La Réforme Et Le Concile de Trente - Old1
La Réforme Et Le Concile de Trente - Old1
La Réforme Et Le Concile de Trente - Old1
1
Plan du cours
Chapitre 1 : Des signes avant-coureur du malaise dans l’Eglise : Wiclef (1324-1384) et
Jean Hus (1369-1415)
Chapitre 2 : La Renaissance
Chapitre 3 : Vers l’explosion religieuse
Chapitre 4 : Luther et sa Réforme
Chapitre 5 : Entre Luther et Calvin, d’autres réformateurs (Zwingli, Bucer,
Oecolampade)
Chapitre 6 : Calvin et sa Réforme
Chapitre 7 : L’Anglicanisme
Chapitre 8 : Le concile de Trente
--------------------o-------------------
Eléments de bibliographie
--------------------o--------------------
2
Sujets d’exposés
1. Le Méthodisme
2. Les Eglises Baptistes
3. Etude comparée des doctrines luthérienne et calviniste
4. Le mouvement œcuménique : vers une Eglise de nouveau unifiée ?
5. Les nouvelles formations chrétiennes ( Pentecôtistes, Adventistes, Armée du
salut, Royaume de Dieu)
6. Les Témoins de Jéhovah et les Mormons sont-ils chrétiens ?
7. Le Conseil Œcuménique des Eglises
8. Faut-il parler de Protestantisme ou de Protestantismes
9. Les Eglises Protestantes en Côte d’Ivoire
10. Les tentatives de dialogue entre Eglises en Côte d’Ivoire
---------------------
3
Chapitre I Des Signes avant-coureurs d’un malaise dans
l’Eglise : Wiclef (1324-1384) et Jean Hus
(1369-1415)
Introduction
I – Wiclef
1. Eléments de biographie
2. Aperçu et conséquences de la doctrine
II – Jean Hus
1. L’homme et ses déviations
2. Conséquences de la doctrine de Hus
---------------------------
Introduction
I – Wiclef
1. Eléments de biographie
Etudiant puis enseignant à Oxford, il se signale pour la première fois en 1366
lorsqu’il prend fait et cause pour le parlement anglais qui refuse de payer le tribut
annuel dû au Pape (Bx Urbain V 1362 – 1370). Il exhorte alors le roi à éloigner les
ecclésiastiques des fonctions publiques et à les dépouiller de leurs biens s’ils en
abusent. Condamné par l’évêque de Londres et par Grégoire (1370 – 1378), il refuse
de se soumettre et s’enfonce dans l’hérésie, engageant les princes à se défaire de la
papauté et à ne reconnaître comme seule autorité que l’Ecriture dont il publie alors une
traduction en langue anglaise.
4
2. Aperçu et conséquences de la doctrine
La doctrine de Wiclef est un ensemble hétéroclite d’affirmation où se mêlent
une sorte de panthéisme inspiré d’un platonisme mal assimilé, d’idées de
prédestination et de fatalisme. Elle nie en bloc toute la doctrine catholique et les
pratiques de l’Eglise. Ses erreurs trouvent des adhérents dans la secte des Lollards qui
se propage au début du XVème siècle. Cette secte séduit beaucoup de monde en
prêchant la suppression des dîmes, et la confiscation des biens de l’Eglise. Les
conciles d’Angleterre anathématisent la secte et son inspirateur et suite à celui de
Constance qui condamne au bûcher son émule bohémien, fait exhumer et brûler ses
restes en 1428. La secte ne disparaîtra quant à elle qu’après une guerre d’extermination
menée par le pouvoir séculier.
II – Jean Hus
5
La doctrine de Hus donne naissance à deux tendances sectaires. La première
s’écarte peu de la foi catholique. C’est celle des Calixtains ou Utraquistes qui se
bornent à réclamer la communion sous les deux espèces. L’autre, plus exaltée, a été
nommée les Horébites ou Taborites parce que ses membres appelaient leurs lieux de
réunion, mont Horeb ou Tabor. Eux, rejettent entre autres, la croyance en l’existence
du Purgatoire, le culte ses saints.
Les Taborites étaient en fait un ensemble de petites sectes dont celle des Picards qui
pratiquaient le nudisme et la promiscuité des sexes.
Sur appel de Martin V, Sigismond essaie de réduire par la violence les sectes
hussites mais en vain. Quatre armées impériales de cent mille hommes sont
successivement vaincues. La négociation qui suit gagne les Utraquistes à l’union
jusqu’à ce que le Protestantisme vienne à nouveau les ravir, suite à des querelles
internes au sujet de la communion sous les deux espèces.
Conclusion
6
Chapitre II La Renaissance
Introduction
Conclusion
----------------------------
Introduction
La Renaissance est une période de l’Histoire qui se situe grosso modo entre la
e
2 moitié du XVème siècle et la fin du XVIème. Cette période qui fait le lien entre le
Moyen Age et l’Epoque Moderne est ainsi nommée parce que, tranchant sur le passé
médiéval, elle apparaît comme un nouveau départ pour l’Europe. La Renaissance est
de fait une nouvelle naissance, un mouvement culturel dont l’influence s’est fait sentir
dans tous les domaines de la vie grâce à l’invention de l’imprimerie, et qui a permis
aux hommes de l’époque de se départir de l’obscurantisme moyenâgeux pour prendre
l’élan d’une évolution qui dure encore de nos jours.
7
portions du monde en prennent un grand coup, notamment dans le domaine culturel. Il
faut attendre jusqu’après 1453 pour que ces relations reprennent.
Les hommes de lettres exploitent comme une mine, les documents grecs. Ils
redécouvrent également les écrits latins. Ils s’inspirent de cette sagesse antique pour
comprendre l’Histoire, expliquer le présent et lui donner des règles de conduite.
C’est de l’Italie, et notamment de la ville de Florence, sous les Médicis que part la
Renaissance artistique. Le mot Renaissance lui-même a été employé pour la première
fois par un peintre italien du nom de Vasari pour désigner le Renouveau de l’Art. Il
s’est donc d’abord limité à cette réalité avant de s’étendre aux autres domaines de la
culture et de la connaissance. Il est à noter que La Renaissance dans le domaine de
l’Art a été fortement marquée par la généralisation de la peinture à huile sur toile.
8
3. L’humanisme
1. L’Europe humaniste
A partir de 1450 et ceci jusque vers 1550. Les grands thèmes de l’humanisme se
répandent dans toute l’Europe grâce à l’imprimerie et à la langue commune à tous : le
latin. Tous les humanistes ( professeurs, précepteurs, libraires, imprimeurs, princes) se
connaissent et entretiennent entre eux une active correspondance. Des cercles se créent
dont les points de rencontre sont des grandes villes comme Florence, Venise, Bâles,
Lyon, Paris, Oxford, Cambridge…
Les grandes bibliothèques s’ouvrent au public (la vaticane en 1475) sous l’influence
des humanistes qui, grands voyageurs vont d’université en bibliothèques et de
bibliothèques en cours princières. Leur intense activité convertit finalement toute
l’Europe à l’humanisme.
- En France, François 1er crée le collège royal pour diffuser leurs idées.
- En Angleterre, l’humanisme chrétien inspire l’œuvre de John Fisher
et de Thomas More.
9
- En Allemagne c’est Rodolphe Agricola qui, entre autres, tient le
flambeau.
- En Espagne le pôle de diffusion est l’université d’Alcala fondée en
1508
Vers 1530-1540 des humanistes ont réussi à créer et à diffuser une nouvelle
conception du monde fondée sur un meilleur usage de la raison. L’humanisme a donné
une nouvelle vision de la place de l’homme face à Dieu, face au monde, au prince et à
tous ses semblables.
2. L’Europe politique
Il est à noter que les Etats pontificaux constituent alors un territoire puissant
avec plus d’un million cinq cent mille habitants, disposant de fortes ressources. Les
papes de la deuxième moitié du XVème siècle ont réussi à y établir une certaine unité
mais sont obligés de lutter constamment contre les grandes familles romaines
(Colonna & Orsini) pour garder cette unité.
Du côté allemand, jusqu’en 1512 le Saint Empire Romain Germanique est du point de
vue politique, une fédération d’Etats souverains dirigée par un empereur élu et une
assemblée commune appelée Diète. Comme le prince élu n’est pas sacré par le pape, il
ne peut pas officiellement porter le nom d’empereur mais celui de roi des romains. En
1508 Maximilien de Habsbourg décide malgré tout de prendre ce titre. A partir de
1512 la chancellerie impériale utilise la formule de Saint Empire Romain de Nation
Allemande. Cette option politique aboutit à une tentative de création d’un Etat
allemand. Mais l’Allemagne est alors un pays pauvre qui n’a pas les moyens de sa
politique.
10
III – L’Eglise à la Renaissance.
1. L’aspiration de fidèles.
Dans une pareille ambiance, les fidèles ressentent une certaine angoisse du
salut. Ils cherchent un refuge auprès d’un clergé qui, malheureusement, ne se montre
pas toujours à la hauteur de la tâche. Les fidèles trouvent donc asile dans des dévotions
et pratiques plus ou moins superstitieuses : culte marial, culte des saints, cultes des
reliques, indulgences et à la possibilité de gagner le paradis sur terre, quitte à passer
par le purgatoire, pourvu que l’enfer soit exclu.
11
principalement de sa fille Lucrèce et de son fils César. Les
conséquences pour l’Eglise sont évidemment catastrophiques.
