Guide Pratique de Rééducation Vestibulaire

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Guide pratique de rééducation vestibulaire

Chez le même éditeur

Vertiges, par J.-P. Sauvage, 3e édition, 2020, 376 pages.


Guide d'ORL, par J.-P. Sauvage, 2016, 344 pages.
Les Acouphènes, par M. Ohresser, 2017, 232 pages.
Audiologie pratique. Audiométrie, par F. Legent, P. Bordure, C. Calais, O. Malaard, A. Chays, J. Roland,
S. Garnier et X. Debruille, 2011, 308 pages.
Guide pratique de
rééducation vestibulaire
Jean-Pierre Sauvage
Professeur émérite des universités, ancien chef du service ORL, CHU de Limoges

Hélène Grenier
Kinésithérapeute, service ORL, CHU de Limoges

2e édition

Illustrations Carole Fumat


Elsevier Masson SAS, 65, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex, France

Guide pratique de rééducation vestibulaire, 2e édition de Jean-Pierre Sauvage et Hélène Grenier.


© 2023 Elsevier Masson SAS
ISBN : 978-2-294-78026-4
e-ISBN : 978-2-294-78053-0
Tous droits réservés.

Les praticiens et chercheurs doivent toujours se baser sur leur propre expérience et connaissances
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Sommaire
Table des compléments en ligne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . VII
Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . XI
Liste des abréviations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . XIV

Chapitre 1 Anatomie et physiologie du système vestibulaire . . . . . . . . . 1


Chapitre 2 Vertiges positionnels paroxystiques bénins
du canal postérieur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Chapitre 3 Vertiges positionnels paroxystiques bénins
du canal horizontal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
Chapitre 4 Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole
diagnostique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
Chapitre 5 Approche de l’équilibration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
Chapitre 6 Névrite vestibulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
Chapitre 7 Suivi d'une névrite vestibulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
Chapitre 8 Tiroirs de la rééducation des déficits vestibulaires
unilatéraux brutaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103
Chapitre 9 Vestibulopathies bilatérales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115
Chapitre 10 Déficits vestibulaires partiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
Chapitre 11 Vertiges itératifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
Chapitre 12 Chutes de la personne âgée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
Chapitre 13 Bilan vestibulaire du kinésithérapeute . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147
Chapitre 14 Conduite et surveillance d'une rééducation vestibulaire . . . . 153
Chapitre 15 Pièges de la pathologie vestibulaire centrale . . . . . . . . . . . . . . 157
Chapitre 16 Tester ses connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
Chapitre 17 Histoires cliniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
Chapitre 18 Épistémologie des vertiges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215
Table des compléments
en ligne
Des compléments numériques consistant en des conférences et vidéos sont asso-
ciés à cet ouvrage. Ils sont indiqués par un picto dans le texte. Pour accéder
à ces compléments, connectez-vous à l’adresse http://www.em-consulte.com/e-
complement/478026 et suivez les instructions pour activer votre accès.

Conférences
Chapitre 1 – Anatomie et physiologie du système vestibulaire
Chapitre 2 – Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal postérieur
Chapitre 3 – Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal
Chapitre 4 – Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole
diagnostique
Chapitre 5 – Approche de l’équilibration
Chapitre 6 – Névrite vestibulaire
Chapitre 7 – Suivi d’une névrite vestibulaire
Chapitre 8 – Tiroirs de la rééducation des déficits vestibulaires unilatéraux
brutaux
Chapitre 9 – Vestibulopathies bilatérales
Chapitre 10 – Déficits vestibulaires partiels
Chapitre 11 – Vertiges itératifs
Chapitre 12 – Chutes de la personne âgée
Chapitre 13 – Bilan vestibulaire du kinésithérapeute
Chapitre 14 – Conduite et surveillance d’une rééducation vestibulaire
Chapitre 15 – Pièges de la pathologie vestibulaire centrale
Vidéos
Chapitre 1 – Anatomie et physiologie du système vestibulaire
Diapositive 1-10
Oscillopsies.
Diapositive 1-20
Nystagmus physiologiques horizontaux.
Viii

Diapositive 1-24
Nystagmus physiologique vertical, tête tournée à droite.
Diapositive 1-25
Nystagmus physiologique vertical, tête tournée à gauche.
Chapitre 2 – Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal postérieur
Diapositive 2-13
Manœuvre de Sémont pour un VPPB du canal postérieur gauche.
Diapositive 2-19
Manœuvre d’Epley pour un VPPB du canal postérieur droit.
Diapositive 2-20
Manœuvre d’Epley à la tête du patient.
Diapositive 2-22
Manœuvre réalisée par A. Sémont pour un VPPB du canal postérieur gauche.
Chapitre 3 – Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal
Diapositive 3-14
Manœuvre de Baloh-Lempert pour un VPPB du canal horizontal.
Diapositive 3-22
Cupulolithiase du canal horizontal droit.
Diapositive 3-23
Œdème cupulaire du canal horizontal chez une femme enceinte (côté inconnu).
Chapitre 4 – Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole
diagnostique
Diapositive 4-10
VPPB du canal antérieur gauche.
Diapositive 4-12
Manœuvre de Dix et Hallpike gauche avec rétropulsion.
Diapositive 4-14
Conversion d’un VPPB du canal postérieur gauche en un VPPB du canal horizontal
gauche.
Diapositive 4-15
VPPB multiple des canaux postérieur droit et gauche.
Diapositive 4-17
Phase secondaire dans le cas d’un VPPB du canal horizontal gauche.
Diapositive 4-20
VPPB post-traumatique.
Diapositive 4-22
Syndrome de Lindsay et Hemenway gauche.
Chapitre 6 – Névrite vestibulaire
Diapositive 6-7
Nystagmus horizontal rotatoire après labyrinthectomie droite.
ix

Diapositive 6-8
Névrite gauche au 2e jour.
Chapitre 7 – Suivi d’une névrite vestibulaire
Diapositive 7-10
HIT normal.
Diapositive 7-11
Déficit vestibulaire gauche révélé par un HIT positif.
Diapositive 7-13
Déficit gauche au 10e jour.
Diapositive 7-15
Névrite vestibulaire gauche au 10e jour.
Diapositive 7-17
Épreuves post-giratoires normales.
Chapitre 8 – Tiroirs de la rééducation des déficits vestibulaires unilatéraux
brutaux
Diapositive 8-3
Exercices de Tusa.
Diapositive 8-6
Cibles égocentrées.
Diapositive 8-7
Lecture tête mobile normale.
Diapositive 8-8
Lecture tête mobile trop difficile.
Diapositive 8-16
Les différents exercices de marche.
Diapositive 8-17
Plateau basculant.
Diapositive 8-22
Arrêts brusques au fauteuil de Sémont.
Diapositive 8-23
Rotations passives avec arrêts brusques et fixation.
Diapositive 8-24
Rotations actives au tabouret dans la lumière et en fixation.
Diapositive 8-25
Technique du point fixe utilisée par les danseuses étoiles.
Diapositive 8-30
Équilibre sur le seul vestibule.
Diapositive 8-31
Réalité virtuelle.
x

Chapitre 9 – Vestibulopathies bilatérales


Diapositive 9-4
Vestibulopathie bilatérale chez un chef d’orchestre classique.
Diapositive 9-6
Test d’acuité visuelle dynamique (AVD).
Diapositive 9-8
Rééducation de type AVD.
Chapitre 10 – Déficits vestibulaires partiels
Diapositive 10-3
Déficit vestibulaire droit subaigu à 70 ans.
Diapositive 10-9
Protocole de Norré.
Diapositive 10-17
Principe du HIT électronique : filmer et analyser les mouvements de l’œil.
Chapitre 11 – Vertiges itératifs
Diapositive 11-6
Neurotomie vestibulaire droite.
Chapitre 12 – Chutes de la personne âgée
Diapositive 12-1
Réaction de déséquilibre après le relevé de Dix et Hallpike chez un sujet âgé.
Diapositive 12-4
VPPB des canaux postérieur et horizontal droits chez un sujet âgé.
Diapositive 12-7
Presbyvestibulie avec HIT positif des deux côtés.
Diapositive 12-10
Presbyvestibulie avec faibles nystagmus post-giratoires.
Diapositive 12-15
Head shaking dans une démence vasculaire (maladie des microvaisseaux).
Chapitre 13 – Bilan vestibulaire du kinésithérapeute
Diapositive 13-7
Test d’acuité visuelle dynamique.
Diapositive 13-11
Test vestibulospinal de Fukuda.
Diapositive 13-12
Test vestibulospinal de Fukuda significatifs.
Avant-propos
Cet ouvrage est consacré aux vertiges et à la pathologie de l’appareil vestibulaire.
Il se veut didactique. Une fois digérées les notions d’anatomie et de physiolo-
gie, il faut écouter le patient, poser des questions et pratiquer un examen sté-
réotypé. Souvent, un détail met sur la voie. L’objectif est d’inclure le patient dans
une logique diagnostique. C’est ludique et souvent, cela permet de proposer un
traitement physiothérapique efficace.
L’ouvrage comporte cinq étapes :
1. regarder et écouter 15 vidéoconférences qui cherchent à convaincre ;
2. mémoriser les points fondamentaux en lisant les textes écrits de chaque dia-
positive avec leurs schémas correspondant ;
3. répondre aux questions à choix multiples dont l’objectif est de provoquer une
démarche active consistant à revenir sur les textes et les vidéos inclus dans les
diaporamas concernés ;
4. s’intéresser aux 25 histoires cliniques proposées qui possèdent chacune le
détail clé du diagnostic et/ou de la conduite à tenir ;
5. lire l’épistémologie des vertiges pour se distraire.
Qu’est-ce que le vertige ?
En 1892, dans leur dictionnaire des sciences médicales, Dechambre, Duval et Lere-
boullet donnent une définition académique du vertige : « État pathologique dans
lequel les objets semblent tourner autour de nous ». Mais, immédiatement après,
ils expriment leur embarras : « Dans le langage des malades et de beaucoup de
médecins, le mot vertige exprime des états cérébraux assez différents les uns des
autres et particulièrement celui dans lequel le malade, sans voir les objets tourner
ni se déplacer d’aucune manière, se sent peu assuré dans sa marche, fait de temps à
autre quelques pas de côté, et craint à chaque instant de tomber. Le vertige s’observe
toutes les fois que l’on ne peut apprécier rapidement l’état des rapports qui peuvent
exister entre soi-même et les objets extérieurs. » Le commentaire de ces auteurs
est ambigu : « Pathologiquement, on observe le vertige dans certains mouvements
accidentels (mouvements de l’escarpolette, mouvements d’un navire, etc.). Il survient
aussi dans l’anémie cérébrale, la congestion cérébrale, l’encéphalite, et presque dans
toutes les maladies, surtout les tumeurs du cerveau, dans les empoisonnements
(surtout par la quinine), dans les cas de maladie d’estomac, des voies urinaires, de
l’oreille, etc. Il peut être le prodrome de l’épilepsie ou l’une de ses manifestations les
plus habituelles »
En résumé : « le vertige, ce n’est pas grave mais ça peut être très grave ! »
XII

A-t-on progressé depuis 1892 ?


Les Anglo-Saxons ne sont pas tombés dans cette ambiguïté car ils disposent du
mot dizziness qui n’a pas la même charge émotionnelle que vertigo. En français, on
pourrait traduire dizziness par « pseudo-ébriété ». Au pays du vin, l’ébriété n’est pas
pathologique. Le vertige, lui, doit être pris au sérieux car la pathologie vestibulaire
a émergé dans les services d’urgence avec l’expérience des ORL, des neurologues
et des kinésithérapeutes.
Diagnostics à la mode
Depuis 100 ans, on n’a pas arrêté d’agacer nos maîtres qui recevaient les patients
vertigineux.
Autrefois, tout était « Menière »1. Il est vrai que pour les neurologues, tout ce qui
était périphérique était Menière. Un petit vertige pas grave en somme. Pourtant,
la vraie maladie de Menière, c’est rare mais terriblement invalidant !
Aujourd’hui, tout est « cristaux »2 : abus de vertige positionnel paroxystique bénin
(VPPB).
Pour nos patients
Il faut concevoir qu’avoir un grand vertige est particulièrement stressant, la terre
qui tourne à l’envers, quelque chose qui se rompt dans la tête : une hémorragie
cérébrale peut-être, ou encore une tumeur qui se déplace dans le cerveau ! Alors
vous rencontrez quelqu’un qui vous dit que c’est « les cristaux ». Tout d’un coup,
vous voilà rassuré. Ce n’était qu’un VPPB. Autrefois, avoir un beau Menière, ça
c’était grandiose. Mais maintenant, avoir des « cristaux », ça fait un peu « came-
lote ». Il est vrai que le VPPB représente un tiers de tous les vertiges. Mais le VPPB,
ce n’est pas si facile ! On vous réclame une « manipulation miracle ». Mais de quel
canal s’agit-il ? Il ne suffit pas de « bradasser » le patient dans n’importe quel sens.
Il faut comprendre ce que l’on fait.
En bref : le vertige, un diagnostic difficile
Des sensations vertigineuses sont des symptômes non spécifiques associés à de
multiples causes de malaises physiques ou psychiques. La difficulté est d’en distin-
guer les atteintes vestibulaires périphériques et les causes centrales.
L’atteinte vestibulaire provoque des vertiges. L’équilibre est en effet une sensation
reposant sur la symétrie des signaux envoyés aux structures centrales par l’appareil
vestibulaire des deux oreilles. Dans ces atteintes vestibulaires, le vertige n’est pas
seulement l’illusion de tourner, de chanceler ou de se pencher. Il peut s’accom-
pagner de nausées et de vomissements sévères, de désorientation spatiale, de
troubles de l’équilibre avec chutes.

1 Prosper Menière, 1799-1862. En même temps que la maladie qu’il avait décrite a été détournée,
l’accent sur le premier « e » apparaissait.
2 Censés être provoqués par une lithiase dans les canaux semi-circulaires.
XIII

Les atteintes vestibulaires périphériques correspondent à des atteintes de l’oreille


interne et du nerf vestibulaire. On décrit les VPPB supposés en rapport avec la
migration de débris d’origine otolithique dans les canaux semi-circulaires. Il y a
encore la névrite vestibulaire qui est une atteinte du nerf vestibulaire ou de son
ganglion par un virus herpès ayant infecté le patient très longtemps avant l’ap-
parition des vertiges (ce qui expliquerait l’absence de virage récent des sérodia-
gnostics). La maladie de Menière est supposée être une hydropisie récidivante de
l’endolymphe terriblement invalidante du fait de la crainte permanente de faire
une crise en public. Si le patient sort d’un service de réanimation, on suspecte une
ototoxicité médicamenteuse : aminosides, etc. Pour terminer, il y a les pathologies
situées dans l’os temporal : otites chroniques et traumatismes devant être dépistés
en première instance.
Les atteintes centrales responsables d’états vertigineux sont les hémorragies et les
infarctus cérébraux. Leurs images à l’IRM sont parfois retardées et le dépistage en
urgence repose davantage sur la clinique (protocole HINTS : head impulse test,
nystagmus, skew). Une atteinte initiale isolée de sclérose en plaques est rare. La
migraine est un diagnostic par défaut.
Enfin, les vestibulopathies bilatérales sont trop négligées du fait de l’absence ou de
la faiblesse des vertiges les accompagnant. L’exemple en est le déficit vestibulaire
bilatéral du sujet âgé responsable de chutes à répétition. Un bilan minimum et
une rééducation spécifique dont efficaces dans presque 100 % des cas.

Remerciements à Olivier Dumas, kinésithérapeute à Lyon, et à Caroline Mai, élève


kinésithérapeute pour leur aide précieuse.
Liste des abréviations
ADN Acide désoxyribonucléique
AIT Accident ischémique transitoire
AVD Acuité visuelle dynamique
CSCH Canal semi-circulaire horizontal
DLG Décubitus latéral gauche
EHPAD Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes
ENG Électronystagmographie
Flair Fluid attenuation inversion recovery
GPS Global positioning system
HINTS Head impulse test, nystagmus, skew
HIT Head impulse test
IFO Indice de fixation oculaire
IRM Imagerie par résonance magnétique
LARP Left anterior right posterior
LCS Liquide cérébrospinal
LFG Latéroflexion gauche
MMSE Mini mental state examination
OD Oreille droite
OG Oreille gauche
OTR Ocular tilt reaction
PEA Potentiels évoqués auditifs
RALP Right anterior left posterior
VI Vestibulaire inférieur (nerf)
VNG Vidéonystagmographie
VNS Vidéonystagmoscopie
VPPB Vertige positionnel paroxystique bénin
VRT Vestibular rehabilitation therapy
VS Vestibulaire supérieur (nerf)
CHAPITRE

1
Anatomie et physiologie
du système vestibulaire

Les trois oreilles (diapositive 1-1)


Canaux Nerf vestibulaire
semi-circulaires
VIIIe paire
Osselets Nerf facial crânienne

Nerf cochléaire

Trompe
d’Eustache

Tympan Vestibule

Anatomie de l’oreille et de ses connexions avec les centres.


D’après Schuller DE, Schleuning AJ. Otolaryngology – Head and Neck Surgery. 8 th edn. St Louis : Mosby ; 1994.
Dessins : Carole Fumat.

L’oreille comporte trois parties :


1. l’oreille externe, constituée du pavillon et du conduit auditif externe (méat
acoustique externe dans la Terminologia Anatomica) pour l’entrée des sons
(vibrations aériennes) ;
2. l’oreille moyenne, constituée du tympan et des osselets pour transformer les
vibrations aériennes en vibrations liquidiennes ;
3. l’oreille interne, constituée de la cochlée pour l’audition et du labyrinthe vesti-
bulaire pour l’équilibration.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


© 2023 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
2 Guide pratique de rééducation vestibulaire

En outre, la trompe d’Eustache (trompe auditive dans la Terminologia Anato-


mica) aère l’oreille moyenne et deux nerfs font issue de l’oreille interne : le nerf
cochléaire pour l’audition et le nerf vestibulaire pour l’équilibration.

Labyrinthe osseux : canaux semi-circulaires


et vestibule (diapositive 1-2)

Dissection de l’oreille interne chez un fœtus de 7 mois.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Le labyrinthe osseux présenté dans cette figure est celui d’un fœtus décédé 2 mois
avant la naissance. L’oreille interne est complètement ossifiée et facile à séparer
de l’os de membrane environnant tendre car non ossifié. On distingue : en bleu,
le canal semi-circulaire horizontal, en rouge, le canal semi-circulaire postérieur et
en blanc, le canal semi-circulaire antérieur. Ces trois canaux sont perpendiculaires
entre eux. Ils sont creux et s’abouchent dans un cube osseux également creux
appelé vestibule (V), d’où le nom de système vestibulaire. La cochlée n’est pas
visible car elle est restée soudée au crâne environnant.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 3

Labyrinthe membraneux : canaux semi-circulaires,


utricule et saccule (diapositive 1-3)
CA
VS VII

CC A
CH A
Utricule VI

CP A

Saccule CR
Cochlée

Labyrinthe membraneux vu de profil.


Les deux extrémités non ampullaires des conduits semi-circulaires antérieur (CA) et
postérieur (CP) s’abouchent par le même orifice dans l’utricule : la crus commune (CC).
C’est par cet orifice que sortiront les lithiases du canal postérieur pour être délitées
et réabsorbées dans l’utricule. Les nerfs ampullaires issus des trois ampoules (A) et
les nerfs utriculaire et sacculaire se rejoignent pour former les nerfs vestibulaires
supérieur (VS) et inférieur (VI) formant eux-mêmes le nerf vestibulaire parallèle au
nerf facial (VII) dans le conduit auditif interne. La cochlée communique avec le saccule
par le canal réuniens (CR). CH : canal horizontal.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

C’est une structure tubulaire enroulée sur elle-même, s’emboîtant exactement dans
les cavités osseuses précédentes. La cochlée ou limaçon a la forme d’un escargot. On
retrouve les trois canaux semi-circulaires membraneux. Les canaux antérieur et pos-
térieur présentent une partie commune : la crus commune par où s’échappent les
lithiases dans les manœuvres thérapeutiques pour VPPB. Chaque canal possède
une dilatation à l’une de ses extrémités : l’ampoule. Dans le vestibule osseux sont
situés deux sacs membraneux : l’utricule où s’abouche l’extrémité ampullaire des
canaux semi-circulaires, et le saccule qui s’abouche à l’extrémité de la cochlée.
De toutes ces structures font issus des nerfs : les nerfs ampullaires horizontal et
antérieur se joignent au nerf utriculaire pour former le nerf vestibulaire supérieur.
Le nerf ampullaire postérieur et le nerf sacculaire se rejoignent pour former le
nerf vestibulaire inférieur. Il existe deux types de névrite selon que l’un de ces
nerfs ou les deux sont atteints. Les nerfs vestibulaires supérieur et inférieur (VS et VI)
se rejoignent pour former le ganglion de Scarpa (ganglion vestibulaire dans la
4 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Terminologia Anatomica). De ce ganglion fait issue le nerf vestibulaire qui traverse


le conduit auditif interne (méat acoustique interne dans la Terminologia Anato-
mica) accompagné du nerf cochléaire et du nerf facial (pédicule acousticofacial)
pour rejoindre le tronc cérébral dans la fosse postérieure du crâne.

Un double système hydraulique (diapositive 1-4)


Aqueduc de la cochlée
(anciennement limaçon)

Canaux
semi-circulaires

Canal
Endolymphe cochléaire
Périlymphe

Utricule Saccule

Compartiments liquidiens de l’oreille interne.


Source : D’après : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014.
Dessins : Carole Fumat.

Le labyrinthe membraneux est rempli d’endolymphe (en bleu) qui joue un rôle
essentiel dans le fonctionnement des canaux semi-circulaires. Elle est sécrétée sur-
tout au niveau de la cochlée, selon un flux continu. Ce flux s’échappe du saccule
et de l’utricule par deux minuscules canaux se rejoignant pour former le canal
endolymphatique. Celui-ci se termine par un sac situé dans un dédoublement de
la dure-mère où l’endolymphe est réabsorbée. Un défaut de réabsorption de l’en-
dolymphe est à l’origine de la maladie de Menière avec formation d’un hydrops
labyrinthique (cf. diapositive 11-2).
La périlymphe est un liquide issu du liquide cérébrospinal (LCS) qui remplit
l’espace entre le labyrinthe membraneux et l’os temporal (en gris). Elle joue un
rôle essentiel dans la physiologie de l’audition et un rôle d’amortisseur pour les
chocs et des vibrations pouvant perturber le vestibule membraneux. Il existe une
communication directe avec le LCS par le canal cochléaire (flèche rouge). Les
pathologies pressionnelles du LCS peuvent commencer par des manifestations
cochléovestibulaires.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 5

Trois axes d’accélération linéaire ou angulaire


(circulaires) (diapositive 1-5)
Haut

Zigzag (Yaw)

Arrière

Droit Gauche

Avant Tangage (pitch)

Roulis (roll) Bas


Forces d’accélération agissant sur la tête.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

L’appareil vestibulaire est insensible aux mouvements uniformes. À l’équateur, la


terre tourne de 40 000 km en 24 heures sans que l’on s’en aperçoive. En revanche,
la mobilisation de la tête est perçue par les accélérations qu’elle subit. Ces accélé-
rations sont linéaires ou circulaires selon trois axes :
▪ l’axe z est vertical. C’est la gravité g qui est une accélération linéaire verticale
comme celle perçue dans les ascenseurs. C’est autour de cet axe que se produisent
les accélérations rotatoires horizontales (yaw) ;
▪ l’axe x est un axe antéropostérieur passant par le nez. Les accélérations linéaires
selon cet axe sont les poussées antéropostérieures et les accélérations rotatoires
sont les mouvements de roulis (roll) ;
▪ enfin, l’axe y est un axe horizontal interauriculaire. Ses accélérations linaires
sont les poussées latérales et ses accélérations angulaires sont les mouvements de
tangage (pitch).

Structure vestibulaire (diapositive 1-6)


C’est une centrale inertielle à 5 capteurs :
▪ 3 canaux semi-circulaires orthogonaux pour les rotations dans les trois plans
de l’espace (accélérations angulaires) ;
▪ 2 macules otolithiques pour les accélérations linéaires dont la gravité :
● la macule sacculaire pour les accélérations linéaires dans le plan vertical,
● la macule utriculaire pour les accélérations linéaires dans le plan horizontal.
6 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Coplanarité des canaux horizontaux


(diapositive 1-7)
CSCA CSCP
CSCA CSCH

CSCP 30
30 CSCH

A B
Plan des canaux semi-circulaires horizontaux.
A. Tête droite. B. Tête inclinée de 30°. CSCA : canal semi-circulaire antérieur ;
CSCH : canal semi-circulaire horizontal ; CSCP : canal semi-circulaire postérieur.
D’après : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Les deux canaux horizontaux sont dans le même plan. Cette coplanarité explique
la grande sensibilité des canaux car elle est à la base d’un effet push pull (interac-
tion réciproque) (cf. diapositive 1-17), c’est-à-dire que dans une rotation, le canal
d’un côté est excité tandis que son coplanaire est inhibé. Concernant les canaux
horizontaux, leur plan commun n’est d’ailleurs pas horizontal mais basculé en
arrière de 30°. Pour les rendre horizontaux et donc parfaitement efficaces, il faut
pencher la tête de 30°. C’est nécessaire pour la marche et surtout pour la course
où il faut détecter les obstacles qui peuvent se présenter quelques mètres plus
loin. C’est pourquoi on l’appelle le plan de la piste terrestre.

Coplanarité des canaux verticaux (diapositive 1-8)


Occiput

CPD CPG

45

CAD CAG

Sourcils

Disposition schématique des canaux verticaux vue de dessus.


CAD : canal antérieur droit ; CAG : canal antérieur gauche ; CPD : canal postérieur
droit ; CPG : canal postérieur gauche. Flèche en gras : plan sagittal de la tête.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 7

Là, c’est plus compliqué. Sur cette vue endocrânienne, on voit que les deux
canaux antérieurs sont à angle droit, de même que les deux canaux postérieurs.
Par conséquent, un canal vertical antérieur n’est coplanaire qu’avec un canal ver-
tical postérieur du côté opposé, c’est-à-dire le canal antérieur droit avec le canal
postérieur gauche (plan du RALP : right anterior left posterior) et le canal antérieur
gauche avec le canal postérieur droit (plan du LARP : left anterior right posterior).

Fonctions de l’appareil vestibulaire (diapositive 1-9)


Cet appareil a cinq fonctions globales :
1. informer sur les mouvements de la tête ;
2. informer sur la position de la tête par rapport à la gravité ;
3. stabiliser le regard au cours du mouvement de la tête en générant des réflexes
vestibulo-oculaires ;
4. stabiliser le corps en dépit des forces contraires en générant des réflexes vesti-
bulospinaux ;
5. stabiliser la pression artérielle et le transit œsogastrique en fonction de la posi-
tion du corps.
Insistons d’abord sur la stabilisation du regard. Elle est nécessaire parce que la vision
repose sur des réactions chimiques relativement lentes. Pour être vue, l’image doit
rester stable sur la rétine pendant au moins 300 ms.

Absence d’oreilles internes : apparition


d’oscillopsies !
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 1-10 .
Oscillopsies.
En marchant, en l’absence d’oreille interne, comme en filmant avec cette caméra
rudimentaire placée sur l’épaule, il apparaît des oscillopsies, c’est-à-dire des trem-
blements de l’image qui ne permettent même plus de lire le nom de Limoges
inscrit sur cette gare.
8 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Stabilisation du regard et du corps par des réflexes


à 3 neurones (diapositive 1-11)
Faisceau longitudinal médian
(nystagmus)

III III
Pédoncules
cérébraux
IV IV
VI VI
Protubérance

VIII

Bulbe
Sillon
X X
bulboprotubérantiel
Noyaux du vague
(troubles neuro-
végétatifs)

Faisceau vestibulospinal
(déviations lentes)
Appareil vestibulaire (côté droit).
D’après Sauvage JP. Révisions accélérées en ORL. Paris : Maloine ; 1987. Dessins : Carole Fumat.

La stabilisation du regard est mécanique et instantanée grâce à des réflexes à


3 neurones. Le premier neurone est issu des capteurs vestibulaires (VIIIe paire
crânienne) et gagne les noyaux vestibulaires en pénétrant le tronc cérébral au
niveau du sillon bulboprotubérantiel. Le 2e neurone se connecte aux noyaux ocu-
lomoteurs ipsi- et controlatéraux (VI, IV et III) par le faisceau longitudinal médian.
Le 3e neurone se connecte aux muscles oculomoteurs correspondants (muscles
droits et obliques). La stabilisation du corps ne diffère de ce schéma que seule-
ment pour le 2e neurone qui se connecte aux cornes antérieures de la moelle
épinière par le faisceau vestibulospinal. Signalons encore deux autres connexions
des noyaux vestibulaires : avec les noyaux du nerf pneumogastrique et avec le
cervelet. La crise vertigineuse comporte des illusions de déplacement du fait des
connexions centrales non représentées ici transitant par les voies de la sensibilité
profonde et le thalamus. Les signes d’accompagnement sont illustrés par la figure :
nystagmus, déviations posturales, nausées et vomissement.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 9

Fonctionnement des canaux semi-circulaires


(diapositive 1-12)
RT

U C
PEI
PEI
CA CA
I NA II
Mécanisme de la fonction canalaire.
I : la tête est droite et immobile. C : cupule ; CA : ampoule du canal semi-circulaire ;
NA : nerf vestibulaire au contact des cellules sensorielles dont les stéréocils (en rouge)
s’enchâssent dans la cupule ; U : utricule. II : le sujet effectue une rotation de tête
antihoraire d’environ 40° (RT). L’endolymphe (en bleu) a subi une poussée inertielle
horaire (PEI) déformant la cupule dont les cils se sont couchés dépolarisant les cellules
sensorielles à l’origine d’un message vestibulaire.
© Carole Fumat.

Chaque canal peut être considéré comme un anneau de liquide endolympha-


tique. Son ampoule est fermée par un diaphragme composé de deux parties :
la cupule et la crête ampullaire. La cupule est une membrane anhiste de même
densité que l’endolymphe reposant sur la crête ampullaire recouverte de cellules
sensorielles ciliées dont les cils s’enchâssent dans la cupule. À la base de la crête
ampullaire, le nerf ampullaire du canal (en jaune) se connecte au nerf vestibulaire.
Considérons une rotation antihoraire du canal. Son liquide endolymphatique
subit une force inertielle de sens horaire. Elle enfonce la cupule et couche les cils
des cellules sensorielles. Se produit alors soit une excitation, soit une inhibition qui
est envoyée au nerf vestibulaire par l’intermédiaire du nerf ampullaire de ce canal.

Polarisation des cellules ciliées (diapositive 1-13)

Polarisation des cellules ciliées.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins : Carole Fumat.
10 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Les cellules ciliées ont la propriété d’être polarisées. À leur sommet, existe une
touffe de stéréocils (flèche rouge) dont un cil plus long, le kinocil placé latérale-
ment (flèche verte). Lorsque les cils s’inclinent vers le kinocil, la cellule est excitée.
Lorsque les cils s’inclinent du côté opposé au kinocil, la cellule est inhibée.

Existence d’un tonus de repos (diapositive 1-14)

Cellule ciliée

Neurone efférent

Tonus excitation
inhibition Repos
Potentiels
daction

Réactivité du capteur horizontal.

À la base de la cellule ciliée, il existe un tonus de repos permanent, y compris


pendant le sommeil. Lorsque les stéréocils se couchent vers le kinocil, à la base de
la cellule, la fréquence des potentiels d’action augmente et quand les stéréocils se
couchent en sens inverse du kinocil, la fréquence des potentiels d’action diminue.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 11

Connexions oculomotrices des canaux semi-


circulaires (diapositive 1-15)
Excitation des canaux semi-circulaires droits :

Antérieur Horizontal Postérieur

SR MR LR

IR
IO

IV
YG MLF MLF
AC BC
HC
VI
MV PC
VN

Inhibition des antagonistes par les canaux droits :

Antérieur Horizontal Postérieur


SO SR
LR MR

IR IO
III

IV
AC SV
HC
VI
PC
VN
Connexions oculomotrices des canaux semi-circulaires.
AC : canal antérieur ; BC : brachium conjonctivum ; HC : canal horizontal ; IO : oblique
inférieur ; IR : droit inférieur ; LR : droit latéral ; MLF : faisceau latéral médian ;
MR : droit médian ; MV : noyau vestibulaire médial ; PC : canal postérieur ; SO : oblique
supérieur ; SR : droit supérieur ; SV : noyau vestibulaire supérieur ; VN : noyau
vestibulaire ; YG : satellite vestibular nucleus.
© Dix MR, Hood JD. Vertigo. Chichester : John Wiley & Sons ; 1984.
12 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Chaque canal semi-circulaire à une connexion privilégiée avec les noyaux ocu-
lomoteurs. On peut donc le reconnaître au mouvement oculaire qu’il produit.
La figure est trop complexe pour être apprise par cœur. En revanche, les diaposi-
tives 4-2 à 4-4 et 4-9 montrent comment reconnaître le canal qui a été stimulé en
fonction du type de nystagmus qu’il a déclenché.

Mécanisme de la stabilisation du regard générant


un nystagmus (diapositive 1-16)
Cette stabilisation repose sur la genèse par les canaux, d’une rotation des yeux
en sens contraire de la rotation de la tête. Toutefois, la rotation des yeux ne peut
compenser celle de la tête au-delà de 30°. Au-delà, se produit une secousse de
rappel ramenant l’œil à sa position initiale. Ainsi est formé un nystagmus com-
posé d’une phase lente compensatrice et d’une phase rapide de rappel. Assis sur
un tabouret tournant de 360° en sens horaire (vers la droite) devraient théori-
quement se produire 360/30 (12 phases lentes vers la gauche), soit 12 nystagmus
droits puisque les nystagmus sont dénommés par le sens de leurs phases rapides.
La nature a donc trouvé le moyen de faire tourner un œil de 360° dans l’orbite.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 13

Grande sensibilité vestibulaire : push pull


ou interaction réciproque (diapositives 1-17
et 1-18)
Rotation de la tête vers la droite

Nystagmus

Phase rapide

Phase lente

Muscles droits
++ – ++ – Noyaux du III
III III

FLM

++ ––
VI VI Noyaux du VI

– ++
NV NV Noyaux
vestibulaires
– ++ Neurones
afférents
primaires
–– ++

Canal gauche Canal droit


Mécanisme simplifié du push pull.
D’après Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

Ce mécanisme repose sur le fait que dans une rotation de la tête, un canal est
stimulé et son canal coplanaire est inhibé. Prenons l’exemple des canaux semi-
circulaires horizontaux vus de dessus. Dans une rotation de la tête vers la droite, le
canal droit stimule le noyau du VI gauche, induisant une rotation des deux yeux
vers la gauche (phase lente) par stimulation du muscle droit latéral gauche et du
muscle droit médial droit. En même temps, le canal gauche inhibe le noyau du VI
droit, empêchant la rotation des yeux vers la droite.
14 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Canaux semi-circulaires horizontaux


(diapositive 1-19)

Courants endolymphatiques dans une rotation de la tête vers la droite


(vue de dessus).
Courant ampullipète dans l’oreille droite. Courant ampullifuge dans l’oreille gauche.
A : ampoule ; OD, OG : oreilles droite et gauche ; Ut : utricule.
D’après : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.

Pour les canaux semi-circulaires horizontaux, ce mécanisme de push pull est pos-
sible car les courants endolymphatiques ampullipètes (se dirigeant vers l’ampoule)
sont stimulants et les courants endolymphatiques ampullifuges (de dirigeant vers
le canal) sont inhibiteurs. L’explication en est que pour les canaux horizontaux,
les kinocils sont du côté de l’ampoule. Ainsi, dans un courant ampullipète, les
stéréocils se couchent vers le kinocil, d’où la stimulation. Inversement, dans un
courant ampullifuge, les stéréocils se couchent en direction opposée du kinocil,
d’où une inhibition.

Nystagmus physiologiques horizontaux


(diapositive 1-20)
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 1-20 .
Nystagmus physiologiques horizontaux.

En position assise, dans l’obscurité, sous lunette vidéo infrarouge, les rotations
horizontales passives vers la droite déclenchent des nystagmus horizontaux droits,
et les rotations horizontales passives vers la gauche déclenchent des nystagmus
horizontaux gauches. Chaque sujet présente des nystagmus plus ou moins vifs,
mais dont les caractéristiques demeurent.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 15

Canaux verticaux coplanaires


Tête tournée à droite de 45° = LARP (diapositive 1-21)

A B
Courants endolymphatiques, tête tournée à droite.
Dans les mouvements verticaux, tête tournée à droite, le canal postérieur droit est
coplanaire du canal antérieur gauche. Lorsqu’on allonge le patient, on provoque
un courant ampullifuge excitateur dans le canal postérieur droit et un courant
ampullipète inhibiteur dans le canal antérieur gauche (A). Lorsqu’on redresse le
patient, on provoque un courant ampullifuge excitateur dans le canal antérieur
gauche et un courant ampullipète inhibiteur dans le canal postérieur droit (B).
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins : Carole Fumat.

En ce qui concerne les canaux verticaux, les kinocils sont du côté du canal. Par
conséquent, dans un courant ampullifuge, les stéréocils se couchent en direction
du kinocil, provoquant une stimulation. Au contraire, les courants endolympha-
tiques ampullipètes se dirigeant vers l’ampoule provoquent une inhibition.

Tête tournée à gauche de 45° = RALP (diapositive 1-22)

Courants endolymphatiques, tête tournée à gauche.


Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.
16 Guide pratique de rééducation vestibulaire

En allongeant le patient sur le dos, la tête tournée à gauche, on déclenche une


inclinaison des stéréocils ampullifuge dans le canal postérieur gauche qui est sti-
mulé et un courant ampullipète dans le canal antérieur droit qui est inhibé.
Pour simplifier, en ce qui concerne les canaux verticaux, en allongeant le sujet, on
stimule le canal postérieur du côté vers lequel la tête est tournée de 45°. En les
relevant, c’est le canal antérieur opposé qui est stimulé.

Canaux semi-circulaires verticaux (diapositive 1-23)

Effets des manœuvres de Dix et Hallpike sur les courants endolymphatiques.


D’après Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

En résumé, voici ce qui se passe pour les canaux verticaux quand on bascule le
patient en arrière, la tête tournée à droite de 45° : il est produit un courant ampul-
lifuge stimulant dans le canal postérieur droit et un courant ampullipète inhibi-
teur dans le canal antérieur gauche coplanaire. Le push pull est respecté.

Nystagmus physiologiques verticaux


Tête tournée de 45° à droite
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 1-24 .
Nystagmus physiologique vertical, tête tournée à droite.

En allongeant le patient, on stimule le canal postérieur droit en déclenchant un


nystagmus caractéristique, c’est-à-dire un nystagmus vertical supérieur (caracté-
ristique du canal postérieur) et torsionnel antihoraire (caractéristique d’un côté
droit). En relevant le patient, on stimule le canal antérieur gauche en déclenchant
un nystagmus caractéristique, c’est-à-dire un nystagmus vertical inférieur (carac-
téristique du canal antérieur) et torsionnel horaire (caractéristique d’un côté
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 17

gauche). Là encore, les nystagmus sont disparates entre les sujets d’autant plus
que surviennent des secousses horizontales liées au fait de déviations horizontales
inappropriées.

Tête tournée de 45° à gauche


Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 1-25 .
Nystagmus physiologique vertical, tête tournée à gauche.

En allongeant le patient, on stimule le canal postérieur gauche en déclenchant


un nystagmus caractéristique, c’est-à-dire un nystagmus vertical supérieur (carac-
téristique du canal postérieur) et torsionnel horaire (caractéristique d’un côté
gauche). En relevant le patient, on stimule le canal antérieur droit en déclenchant
un nystagmus caractéristique, c’est-à-dire un nystagmus vertical inférieur (carac-
téristique du canal antérieur) et torsionnel antihoraire (caractéristique d’un côté
droit). Là encore, les nystagmus sont disparates entre les sujets d’autant plus que
surviennent des secousses horizontales liées au fait de déviations horizontales
inappropriées.

En pratique
1. Pour les canaux semi-circulaires horizontaux, dans une rotation hori-
zontale de la tête vers la droite, on stimule le canal horizontal droit, et
dans une rotation horizontale vers la gauche, on stimule le canal hori-
zontal gauche.
2. Pour les canaux semi-circulaires verticaux, lorsqu’on allonge le patient,
on provoque une excitation du canal postérieur situé du côté vers
lequel la tête est tournée et lorsqu’on redresse le patient, on provoque
une excitation dans le canal antérieur du côté opposé à celui vers la tête
est tournée.

Fonctions du système otolithique (diapositive 1-26)


Certes, le système otolithique collabore avec les canaux semi-circulaires pour la
stabilisation du regard mais on peut aussi lui attribuer des fonctions spécifiques
comme détecter les accélérations linéaires dont la gravité. Il intervient ainsi
pour interpréter les signaux canalaires. Par exemple, tourner la tête à droite et à
gauche n’a pas la même signification selon que l’on traverse une rue ou que l’on
se retourne dans son lit pour lire l’heure. En ce qui concerne l’équilibration, le
système otolithique gère le tonus des muscles antigravitaires et détecte les chutes
dès leur commencement pour enclencher toute une série de réflexes en vue de
rétablir l’équilibre.
18 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Le système otolithique
Structure (diapositive 1-27)

Utricule Saccule

Macule utriculaire.
Source : Sans A, Dechesne CJ, Demêmes D. The mammalian otolithic receptors : a complex morphological and biochemical
organisation. In : Tran Ba Huy P, Toupet M, editors. Otolith function and disorders. Basel : Karger ; 2001. p. 1 -14. Dessins :
Carole Fumat.

Le système comporte deux macules qui sont des épaississements des parois de
l’utricule et du saccule. La macule utriculaire est plutôt horizontale et la macule
sacculaire est plutôt verticale.

Les trois couches des macules otolithiques


(diapositive 1-28)
S O

MC

CS

CaCO3 Vecteurs
Densité : daccélération
2,6

Macules otolithiques.
CS : cellules sensorielles ; MO : membrane otolithique ; O : cristaux de carbonate de
calcium ; S : striola.
Source de la figure du haut : Sans A, Dechesne CJ, Demêmes D. The mammalian otolithic receptors : a complex
morphological and biochemical organisation. In : Tran Ba Huy P, Toupet M, editors. Otolith function and disorders. Basel :
Karger ; 2001. p. 1-14. Dessins : Carole Fumat. En bas à gauche : Harada Y. The vestibular organs. SEM Atlas of the inner
ear. Amsterdam : Nishimura Kugler & Chedini ; 1988. En bas à droite : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de
réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 19

La couche profonde (CS) est celle des cellules ciliées comparables à celles des
canaux. Les cils sont engagés dans la membrane otoconiale (MO). Enfin, la couche
supérieure est celle des otolithes ou pierres d’oreille qui sont des cristaux de car-
bonate de calcium de densité 2,6. Chaque macule est divisée en deux parties par
un sillon, la striola (S). Pour la macule utriculaire, les kinocils sont disposés du côté
de la striola et du côté opposé pour la macule sacculaire. Ainsi, au sein de chaque
macule, un effet push pull est obtenu permettant de gérer indépendamment
l’équilibration de chaque moitié du corps. Enfin, si l’on arrache les otolithes de la
membrane otoconiale, chaque macule apparaît comme un champ de blé dont
les cils s’organisent en vecteurs d’accélération dirigés dans toutes les directions.

Transcription d’une accélération linéaire


(diapositive 1-29)

Accélération Vitesse uniforme Freinage


mb otoconiale

I II

Activité tonique

Accélération linéaire dans le plan horizontal.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

Imaginons une voiture arrêtée devant un feu rouge. Le feu passe au vert et le
conducteur accélère. Par inertie, les otolithes et la membrane otolithique sont
déportés en arrière. À la base des cellules cillées, l’activité tonique augmente.
Ensuite, la voiture roule à une vitesse uniforme (50 km/h en ville). Les cellules
ciliées se redressent et reviennent à leur activité de repos. Puis, la voiture arrive à
un feu rouge : coup de frein ! Otolithes et membrane otolithique sont déportés en
avant. Apparaît une inhibition des cellules ciliées avec baisse de l’activité tonique.
Toutes ces informations sont transmises aux centres.
20 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Transcription d’une position de la tête


(diapositive 1-30)
Ambiguïté

A B I II

Ambiguïté otolithique.
Source figure de droite : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ;
2014. Dessins : Carole Fumat.

Le système otolithique rencontre alors une ambiguïté. Un même cisaillement des


cils peut signifier : soit : A = une translation linéaire vers la droite du sujet, soit
B = une inclinaison gauche de sa tête. Cette ambiguïté se résout en faisant appel
à d’autres informations : par exemple, il y a deux types de cellules ciliées : le type I
qui code des mouvements et le type II qui est plus sensible aux positions. De plus,
le contexte incluant l’ensemble du corps aide à la distinction.

Un GPS ? (diapositive 1-31)

Réseau neural hypothétique générant les saccades oculaires.


En bleu, motoneurones innervant les muscles extraoculaires. En rouge, neurones burst
activant ces muscles à partir des formations réticulaires pontiques paramédianes
(PPRF) pour les mouvements horizontaux et du mésencéphale interstitiel rostral du
faisceau longitudinal médian (RIMLF) pour les mouvements verticaux. Ces neurones
burst sont inhibés par les neurones omnipauses (en noir) situés dans le noyau
pontique interpositus (RIP). En vert, les neurones latch verrouillent les neurones
omnipauses jusqu’à ce que la saccade soit complète.
Source : Leigh RJ, Zee DS. The neurology of eye movements, 5th edn. © Oxford : Oxford University Press ; 2015.
Anatomie et physiologie du système vestibulaire 21

La tentation est de comparer le fonctionnement de notre cerveau à un système


électronique. Par exemple, le système vestibulaire serait un GPS (global positioning
system) de voiture doté de six gyroscopes et de quatre fils à plomb. Quant à la
carte routière, elle serait fournie par la vision. Seule difficulté, on ne voit réellement
distinctement, notamment les couleurs, que sur le millimètre carré de la fovéa au
centre de la rétine. Le reste du champ visuel n’est donc qu’une construction per-
manente. Il faut ainsi concevoir que notre environnement visuel se construit sans
cesse par des centaines de saccades oculaires. Sinon, comment pourrait-on entrer
dans une forêt et voir tout en vert ?

Le 6e sens, l’oublié d’Aristote ? (diapositive 1-32)


Certainement pas. Aristote avait distingué les « sensibles propres » qui sont spé-
cialisés (la vue, l’ouïe, l’olfaction, le goût et le toucher) et les « sensibles communs »
perçus en même temps par plusieurs sensibles propres agissant comme un seul
sens (sensorium commune). N’oublions pas notre sujet, qui est la pathologie de la
perception de nos rapports avec l’espace, c’est-à-dire : notre position par rapport à
la pesanteur et la perception de nos mouvements dans ses trois plans. Pour conti-
nuer, il faut comprendre que cette perception est une construction permanente
par l’appareil vestibulaire, l’œil et la sensibilité profonde (proprioception).
CHAPITRE

2
Vertiges positionnels
paroxystiques bénins
du canal postérieur

Les VPPB représentent un domaine où les manipulations spécifiques obtiennent


d’excellents résultats. Le VPPB du canal semi-circulaire postérieur est le plus
fréquent.

Lithiases des canaux semi-circulaires


(diapositive 2-1)

Théorie physiopathologique reconnue mondialement.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


© 2023 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
24 Guide pratique de rééducation vestibulaire

À gauche, on voit une dissection de la partie ampullaire des canaux semi-circu-


laires avec leurs cupules et à droite, une photographie d’otolithes recouvrant une
macule. La physiopathologie des VPPB repose sur l’hypothèse que des otolithes
dégénérés sont tombés dans les canaux semi-circulaires et qu’ils se déplacent dans
l’endolymphe lors des changements de position de la tête en créant de violents
vertiges (buoyancy theory). Cette théorie ne peut pas être confirmée par imagerie
(scanner ou IRM). Mais il existe un consensus mondial à son propos démontré par
l’efficacité immédiate de manœuvres thérapeutiques libératrices.

Symptômes évocateurs (diapositive 2-2)


Les vertiges sont violents mais brefs, déclenchés par des mouvements de tête,
toujours les mêmes :
▪ pour le canal postérieur : se lever et surtout se coucher sur le côté droit ou
gauche ;
▪ pour le canal horizontal : se retourner dans le lit tant du côté droit que du côté
gauche.

VPPB du canal postérieur (diapositive 2-3)


Le canal postérieur est atteint dans 90 % des cas car il constitue la partie déclive du
vestibule en position érigée. Le canal horizontal est touché dans 9 % des cas et le
canal antérieur dans 1 % des cas car il constitue la partie la plus haute du vestibule
(cf. diapositives 1-1 à 1-3). Plusieurs canaux peuvent être atteints, surtout chez les
sujets âgés car la fréquence du VPPB augmente avec l’âge.

Rappel important (diapositive 2-4)

Courants endolymphatiques, tête tournée à droite.


D’après : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal postérieur 25

Les canaux postérieurs sont stimulés par les courants endolymphatiques ampul-
lifuges alors que les canaux horizontaux sont stimulés par les courants endo-
lymphatiques ampullipètes. Sur cette diapositive, à gauche, quand on allonge le
patient sur le dos, la tête tournée de 45° à droite, il se produit un courant endo-
lymphatique inertiel inverse qui s’éloigne de l’ampoule du canal postérieur droit
(ampullifuge). Le canal postérieur droit est stimulé. En même temps, il se produit
un courant endolymphatique inertiel qui se rapproche de l’ampoule du canal
antérieur gauche (ampullipète). Le canal antérieur gauche est inhibé. Le méca-
nisme de push pull peut alors s’exercer (cf. diapositives 1.8, 1.17 et 1.18).

Manœuvre de Dix et Hallpike pour un VPPB


du canal postérieur droit (diapositive 2-5)

Manœuvre de Dix et Hallpike.


Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.

Le sujet est allongé sur une table d’examen. On empoigne sa tête à deux mains. Puis, pour
un canal postérieur droit, on fait tourner la tête du patient de 45° vers la droite. Ensuite,
on l’allonge sur le dos de telle sorte que la tête arrive pendante au bord de la table (head
hanging position), la tête toujours tournée de 45° vers la droite.

Résultat de la rotation de 45° vers la droite


(diapositive 2-6)
CP

CE
CP Pl
CE

CA an
m
éd
CA

ia
Plan médian de la tête n
Plan médian dude corps
la

te
CP

Plan médian du corps


CE

CA

CP CA
CE

Alignement du canal postérieur droit sur le plan médian du corps (plan de bascule).
Vue de dessus. Tourner la tête de 45° vers la droite. CA : canal antérieur ; CH : canal
horizontal ; CP : canal postérieur.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.
26 Guide pratique de rééducation vestibulaire

La rotation de la tête de 45° vers la droite aligne le canal postérieur droit sur le plan
de bascule illustré par le plan médian du corps.

