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UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL

LA DÉCENTRALISATION AU MALI :
MUTATIONS POLITIQUES LOCALES ET CHANGEMENTS SOCIAUX

MÉMOIRE
PRÉSENTÉ
COMME EXIGENCE PARTIELLE
DE LA MAÎTRISE EN SCIENCE POLITIQUE

PAR
SIMON GODIN-BILODEAU

FÉVRIER 2010
UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL

Service des bibliothèques

Avertissement

La diffusion de ce mémoire se fait dans le respect des droits de son auteur, qui a
signé le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche
de cycles supérieurs (SDU-522 - Rév.01-2006). Cette autorisation stipule que
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cette autorisation n'entrainent pas une renonciation de [la] part [de l'auteur] à [ses]
droits moraux ni à [ses] droits de propriété intellectuelle. Sauf entente contraire,
[l'auteur] conserve la liberté de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il]
possède un exemplaire.»
AVANT PROPOS

La décentralisation représente un concept à géométrie variable pouvant prêter à


des interprétations multiples. La réflexion peut être posée du point de vue de
l'autonomie confiée à des pouvoirs locaux ou à des échelons inférieurs de
l'administration, de la mise en place de procédures de délibérations et de budgets
participatifs, de la subordination de l'appareil administratif par des organes élus par la
population, de la sous-traitance à des organismes communautaires de certaines charges
jusque-là assumées par l'État, de la privatisation des entreprises et des services publics
ou de la répartition des pouvoirs parmi les membres de J'exécutif (hauts fonctionnaires,
ministres, chef du gouvernement). Au Mali, les questions soulevées par la
décentralisation concernent avant tout les paramètres hérités des prérogatives de
commandement des agents de l'administration territoriale et du «centralisme
démocratique» qui régit les rapports entre militants de la base jusqu'au sommet du parti
unique. Le système prend la forme d'une pyramide administrative inspirée des rapports
de subordination hiérarchiques qui prévalent dans l'armée et les compétences attribuées
aux pouvoirs locaux sont continuellement remodelées par la valse effrénée des
changements de garde à la tête de l'État.

Ainsi, le processus de communalisation en cours au Mali n'est en rien


comparable à celui déjà emprunté par les municipalités nord-américaines et les enjeux
liés aux rapports pouvoirs/territoire suivent des trajectoires historiques qui sont bien
distinctes à ce pays. La décentralisation malienne doit être située par rapport aux
différentes représentations du pouvoir qui prévalent dans l'imaginaire de la société ainsi
qu'aux divers mouvements de contestation qui ont secoué la scène politique depuis le
début des années 1990. La réforme s'inscrit dans l'esprit d'une doctrine participative
d'inspiration populiste (mobilisée par le gouvernement, mais aussi - dans une moindre
mesure - par les bailleurs de fonds) qui a pour ambition de répondre à certaines
revendications « populaires» par la refondation démocratique de la sphère publique au
niveau local. Les mutations de l'État sont étroitement imbriquées aux changements
iii

sociaux et les réformes de décentralisation constituent des aspects parmi d'autres des
processus de formation de l'État. À ce titre, la transformation des dispositifs
d'administration territoriale représente un sujet potentiellement « explosif» et les
conflits susceptibles d'émerger sont largement tributaires des rivalités entre les
différentes composantes sociales qui influencent le cours de la vie politique locale ou
nationale.

Le plus souvent, la littérature sur la décentralisation au Mali est le fait d'auteurs


provenant du milieu de la « coopération au développement» (institutions financières
internationales, agences de développement, organisations non gouvernementales,
consultants privés) et de la « société civile l » (mouvement associatif et groupes de
pression) où la réforme est presqu'exclusivement abordée sous l'angle des cibles de
développement à atteindre grâce à l'accroissement de la participation populaire et à
l'appropriation des initiatives locales de développement. La réforme est exposée en
citant une chronologie des actions déployées et en énumérant les mécanismes d'appui
mis à la disposition des acteurs impliqués dans le processus. L'analyse tend alors à être
focalisée sur la contribution des organismes de coopération internationale dans « la prise
en charge par la population de son propre développement », d'une manière telle que
l'institutionnalisation des pouvoirs d'État et l'action politique des acteurs est presque
entièrement passée sous silence. D'ailleurs, les communautés locales sont souvent
idéalisées d'après une image qui les conçoit comme des entités homogènes et sans
conflit dont les membres parlent tous d'une seule et même voix. La perspective adoptée
a pour effet d'occulter les luttes sociales et les rivalités entre acteurs qui se déploient
dans l'arène locale tout en proposant une analyse technicisée et dépolitisée des enjeux
par des exigences de « renforcement des capacités », « d'appui à la mise en œuvre» ou
de « bonne gouvernance ».

Notre intention est de montrer que les processus de décentralisation s'insèrent


dans des espaces aux rapports de force déjà bien structurés et que ces réformes sont

1 Sur les ambiguïtés liées à l'appellation « société civile}) dans le contexte malien, voir: Roy, 200Sa.
IV

susceptibles d'engendrer des mutations politiques pouvant (ré-)activer certains conflits


locaux. La transformation des structures d'ancrage du pouvoir central dans la sphère
locale entraîne une recomposition des luttes sociales et un repositionnement des acteurs
dans l'arène politique locale. La décentralisation ne relève pas simplement de
paramètres techniques ou jurid iques et prend sa source dans une plural ité d'idéologies
qui façonnent l'action politique en imaginant et réinventant des modalités d'exercice du
pouvoir tant au niveau de la sphère locale que de l'État central. Si l'influence de la
pensée néolibérale sur la conception contemporaine des politiques publiques n'est plus à
démontrer, celle apportée par le courant néo-traditionaliste reste encore peu abordée
dans la recherche en sciences sociales. Pourtant, l'idéologie communautaire mobilisée
par l'État dans la promoüon de sa réforme n'est pas sans conséquence sur la voie
localement empruntée par la décentralisation. Les rapports entre pouvoirs locaux et
pouvoirs d'État font l'objet de différentes lectures par les acteurs (suivant leur
positionnement stratégique dans l'arène locale) et sont constamment retravaillés par les
groupes sociaux en lutte pour le contrôle des nouvelles instances municipales. À ce titre,
la question domaniale constitue sans doute la démonstration par excellence des divers
rapports de force entre acteurs sociaux qui se dessinent dans le nouveau contexte de
pluralisme juridique et institutionnel apporté par la décentralisation. L'appropriation de
la terre est intimement liée à l'action politique (ou à la capacité d'influencer les
décideurs) et l'arène communale devient un site de confrontation/collaboration entre
di fférents « groupes stratégiques» impliqués dans les enjeux fonciers.

Nous tenons à remercier plusieurs personnes qui ont contribué de différentes


façons à la réalisation de ce mémoire. Nous sommes d'abord redevables à notre famille
et à nos amis, sans qui nos études à la maîtrise n'auraient jamais été possibles. Nous
remercions Mme Chantal Rondeau, professeure au département de science politique de
l'Université du Québec à Montréal, qui nous a largement appuyé lors de la phase
préparatoire au projet de recherche. Nous soulignons aussi le concours apprécié des
membres du personnel de la Direction nationale de l'agriculture (DNA) du Mali, de
l'antenne du Projet de réduction de la pauvreté (PRP) de Kolokani et de l'ONG Kilabo à
v

Bamako qui nous ont introduit aux enjeux soulevés par la décentralisation. Une mention
particulière à Mme Lydia Rouamba, dont les corrections, les observations et les
commentaires ont été vivement appréciés tout au long de nos travaux de recherche.
Enfin, nous tenons tout spécialement à remercier notre directrice de recherche, Mme
Nancy Thede, professeure au département de science politique de l'Université du
Québec à Montréal, sans qui la rédaction de ce mémoire n'aurait jamais pu se réaliser.
Ses pistes de réflexion et ses judicieux conseils nous ont été d'un grand secours pour
surmonter les impasses et peaufiner notre analyse.
TABLE DES MATIÈRES

AVANT PROPOS ii
LISTE DES ABRÉVIATIONS __ ._ _._ ix
RÉSUMÉ xi

INTRODUCTION _ _ _ .

CHAPITRE 1: HISTORIQUE DE L'ADMINISTRATION TERRlTORIALE ET DES


RÉFORMES DE DÉCENTRALISATION _ 23

1.1 Les modalités d'occupation du territoire pendant la période précoloniale 23


1.2 La colonisation française et l'invention des pouvoirs « coutumiers » _ _ 25
1.3 La décentralisation et la « révolution active» de Modibo Keïta _ 27
lA Les pouvoirs locaux sous le régime militaire et le parti unique de Moussa Traoré ~ .. 29
1.5 Conclusion 34

CHAPITRE Il : CONTEXTE ET DESCRlPTION DE LA RÉFORME __ _ . 37

2.1 La décentralisation dans la perspective des mouvements sociaux de 1980-1990 37


2.1.1 L'ajustement structurel et l'essor de la « société civile» locale _ 37
2.1.2 Le « problème du Nord» et les Accords de Tamanrasset_._ _ _ 38
2.1.3 Les « événements» de mars 1991 et la naissance du « mouvement démocratique» 39
2.104 La décentralisation à la Conférence nationale souveraine de 1991 _ 40
2.1.5 La crise de légitimité de l'État et la montée des revendications sociales. __ _._ 42
2.1.6 La décentralisation: impulsion du gouvernement ou des bailleurs de fonds ? 43
2.2. La décentralisation au regard des formes contemporaines du populisme 45
2.2.1 Quelques précisions sur les idéologies populistes _ 45
2.2.2 L'idéologie participative _. __ _ _ 46
2.2.3 L'idéologie communautaire _ __ 47
2.3 Description de la réforme _ 51
VIl

2.3.1 Le découpage des communes _ 53


2.3.2 Les transferts de compétences _. .__ .. __ _ _ _ __ . 55
2.3.3 Les dispositifs d'appui ._ _. _.. _ _.. __ . 56
2.4 Conclusion_ .__ __. .__ __ __ __ ._ 58

CHAPITRE III : LES STRATÉGIES D'ACTEURS DANS LE CADRE JURIDIQUE ET


INSTITUTIONNEL PLURALISTE DE LA DÉCENTRALISATION 59

3.1 Les administrateurs civils face à la décentralisation _. _ _.. 61


3.2 Les autorités « coutumières» face à la décentralisation 65
3.3 La « présidentialisation» des maires et le monopole de l'arène locale par les élus __ _ 71
3.3.1 Les maires face aux dispositifs participatifs de la réforme _. . 72
3.3.2 Les rapports entre conseillers de la commune dans le contexte du multipartisme 76
3.3.3 Complicité et conflit entre les membres associatifs et les élus ._ . 78
3.4 La gestion budgétaire et financière des communes . .. _ ._ 80
3.4.1 La collecte des impôts depuis la décentralisation._ _ _._ __ 80
3.4.2 La gestion du budget par les maires _.. __ _ _._ .. 83
3.5 La décentralisation et les mutations de la gestion domaniale _ ._ _ _.. _ 85
3.5.1 La fonction publique nationale et l'attribution de titres d'occupation par l'État.. 85
3.5.2 La maîtrise coutumière du territoire par des chefs tignagers _._ .. _.. . _ __ 87
3.5.3 Les autorités communales face à la gestion décentralisée des affaires foncières.. . 88
3.5.4 Conclusion 91
3.6 Conclusion _ __ __ .. _ _ __ .. __ . .. _ _ _ _ ._._. __ . 92

CHAPITRE IV : REPOSITIONNEMENT DES ACTEURS ET RECOMPOSITION DES


DYNAMIQUES LOCALES PAR LA RÉFORME: L'EXEMPLE DE L'APPROPRIATION
FONCIÈRE 93

4.1 Découpage territorial et recomposition des conflits locaux autour du foncier .__ _._ 96
4.1.1 L'influence de l'administration civile dans te processus de découpage_ .. .. _._.......... 99
4.1.2 L'intervention des chefs « coutumiers» et leurs rapports au foncier. ._ __ _. 100
4.2 L'instrumentalisation de la commune par les rivalités foncières.. _._ __ .. _.. _ 104
viii

4.2.1 La réactivation des hiérarchies statutaires par la décentralisation au Nord-Mali __ 105


4.2.2 RaIl iements clienté1istes et conflits de « propriété» dans la région de Mopti _... 107
4.2.3 La renaissance du cantonnat dans la région de Kayes ._ _. 110
4.2.4 Lotissement des communes et recomposition sociale en périphérie de Bamako _.. __ III
4.3 Conclusion ._ _._ __ 113

CONCLUSION _. ._ _.. __ _. __ . __ .. _ __ .__ 115


ANNEXES .. .__ __ ._ .__ .. _ __ _. __ 123
BIBLIOGRAPHIE 139
LISTE DES ABRÉVIATIONS

ACI Agence de cession immobilière


ADEMA-PASJ Alliance pour la démocratie au Mali/Parti africain pour la solidarité et lajustice
ADIDE Association des diplômés initiateurs et demandeurs d'emploi
AEEM Association des élèves et étudiants du Mali
AGETIPE Agence d'exécution des travaux d'intérêt public pour l'emploi
AMDH Association malienne des droits de l'Homme
AMM Association des municipalités du Mali
ANICT Agence nationale d'investissement des collectivités territoriales
APE Association de parents d'élèves
ARLA Armée révolutionnaire de 1ibération de l' Azawad
ASACO Association de santé communautaire
AV Association villageoise
BEC Bureau exécutif central
CAFO Coordination des associations et ONG féminines du Mali
CCA/ONG Comités de coordination des actions des ONG
CCC Centre de conseil communal
CCN Cellule de coordination nationale
COI Commissariat au développement institutionnel
CLO Comité local d'orientation
CNO Comité national d'orientation
CRO Comité régional d'orientation
CSR Comité de suivi régional
CMDT Compagnie malienne de développement du textile
CMLN Comité militaire de libération nationale
CNID Comité national d'initiative démocratique
CNRA Commission nationale des réformes administratives
CRN Conseil de réconciliation nationale
CSCOM Centres de santé comm unautai re
CTA Collège transitoire d'arrondissement
CTSP Comité transitoire de salut du peuple
DNCN Direction nationale de la conservation de la nature
DNCT Direction nationale des collectivités territoriales
DNAT-CT Dispositif national d'appui technique aux collectivités territoriales
FENU Fonds d'équipement des Nations Unies
FIAA Front islamique arabe de l' Azawad
FICT Fonds d'investissement des collectivités territoriales
FPLA Front populaire de libération de l'Azawad
GIE Groupements d'intérêt économique
x

GLEM Groupe local d'études et de mobilisation


GRAD Groupe recherche actions pour le développement
GREM Groupe régional d'études et de mobilisation
GRM Gouvernement de la République du Mali
HCCT Haut conseil des collectivités territoriales
MARP Méthodes adaptées de recherche participatives
MATCL Ministère de l'administration territoriale et des collectivités locales
MATS Ministère de l'administration territoriale et de la sécurité
MDD Mission de décentralisation et déconcentration
MFUA Mouvements et Fronts unifiés de l' Azawad
MPA Mouvement populaire de l'Azawad
ODHD-LCPM Observatoire du développement humain dùrable et de la lutte contre la pauvreté
ODR Opération de développement rural
ONG Organisation non gouvernementale
PAS Programme d'ajustement structurel
PACT Programme d'appui aux collectivités territoriales
PCASED Programme de coordination et d'assistance à la sécurité et au développement
PDESC Programme de développement économique, social et culturel
PDUD Projet de développement urbain et décentralisation du Mali
PNUD Programme des Nations Unies pour le développement
PRODEC Programme décennal de l'éducation
PRODEJ Programme décennal de développement de lajustice au Mali
PRODESS Programme de développement sanitaire et social
PRP Projet de réduction de la pauvreté
PSP Parti progressiste soudanais
SECO/ONG Secrétariat de coordination des ONG
TDRL Taxe de développement régional et local
UDPM Union démocratique du peuple malien
UMOA Union monétaire ouest-africaine
UNFM Union nationale des femmes du Mali
UNJM Union nationale des jeunes du Mali
UNTM Union nationale des travailleurs du Mali
USRDA Union Soudanaise-Rassemblement Démocratique Africain
ZAER Zones d'animation et d'expansion rurale
RÉSUMÉ

Au Mali, les arènes locales sont composées d'une hiérarchie de pouvoirs locaux et de
pouvoirs d'État qui s'assemblent et se superposent entre eux. Les rapports entre ces
pôles d'autorité se trouvent au carrefour de plusieurs logiques (locales et étatiques) dont
les légitimités sont transformées, réinterprétées et instrumentalisées par les acteurs qui
évoluent dans la sphère locale. Avec la réforme de décentrai isation engagée sous la
présidence d'Alpha Oumar Konaré (1992-2002), la création de nouvelles communes
recouvre les anciens rapports de pouvoirs/territorialités et obligent les acteurs à se
repositionner dans l'arène locale en redéfinissant leurs modes d'action politique.

Ce mémoire examine les interactions entre les principaux acteurs et les conflits entre
groupes sociaux suscités par la décentralisation en les situant d'après les modalités
d'institutionnalisation de la sphère locale par l'ancien régime. Le cadre théorique adopté
s'inspire des travaux de la sociologie historique néowébérienne et de l'anthropologie
politique des espaces publics. Partant de la conceptualisation de la décentralisation en
tant qu'enjeu de pouvoir de l'arène locale, nous considérons que cette réforme suscite
des luttes entre « groupes stratégiques» qui la transforment, tout en l'intégrant dans des
pratiques et des structures de pouvoir antérieures.

Nous illustrons ce processus d'hybridation des dynamiques sociales aux pouvoirs


municipaux en prenant l'exemple de la recomposition des conflits locaux et du
repositionnement des acteurs communaux autour des enjeux fonciers. La
décentralisation tend à bouleverser les rapports sociaux liés à la propriété et à faire dù
contrôle des nouvelles collectivités un enjeu majeur de la gestion domaniale. Les
communes deviennent alors un site de confrontation entre différents groupes sociaux
(autochtones/allochtones, propriétaires/non-propriétaires) qui entrent en lutte pour
l'accès aux ressources foncières.

Mots-clés: décentralisation; pouvoirs municipaux; arène locale; conflits fonciers;


sociologie historique; Mali.
INTRODUCTION

L'Afrique des Conférences nationales qui se dessine au début des années 1990
voit un essor rapide du multipartisme dans un paysage politique marqué par des régimes
autoritaires et l'omniprésence de l'armée. Les réformes de décentralisation initiées au
Mali s'inscrivent dans cette tendance lourde allant vers la libéralisation de l'espace
politique à l'échelle du continent. Depuis l'indépendance en 1960, la présence de l'État
dans les régions rurales se limitait aux contraintes des administrateurs civils, des
militaires, des douaniers et des percepteurs d'impôt. Les hauts fonètionnaires de la
capitale prenaient les décisions pour l'ensemble du tenoitoire et les comités du parti
unique dispersés à tous les niveaux noyautaient la scène politique. Dans le contexte des
plus récentes réformes de décentralisation mises en œuvre à compter de 199 l, la
dévolution de certains pouvoirs de l'appareil d'État à des autorités locales élues par la
population représente à la fois une rupture avec le « centralisme démocratique» du parti
unique et une remise en cause des structures de commandement héritées de la
colonisation. La transition démocratique en cours au niveau national est
progressivement étendue au fonctionnement des institutions locales sur l'ensemble du
pays. Un système administratif reposant jusque-là sur la répression est appelé à laisser
place à une arène plus ouverte aux débats offrant davantage de libertés aux citoyens.

L'aspiration à un partage plus équitable des pouvoirs entre l'administration


centrale et les communautés locales prend ses origines dans les revendications portées
par divers mouvements sociaux qui ont précipité la chute de la dictature lors des
« événements» de mars 1991. Le thème de la décentralisation s'est rapidement trouvé
en tête de l'agenda des dirigeants de la Troisième République qui a succédé au parti
unique, dont la plupart se réclamaient de la « société civile» et avaient milité en faveur
d'une refondation du système politique sous la houlette d'associations militantes. Sous
la présidence d'Alpha Oumar Konaré, le gouvernement propose de repenser les rapports
entre pouvoirs locaux et pouvoirs d'État d'après la nouvelle trajectoire démocratique
dans laquelle vient de s'engager le pays. Il s'agit d'une politique de refondation de
2

l'État s'inscrivant dans un vaste processus de changement social ayant pour finalité de
rompre avec l'héritage laissé par les précédents régimes coloniaux et postcoloniaux :

La Décentralisation malienne est définie par ceux qui l'ont mise en œuvre comme
« une révolution institutionnelle» qui, dans une perspective de « consolidation du
processus démocratique », définit « avant tout un esprit et une logique de
gouvernance », et vise donc, par le biais d'une reformulation des rapports entre État
et citoyens, à une « intégration sociale, économique et culturelle» générale
supposant «la prise en compte et la gestion ...(de tous les) ... déséquilibres
économiques, sociaux et culturels ... qui s'ilfustrent dans la société malienne »,
notamment des « cassures ... entre le traditionnel et le moderne, le rural et l'urbain,
l'alphabétisé et l'analphabète, le riche et le pauvre, le Nord et le Sud, t'indigène et
l'importé ... »(Fay, 2006, 103)

Prenant la forme d'une « seconde indépendance », la décentralisation malienne se veut


postcoloniale et propose de s'inspirer des formes précoloniales d'administration du
territoire. Cependant, la réforme entreprise au Mali fait aussi partie de l'ajustement
structurel et des «conditionnalités » imposées par les bailleurs de fonds pour accéder à
leur aide financière. Le désengagement économique de l'État, la démocratisation de la
vie politique locale et la prise en charge des dépenses de développement par la
population s'inscrivent dans les pratiques de « bonne gouvernance » encouragées par les
institutions financières internationales par le biais des réformes de décentralisation.
L'appropriation du développement et l'introduction de modes participatifs de gestion
permettraient de rendre la parole aux acteurs politiques locaux et de «libérer» leur
potentiel d' initiati ve des mailles jugées trop pesantes de l'appareil d'État.

Question de recherche

Au Mali, les arènes locales sont composées d'une hiérarchie de pouvoirs locaux
et de pouvoirs d'État qui s'assemblent et se superposent les uns aux autres au fil des
reconfigurations introduites par les différents régimes qui se sont succédés à la tête du
pays. En créant de nouvelles instances communales, la décentralisation recouvre ces
anciens pouvoirs en redéfinissant les pôles d'autorité, les formes d'articulation aux
autres pouvoirs et les logiques qui conduisent leurs modes d'action politique. Ainsi, il
importe de bien distinguer l'espace politique préexistant à la réforme des nouvelles
3

communes (ou collectivités territoriales) récemment introduites par le gouvernementau


sein des communautés locales. Par la notion de « décentralisation », nous renvoyons à
«l'organisation des activités de l'administration centrale en dehors du siège du
gouvernement soit par le biais de mesures administratives prévoyant le transfert de
ressources et de responsabilités à des agents détachés de l'administration centrale, soit
par le biais à caractère politique prévoyant l'attribution par le gouvernement de
pouvoirs, de responsabilités et de ressources spécifiques à des instances administratives
locales. » (Fisette, L990, 3) La réforme malienne réunit ces deux. cas de figure à travers
le réaménagement des pouvoirs des services déconcentrés de l'État et la dévolution de
certains champs de compétences du gouvernement central à des autorités locales élues
par la population. Toutefois, nous porterons plus précisément notre attention à la
seconde dans la mesure où il s'agit d'un phénomène totalement nouveau par rapport aux
précédentes réformes qui, nous le verrons plus loin, représentaient surtout un processus
de déconcentration territoriale de l'appareil bureaucratique centralisé dans la capitale.

La refonte de l'administration territoriale entreprise sous la présidence d'Alpha


Oumar Konaré fait encore l'objet de nombreux débats sur la scène politique et constitue
l'un des principaux héritages laissés par son régime. Le choix de notre sujet de
recherche fait suite à deux séjours au Mali à l'automne 2005 et à l'été 2007 où nous
avons été emmené à nous familiariser avec la décentralisation et ses enjeux. Nous avons
eu l'occasion de constater que la transformation des relations entre le «centre» et la
« périphérie» de l'État représente un projet de société mobilisateur qui suscite un vif
intérêt tant auprès de l'opinion publique que des chercheurs. Dans la perspective de
traiter des nouvelles dynamiques locales entraînées par la décentralisation, notre
questionnement se situera à deux niveaux. D'abord, il s'agira de porter attention à la
façon dont les relations entre le gouvernement central et les communautés locales ont
été modifiées par l'introduction d'autorités administratives élues dans les arènes locales.
Comment les interactions entre pouvoirs d'État et pouvoirs locaux se sont trouvées
reconfigurées par la réforme 1 Quel impact a engendré la création des nouvelles
communes dans les rapports de force entre l'administration territoriale et les élus
4

locaux? Les communautés locales disposent-elles de plus grands espaces d'autonomie


par rapport à l'État grâce à la mise e~ place des nouvelles instances locales suscitées par
la décentralisation ? Ensuite, nous souhaitons questionner la façon dont la venue des
communes reformule les modes d'action et de revendication des groupes sociaux
évoluant dans l'arène locale. Il s'agit d'interroger les interactions entre les acteurs des
différents pouvoirs locaux face à leur remodelage par les pouvoirs d'État. Comment
l'action politique «d'en bas» s'est-elle trouvée transformée par cette réforme venue
« d'en haut»? Quelles formes de collaborations et/ou de conflits entre acteurs sont
susceptibles d'émerger à la faveur de la décentralisation? Nous posons de façon
générale la question de l'institutionnalisation du nouveau régime dans la sphère locale et
de l'imbrication des logiques d'acteurs par rapport à celles des pouvoirs d'État. Notre
recherche débutera au moment où le parti unique fut renversé par l'armée en 1991,
couvrira toute la durée du mandat d'Alpha Oumar Konaré (1992-2002) et se terminera
avec la fin du premier mandat des élus locaux en 2004. Puisque les communes urbaines
qui existaient déjà avant la réforme (principalement à Bamako et dans les capitales
régionales) représentent des cas à part, nous nous intéresserons surtout aux nouvelles
communes rurales créées au cours de la décentralisation.

Par «communautés locales », «arènes locales» ou «sphère locale », nous


faisons référence aux espaces politiques de proximité formés d'une pluralité d'acteurs
en négociation permanente les uns par rapport aux autres et qui composent les
dynamiques dujeu politique local (Bierschenk et Olivier de Sardan, 1998,14). Avant la
réforme de décentralisation, les chefferies coutumières représentaient les principales
instances locales avec lesquelles transigeaient les pouvoirs d'État. Les prérogatives
coutumières conférées par l'État suivent une pluralité de cas de figure et peuvent être
reconnues de façon officielle (chefs de village, chefs de fraction, conseil de village, etc.)
ou officieuse (lignages détenteurs de propriétés coutumières, anciens chefs de cantons,
etc.). Quant aux nouvelles collectivités locales nées de la décentralisation, elies
regroupent ensemble plusieurs villages, quartiers ou fractions nomades et se voient
reconnaître des compétences spécifiques par la législation pour agir dans la sphère
5

locale. Les élus placés à la tête des communes sont destinés à· incarner la «volonté
populaire» des communautés et à prendre des décisions en leur nom. C'est sur ces
nouveaux pouvoirs locaux créés par la réforme et les rapports qu'ils entretiennent avec
les instances coutumières et les pouvoirs d'État que nous souhaitons porter l'essentiel
de notre analyse. Lorsque nous faisons référence à «l'appareil d'État» ou aux
« pouvoirs d'État », il s'agit principalement des administrateurs civils qui exercent les
prérogatives de puissance publ ique dans leur circonscription et dont les postes
quadrillent l'ensemble du territoire: «Les divers représentants locaux de
l'administration forment une couche sociale dotée d'intérêts propres, d'une
représentation propre de son statut et d'une assez grande liberté d'action face au pouvoir
central. » (Fay, 2000b, 129) La présence du gouvernement se fait aussi sentir à travers
l'intervention des agents des services déconcentrés de l'État dépêchés dans les antennes
locales des ministères. De plus, le rôle ambigu joué par les factions politiques et leurs
membres présents dans la sphère locale devra nécessairement être pris en compte. Il
s'agit de réseaux réticulaires qui englobent des députés, des ministres, des cadres de
partis ou des hauts fonctionnaires, pénètrent les intermédiaires placés à tous les niveaux
de la pyramide administrative de l'État et vont jusqu'aux plus petits détenteurs d'une
position politique dans l'espace local. En outre, des autorités religieuses, des
organisations non gouvernementales (ONG), des opérateurs économiques privés et toute
une gamme d'associations locales de développement apportent leur contribution aux
dynamiques locales. Malgré l'influence manifeste de ces multiples acteurs dans la vie
politique locale, les questions soulevées par la décentralisation se révèlent
particulièrement vastes et nous souhaitons concentrer notre analyse sur la
transformation des rapports de force entre pouvoirs locaux et pouvoirs d'État en
examinant les rapports qu'entretiennent les élus communaux avec l'administration
telTitoriale et la chefferie administrative coutumière.

Revue de littérature: la décentralisation et « l'idéologie participative» .

Nous proposons de diviser la littérature sur la décentralisation en plusieurs


courants qui nous apparaissent significatifs pour notre recherche, dans la mesure où ils
6

ont exercé une influence (que ce soit en terme de projet de société ou de cadre
d'analyse) sur la façon dont les réformes de l'administration territoriale ont été mises en
œuvre au Mali. L'unanimité de la « société civile », des « développeurs» et des
gouvernements à propos des politiques de décentralisation montre qu'une « idéologie
participative» s'est dessinée peu à peu dans l'imaginaire politique contemporain.
Néanmoins, cette apparence de consensus cache une juxtaposition de lectures de la
décentralisation où chaque acteur investit ces réformes de significations et d'objectifs
qui reflètent des projets de société distincts. Ainsi, « l'idéologie participative» des
différents auteurs que nous abordons se conçoit d'après un agenda politique, une grille
d'analyse des enjeux et une conception du rôle de chaque acteur qui expriment une
vision particulière des modalités et des buts poursuivis par la décentralisation.

La « tradition française » d'administration publique

L'administration publique de tradition française représente sans doute le courant


d'analyse le plus ancien ayant porté attention à la décentralisation en Afrique de l'Ouest
francophone. Les auteurs que nous associons à cette approche proposent de réorganiser
administrativement les relations entre le centre et la périphérie de l'État par la mise en
place de structures institutionnelles (s'inspirant du modèle français d'administration
territoriale) jugées plus favorables à la réussite des projets de développement :
« Répondant au double besoin de remédier à des dysfonctionnements des appareils
administratifs et de rapprocher l'administration des administrés, ces politiques sont
aussi vieilles que la centralisation du pouvoir [... ].» (Le Roy, 1997, 155-156). Cette
approche renvoie à une vision fonctionnaliste et spatiale des rapports institutionnels où
« il s'agit "d'articuler" le rôle normatif descendant de l'administration déconcentrée et
le rôle participatif remontant des communautés locales.» (Bertrand, 1997, 17) Les
théories du « droit pur » sur lesquelles repose ce courant traduit une approche formaliste
du développement correspondant à une tradition intellectuelle qui s'inscrit en continuité
avec l'expérience coloniale de la décentralisation (Fay, 2005, 146). Puisque les
anciennes colonies françaises ont hérité du modèle d'administration territoriale de la
métropole, les politiques de décentralisation récemment entreprises en Afrique de
7'

l'Ouest s'inspirent largement de l'expérience française dans ce domaine en raison de la


proximité administrative et juridique des deux systèmes.

Yves Prats et Pierre-François Gonidec dressent un inventaire des différentes


modalités de décentralisation pouvant être adoptées en illustrant de quelle façon la mise
en place de certaines structures administratives locales permet de créer un équilibre
entre l'autonomie des communautés et le rattachement à l'appareil national de
planification du développement. Les organisations traditionnelles doivent être
converties en «cellules de développement» qui entretiennent des rapports constants
avec l'appareil administratif et permettent de sortir les villages de leur isolement (Prats,
1973,37-38, 51-57). La création de nouveaux échelons de participation concédant des
pouvoirs aux communautés locales vise à favoriser un meilleur contact avec la vie
publique, à encourager la prise en charge du développement par les populations et à
susciter l'adhésion aux politiques du gouvernement (Gonidec, 1984,254-256). Pour ces
deux auteurs que nous associons à la tradition française d'administration publique; la
décentralisation est abordée d'après une perspective instrumentale liée à l'atteinte des
objectifs de développement fixés par le gouvernement. Ils adoptent une démarche
juridique d'une manière telle qu'il ne semble rien exister en dehors de l'intervention et
du contrôle de l'appareil d'État. De plus, la formation de ['État est appréhendée
uniquement d'après une logique d'extranéité s'inscrivant dans les rapports de
dépendance avec l'Occident. À la manière de Bertrand Badie (1992), ils conçoivent que
les « États périphériques» sont essentiellement le produit d'un mimétisme des
'structures juridiques des «États du centre ». Ainsi, la définition du concept de
décentralisation se limite à la norme juridique prescrite par la législation et l'analyse des
réformes ne prend pas en compte les dynamiques locales dans lesquelles elles
s'inscrivent'. En outre, cette approche ne porte aucune attention aux stratégies d'acteurs
et au contexte social dans lequel se déroule la décentralisation.

1 Face à celte approche [Jositiviste du droit, l'anthropologie juridique propose une analyse sociologique
qui prend en compte l'existence au sein des arènes locales de systèmes juridiques appartenant à des
«champs sociaux semÎ-autonomes» pouvant entrés en complémentarité ou en conflit avec le droit
étatique (Hesseling et Oomen, 2005 ; Le Roy, 2006 ; Dicko et Djiré, 2007),
8

Les théories de la gouvernance

Avec la reconceptualisation du développement en tenue de « gouvernance» et


de «lutte à la pauvreté », les préoccupations des bailleurs de fonds se concentrent
désormais vers le renforcement du cadre institutionnel des pays « en développement»
d'après une vision fonctionnaliste du rôle de l'État. L'échec des programmes de
développement est attribué à la centralisation exacerbée de l'administration publique et
la dévolution des pouvoirs de l'État à des autorités locales devient alors une priorité
(Venard, 1993,25-27; Osmont, 1997,103-106; Le Bris, 2003,111-113). La réduction
de la pauvreté serait indissociable des efforts de responsabilisation des populations dans
la prise en charge de leur développement et nécessiterait un large transfert de
compétences aux acteurs locaux. Le plus souvent, la littérature apparentée aux théories
de la gouvernance discute de la contribution de la décentralisation dans le
développement local ou de l'impact de ces réformes sur la gouvernance des institutions
au regard d'indicateurs d'imputabilité, de rendement ou de participation. La gestion des
services publics par les populations à la base (via la « société civile» et l'entreprise
privée) est estimée plus efficace et transparente que celle menée par l'appareil d'État:
« L' hypothèse sous-jacente est que la proximité est un facteur de "bonne gouvernance"
puisqu'elle met en relation directe le besoin social tel qu'il est vécu par le citoyen et la
décision publique qui y répond. » (Freyss; 2006, 37) Les réformes de décentralisation

\
représentent une composante essentielle du nouvel agenda axé sur la «bonne
gouvernance» et deviennent rapidement une des principales composantes des
« conditionnalités » des bailleurs d~ fonds. Sous couvert de « participation populaire»
et «d'action citoyenne », la dévolution des responsabilités du gouvernement à des
instances locales de proximité prend alors la forme d'une privatisation «par le bas» des
services à la population (Samaké, 2005).

Selon la Banque mondiale, la décentralisation contribuerait à rationaliser les


finances publiques (par l'accroissement des revenus) en incitant les contribuables à
s'acquitter des impôts pour assurer le maintien des services publics et en prélevant
directement au sein des communautés les ressources destinées au développement local:
9

"Accountability is often best promoted by establishing a clear and close linI< between
the costs and benefits if public services, so that the overall amount of expenditure
responsibility assigned to a level of government ideally will correspond to the amount
of revenues that level has its potential command." (Litvack et. al., 1998, 10) En
diffusant les responsabilités de l'État à différents niveau de l'administration, la
décentralisation offrirait davantage de liberté aux citoyens en introduisant une forme de
compétition entre différents fournisseurs de services publics : "Analysts employing
public choice approaches began to see democratic decentralization as an option which
offers something resembling a free market - bringing together « buyers » (citizens) and
« sellers » (decentralized authorities) in a setting where the wishes of the former can
impinge effectively on the latter." (Manor, 1999, 28) Les paradigmes théoriques de la
microéconomie tant célébrés par l'économie néoclassique (où les acteurs font des choix
rationnels en fonction de leurs intérêts dans un cadre institutionnel pluraliste) se
trouvent transposés en terme « d'appropriation» et de « participation» des populations
aux projets de développement. En confiant à des collectivités (administrées par des élus)
les charges jusque-là assumées par les administrateurs (nommés par le pouvoir central),
la décentralisation permettrait de réduire le déficit budgétaire de l'État tout en favorisant
l'essor d'une «culture managériale » dans la gestion des affaires locales 2• À des fins de
compétitivité et d'efficacité, les services publics (comme la collecte des ordures ou
l'adduction d'eau) sont de plus en plus confiés à des entreprises privées ou pris en
charge par des associations locales et des comités de gestion.

Les stratégies institutionnelles misant sur un développement endogène


entièrement pris en charge par des communautés locales autogérées (de Bruyne et
Nkulu Kabamba, 2001) expriment bien l'idéal envisagé par les théories de la
gouvernance où l'État se révèle pratiquement absent la sphère locale. Goran Hydén
relève quatre variables (l'autorité, l'imputabilité, la réciprocité et la confiance) qu'il
considère essentielles pour évaluer le degré de légitimité d'un système politique (c'est­

,2 L'obligation pour les communes du Mali de transiger avec des prestataires privés pour la réalisation des
projets financés par l' ANICT a suscité la création de plusieurs nouvelles entreprises et a doublé ou même
triplé le chiffre d'affaires des compagnies déjà ex.istantes (Diawara el. al., 2004, 52).
10

à-dire accepté par la majorité de la population) (1992, 12-14). La dévolution de


pouvoirs aux communautés « à la base» permettrait de rationaliser la gestion des
affaires locales tout en offrant davantage de poids aux revendications des groupes
sociaux marginalisés: « Dans ce sens, les politiques de décentralisation apparaissent
comme un des meilleurs moyens de renforcer la légitimité des institutions pol itiques au
sein des États africains, diminuant ainsi les risques de fragilité. » (Elong Mbassi, 2007,
235) Alors que l'administration publique de tradition française envisage la
décentralisation uniquement d'après le réaménagement des liens qu'entretiennent les
communautés locales avec l'État, les théories de la gouvernance ne cessent de souligner
l'importance du rôle de la société civile et du secteur privé aux côtés des élus locaux. La
décentralisation se révèle alors indissociable des réformes plus larges devant renforcer
la libéralisation politique et économique à l'échelle nationale. La prescription de règles
visant à guider l'action publique traduit une vision résolument plus normative du
développement qui s'inspire de l'idéologie néolibérale. La logique du contrat social qui
sous-tend cette approche fait abstraction des luttes sociales qui se dessinent dans l'arène
locale et l'euphémisation des enjeux de pouvoirs en terme de gouvernance occulte la
participation politique inégale des différentes couches de la population. « L'apolitisme»
des théories de la gouvernance nous incite à nous en distancier afin d'éviter de
restreindre notre analyse aux progrès accomplis vers la « bonne» gouvernance en
empruntant des indicateurs universels, abstraits et stéréotypés.

