre Turquoise « Algues, filières du futur », rédigé par Julie Person et édité par Adebiotech (329).
Avec l’aimable relecture de Jean Paul CADORET, Laboratoire Physiologie et Biotechnologie des
Algues - IFREMER (Nantes)
Pour cultiver les microalgues, deux systèmes existent : les systèmes de bassins ouverts et les
systèmes fermés appelés les photobioréacteurs. Cette partie a pour objet la présentation des
systèmes de culture de microalgues en bassins ouverts « raceway ».
De manière générale, les bassins ouverts ont des coûts d’investissement et de fonctionnement
moindres que ceux des photobioréacteurs (systèmes fermés). En revanche, les bassins ouverts sont
plus sensibles aux contaminations et sont davantage appropriés aux espèces d’algues à fort taux de
croissance et/ou résilientes aux perturbations, que les photobioréacteurs.
Les bassins ouverts semblent être la technique privilégiée dans le cas du traitement des eaux usées
en comparaison avec les systèmes fermés. Dans ce cas, l’objectif est de capter par les microalgues
les nutriments inorganiques voire organiques présents dans ces effluents. La biomasse ainsi produite
peut ensuite être valorisée (Figure 77). Toutefois, traiter de telles eaux chargées comporte comme
enjeux le contrôle des paramètres et le contrôle des espèces s’y développant. Ces aspects
techniques doivent encore être améliorés (333).
Les cultures en bassins ouverts peuvent tout aussi bien utiliser une souche sélectionnée ou un
ensemble de souches :
Les cultures monospécifiques utilisent des souches sélectionnées, qui, afin d’éviter toute
contamination extérieure, sont spécifiques à un environnement. Certaines sont adaptées à
des conditions de salinité élevées, d’autres à des pH élevés, d’autres à des températures très
basses…
Les cultures multispécifiques ou biocénoses (plusieurs souches vivantes qui forment un
écosystème) se reproduisent en suivant la sélection naturelle des espèces. Ce système
permet l’évolution des espèces en fonction des conditions extérieures et la mise en place d’un
équilibre naturel. Ce mode de culture minimise le nombre d’étapes de culture et les coûts de
production des algues.
La culture de microalgues en bassins ouverts s’est développée car les technologies sont simples et
les coûts moindres par rapport aux cultures en réacteurs fermés. Néanmoins, la productivité des
algues est limitée et les retours d’expériences de cultures à grande échelle de microalgues pour la
production de biocarburants sont encore peu nombreux.
Les essais réalisés en Israël à Ashkelon à partir de gaz désulfuré d’aciérie montrent que les
rendements de production sont meilleurs avec le CO2 issu des fumées industrielles qu’avec du CO 2
pur.
La qualité du CO2 entrant dépend donc du produit final souhaité et de son usage. En effet, les normes
sont différentes pour la production d’algocarburants et pour la fabrication de produits alimentaires,
cosmétiques, ou pharmaceutiques. Les impuretés dans la biomasse récoltée empêcheraient la
commercialisation des algues pour les débouchés agroalimentaires.
Quantité
Le volume de CO2 valorisable par les cultures de microalgues en bassins ouverts est limité par les
-1
surfaces disponibles. En effet, les faibles ratios surface / volume compris entre 1 et 8 m
impliquent de grandes surfaces pour une production importante. De plus, il s’agit d’une culture
dépendante de sa localisation. Les disponibilités en grande quantité d’eau, facteurs évaporation de
l’eau, quantités de précipitations (diluant les milieux de culture), taux d’humidité … sont à considérer
avant toute implantation de ces bassins sur une zone.
L’apport de CO2 doit être réalisé de manière non limitante pour ne pas affecter la croissance des
algues. L’apport doit se faire tout au long de la culture. Les besoins en CO2 nécessaires pour la
croissance des algues en bassins ouverts sont d’environ 1,8 à 2 grammes CO2 par gramme de
biomasse microalgale sèche (336).
Conditionnement
La concentration en CO2 dans l’air ne suffit pas pour une culture intensive d’algues. Un ajout de CO 2
concentré est nécessaire, et pour cela plusieurs facteurs sont à prendre en compte. Ces facteurs
déterminent l’efficacité de fixation du CO2 par les algues sous forme de carbone organique. Tout
d’abord, la méthode d’apport de CO2 doit en limiter les pertes vers l’atmosphère au-dessus du bassin.
Il est ensuite nécessaire d’étudier l’efficacité de dissolution du CO 2 dans l’eau. L’apport de CO2 à la
culture se fait sous forme dissoute (sels de bicarbonate) ou sous forme de bulles. La méthode la
plus utilisée semble être l’apport sous forme de bulles. La quantité de CO 2 à apporter est calculée en
estimant au préalable les pertes selon les conditions d’opération (333).
De manière générale, la technologie de cultures de microalgues en bassins ouverts est bien connue
(stade industriel) et les acteurs voient peu d’axes d’amélioration.
Des voies d’améliorations de la productivité sont à l’étude, par des modifications génétiques, une
optimisation de l’énergie solaire et le contrôle facilité des conditions de culture. D’autres points sont
importants lors de la culture en bassins ouverts : les étapes de récolte et d’extraction ainsi que le
risque de contamination. Cependant, les recherches sont davantage tournées à ce jour vers le
développement des systèmes fermés.
Eau Eaux
591 kg
3 726 kg (si recyclage)
Azote Biodiesel
0,33 kg 1 kg
Phosphate
0,71 kg Productivité moyenne : 30g/m²/jour
Figure 84 : Intrants et quantités nécessaires pour produire un kilogramme de biodiesel par culture
de microalgues en bassins ouverts (Synthèse APESA) (93) (31)
Productivité (30)
Le choix des souches est essentiel pour la productivité de la récolte et pour sa composition (teneur en
lipides, protéines et cellulose). Rappelons que la composition des algues varie selon la souche utilisée
et selon son état physiologique. Les applications peuvent alors être différentes.
Le choix d’un mode de culture monospécifique permet d’orienter la production des microalgues vers
un type de produit donné. L’utilisation d’une biocénose (culture multispécifique) présente l’avantage
d’assurer une production de biomasse tout le long de l’année mais la composition obtenue est
variable : prévoir les teneurs obtenues est plus compliqué.
Pour la production d’algocarburants à grande échelle, il est très important de sélectionner des
souches riches en lipides (ou en sucre) et de comprendre les modes de culture favorables. De
nombreux laboratoires et sociétés travaillent encore sur la sélection des souches apportant la
meilleure rentabilité économique au système, tout en garantissant une technologie reproductible à
grande échelle.
Plusieurs entreprises, notamment aux Etats-Unis, en Israël, ou en France (Société Algenics),
travaillent actuellement sur le développement de microalgues génétiquement modifiées. L’intérêt
est de sélectionner les souches les plus intéressantes et d’optimiser leur productivité (338) (339).
L’étape de récolte
Concernant la récolte des microalgues cultivées en bassins ouverts, la centrifugation est la méthode
la plus utilisée pour les applications pharmaceutiques, alimentaires et cosmétiques. Les coûts de
centrifugation sont élevés. De ce fait, la floculation et la filtration sont deux autres techniques pour la
récolte de la biomasse. Elles sont moins coûteuses puisqu’elles nécessitent moins d’énergie. Elles
sont cependant plus lentes.
Globalement, la phase de récolte de la biomasse microalgale est toujours à l’étude. Les acteurs
souhaiteraient diminuer la consommation en énergie afin d’améliorer la rentabilité de cette culture
(336).
Afin d’extraire les molécules d’intérêt, deux solutions sont possibles : l’extraction sèche suivie par une
extraction à l’hexane ou l’extraction directe qui conduit à l’obtention d’une « boue » d’algues. Suivant
la méthode d’extraction choisie, les besoins en séchage sont plus ou moins importants.
L’étape de séchage a un coût élevé puisque les volumes de microalgues à sécher contiennent près
de 99% d’eau. Dans les bassins ouverts, les concentrations en biomasse sont faibles (entre 0,1 et 0,5
g/L), cela rend l’étape de séchage d’autant plus énergivore et coûteuse.
Au sein des bassins et des réacteurs, des bactéries et d’autres microorganismes peuvent envahir
rapidement le système et créer une prédation (ciliés) ou une compétition (substrat) ; il est alors
nécessaire de lutter contre ces éléments indésirables. On considère que les bassins ouverts avec
lumière solaire sont soumis à un risque de contamination très élevé. Ce risque, plus important
qu’en réacteurs fermés, inclus l’invasion d’espèces de microalgues locales ou de prédateurs
zooplanctoniques. Pour limiter les risques de contamination, il est préférable d’assurer un bon
mélange du système en évitant la création de zones mortes et en privilégiant les surfaces planes et
lisses. En cas d’apparition de mousses, l’utilisation d’un antimousse biocompatible est possible.
Les coûts d’investissement élevés des bassins ouverts s’expliquent par la mise en place d’installations
nécessaires pour la récolte et pour l’apport en CO 2. Selon les équipements choisis et la localisation, le
coût total d’investissement est compris entre 9,5 et 27 €/m². Cet ordre de grandeur est confirmé par
une étude menée pour GrDF qui évalue le coût d’investissement entre 10 et 40 €/m².
Les postes de fonctionnement les plus coûteux sont les apports de fertilisants et de CO 2 ainsi que les
dépenses énergétiques liées aux étapes de récolte et d’extraction de la biomasse. Ces coûts peuvent
atteindre jusqu’à 20 à 30 % des coûts totaux de production des algues. Pour la récolte, le recours à
des systèmes de microflottation plutôt que l’utilisation de la centrifugation peut faire baisser les coûts
d’un facteur 10. Ces coûts opérationnels peuvent aussi dépendre de la souche d’algues exploitée
ainsi que l’échelle de production considérée (30).
En 2012, une étude sur le coût et le bilan énergétique des cultures de microalgues estime que dans
un système ouvert idéal de type raceway, la production d’un kilogramme de biomasse
microalgale revient entre 1,6 à 1,8 €. Les coûts espérés dans un futur proche sont de 0,3 à 0,4 € par
kilogramme d’algues produit. Les coûts actuels pourraient être réduits de 50 % si l’eau, le CO 2 et les
nutriments nécessaires à la culture étaient obtenus à des coûts faibles.
Les coûts annoncés par l’usine à Ashkelon sont les plus faibles. En effet, le procédé utilise du CO 2
issu de fumées industrielles et de l’eau de mer gratuite. La fumée industrielle est source d’azote,
limitant ainsi les coûts en fertilisants. Dans ce projet, les algues sont ensuite exploitées dans
plusieurs filières : alimentaire et production de biocarburant. Les coûts sont évalués à 0,26 euro
par kg de biomasse (30).
Rentabilité économique
Les différentes études réalisées concernant la rentabilité économique montrent à ce jour que les
applications en chimie fine sont rentables ce qui n’est pas le cas de la production d’algocarburant
(336). Pour lever le verrou économique et permettre l’industrialisation de la filière algocarburant, il est
attendu une avancée importante de la technologie établie et une optimisation du procédé afin de
baisser considérablement le coût énergétique (341). Certains acteurs pensent qu’une aide à travers
des subventions à la filière et une hausse du prix du pétrole brut permettraient définitivement que la
filière de production d’algocarburants soit rentable.
Résultats d’ACV
Dans le cadre du projet Symbiose, une analyse de cycle de vie a été réalisée pour la production de
biogaz à partir de microalgues. La Figure 85 présente les résultats de l’ACV (343).
Une autre ACV s’est attachée à comparer deux méthodes de récupération et d’extraction de la
biomasse d’intérêt qui sont le filtre presse et la centrifugation. L’unité fonctionnelle de comparaison
est la production de 1 000 MJ, énergie équivalente à 24 kg d’algocarburant. L’étude s’est
principalement intéressée au calcul de l’énergie nécessaire pour ce procédé et aux émissions de CO2,
correspondant aux différents postes d’ingénierie. Les conclusions de ce projet sont que la demande
en énergie est importante, et qu’il y a nécessité de nouvelles technologies pour rendre cette technique
plus viable économiquement et techniquement (344).
