Cours Stéréochimie

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Département de Chimie

Faculté des Sciences


Université Mohamed V

Master Pharmaco chimie 1ère année

Module M1 ‘Stéréochimie Statique et Dynamique’

Cours
Pr. Hakima EL HAJJI

Année universitaire 2022-2023


Chapitre I
Stéréochimie Statique
Introduction générale
A la base de la chimie organique, on trouve les notions fondamentales de structure
moléculaire et de réactivité des composés organiques. On peut la diviser en trois secteurs:

La Structure: englobe les méthodes de détermination et d’analyse (analyses élémentaires,


spectrométrie de masse, RMN 1H et 13C, Infrarouge : IR, Ultraviolet : UV, Raman, RPE…),
la description des liaisons des molécules organiques (notion de liaisons de valence :
hybridations des éléments sp3, sp2, sp ; liaisons σ, π…), la répartition de la densité
électronique (effets électroniques inductifs I et mésomères M…) et la prévision de la structure
moléculaire (positions relatives des noyaux de la molécule : analyse configurationnelle et
analyse conformationnelle : c'est-à-dire l’étude de la stéréochimie statique de la molécule).

La Dynamique: se réfère à l’étude de propriétés physiques et des transformations chimiques


des molécules : c’est l’étude de la stéréochimie dynamique.

La Synthèse: englobe les activités visant à trouver des méthodes de transformation des
substances existantes en d’autres composés.

Ces trois secteurs sont interdépendants, mais la synthèse s’appuie sur la connaissance à la fois
de la structure et des réactions (dynamique chimique), alors que la compréhension des
processus dynamiques revient toujours à la connaissance détaillée de la structure moléculaire.
Il est donc essentiel de connaître parfaitement les principes de la structure et des liaisons
chimiques pour envisager la dynamique et la synthèse.
Principe de Stéréochimie en Chimie Organique
A une même formule brute (CxHyOz…) peuvent correspondre plusieurs structures moléculaires différentes les unes des
autres.
On appelle isomère: chaque assemblage moléculaire, et le terme constitution désigne la combinaison particulière des liaisons
et la succession des atomes caractéristiques de la structure.
Les stéréoisomères sont des structures de même constitution qui diffèrent par leur arrangement spatial. Nous distinguons :

Les stéréoisomères conformationnels, appelés aussi conformères, rotamères ou conformations, sont les divers arrangements
moléculaires variant par leur disposition spatiale en raison de la libre rotation autour des liaisons simples à l’exclusion de
toute rupture de liaison.
Les stéréoisomères configurationnels, appelés aussi énantiomères s’ils sont images l’un de l’autre dans un miroir et non
superposables. Les stéréoisomères qui ne sont pas énantiomères sont des diastéréoisomères.

Dans toute la chimie, la stéréochimie se manifeste sous le double aspect : statique et dynamique.
La stéréochimie statique regroupe toutes les données concernant la structure des molécules : c'est-à-dire la localisation dans
l’espace des atomes les uns par rapport aux autres: analyse conformationnelle et analyse configurationnelle.
La stéréochimie dynamique concerne la réactivité des molécules. Elle s’intéresse aux relations entre le déroulement des
réactions chimiques et la stéréochimie des composés impliqués dans ces réactions. Connaître le déroulement stérique d’une
réaction, signifie connaître la stéréochimie des produits formés.
L’intérêt d’une telle étude stéréochimique a des répercussions considérables sur l’évolution de la chimie organique (synthèse
des molécules actives, synthèse totale des molécules issus des produits naturels à intérêt thérapeutique: antibiotiques, anti-
inflammatoires, anticancérigènes…).
Stéréochimie Statique
A. Analyse conformationnelle
I- Introduction
L’énergie totale d’une molécule est fonction de sa géométrie: La forme de la molécule est avant tout déterminée par les
- répulsions entre atomes non liés entre eux, phénomènes de rotation autour des liaisons simples et les
- des tensions propres au système cyclique (distorsion de l’angle de diverses formes engendrées sont appelées conformations
liaison (angle de valence) (conformères ou rotamères). A l’équilibre la conformation
- des tensions de torsions (angle de torsion φ) dues à un alignement correspondant à la plus faible énergie.
imparfait de rotation ou de déstabilisation due à des longueurs de
liaisons ou des angles de liaison s’écartant des valeurs optimales…
II- Coordonnées et géométrie des molécules
Dans une molécule diatomique, la connaissance de d : distance qui sépare A et B suffit à définir la géométrie de la molécule.
Dans une molécule comportant trois atomes, il est nécessaire de connaître en outre
l’angle de valence θ de l’atome central.