Les théories de l'espace public

En proposant un système politique fondé sur la prise de parole et le dialogue


entre individus, la théorie du pouvoir communicationnel d'Habermas offre
d'importantes pistes de réflexion quant au rôle des espaces publics de proximité dans la
constitution d'un pouvoir « libre de domination» entre l'État et les citoyens (Ladrière,
1992, 32-43). Les lieux de délibération où les citoyens ont la possibilité d'exprimer
librement leur volonté politique (et de trouver un compromis à leurs opinions
divergentes) introduisent des formes démocratiques de prises de décision qui sont
sources de légitimité pour les pouvoirs publics. La constitution d'une sphère locale par
Il

le dialogue et l'action laisse toute latitude pour donner fonne à un «vouloir


s'assembler» où les citoyens prennent conscience de leur capacité d'agir sur leur propre
histoire: «Dans cette perspective radicale de la place publique, plus que la parole, c'est
parler qui est politique, [... ] une action grâce à laquelle se manifeste alors
conjointement une double logique d'assemblée et "d'individualisation" qui révèle
l'existence politique de l'individu au sein de la cité.» (Holder, 2004, 10-11)

Selon Michèle Leclerc-Olive, la substitution d'instances publiques aux pouvoirs


communautaires est susceptible de conférer par transitivité (en se transmettant d'un
échelon à l'autre) une légitimité nouvelle à l'État. À la différence d'une autorité
traditionnelle où les modalités de gestion des biens communs reposent sur le consensus
entre ses propriétaires, la création d'un espace public suscite des lieux de délibération
ouverts aux débats où les citoyens peuvent se distancier de leurs appartenances
lignagères dans l'administration des biens publics: «Les espaces publics de proximité
apparaissent, alors, comme des lieux possibles d'action, de critique et de contrôle tout à
la fois - c'est-à-dire de participation -, de nature à accroître la légitimité des pouvoirs
publics locaux qui en constituent le noyau institutionnel. » (Leclerc-Olive, 2003b, 182)
De ce point de vue, l'articulation des dynamiques locales aux « logiques de projets»
introduites par les associations de développement ou les collectivités locales
contribuerait à l'émergence «d'espaces métisses» où s'élaborent des modalités de
«vivre ensemble» qui font la médiation entre les procédures consensualistes de
l'espace communautaire et les modalités délibératives de l'espace public occidental:
«Ces configurations variées obligent les acteurs locaux à circuler entre différents
niveaux institutionnels et ouvrent un espace duquel émergent des formes d'autonomie et
des exigences de légitimité nouvelles. » (Leclerc-Olive, 1997, 185)

En proposant des modalités de participation initiées dans le cadre d'une éthique


de la discussion plutôt qu'à travers une intervention accrue des groupes de pression, la
mise en place d'une véritable démocratie locale serait mieux prise en compte par le
concept d'espace public que par la notion de société civile (Leclerc-Olive, 2003b).
12

Cependant, l'exercice d'un pouvoir communicationnel fondé sur les procédures


délibératives s'inscrit à l'intérieur d'une tension structurelle permanente avec un
pouvoir administratif qui procède d'une rationalité instrumentale impliquant la
contrainte et la domination. Si les espaces publics représentent la seule source
démocratique de légitimité, le caractère systématique du pouvoir administratif se révèle
néanmoins indispensable à sa mise en œuvre (Ladrière, 1992,37-39). L'introduction
d'espaces publics participatifs par la décentralisation des pouvoirs à des instances de
proximité est susceptible d'apporter certains éléments de démocratie délibérative dans la
gestion des affaires locales. Mais, les modalités restrictives dans lesquelles ces réformes
s'exercent dans l'administration publique temporisent l'impact réel de
l'institutionnalisation de la participation citoyenne et maintien des rapports de force qui
sont susceptibles de rendre inopérants ces instruments de démocratie locale (Blondiaux
et. al., 1999) L'approche critique empruntée par les théories de l'espace public rend
bien compte des tensions persistantes entre l'idéal participatif qui sous-tend l'existence
de procédures délibératives et la nécessité d'une bureaucratie locale devant traduire en
acte la volonté politique exprimée en assemblée. Toutefois, une analyse qui se restreint
au seul paradigme de la légitimité peut difficilement rendre compte des stratégies
d'acteurs dans le jeu politique et se révèle incapable d'envisager historiquement les
rapports qu'entretiennent les pouvoirs locaux avec les pouvoirs d'État.

Approche théorique

La sociologie historique néowébérienne nous apparaît être un cadre d'analyse


pertinent pour faire sortir la décentralisation de l'exégèse juridique qui j'enrobe et éviter
de restreindre l'examen de ces réformes aux seuls paramètres de la «bonne
gouvernance» des bailleurs de fonds. Cette approche traverse les barrières de plusieurs
disciplines et offre une alternative critique aux théories normatives en portant attention
au contexte social dans lequel se déroulent les processus de transformation politique
(Déloye, 2007, 23). La sociologie historique réintroduit l'appareil d'État dans l'analyse
en considérant la trajectoire historique de chaque institution dans une perspective qui
puisse rendre compte des continuités et des ruptures avec le passé. Les modalités
13

d'aménagement de la sphère locale font simultanément intervenir différentes


temporalités politiques et sociales et les enjeux locaux ne peuvent être isolés par rapport
à ceux de la sphère politique nationale. De plus, l'analyse sociologique de
l'administration territoriale nous permet d'envisager la transformation des rapports de
pouvoir à l'échelle locale d'après l'historicité propre aux acteurs sociaux. Les stratégies
d'acteurs dépendent tout autant des normes juridiques imposées par l'État que des
rapports de force en présence parmi les différents «groupes stratégiques» qui se
déploient dans l'arène locale: «Le gouvernement est conçu ici, non pas au sens
juridique de structure politique de l'État, mais au sens large qui décrit l'action de
gouverner ou de diriger une entité sociale complexe, que ce soit par les moyens d'une
bureaucratie ou par tout autre moyen, y compris ceux qui sont généralement qualifiés
d"'informels". » (Quantin, 2005, 10) Les conséquences réelles de la redistribution des
pouvoirs de l'État (au point de vue des transformations effectives des rapports de force
entre acteurs sociaux) ne peuvent être rendues que grâce à une «économie politique de
la décentralisation» où l'impact de ces réformes sur des acteurs spécifiques dans des
situations concrètes (plutôt qu'un a priori théorique abstrait et universellement
applicable) se trouve au cœur de l'analyse (Fisette, 1990). Si les politiques de
décentralisation sont principalement impulsées par l'appareil d'État, les mutations
qu'elles entraînent sont le produit de luttes entre acteurs engagés dans l'action politique
locale. Les pouvoirs locaux actuels S~)llt le résultat de changements politiques qui
s'inscrivent dans la longue durée et leur transformation se trouve étroitement imbriquée
à l'héritage historique des rapports qu'entretiennent les communautés locales avec
l'administration territoriale (Fourchard, 2005, 13).

La place de l'État dans la sociologie historique néowébérienne

La sociologie historique analyse les luttes sociales pour le pouvoir d'après


l'hypothèse de la formation concomitante du politique, de l'économique, du social et du
culturel (Hibou, 1999, 58). En ayant une perspective d'analyse historique des processus
sociaux, cette approche théorique examine les modalités de transformation de l'État et
les mutations des forces sociales en évitant de réduire la définition du politique à un a
14

priori anhistorique et substantialiste. S'inspirant de l'héritage intellectuel de Max


Weber, la sociologie historique propose une analyse multicausale et un modèle
hypothético-déductif employant des idéaux-types qui expriment des abstractions
conceptuelles traduisant des réalités sociales spécifiques. Ces différents concepts
rendent compte des rationalités historiques particulières à un contexte politique et social
donné: «Pour Weber, [...] l'État n'a pas d'existence en dehors d'un ensemble de
croyances socialement partagées et d'attentes de comportements réciproques qui
s'institutionnalisent. » (Dufour et Lapointe, 2008a, 310) La production du sens (la force
symbolique de l'ordre social légitime) intervient dans la production des rapports sociaux
et les stratégies sociales des acteurs sont intimement liées aux différentes façons de
penser le pouvoir ou de se représenter l'État dans une société.

Le recours au concept de trajectoire pour étudier l'État cherche à rendre compte


de son historicité en examinant les assises sociales particulières sur lesquelles il
s'appuie et en analysant la concaténation des facteurs à la fois endogènes et exogènes
qui concourent à sa formation (Bayart, 1996, 16-20). La sociogenèse de l'État proposée
par Norbert Élias interroge certaines catégorisations juridiques trompeuses des sciences
politiques en retraçant les dynamiques soçiales à la source de la formation de l'État en
Europe. Bien plus qu'un simple concept juridique, la consolidation de la souveraineté
de « l'État westphalien » sur son territoire représente un construit social résultant d'un
long processus historique de mutation des régimes de propriété de la terre et de
monopolisation du pouvoir par la bureaucratie d'État: « Le monopole privé de quelques
individus isolés se socialise; il devient le monopole de couches sociales tout entières, il
se transforme en monopole public, organe central d'un État» (Élias, 1991, 35).
L'institutionnalisation de ce mode de domination est étroitement liée à la généralisation
de la perception fiscale, l'extension de l'appareil militaire et la naissance de
l'administration civile comme entité autonome de la société. Les rapports sociaux de
propriété et les formes d'exploitation liées à l'appropriation domaniale se trouvent au
cœur des tensions sociales dans lesquelles les mutations de la souveraineté territoriale se
trouvent imbriquées (Lache l', 2006).
15

Les rapports entre l'État et la société se déroulent dans le cadre de réseaux


politiques qui s'influencent mutuellement et les changements sociaux ne peuvent se
comprendre qu'en observant l'interaction complexe existant entre les structures de
classes et l'appareil d'État. Ainsi, « les crises politiques à l'origine des révolutions
sociales ne peuvent se réduire à des épiphénomènes reflétant les tensions de la société
ou les contradictions de classes. Elles ont plutôt directement exprimé des contradictions
situées au cœur des structures étatiques [...]. » (Skocpol, 1985b, 54) Les mutations de
l'État en des régimes plus centralisés et bureaucratiques sont intimement liées aux
conflits entre paysans et propriétaires terriens dans un contexte de tensions latentes entre
l'administration d'État et les classes agraires supérieures. Enfin, les changements
sociaux ne peuvent se comprendre qu'en observant les multiples interrelations entre les
dynamiques sociales au niveau interne et international: « Dès ses débuts en Europe, la
modernisation a toujours impliqué l'existence de trajectoires nationales de
développement dans le contexte de structures transnationales historiquement en
mutation, tant économiques que militaires.» (Skocpol, 1985b, 45) L'évolution des
rapports de force au sein du système international et l'expansion mondiale de
l'économie capitaliste contribuent donc à façonner les conflits sociaux et à influencer
les structures étatiques.

Bien que la sociologie des mouvements sociaux européens et l'étude des


conditions historiques de la formation de « l'État westphalien» soient éloignées de
notre objet de recherche, nous croyons que la démarche d'analyse des auteurs que nous
venons de présenter est hautement pertinente à prendre en considération pour mettre en
perspective les mutations des pouvoirs locaux - et des rapports que ces autorités
entretiennent avec les pouvoirs d'État - en fonction du « poids» sociologique et
historique de chaque acteur ou de chaque institution. Leur approche théorique permet de
rendre compte de quelles façons les interactions conflictuelles entre groupes sociaux
dans un contex te de transformation de l'État (notamment au regard des questions liées à
la propriété) sont sources de changements sociaux et de mutations de l'action politique.
Ainsi, la sociologie historique du politique envisage dans sa plein mesure l'influence
16

des mouvements sociaux dans le processus de transformation de l'État tout en


questionnant le rôle (et les motivations) des dirigeants de l'appareil d'État dans
l'impulsion à l'échelle nationale de changements politiques au niveau local.

Transformations de l'État et mutations de l'action politique

Les mutations de l'État et les transformations socioéconomiques sur le long


terme affectent la fin et les moyens de l'action collective en modifiant les modes de
revendication et de contestation des acteurs sociaux. Les différents processus de
démocratisation et de décentralisation qu'ont connus les États africains ont entraîné des
dynamiques de changement social et des transformations de la « culture politique» qui
offrent d'intéressantes pistes de recherche. Les revendications populaires se transposent
désormais dans les groupes de pression, les mouvements associatifs et les partis
politiques qui évoluent dans l'espace public national. Les autorités communales nées
des réformes de décentralisation peuvent être associées à ces nouveaux pouvoirs publics
situés en marge de l'État qui émergent peu à peu dans la sphère locale. En postulant
l'autonomie des différentes sphères sociales du pouvoir, la sociologie historique évite
de réduire l'analyse du politique à des facteurs d'ordre économique (l'impérialisme ou
l'ajustement structurel) et à cantonner les acteurs sociaux à un rôle passif vis-à-vis du
pouvoir étatique: « À \' opposé des variations savantes ou militantes sur les type's de
bourgeoisie, nous devons placer l'État en rapport avec une structure sociale à construire
sur plusieurs dimensions au gré des procédures complexes du "chevauchement" et de la
"concaténation".» (Bayart, 1989, 226) L'approche socio-historique axée sur le .
« politique par le bas» représente une alternative à un champ d'étude centré sur le point

de vue « d'en haut» et largement dominé par les thèses marxistes axées sur la lutte des
classes ou la dépendance des régimes de la « périphérie» à l'égard de ceux du
« centre» (Geschiere, 2000, 95-96). Les modes populaires d'action politique 'montrent
que les groupes sociaux subordonnés interviennent dans la production du politique et
contribuent activement à l'institutionnalisation des régimes africains postcoloniaux. Les
acteurs politiques se trouvent imbriqués dans des réseaux qui se font concurrence pour
l'accès aux ressources économiques et sociales que commande l'État: « [Ces réseaux]
17

transcendent, sans les annuler, les clivages de statut, de revenus et de pouvoir. Ils relient
les "en bas du bas" aux "en haut du haut" par des flux ininterrompus d'informations, de
requêtes, de dons, de célébrations symboliques [... J. »(Bayart, 1989, 270) D'une part,
cette politique du ventre (où l'acquisition de positions de pouvoir dans le système
politique détermine l'accès aux ressources) suggère que les pratiques d'accumulation
contemporaines sont le résultat d'une réappropriation de l'appareil administratif
colonial par les élites africaines postcoloniales. D'autre part, les pratiques de pouvoir et
les modes de résistance observés dans la culture populaire (opposant notamment les
« aînés sociaux» aux «cadets sociaux») apparaissent en continuité historique avec les
luttes sociales présentes dans les sociétés précoloniales 3 .

. La crise financière qui persiste depuis les années 1980 et la «transition


démocratique» en cours depuis le début des années 1990 réduit considérablement les
capacités redistributives de l'État à l'intérieure des différentes couches sociales de la
population. Cette conjoncture remet en cause la « politique du ventre» et contribue à
l'émergence de nouveaux modes de régulation politique et sociale impliquant des
circuits parallèles. En portant attention au 'nouveau phénomène de « privatisation des
États », Béatrice Hibou emprunte à Max Weber le concept de décharge pour illustrer les
métamorphoses des modes de gouvernement et des stratégies étatiques consécutives à la
libéralisation politique et économique. L'usage d'intermédiaires pour des fonctions
autrefois dévolues à l'administration publique pourrait annoncer le retrait de
l'intervention de l'État, mais la renégociation permanente des pouvoirs transférés - par
le maintien de frontières floues et arbitraires entre les rratiques qui sont tolérées et
celles qui sont réprimées - permet à l'État d'exercer une pression constante à l'endroit
des différents «courtiers» avec lesquels il transige (Hibou, 1999, 28-31). La
« privatisation des États» traduit donc une rupture historique par rapport à la politique
du ventre résultant d'une crise de légitimité de l'administration publique sur le

3 Le concept de « néo-patrimonialisme » emprunté par Jean-François Médard (1987, 1991) traduit un


portrait semblable.en plusieurs points à celui de Bayait sur les pratiques liées à l'occupation de l'appareil
d'État. Toutefois, sa perspective met l'accent sur la personnalisation exacerbée des pouvoirs publics « par
le haut» et porte moins attention aux formes d'accumulation des ressources politiques « par le bas ».
18

continent. C'est dans cet ordre d'idée que Jaglin et Dubresson voient dans les récentes
réformes de décentralisation « un mode de partage compensatoire vers le "bas" des
difficultés rencontrées en "haut" pour préserver des positions de rente au sein d'États
alimentant l'accumulation privée. » (1993, 304)

Enfin, nous appuierons notre démarche d'analyse sur les travaux


d'anthropologie sociale de l'École de Manchester (axés sur la problématique du local­
level politics) pour rendre compte des confrontations entre acteurs évoluant dans l'arène
locale à travers l'identification des « groupes stratégiques» et des intérêts
contradictoires qui les animent: « Mettant l'accent plutôt sur les acteurs que sur les
facteurs structurels qui façonnent la réalité sociale locale, elle propose une analyse en
termes d'acteurs clés, des ressources dont ils disposent et de leurs stratégies.»
(Hesseling et Oomen, 2005, 12) Il s'agit d'envisager dans quelles mesures les réformes
introduites par l'État dans l'administration territoriale s'imbriquent aux dynamiques
locales et réorganisent les rapports de force entre différents groupes sociaux:

Chaque société locale peut être considérée comme une arène socio-politique, dans
laquelle différents "groupes stratégiques" sont en confrontation, coopération et
négociation permanentes les uns par rapport aux autres. Les interventions
extérieures sont un élément supplémentaire de la dynamique de ces contradictions
locales, au cours desquelles les nouvelles règles du jeu politique et les nouvelles
structures décentralisées sont régulièrement ré-interprétées, transformées et même
"détournées". » (Bierschenk et 01 ivier de Sardan, 1998, 14-15)

Ainsi, 1~analyse du « jeu politique» doit rendre compte des marges d'autonomie dont
disposent les acteurs locaux vis-à-vis des normes imposées par les pouvoirs d'État tout
en empruntant une profondeur historique permettant d'apprécier la trajectoire
sociopolitique de chaque arène locale. À la faveur des changements de régime au niveau
national, de nouveaux pouvoirs locaux s'ajoutent successivement aux anciens et
contribuent à la superposition d'instances locales concurrentes dans le champ politique
(Bierschenk et Olivier de Sardan, 1998, 30-37). La polycéphalie des arènes locales
permet aux « groupes stratégiques» de négocier leur forum politique (institution
shopping) en choisissant celui qui est susceptible de mieux répondre à leurs intérêts.
19

Dans ce contexte, les acteurs locaux suivent moins les normes officielles édictées par
l'État que le «droit de la pratique» né de l'hybridation d'une pluralité d'héritages
juridiques (Le Roy, 2006, 27). L'organisation des protagonistes en réseaux politiques
suit des configurations mouvantes qui reflètent les logiques situationnelles spécifiques à
chaque acteur. Cette imbrication d'une pluralité de logiques de pouvoir et de légitimités
politiques traduit la présence d'une multiplicité de formes d'espaces publics dont le
chevauchement (straddling) place les acteurs au carrefour de la démocratie locale,
nationale et globale (Rijnierse, 2000).

Hypothèse de recherche

Notre recherche analyse les luttes politiques et sociales suscitées par la


décentralisation en les situant d'après les modalités d'institutionnalisation de la sphère
locale par l'ancien régime. Partant de la conceptualisation de la décentralisation en tant
qu'enjeu de pouvoir de l'arène politique locale, nous considérons que cette réforme
suscite des luttes entre « groupes stratégiques» qui la transforment, tout en l'intégrant
dans des pratiques et des structures de pouvoir antérieures par les divers acteurs locaux.
La d~centralisation prolonge ainsi les pratiques de commandement de l'administration
territoriale et suscite des compétitions entre groupes sociaux qui comportent des
similarités frappantes avec la stratégie d'occupation de l'appareil d'État sous le
«centralisme démocratique» du parti unique. Toutefois, ces continuités avec l'ancien
régime ne sont que partielles et la venue des communes provoque des ruptures dans les
rapports entre le « centre» et la «périphérie» qui prévalaient jusque-là au sein des
structures de l'État. Afin d'illustrer notre hypothèse sur l'hybridation des institutions
municipales aux dynamiques sociales, nous verrons comment les enjeux fonciers se
greffent au processus de réforme et (ré-)acti vent des conflits à l'intérieur de l'espace
communal. La décentralisation remet en cause les rapports sociaux liés à la propriété et
fait du contrôle de la commune un enjeu majeur de la gestion domaniale. L'accès à la
terre relève moins des règles administratives que de l'action politique et la gestion des
terres par les collectivités est largement tributaire des rapports de force existant entre
acteurs et groupes sociaux qui évoluent dans l'arène locale.
20

Méthodologie

La décentralisation au Mali représente un sujet particulièrement en vogue auprès


des chercheurs et des experts qui s'intéressent aux réformes administratives en Afrique
de l'Ouest. Ainsi, nous disposons de sources abondantes sur lesquelles nous pourrons
travailler dans le cadre de notre recherche documentaire (notamment en ce qui a trait
aux rapports entre le processus de réforme et les mutations foncières). Nous
examinerons d'abord les sources officielles du gouvernement malien, des agences de
coopération et des organisations internationales afin de rendre compte du cadre légal et
institutionnel de la réforme. Il s'agira d'identifier les principaux sites de pouvoir et les
différents mécanismes qui les lient entre eux. Nous ferons ensuite référence aux
rapports d'enquête publiés par les nombreux chercheurs qui se sont intéressés à la
décentralisation malienne. D'une part, nous étudierons les mutations des rapports de
force entre acteurs, le repositionnement de leurs interactions dans l'arène locale et leur
imbrication aux luttes sociales qui se reconstituent autour des nouveaux modes d'action
politique apportés par la décentralisation. D'autre part, nous porterons attention aux
énoncés de sensibi lisation à la réforme (provenant du gouvernement ou des agences de
développement) et aux discours empruntés par les acteurs locaux à propos de la
décentralisation. Enfin, il importe de mentionner que notre expérience de terrain au Mali
(dans le cadre de stages. dans l'administration ou de projets financés par des ONG) nous
a aidé à cerner certaines dynamiques ayant pris forme avec la décentralisation et s:est
révélée essentielle pour bien comprendre la littérature sur laquelle nous appuyons notre
mémoire. Nous mentionnons nos séjours simplement à titre indicatif (comme quoi ils
ont pu influencer notre compréhension de la réforme) et les données sur lesquelles
repose notre analyse proviennent donc exclusivement de la recherche documentaire.

La sociologie historique du politique porte principalement attention aux


mouvements sociaux, à la sociogenèse de l'État et à l'administration territoriale. C'est à
ce titre que nous avons choisi de centrer notre analyse vers les rapports entre structures
d'État, gestion foncière et pouvoirs locaux pour rendre compte des nouvelles
dynamiques locales introduites par la décentralisation. Si la question domaniale
21

représente une démonstration par excellence de l'influence des luttes sociales sur le
processus de réforme, notre recherche tend néanmoins à porter moins attention à
d'autres formes de luttes sociales, notamment les enjeux liés à la place des femmes, des
jeunes et des gens « de caste» au sein du nouvel espace communal. Ces questions se
révèlent très pertinentes dans le contexte de la décentralisation, mais celles-ci
impliquent une problématique beaucoup plus large que celle des rapports entre pouvoirs
locaux et pouvoirs d'État. Nous portons davantage attention aux politiciens et aux
administrateurs locaux (délégués du gouvernement, élus locaux et autorités
coutumières) dans le mesure où - malgré la volonté de refondation politique du
gouvernement - ce sont surtout les élites héritées de l'ancien régime (et leur
repositionnement dans l'arène locale) qui sont les premiers concernés par la réforme.
Bien que la décentralisation soit confrontée à des dynamiques qui diffèrent fortement
d'une localité à l'autre, une analyse trop « localisée» nous aurait empêché de bien
rendre compte des mécanismes d' institutionnal isation du nouveau régime et des
différentes façons dont les pouvoirs d'État parviennent à façonner (voire même
uniformiser) les pouvoirs locaux. Nous couvrirons donc plusieurs régions (notamment
le Manden, te Maasina et le Nord-Mali) de façon à mettre en perspective les liens entre
le « centre» et la « périphérie» de l'État tout en considérant la pluralité des modes de
réappropriation de la réforme par les acteurs locaux. Une telle approche permet de
mettre en relation le niveau local par rapport à la sphère nationale, mais offre
évidemment une perspective limitée sur certains enjeux strictement locaux qui sont
bouleversés par la décentralisation. À la différence d'une enquête de terrain prolongée
(offrant la possibilité d'aborder certains objets inédits), la recherche documentaire que
nous avons entreprise laisse de côté des aspects qui restent encore très peu étudiés par
les chercheurs (le poids des leaders religieux et des milieux d'affaire au sein des
pouvoirs municipaux, le déroulement des campagnes électorales, l'influence des cadres
de partis sur les décisions prises à la commune, l'impact des liens parentaux et
matrimoniaux, etc.). La décentralisation malienne représente un sujet particulièrement
vaste comprenant encore de nombreuses zones d'ombres qui méritent davantage
d'attention afin d'obtenir une meilleure vue d'ensemble du processus. Néanmoins, notre
22

recherche vise d'abord à faire le point sur une littérature éparse où il se révèle souvent
difficile de trouver des réponses claires à propos des transformations réelles apportées
par la réforme dans les dynamiques entre acteurs locaux. Il nous apparaît essentiel de
dégager des conclusions par rapport aux études déjà existantes et de poser certaines
balises par rapport à notre objet de recherche avant d'entreprendre des enquêtes sur le
terrain et/ou de pousser plus loin la problématique sur le sujet.

Dans le premier chapitre, nous ferons un bref historique de l'administration


territoriale et des différents acteurs qui évoluent dans la sphère locale depuis la période
p:écoloniale jusqu'à la plus récente réforme. Il s'agit de montrer que la décentralisation
se superpose à des pouvoirs/territorialités déjà bien ancrés et qu'elle prend racine dans
un espace aux rapports de force bien établis. Dans le second chapitre, nous
interrogerons le contexte social et politique dans lequel la refonte de l'administration
territoriale s'est trouvée amorcée. Nous situerons la décentralisation au regard des
revendications portées par certains mouvements sociaux et de l'idéologie populiste
mobilisée par le gouvernement pour pallier à la crise de légitimité de l'État. Nolis
terminerons en décrivant les principaux aspects de la réforme et de son processus de
mise en œuvre par la Mission de décentralisation et déconcentration (MDD). Dans le
troisième chapitre, nous envisagerons le jeu politique local et le repositionnement des
acteurs locaux d'après le nouveau cadre juridique pluraliste apporté par la
décentralisation. En analysant le nouveau paysage institutionnel et les stratégies
d'acteurs en présence, il s'agit de rendre compte des représentations du pouvoir, des
mécanismes de l'action politique, des formes d'interactions entre acteurs et des rapports
de force entre pouvoirs locaux qui apparaissent dans le contexte de la décentralisation.
Dans le quatrième chapitre, nous discuterons de la façon dont l'arrivée des communes
est susceptible de (ré-)activer les conflits locaux et de remettre en cause les rapports de
force entre groupes sociaux. En prenant l'exemple de la ge~tion domaniale, nous
verrons que la décentralisation entraîne une recomposition des luttes sociales où la
commune devient un site de confrontation entre groupes sociaux en lutte pour
l'appropriation foncière.
CHAPITRE 1

Historique de l'administration territoriale et


des réformes de décentralisation

Les pouvoirs d'État qui se sont succédés au Mali ont chacun contribué à
redéfinir les pouvoirs locaux qu'ils subordonnaient en insufflant des transformations
ayant pour but de consolider un nouvel ordre politique et social. Nous évoquerons les
tendances lourdes de la centralisation-décentralisation tout en nous intéressant à la façon
dont les luttes sociales s'insèrent dans le fonctionnement des instances pol itiques
locales. Cette mise en perspective cherche à mettre en évidence les continuités et les
ruptures qui se sont dessinées au fil des réformes de l'administration territoriale mises
en place par l'État. Nous verrons que les pouvoirs locaux tendent à s'emboîter les uns
aux autres à mesure que les pouvoirs d'État les transforment au nom d'idéologies
diverses. C'est dans ce contexte sociohistorique marqué par des transformations
politiques rapides que prendra forme la politique de décentralisation qui nous intéresse.

1.1 Les modalités d'occupation du territoire pendant la période précoloniale

Jusqu'à la fin du XIX e siècle, les rapports entretenus entre les villages
s'imbriquent dans un assemblage complexe de chaînes politiques et tributaires tissées au
fil des conflits, des alliances et de l'ordre d'occupation de l'espace. Des articulations
entre différents lignages sont rapportés par la tradition sous forme de pactes qui fixent
des identités et organisent des statuts à chacun d'eux (Barrière, 2002, 25-31 ; Koné,
2002, 185-187) : « Ces pactes, en instaurant des droits différenciés et inégaux sur les
territoires et les ressources, consacrent des rapports de force divers entre groupes se
rencontrant dans un même espace (... ) ». (Fay, .l999, 118) L'exercice du pouvoir
politique est étroitement lié à l'appropriation de la terre par des lignages autochtones ou
propriétaires et la sacralisation de cette occupation est étayée par des mythes ou des
récits historiques. Sauf en cas de conquête ou de « coup de force », c'est l'ordre
d'occupation du sol qui détermine les rapports de dépendance entre les villages (et
24

entre les lignages) : celui qui est arrivé en premier et qui dispose de la maîtrise des
terres coiffe tout ceux à qui il a consenti des droits d'occupation. Si les descendants des
lignages fondateurs disposent d'un accès sans condition aux ressources foncières, les
groupes subséquemment accueillis se voient attribuer des terres en échange du respect
de l'ordre établi et/ou du versement d'une rente conditionnelle à l'accès aux ressources
(Dembélé, 1981, 104). La conquête d'un village par un lignage étranger fait coexister
une autorité chargée de la maîtrise des terres avec un pouvoir politique et administratif
détenu par le nouveau groupe dominant. De ce fait, « la chefferie est dévolue aux seuls
descendants de ceux qui, les premiers, ont occupé la terre ou l'ont conquise par une
action guerrière. » (L. Traoré, 2006, 100). Un pacte d'allégeance avec le pouvoir central
qui englobe le village autorise le prélèvement de tributs en hommes ou en ressources en
échange d'une protection militaire. Les chefs locaux sont donc plus ou moins
indépendants par rapport aux organisations politiques plus vastes qui se sont constituées
au fil des « expansions et contractions» des empires et dont le pouvoir se superpose à
des chaînes tributaires plus anciennes (Samaké, 1988; Fay, 1997a, 55-56 ; Camara,
2002, 39 ; Kassibo, 2006, 76).

Au Manden, des chefferies (kaJo) placées sous le contrôle de lignages « nobles»


réunissent des villages alliés ou apparentés et constituent des ensembles politiques
autonomes dont les rapports reposent principalement sur le secours mutuel en cas de
danger: «Ces unités se sont constituées au long d'une série de migrations sur la base de
liens de lignages, de rapports entre invités et hôtes, et d'alliances matrimoniales.»
(Zobel, 200\, 128). La hiérarchisation des rapports sociaux relève des principes de
gérontocratie, d'autochtonie, de parenté et de genre où seuls les «hommes libres»
(haron) sont habilités à exercer le pouvoir politique, excluant ainsi les cadets, les
femmes, les captifs, les étrangers et les hommes de castes (Camara, 2006, 147). Entre le
XVIe et le XIX e sièc le, les aires de pouvoir du Maasina se composent en une série de
petites chefferies lignagères (janyeeli) subordonnées à des pouvoirs guerriers (laamu)
dominés par les arjJe peuls (Fay, 1997b, 177-186). Après la conquête d'un territoire, ces
laamu «recouvrent» les pouvoirs locaux préexistants en se plaçant au sommet des
25

structures lignagères (régies par des pactes) qui s'empilent les unes aux autres: « Le
nouveau laamu s'installe donc de ce fait au sommet d'une chaîne de pouvoirs
tributaires, et fait fonctionner les anciennes capacités (guerrières, productives,
symboliques) des anciens pouvoirs à son profit, ou/et leur distribue de nouveaux statuts
et capacités dans un système partiellement remodelé [...] ». (Fay, 2000, 128) Les
régimes ayant succédé aux arfJe ont procédé de la même façon en « coiffant» une
hiérarchie de pouvoirs locaux emboîtés les uns aux autres 4 •

1.2 La colonisation française et l'invention des pouvoirs « coutumiers»

Au lendemain de la conquête de ce qui fut nommé le Soudan à la fin du XIXe


siècle, la France superposa des structures administratives aux chefferies déjà existantes
en s'inspirant à la fois du modèle jacobin de la métropole et de la hiérarchie dans
l'armée coloniale. D'une part, des circonscriptions appelées « cercles» puis découpées
en « subdivisions» sont réparties sur l'ensemble du territoire (d'après une logique
d'encerclement par rapport à un centre) et placées sous la direction d'un commandant
originaire de la métropole (Centre Djoliba, 2000, 28-32; Lama, 2008, 15). Les
administrateurs coloniaux disposent de pouvoirs presque sans limite pour gérer leur
circonscription et l'organisation régulière de « tournées» permet de réaffirmer
périodiquement leur domination sur l'ensemble du territoire. D'autre part, les autorités
coutumières créées à partir des lignages « dominants» se voient confier le rôle
d'auxiliaires du pouvoir colonial en étant placées à la tête de cantons (érigés de façon
arbitraire) formant la base de la pyramide administrative (Klute, 1999, 168-170; L.
Traoré, 2006, 101-102). L'invention de la coutume par le régime colonial donne l'image
de rapports de force figés par les « traditions» de l'ère précoloniale, alors qu'il s'agit
avant tout d'un ordre politico-juridique façonné par l'administration française. Dans le
cadre de ce système prenant la forme d'un « despotisme décentralisé» (Mamdani,
1996), les chefs de cantons (jamanatigui) se voient confier la responsabilité d'exécuter

4Après l'indépendance, le « pouvoir du Mali» (Iaamu Mali) des administrateurs civils joue encore le, rôle
d'un « pouvoir recouvrant» à travers la collecte des impôts, l'arbitrage des conflits et la perception des
pots-de-vin (Fay, 2006. 107-108).
26

les ordres émanant des commandants détachés auprès d'eux. Le prélèvement des
impôts, la fourniture de céréales, les travaux forcés, la conscription et les autres formes
de réquisitions étaient pour la plupart conduites par les autorités cantonales. Le souvenir
des famines, des violences et des diverses formes d'humiliation vécues à l'époque du
régime colonial demeure encore très vif dans les mémoires collectives.

En réorganisant les kafo du Manden en cantons, l'administration coloniale


entend profiter des anciennes structures de pouvoir pour faciliter la gestion du territoire
en les «cantonnant» vers un espace central précis. Les chefs de kafo qui se rallient au
régime colonial sont maintenus dans leur fonction puis investis chefs de canton, tandis
que ceux qui s'opposent à l'arrivée des Français sont rapidement déchus et remplacés
par un représentant plus dévoué (Zobel, 200 l, 128 ; L. Traoré, 2002, 376). De la même
façon, les cantons érigés dans le Maasina ont pour la plupart été délimités en fonction
des anciennes aires de pouvoir et les chefs placés à leur tête appartiennent aux 1ignages
« dominants»~ Les chefferies conservent leur domination politique et leurs droits

tributaires tout en profitant des nouvelles prérogatives administratives qui leur sont
attribuées pour durcir leur pouvoir et s'accaparer davantage de tributs (Kintz et Poncet,
1995,8; Le Marcis, 1999, 160). Si la France introduit en Afrique un pouvoir centralisé
visant à mieux s'assurer du contrôle des territoires conquis, les limites de ce mode
d'administration mènent le régime colonial à adopter dès le début du XX e siècle un
nouveau modèle de gestion « décentralisé» visant à «rapprocher l'administration des
administrés ». En milieu rural, des «sociétés indigènes de prévoyance» sont créées
pour développer les cultures de rente (arachides, riz et coton) grâce à l'encadrement des
producteurs (Kassibo, 1994, 220; Keïta et Samaké, 2007, 19-26). En zone urbaine, les
politiques d'assimilation à la culture métropolitaine supposent à plus ou moins long
terme l'atténuation progressive des rigueurs de l'indigénat dans l'État colonial:
"Colonial pluralism was basically dual: on one side was a patchwork of customs and
practices considered customary, their single shared feature being sorne association with
the colonized; on the other side was the modern, the imported law of the colonizer."
(Mamdani, 1996, III) Si les_ citadins jugés plus «évolués» par rapport aux ruraux
27

bénéficièrent de la mise en place de communes mixtes indigènes S, ces municipalités


représentent des modalités d'encadrement parmi d'autres et leur fonctionnement
bureaucratique limite les possibilités de participation aux prises de décision (Coulibaly,
1998, 18-20; Keïta et Samaké, 2004, 5-8).

1.3 La décentralisation et la « révolution active» de Modibo Keïta

Le régime colonial contribua à l'émergence d'une classe bureaucratique formée


de commis et d'instituteurs très actifs au niveau syndical qui furent à l'origine de la
fondation de l'Union soudanaise-Rassemblement démocratique africain (USRDA) en
1946 (Amselle et Grégoire, 1987,25-26). À compter de la fin des années 1950, ce parti
d'allégeance socialiste s'impose progressivement au détriment du Parti progressiste
soudanais (PSP), davantage associé aux chefs de canton. En lutte contre le régime
colonial et les pouvoirs «féodaux », l'USRDA réussit à obtenir la suppression des
chefferies de canton dès 1957, mais l'administration continua à faire des chefs de village
des intermédiaires importants dans la plupart de ses interventions. Après l'échec de la
fédération avec le Sénégal, le territoire devint indépendant en 1960 sous la présidence
de Modibo Keïta et prit le nom de «République du Mali ». Les dirigeants de l'USRDA
transforment leur organisation en parti unique et ajustent le fonctionnement de
l'appareil d'État aux principes du «centralisme démocratique» et de la « primauté du
politique ». L'un des premiers soucis des nouvelles autorités est de refonder la pyramide
administrative de façon à «conforter l'unité nationale» et à rompre avec l'héritage
laissé par la colonisation. De nouveaux arrondissements sont découpés sur la base des
cantons «de façon à la fois transversale et englobante» en les divisant ou en les
regroupant entre eux (Fay, 2002, 132) : «( ... ] L'accent est mis sur la communauté
d'intérêt économique et les tendances coopératives au détriment des liens traditionnels à
base de relation de parenté et d'alliances. » (Camara, 2002, 4 L) Ces circonscriptions
placées sous la tutelle de l'administration doivent normalement être gérées de façon

5 Les premières furent érigées à Kayes et à Bamako en 1918, auquel s'ajoutèrent onze autres dans les
années 1950. Après ['indépendance, ces communes urbaines furent toutes maintenues en place et
quelques unes des principales agglomérations purent progressivement bénéficier du même statut.
(Hilhorst et Baltissen, 2004, 15-16).
28

participative par des conseils élus au suffrage universel. Toutefois, ces dispositions
n'entreront jamais en vigueur et ces subdivisions demeureront placées sous le contrôle
des chefs d'arrondissement (Tag, 1994,35; Béridogo, 2006, 202).

Le « socialisme africain» auquel adhère l'USRDA défend l'idée que « l'Afrique


d'avant les Blancs aurait été essentiellement rurale, communautaire et égalitaire» et que
« les paysans auraient vécu dans des collectivités villageoises harmonieuses que seule
l'empreinte coloniale serait venue oblitérer.» (Amselle, 1985, 251). Afin de
promouvoir le retour aux solidarités « traditionnelles» tout en les réconciliant avec les
impératifs du développement rural, les autorités mettent en place différentes formes
d'encadrement coiffées par les instances du parti unique. La «révolution active» fut
lancée avec l'objectif de collectiviser les terres, d'octroyer la commercialisation de la
production à des coopératives et d~ériger des conseils révolutionnaires prenant la place
des chefs de village. Pour mettre fin aux prérogatives des lignages propriétaires dans
l'attribution des terres, l'État devient le seul propriétaire légal des domaines fonciers et
des ressources naturelles sur l'ensemble du telTitoire (principe de la domanialité),
transformant ainsi les propriétés coutumières en « biens communs» (joroba) (Fay,
1997a, 63; Konaté, 1998, 78-82). Le gouvernement encourage la formation
d'associations de jeunes (mali ton) qui incitent les cadets à se dégager de l'emprise des
aînés (Jonckers, 1994, 124). Des « groupements ruraux de producteurs et de secours
mutuel» sont formés au niveau de chaque village, la participation « volontaire» et non­
rémunérée au «travail de la patrie» (jasobaara) devient obligatoire et des champs
collectifs (maliforo) sont cultivés pour assurer le financement de projets
d'investissements locaux (Tag, 1994,49; Keïta et Samaké, 2007,36-37).

En remaniant de fond en comble le dispositif d'administration territoriale, les


autorités veulent définitivement écarter les leaders coutumiers et barrer la route à la
classe commerçante tout en contribuant à la promotion d'une nouvelle classe formée de .
fonctionnaires choisis à la fois pour leurs compétences professionnelles et leur
militantisme politique (Rawson, 2000, 270-271). Cette nouvelle « bourgeoisie d'État»
29

forme peu à peu une nomenklatura bénéficiant de privilèges exceptionnels et disposant


d'une « rente bureaucratique» (issue de l'appareil d'État) qu'elle redistribue à toute une
série de dépendants (Amselle, 1985, 250-251). Les principes de prédation tributaire des
surplus et de redistribution clientéliste des richesses qui structurent le pouvoir des
chefferies se trouvent récupérés par les fonctionnaires du nouvel État indépendant en
reproduisant un « modèle aristocratique de domination étatique» (Bagayogo, 1987,
106). Le socialisme profite à une petite élite urbaine qui bénéficie de la plupart des
emplois créés par l'expansion de l'appareil d'État tout en profitant des services publics
installés en ville et d'un approvisionnement de produits subventionnés par le
gouvernemen{ Si les fonctionnaires se font davantage présents sur l'ensemble du
territoire après la création des arrondissements, il s'agit surtout d'administrateurs, de
gendarmes, de militaires et de douaniers chargés des fonctions de répression. Alors que
les Maliens espéraient gagner davantage de liberté avec l'indépendance, les réformes
entreprises par l'État postcolonial contribuent plutôt à renforcer le pouvoir centralisé
hérité de la colonisation. Si le fossé se creusant entre la nomenklatura et le reste de la
population se manifeste le plus souvent par une résistance passive, plusieurs révoltes
réprimées dans le sang allièrent paysans et commerçants pour protester contre les
travaux forcés, les monopoles commerciaux, les privilèges des fonctionnaires et la
corruption des dirigeants locaux du parti? (Amselle, 1978 ; Dembélé, 1981, 122).

