Séries Entières

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Année 2023-2024. Spé PC. Lycée Rabelais-Saint-Brieuc.

Séries entières (fin du chapitre)

Développement en série entière.

I. Généralités.

Définition 1. Soit f une fonction de R dans R ou C, dont le domaine de définition D contient un intervalle ouvert Xcentré en 0.
On dit que f est développable en série entière en 0 (ou au voisinage de 0) s’il existe r > 0 et une série entière an xn de rayon de
n≥0
+∞
X
convergence R ≥ r tels que : ∀x ∈] − r, r[, f (x) = an xn . On dit alors que f est développable en série entière en 0 (DSE(0)) sur ] − r, r[.
n=0
Autrement dit, f est DSE(0) si f est la somme, sur un intervalle ouvert centré en 0, d’une série entière.

Exemple 1. 1. Toute fonction polynôme est DSE(0) sur R !


+∞
1 X 2n n
2. La fonction f : R → R, x 7→ , définie sur D = R \ {− 32 }, est DSE(0) sur ] − 3 3
, [
2 2
car ∀x ∈] − 3 3
, [,
2 2
f (x) = (−1)n x .
3 + 2x n=0
3n+1
3
Ici, r = R = 2
.

On sait que la (fonction) somme d’une série entière de rayon de convergence R ∈]0, +∞] est une fonction indéfiniment dérivable terme à
terme sur ] − R, R[. Par conséquent :

Proposition 1. [Unicité du DSE(0), série de Taylor en 0] Si f est DSE(0) sur ] − r, r[, alors f est de classe C ∞ sur ] − r, r[.
+∞
f (n) (0) X f (n) (0)
De plus, ∀n ∈ N, an = et ∀x ∈] − r, r[, f (x) = xn .
n! n=0
n!

Remarque 1. Une fonction DSE(0) est donc une fonction indéfiniment dérivable sur un intervalle ouvert ] − r, r[ sur lequel elle est égale
à la somme de sa série de Taylor en 0. Autrement dit, en revenant à la définition de la somme d’une série convergente, f est DSE(0) s’il
n
X f (k) (0) k
existe r > 0 tel que ∀x ∈] − r, r[, f (x) = lim x .
n→+∞
k=0
k!

Corollaire 1. [Développement limité à l’ordre n] Si f est DSE(0) sur ] − r, r[, alors :


n
X f (k) (0) k
∀n ∈ N, f (x) = x + xn ε(x), avec lim ε(x) = 0.
k=0
k! x→0

ex − 1
Exercice 1. Soit f définie par : f (0) = 1 et ∀x 6= 0, f (x) = . Prouver que f ∈ C ∞ (R, R) en montrant que f est DSE(0) sur R.
x
Préciser la valeur de f (n) (0), n ∈ N.
1
Exercice 2. (∗) Soit f définie sur R par : f (x) = 0 si x ≤ 0 et ∀x > 0, f (x) = e− x . Prouver que f ∈ C ∞ (R, R). On précisera la valeur de
f (n) (0), n ∈ N. f est-elle DSE(0) ?

Proposition 2. [Parité, imparité] Soit f une fonction DSE(0). Si f est paire (resp. impaire), son DSE(0) ne comporte que des
puissances paires (resp. impaires).

Démonstration. La dérivée d’une fonction paire (resp. impaire) est impaire (resp. paire) et une fonction impaire est nulle en 0. On en
f (2p+1) (0) f (2p) (0)
déduit que si f DSE(0) est paire (resp. impaire) alors ∀p ∈ N, a2p+1 = (2p+1)!
= 0 (resp. a2p = (2p)!
= 0).

En utilisant les propriétés sur la somme et le produit de deux séries entières, on a :

Proposition 3. [Combinaison linéaire et produit de fonctions DSE(0)]


+∞
X +∞
X
Soient f , g deux fonctions DSE(0) sur ] − r, r[. Posons : ∀x ∈] − r, r[, f (x) = an xn et g(x) = bn xn . Alors :
n=0 n=0
+∞
X
i) pour tout (α, β) ∈ R2 , αf + βg est DSE(0) sur ] − r, r[ et ∀x ∈] − r, r[, (αf + βg)(x) = (αan + βbn )xn .
n=0
+∞
X n
X
ii) Le produit f g est DSE(0) sur ] − r, r[ et ∀x ∈] − r, r[, f g(x) = cn xn où : ∀n ∈ N, cn = ak bn−k
n=0 k=0

En utilisant les propriétés de la (fonction) somme d’une série entière, on a :