Dans une molécule comportant un enchaînement de quatre atomes, il


faut connaître en plus l’angle de torsion φ définie par l’angle dièdre des
deux plans formés par la liaison centrale et chacune des liaisons latérales.

Dans le butane pris comme exemple, l’angle dièdre φ au niveau de la liaison C2-C3, est l’angle
que forment entre eux les plans C1, C2, C3 et C2, C3, C4.
L’angle positif est l’angle rentrant de rabattement dans le sens des aiguilles d’une montre de la
liaison située en avant du plan de projection de Newman.
L’angle est négatif si le rabattement se fait dans le sens inverse des aiguilles d’une montre.
Pour les molécules renfermant un plus grand nombre d’atomes rencontrées en chimie organique, l’attention est fixée sur les angles
dièdres φ des liaisons carbone-carbone. La variation de ces angles par la rotation autour de l’axe joignant les deux atomes et sans qu’il y
ait coupure des liaisons, modifie la géométrie de la molécule et change sa conformation. Les conformations d’une molécule sont les
diverses dispositions de ses atomes dans l’espace qui ne se différencient que par une rotation autour des liaisons sans rupture de
liaison.

Angles dièdres dans une chaîne protéique. Il existe deux


degrés de liberté de rotation, repérés par deux angles φ et
ψ. Les liaisons peptidiques sont en jaune et R1 et R2
indiquent les chaînes latérales de deux acides aminés
consécutifs
III – Facteurs modifiant la
géométrie des molécules

Volume des atomes: Lorsque deux atomes


non liés se rapprochent, une force de
répulsion importante apparaît. La distance
minimale à laquelle ces atomes peuvent
s’approcher permet de définir le rayon de
Van der Waals (a). Ce dernier (a) est plus
grand que le rayon de valence.

d0 : distance moyenne entre les atomes A et B avec le


minimum d’interaction et où le système atteint son
maximum de stabilité.
Le rayon de Van der Waals est une donnée importante ; elle permet d’évaluer l’encombrement stérique des molécules et des
groupes d’atomes. Cet encombrement peut influencer la conformation des molécules.

- Moment dipolaire
La liaison covalente entre deux atomes d’électronégativité différente fait apparaître des charges partielles aux extrémités
de la liaison. Exemple :

Les dipôles se repoussent lorsque leurs moments sont


parallèles. Cette répulsion peut influencer la conformation
des molécules.

Cette répulsion faible entre deux liaisons peu polarisées de type C-H est loin d’être négligeable entre deux orbitales
occupées par des doublets n.
- Liaison hydrogène.
La formation d’une liaison hydrogène (une liaison entre un hydrogène
mobile et un hétéroatome) dont la valeur énergétique peut atteindre 5 Kcal,
est susceptible d’intervenir dans les conformations d’une molécule en
favorisant l’une d’entre elles, bien qu’elle soit généralement défavorisée.

IV- L’énergie conformationnelle


Une molécule adopte la géométrie qui minimise son énergie totale. Cette énergie,
appelée énergie stérique est la somme de plusieurs contributions.
E(r): est la composante d’énergie associée à l’étirement ou à la compression des liaisons simples. Elle a pour expression mathématique:
avec Kr : constante de la force d’étirement ; r : la longueur de la
liaison ; r0 : longueur normale de la liaison

E(θ): est l’énergie de la distorsion de l’angle de liaison (angle de valence), E(φ): est l’énergie de la torsion ou tension de torsion, appelée tension de
appelée aussi contrainte angulaire ou contrainte de Baeyer. Ces angles de Pitzer . C’est une fonction sinusoïdale de l’angle de torsion φ. Elle
liaison sont facilement déformés afin de minimiser les tensions à l’intérieur de
résulte de la barrière à la rotation autour des liaisons simples. La barrière
la molécule. E(θ) est fondamentale dans le cas des molécules cycliques.
de torsion est exprimée par:
avec V0 : la barrière rotationnelle ; φ : l’angle de
avec V0 : la barrière rotationnelle ; φ : l’angle de
torsion. Pour les hydrocarbures, V0 est égale à la E(φ) = V0 /2 (1+cos3φ) torsion. Pour les hydrocarbures, V0 est égale à la
barrière de potentiel de l’éthane : 3 kcal/mole.
barrière de potentiel de l’éthane : 3 kcal/mole.