1.4 Les pouvoirs locaux sous le régime militaire et le parti unique de Moussa Traoré

C'est dans ce contexte de mé~ontentement généralisé que l'armée prend le


pouvoir et forme le Comité militaire de libération nationale (CMLN) en 1968. Le
régime militaire s'institutionnalise en 1979 par une nouvelle constitution qui concentre
les pouvoirs aux mains de l'exécutif et prévoit la création d'un parti unique UDPM
(Union démocratique du peuple malien) organisé lui aussi selon les principes du
« centralisme démocratique ». Avec la formation des sections locales du parti et la

fiCet aspect est encore valable aujourd'hui : à mesure qu'on s'éloigne des mailles territoriales de J'État,
moins on a accès aux services publics et plus il faut payer pour les obtenir.
7 Encore aujourd' hui, le sosanlisi (socialisme) est synonyme de violence, de désordre et de « dépravation
des mœurs» pour de nombreux Maliens. (Le Marcis, 1999, 161)
30

proclamation par le pouvoir central du « primat du politique sur l'administratif », les


compétitions entre notables locaux pour occuper les postes de responsable de l'UDPM
tendent progressivement à transformer le paysage politique du Mali (Félix, 1997). Lors
des échéances électorales, différentes tendances s'affrontent pour la conquête des postes
disponibles d'après des ralliements qui s'opèrent « suivant les lignes de tension ou de
fracture sociale localement en place entre villages ou entre lignages, et essentiellement
par rapport au foncier-territorial. » (Fay, 2000, 130) Les conflits entre propriétaires et
non-propriétaires, entre autochtones et allochtones ou entre aînés sociaux et cadets
sociaux représentent les principaux enjeux autour desquels se définissent les clientèles
politiques et les luttes de tendances qui parcourent les sections locales du parti unique:
« Avec la collaboration plus ou moins étroite des administrateurs territoriaux, la faction

politique locale élue intervenait dans l'ordre foncier en faveur de son propre électorat,
l'autre étant condamnée à une opposition factionnelle se traduisant par des
investissements clientélistes de l'administration et de la justice (... ]. » (Fay, 2002, 141)
La naissance du parti unique créé un pouvoir «d'influence» parallèle au
« commandement» de l'administration et suscite des rapports souvent conflictuels entre

les cadres politiques et les hauts fonctionnaires.

À travers l'ensemble du pays, les responsables du parti installent des «comités»


dans les villages. des « sous-sections» dans les arrondissements puis des « sections»
dans les cercles qui sont ensuite chapeautées par le Bureau exécutif central (BEC) à
Bamako (Mamane, 1982; Fay, 1995, 20). La population doit élire à tous les trois ans les
membres de leur comit~, et chacun des « niveaux» du parti choisit ensuite les membres
siégeant à l'échelon supérieur. L'UDPM chapeaute l'ensemble des institutions et
l'obtention d'un poste ne peut se réaliser sans l'acquisition d'une place au sein des
instances du parti 8 . Le secrétaire général du parti (le Général Moussa Traoré) est le seul
candidat possible à la présidence de la République et il est réélu tous les cinq ans lors
d'un référendum qui Je reconduit à son poste à la quasi-unanimité. L'adhésion à

H Le secrétaire général et son entourage manipulent à leur guise la composition des sections locales. Être
élu au sein des instances de l'UDPM représente la seule issue pour s'engager en politique (ou trouver un
emploi dans la fonction publique) et ne signifie pas pour autant qu'on appuie le régime en place.
31

l'UDPM, l'achat des cartes de membre et le paiement des taxes du parti sont
obligatoires pour l'ensemble de la population. Des comités de l'Union nationale des
jeunes du Mali (UNJM) et de l'Union nationale des femmes du Mali (UNFM) sont
présents dans tous les villages et la participation des jeunes et des femmes y est
automatique (Tag, 1994, 90). Placé à la tête d'un vaste réseau c\ientéliste, le secrétaire
général de l'UDPM entretient des rapports personnalisés avec ses militants et ses
retentissantes « tournées» en province réactualisent périodiquement son autorité à
travers le pays. Il s'informe des événements dans tous les recoins du territoire et chacun
en appelle à son arbitrage en cas de conflits de voisinage ou de problèmes de famille
(Bertrand,2006, 193). Tous les pouvoirs sont concentrés au sein du proche entourage de
Moussa Traoré et l'État n'existe pas en dehors de son président.

À partir de 1970, le gouvernement militaire met sur pied une vingtaine


d'Opérations de développement rural (ODR) destinées à encadrer les populations
rurales afin d'accroître la production du coton, de ('arachide ou du riz dans les régions
les plus favorables à ces cultures de rente. Grâce au financement provenant des bailleurs
de fonds étrangers, l'État accorde une assistance aux producteurs à travers la formation
d'animateurs villageois, l'octroi de crédits agricoles et la commercialisation de la
production (Pierot, 1979, 44-48 ; Kébé, 1981, 34-37 ; Baumann, 1992, 56; Kassibo,
1994, 223-227). Vers la fin des années 1970, les ODR mettent en place des dispositifs
de «développement intégré» qui cherchent à résoudre simultanément tous les
problèmes en veillant au développement des cultures vivrières (aux côtés des produits
d'exportation), à la promotion de l'alphabétisation ou à l'amélioration des soins de santé
(Kouyaté, 1990, 102). Le lancement de cette politique est étroitement lié à la création
d'associations villageoises (AV) confiant aux producteurs une partie des charges de la
gestion de projets (Châu, 1992, 35 ; Diarra, 1995) : « Les AV servent de relais entre
l'encadrement et les villageois pour les actions de développement (par exemple, les
équipements collectifs, les greniers de prévoyance, la lutte anti-érosive, la santé). Des
"équipes techniques", composées de néo-analphabètes, assument les différentes
fonctions techniques confiées à l'AV. » (Joldersma et. al., 1996, 23) Les activités des
32

AVpermettent d'engranger des revenus qui peuvent être investis dans la réalisation de
projets de développement communautaire. Leur gestion est assurée par un bureau
permanent dont les membres sont élus par la communauté lors de la tenue d'assemblées.
En même temps, le gouvernement encourage la formation de «tons villageois»
(duguton) qui s'inspirent des associations de culture précoloniales du même nom ':
«Autrefois, le ton pouvait être mobilisé par le chef de village pour venir en aide aux
villageois en difficulté. Aujourd' hui, il est devenu essentiellement une équipe de travail
rémunérée qui loue ses services aux riches producteurs. » (Jonckers, 1994, 128) Ces
associations précoloniales hiérarchisées d'après l'âge, le genre et le statut voient leurs
objectifs initiaux transformés et récupérés idéologiquement par l'UDPM. Le ton
favorise l'adhésion au programme de développement adopté par le gouvernement tout
en devenant un symbole de l'autogestion des villages et du «développement des
populations à la base» (Dembélé, 1981, 126; Diarra, 1990, 69) Le mandat des tons
villageois est semblable à celui des AV, mais les premiers sont le plus souvent érigés à
partir des sections les plus méritantes du parti unique.

À la différence du régime socialiste dont les structures d'encadrement rural


prétendaient mettre un terme aux « féodalités », la junte militaire qui lui succède voit
une garantie de paix sociale dans le maintien des pouvoirs coutumiers et recours au
registre de la « tradition» pour asseoir sa légitimité (Fay, 1997a, 66). La mise en place
d'un système reposant sur le parti unique serait le mode de gouvernement le plus proche
de la « coutume» et l'encadrement rural est considéré comme une forme de renaissance
de la « tradition» (Klute, 1999, 172). Bien qu'ils représentent des structures de gestion
liées aux exigences de l'économie de marché et qu'ils soient calqués sur le modèle de
l'administration civile, les AV et les tons sont explicitement associés à un retour aux
pouvoirs coutumiers et aux solidarités « traditionnelles ». Hormis la façade formelle et
démocratique donnée à ces organisations, le bureau est généralement sous le contrôle
des membres du lignage «dominant» et c'est souvent le chef de village lui-même qUI
en assume la présidence, en compagnie de ses proches parents lettrés qui accaparent les
autres postes les plus importants (Bagayogo, 1987, 115; Kassibo, 1994, 231-233).
33

Comme c'était le cas sous l'USRDA, l'encadrement représente un système d'extorsion


reposant sur le prélèvement de taxes et d'obligations de toute sorte par l'État. Les
producteurs doivent se plier aux décisions du gouvernement et l'ensemble du système
est conçu dans les seuls intérêts des filières commerciales. Les structures villageoises
visent à faciliter l'intervention de l'État en zones rurales tout en se désengageant de la
gestion et du financement des projets. L'encadrement profite surtout à quelques
« paysans pilotes» (pour la plupart des commerçants ou des fonctionnaires) qui

bénéficient de liens privilégiés au sein de l'appareil d'État (Amselle, 1985,256).

La Commission nationale des réformes administratives (CNRA) instaurée par le


CMLN travailla à redéfinir la carte administrative du pays et à promouvoir de nouvelles
structures « de participation» visant à «passer d'une culture d'administration à une
culture de développement» (Sail, 1993, 92-95). Dès le début des années 1970, les
villages furent regroupés en « secteurs de base» puis en «zones d'animation et
d'expansion rurale» (ZAER) plus vastes afin de créer des organisations de proximité
pouvant faciliter les actions de développement. Un chef-lieu est choisi parmi les villages
du secteur pour accueillir l'implantation des services collectifs et des activités
socioéconomiques : « Ainsi l'on venait au chef-lieu du secteur de développement pour
"consommer des services", tandis qu'on se rend à l'arrondissement pour satisfaire des
exigences d'administration. » (Y. Koné, 1997) Les limites des secteurs s'inspirent de
celles des chefferies précoloniaJes (ka/o, janyeeli, etc.) et la plupart des chefs-lieux
choisis correspondent à des centres politiques coutumiers (Tag, 1994, 38). À co~pter de
1977, des comités et des conseils de développement sont mis en place à chaque niveau
de l'administration territoriale. Les comités de développement réunissent les agents de
l'administration avec les chefs d'antennes des ministères et sont chargés de programmer
les interventions du gouvernement dans la sphère locale. Les conseils de développement
sont composés au deux tiers de consei Ilers élus (pour un mandat de cinq ans) et pour un
tiers des représentants des organes à caractère socio-économique (chambre de
commerce, chambre d'agriculture, etc.). Ils réunissent les notables tes plus influents et
donnent leur approbation aux actions « proposées» par les comités de développement
34

(Pierot, 1979, 23-28; Kouyaté, 1990, 100-101 ; Bélanger, 1996, 320). Ce nouveau
modèle d'administration doit encourager le «développement des populations à la base»
par la création d'instances locales pouvant susciter la participation des masses. En 1988,
des taxes de développement régional et local (TDRL) s'ajoutent à l'impôt de capitation
et à l'impôt sur le revenu dans le but de «faire contribuer la population à son propre
développement» (Sail, 1993, 95-98 ; Bertrand, 1999a, 65).

1.5 Conclusion

Après ce bref aperçu historique de l'administration territoriale au Mali, nous


constatons que la décentralisation n'est pas une réalité nouvelle, qu'il s'agit d'un enjeu à
l'ordre du jour au moins depuis la colonisation et que la plus récente réforme ne se
déroule pas dans un vide institutionnel. Elle intervient dans le cadre de rapports de force
complexes et d'un milieu déjà bien structuré, de telle sorte que les nouvelles institutions
locales implantées par l'État sont constamment détournées, transformées et
réinterprétées en fonction des logiques déjà existantes. Les réformes successivement
mises en œuvre se soldent le plus souvent par un échec en se heurtant à des luttes entre
groupes antagonistes tant au niveau des pouvoirs locaux que de l'appareil d'État. Le
noyautage des institutions locales par le parti et la centralisation administrative
contribuent largement à limiter les impacts attendus des modalités de participation et à
faire de l'applaudissement la seule contribution possible aux prises de décision
(Bélanger, 1996, 322). Dans la mesure où les administrateurs civils conservent
d'importants pouvoirs de tutelle, les multiples réformes mises en place s'apparentent
moins à une dévolution de nouveaux pouvoirs aux communautés qu'à une
déconcentration des organes dirigeants (Tag, 1994, 36 ; Hilhorst et Baltissen, 2004, J 5).

Selon Achille Mbembe, le commandement traduit bien l'imaginaire de violence


et d'assujettissement qui structure les rapports de pouvoir de l'État à partir d'une
économie matérielle et symbolique de la terreur (Mbembe, 1992). Tout en prolongeant
les aspects les plus despotiques des pouvoirs coutumiers, l'administration postcoloniale
hérite d'un régime colonial où gouverner, commander et civiliser constituent les trois
35

«fardeaux» d'un pouvoir personnalisé et omnipotent voué à la planification du


« bonheur public» par la «mise en valeur» du pays (Mbembe, 2000, 52-53). Après
l'indépendance, la société malienne est dans son ensemble cooptée par un parti unique
devant être le creuset où l'unité nationale et la modernisation économique' pourront se
consolider. Malgré la volonté de l'USRDA d'entreprendre de profondes réformes visant
à rompre avec le «despotisme décentralisé» de la colonisation, les nouvelles autorités
n'ont pas agi différemment de leurs prédécesseurs: "No nationalist government was
content to reproduce the colonial legacy uncritically. Each sought to reform the
bifurcated state that institutionally crystallized a state-enforced separation, of the rural
from the urban and of one ethnicity from another. But in doing so each reproduced a
part of that legacy, thereby creating its own variety of despotism." (Mamdani, 1996, 8)
Le fossé creusé entre l'administration et la population de même qu'entre les zones
rurales et urbaines s'est maintenu malgré le processus de décolonisation. De plus, les
notions de tradition et de coutume auxquelles le pouvoir colonial a régulièrement eu
recours se sont de nouveau trouvées investies par le régime postcolonial dans
l'administration du territoire et l'implantation des programmes de développement.

Si les réformes de décentralisation se révèlent généralement dépourvues d'un réel


transfert de pouvoir, nous voyons cependant qu'dies ne surviennent pas sans entraîner
des mutations dans l'action politique au niveau local. Dans un système où presque tout
procède de l'État, les instances suscitées par les réformes sont rapidement accaparées
par les acteurs de la « périphérie» afin d'exercer une plus grande influence auprès des
décideurs du «centre» tout en tirant profit du capital social et des ressources
économiques que commande l'État: «Toute stratégie de promotion économique et
sociale a pour enjeu l'État qui est perçu autant qu'il se présente lui-même comme le
maître d'œuvre du remodelage de la société civile. La puissance et l'autonomie de l'État
tiennent en sa capacité d'engendrer une nouvelle société plutôt que d'en être une
émanation, parallèlement à son rôle classique de lieu de rencontre et de confrontation
des segments des différentes classes et couches sociales qui s'y reconnaissent.»
(Bagayogo, 1987, 115). Le régime monopartisan trouve son intelligibilité au regard
36

d'un processus de recherche hégémonique reposant sur la neutralisation de l'opposition


et fa construction d'une classe politique homogène par une dynamique d'assimilation
réciproque des élites: «II systématise et transpose dans la dimension nationale les
compromis et les amalgames que les formations d'obédience locale, encouragées ou non
par le colonisateur, avaient ébauchés dans les terroirs entre les sédiments historiques de
l'élite.» (Bayart, 1989, 209) En arbitrant les conflits qui se dessinent dans l'arène
locale, les séances de travail réunissant les leaders locaux autour des responsables de
l'État (notamment à travers le recours aux autorités coutumières, le fonctionnement des
conseils de développement, la mise en place des tons et des AV, etc.) participe
étroitement à cette dynamique de cooptation des élites par l'appareil d'État.

Toutefois, il serait faux de considérer les pouvoirs d'État comme de simples


appareils de domination voués à la reproduction du pouvoir de l'élite. Les groupes
sociaux investissent l'appareil d'État dans le cadre des rapports antagonistes qui les
traversent et la production sociale résultant de ces «modes populaires d'action
politique» participe étroitement à l'institutionnalisation du régime (Bayart, 1981, 55­
56). La multiplication des instances décisionnelles au niveau local par ]e biais des
réformes de décentralisation contribue à la mise en place de réseaux de clientèles qui
parcourent l'État rhizome de «haut» en «bas ». Si le parti unique a pour principale
fonction de verrouiller le paysage politique et de gommer les formes autonomes
d'organisation de la société civile, «là où il est le mieux institutionnalisé, il offre
souvent aux petites gens un recours contre l'arbitraire et de l'administration et de la
police, et il est capable de médiatiser des compétitions individuelles, au niveau
parlementaire ou présidentiel, aussi bien que la participation plus ou moins conflictuelle
de groupes sociaux. » (Bayart, 1983, 97) Le jeu des forces sociales (entre aînés sociaux
et cadets sociaux, propriétaires et non-propriétaires, autochtones et étrangers, etc.)
procède alors largement d'une logique d'occupation de l'appareil d'État dans un
contexte où le parti unique tend à s'autonomiser par rapport aux conflits sociaux. Les
diverses instances locales mises en place par l'État deviennent donc' le théâtre de
confrontations entre groupes sociaux antagonistes.
CHAPITRE II

Contexte et description de la réforme

Si nous avons d'abord choisi d'aborder la problématique de la décentralisation


d'après une perspective historique des modalités d'administration territoriale, il nous
importe maintenant de situer la réforme au regard de l'intense activité déployée par les
mouvements sociaux qui ont animé la vie politique malienne au cours des années 1990.
Nous verrons que la réémergence du thème de la décentralisation est étroitement liée à
l'explosion des revendications sociales dans 'un contexte de crise économique et de
contestation du pouvoir de J'État, mais aussi à l'aspiration d'une élite émergente issue
de la « société civile» d'instaurer une démocratie à l'échelle locale en se justifiant
d'une idéologie populiste.' À ces facteurs endogènes d'ordre multiple, nous ajoutons
certaines dimensions ayant trait au contexte international particulier dans lequel la
réforme fut mise sur pied, notamment en ce qui a trait au rôle joué par les bailleurs de
fonds internationaux. Nous terminerons ce chapitre en présentant brièvement les
grandes lignes de la réforme de décentralisation entreprise par le gouvernement.

2.1 La décentralisation dans la perspective des mouvements sociaux de 1980-1990

2.1.1 L'ajustement structurel et l'essor de la « société civile» locale

Au cours des années 1980, le Mali est confronté au problème de la dette et à


l'effondrement des cours mondiaux du coton et de l'arachide. Une série de programmes
d'ajustement structurel (PAS) force le gouvernement à adopter des mesures d'austérité
budgétaire, à privatiser les entreprises d'État et à démanteler les monopoles
commerciaux (Châu, 1992, 35-40). En 1983, la dévaluation du franc malien consécutive
au retour dans l'Union monétaire ouest-africaine (UMOA) entraîne un effondrement
rapide du pouvoir d'achat. L'afflux des populations rurales fuyant les vagues de
sécheresse et l'exode des jeunes en quête d'un emploi entraînent une urbanisation
accélérée des quartiers spontanés (sonsorobuguw) situés à la périphérie de la capitale.
38

Alors que l'État avait jusque-là l'habitude de recruter systématiquement tous les
diplômés, le gouvernement instaure un concours d'entrée à la fonction publique, pour
ensuite mettre fin à toute embauche de personnel et procéder à des licenciements
massifs. Les fonctionnaires qui demeurent en poste sont aléatoirement rémunérés et la
corruption se multiplie pour palier à l'absence de salaire (Diarrah, 1990, 140).

En réaction au verrouillage de la scène politique et au désengagement


économique des pouvoirs d'État se manifestent des réseaux d'entraide communautaires
gravitant autour d'associations locales où se dessinent des expériences de gestion de
proximité et de nouvelles formes d'engagement politique9 (Leclerc-Olive, 2003a, 301 ;
Berthomé et. al., 2003, 153-154). La multiplication de ces initiatives en marge des
instances officielles inaugure de nouveaux lieux de contrepouvoir dotés d'une
« légitimité populaire» qui les distinguent des formes d'intervention dirigistes de l'État.
Une série de structures associatives prennent en charge les services sociaux délaissés
par l'État et créent de nouveaux liens de réciprocité. Les activistes provenant de ces
mouvements interviennent progressivement dans le champ politique "Sous la forme de
groupes de pression agissant pour le développement de leur communauté (Raghavan,
1992; Freyss et. al., 1995; Mback, 2003, 82-88). Les villages sont de plus en plus
sollicités par les projets des ONG ou des associations de ressortissants, de telle sorte
qu'un nouveau «complexe développementiste» qui préfigure à la décentralisation
émerge progressivement. En s'inspirant à la fois du militantisme syndical, de
« l'idéologie développementiste» et des règles consensualistes soucieuses des
hiérarchies coutumières, ces associations occupent un nouvel espace de pouvoir et
réclament une plus large autonom ie d'action par rapport à l'État (Lévy, 2003, 251).

2.1.2 Le « problème du Nord» et les Accords de Tamanrasset

Depuis la colonisation française, les populations des régions de Tombouctou,


Gao et Kidal se sont fréquemment montrées hostiles vis-à-vis des autorités de Bamako

') Les structures paragouvernementales mises en place en cours des années 1980-1990 (associations de
parents d'élèves (APE), associations de santé communautaire (ASACO), associations villageoises (AV),
Groupements d'intérêts économiques (GIE), etc.) contribuent aussi à cette mouvance associative.
39

et l'opposition entre le Nord et le Sud du pays demeure un paradigme incontournable de


la situation politique malienne (Maïga, 1997, 207-230). À compter de juin 1990, des
groupes armés lü (principalement composés de jeunes Touaregs, Maures et Arabes)
entrent de nouveau en conflit avec le gouvernement. Ces mouvements dénoncent la
violence des autorités, réclament davantage d'investissements dans le développement et
revendiquent une plus grande autonomie de leur région par rapport au pouvoir central
(Boilley, 1999, 478-485; Demante, 2005, 196-197; Marty, 2007, 292). Devant
l'impuissance de l'armée à vaincre les « rebelles », le gouvernement signe les Accords
de Tamanrasset avec le MPA en janvier 1991. Moussa Traoré obtient la paix contre la
promesse d'honorer les revendications des groupes armés par l'octroi d'un « statut
particulier» pour le Nord, la dévolution de pouvoirs à des autorités locales dans le cadre
d'une réforme de décentralisation et la disponibilité de nouveaux fonds dédiés au
développement dans la région Il (Diarrah, 1996, 44 ; Mback, 2003, 106-107).

2.1.3 Les «événements» de mars 1991 et la naissance du « mouvement démocratique»

Au cours des années 1980, la baisse des investissements de l'État « a favorisé sa


perception dans les zones rurales en termes de puissance publique à dominante
répressive (sous-préfet, gendarmerie, fisc) plus que de service public (écoles, centres de
santé, soutiens aux initiatives populaires).» (Mback, 2003, 40) La libéralisation
économique remet en cause le fo~ctionnement du système clientéliste (reposant sur les
privilèges de la « bourgeoisie d'État» et la redistribution de la « rente bureaucratique »)
et devient un catalyseur du mécontentement à l'encontre du régime (Fay, 1995,22-23).
Deux mouvements de contestation distincts se déploient progressivement dans les
principales villes du pays pour s'opposer au parti unique. Le premier occupe le devant
de la scène « populaire» et s'exprime sous les thèmes de la lutte contre la corruption.

JI) Au sein des groupes qui s'associeront aux Mouvements et Fronts unifiés de l'Azawad (MFUA) figure

le Mouvement populaire de l'Azawad (MPA), le Front islamique arabe de "Azawad (FIAA), l'Armée
révolutionnaire de libération de l'Azawad (ARLA) et le Front populaire de libération de l'Azawad
(FPLA). La milice Ganda Koy (les « maîtres de la terre ») apparaîtra peu après pour combattre ces
froupes armés au nom des populations songhaïs « sédelllaires » qui résident dans la Boucle du Niger.
1 Le cessez-le-feu sera plus ou moins respecté en raison de la multiplication des groupes dissidents et de

l'attitude va-t-en-gtlerre de la hiérarchie militaire.


40

L'opposition à Moussa Traoré est motivée par la répression à large échelle pratiquée 'par
son régime et s'exprime sous le slogan du « kokadjè» (propreté), traduisant ainsi la
volonté de mettre en lumière les choses trop longtemps dissimulées (Tag, 1994, 100).
Le second est dominé par des « intellectuels» qui aspirent à une refondation de l'État
sous l'égide de la démocratie et du multipartisme. Ce mouvement réclame un renouveau
politique (yèlèma) et l'instauration d'un gouvernement populaire (bè jè fanga) pouvant
rétablir un certain équilibre entre les pouvoirs (Kassibo, 2006, 67). En dépit de tous les
risques encourus, les militants de différentes associations à travers le pays sortent de la
clandestinité et s'allient entre eux pour former un « mouvement démocratique l2 ». Leur
programme d'action est ponctué par l'organisation de manifestations et la diffusion de
revendications en faveur du pluripartisme dans la presse et la radio libre (DialTah, 1996,
25 ; Centre Djoliba, 2002 ; Roy, 2005a, 576). Face à l'immobilisme des aUtorités, les
manifestations organisées à Bamako se transforment en pillages ciblés des propriétés
des proches du président et en émeutes violemment réprimées par l'armée (DialTah,
1991, 83 ; Bertrand, 1992, 10-11). Ce sont les étudiants, les chômeurs et les jeunes
urbains des sonsorobuguw qui fournissent l'essentiel des combattants de rue impliqués
dans les « événements» qui précipiteront la chute du régime. Après le massacre
d'environ 200 manifestants par l'armée, les troupes d'élite procèdent à l'arrestation de
Moussa Traoré au nom du Conseil de réconciliation nationale (CRN) en déclarant
parachever le processus démocratique initié par le soulèvement populaire. À travers
l'ensemble du pays, le coup d'État fut suivi d'une révolte contre les symboles de l'État
par le pillage des biens publics et le lynchage de représentants des autorités (ministres,
gendarmes, etc.) saisis par la « justice populaire» (Bertrand, 1992, 17).

2.1. 4 La décentralisation à la Conférence nationale souveraine de 1991

Arrivés au pouvoir, les officiers de l'armée doivent composer avec les


mouvements sociaux. Le Comité transitoire de salut du peuple (CTSP) placé la tête du

12 Parmi ces groupes du II/ouvelllent démocratique figure l'Association malienne des droits de l'Homme
(AMDH), le Comité national d'initiative démocratique (CNID), l'Alliance pour la démocratie au Mali
(ADEMA), l'Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) l'Association des diplômés initiateurs
et demandeurs d'emploi (ADIDE) et l'Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM).
41

régime de transition comporte donc à la fois des représentants du mouvement


démocratique, du MPA et du CRN (Clark, 2000, 259). S'inspirant de l'expérience
récente du Bénin, une Conférence nationale est organisée afin d'inviter « les forces
vives de la nation» à concevoir les institutions de la Troisième République. En vue
d'organiser des élections législatives et présidentielles, les membres de la Conférence
participent à la rédaction d'une nouvelle constitution tout en traçant les grandes
orientations vers lesquelles la démocratie naissante est appelée à s'engager. Lors des
discussions, la centralisation administrative est désignée comme la principale cause du
dysfonctionnement de l'État et la création de nouvelles collectivités territoriales pouvant
s'administrer au moyen de conseils élus fait consensus parmi les participants (Rawson,
2000, 265). Le président du CTSP Amadou Toumani Touré soutient que la
décentralisation des précédents gouvernements « n'était pas compatible avec les intérêts
des populations en raison de la logique même de l'administration néo-coloniale» et le
premier ministre Sou mana Sacko ajoute qu'il est indispensable de « corriger les erreurs
commises et de poursuivre les réformes nécessaires pour faire de l'administration
malienne, une administration moderne, décentralisée, efficace et, surtout, conforme aux
aspirations de la population. »(Mback, 2003, 77-79)

À la Commission du Nord placée sous l'égide de la Conférence nationale, les


représentants des mouvements autonomistes insistent pour que le projet de réforme de
l'administration territoriale se déroule sur les bases des Accords de Tamanrasset (Ag
Baye, 2002, 455). Quant aux autres membres de la Commission, ils estiment que la
création des collectivités prévue dans le projet de constitution permet le mieux
d'appliquer les Accords sans remettre en cause le cadre unitaire de l'État l3 (Diarrah,
1996,44; Mback, 2003, 91). La signature d'un Pacte national avec les MFUA en 1992
consacre la reconnaissance d'un «statut particulier» pour le Nord et la création de
«collèges transitoires d'arrondissement» fonnant des pouvoirs locaux autonomes qui

13 Dans le discours politique malien, la notion de «'fédéralisme» n'est appréhendée que dans une
perspective panafricaniste et les revendications d'autonomie locale (même dans le cadre d'une
décentralisation administrative à l'échelle nationale comme celle proposée par la Conférence) sont le plus
souvent associées à une menace à l'unité nationale.
42

préfigurent aux communes qui seront plus tard érigées à travers l'ensemble du pays
(Keïta, 1998, 113-115; PNUD, 2002, 18-32; Marty, 2007, 297-298). Des équipes
mobiles font le tour de la région afin d'animer la création des structures transitoires tout
en essayant de tisser des liens de confiance par le dialogue avec la population (F. Maïga,
2002, 238-239): La politique nationale de décentralisation représente ainsi une
extension à tout le pays de l'accord intervenu entre le gouvernement et les groupes
armés pour la cessation des hostilités (Sali, 1993 ; M. Maïga, 1997 ; Seely, 2001).14

2.1.5 La crise de légitimité de l'État et la montée des revendications sociales

Après les élections législatives de 1992 qui accordent les deux-tiers des sièges à
l'Adéma-PASJ, les élections présidentielles donnent une victoire décisive au leader du
parti lors du second tour. Les militaires retournent alors dans leur caserne et cèdent leur
place au nouveau président élu Alpha Oumar Konaré. En se soumettant à des
consultations populaires, l'image que projette le nouveau chef d'État représente une
forme inédite de pouvoir accessible à tous et soumis à la critique. Mais une fois
l'euphorie démocratique passée, la fin de l'unanimisme politique tend à libérer les
tensions accumulées au fil des années et à donner au nouveau régime un air de chaos et
d'anarchie (Bertrand, 1992, 10-19; Vengroff, 1993, 562; Lange, 1999, 125-129).
Divers groupes d'intérêts (chômeurs diplômés, «volontaires» à la retraite anticipée,
mouvement syndical, etc.) profitent à fond des libertés acquises en faisant pression avec
force (et de façon parfois violente) pour que le gouvernement honore leurs
revendications. Prenant la forme d'opérations quasi-militaires ciblant les principaux
symboles du pouvoir, les émeutes étudiantes de 1993-1994 conduisent à la démission
des deux premiers gouvernements de la Troisième République (Smith, 1997). Peu après
l'abolition de l'impôt de capitation, c'est l'ensemble des taxes que les Maliens
refuseront ·d' acquitter en feignant de mal comprendre ou en chassant les administrateurs
osant demander des comptes.

14 Face à la lenteur du gouvernement à appliquer le Pacte national, les combats reprendront de nouveau

jusqu'à ce que la cérémonie de la « Flamme de la paix}) annonce la fin définitive des hostilités en 1996,
Plus récemment, de nouveaux mouv"ements armés ont repris les hostilités contre l'État depuis mai 2006.
43

Si la révolte contre le parti unique incarne d'abord le refus de l'arbitraire auquel


chacun était quotidiennement confronté, il traduit aussi un « rejet de l'État» où toute
fonne de pouvoir ne saurait à nouveau s'imposer après qu'il ait été renversé (Dramé,
1995) : «La démocratie était également dans la conscience populaire un refus de
l'ancien, de toutes les pratiques anciennes, un slogan dont se nourrissaient bien les
campagnes électorales stigmatisant le rôle régalien de l'État [... J. » (Diakité, 2002, 94­
95) Depuis les « événements» de mars 1991, les pouvoirs des fonctionnaires, des chefs
de village et des chefs de famille sont jugés illégitimes dans la mesure où « il n'y a [... J
plus d'ordre, plus d'autorité suprême dans la société et chacun et chacune fait ce
qu'il/elle veut. La démocratie est pour ceux-là une libération totale de tout principe
ordonnant une société après une longue période d'un ordre répressif et dictatorial. »
(Tag, 1994, 104) Les rapports vis-à-vis de l'autorité sont en mutation et la trajectoire
que prend le nouveau régime soulève des inquiétudes alors que les «jeunes» sont
soupçonnés de vouloir remettre en question l'ordre social des «vieux ». Plusieurs
soutiennent d'ailleurs que la nation est à la dérive parce qu'il n'y a plus d'autorité
«pour faire peur» et qu'il faut freiner les réformes pour remettre de l'ordre dans la
société. Face à cette crise de légitimité et à l'impossibilité matérielle d'instaurer un
nouveau pouvoir, la décentralisation va intervenir pour consolider la démocratie et
tenter de ramener la paix sociale en rétablissant le lien de confiance entre l'État et sa
population: «Ce qui est mis en jeu, c'est l'institution de nouvelles modalités de
domination légitime, la reconstruction graduelle de formules d'autorité fondées sur
d'autres bases.» (De Villers, 2003, 45) La réforme des institutions locales doit
contribuer au rétablissement de la paix sociale, à l'accroissement des ressources fiscales
et à l'ancrage de la démocratie dans les villages. La légitimation du pouvoir de l'État et
l'institutionnalisation du nouveau régime dans l'espace local représentent donc des
enjeux incontournables de la décentralisation projetée par le gouvernement.

2.1.6 La décentralisation: impulsion du gouvernement ou des bailléurs de fonds?

Lors de son procès pour «crimes de sang », Moussa Traoré accusait «les
manipulateurs et les manipulateurs de manipulateurs» téléguidés par les socialistes
44

français d'être les principaux responsables des «événements» de mars 1991. Ils
auraient agi grâce à l'appui financer de l'ancienne puissance coloniale, en fonction de
leurs seuls intérêts personnels et au nom de valeurs politiques étrangères à la culture
mal ienne (Kpatindé, 1992; C. K. Maïga, 2002). Ce genre de plaidoyer montre à quel
point «l'étranger» - et en particulier la France - se voit régulièrement imputer la
responsabilité des changements politiques survenus au cours des années 1990. De la
même façon, la décentralisation est fréquemment perçue comme étant le seul résultat
des conditions de l'aide imposées par les bailleurs de fonds. Assurément, les
bouleversements politiques que connaît le Mali sont indissociables de la nouvelle
conjoncture mondiale qui prend forme avec la dissolution des régimes communistes en
Europe de l'Est, la Conférence nationale au Bénin et le Sommet de La Baule où la
démocratie se retrouve soudainement sur toutes les lèvres: « [... ] La décentralisation
s'inscrit durant cette période dans un véritable enchaînement de slogans, de mots
d'ordre et de «conditionnalités » du développement: libéralisation, dimensions sociale
de l'ajustement structurel, démocratisation, participation populaire et gestion partagée
[... ]. » (Bertrand, 1999a, 16) Après [a chute du parti unique, le Mali bénéficie de la
bienveillance de la «communauté internationale» et d'importantes largesses des
bailleurs de fonds pour financer le processus démocratique. Si la décentralisation est un
thème à la mode et que le gouvernement fait l'objet d'importantes pressions, elle ne doit
toutefois pas être considérée uniquement du point de vue des conditions liées à l'aide:
« [... ] La réforme est pensée et présentée au Mali comme LIn projet politique, à la
différence de la plupart des pays d'Afrique de l'Ouest, là où, tout au moins, la
décentralisation est envisagée comme une simple réforme de l'administration du
telTitoire pour répondre aux exigences des bailleurs de fonds. » (Hilhorst et Baltissen,
2004, 18) Divers mouvements sociaux ont contribué à inscrire la décentralisation à
l'agenda politique et il semble donc que les pressions en provenance de l'étranger
arri vaient à point nommé pour le nouveau régime (Béridogo, 2006, 215). L'État reste le
maître des orientations données à la réforme et le discours du gouvernement ne doit pas
être simplement vu comme une légitimation avec des modèles politiques locaux d'une
réforme conçue à l'étranger (Oosterhout, 2002, 14-15).
45

2.2. La décentralisation au regard des formes contemporaines du populisme

Si la décentralisation s'inscrit bel et bien dans le prolongement des


revendications portées par divers mouvements sociaux, cela ne signifie pas pour autant
que la réforme provienne entièrement de la volonté populaire. En proclamant le retour
du pouvoir au peuple, le gouvernement fait explicitement appel à une doctrine populiste
pour promouvoir son nouveau projet de société: « Quand nous avons décidé de mettre
en œuvre le projet de la décentralisation, c'était pour répondre à la soif des populations
de se prendre en charge, de participer à la gestion de l'État, d'être écoutées et de voir
leurs aspirations se réaliser. [... ] Nous avons écouté les populations, et le schéma
administratif qui en est sorti a été fait par les populations elles-mêmes. » (Konaré, 2005,
116-117) Bien que la nouvelle élite au pouvoir fasse la promotion de la décentralisation
en capitalisant sur certaines aspirations populaires, il s'agit avant tout d'une réforme
dont les modalités émanent des experts du gouvernement appuyés par une myriade de
conseillers techniques dépêchés par la coopération internationale. Après avoir formulé
certaines précisions à propos du concept de « populisme », nous verrons que l'idéologie
promouvant ta réforme se trouve au carrefour d'un modèle démocratique occidental
inspiré du néolibéralisme et des revendications identitaires d'une élite intellectuelle
postcoloniale souhaitant inscrire les formations politiques africaines dans la modernité.

2.2.1 Quelques précisions sur les idéologies populistes

La notion de «populisme» est le plus souvent empruntée sous la forme d'un


vague « prêt-à-penser » cherchant à décrire la démagogie ou le messianisme de certains
politiciens charismatiques. Quelques précisions s'imposent donc quant à l'application
de ce concept dans l'analyse des réformes de décentralisation. Le populisme représente
un type de rapport social où les intellectuels (chercheurs, développeurs, administrateurs,
etc.) exaltent les vertus du « peuple» en s'émerveillant de son potentiel de contestation
ou de son imagination créatrice par la projection de certains stéréotypes :« La force
d'attraction du populisme tient à ce qu'il propose ses sollicitations sous la triple espèce
de la sensibilité et du projet politiques, du penchant de la littérature et de l'art pour les
46

objets inédits, et du devoir méthodologique de neutralité éthique, aussitôt confondu avec


la conversion à la cause des offensés et des humiliés. » (Grignon et Passeron, 1989, 10)
Conçu comme une entité sociale autonome et homogène, le «populaire» se trouve
investi d'une volonté de transformation politique en suggérant l'introduction d'une
vision « par le bas» dans les pratiques d'administration. Dès lors, l'idéologie populiste
emprunte une attitude hostile envers les élites Uugées illégitimes, arrogantes,
corrompues, etc.) et propose de redonner le pouvoir au «vrai peuple» tout en faisant
abstraction des conflits sociaux pouvant survenir au sein des « classes populaires»
(Sardan, 1995, 101-106).

2.2.2 L'idéologie participative

Si elle incarne en partie les désirs de « bonne gouvernance» exprimés par les
bailleurs de fonds, nous avons vu que la décentralisation correspond surtout au souhait
du régime au pouvoir de prolonger au niveau local la démocratie récemment conquise à
l'échelle nationale: «Le nouveau projet de société est idéologiquement présenté par la
nouvelle élite politique comme une rupture avec l'ordre ancien et une tentative de
refondation de l'État sur la base du pouvoir partagé. » (Kassibo, 2006, 68) En effet, le
gouvernement insiste sur la corrélation existant entre l'avènement de la démocratie au
Mali et la nécessité de déléguer de nouveaux pouvoirs au peuple: « La décentralisation
y apparaît comme un "grand chantier" pour le pays, impulsé par le chef de l'État en
personne qui en incarne la philosophie d'avenir [... J. » (Bertrand, 1999a, 36-37) Les
institutions municipales ayant été jusque-là un privilège exclusif des zones urbaines, il
s'agit de mettre fin à la discrimination qui maintient les ruraux dans un statut de demi­
citoyen en créant des communes à travers l'ensemble du pays. Avec l'arrivée des
concepts de citoyenneté, de société civile et de démocratie, les formules-clés de
« l'idéologie participative» présente dans l'imaginaire politique occidental deviennent
tout à coup omniprésentes dans l'arène politique malienne (De Langen, 2005, 131-133 ;
Bourdarias, 2006, 222). La mise en place de nouveaux espaces de délibération est
présentée comme un catalyseur au développement local et un élargissement des libertés
devant introduire une culture participative au village. Les nouvelles communes
47

symbolisent l'exercice de la démocratie à la base dans un nouveau système politique


«qui ambitionne de redonner confiance aux populations en leur propre capacité de
décision et de gestion» et « libère enfin l'énergie insoupçonnée du pays profond ».
(Bertrand, 1999a, 37) En idéalisant le rôle de la «société civile» et de l'action
citoyenne dans le « Mali nouveau », la décentralisation consacre le principe de l'entière
prise en charge du développement par la population grâce « à une stratégie participative
d'acteurs conscients de leur développement. » (Béridogo, 1997).