- Pie III (1503) qui lui succède à sa mort est un saint homme qui ne
règne malheureusement que 26 jours.
- Jules II (1503-1513) : c’est un pape guerrier aux mœurs obscures. Il
doit son élection à la simonie. Plutôt qu’un homme d’Eglise, c’est un
stratège doué de grands talents de gouvernement. Il met toute son
énergie à reconstituer les Etats pontificaux dont quelques parcelles
avaient été grignotées pour des puissances étrangères. Il meurt durant
le Ve concile du Latran qu’il avait convoqué un an auparavant en
disant : « Il n’y a plus de Français à Rome. »
- Léon X (1513-1521) : Jean de Médicis, tonsuré à 7 ans, cardinal à 14,
n’en a que 37 quand il devient pape. Il préside le concile jusqu’à sa
fin (1517). Homme de bonnes mœurs, mangeant peu et ne buvant pas
de vin, il est ami de la Science, bon, libéral et répugne à faire le mal à
personne. Mais son goût trop poussé pour la chose culturelle et pour
la chasse ne répond pas à la haute mission d’un chef d’Eglise, surtout
à cette époque de grands bouleversements.
Conclusion
12
Chapitre III Une situation explosive
Introduction
----------------------------
Introduction
A la fin du Moyen Age, l’Occident qui a rencontré le Christ depuis plus de 1000
ans n’est pourtant pas encore totalement christianisé. Considérée sous l’angle de la
connaissance du Christ et de la pratique de la religion chrétienne, l’Eglise d’Occident
présente deux couches nettement différentes de fidèles. D’une part, il y a la population
urbaine et de l’autre la masse rurale.
13
relativement bonne de la religion. Ce n’est pas le cas dans les campagnes. Les causes
de cette méconnaissance du Christianisme sont multiples. Citons-en deux :
l’analphabétisme des paysans et l’absentéisme des prêtres.
- L’analphabétisme des paysans : la masse rurale, en grande partie, ne
sait pas encore lire. Et même si elle avait su lire, il lui aurait été
difficile de se procurer des livres qui, malgré l’invention de
l’imprimerie, restaient encore le privilège des gens de la ville. Pour
les analphabètes des campagnes, le moyen le plus adéquat que l’on a
cru trouver pour palier la carence fut la pédagogie iconographique.
Mais il est difficile de savoir exactement ce que chacun en tirait
comme message, dans la mesure où les personnes préposées à
l’interprétation de ces images brillaient ou bien par leur incapacité à
accomplir leur devoir pastoral ou bien par leur inattention à ce devoir.
- L’absentéisme des prêtres : les prêtres instruits préfèrent la ville,
quittes à se faire remplacer en campagne par d’autres qu’ils paient
(mal en général). Quant aux ruraux, ils ne sont pas à la hauteur de
leur tâche ; d’une part parce qu’ils sont très peu formés et d’autre part
parce que les maigres émoluments qu’ils reçoivent ne leur laissent
pas d’autre choix que de consacrer une bonne partie de leur temps à
cultiver le terre. Par ailleurs, de nombreux évêques pèchent par leur
non-résidence.
La conséquence de cette situation est que le Christianisme tel que le pratique cette
masse paysanne n’est ni plus ni moins qu’un mélange de croyances chrétiennes et de
coutumes païennes chargé de superstition.
Les tares des clercs et les abus de la hiérarchie ont contribué entre autres à
affaiblir l’Institution. Insensiblement, le comportement de ses dignitaires a fini par trop
engager l’Eglise romaine dans le siècle.
La première tare qui frappe l’observateur de la vie des prêtres d’alors, c’est le scandale
de la nette séparation du clergé en deux couches dont l’une vit dans l’opulence et dont
l’autre doit se contenter de la portion congrue. L’une et l’autre couche pressurent le
peuple des fidèles, la première pour tenir son train de vie et la seconde pour survivre.
En outre, les clercs qui vivent dans un concubinage quasi officiel ne sont pas rares.
D’une façon générale, tous mettent leur énergie à faire transférer leur bénéfice à leur
propre fils. Par ailleurs trop d’évêques se montrent plus soldats ou conseillers de
princes que pasteurs.
Notons également les abus en matière de pénitence. Ils sont énormes et les pénitences
– on devrait plutôt dire les sanctions – sont terribles : on excommunie pour des
peccadilles et le sacrement de pénitence est un véritable tribunal de la peur où le fidèle
vient plus par attrition que par contrition. La lourdeur des pénitences a sans doute
finalement contribué à cette époque-là, à forger la notion de rachat à prix d’argent ou
par des œuvres méritoires telles que les pèlerinages auprès de reliques célèbres.
14
Il y a enfin le nombre impressionnant des mauvais exemples venus de Rome où la
confusion du sacré et du profane affadit peu à peu le culte.
Malgré tout, il faut récuser les idées reçues sur les causes de la Réforme.
Celle-ci n’est pas une simple réaction contre la décadence de l’Eglise d’Occident. Car
l’Eglise n’est pas complètement décadente à l’époque de la crise protestante. Une
réelle ferveur habite encore le cœur de nombreux fidèles, clercs et laïcs, qui témoigne
de sa vitalité. C’est même dans cette ferveur que s’enracinera la réforme luthérienne.
Comme signe extérieur de cette vitalité, l’époque de la Renaissance est celle de la
multiplication des chapelles rurales - donc de l’évangélisation en profondeur des
campagnes - et de l’introduction dans les campagnes de dévotions jusqu’alors
exclusivement urbaines (Confréries du Rosaire). Des ordres religieux sont restructurés,
d’autres commencent déjà des missions outre Atlantique. On accorde de plus en plus
d’importance à l’expérience mystique personnelle ( Cf. Succès de l’imitation de Jésus)
II - Le désir de réforme
Avec leur goût prononcé pour l’exégèse, les humanistes fondent leur action sur
la conception optimiste de l’homme qui caractérise tous les membres de leur
mouvement, chrétiens ou non. Ils prônent une interprétation large des dogmes et
accordent plus d’importance aux expériences mystiques qu’aux dissertations
théologiques. En un mot, ils appellent l’Eglise à être plus évangélique et à se montrer
plus tolérante. Les tenants de cette lutte sont entre autres, Rabelais en France (+
1553) ; le cardinal Nicolas du Cues, en Allemagne (+ 1464) ; John Colet (+1519) et
15
Thomas More (1535) en Angleterre ; Pic de la Mirandole à Florence (+ 1494 ) et
Marsile Ficin en Toscane ( + 1499).
Le plus représentatif de cette tendance reste cependant le Hollandais Erasme
(1466(69) - 1536) qu’on nomme le prince des humanistes
Fils illégitime d’un prêtre, il fréquente entre autres, l’école des Frères de la Vie
Commune à Deventer avant de prononcer ses vœux au chapitre régulier de Steyn en
1487. Il est ensuite ordonné prêtre le 25 avril 1492. Nommé Secrétaire de l’évêque de
Cambrai, il assure cette fonction durant trois années puis part étudier à Paris en 1495.
Il y rencontre entre autres, Lefèvre d’Etaples. Il passe ensuite en Angleterre d’où il se
rend à Florence, Bologne Padoue et Venise. Connaissant le latin depuis l’enfance, il
apprend durant ces péripéties le grec, l’hébreu et l’araméen. Pendant un certain temps,
sa vie se partage entre Paris, Louvain et Cambridge puis il se fixe à Bale où il meurt.
3. La rébellion : Savonarole
Si Erasme a choisi la fidélité, d’autres bien avant Luther, lassés d’appeler une
réforme qui ne vient pas, choisissent la révolte contre une Rome devenue trop
humaine. C’est le cas de l’Italien Jérôme Savonarole (1452-1498 )
Né à Ferrare, il est d’abord destiné à la médecine par ses parents. Mais il choisit plutôt
de se faire dominicain à Bologne. Sa grande ferveur pousse ses supérieurs à le nommer
maître des novices. En 1482, il est envoyé pour la première fois à Florence. Le
Dominicain n’apprécie guère la vie dissolue de la cité. La ville non plus d’ailleurs
n’apprécie ce trouble fête qui s’en prend à tout ce qui fait de Florence ce qu’elle est :
douceur de vivre, luxe, corruption, débauche …
16
Entre 1492 et 1493, il annonce pour Florence des heures de tribulations, la guerre et la
peste comme sanction de son immoralité. En 1494 Charles VIII de France envahit
l’Italie et chasse de la ville Pierre de Médicis. C’est Savonarole qui prend en mains les
négociations. Dès lors, les Florentins le regardent non seulement comme prophète
mais aussi comme leur sauveur. Ils auraient voulu en faire leur roi. Mais cet honneur
n’intéressait pas le Dominicain. Il le réserve au Christ qu’il proclame roi de Florence
en 1495 ; lui-même restant la conscience du peuple qu’il pousse chaque fois un peu
plus loin dans le recherche de la perfection. Mais à la longue, son succès baisse peu à
peu ; d’une part parce que les Florentins sont bientôt lassés par ses excès de l’autre
parce qu’il entre en conflit avec Alexandre VI, cible principale de sa prédication
depuis 1492.
1. La Devotio Moderna
17
Le succès des frères, des sœurs et des chanoines est si grand qu’il déborde
bientôt les Pays-Bas pour rayonner dans toute l’Europe occidentale. Ils deviennent
ainsi à l’époque de la Renaissance, les maîtres spirituels de tout l’Occident qu’ils
éduquent à travers l’enseignement ou plus exactement à travers l’encadrement de la
jeunesse.
