Alioua

Recherches Cognitives, 2017, N°8
L’Etablissement scolaire au cœur de la Réforme de

l’Enseignement
Khalid ALIOUA
Président d’ALCO – Rabat, Maroc
« … Nul doute que l'adhésion des jeunes reste tributaire de leur niveau de
qualification et de la manière avec laquelle ils sont préparés pour l'avenir. Ceci nous
renvoie ipso facto au système d'éducation et à sa capacité à former les générations
montantes et à les préparer à s'investir pleinement dans le processus de
développement et de progrès démocratique de la société. Il est donc impératif de
se pencher avec sérieux et résolution sur ce système que Nous plaçons, d'ailleurs,
en tête de nos priorités nationales. Car ce système, qui nous interpelle aujourd'hui,
se doit non seulement d'assurer l'accès égal et équitable à l'école et à l'université
pour tous nos enfants, mais également de leur garantir le droit à un enseignement
de qualité, doté d'une forte attractivité et adapté à la vie qui les attend… »
Extrait du discours de SM le Roi Mohammed VI, du 20 août 2012
* * *
La croissance dont bénéficie le Maroc ces dernières décennies rend de

plus en plus crucial le rôle du système éducatif en tant que levier du
développement économique et social.
Toutefois, le système éducatif du Maroc se heurte à des difficultés liées
essentiellement à l’insuffisance des services d’éducation, aux inégalités entre
les sexes à différents niveaux, aux disparités entre le milieu urbain et rural et à
des taux élevés de déperdition scolaire.
Afin de remédier à ces difficultés, le Maroc s’est inscrit dans un vaste
chantier de réformes. La Charte nationale d’éducation et de formation a été
adoptée en 1999, annonçant la période 2000-2009 comme une décennie de
l’éducation. En 2009 un Plan d’urgence pour l’éducation est mis en place pour
parer aux déficits du système. En 2015, le pays s’est doté d’une vision (2015-
24 L’Etablissement scolaire au cœur de la Réforme de l’Enseignement
2030), produit par le Conseil Supérieur de l’Education et de la Formation.

Cette vision enclenche dès la rentrée scolaire 2015-2016, un processus de
réforme structurel, au niveau pédagogique, encadrement, infrastructure…etc.
Les problématiques du système éducatif marocain diffèrent selon qu’il
s’agisse de l’enseignement primaire, secondaire ou supérieur. .
Le cycle primaire, comptait en 2014, 7.541 écoles publiques et 2.374
écoles privées enregistrant ainsi un taux net de scolarisation de 99,5% et un
taux d’inscription de 117.5% à l’école primaire.
Le système éducatif marocain a incontestablement progressé sur le plan
de l’élargissement de l’accès à la scolarité, mais des progrès restent à accomplir
au niveau de la qualité. En effet, il ne suffit pas d’assurer la généralisation du
primaire, encore faut-il assurer de meilleurs taux de passage du primaire au
secondaire.
Positionnement de la présente contribution :
En 2011, les enquêtes menées par l’Association Internationale
d’Evaluation du rendement en éducation (IEA), notamment TIMSS relatif à
l’enseignement des mathématiques et des sciences et PIRLS sur les progrès en
lecture ont mis en évidence la faiblesse du niveau d’apprentissage des élèves
marocains par rapport à leurs pairs dans les autres pays participants aux
enquêtes (Mathématiques : 337/500, Sciences: 323/500, Lecture et écriture:
310/500) .
L’amélioration des performances du système scolaire agrège plusieurs
dimensions : formation des enseignants, curricula, rythmes scolaires et
parascolaires, développement des compétences…etc. De nombreux outils
Recherches Cognitives, 2017, N°8, pp: 23-28