Les différentes ACV consultées aboutissent aux mêmes conclusions : la consommation d’énergie
est aujourd’hui le problème principal lié à la culture de microalgues.
Enjeux environnementaux
Le bilan environnemental des bassins ouverts de type « raceway » soulève deux principales
problématiques : la demande importante en eau pour ce procédé et la consommation élevée
d’énergie externe sur les postes d’ingénierie. Les autres impacts environnementaux semblent
secondaires.
Eau
Le besoin en eau de la culture de microalgues est un impact majeur de cette production. Les algues
sont composées à 99% d’eau, qui doit être évaporée par la suite pour ne récupérer que la biomasse
sèche. Pour les cultures en bassins ouverts, l’eau de culture ne peut être que partiellement recyclée
(337).
Dans les systèmes ouverts, une partie de l’eau est perdue par évaporation. Dans le contexte
méditerranéen, par exemple, les pertes d’eau ont été estimées à 300 mm par an (345). L’évaporation
Nutriments et fertilisants
Catalyseurs et solvants
Lors des étapes d’extraction et de transformation, des catalyseurs et solvants sont utilisés. Ces
derniers peuvent être toxiques pour l’environnement et représenter l’impact principal de ce type de
culture.
Déchets
La culture de microalgues génère une faible proportion de déchets. Il semble que tous peuvent être
recyclés vers les filières appropriées. Les experts travaillant sur ce sujet essaient de valoriser la
totalité de la culture.
Odeurs
L’installation de bassins ouverts peut être source d’odeurs pour la population locale. En fonction des
souches choisies, de la localisation et du dimensionnement, ce paramètre est à prendre ou non en
compte.
Les bassins ouverts nécessitent une grande surface disponible au sol, contrairement aux réacteurs
fermés. De ce fait, ils peuvent occuper des espaces naturels et impacter l’environnement local
(espèces animales et végétales, bruit, odeur,…). La mise en place de tels bassins sur plusieurs
centaines de m² peut impacter de manière très négative l’écosystème de la zone d’implantation. De
plus, la réalisation du bilan carbone de l’installation est conseillée, notamment en cas de destruction
de zones naturelles végétalisées.
La création de ces bassins ouverts est à privilégier sur des terres difficilement cultivables, et en zones
de reconversion industrielle. Cette production de microalgues permettrait de redonner une activité à la
zone et de valoriser des terrains industriels et/ou non occupés.
Bilan carbone
Les résultats de l’ACV montrent que les principaux postes émetteurs de CO2 sont les postes
d’ingénierie tels que la récolte (96%), la séparation (2%) et la conversion des algues en produits
d’intérêt (1,4%) (344).
Etude d’impact
Pour la construction d’une installation de ce type en France, la réalisation d’une étude d’impact et
d’une étude des risques est obligatoire. Ces études sont alors adaptées à la localisation du site, aux
choix de production, aux objectifs fixés et à chaque étape du procédé. D’autres impacts
environnementaux peuvent alors être identifiés.
Efficacité énergétique
Les différents acteurs mettent en avant que la consommation énergétique externe est limitée dans la
mesure où les microalgues captent l’énergie lumineuse. Cependant, plusieurs étapes d’ingénierie et
de fonctionnement nécessitent des énergies fossiles, émettrices de CO 2 (336).
Les besoins en énergie sont notamment importants lors du pompage de l’eau, de la récolte, du
séchage, de l’extraction et du transport des matières. A ce jour, la demande en énergie externe est
encore trop élevée pour rentabiliser le procédé. Plusieurs études comparent l’énergie consommée au
cours du cycle de vie du procédé et les quantités d’énergie tirées de la biomasse algale. La diminution
de cette demande en énergie rendrait le procédé viable à long terme (337) (344) (336) (334).
D’après une étude d’Analyse de cycle de vie réalisée sous différentes conditions, la production d’1 MJ
de biocarburant nécessite entre 1,6 et 5,5 MJ d’énergie. L’énergie obtenue par les coproduits s’évalue
entre 0,5 et 3 MJ (345).
L’énergie nécessaire pour la mise en circulation des fluides représente entre 22 et 79 % de l’énergie
totale requise. Pour les postes « construction » et « obtention de fertilisants », les besoins
énergétiques se situent respectivement entre 8 à 70 % et entre 6 à 40 % de l’énergie totale requise
(341).
Les quelques résultats d’efficacité énergétique montrent qu’un kilogramme d’algocarburant représente
de 40 MJ d’énergie (345) à 41,7 MJ (344).
La Figure 87 illustre les besoins en énergie (MJ) pour les différentes étapes du procédé. Cette étude a
été réalisée dans le cadre d’une ACV comparative entre deux méthodes de récupération de la
biomasse microalgale : la centrifugation ou le filtre presse (344).
La Figure 88 présente les résultats ci-dessus via la répartition de la consommation d’énergie selon les
postes, quand le procédé de filtre presse est utilisé.
Figure 88 : Répartition des dépenses d'énergie du procédé (recours au filtre presse) (344)
A ce jour, l’efficacité énergétique optimale du procédé n’est pas atteinte. La consommation d’énergie
est trop élevée. Pour l’obtention d’un système énergétique positif, il faudrait une avancée
technologique importante sur le procédé et une optimisation des systèmes de production (341).
D’une manière générale, il est établi que la construction et le fonctionnement d’un système ouvert
nécessitent environ 1/3 d’énergie en moins que pour les photobioréacteurs (341).
Les cultures en bassins ouverts sont déjà bien développées pour la production de molécules à haute
valeur ajoutée. De ce fait, de nombreux organismes sont déjà compétents dans ce domaine.
Actuellement, les acteurs de ce secteur cherchent à industrialiser et rentabiliser le procédé pour la
production d’algocarburants (336).
Les travaux sur les microalgues pour la production de biocarburants se sont multipliés ces dernières
années. Les pays les plus concernés sont ceux ayant les conditions propices au développement de
cette technologie, c’est-à-dire les pays ensoleillés. Les principaux projets de bassins ouverts sont
situés aujourd’hui aux Etats-Unis et en Israël.
Retours d’expériences
En Israël (338)
Ce pays est très actif pour la production de produits à haute valeur ajoutée et d’algocarburants.
Plusieurs pilotes ont été réalisés en Israël et certaines entreprises du pays ont un rôle majeur dans la
culture d’algues à travers le monde. Il s’agit de :
- TransAlgae : Cette société, fondée en 2008, est spécialisée dans le développement d’algues
transgéniques à destination de l’alimentation animale et de la production d’énergie. La
commercialisation d’algues en vue de nourrir les animaux permet de rentabiliser le procédé.
Seambiotic a initié un pilote en bassins ouverts à l’échelle préindustrielle avec du CO 2 issu des
cheminées de combustion à Ashkelon. Les gaz utilisés sont préalablement traités avec l’élimination
des composés soufrés (Tableau 38). Les rejets de CO2 de la cheminée sont évalués à 431 tonnes par
heure
Tableau 38 : Composition du gaz en sortie de la cheminée traité par des algues (30)
3
CO2 (%) O2 (%) SO2 (ppm) NOx (ppm) CO (mg / Nm )
13,30 4,7 – 5,12 56 – 70 190 - 200 250
(504 avant traitement)
Ce pilote utilise des souches auto-sélectives au contact des gaz de fumées et en fonction de la
saison. La productivité moyenne obtenue est de 20 g/m²/jour. Elle est variable en fonction des
saisons. La récolte est ensuite réalisée par floculation et filtration. Ces procédés sont moins
énergivores que la centrifugation. Les algues sont ensuite congelées et envoyées par bateaux aux
Etats-Unis. La société Inventure se charge d’extraire les lipides et la cellulose pour la production
d’algocarburant (30).
- Algaenesis : Localisé à Jérusalem, elle a mis au point une réduction du coût de production par un
système breveté de distribution de la lumière : les intensités lumineuses reçues par les algues sont
optimales à tout moment de la journée (338).
- Le projet SALINALGUE est porté par la Compagnie du Vent et d’autres partenaires de recherche
ou industriels depuis 2010. Il a pour objets l’étude en milieu ouvert de culture d’algues (Dunaliella
salina) sur des salines inexploitées et le bioraffinage pour des marchés de masse (énergie et/ou
alimentation animale). Une première phase pilote, étendue sur 1 000 m², est en cours de finition. Les
rendements de transfert gaz/liquide obtenus sont très bons (s’approchant des 100%) grâce à des
technologies très performantes. La mise en place d’un démonstrateur (1 ha) dès 2014, pour une
durée maximale de 2 ans, permettra d’identifier les molécules intéressantes ainsi que de valider la
faisabilité technique et la rentabilité économique. Il s’agit d’un projet complet puisqu’il associe une
étude des impacts environnementaux via la réalisation d’une Analyse de Cycle de Vie (ACV), une
réduction maximale des coûts et la valorisation intégrale de la microalgue. A l’avenir, une échelle
industrielle est envisageable grâce à la proximité d’une cimenterie émettrice de CO 2 (348) (349) (336).
- Le projet européen All-Gas a été lancé courant 2012 à l’initiative de l’entreprise espagnole de
gestion de l’eau Aqualia pour créer en Espagne un démonstrateur de culture de microalgues sur une
très grande superficie pour la production de biocarburants. Ce projet s’appuie sur l’utilisation et le
traitement des eaux usées pour la croissance microalgale. L’objectif est la production de
biocarburant équivalent à l’alimentation de 400 véhicules par jour (352) (353).
- Un autre projet européen EnAlgae est en cours dans le Nord-ouest de l’Europe. Ce projet implique
19 partenaires, 14 observateurs et 7 pays européens. L’objectif de ce programme est la réduction des
émissions de CO2 et de la dépendance aux carburants fossiles. Ce projet a débuté en mars 2011 et
devrait prendre fin le 30 juin 2015. Les études sont réalisées principalement sur des systèmes ouverts
de type raceway, néanmoins des systèmes fermés sont aussi concernés (354).
- En Allemagne, l’Institut de traitement des céréales (IVG, Brandebourg) est investi actuellement
dans plusieurs projets concernant les algues. Cet organisme de recherches est pionnier en Europe
pour les cultures d’algues et le développement de photobioréacteurs.
- Quant à l’amélioration génétique des algues, elle est au cœur du programme de recherche FP 7
GIAVAP (Genetic Improvement of Algae for Value Added Products) pour développer des applications
à forte valeur ajoutée (339).
Acteurs en France
Les zones littorales humides du sud en France (salines du midi) semblent être les zones les plus
propices au développement de la culture de microalgues en bassins ouverts. En effet, cette région
présente de grandes superficies disponibles pour lesquelles une reconversion des activités est en
cours de réalisation. La microalgue Dunaliella salina est présente de manière naturelle et en grande
quantité au niveau des salines du midi. Enfin, du CO2 est produit par les industries situées à proximité
(Fos-sur-Mer).
Concernant le projet SALINALGUE, les acteurs sont la Compagnie du Vent, le groupe GDF-Suez,
l’Institut Français pour l’Exploitation de la Mer (IFREMER), le Pôle Mer PACA et la région PACA.
En lien avec les avancées du projet SALINALGUE, un site d’expérimentation et de production serait
installé au niveau du bassin de Thau. La culture d’algues rouges sur les anciens salins est envisagé
d’ici 2015 suite aux tests réalisés sur des sites à proximité. Ce projet s’associe à celui de l’écosite de
Mèze, zone pour laquelle des bassins de lagunage destinés à la culture d’algues sont en cours de
réflexion (355).
Les territoires d’Outre-Mer sont aussi concernés par les projets de développement de culture
d’algues. Les conditions d’ensoleillement, de températures en font des lieux optimaux. A ce jour, les
potentialités sont étudiées sur l’île de la Réunion au niveau du site pénitentiaire du Port. Le projet est
la culture de microalgues sous serre photovoltaïque afin d’optimiser la productivité. La phase
pilote devrait être lancée en 2014. Ce projet est soutenu par l’Agence Régionale Energies Réunion
(ARER) (356). En Nouvelle Calédonie, Ifremer est associé à l'Adecal (Association pour le
développement de la Calédonie) pour créer une filière de production de microalgue. Ce projet prévoit
la création d'un laboratoire (déjà opérationnel) ainsi qu'un centre technique destiné à la montée en
puissance.
