Responsabilité Civile IMANE HILANI S3
Responsabilité Civile IMANE HILANI S3
Responsabilité Civile IMANE HILANI S3
Imane HILANI
Professeur à la faculté de droit de Casablanca
1
Article 230 du DOC.
RESPONSABILITE RESPONSABILITE
SANCTION PENALE DELICTUELLE
CONTRACTUELLE
- Dommage
- Faute - Dommage
Contractuelle - Fait générateur
- Dommage - Lien de causalité
résultant de la entre fait et
faute dommage
contractuelle
Section 1
Conditions de la responsabilité contractuelle
La responsabilité est dite contractuelle parce que tout d’abord elle est liée à un contrat et
ensuite, elle est liée à une inexécution du contrat valablement formé entre les parties. Si la
relation contractuelle fait défaut, la responsabilité engagée serait qualifiée de responsabilité
2
extracontractuelle gouvernée par des règles spécifiques .
En vertu de l’article 263 du DOC « les dommages-intérêts sont dus, soit à raison de
l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, et encore
qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de la part du débiteur » ; mais pour appliquer
les sanctions prévues dans cet article, deux éléments essentiels doivent être
envisagés : il faut tout d’abord, qu’une relation contractuelle existe entre le
créancier et le débiteur de l’obligation (A) et il faut, ensuite, que cette obligation
soit inexécutée (B).
Aux termes de l’article 263 du DOC « les dommages-intérêts sont dus, soit à raison de
l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, et encore
qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de la part du débiteur ». La responsabilité
2
Articles 77 et suivants du DOC.
3
Article 399 du DOC.
La mise en demeure est une mesure qui a pour finalité non seulement de
permettre au créancier de justifier la demande des dommages intérêts pour le
préjudice subi 5, mais également elle pourrait être une preuve de l’inexécution du
contrat par le débiteur 6. Elle permet de justifier l’action en responsabilité
contractuelle intentée par le créancier ayant fait constater la faute du débiteur
consistant dans l’inexécution du contrat. L’interpellation du débiteur est une
preuve de la défaillance caractérisée du débiteur s’il ne s’exécute pas après qu’il
soit en demeure d’avoir à remplir ses engagements contractuels.
4
VINEY, Les sanctions de l'inexécution des obligations contractuelles, Études de droit
comparé, 2001, Bruylant/LGDJ, p. 113.
5
Article 259 du DOC.
6
Article 638 du DOC.
MISE EN DEMEURE
DEMANDER LA RESOLUTION
DU CONTRAT EN JUSTICE +
DOMMAGES INTERETS
Monsieur BELHASSAN
RUE OASIS
RABAT
GARAGE DE LA PLACE
6, place du Marché
AGADIR
Lettre Recommandée avec A.R
Messieurs,
Par contrat daté du 12 avril 2020 vous vous êtes engagé à me livrer une
Peugeot 3008 neuve dont les caractéristiques sont mentionnées ci-après…
BELHASSAN
C- Imputation de l'inexécution
7
Article 270 du DOC.
La notion de cause étrangère peut revêtir plusieurs formes ; il peut s’agir d’un fait de la nature
ou d’une cause ayant pour source un fait de l’homme ou un cas fortuit et qui rendent
l’exécution du contrat impossible ou difficile à exécuter comme dans le cas où il y a fait du
prince ou intervention de l’administration.
Il convient de rappeler la définition de la force majeure qui est donnée par
l’article 269 du DOC, « la force majeure est tout fait que l'homme ne peut
prévenir, tel que les phénomènes naturels (inondations, sécheresses, orages,
incendies, sauterelles), l'invasion ennemie, le fait du prince, et qui rend
impossible l'exécution de l'obligation » ; le même texte écarte certaines
situations de cette définition et ajoute « n'est point considérée comme force
majeure la cause qu'il était possible d'éviter, si le débiteur ne justifie qu'il a
déployé toute diligence pour s'en prémunir. N’est pas également considérée
comme force majeure la cause qui a été occasionnée par une faute précédente du
débiteur ».
L’exigence des trois éléments de la force majeure est très discutée en droit
français et a abouti avec la réforme du droit des contrats le 10 février 2016 à
reconnaître à l’élément de l’imprévisibilité une certaine autonomie par rapport
aux autres éléments.. L’extériorité et l’imprévisibilité apparaissent comme deux
Lorsque le contrat contient une obligation de moyens, le débiteur doit faire son
possible pour atteindre le résultat recherché par le créancier ; celui-ci ne peut
engager la responsabilité du débiteur qu’en démontrant que le débiteur n’a pas
déployé tous les moyens nécessaires et possibles pour réaliser le résultat
escompté.