1
Proposition 4. [Dérivée et primitive d’une fonction DSE(0)]
+∞
X
Soit f une fonction DSE(0) sur ] − r, r[. Posons : ∀x ∈] − r, r[, f (x) = an xn . Alors :
n=0
+∞
X +∞
X
i) f 0 est DSE(0) sur ] − r, r[ et ∀x ∈] − r, r[, f 0 (x) = nan xn−1 = (n + 1)an+1 xn .
n=1 n=0
+∞
X an n+1
ii) Toute primitive F de f est DSE(0) sur ] − r, r[ et ∀x ∈] − r, r[, F (x) = F (0) + x .
n=0
n+1

II. Deux DSE(0).


Proposition 5. [DSE(0) de (1 + x)α ] Soit α ∈ R \ N. On a :
+∞
X α(α − 1) . . . (α − (n − 1)) n
∀x ∈] − 1, 1[, (1 + x)α = 1 + x . (1)
n=1
n!

Démonstration. Posons I =] − 1, 1[ et pour tout x ∈ I, f (x) = (1 + x)α . Cette fonction f est indéfiniment dérivable sur ] − 1, 1[ avec ∀x ∈ I,
∀n ∈ N, f (n) (x) = α(α − 1) · · · (α − (n − 1)) (1 + x)α−n . En particulier, ∀n ∈ N, f (n) (0) = α(α − 1) · · · (α − (n − 1)).
X
La série de Taylor de f en 0 est donc la série entière an xn avec :
n≥0

f (n) (0) α(α − 1) · · · (α − (n − 1))


a0 = f (0) = 1 et ∀n ∈ N∗ , an = = .
n! n!

an+1 α−n |an+1 xn+1 | n−α


On a : ∀n ∈ N, an 6= 0 car α 6∈ N, et = . Donc, pour tout x 6= 0, pour tout n > α, = |x|. D’où
an n+1 |an xn | n+1
|an+1 x n+1 |
lim = |x|
n→+∞ |an xn |
X
On en déduit classiquement par la règle de D’Alembert que le rayon de convergence de la série entière an xn est égal à 1.
n≥0
+∞ +∞
X α(α − 1) . . . (α − (n − 1)) n
X
Posons alors, pour tout x ∈ I, g(x) = a n xn = 1 + x . Comme g est la somme d’une série entière de
n=0 n=1
n!
rayon 1, g est dérivable terme à terme sur ] − 1, 1[ et comme (n + 1)an+1 = (α − n)an , on a :
+∞
X +∞
X +∞
X
∀x ∈ I, g 0 (x) = nan xn−1 = (n + 1)an+1 xn = (α − n)an xn = αg(x) − xg 0 (x).
n=1 n=0 n=0
Donc g est l’une des solutions sur I de l’équation différentielle d’ordre 1 homogène : (1 + x)y 0 (x) − αy(x) = 0.
α
Comme x 7→ −α ln(1 + x) est une primitive sur I de x 7→ − , il existe k ∈ R tel que ∀x ∈ I, g(x) = k(1 + x)α .
1+x
Or g(0) = a0 = 1 donc ∀x ∈] − 1, 1[, g(x) = (1 + x)α , c’est-à-dire (1).

+∞
X 1.3 . . . (2n − 1) x2n+1
Proposition 6. [DSE(0) de arcsin] ∀x ∈] − 1, 1[, arcsin x = x + .
n=1
2.4 . . . (2n) 2n + 1

1 1
Démonstration. Soit t ∈] − 1, 1[. On a : arcsin0 (t) = √ = (1 − t2 )− 2 .
1 − t2
Comme −t2 ∈] − 1, 0], en utilisant (1) avec u = −t2 et α = − 12 , on obtient :
+∞
X − 21 (− 21 − 1) . . . (− 12 − (n − 1))
arcsin0 (t) = 1+ (−t2 )n
n=1
n!
+∞
X − 21 (− 23 ) . . . (− 2n−1 )
= 1+ 2
(−1)n t2n
n=1
n!
+∞
X 1 · 3 . . . (2n − 1) 2n
= 1+ t . (2)
n=1
2n n!
Soit x ∈] − 1, 1[. D’après le cours sur les séries entières, la fonction somme d’une série entière de rayon de convergence R > 0 s’intègre terme
à terme sur tout segment [a, b] ⊂] − R, R[.
La série entière de la variable t de l’égalité (2), dont la somme est arcsin0 sur ] − 1, 1[, a un rayon de convergence égal à 1 (ce dernier résultat
pouvant être facilement être vérifié à l’aide du critère de D’Alembert).
On peut ainsi l’intégrer terme à terme sur [0, x] si x ∈ [0, 1[ (ou sur [x, 0] si x ∈] − 1, 0]). Par conséquent, en utilisant l’égalité (2), on
obtient :
Z x Z x +∞
X 1 · 3 . . . (2n − 1)
arcsin0 (t) dt = t2n dt
` ´
arcsin x = arcsin x − arcsin 0 = 1+ n n!
0 0 n=1
2
x +∞ x
1 · 3 . . . (2n − 1)
Z X Z
= 1 dt + t2n dt
0 n=1
2n n! 0

+∞
X 1.3 . . . (2n − 1) x2n+1
= x+ .
n=1
2n n! 2n + 1

2
III. Rappels : formule de Taylor avec reste intégral. Applications.
Comme d’habitude, K désigne R ou C et suivant le contexte, | · | la valeur absolue ou le module.
Dans cette section, a et b sont deux réels quelconques d’un intervalle I et n un entier naturel.