2.2.3 L'idéologie communautaire

Comme l'a déjà démontré Shaka Bagayogo (1987, 1989, 1992), les conceptions
du pouvoir et les représentations de l'État au Mali sont étroitement imbriqués à une
« idéologie communautaire» qui exalte les valeurs d'authenticité culturelle, glorifie les
héros de l'époque impériale et célèbre une représentation idyllique de la vie au village.
Pour discuter des événements présents, le recours aux « traditions» mandingues par un
récit populiste du passé se révèle être une constante et participe à la constitution d'une
culture nationale dominante La grande geste de l'empire du Mali (qui a donné son nom
au nouvel État indépendant) et les exploits de ses figures légendaires font figure de
«lieux de mémoire» qui procurent les paradigmes essentiels de la pensée politique
actuelle. Sous la présidence d'Alpha Ournar Konaré, le gouvernement n'a pas échappé à
cet imaginaire communautariste et a régulièrement fait appel aux « traditions» passées
pour construire des récits de la nation qui mettent en perspective la nouvelle trajectoire
démocratique (et décentralisatrice) empruntée par le Mali (Arnoldi, 2003 ; De Jorio,
2003 ; Konaté, 2006a ; Baudais et Chauzal, 2006 ; Sears, 2007).

Presque partout en Afrique de l'Ouest, l'idée d'une refondation de l'État


s'inspirant des modèles politiques du passé est en vogue parmi les leaders politiques et
les hauts fonctionnaires ayant la charge de concevoir les réformes de décentralisation l5 .
En s'inspirant des pouvoirs coutumiers et des cultures africaines «traditionnelles »,

15 Dès les années 1950, des intellectuels sénégalais avaient entrepris la même discussion à propC's de la
décentralisation afin de libérer le savoir africain de la « bibliothèque coloniale» par un programme de
« construction nationale» s'appuyant sur la redécouverte des sociabilités communautaires (Diouf, 2008).
48

Antoine Sawadogo (2001) propose une refondation de l'État postcolonial (comme


alternative aux politiques de décentralisation actuelles) par la réhabilitation des savoirs
populaires et l'émancipation des cadres intellectuel~ de l'Occident. Au Mali, plusieurs
concepteurs de la réfonne envisagent la décentralisation comme une réconciliation du
pays avec son passé en y voyant une continuité avec les réformes orchestrées par
l'empereur Sundjata Keïta au XIIIe siècle (Rawson, 2000, 266-268 ; Kassibo, 2006, 71­
77; Béridogo, 2006, 213-214). Alors qu'il procédait à une enquête sur la
décentralisation au Mali, Jean-Loup Amselle constata que l'idéologie des associations
N'ko fournissait une structure narrative «bonne à penser» auprès de l'élite
intellectuelle malienne et servait 'de modèle pour justifier la décentralisation: « [ ... ] la
lecture faite par Souleymane Kanté, le fondateur du mouvement N' ko, des formations
politiques médiévales et notamment de l'empire du Mali, s'est révélée pertinente pour
enraciner dans le terroir africain une réforme qui concerne au premier chef les avatars
coloniaux et post-coloniaux de l'État dans ce pays. » (Amselle, 2002, 9)

Le mouvement fondamentaliste N' ko est un prophétisme religieux et scripturaire


qui propose des méthodes « modernes» de tradithérapie et travaille à la promotion de
l'alphabet N' ko que le marabout guinéen Souleymane Kanté se fit «révéler» par un
songe le 14 avril 1949: « Le N'ka, comme l'arabe, s'écrit de droite à gauche, mais
comme le latin, il s'écrit avec deux sortes de lettres, les voyelles et les consonnes, et
c'est ainsi qu'il est indépendant car il n'est ni occidental, ni oriental.» (Kanté, 1961 In
Amselle, 2002, 16) Pour inventer certaines lettres de son alphabet, Kanté se serait
inspiré des plans de bataille de l'armée de Sumanoro, des hiéroglyphes égyptiens et des
signes de la société initiatique du komo. En utilisant des médiums graphiques
mystérieux rechargés de significations nouvelles, cette herméneutique « vise à purifier
la culture mandingue des apports extérieurs afin de la régénérer et de la hisser au niveau
des autres cultures, voire de dépasser celles-ci [...].» (Amselle, 2001, 159) Les
ouvrages publiés par Souleymane Kanté traduisent une volonté d'énoncer une identité
mandingue authentique par la réappropriation d'un sens caché de l'histoire enfoui sous
les alluvions de la colonisation. Si ce mouvement s'inspire avant tout de l'idéologie
49

afrocentriste, il participe aussi aux mouvances réfOl:mistes de l'islam qui connaissent


une ascension rapide en Afrique de l'Ouest depuis le début des années 1980.

À travers l'élaboration d'une philosophie politique concevant la démocratie, la


décentralisation et l'État de droit d'après le système politique de l'époque impériale, les
associations N'ko ont apporté à «l'idéologie communautaire» une contribution
nouvelle largement reprise par une bonne part de l'intelligentsia. En définissant le statut
de chaque citoyen au sein de la communauté, la Charte de Kurukanfuga promulguée en
1236 lors de la fondation du Mali serait une Constitution qui défendrait les droits de la
personne au même titre que le Bill of Rights ou la Déclaration des droits de l'Homme et
du citoyen (Sail, 1993, 108 ; Sissoko, 1995,57-60; Sawadogo, 2003, 94; Cissé, 2006,
129-132) : «L'égalité de principe, l'altérité, la liberté d'entreprise, la liberté
d'association ajoutées à la liberté de la parole et à l'action des contre-pouvoirs (griots,
forgerons ... ) ont compté parmi les fondements du dynamisme de l'Empire du Mali
[... ]. » (Ouattara, 2007, 32) Les discussions sous l'arbre à palabre, les associations de
culture (ton) et les sociétés d'initiation seraient l'expression de la «démocratie directe»
mise en place à l'échelle locale il y a plusieurs siècles. Aussi, les parentés à plaisanteries
(senankuya) et les relations entre ail iés aînés et cadets (nimogoya) seraient l'équivalent
du contrat social dans la philosophie politique occidentale (Keïta, 2006).

Par la mise en place d'une structure confédérale (kurufaba), l'empereur (mansa)


du Mali aurait régulièrement discuté avec les représentants (jama) des provinces en leur
laissant le soin de gérer par eux-mêmes les affaires locales (Cissé et Kamissoko, 1988,
299; Traoré, 2002; Dicko, 2007, 102-103). Cette forme d'organisation du pouvoir
serait observable encore aujourd'hui dans le fonctionnement des communautés
villageoises, qui sont libres de choisir leur chef selon leurs propres us et coutumes.
L'article l29 de la Charte du Manden aurait établi un devoir de responsabilité des
dirigeants envers leur peuple à travers un dispositif de « concertation»
(kolagnonkorognonya) qui obligeait « de faire connaître, de rendre compte des actes que
l'on pose en matière de gouvernance de la cité, et du pays à niveau utile. » (Bamba,
50

2007, 167) En gouvernant d'après une éthique de la discussion reposant sur la tenue
d'assemblées délibératives (gbara), le règne de Sundjata Keïta aurait été l'exemple d'un
pouvoir légitime, décentralisé et consensuel capable de gagner la confiance d'un
peuple: « [ ... ] Le Mansa du Mali soumet les grands problèmes de la collectivité à
l'examen d'une assemblée constituée de notables issus des principaux clans. Le pouvoir
du souverain est donc contrôlé et ses décisions peuvent être contestées. Il s'agit de faire
une place à la participation des secteurs représentatifs de la société dans son ensemble,
au débat libre et responsable et à la recherche commune. » (Ouattara, 2007, 29) Le
« pouvoir en association» (ton fuga) de Ségou au XVIIIe siècle et le Madjilis de

Cheickou Amadou au XIXe siècle sont d'autres exemples puisés dans l'histoire pour
démontrer l'antériorité de la démocratie/décentralisation au Mali (Mariko, 2007).

Par rapport à ces thèses « traditionalistes» sur J'antériorité de la démocratie au


Mali, le Chef de la Mission de décentralisation Ousmane Sy souscrit à ['idée que la
décentralisation soit un système politique ancré dans la «tradition» qu'il faut faire
renaître: «Il faut s'appuyer sur l'ancienne tradition malienne de pouvoir décentralisé
comme l'atteste la charte de Kuru Kan Fuka du XIVe siècle. Les pratiques
communautaires sont importantes et sources d'une véritable dynamique. La
décentralisation doit donc s'appuyer sur elles en veillant à leur donner les formes les
plus démocratiques. » (Sy, 1995, 151) En ce sens, les messages de sensibilisation sur la
décentralisation diffusés à la radio proclament le « retour du pouvoir à la maison J6 »
(mara ka la segi sa) et !a « prise en charge» (yèrèta) des communautés par elles-mêmes
(Koné, 2006, 188). En associant à des lignages (jasa) les nouvelles collectivités issues
de la réforme et en voulant faire coïncider les communes avec les solidarités déjà
existantes, le gouvernement recourt largement à une « légitimité communautaire» pour
fonder de nouveaux pouvoirs locaux:

Les communes rurales devront intégrer "toutes les formes communautaires de


développement social à l'échelle du village" et les "dépasser" en intégrant des

1(, Il s'agit aussi de «remettre le pouvoir à ses maîtres réels» (kafanka sake a tigiyi ma), de « restaurer le

pouvoir» (Il/ara kanan bo) ou « d'élargir le cercle du pouvoir» (kafclIlga cè bo) (Béridogo, 1998).
51

"formes modernes de démocratie représentative et élective". Sur le plan de la


gestion foncière, on parle d'une "mise en commun" des ressources qui devrait
permettre de "rendre caducs" les conflits existants. La traduction en peul des
messages de sensibilisation destinés au Maasina disent, plus radicalement, que les
membres des communes rurales "formeront un même lignage", qu'ils "auront un
même nombril" et qu'ils "mangeront ensemble les biens communs", notamment
"avec les étrangers qui sont venus s'installer parmi nous". (Fay, 1999, 131)

De ce fait, le gouvernement conçoit la réforme sous (' angle d'une re-traditionalisation


des affaires locales, d'un mariage entre le droit coutumier et le droit positif moderne et
d'une restitution d'un pouvoir autrefois spolié. Le recours à la « coutume» et aux désirs
du «peuple profond» pour promouvoir la décentralisation tout en exprimant des
slogans en faveur de l'action citoyenne et de la «borme gouvernance» introduit un
discours populiste et légitimiste faisant un étrange amalgame entre le culturalisme et le
néolibéralisme (Labazée, 1995).

2.3 Description de la réforme

La Mission de décentralisation et déconcentration (MDD) fut créée peu après


l'investiture d'Alpha Oumar Konaré avec le mandat d'animer les débats, de concevoir
la réforme et de préparer sa mise en œuvre (Sali, 1993, 10-12). Puisque les hauts
fonctionnaires hérités de l'ancien régime sont jugés hostiles au projet de réforme, des
organes consultatifs sont mis en place dès le début pour contourner l'appareil d'État et
inciter « la base» à prendre la parole: « Les premiers travaux de la décentralisation ont
été faits en dehors de l'administration: on a d'abord repéré ça et là de grandes figures,
des notabilités dotées d'une forte personnalité, sachant parler, mobil iser et convaincre
[... ]. » (Camara, 2002, 44). Le dispositif mis en place vise à resserrer le contrôle du
gouvernement sur la bureaucratie d'État et a explicitement pour but de retirer la plupart
des privilèges des administrateurs civils en substituant une structure plus démocratique
aux anciens commandants. Un « groupe de référence» associant des représentants du
gouvernement, des associations de la « société civile» et des experts-conseil est formé
pour discuter des propositions formulées par la Mission et servir de relais entre les
différents acteurs impliqués dans la réforme (Mback, 2003, 207). Après la tenue de
séminaires de formation préparés par les responsables de la MDD, les participants sont
52

intégrés à des « Groupes d'études et de mobilisation» disséminés à travers le pays au


niveau local (GLEM) et régional (GREM). Il s'agit de tisser un réseau de responsables
locaux acquis à la réforme et d'organiser des campagnes de sensibilisation dans les
communautés (par l'animation de causeries, la tenue de pièces de théâtre ou la
distribution de documents relatifs au projets) dans le but d'encourager les citoyens à
s'impliquer dans la décentralisation (Sydness et. al., 2000, 17). Le projet de réforme
retenu s'inspire à la fois des expériences mises en œuvre en Occident - en particulier la
réforme de 1982 en France - et du modèle participatif développé par les structures
villageoises de la CMDT I7 (Zobel, 2006, 265). Désormais, l'administration territoriale
comporte trois échelons administratifs (703 communes, 49 cercles et 8 régions, auquel
s'ajoute le district de Bamako 18) qui se répartissent les compétences transférées par
l'État selon les principes de subsidiarité et qui n'entretiennent (en principe) aucun lien
de subordination hiérarchique. En disposant de ressources financières propres (par le
biais de taxes, d'impôts et d'une dotation de l'État qui leur sont dédiées l \ ces
collectivités territoriales pourront gérer leurs services de façon autonome par le biais
d'organes exécutives et délibérantes tout en ayant la possibilité de faire appel aux
ressources mises à la disposition de l'État (Hilhorst et Lodenstein, 2008, 19).

Les arrondissements - symbole du commandement par excellence - sont dissous


afin d'être remplacés par des communes devant s'administrer par le biais d'un conseil
dont les membres sont élus par la population2o . Les candidats doivent résider dans leur

17 La compagnie cotonnière faisait office de contre-pouvoir sous l'UDPM et· la décentralisation est
souvent associée au « clan CMDT ", formé de l'entourage de feu Boubacar Sada Sy, ancien patron de la
CMDT nommé Ministre de la défense sous la Troisième République. Les « super-cadres» appartenant à
cette tendance sont un pilier du régime d'Alpha Oumar Konaré et occupent de nombreux postes clés au
sein du gouvernement (Amselle, 2001,113-114; Couloubaly, 2004,184).
IX Avant la réforme, les circonscriptions administratives étaient composées de 287 arrondissements, 49
cercles et 8 régions, auquel s'ajoutaient 19 communes urhaines et le district de Bamako.
I~ Les taxes locales sont approximativement réparties à 80% pour les communes, 15% pour les cercles et
5% pour les régions.
211 Les élections communales sont d'une importance majeure pour le financement annuel des partis
politiques (fixé il 0,25% des recettes fiscales de l'État) : « Tous les partis légalement reconnus reçoivent
une "première fraction égale il 20% des crédits" [... ] ; une seconde partie est attribuée en fonction du
nombre <.le député (40%); une troisième au prorata du nombre de conseillers communaux (40%). »
(Baudais et Chauzal, 2006, 66) Ce système n'est pas étranger il la surmultiplication des formations
politiques et aux nombreuses scissions au sein des partis lorsque surviennent des rivalités personnelles.
53

commune d'attache, les élections sont organisées à l'échelle de l'ensemble du pays au


cours d'un scrutin de liste proportionnel et les élus disposent d'un mandat de cinq ans
renouvelable. Lors de leur première réunion, les conseillers désignent entre eux les
membres devant remplir des fonctions au bureau de la commune (le maire, ses adjoints,
les responsables des commissions, etc.). Toujours selon le principe du scrutin indirect,
des conseillers sont élus pour aller représenter leur commune au conseil de cercle, des
membres du conseil de cercle sont élus pour aller siéger au conseil régional et des
membres du conseil régional sont choisis pour devenir des conseillers nationaux
siégeant au Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) (Dicko, 2004, 71). Le
HCCT assure la représentation des pouvoirs communaux au niveau national et dispose
d'un «pouvoir consultatif» sur toutes les questions touchant à la décentralisation ou
aux collectivités locales. Quant aux administrateurs civils, ils deviennent des « délégués
du gouvernement» chargés de la tutelle de l'État sur les collectivités associées à leur
niveau. Ils supervisent l'investiture du conseil de chaque collectivité territoriale,
contrôlent la légalité des décisions des élus et veillent au respect des orientations du
gouvernement en matière socioéconomique. En outre, les délégués disposent d'un rôle
d'assistance-conseil auprès des élus et peuvent «mettre à la disposition» des
communes les agents des services déconcentrés de l'État (D. Dembélé, 2005, 159-163).

2.3.1 Le découpage des communes

La mise en place d'une « démocratie à la base» se trouve au cœur de la réforme


et la MDD souhaite laisser à chaque communauté le soin de choisir sa commune sur la
base des «solidarités communautaires» préexistantes. En formant de nouvelles
communes par le regroupement volontaire des villages et des fractions nomades (au
nombre d'environ 10 500), il s'agit de construire une nouvelle pyramide administrative
en partant de la base vers le sommee' (Kassibo, 1997). Dans l'objectif de rompre avec
la réputation bureaucratique et technicienne de l'administration publique malienne, les

21 Plusieurs partis de l'opposition contestent la voie empruntée par le gouvernement: selon un


représentant de l'USRDA, la décentralisation ne serait que « la réédition du système de conseil de
notables du temps colonial: un système qui faisait des élus de simples caisses de résonance du pouvoir
tout en leur laissant les coudées franches dans la gestion des biens publics. » (Bertrand, 1999a, 38)
54

consultations publiques animées par les agents de la MDD ont recours à des méthodes
adaptées de recherche participatives (MARP) qui associent directement les
représentants des communautés locales au processus de découpage et au choix du chef­
lieu de leur commune 22 (Mback, 2003, 275-281 ; Cissé et. al., 2003b). Toutefois, les
propositions de regroupement formulées aux équipes techniques par les communautés
locales doivent obligatoirement respecter une combinaison de cinq« critères de
viabilité» définis par le gouvernement: le respect des « solidarités communautaires»
(par la présence de liens historiques ou d'affinités sociologiques), l'accessibilité au
chef-lieu (dans un rayon de 20 km. dans les zones à forte densité ou de 40 km. dans les
zones à faible densité), une démographie suffisante (au moins 10 000 habitants), le
potentiel de croissance économique (d'après les équipements socio-économiques
disponibles ou les projets de développement en cours) et la délimitation d'un territoire
cohérent (par des critères d'ordre spatial, morphologique, climatique, etc.) (Coulibaly,
1998,27-32; Cissé et. al., 2003a, 26; Mback, 2003, 269-274). Nous verrons plus loin
que ces critères d'ordre technique ont souvent laissé place à des considérations d'ordre
plus politique lors des négociations impliquant les responsables locaux et les agents de
l'État. Une fois les tournées de promotion terminées, les GREM et les GLEM devaient
normalement être responsable de la suite des procédures. En raison de leur incapacité
manifeste à remplir leur mandat, la MDD se résolue à faire appel à l'administration
territoriale en associant davantage son personnel à la réforme (Kassibo, 2006, 78). Des
« Commissions de découpage» réunissant les chefs d'arrondissement, les représentants

des antennes des ministères sur place et certains notables locaux (représentants des
chefferies, des associations de développement ou des partis politiques) sont chargées du
pilotage des négociations pour la création des communes (Mback, 2003, 279-280) :
«Au niveau de chaque "cercle" [... ] une commission doit, dans les trois mois, consulter
les populations de tous les villages pour les impliquer dans la définition des espaces
communaux. Un guide et une cartographie ont été mis au point par des géographes pour

21 Ces méthodes de recherche-action-participation s'inspirent de ('approche «gestion du terroir})


(largement promues par la Banque mondiale) qui sous-tend la plupart des projets de conventionnement
des ressources naturelles (Joldersma el. al., J 996).
55

faciliter l'analyse des facteurs locaux et aider à la prise de décision. » (Sy, 1995, 151)
L'impossibilité d'arriver à un accord entre les parties entraîne le déplacement de
l'équipe de découpage pour fin d'arbitrage en justice. À la toute fin des procédures, un
projet de loi soumis à l'approbation des députés de l'Assemblée nationale doit
confirmer la création des nouvelles communes (Rawson, 2000, 279).

2.3.2 Les transferts des compétences

Bien que les communes soient appelées à s'administrer librement par rapport à
l'appareil d'État, le transfert des compétences et des moyens pour leur mise en œuvre
n'est pas automatique et se réalise progressivement: «Le schéma d'opérationnalisation
repose sur une présomption des capacités/incapacités des acteurs dans le temps et dans
l'espace et fixe par avance l'échéance marquant l'atteinte des résultats attendus.
D'abord, cette approche tend à créditer l'idée que l'État doit obligatoirement et
mécaniquement procéder à des transferts de compétences, ensuite, elle considère que les
c;ollectivités territoriales doivent nécessairement recevoir un paquet de compétences
identiques en même temps [... ]. » (Dicko et Djiré, 2007, 194) Seules les compétences
ayant trait à l'État civil (enregistrement, recensement et liste électorale), la police
judiciaire, l'hygiène et l'assainissement sont sous la responsabilité des communes dès
l'investiture du premier conseil en 1999. Tout juste avant la fin du second mandat
d'Alpha Oumar Konaré en 2002, de nouvelles compétences sont cédées dans le
domaine de l'éducation (alphabétisation, enseignement préscolaire et enseignement
fondamental), de la santé (dispensaire, maternité, centre de santé communautaire) et de
l'hydraulique (puits, forages, réseau d'adduction d'eau) (Hilhorst et Lodenstein, 2008,
57). Les délais de transfert ont d'autant plus tendance à s'étirer que la plupart des
communes ne disposent pas des ressources pour assurer leurs charges de
fonctionnement et qu'il n'y a habituellement jamais eu de services offerts à l'échelle
locale par l'État, d'où la difficulté de transférer ce qui n'ajamais vraiment existé (Dicko
et Djiré, 2007, 189-193). Si certaines communes bénéficient d'une longueur d'avance
dans le processus de transfert, les retards dans le v€rsement des subventions, les
problèmes dans le recouvrement d'impôt et les difficultés à procéder à l'embauche du
56

personnel représentent des obstacles difficiles à surmonter pour la plupart des maires23
(Hilhorst et. al., 2005, 13). Les dispositifs d'appui sont alors susceptibles d'occuper une
place prédominante en confinant la plupart des élus à un rôle de « figurants» (Leclerc­
Olive, 2003a, 301 ; Ag Aboubacrine et. al., 2007,4).

2.3.3 Les dispositifs d'appui

Après les premières élections communales de 1999, des consultants et des


persormes ressources issus des bureaux d'étude, des ONG et des agences de
développement consacrés à la décentralisation sillonnent le pays pour financer des
projets de développement local, prodiguer des conseils sur le démarrage des communes
et assurer la formation des nouveaux élus. De nombreux organismes (largement
appuyés par l'aide internationale) chapeautés par le Dispositif national d'appui
technique aux collectivités territoriales (DNAT-CT) du Ministère de l'administration
territoriale et des collectivités locales (MATCL) sont mobil isés pour superviser le
déroulement de la réforme au niveau de chaque commune: « Ce dispositif est basé sur
l'appui conseil et la formation fournis par les Centres de Conseil Communal (CCC) et
des prestataires privés, ainsi que sur la mise à disposition par les services déconcentrés
de l'État d'informations et d'expertises techniques. Ce programme national, à vocation
temporaire, est destiné à développer les compétences des communes, principalement en
terme d'administration, de gestion communale, de programmation locale et de maîtrise
d'ouvrage. » (Le Bayet. al., 2007,4) Des comités d'orientation réunissent les élus, les
représentants de l'État, les services techniques déconcentrés et les groupes de la
«société civile» au niveau local (CLO), régional (CRO) et national (CNO) pour
coordonner les actions, superviser le processus de transfert de compétence et servir de
relais entre les différents intervenants impliqués dans la réforme (Diawara et. al.,
2004,53-56 ; Traoré, 2007, 220-223 ; Caspari et. al., 2007, lI). L'Agence nationale
d'investissement des collectivités territoriales (ANICT) est l'organisme rattaché au

;) Le « vivier» mis en place par l'État pour le recrutement des employés (secrétaires généraux, secrétaires
d'État civil, régisseur des recettes, etc.) n'a pas été suffisant pour attirer de nouveaux candidats et le
personnel demeure très instable. Ces postes sont peu rémunérés (quand ils le sont), situés dans des LOnes
jugées indésirables et n'ouvrent al/cune perspective de carrière dans la fonction publique.
57

MATCL qui fixe les droits de tirage provenant du Fonds d'investissement des
collectivités territoriales (FlCT - financé à 90% par l'aide extérieure et 10% par le
gouvernement) que les élus peuvent utiliser pour le développement local. Les
commLines doivent garantir le financement de 20% des coûts d'investissement pour que
l'Agence accepte de subventionner les 80% restants 24 (Leclerc-Olive, 20ü3a, 306-307 ;
Jourdam, 2007, 227-230). Pour la plupart des collectivités, les recettes destinées à cette
contrepartie ne proviennent pas des taxes et des impôts (vu leur faible recouvrement),
mais plutôt des cotisations des « bénéficiaires» des infrastructures, des entrepreneurs
« prestataires» qui accordent un crédit en échange du contrat; des revenus des
opérations de lotissement, de l'emprunt auprès des commerçants et de l'aide provenant
des ONG, de la coopération décentralisée ou des ressortissants à l'extérieur (Logié,
2004, 5 ; Zobel, 2004, 17). Pour obtenir des droits de tirage, les projets proposés doivent
figurer sur la liste des investissements éligibles, les prévisions budgétaires doivent avoir
été précédées de consultations populaires et le tout doit avoir obtenu l'approbation de
['autorité de tutelle: « La clé de répartition des fonds entre les collectivités territoriales
est basée sur le niveau d'équipement, l'enclavement, le nombre d'habitants dans les
collectivités territoriales et le taux de mobilisation des ressources internes
(recouvrement des impôts et taxes). En moyenne, une commune rurale dispose de 10 à
15 millions Fefa de droits de tirage par an 25 . » (Hilhorst et Baltissen, 2004, 35) De plus,
l'accès aux fonds de l'Agence est conditionnel à la rédaction par les élus (d'après un
schéma préétabli par la DNCT qui nécessite la tenue de concertations populaires) d'un
plan local de développement économique et socioculturel (PDESC) (ayant lui aussi reçu
l'approbation des autorités de tutelle) prévoyant sur plusieurs années les actions de
développement et les prévisions budgétaires de la commune (Centre Djoliba, 2000, 40­
44; Diawara et. al., 2004, 26-36; Lemelle et Bâ, 2008, 28-30). La rédaction des
PDESC doit obi igatoirement associer les populations de chaque village où tous les
citoyens qui le désirent pourront s'exprimer sur les besoins de leur communauté.

"4 1\ s'agit d'une façon d'inciter les élus à faire des efforts supplémentaires pour la mobilisation des
ressources fiscales de leur commune. L'ANICT représente aussi une façon 'pour les bailleurs de fonds
d'exiger un décaissement des fonds qui soit indépendant du Trésor public.
25 En 2009, 1 Euro correspond à 655,96 Fcfa.
58

2.4 Conclusion

Tout d'abord, la décentralisation a inspiré un redécoupage complet de la carte


administrative en encourageant le regroupement des villages d'après les facteurs de
« solidarités traditionnelles» qui les unissent entre eux. Les collectivités créées ont
l'ambition de rompre avec les circonscriptions artificiellement créées par les régimes
colonial et postcolonial tout en renouant avec les formes précoloniales de territorialités.
Par la suite, la réforme érige de nouveaux pouvoirs communaux qui se superposent à
l'appareil de l'administration territoriale et se substituent à la hiérarchie ascendante des
instances défuntes du parti unique. Il s'agit de répondre aux aspirations populaires
favorables à un assouplissement de l'appareil répressif de l'État, de palier aux craintes
de « vacance du pouvoir» ayant suivi les « événements» de mars 1991 et de conférer
une légitimité nouvelle aux institutions par l'institutionnalisation dans l'espace local de
la démocratie récemment conquise à l'échelle nationale. Dans ce nouveau système, les
élus locaux ne disposent plus seulement de pouvoirs « d'influence» ou de
« consultation» et se voient maintenant attribuer de réelles prérogatives de décision
grâce aux compétences qui leur sont transférées par l'État. L'action des élus demeure
toutefois subordonnée à la tutelle des délégués et le transfert des compétences
représente un processus aléatoire qui reste tributaire des incertitudes du gouvernement à
se départir de certains de ses pouvoirs. Enfin, la présence d'instruments participatifs de
prise de décision (pour l'adoption du budget ou la rédaction des plans de
développement) rend possible une certaine implication des citoyens dans les affaires de
la commune. Cependant, le fonctionnement de ces dispositifs reste à la discrétion des
élus et/ou dépend étroitement des organismes qui viennent en appui à la décentralisation
(animés par des fonctionnaires, des consultants, des représentants d'ÜNG). Le désir de
rendre le pouvoir au peuple tel que proclamé par les slogans du gouvernement peut
rendre possible une certaine action citoyenne, mais la participation aux activités de la
commune se trouve largement temporisée par le poids occupé par les acteurs locaux les
plus influents (les conseillers communaux, les administrateurs civils, les « appuyeurs »)
et le besoin de respecter les conditions liées à l'octroi des subventions.
CHAPITRE III

Les stratégies d'acteurs dans le cadre juridique


et institutionnel pluraliste de la décentralisation

Dans ce chapitre, nous discutons de la trame institutionnelle dans laquelle se


déroule l'action politique et des formes de compétition/collaboration qui se dessinent
entre les principaux « groupes stratégiques» de l'arène locale (administrateurs civils,
conseillers communaux, chefs coutumiers, membres associatifs) depuis la mise en
œuvre de la décentralisation. Les rapports de force entre acteurs sont remis en cause et
de nouvelles rivalités pour le pouvoir prennent forme dans le cadre de ce nouveau
pluralisme juridique et institutionnel qui régit les rapports entre pouvoirs locaux et
pouvoirs d'État. Cette situation n'est pas nouvelle dans la mesure où les chefs
coutumiers et les élus du parti unique disposaient déjà d'une certaine force « de
persuasion» sur les organes de l'administration territoriale. Cependant, la présente
réforme de décentralisation a pour effet de remanier et même d'accroître ce pluralisme
en transférant certaines prérogatives de commandement Qusque-Ià entièrement détenues
par les fonctionnaires de l'État) vers les conseillers communaux élus par la population.
Ainsi, les représentants des instances locales ne disposent plus seulement d'une capacité
d'influence, mais aussi d'un pouvoir de décision surIes enjeux qui concernent leur
communauté. La redistribution des pouvoirs entre acteurs locaux se déroule toutefois
dans une zone grise où tout dépend des stratégies que chacun d'eux est en meSure de
déployer pour orienter la décentralisation en sa faveur. La diversité des interprétations
du processus proposées traduit une lutte pour le sens quant aux modalités opératoires de
la réforme. À ce titre, « la fonction politique des écarts entre le texte et les pratiques doit
être mise en relief, selon une lecture qui privilégie à la fois ce qui est dit et n'est pas fait,
et ce qui n'est pas dit mais qui est vécu. Les façades institutionnelles, le formalisme
juridique permettent de soupçonner le poids des rouages administratifs et définissent
certains des sites qui accueillent le théâtre des acteurs. » (Mbembe, 1988, 139)
60

Si la décentralisation doit avant tout favoriser la «prise en charge »des


populations « à la base », la délégation de nouveaux pouvoirs aux communautés locales
(par le biais des communes) ne se déroule pas sans tentatives de l'administration
territoriale de maîtriser l'ensemble du processus. Nous verrons que l'installation des
pouvoirs communaux au sein des arènes locales ne se produit pas sans rapports de
complémentarité et (surtout) de conflit entre l'administration civile et la mairie. Malgré
certains obstacles qui minent leur capacité d'agir dans la sphère locale, les maires
parviennent graduellement à prendre leur indépendance vis-à-vis de l'appareil d'État en
invoquant le projet décentralisateur du gouvernement et en empruntant différents
moyens de contournement des pouvoirs de tutelle. Ils tendent même à adopter des
attitudes d'administrateurs en superposant leur pouvoir à tous les autres pouvoirs locaux
et en centralisant la gestion des affaires locales au niveau du bureau de la commune. En
fait, le paternalisme technocratique et la bureaucratisation exacerbée des affaires locales
(autant de la part des délégués que des élus) reproduisent les formes de commandement
historiquement associées à l'administration territoriale et temporisent l'idéal participatif
de la réforme. Nous prendrons les exemples de la gestion financière et de
l'appropriation foncière pour illustrer les interactions entre acteurs qui se dessinent dans
le contexte juridique et institutionnel pluraliste de la réforme. Dans le premier cas,
l'accroissement de la mobilisation fiscale et le financement de projets de développement
se trouvent au cœur de la « mission» confiée par l'État aux collectivités. L'analyse des
enjeux d'ordre budgétaire se révèle donc incontournable pour rendre compte des /
mutations apportées par la décentralisation dans les rapports entre pouvoirs locaux et
pouvoirs d'État. Dans le second cas, les dynamiques territoriales représentent une
démonstration concrète de la façon dont les rapports de force, les interactions entre
acteurs et les modes d'action politique sont transformés par l'arrivée des pouvoirs
communaux. L'activité économique est étroitement rattachée à l'exploitation des
ressources naturelles et l'exercice du pouvoir se trouve imbriqué à l'occupation du
territoire. Cet aperçu des stratégies d'acteurs dans le cadre de la gestion domaniale nous
conduira ensuite (au chapitre IV) à voir de quelles manières les litiges fonciers en,tre
61

différents groupes sociaux (notamment entre propriétaires et non-propriétaires ou


autochtones et allochtones) tendent à se recomposer au sein des instances communales.

3.1 Les administrateurs civils face à la décentralisation

Si la plupart des administrateurs civils furent maintenus en poste après les


« événements» de mars 1991, leur attitude se trouva radicalement transformée par les
émeutes populaires et la monté du mouvement démocratique: « Les responsables
administratifs [... ] restaient globalement les mêmes à l'exception de quelques (très
rares) mutations disciplinaires et des mutations tournantes courantes. Ils devinrent
néanmoins plus timides dans leurs modes habituels de gouvernement, soit qu'ils aient
été gagnés par l'esprit démocratique, soit qu'ils aient été moins sûrs qu'avant de leurs
éventuels soutiens dans une période de changements politiques.» (Fay, 1995, 46)
Depuis la chute de Moussa Traoré, les « commandants» sont continuellement dénigrés
et deviennent des cibles privilégiées pour les slogans des campagnes électorales. Face à
l'hostilité de la MDD explicitement dirigée à l'encontre de l'administration civile Uugée
hostile au changement et compromise avec l'ancien régime), c'est sans grand
enthousiasme que la décentralisation est accueillie par ces derniers, qui ne manqueront
pas d'exprimer ouvertement leur désaccord par rapport à la réforme: « Presque toutes
les interventions portent sur des discours du genre: "votre projet est irréaliste; dans le
passé tout cela a déjà été essayé mais n'a pas donné de résultat" [...], "cette réforme
telle que vous la prévoyez risque de faire porter de graves menaces sur l'unité et la
stabilité du pays" [... ].» (Hilhorst et Baltissen, 2004, 21-22)

En devenant des « délégués du gouvernement» et en confiant la plupart de leurs


prérogatives à des conseils élus, la décentralisation réduit considérablement les
privilèges de l'administration territoriale et porte directement atteinte aux intérêts
corporatistes de ses agents. Ces derniers se plaignent du manque de personnel et des
compressions budgétaires qui les empêchent d'exercer leur autorité de tutelle en les
confinant simplement à délivrer des pièces administratives, à mettre les services
déconcentrés de l'État à la disposition des élus ou à lire les « circulaires» qui leur sont
62

adressées par le MATCL (Diakité, 2002, 129; Logié, 2004, 7; COI, 2007, 30). Somme
toute, ils conservent encore d'importants moyens pour faire valoir leurs intérêts et
influencer le cours de la réforme grâce aux pouvoirs de tutelle qui leur sont conférés et à
l'ancrage solide dont ils disposent au sein de la société malienne. Certains
délégués considèrent qu'ils doivent reprendre en main les collectivités locales et que
« sans chercher à mettre en cause leur autonomie, les communes doivent être "suivies de

près". Ils pensent en outre qu'il faut, dans la situation actuelle, "exercer sur elles une
certaine contrainte".» (Bâ, 2008, 88) Les administrateurs civils veulent éviter une
marginalisation de la profession et une exclusion des arènes locales en tentant de limiter
les pertes d'attributions entraînées par l'UlTivée des communes:

[... ] Ils essaient, au nom de l'efficacité administrative, de se battre pour améliorer


les conditions de travail et acquérir dans le même temps le maximum d'avantages
liés à la qualité d'autorité de tutelle. Ils essaient donc d'orienter les normes
réglementant la tutelle dans une direction précise, qui n'est pas toujours celle
initialement voulue par le législateur. [... ] Ils font parfois des propositions, certes
pertinentes à bien des égards mais visant des objectifs qui ne sont pas
nécessairement ceux de la décentralisation Au plan national, ils ont d'ailleurs pu
atteindre quelques résu ltats en obtenant, d'une part, le changement des appellations
de délégués du gouvernement Uugées banales) par celles de préfet et sous-préfet
(considérées plus prestigieuses), et, d'autre part, l'attribution au sous-préfet de
compétences en matière foncière que son prédécesseur, le chef d'arrondissement,
n'avait pas. (O. Dembélé, 2005,174)

Dans leurs rapports avec tes élus, les délégués tendent à reproduire les liens de
subordination hiérarchique (inspirés de \' armée) qui organisent les rapports entre les
membres du personnel de la fonction publique. Ainsi, l'autorité des administrateurs
civils se fait moins sentir auprès de la population en général, mais les élus et le
personnel de la fonction publique y sont encore quotidiennement confrontés.

S'ils parviennent quelques fois à travailler ensemble sur certains projets, les élus
et les administrateurs civils sont le plus souvent en concurrence et entretiennent des
rapports conf! ictuels. Les maires reprochent au gouvernement de leur avoir donné
« l'autorité sans le pouvoir », de «reprendre d'une main ce qu'il a donné de l'autre» et
de ne pas, avoir suffisamment précisé le contenu exact des pouvoirs de tutelle: «Ils
63

considèrent généralement que les Délégués se préparent à rire de leurs malheurs, qu'il y
a une contradiction à avoir instauré 'ceux qu'on a enlevé' comme 'surveillants des
maires' : "ils disent qu'ils vont nous aider à chercher mais ne veulent pas que nous
trouvions", selon la formule d'un informateur.» (Fay, 2002, 169-170) Les élus sont
méfiants et accusent les administrateurs civils de vouloir conserver leurs privilèges en
faisant échouer la décentralisation par la rétention de l'information, ta manipulation de
la législation ou en faisant volontairement preuve de laxisme dans l'assistance-conseil
dans le seul but de démontrer l'incapacité des élus à remplir leurs responsabilités (D.
Dembélé, 2005, 172-175). Étant donné le faible nombre de tribunaux habilités à
trancher les conflits entre les élus des collectivités et les représentants de l'État, les
litiges non-résolus portés en justice tendent à s'accumuler et du même coup à paralyser
le fonctionnement des communes. Les maires cherchent donc à contourner la tutelle afin
d'éviter d'être constamment subordonnés aux délégués. À propos des CLO « dans
certains cercles où la tutelle reste dans une logique de commandement, les élus
mentionnent qu'ils n'y participent ou n'y participaient pas, ne souhaitant pas s'y rendre
pour s'y faire invectiver par la tutelle ou préférant y déléguer leurs agents. » (Diawara
et. al., 2004, 55) De plus, le fait de devoir se déplacer dans les bureaux spacieux d'un
représentant de l'État en uniforme et entouré de tout un décorum représente une forme
d'allégeance dont les élus préfèrent se passer autant que possible.

