Cnklivremeiji 1
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Le Japon de Meiji
Le jeu de rôle mystique et occulte
au Pays du Soleil Levant
Studio Deadcrows
Direction éditoriale : François Cedelle, David Grollemund & Stephan Barat
Relecture éditoriale : David Grollemund
Chef de projet : Raphaël Hamimi
Auteurs : Alicia Hamimi, Benjamin Ott, Raphaël Hamimi
Textes complémentaires : Guillaume Dequeker
Nouvelle d’ambiance : Christophe Rosati
Scénario « L’Égarée » : Benjamin Ott
Règles originales Chroniques Oubliées Compatible : David Burckle, Damien Coltice,
Laurent « Kegron » Bernasconi
Règles spécifiques : Alicia Hamimi, Benjamin Ott, Raphaël Hamimi, Guillaume Dequeker
Relecture technique : Guillaume Dequeker
Relecture : Alexandra Dozière
Traduction des termes japonais : Tony Sanchez
Maquette : Olivier Trocklé
Feuille de personnage : Alicia Hamimi
Couverture : Kahouet
Illustrations : Maxime Teppe, Kahouet, Vincent Laik
Production : Stephan Barat
Avertissements
Ce livre est avant tout un jeu. Il s’inspire de fait réel et reste une œuvre de fiction.
Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite.
Toute ressemblance de personnages ou d’éléments du jeu avec d’autres personnages fictifs ou
d’autres éléments déjà existant serait purement fortuite.
Mentions légales
Publié pour Book in Game par le Studio Deadcrows, 2023
6 rue Henri René, 34000 Montpellier
Imprimé en Lituanie par UAB STANDARTU SPAUTSUVE
Remerciements
Raphaël Hamimi
Je dédie ce livre à Aydan, mon fils.
Cthulhu no Kami est l’accomplissement d’une longue et belle aventure humaine qui aura duré
huit ans. Je remercie mes amis de plumes de m’avoir supporté comme chef de projet : Alicia,
ma moitié et âme sœur, Benjamin O qui est entré dans nos vies avec sa bienveillance et sa
drôlerie et Guillaume, notre meilleur ami qui jalonne notre quotidien. Au-delà de ce projet je
suis fier, heureux et comblé de vous avoir dans ma vie et j’espère le plus longtemps possible.
Je n’oublie pas Shendor, Christophe, Eric, Benjamin D qui nous ont prêté mains fortes. Je
remercie Stephan et François qui sans détour ont cru en notre projet après une course de
Pousse-pousse dans le Gers. Et mon âme d’enfant a une pensée à ces années Club Dorothée
qui lui a permis au-delà des manga de découvrir le Japon.
Et bien sûr j’ai une pensée pour tous les testeurs à Jeux de RUNE, Rôle’N’Troll, RPGers, etc.
et souscripteurs qui nous ont permis de réaliser notre rêve. Maintenant, ce jeu est votre et
j’espère qu’il aura une belle et longue vie autour de vos tables.
Benjamin Ott
À mes quatre lutins, Delphine, Nathan, Gauthier et Thaïs, vous êtes mes muses. À Raph et
Alicia pour leur confiance et leur amitié. A mes frangins Julien et Mick. Aux Alex qui ont
jalonné mon parcours. À Olivier Akkah, un vrai samouraï. Et enfin à Gillou, la sombre
hospitalité à la base de beaucoup de chose dont notre amitié.
Alicia Hamimi
Je remercie mes parents qui ont tant dénigré la culture japonaise et qui m’ont poussé à m’y
intéresser et m’instruire avec enthousiasme et pugnacité. C’est ainsi que j’ai pu connaître ma
moitié cosplayée dans un salon de culture japonaise et manga dont notre union a donné
naissance au petit Kakarot prénommé Aydan. Nous avons lancé le projet fou de permettre
aux personnes passionnées de jeux de rôle de partager notre passion pour cette culture si
riche et vives en couleurs. Je remercie mes collaborateurs d’écriture qui ont fait preuve de
grandes créations, d’inventivités et de grandes parties de foux rires autour duquel nous avons
pu mettre au monde ces œuvres (Benjamin2, Shendor, Guillaume, Christophe, Éric, etc.).
Je remercie également tous nos amis originaux qui ont fait le pari étrange de partager des
soirées avec nous pour tester les scénarios. Et pour finir je remercie le Studio Deadcrows qui
a fait confiance à des non-écrivains plein de rêve et d’étoiles dans leurs yeux autour d’un verre
de signer le contrat pour réaliser ces livres. On vous aime.
Guillaume Dequeker
Je remercie le studio Deadcrows pour avoir permis à ce grand projet de voir le jour.
Je remercie mes auteurs et meilleurs amis Raphaël et Alicia Hamimi de m'avoir fait participer
à l'écriture. Merci aussi à Benjamin Ott pour tout ce qu'il a apporté de bons et de drôles
pendant les réunions.
Enfin je remercie tous ceux qui m'ont fait découvrir et aimer le jeu de rôle et l'univers
rôlistique en général. La passion du jeu m'a donné l'envie de participer à ce projet.
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Chapitre 1
Le songe et le parchemin
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bifurquerons vers le septentrion si d’aventure tour de ce territoire dans un premier temps,
Le songe et le parchemin
nous ne trouvions trace de notre destination. puis nous enverrons des canots. Je descends
Ainsi, nous pourrons reprendre un vecteur en compagnie de quelques hommes chercher
plus sûr, probablement. Mais pas aujourd’hui. les armes qui sont tenues sous clé, dans la
Pas tout de suite. J’ai le sentiment d’être sur la cale. Nous pourrions en avoir besoin. D’autant
bonne voie. Aujourd’hui, alors que je rédige ce qu’au moment de descendre, le vent soufflant
compte rendu, je me demande si cette décision dans notre direction est porteur d’un bien
n’a pas marqué un coup du sort. Je m’interroge sombre présage ; je ne suis pas quelqu’un de
sur le sens même de la destinée. Si d’aventure superstitieux. Je suis un fervent croyant, mais
j’avais décidé de suivre le septentrion, aussi une âme pragmatique. Je n’ai pas pour
qu’aurais-je trouvé ? Rien, pour sûr, et nous habitude de m’en laisser conter, et pourtant,
serions rentrés plus tôt, quoique bredouilles. cette fois, un frisson me parcourt. Je suis
Mais fi de ces divagations. À cet instant, je persuadé d’avoir entendu quelqu’un murmurer.
me contente de m’interroger sur le chemin à Quelque chose comme « muhempo », mais ce
suivre lorsque soudain, la vigie entonne un nom ne veut rien dire.
chant inattendu. « Terre ! », crie-t-elle. Ce mot
résonnait souvent, ces dernières semaines, Un simple coup d’œil aux autres me confirme
l’Archipel étant composé d’innombrables îlots, qu’ils ont eux aussi entendu. Je lance des ordres
mais quelque chose dans l’intonation de sa afin qu’ils préparent nos deux canons, qu’ils
voix, plus aiguë qu’à l’accoutumée, me met la hissent les voiles carrées et qu’ils s’affairent. Je ne
puce à l’oreille. D’autant qu’aucune des cartes veux pas qu’une rumeur paniquée commence
fournies par Saigō Takamori ne signale une à les disperser. Pas maintenant. Nous sommes
quelconque île si loin vers l’orient. Il nous avait peut-être sur le point de trouver ce pour quoi
prévenus, cela dit. nous voguons en cercles toujours plus larges
depuis deux semaines !
J’ai à peine le temps de me tourner dans la
direction qu’indique le marin en haut de son Malgré tout, je ne peux m’empêcher de
mât que les cris des autres me confirment que frissonner.
la situation est différente cette fois. Il faudra que je reste à l’affût.
La lumière encore rasante m’éblouit un court
instant, car ce qui s’étend à l’horizon se trouve
dans l’axe est du monde. Toutefois, malgré ce
désagrément, je reste le souffle coupé : la terre
que nous approchons s’étiole en dizaines d’îles,
du simple rocher affleurant les flots à l’îlot Une île antique
volcanique et les rayons d’Amaterasu* ainsi Voilà une dizaine de jours que nous restons à vue
que la nomment les Nippons, enflamment de ces côtes et elles nous servent un spectacle
les couleurs de ces atolls. Nous voguons prodigieux. Sans commune mesure avec ce
précautionneusement entre les récifs. La vigie que nous avons vu jusqu’alors. Par endroits,
nous guide, ainsi que le navigateur, muni de sa le paysage est semblable à celui des autres îles,
corde à nœuds plombée. Nous avons ramené la innombrables dans l’archipel nippon, que nous
voilure et ne naviguons, peu s’en faut, qu’au foc. avons croisées, mais parfois, un reflet ou un cri
Ce n’est qu’au couchant que nous parvenons à porté par le vent nous semblent si étranges ! Si
une lande de taille plus importante. Une large anciens ! Cette île nous broie par sa majesté.
bande rugueuse s’étend sur une bonne partie de
Takamori-sama nous avait bien dit que nous
l’horizon. Une plage douce. Bien plus grande,
trouverions probablement de quoi gagner la
à priori, que notre port de départ. D’ici, je ne
guerre de Boshin, ici, si nous nous pressions,
distingue pas réellement ce qui nous attend,
mais maintenant que nous y sommes, j’avoue
mais une intuition m’indique que nous sommes
que l’empressement ne me prend plus. Quelque
parvenus à destination.
chose de repoussant et de très attirant à la fois
Outre des hommes de la mer, nous sommes des est présent ici. Un paradoxe artistique et antique,
militaires, rompus à bien des situations délicates comme un retour à la primalité du monde.
et le cœur de mes matelots saura répondre aux
Un détail fugace dans ce paysage attire un
ordres donnés avec ferveur et honneur, je le
instant mon regard, mais disparaît dès que je
sais. Je les lance d’une voix décidée : nous allons
le fixe. Un mouvement inattendu. Ai-je rêvé ?
nous rapprocher, nous essaierons de faire le
Je ne désire pas y réfléchir pour le moment.
Si j’avais été à l’aise avec la poésie, j’aurais pu
* La déesse du soleil décrire plus en détail ce sentiment d’angoisse et
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de respect qui nous étreint tous à cet instant. longeons depuis trop de temps maintenant ?
Le regard de certains des hommes est embué de Est-ce que les matelots n’auraient pas raison
larmes. En ont-ils conscience ? en colportant des rumeurs affirmant que nous
venons d’accoster les rives de l’Enfer ? Les
J’aimerais avoir la preuve d’une présence
autres samouraïs n’avaient pas bronché lorsque
quelconque avant de débarquer, mais hormis
Takamori-sama avait évoqué le secret de cette
cette impression d’être épiés, certainement due
île, mais dans le regard de certains, la peur se
à l’anxiété qui enfle de ne pas pouvoir poser pied
blottissait. Le commandant Brunet m’avait
à terre pour le moment, rien ne vient étayer une
mis en garde contre la tendance de ces terres à
présence humaine. Ou autre, d’ailleurs. Hormis
véhiculer des pensées qui relevaient autrement
quelques oiseaux dont les cris percent le silence.
de la pure magie. Est-ce que…
J’ai entendu quelques hommes d’équipage
C’est mon second qui m’arrache heureusement
murmurer que nous avons trouvé les Enfers,
à mes chimères :
d’autres le Paradis. Tous les propos ramènent à
la religion et ce n’est jamais bon signe lorsque « Capitaine ? »
l’obscurantisme s’impose. Les deux autres
Je soupire et prends un instant pour rassembler
navires m’envoient des messages analogues.
mes esprits, avant de lui répondre d’une voix
Nous avons étouffé ces propos indignes, mais
bien trop lasse :
il n’en reste pas moins que l’aspect à la fois
attirant et terriblement repoussant de ce lieu « Oui, Audibert ?
marque les esprits.
— Les hommes s’impatientent. Ils contemplent
Je soupire. J’aimerais découvrir ici une vie cette terre depuis plusieurs jours, et il leur tarde
indigène. Civilisée, peut-être. Capable de de pouvoir poser pied à terre.
communiquer, à tout le moins. Je pourrais alors
— Vous voulez dire que les esprits s’échauffent ?
rentrer au pays avec davantage qu’une entorse
au traité avec les Portugais. — Pas encore, Capitaine, mais je pense que d’ici
quelques jours, nous pourrions avoir quelques
Un volcan se dresse, dans le lointain. Ainsi
âmes à mater. C’est aussi l’avis des deux autres
que cet affleurement, plus proche de nous, aux
capitaines. »
pierres dressées à la couleur incarnat pointant
vers le ciel, en un cercle parfait, comme Je réfléchis un instant. Cette bonne Amaterasu
taillées par un fou. Mais comment imputer semble ne pas vouloir quitter le ciel, aucun
cette construction géologique à la main de nuage ne vient l’obscurcir. Nous avons repéré
l’homme ? Après tout, la nature est une artiste un fleuve, donc de l’eau potable, il est peut-être
qui n’a pas besoin de nous pour forger quelques temps de remplir les soutes et de s’enquérir de
merveilles ! J’ai pu le constater au long de ces fameux parchemins. Il convient néanmoins
mes voyages, rien n’est plus mystérieux que le de garder la tête froide et d’être prudent. Nous
monde. La création est une machine huilée à ne débarquerons pas tous en même temps. Je
la perfection. Je ne saurais pas l’expliquer, mais me tourne vers mon second :
il semble que si Dieu n’avait pas trouvé bon de
« Fort bien. Donnez l’ordre de nous rapprocher,
nous mettre en ce monde si diversifié, personne
nous allons accoster. Un tiers de l’équipage de
n’aurait pu louer la magnificence de la nature et
chaque navire se rendra à terre. De là, nous
c’est peut-être ce pour quoi le Seigneur nous a
aviserons.
mis sur cette terre, finalement : afin de vénérer
sa Création. Il n’a que faire de nos querelles — Vous y rendrez-vous ?
politiques, fussent-elles nos tentatives pour
— Bien sûr ! Serais-je un si mauvais capitaine
soutenir Takamori-sama.
que je ne puisse plus guider mes hommes et
Cependant, et pour la peine que j’y passe montrer l’exemple ?
quelques instants, la vue de ces roches,
— Je n’imaginais pas que vous puissiez l’être,
apparentées à des dolmens, me procure un
Capitaine.
frisson bien désagréable. Est-ce parce que,
l’espace d’un instant, j’ai associé cette couleur — Alors l’affaire est entendue. Transmettez.
vermeille à celle du sang ? Est-ce parce qu’un
— À vos ordres ! »
souffle chaud, venu des terres, a porté jusqu’à
mes oreilles un nouveau murmure dont les Il s’exécute et j’en profite pour préparer
inflexions m’ont invariablement fait penser à un discours à l’attention des marins. Ils
une voix humaine terriblement déformée ? apprécieront le geste et cela me donnera
Qu’est-ce réellement que cette île, que nous l’occasion de leur rappeler quelques règles
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élémentaires de sécurité. Nous avons perdu de m’écouter jusqu’au bout lorsque j’entends ce
Le songe et le parchemin
trop d’hommes dans des tempêtes au large qu’ils marmonnent : « Regardez ! Regardez ! »
du cap de Bonne Espérance, en chemin pour
Machinalement, je me tourne en direction des
le Japon. Aucun par maladie, grâce en soit
côtes. Mon sang se fige : à quelques encablures
rendue à Dieu, et je ne voudrais pas devoir
de là, se dressent une vingtaine d’individus
rajouter à la liste des disparus quelques
à la peau hâlée. Droits. Immobiles comme
imprudents avides d’un caillou ou d’une
des statues impies surgies du néant. Leurs
découverte quelconque. Ils devront rendre
silhouettes dénudées laissent apparaître des
compte de chacun de leurs mouvements.
tatouages presque lumineux, à la lueur du soleil.
Moins d’une heure plus tard, tout le monde Peut-être sont-ce des peintures. Je ne peux en
est rassemblé sur le pont et les deux autres distinguer davantage, mais ils sont armés.
navires sont suffisamment proches pour qu’à Des lances. Des épées. S’ils ont visiblement
l’aide d’un porte-voix, je puisse m’adresser à la peau dorée et le faciès proche de celui des
tous directement. Rien à voir avec les fameuses Aborigènes d’Australie, rien dans leur attitude
trompettes d’Alexandre le Grand dont les écrits ne suggère l’agressivité. Il y a, de part et d’autre,
disent qu’elles permettaient à la voix du grand une curiosité évidente. Une certaine crainte
homme de porter jusqu’à plusieurs centaines aussi… En un instant, la réponse à la question
de mètres, mais le cornet de cuivre est bien de savoir si cette île est peuplée vient de trouver
pratique tout de même. une réponse.
« Mes compagnons ! Mes fiers marins et Tandis que les hommes palabrent avec ferveur,
soldats. Vous n’ignorez pas que nous sommes je me tourne vers Audibert :
en mission, non seulement pour notre général,
« Voilà qui va me contraindre à revoir mes
pour soutenir la révolte de Takamori-sama,
plans… »
mais avant tout, pour la gloire de la France
et de notre empereur. L’information relayée
depuis des jours maintenant, qui circule sous
Les premiers, les Aïnous
forme de murmures dans vos rangs, a eu le
temps d’échauffer les esprits les plus troublés Les Aïnous, voilà comment se nomme ce
et d’exciter les âmes les plus vaillantes. Ne peuple. Les fameux Aïnous. J’ai un vague
soyez pas inquiets ! Nous aurions eu tôt fait souvenir d’avoir entendu ce nom quelque part,
de débarquer et d’explorer, mais la nature du lors de l’un de nos séjours à la cour du shogun
terrain qui s’offre à nos yeux engage à la plus ou ailleurs, mais je ne parviens pas à remettre
grande prudence. Nul doute qu’aucune créature mes souvenirs en place. Ils s’expriment dans un
vomie des Enfers ne vit ici, mais nous pourrions sabir de japonais mâtiné d’un dialecte propre qui
tomber sur quelque tribu reculée assoiffée d’un rend leurs palabres hermétiques. Nous avons
sang chrétien, comme d’autres navigateurs entendues bien des légendes à leurs propos,
en ont eu le malheur avant nous. Cette lande, mais elles nous avaient toujours paru trop
que nous contemplons aujourd’hui, possède superstitieuses. Maintenant que nous les avons
pourtant certainement sa part de dangers et de rencontrés, je ne saurais dire. Quelque chose
merveilles. Concentrons-nous sur la recherche me met mal à l’aise. Dans leur faciès. Dans leur
des secondes pour mieux être attentifs à la regard. Mais ce sont des espèces de sauvages,
découverte des premières. À cette fin, nous après tout, et c’est ce relent d’animalité qui doit
débarquerons par groupes. Le premier tiers résonner en moi comme un avertissement. Mais
des hommes d’équipage, que je mènerai, aura je ne vais pas me laisser embarquer par de telles
la tâche d’établir un campement et de sécuriser billevesées. Nous sommes des gens civilisés, de
la zone sur quelques centaines de mètres afin brillants esprits, les héritiers de Voltaire et de
de nous assurer que nulle menace ne nous Condorcet, ce ne sont pas des légendes qui nous
guette. Dans deux jours, le second tiers viendra arrêteront.
puis, par roulement, le troisième, tandis que le
Nous avons approché d’eux, circonspects
premier tiers reviendra prendre ses quartiers à
car leurs armes semblaient tout de même
bord de chacun des navires. »
trop aiguisées, mais il s’agit, in fine, d’un
Je marque une pause. Ils acquiescent dans un peuple pacifique. Il nous a fallu près de deux
long chuchotement qui s’éteint après quelques semaines pour parvenir à communiquer
minutes. Je m’apprête à poursuivre lorsque correctement. L’un des matelots, Ernest, est
je remarque, dans les rangs des matelots, doué pour les langues, visiblement. Un don
quelques individus dont le regard reste fixé sur de Dieu, dit-il lorsqu’on l’interroge sur sa
le rivage. Je suis sur le point de leur rappeler capacité à comprendre et retenir les mots
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étrangers. L’homme parlait déjà une demi- — Mon Capitaine, je dois vous relayer une
douzaine de langages et il est sur le point demande du sorcier des Aïnous. Leur prêtre, ou
d’ajouter à cette liste un dialecte inconnu. que-sais-je.
Il nous sert en quelque sorte d’interprète. Il
— Eh bien, parle !
fait de son mieux malgré quelques ratés qui
s’estompent au fil des jours. Il leur a appris — Il souhaiterait vous convier à une sorte de
quelques rudiments de français, en échange cérémonie, ce soir. Je crois comprendre qu’il
de quoi, il s’immerge dans leur culture. Le s’agit de vous expliquer une situation ou un
garçon est impressionnant.Nous avons mangé problème, je ne sais pas exactement. Cela
d’étranges fruits, goûté la chair d’animaux consistera à entrer dans ce qui semble être le
délicieux, bien que notre façon de chasser ait rêve de leur maître-dieu ou déesse.
épouvanté nos hôtes. Le fusil, notamment, les — Encore cette histoire de songes et de Mère.
a mis en rage. Nous les avons laissés à bord Peux-tu m’en dire davantage ? T’ont-ils entretenu
des navires, depuis, et ressorti nos épées du modus operandi de leur cérémonial ? Ou sur
ainsi que les gaffes, tout en gardant çà et là la nature de leur divine maîtresse ?
un pistolet. Nous avons alors respecté leurs
étranges coutumes et ils sont dorénavant — Non pas, Capitaine, mais j’ai pu constater
apaisés. Ils n’ont jamais montré un signe qu’ils préparaient une certaine plante depuis
d’agressivité réel, lorsque j’y songe. Pourtant, quelques jours, en la faisant sécher et j’ai dans
pour les avoir vu à l’œuvre un soir, lors d’une l’idée qu’elle pourrait servir. Quant à leur Mère,
démonstration guerrière donnée en notre ils restent encore très évasifs, se contentant
honneur, leur agilité et leur combativité en de récits symboliques et je ne maîtrise pas
ferait pâlir plus d’un ! Il ne s’agissait que d’un encore suffisamment leur langage pour en dire
davantage.
simple entraînement martial, selon ce que j’en
ai compris, mais ils usent de leurs armes de — Fort bien. Cela te paraît-il dangereux ?
merveilleuse manière. Proche du kendo de
— Je ne crois pas, Capitaine. Ils sont effrayés
nos hôtes nippons, en quelque sorte, mais avec
par quelque chose, mais la perspective de cette
des gestes plus sauvages, plus primitifs. Ils
cérémonie les apaise. Et puis, s’ils avaient voulu
pourraient se révéler de mortels adversaires
nous faire du mal, ils auraient eu mille occasions.
s’ils le souhaitaient. Ils ne le désirent pas et
Par Dieu, je pense qu’ils sont sincères.
j’en rends grâce à Dieu.
— Très bien. En ce cas, je participerai à cette
Ils posent beaucoup de questions sur nos
célébration ou quel que soit le nom qu’ils
bateaux. Ils les trouvent étranges. Je me méfie lui donnent. Cela ne peut qu’améliorer nos
un peu et j’ai d’ailleurs commandé à Ernest de relations. Va ! »
ne pas s’étendre sur le sujet. Il semble qu’ils
craignent quelque chose ou quelqu’un… une Je replonge dans mon journal et n’entend
sorte de « peuple », des yokai* qui visent à presque pas la réponse d’Ernest :
détruire leurs âmes, et les nôtres, j’imagine. « Aye, Capitaine. »
Superstitions que tout cela. D’autant que ces
bons Aïnous croient vivre dans un sanctuaire.
Ils seraient les gardiens de quelque chose, si
j’ai bien suivi. Une Mère divine, une Pondeuse,
mon traducteur n’a pas su se montrer plus précis
là-dessus. Cette histoire n’est pas claire, et nous Voyage au coin du feu
aurons tout le temps d’approfondir la question
plus tard, mais c’est peut-être là l’aspect le Le temps de clore l’entrée du jour, je vais me
plus étrange de leur culture. Je compte bien préparer. Afin de faire honneur à nos hôtes, je
demander à quelques-uns de ces Aïnous de revêts mon costume d’apparat et ceins mon épée
revenir avec moi au campement de Takamori- au côté. Le soleil est déjà couché tandis que je
sama, si nos relations continuent à emprunter quitte le campement que nous avons installé non
cette voie positive. loin de la plage. Accompagné de trois matelots,
je traverse un pan de forêt et me rends au village
Ernest entre sous la tente de commandement et des Aïnous. La lueur de la lune donne à leurs
me salue. J’évacue le protocole d’un geste évasif : peintures un reflet subtil que je ne n’avais pas
noté jusqu’alors. Je frissonne, mais n’en montre
« Qu’y a-t-il ?
rien aux hommes qui m’accompagnent. Est-ce la
proximité d’un rituel auquel je suis sur le point
* Esprits, fantômes ou démons mineurs. de participer, qui me rend couard ? Je prends
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une ample respiration et pénètre dans le village. grand. Leur fameuse divinité, peut-être ? »
Le songe et le parchemin
Les hommes présents, les femmes et les enfants
Je replonge mon regard dans celui du chef. Je
nous saluent beaucoup plus solennellement
reste à nouveau subjugué par sa force mentale
que d’ordinaire. Je garde mon calme et mon
et puis je réalise, après ce que m’a dit Ernest,
flegme. Quelques guerriers, revêtus de leurs
que cette lueur vacillante que je distingue au
habits d’apparat, une sorte de kimono aux
fond de ses pupilles n’est rien d’autre que de la
symboles géométriques, nous pointent du doigt
déférence.
une direction. Ernest me confirme qu’ils nous
exhortent à nous rendre auprès du prêtre. Mon Avant qu’il ne reprenne, j’interroge Ernest :
regard s’attarde sur les dessins de certains de
« Dis-moi, peux-tu lui demander ce qu’ils
leurs kimonos, majoritairement noirs aux liserés
comptent faire exactement et quelle est la raison
argentés. Certains angles représentés semblent…
de ce rite ? Pour quelle raison ai-je le soi-disant
dérangeants. Comme impossibles. Sortis de
honneur d’y participer ?
l’esprit dérangé d’un quelconque tisserand.
— Vous êtes certain, Capitaine ? Cela pourrait
Je frissonne à nouveau, mais me ressaisis : quid
être mal interprété ?
de la superbe des officiers de l’armée française,
si d’aventure je me laissais aller à cette couardise — J’ai confiance en ton don pour les langues,
que je réprouve tant ? Ernest, tu sauras expliquer les subtilités. »
À quelques dizaines de mètres de leur village, Il soupire et s’exécute. S’ensuit un dialogue
à l’orée de la forêt aux troncs noueux, nous assez long. Pendant quelques instants, le
trouvons les officiels. Les notables. Celui que chef semble s’énerver, ou du moins perdre
nous avons identifié comme le guide spirituel de un peu de sa superbe et, par là même, de son
la tribu me commande de m’asseoir. En retour, calme autrement olympien. Mais tout rentre
j’indique à Ernest de rester non loin de moi afin finalement dans l’ordre.
d’être en mesure de profiter de ses traductions,
Un petit vent frais vient me glacer les sangs
et les deux autres matelots restent en retrait,
une seconde, mais il fait place rapidement à la
sabre prêt à être dégainé en cas de besoin. Ils
chaleur nocturne, qui suit la terrible moiteur
sont aussi armés de révolvers. Après tout, la
diurne et ce, depuis que nous sommes arrivés
tribu peut bien sembler nous être amicale, je
en vue de cette île étrange. J’entends à nouveau
préfère rester prudent.
ce murmure, porté par la brise. Ce murmure qui
Le chef des Aïnous nous rejoint. Il s’assoit avec parle à une partie de mon âme dont j’ignorais
nous et me parle. Le vieil homme, torse nu, aux la présence jusqu’à ce que nous touchions ces
tatouages lumineux, me dévisage d’un regard rives. Une part de moi qui remonte aux temps
profond. Dans ses yeux danse une lueur farouche où nos ancêtres se terraient dans des grottes, à
de détermination et… autre chose. Cachée l’abri des dieux et des choses qui arpentaient
derrière cette apparente volonté inébranlable, le monde librement. Un temps bien avant la
je décèle une flamme plus primale que j’ai du civilisation. J’ai la sensation de n’être plus qu’un
mal à identifier dans l’instant, mais qui tremble jouet entre les mains de fantômes tourmentés.
comme une feuille au vent. La seule faiblesse de Muhenbo…
cet homme. Pourquoi me la montre-t-il ? Serait-
Je ne suis pas le seul à l’entendre, cet appel
ce une marque de confiance ? Un stratagème ?
primal, apparemment. Les Aïnous dressent
Ernest m’explique que l’homme semble faire la tête et Ernest à leur suite. Le chef se tourne
référence à une tradition rare. Il stipule qu’aucun vers moi et commence à s’exprimer – Ernest me
être humain hormis un Aïnou, n’a jamais eu la précise qu’il parle de départ, de notre départ –
possibilité de participer à ce rite. mais c’est alors que le guide spirituel se lève à
l’aide de son bâton orné, pousse son supérieur
« La possibilité ?
devant la tribu immobile, pour s’asseoir à sa
— Oui, Capitaine. place en l’invectivant. Je ne comprends pas
la hiérarchie de ce peuple. Leur dirigeant se
— N’a-t-il pas dit l’honneur, ou quoi que ce
fait sermonner semble-t-il par leur prêtre, et
soit d’approchant ? Cela me semblerait pour le
personne ne réagit. Puis je réalise que certains
moins bien plus logique.
évêques n’agissent pas moins de la sorte avec
— Non. À vrai dire, j’ai traduit par possibilité nos politiciens et la chose me semble soudain
un mot dont le sens littéral m’est inconnu, mais beaucoup plus commune. Je demande à Ernest
qui semble englober la notion de devoir et s’il saisit la portée de la conversation, mais le
une certaine déférence, peut-être de la crainte, marin n’est pas certain : il pense que le prêtre
devant quelque chose ou quelqu’un de plus vient de parler de vérité, mais il n’en jurerait pas.
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Je vois cet homme, âgé, vénérable, aux Mes paupières devenaient lourdes. La fumée,
rides profondes et aux décorations tribales âcre, emplissait mes narines tandis que j’écoutai
inquiétantes se poser face à moi dans un bruit le vieil homme poursuivre son histoire :
d’ossements d’oiseaux. Le feu pâlit. Ses flammes
« Ils nous chassèrent jusqu’à ce monde. Pendant
dansantes nous séparent et au-delà d’elles, sa
un temps, nous fûmes paisibles. Puis les
peau hâlée se confond avec les noirceurs de la
démons à la peau pâle nous retrouvèrent et nous
forêt. La lumière hasardeuse ne se reflète que
chassèrent à nouveau. Excepté l’un d’entre eux
dans ses yeux et je me concentre sur eux. Seul
qui nous rejoignit, plus tard, pour apprendre de
son regard compte. Le reste s’évanouit peu à peu
nos rites et de nos croyances, et qui consigna
tandis que cet homme à la peau de ténèbres et
nos mots dans des parchemins qu’il nous offrit
aux atours de mort tente de scruter mon âme.
alors. Puis qui nous furent subtilisés, mais ceci
C’est comme s’il avait apporté avec lui une partie est une autre histoire. Nous fûmes contraints de
de la nuit. Il s’adresse à moi de sa voix profonde. fuir jusqu’à cet archipel. Pourtant, l’un d’entre
Ernest essaie de traduire de son mieux, presque nous, un homme valeureux, décida de braver le
simultanément, mais plus les mots s’enchaînent, danger et de mener la mort dans le campement
plus le prêtre jette ses herbes dans les flammes. des hommes pâles. Nous n’avons pas le droit de
Et plus la fumée qui s’élève me pénètre, plus j’ai prononcer son nom car il est maudit depuis cet
la sensation de comprendre ce qu’il me dit sans instant, bien que chacun des membres du peuple
le concours de mon matelot : des Aïnous s’en souvienne et s’en souviendra
« Juste après notre création, lorsque nous avons jusqu’à la fin du monde. Il se saisit de sa lance,
ouvert les yeux sur les étoiles, il n’y avait que les de ses lames trempées dans le sang et se para
Aïnous dans les contrées du Rêve. Nous vivions des couleurs de la nuit. Tandis que la lune se
en paix. Pendant longtemps, nous avons visité cachait dans les ténèbres, ce soir-là – car elle ne
les pays de la vie, ceux de la transition, puis voulait voir ce qui allait se passer – notre maudit
nous sommes revenus pour chanter le rêve. Tout se glissa, ombre parmi les ombres, jusque sous
allait pour le mieux. Nous étions les enfants de les abris de peau rêche du peuple pâle et il les
Mugenbo, la Pondeuse Insatiable. Puis, notre égorgea, ainsi que l’on tue les proies à la chasse.
Mère nous envoya vers le sud, vers un archipel Il les égorgea tous. Hommes, femmes et enfants,
d’îles, notre paradis. sans réciter le chant qui apaise la mort. Il laissa
les âmes de ses ennemis se perdre dans les
Mais il fut un temps, alors que la lune était limbes et celles qui ne se perdraient pas, être
rouge lors de la plus haute chaleur, où un le jouet de notre Mère. Il se saisit alors d’un
peuple descendit sur nous depuis les rivages du trophée pour le ramener à son peuple, afin que
Nord. C’était un peuple contrefait, a la peau plus personne n’oublie les hommes pâles aux dieux
pâle que la nôtre, et la bave suintaient de leurs sanglants. Les histoires disent que ce qu’il prit
lèvres pendantes, tandis qu’ils exprimaient leur avec lui était un large parchemin, étrange, peint
colère. Ils emmenèrent avec eux leur cortège de symboles incompréhensibles. Ce qu’ignorait
de ce qu’ils appelaient des dieux. Ils étaient le guerrier, c’est qu’une malédiction lui avait été
mauvais. Ils étaient impies tant et si bien que lancée. Par les traditions de son peuple, bien
la terre hurlait sous leurs pas. L’un d’entre eux sûr, puisque son geste, sa volonté de porter
se nommait N’Metzu, dont les séides étaient la mort le destinait à ne plus faire partie du
les plus farouches. Les Aïnous tremblaient
devant tant de corruption, mais il sembla que
rien ne pouvait les arrêter. Le sol grondait * Le peuple qui sera connu sous le nom de
de douleur lorsqu’ils campaient. Les rivières Japonais, débarqua dens les îles sud de
devenaient impropres à la boisson, les poissons l’archipel nippon, et progressa vers le Nord
suffoquaient, les arbres se couvraient d’épines et en prenant le contrôle des terres des Aïnous,
toute la nature se révoltait sans savoir contrer abandonnées généralement sans trop de
ces hommes pâles. Mon peuple n’a jamais été résistance. On garde pourtant trace de guerres
volontaire pour guerroyer, surtout pour la perdues par les Aïnous : 1268 (première
possession de la terre, qui appartient à tous*. révolte connue), 1457 (bataille de
Koshamain), 1669 (Rébellion de Shakushain).