Si l’obligation du débiteur est une obligation de résultat, celui-ci s’engage à un
résultat déterminé ; ainsi, le contrat de transport de personne renferme une
obligation de résultat de conduire le passager sain et sauf à destination ou par
8
Cass., ass. plén., 14 avr. 2006, n° 02-11.168 , RDC 2006. 1207.
9
Civ. 1ère , 30 oct. 2008, n° 07-17.134.
Obligation de garantie
10
Article 509 du CC.
11
Civ. 2ème , 30 juin 2011, n° 10-23.004 , Bull. civ. II, n° 145.
la faute lourde
La plupart du temps, la faute lourde est liée au dol dans les causes d’aggravation
de la responsabilité pour inexécution contractuelle ; cette liaison est même
rencontrée en matière extracontractuelle 12 ; cette liaison entre les deux fautes ne
P1F P
traduit nullement une certaine similitude ; elles sont très différentes. La faute
lourde n’est pas une faute intentionnelle, elle revêt une certaine gravité dans la
mesure où elle relève d’une négligence très grave provoquant un dommage
important au créancier 13. P12F P
la faute inexcusable
La faute inexcusable n’est pas mentionnée dans le texte du Dahir des obligations
et contrats, on la retrouve en droit des accidents du travail ; l’article 155 du
Dahir du 29 décembre 2014 relatif à la réparation des accidents du travail
permet au juge de diminuer la réparation du dommage si la preuve d’une faute
inexcusable est établie.
Aux termes de l’article 264 du DOC « les dommages sont la perte effective que le
9T 9T
Le dommage réparable doit être certain ; il peut être futur dans la mesure où sa
survenance est inéluctable 14.
2. Origine du dommage
14
Civ. 5 mars 1913, DP 1914. 1. 61.
3. Consistance du préjudice
Selon l’article 264 D.O.C ... le préjudice consiste dans la « perte effective que le
créancier a éprouvée mais aussi dans le gain dont il a été privé».
Il peut s’agir d’un dommage matériel (c’est à dire non seulement la perte
éprouvée, mais aussi le gain dont le contractant a été privé)
Il peut s’agir d’un dommage moral lorsqu’il y a atteinte aux sentiments et plus
généralement à la personnalité. (En cas de perte de chance, voyageur défiguré
par un accident etc.…) la jurisprudence n'hésite pas à en admettre la réparation.
B- Lien de causalité
1- Difficultés pratiques
Devra-t-il alors mettre de côté tous ces facteurs pour ne retenir que la seule
faute du médecin ou devra-t-il mesurer le rôle causal de chaque facteur pour ne
retenir la responsabilité du médecin que pour la part qui lui revient.
- Selon la théorie de l’équivalence des conditions, tous les facteurs qui ont
concouru à la réalisation du dommage et sans lesquels le dommage ne serait pas
produit ont une même valeur causale et doivent être retenus.
- Il faut bien reconnaitre cependant que ces théories n’ont pas dissipé le
brouillard qui entoure la question de la causalité. C'est pourquoi le législateur
s’est gardé d’opter en faveur de telle ou telle thèse préférant se décharger sur le
bon sens du juge. Dans cette mission délicate, le juge peut néanmoins s'appuyer
sur quelques règles :
La règle énoncée par l'article 1150 Code Civil français n'a pas son
équivalent dans le D.O.C. qui, à aucun moment ne fait allusion aux suites
prévisibles ou imprévisibles de l’inexécution. Par ailleurs, la jurisprudence
publiée ne parait pas avoir fait un quelconque usage de cette notion. Par contre,
de nombreuses décisions de justice insistent sur l’exigence d’une causalité
En principe, tout le dommage subi par le créancier doit être réparé suivant des
modalités déterminées ou par équivalent par l’allocation de dommages
intérêts (§1) ; les parties peuvent parfaitement prévoir dans le contrat, des
clauses aménageant la responsabilité contractuelle (§2).
A- Modes de réparation
1. Réparation en nature
16
Civ. 1ère , 18 nov. 1997, n° 95-19.516 , Bull. civ. I, n° 317.