En transférant vers les collectivités locales la plupart des compétences jusque-là


placées sous l'autorité de l'administration territoriale, la décentralisation consacre le
retrait de la plupart des privilèges qu'avaient les administrateurs civils. Au début de la
phase de transfert, bon nombre d'entre eux négligent les nouvelles attributions des
pouvoirs communaux en continuant à délivrer les documents d'État civil et à arbitrer les
conflits locaux. Ils reprochent aux maires «de ne pas faire appel à l'appui-conseil ou de
n'y faire appel qu'au dernier moment devant un blocage (... ], de multiplier les fautes
d'incompétences et les irrégularités, enfin de les considérer, et selon la formule de l'un
d'eux "comme des co-épouses." » (Fay, 2002, 169) Si les chefs coLtlumiers et les leaders
religieux demeurent les personnalités les plus sollicitées pour arbitrer un conflit, les élus
64

des communes sont désonnais préférés aux fonctionnaires de l'État lorsqu'il devient
nécessaire de recourir à un autre intermédiaire (Bratton et. al., 2000, 16-17).
Néanmoins, les délégués soutiennent qu'il était prématuré de les décharger d'une partie
de leurs tâches en confiant aux maires la charge d'officier de police judiciaire. À la
différence des élus (qui seraient en conflit d'intérêt permanent), les administrateurs
civils disposeraient du recul nécessaire afin d'imposer un règlement équitable à un
litige. Les maires déplorent les manœuvres des délégués et les accusent de vouloir
s'ingérer dans les conflits locaux dans le seul but de tirer (monétairement) profit des
situations difficiles (Djiré, 2005, 49). Le principe de progressivité et l'obligation de
prudence dans le transfert servent souvent de prétexte aux administrateurs pour ralentir
la dévolution des pouvoirs et des ressources financières qui les accompagnent (Hilhorst
et Baltissen, 2004, 41-42). Alors que les compé,tences transférées aux communes
impliquent d'importantes dépenses, les revenus de l'État sont faiblement redistribués
aux collectivités et demeurent en grande partie aux mains du gouvernement central.
Pour palier aux manques de moyens des communes, les ressources matérielles et
financières provenant des services déconcentrés de l'État sont ponctuellement apportées
aux nouveaux élus par les délégués. De plus, une partie du personnel de J'administration
territoriale est « mis à la disposition» des communes tout en demeurant rattaché à la
fonction publ ique nationale (Diakité, 2002, 118). L'ensemble des acteurs concernés sont
pour la plupart peu informés à propos de la réforme, ce qui tend à prêter au nouveau rôle
de chacun des interprétations variées. Face au souhait des élus de bénéficier pleinement
de leurs attributions et aux pressions émanant du personnel de l'administration
territoriale pour ralentir le rythme des réformes, touteS sortes de compromis sont trouvés
selon des arrangements qui varient en fonction de chaque situation particulière,

Les antagonismes entre élus et administrateurs civils prennent souvent l'allure


d'une opposition entre « intellectuels» et « illettrés ». La lecture des documents et la
participation aux débats est conditionnel à la maîtrise du Français, qui demeure la
langue administrative malgré la volonté d'introduire davantage l'usage des « langues
nationales ». Dans la région de Gao, «la majorité des élus avoue ne "rien connaître à
65

ces affaires de communes" et perçoivent la gestion communale comme compliquée et


exigeante. » (Demante, 2004, 10) Les délégués sont bardés de diplômes et maîtrisent les
subtilités de l'argot juridique malien alors que les conseillers communaux ont le plus
souvent un faible niveau de formation et comptent pour environ 80% d'analphabètes
(Hilhorst et Baltissen, 2004, 56). Certains élus bénéficient d'un parcours scolaire plus
poussé (il s'agit souvent du maire et de ses adjoints), mais bon nombre d'entre eux ne
peuvent lire ou s'exprimer en Français26 . Aux yeux des « intellectuels », l'arrivée de
personnes analphabètes ou peu scolarisées à des postes de décision justifie un
« renforcement des capacités» et un accompagnement continue de leurs activités: « La
masse étant analphabète, vivant en conséquence dans l'obscurité comme on le dit au
Mali (kalan baliya ye dibi yé : l'analphabétisme c'est de l'obscurité), elles doivent donc
être guidées à l'éclairage de ces quelques "lampes". »(Béridogo, (997). Bon nombre de
fonctionnaires sont persuadés de l'incompétence des maires, se croient indispensables
pour assurer le fonctionnement des communes et doutent de l'efficacité des formations
données à des maires analphabètes (Koné et Sow, 2003, 20-22), Les opposants
« lettrés» évoquent l'analphabétisme des élus pour discréditer le pouvoir de la mairie et
certains « intellectuels» militent pour que la scolarisation devienne un critère légal
d'éligibilité pour prétendre à la gestion des collectivités (Leclerc-Olive, 2007,422),

3.2 Les autorités «coutumières» face à la décentralisation

Les attributions coutumières dont se prévalent certains chefs de lignage se


présentent sous différentes formes (reconnues ou non par l'État) qui sont historiquement
liées à la conquête, à l'autochtonie ou à la propriété foncière de certains groupes
sociaux 27 . Nous concentrerons cependant notre analyse sur les autorités coutumières
légalement reconnues par l'État (principalement les chefs et les conseillers de village).
Par l'arbitrage des conflits de succession et l'imposition de nouvelles règles d'exercice
de la chefferie, les pouvoirs d'État contribuent à façonner et refaçonner la manière dont

2(, Dans le cercle de Mopti, 9 des 14 maires sont analphabètes (Bâ, 2008, 95). Dans les cercles de Sikasso
et de Kadiolo, 74% des élus sont seulement alphabétisés en bomonon (Coulibaly et Hilhorst, 2004, 27).
27 La succession coutumière n'est toutefois pas exempte de « coups de force» dont la justification peut
reposer sur des légitimités multiples (autres que la tradition) mises en avant par les acteurs.
66

s'exercent les pouvoirs coutumiers. Les pratiques de l'appareil administratif réinventent


constamment la tradition en créant des instances locales traditionnelles de toute pièce et
en procédant à une redistribution des pouvoirs par la promotion/exclusion des aspirants
à un titre coutumier (Touré, 2006, 7-11). La médiation des conflits de succession par les
délégués leur confère un rôle déterminant où ils font l'objet de pressions provenant des
factions concurrentes qui aspirent à la chefferie. En outre, la chefferie traditionnelle
s'est trouvée uniformisée et institutionnalisée par l'attribution de certaines
responsabilités au chef de village ou de fraction. Ces derniers sont officiellement
chargés de réunir les impôts, d'arbitrer les conflits, de représenter leur communauté
auprès de l'administration et de mobiliser la population à la demande des autorités.

Même s'ils n'ont jamais été reconnus en tant que collectivités locales, les
villages et les fractions nomades sont à la base de presque toutes les interventions de
l'État en milieu rural. Au fil des réformes de l'administration territoriale, le village a
successivement été défini en tant qu' « unité administrative de base» (1959), « division
administrative de l'arrondissement» (1977) et « communauté de base en milieu rural»
(1995) (Dicko et Djiré, 2007, 129). D'une part, leur reconnaissance juridique demeure
une prérogative laissée aux administrateurs civils, qui disposent de l'autorité d'ériger
une communauté en village ou de la rétrograder au statut d'un simple «hameau de
culture ». D'autre part, les différentes réformes introduites au fil des ans par l'État pour
démocratiser la vie des villages tendent à faire coexister la chefferie coutumière avec
une chefferie administrative élue. Alors que l'investiture du chef traditionnel repose sur
les normes de transmission héréditaires au sein du lignage cheffal, la nomination du
chef administratif doit (en théorie) être entérinée par le délégué après la tenue d'une
élection au sein du conseil de village (Coll, 1997; Ribot, 1999, 35). Ce dernier est
composé de représentants élus en assemblée villageoise pour un mandat de cinq ans et
coexiste (en théorie) avec un conseil des notables formé des hommes « aînés» placés à
la tête de chacun des lignages, clans ou familles qui composent le village (Keïta, 2005,
82-86). Dans la réalité, ce sont presque toujours les chefs coutumiers qui remplissent la
fonction de chef administratif et tout ce qui se décide dans le village doit
67

obligatoirement passer par eux. Le conseil de village est formé des mêmes représentants
que ceux du conseil des notables ou sont choisis par pure forme pour respecter les
exigences du MATCL (Tag, 1994, 86-89). Avec les agents de l'administration
territoriale, les chefs de village représentent les acteurs qui se révèlent somme toute les
plus touchés par la décentralisation. Depuis l'arrivée des communes, ils sont
théoriquement placés sous la «tutelle» des élus et ne représentent plus les seuls
intermédiaires entre l'État et la population. Si le pouvoir des chefs de village ou de
fraction se trouve maintenant coiffé par celui des communes, les maires ont cependant
un «devoir de consultation préalable» à l'endroit des chefs coutumiers et la nomination
des chefs de village demeure sous la supervision des administrateurs de l'État (Dicko et
Djiré, 2007, 177). Les règles de nomination et les attributions conférées aux autorités
coutumières ont connu assez peu de changements au cours des dernières années, mais
les chefferies sont tout de même confrontées à d'importantes mutations des modal ités
d'exercice de leurs pouvoirs en raison de l'entrée en scène des élus dans l'arène locale.

Depuis l'arrivée des communes, les chefs coutumiers souhaitent maintenir la


prédominance des hiérarchies coutumières et conserver leur position d'intermédiaire
exclusif entre la population et l'administration territoriale. Ils font valoir leur
«expérience du pouvoir» et tentent de monopoliser les institutions communales en
investissant les partis politiques et en plaçant leurs proches à des postes stratégiques.
Comme ils l'ont déjà fait par le passé avec le bureau des associations villageoises et les
sections locales du parti unique, les chefs de vinage cherchent autant que possible à
faire élire des conseillers qui ne remettront pas en cause leurs privilèges et qui
s'assureront qu'un règlement favorable soit trouvé dans les litiges fonciers ou les
compétitions pour la chefferie. Grâce à leur parcours scolaire, la décentralisation
représente pour les jeunes « lettrés» l'occasion d'occuper une position influente dans la
nouvelle arène municipale. Les « vieux» se sentent peu concernés par l'administration
des nouvelles collectivités et refusent de s'impliquer directement en se portant candidat
au poste de conseiller : «Pour eux, tous ces nouveaux concepts de "démocratie",
"décentralisation", "partis politiques" n'avaient aucun sens et n'étaient que l'affaire des
68

jeunes. » (Camara, 2006, 156) Les chefs de village laissent le champ libre aux jeunes
agriculteurs, aux enseignants et aux diplômés sans emploi pour se lancer dans la joute
électorale et remporter une position influente aux côtés de leurs aînés en occupant un
siège de la commune. Ces «intellectuels» doivent néanmoins s'attirer la bienveillance
des chefs de lignage locaux pour aspirer à des fonctions dans la nouvelle commune. Les
1istes de candidats qui ne bénéficient pas de l'appui des chefs de village ont peu de
chance de remporter un siège. Peu importe l'âge du candidat, le maire doit être un
massasi (une semence de chef) en application du principe selon lequel seuls les
descendants d'une famille régnante disposent des qualités pour être un chef. Les élus
sont idéalement perçus comme des «fils du terroir» censés suivre la volonté des
« anciens» qui les ont fait accéder au pouvoir. Ainsi, les postes clés du bureau
communal sont souvent occupés par des « intellectuels» originaires de la commune et
appartiennent à des « nobles» invités à revenir dans leur région natale pour se présenter
aux élections (Camara, 2002, 68; Zobel, 2006, 272; Leclerc-Olive, 2007, 411-412).

Forts de leur statut dans la hiérarchie sociale, les chefs coutumiers représentent
des notables influents que les entrepreneurs politiques s'empressent d'approcher pour
« orienter» le choix des électeurs. L'implantation d'un parti dans un village requiert
l'assentiment de son chef, qui peut monnayer son autorisation ou refuser l'arrivée d'une
formation conCUITente à la sienne. Les partis qui sollicitent une implantation locale
laissent généralement aux chefs de village le soin de désigner les membres du bureau
politique et d'organiser les élections devant légaliser leur propre choix. Dans plusieurs
communes, les chefs de village désignent les candidats d'une liste unique en veillant à
répartir les conseillers entre chacun des villages (Koné, 2002, 208-214; K. Traoré,
2002,330-334; Lévy, 2003, 256; Coulibaly et Hilhorst, 2004, 10-11). Les militants qui
constituent une autre J iste de cand idats sans avoir obtenu l'aval des autorités
coutumières peuvent se voir refuser de faire campagne dans les villages. Dans la
commune du Mininjan (cercle de Kangaba), deux listes électorales (l'une composée de
membres allochtones et l'autre composée de membres autochtones) étaient proposées
au nom du même parti politique. La seconde s'est imposée à la première sous la
69

pression des chefs de village, qui ont blâmé les responsables de la première liste d'avoir
eu l'audace de se présenter aux élections sans leur autorisation et d'avoir omis de
présenter des candidats natifs du village 28 (Koné, 2006, 139).

Cependant, l'appui inconditionnel des chefs de village à une liste de candidats


ne se révèle pas toujours suffisant pour la faire remporter et il arrive que les « vieux» ne
parviennent pas à imposer leur point de vue lors des élections. Le statut social demeure
un critère déterminant dans le choix des conseillers, mais la décentralisation tend à
atténuer des barrières autrefois infranchissables. Avec l'arrivée des élus, nombreux sont
ceux qui anticipent une mutation du rôle joué par la chefferie traditionnelle: « "Avec la
décentralisation et le nouveau découpage administratif les clivages tribaux vont
disparaître." ... "Les gens ne vont pl us se tourner vers leurs chefs traditionnels mais vers
leurs communes, parce que c'est là qu'ils seront administrés et que se situeront leurs
intérêts politiques et économiques." ... "Les gens vont s'attacher à celui qui pourra leur
accorder des avantages, et le chef d'une commune saura s'attacher sa population parce
qu'il voudra être réélu."» (Klute, 1999, 167) Les partis qui promettent d'apporter des
solutions concrètes aux problèmes des citoyens et parviennent à bien s'implanter sont
susceptibles de mettre en difficulté des listes soutenues par les chefs coutumiers. Ainsi,
une coalition de clientèles électorales «exclues» peut avoir raison du monopole des
« vieux» et propulser à la tête de la commune des représentants de groupes sociaux

longtemps restés en marge des affaires locales (Diakité, 2002, 102-107). Les élections
offrent la possibilité aux jeunes, aux femmes, aux étrangers, aux hommes de caste ou
aux anciens «captifs» de se voir confier des responsabilités auxquels ils n'auraient
auparavant jamais pu accéder. En outre, les chefs coutumiers ne sont pas toujours
unanimes entre eux et des clans peuvent entrer en concurrence pour le contrôle de la
commune. Ces rivalités attisent la méfiance de la« veille génération» à l'égard de la

2X Des opposants à l'Adéma ont véhiculé l'idée que les communes n'étaient pas l'affaire des partis
politiques et qu'elles devaient exclusivement revenir aux autochtones: « Si jamais vous votez pour les
partis politiques. ils vendront toutes vos terres. Le parti Adéma n'est-il pas réputé pour la spéculation
foncière! L'exemple de Bamako doit servir à tout le monde. » (Camara, 2006, 156)
70

décentralisation alors que les divergences d'opinion sont interprétées comme un signe
de déstabilisation de l'ordre social.

Si les chefs coutumiers ont relativement bien réussi à s'insérer dans les
nouvelles formes d'action politique introduites par la décentralisation, leur influence est
peu à peu battue en brèche par les jeunes conseillers qu'ils ont contribué à mettre au
pouvoir: « Ces nouveaux chefs d'arrondissement que représentent les maires sont forts
embarrassés entre la volonté d'exercer pleinement leur pouvoir et la faiblesse de se
laisser manipuler par leurs parents. [... ] Ils ont récupéré les privilèges du pouvoir
administratif et quelque part, leur victoire leur ouvre le chemin du pouvoir d'État,
malgré les nombreux obstacles à franchir pour y accéder. » (Camara, 2002, 88) Bien
qu'ils ne soient en poste que grâce à l'appui des autorités lignagères, les conseillers des
communes ne cachent pas leurs ambitions politiques et n'entendent pas se laisser
dominer par les « vieux ». Ils cherchent à acquérir une position plus enviable dans
l'arène locale et leur coexistence à proximité des vestibules les fait peu à peu entrer en
conflit avec les autorités coutumières. Les élus refusent d'être convoqués chez les aînés
en exigeant que Ge soit eux qui les rejoignent à la mairie et accusent les notables du
.conseil de village d'être des dinosaures indélogeables et corrompus. De plus, les maires
disposent de pouvoirs de contrainte à l'égard des chefs de village (grâce à leurs
prérogatives d'officiers de police judiciaire) et ceux d'entre eux qui ont tenté d'en
imposer aux élus se sont fait lourdement sanctionner (Diakité, 2002, 124-126). Même
lorsqu'ils réussissent à placer leurs candidats au conseil communal, les « anciens
pouvoirs» tendent de moins en moins à être le pivot des relations sociales et perdent
progressivement du terrain au profit des élus. Les villages ne sont plus considérés
comme étant la propriété d'une seule famille et la chefferie se trouve peu à peu
remodelée par le nouveau système démocratique. Parfois, les règles de succession du
chef coutumier ont été modifiées et c'est maintenant l'homme le plus âgé du village qui
devient chef, sans égard à sa lignée ou à son statut (Lévy, 2003, 272). Quant aux chefs
de village, ils n'acceptent pas d'être confinés à un rôle subalterne et que leur autorité
soit coiffée par les élus dans leur propre village. Ils se plaignent de l'intrusion des
71

maires dans leurs affaires et voient dans la décentralisation une menace à leurs pouvoirs
sur la scène politiques locale. Les notables coutumiers contestent la légitimité des
conseillers, soutiennent qu'ils représentent un « pouvoir moderne et imposé» et les
menacent de décréter la désobéissance civile en cas de désaccord (K. Traoré, 2002, 358­
364; Nijenhuis, 2003; Grémont et. al., 2004, 206; Leclerc-Olive, 2007, 416). À propos
des difficultés à percevoir les impôts auprès des chefs de village, un maire affirme que
« les vieux te font toujours observer l'insignifiance de ton statut de maire par des propos
tel que nous t'avons vu naître "i wolola an j1ana". Qu'est-ce que tu peux bien nous
apprendre et quelle contrainte peux-tu exercer sur nous? [... ] » (Koné et Sow, 2003,
10) Dans ce contexte, les élus accusent les chefs de lignage de faire preuve de mauvaise
foi en ne voulant pas comprendre ce que signifie réellement la décentralisation.

3.3 La présidentialisation des maires et le monopole de l'arène locale par les élus

Bien que l'autorité des maires soit relativisée par le maintien d'une tutelle de
l'État sur les communes, cela ne les empêche pas de s'arroger les pleins pouvoirs et
d'adopter des attitudes « d'administrateurs» qui pérennisent les déséquilibres entre
gouvernants et gouvernés caractéristiques du commandement. Au cours des campagnes
de sensibilisation, certains leaders politiques « affirment sans ambages qu'ils "vont
prendre la place des chefs d'arrondissement", que "le commandant ne percevra plus
l'impôt".» (L. Traoré, 2002, 394) Malgré le poids de l'appui-conseil, les communes
prennent leur indépendance à l'égard de l'État par des coups de force ou des stratégies
d'évitement. Les élus ont une conception « impériale» de leur rôle et souhaitent profiter
du « départ des commandants» pour s'arroger le monopole de l'action politique au
détriment des autres acteurs locaux en présence: « Dans la cinquième région, un maire
voulait que l'ex-chef d'arrondissement fasse rapidement ses bagages pour s'installer à
sa place dans les locaux de l'administrateur.» (Cissé et. al., 2003a, 34) Les affaires
locales se concentrent progressivement vers le bureau du maire et on assiste à
l'apparition d'un style de gestion copiant largement celui de l'administration territoriale.
72

3.3.1 Les maires face aux dispositifs participatifs de la réforme

Au début, les populations étaient enthousiastes devant la création des communes


et « s'imaginaient qu'elles allaient gérer désormais tout leur patrimoine» en devenant
« leurs propres "commandants" ». (Camara, 2002, 85) Mais, une fois l'euphorie de la

réforme passée, la plupart des gens ne savent plus précisément à quoi s'en tenir à propos
des maires et attendent de voir s'il y aura réellement des changements. Pour l'instant,
« la perception qu'en ont les populations est variée: "ils nous représentent et ils vont

pouvoir enfin négocier avec l'Etat", "la gestion de la commune va être juste parce qu'on
les a choisis et que nous pourrons les chasser .si cela ne va pas", "c'est les nouveaux
chefs mis en place par les partis", "ils sont là pour l'argent". » (Demante, 2004, \0)
Toutefois, la décentralisation est de plus en plus ressentie comme une source de
contrainte (et même de danger) provenant d'une administration mise en place « d'en
haut» par l'État, de telle sorte que les élus sont désignés comme «ceux qui ont
remplacé les commandants» (Doquet, 2006, 305-306). Les affaires locales ne relèvent
que des «hommes de pouvoir» (le maire, ses plus proches conseillers, les
administrateurs civils et les chefs coutumiers), les élus restent des personnes difficiles à
aborder et les délibérations prennent généralement la forme de doléances. Une fois
arrivés à leur poste, les maires restent souvent impassibles aux demandes de leurs
concitoyens et tendent à reconduire les rapports de force qui prévalaient entre
l'administration territoriale et la population. Au moment des échéances électorales, les
candidats sont cependant à la merci du vote des électeurs et ces derniers s'empressent de
réclamer des promesses pour marchander leur appui auprès des partis.

De nombreux villages se sont sentis laissés pour compte par la réforme et les
attentes concrètes en terme de développement ont parfois été déçues. Les candidats
inscrits 'aux listes électorales proviennent des communautés les plus influentes et peu de
villages disposent d'une représentation au conseil communal: « Au cours de la
mandature communale 1999-2004, 65,58% de ces communautés n'avaient pas de
ressortissants au sein des conseils communaux [... ]. Cela voudrait dire que quelques
villages (ou fractions) influents dominent la vie politique locale et composent les têtes
73

de listes des partis politiques lors des élections. » (Ongoïba et. al., 2006, 19) La création
des communes entraîne un important déséquilibre entre les communautés qui
bénéficient d'un chef-lieu et les autres villages aux alentours qui restent en marge des
initiatives locales (K. Traoré, 2002, 344). L'absence d'investissements en contrepartie
des impôts payés et/ou la concentration des projets dans les chefs-lieux suscite alors
d'importantes frustrations pour certains villages. Compte tenu du fonctionnement rigide
de l' ANICT et de l'importance que représentent les droits de tirage, les maires sont
davantage préoccupés par les canevas à respecter qu'à animer des débats d'idées ou
concevoir des projets novateurs. Aussi, l'ampleur des contraintes et la complexité du
travail qu'impose l'obtention de subventions de l'ANICT font en sorte que de
nombreuses communes se révèlent incapables d'obtenir des fonds.

Bien que les séances du conseil traitant des questions budgétaires ou de


développement soient obligatoirement publiques, beaucoup de chefs coutumiers, de
membres associatifs ou de simples citoyens qui souhaitent s'impliquer dans l'activité de
la commune n'ont pas droit de regard et se sentent exclus par le maire: «Une partie de
la population est impliquée dans le processus d'identification des besoins mais, quand il
s'agit d'estimer le coût des réalisations visant à apporter des réponses adaptées à ces
besoins, elle est absente des délibérations. Elle se plaint de n'être mise au courant ni de
l'exécution du plan ni de l'utilisation des fonds.» (Cissé et. al., 2003a, 34) Les
consultations budgétaires prennent la forme de séances d'information sur des prévisions
déjà faites où il se révèle difficile à l'auditoire d'apporter des modifications et où
certains aspects sensibles sont volontairement dissimulés par les élus (Gré mont, 2004,
206-207 ; Sissoko, 2008, 14-22). Les rencontres sont normalement publiques, mais les
citoyens et les représentants des associations y sont rarement conviées et/ou ne savent
pas qu'ils peuvent y participer. Même lorsqu'elles sont annoncées, ces réunions se
heurtent à une indifférence généralisée qui n'est pas étrangère à la méconnaissance par
les citoyens des droits dont ils disposent en matière d'information et de participation,
des aspects que les élus connaissent mais négligent de mettre en œuvre pour diverses
raisons (garder la main haute sur le budget, ne pas multiplier les obstacles à un
74

processus déjà complexe, manque de moyens, etc.). Seuls des événements spéciaux,
comme la tenue « d'espaces communaux d'interpellation démocratique », permettent
aux citoyens de s'adresser à leurs conseillers par des doléances 29 (Centre Djoliba, 2001 ;
Felber et. al., 2006, 30). On reproche aux élus d'être coupés « de la base », de
manipuler à leur guise l'information et de prendre des décisions moins en fonction des
besoins exprimés que d'après les exigences formulées par les autorités de tutelle
(Diakité, 2002, 118). Du reste, les renseignements sur les activités de la commune ne
circulent pas très bien et ce sont généralement les rumeurs qui se chargent de propager
l'information, contribuant ainsi à accroître le sentiment de la population (et de
nombreux élus) que la commune est uniquement la chose du maire.

Les séances de délibération ayant précédé la rédaction des PDESC ont connu un
certain succès dans les collectivités où elles ont eu lieu et les encouragements des élus
ont parfois incité l'ensemble des citoyens (y compris les jeunes et les femmes) à prendre
la parole lors des assemblées. Néanmoins, la plupart des communes n'organisent jamais
de consultations et les discussions se déroulent exclusivement au siège de la mairie
entre les membres du bureau et les représentants de chaque village: « Lorsqu'un
membre du conseil communal parle de participation des populations, il évoque, le chef
de village, un ou deux conseillers du chef de village et tout au plus un représentant des
femmes et un représentant des jeunes. Lorsque ces représentants des populations
retournent au village ou au quartier, le compte rendu, quand il y en a, prend l'al1ure
d'une information ou du moins d'un appel à l'exécution. »(Koné et Sow, 2003, 37) Les
réunions organisées par le maire auprès de chaque communauté (même si elles
n'incluent que les chefs coutumiers et/ou leurs représentants) constituent des opérations
délicates pour les communes qui comptent une cinquantaine de villages (ou même plus).
La présence d'une pluralité d'acteurs imbriqués dans des dynamiques conflictuelles
donnent du fil à retordre aux élus et les consultations prennent alors la forme de séances
d'information qui aplanissent toutes divergences d'opinion (par le spectacle d'un

2~ Les doléances regroupent des notables triés sur le volet qui sont autorisés à s'adresser aux grosses
pointures (maire, ministre, président, etc.) dans l'espoir que leurs requêtes soient entendues. Ces séances
d'interpellation représentent parfois le seul contact que les responsables entretiennent avec la population.
75

supposé consensus exprimé par la population) et évitent toute forme de débats


susceptibles de réactiver des rivalités locales. Aux yeux des citoyens, « cette façon
d'agir a renforcé l'idée que le travail de la mairie était quelque chose de lointain qui ne
les concernait pas directement. (... ) Le déplacement des représentants villageois à la
mairie soutient également l'hypothèse d'un rapport hiérarchique entre le centre de la
commune et l'espace qui l'entoure; rapport qui reflète le système administratif français,
aussi bien que la relation entre chefs lignagers et populations. » (Zobel, 2006, 274)
L'étendue du territoire et la mobilité des populations dans certaines communes posent
des obstacles supplémentaires à l'inclusion de l'ensemble des villages (ou des fractions
nomades) dans la rédaction des plans de développement (Ongoïba, 2003, 16; Hilhorst
et Baltissen, 2004, 60 ; Ongoïba et Sylla, 2007, 10). En raison du manque de formation
des élus, ce sont parfois des consultants embauchés par la mairie qui rédigent seuls le
PDESC de la commune. Il arrive même que certains maires présentent de faux résumés
des délibérations afin d'obtenir l'approbation rapide de leur plan et ainsi respecter les
délais impartis pour le déposer (Dicko, 2004, 88-89).

Malgré leur difficulté de mise en œuvre, les projets de (' ANICT se révèlent
généralement populaires et représentent un signe concret des bénéfices de la
décentralisation. Lors d'une enquête menée dans le Nord-Mali, « plus de 60 % des
populations rencontrées déclarent que l'existence de ces investissements constitue pour
elles la preuve du changement. Ces personnes estiment que ['existence
d'investissements dans des bâtiments (qu'ils soient fonctionnels ou non) est une
garantie que, tôt ou tard, les services qu'ils sont censés abriter seront fournis. » (Cissé
et. al., 2007, 16) Il reste que l'exercice de planification du développement de la
commune est d'abord guidé par le besoin de faciliter l'accès aux fonds de l'Agence
(plutôt qu'à mettre en œuvre les priorités exprimées par les citoyens) et se limite donc à
dresser une liste de projets devant être approuvés, financés et mis en œuvre aux
échelons supérieurs: « Dans certains cas, les communes sont invitées à déposer leurs
projets avant une certaine date et les services techniques procèdent ensuite à l'étude et à
la sélection des dossiers pour analyse et approbation. Dans d'autres cas, chaque
76

commune est dotée d'un nombre limité de projets avec un budget plus au moins
équilibré pour toutes les communes. » (Cissé et. al., 2003a, 38) On semble renouer avec
les programmes de développement qui parachutent ici et là des projets sans que
personne ne sache vraiment qui les a commandé. De plus, certaines considérations
électoralistes des élus les incitent à favoriser les petits projets populaires, visibles et
réalisables à court terme au détriment des initiatives à long terme qui engendrent de
meilleures retombées. Les subventions accordées sont surtout destinées à des projets
d'infrastructures (ODHD-LCPM, 2003, 7) et « la pertinence, la viabilité et la durabilité
de ces investissements est une source de préoccupations, notamment devant le nombre
de réalisations non ou peu fonctionnelles par manque de personnel et/ou de ressources
matérielles et financières pour leur fonctionnement. » (Cissé et. al., 2007, 16)

3.3.2 Les rapports entre conseillers de la commune dans le contexte du multipartisme

En raison de la composition pluripartite du conseil communal, des divergences


internes surviennent régulièrement entre les élus de l'opposition (ou certains membres
« laissés pour compte» d'une liste gagnante) et les élus profitant d'un poste au bureau
communal, ou entre les différents membres du bureau c9mmunal (surtout lorsque le
maire et ses adjoints proviennent de partis différents). Chaque formation politique tend
à apparaître comme un pouvoir parallèle à celui de la commune et l'appui à un candidat
dépend moins d'un ralliement idéologique que d'un positionnement stratégique des
acteurs dans l'arène locale. À ce titre, les conflits au conseil font souvent renaître les
luttes de tendances qui parcouraient autrefois les instances locales du parti unique. Si les
partis sont d'abord nés d'une reconstitution des clientèles déjà en place sous l'UDPM,
l'ascension au pouvoir de l'Adéma a suscité une tendance générale à s'y rallier, quitte à
créer des bureaux concurrents qui s'affrontent dans un même village (Fay, 1995,29). Le
re-quadrillage du territoire par des communes gérées par des élus «c1ientéliquement»
rel iés aux partis nationaux renoue partiellement avec le système hiérarchique
d'allégeances personnelles de l'UDPM allant du «Père de la Nation» jusqu'aux
détenteurs d'une position au niveau local (Fay, 1999, 130- 131 ; Bertrand, 2006, 192).
Néanmoins, les élus tendent progressivement à remettre en cause cette hiérarchie et à
77

s'autonomiser par rapport aux politiciens régionaux, dont l'influence reposait jusque-là
sur leur position d'intermédiaire entre les parties en conflit et les pouvoirs d'État: « Les
juges sont devenus plus indépendants, les influences partisanes s'opposent au niveau
même de la capitale et se reflètent dans le pluralisme local. Si les représentants des
grandes factions continuent à accom pagner leurs partisans au cercle ou à la justice, ils
ont donc perdu une bonne part de leur pouvoir d'influence.» (Fay, 2006, 116) Ainsi, les
tentatives de certains cadres politiques régionaux d'influencer les candidatures locales
ont entraîné de fortes contestations en plusieurs endroits.

La fragmentation de partis encore faiblement implantés et le phénomène de


« transhumance» des élus (par des ralliements clandestins, des scissions nées de
rivalités personnelles ou des conversions politiques spectaculaires) démontrent le
caractère mouvant et incertain des solidarités politiques qui unissent les militants. Les
listes de candidats sont dressées par un groupe restreint d'individus, incluant parfois des
notables influents qui résident à l'extérieur de la commune. Les formations partisanes
ne durent généralement que le temps d'une campagne avant de retomber en léthargie
jusqu'à la prochaine échéance électorale. Lorsqu'une liste remporte la majorité absolue
des sièges, un seul parti peut alors imposer son agenda au conseil communal Uusqu'aux
élections suivantes) au détriment des factions rivales. Ces dernières refusent alors d'être
dominées par le maire et contestent par tous les moyens sa gestion autocratique des
affaires en exigeant de l'administration territoriale davantage de moyens de contrôle des
décisions prises par la commune. Même dans les communes où aucun parti ne disposent
de la majorité, les maires ont tendance à administrer seuls leur commune (en compagnie
des adjoints ou du secrétaire général) sans associer les autres élus et sans rendre de
compte à personne (Diakité, 2002, 118 ; K. Traoré, 2002, 352). Les réunions du conseil
sont plutôt sporadiques et se bornent à la tenue des réunions ordinaires prévues par la loi
: «Au lieu d'être de véritables tribunes de discussion, [... ] les quelques concertations
qui ont lieu fonctionnent le plus souvent comme de simples réunions d'information.
[... ] Il n'est pas rare que les populations et même certains membres du conseil
communal disent ne rien savoir des décisions prises par le maire ou des activités
78

exécutées au nom de la commune. » (Cissé et. al., 2003a, 22) Les élus ont généralement
de la difficulté à obtenir l'oreille du maire et les réunions se limitent à la participation
des membres du bureau communal, ou se déroulent exclusivement au sein d'un «état
major» informel où le maire s'entoure de ses principaux sympathisants (Koné et Sow,
2003, 41 ; Demante, 2005, 212).

3.3.3 Complicité et conflit entre les membres associatifs et les élus

Au cours des années 1980-1990 sont nées une myriade d'organisations de la


«société civile» revendiquant un rôle de représentation auprès des populations pour
faire face à l'inertie des pouvoirs d'État. Avec la décentralisation, ces associations de
développement veillent à être solidement représentées au sein des communes de façon à
consolider leur influence dans l'arène locale (Quiminal, 2002, 290). Les élus doivent
composer avec ces organisations très influentes et de nombreux membres associatifs
mènent campagne pour obtenir un siège au conseil communal. En effet, plusieurs
d'entre eux se sont déjà fait remarquer auprès des membres de leur communauté par
leurs capacités d'initiative (entre autres dans la geStion des projets de développement) et
voient dans la décentralisation la possibilité de consolider leur projet de changement
social en s'inscrivant sur l'échiquier politique. Grâce à leur longue expérience de
gestion des affaires locales, les membres de l'exécutif des AV, des APE ou de
l'ASACO sont perçus comme des candidats tout désignés pour occuper un poste à la
mairie (Hilhorst et. al., 2005, 23). Aussi, les jeunes « lettrés» (agents de
développement, enseignants, infirmiers, techniciens, etc.) longtemps restés dans l'ombre
des chefs de lignage voient dans la décentralisation le moyen d'acquérir davantage
d'influence dans leur milieu et de s'émanciper des autorités coutumières 30 (Béridogo,
1997). L'avènement des communes permet aux associations locales de faire pression sur
les élus (plus facilement qu'avec l'administration) pour faire valoir certaines de leurs
revendications (Hilhorst et Lodenstein, 2008, 47). Inspirés par le slogan politique du

Les employés des GLEM (pour la plupart de jeunes diplômés sans emploi) ont souvent fait pression
.10
pour intégrer les sections locales d'un parti et/ou de se porter candidat aux élections communales.
Certains groupes de « lettrés» véhiculaient des messages faisant croire que le poste de maire (et les
prérogatives jusque-là réservés à l'administration civile) leur était nécessairement prédestiné.
79

« kokadjè », les jeunes diplômés (souvent formés de militants de la première heure du


mouvement démocratique) dénoncent l'accaparement du pouvoir par les « vieux» et
entendent occuper un rôle politique accru pour défendre leurs droits sur la scène locale.
Les groupes de jeunes cherchent à attirer l'attention des élus en affirmant « que le maire
pourrait être suspendu par la force de leur vote "comme Alpha le président" et que "aux
jours de la démocratie" les injustes seraient poursuivis. » (Zobel, 2001, 131)

Les associations locales représentent d'importantes opportunités de financement


pour les communes et la réforme encourage les maires à déléguer les charges sociales
aux ONG et aux GIE par l'octroi de contrats de prestation de services (Dorier-Apprill,
2002). Grâce aux revenus engrangés par le coton, les structures villageoises de la
CMDT sont des partenaires majeurs pour la réalisation des projets de développement
dans le Mali-Sud. Dans certaines communes, les associations de développement tendent
même à s'imposer aux municipalités dans la recherche de financement et la gestion des
projets de développement (Leclerc-Olive, 2003a, 303). Les élus doivent tolérer certaines
pratiques informelles, comme le prélèvement en dehors du circuit communal des taxes
d'exploitation des ressources qui financent les activités de certains comités de
développement (Zobel, 2006, 275). Si les relations entre les communes et les membres
associatifs se jouent en terme de complémentarité, leurs relations ne sont pas exemptes
de rapports de compétition ou de conflits. Les compétences transférées aux communes
qui, sans leur octroyer un monopole, leur confie une responsabilité d'initiative, sert
souvent de prétexte aux maires pour prendre le contrôle des comités de gestion (APE,
ASACO, etc.), des conseils d'exploitation des ressources (forestières, halieutiques, etc.)
et de certains groupements locaux (A V, associations de jeunes, groupements féminins,
etc.). Les élus tendent alors à s'arroger le monopole des affaires locales en voulant
coordonner l'ensemble des associations: « Les maires et les conseillers communaux,
face à la fragmentation des lieux organisés d'initiatives, de prises de décisions
politiques sont entraînés, quelle que soit leur appréciation du processus, à constituer la
mairie comme lieu unique, centralisateur, légitime de la régulation à son niveau [... J. »
(Quiminal, 2002, 304) Puisque les maires deviennent les interlocuteurs officiels entre
80

l'État et les communautés locales, la décentralisation est susceptible de favoriser la


mainmise du bureau communal sur les affaires locales par l'exclusion (ou la cooptation)
des membres associatifs et la dépossession des équipements acquis par certaines
communautés (Leclerc-Olive, 2003b, 176). Plusieurs villages «modèles» refusent
d'intégrer la commune parce qu'ils craignent que leurs voisins s'approprient
gratuitement les infrastructures misent en place dans le cadre des « projets pilotes ».

En raison des importants moyens matériels et financiers à leur disposition, les


associations deviennent un enjeu des luttes entre factions politiques rivales pour le
positionnement des partis dans l'arène locale et la conquête du pouvoir de la commune.
Les postes-clés des comités appartiennent presque toujours aux mêmes personnes
(souvent des élus des collectivités, qu'ils soient du côté du maire ou de l'opposition) et
le taux de renouvellement des membres du bureau est généralement très élevé (Koné et.
al., 2007, 27). Les membres des associations locales s'assimilent à des militants
politiques et choisissent souvent de lier leurs actions au sein d'une association par un
engagement envers une formation politique (ou vice-versa). Il n'est pas rare que des
élus refusent que les associations mettent leur nez dans leurs affaires et les accusent
d'être des «espions» pour le compte d'un rival politique (Camara, 2006, 160). Si la
compromission des organisations locales avec les milieux politiques leur fait perdre une
part de leur crédibilité auprès du grand public (qui voit alors ces associations comme un
instrument au service de l'État ou d'un parti), l'apolitisme est perçu comme un frein à la
promotion de leurs revendications et la mise sur pied de leurs projets.

3.4. La gestion budgétaire et financière des communes

3.4.1 La collecte des impôts depuis la décentralisation

Au regard du revenu annuel moyen - estimé à 160000 Fda/habitant (ODHD­


LCPM, 2003, 13) - et de la persistance de fortes inégalités sociales (visibles jusqu'à
l'intérieur même des familles), le Mali dispose d'un régime fiscal qui peut se révéler
particulièrement accablant pour certaines couches de la population. Les impôts sont
généralement versés en plusieurs tranches et la capacité de paiement au cours d'une
81

année est largement tributaire de la pluviométrie. Les procédures de recouvrement


s'inspirent du système français et se partagent en deux processus distincts (qui ne sont
pas toujours bien perceptibles dans la réalité) : l'émission des « rôles» de chaque
contribuable à partir des carnets de famille (incombant au service des impôts), suivie de
la collecte des impôts et des taxes à proprement dit (incombant au service du Trésor).
Avant l'avènement des communes, ce sont les commandants de cercle et les chefs
d'arrondissement - accompagnés d'un détachement de l'armée - qui établissaient les
rôles et recouvraient les impôts pour le compte du percepteur (Dicko, 2004, 78). Pour
motiver leur ardeur au travail, les administrateurs bénéficiaient d'importantes ristournes
sur les collectes et n'hésitaient pas à faire usage de la répression (garde à vue,
emprisonnement, travaux forcés) pour faire entrer les fonds. Les chefs de village
jouaient un rôle-clé tout au long du processus: la population leur versait le montant des
impôts, qu'ils redonnaient ensuite aux fonctionnaires en échange d'une indemnité de
compensation. À l'heure actuelle, ce sont les agents communaux (avec l'aide des
services du Trésor) qui établissent la liste des rôles et procèdent au recouvrement. Les
impôts collectés par les communes se répartissent ensuite entre les autres collectivités
telTitoriales (cercles et région) selon un pourcentage prédéterminé par l'État. Les chefs
de village servent encore d'intermédiaires aux percepteurs (mais ne retirent plus rien ­
en principe - sur les sommes amassées) et l'influence des leaders coutumiers se révèle
décisive dans le paiement (ou le non-paiement) des impôts à la commune.