La guerre corrompt les cœurs et les âmes. Elle
En 1799, les Aïnous restants, qui n’avaient pas
interdit à celui qui tue de se réveiller à nouveau
été exilés, de l’est d’Hokkaido sont soumis au
dans le monde. La mort devient alors un
contrôle du shogun et en 1807, c’est au tour de
châtiment. Le guerrier est un homme maudit,
ceux de l’ouest de l’île. Cette absence de réelle
vous comprenez ? »
résistance s’explique probablement par leurs
J’avais envie d’acquiescer, mais je n’avais plus croyances selon lesquelles la terre n’appartient
assez de force. Je me contentai de hocher la tête. à personne.
18
Monde. Mais aussi par l’un des membres du tentacules phalliques issus de l’arrière de son
Le songe et le parchemin
peuple pâle, l’un de leurs prêtres. Et ce sortilège corps arrondi et velu. Elle est représentée assise
ne tarda pas à faire effet : tandis qu’il s’apprêtait en position zazen. Sa disproportion corporelle
à revenir vers nous pour clamer sa vengeance, la rend difficilement imaginable et je peine
il fut enseveli par le tremblement de la terre, au à décrire ce que j’ai vu. Son petit tronc est
campement des hommes pâles. » dérisoire face à son imposante tête arachnoïde
dont les huit yeux sont séparés par une fente
Le prêtre marqua une pause. Son regard
vaginale humide et verdâtre. Il s’en échappe une
continuait à me scruter et c’est d’une voix plus
ténue qu’il poursuivit son récit : sécrétion de couleur blanchâtre à l’odeur âcre.
Je réalise où je suis : j’ai vu cet endroit, le jour où
« Nous nommons cet endroit le Murmure de les Aïnous nous sont apparus ! Mais il n’y avait
Pierre et personne ne s’y rend car il est impie pas de statue.
et ne fait plus partie du Monde. Pourtant,
malgré le sacrifice de ce guerrier, les hommes Qu’est-ce que je fais ici ? N’étais-je pas devant le
pâles revinrent. On ne tue pas un monstre si feu, avec le prêtre, il y a un instant ? Que m’a-t-il
aisément. Leurs yūrei*, non contents de trouver dit ? Je visite le rêve ?
le chemin des limbes, s’ancrèrent encore Trop de questions m’assaillent. Trop pour
davantage dans notre monde et depuis cette obtenir une quelconque réponse.
éternité, ils reviennent la nuit de la grande
chaleur afin de réclamer leur dû. Les Aïnous, J’essaie de me relever et peu à peu, j’y parviens.
parce qu’instigateurs de leur perte, sont Le sang afflue à nouveau dans mes membres
contraints de leur donner leur content d’âmes par vagues de picotements désagréables. Les
et de corps. Ils réclament essentiellement sensations de mon corps tendent à prouver
des enfants et les sacrifient lors de leurs rites qu’il ne s’agit pas d’un songe. Je me remets
maudits, à leurs dieux. Ils se servent du sang et enfin debout. Juste à temps pour me tourner
en souillent la terre qui n’est plus fertile depuis. et voir une foule monter jusqu’à moi : ils
Et notre peuple dépérit. Nous sommes de pourraient appartenir au peuple des Aïnous,
moins en moins nombreux, contraints de faire ils en ont la forme de visage si particulière,
des enfants pour que certains soient tués lors quoi que plus primitive encore, et la peau
de leur purge. Bientôt, les Aïnous disparaîtront. plus pâle. Mon cœur manque alors un
Nous l’avons lu dans les pleurs de la lune. Nous battement : s’ils ont une apparence humaine
ne serons plus qu’un nuage, l’un des nombreux indéniable, leurs deux bras sont beaucoup
nuages qui ont peuplé le monde et dont les trop longs et atteignent aisément des genoux
vestiges ne laissent plus de traces que dans les osseux. Ils ont le front plus bas que nos
cieux et dans les étoiles. » hôtes, et de toutes petites pupilles enfoncées
dans des orbites trop creuses. Leur mâchoire
J’avais la sensation de sombrer. Mes paupières inférieure, prognathe, est plus massive que
étaient closes et je n’entendis plus que dans un la nôtre. Leurs doigts sont griffus, leur peau
murmure, les derniers mots du prêtre : épaisse et ils sont, pour la plupart, vêtus de
« Dormez maintenant, visitez le rêve et voyez ce peaux de bêtes sauvages. Pourtant, chez les
qui était, ce qui est et ce qui sera… » hommes comme chez les femmes, au-delà
de cette apparence bestiale, il se dégage d’eux
une sensualité évidente. Ils me terrifient. Ils
Le songe m’encerclent, mais je réalise rapidement qu’ils
ne me voient pas. Rien n’est vrai ! Grâce à
Je rouvre les yeux et tente de me relever,
Dieu, rien de tout cela n’est réel ! Je suis dans
mais y renonce aussitôt car mes membres me
un songe, il avait raison. Je suis le spectateur
paraissent glacés, comme pris dans un étau
d’un rêve qui fut, qui est et qui sera. Ainsi
de froid qui me réduit à l’impuissance. Je
que me l’a révélé le prêtre des Aïnous. Je
tourne le regard et je vois un cercle de pierres
recule néanmoins, machinalement, sous le
dressées à moins de trois mètres de moi. Elles
coup d’une horreur grandissante. Car je les
sont hautes. Rouges. Brillantes sous la lumière
vois entamer une mélopée aux inflexions
de la lune et gravées de symboles que je ne
ignobles, dans une langue que je ne connais
connais pas, mais dont la simple vue provoque
pas. Qui sont ces êtres ? Je n’en ai aucune
un haut-le-cœur. Au centre, haute de huit
connaissance, ni dans les livres de science, ni
mètres environ, cette idole impie présente une
dans les contes et légendes nippons, ni même,
envergure cyclopéenne grâce à ses multiples
de près ou de loin, dans la Bible. Comment
se pourrait-il que notre Seigneur ait créé une
* Spectres vengeurs race si atroce ?
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Devant le cercle de pierre, un feu brûle et Les fidèles hurlent, ont l’écume aux lèvres,
une abominable fumée rouge s’en exhale. tout n’est que dents et ongles, chairs moites et
En spirales ondoyantes. Deux silhouettes sanglantes. Les hommes, relégués au rang de
approchent et entrent dans le cercle : une femme bêtes démentes, copulent et se mordent entre
nue et un bébé. L’enfant n’est clairement pas un eux dans une frénésie extatique qui heurte
Aïnou, il est plus proche des représentations violemment ma conscience d’homme civilisé.
que font nos scientifiques de nos ancêtres Je crois que je les observe, mais que mon esprit
préhistoriques et il hurle, bien que je ne l’entende n’est plus totalement présent. Il navigue au bord
pas. La femme s’approche de moi. Elle est vieille de la folie et ne saurait tarder à sombrer à la vue
et hideuse. Elle pose l’enfant. Elle le lâche, de ces fantômes du passé.
plutôt, et il doit se faire mal car je vois les traits
Je ne sais combien de temps dure leur
de son visage se tendre. La femme s’accroupit.
réjouissance païenne, mais je sors quelque
Elle murmure et des sons commencent à me
peu de ma torpeur lorsque je vois la vieille
parvenir, indistincts.
se relever en un bond dont je ne l’aurais pas
L’un des hommes avance, peint de longues crue capable compte tenu de son âge et de ce
lignes rouges et brunes sur tout le corps. Il est qu’elle vient de subir. Elle repousse ses violeurs
nu. Il porte un tambour et s’assoit avant d’en – mais était-elle vraiment en danger ou cette
jouer. Je recule machinalement. Bien que je fornication terrible n’était-elle qu’une part de
n’entende pas réellement les sons, je perçois ce rite impie ? – en leur criant dessus et en
une vibration que j’identifie comme étant gesticulant. Les hommes qui étaient sur elle, le
celle de l’instrument. Quelque part, au fond membre encore honteusement et terriblement
de mon esprit, naît l’idée que si je suis capable dressé, reculent. Elle se saisit alors du bébé et le
de sentir cette vibration, il se peut, si je n’y balance violemment contre un pilier de pierre.
prends garde, qu’eux aussi soient capables de Son pauvre corps se désarticule, mais elle ne
me percevoir. À cette idée, mon sang se glace. s’arrête pas là. Elle le saisit par les pieds et le
Je recule encore un peu. fait tournoyer au-dessus d’elle, accompagnée
par un tambour frénétique et des spectateurs
Les participants se balancent tout d’abord
horriblement couverts de sang, de sueur, de
doucement, puis je les vois accélérer. La
terre et de je ne sais quoi de peu chrétien. À
sarabande commence à devenir diabolique,
l’instant où je réalise qu’elle est sur le point de
les gens se mettent à hurler et je sens encore
lui fracasser le crâne contre la pierre, je hurle.
davantage la vibration. Ils secouent maintenant
Machinalement.
leurs bras en tous sens, avec violence et
peu à peu, entourent la vieille femme qui « Non ! »
convulse comme si elle avait été possédée par
Glacé d’horreur, je vois les participants se
le démon. Des hommes sortent du rang et
figer un instant. La vibration du tambour
viennent caresser sa peau fripée. D’autres lui
cesse. La vieille semble humer l’air. Je recule.
crachent dessus. Elle lèche cette salive brune.
Ils cherchent. Ma voix aurait-elle traversé
Les pulsations s’accélèrent. Les hommes et les
l’espace, le temps, pour toucher ces spectres
femmes commencent à danser, leurs corps de
immondes ? C’est impossible ! Inconcevable !
plus en plus proches. Quelques hommes sortent
Mais une part de mon esprit me rappelle
à nouveau de la foule et viennent coucher la
insidieusement que tout ce qui se passe ici,
vieille. Ils la prennent comme ils prendraient
cette vision même, est de l’ordre de l’impossible.
leur femme à cette différence qu’ils n’hésitent
Quelques mots s’échappent de mes lèvres. Des
pas à la frapper. À la violenter. La scène est
mots qui ne sont qu’un réflexe à l’horreur à
horrible. J’aimerais intervenir car mon sang
laquelle je viens d’assister :
noble bout dans mes veines ! Quelle ignominie !
Pourtant, la brutalité même de ces mâles n’est « Mon Dieu ! »
pas ce qui me confond d’horreur. C’est la vieille :
Je les vois hurler et pointer du doigt dans
si elle griffe ses assaillants pour se défendre, elle
ma direction, mais plus encore, étouffé par
garde le sourire et semble atteindre une sorte
les étendues des mondes qui nous séparent,
d’extase. Le sang des torses lacérés coule sur elle
j’entends leurs hurlements. Leurs voix de
tandis qu’ils la pénètrent et qu’ils se l’échangent.
déments. Ils hurlent dans une langue qui m’est
Je détourne le regard. Dans la foule, l’hystérie
inconnue et que pourtant je comprends. Ils
gagne du terrain. Les hommes et les femmes se
m’ont trouvé et viennent à ma recherche. Au
mêlent eux aussi en une orgie, un pandémonium
fond de moi, je sens confusément que la mort
humain auquel je voudrais ne plus assister, mais
même ne saurait les arrêter.
malgré moi, je reste immobile, à l’orée de ce
cercle de pierres. Les corps se contorsionnent. Je me tourne et m’enfuis en courant.
20
Réveil et résolution peur de la maladie, de perdre mes hommes,
Le songe et le parchemin
ma famille. Tout le monde a peur, mais ces
Je m’éveille, en sueur. Le prêtre des Aïnous est
peurs-là peuvent être contrôlées. Ces… yūrei,
là, il m’observe. Ernest aussi et son regard en
ces choses qui se tortillaient, elles n’avaient
dit long sur son inquiétude. Encore en sueur,
pas peur et elles m’ont vu. Cet effroi qu’elles
je tends une main vers lui et attrape son bras,
m’ont insufflé est différent. Viscéral. Comme
pour le rassurer.
si… je l’ai pensé, plus tôt, et te fais part de
« Demande-leur ce qu’est exactement ce que je mon intime conviction… comme si une part
viens de voir ? », dis-je dans un murmure. de moi se souvenait de temps anciens où
nos ancêtres se réfugiaient dans les cavernes
Il s’exécute et j’attends que leur échange se
sombres, préférant les horreurs et les démons
termine afin d’en savoir davantage. Ernest parle
qui se tapissaient sous la terre aux déments
doucement :
qui parcouraient les terres battues par les
« Il s’agit apparemment d’un rituel des vents. Du temps où nos aïeux utilisaient
temps anciens, d’un temps où leur Mère une magie païenne pour se protéger d’êtres
était omniprésente. Un temps où des choses capables de rendre la mort si douce en
semblables à des hommes marchaient au milieu comparaison de ce qu’ils pourraient vous
de leurs ancêtres et se livraient à des vénérations faire subir. Dieu me pardonne pour ce que je
terribles et sanglantes. Le prêtre précise aussi, viens de te dire, Ernest, mais c’est la stricte
mais je ne suis pas certain de la traduction à vérité. Ces fantômes sont libres, par-delà le
apporter à ses mots, que les choses qui furent mur du temps et du sommeil. Ils peuvent
semblables aux hommes sont désormais une nous atteindre et je ne suis pas loin de croire
part intégrante de cette île, dans laquelle ils que les Aïnous, depuis des siècles, ont à subir
peuvent aller et venir. Ils s’incarnent parfois leurs exigences macabres !
dans les chairs des hommes et des bêtes et — Capitaine, c’est folie que cela. »
perpétuent leurs rites sanglants. Il semble croire
particulièrement que leurs yūrei reviennent lors Je le saisis par le col et rapproche ma bouche si
de la célébration de l’été et qu’en chacune de ces près de son visage que l’espace d’un instant, je
fêtes, tous les ans, ils viennent réclamer une lis dans ses yeux une crainte irraisonnée :
âme à sacrifier à leurs Grands Anciens. « Ernest. Je sais ce que j’ai vu. Et tu ne l’as pas
— Impies ? Oui, si ce que j’ai vu est une vu, toi. Ne crois pas que j’aie perdu l’esprit. Je
réminiscence du passé, ce mot est le moindre suis simplement effrayé et ne suis pas homme
que l’on puisse utiliser. Et les Aïnous ne sont de peu de courage, tu le sais !
même pas chrétiens ! C’est l’Enfer qui leur est — Ou… oui, Capitaine, je le sais. Mais que
promis ! Oh, Ernest, si seulement j’avais les peut-on faire ?
mots pour te décrire le terrible rite auquel j’ai
assisté en songe ! — Faire ? Y a-t-il seulement quoi que ce soit à
faire ? »
— Selon les croyances de nos hôtes, il ne
s’agissait pas d’un songe, Capitaine. Je le relâche et me rassois. Mon regard plonge
dans celui du prêtre :
— Oui, je sais. Rêve et réalité ne sont qu’une
seule et même entité, pour eux. Et à vrai dire, « Pourquoi a-t-il tenu à me montrer ces
je me demande jusqu’à quel point ils n’ont pas horreurs ? demande-le lui, Ernest. »
raison. Les fantômes de ces êtres, Ernest, ils J’attends la réponse qui ne tarde pas à venir :
étaient… terribles ! Horribles ! Comme vomis
de l’Enfer, des monstres que même Satan n’a pu « Les Aïnous sont un peuple pacifique qui vit
garder en son sein. Et… » en harmonie sur cette terre, mais il précise que
si nous restons, nous devrons subir nous aussi
Je frissonne un instant avant de reprendre. Les cette malédiction.
Aïnous et Ernest n’ont pu ne pas remarquer
— Alors il est effectivement hors de question
mon effroi :
que nous subissions cela. Mais nos hôtes nous
« … et ils m’ont vu. Je ne sais comment, au ont bien accueillis, j’aimerais trouver une
travers du temps, des régions glacées, dans solution pour les aider. Existe-t-elle ? »
lesquels ils vivent et revivent inlassablement
Ernest interroge le vieux sage.
leurs horreurs rituelles, je suis certain qu’ils
m’ont vu et j’ai peur, Ernest. Ce n’est pas « Il n’y a pas de solution. Le prêtre prend cette
quelque chose dont je suis coutumier. Oh, malédiction comme un acquis auquel on ne
bien entendu, j’ai peur lors d’une tempête, j’ai peut se soustraire.
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— Il doit bien exister un moyen de lever l’ire Le Murmure de Pierre
de ces yūrei, il doit bien exister une personne
Trois jours de marche.
qui connaît un rite, quoi que ce soit ? Peut-être
les monstres ont-ils un maître, quelqu’un avec Je n’ai pas souhaité que l’un de mes hommes
qui l’on peut discuter ? Négocier ? Un de leurs m’accompagne, je dois accomplir cette quête
maîtres, un… » seul. J’ai donné des ordres à mon second afin
qu’ils lèvent l’ancre en compagnie des Aïnous
Je cesse de parler soudainement. Une idée vient
si je n’étais pas de retour au terme de dix jours
de traverser mon esprit. Le fait de parler d’un
révolus. Il m’en a fallu trois pour parvenir
éventuel maître me permet de me souvenir d’un
jusqu’ici, comme prévu, car le terrain est très
détail de l’histoire des Aïnous dont parlait le
accidenté. J’ai pu profiter des merveilles et des
prêtre avant ma vision. Comme si une pensée
horreurs que recèle cette île inconnue. C’est un
qui ne m’appartenait pas vraiment avait fait
endroit très différent de tout ce que j’ai pu voir,
surgir une réponse à mes interrogations. Un
que ce soit en Afrique, en Asie ou même aux
détail qui, loin d’en être un, pourrait receler la
Amériques. Ici, il est possible de se penser en
solution au problème. Ernest, qui est suspendu
explorateur à la découverte d’un autre monde.
à mes lèvres et qui vient certainement de
Littéralement. Une autre création divine,
remarquer mon trouble, se penche vers moi :
différente de celle sur laquelle nous vivons. Les
« Capitaine ? Qu’y a-t-il ? arbres hauts et secs, tordus et contrefaits, voire
mus par une conscience propre, succèdent aux
– Le Murmure de Pierre. La dernière sépulture
roches noires gravées de symboles inconnus,
de leur héros. Il leur est interdit, mais pas à
dont certains me donnaient la nausée. Ce volcan
nous ! Le guerrier voulait rapporter un trophée,
est immense, comme un temple naturel dont je
c’est ça ? C’était un parchemin ! Peut-être est-ce
percevais la colère sourde dans le lointain, mais
là ce que nous sommes venus chercher. Peut-
que je n’ai jamais approché, par crainte de sa
être devrions-nous l’arracher à ce lieu maudit
colère. Le prêtre m’a expliqué comment cueillir
et l’en extraire. Peut-être est-ce là le vecteur de
quelques baies et capturer de petits rongeurs
leur malédiction et de notre salut ?
dont il m’a précisé qu’il fallait remercier le
— C’est une idée saugrenue, Capitaine. yokai de la forêt, afin de ne pas le courroucer.
Etrangement, ces petits rites qui m’auraient
— Je sais, mais nous ne sommes pas ici en terre
semblé relever de la superstition quelques jours
cartésienne, Ernest. Il nous faut nous adapter.
plus tôt, je les respecte aujourd’hui par crainte
Comme en mer, lorsque cette maquerelle décide
et par respect pour ce lieu que, de mes pas
de nous malmener. Il faut que l’on s’adapte. »
étrangers, je foule aujourd’hui. Et la terre elle-
Ma décision est prise. Mon regard s’affirme. Je même semble me répondre positivement par
parcours l’assemblée : des hommes, des femmes, des murmures et parfois, j’entends à nouveau ce
des enfants de la tribu des Aïnous, mais aussi mot… plus clairement cette fois… Mugenbo…
mes matelots, unis sous la lune, en ce soir si La mère des Aïnous… me protège-t-elle ?
particulier, si étrange qui m’a vu pénétrer l’une Serais-je tel le croisé médiéval, guidé par Dieu
des horreurs les plus profondes de cette planète dans sa quête de Jérusalem ?
et qui me permet d’affirmer que l’enfer n’est pas
Je crois que je deviens fou… Je pense à ma
un leurre. Non, mon âme chrétienne ne peut
famille et cela m’apaise. Cela me permet de
souffrir de laisser simplement là des gens qui
poursuivre sans perdre définitivement l’esprit.
nous ont accueillis sans jugement ni arrière-
pensée. Je vais les aider. S’il existe une solution, Et voici que je me trouve face au mausolée
je la trouverai. J’attrape l’épaule d’Ernest : naturel de ce guerrier Aïnou. Un ensemble de
gravats, de roches amassées en tertre que je
« Dis au prêtre que je vais me rendre au
dois m’atteler à déplacer, à soulever ou à faire
Murmure de Pierre. Qu’il m’indique le
rouler pour dégager le corps de ce héros. La
chemin le plus rapide. S’il existe un moyen de
nuit passe et je ne prends que peu de repos. J’ai
contourner leur malheur ou de faire en sorte
à cœur de terminer mon œuvre funeste au plus
qu’il cesse, je le trouverai. »
tôt. Funeste car, bien qu’étant à l’autre bout du
monde – d’aucuns auraient dit que j’étais même
dans un autre monde – je m’apprête simplement
à profaner une sépulture. L’idée me procure
un frisson de dégoût et je me signe avant de
continuer. À moins que la volonté d’aider tout
un peuple prime sur le fait de déterrer un
mort ? Où se situe la limite de la morale ? Je
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ne suis pas philosophe, je suis un soldat. Seul fragments d’os qui s’effritent, recouverts parfois
Le songe et le parchemin
un penseur saurait me renseigner et je n’en ai d’une chair depuis longtemps momifiée et, au
pas sous la main. Je cesse de me tourmenter. milieu de ce tas morbide, écrasé et bosselé, un
Pour ma part, je me contente de faire ce qui me large parchemin que la chaleur a protégé des
semble le mieux sur l’instant. C’est ainsi que l’on moisissures. Je m’en saisis avec une impatience
survit et c’est ainsi que j’agis. frénétique et le débarrasse de la poussière qui
s’y colle. Je parcours les symboles. Ils sont
Trouverai-je la relique enlevée au peuple
clairement composés de kanjis. C’est étrange ?
dégénéré ? J’ai un instant de doute tandis que je Le prêtre Aïnou faisait référence à un langage
pousse à la sueur de mon front et au prix d’un incompréhensible. Peut-être pour lui. C’est
cri de douleur arraché à mes muscles, une pierre un Japonais qui a écrit cela, clairement. Je ne
bien trop lourde pour moi. Mais je reviens vite connais que peu leur langue, mais je parviens
à la raison : selon la légende, cet homme était à trouver et lire le nom de celui qui a rédigé
parti seul et personne n’était venu réclamer son ces caractères fiévreux : Hiro. Je remets ensuite
corps. Il se devait d’être toujours coincé sous quelques pierres à leur place, je ne veux pas que
cet éboulis funèbre. Pourtant, quelque chose en la dépouille de l’Aïnou soit exposée ainsi. Si
moi n’est pas satisfait de cette réponse logique. Dieu – ou qui que ce soit d’autre en ces terres à la
J’essaie, tandis que je m’active, de comprendre fois bénies et maudites – a trouvé bon d’enfouir
ce qui me tourmente, mais je n’y parviens le corps de cet homme, il ne m’appartient pas de
pas et préfère me concentrer sur mon labeur décider d’un autre destin pour lui.
trop éreintant pour les autres considérations,
fussent-elles l’ire divine. C’est en courant presque que j’entame le chemin
du retour. En courant et en tentant d’ignorer ce
Au lever du cinquième jour, épuisé et ne murmure qui ressemble trop à un rire, au loin.
comprenant pas moi-même comment j’ai
pu mener à bien une tâche si exténuante, je
parviens au corps de l’Aïnou. J’attends que les
premiers rayons du soleil éclaire le tombeau ou
du moins, ce qu’il en reste, afin de comprendre
davantage ce qui se cache devant mes yeux. Le parchemin et le prêtre
Peut-être y aura-t-il un indice sur ce détail qui
me contrarie ? « Merci de votre aide, capitaine Deslouettes, me
lance le prêtre dans un français avec un accent
Amaterasu illumine la vaste plaine ocre et je vois prononcé. Et merci de m’avoir laissé consulter
l’ombre se disperser à la vitesse de la lumière le parchemin maudit, et d’en copier quelques
qui la chasse, jusqu’à ma pupille. Je place une pages.
main au-dessus de mes sourcils et profite du
— Tout le plaisir est pour moi, Shun Ikura-
spectacle qui s’offre à moi, un instant, bien que
sama.
la lumière me dérange plus qu’à l’accoutumée.
Je dois être plus fatigué que je ne le pense. La — Oh, non, vous avez fait grand cas d’un
chaleur qui me caresse me réconforte un peu. peuple inconnu en tentant de le soustraire à
Je me retourne vers la tombe et suis presque une malédiction dont vous auriez tout aussi
déçu de ce que j’y trouve : quelques pitoyables bien pu rétorquer que vous n’aviez rien à faire et
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pour cela, le peuple des Aïnous vous remercie. j’y songe. Cette vision, ces yūrei, ce rite atroce.
Vous avez payé le prix de cette bonté et nous ne D’autres esprits que le mien, moins aguerris, y
vous oublierons pas. Vous avez votre place dans auraient laissé la raison.
notre rêve et nous vous attendrons au seuil du
Le prêtre avait fini, quelques jours après et
Temps lorsque vous quitterez votre peau, n’en
tandis que nous nous apprêtions à prendre la
doutez pas. »
mer, par venir me voir, ennuyé. Il avait consulté
Je m’incline malgré un frisson désagréable et les yokai et ceux-ci lui avaient confirmé que le
laisse là ces hommes et ces femmes à la culture si seul moyen de mettre fin à la malédiction, c’était
fascinante. Effrayante aussi, car depuis que nous de partir vers l’ouest de Hokkaido. Purement
avons entamé le voyage du retour depuis leur île et simplement. En des termes polis et voilés,
australe, nous avons eu le temps d’échanger. J’ai le prêtre me demandait si nous pouvions les y
appris quelques rudiments de leur langage et mener et, de fait, mettre un terme à leur exil.
eux, du nôtre – point indispensable – car avant D’autant que certains samouraïs, considérant
de les libérer à l’ouest de Hokkaido, je voulais en – certainement et d’une certaine manière,
savoir davantage. à raison – que les Aïnous étaient maudits,
Une fois les Aïnous débarqués, nous repartirons tentaient parfois des raids pour les détruire
vers notre général. J’ai ouï dire, en ce début définitivement et que son peuple était fatigué.
d’avril 1868, par on-dit, dans les ports, que Après concertation avec mon second et les
la guerre de Boshin tourne en défaveur de autres capitaines des caravelles, nous convînmes
Takamori-sama. J’espère qu’il saura faire bon de les prendre tous : hommes, femmes, enfants,
usage de ce parchemin que nous lui rapportons. alors que nous avions prévu initialement d’en
Et que ce qu’il considère comme une arme ramener quelques-uns. C’est ainsi que je me
saura renverser le cours, qui semble inéluctable, retrouve à dire adieu de la main à un peuple
de ce conflit. dont je ne soupçonnais pas l’existence quelques
années auparavant.
Pourtant, pas un instant je n’ai pu me départir de
Je monte sur la dunette de mon navire et cette idée que ce détail dont j’avais eu l’intuition
adresse un dernier signe aux Aïnous tandis et dont je n’ai pu deviner la teneur tandis que
qu’ils s’éloignent vers les montagnes boisées. je déterrai le cadavre du héros Aïnou, aurait pu
Shun Ikura a raison : j’ai perdu beaucoup lors de changer le cours des choses.
ce voyage. Tandis que j’arrivais au campement Les silhouettes du peuple exilé disparurent et
des Aïnous, après mon périple, un groupe de les côtes de leur nouveau refuge finirent par
mes hommes vint à ma rencontre. Ils m’apprirent n’être plus qu’un trait dans le lointain. Je n’avais
qu’une troupe armée, au mon* inconnu, avait pas quitté la dunette. C’est mon second qui me
attaqué les Aïnous. Bien entendu, mes marins tira de mon infinie rêverie :
ont défendu leurs hôtes, mais nombreux étaient
ceux qui avaient perdu la vie. Les assaillants ont « Capitaine, le soir tombe. »
fini par prendre la fuite et Ernest m’expliqua Je me tournai vers lui en soupirant :
qu’effrayés par nos armes à feu, ils criaient, tout
à leur course effrénée, que les oni** avaient « Fort bien, Audibert. Merci. Je me retire un
invoqué des oni ! « Des démons ! ajouta Ernest instant dans ma cabine, je vous rejoins sur le
en riant. Nous, des démons, Capitaine ! Ne pont sous peu.
trouvez-vous pas la situation cocasse ? » Je lui
— Pour sûr, Capitaine ! Nous allons ouvrir
répondis que oui avant de prendre le temps
quelques bouteilles de vin ! »
d’enterrer nos vaillants matelots dont les corps
resteraient ici, en terre non chrétienne. Paix Je lui tape sur l’épaule et lui souris avant de me
à leur âme. Nous avons sabordé l’un des trois réfugier dans ma cabine. Je ferme la porte. Les
navires et l’avons laissé là. Il nous était inutile, rires et les chants des marins me parviennent
nous n’avions pas suffisamment d’hommes pour assourdis. Je m’étends sur ma couche et observe
le manœuvrer. le plafond de bois. Qu’ai-je manqué ? me dis-je.
Où ai-je fait une erreur ?
Shun Ikura accepta mon récit en tremblant,
puis nous avons entamé les préparatifs du Je me souviens de ce soir-là, le soir de ma vision.
départ. Toute cette histoire est étrange, quand Je n’ai oublié aucune image de ce rite atroce. Ni
des jours qui ont suivi. La solution n’est pas
dans les images, donc. Mais peut-être dans les
* blason
mots. Je m’acharne à me souvenir des paroles
** démons qui furent prononcées, de tout ce qui fut dit,
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murmuré, et dont ma mémoire avait gardé la Un frisson terrible parcourt mon corps. Je serre
Le songe et le parchemin
trace, mais là encore, je ne parvins pas à trouver les mains sur le bastingage et mon souffle se
la solution à ce problème qui m’obsède. fait court. Je tente de contenir ma pensée un
instant, mais elle s’échappe :
Je me tourne sur le côté. La houle agite
doucement les quelques objets pas Parce que vous êtes les descendants de ce peuple
suffisamment lourds ou attachés de ma cabine. maudit. Vos ancêtres ont perdu un pouvoir dont
C’est hypnotique. Je me laisse bercer. Mon je ne sais rien, mais dont, inconsciemment, j’ai
esprit divague. Je me souviens, tandis que mon ressenti la portée maléfique. Le peuple pâle n’a
esprit se perd en rêverie cotonneuse, que c’est jamais disparu ! Il s’agit soit des Japonais qui
ce « Mugenbo », cette voix, la mère des Aïnous, ont eu l’intuition de votre nature réelle, soit d’un
qui m’avait inspiré le fait que ce parchemin, autre peuple qui vous combattait et qui, in fine,
perdu depuis des siècles peut-être, pouvait être s’est mêlé aux Aïnous jusqu’à ce que vous vous
celui que je recherchais. Qui m’avait insufflé la confondiez ! C’est pour cela que les autres vous
certitude qu’aller chercher le corps du héros ont traité de démons ! Tu m’as envoyé, manipulé
trépassé était la solution à cette malédiction. pour aller chercher ce parchemin. Pourquoi
Je me demande s’il viendrait à mon aide, à donc ? Etiez-vous réellement maudits au point
nouveau… je murmure un nom : « Hiro », de ne pouvoir le faire vous-mêmes ? Était-ce
comme le ferait un enfant effrayé, pas encore une sorte de talisman qui vous empêchait de
conscient de la nature divine du monde, un quitter cette terre sur laquelle vous étiez menacés
appel mâtiné de paganisme ancien, pour me d’extinction ? Le fait de le prendre vous a-t-il
souvenir de quelque chose. N’importe quoi…Je permis de fuir avec notre bénédiction ? Et par
me lève soudain ! conséquent, quelle est la nature de cette Mugenbo
funeste que vous vénérez, mais plus encore, quels
Je sais ! Je sais et mon sang se glace dans mes
sont vos noirs desseins maintenant que vous êtes
veines ! Je cours sur la dunette et tandis que les
libres ?
derniers feux du soleil se couchent dans mon
dos, j’observe la mer. Une dernière pensée m’assaille qui manque de
me faire défaillir. L’avenir est sombre. J’ai parfois
« Ikura », dis-je dans un murmure.
pensé mériter l’Enfer, mais ce serait un endroit
C’est toi qui m’as envoyé cette vision. Toi qui encore trop doux pour moi, et je crains que mon
m’as conté cette histoire. Toi et uniquement toi. destin, funeste, ne soit bien plus terrible encore.