Un autre projet porté par l’Institut de traitement des céréales (IVG biotech), situé en Allemagne à
Brandebourg et soutenu par EADS, concerne l’Ile de la Réunion. Il s’agit de produire du biocarburant
à partir d’algues. Ce projet devrait être lancé au cours de l’année 2013.
Facteurs de succès
Les systèmes ouverts sont particulièrement adaptés pour le traitement des eaux usées par les algues
et pour l’utilisation d’eau de mer (installation en zone côtière).
Forces Opportunités
- Grande variété de microalgues disponible - Possibilité de croiser les intérêts des
industries agro-alimentaires avec l’énergie
- Utilisation de l’énergie solaire et le captage du CO2
- Développement industriel déjà réalisé pour les - Menace concernant la production de pétrole
molécules à haute valeur ajoutée brut au cours des prochaines décennies
(raréfaction de la ressource)
- Grandes entreprises impliquées
- Objectif de rentabilité du procédé pour 2020
- Association d’organismes aux compétences
diverses (génie des procédés, optique, algues) - Valorisation d’espaces disponibles
Inconvénients
Pour le développement à grande échelle de cette méthode de culture des microalgues, il existe une
menace concernant l’acceptabilité sociale du projet. En France, l’image des algues a été écornée
depuis les évènements de pollutions en Bretagne de ces dernières années. De plus, les installations à
bassins ouverts occupent une surface très importante et modifient le paysage. La population pourrait
s’opposer à ce genre de projets par crainte de l’aspect visuel, de l’odeur et des possibles rejets. Cette
opposition pourrait être d’autant plus forte en cas d’installation près de zones habitées.
Une autre menace concerne le développement des cultures d’organismes génétiquement modifiés.
En France, l’acceptabilité d’un tel projet associé à la culture de microalgues transgéniques serait
compliquée. Les OGM sont à ce jour interdits de culture sur le sol français. Il faudrait donc examiner
de près cette production de microalgues génétiquement modifiées et étudier les potentiels impacts
selon les futures applications.
D’un point de vue réglementaire, de nombreuses contraintes existent sur nos territoires avant
lancement de tout projet : études de sol, contrôles, gestion des flux, etc…
Avec l’aimable relecture de Jean Paul CADORET, Laboratoire Physiologie et Biotechnologie des
Algues - IFREMER (Nantes)
Pour cultiver les microalgues, deux systèmes existent : les systèmes de bassins ouverts et les
systèmes fermés appelés « photobioréacteurs ». Cette partie a pour objet de présenter ce second
système.
Les réacteurs tubulaires ont été beaucoup étudiés et sont à ce jour les plus utilisés. Ils sont composés
d’une série de tubes transparents, en plastique ou en verre. Ces tubes excédent rarement 10 cm de
diamètre car ils doivent permettre la pénétration des rayons solaires sur toute la largeur. Les
microalgues circulent dans ces tubes grâce à un système de pompe.
Les photobioréacteurs de type colonne à bulles sont des enceintes de conception simple, peu
coûteuses et avec une maintenance facilitée. Les algues sont mises en culture dans des colonnes
pour lesquelles du CO2 est incorporé en bas du dispositif. Le ratio surface/volume est très intéressant
et les bulles permettent un brassage efficace des microalgues. La complexité de cette méthode réside
dans la structure et la gestion des écoulements. Les colonnes à bulles sont aussi étudiées dans le
cadre de la production d’énergie renouvelable puisqu’en anaérobie (absence d’oxygène), certaines
algues sont capables de produire de l’hydrogène (358).
L’apport de CO2 doit être réalisé de manière non limitante pour ne pas affecter la croissance des
algues. La concentration atmosphérique en CO2, de l’ordre de 400 ppm, est par exemple insuffisante
pour ce procédé. L’apport doit se faire tout au long de la culture, sous forme gazeux ou sous forme de
carbonate liquide. En général, la technique du gazosiphon (airlift) est mise en place, permettant une
circulation et des échanges gazeux : l’oxygène est évacué du système alors que le CO 2 est incorporé.
La Figure 91 présente un schéma simplifié d’un gazosiphon (327).
Les besoins en CO2 nécessaires pour la croissance des algues sont de l’ordre de 1,65 à 1,83 g par
gramme de biomasse microalgale sèche.
De manière générale, la pureté du gaz utilisé n’est pas problématique pour la croissance des
microalgues. Au contraire, certains éléments que le gaz contient peuvent être utilisés comme
nutriments par les micro-organismes (335) (359).
Pour la technologie des photobioréacteurs, le choix des souches est important car il y a de
nombreuses sollicitations mécaniques. Les algues très fragiles ne peuvent donc pas être exploitées
dans un tel système. La fixation sur les parois au bout de 15 jours est aussi un critère de sélection des
souches. A ce jour, cette sélection est toujours un point de recherche. Seule une vingtaine d’espèces
est exploitée sur plusieurs milliers, les possibilités restent donc nombreuses.
Productivité
Le captage du CO2 par les microalgues en réacteur fermé est sensiblement similaire au captage du
CO2 en bassins ouverts. Pour produire 1 g de biomasse sèche, la culture nécessite 1,65 à 1,83 g de
Cette productivité peut encore être améliorée par l’intermédiaire de systèmes artificiels. Ces systèmes
utilisent des sources de lumière artificielle pour optimiser l’absorption de lumière ce qui entraine des
hausse de productivité de biomasse avec des concentrations dépassant les 10 g/L.
Grâce à une technologie « flash » d’apport de lumière particulier pour activer les chloroplastes, la
société Fermentalg annonce être arrivée jusqu’à 220 g MS/L dans ses pilotes. Ce niveau de
concentration entraîne des problèmes techniques pour les phases d’exploitation et de récoltes, ce qui
pousse l’industriel à travailler autour de 100 g MS/L (360).
En considérant une croissance moyenne des algues de 20 g/m²/jour, et 15% de matière sèche dans
3
ces organismes, on obtient une productivité de 12 m d’huile par hectare par an (361).
Oxygène (329)
Lors du processus de photosynthèse, de l’oxygène est produit. Or il s’agit d’un composé pouvant
affecter la croissance des microalgues. En effet, une concentration élevée d’oxygène dans le milieu
inhibe la réaction de photosynthèse avec pour conséquence de stopper la croissance des
organismes. L’oxygène doit donc être extrait des tubes et les cultures doivent passer par des zones
de dégazage. Dans cette étape, du CO2 doit être ajouté pour permettre d’ajuster le pH, qui augmente
à cause de la consommation de CO2 par les algues.
Au sein des bassins et des réacteurs, des bactéries et d’autres microorganismes peuvent envahir
31
rapidement le système et créer un biofilm , il est alors nécessaire de lutter contre ces éléments
indésirables. On considère pour les photobioréacteurs avec lumière solaire un risque de
contamination élevé (sauf pour les espèces extrêmophiles). Pour limiter les risques de contamination,
il est préférable d’assurer un bon mélange du système en évitant la création de zones mortes et en
privilégiant les surfaces planes et lisses. En cas d’apparition de mousses, l’utilisation d’un antimousse
biocompatible est possible.
Récolte de la biomasse
La récupération de la biomasse est une des étapes les plus coûteuses dans les procédés algaux. Par
conséquent, la sélection de la meilleure technologie pour cette étape est importante. La difficulté de la
séparation repose sur la petite taille des microalgues et sur la dilution des cellules dans l’eau. La
centrifugation est le mode de récupération le plus utilisé pour la production de produits à haute valeur
31
Un biofilm est une couche de microorganismes, contenus dans une matrice solide.
Cependant, la récupération de la biomasse est facilitée dans les réacteurs fermés, par rapport aux
bassins ouverts, car les concentrations en biomasse sont plus importantes.
Le stade industriel est en cours de franchissement avec la création de plusieurs usines et pilotes. Les
recherches sont actuellement centrées sur la production à grande échelle ainsi que l’amélioration de
la productivité et de la rentabilité. Pour cela, plusieurs possibilités sont à l’étude telle que la sélection
de souches plus performantes et permettant une productivité plus élevée.
Coût
Selon les techniques et les entreprises, le prix du litre d’algocarburant varie entre 1,5 et 10 euros. La
variabilité est donc très importante. Déterminer le coût reste compliqué compte tenu de la variété des
procédés, de la jeunesse de la filière et du manque de transparence sur les premiers résultats à
l’échelle industrielle.
D’après une étude menée pour Gaz réseau Distribution France (GrDF), le coût d’investissement des
photobioréacteurs est évalué entre 100 et 300 €/m² (340).
Les coûts opérationnels sont également importants et difficiles à évaluer. En effet, ces coûts
dépendent de plusieurs facteurs et de la méthode choisie. Les principaux facteurs intervenant dans
ces coûts sont les apports en eau, en fertilisants et en CO 2, la mise en circulation des fluides, la
récolte des produits, les postes de maintenance et de nettoyage, le système considéré pour
l’évacuation de l’oxygène ainsi que les systèmes de refroidissement utilisés (30).
D’après Bryan Wilson, fondateur de la société Solix BioFuels, le prix d’algocarburant assurant la
viabilité de la production est de 6 euros. Ce montant se situe dans la fourchette haute des coûts de
production en bassins ouverts (de 0,5 à 6 € / tMS d’après la FAO en 2010). A ce jour, il ne s’agit donc
pas d’une production entrant en compétition avec le carburant traditionnel, son prix étant trop élevé.
Du point de vue du traitement du CO2, le coût de valorisation d’une tonne de CO2 est estimé à 600 €
pour des systèmes fermés, le coût de production d’un GJ ayant été évalué à 153 € (363).
Néanmoins, la rentabilité économique est atteinte pour la fabrication de produits à haute valeur
ajoutée produits dans de petites unités. En effet, la tonne de produits tels que la β-carotène et des
acides gras de type omégas 3 se commercialise à hauteur de 100 000 €.
Des ACV sont en cours de réalisation et/ou en projet, par exemple au laboratoire GEPEA (335).
Certaines ont déjà été réalisées par différents acteurs mais les premiers résultats sont confidentiels.
L’utilisation de l’eau est l’un des impacts environnementaux les plus importants pour la culture des
microalgues. En effet, ces cultures sont composées à 99% d’eau qui doit ensuite être éliminée pour
récupérer la biomasse sèche. Dans le cas des photobioréacteurs, cette problématique est atténuée
car le risque d’évaporation de l’eau est nul et l’eau peut être recyclée dans le procédé.
Pour la culture d’algues, l’eau utilisée peut être celle provenant des eaux usées et de l’eau de mer
(eau salée). La consommation en eau potable ne représente donc pas un frein pour cette culture
(337).
Polluants
De nombreuses possibilités existent selon les méthodes choisies. Un solvant possible est le dioxyde
de carbone à l’état supercritique (-SC-CO2) en phase d’extraction. D’un point de vue environnemental,
ce dioxyde de carbone supercritique est non toxique, stable et facilement séparable des autres
produits.
Efficacité énergétique
Le bilan énergétique du processus étudié est complexe à réaliser, étant donné les nombreuses
possibilités concernant les modes de culture, les machines utilisées et les résultats souhaités.
De manière générale, les acteurs mettent en avant le fait que la consommation énergétique externe
est limitée dans la mesure où les microalgues captent l’énergie lumineuse. Cependant, des postes
d’ingénierie ainsi que la fabrication des fertilisants sont des étapes demandant un apport d’énergie
externe pour fonctionner correctement. Les postes nécessitant le plus d’énergie sont la récolte des
algues, la séparation, le transport et la conversion en biocarburant (344).
Les photobioréacteurs sont bien connus à petite échelle pour la production de molécules à Haute
Valeur Ajoutée (HVA) et même pour les biocarburants. De nombreuses entreprises pharmaceutiques
ou agroalimentaires ont de solides connaissances scientifiques sur ces technologies. En revanche, le
développement à grande échelle de biocarburants est émergent et différents acteurs s’y intéressent
ème
pour la production de biocarburants de 3 génération.
