These Wedraogo 2014
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LIENS
par
I Introduction 1
1 Quelles méthodes de valorisation pour le biogaz ? 5
1.1 Composition du biogaz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.2 Purification du biogaz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.3 Voies de valorisation choisies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
II Revue bibliographique 11
2 Absorption 13
2.1 Processus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
2.1.1 Solubilité des gaz dans les liquides . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
2.1.2 Absorption physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
2.1.3 Absorption avec réaction chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
2.2 Procédés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.3 Absorption en micro-réacteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.3.1 Micro-contacteurs gaz-liquide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.3.2 Micro-réacteurs à phases séparées . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
2.3.3 Micro-réacteurs à dispersion de phase . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.4 Absorption dans un mélange diphasique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
2.4.1 Variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
2.4.2 Résultats de la littérature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
3 Reformage 39
3.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
3.2 Procédés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
3.2.1 Reformage à la vapeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
3.2.2 Reformage au CO2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
3.2.3 Oxydation partielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
3.2.4 Reformage autotherme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
3.3 Reformage en micro-réacteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
3.3.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
3.3.2 Travaux de la littérature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
3.4 Reformage du biogaz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
3.4.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
3.4.2 Etude bibliographique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
i
III Matériel et méthodes 59
4 Absorption 61
4.1 Produits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
4.1.1 Biogaz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
4.1.2 Phases aqueuses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
4.1.3 Phases organiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
4.2 Dispositifs expérimentaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
4.2.1 Absorption en cuve agitée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
4.2.2 Observation du système gaz-liquide-liquide . . . . . . . . . . . . . 66
4.2.3 Absorption en micro-mélangeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
4.3 Détermination du coefficient de transfert kL a . . . . . . . . . . . . . . . . 70
5 Reformage 75
5.1 Produits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
5.1.1 Biogaz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
5.1.2 Catalyseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
5.2 Dispositif expérimental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
5.3 Protocole expérimental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
5.4 Calcul de l’équilibre chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
ii
7.2 Influence des conditions expérimentales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
7.2.1 Efficacité d’absorption physique des différentes configurations . . 113
7.2.2 Qualité de la dispersion gaz-liquide . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
7.2.3 Absorption en présence de réaction chimique . . . . . . . . . . . . 118
7.3 Mesure de kL a . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
7.3.1 Modèle de transfert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
7.3.2 Absorption physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121
7.3.3 Absorption avec réaction chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
7.3.4 Comparaison avec les travaux de la littérature . . . . . . . . . . . 129
7.4 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
Bibliographie 171
VI Annexes 181
A Analyseur de biogaz 183
A.1 Détecteurs infrarouges à double faisceau . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183
A.2 Cellule électrochimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184
A.3 Spécifications complètes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184
iii
B Chromatographe 187
B.1 Paramètres opératoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187
B.2 Spécifications complètes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188
iv
Première partie
Introduction
1
Introduction générale
Depuis longtemps, le potentiel de développement des sociétés humaines est condi-
tionné par l’accès aux ressources naturelles et, plus spécifiquement depuis l’avènement
de l’ère industrielle, aux ressources énergétiques. Or, les prochaines décennies vont être
marquées par une raréfaction de ces ressources qui aura un impact considérable sur nos
moyens de production et notre mode de vie, autant du point de vue énergétique que du
point de vue des matières premières pour la fabrication des objets de notre quotidien.
De plus, ce déclin des ressources fossiles coı̈ncide avec une augmentation de la demande
liée à la croissance démographique mondiale et au développement économique des pays
émergents. Dans ce contexte, il est essentiel de rechercher dès à présent de nouvelles
sources d’énergie et de matériaux. C’est un problème d’ordre sociétal et donc économique
et politique. Dans le contexte actuel du réchauffement climatique, un problème environne-
mental se superpose à cette situation : le rôle de l’activité humaine dans l’augmentation de
l’effet de serre est aujourd’hui largement reconnu par la communauté scientifique [1]. Les
effets de ce phénomène seront une augmentation des températures et de la fréquence des
événements climatiques extrêmes ainsi qu’une élévation du niveau des océans qui auront
des conséquences importantes sur les activités humaines mais aussi sur les écosystèmes
naturels. Le secteur énergétique est responsable de près de 70% des émissions de gaz à
effet de serre à travers la combustion de matières fossiles telles que le pétrole, le charbon
ou le gaz naturel. Les sources d’énergie dites renouvelables telles que l’énergie solaire
ou l’énergie éolienne permettront dans les années futures de réduire notre dépendance
vis-à-vis des énergies carbonées. Cependant, elles ne peuvent remplacer les hydrocar-
bures fossiles qui fournissent aussi la matière première de la quasi-totalité de l’industrie
chimique.
Dans les dernières années, une grande attention a été portée à l’utilisation de la bio-
masse. Définie comme la fraction biodégradable de l’ensemble des matières organiques
(déchets ou produits) issues de l’agriculture, de la sylviculture ou encore des déchets
municipaux ou industriels, elle constitue une source de carbone intégrée dans un cycle
court. Si la production de ces ressources est aussi rapide que leur utilisation, on les
considère comme renouvelables. Il est à noter que l’utilisation de produits agricoles (no-
tamment issus de culture énergétiques) pose des problèmes d’acceptabilité sociale liés à
la compétition possible avec l’alimentation quant à l’utilisation des terres agricoles. A
l’opposé, l’utilisation de déchets présente un intérêt évident, d’autant que les résidus so-
lides de la digestion peuvent souvent servir de fertilisants agricoles. On peut tirer profit
du potentiel de la biomasse par conversion thermochimique (combustion, gazéification)
ou par conversion biochimique (digestion anaérobie ou méthanisation, fermentation). La
combustion est déjà mise en place depuis longtemps avec la ressource bois et se développe
fortement avec les déchets municipaux et la co-génération. La gazéification convient bien
pour les produits ligno-cellulosiques comme le bois ou la paille mais rencontre encore
des problèmes de rendement énergétique. La méthanisation est un procédé éprouvé (c’est
Volta qui l’introduit dans le milieu scientifique en 1776) dont les réalisations à grande
échelle sont déjà nombreuses. Ce procédé est la mise en œuvre contrôlée du processus na-
turel de dégradation de la matière organique en absence d’oxygène. Il produit du biogaz,
3
un mélange inflammable composé majoritairement de méthane et de dioxyde de carbone
appelé biogaz qui peut alors être utilisé pour de multiples applications similaires à celles
du gaz naturel :
– la production d’électricité et de chaleur par combustion (ou co-génération) in situ
ou après transport,
– l’utilisation comme carburant pour véhicule [2],
– la production de gaz de synthèse par reformage [3],
– l’alimentation d’une pile à combustible [4].
Le premier chapitre est destiné à expliciter le choix des procédés testés en vue de la
valorisation du biogaz. Il est donc nécessaire de faire au préalable un état de l’art des
options existantes et de les évaluer en fonction de nos objectifs. Certains de ces sujets ont
déjà été longuement discutés dans la littérature (c’est le cas de la capture du dioxyde de
carbone par exemple) et des procédés existent déjà pour la valorisation du gaz naturel. Le
premier but que nous nous fixons est donc d’étudier des procédés innovants. Cependant,
l’acceptation de procédés nouveaux et surtout leur application concrète est très fortement
conditionnée par leur rentabilité. C’est un deuxième objectif à prendre en considération.
Enfin, il est important d’un point de vue sociétal que les nouveaux procédés développés
aient une empreinte écologique la plus faible possible.
4
Chapitre 1
Les autres applications comme le reformage ou la pile à combustible sont aussi im-
pactées par la présence de ces impuretés qui peuvent empoisonner les catalyseurs.
5
Table 1.1 – Composition de gaz de différentes sources. [5]
Biogaz
Gaz naturel
Paramètre Unité Gaz de décharge (digestion
(Mer du Nord)
anaérobie)
Méthane % vol 35–65 53–70 87
Autres
% vol 0 0 12
hydrocarbures
Hydrogène % vol 0–3 0 –
Dioxyde de
% vol 15–50 30–47 1,2
carbone
Azote % vol 5-40 0,2 0,3
Oxygène % vol 0–5 0 0
Sulfure
ppm 0–100 0–10000 1–2
d’hydrogène
Ammoniac ppm 5 <100 0
Chlore total mg/Nm3 20–200 0–5 0
Pouvoir
calorifique kWh/Nm3 4,4 6,5 11
inférieur
Masse
kg/Nm3 1,3 1,2 0,84
volumique
6
1.2 Purification du biogaz
Les techniques permettant de purifier le biogaz sont nombreuses et bien documentées
[6]. Pour éliminer l’eau, on peut agir en phase gazeuse par adsorption ou absorption mais
aussi après condensation de l’eau grâce à un cyclone, un dévésiculeur ou un séparateur
gravitaire. L’élimination du sulfure d’hydrogène est possible dès le digesteur par injection
d’oxygène ou par ajout de chlorure de fer. On peut retirer le sulfure d’hydrogène ou les
composés de silicium par adsorption, absorption, séparation membranaire... L’oxygène et
l’azote peuvent être séparés du biogaz par adsorption ou par séparation membranaire.
Enfin, l’ammoniac peut être absorbé dans des solutions acides ou adsorbé sur charbon
actif. Concernant le dioxyde de carbone, sa capture a été, ces dernières années, l’un des
sujets les plus étudiés dans le domaine du génie chimique. De nombreuses techniques
classiques du génie des procédés sont au point ; elles sont comparées dans le tableau 1.2.
L’absorption physique repose sur la solubilité physique du gaz dans un liquide. Elle
est relativement simple à mettre en place. On peut faire varier la solubilité du dioxyde
de carbone dans le liquide en agissant sur la pression et la température. L’eau est l’un
des solvants utilisés mais il existe aussi de nombreuses formulations commerciales dans
lesquelles le dioxyde de carbone est plus soluble. L’inconvénient majeur est lié à l’énergie
nécessaire à la compression du gaz et à la circulation du liquide.
Dans le cas de l’absorption avec réaction chimique, le gaz réagit avec le li-
quide après être passé en solution, ce qui augmente la vitesse d’absorption par rapport
au procédé purement physique. Ce processus est faiblement sensible à la concentration
d’entrée du gaz à absorber ; c’est pourquoi il est particulièrement adapté au nettoyage
des fumées de centrales thermiques qui contiennent en général moins de 20% de CO2 .
Les solvants chimiques les plus utilisés sont les amines et les solutions basiques. D’autres
méthodes basées sur la réaction chimique ont été décrites dans la littérature ; par exemple,
de la chaux (CaO) issue de déchets industriels peut être utilisée pour précipiter le dioxyde
de carbone et ainsi le stocker sous forme solide [7].
L’adsorption est aussi un procédé éprouvé. Il est généralement mis en place de
manière cyclique (adsorption-désorption), ce qui nécessite plusieurs installations en pa-
rallèle pour un fonctionnement continu. Cependant, il ne requiert pas de produits chi-
miques et ne rejette pas de déchets [8].
La séparation membranaire est une méthode de séparation assez récente mais qui a
déjà fait ses preuves dans le traitement du gaz naturel [9]. Elle est plus simple et compacte
que les techniques sus-citées mais rencontre encore des problèmes de performances dûs à
la détérioration des matériaux membranaires.
Enfin, la séparation par cryogénie est une méthode de distillation qui nécessite
des températures très faibles (jusqu’à -110°C) et des pressions très élevées (typiquement
autour de 80 bar). Etant donné les coûts d’investissement et de fonctionnement (facture
énergétique et entretien), ce procédé est réservé aux très gros débits.
Pour évaluer l’impact environnemental des différents procédés, un groupe de travail
a produit une comparaison basée sur l’analyse de cycle de vie [10]. Selon leur étude,
les procédés qui utilisent des déchets (méthode de précipitation mentionnée plus haut)
ou qui consomment peu de produits chimiques (absorption physique dans l’eau) ont les
impacts environnementaux les plus faibles. A l’inverse, les procédés gourmands en énergie
(adsorption, cryogénie) ont toujours un impact important.
7
Table 1.2 – Techniques d’élimination du dioxyde de carbone. [6]
Méthode Avantages Inconvénients
Efficacité jusqu’à 95%
Séparation de H2 S
Absorption Coûts d’investissement et
physique Simplicité d’opération d’exploitation élevés.
Régénération possible
Pertes en CH4 faibles
(<2%) si le solvant est bien
choisi.
Coûts d’investissement
Efficacité jusqu’à 99%
élevés
Absorption Nécessité de chauffer pour
chimique aux Pertes en CH4
la régénération
amines très faibles (0.1%)
Problèmes de corrosion
Grande capacité
Problèmes de
d’absorption par unité de
décomposition des amines
volume
Régénération possible. Précipitation de sels
Efficacité jusqu’à 98% Coûts d’investissement et
Séparation de H2S d’exploitation élevés.
Adsorption
Technique compacte Faible résistance aux conta-
Peu énergivore minants
Efficacité jusqu’à 95% Pertes en CH4
Séparation
Simple et fiable Faible résistance aux conta-
membranaire
Séparation de H2 S et H2 O minants
Séparation Efficacité jusqu’à 98% Coût énergétique très im-
cryogénique Pas de produits chimiques portant
utilisés
8
1.3 Voies de valorisation choisies
Dans le cadre de la diversification du bouquet énergétique et particulièrement dans
l’optique d’une intégration des énergies renouvelables, le biogaz offre une opportunité
intéressante. Il existe des tarifs réglementés de rachat pour l’électricité issue de la va-
lorisation par co-génération du biogaz ainsi que pour le bio-méthane qui incitent à la
production de biogaz au niveau local. Pour des centrales de production qui ont souvent
une taille modérée, l’un des problèmes rencontrés est la lourdeur et le coût de la technolo-
gie de capture du dioxyde de carbone. Il serait donc pertinent de développer un procédé
intensifié de purification du biogaz relativement aisé à mettre en place. En gardant à
l’esprit les contraintes économiques et environnementales liées à ce type d’innovation, il
apparait intéressant de travailler sur l’intensification du procédé d’absorption physique.
Deux voies parallèles et complémentaires sont choisies pour remplir cet objectif dans la
présente étude : l’absorption dans une émulsion et l’absorption en micro-réacteur (figure
1.1).
D’autre part, la diminution inéluctable des réserves d’énergies fossiles telles que le
pétrole et le gaz naturel rend obligatoire la recherche de nouvelles sources de carbone,
élément indispensable à la production d’un très grand nombre de biens de consommation.
Le biogaz constitue une source de carbone renouvelable et peut, à ce titre, prétendre se
substituer en partie aux hydrocarbures fossiles. De nombreuses méthodes ont déjà été
développées pour la conversion chimique du gaz naturel. La question se pose de savoir si
ces méthodes sont transposables au cas du biogaz. Le présent travail s’efforce d’y répondre
en tenant compte une nouvelle fois des contraintes économiques et environnementales
citées plus haut. Pour les mêmes raisons, la conversion chimique du biogaz (reformage)
sera testée en micro-réacteur.
9
Absorption Absorption
en micro- dans une
mélangeur émulsion
Liquide
Reformage +Q
catalytique en M
canal étroit
10
Deuxième partie
Revue bibliographique
11
Chapitre 2
Absorption
2.1 Processus
Les prochains paragraphes reprennent les bases des opérations d’absorption et nous
permettent d’introduire les concepts et conventions utilisés dans les développements
ultérieurs. L’absorption est une opération unitaire ayant pour but de séparer les consti-
tuants d’un mélange gazeux. En mettant en contact un flux gazeux à traiter avec un
liquide, il est possible d’en éliminer sélectivement certains composants. La séparation
peut se faire par simple absorption physique (solubilité physico-chimique du gaz dans le
liquide) ou par absorption chimique (où le gaz est consommé par réaction avec un consti-
tuant de la phase liquide). Dans l’industrie, les procédés d’absorption sont largement
utilisés, notamment pour les réactions en phase liquide d’hydrogénation, d’oxydation ou
d’halogénation. On les utilise aussi de manière quasi-exclusive pour le lavage de gaz (H2 S,
SO2 , N Ox , CO2 ...)
En supposant que la phase gaz est un mélange idéal (c’est-à-dire que tous les constituants
se comportent comme des gaz parfaits) et que la concentration de gaz dissous reste faible
(de sorte que le coefficient d’activité en phase liquide est égal a 1), on peut en déduire la
loi de Henry :
P ∗ yi = pi = xi ∗ Hix (2.2)
avec :
13
– P (Pa) : pression totale ;
– pi (Pa) : pression partielle du gaz i ;
– xi (-) : fraction molaire du composé i en phase liquide
– yi (-) : fraction molaire du composé i en phase gaz
– Hix (Pa) : constante de Henry pour le constituant i ;
D’autres notations existent pour la solubilité d’un gaz i dans un liquide. Par exemple, en
concentrations :
P ∗ yi = pi = Ci ∗ Hic (2.3)
avec :
– P (Pa) : pression totale ;
– pi (Pa) : pression partielle du gaz i ;
– Ci (mol/m3 ) : concentration molaire de i dans la phase liquide ;
– Hic (m3 .Pa/mol) : constante de Henry pour le constituant i ;
Les valeurs de solubilité sont souvent exprimées en constantes de Henry dans la littérature,
sous forme de corrélations fonctions de la température et de la pression.
Avec :
– J (mol/m2 /s) : densité de flux de matière à travers l’interface,
– kL , kG (m/s) : coefficients de transfert côté liquide et gaz,
– CL,i , CG,i (mol/m3 ) : concentrations à l’interface côté liquide et gaz.
14
Ces coefficients de transfert de film kL et kG dépendent de la nature des fluides et des
caractéristiques de l’écoulement. La mesure directe de ces coefficients n’est cependant pas
possible car les concentrations à l’interface ne sont pas connues. On utilise donc souvent
des coefficients de transfert globaux basés sur des potentiels d’échange différents :
Avec :
– KL , KG (m/s) : coefficients de transfert globaux côté liquide et gaz,
– CL∗ , CG∗ (mol/m3 ) : concentrations fictives en équilibre respectivement avec CG,0 et
CL,0 .