17
Civ. 1ère , 4 févr. 2003, n° 00-15.572 , Bull. civ. I, n° 40.
18
Philippe Malaurie, Laurent Aynès et Philippe Stoffel-Munck,op.cit., n° 2, p. 20.
19
Philippe Malaurie, Laurent Aynès et Philippe Stoffel-Munck,op.cit., n° 2, p. 20.
4. Réfaction du contrat
Montant de la réparation
20
Article 261 du DOC.
21
Com. 17 mars 1987, n° 85-15.711 ; Civ. 18 mai 1915, S. 1917. 1. 38.
production d’intérêts
Astreinte
Des clauses particulières peuvent être insérées dans le contrat et prévoir soit une
exonération de la responsabilité du débiteur soit une limitation de cette
responsabilité (A) ; les parties dans un contrat peuvent également fixer un forfait
de dommage intérêts à la charge du débiteur à travers les clauses pénales (B).
L’obligation convenue entre les parties peut renfermer des clauses contenant un
allégement de la responsabilité du débiteur en transformant par exemple une
obligation de résultat en obligation de moyens ; elle peut contenir aussi des
clauses excluant tout simplement la responsabilité du débiteur. La loi et le juge
interviennent pour limiter les effets négatifs des clauses exonératoires et
limitatives de responsabilité qui sont dans la plupart des cas des clauses
abusives.
On retiendra plusieurs illustrations dans la loi qui considèrent les clauses
exonératoires et limitatives de responsabilité comme nulles ; dans le contrat de
fourniture de produits, la responsabilité du producteur ou de l’importateur ne
peut être réduite ou exclue à l’égard de la victime par une clause limitative ou
22
Philippe Malaurie, Laurent Aynès et Philippe Stoffel-Munck, op.cit., n° 251, p. 147.
B- Clauses pénales
La clause pénale peut généralement être définie comme étant la clause par
laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à
quelque chose en cas d’inexécution 25. Le deuxième alinéa de l’article 264 du DOC
prévoit que « les parties contractantes peuvent convenir des dommages-intérêts
dus au titre du préjudice que subirait le créancier en raison de l'inexécution
totale ou partielle de l'obligation initiale ou en raison du retard apporté à son
exécution ». Cette disposition du Dahir des obligations et contrats donne une
conception de la clause pénale très restrictive du moment qu’elle se limite
uniquement aux dommages intérêts. La clause pénale revêt un certain nombre de
caractères et est soumise au contrôle du juge.
La clause pénale présente trois caractères : elle doit résulter d’un contrat, elle a
un aspect réparateur et elle est comminatoire 26.
La clause pénale a un caractère contractuel dans la mesure où elle doit être issue
d’une relation contractuelle ; elle est accessoire au contrat ; si celui-ci est déclaré
nul, la clause n’est plus opérationnelle.
23
Article 106-13 du DOC.
24
Article 574 DOC.
25
Définition donnée par l’ancien article 126 du CCF.
26
D. MAZEAUD, La notion de clause pénale, th. Paris XII, LGDJ, 1992, préf. Fr. Chabas ; F.
PASQUALINI, « La révision des clauses pénales », Defrénois 1995, art. 36106.
27Dahir n°1-95-157 du 13 rabii I 1416 (1 août 1995); Bulletin Officiel n° 4323 du 10 rabii II
1416 (6 septembre 1995), p. 602.
La faute qui est protéiforme, doit être définie, classée sous différentes rubriques
er appréciée par les juges du fond.
A- Notion de faute
La faute est définie dans le Dahir des obligations et contrats à travers le dernier
alinéa de l’article 78 ; elle « consiste, soit à omettre ce qu'on était tenu de faire,
soit à faire ce dont on était tenu de s'abstenir, sans intention de causer un
dommage ». La faute peut alors être une omission ou une commission.
La faute pénale est nécessairement une infraction pénale et réprimée en tant que
telle par la loi pénale qui est dominée par le principe de la légalité, pas
d’infraction, pas de peine sans un texte de loi.
