Etats Limites
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Le terme borderline concernait initialement des symptômes physiques au cours de diverses affections
psychiatriques. Il a ensuite décrit des cas frontières entre schizophrénie et névroses, qualifiant le
fonctionnement de patients apparemment névrotiques traversant des moments psychotiques brefs ou
des patients ayant une grande instabilité des affects et des comportements. Enfin, l’état limite a pu
désigner une forme particulière d’organisation de la personnalité, intermédiaire entre névrose et
psychose. Cette diversité des champs sémantiques couverts par l’expression a persisté jusqu’à ce que la
classification américaine du Diagnostic and statistical mental disorders III (DSM-III) en 1980 propose
de définir la personnalité borderline comme une entité autonome, impliquant une instabilité identitaire
responsable de perturbations relationnelles évocatrices et une dysrégulation des affects et des
comportements avec impulsivité. Les principales complications sont le risque suicidaire, les
automutilations et les addictions. Les travaux d’inspiration psychodynamique ont mis en évidence chez
ces patients de fréquentes perturbations de l’attachement, favorisées par des expériences traumatiques
précoces. Les perspectives cognitivocomportementales ont approfondi les notions de schémas cognitifs et
comportementaux dysfonctionnels. Le principal traitement de fond est de nature psychothérapique. Les
traitements psychotropes sont utiles pour réduire nombre de symptômes-cibles anxieux, dépressifs ou
impulsifs. Plusieurs techniques psychothérapiques individuelles ou de groupe ont prouvé leur efficacité. Les
résultats obtenus dépendent largement de la qualité de l’alliance thérapeutique qui influence elle-même
la bonne observance des traitements.
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La confusion originaire entre ces concepts est probablement Cet auteur a défini en 1942 les distorsions des relations d’objet
due au fait que la personnalité borderline et/ou l’état limite internalisées observées chez ces sujets et caractérisées par un
représentent aujourd’hui un centre de réflexion autour de la manque d’authenticité dans leur relation à autrui, mais donnant
démarche classificatoire des troubles mentaux, aussi bien au sein superficiellement l’illusion de la normalité. Ce courant d’idées
du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux ou a ultérieurement été poursuivi avec Winnicott et le concept de
DSM [1] que de la Classification internationale des maladies ou faux-self. Plus tard, Eisenstein a insisté sur le risque de décom-
(CIM) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) [2]. Les pensations psychotiques transitoires chez certains patients
efforts réalisés au cours des 30 dernières années pour améliorer fragiles. L’utilisation du même terme borderline, pour désigner
la fidélité des diagnostics à l’aide de critères descriptifs ont
à la fois les patients ayant présenté une symptomatologie
permis de mieux cerner ce trouble : personnalité borderline
psychotique transitoire et rapidement résolutive et des patients
pour le DSM, personnalité émotionnellement labile pour la
CIM-10, soit de type impulsif, soit de type borderline. Les fonctionnant de façon stable à un niveau considéré comme
études empiriques récentes ont suscité un renouveau des intermédiaire entre névrose et psychose, est longtemps restée
recherches cliniques et mis en évidence les difficultés soulevées source de confusion.
par les trop fréquentes associations avec d’autres troubles de la En 1959, c’est Schmideberg qui a décrit le premier l’état
personnalité ainsi que les nombreuses comorbidités avec les limite comme une organisation « stable dans l’instabilité »,
troubles de l’humeur. limitrophe des névroses, des psychoses psychogènes et de la
psychopathie, en insistant sur le défaut de modulation émo-
tionnelle et de tolérance à l’angoisse et sur les affects dépressifs
■ Perspectives historiques. Critères de ces patients, sur leurs comportements excessifs et leurs
diagnostiques tendances à l’agir destinés à lutter contre le vide intérieur, leur
intolérance aux frustrations et leur trouble du jugement (in [4]).
En 1968, Grinker, Werble et Drye [5] ont réalisé une première
Perspectives historiques, psychiatriques analyse multifactorielle des données recueillies chez 51 patients
et psychanalytiques limites. Ils ont cherché à vérifier l’hypothèse selon laquelle les
L’historique du concept situe ce dernier à la frontière des fonctions du Moi pourraient être appréhendées à partir du
perspectives psychiatriques et psychanalytiques. La liste des comportement de ces patients. Ils ont ainsi identifié un syn-
termes utilisés pour désigner et décrire cette pathologie entre drome spécifique stable avec une bonne consistance interne,
1884 – date de la première utilisation du terme borderline dans présentant quatre composantes fondamentales : l’agressivité, le
la littérature médicale par Hugues – et nos jours, est longue. mode de relation à autrui de type anaclitique, le trouble de
l’identité et une forme particulière de dépression. Ce travail a
Perspectives psychiatriques anciennes également conduit à caractériser quatre sous-groupes : les états
limites psychotiques, le noyau de l’état limite, les personnalités
Le terme borderline a été utilisé pour la première fois aux
États-Unis pour qualifier des cas de symptômes physiques as-if et les états limites névrotiques. Plusieurs auteurs ont
survenant dans des affections psychiatriques, puis il est tombé ensuite approfondi les concepts de dépression d’abandon (dont
dans l’oubli lors de la Seconde Guerre mondiale. Masterson en 1971) et de relations d’objet chaotiques.
De leur côté, les psychiatres français et germaniques ont isolé En 1974, Kohut (in [4]), s’intéressant tout particulièrement au
à diverses reprises des tableaux se situant, par leur aspect ou leur développement du narcissisme qu’il a dissocié du développe-
évolution, aux limites de plusieurs cadres nosographiques. Les ment libidinal, a rendu compte de l’inaptitude fondamentale
troubles borderline ont été considérés, au moins initialement, des personnalités limites à réguler l’estime de soi et a dégagé la
du point de vue nosographique, comme étant de nature schi- notion du Soi grandiose.
zophrénique. Les auteurs s’accordent pour identifier deux types Ce sont les travaux de Kernberg [6, 7] qui constituent la plus
d’états mixtes ou schizonévrotiques : des formes de passage d’un importante des contributions psychodynamiques à la définition
état à l’autre, dans une conception hiérarchique de la person- de l’état limite. Cet auteur a effectué une analyse complexe des
nalité, et des formes d’existence relativement permanente, aspects structurels du Moi dans ce trouble et a relié ces concepts
d’« instabilité stable ». à une théorie générale multidimensionnelle de l’organisation de
la personnalité. Il a classé de façon hiérarchique des niveaux
Perspectives psychanalytiques d’organisation allant de la normale aux névroses et aux psycho-
C’est le souci de distinguer névrose et psychose qui a relancé ses, les états limites étant situés en position intermédiaire. C’est
aux États-Unis, dans les années 1940, le concept de pathologie aussi au cours des années 1970, en France, que Bergeret a
borderline. L’article de Chaine et Guelfi publié en 1999 [3] et développé une théorie générale de la structuration limite de la
celui de Gunderson de 2009 [4] résument cet historique avec des personnalité, craignant que le « groupe des états limites ne
bibliographies importantes. La démarche anglo-saxonne trouve devienne rapidement un vaste fourre-tout ».
ses origines dans la constatation, au cours de certaines cures Cet auteur a considéré l’état limite comme une « troisième
analytiques, chez des patients apparemment névrotiques, d’un lignée psychopathologique » intermédiaire entre névrose et
transfert particulier altérant gravement la relation patient- psychose, sans symptôme névrotique ni décompensation
thérapeute, semblable à celui des patients psychotiques. Il psychotique franche. À partir de ce qu’il a nommé « le tronc
s’agissait donc, pour les thérapeutes, de percevoir dès que commun de l’état limite », il a décrit un certain nombre de
possible, dans le fonctionnement mental de ces patients, des
formes cliniques évolutives, plus ou moins proches des névroses
distorsions de la dynamique de la relation, devant faire craindre
ou des psychoses, des formes aménagées de type caractériel ou
l’installation ultérieure de ce qui a été considéré comme une
pervers et des formes de sénescence [8].