Dans le cas où les solutions sont diluées, la loi de Henry (eq. 2.3) permet d’obtenir une
relation entre les deux types de coefficients de transfert.
1 1 RT
= + c (2.6)
KL kL H kG
1 Hc 1
= + (2.7)
KG kL RT kG
Les termes de cette équation (inverses des coefficients de transfert) sont appelés
résistance au transfert. On constate que si le gaz n’est pas très soluble (H c élevé) et
que la conductance de transfert en phase gazeuse kG est assez élevée, la résistance est
localisée dans le film liquide, ce qui nous permet d’assimiler le coefficient de transfert
global KL au coefficient partiel kL .
Modèles
∂C ∂ 2C
=D∗ (2.9)
∂t ∂z 2
où D (m2 /s) représente la diffusivité du soluté.
15
Modèle du double film de Lewis et Whitman
Le premier modèle de transfert est suggéré par Lewis et Whitman [11] et considère
que la résistance au transfert est localisée à l’intérieur de la couche limite de diffusion.
Il existe donc des films de chaque côté de l’interface d’épaisseur δG dans le gaz et δL
dans le liquide dans lequel le soluté gazeux ou dissous diffuse en régime permanent. A
l’extérieur des films, la convection devient majoritaire et la concentration est considérée
uniforme. On suppose enfin que l’équilibre thermodynamique est atteint au niveau de
l’interface (i.e. les concentrations à l’interface côté gaz et côté liquide sont en équilibre).
Côté liquide, on résout donc le système suivant :
d 2 CL
DL ∗ dz 2 = 0
(2.10)
CL (z = 0) = CL,i
CL (z = δ) = CL,0
avec :
– CL,i la concentration à l’interface ;
– CL,0 la concentration dans le sein du liquide.
On en déduit que
dCL
= constante (2.11)
dz
Or, d’après la première loi de Fick, la densité de flux de matière à l’interface s’écrit ainsi :
dCL DL
J = −DL ∗ = ∗ (CL,i − CL,0 ) (2.12)
dz z=0 δL
dCG DG
J = −DG ∗ =− ∗ (CG,0 − CG,i ) (2.13)
dz z=0 δG
On identifie les coefficients de transfert qui sont directement ici proportionnels aux coef-
ficients de diffusion.
DL
kL = (2.14)
δL
DG
kG = (2.15)
δG
D’après ce modèle, dC
dz
L
est donc constant dans le film de transfert, ce qui suppose les
profils de concentration linéaires suivants :
16
Gaz Liquide
δG δL
C
G
CG,i
CL,i
CL
∂ 2 CL
∂CL
DL ∗ =
∂z 2 ∂t
CL (t = 0, z > 0) = CL,0 (2.16)
CL (t > 0, z = 0) = CL,i
CL (t > 0, z → ∞) = CL,0
√z
CL,i − CL z 2
Z
2 DL t
= erf √ =√ exp(−z 2 )dz (2.17)
CL,i − CL,0 2 DL t π 0
r
dCL DL
J(t) = −DL ∗ =2 (CL,i − CL ) (2.18)
dz z=0 πt
τ
r
J(τ ) 1 DL
Z
kL = = J(t)dt = 2 (2.19)
CL,i − CL CL,i − CL 0 πτ
√
On note que le coefficient de transfert liquide kL est ici proportionnel à DL . Le modèle
donne les profils de concentration suivants :
17
Gaz Liquide
δG
C
G
C
G,i
t
CL,i
Malgré des approches différentes, les trois modèles donnent des résultats sensiblement
similaires. La simplicité du modèle du double film explique que son utilisation soit de loin
la plus fréquente.
18
Gaz traité Gaz séparé
Gaz à traiter
Figure 2.4 – Schéma simplifié d’un procédé de traitement des gaz par absorption phy-
sique (régénération par détente).
Le gaz à traiter est injecté dans le bas du réacteur et rencontre le solvant qui circule à
contre-courant. Pour augmenter la solubilité du gaz, la colonne fonctionne sous pression.
En sortie, on récupère le gaz épuré tandis que le solvant chargé de soluté est évacué
pour être envoyé dans une section de régénération. La régénération du solvant se fait
généralement en déplacant l’équilibre de solubilisation par une détente dans un ballon
”flash” ou un chauffage du solvant. On peut aussi faire circuler un gaz inerte dans le
solvant usé (strippage à l’azote) avec l’inconvénient de diluer le gaz capturé.
Les solvants fréquemment utilisés sont décrits dans le tableau 2.1. En tant que solvant
pour le dioxyde de carbone, l’eau est peu adaptée, même à des températures élevées mais
reste le solvant le moins cher. Le méthanol est très volatil et nécessite donc un appoint
régulier ; de plus son affinité pour le CO2 diminue très rapidement si la température
aumgente (il est donc utilisé à des températures de l’ordre de -40°C dans le procédé
Rectisol). Le DMPEG (dimethyl polyéthylène glycol) devient quant à lui visqueux aux
faibles températures ce qui limite la plage des conditions opératoires possibles pour ne
pas nuire au transfert de matière ou augmenter le travail des pompes de recirculation.
Un type de solvant alternatif a récemment été proposé : les liquides ioniques. Certains
de ces sels possédant une température de fusion très faible ont une importante affinité
19
pour le CO2 . Des auteurs [18] ont d’ailleurs proposé de les utiliser pour purifier le biogaz.
Cependant, cette solubilité élevée est contrebalancée par une viscosité parfois importante
qui freine les processus de transfert.
Gaz Liquide
δG δL
C
G
CG,i
Ccoréactif
CL,i
CL
Si l’on considère le cas simple d’une réaction d’ordre 1 par rapport au réactif gazeux
kR
A et au réactif en phase liquide B (A + B −→ C), les bilans de matière dans le film
liquide s’écrivent ainsi :
2
DA ∗ d CA = kR CA CB
dz 2
(2.24)
d 2 CB
DB ∗
= kR C A C B
dz 2
Les conditions aux limites sont :
z 0 δL
A CA = CA,i -DA S dC
dz
A
= V L kR C A C B
dCB
B dz
=0 -DB S dC
dz
B
= V L kR C A C B
Ces équations n’ont pas de solution analytique mais un réarrangement (usant du fait
que kL = DδLL ) fait apparaı̂tre un paramètre important pour l’accélération chimique de
20
l’absorption :
k R C B DA
Ha2 = (2.25)
kL 2
Le critère de Hatta Ha compare la vitesse de réaction à la vitesse de diffusion. Ainsi,
s’il est faible (Ha<0,3), la réaction a lieu uniquement à l’extérieur du film liquide et la
rétention liquide est le facteur déterminant pour l’absorption. A l’inverse, s’il est élevé
(Ha>3), la réaction prend place uniquement dans le film et il est important de créer
un maximum d’aire interfaciale. Dans les cas intermédiaires (0,3 < Ha < 3) la réaction
démarre dans le film et se poursuit en dehors.
Gaz à traiter
Rebouilleur
Figure 2.6 – Schéma simplifié d’un procédé de traitement des gaz par absorption chi-
mique (régénération par strippage).
De la même manière qu’en absorption physique, le gaz à traiter est injecté dans le bas
du réacteur et réagit avec le solvant qui circule à contre-courant. En sortie, on récupère
le gaz épuré tandis que le solvant chargé de soluté est évacué pour être envoyé dans
une section de régénération. Il y circule à contre-courant d’un courant de vapeur chaud
généré par un rebouilleur. La chaleur permet la rupture des liaisons chimiques retenant
le dioxyde de carbone. Les solvants fréquemment utilisés sont décrits dans le tableau 2.2.
Les ordres de grandeur des chaleurs d’absorption rassemblées dans le tableau peuvent
être comparées car elles sont obtenues à des charges similaires d’environ 0,5 mol de CO2
21
Table 2.2 – Solvants utilisés pour l’absorption chimique du CO2 .
Carbonate de
N H3 (2.5%
Solvant MEA (30% mass.) potassium (40%
mass.)
mass.)
Vitesse d’absorption Elevée Moyenne Faible
Solubilité à 60 °C
sous 0,1 atm 0,5 [19] - 0,4 [20]
(molCO2 /molSolution)
Chaleur d’absorption
à 298 K et 1 bar 90 [21] 70 [22] 20 [20]
(kJ/molCO2 )
Précipitation
Dégradation en
aux
Pertes/Dégradation présence de O2 , CO2 , Très volatil
concentrations
SOx
élevées
par mol de solvant. La MEA (monoéthanolamine) est le solvant le plus utilisé mais la
chaleur nécessaire à sa régénération rend le coût de la séparation rédhibitoire dans le cas
du traitement des fumées de centrale thermique.
2.2 Procédés
Le transfert se fait par diffusion à travers l’interface qui sépare une bulle de gaz du
milieu liquide continu qui l’entoure. Il est donc avantageux de produire le plus de surface
de contact possible entre le le gaz et le liquide. Ainsi, diverses technologies sont appliquées
au transfert de matière gaz/liquide :
– les colonnes à bulles ou les cuves agitées : où le gaz est injecté en bas du réacteur et
dispersé (par agitation mécanique dans le cas des cuves agitées) en bulles les plus
fines possibles pour augmenter la surface de contact entre liquide et gaz ;
– les colonnes à garnissage : où le liquide s’écoule en général par gravité à contre-
courant du gaz sur un garnissage qui permet d’augmenter la surface de contact
entre liquide et gaz ;
– les colonnes à plateaux : où le liquide s’écoule par gravité à contre-courant du gaz
sur des plateaux perforés et forme de minces couches liquides où les bulles de gaz
se dispersent ;
– les colonnes à pulvérisation : où le liquide est pulvérisé en gouttelettes et mis en
contact avec le gaz à contre-courant.
Le coefficient volumétrique de transfert kL a est utilisé pour évaluer la performance de
l’opération de transfert de matière gaz-liquide. Le tableau 2.3 rassemble les données sur
les réacteurs traditionnellement utilisés.
22
Table 2.3 – Ordres de grandeur de kL et a pour des contacteurs gaz-liquide connus. [23]
Coefficient de
Aire interfaciale
Type de réacteur transfert côté liquide kL a (s-1 )
a (m2 /m3 )
kL (m/s)
Colonne à bulle 5.10−3 - 6.10−2 10−4 - 4.10−4 5.10−3 - 1,2.10−1
Cuve agitée 1.10−2 - 2.10−1 3.10−5 - 4.10−4 3.10−3 - 8.10−1
Colonne à garnissage 1.10−3 - 3,5.10−2 4.10−5 - 2.10−4 4.10−3 - 1
Colonne à plateau 1,5.10−2 - 6.10−1 3.10−4 - 1.10−3 5,5.10−2 - 6.10−1
Colonne à
1.10−3 - 1.10−2 5.10−5 - 1,5.10−4
pulvérisation
23
flux peuvent simplement converger vers le micro-canal (jonction en T ou en Y) mais il
est aussi possible de mettre en place des étapes supplémentaires de mélange (division et
recombinaison, injection de multiples flux au lieu d’un seul...). Nous allons passer en revue
un certain nombre de micro-réacteurs et évaluer leur performance en terme de transfert
de matière à travers l’exemple de l’absorption de CO2 .
Circulation gaz
Sortie En
tré
e liqu
gaz
ide
Entrée
gaz
Sortie
Circulation liquide
liquide
Zanfir et al. [26] ont étudié l’absorption de CO2 dans un réacteur à film tombant (voir
figure 2.7) dans lequel le liquide (une solution de soude) est distribué dans plusieurs micro-
canaux. Un modèle à deux dimensions est développé pour simuler le réacteur. Ce modèle
fournit des résultats comparables à ceux des expériences pour les faibles concentrations
de soude et indique que le dioxyde de carbone est entièrement consommé à proximité de
l’interface et n’atteint pas l’autre extrémité du film liquide, ce qui tend à montrer que
c’est dans la phase liquide qu’est localisée la résistance au transfert. La conversion du
dioxyde de carbone atteint des valeurs importantes pour des vitesses de gaz faibles (temps
de passage important). Néanmoins, lorsque l’épaisseur de la chambre de circulation du
gaz est réduite, le gaz atteint l’interface même si sa vitesse est élevée.
Zhang et al. [27] ont étudié l’absorption physique du CO2 dans un réacteur similiaire.
En l’absence de gaz, ils ont été en mesure d’observer trois types d’écoulement selon le
débit liquide. C’est uniquement lorsque le débit liquide est suffisamment élevé que le
film recouvre la totalité du canal. Ce débit minimum est influencé par les propriétés
24
physico-chimiques du liquide. En absorption physique, le liquide sortant est conduit dans
une solution de soude qui est ensuite titrée à l’acide chlorhydrique. A partir de cette
concentration, ils ont obtenu des valeurs de kL de l’ordre de 10−4 m/s. La viscosité du
liquide est modifiée par l’ajout d’éthylène glycol et son augmentation semble réduire le
coefficient de transfert (à travers une diminution de la diffusivité).
La simulation de micro-réacteur à film tombant a montré que la dispersion axiale
n’était pas négligeable mais pouvait être réduite par l’ajout de plateaux sur le trajet du
liquide [28]. Des valeurs de kL a supérieures à l’unité sont rapportées pour des réactions
d’hydrogénation.
Micro-réacteurs à mailles
L’interface est ici créée par un réseau de mailles situé entre le flux gazeux et le flux
liquide. Dans de nombreux cas, il est possible de déterminer, pour chaque phase, des
intervalles de pression qui permettent de maintenir une interface stable et éviter l’entrai-
nement d’une phase dans l’autre [28].
Constantinou [29] a étudié l’absorption du dioxyde de carbone dans une solution de
soude dans ce type de réacteur (voir figure 2.8).
Les résultats expérimentaux sont comparés à ceux obtenus en utilisant un modèle
pseudo-homogène et un modèle plus réaliste où les bilans sont réalisés sur les différentes
phases. Le pourcentage de CO2 séparé augmente avec le débit de liquide car la concen-
tration moyenne de soude est plus élevée. L’absorption est en revanche ralentie lorsque le
débit de gaz augmente car le temps de passage diminue. L’auteur a trouvé la résistance
la plus importante dans le maillage, le pourcentage de CO2 récupéré augmentant avec
l’ouverture du maillage.
25
Sortie
gaz
Entrée
gaz
Joint
Maillage
Joint
Sortie
liquide
Entrée
liquide
26
Figure 2.9 – Schéma des différents principes de mélange possibles. Source : IMM.
Micro-canal
Les écoulements en micro-canaux sont régis par des phénomènes différents des écoulements
en conduites de taille macroscopique. Premièrement, l’importance des forces de surface
vis-à-vis des forces volumiques augmente de manière significative. Deuxièmement, les
nombres de Reynolds sont généralement faibles et le régime est le plus souvent laminaire
(les forces visqueuses l’emportant sur les forces inertielles). Enfin, les phénomènes liés
aux parois du canal ne sont plus négligeables et leur texture et mouillabilité influe sur
l’écoulement.
Des observations visuelles ont montré que les écoulements diphasiques en micro-
canaux prennent des formes similaires à celles des mêmes écoulements observés en macro-
canaux. Comme on l’a évoqué plus haut, les transitions entre les différents régimes
d’écoulement sont tributaires des propriétés physico-chimiques du système. On peut ce-
pendant représenter un schéma global dans un espace dont les axes sont les vitesses de
chacune des phases (figure 2.10).
27
UL
UG
Régime dominé Régime Régime dominé
par les forces de intermédiaire par les forces inertielles
tension de surface
A faible débit de gaz, ce sont les forces de tension de surface qui sont prépondérantes.
Lorsque la vitesse du liquide est significativement plus élevée que celle du gaz un écoulement
dit ≪ à bulles ≫ (≪ bubbly flow ≫) se forme. On y observe des bulles de gaz de taille
inférieure aux dimensions du canal. A paramètres fixés, c’est la forme de l’injecteur de
gaz qui décide de la taille des bulles. Lorsque les deux débits sont faibles, on observe
un écoulement à bouchons dit ≪ de Taylor ≫ (aussi appelé ≪ slug flow ≫ ou ≪ intermit-
tent flow ≫) qui se caractérise par l’alternance de bulles allongées de diamètre équivalent
supérieur aux dimensions du canal et de ”bouchons” de liquide. La disposition des deux
phases implique que la dispersion axiale est faible.
Parmi ces différents régimes c’est l’écoulement annulaire qui génère l’aire interfaciale la
plus importante. Cependant, c’est le régime de Taylor qui a été le plus étudié, notamment
parce qu’il permet la plus grande variation des conditions opératoires (voir figure 2.10).
28
LB LS
UB
transfert de matière
Figure 2.11 – Représentation schématique du transfert de matière en écoulement de
Taylor.
29
que le critère suivant doit être respecté pour éviter ce phénomène :
LB δ2
<< (2.26)
UB D
où D est la diffusivité du gaz dans le liquide dans le cas d’une absorption physique et la
diffusivité du co-réactif dans le cas d’une absorption chimique avec réaction instantanée.
Yue et al. [36] ont étudié l’absorption du dioxyde de carbone dans un micro-canal.
Pour l’absorption physique, ils ont observé que le coefficient volumétrique de transfert
kL a augmente avec les débits dans les deux régimes étudiés : Taylor et annulaire et ont
développé une corrélation du nombre de Sherwood en fonction de ReG , ReL et ScL dans
ces deux cas. Par absorption chimique dans un tampon de carbonates, ils ont trouvé une
tendance identique et une valeur de kL a légèrement plus faible à cause de la plus faible
diffusivité du CO2 dans le tampon. L’absorption de CO2 dans une solution de soude a
permis de déterminer l’aire interfaciale et de montrer qu’elle augmente avec le débit de
gaz via l’augmentation de la longueur des bulles. La valeur de kL déduite par division
augmente avec le débit de liquide.