Théorème 1. [Formule de Taylor avec reste intégral]. Soit f ∈ C n+1 (I, K). On a :
n Z b
X (b − a)k (k) (b − t)n (n+1)
f (b) = f (a) + f (t) dt.
k=0
k! a n!

Démonstration. On démontre ce résultat par récurrence sur n.


Z b
• Initialisation. Pour n = 0 : si f ∈ C 1 (I, K), f 0 est continue sur I et f 0 (t) dt = f (b) − f (a). Donc
a
Z b
f (b) = f (a) + f 0 (t) dt.
a

• Hérédité. Supposons le résultat vrai pour un certain entier n ∈ N. Soit f ∈ C n+2 (I, K).
Z b
(b − t)n (n+1)
Intégrons par parties f (t) dt. On obtient :
a n!
Z b Z b
(b − t)n (n+1) ˆ (b − t)n+1 (n+1) ˜b (b − t)n+1 (n+2)
f (t) dt = − f (t) a + f (t) dt
a n! (n + 1)! a (n + 1)!
(b − a)n+1 (n+1)
Z b (b − t)n+1
= f (a) + f (n+2) (t) dt. (3)
(n + 1)! a (n + 1)!
Comme f ∈ C n+1 (I, K), on a, par hypothèse, l’égalité :
n Z b
X (b − a)k (k) (b − t)n (n+1)
f (b) = f (a) + f (t) dt
k=0
k! a n!

Par conséquent, en utilisant (3), on obtient finalement que :


n Z b
X (b − a)k (k) (b − a)n+1 (n+1) (b − t)n+1 (n+2)
f (b) = f (a) + f (a) + f (t) dt
k=0
k! (n + 1)! a (n + 1)!
n+1 b
(b − a)k (k) (b − t)n+1 (n+2)
X Z
= f (a) + f (t) dt
k=0
k! a (n + 1)!

ce qui établit le résultat au rang n + 1.

L’inégalité de Taylor-Lagrange s’obtient à l’aide de la formule de Taylor avec reste intégral :

Théorème 2. Soit f ∈ C n+1 (I, K). Soit M un majorant de |f (n+1) | sur [a, b] (ou sur [b, a] si b ≤ a). On a :
n
X (b − a)k (k) |b − a|n+1
|f (b) − f (a)| ≤ M .
k=0
k! (n + 1)!

Remarque 2. Comme |f (n+1) | est continue sur le segment [a, b], |f (n+1) | est majorée sur [a, b] et atteint sa borne supérieure, c’est-à-dire
qu’il existe c ∈ [a, b] tel que ∀x ∈ [a, b], |f (n+1) (x)| ≤ |f (n+1) (c)|.
On peut donc prendre M = |f (n+1) (c)| = max |f (n+1) (x)| dans l’énoncé du théorème 2.
x∈[a,b]

Démonstration. Supposons a < b. Utilisons la formule de Taylor-intégral du théorème 1. On a alors :


n Z b
X (b − a)k (k) (b − t)n (n+1)
|f (b) − f (a)| ≤ |f (t)| dt
k=0
k! a n! | {z }
≤M
Z b (b −t)n
≤ M dt
a n!
b n
(b − t)n ˆ (b − t)n+1 ˜b (b − a)n+1 (b − a)k (k) (b − a)n+1
Z X
Or dt = − a
= , d’où |f (b) − f (a)| ≤ M .
a n! (n + 1)! (n + 1)! k=0
k! (n + 1)!
Z b a (b − t)n
(b − t)n (n+1)
Z
Le cas b ≤ a se traite de la manière en utilisant : f (t) dt = − f (n+1) (t) dt.
a n! b n!

Cette inégalité permet de retrouver le DSE(0) de la fonction exponentielle :


n
X xk
Proposition 7. Pour tout x ∈ R, ex = lim .
n→+∞
k=0
k!

3
Démonstration. La fonction exponentielle (exp) est de classe C ∞ sur R et ∀k ∈ N, exp(k) = exp.
En particulier, ∀k ∈ N, exp(k) (0) = exp(0) = 1.
Soit x ∈ R+ . Utilisons l’inégalité de Taylor-Lagrange avec f = exp, a = 0 et b = x à l’ordre n.
Comme ∀t ∈ [0, x], | exp(n+1) (t)| = exp(t) ≤ ex , on peut choisir M = ex et on obtient :
n
X xk xn+1
|ex − | ≤ ex . (4)
k=0
k! (n + 1)!