La faute lourde n’est pas une faute intentionnelle, elle consiste « en une
négligence grossière que l'homme le moins averti ne commettrait pas dans la
gestion de ses propres affaires » 28. Les articles 77 et 78 du DOC ne font pas
P27F P
L’on a déjà évoqué cette distinction à travers la définition de la faute donnée par
l’article 78 du DOC pour qui la faute « consiste, soit à omettre ce qu'on était
tenu de faire, soit à faire ce dont on était tenu de s'abstenir, sans intention de
causer un dommage ». La faute peut alors être une omission ou une
commission ; cette distinction s’attache à l’élément matériel, plus exactement à
la structure du comportement anormal. La faute de commission rend responsable
une personne qui a agi alors qu’elle aurait dû s’abstenir. La faute par omission
rend responsable une personne qui s’est abstenue alors qu’elle aurait dû agir.
1. Absence de discernement
Celui qui commet une faute doit être conscient de son agissement contraire à la
loi et du dommage qu’il cause à autrui du fait de cette faute. L’article 77 du
DOC précise bien que l’auteur de la faute doit l’avoir commise sciemment et
28
Cass. civ. 1re, 1er mars 1983, Bull. civ. I, no 82.
2. Légitime défense
3. Etat de nécessité
Le débat doctrinal se rapportant à cette question est très ancien et nourrit encore
la doctrine moderne qui refuse la nullité du contrat 29 si la demande en annulation
P28F P
du contrat est justifiée par des considérations et circonstances extérieures 30. La P29F P
doctrine moderne est du même avis et propose d’annuler l’engagement pris sous
l’emprise de la nécessité pour défaut de cause et d’indemniser l’autre partie sur
la base de l’enrichissement sans cause ou de la gestion d’affaires ou même en
retenant la notion de lésion 31 . P30F P
29
En droit français, l’article 1111 du code civil parle de nullité de l’acte.
30
Pallard, L’exception de nécessité en droit civil, thèse Poitiers, 1949.
31
Voir dans ce sens, Christian Larroumet, Droit civil, T. 3, Les Obligations, Le contrat, 3ème
édition, p. 328 ; Voir aussi, la présentation de ce débat doctrinal dans l’ouvrage des
professeurs Henri et Léon Mazeaud, Jean Mazeaud et François Chabas, op.cit., n° 203, p.
193.
La définition de la force majeure est donnée par l’article 269 du DOC qui
précise qu’elle « est tout fait que l'homme ne peut prévenir, tel que les
phénomènes naturels (inondations, sécheresses, orages, incendies, sauterelles),
l'invasion ennemie, le fait du prince, et qui rend impossible l'exécution de
l'obligation. N'est point considérée comme force majeure la cause qu'il était
possible d'éviter, si le débiteur ne justifie qu'il a déployé toute diligence pour
s'en prémunir. N’est pas également considérée comme force majeure la cause
qui a été occasionnée par une faute précédente du débiteur ». Le texte de l’article
269 du DOC est en concordance avec les dispositions de l’article 95 du DOC qui
exonère l’auteur du dommage s’il apporte la preuve de l’existence d’une cause
fortuite ou d’un cas de force majeure ; ce texte dispose qu’« il n'y a pas lieu à
responsabilité civile dans le cas de légitime défense, ou lorsque le dommage a
été produit par une cause purement fortuite ou de force majeure, qui n'a été ni
précédée, ni accompagnée, d'un fait imputable au défendeur ». Le défendeur,
dont la responsabilité est recherchée, doit faire la preuve de l’existence des trois
caractères de la force majeure ; elle doit s’agir d’un évènement imprévisible,
irrésistible et extérieur. La force majeure ou le cas fortuit s’ils sont la source de
l’agissement défectueux du défendeur vont en même temps donner à cet
agissement une certaine légitimité ; il va être perçu comme étant un
comportement normal.
B- Caractères du préjudice
Pour que le préjudice puisse être réparable, il faut qu’il soit personnel (A),
certain (B) et légitime (C).
1. Préjudice personnel
Le préjudice dont est victime la victime peut affecter d’autres personnes qui
subissent un dommage par contrecoup dit “préjudice par ricochet” ou “préjudice
médiat” par opposition au “préjudice immédiat” qui frappe la victime dans sa
personne et dans ses biens sans intermédiaire ; ainsi par exemple, lorsqu’une
personne décède dans un accident laissant derrière elle un conjoint et des enfants
en bas âge, il est évident que ces personnes vont subir inéluctablement un
préjudice matériel du fait de la perte d’une personne qui subvenait à leurs
besoins et par la même, un préjudice moral ou affectif à la perte d’un être cher.
Ces personnes doivent justifier de l’existence d’un lien juridique statutaire avec
la victime telle une filiation ou une relation de mariage.