Micro-canal
Mélangeur statique
Venturi
Type de contacteur gaz-liquide
Canal
Colonne à garnissage
Cuve agitée
Colonne à bulle
Réacteur à écoulement Taylor-Couette
kLa (s-1)
Micro-canal
Venturi
Canal
Cuve agitée
Colonne à garnissage
Réacteur à écoulement Taylor-Couette
Mélangeur statique
Colonne à bulle
a (m-1)
30
2.4 Absorption dans un mélange diphasique
Les systèmes polyphasiques sont présents dans de nombreux secteurs industriels et à
différentes étapes d’un procédé. Si de nombreuses études ont été consacrées aux systèmes
gaz-liquide et gaz-liquide-solide, le cas spécifique des systèmes gaz-liquide-liquide a en
revanche été étudié peu malgré son importance dans le domaine industriel. Ces systèmes
sont fréquents dans les bioprocédés mais aussi dans certains procédés d’alkylation [38].
Dans les applications de type biochimique, des hydrocarbures sont parfois dispersés dans
l’eau pour fournir un substrat à des bactéries aérobies [39]. Dans certains cas, une seconde
phase immiscible est ajoutée pour des besoins réactionnels, par exemple l’extraction in
situ d’un produit pour déplacer l’équilibre et augmenter la conversion. Dans d’autres
cas, il s’agit uniquement d’améliorer les conditions de transfert de matière et ce sont
ces situations que nous étudierons exclusivement. Que ce soit par l’ajout d’une seconde
phase liquide immiscible ou d’une phase solide dispersée, les caractéristiques d’un système
gaz-liquide précis peuvent varier de manière importante.
L’addition d’une phase dispersée modifie les propriétés physico-chimiques de la solu-
tion (densité, viscosité, tension interfaciale, solubilité et diffusivité des gaz) et a donc des
effets sur l’évolution des bulles de gaz injectées (caractéristiques de l’interface gaz-liquide,
coefficients de transfert...). Dans le cas de l’absorption d’un gaz dans une émulsion, il
existe a priori deux voies possibles pour l’absorption du soluté au passage de l’interface
gaz-liquide :
– transfert en série : passage du soluté dans l’eau, puis dans la phase dispersée,
– transfert en parallèle : passage simultané du soluté dans l’eau et dans la phase
dispersée.
L’observation de l’une ou l’autre de ces voies est fortement conditionnée par la dis-
tribution de la phase dispersée à l’interface gaz-liquide. Ainsi, plusieurs approches sont
mentionnées dans la littérature pour rendre compte de ces possibilités et expliquer la
variation des caractéristiques de transfert :
– Effet navette (fig. 2.13) : si les gouttelettes de phase dispersée sont susceptibles de se
placer dans la couche limite, alors elles peuvent se charger de soluté et le transporter
de l’interface vers la phase continue augmentant ainsi la vitesse de transfert ;
G L
– Complexe gaz-organique (fig. 2.14) : la phase dispersée entre en contact direct avec
le gaz [40] et peut faire augmenter ou faire baisser la vitesse de transfert selon
31
l’affinité du gaz pour la phase organique.
2.4.1 Variables
Fraction de phase dispersée (Φ)
Le rapport entre le volume de phase dispersée et le volume total de solution est le
paramètre de base de la formulation d’une émulsion. Il joue aussi un rôle crucial dans le
comportement d’absorption du système.
Solubilité (s)
La solubilité du gaz dans l’émulsion détermine la quantité maximale de gaz que l’on
peut transférer dans le liquide. D’après Littel et al. (1994) [41], la solubilité d’un gaz dans
une émulsion peut être représentée de façon assez précise par :
On constate ainsi l’intérêt de l’utilisation d’une phase dispersée possédant une forte affi-
nité pour le gaz). On utilise ainsi souvent la solubilité relative (ou coefficient de partage)
d’un solvant par rapport à l’eau :
shuile
m= (2.28)
seau
32
Diffusivité (D)
La diffusivité du soluté dans les phases liquides joue un rôle important dans le transfert
du gaz, notamment à proximité de l’interface où seule la diffusion permet son déplacement.
Comme pour la solubilité, on peut définir une diffusivité relative DR :
Dhuile
DR = (2.29)
Deau
Selon les mécanismes de transfert envisagés (contact ou non entre la phase dispersée et
le gaz), la valeur de DR peut avoir une influence plus ou moins importante sur la vitesse
de transfert.
Propriétés interfaciales
Les propriétés d’interface de l’émulsion sont susceptibles de jouer un rôle sur l’interface
gaz-liquide (taille des bulles, vitesse de coalescence/rupture, résistance au transfert). Cer-
tains auteurs ([39],[42]) mettent en relation les propriétés physico-chimiques des émulsions
avec les différents mécanismes de transfert possibles. Ainsi, un coefficient d’étalement (cf
equation 2.30) supérieur à zéro impliquerait que le contact entre le gaz et la phase dis-
persée est possible et le transfert pourrait donc avoir lieu en parallèle. Au contraire, si
cette valeur est négative, la phase dispersée n’entrerait pas en contact avec le gaz et le
transfert serait obligatoirement en série.
33
– La taille des bulles diminue et l’aire interfaciale augmente ;
– La valeur de kL a en fonction de la concentration de produits organiques prend en
compte ces deux effets antagonistes et présente une allure similaire à celle de kL
seul.
Tous les produits organiques utilisés sont des tensio-actifs qui agissent sur l’interface
gaz-liquide. Leur présence rigidifie l’interface et diminue la circulation du liquide dans la
couche limite. Elle permet néanmoins de stabiliser de plus petites bulles de gaz, ce qui a
pour effet d’augmenter l’aire interfaciale.
Yoshida et al. [39] obtiennent des valeurs de kL a pour l’absorption d’oxygène dans
différentes émulsions en cuve agitée. Selon la nature de la phase huileuse, ils observent
k aΦ6=0
deux types de conséquences sur le coefficient de transfert. Le tracé du rapport kLL aΦ=0 en
fonction de la fraction d’émulsion permet de visualiser ces effets (figure 2.16).
Yoshida et al (Kerosène)
Yoshida et al. (Toluene)
2,5 Yoshida et al. (acide oléique)
Yoshida et al. (Toluene)
2
kL a / kL a0
1,5
0,5
0
0 0,05 0,1 0,15 0,2
Fraction de phase dispersée
On constate :
– une diminution de kL a pour l’ensemble des fractions de phase dispersée testées (de
Φ = 0 à Φ = 0,2) pour la paraffine et le kérosène ;
– une diminution de kL a aux fractions très faibles (Φ < 0,02) puis une augmentation
pour le toluène et l’acide oléique.
Certaines phases organiques permettent donc une amélioration des conditions de trans-
fert tandis que d’autres les affaiblissent. Les auteurs utilisent le coefficient d’étalement
pour expliquer ces deux types de comportement : le toluène et l’acide oléique ont un coef-
ficient d’étalement positif, ce qui signifie que s’ils rencontrent une bulle de gaz, ils auront
tendance à s’y étaler pour former un film autour de la bulle. Au contraire, la paraffine
et le kérosène, qui présentent un coefficient d’étalement négatif, ne formeraient que des
34
gouttelettes à la surface des bulles, réduisant la coalescence de ces dernières mais aussi le
renouvellement du liquide à la surface de la bulle.
Linek et Benes [42] présentent une étude similaire à celle de Yoshida et al. Le montage
utilisé permet d’évaluer l’aire interfaciale de contact gaz-liquide et d’obtenir des valeurs
de kL (figure 2.17). D’autre part, les expériences couvrent toute la gamme des fractions
volumiques : de l’eau pure à l’huile pure.
1.5
1.25
1
kL/k0L
0.5
0
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
Fraction de phase dispersée
35
– l’effet d’intensification diminue lorsque le transfert est accéléré par la réaction chi-
mique.
Les auteurs concluent que pour observer une intensification notable du transfert, les
gouttelettes doivent avoir un diamètre inférieur à l’épaisseur du film de diffusion et le gaz
doit présenter une forte affinité pour la phase dispersée.
Des résultats pour l’absorption de CO2 et de propène dans une émulsion eau-toluène
sont présentés par Littel et al. [41]. Un modèle est développé pour évaluer le facteur
d’intensification. Les deux hypothèses principales sont :
– la phase dispersée n’est jamais en contact direct avec le gaz ;
– les phases continue et dispersée sont à l’équilibre.
Le modèle est testé à l’aide de deux expériences. Une expérience d’absorption en cuve
agitée avec une interface plane et une expérience en film laminaire. Seuls les résultats de
la deuxième expérience s’accordent avec le modèle. Les facteurs d’intensification obtenus
lors de la première expérience sont plus élevés que ceux obtenus par le modèle et, à
fraction de phase dispersée constante, ils diminuent lorsque l’agitation augmente. Les
auteurs expliquent ces phénomènes par la formation à la surface de la cuve agitée d’un
film de toluène qui n’a cependant pas été observé directement.
Van Ede et al. [45] étudient l’absorption d’oxygène dans une émulsion eau-octène.
Un modèle basé sur la théorie du film prend en compte la position et la quantité de
phase dispersée dans le film à l’interface gaz-liquide (Film Variable Holdup model). Le
modèle représente bien l’expérience (ainsi que les données de [41] et[44]) malgré deux
paramètres non mesurables. L’article pointe la nécessité pour aller plus loin d’obtenir des
informations sur la position et la distribution de tailles gouttelettes à l’interface.
Dans la thèse de A.H.G. Cents [46], on trouve une étude de l’absorption de CO2 dans
des émulsions eau-toluène/dodécane/heptane/1-octanol. Des valeurs de kL a sont obtenues
par la méthode de ≪ Danckwerts plot ≫. Celles-ci indiquent une intensification dans le
cas du toluène et de l’octanol mais pas pour le dodécane et l’heptane. L’auteur explique
ces observations par la présence ou l’absence de gouttelettes de phase dispersée dans
la zone de transfert. On peut établir ici un parallèle avec l’interprétation du coefficient
d’étalement : en effet, le toluène présente un coefficient d’étalement positif, tandis que
celui des alcanes est négatif. Par la suite, un modèle est développé pour une particule
unique dans la zone de transfert. L’influence des paramètres suivants est étudiée :
– la position de la particule,
– la capacité (coefficient de solubilité relatif sR et de diffusivité relative DR )
La conclusion de l’étude est que la distance de la particule à l’interface (L) représentée
par L/δ (δ : épaisseur de la couche limite) est un facteur très influent et que seules les
particules réellement proches de l’interface jouent un rôle dans le transfert.
Dumont et Delmas [47] présentent une revue des différentes études existantes. Les
différents paramètres affectés par la présence d’une phase liquide dispersée sont exa-
minés. Les mécanismes de transfert dans la couche limite (transfert en série, transfert en
parallèle) sont mis en relation avec le coefficient d’étalement sans qu’il soit possible de
conclure définitivement sur l’influence de ce paramètre. L’effet de l’addition sur kL a (et
de même sur kL et sur a séparément) n’est pas clair puisque les différentes études donnent
36
des résultats contradictoires. Même dans le groupe des huiles à coefficient d’étalement po-
sitif, la tendance n’est pas toujours la même. Les auteurs remarquent que le mécanisme
le plus étudié dans la littérature est l’effet navette. Ils notent aussi que dans les études
où des valeurs expérimentales sont publiées, ce mécanisme sous-estime d’environ 20 %
le facteur d’intensification. Enfin, une classification des modèles développés pour rendre
compte des phénomènes d’intensification est présentée.
37
38
Chapitre 3
Reformage
3.1 Introduction
La conversion directe du méthane (qu’il provienne du gaz naturel ou du biogaz) en
molécules d’intérêt pour l’industrie chimique est difficile à réaliser, principalement à cause
de l’importance de l’énergie de la liaison CH3 −H (439,3 kJ/mol). Les études de conversion
directes en restent au stade expérimental ([57]). Au contraire, la conversion indirecte est
déjà mise en place au niveau industriel. Elle consiste à produire du gaz de synthèse
(mélange de CO et de H2 ) qui est un précurseur pour une grande partie de la chimie
organique industrielle. Il est notamment utilisé pour la production de méthanol et de
carburants liquides via la synthèse Fischer-Tropsch. Le tableau 3.1 établit la liste des
différents procédés existants.
39
Vapeur Eau de
refroidis- Gaz de
sement synthèse
Carburant
Condensat
Air
Gaz de combustion
Vapeur
Vapeur Désulfuration
Gaz naturel
3.2 Procédés
3.2.1 Reformage à la vapeur
C’est le procédé le plus mature pour la conversion chimique du méthane et il est à
l’origine de la majeure partie du dihydrogène produit industriellement. Un schéma de ce
type de procédé est proposé en figure 3.1.
Réactions principales
0
(1) CH4 + H2 O = CO + 3H2 (∆H298 = 206 kJ.mol−1 )
0
(2) CO + H2 O = CO2 + H2 (∆H298 = −41 kJ.mol−1 )
40
Conversion du méthane , %
Le ratio entre débit de vapeur d’eau et de méthane (S/C) est déterminant comme le
montre la figure 3.2. Ce comportement est probablement dû au rôle prépondérant que
joue l’oxygène dans le mécanisme des réactions. Dans la pratique, les unités de production
d’hydrogène utilisent souvent un ratio S/C faible pour réduire les débits et donc les tailles
et les coûts des équipements.
Réacteur
41
Mécanismes
Plusieurs auteurs ont proposé des mécanismes réactionnels. Dans chaque mécanisme pro-
posé, on retrouve le schéma global suivant :
– dissociation du méthane jusqu’à l’obtention sur le catalyseur de carbone et d’hy-
drogène,
– dissociation de l’eau,
– réaction du carbone et de l’oxygène pour former CO (généralement considérée
comme l’étape cinétiquement déterminante),
– recombinaison de l’hydrogène pour former H2 .
Rostrup-Nielsen [65] a déterminé que les catalyseurs les plus actifs sont le ruthénium
(Ru) et le rhodium (Rh) suivis du nickel (Ni), de l’irridium (Ir), du platine (Pt) et du
palladium (Pd).
Obstacles
Les principaux obstacles au bon fonctionnement de ce procédé sont associés à la
désactivation du catalyseur :
– l’empoisonnement ; le soufre est un poison pour les catalyseurs métalliques et no-
tamment pour le nickel. La présence de H2 S entraine une diminution de la surface
active du métal par adsorption. D’autres composés sont susceptibles d’enrayer la
réaction notamment la silice et certains métaux. [66]
H2 S + N i → N i − S + H2
– le frittage ; il s’agit du phénomène de croissance de particules de nickel et la réduction
de leur activité par perte de surface. Ce processus est encouragé par de fortes
températures et une pression partielle de vapeur élevée [67].
– la formation de carbone. Dans le tableau 3.2 sont listées les réactions susceptibles
de former du carbone.
42
3.2.2 Reformage au CO2
Procédé
L’intérêt de ce procédé récent est d’utiliser des gaz à effet de serre pour produire des
molécules utiles pour les industries chimiques.
0
(3) CH4 + CO2 = 2CO + 2H2 (∆H298 = 247 kJ.mol−1 )
0
(-2) CO2 + H2 = CO + H2 O (∆H298 = 41 kJ.mol−1 )
Température (K)
43
Conversion du dioxyde de carbone à l'équilibre (%)
Température (K)
Mécanisme
La réaction de réformage au CO2 est favorisée à des températures supérieures ou
égales à 973 K. Au dessus de cette température, on peut atteindre une conversion quasi-
complète de CH4 et CO2 si l’on utilise un catalyseur suffisamment actif. Néanmoins, à
cette température la réaction de craquage du méthane, est elle, aussi favorisée. Cette
réaction produit du carbone solide susceptible de couvrir les sites actifs du catalyseur
et conduire à sa désactivation. C’est pourquoi un catalyseur adapté doit accélérer la
réaction principale mais retarder certaines réactions annexes. Pour cela, il est nécessaire
de s’intéresser aux mécanismes de ces différentes réactions. Les réactions impliquées sont
présentées dans le tableau 3.3
44
Table 3.3 – Réaction élémentaires à la surface du catalyseur [73].
Adsorption et dissociation du méthane
∗
CH4 + = CH4∗
CH4 ∗ + (4 − x)∗ = CHx∗ + (4 − x)H ∗
2H ∗ = H2 + 2 ∗
Adsorption et dissociation du dioxyde de carbone
∗
CO2 + = CO2∗
CO2∗ + ∗
= CO∗ + O∗
CO2∗ + H∗ = CO∗ + OH ∗
Formation des ions hydroxyles et de l’eau
∗
O + H∗ = OH ∗ + ∗
OH ∗ + H∗ = H2 O + 2 ∗
Formation et désorption de CO de H2
CHx∗ + OH ∗ = CHx O∗ + H∗
CHx∗ + O∗ = CHx O∗
CHx O∗ = CO∗ + x/2H x
C∗ + OH ∗ = CO∗ + H∗
CO∗ = ∗
+ CO
∗ ∗
2H = H2 + 2∗
support est d’autant plus crucial que c’est à l’interface entre ce dernier et les particules de
métal que l’adsorption de CO2 est la plus probable. L’utilisation d’oxydes de terres rares
(Ce, La) dans les catalyseurs est en partie justifiée par leur importante capacité d’ad-
sorption et d’activation du dioxyde de carbone. Cette étape est généralement considérée
comme étant rapide et atteignant l’équilibre thermodynamique [75].
45
Figure 3.5 – Etapes réactionnelles pour le reformage au CO2 du méthane. (a) Adsorption
et dissociation de CH4 et CO2 sur le métal ou à l’interface métal-support ; (b) Désorption
de CO et H2 (étapes rapides) ; (c) Formation des composés hydroxyles ; (d) Les espèces
oxygénées réagissent avec les espèces de type méthyl précédemment déshydrogénées.