E(d) : est l’énergie qui résulte des interactions entre atomes non liés entre eux. Ces interactions peuvent être inter ou intramoléculaires.
Les intramoléculaires qui rentrent dans le cadre de la stéréochimie statique et qui définissent l’énergie E(d1), peuvent être des interactions
attractives ou répulsives.
A et B : constantes qui dépendent des atomes considérés
ρ : la distance qui les sépare.
Le terme attractif -A/ρ6 : est dû aux forces de dispersion (attractives) ou forces de London. Ces interactions attractives, assez faibles,
résultent de la polarisation des électrons de chaque atome par l’autre atome.
Le terme répulsif B/ρ12 : est dû aux forces de répulsion dites de Van der Waals, suite aux interpénétrations des nuages électroniques
pour des distances inférieures à la somme des rayons de Van der Waals.
D’autres interactions peuvent intervenir dans E(d), il s’agit des interactions électrostatiques entre moment dipolaire, des interactions
d’association type liaison hydrogène et interactions de résonance des systèmes insaturés (conjugaison voire hyperconjugaison).
V- Les équilibres conformationnels
Les populations des conformations en équilibre sont liées à leurs stabilités relatives. La vitesse d’interconversion dépend de la hauteur des
barrières énergétiques séparant les différents conformères. L’origine de cette barrière provient de l’interaction des orbitales de deux atomes
non liés (répulsions de Van der Waals) et est accessibles par diverses méthodes physiques. Elle est de l’ordre de 3 Kcal/mole: valeur
faible et ne permet pas de séparer des conformères à la température ambiante. La proportion des conformations varie en fonction de
leur énergie selon la relation de Boltzman.
avec na et nb : les populations des niveaux énergétiques correspondant
aux conformères a et b qui diffèrent de ΔG.

Soit le cas des deux conformères a et b en équilibre à la température T.

na et nb : populations relatives aux deux


conformations a et b

On a : K: constante d’équilibre conformationnel


na + nb = 100
𝒏𝒏𝒃𝒃
𝑲𝑲 = = 𝒆𝒆−𝜟𝜟𝑮𝑮/𝑹𝑹𝑹𝑹 ΔG : la différence d’énergie libre entre les deux
𝒏𝒏𝒂𝒂 conformations a et b.
La relation de Boltzman conduit à la représentation
graphique ci-dessous:
VI- L’analyse conformationnelle.
L’analyse conformationnelle a pour but d’examiner les conformations adoptées par les molécules et de dégager parmi celles-ci celles qui
sont énergétiquement favorisées : c'est-à-dire privilégiées.

VI- 1- L’analyse conformationnelle autour de liaisons non incluses dans un cycle.


Il concerne l’examen de la rotation autour des liaisons simples des composés de type suivant :

VI-1-1- L’analyse conformationnelle des molécules type M1


- cas de l’éthane
La valeur de l’énergie potentille de la molécule varie en fonction de l’angle dièdre entre deux liaisons C—H prises comme référence.
Elle est de l’ordre de 3 Kcal/mole (12 KJ) quand les liaisons sont vis-à-vis. En utilisant la projection de Newman, les conformations
remarquables, éclipsées (défavorisées) et décalées (privilégiées), sont les conformations caractéristiques rencontrées au cours de la
rotation autour de la liaison simple C1—C2.
La variation de l’énergie potentielle de la molécule en fonction de l’angle dièdre est représentée par la figure suivante.

La conformation éclipsée représente la barrière de rotation de l’éthane. Cette barrière énergétique est appelée tension de Pitzer.

- Cas du n-butane
Les conformations caractéristiques,
éclipsées et décalées, sont obtenues suite
aux diverses rotations autour de la liaison
C2—C3.
Pour φ = 0° et 360° max. conformation éclipsée
C1-C4 au plus près E= 6 kcal.mol-1
Pour φ = 60° et 300° mini conformation
décalée gauche, E= 0,8 kcal.mol-1
Pour φ = 120° et 240 max. conformation éclipsée
E= 3,4 kcal.mol-1
Pour φ = 180° min. conformation décalée anti C1-
C4 au plus loin E= 0 kcal.mol-1

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