À tout moment, tu as manœuvré pour que j’aille Les derniers mots de Shun Ikura résonnent
chercher ce parchemin aux kanjis si étranges. Toi encore dans mon esprit, comme une menace
qui as insisté pour en copier des passages. Toi qui à peine voilée d’une éternité de souffrance à
m’as conté l’histoire de ton héros, mais selon tes venir : Vous avez votre place dans notre rêve et
propres mots, il est parti seul au combat, pour nous vous attendrons au seuil du Temps lorsque
vous débarrasser du soi-disant peuple maudit. vous quitterez votre peau, n’en doutez pas.
Comment, dès lors, aurais-tu pu savoir qu’il
était en possession de cette relique à son retour ?
Comment ? Et pourquoi ces autres clans nippons
s’acharnent-ils contre ton peuple ? Pourquoi ?
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Chapitre 2
Généralités
Ce cadre de jeu est axé sur les années 1890. La modernisation du pays et le
changement de mentalité chez une partie des Japonais a créé une rupture au sein
même de la société entre les traditionalistes et les pro-Occidentaux.
Dans l’univers de Cthulhu No Kami, il marque le recul du folklore ancestral et de
ces entités telles que les yokai. Les pratiques magiques sont totalement prohibées
et l’occultisme apparaît dans les clubs privés de personnes notables et d’influence.
Enfin, l’ouverture de l’Archipel entraîne l’apparition de nouvelles croyances
spirituelles et occultes venus de l’Occident.
Yamagata Aritomo, actuel Premier ministre Membre du conseil des neuf (Genrō), il a une
influence importante dans l’administration
Fils de samouraï, Yamagata Aritomo embrasse
Meiji. En 1890, il est nommé à la tête de
une carrière militaire avant d’entrer en politique.
l’université de Tokyo.
Durant les premières années de l’ère Meiji, il est
l’un des neuf Genrō, les Anciens qui gouvernent
avec l’empereur. Il est Premier ministre jusqu’en
1891. Du côté militaire, il mène la répression
contre Satsuma en 1877 et dirige la première
armée dans la guerre sino-japonaise. Personnalité
influente, il est nommé maréchal et conseiller
privé de l’empereur en 1893.
28
Généralités
Chronologie détaillée du cadre
1853 : l’amiral Perry des États-Unis d’Amérique suprématie guerrière des samouraïs. La mesure
débarque dans la baie de Tokyo à bord de son d’exclusion des chrétiens est levée.
vaisseau noir et pose un ultimatum au shogun
concernant l’ouverture de l’Archipel à son pays. 1876 : interdiction du port du sabre et des
signes distinctifs du samouraï. Le Japon impose
1854 : retour de Perry au Japon. Un traité est à la Corée l’ouverture de ses ports à ses navires,
signé instaurant deux escales pour les navires réitérant l’action de Perry.
des États-Unis.
1877 : présentation du téléphone au Japon par
1858 : les États-Unis obtiennent un traité Graham Bell. Dernière révolte de samouraïs
commercial leur octroyant l’extraterritorialité contre le gouvernement à Shiroyama.
pour leurs ressortissants : ils ne peuvent pas L’université de Tokyo est fondée.
être jugés par la justice japonaise.
1879 : les premières élections ont lieu, élisant
1862 : un Anglais est tué par des conservateurs les conseils généraux.
du clan Satsuma. La Grande-Bretagne demande
réparation au bakufu qui se tourne vers le clan 1880 : premières élections municipales.
pour payer l’indemnité, mais ce dernier refuse.
1884 : l’empereur crée une nouvelle noblesse
1863 : Kagoshima, capitale des Satsuma, est pour le servir. Elle est répartie en cinq
attaquée par la flotte anglaise et capitule après catégories avec l’équivalent de princes, marquis,
une intense bataille et l’incendie de la ville. comtes, vicomtes et barons, copiant le système
britannique.
1865-1866 : première campagne victorieuse
des troupes de l’empereur Meiji contre celles du 1885 : premier gouvernement de cabinet avec
shogun Tokugawa Yoshinobu. un Premier ministre à sa tête.
1867 : deuxième campagne qui signe la défaite
1889 : Yokohama devient une préfecture
définitive des partisans du shogun.
indépendante de celle de Tokyo. La première
1868 : le 3 janvier, l’empereur restaure son constitution japonaise est promulguée. Elle
pouvoir au détriment du shogun. Edo devient inaugure un repli identitaire qui contraste avec
Tokyo et la nouvelle capitale impériale. Début l’ouverture du début de l’ère Meiji.
officiel de l’ère Meiji.
1894-1895 : guerre sino-japonaise à la suite
1869 : ouverture de la ligne télégraphique entre d’une double intervention en Corée. Premier
Tokyo et Yokohama. Les clans Satsuma, Chosu, conflit contre une puissance étrangère qui se
Tosa et Hizen remettent leurs fiefs à l’empereur. solde par une victoire malgré de nombreuses
Les autres clans sont obligés de suivre. Fin de pertes.
l’administration féodale du pays.
1895 : l’impératrice de Corée est assassinée,
1871 : l’empereur proclame l’égalité de tous ses supposément par des activistes japonais.
sujets, y compris les eta. Le système monétaire
basé sur le yen est mis en place. 1904-1905 : guerre russo-japonaise. À la
stupeur générale, l’armée russe est vaincue par
1872 : ouverture de la première ligne de chemin les Japonais, les faisant entrer définitivement
de fer entre Tokyo et Yokohama. L’empereur dans le cercle des grandes puissances.
impose à tous les fonctionnaires le port d’un
uniforme. 1910 : la Corée est annexée dans le cadre de la
politique expansionniste.
1873 : l’impératrice met fin à la mode des dents
noires et des sourcils épilés. Le service militaire 1912 : décès de l’empereur Meiji. Une nouvelle
universel est mis en place, mettant fin à la ère commence, Taishō.
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Chapitre 3
Vie quotidienne
La modernisation du Japon entraîne des réformes qui bouleversent le quotidien
des Japonais : l’abolition des privilèges des daimyos, l’interdiction du port du sabre
des samouraïs, la création d’une armée nationale, le développement du réseau de
transport et l’apparition du yen comme monnaie unique. Le shintoïsme devient
une religion d’État en sacralisant l’empereur dans les institutions en tant que Grand
Prêtre. L’enseignement devient obligatoire. Les classes et clans laissent la place à la
libre accession à des postes qui étaient auparavant prohibés pour le peuple. La femme
japonaise se libère progressivement selon les modes de l’Occident.
32
Vie quotidienne
33
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L’omnibus L’arrivée du bicycle
L’autre grand moyen de transport urbain est Un dernier moyen de transport a fait son
l’omnibus appelé entarō. Wagon hippomobile apparition récemment : la bicyclette. Appelée
(tiré par un ou deux chevaux et monté sur jitensha, elle reste très rare. On ne peut se
roues), il peut accueillir de sept à huit personnes procurer que des modèles occidentaux et
avec leurs bagages. Comme les kuruma, beaucoup de Japonais méprisent ou craignent
il évolue au cours de l’ère Meiji. Dans les ce nouveau moyen de transport. Ce n’est qu’au
principales agglomérations, les grandes lignes XXe siècle que la bicyclette deviendra l’un des
sont montées sur des rails, réparties en deux moyens de transport les plus utilisés au Japon.
voies pour éviter les bouchons. On trouve aussi
à Tokyo une trentaine d’omnibus à impériale
(d’une capacité de trente personnes), mais les
nombreux accidents les rendent impopulaires,
ils disparaissent donc progressivement.
Hors ville
Enfin, d’autres sont tirés par davantage de Se déplacer sur l'archipel
Quelques prix des chevaux, entre quatre et six, ce qui leur permet
transports en 1890 Si des Japonais se déplacent encore à pied,
d’accueillir plus de personnes. On compte à
en kago (chaise à porteur) ou en omnibus,
Tokyo 350 omnibus sur rails et environ 125 sur
c’est bien le chemin de fer qui est le nouveau
Jinrikisha, roues assurant les liaisons entre la capitale et les
moyen privilégié pour voyager dans l’archipel.
de 6 à 7 sen pour un villes autour, en particulier Yokohama. Mais en
Toutefois en 1890, il ne permet que de relier
ri (environ 4km) 1890, le développement du chemin de fer rend
les grands centres urbains.
la concurrence impossible et les omnibus extra-
Omnibus, urbains se retrouvent cantonnés au réseau
75 sen pour un routier secondaire, voire tertiaire. Le développement ferroviaire
trajet Tokyo-
Yokohama En 1872, la première ligne de chemin de fer
nippone est ouverte entre Tokyo et Yokohama.
10 sen pour un Charrettes et chariots
trajet moyen dans Le voyage passe à 45 minutes contre les six
Tokyo Les chariots transportant des marchandises, heures traditionnellement. Elle comporte cinq
souvent tirés par des chevaux et rarement stations et un train part toutes les heures, de
des bœufs, sont le principal moyen 6 heures à 23 heures. La principale conséquence
d’approvisionnement des villes. Leur de son apparition est la diminution drastique
augmentation a deux conséquences à l’ère Meiji. du trafic routier sur cet axe. La deuxième voie la
plus utilisée en 1890 est la liaison Tokyo-Kyoto.
La première, une réglementation spécifique Le trajet dure environ une journée, contre deux
pour leur circulation apparaît (comme pour semaines à pied.
les kuruma), accompagnée de l’élargissement
Un train comporte trois classes de wagons.
des rues afin de leur permettre de se croiser.
La première classe est luxueuse, la deuxième
Des lois promulguées en 1876 et 1881 mènent
un peu moins et la troisième, la moins chère,
à l’expropriation de nombreux habitants et
concerne les voitures de queue. Il n’y a pas de
artisans dont les bâtiments empiètent parfois
wagon-lit et la troisième classe est fermée à clef
sur plus de la moitié de la chaussée. La faible
afin d’éviter les bousculades à l’arrêt en gare.
uniformisation des rues entraîne des problèmes
récurrents de bouchons inextricables. En 1889, on compte 1 600 km de voies avec
des lignes publiques et privées. Les principaux
La seconde est leur entretien. Les nombreux utilisateurs du train sont les touristes (qui
passages et manœuvres détériorent ces voies se développent en cette fin de siècle), les
encore trop souvent en terre. Si dans les travailleurs (surtout dans le négoce) et les
quartiers aisés et les grandes artères le pavage pèlerins. Les Japonais voyagent rarement seuls
est en cours, il est cher et long à mettre en place. et à moins qu’il ne soit nécessaire, ils préfèrent
Et même là, l’entretien est quasi permanent. attendre une occasion de partir à plusieurs. En
Afin de financer ces travaux, l’État a mis en groupe, la majorité des voyageurs sont bruyants
place dès 1871 une taxe sur les véhicules. Mais et sales. Les wagons, même de première
l’impression qu’aurait un étranger qui déambule classe, sont souvent jonchés de crachats et de
dans ces villes japonaises est celle d’endroits déchets divers. Ils restent assez odorants et
constamment en travaux de voirie. inconfortables, les banquettes étant en bois.
Mais ce moyen de transport est de plus en plus
populaire car il reste plus abordable que les
autres et nettement plus rapide.
34
Les routes dérivé essentiellement) ou de riz, souvent
Vie quotidienne
fabriqué sur place. Enfin il est d’usage de payer
À l’exception de Hokkaido toujours à part et peu
un chadai (une sorte de pourboire) au tenancier
développée, sur les autres îles les routes sont
en entrant. En contrepartie, ce dernier offre un
pour une grande majorité encore des chemins
petit présent lors du départ de l’hôte.
de terre et seuls les axes majeurs sont pavés. Sur
le réseau secondaire, les anciennes bordures
en pierre confinant les chemins empêchent les
Se déplacer autour de l'archipel
omnibus et les chariots les plus imposants de
passer. Les Japonais se déplaçant bien plus qu’à Constitué d’une myriade d’îles, le Japon a très
l’époque d’Edo (où les voyages étaient soumis tôt développé l’art de la navigation. Toutefois,
à autorisation), les routes sont aussi éprouvées les Japonais n’utilisent pas beaucoup le
que les rues des grandes villes. Leur entretien bateau lorsqu’ils doivent voyager. La majorité
était auparavant confié au daimyo qui usait des d’entre eux sont encore à voile, surtout les
corvées pour garantir leur bon état. Avec la navires de pêche, mais les cargos à vapeur
chute du système féodal, la taxe sur les moyens remplacent progressivement leurs homologues Quelques prix sur les
de transport apparaît et l’État doit souvent traditionnels, leur nombre ne cessant routes du Japon
employer des ouvriers des villes pour effectuer d’augmenter.
ces travaux, les paysans refusant de le faire En 1872, le Japon compte 35 cargos à voile Ryokan
car ils ont l’impression de subir à nouveau les contre 92 à vapeur. Toutefois, le transport
anciennes corvées. Pour autant, ils voient d’un Chambre
maritime a tendance à disparaître lorsqu’une
très mauvais œil ces étrangers et font souvent traditionnelle :
ligne de chemin de fer se développe en 25 sen pour une
des histoires. parallèle. Ainsi en 1890, le nombre de passagers nuit et trois repas.
Les ponts sont rares au profit des gués dans un diminue alors que celui des bateaux augmente,
conséquence de l’industrialisation galopante de Chambre à
pays où les rivières ne sont pas très imposantes. l’occidentale :
Avec l’ère Meiji, l’État a la volonté de développer l’archipel.
40 sen pour une
ces infrastructures massivement. La plupart Les navires à vapeur apportent l’avantage de nuit et trois repas.
sont confiées à des privés qui les financent par pouvoir naviguer toute l’année et même à
des péages. Aucun pont en dehors des villes contrevent, changeant des habitudes plusieurs
n’est gratuit. fois centenaires, surtout dans le nord du Japon. Hôtel occidental
Enfin, pour quitter l’archipel, les Japonais De 1,75 yen à 2,5
doivent utiliser des compagnies étrangères : la yens par nuit, repas
Faire étape première compagnie hauturière japonaise ne inclus.
Souvent autour des gares, pratiquement toutes sera ouverte qu’en 1896.
construites en brique et pierre (parfois c’est le
seul bâtiment de cette facture), s’érigent des
hôtels et de véritables quartiers commerçants,
transformant parfois de petits villages en villes Mae Suzu
de taille respectable (comme autour des stations Ouvrier
entre Tokyo et Yokohama). Rustre, bavard, alcoolique, râleur
Avec une vie si compliquée, il est difficile
Sur les routes de province, on trouve aussi des
pour un homme d’être patient et doux.
auberges relais appelées ryokan. Leur nombre
ne fait qu’augmenter alors que le réseau ferré NC 1
secondaire se met en place, revitalisant les FOR +2 DEX +1 CON +2
zones excentrées de la campagne japonaise. INT +0 PER +1 CHA +0
Généralement à étages et de facture encore
traditionnelle, elles comportent deux types de DÉF 11 PV 10 Init 11
chambres. La majorité sont adaptées à la vie
nippone, mais quelques-unes sont aménagées
à l’occidentale (avec du mobilier tel que des
tables, des chaises et un lit en hauteur). Leur
prix n’est pas très élevé bien qu’il faille payer un
supplément pour les chambres occidentales.
Le long des routes les plus fréquentées, des hôtels
à l’occidentale bien plus luxueux et plus chers
se construisent. Les deux types d’établissement
proposent de l’alcool, occidental (whisky et
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Communiquer à distance
Communiquer L’ère Meiji voit l’apparition de deux nouveaux
Le modernisme pénètre les villes en pleine moyens de communiquer : le télégraphe et le
urbanisation. Les réseaux de communications téléphone. Le premier est installé le long des
doivent s’adapter et rattraper leur retard par voies ferrées et se développe doucement en
rapport au reste du monde. dehors des grandes villes. La première ligne
télégraphique est logiquement celle entre
Tokyo et Yokohama, installée en 1869. En 1890,
on trouve près de 2000 bureaux de télégraphe.
Communiquer Le système utilisé est le morse, adapté pour les
par courrier kanas. Le principal défi pour les services du
Lors de l’ancienne époque d’Edo, au-delà des télégraphe est la maintenance des lignes dans le
laissez-passer nombreux et contraignants, pays. Au-delà des habituels problèmes de câbles
les courriers étaient soit à pied, soit montés endommagés ou coupés, les fonctionnaires
à cheval. Ces contraintes les rendaient très doivent faire face à une très grande réticence
souvent coûteux et lents, et de fait réservés des Japonais des campagnes. Ces derniers
aux officiels et concentrés sur les grands voient d’un mauvais œil ces installations et,
axes. La modernisation du Japon a changé ne comprenant pas le principe, prennent la
progressivement la donne, la poste s’adaptant télégraphie pour de la magie. Il n’est pas rare
aux avancées techniques. qu’ils abattent des poteaux télégraphiques afin
de pouvoir passer, ou s’ils se situent à proximité
Il faut attendre les années 1870 pour voir de leurs demeures.
un changement notable avec l’apparition
des premiers timbres. Ils remplacent les
taxes versées et restent contraignants : ils
L’arrivée du téléphone
sont fléchés et ne peuvent servir pour un
autre trajet. Trois ans plus tard, le service Le téléphone est encore une technologie
se diversifie et les courriers sont divisés balbutiante mais connue des autorités
en trois catégories : les lettres ordinaires, japonaises. En 1877, Graham Bell en personne
exprès et « volantes » (les plus rapides). La vient à Tokyo en faire la démonstration.
Durée d’un envoi même année l’État décide que les services Toutefois la qualité audio est encore très
entre Kyoto et postaux seront uniquement publics, fermant mauvaise et la gestion des lignes à perfectionner.
Tokyo en 1890 : en toute opportunité d’un pendant privé. Les Le téléphone devient un service public organisé
moyenne 36 heures. fonctionnaires postaux sont reconnaissables à via des standardistes. La majorité des lignes
Nombre de bureaux leur uniforme inspiré de celui des militaires : sont à Tokyo et servent à relier les différents
des postes en 1890 : une redingote bleu sombre et une casquette. services impériaux entre eux. Il n’existe aucune
3692. Ils empruntent différents moyens de transport liaison entre deux villes en 1890.
en fonction du lieu de destination. S’il existe
Nombre de boîtes toujours les courriers à pied ou à cheval, la
aux lettres situées poste utilise aussi les diligences et les bateaux
dans les grandes villes pour aller sur les différentes îles, se mêlant
ou le long des axes John Davis
aux autres voyageurs. Le train ne sera utilisé
majeurs : 38 000. couramment qu’après 1890, lorsque le réseau Entrepreneur étranger
sera bien développé. Face aux dangers de la Raciste, énergique, flamboyant, méprisant.
route, les officiers des postes sont habilités à
porter une carabine dès 1874. Avec l’ouverture du Japon, ce sont des milliers
d’opportunités qui s’offrent aux esprits
Avec un service de plus en plus efficace et de aventureux. Et malgré leur retard, John Davis
moins en moins cher, le nombre de postes et est toujours étonné de voir que parmi ces
de boîtes aux lettres augmente énormément « Chinois », il y en a de très capables.
à cette époque. Enfin, la carte postale fait
son apparition vers 1880 avec les premières NC 1
reproductions de peintures ou de dessins. En FOR +0 DEX +0 CON +1
1890, les cartes postales photo sont encore
très rares et considérées comme un produit INT +1 PER +0 CHA +2
de luxe. DÉF 10 PV 8 Init 10
36
Avec l’ère Meiji, on voit l’explosion de plusieurs
S’habiller
Vie quotidienne
matériaux. Tout d’abord, le chanvre rustique
et solide est sollicité pour les habits de travail
Cette partie inclut les vêtements, mais mais aussi pour les filets et les cordages. La
aussi les autres aspects de l’apparence à soie douce et subtile voit son exploitation se
l’ère Meiji comme les coiffures, l’usage de développer brutalement, à destination des
cosmétiques et les phénomènes de mode habitants de l’Archipel ou de l’exportation. Les
aux environs de 1890. campagnes se couvrent de champs de mûriers
là où les conditions sont réunies. Le coton est
le tissu le plus utilisé, à tel point que la moitié
De la matière des provient de l’importation en 1890. Enfin le cuir
vêtements dans et la laine sont très peu présents à cause du
le Japon de Meiji faible nombre d’élevages. Ainsi, en dehors des
uniformes impériaux confectionnés avec de la
Avec la modernisation de la société nippone, laine australienne, les habits dans ces matériaux
l’apparence des Japonais se modifie sensiblement sont rares parmi les natifs.
aux alentours de 1890. À l’époque d’Edo, les
classes dominantes et soumises avaient des
tissus attribués. À la noblesse et aux samouraïs Une évolution technique
la soie et le coton fin ; aux autres le chanvre et
éventuellement le coton tissé à la maison. Le métier à tisser traditionnel disparaît de plus
en plus en cette fin de siècle pour ne rester
que chez quelques artisans spécialisés dans
les produits de luxe. À la place, des filatures
manufacturières apparaissent dans les villages,
et de véritables usines-filatures industrielles
dans les villes. Enfin, les colorants naturels,
souvent ternes, sont abandonnés pour les
colorants chimiques occidentaux. Les premiers
colorants japonais apparaissent en ce début
d’année 1890.
Tamai Seiho
Cadre de zaibatsu
Raciste, méprisant, sobre, discipliné
L’Européen est fainéant, le Japonais travaille,
nul besoin de l’Ouest pour entrer dans une
nouvelle ère… Vive l’empereur !
NC 2
FOR +0 DEX +1 CON +1
INT +3 PER +1 CHA +3
37
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Se vêtir pour une femme du costume à l’occidentale. Il reste malgré tout
lui aussi très largement inspiré des uniformes
Comme souvent à cette époque, la vie dans les militaires et devient la marque des classes aisées
campagnes se distingue de celle dans les villes. et moyennes.
L’habit traditionnel constitué d’un kimono
noué par un obi, un nœud de grande taille À la campagne comme dans les villes, les
porté dans le dos, reste celui de la maison. hommes de condition modeste portent le
C’est la tenue ancienne qui a le mieux résisté à pantalon tube. Toutefois, même en 1890, le
l’occidentalisation de la société. Japonais abandonne très souvent son costume
pour reprendre le traditionnel kimono. En été,
Dans les campagnes, les femmes sont souvent les plus pauvres ne portent qu’un fundoshi, un
vêtues d'une blouse aux manches étroites et pagne.
d'un pantalon bouffant resserré aux chevilles.
Leur tenue n'est pas très éloignée de celle des La loi impériale régit aussi le costume pour
hommes. Depuis quelques années, le tablier les fêtes et festivals. Il doit être constitué d'un
remplace la blouse. En cas de temps froid ou kimono, d'un hakama et d’un haori de couleur
humide, elles revêtent une cape en paille de riz noire.
tressée ainsi que des bottes en paille également. Concernant les chapeaux, l’élite de la société
Dans les villes, on trouve des kimonos aux préfère le panama tandis que l’armée a opté pour
couleurs vives et aux motifs élaborés quelle la casquette à visière. Pour les autres, le chapeau
que soit l'origine sociale des femmes. Les longs melon est à la mode en 1890, accompagnant
kimonos ternes se raréfient au profit d’une même le kimono, ce qui ne cesse d’amuser les
version plus pratique recouvrant une culotte étrangers. Concernant les têtes nues, la coupe
large à la mode depuis quelques années. Lorsqu'il des samouraïs est interdite en 1876, bien que
fait mauvais temps, les japonaises mettent un dans certaines régions cette loi ne soit que très
haori, un manteau bouffant dans le dos afin de peu appliquée. L’armée se caractérise par le
recouvrir le nœud du obi. Dans les usines et port d’une brosse tandis que les plus pauvres
dans les différentes écoles, elles portent de plus se reconnaissent à leurs cheveux longs portés
en plus un uniforme (le phénomène s’étend aux souvent en chignon. À l’inverse, le port de la
campagnes) constitué d’un kimono sur hakama, moustache et de la barbe, autrefois réservé aux
tenue autrefois réservée aux hommes. Mais anciens, est aujourd’hui la marque de l’élite
une fois à la maison, elles portent à nouveau le tandis que les plus modestes sont rasés de près.
kimono traditionnel.
La mode est dictée par l’impératrice elle-même.
C’est elle qui est la première à oser briser les Se vêtir pour un enfant
conventions et à s’afficher en robe à l’occidentale Pour simplifier, les enfants portent les mêmes
lors de cérémonies officielles. Bien qu’elle ait tenues que les adultes. Pour les plus jeunes, on
ouvertement appelé les femmes à épouser trouve souvent cousu une étiquette en métal
des coupes de vêtements étrangères, elle n’a appelée maigo-fuda. On y inscrit au revers
jamais tenté d’imposer la robe occidentale l’année ou l’animal de naissance et sur l’autre
face au kimono. Les principaux relais de cette face le nom et l’adresse de l’enfant.
mode en dehors de la classe aristocratique
sont des revues féminines ou familiales. Cette
période voit aussi l’abandon de la coiffure à
nuque révélée (réservée aux grandes fêtes ou
aux geishas), la pratique de se noircir les dents S’instruire
et celle de s’épiler intégralement les sourcils.
Toutefois, la femme japonaise n’a toujours pas La modernisation du pays passe par une
pris l’habitude de porter des bijoux. éducation la plus répandue possible.
L’empereur l’a bien compris et très tôt, il
incite son peuple à s’instruire, à l’image de
ce qui s’est passé en Europe. Comme pour les
Se vêtir pour un homme autres aspects de la société, la situation est
Les premiers à changer leur tenue sont les différente entre le monde des villes, foyers
soldats de l’armée qui optent pour un uniforme de la modernité, et celui des campagnes,
calquant celui des Français sous Napoléon réminiscences de l’âge féodal. L’instruction
III. Dès 1872, l’empereur Meiji impose à tous des filles est aussi à part, car si elle est
les fonctionnaires (de plus en plus nombreux souhaitée très tôt, elle va à l’encontre du
pour accompagner la modernisation) le port mode de vie traditionnel.
38
L’école primaire
Vie quotidienne
Asato Yasunobu C’est l’établissement le plus répandu. Dans
Journaliste les villes, à l’image de la capitale, il s’agit
Curieux, volubile, sans gêne, débrouillard. d’un bâtiment en bois peint en bleu, et qui
Féru de modernité, Asato Yasunobu prend de fait tranche avec les autres maisons de
un malin plaisir à user de sa profession pour son voisinage.
briser l’intimité des Japonais. Toujours à À la campagne, elles sont souvent installées
l’affût de nouvelles, c’est un bavard impénitent. dans les temples bouddhiques vidés à la
NC 2 suite de l’instauration du shintoïsme comme
FOR +0 DEX +1 CON +0 religion d’État, ou dans une maison de paysan
INT +2 PER +2 CHA +2 constituée d’une vaste pièce. Parfois, elle est
aussi peinte en bleu pour imiter Tokyo. L’école
DÉF 11 PV 14 Init 11
est divisée en quatre espaces contigus dont un
seul est réservé à l’étude. Un autre est dédié
au logement des écoliers qui y restent dormir
une partie de la semaine. Toutefois, le nombre
L’émergence d’une d’élèves est souvent supérieur à la capacité
éducation nationale d’accueil, aussi certains marchent-ils plusieurs
kilomètres par jour pour rejoindre ce lieu
Le système scolaire à l’ère Meiji n’est pas
de savoir. L’enseignement couvre la lecture,
obligatoire. Mais entre la propagande
l’écriture, le calcul de base et tout un ensemble
impériale et l’espoir d’une vie meilleure grâce
de connaissances à vocation patriotique. Tout
à une éducation soignée, beaucoup de Japonais
comme les écoles prussiennes puis allemandes
sont très tôt enthousiastes, à la ville comme
ou celles de la IIIe République, l’école japonaise
à la campagne, malgré le fait que l’école soit
est un des piliers du nationalisme nippon et
payante. Il n’y a pas d’âge encadrant la scolarité.
son programme a pour but de faire adhérer le
Dans les familles modestes, on attend souvent
les 10 ans de l’enfant avant de l’envoyer à peuple aux idées modernes de Meiji.
l’école, préférant utiliser ces années pour lui
apprendre les bases de son futur métier (celui
de son père ou de sa mère). L’école primaire secondaire
Elles sont peu répandues, principalement
dans les villes et les régions rurales les plus
Le système peuplées. Il s’agit d’un échelon intermédiaire
scolaire japonais permettant aux catégories modestes de pouvoir
se préparer à entrer au collège. L’enseignement
Les premières écoles ouvrent à Tokyo dès y est plus poussé avec l’étude des caractères
les années 1850 et en 1890, le système est
sino-japonais. En 1890, une loi impériale
bien en place. il repose sur quatre niveaux de
introduit en plus des cours théoriques des
scolarisation : l’école primaire, l’école primaire
temps réservés à la pratique.
supérieure, le collège et enfin l’université et les
grandes écoles.
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Le collège Autre conséquence, la loi impériale instaurant
Tout comme les études supérieures, ces le port de l’uniforme pour les élèves de 1885.
établissements ont été de tout temps réservés Copiant les écoles allemandes et anglaises,
aux classes nobiliaires et aux samouraïs. En elle est bien acceptée et très vite chaque école
1890, ces catégories restent très majoritaires développe son propre uniforme. Dans un
(environ 75 %) mais de plus en plus de personnes pays en pleine expansion, les conséquences
d’origine modeste y étudient. Au départ les économiques et industrielles d’un tel
cours y sont prodigués par des professeurs engouement se chiffrent en millions de yens.
étrangers français, anglais ou allemands pour Enfin, tous les Japonais ne peuvent pas assurer
l’essentiel. L’apprentissage de ces langues est ces frais de scolarité. Ainsi, dans les quartiers
donc fondamental et explique le haut niveau
pauvres et dans les campagnes apparaissent
linguistique des fonctionnaires occupant les
des écoles gratuites tenues par des moines
postes importants en 1890. Depuis quelques
bouddhistes. Si l’enseignement reste simple
années, ces étrangers sont remplacés par des
(lecture, écriture en syllabique et maniement
Japonais. En conséquence, l’apprentissage de
du boulier pour l’arithmétique de base), il est
ces langues retombe, sauf dans le domaine
toléré et même encouragé afin de garantir le
des sciences qui reste l’apanage des puissances
étrangères occidentales. minimum à tous les habitants.
40
Vivre en société
Vie quotidienne
Les éta
La famille à l'ère Meiji
Dans une société en pleine modernisation Malgré l’abolition officielle du statut de
et malgré quelques évolutions, l’organisation paria en 1871, les discriminations dont
familiale reste résolument traditionnelle. font l’objet les eta n’ont pas totalement
disparu et certaines couches de la
population moderne ne marieraient
La place des hommes pas leurs enfants avec un membre
d’une famille dont la lignée comprend
Il n’est pas nécessaire de trop s’étendre sur un burakumin (hors caste). Certains
le rôle des hommes à l’ère Meiji. Dans une propriétaires immobiliers (en refusant
société patriarcale, ils ont toujours la place de louer) ou certaines entreprises (en
de premier rang, même si parfois des femmes payant moins) pratiquent la ségrégation
influentes ont eu du pouvoir au moins envers les parias.
localement (ne serait-ce que les geishas).
Aussi, chaque fois que l’on parle de Japonais,
il faut y voir la description de la condition
masculine en 1890.
Sera Masaki
Militaire
Fier, droit, obéissant, lunatique
« Il est loin le temps où les ashigaru se faisaient
massacrer par les samouraïs. Aujourd’hui,
c’est vous qui tenez le fusil et bientôt le monde
découvrira la puissance des Japonais. »
NC 3
FOR +1 DEX +2 CON +1
INT +0 PER +2 CHA +0
DÉF 11 PV 14 Init 11
Fusil Arisaka +5 DM 2d8
Couteau/Baïonnette +5 DM 1d6+1
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La place des femmes une fois vieux). Toutefois il n’existe pas de loi
cadrant l’âge minimum pour travailler dans
Leur importance diminue lors de l’ère Meiji.
les usines et beaucoup d’enfants pauvres s’y
Globalement peu instruites encore en 1890
retrouvent. L’adolescence n’est pas un concept
malgré une loi pour élever leur niveau, les
japonais. Un enfant sera traité comme un
femmes ont été surtout mises à contribution
adulte une fois son physique et son âge jugés
dans les usines de la modernisation du pays.
suffisants, mais il devra de toute façon respect
Elles sont même majoritaires dans les filatures et
et obéissance à ses aînés.
les usines liées au textile. Si une forme d’égalité
de traitement dans la misère les rapprochent
des hommes de leur condition, cette mise au
travail qui ne concernait que les paysannes et Le mariage
les femmes d’artisans à l’époque d’Edo touche En l'absence de réel statut régissant la majorité,
maintenant celles de la classe moyenne. Même le mariage peut avoir lieu entre 13 et 20 ans.
les femmes d’origine sociale élevée mais Si encore une fois il faut distinguer le monde
désargentées exercent un métier pour vivre. des villes et celui des campagnes, cette fois-ci
Elles se répartissent entre la prostitution et les le modernisme apparaît plus du côté du monde
métiers de la médecine en fonction de leur rural. En effet, il n'est pas rare que les mariages ne
niveau d’instruction. soient pas arrangés mais des mariages d'amour.
Une femme se doit d’arrêter de travailler Tout le contraire des villes où le mariage est une
lorsqu’elle se marie afin de tenir correctement le affaire entre deux familles (du moins pour les
foyer. Ce n’est pas toujours le cas, ce qui est très catégories moyennes et supérieures). L'intérêt,
mal vu. Dans le cas des veuves, elles se remarient proche des valeurs bourgeoises occidentales,
souvent à la campagne pour assurer la bonne priment sur les sentiments. D'ailleurs le mariage
tenue de leurs domaines tandis qu’en ville, elles shintô insiste plus sur les valeurs d'amitié, de
se remettent à travailler car le remariage est là respect mutuel et d'affection que sur l'amour
aussi mal vu. En général, la morale japonaise est passionnel jugé trop inconstant et bref. Ce trait
très exigeante envers les femmes qui se voient de société explique l'importance et la place de la
chaperonnées à tous les niveaux de la société. prostitution au Japon en 1890.