« psychose de transfert ».
Stern, en 1938 (in [4]), a consacré l’entrée du terme borderline Widlöcher [9] a préféré le terme d’organisation à celui de
dans la nosologie avec un article intitulé : « Investigations structure. Il a distingué les états limites du conflit névrotique
psychanalytiques et abord thérapeutique dans un groupe par leurs modalités de représentation de Soi et des objets
borderline de névroses » en soulignant le sentiment d’insécurité (perçues et traitées comme telles par le patient névrotique,
diffuse de ces patients, leur hyperesthésie affective et leur fonctionnant comme des parties de Soi, des « introjects » chez
défaillance de l’estime de soi, attribués à une carence narcissique le patient limite). Il a différencié l’organisation limite des
fondamentale. organisations psychotiques grâce à des critères négatifs (absence
L’une des premières descriptions d’état limite a été proposée de confusion entre le monde extérieur et intérieur et absence de
par Helen Deutsch en 1935 avec la notion de personnalité as-if. dissociation de l’appareil psychique).
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Perspectives critériologiques récentes entre 18 % et 42,7 % [24]. Ce diagnostic est un des deux plus
fréquents troubles de la personnalité diagnostiqués dans la
À partir des travaux de Grinker et al. [5] de nombreux auteurs plupart des études.
comme Kernberg, Gunderson et Singer, Perry et Klerman ou L’étude MIDAS (Rhode Island Methods to Improve Diagnostic
encore Millon se sont attachés, à partir de revues de la littéra- Assessment and Services) représente la plus vaste étude en
ture concernant le trouble borderline, à dégager des constella- population clinique (854 patients) utilisant un entretien semi-
tions de traits ou des critères fondamentaux considérés comme structuré comme mode d’évaluation (Structured Interview for
étant les plus spécifiques possibles du désordre concerné. Les the DSM-IV Personality Disorders ou SIDP-IV de Pföhl et al.).
critères diagnostiques proposés sont, selon les options de leurs Environ 45,5 % des patients consultant présentent au moins un
auteurs, soit purement descriptifs, soit psychodynamiques. trouble de la personnalité et plus de 60,4 % de ceux-ci plus d’un
Les premières études publiées qui avaient utilisé des critères trouble de la personnalité, 25,2 % répondant aux critères de
diagnostiques pour décrire les échantillons cliniques sont celles deux troubles ou plus. Cette étude fait état de 9 % de person-
de Gunderson à partir de 1975, d’Akiskal en 1981 et de Pope en nalités borderline dont 32,5 % seulement sans autre diagnostic
1983 (in [4]). de trouble de personnalité associé [25].
Les études de suivi au long cours des personnalités borderline
ont été inaugurées par celle de Grinker et al. (1968-1977) qui
ont mis en évidence que l’évolution schizophrénique était rare,
Comorbidités sur les axes I et II du DSM
contrairement aux troubles de l’humeur et par celle de Pope et Les troubles comorbides, tant sur l’axe I que sur l’axe II du
al. (in [4]). DSM, sont très fréquents chez ces patients. Dans l’étude CLPDS
Les études les plus longues et rigoureuses sont celles de (Collaborative Longitudinal Personality Disorders Study), le
McGlashan publiée en 1986 [10], de Stone [11] et de Zanarini et nombre moyen de troubles comorbides sur l’axe I sur la vie
al. [12-20], développées ci-après. entière (tous troubles de personnalité confondus) est de 3,4 et
le trouble borderline est celui pour lequel existent le plus de
troubles comorbides selon Mc Glashan [22]. Les plus fréquents
■ Épidémiologie des troubles de l’axe I sur la vie entière sont les troubles de
l’humeur unipolaires et les troubles anxieux, en particulier l’état
de stress post-traumatique, le trouble panique et la phobie
Prévalence de la personnalité borderline sociale. L’abus de substances et les troubles du comportement
alimentaire sont également communs (Zanarini et al., 1998 et
En population générale Marino, 2001 cités in [22]). La sévérité et la récurrence d’un
trouble dépressif majeur et d’un trouble dysthymique sont
Jusqu’aux années 1990, la prévalence estimée des troubles de
prédictives de l’existence d’un trouble borderline associé. Ces
la personnalité en population générale était largement spécula-
données sont concordantes avec la notion clinique selon
tive, souvent extrapolée à partir d’échantillons cliniques recrutés
laquelle un trouble dépressif à début insidieux, récurrent et
pour d’autres études. Les principales études épidémiologiques en
évoluant vers la chronicité et l’aggravation conduit souvent à
population générale menées depuis lors trouvent une prévalence
poser un diagnostic de trouble de la personnalité chez de jeunes
des troubles de la personnalité variant entre 9 % et 15,7 % avec
adultes.
une médiane à 10,56 % : Torgersen et al., en 2001 [21], Len-
Sur l’axe II, les troubles de la personnalité paranoïaque,
zenweger et al. [22], Samuels en 2007 et Crawford en 2005, tous
évitante, dépendante et à conduite d’échec sont les plus
cités par Lenzenweger en 2008 [23]. En dépit des différences
communs (Zanarini et al., 1998, McGlashan et al., en 2000,
entre les méthodes d’évaluation employées, environ une
cités in [22]), avec un nombre moyen de 1,4 troubles de person-
personne sur 10 présenterait un diagnostic de trouble de la
nalité associés à un autre trouble de la personnalité et une
personnalité.
fréquente association entre personnalité borderline, personnali-
La prévalence du trouble borderline varie dans la littérature
tés antisociales et personnalités dépendantes. Les hommes
entre 0,5 % et 5,9 %. Une des données des études récentes est
présentant un trouble borderline de la personnalité sont
l’absence de différence de prévalence entre les hommes et les
davantage susceptibles de présenter une comorbidité avec l’abus
femmes selon Lenzenweger [22]. Les taux plus élevés retrouvés
de substance ainsi qu’avec les troubles de personnalité, soit
chez les femmes en population clinique pourraient être liés à
schizotypique [26], soit narcissique et antisociale tandis que les
des biais méthodologiques ou refléter un meilleur accès aux
femmes présenteraient davantage de troubles du comportement
soins des femmes présentant une personnalité borderline.
alimentaire et de pathologie post-traumatique selon Johnson
et al. [27].