3. Préjudice certain
32
I. Poiro-Mazères, la notion de préjudice en droit administratif français, RDP 1997, p.521 et
523.
4. Préjudice légitime
A- Théories de la causalité
Plusieurs théories ont été avancées pour expliquer les critères de la relation
causale ; l’on passera successivement en revue quatre théories : la théorie de la
proximité de la cause, la théorie de l’équivalence des conditions, la théorie de la
causalité adéquate et enfin la théorie de la causalité et l’implication.
33
H. et L. Maeaud, J.Mazeaud et F.Chabas, Leçons de droit civil, TT.II, 1er Volume,
Obligations, 1998, n° 560,p. 654. Voir les références citées par ces auteurs, P.Esmein, Le nez
de Cléopâtre ou les affres de la causalité, D. 1964, chr. 205 ; Aberkane, Du dommage causé
par une personne indéterminée dans un groupe déterminée de personnes, RTD civ.1958, p.
516.
Cette théorie fait référence à une maxime très ancienne de Francis Bacon selon
laquelle “ne serait juridiquement causal que l'événement le plus proche du
dommage, le dernier en date” ; seule donc la cause la plus proche dans le temps sera admise.
Selon cette théorie, tous les évènements qui sont liés à la survenance du
dommage sont retenus sur un pied d’égalité, il n’y a ni distinction ni différence
ni hiérarchie entre les différents évènements.
Cette théorie consiste à faire un choix entre les différents faits ayant participé
dans la survenance du dommage et ne retenir que celui ou ceux qui étaient
déterminants dans sa réalisation. La théorie de la causalité adéquate restreint le
nombre de responsables ; ainsi par exemple, si une personne laisse, par
négligence, les clefs de la voiture sur le contact et qu’un voleur, après avoir volé
le véhicule, heurte un piéton, faut-il considérer que seule la faute du voleur est
retenue ou au contraire retenir la faute de négligence ou d’imprudence du
propriétaire du véhicule comme cause de l’accident ? Pour les partisans de la
théorie de la causalité adéquate, seule la faute de conduite du voleur est retenue
comme étant une faute adéquate.
Cette théorie a été développée par le Professeur Noël Dejean de la Bâtie qui
retient la position selon laquelle un fait défectueux ne peut être considéré
comme cause du dommage que s’il réunit deux conditions :
Le fait défectueux doit avoir joué un rôle dans la survenance du
dommage ;
Le fait défectueux doit expliquer le dommage survenu.
Selon cette théorie, si une personne commet une faute, cette personne doit être
déclarée responsable de toutes les conséquences que peut provoquer ce mal en
se propageant d’où l’appellation de cette théorie.
C- Exonération de responsabilité
La force majeure est définie par l’article 269 du DOC comme étant « tout fait
que l'homme ne peut prévenir, tel que les phénomènes naturels (inondations,
sécheresses, orages, incendies, sauterelles), l'invasion ennemie, le fait du prince,
et qui rend impossible l'exécution de l'obligation. N'est point considérée comme
force majeure la cause qu'il était possible d'éviter, si le débiteur ne justifie qu'il a
déployé toute diligence pour s'en prémunir. N’est pas également considérée
comme force majeure la cause qui a été occasionnée par une faute précédente du
débiteur ».
Le défendeur peut être exonéré partiellement s’il démontre que la victime a elle-
même commis une faute ayant contribué dans la réalisation du dommage ;
généralement, cette faute consiste en une imprudence ou une négligence ; ainsi,
si cette faute est établie, les juges peuvent faire supporter à la victime une part
de la responsabilité encourue et par conséquent la réparation doit être réduite.
Section 2
Les effets de la responsabilité du fait personnel
34
Cour suprême, 16 décembre 1980, n° 594, doss. n° 79076, revue jurisprudence de la cour
suprême n° 27, p. 88.
La prescription, pendant le laps de temps fixé par la loi, éteint l'action naissant
d’un délit ou d’un quasi-délit et par la même, elle éteint l’action de la victime à
demander réparation du dommage qu’elle a subi 37. Les règles de la prescription
en matière extracontractuelle sont prévues par l’article 106 du DOC qui prévoit
que « l'action en indemnité du chef d'un délit ou quasi-délit se prescrit par cinq
ans, à l’exception des actions en réparation résultant des explosions des mines
qui se prescrivent par le délai de quinze années, ces délais commencent à courir
à partir du moment où la partie lésée a eu connaissance du dommage et de celui
qui est tenu d'en répondre. Elle se prescrit en tous les cas par vingt ans, à partir
du moment où le dommage a eu lieu » 38.