Chez les ordres religieux, le désir de réforme se traduit par une tendance
marquée pour le retour à la pureté de la règle originelle.
Chez les Bénédictins, la création de branches réformées s’appuie sur le rétablissement
de la clôture et le développement de l’étude ( Camaldules, Olivétains en 1504).
Chez les Augustins, la vie commune est rétablie.
L’ordre des Chartreux dont la règle est très stricte connaît un grand succès, tandis que
chez les mendiants, une crise oppose les partisans de la règle de pauvreté intégrale ( les
Observants) à ceux de l’assouplissement (les Conventuels). La crise est si grave chez
les Franciscains que Léon X se voit, pour ainsi dire, contraint d’entériner la rupture
entre les deux groupes.
Chez les Clarisses, sainte Colette de Corbie entreprend une réforme qui rétablit la règle
dans sa pureté originelle.
La réforme chez les Dominicains commence par l’Espagne puis s’étend à toute
l’Europe.
En définitive, l’idée, le désir de réforme sont donc partout présents. Dans les années
1490-1510, tous ceux qui ont assez d’audace pour lui donner forme à travers des
mesures concrètes sont tout de suite écoutés et suivis. Aussi, sous Jules II, l’Eglise se
lance-t-elle, elle aussi, dans cette entreprise.
A vrai dire, le Vème concile du Latran n’avait pas pour objectif premier de
réformer l’Eglise. Jules II l’a convoqué pour contrecarrer le concile anti-papal de Pise,
réuni par Louis XII de France, entré en conflit avec le pape. Ce concile du Latran
réunit donc principalement des prélats Italiens fidèles au Saint Siège. On y songe tout
de même à la santé de l’Eglise, sans toutefois s’attaquer aux grands maux ni lancer une
réforme générale. Douze sessions en tout meublent le temps de ce concile qui traîne en
longueur sur cinq années pour ne sortir que quelques décrets sur l’interdiction du
cumul des bénéfices, la restriction de la commende et la condamnation des
incantations superstitieuses. On y blâme également le luxe du Sacré Collège. Mais
hormis un mémoire venu d’Espagne, personne n’ose s’attaquer aux vices de la
Papauté. Pire ; les décrets concernant les autres abus n’en restent qu’à de vagues
souhaits.
Le 16 mars 1517, les Pères conciliaires, se dispersaient, fiers d’avoir donné à l’Eglise,
les outils de son auto régénération. Sept mois plus tard, le 31 octobre de la même
année, Luther commençait sa réforme.
18
Chapitre IV Luther et sa réforme
Introduction
I Luther
1. Le fils de Hans et de Marguerite Luther
2. Le moine augustin
3. Luther découvre la miséricorde de Dieu
II La rupture
1. L’affaire des indulgences
2. Les grands écrits réformateurs
3. Luther Banni
III Le succès de Luther
1. Les causes
2. Les conséquences
3. La confession d’Augsbourg et l’essentiel de la pensée de Luther
Conclusion
----------------------------------
Introduction
La réforme luthérienne qui est une véritable révolution, s’est édifiée sur un
arrière fond de raisons extrêmement mêlées qu’on ne peut jamais séparer sans risquer
de tronquer la réalité. Les abus et les tares de Rome, les ambitions politiques de
l’Allemagne et la crise économique qui frappe alors l’Europe sont quelques-unes de
ces raisons. Mais elles ne suffisent à tout expliquer. Aussi faut-il d’abord chercher les
sources de cette rupture dans la personne même de l’initiateur de la réforme : le moine
augustin, Martin Luther.
I - Luther
19
maître ès Arts en 1505. C’est alors qu’il est surpris un jour par l’orage dans un bois et
que la foudre tombe à ses pieds. Affolé, il fait à la Vierge le vœu de se faire moine s’il
sort indemne de cette situation. Aussi rentre-t-il à 22 ans, chez les moines augustins du
couvent d’Erfurt contre le gré de ses parents.
2. Le moine augustin
De toute évidence Luther était une âme angoissée. Il se sentait comme poursuivi
par la mort et le jugement dernier dont il avait tellement entendu parler. Il avait perdu
deux de ses frères emportés par la peste et vu mourir tragiquement un de ses
compagnons de couvent. Lui-même avait failli perdre la vie en se blessant par accident
avec un poignard. Aussi a-t-il pu voir dans l’orage et la foudre, les instruments du
jugement dernier. C’était trop pour cette âme angoissée.
Comme tous les ordres, les Augustins sont eux aussi traversés à l’époque, par
un courant de réforme. C’est Luther que le supérieur des observants charge en 1510
d’obtenir de Rome la reconnaissance de leur réforme. Le voyage à la cour de Jules II
ne semble pas lui avoir laissé une très bonne impression…
En 1511, le même supérieur décide d’en faire le théologien de l’ordre. Parti pour
Wittenberg, Martin est promu docteur en 1512. Il reçoit la Chaire d’Ecriture Sainte et
se révèle un brillant jeune professeur dont la démarche théologique, sortant des
sentiers battus de l’époque - le salut par les œuvres - se fonde sur le péché, la grâce, la
foi et la justice de Dieu.
En 1515, il est élu vice provincial de l’ordre et reçoit la charge de superviser une
dizaine de monastères…
20
3. Luther découvre la miséricorde de Dieu.
II - La rupture
21
argumenter contre lui. C’était alors une pratique courante, banale même dans les
universités. Mais cette fois, des événements vont la faire sortir de l’ordinaire : des
étudiants traduisant ces thèses - dont quelques-unes concernent les indulgences - du
latin à l’allemand, les diffusent. Cela déclenche une certaine agitation autour des
prédicateurs.
Luther lui-même aurait envoyé avec une lettre de mise en garde, une copie de ses
thèses au commanditaire de la prédication des indulgences qui les auraient, à son tour,
transmises à Rome. L’affaire gagne donc progressivement en importance.
Les Dominicains pris dans le feu, réagissent par la bouche du Cardinal Cajetan.
Ce dernier dénonce au moins deux propositions condamnables : la négation de la
nécessité des œuvres pour parvenir au salut et la référence à l’autorité exclusive de
l’Ecriture. L’agitation gagne les autres universités européennes (Cologne, Louvain
Paris,…) . On y discute les thèses de Luther qu’on désapprouve en général.
Le 15 juin 1520, Léon X condamne les propositions de Luther par la bulle Exsurge
Domine et le menace d’excommunication pour hérésie s’il ne se rétracte pas.
Le 8 octobre 1520 Charles Quint préside à Louvain, une diète à caractère religieux
durant laquelle les écrits de Luther sont brûlés.
Le 11 décembre Luther répond en brûlant et les œuvres de Jean Eck, un de ses
contradicteurs les plus efficaces, un livre de Droit canonique et la bulle du pape.
Le 3 janvier 1521, Luther est excommunié par la bulle Decet romamum. La rupture est
consommée.
22
- Le troisième écrit paru en septembre 1520 s’intitule De captivitate
babylonica ecclesiae. C’est un exposé doctrinal sur les sacrements.
Luther les réduit de sept à deux : le baptême et la cène qui sont, selon
lui, les deux seuls cités par l’Ecriture. De plus, Luther précise que le
sacrement n’a pas d’effet par lui-même mais seulement par la
disposition de foi de celui qui le reçoit. Par ailleurs, le sacrément de
la cène, toujours selon lui, est une commémoration et non un
sacrifice. Il doit être reçu sous les deux espèces par tous les chrétiens.
Luther rejette la doctrine de la transsubstantiation selon laquelle le
prêtre réactualise le sacrifice de la croix en changeant par la
consécration, le pain en corps et le vin en sang du Christ.
- Le quatrième et dernier écrit, La liberté chrétienne, date quant à lui
de novembre 1520. Luther y démontre que le chrétien est libre, que
Dieu l’a établi seigneur de toute chose et qu’en conséquence, il n’est
soumis à personne.
3. Luther Banni
23
Du temps passé à la Wartbourg, sort un traité sur la confession auriculaire puis un
autre sur l’abrogation des messes privées ainsi qu’une partie de la traduction
allemande de la Bible (Le Nouveau Testament).
Le 1er mars 1522, Luther met brusquement fin à son exil et averti son protecteur
de sa décision par une lettre où il écrit ceci : « Etre chrétien au péril d’autrui, cela
Christ ne me l’a point enseigné à moi. »
En fait, Luther ne courait plus de danger à cette époque. La situation lui était plutôt
favorable. L’empereur était retenu hors d’Allemagne par la guerre contre le Valois,
François 1er et préoccupé par la menace turque de Soliman le Magnifique. Le Pape
Adrien IV qui avait remplacé Léon X, mort quelques mois après la condamnation de
Luther, était lui-même près de la tombe. On le disait homme énergique, décidé à
trouver une solution à l’affaire Luther. La maladie le clouait malheureusement au lit et
devait l’emporter en 1523, laissant le siège à Clément VII, un autre Médicis, plus
préoccupé par des affaires dynastiques que par ‘l’hérésie’ de Luther. Tout ceci laissait
la voie libre à l’augustin pour répandre sa doctrine.