En population clinique
Dans une revue de la littérature parue en 2008, Zimmerman Antécédents
et al. [24] ont souligné les dangers d’extrapoler les données
épidémiologiques obtenues en population générale aux popula- L’importance des facteurs environnementaux dans la com-
tions cliniques, notamment en termes de comorbidités. Les préhension du trouble borderline a été soulignée par de nom-
services spécialisés drainent de fait davantage de patients breux auteurs, par exemple Frank et Paris en 1981 [28], Herman
présentant des troubles comorbides. Ces auteurs identifient et al. en 1989 [29], et confirmée, à quelques nuances près, par les
16 études épidémiologiques de 500 patients ou plus en popula- études épidémiologiques récentes. Environ 90 % des patients
tion clinique. La plus large étude, celle de Oldham en rapportent un antécédent d’abus dans l’enfance et/ou de
1991 citée par Zimmerman et al. [24], retrouve une prévalence de négligence émotionnelle avant 18 ans selon Zanarini [13]. Ces
11 %, proche de celle des études épidémiologiques en popula- antécédents traumatiques sont significativement plus fréquents
tion générale, mais sans doute sous-estimée d’après les auteurs. (en particulier les abus sexuels, notamment dans l’enfance) et
La fréquence des troubles de personnalité dans cinq des huit surviennent à un âge plus précoce chez les patients borderline
études menées sur la base d’entretiens non structurés est que ce que l’on observe dans d’autres troubles de la personnalité
inférieure à 20 % alors que dans sept des huit études utilisant selon Yen [30] . En outre, la sévérité des abus sexuels dans
un instrument de diagnostic semi-structuré, plus de 40 % des l’enfance et des autres formes de maltraitance est significative-
patients présentent un trouble de personnalité. Ces résultats ment corrélée à la fois à la sévérité de la psychopathologie
sont concordants avec l’idée que les cliniciens sous-estiment la borderline et au dysfonctionnement psychosocial [13, 19].
fréquence du diagnostic de trouble de personnalité par rapport Sur le plan développemental, les patients borderline sont
aux données des entretiens structurés. Concernant la personna- davantage susceptibles de se remémorer des difficultés de sépara-
lité borderline, ces études retrouvent une fréquence variant tion que les patients ayant d’autres troubles de la personnalité ;
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Dans ce modèle, les frontières entre les différents troubles de Diagnostic différentiel
personnalité sont effacées. Les traits de personnalité prototypi-
ques de la personnalité borderline seraient : l’anxiété, l’impulsi- Du fait du polymorphisme du trouble, le diagnostic clinique de
vité, la réactivité émotionnelle, l’intensité émotionnelle, trouble borderline est sans doute un des plus complexes de la
l’anhédonie pessimiste, le besoin d’attachement, les actes nosographie psychiatrique et la publication des critères dia-
autoagressifs, la dysrégulation cognitive et les idées gnostiques pour les troubles de la personnalité n’a que peu
autoagressives. amélioré la fidélité interjuges des diagnostics. La question des
Le manque de familiarité des cliniciens avec l’approche fréquentes comorbidités, notamment avec les autres troubles de
dimensionnelle, le caractère moins évocateur des dimensions la personnalité, a déjà été envisagée ci-dessus (cf. supra).
cliniques que les termes connus des catégories des troubles Les relations entre troubles thymiques et trouble limite de la
psychiques constituent les principaux inconvénients de l’utili- personnalité suscitent également débats et controverses. Diffé-
sation de celle-ci par les médecins [1]. rentes hypothèses ont été formulées à ce propos depuis les
Le groupe de travail pour la révision du DSM a préconisé travaux d’Akiskal en 1981 [40] et ceux de Gunderson et al. en
pour le DSM-V une diminution du nombre des troubles de la 1999 [41]. Akiskal a ainsi remis en question la pertinence de
personnalité spécifiés (cinq au lieu de dix) et une description l’individualisation du trouble limite de la personnalité. Ce
clinique combinant des altérations du fonctionnement et des concept ne constituerait pas, selon cet auteur, une entité
relations interpersonnelles avec une configuration particulière autonome, mais s’intégrerait plutôt aux troubles de l’humeur et
de traits de personnalité. Le remplacement de critères diagnos- se caractériserait par une labilité affective marquée. Akiskal
tiques comportementaux par des traits devrait entraîner une défend l’hypothèse du caractère secondaire des manifestations
meilleure stabilité temporelle des diagnostics. La description attribuées au trouble de la personnalité. L’existence d’un trouble
dimensionnelle de la personnalité retenue par le groupe de thymique et notamment d’un épisode dépressif majeur serait à
travail comprend six dimensions principales (correspondant à l’origine d’un remaniement des traits de personnalité consti-
37 facettes spécifiques). Quatre de ces dimensions correspon- tuant un trouble de la personnalité alors considéré comme
dent à la personnalité borderline (avec dix facettes) : l’émotion- secondaire. Cette hypothèse repose sur sa théorie des tempéra-
nalité négative avec six facettes, l’antagonisme avec deux ments affectifs (hyperthymique, cyclothymique, dysthymique,
facettes, la désinhibition avec une facette et la schizotypie avec irritable) constituant selon lui des variations subcliniques du
une facette. Les six facettes proposées pour décrire l’émotionna- spectre des troubles affectifs, à forte composante génétique,
lité négative de la personnalité borderline sont : la labilité mais susceptibles de remaniements sous l’influence de facteurs
émotionnelle, les autoagressions (automutilations et idées ou environnementaux pouvant conduire à l’expression aussi bien
gestes suicidaires), l’insécurité liée à la séparation, les tendances de troubles thymiques caractérisés que de troubles de la
anxieuses, l’estime de soi basse et la dépressivité de l’humeur. Le personnalité. Pour Gunderson [41], en revanche, il existerait une
diagnostic ne peut être retenu que si les critères généraux d’un association étiologique commune, non spécifique, entre trouble
trouble de la personnalité sont réunis, ce qui implique un échec limite de la personnalité et épisodes dépressifs majeurs. Ainsi, la
adaptatif stable dans le temps avec un degré extrême d’au dysrégulation affective, disposition non spécifique observée chez
moins un des principaux traits de personnalité figurant dans la les patients borderline, constituerait un facteur de vulnérabilité
liste des critères diagnostiques spécifiques. La gravité de à une dépression de type anaclitique. Le même auteur a
l’altération du fonctionnement figurait déjà dans les critères défendu également l’hypothèse d’une indépendance entre les
généraux du DSM-IV (cf. infra). deux entités. La survenue fortuite et simultanée de ces deux
troubles conduirait à des interactions et à une influence
mutuelles modifiant la symptomatologie observée. En outre, les
caractéristiques cliniques de la dépression chez ces patients
seraient sensiblement différentes, marquées chez les borderline
“ Point important
par l’absence de culpabilité et d’autoaccusations, laissant place
à l’expression de sentiments de colère et de rage à l’égard de
l’objet ou à la manifestation d’un vécu de désespoir et
Critères diagnostiques généraux des troubles de d’impuissance à l’encontre de cet objet perçu comme inaccessi-
ble. Ce point de vue est aussi celui d’auteurs comme Fran-
la personnalité dans le DSM-IV
kenburg, Zanarini ou Preston (in [41]). Kernberg [6] décrivait aussi
A. Modalité durable de l’expérience vécue et des
en 1975 l’aspect particulier des affects dépressifs chez ces
conduites qui dévie notablement de ce qui est attendu patients avec leur « rage vaine, d’impuissance ou de désespoir
dans la culture de l’individu. Cette déviation est manifeste liés à l’effondrement d’un concept de soi idéalisé ».