Réactions de surface
La décomposition du méthane et du dioxyde de carbone adsorbés produit de l’hy-
drogène, des composés CHx , du monoxyde de carbone et de l’oxygène. D’après [74], la
réaction de Water Gas Shift est proche de l’équilibre, ce qui suppose que les réactions
de surface impliquées soient rapides. L’hydrogène et l’oxygène adsorbés sont susceptibles
de migrer pour former les composés OH ∗ et CHx∗ O. La décomposition de ces derniers
pour former CO et H2 est considérée comme l’étape cinétiquement déterminante [76].
Par ailleurs, si la vitesse d’oxydation des CHx est faible devant leur vitesse de formation,
l’accumulation de carbone adsorbé risque de conduire à la désactivation du catalyseur.
Obstacles
La réaction peut être mise en place dans un réacteur de type lit-fixe avec l’inconvénient
majeur de la désactivation du catalyseur par formation de coke au cours de la réaction.
Des alternatives en lit fluidisé ont été proposées et conduisent à de meilleurs performances
en terme de production de syngas et une moindre désactivation du catalyseur (les forts
gradients de température induisent la formation de coke [77]).
La production de coke est ici liée à la décomposition simultanée de CH4 et CO2 . Au
delà de 950K, elle est principalement due à la réaction de décomposition du méthane,
tandis que pour des températures plus faibles, c’est la réaction de Boudouard qui est
prédominante [78]. En l’absence d’espèces oxygénées permettant de poursuivre la chaine
de réactions de surface décrite précédemment (tableau 3.3), ces dépôts de carbone peuvent
grossir sous la forme d’une couche qui couvre la particule métallique ou sous la forme
d’un filament. La désactivation semble augmenter avec la taille des particules de métal
46
mais il n’y a pas de consensus sur la taille critique. Choudhary et al. [70] ont comparé
différents catalyseurs sur leurs performances et sur leur résistance à la déposition de coke.
Il s’avère que la déposition de coke est plus rapide sur les catalyseurs à base de nickel
que lorsque ceux-ci contiennent des métaux nobles. En effet, sur les catalyseurs à base
de nickel, le carbone a la possibilité de rester en surface du métal ou de diffuser vers
l’intérieur de la particule où il peut rejoindre d’autres atomes de carbone et former des
couches successives de graphène. Les métaux nobles opposent au passage du carbone
une résistance plus grande et déplacent l’équilibre de décomposition du carbone, ce qui
explique qu’ils soient moins sujets à la formation de coke.
D’autre part, Oyama et al. [79] montrent que lorsque la pression est importante, la
réaction inverse de Water-Gas-Shift devient prépondérante et transforme l’hydrogène en
eau.
0
(-2) CO2 + H2 = CO + H2 O (∆H298 = 41 kJ.mol−1 )
Procédé
Cette réaction n’est pas la seule qui soit possible dans ce système et elle n’est pas
toujours majoritaire. En fonction des conditions, notamment selon le rapport CH4 /O2 ,
on peut donc obtenir différents produits en plus du gaz de synthèse. Hu et Ruckenstein
[80] rapportent qu’on peut s’attendre à la formation de CO2 , H2 O et de composés C2 .
Mécanismes
47
CH4
Ox
ydatio
CH np
+1 arti
4
/2 O elle
2 =C
O+
2H 2 CO + H2
CH 4
+2
Oxydation
O2
totale
2
=C
2CO H2
+ 2H
Reformage
CO +
O2
à la vapeur
+2
2O =
et au CO2
H 2O
O2 =
4 + H
4+ C
CH
CH
CH4 + CO2 + H2O
Catalyseur
La réaction peut être réalisée :
– sans catalyseur : pour des raisons cinétiques, la réaction qui produit du gaz de
synthèse par oxydation partielle nécessite des températures élevées, proches de
1000°C. L’exothermicité de la réaction d’oxydation partielle permet de réaliser les
autres réactions de reformage qui sont endothermiques.
– avec catalyseur : les plus performants contiennent des métaux nobles comme le
platine, le rhodium mais leur coût prohibitif encourage plutôt à utiliser le nickel
pour des applications industrielles. Le nickel a le désavantage de catalyser la réaction
de formation de coke. Les pistes d’amélioration des catalyseurs incluent l’utilisation
de nouveaux supports (les supports basiques et interagissant fortement avec les
particules de nickel semblent prometteurs pour limiter la déposition de carbone) et
certains catalyseurs à base de terres rares. [81]
Obstacles
Dans le mécanisme indirect, la réaction de combustion du méthane dégage d’impor-
tantes quantités de chaleur et entraine la fusion du métal du catalyseur qui se sépare de
son support. Pour s’affranchir de ce phénomène, il s’agira d’augmenter l’interaction entre
le catalyseur et son support ou de réaliser la réaction à des températures moins élevées.
Ici encore, les réactions conduisant à la formation de coke sont les suivantes :
48
Oxygen/Air
ou air enrichi
Méthane
et vapeur
Brûleur
Chambre de
combustion
Lit
catalytique
Gaz de synthèse
Réactions
Les réactions à considérer sont les suivantes :
Réacteur
Le flux d’hydrocarbures est prémélangé avec de la vapeur, puis il est injecté dans une
chambre de combustion alimentée en oxygène ou en air enrichi en oxygène. La combustion
chauffe le mélange qui passe ensuite dans un lit catalytique où le vaporeformage a lieu
(voir figure 3.7).
Une solution alternative utilise un réacteur membranaire (Oxygen Membrane Refor-
ming). Le principe en est expliqué sur la figure 3.8. Cette option permet de s’affranchir
49
Figure 3.8 – Principe de l’Oxygen Membrane Reforming. [83]
Catalyseur
Obstacles
50
−∆Hr reff dh Ea
< 1, (3.1)
αRT 2
alors la limitation au transfert de chaleur dans le gaz peut être négligée. Dans l’équation
3.1, ∆Hr est l’enthalpie de la réaction, ref f la vitesse apparente de la réaction, dh le
diamètre hydraulique, Ea l’énergie d’activation, R la constante des gaz parfaits, et T la
température en phase gaz.
La diminution du diamètre hydraulique implique aussi une intensification du transfert
de matière grâce à des temps de diffusion radiale très faibles. Plusieurs critères sont utilisés
dans la littérature pour évaluer l’importance des limitations au transfert. Commenge et al.
[87] utilisent des simulations numériques pour évaluer le rôle des profils de concentrations
axial et radial sur la détermination de constantes cinétiques dans un micro-canal où la
réaction à lieu à la paroi. Leur étude montre que des limitations au transfert de matière
deviennent faibles pour un nombre de Dämkohler inférieur à 0,1.
d2h kr
Da = < 0,1 (3.2)
D
Avec
– kR (s−1 ) : constante de réaction
– D (m2 /s) : coefficient de diffusion
Ces propriétés ont été utilisées par de nombreux groupes de recherche dans le domaine
du génie de la réaction catalytique. On trouve notamment de nombreux travaux sur
le test de nouveaux catalyseurs, l’élucidation de la cinétique des réactions catalytiques
hétérogènes ou l’adaptation de procédés existants.
51
Table 3.4 – Travaux sur le reformage en milli- ou micro-canal dans la littérature.
Auteur Procédé Système Catalyseur
Al-Nakoua et Dry + Ni/Al2 O3 ,
5 x 2 x 185 mm
El-Naas [88] Steam Ni-Ba-Cr/(La2 O3 ,Al2 O3 )
Simsek et al. [89] Steam 0,75 x 4 x 25 mm (Ni, Rh, Ru, Pd) /Al2 O3
Eilers [90] Steam 0,7-1 x 19 x 133,6 mm Pd/FeCrAlY
Ni/MgO, (Ni, Pt,
Izquierdo [91] Steam 0,5 x 0,25 mm
Pd)/Al2 O3
Mbodji et al. [64] Steam 5 x 1,6 x 200 mm Rh/Al2 O3
Karakaya et al. [92] Steam 0,75 x 4 x 20 mm (Ni, Rh, Ru, Pt) /Al2 O3
Cao et al. [93] Steam 0.75 x 9 x 51 mm Rh/(MgO, Al2 O3 )
Zhai et al. [63] Steam 0,4 x 1,8 x 5,5 mm Ni/Al2 O3 /FeCr
O2 +
Simsek et al. [94] 0,75 x 4 x 20 mm Pt-Rh/Al2 O3
Steam
Younes-Metzler et
O2 0.2 x 1,5 x 10 mm Pd/Al2 O3
al. [95]
52
100
90
80
60
50
40
30
20
10
0
(3%Ni+0.15% Ce+0.05% Ca)/Al2O3
(Ni+0.3% Zr)/Al2O3
(Ni+0.3% Ca)/Al2O3
Température (K)
ratio S/C supérieur ou égal à 2,5. Certains de leurs résultats sont présentés dans la figure
3.10. La conversion augmente avec la température quelque soit le système. L’augmenta-
tion du ratio S/C dans l’alimentation favorise aussi la réaction de reformage. Les auteurs
constatent que la conversion du méthane et les vitesses de production de H2 et CO sont
supérieures lorsque le catalyseur est déposé en couche mince à la paroi. Ils associent cette
amélioration à une meilleure gestion du transfert de matière et de chaleur.
Enfin, le dernier paramètre majeur est le temps de passage du gaz dans le réacteur.
On peut le définir de deux manières :
– le temps de passage volumique utilisé pour caractériser les lits fixes.
volume du réacteur
τ= (3.3)
débit volumique des réactif s
masse de catalyseur
τ′ = (3.4)
débit massique des réactif s
Mbodji et al. [64] ont réalisé la réaction de reformage à la vapeur sur un catalyseur
Rh/Al2 O3 dans un réacteur de taille millimétrique. Ils ont observé que la conversion
augmente avec le temps de passage et atteint presque les valeurs d’équilibre pour un
temps de passage de 200 ms dans leur système. Une partie de leurs résultats est présentée
sur la figure 3.11. On peut constater que, toutes choses égales par ailleurs, la conversion
augmente aussi avec la quantité de catalyseur puisqu’on augmente le nombre de sites de
catalyse disponibles.
53
60
40
30
20
10
0
1050
Catalyseur en film
1000
950
Catalyseur en lit fixe
900 3.4 3.5
3.2 3.3
3 3.1
2.8 2.9
850 2.6 2.7
2.5
Température (K)
Temps de passage massique (g.s/m3)
100
90
22.4 mg de catalyseur
Conversion du méthane (%)
80 4mg catalyseur
70
60
50
40
30
20
10
0
1200
1150
1100
1050 0.2
1000 0.05 0.1 0.15
0
Température (K) Temps de passage volumique (s)
54
Figure 3.12 – Composition du gaz produit par reformage au CO2 pour les temps de
passage τ = 16500 h−1 (a) et τ = 27500 h−1 (b). [100]
Les composés présents dans le biogaz se prêtent à la réaction de reformage au CO2 . Ce-
pendant, la composition de base du biogaz ne respecte pas le rapport stœchiométrique de
la réaction, un défaut de dioxyde de carbone aboutit à une faible conversion du méthane
et une production de carbone accrue. A l’inverse, un excès de dioxyde de carbone diminue
le rendement en hydrogène à cause de la réaction inverse de Water Gas Shift mais aug-
mente la résistance envers la formation de carbone par la présence d’espèces oxygénées à
la surface du métal [73]. Lau et al. [100] ont étudié cette réaction sur un catalyseur Pt-Rh
déposé sur un support contenant un mélange d’oxydes (cérium, zirconium et aluminium).
Certains des résultats sont présentés sur la figure 3.12. On constate qu’à température
égale, c’est le temps de passage le plus grand (ie le débit le plus faible) qui assure la
meilleure conversion du méthane à cause du temps de contact entre les réactifs et le
catalyseur.
55
Cas du vaporeformage
Kolbitsch et al. [97] présentent une étude du vaporeformage d’un biogaz synthétique
(60% CH4 et 40% CO2 ) sur un catalyseur de type Ni/(CaO, Al2 O3 ). Cette méthode per-
met d’obtenir un gaz plus riche en hydrogène avec un rendement maximum en hydrogène
autour de 750°C. A cette température, l’augmentation du rapport S/C (vapeur d’eau sur
méthane) améliore légèrement la conversion de CH4 et diminue fortement celle de CO2 .
En effet, l’augmentation de la teneur en eau favorise la réaction de vaporeformage. La
sélectivité pour l’hydrogène (par rapport à CO) augmente aussi avec le rapport S/C. Dans
ces conditions, les auteurs ne remarquent pas de formation de carbone sur le catalyseur.
Effendi et al. [69] ont étudié la réaction de vaporeformage d’un biogaz de composition
CH4 /CO2 = 1,5 à différents ratio S/C dans un réacteur de type lit fixe et un réacteur à lit
fluidisé. En termes de conversion, les performances du second réacteur sont meilleures de
7 à 15 %. Les conclusions sur l’influence de la température et du ratio S/C sont identiques
à celles présentées ci-dessus. L’utilisation d’un réacteur à lit fluidisé permet de résoudre
en partie le problème de formation du carbone. Il introduit néanmoins le problème de la
destruction du catalyseur par attrition.
Izquierdo et al. [102] proposent une étude du reformage par oxydation partielle ca-
talytique, en lit fixe et en micro-réacteur, d’un biogaz synthétique (60 % CH4 et 40 %
CO2 ) sur un catalyseur Ni et un catalyseur Rh-Ni dont les supports Al2 O3 sont dopés à
l’aide de Ce et Zr pour améliorer la résistance à la déposition de carbone. Les conversions
56
obtenues dans le micro-réacteur sont similaires à celles du lit fixe, et même légèrement
inférieures pour le méthane. Cependant les vitesses de réactions y sont supérieures d’un
ordre de grandeur.
57
58
Troisième partie
Matériel et méthodes
59
Chapitre 4
Absorption
4.1 Produits
4.1.1 Biogaz
Pour l’ensemble des expériences, le biogaz est simulé par un mélange des gaz issus de
bouteilles de méthane et de dioxyde de carbone. Les gaz sont fournis par Messer et sont
purs à 99,95% (qualité 3.5). Malgré l’intérêt que représente l’élaboration d’un procédé
intégré, il n’a pas été possible d’assurer au laboratoire une production de biogaz suffisante
pour les expériences. D’autre part, la composition réelle du biogaz est plus complexe.
La composition du mélange est établie à l’aide de deux régulateurs de débit massique
Brooks (modèle SLA5850) contrôlés par un coffret d’affichage et de régulation Brooks
(modèle 0254). Les débitmètres ont été nettoyés et ré-étalonnés une fois par an par le four-
nisseur Serv’instrumentation. Les gammes de débit pour les expériences d’absorption en
cuve agitée et en micro-mélangeur sont respectivement de 0-100 mL/min et 0-50 mL/min.
Paramètres physiques
La solubilité du dioxyde de carbone dans cette solution est déterminée à partir des
travaux de Weisenberger et Schumpe [104] (relation 4.1) :
s
0
log = Σ(hi + hG )ci (4.1)
s
Avec :
61
1
CH4
0.9 CO2
0.8
0.7
Fraction molaire (%)
0.6
0.5
0.4
0.3
0.2
0.1
0
0 500 1000 1500 2000 2500 3000
Temps (secondes)
Figure 4.1 – Graphe des fractions molaires dans le gaz en fonction du temps pour
l’absorption physique dans l’eau.
62
– s0 (mol/m3 ) : solubilité dans l’eau pure
– s (mol/m3 ) : solubilité dans la solution
– hG (m3 /mol) : paramètre spécifique au gaz
– hi (m3 /mol) : paramètre spécifique à l’ion i
– ci (mol/m3 ) : concentration de l’ion i
Ces produits ont été sélectionnés pour des raisons diverses. Leur faible miscibilité
avec l’eau assure que le milieu d’absorption sera bien diphasique. L’huile de colza est un
produit alimentaire, ce qui lui assure une faible toxicité humaine et environnementale.
L’octanol et le toluène possèdent une affinité pour le dioxyde de carbone qui en fait de
bons candidats pour la capture de ce gaz.
63
Régulateurs de débit
Rotamètre
Unité de
refroidissement
C C
H O Cuve agitée
Analyseur
4 2 de gaz
By-pass
Bouteilles de gaz
64
Figure 4.3 – Photographie du réacteur (à gauche) et du module de refroidissement (à
droite).
65
Table 4.3 – Composition des émulsions : volumes de solvants et fraction de phase dis-
persée.
Volume d’eau Volume d’huile Fraction volumique de
(mL) (mL) phase dispersée Φ (-)
500 0 0
490 10 0,02
475 25 0,05
450 50 0,1
425 75 0,15
400 100 0,2
inclinées. Le volume total de la solution absorbante est fixé à 500 mL pour l’ensemble des
expériences. Le tableau 4.3 rappelle les volumes de solvants utilisés.
Après avoir placé le réacteur sous agitation pendant 10 minutes, la position de la
vanne est modifiée et le gaz est injecté au fond du réacteur. A sa sortie du réacteur,
il est refroidi puis analysé en continu. Après l’établissement du régime permanent, les
concentrations des gaz sont stables et la valeur de la concentration en dioxyde de carbone
permet d’établir la vitesse d’absorption à partir du bilan de matière suivant :
Qe ∗ CCO
e
2
= Qs ∗ CCO
s
2
+ R ∗ VL (4.4)
Avec :
– Q (m3 /s) : débit volumique de gaz
– CCO2 (mol/m3 ) : concentration de dioxyde de carbone en phase gaz
– R (mol/m3 /s) : vitesse d’absorption volumique
– VL (m3 ) : volume de liquide dans le réacteur
– exposants e et s : se réfèrent à l’entrée et à la sortie du réacteur
66
Figure 4.5 – Evolution des concentrations et de la vitesse d’absorption en fonction du
temps.