Dans le monde, les travaux sur les microalgues pour la production de biocarburants se sont multipliés
ces dernières années, surtout dans les pays ensoleillés, propices au développement de la
technologie. C’est le cas de l’Italie, de l’Espagne, d’Israël, du Japon, de l’Australie, de la Chine, de la
Corée et des Etats-Unis (30).
A ce jour, les pays les plus à la pointe de la technologie sont l’Australie, Israël et les Etats-Unis.
Les impacts environnementaux ont été pensés, de manière à les limiter au maximum. Pour cela, de
nombreuses études ont été préalablement effectuées (sol, air, eau, acceptabilité sociale, phase de
travaux, …). Les études prédisent une empreinte carbone inférieure de 80% à celle du combustible
traditionnel. La mise en service et les mois d’activité de la bioraffinerie devraient permettre la
publication de résultats prochainement (364).
o Aux Etats-Unis, BASF et SOLIX BioSystems ont signé fin 2010 un partenariat concernant
l’étude des potentialités liées aux cultures d’algues. L’objectif est de fabriquer des produits
spécifiques et des biocarburants. Très peu d’informations (financières ou technologiques) sont
communiquées autour de ce projet. Pour ce partenariat, SOLIX, entreprise américaine
spécialiste des technologies de culture des algues, testera différentes espèces via son
système propriétaire AGS pour BASF.
SOLIX possède aussi à Durango dans le Colorado une unité pilote pour la production de
biocarburants à partir de fumées de combustion d’industries depuis 2009. SOLIX récupère les eaux
usées d’un site d’extraction de méthane et le CO 2 est issu de la production d’amines. L’usine pilote
produirait près de 5 600 litres d’algues par an. En août 2012, SOLIX a annoncé la construction d’une
usine pour commercialiser de l’algocarburant et de la nourriture animale. L’entreprise américaine
souhaite étendre le processus à plus grande échelle et ainsi améliorer la productivité et la rentabilité
(365).
o En Israël, l’algoculture est très développée aussi avec notamment un site dans le désert du
Negev utilisant des photobioréacteurs tubulaires solaires pour lesquels la productivité
maximale serait de 1,6 g/L/jour (entreprise Algatech). La méthode des photobioréacteurs plats
à orientation inclinée est aussi présente en Israël pour la culture de l’algue Spirulina Platensis,
avec une productivité maximale de 4,3 g/L/jour (338).
o En Espagne, la première usine dite « de pétrole artificiel » à partir d’algues a été démarrée en
mars 2011 à Alicante par Bio Fuel Systems. Des photobioréacteurs de 8 m de haut ont été
installés, pour une surface totale de l’installation de 40 hectares. Grâce à une technologie
faisant appel à des champs électromagnétiques (et autres brevets non divulgables), une
32
mitose de 12 heures des cellules algales est atteinte (366). L’objectif de production est de
230 000 barils par an, ce qui équivaut à la consommation de 20 000 européens à peu près.
En parallèle, la société commercialise des produits à haute valeur ajoutée tels que la β-
carotène et des acides gras de type omégas 3 (367). Remarque
Souhaitant valoriser le CO2 issu du procédé cimentier, le groupe Italcimenti s’intéresse depuis
plusieurs années à différentes voies de recyclage de ce composé :
- réutilisation directe sans transformation mais après purification,
- transformation chimique du CO2 en méthane ou méthanol nécessitant également une
purification (collaborations avec des universités ; projet européen CEOPS). La transformation
chimique du CO2 nécessitant beaucoup d’énergie, cette dernière peut être réalisée via
l’utilisation d’énergie renouvelable. Le CO 2 peut alors être considéré comme un moyen
pertinent de stockage de l'énergie électrique issue de sources renouvelables.
- valorisation biologique du CO2 via la culture de microalgues (359).
Sur le site de la cimenterie de Gargenville (78), un pilote de recherche est installé depuis un an et
demi. Les microalgues sont cultivées dans des photobioréacteurs tubulaires et plans. L’objectif est de
32
Remarque : la véracité des chiffres présentés et les productions / commercialisations effectives à ce jour n’ont pu être
validées.
A la vue des résultats prometteurs de ce premier pilote, le groupe Italcementi a en projet de construire
un démonstrateur semi-industriel de valorisation biologique du gaz de cimenterie au sein du site de
Gargenville. Ce démonstrateur devrait inclure également les autres étapes du procédé de culture
telles que la récolte, le séchage et l’extraction des molécules d’intérêts contenues dans les algues
(« algo-raffinerie »). Le marché visé serait celui des molécules à haute valeur ajoutée, assurant au
procédé dans son ensemble une rentabilité économique (359).
Plusieurs dizaines de projets concernant la culture de microalgues ont été identifiés. Nous en citerons
certains, d’autres sont présentés dans le Livre Turquoise « Algues, filières du futur » (329).
La Figure 92 recense quelques projets de référence (non exhaustif), selon l’investissement représenté
et la période de réalisation du programme.
- Projet Suprabio : Ce programme de recherche (février 2010 à janvier 2014), soutenu par 16
organismes européens, a pour principal objectif le développement de solutions innovantes et de
bioraffineries.
- Projet CENIT VIDA (Valoración Integral De Algas) : Lancé en Espagne et appuyé par le
gouvernement, il a pour objectif la création d’une ville BIOCAS (auto-suffisante et durable) pour
laquelle les algues serviraient dans plusieurs secteurs : pharmaceutique, énergétique, alimentaire
et aussi dans la gestion des résidus, des eaux usées et de la commune. Il s’agit d’un vaste projet,
dont le principal frein au développement d’une telle ville est l’aspect économique. Les principales
recherches de ce programme sont centrées sur des modèles plus écologiques et plus
économiques (370).
- Aux Etats-Unis, les programmes de recherches sont nombreux et soutenus par le gouvernement.
En 2012, près de 14 millions de dollars de subventions ont été consacrés à l’étude des algues
(371).
- Le groupe Séché Environnement poursuit depuis quelques années des recherches quant à la
production de microalgues. Actuellement, il s’intéresse à la culture de ces organismes dans des
photobioréacteurs en symbiose avec une façade. Ce concept est nommé « biofaçade ». Le CO2
serait issu des fumées des usines d’incinération d’ordures ménagères. Le projet SymBio2-
BOX devrait être initié au cours de l’année 2013 en partenariat avec le laboratoire GEPEA et
l’Agence X-TU Architects. Une démonstration industrielle est par la suite envisagée. Le budget
total de ce projet s’élève à 4,9 millions d’euros. L’investissement se chiffre à 2 000 € / m² de
biofaçade. La production attendue est estimée entre 3 et 4 kg de biomasse sèche algale par
mètre de façade par an. D’après les différentes études menées, l’isolation des bâtiments serait
fortement améliorée, diminuant de 75% les besoins en chaleur en hiver. Lors de la période
estivale, le bâtiment serait aussi isolé des fortes chaleurs (372) (328)(373).
Acteurs
-Le Laboratoire Physiologie et Biotechnologie des Algues (Ifremer - Centre Atlantique) est
en mesure de mettre en culture un panel représentatif de la diversité énorme du monde des
microalgues et ce dans des situations métaboliques très variées. Cette capacité explique les
sollicitations nombreuses qui lui sont adressées, tant par le monde académique qu'industriel,
pour participer à des projets de recherche s'adressant à des champs d'application de toute
nature. Il s'agit alors de:
o Cultiver et optimiser les cultures de microalgues en bassins et réacteurs plus ou
moins sophistiqués
o Identifier et valoriser l'ensemble des produits originaux qu'elles peuvent produire.
o Comprendre une Biologie dans tous ces aspects avec deux composantes fortes au
laboratoire: l'écophysiologie et les "omiques"
o Exploiter une énorme diversité de cellules cultivables en suspension, pour la
production de molécules recombinantes
L'étude de la physiologie et la valorisation biotechnologique des microalgues nécessitent la réunion
d'un ensemble de métiers indispensables:
o la phytotechnie contrôlée : la base même, être capable de cultiver une diversité de
microalgues
o l'écophysiologie pour comprendre les relations entre les microalgues et leur
environnement
o la biologie moléculaire pour reconnaître, comprendre l'expression de gènes et agir sur ces
voies
o la chimie et la biochimie pour analyser finement les métabolites
o la bio-informatique, outil dont la puissance est désormais incontournable
o la souchothèque, dans une acception large: identifier, sélectionner et maintenir des
cultures
Le laboratoire PBA tend à réunir ces 6 métiers, ce qui lui a permis de monter en puissance dans sa
capacité de recherche. (375)
- Le Laboratoire Mer Molécules Santé MMS (EA 2160) (Université de Nantes / Le Mans).
Le projet scientifique porté par l'ensemble du groupe MMS a pour objectif de participer à l'amélioration
des connaissances sur les réseaux trophiques marins littoraux (en zone côtière et en milieux
estuariens) dans le but de contribuer à une gestion intégrée et durable de ces écosystèmes par une
connaissance de leur diversité et de leur fonctionnement ou de leurs perturbations, mais aussi de les
valoriser par la mise en évidence d'organismes ou de métabolites d'intérêt pour la santé humaine ou à
forte valeur ajoutée industrielle. (375)
- Plusieurs équipes de recherche, actives dans le domaine des microalgues, sont répertoriées
dans différentes structures :(375)
- le Laboratoire LBBE à Narbonne
- le Laboratoire Biocore Sophia Antipolis
- les Laboratoire Oceanographique de Banyuls (2 équipes) et de Villefranche
- le CEA avec 2 ou 3 equipes
- l’ENS Paris avec 2 Equipes
- l’UPMC Paris
- l’Université de Caen
- la station Ifremer de Palavas
- La Station Biologique de Roscoff
La société en est au stade de conception d’une unité pilote, capable de produire par la suite 250
tonnes d’huile alimentaire par an. La vente de ses produits est attendue pour 2014/2015. Fermentalg
utilise, pour ses cultures en systèmes fermés, du carbone provenant d’un substrat (carbone
organique ou sucres). Il s’agit d’un procédé très intensif, demandant moins d’énergie que le système
« habituel ». Son principe se base sur l’activation des chloroplastes en fonction d’un apport de lumière
particulier (technologie « flash »). D’après M. Calleja, directeur de Fermentalg, le rendement peut
atteindre jusqu’à 220 g de matière sèche par litre après 2 semaines d’optimisation. Les coûts
énergétiques pourraient être diminués d’un facteur 100 avec cette technologie en comparaison avec
d’autres techniques classiques de culture de microalgues. Les recherches doivent donc porter à ce
jour sur les substrats et les organismes les plus performants et rentables (376) (377) (360).
- L’entreprise Algosource, en activité depuis 1993, travaille sur l’ensemble des procédés de la
production et de la transformation de microalgues. Elle est structurée en quatre axes : valorisation
d’effluents, production de microalgues, ingénierie de bioraffinage et conception de systèmes
intégrés. Algosource travaille sur plusieurs projets et/ou en partenariat avec d’autres organismes.
Elle se charge notamment de la valorisation et de la transmission des données issues des
programmes de recherches BIOSOLIS et DIESALG vers l’industriel (378).
Voici une liste non exhaustive de projets auxquels Algosource participe :
Suprabio
Biofat : Production d’algocarburant et valorisation des co-produits
Mise en place de photobioréacteurs pour la cimenterie Ciment Calcia à Gargenville
Algoraffinerie : Développement de la bioraffinerie de deux espèces de microalgues
- Le groupe Roquette, producteur d’amidon et de ses dérivés, s’est lancé au cours de ses
dernières années dans la culture d’algues. Les marchés visés sont ceux de l’alimentation, de la
chimie et de la cosméto-pharmacie. D’après le groupe, produire de l’énergie à partir d’algues n’est
pas intéressant puisque la filière n’est pas rentable (379).
- La société française Gaz réseau Distribution France (GrDF), filiale de GDF Suez, s’intéresse au
potentiel de production de biométhane par les algues aux horizons 2020 et 2050. L’objectif est
d’aboutir à la production de biogaz par digestion des microalgues cultivées. Une étude a été
réalisée par le Centre de Recherches et Innovations en Gaz et Energies Nouvelles (CRIGEN) de
GDF Suez en 2013 afin d’évaluer le potentiel de cette filière (340).