Critères du nystagmus provoqué par la manœuvre


de Dix et Hallpike en cas de VPPB (diapositive 2-7)

Composantes horizontale, verticale et rotatoire d’un nystagmus provoqué dans un


VPPB du canal postérieur gauche.
© Ushio K, Morizono T, Yagi T. Three-component analysis of benign paroxysmal positional nystagmus. Acta Otolaryngol
Suppl. 1995 ; 519 : 107-9.

Après une latence d’au moins une seconde, se déclenche un nystagmus ayant
deux composantes : l’une verticale supérieure et l’autre torsionnelle (rotatoire),
antihoraire pour le côté droit et horaire pour le côté gauche. Son amplitude
est crescendo-decrescendo. Le nystagmus ne dure pas plus de 30 secondes. Il
réapparaît inversé au redressement et diminuerait en intensité si l’on répétait la
manœuvre, ce qu’il est inutile de faire tant ce nystagmus est caractéristique et
désagréable pour le patient.

Lithiase dans l’ampoule du canal postérieur droit


(diapositive 2-8)
Analysons les étapes de la genèse du nystagmus provoqué par les manœuvres
lorsqu’une lithiase est présente dans l’ampoule du canal postérieur droit. Envisa-
geons d’abord l’exemple d’une manœuvre de Dix et Hallpike où l’opérateur mani-
pule en étant placé sur le côté droit du lit d’examen. La tête du patient est vue de
profil. On lui demande de tourner la tête de 45° vers la droite.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal postérieur 27

Bascule de Dix et Hallpike (diapositive 2-9)

Manœuvre diagnostique de Dix et Hallpike pour une canalolithiase située dans le


canal postérieur droit.
Rangée supérieure : positions successives de la lithiase et courants endolymphatiques.
Rangée inférieure : mouvements et positions obtenus par la bascule et le relèvement
du corps.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.

La lithiase formée d’otolithes est située dans l’ampoule en a. Elle est bloquée par la
cupule. Quand on bascule le patient sur le dos, après un temps de latence d’une
à plusieurs secondes, la lithiase se décroche en a’ sous l’effet de la pesanteur. Puis
elle coule dans l’endolymphe en accélérant : c’est la phase crescendo du nystag-
mus. Ensuite, sa vitesse se stabilise quelques instants. Puis sa vitesse décroît et elle
s’arrête à mi-canal en b. C’est la phase decrescendo du nystagmus. Ce processus
théorique coïncide bien avec la genèse du nystagmus observé.
28 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Manœuvre de Sémont avec manipulation de face


(diapositive 2-10)

Manœuvre de Sémont.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.

Alain Sémont, kinésithérapeute, a eu l’astuce de manipuler le patient de face, ce


qui facilite l’exécution des mouvements. Cette fois, le patient est assis au bord de
la table d’examen. Par rapport à une manipulation de profil, tout se passe comme
si on avait tourné la tête de 90°, soit 45° de trop. Par conséquent, pour avoir la
position de stimulation du canal postérieur droit de la manœuvre de Dix et Hal-
lpike, il faut tourner la tête du patient de 45° vers le côté non étudié, en l’occur-
rence vers la droite.

En résumé (diapositive 2-11)


Pour une manœuvre de Dix et Hallpike, si l’on tourne la tête du patient de 45°
vers la droite, on recherche un VPPB du canal postérieur droit. Mais pour une
manœuvre de Sémont, si l’on tourne la tête du patient de 45° vers la droite, on
recherche un VPPB du canal postérieur gauche.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal postérieur 29

Principe de la manœuvre de Sémont simplifiée


pour un VPPB du canal postérieur droit
(diapositive 2-12)
b’ c

c d

a a’

A B C D
Manœuvre de Sémont pour un VPPB du canal postérieur droit.
A. Le patient est assis au bord du lit, face à soi ; faire tourner la tête de 45° du côté
gauche pour mettre son canal postérieur droit parallèle au plan biscapulaire. La
lithiase est bloquée en « a » contre la cupule de l’ampoule. B. Basculer le patient
vers sa droite dans le plan biscapulaire. La tête arrive dans une position couchée sur
l’épaule droite, avec une légère déclivité par rapport au thorax du fait de la hauteur
de la clavicule. L’oreille atteinte (côté droit, étoile) est placée en bas. Le nez est en l’air.
Sous l’effet de la pesanteur, la lithiase coule de « a’ en b » provoquant un courant
ampullifuge excitateur. Observer le nystagmus qui a été déclenché. Il est typique d’un
VPPB du canal postérieur droit, c’est-à-dire avec une composante verticale supérieure
et une composante torsionnelle antihoraire. Attendre quelques minutes pour que les
particules lithiasiques se rassemblent à mi-canal. C. Passage à la partie libératrice de
la manœuvre. Sans modifier la rotation de la tête, basculer l’ensemble tête et corps de
180° dans le plan biscapulaire pour coucher le patient sur son épaule gauche, jusqu’à
ce que la pommette du patient touche le matelas, le nez étant cette fois dirigé vers
le bas. L’oreille atteinte (côté droit) est cette fois placée en haut. Après un temps de
latence de quelques secondes, la lithiase tombe de « b’ en c » à l’entrée de la crus
commune. Elle déclenche encore un courant ampullifuge provoquant un vertige et
un nystagmus libératoire identique à celui déclenché par la manœuvre diagnostique.
D. Le patient est relevé, le cou fléchi de 20° pour verticaliser la crus commune. Lors
du retour en position assise, la lithiase tombe dans l’utricule où elle sera dissoute. Le
patient peut alors avoir l’impression d’être projeté en avant et réagit par une violente
rétropulsion nécessitant de le tenir fermement.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.
30 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Cette manœuvre a été mal interprétée car on pensait qu’il fallait exercer un effet
catapulte brutal, ce qui est une cause possible d’échec. C’est pourquoi Sémont
lui-même la fait d’une manière différente (cf. diapositive 2-13).

Manœuvre de Sémont pour un VPPB du canal


postérieur gauche
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 2-13 .
Manœuvre de Sémont pour un VPPB du canal postérieur gauche.

On manipule la patiente de dos pour mieux enregistrer le déroulement de la


manœuvre. On commence par tourner sa tête de 45° vers sa droite. On la bascule
ensuite sur son épaule gauche, la tête pendante au bord de la table. Après un
temps de latence de quelques secondes, on voit apparaître un nystagmus verti-
cal supérieur (typique d’un canal postérieur) et torsionnel horaire (typique d’un
côté gauche). Après une phase d’accélération du nystagmus, celui-ci va ralentir et
s’arrêter au bout de 20 secondes. C’est bien un VPPB du canal postérieur gauche.
Après quelques minutes de repos, on retourne la patiente dans le plan du canal
postérieur gauche pour qu’elle arrive sur son épaule droite, la tête toujours tour-
née de 45° vers sa droite. Après quelques secondes de latence, survient un nystag-
mus identique au précédent. On en déduit que la lithiase a continué son chemin
dans le canal postérieur gauche en direction de la crus commune pour tomber dans
l’utricule. À noter qu’on avait auparavant commencé par tester le canal postérieur
droit qui n’avait déclenché aucun nystagmus.

Preuve d’une manœuvre réussie (diapositive 2-14)


Si l’on a obtenu ce nystagmus dit libératoire, c’est la preuve que la manœuvre a réussi.
Toutefois, pour être prudent, on renvoie le patient en salle d’attente en lui deman-
dant de se reposer pendant au moins 30 minutes. La crainte est que la lithiase soit
restée coincée dans la crus commune. En effet, il serait catastrophique que la lithiase
tombe dans l’utricule avec un grand vertige après que le patient a repris le volant de
sa voiture. La lithiase n’est réabsorbée qu’au bout de quelques jours. Demeure donc
le risque qu’elle ne retombe dans le canal postérieur. C’est pourquoi on conseille au
patient de dormir avec des oreillers sous la tête, de ne pas aller ni chez le coiffeur ni
chez le dentiste pendant plusieurs jours pour éviter une position tête rétrofléchie.
Le patient est revu une semaine après pour refaire une manœuvre provocatrice et
vérifier qu’il est guéri. Sinon, il faut réfléchir à la cause de l’échec :
▪ au départ de la manœuvre thérapeutique, la tête n’a pas été suffisamment tête
pendante ;
▪ la manœuvre a été trop brusque ou au contraire trop lente (> 6 secondes) ;
▪ le patient a voulu aider et il est sorti du plan du canal postérieur.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal postérieur 31

Causes d’échec
Absence de position tête pendante (diapositive 2-15)

I II III
Échec en rapport avec une absence de position tête pendante.
I. La tête est en position pendante. La lithiase est parvenue en b, au sommet du canal à
2 mm en deçà de b (vue en III). II. La tête était restée à plat sur la table. La lithiase n’est
parvenue qu’en b’ (vue en III). Ces quelques millimètres manquent dans la manœuvre
libératrice et la lithiase repart vers l’ampoule au lieu de continuer son chemin dans le
canal postérieur (vue en III).
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Accélération brutale (diapositive 2-16)

I II III
Échec en rapport avec une recherche de l’effet catapulte dans une manœuvre de
Sémont trop brutale.
I. La lithiase est arrivée en « b ». L’opérateur recherche un effet catapulte et applique
une forte accélération lors du début de la manœuvre. Cette recherche est contre-
productive car elle a un effet inertiel sur la lithiase qui la ramène vers l’ampoule du
canal (en b’). La manœuvre thérapeutique n’amène donc plus la lithiase en capacité de
retomber vers la crus commune.
D’après Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.
32 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Manœuvre d’Epley (diapositive 2-17)


Cette manœuvre concerne aussi le traitement des VPPB du canal postérieur. Mais
le retournement du patient de 180° se fait autour de son axe longitudinal au lieu
de se faire dans le plan frontal comme dans la manœuvre de Sémont. Son utili-
sation est logique après une manœuvre de Dix et Hallpike puisqu’elle se pratique
sur un patient en décubitus.

Manœuvre d’Epley en cinq étapes pour un VPPB du canal postérieur gauche.


Pour un VPPB du canal postérieur gauche, après la manœuvre de Dix et Hallpike, le
patient est allongé sur le dos, la tête tournée de 45° vers la gauche. Sur le schéma, les
canaux postérieur et antérieur sont vus de dessus et sont perpendiculaires entre eux.
La lithiase est arrivée en « b » immobile au milieu du canal postérieur gauche. Les
orifices des crus communes « cc » sont situés aux jonctions des canaux antérieur et
postérieur. Si l’on tourne la tête de 90° vers la droite, la lithiase remonte en « b’ » sans
se déplacer dans le canal et donc en ne provoquant aucun vertige. Puis on demande
au patient de se tourner sur le côté droit, ce qui permet de tourner la tête de 90°
supplémentaires. La tête du patient arrive ainsi placée dans une position libératrice
identique à celle de la manœuvre de Sémont. La lithiase remonte en b’’, puis tombe en
c et de là, dans l’utricule en traversant la crus commune. Les différentes rotations de la
tête sont espacées de 1 à 2 minutes. Le principe de la manœuvre est de ne mettre en
jeu que la pesanteur.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. Paris : Elsevier-Masson ; 2015. Dessins : Carole Fumat.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal postérieur 33

Manœuvre d’Epley pour un VPPB du canal


postérieur gauche (diapositive 2-18)

Manœuvre d’Epley pour un VPPB du canal postérieur gauche : réalisation pratique


sur un lit d’examen.
1 : le patient, assis, a la tête tournée à gauche. Un oreiller est positionné sous ses reins
pour obtenir une position tête pendante. 2 : position de Dix et Hallpike gauche, qui
déclenche le nystagmus caractéristique. 3 : rotation de la tête de 90° vers la droite. Là,
il ne doit y avoir ni vertige ni nystagmus. 4 : on demande au patient de se coucher sur
son côté droit, ce qui amène la lithiase dans la crus commune avec un violent vertige.
5 : on redresse le patient avec un risque de chute identique à ce qu’il était pour la
manœuvre de Sémont.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. Paris : Elsevier-Masson ; 2015. Dessins : Carole Fumat.

Manœuvre d’Epley pour un VPPB du canal


postérieur droit
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 2-19 .
Manœuvre d’Epley pour un VPPB du canal postérieur droit.

On commence par pratiquer une manœuvre de Dix et Hallpike droite sur une
patiente assise, les jambes allongées sur le divan d’examen. La tête a été tournée de
45° vers la droite pour mettre le canal postérieur droit dans le plan de bascule. L’al-
longement sur le dos provoque un vertige et un nystagmus caractéristique d’une
stimulation du canal postérieur droit : vertical supérieur et torsionnel antihoraire.
On attend que le vertige et le nystagmus aient cessé. Sur le dos, on fait ensuite
tourner la tête de 90° vers le côté sain, c’est-à-dire vers la gauche. Dans ce mouve-
ment, il ne se produit aucun vertige. On demande ensuite à la patiente de se tour-
ner sur son côté gauche. On peut ainsi faire tourner la tête de 90° supplémentaires
vers la gauche. Après un petit temps de latence, le nystagmus précédent vertical
supérieur et torsionnel antihoraire se répète, témoignant de la poursuite du che-
minement de la lithiase dans le canal postérieur droit vers l’utricule.
34 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Manipulation d’Epley à la tête du patient


Sur cette vidéo présentée dans la diapositive 2-20 , Bronstein effectue d’abord
une manœuvre de Dix et Hallpike. Elle est positive du côté droit. Le médecin
s’assoit ensuite à la tête du lit en maintenant sa tête comme pour la poser sur
ses genoux. Il tourne alors rapidement la tête vers le côté gauche. Aucun nystag-
mus n’apparaît. Il demande ensuite au patient de se coucher sur son côté gauche.
Aucun nystagmus n’apparaît. Ensuite, le médecin peut alors poursuivre facilement
la rotation de la tête vers la gauche jusqu’à atteindre la position libératrice. Il ter-
mine en remettant le patient en position assise, le cou légèrement fléchi.
Manœuvre d’Epley à la tête du patient.
© Bronstein A. Dizziness : a practical approach to diagnosis and management.
University Press Cambridge 2007.

Théorie de la vraie manœuvre de Sémont


(diapositive 2-21)

Théorie de la vraie manœuvre de Sémont par A. Sémont pour un VPPB du canal


postérieur gauche.
Réalisation pratique sur un lit d’examen.
Source : Sémont A. Manœuvre libératoire de Sémont. In Sauvage JP, Chays A, Gentine A, eds. Vertiges positionnels. Rapport
SFORL 2007 © SFORL.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal postérieur 35

Dans le rapport 2007 de la Société française d’ORL « Vertiges positionnels », Alain


Sémont explique son protocole. Sa particularité est de n’effectuer les rotations
de la tête de 45° qu’après les mouvements de bascule. L’objectif est de plaquer la
lithiase sur la paroi du canal afin de prévenir les mouvements inertiels de la lithiase
la faisant retourner vers l’ampoule. La rotation de la tête de 45° n’est effectuée
qu’après que le nystagmus a commencé à battre pour l’accélérer. Le principe est
de ne mettre en jeu que la pesanteur comme dans la manœuvre d’Epley.

Manœuvre de Sémont
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 2-22 .
Manœuvre réalisée par A. Sémont pour un VPPB du canal postérieur gauche.
CHAPITRE

3
Vertiges positionnels
paroxystiques bénins
du canal horizontal

Ce sont des VPPB très invalidants car survenant au lit, obligeant le patient à ne pas
rester allongé, à ne pas se retourner et à dormir en position demi-assise. Leur trai-
tement est aussi plus compliqué que pour le canal postérieur car il faut d’abord
comprendre quel côté est atteint.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


© 2023 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
38 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Canaux semi-circulaires horizontaux vus de profil


(diapositive 3-1)

Cochlée
Labyrinthe
postérieur

Labyrinthe cochléovestibulaire droit vu de profil.


Au centre se trouve un cube creux appelé vestibule osseux s’ouvrant par deux fenêtres
dans la caisse du tympan. Les trois canaux semi-circulaires s’abouchent à trois coins du
vestibule (V).
Reproduced from Sauvage JP, Puyraud S, Roche O, Rahman A. Anatomie de l’oreille interne. EMC - Oto-rhino-laryngologie
1999 : 1-16 [Article 20-020-A-10]. Copyright © 1999 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

En position érigée, les canaux horizontaux sont stimulés par des rotations de la
tête dans le plan horizontal. En position couchée, ils sont stimulés dans le plan
vertical. Dans les deux cas, leur stimulation provoque des nystagmus horizontaux.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal 39

Inclinaison du canal horizontal de 30° en arrière


en position érigée (diapositive 3-2)

CA

CP
30º
CH

Assis

30º 30º
CA

CA

CP
CH
CH CP

Couché Cou fléchi de 30º

Plan des canaux horizontaux.


CA : canal antérieur ; CH : canal horizontal ; CP : canal postérieur.
D’après Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.
40 Guide pratique de rééducation vestibulaire

En position érigée, tête droite, le plan du canal horizontal est incliné de 30° en
arrière (A). Cette inclinaison entraîne le fait qu’en position debout, pour horizon-
taliser le canal horizontal (CH), il faut fléchir le cou de 30° (B). En position cou-
chée, pour verticaliser ce canal horizontal, il suffit de rétrofléchir le cou de 60°(C).
Ainsi, quand le patient est couché sur le dos, le cou fléchi de 30°, les roulis du corps
provoquent des rotations des canaux horizontaux dans un plan vertical, soit vers
la gauche, soit vers la droite.

Manœuvre de roulis en décubitus vue par le vertex


(diapositive 3-3)

A B C
Manœuvre de roulis en décubitus.
Le canal semi-circulaire horizontal est vu par le vertex. Il est parfaitement vertical par
une flexion du cou de 30°. U : utricule.
D’après Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

Le canal semi-circulaire droit tourne en sens horaire (C) et en sens antihoraire (A)
dans un plan parfaitement vertical.

Propriétés des courants endolymphatiques


(diapositive 3-4)
Dans une rotation de la tête vers la droite, on obtient un nystagmus horizontal
dont la phase rapide est dirigée vers la droite, grâce à une stimulation du canal
horizontal droit où est produit un courant endolymphatique ampullipète, et à
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal 41

une inhibition du canal horizontal gauche où est produit un courant endolym-


phatique ampullifuge (effet push pull).
Rotation
Courant Courant
vers la droite
ampullifuge ampullipète

Z
OG Ut Ut OD

NYSTAGMUS DROIT

Nystagmus horizontal droit provoqué par rotation horizontale horaire grâce à une
stimulation ampullipète du canal horizontal droit.
OD : oreille droite ; OG : oreille gauche ; Ut : utricule.
D’après Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. Paris : Elsevier-Masson ; 2015. Dessins : Carole Fumat.

Les trois formes pathogéniques (diapositive 3-5)

Les trois formes pathogéniques des VPPB du canal horizontal.


U : utricule.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.
42 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Sur cette figure, le patient est couché sur le dos et est vu par le vertex. C’est le canal
horizontal droit qui est atteint. Dans la première forme, la lithiase est placée dans
le bras postérieur du canal où elle se déplace librement lors des rotations de la tête
(canalolithiase). Dans la seconde forme, la lithiase est placée dans l’ampoule où
elle se déplace encore librement (ampulolithiase). Dans la troisième, la lithiase est
attachée à la cupule du canal (cupulolithiase). Dans cette dernière forme, on n’est
pas sûr qu’il s’agisse de lithiase formée d’otolithes dégénérés, il pourrait aussi bien
s’agir d’œdème de la cupule d’origine virale.

Les deux types de nystagmus (diapositive 3-6)

Forme antigéotropique

Forme géotropique

Les deux types de nystagmus horizontal.


Quand on tourne le patient du côté droit, il est horizontal gauche et quand on le
tourne du côté gauche, il est horizontal droit. U : utricule.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

En position couchée, lorsque la lithiase est située dans le bras postérieur du canal,
les rotations droites et gauches de la tête provoquent des nystagmus horizontaux
qui battent vers le bas (nystagmus géotropiques). Dans ces mêmes rotations, il
peut s’agir de nystagmus qui battent vers le haut (antigéotropiques). Cette der-
nière possibilité arrive dans deux autres cas :
▪ lorsque la lithiase est située dans l’ampoule ;
▪ lorsque la lithiase est fixée à la cupule.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal 43

Mécanisme d’une forme géotropique


(diapositive 3-7)


+

U U

U a'
b a
c
a''
af

ap
Canalolithiase droite.
U : utricule.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Tous droits
réservés. Dessins : Carole Fumat.

Considérons une forme géotropique d’un canal horizontal droit où la lithiase est
dans la partie postérieure du canal horizontal en « a ». Dans une rotation gauche de
la tête, sous l’effet de la pesanteur, la lithiase tombe vers l’utricule (a’ → b) en déclen-
chant un courant endolymphatique ampullifuge (af) inhibiteur du canal droit (–), et
par conséquent un nystagmus horizontal gauche battant vers le bas. Au contraire,
dans une rotation droite de la tête, sous l’effet de la pesanteur, la lithiase tombe vers
l’ampoule (a’’ → c) en déclenchant un courant endolymphatique ampullipète (ap)
stimulant, et par conséquent un nystagmus horizontal droit battant encore vers le
bas puisque cette oreille est maintenant placée en bas. Un nystagmus horizontal
géotropique a donc bien été produit.
44 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Exemple : prise en charge d’une forme géotropique


du canal horizontal droit (diapositives 3.8 à 3-10)

U U

U
a b c

Canalolithiase du canal horizontal droit.


U : utricule.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

En I, sur le dos, la lithiase est placée dans le bras postérieur gauche, schémati-
quement dans le prolongement de la cupule. En II, on réalise une rotation de la
tête vers la gauche. La lithiase tombe de a → b vers l’ampoule en produisant un
courant endolymphatique ampullifuge inhibiteur et donc un nystagmus gauche
géotropique. En III, on tourne la tête vers la droite. La lithiase tombe en c en pro-
duisant un courant endolymphatique endolymphatique ampullipète dirigé vers
l’ampoule et donc excitateur. Ce nystagmus qui bat vers la droite est encore géotro-
pique mais il désigne le côté atteint. Il est si violent qu’il peut même s’inverser,
confirmant qu’il indique bien le côté atteint.

En résumé, comment déterminer le côté atteint ?


(diapositive 3-11)
1. C’est le côté qui déclenche le nystagmus le plus violent (2e loi d’Ewald qui
stipule que les stimulations l’emportent sur les inhibitions).
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal 45

2. Le contexte peut aider :


– par exemple, une réversion ou inversion spontanée d’un violent nystagmus
horizontal (cf. diapositives 4-16 et 4-17) ;
– autre exemple, quand une forme du canal horizontal est provoquée à la
suite d’une manœuvre pour VPPB du canal postérieur (canal switch), le côté
atteint reste le même que celui du canal postérieur plus facile à déterminer
(cf. diapositive 3-14) ;
– enfin, dans un faible pourcentage de cas, il existe des VPPB secondaires avec
des pathologies labyrinthiques s’accompagnant de déficit vestibulaire calorique
ou giratoire désignant le côté atteint.
3. Si un doute persiste, il reste à utiliser le procédé de Brandt…

Manœuvre de Brandt (diapositive 3-12)

Manœuvre de Brandt.
OD : oreille droite ; OG : oreille gauche.
D’après Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.
46 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Elle est utile pour connaître le côté atteint dans une canalolithiase du canal hori-
zontal. Considérons le cas d’une canalolithiase située dans le bras postérieur du
canal horizontal droit. À partir de la position couchée sur le dos, la tête droite, on
relève le patient et on le fait s’incliner en avant comme s’il allait lacer ses souliers.
Au départ, la lithiase est en « a ». Après que le patient s’est penché en avant,
la lithiase coule en « b » en produisant un courant endolymphatique ampulli-
pète stimulant. Un nystagmus horizontal droit est alors généré battant vers le
côté atteint. Toutefois, cette manœuvre présente un inconvénient : l’envoi de la
lithiase dans l’ampoule d’où il sera plus difficile de la faire sortir. C’est la raison pour
laquelle il faut redresser le patient dès que le nystagmus démarre et avant que la
lithiase n’atteigne l’ampoule.

Manœuvre libératrice de Baloh-Lempert


(diapositives 3-13 et 3-14)
I II III

U d
c e
U

Manœuvre libératrice de Baloh-Lempert.


U : utricule.
D’après : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal 47

C’est la manœuvre utilisée pour traiter une forme géotropique de canalolithiase


du canal horizontal. Le patient est en décubitus dorsal, le cou fléchi de 30°. Elle
consiste à lui faire effectuer des rotations de la tête vers le côté sain. En III, pour un
côté gauche, la lithiase était arrivée en « c ». Après une première rotation de 90°
vers la droite, la lithiase tombe dans l’utricule en « d ». En II, une rotation supplé-
mentaire mettant le patient à plat ventre confirme sa situation dans l’utricule en
« e ». Le succès de la manœuvre se traduit par la genèse d’une salve de nystagmus
horizontal battant vers le côté sain. On continue la rotation jusqu’à ce que le
patient arrive sur le dos, soit un total de 360° expliquant que cette manœuvre soit
surnommée « manœuvre barbecue ».
Cette manœuvre est illustrée par la vidéo de la diapositive 3-14 .
Manœuvre de Baloh-Lempert pour un VPPB du canal horizontal.

On commence par réaliser une manœuvre de Dix et Hallpike droite. Après un


temps de latence de quelques secondes, apparaît un nystagmus horizontal bat-
tant vers la droite, donc géotropique. Par conséquent, ce n’est pas un VPPB du
canal postérieur, mais un VPPB du canal horizontal. On retire alors le coussin qui
avait été placé sous les reins de la patiente pour le positionner sous la tête afin de
relever celle-ci de 30° et de bien verticaliser les canaux horizontaux. Puis on réalise
une rotation de la tête vers la gauche. Après un temps de latence, on déclenche
un nystagmus horizontal gauche encore géotropique mais plus faible que le pré-
cédent. On a donc affaire à un VPPB du canal horizontal droit. On décide de
pratiquer une manœuvre de Baloh-Lempert vers le côté sain, donc vers la gauche.
Dans un premier temps, on demande au patient de se tourner sur son côté
gauche pour faciliter les rotations de la tête dans cette direction. Une rotation
supplémentaire de 90° vers la gauche déclenche un violent nystagmus horizontal
gauche traduisant la sortie de la lithiase du canal horizontal et son entrée dans
l’utricule. Après que ce nystagmus s’est arrêté, on réalise d’autres rotations de la
tête vers la gauche, mais sans caméra jusqu’à ce que le patient atteigne la position
à plat dos. Depuis, la patiente n’a plus présenté de vertiges.
48 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Cas d’une lithiase dans l’ampoule du canal


horizontal droit (forme antigéotropique)
(diapositive 3-15)

Forme
antigéotropique

A B C D
Manœuvre provocatrice.
Rangée du haut : patient vu par le vertex et sens du nystagmus. Rangée du bas :
canal horizontal droit vu par le vertex et direction des courants endolymphatiques
induits. U : utricule. La lithiase reste mobile avec la pesanteur mais reste prisonnière
de l’ampoule du canal horizontal (A). Si l’on tourne la tête du patient vers sa gauche
(B), on voit que la lithiase enfonce la cupule en direction ampullipète exerçant une
stimulation qui produit un nystagmus droit, donc vers le haut, soit antigéotropique.
Inversement, si l’on tourne la tête du patient vers sa droite (C), on voit que la lithiase
mobilise la cupule en direction ampullifuge exerçant une inhibition qui produit un
nystagmus gauche, donc battant vers le haut et encore antigéotropique.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Cette fois, le courant ampullipète survient quand la tête est couchée sur le côté
sain. C’est-à-dire que le côté atteint est celui sur lequel le patient se couche en
déclenchant le vertige le plus faible. C’est l’inverse de ce qui se passe pour une
forme géotropique. Ce peut être une source de désaccord avec le patient.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal 49

Manœuvre de Gufoni pour une forme


antigéotropique de canalolithiase gauche
(diapositive 3-16)
Cette manœuvre permet de transformer une forme antigéotropique en une
forme géotropique.

A B C
Manœuvre de Gufoni.
Le labyrinthe vestibulaire et le patient sont vus de face. La lithiase est bloquée dans
l’ampoule du canal horizontal de l’oreille gauche, séparée de l’utricule par la cupule.
Le canal horizontal a été trépané pour visualiser la lithiase (A). On commence
par plaquer l’oreille gauche sur la table d’examen (B) en position indifférente sur
l’oreille atteinte avec décélération brutale ; on attend que le nystagmus horizontal
antigéotropique s’arrête indiquant que les débris sont arrivés à la partie moyenne
du canal. On donne une brusque rotation de la tête vers la droite de 45°, nez en l’air
(C), ce qui déclenche encore un nystagmus antigéotropique signifiant que les débris
arrivent dans la partie postérieure du canal. Il faut encore finir par une manœuvre de
Baloh-Lempert classique vers la droite (non figurée ici). Mais, en cas d’échec, il ne faut
surtout pas insister (cf. infra).
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.
50 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Cas d’une cupule lourde


Diagnostic (diapositive 3-17)
Nystagmus gauche Null position

A B C
Diagnostic d’une cupule lourde selon Bisdorf (Luxembourg).
Chez un patient couché sur le dos, la tête en position médiane, le diagnostic repose
sur la présence d’un nystagmus de position. En pareil cas (A), la cupule du canal
horizontal ne serait pas verticale mais oblique, parallèle à l’axe du rocher. Si l’on
dessine les vecteurs d’accélération en rapport avec la pesanteur (B), on constate que
l’on peut en distinguer deux. Le premier est dans le prolongement de la cupule et
est sans action sur elle. En revanche, le deuxième est perpendiculaire à la cupule. Il
exerce ainsi un effet ampullipète stimulant qui produit donc un nystagmus horizontal
battant vers le côté atteint et aussi longtemps que dure cette position. Pour arrêter
ce nystagmus de position, il suffit de donner une légère rotation de la tête de 20°
dans le sens de sa phase rapide, donc vers le côté atteint, pour aligner la cupule sur la
pesanteur (C).

Répétons qu’une cupule lourde peut être le résultat d’un œdème d’origine virale,
donc sans espoir de pouvoir décrocher une lithiase ! En pareil cas, plutôt que de
répéter des manœuvres risquant de déchirer la cupule et d’aggraver la situation,
mieux vaut prescrire une courte corticothérapie qui a toutes les chances d’être
efficace.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal horizontal 51

En pratique (diapositives 3-18 à 3-21)


I II III IV

30° 45°

U U
Ap 30° 30°
U
G G=Cu
Cu
Cupulolithiase du canal horizontal droit.
I. Nystagmus de position sur le dos tête en rectitude battant vers le côté atteint.
II. Disparition du nystagmus de position lorsque la tête est tournée de 30° vers le côté
droit. III et IV. Nystagmus antigéotropique dans le roulis en décubitus latéral. Ap :
vecteur ampullipète excitateur ; Cu : plan de la cupule ; G : force gravitaire ; G = Cu :
cupule alignée sur la gravité.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. Paris : Elsevier-Masson ; 2015. Dessins : Carole Fumat.

On commence par vérifier s’il existe un nystagmus spontané dans la position sur le
dos tête droite (I). Le cas échéant, on donne une petite rotation à la tête dans
le sens de sa phase rapide (ici vers la droite, II) pour vérifier que cette manœuvre
arrête le nystagmus. Le cas échéant, c’est une cupule lourde. Si l’on continuait la
rotation de la tête vers la droite, on verrait s’inverser le nystagmus pour battre à
gauche donc vers le haut (III). En pareil cas, il faut renoncer aux manœuvres thé-
rapeutiques et renvoyer ce patient au médecin traitant pour essai d’une courte
corticothérapie.
Cupulolithiase du canal horizontal droit.

La vidéo de la diapositive 3-22 illustre le cas d’une patiente qui présentait des
vertiges positionnels. On commence par une manœuvre de Dix et Hallpike gauche
qui provoque un nystagmus horizontal droit évoquant une forme antigéotro-
pique de VPPB. À plat dos, le nystagmus s’arrête, puis repart à droite. On suspecte
alors une cupule lourde du canal horizontal droit. Ce diagnostic est confirmé par
le fait qu’une petite rotation de la tête vers la droite arrête ce nystagmus de position.
52 Guide pratique de rééducation vestibulaire

On pratique une manœuvre de Gufoni droite qui échoue. On renonce donc aux
manœuvres thérapeutiques.
Œdème cupulaire du canal horizontal chez une femme enceinte (côté inconnu).

La vidéo de la diapositive 3-23 illustre le cas d’une patiente, enceinte, qui pré-
sentait aussi des vertiges positionnels. Tête tournée à droite, le nystagmus hori-
zontal bat à gauche. Puis tête tournée à gauche, le nystagmus horizontal bat à
droite. Or, ce terrain expose aux œdèmes comme des paralysies faciales. Une
courte corticothérapie s’est avérée efficace.
CHAPITRE

4
Vertiges positionnels
paroxystiques bénins :
protocole diagnostique

Indications de la recherche de VPPB


(diapositive 4-1)
La première question qui se pose est de savoir si on doit seulement réserver la
recherche d’un VPPB aux plaintes de vertige positionnel ? La réponse est non !
La manœuvre de Dix et Hallpike doit être systématique. Par exemple, les VPPB
chez les sujets âgés ne se manifestent le plus souvent seulement que par des
troubles de l’équilibre et une baisse de la qualité de vie.

Prérequis : manœuvre de Dix et Hallpike


(diapositive 4-2)
L’examen d’un patient présentant des vertiges doit toujours commencer par la
pratique des manœuvres diagnostiques de Dix et Hallpike.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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54 Guide pratique de rééducation vestibulaire

A B

C D
Manœuvres de Dix et Hallpike droite (A, B) et gauche (C, D).
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. Paris : Elsevier-Masson ; 2015. Dessins : Carole Fumat.

Cette manœuvre consiste à allonger sur le dos un patient qui était en position
assise, la tête tournée de 45°à droite ou à gauche pour le mettre en position cou-
chée, tête légèrement pendante par rapport aux épaules. Cette position, tête pen-
dante, peut être obtenue de deux façons : soit en plaçant un coussin sous ses
reins, soit en le manipulant en bout de table (cf. vidéo de la diapositive 2-20).
La manœuvre de Dix et Hallpike est positive lorsque l’on déclenche un vertige
apparaissant après un temps de latence d’une à plusieurs secondes et durant
moins d’une minute.
▪ C’est un VPPB du canal postérieur s’il survient un nystagmus contemporain
possédant une composante verticale supérieure. Si la tête avait été tournée à
droite, le canal postérieur en cause est situé du côté droit et le nystagmus pré-
sentait une composante antihoraire. Si la tête avait été tournée à gauche, le canal
postérieur en cause est situé du côté gauche et le nystagmus présentait une com-
posante horaire. La manœuvre thérapeutique est la manœuvre d’Epley ou de
Sémont (cf. chapitres 2 et 3).
▪ C’est un VPPB du canal antérieur s’il apparaît un nystagmus contemporain
possédant une composante verticale inférieure. Si la tête avait été tournée
à droite, le canal antérieur en cause est situé du côté gauche et le nystag-
mus présente une composante horaire. Si la tête avait été tournée à gauche,
le canal antérieur en cause est situé du côté droit et le nystagmus pré-
sente une composante antihoraire. La manœuvre thérapeutique est la
manœuvre de Sémont inversée (cf. diapositive 4-11).
Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole diagnostique 55

Manœuvres diagnostiques déclenchant


un nystagmus horizontal (diapositive 4-3)
Il s’agit alors probablement d’un VPPB du canal horizontal. On commence par déplacer
le coussin qui était sous les reins pour le poser sous la tête du patient (cf. diapositive 4-2,
figures A et B). On obtient ainsi une flexion du cou de 30°. L’objectif est l’obtention de
canaux horizontaux situés dans un plan parfaitement vertical (cf. diapositive 3-2). On
peut dès lors effectuer des roulis du corps en décubitus et provoquer des rotations des
canaux horizontaux vers la droite et vers la gauche.

Manœuvres de roulis en décubitus (diapositive 4-4)


En premier lieu, on vérifie s’il existe un nystagmus de position horizontal, le patient
étant couché immobile, la tête dans un plan médian parfaitement sagittal.
Cupulolithiase
U
Ap 30°
30°
G G=Cu
Cu

Nystagmus
horizontaux
Canalolithiase
dans le bras
géotropiques postérieur

Canalolithiase
antigéotropiques
dans l’ampoule

Manœuvres de roulis en décubitus.


Ap : vecteur ampullipète excitateur ; Cu : plan de la cupule ; G : force gravitaire ;
G = Cu : cupule alignée sur la gravité.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. Paris : Elsevier-Masson ; 2015. Dessins : Carole Fumat.

1. S’il existe un nystagmus horizontal tant que dure cette position, c’est en faveur
d’une lithiase collée à la cupule (cupulolithiase) ou d’une cupule lourde (œdème
de la cupule du canal horizontal). L’anatomie montre que les cupules ne sont pas
sagittales mais parallèles à l’axe du rocher (cf. diapositives 3-17 et suivantes). En
décubitus dorsal strict, le plan de la cupule du canal horizontal n’est donc pas
vertical mais incliné d’environ 30° vers le côté opposé. Si une lithiase est collée à
la cupule, elle exerce des forces liées à la gravité qui peuvent être décomposées
56 Guide pratique de rééducation vestibulaire

en 2 vecteurs : « Cu » est dans le prolongement de cupule et ne possède aucune


action sur elle. En revanche, « Ap » est perpendiculaire à la cupule et exerce une
force stimulante ampullipète responsable du nystagmus de position observé et
battant vers l’oreille atteinte. Pour vérifier cette hypothèse, il suffit ensuite d’impri-
mer à la tête une rotation de 30° dans le sens de la phase rapide du nystagmus
pour l’annuler. Dès lors, il faut rester très prudent car des manœuvres thérapeutiques
acharnées peuvent déchirer la cupule et aggraver la situation. Un traitement médical
par corticoïdes peut être proposé car il ne s’agit en fait généralement que d’œdème
cupulaire d’origine virale.
2. S’il n’existe pas de nystagmus horizontal de position, il faut exercer des rota-
tions de la tête et du corps en position allongée dans un sens, puis dans l’autre. Ces
manœuvres de roulis en décubitus sont effectuées en posant la tête du patient
sur l’oreiller pour fléchir le cou de 30°. On exerce ensuite des forces douces en se
servant du genou replié du patient faisant office de bras de levier. Ces change-
ments de position exercent des forces gravitaires sur les canalolithiases au sein
des liquides endolymphatiques. Le diagnostic de VPPB du canal horizontal est
alors déduit de l’observation d’un nystagmus horizontal provoqué qui peut être
de deux types :
– soit géotropique car battant vers le bas, c’est-à-dire vers l’oreille située en
bas ;
– soit antigéotropique, c’est-à-dire battant en haut vers l’oreille qui est située
en haut.
Dans les formes géotropiques, on a vu que la lithiase se mobilise dans le bras
postérieur du canal horizontal alors que dans les formes antigéotropiques, elle
reste prisonnière dans l’ampoule (cf. diapositives 3-15 et 3-17). De cette différence
découlent les modalités des manœuvres libératrices, en particulier la transforma-
tion d’une lithiase située dans l’ampoule en une lithiase située dans le bras pos-
térieur du canal horizontal par une manœuvre de Gufoni (cf. diapositive 3-16).

Formes symptomatiques (diapositive 4-5)


1. VPPB du canal antérieur
2. Cas avec manœuvre de Dix et Hallpike négative mais forte rétropulsion en
relevant le patient
3. Canal switch ou conversions en une forme d’un autre canal
4. Atteintes multicanalaires
5. Formes avec phase secondaire
6. Formes étiologiques
7. Formes dites secondaires
Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole diagnostique 57

Découverte d’un VPPB du canal antérieur


(diapositives 4-6 à 4-8)
Le canal antérieur ne représente que 1 % de tous les VPPB en raison de sa forme
en anse de seau et de sa situation dans la partie haute du labyrinthe qui ne lui
permettent pas de retenir les lithiases.

P
CH
Plan mêdian

C
Pl
*

H
an CP CA

C
CP CP m
êd
êd

Plan biscapulaire

A
ia
*

C
CH CH n Plan sagittal du corps
de
Plan de bascule
la
de la tête


P

te
* CA
C

CA
H

CA
C

CP
A

CH
C

45°
45°

III I II
Découverte d’un VPPB du canal antérieur.
I. Orientation du plan de bascule pour un VPPB du canal antérieur gauche.
II. Obtention de cette orientation par une rotation de 45° vers la droite dans la
manœuvre de Dix et Hallpike. III. Obtention de cette orientation par une rotation
de 45° vers la gauche dans la manœuvre de Sémont. CA : canal antérieur ; CH : canal
horizontal ; CP : canal postérieur.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Les circonstances du diagnostic sont toujours les mêmes. Par exemple, on veut
pratiquer une manœuvre de Dix et Hallpike avec une rotation de la tête de 45°
vers la droite. Après un temps de latence, un nystagmus se déclenche dont on
s’aperçoit qu’il n’est pas caractéristique d’un canal postérieur droit car il a une
composante verticale inférieure et une composante giratoire horaire incriminant
un côté gauche. C’est donc un canal antérieur gauche.
Lors du temps diagnostique d’une manœuvre de Sémont, le patient est assis face
à soi. On lui tourne la tête de 45° vers la gauche dans l’idée de rechercher un VPPB
du canal postérieur (CP) droit. On le bascule ensuite sur son côté droit, la tête
toujours tournée à gauche. La surprise est de déclencher un nystagmus ayant une
composante verticale inférieure et une composante torsionnelle horaire. C’est
donc un canal antérieur (CA) gauche.
▪ Dans le cas d’une manœuvre de Dix et Hallpike : on tourne la tête de 45°vers
la droite avant de basculer le patient sur le dos pour stimuler le canal antérieur
gauche.
▪ Dans le cadre d’une manœuvre de Sémont : on tourne la tête de 45°vers la
gauche et on bascule le patient sur son côté droit pour stimuler le canal antérieur
gauche.
58 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Synthèse des nystagmus provoqués dans les VPPB


du canal antérieur (diapositive 4-9)

Nystagmus du VPPB du canal antérieur.


A. Obtenu à la manœuvre de Dix et Hallpike gauche pour un VPPB du canal antérieur
droit. B. Obtenu à la manœuvre de Dix et Hallpike droite pour un VPPB du canal
antérieur gauche.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Pour un VPPB du canal antérieur droit, le nystagmus possède une composante


verticale inférieure et une composante torsionnelle antihoraire (A). Pour un VPPB
du canal antérieur gauche, le nystagmus possède une composante verticale infé-
rieure et une composante torsionnelle horaire (B).

VPPB du canal antérieur gauche


Manœuvre de Dix et Hallpike droite
Comme le montre la vidéo de la diapositive 4-10 , on commence par faire une
manœuvre de Dix et Hallpike droite : on avait tourné la tête du patient de 45° vers
la droite et on allonge le patient sur le dos. Après un bref temps de latence, on
déclenche un nystagmus horaire et vertical inférieur. C’est donc un VPPB du canal
antérieur gauche et non un VPPB du canal postérieur droit.
VPPB du canal antérieur gauche.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole diagnostique 59

Manœuvre de Sémont inversée (diapositive 4-11)

Manœuvre de Sémont inversée pour un VPPB du canal antérieur gauche.


D’après Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Sur la figure A, l’oreille interne gauche est vue de dos avec la crus commune au pre-
mier plan. La lithiase est bloquée dans l’ampoule du canal antérieur gauche. En B,
on a effectué une bascule sur le côté gauche du patient, nez en bas comme dans
le temps libératoire d’une manœuvre de Sémont. La lithiase sort de l’ampoule et
gagne la partie moyenne du canal antérieur gauche en créant un courant ampul-
lifuge stimulant avec un nystagmus horaire et vertical inférieur. En C, on a remis
le patient couché sur son épaule droite, nez en l’air, comme dans le temps initial
d’une manœuvre de Sémont. Dans le canal antérieur gauche, la lithiase poursuit
son chemin vers la crus commune en créant à nouveau un courant ampullifuge et
un nystagmus identique au précédent. Enfin, en D, on a remis le patient en posi-
tion érigée. Par gravité, la lithiase traverse la crus commune et tombe dans l’utricule
où elle sera réabsorbée. C’est un instant critique devant être contrôlé car le patient
peut déclencher des réactions brutales le faisant tomber en bas de la table.
En résumé, le terme de Sémont inversé correspond au traitement d’un VPPB anté-
rieur gauche en commençant par une manœuvre thérapeutique de Sémont pour
un VPPB du canal postérieur droit et en finissant par la manœuvre diagnostique
de Sémont pour un VPPB du canal postérieur droit.
60 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Manœuvre de Dix et Hallpike négative mais forte


rétropulsion lors du redressement
Cette situation est illustrée par la vidéo de la diapositive 4-12 .
Manœuvre de Dix et Hallpike gauche avec rétropulsion.

Chez cette femme, les manœuvres de Dix et Hallpike gauche et droite s’étaient
avérées normales. Toutefois, en la remettant en position érigée, il apparaissait
chaque fois une très forte rétropulsion très difficile à contrôler. En pareil cas, il faut
répéter les manœuvres de Dix et Hallpike. C’est ce que l’on fit chez cette patiente.
On déclencha alors le nystagmus typique d’un VPPB du canal postérieur gauche.
Il est difficile d’expliquer la raison de cette forte rétropulsion : probablement un
blocage initial de la lithiase dans l’ampoule ou à l’origine de la crus commune.

Conversion ou canal switch (diapositive 4-13)

Conversion d’une canalolithiase du canal postérieur droit en canalolithiase du


canal horizontal.
Trajet de la lithiase au cours de la manœuvre d’Epley ou de Sémont et chute dans le
canal horizontal en a. CA : canal antérieur ; CC : crus commune ; CH : canal horizontal ;
CP : canal postérieur.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Cette troisième forme clinique concerne des cas de VPPB du canal postérieur où
après une manœuvre de Sémont ou de Epley, on a envoyé la lithiase non pas
dans l’utricule mais dans le canal horizontal. On se trouve alors amené à faire
une manœuvre libératrice de Baloh-Lempert avec l’avantage d’être certain du côté
atteint puisque c’était celui du canal postérieur initial.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole diagnostique 61

Conversion d’un VPPB du canal postérieur gauche


en VPPB du canal horizontal gauche
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 4-14 .
Conversion d’un VPPB du canal postérieur gauche en un VPPB du canal horizontal
gauche.

Après avoir tourné la tête de 45°vers la droite, on a commencé par une manœuvre
diagnostique de Sémont en basculant le patient sur son épaule gauche. C’était bien
un VPPB du canal postérieur gauche avec ses composantes verticale supérieure et
torsionnelle horaire. On a enchaîné par la manœuvre libératrice de Sémont. Mais
là, ce fut un échec, aucun nystagmus libératoire n’apparut. On releva le patient
et on décida de recommencer. La manœuvre diagnostique de Sémont n’a alors
plus déclenché le beau nystagmus précédent, mais un violent nystagmus hori-
zontal prolongé géotropique battant vers la gauche. Après avoir remis le patient
à plat dos pour vérifier qu’il n’y avait pas de nystagmus de position impliquant
une cupulolithiase, on a pratiqué un roulis complet vers la droite qui déclencha
cette fois un faible nystagmus horizontal droit encore géotropique, confirmant
que l’on avait bien transformé le VPPB du canal postérieur gauche initial en une
canalolithiase du canal horizontal gauche et qu’il n’y avait plus qu’à poursuivre la
rotation de 180° vers le côté sain, c’est-à-dire vers la droite. Le patient fut revu le
surlendemain. Il confirma le succès clinique avec des manœuvres diagnostiques
devenues négatives.

Atteinte multiple
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 4-15 .
VPPB multiple des canaux postérieur droit et gauche.

Une première manœuvre de Dix et Hallpike gauche a montré le nystagmus verti-


cal supérieur et torsionnel horaire d’une canalolithiase du canal postérieur gauche.
À noter que cette patiente souffrait du dos. En pareil cas, il faut qu’un aide soulève
les jambes du patient pendant les manœuvres pour diminuer les douleurs. Puis,
on a pratiqué une manœuvre de Dix et Hallpike droite qui a déclenché à son tour
un nystagmus vertical supérieur et antihoraire caractéristique d’un VPPB du canal
postérieur droit. Il ne restait plus qu’à pratiquer les manœuvres libératrices corres-
pondantes éventuellement réparties sur plusieurs jours.

Survenue d’une phase secondaire (diapositive 4-16)


Il s’agit de formes cliniques où le nystagmus provoqué change de sens sans que
l’on ait modifié la position de la tête. Cette inversion apparaît à l’occasion des
62 Guide pratique de rééducation vestibulaire

fortes stimulations. Sa présence présente un grand intérêt dans les VPPB du canal
horizontal en survenant du côté atteint. En effet, celui-ci déclenche un courant
ampullipète alors que le roulis du côté sain ne déclenche qu’un courant ampulli-
fuge plus faible. C’est donc un argument décisif pour déterminer le côté atteint. Le
mécanisme de cette inversion est discuté. Il pourrait s’agir d’un excès de sortie du
potassium à partir des cellules ciliées vers l’endolymphe inversant ainsi la polarité
de la stimulation.
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 4-17 .
Phase secondaire survenant dans le cas d’un VPPB du canal horizontal gauche.

Chez cette patiente, la manœuvre de Dix et Hallpike droite a déclenché un nystag-


mus horizontal droit en faveur d’un VPPB du canal horizontal. On a tourné la tête
vers la gauche, ce qui a déclenché un très violent nystagmus horizontal gauche
encore géotropique. Puis, sans que l’on ait quitté la position tête tournée à gauche,
le nystagmus a ralenti, s’est arrêté, puis inversé, devenant horizontal droit. C’était donc
bien le côté gauche qui était atteint. En outre, la manœuvre de Baloh-Lempert vers le
côté droit a été efficace.

Causes otologiques (diapositive 4-18)


Dans 10 % des cas, le VPPB est en rapport avec une étiologie identifiée.
▪ Le traumatisme est la première cause chez les sujets jeunes.
▪ Dans la névrite vestibulaire, le VPPB entre dans le cadre d’un syndrome de Lind-
say et Hemenway (cf. infra).
▪ Dans les labyrinthites, il existe une surdité.
▪ Dans la maladie de Menière, la fréquence du VPPB est sous-estimée car on le
confond avec les crises typiques. Il faut souligner que toute pathologie de l’oreille
interne est susceptible d’entraîner un VPPB.
En cas de VPPB, un examen ORL est indispensable avec, en particulier, une otos-
copie sous microscope et un audiogramme.