C C
H O
4 2 Source
lumineuse
67
Figure 4.7 – Photographie du borescope utilisé pour l’observation in-situ.
68
Analyseur
de gaz
P Séparateur
gaz-liquide
MM
C C
H O P
4 2
P
Eau Huile
69
identiques. Cette configuration nous permet d’observer la dispersion gaz-liquide mais
aussi de quantifier l’absorption dans un tel tube.
Le séparateur gaz-liquide est une cuve de plexiglas d’un volume de 300 mL environ.
Le mélange gaz-liquide sortant du contacteur est injecté par une entrée usinée dans le
couvercle. Le liquide est collecté au fond de la cuve pour mesurer le débit total de liquide et
le gaz ressort par une sortie usinée dans le couvercle. La composition du gaz est mesurée
grâce à un chromatographe (Micro GC 490, Agilent) contenant une colonne Cox. Le gaz
vecteur utilisé est l’argon. Les spécifications complètes de l’appareil sont disponibles en
annexe B.
Cinétique
La vitesse de la réaction du dioxyde de carbone avec l’eau (équation 4.6) est faible mais
peut être catalysée par divers agents, ce qui permet de faire varier de manière importante
70
la vitesse de la réaction sans trop modifier les propriétés de la solution. La vitesse de
cette réaction peut être écrite :
Avec :
– rH2 O (mol/m3 /s) : vitesse de la réaction 4.6
– kH2 O (s-1 ) : constante de vitesse de la réaction 4.6 non catalysée
– kC (m3 /mol/s) : constante de vitesse de la réaction 4.6 catalysée
– cC (mol/m3 ) : concentration de catalyseur
– cCO2 (mol/m3 ) : concentration en dioxyde de carbone dissous
La constante de vitesse de la réaction (kH2 O = 0,02 s-1 ) a été déterminée par Danck-
werts et Sharma [110]. Le catalyseur choisi est l’ion hypochlorite ClO− contenu dans une
solution d’hypochlorite de sodium car il présente une toxicité plus faible que l’ion arsénite
qui constitue la principale alternative. La constante de vitesse de la réaction catalysée
par l’hypochlorite est déterminée à partir du travail de Benadda et al. [111] :
−3037
kc = 48700 ∗ exp (m3 /mol/s) (4.10)
T /K
La réaction du dioxyde de carbone avec l’ion hydroxyde (équation 4.7) est de second
ordre. Elle peut s’écrire comme suit :
∞ −2382
log(kOH − ) = 11.895 − (4.12)
T /K
∞
kOH − = kOH − ∗ exp (Σbion Iion ) (m3 /mol/s) (4.13)
Avec :
– Iion (mol/m3 ) : force ionique liée à l’ion
– bion (m3 /mol) : paramètre de calcul établi par Pohorecki et Moniuk [112]
71
Ke ∗ cCO32− Ke
cHO− = = (4.14)
Kcarb ∗ cHCO3− Kcarb
Avec :
– cHO− (mol/m3 ) : concentration en ions hydroxyde
– cCO32− (mol/m3 ) : concentration en ions carbonate
– cHCO3− (mol/m3 ) : concentration en ions bicarbonate
– Ke : constante d’équilibre de la réaction d’autoprotolyse de l’eau
– Kcarb : constante d’équilibre de la réaction de dissociation du bicarbonate (equation
4.8)
Ce critère est vérifié a posteriori pour toutes les valeurs expérimentales obtenues. La
loi de vitesse de la réaction du dioxyde de carbone peut alors s’écrire :
Ke
rCO2 = (kH2 O + kC cC + kHO− ) ∗ cCO2 = kapp ∗ cCO2 (4.16)
Kcarb
72
Table 4.4 – Paramètres utilisés pour le calcul de kL et de a.
Paramètre Valeur Unité
k H2 O 0,02 s-1
kc 1,54 m3 .mol-1 .s-1
kHO- 2,16 m3 .mol-1 .s-1
Ke 10-14 -
Kcarb 4,79.10-11 -
73
74
Chapitre 5
Reformage
5.1 Produits
5.1.1 Biogaz
Le biogaz est simulé de la même façon que pour les expériences d’absorption (cf.
paragraphe 4.1.1)
Pour l’ensemble des expériences, le biogaz est simulé par un mélange de gaz issus de
bouteilles de méthane et de dioxyde de carbone. Les gaz sont fournis par Messer et sont
purs à 99,95% (qualité 3.5). Le mélange est dilué dans un flux d’azote issu du réseau de
gaz du laboratoire.
La composition du mélange est établie à l’aide de trois régulateurs de débit mas-
siques Brooks (modèle SLA5850 et SLA5800) contrôlés par deux coffret d’affichage et de
régulation Brooks (modèle 0254). Les débitmètres ont été nettoyés et ré-étalonnés une
fois par an par le fournisseur Serv’instrumentation. Les gammes de débit pour CO2 , CH4
et N2 sont respectivement de 0-50 mL/min, 0-50 mL/min et 0-200 mL/min.
5.1.2 Catalyseur
Le catalyseur utilisé est produit par la société Evonik Degussa. Il contient 5% en masse
de ruthénium déposé sur de l’alumine. Une caractérisation sommaire du catalyseur est
présentée ici.
Granulométrie
d32 = 28 µm
75
Surface spécifique
La surface spécifique du catalyseur est mesurée par adsorption de l’azote selon la
méthode B.E.T.. La surface obtenue après trois répétitions est de :
SBET = 102 ± 1 m2 /g
Imagerie au microscope
Des images réalisées avec un microscope électronique à balayage sont présentées à
la figure 5.1. On peut y observer la variabilité des diamètres ainsi que la forme quasi-
sphérique des particules.
76
5.2 Dispositif expérimental
Un dispositif expérimental complet a été mis au point pour étudier le reformage du
dioxyde de carbone en micro-canal. Un schéma de l’installation est présenté en figure 5.2.
Les flux de gaz sont assurés par des régulateurs de débit. Le mélange est ensuite injecté
dans le réacteur.
N2 réseau Bain
Thermostaté
Event
C C
H O
Analyse
4 2
Régulation
Le réacteur est constitué de deux blocs d’acier inoxydable (figure 5.3). Le bloc inférieur
sert de fond pour les canaux gravés dans le bloc supérieur. Dans chacun des blocs sont
insérées deux cartouches chauffantes. A l’entrée, un canal en forme de créneaux de dimen-
sions 5x5x160 mm sert à préchauffer le gaz tout en le menant dans la zone de réaction.
77
A la sortie du canal de préchauffage, une chambre gravée dans l’acier accueille une
plaque amovible de dimensions 30x60x5 mm. Un canal de section 1x1 mm est gravé sur
toute la longueur de cette plaque pour accueillir le catalyseur de reformage (figure 5.4).
La couche de catalyseur représente environ un cinquième de la profondeur du canal.
Figure 5.4 – Schéma de la plaque accueillant le catalyseur. A vide (à gauche), et avec
la disposition du catalyseur en couche au fond du canal (à droite).
A la sortie de la zone de réaction, le gaz est envoyé dans un échangeur de chaleur pour
abaisser sa température. L’eau, éventuel produit de la réaction, est condensée et séparée.
Une partie du gaz sortant est analysée par chromatographie et le reste est envoyé à l’évent.
L’ensemble des expériences est réalisé sous une sorbonne.
78
Démarrer bain
Attente
thermostaté (40.1)
T° échangeur
OK ? (40.3) NON
T° réacteur
OUI
OK ? (30.1) NON
OUI OUI
Fermeture débitmètre N2
Fermeture N2 Réseau (10.1)
(10.2)
5.4 Calcul de l’équilibre chimique
Le calcul de l’équilibre chimique permet de connaı̂tre les conversions maximales que
l’on peut atteindre pour une composition d’alimentation donnée et dans des conditions
de température et de pression fixes. Les constituants du mélange de départ sont CH4 ,
CO2 et N2 . Les produits majeurs sont CO, H2 , H2 O et C. Dans la suite, les espèces sont
numérotées de 1 à 7 dans l’ordre décrit ci-dessus.
Lorsque le système est à l’équilibre thermodynamique à température et à pression
fixées, l’énergie de Gibbs G atteint un miminum. Pour chaque constituant i, on définit :
– la quantité de matière de i : ni
– le potentiel chimique de i : µi
Contraintes Les bilans de conservation des trois types d’atomes présents (C, H, O)
imposent de satisfaire les conditions suivantes :
C : nCH4 + nCO2 + nCO + nC
= n0CH4 + n0CO2
H : 4nCH4 + 2nH2 + 2nH2 O = 4n0CH4 (5.6)
O : 2nCO2 + nCO + nH2 O = 2n0CO2
80
Problème d’optimisation
Le calcul de la composition d’équilibre revient donc à trouver le minimum de la fonction
5.7 sous les contraintes 5.6.
◦ ◦
G = nCH4 (∆GCH4 + RT ln(yCH4 )) + nCO2 (∆GCO2 + RT ln(yCO2 ))
◦ ◦
+nCO (∆GCO + RT ln(yCO )) + nH2 (∆GH2 + RT ln(yH2 ))
◦ ◦ (5.7)
+nH2 O (∆GH2 O + RT ln(yH2 O ) + nN2 (∆GN2 + RT ln(yN2 ))
Une solution du problème est obtenue par l’algorithme fmincon du logiciel de calcul
MATLAB. D’autre part, dans une optique de comparaison, le réacteur GIBBS du logiciel
de simulation PRO/II a aussi été utilisé pour connaitre les conversions à l’équilibre du
même système (modèle thermodynamique utilisé : Peng-Robinson).
81
82
Quatrième partie
83
Chapitre 6
Ce chapitre présente les résultats des expériences d’absorptionde CO2 dans un milieu
diphasique. Les expériences menées en cuve agitée permettent de mettre en lumière les
phénomènes de transfert particuliers à ce type de milieu. Notamment, un facteur d’in-
tensification est établi sur la base de la mesure du flux d’absorption en présence et en
absence de phase dispersée. L’influence des gouttelettes sur le coefficient de transfert de
matière kL et l’aire interfaciale a est mise en évidence. Les propriétés interfaciales sont
prises en compte à travers un bilan de tension superficielle. Finalement, les mécanismes
et les modèles associés, issus de la littérature, sont présentés et comparés aux données
expérimentales.
85
−5
x 10
3
2.5
2
Nabs (mol/s)
1.5
0.5
Pas de phase dispersée
Octanol
0 Toluène
Huile de colza
−0.5
0 200 400 600 800 1000
Temps (s)
Figure 6.1 – Evolution temporelle du flux d’absorption dans différents milieux. N =1300
rpm, QCH4 = 50 mL/min, QCO2 = 50 mL/min.
86
Vitesse d’agitation
La vitesse d’agitation a une influence directe sur les processus de transfert. Une forte
agitation a pour conséquences un meilleur mélange de la phase liquide continue ainsi
qu’une meilleure dispersion de la phase liquide dispersée et de la phase gaz. Le mobile
d’agitation utilisé est une turbine dont les 4 pales sont inclinées à 45°. Ce type de mo-
bile présente l’avantage de permettre une recirculation importante tout en favorisant le
cisaillement nécessaire à la dispersion. Des observations visuelles indiquent que, pour les
concentrations d’huile utilisées, une vitesse minimale de 1000 min-1 est nécessaire pour
obtenir une dispersion complète. En deçà de cette vitesse, une épaisse couche d’huile
subsiste à la surface de l’émulsion.
−5
x 10
5
Huile de colza 1000 tr/min
4.5
Huile de colza 1300 tr/min
Octanol 1000 tr/min
4
Octanol 1300 tr/min
3.5
(mol/s)
2.5
abs
2
N
1.5
0.5
0
0 0.05 0.1 0.15
Fraction de phase dispersée
Débits de gaz
Les débits de gaz peuvent être adaptés à l’aide de deux régulateurs de débit. Un faible
débit de gaz implique a priori un temps de passage élevé et donc une meilleure absorption.
D’un autre côté, l’augmentation de la quantité de gaz dans le liquide (rétention gazeuse)
augmente l’aire interfaciale et donc la vitesse d’absorption globale. D’un point de vue
pratique, un débit global de gaz trop faible entraine un problème de temps de réponse
au niveau de l’analyseur infra-rouge. Au contraire, les débits maximums ne peuvent être
assurés que de manière approximative par les régulateurs de débit massique. Pour ces
raisons, les débits sélectionnés pour toutes les expériences sont de 50 mL/min pour le
dioxyde de carbone et de 50 mL/min pour le méthane.
87
6.1.2 Facteur d’intensification
Afin d’évaluer l’effet de la présence d’une phase dispersée, on utilise un facteur d’accélération
qui représente le rapport entre le flux d’absorption dans l’émulsion et le flux d’absorption
dans la phase aqueuse pure. Les processus mis en jeu reposant sur la solubilité dans le cas
d’une absorption physique, ce facteur est nommé Eph et est ainsi différencié du facteur
d’accélération dû à une réaction chimique noté quant à lui Ech .
Nǫ6=0
Eph = (6.1)
Nǫ=0
Pour chaque émulsion, deux répétitions de l’expérience d’absorption ont été réalisées.
Les incertitudes relatives sont inférieures à 5%. Les facteurs d’intensification pour les trois
phases organiques testées sont représentés sur la figure 6.3.
Octanol
Toluène
Huile de colza
1.3
1.2
ph
1.1
E
0.9
0.8
0 0.05 0.1 0.15 0.2
Fraction de phase dispersée
88
il est décidé de poursuivre les expériences majoritairement avec l’octanol et l’huile de
colza puisque le toluène n’a que peu d’effet sur le transfert de matière et qu’il présente
des risques importants pour la santé.
Influence de la solubilité
La solubilité du dioxyde de carbone dans l’émulsion peut être calculée comme la
moyenne des solubilités dans les phases pures, pondérée par les fractions volumiques. Les
valeurs ainsi calculées sont présentées dans le tableau 6.1. La solubilité dans l’huile de
colza reste inconnue car aucune valeur n’a pu être obtenue dans la littérature.
Table 6.1 – Solubilité du dioxyde de carbone (mol/m3 ) dans les émulsions à T = 20˚C
et PCO2 = 0,5 atm.
Fraction de phase
Octanol Toluène
dispersée
0 12,2 12,2
0,05 12,6 12,9
0,1 13,1 14,0
0,15 14,0 15,8
0,2 14,9 17,6
L’examen des valeurs de solubilité reportées dans ce tableau montre que l’augmenta-
tion de ce paramètre ne suffit pas à expliquer la modification du flux d’absorption. En
effet, la figure 6.3 montre que dans la plage testée, le facteur d’intensification diminue
avec la fraction volumique de phase dispersée alors que la solubilité augmente (tout au
moins dans le cas du toluène et de l’octanol). De plus, malgré une solubilité plus im-
portante dans le toluène, le dioxyde de carbone est absorbé plus rapidement lorsque la
phase dispersée est composée d’octanol. La solubilité du méthane dans les liquides est
une des sources d’imprécision dans la mesure du flux d’absorption. En effet si le méthane
est, en mol/L, environ 15 fois moins soluble dans l’eau que le CO2 , sa solubilité dans les
phases organiques n’est pas bien documentée dans la littérature. En cas de solubilité non
négligeable du méthane dans la phase dispersée, les bilans de matière devraient prendre
en compte un flux d’absorption du méthane.
R = kL a ∗ (C ∗ − C) ∗ Ech (6.2)
89
Cette équation est basée sur l’hypothèse que la résistance à l’interface est négligeable.
Cette méthode globale est habituellement destinée à l’absorption dans une seule phase
liquide. C’est pourquoi nous devons considérer l’émulsion comme une phase pseudo-
homogène dont les propriétés sont intermédiaires entre les propriétés de la phase aqueuse
et celles de la phase organique.
6.2.1 Mesure de kL et de a
La méthode de la droite de Danckwerts décrite à la section 4.3 est utilisée pour
déterminer séparément kL et a. La technique est d’abord testée en l’absence de phase
dispersée en réalisant l’absorption dans une solution de carbonates avec des quantités va-
riables de catalyseur. Les conditions expérimentales de la série de mesures sont présentées
dans le tableau 6.2.
Le tracé de (R/c∗ )2 en fonction de kapp DCO2 (voir figure 6.4) est une droite dont la
pente vaut a2 et l’ordonnée à l’origine kL a2 . La valeur de la solubilité c∗ du CO2 dans la
solution varie de manière importante avec la pression partielle de CO2 dans le gaz. La
solubilité du gaz entrant dans la solution est reportée dans le tableau 6.2. Dans l’hypothèse
d’une phase gaz parfaitement agitée, il faudrait utiliser la solubilité correspondant à la
pression partielle de sortie du réacteur. Cette approche conduit toutefois à une importante
surestimation du coefficient de transfert de matière, si bien que l’on préfère utiliser une
solubilité moyenne calculée comme suit :
C1∗ − C2∗
C∗ = C∗
(6.3)
ln C1∗
2
90
−4
x 10
2
(R/c*)2 (s−2)
0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5
2 −2 −7
x 10
kapp*DCO (m s )
2
Les valeurs de kL et a qui servent de référence pour les comparaisons avec les kL et a
obtenus en présence d’émulsion sont donc les suivantes :
91
6.2.2 Influence de la phase dispersée sur kL et a
Les expériences résumées dans les tableaux 6.3 et 6.4 sont menées pour déterminer
les valeurs de kL et a en présence d’une phase dispersée.
Table 6.3 – Résumé des expériences pour la mesure de kL et de a dans les émulsions à
base d’huile de colza.