Khalid ALIOUA 25
d’évaluation ont été mis en place pour observer la qualité et redresser les
mauvaises performances.
Jusqu’à très récemment, on ne disposait pas d’outils d’évaluation des
prestations fournies par les Etablissements Scolaires. Pour combler cette
carence et en complément des TIMSS et PIRLS, la Banque Mondiale a initié
des IPS : Indicateurs de Prestation de Service, mesurés à travers une enquête
standardisée et à régularité prévisible. Ce type d’outil basé sur la collecte des
données auprès des Etablissements Scolaires, des Enseignants et des Elèves
permet d’évaluer la qualité et la performance des services dans les écoles (et
également les établissements de santé).
Ces indicateurs analysent les efforts et les capacités du personnel ainsi
que la disponibilité des principaux facteurs et ressources contribuant au bon
fonctionnement d’une école ou d’un établissement de santé. Elles permettent
d’obtenir des indicateurs représentatifs à l’échelle nationale, ventilés en
fonction de l’emplacement (rural ou urbain) et du type de prestataire (public
ou privé).
Par ailleurs, en éducation, les IPSE : Indicateurs de Prestation de Service
en Education sont structurés comme suit :
Disponibilité d’intrants clés Effort du prestataire Compétence du prestataire
Infrastructure scolaire Absence de l’école Enseignant ayant un niveau
Disponibilité de matériel Absence de la salle de classe minimal en mathématiques,
didactique de base français et arabe
Rapport qualité Qualité de l’instruction
enseignant-élève Temps d’enseignement
Elèves par manuel scolaire quotidien

La présente contribution s’inscrit dans le cadre de la recherche d’une

nouvelle démarche d’évaluation des performances du système scolaire. La
démarche préconisée s’intéresse à l’aspect mise en place de dispositifs centrés
sur le rôle de l’Etablissement scolaire comme levier de la connaissance des
performances, des carences et des dysfonctionnements du fonctionnement et
de l’organisation de l’Enseignement. La contribution se limite à l’Etude de
l’Ecole (cycle primaire). Elle cible le 2éme et 3éme maillon (Collège et Lycée)
de la chaîne du processus éducatif.
Il s’agit en particulier d’explorer les possibilités d’obtenir une
amélioration du rendu du système scolaire grâce à une redéfinition du rôle et
des compétences de l’Etablissement : autonomie, ouverture sur
l’environnement socio-économique, approche inclusive, suivi des
performances, diversification des rythmes de la vie scolaire, passerelles entre
enseignement général et formation professionnelles…etc. telles seraient
quelques un des attributs de l’Ecole répondant aux ambitions de la vision
2015-2030.
Justification du Sujet : La mise en place d’un nouveau modèle de
gestion des établissements scolaires est traitée dans la Vision 2030 qui la
considère dans le préambule et les leviers 22, 23 comme composante de la
stratégie innovante pour assurer l’équité, le rendement et l’articulation à
l’environnement externe. Agir sur les rythmes de la vie scolaire, la
modernisation du management, l’introduction de soft skills, repositionner
l’Etablissement comme structure de socialisation avec une ouverture sur son
environnement externe, ses partenaires socio-économiques, les collectivités
locales, le secteur privé… sont autant d’objectifs nobles. Mais peut-on réussir à
transformer notre bonne vieille perception du fonctionnement de

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l’Etablissement ? Oui à condition de se quitter le domaine des ambitions et de

s’inscrire dans celui de l’action. Or l’action suppose de grandes
transformations dans la gouvernance, le suivi, l’évaluation et la mobilisation
des acteurs. Les positions des uns et des autres de ces acteurs doit être
actualisé et tout changement de rôle doit être précédé d’une volonté de faire.
Or on entend souvent ici et là qu’on demande trop aux managers des
Ecoles : les Directeurs sont débordés par les sollicitations fréquentes de
l’Administration Centrale, de la société et des différentes parties prenantes du
système éducatif. Ceci est vrai. Et cela aboutit souvent à de la saturation
démobilisatrices : trop de changements, trop de projets expérimentaux, trop
d’orientations…bref, l’objectif de réforme se perd dans les méandres des essais,
des projets pilotes, des directives et des contre directives…
On dira que c’est le propre de toute politique centrale et centralisatrice.
Cependant, le rythme du changement social, socio-économique et socio-
politique est tel qu’il faudra bien convenir que l’Ecole se trouve balloté entre la
pression de la demande sociale et économique et la faiblesse des moyens, la
lourdeur des procédures et lenteurs des processus de décision.
Notre postulat dans cette contribution part de la nécessité d’une
démarche de Reengineering du management scolaire. Telle est aujourd’hui la
tendance mondiale en matière de potentialisation des ressources internes et
externes du système.
Nous disposons aujourd’hui d’une ambition clairement établie pour
l’Etablissement scolaire, telle qu’elle ressort de l’intitulé même de la Vision
2030 : « Pour une Ecole de l’Equité, de la Qualité et de la Promotion ». Cette
ambition traverse les orientations définies dans les 23 leviers traités de la

réforme du système éducatif Marocain. C’est une opportunité. Elle demande à

être prise en charge par l’ensemble des parties prenantes du système scolaire
Marocain.

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