1. Les causes
Lorsque environ deux ans plus tôt Luther avait disparu, un mouvement
d’opinion s’était amorcé, en faveur du moine contre le pape et ses partisans. Ses textes
et ceux de son allié, Ulrich Von Hutten s’étaient alors rapidement répandus dans une
Allemagne qui le regardait comme un héros (martyre) et qui s’était rallié à lui par
nationalisme. Sa sortie de l’ombre n’a pas arrêté ce mouvement. Au contraire, celui-ci
s’est amplifié et Luther reçoit désormais l’appui ouvert d’un bon nombre d’humanistes
illustres. Il a également celui des chevaliers allemands qui voient en lui leur homme, le
porte flambeau du nationalisme germanique et le porte-parole de la petite noblesse.
Tous reconnaissent en lui tout ce qui caractérise l’Allemand typique et se
reconnaissent surtout dans la haine furieuse qu’il voue désormais à Rome. Car, ce que
veulent ces politiques, ce n’est pas d’abord la réforme de l’Eglise comme telle, mais
l’érection d’une Eglise allemande débarrassée de la tutelle romaine.
24
2. Les conséquences
D’abord gêné par ces mariages de prêtres, Luther jure de ne point en arriver là
mais finit par les justifier. Toutefois, le plus grave ne réside pas dans ces ruptures de
vœux. Le plus grave, c’est qu’entraînée par des leaders défroqués, hommes et femmes,
la populace fomente des troubles un peu partout en Allemagne dès le temps de la
Wartburg, mettant en danger la vie du clergé resté fidèle à Rome. En outre, non
contents d’avoir quitté l’Eglise à la suite de Luther, certains commencent déjà à ouvrir
leur propre voie. C’est le cas de Zwingli en Suisse alémanique. C’est également celui
de Thomas Münzer en Saxe. Ce dernier proclame le ‘Royaume du Christ’ dont il est le
maître. Il se fait entourer de douze apôtres et de soixante-douze disciples et abreuve le
peuple de sermons pleins d’anathèmes et de prophéties contre Rome et son Eglise. Le
mouvement qu’il suscite ainsi est connu sous nom de mouvement anabaptiste parce
qu’il rejette le baptême des enfants et en exige un second. Les membres de cette secte
eux-mêmes s’intitulent ‘les régénérés ou les saints’.
25
que Melanchthon rédige le texte connu sous le nom de Confession d’Augsbourg, texte
qui devait passer devant la diète pour la formulation exacte de la réforme Luthérienne.
Le titre commun donné à ces sept articles en dit long sur ce qu’en pensent Luther et
ses compagnons : Articles qui sont en discussion et où l’on traite des abus.
A la diète, Melanchthon lui-même, tout disposé qu’il était à faire des concessions,
refuse de transiger sur ces questions.
La confession d’Augsbourg, par son ton modéré, est restée jusqu’au colloque de
Poissy (1561) le gage et l’espoir d’un éventuel rapprochement. Faux espoir en réalité
et pour cause : s’il est vrai que la confession respecte d’une façon générale la ligne de
pensée de Luther, ce n’est pas dans ce texte édulcoré qu’on peut « trouver sa pensée
totale, l’essence du Luthéranisme » (Daniel-Rops). Il faut compléter cette déclaration
par la doctrine qu’il développe dans les traités du serf-arbitre, de la messe, des vœux
monastiques et dans deux catéchistes rédigés en 1529.
Selon Luther depuis la chute d’Adam l’homme est tellement corrompu par le
péché, vicié dans ses facultés que sa raison est incapable de distinguer ce qui peut le
sauver de ce qui ne peut pas. Dans le meilleur des cas, même s’il lui arrivait de
discerner le bien et la vérité, sa volonté serait absolument incapable de l’accomplir
toute seule. C’est la négation du libre-arbitre qu’enseigne le Catholicisme.
26
définitive c’est que par rapport au péché, les mérites humains sont dérisoires. C’est
pourquoi il faut la grâce pour arracher l’humain à son sort. Face à cette grâce, l’homme
qui fait le bien n’a pas de choix. Il est prisonnier du serf-arbitre tout comme l’est celui
qui fait le mal. Luther, on le voit, a tendance à majorer le rôle de la grâce. Il pousse
plus loin d’ailleurs, pour dire qu’étant donné que ce que l’on fait pour se concilier la
bienveillance de Dieu est vain, ni la grâce ni le salut ne s’obtiennent. Ils sont des dons
gratuits de Dieu qui l’accorde ou la refuse selon des raisons qui échappent
complètement à l’homme : c’est la doctrine de la prédestination. En définitive, s’il y
en a qui sont sauvés, ce n’est pas parce qu’il s’opère en eux une conversion intérieure ;
c’est parce que Dieu, librement, au nom des mérites du Christ, les enveloppe de son
amour et de sa miséricorde qu’il n’accorde pas à d’autres. Tout l’effort religieux de
l’homme doit consister à se faire imputer les mérites du Christ. Cela est possible selon
Luther par la foi qu’il définit comme la ferme confiance en Dieu, la certitude qu’il peut
pardonner à l’homme ses fautes et la conviction que le simple fait de posséder cette foi
est la garantie du salut. C’est la foi justifiante qui supplée à tous les vains efforts de
l’homme.
Comme les catholiques, Luther affirme que cette foi procède de l’enseignement
de l’Ecriture mais il refuse la médiation du Magistère comme interprète parce que
celle-ci empêcherait la relation directe du chrétien avec son Dieu. Chaque conscience
chrétienne doit pourvoir se reporter aux textes sacrés pour tirer ses règles de vie sous la
conduite de l’Esprit Saint. C’est la théorie du libre d’examen.
La foi Luthérienne s’équilibre donc sur une espèce d’expérience mystique toute
intérieure, subjective et personnelle. Elle n’admet pas de principes extérieurs, de
dogmes intangibles, irrécusables, ni de discipline. « C’est une expérience intérieure de
libération spirituelle. » (Daniel-Rops)
Conclusion
27
Chapitre V : Entre Luther et Calvin, d’autres réformateurs
( Zwingli, Carlstadt, Bucer, Œcolampade)
Introduction
Conclusion
---------------------------
Introduction
1. L’homme
Ulrich Zwingli, prêtre suisse, est né en 1484 à Wildhauss, d’un père paysan
aisé, maire de sa commune. Il est d’abord confié à l’éducation de son oncle, prêtre,
curé de paroisse avant de poursuivre par la suite, de brillantes études universitaires à
Vienne et à Bâles. Ordonné prêtre en 1506, il cumule les fonctions de curé et
d’aumônier des troupes suisse puis devient prédicateur d’un haut lieu de pèlerinage :
Notre Dame d’Einsiedeln. Dans le ministère, ce qu’il y perçoit de l’Eglise de son pays
ne l’édifie guère : la puissance du clergé et les dévotions superstitieuses des foules. De
son séjour à Einsiedeln, il emporte une haine inextinguible des pèlerinages et autres
dévotions mariales contre lesquels il se met d’ailleurs à prêcher à partir de 1516.
Zwingli se considère comme un disciple d’Erasme. Il devait peu à peu s’écarter de ses
idées et tracer sa propre voie.
28
En 1518, il obtient la chaire de premier prédicateur à la collégiale de Zurich. C’est
l’occasion pour lui de répandre ses idées. Il tonne contre les abus, les vœux
monastiques, le culte des saints, les indulgences, etc.…
Léon X, irrité par les invectives de ce petit curé prétentieux aurait bien aimé le
sanctionner. Mais il a besoin de suisses et préfère ne pas prendre de risques. Il essaie
de prendre Zwingli par le sentiment en le nommant chapelain. Zwingli accepte
l’honneur mais ne change rien à son discours. Au contraire, en 1521, il fait ordonner
par les autorités de la ville que les prédicateurs aient pour seule et unique base de leur
enseignement, la Bible. La même année, à la diète fédérale des Etats helvétiques de
Lucerne, il fait admettre comme licite et valide le mariage des prêtres, toutes choses
dont il a lui-même besoin pour régulariser sa situation de concubinage.
2. Aperçu de la doctrine
Pour Zwingli comme pour Luther, l’Ecriture est la seule autorité dans la
religion chrétienne. La Bible doit être laissée à l’interprétation individuelle, sous la
lumière de l’Esprit Saint. Dès lors, les autres lieux théologiques, la tradition
notamment, ne revêtent plus aucune importance. Par ailleurs, Zwingli réduit le péché
originel à une simple inclination au mal. Il ne garde comme sacrement que le baptême
et l’Eucharistie mais il les conçoit tous les deux comme de simples symboles de grâce,
sans présence réelle. Le mal estime-t-il en outre, entre dans le plan divin. Dieu lui-
même en est l’auteur comme il l’est aussi du Bien. Enfin, Zwingli rejette la hiérarchie
dans l’Eglise, le sacerdoce, les vœux, l’existence du purgatoire.
29
II - Carlstadt, Bucer, Œcolampade
André Bodenstein dit Carlstadt est né autour des années 1480. Archidiacre et
professeur à Wittenberg, il devient partisan de Luther après s’être opposé à lui. Durant
l’exil à la Wartbourg, c’est lui qui prend en mains l’organisation de la réforme. Il
introduit sans transition des innovations hardies - la communion sous les deux espèces,
par exemple – et vide la messe catholique de sa substance.
Désavoué par Luther qui, revenu de son exil, juge ces innovations trop rapides
pour être supportées par des esprits faibles, chassé de Wittenberg, il devient pasteur à
Orlamund. Il y prêche contre la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie, soutien
que Dieu ne hait pas le péché qui est son œuvre, supprime le titre de docteur qu’il
dénonce comme anti-chrétien et se fait appelé frère André ou cher frère.