dans au moins deux des domaines suivants :
• la cognition ;
• l’affectivité (c’est-à-dire la diversité, l’intensité, la labilité ■ Évolution. Stabilité du diagnostic
et l’adéquation de la réponse émotionnelle) ;
• le fonctionnement interpersonnel ; Évolution. Stabilité des critères
• le contrôle des impulsions. diagnostiques
B. Ces modalités durables sont rigides et envahissent des
situations personnelles et sociales très diverses. La stabilité des troubles fait partie de la définition même des
C. Ce mode durable entraîne une souffrance cliniquement troubles de la personnalité selon le DSM. Pourtant, nombre
d’études de suivi, menées avec les critères du DSM, montrent
significative ou une altération du fonctionnement social,
que moins de 50 % des patients diagnostiqués avec un trouble
professionnel ou dans d’autres domaines importants.
de la personnalité voient ce diagnostic maintenu dans le temps.
D. Ce mode est stable et prolongé et ses premières Cet amendement de la symptomatologie au cours du temps a
manifestations sont décelables au plus tard à pu être comparé par certains auteurs comme Paris à l’évolution
l’adolescence ou au début de l’âge adulte. des personnalités antisociales et des conduites addictives. Ces
E. Ce tableau n’est pas mieux expliqué par les études présentent cependant des biais méthodologiques impor-
manifestations ou les conséquences d’un autre trouble tants (taille des échantillons, méthodes d’évaluation du trouble
mental. de personnalité non standardisées, absence de cotation en
F. Ce mode durable n’est pas dû aux effets physiologiques aveugle lors des réévaluations, absence de prise en compte des
directs d’une substance (par exemple drogue) ou d’une comorbidités, absence de groupes contrôles, etc.).
affection médicale générale. Toutefois, les données des principales études longitudinales
publiées au cours de la dernière décennie apportent un éclairage
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nouveau et concordant sur la faible stabilité du diagnostic de la d’autre part, des éléments plus stables, relevant de facteurs
personnalité borderline et sur les possibles améliorations des tempéramentaux, et persistants, comme le sentiment de vide, de
manifestations symptomatiques comme du fonctionnement colère, de méfiance, l’intolérance à la solitude et la crainte de
psychosocial au fil du temps. l’abandon.
Les études menées en population générale ne permettent pas
d’apprécier la stabilité du diagnostic de trouble de la personna- Impact sur le fonctionnement psychosocial
lité du fait du faible nombre absolu d’individus identifiés
comme présentant un trouble de la personnalité. Toutefois, Les individus ayant un trouble persistant de la personnalité
l’étude CICS (Children In the Community Study) met en ont un fonctionnement global moins bon que ceux n’ayant
évidence une décroissance de 48 % du niveau d’intensité des jamais présenté de troubles de personnalité ou ceux ayant un
traits de personnalité entre l’adolescence et l’âge adulte [42]. Ce trouble de personnalité en rémission. Le pronostic de ces
déclin dans le temps est retrouvé lors de l’étude LSPD (Longi- derniers apparaît comme intermédiaire. Les troubles de person-
tudinal Study of Personality Disorders) avec une décroissance du nalité débutant à l’âge adulte sont également associés à un
niveau d’intensité des traits de personnalité lors des 4 ans de moins bon fonctionnement global [47]. L’étude MSDA fournit
suivi [43]. des données similaires avec une amélioration significative du
Le résultat le plus marquant des études longitudinales en fonctionnement global au cours du suivi [19], mais un fonction-
population clinique est constitué par le taux important de nement restant cependant en deçà de celui de patients présen-
rémission des patients borderline : 88 % des patients expérimen- tant d’autres troubles de personnalité, notamment en termes
tent au moins une rémission en 10 ans selon Zanarini et al. en d’adaptation professionnelle. Le statut symptomatique des
2006 [20]. Par ailleurs, ces rémissions paraissent stables dans le patients borderline semble avoir un fort impact sur le fonction-
temps avec seulement 6 % de récurrences. Ces rémissions sont nement psychosocial, alors que le fonctionnement socioprofes-
définies dans l’étude CLPDS (Collaborative Longitudinal sionnel des patients en rémission s’améliore au fil du temps,
Personality Disorders Study) comme au moins 12 mois consé- ceux qui n’ont jamais connu de rémission demeurent à un
cutifs avec « pas plus de deux critères du trouble d’origine » et niveau bas dans la plupart des domaines. Il faut noter que le
interviennent dans les 6 premiers mois pour 10 % des patients fonctionnement psychosocial des patients en rémission conti-
nue de s’améliorer avec le temps, suggérant une évolution allant
borderline, le plus souvent à l’occasion de changements de
au-delà d’un simple retour au niveau antérieur aux manifesta-
situation. Moins de 50 % des patients maintiennent le nombre
tions symptomatiques [19] . Le secteur des relations sociales
de critères nécessaires au diagnostic à 2 ans selon Shea et al. en
semble être le domaine de fonctionnement où les difficultés
2002 [44], Grilo et al. en 2004 [45], Zanarini et al. en 2005 [18, 19],
sont les plus stables [48].
Skodol en 2008 [46]. Ce profil d’évolution distingue clairement
En outre, les expériences de violence à l’âge adulte sont
le trouble borderline de la personnalité des troubles de l’humeur
fréquentes parmi ces patients ; 46 % d’entre eux disent avoir été
avec une progression relativement lente, mais durable vers la
victimes de violence (violences physiques du partenaire, viols,
rémission. Toutefois, il semble que l’évolution soit hétérogène
violences intraconjugales). Les abus sexuels dans l’enfance
selon les patients, avec un aspect dichotomique de leur réparti-
comme la négligence parentale constitueraient des facteurs de
tion : un quart de ces patients ne présentera ainsi jamais de
risque de ces expériences à l’âge adulte de violences physiques
rémission [14]. Cette constatation rejoint celle de Shea, Gunder-
ou sexuelles [13]. D’une manière générale, ces patients seraient
son et al. observant, chez les patients bénéficiant de soins
davantage exposés à la répétition d’événements de vie négatifs
psychiatriques intensifs, la persistance d’une symptomatologie
que des patients présentant un autre trouble de la personnalité
active [44].