35
N° 1-69-100 du 8 chaabane 1389.
36
Les calculs retenus pour la détermination des indemnités dues à la victime ou à ses ayants
droits en cas de son décès, seront exposés à l’occasion de la réparation des dommages
causés par les véhicules terrestres à moteur dans le cadre de l’article 88 du DOC traitant de
la responsabilité du fait des choses.
37
Article 371 du DOC.
38
L’article 106 du DOC a été modifié en vertu de la loi n° 04-19 promulgué par
Dahir n° 14.19.1 du 2 joumada II 1440 (8 février 2019), BO, n° 6754 DU 21
février 2019, p. 843.
Imane HILANI
Professeur à la faculté de droit de Casablanca
Section 1
Conditions de la responsabilité des père et mère
La responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur est établie du seul que
le dommage a été causé par cet enfant mineur. Le deuxième alinéa de l’article
85 du DOC ne met pas en évidence une quelconque faute qui peut être commise
par l’enfant comme d’ailleurs le premier alinéa du même article qui prévoit
qu’« on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son
propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on
doit répondre ». Les éléments les plus importants, comme on l’a déjà relevé,
sont :
Les parents doivent exercer une autorité parentale sur l’enfant mineur ;
L’enfant mineur doit avoir commis par son fait un dommage à autrui.
Section 2
Nature de la responsabilité des père et mère
du fait de leurs enfants mineurs
La notion de lien de préposition est très vaste est englobe une multitude de
situations dans lesquelles le commettant peut être déclaré responsable du
dommage causé par son préposé.
1. Relations de travail
Très fréquemment, le lien de préposition nait de l’existence d’une relation de
travail découlant du contrat de travail tel qu’il est défini dans le code du travail.
Cette relation de travail renferme un élément très important qui est le critère de
cette relation à savoir le lien de subordination et qui est évoqué par le code de
travail soit sous cette même appellation 1 soit à travers les notions de direction 2
ou d’autorité 3.
2. Préposition occasionnelle
1
Article 8 du code de travail.
2
Articles 6 et 24 du code de travail.
3 Article 21 du code de travail : « Le salarié est soumis à l'autorité de l'employeur dans le
Section 2
Régime de la responsabilité des commettants du fait
de leurs préposés
7
Cass. civ. 2e, 19 juin 2003, Bull. civ. II, no 202.
8
Cour de Cassation, Assemblée plénière, du 19 mai 1988, 87-82.654.
Le fait du préposé ne doit pas constituer pour le commettant une cause étrangère
en apportant la preuve qu’il n’a pu empêcher le dommage parce que dans ce cas,
on se placerait dans le cadre du régime de la responsabilité des artisans et des
père et mère qui, seuls, peuvent s’exonérer de la responsabilité en apportant une
telle preuve.
L’on peut retenir trois situations dans lesquelles le préposé ne bénéficie pas
d’une immunité civile et doit par conséquent être déclaré personnellement
responsable.
9
Cour de Cassation, Assemblée plénière, du 19 mai 1988, 87-82.654.
10 Cour de Cassation, Assemblée plénière, du 25 février 2000, 97-17.378 97-20.152.
Section1
Conditions de la responsabilité des artisans
du fait de leurs apprentis
Historiquement, les enfants étaient placés chez des artisans pour apprendre un
métier manuel et pendant qu’ils sont sous leur autorité, ces artisans doivent
répondre de tous les faits engendrant un dommage à des tiers.
12
Loi n° 12-00 promulguée par le dahir n° 1-00-206 du 15 safar 1421 (19 mai 2000).
Section 2
Régime juridique de la responsabilité des artisans
du fait de leurs apprentis
13 Décret n° 2-00-1017 du 28 rabii I 1422 (21 juin 2001) pris pour l'application de la loi n° 12-
00 portant institution et organisation de l'apprentissage.
14
Dahir n° 1-00-207 du 15 safar 1421 (19 mai 2000) portant promulgation de la loi n° 13-00
portant statut de la formation professionnelle privée.