En 1524, il a des confrontations publiques avec Luther dans sa ville
d’Orlamund puis à Iéna. Mais les deux ne réussissent pas à rapprocher leur point de
vue sur la réforme ni sur la question essentielle qui les opposait : la présence réelle.
Accusé d’être un fauteur de troubles, le pasteur est une fois de plus chassé. Il erre de
ville en ville avant de s’établir à Bâle où il finit sa vie en 1541 comme professeur de
Théologie.
Comme Carlstadt, Bucer non plus ne s’entend pas avec Luther sur la question
de l’Eucharistie. Pour lui, il n’y a pas d’impanation, de transsubstantiation encore
moins. Le pain eucharistique n’est pas vraiment le corps du christ ni le vin son sang.
Dans l’expression ceci est mon corps, il faut donner au verbe être, le sens de signifier.
A la diète d’Augsbourg, étant en désaccord avec Luther, il présente une confession
dite tétrapolitaine, parce qu’agréer par quatre villes à savoir : Strasbourg, Constance,
Memmingen et Lindau. Ceci ne l’empêchera pas de signer avec les luthériens en 1536,
la Concorde de Wittenberg, par laquelle il se rapproche des Luthériens. Son héritage
est aujourd’hui absorbé par le Luthéranisme.
30
Ami d’Erasme qu’il aide à mettre au point son édition du Nouveau Testament, il
est également ami de Zwingli dont il essaie de modérer les ardeurs.
En 1518, la découverte des écrits de Luther le conduit entrer au couvent. Il en sort
partisan convaincu de la Réforme qu’il introduit à Bâle.
Professeur à l’université puis curé de l’Eglise saint Martin, il obtient en 1527, des
catholiques Bâlois, la liberté de culte pour les réformés.
En 1528, il épouse une veuve qui après lui sera tour à tour la femme de Capito et de
Bucer.
En 1529, il fait interdire le culte catholique par le conseil de la ville.
Œcolampade entre en conflit avec Luther, comme les autres sur la question de la
présence réelle. Il propose lui, de comprendre l’expression « Ceci est mon corps »
comme suit : « ceci figure mon corps. » Il attribue donc au mot corps, un sens figuré.
De caractère modéré, Œcolampade, quoique ayant tracé sa propre voie est partisan
d’une entente protestante. Il s’emploie mais en vain à rapprocher les vues de Luther et
de Zwingli. Il meurt en 1531.
Conclusion
31
Chapitre VI Jean Calvin et sa réforme
Introduction
I - Jean Calvin
1. La formation
2. Le tournant
3. La conversion
II – L’œuvre de Calvin
1. Calvin et Genève
2. La doctrine de Calvin
3. Le Calvinisme en France
Conclusion
-----------------------------
Introduction
I - Jean Calvin
1. La formation
Jean Cauvin qui a latinisé son nom en Calvinus, est né en 1509 à Noyon en
France, dans une famille en pleine mutation sociale comme celle de Luther. De sa
mère, on ne sait à peu près rien, sinon qu’elle s’appelait Jeanne Lefranc, qu’elle était
issue du milieu bourgeois, qu’elle était très pieuse et qu’elle est morte jeune après
avoir donné quatre fils et deux filles à son mari. Son père Gérard Cauvin, issu d’un
milieu d’artisans et de batelier, s’est peu à peu élevé par l’office. Il est greffier de sa
ville, juriste et logicien ; il gère les affaires du chapitre de la Cathédrale. A ce titre,
Gérard a accès aux milieux aristocratiques et notamment chez des parents du comte
évêque de Paris.
Grâce aux fonctions qu’il assume auprès du chapitre cathédrale, Gérard peut obtenir
pour ses enfants, des bénéfices qui leur permettent de faire des études. Aussi Jean
fréquente-t-il le collège de Noyon (dit des capettes) puis se rend à Paris à l’âge de 14
32
ans en 1523. Là, il suit successivement des cours au collège de la Marche et au collège
de Montaigu. Le 1er est gagné à l’humanisme. Calvin en hérite le goût de l’élégance
latine. Le second qui exècre ce courant est resté à la scolastique et pratique une
discipline aussi rude que celle d’un monastère. Pendant cinq ans (1524-1529) Calvin
s’y soumet sous la direction du principal Noel Béda qui met ses élèves en garde contre
les méfaits de l’humanisme qui, dit-il, véhicule le paganisme. Là, Calvin apprend entre
autres à aimer saint Augustin.
2. Le tournant
33
3. La conversion
Le texte était une attaque de front contre « le Dieu de Pâte » le noyau même de
la doctrine catholique de l’Eucharistie à savoir la question de la présence réelle. Le roi
manifeste son mécontentement contre cette provocation sacrilège contre sa personne et
sa foi. La répression qui suit est très violente. Elle est encore plus corsée lorsqu’en
janvier 1535, les réformés récidivent. Au bout d’une longue procession expiatoire
organisée par le roi en personne, six évangélistes sont brûlés vif. Cette affaire qui jette
le roi définitivement dans le camp catholique change l’atmosphère de la France. Calvin
choisit le chemin de l’exil et se réfugie à Bâle. Là, il participe à la traduction et à la
publication de la première version française de la Bible Protestante parue en 1535. En
1536 pour défendre la position des persécutés, il publie l’un de ses ouvrages
majeurs : De l’institution de la religion chrétienne. Dans cet ouvrage, dont il dédiera
pour ainsi dire, la traduction française au roi (la préface est une épître à François 1 er), il
veut donner aux chrétiens, une clef pour bien comprendre l’Ecriture. L’œuvre connaît
un grand succès et révèle son auteur comme l’un des meilleurs porte-parole de l’Eglise
réformée.
34
II – L’œuvre
1. Calvin et Genève
Après la publication de l’œuvre sus citée, Calvin revient faire un bref séjour en
France puis la quitte définitivement. Il s’installe à Genève auprès de Guillaume Farrel
qu’il aide dans sa tâche, de ses grands dons d’organisateur. Toutefois, pour avoir voulu
aller trop vite en besogne, ce premier séjour à Genève se solde par un échec. Calvin et
son protecteur sont chassés de la ville après avoir été destitués. Il est alors appelé par
Bucer à Strasbourg et nommé pasteur auprès de la communauté des réformés français
réfugiés dans la ville. Calvin assume merveilleusement ces fonctions en même temps
que celles de professeur d’exégèse. Il trouve en outre le temps de se livrer à une
intense activité littéraire (traduction française des Institutions, Commentaire de la
Lettre aux Romains, Traité de la Sainte Cène.
35
prouvée, qui ont subi un examen sur la bonne et saine connaissance de l’Ecriture et qui
ont les capacités ainsi que les qualités requises pour la communiquer au Peuple. Le
candidat doit évidemment avoir de bonnes mœurs.
2. La doctrine de Calvin
- Dieu
Pour Calvin, Dieu est un être tout puissant dont la souveraineté s’exerce sur
toutes les créatures. La providence de ce Dieu se manifeste dans tous les événements
de l’histoire. Calvin considère ces vérités comme fondamentales. Cependant il estime
que la majesté de Dieu est trop haute pour que les hommes qui ne font que ramper sur
la terre puissent l’atteindre. Aussi, insiste-t-il particulièrement sur la manifestation de
Dieu en Jésus-Christ et en lui seul. Pour Calvin donc, l’article du Credo qui dit que
« Jésus est l’image du Dieu invisible » est d’une importance capitale. Cet article nous
rappelle que nous ne pouvons connaître Dieu que s’il se révèle à nous. La révélation
comporte deux volets : dans un premier temps, Dieu s’est fait connaître dans l’ordre de
la matière (la création et la connaissance humaine que Calvin appelle semence de
religion). Cette première révélation ayant été voilée par le péché, Dieu s’est fait
connaître une seconde fois à travers l’Ecriture qui permet à l’homme de saisir le projet
de rédemption que Dieu a sur lui. Ainsi, la Bible est la révélation par excellence dont
la clarté, la simplicité, le caractère complet et sans cesse actuel exclut la nécessité de
toute tradition. Mais la Bible elle-même resterait lettre morte si Dieu n’intervenait pas
36
par le témoignage intérieur de l’Esprit Saint dans le cœur du lecteur pour lui permettre
d’entendre sa voix dans les écrits des apôtres, des prophètes etc…
- La justification
L’homme ayant été corrompu par la chute originelle, sa volonté est entièrement
soumise au mal. Il ne peut donc en rien contribuer à son salut : c’est la négation du
libre-arbitre. La délivrance du pécheur a donc son fondement dans l’œuvre de Jésus. A
l’homme il n’est demandé qu’une seule chose : faire de la place en lui pour Jésus « par
le moyen de la foi qui n’est ni l’adhésion à quelque doctrine ni la croyance à quelque
fait histoire mais l’union intime entre le fidèle et son sauveur. La foi ainsi définie ne
dépend pas de l’homme, puisqu’elle a sa source dans une opération secrète de l’Esprit
Saint, opération qu’elle même dépend du bon plaisir de Dieu.
Calvin pense en effet que le fait que certains croient et d’autres pas est fixé de toute
éternité dans le dessein de Dieu. Les damnés (les réprouvés) sont ceux qui ont été
frappés par un décret spécial d’exclusion (réprobation) de Dieu.
Nous touchons là à la doctrine de la prédestination que Calvin défend théoriquement
mais dont il n’a puis tiré les conséquences pratiques. Chez lui comme chez Luther, la
justification de l’homme est la conséquence non des œuvres qu’il peut accomplir mais
de cette foi, don gratuit de Dieu.