Lors des campagnes de recouvrement d'impôt ayant suivi l'installation des


communes, la méconnaissance de la réforme, l'imprécision des règles et la carence de
moyens entraînèrent une certaine confusion tant parmi les élus que tes fonctionnaires.
Les percepteurs des services du Trésor sont trop peu nombreux pour collecter
l'ensemble des impôts et doivent être indemnisés financièrement par la commune pour
le travail qu'ils font. Les montants amassés peuvent varier d'une commune à l'autre en
fonction des antécédents de paiement, de l'acceptation du pouvoir des élus ou des
rapports qu'entretient le maire avec les chefs coutumiers. Dans les cercles de Diéma et
de Nioro du Sahel, le taux de recouvrement des impôts de chaque commune en 2001
82

varie entre 12% et 90% et dépend fortement de la représentation des villages au conseil
et/ou des retombées concrètes (en terme de projets) apportées par la décentralisation3l
(Leclerc-Olive, 2003a, 304). Les villages qui estiment être mal représentés refusent de
payer afin d'exiger que l'argent soit mieux redistribué entre chaque communauté.
D'autres villages qui ne reconnaissent pas l'autorité des élus refusent de donner leur
argent au maire et insistent pour régler tous leurs impôts avec le délégué du
gouvernement. Au Mali, l'impôt ou « prix de la vie» (ni' sanga) est synonyme
d'humiliation et d'extorsion de la part d'une autorité extérieure à la communauté. Les
fonctionnaires (et maintenant les élus) sont constamment accusés « d' autoconsommer »
les fonds ou d'être incapables de gérer leurs dépenses (Diawara et. al., 2004, 25).

Dans certains cas, les maires préfèrent renoncer à la collecte des impôts de peur
d'aggraver les tensions sociales et/ou se plient à certains chefs de village qui menacent
de se retirer de la commune si on leur impose des taxes. Plusieurs communautés
« dissidentes» ont interdit de passage les collecteurs et n'ont jamais rien payé au maire.

Les villages qui contestent l'autorité des élus peuvent refuser de se faire recenser par le
personnel de la commune et demander que le délégué du gouvernement vienne à Jeur
place (Camara, 2002, 73). Certains groupes de l'opposition accusent les élus de fraude
électorale ou de détournement fiscal et incitent la population à la désobéissance civile.
Dans d'autres cas, les exonérations consenties à la clientèle électorale des élus sont
d'une telle ampleur que la mairie ne se retrouve plus qu'avec des miettes en revenus. En
outre, plusieurs maires ont été élus contre la promesse d'abolir les impôts parce qu'ils
considèrent illégitime que leur commune perçoive des fonds auprès de leurs électeurs
démunis alors qu'aucun service ne pourra leur être offert en contrepartie. Le manque à
gagner en recettes fiscales empêche alors la mise sur pied de projets d'investissements
(en raison de l'incapacité des élus à fournir la contrepartie de 20% de l'ANICT) et porte
un dur coup à la viabilité économique (et politique) des nouvelles communes.

JI 39% des contribuables se sont acquittés de leurs impôts au niveau national en 2002 (Pringle, 2006, 26).
83

Face à des maires qui s'effacent devant leur responsabilité d'imposer leurs
concitoyens, les administrateurs civils y voient la preuve que les politiciens n'ont pas la
poigne suffisante pour forcer leurs « parents» à payer et que le recouvrement se révèle
être impossible s'il est effectué par «quelqu'un du milieu ». Malgré l'objection des
maires, la responsabilité du recouvrement fût donc temporairement confiée aux
délégués du gouvernement en 2000 afin d'essayer de mettre un terme au désordre qui
était en train de se dessiner un peu partout au pays: « Ils devaient en retour recevoir 2%
des ristournes, le premier trimestre et 1%, le trimestre suivant. Mais ces administrateurs
[... ] refusèrent unanimement en réclamant plutôt 25% des ristournes comme condition
de leur acceptation. [...] Le Ministre de l'administration territoriale voyait la main du
nouveau syndicat libre de l'administration territoriale (Sylmat) dont le chef Mahamane
Maïga s'était insurgé contre les prétentions de l'État et avait affirmé que la
décentralisation était "la chose d'Alpha Oumar Konaré et d'Ousmane Sy". » (Camara,
2002, 81-82) Une fois l'impôt définitivement transféré sous l'autorité du maire, le
recours aux forces de l'ordre pour accompagner les percepteurs (ou récolter les taxes
aux postes de contrôle) s'est répandu afin de faire symboliquement pression auprès des
réfractaires (Diawara et. al., 2004, 21; Diawara, 2007, 16-17 ; Sissoko, 2008, 13). Les
gardes qui perçoivent les taxes et les impôts sont «mis à la disposition» par
l'administration et rétribués par la commune selon un certain pourcentage des sommes
récoltées J2 • Malgré la volonté initiale du gouvernement de mettre un terme aux
méthodes répressives, certains maires zélés sont convaincus du bien-fondé du recours à
la contrainte et menacent de renvoyer les enfants de ['école, de faire emprisonner les
récalcitrants ou de traduire en justice les chefs dont le village ne se serait pas acquitté de
ses arriérés de paiement.

3.4.2 La gestion du budget par les maires

Après les consultations menées dans les villages et l'approbation obtenue auprès
du conseil communal, le budget doit obligatoirement être approuvé par la tutelle en

32Certains jours de marché. les forces de l'ordre peuvent confisquer les motos, les vélos et les charrettes
non munies de vignettes jusqu'à ce que leurs propriétaires se soient acquittés de leurs arriérés d'impôts.
84

fonction des normes légales à respecter. En raison de la complexité des prévisions


comptables à réaliser, il s'agit d'une tâche qui se révèle généralement difficile à
accomplir pour le bureau communal. Partout au pays, la gestion financière est jugée
irrégulière et les nouveaux élus sont placés en situation de faiblesse par rapport aux
délégués et aux représentants des organismes d'appui: «Les budgets élaborés par les
collectivités sont souvent rejetés par la tutelle [... ] pour des motifs qui ne sont pas
toujours clairs pour les communes. Dans certains cas, les communes ont aussi été
obligées de payer le service d'appui ou la tutelle pour que le dossier sur le budget soit
traité dans un minimum de délai. » (Dicko, 2004, 83) En raison de leur gestion jugée
négligente, les maires sont régulièrement menacés de suspension par les délégués et
certains conseils ont d'ailleurs été dissous pour être confiés à des délégations de gestion.

À la tutelle de l'administration civile s'ajoutent les rapports tendus que les


maires entretiennent avec les services du Trésor. En vertu du principe de l'unicité de
caisse, le personnel de ce ministère est chargé à la fois de la collecte de l'impôt et de la
gestion des fonds des collectivités avec ceux de l'ensemble de l'appareil d'État))
(Pringle, 2004, 44). Aux dires d'un élu, «le percepteur a trouvé de cette manière un
pouvoir sur les maires. À ce jour encore, les mandats peuvent tomber sur son bureau et
y rester plus d'un mois avant traitement. » (Diawara et. al., 2004, 58) Les maires doivent
régulièrement faire le déplacement vers la perception (basée au niveau du cercle) pour
justifier leurs dépenses et toucher aux fonds: «Au principe de l'unicité de caisse se
rajoute celui du transfert des fonds à la paierie régionale à partir d'une certaine somme,
ce qui oblige les communes à financer d'incessant voyage éventuellement sans
résultats. Un informateur remarquait "alors on te dit que c'est devenu l'argent de tout le
Mali, et l'argent du Mali ce n'est pas souvent que tu peux le voir" [...]. » (Fay, 2002,
168) En effet, les maires voient leurs demandes rejetées de .façon injustifiée et sont
déconcertés de voir l'argent de la commune «disparaître» parce que le Trésor a dû
l'utiliser pour le paiement d'autres dépenses de l'État (Hilhorst et Baltissen, 2004, 38).

·1J Avec ce fonctionnement hérité de la colonisation, tous les fonds publics doivent obligatoirement
transiter par le Trésor, dont la caisse unique centralise l'ensemble des revenus et des dépenses de l'État.
Évidemment, ces règles limitent les possibilités de gestion participative du budget des communes.
85

3.5 La décentralisation et les mutations de la gestion domaniale

Les dynamiques foncières représentent le lieu d'expression par excellence des


rapports de force au sein des arènes locales et « la mobilisation du sol se comprend dans
un jeu de miroir d'aspirations finement localisées et d'ajustements nationaux.»
(Bertrand, 1994, 10) La décentralisation provoque d'importantes transformations dans
la gestion domaniale en introduisant de nouvelles normes qui obligent les acteurs à se
repositionner et à repenser leurs interventions dans le jeu politique local. L'analyse des
procédures d'attribution foncière nous permettra d'illustrer les lieux d'interactions, de
rivalités ou de compromis qui se dessinent entre les différents «acteurs stratégiques»
qui sont impliqués. Nous verrons que malgré la présence de dynamiques locales
plurielles à l'égard du foncier, la législation adoptée parallèlement à la décentralisation
contient des règles uniformes, abstraites et contradictoires qui font de la gestion
domaniale des démarches qui se révèlent longues, imprévisibles et peu transparentes. Il
apparaîtra aussi que les conseillers communaux (et surtout les maires) occupent une
position intermédiaire parmi les différentes instances concernées par les enjeux fonciers.
Pouvoirs politiques et administratifs tendent à se confondre, offrant de nouvelles
prérogatives aux détenteurs d'une position dans l'appareil municipal. Après avoir
discuté des liens d'interdépendance entre les différents acteurs de la gestion domaniale,
nous approfondirons la réflexion sur les enjeux fonciers en analysant (dans le chapitre
IV) la façon dont les conflits entre groupes sociaux (entre propriétaires et non­
propriétaires ou autochtones et allochtones) se transposent dans l'espace communal.

3.5.1. Lafonetion publique nationale et l'attribution de titres d'occupation par l'État

D'un point de vue juridique, l'ensemble des propriétés appartiennent à l'État


(principe de la domanialité) et la gestion domaniale constitue une prérogative régalienne
placée sous le contrôle exclusif des fonctionnaires. Les pouvoirs étendus des
administrateurs civils les autorisent à « figer» le droit coutumier par ['enregistrement
d'un constat d'occupation (d'espaces d'habitation ou de zones d'exploitation) qui atteste
par écrit les privilèges fonciers détenus par différents acteurs (moyennant commission).
86

Ce type de papier n'est pas toujours recevable devant les tribunaux et ne signifie pas
pour autant que son détenteur possède un titre de propriété. Celui-ci demeure un
concessionnaire des lieux détenant des «droits d'usage» (à tout moment révocables)
alors que l'État demeure le seul propriétaire légal des 1ieux. Sinon, des titres de
concession rurale (ou titres provisoires) peuvent être attribués une fois les droits
coutumiers «purgés» par le consentement des propriétaires traditionnels à renoncer
à leurs prérogatives (Djiré, 2004, 27-32). Ces lettres n'ont qu'une valeur transitoire, ne
peuvent être délivrées que dans les espaces destinés à être viabilisés et impliquent le
versement d'une rente annuelle pour toute la période couverte par le titre. Sauf en cas de
conflits difficiles à résoudre (et où les administrateurs tiennent le rôle d'arbitre), les
acteurs rechignent à s'engager dans ces procédures coûteuses qui tendent à ébranler les
rapports de force fragiles entre les composantes sociales d'une communauté. Les
propriétaires coutumiers acceptent rarement de collaborer aux procédures de purge et la
délivrance d'une lettre officielle est susceptible de faire l'objet de contestations lorsque
plusieurs groupes réclament des droits sur un même territoire.

Les constats d'occupation et les titres provisoires peuvent à tout moment être
remis en cause par l'administration et ne mettent pas ses détenteurs à l'abri d'un retrait
ou d'une expropriation de leurs attributions. La seule façon de sécuriser sa propriété
consiste donc à immatriculer sa parcelle au nom d'une personne privée. Le processus
« requiert au préalable une enquête cadastrale qui doit être exécutée par les services
techniques de l'urbanisme et qui permet d'obtenir un titre provisoire d'occupation. [... )
Petits employés et hauts fonctionnaires ont coutume de chercher leur bénéfice en
négociant leur signature ou leur décision auprès du citoyen qui demande comment faire
pour que sa demande aboutisse et que le dossier avance. » (Bouju, 2000, 158). Ensuite,
la procédure exige l'immatriculation du lot au nom de l'État puis sa mise en valeur (par
la construction d'un bâti) d'après des normes précises et à l'intérieur de certains délais.
Les campagnes de lotissement s'échelonnent sur plusieurs années et nécessitent souvent
l'intervention des députés, des ministres concernés ou même du Président de la
République pour faire débloquer le dossier (Djiré, 2004, 19-22). Si l'acquisition d'une
87

lettre d'immatriculation offre une certaine garantie de propriété à ses détenteurs, il reste
que cette procédure n'est applicable qu'aux lots viabilisés en milieu urbain. Les
exploitants des terres agricoles, des zones pastorales et des zones halieutiques (de même
que tous ceux qui résident en zone rurale) n'ont donc aUcune possibilité d'obtenir une
reconnaissance juridique formelle de leurs droits fonciers par l'État.

3.5.2 La maîtrise coutumière du territoire par des chefs lignagers

Si l'État dispose légalement du monopole d'attribution foncière, les propriétés


sont, dans les faits, le plus souvent gérées par les autorités coutumières sous la forme
d'ententes orales où les usagers ne détiennent aucun titre officiel délivré par l'État. Des
lignages se prévalent d'un statut d'autochtone ou de propriétaire acquis par les ancêtres
grâce à l'alliance sacrificielle du clan avec les « génies des lieux », la primo-installation
des descendants ou l'éviction/subordination des premiers occupants (K. Traoré, 2002,
309-313; Fay, 2005, 144; Berthé et Cissé, 2008,42-43). Ils exercent le contrôle des
champs agricoles, des terres de pâturage ou des zones halieutiques en distribuant des
droits d'exploitation aux demandeurs en fonction de certaines règles (comme le
versement de redevances). La maîtrise d'un territoire s'exerce à plusieurs niveaux et des
hiérarchies d'ayants drQit (pas toujours clairement définies) se superposent les unes aux
autres au gré des alliances matrimoniales et des positions statutaires. Bien qu'elles
soient jugées illégales par l'État, les prérogatives coutumières de certains lignages sont
le plus souvent tolérées par les autorités. La réforme foncière accomplie parallèlement à
la décentraI isation consacre d'ailleurs certaines prérogatives aux propriétaires
coutumiers, notamment en reconnaissant des droits aux usagers du domaine public, en
garantissant des compensations en cas d'expropriation et en obligeant l'administration à
consulter les conseils de village avant d'effectuer tout changement.

Cependant, les droits consentis se limitent à des droits d'exploitation des


ressources et excluent tout droit à en disposer à titre privé. La reconnaissance d'une
utilisation coutumière signifie dans la pratique que l'exploitant peut conserver ses
« droits d'usage» tant que les autorités n'en auront pas besoin pour des fins « d'utilité
88

publique ». Plusieurs chefs de village procèdent à la vente de lettres d'attribution aux


occupants de leurs terres, mais les papiers qu'ils distribuent n'ont aucune valeur légale
devant les tribunaux (Béridogo, 2003, 9; Bourdarias, 2006, 231-234). Certains chefs
coutumiers sont même menacés de sanctions par l'administration pour ingérence
illégale dans la gestion foncière. En outre, il faut souligner que les prérogatives
coutumières se sont transformées au fil du temps (tant au point de vue de ses modalités
que de ses ayants droit) et qu'elles sont maintenant très éloignées de ce qu'elles étaient
avant la colonisation. Les lignages propriétaires ont tendance à s'approprier les
ressources collectives (et les redevances qui viennent avec) non plus au nom de la
coutume, mais à titre privé en profitant du réaménagement successif des pouvoirs
locaux par l'État eUou de la délivrance de titres fonciers (Bertrand, 1994,247 ; Barrière,
2002,33-35 ; Maïga, 2005,207-208). Les juges et les administrateurs civils contribuent
d'ailleurs à refaçonner les règles et à transformer la tradition en « figeant» les droits
coutumiers, en transigeant avec les chefs de village ou en arbitrant les conflits fonciers.
Les concepts de propriétaires et d'autochtones prêtent à t: ambiguïté et constituent une
rhétorique subjective des acteurs plutôt qu'une définition objective de leur statut.

3.5.3 Les autorités communalesface à la gestion décentralisée des affairesfonàères

Avec la décentralisation, les élus municipaux (plus particulièrement les maires)


s'ajoutent aux administrateurs civils et aux autorités coutumières parmi les acteurs qui
prennent des décisions à propos des questions domaniales. La réforme prévoit le
transfert de compétences élargies aux collectivités dans les procédures d'attribution des
terres, les programmes de lotissement des villes et la gestion des ressources agricoles,
pastorales, halieutiques, minières et forestières qui sont comprises sur son territoire. Le
gouvernement les autorise aussi à tarifer leurs services administratifs et à percevoir des
taxes sur les ressources pour assumer leurs dépenses de fonctionnement ou financer la
mise sur pied de projets de développement. Les maires sont même appelés à offrir leur
médiation lorsque les conseils de village se révèlent impuissants à mettre fin aux
conflits fonciers (Lévy, 2003, 265-266; Beeler, 2006, 17-20). S'ils sont tenus de
consulter les instances coutumières avant d'apporter des changements à l'ordre foncier,
89

les élus n'ont cependant aucune obligation de tenir compte de leur point de vue pour
prendre des décisions (Keïta, 2005, 91-93 ; Benjamin, 2008, 2262).

Au terme du transfert des compétences, les conseillers communaux devraient


normalement exercer l'intégralité des prérogatives foncières jusque-là détenues par les
administrateurs civils et les services déconcentrés de l'État. Néanmoins, les modalités
de ce vaste processus ne sont pas clairement précisées et entrent en conflit avec les
pouvoirs que possèdent encore plusieurs agents de la fonction publique. La création des
nouvelles collectivités ne met pas pour autant fin au monopole foncier de l'État, dans la
mesure où les communes se voient conférer des compétences uniquement sur les
domaines qui leur sont légalement transférés par l'État. Puisqu'aucun domaine n'a
jusqu'ici été transféré, les élus n'ont donc théoriquement (et pour l'instant) aucune
propriété foncière à gérer (Benjamin, 2008, 2261). Les règles actuelles sont
contradictoires dans la mesure où elles « instituent d'une part le principe de domanialité
dans Je code domanial et foncier et stipulent d'autre part le transfert du pouvoir de
gestion foncière aux collectivités territoriales dans les textes de la décentralisation. »
(Coulibaly et Diakité, 2004, 4) Les élus doivent alors transiger avec les administrateurs
civils et les services déconcentrés, qui gardent la mainmise sur l'octroi des permis, la
collecte des redevances, la gestion des conflits et l'expertise technique. Les procédures
d'attribution demeurent sous l'autorité des délégués et le gouvernement reporte sans
cesse le transfert des domaines aux élus en justifiant sa tutelle par le besoin de protéger
les couches rurales de la voracité des spéculateurs fonciers et des abus des chefs
coutumiers. En somme, l'État concède des ressources naturelles et foncières aux
communes tout en ayant la possibilité de reconsidérer en tout temps et par un simple
décret les modalités de transfert de ces pouvoirs (Kintz et. al., J 997, 427-431 ; Ribot,
1999,44-47; Barrière, 2002, 271-272; Keïta, 2005, 96-101).

Bien que les communes soient démunies de toute propriété foncière et que les
transactions soient suspendues jusqu'à nouvel ordre, les maires peuvent demander aux
administrateurs civils d'exproprier des portions de terre pour des lotissements dont les
90

fonds engrangés permettront de financer leurs projets. Grâce à leur rôle d'interface entre
les citoyens et l'administration territoriale dans la vente des permis d'occupation et des
titres d'attribution, les élus communaux - en tandem avec les propriétaires coutumiers­
peuvent utiliser à des fins spéculatives et clientélistes la gestion foncière en jàuant des
interdépendances existant entre chacun des pouvoirs impliqués dans l'opération 34
(Bagayoko, 2005 ; Roy, 2005b). Le lotissement de Douentza est un exemple parmi
d'autres de la spéculation dans laquelle les élus se trouvent impliqués:

Une [... ] décision n'ayant pas été consignée par écrit a été de mettre à la
disposition des demandeurs 160 lots seulement sur les 200 qui avaient été bornés.
Les quarante autres ont été mis à la disposition du maire pour être distribués à des
personnes qui avaient «rendu possible» ce lotissement. De ces quarante lots de
réserve, chaque conseiller communal en a reçu deux pour lui-même. Cette décision
a été justifiée par le fait que les conseillers s'investissent beaucoup pour la
commune et ne reçoivent en retour qu'une indemnité très modeste. Les autres lots
ont été gracieusement offerts au préfet et ses proches ainsi qu'au chef de village de
Douentza et à ceux de Coumbéna, Dirimbé, Fombori et Evéry, les quartiers
composant la commune urbaine de Douentza. (De Langen, 2005, J 41-142)

Quant à la distribution des lots restants, leur attribution par le maire est le résultat de
multiples négociations entre élus communaux, intermédiaires de vente et acteurs locaux
influents35 . La complexité et le coût de ces procédures font qu'elles sont
presqu'exclusivement accessibles aux notables (fonctionnaires et commerçants)
disposant de l'argent etde l' infl uence nécessaires pour franchir tous les obstacles. Ainsi,
les campagnes de « réhabilitation» entreprises dans le sillage de la décentralisation ont
pour effet d'accélérer le processus d'appropriation privée des terres coutumières et
d'accroître les inégalités dans la répartition foncière. Si les campagnes de lotissement
servent d'abord à renflouer les coffres de la commune, elles permettent aussi aux élus
(et aux administrateurs civils qui tes endossent) de s'approprier gratuitement les terrains
en vente en se justifiant des salaires trop faibles qui leur sont versés. 36 Les maires

,14 L'opération « Sauvons notre quartier» lancée à Bamako en 1993 préfigure aux vagues de spéculation
foncière illégale qui suivront l'installation des nouveaux maires à travers l'ensemble du pays en 1999.
15 Certaines considérations électoralistes peuvent inciter les maires à brader les teri'es de leur commune
pour compenser les montants investis dans la campagne électorale et/ou en échange de l'appui de
« cl ients » influents pour conquérir des votes.
,1(, En 2002. les maires sont payés 15 000 Fcfa/mois et leurs adjoints la 000 Fcfa/mois.
91

prennent des risques politiques et administratifs afin de profiter d'une économie


parallèle autour des « affaires de terrains» grâce à des taxes d'édilité et des
commissions personnalisées (Bertrand, 2006, 182).

3.5.4 Conclusion

En conditionnant les procédures d'attribution des terres à plusieurs types


d'autorités locales et étatiques, la décentralisation représente une source de conflits
entre pouvoirs locaux concurrents sur le plan foncier. D'une part, les prérogatives
domaniales conférées aux administrateurs civils s'imbriquent à celles des élus, qui
peuvent invoquer la légitimité des urnes et le projet décentralisateur du gouvernement
pour faire contrepoids aux ordonnances de la bureaucratie d'État. Les maires sont en
contrepartie redevables à l'endroit des délégués (et non à l'égard de la population) en
raison des pouvoirs de tutelle dont ils disposent. D'autre part, les élus tendent de plus en
plus à concurrencer les prérogatives foncières des chefs traditionnels. Mais, ces derniers
disposent d'une influence considérable auprès des électeurs et les politiciens doivent
généralement composer avec eux pour prétendre à un siège de la commune. Malgré
leurs pouvoirs temporisés par ceux des autres acteurs de la sphère locale, les élus
communaux jouent somme toute un rôle-clé dans l'attribution des terres et l'arbitrage
des conflits en se posant comme intermédiaires par excellence entre la population, les
autorités coutumières et l'appareil d'État. En effet, la persistance d'un flou politico­
juridique engendrant des incertitudes dans la gestion foncière fait du contrôle de la
commune un enjeu majeur. La propriété devient moins une question d'ordre lignager ou
administratif et dépend plus que jamais de l'action politique des acteurs. Conserver (ou
acquérir) des droits d'usage ou de propriété est intimement lié à la capacité d'influencer
les décideurs en place au niveau de la commune. Déjà sous l'UDPM, les instances du
parti disposaient d'une certaine influence sur l'attribution domaniale et les enjeux
fonciers se trouvaient au cœur des compétitions électorales~ Cependant, l'ambiguïté des
prérogatives des élus ne leur donnait qu'une possibilité d'influence sur les décisions et
la gestion foncière demeurait entièrement aux mains des administrateurs civils. La
venue des communes consacre de réels pouvoirs de décision aux élus et transforme le
92

régime foncier par la création de nouvelles arènes pour le règlement des litiges. La
décentralisation permet alors d'inclure certains acteurs jusque-là restés en marge de la
gestion des terres grâce au processus électif qui régit le fonctionnement de la commune.

3.6 Conclusion

Par un amalgame récurrent et contradictoire des « solidarités communautaires»


avec le modèle légal-rationnel de l'administration territoriale, la décentralisation prend
la forme d'un populisme bureaucratique où le renforcement de la participation conduit
paradoxalement à un accroissement du formalisme par des dispositions autoritaires et
globalisantes (Chauveau, 1994). D'un côté, les pouvoirs locaux sont sollicités par l'État
pour être des foyers de génie et de «tradition» prédisposés à la participation. D'un
autre côté, l'inaptitude anticipée des élus à administrer leur commune nécessite la tutelle
de l'État pour corriger les comportements et maintenir l'ordre grâce à un encadrement
autoritaire des instances locales. Au-delà du managérialisme populiste qui replace les
compétences transférées sous le contrôle de mécanismes juridiques complexes,
l'expérience malienne montre que le processus de décentralisation en cours dépend
largement de l'action politique des acteurs et des rivalités entre «groupes stratégiques»
qui parcourent l'arène locale. Les dédoublements de l'autorité, les rapports de force et
les compromis instables qui se dessinent entre l'administratioo, les collectivités, les
associations locales et les pouvoirs coutumiers participent à une recomposition
progressive des dynamiques locales. Les acteurs usent stratégiquement du pluralisme
institutionnel pour négocier leurs appuis, faire valoir leurs revendications et influencer
le cours de la réforme d'après leurs intérêts du moment. Au prochain chapitre, nous
verrons que l'élection des administrateurs par la population (au lieu d'être nommés par
le gouvernement) et les pouvoirs confiés aux élus dans la gestion domaniale (pouvant
contrebalancer ceux des fonctionnaires et des autorités coutumières) tendent à
transformer les rapports soc iaux de propriété et à (ré-)activer les conf! its liés à l'ordre
foncier. Les communes se trouvent alors investies par des luttes en lien avec l'accès à la
terre où les «groupes stratégiques» invoquent des légitimités multiples afin d'orienter
la décentralisation à leur avantage.
CHAPITRE IV

RepositiOlmement des acteurs et recomposition des dynamiques


locales par la réforme: l'exemple de l'appropriation foncière

La refonte « participative» du découpage territorial et l' élection des


représentants locaux au suffrage universel provoquent de profonds bouleversements des
rapports de force au sein des arènes locales. Les nouvelles prérogatives aux mains des
élus (et plus particulièrement des maires) remettent en question non seulement le rôle
joué par l'administration territoriale, mais aussi la place jusque-là occupée par la
chefferie coutumière dans l'attribution foncière. À travers les nouvelles règles d'action
politique introduites par la réforme, chaque acteur déploie des stratégies pour se
repositionner dans l'arène locale: « Les formules institutionnelles mises en place par les
pouvoirs sont "revisitées" et "re-pratiquées" en fonction des intérêts - divergents - de
ceux qui les "fréquentent". » (Mbembe, 1988, 140) Dans ce chapitre, nous verrons
comment les collectivités deviennent des lieux d'affrontement entre groupes sociaux
(autochtones/allochtones, propriétaires/non-propriétaires) en lutte pour l'appropriation
des terres. Nous examinerons de quelles façons ces compétitions s'opèrent en portant
attention au processus de découpage et à l'élection des conseillers municipaux. Notre
analyse des dynamiques foncières portera spécifiquement sur les procédures
d'attribution ou d'arbitrage qui concernent les « droits d'usages» (dits coutumiers) sur
les domaines de l'État. Le contrôle du conseil municipal représente un enjeu de taille,
surtout au regard des pouvoirs importants dont disposent les élus sur un enjeu aussi
sensible. Les forces sociales en présence tentent chacune d'investir la commune afin d'y
faire valoir leurs intérêts stratégiques. De ce fait, la composition des factions pol itiques
(et des clientèles électorales qui y sont associées) tend à suivre les grandes fractures
sociales 1iées à l'occupation des terres.

Les procédures d'attribution ont toujours été précaires et arbitraires, mais la


venue des communes entraîne des incertitudes nouvelles pouvant rapidement conduire à
94

la (ré-)activation des conflits fonciers. L'arsenal juridique est généralement peu


maîtrisé, les acteurs interprètent les textes à leur manière et les slogans politiques
contradictoires du gouvernement ajoutent une touche finale au désordre foncier. Ainsi,
les campagnes de sensibilisation soulignent que la réforme rendra tous les hommes
égaux, que le pouvoir sera désormais partagé et que chacun disposera des mêmes droits
(Le Marcis, 1999, 162-163). Les ressources agricoles, pastorales, halieutiques,
forestières et minières sont alors présumées «appartenir» aux collectivités tandis que
les administrateurs ne pourront plus jouer leur rôle d'arbitre lors de conflits fonciers. La
décentralisation « donne surtout à penser aux "gens du telToir" que la terre est désormais
monopole public et que la délimitation des nouvelles collectivités telTitoriales vaut
menace de réquisition: » (Bertrand, 1999a, 40) La plupart des conflits que nous allons
évoquer surgissent en raison de l'ordre des propriétés ambigu résultant de l'empilement
des droits d'usage et des chaînes de dépendance lignagères complexes qui conditionnent
la maîtrise des terres. Personne ne peut formellement déterminer à qui un terrain,
appartient après avoir été successivement hérité, loué ou repris à toute une série
d'occupants répartis sur plusieurs générations. Les droits fonciers sont étroitement
imbriqués à l' histoire des migrations, mais les récits invoqués sont la plupart du temps
manipulés en fonction des intérêts de chaque protagoniste qui se réclame d'un droit
d'usage ou de propriété (Camara, 2002, 76-78 ; A. Dembélé, 2005, 231-235).

L'arrivée de pouvoirs communaux élus par la population et dotés de


compétences élargies sur les questions foncières bouscule l'ordre des maîtrises foncières
et des hiérarchies statutaires. D'un côté, les chefs de lignages autochtones et/ou
propriétaires craignent de se voir ravir la totalité de leurs prérogatives foncières par les
communes et que la gestion des domaines tombe aux mains des factions politiques
dominées par les lignages allochtones ou non-propriétaires. Les messages diffusés par
le gouvernement conseillant de « s'entendre entre soi» pour régler les conflits (à travers
le recours aux élus des communes plutôt qu'à l'arbitrage de l'administration civile) sont
perçus comme une incitation à détruire toute forme d'autorité traditionnelle sur les
terres. De plus, l'autorisation accordée aux communes de taxer l'exploitation des
95

ressources est perçu comme une récupération des redevances coutumières en fav~ur des
élus. Le principal moyen pour les chefs de lignages autochtones/propriétaires
d'empêcher les conseillers de s'accaparer «leurs» redevances et de redistribuer
« leurs» terres consiste alors à occuper les instances communales en appuyant des
candidats qui ne remettront pas en cause les hiérarchies foncières. D'un autre côté, les
familles allochtones/non-propriétaires voient dans la décentralisation la possibilité
d'étendre leurs patrimoines et de sécuriser leur accès à la terre. La création des
nouvelles collectivités représente pour eux une occasion inédite de prendre part aux
décisions qui les concernent à propos des questions foncières et de faire contrepoids à
l'influence des notables coutumiers dans l'attribution des terres. Certaines franges de la
population jusque-là restés à la marge des rapports sociaux de propriété entrevoient
alors la possibilité d'améliorer leur accès aux ressources foncières.

Tous les conflits que nous allons évoquer ont en commun d'avoir été (ré-)activés
par la nouvelle donne foncière suscitée par la décentralisation. Les rapports de force au
sein des espaces communaux s'imbriquent aux rapports sociaux de propriété et la
décentralisation devient un catalyseur des antagonismes liés au foncier. La réforme
commandée « d'en haut» se trouve ainsi instrumentalisée «par le bas» à travers les
luttes entre acteurs qui parcourent l'arène locale. Ces conflits prennent la forme d'une
lutte pour le sens où différents groupes sociaux réinterprètent la décentralisation d'après
leurs propres intérêts: «Dynamiques locales et décentralisation s'articulent et·
s'opposent à la fois, révélant la diversité des stratégies qui s'élaborent au sein de ces
espaces métisses.» (Leclerc-Olive, 1997, 191) Chaque catégorie d'acteur tente
d'infléchir en sa faveur le découpage territorial et de placer ses candidats à la commune
en se justifiant d'une pluralité d'interprétations possibles à la décentralisation. Cette
logique d'occupation de l'appareil communal par les acteurs sociaux semble s'inscrire
en continuité avec le fonctionnement du parti unique, où l'espace politique local
réaménagé par l'État devient le lieu de médiation des conflits locaux. Ainsi, la
décentralisation peut emprunter plusieurs voies possibles en fonction du jeu des acteurs
et des rapports de force en présence au sein des différents pouvoirs locaux. La venue des
96

communes peut tout autant conduire à resserrer l'ordre des statuts et des propriétés qu'à
remettre en cause les hiérarchies sociales.

4.1 Découpage territorial et recomposition des conflits locaux autour du foncier

Partout au Mali, l'inscription de la politique de décentralisation dans un


processus de « re-traditionalisation» de la sphère locale par le gouvernement s'est
trouvée récupérée par les différents détenteurs traditionnels de l'autorité administrative:
« L'occasion était trouvée par les griots de rappeler que les maîtres d'hier, les anciens

lignages impériaux, retrouvaient enfin leur pouvoir confisqué, leurs propriétés et leurs
privi lèges perdus.» (Camara, 2002, 41) Le « retour du pouvoit à la maison» est
interprété comme une renaissance de l'ordre ancien où les chefs coutumiers sont
conviés à reprendre les pouvoirs dont ils ont été dépouillés par le passé. Pour ceux-là, le
retour aux valeurs traditionnelles signifie aussi le maintien de l'exclusion des étrangers,
des jeunes et des femmes dans les instances de décision. Un maître d'eau 37 de
Youwarou appuie la réforme « à condition que ce soit effectivement ùn retour à la
tradition, comme annoncé» en évoquant « le temps où on ne confectionnait que des
habits sans poche aux cadets pour leur signifier qu'ils ne devaient rien garder pour
eux.» (Béridogo, 2006, 206-207) Puisque les comités de découpage sont
principalement composés des chefs coutumiers ou des notables qui les représentent, ces
derniers useront de leur influence auprès des administrateurs civils pour que le
regroupement des villages en communes (de même que le choix du chef-lieu) soit
calqué sur les hiérarchies cheffales en place. Cette stratégie n'est pas sans rapport avec
la détermination des chefs de lignage propriétaires à vouloir conserver l'intégralité de
leurs prérogatives foncières et la tentative de certaines autorités villageoises à
s'approprier les terres de communautés voisines (pour l'extension des terres cultivées
ou à des fins purement spéculatives) sous prétexte de communalisation du patrimoine.

37Il s'agit d'un chef de lignage propriétaire d'une zone halieutique qui détermine les périodes de pêche et
accorde des droits d'exploitation en échange d'une redevance de la part des usagers.
97

Les tentatives de reconstitution des pouvoirs coutumiers se heurtent à des


antagonismes locaux anciens liés au contrôle foncier que les politiciens locaux ne
manquent pas d'instrumentaliser pour orienter la réforme à leur avantage: « Un des
grands enjeux était de ne pas se trouver dans la même commune que ses ennemis, à
moins d'y être dominant (et c'est alors eux qui ne le souhaitaient pas), ce qui donne à
certaines communes un tracé géométriquement surréaliste, et explique sans doute en
partie pourquoi les communes sont beaucoup plus nombreuses qu'initialement prévu. »
(Fay, 1999, 132) Les démarcations aléatoires et équivoques entre chaque village font
craindre que le rattachement à une commune plutôt qu'à une autre fasse perdre des
maîtrises· foncières à certains producteurs (Cissé, 1999, 146-149 ; Bertrand, 1999b, 28­
31 ; Idelman, 2009, 11-14). Le territoire de chaque village n'est pas légalement attesté
par l'État et ses limites épousent rarement celles des zones de culture ou de
transhumance des animaux 38 . Les tentatives de regroupement entre villages voisins
placent donc les acteurs en conflit sur des questions liées au statut et à la propriété, qui
relèvent tout deux des hiérarchies lignagères d'occupation (ou de conquête) du
territoire. C'est ainsi que des villages « pères» s'opposent à des villages « fils »39, des
vestibules majeurs entrent en conflit avec des vestibules mineurs 40 et des lignages
« nobles» refusent d'être placés avec d'anciens « captifs» (Koné, 2006, 128-137;

Idelman, 2009, 5-6). Les villages d'une même zone sont souvent. issus de l'essaimage
des membres d'un même lignage ayant fondés des hameaux qui ont toujours conservés
des rapports de dépendance hiérarchique avec leur village d'origine. Les chefs lignagers
qui revendiquent l'antériorité de leur installation soutiennent qu'ils n'iront vers
personne et que ce sont leurs voisins qui doivent venir à eux. Les conflits entre familles

3K Les réalités spécifiques aux communautés nomades sont peu prises en compte par la réforme alors que
l'État « perçoit le rapport homme espace selon le modèle (pourtant à peine majoritaire au Mali) de
l'agriculture sèche dans un terroir géographitluement continu et temporellement stable de forme
concentrique ou radiante. » (Kintz et Poncet, /995, 7)
39 Les villages d'une même zone sont souvent issus de l'essaimage des membres d'un même lignage
ayant fondé des hameaux qui ont toujours conservé des rapports hiérarchiques avec leur village d'origine.
Sauf en cas de conquête ou de « coup de force », c'est l'ordre d'occupation du sol qui détermine les
rapports de dépendance entre les villages (et entre les lignages).
411 Le vestibule (blon) est la pièce où trône l'aîné d'un lignage et la hiérarchie de ces vestibules reflète les
rapports de force entre les différents groupes sociaux d'un même territoire (Samaké, 1988, 340).
98

« nobles» prétendant à la chefferie et les concurrences entre lignages pour la propriété

des terres sont susceptibles de ressurgir à la faveur du redécoupage territorial.

Si les chefs coutumiers exercent de vives pressions pour que l'espace communal
corresponde à l'espace lignager, certains groupes subordonnés refusent d'être replacés
sous le commandement de leurs anciens «maîtres» et voient dans la décentralisation
l'opportunité de s'émanciper des vieilles hiérarchies foncières en dissociant la commune
des coutumes. Il existe rarement un consensus quant au choix de la commune à
rejoindre et il arrive même que des chefs traditionnels soient en opposition avec leur
propre village sur la question (Coulibaly et Hilhorst, 2004, 9). La spoliation des terres
par les chefs coutumiers a laissé de mauvais souvenirs et les familles non-propriétaires
veulent éviter de retomber sous la coupe de l'aristocratie locale (Diakité, 2002, 98-10 1).
Les anciens pôles de pouvoir précoloniaux ou cantonaux sont concurrencés par certains
chefs-lieux de secteur ou d'arrondissement qui ne peuvent se prévaloir d'une antériorité
d'installation mais disposent d'importants atouts logistiques (en terme d'infrastructures
et de services offerts) pour obtenir le siège de la mairie. Grâce à leur influence, les
membres des associations locales de développement parviennent à influencer le
redécoupage territorial de façon à favoriser une plus grande mobilité sociale des
individus. Ils tendent à faire de l'ombre aux chefs de village en promouvant des
délimitations qui font abstraction des hiérarchies lignagères et des rapports sociaux de
propriété (Qui minai, 2002, 289 ; Daum et Le Guay, 2005, 107-110; Lima, 2008, 25).