VPPB et traumatisme (diapositive 4-19)


Tous les traumatismes peuvent être en cause, y compris le « coup du lapin ». Le pic de
survenue se situe dans les heures ou dans les quelques jours qui suivent. En expertise,
son imputation peut être acceptée jusqu’à 3 mois. La manœuvre libératrice n’est pas
toujours efficace mais le taux des récidives est faible.
Cette situation est illustrée par la vidéo de la diapositive 4-20 .
VPPB post-traumatique.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole diagnostique 63

Cette jeune patiente avait été frappée par son compagnon. Sur la vidéo, on voit encore
les traces d’un hématome périorbitaire gauche. La surprise fut que c’était la manœuvre
de Dix et Hallpike droite qui était positive. L’interrogatoire a révélé que sous la violence
du choc, elle avait été brutalement projetée à terre sur l’oreille droite.

Syndrome de Lindsay et Hemenway (diapositive 4-21)

Anatomopathologie du syndrome de Lindsay et Hemenway.


CA : canal antérieur ; CC : crus commune ; CH : canal horizontal ; CP : canal postérieur ;
CR : canal réuniens ; VI : nerf vestibulaire inférieur ; VII : nerf facial ; VS : nerf vestibulaire
supérieur.
D’après : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

Il survient après une névrite du nerf vestibulaire (cf. chapitre 6). La forme clinique
particulière en cause est celle qui atteint le nerf vestibulaire supérieur et respecte
le nerf vestibulaire inférieur qui innerve le canal postérieur. Le nerf vestibulaire
supérieur innerve les canaux semi-circulaires antérieur et horizontal et l’utricule.
L’hypothèse anatomopathologique du syndrome de Lindsay et Hemenway est
que la macule otolithique utriculaire se désagrège et laisse échapper ses otolithes
qui tombent dans l’ampoule du canal postérieur dont le nerf ampullaire est resté
intact (flèche). Apparaît alors un VPPB typique qui peut persister des mois, voire
plusieurs années. Les manœuvres libératrices ne sont pas toujours efficaces ou
n’obtiennent qu’une régression transitoire.
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 4-22 .
Syndrome de Lindsay et Hemenway gauche.

Cette patiente avait présenté une névrite vestibulaire gauche plusieurs années
auparavant. Depuis, elle ressentait de violents vertiges positionnels. Lors de la
consultation, elle présentait encore un HIT (head impulse test) positif qui témoi-
gnait de la persistance d’un déficit du canal semi-circulaire horizontal gauche
(cf. diapositives 7-7 à 7-9). Lors de la manœuvre de Dix et Hallpike gauche, on a
64 Guide pratique de rééducation vestibulaire

déclenché le nystagmus vertical supérieur torsionnel horaire typique d’un VPPB


du canal postérieur. Toutes les manœuvres libératrices effectuées ont été inef-
ficaces. Il a fallu réaliser une section du nerf ampullaire postérieur gauche sous
anesthésie locale (intervention de Gacek) pour soulager cette patiente très han-
dicapée depuis des années.

Facteurs favorisants des VPPB (diapositive 4-23)


Ce ne sont pas vraiment des causes mais des facteurs favorisants : l’ostéoporose, le
vieillissement et le terrain migraineux.

VPPB et ostéoporose (diapositive 4-24)


Chez les femmes de plus de 50 ans présentant un VPPB, on retrouve une pré-
valence statistique de l’ostéoporose. Ce pourrait être une cause d’échec des
manœuvres et surtout de récidives. Il y a en effet des points communs entre l’os
et les otolithes :
▪ les deux possèdent une matrice protéique préformée : collagène pour le pre-
mier et otoconine 90 pour les seconds ;
▪ les deux sont caractérisés par un dépôt de calcium : sous forme de phosphate
pour l’un et de carbonate pour l’autre ;
▪ enfin, ils ont en commun le processus de formation et d’enchâssement entravé
par la diminution des œstrogènes après la ménopause.

VPPB et vieillissement (diapositive 4-25)


Si l’on fait une manœuvre de Dix et Hallpike systématique en EHPAD (établissement
d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), on trouve 10 % de VPPB dont
9 % sont méconnus car ne se manifestant que par de troubles de l’équilibre et une
baisse de la qualité de vie. Les formes multiples et les récidives sont fréquentes. On
invoque le rôle de la diminution de la couche gélatineuse de la membrane otolithique
facilitant le décrochage des otolithes (cf. chapitre 12).

VPPB et migraine (diapositive 4-26)


Chez les patients présentant un VPPB, la fréquence d’antécédents de migraine est
multipliée par trois. Chez les femmes, tout se passe comme si les migraines dispa-
raissaient après la ménopause et étaient remplacées par des vertiges. La fréquence
du sexe féminin dans les VPPB atteint 83 %, ce qui pourrait s’expliquer par le fait
que les femmes sont plus souvent migraineuses que les hommes. La fréquence
des récidives atteint 77 % chez les migraineux.
Vertiges positionnels paroxystiques bénins : protocole diagnostique 65

Question sans réponse (diapositive 4-27)


▪ Dans 80 % des cas, le VPPB est dit primaire, c’est-à-dire qu’il apparaît brutale-
ment, qu’il peut régresser spontanément ou qu’il répond bien aux manœuvres
thérapeutiques. La récidive est rare.
▪ Dans 20 % des cas, il est dit secondaire, c’est-à-dire qu’il s’accompagne de désé-
quilibre permanent et d’un examen vestibulaire anormal témoignant d’une vesti-
bulopathie supplémentaire.

VPPB récidivants à bilan vestibulaire anormal


(diapositive 4-28)
Un déficit vestibulaire est retrouvé aux épreuves caloriques et giratoires et en pos-
turographie dynamique avec augmentation des oscillations. Les anomalies vesti-
bulaires les plus fréquentes sont : une hyporéflexie calorique uni- ou bilatérale, des
épreuves giratoires asymétriques, des anomalies en posturographie dynamique
(conditions 4, 5 et 6). L’hydrops labyrinthique est rare.

VPPB avec vestibulopathie supplémentaire


(diapositive 4-29)
Les manœuvres thérapeutiques sont moins souvent efficaces dans ce cas. Elles
doivent être répétées au maximum jusqu’à 3 fois à 7 jours d’intervalle. Même en
cas de succès, un déséquilibre peut persister dans un tiers des cas. La prise
en charge doit alors être complétée par une rééducation par habituation du type
exercices de Norré simplifiés (cf. diapositives 12-24 et 12-25).

Hypothèse de la vestibulopathie lithiasique


chronique (diapositive 4-30)
Chez ces patients, la physiopathologie comporterait trois étapes :
1. il existerait des débris lithiasiques répartis dans toute l’endolymphe ;
2. l’augmentation de densité de l’endolymphe qui en résulte s’opposerait au
déplacement de la cupule et expliquerait le syndrome déficitaire permanent ;
3. de temps à autre, la formation de concrétions dans la partie déclive du laby-
rinthe expliquerait la genèse de VPPB récidivant.
66 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Vue d’une canalolithiase (diapositive 4-31)

Photographie d’une canalolithiase.


Source : Sémont A. Histoire de vertige. Conséquences en tous genres. In Sauvage JP, Chays A, Gentine A, eds. Vertiges
positionnels. Rapport SFORL 2007 © SFORL.

Celle-ci a été réalisée après trépanation d’un canal semi-circulaire pour VPPB irréduc-
tible. Elle montre une masse otolithique qui flotte dans l’endolymphe.
CHAPITRE

5
Approche de
l’équilibration

L’homme est un bipède avec un centre de gravité haut perché, sur un polygone
de sustentation étroit. Dans ces conditions, se tenir érigé et se déplacer relève de
l’exploit. Les mammifères se lèvent et déambulent dès leur naissance. Le nouveau-
né humain en serait bien incapable. Il lui faut 2 mois pour tenir sa tête, 6 mois
pour tenir assis et plus d’un an pour faire ses premiers pas. Son équilibre n’est
mature que vers l’âge de 7 ans ; en revanche, sa plasticité lui permet ensuite de faire
un saut périlleux, du ski et de voler en kitesurf.

Posture érigée, redressement et maintien


de l’équilibre (diapositive 5-1)
▪ L’équilibration est une fonction complexe soumise à un apprentissage perma-
nent. Par exemple, en cas d’immobilité prolongée, il faut réapprendre à se tenir
debout. De nombreux automatismes sont réglés en routine par le cerveau. La
vision périphérique permet de savoir où l’on est et la vision fovéale ce que l’on voit.
▪ Le cerveau dispose encore d’un appareil proprioceptif très fin, cultivé en per-
manence par l’exercice physique. La régulation posturale repose sur l’anticipation
et l’aptitude à s’adapter à des expériences nouvelles.
▪ L’appareil vestibulaire n’est que spécialisé dans la détection des mouvements
de la tête. En pathologie, les pires situations sont les attitudes d’évitement et les
meilleures reposent sur une bonne motivation du patient.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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68 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Première approche : les réflexes (diapositive 5-2)


Elle a été développée par Magnus en 1924 qui a considéré que l’équilibration était le
résultat d’une chaîne de réflexes réafférents. Le modèle était celui d’un chat qu’on lâche
sur le dos et qui se rétablit au sol sur ses quatre pattes. Ces réflexes peuvent persister
chez un canard décérébré après une section au niveau du mésencéphale. On distingue
deux types de réflexes stabilisateurs :
1. les réflexes myotatiques d’étirement, gérant le tonus musculaire ;
2. les réflexes vestibulospinaux, générant des mouvements en sens inverse de ceux
qui les avaient créés (canaux semi-circulaires et surtout macules otolithiques).

Réflexe myotatique
Définition (diapositive 5-3)

A
f

T
m

la

SS



f
Approche de l’équilibration 69

Réflexe myotatique : résultat de l’innervation fusomotrice.


A. Réflexe myotatique du quadriceps du chat décérébré. Dispositif expérimental. On exerce


une traction τ sur le muscle ayant conservé son innervation (fibres Ia) sensitive (s) issue du
fuseau et motrice (m). La tension résultante (T) est mesurée par jauge A. B. Principe de la
« boucle gamma ». L’axone du neurone fusimoteur gamma innerve la striation intrafusale
du fuseau f. Son excitation n’entraîne aucune contraction musculaire. En revanche, sous
l’effet d’actions supraspinales (SS), il module les terminaisons primaires (Ia), lesquelles
excitent ou inhibent les neurones (α) de l’innervation extrafusale provoquant ainsi une
contraction musculaire tonique adaptée.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat. D’après Buser P, Imbert M. Neurophysiologie fonctionnelle. Paris : Hermann, 1975.

C’est la contraction réflexe d’un muscle lors de son propre étirement pour ajuster son
tonus et maintenir une posture. Dans un muscle, certaines fibres, les fuseaux, sont des
récepteurs proprioceptifs mesurant l’étirement et le degré de tension de ce muscle.
Ces fibres sont connectées au motoneurone du muscle correspondant par l’intermé-
diaire des cornes postérieures, puis des cornes antérieures de la moelle épinière. Ainsi
peut s’exercer une contraction de ce muscle. Ce réflexe est contrôlé et modulé par la
boucle gamma sous l’effet d’actions centrales supraspinales sensitives (SS), en particu-
lier vestibulaires.

Contrôle du réflexe myotatique et réglage du tonus des muscles


antigravitaires (diapositive 5-4)
▪ Il existe des centres dits facilitateurs comme les noyaux vestibulaires et la réticu-
lée rostrale. Par exemple, en cas de destruction labyrinthique unilatérale apparaît une
hypotonie unilatérale ipsilatérale avec déviations posturales lentes comme dans la
névrite vestibulaire (cf. diapositive 6-5).
▪ À l’inverse, il existe des centres inhibiteurs comme le cortex frontal et surtout le
cervelet. Par exemple, si l’on effectue une destruction du cervelet chez un animal
(décérébellation), il apparaît une rigidité des muscles extenseurs avec opisthoto-
nos par désinhibition de ce réflexe. C’est un état qui peut être supprimé par une
labyrinthectomie bilatérale.
70 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Réflexes vestibulospinaux (diapositive 5-5)


CSC

L
MO
D M

FVSL


FVSM

Arcs réflexes vestibulospinaux passant par les noyaux vestibulaires.


CSC : canaux semi-circulaires ; D : noyau vestibulaire descendant ; FVSL : faisceau
vestibulospinal latéral ; FVSM : faisceau vestibulospinal médian ; L : noyau vestibulaire latéral ;
M : noyau vestibulaire médian ; MO : macule otolithique ; S : noyau vestibulaire supérieur.
D’après Dix MR, Hood JD. Vertigo. New Jersey : Wiley ; 1984. Dessins : Carole Fumat.

Il existe deux modalités de connexion entre le vestibule et les cornes antérieures


de la moelle :
▪ la première s’effectue par le faisceau vestibulospinal médian se connectant
aux muscles du cou générant des réflexes canalo-coliques. Ce faisceau est dans la
continuité du faisceau longitudinal médian connectant le vestibule aux noyaux
oculomoteurs. C’est naturel puisque les rotations du cou et les rotations des yeux
sont concomitantes ;
▪ la deuxième s’effectue par le faisceau vestibulospinal latéral connectant le
vestibule à tous les muscles du tronc et des membres pour générer surtout des
réflexes maculo-somatiques entraînant des mouvements en sens inverses de ceux
qui les ont déclenchés.
Approche de l’équilibration 71

Premier résultat : la coordination œil-tête


(diapositive 5-6)
C’est la genèse d’un mouvement des yeux lors d’un mouvement de la tête.
Cette genèse passe par le faisceau longitudinal médian. Il s’y ajoute un réflexe
vestibulocolique et un réflexe proprioceptif cervico-oculaire. Ces réflexes agissent
en synergie ou en dissociation. L’application clinique repose sur les exercices de
Tusa en synergie, lorsque le mouvement de la tête commande celui des yeux,
ou en dissociation, lorsque le mouvement des yeux commande celui de la tête
(cf. diapositives 8-2 et 8-3).

Deuxième résultat : les réflexes vestibulo-


somatiques (diapositive 5-7)
On distingue l’origine otolithique, où chaque hémicorps est géré indépen-
damment par les mouvements de la tête avec un mécanisme de push pull au
sein de chaque macule otolithique, et la modulation du tonus des muscles
extenseurs d’un l’hémicorps par des réflexes statiques myotatiques fonction
de la position de la tête dans l’espace. Et enfin, sont constitués des réflexes
dynamiques comme la réaction d’alerte précoce en cas de chute enclenchant
une réponse en chaîne de tous les muscles squelettiques.
72 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Réaction d’alerte précoce (diapositive 5-8)


OTR

EMG
Muscle gastrocnémien

Muscle tibial antérieur

Posturographie
A

L R

10 mm P

Phénomène de Tullio.
Son émis dans l’oreille gauche pathologique. Le patient est debout sur une plate-
forme de posturographie. Le son a une fréquence de 480 Hz et une intensité de 95 dB.
Après une latence de 22 ms apparaît : une OTR (ocular tilt reaction) comportant un
strabisme vertical avec un œil ipsilatéral positionné au-dessus de l’œil controlatéral
(hypertropie) et une inclinaison de la tête vers la droite ; une déviation du corps
en arrière et à droite mesurable en posturographie avec une latence de 80 ms
(contraction du muscle gastrocnémien enregistré en électromyographie [EMG] avec
une latence de 52 ms et du muscle tibial antérieur avec une latence de 47 ms).
D’après Brandt T. Vertigo, its multisensory syndromes. London : Springer-Verlag ; 2000. p. 108. Dessins : Carole Fumat.

Elle est illustrée par l’exemple d’une fracture de l’étrier (stapes dans la Terminologia
Anatomica) après un traumatisme auriculaire (Brandt, 2000). Une telle fracture pro-
voque le phénomène de Tullio ou vertige acoustique. Ce phénomène est produit par
un son fort envoyé dans l’oreille traumatisée. En même temps, une vidéonystagmos-
copie (VNS) enregistre une OTR (ocular tilt reaction) constituée par une inclinaison
de la tête vers le côté sain, une rotation des yeux vers le côté sain avec abaissement de
l’œil du côté sain, et une élévation de l’œil du côté atteint. En même temps, une élec-
tromyographie enregistre une excitation du muscle gastrocnémien et du muscle tibial
antérieur. Le patient est placé sur une plateforme de posturographie qui enregistre une
déviation vers l’arrière et vers l’oreille atteinte. Tous ces signes objectivent une excita-
tion réflexe otolithique concomitante à la stimulation sonore.
Approche de l’équilibration 73

Approche par les stratégies (diapositive 5-9)


L’équilibration doit maintenant être envisagée sous l’angle des stratégies. Ce sont
des programmes internes dépendant d’afférences redondantes visuelles, proprio-
ceptives et vestibulaires. Ils aboutissent à des patrons d’activité musculaire : soit
des stratégies de stabilisation posturale prêtes à toute modification inattendue de
la surface d’appui, soit des stratégies d’anticipation préparant le sujet à exécuter
toutes sortes de comportements moteurs volontaires

Réponses à des mouvements inattendus d’une


plateforme (diapositive 5-10)

A B C
Stratégies en réponse à des mouvements inattendus sur une plateforme.
D’après Horak Effects of neurological disorders on postural movement strategies in the elderly. In Vellas B, Toupet M,
Rubenstein L, Albarede JL, Christen Y, Eds. Falls, balance and gait disorders in the elderly. Paris : Elsevier ; 1992. p. 137-51.
Dessins Carole Fumat.

Le sujet est debout sur une plateforme qui effectue de brusques mouvements
vers l’arrière d’amplitude variable.
a. Le recul est léger et il suffit au sujet d’adopter une stratégie de cheville consis-
tant seulement à incliner tout le corps vers l’avant pour rétablir son équilibre.
b. Le recul est violent et pour rétablir son équilibre, le sujet doit adopter une
stratégie de hanche consistant à incliner en avant tout l’hémicorps supérieur
tandis que l’hémicorps inférieur s’incline vers l’arrière.
c. Pour éviter une chute imminente, le sujet doit adopter la stratégie du pas en
avant consistant à poser un pied en dehors de la plateforme.
74 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Patient vestibulaire (diapositive 5-11)


Il privilégie la stratégie de cheville.
Normal Vestibulaire

pa pa
du s
du

en

s
ie

ie

en
tég

tég
av

ava
Stra

ant

Stra

nt
Stratégie Stratégie
de cheville de cheville

CG
CG

Stratégie de hanche Stratégie de hanche

Surfaces comparées chez le sujet normal et chez le patient vestibulaire


de la stratégie de cheville, de hanche et du pas en avant.
CG : centre de gravité.
D’après Horak Effects of neurological disorders on postural movement strategies in the elderly. In Vellas B, Toupet M,
Rubenstein L, Albarede JL, Christen Y, eds. Falls, balance and gait disorders in the elderly. Paris : Elsevier ; 1992. p. 137-51.
Dessins : Carole Fumat.

Sur le schéma de gauche, chez un sujet normal, chaque stratégie est représen-
tée par une surface conséquente centrée sur le centre de gravité. Sur le schéma
de droite, il s’agit d’un patient vestibulaire. Son équilibre ne tient plus que sur la
stratégie de cheville et la stratégie de hanche a disparu. On passe directement
à la stratégie du pas en avant. Ainsi peuvent s’expliquer un certain nombre de
chutes.
Approche de l’équilibration 75

Stratégie d’anticipation (diapositive 5-12)

Écarter la jambe droite.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

L’existence de cette stratégie doit être admise par le patient. C’est souvent difficile.
Pour le convaincre, il faut le mettre debout et se placer derrière lui, prêt à le retenir
en cas de chute. Ensuite, on lui demande de lever la jambe droite. Le patient com-
mence alors instinctivement par anticiper en déportant le poids de son corps sur
la jambe gauche, et il lève la jambe droite seulement après. La prise de conscience
de ce phénomène est très efficace pour faire comprendre que tout déplacement
doit être anticipé sous peine de déséquilibre et de chute.
76 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Harmonie des redondances (diapositive 5-13)

Image attendue

Interaction visuo-proprio-vestibulaire.
© Carole Fumat.

Les entrées visuelles, proprioceptives des membres inférieurs et vestibulaires donnent


des informations redondantes avec pour objectif une action coordonnée de tout
le corps pour un objectif précis. Par exemple, avancer un pied pour faire un pas. La
vision capte l’avancement de l’environnement, la proprioception mesure l’amplitude
du déplacement de la jambe et le vestibule détecte le mouvement en avant. L’interac-
tion visuo-proprio-vestibulaire contrôle la réalisation harmonieuse de cette démarche
apprise de longue date.
Approche de l’équilibration 77

Vertige ou conflit sensoriel ? (diapositive 5-14)


Nouvelles lunettes

Image attendue
???????? Vertige ?

Vertige ou conflit sensoriel ?


© Carole Fumat.

Toutes les sensations étranges, pseudo-vertigineuses, ne sont pas obligatoire-


ment vestibulaires. L’harmonie précédente peut être rompue par toutes sortes
d’évènements. Par exemple, ce patient vient de changer ses lunettes. L’interaction
visuo-proprio-vestibulaire précédente est perturbée et l’image attendue par le
cerveau est dérangée provoquant une sensation étrange et angoissante pseudo-
vertigineuse. Mais là, c’est un conflit sensoriel ! Chez un patient se plaignant de
vertige, l’évaluation doit donc concerner les trois entrées visuo-proprio-vestibulaires.
78 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Évaluation électronique des entrées sensorielles


intéressées par l’équilibre (diapositive 5-15)
Vision fixe Yeux fermés Vision stabilisée
Suppression de l’entrée visuelle
Plateforme fixe

A B C
Suppression de l’entrée visuelle et proprioceptive
Plateforme stabilisée

D E F
Évaluation des entrées sensorielles.
A-C. L’entrée proprioceptive est conservée. D-F. L’entrée proprioceptive est supprimée.
Dans les conditions C et F, l’entrée visuelle est supprimée sans bander les yeux. Dans
les conditions E et F, le sujet ne tient que sur son entrée vestibulaire.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat. Adapté d’après : Nashner LM, Jacobson GP, Newman CW, Kartush JM. Computerized dynamic posturography.
In : Handbook of Balance Function Testing. St. Louis : Mosby ; 1996.

C’est l’objectif de la posturographie computérisée. Pendant cet examen, au départ


(A), la plateforme est stable ainsi que l’environnement visuel représenté par le
panneau placé en face du patient. Des mesures posturographiques de base sont
ainsi réalisées. On refait les mêmes mesures (B), le sujet ayant les yeux bandés
pour supprimer l’entrée visuelle. Puis on enlève le bandeau (C) mais la vision est
stabilisée par un mécanisme électronique qui mobilise le panneau de telle sorte
qu’il paraisse fixe bien que le patient oscille sur ses pieds. Une troisième mesure
posturographique est ainsi réalisée.
Ensuite, le panneau est fixe et donc l’entrée visuelle normale (D) mais cette fois,
c’est la plateforme qui est stabilisée et qui s’incline en fonction des oscillations du
patient perturbant ainsi l’entrée proprioceptive par les pieds. Puis la plateforme
est toujours stabilisée mais l’entrée visuelle a été supprimée par un bandeau placé
sur les yeux du patient (E). Enfin, la plateforme et la scène visuelle sont toutes
deux stabilisées (F). Par conséquent, le sujet ne tient debout que sur son entrée
Approche de l’équilibration 79

vestibulaire et les mesures posturographiques sont les fidèles reflets des atteintes
vestibulaires isolées.
Cet appareillage fournit une évaluation irremplaçable des entrées sensorielles inté-
ressées par l’équilibre. Malheureusement, son coût le rend hors de portée de la
plupart des centres de rééducation vestibulaire malgré la baisse des prix initiaux.

Application à la rééducation vestibulaire


(diapositive 5-16)
De ces notions de base concernant l’équilibration, on peut tirer trois consé-
quences pratiques.
1. En cas de déficit vestibulaire permanent, un système compensateur se
déclenche à partir de messages d’erreur constitués par le vertige et surtout par le
glissement rétinien de l’image. En d’autres termes, plus on a de vertiges et mieux
on compense. C’est une notion qui doit être comprise des patients.
2. La rééducation par adaptation vise à reparamétrer les réflexes posturaux et
repose sur des exercices actifs répétés avec feedback (retour d’information).
3. La rééducation par substitution vise à reconstruire des stratégies sans le vesti-
bule et reposant sur le travail de la vision et de la proprioception (sensibilité du
système nerveux aux mouvements et aux changements de posture provenant
des muscles et des articulations).
CHAPITRE

6
Névrite vestibulaire

La névrite vestibulaire représente le modèle de ce qui se passe quand un vesti-


bule cesse brutalement fonctionner et quand le vestibule du côté opposé fonc-
tionne normalement. C’est un tableau clinique impressionnant comportant des
vertiges intenses, des nausées et des troubles de l’équilibre. Rien d’étonnant donc
si devant un tel tableau, on évoque d’abord un accident vasculaire cérébral. Ces
patients sont alors adressés à des services d’urgence. Autrefois, les patients atteints
de névrite vestibulaire étaient laissés au lit, confinés dans l’obscurité et saturés de
sédatifs. Aujourd’hui, la névrite vestibulaire est la pathologie, après le VPPB où la
kinésithérapie remporte ses meilleurs succès. Auparavant, il y avait des séquelles
persistant 3 à 5 ans. Depuis que la prise en charge kinésithérapique précoce est
devenue la règle, ces séquelles sont devenues rares.

Pédicule acousticofacial (diapositive 6-1)


Cochlée
VII
VIII Vestibule

CAI

D
M L V
Do

Schéma d’ensemble du VIII.


CAI : conduit auditif interne ; D, Do, L, M, V : noyaux vestibulaires descendant, dorsal
interne, latéral, médian et vestibulaire latéral respectivement.
© Carole Fumat.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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82 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Ce pédicule comporte trois nerfs traversant le conduit auditif interne (méat


acoustique interne dans la Terminologia Anatomica). Le nerf vestibulaire issu du
labyrinthe postérieur est l’un d’entre eux aux côtés du nerf cochléaire issu de la
cochlée et du nerf facial cheminant dans l’aqueduc de Fallope (canal du facial
dans la Terminologia Anatomica) entre les deux parties du labyrinthe. Le gan-
glion du nerf vestibulaire est le ganglion spiral situé juste à l’entrée du nerf dans le
conduit auditif interne. Enfin, le nerf vestibulaire pénètre dans le tronc cérébral au
niveau du sillon bulboprotubérantiel pour rejoindre les noyaux vestibulaires et se
connecter dans la fosse postérieure au niveau du thalamus postérieur.

Névrite vestibulaire et virus (diapositive 6-2)


NV GS

Tronc cérébral Nerf vestibulaire Labyrinthe


vestibulaire
Étiologie de la névrite vestibulaire.
Le nerf vestibulaire relie le labyrinthe vestibulaire périphérique aux noyaux
vestibulaires situés dans le tronc cérébral. La névrite vestibulaire est une atteinte
virale du ganglion de Scarpa (GS). À la suite d’une infection à virus herpès (Herpès
simplex, virus varicelle-zona, cytomégalovirus, etc.), le virus reste dormant dans le
ganglion du nerf vestibulaire ou ganglion de Scarpa (GS – ganglion vestibulaire dans
la Terminologia Anatomica). À l’occasion d’un stress, d’une baisse d’immunité ou
d’une infection virale des voies aériennes supérieures, il se réactive et occasionne une
névrite. Les virus herpès sont en cause mais les tests sérologiques ne révèlent que
les traces d’une infection ancienne. Le processus est analogue à celui des paralysies
faciales a frigore (paralysie de Charles Bell) et de certaines surdités neurosensorielles
brusques.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.
Névrite vestibulaire 83

Évolution caractéristique (diapositive 6-3)


AVRIL

1 L
2 M
3 M
4 J
5 V
6 S
7 D
8 L
9 M
10 M
11 J
12 V
13 S
14 D
15 L
16 M
17 M
18 J
19 V
20 S
21 D
22 L
23 M
24 M
25 J
26 V
27 S
28 D
29 L
30 M

Névrite vestibulaire : évolution des symptômes.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

Sur ce calendrier, on a tracé l’évolution caractéristique d’une névrite vestibulaire.


C’est un vertige de début brutal et de régression progressive. Les premiers jours,
l’invalidité est quasi totale chez un patient alité qui ne peut pas tenir debout,
qui présente des nausées et vomit lors du moindre mouvement. Vertiges, désé-
quilibre postural et nausées restent sévères avec alitement pendant 2 à 4 jours.
Puis le patient commence à se lever mais reste très déséquilibré pendant une
semaine. Petit à petit, il reprend une marche normale mais avec des embardées
et des vertiges positionnels. Plusieurs mois après, il reste souvent des sensations
84 Guide pratique de rééducation vestibulaire

inopinées de déséquilibre provoquées par les rotations rapides de la tête (vertiges


cinétiques). À long terme, seulement 50 % des patients voient disparaître com-
plètement leurs symptômes subjectifs. Deux mécanismes sont possibles : il s’agit
soit d’une récupération de la fonction vestibulaire du côté atteint, soit d’une com-
pensation par le côté sain, la vision et la proprioception. Ce mécanisme ne peut
être identifié qu’au bilan effectué au 3e mois. À la période initiale, tous les patients
doivent être pris en charge par les kinésithérapeutes car on ne peut pas prendre le
risque d’attendre le 3e mois pour décider.

Syndrome vestibulaire (diapositive 6-4)


Il associe quatre signes cliniques :
1. des vertiges permanents avec illusion de rotation ;
2. des signes neurovégétatifs avec sueurs, nausées et vomissements ;
3. un nystagmus qui est un mouvement oculaire comportant une phase lente
dirigée vers le côté atteint et une phase rapide dirigée vers le côté sain. Ce nystag-
mus est aboli par la fixation du doigt de l’examinateur. Il est augmenté quand on
l’observe derrière des lunettes de Frenzel (lunettes de 20 dioptries pour abolir la
fixation avec système éclairant pour observer les mouvements de l’œil) ;
4. des troubles de l’équilibre en position assise dans le lit, le dos décollé de l’oreiller
et les bras tendus : on observe une déviation lente dans la même direction que la
phase lente du nystagmus précédent.

Lunettes de Frenzel.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Il faut insister sur le fait que dans la névrite vestibulaire, on peut toujours à force
de persuasion mettre le patient debout les yeux ouverts. Au contraire, dans un
accident vasculaire cérébral, c’est impossible.
Névrite vestibulaire 85

Syndrome vestibulaire harmonieux pour un déficit


brusque droit (diapositive 6-5)

* *
B

CPD CPG
CHD CHG

CAD CAG

A C

Chute Nystagmus
Déviations axiales Vertige
et segmentaires
Syndrome vestibulaire harmonieux droit.
L’étoile indique le côté atteint (côté droit). A. Signe de Romberg vestibulaire (déviations
posturales axiales) après un temps de latence, le sujet debout s’incline lentement vers
le côté lésé. B. Nystagmus horizontal rotatoire battant vers le côté sain. On désigne les
nystagmus par leur phase rapide et non par leur phase lente. Un syndrome vestibulaire
harmonieux se caractérise donc par un nystagmus battant en sens inverse des déviations
posturales lentes. C. Mécanisme du nystagmus horizontal rotatoire : tous les canaux
semi-circulaires du côté droit sont détruits et il n’y a donc plus de tonus vestibulaire de
ce côté. En revanche, du côté gauche resté sain, le tonus vestibulaire persistant génère des
phases lentes vers le côté lésé, donc des phases rapides battant vers le côté sain. Les phases
rapides caractéristiques des canaux semi-circulaires gauches s’additionnent, c’est-à-dire
pour le canal postérieur gauche : « un nystagmus horaire et vertical supérieur » + pour le
canal antérieur gauche : « un nystagmus horaire et vertical inférieur ». À noter que patient
voit tourner la pièce dans le sens de la phase rapide du nystagmus. CAD : canal antérieur
droit ; CAG : canal antérieur gauche ; CHD : canal horizontal droit ; CHG : canal horizontal
gauche ; CPD : canal postérieur droit ; CPG : canal postérieur gauche.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

Le déficit vestibulaire est dit harmonieux parce que toutes les déviations lentes
battent vers le côté atteint, en l’occurrence vers la droite du patient. Ainsi,
les troubles de l’équilibre se manifestent par des chutes vers la droite (déviations
86 Guide pratique de rééducation vestibulaire

axiales) et des déviations segmentaires également vers la droite (déviations des


index). La phase lente du nystagmus bat vers la droite, mais comme on désigne
les nystagmus par leur phase rapide, c’est un nystagmus gauche. Typiquement
périphérique, ce nystagmus est horizontal rotatoire gauche sans aucune composante
verticale (B). L’explication est en C ou les deux labyrinthes sont vus par-dessus. Le tonus
du labyrinthe droit a disparu (canaux horizontal droit, postérieur droit et antérieur
droit). En revanche, le tonus du labyrinthe gauche est normal et chaque canal
provoque le nystagmus qui le caractérise, c’est-à-dire : un nystagmus horizontal
gauche pour le canal horizontal, un nystagmus ayant des composantes horaire et
verticale supérieure pour le canal postérieur gauche, et un nystagmus vertical inférieur
et horaire pour le canal antérieur gauche. Les composantes rotatoires s’ajoutent
et les composantes verticales s’annulent. On obtient ainsi le nystagmus horizontal –
rotatoire caractéristique des atteintes vestibulaires périphériques aiguës.

Nystagmus typiquement périphérique


(diapositive 6-6)
En résumé, voici les critères d’un nystagmus qui permettent d’affirmer son ori-
gine périphérique et éliminent une cause centrale comme un accident vasculaire
cérébral :
1. c’est un nystagmus spontané horizontal rotatoire (cf. diapositive 6-5) ;
2. il est diminué dans la lumière et augmenté dans l’obscurité ;
3. il est supprimé par la fixation ;
4. il est unidirectionnel, c’est-à-dire qu’il ne change jamais de sens quelle que soit
la direction du regard ;
5. il augmente en vitesse quand le patient se couche sur le côté atteint et diminue
lorsqu’il se couche sur l’oreille saine (position de confort).
Ce dernier critère est reconnu comme inconstant.

Nystagmus après chirurgie destructrice de l’oreille


droite
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 6-7 .
Nystagmus horizontal rotatoire après labyrinthectomie droite.

Chez cette patiente, il n’y a aucun doute sur l’origine périphérique du nystagmus
car celui-ci était apparu à la suite d’une chirurgie destructive du labyrinthe droit.
Le lendemain de la chirurgie, est survenu un nystagmus horizontal rotatoire ayant
une composante horizontale gauche et une composante torsionnelle horaire.
Dans le regard vers la gauche, le nystagmus s’accélérait mais ne changeait pas
de sens. Dans le regard vers la droite, ne restait que la composante torsionnelle
horaire. La fixation du doigt a fortement diminué le nystagmus.
Névrite vestibulaire 87

Nystagmus sur névrite vestibulaire gauche


Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 6-8 .
Névrite vestibulaire gauche au 2e jour.

Dans la lumière, le nystagmus était faible et battait seulement vers la droite. En


cachant les deux yeux, il accélérait modérément. La rotation de la tête vers la
gauche accélérait le nystagmus surtout lorsqu’on lui demandait de tourner son
regard vers la droite. Ensuite, la rotation de la tête vers la droite a fortement dimi-
nué le nystagmus (position de confort). Fâcheusement, il a fallu redresser rapi-
dement la patiente car toutes ces manipulations ont déclenché des nausées. En
pareil cas, il faut toujours disposer d’une bassine à proximité.

Épreuve calorique (diapositives 6-9 et 6-10)


A

OD chaud
OD froid
OG froid

OG chaud

B C
Irrigation du conduit
OD cumulée OD OG
auditif axterne droit

ND
31,4°/s 24,1°/s
Vestibule Vestibule
Droit Droit

Réchauffement Refroidissement
0 0
OG cumulée

24,9°/s NG 25,5°/s

Nyst. à droite Nyst. à gauche

Courants de convection dans Vitesse horizontale


le canal horizontal droit

Épreuve calorique normale.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Elle consiste à irriguer le conduit auditif externe de chaque côté avec une eau à
44 °C (épreuve chaude), puis avec une eau à 30 °C (épreuve froide). Les irrigations
durent 20 secondes et les nystagmus 2 à 3 minutes. On obtient ainsi quatre nys-
tagmus horizontaux qui durent chacun environ une minute (A) :
1. OD chaud : nystagmus droit pour l’épreuve chaude dans l’oreille droite (excitation) ;
2. OD froid : nystagmus gauche pour l’épreuve froide dans l’oreille droite (inhibition) ;
88 Guide pratique de rééducation vestibulaire

3. OG froid : nystagmus droit pour l’épreuve froide dans l’oreille gauche (inhibition) ;
4. OG chaud : nystagmus gauche pour l’épreuve chaude dans l’oreille gauche
(excitation).
Le logiciel supprime les phases rapides et fait une cumulée des phases lentes pour
chaque épreuve. Ainsi sont délimitées des surfaces correspondant à la réponse des
épreuves chaude et froide pour chaque oreille. Normalement, l’épreuve chaude
déclenche un nystagmus battant vers l’oreille irriguée et l’épreuve froide déclenche
un nystagmus battant du côté opposé à l’oreille irriguée. Ces nystagmus naissent du
fait que le réchauffement ou le refroidissement déclenchent des courants de convec-
tion dans le canal semi-circulaire horizontal du côté testé. Dans la position tête rétro-
fléchie de 60°, le canal horizontal devient vertical. Le réchauffement déclenche alors
un courant endolymphatique ascendant ampullipète stimulant. Le refroidissement
déclenche un courant endolymphatique descendant ampullifuge inhibiteur.
Les épreuves chaudes et froides sont réalisées pour chaque oreille. On obtient
ainsi 4 nystagmus enregistrés en totalité sous forme d’un graphique appelé
« cumulée » (B). Mais il est plus commode de reporter leurs paramètres (vitesse
et fréquence des phases lentes à l’acmé de la réponse) sur un diagramme appelé
papillon de Freyss (C). Les nystagmus vers la droite y sont notés positivement et
les nystagmus vers la gauche y sont notés négativement. Les épreuves chaudes
sont notées en rouge et les épreuves froides en bleu. Ce papillon permet de visua-
liser la réflectivité de chaque côté qui est la somme en valeur absolue des nystag-
mus obtenus à l’épreuve chaude et à l’épreuve froide. Normalement, si l’on rejoint
par une ligne rouge les valeurs obtenues aux épreuves chaudes et par une ligne
bleue celles obtenues aux épreuves froides, ces deux lignes doivent se croiser au
centre du diagramme. Sinon, il y a un décalage de leur point de croisement dont
la valeur correspond à la vitesse du nystagmus spontané contemporain.
Névrite vestibulaire 89

Papillon de Freyss : névrite vestibulaire droite au 5e jour.

Tous les nystagmus battent vers la gauche. Les cumulées du côté droit sont
réduites à deux lignes superposées correspondant au nystagmus spontané. Du
côté gauche, la surface de réflectivité est diminuée et toute la surface représentant
la réponse est du côté des nystagmus battant vers la gauche. Les épreuves chaude
et froide sont incapables de modifier significativement le nystagmus spontané
dont la vitesse de la phase lente reste inchangée à 15,4 et 18,9°/seconde. Du côté
gauche, l’épreuve calorique chaude provoque un nystagmus gauche de 26,4°/
seconde et l’épreuve calorique froide est incapable de renverser le nystagmus
spontané qui reste gauche avec une vitesse de 6,3°/seconde vers la gauche. Le
90 Guide pratique de rééducation vestibulaire

déficit calorique atteint 100 % et la prépondérance directionnelle absolue atteint


17,8°/seconde. Le diagnostic de névrite vestibulaire est achevé quand l’épreuve
calorique met en évidence une aréflexie calorique ipsilatérale avec une prépondé-
rance directionnelle controlatérale.
Le choix de faire cet examen au 5e jour est dicté par le fait que dans les premiers
jours de la névrite, la réflectivité du côté sain est souvent réduite par le cerve-
let afin de diminuer l’asymétrie vestibulaire et d’améliorer le confort du patient.
L’épreuve calorique a donc d’autant plus de valeur qu’elle est faite à distance du
début (idéalement du 5e au 7e jour).

Causes de déficits unilatéraux brutaux


(diapositive 6-11)
Si la névrite vestibulaire sans séroconversion virale évidente est le modèle le plus
fréquent du syndrome vestibulaire destructif brutal, d’autres causes peuvent être
identifiées.
▪ Le virus varicelle-zona donne une forme clinique particulière qui peut être
reconnue parce qu’il associe une éruption dans le conduit auditif externe, une
paralysie faciale et une surdité s’échelonnant sur quelques jours.
▪ La maladie de Lyme est aussi probablement responsable mais reste difficile à
prouver.
▪ La fracture du rocher ou une labyrinthite infectieuse surviennent dans un riche
contexte clinique évident.
▪ Sur le plan chirurgical, les suites opératoires d’une labyrinthectomie, d’une neu-
rotomie vestibulaire pour maladie de Menière ou d’une ablation de neurinome
du VIII peuvent donner un tel syndrome et nécessitent l’intervention d’un kinési-
thérapeute.
▪ Les accidents vasculaires cérébraux sont parfois de diagnostic difficile en cas de
lésions limitées du tronc cérébral. S’ils les patients concernés arrivaient au cabinet
du kinésithérapeute, ils pourraient être reconnus sur l’importance de l’instabilité
les yeux fermés, sur la présence d’un nystagmus s’inversant en fonction de la direc-
tion du regard, et sur l’absence de HIT positif.
Névrite vestibulaire 91

Compensation centrale et rééducation vestibulaire


(diapositive 6-12)
Neurotomie vestibulaire unilatérale
État de rétablissement clinique

2
Animaux libres
Animaux bloqués
1
Durée postopératoire en jours

0 2 7 14 21 30
Influence de la restriction d’activité sur la compensation vestibulaire centrale.
Source : Lacour M, Roll JR, Apaix M. Modifications and spinal reflexes in the alert baboon (Papio papio) following unilareral
vestibular neurotoly. Brain Res 1976 ; 113 : 255-69. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

C’est Lacour qui a démontré en 1976 le principe de la rééducation vestibulaire


reposant sur l’exercice physique. Il a pratiqué une neurotomie vestibulaire unilaté-
rale chez des singes qu’il a ensuite divisés en deux groupes :
▪ le premier groupe de singes a été laissé libre de grimper dans leur cage, notam-
ment pour trouver leur nourriture. Leur degré de récupération a été chiffré en
4 degrés, le degré 4 étant une récupération complète. Dès le 7e jour, ils avaient
atteint le degré 3. Au 21e jour, leur comportement était normal (degré 4) ;
▪ le second groupe de singes a été laissé dans l’obscurité toute la semaine pos-
topératoire et de plus, ils étaient plâtrés des pieds à la tête pour les empêcher de
bouger. Le 7e jour postopératoire, ils furent remis dans la lumière et libérés de leur
plâtre. On voit sur le graphique qu’au 14e jour postopératoire, ils en étaient tou-
jours au degré 2 et qu’au 30e jour, ils restaient au degré 3.
En conclusion, après une névrite vestibulaire, il faut bouger, rester actif et ne pas se
cloître dans le noir et dans son lit sous sédatifs en quantité massive.

Prise en charge (diapositive 6-13)


Une prise de contact rapide avec le kinésithérapeute permet à ce dernier de
convaincre son patient du fait que plus il aura de vertiges, et plus vite il guérira.
Dans cet objectif, les antivertigineux et les sédatifs doivent être arrêtés au-delà de
48 heures.
CHAPITRE

7
Suivi d’une névrite
vestibulaire

Il s’agit d’un suivi clinique pouvant être réalisé dans les cabinets des kinésithé-
rapeutes. L’idéal serait toutefois de disposer de lunettes de vidéonystagmosco-
pie en infrarouge et d’un fauteuil giratoire de Sémont pour réaliser des exercices
giratoires avec arrêts brusques. En principe, le diagnostic a été fait par le service
d’urgence qui a reçu le patient et qui l’a adressé au kinésithérapeute. Une épreuve
calorique est le minimum exigé pour cette prise en charge. Une telle rééducation
doit pouvoir être entreprise partout en France.

Le dilemme (diapositive 7-1)


Sauf chez les personnes âgées, l’évolution d’une névrite vestibulaire se fait vers
l’amélioration en 3 à 4 semaines, parfois suivie de vertiges positionnels pendant
très longtemps. Mais cette évolution résulte-t-elle d’une récupération spontanée
ou de la compensation d’une lésion vestibulaire irréversible ? Au début, rien ne
permet de prédire le mécanisme de cette régression. Mais le risque de séquelles
après 3 voire 5 ans est lui bien réel. En pareil cas, il faut donc adopter l’esprit du
pari de Pascal et commencer la réhabilitation le plus tôt possible dans tous les cas
puisqu’on n’a rien à perdre.

Suivi par le nystagmus spontané


Principe (diapositive 7-2)
C’est la manière la plus simple de suivre ces patients.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


© 2023 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
94 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Névrite droite au 2e jour

0 = =

Degré II Degré III Degré III


en fixation dans la lumière dans l'obscurité

Névrite droite au 7e jour

0 0

0 0 = 0 =

Degré I Degré II Degré III


en fixation dans la lumière dans l'obscurité

Névrite droite au 14e jour

0 0 0

0 0 0 0 0 0 0 0

Degré I
En fixation Dans la lumière dans l'obscurité

Schéma représentant les nystagmus dans le regard médian, droit et gauche (point
de vue du patient) et vers le haut.
Correspondance des degrés du nystagmus droit en fixation, dans la lumière et dans
l’obscurité avec lunettes vidéo en infrarouge.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. Paris : Elsevier-Masson ; 2015.
Suivi d’une névrite vestibulaire 95

Les nystagmus sont notés sur un schéma à 4 cases en fonction de la direction du


regard :
■ les trois cases inférieures correspondent à la direction du regard dans le plan
horizontal :
• celle du milieu dans le regard en rectitude,
• les cases latérales dans le regard à droite et à gauche ;
■ la case du haut est consacrée au regard en haut.
On distingue trois types de degré de nystagmus :
■ dans le degré I, le nystagmus n’est présent que dans une seule case : soit le
regard à droite, soit le regard à gauche ;
■ dans le degré II, le nystagmus est présent dans deux cases : le regard direct + soit
le regard à droite, soit le regard à gauche ;
■ dans le degré III, le nystagmus est présent dans toutes les directions du regard.
Ce schéma à 4 cases est rempli dans trois circonstances : en fixation (action inhi-
bitrice pour une lésion périphérique comme la névrite), dans la lumière (action
moins inhibitrice, voire facilitatrice) et dans l’obscurité.
Par exemple, une névrite droite entraîne un nystagmus gauche qui ne change
jamais de sens quelle que soit la direction du regard. Dans le cas présenté :
■ le 2e jour il est de degré III sauf en fixation où il n’est que de degré II ;
■ le 7e jour, il a diminué, il n’est plus que de degré I en fixation, de degré II dans la
lumière et de degré III dans l’obscurité ;
■ le 14e jour, il a encore régressé car il a disparu en fixation et dans la lumière. Il ne
persiste plus que dans l’obscurité et encore de degré I.

3e semaine (diapositives 7-3 et 7-4)


Névrite droite au 21e jour

0 0 0

0 0 0 0 0 0 0 0 0

En fixation Dans la lumière Dans l'obscurité


Suivi par le nystagmus spontané à la 3e semaine.
96 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Au 21e jour, il n’y a plus aucun nystagmus, ni en fixation, ni dans la lumière, ni


dans l’obscurité. C’est ainsi que l’on peut suivre l’évolution clinique de cette névrite
vestibulaire droite.
Comment révéler la persistance du déficit vestibulaire ? La question qui se pose
est : l’aréflexie calorique persiste-t-elle, c’est-à-dire est-ce que la fonction vestibu-
laire a récupéré ?

Persistance d’un déficit droit (diapositive 7-5)


TESTS
Head impulse - Head shaking - Vibrations osseuses
droits

Tests pour révéler la persistance d’un déficit droit.

Sans refaire d’épreuve calorique, on peut utiliser trois tests cliniques très utiles
pour mettre en évidence un déficit vestibulaire droit latent :
■ le head impulse test vers la droite (HIT ou test impulsionnel céphalique) ;
■ deux tests déclenchant des nystagmus gauches :
• le secouage de la tête (head shaking test),
• les vibrations osseuses nécessitant un vibrateur.

Persistance d’un déficit gauche (diapositive 7-6)


TESTS
Head impulse - Head shaking - Vibrations osseuses
gauches

Tests pour révéler la persistance d’un déficit gauche.

C’est l’inverse pour un déficit gauche :


■ le HIT vers la gauche ;
■ deux tests déclenchant des nystagmus droits :
• le secouage de la tête,
• les vibrations osseuses nécessitant un vibrateur.
Suivi d’une névrite vestibulaire 97

HIT – Étude du côté gauche (diapositives 7-7 à 7-9)

Saccade

Test vers la gauche, Saccades de recentrage en cas de déficit


bon recentrage de l’œil du canal horizontal gauche

HIT – head impulse test (test de Halmagyi).


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. Paris : Elsevier Masson ; 2015. Dessins : Carole Fumat.

On demande au patient de fixer une cible éloignée de moins de 2 m. Après avoir


écarté la tête de 15° vers la droite, on applique à la tête une petite impulsion vers
la gauche dans le plan des canaux horizontaux pour ramener la tête en position
médiane.
En l’absence de déficit gauche, piloté par le canal horizontal gauche normal, l’œil
se recentre harmonieusement sur la cible.
Normalement, on a vu précédemment que lorsqu’on impulsait la tête d’une position
latérale en une position médiane, l’œil se recentrait parfaitement sur la cible qu’on lui
avait demandé de fixer. En cas de déficit vestibulaire du canal semi-circulaire gauche,
l’œil ne se recentre pas : le canal semi-circulaire horizontal gauche est incapable de
ramener la vision sur la cible. Celle-ci est dépassée. Ce n’est qu’après coup que quelques
saccades vers la droite ramènent l’œil en position médiane. Ces secousses sont très
reconnaissables et caractéristiques d’un déficit vestibulaire gauche.

HIT normal
Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 7-10 .
HIT normal.
98 Guide pratique de rééducation vestibulaire

On commence par demander au sujet de fixer une cible située à 2 m. Puis on


écarte la tête vers la droite d’environ 15 à 20°. Ensuite, on impulse la tête vers
la gauche pour la ramener sur la ligne médiane. En vidéonystagmoscopie (VNS)
infrarouge, l’œil se recentre parfaitement sans aucune saccade de rattrapage. On
recommence le test plusieurs fois dans les directions droite et gauche avec encore
des recentrages de l’œil parfaitement harmonieux. Les deux vestibules fonc-
tionnent bien.

HIT positif (diapositive 7-11)


Ce sujet est illustré par la vidéo de la diapositive 7-11 .
Déficit vestibulaire gauche révélé par un HIT positif.