Les conclusions de cette étude sont une évaluation du potentiel de production de biométhane par
les algues de 1,1 à 9,3 TWh/an en 2020 et de 19,3 TWh/an en 2050. Le biométhane serait une
solution afin d’améliorer le bilan environnemental de cette production, puisque tous les co-produits
seraient valorisés, et les besoins énergétiques diminués par le recyclage des algues. Cette culture
serait plus intéressante d’un point de vue énergétique et économique. D’après les résultats de
cette étude, la maturité technique de cette voie de valorisation des algues est estimée pour les
années 2025/2030 (Cf. Figure 93). Les premiers pilotes devraient être installés vers 2020 et
l’injection dans le réseau de gaz est prévue pour les années 2030 (340).
Facteurs de succès
Le principal atout des algues est le besoin en biocarburants qui augmente depuis plusieurs années.
ème
Le développement de ces biocarburants de 3 génération (à base d’algues) est à privilégier car les
algues n’entrent pas en compétition avec des denrées alimentaires contrairement aux autres types de
biocarburants.
Le procédé par photobioréacteurs présente plusieurs avantages en comparaison avec les bassins
ouverts de type raceway. En effet, les risques de contamination sont moindres, la récupération des
produits est facilitée et les possibilités de contrôle du processus sont plus élevées.
Les opportunités sont nombreuses aussi, notamment grâce à la production de molécules à haute
valeur ajoutée, les possibilités agroalimentaires et énergétiques. Un tel procédé pourrait ainsi
intervenir au sein de plusieurs filières industrielles, et s’avérer rentable.
Forces Opportunités
- Grande variété de - Association d’organismes - Production de molécules à
microalgues disponible aux compétences diverses haute valeur ajoutée
(génie des procédés,
- Peu de consommation optique, algues) - Possibilité de croiser les
énergétique externe liée à intérêts des industries
l’utilisation de l’énergie - PMEs innovantes pouvant agro-alimentaires avec
lumineuse être impliquées rapidement l’énergie et le captage du
sur le sujet CO2
- Risque de contamination
moins important qu’en - Non compétition avec des - Projets européens
bassins ouverts, faibles terres agricoles/denrées
pertes d’eau par évaporation alimentaires - Menace concernant la
et récupération facile des production de pétrole brut
produits - Marché alimentaire non pour les prochaines
affecté (contrairement aux décennies (raréfaction de
- Marge d’optimisation des autres biodiesels) la ressource)
procédés importante
- Eau douce ou eau salée : - Objectif de rentabilité du
- Rapport surface / volume pas de pression sur l’eau procédé pour 2020
intéressant potable
Inconvénients
Le principal verrou actuel est la production de manière industrielle, en assurant une rentabilité
économique du système et des produits corrects.
D’un point de vue réglementaire en France, l’usine doit répondre aux exigences de gestion des rejets,
des déchets, des risques et doit prendre en compte l’aspect sanitaire (respect des normes).
Principe
La biocatalyse se définit comme étant l’utilisation de biocatalyseurs afin de stimuler les réactions
chimiques, en imitant les processus naturels. Les biocatalyseurs sont des enzymes isolées ou
maintenues au sein du microorganisme d’origine. La biocatalyse est une technique déjà développée
pour plusieurs applications telles que la chimie fine, le secteur de la santé ou encore l’agroalimentaire
(380).
En biocatalyse, le CO2 peut servir de réactif et être transformé en molécules organiques d’intérêt pour
la production d’énergie, de biocarburants ou encore de substances pharmaceutiques (30).
Dans cette technologie, des enzymes synthétiques, similaires à celles naturelles, sont aussi utilisées.
Biocatalyseurs
Enzymes
Microorganismes
Enzymes synthétiques
Produits d’intérêt
CO2 Molécules organiques (lipides,
Biocatalyse composés oxygénés…)
Les principaux avantages de la biocatalyse sont les conditions opératoires douces mises en
œuvre telles qu’une réaction souvent à température ambiante et à pression ordinaire. La réaction est
sélective et engendre peu de pollution. De plus, la consommation énergétique est souvent
relativement faible en comparaison avec d’autres procédés.
Applications
Certains projets de biocatalyse en lien avec le CO 2 concernent son captage (381). Ces applications
n’ont pas vocation à utiliser le CO2 mais simplement à l’hydrater et ainsi le transformer en
bicarbonates (et protons) plus faciles à stocker ou à réutiliser. Ces procédés font appel à l’enzyme
anhydrase carbonique, responsable du captage enzymatique du CO2 dans une solution aqueuse puis
3-
de sa séquestration sous forme d’acide carbonique / bicarbonate (HCO ). Cette enzyme est un
biocatalyseur très actif.
La société canadienne CO2 Solutions propose par exemple, via son procédé de catalyse
enzymatique, de capturer le CO2 produit par les industries pour obtenir un gaz de qualité commerciale
A ce jour, le volume de CO2 valorisé par biocatalyse est faible. En effet, la plupart des systèmes
utilisant cette technique ciblent la production de produits à haute valeur ajoutée dont la production est
limitée. Le volume potentiel de CO2 valorisable par biocatalyse pourrait devenir important avec la
production de biocarburants ou de vecteurs énergétiques tels que le méthane ou le méthanol (30).
D’une manière générale, les biocatalyseurs permettent des réactions sélectives dans des conditions
faciles à obtenir (pH neutre, température ambiante, pression atmosphérique et milieux aqueux).
Les recherches visent à améliorer et/ou imiter des réactions naturelles, et s’intéressent notamment à
deux enzymes qui sont l’Anhydrase Carbonique (AC) et la RuBisCO (Ribulose Biphosphate
Carboxylase Oxygénase). Les réactions mises en jeu sont présentées ci-dessous pour chacune des
deux enzymes.
Enzyme RuBisCO
Les enzymes utilisées peuvent provenir d’extraits d’organismes naturels ou bien être synthétisées
(380).
Les systèmes biologiques capables de transformer le CO 2 sont de différentes natures. Tout d’abord, il
peut s’agir d’éléments intervenant lors de la photosynthèse : cellules végétales ou leurs constituants
(thylacoïdes des cyanobactéries ou des chloroplastes (structures où se déroulent la photosynthèse)).
Des complexes non photosynthétiques peuvent aussi être envisagés. Un exemple est la conversion
du CO2 en acétylCoA par le cycle de Wood-Ljundahl impliquant la CO déshydrogénase et l’acetyl-CoA
synthétase des bactéries méthanogènes (30). L’acétylCoA est une molécule énergétique importante
du métabolisme cellulaire.
Les enzymes sont extraits d’organismes naturels ou recombinants. Ces éléments peuvent être
sensibles aux conditions ambiantes, tel que le contact avec l’oxygène. Ils doivent alors être modifiés
pour être plus résistants ou mis en œuvre dans des environnements protégés.
Les enzymes synthétiques sont la plupart du temps des molécules naturelles modifiées pour adapter
leurs propriétés de catalyse.
Avec les enzymes synthétiques, on parle de réactions biomimétiques (création de la même molécule
que dans le milieu naturel).
D’autres recherches s’intéressent aux enzymes des bactéries acétogènes capables de synthétiser de
l’acide acétique à partir de CO2. Ces réactions mettent en oeuvre des complexes à base de Nickel
(30).
Actuellement, la biocatalyse et le recours à des biocatalyseurs sont considérés comme des procédés
à l'état de recherche fondamentale en ce qui concerne la technique de captage du CO2 par
biocatalyse. Le développement de cette technologie n’est pas attendu avant une dizaine d’année
minimum. Une avancée significative au niveau de la recherche et notamment la compréhension des
mécanismes et le développement des biocatalyseurs sont nécessaires pour permettre un déploiement
de la biocatalyse du CO2 (383).
Coût
Etant au stade de recherche, aucun bilan financier n’est disponible pour cette technologie à ce jour.
Globalement, les couts de développement peuvent être très élevés : ils font appel à des technologies
précises de biologie moléculaire ou de physico-chimie (par exemple caractérisation par diffractométrie
de rayons X pour déterminer la structure d’enzymes, …).
Les couts d’exploitations des techniques de biocatalyse sont généralement faibles (383), pour autant
que la récupération des produits obtenus (souvent très dilués dans des milieux aqueux) qui peuvent
comprendre des étapes couteuses, ne soit pas trop complexe. (30)
Bilan environnemental
La biocatalyse est une voie utilisant des catalyseurs à base de matériaux biologiques, principal
avantage de cette technique. Cependant, certaines molécules bio-inspirées peuvent contenir des
métaux nobles. Afin de limiter le recours à ces métaux et de leurs contraintes d’utilisation
(approvisionnement, coût, recyclage …), des équipes se concentrent actuellement sur la fabrication
de biocatalyseurs efficaces et sélectifs pour l’électroréduction de CO 2 à base de métaux non nobles
comme le Fe ou le Ni(384).
A ce jour, la filière n’étant pas développée, les besoins en eau sont faibles, mais ceux-ci pourraient
devenir significatifs avec le déploiement à l’échelle industrielle (30).
Bilan énergétique
Les données ne sont pas disponibles dans la littérature pour conclure sur un bilan énergétique.
Les consommations d’énergie sont relativement moins importantes pour ce procédé de valorisation du
CO2 que pour d’autres. En effet, les conditions de réaction (température ambiante et pression
atmosphérique) sont douces. De plus la possible utilisation d’énergie lumineuse dans le cas de
réactions photosynthétiques diminue d’autant les besoins en apport d’énergie.
Les postes les plus gourmands en énergie sont la récupération des produits et leur conversion en
molécules d’intérêt.
Programmes de recherches
Les projets consacrés à la biocatalyse du CO 2 sont rares. Le projet ANR « CarBioRed » vise au
développement, à base de métaux non nobles, de nouveaux catalyseurs efficaces et sélectifs pour
l’électroréduction bioinspirée de CO2, ainsi qu’à l’étude de leurs mécanismes d’action. Les résultats
sont attendus(384)
Aucune unité opérationnelle ou pilote n’a été identifiée dans le cadre de cette étude.
Acteurs
- L’entreprise Carbon Sciences, Inc. située à Santa Barbara en Californie a annoncé dès 2010 sa
volonté de créer une usine de production de biocarburants par biocatalyse du CO2. Le procédé
établi consiste en la formation de syngaz (CO + H 2) à partir de gaz naturel et de CO2. Le
catalyseur a été développé en partenariat avec l’université de Saskatchewan au Canada. La
technique proposée par Carbon Sciences, Inc. est peu gourmande en énergie, permettant ainsi le
faible coût de production (386).
- Au Québec, le Centre en Chimie Verte et Catalyse (CCVC) étudie la catalyse enzymatique, les
aspects environnementaux des produits de synthèse obtenus et la réglementation associée (389).
Acteurs en France
Au sein du LISBP, l’équipe de M. Denis Pompon travaille sur la biocatalyse au sein du centre de
recherche Toulouse White Biotechnology (TWB). Ce centre regroupe des institutions publiques,
des chercheurs et des industriels. L’objectif est de développer des biotechnologies industrielles
- Le laboratoire de Chimie des processus biologiques du Collège de France à Paris travaille sur
les systèmes enzymatiques complexes pour de futures applications en biocatalyse et dans le
domaine de la santé. Un projet intitulé « Photosynthèse artificielle et valorisation du dioxyde de
carbone ; nouveaux catalyseurs pour des dispositifs de photo-électro-réduction du CO2» a ainsi
été mis en place au sein de ce laboratoire (392).
- L’équipe du Centre de Recherches Paul Pascal (CRPP) du CNRS, l’Institut des Sciences
Moléculaires de Bordeaux et le Laboratoire de Chimie de la Matière Condensée du Collège de
France travaillent sur la production de biocarburant de manière continue par catalyse
enzymatique. La production d’un ester d’éthyle et l’activité catalytique ont pu être maintenues à
des valeurs élevées sur une durée de 2 mois. A ce jour, les recherches se poursuivent dans le but
de réduire l’utilisation de solvants et de métaux, ainsi que les déchets issus du procédé (394).