- Les sacrements
- L’Eglise
Pour Calvin, l’Eglise est constituée par l’assemblée des élus du passé (l’Eglise
invisible) mais aussi des communautés encore en marche sur terre. Cette deuxième
partie de l’Eglise (l’Eglise visible) a été instituée par Dieu comme le lieu où la foi des
fidèles est alimentée, entretenue par la prédication et les sacrements. Comme telle, elle
est la mère de tous les enfants de Dieu et conformément à la sentence de Cyprien de
37
Carthage, celui qui se met hors d’elle ne peut espérer avoir part au salut. La question
étant de savoir à l’époque de la Réforme où se trouve la vraie Eglise, Calvin
disqualifie sans ambages, l’Eglise romaine : « Là où la Parole de Dieu est purement
prêchée et écoutée et où les sacrements sont administrés selon l’institution du Christ. »
Pour le service de l’Eglise ainsi définie, Calvin prévoit quatre types de ministres : les
pasteurs, les docteurs, les anciens et les diacres.
Les premiers ont pour charge d’annoncer la Parole de Dieu, les deuxièmes,
d’enseigner aux fidèles la saine doctrine. Le troisième groupe doit veiller à la droiture
de la vie morale de chaque fidèle. Les diacres enfin s’occupent de l’assistance
publique (aide aux pauvres, gestion des biens, assistance des malades.)
3. Le Calvinisme en France
Quand Calvin a quitté la France, c’était pour fuire les représailles. Il s’est
installé en dehors de son pays d’origine, mais n’a pas renoncé à le convertir au
Protestantisme. C’est dans ce but qu’il a traduit en 1541, son Institution chrétienne en
français et fait précéder cette traduction d’une lettre au roi de France. Dans cette épître,
il explique à François 1er le bien fondé de son entreprise et l’exhorte à soutenir son
effort pour amener le peuple à la vraie connaissance de Dieu, pour son salut.
De fait, durant tout son exil et jusqu’à sa mort, Calvin a considéré comme un
devoir pour lui de gagner la France à sa réforme. A cause du climat qui régnait en
France et de la place peu enviable faite au Protestantisme, Calvin à dû mener toute son
action, de façon clandestine. Le suivi des réformés de France qu’il n’a jamais cessé
d’encourager, de former et d’organiser de l’extérieur, s’est fait d’abord par courrier.
Calvin a entretenu une correspondance suivie avec des communautés, des familles et
même des individus. Ce suivi a ensuite été assuré par l’expédition d’écrits divers sur
les couvertures desquelles il n’hésitait pas à faire parfois inscrire la mention
« imprimée à Rome » pour les faire passer inaperçus tandis que d’autres écrits
entraient par contre-bande. Enfin et c’est peut être cela le plus important, le suivi des
communautés s’est fait par l’accueil des reformés en fuite ainsi que par la formation et
l’envoie des prédicateurs et des pasteurs en France. Cette méthode a si bien réussi que
malgré la violente répression, en 1561 (début des guerres de religion) on ne compte
pas moins de six cent soixante-dix (670) églises dressées en France.
38
Il est à noter tout de même que la pénétration des différentes couches sociales est
inégales. Les paysans ont peu adhérer à la foi protestante tandis que les artisans du
cuir, du textile et de l’imprimerie se sont convertis en masse, de même que les gros
négociants et les juristes.
Conclusion
Parce que la France se voulait une terre catholique – elle est appelée la fille
aînée de l’Eglise - elle est l’un des pays, voire même le pays où le Protestantisme a été
le plus violemment réprimé par la suite. Au nom de la pureté de la religion, de graves
atrocités ont été commises de part et d’autre, mais surtout par le camp catholique en
position de force. L’histoire retient comme point culminant du conflit, le massacre de
la saint Barthélemy, perpétrée dans la nuit du 23 au 24 août 1572 par les catholiques
contre les protestants. Malgré les efforts de réconciliation et la relative accalmie qui
suivra l’accession d’Henri de Navarre au trône (Henri IV 1589-1610), le
Protestantisme restera une religion marginale, pratiquement jusqu’à la Révolution.
39
Chapitre VII L’Anglicanisme
Introduction
I Henry VIII
1. Le roi catholique
2. la rupture avec Rome
3. l’élargissement du fossé sous Henry VIII
II Une période d’incertitude
1. Edouard VI : l’option protestante
2. Marie Tudor ou la tentative de retour au Catholicisme
III Elizabeth 1ère
1. Elizabeth et la religion
2. L’organisation de l’Eglise Anglicane
3. Elizabeth et les catholiques
Conclusion
---------------------------
Introduction
A la différence des réformes entreprises sur le continent qui ont été le fait
d’hommes du peuple, la réforme anglicane présente la particularité d’être venue de la
plus haute autorité du royaume, du roi en personne. Pour avoir pris l’initiative de la
rupture avec Rome, Henry VIII Tudor est en effet le souverain dont le nom est resté lié
à l’Anglicanisme. Il convient toutefois de préciser que la constitution d’une Eglise
Anglicane s’est faite en trois mouvements. Le premier, antérieur au Tudor, court tout
le long du Moyen Age. C’est celui de l’affirmation des droits de la monarchie anglaise
face aux prétentions de la papauté. Le terme d’Ecclesia Anglicana date de cette époque
où les rois, tout en maintenant l’unité dogmatique et en reconnaissant au pape le titre
de chef de l’Eglise Catholique, n’ont cessé de proclamer leurs droits, même en matière
ecclésiastique. La décision d’Henry VIII de créer une Eglise anglaise indépendante de
Rome constitue le deuxième mouvement. Loin d’être un rejet du Catholicisme, ce
schisme provient d’une cause occasionnelle de rupture. Le troisième mouvement
consiste enfin en l’organisation doctrinale et disciplinaire de la nouvelle Eglise par
Elisabeth 1ère comme une voie moyenne (Via Media) entre le Catholicisme romain et le
Protestantisme.
40
I Henry VIII
1. Le roi catholique
En 1509, Henry VII Tudor, roi d’Angleterre depuis 1485 meurt, laissant le trône
à son fils du même prénom. Ce dernier qui prend le nom d’Henry VIII, est alors un
jeune homme de 18 ans, cultivé, proche du Cénacle d’Oxford, distingués dans ses
manières, sportif, théologien à ses heures et surtout très attaché à la foi catholique qui a
reçu du Pape, le titre de Défenseur de la Foi pour avoir réfuter dans un ouvrage –
Assertio septem sacramentorum, - le De la Captivité de l’Eglise à Babylone de Luther.
De fait, le jeune roi se pose en défenseur de l’Eglise Catholique puisque l’une des
toutes premières tâches qu’il s’assigne est de réformer sans provoquer de rupture
dogmatique, l’Eglise d’Angleterre dont il trouvait le clergé corrompu et incompétent.
Pour mener sa réforme, Henry VIII, dispose d’un moyen efficace : il jouit du
congé d’élire qui assure aux souverains le droit de choisir les prélats et les abbés par le
truchement du chapitre. Il pousse donc les chanoines électeurs à choisir de préférence
des clercs acquis à sa politique de réforme pour purger le clergé de ses tares et de ses
brebis galeuses.
Sur le plan de la politique intérieure, Henry VIII avait besoin d’un héritier mâle
pour stabiliser la dynastie des Tudor face à des prétendant de la famille rivale des
York. Or, après la naissance de Marie en 1516, Catherine d’Aragon fait une série de
fausses couches et avance peu à peu vers la ménopause.
41
En 1527 donc, Henry VIII se fait citer à comparaître devant un tribunal où il confesse
le caractère incestueux de son mariage.
En 1528, il envoie auprès du pape, son conseiller le cardinal Wolsey pour négocier une
solution qui le libèrerait de ce poids. Mais sous la pression de Charles Quint, Clément
VII qui ne veut en outre pas désavouer son prédécesseur signataire de la dispense
tergiverse avant de finir par confier le dossier aux cardinaux Campeggio et Wolsey
qu’il nomme légats pour régler cette affaire.
En 1529, les investigations des deux légats se heurtent au refus catégorique de
Catherine d’Aragon qui à son tour fait appel au pape. L’affaire se solde finalement par
un échec pour Henry VIII. Furieux, le roi cherche des appuis à l’intérieur de son
royaume. Il obtient celui de l’université d’Oxford, renvoie Wolsey et s’entoure d’une
nouvelle équipe dont les membres se prénomment tous Thomas comme le cardinal du
reste :
- Thomas Howard, ami personnel du roi
- Thomas More qu’il nomme chancelier.
- Thomas Cranmer, ancien professeur de Cambridge qui devient par la
suite archevêque de Cantorbéry en 1532.
- Thomas Cromwell, ancien secrétaire particulier du cardinal Wolsey,
promu secrétaire d’Etat.
Les hommes du roi lui concilient l’appui du Parlement ainsi que le soutien de
l’Assemblée Générale du clergé des provinces d’York et de Cantorbéry.
Forts de tous les appuis cités, Henry VIII passe outre l’autorité romaine. Il
épouse Anne déjà enceinte en janvier 1533. En mars de la même année, Cranmer
devenu archevêque par élection du chapitre, reçoit les lettres de confirmation du Pape.
Il cite aussitôt Catherine à comparaître devant son tribunal à Cantorbéry. Devant le
refus de l’Infante, est prononcé un jugement par contumace à l’issue duquel son
mariage est déclaré nul et dissout le 23 mai 1533.