Ce patient avait subi un violent traumatisme auriculaire gauche et il n’était pas


question de pratiquer une épreuve calorique. Le HIT, franchement positif, déclen-
chait des saccades de rattrapage droites dans les impulsions gauches de la tête,
et rien dans les impulsions droites. C’est dans la direction de la tête vers l’oreille
atteinte que se déclenchent des saccades de rattrapage en sens inverse.

Head shaking test pour un déficit gauche


(diapositive 7-12)
Le patient examiné dans la vidéo de la diapositive 7-13 avait présenté une
névrite vestibulaire gauche 10 jours auparavant. Mais il ne présentait plus
aucun nystagmus spontané ni dans la lumière, ni dans l’obscurité, ni dans
le regard médian, ni dans le regard latéral. On a alors pratiqué 20 impulsions
céphaliques de faible amplitude (15°/seconde en 20 secondes, soit une fré-
quence de 1 Hz).
Déficit gauche au 10e jour.

Il n’y avait plus aucun nystagmus spontané. On a commencé par un HIT qui s’est
avéré encore positif vers la gauche. Ensuite, le secouage de la tête a déclenché
un net nystagmus horizontal droit. On a terminé par une étude des vibrations
osseuses à l’aide d’un vibrateur 100 Hz. Là encore, on a déclenché des deux côtés
un net nystagmus horizontal droit témoignant de la persistance du déficit ves-
tibulaire gauche datant de la névrite gauche survenue 10 jours auparavant. Le
résultat de ces trois tests a incité à poursuivre la rééducation.
Suivi d’une névrite vestibulaire 99

Névrite vestibulaire gauche (diapositive 7-14)

Épreuve calorique d’une névrite vestibulaire gauche au 10e jour.

Chez cette patiente, l’épreuve calorique faite au 5e jour d’une névrite vestibulaire
gauche montrait une aréflexie gauche complète et une très faible prépondérance
directionnelle droite à la limite du significatif. Le papillon de Freyss, les courbes des
cumulées témoignaient d’une compensation rapide chez cette femme jeune. Au
10e jour, la vidéonystagmoscopie ne montrait aucun nystagmus ni dans la lumière
ni à la fixation.
Comme le montre la vidéo de la diapositive 7-15 , chez cette même patiente
le HIT est en revanche resté très positif vers la gauche. Le secouage de la tête a
déclenché un nystagmus droit. Le fait de coucher la patiente sur le côté droit
n’a déclenché aucun nystagmus (position de confort). En revanche, en la cou-
chant sur le côté gauche, on a déclenché un net nystagmus droit retrouvé en
rétroflexion de la tête. En conclusion, il n’y a pas eu de récupération vestibulaire
complète chez cette patiente. Des signes cliniques caractéristiques ont persisté et
la rééducation a dû être poursuivie.
Névrite vestibulaire gauche au 10e jour.
100 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Épreuve post-giratoire
Principe pour une rotation horaire (diapositive 7-16)

Rotation
uniforme

STOP

N=0

Exercices post-giratoires passifs.


Source de la photo : Gil R, Kremer-Mérère C, Morizio P, Gouarné R. Rééducation des troubles de l’équilibre. Paris : Frison-
Roche ; 1991.

Cette épreuve nécessite un fauteuil tournant spécial permettant de bloquer


brutalement la rotation par un système de pédalier. Le patient doit avoir le cou
fléchi de 30° pour bien horizontaliser les canaux semi-circulaires horizontaux.
L’accélération par la mise en rotation du patient stimule le vestibule vers lequel le
patient tourne et inhibe le côté opposé. Mais le nystagmus généré n’est pas très
accessible à l’observation. En revanche, après une mise en rotation uniforme de
1 tour/seconde (1 Hz), l’arrêt brusque inhibe fortement le vestibule vers lequel le
patient tournait et stimule le côté opposé. Par conséquent, à l’arrêt brusque, on
déclenche un nystagmus horizontal battant vers l’oreille opposée au sens de la
rotation que l’on avait effectuée. Schématiquement, normalement, on déclenche
un nystagmus gauche à l’arrêt brusque en sens horaire et un nystagmus droit à
l’arrêt brusque d’une rotation en sens antihoraire. Ces nystagmus durent de 20 à
35 secondes et sont faciles à chronométrer.
Le cas d’une épreuve post-giratoire normale est illustré par la vidéo de la diapo-
sitive 7-17 . Dans une giration de 5 tours en 5 secondes dans le sens horaire, à
l’arrêt brusque, on a stimulé l’oreille gauche avec un nystagmus horizontal gauche
qui a duré 38 secondes. Dans une giration identique mais dans le sens antihoraire,
Suivi d’une névrite vestibulaire 101

à l’arrêt brusque, on a stimulé l’oreille droite avec un nystagmus horizontal droit


qui a duré 32 secondes.
Épreuves post-giratoires normales.

Synthèse (diapositive 7-18)


Pour un arrêt brusque après 5 tours en 5 secondes, on étudie le côté gauche en
sens horaire et le côté droit en sens antihoraire.
CHAPITRE

8
Tiroirs de la rééducation
des déficits vestibulaires
unilatéraux brutaux

La division en tiroirs permet de classer les exercices en fonction de leurs principes.


Dans chaque séance, on en sélectionne quelques-uns pour s’adapter au patient en
fonction du stade de sa pathologie. On commence par le début aigu où le patient
est couché et n’ose même pas bouger la tête de peur de vomir. À ce stade, il n’y
a rien à faire car il est trop mal ; il faut le persuader que plus tôt on commence la
rééducation et meilleurs seront les résultats.

1er tiroir : exercices de coordination œil-tête


(diapositive 8-1)
Ce sont les exercices par lesquels on doit commencer. Le patient est « mono-
bloc » car les vertiges augmentent dès qu’il bouge la tête. Il faut le forcer à la
bouger par rapport aux épaules.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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104 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Exercices de Tusa avec cibles exocentrées (diapositive 8-2)

2 1 3 2 1 3

3 1 2

Exercices de Tusa.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

D’abord assis au bord du lit, le patient doit fixer une cible tenue par le kinésithé-
rapeute. Dans un premier temps, le patient doit tourner la tête d’un côté et de
l’autre en continuant à fixer la cible. Dans un deuxième temps, le kinésithérapeute
écarte la cible d’un côté et de l’autre et le patient doit continuer à fixer la cible tout
en tournant la tête du côté opposé à la cible (dissociation œil-tête).
La réalisation de ces exercices est présentée dans la vidéo de la diapositive 8-3 .
Exercices de Tusa.

« Oui – non – peut-être » (diapositive 8-4)


Oui Non Peut-être

Oui, non, peut-être.


D’après : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.
Tiroirs de la rééducation des déficits vestibulaires unilatéraux brutaux 105

Ces mouvements de tête sont effectués yeux ouverts et progressivement : d’abord


avec le regard fixe, le patient travaille le « oui – non – peut-être » dans les trois
plans de l’espace. On commence en position assise au bord du lit puis, ultérieure-
ment, à la marche.

Cibles égocentrées (diapositive 8-5)

A B

C D
Fixation d’une cible tenue à bout de bras.
A, B. En rotation. C, D. En alternance.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

En position debout, avec un stylo, le fixer en tournant le tronc, en se baissant et


en se relevant. Avec deux stylos, les regarder alternativement. Le principe de cet
exercice est de reparamétrer les mouvements du patient sur son propre corps.
La réalisation de ces exercices est présentée dans la vidéo de la diapositive 8-6 .
Cibles égocentrées.

Lecture tête mobile


Lecture tête mobile normale.
Il s’agit d’un autre exemple de cibles égocentrées, présenté dans la vidéo de la
diapositive 8-7 , puis dans celle de la diapositive 8-8 avec des lunettes double
foyer.
Lecture tête mobile trop difficile.
106 Guide pratique de rééducation vestibulaire

2e tiroir : exercices de maintien postural


et d’équilibre (diapositive 8-9)
L’équilibration combine automatiquement la proprioception, la vision et la fonc-
tion vestibulaire. Trois piliers sont donc à reconstruire :
1. la proprioception ;
2. la vision ;
3. le vestibule.
Il faut reparamétrer les capteurs pour aboutir à des réponses adaptées et s’ap-
puyer d’abord sur la vision et la proprioception, puis les supprimer et les fausser.

Asthénie et troubles de l’équilibre (diapositive 8-10)


Lorsque l’une de ces afférences est faussée, la compensation par le cortex entraîne
une importante dépense d’énergie. Les patients sont ainsi très fatigués ou plutôt
fatigables. Il faut donc être très progressif et recommander des moments de repos
dans la journée.

Travail de station debout tête immobile (diapositive 8-11)

Travail de la station debout tête immobile.


Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

L’exercice consiste à :
■ prendre d’abord un appui large, les yeux ouverts et contrôler son équilibre pen-
dant 5, 10, 30 secondes ;
■ réduire progressivement la surface d’appui.
Tiroirs de la rééducation des déficits vestibulaires unilatéraux brutaux 107

Travail de l’appui unipodal (diapositive 8-12)

Appui unipodal.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

L’exercice consiste à prendre appui sur un pied puis sur l’autre, les yeux ouverts,
fermés, pieds nus, puis en chaussures, pendant quelques secondes, puis en chro-
nométrant.
108 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Travail de la marche
Marche simple (diapositive 8-13)

Marche simple.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Le patient fait d’abord seulement quelques pas dans le couloir pour se sécuriser
et permettre l’appui des mains sur le mur en cas de soudaine perte d’équilibre.
Puis, avec autorité, pas décidé, tête haute, bras ballants, yeux ouverts puis fermés,
il allonge progressivement la distance.
Tiroirs de la rééducation des déficits vestibulaires unilatéraux brutaux 109

Marche en vision latérale (diapositive 8-14)

Marche en vision latérale.


Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

On place une petite pancarte au bout du couloir pour élargir le champ visuel. Puis
en dissociation œil-soma, le patient marche la tête tournée à gauche ou à droite.
Il s’agit d’un exercice difficile consistant à garder le cap.
110 Guide pratique de rééducation vestibulaire

« Oui – non – peut-être » à la marche (diapositive 8-15)


Oui Non Peut-être

« Oui – non – peut-être » debout.


Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

En fixant un point éloigné, puis en bougeant la tête, le kinésithérapeute doit tou-


jours rester à côté du patient. On termine par la marche en levant les pieds pour
travailler l’appui unipodal, les yeux ouverts, puis les yeux fermés. Certains patients
n’y arrivent jamais. L’objectif n’est pas qu’il sache le faire. Pour la rééducation, le but
est seulement de travailler les exercices difficiles. Ce n’est pas de savoir marcher en
levant les pieds, tout en bougeant la tête avec les yeux fermés. Les exercices avec
yeux fermés sont interdits à domicile.
La réalisation des différents exercices de marche est présentée dans la vidéo de la
diapositive 8-16 .
Les différents exercices de marche.

Plateau basculant
La réalisation de cet exercice est présentée dans la vidéo de la diapositive 8-17 .
Plateau basculant.
Tiroirs de la rééducation des déficits vestibulaires unilatéraux brutaux 111

On utilise un plateau qui ne bascule que dans un sens. Le patient monté dessus,
l’objectif est que le plateau bouge le moins possible. On lui demande en même
temps du mouvement de tête d’avant en arrière dans les bascules antérieures et
de droite à gauche dans les bascules latérales, d’abord les yeux ouverts puis les
yeux fermés. Il faut veiller à tenir le patient lorsqu’il descend du plateau.

Jeux de ballon avec calcul mental (diapositive 8-18)


L’échange de balle ou de ballon fait repasser l’équilibre en mode automatique.

Niveau de difficulté (diapositive 8-19)


Les exercices sont des moyens et non des buts.
■ Plus on travaille des exercices difficiles et mieux on « reparamètre ». Si le patient
n’y arrive jamais, peu importe.
■ En rééducation, on propose donc des exercices toujours plus difficiles car il n’y
a pas d’intérêt à faire faire des mouvements que le patient parvient à faire seul

Exercices à domicile (diapositive 8-20)


Dès qu’un exercice est acquis, il ne nous intéresse plus, mais il faut continuer à le
faire à la maison. En revanche, le patient ne doit pas pratiquer d’exercice les yeux
fermés car il doit travailler seul mais sans risque.

3e tiroir : exercices giratoires (diapositive 8-21)

Installation pour les exercices gyratoires.


112 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Ce sont des exercices spécifiques du système vestibulaire, qui stimulent le canal


horizontal.
■ Les rotations passives répétées avec arrêts brusques stimulent l’habituation.
■ Inversement, les rotations actives au tabouret dans la lumière constituent un
travail d’adaptation.
La réalisation de ces exercices est présentée dans les vidéos des diapositives 8-22
à 8-25 .
Arrêts brusques au fauteuil de Sémont.
Rotations passives avec arrêts brusques et fixation.
Rotations actives au tabouret dans la lumière et en fixation.
Technique du point fixe utilisée par les danseuses étoiles.

4e tiroir : exercices de sensibilisation


(diapositive 8-26)
Le principe est de diminuer progressivement les apports proprioceptifs et les
apports visuels.

Suppression des informations proprioceptives


(diapositives 8-27 et 8-28)

« Oui – non – peut-être » sensibilisé sur tapis de mousse.


Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.
Tiroirs de la rééducation des déficits vestibulaires unilatéraux brutaux 113

« Oui – non – peut-être » sensibilisé sur tapis de mousse épais.


Insister sur le fait que la tête doit bouger par rapport aux épaules.

Des mouvements de tête : oui, non, peut-être sont effectués sur des coussins
de mousse de 5 cm d’épaisseur : les yeux ouverts, puis les yeux fermés.
114 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Stimulations optocinétiques (diapositive 8-29)

Exercices avec stimulations optocinétiques.


Utilisées seules ou associées à une déstabilisation sur tapis en mousse.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins : Carole Fumat.

On fausse les informations visuelles par des stimulations optocinétiques en met-


tant le patient sur un plateau instable pour fausser la proprioception. On reste
ainsi en équilibre sur le seul vestibule.
Diverses stimulations optocinétiques sont présentées dans la vidéo de la diapo-
sitive 8-30 .
Équilibre sur le seul vestibule.

Réalité virtuelle
Il s’agit d’un concept en devenir : le patient porte un masque lui permettant par
exemple de se croire sur un bateau voguant sur un océan déchaîné, comme l’il-
lustre la vidéo de la diapositive 8-31 .
Réalité virtuelle.
CHAPITRE

9
Vestibulopathies
bilatérales

Dans ce sujet, il faut admettre qu’il s’agit d’une pathologie vestibulaire sans ver-
tige, ce qui en rend le diagnostic difficile avec un risque très fort de passer à côté.
Cette absence de vertige est due à la symétrie parfaite des deux vestibules droit
et gauche. En revanche, on trouve d’importants troubles de la stabilisation du
regard et d’importants troubles de l’équilibre en diverses circonstances. C’est une
pathologie rare mais c’est un modèle de presbyvestibulie des personnes âgées.
Chez elles, il ne s’agit pas d’une destruction des deux labyrinthes vestibulaires mais
d’une dépression profonde de tout l’appareil vestibulaire. Le résultat est le même.
La presbyvestibulie fait l’objet du chapitre 12.

Tableau clinique
Symptômes (diapositive 9-1)
Le patient voit la scène visuelle trembler et s’agiter dès qu’il bouge la tête (cf. vidéo
de la diapositive 1-10). Mais comme c’est un symptôme visuel, on ne pense pas à
l’oreille. Il a des troubles de l’équilibre et chute dans l’obscurité car il ne tient plus
debout que sur la proprioception. C’est peut-être là l’explication des chutes chez
les personnes âgées (cf. infra).
Le diagnostic repose sur :
1. un HIT positif des deux côtés (cf. diapositives 7-7 à 7-9) ;
2. une aréflexie post-giratoire bilatérale (cf. diapositive 7-16) ;
3. un effondrement de l’acuité visuelle dynamique (cf. infra) ;
4. une aréflexie calorique bilatérale (cf. diapositives 6-9 et 6-10).

Étiologie (diapositive 9-2)


■ C’était surtout la prescription d’aminosides qui est à l’origine des vestibulo-
pathies bilatérales, notamment la gentamicine qui était autrefois très utilisée à
Guide pratique de rééducation vestibulaire
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116 Guide pratique de rééducation vestibulaire

tort et à travers. Toutefois, les autres aminosides restent la seule solution dans
certaines infections très graves. On doit y penser en cas de troubles de l’équilibre
au sortir d’un séjour en réanimation pour méningite, métastases méningées.
■ Une intoxication par l’oxyde de carbone (CO) ou par des produits industriels
est également évocatrice.
■ Les fractures du rocher bilatérales et diverses pathologies neurologiques cérébel-
leuses sont plus rarement en cause mais il faut toujours avoir un avis neurologique.
■ Soulignons que l’étiologie reste inconnue dans 50 % des cas.

Cas clinique
Le patient présenté dans la vidéo de la diapositive 9-4 était un chef d’orchestre
réputé en musique classique. Il lui avait été impossible de continuer à diriger son
orchestre car dans ce mouvement de tête allant de la partition à ses musiciens,
tout était devenu trouble et illisible. Son épreuve calorique (diapositive 9-3) est un
désert de nystagmus. À aucun moment on ne peut réveiller ses vestibules.

Épreuve calorique réalisée chez le chef d’orchestre.

D’emblée, on constate dans la vidéo de la diapositive 9-4 que le HIT était positif
des deux côtés. L’épreuve post-giratoire montre l’absence de nystagmus tant dans
les girations horaires que dans les rotations antihoraires. Tout concourt donc au
diagnostic de vestibulopathie bilatérale sévère et symétrique.

Vestibulopathie bilatérale chez un chef d’orchestre classique.


Vestibulopathies bilatérales 117

Rééducation par substitution (diapositive 9-5)


Elle repose sur l’utilisation de la vision et de la proprioception dans l’élaboration
de nouvelles stratégies comportementales (lever d’une chaise, trajets accidentés,
marche sur support incliné, poussées déséquilibrantes) et sur le travail des antici-
pations et préhensions d’objets lourds.

Test d’acuité visuelle dynamique (AVD)


Le principe est de rechercher s’il existe une différence significative entre l’acuité
visuelle statique et l’acuité visuelle dynamique. Le patient est situé à une distance
de 5 m d’un panneau sur lequel sont imprimés des « optotypes ». Ce sont des
lignes de caractères de tailles différentes et décroissantes. On lui désigne
des caractères de plus en plus petits qu’il doit lire avec ses deux yeux. On note la
ligne la plus petite qu’il est capable de lire. On recommence le test mais cette fois
en exerçant sur lui des rotations droites et gauches de la tête et en lui demandant
de ne lire que la première et la dernière lettre de chaque ligne. On note encore la
ligne la plus petite qu’il est capable de lire malgré ces mouvements. Normalement,
on ne doit pas perdre plus de deux lignes par rapport à la première partie du test.
Un exemple de test d’AVD est présenté dans la vidéo de la diapositive 9-6 .
Test d’acuité visuelle dynamique (AVD).

Covert et overt saccades (diapositive 9-7)

Discrète covert saccade ne permettant pas de restabiliser le regard, suivie d’une


overt saccade.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Figure
aimablement fournie par Olivier Dumas, kinésithérapeute à Lyon.

Le test HIT avait montré qu’après le mouvement, en cas de déficit du réflexe vestibulo-
oculaire, des over saccades permettaient de refixer la cible après le mouvement de tête
(cf. diapositives 7-7 à 7-11). Au cours du test d’AVD, les enregistrements très fins du
mouvement des yeux (ligne noire) ont montré qu’il existait aussi des covert sac-
cades survenant pendant le mouvement de la tête (ligne verte) pour aider l’acuité
118 Guide pratique de rééducation vestibulaire

visuelle. Ces covert saccades n’ont rien à voir avec le vestibule mais dépendent de
la proprioception des muscles oculomoteurs. Par conséquent, en cas de déficit
vestibulaire bilatéral, leur travail doit permettre d’améliorer la situation.

Rééducation de type AVD


Comme le montre la vidéo de la diapositive 9-8 , l’appareillage construit pour
le travail des covert saccades comporte des écrans sur lesquels apparaissent des
chiffres ou des mots lorsqu’un capteur de vitesse placé sur la tête du patient
détecte la vitesse du mouvement fixée par l’opérateur. En augmentant progressi-
vement cette vitesse, on améliore progressivement les performances du patient à
lire ces cryptogrammes.
Rééducation de type AVD.
CHAPITRE

10
Déficits vestibulaires
partiels

Ils représentent une pathologie embarrassante. Le bilan fonctionnel doit être


effectué par les kinésithérapeutes. Ce sont les mieux placés pour le diagnostic et
la prise en charge.

Deux formes cliniques (diapositive 10-1)


Cliniquement, ces déficits partiels se présentent sous deux formes :
1. le déficit vestibulaire unilatéral progressif. C’est le tableau d’une névrite vestibu-
laire vue au 10e jour mais sans la grande crise inaugurale ;
2. un patchwork de microlésions vestibulaires provoquant des vertiges position-
nels et des troubles de la marche n’arrivant pas à compenser.
Dans les deux cas, c’est le bilan du kinésithérapeute qui permet de choisir le type
de prise en charge

Déficit vestibulaire unilatéral progressif


Diagnostic (diapositive 10-2)
Sous lunettes de Frenzel, on trouve des nystagmus unidirectionnels spontanés dans le
regard médian et le regard latéral. Parfois, ils sont seulement positionnels dans quelques
prises de position. Surtout, lors du head shaking, du HIT et aux épreuves postgi-
ratoires et caloriques, on met en évidence un déficit du côté de la phase lente du
nystagmus trouvé précédemment.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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120 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Cas clinique
Un cas de déficit vestibulaire droit subaigu est illustré dans la vidéo de la diapo-
sitive 10-3 .
Déficit vestibulaire droit subaigu à 70 ans.

Cette femme ne présentait pas de vertiges mais seulement des chutes à répétition,
en particulier dans sa douche. Il n’y avait aucun nystagmus spontané. Le HIT était
très positif vers la droite avec des saccades évidentes évoquant un déficit vestibu-
laire droit. Puis, ces manipulations ont réveillé un nystagmus gauche équivalent
d’un nystagmus au head shaking en accord avec le déficit vestibulaire droit. Après
mise en décubitus dorsal, le nystagmus précédent a redémarré. Il n’a pas changé
de sens dans le décubitus latéral, ce qui élimine le diagnostic de cupulolithiase du
canal horizontal. Après avoir relevé la patiente, on a effectué un head shaking qui
a de nouveau mis en évidence le nystagmus gauche. L’épreuve giratoire horaire a montré
une bonne réponse du vestibule gauche à l’arrêt brusque : nystagmus horizontal
gauche durant 20 secondes. En revanche, l’épreuve giratoire antihoraire a montré
une faible réponse du vestibule droit à l’arrêt brusque : seulement 4 à 5 secousses
horizontales droites. On se trouve donc devant un tableau de déficit vestibu-
laire droit d’évolution progressive sans la grande crise inaugurale de la névrite. De
plus, cette patiente présentait une surdité de perception droite à l’audiogramme.
C’était donc une indication d’imagerie à la recherche d’un processus destructif
dans l’os temporal droit ou dans la fosse cérébrale postérieure droite.
L’IRM (diapositive 10-4) a effectivement montré la présence d’un neurinome de
l’acoustique droit élargissant et remplissant le conduit auditif droit mais débordant
à peine dans la fosse postérieure droite (flèches rouges). Compte tenu de la présence
d’importants troubles de la mémoire, on a décidé de ne pas recourir à la chirurgie mais
de se contenter d’une simple surveillance.

A B
IRM d’un neurinome acoustique droit.
A. Coupe axiale. B. Coupe frontale.
Déficits vestibulaires partiels 121

Prise en charge (diapositive 10-5)


Ce tableau de déficit vestibulaire destructif progressif peut avoir été adressé au
kinésithérapeute. Avec diplomatie, celui-ci doit alors vérifier qu’un bilan ORL a été
fait à la recherche de lésions d’otite chronique, de lésions de l’os temporal, d’un
neurinome de l’acoustique, etc. Si tout a été négatif, on peut conclure au carac-
tère idiopathique du processus et commencer une rééducation par les 4 tiroirs,
comme pour une rééducation de névrite vestibulaire (cf. chapitre 8).

Patchwork de microlésions (diapositive 10-6)


CA
D

VI VS
CC A
CL A
A B
Utricule

CP A
Saccule CR
Cochlée
C D
Patchwork de microlésions.
A. Crêtes ampullaires des canaux semi-circulaires. B. Macules otolithiques. Ces lacunes
sont en rapport avec des microthromboses dans des territoires où la vascularisation
est de type terminal (C) ou en rapport avec des atteintes virales neuronales
incomplètes (D). CA : canal antérieur ; CC : crus commune ; CL : canal latéral ; CP :
canal postérieur ; VI : nerf vestibulaire inférieur ; VS : nerf vestibulaire supérieur.
D’après : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Dans cette deuxième situation, il existe des mini-lésions dispersées ampullaires


et maculaires unilatérales, voire bilatérales. Il peut s’agit de lésions microvascu-
laires dégénératives liées au fait que la vascularisation des crêtes ampullaires et
des macules otolithiques est de type terminal (à gauche). Par conséquent, aucune
suppléance n’est possible. Il apparaît alors de véritables trous dispersés dans les
champs de cellules ciliées. Une autre hypothèse est que ces lésions ampullaires et
maculaires dispersées seraient les séquelles de mini-névrites virales des branches
du ganglion de Scarpa. Le résultat est le même (à droite).

Signes cliniques : situation subaiguë (diapositive 10-7)


La présence d’un patchwork de microlésions est parfois confortée par la découverte
d’une petite crise initiale n’ayant duré que quelques heures et suivie de vertiges posi-
tionnels et d’accès d’instabilité à la marche. Dans cette situation subaiguë, il peut exister
des nystagmus positionnels mais très différents de ceux trouvés dans les VPPB.
122 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Bilan vestibulaire (diapositive 10-8)


Dans ces situations subaiguës, le bilan ORL instrumental classique est décevant. Il
est trop grossier pour faire une analyse fine et détaillée des lésions. Se pose alors
l’indication d’un inventaire fonctionnel détaillé effectué par le kinésithérapeute et
dont découlera la prise en charge.

Stimulations spécifiques de Norré


Norré, un Belge, a établi un inventaire de 19 prises de position utilisées dans la vie cou-
rante (vidéo de la diapositive 10-9 ). Il faut détecter les mouvements qui déclenchent
les vertiges. Le rythme de ce bilan doit être rapide mais sans brutalité. À partir de ces
constatations, un programme personnalisé d’exercices est établi, que le patient doit
répéter chez lui : 5 fois chaque mouvement, 2 fois/jour. C’est une rééducation par habi-
tuation pour empêcher les mouvements en cause de déclencher les vertiges. Le patient
est revu pour un contrôle chaque semaine. Les manœuvres de Norré sont reproduites
dans leur intégralité et, si besoin, le programme d’exercices est modifié.
Protocole de Norré.

Notation des résultats (diapositive 10-10)


Vertige
Intensité NV Durée
T AT xx

1
2
3 G
4 D
5
6
7 G
8 G
9 D
10 D
11
12 H
13 AH
14
15
16 G
17 D
18 H
19 AH

Positions de Norré : notation des résultats.


AH : antihoraire ; AT : atypique ; D : droit ; G : gauche ; H : horaire ; NV : sueurs, nausées
et vomissements ; T : typique.
Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins : Carole Fumat.
Déficits vestibulaires partiels 123

Les vertiges sont notés sur un graphique en précisant leur intensité, la durée et
leur association à des nausées. On note aussi si ces sensations s’accompagnent
d’un nystagmus typique (T) ou atypique.

Rééducation personnalisée (diapositive 10-11)


En résumé, c’est un programme personnalisé d’exercices à faire chez soi à partir de
l’inventaire positionnel de Norré. C’est une rééducation par habituation, l’inverse
des 4 tiroirs. L’objectif est de forcer le vestibule à ne pas répondre par des stimula-
tions passives répétées.

Système HIT électronique avec caméra déportée


(diapositive 10-12)

Système HIT avec caméra déportée (VHIT Ulmer, Synapsys).


VHIT Ulmer, Synapsys.

Son intérêt est de permettre de faire un HIT pour chacun des 6 canaux semi-
circulaires.
124 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Impulsions horizontales (diapositive 10-13)

Saccade

Test vers la gauche, Saccades de recentrage en cas de déficit


bon recentrage de l’œil du canal horizontal gauche

HIT – head impulse test (test de Halmagyi).


Source : D’après : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014.
Dessins : Carole Fumat.

Le principe du HIT manuel est de pratiquer de brusques impulsions dans le plan


horizontal et d’enregistrer en vidéonystagmoscopie si le recentrage de l’œil sur
une cible se fait harmonieusement grâce aux canaux semi-circulaires horizontaux
ou s’il faut des saccades de recentrage sur la cible après le mouvement (overt
saccades) ou pendant le mouvement (covert saccades). C’est facile dans le plan
horizontal car les deux canaux horizontaux sont coplanaires et il suffit d’incliner la
tête de 30° pour être parfaitement dans le plan de la stimulation.
Déficits vestibulaires partiels 125

Impulsions verticales (diapositive 10-14)


Canal Canal
antérieur antérieur
gauche gauche

Canal Canal
postérieur postérieur
droit Bascule droit
en arrière

A B

Canal Canal
antérieur antérieur
droit droit

Canal Canal
postérieur postérieur
Retour
Bascule gauche gauche
en position
en arrière
assise

C D
Courants endolymphatiques, tête tournée à droite (plan du LARP [A, B], puis à gauche
(plan du RALP [C, D]).
Source : D’après : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014.
Dessins : Carole Fumat.

En ce qui concerne les canaux verticaux, faire un HIT manuellement est beaucoup
plus difficile. Les plans de stimulation du mouvement de tête sont des roulis dans
un plan vertical oblique situé à 45° du plan vertical médian. Deux difficultés sur-
viennent :
1. les canaux postérieurs sont coplanaires avec les canaux antérieurs du côté
opposé plan du LARP (A et B), et plan du RALP (C et D) ;
2. le roulis de la tête doit se faire sans mouvements horizontaux sous peine d’in-
troduire des déviations horizontales inopportunes.
La première conséquence est que les roulis doivent se faire dans un plan parfaite-
ment vertical. La solution est de se placer en arrière du patient et de faire rouler sa
tête sur son propre thorax. La deuxième difficulté est de se rappeler qu’on stimule
les canaux postérieurs ipsilatéraux à la rotation de la tête de 45° dans un roulis
de la tête vers l’arrière et les canaux antérieurs du côté opposé à la rotation de la
tête de 45° dans un roulis de la tête vers l’avant. Pour observer des saccades de
recentrage, il est difficile, voire impossible d’intégrer toutes ces données. On est
vite perdu devant tant de complexité que l’on peut amoindrir en s’appuyant sur
les manœuvres de Dix et Hallpike.
126 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Résumé
Raisonnons en termes de Dix et Hallpike (diapositive 10-15). En tournant la tête
de 45° vers la droite, on est dans le plan du LARP. Une bascule postérieure teste le
canal postérieur droit. En relevant le patient, on teste le canal antérieur gauche. En
tournant la tête de 45° vers la gauche, on est dans le plan du RALP. Une bascule
postérieure teste le canal postérieur gauche. En relevant le patient, on teste le
canal antérieur droit.

Vers I’arrière = Vers I’avant =


canal postérieur canal antérieur
ipsilatéral à la controlatéral à
rotation de la la rotation de
tête la tête

Plan du LARP =
Tête tournée de
45º à droite

Plan du RALP =
Tête tournée de
45º à gauche

Canaux stimulés en fonction des plans et des mouvements effectués.


D’après Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

En termes d’impulsions (diapositive 10-16), en tournant la tête de 45° vers la droite,


on est dans le plan du LARP. Une impulsion postérieure teste le canal postérieur
droit. Une impulsion antérieure teste le canal antérieur gauche. En tournant la
tête de 45° vers la gauche, on est dans le plan du RALP. Une impulsion postérieure
teste le canal postérieur gauche. Une impulsion antérieure teste le canal antérieur
droit. Ces notions sont difficiles à retenir. L’intérêt de l’informatique est qu’elle
analyse l’image et une voix indique si le mouvement est correctement réalisé et
quel canal on a stimulé.
Déficits vestibulaires partiels 127

Vers I’arrière = Vers I’avant =


canal postérieur canal antérieur
ipsilatéral à la controlatéral à
rotation de la la rotation de
tête la tête

Plan du LARP =
Tête tournée de
45º à droite

Plan du RALP =
Tête tournée de
45º à gauche

Canaux stimulés par les impulsions en fonction des plans et des mouvements
effectués.
D’après Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

Un exemple d’utilisation de HIT électronique par Olivier Dumas est proposé dans
la vidéo de la diapositive 10-17 . La patiente fixe une cible située à 45° à droite
ou à gauche du plan médian. L’appareil filme ses yeux et analyse leurs mouve-
ments par rapport à la cible. Il indique si l’on est resté dans le bon plan et mesure
le réflexe oculaire canalaire stabilisateur. C’est facile dans le plan horizontal. Dans
les plans verticaux, la tête roule sur le thorax de l’examinateur pour éviter les mou-
vements horizontaux et ne garder que l’impulsion verticale.
Principe du HIT électronique : filmer et analyser les mouvements de l’œil.
Vidéo aimablement fournie par Olivier Dumas, kinésithérapeute à Lyon.
128 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Phases rapides des nystagmus produits par chaque canal


(diapositive 10-18)

Phases rapides des nystagmus produits par chaque canal.


CAD : canal antérieur droit ; CAG canal antérieur gauche ; CPD : canal postérieur
droit ; CPG : canal postérieur gauche ; CHD : canal horizontal droit ; CHG : canal
horizontal gauche.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.

L’appareil ne mesure pas un nystagmus mais le réflexe stabilisateur qui maintient


l’œil sur la cible. Le HIT effectué pour les 6 canaux semi-circulaires donne une
évaluation précise de leur fonctionnement. La rééducation peut alors s’appuyer
sur des arguments objectifs.

Exemple du déficit des canaux antérieur et horizontal droits


au HIT (diapositive 10-19)

Petits déficits des canaux antérieur et horizontal droits.


Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Déficits vestibulaires partiels 129

Les résultats sont consignés sur un schéma : le canalogramme représentant les


six canaux. Les résultats normaux sont situés au centre dans la zone verte. Les
résultats anormaux sont excentrés en rouge. On voit dans cet exemple qu’il y
a des déficits des canaux antérieur et horizontal droits pouvant impliquer soit
l’artère vestibulaire antérieure, soit la racine supérieure du ganglion de Scarpa. Peu
importe l’étiologie précise. L’important est de faire travailler l’oreille interne.

Covert saccades
Ce sont des enregistrements sophistiqués qui ont révélé que dans le HIT, il n’y avait
pas seulement des overt saccades (après le mouvement) pour compenser un défi-
cit mais aussi ces cover saccades (pendant le mouvement d’origine oculaire) sur
lesquelles on s’appuie pour favoriser la compensation (cf. diapositive 9-7).

Et la rééducation ? (diapositive 10-20)


En fonction du canalogramme, on travaille ces cover saccades… (cf. diapositive 9-7)
sans négliger pour autant la culture des stratégies : la rééducation à « mains nues » n’a
donc pas disparu. En particulier, les manœuvres de Norré sont très représentatives de
la plainte du patient et gardent toute leur valeur.
CHAPITRE

11
Vertiges itératifs

Lorsqu’un kinésithérapeute reçoit un patient pour crises de vertige à répétition


séparées par des périodes de retour à la normale, il faut s’attendre à des difficultés.
Ce sujet est même l’objet d’une polémique entre les kinésithérapeutes.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


© 2023 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
132 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Vertiges spontanés évoluant par crises


(diapositive 11-1)

Périodes de crise représentées par des zones rouges sur un calendrier.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Le patient présente des crises de vertige rotatoire durant de ¼ d’heure à plusieurs


heures. Elles sont intenses avec nausées et vomissements. Entre les crises, il n’y a
pas de symptôme, du moins au début.
Vertiges itératifs 133

Maladie de Menière
Hydrops endolymphatique (diapositive 11-2)
La maladie de Menière en représente le modèle complet. C’est une maladie rare bien
que pendant des dizaines d’années, tout était étiqueté « maladie de Menière ». Elle
était devenue synonyme de vertige d’origine périphérique. Actuellement, cette mala-
die procède d’un processus physiopathologique qui est l’hydrops endolymphatique
caractérisé par une inflation d’endolymphe (cf. diapositive 1-4) se manifestant par
des vertiges et par des symptômes auditifs. Il s’agirait d’un défaut de réabsorption de
l’endolymphe au niveau des voies endolymphatiques.
Cette maladie chronique dure de 5 à 10 ans. Elle évolue en deux phases :
■ la première est celle des crises récurrentes de quelques heures ;
■ puis, après plusieurs années, c’est la phase de Menière vieilli où la surdité
devient permanente et très sévère.
Quoi qu’il en soit, il faut comprendre que les patients présentant une maladie de
Menière éprouvent un handicap majeur. Ce n’est pas tant la durée cumulée des
crises qui est redoutable que la crainte de la survenue d’une nouvelle. Elle arrive à
l’improviste. Elle couche le patient par terre en sueurs et vomissant. Les patients
n’osent plus voyager ni aller au cinéma ou au théâtre. Au travail, il faut supporter
le regard des autres.
134 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Triade auditive unilatérale annonçant la crise de vertige


(diapositive 11-3)

Audiogramme montrant une surdité fluctuante sur les fréquences graves.


Trois crises en octobre. En abscisses : fréquences graves de 250 à 1 000 Hz et
fréquences aiguës de 2 000 à 8 000 Hz. En ordonnées inversées : perte auditive
moyenne de 30 à 70 dB selon les fréquences.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Vertiges itératifs 135

La crise débute par la sensation de plénitude d’une oreille, suivie d’un bourdon-
nement et enfin d’une surdité fluctuante sur les fréquences graves. La diaposi-
tive 11-3 présente le cas d’une patiente de 43 ans atteinte de maladie de Menière
gauche. En septembre, elle n’avait qu’une discrète surdité de 20 à 40 dB sur les
fréquences 250 et 500 Hz. Puis en octobre, lors de crises à répétition, dans l’oreille
gauche, les seuils auditifs sont devenus très bas avec une courbe horizontale
à moins de 70 dB respectant les fréquences aiguës 4 000 et 8 000 Hz. Enfin, en
novembre, elle va mieux et son audition est revenue aux seuils de septembre. En
résumé, devant des crises de vertiges à répétition, le diagnostic de Menière se fait
par l’association à des bourdonnements et à une surdité qui prédominent sur les
fréquences graves.

Traitement
Traitement médical (diapositive 11-4)
■ Les diurétiques en petites cures, tout comme la restriction hydrosodée, font
diminuer l’hydrops labyrinthique.
■ La flunarizine, la bétahistine obtiennent des résultats irréguliers.
■ La rééducation par habituation est préconisée par Alain Sémont (cf. diaposi-
tive 8-21) : stimulations passives et répétées par arrêts brusques au fauteuil rotatoire.
On espère que les capteurs vestibulaires diminuent leur réponse. Par expérience, chez
ces malades, ce type de rééducation est mal toléré.

Traitement radical (diapositive 11-5)


20 20
Récurrence
Pas de récurrence
15 15
Nombre de patients

10 10

5 5

0 0
Total 2-3 injections 4-5 injections
Résultats de la labyrinthectomie chimique par gentamicine dans la maladie de
Menière.
© Murofushi T, Halmagyi GM, Yavor RA. Intratympanic gentamicin in Ménière’s disease : results of therapy. Am J Otol 1997 ;
18 : 52-7.
136 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Il existe deux traitements radicaux :


■ la labyrinthectomie chimique par injection de gentamicine dans la caisse du
tympan sous anesthésie locale. C’est un antibiotique aminosidique ototoxique
qui passe dans l’oreille interne par la fenêtre ronde. Cette technique détruit le
vestibule mais entraîne également des surdités. Il faut une grande expérience pour
s’en servir, mais les résultats sont bons ;
■ la section du nerf vestibulaire (neurotomie vestibulaire, présentée dans la vidéo
de la diapositive 11-6 ) qui est effectuée par une petite voie d’abord rétromas-
toïdienne en suivant toutes les règles de la neurochirurgie.
Neurotomie vestibulaire droite.
Ce patient présente une maladie de Menière droite. Après la petite voie d’abord
rétrosigmoïdienne, on tombe tout de suite sur la 8e paire crânienne. Il faut d’abord
séparer le nerf vestibulaire à gauche du nerf cochléaire à droite. Dans le fond, on
aperçoit le nerf trijumeau. On fait la section du nerf vestibulaire et on écarte ses
extrémités pour éviter la repousse du nerf sectionné.

La chirurgie est systématiquement associée à de la rééducation.

Autres causes de vertiges itératifs (diapositive 11-7)


Il s’agit de :
■ de migraine chez les femmes après la ménopause. Les vertiges remplacent les
accès de céphalées. Le traitement repose sur la flunarizine qui est un médicament
antimigraineux et vestibuloplégique ;
■ d’anxiété aiguë qui peut aussi se manifester par des crises de céphalées sous
forme d’attaques de panique à répétition ;
■ de pathologie vagale.
CHAPITRE

12
Chutes de la personne
âgée
Rôle du vestibule

Chez le sujet âgé, en cas de chutes à répétition, le pronostic est sombre. Il est
classique de dire que si le patient ne se relève pas seul, il mourra dans l’année.
Les gériatres effectuent des bilans mais ils oublient souvent le bilan vestibulaire.
Certes, les chutes à répétition de la personne âgée sont plurifactorielles, mais il
existe un problème vestibulaire une fois sur trois. Sa prise en charge par le kinési-
thérapeute améliore le patient dans 30 % des cas.

Réactions de déséquilibre
Réaction de déséquilibre après le relevé de Dix et Hallpike chez un sujet âgé.

Comment l’oreille interne fait tomber les patients ? Ce n’est pas à cause de troubles
de l’équilibre, mais de réactions de déséquilibre. Dans la vidéo présentée en diapo-
sitive 12-1 , la patiente de 84 ans tombe constamment. L’enregistrement de l’œil
est en haut et la patiente est en bas. On commence par une manœuvre de
Dix et Hallpike droite qui ne montre rien. Toutefois en la redressant, on sent une
réaction de déséquilibre entre nos mains. Ensuite, on réalise une manœuvre de Dix
et Hallpike gauche et là, on obtient un minuscule nystagmus. Et en redressant la
patiente, elle se jette en arrière : pourquoi ? Parce qu’elle se croit projetée en avant.
Son oreille interne lui a communiqué une fausse information et elle a eu une réac-
tion complètement inappropriée. De plus, il y a un temps de latence qui implique
qu’elle ne fait pas la liaison avec le mouvement précédent. Elle se retrouve donc
par terre sans savoir ni pourquoi ni comment ! Ces personnes âgées, dans la plu-
part des cas, ne savent pas pourquoi elles tombent.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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138 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Causes vestibulaires principales (diapositive 12-2)


Ce sont les VPPB, la presbyvestibulie, la dépression vestibulaire et les troubles du
contrôle cérébelleux. Il ne faut bien sûr pas oublier les antécédents d’otite chro-
nique, de stapédotomie, de fractures du rocher, de maladie de Menière, de névrite
vestibulaire etc. La récidive ou une décompensation sont fréquentes au grand âge.

VPPB (diapositive 12-3)


Leur fréquence s’accroît avec l’âge. En EPHAD, on considère que près de 10 % des
pensionnaires ont un VPPB méconnu. En effet, le VPPB des personnes âgées est
une maladie chronique où les patients ne se plaignent pas de vertiges :
■ d’une part, leurs mouvements sont trop lents pour en déclencher ;
■ d’autre part, leurs sensations sont émoussées.
Il y a seulement une diminution de la qualité avec entrave au lever, au coucher et
à tous les mouvements rapides de la tête. La conclusion est que chez eux, le bilan
de chutes à répétition doit comporter une manœuvre de Dix et Hallpike bilatérale
systématique.
VPPB des canaux postérieur et horizontal droits chez un sujet âgé.

Dans la vidéo de la diapositive 12-4 , les HIT étaient tout d’abord normaux, il n’y
avait donc pas de vieillissement des vestibules. Pour soulager le dos au cours de la
manœuvre, un aide doit relever les jambes en même temps. On a ainsi déclenché,
après un temps de latence de quelques secondes, un nystagmus ayant deux com-
posantes : l’une verticale supérieure et l’autre torsionnelle antihoraire. Il s’agissait
donc d’un VPPB du canal postérieur droit typique. Il a duré plus longtemps que
chez un sujet jeune et a surtout changé de sens pour devenir horizontal droit
géotropique, évoquant une canalolithiase associée. Il est vrai que l’association de
plusieurs canaux est fréquente dans les VPPB des personnes âgées. Les Anglo-
Saxons appellent cela canalith jam.
Les manœuvres de Sémont ou d’Epley peuvent être aussi faciles à réaliser que chez
un sujet jeune mais elles peuvent s’avérer pénibles. Le fauteuil de Thomas Richard-
Vitton (diapositive 12-5) peut alors rendre de grands services même si nous n’en
avons pas l’expérience.
Chutes de la personne âgée 139

Fauteuil de Thomas Richard-Vitton.


Courtesy of Interacoustics A/S.

Presbyvestibulie (diapositive 12-6)


Deuxième cause de chute chez le sujet âgé, c’est l’équivalent pour le vestibule
de la presbyacousie pour la cochlée. Tant que l’on n’avait pas testé le vestibule à
haute accélération, on ne se rendait pas compte de ce vieillissement. Les épreuves
caloriques et les épreuves giratoires sont des tests à basse vitesse. Comme pour
l’audition, ce sont d’abord les hautes fréquences pour l’équilibration qui sont tou-
chées. Le HIT est un test à haute vitesse de la tête. On demande à un sujet de ne
pas perdre de vue une cible visuelle (cf. diapositives 7-7 à 7-9). On écarte sa tête de
la position médiane. Puis on la ramène en position médiane très brusquement :
400°/seconde. Chez le sujet normal, l’œil se recentre harmonieusement. En cas
de déficit du réflexe vestibulo-oculaire, l’œil se recentre après coup par de petites
saccades (overt saccades).
Presbyvestibulie avec HIT positif des deux côtés.

Dans la vidéo de la diapositive 12-7 , on demande à une femme de 79 ans de


fixer une cible située à 2 m. Puis on tourne lentement sa tête vers la gauche de 15
à 20°. L’œil fixe toujours la cible et dévie vers la droite. Par une brusque impulsion,
on ramène ensuite la tête en position médiane. Le réflexe vestibulo-oculaire ne
se déclenche pas et l’œil ne se recentre après l’impulsion que par 3 à 4 petites
140 Guide pratique de rééducation vestibulaire

saccades vers la gauche d’origine proprioceptive oculaire. C’est l’inverse dans la


rotation de la tête vers la droite de 15 à 20° avec le même résultat.

Entrée vestibulaire sous- ou mal employée


La troisième cause de chutes à répétition tient au fait que les personnes âgées ne
se servent plus de leur entrée vestibulaire (diapositive 12-8). Certaines ne sortent
plus ou peu, se meuvent avec lenteur et sont assises une grande partie de la jour-
née. Pire, en cas de cyphose cervicale dorsale haute, les canaux semi-circulaires
sont désorientés. Au cours de la jeunesse, ils avaient été formés à reconnaître
des mouvements dans des plans très précis et voilà qu’ils sont basculés vers le bas.
Ils ne donnent alors plus que de fausses informations qui ne sont plus congruentes
avec les autres systèmes de l’équilibre.

Vieillissement postural.
Le cou est en hyperextension permanente avec tractions sur les insertions musculaires
cervicales dont l’inflammation douloureuse perturbe les propriorécepteurs.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

Parce qu’ils ne sont plus utilisés, les réseaux neuronaux entrent en dépression
(diapositive 12-9). Les influx nerveux ne passent plus. Au début, c’est réversible
mais ensuite, c’est définitif. Les conséquences sont l’émoussement des sensations
vestibulaires aux épreuves post-giratoires (vection) et le développement d’une
dépendance visuelle à l’âge de la cataracte.
Chutes de la personne âgée 141

Presbyvestibulie avec faibles nystagmus post-giratoires.

La patiente de la vidéo proposée dans la diapositive 12-10 présente des HIT


légèrement positifs des deux côtés. Les arrêts brusques dans le sens horaire et
dans le sens antihoraire ne donnent que de minuscules nystagmus sans aucune
sensation de giration.

Troubles du contrôle inhibiteur de l’archéocervelet


Chez la personne âgée, la quatrième cause de chutes à répétition est la perte
du contrôle inhibiteur du cervelet sur les vestibules (diapositive 12-11). Les
connexions du labyrinthe postérieur avec les centres sont doubles :
■ la première se fait avec les noyaux vestibulaires pour se relier avec les noyaux
oculomoteurs et les cornes antérieures de la moelle. Ainsi sont générés les réflexes
vestibulaires ;
■ la voie est directe avec l’uvula, le nodulus et le flocculus cérébelleux. Celle-là ne
passe pas par les noyaux vestibulaires. Cette connexion directe apporte des infor-
mations otolithiques au cervelet, c’est-à-dire des informations sur la position du
sujet : position érigée ou position couchée. De façon caricaturale, en fonction de
cette position, le cervelet autorise ou non le réflexe grâce à une connexion retour-
nant aux noyaux vestibulaires (en rouge sur le cliché). En effet, une stimulation du
canal semi-circulaire horizontal ne peut pas être interprétée par les centres de la
même façon selon qu’on est en position couchée ou érigée. Le cervelet inhibe ou
désinhibe le réflexe en fonction des informations de position qui lui sont fournies
par les otolithes mais aussi par la proprioception et la vision.

Contrôle du cervelet sur les voies vestibulaires.


142 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Chez la personne âgée, la perte d’inhibition du cervelet se traduit en VNS par


la présence de signes centraux (diapositive 12-12), c’est-à-dire un nystagmus de
désinhibition centrale bilatéral :
1. nystagmus vertical inférieur pour la malformation d’Arnold Chiari (engage-
ment des amygdales cérébelleuses dans le trou occipital – foramen magnum dans
la Terminologia Anatomica) et down beat nystagmus syndrome (d’origine incon-
nue) ;
2. nystagmus de position central of the changing type de Nylen (très rare). C’est
un nystagmus violent et prolongé survenant dans le décubitus latéral s’accompa-
gnant de faibles vertiges ;
3. surtout : nystagmus au head shaking de type central dans la maladie des micro-
vaisseaux.