Ainsi, les hiérarchies entre villages et les liens de dépendance tributaires entre
groupes sociaux sont à la fois réactivés et remis en question d'après des modes de
compréhension diversifiés de la réforme qui suivent des intérêts précis. Des factions
politiques se constituent de part et d'autre des groupes belligérants et les séances de
concertation sont régulièrement court-circuitées par des politiciens locaux qui cherchent
à négocier un arrangement directement auprès d'un commandant de cercle, d'un député
ou d'un haut fonctionnaire. Des politiciens ambitieux cherchent à s'allier les principaux
leaders d'opinion d'une communauté en promettant d'aider des regroupements de
99

village à se constituer en commune s'ils sont élus (Diakité, 2006, 167-168). Des projets
de délimitation comprenant de longs appendices territoriaux permettent à des villages en
conflit avec leurs voisins d'aller rejoindre une commune plus éloignée. Si certains de
ces découpages ont pu se réaliser, d'autres sont empêchés par les villages voisins,
bloqués par l'administration territoriale ou tout simplement «morts au feuilleton ».

Dans l'impossibilité de trouver un compromis, la commission de découpage décide le


plus souvent de s'appuyer sur les limites des arrondissements pour créer la commune.
Dans de tels cas, les nouvelles collectivités doivent composer avec des villages qui
refusent de les reconnaître et la légitimité des élus est fortement remise en cause41 •

4.1.1 L'influence de l'administration civile dans le processus de découpage

En raison des difficultés à rassembler les ressources humaines et financières


nécessaires à la tenue des séances de consultation, l'administration territoriale prit un
rôle prépondérant dans la réforme par sa contribution au parachèvement de la refonte
territoriale initiée par la MDD. Bien que le gouvernement ait souhaité maintenir les
l'administration civile à l'écart, ces derniers se sont peu à peu révélés incontournables
grâce à leur qualification, à leur connaissance du terrain et aux moyens logistiques à
leur disposition (Zobel, 2004, 10 ; Kassibo, 2006, 78). L'influence conférée aux
commandants de cercle est alors susceptible d'encourager le recours à des négociations
parallèles et à des ingérences arbitraires dans l'érection des communes. La liberté de
regroupement des villages et des fractions n'excluait pas des propositions provenant des
agents de l'État et si ces derniers étaient censés intervenir seulement lorsqu'il s'avérait
impossible de s'accorder sur une proposition finale, certains décidèrent de prendre les
devants dès le départ. Sur l'ensemble du telTitoire, « plus de 50% des arrondissements
ont subi des modifications, cependant 40% des arrondissements sont entièrement
transformés en communes rurales et/ou urbaines. » (Sydness et. al., 2000, 12)

41Environ 1000 villages (sur les 5000 villages « officiels» que compte le Mali) refusent de participer au
processus électoral pour ne pas avoir été rattaché à la commune de leur choix. Le jour du vote, les
bureaux de scrutin sont déserts et l'armée doit parfois être déployée pour éviter un saccage (Béridogo.
2006,210).
100

Dans les régions de Kayes et de Sikasso, les administrateurs empruntent un rôle


plus effacé favorisant la création de «micro-communes» et une recomposition
complète des anciennes circonscriptions. L'adhésion volontaire et le respect des
« solidarités communautaires» étant les principaux critères privilégiés par les comités
de découpage, les communes sont constituées d'après les secteurs de développement et
les regroupements d'AVen demeurant en deçà des seuils juridiques conditionnels à leur
création (Coulibaly et. al., 1998,77 ; A. Dembélé, 2005, 221-222). Par exemple, «en
lieux et places de dix communes rurales théoriquement construites, le cercle de Sikasso
en compte quarante-deux. Sur ces quarante-deux communes, seules dix ont une
population égale ou supérieure à 10 000 habitants. » (Koné, 1997) Face à la création de
communes jugées fantaisistes, l'administration propose désormais de rectifier le
découpage en regroupant ces micro-communes: "When it is pointed out that the 1999
borders were democratically, if inexactly, defined (not without sorne strife), thereby
greatly enhancing a sense of local ownership, their answer is "that was then and this is
now."" (Pringle, 2004,46) D'ailleurs, la création des communes dans les autres régions
(Koulikoro, Ségou, Mopti) comporta peu de consultations et se déroula sous la seule
conduite des administrateurs civils. Ces derniers useront de leur influence pour favoriser
un règlement évitant une remise en cause trop profonde des anciennes délimitations. Les
nouvelles circonscriptions furent dessinées d'après des considérations d'ordre technique
et les commandants imposèrent souvent leurs choix en s'inspirant des limites des
arrondissements (Bertrand, 1999a, 22 ; Camara, 2002,44; Doquet, 2006, 305).

4.1.2 L'intervention des chefs « coutumiers» et leurs rapports aufoncier

Au moment du découpage territorial, « les chefs de village avaient le sentiment


que la création d'une commune ou l'implantation du chef lieu de commune dans un
village signifie l'affaiblissement de la responsabilité des autres. » (F. Maïga, 2002, 243)
Les villages qui accueillent un siège administratif et vers lequel les autres doivent
converger sont perçus comme ayant une suprématie sur leurs voisins. Des communautés
qui prétendent au siège d'une commune entrent en compétition pour s'assurer la
prééminence future de leur village (ou fraction) sur les autres. Partout au pays, le
101

processus de réorganisation territoriale est stratégiquement orienté par les chefs


coutumiers afin de leur assurer le monopole futur des institutions communales. Les
limites des nouvelles collectivités sont alors déterminées en fonction des réseaux
c1ientélistes (notamment ceux liés aux droits d'exploitation des ressources) qui
parcourent les différentes composantes sociales du territoire. Les chefs de lignage
anticipent les transferts de compétences dans la gestion des domaines et tentent de
s'assurer que les nouvelles délimitations territoriales ne remettent pas en cause leurs
prérogatives foncières. La réorganisation administrative représente une opportunité pour
sécuriser leurs domaines et sert de prétexte pour repousser le plus loin possible les
limites de leurs terres (Kassibo, 1997). Les autorités traditionnelles sont propriétaires
de l'ensemble des terres et personne ne peut s'opposer à leur volonté de reconstituer
leur territoire coutumier sans risquer de se voir retirer certains droits fonciers. Il arrive
ainsi que des lignages propriétaires menacent de retirer leurs terres à certains villages
environnants (qui souhaitent adhérer à une collectivité voisine) pour les « inciter» à
changer d'idée et à venir rejoindre « leur» commune. À titre d'exemple, les membres
d'une fraction nomade propriétaire de l'alTondissement de Gossi (cercle de Gourma­
Rharous) se sont opposés à la division de leur circonscription administrative en
plusieurs communes parce qu'ils craignaient que les allochtones réussissent à leur ravir
le contrôle des terres en faisant élire une majorité de conseillers à la mairie. Les lignages
autochtones de cette zone souhaitent conserver la maîtrise traditionnelle des terres et
usent alors de leurs prérogatives foncières pour acheter des appuis avec l'octroi de
nouvelles parcelles (Hetland, 2008, 28-29).

Au Maasina, la campagne orchestrée par les militants en faveur du retour de la


chefferie joue sur les ambiguïtés de la décentralisation en mobilisant à la fois « la
représentation "communautaire", évoquant des alliances passées et la solidarité des
biens42 , et le thème "impérial", rappelant que "nous étions vos dirigeants ... nous étions
votre prestige... notre pouvoir est revenu ... nous sommes ceux qui avons tété le

42« Nous sommes les mêmes ... nous avons le même nombril ... les mêmes mamelles ... nous nOLIs
marions entre nOlis ... nous mangeons les mêmes propriétés. » (Fay, 2002, 135)
102

pouvoir, qui parlons et sommes écoutés et à qui tout revient".» (Fay, 2002, 146) Les
représentations classiques du laamu qui réorganise les propriétés en dépossédant les uns
aux profits des autres sont reconduites en faisant miroiter aux anciens «captifs» le
bénéfice de «rejoindre leurs anciens maîtres »43. Lors des négociations précédant le
redécoupage territorial, le recours aux légitimités politiques coloniales ou précoloniales
par les chefs coutumiers a fait en sorte que tous les cantons et les janyeeli aient au
moins projeté de se reconstituer en commune44 : « Lorsque ces deux types de légitimités
ne coïncidaient pas (tous les cantons ne correspondaient pas à d'anciens janyeeli), la
tendance a même été très nettement à la reconstitution d'unités précoloniales (...]. »
(Fay, 2000, 127) Si certaines collectivités ont des délimitations semblables à celles des
an'ondissements ou des secteurs de développement, c'est parce que ces circonscriptions
avaient elles-mêmes été découpées en fonction des chefferies de canton ou des aires de
pouvoir précoloniales. Néanmoins, les tentatives de reconstitution des anciennes aires
de pouvoir furent vi vement combattues par certains opposants aux chefferies
(notamment les lignages allochtones et les familles non-propriétaires), à travers une
contre-carr)pagne évoquant les plus mauvais souvenirs laissés par le cantonnat
(violences, réquisitions, travaux forcés, spoliation des terres, etc.) (Cissé, 1999, 14[­
142). Ainsi, les partisans de la reconstitution des chefs-lieux d'arrondissement en chefs­
lieux pour les communes retournent le thème « impérial» contre ses utilisateurs tout en
arguant des nombreux atouts « logistiques» déjà existants au centre de la
circonscription (réseau routier, centre de santé, école, etc.) (Fay, 2000, 135).

Au Manden, « les propositions avancées par les délégations villageoises ont été
caractérisées par une tension entre des revendications basées sur les limites des
anciennes chefferies et les ambitions hégémoniques de certains villages. » (Zobel, 2004,

43 Le laamll réfère historiquement au pouvoir guerrier des chefferies précoloniales assoyant sa domination
par la force et entretenant un rapport ambivalent avec l'ordre des propriétés: « Un nouveau pouvoir est
toujours potentiellement violent (il "frappe, insulte, vole"), susceptible de déposséder tels propriétaires
particuliers, mais ensuite le temps de son règne il est objectivemellt le garant de ['ensemble des droits de
p,ropriété (ceux qu'il a reconnus, ceux qu'il a attribué) [... J.» (Fay, 2006, 106)
4 Leur échec est le résultat des contlits survenus dans le choix du chef-lieu ou de leur incapacité à
rencontrer les critères de viabilité économique. Sur les vingt-cinq demandes de regroupement de villages
formulées dans le cercle de Tenenkou, seules neuf communes rurales furent par la suite créées.
103

9-10) Dans leur choix d'adhérer à une commune, les chefs de village se réfèrent aux
histoires de peuplement et aux règles d'autochtonie qui régissent les rapports entre
chaque lignage. Chacun des protagonistes réinterprète à son avantage les récits de
fondation (souvent contradictoires) pour démontrer l'ancienneté de son lignage. Les
antagonismes locaux viennent souvent à bout des aspirations à faire renaître les grandes
chefferies et entraînent alors la fragmentation des arrondissements en plusieurs micro­
communes. Au cœur de ces rivalités se trouvent d'importants enjeux fonciers liés à la
maîtrise de zones d'exploitation forestière, agricole, pastorale, halieutique, etc. De
nombreuses chefferies voient dans la décentralisation l'occasion de diriger seuls les
communes et de reconquérir leur suprématie sur les autres villages des environs (S.
Koné, 1997 ; L. Traoré, 2002, 378-387). Ils soutiennent devoir être placés au centre du
nouveau découpage puisque leurs ancêtres ont offert l'hospitalité aux autres lignages
venus s'établir chez eux dans le passé. En arguant l'antériorité de leur installation sur le
site pour accueillir la commune, ces chefs de lignage revendiquent ainsi la propriété et
le contrôle des terres sur tous les villages des environs. Les villages qui sont coiffés par
les mêmes pouvoirs locaux depuis l'époque précoloniale (dans un kafo, un canton, puis
un secteur par exemple) et qui disposent déjà d'un chef-lieu potentiel comportant toutes
les infrastructures nécessaires acceptent généralement de demeurer ensemble au sein
d'une même commune. Mais, lorsque la conjoncture se révèle plus indécise (ce qui est
très souvent le cas) les différents groupes sociaux habitant un même territoire entrent en
compétition pour faire pencher le découpage en leur faveur. Les velléités de certains
chefs coutumiers voulant s'approprier les ressources foncières se trouvent alors
vivement combattues par des lignages concurrents. Lorsque les villages d'une même
collectivité doivent départager le lieu d'installation du chef-lieu, ceux qui sont vaincus
par les urnes préfèrent rejeter l'autorité des élus ou ériger une nouvelle commune avec
les villages des alentours qui les appuient (L. Traoré, 2002, 378-380, 387-390;
Béridogo, 2003, 6-7 ; Camara, 2006, 150-156). Si certaines communautés ne peuvent
mobiliser leur appartenance lignagère pour prétendre accueillir la commune, ils
recourent alors à -l'argument de l'appartenance commune à une association de
104

développement ou à la présence de certaines infrastructures sur leur territoire (route,


école, centre de santé, centre d'État civil, etc.).

4.2 L'instrumentalisation de la commune par les rivalités foncières

Au Mali, les appartenances politiques sont des appartenances sociales et le vote


en faveur d'un candidat résulte moins d'une décision individuelle que d'une consigne
entre les membres d'une même clientèle (Bouju, 2000, 153-154). Les luttes sociales se
projettent sur les clivages entre factions et la composition du conseil est révélatrice des
rapports de force au sein d'une arène locale. Les propos de certains électeurs illustrent à
quel point les compétitions entre partis pour l'occupation des sièges à la commune sont
déterminantes dans le jeu politique local: « Les élections ont créé des divisions au sein
des villages. Les gens ont pensé que s'ils gagnaient les élections, ils allaient pouvoir
renverser la chefferie. Il y avait sept partis politiques, chacun avait ses militants. On
s'est mis dans les partis parce qu'on a constaté depuis le temps de Moussa [Traoré] que
celui qui n'est pas avec le pouvoir ne bénéficie de rien. » (Grémont et. al., 2004, 205)
L'élection d'un maire aux pouvoirs « présidentiels» qui doit subordonner les chefs
coutumiers et gérer à leur place les domaines fonciers fait du contrôle de la commune
un enjeu déterminant pour les acteurs locaux. Les dynamiques foncières se transposent
aux pouvoirs municipaux et les compétitions électorales sont le prolongement des luttes
sociales liées à l'occupation des terres.

Nous verrons plusieurs exemples où les conflits qui opposent propriétaires et


non·propriétaires ou autochtones et allochtones se trouvent réactivés par la réforme.
Derrière différents groupes sociaux se trouvent des candidats en quête d'une position
dans la commune pouvant faire avancer les revendications foncières de leur clientèle. Si
les chefs coutumiers disposent de pouvoirs assez limités dans le cadre de la
décentralisation, ils peuvent exercer une forte influence auprès des électeurs et faire
jouer leurs attributions foncières à des fins clientélistes pour orienter le vote en leur
faveur. Des candidats jouent la carte de l'autochtonie pour conquérir un siège et
réussissent à exclure tous ceux qui ne peuvent se prévaloir de l'argument de la
105

« tradition ». Lors des élections, certains militants «disaient aux populations, faites
beaucoup attention aux hommes que vous allez choisir, car l'histoire des communes,
c'est une histoire de terres. Si jamais vous donnez le pouvoir à quelqu'un qui n'est pas
l'un de nous, nous n'aurons plus jamais rien quand il va s'agir du problème domanial. »
(Koné, 2002, 203) Néanmoins, l'influence des militants traditionalistes ne semble pas
toujours avoir été suffisante pour qu'ils imposent leur point de vue aux électeurs. Alors
que la création des communes représente pour certains (les familles autochtones, les
lignages propriétaires, etc.) l'occasion d'un retour aux anciennes valeurs, il s'agit pour
d'autres (les allochtones, les non-propriétaires, les anciens «captifs », etc.) d'une
opportunité pour s'émanciper des rigidités sociales qui bloquent l'accès au pouvoir (et
par conséquent au foncier).

4.2.1 La réactivation des hiérarchies statutaires par la décentralisation au Nord-Mali

Dans les régions de Tombouctou, Gao et Kidal, la gestion des affaires locales est
généralement confiée au seul clan familial détenteur du pouvoir et les relations
parentales restent au cœur des enjeux électoraux indépendamment des changements
politiques à l'échelle nationale (Klute, 2002, 5; Cissé, 2007, 16). Peu importe l'âge ou
le niveau d'instruction, l'occupation de postes de responsabilité est conditionnelle à
l'appartenance à un lignage «noble» disposant de la «propriété» du territoire. Au
cours des élections municipales, les chefs traditionnels influencent les listes de
candidature en faveur des membres de leur famille ou décident de cumuler leurs
fonctions coutumières avec celles de la commune (Maïga, 2002, 254; Touré, 2006, 13­
16). Dans la plupart des localités du Nord-Mali, les communes se trouvent accaparées
par les lignages «dominants» et les changements apportés par la décentralisation se
révèlent donc peu apparents. Cependant, le pouvoir de certains lignages ne fait pas
partout l'unanimité et la persistance de hiérarchies statutaires concurrentes dans
certaines zones (entre des groupes sociaux distincts ou entre différents prétendants à la
propriété coutumière au sein d'un même groupe) est susceptible de réactiver les
compétitions pour le contrôle de la mairie. L'appropriation foncière se trouve au cœur
- 106

de ces conflits puisque la mainmise des institutions communales par une faction est
perçue comme une confirmation de la propriété de sa clientèle sur le site.

Dans le cercle de Gao, la décentralisation fait craindre aux pasteurs touaregs que
les villages près du fleuve (largement majoritaires en terme de population) ne leur
ferment définitivement l'accès aux bourgoutières sous prétexte de communalisation des
« propriétés ». Bien que les Touaregs aient déjà soumis les populations « sédentaires» à
des prestations tributaires par le passé, ces villages « dépendants» se sont accaparés la
totalité des telTes à la faveur de la colonisation et souhaitent maintenant bloquer l'accès
de la commune à leurs anciens « maîtres» (Marty, 1999; Grémont, 2005, 279-286). La
volonté de garder la main haute sur les ressources foncières grâce au contrôle des
instances communales fait entrer en conflit différents lignages qui se réclament chacun
d'un titre de propriété coutumière sur les lieux. Dans ce contexte, c'est moins la
capacité de faire valoir l'existence d'un droit d'usage que le potentiel de mobilisation du
plus grand nombre de votes (afin d'occuper les principaux postes du bureau communal)
qui peut faire la différence. Lors des élections de 1999, plusieurs fractions nomades ont
d'ailleurs invité des familles alliées à venir gonfler leurs rangs au détriment d'une
fraction adverse dans le but de faire pencher le vote en leur faveur (Hetland, 2008, 28).
Dans le cercle de Goundam, les hiérarchies statutaires et les rapports de dépendance qui
opposent les «maîtres» et les «esclaves» d'hier se recomposent autour des luttes
foncières et des rivalités pour l'accès aux subventions des bailleurs de fonds. Les
« nobles» craignent que la forte croissance démographique des anciens « captifs» (et
par corollaire l'obtention d'une majorité des voix au conseil) leur permettent de
s'approprier les telTes et de capter tous les fonds destinés au développement communal
(Giuffrida, 2005, 820-825). Dans certaines localités, les propriétaires ne reconnaissent
pas l'autorité des élus dans la gestion des conflits fonciers et préfèrent aller régler toutes
leurs affaires chez l'administrateur civil. Quant aux maires, ils disent que les chefs de
village entretiennent volontairement le flou sur la réforme et qu'ils ne comprennent pas
que les règles d'attribution foncière ont changé pour la simple raison que ça les arrange.
107

4.2.2 Ralliements clientélistes et conflits de « propriété» dans la région de Mopti

Au Maasina, l'élection des conseillers communaux au suffrage universel est


contraire aux représentations habituelles de l'autorité sous la forme d'un pouvoir « de
niveau supérieur ». Les traditionalistes voient même dans la création des communes le
retour à la collectivisation des terres et au socialisme de Modibo Keïta. De plus, « l'idée
d'un maire élu par une fraction (donc une faction) paysanne et chargé de gérer les
"propriétés" locales était plus effrayante encore: le pouvoir de trancher entre les intérêts
lignagers, pouvoir autrefois propre au pouvoir-laamu, allait-il être confié à un lignage
ou à une coalition de lignages? » (Fay, 2002, 143) À la différence des administrateurs
civils (auxquels il fallait « donner à manger» sans toutefois qu'ils ne prétendent à
l'appropriation des terres), les communes ne représentent pas (aux yeux des citoyens)
un pouvoir « recouvrant» situé à l'extérieur des dynamiques foncières et qui met fin
aux litiges moyennant « tribut ». La gestion foncière par les élus est perçue comme une
menace puisqu'ils font partie du même système et qu'ils sont susceptibles de vouloir
favoriser leur propre camp au détriment d'un autre (Fay, 1999, 131).

La perception qu'ont les acteurs de l'étendue des pouvoirs confiés aux élus dans
la gestion des domaines fait du contrôle de la mairie un enjeu stratégique des
dynamiques foncières. Dans la région de Mopti, l'élection de clients, de parents et de
dépendants représente le meilleur moyen pour les lignages propriétaires de conserver
leurs privilèges fonciers (Bouju, 2000, 154). De cette façon, les clans « fondateurs»
entendent profiter de l'essor du marché foncier suscité par la décentralisation pour
accroître leur patrimoine en se justifiant de l'autochtonie de leur famille (Dorier-Apprill,
2002, 128-132). Les enjeux fonciers commandent ainsi les mêmes ralliements politiques
qui avaient cours à l'époque de l'UDPM en continuant d'opposer les clientèles des
factions Nyang (celle des allochtones et des non-propriétaires) et Koreïsi (celle des
,
autochtones et des propriétaires). Lorsque les communes se trouvent monopolisées par
un seul parti, les délégués du gouvernement peuvent constituer une alternative appréciée
à un maire dont les décisions seront toujours jugées partiales (Barrière, 2002, 166-167) :
« Beaucoup de communes s'étant constituées [...] sur fond d'importantes tensions et la
108

plupart des bureaux communaux ayant été monopolisés par une tendance, si un conflit
oppose des parties appartenant à des factions opposées, l'une d'entre el1es peut tenter de
privilégier le recours à l'administration: des conseil1ers communaux opposants au
maire peuvent alors eux-mêmes diriger (et accompagner) leurs partisans chez le DG
[délégué du gouvernement]. » (Fay, 2006, 115). Partout dans la région, le « retour du
pouvoir à la maison» inspira la candidature des fils .ou petits-fils d'anciens chefs de
cantons pour l'obtention d'un siège à la mairie. Le paysage politique est monopolisé par
les lignages «dominants» et il n'est pas rare de trouver qu'un des fils du chef de vil1age
soit à la tête d'une section locale d'un parti en même temps qu'un de ses neveux occupe
une position importante dans un autre parti (Doquet, 2006, 305).

Après avoir tenté d'être représentés dans chacun des partis en lice aux élections,
les jowro45 du cercle de Youwarou ont tous décidé de se rallier à l'Adéma (attendu
gagnant à l'échelle nationale 46 ) pour être en mesure de négocier le maintien de leurs
privilèges en ayant les nouveaux pouvoirs communaux de leur côté (Le Marcis, 1999,
162-163). Les jowro craignent que les maires se mêlent de la gestion foncière et qu'ils
se saisissent entièrement des revenus provenant de la perception des droits de passage
des troupeaux (conngi) sur leurs bourgoutières 47 • Plusieurs d'entre d'eux décident donc
de se lancer dans la course électorale (en appuyant des candidats ou à titre personnel) de
façon à obtenir l'allégeance d'un plus grand nombre de conseil1ers communaux. Les
maires de Youwarou et de Dial10ubé sont tout deux des jowro et ceux de plusieurs
autres communes des environs appartiennent aux familles descendants des chefs de
cantons (Bâ, 2008, 95). Le jowro de Youwarou « reconnaît que ces élections entrent
dans Je cadre d'une stratégie de sauvegarde de ses avantages, mais l'inquiétude demeure
toujours: "J'ai peur de la décentralisation, elle veut me dépouiller de touS mes pouvoirs

45 Lesjowro sont des chefs de lignage disposant de la maîtrise d'un territoire de pâturage (leydi) et avec
qui il faut négocier un droit de passage (conngi) pour avoir l'autorisation d' y faire entrer son bétail.
46 Le positionnement des acteurs locaux en faveur du parti majoritaire représente un enjeu politique
majeur dans le contexte de la décentralisation. En effet, les élus préfèrent se trouver du côté de l'Adéma
parce qu'ils croient être en meilleure position pour recueillir des bénéfices du pouvoir.
47 Le conngi représente un revenu de plusieurs millions de francs Cfa pour lesjowro et les élus attendent
impatiemment que leur gestion soit transférée aux communes afin de pouvoir mettre la main dessus.
109

de dioro au profit du maire. Pour ne pas perdre mes bourgoutières, je me suis engagé
dans la politique et, dieu merci, je suis élu maire. Cependant je suis toujours inquiet car
la majorité de mes bourgoutières se situe sur d'autres communes [... J". » (Maïga, 2005,
212) Puisque personne ne peut appuyer un opposant au jowro sans risquer de se voir
refuser l'accès aux pâturages, les électeurs votent massivement en faveur de l' Adéma.
Selon un éleveur, « le dioro nous tient par la gorge. Nous avons des animaux, lui a du
bourgou, nous sommes obligés de voter pour lui sinon il peut prendre des mesures de
représailles contre nous en nous empêchant d'accéder à ses bourgoutières. » (Maïga,
2005, 211-212) Avec la venue des communes, le gouvernement a proposé' un
compromis: les maires ne se substitueront pas aux jowro pour percevoir le conngi et
n'imposeront aucune taxe sur le passage des troupeaux. Quant aux jowro, ils pourront
continuer à percevoir leurs rentes, leurs propriétés seront officieusement reconnues mais
ils seront astreints à verser des redevances à la commune48 . Grâce à la neutralité
bienveillante de l'administration et au soutient des lignages clients qu'ils subordonnent,
lesjowro continuent donc à bénéficier de l'usufruit de leurs prérogatives coutumières.

La communalisation des ressources naturelles et foncières par la décentralisation


peut servir de prétexte aux lignages propriétaires pour s'arroger le monopole des droits
d'exploitation au détriment de certains groupes allochtones (Bocoum et. al., 2003, 9­
17). En plusieurs endroits, l'arrivée des communes contribue à raviver les conflits entre
pasteurs transhumants et agriculteurs sédentaires en lien avec l'utilisation différenciée
des ressources sur un même territoire. Les premiers s'opposent à l'occupation des
pâturages par des champs, à l'obstruction des couloirs de passage et aux obstacles pour
accéder aux points d'eau alors que les seconds se plaignent de la divagation des
ani maux, de l'abattage des arbres, du non respect des dates de transhumance ou du
passage sans consentement préalable des troupeaux (Bee1er, 2006, 13-16). Dans la
commune de Madiama (cercle de Djenné), la composition du conseil est le résultat d'un
consensus négocié entre les chefs de village (les propriétaires), qui sont à la tête de

4XCe dernier point n'est pas encore tout à fait réglé et en 2002 la perception .de la taxe d'élevage devait
provisoirement être versée au Comi,té d'organisation de la Coupe d'Afrique des Nations.
110

communautés presqu'exclusivement fonnées d'agriculteurs sédentaires. Les notables


coutumiers conservent la maîtrise de la gestion foncière et les maires doivent
obligatoirement négocier avec eux pour octroyer des terres ou obtenir l'autorisation de
construire (Sissoko, 2008, 5). L'accaparement de la commune par les autorités
villageoises a pour principal résultat d'exclure les pasteurs au profit des lignages
d'agriculteurs (qui sont majoritaires dans la commune et comptent 10 des Il sièges au
conseil). Les éleveurs (considérés comme des non-propriétaires) craignent alors que les
élus tranchent toujours les litiges en faveur des cultivateurs, d'autant plus que certains
d'entre eux ont déjà suggéré d'interdire l'accès de la commune aux populations
transhumantes (Moseley et. al., 2002). Les pêcheurs soupçonnent eUx aussi les
agriculteurs de vouloir profiter de leur majorité au conseil pour étendre les surfaces
cultivées au détriment des mares piscicoles (Poncet et Quensière, 2000, 266-276). Les
maîtres d'eau craignent que leurs droits de pêche et leurs redevances soient spoliées
par les élus ou redistribuées à des électeurs «clients ». Ces derniers sont de plus en plus
confrontés à la destruction des mises en défens, au non-respect des périodes de pêche et
à la réduction des superficies des zones halieutiques. Toutefois, leurs problèmes ont de
la difficulté à être entendus au niveau de la commune et plusieurs d'entre eux doivent
alors se tourner vers l'arbitrage de l'administration.

4.2.3 La renaissance du cantonnat dans la région de Kayes

Les autorités coutumières de la région de Kayes se révèlent incontournables dans


le fonctionnement des nouvelles collectivités et le choix des élus au conseil. Un maire
affirme d'ailleurs que « les chefs de village sont nos oreilles, nos pie,ds, nos mains dans
les villages. Tout ce qu'il y a comme activité au niveau du village, ça passe par le chef
de village et ses conseillers". » (Leclerc-Olive, 2007,424) Des instances traditionnelles
jusque-là éteintes renaissent à la faveur de la mise en place des communes. En effet, « il
ressort des entretiens effectués dans les villages que peu de personnes imaginent que la
terre sera gérée autrement que par les autorités villageoises, et que le conseil communal
aura son mot à dire dans les affaires foncières. » (Lima, 2003, 321) À Nioro du Sahel,
« un djamanatigui, chef coutumier, le plus âgé des lignages nobles du Kaarta, a été
111

chargé de régler les conflits fonciers, amplifiés par la décentralisation. Dans certaines
communes, même lorsque la chefferie exerce l'autorité municipale, au côté du conseil
municipal, siège l'association des chefs de village de la commune (créé à cet effet),
rappelant la légitimité maintenue des structures traditionnelles. » (Leclerc-Olive, 2007,
418) L'attention portée à la décentralisation par les chefs coutumiers est là aussi
motivée par les transformations que l'arrivée des maires est susceptible d'apporter aux
dynamiques foncières. Certains élus laissaient entendre qu'ils voulaient interdire l'accès
des pasteurs transhumants au territoire de leur commune (Leclerc-Olive, 2003b, 180).

4.2.4 Lotissement des communes et recomposition sociale en périphérie de Bamako

À Sanankoroba (cercle de Kati), les chefs de lignages autochtones redoutent la


remise en cause de l'ordre foncier pouvant résulter du transfert de la gestion des
domaines de l'État aux élus des communes: « La démocratie et la décentralisation sont
les principales sources de conflit, car soutiennent-ils, "quand on a commencé à parler de
libertê et d'égalité, même ceux qui n'avaient rien ont voulu chercher leur part et ont
commencé à réclamer ce qui ne \eur appartient pas." » (Djiré, 2005, 63) Suite aux
menaces d'expropriations sans compensation prononcées à la faveur des opérations de
lotissement, les lignages propriétaires ont tenté de recourir aux autorités coutumières
pour négocier un compromis et conserver leurs privilèges. Ils soutiennent que la terre
est sacrée, qu'elle n'est pas une marchandise et que toute réforme de la gestion
domaniale est vouée à l'échec si elle ne tient pas compte des propriétaires traditionnels
de la terre. Les chefs de village se révéleront néanmoins impuissants à empêcher le
transfert des compétences foncières aux maires dans la mesure où « il existe de la part
des autorités communales une réelle volonté de "rattraper la vache communale" et de
s'approprier des prérogatives que la loi lui a octroyées.» (Djiré, 2004, 16) Les
procédures de purge des droits coutumiers font alors l'objet de litiges entre plusieurs
prétendants à la propriété des lieux (qu'elle soit coutumière ou non). Certains lots
peuvent être attribués à plusieurs personnes en même temps et \es démarcations entre
chaque.terrain sont source de conflits.
112

À Dialakorodj i (cercle de Kati), les rapports qu'entretiennent les chefs coutumiers


et les élus communaux (pour la plupart des fonctionnaires qui travaillent à Bamako)
sont tendus en raison des dissensions nées des opérations de lotissement sur la
commune. Le maire dénonce le marché « illégal» de la terre auquel s'adonnent les
chefs de village, alors que ces derniers s'objectent à la mainmise de l'État sur leurs
prérogatives foncières et accusent les élus de s'adonner à la vente « parallèle» des lots
avec la complicité des administrateurs civils (Bourdarias, 2006, 226-227). Le chef de
village dénonce le maire comme un «traître autochtone» qui refuse d'obéir à
«son père », qui prend l'initiative de lever des taxes à sa place et qui tente d'investir la
chefferie en mettant la main sur ses terres. L'influence des lignages fondateurs tend
ainsi à décliner face à une classe «d'intellectuels» allochtones ayant pris le contrôle
des affaires locales à la faveur de la décentralisation (GRAD, 2001, 13). L'arrivée aux
commandes de cette nouvelle élite urbaine déplace l'appropriation des terres du site des
mains des propriétaires coutumiers vers les élus des communes.

Les opérations de lotissement remettent en cause le système traditionnel de


gestion des telTes et offrent la possibilité à des groupes jusque-là exclus du foncier
(étrangers, hommes de caste, descendants de captifs et parfois même des femmes)
d'accéder à la propriété. Cependant, cette nouvel1e mobilité foncière reste réservée à
une élite et se trouve limitée de plusieurs manières. D'une part, les chefs coutumiers ont
su conserver leur influence auprès du maire et sont en mesure de négocier avec les élus
pour obtenir des compromis favorables auX familles de notables. À Sanankoroba, un lot
de recasement a gratuitement été attribué à chacun des hommes appartenant aux
lignages autochtones en compensation des expropriations de terrains par la commune
(Djiré, 2004, 25). D'autre part, les mutations foncières apportées par la décentralisation
profitent presqu'uniquement aux commerçants et aux fonctionnaires bien nantis de la
capitale. Les programmes de viabilisation contiennent des normes d'urbanisme
difficiles à respecter et peuvent mener au « déguerpissement » des occupants irréguliers
de la zone concernée (Bertrand, 1994, 229-233). Toujours à Sanankoroba, la plupart des
populations allochtones demeurant déjà sur place ne disposent pas des moyens
113

suffisants pour accéder à la propriété et restent potentiellement à la merci d'un ordre


d'expulsion de la part des autorités. Même les familles autochtones qui se voient
attribuer un lot n'ont pas toujours les moyens de le bâtir et doivent le revendre à un
intennédiaire ou à un spéculateur (Djiré, 2004, 25).

4.3 Conclusion

Le contexte politique actuel voit se dessiner une stratégie d'occupation de


l'appareil communal qui comporte des continuités frappantes avec les dynamiques
d'institutionnalisation de l'ancien parti unique. Les rapports tendus qu'entretiennent les
élus avec les fonctionnaires de l'État et les compétitions entre notables pour accéder au
pouvoir de la commune sont en plusieurs points similaires aux dynamiques locales qui
prévalaient à l'époque de l'UDPM. Au lieu de susciter de nouvelles alliances, les
incertitudes foncières suscitées par la réforme tendent à faire renaître d'anciennes
factions politiques. Toutefois, l'interface administrative nouvelle que procure la
décentralisation ouvre de plus grands espaces d'autonomie par rapport au pouvoir
central et suggère de nouvelles formes d'action politique aux acteurs locaux. Alors que
les cadres politiques de l'UDPM n'avaient qu'un pouvoir d'influence auprès des
décideurs de l'appareil d'État, les élus communaux disposent de r:éels pouvoirs de
décision dans la gestion des affaires locales et sont en mesure de faire contrepoids tant à
l'endroit des chefs coutumiers que de l'administration territoriale. Pouvoirs politiques et
pouvoirs administratifs tendent à se confondre et les clivages historiques entre pouvoirs
locaux et pouvoirs d'État s'estompent peu à peu depuis l'arrivée des communes. La
nouvelle donne introduite par la décentralisation suscite des incertitudes et contribue à
exacerber les rivalités entre groupes sociaux au niveau de la gestion des domaines.
L'accès à la terre est plus que jamais lié à l'action politique et le contrôle de la
commune devient un enjeu clé pour les acteurs impliqués dans des conflits fonciers.

L'enchevêtrement d'une multitude de droits superposés permet à différentes


forces sociales de manœuvrer sur plusieurs registres et de mettre à profit la discordance
des textes législatifs afin d'orienter la réforme en fonction de leurs intérêts. L'idéologie
114

populiste qui sous-tend la décentralisation procure un assortiment d'idées «bonnes à


penser» qui s'articulent (de manière souvent contradictoire) aux revendications d'une
pluralité d'acteurs locaux. Il convient ainsi de rendre compte de l'habilité des acteurs à
réinterpréter les slogans du pouvoir central et à détourner à leur profit les instances de
décision apportées par la réforme. Les rapports de force entre groupes sociaux sont
volatiles et l'accès à la terre fait l'objet de rivalités qui peuvent à tout moment être
réactivées. Dans certains cas, le processus de réforme entraîne un resserrement de
l'ordre des propriétés, une concentration du pouvoir aux mains des chefs coutumiers et
une réactivation des rapports de dépendance entre groupes sociaux. Mais, dans d'autres
cas, la venue des communes est propice à la remise en cause des hiérarchies statutaires,
aux mutations des rapports à l'autorité et à la transformation des modes d'accès à la
terre. La réforme permet alors d'élargir le cercle du pouvoir et de faire accéder à des
postes de responsabilité une frange de la population jusque-là exclue des prises de
décision. Ainsi, l'avènement de la décentralisation est tout autant susceptible d'entériner
des logiques d'exclusion que de contribuer à un accroissement de la mobilité sociale.
L'étendue des scénarios possibles (allant d'un resserrement de l'accès à la terre à
l'ouverture de la propriété à de nouvelles franges de la population) varie alors d'après
l'évolution des rapports de force entre groupes sociaux dans l'arène communale.
CONCLUSION

Du point de vue des institutions financières internationales et des agences de


coopération, la décentralisation représente une opportunité pour outrepasser une
administration accusée de détournement massif de l'aide au développement. La création
des communes tend alors à s'inscrire dans un cadre plus large de remaniement des
rapports liant l'appareil d'État à la gestion des projets de coopération. Les programmes
des « supraministères» financés par l'étranger (PRODEC, PRODEl, PRODESS) se
superposent aux organes plus anciens de la fonction publique et l'argent de l'aide
circule à travers des projets sectoriels (AGETIPE, PCASED, PDUD, PRP), des régies
d'investissement (ACI, ANICT), des collectifs autonomes de gestion (ASACO, APE),
des organisations de la « société civile» ou des opérateurs privés. La reformulation des
rapports entre le « local» et le « global» (à laquelle la décentralisation se trouve
étroitement liée) introduit de nouveaux rapports de « solidarité» entre le Nord et le Sud
à travers les canaux d'une coopération décentralisée devant peu à peu se substituer à la
coopération bilatérale entre États (Cissé et. al., 1999; Husson, 2004 ; AMM et DNCT,
2006). Cependant, il faut noter que la plupart des initiatives locales dites « non
gouvernementales» (écoles communautaires, périmètres maraîchers, caisses de micro­
crédit, etc.) sont lancées, encouragées ou financées d'une manière ou d'une autre par le
gouvernement ou les bailleurs de fonds. Du point de vue du gouverpement malien, la
réforme de l'administration territoriale constitue moins un affaiblissement de son
intervention qu'une remise en ordre de ses rapports à l'espace politique local: « (... ] Il
s'agit bien de faire valoir une pensée pratique de l'État, que ses nouvelles relations "au
local" redéfinissent comme cadre fort, incitateur, arbitre et coordinateur. » (Bertrand,
1999a, 24) La création des communes représente avant tout une tentative de ramener la
paix sociale et de résoudre la crise de légitimité à laquelle l'État se trouvait confronté
dans l'atmosphère tendue du début des années 1990. L'intervention de l'État passe par
de nouvelles instances locales de décision et la décentralisation permet au
gouvernement de fédérer sous son autorité des pouvoirs locaux dont le contrôle
116

commençait progressivement à lui échapper. Ainsi, la décentralisation ne veut pas dire


moins d'État, mais plutôt une recomposition de son action dans la sphère locale. La
réorganisation des rapports d'autorité et le déplacement des lieux de pouvoir au profit
des communes doivent donc être considérés comme étant indissociables de
l'institutionnalisation du nouveau régime au travers des différentes couches (parfois en
conflit) de la société malienne. Les mutations des rapports de force entre pouvoirs
locaux sont en partie tributaires des changements d'interfaces susceptibles d'être
programmés dans les· plus hautes sphères de la capitale. La décentralisation représente
un processus particulièrement instable où les décisions prises par les élus sont
potentiellement révocables par la tutelle et où les attributions confiées aux collectivités
peuvent être à tout moment retirées ou modifiées par le gouvernement.