X xn+1 xn+1
Le critère de D’Alembert permet de prouver que la série converge ce qui implique que lim = 0. L’inégalité (4) et
(n + 1)! n→+∞ (n + 1)!
le théorème des gendarmes permettent de conclure.
Le cas x ≤ 0 se traite de la même façon (ici M = 1 car ∀t ∈ [x, 0], | exp(n+1) (t)| = exp(t) ≤ 1) avec l’inégalité
n
X xk |x|n+1
|ex − |≤ .
k=0
k! (n + 1)!

Le résultat élémentaire suivant permet de prouver que cos et sin sont DSE(0) sur R :

Proposition 8. Soit f ∈ C ∞ (R, K) telle qu’il existe C > 0 de sorte que

∀x ∈ R, ∀n ∈ N, |f (n) (x)| ≤ C.
+∞
X f (n) (0) n
Alors ∀x ∈ R, f (x) = x . Autrement dit, f est DSE(0) sur R.
n=0
n!

Démonstration. Soient x ∈ R et n ∈ N. Comme f ∈ C n+1 (R, K), l’inégalité de Taylor-Lagrange donne directement
n
X xk (k) |x|n+1
|f (x) − f (0)| ≤ C
k=0
k! (n + 1)!

|x|n+1
car C est par hypothèse un majorant de |f (n+1) | sur [0, x] (ou sur [x, 0] si x ≤ 0). Comme lim = 0 (cf. preuve de la proposition
n→+∞ (n + 1)!
n
X f (k) (0) k
précédente), le théorème des gendarmes permet de conclure que f (x) = lim x .
n→+∞
k=0
k!

Le résultat suivant plus technique est hors programme. Il peut être utile d’en comprendre la preuve :

Proposition 9. Soit f ∈ C ∞ (] − a, a[, K) telle qu’il existe deux réels strictement positifs M et r de sorte que

∀x ∈] − a, a[, ∀n ∈ N, |f (n) (x)| ≤ M n! r n .


+∞
X f (n) (0) n
Soit b = min(a, r1 ). Alors ∀x ∈] − b, b[, f (x) = x : f est donc DSE(0) au voisinage de 0.
n=0
n!

Z x (x − t)N (N +1)
Démonstration. Soient N ∈ N et x ∈] − a, a[. Posons RN (x) = f (t) dt. Vérifier que |RN (x)| ≤ M (r|x|)N +1 et conclure
0 N!
avec la formule de Taylor avec reste intégral.

4
IV. DSE(0) usuels. Ce paragraphe regroupe les DSE(0) classiques à connaître :
+∞
1 X
0. Soit z ∈ C. On rappelle que si |z| < 1, alors = zn .
1−z n=0
+∞
1 X
1. a. ∀x ∈] − 1, 1[, = xn .
1−x n=0
+∞
1 X
1. b. ∀x ∈] − 1, 1[, = (−1)n xn .
1+x n=0
+∞
X xn
2. a. ∀x ∈] − 1, 1], ln(1 + x) = (−1)n−1 .
n=1
n
+∞
X xn
2. b. ∀x ∈ [−1, 1[, − ln(1 − x) = .
n=1
n
+∞ +∞
X xn X zn
3. ∀x ∈ R, ex = . Plus généralement, ∀z ∈ C, ez = .
n=0
n! n=0
n!
+∞
X x2n
4. a. ∀x ∈ R, ch x = .
n=0
(2n)!
+∞
X x2n+1
4. b. ∀x ∈ R, sh x = .
n=0
(2n + 1)!
+∞
X x2n
5. a. ∀x ∈ R, cos x = (−1)n .
n=0
(2n)!
+∞
X x2n+1
5. b. ∀x ∈ R, sin x = (−1)n .
n=0
(2n + 1)!
+∞
X α(α − 1) . . . (α − n + 1) n
6. Soit α ∈ R \ N. Alors ∀x ∈] − 1, 1[, (1 + x)α = 1 + αx + x .
n=2
n!
+∞
X x2n+1
7. ∀x ∈ [−1, 1], arctan x = (−1)n .
n=0
2n + 1

et à savoir retrouver rapidement :


+∞
X x2n+1
1 1+x
8. a. ∀x ∈] − 1, 1[, ln( )= .
2 1−x n=0
2n + 1
+∞
X 1.3 . . . (2n − 1) x2n+1
8. b. ∀x ∈] − 1, 1[, arcsin x = x + .
n=1
2.4 . . . (2n) 2n + 1

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