Maladie des microvaisseaux (diapositive 12-13)


La maladie des microvaisseaux (diamètre 200 à 800 µm) s’oppose à la pathologie
vasculaire des gros vaisseaux. C’est une dégénérescence de la paroi des microvais-
seaux cérébraux. Sous l’effet de l’hypertension artérielle, il se produit :
■ une fuite de protéines plasmatiques, en particulier de l’apolipoprotéine E
(apoE) qui joue un rôle important dans la pathologie vasculaire ;
■ des microhémorragies et des petits infarctus « dits lacunaires ».
La conséquence est une destruction de la substance blanche (leucoaraïose) au
niveau du lobe frontal, des espaces périventriculaires et du cervelet. Cliniquement,
les troubles cognitifs sont légers mais les troubles de l’équilibre coexistent avec des
chutes à répétition. Le polygone de sustentation s’élargit mais le balancement
des bras est conservé. La perte du caractère automatique de la marche engendre
une asthénie importante. Surtout, les anomalies en VNS précèdent celles de l’IRM.
L’ORL joue le rôle d’un donneur d’alerte.
Cas clinique
Head shaking dans une démence vasculaire (maladie des microvaisseaux).

Ce cas illustre le rôle de l’ORL dans la prévention de cette pathologie (diaposi-


tive 12-14). Il s’agit d’une femme de 84 ans qui présentait de nombreux facteurs de
risque vasculaire dont une hypertension artérielle. De 1996 à 2001, elle a été suivie
pour des vertiges positionnels déclenchés par le décubitus latéral droit survenant
par périodes. En 2002, elle a présenté plusieurs AIT (accidents ischémiques transitoires)
avec signes neurologiques. En 2004-2005 sont apparues des crises de désorientation
à répétition. Elle a été revue pour vertiges en 2006 et la vidéo de la diaposi-
tive 12-15 montre le nystagmus déclenché au head shaking, accompagné d’un
malaise avec de tels vomissements qu’elle a dû être hospitalisée 24 heures jusqu’à
Chutes de la personne âgée 143

l’obtention d’une IRM normale. Elle a été perdue de vue jusqu’en 2010, date où
elle s’est de nouveau présentée pour des chutes à répétition survenant dans le
cadre d’une démence vasculaire (MMSE – Mini mental state examination – à 20).
L’IRM (diapositive 12-16) a montré une atrophie du lobe frontal et de nombreuses
petites lacunes pontocérébelleuses.

A B
Évolution d’une maladie des microvaisseaux.
A. IRM d’une atrophie du lobe frontal. B. IRM de lacunes dans le tronc cérébral.

Conclusion (diapositive 12-17)


Dans le cas présenté, les signes vestibulaires, témoins des désinhibitions cérébel-
leuses, ont précédé les anomalies à l’IRM de près de 4 ans. Ils peuvent donc consti-
tuer des signes d’alerte devant faire renforcer la prévention.

Prise en charge (diapositive 12-18)


Comme il s’agit de lésions centrales plus ou moins latéralisées, on pourrait utiliser
le travail de coordination œil-tête et des rééducations à haute vitesse pour déve-
lopper les fameuses covert saccades. Mais celles-ci sont impraticables chez des
sujets de plus de 80 ans en moyenne. En revanche, le travail de la coordination
œil-tête a donné d’excellents résultats.

Objectifs (diapositive 12-19)


Il s’agit de réveiller et de reparamétrer le réflexe vestibulo-oculaire. Le but étant
de maintenir le sujet à domicile, les exercices sont donc à répéter chez soi sous le
contrôle personnel du kinésithérapeute avec l’aide de la famille.
144 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Principe du travail de coordination œil-tête


(diapositive 12-20)
Il est d’ajouter du mouvement de tête, les yeux ouverts dans un environnement
normal. En cas de vertiges positionnels, on ajoute des exercices posturaux, yeux
ouverts également.

Exercices de Tusa en synergie et en dissociation


(diapositive 12-21)
Cf. diapositive 8-2.

Cibles égocentrées pour rétablir le schéma corporel


(diapositive 12-22)
Cf. diapositive 8-5.

Exercices oui, non, peut-être : assis ou debout près d’un mur


Cf. diapositive 8-15.

Exercices de Norré

Exercice de Norré simplifié dans le plan sagittal.

■ Simplifiés dans le plan sagittal en antéflexion (diapositive 12-24).


■ En cas de facteur positionnel ou d’échec des manœuvres thérapeutiques dans
le VPPB.
Chutes de la personne âgée 145

Exercice de Norré simplifié dans le plan frontal.

■ Dans le plan frontal : pseudo-manœuvres de Dix et Hallpike ou Sémont (dia-


positive 12-25).

Exercice de Norré simplifié, roulis en décubitus.

■ Dans le roulis en décubitus (diapositive 12-26).

Résultats (diapositive 12-27)


■ Pour Macias et al. (2005), la VRT (vestibular rehabilitation therapy) réduit la
probabilité de chute à moins de 5 % chez un tiers d’une population de chuteurs
en quelques mois.
■ L’American geriatric society (2001) recommande systématiquement la VRT
chez les sujets âgés qui présentent des perturbations de la marche et de l’équilibre.
CHAPITRE

13
Bilan vestibulaire du
kinésithérapeute

Le symptôme vertige peut survenir dans des pathologies très différentes.

Patients adressés par un médecin (diapositive 13-1)


Souvent, les patients arrivent avec une prescription du médecin traitant mais
sans aucun diagnostic précis. Il revient donc au kinésithérapeute de reconnaître
la pathologie en cause pour initier, conduire et surveiller une rééducation vesti-
bulaire. Son bilan est différent du bilan médical ayant amené à la prescription de
rééducation vestibulaire mais il faut rester vigilant.

Histoire du vertige (diapositive 13-2)


L’interrogatoire est fondamental pour distinguer les pathologies. Est-ce un vertige
rotatoire avec nausées et vomissements ou une instabilité en position érigée ? Y
a-t-il un caractère positionnel et quels changements de position sont en cause ?
Depuis combien de temps cela dure-t-il ? (ancienneté du vertige : névrite, situation
chronique si plus de 3 mois). On cherche à savoir s’il s’agit de vertige par crises
(fréquence, durée), s’il y a une éventuelle association à des symptômes auditifs
(Menière, neurinome) et quel est le retentissement sur les activités perturbées et
le métier (handicap).

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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148 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Calendrier du vertige (diapositive 13-3)


JUILLET AOUT SEPTEMBRE

1 L 1 J 1 D
2 M 2 V 2 L
3 M 3 S 3 M
4 J 4 D 4 M
5 V 5 L 5 J
6 S 6 M 6 V
7 D 7 M 7 S
8 L 8 J 8 D
9 M 9 V 9 L
10 M 10 S 10 M
11 J 11 D 11 M
12 V 12 L 12 J
13 S 13 M 13 V
14 D 14 M 14 S
15 L 15 J 15 D
16 M 16 V 16 L
17 M 17 S 17 M
18 J 18 D 18 M
19 V 19 L 19 J
20 S 20 M 20 V
21 D 21 M 21 S

Trois exemples de calendrier du vertige.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Trois grands types d’évolution doivent être reconnus.


1. En juillet, c’est un début brutal, alitant le patient pendant quelques jours, puis
régressant progressivement et se terminant par des vertiges positionnels après
plusieurs semaines. C’est probablement une atteinte unilatérale de type névrite.
2. En août, ce sont des crises de durée variable survenant de façon aléatoire. Ceci
évoque une pathologie type maladie de Menière.
3. En septembre, ce sont des vertiges plus ou moins brefs, plus ou moins intenses
mais survenant tous les jours, souvent positionnels et avec parfois de petites crises
d’instabilité. Toutes sortes d’hypothèses peuvent être soulevées.

Antécédents (diapositive 13-4)


Certains antécédents éclairent sur l’étiologie : traumatisme (VPPB), coup du lapin
(dissection de l’artère vertébrale), antécédent vasculaires (accidents ischémiques).
D’autres antécédents sont des facteurs aggravants : pathologie ophtalmologique,
problèmes orthopédiques, traitement sédatif.

Description d’un nystagmus spontané


(diapositive 13-5)
Dans les pathologies vestibulaires, c’est un mouvement alternatif des deux yeux
comportant une phase lente et une phase rapide de rappel battant en sens
Bilan vestibulaire du kinésithérapeute 149

inverse. Dans les pathologies vestibulaires périphériques, la fixation du doigt


de l’examinateur diminue le nystagmus. C’est pourquoi on préfère les observer
derrière des lunettes de Frenzel auto-éclairantes comportant deux lentilles de
20 dioptries supprimant la fixation et permettant de mieux le voir. Les nystagmus
d’origine périphérique sont augmentés dans l’obscurité (VNS avec une caméra
infrarouge sur l’œil). La description d’un nystagmus consiste à définir :
■ son sens qui est celui de sa phase rapide car plus facile à déterminer (droit ou
gauche du point de vue du patient) ;
■ sa direction (horizontale, verticale, rotatoire – horaire ou antihoraire du point
de vue de l’observateur – ou horizontale – rotatoire) ;
■ sa fréquence et son amplitude ;
■ l’effet du regard latéral droit et gauche ;
■ l’association à un vertige spontané.

Signification des nystagmus (diapositive 13-6)


■ Un nystagmus spontané traduit une asymétrie labyrinthique non compensée :
• d’origine périphérique si le nystagmus est horizontal – rotatoire unidirec-
tionnel ne changeant pas de sens avec la direction du regard. C’est une bonne
indication de rééducation. Lorsque le nystagmus disparaît, la compensation est
en bonne voie ;
• d’origine centrale si le nystagmus change de direction avec le regard. Un
nouvel avis médical doit être demandé.
■ Les nystagmus peuvent être provoqués par :
• head shaking (asymétrie incomplètement compensée),
• vibrations osseuses (toutes asymétries labyrinthiques),
• manœuvres de Dix et Hallpike (VPPB),
• exercices de Norré (vertiges positionnels en dehors du VPPB).
Ces tests sont à répéter tout au long de la rééducation.

Test d’acuité visuelle dynamique


Comme présenté dans la vidéo de la diapositive 13-7 , on fait lire des lettres au
patient, sa tête étant immobile. Puis on lui fait relire la première et la dernière lettre
de chaque ligne, mais cette fois en lui imprimant des rotations de la tête dans un
sens et dans l’autre. Normalement, le patient ne doit pas avoir une différence de
plus deux lignes entre les deux modes de lecture. Dans le cas contraire, il y a une
asymétrie vestibulaire.
Test d’acuité visuelle dynamique.

Tests vestibulospinaux (diapositive 13-8)


Il s’agit des tests de Romberg, de déviations des index, de Fukuda, et de marche
en étoile de Babinski. Suivant l’état du patient, un seul de ces tests est suffisant.
150 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Signes de Romberg simple et sensibilisé


(diapositives 13-9 et 13-10)

Signes de Romberg simple et sensibilisé.


Source : Toupet M, Van Nechel C, Bodson I, Pezzini-Picart S. Vestibular rehabilitation in the ederly. In Guidetti D, ed.
Rehabilitative Management of the dizzy patient. Amsterdam : Excerpta Medica Reed Elsevier Group ; 2000.

Le patient reste debout les pieds joints pour évaluer sa stabilité. En cas d’asymétrie
labyrinthique, il tombe du côté déficitaire. On peut sensibiliser ce test en faisant
monter le patient sur un tapis mousse épais.

Recherche d’un signe de Romberg.


Bilan vestibulaire du kinésithérapeute 151

Test vestibulospinal de Fukuda


Test vestibulospinal de Fukuda.

Comme le montre la vidéo de la diapositive 13-11 , on fait marcher le patient


sur place les yeux fermés et les bras tendus : 40 pas en levant bien les genoux.
Une déviation n’est significative au-delà de 30°. Chez certains patients, la déviation
peut dépasser 120°. Un test trop difficile à réaliser est illustré dans la vidéo de la
diapositive 13-12 .
Test vestibulospinal de Fukuda significatif.

Marche en étoile de Babinski (diapositive 13-13)


Point de direction

1
3

8 7

4
2

Point de départ
Marche en étoile de Babinski.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.

On fait marcher le patient les yeux fermés de 3,5 m en avant, puis de 3,5 m en
arrière. En cas de déficit vestibulaire unilatéral, il décrit une étoile. Ce test n’est pas
souvent réalisable.
152 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Tests giratoires (diapositive 13-14)


On arrête brusquement le patient après rotation horaire pour étudier l’oreille
gauche et antihoraire pour étudier l’oreille droite :
■ compter les durées des nystagmus en secondes jusqu’à extinction ;
■ vection : demander au patient quand son vertige s’arrête.

Synthèse (diapositive 13-15)


■ Date d’apparition du vertige, circonstance d’apparition, description, activités
perturbées
■ Nystagmus spontané de face, regard droit, regard gauche
■ Nystagmus provoqué : manœuvres de Dix et Hallpike gauche et droite, head
shaking
■ Bilan postural : test de Romberg, de Fukuda, de Babinski
■ Test d’acuité visuelle dynamique
■ Bilan giratoire
■ Exercices de Norré
Il ne s’agit pas d’un bilan initial que l’on fait de façon standard à tous les patients.
Le plus souvent, c’est une synthèse que l’on complète progressivement, ou que
l’on tronque lorsqu’il s’agit d’un VPPB avec manœuvre thérapeutique effectuée
dans la foulée des manœuvres provocatrices.
CHAPITRE

14
Conduite et surveillance
d’une rééducation
vestibulaire

Principes selon Michel Lacour (diapositive 14-1)


La rééducation peut se faire selon plusieurs approches.
1. Un premier schéma très dynamique repose sur des exercices actifs dans un
contexte statique, dynamique, spatial et environnemental naturel. Il vise :
– l’adaptation : processus consistant à reparamétrer les structures vestibu-
laires restantes ou à recréer de nouveaux circuits (sprouting) ;
– la substitution : recours à la vision et la proprioception pour remplacer le
vestibule ;
– la sensibilisation : réveil ou amélioration de la fonction vestibulaire en per-
turbant la vision et la proprioception.
2. Un deuxième schéma repose sur des stimulations passives répétées. Il vise
l’habituation : processus forçant le vestibule à ne pas répondre, par exemple les
exercices de Norré, les arrêts brusques répétés au fauteuil giratoire, etc.

Déroulement de la rééducation (diapositive 14-2)


■ Choisir une méthode très progressive et adaptée à chaque cas car les patients
sont fatigables.
■ Forcer les autres systèmes sensoriels qui concourent à l’équilibre : la vision et la
proprioception.
■ Soulager les contractures et les douleurs cervicales apparues secondairement
aux vertiges. Bien les distinguer les douleurs cervicales survenant dès le début
(on voit dans le chapitre 15 que c’est un piège).

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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154 Guide pratique de rééducation vestibulaire

■ Parler, dédramatiser et redonner confiance en soi. Le patient doit raconter ce


qu’il n’ose plus faire, car ces pathologies sensorielles ne se voient pas.
■ Remuscler les personnes âgées. Les évaluer régulièrement et les féliciter même
pour les petits progrès qu’elles racontent lors de chaque séance.

Fixer des objectifs (diapositive 14-3)


■ Pouvoir travailler les yeux ouverts, puis les yeux fermés, en lisant un texte tout
en oscillant la tête.
■ Pouvoir tenir debout.
■ Pouvoir marcher droit devant soi et dans l’obscurité.
■ Pouvoir tourner en rond sans embardée. Stabiliser le regard : tête immobile, en
tournant la tête tout en lisant un texte. En marchant, rechercher des cibles situées
derrière soi. Se forcer à faire ses courses dans les grandes surfaces.

Évolution favorable (diapositive 14-4)


Elle se traduit par :
■ la disparition des sensations vertigineuses et des nausées ;
■ la disparition des déviations axiales ;
■ la disparition des nystagmus sous lunettes de Frenzel.
Les déséquilibres aux mouvements brusques de la tête sont les plus longs à dispa-
raître (tourner la tête en traversant la rue).
L’objectif final est la reprise du sport et du travail comme avant.

Stagnation des progrès (diapositive 14-5)


■ Rechercher :
• un blocage psychologique : détecter et lever les fausses craintes (tumeur ou
anévrisme) car il n’y a pas eu d’imagerie scanner ou IRM ;
• des incohérences entre le discours du médecin et du kinésithérapeute ou
une recherche sur internet mal comprise.
■ Détecter les bénéfices secondaires cachés : personne âgée s’étant rapprochée
de ses enfants à l’occasion de sa maladie, etc.
■ Être toujours prêt à remettre le diagnostic en question (nystagmus de position
centrale qui ne s’arrête pas +++).
■ Changer la méthode. Exemples :
• introduction d’exercices de Norré en cas de séquelles positionnelles d’une
névrite ;
• habituation pour un vertige cinétique particulier, etc.
Conduite et surveillance d’une rééducation vestibulaire 155

Conclusion (diapositive 14-6)


Le pronostic dépend :
■ de la précocité de la prise en charge ;
■ de l’âge : la plasticité est meilleure chez le sujet jeune ;
■ du type de lésion :
• dans le neurinome du VIII, la compensation se fait au fur et à mesure,
• dans la maladie de Menière, la compensation n’a pas le temps de s’installer,
• les polytraumatismes sont de mauvais pronostic ;
■ d’erreurs médicamenteuses (sédatifs) ;
■ de lésions associées (oculaires, orthopédiques centrales et névrotiques qui
retardent la compensation).
CHAPITRE

15
Pièges de la pathologie
vestibulaire centrale

La plupart de ces pièges impliquent des pathologies vestibulaires centrales prises


à tort pour des pathologies vestibulaires périphériques. Ils concernent surtout les
médecins qui adressent ces patients au kinésithérapeute sans faire de bilan ORL.
Mais ce dernier peut être aussi en première ligne et doit rester vigilant.

Infarctus latérobulbaire et cérébelleux


(diapositive 15-1)

Petit infarctus latérobulbaire ayant donné un syndrome de Wallenberg.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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158 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Ce sont le syndrome de Wallenberg et l’infarctus dans le territoire de l’artère céré-


belleuse antéro-inférieure s’accompagnant de surdité brusque. Le tableau peut
être d’autant plus trompeur que des vertiges prémonitoires peuvent survenir dans
les mois précédant l’accident vasculaire. Devant un grand vertige à début brutal,
à la phase aiguë, la règle du HINTS (head impulse test, nystagmus, skew) négatif
permet d’éviter cet écueil. Il faut se méfier si l’un quelconque de ces signes est
présent :
■ HIT négatif ;
■ nystagmus s’inversant dans le regard latéral ;
■ head shaking test négatif ;
■ surdité.
Ajoutons que si le patient est incapable de tenir debout les yeux fermés, il faut
se méfier. La rééducation est peu efficace. Le traitement repose sur le repos et la
régression spontanée

Hématome cérébelleux (diapositive 15-2)

Gyroscan d’un hématome intracérébelleux.


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Ce deuxième piège concerne surtout les services ORL hospitaliers. On voit arri-
ver des patients en début d’après-midi adressés par le service des urgences pour
névrite vestibulaire. Mais à la contrevisite, l’infirmière signale que le patient tient
des propos incohérents. En réalité, il s’agit d’un hématome cérébelleux qui a évo-
lué en deux temps avec apparition secondaire de troubles de la conscience.
Pièges de la pathologie vestibulaire centrale 159

Astrocytome malin provoquant un nystagmus


de position central (diapositive 15-3)

Astrocytome malin de la fosse postérieure.


Source : Sauvage JP. Vertiges. Manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Paris : Elsevier Masson ; 2014. Dessins :
Carole Fumat.

Dans ce cas, c’est une pathologie centrale (nystagmus de Nylen) qui prend le
masque d’une cupulolithiase. Lorsqu’on couche le patient sur l’oreille droite, on
déclenche un nystagmus horizontal gauche, puis lorsqu’on le couche sur son
oreille gauche, on déclenche un nystagmus horizontal droit. Cela pourrait certes
ressembler à une cupulolithiase du canal horizontal mais il manque le nystagmus
de position en décubitus dorsal tête droite, les nystagmus sont trop longs et le
vertige associé est minime. Enfin, les nystagmus apparaissent sans latence, durent
le temps de la position et sont exagérés par la fixation.

Pseudo-maladie de Menière : neurinome


de l’acoustique (diapositive 15-4)

Neurinome de l’acoustique (IRM).


Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
160 Guide pratique de rééducation vestibulaire

En réalité, 5 % des neurinomes du VIII se présentent au début comme une mala-


die de Menière, du fait qu’il existe une surdité de perception unilatérale et des
crises de vertige aigu correspondant à des hémorragies intratumorales. Le signe
qui détrompe est que la surdité est progressive et prédomine sur les fréquences
aiguës et non sur les fréquences graves comme dans la maladie de Menière.

Malformation d’Arnold Chiari : nystagmus vertical


inférieur (diapositive 15-5)

Malformation d’Arnold Chiari associée à une syringomyélie : IRM sagittale en T2.


Engagement de l’amygdale cérébelleuse sous la ligne de Malgaigne (flèche rouge).
Atrophie centrale de la moelle cervicale caractéristique de syringomyélie
(flèche jaune).
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Il est difficile de s’imaginer qu’une malformation sévère puisse se révéler par des
poussées de déséquilibre à l’âge de 70 ans. C’est pourtant le cas d’une patiente qui
se plaignait de ne plus pouvoir skier en raison de troubles de l’équilibre : la VNS a
montré un net nystagmus vertical inférieur lors de la mise en décubitus dorsal et
l’IRM a confirmé la présence d’une malformation d’Arnold Chiari de type I.
Pièges de la pathologie vestibulaire centrale 161

Pseudo-torticolis dans une dissection de l’artère


vertébrale (diapositive 15-6)

Dissection de l’artère vertébrale gauche.


IRM en T2 avec saturation du signal de la graisse. L’hématome de la paroi de l’artère
vertébrale est indiqué par la flèche.
Source : Sauvage JP, Grenier H. Guide de rééducation vestibulaire. © 2015 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Le vrai piège concernant les kinésithérapeutes survient le jour où on leur adresse


un patient pour des douleurs cervicales en vue de pratiquer des manipulations.
C’est le cas d’un patient chez qui apparurent le lendemain des manipulations des
vertiges, puis une quadriplégie suivie de coma (locked-in syndrome). L’angio-IRM
confirma que l’artère vertébrale gauche était le siège d’un hématome compressif
ayant remonté jusqu’au tronc cérébral en s’infiltrant entre l’endothélium et la paroi
artérielle. Le kinésithérapeute fut accusé et condamné. Personne ne s’est inquiété
de savoir si le patient avait repeint son plafond la veille, traumatisme minime clas-
sique dans les dissections de l’artère vertébrale. En conclusion, il faut être vigilant
quand les douleurs cervicales apparaissent en même temps que les vertiges.
162 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Toujours une prescription (diapositive 15-7)

Prescription type.

La meilleure défense pour le kinésithérapeute consiste à n’agir que couvert par


une prescription médicale.
CHAPITRE

16
Tester ses connaissances

Ce chapitre ne doit pas être considéré comme un exercice pour évaluer les
connaissances mais comme un outil pédagogique incitant à revoir les diapositives
et les vidéos concernées dans une approche pratique et constructive.

QCM
Questions
Généralités

Question 1
Le vertige se définit comme :
a. Une illusion de mouvement
b. Une perte de connaissance
c. Un déséquilibre à la marche
d. Des vomissements positionnels
e. Une pathologie de l’oreille externe

Question 2
La pathologie vestibulaire se reconnaît :
a. À l’interrogatoire
b. À l’examen oculaire
c. À l’examen neurologique
d. Par une prise de sang
e. À l’IRM

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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164 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Chapitre 1 – Anatomie et physiologie du système


vestibulaire

Question 3
Les canaux semi-circulaires membraneux :
a. Comportent une dilatation à leur extrémité
b. S’abouchent dans l’utricule
c. S’abouchent dans le saccule
d. N’ont aucune partie commune
e. Possèdent un nerf qui rejoint le ganglion de Scarpa

Question 4
Dans le conduit auditif interne, on trouve :
a. Le nerf olfactif
b. Le nerf oculaire commun
c. Le nerf facial
d. Le nerf auditif
e. Le nerf vestibulaire

Question 5
L’endolymphe :
a. Remplit le labyrinthe membraneux
b. Joue un rôle important dans le fonctionnement des canaux semi-circulaires
c. Est évacuée par le canal endolymphatique
d. Est réabsorbée dans le sac endolymphatique
e. N’a aucun rapport avec la maladie de Menière

Question 6
Les canaux semi-circulaires sont sensibles :
a. Aux mouvements uniformes
b. À la gravité
c. Aux rotations horizontales
d. Au tangage
e. Au roulis

Question 7
Les fonctions de l’appareil vestibulaire sont :
a. D’informer sur les mouvements de la tête
b. D’informer sur la position de la tête par rapport à la gravité
c. De stabiliser le regard au cours du mouvement
d. De stabiliser le corps en dépit des forces contraires
e. De stabiliser la pression artérielle en fonction de la position du corps
Tester ses connaissances 165

Question 8
En l’absence d’oreille interne :
a. Il apparaît des oscillopsies
b. Des chutes se produisent
c. Le mal de mer disparaît
d. Il apparaît une hypotension orthostatique
e. Il apparaît une baisse de la qualité de vie

Question 9
Polarisation des cellules ciliées :
a. Au sommet des cellules ciliées existe une touffe de stéréocils
b. Le kinocil est un cil plus long placé latéralement
c. Lorsque les stéréocils s’inclinent vers le kinocil, la cellule est excitée
d. Lorsque les stéréocils s’inclinent du côté opposé au kinocil, la cellule est inhibée
e. Il existe un tonus de repos qui augmente lorsque les stéréocils se couchent vers
le kinocil et qui diminue quand les stéréocils se couchent en sens inverse du
kinocil

Question 10
Stabilisation du regard au cours des mouvements de la tête :
a. Elle repose sur la genèse d’une rotation oculaire en sens contraire
b. Au-delà de 30°, un nystagmus est généré
c. Le nystagmus comporte des phases rapides de rappel
d. Les nystagmus sont dénommés par le sens de leurs phases lentes
e. Sur un tabouret tournant de 360° en sens horaire sont produits 12 nystagmus
gauches

Question 11
Le mécanisme de push pull ou interaction réciproque :
a. Fait qu’en tournant la tête, un canal est stimulé tandis que son canal coplanaire
est inhibé
b. Pour les canaux semi-circulaires horizontaux, les courants ampullipètes sont
stimulants
c. Pour les canaux semi-circulaires horizontaux, les courants ampullifuges sont
inhibiteurs
d. Pour les canaux semi-circulaires verticaux, les courants ampullifuges sont
stimulants
e. Pour les canaux semi-circulaires verticaux, les courants ampullipètes sont
inhibiteurs
166 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Chapitres 2 à 4 – Vertiges positionnels paroxystiques


bénins

Question 12
Physiopathologie des VPPB (buoyancy theory) :
a. Des otolithes dégénérés sont tombés dans les canaux semi-circulaires et se
déplacent dans l’endolymphe en créant de violents vertiges lors des changements
de position de la tête
b. Cette théorie peut être confirmée par imagerie (scanner ou IRM)
c. Il existe un consensus mondial pour cette théorie confirmé par l’efficacité
immédiate de manœuvres thérapeutiques libératrices
d. Les mouvements déclenchants pour le canal postérieur sont : se lever et se
coucher sur le côté droit ou gauche
e. Les mouvements déclenchants pour le canal horizontal sont : se retourner
dans le lit à la fois du côté droit que du côté gauche

Question 13
Fréquence des VPPB :
a. Canal postérieur dans 90 % des cas
b. Canal horizontal dans 9 % des cas
c. Canal antérieur dans 1 % des cas
d. Les formes du sujet jeune sont souvent d’origine traumatique
e. La fréquence des VPPB augmente avec l’âge

Question 14
Manœuvre de Dix et Hallpike pour déclencher un VPPB du canal postérieur :
a. Le côté atteint est celui vers lequel on a tourné la tête de 45°
b. Le côté atteint est l’opposé de celui vers lequel on a tourné la tête de 45°
c. Pour un VPPB du canal postérieur gauche, on obtient un nystagmus torsionnel
antihoraire et vertical inférieur
d. Pour un VPPB du canal postérieur gauche, on obtient un nystagmus torsionnel
horaire et vertical supérieur
e. Pour un VPPB du canal postérieur droit, on obtient un nystagmus torsionnel
antihoraire et vertical supérieur

Question 15
Manœuvre de Sémont simplifiée pour déclencher un VPPB du canal postérieur :
a. Le côté atteint est celui vers lequel on a tourné la tête de 45°
b. Le côté atteint est l’opposé de celui vers lequel on a tourné la tête de 45°
c. Pour un VPPB du canal postérieur droit, on obtient un nystagmus torsionnel
antihoraire et vertical inférieur
Tester ses connaissances 167

d. Pour un VPPB du canal postérieur gauche, on obtient un nystagmus torsionnel


antihoraire et vertical supérieur
e. Pour un VPPB du canal postérieur gauche, on obtient un nystagmus torsionnel
horaire et vertical supérieur.

Question 16
Manœuvre d’Epley pour traiter un VPPB du canal postérieur droit :
a. Assis, les jambes allongées sur un lit d’examen
b. Puis allongement sur le dos, la tête droite
c. Retournement de 45° vers le côté droit déclenchant vertige et nystagmus
d. Puis retournement de 90° vers le côté gauche : pas de nystagmus
e. Puis continuation du retournement vers la gauche de 90° supplémentaires
déclenchant un nystagmus libératoire

Question 17
Protocole d’examen pour diagnostiquer un VPPB :
a. Commencer par la manœuvre de Dix et Hallpike en plaçant un coussin sous
les reins, ou en le manipulant en bout de table pour obtenir une position tête
pendante
b. C’est un VPPB du canal postérieur s’il apparaît un nystagmus contemporain
possédant une composante verticale supérieure, faire une manœuvre d’Epley
c. C’est un VPPB du canal antérieur s’il apparaît un nystagmus contemporain
possédant une composante verticale inférieure
d. Si l’on déclenche un nystagmus horizontal qui dure autant que cette position,
c’est une cupulolithiase ou un œdème de la cupule : arrêter les manipulations
et prescrire une corticothérapie
e. Sinon faire une manœuvre de Baloh-Lempert

Chapitre 5 – Approche de l’équilibration

Question 18
Première approche – les réflexes :
a. Le réflexe myotatique est la contraction réflexe d’un muscle lors de son propre
étirement pour ajuster son tonus et maintenir une posture
b. Le réflexe myotatique est régulé par les centres facilitateurs (noyaux vestibulaires et
réticulée rostrale)
c. Le réflexe myotatique est réglé par les centres inhibiteurs (cervelet)
d. Si l’on effectue une destruction du cervelet chez un animal (décérébellation), il
apparaît une rigidité des muscles extenseurs
e. C’est un état qui peut être supprimé par une labyrinthectomie bilatérale
168 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Question 19
Réflexes vestibulospinaux :
a. Le faisceau vestibulospinal médian se connecte aux muscles du cou pour
générer des réflexes canalo-coliques
b. Ce faisceau est dans la continuité du faisceau longitudinal médian connectant
le vestibule aux noyaux oculomoteurs
c. Le faisceau vestibulospinal latéral se connecte à tous les muscles du tronc et
des membres pour générer des mouvements en sens inverses de ceux qui les
ont déclenchés
d. Les exercices de Tusa sont un travail de la coordination œil-tête
e. Les exercices de Tusa se font en synergie lorsque le mouvement de la tête com-
mande le mouvement des yeux ou en dissociation lorsque le mouvement des
yeux se fait en sens inverse du mouvement de la tête

Question 20
Deuxième approche – les stratégies :
a. Elles aboutissent à des patrons d’activité musculaire
b. Il y a les stratégies de stabilisation posturale
c. Il y a aussi les stratégies d’anticipation
d. La stratégie de cheville répond à de petites pertes d’équilibre
e. Les stratégies de hanche et du pas en avant répondent à d’importantes pertes
d’équilibre

Question 21
Notion de conflit sensoriel :
a. Chez un patient vertigineux, l’évaluation doit concerner les trois entrées
visuo-proprio-vestibulaires
b. L’idéal est de disposer de la posturographie computérisée
c. Elle commence par mesurer l’équilibre sur une plateforme stable dans un envi-
ronnement visuel normal
d. Puis elle mesure l’équilibre les yeux bandés
e. Enfin, elle mesure l’équilibre en vision et plateforme stabilisées par un méca-
nisme électronique

Question 22
Application à la rééducation vestibulaire :
a. Il y a un système compensateur qui se déclenche à partir du glissement rétinien
de l’image
b. En cas de déficit vestibulaire permanent, plus on a de vertiges et mieux on
compense
c. La rééducation par adaptation repose sur des exercices actifs répétés avec
feedback
Tester ses connaissances 169

d. Les muscles et les articulations sont capables de renseigner le système nerveux


sur les mouvements et les changements de position
e. La rééducation par substitution repose sur le travail de la vision et de la pro-
prioception en visant à reconstruire des stratégies sans le vestibule

Chapitres 6 et 7 – Névrite vestibulaire

Question 23
Évolution :
a. Les premiers jours, l’invalidité est quasi totale chez un patient alité qui ne peut
pas tenir debout, présente des nausées et vomit lors du moindre mouvement
b. La semaine suivante est marquée par une amélioration progressive : il peut
tenir assis et même aller aux toilettes à condition d’être accompagné
c. Les dernières semaines sont marquées par la persistance de vertiges positionnels et
des vertiges lors des mouvements rapides de la tête
d. La rapidité de cette régression n’est pas fonction de l’âge
e. Le mécanisme n’est identifié qu’au bilan effectué au 3e mois

Question 24
Le syndrome vestibulaire aigu associe :
a. Des vertiges permanents avec illusion de rotation
b. Des signes neurovégétatifs avec sueurs, nausées et vomissements
c. Un nystagmus qui est un mouvement oculaire comportant une phase lente
dirigée vers le côté sain et une phase rapide dirigée vers le côté atteint
d. Ce nystagmus est aboli par la fixation du doigt de l’examinateur
e. Ce nystagmus est augmenté quand on l’observe derrière des lunettes de
Frenzel

Question 25
L’épreuve calorique :
a. Consiste à irriguer le conduit auditif externe de chaque côté avec une eau à
44 °C (épreuve chaude) puis avec une eau à 30 °C (épreuve froide)
b. Pendant ces irrigations, la position tête est antéfléchie
c. Normalement, l’épreuve chaude déclenche un nystagmus battant vers l’oreille
irriguée et l’épreuve froide déclenche un nystagmus battant du côté opposé à
l’oreille irriguée
d. On obtient 4 nystagmus enregistrés en totalité sous forme d’un graphique
appelé « cumulée »
e. On peut aussi noter la vitesse ou la fréquence des phases lentes de ces nystag-
mus à l’acmé de leur réponse, sur un diagramme appelé papillon de Freyss
170 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Question 26
Résultats de l’épreuve calorique effectuée au 5e jour dans une névrite vestibulaire
droite :
a. Aréflexie calorique droite
b. Prépondérance directionnelle gauche
c. Nystagmus spontané gauche permanent
d. Du côté droit, la réflectivité se confond avec le nystagmus spontané
e. Avant le 5e jour, le cervelet réduit l’asymétrie vestibulaire et améliore spontané-
ment le confort du patient

Question 27
Causes de déficits unilatéraux brutaux :
a. Infection virale ancienne inconnue sans séroconversion virale récente
b. Infection contemporaine à virus varicelle-zona
c. Maladie de Lyme
d. Fracture du rocher ou labyrinthite infectieuse
e. Traitement destructif pour maladie de Menière

Question 28
Arguments diagnostiques en faveur d’un accident vasculaire cérébral :
a. Diagnostic difficile en cas de petite lésion limitée du tronc cérébral
b. Instabilité les yeux fermés très importante
c. Nystagmus s’inversant en fonction de la direction du regard
d. HIT normal
e. Surdité brusque contemporaine ipsilatérale

Question 29
Prise en charge des névrites vestibulaires :
a. Rencontre urgente avec le kinésithérapeute qui doit expliquer au patient que
plus il a des vertiges, plus vite il guérira
b. Arrêt des antivertigineux et des sédatifs au-delà des premières 48 heures
c. Commencer la réhabilitation le plus tôt possible sans préjuger si l’absence de
séquelles est le résultat d’une récupération spontanée ou de la compensation
d’une lésion vestibulaire irréversible
d. Suivre l’évolution sur le degré du nystagmus spontané et sur le HIT
e. Refaire une épreuve calorique au 3e mois

Question 30
Épreuve post-giratoire normale – principe :
a. Cette épreuve nécessite un fauteuil tournant permettant de bloquer brutalement
la rotation par un système de pédalier
Tester ses connaissances 171

b. Le patient doit avoir le cou fléchi de 30° pour horizontaliser les canaux
semi-circulaires horizontaux
c. Commencer par une mise en rotation uniforme d’un tour par seconde (1 Hz)
d. L’arrêt brusque en sens horaire déclenche normalement un nystagmus gauche
durant de 20 à 35 secondes
e. L’arrêt brusque d’une rotation en sens antihoraire déclenche normalement un
nystagmus droit durant de 20 à 35 secondes

Chapitre 8 – Tiroirs de la rééducation des déficits


vestibulaires unilatéraux brutaux

Question 31
Utilisation des tiroirs :
a. Les exercices y sont classés en fonction de leur principe
b. Dans chaque séance, on en choisit quelques-uns pour s’adapter au patient en
fonction du stade de sa pathologie
c. Au début, le patient est alité et il faut seulement le persuader que plus tôt on
commence la rééducation et meilleurs seront les résultats
d. Commencer par des exercices de coordination œil-tête de Tusa avec cible
exocentrée immobile
e. Poursuivre par les exercices de coordination œil-tête de Tusa en dissociation
œil-tête

Question 32
1er tiroir – travail du « oui – non – peut-être » égocentré :
a. D’abord assis au bord du lit, reparamétrage des mouvements en fixant un stylo
tendu à bout de bras
b. Puis en position debout fixer le stylo, en tournant le tronc, en se baissant et en
se relevant
c. Ensuite, avec deux stylos : les regarder alternativement
d. Ensuite en marchant
e. Terminer avec une lecture tête mobile sauf si le patient porte des lunettes
double foyer

Question 33
2e tiroir – exercices de maintien postural et d’équilibre pour reparamétrer la vision
et la proprioception :
a. Prendre un appui large, les yeux ouverts et contrôler son équilibre pendant 5,
10, et 30 secondes
b. Réduire progressivement la surface d’appui
172 Guide pratique de rééducation vestibulaire

c. Osciller la tête d’abord doucement, les yeux ouverts, puis fermés puis plus
amplement et terminer par du « oui, non, peut-être »
d. Puis passage de la position talon à la position pointe des pieds
e. Il faut être progressif et recommander des moments de repos dans la journée

Question 34
Travail de la marche simple :
a. Prendre appui sur un pied puis sur l’autre les yeux ouverts en chronométrant
b. Idem, les yeux fermés, pieds nus, puis en chaussures
c. Quelques pas dans le couloir en se sécurisant par un appui des mains sur le
mur
d. Puis, avec autorité, yeux ouverts puis fermés
e. Allonger progressivement la distance avec et sans cible visuelle en gardant le
cap

Question 35
Objectifs de la rééducation :
a. Certains patients n’arrivent jamais à marcher en levant les pieds, tout en bou-
geant la tête avec les yeux fermés
b. L’objectif est que le patient sache faire tous les exercices
c. L’objectif est de travailler les exercices difficiles
d. Toujours rester à côté du patient pour le sécuriser
e. Pour les exercices à domicile, interdire ceux avec les yeux fermés

Question 36
3e tiroir – exercices giratoires :
a. Ils sont spécifiques du système vestibulaire
b. Ce sont des stimulations du canal horizontal
c. Les arrêts brusques passifs répétés au fauteuil de Sémont stimulent l’habituation
d. Les rotations actives au tabouret dans la lumière sont un travail d’adaptation
e. La technique du point fixe est utilisée en danse classique

Question 37
4e tiroir – exercices de sensibilisation :
a. Principe : diminuer progressivement les apports proprioceptifs et les apports
visuels
b. Supprimer les informations proprioceptives par des tapis de mousse de 5 cm
d’épaisseur
c. Effectuer des mouvements de tête les yeux fermés
d. Fausser les informations visuelles par des stimulations optocinétiques.
e. Installer le patient sur un plateau instable pour fausser la proprioception
Tester ses connaissances 173

Chapitre 9 – Vestibulopathies bilatérales

Question 38
Caractéristiques de cette pathologie :
a. Les vertiges sont intenses
b. Le déséquilibre est intense
c. Les troubles de la stabilisation du regard sont minimes
d. Le HIT est positif des deux côtés

Question 39
Cause des vestibulopathies bilatérales :
a. Prescription de gentamicine (aminoside)
b. Intoxication par l’oxyde de carbone (CO) ou par des produits industriels
c. Fractures du rocher bilatérales
d. Presbyvestibulie
e. Inconnue dans 50 % des cas

Question 40
Rééducation des vestibulopathies bilatérales :
a. Rééducation par substitution
b. Utilisation de la vision et de la proprioception pour élaborer de nouvelles
stratégies comportementales
c. Travail des anticipations avec préhensions d’objets lourds
d. Travail des covert saccades (acuité visuelle dynamique)
e. Bon pronostic

Réponses
Généralités

Question 1
a

Question 2
a, b
174 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Chapitre 1 – Anatomie et physiologie du système


vestibulaire

Question 3
a, b, e

Question 4
c, d, e

Question 5
a, b, c, d

Question 6
c, d, e

Question 7
a, b, c, d, e

Question 8
a, b, c, e

Question 9
a, b, c, d, e

Question 10
a, b, c, e

Question 11
a, b, c, d, e

Chapitres 2 à 4 – Vertiges positionnels paroxystiques


bénins

Question 12
a, c, d, e

Question 13
a, b, c, d, e
Tester ses connaissances 175

Question 14
a, d, e

Question 15
b, e

Question 16
a, b, c, d, e

Question 17
a, b, c, d, e

Chapitre 5 – Approche de l’équilibration

Question 18
a, b, c, d, e

Question 19
a, b, c, d, e

Question 20
a, b, c, d, e

Question 21
a, b, c, d, e

Question 22
a, b, c, d, e

Chapitres 6 et 7 – Névrite vestibulaire

Question 23
a, b, c, e

Question 24
a, b, d, e

Question 25
a, c, d, e
176 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Question 26
a, b, c, d, e

Question 27
a, b, c, d, e

Question 28
a, b, c, d, e

Question 29
a, b, c, d, e

Question 30
a, b, c, d, e

Chapitre 8 – Tiroirs de la rééducation des déficits


vestibulaires unilatéraux brutaux

Question 31
a, b, c, d, e

Question 32
a, b, c, d, e

Question 33
a, b, c, d, e

Question 34
a, b, c, d, e

Question 35
a, c, d, e

Question 36
a, b, c, d, e

Question 37
a, b, c, d, e
Tester ses connaissances 177

Chapitre 9 – Vestibulopathies bilatérales

Question 38
b, d

Question 39
a, b, c, d, e

Question 40
a, b, c, d

À retenir
Chapitre 10
Déficits vestibulaires partiels
■ Tableau d’un déficit vestibulaire destructif unilatéral sans la grande crise inaugurale
de la névrite vestibulaire ; une cause tumorale doit être recherchée (neurinome de
l’acoustique).
■ Patchwork de microlésions vasculaires ou neurales ampullaires et maculaires
unilatérales ou bilatérales d’origine inconnue, parfois séquelles d’une crise ayant
duré moins de 24 heures.
■ Le bilan ORL instrumental classique est décevant.
■ Le bilan du kinésithérapeute comporte l’inventaire de Norré, soit 19 prises
de position.
■ À partir de ces constatations, un programme personnalisé d’exercices est éta-
bli, que le patient doit répéter chez lui : 5 fois chaque mouvement, 2 fois par jour
(rééducation par habituation).

Chapitre 11
Vertiges itératifs
Caractéristiques de cette pathologie
■ Ce sont des crises de vertige à répétition, intenses avec nausées et vomisse-
ments séparés par des périodes de retour à la normale.
178 Guide pratique de rééducation vestibulaire

■ La maladie de Menière procède d’un processus physiopathologique qui est


l’hydrops endolymphatique (inflation d’endolymphe par défaut de réabsorption
au niveau des voies endolymphatiques).
■ Dans la maladie de Menière, il existe une surdité prédominant sur les fré-
quences graves qui au début précède la crise et régresse avec elle.
■ La maladie de Menière est une maladie chronique qui évolue en deux phases :
la première est celle des crises récurrentes de quelques heures, puis, après plusieurs
années, c’est la phase de Menière vieilli où la surdité devient sévère et permanente.
■ Le handicap dans la maladie de Menière ne résulte pas tant de la durée cumu-
lée des crises au cours de l’année que de la crainte d’avoir une nouvelle crise fai-
sant renoncer au moindre projet.

Traitement de la maladie de Menière


■ Diurétiques en petites cures pour diminuer l’hydrops labyrinthique.
■ Restriction hydrosodée.
■ Rééducation par habituation préconisée par Alain Sémont, consistant en sti-
mulations passives et répétées par arrêts brusques au fauteuil rotatoire.
■ Labyrinthectomie chimique par injection de gentamicine dans la caisse du
tympan sous anesthésie locale.
■ Section du nerf vestibulaire (neurotomie vestibulaire) effectuée par une petite
voie d’abord rétromastoïdienne, respectant les règles de la neurochirurgie.

Chapitre 12
Chutes de la personne âgée – Rôle
du vestibule
Bilan vestibulaire systématique dans les chutes
à répétition des personnes âgées
■ Il met en évidence une anomalie vestibulaire une fois sur trois.
■ La chute est provoquée par une réaction de déséquilibre lors de certains mouve-
ments de la tête quand l’oreille interne fournit une fausse information.
■ Les manœuvres de Dix et Hallpike doivent être systématiques car souvent, ces
patients ne se plaignent pas de vertiges positionnels.
■ Les VPPB des personnes âgées concernent souvent plusieurs canaux (canalith
jam).
■ Les tests vestibulaires à haute vitesse (HIT) sont anormaux alors que les épreuves à
basse vitesse restent normales (épreuves caloriques et giratoires).
Tester ses connaissances 179

Prise en charge vestibulaire de la personne âgée


■ Dans les VPPB multiples, faire les manœuvres thérapeutiques à raison d’un
canal par semaine.
■ Réveiller et reparamétrer les réflexes vestibulo-oculaires par le travail de la coor-
dination œi-tête : exercices de Tusa et cibles égocentrées.
■ Ajouter des mouvements de tête aux conditions de vie habituelle.
■ Ajouter des exercices posturaux en cas de facteur positionnel.
■ Maintenir le sujet à domicile sous le contrôle du kinésithérapeute avec l’aide
de la famille.

Chapitre 13
Bilan vestibulaire du kinésithérapeute
Histoire du vertige
■ Vertige rotatoire avec nausées et vomissements.
■ Instabilité en position érigée.
■ Caractère positionnel et changements de position en cause.
■ Ancienneté du vertige : névrite récente, névrite de plus de 3 mois.
■ Vertige par crises (fréquence, durée), association à des symptômes auditifs
(Menière, neurinome), activités perturbées et métier (handicap).

Calendrier du vertige et antécédents


■ Début brutal, alitant le patient pendant quelques jours puis régression progressive
se terminant par des vertiges positionnels après plusieurs semaines ; c’est probable-
ment une atteinte unilatérale type névrite.
■ Crises de durée variable survenant de façon aléatoire évoquant une patholo-
gie type maladie de Menière (surdité concomitante) ou équivalents migraineux
(migraine après la ménopause, prescription de flunarizine).
■ Vertiges plus moins brefs, plus ou moins intenses mais survenant tous les
jours, souvent positionnels et avec parfois de petites crises d’instabilité : faire une
manœuvre de Dix et Hallpike et une manœuvre de roulis en décubitus, rechercher
des antécédents de traumatisme.
■ Algies cervicales dès le début des vertiges dans le cadre d’un traumatisme cer-
vical ou s’il existe des antécédents vasculaires : penser à une dissection de l’artère
vertébrale.
■ Facteurs aggravants : pathologie ophtalmologique, problèmes orthopédiques,
traitement sédatif.
180 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Description d’un nystagmus spontané vestibulaire


périphérique
■ Mouvement alternatif des deux yeux comportant une phase lente et une
phase rapide de rappel battant en sens inverse.
■ La fixation du doigt de l’examinateur diminue le nystagmus.
■ Sa fréquence augmente derrière des lunettes de Frenzel auto-éclairantes ou en
VNS infrarouge.
■ Son sens est déterminé par la direction de sa phase rapide du point de vue du
patient.
■ Son sens ne change pas sous l’effet du regard latéral droit ou gauche.

Signification des nystagmus


■ Nystagmus spontané horizontal rotatoire unidirectionnel ne changeant pas de
sens avec la direction du regard : c’est une asymétrie labyrinthique non compen-
sée, bonne indication de rééducation.
■ Nystagmus changeant de direction avec le regard : attention, c’est central, un
nouvel avis médical doit être demandé.
■ Nystagmus provoqués par le head shaking : c’est une asymétrie incomplète-
ment compensée.
■ Nystagmus vertical et rotatoire provoqué par la manœuvre de Dix et Hallpike :
c’est le plus souvent un VPPB du canal postérieur ou rarement du canal antérieur.
■ Nystagmus horizontal provoqué par les manœuvres de roulis en décubitus :
c’est peut-être un VPPB du canal horizontal.

Test d’acuité visuelle dynamique


■ Utiliser une échelle de mesure de l’acuité visuelle.
■ Faire lire des lettres au patient, sa tête étant immobile.
■ Puis lui faire relire la première et la dernière lettre de chaque ligne, mais cette
fois en lui imprimant des rotations de la tête dans un sens et dans l’autre.
■ Normalement, le patient ne doit pas avoir une différence de plus deux lignes
entre les deux modes de lecture.
■ Sinon, il y a une asymétrie vestibulaire.

Tests vestibulospinaux
■ Romberg simple : le patient doit rester debout les pieds joints pour évaluer sa
stabilité ; en cas d’asymétrie labyrinthique, le patient tombe du côté déficitaire.
■ Romberg sensibilisé : le patient monte sur un tapis mousse épais.
Tester ses connaissances 181

■ Fukuda : on fait marcher le patient sur place les yeux fermés et les bras tendus :
40 pas en levant bien les genoux ; une déviation n’est significative qu’au-delà de 30°.
■ Marche en étoile de Babinski : on fait marcher le patient les yeux fermés alter-
nativement en avant et en arrière.
■ Test giratoire horaire avec arrêt brusque pour étudier l’oreille gauche : compter
la durée des nystagmus en secondes jusqu’à extinction ; test giratoire antihoraire
pour étudier l’oreille droite.