ou une maladie maniacodépressive [49]. Ces événements de vie,
Dans une approche dimensionnelle, les troubles de la person- en particulier les événements interpersonnels, sont prédictifs de
nalité apparaissent beaucoup plus stables. Bien que le nombre la dégradation du fonctionnement psychosocial dans le temps.
moyen de critères décroisse au cours du temps, la mesure
continue du nombre de critères rencontrés montre des corréla-
tions fortes lors des évaluations des deux premières années de Impact sur les troubles des axes I et II
suivi. Ces résultats suggèrent que les troubles de personnalité Un pourcentage important de patients borderline continue de
pourraient être caractérisés par une constellation de traits présenter des épisodes aigus de troubles de l’axe I [16]. Même
inadaptés, stables dans leur structure, mais variant dans leur après 6 ans de suivi, 75 % des patients borderline présentent les
sévérité ou leur expression au cours du temps [46]. Certains critères d’un trouble de l’humeur, 60 % d’un trouble anxieux,
critères seraient plus stables que d’autres comme l’instabilité 34 % d’un trouble du comportement alimentaire et 19 % d’un
affective, les colères intenses et inappropriées [10]. Les critères les abus de substances. Cette prévalence de troubles sur l’axe I est
moins stables seraient les efforts frénétiques pour éviter l’aban- influencée par la rémission ou non du trouble de personnalité.
don et les automutilations. Ces données sont en accord avec les Le pourcentage de patients en rémission présentant les critères
conclusions de l’équipe du MSAD (McLean Study of Adult de troubles de l’axe I décroît avec le temps alors que le taux de
Development) [14, 18] et celles de Skodol en 2008 [46] qui ces manifestations symptomatiques demeure constant chez les
retrouvent une décroissance de l’ensemble des symptômes patients sans rémission, à l’exception de l’abus de substances
étudiés ; ces symptômes demeurent cependant plus fréquents qui diminue de 64 % à 41 % au cours du suivi. De plus,
parmi les patients borderline que chez ceux ayant d’autres l’absence d’abus de substances constitue un puissant facteur
troubles de personnalité. Les différents secteurs du trouble ne prédictif de la rémission du trouble borderline. En outre,
sont pas concernés de la même manière par cette décroissance. l’existence d’un trouble de la personnalité influence l’évolution
Les symptômes affectifs, notamment, persistent chez 79 % des de certains troubles de l’axe I. Ainsi le temps avant rémission
patients au terme du suivi. Ces affects dysphoriques pourraient d’un épisode dépressif majeur est augmenté chez les patients
constituer un trait central du trouble limite de la personnalité. présentant un trouble de la personnalité selon Grilo et al. [50],
Le champ de l’impulsivité est marqué par un taux de résolution alors que la présence ou la sévérité de ces troubles de la
plus élevé, mais hétérogène selon les sous-types de symptômes personnalité ne semble pas affecter l’évolution des troubles du
(persistance des symptômes de binge eating, des explosions comportement alimentaire. La coexistence d’un état de stress
verbales). Les symptômes cognitifs et interpersonnels occupent post-traumatique chez les patients borderline n’accroît pas
une position intermédiaire. Cette hétérogénéité de l’évolution significativement le niveau de psychopathologie borderline ou
symptomatique a conduit à proposer de distinguer deux types de morbidité psychiatrique, mais accroît le dysfonctionnement
de symptômes chez les patients états limites : d’une part les global et la fréquence des hospitalisations ainsi que les tendan-
automutilations, les tentatives de suicide, les pensées « quasi ces suicidaires et l’impulsivité [51, 52].
psychotiques » comme les manifestations aiguës de la patholo- Concernant les troubles associés sur l’axe II, la plupart
gie, nécessitant parfois hospitalisation ou traitement de crise ; diminuent avec le temps [16, 17]. Cette décroissance est observée
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37-395-A-10 ¶ États limites et personnalité borderline
tant chez les patients borderline en rémission que chez les La CIM-10 ne reconnaît aucun trouble de la personnalité en
patients ayant un autre trouble de la personnalité, à l’exception dessous de l’âge de 18 ans (OMS, 1993). La classification
des troubles de personnalité de type évitant (59 %), dépendant française des troubles mentaux de l’enfant et de l’adolescent
(45 %) et à conduite d’échec (27 %). L’absence de ces comorbi- (CFTMEA) individualise quant à elle la pathologie limite avec
dités augmente significativement les chances de rémission. dominance des troubles de la personnalité, celle à dominance
schizotypique ainsi que celle à dominance comportementale
selon Misès et Quemada [59].
Suicide L’analyse de la validité convergente a montré que l’homogé-
néité des critères diagnostiques de la personnalité borderline est,
Dans la plupart des études épidémiologiques, la fréquence du
chez l’adolescent, modérée, plus faible que chez l’adulte [58]. De
suicide dans cette population rejoint celle de patients présentant
plus, la force des liens qui unissent les critères de la personnalité
un trouble de l’humeur ou une pathologie schizophrénique et
borderline adolescente entre eux est également inférieure à celle
atteint près de 10 %. Ce risque suicidaire concernerait essentiel-
retrouvée chez l’adulte [35, 60]. Les études portant sur le degré de
lement des patients âgés de 30 ans et plus et ne surviendrait pas
souffrance et de dysfonctionnement global de l’adolescent ayant
nécessairement au cours des périodes de crise [53]. L’étude MSAD
une personnalité borderline rapportent d’importantes difficultés
met en évidence un taux de suicides de 3,8 % au cours des
fonctionnelles (sociales, scolaires, professionnelles, judiciaires),
6 ans de suivi tandis que les chiffres de l’étude CLPS sont plus
aussi bien en population générale, qu’en population clinique
proches des donnés plus anciennes avec 9 % de suicide, tous
selon Westen, Shedler et al. [61] et Levy et al. [62].
troubles de personnalité confondus, dans les deux premières
L’analyse de la validité discriminante de la personnalité
années de suivi, 44 % de ceux-ci ayant déjà commis plusieurs
borderline avec les autres troubles de la personnalité montre, à
passages à l’acte suicidaires. Les critères : instabilité affective,
l’adolescence, une tendance au recouvrement avec les autres
troubles de l’identité et impulsivité en cas de diagnostic de
entités diagnostiques de l’axe II, mais également de l’axe I,
personnalité borderline lors de l’évaluation initiale sont
encore plus importante que chez l’adulte. La coexistence de
significativement prédictifs de comportements suicidaires
troubles de la personnalité chez les adolescents s’étend plus aux
ultérieurs selon Yen et al. [54].
clusters A (personnalité schizoïde, schizotypique et paranoïaque)
et C (personnalité obsessionnelle-compulsive, dépendante et
Pathologies somatiques associées évitante) que chez les adultes : la psychopathologie adolescente
paraît donc plus diffuse que chez l’adulte [63].