15 Cour de Cassation, Chambre civile 2, du 19 février 1997, 94-21.111.
Section 1
Fondement de la responsabilité du fait
des personnes aliénées
La personne souffrant d’un handicap mental peut être internée dans un centre
hospitalier ou confiée à une personne par contrat pour en assurer la garde. Dans
ce cas, la responsabilité civile est supportée par ces personnes qui ont accepté
d’assurer cette garde.
Le texte du code de la famille donne une définition du faible d’esprit qui selon
les dispositions de l’article 216 « qui est atteint d'un handicap mental
l'empêchant de maîtriser sa pensée et ses actes » ; mais en même temps le même
code ne semble pas faire de la faiblesse d’esprit un handicap majeur empêchant
l’individu de mesurer à l’absolu ses actes 16 et la distingue de la démence qui
affecte la personne qui a perdu la raison. On retrouve cette distinction entre le
faible d’esprit et le dément qui a perdu la raison dans les articles 220, 233 et 279
du code de la famille 17. L’article 217 du même code prive le dément et celui qui
16 Article 213 : « La capacité d'exercice est limitée dans les cas suivants :
1) l'enfant qui, ayant atteint l'âge de discernement, n'a pas atteint celui de la majorité;
2) le prodigue;
3) le faible d'esprit ».
17 Article 220 : « La personne qui a perdu la raison, le prodigue et le faible d'esprit sont
frappés d'interdiction par jugement du tribunal, à compter du moment où il est établi qu'ils
se sont trouvés dans cet état. L'interdiction est levée, conformément aux règles prévues au
présent Code, à compter de la date où les motifs qui l'ont justifiée ont cessé d'exister ».
Section 2
Le régime juridique de la responsabilité du fait
des personnes aliénées
Les personnes qui ont la garde des aliénés mentaux doivent prendre les mesures
nécessaires pour que ces derniers ne causent par leur comportement un
dommage à des tiers victimes. La responsabilité résulte du fait qu’il y a une
défaillance dans la surveillance et dans le contrôle de ces personnes souffrant de
troubles psychiques. L’article 85 du DOC fait peser à la charge des personnes
gardiennes une véritable responsabilité fondée sur l’existence d’une présomption
de faute
Les conditions d’exonération des personnes qui ont la garde des aliénés mentaux
sont prévues par l’article 85 du DOC qui prévoit que « le père, la mère et les
Article 233 : « Le représentant légal exerce sa tutelle sur la personne et les biens du mineur,
jusqu'à ce que celui-ci atteigne l'âge de la majorité légale. Il l'exerce également sur la
personne qui a perdu la raison, jusqu'à la levée de son interdiction par un jugement. La
représentation légale, exercée sur le prodigue et le faible d'esprit, se limite à leurs biens,
jusqu'à la levée de l'interdiction par jugement ».
Article 279 : « Le testateur doit être majeur. Est valable le testament fait par le dément
durant un moment de lucidité, par le prodigue et le faible d'esprit ».
Section 1
Conditions de la responsabilité des instituteurs
§1. La faute
A- Faute de surveillance
18
L’article 85 bis ci-dessus a été modifié en vertu de l’article premier du dahir 19 juillet 1937
(10 joumada 1356) modifiant et complétant le dahir du 12 août 1913 (9 ramadan 1351)
formant code des obligations et contrats; Bulletin officiel n° 1298 du 10 septembre 1937,
p.1222.
Section 2
Régime juridique de la responsabilité des instituteurs
Une distinction doit être faite entre la responsabilité des établissements scolaires
publics et les écoles privées des dommages causés par les élèves qui sont sous la
garde et la surveillance des instituteurs ; si l’article 85 bis s’applique pour les
instituteurs du secteur public, dans l’enseignement privé, la victime peut
chercher soit la responsabilité personnelle de l’instituteur soit celle de son
commettant dans le cadre du 3ème alinéa de l’article 85 du DOC, l’instituteur est
considéré comme un préposé.
§2. Règles particulières relatives à la responsabilité des instituteurs
53
Le Dahir des obligations réserve deux articles à la responsabilité du fait des
animaux :
L’article 86 du DOC prévoit que « chacun doit répondre du dommage causé
par l'animal qu'il a sous sa garde, même si ce dernier s'est égaré ou échappé,
s’il ne prouve :
1. Qu'il a pris les précautions nécessaires pour l'empêcher de nuire ou pour le
surveiller;
2. Ou que l'accident provient d'un cas fortuit ou de force majeur, ou de la faute
de celui qui en a été victime » ;
L’article 87 dispose que « le propriétaire, fermier ou possesseur du fonds
n'est pas responsable du dommage causé par les animaux sauvages ou non
sauvages provenant du fonds, s'il n'a rien fait pour les y attirer ou les y
maintenir.