Chapitre 14
Conduite et surveillance d’une
rééducation vestibulaire
Principes de la rééducation selon quatre processus
■ Processus d’adaptation reposant sur des exercices actifs pour reparamétrer les
structures vestibulaires restantes ou pour recréer de nouveaux circuits.
■ Processus de substitution avec recours à la vision et la proprioception pour
remplacer le vestibule.
■ Processus de sensibilisation pour améliorer la fonction vestibulaire en pertur-
bant la vision et la proprioception.
■ Processus d’habituation pour forcer le vestibule à ne pas répondre, reposant sur des
stimulations passives répétées (Norré, arrêts brusques répétés au fauteuil giratoire).

Déroulement de la rééducation
■ Choisir une méthode progressive car les patients sont fatigables.
■ Forcer la vision et la proprioception.
■ Soulager les contractures et les douleurs cervicales secondaires aux vertiges.
■ Parler, dédramatiser et redonner confiance en soi.
■ Évaluer, féliciter même pour les petits progrès.

Objectifs à fixer
■ Pouvoir stabiliser le regard : lire un texte tout en oscillant la tête.
■ Pouvoir marcher droit devant soi dans la lumière et dans l’obscurité.
■ Pouvoir tourner en rond sans embardée.
■ Pouvoir rechercher des cibles situées derrière soi.
■ Pouvoir faire ses courses dans les grandes surfaces.
182 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Évolution favorable
■ Disparition des sensations vertigineuses et des nausées.
■ Disparition des déviations axiales.
■ Disparition des nystagmus sous lunette de Frenzel.
■ Disparition des déséquilibres aux mouvements brusques de la tête.
■ Reprise du sport et du travail comme avant.

Stagnation des progrès


■ Rechercher un blocage psychologique.
■ Détecter de fausses craintes comme une incohérence entre le discours du
médecin et du kinésithérapeute (ou recherche sur internet mal comprise).
■ Détecter les bénéfices secondaires cachés comme une personne âgée s’étant
rapprochée de ses enfants à l’occasion de sa maladie.
■ Être prêt à remettre le diagnostic en question.
■ Changer la méthode – exemples : introduction de Norré en cas de séquelles
positionnelles d’une névrite, habituation pour un vertige cinétique particulier.

Facteurs pronostiques
■ Précocité de la prise en charge.
■ Âge : meilleure plasticité chez le sujet jeune.
■ Type de lésion : dans le neurinome du VIII, la compensation se fait au fur et à
mesure.
■ Dans la maladie de Menière, la compensation n’a pas le temps de s’installer.
■ Facteurs de mauvais pronostic : polytraumatismes, erreurs médicamenteuses
(sédatifs), lésions associées (oculaires, orthopédiques, centrales et névrotiques).

Chapitre 15
Pièges de la pathologie vestibulaire
centrale
Infarctus latérobulbaire et cérébelleux
■ Syndrome de Wallenberg et infarctus dans le territoire de l’artère cérébelleuse
antéro-inférieure.
■ Vertiges prémonitoires survenant dans les mois précédant un authentique
accident vasculaire.
Tester ses connaissances 183

■ Surdité brusque concomitante très significative.


■ HINTS positif. Devant un grand vertige à début brutal, il faut se méfier si l’un
de ces signes est présent : HIT négatif, nystagmus s’inversant dans le regard latéral,
head shaking test négatif, surdité.
■ Se méfier aussi si le patient est incapable de rester debout dès qu’il ferme les
yeux.

Hématome cérébelleux
■ Concerne les services ORL hospitaliers.
■ Les patients sont hospitalisés par le service des urgences pour névrite vestibulaire.
■ À la contrevisite, l’infirmier signale que le patient a des propos incohérents.
■ Apparition secondaire de troubles de la conscience.
■ Réfuter le diagnostic de névrite vestibulaire et suspecter une pathologie centrale.

Nystagmus de position centrale prenant le masque


d’une cupulolithiase
■ Lorsqu’on couche le patient sur l’oreille droite, on déclenche un nystagmus
horizontal gauche.
■ Puis lorsqu’on le couche sur son oreille gauche, on déclenche un nystagmus
horizontal droit.
■ Pour une cupulolithiase du canal horizontal, il manque le nystagmus de position en
décubitus dorsal tête droite.
■ Les nystagmus positionnels sont trop longs et le vertige associé est minime.
■ Les nystagmus apparaissent sans latence, durent autant que la position et sont
exagérés par la fixation.

Pseudo-maladie de Menière – neurinome de


l’acoustique
■ 5 % des neurinomes de l’acoustique se présentent au début comme une maladie
de Menière.
■ Mais dans ces cas, les crises de vertige aigu correspondent à des hémorragies
intratumorales.
■ Il existe effectivement une surdité de perception unilatérale.
■ Mais elle prédomine sur les fréquences aiguës.
■ Au lieu de prédominer sur les fréquences graves comme dans la maladie de
Menière.
184 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Malformation d’Arnold Chiari – nystagmus vertical


inférieur
■ Accès de déséquilibre apparaissant tardivement chez un adulte.
■ Présence d’un nystagmus vertical inférieur lors de la mise en décubitus dorsal.
■ IRM montrant la présence d’une malformation d’Arnold Chiari de type I avec
engagement des amygdales cérébelleuses sous la ligne de Malgaigne.
■ Syringobulbie, conséquence de la compression médullaire.
CHAPITRE

17
Histoires cliniques

Histoire 1
Un trop beau VPPB
Une patiente de 47 ans a consulté pour une symptomatologie type VPPB depuis
48 heures. Elle se plaignait essentiellement de vertiges rotatoires peu intenses,
durant quelques secondes mais avec de fortes nausées survenant au lever, au
coucher et en se retournant dans son lit. L’examen n’a montré aucun nystagmus
spontané. La manœuvre de Dix et Hallpike gauche a déclenché un violent nys-
tagmus horizontal droit (agéotropique) sans temps de latence et très prolongé :
≥ 2 minutes. Le vertige contemporain était modéré et il a fallu questionner la
patiente pour qu’elle reconnaisse présenter une certaine sensation rotatoire. En
restant en décubitus dorsal, la rotation lente de la tête vers la droite déclenchait
cette fois un nystagmus horizontal gauche (encore agéotropique). Lorsque l’on
tournait à nouveau très lentement la tête de la patiente vers la gauche, le nys-
tagmus horizontal droit agéotropique durant encore plusieurs minutes réappa-
raissait. Il n’y avait aucun signe cérébelleux. L’audiogramme était normal. Dans les
antécédents, on trouvait seulement un épisode d’instabilité de quelques jours avec
céphalées, 10 ans auparavant.
L’électronystagmographie (ENG) (figure 17.1) faite le lendemain a montré un
nystagmus horizontal droit en latéroflexion gauche (LFG) et en décubitus latéral
gauche (DLG) qui ne s’accompagnait que d’un discret vertige. En LFD et en DLD,
le nystagmus horizontal devenait gauche. Il n’y avait aucun nystagmus en relevant
la malade. Le reste de l’ENG était normal, y compris les épreuves caloriques et les
épreuves rotatoires.
En conclusion, cette patiente semblait présenter le tableau d’un VPPB du canal
latéral de type agéotropique. On est resté surpris par son apparition si brutale,
contrastant avec un vertige simultané très faible. Une IRM a donc été demandée,
qui a révélé un petit cavernome situé entre l’hémisphère cérébelleux droit et le
vermis qui avait saigné (figure 17.2). L’épisode vertigineux datant de plus de 10 ans
correspondait vraisemblablement à un premier saignement. La patiente a été opé-
rée en stéréotaxie avec succès. Rappelons que le cervelet est capable d’utiliser des
informations otolithiques pour générer un nystagmus…
Guide pratique de rééducation vestibulaire
© 2023 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
186 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Figure 17.1 Électronystagmographie : nystagmus gauche agéotropique en


décubitus latéral droit (A) et nystagmus droit encore agéotropique en décubitus
latéral gauche (B).
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Figure 17.2 IRM : hémorragie au sein d’un cavernome cérébelleux.


Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Histoires cliniques 187

Histoire 2
Coton-tige et vertiges
L’accident est classique. La salle de bains est étroite. « Il » ou « elle » récure conscien-
cieusement son conduit auditif externe avec un coton-tige. Le conjoint pressé ouvre
la porte brutalement, heurtant le coude du bras qui tient le coton-tige. La douleur est
atroce. La surdité est immédiate et bientôt apparaissent des vertiges. L’oreille saigne.
La surdité est fluctuante avec des bruits hydriques. Les vertiges varient avec la position
du corps et le côté du décubitus. L’otoscopie est quasi impossible du fait de l’otorragie.
C’est une urgence. L’exploration chirurgicale découvre : une plaie du conduit auditif
externe (figure 17.3), une perforation tympanique dans le quart postérosupérieur du
tympan, une luxation et une fracture de la platine de l’étrier avec fuite de périlymphe.
Parfois un simple colmatage suffit à empêcher l’évolution vers la perte totale de l’audi-
tion et une stapédectomie avec obturation de la fenêtre ovale par une greffe d’aponé-
vrose temporale permet d’enrayer cette évolution.
Mieux vaut éviter les cotons-tiges.

Histoire 3
Névrite vestibulaire ou infarctus cérébelleux ?
Les services d’urgences sont concernés par ces patients qu’on leur amène allongés sur
un brancard, incapables de se lever, un haricot placé à côté d’eux pour parer aux vomis-
sements. Dans les premières heures, il faut distinguer une névrite vestibulaire d’un acci-
dent vasculaire cérébelleux ou du tronc cérébral et répondre à ces trois questions :
1. Y a-t-il un nystagmus horizontal rotatoire ?
2. Y a-t-il des signes neurologiques ?
3. Y a-t-il un syndrome vestibulaire déficitaire unilatéral ?

Figure 17.3 Plaie du conduit auditif externe gauche par coton-tige ayant retroussé
la peau jusqu’au tympan.
Source : Sauvage JP. Guide d’ORL – Clinique et thérapeutique. © 2016 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
188 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Après avoir répondu à ces trois questions, on peut choisir d’envoyer ou non le
patient à l’imagerie pour une IRM de diffusion.
■ Le nystagmus spontané doit être recherché en faisant regarder au plafond pour
supprimer la fixation.
■ L’examen neurologique complet est excessif. En l’occurrence, il faut surtout
demander s’il y a une dysphonie ou une dysphagie et rechercher des signes céré-
belleux ou une atteinte des nerfs crâniens.
■ En revanche, un déficit vestibulaire unilatéral peut être recherché à mains nues :
1. faire fixer au patient le nez du praticien au cours de petites rotations
rapides de la tête et noter, dans la direction opposée au nystagmus spon-
tané, l’existence de petites secousses de rattrapage (test impulsionnel
céphalique angulaire – HIT) ;
2. imprimer une dizaine de rotations rapides la tête dans les deux sens (head
shaking test) et noter s’il y a une amplification du nystagmus spontané ;
3. appliquer des vibrations osseuses sur les mastoïdes (test vibratoire osseux)
et constater une amplification du nystagmus spontané.
Si tout concorde : par exemple un nystagmus spontané gauche, amplifié par le head
shaking test et le test vibratoire et d’autre part des secousses de rattrapage dans la
rotation gauche au test impulsionnel : il n’y a plus qu’à hospitaliser ce patient en
ORL en demandant que l’on convoque le kinésithérapeute aussi vite que possible.
S’il n’a pas été observé de nystagmus spontané horizontal rotatoire unidirection-
nel, si les trois tests précédents sont négatifs et si le patient est complètement désé-
quilibré, alors c’est un bon candidat pour l’imagerie.
Bien sûr, il y a quelques pièges, sinon, la médecine ne serait pas un art.

Histoire 4
Détour par l’ORL
Une patiente de 36 ans, adressée aux urgences pour vertiges, a été hospitalisée
en ORL sur la foi d’un scanner normal. Elle avait présenté, une semaine aupara-
vant, un premier épisode de vertige ayant duré quelques minutes suivi d’un malaise
d’une heure avec nausées, douleurs latérocervicales droites et parésies dans la main
droite. Dans la semaine précédente, il y a eu trois épisodes semblables. Depuis
48 heures, elle était instable avec algies cervicales droites croissantes. L’otoscopie
était normale et il n’y avait ni nystagmus spontané, ni nystagmus positionnel. Le
head shaking ne provoquait aucun nystagmus. Toutefois, l’interne qui l’a examinée
a été frappé par l’importance de l’instabilité posturale car la patiente tombait dès
que l’on tentait de la faire lever avec élargissement du polygone de sustentation
et latéropulsion droite. Il a fait appel à un neurologue complaisant qui a été alerté
par l’importance de l’instabilité et des douleurs cervicales. Une IRM a été réalisée
en urgence. En séquence Flair (fluid attenuation inversion recovery) a été repérée
une minuscule zone sur la partie latérale du plancher du IVe ventricule témoi-
gnant d’un infarcissement datant probablement de plusieurs jours (figure 17.4).
Une séquence de diffusion a éclairé cette zone témoignant d’un œdème persistant.
Histoires cliniques 189

Figure 17.4 Dissection de l’artère vertébrale droite.


Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Dans la foulée, une angio-IRM a montré le rétrécissement progressif de l’artère ver-


tébrale droite « en flamme de bougie » avec disparition des derniers centimètres
de l’artère vertébrale.
C’était donc un petit accident ischémique latérobulbaire droit semi-récent sur
dissection de l’artère vertébrale droite. L’atteinte n’incluait que les noyaux vesti-
bulaires inférieurs, le noyau du IX et léchait les pédoncules cérébelleux. Transférée
en neurologie, la patiente a été traitée par anticoagulants de façon curative dès le
premier soir. Trois jours après, l’angioscanner montrait une artère vertébrale droite
à nouveau perméable. La semaine suivante, cette patiente est sortie sous anticoa-
gulants, les troubles de l’équilibre avaient régressé. Un arrêt de travail de 15 jours
a été prescrit.

Histoire 5
Se méfier d’un nystagmus vertical inférieur pur à la manœuvre de Dix et
Hallpike
Les vertiges positionnels paroxystiques bénins du canal semi-circulaire antérieur
sont rares. Le diagnostic repose sur la découverte à la manœuvre de Dix et Hallpike
d’un nystagmus dont la composante rapide est verticale inférieure et torsionnelle
[1]. Une difficulté est que le canal antérieur gauche est interrogé en faisant une
manœuvre de Dix et Hallpike à la recherche d’une canalolithiase du canal posté-
rieur droit. En cas de canalolithiase du canal antérieur gauche, la réponse serait
alors un nystagmus dont la composante rapide est verticale inférieure mais aussi
horaire (du point de vue de l’observateur) au lieu d’être antihoraire comme si
c’était une réponse du canal postérieur droit.
190 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Trijolet et al. ont rapporté le cas d’une jeune patiente de 30 ans, qui présentait un vertige
positionnel paroxystique (c’est-à-dire survenant par crises) depuis plus d’un an [2]. Des
manœuvres dites « libératoires » avaient été effectuées sans succès. La manœuvre de Dix et
Hallpike droite mettait en évidence un nystagmus provoqué vertical inférieur pur survenant
sans latence et prolongé. Il n’y avait pas d’inversion au retour à la position assise. L’audition et
les épreuves caloriques étaient normales. Un nystagmus vertical inférieur pur étant insuffi-
sant pour affirmer la présence d’une canalolithiase du canal antérieur, une origine centrale a
été suspectée et une IRM avec injection demandée. Elle a révélé une masse kystique compri-
mant le IVe ventricule. Après exérèse neurochirurgicale, l’anatomopathologie a conclu qu’il
s’agissait d’un kyste dermoïde du IVe ventricule. En postopératoire, tous les vertiges ont dis-
paru. Les auteurs insistent sur le fait qu’il faut se méfier en cas de nystagmus provoqué ver-
tical inférieur pur, souvent central, surtout lorsque le nystagmus ne présente pas de latence,
qu’il est inépuisable ou prolongé au-delà d’une minute, qu’il ne s’inverse par au retour en
position assise et que le vertige l’accompagnant est faible.

Histoire 6
À chacun ses nystagmus
Tous les nystagmus ne sont pas vestibulaires : il faut en laisser aux ophtalmologues.
Habituellement, on ne peut pas se tromper car le nystagmus congénital essentiel
donne un nystagmus horizontal pendulaire dans toutes les directions du regard, y
compris dans le regard vers le haut ou le bas. Mais il peut être aussi à ressort et le
patient peut ignorer son état.
■ Premier piège : un déficit visuel perceptif peut induire un nystagmus. Une
consultation ophtalmologique est indispensable si le patient n’est pas déjà suivi.
■ Deuxième piège : certains nystagmus congénitaux peuvent rester longtemps
méconnus parce qu’une adaptation se développe au cours de la maturation
visuelle. Le cerveau stabilise l’image en déclenchant de petites saccades rame-
nant sans cesse l’image fixée sur la fovéa et en prélevant des instantanés dès
qu’elle se projette dessus. Une désadaptation soudaine peut alors survenir à
l’occasion d’un traumatisme crânien, d’un traitement sédatif ou d’un épisode
fébrile et c’est peut-être à cette occasion qu’on l’observera.
■ Troisième piège : certains nystagmus congénitaux n’apparaissent qu’en fixation
monoculaire (comme au cours d’une VNG). C’est un nystagmus à ressort dit
« latent » qui bat dans la direction de l’œil fixateur. Il peut être méconnu jusqu’à ce
que soit pratiqué un examen ophtalmologique évaluant chaque œil séparément.
On reconnaît le caractère congénital à quelques traits :
■ l’absence d’oscillopsies malgré l’importante amplitude du nystagmus (les nys-
tagmus pendulaires acquis sont très mal supportés) ;
■ la persistance du sens horizontal du nystagmus dans le regard vers le haut (un
nystagmus vertical imposerait la pratique d’une imagerie) ;
■ l’augmentation de la fréquence du nystagmus lors de la fixation au loin ;
■ l’association à des oscillations de la tête ou à un léger torticolis présent depuis
l’enfance…
Bonne chance !
Histoires cliniques 191

Histoire 7
Relations entre vertige et migraine
La migraine pourrait être la deuxième cause de vertige après les VPPB. Même si cette
opinion n’est pas partagée par tous les auteurs, la conviction qu’il y a une relation forte
entre migraine et vertige se renforce progressivement. La notion de « vertige migrai-
neux » ou « vestibulopathie migraineuse » ou encore « migraine vestibulaire » repose
sur le concept que la « marche migraineuse » pourrait se développer vers le tronc céré-
bral au lieu de se faire d’arrière en avant, c’est-à-dire du cortex visuel au cortex sensi-
tif puis phasique. Il existe quatre tableaux cliniques dont seuls les deux premiers sont
reconnus par l’International headache society.
1. La crise vertigineuse appartient à l’aura d’une migraine basilaire.
2. Le vertige paroxystique bénin de l’enfant est un équivalent migraineux au même
titre que certaines douleurs abdominales.
3. Le vertige migraineux proprement dit est constitué de vertiges rotatoires épiso-
diques, de vertiges positionnels et d’accès de pseudo-ébriété qui sont différents
des auras migraineuses. Le diagnostic repose sur la coexistence d’au moins une
crise de vertiges avec des symptômes migraineux typiques survenant sur un ter-
rain migraineux personnel et familial. L’idéal est d’enregistrer des nystagmus de
type central au cours de la crise. Il convient surtout d’éliminer une autre cause
par l’examen neurologique et le bilan ORL.
4. Enfin, certains états migraineux sont susceptibles de retentir directement sur
l’oreille interne et d’induire un VPPB classique ou de mimer les stades précoces
de la maladie de Menière avec ses symptômes auditifs, sa plénitude de l’oreille,
ses acouphènes et son hypoacousie fluctuante sur les fréquences graves.
Malheureusement, il n’existe pas de test objectif permettant de prouver la respon-
sabilité de la migraine. Seule l’efficacité des traitements antimigraineux agissant en
même temps sur les vertiges peut emporter la conviction.

Histoire 8
VPPB et VTT
Dans tous les pays montagneux, s’est développé un sport où des VTTistes témé-
raires dégringolent les sentiers de montagne à toute allure et sautent de rocher
en rocher dans de spectaculaires compétitions. Un article décrit le cas de 4 sujets
qui se sont présentés dans le service ORL de Berne avec une symptomatologie de
VPPB apparue quelques heures après une telle course en montagne mais pas plus
éprouvante que d’habitude et en tout cas sans chute ni traumatisme crânien [3]. Il
s’agissait de vertiges déclenchés par le fait de lever la tête, de se coucher ou de se
retourner dans le lit. L’un d’entre eux ne pouvait dormir que la tête surélevée par
3 ou 4 oreillers. Ils présentaient tous une manœuvre de Dix et Hallpike positive
d’un côté avec nystagmus torsionnel associé à un nystagmus horizontal géotro-
pique caractéristique de l’association d’un VPPB du canal postérieur et d’un VPPB
du canal horizontal ipsilatéral. Pour l’un de ces patients, les vertiges étaient apparus
plusieurs fois dans les mêmes conditions. Deux d’entre eux ont été traités par des
manœuvres de Sémont. Les deux autres ont guéri spontanément.
192 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Les traumatismes crâniens sont une cause classique de VPPB [4], souvent multica-
nalaire. Qu’en est-il des vibrations, des chocs et des traumatismes cervicaux subis
par ces audacieux sportifs du fait de l’inertie céphalique ? L’étude sur des modèles
mécaniques avec des marqueurs montre que dans un saut d’environ 38 cm, la roue,
au moment de l’impact, est soumise à une décélération de 4 g. La tête et les épaules
ne sont soumises qu’à une décélération de 2 g du fait des amortisseurs du VTT.
Les accélérations-décélérations auxquelles sont soumis les organes otolithiques
sont équivalentes à de multiples « coups du lapin ». Il y a donc lieu de penser que
les otolithes finissent par être arrachés des macules pour constituer des canaloli-
thiases multiples.

Histoire 9
Vertiges de l’été
L’été, il n’y a pas que le vertige de l’amour. L’oreille interne, elle aussi, part en
vacances. Dans les bagages de l’estivant, il y a parfois déjà une oreille malade et
donc un vertige en puissance. Ailleurs, ce sont les mauvaises rencontres qu’il faut
craindre : virus et bactéries. Le choix des loisirs implique aussi de choisir son vertige.
L’accident classique est celui des patients ayant une otite chronique. Une poussée
de labyrinthite peut survenir à l’occasion d’une baignade. C’est souvent la circons-
tance de découverte d’une otite chronique cholestéatomateuse. Tout autre est le
vertige du baigneur en eau froide lorsqu’un tympan est percé d’un côté, réalisant
une véritable épreuve calorique.
Il y a encore les vertiges épidémiques dont la preuve de l’origine virale n’est pas tou-
jours facile à établir. Bien que ces épidémies soient plus fréquentes au printemps et à
l’automne, il est parfaitement possible de les rencontrer en plein été. On peut en rap-
procher la maladie de Lyme, les rickettsioses et le typhus des promiscuités estivales.
La plongée sous-marine est certainement le sport où l’oreille est la plus menacée,
tant dans sa partie moyenne qu’interne : otite barotraumatique, coup de piston
de l’étrier, forçage cérébrospinal responsables de fuites périlymphatiques et, à la
remontée : vertige alternobarique ou accident de décompression.
N’oublions pas non plus que dans le coup de chaleur, le vertige associé aux cépha-
lées est le principal signe d’alarme de l’hyperpyrexie dangereuse.
Enfin, le retour ne va pas sans quelques troubles de l’équilibre. Dans le mal
de débarquement, après une longue croisière, dès qu’elle est à terre, l’oreille
interne se croit encore en bateau. La reprise de travail ne va pas non plus sans
les vertiges de l’angoisse et de la dépression réactionnelle à l’idée de retrouver
son supérieur, ses collègues et/ou ses clients.

Histoire 10
Agoraphobie n’est pas folie
En présence d’une personnalité névrotique, la tentation est d’évoquer un vertige
psychogénique. Certains sujets sont agoraphobiques parce qu’ils se sentent ébrieux
dans certaines circonstances visuelles, par exemple : traversées de grands espaces,
Histoires cliniques 193

lumières scintillantes des supermarchés, certains ciels nuageux, arbres couchés par
le vent, circulation sur une route plantées d’arbres et ensoleillée. Il s’agit soit de
perte de repères, soit de stimulations optocinétiques intenses interprétées comme
un mouvement de soi.
Tous ces patients ne sont pas des malades psychiatriques.
On peut d’abord considérer qu’il s’agit de conflits sensoriels entre les appareils
vestibulaires et visuels par sursimulations visuelles entraînant des nausées compa-
rables au mal de mer. Dans le terrain migraineux, il existe ainsi des hypersensibili-
tés expliquant la photophobie, la phonophobie et le mal des transports dont ces
sujets sont classiquement atteints.
D’autres patients présentent une authentique lésion vestibulaire bien compen-
sée. Mais cette compensation se fait par des substitutions visuelles. Ils sont donc
beaucoup plus sensibles aux anomalies qu’apportent ces stimuli. Il y a dépendance
visuelle.
On a décrit le syndrome de désorientation de l’automobiliste. Les personnes concer-
nées racontent que, surtout sur autoroute, elles ont l’impression que leur auto
s’incline, change de trajectoire et n’obéit plus aux commandes. L’épisode se déroule
souvent au sommet d’une côte ou à l’occasion d’un dépassement alors qu’elles
n’avaient plus de repères visuels. Il peut aussi s’agir de la négociation d’une courbe
ou de la rotation autour d’un rond-point alors que la force centrifuge agissait sur
les otolithes. Là encore, on peut se trouver devant une authentique lésion vestibu-
laire plus ou moins bien compensée. C’est qu’en effet, la posture non physiologique
de la conduite automobile exacerbe les anomalies d’une asymétrie vestibulaire du
fait d’une déprivation sensorielle liée à l’absence de sensations proprioceptives
(coussins mous, voire agités de vibrations).
En revanche, s’il n’y a aucun antécédent vestibulaire et peu de sensations d’incli-
naison et de déviation, il faut rechercher des arguments en faveur d’une crise de
panique : paresthésies périorales et sensation d’oppression thoracique.

Histoire 11
Plaidoyer pour le vertige cinétique
Le vertige cinétique serait un vertige ressenti au cours du mouvement. Pour les
puristes, ce n’est pas un vertige car il n’y a pas d’illusion de mouvement. On reste
donc dans le domaine de l’oscillopsie. Pourtant, ce sont des manifestations orphe-
lines fréquentes d’un dysfonctionnement caché du réflexe vestibulo-oculaire. Aux
antipodes du grand vertige rotatoire spontané, ce sont des symptômes du stade
compensé : brefs flous visuels, brusques impressions de décrochage du regard
interprétées par le patient comme de soudaines pertes d’équilibre. Leur survenue
en traversant une rue et en tournant vivement la tête à gauche et à droite pour
vérifier que la voie est libre est une circonstance évocatrice.
Le schéma universitaire serait une illusion de scène visuelle qui bouge en marchant.
Mais combien de patients entrent dans ce tableau convenu ? Même si dans la plu-
part des cas, l’examen clinique ou instrumental objective un déficit vestibulaire
194 Guide pratique de rééducation vestibulaire

unilatéral sévère, les oscillopsies restent à l’état abortif. C’est que le patient utilise
une stratégie d’évitement, ou une stratégie de substitution par des saccades d’anti-
cipation ou par son système de poursuite oculaire. Ainsi, sa plainte reste faible en
dépit d’un déficit vestibulaire majeur. L’épreuve calorique peut rester muette car
ne testant que le canal latéral. C’est dans cette circonstance que le test d’acuité visuelle
dynamique prend tout son intérêt en révélant une symptomatologie visuelle latente
(cf. diapositives 9-5 et 9-7).
Ainsi, gardons les oscillopsies pour ce qu’elles sont et vive le vertige cinétique qui
survient lors du mouvement, aux côtés de ses complices : le vertige de positionne-
ment qui apparaît transitoirement après le mouvement et le vertige de position
qui dure tant que la position est maintenue. Restent le vertige des hauteurs et le
vertige de l’amour, mais ceci est une autre histoire.

Histoire 12
Vertiges et cancer
Les cancers ORL ont une extension locorégionale qui peut suivre les voies ner-
veuses en empruntant les canaux et les trous des nerfs crâniens. C’est surtout vrai
pour les cylindromes et les adénocarcinomes.
Une patiente âgée de 64 ans s’est présentée avec une paralysie faciale gauche
incomplète d’apparition progressive. L’examen ORL a retrouvé la cause en palpant
un nodule ferme, infiltrant la peau, situé dans la parotide juste à l’émergence du nerf
facial au niveau du trou stylomastoïdien gauche. C’était un adénocarcinome qui
a nécessité une parotidectomie totale avec sacrifice du nerf facial et un curage
ganglionnaire qui s’est avéré positif. Une radiothérapie a complété la chirurgie.
La réhabilitation de la paralysie faciale a occupé tous les mois suivants. Après
plus d’un an, la patiente s’est plainte d’une baisse d’audition du côté gauche
avec vertiges. Un scanner de l’os temporal gauche a été considéré comme nor-
mal. Ces troubles ont été mis sur le compte de l’irradiation de l’oreille interne.
Mais, 5 mois après, la surdité gauche est devenue totale. La radiothérapie a encore été
incriminée. Puis, presque 3 ans après la chirurgie initiale, une instabilité chronique inva-
lidante s’est installée. Les épreuves caloriques ont montré une aréflexie gauche avec un
discret nystagmus spontané horizontal gauche prenant une forte composante verticale
supérieure dans la position de Rose, en rétroflexion et en se relevant. L’IRM a montré
que le conduit auditif interne était rempli par une masse qui débordait dans la fosse
postérieure (figure 17.5). Une exploration du conduit auditif interne a été réali-
sée par voie translabyrinthique et la biopsie a confirmé qu’il s’agissait bien de
l’adénocarcinome initial.
En reprenant le scanner de l’année précédente, on s’est aperçu qu’on n’avait pas
noté l’élargissement de la première portion de l’aqueduc de Fallope gauche. Le can-
cer avait donc remonté le nerf facial, puis occupé tout le conduit auditif interne et
détruit le paquet acoustique. Enfin, il avait atteint la fosse postérieure en donnant
des signes vestibulaires centraux. La patiente est décédée au cours de la 5e année
postopératoire.
Histoires cliniques 195

A B
Figure 17.5 Scanner : envahissement du conduit auditif interne, coupes axiale (A)
et coronale (B).

Histoire 13
L’interne avait-elle eu la berlue ?
Une patiente de 75 ans aux antécédents d’hypertension artérielle et de rectocolite
hémorragique récemment en poussée a brutalement présenté un vertige rotatoire
intense avec instabilité. Dans la nuit, les vertiges se sont aggravés avec vomisse-
ments et diarrhée. Adressée aux urgences, elle était incapable de tenir debout.
L’examen neurologique était normal. L’interne d’ORL a observé sous lunette de
Frenzel un nystagmus horizontal rotatoire gauche dans le décubitus latéral droit.
Les index déviaient à droite. La patiente a logiquement été hospitalisée avec le dia-
gnostic de névrite vestibulaire droite.
La surprise a été qu’au matin, les épreuves caloriques n’ont montré qu’un léger
déficit calorique droit de 15 % (figure 17.6) et qu’en VNG, on a eu la surprise d’enre-
gistrer un nystagmus horizontal spontané droit de degré II dans l’obscurité au lieu
et place du nystagmus gauche observé la nuit précédente (figure 17.7). Ce nystag-
mus horizontal droit était encore retrouvé dans l’antéflexion de la tête et dans la
latéroflexion gauche où il devenait aussi vertical inférieur (figure 17.8). Enfin, les
stimulations vibratoires mastoïdiennes déclenchaient aussi des deux côtés un nys-
tagmus horizontal droit. Tout se passait donc comme si en position assise, on était
en présence d’un déficit vestibulaire gauche.
■ Alors, l’interne avait-elle eu la berlue ? Et bien non ! En effet, en décubitus
dorsal, latéral droit et lors du redressement, le nystagmus devenait vertical
supérieur avec une composante horizontale gauche très nette (figure 17.9).
Tout se passait donc comme si en décubitus dorsal, on était en présence
d’un déficit vestibulaire droit.
■ Tout a régressé en 5 à 6 jours.
■ Quelques jours après, l’IRM a montré une ectasie anévrismale de la terminaison du
tronc basilaire estimée à 5,6 mm (figure 17.10). En cas d’antécédents de rectocolite
hémorragique et plus généralement dans les pathologies inflammatoires intesti-
nales, on sait que les accidents vasculaires cérébraux et les vascularites sont plus
fréquents [5].
196 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Réflectivité: 80.5°/s (à gauche)


Prép. absolue: 1.7°/s (gauche)
Prép. relative: 9% (gauche)
Déficit: 15% (droite)

Vitesses lentes

204 s

Figure 17.6 Épreuves caloriques.

Figure 17.7 Nystagmus spontané droit dans l’obscurité et le regard médian (dans
le cadre vert, on trouve les autres positions du regard le patient étant assis).
Histoires cliniques 197

Figure 17.8 Nystagmus droit en latéroflexion gauche (dans le cadre, on trouve les
autres positions de la tête le patient étant assis).

Figure 17.9 Nystagmus gauche et vertical supérieur en décubitus dorsal (dans le


cadre, on trouve les autres positions le patient étant en décubitus).

En conclusion, cette patiente a présenté une vascularite du tronc basilaire avec isché-
mie hémodynamique bilatérale et partielle dans le territoire des deux artères labyrin-
thiques. En position érigée, le déficit hémodynamique portait sur le vestibule gauche,
surtout sur le canal horizontal et le canal antérieur. En décubitus dorsal, le déficit hémo-
dynamique portait sur le côté droit avec en plus une ischémie sur l’artère vestibulaire
postérieure avec atteinte du canal postérieur gauche s’exprimant par des nystagmus
verticaux supérieurs. Malheureusement, on ne dispose pas en VNG des composantes
torsionnelles, ce qui nous aurait aidés à préciser à chaque fois les côtés atteints.
198 Guide pratique de rééducation vestibulaire

A B

Figure 17.10 IRM : ectasie anévrismale de la terminaison du tronc basilaire


estimée à 5,6 mm (flèches).

Depuis un an, la patiente a cumulé les poussées de rectocolite. Elle a encore pré-
senté deux épisodes d’instabilité de plusieurs jours. Puis, malgré le traitement anti-
coagulant, est apparue une instabilité systématique lorsqu’elle se levait trop bruta-
lement. L’histoire n’est certainement pas finie.

Histoire 14
Mélange implosant
Un patient âgé de 62 ans nous a été adressé pour grands vertiges aigus rotatoires
survenant depuis 2 ans. Chaque crise l’obligeait à arrêter son activité, voire à se cou-
cher en attendant que tout disparaisse. Dans le courrier du médecin traitant, on a
appris que l’examen cardiaque était normal ainsi que le doppler. L’IRM ne montrait
pas de processus expansif de la fosse postérieure. Son seul antécédent était une
hypertension artérielle traitée par Célectol® (céliprolol) et Zanidip® (lercanidipine).
Ce patient avait déjà consulté un ORL : l’audiogramme et la VNG avec épreuves
caloriques et giratoires étaient normaux.
L’interrogatoire a révélé que l’épisode de vertige rotatoire initial était survenu au
cours d’un déjeuner « arrosé ». Il s’était effondré en se levant pour aller chercher un
plat. Tous les vertiges survenus depuis étaient brefs, ne duraient que 1 à 2 secondes
mais étaient systématiquement suivis de syncope. Le patient se réveillait dès qu’il
atteignait la position allongée. Ces épisodes survenaient aussi en sortant de sa voi-
ture, en tordant le cou pour faire un créneau, en se relevant brutalement après
avoir travaillé à genoux dans son jardin.
En VNS, il n’y avait qu’un discret nystagmus vertical inférieur sans vertige dans les
positions en décubitus. Couché, la pression artérielle était à 130/80 mmHg et le
pouls à 75 aux bras droit et gauche. Immédiatement après le lever, la pression arté-
rielle s’élevait à 150/90 mmHg et le pouls à 80 au bras droit et 160/90 mmHg avec
un pouls à 83 au bras gauche. Après 10 minutes de station debout, la pression arté-
rielle retombait à 130/80 mmHg. Le patient à qui on a alors demandé s’il se sentait
Histoires cliniques 199

bien nous a répondu qu’il ne risquait rien car il était 17 h et que tous les vertiges
avec malaises survenaient le matin.
L’examen de l’ordonnance de son médecin a révélé qu’il prenait trois médicaments
le matin :
1. de la tamsulosine LP (Omix®), indiquée pour les symptômes fonctionnels de
l’hypertrophie prostatique : un comprimé à la fin du petit-déjeuner. L’effet
indésirable majeur de ce médicament est l’hypotension orthostatique pouvant
conduire à des syncopes ;
2. de plus, cet effet était potentialisé par un antihypertenseur antagoniste du calcium :
la lercanidipine (Zanidip®) qui s’administre aussi au petit-déjeuner ;
3. enfin, l’effet hypotenseur de la lercanidipine était potentialisé par l’association
d’un bêtabloquant : le céliprolol (Célectol®) qui s’administre de préférence avant
le petit-déjeuner.
Ainsi, ces trois comprimés pris le matin avant 9 h potentialisaient leurs effets hypo-
tenseurs jusqu’en début d’après-midi, surtout en cas de vasodilatation abdominale
qui peut survenir au cours d’un déjeuner alcoolisé. On était donc probablement
en présence d’une hypotension orthostatique iatrogénique avec bourdonnement
d’oreille prémonitoire, vision floue, douleurs dans la nuque et le dos (coat hanger
pain) et… vertige !
On a décidé qu’il prendrait la tamsulosine LP (Omix®) le soir. Après 2 mois, les ver-
tiges et les syncopes ne se sont plus reproduits. La présence du nystagmus vertical
inférieur positionnel était plus inquiétante car elle pourrait suggérer une patholo-
gie centrale encore infraclinique du type atrophie multiple systémique fragilisant
déjà le système autonomique.

Histoire 15
Le nystagmus à l’heure de la vidéo
La VNS a changé notre façon de voir les nystagmus car sur l’écran, l’image reste
orientée de la même façon que le patient soit assis, couché ou la tête en bas. Des
expressions telles que géotropique ou antigéotropique ne vont donc plus de soi.
Pour les nystagmus rectilignes, ce n’est pas grave. Les nystagmus verticaux restent
orientés vers le haut et le bas du patient. Pour les nystagmus horizontaux, c’est
un peu plus difficile, il faut les regarder comme on regarde une radiographie pul-
monaire : un nystagmus gauche pour le malade, c’est un nystagmus droit pour
l’observateur et inversement. Mais pour le nystagmus rotatoire (ou mieux, torsion-
nel) : ça se complique. Dans le VPPB, le bon vieux nystagmus géotropique roulant
vers le bas perd de son sens. Où est donc le bas ? Certes, on pourrait revenir à
l’ancienne dénomination « nystagmus rotatoire droit ou gauche » en ne considé-
rant que la direction du pôle supérieur de l’œil. Mais quand on souhaite voir le
sens du nystagmus provoqué au cours d’une manœuvre de Dix et Hallpike chez
un malade qui crie, cligne ou ferme les yeux, c’est dans un éclair qu’il faut voir une
petite portion de l’œil qui n’est pas forcément le pôle supérieur. Alors, pourquoi
200 Guide pratique de rééducation vestibulaire

refuser les termes d’horaire et d’antihoraire ? Nous avons appris à lire l’heure depuis
l’enfance et c’est instinctif. Il suffit de retenir que les nystagmus antihoraires ne
peuvent être produits que par des canaux verticaux droits et que les nystagmus
horaires ne peuvent être produits que par des canaux verticaux gauches (phases
rapides, bien sûr). Cependant, il reste quelques esprits physiologistes chagrins qui
voudraient que le sens horaire ou antihoraire soit défini par rapport au patient et
non par rapport à l’observateur. Mais, chers collègues, comment lisez-vous l’heure
à votre bracelet-montre ? Dessus ou par en dessous du poignet ? Ne compliquons
donc pas tout, c’est déjà assez difficile !

Histoire 16
Rééducation à mains nues
Peut-on réellement penser que tous les kinésithérapeutes de France vont s’équiper
de matériels de rééducation vestibulaire à 15 000 € pièce ? Peut-on réellement penser
que seuls une vingtaine de centres en France seraient habilités à prendre les vertiges en
charge ? Ces appareils et ces investissements sont nécessaires pour comprendre ce que
l’on fait, pour mesurer notre action, pour apprendre à poser des indications. Et finale-
ment mettre au point des protocoles rationnels utilisables partout en France à la ville
comme à la campagne. Mais pour cela, il faut travailler ensemble. Il est quand même
dommage que dans le pays où a été découverte la manœuvre de Sémont, aucune étude
clinique multicentrique recevable avec groupe contrôle et évaluation des résultats en
aveugle n’ait jamais été faite pour en démontrer l’efficacité. Pour cela, il a fallu encore
compter sur les Américains et seulement pour la manœuvre d’Epley. Mais d’autres
chantiers devraient s’ouvrir. En collaboration avec les gériatres, les ORL ont un rôle
essentiel à jouer dans les vertiges, troubles de l’équilibre et chutes des personnes âgées.
Trop souvent oubliée, l’oreille interne a sa place dans le mouvement et le schéma cor-
porel. Là plus qu’ailleurs, des protocoles simples sont à tester. Mais il faut « mettre les
mains dans le cambouis », prendre les patients à bras-le-corps pour leur faire retrouver
un statut vestibulaire correct.
Sous contrôle du kinésithérapeute, les exercices sont à répéter à la maison avec
l’aide la famille : travail de l’équilibre et coordination œil-tête. Tout est objet
d’études cliniques multicentriques. Le kinésithérapeute possède un bilan qui lui est
propre et différent du bilan médical. C’est l’aptitude à mobiliser les corps avec le
petit doigt. C’est enfin une prise en main mentale du patient. Même les protocoles
de motivation sont à perfectionner et à travailler comme on travaille la publicité à
la télévision. Des résultats spectaculaires et inespérés seront obtenus à condition
que le kinésithérapeute soit présent, s’occupe physiquement de ces patients âgés
sans se contenter de les laisser seuls à attendre devant une machine.

Histoire 17
Vertige cataménial
Une patiente âgée de 38 ans a présenté depuis 3 mois, à 3 reprises, une période de
vertiges d’une dizaine de jours comportant des accès de pseudo-ébriété. Chaque
Histoires cliniques 201

période débutait 48 heures avant les règles. D’abord, apparaissaient des céphalées
frontales bilatérales, puis survenaient une crise de vertige rotatoire, des troubles
de l’équilibre et quelques nausées pendant 1 à 2 heures. Le paracétamol était inef-
ficace. Les jours suivants, apparaissaient des accès de pseudo-ébriété avec sensa-
tion d’être en bateau, sans symptômes auditifs. Dans les antécédents, il y avait une
maladie de Crohn en rémission depuis 10 ans. Le médecin traitant pensant à un
syndrome prémenstruel avait prescrit de la spironolactone sans résultats. L’IRM
récente n’a montré aucune lésion de la fosse postérieure.
Lors de l’examen, la patiente était en période prémenstruelle. Elle s’est présentée,
les yeux plissés, manifestement photophobique. L’interrogatoire a révélé qu’un dis-
positif intra-utérin avait été mis en place 6 mois auparavant car elle ne supportait
plus la contraception orale qui lui déclenchait de violentes céphalées. On a encore
noté des migraines ophtalmiques à l’adolescence et un terrain migraineux chez la
mère. En VNS et en VNG, on a trouvé un nystagmus horizontal de position dans le
décubitus latéral de type agéotropique devenant horizontal droit lors de la remise
en position érigée. À noter une composante verticale inférieure en décubitus laté-
ral droit (figures 17.11 et 17.12). Ces nystagmus étaient accompagnés de faibles
sensations vertigineuses. Un diagnostic de « vertige migraineux » a été évoqué et
un triptan prescrit.
Trois jours après, la patiente a téléphoné pour demander si elle pouvait reprendre
le Tanganil® (acétyl-leucine) car, si elle n’avait plus de céphalées, elle gardait les
sensations de tangage dans un contexte de grande fatigue. Revue en urgence, on a
constaté que le nystagmus de position avait disparu. Mais en pleine consultation,
elle a éclaté en sanglots. Elle ne dormait plus, sa vie professionnelle était précaire,
sa vie sentimentale mouvementée et la charge de ses enfants insupportable. La
prescription d’un inhibiteur spécifique de la recapture de la sérotonine a apporté
une amélioration spectaculaire. Depuis 6 mois elle n’a pris son triptan qu’occasion-
nellement.

Figure 17.11 VNG en décubitus latéral droit.


202 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Figure 17.12 VNG en décubitus latéral gauche.

En conclusion, la relation avec la vie génitale est classique dans la migraine cata-
méniale. Ici, on peut légitimement parler de vertige migraineux. Reste que les
symptômes n’auraient pas dû persister au-delà des règles. La présence d’un terrain
anxiodépressif est fréquent dans cette pathologie et le manque de sommeil consé-
cutif explique la prolongation des symptômes. Concernant le nystagmus de posi-
tion enregistré au cours de la crise, son caractère prolongé, l’absence de vertiges
concomitants, les changements de direction avec la position sont en faveur de son
origine centrale, ce qui est en adéquation avec la migraine.

Histoire 18
On vous l’avait déjà dit
Un patient âgé de 58 ans a présenté depuis un an une dizaine d’accès vertigineux
rotatoires intenses ne durant pas plus de 2 minutes, presque toujours précédés
d’un acouphène dans l’oreille droite. Plusieurs examens neurologiques et un bilan
cardiologique se sont avérés normaux. L’examen en VNS a mis en évidence un nys-
tagmus vertical inférieur spontané retrouvé dans toutes les prises de position et ne
changeant jamais de sens. L’audiogramme n’a montré qu’un discret scotome à la
fréquence 4 000 Hz du côté droit et une discrète surdité sur les fréquences aiguës
du côté gauche (figure 17.13). L’IRM a mis en évidence une image au niveau de la
lame tectale, latéralisée à gauche, près de la ligne médiane, intéressant le colliculus
inférieur (figure 17.14). Cette image était en hypersignal en T1, ce qui a orienté
vers une nature graisseuse. Le diagnostic le plus probable est celui d’un lipome de
la lame tectale. Cette localisation est une voie de passage pour les voies auditives,
visuelles et cérébelleuses, ce qui peut expliquer les symptômes du patient. En tout
cas, ce n’est pas une malformation vasculaire.
Le nystagmus vertical inférieur spontané est un nystagmus typique de l’origine cen-
trale. Il est souvent attribué à la malformation d’Arnold-Chiari mais il est aussi fré-
quemment retrouvé dans les lésions cérébelleuses (down beat nystagmus syndrome
où il peut d’ailleurs rester idiopathique). Les lipomes et les kystes épidermoïdes
Histoires cliniques 203

Figure 17.13 Audiogramme.

sont les plus fréquentes des tumeurs rares du conduit auditif interne et de l’angle
pontocérébelleux. Les lipomes, bien qu’étant des lésions bénignes, peuvent infiltrer
les structures nerveuses et s’avérer d’exérèse délicate. Il a été décidé d’exercer une
simple surveillance et de refaire une IRM un an plus tard pour juger de l’évolutivité.

Histoire 19
La dictature des anatomistes
À partir de quelles dates le canal semi-circulaire « horizontal » est-il devenu
« externe » puis « latéral » ? Pour Politzer (1883), prophète de l’otologie, c’était le
« canal horizontal ». Le dictionnaire usuel des sciences médicales (1892) hésita :
« … le canal externe (canal horizontal de quelques auteurs)…». Pour les anatomistes,
c’était tantôt un canal demi-circulaire « externe » (Testut, 1899), tantôt un canal
horizontal (Poirier, 1904). Baldenweck (1928) se laissa impressionner : « le canal hori-
zontal encore dit canal externe ». De Aubry (1944) à Pialoux (1957), pour les ORL, le
canal resta longtemps « horizontal ». Pourtant, les anatomistes revinrent en force :
Rouvière en 1959 avec un : « canal demi-circulaire externe », Legent (1984) et surtout
Guerrier (1988) qui enterra le canal horizontal sous les coups de la mondialisation de
l’anatomie. Dans la « nomenclature internationale », il fut rebaptisé « canal latéral ».
Pourquoi cette aversion de l’horizontalité ? Est-ce une réminiscence impudique ?
Ou réellement un contresens anatomique, au prétexte qu’on ne dort pas debout ?
Ce canal est dans un plan incliné de 30° en arrière. Mais André Thomas (1940)
avait bien montré qu’en position érigée, lorsque le regard est porté de quelques
mètres en avant, le canal horizontal devenait réellement horizontal et que c’était
là, le plan de « la piste terrestre ». Ne serait-il pas imprudent de courir dans la
forêt en regardant l’horizon sans voir le tronc d’arbre sur lequel on va s’affaler ? Ce
canal doit bien avoir quelque chose de spécial puisqu’au cours de l’évolution, il est
apparu plus tard que les canaux verticaux (chez les chondrichtyens ou poissons
cartilagineux). Ce sont les canaux semi-circulaires horizontaux qui sont stimulés
quand on traverse la rue et ce sont les canaux semi-circulaires verticaux qui sont
204 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Figure 17.14 IRM : lipome de la lame tectale (flèches).


Histoires cliniques 205

stimulés pour prier et aller se reposer : l’antérieur quand on se penche en avant et


le postérieur quand on se couche en arrière.
Pourquoi ne pas revenir au canal semi-circulaire horizontal ? Tout serait pour le
mieux dans le meilleur des mondes physiologiques.

Histoire 20
VPPB : faut-il prendre des précautions après les manœuvres ?
L’objectif d’une méta-analyse [6] a été de savoir si la prescription de précautions
(restrictions) après les manœuvres thérapeutiques effectuées pour VPPB augmen-
tait l’efficacité dans les suites immédiates. Les auteurs ont réalisé cette méta-analyse
à partir de 6 études regroupant 523 patients ayant été traités pour VPPB unilaté-
ral du canal postérieur objectivé par une manœuvre de Dix et Hallpike positive.
Ces 6 études ont été choisies parmi 158 études en langue anglaise traitant de la
question. Les critères de choix étaient les suivants : pas de forme multicanalaire,
la manœuvre thérapeutique utilisée devait être soit une manœuvre de Sémont,
soit une manœuvre d’Epley, l’efficacité devait être objectivée par une manœuvre
de Dix et Hallpike négative, l’étude devait comporter deux groupes : un à qui l’on
prescrivait des « restrictions » pendant quelques jours après la manœuvre théra-
peutique et l’autre pas ! Les restrictions prescrites étaient « ne pas lever la tête »
dans toutes les études. Étaient associés : « éviter » les rotations de la tête (5 études),
éviter le coucher sur le côté atteint (4 études), ou encore l’obligation de porter une
minerve souple (2 études). La durée de ces restrictions variait de 1 à 7 jours.
L’âge variait de 22 à 88 ans avec une moyenne de 54,5 ans et le sex-ratio était de
2 femmes pour un homme. Le suivi moyen était de 3 à 7 jours avec une moyenne
de 5,5 jours. Toutes les études utilisaient au moins deux types de restriction. L’effi-
cacité globale a été de 88,5 % pour le groupe « avec restrictions » et de 83,6 %
pour le groupe « sans restrictions ». Le résultat n’était donc pas significativement
influencé, qu’il y ait eu ou non prescription de restrictions tout type confondu.
L’analyse ne trouve pas non plus de différence significative entre les divers types de
restriction. Le port d’une minerve élève le taux d’efficacité à 90,7 % mais ce n’est
pas non plus significatif.
En conclusion, pour les auteurs, cette absence de différence tient au fait qu’en
pratique, pour les patients, ces restrictions sont inapplicables, sauf peut-être la
minerve.