Les patients borderline en rémission présentent significative- En ce qui concerne la comorbidité de la personnalité border-
ment moins de manifestations psychosomatiques (syndrome de line adolescente avec les troubles de l’axe I, l’étude de Becker
fatigue chronique, fibromyalgies ou syndrome de la jonction (n = 123) rapporte une occurrence de la dépression dans 65 %
temporomandibulaire) et sont également moins susceptibles de des cas, de la dysthymie dans 30 % des cas, du trouble des
présenter des pathologies somatiques (obésité, diabète, hyper- conduites dans 55 % des cas, de l’abus d’alcool dans 47 %, de
tension, douleurs lombaires, incontinence urinaire) que les l’abus de substances dans 40 %, et de l’anxiété dans 24 % des
patients sans rémission [55] . Ils présentent également une cas [36].
meilleure hygiène de vie en termes de tabagisme, sédentarité, Les taux de persistance dans le temps du trouble n’excèdent guère
consommation de café et de psychotropes. 33 % [56]. Il ne semble pas y avoir de continuum entre le trouble chez
l’adolescent et chez l’adulte [62, 64]. Les données disponibles sont
insuffisantes pour identifier les facteurs d’évolution favorable ou
■ Particularités du diagnostic défavorable.
à l’adolescence
■ Psychopathologie.
Selon le DSM-IV-TR, le diagnostic de personnalité borderline
est classiquement posé à l’âge adulte, mais il peut également
Étiopathogénie
l’être à l’adolescence, sous certaines conditions : « les différentes
catégories de troubles de la personnalité peuvent s’appliquer aux
Perspectives psychanalytiques
enfants et aux adolescents dans les cas relativement rares où les Dans une perspective psychanalytique, le noyau central de la
traits de personnalité inadaptés du sujet semblent envahissants, pathologie limite est situé autour de l’angoisse de perte de
durables et dépassent le cadre d’un stade particulier du dévelop- l’amour de l’objet, à l’origine d’une constante « dépressive »
pement ou d’un épisode d’un trouble de l’axe I. Il faut savoir selon Bergeret [8] . Une définition classique de l’état limite
que les traits d’un trouble de la personnalité apparaissant dans associe des modes de fonctionnement névrotiques et psychoti-
l’enfance se modifient habituellement avec le passage à l’âge ques, variables en proportion selon les sujets. L’état limite
adulte. On ne peut diagnostiquer un trouble de la personnalité correspond à cette juxtaposition, sans s’y réduire, puisque son
chez une personne de moins de 18 ans que si les caractéristi- organisation psychopathologique intègre en même temps des
ques ont été présentes depuis au moins un an » [1]. mécanismes de défense que sont, notamment, le clivage et
Le concept de personnalité borderline à l’adolescence a été l’identification projective. L’association entre la projection et le
développé relativement récemment, bien que les premiers cas clivage produit une coexistence exclusive et sans compromis entre,
décrits remontent à 1958. Les études de validation empirique du d’une part, des mouvements hyperadaptatifs à la réalité externe et,
concept sont apparues, avec Ludolph notamment, en 1990 d’autre part, des éléments hyperprojectifs la déformant nettement. Le
(in [51]). Depuis, elles n’ont cessé d’évaluer la pertinence de ce conflit est externalisé, la réalité externe et ses objets d’étayage
trouble chez l’adolescent, tentant de montrer qu’il partage avec y sont surinvestis, marquant une forte dépendance à l’environ-
celui de l’adulte une phénoménologie commune. La prévalence nement, à l’origine d’une lutte contre les fantasmes destructeurs
du trouble à l’adolescence est évaluée, selon les études, entre qui lui sont associés. La réalité interne est défaillante et
6 % et 18 % en population générale, ce qui est largement l’absence de fantasmatisation en est le témoin. L’association
supérieur à celle décrite chez l’adulte. Un pic de prévalence est entre la représentation et l’affect fait défaut.
observé en début d’adolescence (12-13 ans), décroissant ensuite Les tests projectifs (Thematic Apperception Test [TAT] et
avec l’âge selon Bernstein et al. [56] , Chabrol et al. [57] et Rorschach) révèlent, en plus des éléments précédents, une
Torgersen et al. [21]. Les adolescents ayant une personnalité représentation de soi marquée par une précarité des enveloppes,
borderline représenteraient plus de la moitié des adolescents témoignant d’une différenciation partielle entre dedans et
hospitalisés en psychiatrie [58]. Selon les études, le sex-ratio de dehors. Les relations d’objet sont caractérisées par une difficulté
la personnalité borderline adolescente varie de 1, dans les études d’accès à l’ambivalence, et l’objet est, tour à tour, idéalisé ou
en population générale, à un tiers en population clinique [51]. dévalorisé.
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Bond a décrit, grâce au questionnaire des styles de défense, plus, le développement de la personnalité borderline, selon ce modèle,
que des patients borderline adultes utilisaient plus le clivage et suppose l’existence d’un contexte développemental invalidant, dans
l’acting, et moins la suppression et la sublimation que les lequel l’expression du vécu émotionnel de l’enfant n’est pas tolérée,
témoins [65]. Skodol a proposé l’idée que la capacité à régresser et dans lequel il ne lui est donc pas appris comment comprendre,
(aptitude du patient à adopter des conduites et attentes infan- nommer, réguler, et tolérer ses états internes. Des dimensions
tiles dans des situations de désorganisation), décrite par les cognitives sont actuellement étudiées, en référence aux schémas
premiers auteurs, pourrait représenter une perspective dimen- cognitifs décrits par Beck et Freeman. Ainsi sont élaborés la
sionnelle pertinente [66]. De plus, une approche centrée sur les pensée « dichotomique » issue du clivage, et les schémas de
conflits, telle que l’ont réalisée Perry et Cooper [67] a mis en cognitions dysfonctionnelles, dans lesquelles le sujet borderline
évidence la valeur discriminante de l’existence d’un conflit se perçoit lui-même comme impuissant et vulnérable, et
séparation-abandon dans la personnalité borderline, notamment envisage le monde autour de lui comme dangereux et mal-
avec les catégories « bipolaire de type II » et « personnalité veillant selon Beck et Freeman en 1990 [75] et Zanarini et al. en
antisociale. » 1998 [12].
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frontolimbique (incluant le cortex orbitofrontal, le cortex Enfin, certaines équipes ont adapté leurs prises en charge en
préfrontal ventrolatéral, l’amygdale, l’hippocampe, le gyrus fonction de situations particulières telles que le milieu carcéral,
fusiforme, le cortex cingulaire antérieur, les ganglions de la base ou de populations spécifiques, telles que les adolescents ou les
et le thalamus) a été mis en évidence par Gatzke-Kopp et toxicomanes.
Beauchaine en 2007 [81]. De plus, l’exposition de sujets border-
line à des stimuli émotionnels provoque une hyperactivation
amygdalienne [82] . Le modèle prévalent suggère ainsi une Traitements biologiques
activité limbique excessive, insuffisamment contrebalancée par
une régulation préfrontale elle-même dysfonctionnelle. La prescription de psychotropes concerne des symptômes
cibles (automutilations, instabilité affective, impulsivité,
problèmes interpersonnels, colères, symptômes psychotiques ou
Aspects socioculturels dissociatifs, anxiété). En outre, les fréquentes co-occurrences
peuvent nécessiter elles aussi des traitements médicamenteux.