Section 1
Conditions de la responsabilité du fait des animaux
L’animal dont il est question dans l’article 86 du DOC est celui qui peut être
approprié par l’homme tels les animaux domestiques ou ceux qui sont exploités
dans une activité quelconque. Les animaux sauvages sont exclus du moment
qu’ils ne sont pas domestiqués.
Les animaux domestiques ne sont pas définis en droit marocain. Des arrêts très
anciens rendus par la chambre criminelle de la Cour de cassation française les
14 mars 1861 et 16 février 1895, définissent les animaux domestiques comme
étant des « êtres animés qui vivent, s'élèvent, sont nourris, se reproduisent sous
le toit de l'homme et par ses soins »1. En droit moderne, ces animaux
domestiques sont considérés comme étant de compagnie qui sont détenus ou
destinés à être détenus par l’homme pour son agrément 2.
1
Crim. 14 mars 1861, DP 1861. 1. 184.
2
Article L 214-6 Modifié par Ordonnance n°2015-1243 du 7 octobre 2015 - art. 1, (code rural
et de la pêche maritime).
54
B- Les animaux placés pour le service et l'exploitation d’un fonds
Il doit y avoir une relation causale entre le fait de l’animal et le dommage subi
par la victime ; cette relation est réalisée lorsque l’animal intervient
matériellement dans la survenance de l’accident et aussi lorsqu’il joue un rôle
actif dans la réalisation du dommage.
Section 2
Régime juridique de la responsabilité du fait des animaux
55
§1. Faute présumée du gardien de l’animal
56
CHAPITRE 9
LA RESPONSABILITE DU FAIT DES BATIMENTS
57
Le Dahir des obligations et contrats consacrent deux articles à la responsabilité
du fait des bâtiments à savoir les articles 89 et 90. Le premier article prévoit que
« le propriétaire d'un édifice ou autre construction est responsable du dommage
causé par son écroulement ou par sa ruine partielle, lorsque l'un ou l'autre est
arrivé par suite de vétusté, par défaut d'entretien, ou par le vice de la
construction. Sa même règle s'applique au cas de chute ou ruine partielle de ce
qui fait partie d'un immeuble tel que les arbres, les machines incorporées à
l'édifice et autres accessoires réputés immeubles par destination. Cette
responsabilité pèse sur le propriétaire de la superficie, lorsque la propriété de
celle-ci est séparée de celle du sol. Lorsqu'un autre que le propriétaire est tenu
de pourvoir à entretien de l'édifice, soit en vertu d'un contrat, soit en vertu d'un
usufruit ou autre droit réel, c'est cette personne qui est responsable. Lorsqu’il y a
litige sur la propriété la responsabilité incombe au possesseur actuel de
l’héritage » ; l’article 90 dispose quant à lui que « le propriétaire d'un héritage,
qui a de justes raisons de craindre l'écroulement ou la ruine partielle d'un édifice
voisin, peut exiger du propriétaire de l'édifice, ou de celui qui serait tenu d'en
répondre, aux termes de l'article 89, qu'il prenne les mesures nécessaires afin de
prévenir la ruine ». Pour que la responsabilité du fait des bâtiments puisse être
déclenchée, des conditions doivent être réunies et qui permettent de dégager les
particularités du régime juridique réservé à ce type de responsabilité.
Section 1
Conditions de la responsabilité du fait des bâtiments
58
La notion de bâtiment concerne l’édifice ou l’ouvrage formé d’un assemblage de
matériaux incorporés au sol.
1
Loi n° 94-12 promulguée par le Dahir n° 1-16-48 du 19 rejeb 1437 (27 avril 2016).
59
La victime doit faire la preuve de l’existence d’une relation causale entre le
dommage qu’elle a subi et le défaut d’entretien ou par le vice de construction.
Le demandeur doit apporter la preuve de l’existence de ce lien de cause à effet.
Section 2
Régime juridique de la responsabilité du fait des des bâtiments
A- Faute de la victime
B- Cause étrangère
60
§3. Recours du gardien ou du propriétaire du bâtiment
1
Modifié par le Dahir du 3 décembre 1959 - 7 joumada II 1379.
2
Article 573 du DOC.
61