Histoire 21
Vertiges allergiques ?
Le patient a toujours raison mais comment garder son calme devant une personne
qui réclame une désensibilisation pour ses vertiges ? Cette année-là, lors des aller-
gies habituelles de printemps de ce patient, les éternuements lui déclenchaient un
vertige violent mais bref avec, en même temps, une sensation de pesanteur du côté
gauche. Il n’avait pas fait la relation avec le très grand vertige rotatoire qu’il avait
206 Guide pratique de rééducation vestibulaire

présenté fin janvier et qui l’avait obligé à s’aliter pendant 10 jours. La régression
avait été progressive avec vertiges positionnels résiduels.
La VNS a montré un nystagmus très net, battant du côté gauche sauf lors du head
shaking où il devenait droit. On a alors invoqué qu’il avait d’abord présenté une
névrite vestibulaire gauche (nystagmus droit au head shaking) qui avait ensuite
évolué vers un hydrops labyrinthique gauche avec un nystagmus battant vers le
côté atteint : recovery nystagmus gauche.
Ce recovery nystagmus ou « nystagmus de récupération » (Mac Lure, 1978) fait
partie des discussions et des polémiques qui font le charme de la pathologie vesti-
bulaire. Ainsi dans cette hypothèse, chez ce patient, les vertiges déclenchés par les
éternuements représentent le signe de Hennebert, c’est-à-dire un vertige déclen-
ché par une hyperpression : le transfert d’un coup de pression passant de la caisse
du tympan à l’oreille interne. Par exemple, en cas de fistule labyrinthique post-
traumatique, un nystagmus peut être déclenché par la simple compression digitale
du conduit auditif externe. Ce signe est aussi rencontré dans certaines maladies de
Menière en crise.
Une autre explication pourrait être le phénomène de Bechterew (1883). La destruc-
tion des organes vestibulaires du côté gauche d’un animal entraîne un nystagmus
droit (controlatéral) et une déviation du corps gauche (ipsilatérale). Ce nystagmus
disparaît en quelques jours par compensation centrale. Dans un deuxième temps, si
l’on détruit ses organes vestibulaires du côté droit, il apparaît un nystagmus gauche
(controlatéral) et une déviation corporelle droite (ipsilatérale). Pourtant, l’animal
n’a plus aucun vestibule. Ce fait expérimental est la preuve du phénomène de com-
pensation centrale d’un déficit vestibulaire unilatéral. Certes, il peut se rencontrer
en cas de maladie de Menière bilatérale mais ce n’était pas le cas de notre patient.
Revenons à notre patient allergique. Il a finalement été pratiquement soulagé et a
repris la conduite automobile.
En conclusion, lorsqu’un nystagmus bat en sens inverse de ce que l’on attend, le
spécialiste trouve toujours une bonne raison.

Histoire 22
Ces cas qui pourraient nous empêcher de dormir
Un patient âgé de 78 ans a consulté pour des crises de vertige dont une en voiture
alors que son épouse conduisait. Il a eu l’impression d’être culbuté en avant pen-
dant 30 secondes. Un autre épisode était survenu alors qu’il était assis sans bouger.
Cette fois-là, il s’était senti tourner horizontalement, pendant 30 secondes. Il ne se
rappelle plus avoir exécuté un mouvement de tête avant l’apparition de ses crises.
Il y a eu aussi des crises moins intenses survenues alors qu’il était allongé.
L’otoscopie était normale avec, à l’audiométrie, une presbyacousie bilatérale. La
manœuvre de Dix et Hallpike droite a déclenché un violent vertige et un nystag-
mus vertical supérieur pur survenant après un temps de latence de 5 secondes et
durant 30 secondes. Ensuite, la manœuvre de Dix et Hallpike gauche a aussi déclen-
ché un nystagmus vertical supérieur pur s’accompagnant également de vertiges,
Histoires cliniques 207

après une latence de plusieurs secondes et durant 30 secondes. La mise en position


sur le dos, tête pendante dans le plan sagittal a de nouveau déclenché ce nystag-
mus vertical supérieur pur avec encore une latence de 5 secondes et une durée de
30 secondes. Le patient étant claustrophobe, l’IRM n’a pas pu être réalisée. Toute-
fois, un scanner injecté a montré des conduits auditifs internes libres et l’absence
de neurinome. Les oreilles moyennes et internes étaient normales.
Un manœuvre d’Epley a d’abord été réalisée pour traiter un hypothétique VPPB
du canal postérieur droit : elle a de nouveau montré le fort nystagmus vertical
supérieur pur dans la position tête pendante vers la droite et le même dans le
roulis vers le côté opposé. Six semaines plus tard, les vertiges avaient disparu et les
manœuvres de Dix et Hallpike étaient négatives des deux côtés.
En définitive, le tableau clinique semble bien celui d’un VPPB du canal postérieur
bilatéral malgré une symptomatologie peu évocatrice (pas de mouvement déclen-
chant spécifique). Certes, le nystagmus vertical supérieur pur est classiquement un
signe de centralité. Toutefois, ici, l’existence d’un temps de latence, son caractère
transitoire militent en faveur de mouvements lithiasiques déclenchés simultané-
ment des deux côtés. Dans ce cas, les composantes torsionnelles s’annulent.
En conclusion, on a aussi le droit de compter sur la chance.

Histoire 23
Enfin une maladie de Menière !
Odette, 69 ans, est suivie pour hypertension artérielle et presbyacousie bilatérale
sur les fréquences aiguës. Son histoire est la suivante :
■ 2017 : crise rotatoire de 4 heures avec vomissements.
■ 2018 : acouphène et hypoacousie droite d’aggravation progressive.
■ 2021 : nouvelle crise de vertige de 90 minutes sans aggravation de la surdité.
– Mars à septembre : une crise par semaine avec nausées.
– Septembre : chute brutale suivie d’un vertige de 15 minutes.
■ 2022 :
– Janvier : crises d’instabilité, peur de tomber.
– Été : une crise vertigineuse rotatoire ayant duré plusieurs heures, aggravation
de la surdité de perception droite avec bourdonnement dans l’oreille droite
lors de la crise vertigineuse. IRM demandée par le médecin traitant : absence
de neurinome.
■ Octobre : examen dans le service. Hypoacousie droite prédominant sur les
graves avec bourdonnement droit permanent (figure 17.15). Prépondérance
directionnelle droite au calorique et aux épreuves giratoires (figure 17.16).
Les crises de vertiges récurrentes ne durent au maximum que quelques heures et
témoignent d’un syndrome vestibulaire irritatif droit avec nystagmus unidirection-
nel droit battant vers le côté du déficit calorique accéléré par le secouage de la tête
(head shaking) (figure 17.17). Les signes vestibulaires sont en faveur d’un hydrops
labyrinthique droit associé à des symptômes auditifs droits prédominant sur les
208 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Figure 17.15 Audiogramme montrant une surdité sur les fréquences graves du
côté droit.
L’atteinte sur les aigus correspond à la presbyacousie retrouvée du côté gauche.

Figure 17.16 VNG : épreuve calorique.


Papillon : déficit calorique du côté droit de 58 % avec prépondérance directionnelle
droite de 2,4°/s.

fréquences graves. Il s’agit probablement d’une maladie de Menière droite. Un neu-


rinome a été éliminé par l’IRM du conduit auditif interne et de la fosse postérieure.
Le traitement suivant est prescrit : diurétiques (Diamox® : acétazolamide, inhibi-
teur de l’anhydrase carbonique), régime de Fürstenberg (régime sans sel associé
aux diurétiques). La flunarizine est contre-indiquée (risque de syndrome extrapy-
ramidal à cet âge). Une labyrinthectomie chimique est proposée en cas d’échec.
Histoires cliniques 209

Figure 17.17 VNG. Nystagmus droit de 7,3°/s déclenché par le head shaking.

Histoire 24
Vertige en avion
Un patient adepte passionné de la plongée et de la chasse sous-marine, après une
semaine en Martinique à exercer son sport favori, a brutalement ressenti, dans
l’avion qui le ramenait à Paris, vers 7 000 m d’altitude et alors qu’il ne faisait aucun
mouvement, un vrombissement dans l’oreille droite avec depuis, surdité totale. En
même temps, sont apparus des vertiges avec déséquilibre. Apparemment, il était le
seul dans l’avion à éprouver ces symptômes. De retour en métropole, son médecin
lui a prescrit des corticoïdes. Il a été reçu à la consultation ORL de notre service
4 jours après son retour. Le tympan était normal. Il n’y avait pas de signe de fis-
tule. Il existait une surdité en plateau du côté droit mais fluctuante avec présence
de réflexes stapédiens normaux. Le point essentiel a été de pouvoir déclencher
des nystagmus dans le décubitus dorsal mais sans aucun temps de latence. À la
manœuvre de Dix et Hallpike droite, on a d’abord pensé à un VPPB gauche avec
son nystagmus horaire, sa composante verticale supérieure et au redressement, sa
composante verticale inférieure. Mais à la manœuvre de Dix et Hallpike droite, on
a obtenu exactement le même nystagmus. On a alors évoqué un VPPB du canal
antérieur gauche associé. Mais là, manque de chance, il y avait bien une compo-
sante verticale inférieure, elle aussi obtenue au redressement.
L’examen vestibulaire n’a retrouvé aucun nystagmus spontané dans la lumière
comme dans l’obscurité (figure 17.18). La manœuvre de Dix et Hallpike droite
a déclenché un nystagmus horaire pur avec composante horizontale droite à la
fin et nystagmus vertical inférieur lors du redressement, avec peu de vertiges. La
manœuvre de Dix et Hallpike gauche a déclenché un nystagmus horaire et vertical
supérieur et devenant encore vertical inférieur au redressement. En position de
Rose, le nystagmus rotatoire horaire s’est arrêté spontanément.
En plongée, les accidents de désaturation vestibulaire sont classiques par aéroem-
bolisme. Le responsable est l’azote : N2. Un des mécanismes invoqués est celui de
microbulles ou de bulles dans les tissus et les liquides labyrinthiques. Le pire, c’est
quand ce phénomène se situe au niveau du système artériolaire de l’oreille interne
210 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Rose

Redressement Rétroflexion Redressement

DLD DLG
Figure 17.18 Mécanisme des nystagmus produits par les mouvements dans le plan
vertical.
Inhibition des canaux verticaux lors de la mise en décubitus latéral gauche (DLG),
droit (DLD), et en position de Rose (sur le dos tête légèrement pendante). Au
redressement, excitation d’un ou des deux canaux verticaux produisant un nystagmus
vertical inférieur.

(embole artériel de bulles de N2). Les lésions sont importantes et souvent défini-
tives. C’est moins grave quand les bulles se forment dans les liquides labyrinthiques
(dégazage intralabyrinthique). En conséquence, après des exercices de plongée, on
recommande d’observer une période de repos de plusieurs jours avant de prendre
l’avion. Le patient a ici commis une erreur : l’horaire du départ de l’avion ayant été
repoussé de 24 heures, il n’a pas résisté à une petite plongée supplémentaire. Mais
dans l’avion, à 7 000 m d’altitude, les petites bulles de N2 se sont formées dans
le vestibule gauche et ont circulé dans le labyrinthe postérieur pendant près de
21 jours avant de disparaître spontanément sans séquelles.
Si la cause a été identifiée, il restait à expliquer les nystagmus positionnels. Le siège
de la surdité a montré que la ou les bulles étaient situées dans l’oreille interne
droite. On peut même préciser qu’elle(s) étai(en)t au sein d’un ou des deux canaux
verticaux droits puisqu’en couchant le patient, on déclenchait un nystagmus d’in-
hibition torsionnel horaire. En le redressant, la bulle changeait de direction pour
déclencher un nystagmus d’excitation vertical inférieur avec annulation de ses
composantes antihoraires.
En conclusion, imaginer que des bulles d’azote flottent dans les canaux semi-circulaires
verticaux en créant des nystagmus spécifiques est ingénieux, réjouissant mais peut-être
faux ! Il existe d’autres théories : celle des interactions entre les canaux semi-circulaires et
le système otolithique par exemple où les macules otolithiques bloqueraient les canaux
semi-circulaires dans certaines situations. Restons prudents.
Histoires cliniques 211

Histoire 25
L’âge n’est pas une maladie
Un patient alerte de 88 ans est adressé pour vertiges positionnels depuis 6 mois ayant
commencé un matin en se levant par un grand vertige suivi d’une chute sur le sol.
Il s’était relevé immédiatement mais était resté instable pendant 3 jours. Depuis, il a
continué à faire de grandes marches, mais doit se lever chaque matin précautionneuse-
ment et présente toujours des vertiges en levant la tête, par exemple pour regarder un
oiseau. Il n’y a pas eu d’aggravation récente de sa surdité en rapport avec des trauma-
tismes sonores. Un pacemaker a été posé 2 ans auparavant.
VNS
■ HIT négatif vers la gauche mais positif vers la droite.
■ Pas de nystagmus spontané dans l’obscurité sauf dans le regard gauche.
■ Manœuvre de Dix et Hallpike droite : après une seconde de latence, apparition
d’un net nystagmus horizontal gauche crescendo-decrescendo très prolongé,
persistant dans la remise en position assise.
■ Manœuvre de Dix et Hallpike gauche : cette fois, aucun nystagmus.
■ Redressement : de nouveau nystagmus horizontal gauche, persistant lors de
la mise en décubitus dorsal.
■ Mise en décubitus latéral droit : de nouveau nystagmus gauche mais moins vif
que la première fois.
■ Remise en décubitus latéral droit : de nouveau nystagmus horizontal gauche.
■ Redressement en position assise : de nouveau nystagmus horizontal gauche et
déséquilibre.
■ Head shaking : net renforcement du nystagmus horizontal gauche.
VNG
■ Épreuve calorique : hyporéflexie droite avec prépondérance directionnelle
gauche.
■ Nystagmus horizontal gauche présent dans de nombreuses prises de position
prenant une composante verticale supérieure en décubitus dorsal.
■ Forte prévalence gauche aux épreuves giratoires (burst) avec indice de fixation
oculaire à 1 %.
Imagerie
Scanner avec injection complètement normal.
Synthèse et conclusion
C’était un déficit vestibulaire périphérique partiel droit avec note centrale datant
de 6 mois dont témoignent (figure 17.19) :
1. un nystagmus unidirectionnel gauche associé à un HIT droit positif ;
2. un head shaking provoquant un nystagmus horizontal gauche ;
3. des épreuves caloriques déficitaires droites.
212 Guide pratique de rééducation vestibulaire

A B

C D

Figure 17.19 Résultats.


A. Nystagmus unidirectionnel gauche. B. Aréflexie calorique droite avec prépondérance
directionnelle gauche. C. Nystagmus horizontal droit avec composante verticale supérieure
en décubitus dorsal. D. Prépondérance gauche aux épreuves giratoires (burst).

Au total, il s’agissait d’une mauvaise compensation 6 mois après l’apparition de


ce déficit vestibulaire. Une rééducation de type adaptation-substitution a obtenu
un excellent résultat. De temps à autre, le patient ressent un peu d’instabilité, il
reprend alors ses exercices avec succès. C’est parce qu’il était très âgé qu’il n’avait
pas été pris en considération.
Histoires cliniques 213

Références
[1] Sauvage JP, Aubry K, Codron S. Vertiges positionnels paroxystiques bénins des canaux latéraux et
antérieurs. Rev Laryngol Otol Rhinol 2005 ; 125 : 257‒62.
[2] Trijolet JP, Pondaven-Letourmy S, Robier A, Morinière S. Vertige positionnel paroxystique découvrant
un kyste épidermoïde du quatrième ventricule. Ann Otolaryngol Chir Cervicofac 2008 ; 125 : 146‒50.
[3] Vibert D, Redfield RC, Hausler R. Benign paroxysmal positioning vertigo in mountain bikers. Ann
Otol Rhinol Laryngol 2007 ; 116 : 887‒90.
[4] Bertholon P, Chelikh L, Tringali S, Timoshenko A, Martin C. Combined horizontal and posterior canal
benign paroxysmal positioning vertigo in three patients with head trauma. Ann Otol Rhinol Laryngol
2005 ; 114 : 105‒10.
[5] Cambon H, Galland C. Accidents vasculaires cérébraux au cours des maladies inflammatoires
intestinales. Sang Thrombose Vaisseaux 1998 ; 10 : 547‒53.
[6] Devaiah AK, Andreoli S. Postmaneuver restrictions in benign paroxysmal positional vertigo : an
individual patient data meta-analysis. Otolaryngol Head Neck Surg 2010 ; 142 : 155‒9.
CHAPITRE

18
Épistémologie
des vertiges

Éloge de l’appareil vestibulaire (vestibule)


Autrefois, pour les anatomistes, l’oreille interne, ce n’était que des « trous » dans l’os
temporal (figure 18.1). Les philosophes s’écharpaient sur sa fonction. Aujourd’hui,
on voit l’oreille interne en long, en large et en travers au scanner et en IRM. Mais
le plus étonnant, c’est que 2 mois avant la naissance, la maturation de l’oreille
interne est achevée. Deux mois avant la naissance, elle entend tout. Deux mois
avant la naissance, l’équilibration est présente chez le fœtus. Ce n’est pas pour
rien. Attendons qu’un enfant soit conçu en impesanteur et que l’embryon y reste
jusqu’à la naissance. Peut-être serons-nous surpris de lui voir des jambes pousser
à la place des oreilles.

Aristote a-t-il oublié le 6e sens ?


Pour sa défense, Aristote ne connaissait pas l’existence de l’oreille interne et
des organes vestibulaires : les trois canaux semi-circulaires et les deux macules

A B
Figure 18.1 Labyrinthe auriculaire en dissection (A) et vu au scanner (B).

Guide pratique de rééducation vestibulaire


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216 Guide pratique de rééducation vestibulaire

otolithiques. Il a fallu attendre Fallope (1561) et Du Verney (1683) pour décrire


ces organes. Et encore, les croyaient-ils pleins d’air et destinés à l’audition comme
des « trompettes » de résonance.
Toutefois, Aristote avait distingué les « sensibles propres » des « sensibles com-
muns » :
▪ les sensibles propres sont ceux perçus par les sens spécialisés comme la vue,
l’ouïe, la placode olfactive, la face dorsale de la langue et la peau ;
▪ les sensibles communs sont ceux perçus par plusieurs sens en même temps
comme le mouvement.
Dans ce dernier cas, les sens agissent comme un seul sens (sensorium commune).
Pas si bête, Aristote !
C’est bien ce que pensent des auteurs modernes comme Barra et Pérennou [1]
selon qui le système vestibulaire permet à l’homme de coder la direction gravi-
taire, mais la construction du sens de verticalité repose sur des modèles internes
intégrant des informations graviceptives vestibulaire, somesthésiques et visuelles.
Piéron n’hésite pas à nommer ce sensorium commune : perception spatiotem-
porelle [2], c’est-à-dire prendre l’espace en soi, dans son corps. Être capable à
tout moment de savoir dans quelle position on est par rapport à la pesanteur. Si
l’on est immobile ou si l’on est en mouvement, dans quelle direction, et à quelle
vitesse. On est bien là dans le cadre du sensoriel qu’avait défini Aristote comme
des « fonctions par lesquelles le système nerveux perçoit consciemment et analyse
des objets ou des phénomènes extérieurs ».

Quels stimuli pour ce 6e sens ?


Ce sont les forces qui sont appliquées à la tête. Ces forces excitent les organes
vestibulaires en produisant des accélérations. Les organes vestibulaires ne sont
pas sensibles aux mouvements uniformes. Les canaux semi-circulaires sont des
gyroscopes captant les courants inertiels du liquide endolymphatique qu’ils
contiennent sous l’effet d’accélérations angulaires. Les otolithes ou pierres d’oreille
font office de fil à plomb pour capter la pesanteur. Mais la gravité est aussi une
accélération (9,81 m/s2).

Quelle est l’originalité du vestibule périphérique ?


C’est d’être connecté à tous les étages du névraxe : thalamus, noyaux oculomo-
teurs, noyau du nerf pneumogastrique, cornes antérieures de la moelle et cervelet.
C’est ce qui explique qu’il est impliqué dans de très nombreuses fonctions. C’est
aussi ce qui explique le profond désarroi des patients en cas de dysfonctionne-
ment.
Épistémologie des vertiges 217

En définitive, le vestibule, à quoi ça sert ?


1. À stabiliser le regard au cours du mouvement de la tête. C’est indispensable car
la rétine fonctionne par une cascade de réactions chimiques et car l’image devient
trouble dès que la cible bouge trop vite (dès 2-3°/s). Au contraire, la transduction
du mouvement de la tête par le vestibule est de type mécanique. Les canaux
semi-circulaires produisent une rotation des yeux égale et de sens contraire à celle
de la tête. Au-delà de 30° de rotation, apparaît un mouvement rapide ramenant
l’œil à la position de départ. Ainsi naît le nystagmus vestibulaire physiologique. Par
exemple, pour une rotation sur soi-même de 360°, il se forme au moins 12 nystag-
mus.
2. À stabiliser le corps en dépit des forces contraires. Le système otolithique gère
le tonus postural des muscles antigravitaires. Il détecte les chutes dès le début et
déclenche ensuite une cascade de mouvements de rattrapage.
3. À stabiliser la pression artérielle lors de la mise en position érigée. L’oreille
interne détecte le mouvement dès le début et accélère le cœur avant que toute
hypotension ne se produise. Si l’on comptait seulement sur le sinus carotidien
pour augmenter la pression artérielle, un malaise surviendrait chaque fois que l’on
se lève de sa chaise.
4. À dialoguer en permanence avec tout le corps. Contrairement aux autres sys-
tèmes sensoriels, il n’y a pas de cortex vestibulaire exclusif. Ainsi, le cortex pariéto-
insulaire vestibulaire n’a que 50 % d’entrées vestibulaires, le reste étant des entrées
visuelles et somesthésiques. Dans l’hippocampe et le cortex entorhinal, il y a des
neurones de direction s’activant lorsque la tête pointe dans certaines directions.
Le mécanisme repose sur l’intégration de la vitesse de la tête fournie par le sys-
tème vestibulaire.
Dans le domaine sensoriel, la perception ne doit pas être confondue avec les sen-
sations élémentaires. Toute perception est une construction. Dans le domaine
du 6e sens, il y a d’abord une calibration et un apprentissage de l’équilibre jusqu’à
l’âge de 7 ans. La construction repose sur l’intégration des réponses des capteurs
situés dans les organes de la mobilité : articulations, muscles et tendons. Peu à peu
se construisent des complexes syncrétiques : reconnaissance des trajectoires, des
types de mouvements : inertiel, chute, balançoire, etc.

Et les vertiges ?
Il a fallu attendre le xixe siècle pour reconnaître ce 6e sens et sa pathologie : Pierre-
Jean-Marie Flourens (1794-1867) et Prosper Menière (1799-1862) (figure 18.2).
Pourtant, le mot vertige est connu depuis l’Antiquité. Dans les textes anciens, on
retrouve le discours de nos patients, c’est-à-dire une foule de symptômes et pas
seulement « l’illusion de mouvement » que l’on enseigne aux étudiants actuels.
218 Guide pratique de rééducation vestibulaire

A B
Figure 18.2 Naissance du vertige.
A. Pierre Flourens (1794-1867), l’académicien tortionnaire de pigeons. B. Prosper
Menière (1799-1862) qui a sorti les vertiges des épilepsies.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Les multiples connexions vestibulaires à tous les étages du névraxe expliquent


que les symptômes débordent ce cadre étroit faisant même penser à des troubles
fonctionnels. De plus, les connexions avec l’hippocampe expliquent l’angoisse si
souvent associée. Ce n’est pas pour rien si Hitchcock a appelé son film : « Vertigo »
(Sueurs froides en version française). Dans ce film, James Stewart était en fait acro-
phobe, c’est-à-dire sujet au vertige des hauteurs. Tous les ORL diront que c’est un
faux vertige. L’acrophobie est même un diagnostic différentiel du (vrai) vertige.
Mais l’angoisse n’a pas de frontière.

Jumelles dans un même berceau : audition et perception


spatiotemporelle
Ces deux systèmes se ressemblent.
▪ Leur premier point commun est cette extraordinaire cellule ciliée polarisée.
Couchée dans un sens, elle est excitée, couchée dans l’autre, elle est inhibée. Ses
rubans synaptiques lui permettent de décharger à la fréquence du son. Ses canaux
de mécanotransduction axés sur les tip-link lui permettent de faire des réglages
très fins.
Épistémologie des vertiges 219

▪ Leur deuxième point commun est qu’une partie de chaque système contrôle
l’autre partie par l’intermédiaire des centres.
● Pour l’audition, les cellules ciliées internes amplifient leur réponse en
déclenchant les phénomènes actifs des cellules ciliées externes par une boucle
cochléo-olivo-cochléaire.
● Pour les informations vestibulaires, le principe est analogue. Par exemple,
pour le canal semi-circulaire horizontal, se retourner dans son lit donne la
même réponse qu’en traversant la rue en tournant la tête à droite et à gauche
pour vérifier qu’aucune voiture n’est à l’horizon. C’est là qu’interviennent les
projections otolithiques directes sur le cervelet et de là sur le noyau vestibulaire
pour indiquer que l’on est en position couchée et non en position debout et
que l’on peut se rendormir tranquillement (figure 18.3).

F IC

NV

IO N

NF

Figure 18.3 Projections vestibulaires centrales.


Les influx canalaires (IC) gagnent les noyaux vestibulaires. Certains influx otolithiques
gagnent directement l’archéocervelet : uvula (U) et noyau fastigial du nodulus
(NF). Puis une connexion s’établit entre archéocervelet, noyau fastigial et noyaux
vestibulaires pour inhiber ou faciliter les sorties canalaires. F : flocculus ; IO : influx
otolithiques ; NV : noyaux vestibulaires.
D’après Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés. Dessins :
Carole Fumat.
220 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Le système vestibulaire : à l’origine, une simple


tactilité ectodermique
Le tout premier organe de l’équilibre, le statocyste, capable de déterminer la direc-
tion de la force de gravité, est apparu il y a 600 millions d’années, au Précambrien.
Les premières méduses (Drymonema Victoria), et tous les cœlentérés en sont
munis. Depuis, toutes les espèces animales possèdent un système leur permet-
tant de se situer et de se déplacer dans le champ gravitationnel terrestre. Mais
si la fonction est identique, la manière d’y parvenir est différente. Par exemple, le
statolithe (pierre d’équilibre) peut être sécrété par l’animal, alors que pour d’autres,
il résulte de l’incorporation de particules empruntées au milieu extérieur. Après
chaque mue, l’animal introduit lui-même une petite pierre dans le statocyste. Si,
à la place, on introduit de la limaille de fer, l’animal, ne s’oriente plus en fonction
de la pesanteur mais en fonction d’un champ magnétique que l’on peut modifier.
Quant au scorpion d’eau, une bulle d’air remplace la petite pierre.
Pour remonter le temps et comprendre comment ces fonctions physiologiques
sont apparues, le plus simple est de commencer par descendre de l’oreille humaine
et de la réduire à ses formations élémentaires. Commençons par faire disparaître
l’oreille externe, le système tympano-ossiculaire, l’appareil pneumatique de la
trompe, de la cavité et des cellules mastoïdiennes. Puis faisons disparaître la cap-
sule labyrinthique et le compartiment périlymphatique.
À présent, donnons la parole à Pierre Bonnier [3] : « Réduit au récipient endo-
lymphatique, l’organe perd sa forme labyrinthique ; le limaçon est absorbé par le
saccule, celui-ci se confond avec l’utricule, les canaux semi-circulaires s’effacent en
sillons ; le tout prend la forme d’un otocyste irrégulier, puis sphérique, puis ouvert à
l’extérieur, et enfin la vésicule se transforme en une simple fossette. L’otolithe grandit,
reprend son pédicule, et de la fossette qui s’efface sort sous forme d’une petite masse
oscillante.
Le nerf labyrinthique, d’abord en rapport avec le cerveau postérieur, n’aboutit plus
qu’à des ganglions cérébroïdes, puis se dissipe dans un plexus sous-ectodermique.
Le neuroépithélium des papilles perd, de son côté, ses membranes operculaires ; les
éléments épithéliaux adoptent une physionomie plus uniforme ; ce n’est plus qu’un
ectoderme cilié, tactile… C’est donc en dernière analyse à une simple tactilité ecto-
dermique qu’il nous faut emprunter les éléments primordiaux de toutes les fonctions
auriculaires. »
Première déduction : si les fonctions vestibulaires sont d’origine tactile, on com-
prend pourquoi les informations vestibulaires remontent au thalamus et au
cerveau en empruntant les voies de la sensibilité profonde. Il n’y a pas de voies
vestibulocorticales exclusive.
Continuons…
1. L’appareil vestibulaire le plus simple est constitué par les organes marginaux
de la famille des méduses. À la base des tentacules, on trouve une petite massue
Épistémologie des vertiges 221

suspendue à un pédicule capable de détecter un corps à distance par les ébranle-


ments que ce corps imprime au milieu liquide environnant (figure 18.4A).
2. Un premier perfectionnement améliore la sensibilité du système en augmen-
tant la densité de son extrémité par une masse calcaire ovoïde formant un corps
otolithique (figure 18.4B).
3. La massue otolithique est entourée d’un bourrelet circulaire constituant une
cavité otocystique fermée ou restant ouverte mais pourvue d’un nerf (figure
18.4C).
4. Puis l’organe otolithique devient central, impair et médian dans une excavation
tapissée de cellules à bâtonnets garnies de cils soutenant un amas otolithique
(figure 18.4D).
5. Chez les cyclostomes, les poissons et les amphibiens, ces organes s’organisent
selon deux lignes latérales constituées de fossettes et de canaux reliés entre eux
par des sillons plus ou moins profonds. La perception de pressions différentes en
des points multiples du corps et de la tête permet de s’orienter par rapport aux
courants liquidiens (figure 18.4E).
6. Les organes labyrinthiques se forment enfin avec de multiples vésicules spécia-
lisées dans les perceptions auditives, canalaires et otolithiques (figure 18.4F).

A B C

D E F

Figure 18.4 Physiogénie vestibulaire.


A. Ptychogena pinnulata. B. Drymonema victoria (apparition d’un otolithe).
C. Carmarina hastata. D. Cténophores (groseille de mer). E. Cyclostomes, poissons et
amphibiens. F. Seiche.
Source : Bonnier P. L’oreille, tome II. © 1896 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
222 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Et l’audition dans tout ça ?


C’est un luxe apparu tardivement. Avant que les êtres vivants ne grimpent sur la
terre ferme, les animaux marins n’avaient pas besoin d’audition. Pourtant, chez
les téléostéens, le système vestibulaire s’est développé de façon à percevoir les
vibrations sonores captées par la vessie natatoire. Celles-ci sont transmises via des
ébauches d’osselets à l’épithélium sensoriel du labyrinthe. Cet épithélium sensoriel
a continué de se développer jusqu’à devenir la cochlée chez les mammifères.
Soulignons qu’après la sortie des mers, la vie sur terre a entraîné le développement
du cou pour mieux explorer la piste terrestre. Le cou possède un complice : le
canal semi-circulaire horizontal (latéral pour les anatomistes), d’où l’innervation
commune par le faisceau longitudinal médian prolongé par le faisceau vestibu-
lospinal médian.

Lumière, oxygène et gravité


L’ontogénie nous a appris que l’oreille interne était la première structure sensorielle
fonctionnelle chez le fœtus. Cette précocité explique le nombre impressionnant
de fonctions auxquelles elle participe. Nous avons vu que le système vestibulaire
avait plus de 600 millions d’années d’existence. Alors, et avant ?
Dans la création des êtres vivants, la lumière et l’oxygène se sont accaparé la
vedette. Or, la gravitation, c’est tout le cosmos ! La gravité était là depuis le début !
La biologie oblige à la recherche de nourriture. Comment se déplacer si l’on ne
peut pas résoudre les problèmes posés par la gravité ? Soyons persuadés que
même les paramécies savent distinguer le haut du bas. Mais il a fallu attendre
Newton pour comprendre la chute des pommes.
On a pu se passer de lumière. On a pu se passer d’oxygène (l’anaérobie). Mais il
a fallu attendre la fin du xxe siècle pour se passer de pesanteur. Les vols spatiaux
fournissent un modèle de suppression de la fonction otolithique. Mais à quel
prix ! On constate d’importantes perturbations cognitives : désorientation spatiale
avec illusions perceptives, déficit du contrôle moteur de la main ou d’un bras télé-
commandé, modifications de l’horloge biologique, difficultés pour s’endormir et
perte de sommeil. On peut limiter ces troubles par le surentraînement préalable
des astro-cosmonautes. Mais les perturbations persistent après le retour : perte
considérable de densité osseuse et forte hypotension orthostatique. Mettre 2 ans
pour arriver sur Mars ne sera pas simple !

Conclusion
Chaque spécialité médicale possède son histoire. En ORL, il n’y a pas que l’otologie.
Il y a aussi le labyrinthe ethmoïdal merveilleusement illustré de planches par Zuc-
kerkandl (1895). En laryngologie, nous avons le chanteur d’opéra Manuel Garcia
Épistémologie des vertiges 223

Junior (1805-1906) examinant ses cordes vocales à l’aide de petits miroirs laryn-
giens. Ces histoires ne sont ni du folklore ni de la nostalgie. Ce sont le témoignage
d’une immense curiosité inspirée du xviiie siècle et ayant explosé au xxe. À l’époque
de l’imagerie, du laser, de la chirurgie endoscopique et de l’implantation cochléaire,
l’ignorer serait comme foncer à 130 km/h sur un pont qui soudain s’écroule.

Dans l’oreille : sens géométrique (espace)


et sens arithmétique (temps et nombre)
Elie de Cyon, successeur de Flourens à la tête de son laboratoire, a consacré sa
carrière à relier l’arithmétique à l’audition et la géométrie à l’espace [4].
Il a fallu plus d’un siècle de recherches expérimentales, fécondes en découvertes
retentissantes, pour arriver à une solution scientifique des problèmes du temps
et de l’espace. L’opposition, rencontrée dès le début par cette solution, provenait
en grande partie des philosophes et des métaphysiciens qui depuis des milliers
d’années s’épuisaient en efforts stériles pour résoudre ce problème fondamental
de la psychologie.
La première tentative de donner, à l’aide de l’expérimentation, une solution phy-
siologique du problème de l’espace date de la fin du xviiie siècle ; elle est due
à l’éminent physicien Venturi à Bologne, dont les études sur le sens de l’espace
furent publiées dans les Indagine fisica sui colori, sous le titre Reflessioni sulla conos-
cenza dello Spazio che noi possiamo ricevar dell’audito.
Les expériences de Venturi portaient sur la détermination des directions des sons :
« Comment donc l’oreille nous indique-t-elle cette direction ? Et quel rapport y
a-t-il entre le sens de l’ouïe et la connaissance des différents lieux de l’espace ? » se
demandait-il. « De grands génies ont traité un semblable problème à l’égard de la
vue : l’éclairer de même à l’égard de l’ouïe, ce serait avancer d’un degré l’analyse des
sentiments et la connaissance de nous-mêmes. »
Vers la même époque, en 1794, le Pr Vassali communiqua à l’Académie de Turin
et Spallanzani conclut de ces expériences que les chauves-souris possédaient
dans l’oreille un 6e sens, celui d’orientation, « qui nous manque et dont nous ne
pouvons avoir aucune idée ». Cette découverte a eu, comme nous verrons tout
de suite, un grand retentissement et rencontra des objections de plusieurs côtés,
notamment de la part du grand Cuvier.
Quelques années plus tard, le physiologiste Autenrielh a publié des études expé-
rimentales sur la direction des sons, qui ont également abouti à la conclusion
que l’oreille, et notamment les trois canaux semi-circulaires, situés dans les trois
dimensions de l’espace, nous fournit des sensations de direction qui permettent
de nous diriger dans l’espace.
Mais c’est l’illustre Flourens (figure 18.5) qui fut le véritable initiateur de l’expé-
rimentation directe sur les canaux semi-circulaires du labyrinthe de l’oreille. La
224 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Figure 18.5 Flourens.


© de Cyon E. L’oreille. Paris : Felix Alcan ; 1911.

solution du problème de l’espace se trouvait déjà en germe dans la belle décou-


verte que la « section des canaux semi-circulaires provoque des mouvements forcés
des animaux dans la direction correspondant au plan de chaque canal opéré ». Les
trois canaux, étant situés dans trois plans perpendiculaires l’un à l’autre, les mou-
vements des animaux, dominés par eux, s’accomplissent forcément dans les trois
directions cardinales de l’espace !
Les expériences de Flourens fournirent, 40 ans plus tard, le point de départ
des recherches d’Elie de Cyon sur l’orientation à l’aide du sens de l’espace. Ces
recherches poursuivies pendant plusieurs dizaines d’années ont abouti à la
démonstration définitive de l’existence dans le labyrinthe de l’oreille de deux
organes de sens bien déterminés : le sens géométrique et le sens arithmétique ;
deux sens généraux, auxquels nous devons d’une part la faculté de nous orienter
dans l’espace et le temps, et d’autre part l’origine de nos concepts de l’espace, du
temps et du nombre. L’ouvrage qui, sous forme de monographie a développé
intégralement toutes ses recherches sur les fonctions si diverses de ces deux sens,
a paru juste un siècle après les premières études de Venturi.
Coïncidence heureuse, c’est le très éminent physiologiste de Bologna, Pietro Alber-
toni, qui un des premiers a publié une analyse critique complète de son ouvrage
et en a fait ressortir, avec un rare entendement, toute la portée physiologique et
Épistémologie des vertiges 225

psychologique ; il l’a enrichi de quelques remarquables observations pathologiques


qui démontrent la justesse de plusieurs données importantes de mes expériences.
L’histoire des découvertes scientifiques qui, par leur essence même, ne sont pas
destinées à des applications pratiques immédiates, présente un très haut intérêt
pour la psychologie de la science, ou plutôt pour celle des savants qui, à un degré
quelconque, ont présidé à leur création ou à leur développement ultérieur. Elle
éclaire en même temps d’une vive lumière la psychologie des adversaires de toute
grande découverte, faite par autrui, qui lui font une opposition systématique et
obstruent les voies de propagation des théories nouvelles, même fondées sur des
preuves expérimentales indiscutables ; ils entravent ainsi la marche victorieuse de
la science vers la vérité.
Nous venons de constater que la solution définitive du problème de l’espace et du
temps porte sur deux questions distinctes :
▪ l’une purement physiologique, celle de l’orientation dans les trois directions de
l’espace ;
▪ l’autre, d’une importance fondamentale pour la philosophie et les mathéma-
tiques, dévoilant l’origine de nos concepts de l’espace et du temps, ainsi que celle
de nos connaissances géométriques et arithmétiques.
La découverte de deux sens mathématiques dans l’oreille a démontré combien
intimes sont les liens fonctionnels qui les ramènent à une solution unique du
problème primordial de la connaissance humaine.
Quand on analyse de plus près les découvertes des illustres savants de la fin du
xviiie et du commencement du xixe siècle, qui s’étaient occupés expérimentale-
ment de l’orientation dans l’espace et de la localisation de nos sensations provenant
du monde extérieur, on reconnaît aisément que leurs découvertes contenaient
déjà des indications suffisamment claires sur la véritable solution à donner au pro-
blème de l’espace. On est donc surpris de voir qu’aucun de ces grands naturalistes
n’a essayé de diriger ces investigations expérimentales vers le côté psychologique
du problème. Venturi a bien prononcé le terme : « sens de l’espace » et a même
essayé de le localiser principalement dans l’organe de l’ouïe, mais il ignorait encore
l’admirable système des trois canaux semi-circulaires, disposés perpendiculaire-
ment l’un à l’autre dans les trois directions de l’espace ; il lui manquait ainsi le point
d’appui fondamental pour s’attaquer au problème philosophique.
Spallanzani de son côté a rencontré des objections contre l’existence même d’un
6e sens résidant dans l’oreille et s’est cru obligé de renoncer à sa découverte.
En effet, le grand Cuvier essaya d’expliquer l’observation de Spallanzani, sans avoir
recours à l’hypothèse d’un 6e sens. L’orientation des chauves-souris aveuglées se fai-
sait, selon lui, grâce au développement extraordinaire des organes du toucher dans
les ailes et dans l’oreille extérieure de ces animaux. Ces organes du toucher leur
permettraient de reconnaître les différences de température, les mouvements et la
résistance de l’air, ainsi que le plus léger contact des objets étrangers.
226 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Un naturaliste genevois, Jurine, qui a répété les expériences de Spallanzani, a


conclu également que l’organe de l’ouïe sert l’orientation, mais il a nié l’existence
d’un 6e sens. Lui aussi ignorait l’existence des canaux semi-circulaires qui sont
excessivement développés chez les chauves-souris. Après la publication de Jurine,
Spallanzani a malheureusement renoncé à son 6e sens et n’a pas poussé plus loin
ses investigations.
Il est vrai que Flourens, qui avait reconnu la portée fonctionnelle des canaux semi-
circulaires pour l’orientation dans les trois directions de l’espace, s’était, comme ses
prédécesseurs, abstenu d’aborder le côté philosophique du problème. Et pourtant
Flourens était un profond penseur, doué d’un esprit philosophique très pénétrant.
Il en a donné maintes preuves surtout dans ses admirables éloges académiques.
Comment expliquer une pareille réserve ?
Il est plus aisé d’indiquer l’effet de cette abstention étrange que d’en préciser les
véritables causes. Cet effet se manifesta malheureusement par l’oubli presque
complet, dans lequel sont tombées les découvertes de ces quatre savants, dont
deux au moins, l’abbé Spallanzani et Flourens, appartiennent aux plus glorieux
représentants des sciences naturelles.
L’étude approfondie des écrits de ces savants semble pourtant indiquer que la
véritable cause de l’abstention d’Autenrieth et de Flourens d’aborder les consé-
quences philosophiques de leurs découvertes doit être cherchée dans la domina-
tion que Kant, avec son apriorisme des concepts du temps et de l’espace, exerçait
déjà vers la fin du xviiie siècle. Une théorie qui paraît tout expliquer, sans exiger des
preuves et sans nécessiter des études et des recherches, est toujours séduisante.
Ainsi voit-on Venturi reconnaître le rôle dominant de l’oreille comme organe
du sens de l’espace et, malgré cela, se prononcer dans l’ouvrage cité supra [4],
en faveur des idées de Kant ! Il nie expressément toute possibilité d’une relation
entre les expériences des sens et le concept de l’espace ; et il raille les objections de
Locke contre l’existence de représentations innées.
Dans son ouvrage « L’oreille », Elie de Cyon raconte comment il fut initié aux
découvertes de Flourens par Ernest Vulpian médecin physiologiste [4]. Après
avoir reproduit ses expériences et confirmé leurs résultats, il décida de pousser ses
investigations avec l’espoir de découvrir la véritable destination physiologique du
système des canaux semi-circulaires.
En particulier, c’est à l’occasion d’un séjour à la mer en été 1873 qu’il eut l’intuition
des rapports entre les canaux semi-circulaires et le système oculomoteur. Il pour-
suivit ses recherches en 1874 dans son laboratoire de Petersburg. En août 1876,
Claude Bernard communiqua de sa part à l’Académie des sciences de Paris une
première note sur le mécanisme complexe par lequel le nerf acoustique domine
tous les mouvements des globes oculaires. Puis, ce fut dans le laboratoire de
Claude Bernard (autrefois celui de Flourens), et enfin dans son laboratoire privé
qu’il acheva ses recherches.
Épistémologie des vertiges 227

En 1877, à l’Académie des sciences, il remit à Claude Bernard une note résumant
sa théorie des fonctions du système des canaux semi-circulaires, comme organe
périphérique du sens de l’espace. Sa théorie fut publiée en 1878 sous le titre
« Recherches expérimentales sur les fonctions des canaux semi-circulaires et sur
leur rôle dans la formation de la notion de l’espace ». Une partie de cet ouvrage
était consacrée à la réfutation expérimentale des hypothèses erronées de Goltz,
Mach et Breuer ressuscitant les sens défunts, comme le sens de rotation.
Pour Elie de Cyon, Les erreurs sont contagieuses comme les maladies, elles se pro-
pagent avec la vitesse d’un éclair et sont difficiles à dissiper. La vérité, elle, n’est pas
contagieuse. Son rétablissement ne se fait jour et ne triomphe qu’après de longs
combats. En résumé, il tirait trois déductions de sa théorie du sens de l’espace :
1. si les trois canaux semi-circulaires servent pour l’orientation dans les trois direc-
tions de l’espace, les animaux ne possédant que deux paires de canaux, comme
les lamproies, ne doivent pouvoir s’orienter que dans deux directions. C’est ce qu’il
vérifia dans des expériences sur des lamproies ;
2. les non-vertébrés, qui ne possèdent pas du tout de canaux semi-circulaires,
ne peuvent s’orienter que grâce aux saccules de leurs oreilles. Les recherches sur
l’orientation des crustacées ont confirmé cette déduction ;
3. si leur système de canaux semi-circulaires est hors de fonction, les sourds-
muets ne doivent connaître ni le vertige, ni le mal de mer. Cette dernière déduc-
tion fut depuis confirmée par les observations et expériences de James Strehl,
Bruck et autres.
Une découverte montra chez les souris japonaises que la dégénérescence du laby-
rinthe était la véritable base anatomique de leurs mouvements et de leurs danses
forcées. Cette découverte a expliqué leurs danses si étranges et leurs troubles
d’orientation. L’éminent Pr Paul Ehrlich, prix Nobel de physiologie en 1908, réus-
sit à produire des souris dansantes, en leur injectant une préparation arsenicale,
l’arsacétine. Il montra que chez ces animaux, il existait une dégénérescence pro-
noncée du nerf vestibulaire . Sa conclusion fut que « Leurs troubles d’orientation ne
peuvent s’expliquer qu’à l’aide de la théorie de Cyon sur les fonctions du labyrinthe ».

Histoire illustrée du VPPB du canal postérieur


Ce fut un feuilleton riche en rebondissements ayant abouti à un consensus
mondial.

1921 – Début avec Bárány1


Il fit la description d’un vertige de positionnement avec un violent nystagmus rota-
toire chez une femme de 47 ans. Pour lui, il s’agissait d’une pathologie otolithique :
1 ORL autrichien, prix Nobel 1914 pour ses travaux sur la physiologie et les maladies de l’oreille.
228 Guide pratique de rééducation vestibulaire

« Mon assistant, le docteur Karlefors, nota d’abord que le vertige n’apparaissait que
lorsqu’elle se couchait sur son côté droit. Quand elle faisait cela, il apparaissait un
violent vertige rotatoire. La crise durait environ 30 secondes et était accompagnée
de violentes nausées. Si, immédiatement après l’arrêt des symptômes, on tournait à
nouveau la tête de la patiente vers la droite, aucun vertige n’apparaissait plus. Pour
provoquer une nouvelle crise de cette façon, il fallait d’abord qu’elle reste pendant
quelque temps soit sur le dos, soit tournée du côté gauche. » [5]

1927 – Description d’une forme post-traumatique


par Bouchet
Il trouva un nystagmus rotatoire avec une composante verticale supérieure qui
apparaissait avec un temps de latence de 10 secondes lorsque le patient s’inclinait
sur l’épaule droite : « G. Paolino, 38 ans, maçon, nous est adressé parce qu’il se plaint
de vertiges survenus à la suite d’un accident. Le 18 mai 1925, chute de 3 mètres
d’un échafaudage, perd connaissance, est transporté à l’hôpital de la Charité où il
reste 18 jours. Son état s’améliore rapidement. La radiographie du crâne ne montre
aucune lésion osseuse. À sa sortie de l’hôpital, le blessé se plaint de quelques maux
de tête et surtout de vertiges qui surviennent plusieurs fois par jour et en particulier
quand il se couche sur le côté droit. Nous l’examinons à ce moment : inclinaison
brusque de la tête vers l’épaule droite. Au bout de 10 secondes, le malade relève la
tête et déclare qu’il a du vertige, nystagmus très net des deux yeux qui dure environ
15 secondes. On recommence l’épreuve en maintenant la tête du patient qui accuse
un vertige très net et dont le front se couvre de sueurs avec un nystagmus rotatoire
à dominante verticale. » [6]

1952 – Description par Mme Dix et M. Hallpike du


Positional Nystagmus of the Benign Paroxysmal Type
chez 100 patients
Dans cette publication [7], on trouve d’abord le protocole de la manœuvre dite
de « Dix et Hallpike » provoquant le vertige et le nystagmus caractéristiques
(cf. diapositive 2-5) : « Le patient ressent une sensation de détresse, change de cou-
leur, ferme les yeux et jette des cris d’alarme ». Le nystagmus apparaît avec une
latence de 5 à 6 secondes. Il est surtout rotatoire roulant vers l’oreille la plus basse
et crescendo-décrescendo avec inversion au redressement et habituation quand
on répète la manœuvre. Le caractère bénin de l’affection est démontré par l’absence
de toute pathologie sévère dans les suites.
Épistémologie des vertiges 229

1955 – Invitation de Hallpike à Paris pour un cours


international sur l’appareil vestibulaire
Dans le recueil des conférences [8], on trouve une description complète de cette
pathologie accompagnée d’un schéma explicite montrant la manœuvre de Dix
et Hallpike. On y trouve également les examens histologiques des labyrinthes
d’un sujet décédé d’une autre cause. « Du côté gauche, Il existait des altérations
importantes de la macule des organes otolithiques. Du côté droit, il était montré une
macule utriculaire normale » (figure 18.6). Il est dommage que cette description
en français ait été glissée dans une conférence sur la maladie de Menière, ce qui
a sans doute contribué à l’indifférence que rencontra cette présentation auprès
des meilleurs spécialistes européens de l’époque participant à cette rencontre. En
ce qui concerne la prise en charge, Hallpike conseillait de rassurer le patient et
d’attendre la régression spontanée.

Figure 18.6 Macules otolithiques du côté atteint et du côté sain.


Hallpike CS. In Aubin A. L’appareil vestibulaire. Paris : PUF ; 1957 : 380-1.
230 Guide pratique de rééducation vestibulaire

A B

Figure 18.7 Théorie de la cupulolithiase.