Facteurs de succès
Les principaux avantages de cette technique sont liés aux intrants et au mode de culture. En effet, ce
procédé s’effectue dans des conditions douces – température ambiante et pression atmosphérique –
expliquant la consommation d’énergie moindre en comparaison avec d’autres voies de valorisation.
De plus, aucun solvant n’est utilisé, la consommation en eau est réduite et il s’agit d’utilisation de
matériaux biologiques.
La filière de production de molécules à haute valeur ajoutée par biocatalyse est en cours d’étude. Le
développement de cette filière permettrait d’approfondir les connaissances et de mettre en place des
pilotes ou structures d’étude.
Les premiers éléments de l’étude environnementale semblent donner de bons résultats, notamment
en comparaison avec d’autres filières. Toutefois, aucune étude complète n’a été réalisée à ce jour,
tant en termes de bilan environnemental, que d’efficacité énergétique.
Forces Opportunités
- Conditions : température ambiante et pression - Production de molécules à haute valeur
atmosphérique ajoutée (à valider dans le cas de l’utilisation
du CO2)
- Utilisation de matériaux biologiques
- Nombreux laboratoires en France
- Consommations d’eau et d’énergie réduites (en possédant les compétences nécessaires à
comparaison avec d’autres techniques) un développement de la filière
Cette voie est encore à l’étude, son développement à l’échelle industrielle n’est pas attendu avant une
dizaine d’années au minimum. La biocatalyse et le recours à des biocatalyseurs sont à ce jour des
procédés à l’état de recherche fondamentale (383).
A ce jour, les coûts de synthèse des biocatalyseurs, des étapes de récupération et de conversion en
molécules d’intérêt ne sont pas encore optimisés.
Pour le moment, les catalyseurs développés présentent des défauts de performance et de stabilité
structurelle (394). L’utilisation industrielle est donc à ce jour limitée par ces facteurs.
Le Tableau 45 résume les points faibles et verrous identifiés pour la biocatalyse, dans le cas de la
valorisation du CO2.
Les voies de valorisation du CO2 sont elles aussi diverses. A partir du dioxyde de carbone, il est ainsi
possible d’aboutir à la production d’énergie (méthanation, algocarburants, synthèse de méthanol, etc.)
et d’intermédiaires chimiques (réactions de synthèse organique : production d’urée ou de polymères).
Avec une tonne de CO2 valorisé, on peut par exemple extraire un peu plus d’une demi-tonne de
pétrole par récupération assistée des hydrocarbures ou générer environ 2,64 tonnes de minéraux
carbonatés par le procédé de minéralisation ex-situ.
Des ordres de grandeur en équivalents « tonne de CO2 » produite provenant de sources anthropiques
(transport, fabrication, traitement des déchets et énergie) ou valorisable comme « matière première »
(chimie, énergie, etc.) sont donnés dans la Figure 95.
Energie
0,73 t de méthanol
1,8 t de papier
Fabrication
Transport
Capture
1,67 t de verre (verrerie) 1 tonne de 0,20 t d’algocarburant
CO2
Traitement des déchets
Fabrication
2,32 t de polymères
0,58 t de déchets plastiques recyclés
2,64 t de minéraux carbonatés
3,9 t de déchets en verre recyclés
Autre
4 274 kWh d’électricité (gaz naturel) tonne de CO2 en un an
Figure 95 : Le CO2 : Des sources anthropiques et des voies de valorisation variées (compilation RECORD/APESA)
Remarque : les quantités calculées aboutissant à l’émission d’une tonne de CO 2 sont issues des bases de données de la méthodologie Bilan Carbone®. Elles correspondent à l’émission d’une
tonne de CO2 d’origine fossile. Ces ordres de grandeurs ne prennent pas en compte les potentielles pertes de CO 2 pour atteindre un seuil de pureté requis (necessitant par exemple des procédés
intermédiaires tels qu’une opération de captage).
Pour les industriels souhaitant valoriser du CO2, les aspects logistiques de mise en place d’une
technologie sont importants. Ils doivent notamment considérer les étapes préliminaires telles que le
captage, le transport et le stockage du CO2 ainsi que le traitement du gaz (purification, désulfuration,
etc.). Ces étapes dépendent fortement de la localisation du site et du procédé de valorisation choisi, et
impactent directement les coûts.
Captage
Les données publiées sur les performances et les coûts liés aux procédés de captage varient
significativement au cours du temps, selon les études, et parfois même selon les pays ou les régions.
Une étude de l’AIE (Agence Internationale de l’Energie) de 2011 spécifiquement sur le sujet (398)
donne une moyenne des coûts de captage répertoriés aux Etats-Unis et en Union Européenne.
Tableau 46 : Ordres de grandeur de coûts de captage d’une tonne de CO2 évitée en 2011 (398)
Purification (395)
Selon les caractéristiques de l’effluent gazeux et la voie de valorisation considérée, une étape de
purification peut s’avérer nécessaire suite au captage du CO2. Plusieurs techniques de purification
existent et le choix dépend du gaz d’origine et des exigences de qualité. On distingue quatre types de
purification : par adsorption, par absorption, sur membrane et par cryogénie. La purification est
estimée à un coût compris entre environ 30 et 45 € par tonne de CO2 traité.
Transport
Le transport du CO2 peut se faire sous différentes modalités, telles que par gazoduc sur terre et en
mer, par voie maritime, par voie ferroviaire et par transport routier (camions). Sur de longues
- Transport en gazoduc
Figure 99 : Coûts du transport par gazoduc sur terre et en mer en fonction de la masse transportée
par an sur une distance de 250 km (399)
NB : Les estimations supérieures sont figurées en pointillés, et celles inférieures en traits pleins.
Figure 100 : Coûts de transport du CO2 par gazoduc et par voie maritime en fonction de la distance
parcourue (399)
Il existe une diversité de procédés de valorisation du CO2. Vouloir les comparer reste hasardeux dans
la mesure où chaque voie présente ses propres particularités et contraintes. Certaines, par exemple,
vont aboutir à la production d’énergie ou de coproduits directement valorisables quand d’autres
n’aboutiront qu’à la simple valorisation du CO 2. La durée de stockage du CO 2 est aussi variable,
certaines techniques stockant sur du court terme (quelques jours) alors que d’autres permettent une
séquestration plus longue (plusieurs mois à années). De nombreuses voies sont au stade recherche
et développement : des avancées technologiques sont donc réalisées au quotidien selon le contexte
(coût du CO2, réglementation, transition énergétique …) et l’évolution des procédés.
Cette partie a pour objectif de donner un ordre d’idée de positionnement en termes de technologie
(maturité, conditions opératoires), d’intrants (qualité et potentiel de valorisation du CO2, types
d’intrants nécessaires), de ressources (financières) ou d’impact (bilan CO 2 et acceptabilité sociale).
Ressources
Coûts d’investissement
Coûts de fonctionnement
Intrants Technologie
CO2 (qualité, quantité, potentiel Maturité Produits
de valorisation) Conditions opératoires
Autres intrants (eau, énergie, etc.)
Impacts
Bilan environnemental
Acceptabilité sociale
La synthèse réalisée ci-après n’est pas exhaustive et reste indicative. Seules les technologies ayant
des caractéristiques suffisamment représentatives sont présentes dans les graphiques suivants.
Pour les voies actuellement en phase de recherche et développement, les projections de date de
« premier pilote » ou d’industrialisation sont estimées par les experts contactés du domaine. Ces
projections restent empreintes d’incertitudes et se basent sur la connaissance actuelle. En fonction de
la conjoncture à venir, des investissements nationaux, et d’autres facteurs, certaines voies
actuellement en recherche et développement telles que la photoélectrolyse, la thermochimie ou la
biocatalyse pourraient bénéficier d’une industrialisation plus rapide.
Quant aux voies industrialisées avant 2010, elles l’ont été sur une plage allant de 1960 pour la
récupération assistée de pétrole aux Etats-Unis à 2004 pour le reformage du méthane avec de l’eau
et du CO2.
RAH (EOR)
Sans transformation
RAH (EGR)
RAH (ECBM)
Géothermie profonde
○
Utilisations industrielles
Hydrates de CO2
Minéralisation ex-situ
Hydrogénation
Méthanation
Reformage sec
Vaporeformage
Trireformage
Electrolyse
Photoélectrolyse
Thermochimie
Transformation
Le Figure 103 représente la valorisation actuelle du CO 2 et le potentiel en 2050 estimé par les experts d’après les ressources disponibles et le développement
de la technologie. Les données et estimations ne sont disponibles que pour huit voies. Concernant l’hydrogénation et la méthanation, les experts estiment que
le potentiel de valorisation du CO2 par ces voies est supérieur à 300 Mt/an (représentation en dégradé bleu). Pour la récupération assistée de pétrole (EOR),
les experts estiment une capacité maximale de 300 Mt/an en 2050. Ces trois dernières voies citées ainsi que la culture de microalgues et la synthèse
organique de polymères semblent être celles les plus susceptibles de se développer.
RAH (EOR)
Géothermie profonde
Utilisations industrielles
Minéralisation
Hydrogénation
Culture de microalgues
Quantité de CO2 valorisée en 2010 (Mt/an) Potentiel de valorisation du CO2 en 2050 (Mt/an)
Figure 103 : Quantités de CO2 actuellement valorisées et estimations en 2050 pour différentes voies
La Figure 104 schématise la pureté préférentielle (composition en CO2 du gaz entrant) selon le type
de valorisation. Les voies industrialisées sont mentionnées en gras, alors que celles au stade de
recherche et développement en gris. Les voies restantes sont au stade de démonstration (échelle du
pilote).
70%
40%
25 à 45% : biogaz
30%
Selon les applications visées et les exigences des marchés, les concentrations utilisées peuvent être
différentes pour une même technologie (exemple de la culture de microalgues).
Les réactions impliquées dans les procédés se réalisent à des pressions et températures particulières.
Ces conditions opératoires varient selon la technologie et influencent le coût global de la voie de
valorisation : les conditions opératoire recherchées privilégieront les pressions et températures
proches des conditions normales à moins que le bilan énergétique global du procédé et son efficacité
ne soient améliorés dans des conditions différentes
Electrolyse
Transformations chimiques
750
Reformage à sec
Sans transformation
P
500
Transformations biologiques et autres
Minéralisation ex-situ
Méthanation Hydrogénation
200
Voies pour lesquelles les conditions opératoires
sont température et pression ambiantes :
3.2.5 RECAPITULATIF DES INTRANTS NECESSAIRES POUR L’ENSEMBLE DES VOIES CONSIDEREES
Chaque technologie nécessite un apport d’énergie associé à d’autres intrants tels que l’eau, les
minéraux, etc. Ces intrants conditionnent fortement la mise en application d’un procédé, selon la
disponibilité ou non de la ressource nécessaire. Ils représentent donc des contraintes, ou du moins
des verrous à lever en termes d’approvisionnement, de logistique et de coûts supplémentaires.
Le tableau ci-après résume les besoins en intrants (énergie, eau, catalyseurs, minéraux et intrants
spécifiques) pour les différentes technologies ainsi que les principales contraintes de mise en œuvre
(liste non exhaustive).
Légende du tableau
33
Les catalyseurs, généralement composés d’un centre métallique à base de métaux nobles, représentent un problème pour ces technologies. La disponibilité de ces métaux,
ainsi que leur recyclage après utilisation sont deux enjeux majeurs. Les recherches actuelles se concentrent sur le développement de nouveaux catalyseurs.
34
Utilisation possible de catalyseurs pour cette technologie (dépend des produits souhaités).
35
La consommation d’eau pour la biocatalyse pourrait devenir problématique en cas de développement de cette technologie à grande échelle.
L’objectif de valoriser du CO2, principal gaz à effet de serre anthropique, est d’en limiter le surplus
d’émission dans l’atmosphère. Des résultats d’ACV utilisant comme unité fonctionnelle la valorisation
d’une tonne de CO2 permettent de comparer neuf voies distinctes en termes d’émission de CO 2. Les
équivalents CO2 prennent en compte les émissions de CO2 et des autres gaz à effet de serre tels que
le méthane. Les résultats sont représentés sur la Figure 107.