42
Vie quotidienne
Les médecins modernes se distinguent par
Imada Torio leur kimono noir et leurs cheveux tondus
ainsi que leur sacoche souvent en cuir noir,
Professeur comportant les mêmes instruments que
Psychorigide, intolérant, observateur, les médecins occidentaux : stéthoscope,
pessimiste seringues, mètre ruban… Toutefois en 1890,
la majorité de la population ne leur fait pas
Après avoir bénéficié d’études à Paris, Imada confiance et se tournent encore vers les
Torio est revenu choqué par la licence qui médecines traditionnelles.
règne en Occident. Depuis, il a conscience de
l’énorme tâche pour éviter que ses concitoyens
ne sombrent dans la même décadence.
NC 1
Travailler
FOR +0 DEX +0 CON +1
Avec la modernisation du pays, l’État nippon
INT +3 PER +0 CHA +1 a eu besoin d’énormément de main-d’œuvre
pour accompagner les grands changements.
DÉF 10 PV 14 Init 10
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sociales est en forte augmentation grâce aux L'émergence des ouvriers
lois sur l’éducation. En 1890, on considère
qu’un fonctionnaire sur trois est issu de ces Très tôt, l’État convertit une grande partie de
strates moins favorisées. ses paysans et de ses pêcheurs en ouvriers pour
ses usines qui se sont ouvertes un peu partout.
La modernisation se fait par étape et au niveau Mais comme en Europe au début du siècle,
du travail, il en va de même. Les premiers l’absence de vision à long terme et le libéralisme
salaires versés aux fonctionnaires datent de économique font des ravages sur la condition
1871 seulement, et ils sont composés pour de ces ouvriers. Il existe des lois sur le travail,
moitié de riz (comme dans l’ancien système) mais leur application est mal encadrée et les
et pour moitié d’argent numéraire. En 1890, ce abus sont très nombreux. La récession dans les
n’est plus le cas, sauf exception locale dans les campagnes (depuis les années 1885) augmente
préfectures les plus reculées. la demande par rapport à l’offre d’emploi.
De même, il faut attendre 1872 pour que les En conséquence les salaires diminuent et la
fonctionnaires portent le même uniforme, une journée de travail atteint souvent les 12 heures
version simplifiée de celui de l’armée. Cette (contre 7 pour les fonctionnaires et 10 pour
veste noire ou bleu foncé à boutons dorés a les cadres du privé). Les conditions de travail
surtout été popularisée dans les provinces par et d’encadrement sont souvent effroyables :
les fonctionnaires des postes et les instituteurs. dortoirs insalubres, blessés ou morts
Leur journée est normée de 9 heures à 16 importants à cause d’une sécurité défaillante,
heures, six jours sur sept. aucune protection pour les tâches dangereuses
comme le textile ou la métallurgie, des
À partir de l’année 1881, l’État commence à cadences imposées trop fortes, etc.
privatiser des domaines entiers de la société
japonaise. Les grands groupes s’emparent En l’absence de lois sociales (si ce n’est la
de pans entiers de l’économie, provoquant scolarité qui protège un peu les enfants), les
une chute du nombre de fonctionnaires ou employeurs tendent à recruter surtout des
leur reconversion. Les cadres du privé se femmes de la campagne, auxquelles ils font
distinguent par leur costume à l’anglaise miroiter une vie confortable dans une ville
différent de l’uniforme, mais aussi par des moderne avant de les exploiter souvent jusqu’à
horaires plus flexibles et un salaire moins la mort ou l’infirmité. Une fois embauchées,
important, sauf pour les postes à haute elles sont cloîtrées dans des dortoirs à l’intérieur
responsabilité. Bien que leur mission ne soit des usines (pour éviter les « évasions ») ou dans
pas d’imposer la modernisation au pays, ils y des pensions communautaires payantes et très
contribuent à leur manière car sans l’ère Meiji, liberticides. Ces conditions difficiles (qui
ils n’auraient pas eu autant de pouvoir. effraient même les observateurs occidentaux)
dureront encore quelques décennies.
Okubo Fuminaro
Kanno Yoshitake
Yakuza
Chef de village
Viril, honorable, pragmatique, résistant.
Honorable, respectueux, pataud, impulsif.
Tatoué et dévoué à son clan, Okubo Fuminaro
sait qu’il est parfois nécessaire d’user de la D’un naturel bourru, Kanno Yoshitake
plus grande violence. Néanmoins, il met un a toujours défendu les intérêts de sa
point d’honneur à respecter le code. communauté au détriment des siens.
Respectueux en général de l’ordre social, il
NC 3
a pourtant plusieurs fois risqué sa vie pour
FOR +2 DEX +1 CON +2 protéger les plus faibles.
INT +0 PER +1 CHA +1 NC 2
DÉF 10 PV 14 Init 10 FOR +1 DEX +1 CON +3
Tantō +5 DM 1d6+1 INT +2 PER +1 CHA +3
DÉF 11 PV 15 Init 11
44
Protéger l’ordre public machibikeshi de l’époque d’Edo. Ces dernières
Vie quotidienne
années, de plus en plus d’entreprises privées
A l’époque d’Edo, la protection de la proposent leurs services aux municipalités.
communauté incombait au daimyo et à ses
samouraïs. Dans les villes, ils étaient assistés Les techniques pour lutter contre le feu restent
d’une milice conscrite et dans les villages, les sommaires en 1890. À défaut d’éteindre les
jeunes hommes avaient la tâche de veiller au bon incendies (les pompes à eau et les tuyaux étant
ordre en attendant de fonder leur propre famille. un luxe très peu présent), il faut circonscrire
Avec la modernisation, de nouveaux métiers le feu et éviter qu’il ravage le voisinage.
apparaissent et dans les villes le changement Ainsi, l’équipement de base est l’échelle et la
est palpable, tandis qu’encore une fois, dans les hache. Elles servent à détruire les maisons
campagnes les anciennes structures sont encore environnantes et ainsi enlever du combustible
vivaces là où l’État fait défaut. au feu. Les pompiers ont aussi des seaux et
parfois (à Tokyo surtout) des citernes montées
sur un chariot en guise de réserves d’eau.
Police
Le corps des policiers est fondé très tôt. Inspiré
de l’armée impériale et de la police occidentale,
il suit son évolution. Ouvert à tous, il reconvertit
les samouraïs en officiers tandis que les classes
Se divertir
populaires fournissent les agents de base. Loin du cinéma naissant (et de ses ancêtres)
L’uniforme de la police est un emprunt à celui ou de l’opéra, le Japon distrait sa population
de l’armée, pantalon tube droit et veste à double avec les mêmes loisirs qu’à l’époque d’Edo. La
rangée de boutons de couleur sombre. En 1890, différence notable est leur ouverture à tous
les officiers peuvent encore porter le sabre ceux qui peuvent payer, au lieu de le réserver
mais c’est de moins en moins le cas, les anciens à une catégorie de la population.
samouraïs étant trop vieux et les nouveaux
officiers trop éloignés de cette culture. En
revanche, la nouveauté vient du revolver qu’ils Des loisirs encore
ont. Peu d’entre eux savent bien s’en servir, mais
il devient une de leurs caractéristiques.
très traditionnels
Le théâtre, en fusionnant les diverses formes,
Les agents n’ont pas le droit de porter d’arme
reste l’endroit le plus populaire du moment. Sur
blanche ou à feu, à l’exception de fusils lors
une scène à peine surélevée, éclairée par des
des interventions. À la place, ils manient une
lanternes de papier coloré, se joue des pièces
matraque de bois à l’image des policiers anglais.
plutôt courtes qui retracent les grands moments
Ils portent tous un sifflet qui leur permet de
de l’histoire récente du Japon ou des contes
prévenir leurs collègues d’un incident.
traditionnels. Les gens sont assis à même le sol
La police effectue des missions de surveillance et l’ambiance souvent bruyante.
et de répression, mais endosse également le rôle
Les autres formes d’art, souvent réservées à
d’administratrice de proximité. Aux policiers
la caste des samouraïs, s’ouvrent également à
de faire respecter la loi et de régler les litiges
plus de monde par l’entremise de l’université.
du quotidien liés à la circulation, la nuisance
Toutefois il s’agit de loisirs individuels rarement
à autrui, les problèmes de voisinage, etc. En
mis en valeur auprès des autres (les expositions
1890, ils sont globalement bien acceptés dans
n’existent pas encore).
la société, mais même s’ils sont craints par le
commun des mortels, ils ne représentent pas Enfin, les arts martiaux, y compris le maniement
une grande menace pour la pègre. du sabre, rassemblent encore beaucoup
d’adeptes malgré l’interdiction de porter en
public ce genre d’armes. Un engouement dû
Pompiers à la nouvelle accessibilité de cet art autrefois
exclusivement réservé aux samouraïs.
Les incendies restent un fléau des villes
japonaises, encore construites à 80 % en bois
et aux rues très étroites. Si auparavant ce sont
les associations de quartier qui avaient aussi la
Du sport à l’occidentale
charge de pompier, on voit apparaître dans les Avec l’ouverture, la culture occidentale pénètre
villes des corps de professionnels. La majorité petit à petit le Japon. Mais la résistance est
sont des fonctionnaires d’État, héritiers des forte, surtout depuis la politique du patriotisme
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cultivée par l’empereur et ses ministres. Aussi La place particulière
ne trouve-t-on pas encore beaucoup d’endroits
de la prostitution
où les sports occidentaux sont exercés. Ils se
concentrent à Tokyo autour des ambassades La prostitution n’a jamais été mal vue comme
et sont fréquentés en grande majorité par les ce fut le cas dans l’Occident chrétien. C’est
étrangers travaillant dans ces quartiers. Même une activité encadrée et codifiée et une
à l’université il n’existe pas encore de clubs part de la vie des villes. Avec la croissance
sportifs. Les étudiants pratiquent l’équitation, urbaine et démographique, la prostitution
la gymnastique (où la concurrence avec les a vu ses activités grandir au cours des
diverses formes de tai-chi est très forte) et décennies précédentes. Malheureusement, ce
le tennis. Les sports collectifs n’en étant qu’à développement a été de pair avec un recul
leurs débuts en Europe, ils ne sont pas du tout des droits des femmes, premières victimes
représentés sur l’archipel. de cette activité. Quatre statuts très codifiés
distinguent les catégories de « prostituées »,
même si pour certaines l’acte sexuel n’est pas
L’âge des revues fondamental dans leur fonction.
Avant la radio, il y avait l’écrit. Avec la liberté
de la presse et les avancées techniques de
Au sommet, les geishas
l’imprimerie occidentale, le nombre de revues
a explosé ces dernières décennies. Elles Environ 30 000 en 1890, les geishas sont
deviennent un des principaux vecteurs de puissantes et influentes. Certaines d’entre
diffusion de la modernité auprès des masses elles sont des conseillères personnelles des
aisées et de mieux en mieux éduquées. plus grandes personnalités de l’époque, dans
Ces revues, qui font en moyenne une l’entourage même de l’empereur. Les geishas
trentaine de pages, n’ont pas de officient dans des karyukai, des maisons de thé
parution régulière et faisant aussi office de restaurants. On trouve
ne comportent pas des lanternes à l’entrée de ces établissements
encore beaucoup où sont calligraphiés le nom du lieu et des
d’annonces, un geishas présentes.
aspect qui va
se développer
dans la Les joro
décennie à
venir. Elles Ces prostituées plus classiques sont environ
touchent tous 50 000 en 1890, réparties surtout au sein
les sujets, des d’établissements neufs dans les yuri, les quartiers
progrès techniques des plaisirs. Ce sont des professionnelles inscrites
à la découverte des dans un registre impérial et donc soumises
autres cultures (avec un aux mêmes contraintes administratives que
discours toujours biaisé n’importe quel autre métier légal. Elles portent
accentuant les défauts des des vêtements coûteux et soignés et vivent
autres sociétés) en passant par dans des pièces ouvertes sur la rue. Elles ont
des conseils d’hygiène et de vie. Les obligation d’avoir une tenue respectueuse et
femmes (ayant acquis les bases de un langage soutenu et il n’est pas rare de voir
la lecture, soit encore une minorité) des familles entières faire une balade dans ces
sont de grandes consommatrices quartiers des plaisirs pour admirer et observer
de ces revues, contribuant à leur des joro dans leur lieu de vie. Évidemment,
fournir les connaissances pour leur lorsqu’elles sont avec un client, elles se rendent
émancipation future. dans une pièce plus intime.
La majorité sont éditées à Tokyo et diffusées
à partir de là, mais quelques revues locales
Les miso-joro
voient le jour à Osaka, Hiroshima, Kyoto
et Nagoya. Leur qualité technique est Ce sont les plus nombreuses, environ 80 000 en
moindre et le papier souvent si bas de 1890, et celles dont l’effectif a le plus augmenté
gamme qu’il est presque impossible de les avec l’ère Meiji. Ces prostituées s’entassent dans
conserver longtemps en bon état. des maisons closes bariolées et se montrent de
la même manière que les joro dans des pièces
donnant sur la rue, mais toutes ensemble.
46
Plus frivoles et moins éduquées, elles Evidemment, ces femmes n’ont pas leur mot
Vie quotidienne
viennent souvent des classes les plus pauvres à dire et sont choisies par les autorités, sans
et ne bénéficient pas d’une instruction possibilité de recours. Une des histoires les
financée comme les geishas ou les joro. plus populaires de l’époque Meiji raconte celle
Enfin, celles qui acceptent les étrangers (de (basée sur des faits réels) d’une très belle femme
plus en plus nombreux, surtout à Yokohama promise à un homme qu’elle aimait, mais
ou Tokyo), sont les plus mal vues. Elles choisie pour être la mekake d’un diplomate
sont méprisées par les autres prostituées, anglais. Au terme du séjour du dignitaire, elle
et souvent aussi par les Occidentaux qui les a voulu retrouver son amant, mais ce dernier
brutalisent et abusent d’elles. la repoussa, la jugeant impure et déjà mariée.
Folle de désespoir, elle se suicida après une
courte période de misère.
Les mekake
Il s’agit de femmes temporairement octroyées
aux dignitaires étrangers. En effet, dans la
société japonaise, il est très mal vu de ne pas
être marié à partir d’un certain âge et surtout
Us et coutumes
d’un certain rang. Aussi les Japonais ont-ils Face à la modernisation de la société,
trouvé cette solution pour les ambassadeurs les Japonais paradoxalement sont très
et autres professeurs effectuant un séjour long conservateurs au niveau des us et coutumes.
sur l’Archipel, même s’ils sont mariés chez eux. Bien qu’ils adoptent facilement dans certains
Les mekake ne sont liées à leur « mari » que le domaines les apports occidentaux, au niveau
temps du séjour, mais après son départ, leur des loisirs ou de l’éducation par exemple, dans
situation empire. Elles sont alors considérées les rites du quotidien ou dans le folklore, ils se
comme ayant déjà été mariées, qui plus est avec comportent encore comme à l’ère Edo. L’une
un étranger, sans être devenues veuves pour des évolutions les plus marquantes est leur
autant. Elles finissent souvent dans la misère. attitude face à la mort.
Le suicide
Le suicide a toujours fait partie de la tradition
japonaise. Mais le seppuku, ce suicide rituel
pour effacer une faute, bien qu’il ne soit pas
interdit, est de moins en moins pratiqué. Outre
une évolution des mœurs et la chute de la caste
des samouraïs, c’est surtout un détail technique
qui explique son désintérêt. En effet, le seppuku
est ordonné, ou autorisé, par son supérieur
direct, autrefois le daimyo. Mais en 1890, plus
aucun supérieur de l’administration impériale
n’ordonne un tel châtiment. Ce ne sera pas le
cas dans les années 1930.
Le suicide étant admis, il n’a aucune conséquence
morale, religieuse ou administrative particulière
vis-à-vis de l’État. Parfois non recommandé
dans certaines formes de spiritualité, il reste
un moyen de mourir comme les autres. Enfin
il existe aussi le junshi, le suicide par amour. À
une époque où les mariages sont trop souvent
arrangés, c’est une forme de suicide importante
et mise en exergue par la littérature féminine
de l’époque.
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Le deuil et coutumes locales et villageoises, mais ne les
abrogent pas. Il en ressort, peut-être plus
la place des morts
qu’ailleurs, une très grande différence entre le
Si auparavant on inhumait les morts dans les monde des villes et celui des campagnDans les
espaces sacrés des temples, c’est de moins en villes, en 1890, la succession est codifiée par un
moins le cas avec l’ère Meiji. En 1874, à Aoyama nouveau code civil dans lequel l’héritage va à la
près de Tokyo, ouvre le premier cimetière primogéniture, même célibataire. Une primauté
« civil », c’est-à-dire distinct des temples. En est accordée aux fils sur les filles.
1890, les tombes, sauf celles des personnes les
plus importantes, sont anonymes. Avec un À la campagne, l’héritage va au fils et non à la
besoin d’espace urbain de plus en plus important, fille. En l’absence de garçon, il est possible d’en
les cimetières se réduisent et la crémation adopter un pour lui transmettre le patrimoine.
est davantage utilisée. Distincte des temples Enfin, le sceau familial, symbole du pouvoir
bouddhistes (qui la pratiquaient auparavant), dans la famille, est encore transmis aux 60 ans
elle est une activité encadrée par l’État. du chef de famille tandis qu’en ville, il est remis
à la mort de ce dernier, sauf pour les familles les
Après la guerre sino-japonaise, les cimetières plus traditionnelles et guerrières.
composés de pierres tombales (un long pavé
où est inscrit le nom du défunt, aligné avec
les autres) font leur apparition, trop de morts
n’ayant pas pu être ramenés (en entier) sur Se nourrir
l’Archipel. Bien qu’avec la modernisation des plats
Avec le développement du shintoïsme d’État, occidentaux soient servis dans les ports de
le rôle des bouddhistes et de leurs cimetières commerce, l’alimentation à l’ère Meiji reste la
décroît même s’il existe toujours. L’empereur même qu’à l’époque d’Edo. Lorsque l’idée de
et son administration instaurent une politique rejeter les « barbares » de l’île se fait de plus en
de création de grands cimetières shintô pour plus populaire, les quelques apports étrangers à
aider à combattre l’influence bouddhiste : en la gastronomie sont mis au ban et disparaissent
1868, celui de Yasukuni à Tokyo est inauguré. Il presque partout.
accueille toutes les personnalités défuntes ayant L’identité culinaire japonaise reste très marquée
contribué à la grandeur de la patrie. pendant toute la période.
La mort pose toujours le problème de la
souillure couverte par le deuil, une différence
notable avec le monde occidental qui associe au
deuil un travail de mémoire et de recueillement.
Payer
Si autrefois les moines bouddhistes et des eta Avec l’abandon de l’unité de compte appelée
avaient la charge des morts, cette fonction est koku, le Japon se dote d’un système monétaire
aujourd’hui assurée par des professionnels complet à l’aide de pièces puis des premiers
civils, bien que les moines officient toujours billets à la fin de la période. Voici les différentes
dans certains villages, ou à la demande de monnaies utilisées par les Japonais, de celle qui
pratiquants. En 1886, apparaissent les premières a la plus forte valeur à la moins cotée :
pompes funèbres. Il s’ensuit une appropriation • Le ryo, une monnaie d’or dont la valeur
par l’entreprise, dans les grandes villes, de la réelle fluctue avec le cours du métal
cérémonie de fin du deuil autrefois gérée par le précieux. Peu utilisée dans la vie courante.
voisinage et les associations de jeunes. • Le yen, qui vaut environ un demi-dollar
La souillure entachant la demeure du défunt américain, est l’équivalent du ryo. Plus
stable, il est la principale monnaie de
(ou ses propriétés agricoles) existe toujours
référence dans la vie quotidienne.
pour la société nippone, mais la procédure
de purification, longue et ritualisée à l’époque • Le sen, qui vaut un centième de yen.
d’Edo, a été simplifiée et revêt un caractère • Le rin, qui vaut un dixième de sen et donc
avant tout symbolique. un millième de yen. Petite monnaie pour
les produits bas de gamme du quotidien.
• Le mo, appelé aussi momme ou mon et
qui correspond à un dixième de rin. Petite
La succession monnaie qui ne sert pas à grand-chose.
Les lois impériales sur la succession sont • le Ryo, une monnaie d’or dont la valeur
calquées sur les européennes et au profit de réelle fluctue avec le cours du métal
l’aristocratie japonaise. Elles négligent les précieux. Peu utilisée dans la vie courante.
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Vie quotidienne
Prier
temples et les prêtres shintô sont subventionnés
On retrouve à l’ère Meiji deux grands courants
par le gouvernement et les grandes cérémonies
religieux : le shintoïsme et le bouddhisme.
du pays sont exclusivement shintô. Sans être
Toutefois, les courants religieux occidentaux,
interdit, le bouddhisme est combattu dans une
le christianisme, le judaïsme et l’islam, sont de
certaine mesure en lui ôtant tous les avantages
plus en plus présents avec l’ouverture du pays,
qu’il pourrait avoir et en l’excluant des moments
mais restent marginaux.
de la nation. Malheureusement pour les
La principale innovation en matière religieuse dirigeants japonais, une partie importante
est l’imposition du shintoïsme par l’État. Ce de la population, essentiellement dans les
dernier est valorisé afin de créer un ciment couches populaires, reste ancrée dans cette
culturel unissant tous les Japonais face à la religion. En revanche, l’élite du pays est presque
menace d’acculturation liée à l’ouverture. Les exclusivement shintô.
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Chapitre 4
Tokyo
A l’époque d’Edo, la ville était divisée en quartiers À l’est, au-delà de la Sumida-gawa, les ku
dirigés par un gouverneur de quartier. Si au de Fukagawa et Honjo sont des quartiers
début de l’ère Meiji, avec le départ des daimyos périphériques servant essentiellement de
et de leurs suites, la population a fortement résidence aux classes moyennes.
décliné (environ 570 000 habitants lors du Au nord du palais impérial se trouvent les ku
premier recensement de l’ère Meiji en 1877), elle de Koishikawa, Hongo, Shitaya et Asakusa. Ils
retrouve sa taille d’antan grâce au commerce et accueillent l’université impériale, le premier
à la modernisation du pays (qui commence à zoo du Japon dans les jardins d’Ueno, un lac
la capitale). Il faut attendre la publication de dédié au kami Benten et pas moins de cinq
la constitution de Meiji, en 1889, pour que jardins qui ponctuent les résidences de plus en
l’organisation définitive de la ville soit adoptée. plus modernes. C’est aussi au nord-est de la ville
Tokyo est alors découpée en 15 districts appelés que se trouve le plus célèbre des 35 quartiers des
ku : Fukugawa, Honjo, Asakusa, Sotoshiro, plaisirs de la capitale, Yoshiwara.
Kanda, Nihonbashi, Kyobashi, Shitaya, Hongo,
À l’ouest des quartiers centraux, le ku d’Ushigome
Koishikawa, Ushigome, Yotsuya, Akasaka,
se caractérise par sa caserne d’artillerie et une
Azabu et Shiba. À la tête de chacun se trouve
grande école militaire (calquée sur le modèle
un préfet spécial.
prussien). Il avoisine le ku de Yotsuya où se
trouvent de nombreux palais dont Aoyama,
domaine du prince héritier, et les ku d’Akasaka
Apparence générale et Azabu où se regroupent le plus d’industries.
52
Tokyo
Kondo Yasuhiro l’immortalité. Nawa Hanpei de son vrai nom
Responsable du club house de la société du embrassa la cause des Implantés et traversa
Chrysanthème à Tokyo situé dans le ku de les siècles sans mourir.
Sotoshiro. NC 7
Confiant, manipulateur, opportuniste. FOR +2 DEX +2 CON +2
Trentenaire sûr de lui, ce bel homme au INT +3 PER +2 CHA +4
charisme magnétique est d’une intelligence
redoutable. Tout lui réussit. Sous son air de DÉF 12 PV 40 Init 12
gentleman, dilettante parfois superficiel, Pistolet Nambu +7 DM 2d6
Kondo Yasuhiro cache un autre visage, celui
d’un homme arriviste et implacable, froid Tantō +7 DM 1d6+3
et calculateur. Yasuhiro est un adepte de la Voie de la magie par le sang rang 3
magie corrompue vieux de plusieurs siècles.
En 950, alors qu’il était jeune onmyōji, Malédiction (L) : Kondo Yasuhiro fait un
il croisa le chemin du père fondateur des test d’attaque magique opposé contre un
Implantés. Voyant le potentiel du jeune personnage. S’il l’emporte, le personnage lance
homme, le fondateur lui proposa s’il le désirait deux d20 et garde le plus mauvais résultat
une longue existence. Mais en aucun cas pendant les 1d6 prochains tours.
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Chapitre 5
Yokohama
La porte vers le monde
Frank DerKros
Organisation administrative Marin étranger
La ville et son territoire ont acquis en 1889 Raciste, violent, misogyne, sournois
le statut de préfecture, preuve que leur « Si j’avais su à quel point ils étaient barbares,
développement est très important et rapide. j’aurais pas signé. Toutefois leurs femmes sont
La population de Yokohama oscille entre 110 dociles et la bière, si elle est mauvaise, est pas
000 et 120 000 habitants, aucun recensement chère. »
sérieux n’ayant été encore effectué. Elle est NC 2
dirigée par un préfet qui cumule ce poste avec
celui de maire. Ses pouvoirs sont étendus à la FOR +1 DEX +1 CON +3
police et il instruit certaines affaires judiciaires, INT +2 PER +1 CHA +3
mais renvoie souvent aux tribunaux de Tokyo. DÉF 11 PV 15 Init 11
Il est assisté dans ces tâches par un sous-
préfet, un commissaire général et un préfet
maritime (en charge de la capitainerie). Il est
entouré d’un conseil municipal élu, mais au
simple rôle consultatif à propos des questions
Une division en districts
de politique étrangère, de police et de sécurité La ville est divisée en sept zones distinctes
en général. Enfin, il peut solliciter les autorités appelées districts.
religieuses en la personne du prêtre du temple
shintô du centre-ville et les intérêts occidentaux
en assistant au conseil des entrepreneurs Le district pauvre (au nord du centre)
rassemblant les principaux conglomérats Tout au nord de Yokohama, le plus éloigné de
étrangers présents à Yokohama. la mer, se trouve le quartier prolétaire. Il est
organisé autour d’une grande avenue en terre
qui mène du Tokkaido au centre-ville et à sa
Géographie de la ville fameuse gare. De chaque côté de cet axe s’étend
un dédale de petites ruelles boueuses ouvrant
Yokohama est située à l’embouchure d’une sur le quartier plutôt pauvre. Les maisons sont
rivière, la Tsurumi (Tsurumi-gawa), qui se jette en bois et de facture traditionnelle. Des enfants
dans la baie de Tokyo. Ses eaux sont relativement non scolarisés jouent dans la rue, il n’est pas
profondes, permettant aux steamers étrangers de rare de déranger des poules ou quelques chiens
mouiller dans son port. Elle est adossée à l’ouest en maraude. L’air est porteur des odeurs de plats
contre une grande colline tandis que les autres cuisinés, de relents de déchets mal évacués ou
directions débouchent sur une vaste plaine de flaques vaseuses par endroits.
courant jusqu’à Tokyo. La ville s’est construite Ce quartier abrite la prison de la ville, le seul
le long de cette rivière, mais aujourd’hui il ne bâtiment en pierre qui comprend aussi en
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sous-sol la morgue. Il est près de la rivière à de services techniques (souvent entre trois et cinq
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La sorcière au carrefour des chemins
(voir le supplément L’époque de Heian) le plus direct pour résoudre leurs problèmes,
car pour elle, ils ne peuvent l’être que s’ils
Kawasonaji Fujimi est une femme grande et
prennent conscience qu’il faut changer eux-
mince, à la peau pâle. Ses longs cheveux noirs
mêmes pour y parvenir. Ainsi, la plupart du
sont coupés en escalier : une frange devant
temps, si la personne manque de sincérité
ses sourcils, puis une autre allant jusqu’à sa
et de volonté pour changer, elle attirera
mâchoire, la suivante au niveau des hanches,
forcément la mauvaise fortune.
et une dernière au niveau des genoux. La
couleur de ses yeux est généralement rouge, Les capacités de Fujimi ne sont toutefois
même si elle change parfois pour du violet pas illimitées et peuvent presque apparaître
ou du bleu turquoise ; par conséquent, leur comme une malédiction, car elle est incapable
véritable couleur n’est pas connue. de faire quoi que ce soit ou d’accorder une
faveur sans que cet acte prenne la forme d’une
Si, chez elle, Fujimi porte toujours un kimono,
transaction contraignante. Elle a cependant
elle ne met jamais la même chose deux fois
une grande connaissance de tous les types
et a généralement des accessoires pour
d’objets magiques existants, dont beaucoup se
l’accompagner. Par exemple, si son kimono
trouvent dans son magasin.
présente un motif rose avec de la dentelle,
elle ajoutera une rose dans ses cheveux, un Fujimi s’en remet aux lois de l’univers, et
tour de cou en dentelle et un bracelet. En son magasin ressemble à une petite bicoque
outre, Fujimi coiffe ses cheveux de façon en bois dont l’intérieur paraît plus grand
élégante mais originale, et les décore toujours que l’extérieur. Peuplé de créatures et de
d’accessoires comme des épingles colorées ou yokai en tout genre tapis dans l’ombre de
des baguettes. Comme pour ses tenues, elle ses recoins, il contient une impressionnante
n’a jamais été vue deux fois avec le même style quantité d’innommables trésors et autres
de coiffure, sauf lorsqu’ils sont lâchés. objets occultes. Son point d’ancrage n’étant
pas fixe, il est présent dans plusieurs lieux à
Excentrique et amusante, Fujimi est
la fois : Ikai, monde des humains, contrées
respectueuse de tous les êtres, mais suit des
du Rêve, etc. Ainsi, il n’est pas rare d’y croiser
préceptes qui dépassent la conscience de la
des clients venant de différentes époques et
plupart des gens : bon et mauvais sont des
plans d’existence. En effet, cette belle, grande
notions que les humains décident, et celles-
et mystérieuse sorcière ayant d’importantes
ci ne s’appliquent pas aux non-humains.
connaissances en folklore et Mythe des
Toutefois, bien qu’elle soit assez sarcastique et
Grands Anciens, elle peut résoudre différents
puisse parfois paraître très autoritaire envers
problèmes en trouvant la bonne potion
son fidèle employé Tomoe, il est évident
rare ou le bon artefact ou autre, en échange
qu’elle se soucie de lui.
d’un « fragment de l’essence » du client
En outre, Fujimi n’ayant jamais révélé son proportionnel à sa requête : Ki, maho, points
vrai nom, elle a reçu de nombreux surnoms. de caractéristique, etc. Comme Fujimi se plaît
Sorcière de grande puissance, son énergie à le dire, toute chose a une contrepartie.
spirituelle est incommensurable et elle est
aussi connue sous le nom de « La Sorcière
des Dimensions », en raison de sa capacité NC 14
à voyager dans le temps. Elle est également FOR +1; DEX +2 ; CON +3 ;
assez douée pour manipuler et créer des objets
magiques d’envergure, et peut également INT +4 ; PER +5 ; CHA +4 ;
s’entendre avec n’importe quelle entité des DÉF 12 ; PV 85 ; Init 12 ;
royaumes « non humains » : fantômes, dieux,
ATM +15 ; PM 30
esprits, yokai, etc.
Voie de l’alchimie rang 4
Tous les clients de Fujimi doivent payer le
prix pour exaucer leurs vœux, ou ils devront Voies de l’éveil, de la divination et de la
en subir les conséquences. En outre, elle n’est protection rang 5
pas du genre à révéler à ses clients le moyen Sorts : tous les mineurs de rangs 1, 2 et 3
58
Le district des plaisirs Le district des étrangers
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Chapitre 6
Système de jeu
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Système de jeu
Cette voie utilise le nagamaki ou la naginata.
Nouvelles voies de prestige Elle requiert d’avoir atteint le rang 5 dans la voie
des armes de contact et également le rang 2 dans
Les voies de prestige des arts martiaux la voie des arts martiaux. Elle peut être apprise à
peuvent être utilisées comme voie de base n’importe quelle époque.
pour le combat. Il suffit alors de remplacer les
voies voie des arts martiaux, voie des armes à
distance et voie des armes de contact. 1 — Barrière de lame (L) : l’Eiyu gagne un
bonus de +2 en DÉF lorsqu’il utilise une
action de défense ou de défense totale.
Voie de la naginata Il rajoute son mod. de Ki à ses tests
d’attaque*.
Le naginata-jutsu concerne les techniques de
combat à la naginata et au nagamaki. À l’origine 2 — Coup rapide (L) : l’Eiyu doit utiliser son
dédié aux femmes de samouraïs et très apprécié mod. de DEX pour attaquer ; il gagne +2 à
des moines guerriers, cet art largement répandu l’Initiative.
parmi les bushi regroupe les techniques de 3 — Toucher spirituel : l’Eiyu peut dépenser
combat contre un adversaire monté ou au sol. un unique point de Ki pour augmenter ses
Depuis l’ère Meiji, le naginata-jutsu est devenu DM de +2d6 OU annuler une éventuelle
l’équivalent du kendo pour les femmes : un art immunité lors d’une attaque réussie.
permettant de travailler le corps et l’esprit grâce 4 — Riposte (L) : lorsqu’un adversaire rate
à des techniques et des mouvements inspirés des l’Eiyu en Défense totale, ce dernier peut
anciennes méthodes de combat à la naginata ou tenter une attaque en action gratuite. Il
au nagamaki. ne peut faire cette action qu’une fois par
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tour ; il doit donc choisir sur qui appliquer
sa riposte si plusieurs adversaires sont Armes et équipement
concernés.