Fraction
Vitesse
volumique de Volume de
Expérience d’absorption
phase dispersée catalyseur (mL)
(mol/s)
(%)
HC.2.5 2 5 2,42.10-5
HC.2.10 2 10 2,75.10-5
HC.2.15 2 15 3,01.10-5
HC.2.20 2 20 3,15.10-5
HC.5.10 5 5 2,28.10-5
HC.5.20 5 10 2,53.10-5
HC.5.30 5 15 2,66.10-5
HC.5.40 5 20 2,77.10-5
HC.10.5 10 5 2,48.10-5
HC.10.10 10 10 2,68.10-5
HC.10.15 10 15 2,86.10-5
HC.10.20 10 20 2,97.10-5
92
Table 6.4 – Résumé des expériences pour la mesure de kL et de a dans les émulsions à
base d’octanol.
Fraction
Vitesse
volumique de Volume de
Expérience d’absorption
phase dispersée catalyseur (mL)
(mol/s)
(%)
OCT.2.5 2 5 2,42.10-5
OCT.2.10 2 10 2,75.10-5
OCT.2.15 2 15 3,01.10-5
OCT.2.20 2 20 3,15.10-5
OCT.5.10 5 5 2,86.10-5
OCT.5.20 5 10 3,13.10-5
OCT.5.30 5 15 3,19.10-5
OCT.5.40 5 20 3,26.10-5
OCT.10.5 10 5 2,97.10-5
OCT.10.10 10 10 3,14.10-5
OCT.10.15 10 15 3,19.10-5
OCT.10.20 10 20 3,27.10-5
2 2
Octanol Octanol
1.8 Huile de colza 1.8 Huile de colza
1.6 1.6
1.4 1.4
1.2 1.2
k /k0
L
0
a/a
1 1
L
0.8 0.8
0.6 0.6
0.4 0.4
0.2 0.2
0 0
0 0.05 0.1 0.15 0 0.05 0.1 0.15
Fraction de phase dispersée (%) Fraction de phase dispersée (%)
93
Cette figure montre que l’octanol et l’huile de colza ont des effets opposés à la fois
sur kL et sur a. La présence d’octanol améliore l’hydrodynamique à travers une augmen-
tation de kL mais conduit à une diminution de l’aire interfaciale alors qu’au contraire,
en présence d’huile de colza, a augmente et kL décroı̂t. Comme nous l’avons mentionné
précédemment, les nombreux résultats publiés dans la littérature à propos de la variation
de kL a sont contradictoires. Pour le système eau-octanol-CO2, Cents [46] rapporte lui
aussi une augmentation de kL et une diminution de a. Cependant, dans de nombreux tra-
vaux, l’aire interfaciale est augmenté avec l’ajout d’une phase organique car la présence
gouttelettes diminuerait la vitesse de coalescence des bulles [47]. Expérimentalement, on
obtient logiquement une augmentation du coefficient de transfert de matière kL avec la
diffusivité. En effet, sachant que la diffusivité du dioxyde de carbone est environ trois
fois plus importante dans l’octanol que dans la solution de carbonates, les résultats de la
figure 6.5 sont en accord avec nos attentes.
Les valeurs de kL a/kL a0 présentées en figure 6.6 montrer que kL a est légèrement plus
grand en présence d’octanol que dans la solution aqueuse pure alors qu’il est 20% plus
faible lorsque la phase dispersée est l’huile de colza.
1.8
1.6
1.4
1.2
kLa/kLa0
0.8
0.6
0.4
0.2
0
0 0.05 0.1 0.15
Fraction de phase dispersée (%)
94
pas représentés par l’équation 6.2.
Par exemple, dans l’effet navette décrit dans la littérature, le soluté est d’abord ab-
sorbé dans la phase continue puis dans la phase dispersée. A l’opposé, le mécanisme de
transfert en parallèle décrit une situation où le gaz peut être absorbé simultanément dans
les deux phases.
Les résultats obtenus sont en accord avec ceux de Cents [46] pour l’octanol et le
toluène (S > 0). Ces deux produits auraient donc tendance à se répandre à la surface des
bulles, créant ainsi une interface gaz-phase dispersée inexistante dans le cas de l’huile de
colza pour laquelle S est négatif.
95
6.3.2 Influence sur le transfert
Lorsque la solubilité du gaz dans la phase dispersée est grande, on peut observer
une amélioration importante du transfert dans le cas où le transfert en parallèle est
possible. Dans la littérature, les résultats de cette approche sont contradictoires. En effet,
des travaux rapportent une diminution de kL a malgré un coefficient d’étalement positif
[47]. Dans une étude récente, Pinho and Alves [116] font varier la tension superficielle
en modifiant la composition de la phase dispersée. Ceci a pour conséquence de modifier
le coefficient d’étalement. Les auteurs observent alors que l’efficacité de Murphree du
transfert de matière (notée E) augmente avec S. Ils notent l’existence d’une zone de
transition entre une valeur faible de E associée à un coefficient d’étalement inférieur à 0
et une valeur élevée de E dans des conditions où le coefficient d’étalement est supérieur
à 0. Les auteurs remarquent aussi que la transition n’est pas toujours centrée autour
de S = 0 et varie en fonction de la concentration en phase dispersée et de la vitesse
d’agitation. La figure 6.7 présente des résultats issus de la littérature pour la valeur de
kL a/kL a0 en fonction de la valeur de S pour une fraction de fraction dispersée de 0,1.
Dans les travaux analysés, la nature de la phase organique est variable, tout comme le
type de réacteur ainsi que la vitesse d’agitation, ce qui limite la portée de ce graphe à
une analyse purement qualitative. En effet, on observe sur ce graphe que l’augmentation
de S favorise une rapport kL a/kL a0 supérieur à un mais qu’il existe des exceptions à la
règle.
2.5
2
k a/k a0
L
1.5
L
0.5
Travaux de la littérature
Présent travail
0
−20 −10 0 10 20 30 40
Coefficient d’étalement S (mN/m)
96
L’observation d’une amélioration du transfert ne peut donc pas être reliée unique-
ment à S puisque cela reviendrait à ignorer les effets des autres paramètres (concentra-
tion, solubilité, viscosité, taille des gouttelettes, énergie dissipée...). De plus, ce coefficient
d’étalement est établi par une analogie avec le mouillage d’une surface plane dont le com-
portement peut être très éloigné de celui de l’interface d’une bulle. Pour examiner plus
avant l’effet des propriétés interfaciales sur le transfert, on réalise des expériences d’ab-
sorption en présence de tensio-actif. On dissout 5 mL de polysorbate 80 (Tween 80) dans la
phase organique avant de démarrer l’émulsification. A cause des propriétés moussantes du
tensio-actif, il n’a pas été possible de mesurer la vitesse d’absorption en absence de phase
organique ou avec l’huile de colza (dans ces conditions, le réacteur se remplit rapidement
de mousse et provoque une absorption complète du dioxyde de carbone, probablement
à cause de l’aire interfaciale très importante développée dans la mousse). Des travaux
issus de la littérature rapportent une influence négligeable [118] ou une diminution de la
vitesse d’absorption [119] en présence de tensio-actif. Le facteur d’intensification Eph , cal-
culé en rapportant la vitesse d’absorption dans l’émulsion stabilisée à la vitesse d’absorp-
tion dans la solution aqueuse pure, pourrait donc être sous-estimé. Les valeurs obtenues
sont présentées à la figure 6.8. On y constate que les émulsions stabilisées améliorent le
transfert de matière de manière plus importante que les émulsions sans tensio-actif. La
présence de tensio-actif est supposée réduire la taille des gouttelettes et des bulles à cause
du ralentissement de la coalescence. Cette stabilisation de l’aire interfaciale expliquerait
le comportement monotone du facteur d’intensification avec l’augmentation de la fraction
de phase dispersée. La diminution de la taille des gouttelettes permet une augmentation
de l’effet navette. La diminution de la taille des bulles fait quant à elle augmenter l’aire
interfaciale et par conséquent la vitesse de transfert.
97
2
1.8
1.6
1.4
1.2
Eph
0.8
0.6
Octanol+Tween 80
0.4 Toluène+Tween 80
Octanol
0.2 Toluène
0
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
Fraction de phase dispersée (%)
98
H2
H2 Gaz
Gaz H1
H1
H2
H1
Gaz
t=0 t = 25 ms t = 35 ms
alors que H2 est isolée. Par la suite, H2 se rapproche et adhère à la bulle tandis que H1
s’en éloigne.
La figure 6.10 illustre l’étalement d’une gouttelette d’octanol sur une bulle de biogaz.
Le point de départ de ce phénomène est une position très fréquente où une gouttelette
d’huile est collée presque point à point à la surface d’une bulle. Dans cette configura-
tion, les deux objets sont en contact sur une très faible surface. Il est même probable
qu’une mince couche de liquide de la phase continue les sépare. Depuis cette situation,
on peut passer à une autre position dans laquelle la gouttelette n’est plus sphérique mais
adopte la courbure de la bulle et en couvre une surface relativement importante. Le
phénomène inverse, c’est-à-dire le détachement de la gouttelette de la surface de la bulle,
n’a pas été observé. Il est donc impossible de spécifier les conditions qui mènent à ce
genre de réarrangement. D’autre part, l’observation de cet événement n’est possible que
selon un angle bien précis : la gouttelette doit être située près du plan perpendiculaire
à l’axe du borescope et passant par l’équateur de la bulle. Si la gouttelette est devant
ou derrière la bulle, on ne remarque pas le changement. Si on ajoute à cela le fait que
ce type d’observation est difficile à systématiser, on arrive à la conclusion qu’il nous est
impossible de quantifier ce phénomène et, en particulier, de déterminer quelle portion de
l’aire interfaciale gaz-liquide est occupée par la phase dispersée.
Brilman [40] a étudié les interfaces dans les systèmes gaz-liquide-liquide en forçant le
contact entre une gouttelette et une bulle. Il a observé que dans ces circonstances toutes
les huiles peuvent former des ”complexes gaz-phase organique” similaires à celui présenté
sur la figure 6.11. Il propose aussi un critère rendant compte de la possibilité de formation
99
Figure 6.10 – Illustration de l’étalement d’une gouttelette d’octanol sur une bulle de
biogaz.
d’une telle structure en raisonnant sur la variation de l’énergie de surface (eq. 6.5) pour
un système où S est négatif.
2
dbulle σ huile-eau
< (6.5)
dgouttelette −S
Pour le système eau-huile de colza-biogaz, le diamètre de la bulle doit être inférieur à
2,4 fois le diamètre de la gouttelette.
Figure 6.11 – Une gouttelette d’huile de colza répandue sur une bulle de gaz.
100
6.4 Mécanismes et modèles
Selon les mécanismes de transfert envisagés, différents types de modèles peuvent être
proposés. Dans la littérature, le transfert en parallèle est souvent rejeté au profit du
transfert en série. Le modèle le plus souvent utilisé est basé sur l’effet navette. Cependant,
les résultats présentés plus haut constituent un argument probant en faveur du transfert
en parallèle. Dans ce cas, il convient d’additionner les flux d’absorption dans chacune des
deux phases pour obtenir la vitesse d’absorption totale.
Figure 6.12 – Schéma de l’interface gaz-liquide dans les hypothèses du modèle de Brui-
ning et al. [44].
Si l’on considère une couche de liquide de taille dz dans la couche limite de diffusion
présentée à la figure 6.12, le système est le suivant :
∂ 2C
∂C
D ∗ = kapp ((1 − ǫ)C + (1 + ǫ(mR − 1))
C
∂z 2 ∂t
C(t = 0,z > 0) = C0 (6.6)
i
C(t > 0,z = 0) = C
C(t > 0,z → ∞) = C0
avec
– mR : ratio entre la solubilité du CO2 dans la phase dispersée et la solubilité du CO2
dans l’eau,
– ǫ : fraction de phase dispersée,
– C0 (mol/m3 ) : concentration de CO2 dissous au sein de la phase liquide.
101
2 2
1.8
(a) 1.8
(b)
1.6 1.6
1.4 1.4
1.2 1.2
ph
ph
1 1
E
E
0.8 0.8
0.6 0.6
0.4 0.4
Effet navette Effet navette
0.2 Experience 0.2 Experience
0 0
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0 0.05 0.1 0.15 0.2
Fraction de phase dispersée (%) Fraction de phase dispersée (%)
102
modèle en prenant en compte la distribution spatiale des gouttelettes près de l’interface
ainsi que le transfert liquide-liquide. Les auteurs montrent ainsi que seules les gouttelettes
qui sont très proches de l’interface interviennent dans le processus du transfert. Leur
modèle tridimensionnel représente bien les données de Littel et al. [41] pour lesquelles la
taille des gouttelettes est de 3 µm. Ce dernier paramètre a une grande importance dans
les modèles de transfert en série. En effet, une hypothèse importante est la présence de
gouttelettes dans la zone de transfert située à proximité de l’interface. Des gouttelettes
de petites tailles auraient donc plus d’efficacité dans l’intensification du transfert.
Pour pousser plus loin la comparaison, une mesure de la taille moyenne des gouttelettes
d’huile est réalisée. Les résultats sont présentés dans le tableau 6.6.
Pour avoir suffisamment de lumière il est nécessaire de placer l’objectif près du bas
de la cuve. D’autre part, il est aussi obligatoire de le placer à la périphérie de la cuve
pour éviter le contact avec l’agitateur. Les objets observés à cet endroit ne sont pas
forcément représentatifs du contenu du reste du réacteur. Notamment, on a pu observer
que les bulles de gaz sont plus petites et grossissent à mesure que l’on s’approche de la
surface libre, ce qui est probablement dû au fait que les grosses bulles ont une vitesse
ascensionnelle plus importante. D’un autre côté la résolution du système est d’environ 10
µm pour un pixel. Il est donc possible qu’il existe des objets inférieurs à cette taille qui
n’ont pas été détectés, même si les plus petites gouttelettes mesurées ont un diamètre de
l’ordre de 30 µm. Ainsi, cette méthode n’est pas adaptée pour une mesure absolue de la
taille des gouttelettes ou des bulles. Cependant elle peut être utilisée avec une précision
raisonnable à des fins de comparaisons.
Ces précautions étant prises, on peut raisonner sur la taille des gouttelettes. Celle-ci
est plus importante pour l’huile de colza que pour l’octanol, en accord avec les mesures
de tensions interfaciales (voir tableau 6.5). La taille des gouttelettes augmente avec la
fraction volumique de phase dispersée. Ce phénomène est explicable par l’augmentation
de la fréquence de coalescence. Dans le cas d’un transfert en série, il pourrait être la cause
de la stabilisation (ou diminution) du facteur d’intensification aux concentrations d’huile
croissantes. Ainsi, l’augmentation de la quantité de phase organique serait contrebalancée
par la difficulté des gouttelettes à s’approcher de l’interface.
Comme on pouvait s’y attendre, la taille des gouttelettes diminue aussi avec l’ajout
de tensio-actif du fait de la réduction de leur coalescence et de la facilité de fragmenta-
tion d’une gouttelette. Ces conditions sont favorables à l’effet navette. Les diamètres des
gouttelettes sont cependant toujours supérieurs d’un ordre de grandeur à l’épaisseur du
103
film de transfert. L’une des hypothèses principales du modèle présenté plus haut n’est
donc probablement pas satisfaite.
avec :
– N (mol/s) : vitesse d’absorption du soluté à travers l’interface ;
– J (mol/s/m2 ) : flux surfacique de soluté à travers l’interface ;
– A (m2 ) : surface de l’interface ;
– kL (m/s) : coefficient de transfert de matière ;
– CC (mol/L) : concentration de soluté dans la phase continue ;
– CC,i (mol/L) : concentration de soluté dans la phase continue à l’interface gaz -
phase continue ;
– CD (mol/L) : concentration de soluté dans la phase dispersée ;
– CD,i (mol/L) : concentration de soluté dans la phase dispersée à l’interface gaz -
phase dispersée ;
104
Les indices GC et GD représentent respectivement les grandeurs relatives au transfert du
gaz vers la phase continue et du gaz vers la phase dispersée.
CD = mCC (6.14)
Soit,
(kL,GC ∗ AGC + mkL,GD ∗ AGD )(CC,i − CC )
E= (6.15)
kL (CC,i − CC ) ∗ A
2. la fraction d’interface gaz-liquide occupée par la phase dispersée AGD vaut ǫA, la
fraction d’interface gaz-liquide occupée par la phase continue AGC vaut (1 − ǫ)A
(1 − ǫ)kL,GC + ǫmkL,GD
E= (6.16)
kL
La valeur numérique de kL,GD est inconnue. Sa mesure directe n’est pas possible avec
notre installation expérimentale.
Van Ede et al. [45] proposent d’utiliser les définitions de kL,GC et kL,GD associées aux
modèles décrits au chapitre 2.1.2 (page 15) :
– le modèle du double film :
DL,C DL,D
kL,GC = , kL,GD = (6.17)
δL δL
DL,D
Eph =1+ǫ m −1 (6.18)
DL,C
– le modèle de pénétration :
r r
DL,C DL,D
kL,GC = 2 , kL,GD = 2 (6.19)
πτ πτ
s !
DL,D
Eph = 1 + ǫ m −1 (6.20)
DL,C
105
Les résultats de cette approche sont comparés aux valeurs expérimentales sur les
figures 6.15 (en présence d’octanol) et 6.16 (en présence de toluène).
2
Eph Double film
1.9
Eph Higbie
1.8 Octanol
Octanol + Tween 80
1.7
1.6
ph
1.5
E
1.4
1.3
1.2
1.1
1
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
Fraction de phase dispersée (%)
Dans le cas de l’octanol, les modèles basés sur un mécanisme de transfert en pa-
rallèle prédisent des valeurs du facteur d’intensification du même ordre de grandeur que
l’expérience. Comme nous l’avons évoqué précédemment, en absence de tensio-actif, Eph
présente un maximum à faible fraction de phase dispersée. Ce phénomène n’est pas re-
produit par les modèles utilisés. Pour l’émulsion stabilisée, l’augmentation est continue
et le modèle utilisant l’expression de kL du modèle de Higbie représente bien les données
expérimentales.