Concernant enfin les aspects socioculturels, les premières Enfin, les profils d’effets indésirables, la compliance et les
parutions sur les corrélats psychopathologiques de la personna- risques de détournement d’usage de produits limitent l’utilisa-
lité borderline étaient en faveur de prévalences comparables tion des médicaments.
selon les pays et les milieux socioculturels. Une étude récente Outre les recommandations d’experts, nous disposons de cinq
portant sur 34 653 Américains suggère au contraire une diffé- méta-analyses publiées permettant de préciser les critères de
rence de prévalence interethnique, avec une prévalence de choix : Mercer, Douglass et Links en 2009 [86], Nosé et al. en
13,2 % de personnalité borderline chez les Américains natifs, 2006 [87], Ingenhoven et al. en 2009 [88], Binks et al. en 2006 [89],
versus 2,5 % chez des femmes asiatiques et une prévalence Lieb et al. enfin en 2010 [90]. Quatre classes de médicaments ont
également supérieure chez les individus ayant des revenus été étudiées sur les symptômes spécifiques dans des études
modestes [83]. randomisées contrôlées : neuroleptiques, antidépresseurs, acides-
gras et anticonvulsants. Les benzodiazépines quant à elles
peuvent rendre des services ponctuels, mais elles possèdent des
■ Traitement risques addictifs ou désinhibiteurs dans cette population [84]. De
façon générale, les traitements sédatifs ne devraient pas dépasser
une prescription d’une semaine pour gérer une crise [85].
Deux recommandations professionnelles internationales L’absence d’autorisation de mise sur le marché dans cette
portent sur les patients borderline : celle de l’American Psychia- indication en France, pour l’ensemble des produits présentés,
tric Association (APA) en 2001 [84] et du National Institute for doit faire donner une information claire au patient, éventuelle-
Clinical Excellence (NICE) en 2009 [85] . Elles désignent les ment écrite [85], portant sur les bénéfices attendus et les risques
psychothérapies de long cours comme traitement de choix du encourus. La révision régulière du traitement doit permettre de
trouble, alors qu’elles assignent aux psychotropes l’objectif de supprimer avec prudence (suivi intensif et diminution progres-
réduire certains symptômes cibles. sive) ceux qui n’ont pas ou plus d’utilité.
Les neuroleptiques et notamment les antipsychotiques de
Objectifs thérapeutiques seconde génération représentent une des classes médicamenteu-
ses les plus prometteuses en termes d’efficacité thérapeutique
Hiérarchiser les objectifs thérapeutiques (trouble clinique, avec un apaisement relatif des problèmes interpersonnels (aripi-
personnalité, fonctionnement, insight) représente le premier prazole), de l’impulsivité (aripiprazole), de la dépression (aripipra-
enjeu. L’instabilité du patient majore la complexité de cette zole) et, dans une moindre mesure, des automutilations
étape. En pratique, ce choix suivra l’évolution du patient, (flupentixol, olanzapine), de l’anxiété (aripiprazole, olanzapine)
passant de façon caricaturale d’une gestion par crise à une et de la psychopathologie générale (aripiprazole).
gestion des comportements dommageables, pour évoluer vers Les antiépileptiques constituent l’autre classe médicamenteuse
un travail au long cours sur la personnalité. À chaque étape, la dont les effets sont le mieux documentés avec une efficacité sur
création d’une alliance thérapeutique, ainsi que la détermination l’apaisement des problèmes interpersonnels (divalproate, topira-
des besoins et des motivations au changement devraient mate), de l’impulsivité (topiramate, lamotrigine), de la colère
précéder les contrats de soin. (topiramate, divalproate et lamotrigine), sur l’anxiété et le niveau
général de psychopathologie (topiramate) et, dans une moindre
mesure, sur l’instabilité affective (lamotrigine) et la dépression
Cadre de soin (divalproate).
Les oméga 3 seraient d’une certaine utilité dans la prise en
Le traitement des patients borderline s’envisage préférentiel- charge de la dépression et des automutilations.
lement en ambulatoire. Une approche séquentielle et éclectique Aucune pharmacopée n’a prouvé son efficacité sur le trouble
offre une solution pragmatique à la diversité clinique et à identitaire, le sentiment de vide et la peur d’être abandonné.
l’évolution naturelle du trouble [71]. La détermination du cadre Toutefois, ces résultats sont à nuancer car les faibles durées
de soins repose ainsi sur différents aspects : évaluation du des études, le faible nombre d’études par molécule, l’importance
risque, état mental, niveau de fonctionnement psychosocial, du nombre de perdus de vue, l’absence d’études comparatives et
objectifs et motivations du patient, environnement social, les critères restrictifs des inclusions dans l’ensemble des essais
co-occurrences et dimension prédominante. contrôlés en limitent la portée.
En pratique, le traitement hospitalier devrait être proposé
pour les cas à fortes co-occurrences (ex. : addictions, dépressions
sévères), lorsque les dispositifs de crise ou d’hospitalisation de Psychothérapies
jour ne permettent pas de contenir les passages à l’acte. La
gestion à court terme du risque suicidaire par l’hospitalisation Les traitements psychothérapiques se distinguent communé-
se pondère par l’absence de données d’efficacité de celles-ci sur ment selon leurs références théoriques, leurs objectifs, leurs
ces comportements et le risque de régression. En ambulatoire, techniques, voire leur philosophie. Outre les facteurs non
le traitement psychothérapique peut s’effectuer en suivi indivi- spécifiques, de nombreuses stratégies sont communes aux
duel, en duo (psychiatre traitant et psychothérapeute) ou en psychothérapies adaptées au trouble de la personnalité border-
hôpital de jour. Il ne paraît pas souhaitable – en règle générale line [91]. Ainsi, les auteurs mettent en avant l’importance de
– que la prise en charge psychothérapique et les prescriptions définir un contrat de soin au début de la psychothérapie,
médicamenteuses éventuelles soient assurées par une seule et incluant une discussion à propos des situations à risque, en
même personne. particulier les crises suicidaires. La posture relationnelle repose
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États limites et personnalité borderline ¶ 37-395-A-10
le plus souvent sur une attitude de validation des ressentis du indications préférentielles respectives au sein même de la
patient, en face à face. Les modalités possibles des contacts (par pathologie borderline. De plus, un nombre insuffisant de
exemple : téléphone) entre les séances doivent aussi être thérapeutes formés aux applications de ces techniques en limite
définies précocement dans la prise en charge. encore la portée.