36
Figure 107 : Bilan CO2 (tonne d'équivalent CO2 émis / tonne de CO2 valorisé)
Compte tenu de ces résultats correspondant à des retours d’expériences, les voies les plus favorables
semblent être la minéralisation ex-situ, la culture de microalgues et la récupération assistée des
hydrocarbures, les émissions d’équivalents CO 2 étant les plus faibles. Les réactions de synthèse
organique (urée, polymères et carbonates cycliques) semblent peu intéressantes dans l’objectif
unique de diminuer le bilan CO2.
Remarque : Les coûts de traitement du CO2 relatifs à la synthèse organique ne comprennent pas
dans ce cas le coût de fabrication et/ou d’achat des catalyseurs impliqués.
36
Ces données correspondent à des ACV réalisées sur des cas particuliers. Un changement
d’approvisionnement énergétique peut impacter significativement le résultat.
6
6
5
4,81
4 Cout moyen Cout moyen
gaz naturel méthanol à
aux USA (0,08) Cout moyen partir de bois Cout moyen
méthanol à (0,22 à 1,3) diesel au
3
partir de gaz rouaume Unis
naturel (0,13 à (0,09)
2 0,28)
1,99
1,7
1
1,04
0,85
0,286 0,422 0,033 0,667 0,42
0
Méthane (CH4) Urée Polymères Carbonates Méthanol Méthanol Méthanol Méthanol Diesel Biomasse Algocarburant
(énergie (énergie (énergie (énergie solaire) microalgale
hydraulique) géothermique) éolienne) sèche
Remarque : des prix de production du marché actuel ont été proposés. Il s’agit d’ordres de grandeurs dans la mesure où les coûts de production sont
dépendant de multiples variables : disponibilité et tension sur le marché des matières premières, spécificités locales (approvisionnement électrique de bon
marché, coût de la main d’œuvre, etc), valorisation ou pas de coproduits, etc…
Quelques enjeux d’acceptabilité sociale sont recensés dans le Tableau 49 (non exhaustif).
Tableau 49 : Principaux facteurs positifs et négatifs d’acceptabilité sociale des technologies de valorisation du CO 2
Acceptabilité sociale
Points positifs Points négatifs
Stockage permanent du CO2 Risque de rejet du CO2 stocké et incertitudes sur
Récupération assistée des hydrocarbures
les quantités d’hydrocarbures récupérables
Demande en eau moins importante que pour la Risque de rejet du CO2 stocké et incertitudes sur
Géothermie profonde
RAH la durée de vie des sites géothermiques
Substitution de produits/solvants toxiques grâce au Limitation du marché mondial
Utilisations industrielles
CO2 et bilan environnemental positif
Substitution de produits toxiques et durée de Limitation du marché mondial
Synthèse organique
séquestration relativement longue
Durée de séquestration du CO2 importante et Acceptabilité des produits pas encore acquise
Minéralisation
possible utilisation de déchets et fumées industriels
Stockage des énergies renouvelables et produits à Forte consommation énergétique et incertitudes
Hydrogénation / Méthanation
valeur énergétique obtenus de manière décarbonée économiques pour cette filière
Reformage Utilisation de deux gaz à effet de serre : CO2 et CH4 Consommation énergétique élevée
Couplage possible de ce procédé avec des Manipulation d’hydrogène, source de craintes
Electrolyse
énergies renouvelables pour la population
Photoélectrolyse Utilisation de l’énergie solaire
Utilisation et stockage de l’énergie solaire et Craintes de la part des populations locales et
Thermochimie
aucune pollution engendrée impact visuel
Utilisation de l'énergie solaire, traitement des eaux Développement des OGM, grandes surfaces
Culture de microalgues usées, reconversion de zones industrielles en nécessaires (impact visuel) et fortes
(en systèmes ouverts et fermés) déclin, marché alimentaire non affecté et non consommations en eau et en énergie
compétitivité avec des terres agricoles
Utilisation de matériaux biologiques et bilan Possible développement des OGM, besoins en
Biocatalyse environnemental encourageant énergie élevés et future consommation d’eau
problématique
Les possibilités de valoriser du CO2 sont nombreuses. Le choix d’une voie de valorisation peut être
affiné selon différents critères tels que la pureté du CO 2, la proximité ou la disponibilité de ressources
(eau, énergie, minéraux, etc.) (Cf. Figure 110).
Un des premiers paramètres à considérer lors de la recherche d’une voie de valorisation est la pureté
du CO2 requise. Avec un traitement du gaz entrant, la pureté peut être améliorée, ce qui permet
d’élargir l’éventail des voies de valorisation.
Dans le cas de la filière de traitement des déchets, la qualité et la quantité de CO 2 généré vont
orienter vers des techniques de valorisation différentes. Deux approches simplifiées sont présentées
ci-dessous : celle d’un incinérateur et celle d’une Installation de Stockage pour les Déchets Non
Dangereux (ISDND).
Reformage avec de
Culture de microalgues Utilisations industrielles
l’eau et du CO2
CO2 dilué
Disponibilité en Proximité avec (20 à 99 %)
surface et en eau une usine
Culture de microalgues
Autres voies Qualité industrielle
(en recherche) CO2 pur à 99,99 % CO2
CO2 < 20 %
En sortie d’incinérateur, la composition des fumées est très variable et dépend des déchets présents à
l’origine. Toutefois, on peut considérer que la teneur en CO2 des fumées humides moyenne est
comprise entre 5 et 13 % (396).
On retrouve au sein de ces fumées de l’eau (entre 10 et 20 %), du dioxyde d’azote (NO 2), de
l’oxygène, du monoxyde de carbone (CO), du dioxyde de soufre (SO 2), du chlorure d’hydrogène
(HCL), du fluorure d’hydrogène (HF) ainsi que des métaux lourds en très faibles quantités.
Tableau 50 résume les possibilités et freins pour différentes techniques quant à la valorisation du CO 2
issu d’un incinérateur. Les données et éléments s’appuient sur les retours d’expériences propres à
chaque voie et présentés au sein de la partie 2.
Quantité de CO2 :
— —
++ — ++ ++ +
(Quantité trop
(Quantité (Potentiel de (Objectif du élevée ; Usine (Pilotes à ce (l’usine de production (Capacité de
Entre 90 000 et 110 000 correspond croissance de démonstrateur Carbon Recycling jour ; projet de méthanol par traitement dépend
37 aux projets cette voie très GreenMag : International en Audi : 3 086 reformage en Iran de la surface
tonnes de CO2/an
actuels) faible) valoriser 100 000 Islande : 4 500 tonnes de produit 3030 tCH3OH disponible pour la
tonnes de CO2/an) tonnes de CO2/an) CO2/an) par jour soit une culture)
consomamtion de
4 166 tonnes de
CO2/j
Teneur en CO2
De 5 à 13 % (sans — — + — ++
traitement)
> 90 % (après
++ ++ ++ ++ ++ ++ ++
traitement)
Eau (entre 10 et 20 %) + — + ++
O2 — — — + —
CO — — + ●
SO2 — — — — — —
H2S — — — — —
Métaux lourds ● — — — —
37
Moyenne nationale : 100 000 tCO2/an/incinérateur (6) (17)
En effet, les pilotes menés en Israël à Ashkelon et en France au sein de la cimenterie Ciment Calcia
montrent que les rendements de production sont encourageants avec des fumées de qualité
industrielle et non traitées. Il est donc envisageable de valoriser le CO 2 d’un incinérateur par la culture
de microalgues. Toutefois, il faut prendre en compte que le volume de CO 2 produit est élevé
(moyenne de 100 000 tonnes/an). Les installations nécessaires au traitement de ces fumées
demandent une surface disponible importante, à l’échelle du problème à traiter.
Les voies par transformation chimique nécessitent l’utilisation de catalyseurs, sensibles aux
impuretés, d’où le prétraitement des fumées. Il s’agit du principal enjeu de ces techniques, les
mécanismes étant compris et les produits intéressants dans le contexte actuel (notamment les
molécules énergétiques via les voies hydrogénation et méthanation). Des recherches sont en cours
pour diminuer la sensibilité des catalyseurs, et envisager dès lors l’utilisation directe de fumées
d’incinérateur.
Une Installation de Stockage des Déchets Non Dangereux (ISDND) est un site d’enfouissement des
déchets ménagers et assimilés. Des géomembranes sont mises en place entre les déchets et le sol,
afin d’éviter les pollutions. Dans une telle installation fermée, les déchets fermentent et du biogaz est
alors produit.
Ce biogaz produit en sortie d’une installation de stockage est majoritairement composé de méthane et
de CO2, dont le rapport varie selon le substrat d’origine. Cette composition est très variable. La teneur
en CH4 sera d’autant plus importante que les déchets seront riches en éléments H et C. Le Tableau
51 donne des ordres de grandeur de concentrations des composés contenus dans un biogaz.
Dans ce cas, le volume de biogaz produit est moindre que celui des fumées issues d’un incinérateur.
De ce fait, les principales caractéristiques pour une ISDND sont la disponibilité du CO 2 (en termes de
volume) moins importante qu’en sortie d’incinérateur et l’importante teneur en méthane CH 4.
Le Tableau 52 synthétise les possibilités et freins pour différentes techniques quant à la valorisation
du biogaz issu d’une ISDND. Les données et éléments s’appuient sur les retours d’expériences
propres à chaque voie et présentés au sein de la partie 2.
Quantité de CO2 :
— + + — — + +
Entre 10 600 et 44 700
tonnes de CO2/an (Quantité de (Quantité trop (Pilotes à ce (l’usine de production (Capacité de
(Des pilotes
(moyenne de 17 ISDND = l’ISDND trop permettant de élevée ; Usine jour ; projet de méthanol par traitement dépend
32 950 tonnes de diffuse et peu traiter de 30 000 à Carbon Recycling Audi : 3 086 reformage en Iran de la surface
38
CO2/an) importante par 75 000 tonnes International en tonnes de produit 3030 tCH3OH disponible pour la
rapport aux CO2/an sont Islande : 4 500 CO2/an) par jour soit une culture)
besoins en CO2 : opérationnels) tonnes de CO2/an) consomamtion de
1,7Mt CO2/an en 4 166 tonnes de
moyenne sur CO2/j
Weyburn entre
2000 et 2010)
Teneur en CO2
De 25 à 45 % — — ++ ++ — ++
(sans traitement)
> 90 % (après
++ ++ ++ ++ ++ ++ ++
traitement)
CH4 (de 50 à 75 %) — — — — ++ ++ ●
Eau (de 2 à 7 %) + — + ++
H2S — — — — — ++
N2 — — + ● ●
O2 — — + + —
H2 — — ++ ++ — ●
Métaux lourds ● — — — —
Pour le procédé de méthanation, le pilote d’Etogas a utilisé comme intrant du CO2 provenant d’un site
de production de biogaz. Les résultats ont été positifs, avec un effluent de sortie contenant près de 93
% de méthane et correspondant aux caractéristiques du réseau de gaz allemand.
La technologie de reformage du méthane avec de l’eau et du CO2 est industrialisée depuis quelques
années. La présence de méthane dans le gaz entrant est favorable au procédé.
Pour les autres voies étudiées, la présence de CH4 et autres composés affectent la réaction
(sensibilité des catalyseurs) et/ou diminuent la productivité.
Le choix d’une voie de valorisation du CO2 appropriée dépend de nombreux paramètres qui sont à la
fois propres à l’installation de traitement des déchets (caractéristiques des déchets, localisation,
quantité et qualité des fumées, etc.) et spécifiques à la voie de valorisation choisie (maturité
technologique, efficacité énergétique, disponibilité des intrants nécessaires, acceptabilité sociale…).
Ce choix est éminament lié au marché actuel et potentiel (stable ou en croissance).
Pour l’instant, un obstacle important à la valorisation du CO 2 des unités de traitement de déchets est
lié à sa pureté. Des recherches sont en cours pour que certaines voies de valorisation puissent
fonctionner directement avec des fumées de combustion. Celles qui necessitent un CO 2 d’une pureté
élevée, sont pénalisées économiquement par les coûts supplémentaires liés au captage du CO 2.