106
2
Eph Double
1.9 film
Eph Higbie
1.8 Toluene
Toluene +
1.7 Tween 80
1.6
Eph
1.5
1.4
1.3
1.2
1.1
1
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25
Fraction de phase dispersée (%)
Dans le cas du toluène, les modèles supposant le contact direct entre le gaz et la phase
dispersée surestiment largement le facteur d’intensification. Le coefficient d’étalement du
système eau-toluène-biogaz est positif mais pas aussi important que pour l’octanol et
pourrait le situer dans une zone où la quantité d’huile en contact avec le gaz est inférieure
à la fraction de phase dispersée dans le reste de l’émulsion. En présence de Tween 80,
toutefois, le schéma semble changer pour passer du transfert en série au transfert en
parallèle. Ceci est confirmé par le fait que la tension interfaciale eau-toluène chute en
présence de tensio-actif et contribue à augmenter la valeur de S.
6.5 Conclusion
Dans l’optique de purifier le biogaz, l’absorption du dioxyde de carbone dans des
émulsions de compositions variables a été étudiée. La mesure de la vitesse d’absorption
en présence et en absence de phase dispersée a permis d’identifier l’influence positive ou
négative de chaque phase organique testée, via le calcul d’un facteur d’intensification.
Si l’octanol a un effet clairement positif sur l’absorption, le toluène a un impact plus
modéré et l’huile de colza défavorise le transfert du CO2 . Les coefficients volumiques de
107
transfert de matière coté liquide kL a en présence d’émulsion ont été mesurés à l’aide de
la méthode de la droite de Danckwerts et comparés aux valeurs obtenues en absence de
phase dispersée. Ils montrent une baisse de 20% dans le cas de l’huile de colza et un effet
faible pour l’octanol. L’observation directe du système à l’aide d’un borescope et d’une
caméra rapide a permis de mettre en évidence les mécanismes de transfert proposés dans
la littérature. L’observation de l’étalement d’une gouttelette d’octanol à la surface d’une
bulle de biogaz donne du crédit au mécanisme de transfert en parallèle, jusqu’ici assez peu
étudié. La comparaison des données expérimentales à différents modèles a montré que le
comportement des gouttelettes de phase dispersée est bien lié aux propriétés interfaciales.
108
Chapitre 7
Ce chapitre présente les résultats des expériences d’absorption réalisées dans le micro-
mélangeur Caterpillar. Une description rigoureuse du montage permettra de mettre en
lumière les problématiques inhérentes aux systèmes micro-structurés concernant la mesure
de la performance d’absorption. Un modèle de transfert appliqué aux données expérimentales
permet la détermination du coefficient de transfert de matière côté liquide kL et de l’aire
interfaciale a et ainsi d’expliquer les phénomènes liés à l’intensification du transfert.
e s
yCO − yCO
η= 2
e
2
(7.1)
yCO2
e s
où yCO 2
et yCO 2
représentent les fractions molaires de dioxyde de carbone respective-
ment à l’entrée et à la sortie du montage.
L’efficacité ainsi mesurée prend en compte tous les éléments de l’installation puisque
la mesure de concentration ne peut être faite qu’après le séparateur gaz-liquide. Or, des
phénomènes d’absorption peuvent exister dès lors que le gaz est en contact avec le liquide,
ce qui est le cas dans le micro-mélangeur lui-même mais aussi dans les équipements situés
en aval. Pour pouvoir établir la performance du micro-mélangeur seul, il est nécessaire de
savoir si les autres parties de l’installation jouent un rôle dans l’absorption. Les fluides
n’étant mélangés qu’à l’intérieur du Caterpillar, aucun phénomène d’absorption n’est à
prendre en compte en amont de cet élément.
109
7.1.2 Configuration initiale
Pour évaluer les capacités d’absorption du micro-mélangeur seul, il conviendrait d’ana-
lyser le gaz directement à la sortie du micro-mélangeur. Or, la méthode d’analyse utilisée
ici ne tolère pas la présence de liquide, c’est pourquoi il est nécessaire de séparer le mélange
avant d’analyser la phase gaz. La sortie du réacteur est donc reliée à un séparateur gaz-
liquide. La conformation du tube reliant ces deux éléments est cruciale car elle maintient
nécessairement un contact entre le gaz et le liquide, ce qui en fait potentiellement un
espace propice à l’absorption.
Entrée gaz
Entrées
liquides
Sortie
110
dans le liquide à l’intérieur du micro-mélangeur. Dans certaines conditions, les deux
phases peuvent en effet passer alternativement et n’entrer en contact qu’à la sortie.
111
7.1.4 Configurations finales
Configuration 1
Pour limiter l’effet de la coalescence, le raccord de sortie de la configuration initiale
est remplacé par un raccord dont le diamètre interne est inférieur à 1 mm. La longueur
de la liaison entre le micro-mélangeur et le séparateur est diminuée au maximum dans le
but d’évaluer la contribution du réacteur seul (cette configuration est visible à la figure
7.3). Le volume total de la zone de contact entre les phases gaz et liquide est de 1,21.10−6
m3 .
Entrée Gaz
Entrées
Liquides
Sortie
Séparateur
Configuration 2
Un tube en plastique de diamètre intérieur 3,1 mm et de longueur 20 cm est ajouté
à la sortie du micro-mélangeur pour permettre l’observation directe de l’écoulement gaz-
liquide. Cette deuxième configuration est visible sur la figure 7.4. Tous les autres éléments
sont identiques à la configuration 1. Le volume total de la zone de contact entre les phases
gaz et liquide est dans ce cas de 3,30.10−6 m3 .
112
Entrée gaz
Entrées
liquides
Tube 3mm*30 cm
Sortie
113
0.25
0.2
Efficacité d’absorption
0.15
0.1
QG= 50 mL/min
QG= 25 mL/min
0.05
Q =13 mL/min
G
0
0 10 20 30 40 50 60 70
Débit d’eau (mL/min)
Figure 7.5 – Efficacité d’absorption physique en fonction du débit d’eau dans la confi-
guration 1.
Il est à noter que dans ces conditions, il est difficile de réaliser des expériences précises.
En effet, le faible débit de gaz ne permet pas de remplacer rapidement le contenu du
séparateur. Le gaz à analyser est alors susceptible d’être dilué dans le gaz initialement
contenu dans le séparateur et de voir sa concentration faussée. D’autre part, la pression
augmentant avec le débit de liquide, il devient rapidement impossible d’injecter du gaz
dans le micro-mélangeur. Pour des débits de gaz de 25 mL/min et 50 mL/min, on observe
un maximum pour un débit liquide QL entre 40 et 50 mL/min. L’efficacité est plus élevée
pour QG = 25 mL/min car le temps de passage du gaz dans le mélangeur est plus
important.
Lorsque QL augmente, la pression à l’entrée du micro-mélangeur (représentée à la fi-
gure 7.6) augmente ce qui a pour effet de modifier l’équilibre entre le dioxyde de carbone
plus soluble et l’eau. Ainsi, pour des débits de liquide inférieurs à 50 mL/min, l’augmen-
tation de l’efficacité peut être expliquée en partie par une meilleure solubilité. Lorsque
QL est supérieur à 50 mL/min, le temps de passage du gaz devient si court que l’efficacité
est limitée même si la vitesse de transfert est importante.
Configuration 2
Le but de ces expériences est de voir s’il est possible de profiter de la dispersion créée
par le micro-mélangeur pour prolonger l’absorption dans un tube à la sortie. Par rapport
à la configuration initiale, cette configuration bénéficie d’un design différent au niveau de
la sortie du micro-mélangeur : le raccord qui collecte le mélange gaz-liquide possède un
diamètre interne très faible (inférieur à 1 mm) et permet ainsi d’éviter la coalescence qui
avait lieu dans la configuration initiale. Ce raccord amène la dispersion dans un tube de
114
0.16
0.12
0.1
0.08
0.06
QG= 50 mL/min
0.04
Q = 25 mL/min
G
QG= 13 mL/min
0.02
0
0 10 20 30 40 50 60 70
Débit d’eau (mL/min)
3 mm de diamètre intérieur.
Les valeurs d’efficacité d’absorption en fonction du débit d’eau pour différents débits
de gaz sont reportées sur la figure 7.7. Ces graphes présentent la même allure que ceux
de la figure 7.5 obtenus pour la configuration 1. Pour chaque débit de gaz, il existe un
débit d’eau qui maximise l’efficacité d’absorption. Pour un faible débit de gaz (QG = 13
mL/min), le maximum pourrait se situer entre QL = 25 mL/min et QL = 40 mL/min.
Pour des débits de gaz moyens et élevés (QG = 25 mL/min et QG = 50 mL/min) le
maximum se situe autour de QL = 40 mL/min. Ces constats, similaires à ceux issus de
l’étude de la configuration 1, appellent les mêmes conclusions.
Les valeurs d’efficacité des deux configurations sont comparées à la figure 7.8 pour un
débit de gaz de 50 mL/min.
Ce graphe démontre que l’absorption a aussi lieu dans le tube, spécialement lorsque
le débit de liquide est élevé. En terme d’absorption, la rétention du gaz, l’aire et la
forme de l’interface gaz-liquide ainsi que la qualité du mélange sont d’une très grande
importance. Ces observations sont donc à rapprocher de l’état de la dispersion gaz-liquide.
En effet, la variation des débits entraine une modification importante de la morphologie
de l’écoulement.
115
0.3
0.25
Efficacité d’absorption
0.2
0.15
0.1
Q =50 mL/min
G
QG=25 mL/min
0.05
Q =13 mL/min
G
0
0 10 20 30 40 50 60 70
Débit d’eau (mL/min)
Figure 7.7 – Efficacité d’absorption physique en fonction du débit d’eau dans la confi-
guration 2.
0.25
0.2
Efficacité d’absorption
0.15
0.1
0.05
Configuration 1
Configuration 2
0
0 10 20 30 40 50 60 70
Débit d’eau QL (mL/min)
116
7.2.2 Qualité de la dispersion gaz-liquide
Dans la configuration 2, un tube transparent relie la sortie du micro-mélangeur à
l’entrée du séparateur gaz-liquide. L’observation directe de la dispersion gaz-liquide est
alors possible comme le montrent les photographies de la figure 7.9.
On constate ainsi que les bulles produites lors du passage du gaz dans le micro-
mélangeur sont plus petites à l’entrée du tube d’observation mais grossissent par coales-
cence le long de ce dernier. La taille des bulles observées à l’entrée du tube d’observation
constitue, même si elle n’est que qualitative, une indication assez fiable de la qualité de
la dispersion créée dans le micro-mélangeur.
Ainsi, lorsque le débit de liquide est faible, les bulles sont de grande taille dès la sortie
du micro-mélangeur. Sous certains conditions, il est même possible que le gaz et le liquide
117
passent alternativement dans le réacteur, le volume interne du micro-mélangeur n’étant
que de 78 µL, ce qui signifierait que le contact entre les deux phases est très réduit. A la
fin du tube, les bulles occupent toute la section du tube et sont séparées par de courts
bouchons de liquide (régime de Taylor).
Pour une valeur intermédiaire de QL , les bulles sont plus petites et produisent une
aire interfaciale élevée. Après une phase de coalescence, un régime stable s’installe où les
bulles ont un diamètre inférieur au diamètre interne du tube. Finalement, à fort débit de
liquide, la faible rétention du gaz est contrebalancée par l’effet positif créé par la petite
taille des bulles sur l’aire interfaciale.
0.25
0.2
Efficacité d’absorption
0.15
0.1
0.05
Eau
Carbonates
0
0 10 20 30 40 50 60 70
Débit de liquide (mL/min)
118
on observe en sortie du micro-mélangeur de grosses bulles de gaz. Compte tenu de l’opa-
cité du réacteur, il est impossible de connaı̂tre la répartition des phases à l’intérieur et
il est possible que le mélangeur soit par moment rempli entièrement de gaz. Dans ce cas
l’absence de contact entre le gaz et le liquide pourrait expliquer la faiblesse de l’absorp-
tion. Le maximum d’absorption correspond à une valeur du rapport entre débit de liquide
et débit de gaz QL /QG légèrement inférieure à 1. Ces conditions opératoires semblent être
les plus adaptées au transfert de matière. En sortie, on observe des bulles de plus petite
taille séparées par des bouchons de liquide. Pour des débits de liquide plus importants,
l’absorption diminue vers des valeurs intermédiaires. La taille des bulles de gaz observées
en sortie ne varie pas beaucoup mais la vitesse globale d’écoulement augmente, réduisant
par là même le temps de séjour du gaz. C’est cette diminution du temps de contact entre
les deux phases qui semble être à l’origine de la chute des performances d’absorption.
V V+dV
Qs, Csi
Qe, Cei FCO2(V) FCO2(V+dV)
Te, P e FCH4(V) FCH4(V+dV) Ts, Ps
Figure 7.11 – Schéma du réacteur dans le cadre du modèle d’interprétation des résultats
Les bilans de matière différentiels en phase gaz sur les deux composants sont les
suivants :
∂FCO2 ∂CCO2
FCO2 (V ) = FCO2 (V ) + dV + (1 − ǫ) dV + RǫL dV (7.2)
∂V ∂t
∂FCH4 ∂CCH4
FCH4 (V ) = FCH4 (V ) + dV + (1 − ǫ) dV (7.3)
∂V ∂t
Avec :
119
– Fi (mol/s) : débit molaire de i en phase gaz
– Ci (mol/m3 ) : concentration molaire de i en phase gaz
– R (mol/m3 /s) : vitesse d’absorption par unité de volume de liquide
– ǫL (m3 liquide /m3 total ) : rétention liquide calculée par rapport des débits liquide et
total
– V (m3 ) : volume du réacteur utilisé comme coordonnée pour le modèle
dFCO2
= − RǫL (7.4)
dV
dFCH4
=0 (7.5)
dV
dCCO2 dQ
Q∗ + CCO2 ∗ = − RǫL (7.6)
dV dV
dCCH4 dQ
Q∗ + CCH4 ∗ =0 (7.7)
dV dV
Les pressions étant faibles, on peut considérer le gaz comme un mélange de gaz par-
faits :
PCO2 P ∗ yCO2
CCO2 = = (7.9)
RT RT
PCH4 P ∗ (1 − yCO2 )
CCH4 = = (7.10)
RT RT
QP 1 dyCO2
∗ ∗ = −RǫL (7.11)
RT 1 − yCO2 dV
120
Le débit Q peut être déterminé à partir d’un bilan de matière (en régime permanent
le flux molaire de méthane est conservé) :
e
FCH4 (V ) = FCH 4
(7.12)
e e
Q ∗ CCH
Q(V ) = 4
(7.13)
CCH4 (V )
e
e 1 − yCO
Q(V ) = Q ∗ 2
(7.14)
1 − yCO2 (V )
i
R = kL a ∗ (CCO2 ,L
− CCO2 ,L ) (7.16)
Avec :
i
– CCO 2 ,L
(mol/m3 ) : concentration du dioxyde de carbone à l’interface côté liquide,
en équilibre avec la pression partielle de dioxyde de carbone à l’interface côté gaz,
– CCO2 ,L (mol/m3 ) : concentration du dioxyde de carbone en phase liquide.
Si l’on suppose que la résistance au transfert en phase gazeuse est négligeable (c’est
à dire que la fraction molaire de CO2 à l’interface à la même valeur qu’au sein du gaz)
et que la loi de Henry décrit bien l’équilibre à l’interface :
i i
CCO2 ,L
= PCO2
∗ H = Ptot ∗ yCO2 ∗ H (7.17)
Avec :
– H (mol/m3 /Pa) : constante de Henry du dioxyde de carbone dans le solvant utilisé.
La concentration en dioxyde de carbone dans le liquide est calculée à l’aide d’un bilan
de matière sur la phase liquide en régime permanent :
dCCO2 ,L RǫL
= (7.19)
dV QL
121
On obtient finalement l’équation 7.20 qu’on résout numériquement par la méthode
d’Euler explicite.
dyCO2 RT ǫL (1 − yCO2 )2
= −kL a ∗ (Ptot ∗ yCO2 ∗ H − CCO2 ,L ) ∗ e ∗ e
(7.20)
dV Q Ptot 1 − yCO2
Configuration 1
Les résultats pour la configuration 1 sont présentés sur la figure 7.12
0.5
QG= 50 mL/min
0.45
Q = 25 mL/min
G
0.4 Q = 13 mL/min
G
0.35
0.3
k a (s−1)
0.25
L
0.2
0.15
0.1
0.05
0
0 10 20 30 40 50 60 70
Débit d’eau (mL/min)
Figure 7.12 – Valeurs de kL a en fonction du débit d’eau pour différents débits de biogaz.
122
Les valeurs de kL a s’échelonnent entre 0,05 et 0,3 s-1 et augmentent avec le débit
de gaz, ce qui constitue un comportement différent de celui observé lors des mesures
directes d’efficacité d’absorption (paragraphe 7.2). En effet, à débit liquide fixé, l’efficacité
présentait un maximumen fonction débit de gaz. Or, bien que cette efficacité ne soit que
légèrement plus faible lorsque le débit de gaz est très important, les résultats de la figure
7.12 montrent que l’intensité du transfert est plus importante à débit élevé, ce qui se
traduit par une valeur de kL a plus élevée. Pour chaque débit de gaz, kL a semble passer
par un maximum lorsque le débit d’eau augmente.
Configuration 2
0.2
QG=50 mL/min
0.18
Q =25 mL/min
G
0.16 QG=13 mL/min
0.14
0.12
k a (s )
−1
0.1
L
0.08
0.06
0.04
0.02
0
0 10 20 30 40 50 60 70
Débit d’eau (mL/min)
Figure 7.13 – Valeurs de kL a en fonction du débit d’eau pour différents débits de biogaz.