Afin de diversifier les possibilités offertes
5 — Frappe tournoyante : l’Eiyu peut dépenser par le jeu et permettre des variations de
un PC pour que l’une de ses attaques du tour l’Eiyu combattant, certaines armes sont
(et une seule) affecte tous les adversaires à désormais dotées de règles spéciales. Le but
portée de l’arme. Son test d’attaque est alors est d’encourager un choix autre qu’esthétique
confronté à la DÉF la plus haute ; en cas et un peu plus technique. Ces règles sont
de succès, tous les ennemis sont touchés. optionnelles et peuvent être ignorées par le
Il rajoute son mod. de Ki à ses DM*. Sensei et les joueurs.
64
Système de jeu
Nom Dégâts* FOR min. Utilisation Prix (yens)
1 main (Couteau, 1D6)
Baïonette 1D6/1D8 8 5,5
ou 2 mains (Fusil, 1D8)
1 main (D6)
Bokken / Shinai 1D6 / 1D8 10 3,3
ou 2 mains (D8)
Hanbo / Tanbo 1D6 7 1 mains 2,5
1D8/1D10, 1 mains (1D8)
Katana 10 165
Critique 19-20 ou 2 mains (1D10)
Sabre 1D8 10 1 mains 8
Tanto / Kaiken 1D6 7 1 mains 16,5
1D8
Wakizashi 8 1 mains 110
Critique 19-20
Yari 2D6 12 2 mains 3,3
Hanbō et tanbō : le « demi-bō » est utilisé Le kaiken est le couteau court que portent les
surtout pour l’auto-défense. D’environ dames dans leur obi (ceinture) pour pouvoir
90 centimètres, il est généralement modifié afin se défendre.
de pouvoir contenir des messages, des poudres
ou des poisons et parfois même une petite lame
à l’une de ses extrémités. Wakizashi : utilisé par les forces shogunales
pendant la guerre de Boshin, il devient aussi
Le tanbō nécessite d’apprendre un art martial à rare que le katana.
part entière pour pouvoir le manier. Bâton court
de 45 à 60 centimètres, il est principalement Règle : cette arme est de type léger malgré ses
utilisé pour frapper un adversaire, le bloquer, DM.
l’étrangler, le projeter ou effectuer une clé. Le
tanbō peut être utilisé seul ou par paire. Yari : cette lance mesure entre 250 et 400
centimètres. La hampe est le plus souvent garnie
d’une lame droite dont la forme varie selon
Katana : l’arme emblématique des samouraïs
la conception. Le yari permettait de trancher
depuis l’époque d’Edo est devenue, à la chute du
les jarrets des chevaux ou de désarçonner les
shogunat, rare à trouver et la plupart des artisans
cavaliers. Il fut abandonné avec la généralisation
ont abandonné la voie du forgeron d’arme.
des fusils.
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aussi des principes de fabrication d’armes à Murata type 18 (1888) corrige grandement les
feu grâce aux études des principes néerlandais problèmes de son prédécesseur en ajoutant un
et inventa notamment ce fusil à air comprimé système de culasse et d’éjecteur. Le fusil Murata
durant cette période. type 22 apparaît en 1889. Sa conception diffère
peu de celle du type 18. Il reste en service
Règle : l’Eiyu ne relance qu’une fois les DM en
jusqu’en 1905.
cas de maximum sur le dé. Cependant, l’arme
augmente de +5 la difficulté des tests de PER
pour repérer l’origine du tir. Hankyū : ce « demi-arc » est principalement
utilisé par les paysans pour la chasse et par les
Fusil à platine : ces vieux fusils, vestiges de combattants non formés à l’usage du daikyū.
l’époque d’Edo, sont remplacés par des modèles Il mesure entre 100 et 120 centimètres, et sa
plus modernes dès le début de l’ère Meiji. conception est asymétrique.
Règle : sur un résultat de 1, 2 ou 4 sur le d20, Règle : si l’Eiyu est monté, il a un malus de -3
le fusil a un problème technique et ne peut à ses tests d’attaque. Cela ne s’applique pas s’il
plus être utilisé pendant le combat. est passager d’un véhicule.
Fusil Arisaka : inventé à partir de modèle de Mitrailleuse légère type 11 : elle entre en
fusils allemand et autrichien, le modèle 30 service dans l’armée japonaise à partir de 1922.
apparaît en 1897 et le type 38 en 1905. Très utilisée, elle garde cependant un système
Grandement amélioré, il équipe les fantassins de rechargement très vulnérable à la poussière
à partir de 1907. Le modèle 38 est réputé pour ou à la boue. Elle est fournie avec une lunette de
son extrême solidité. Les fusils Arisaka restent visée et une baïonnette.
très reconnaissables à leur bois laqué en rouge
et un meulage représentant un chrysanthème,
Pistolet Nambu (type A/4, type B) : première
symbole de l’empereur.
arme de poing entièrement japonaise mise au
La carabine type 44 est une variante améliorée point par l’arsenal de Tokyo, inventée en 1902,
du type 38 avec une baïonnette, conçue pour la elle équipe la marine nipponne à partir de 1909
cavalerie. Elle entre en service dès 1911. et l’armée thaïlandaise en 1920.
Le pistolet Nambu type B est produit de 1909 à
Fusil européen à chargement par culasse 1930. Il équipe les officiers de l’armée impériale
(Chassepot modèle 1866, fusil Dreyse 1841, qui se l’achètent à titre personnel. Il est plus
fusil Snider) : importé depuis la Prusse où le court et plus léger que le type A, mais son
fusil Dreyse 1841 est créé en secret, il équipe la calibre est également inférieur.
majorité des forces shogunales en 1867.
Le fusil Snider vient de Grande-Bretagne et Revolver type 26 : adopté par l’armée impériale
équipe les troupes de Tosa contre les armées japonaise en 1893, ce revolver additionne la
shogunales en 1867. conception des revolvers Smith & Wesson
Le Chassepot est le fusil français concurrent américains avec des pièces d’armes britanniques.
direct du Dreyse germanique. Il est employé par Il est produit jusqu’en 1923 et participe à toutes
l’armée impériale japonaise dès 1868, après la les guerres japonaises, y compris la Seconde
révolte de Satsuma. Guerre mondiale.
Fusil Minié : importé de France par le shogun Shuriken : ces petites lames en bois ou en métal
lors de la guerre de Boshin, il possède une peuvent tenir dans le creux de la main et sont de
meilleure portée et une plus grande létalité tout formes variables (feuille, étoile, losange, carré,
en étant plus léger que les fusils Dreyse. Il arrive triangle ou cylindre). Utilisées pour détourner
au Japon en 1868. l’attention ou comme outils improvisés, elles
n’étaient donc pas toujours aiguisées.
Règle : l’arme a un bonus de +3 pour être
Fusil Murata (type 13, type 18 et type 22) :
dissimulée.
le type 13 est le premier fusil entièrement
de conception japonaise sorti en 1880. Le
66
Système de jeu
FOR
Nom Dégâts Portée Rechargement Utilisation Prix
minimum
daikyu 1d8 80 Action simple 9 2 mains 11
Fusil à air
1d10 70 Action limitée 10 2 mains -
comprimé (L)
Fusil à Platine (L) 1d8 70 Action limitée 13 2 mains -
Fusil Arisaka2 2d8 80 Action simple 13 2 mains -
Fusil Européen
2d6 80 Action limitée 11 2 mains -
à Culasse
Fusil Minié 2d8 80 Action limitée 10 2 mains -
Fusil Murata 2d6 70 Action simple 12 2 mains -
Hankyū 1d6 40 Pas d'action 7 2 mains 2,2
Mitrailleuse
3d6 80 Action limitée 16 2 mains -
légère Type 11 #
Pistolet Nambu 2d6 30 Action simple 10 1 main -
Revolver Type 26 1d10 40 Action simple 8 1 main -
Shuriken 1d6 10 Pas d'action 6 1 main 0,12
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Aire
Nom Dégâts Portée Rechargement Utilisation Prix
d’effet
Canon
3d10 400 2 Actions limitées Aucune 3 hommes N/A
Armstrong
Canon de
5d10 1 200 2 Actions limitées 2 10 hommes N/A
Montagne
30 tirs puis 3
Canon Gatling ² # 3d10 200 Aucune 3 hommes N/A
Actions limitées
Canon Parrott 3d10 500 2 Actions limitées Aucune 3 hommes N/A
Obusier 150 mm 5d10 1 400 3 Actions limitées 3 12 hommes N/A
Bâton de dynamite : explosif en forme de Grenade à main type 10 : elle apparaît en 1914
bâton long d’environ 25 centimètres et large de et est la première à être conçue. Les problèmes
3 centimètres. Stabilisé, il n’explose pas en cas d’instabilité du déclencheur la rendent au début
de choc (sauf s’il est gelé) et même placé dans aussi dangereuse pour le lanceur que pour la
un feu, il brûle simplement. Un détonateur est cible. Elle sert notamment en tant que grenade
glissé à l’intérieur pour l’activer. fumigène ou incendiaire.
FOR
Nom Dégâts Portée Rechargement Utilisation
minimum
Dynamite 3d6 20 Action limitée 8 2 mains
Grenade à main
4d6 20 Action simple 9 1 main
type 10
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Système de jeu
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Chapitre 7
Les secrets
Tout comme le reste de la société de l’époque, les organisations occultes subissent
elles aussi beaucoup de changement. Tandis que les plus anciennes vivent leurs
dernières heures, de nouveaux acteurs entrent en scène. Ils deviendront les
principaux antagonistes du siècle suivant.
72
1880 : fondation de la société du plusieurs hommes en tentant d’appréhender
Les secrets
Chrysanthème (Kikudantai), club de le mystérieux vieux moine, les autorités
gentlemen occultistes. décident de mettre le feu au bâtiment. On
1881 : création de la société secrète de raconte que des colonnes d’esprits enflammés
l’Océan Noir (Kuroi Umi). Découverte de l’île se sont échappés du bûcher, provoquant une
perdue de Yamatai. Premier contact avec une vague de démence dans les environs pendant
colonie de Mi-Go (créatures qui vivent sur la plusieurs mois.
planète Yuggoth, que l’on appelle Pluton), puis
isolement de l’île. Par ailleurs, on rapporte 1890 : arrivée du Gardien de R’lyeh (Mizu no
plusieurs apparitions d’un vieux moine défiguré moribito) dans la baie de Yokohama.
aux quatre coins de l’Archipel. Il serait le seul
lien entre plusieurs massacres inexpliqués.
Il s’agit du chef de l’École de l’Œil unique 1892 : tentative d’assassinat sur Sir Fusanosuke
(Hitotsu no me ha). Hitachi. Blessé gravement, il se retire dans son
hôtel particulier à Yokohama, gardé par ses plus
fidèles alliés et une impressionnante protection
1882 : découverte d’une source de Ki par magique. Après avoir accusé la faction anti-
Mayuri Ito. La prêtresse carmine (Yoko no Occident de la Société du Chrysanthème, le
miko) y installe son fief. Le rituel propageant bureau de l’organisation se rend compte que
la corruption du site est si puissant qu’il alerte Fusanosuke a été la cible de la famille Yoshida.
les autres factions du réveil du culte d’Hastur. Une lutte d’influence commence entre les deux
Mayuri reste discrète et ne se révèle pas comme organisations.
la grande dirigeante. Un culte sans chef paraît
ainsi moins dangereux aux yeux de tous.
1895 : ralliée à l’organisation secrète de l’Océan
Noir, l’armée japonaise s’en prend à la Corée en
1883 : Mayuri Ito infiltre les institutions assassinant la reine coréenne.
japonaises et intègre l’Académie impériale des
arts et des traditions populaires, à la section
« Tradition ». Elle commence à collecter les 1901 : création de la société secrète du Dragon
informations sur tout le savoir occulte réparti Noir (Kokuryukai) par Ushida Ryōhei.
sur le Japon pour le compte de l’empereur.
73
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communiquent avec eux afin de comprendre
Présentation de qui ils étaient. Mais bien qu’ils parlent la
l’intrigue principale
même langue, au travers d’un villageois servant
d’interface, le vocabulaire et les notions que
Lors des dernières décennies du XIXe siècle, la chacun véhicule restent trop étrangères pour
plupart des acteurs occultes ont un lien plus être comprises.
ou moins distant avec la nouvelle Académie En 1885, un académicien du nom de Toshigiwa
impériale des arts et traditions populaires. réussit à établir une conversation suffisante
Les agents de cette dernière sont au cœur des pour comprendre que ces êtres viennent
plus grandes intrigues de la période. d’une autre terre nommée Yuguof et qu’ils
ne cherchent pas à envahir l’Archipel, mais
recherchent des matières premières pour
Les grands travaux leur industrie. Après avoir été consulté sur
de l’Académie impériale l’affaire, le gouvernement accepte d’établir un
des arts et traditions accord avec ces créatures sous la double tutelle
de l’Académie et du ministère des Armées.
populaires L’objectif est clair : obtenir une technologie
Lorsque le nouveau gouvernement se met au militaire afin de pouvoir dominer l’Asie. Le
travail vers 1869, la plupart des dirigeants sont prix à payer est élevé, beaucoup de matériaux
au fait des événements occultes sévissant sur dont le Japon ne disposait qu’en petite quantité
l’Archipel. Ils sont source d’inquiétude pour comme certains minerais rares et des hommes
des dirigeants déjà fort occupés à réformer et en guise d’esclaves, rapidement asservis
moderniser la société japonaise. Ne pouvant par leur vile technologie. Le gouvernement
plus laisser cette mission à des organisations choisit des personnes rejetées de la société,
datant de l’ère précédente, comme la garde des criminels, des Aïnous et plus tard des
de l’empereur à Kyoto ou le clan Fuyumi, prisonniers chinois et coréens.
une nouvelle institution est créée afin de
coordonner tous les agents de l’occulte.
L’Académie impériale des arts et traditions Une étrange alliance
populaires naît en 1875.
Lors de cette coopération, les armées japonaises
obtinrent peu de choses : une arme équivalente
La découverte de Yamatai à une arme à feu, mais dont le mécanisme fut
trop étranger pour être véritablement utilisé,
Si dans ses premières années cette organisation et un traducteur japonais/yuggoth basé sur un
se contente de collecter toutes les informations cerveau humain.
possibles pour rationaliser les connaissances
occultes, elle découvre en 1881 une situation Au cours des années 1890, plusieurs fuites
si particulière qu’elle changea pour toujours d’informations sur cet accord sont publiées
l’Académie. Sur une petite île située au nord- dans des revues tokyoïtes forçant chaque fois
ouest d’Honshu, Yamatai, un académicien, l’Académie et les services spéciaux de l’armée
découvre une colonie de créatures qui à retrouver les taupes et neutraliser la menace,
n’appartiennent pas à cette terre. Les villages en emprisonnant, voire en exécutant les
de pêcheurs de l’île, bien que loquaces, sont journalistes mis au courant.
réticents à mener toute action ayant un rapport Le clou de cette alliance fut un projet de
direct avec ces êtres. L’agent découvre par lui- grande envergure entre 1902 et 1917 : la
même l’existence de ces êtres intelligents à création d’une nouvelle propulsion pour
l’allure vaguement insectoïde et s’échappe de navire à partir de la technologie yuggoth
leurs griffes de justesse. Lorsqu’un contingent qui n’utilise ni le charbon ni le pétrole. Un
de l’armée l’accompagne pour éradiquer sous-marin expérimental, le Bakemono, est
cette colonie, les pertes des deux côtés sont conçu et mis à l’eau en 1917 pour un voyage
importantes. Mais avec l’arrivée de renforts, les test de plusieurs mois. L’équipage est trié sur
insectoïdes sont poussés au bord de l’extinction. le volet et la maintenance de la propulsion
C’est alors qu’ils établirent une communication
confiée à un Yuggoth. Malheureusement une
avec leurs agresseurs au travers des villageois
série d’événements tragiques transforment
qui semblaient sous leur contrôle.
l’expérience en désastre laissant peu de
Dans un premier temps, seuls des émissaires de survivants (voir Recueil de kaidan, scénario
l’Académie, toujours sous bonne garde militaire, « Alone in the Dark »).
74
En conséquence de ce désastre, les Yuggoths, Une fois réincarnée, et afin d’obtenir le
Les secrets
furieux d’avoir perdu un des leurs, refusent pouvoir tant désiré, Mayuri Ito décide de se
de continuer la collaboration. De son côté, le montrer plus subtile que la première fois. Point
ministère des Armées commence à penser qu’il d’invocation de son dieu maléfique. Elle opte
n’a plus besoin de ces créatures répugnantes. En pour un plan sur le long terme, en infiltrant
1919, après treize mois sans contact, la marine la société japonaise pour construire un petit
et l’armée japonaises envahissent l’île, pillent empire. Mayuri Ito n’est pas à l’ère Meiji un
les installations yuggoths et rasent le site. Les personnage de premier plan. Jamais elle ne
Yuggoths sont tous exterminés. s’implique, mais use de ses charmes pour se
constituer une cour de prétendants qui lui sert
Au début de l’ère Taishō, les lourds secrets
de main-d’œuvre et de combustible pour son
de la colonie extraterrestre et des projets
prochain cocon de chair.
de l’armée scellent le destin de l’Académie.
Progressivement, elle est démantelée pour éviter
qu’un jour la population apprenne le terrible
pacte qu’avait contracté le gouvernement.
Les prémices d’un empire tentaculaire
En 1890, Mayuri Ito se fait passer pour
l’épouse du ministre des postes
Mayuri Ito du gouvernement. Elle
participe aux soirées
Mayuri Ito était la femme d’un petit daimyo mondaines des femmes
de l’époque d’Edo. Elle découvrit grâce à des occidentalisées et côtoie
marchands néerlandais le Mythe et se mit à les puissants. Elle cherche
l’étudier afin d’obtenir le pouvoir que son mari parmi eux les personnalités
ne pouvait lui donner. Alors qu’elle tentait les plus vulnérables et
d’invoquer un avatar de son nouveau dieu, elle entame un long processus
fut mise en échec par un groupe de samouraïs d’asservissement, usant de
qui la tuèrent et arrêtèrent le rituel. Mais dans ses charmes, puis une fois
un ultime mouvement, elle scinda son âme en devenue leur maîtresse,
douze fragments qu’elle implanta dans celles de de sa magie immonde
ses bourreaux. pour en faire des esclaves
Juste avant le début de l’ère Meiji, le fragment totalement à sa botte. Elle
le plus important réussit à prendre le contrôle a ainsi créé une demi-
de son hôte. L’ayant petit à petit usé au fil des douzaine de cellules de
années et profitant de sa vieillesse, Mayuri repris son culte à Hastur,
conscience dans le corps d’un vieillard. Elle essentiellement à
utilise alors ce qu’il lui restait de fortune pour Tokyo et dans sa
poursuivre son apprentissage de la sorcellerie et région. Si cela
finit par transférer son fragment d’âme dans le peut paraître
corps du fils de son hôte. Mais n’ayant pas accès très efficace, les
à toute son essence, son pouvoir restait faible et résultats sont
si elle n’était pas assez discrète, elle pouvait se pour le moment
faire exorciser même par un prêtre shintô sans assez succincts. Ito
grande envergure. a découvert qu’elle
n’était pas la seule à
En 1874, Mayuri Ito retrouve dix de ses jouer à ce niveau et
fragments et en les réunissant (toujours en elle doit absolument
causant la mort de ses hôtes), elle atteint un éviter de se faire
niveau de puissance suffisant pour tenter une repérer par
réincarnation. En 1876, elle accomplit pour la d’autres forces
première fois le rituel du cocon de chair pour se occultes tant
régénérer et apparut dès lors comme une jeune que sa puissance
femme à la beauté ravageuse, mais au regard un n’est pas établie.
peu vide. Les deux fragments perdus lui ôtaient Au cours de ces
toute chance de retrouver l’intégralité de ses soirées, elle entend
souvenirs et une partie de sa psyché. Ainsi, elle parler de l’Académie
n’éprouve plus de sentiments comme la pitié et impériale des arts et
reste focalisée sur les émotions éprouvées lors traditions populaires et
de sa mort physique, la haine et l’adoration de décide de l’infiltrer. C’est grâce
son dieu, Hastur.
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à cette organisation qu’elle prend conscience du l’industrie. Pour y parvenir, elles ont besoin
potentiel occulte de l’Archipel et approfondit d’un maximum de ressources pécuniaires et
ses connaissances déjà importantes. d’identifier les sites des quarante-sept sources.
Dans ce but, les Fortunes accumulent les
À la fin de l’ère Meiji, Mayuri Ito a la mainmise
renseignements sur les organisations occultes,
sur une petite zaibatsu en pleine croissance
voire se rapprochent de certaines. À travers
grâce à ses « contacts » dans le gouvernement et
elles, les Fortunes espèrent accélérer la phase
l’asservissement de trois capitaines d’industrie. de recherche des sources. La deuxième étape
Elle peut passer à l’étape suivante, accroître du grand plan sera alors terminée et malgré
sa puissance ésotérique. Elle a d’ailleurs les vicissitudes de l’époque suivante, les Quatre
commencé à se pencher sur le cas des sources Fortunes vont entamer la troisième étape,
de Ki découvertes par l’Académie impériale. cruciale pour arriver à concrétiser le plan de
Elle pense en faire sa prochaine cible. Nyarlathotep s’étalant sur quatre siècles.
Le grand plan
des Quatre Fortunes
Lorsque le Traqueur Infernal, l’avatar de
Légende urbaine
Nyarlathotep, a recruté quatre personnages
au début de l’époque d’Edo, il leur a confié Dans la ville de Kyoto, on raconte
à chacun une tâche. La première étape de qu’il existe une ruelle capable
son grand plan en cette époque déclinante d’emprisonner les hommes à
fut de créer des groupes d’influence tout en jamais. Cela aurait pu rester l’un
se préservant des puissants qui auraient pu des nombreux contes folkloriques
mettre un terme à leurs activités. Alors que de l’Archipel si les forces de police
l’époque d’Edo touchait à sa fin dans les n’avaient pas à régulièrement chasser
années 1840-1850, les Quatre Fortunes, le des hordes de désœuvrés cherchant de
nom de ce groupuscule, avaient toutes atteint manière obsessionnelle une rue qui les
leur objectif. Chacune de ces « familles » « appelle ». Face à ce fléau qui donnait
était une organisation semblable aux yakuzas, une mauvaise image de l’ancienne
structurée et solidement établie dans une des capitale, les autorités ont rasé le vieux
grandes villes de l’Archipel (Osaka, Kyoto, quartier et construit les premiers
Edo et Nagasaki). Leurs activités oscillaient bâtiments en pierre à l’occidentale.
entre une vitrine légale (définie en fonction Pour soigner ces malheureux fous qui
de l’occupation du fondateur), quelques continuaient d’errer dans cette partie
trafics mafieux et la mise en place d’un réseau de la ville, un hôpital a été construit.
d’agents infiltrés et de contacts liés aux À l’aube du XXe siècle, ce mal étrange
familles par le chantage. semble être endigué.
Avec la modernisation du pays et la quinzième
génération de dirigeants, le grand plan prit une
inflexion. Le Traqueur Infernal vint visiter en
personne chacun des héritiers et héritières et
leur annonça leur ordre de mission tout en leur
confiant une partie de son pouvoir. L’un d’entre
eux, le descendant de Matsuda, ne croyant
pas les dires de son père, voulu prouver que
le Traqueur n’était qu’une imposture. Tandis
qu’un nouveau successeur prenait la tête de
la famille, chacune des trois autres Fortunes
reçut un présent sous la forme d’un morceau
de peau et de chair qui gémissait péniblement
tout en prononçant le nom de Matsuda comme
une litanie. Ce signe suffit à assurer la fidélité
des Fortunes suivantes pour des décennies.
L’objectif des Quatre Fortunes est de mettre
la main sur un maximum de sources de Ki
afin de les souiller avec leur nouvelle arme :
76
Dramatis personae
Les organisations occultes
Les secrets
L’École de l’Œil unique n’est pas connue pour
à l’ère Meiji sa hiérarchie rigide. Néanmoins, un des
moines est reconnu par les autres comme
Durant cette période, les organisations étant le plus Illuminé en atteignant le concept
secrètes s’adaptent tout comme la société d’Azathoth (Azatosu no gainen), c’est-à-dire
japonaise à l’occidentalisation du pays. qu’il a survécu à une vision assez précise de
Des nouvelles influences occultes telle la l’avatar d’Azathoth.
société du Chrysanthème vont rapidement
émerger et prospérer tandis que d’autres plus Le grand illuminé de l’ère Meiji est Sadako,
traditionnelles vont s’éteindre. un vieux moine incapable de bouger, mais
qui a pourtant la capacité d’apparaître là où
Les statistiques Action, Connaissances, il le veut. Il meurt en 1889 et pour le reste
Ressources et Magie des groupuscules sont de la période aucun autre moine ne peut
différentes de celles de La Voie du Sensei. prétendre à ce rang.
En effet, leur influence, leur taille et leur
fonctionnement diffèrent d’une ère à l’autre.
Les rites
Effectifs
Lieux de rencontre
Entre 1850 et 1890, dix-sept moines sont
Il n’existe qu’un lieu pour ce culte, un vieux
affiliés à l’École de l’Œil unique. Mais dans
monastère décrépit situé dans la préfecture
la décennie qui suit, ce nombre passe à huit
de Miyagi au nord de l’île d’Honshu. N’ayant
avec la mort des plus anciens. Durant la
aucun fidèle régulier en dehors des moines,
révolution de Meiji, les disciples de l’Œil de la
il n’est pas entretenu, mais reste toléré par
Vérité (Shinri no me, Azathoth) passent pour
la population et les autorités au nom des
des mendiants, voire des déments avec leur
traditions. Fidèles aux premiers enseignements
scarification sur le front représentant un œil
de l’École de l’Œil unique, dix des dix-sept
ouvert et leurs vieux kimonos jadis blancs
moines sont gyrovagues, c’est-à-dire qu’ils
en lambeaux et rapiécés. Ils ont souvent été
errent le long des routes.
arrêtés, incarcérés, voire internés dans des
camps pour la plupart d’entre eux
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Interactions avec les autres organisations Effectif
L’École de l’Œil unique n’entretient aucun En 1861, avec l’accession au pouvoir du
rapport régulier, hostile ou bienveillant nouveau Frère supérieur, on dénombrait 28
avec les autres factions occultes. Si jamais moines dont dix parcouraient les routes de l’île
un de ses membres rencontre des personnes d’Honshu. En 1890, ce nombre est tombé à 15
éveillées (possédant un Ki important comme moines dont seulement trois sont sur les routes.
beaucoup de membres des organisations Jusqu’en 1915, ce nombre restera constant avant
secrètes), il tentera par tous les moyens de de chuter encore au moment de l’ère Taisho.
les convertir à son culte. Au-delà de cela, les - Le Frère supérieur, un haut rêveur dirige le
moines sont trop peu nombreux pour avoir monastère. Il génère une aura mystérieuse
une quelconque influence. ressentie la nuit. Ce bouclier mystique le
rend invisible des forces malintentionnées.
Il existe une exception : lorsqu’un moine de Il officie aussi en tant que Gardien de
l’École de l’Œil unique croise le chemin d’un la souillure qui surveille les artefacts et les
moine du monastère de la Contemplation entités emprisonnées.
endormie, la haine ancestrale qui les oppose
s’empare d’eux et ils se livrent à un affrontement - L’Archiviste d’Eternité est la mémoire du
sans limite. Heureusement pour les Japonais, ce savoir dans cette enceinte sacrée.
genre de rencontre est très rare. - 2 Priants qui se relaient en continu pour
réciter de sûtras ou de chants (mantra,
psalmodie, chant de gorge, etc.) avec des
accompagnements percussifs. A l’ère Meiji,
la caste des Rêveurs du Frère supérieur
permettant de maintenir la purification du
monastère, ont disparu.
Le monastère de la
contemplation endormie
(Bukkyo kansho shudoin
no soritsu)
(Voir La Voie du Sensei, p. 132)
Action : 1
Connaissances : 4
Ressources : 2
Magie : 5
78
- 10 gyrovagues (3 à la fin de la période)
Les secrets
parcourent l’archipel pour chercher les Sumochi
endroits marqués par l’occulte.
Ce moine est celui que les Eiyu ont le plus de
-Une dizaine de moines impliqués dans la
chances de rencontrer. Agé de 27 ans en 1890,
pratique ancestrale du Bukkyo kansho
shudoin no soritsu garde le monastère. Ce c’est un homme enjoué qui parcourt les routes
nombre tombe à 7 en fin de période. de campagne pour rencontrer les villageois et
éventuellement les aider face à une menace
-Le Maitre de la plume et de la fleur de prunier occulte. Il évite soigneusement les villes et
(responsable de la garde du monastère). leur industrie qu’il déteste. D’un abord facile,
Sumochi n’hésite pas à assister quiconque
veut affronter les forces obscures.
Dramatis personae
NC 3
FOR +1 DEX +1 CON +2
Udo
INT +3 PER +2 CHA +2
Le Frère supérieur est un moine aguerri
d’une soixantaine d’années. Il a conscience DÉF 11 PV 23 Init 11
du déclin inexorable de son monastère ATM +6 PM 20
et cherche un moyen de garantir après
sa mort l’intégrité de la grande salle de Bō +4 DM 1d6 + 1
confinement, un lieu mystique qui renferme Voie de la divination rang 3
quelques artefacts maléfiques que l’homme
n’a pas su détruire. Soins légers (L) (2PM) : une cible touchée (y
compris Sumochi lui-même) récupère 1d8 +
NC 4 3 PV perdus.
79
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Lieux de rencontre Les Implantés
Le monastère de l’île d’Honshu est le seul lieu (Homonsha)
revendiqué par l’organisation. À cette époque, (Voir La Voie du Sensei, p. 129)
il est encore bien entretenu et se trouve en haut
d’une crête à pic jusque vers des rivières de
montagne loin en contrebas. Il est composé de Action : 4
quatre bâtiments en pierre datant des débuts de Connaissances : 3
l’organisation, le tout entouré d’une palissade
Ressources : 4
de bois peint qui donne sur l’unique chemin
de crête menant au monastère. Le bâtiment Magie : 5
le plus important est la tour de Bouddha, une
pagode haute de presque trente mètres où trône Comme depuis le commencement de cet
une statue en bois d’un Bouddha rayonnant. ordre mystérieux, les Implantés poursuivent
Il renferme la chambre de purification et la leur propre agenda nimbé de ténèbres
salle de confinement, véritable cache au trésor et de mystères. Sans jamais connaître
d’objets très souvent maléfiques. véritablement leur but commun et la volonté
du père fondateur, chacun des élus poursuit
ses propres recherches et se met au service
Interactions avec les autres organisations de l’ordre si besoin est. Recrutés dans toutes
Le monastère de la Contemplation endormie les organisations occultes et toutes les strates
est peu impliqué dans les affaires occultes de la influentes de la société, ils sont toujours
société de Meiji. Son ennemi juré est l’École de présents, mais invisibles. Leur implication
l’Œil unique et à chacune de leurs rencontres, directe est extrêmement rare, et il faudra
le sang a coulé. Mais les faibles effectifs de la attendre le grand tremblement de terre de
Contemplation endormie font que ces duels 1923 pour qu’ils se mettent en avant.
sont extrêmement rares.
La seule autre organisation avec laquelle
Effectifs
le monastère entretient des relations est
l’Académie impériale des arts et traditions Paradoxalement à leur implication, les
populaires. Les académiciens découvrent Implantés sont assez nombreux pour
le monastère vers 1881. Leurs archives figurer parmi les organisations les plus
contiennent leurs carnets de notes et les importantes en taille. On dénombre en 1890
entretiens avec les moines. Ils connaissent pratiquement 800 Implantés et ce nombre
l’existence de la salle de confinement et tentent augmente très peu au cours des décennies
depuis d’y accéder, essuyant toujours un refus suivantes. Le fait d’atteindre une forme de
du frère Udo. Les académiciens ont essayé la vie éternelle explique ces effectifs et bien
menace, mais les moines donneraient leur vie peu sont ceux qui sont rattrapés par les
pour protéger ces trésors. Aussi l’Académie suivants d’Enma. Parmi ces 798 Implantés,
essaie-t-elle régulièrement d’obtenir des faveurs 93 sont d’origine étrangère à l’Archipel dont
pour entrevoir les secrets cachés, mais sans pas moins de 41 Occidentaux.
aucun résultat jusqu’à présent.
Leur père fondateur
Depuis presque 500 ans, Uchida Chikanori
dort dans son gensō dans le sanctuaire des
Âmes vagabondes (Samayotamashi no seiiki).
Il attend la Grande Révélation, selon ses dires.
En son absence, la cour surveille les actions de
ses membres.
La cour
L’identité de ses membres est tenue secrète.
Lors de leur réunion annuelle à Kyoto, ceux-ci
portent un sokutai de soie blanche. Leur tête est
couverte par un chapeau traditionnel, fait de
bambou. De longues bandes de soie verticales
y sont attachées sur tout son pourtour pour
masquer le visage.
80
La cour est composée de cinq membres. Quatre Mains nues +4 DM 1d4 + 1
Les secrets
sont affiliés aux îles principales constituant le
Voie de l’ésotérisme rang 1
Japon et un à l’ouest (continent et Occident).
Voie des relations rang 3
Les guerres qui déchiraient les Implantés depuis
300 ans ont cessé. Les partisans du sommeil
d’Uchida Chikanori ont pris la direction de
la cour, servant leurs propres désirs et leurs
intérêts personnels. Enfin un des nouveaux Implantés, le gentleman
Philip Priceless, est un érudit très versé dans
le Mythe. S’il a surtout des connaissances
Dramatis personae sur Yog-Sottoth, il est aussi en contact avec
des adorateurs de Nyarlathotep et de Shub-
Théoriquement, aucun membre n’a plus Niggurath dans et hors de l’Archipel. Cela en
d’autorité que les autres si ce n’est le fondateur fait un homme particulièrement dangereux.
qui possède un rang moral supérieur. Toutefois,
bien que leurs relations soient souvent très
lâches, il existe une compétition entre certains Philip Priceless
membres autour de leur puissance séculière ou
NC 2
leur maîtrise des arts du fondateur.