La réponse de Rome ne se fait pas attendre. Henry VIII et sa nouvelle épouse sont
excommuniés en juillet de la même année. C’est la rupture et le fossé ne cessera plus
dès lors, de s’élargir.
42
En 1534 est voté l’acte de suprématie qui fait du roi, le Chef suprême ( Supreme
Head) de l’Eglise et l’investit du « pouvoir de visiter, redresser, réformer et réprimer
les hérésies, les erreurs etc… »
La même année, est voté l’acte de succession qui confirme la nullité du premier
mariage et invite les sujets du roi à jurer qu’ils croient en la validité religieuse du
divorce.
En 1535 a lieu le vote du statut sur les trahisons qui prévoit des poursuites contre ceux
qui entreprennent des actions pour priver le roi d’un titre ou d’une dignité. Cette loi
fixe le cadre juridique qui permet au roi de poursuivre en justice les personnes qui,
publiquement, refusent entre autres de le reconnaître comme chef de l’Eglise
d’Angleterre. C’est elle qui a conduit au martyre, entre autres, Thomas More et John
Fisher, évêque de Rochester.
L’année 1536 est riche en événements. Elle est encore celle de l’exécution
d’Anne Boleyn, accusée d’adultère et d’inceste sous l’impulsion de Cromwell. En fait,
elle avait donné naissance à une fille, Elisabeth, et le roi, très déçu, avait trouvé ainsi,
le moyen de s’en débarrasser.
Anne Boleyn morte, Henry VIII se remarie en 1537 avec Jane Seymour qui lui
donnera un fils, Edouard, de santé fragile, auquel elle ne survit elle-même que douze
jours.
En 1539 est voté le statut des six articles qui a pour but d’abolir la diversité
d’opinion et d’établir une orthodoxie stricte. Elle établit une religion qui tout en se
démarquant du Catholicisme romain, se montre hostile au Protestantisme. Ceci, parce
qu’Henry VIII, après avoir rompu avec l’Eglise Catholique, n’entend pas non plus
tremper dans ‘‘l’hérésie protestante.’’ L’Anglicanisme se veut une voie moyenne entre
ces deux extrêmes. Aussi, le premier des six articles reconnaît-t-il la
transsubstantiation, le deuxième, l’inutilité de la communion sous les deux espèces, le
troisième, l’excellence du célibat sacerdotal, le quatrième la validité des vœux et
promesses de chasteté et prévoit des peines contre les prêtres qui les négligeraient. Le
cinquième article souscrit à la célébration des messes privées et le dernier maintient la
confession auriculaire.
Durant les huit années qui suivent la promulgation de ce statut, une violente répression
s’abat sur tous les marginaux, de quelque bord qu’ils soient.
43
En 1540, Henry VIII qui, devant la fragilité de la santé d’Edouard veut un autre
fils pour mettre sa dynastie à l’abri des prétendants rivaux, épouse Anne de Clèves,
une princesse protestante allemande. Cette femme ne lui plaît guère, mais elle est pour
lui le gage de l’appui politique des nations protestantes allemandes. Aussi, dès que les
circonstances politiques qui ont présidé à ce choix changent, il fait annuler son
mariage et épouse Catherine Howard, sa cadette de plus de 30 ans – elle a alors 18 ans.
Thomas Cromwell, inspirateur de la politique protestante et négociateur du mariage
avec Anne de Clèves est arrêté pour haute trahison jugé et exécuté le 28 juillet.
En 1542, Catherine Howard, accusée d’adultère est à son tour exécutée. Henry
VIII convole pour la sixième et dernière fois en noces avec Catherine Parr qui soigne
le roi, vieux et malade jusqu’à sa mort en 1547 et lui survit.
Lorsque Henry VIII meurt en janvier 1547, son fils Edouard n’a que 10 ans.
C’est tout de même à lui, et non à l’aînée que le défunt roi lègue le royaume par
testament. Dix-huit membres du Conseil sont chargés d’assurer la régence jusqu’à sa
majorité. Tous les groupes religieux en présence se précipitent afin de profiter de
l’interrègne pour s’imposer :
- Les protestants de tendance luthérienne réclament le passage du plan
disciplinaire au plan doctrinal de la Réforme pour imposer le
Luthéranisme en Angleterre.
- Les catholiques veulent un retour pur et simple au Catholicisme
romain
- Les modérés veulent conserver l’héritage d’Henry VIII, c’est-à-dire
un Catholicisme sans pape.
44
Entre 1547 et 1549, une série de révoltes éclate chez les paysans, pressurés par
leurs nouveaux maîtres (ceux qui ont racheté les terres des monastères), victimes d’une
réforme agraire faite en faveur de la haute classe et en forte minorité hostiles aux
nouvelles orientations religieuses. La répression est assurée par un nommé John
Dudley, chef du parti protestant qui remplace bientôt le duc de Somerset jugé trop
modéré. Avec l’appui de réfugiés protestants fuyant le continent et leur apport en
science théologique et en expérience, le parti protestant prend le dessus dans le
royaume.
En 1553 est publié un texte en quarante-deux articles qui précise les principaux
points de la foi anglicane :
- le prêtre devient un simple ministre de la parole. Il ne porte plus de
vêtements liturgiques.
- La transsubstantiation est rejetée tout comme la croyance au
Purgatoire et les pratiques qui lui sont liées (messe pour les défunts,
indulgences, invocation des saints…)
- Le culte lié aux images, aux reliques et les pèlerinages sont rejetés
- Des articles sur la justification par la foi et la prédestination inspirés
de la doctrine de Calvin sont introduits.
L’Angleterre a ainsi pris une sérieuse option pour le Protestantisme. Son élan va être
momentanément coupé par la mort d’Edouard VI en 1553.
Edouard VI mort à 16 ans n’a pas eu le temps d’avoir un héritier de son sang.
Le trône devait nécessairement échoir à l’une de ses sœurs. Par ordre de naissance,
l’héritière légitime ne pouvait être que Marie. Or, c’était de notoriété publique, Marie,
de mère catholique espagnole, était restée attachée au Catholicisme au point de refuser
ostensiblement de se soumettre à l’Acte d’uniformité et d’adopter le Prayer Book. Pour
éviter que les progrès vers le Protestantisme réalisés sous son règne ne soient ruinés
par cette ‘‘ demi-espagnole’’ entêtée, Edouard sentant venir sa mort avait essayé de
modifier l’ordre de succession en écartant ses deux sœurs au profit d’une nommée
Jane Grey, arrière-petite-fille d’Henry VII.
A la mort d’Henry VII, Jane Grey est proclamée reine d’Angleterre. Mais la
plus grande partie du peuple choisit le camp de Marie par fidélité aux Tudor. Au bout
45
de neuf jours de règne, Jane Grey et son parti sont obligés de s’incliner devant l’assaut
des troupes de cette dernière. Proclamée reine le 15 juillet, elle entre à Londres le 3
août pour y être sacrée en octobre. Commence alors un terrible compte à rebours pour
le Protestantisme.
1. Elizabeth et la religion
Après une enfance triste, Elizabeth est éduquée dans l’humanisme par des
précepteurs de tendance protestante qui la marquent de leur influence. Toutefois,
jusqu’à la fin de sa vie, elle laissera planer le doute sur sa vraie tendance religieuse, les
différentes situations difficiles qu’elle a connues durant son enfance puis sa jeunesse
ayant développé chez elle, une grande capacité de feinte. Ainsi, protestante déclarée
sous Edouard VI, elle n’a pas hésité à se faire catholique au plus fort de la persécution
ordonnée par sa sœur. Cette option se présentait à elle comme un choix d’autant plus
salutaire que sa sœur la soupçonnant de pactiser et d’ourdir un complot avec ses
ennemis, l’avait déjà fait mettre en résidence surveillée. Même une fois devenue reine,
l’orientation religieuse qu’elle adopte est dictée par son pragmatisme politique et par
les leçons tirées du règne sanglant de sa sœur aînée. En définitive, Elizabeth ne s’est
jamais déclarée elle-même de telle confession chrétienne ou de telle autre. Elle a su à
chaque fois s’adapter à la conjoncture qui prévalait. Son ‘‘instabilité’’ en matière de
religion a fait conclure à certains qu’elle était tout simplement athée ; ce qui est
certainement faux. D’autres ont fait d’elle une sceptique ; ce qui n’est pas vrai non
plus. A en juger par ses lectures, elle serait plutôt une crypto protestante, à la manière
de Marguerite d’Angoulême. La seule chose dont on est absolument sûr, c’est qu’elle
n’est pas catholique. On s’explique mal autrement son attitude vis-à-vis des
catholiques.
46
2. L’organisation de l’Eglise Anglicane
Du règne de Marie, Elizabeth a tiré des leçons. Elle a retenu entre autres que les
régions les plus prospères, celles de Londres et du Sud-Est, sont aussi celles qui sont
les plus touchées par la Réforme. Elle a outre perçu que la majorité de la population ne
veut pas d’un retour au Catholicisme. Elle choisit donc de reprendre la politique
réformatrice lancée par son père et son frère Edouard.
En 1562, la Convocation élabore le texte dit des trente-neuf articles, qui modifie
certains points importants de la foi catholique. Mais dans l’immédiat, Elizabeth hésite
à faire promulguer ce texte, parce qu’elle a hérité d’une alliance espagnole du règne
précédent et que, comme son père, elle ne veut alors pas passer du schisme à l’hérésie.