Peu avant le déclenchement des élections communales de 2004, le président


Amadou Toumani Touré (qui a succédé à Alpha Oumar Konaré à la tête du pays en
2002) affirmait que « la politique de décentralisation est irréversible» tout en ajoutant
qu'il est nécessaire de « trouver la solution aux problèmes qui plombent ['administration
et l'empêchent de faire face efficacement à ses missions de commandement ». Après
avoir évoqué le besoin d'accroître les ressources humaines et financières attribuées à
l'administration territoriale et aux services déconcentrés de l'État, il soulignait que « la
finalité des actions à mener est de bâtir une administration compétente et crédible au
dessus de la tentation du gain facile, de la corruption et de la spéculation foncière. Une
administration non embrigadée par le politique, neutre mais positive dans ses choix et
actes mais aussi rigoureuse et respectueuse des administrés. » (B. Doumbia, 2004a) Ces
propos ambigus sur la décentralisation sont le reflet des tensions qui persistent sur la
scène politique nationale à propos du chemin à suivre pour la suite du processus. Alors
que l'Association des municipalités du Mali (AMM) eUe Haut conseil des collectivités
territoriales (HCCT) font pression pour accélérer le transfert aux collectivités
territoriales des compétences et des ressources financières de l'État, certains ténors de
l'administration publique proposent plutôt d'observer un temps d'arrêt et d'accroître les
mécanismes de tutelle auprès des élus (Hilhorst et Baltissen, 2004, 52). Les premiers
117

ont toutefois moins de succès que les seconds et la décentralisation semble être au point
mort depuis l'alternance politique de 2002. Les « ratés» du démarrage des communes
(clientélisme, corruption, conflits fonciers, etc.) sont attribués « aux partis» ou « à la
. politique ». L'administration civile se voit donc progressivement confier le mandat
d'user de ses prérogatives de commandement pour « moraliser la vie publique» et
restaurer l'ordre troublé par la réforme. S'il doit y avoir participation, elle doit reposer
sur des discussions « consensuelles» et des débats « non partisans» en vue d'atteindre
les cibles de développement projetées par les technocrates du gouvernement. Ce point
de vue « apolitique» de la démocratie locale n'est pas sans rappeler la politique du
« développement des populations à la base» anciennement promue par l'UDPM.

Le populisme développementiste (à la fois dans ses variantes « participative» et


« communautaire») idéalise la prise en charge autogestionnaire des populations,
surestime l'impact de la participation sur le développement et sous-estime les tensions
sociales qui traversent l'arène locale. Les pouvoirs locaux sont assimilés à un l:ôle
purement instrumental qui tend à occulter tout caractère politique à leurs actions. Même
si les assemblées villageoises projettent l'image de communautés solidaires entre leurs
membres et unanimes derrière la parole de leurs chefs, ce consensus de façade cache
souvent des rivalités entre personnes et des conflits entre groupes sociaux qui divisent la
population entre factions concurrentes. Les dynamiques locales suscitées par la
décentralisation sont le résultat d'interactions complexes entre groupes sociaux et
institutions de différents niveaux dont les intérêts entrent souvent en contradiction.
Avec les mutations apportées par la réforme, il importe de considérer comment la
multiplication des instances locales suscite de nouvelles modalités d'action politique
auprès des acteurs. Les administrateurs civils ne détiennent plus le monopole dans les
prises de décision concernant les affaires locales et l'espace communal devient un lieu
. de confrontation privilégié entre les groupes sociaux antagonistes qui évoluent dans
l'arène locale. Les pouvoirs d'État sont peu à peu concurrencés par les pouvoirs locaux
et les entrepreneurs politiques tendent à vouloir jouer sur plusieurs tableaux à la fois
pour faire valoir leurs intérêts. Bien qu'il soit nécessaire de relativiser l'autonomie des
118

collectivités, la démocratisation des autorités locales et la dévolution des pouvoirs de


l'État tend à favoriser la mise en place d'un nouveau pluralisme juridique et
institutionnel où les instances communales sont en mesure de contrebalancer les
pouvoirs de l'administration civile et/ou de la chefferie coutumière.

L'occupation des instances locales instaurées par le pouvoir central ne donne


plus seulement un pouvoir « d'influence» auprès des décideurs (comme à l'époque du
parti unique), mais octroi un réel pouvoir de décision dans la gestion des affaires
locales. Les importantes prérogatives confiées aux élus font de l'occupation des sièges
de la commune un enjeu d'autant plus majeur qu'il contribue ainsi à exacerber les
rivalités locales entre groupes sociaux. À travers l'ensemble du pays, les rivalités entre
acteurs sociaux liées à l'appropriation foncière ont été (ré-)activées par la venue de la
décentralisation. Les conflits fonciers qui opposent différents « groupes stratégiques»
(autochtones/propriétaires et allochtones/non-propriétaires) offrent une démonstration
de la façon dont les instances communales deviennent le site privilégié des luttes
sociales qui se déploient dans l'arène locale. Des factions politiques rivales clientélisent
des groupes sociaux antagonistes (et vice versa) pour conquérir les instances politiques
locales et faire pencher en leur faveur les décisions du conseil qui concernent
l'attribution domaniale. Ces conflits fonciers qui se transposent au sein des espaces
communaux sont en continuité .avec les luttes factionnelles qui parcouraient les
instances de l'ancien parti unique, mais semblent être exacerbés par les nouveaux
pouvoirs confiés aux élus et par les incertitudes qui persistent à l'endroit de la réforme.
Les instances politiques locales créées par la décentralisation ne sont plus seulement
mobilisées pour influencer les décisions de ['administration territoriale, mais servent
aussi aux détenteurs d'un~ position au sein de l'appareil communal à imposer des
décisions aux autres acteurs de l'arène locale dans le domaine de l'attribution des terres.
Ainsi, la réforme est tout autant susceptible de resserrer la maîtrise foncière en faveur
des autochtones ou des propriétaires coutumiers que de favoriser l'accès à la terre à de
nouvelles couches de la population (allochtones, non-propriétaires, etc.).
119

Les communes sont souvent accaparées par les notables coutumiers et les vieux
politiciens «de carrière », mais la décentralisation peut devenir dans certains cas une
porte d'entrée à l'ascension sociale des jeunes, des étrangers ou des femmes. Puisque
l'occupation d'un siège au conseil ne repose pas directement sur l'appartenance
lignagère (comme c'est le cas avec le conseil de village), les étrangers, les hommes de
caste et les descendants de «captifs» - malgré les nombreux préjugés qui persistent à
leur endroit - peuvent prendre part au jeu politique de la commune au même titre que
les familles « nobles» ou «autochtones ». Grâce à leur formation scolaire et/ou à leur
expérience de gestion, les leaders associati fs et les jeunes «lettrés» exercent une
influence croissante dans l'arène locale et sont même encouragés par les notables
coutumiers à se porter candidats aux élections communales. Les enseignants, les
fonctionnaires et le personnel de la santé sont eux aussi appelés à occuper une place
plus importante dans les affaires locales et tendent parfois à se substituer au rôle jusque­
là réservé aux chefs de lignage. Si elles restent pour la plupart en marge de la
décentralisation (la politîque étant considéré affaire d'hommes), les femmes ne sont pas
toutes exclues des communes et une poignée d'entre elles parviennent à inscrire leur
nom sur une liste et à conquérir un siège à la mairie. Parfois, de jeunes femmes
« lettrées» sont même invitées par les notables à occuper d'importantes charges

administratives. Néanmoins, la grande majorité des femmes sont exclues des arènes
locales et les positions qu'elles occupent restent subordonnées au pouvoir des hommes.
Les femmes disposent d'une forte influence au sein dès comités électoraux des partis
politiques, des bureaux de la nébuleuse associative et des sections locales de la CAFO
(une fédération associative qui s'est partiellement substituée à l'UNFM) sans toutefois
occuper des postes où elles disposerai~nt d'un réel pouvoir de décision.

L'attribution de pouvoirs de tutelle à l'administration territoriale et la


présidentialisation croissante de la fonction des maires laisse peu de place aux débats et
tend à favoriser l'extension du clientélisme politique. Chaque protagoniste fait preuve
d'initiative et d'imagination en faisant du marchandage entre les différentes instances
locales (institution shopping) et en instrumentalisant à son avantage les slogans
120

politiques contradictoires sur la décentralisation. Les acteurs locaux entretiennent des


«malentendus productifs» sur la réforme à travers des arrangements instables et des
renégociations permanentes des rapports de force. Au-delà des conflits entre clientèles
politiques rivales, des luttes d'influence et des compétitions entre acteurs
(administrateurs civils, élus communaux, chefs de village, membres associatifs, etc.)
prennent quotidiennement forme dans le nouvel espace local bouleversé par la
décentralisation. Les dispositions de la réforme sont constamment transformées par les
confrontations entre «groupes stratégiques» de l'arène pol itique tout en étant
tributaires de l'héritage historique des pouvoirs et des pratiques de la sphère locale,'
confirmant ainsi notre hypothèse de départ sur l' instrumentalisation de la
décentralisation en tant qu'enjeu de pouvoir pour les acteurs locaux. En conséquence,
l'examen des processus de décentralisation doit porter attention au repositionnement des
acteurs et à la recomposition des luttes sociales entourant la transformation des liens
entre pouvoirs locaux et pouvoirs d'État. La réforme territoriale est susceptible
d'entraîner ou d'aggraver les luttes sociales qui parcourent la sphère locale par la remise
en cause des rapports de force et des modes de partage des richesses. L'arrivée des
communes remet en cause les hiérarchies statutaires entre groupes sociaux, introduisant
ainsi de nouvelles formes de collaborations et de conflits entre acteurs locaux. La voie
empruntée par la réforme est spécifique à chaque localité et dépend tout autant du poids
sociohistorique des paramètres du jeu politique que des rapports entre individus qui se
dessinent de façon conjoncturelle.

Il importe néanmoins de relativiser l'impact du paysage factionnel sur le


processus de décentralisation, notamment au regard des faibles taux de participation lors
des scrutins communaux. Malgré l'importante publicité déployée par le gouvernement,
seulement 42% (en 1999) et 45% (en 2004) des électeurs du pays se sont rendus aux
urnes lors des élections communales (Lemelle et Bâ, 2008, 27). Tout ceux qui sont
déçus par les promesses des partis, qui ne voient aucun gain tangible dans la
décentralisation ou qui sont désillusionnés par la classe politique refusent d'aller voter.
Sinon, les électeurs peuvent accepter les cadeaux de plusieurs candidats à la fois et
121

ensuite choisir le parti ayant fait le plus de dons au cours des meetings de la campagne
(en sacs de sel, de sucre ou de céréales, en carrés de viande, en billets de Fcfa, en
essence, en matériel de cuisine, en t-shirts, etc.). Les citoyens sont conscients de
l'importance de leur vote, ils entendent obtenir des bénéfices concrets des élections et
exigent souvent d'être payés (en argent comptant ou en promesses d'investissement)
pour donner leur appui à un candidat. Il n'est donc pas rare qu'une famille ou un village
ait été entièrement « acheté» par un candidat sans égard à son appartenance lignagère
ou factionnelle. En outre, les acteurs entretiennent des rapports de compl icité et
déploient diverses stratégies de contournement visant à éviter toute forme d'intrusion
des pouvoirs locaux dans leurs problèmes. Les conflits ne passent pas toujours par les
instances officielles et diverses formes de résistances voilées sont perceptibles à divers
degrés sur le terrain. Ces stratégies peuvent s'exprimer sous le couvert du silence, de
l'inertie, de l'évitement, du double langage, de l'ambivalence et du mensonge.
L'opposition des acteurs à la réforme se traduit moins par des démonstrations d' hostilité
que par des allusions, des non-dits, des compromissions ou de fausses adhésions.

Les Maliens n'en sont pas à leur première expérience de décentralisation et la


plupart ne voient aucune raison de croire que cette dernière réforme pOUiTait être
différente des autres: «En intervenant parfois face à ceux-là qui étaient chargés de les
sensibiliser, les populations ont souvent remarqué qu'elles avaient toujours travaillé
ensemble ou collaboré entre elles sans le concours de l'État, de ce fait elles ne
comprenaient pas pourquoi ils s'acharnent à les entraîner avec tant d'ardeur dans un tel
système.» (K. Traoré, 2002, 314) Pour de nombreux citoyens (surtout ceux qui
demeurent exclus du cercle des notables), les « affaires de communes» ne concernent
que «les gens de pouvoir» et la décentralisation reste aux mains des seuls experts
(fonctionnaires, consultants et coopérants) qui maîtrisent le jargon administratif et
viennent en appui aux élus. À ce titre, il "est vrai que la citoyenneté apportée par la
décentralisation se limite essentiellement aux élections communales (qui représentent la
seule occasion pour se prononcer sur la gestion des élus) et aux consultations populaires
(qui prennent souvent la forme de doléances ou de séances d'applaudissements). Malgré
122

le nouveau pluralisme juridique et institutionnel qui temporise la centralisation du


pouvoir administratif, l'autorité demeure personnalisée par un nombre restreint
d'individus (délégués du gouvernement, élus communaux, notables coutumiers) et le
jeu politique local laisse peu de place aux simples citoyens en dehors des échéances
électorales. Les catégories de «citoyens» et de «sujets» décrites par Mahmood
Mamdani (1996) illustrent bien la polarisation des rapports entre une minorité investie
du commandement et une majorité placée en marge des décisions collectives. Ces
clivages qui structurent les relations entre ruraux et citadins, entre fonctionnaires et
administrés ou entre politiciens et électeurs sont caractéristiques des formes
contemporaines de l'exercice décentralisé du pouvoir en postcolonie.

À ces rapports sociaux de dépendance s'ajoute l'auréole présidentielle sur


l'ensemble du pays qui pose un réel défi à la déconcentration des pouvoirs vers les élus
locaux: «Le président de la République, aujourd'hui encore, est par exemple censé
porter dans son bonnet la chance du peuple; la bonne comme la mauvaise pluviométrie
sont supposées dépendre de sa chance, ou plutôt de l'énergie qu'il recèle, tout comme
les bonnes ou les mauvaises récoltes.» (Bâ Konaré, 2008) En cas de conflits qui
perdurent (entre les élus de factions politique opposées, entre le maire et la chefferie
coutumière ou entre la commune et l'administration civile), on peut toujours en appeler
au «président à Bamako» dont l'arbitrage sera rapide et se fera dans l'unanimité. Les
décisions qui concernent la sphère locale ne passent pas toujours par les canaux officiels
de l'administration et les collectivités locales sont quotidiennement « détournées» par
les modes de gouvernement indirects et les réseaux politiques parallèles qui unissent les
pouvoirs locaux aux pouvoirs d'État. De ce fait, les théories du «droit pur », de la
«bonne gouvernance» ou de «l'espace public» offrent une perspective limitée des
transformations apportées par la décentralisation. Pour rendre compte des mutations des
rapports entre l'appareil d'État et la sphère locale, il importe de s'intéresser aux
différentes formes de représentations du pouvoir (et de la politique), à l'héritage
historique des rapports entre autorité et territoire, de même qu'aux luttes sociales qui
façonnent les dynamiques entre acteurs et groupes sociaux.
Annexe no 1

Lexique
ArlJe (fulfulde) : chefs guerriers peuls qui s'imposèrent aux pouvoirs lignagers du
Maasina aux alentours du XVe siècle.

Association de santé communautaire (ASACO) : association formée des utilisateurs


de dispensaires, de maternités ou de centres de santé communautaire (CSCOM). Ces
derniers élisent parmi eux les membres du bureau devant assurer la gestion des services
offerts à la communauté.

Association de parents d'élèves (APE) : association qui fonctionne selon les mêmes
principes que ceux l'ASACO, mais qui relève de la gestion des écoles communautaires.

Bourgoutière: pâturages d'herbes aquatiques (Echinochloa stagnina) accessibles au


bétail au moment de la décrue du fleuve dans le delta intérieur.

Conngi (fulfulde) : contrepartie versée par un propriétaire de troupeaux aux jowro en


échange d'un droit d'accès temporaire au leydi. Autrefois, le conngi avait une valeur
essentiellement symbolique et visait à reconnaître l'autorité dujowro sur ses pâturages.
Avec la monétarisation progressive des rapports sociaux, les jowro s'approprient les
leydi à titre privé et perçoivent des sommes faramineuses en redevances (une pratique
illégale mais tolérée par les autorités).

Dugutigui (bamanan) : nom donné au chef de village en zone bambara/mandingue. Le


titre est employé sans distinction pour désigner le chef « administratif» ou le chef
« traditionnel» et il s'agit le plus souvent de la même personne.

Dugukolotigui (bamanan) : chef d'un lignage descendant des premiers occupants d'un
territoire qui dispose de la maîtrise des terres et en assure la distribution.

Groupements d'intérêt économique (GIE) : entreprises « d'économie sociale» ayant


pris leur essor au cours de la crise des années 1980. La plupart d'entre elles sont
formées de jeunes chômeurs qui se voient accorder la sous-traitance de certains services
publics, notamment dans l'assainissement urbain et l'entretient des infrastructures.

Jamanatigui (bamanan) nom donné aux chefs de cantons en zone


bambara/mandingue. Ces derniers sont nommés par l'administration coloniale française
pour servir d'auxiliaires aux commandants de cercle.

Janyeeli (fulfulde): anciennes aires de pouvoirs précoloniales dans le Maasina


contrôlées par des chefs lignagers.
124

Jowro (julfulde): chef d'un lignage qui dispose de la maîtrise d'un territoire de
pâturage (leydi) et qui accorde des droits d'accès aux troupeaux moyermant le
versement d'une redevance (conngi).

Kafo (bamanan) : chefferie lignagère unissant plusieurs villages sur une base
hiérarchique en zone bambara/mandingue

Leydi (julfulde) : Territoire pastoral du Maasina placé sous le contrôle d'un chef de
lignage « noble» (le jowro).

Maasina : région historique s'étendant sur le delta intérieur du Niger entre les villes de
Sansanding et de Tombouctou. .

Manden: région historique qui chevauche le Sud-ouest du Mali et l'Est de la Guinée


d'où est issu l'ancien Empire du Mali (XIIIe au XVIe siècle). Dans sa partie malienne,
la région correspond approximativement au cercle de Kangaba, à la portion ouest du
cercle de Kati, à la portion Sud du cercle de Kita et à la portion Nord du cercle de
Yanfolia.

Sonsorobuguw (bamanan) : désigne les quartiers « spontanés» situés à la périphérie


des zones urbaines et dont les parcelles sont occupées illégalement.
Annexe no 2:

Carte administrative du Mali

\ Liste des cercles


\ 01- Abe-fbara 26- Kita
02- Ansongo 27- Kolokani
\
03- Bafoulabé 28- Kolondiéba
\ \,
04- Bamako
05- Banamba
29- Koro
30- Koulikoro
\
. 06-,Bandiagara
07- Bankass
31- Koutiala
32- Massina
\­ 08- Baraouéli 33- Ménaka
\ 09- Bla 34- Mopti
10- Bougouni 35- Nara

\ \
45
11 ,,~

7
11- Bourem
12- Diéma
36- Niafounké
37- Niono
18 i 13- Dio-ila 38- Nioro du Sahel
/
.J 17 /1 33 14- Diré
15- Djenné
39- San
40- Ségou
\
( 16- Douentza 41- Sikasso
J
17- Gao 42- Tenenkou
18- Goundam 43- Tessalit
19- Gourma 44- Tin Essako
20- Kadiolo 45- Tombouctou
21- Kangaba 46- Tominian
22- Kati 47- Yanfolia
23- Kayes 48- y élimané
24- Kéniéba 49- Yorosso
25- Kidal 50- Youwarou

Source: adapté de Carte administrative du Mali (2006), [en ligne].


hllp://fr. wikipèd ia.or2:/wiki/Fich ier: Mal i cercles.png
(Consulté le 15 août 2009)
Annexe no 3 : Schéma simplifié du dispositif d'administration territoriale en région rurale sous l'UDPM (1990)
~---------------;
1 1
===================================================;;Il
Il=11
1

1
Président de la République et secrétaire général de l'UDPM

~ ~
État

Bureau exécutif central


Ministère de l'agriculture et du Ministère de l'administration territoriale et (BEC)
déveloDDement rural du développement à la base

. - ---- -_ .. -_ .. - ---.,
Opération de développement rural
(ODR)
l l
,
, Région i ~ ~ 1 Gouverneur de région 1-----. 1. Conseil régional 1.,
1 Secteur 1 ~ ~
f ---- -- --- --- - --1
:1 Cercle :
~ ~ 1 Commandant de cercle 1 • 1 Conseil de cercle 1 .... ------ 1 Section UDPM 1

~ ~
Zone d'animation et
.
----- -_.- ---_ .. -_.,
d'expansion rurale Î Î
Conseil .... ------­ Sous-section
:1 An"on d"lssement:1 ,~
L -1 ~ Chef d'arrondissement
• d'anondissement UDPM
Secteur de
r .... - ..... - ..... - ...... - .. .. - ,
développement ~ ~ Î Î
i Village ou i Conseil .-----------
:L fraction nomade:
' __1
Chef de village • villageois
1 CofiÙté
UDPM
1

,
1
~----------------------------------------------------------------------------------~

Source: élaboration propre


Annexe no 4 : Schéma simplifié du dispositif d'administration territoriale depuis la réforme de décentralisation (2002)
r-------,

__..n__ 1~ Président de laRépubUque 1


État
territoriales (RCCT)
l\tlinistère de l'administration territoriale et
des collectivités locales (MATCL) -1 ANICT i
- 1

+ + ---::::
lj
" 1
" Consei 1national C ellule de coordination

._------, 11 A."
"
d'orientation

~
nationale

~
Région
Bureau de l'assemblée
régionale
..­ Assemblée régionale 1
l l
Haut commissaire 1----. Co~s~il rég~onal
d onentauon
-­ - - ~ Conseil de suivi
régional
, -,­
------­
i i .--'­ --' ... ...
Cercle
Bureau du conseil
de cercle .-­ 1 Conseil de cercle 1 1 Préfet 1 ~ Conseil local
d'orientation
------~
Centre de conseil
communal
,
_ _ _ _ _ _ ....J
-,­
,------,
1

! Commune!
1

Bureau
i i
Conseil communal
.-­ l l
1 1, communal 1 Sous-préfet 1
1 --­ --­
1
,
-------,
Villao-e
b
ou 1 1
Conseil de
----­ ... _-­
--. l l
1 fraction 1
i nomade i village • Chef de village
1 ~

1
-------.
1
; Quartier i
l l Source: élaboration propre
l
I
,
-.J
Conseil de
quartier
• Chef de
quartier
Annexe no 5

Les compétences transférées aux collectivités territoriales (2004)

L es camps
h d e competence sous a responsa bT
l ite'd es communes
- Budget communal
- Collecte des impôts/taxes et fixation des taux
- Programmes de développement économique, social et culturel (PDESC)
- Plans d'occupation et d'aménagement du territoire
- Gestion domaniale et foncière
- Gestion des ressources naturelles
Compétences
- Organisation des activités agro-sylvo-pastorales
générales
- Protection de J'environnement
- Police administrative
- Organisation des foires et des marchés
- Emprunt et octroi de subventions
- Acceptation ou refus des dons, subventions et legs
- Projets de jumelage de coopération avec les collectivités étrangères
- Enseignement préscolaire
- Enseignement fondamental (1 er cycle)
- Centre d'alphabétisation
Éducation - Subventions aux écoles communautaires
- Élaboration et mise en oeuvre d'un plan de
développement de l'éducation
- Appui à l'élaboration de la carte scolaire
- Création de dispensaires
- Création de maternités
- Création de CSCOM
- Subvention aux ASACO
Compétences
- Hygiène publique et assainissement
spécifiq ues Santé
-Élaboration et mise en oeuvre d'un plan de
développement de la santé
- Mise en oeuvre des stratégies nationales de prévention
et de lutte contre les maladies
- Éducation à la santé
- Infrastructures de communications classées dans le
Travaux publics
domaine de la commune
et transport
- TranspOlts publics
- Elaboration et mise en oeuvre du plan de
Hydraulique développement de J'hydraulique
- Construction et entretien des infrastructures
129

L es ch amps d e competence sous a responsa bT lite' des consel.. s de cerc e


- Budcret du conseil de cercle
- Fixation des taux des impôts/taxes du cercle
- Environnement
Compétences
- Organisation des activités agro-sylvo-pastorales
générales
- Emprunts et octroi de subventions
- Acceptation ou refus des dons, subventions et legs
- Projets de jumelage et de coopération avec les collectivités étrangères
Education - Enseicrnement fondamental (2e cycle)
Santé - Centre de santé
Compétences
Travaux publics - Infrastructures de communication classées dans le
spécifiques
et transport domaine du cercle
Hydraulique

Les champs de compétence sous la responsabilité des assemblées régionales


- Programmes régionaux de développement économique, social et culturel
- Budget régional
- Fixation des taux des impôts/taxes de la région
- Schéma d'aménagement du territoire et de développement régional
- Organisation des activités agro-sylvo-pastorales
Compétences
- Environnement
générales
- Tourisme
- Énergie
- Emprunt et octroi de subventions
- Acceptation ou refus des dons, subventions et legs
- Projets de jumelage et de coopération avec les collectivités étrangères
- Enseignement secondaire
Éducation - Écoles techniques et professionnelles
Compétences - Éducation spécialisée
spécifiques Santé - Hôpitaux régionaux
Travaux publics - Infrastructures de communication classées dans le
et transport domaine de la région

Sources: Cissé et. al., 2003a, 29-32 ; Dicko, 2004, 73-75 ; Hilhorst et Battissen, 2004,
41-52 ; Ongoïba, 2006, 85-91
Annexe no 6

Liste (non exhaustive) des revenus


des communes en taxes et en impôts

Si le minimum fiscal (ou taxe de capitation) fut aboli en 1992 peu après l'arrivée
d'Alpha Oumar Konaré à la présidence, toutes les autres taxes héritées de l'ancien
régime sont néanmoins demeurées en vigueur. Les revenus des communes proviennent
principalement des taxes de développement local et régional (TORL) créées en 1988 (en
fusionnant les cotisations obligatoires pour le parti unique, la section locale de la
jeunesse, l'association des parents d'élèves, le développement coopératif, etc.). Son
montant varie de 875 Fcfa/an (à Oiré) à 2600 Fcfa/an (à Yanfolia) pour chaque personne
imposable (Oicko, 2004, 77). Même s'il s'agit d'un impôt individuel, cette taxe est
généralement assumée par les seuls chefs de famille, qui s'organisent pour payer au titre
de tous leurs dépendants. Toute personne âgée de 14 à 60 ans (ou son chef de famille)
est astreinte au versement à l'exception:

- des forces de J'ordre;


- des élèves et des étudiants;
- des « indigents» ;
- des personnes traitées pour la maladie du sommeil, la tuberculose, la lèpre, la
dracunculose ou le SIDA;
- les personnes à charge d'un contribuable décédé à la suite d'un accident de
travail;
- des mères qui ont eu quatre enfants et plus;
- du personnel diplomatique.

Bien qu'ils ne figurent pas officiellement sur le liste des individus exemptés, les salariés
de l'État ne sont généralement pas considérés comme étant une catégorie de personne
imposable. De nombreux Maliens ne disposent pas d'une existence légale (être inscrit
sur un carnet de famille ou un registre d'état civil) et les fiches d'imposition ne sont pas
toujours bien à jour. Il arrive que des familles paient pour ses morts alors que d'autres
n'ont jamais été inscrites au registre. Quant aux commerçants et aux opérateurs
131

économiques, ils sont astreints au paiement d'une « patente» (impôt synthétique) et/ou
d'une licence à la commune. Les montants sont établis à la discrétion des percepteurs,
qui jugent sur place et en l'absence de livres comptables la valeur économique d'un
atelier ou d'un commerce. Ils disposent ainsi d'une marge de manœuvre quasi-illimitée
pour appliquer certaines décisions arbitraires ou jouer sur les normes administratives
ambiguës qui règlent les procédures de collecte. La « patente» est une taxe qui se
négocie facilement et qui peut être momentanément différée en échange d'un « cadeau»
au percepteur. Sinon, les élus sont autorisés par l'État à lever d'autres impôts que la
TDRL et la taxe synthétique pour financer leurs activités:

Taxes relevant de la compétence des communes


(les chiffres indiqués représentent le maximum imposable)

• Taxe de sortie sur les véhicules de transport public (1000 Fcfa/passage)


• Taxe sur les vélos (1000 Fcfa/an)
• Taxe sur les charrettes à bras (2000 Fcfa/an)
• Taxe sur les charrettes à traction animale (7500 Fcfa/an)
• Taxe sur les cycles à moteur (de 3000 à 12000 Fcfa/an selon le type de moteur)
• Taxe sur les embarcations (de 2000 à 40 000 Fcfa/an selon le type
d'embarcation)
• Taxe de stationnement
• Taxe de voirie (2000 Fcfa/famille/an)

• Taxe de marché
• Taxe sur le bétail
• Taxe sur les armes à feu
• Taxe sur les moulins (lSOO Fcfa/mois)

• Taxe sur l'autorisation de spectacle (10% des recettes)


• Taxe de publicité dans les lieux publics (5000 Fcfa/affiche/mois)
• Taxe sur les appareils de jeu installés dans les lieux publics (lS 000 Fcfa/an)
• Taxe sur tes boîtes de nuits (50 000 Fcfa/an)
• Taxe sur les débits de boisson (50000 Fcfa/an)
132

Taxe sur l'autorisation de construire en commune rurale:

• en matériaux non durables (2000 Fcfa) et destiné à une activité professionnelle


(3500 Fcfa)
• en matériaux durables (5000 Fcfa) et destiné à une activité professionnelle (7000
Fcfa)

Taxe sur l'autorisation de construire en commune urbaine:

• en matériaux non durables (5000 Fcfa) et destiné à une activité professionnelle


(7000 Fcfa)
• en matériaux durables (10000 Fcfa) et destiné à une activité professionnelle (25
000 Fcfa)

À ces différentes taxes peuvent s'ajouter des redevances sur l'extraction du sable et du
gravier, l'exploitation du bois, les produits de la pêche, d'orpaillage, etc. Les communes
tirent aussi d'autres revenus de la délivrance de services administratifs (légalisation de
signatures, actes de naissance, certificats de mariage, etc.), des sommes provenant de la
tarification des services publics et parfois de cotisations volontaires de la population. '
Les projets de lotissement en zone urbaine et périurbaine (par le morcellement des lots
ou l'expropriation des terres) représentent les possibilités les plus intéressantes de
financement pour les communes. De plus, les subventions provenant de l'État, des
ressortissants à l'extérieur ou de l'aide au développement peuvent rendre possible la
mise sur pied de projets de développement local.

Sources: Tag, 1994; ODHD-LCPM, 2003 ; Dicko, 2004 ; Diawara, 2007


Annexe no 7

Nombre de sièges attribués aux conseils


de chaque collectivité territoriale

Nombre de conseillers communaux au prorata de la population


de la commune au recensement

Po ulation de la commune Nombre de siè es


moins de 10 000 Il
10000 à 20 000 17
20 001 à 40 000 23
40001 à 70 000 29
7000\ à 100000 33
101000 à 150000 37
15 1 000 à 200 000 41
plus de 200 000 45

Nombre de conseillers communaux siégeant au conseil de cercle au prorata de la


population de la commune au recensement

Po ulation de la commune Nombre de siè es


moins de 20 000 2
20000 à 50000 3
50001 à 100000 4
Plus de 100000 5

Nombre de conseillers de cercle siégeant à l'assemblée régionale au prorata de la


population du cercle au recensement

Po ulation du cercle Nombre de siè es


moins de J 00 000 2
100 000 à 200 000 3
plus de 200 000 4

Source: Ongoïba, 2006, 85-91


Annexe no 8

Les organes d'orientation et d'appui à la réforme


Les Comités locaux d'orientation (CLO)

Membres des comités: Mandat:


• Préfet (président) • Approuver le programme du CCC
• Représentants du conseil communal • Suivre et évaluer les tâches du CCC
• Représentants du conseil de cercle
• Représentants des Chambres d'agriculture,
de commerce et de métiers
• Représentants des ONG qui viennent en
appui à la décentralisation sur le terrain

Les Comités régionaux d'orientation (CRO)

Membres des comités: Mandat:

• Haut-commissaire (président) • Orienter, coordonner et évaluer le


• Préfets dispositif d'appui à la conception et à la
• Représentants de l'assemblée régionale mise en œuvre des POESC
• Représentants des Chambres d'agriculture,
de commerce et de métiers
• Représentants des ONG qui viennent en
appui à la décentralisation sur le terrain

Le Comité national d'orientation (CNO)

Membres du Comité: Mandat:

• Représentants du MATCL (président) • Veiller au bon fonctionnement du


• Représentants de la ONCT dispositif d'appui à la décentralisation
• Représentants de l'ANI CT • Coordonner les programmes de
• Représentants des ministères sectoriels développement des collectivités
• Représentants de l'Association des territoriales avec ceux des ministères
municipalités du Mali (AMM) sectoriels
• Représentants des Chambres d'agriculture, • Coordonner les projets mis en œuvre par
de commerce et de métiers les différents intervenants
• Représentants des Comités de
coordination des actions des ONG
(CCA/ONG) et du secrétariat de
coordination des ONG (SECO/ONG)
135

L'Agence nationale d'investissement des collectivités territoriales (ANICT)

Composition de l'ANICT : Mandat:


• L'Agence est dotée d'une personnalité • Gérer les subventions du FICT destinées
morale et d'une autonomie financière aux investissements locaux programmés
• La direction générale est rattachée au par les collectivités territoriales
MATCL et les antennes régionales sont • Répartir les enveloppes budgétaires par
placées sous la tutelle des CRü région et attribuer les droits de tirage
• Le conseil d'administration est composé • Assurer le suivi de l'utilisation des fonds
des représentants du gouvernement et des
bailleurs de fonds internationaux

Mécanisme de réalisation des infrastructures et équipements


Grâce à l'appui financier de l'ANICT

ANICT National
J. Envoie dossier aVeC moll'/atlon CRO
4. Re<epnon ordre de virement

Antenne régionale
___C_R_o t - - - - - - - - - - - - -.. . . . 1
11"'
... ANICT
_ _ 2.Evaluarion dozl~r; /''------r---.-----'
d((~ptation ou r;,j;,r //

1. fnvole dossier
//aCjjltdrJOn contact
."../ A1VKT(onu})u/1E!S
6. fMoi~ ordre de 'II\-ement / 5. Si9/Mture conwMion,
et instruction pour dossier /" noli/kar/on droit de
ccc
.// tir,'ge

/" -'­
/// A ppui-<omeil"""•.,

Trésor: ""r-~---------'
Commune rurale
rece'Jeur municipal
/
B-fn'/oie ordr;, d;, palnlent
-',
9. Paiement, sous
commune
jnstruetjo:'~~ ~_
1
Prestataires
V
1
1.CO'"'' d. p'''''''''!'.
œ,re manaat de paiement
'-----------'

Schéma tiré de ; Hilhorst et Baltissen, 2004, 37


136

Organisation des pouvoirs de tutelle


organes élus R~pr~e-ntlnt5 dç l'Wt Organes d>'orl~ntltlon
Etat Haut conseil des collectt,~tês }v'lnlstr~ cheargé deI (OIllllé national d'orientation
Wlltorlales
... ....
',
/ . /.. (01I8(II',lt8S territorIales
,.

Région A9Semblée régionale .. .' Hautcomrnls>;alre Comité r~glonal d'orlentatJ>m


/..-"""~I'-~
# ,
Conwll d" cercie.. Pr<l/"t (ùflIlté IIXal d'Orlentdtlon

Commune

_ M$lstan(e conseil ~ la demande de [a (OllecUI'lté


_.--. (ontr~l" d" légalité

Schéma tiré de: Dicko, 2004, 71

La Cellule de coordination nationale (CCN)

Composition de la CCN : Mandat:


• Organe rattaché à la DNCT du MATCL • Coordonner les appuis apportés aux CCC
• Cinq cadres de la CCN sont déployés dans • Organiser des ateliers de rétlexion
chaque région • Mettre à disposition des outils
d'élaboration de plans d'appui
• Faire le suivi des interventions et de leurs
impacts sur le terrain

Les comités de suivi régionaux (CSR)

Il s'agit d'une instance décisionnelle faisant le retais entre la CCN et les CCc. Nous ne
présentons pas de schéma pour ces organes puisque leur fonctionnement demeure
relativement flou et varie d'une région à l'autre tout dépendant de son opérateur.

Les centres de conseil communal (CCC)

Composition du CCC: Mandat:


• Le Mali compte 46 CCC qui sont animés • Conseiller les élus dans la phase de
par 28 opérateurs différents (pour la démarrage des communes
plupart des firmes de consultants, des • Épauler les maires dans l'élaboration et la
ONG nationales ou internationales et des mise en œuvre du PDESC
agences gouvernementales d'aide au
• Créer un réseau entre les communes et les
développement)
prestataires disponibles sur le terrain
(opérateurs privés, bureaux d'étude,
services déconcentrés, ONG, etc.)

Sources: Ongoïba, 2006 ; Hilhorst et Baltissen, 2004, 27-39


Annexe no 9

Formalités administratives et dépenses encourues par les


candidats au lotissement: l'exemple de Sanankoroba

Coût moyen du titre foncier dans la commune de Sanankoroba

Ordre Titre d'opération Coût moyen (en Fefa)


1 Achat du terrain auprès des paysans 225 OOO/ha
2 Levée topographique et confection du plan 75 OOO/forfait
3 Insertion de J'avis d'enquête commodo et incommodo 17500
4 Déplacement des enquêteurs 30 000
5 Signature du sous-préfet 7500
6 Signatures du chef de village et des conseillers 15 000
7 Cahier des charges des concessions rurales 3500
8 Enregistrement au bureau du domaine (timbre) 1250
9 Redevances des concessions rurales (pour cinq ans) 50 000
10 Insertion de l'avis d'immatriculation 17500
11 Insertion de l'avis de bornage 17500
12 Frais d'opérations de bornage 75 000
13 Prix de cession du terrain par l'Etat 360 000
14 Frais d'enregistrement 54 000
15 Frais de timbres 6 000
16 Frais de mutation 5240
Montant total 959990 49

49Ce tableau ne concerne que les demandeurs ayant fait eux-mêmes leurs démarches pour obtenir un lot.
Ceux qui ont préféré avoir recours aux services d'un intermédiaire ont dû débourser 350000 Fcfa/ha
supplémentaire pour l'obtention du titre provisoire et 325 000 Fcfa/ha en plus pour l'obtention d'un titre
fonci er défi ni ti f.
138

Répartition des titres fonciers détenus dans la commune de Sanankoroba


en fonction des catégories socioprofessionnelles

Catégories socioprofessionnelles %
Fonctionnaires et agents ct' établissements publics 40,3 %
État 35,44%
Opérateurs privés 19,4%
Organisations 1,88%
Paysans 1,49%
Artisans 0,75%
Élèves 0,37%
Retraités 0,37%
Total 100%

Source: Dj iré, 2007, 11-13


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_ _ _. Loi No 93-008 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


11/02/1993 déterminant les conditions de la libre administration des collectivités
locales.

_ _ _. Loi No 95-003 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


02/12/94 fixant les conditions de gestion des ressources forestières.
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_ _ _. Loi no 95-004 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


02/12/94 portant exploitation du transport et du commerce du bois.

_ _ _. Loi No 95-032 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


20/0311995 fixant les conditions de gestion de la pêche et de la pisciculture.

_ _-.,.--' Loi No 95-022 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


20/0311995 déterminant les conditions de nomination et les attributions des
représentants de l'État au niveau des collectivités territoriales.

_ _ _. Loi No 95-034 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


12/04/1995 portant code des collectivités territoriales en République du Mali.

_ _ _. Décret No 95-210 du Président de la République du Mali du 30/05/1995


déterminant les conditions de nomination et les attributions des représentants de
l'État au niveau des collectivités territoriales.

_ _ _. Décret No 96-084 du Président de la République du Mali du 20/03/1996


déterminant les conditions et les modalités de mises à la disposition des
collectivités territoriales des services déconcentrés de l'État.

_ _ _. Loi No 96-050 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


16/10/1996 portant principes de constitution et gestion du domaine des
collectivités territoriales.

_ _ _. Loi No 96-051 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


16/10/1996 déterminant les ressources fiscales des communes.

_ _ _. Loi No 96-059 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


0411111996 portant création des communes.

_ _ _. Loi No 97-008 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


14/0111997 portant loi électorale

_ _ _. Ordonnance No 99-032 du Président de la République du Mali du


19/08/1999 portant code minier en République du Mali.

_ _ _. Ordonnance No 00-027 du Président de la République du Mali du


22/03/2000 portant code domanial et foncier.

_ _ _. Loi No 00-042 de l'Assemblée nationale de la République du Mali du


27/07/2000 portant création de l'Agence nationale d'investissement des
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