FOR +1 DEX +1 CON +3
En 1890, trois figures se détachent parmi
les autres. La première est un Implanté de la INT +2 PER +1 CHA +3
première heure qui a pris au cours des âges le DÉF 11 PV 15 Init 11
nom de Vieux saule. C’est sans doute le plus
grand spécialiste du rite du Tensei. Il se fait S&W type 26 +3 DM 1d10
passer pour un maître en médecine chinoise Voie de l’ésotérisme rang 3
et travaille souvent avec le comptoir des
artisans Nakajima. Voie des relations rang 2
Vieux saule
NC 5 Les rites
FOR +2 DEX +2 CON +3 Il n’existe pas de rite particulier à l’ère Meiji,
INT +3 PER +3 CHA +3 les Implantés ont donc conservé ceux du
fondateur et s’en contentent. Le seul et unique
DÉF 12 PV 38 Init 12 rituel qui les caractérise est celui du Tensei
Mains nues +7 DM 1d4 + 2 (Transmigration) créé par leur père fondateur
qui leur permet de prendre possession d’un
Voie de l’ésotérisme rang 4 corps sans mourir et passer par la réincarnation
Voie de la magie de la mort rang 3 et le jugement d’Enma.
Lieux de rencontre
La deuxième figure n’est autre que le ministre Il n’existe qu’un lieu dédié aux Implantés, le
de l’industrie du gouvernement, Hitaka sanctuaire des Âmes vagabondes à Kyoto.
Moritoshi. Implanté depuis le XVIe siècle, il a
utilisé sa fortune pour créer un véritable empire
et surtout un réseau de clients immense. Interactions avec les autres organisations
Comme toujours, les Implantés se font discrets,
Hitaka Moritoshi mais sont présents dans toutes les organisations
actives de l’époque. Cela leur permet de repérer
NC 3
de potentiels nouveaux membres et d’avoir une
FOR +1 DEX +1 CON +1 forme de contrôle sur la situation au Japon.
INT +2 PER +2 CHA +3
DÉF 11 PV 21 Init 11
81
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La société du dragon noir Les rites
(Kokuryūkai) N’étant qu’aux balbutiements de l’organisation,
(Voir La Voie du Sensei, p. 136) les membres du Dragon noir ont encore à se
construire une liturgie qui les distinguerait de
l’Océan noir.
Action : 3
Connaissances : 3
Ressources : 5 Lieux de rencontre
Magie : 1 C’est à la capitale que les premiers membres du
Dragon noir se retrouvent. Ils ont une maison
au sud-est, près de l’école d’artillerie impériale.
Créée en 1901, cette organisation n’intervient
Le caractère militariste de l’organisation en est
de fait pas en 1890, mais certains des
d’autant plus renforcé.
membres de l’Océan noir à cette époque
deviendront les fondateurs du Dragon noir
à l’aube du XXe siècle. Dans ses premières
années, le Dragon noir cherche surtout Interactions avec les autres organisations
à s’établir et à se distinguer de son ancien Outre les inévitables tensions avec leur ancien
modèle. Les membres sont donc très actifs ordre, l’Océan noir, le Dragon noir n’est pas
pour se faire connaître et participer à toute très impliqué sur l’échiquier de l’occulte. Il se
action qui leur donnerait du crédit. tourne dès le départ vers les affaires militaires
du pays. Seul le soutien assez inattendu de
l’Académie impériale des arts et traditions
Effectifs populaires est à noter. Cette dernière a financé
En 1901, la société compte 85 membres. En pendant les cinq premières années de la société
1920, elle grimpe à 312 membres et plus de 800 le loyer de leur quartier général ainsi que de
agents (qui n’ont pas toujours conscience de nombreux voyages vers le continent. Mais
leur obédience). Uchida Ryohei est loin de se douter que ce
n’est pas l’Académie qu’il faut remercier, mais
Mayuri Ito qui dans sa logique d’expansion
Dramatis personae suit de très près ce nouvel arrivant.
Uchida Ryohei
Le fondateur de la société du Dragon noir,
charismatique et de bonne famille, a en horreur
le pragmatisme de l’Océan noir. Lors des débuts
de cette société secrète, il recrute des hommes
avec la même sensibilité que lui. Bien qu’assez La confrérie de la Porte
âgé en 1901, il arrive à structurer et tenir sa de la vérité (Shinri no
nouvelle organisation par une politique très tobira Shintodan)
dure, mais perçue comme honorable.
(voir La Voie du Sensei, p. 127)
Uchida Ryohei
Action : 2
NC 5
Connaissances : 4
FOR +1 DEX +1 CON +1 Ressources : 2
INT +3 PER +2 CHA +2 Magie : 5
DÉF 11 PV 29 Init 11
Pistolet Nambu +6 DM 2d6 La confrérie de la Porte de la vérité n’existe
officiellement plus. Puissante au cours des
Voie de l’ésotérisme rang 3 siècles précédents, elle n’est plus qu’un vestige
Voie de l’autorité rang 4 du passé. Elle se concentre sur la conservation
des anciennes traditions et pour la majorité
de ses membres, appartenir à la confrérie tient
plus du titre honorifique que de la vocation.
82
Effectifs Les rites
Les secrets
On dénombre cinquante personnes se Le principal rite qu’utilise la confrérie de la
qualifiant encore de Gardiens de la Porte Porte de la vérité est une variante du rituel de
de la vérité (Shinri no tobira no bannin) purification shintô. Il doit être effectué par
en 1890. Tous sont issus des anciennes au moins trois personnes, une qui canalise
familles de samouraïs et sont à présent des l’énergie à travers des mudras, une qui protège
hauts fonctionnaires dans l’administration la lame au clair des entités maléfiques et une
impériale. Un seul d’entre eux, Shimagawa dernière qui récite des passages de la vie des
Nobutu a un potentiel énergétique suffisant premiers gardiens.
pour réaliser avec succès les rites anciens.
Si ce rite était autrefois connu pour son
efficacité, il est aujourd’hui pratiqué de manière
festive pour rappeler les traditions d’antan. À
Dramatis personae l’époque d’Edo, les Gardiens le pratiquaient
dans les villages de l’Archipel. En 1890, c’est
Shimagawa Nobutu
une cérémonie réservée à l’élite des villes où on
Le chef désigné par les Gardiens de la Porte de convie parfois des émissaires étrangers.
la vérité est le vénérable Shimagawa Nobutu.
Âgé de presque 90 ans, il a vu le pays sombrer
dans ce qu’il considère comme une lente Lieux de rencontre
décadence. C’est d’ailleurs le seul membre de
la confrérie à ne pas prendre une part active à La confrérie de la Porte de la vérité n’a jamais
la modernisation du pays. C’est aussi le seul à vraiment eu de lieu de résidence particulier.
encore pouvoir pratiquer les anciens rites. Pour Mais avec la sécularisation de la fonction, les
les autres membres, il ne s’agit plus que d’une membres se retrouvent tous les ans dans la
tradition pittoresque. demeure de Nobutu pour échanger et pratiquer
une série de cérémonies qui n’ont qu’un aspect
traditionnel et non ésotérique.
Shimagawa Nobutu
NC 5
Interactions avec les autres organisations
FOR +1 DEX +1 CON +1
Sans réel pouvoir mystique, la confrérie de la
INT +3 PER +2 CHA +3 Porte de la vérité n’a plus de relation directe
DÉF 11 PV 25 Init 11 avec les autres organisations occultes.
ATM +7 PM 25
Voie de la protection rang 3
Voie de l’éveil rang 4
Sorts : Barrière à cinq sceaux, Soins légers,
Gravure manuelle du sceau, Paume mystique,
Confusion.
83
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L’Académie impériale Le « bureau »
des arts et traditions
populaires (Nihon Directeur général
teikoku bunka geijutsu Yamada Nitoshi
in) Mystérieux, distant, méthodique.
NC 4
(Voir La Voie du Sensei, p. 134) FOR +1 DEX +1 CON +1
INT +3 PER +2 CHA +3
Action : 3 DÉF 11 PV 26 Init 11
Connaissances : 3 Voie de l’ésotérisme rang 3.
Voie des sciences rang 4.
Ressources : 5
Magie : 2
Directeur de la section Arts
L’Académie est née de la volonté du Hirogumi Saijo
gouvernement de rationaliser l’occulte du Curieux, passionné, inquiétant.
Japon tout comme il modernise le reste du NC 3
pays. Rattachée à la toute jeune université FOR +0 DEX +3 CON +1
de Tokyo, elle se développe doucement INT +2 PER +2 CHA +2
tandis que les politiques attendent un retour DÉF 13 PV 25 Init 13
sur l’investissement public conséquent. Voie des arts profanes rang 3.
La découverte sur l’île de Yamatai prouve
l’importance de l’Académie, mais est aussi
responsable de son déclin. Directeur de la section Traditions
Sazuyi Kanshiro
Fier, observateur, hautain.
Effectifs NC 3
L’Académie est divisée en deux sections. En FOR +1 DEX +1 CON +1
1890, la section Bijutsucha (Arts) compte une INT +2 PER +3 CHA +3
trentaine de personnes et onze académiciens DÉF 11 PV 24 Init 11
de terrain pour la section Dentosha Voie de l’ésotérisme rang 2.
(Traditions). Pour pallier un manque certain Voie des sciences rang 3.
de moyens humains, un académicien en
mission a recours à des réquisitions auprès des
administrations locales afin de se pourvoir Intendant général
en personnel. Que ce soient des forces de Todohashi Tanduri
police, des pompiers, des fonctionnaires des Méprisant, froid, calculateur.
postes ou bien des services communaux, NC 3
ils sont les yeux et les mains de l’Académie.
FOR +1 DEX +0 CON +2
Seule l’armée est en dehors de son influence
INT +3 PER +2 CHA +1
et n’admet pas d’ordre de sa part.
DÉF 10 PV 28 Init 10
Voie des sciences rang 3.
Dramatis personae Voie des relations rang 2.
84
Section arts Section Traditions
Les secrets
Un professeur émérite Le responsable des collecteurs
Junshi Tameka Ido Suzumi
Enthousiaste, professionnel, stressé. Psychorigide, paranoïaque, manipulateur.
NC 2 NC 3
FOR +1 DEX +3 CON +1 FOR +1 DEX +1 CON +2
INT +3 PER +0 CHA +2 INT +3 PER +2 CHA +2
DÉF 10 PV 15 Init 10 DÉF 11 PV 21 Init 11
Voie des sciences rang 3. Voie de l’ésotérisme rang 2.
Voie des sciences rang 3.
85
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Les rites La société du
En tant qu’entité administrative en charge chrysanthème
du surnaturel, l’Académie n’a mis en place (Kiku Dantai)
aucun rituel spécifique. S’ils sont parfois de
(Voir La Voie du Sensei, p. 133)
grands connaisseurs des formes de magie, les
académiciens ne sont pas des praticiens. Fidèles
à l’esprit des Lumières, ils ont souvent délaissé Action : 1
les vieilles traditions bien qu’ils puissent être Connaissances : 5
très pratiquants (en dehors des horaires de
Ressources : 5
travail).
Magie : 3
86
165 sociétaires et emploie sur ses ressources Tantō +4 DM 1d6 + 1
Les secrets
propres environ 200 personnes (domestiques, Voie des relations rang 3.
bibliothécaires et négociants en livres
essentiellement).
Kagamiko Kaneko
Dramatis personae
Cette dilettante d’une vingtaine d’années
Cette société secrète se développe énormément intègre contre toute attente la société du
dans les cercles d’influence et voit son pouvoir Chrysanthème en 1888. Magnifique créature à
grandir durant l’ère Meiji. la chevelure évanescente noire, elle est la seule
femme à avoir intégré ce club patriarcal très
Sir Fusanosuke Hitachi fermé. En peu de temps, elle a su faire taire
L’actuel premier sociétaire n’est autre que avec sa douceur toute fronde et mouvement
l’homme à l’origine de l’organisation. Riche contestataire machiste à son encontre. En deux
industriel de la première heure, Fusanosuke ans, elle est même devenue un membre très
Hitachi a fait des études d’ingénieur à influent et l’instigatrice de la plupart des rites
Londres, mais s’est surtout pris de passion occultes. Une grande zone de mystère entoure
pour l’occultisme occidental. Une mésaventure Kaneko. Dans les archives civiles, ses ascendants
avec ses compagnons de l’époque l’amena à ont tous un physique similaire et cette éternelle
se confronter aux forces du Mythe en Écosse. moue juvénile et délicate. Personne ne sait d’où
Passablement traumatisé par cette expérience, il proviennent sa richesse et son influence. Une
est revenu au Japon dans l’idée de se renseigner rumeur affirme que son regard aurait hypnotisé
sur ce Mythe et de trouver des moyens de le Sir Fusanosuke Hitachi pour son intronisation
combattre, comme il l’avait fait en Écosse. dans la société du Chrysanthème et depuis
bien d’autres membres lui vouent
une certaine fascination. Kaneko
Sir Fusanosuke Hitachi est une femme maligne qui
NC 5 divise pour mieux régner.
Elle insuffle des tensions
FOR +1 DEX +2 CON +1
entre les membres
INT +3 PER +2 CHA +2 au sein du club et se
DÉF 12 PV 32 Init 12 rapproche rapidement
Pistolet Nambu +6 DM 2d6 de Murakami Genryu
en qui elle voit un
Voie de l’ésotérisme rang 2.
grand avenir.
Voie des relations rang 3.
Kagamiko Kaneko est
en fait Tamamo no Mae,
un des yokai les plus
dangereux et puissants.
Momichuri Eizō Elle est considérée comme
Fils de samouraï, cet homme de lettres a eu faisant partie des Nihon san
un poste à la nouvelle université de Tokyo, dai aku yokai (les trois yokai
mais après deux ans d’exercice, il est parti les plus démoniaques et
dans un tout autre domaine. Profitant des dangereux du Japon
relations de sa famille dans la préfecture de avec Shuten Doji et
Nagano, Momichuri Eizō a fait fortune dans Sutaku Tenno). Ce
l’exploitation minière. Grâce à cet argent, il s’est célèbre kitsune est
mis en tête de retrouver et d’acheter tous les un renard à neuf
rouleaux des Révélations de Celui Qui Ne Doit queues.
Pas Être Réveillé. En 1890 il en a déjà trois. Ses capacités
magiques sont
associées à
Momichuri Eizō sa soif de
NC 3 pouvoir et à
sa perfidie.
FOR +1 DEX +1 CON +0
INT +3 PER +1 CHA +3
DÉF 11 PV 20 Init 11
87
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Kagamiko Kaneko Kaneko est de 5. Elle est immunisée contre les
états Immobilisé, Renversé, Étourdi et Affaibli
NC 18 Taille grand
sauf par la magie.
FOR +5 DEX +6 CON +4
Résistance magique : la difficulté des sorts
INT +5 PER +5 CHA +7 dirigés contre Kagamiko Kaneko augmente
de +5.
DÉF 20 PV 95 Init 17
Souffle de feu (L) : Kagamiko Kaneko peut
Emotion envie Ki -2 infliger 3d6 de DM de feu à une cible jusqu’à
Griffes +18 DM 1d8 + 5 30 mètres.
Morsure +18 DM 2d8 + 5 Sorts : Kagamiko Kaneko a accès à tous les
sorts mineurs de rangs 1, 2 et 3. Elle peut en
Queue +18 DM 1d6 + 5 activer un avec une action de mouvement.
Terrifiant : l’aspect de Kagamiko Kaneko Créer des illusions (L) : Kagamiko Kaneko
demande un test de Volonté difficulté 15 crée une illusion visuelle et sonore immobile
(2 PS) la première fois qu’un personnage la d’une durée de 10 minutes (ou tours si l’illusion
voit sous sa vraie forme. est animée). Le volume maximum de l’illusion
Action multiple : Kagamiko Kaneko gagne est un cube de 10 mètres de côté apparaissant
une action de mouvement en action gratuite au maximum à 500 mètres. Divisez ces
par tour. paramètres par 10 si l’illusion est animée.
Interagir avec l’illusion la fait disparaître.
Discrète : Kagamiko Kaneko augmente de
5 la difficulté des tests de PER destinés à la Coup de queue : si Kagamiko Kaneko obtient
repérer. un score de 15-20 sur une attaque de queue, la
cible est repoussée à 20 mètres et doit réussir
Fascination (L) : en réussissant un test de un test de DEX difficulté 15 ou se retrouver
CHA opposée à la Volonté de sa cible (CHA Renversée.
pour un yokai), Kagamiko Kaneko la rend
Coup brutal : Kagamiko Kaneko ajoute +1d8
Étourdie pendant un tour.
de DM si elle frappe une cible surprise.
Contrôle total du climat (L) : Kagamiko
Enchaînement (L) : Kagamiko Kaneko peut
Kaneko façonne la météo selon son bon vouloir.
effectuer deux attaques. La deuxième se fait
Immunités : la RD de yokai de Kagamiko au d12.
Tamamo no Mae
Apparue en Chine, Tamamo no Mae Les légendes racontent que l’esprit de
émigre au Japon à l’époque de Heian après Tamamo no Mae est ancré dans un rocher
avoir tenté de tuer l’empereur de Chine. tuant toute personne le touchant. Elle est
Elle prit le temps de se faufiler dans les libéré par Mayuri Ito fin des années 1870.
hautes sphères du pouvoir japonais avant Depuis, la yokai participe aux plans de la
d’épouser l’empereur Toba. Elle tente alors servante d’Hastur tout en remplissant ses
de le tuer, mais se fait interrompre et objectifs personnels : se nourrir de Ki et
démasquer par l’onmyōji Abe no Yasunari. répandre le chaos.
Elle meurt pourchassée par les guerriers
envoyés par l’empereur.
88
Murakami Genryu
Les secrets
Ce jeune bureaucrate de 25 ans travaillant Kamemaru Arada
au ministère de la marine est proche de Sir NC 3
Fusanosuke Hitachi. On peut considérer qu’il
est son disciple le plus fidèle, un conservateur FOR +1 DEX +2 CON +0
des traditions ancestrales et des dogmes de INT +2 PER +1 CHA +0
son maître.
DÉF 12 PV 18 Init 12
Voie de l’ésotérisme rang 1.
Murakami Genryu
NC 2
FOR +0 DEX +1 CON +1
Mitsubishi Aroru
INT +2 PER +0 CHA +1 Cet agent de la société chargé de trouver des
DÉF 11 PV 15 Init 11 livres occultes est quelqu’un qui n’a aucun
respect pour la loi ou l’autorité. Très sûr de
lui, Mitsubishi Aoru n’a peur de rien, ni de
personne. Il va où il veut, fait ce qu’il veut,
drague n’importe quelle fille. Il passe son temps
Sayamoto Ginata à mentir à propos de tout, que ce soit sur son
Cet étudiant de 22 ans en philosophie allemande identité, sur sa vie, ou sur ses sentiments. Il
n’est pas du tout à l’aise avec le fait d’exprimer
montre des signes de frondes avec quelques
ce qu’il ressent envers les personnes proches
individus à l’encontre de l’orientation de la
de lui et utilise l’ironie comme façade. Son
société du Chrysanthème et de Sir Fusanosuke unique but dans la vie est de chasser les forces
Hitachi. Sayamoto Ginata est partisan d’une surnaturelles. Il vit sa vie à deux cents à l’heure
« guerre sainte » (seisen) du Japon contre la et sans attache.
Chine et l’Occident. Il considère l’étranger
comme un kichiku (bête), un être inférieur
qui ne peut qu’être méprisé. Pour lui, le peuple Mitsubishi Aroru
japonais est génétiquement supérieur. NC 3
FOR +2 DEX +2 CON +1
Sayamoto Ginata INT +2 PER +2 CHA +0
NC 1 DÉF 12 PV 32 Init 12
FOR +1 DEX +0 CON +0 Tantō +6 DM 1d6 + 2
INT +1 PER +0 CHA +2 Pistolet Nambu +6 DM 2d6
DÉF 10 PV 8 Init 10 Voie de l’ésotérisme rang 1.
Les rites
Kamemaru Arada
Ce bibliothécaire de Tokyo gère la collection La société du Chrysanthème s’inspire
beaucoup de la franc-maçonnerie. Il existe
privée d’ouvrages occultes du club. Méticuleux,
un rituel d’intronisation, un rite de cohésion
maniéré, il est convaincu d’être la personne
effectué tous les ans, un rite pour accéder aux
la plus intelligente au monde et croit qu’il
bibliothèques ésotériques des treize fondateurs,
n’aura de véritable « successeur » que dans des etc. L’organisation a développé tout un champ
centaines d’années. Cherchant perpétuellement lexical pour dissimuler dans une conversation
à exposer sa supériorité intellectuelle, il se mondaine des informations à destination des
montre souvent agaçant. sociétaires. Il en va de même pour évoluer
dans les réunions de la société, ce qui rend son
infiltration des plus difficiles pour les Japonais
non occidentalisés.
89
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Lieux de rencontre La société n’a pas vraiment d’ennemi, mais
deux concurrents. Tout d’abord l’Académie
En 1890, la société du Chrysanthème possède
impériale des arts et traditions populaires ne
trois lieux à Tokyo et d’autres plus modestes
voit pas d’un bon œil une entreprise privée
dans le pays.
empiéter sur son domaine. Il n’est pas rare
Dans la capitale se trouve la maison de la que les sociétaires en charge de la gestion des
société, une riche demeure en brique de biens du Chrysanthème doivent régler des
type anglais dans la partie aisée du port, contraintes administratives provoquées par un
une bibliothèque dissimulée dans une vieille académicien en colère. Le second concurrent
demeure noble dans le quartier du château est une zaibatsu qui a déjà plusieurs fois
impérial et un hôtel particulier pour loger doublé la société dans l’achat de manuscrits
les sociétaires (et parfois des personnes rares. La famille Yoshida, à la tête d’une
recommandées) pour quelques nuits. Elle entreprise florissante, investit d’importantes
possède aussi un appartement dans le quartier sommes dans l’achat de livres occidentaux ou
des étrangers à Yokohama, une maison à la de rouleaux japonais. Elle a déjà corrompu
campagne en bordure de la ville à Osaka et plusieurs intermédiaires pour récupérer le fruit
un entrepôt aménagé sur le port de Nagasaki. des recherches de certains sociétaires. Si les
Chaque bâtiment est aménagé pour assurer le relations restent courtoises, le Chrysanthème
bien-être de ses membres, ainsi qu’une à deux méprise profondément les Yoshida, mais la
salles pour étudier et conserver les ouvrages société est loin de se douter qu’il s’agit d’une
jugés importants. Seul le QG de Tokyo recèle des Quatre Fortunes de Nyarlathotep.
aussi un sous-sol pour s’essayer aux arts
magiques occidentaux.
Tous ces endroits, qu’ils soient occidentalisés
ou non, respirent le luxe et le bon goût. La
maison de la société est référencée comme telle.
Son nom est public et se noie dans la masse des
autres associations de gentlemen de la capitale.
Le clan Fuyumi
Seule son orientation (tournée vers l’occulte) est (Fuyumi dan)
maintenue secrète. (Voir La Voie du Sensei, p. 130)
La bibliothèque générale de la société possède
des ouvrages de magie véritable (contenant
Action : 3
de vrais sorts utilisables), mais aussi des
livres sans réel pouvoir, voire sans intérêt. Connaissances : 2
Elle contient également une dizaine d’œuvres Ressources : 2
mineures traitant plus ou moins profondément Magie : 4
du Mythe. Seul un exemplaire très abîmé du
Roi en jaune sort du lot. Les bibliothèques
Autrefois un clan modeste en taille mais
des antennes n’abritent que des copies des
connu de tous, le clan Fuyumi poursuit sa
ouvrages de Tokyo, mais jamais l’intégralité
chasse aux démons. Mais avec la disparition
des références possédées.
du shogunat, du statut de samouraï et
La société n’a que dix ans d’existence, mais l’interdiction du port du sabre, il est devenu
elle monte en puissance. De plus en plus de très dur en 1890 de poursuivre les objectifs
personnes sont approchées en fonction des qu’il s’était fixé. Paralysé dans un archaïsme
intérêts qu’elles manifestent ou de leur apport qui fait sa force face au surnaturel mais l’isole
éventuel à l’organisation. complètement du monde des hommes, le clan
se meurt petit à petit.
90
Le « Daimyo », qui est devenu un titre
Les secrets
honorifique, est assisté par un conseiller depuis Fuyumi Nonabe
la disparition du Conseil des Anciens dont les
membres étaient issus des branches mineures. Samouraï le plus respecté
Dans l’effectif du clan, seuls les samouraïs NC 8
subsistent. Ils ont le rôle de chasseurs, de
nettoyeurs et de pisteurs. FOR +2 DEX +2 CON +2
INT +1 PER +2 CHA +3
DÉF 12 (14 en armure) PV 42 Init 12
Dramatis personae
Katana +12 DM 1d8/1d10 + 3
Le Daimyo en 1890 est Fuyumi Haneki. Il
est très âgé et cherche parmi ses fidèles un Daikyū +12 DM 1d10
successeur. Mais aucun ne semble avoir l’étoffe
Voies de l’autorité et de l’ésotérisme rang 2.
d’un dirigeant, à son grand regret.
Parade : lorsqu’il est touché avec une ATC,
Fuyumi Nonabe peut tenter un test opposé
Fuyumi Haneki de DEX face à son adversaire ; s’il l’emporte,
NC 12 il ne subit que le mod. de caractéristique
FOR +3 DEX +2 CON +2 comme dégâts.
INT +2 PER +3 CHA +2
DÉF 12 (16 en armure) PV 53 Init 12 Baku
Katana +12 DM 1d8/1d10 + 3 Un aide
Daikyū +12 DM 1d10
NC 2
Voies de l’autorité et de l’éveil rang 4.
FOR +1 DEX +1 CON +2
Savoir indicible : Fuyumi Haneki peut
identifier un symbole, un nom ou une INT +0 PER +1 CHA +0
créature du folklore en réussissant un test
DÉF 11 PV 16 Init 11
d’INT difficulté 15.
Volonté inébranlable : Fuyumi Haneki
gagne un bonus de +5 à tous ses tests pour
résister aux tentatives d’intimidation ou de
manipulation.
Maître d’arme : Fuyumi Haneki connaît les
techniques suivantes :
Parade : lorsqu’il est touché avec une ATC, il
peut tenter un test opposé de DEX face à son
adversaire ; s’il l’emporte, il ne subit que le
mod. de caractéristique comme dégâts.
Tueur de monstre : lorsqu’il touche un
adversaire non humain, celui-ci doit alors faire
un test de CON face à une difficulté de 20 ; s’il
réussit, Fuyumi Haneki ajoute +1d6 à ses DM ;
s’il échoue, il tombe immédiatement à 0 P
Eridu Masamu
Principal conseiller
NC 2
FOR +1 DEX +1 CON +2
INT +0 PER +1 CHA +0
DÉF 11 PV 16 Init 11
Voies de l’administration et du sekentei
rang 2.
91
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Les rites Nakajima Inc.
(ex Confrérie des
Abnégation des justes
Comptoirs des artisans)
Il existe un rite spécifique de purification pour
les samouraïs du clan Fuyumi. Après avoir (Voir La Voie du Sensei, p. 125)
médité une partie de la nuit dans une eau pure,
ceux-ci se battent avec l’un de leurs compagnons
et à chaque blessure, le mal est censé quitter Action : 3
leur corps. Connaissances : 5
Ressources : 3
Le choix des élus Magie : 5
Au moment d’accéder à l’âge adulte, les jeunes
samouraïs du clan Fuyumi reçoivent un katana
qui doit être trempé dans le sang d’une créature Avec l’ouverture sur le monde et
maléfique. Les anciens les emmènent dans une l’industrialisation rapide du Japon, la
forêt et les abandonnent. Si l’aspirant samouraï Confrérie des Comptoirs des artisans vit
revient avec son sabre taché, il devient un un second âge d’or. Le nombre de créatures
véritable Fuyumi. surnaturelles déclinant additionné à la
pacification entreprise par les Tokugawa, les
guerres et les luttes de pouvoir passant au
Lieux de rencontre second plan, les Nakajima avaient vu leur
commerce en difficulté faute de demande. À
Avec la chute du shogunat et la perte du statut l’ère Meiji et avec l’ouverture sur le monde,
de samouraï, le clan a perdu énormément de ses ils découvrent de nouvelles possibilités pour
ressources déjà modestes. Le kyuden (château) se fournir en matériaux étranges et sont
de la famille Fuyumi est toujours là mais le reste sollicités par de nouvelles organisations.
des terres du clan a été racheté par un industriel Que ce soit pour leur expertise des objets
qui les a modernisés, à la grande honte du ésotériques ou leur connaissance des créatures
Daimyo. Dans la vaste propriété du kyuden, et des composantes de rituels, les Nakajima
les serviteurs des Fuyumi, des hommes et des ont renouvelé leur clientèle. À présent, ils
femmes qui ont refusé la modernisation, ne se proposent une gamme de produits bien
considèrent pas comme des « domestiques » plus diversifiés grâce aux importations en
rémunérés, mais bien comme les membres du provenance de Chine ou de Corée et dans
clan. Le chef du clan accueille les samouraïs une moindre mesure, d’Amérique du Nord.
de retour de leurs missions et parfois quelques Le travail à fournir est si important qu’à
invités. La sécurité est forte, mais surtout partir des années 1874-1875, la Confrérie
du point de vue ésotérique. Jusqu’à présent, compte trois usines, douze ateliers et cinq
aucun être surnaturel n’a réussi à pénétrer manufactures sur tout l’Archipel. Pour être
dans ces lieux. En dehors de cette résidence, en phase avec son temps, l’organisation se
les samouraïs du clan vivent de la charité (que renomme Nakajima Inc. mais dans les faits,
beaucoup préfèrent appeler hospitalité) des ses membres comme ses alliés se réfèrent
habitants de l’Archipel. encore à elle sous son ancien nom.
92
Dramatis personae Les rites
Les secrets
L’actuel chef de la Confrérie s’appelle Tōtōbami Le cérémonial issu de l’époque d’Edo est de
Tomone. Âgé de trente ans en 1872 (date de son plus en plus mis de côté lors des réunions
élection), c’est un homme entreprenant et très du bureau ou des rencontres avec les autres
ouvert qui a lutté en interne pour moderniser organisations. Tōtōbami Tomone veut donner
l’organisation. Son principal opposant est le une image moderne de sa confrérie et les
maître artisan Hironobu Izumi. Spécialiste artisans portent plus facilement des costumes
de la trempe des katanas, ce conservateur à l’anglaise que des tenues japonaises. Tout du
cristallise autour de lui la vieille garde, mais moins en public.
voit les effectifs de sa faction diminuer avec les
profits que la politique de Tomone génère.
Lieux de rencontre
Parmi les chasseurs/négociants, les Eiyu
évoluant à proximité de la capitale ont le plus Le quartier général de la Confrérie se situe dans
de chances de croiser Yoshinori Jiro. Cet le district du Palais impérial à Tokyo. C’est un
homme charismatique est un véritable traqueur ensemble de cinq bâtisses contiguës couvrant
de monstres et un marchand accompli. Il a pas moins d’un hectare, héritage de la richesse
la charge du district de la capitale, ce qui en de l’organisation dans les temps anciens.
fait le chasseur le plus renommé, même si en Les maîtres artisans s’y retrouvent pour les
conséquence il doit consacrer plus de temps au réunions importantes et y reçoivent les alliés de
négoce qu’à la traque, à son grand regret. la Confrérie pour signer des contrats.
La Confrérie possède aussi un bureau officiel
dans le district des étrangers à Yokohama.
L’enseigne Nakajima Inc. se noie au milieu des
Tōtōbami Tomone
autres entrepôts d’import/export de ce vaste
NC 4 port de commerce.
FOR +1 DEX +3 CON +1
Enfin, elle détient un comptoir en Corée (à
INT +2 PER +3 CHA +3 Pyongyang) et un autre à Shanghai, ce qui
DÉF 12 PV 25 Init 12 permet aux artisans en voyage de pouvoir
Pistolet Nambu +7 DM 2d6 contacter les autres membres facilement (ou
Voie du discours rang 4. trouver refuge en cas de danger).
Voie des relations rang 3.
Interactions avec les autres organisations
Hironobu Izumi
La Confrérie des Comptoirs des artisans
NC 3 a développé des contrats avec trois autres
FOR +1 DEX +3 CON +2 organisations occultes de l’époque. Le premier
INT +3 PER +1 CHA +2 est public et lie la Confrérie avec l’Académie
DÉF 13 PV 21 Init 13 des arts et traditions populaires. En
contrepartie de leur expertise pour aider les
Katana +6 DM 1d8/1d10 + 1
académiciens dans leur référencement des
Voie de l’artisan rang 4. phénomènes surnaturels, ils reçoivent une
Voie de l’alchimie rang 3. partie des artefacts et des matériaux trouvés
lors des missions de l’Académie. Le second
concerne la société du Chrysanthème qui
Yoshinori Jiro
paie grassement les Nakajima pour obtenir
NC 5 des objets ésotériques. Enfin, des zaibatsu
FOR +2 DEX +2 CON +1 emploient à l’occasion des spécialistes parmi les
INT +2 PER +2 CHA +3 artisans, en particulier pour estimer certains
DÉF 12 PV 20 Init 12 sites miniers japonais. Les missions sont bien
rémunérées et semblent relativement anodines,
Fusil Minié +8 DM 2d6
mais en réalité il s’agit des Quatre Fortunes
Tantō +8 DM 1d6 + 1 qui cherchent à identifier l’emplacement des
Voies de l’investigation et des armes de quarante-sept sources de Ki.
contact rang 3.
Voies du sekentei et du discours rang 2.
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Société de l’Océan noir
(Genyosha) Hiraoka Kotaro
(Voir La Voie du Sensei, p. 136) NC 4
FOR +1 DEX +2 CON +2
INT +2 PER +2 CHA +3
Action : 3
DÉF 12 PV 27 Init 12
Connaissances : 3
Pistolet Nambu +5 DM 2d6
Ressources : 5
Tantō +5 DM 1d6 + 1
Magie : 1
Voie de l’autorité rang 4.