Son attitude évoluera cependant peu à peu vers un parti pris pour le Protestantisme
contre le Catholicisme. Ainsi, en 1563, le parlement adopte les trente-neuf articles. De
même, pour venir en aide aux protestants hollandais, la reine laisse en 1568, ses
corsaires intercepter des vaisseaux espagnols transportant le salaire des soldats qui
combattent pour Philippe II aux Pays-Bas, provoquant ainsi la rupture avec l’Espagne,
première puissance catholique d’alors.
47
catholiques eux-mêmes sont hostiles à la conciliation avec une reine déclarée de
naissance illégitime par un pape et excommuniée par un autre. Le parti catholique
forme au parlement une opposition très dure qui ne laisse à la reine d’autre choix que
celui de s’appuyer sur les protestants et de leur faire même des concessions qu’elle
aurait préféré ne pas faire. Devant les restrictions faites peu à peu à leurs libertés, les
catholiques se révoltent à plusieurs reprises et subissent une répression sans pitié.
L’année 1569 notamment est marquée par une révolte mémorable menée par les
seigneurs catholiques du Nord. La révolte est brisée et les catholiques arrêtée en
masse. L’excommunication de 1570 ne fait qu’empirer les choses. Pie V avait cru
intimider et ramener la reine à de meilleurs sentiments par cette sanction qui déliait par
la même occasion ses sujets de leur serment de fidélité. En d’autres temps et en
d’autres lieux, cette mesure aurait pu mettre en danger et Elizabeth et la dynastie des
Tudor. Mais le pape s’était trompé d’époque et de pays. La majorité des Anglais ne
voulaient revenir au Catholicisme romain. Dès lors, la décision de Pie V ne fit
qu’enfoncer ses coreligionnaires, considérés d’office comme des traîtres. Une
législation draconienne est mise en place contre eux entre 1571 et 1606. On peut citer
Conclusion
48
Chapitre VIII Le concile de Trente
Introduction
Conclusion
----------------------------
Introduction
Pour régler ses crises graves, l’Eglise avait toujours eu l’habitude de recourir à
la réunion de conciles. Cette voie avait permis notamment de résoudre les problèmes
nés du grand schisme d’Occident, lors des concile de Bâle (1414) et de Constance
(1431). Aussi, le peuple chrétien attendait-il devant la crise protestante, que se tienne
une grande assemblée du même genre. De celle-ci, les fidèles meurtris dans leur foi,
espéraient voir sortir des mesures qui leur permettent de concrétiser de façon plus
authentique, le profond désir de sainteté né des mouvements spirituels du XVème
siècle. Bien sûr, les initiatives personnelles n’ont pas manqué. Mais après les
déviations du mouvement protestant et l’incapacité de ses meneurs à s’entendre, il est
49
apparu plus clairement que l’œuvre de restauration, pour être solide et crédible devait
être prise en mains par les plus hauts responsables de l’Eglise.
C’est très tôt, dès les premières alertes de l’affaire Luther que l’on se convainc
de la nécessité de la tenue d’un concile. Dès 1524, Charles Quint qui, en tant que
prince chrétien, se sent le devoir de rechercher des solutions à la crise qui secoue son
empire, propose la ville de Trente comme lieu de la rencontre. Mais plusieurs obstacles
allaient retarder la réunion du concile.
3. L’ouverture du concile
50
C’est tout un programme qui est ainsi défini et son envergure ambrasse aussi
bien le dogme que la discipline et la morale. Le concile en effet vise la destruction des
hérésies, par l’union dogmatique et disciplinaire.
Ouvert le 13 décembre 1545, le concile devait être interrompu pour être repris
par trois fois. La première interruption intervient en 1547, officiellement pour cause
d’épidémie à Trente. Le concile reprend en 1551 pour être de nouveau suspendu au
bout d’une année. Les pères sont rappelés en janvier 1562 et mettent fin à leurs travaux
en décembre 1563.
1. La première phase
Les décrets dits de réformation précisent les conditions de choix des évêques,
rappellent l’interdiction du cumul des évêchés et des cures ; précisent les règles de
sacre des prélats, les règles d’établissement et d’entretien des institutions
d’enseignement ainsi que celles de la désignation des prédicateurs.
Tous ces travaux menent les pères jusqu’en mars 1547. C’est alors que le
cardinal Del Monte, légat du pape, prend prétexte d’une épidémie de peste pour
transférer le concile à Bologne. En fait, le souci de la santé des pères n’était pas sa
première ou tout au moins son unique préoccupation. Il voulait ainsi échapper à la
mainmise de l’empereur. Celui-ci, furieux, interdit aux évêques espagnols et allemands
de se rendre à Bologne. Finalement, devant une situation bloquée, les pères se
dispersent en septembre 1549.
2. La deuxième phase
Ce sont les sessions 9 à 16 ( 1er mai 1551- 28 avril 1552) qui constituent cette
deuxième phase du concile. Les décrets et canons touchent d’abord l’Eucharistie : les
51
pères réaffirment la transsubstantiation et précisent le culte et la vénération que l’on
doit au Très Saint Sacrement ainsi que la nécessité de le conserver dans un vaisseau
sacré (tabernacle). Ils indiquent enfin la préparation à laquelle il faut soumettre les
fidèles avant la réception du sacrement. Puis ils passent aux autres sacrements. Ils
abordent notamment la question de la pénitence et le problème de la contrition qui
consiste en « une douleur intérieure, dans la détestation du péché et résolution à ne
plus pécher à l’avenir. » Ils montrent en outre que l’attrition qu’ils définissent comme
« une honte du péché et une crainte du châtiment et des peines » est une étape sur le
chemin de la réception de la grâce.
Au printemps 1552, les pères sont une fois de plus obligés d’interrompre leurs
travaux, la ville de Trente étant menacée par les troupes protestantes de la ligue de
Smalkalde. S’ouvre alors une période de guerre peu favorable à la reprise du concile.
Jules III (1550-1555) qui succède à Paul III ne peut achever l’œuvre de son
prédécesseur. Paul IV, élu en mai 1555 aurait pu le faire. Mais on dit de lui que c’était
un homme très autoritaire qui n’aimait guère la discussion. Il n’agrée pas l’idée d’un
concile et préfère procéder personnellement à des réformes dans les institutions
romaines pour disposer de moyens puissants et efficaces pour la lutte contre l’hérésie.
Il réforme notamment, l’Inquisition.
Elu en 1559, Pie IV se trouve devant une situation toute nouvelle : Charles
Quint a abdiqué en faveur de son frère Ferdinand, le trône impérial en attendant que
son fils, Philippe II d’Espagne arrive aux affaires. Le nouvel empereur, les Français et
les Allemands veulent la réunion d’un nouveau concile pour réaliser l’accord avec les
protestants. Philippe II, roi de la plus grande puissance catholique de l’heure
( l’Espagne ) exige lui, la reprise et l’achèvement rapide du concile de Trente. Pie IV
finit par s’aligner sur le désir de ce dernier.
3. La troisième phase
Neuf sessions ont meublé le temps de cette troisième phase : les sessions 17 à
25 ( 18 janvier 1562 – 4 décembre 1563 ). Durant ces neuf sessions, les pères détaillent
davantage les questions relatives à l’administration de l’Eglise. Les pouvoirs des
évêques ainsi que ceux des curés sont longuement énumérés et précisés et pour cause.
C’est en effet sur l’efficacité de son système administratif et plus précisément sur le
bon exercice du pouvoir par le clergé séculier que l’Eglise compte alors pour assurer
son triomphe sur l’hérésie. Les pères reviennent également sur le caractère sacrificiel
de la messe pour répondre aux réformés qui reprochent quotidiennement à la messe
‘‘papiste’’ « son caractère blasphématoire, son imposture, ses erreurs et son impiété. »
52
Les canons précisent que la messe doit être dite en latin mais que le prêtre peut en
expliquer le sens dans la langue du pays.
Le concile institue également les séminaires pour la formation des jeunes clercs
en vue d’un meilleur rendement. Il élabore par ailleurs un nouveau missel, un bréviaire
et un catéchisme dont la publication est laissée à la charge du pape.
Le catéchisme romain dont la rédaction a été achevée en avril 1565 est divisé en
quatre parties. La première traite du symbole des apôtres, la seconde des sacrements, la
troisième des commandements de Dieu et la dernière, des prières. Il est publié en
1566, le bréviaire en 1568 et le missel en 1569.
En 1592, paraît une édition révisée de la Vulgate. Il faut également signaler la parution
de l’index du concile en 1564.
Depuis 1560, Pie IV a imposé à tous les bénéficiaires et à tous les évêques une
profession de foi. A la suite du pape et dans le même sens que lui, le concile a surtout
élaboré une nouvelle profession de foi. Celle-ci commence par le symbole des apôtres,
se poursuit par l’acceptation des traditions apostoliques et ecclésiastiques, par la
confession qu’il y a véritablement sept sacrements, par la réception des vérités définies
ou précisées par le concile telles que le péché originel et la justification. Il inclut
encore d’autres vérités à savoir que le véritable sacrifice est offert dans la messe pour
les vivants et pour les morts et qu’il y a un purgatoire. Suivent enfin la reconnaissance
du culte des saints, des reliques, des images, des indulgences. Le tout s’achève par un
serment d’obéissance au pape.
Conclusion
53
Histoire de l’Eglise : examen 2004
54
55