Les études à notre disposition portent sur des dispositifs
psychothérapiques à une ou plusieurs modalités (par exemple :
consultations individuelles, groupes, dispositif de crise) et de
nombreuses techniques d’entretien. Trois travaux concluent de ■ Conclusion
façon concordante à leur efficacité : ceux de Binks et al. en
2006 [92], Leichsenring et Leibing en 2003 [93] et l’Inserm en La pathologie borderline est aujourd’hui de mieux en mieux
2004 [94]. connue. L’utilisation de critères diagnostiques suffisamment
La thérapie développée par Linehan à partir de 1991 [95] et précis et les travaux réalisés depuis une trentaine d’années ont
largement (cinq études randomisées) validée, est la dialectical permis de diminuer le nombre des incertitudes nosographiques
behavioral therapy (DBT) ou thérapie comportementale et liées à la diversité des origines mêmes du concept. Ce cadre
dialectique (TCD). Elle repose sur une approche intégrative diagnostique est hétérogène, certes, mais il mérite bien son
(comportementale, cognitive, et d’inspiration zen) fondée sur individualité, avec des caractéristiques cliniques propres.
un modèle de compréhension bio-psycho-sociale du trouble, où Nous pensons qu’il est préférable de conserver l’emploi de deux
la régulation émotionnelle est considérée comme le problème termes distincts : borderline et états-limites. Le premier permet de
principal. Seule la première partie du protocole, portant sur la désigner un trouble de l’identité avec instabilité fondamentale de la
gestion des comportements autodommageables, et qui comporte vie émotionnelle affective, impulsivité, dysrégulation comportementale
quatre étapes, a été validée. et perturbations cognitives. L’autre terme met l’accent sur la diversité
La schema focused therapy (SFT) ou thérapie orientée sur les des tableaux cliniques réalisés selon la prédominance de telle ou telle
schémas (TOS) de Young, a fait l’objet d’une étude contrôlée manifestation clinique. C’est, selon les cas, soit l’instabilité
publiée par Giesen-Bloo en 2006 [96] : elle postule que le sujet affective avec hyperréactivité émotionnelle (type « affectif »),
traite l’information de son environnement à travers des schémas soit l’impulsivité (type « impulsif »), soit les colères (type
cognitifs appris et inscrits dans la mémoire à long terme, dont « agressif »), soit les angoisses d’abandon et l’intolérance à la
l’activation inadaptée est source de souffrance émotionnelle. solitude (type « dépendant »), soit encore le type « vide ». Plus
Ce principe des schémas cognitifs est retrouvé dans les deux rarement, ce sont, à certains moments, une idéation persécu-
autres études portant sur la cognitive and behavioral therapy (CBT) toire ou des manifestations dissociatives (au sens de la classifi-
ou thérapie cognitive et comportementale (TCC) par Davidson cation américaine) qui sont au premier plan du tableau
en 2006 [97] et Cottraux en 2009 [98] et le manual assisted clinique.
cognitive treatment (MACT) ou traitement cognitif manualisé
La thérapeutique des états-limites est toujours longue et difficile.
(TCM) de Weinberg en 2006 [99].
L’instabilité et l’impulsivité expliquent les difficultés d’une prise
Enfin, il existe une forme de traitement bref et en groupe, en charge globale, prolongée et cohérente. Le développement
fondée sur la gestion émotionnelle, cognitive et la résolution de
d’une alliance thérapeutique suffisante améliore l’observance
problème, impliquant le système de soins et les proches. Il s’agit
des traitements proposés, médicamenteux et psychothérapiques.
de la systems training for emotional predictability and problem
L’amélioration de la prise en charge de ces patients nécessite
solving (STEPPS) par Blum et al. [100] ou, en français, SERP
impérativement une augmentation du nombre des centres
(formation d’inspiration systémique à la prédiction émotion-
spécialisés ainsi qu’une diversification de la nature des activités
nelle et à la résolution de problème).
de ces centres : centres de crise, accueils à temps partiel,
Le premier modèle psychodynamique étudié est le
hospitalisations complètes, brèves à chaque fois que cela paraît
mentalization-based treatment (MBT) par Bateman [101] en
possible, psychothérapies individuelles et de groupe d’orienta-
1999 ou traitement fondé sur la mentalisation (TBM), postulant
tions théoriques différentes. Cela implique aussi une augmenta-
le défaut des patients à mentaliser leur état psychique ou celui
des autres, probablement par la difficulté à se construire une tion du nombre des psychothérapeutes spécifiquement formés
théorie de l’esprit lorsque les attachements aux figures mater- aux techniques qui ont fait la preuve de leur efficacité, quelle
nantes ne sont pas sécures. Le second concerne la transference- que soit leur inspiration : psychodynamique, cognitivocompor-
focused psychotherapy (TFP) de Clarkin en 2007 : ou thérapie tementale ou mixte, intégrative.
centrée sur le transfert (TCT) qui, postulant le clivage des
relations d’objet, oriente la psychothérapie sur le travail .
transférentiel [102].
Une autre façon de distinguer les traitements consiste à ■ Références
envisager leur complexité de mise en œuvre. Pour les uns, ils
comportent un cadre de thérapie en face à face et en individuel [1] American Psychiatric Association. Diagnostic and Statistical Manual
(TOS, TCC, TCM et TCT) et pour les autres un cadre nécessitant of Mental Disorders, Fourth Edition Text revised, (DSM-IV-TR)
Washington: APA; 2000. Paris: Elsevier-Masson; 2004.
une équipe pour associer, à une fréquence hebdomadaire, des
[2] Organisation Mondiale de la Santé. CIM-10 Dixième Révision de la
séances de groupe, à des séances individuelles, dans un envi-
Classification Internationale des maladies. Critères diagnostiques
ronnement très soutenant (TCD et TBM).
pour la recherche. Genève : OMS. Paris: Masson; 1994.
Dans ces études, les psychothérapies apparaissent efficaces [3] Chaine F, Guelfi JD, Lancrenon S. Personnalité borderline : confron-
dans la prise en charge de plusieurs aspects concernant la tation entre diagnostic clinique et diagnostic standardisé. Ann Med
personnalité borderline. La thérapie comportementale et Psychol (Paris) 1999;157:332-9.
dialectique possède le plus haut niveau de preuve d’efficacité, [4] Gunderson JG. Borderline personality disorder: ontogeny of a
notamment concernant son action sur les comportements diagnosis. Am J Psychiatry 2009;166:530-9.
autoagressifs. La thérapie fondée sur la mentalisation possède le [5] Grinker RR, Werble B, Drye R. The Borderline syndrome. New York:
plus large spectre d’action. La thérapie cognitive manualisée et Basic Books; 1968.
la formation d’inspiration systémique à la prédiction émotion- [6] Kernberg O. Les troubles limites de la personnalité. Toulouse: Privat;
nelle et à la résolution de problème offrent la faisabilité la plus 1979.
importante. Sans doute existe-t-il des différences d’indication [7] Kernberg O. Severe personality disorders: psychotherapeutic
probables en fonction des symptômes cibles et des ressources strategies. New Haven: Yale University Press; 1984. Les troubles
sanitaires disponibles. Néanmoins, nous ne disposons quasi- limites de la personnalité : stratégies thérapeutiques. Paris: PUF; 1989.
ment pas d’étude comparant les différentes modalités thérapeu- [8] Bergeret J. Abrégé de psychologie pathologique. Théorie et clinique.
tiques entre elles qui pourraient permettre de préciser leurs Paris: Masson; 1979.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Guelfi J.-D., Cailhol L., Robin M., Lamas C. États limites et personnalité borderline. EMC (Elsevier Masson
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