Créée en 1881, cette toute jeune organisation Voie du sekentei rang 2.
nationaliste développe encore en 1890 son
réseau de renseignements autour des maisons Masashi Tetsuya
closes. Afin de se rendre des plus utiles pour les
NC 3
expansionnistes au gouvernement, elle entame
une infiltration de la Corée qui culmine FOR +0 DEX +2 CON +0
en 1895 avec l’assassinat de l’impératrice INT +2 PER +2 CHA +2
coréenne, ouvrant la voie à une conquête DÉF 12 PV 19 Init 12
militaire. Peu active encore dans le monde de
Pistolet Nambu +5 DM 2d6
l’ombre, la Société de l’Océan noir est surtout
infiltrée par les Implantés et des fidèles des Voie des relations rang 3.
Quatre Fortunes qui essaient d’influer sur
l’agenda de l’organisation afin de vérifier s’il
existe des sources de Ki sur le continent.
Les rites
En tant que nouvelle organisation, l’Océan noir
Effectifs a dû créer tout un décorum pour ses membres.
L’Océan noir compte environ soixante membres Le rite d’initiation est lié à la figure de l’océan et
actifs en 1890. De nombreux contrats avec consiste à s’immerger nu la nuit dans la mer de
le gouvernement (souvent non officiels) lui Genkai en étant entravé au niveau des jambes.
permettent de recruter plus d’hommes et de Après avoir été lâché dans l’eau, les membres de
femmes. Vers 1910, l’organisation compte plus l’organisation prient les kamis de la mer pour
aider le novice qui voit apparaître à la surface de
de mille agents répartis entre le Japon, la Corée
l’eau un couteau en corail. Il doit alors se libérer
et la Chine.
et rejoindre le bateau à la nage. Jusqu’à présent,
malgré le danger de cette cérémonie, aucune
victime n’est à déplorer. En effet, les effectifs
Dramatis personae
sont si réduits qu’il ne serait pas souhaitable de
Le fondateur, Hiraoka Kotaro, a utilisé sa voir mourir un futur membre.
fortune issue de l’industrie minière et son
réseau provenant des familles de samouraïs
pour s’implanter dans tout le Japon et Lieux de rencontre
contrôler un grand nombre de maisons closes.
L’Océan noir se réunit dans le port de Tokyo,
Les luttes de pouvoir avec les yakusas dans
dans un entrepôt appartenant à la société
de nombreuses villes ont épuisé cet homme
minière du fondateur. Très surveillé, il permet
vieillissant. Une aide mystérieuse a permis
aux membres de parler librement et d’établir
à l’Océan noir d’asseoir son pouvoir en la
les prochaines missions. L’organisation possède
personne de Masashi Tetsuya, un homme
aussi une base entrepôt dans le port de Nagasaki.
plein de ressources qui a vite intégré le cercle
privé du fondateur. Détesté par les autres L’Océan noir possède en 1890 trente-cinq
proches de Kotaro, il s’en sort toujours grâce maisons closes situées dans tous les ports
à des informations de première main et un les plus importants du Japon. La maison des
portefeuille des plus fournis. Cet agent des plaisirs du Cerisier ensoleillé, dans le quartier
Quatre Fortunes compte utiliser l’Océan noir des plaisirs de Yokohama, est la plus importante
pour son propre intérêt. en taille et en influence.
94
Interactions avec les autres organisations Les Quatre Fortunes
Les secrets
Vu son jeune âge et son but premier, l’Océan (Voir L’époque d’Edo, p.94)
noir n’a quasiment aucun contact avec
les autres organisations. Ce n’est qu’avec
la création du Dragon noir qu’elle fit tout Action : 3
pour éliminer les traîtres. L’Océan noir est Connaissances : 4
secrètement soutenu par de grandes, riches Ressources : 4
et puissantes familles comme les Quatre
Magie : 4
Fortunes dans le but « d’honorer la famille
impériale, de respecter l’empire et de protéger
les droits du peuple ». Mais son objectif caché Sous cette dénomination se trouvent quatre
est de pousser à l’expansion militaire japonaise familles issues de quatre heimin choisis par le
et à la conquête du continent asiatique pour Traqueur Infernal pour servir son grand Plan.
étendre son pouvoir. Bien qu’ayant tous vécu très vieux, les fondateurs
n’étaient pas éternels et ne sont plus en 1890. C’est
la quinzième génération qui prend les rênes des
clans, lesquels suivent le Plan de Nyarlathotep.
Nakano Wakitaro Transformant des familles devenues puissantes
et bien installées en zaibatsu, ces agents, en
Ce journaliste de 25 ans enquête sur l’Océan retrait des affaires occultes, cumulent richesses,
noir et découvre un lien possible avec de faveurs et connaissances afin de permettre à
riches zaibatsu. En remontant ses sources, leurs descendants d’arriver à leurs fins quand le
il apprend que les familles Arai, Matsuda, grand Plan se conclura.
Shibata et Yoshida ont toujours été proches
du pouvoir, mais surtout que leur puissante
influence serait liée à un vieux culte dont la Effectifs
déité ne serait ni shintoïste, ni bouddhiste.
Nakano Wakitaro est alors pris en chasse par Bien que les familles des Quatre Fortunes aient
les Quatre Fortunes dans l’objectif de le faire une taille différente, on peut estimer qu’elles
disparaître. comptent environ cinq cents membres chacune
et qu’elles emploient directement pas moins
NC 3 de huit mille Japonais à elles quatre. Chaque
FOR +1 DEX +2 CON +0 famille est dirigée par un conseil regroupant les
dix membres les plus importants.
INT +2 PER +2 CHA +1
DÉF 12 PV 20 Init 12
Pistolet Nambu +5 DM 2d6
Dramatis personae
95
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Les rites
Yoshida Narumi Chaque famille a fini par développer des versions
La chef de la famille Yoshida, âgée d’une personnelles des rites que les fondateurs ont
cinquantaine d’années, est une personne appris du Traqueur Infernal.
cruelle et manipulatrice d’apparence sèche et
froide. Yoshida Narumi gère avec efficacité sa Le hurlement du Prédateur
zaibatsu, la plus riche des Quatre Fortunes.
Ce rite, le plus important, permet de contacter
NC 4
ou d’appeler l’avatar de leur dieu. Quelles que
FOR +0 DEX +2 CON +1 soient les versions, il faut une nuit de nouvelle
INT +2 PER +2 CHA +3 lune et beaucoup de sang frais pour que le
DÉF 12 PV 26 Init 12 Traqueur veuille bien apparaître.
Tantō +6 DM 1d6 + 2
Le Sceau familial
Voie des relations rang 4.
Chaque famille possède un rite de marquage
Voie de l’ésotérisme rang 1. de ses membres. Arrivé à l’âge de ses quatorze
ans, il ou elle est enfermé dans une maison
Arai Noburoshi abandonnée et murée (sauf pour la porte
Le chef de la famille Arai est le plus vieux d’entrée). L’adolescent endormi est placé
des quatre dirigeants en 1890 et un sorcier dans une salle contenant une encadrure
accompli. Les autres membres du conseil de de porte au milieu de la pièce, un rouleau
sa famille guettent, voire complotent pour avec des instructions, un tantō et l’animal
précipiter sa fin. Mais l’homme est rusé et avec lequel il a été le plus proche durant sa
s’est préparé à cette éventualité. Toutefois ces jeunesse (animal donné à l’enfant à dessein.
luttes intestines minent la productivité des Si ce dernier n’est plus vivant au moment du
Arai, ce qui en fait la moins puissante des rite, les Fortunes choisissent un bébé animal
Quatre Fortunes.
particulièrement attendrissant). Au moment
NC 5 du réveil, un voile noir recouvre l’intérieur
FOR +1 DEX +1 CON +1 de l’encadrure de la porte et au bout d’une
INT +3 PER +3 CHA +2 heure, un portail vers Nyarlathotep s’ouvre et
DÉF 11 PV 30 Init 11 permet à ses créatures de venir se repaître de
l’infortuné adolescent. Le seul moyen d’éviter
ATM +8 PM 20
ce funeste sort est de réaliser le rituel décrit
Voie de la divination rang 3. dans le rouleau. Il nécessite de se scarifier
Voie de l’ésotérisme rang 2. le kanji de la famille et de sacrifier l’animal
Sorts : Malédiction, Soins légers, Asphyxie, pour abreuver de sang la peau fraîchement
Attaque sonore, Détection de la magie, coupée. Malgré la cruauté du rite, le taux de
Magnétisme. réussite à cette épreuve est de 80 %. Ceux qui
n’y arrivent pas et qui n’ont pas été dévorés
par l’entité invoquée servent de monstres
Shibata Jigoro
asservis aux familles, car souvent ils finissent
Le chef de la famille Shibata est un homme possédés. On leur confie alors la garde des
aussi vigoureux que Matsuda Masaru et un
lieux importants pour l’organisation, ou de
de ses amis d’enfance. Il est tiraillé entre son
amitié et sa propre famille qui voudrait utiliser prisonniers en attente d’interrogatoire.
cette connivence pour prendre l’ascendant sur
les Matsuda et gagner ainsi les faveurs du
Traqueur Infernal. Lieux de rencontre
NC 4 Des usines ou des bureaux des quatre
FOR +2 DEX +1 CON +2 zaibatsu se trouvent sur tout l’Archipel, mais
INT +2 PER +3 CHA +2 personne n’a encore fait le lien entre les
DÉF 11 (13) PV 27 Init 11 quatre familles, ce qui préserve le plus grand
secret des Quatre Fortunes.
Mains nues +7 DM 1d4 + 3
Voie du discours rang 2. La maison mère des familles Matsuda et
Shibata sont situées à Tokyo, celle des Arai à
Voie des arts martiaux rang 2.
Kyoto et celle des Yoshida à Hiroshima. Il s’agit
Voie de l’ésotérisme rang 1. chaque fois d’un grand immeuble en pierre de
style occidental.
96
Les Quatre Fortunes possèdent aussi un lieu
Les secrets
sacré situé dans le village de Yonishiko au Yokai no kage
nord-ouest de la plaine de Tokyo. C’est là que le (Les Ombres de yokai)
Traqueur Infernal a choisi les quatre fondateurs
en 1540. Ce village, s’il n’a pas conservé son NC 1
apparence de l’époque, a été racheté au fil des ans FOR +0 DEX -1 CON +0
par chacune des quatre familles qui se partagent
les quartiers et empêchent toute implantation INT -2 PER -1 CHA -2
de personnes étrangères aux clans. Ainsi, seuls DÉF 12 PV 10 Init 8
des Arai, Matsuda, Shibata et Yoshida résident
à Yonishiko. Toutefois, mis à part une journée Griffes +4 DM 1d6
de fête commémorant la rencontre avec le Morsure +4 DM 1d6
Traqueur, aucun événement important pour les
Quatre Fortunes ne s’y tient. Apparence effrayante : lorsqu’un Eiyu voit
un yokai no kage, il fait un test de résistance
mentale difficulté 10 (1 PS).
Interactions avec les autres organisations Flottant : le yokai no kage se déplace à une
Restant encore discrètes pour suivre les étapes vitesse de 10 par tour sur tous les types de
du grand Plan, les Quatre Fortunes n’ont que peu terrain sauf aquatique, ainsi qu’en escalade.
de contacts avec les autres organisations. Elles Il ne peut être Ralenti par l’environnement.
ont noué des liens officieux avec les Nakajima Immunités : le yokai no kage ne subit que la
afin de savoir ce qui se passe sur l’échiquier moitié des DM des armes à feu et ne peut être
occulte. Enfin les Quatre Fortunes ont perçu Étourdi sauf par la magie.
très tôt l’intérêt que représente l’Océan noir et
l’ont soutenu ou infiltré. Pouvoir : Tir d’eau (kappa) : demande une
action limitée. Permet d’infliger 1d6 de DM à
une cible jusqu’à 50 mètres.
Hypnotiser (itachi) : le yokai no kage et sa cible
font un test opposé de CHA ; si la cible échoue,
elle devient Étourdie pendant deux tours.
Effectifs
Mayuri Ito possède environ cinquante fidèles,
asservis de manière ésotérique pour la plupart.
Elle a des contacts dans plusieurs organisations,
pouvant compter sur un réseau d’une trentaine
d’informateurs. Enfin, à partir des années 1910,
elle est protégée par trois yokai no kage : un
kappa, un ōkami et un itachi.
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Dramatis personae Si le rituel n’a rien de magique, il plonge les
fidèles de Mayuri dans une transe décadente
Au-delà de Mayuri Ito elle-même, personne
tout en les convainquant qu’ils avaient ainsi
n’est assez important pour espérer avoir
accédé à un pouvoir supérieur.
une influence sur son organisation. Même
les chefs des cellules des cultes du Rejeton Lieux de rencontre
Fielleux sont effacés lorsqu’elle arrive pour
Mayuri possède un culte à Tokyo, un autre à
présider les cérémonies.
Osaka et un dernier à Okinawa (peu visité à
cause de la distance). Elle-même occupe un
logement de fonction à l’Académie impériale
Les rites des arts et traditions populaires (peu utilisé
Le rite le plus célèbre de Mayuri Ito est celui du si ce n’est pour se cacher en cas de menace)
Cocon de chair. Lors de la période où Mayuri et évidemment la maison de son « mari »,
cherchait à créer autant de cultes du Rejeton l’infortuné ministre des postes de l’époque,
Fielleux que possible (stratégie abandonnée dès Onobisashi Izuki.
l’ère Shōwa), elle invente un rite semblable au
Cocon de chair (la Renaissance carmine) pour
introniser les nouveaux membres de ses cultes. Interactions avec les autres organisations
Mayuri Ito se contente d’infiltrer une autre
La Renaissance carmine
organisation afin d’avoir une connaissance
Chaque novice doit apporter trois animaux accrue de ses potentiels adversaires. C’est
de ferme pour confectionner à partir de leurs pour cela qu’elle a pris un poste dans
dépouilles une sorte de cocon où ils se glissent l’Académie impériale des arts et traditions
tandis que Mayuri Ito prononce la bénédiction populaires et qu’elle finance la naissante
du Rejeton Fielleux. Une fois la prière dite, Société du Dragon noir. Elle va s’imposer
le novice s’extrait du cocon par ses propres indirectement sur l’échiquier du pouvoir avec
moyens, souvent en arrachant avec ses dents les les Quatre Fortunes.
lambeaux de chair qui commencent à l’étouffer.
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Les secrets
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Chapitre 8
L’égarée
Scénario - par Benjamin Ott
Synopsis
provoquant un regain de tensions. Les meurtres
du yokai ne font que souffler sur des braises
Dans la ville nouvelle de Yokohama, deux prêtes à enflammer la ville.
marins occidentaux sont retrouvés atrocement
mutilés dans le quartier des plaisirs. Bien que
les Occidentaux soient de moins en moins
influents, ils font vivre l’avant-port de Tokyo.
Ambiance
Le préfet, ouvertement anti-Occidentaux, et Il s’agit de mettre l’accent sur une ville nouvelle
son sous-préfet, très pro-Occidentaux, avaient qui se modernise en son centre, mais reste
confié cette mission à un de leurs inspecteurs traditionnelle aux marges. Le fossé entre
les plus brillants. Mais ce dernier a disparu. les Européens et les Japonais est au cœur de
Sur la suggestion du sous-préfet, une nouvelle l’ambiance de cette aventure. Yokohama est
équipe constituée de fonctionnaires de bas une ville moderne, mais terriblement glauque
rang, le bureau 104, est dorénavant responsable et cynique. L’égarement de la futakuchi-onna
de l’affaire. est le symptôme de cette modernité, alliant
amélioration et corruption. La langue est aussi
Le coupable de ces meurtres est un yokai, une
une barrière importante.
futakuchi-onna (La Voie du Sensei, p. 204). Elle
a été violée par cinq marins occidentaux et, ivre
102
Nombre de joueurs
Introduction des Eiyu
L'égarée
Entre 3 et 4.
Il est préférable de jouer des fonctionnaires de
police ou des personnes qui font ce métier à ce
Niveau recommandé moment de leur vie. Si les joueurs ont déjà un
personnage qui n’a jamais eu d’occupation liée à
Entre 4 et 6. Il est conseillé que les Eiyu la police, la façon la plus simple de les introduire
atteignent le niveau 6 avant la confrontation est d’utiliser la crise économique. Avec le boom
finale. de l’industrie et les crises d’emplois et de faillite
qui l’accompagnent, il est tout à fait possible que
certaines personnes, à la recherche d’un salaire,
postulent pour un petit emploi à la préfecture de
Découpage du kaidan
Yokohama. C’est un mélange d’administration
et d’assistance pour les équipes de police plus
L’aventure se déroule en trois temps. La première expérimentées.
partie, la plus longue, dépend de l’initiative des Une autre option est de créer un lien familial
joueurs. Chargés d’enquêter sur la disparition de ou affectif entre deux Eiyu, et la possibilité
l’inspecteur Tamiya, ils ont une série de pistes à d’avoir une prime en assistant le bureau 104 où
exploiter. C’est l’occasion de se faire des alliés travaillent les autres personnages.
ou des ennemis pour la suite. La rencontre avec
Yuko, le chef d’une petite pègre locale, déclenche
la deuxième partie, une confrontation avec des
marins et la futakuchi-onna. Ils devront choisir
un camp, ce qui a une grande influence sur la fin Introduction
de l’aventure. La dernière partie est un compte
à rebours où toute la ville s’embrase tandis que A la suite du meurtre sauvage de deux marins
les personnages doivent mettre la main sur le occidentaux et la disparition de l’inspecteur en
dernier marin vivant et faire un choix difficile charge de l’enquête, le bureau 104 est convoqué
entre deux justices incompatibles. chez le sous-préfet. Le fait est rare et après avoir
été introduits par les gardes en faction, ils se
retrouvent en présence du préfet et du sous-
préfet. Voici ce qui leur est exposé :
Chronologie
L’inspecteur Tamiya en charge de l’affaire a
disparu depuis deux jours. Il devait effectuer
un rapport quotidien. Le dernier remis est
Ces évènements peuvent être hâtés par l’enquête
transmis à l’équipe (voir « Annexe », p. 119) ;
des Eiyu.
Les deux corps des marins sont encore à la
Jour -6 : mort du marin Marcelino assassiné
morgue dans le quartier Nord ;
par le yokai derrière le Nectarine 9.
Les corps ont été retrouvés dans les rues du
Jour -3 : mort du marin Lothar assassiné par le
quartier des plaisirs. Les informations les
yokai aux abords du Fleurs de pétales.
concernant sont dans le rapport de Tamiya ;
Jour -1 : disparition de l’inspecteur Tamiya.
Les tensions entre Japonais et Occidentaux sont
Jour 0 : début de l’enquête des Eiyu, le chasseur vives en ville, il ne faut pas que ces meurtres
de yokai est arrêté pour port illégal du provoquent des troubles graves ;
sabre.
Le bureau 104 disposera d’un laissez-
Jour 1 : Ibara rencontre le matin le préfet et passer directement signé par le sous-préfet,
libère le samouraï vers onze heures. temporaire, mais donnant un grand pouvoir
aux investigateurs ;
Jour 2 : transfert des armes des entrepôts
Dragon vert vers les hangars de la Onnoganshi Takeshi, le préfet, avant de quitter
société Akiyo. le bureau et de laisser le sous-préfet régler
les détails, insiste pour que des preuves de la
Jour 3 : le guet-apens de Yuko.
culpabilité des Occidentaux soient trouvées
Jour 5 : arrivée de la canonnière si la situation afin de les discréditer et de pouvoir les chasser.
ne s’est pas arrangée. Naufrage du Il termine par un « Dehors les Barbares », un
HMS Stalwart. slogan en vogue actuellement ;
103
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Domotai Shizuzu, le sous-préfet, une fois une théière et une carte de Yokohama de bonne
son supérieur sorti, insiste sur l’importance qualité accrochée au mur).
de bonnes relations avec l’Occident et veut à
Le méticuleux inspecteur Tamiya a laissé dans
tout prix que cette enquête permette de tisser
son bureau un certain nombre d’informations :
des liens plus étroits avec les compagnies
européennes. Il aiguille les soupçons sur la – Les deux victimes s’appelaient Marcellino et
pègre de Yuko qu’il estime responsable de ces Lothar. Ils étaient tous deux employés par la
crimes crapuleux ; Far East Local Furniture Company (FELFC).
Le premier marin est mort près du bordel
Les Eiyu doivent rédiger un rapport quotidien
Nectarine 9, six jours plus tôt. Le second à
afin que le sous-préfet puisse tous les matins
l’arrière du Fleurs de pétales, il y a trois jours ;
s’informer de l’avancement de l’enquête.
– La FELFC a eu récemment plusieurs vols de
Un policier remet les plaques de bois qui
cargaisons sur ses bateaux. Elle accuse les
servent de laissez-passer et ouvre le bureau de
hommes de Yuko ;
l’inspecteur Tamiya.
– Au cours de son enquête, Tamiya a vu ou
devait voir plusieurs personnages-clés dans
cette affaire selon lui : le dénommé Yuko, qui
travaille dans les entrepôts de la société du
Scène 1 : Dragon vert, dans le quartier Sud (pas encore
104
Interroger les En voyant les Eiyu, il se rétracte aussitôt et
L'égarée
sort rapidement. Ibara dit simplement de ce
autorités (soit
dernier que c’est un invité.
les autres bureaux,
soit les inspecteurs) Enfin Ibara explique que le quartier est tendu et
fatigué de l’exploitation continue par le patronat
Ce passage, loin d’être obligatoire, n’apporte que et que si des habitants devaient être accusés
des informations secondaires : des crimes sont des crimes envers des étrangers, il faudrait
perpétrés en ville, mais ce n’est pas nouveau. Il s’attendre à un soulèvement.
existe plusieurs pègres dans le port, la principale
étant celle de Yuko. On soupçonne l’existence Revenez à l’encart « Guider les Eiyu dans
d’une mafia chinoise, or malgré une minorité Yokohama » ci-contre, et laissez-les choisir leur
ethnique visible, la police n’a aucune preuve. prochaine destination.
De nombreuses plaintes concernent des viols
commis envers des Japonaises, une situation
préoccupante au regard des nombreuses maisons Visiter la morgue
closes. Depuis quelque temps, la recrudescence (et la prison) dans
de diverses maladies dans le vieux quartier pose
problème, le passage des marins étrangers y est
le quartier Nord
certainement pour quelque chose. Les autorités La morgue est située dans le même modeste
attendent la restructuration de l’urbanisme bâtiment en pierre avec des barreaux de fer
pour en finir avec cette insalubrité. L’un des que la prison principale de Yokohama. Elle
plus importants investisseurs et architectes de est située aux abords est du quartier Nord,
cette modernité est Yoji Akamaru qui possède près d’un des bras de la rivière, avec une
la plus grosse société de négoce vers l’étranger placette en terre devant.
du Japon.
La morgue est une pièce fraîche située
Revenez à l’encart « Guider les Eiyu dans légèrement en sous-sol. Au moment où
Yokohama » ci-contre, et laissez-les choisir leur les Eiyu arrivent, il ne s’y trouvent que
prochaine destination. deux employés qui gardent les corps et
surveillent ceux qui viennent les visiter.
Ils ne comprennent pas grand-chose à la
Visiter Ibara médecine et ne font pas preuve d’une grande
dans le quartier Nord intelligence. Il faut dire que ce métier est
considéré comme dégradant par beaucoup.
Sans la présence d’un natif de Yokohama, Le médecin responsable des autopsies reste
contacter Ibara est compliqué. Les à son cabinet en ville et ne se déplace qu’à
investigateurs ont d’abord affaire à un sous-fifre l’arrivée de nouvelles dépouilles.
du chef local, Ikken, qui écoute les demandes
des Eiyu et les « transmettra » à Ibara. Il reste Les corps reposent sur des dalles en pierre
possible de le convoquer officiellement pour et le sol, en pierre lui aussi, est souvent
lui parler, mais ce dernier n’appréciera pas et arrosé à grands coups de seaux d’eau.
ne donnera presque aucune information. De L’odeur reste forte, mais est masquée par
plus, cela provoquera des tensions dans le des braseros de camphre situés au fond de
quartier Nord, avec des manifestations, des la salle. Le premier cadavre est dans un état
regroupements agités, sans toutefois dégénérer, de décomposition avancé (test de résistance
à moins qu’un Eiyu ne les provoque. mentale, difficulté 10). Les deux victimes
portent deux types de marques morbides.
Le quartier Nord, encore très marqué par Tout d’abord, d’énormes plaies où la chair
l’ancien mode de vie, est un labyrinthe de ruelles a été arrachée. Un test en médecine (INT,
de terre. Ibara est dans une maison qu’il partage difficulté 15) permet d’imaginer l’origine
avec sa mère. Il parle des accrochages de plus de ces blessures : des chiens ou un requin
en plus nombreux avec les Occidentaux, qui se (en fonction de la réussite). Ensuite, un
terminent par des blessés, parfois graves, mais
examen attentif révèle cinq petites marques
pas des morts. Pour lui, les problèmes trouvent
quasiment hexagonales et formées de petites
toujours une origine chez les Européens.
coupures soit sur un bras, soit sur le cou. Il
Deux invités logent chez Ibara. D’ailleurs, s’agit de la « marque » du yokai futakuchi-
lors de la visite des investigateurs, un gamin onna, provoquée par sa chevelure lors du
entre précipitamment et annonce à haute viol. Ce stigmate lui permet de localiser
voix qu’un dénommé Kunimitsu a été arrêté. approximativement ceux qu’il chasse.
105
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La prison se situe au rez-de-chaussée, le hurler des insanités et à se promener nu, une
bâtiment n’ayant pas d’étage, mais un grenier. prostituée, et le chasseur de yokai qui a refusé
Pour y accéder, il faut ouvrir une grille en de donner son sabre.
fer, verrouillée par l’agent en poste à l’entrée, Si les Eiyu le demandent, ils peuvent rencontrer
débouchant sur un couloir en forme de L les prisonniers. Sinon, faites hurler le vieux fou,
et 13 cellules. La plupart des prisonniers en insérant quelques fausses allusions à des
étaient acheminés jusqu’à Tokyo auparavant, chiens ou un requin par exemple. Pour aller
mais depuis que Yokohama est devenue l’interroger, un temps gaspillé car l’homme est
une préfecture, elle en a la garde. Quatre réellement dément, les Eiyu passent devant la
prisonniers sont actuellement détenus cellule du « samouraï », en position de seiza et
lorsque les Eiyu arrivent : un alcoolique qui imperturbable. Un premier contact avec lui est
dessaoule, un vieux fou qui passe son temps à possible à ce moment-là.
Les prisonniers
La prostituée, vérolée, sous l’emprise de avec eux. Il n’apporte pas grand-chose,
l’opium, n’est plus que l’ombre d’elle-même. mais il est prêt à raconter n’importe quoi
Elle a gravement blessé un Occidental. pour un peu d’alcool.
Elle commence à être en manque et
n’hésite pas à interpeller les Eiyu pour
leur mendier la clémence, sa liberté ou Le chasseur de yokai Kunimitsu a refusé
quelques piécettes. de donner son sabre le matin même, à
présent interdit par décret. Il reste muet
Elle ne sait pas grand-chose, mais elle a
et médite. Les personnages ne peuvent
senti la présence du mal dans son quartier.
rien en tirer sauf s’ils interviennent pour
Elle déblatère qu’une créature rôde dans la
le faire libérer. Il les remerciera sobrement
nuit, elle l’a même entendue un soir feuler
puis retournera dans la demeure d’Ibara.
alors qu’elle abordait un client ivre. Pousser
Par cet acte, les Eiyu marqueront un
l’interrogatoire permet d’apprendre qu’il
point. Kunimitsu sera plus enclin à les
s’agissait du marin Lothar avant qu’il ne
écouter une prochaine fois, voire selon
soit assassiné, bien qu’elle ne se souvienne
les circonstances à les aider. Quoi qu’il en
pas exactement du jour à cause de l’opium.
soit le lendemain, Ibara se présentera à la
Mais si les Eiyu la mettent en présence du
prison avec une lettre du préfet pour le
corps du marin, la prostituée craquera, se
faire libérer.
morfondra dans un coin au souvenir de la
créature et finira par la décrire.
« Elle avait une forme humaine, petite, Le vieux fou
portait des haillons, une tête énorme avec
Cet homme de soixante-dix ans est rendu
des tentacules filandreux comme un poulpe
fou à lier par la rudesse de la vie. Il ne se
qui bougent dans les airs. Et son regard, son
lave plus, jappe comme un chiot et aime
regard était froid comme la mort… », après
se dévêtir, même en public. Il ponctue
cela la prostituée deviendra hystérique.
ses singeries par des affabulations qui,
Les tentacules ne sont rien d’autre que la de loin, pourraient faire penser à de la
chevelure vivante de la futakushi-onna qui philosophie zen. Il n’en est rien. Si les Eiyu
dans la pénombre a été interprétée par le s’intéressent à lui, le vieux fou les prendra
cerveau malade de la prostituée comme pour une aimable distraction et après les
un poulpe. N’hésitez pas à jouer cette avoir écoutés, leur parlera de choses sans
scène de manière hystérique, le tout est de queue ni tête sur le ton de la confidence.
rendre mal à l’aise les Eiyu. Si les Eiyu décident qu’il ne sait rien de
l’affaire, le fou s’agrippera aux barreaux et
se mettra à hurler jusqu’à ce que les gardes
L’alcoolique est un fossoyeur, les autres le renvoient au fond de sa cellule à coups
prisonniers ne veulent pas de ce maudit de bâton.
106
Le samouraï en prison
L'égarée
Le chasseur de yokai
Cet homme, proche de la quarantaine, est Kunimitsu Ichiro du clan Oda
une image d’Epinal du samouraï. Il porte le
NC 6
chignon traditionnel, parle de manière sèche
FOR +3 DEX +2 CON +2
et laconique, regarde droit devant lui ou fixe
ses interlocuteurs. Ses gestes sont mesurés et il INT +2 PER +2 CHA +1
économise son énergie à chaque instant. Il se DÉF 12 PV 30 Init 10 Ki +2
dégage de lui une menace palpable. Katana +10 DM 1d8 + 3/1d10 + 3
(critique 19-20)
Interrogé, le samouraï dit venir des provinces Wakizashi +10 DM 1d8 + 3 (critique 19-20)
du Sud (il n’utilise pas le terme de préfecture, le Techniques de combat : Kunimitsu Ichiro
nouveau système administratif), appartenir au connaît les manœuvres suivantes :
clan Oda et demande à son interlocuteur son Charge : une action de mouvement précédant
rang. Si ce dernier est d’ascendance noble, il lui une action d’attaque accorde à Kunimitsu
parlera. Dans le cas contraire, il sera encore plus Ichiro un bonus de +5 en ATC pour le
froid et à la limite de l’impolitesse. Sa langue ne prochain jet.
se déliera que pour expliquer l’importance de Parade : lorsqu’il est touché avec une ATC,
son sabre et ce qu’il représente. Kunimitsu Ichiro peut tenter un test opposé
de DEX face à son adversaire ; s’il l’emporte, il
Sa venue dans un lieu qu’il exècre (car ne subit que le mod. de caractéristique comme
« moderne ») est due à une mission. Une dégâts.
dette d’honneur que sa famille porte depuis Coup brutal (L) : Kunimitsu Ichiro peut faire
des générations. Il n’en parlera qu’en échange un jet d’ATC sans mod. de caractéristique ; s’il
d’informations. Si les investigateurs abordent touche, il ajoute +1d6 à ses DM.
leur affaire, le samouraï demandera des Enchaînement : Kunimitsu Ichiro peut
effectuer deux attaques en une action
précisions, mais ne révèlera pas grand-chose.
d’attaque simple ou limitée. La deuxième se
Enfin, si les Eiyu sont très respectueux, s’ils le fait au d12.
font libérer ou qu’ils lui restituent son sabre une Lame effilée : lorsqu’il utilise un sabre avec
fois qu’il sera relâché grâce à la rançon payée une main, Kunimitsu Ichiro gagne un bonus
de +2 en DÉF. Lorsqu’il utilise un sabre avec
par Ibara, le samouraï offrira à l’un d’entre eux
deux mains, il gagne un bonus de +2 en
un kanji sur une feuille de papier de riz. Ce kanji Initiative.
est une protection contre le yokai qui pourrait Purification : la purification énergétique et
servir lors de la scène 2. vibratoire permet de nettoyer un lieu, une
personne ou un objet de l’influence négative
Une fois libéré, le samouraï restera chez Ibara et
présente. Les malus qui asservissent l’esprit
laissera ses serviteurs effectuer les recherches. ou le corps (possession, charme, paralysie,
Il ne sortira qu’une fois le yokai localisé afin de ralentissement, etc.) sont annulés pendant
mettre un terme définitif à ses agissements. 7 minutes. Un test de PER est demandé en
fonction de la situation rencontrée.
Protection : Kunimitsu Ichiro peut protéger
un lieu, une personne ou un objet contre
l’influence maléfique d’une entité. Le
personnage est immunisé contre la peur
et tous les sorts ou effets magiques qui
asservissent l’esprit ou le corps (possession,
charme, paralysie, ralentissement, etc.)
pendant 7 minutes. Si la purification a été
faite au préalable, elle dure 12 minutes. Un
test de PER est demandé en fonction de la
situation rencontrée.
Diagnostic des cinq éléments : Kunimitsu
Ichiro sait diagnostiquer les troubles liés
aux circulations d’énergie dans un être
vivant et établir le concept de maladie et de
traumatisme. Il reçoit un bonus de +4 à tous
les tests de médecine, d’anatomie, etc.
Guérison accélérée : lorsque Kunimitsu Ichiro
accorde des soins à un personnage blessé
avant une période de repos, il lui permet de
doubler le résultat du DV utilisé (soit 2 DV +
niveau + mod. de CON).