Dans le secteur du traitement de déchets et au niveau économique, les voies préférentielles visant à
valoriser le CO2 peuvent aujourd’hui suivre des stratégies de :
- limitation des coûts : la minéralisation ou la récupération assistée de pétrole par exemple offrent
des coûts de traitement du CO2 de moins de 100€/tonne CO2. Ces coûts sont cependant à regarder
sur l’ensemble de la filière. Si l’on rajoute les étapes de captage (compris entre 40 et 60€/tCO2
captée) le coût total de traitement d’une tonne de CO2 (correspondant aux émissions totales d’une
tonne de déchets d’ordures ménagères incinérée) est de l’ordre de 135€ dans ce cas …. Ce qui reste
plus élevé que le coût de traitement actuel d’une tonne de déchets par incinération ! (404)
- générer des produits à forte valeur ajoutée : l’acide acrylique généré par hydrogénation du CO2
permet un bénéfice net proche de 1500€/ t CO2 utilisé.
- anticipation de coûts à venir liés à des taxes règlementaires par exemple. Différentes voies de
valorisation permettent globalement de réduire l’émission de CO 2 et donc de limiter l’impact de taxe
carbone. Il s’agit par exemple de l’EOR, la géothermie profonde, la minéralisation, la culture de
microalgues, la synthèse organique de carbonates cycliques qui ont un rapport « quantité de CO2
émis par quantité de CO2 valorisé » inférieur à 1.
Les technologies étudiées évoluent au quotidien grâce aux recherches menées et à l’évolution du
contexte économique, politique, social et environnemental.
Les avancées technologiques des voies actuellement en phase de R&D et l’industrialisation à venir de
techniques pour le moment à l’échelle pilote vont offrir de plus grandes possibilités pour le secteur du
traitement des déchets.
L’activité de traitement des déchets émettrait annuellement au niveau nationale de l’ordre de 35Mt de
®
CO2 ….d’après les estimations calculées par la méthode Bilan Carbone à partir des quantités de
déchets produites et traitées en France.
De l’ordre de 83% de ces émissions totales sont canalisées, soit près de 30Mt de CO 2. Cette quantité
de carbone est particulièrement intéressante puisqu’elle peut faire l’objet de potentielle valorisation
directement, ou après transformation chimique ou biologique.
Parmi les voies actuellement au stade industriel, la récupération de pétrole (EOR) utilisant du CO2
consommerait au niveau mondial environ 70 MtCO 2 (d’une pureté requise de 95%). Elle offre un
potentiel de 275Mt à l’horizon 2050. Son utilisation sur le sol français reste néanmoins limitée. Au
contraire, la récupération assistée de la chaleur géothermique profonde à l’aide de CO2 a un
potentiel de développement en France. Cette technique se trouve pour le moment dans une phase de
recherche et développement et pourrait atteindre le stade industriel à l’horizon 2030. Ces deux voies
sont intéressantes d’un point de vue stockage de CO2 puisqu’elles génèrent de l’ordre d’une demi-
tonne de CO2 par tonne de CO2 utilisé (qui se retrouve en partie stocké de façon permanente).
Les utilisations industrielles directes de CO2 sous forme de solvant, d’agent inerte, de fluide
réfrigérant, d’agent « gonflant », de neutralisant chimique, etc.…sont nombreuses mais restent
limitées quantitativement. Le marché mondial utilise actuellement près de 20 millions de tonnes de
CO2 , soit 0,06% des émissions annuelles de CO2 d’origine anthropique.
En revanche, l’usage futur du CO2 en synthèse chimique organique (sans considérer les produits à
valeur énergétique) pourrait atteindre 500 millions de tonnes par an. Actuellement, les voies
industrialisées concernent par exemple l’urée fabriquée depuis plus de 40 ans (de l’ordre de 135-138
millions de tonnes de CO2 valorisé par an), mais aussi l’acide salicylique, les carbonates cycliques…
Les améliorations de ces procédés portent notamment sur l’utilisation de CO2 dilué et contenant des
impuretés. A noter que ces réactions de synthèse organique (urée, polymères et carbonates
cycliques) semblent peu intéressantes dans l’objectif unique de diminuer le bilan CO 2. La synthèse de
l’urée génère en effet plus de 2 tonnes de CO2 par tonne de CO2 utilisé. Pour la production de
polymère, ce ratio se monte à 5,5.
L’emploi de CO2, provenant de gaz de combustion préalablement chauffé, pour produire du gaz de
synthèse (CO+H2) à partir de méthane dans les procédés de reformage, est intéressant du point de
vue environnemental : deux gaz à effet serre sont utilisés comme réactifs. En France, pour améliorer
la technique, la recherche concernant le reformage porte aussi bien sur l’amélioration du procédé
(catalyseurs, réacteurs) que sur des filières telles que celle de la transformation de biogaz issu de la
biomasse (en sortie d’un méthaniseur, composé à 50 % de CH 4 et 50 % de CO2) en gaz de synthèse
puis en biodiesel via le procédé Fischer-Tropsch.
La culture de microalgues consiste à se servir du CO2 comme d’un « engrais carboné » nécessaire
au développement de la matière organique. Elle présente des atouts : utilisation de l'énergie solaire,
reconversion de zones industrielles en déclin, non compétitivité avec des terres agricoles, traitement
potentiel des eaux usées,… mais doit faire face à une complexité de mise en œuvre, des coûts
d’investissement et de production élevés associés à de fortes consommations en eau et en énergie.
La quantité de CO2 nécessaire à cette culture en moyenne est de l’ordre 800 kg de CO 2 par hectare et
par jour.
Actuellement, les applications industrielles rentables des micro algues concernent la synthèse de
molécules à haute valeur ajoutée.
Les voies classées au stade « pré industriel », ayant un potentiel de développement industriel sous
les 5 ans concernent des variantes des techniques précédemment citées. Il s’agit par exemple de la
récupération assistée de gaz naturel dans les veines de charbon, de synthèse organique de
carbonates cycliques, de polymères … Dans ces différentes synthèses organiques, l’enjeu principal
D’autres voies, en cours de développement sont testées ou améliorées sur des unités pilotes. Leur
développement industriel reste étroitement lié au contexte économique, réglementaire et politique.
La minéralisation du CO2 consiste à faire réagir le CO2 avec des oxydes de magnésium ou de
calcium pour produire des produits inertes et stables : les carbonates (MCO3). Cette réaction lente
naturellement nécessite d’être accélérée pour une application à l’échelle industrielle. Elle peut
demander des pressions allant jusqu’à 150 Bar en minéralisation aqueuse mono étape et des
températures de 500°C pour une minéralisation gaz- solide… Elle offre néanmoins une possibilité
d’utilisation de fumées industrielles directement sans utilisation de catalyseurs. Cette solution est
intéressante de par la disponibilité naturelle des oxydes de magnésium ou de calcium et par le
stockage « permanent » du CO2 qui en résulte (bilan carbone favorable). La minéralisation est une
technique appropriée pour la filière de traitement de fumées ou de déchets : des usines de
carbonatation utilisant les résidus de déchets urbains traités par incinération fonctionnent déjà et
fabriquent des granulats valorisables en travaux publics.
L’hydrogénation (réaction chimique avec addition d’une molécule de dihydrogène) du CO2 permet
d’obtenir des produits à valeur énergétique ainsi que des produits chimiques : méthanol, éthanol,
hydrocarbures…. A ce jour, cette technologie n’est pas compétitive économiquement par rapport à la
fabrication de produits issus de la pétrochimie mais sera d’autant plus intéressante commercialement
que les produits obtenus seront valorisables et que l’énergie utilisée proviendra de ressources
renouvelables (surplus non consommé d’énergie solaire ou éolienne par exemple).
La production d’algo carburant par la culture d’algues peut utiliser des effluents industriels peu
concentrés en CO2. Elle présente un potentiel de croissance très important à l’horizon 2020. Le
développement de ce marché, qui offre une alternative aux produits pétroliers, est dépendant des
conditions économiques et de la volonté politique.
Il s’agit par exemple des techniques permettant de produire des hydrocarbures de synthèse et des
composés oxygénés telles que d’Electrolyse, qui correspondent à la réduction électrochimique du
CO2, ou la photoélectrolyse.
La thermolyse, qui utilise la chaleur solaire pour décomposer le CO2 nécessite des infrastructures
conséquentes et des températures élevées (>1200°C). En France pays pionnier qui possède un
savoir-faire reconnu dans le domaine de la thermochimie (four solaire d’Odeillo), les recherches se
concentrent sur l’élaboration/caractérisation de matériaux, l’optimisation des rendements chimiques et
énergétiques, le développement de réacteurs solaires et la réalisation d'expérimentations afin
d’évaluer les performances à grande échelle.
En biocatalyse, le CO2 peut servir de réactif et être transformé en molécules organiques d’intérêt
pour la production d’énergie, de biocarburants ou encore de substances pharmaceutiques. Une
avancée significative au niveau de la recherche et notamment une meilleure compréhension des
mécanismes et le développement de biocatalyseur sont nécessaires pour permettre un déploiement
de cette voie de valorisation.
En pratique, pour valoriser le CO2 issu des fumées d’incinérateur, deux options sont envisageables. Il
est possible de mettre en place une culture de microalgues ou de traiter les fumées pour utiliser le
CO2 au sein d’une autre technologie plus exigeante en termes de qualité.
En ce qui concerne le CO2 issue d’une ISDND, les options directes sont la culture de microalgues ou
la mise en place d’un dispositif de traitement des fumées pour supprimer les impuretés. La présence
de méthane au sein des gaz générés conduit naturellement à certaines techniques. Les voies
préférentielles sont la méthanation (production de CH4) et le reformage du méthane avec de l’eau et
du CO2 (nécessitant du CH4 en grande quantité). Pour les autres voies étudiées, la présence de CH 4
et autres composés affectent la réaction (sensibilité des catalyseurs) et/ou diminuent la productivité
Dans le secteur du traitement de déchets et au niveau économique, les voies préférentielles visant à
valoriser le CO2 peuvent aujourd’hui suivre des stratégies de :
- limitation des coûts : la minéralisation ou la récupération assistée de pétrole par exemple offrent des
coûts de traitement du CO2 de moins de 100€/tonne CO2. Ces coûts sont cependant à regarder sur
l’ensemble de la filière. Si l’on rajoute les étapes de captage (compris entre 40 et 60€/tCO2 captée) le
coût total de traitement d’une tonne de CO 2 (correspondant aux émissions totales d’une tonne de
déchets d’ordures ménagères incinérée) est de l’ordre de 135€ dans ce cas …. Ce qui reste plus
élevé que le coût de traitement actuel d’une tonne de déchets par incinération !
- générer des produits à forte valeur ajoutée : l’acide acrylique généré par hydrogénation du CO 2
permet un bénéfice net proche de 1500€/ t CO2 utilisé.
- anticipation de coûts à venir liés à des taxes règlementaires par exemple. Différentes voies de
valorisation permettent globalement de réduire l’émission de CO 2 et donc de limiter l’impact de taxe
carbone. Il s’agit par exemple de l’EOR, la géothermie profonde, la minéralisation, la culture de
microalgues, la synthèse organique de carbonates cycliques qui ont un rapport « quantité de CO2
émis par quantité de CO2 valorisé » inférieur à 1.
Les technologies étudiées évoluent au quotidien grâce aux recherches menées et à l’évolution du
contexte économique, politique, social et environnemental.
Les avancées technologiques des voies actuellement en phase de R&D et l’industrialisation à venir de
techniques pour le moment à l’échelle pilote vont offrir de plus grandes possibilités pour le secteur du
traitement des déchets.
Ordures ménagères 2 183 265 Proportion "moyenne française" utilisée. Poids de 26% 14% 55% 1% 3% 1%
moyenne déchets en mélange (2160kt) + textile (23kt)
Divers non 2 310 812 Proportion "moyenne française" utilisée 50% 0% 0% 50% 0% 0%
combustible et non
fermentescible
Végétaux 5 546 456 Le poids inclus les déchets d'espace vert 17kt et le bois 2% 32% 66%
5 530kt.
Hypothèse : répartition de traitement du bois est utilisée
Source : * :(2) - ** : (8)- Données par défaut