C : ouverture de la crus commune ; D : lithiase sortant du canal postérieur pour
tomber dans l’utricule.
Source : Schuknecht HF, Ruby RRF. Cupulolithiasis. Adv Oto-Rhino-Laryng. 1973 ; 20 : 434-43.

1973 – Émergence de la théorie de la cupulolithiase


de Schuknecht
À Boston, Schuknecht avait fondé une banque de rochers prélevés chez des sujets
qui avaient présenté des pathologies vestibulaires et qui étaient décédés d’une autre
cause. En cas d’antécédent de VPPB, il montra la présence de dépôts basophiles sur
la cupule du canal postérieur (figure 18.7). Il en tira l’hypothèse qu’il y avait des
dépôts qui alourdissaient la cupule du canal postérieur et la transformaient en cap-
teur d’accélération linéaire au lieu d’être un capteur d’accélération angulaire.

1980 – Dogme de la théorie de la cupulolithiase


La prise en charge reposait sur la physiothérapie (figure 18.8) et parfois sur la
chirurgie (figure 18.9).

Figure 18.8 Physiothérapie par exercices d’habituation pour le vertige positionnel


paroxystique bénin.
Source : Brandt T, Daroff RB. Physical therapy for benign paroxysmal vertigo. Arch Otolaryngol 1980 ; 106 : 484-5.
Épistémologie des vertiges 231

Fenêtre ovale Canal singulaire


(partie proximale)

Membrane de la
fenêtre ronde A B

Figure 18.9 Neurotomie du nerf ampullaire postérieur : oreille droite.


La membrane de la fenêtre ronde est découverte après fraisage de son sourcil.
A. Découverte du canal singulaire. B. Introduction d’un petit crochet dans sa partie
proximale.
Source : Gacek RR. Transection of the posterior ampullary nerve for the relief of benign paroxysmal vertigo. Ann Otol Rhinol
Laryngol 1974 ; 83 : 596-605.

La physiothérapie consistait en manœuvres provocatrices effectuées des deux


côtés par le patient lui-même (precipitating head positions). Le mécanisme pré-
sumé de cette thérapeutique était d’obtenir la dispersion des particules d’otolithes
dégénérés fixées sur la cupule. Les résultats semblaient bons mais ne tenaient pas
compte des guérisons spontanées.
La chirurgie fut proposée par Gacek (Syracuse). Elle consistait en une neurotomie
du nerf ampullaire du canal postérieur effectuée sous anesthésie locale. L’indication
se limitait aux formes chroniques durant plus de 2 ans. On commençait par élargir
la niche de la fenêtre ronde en fraisant son bord supérieur et postérieur jusqu’à
découvrir la totalité de la membrane cochléaire. Ensuite, on recherchait le canal
singulare en dessous de la membrane. On savait que le nerf avait été fraisé quand
le patient signalait un violent vertige. La présence d’un nystagmus vertical inférieur
confirmait la réussite de l’intervention. Le traitement était radical et définitif mais il y
avait un risque important de surdité postopératoire sévère par blessure de l’utricule.

1985 – Manœuvre efficace montrée par Toupet et Sémont


Toupet et Sémont ont présenté cette manœuvre au xixe symposium d’électro-
nystagmographie à Genève. Cent quarante-six patients avaient été examinés par
232 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Toupet pour VPPB. Tous avaient été soumis à une rééducation vestibulaire parti-
culière par Sémont, kinésithérapeute. Parmi ces 146 patients, 123 avaient été guéris
par une seule manœuvre, les autres lors de deux séances suivantes. Au cours du
congrès, Sémont pratiqua sa manœuvre. La salle, amusée, n’y croyait pas. Dans le
livre des résumés distribué au cours du symposium, on trouve 10 photographies
d’Alain Sémont effectuant sa démonstration sur une patiente pour un VPPB du
canal postérieur droit. Les photographies 1, 2, 5, 6, 7, 8, 9 et 10 correspondent exac-
tement à la description qu’il en a faite dans le rapport à la Société française d’ORL
sur les vertiges positionnels publié en 2007 (figure 18.10). En 1985, tous les ingrédients
étaient présents pour faire le diagnostic de VPPB et avoir un traitement efficace en
une seule séance. Il faut toutefois comprendre que les auteurs restaient bloqués sur
l’hypothèse d’une lithiase collée à la cupule du canal postérieur qu’il fallait désagréger.

Physiopathologie de la manœuvre de Sémont


1990 – Mise en évidence de particules flottant librement
dans l’endolymphe au cours d’interventions d’occlusion du canal semi-
circulaire postérieur par Parnes et McClure
Parnes, un chirurgien avait imaginé une intervention consistant à occlure le canal
semi-circulaire postérieur en cas de VPPB invalidant. Cette chirurgie était censée
supprimer les courants endolymphatiques produits par une cupulolithiase sous
l’effet de la pesanteur.
Chez deux patients, après avoir trépané le canal semi-circulaire postérieur, il avait
identifié des particules blanchâtres mobiles dans l’endolymphe (figure 18.11).
Cette découverte lui fit admettre qu’en cas de VPPB, il pourrait exister une autre
explication que le concept de cupulolithiase. Cette nouvelle hypothèse fut pré-
sentée à Philadelphie, à la Laryngological, Rhinological and Otological Society et fut
l’objet d’une publication dans le Laryngoscope [9].

Erreur d’épistémologie dans les vertiges


Depuis quelques années, se développait l’idée qu’il existait plusieurs formes cli-
niques de VPPB. Pour Hall en 1979, le fait qu’en maintenant la position déclen-
chante de façon prolongée, vertige et nystagmus s’épuisaient en quelques
secondes paraissait en contradiction avec le concept de cupulolithiase [9]. Brandt
et Sémont [10] eux-mêmes étaient arrivés à la même conclusion. Le concept de
cupulolithiase était peu probable compte tenu de l’arrêt spontané des nystag-
mus en maintenant la position finale. D’autre part, si on était en présence d’une
cupulolithiase, le nystagmus de la manœuvre provocatrice et le nystagmus de la
manœuvre libératrice seraient de sens inverse (figure 18.12, cf. aussi diapositives
1-21 à 1-25).
Épistémologie des vertiges 233

1 2 3

3 4 5

6
Figure 18.10 Manœuvre de Sémont par Alain Sémont.
Manœuvre complète pour un vertige positionnel paroxystique bénin du canal
postérieur droit. 1, 2. Le patient est couché sur son épaule droite tête en position
indifférente (manœuvre provocatrice). Le nystagmus antihoraire démarre (phase
rapide vue de l’observateur). 3. Rotation de la tête de 45° vers le haut, nez en l’air
pour augmenter la pente et accélérer le nystagmus antihoraire. Arrêt du nystagmus.
Attendre plusieurs minutes dans cette position. 4. Mise à nouveau de la tête en
position indifférente. 5. Bascule sur l’épaule gauche, la tête toujours en position
indifférente. Après une période de latence, le nystagmus antihoraire redémarre.
Il n’a pas changé de sens. 6. Rotation de la tête de 45° vers le bas, nez en bas pour
augmenter la pente et accélérer le nystagmus antihoraire jusqu’à son arrêt. 7. Relever
le patient. La lithiase peut finir sa course dans la crus commune et déclencher une
violente réaction du patient qui se jette en arrière se croyant projeté en avant.
Source : Sémont A. Manœuvre libératoire de Sémont. In Sauvage JP, Chays A, Gentine A, eds. Vertiges positionnels. Rapport
SFORL 2007 © SFORL.

En 1993, très efficace mais mal comprise en France, la manœuvre de Sémont était
encore considérée comme la réponse à une lithiase du canal postérieur collée à
sa cupule. La cause amusante de la persistance de cette erreur provenait du fait
qu’en France, on dénommait les nystagmus provoqués en fonction de la gravité :
nystagmus géotropiques et antigéotropiques. Ainsi, le nystagmus permettant le
234 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Figure 18.11 Amalgame dans le canal semi-circulaire postérieur.


Source : Sémont A. Histoire de vertige. Conséquences en tous genres. In Sauvage JP, Chays A, Gentine A, eds. Vertiges
positionnels. Rapport SFORL 2007 © SFORL.

A B

Figure 18.12 Arguments qui seraient en faveur d’une cupulolithiase et contre


l’hypothèse d’une canalolithiase.
Si cela avait été une lithiase attachée à la cupule, la manœuvre provocatrice aurait créé
un courant ampullifuge stimulant pour le canal postérieur droit avec un nystagmus
antihoraire et vertical supérieur (A), la manœuvre thérapeutique aurait alors créé
un courant ampullipète inhibiteur avec nystagmus horaire et vertical inférieur (B).
Dans les deux cas, le nystagmus n’aurait pas été transitoire mais se serait prolongé
indéfiniment.
Épistémologie des vertiges 235

diagnostic de VPPB roulait vers le bas et le nystagmus libératoire roulait vers le


haut. En réalité, ce n’était pas le nystagmus qui s’était inversé, c’était le patient qui
avait changé de position.
Michel Toupet, élève du Pr Georges Freyss (service ORL de l’hôpital Lariboisière),
avait fondé à Paris un « Centre d’explorations fonctionnelles otoneurologiques »
faisant autorité dans toute la France et bien au-delà. Dans de nombreuses publi-
cations, il avait adopté et simplifié la manœuvre de Sémont. On retiendra un
film, produit et distribué gratuitement par les Laboratoires Ipsen, ayant répandu
sa façon de la pratiquer à travers toute la France. À Paris, au congrès « Vertiges
93 », il communiqua sur l’« Évolution à long terme de 186 vertiges paroxystiques
positionnels bénins traités par cette manœuvre ». Dans la publication qui suivit,
le concept de base qu’il donnait reposait sur la notion de cupulolithiase du canal
postérieur qu’il fallait disperser (figure 18.13).
▪ Manœuvre diagnostique « Le patient est rapidement allongé sur le lit d’examen.
De la jambe droite, le praticien vient de rejeter les deux jambes du patient sur le
divan. La cupule du canal semi-circulaire postérieur situé de ce côté subit l’action
de la pesanteur ce qui provoque un vertige durant 20 secondes, accompagné d’un
nystagmus qui bat dans le plan de ce canal semi-circulaire. C’est un nystagmus
rotatoire géotropique, dont la phase rapide est dirigée vers l’oreille la plus basse. »
▪ Manœuvre thérapeutique. « Le patient reste d’abord allongé sur un divan dans
la position qui a déclenché le vertige. On effectue ensuite un grand mouvement de
bascule retournant rapidement le patient. En même temps, d’un geste rapide de la
jambe, le médecin expédie les jambes du patient sur le divan. Dans un délai variant
entre 2 secondes et 4 minutes, apparaît un grand vertige rotatoire avec un nystag-
mus rotatoire antigéotropique. Il semble traduire un déplacement d’otoconies de
la cupule du canal postérieur ou leur retour sur la macule utriculaire. » [11]

2
1

1
2

A B
Figure 18.13 Manœuvres diagnostique (A) et thérapeutique (B).
1. Macule utriculaire. 2. Cupule du canal postérieur.
Source : Toupet M. Évolution à long terme de 186 vertiges paroxystiques positionnels bénins traités par la manœuvre.
Vertiges 93, Arnette : Paris ; 1994. p. 59-90.
236 Guide pratique de rééducation vestibulaire

En lisant le texte, on a l’impression que le nystagmus déclenché par la manœuvre


thérapeutique est inversé par rapport à celui déclenché par la manœuvre provo-
catrice. Le nystagmus provoqué par la manœuvre de Dix et Hallpike roulait sur le
plancher de l’orbite vers l’oreille la plus basse, donc vers le bas. Il était par consé-
quent géotropique. Au contraire, dans la manœuvre libératrice, le nystagmus libé-
ratoire roulait vers le haut et il était donc devenu antigéotropique. Cette façon de
qualifier le nystagmus entraîna la croyance d’un changement de sens du nystag-
mus, confirmant la théorie de la cupule lourde (cupulolithiase de Schuknecht,
pour qui la cupule était transformée en récepteur sensible à la gravité). Or, répé-
tons-le, ce n’était pas le nystagmus qui s’était inversé mais la position du malade
. Il était d’abord couché sur la nuque. Ensuite, il était couché sur le nez. En fait,
la manœuvre provocatrice et la manœuvre thérapeutique provoquent le
même nystagmus (cf. diapositives 2-12, 2-20 et 2-21).
Le concept de cupulolithiase fut donc abandonné au bénéfice de celui de cana-
lolithiase se déplaçant dans le canal semi-circulaire postérieur. Ce concept s’est
vite répandu dans le monde entier. Ce concept s’est vite répandu dans le monde
entier car il expliquait :
1. la latence : le temps que la lithiase se mette en mouvement sous l’influence de
la gravité pour produire le courant ampullifuge ;
2. l’inefficacité des manœuvres trop lentes (car c’était un nystagmus de position-
nement et non un nystagmus de position) ;
3. la durée courte du vertige qui cesse dès que la lithiase a atteint la partie déclive
du canal ;
4. le succès des manœuvres libératrices du fait que la lithiase poursuit son chemin
jusque dans la crus commune pour tomber dans l’utricule où elle est réabsorbée.
C’est tout à l’honneur de Michel Toupet et d’Alain Sémont dont il faut être recon-
naissant d’avoir reconnu cette pathologie et d’avoir diffusé un traitement fonc-
tionnel remarquablement efficace. La manœuvre de Sémont ne compte en fait
que sur la pesanteur. Si dans le passé, tout vertige était « Menière », ensuite, tout
vertige était devenu « cristaux ».
La manœuvre de Sémont complète dite libératoire a en fait peu changé depuis
le début (cf. diapositives 2-21 et 2-12). Il fallait comprendre que les mouvements
de bascule rapides du patient étaient effectués avec une tête en position indiffé-
rente de manière à plaquer et à immobiliser la lithiase sur la paroi du canal et à
l’empêcher de revenir vers l’ampoule. Ce n’est qu’une fois la tête posée sur la table
et après que le nystagmus a démarré que l’on doit effectuer la rotation de 45°
pour accélérer le nystagmus provoqué (rotation vers le haut, nez en l’air pour la
manœuvre provocatrice et rotation vers le bas, nez sur la table pour la manœuvre
thérapeutique). On ne cherche aucun effet catapulte.
Épistémologie des vertiges 237

1992 – Confirmation du concept de canalolithiase par la manœuvre


d’Epley (canalith repositioning procedure [12])
C’est une manœuvre thérapeutique qui ne comptait d’emblée que sur la pesan-
teur sans ambiguïté, confirmant le principe de la manœuvre de Sémont origi-
nale. Elle consiste à retourner le patient, allongé sur le dos, de 180° dans le plan
axial. Après avoir pratiqué une manœuvre de Dix et Hallpike classique (rotation
de la tête de 45° vers la droite permettant d’étudier le côté droit et rotation de
45° vers la gauche permettant d’étudier le côté gauche). Une fois arrivé dans la
position déclenchante, on demande au patient de tourner la tête de 90° vers le
côté sain. Cette rotation ne doit déclencher aucun vertige. On le fait ensuite se
retourner sur le côté opposé du corps pour permettre une nouvelle rotation
de la tête de 90° vers le côté sain. Un retournement de 180° a ainsi été obtenu.
La tête arrive exactement dans la même position qu’après une manœuvre de
Sémont. C’est, à l’évidence, uniquement la pesanteur qui enclenche le départ
de la lithiase en direction de la crus commune (cf. diapositives 2-17, 2-18 et vidéos
suivantes). L’efficacité est signalée par le retour du vertige et la constatation d’un
nystagmus identique à celui que l’on avait provoqué lors de la manœuvre de Dix
et Hallpike initiale.

Conclusion : consensus mondial au xxie siècle


Même si ni le scanner ni l’IRM n’ont encore pu montrer la lithiase, la théorie de
la canalolithiase est l’objet d’un consensus mondial. L’intérêt de l’histoire du VPPB
au cours du xxe siècle est qu’elle repose sur l’observation clinique avec un débat
émaillé de blocages et de déblocages passionnés.
Mais de nombreux cas restent mystérieux. Il existe des succès immérités : patients
immédiatement guéris après une manœuvre ratée, patients guéris après une
épreuve calorique, ou encore VPPB rebelles guérissant en 24 heures après un trai-
tement par flunarizine (observation personnelle). S’agit-il de globules de calcium,
de potassium, de protéines ? Pourquoi le terrain migraineux ou encore l’ostéopo-
rose favorisent-ils la récidive ? À l’inverse, il existe des VPPB typiques mais rebelles
qui reviennent voir leur médecin, IRM normale à la main et qui n’ont pas tiré de
bénéfice des meilleurs spécialistes de manœuvres « libératoires ». S’agit-il d’hy-
drops localisés au canal postérieur ? De déhiscence du fond du conduit auditif
externe (méat acoustique externe dans la Terminologia Anatomica) avec mini-
compression du nerf ampullaire postérieur ? D’aqueduc cochléaire perméable ?
L’histoire du VPPB postérieur n’est probablement pas finie.
238 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Si la maladie de Menière m’était contée


Le 8 janvier 1861, à l’Académie impériale de médecine de Paris, Prosper Menière
(figure 18.14) fit une lecture intitulée : « Sur une forme de surdité grave dépendant
de l’oreille interne ». Pourtant, le titre de la publication de son exposé dans la
Gazette médicale du 21 septembre 1861 était devenu : « Mémoire sur les lésions
de l’oreille interne donnant lieu à des symptômes de congestion cérébrale apoplec-
tiforme ». Dans cette publication, il décrit une maladie qui porte son nom et qui
aujourd’hui n’a pas pris une ride. Pour résumer, c’est une maladie paroxystique
chronique comportant des crises de vertige durant moins de 24 heures et sépa-
rées de périodes asymptomatiques tandis que se développe une surdité de per-
ception unilatérale prédominant sur les fréquences graves devenant profonde au
fil de l’évolution. Pour comprendre la nature cette maladie, il a fallu attendre la
découverte histologique de l’hydrops endolymphatique par Yamakawa en 1938
[13] et Hallpike et Cairns en 1983 [14].

Première confusion avec un modèle de syndrome


labyrinthique périphérique
Pendant un siècle, la description de cette maladie subit de multiples avatars. Encore
en 1957, Aubry et Pialoux la décrivent sous le nom de « vertige de Menière » [15].
« 1. C’est un syndrome labyrinthique global de type irritatif périphérique ren-
contré dans les atteintes de l’oreille moyenne et dans l’hydropisie labyrinthique.

Figure 18.14 Prosper Menière en 1833 : portrait par Bodinier.


Source : Bibliothèque nationale.
Épistémologie des vertiges 239

2. La vraie maladie de Menière est un syndrome endolabyrinthique destruc-


tif comme l’hémorragie labyrinthique. »
Ainsi, la maladie de Menière est devenue le modèle de syndrome labyrinthique
périphérique s’opposant au syndrome labyrinthique central et au syndrome
labyrinthique radiculaire. L’arrivée des publications anglo-saxonnes sur l’hydrops
endolymphatique a enfin progressivement apporté la fin de ces errances sémio-
logiques.
L’explication de cette dérive est que Prosper Menière a rencontré une forte opposi-
tion lors de sa présentation orale de janvier 1861. Pour la première fois, il établissait
la preuve d’un lien entre l’oreille interne et les vertiges qui étaient classés aupara-
vant dans les épilepsies. Plusieurs contradicteurs s’étaient manifestés. Ensuite, tout
au long de l’année 1861, il a dû réfléchir et construire un argumentaire convaincant.
On en a la trace dans plusieurs extraits publiés entre février et juillet 1861 [16]. En
témoignent les changements de titre et de contenu dans plusieurs extraits publiés
entre janvier et juin 1861. En particulier, il faisait appel à ses collègues pour recruter
de nouveaux patients confirmant son hypothèse.

Deuxième confusion avec une jeune fille morte


en quelques jours
L’erreur de Prosper Menière se trouve dans sans sa publication de septembre 1861.
Croyant pouvoir mieux convaincre, il ajouta un cas clinique qu’il avait rencontré
15 ans auparavant. Ce cas spectaculaire occulta tout le reste. Il s’agissait d’une jeune
fille qui, ayant voyagé la nuit, en hiver, sur l’impériale d’une diligence lorsqu’elle était
à une époque cataméniale, éprouva par suite d’un froid considérable, une surdité
complète et subite. Elle présentait des vertiges continuels, le moindre effort pour
se mouvoir produisait des vomissements, et elle est décédée le 5e jour. Comme
la malade était devenue tout à fait sourde après avoir toujours parfaitement
entendu, les temporaux ont été ôtés, les canaux demi-circulaires étaient remplis
d’une matière rouge, plastique, sorte d’exsudation sanguine qui n’existait pas dans
le limaçon (conduit cochléaire dans la Terminologia Anatomica).
La logique de l’exposé de Menière construite en deux temps était parfaite :
1. à partir d’observations modèles, il décrit sa maladie comme étant des crises
itératives de vertige comme nous la concevons toujours aujourd’hui ;
2. puis il attribue ces crises aux canaux semi-circulaires en faisant le rapproche-
ment avec une observation personnelle d’hémorragie labyrinthique.
Mais la littérature médicale ne retint que la jeune fille ayant voyagé la nuit, en
hiver, sur l’impériale d’une diligence lorsqu’elle était à une époque cataméniale.
Elle oublia que des hommes jeunes et robustes pouvaient éprouver, sans cause
appréciable, des crises de vertiges, avec des nausées et des vomissements. À trop
vouloir convaincre, on obtient l’inverse. Pendant près d’un siècle, la maladie de
Menière resta un syndrome labyrinthique destructif aigu.
240 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Pourquoi cette clairvoyance chez Prosper Menière ?


Elle résulte chez lui de la réunion
▪ d’une solide culture médicale ;
▪ d’une passion pour l’otologie ;
▪ de ses relations avec Marie Jean-Pierre Flourens.
Prosper Menière est né à Angers le 16 juin 1799. Fils de commerçant, il effectua
des études de médecine à Paris : d’abord externe puis interne en 1824. Il fut choisi
par Dupuytren, comme aide de clinique à l’Hôtel-Dieu. Son président de thèse
fut l’anatomiste Cruveilhier. Il fut désigné pour aller à Bordeaux constater la réalité
de la grossesse de la duchesse de Berry, mère du fils posthume du duc de Berry.
Ensuite, les missions pour des épidémies de choléra lui ont valu la Légion d’Hon-
neur. Enfin, il fut nommé médecin en chef de l’Institut des Sourds-muets à Paris
en 1838. Sa vie a ensuite été dévouée à l’otologie. Il a traduit en français le Traité
des maladies de l’oreille de Kramer puis publié des mémoires sur l’exploration de
l’appareil auditif et l’éducation des sourds-muets. Parmi de nombreuses publica-
tions, son mémoire contenant la description de ce qui deviendra la « maladie de
Menière » sera sa dernière œuvre, seulement lue lors de la séance de l’Académie
impériale de médecine du 8 janvier 1861. Elle ne sera publiée que le 21 septembre
1861. Menière meurt de pneumonie en février 1862.
Sa clairvoyance tient aussi de ce que l’otologie est en pleine révolution depuis
les expériences de Flourens qui avait montré en 1830 que la section des canaux
semi-circulaires des pigeons « provoquait des mouvements oculaires dans le plan
des canaux sectionnés ». Or Menière connaissait bien Flourens. Il était donc bien
placé pour attribuer les vertiges au labyrinthe vestibulaire.
En 1938 [13] puis en 1983 [14] est née l’hypothèse d’un trouble pressionnel endo-
lymphatique connu sous le nom d’hydrops. Depuis, il est devenu le substrat clas-
sique de la maladie de Menière [17]. La nouveauté est que l’on peut maintenant
voir l’hydrops endolymphatique en IRM et évaluer les déformations du canal
cochléaire qu’il induit par des explorations fonctionnelles adéquates. Ainsi est né le
concept de maladie pressionnelle du labyrinthe toujours en plein développement.
L’endolymphe n’est plus la seule concernée, il y a aussi des troubles pressionnels
périlymphatiques en relation avec le LCS. Enfin, il y a des rapports de la maladie de
Menière avec la migraine, ce que Menière lui-même avait déjà pressenti.

Dernière (petite) polémique : Menière ou Ménière ?


La polémique est : faut-il mettre un accent aigu sur le premier « e » de Menière ?
Toute sa vie, il signa ses articles, ses livres et ses dédicaces du nom de Menière
[16]. Pourquoi alors l’orthographe « Menière » a-t-elle pu parvenir jusqu’à nous ?
Au point qu’en 2010, dans son article paru dans Otolaryngology Head and Neck
Surgery, Herbert Silverstein orthographie encore Ménière avec un accent aigu sur
le premier « e ».
Épistémologie des vertiges 241

La réponse est au cimetière du Montparnasse à Paris ! Jetons un œil dans la tombe


de la famille Menière (figure 18.15A). Sur la paroi de gauche (figure 18.15B) les
épitaphes sont orthographiées avec un accent aigu sur le premier « e » et du côté
droit, elles sont orthographiées sans accent aigu (figure 18.15C). Du côté gauche,
il s’agit de Prosper et de son épouse née Becquerel (tante du prix Nobel). Du côté
droit, il s’agit de leur fils Émile et de leur petit-fils (mort au champ d’honneur en
1916). Aucun de ces deux-là ne porte d’accent sur le premier « e ».
Il ne faut pas être grand clerc pour se rendre compte qu’à la mort de son père
et de sa mère, Émile leur a « collé » un accent aigu. Plus encore, il s’est attribué le
mérite de la découverte de son père. Il en a même fait son fonds de commerce.
Heureusement, les petits-enfants de Prosper ont effacé l’accent du nom de leurs
parents et rétabli la bonne orthographe. Ce 7 février 1862, c’était bien Prosper
Menière qui décéda avant que son fils ne le tue une seconde fois. Ménière : un
accent au parfum de parricide ?

Initiation au bilan instrumental ORL dans les vertiges


Il comporte une otoscopie avec un microscope de consultation, une audiomé-
trie, une VNG et une étude des potentiels évoqués auditifs. Dans le cas du zona
auriculaire par exemple, le simple examen de l’oreille externe suffit au diagnostic
(figure 18.16).

Otoscopie
Le microscope de consultation peut être utilisé chez un patient assis (figure 18.17)
ou allongé. Il est surtout destiné à l’otoscopie. Le grossissement utile est de 4 à
16. L’intensité de l’éclairage permet d’apprécier la transparence de la membrane
tympanique. Les microscopes sur pied permettent d’examiner un enfant allongé
et d’effectuer de petits gestes opératoires.
Le résultat de l’otoscopie peut être normal (figure 18.18) ou témoigner d’une
otite chronique (figure 18.19) : présence d’otalgies, d’otorrhée purulente, sangui-
nolente et de fièvre. En particulier, les labyrinthites bactériennes avec syndrome
vestibulaire aigu succèdent le plus souvent à une otite chronique cholestéatoma-
teuse connue de longue date ayant même nécessité de multiples gestes chirur-
gicaux (évidements pétromastoïdiens et tympanoplasties). En cas de poussée de
réchauffement, les germes en cause sont le pneumocoque, le staphylocoque
et Haemophilus influenzae avec leurs risques méningoencéphaliques. Ce sont
des urgences ORL nécessitant une hémoculture. La labyrinthite est souvent la
conséquence d’une fistule labyrinthique. Après une antibiothérapie adaptée et
un examen tomodensitométrique pour évaluer les dégâts osseux, une éven-
tuelle éradication chirurgicale complémentaire doit être envisagée en milieu
spécialisé.
242 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Figure 18.15 Explication des différentes orthographes de Menière.


A. Tombeau de la famille Menière au cimetière du Montparnasse à Paris. B. Épitaphes
de Prosper Ménière et de sa femme Anne Pauline Becquerel écrites avec un accent
aigu sur le premier « e ». C. Épitaphes du fils Émile de Prosper Menière et de son petit-
fils écrites sans accent aigu sur le premier « e ».
Épistémologie des vertiges 243

Figure 18.16 Éruption zostérienne du conduit auditif externe (méat acoustique


externe dans la Terminologia Anatomica).

Bilan audiométrique
L’association d’une surdité aux vertiges rétrécit le champ des hypothèses diagnos-
tiques. L’otoscopie a été effectuée sous microscope en position assise. La décou-
verte d’une otite chronique impose d’emblée la recherche d’un signe de la fistule
avec enregistrement du nystagmus provoqué.

Figure 18.17 Microscope de consultation binoculaire.


Source : Sauvage JP. Guide d’ORL – Clinique et thérapeutique. © 2016 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
244 Guide pratique de rééducation vestibulaire

A B

Figure 18.18 Tympan droit normal.|


A. Membrane tympanique grise, fine et transparente. B. Osselets : marteau,
enclume et étrier (respectivement malleus, incus et stapes dans la Terminologia
Anatomica) ne sont vus qu’en cas d’ostéolyse secondaire à une otite chronique.
1 : ligament tympanomalléaire postérieur ; 2 : membrane de Schrapnell ; 3 : ligament
tympanomalléaire antérieur ; 4 : saillie de l’apophyse (processus dans la Terminologia
Anatomica) externe du marteau ; 5 : ombilic ; 6 : manche du marteau ;
ATM : articulation temporomandibulaire ; TL : triangle lumineux.
Source : Sauvage JP. Guide d’ORL – Clinique et thérapeutique. © 2016 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Puis l’acoumétrie et l’audiométrie tonale et vocale permettent de qualifier et de


quantifier un déficit auditif. Les surdités sont de trois types :
▪ les surdités de transmission : atteintes de l’oreille moyenne (tympan, osselets,
caisse du tympan) ;
▪ les surdités de perception endocochléaire : atteintes des liquides labyrinthiques
endolymphatiques et des cellules de l’organe de Corti (organe spiral dans la Termi-
nologia Anatomica) ;
▪ les surdités de perception rétrocochléaires : névrite zostérienne et neurinome
de l’acoustique. Au-delà, des noyaux cochléaires, les surdités centrales sont diffi-
ciles à qualifier.
● Premier cas : il s’agit d’une surdité de perception unilatérale sur les fréquences
aiguës à tympan normal. Le patient ne doit pas être lâché tant que l’on n’a
pas tout fait pour rechercher la présence d’un schwannome du VIII. L’étude
des potentiels évoqués auditifs (PEA) (figure 18.20), en montrant la présence
d’un allongement significatif de l’écart I-V par rapport au côté opposé, indique qu’il
Épistémologie des vertiges 245

Figure 18.19 Otites chroniques : poches de rétraction (tympans droits).


A. Petite poche centrale à surveiller. B. Atrophie globale du tympan avec poche de
rétraction accolée à la branche descendante de l’enclume (incus dans la Terminologia
Anatomica). Prévoir rapidement un renforcement de la membrane tympanique.
C. Poche de rétraction postérosupérieure décollable au Valsalva. Prévoir un
renforcement tympanique dès que possible. D. Poche de rétraction mésotympanique
postérieure au stade adhésif. Prévoir des difficultés chirurgicales pour relever la poche
sans laisser de débris épidermiques dans la caisse. E. Poche de rétraction atticale avec
atticotomie spontanée. Suspicion d’envahissement de la fossette sus-tubaire en avant.
Prévoir un nettoyage complet avec reconstruction du mur de la logette. F. Poche de
rétraction non contrôlable. Étrier (stapes dans la Terminologia Anatomica) noyé dans
les squames et lyse de la branche de l’enclume. Probable cholestéatome sous-jacent.
Attendre le résultat du scanner.
Source : Sauvage JP. Guide d’ORL – Clinique et thérapeutique. © 2016 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
246 Guide pratique de rééducation vestibulaire

OD C
+z
I–V

I–V

OG 1 ms

ITI-V
Figure 18.20 Tracés des potentiels évoqués auditifs.
Oreille droite (OD), tracé normal : les cinq ondes sont présentes avec un écart I-V
à 4,2 ms. Oreille gauche (OG), surdité rétrocochléaire avec une onde I de latence
identique au côté droit et une onde V très retardée avec un écart I-V égal à 5,3 ms.
Forte suspicion de neurinome de l’acoustique gauche.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

s’agit d’une surdité de perception de type rétrocochléaire et impose de passer à


l’IRM.
S’il s’agit d’un schwannome, la surdité est ancienne et progressive. Du fait de
la compensation qui se fait au fur et à mesure du lent processus destructif, on
ne retrouve de vertiges que dans un passé lointain. Parfois, ce sont des surdités
brusques à répétition associées à des vertiges témoignant d’hémorragies intratu-
morales. Ne pas oublier non plus que le schwannome peut être intralabyrinthique
et n’être seulement diagnostiqué que par une injection de gadolinium en T1.
● Deuxième cas : il s’agit d’une surdité prédominant sur les fréquences graves.
Ce type de surdité, associé à des acouphènes de timbre grave, indique une
atteinte du sommet de la cochlée comme on en trouve dans la maladie de
Menière. Les PEA montrent alors qu’il s’agit d’une surdité de type endoco-
chléaire. Elle fluctue d’une heure à l’autre et d’un jour à l’autre en même temps
que les vertiges évoluent par crises. Dans la maladie de Menière, l’atteinte est
importante, d’abord unilatérale, elle n’atteint l’autre côté que dans les années
suivantes.
Épistémologie des vertiges 247

● Troisième cas : il s’agit d’une surdité de perception bilatérale à tympan nor-


mal. Seules les surdités rapidement évolutives sont à prendre en compte. Une
affection auto-immune ou des malformations labyrinthiques doivent être alors
recherchées. Si la surdité est minime, fluctue et prédomine sur les fréquences
graves, on peut parfois incriminer la migraine.

Vidéonystagmographie
C’est une méthode d’oculographie consistant à enregistrer les mouvements
linéaires de l’œil en analysant une image de l’iris en vidéo infrarouge. En VNG, on
enregistre le mouvement d’un seul œil : celui du côté de la caméra. L’autre œil est
soit ouvert dans la lumière avec ou sans fixation oculaire, soit mis dans l’obscurité
à l’aide d’un cache. Il faut souligner que les mouvements torsionnels de l’œil ne
sont pas enregistrés en pratique courante, ce qui fait que les nystagmus générés
par les canaux semi-circulaires verticaux ne sont étudiés que par leur composante
verticale. N’ayant pas de notion sur le sens du mouvement torsionnel, on ne sait
jamais quel est le côté qui a généré le nystagmus.
Les mouvements de l’œil sont enregistrés dans le sens horizontal et dans le sens
vertical. Pour un mouvement horizontal, la ligne de base représente l’œil en posi-
tion médiane. Si l’œil se déplace vers la droite, le tracé s’infléchit vers le haut. Si
l’œil se déplace vers la gauche, le tracé s’infléchit vers le bas. Pour l’enregistrement
des mouvements verticaux, si l’œil se déplace vers le haut, le tracé s’infléchit vers
le haut. Si l’œil se déplace vers le bas, le tracé s’infléchit vers le bas (figures 18.22 et
18.23). Une calibration préalable permet de mesurer exactement l’angle de rota-
tion de l’œil et la pente de la courbe représente la vitesse du mouvement de l’œil.

Protocole
Évaluation du système saccadique, du système de poursuite oculaire
et du système optocinétique
C’est une évaluation du système oculomoteur purement visuel.
▪ Les saccades sont des mouvements rapides de l’œil qui permettent d’aller
quasi instantanément d’une cible visuelle à une autre. Pour les enregistrer, on fait
apparaître le point lumineux d’un côté et de l’autre de l’écran.
▪ Dans la poursuite oculaire, l’œil doit suivre le point qui se déplace latéralement
sur l’écran à une vitesse sinusoïdale lente et régulière.
▪ Enfin, pour les réflexes optocinétiques, le stimulus visuel consiste en stries ver-
ticales défilant dans le sens horizontal (figure 18.24) puis dans le sens vertical.
248 Guide pratique de rééducation vestibulaire

125 250 500 1000 2000 4000 8000 125 250 500 1000 2000 4000 8000

0 0
10 10
20 20
30 30 RINNE
RINNE
40 40
50 50
60 60
70 70
80 80
90 90
100 100
110 110
120 120
A B

125 250 500 1000 2000 4000 8000 125 250 500 1000 2000 4000 8000

0 0
10 10
20 20
30 30
40 40
50 50
60 60
70 70
80 80
90 90
100 100
110 110
120 120
C D
Figure 18.21 Surdités unilatérales significatives dans les vertiges.
A. Audition normale. B. Surdité de transmission (Rinne négatif avec conduction
osseuse meilleure que la conduction aérienne dans les otites chroniques). C. Surdité
de perception prédominant sur les fréquences aiguës (Rinne positif avec conduction
aérienne meilleure que la conduction osseuse et Weber latéralisé du côté sain dans le
neurinome de l’acoustique). D. Surdité de perception prédominant sur les fréquences
graves (maladie de Menière). En traits noirs : conduction aérienne ; en crochets et
grisés : conduction osseuse.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.

Recherche de la présence d’un nystagmus spontané


Elle est effectuée sujet assis, tête droite et immobile dans un environnement
stable d’abord dans le regard médian, puis dans le regard vers la droite, puis dans
le regard vers la gauche et enfin vers le haut :
▪ d’abord dans la lumière ;
▪ puis dans l’obscurité.
Épistémologie des vertiges 249

Mouvement de l’œil

Mouvement de l’œil
vers la gauche
vers la droite

Œil en position Œil tournant


médiane vers la gauche t
Œil tournant
vers la droite

A
Mouvement de l’œil

Mouvement de l’œil
Œil en position
vers le haut

vers le bas
médiane
Œil tourné t
vers le haut Abaissement
(élévation de l’œil) de l’œil
B
Figure 18.22 Enregistrement des mouvements de l’œil.
A. Dans le sens horizontal. B. Dans le sens vertical. Les nystagmus vestibulaires sont
des nystagmus à ressort comportant deux mouvements de l’œil de sens inverse,
d’amplitudes égales mais de vitesses différentes : la phase lente, d’origine vestibulaire, et
la phase rapide, brusque mouvement de rappel qui est d’origine centrale. C’est le sens de
la phase rapide qui détermine celui du nystagmus. Si la phase rapide bat du côté droit,
c’est un nystagmus droit et inversement. L’enregistrement d’un nystagmus à ressort
horizontal droit est un tracé en dents de scie en fonction du temps (cf. figure 18.23).
La vitesse du mouvement de l’œil se mesure par la tangente de l’angle α, soit le rapport
A/t (A exprimé en degrés d’excursion de l’œil et t exprimé en secondes).
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.

Nystagmus droit horizontal


Mouvement de l’œil vers la gauche
Mouvement de l’œil vers la droite

D
ide

ide

e Ph Ph Ph
ase ase ase
p

g
ra

ra

r len len len


te te te
se

se

é
a

A
Ph

Ph

s t1 
d t

a Nystagmus gauche horizontal
n
Ph

Ph

Ph

g te te te
as

as

as

l len len len


se se se
er

er

er

e Pha Pha Pha


ap
ap

ap
ide

ide

ide

Échelle de temps (secondes) t

Figure 18.23 Enregistrement des nystagmus à ressort horizontaux.


Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.
250 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Figure 18.24 Stimulations optocinétiques.


Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.

Recherche des nystagmus de position


Elle est effectuée en plaçant le patient dans différentes positions statiques :
▪ assis en antéflexion ;
▪ puis en rétroflexion ;
▪ puis en latéroflexion droite et gauche ;
▪ enfin en torsion cervicale droite et gauche.
Dans le test de torsion cervicale, seul le fauteuil tourne. La tête est maintenue
immobile à deux mains pour ne pas stimuler les canaux semi-circulaires (épreuve
de Conraux). Lorsque le fauteuil tourne vers la gauche du patient, c’est une tor-
sion cervicale droite et réciproquement. Chez certains malades, cette épreuve
peut entraîner des syncopes. Elle doit être effectuée avec prudence sur un terrain
vasculaire.
Le patient est couché en décubitus dorsal tête droite, fléchie de 30° pour verticali-
ser le canal horizontal, puis on le roule en décubitus latéral droit, puis en décubitus
latéral gauche suivi d’un redressement rapide (relevé).
Épreuves rotatoires
▪ Stimulus sinusoïdal entretenu (figure 18.25).
▪ Stimulus sinusoïdal par bursts (figure 18.26). Une série de cinq impulsions rota-
toires d’amplitude croissante puis décroissante permet d’avoir une meilleure idée
du gain du réflexe vestibulo-oculaire dans la lumière et dans l’obscurité pour des
accélérations plus fortes que dans l’épreuve giratoire pendulaire entretenue tradi-
tionnelle.
Épistémologie des vertiges 251

16.0 18.0 20.0 22.0 24.0 26.0 28.0

240.0

Se
ns
re hor
i aire
120.0 ora
ntih
nsa
Se
00.0
Changement
de sens
–120 de rotation

–240

Mouvement de l’œil
–360

Œil
Cumulée
Fauteuil

Figure 18.25 Conventions pour l’épreuve giratoire pendulaire entretenue.


Mouvement horizontal de l’œil dans les deux sens (en rouge). Enregistrement du
mouvement du fauteuil (en vert). Cumulée des phases lentes (en bleu).
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
Dessins : Carole Fumat.

Figure 18.26 Cumulée des mouvements oculaires au cours d’une épreuve giratoire
par bursts.
Effectuée dans la lumière (VVOR), la compensation des mouvements du fauteuil est
complète. Dans l’obscurité (VOR1), la réduction de la compensation témoigne de la
suppression de l’effet optocinétique. Une deuxième mesure (VOR2) témoigne d’une
bonne reproductibilité. L’inhibition quasi complète des nystagmus par la fixation
(IFO) témoigne d’un bon fonctionnement cérébelleux.
Source : Sauvage JP. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation. © 2020 Elsevier Masson. Tous droits réservés.
252 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Recherche de l’indice de fixation oculaire (IFO)


Ce test peut s’effectuer plus facilement avec des stimuli par bursts. On enlève le
cache de l’œil maître et on demande au patient de fixer un point lumineux fixé au
fauteuil, tournant avec lui et distant de 1 m. Normalement, le nystagmus perro-
tatoire disparaît instantanément. Cette inhibition est d’origine cérébelleuse. L’IFO
est le rapport entre le gain de la vitesse lente du nystagmus avec fixation et sans
fixation. Il doit être inférieur à 20 %.
Épreuve calorique
On termine le bilan par cette épreuve car elle induit un vertige peu intense et bref
mais parfois mal supporté. Elle n’interroge que le canal semi-circulaire horizontal.
Le patient, assis ou couché, doit rester la tête inclinée en arrière de 60° pour ver-
ticaliser le canal horizontal. Avec un distributeur d’eau thermorégulé, on irrigue
successivement les conduits auditifs externes (méats acoustiques externes dans
la Terminologia Anatomica) avec une eau à 44 °C (épreuve chaude) et une eau à
30 °C (épreuve froide), soit 7 °C en plus ou en moins par rapport à la température
du corps (soit quatre épreuves).
Chaque épreuve déclenche un vertige et un nystagmus en agissant sur le canal
semi-circulaire horizontal : excitation (épreuve chaude) ou inhibition (épreuve
froide). Le nystagmus est provoqué par deux processus :
▪ des courants de convection dans le canal semi-circulaire horizontal verticalisé
par la rétroflexion de la tête ;
▪ une excitation calorique directe sur les cellules ciliées des ampoules canalaires
qui persiste en impesanteur dans les navettes spatiales (épreuves caloriques à l’air).
Ces épreuves sont mal tolérées chez les migraineux, chez lesquels elle peut même
déclencher un accès de céphalée.
Les résultats forment le « papillon de Freyss », quatre nystagmus sont normale-
ment obtenus (cf. diapositive 6-10) :
▪ ODC : nystagmus droit (épreuve chaude dans l’oreille droite = excitation) ;
▪ ODF : nystagmus gauche (épreuve froide dans l’oreille droite = inhibition) ;
▪ OGF : nystagmus droit (épreuve froide dans l’oreille gauche = inhibition) ;
▪ OGC : nystagmus gauche (épreuve chaude dans l’oreille gauche = excitation).

Interprétation
Mise en évidence d’une asymétrie vestibulaire
Devant un vertige, la première démarche est de rechercher une asymétrie entre les
deux côtés. L’existence d’un nystagmus spontané est déjà le témoin d’une asymé-
trie tonique entre les côtés droit et gauche induite par une lésion. Dans une névrite
Épistémologie des vertiges 253

vestibulaire, on a affaire à une lésion périphérique. Le nystagmus spontané bat du


côté sain (nystagmus déficitaire) et comme toute lésion périphérique, il s’accélère
dans l’obscurité. L’épreuve calorique confirme qu’il existe une hyporéflexie calorique
du côté de la secousse lente du nystagmus spontané avec prépondérance direc-
tionnelle vers le côté de la secousse rapide. Enfin, les épreuves giratoires montrent
une prévalence vers le côté sain : on voit la cumulée des phases lentes s’élever vers
le haut pour une prévalence gauche (car il y a davantage de phases lentes vers la
droite) et vers le bas pour une prévalence droite (car il y a davantage de phases
lentes vers la gauche). Après quelques semaines, la symétrie réapparaît du fait de
la compensation centrale.
Cas particulier de l’hydrops labyrinthique de la maladie de Menière
Le nystagmus peut battre vers le côté de l’hyporéflexie calorique quand c’est un
nystagmus irritatif.
Recherche de signes en faveur d’une lésion centrale
Le nystagmus spontané apparaît plus nettement à la fixation. Il diminue significa-
tivement dans l’obscurité. Surtout, il s’inverse d’un côté dans le regard latéral. Un
indice de fixation oculaire supérieur à 20 % est en faveur d’une lésion cérébelleuse.
Recherche d’un dysfonctionnement sur les voies oculogyres
L’ambition n’est plus seulement de tester les mouvements oculaires d’origine
vestibulaire, elle est aussi de profiter de l’oculographie pour avoir une idée du
fonctionnement des autres mouvements de l’œil : saccades oculaires, poursuite
oculaire et réflexes optocinétiques. En effet, ces trois systèmes fonctionnent
ensemble parfois les uns contre les autres grâce à des interactions précises dont
l’absence ou la présence au cours d’un vertige aide le diagnostic topographique.
Les saccades d’attraction visuelle sont déclenchées de façon réflexe lorsqu’une
cible visuelle apparaît à la périphérie de la rétine. Cette saccade est un mouve-
ment balistique préprogrammé. Le contrôle volontaire est minime. Au cours de la
saccade, toute vision est supprimée. Les troubles de la saccade oculaire sont liés à
une atteinte du tronc cérébral ou du cervelet. C’est surtout la précision de la sac-
cade qui est étudiée. Si plusieurs saccades sont nécessaires à l’œil pour atteindre la
cible, on parle d’hypométrie. Si, au contraire, la saccade dépasse son but, on parle
d’hypermétrie. L’hypométrie peut être liée à une atteinte du tronc cérébral mais
aussi à une pathologie ophtalmologique. Une hypermétrie significative est liée à
une atteinte cérébelleuse.
La phase rapide d’un nystagmus est aussi une saccade oculaire initiée par le tronc
cérébral. Les lésions de la réticulée du tronc cérébral, perturbant la génération des sac-
cades, se traduisent à l’enregistrement des nystagmus physiologiques, par des dérives
oculaires pathologiques du fait de l’absence de mouvements de rappel.
254 Guide pratique de rééducation vestibulaire

Test de poursuite oculaire


C’est un mouvement de l’œil provoqué par la poursuite d’une cible visuelle ani-
mée d’un mouvement lent et se déplaçant de manière continue. Il est automa-
tique, impossible à reproduire volontairement en l’absence de cible visuelle. C’est la
vitesse de dérive sur la fovéa de la rétine qui assure sa précision. L’œil se colle à la cible
et le mouvement se poursuit dans le cadre d’une boucle de rétroaction perpé-
tuellement entretenue à moins que la cible ne soit perdue de vue. La qualité de la
poursuite oculaire est très fragile. Elle est rapidement perturbée et désorganisée
par la fatigue, les troubles de la vision et le vieillissement. La poursuite est étudiée
à l’aide d’une barre de diodes produisant le déplacement horizontal d’un point
lumineux alternativement vers la gauche et la droite selon le déplacement hori-
zontal d’un point lumineux selon une vitesse variant de façon sinusoïdale. On
étudie le gain, c’est-à-dire le rapport entre la vitesse de déplacement de l’œil et la
vitesse de déplacement de la cible. Ce rapport ne doit pas descendre en dessous
de 60 %. Ce gain est contrôlé par le cervelet. Une chute unidirectionnelle du gain
est très évocatrice d’une lésion centrale.
Test du réflexe optocinétique
Le défilement des stries vers la gauche du patient provoque un nystagmus battant
à droite et inversement. Une parfaite symétrie des nystagmus doit être obtenue.
Dans une lésion périphérique, le nystagmus spontané s’ajoute algébriquement au
nystagmus optocinétique. Le gain des nystagmus optocinétiques est globalement
effondré dans les lésions hautes du tronc cérébral mais reste normal dans les ves-
tibulopathies bilatérales liées aux aminosides.

Conclusion
Trois cas de figure schématique sont possibles.
▪ on trouve à la VNG un nystagmus unidirectionnel spontané et provoqué avec
une hyporéflexie du côté de la direction des phases lentes de ce nystagmus,
avec une prépondérance directionnelle aux épreuves caloriques et rotatoires du
côté opposé. Les autres systèmes fonctionnant normalement, l’hypothèse la plus
vraisemblable est qu’il s’agit d’une lésion extra-axiale, par exemple une névrite
vestibulaire ;
▪ on trouve à la VNG un nystagmus spontané uni- ou multisens, une augmenta-
tion significative de l’indice de fixation oculaire et des troubles des trois systèmes :
saccadique (hypermétrie), de poursuite oculaire lente (baisse des gains) et opto-
cinétique (effondrement bilatéral). Il s’agit vraisemblablement d’une lésion intra-
axiale affectant le tronc cérébral et/ou le cervelet. Le nystagmus spontané peut
d’ailleurs être en rapport avec une lésion au niveau du noyau vestibulaire ou avec
une désinhibition cérébelleuse unilatérale ;
Épistémologie des vertiges 255

▪ on ne trouve à la VNG ni nystagmus significatif spontané ou provoqué, ni


anomalie significative aux épreuves caloriques ou giratoires, ni perturbation signi-
ficative des autres systèmes. Quatre hypothèses peuvent alors être soulevées :
● il s’agit d’une pathologie paroxystique type Menière et on est entre deux
crises,
● c’est une pathologie chronique de l’équilibre sans participation vestibulaire,
● c’est la peur d’une récidive chez un patient qui est effrayé à l’idée que cela
recommence (maladie de Menière guérie chirurgicalement ou névrite vestibu-
laire),
● c’est une maladie générale : migraine, asthénie, anémie, troubles hormo-
naux, troubles du LCS, hypotension artérielle, anxiété, etc.

Références
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