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Revenez à l’encart « Guider les Eiyu dans Il réfute les actions contre les Occidentaux,
Yokohama », p.106, et laissez-les choisir leur mais rappelle qu’il a des intérêts dans le quartier
prochaine destination. des plaisirs et que ces gens posent toujours des
problèmes. Selon lui, il faut bien quelqu’un
d’efficace pour les régler. Il pose des questions
Visiter Yuko sur le HMS Stalwart et négocie ses possibles
informations contre toute information sur ce
dans le quartier Sud navire. Il rappelle qu’un bateau qui n’accoste pas
Le quartier Sud près du port est constitué de est censé être en quarantaine et que ce dernier
petits marchés, d’hôtels modestes, d’auberges et ne l’est officiellement pas. Ici ce n’est pas lui qui
d’entrepôts. Les demeures des marins côtoient cache des choses. S’il est interrogé sur le trafic
des maisons sur pilotis ou des barques. Depuis d’opium dans la ville, Yuko niera et deviendra
quelque temps, des hommes à la solde de Yoji passablement agressif. Il sait qu’il jouera gros
Akamaru tentent de persuader la population s’il est pris.
pauvre de partir pour transformer la zone en Une fois cette visite effectuée, déclenchez la
une extension du port de marchandise. Yuko scène 2 le soir ou le matin suivant, sauf si les Eiyu
s’est mobilisé pour les aider à rester, car une vont eux-mêmes à la rencontre du sous-préfet.
telle mainmise par le riche homme d’affaires
signifierait plus de difficultés pour ses trafics. En attendant, revenez à l’encart « Guider les
Eiyu dans Yokohama », p.106, et laissez-les
Il n’est pas aisé de contacter Yuko car il n’aime choisir leur prochaine destination.
pas les policiers. En traînant dans le quartier,
il est possible de prendre contact avec un de
ses hommes, ou user d’informateurs pour faire Le trafic d’opium (fausse piste)
passer le mot que les Eiyu le cherchent. Ils
peuvent aussi investir les entrepôts du Dragon Yuko a mis en place un trafic d’opium en
vert, mais la réaction de Yuko sera encore plus collaboration avec une pègre chinoise de Hong-
épidermique que celle d’Ibara. Kong. Tout ce trafic est nimbé de mystère et
de noms codés. Pour prendre contact avec les
Yuko reçoit ses « invités » dans l’entrepôt Chinois (localisés dans le quartier du port), il
principal. Il est encombré de nombreuses faut se tenir devant une peinture représentant le
caisses en bois et les chemins à l’intérieur dragon de la compagnie où travaille Yuko, mais
forment une croix. Arrivés au croisement de ces peint en blanc plutôt qu’en vert. Un observateur
chemins, Yuko apparaît en haut d’une pile de zélé (PER, difficulté 20) pourrait voir un Chinois
caisses, flanqué de trois hommes de main, dont surveillant constamment cette fresque toute
un Chinois, armés de fusils. la journée depuis une chambre d’une maison
108
quelconque (en vérité, ils se relaient). Une fois Le HMS Stalwart (fausse piste)
L'égarée
que celui qui demande une entrevue est vu, il
Ce navire, vieux de plus de cent ans, est un
est accosté dans la rue avec une question. La
trois-mâts anglais affrété par la Royal Academy
réponse, quoi qu’il arrive, est toujours « parce
of Science. Son capitaine, Sir Francis D.
que le dragon ne dort pas ».
Hummond, a décidé de faire escale à Yokohama
Arriver à connaître le fonctionnement de ce avant de repartir vers Londres. Il a croisé dans
trafic est long et nécessite d’espionner sur les mers du Sud et lors d’une halte en Polynésie,
plusieurs jours les entrepôts de Yuko. Une sur une île au nord-ouest de Tahiti, ses marins
perquisition révèle des caisses de thé au jasmin, et scientifiques ont découvert une idole païenne
à l’odeur assez forte, qui dissimulent de l’opium. gigantesque et s’en sont emparée. Lorsque les
Elles se distinguent par un idéogramme chinois indigènes les ont vus, ils ont essayé de s’opposer
(montagne) dans un coin. Une autre voie passe mais ils furent massacrés par les Anglais. Ces
par un des hommes de Yuko stationnant au derniers sont vite repartis avec la statue. La
Fleurs de pétales et répondant au nom de Ya bon Polynésie est un territoire français et cette
pour les Occidentaux. De son vrai nom Shiji, attaque pourrait constituer un casus belli. Ainsi,
il y vend de l’opium, est fidèle et mourra plutôt le Stalwart a-t-il fait une route quasi directe avec
que de parler. une seule escale avant de rejoindre Yokohama.
Enfin une autre cargaison sera gardée par des Si le navire ne s’est pas amarré, c’est parce qu’il
hommes armés si les Eiyu passent avant la fin du ne veut pas que l’on découvre son secret.
deuxième jour. Ensuite elle sera transférée vers Le capitaine, ainsi que les trois scientifiques et
les hangars de la société Akiyo. Les caisses sont le maître de quart, sont descendus en chaloupe
frappées d’une pieuvre. Il s’agit de munitions et ont été reçus par la Far East Local Furniture
européennes. Ce trafic, à destination du Company (FELFC). Ils y logent au début de
ministère de la Guerre, est semi-légal. En réalité, l’aventure. Afin de garantir le secret, ils ont
rien ne l’interdit, mais le ministère, en faisant fait courir le bruit d’une quarantaine, mais
ainsi, évite toute paperasse administrative. cela n’apparaît sur aucun document officiel.
L’intégralité de cette histoire est racontée dans
le journal du capitaine, conservé dans un
coffre dans sa chambre (la clé étant à l’hôtel
Visiter le port de la FELFC).
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prévenir le préfet, ce dernier fera jouer ses particulier de Yoji Akamaru, Katsum Hijiro,
relations avec l’Académie des arts et traditions supervise les accords, dont la future extension
populaires pour qu’ils récupèrent l’objet. du port. La société Akiyo (« génération
Éventuellement, les personnages entendront brillante ») s’occupe du négoce avec diverses
parler d’une réunion extraordinaire entre entreprises étrangères dont les américaines
l’ambassadeur anglais et le gouvernement. Un avec lesquelles le gouvernement importe des
bateau de la flotte japonaise viendra mouiller armes plus ou moins discrètement, pour ne
non loin du Stalwart. Mais avant un quelconque pas heurter l’opinion.
dénouement, le trois-mâts sombrera et son Stefan peut être rencontré à l’hôtel de la
contenu sera perdu dans la baie de Tokyo. compagnie dans le quartier des étrangers, une
demeure à trois étages de forme carrée, en pierre
et à la mode occidentale. Il est entouré d’un
Les gardes du HMS Stalwart vaste jardin traversé par une route en graviers.
Tout Japonais qui n’est pas de haut rang ne peut
FOR +2 DEX +1 CON +1 se rendre que dans le vaste hall d’entrée où ses
INT +0 PER +2 CHA +0 interlocuteurs viendront le rejoindre. C’est le
cas d’Ogurson, un homme d’une quarantaine
DÉF 11 PV 10 Init 9 Ki -2 d’années, cheveux courts, au visage sec et
Fusils +3 DM 2d6 buriné. Ses mains sont larges et calleuses, mais
il porte un costume de qualité moyenne. Il parle
Couteau +4 DM 1d6 + 2 un japonais laborieux, d’où un dialogue difficile.
C’est un homme qui, sans l’être à l’excès, porte
en lui comme beaucoup d’Européens un fond
raciste. Ses expressions préférées sont « pong »,
Visite à Stefan Ogurson un terme qui désigne autant les Japonais que
les Chinois et « face de singe » pour ceux qu’il
dans le quartier des méprise particulièrement.
étrangers
• Stefan donne toutes les informations
Le quartier des étrangers est moderne, possibles, mais toujours « orientées »
les petites mains ne font qu’y passer et la selon son point de vue. Voici ce que les
proportion d’étrangers est importante. Tout investigateurs peuvent apprendre :
Japonais n’étant pas un serviteur est épié par les
• Ses « gars » aiment bien les filles et
Occidentaux, voire méprisé. Seuls ceux qui se
fréquentent souvent les prostituées ;
déplacent en voiture et qui ont un statut élevé
reçoivent un respect intéressé. C’est depuis le • Il se plaint des voleurs (faces de singe) qui
bureau de la société Akiyo que le secrétaire sont comme des poissons, capables de passer
110
L'égarée
par la mer et de piller ses bateaux sans que Visite de l’hôtel
les gardes n’y voient quelque chose ; L’Océanique,
• Ses hommes sont souvent pris à partie dans le quartier Sud
par la population locale, surtout dans
Cet hôtel sert à loger les marins de la
le quartier des plaisirs, et s’ils ripostent,
FELFC, principale compagnie occidentale
c’est en légitime défense (« Quand vous
à Yokohama, mais aussi de toutes les autres.
vous sentez menacés constamment, vous
Il est de plain-pied, au bord de l’artère
mordez avant de vous faire mordre, hein,
principale du quartier Sud, une grande voie
Pong, tu comprends ça, non ? ») ;
en terre qui coupe le méli-mélo de ruelles
• Les problèmes sont de plus en plus étroites constituant la très grande majorité
fréquents, à tel point qu’un de ses bateaux de ce quartier populaire pourvu d’entrepôts.
n’a même pas pu s’amarrer au port et ne le Seule la promenade au bord de la mer
fera pas tant que les vols ne cesseront pas ; contraste avec ces grands hôtels européens
et sa population plus riche. L’Océanique est
• Si un Eiyu fait allusion aux accusations en réalité constitué de trois vastes dortoirs
de viol, il répondra que les Japonaises se avec des commodités usées dans la cour qui
comportent comme des prostituées même donne sur l’arrière du bâtiment. Chaque
en dehors des bordels. Ses gars, ce sont des dortoir comporte une trentaine de paillasses
marins, il ne faut pas s’étonner s’ils veulent affublées chacune d’un coffre à cadenas.
jouer avec les demoiselles, ça se comprend Certains préfèrent arrimer leur hamac aux
tout de même. poutres pour éviter la morsure des puces.
• Pour d’autres informations, Ogurson Une personne est presque toujours présente,
enverra les investigateurs vers l’hôtel sauf entre 3 et 6 heures du matin, voire
L’Océanique, s’ils n’y ont pas déjà été. deux qui « montent la garde » de manière
Enfin, en cas de tensions avec lui (ce qui officieuse. Leurs lourds gourdins suffisent en
est très probable au vu de son attitude), il général à dissuader les fauteurs de troubles.
lâchera dans une flopée de termes presque Tout Japonais qui se rend dans ces lieux peut
injurieux que son « big boss » a pris contact sentir la menace exsuder de chaque mur.
avec l’US Navy et qu’une canonnière serait Ici, ce sont des hommes durs, qui ont déjà
en marche, histoire de montrer à tous ces commis plusieurs crimes, habitués à une
« Pong » prétentieux comment on règle ça vie difficile et dangereuse loin de chez eux.
chez les civilisés. Il ne faut qu’une étincelle ou une menace
prononcée pour qu’ils répondent de la seule
Revenez à l’encart « Guider les Eiyu dans
façon qu’ils maîtrisent, la violence.
Yokohama », p.106, et laissez-les choisir leur
prochaine destination.
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Stefan Ogurson Dans les deux établissements, les mêmes
éléments sont rapportés : ces marins sont des
Avec les laissez-passer et un mot d’Ogurson, les
brutes obsédées qui ont été chassés pour leur
Eiyu peuvent entrer. Les voisins de paillasse des
violence et les abus qu’ils commettent. Les deux
victimes ne sont pas loquaces et la seule chose
qui en ressort, c’est qu’ils aimaient bien les maquerelles ne regrettent pas leur mort, mais
femmes (« Ça, dès qu’ils pouvaient démonter pour elles, s’ils se sont fait zigouiller, c’est à
une Jap, ils claquaient toute leur paie ! Z’auraient cause de la pègre et de l’opium, pas par une de
mieux fait d’en épouser une, comme Simon, leurs filles. Seuls les mafieux sont capables de
hein, ils auraient fait des économies ! »). faire un truc aussi sale et original.
Fouiller dans les affaires des victimes (PER, Visiter de nuit les rues où les marins sont
difficulté 20) permet de trouver un sachet en morts entraîne une première rencontre avec
tissu contenant trois boulettes d’opium cachées la futakuchi-onna. Ensuite, le yokai changera
chez Lothar et un autre vide chez Marcellino. de quartier, surtout parce que ses « victimes »
Évidemment, personne ne savait qu’ils ne le fréquentent plus mais se terrent dans le
consommaient (ce qui est faux). Tout au plus, quartier Sud.
les voisins lâcheront, si les Eiyu réussissent à
leur mettre la pression, que « le fournisseur c’est
souvent un gars de chez Yuko, un Chinois ». Les pauvres filles du quartier des plaisirs
Revenez à l’encart « Guider les Eiyu dans (vraie piste)
Yokohama », p.106, et laissez-les choisir leur Lors de leur visite dans le quartier des plaisirs,
prochaine destination. sans doute nocturne afin de rencontrer
tenancières et témoins, les Eiyu vont peut-être
sur les lieux du crime. Un des deux meurtres a
Visiter le eu lieu dans une ruelle transversale, mais assez
quartier des plaisirs fréquentée (pas de témoins connus, la violence
du crime les ayant effrayés, ils ont décidé de
Ce quartier est paisible la journée, la plupart de faire profil bas). Le second s’est déroulé dans
ses occupants travaillent à préparer la soirée ou
une allée située à l’arrière-cour des bordels.
se terrent dans les masures misérables au bord
Dans cette rue se trouvent des indigents, soit
des canaux. Mais une fois la nuit venue, c’est le
trop malades pour parler, soit violents et
quartier le plus lumineux et le plus fréquenté.
alcooliques, ainsi que les filles qui n’ont pas été
Au début de l’aventure, les rues principales sont
prises dans un établissement.
bondées et il est difficile de suivre quelqu’un
dans la rue. À la fin de l’aventure, avec les
tensions et les explosions de violence, il y aura
à peine la moitié du monde.
Les rues traversières, et celles qui longent les
portes arrière des bordels, sont boueuses et
malpropres. Seuls les indigents, les vendeurs de
produits illicites et les pauvres jeunes filles qui
vendent leur corps pour survivre fréquentent
ces lieux lugubres.
Le Nectarine 9, bordel de luxe, est très grand
et européanisé pour répondre à la clientèle
occidentale, mais propose aussi de l’exotisme
à la clientèle nationale. Même une Anglaise et
deux geishas de luxe y exercent. La maquerelle
tient parfaitement son établissement et possède
quelque soutien haut placé…
Le Fleurs de pétales, petit lupanar traditionnel
de seconde zone, regroupe l’essentiel de la
clientèle des marins. Un représentant du
Dragon vert y est toujours présent, surnommé
« Ya bon » du fait qu’il répète cette phrase à ses
clients occidentaux. En cas de grabuge, il fuit
dans le dédale de ruelles qu’il connaît par cœur.
112
L'égarée
Sans protection, sans logis, ce sont de presque inaperçue (jeune fille en haillons
miséreuses adolescentes qui meurent à petit aux cheveux longs et filasses). Elle se
feu et ne prennent presque rien pour une rapproche, mais ne tend pas la main. De
passe. Il n’est pas rare qu’elles soient violées, préférence, elle se montre à une ou deux
violentées, voire tuées sans que personne ne personnes. Silencieuse et immobile, elle
s’en émeuve. Très peu survivent à leurs 20 ans, inspire tout autant la pitié que le dégoût. À
tuées par la maladie. l’approche des Eiyu, elle reste tête baissée.
S’ils deviennent menaçants ou viennent trop
C’est parmi elles que se terre le yokai. Lorsqu’un
près, ils entendront un feulement sinistre et
étranger arrive, ces jeunes filles en haillons
glaçant d’effroi inspirant une peur primale
se traînent jusqu’à lui en tendant le bras.
(Résistance mentale, difficulté 15). Son
Épuisées par une vie malsaine, elles geignent
corps est froid comme un cadavre et si elle
et ne parlent pas. Si elles sont interrogées, elles
est découverte, la futakuchi-onna attaquera
murmureront. Elles se jetteront littéralement
ses cibles à l’aide de ses cheveux, avec une
sur les hommes et leurs mains vont chercher
vélocité et une violence hors du commun. Ses
les attributs sexuels afin de suggérer ce qu’elles
peuvent faire. Cette scène doit être glauque et cheveux semblent innombrables, résistants,
effrayante. Ce ne sont que des humaines, mais blessants. Elle marque avec eux ses victimes.
elles vivent l’enfer sur terre et ont perdu une Son but premier sera de s’enfuir grâce à son
grande partie de leur humanité. Si les Eiyu agilité. Elle disparaîtra au fond d’une sombre
abordent la question d’une petite fille étrange ruelle ou tombera dans un canal insalubre.
ou d’une créature, ils obtiendront une réaction L’attaque sera si violente que les Eiyu seront
en deux temps, une pause prouvant que la fille hagards, avec la sensation de n’avoir pas tout
interrogée a vu quelque chose puis la fuite. compris, mais d’avoir échappé à la mort. Un
L’ensemble des filles ne savent pas ce que c’est, homme très observateur (PER, difficulté 20)
mais elles l’évitent, leur instinct de survie leur pourra avoir remarqué l’étrange difformité à
disant de ne pas chercher plus loin. l’arrière de son crâne.
Parmi les autres filles, certaines lâcheront enfin
Première rencontre qu’elle a mangé le méchant homme, et qu’elle
Si les Eiyu poursuivent leurs investigations leur fait peur.
dans les ruelles auprès des petites souillons, ils
Revenez à l’encart « Guider les Eiyu dans
risquent de tomber sur la futakuchi-onna.
Yokohama », p.106, et laissez-les choisir leur
Au milieu des désespérées, elle passe prochaine destination.
113
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La futakuchi-onna Scène 2 :
NC 6
première rencontre
FOR +3 DEX +3 CON +2
Rapidement après la rencontre avec
INT +1 PER +3 CHA +1
Yuko, probablement le soir en rentrant au
DÉF 15 PV 30 Init 12 Ki de départ -5 (envie bureau 104 ou le matin suivant, le sous-préfet
muée en rancune) convoque l’équipe. Il lui demande de faire le
Mains nues +8 DM 1d4 + 3 (+8 avec le Ki) point et la félicite si les rapports journaliers
Morsure +8 DM 1d8 + 3 (+8 avec le Ki) ont été réguliers et bien rédigés. Dans le cas
contraire, ce sera une belle remontrance.
Cheveux +8 DM 1d4 + 3 (+8 avec le Ki) Enfin, il conclut en expliquant qu’il a eu
Apparence effrayante : lorsqu’un personnage des informations sensibles concernant une
réalise la véritable nature de l’entité, il fait un embuscade des hommes de Yuko tendue envers
test de choc difficulté 10 (1 PS). des marins de la FELFC, à défaut d’en trouver
Plus mort que vivant : la futakuchi-onna n’a du Stalwart, concernant la cargaison du
pas besoin de boire, manger ou dormir pour navire anglais. L’attaque serait programmée
subsister, mais n’a aucune récupération de pour le soir même ou le lendemain. C’est
PV. Elle doit dévorer les matières organiques pour le sous-préfet l’occasion de prendre
(mortes ou vivantes) pour se régénérer. Enfin, les hommes de Yuko en flagrant délit et de
ses attaques sont considérées comme infusées
pouvoir les condamner pour les meurtres des
d’énergie pour ce qu’elle peut affecter.
marins. Puis il congédie les Eiyu.
Attaque multiple : la futakuchi-onna gagne
une attaque gratuite de chevelure lorsqu’elle
utilise une action d’attaque.
Savoir où et quand
Chevelure : les cheveux de la futakuchi-onna
ont également des propriétés mystiques. Leur L’attaque a lieu le soir qui vous convient le mieux.
solidité est extraordinaire tout comme la Une enquête, auprès d’autres agents de police
possibilité de s’en servir d’arme. Cependant, ou de leurs indicateurs habituels (à la discrétion
si l’attaque supplémentaire porte avec un du Sensei), confirme les rumeurs d’une attaque
critique, la cible est Immobilisée jusqu’à ce imminente et les raisons seraient les mêmes que
qu’elle réussisse un test de FOR opposé. Dès celles énoncées par le sous-préfet. Si les Eiyu
lors, tant qu’elle n’a pas réussi à se dépêtrer, poussent très loin leurs investigations, voici ce
la cible subit les DM de la morsure. La
qu’ils apprennent :
futakuchi-onna ne peut immobiliser qu’un
adversaire à la fois. • Six hommes de main de Yuko ont pour
Suivre une cible : la cible doit avoir eu un mission d’attraper un marin de la FLEFC
contact direct avec les cheveux de la futakuchi- et de le faire parler concernant le Stalwart,
onna. L’effet perdure pendant une semaine ; ou à défaut d’apprendre où se trouve son
pendant ce délai, le yokai sait toujours dans équipage. La mort semble inéluctable pour
quelle direction se trouve sa cible, si elle est en l’infortuné anglais car Yuko veut faire un
mouvement et à quelle distance. La portée de exemple pour les viols en ville (et affirmer
la connexion n’a aucune limite. son autorité) ;
Immunités : la futakuchi-onna ne reçoit que la
moitié des DM issus d’armes à feu ou d’armes • Les Anglais ne se déplacent pas seuls. Ils
contondantes. Elle est immunisée contre l’état vont souvent en groupe de 3 à 5 personnes
Étourdi sauf par la magie. et portent des couteaux, voire des pistolets
pourtant interdits ;
Vision parfaite : la futakuchi-onna voit aussi
bien dans les ténèbres qu’en plein soleil, elle • L’attaque devrait avoir lieu dans le
ne subit aucune pénalité d’obscurité. quartier Sud.
Vulnérabilité : la futakuchi-onna est La suite de la scène, et de l’aventure, dépend
vulnérable aux magies shintoïste et
de la réaction des Eiyu. Ils peuvent intercepter
bouddhiste, plus qu’un être normal. Ses tests
en opposition souffrent d’une pénalité de 5. le groupe de Yuko, moyennant surveillance
De plus, un ritualiste qui réussirait à créer un et filature, avant qu’il n’opère son forfait,
kanji magique imprégné du concept de satiété simplement observer l’affrontement et décider
et à l’insérer dans sa gueule peut détruire la en fonction du déroulement, ou directement
futakuchi-onna. intervenir dans l’altercation.
114
Bagarre de rue S’ils ne sont pas là ou qu’ils ne sont jamais
L'égarée
intervenus (ou que le groupe de Yuko a été
tripartite
arrêté avant), faites jouer la scène 3.
Dès le début de l’affrontement, les Anglais,
à cran, tirent deux coups de feu tuant deux
Japonais. Ainsi alertées, les autorités rappliquent
dans les dix minutes. C’est peut-être aussi ainsi Les hommes de Yuko
que les investigateurs trouvent la bagarre. Par
la suite, c’est une échauffourée à base de coups FOR +1 DEX +2 CON +0
de poing, de pied, de couteau, de gourdins et de INT +1 PER +1 CHA +0
chaînes avec crochet.
DÉF 12 PV 10 Init 10 Ki 0
Lors de ce combat, le yokai fond sur un Anglais
un peu en retrait qui se trouve être un de ses Couteau/Kusarigama/Gourdin +3 DM 1d6 + 1
violeurs (d’où la nervosité accrue du groupe
anglais et le fait qu’ils aient tous tiré si vite). Son
Les marins britanniques
arrivée crée un mouvement de panique (test
de résistance mentale) bien qu’elle n’attaque FOR +2 DEX +1 CON +1
que les marins. Poursuivant les Anglais qui
INT +0 PER +1 CHA +0
se dispersent dans les rues, la futakuchi-onna
en tue un second, blesse gravement un autre, DÉF 11 PV 12 Init 9 Ki -2
tandis que le troisième s’enfuit (voir scène 5). La
Pistolet +3 DM 1d10
violence de l’attaque est sidérante et les cadavres
dissipent sans équivoque toutes les théories Couteau +4 DM 1d6 + 2
précédentes sur les auteurs des meurtres (test
de résistance mentale).
Si les Eiyu interviennent, la futakuchi-onna
ne cherchera pas à leur faire du mal, mais son
Scène 3 :
intention ne sera pas très claire. Vous avez
plusieurs possibilités pour gérer la scène :
Laissez les Eiyu l’affronter. Le yokai peut être les Européens
passent à l’attaque
blessé, mais il ne doit pas être tué ;
Un acolyte du chasseur de yokai surveille
la zone et peut intervenir pour « sauver » les Le lendemain de l’altercation, les Eiyu sont
personnages en projetant un kanji enchanté. convoqués au bureau du préfet. Ils y sont
Néanmoins il mourra des mains de la futakuchi- attendus par le préfet, le sous-préfet et un
onna qui s’enfuira dans la foulée, apeurée ; gentleman très distingué et poli, Andrew
Nichols, le chef de la FELFC.
Si un des Eiyu a le kanji du chasseur de yokai,
celui-ci brûlera la futakuchi-onna et la mettra Après avoir accueilli les investigateurs, le
en fuite. préfet les remercie de leur implication et de
leur obstination à faire triompher la vérité.
Puis il annonce que le sous-préfet va les
Dans tous les cas, la futakuchi-onna marque mettre au courant de la suite des affaires,
celui ou ceux qui s’opposent à elle, même si c’est se lève et quitte le bureau. Ce dernier, qui
pacifiquement. exulte ostensiblement, prend sa place dans
son fauteuil et explique la nouvelle situation.
La scène se termine avec l’arrivée des autorités Il demande souvent l’accord d’Andrew Nichols
et la décision importante que doivent prendre qui hoche la tête et parfois, dans un japonais
les investigateurs ; ils ont des explications à très pur, ajoute quelques explications.
fournir et en tant que personnes de haut rang,
du fait de leurs laissez-passer, ils seront crus sur
parole :
Changement de cible
S’ils choisissent d’accuser les hommes de Yuko,
En plus du massacre de deux de ses hommes,
faites jouer la scène 3 ;
Andrew Nichols annonce qu’un troisième est
S’ils choisissent d’accuser les Anglais (qui en porté disparu. Convaincus que Yuko et son
théorie ne sont pas en état de protester), faites groupe sont responsables de cet enlèvement,
jouer la scène 4 ; les bureaucrates annoncent la tenue d’une
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grande opération de purge dans le quartier Le quartier Sud est en état de siège. Les hommes
Sud, mais aussi dans le quartier Nord. En effet, de Yuko ne se laissent pas faire et ripostent avec
d’après leurs informations, la tête pensante des armes à feu. Des escarmouches ont lieu et
de l’opération serait un traditionaliste du l’entrepôt principal est cerné de policiers en
nom de Kunimitsu Ichiro. Selon eux, c’est un attente d’un canon arrivant avec le train de
révolutionnaire du Sud. Un de ses acolytes a Tokyo. Régulièrement, des coups de feu éclatent
été arrêté, « interrogé » et a expliqué que son au loin et des agents courent dans tous les sens.
« maître » était venu en ville pour affronter la Le long de la rue principale, où est situé l’hôtel
« dévoreuse sans âme ». Ils en ont conclu qu’il L’Océanique, des marins armés surveillent les
parlait de l’Europe et que Kunimitsu devait être mouvements des Japonais ;
derrière tout ça.
Le quartier Nord est une vraie poudrière.
Comme ce dernier loge dans le quartier Nord, Les gens ont créé leurs propres barricades et
chez un « édile local », les bureaucrates ont la révolte gronde. Mais aucun coup de feu
décidé de boucler la zone et de procéder dans les n’a été tiré jusqu’à présent. De nombreux
jours qui viennent à un ratissage en règle. Enfin attroupements se développent, aussi bien
Nichols énonce qu’il a demandé l’assistance de d’adultes que d’enfants et de vieillards ;
la marine américaine et qu’une canonnière est
censée arriver dans 48 heures. Une enquête sur Bob Wilson apprend que c’est
un marin connu pour son amour de la chair,
sa tendance à la violence et à l’alcoolisme. Il a
De nouveaux objectifs des liens d’amitié très forts avec certaines des
victimes (Lothar, Simon et Edgar, les deux
En fonction de leurs actions précédentes, les dernières victimes du yokai). Depuis une
membres du bureau 104 ont trois choses à faire : semaine, il est très souvent saoul, plus que
• Retrouver le marin manquant (Bob d’habitude, et se gratte frénétiquement le bras
Wilson) et le ramener au sous-préfet. S’ils gauche (où il a la marque de la futakushi-onna).
ne le trouvent pas sous 48 heures ou qu’ils Il parlait de « partir en salade » (terme mal
découvrent qu’il est mort, l’opération de compris par ses camarades, il faisait allusion
purge sera déclenchée ; à Batavia, le port indonésien, voir le manifeste
• Accompagner le samouraï à la préfecture en annexe, p.119). Sur ce point n’hésitez pas
afin qu’il soit jugé le plus vite possible. Il à « délayer » (« Il voulait toujours bouffer de
ne fait aucun doute pour les deux hommes la salade, une vraie obsession » ; « Il parlait
qu’il finira condamné à mort (pendu, ce toujours d’aller au pays de la salade, un truc
qui semble être la peine requise, l’infamie comme ça » ; « Il voulait rejoindre une nana
pour un samouraï traditionaliste) ; qui avait un nom de salade, sans doute une
• Aider à neutraliser Yuko et ses alliés du asiate... »). Insistez sur le fait que Bob Wilson
quartier Nord, dont Ibara semble être en parlait très souvent de quitter la ville et ce
haut de la liste. « maudit pays » au plus vite. Que ce soit en allant
directement à la capitainerie ou en demandant
Les Eiyu ont carte blanche. S’ils mentionnent à un contact, les Eiyu peuvent obtenir la liste
l’existence de la futakuchi-onna, ils seront des navires actuellement à quai.
moqués et discrédités. S’ils insistent, ils seront
mis sur la touche et devront terminer l’aventure Une fois les investigateurs sur la piste de Bob
sans l’aide précieuse du laissez-passer. Wilson (qui est caché sur le bateau hollandais à
destination de Batavia), passez à la conclusion.
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L'égarée
Et pendant ce temps-là, dans la baie de Yokohama
Cet événement est optionnel. Son La vérité est sombre et a des
explication et la vérité derrière le Stalwart conséquences sur le long terme : le
ne sont en réalité pas liés à cette aventure. Gardien de R’lyeh, protecteur de la
Si vous voulez rajouter de la tension statue polynésienne et serviteur de
et embrouiller un peu plus les joueurs, Cthulhu, a retrouvé la trace du bateau
faites couler le Stalwart. Vous pouvez et l’a coulé. Les quatre occupants qui
le faire la nuit précédant l’attaque de la étaient de quart sont morts, dévorés
scène 2, la même nuit ou par la suite. Les par la bête. Une fois la statue par
investigateurs peuvent aussi le vivre en 25 mètres de fond, la bête se tapit à
direct lorsqu’ils se rendent au port pour ses côtés et reste là jusqu’à ce qu’on la
autre chose. déloge ou qu’on la tue. La bête de la
Le Stalwart coule en moins de dix minutes. baie de Yokohama sera à l’origine de
Aucun coup de feu ni aucune explosion n’est nombreux malheurs pour la ville et
entendu. Les spéculations vont bon train et son élimination est en soi une aventure
la majorité des gens pensent que ce sont les complète. Mais les investigateurs
hommes de Yuko qui ont coulé le bateau ne sont pas ceux qui résoudront ce
en représailles. Ce qui, si vous le faites mystère. Cet événement tragique sert
avant l’entretien de la scène 3, ajoute à la surtout à augmenter une tension déjà
détermination du sous-préfet et de Nichols. à son comble.
passent à l’attaque
chasseur, avec les éléments rapportés par ses
acolytes, a compris que le yokai pourchasse
Bob Wilson. Là où il se trouve, se trouve
Cette scène a de nombreux points communs
Wilson, et inversement.
avec la scène 3, mais au lieu du renvoi du
préfet, c’est le sous-préfet qui paye, pour avoir Si un Eiyu porte la marque de la futakuchi-
manipulé la « vérité » et avoir favorisé les onna, il suggèrera aussi de l’utiliser afin de
intérêts occidentaux sur ceux de son pays. lui tendre un piège. Les personnages peuvent
L’entretien qui suit est beaucoup plus tendu, aussi enquêter sur Wilson comme dans la
le préfet remerciant froidement Nichols et le scène 3, mais il leur faut un délicat mélange
menaçant d’expulsion de la ville s’il trouvait d’intimidation et de diplomatie car les
des preuves de son implication dans les troubles Européens se sentent piégés. Ils pourraient
récents. En conséquence, ce dernier lance un bien être pris à partie et subir une bagarre qui
ultimatum de 48 heures pour qu’on retrouve dégénèrera s’ils ne sont pas assez subtils.
son marin, ou il demandera à la canonnière
de protéger les ressortissants étrangers, ce qui
peut très bien être la première étape d’une D’autres objectifs
guerre, ou tout du moins d’un accrochage
Le préfet veut retrouver Wilson, ou sa dépouille,
violent à Yokohama (l’empereur saura éviter
afin d’avoir des preuves à l’encontre des
un conflit entre le Japon, les Etats-Unis et
Occidentaux et pouvoir plaider leur expulsion
l’Angleterre, mais la violence déchaînée à
à la cour impériale. Au vu de leur enquête, il
Yokohama aura l’intensité d’une guerre). demande aux investigateurs d’aller revoir Ibara
et Yuko et de solliciter leur aide.
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deux autres témoins : un marin hollandais qui
Conclusion : accompagne et surveille les investigateurs et
confrontation finale
sans doute le Japonais interprète de la sous-
préfecture marine.
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Annexes
L'égarée
Aide de jeu n°1 : les notes de Tamiya
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Aide de jeu n°2 : manifeste de la capitainerie
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