Les valeurs de kL a s’échelonnent entre 0,02 et 0,16 s-1 et augmentent avec le débit de
gaz. Le coefficient volumique de transfert kL a semble passer, là encore, par un maximum
lorsque le débit d’eau augmente, et ce pour chacun des débits de gaz étudiés. Par rapport
à la configuration 1, les valeurs de kL a obtenues pour les mêmes débits sont divisés de
moitié. L’intensité du transfert de matière est donc moins importante dans ce second
système, ce qui peut être lié à la coalescence des bulles dans le tube d’observation.
123
Estimation des différentes contributions
Les valeurs de kL a ainsi déterminées sont des valeurs globales pour le système pris
dans sa totalité : le micro-mélangeur, le tube qui le relie au séparateur et le séparateur
gaz-liquide. Comme nous l’avons indiqué plus haut, des expériences spécifiques indiquent
que l’on peut négliger l’absorption dans le séparateur. Selon la représentation schématique
du système présentée à la figure 7.14, les valeurs mesurées sont (kL a)conf 1 et (kL a)conf 2 .
La valeur caractéristique du Caterpillar seul que nous cherchons à calculer est (kL a)M M .
Tous les temps de passage τ sont calculés sur la base du débit total d’alimentation et
du volume. Les valeurs numériques présentées ci-dessous sont associées aux conditions
expérimentales suivantes :
– débit d’eau QL = 40 mL/min
– débit de biogaz QG = 50 mL/min
conf1
(kLa)
conf1
MM
T3 RS
conf2
(kLa)conf2
(kL a)conf 2 ∗ τconf 2 = (kL a)M M ∗ τM M + (kL a)T 3 ∗ τT 3 + (kL a)RS ∗ τRS
(7.23)
= (kL a)conf 1 ∗ τconf 1 + (kL a)T 3 ∗ τT 3
124
On peut ainsi déterminer la valeur de (kL a)T 3 qui est estimée à 0,08 s-1 . Cette valeur
est du même ordre de grandeur que celles obtenues par Vandu et al. [122] pour le transfert
air-eau dans des canaux de faible diamètre (1 à 3 mm).
Finalement, si l’on suppose que le coefficient de transfert du raccord vers le séparateur
est identique à celui de tube T3, on peut estimer la contribution du micro-mélangeur seul
à l’aide de l’équation 7.22. Cette hypothèse s’appuie sur le fait que les deux éléments
comparés sont constitués de tubes du même diamètre et que le régime d’écoulement et
la taille des bulles, établis dès les premiers centimètres du tube T3, varie peu par la
suite. Sous ces précautions d’interprétation, on peut estimer le coefficient de transfert du
micro-mélangeur seul à (kL a)M M = 3.5 s-1 .
Table 7.1 – Valeurs numériques pour le calcul des différentes contributions pour QL =
40 mL/min et QG = 50 mL/min.
Elément τ (s) kL a ∗ τ kL a (s-1 )
Conf2 2,2 0,35 0,16
Conf1 0,81 0,24 0,3
T3 1,4 0,11 0,078
MM 0,052 0,18 3,5
RS 0,75 0,059 0,078
dyCO2 HRT ǫL
q
=− e e
∗a∗ kL2 + kapp D ∗ yCO2 (1 − yCO2 )2 (7.25)
dV Q Ptot (1 − yCO2
)
où l’indice i représente l’une des 4 expériences réalisées en faisant varier la concen-
tration de catalyseur (tableaux 7.2 et 7.3). L’optimisation permet donc de trouver les
valeurs de kL et a qui assurent le meilleur accord entre les valeurs de yCO2 mesurées en
125
sortie du réacteur d’une part et les valeurs de yCO2 calculées par le modèle d’autre part,
et ce pour l’ensemble des 4 expériences.
Les conditions choisies pour ces expériences sont celles qui permettent une manipula-
tion aisée :
– un débit de liquide de 40 mL/min permet de remplir le séparateur en moins de 10
minutes. Ce délai est suffisant pour l’établissement d’un régime d’écoulement stable
et permet de limiter la durée d’une expérience.
– un débit de gaz de 50 mL/min assure une bonne mobilité du gaz et limite les effets
de dilution dans le séparateur.
Configuration 1
Les expériences réalisées pour la mesure de kL et a sont résumées dans le tableau 7.2.
Les valeurs de kL et a permettant d’avoir le meilleur accord entre ces données expérimentales
et les valeurs calculées par le modèle sont :
kL = 6,02.10−4 m.s−1
a = 802 m−1
kL a = 0,48 s−1
126
20
18 Configuration 1 (Experience)
Configuration 1 (Modèle)
16
Fraction molaire de CO2 en sortie (%)
14
12
10
0
0 50 100 150
Constante de vitesse kapp (s−1)
Configuration 2
Les expériences réalisées pour la mesure de kL et a sont résumées dans le tableau 7.3.
Les valeurs de kL et a permettant d’avoir le meilleur accord entre ces données expérimentales
et les valeurs calculées par le modèle sont :
127
20
Configuration 2 (Experience)
18
Configuration 2 (Modèle)
16
Fraction molaire de CO2 en sortie (%)
14
12
10
0
0 50 100 150
Constante de vitesse kapp (s−1)
kL = 2,26.10−4 m.s−1
a = 599 m−1
kL a = 0,14 s−1
128
volume de contact gaz-liquide est multiplié par 2,75 entre les deux configurations, ce qui
montre que l’intensité du transfert est bien plus importante dans la première configuration
et donc que le micro-mélangeur est le siège d’une part très importante du transfert.
7.4 Conclusion
Des expériences d’absorption du dioxyde de carbone contenu dans un biogaz synthétique
ont été réalisées en utilisant un micro-mélangeur. Les mesures permettent de montrer
qu’il est possible de capturer dans l’eau jusqu’à 25% du CO2 contenu dans le gaz. Dans
une variante du système, l’ajout d’un tube destiné à l’observation de la dispersion gaz-
liquide a un impact assez faible sur l’efficacité d’absorption car celui-ci est beaucoup
moins performant que le micro-mélangeur. Ceci est confirmé par des mesures de kL a
pour différentes conditions expérimentales. La détermination de kL a grâce à des mesures
d’absorption physique d’un coté et d’absorption avec réaction chimique de l’autre conduit
à des résultats similaires : les valeurs de kL a s’échelonnent -selon les systèmes et les débits
d’alimentation- entre 0,02 et 0,5 s-1 et offrent une bonne comparaison avec la littérature.
Pour le micro-mélangeur kL a est estimé à 3,5 s-1 ce qui témoigne de sa forte intensité de
transfert de matière.
129
Table 7.4 – Résumé des travaux sur la mesure de kL a en micro-canal issus de la
littérature.
Auteur Gaz Système kL (m/s) a (m-1 ) kL a (s-1 )
Canaux
Berčič and circulaires
CH4 - - 0,006 - 0,3
Pintar [34] d=1,5 ; 2,5 ; 3,1
mm
Canaux
Roudet et
Air rectangulaires 1 - 5.10-4 200 - 1600 0,05 - 0,7
al. [126]
dH = 2 mm
Canaux
Sobieszuk
CO2 circulaires d = - - 2 - 6,0
et al. [127]
0,4 mm
Canaux
Tan et al.
CO2 rectangulaires 1 - 7.10-4 - -
[128]
dH = 0,44 mm
Canaux
Wang et rectangulaires
O2 - - 0,4 - 2
al. [129] dH = 66,7 ;
133,3 ; 266,7 µm
Canaux
3000 -
Yue [36] CO2 rectangulaires 5 - 15.10-4 0,2 - 21
9000
dH = 666,7 µm
130
Chapitre 8
Ce chapitre présente les résultats des expériences de reformage du biogaz. Les me-
sures de conversion des réactifs en fonction de la température sont présentées et mises en
relation avec les différents schémas réactionnels possibles. La détermination des concen-
trations de sortie en fonction de la variation du temps de passage dans le réacteur permet
d’évaluer la vitesse apparente de réaction et de mettre en évidence d’éventuelles limita-
tions diffusionnelles.
8.1 Définitions
Les définitions adoptées pour l’ensemble de ce chapitre sont regroupées dans cette
section.
8.1.1 Conversion
Le calcul du taux de conversion d’un réactif permet de savoir quelle fraction de ce
réactif a été transformée. Il est compris entre 0 et 1.
Conversion du méthane :
e s
FCH − FCH
XCH4 = 4
e
4
(8.1)
FCH 4
Avec :
– Xi (-) : taux de conversion de l’espèce i,
– Fie , Fis (mol/s) : débit molaire de l’espèce i respectivement en entrée et en sortie
du réacteur.
131
La mesure du débit molaire en sortie de réacteur nécessite la mesure du débit volu-
mique. Cette mesure est complexe à cause des changements de température importants le
long du flux de gaz. Pour cette raison, on fait appel au raisonnement suivant pour obtenir
les valeurs numériques des taux de conversion à partir des seules fractions molaires :
Fie − Fis
Xi = (8.3)
Fie
Qe Cie − Qs Cis
Xi = (8.4)
Qe Cie
Avec :
– Qe , Qs (m3 /s) : débit volumique total respectivement en entrée et en sortie du
réacteur,
– Ci (mol/m3 ) : concentration molaire de l’espèce i.
Si l’on considère que l’on est en présence d’un mélange de gaz parfaits (pression proche
de la pression atmosphérique) :
P e ye P s ys
Qe RT ei − Qs RT si
Xi = P e ye
(8.5)
Qe RT ei
Avec
– P e , P s (Pa) : pression totale respectivement en entrée et en sortie du réacteur,
– T e , T s (K) : température respectivement en entrée et en sortie du réacteur,
– yi (mol/m3 ) : fraction molaire de l’espèce i.
– R (J/K) : constante des gaz parfaits.
P e yN
e s s
s P y N2
Qe 2
= Q (8.7)
RT e RT s
Finalement, on fait l’hypothèse que la pression est constante (la variation de pression
mesurée est inférieure à 0,02 bar) :
Qs T s yN
e
= s
2
(8.8)
Qe T e yN 2
ye
yie − yis yNs 2
N2
Xi = (8.9)
yie
132
8.1.2 Temps de séjour
Le temps de séjour ts des molécules dans le réacteur est défini par :
V
dV
Z
ts = (8.10)
0 Q
A cause de la réaction chimique, Q varie tout au long du réacteur et cette relation
n’est pas intégrable en l’état.
On définit toutefois un temps de passage τ qui sera égal au temps de séjour dans le
cas où Q ne varie pas :
V
τ= e (8.11)
Q
Enfin, on introduit un temps de passage modifié qui prend en compte la masse de
catalyseur plutôt que le volume du réacteur :
Mcatalyseur
τ′ = (8.12)
Qe
CH4
0.9
CO2
0.8
Taux de conversion
0.7
0.6
0.5
0.4
0.3
0.2
0.1
0
0 100 200 300 400 500 600 700 800
Température (°C)
133
Les taux de conversion augmentent avec la température mais ne dépassent jamais 10%
car l’énergie de la liaison C-H dans la molécule de méthane est importante (431 kJ/mol).
La quantité d’énergie nécessaire pour la réaction peut être abaissée par l’utilisation d’un
catalyseur. Le ruthénium (utilisé ici sur un support d’alumine) est connu pour avoir
une activité catalytique importante ainsi qu’une résistance à la formation de coke [130],
[131]. La masse de catalyseur placée dans le canal de réaction est fixée pour toutes les
expériences à 25 mg.
0.7
0.6 N
2
0.5
Fraction molaire à l’équilibre
0.4
0.3
CO
0.2 CH H
4 2
CO2
0.1
0 H O
2
−0.1
0 200 400 600 800 1000 1200
Température (°C)
134
départ pour des températures inférieures à 300°C. A partir de 400°C, les réactifs sont
consommés pour produire dihydrogène, monoxyde de carbone et eau. Au-delà de 800°C,
les réactifs ont disparu et la composition du mélange n’évolue plus.
La composition d’équilibre dépend naturellement de la composition de départ. Dans ce
travail, quatre ratios CH4 : CO2 sont étudiés : 1,7, 1,3, 1 et 0,75. Nous nous intéresserons
donc à quatre courbes d’équilibre qui sont proposées à la figure 8.3.
0.8 0.8
0.6 0.6
0.4 0.4
0.2 0.2
0 0
0 200 400 600 800 0 200 400 600 800
CH
4
CO
2
CH :CO = 1 CH :CO = 0,75
4 2 4 2
1 1
Conversion à l’équilibre
0.8 0.8
0.6 0.6
0.4 0.4
0.2 0.2
0 0
0 200 400 600 800 0 200 400 600 800
Température (°C)
Lorsque le méthane est en excès dans l’alimentation (ratios de 1,7 et 1,3), son taux de
conversion est toujours inférieur à celui du dioxyde de carbone. A l’inverse si le dioxyde de
carbone est en excès (ratio de 0,75), le taux de conversion du méthane est meilleur. Si le
mélange est équimolaire (ratio de 1) la conversion du dioxyde de carbone est légèrement
135
supérieure à cause de la réaction inverse de Water-Gas-Shift (eq. 8.13).
H2 + CO2 = CO + H2 O (8.13)
Cette réaction affecte aussi la distribution des produits en consommant le dihydrogène
formé pour le convertir en monoxyde de carbone et en eau.
La figure 8.4 permet de comparer les taux de conversion à différents ratio séparément
pour chaque réactif.
1
Conversion de CH4 à l’équilibre
CH : CO = 1,7
4 2
0.8 CH4 : CO2 = 1,3
CH : CO = 1
0.6 4 2
CH : CO = 0,75
4 2
0.4
0.2
0
26.85 126.85 226.85 326.85 426.85 526.85 626.85 726.85 826.85
Température (°C)
1
Conversion de CO2 à l’équilibre
CH : CO = 1,7
4 2
0.8 CH4 : CO2 = 1,3
CH : CO = 1
0.6 4 2
CH : CO = 0,75
4 2
0.4
0.2
0
26.85 126.85 226.85 326.85 426.85 526.85 626.85 726.85 826.85
Température (°C)
Figure 8.4 – Taux de conversion du méthane (en haut) et du dioxyde de carbone (en
bas) en fonction de la température pour différents ratios CH4 : CO2 .
136
0.6
0.5
N
2
0.4
Fraction molaire à l’équilibre
0.3
H
2
0.2 C
(s)
CO
H O
2
0.1 CO
2
0 CH
4
−0.1
100 200 300 400 500 600 700 800 900
Température (°C)
0
Réaction ∆H298 (kJ.mol−1 )
(1) 2CO = C + CO2 -172
(2) CH4 = C + 2H2 75
(3) H2 + CO = H2 O + C -131
(4) CO2 + 2H2 = C + 2H2 O -90
Si l’on ajoute le carbone en phase solide aux constituants possibles lors de la résolution
de l’équilibre, on obtient une répartition très différente comme on peut le voir à la figure
8.5.
Dans ce cas de figure, les quantités de carbone solide et d’eau formées à l’équilibre
est importante, elles ne diminuent que pour des températures supérieures à 800°C car les
réactions impliquées (tableau 8.1) sont plutôt favorisées à faible température et subissent
la concurrence de la réaction de reformage à haute température [72]. Plus précisément,
la réaction (1) de dismutation du monoxyde de carbone apparait pour des températures
inférieures à 700°C, tandis que la réaction (2) de dissociation du méthane est favorisée si
la température est supérieure à 560°C [132]. Dans l’intervalle commun de 560 à 700°C, la
formation de carbone serait due aux deux réactions en parallèle.
137
Les conversions à l’équilibre de CH4 et CO2 en fonction de la température pour les
différentes compositions d’alimentation sont présentés en figure 8.6.
La conversion des deux réactifs est importante à faible température lorsque la forma-
tion de carbone est prise en compte dans les calculs d’équilibre. Les courbes présentent
plusieurs parties :
– une augmentation de la conversion jusqu’aux environs de 150°C qui correspond aux
réactions de formation de carbone à faible température mentionnée plus haut,
– une diminution entre 150 et 550°C due à la réaction exothermique CO2 + 2H2 =
C + 2H2 O qui est de moins en moins favorisée lorsque la température augmente,
affaiblissant la conversion du CO2 [72],
– une augmentation au dessus de 550°C engendrée par l’augmentation de la constante
d’équilibre de la réaction de reformage.
138
CH :CO = 1,7 CH :CO = 1,3
4 2 4 2
1 1
0.8 0.8
0.6 0.6
0.4 0.4
0.2 0.2
0 0
0 200 400 600 800 0 200 400 600 800
CH
4
CO
2
CH :CO = 1 CH :CO = 0,75
4 2 4 2
1 1
Conversion à l’équilibre
0.8 0.8
0.6 0.6
0.4 0.4
0.2 0.2
0 0
0 200 400 600 800 0 200 400 600 800
Température (°C)
139
Table 8.2 – Valeurs du taux de conversion du méthane dans les différentes conditions
expérimentales testées.
Qe T(°C)
CH4 : CO2
(mL/min) 30 300 400 500 600 700 800
1,7 45 0,00 0,00 0,07 0,16 0,25 0,43 0,54
1,7 80 0,00 0,01 0,02 0,12 0,21 0,29 0,42
1,7 100 0,00 -0,02 -0,01 0,07 0,17 0,30 0,45
1,7 120 0,00 -0,01 0,02 0,09 0,16 0,19 0,33
1,3 20 0,00 -0,02 0,08 0,23 0,52 0,68 0,76
1,3 45 0,00 0,01 0,04 0,16 0,34 0,57 0,71
1,3 80 0,00 0,00 0,03 0,16 0,25 0,33 0,49
1,3 100 0,00 0,07 0,08 0,10 0,28 0,31 0,44
1,3 120 0,00 -0,01 -0,01 0,08 0,20 0,27 0,42
1 20 0,00 0,03 0,08 0,19 0,66 0,89 0,99
1 45 0,00 0,05 0,07 0,22 0,49 0,83 0,93
1 80 0,00 -0,01 0,05 0,25 0,41 0,49 0,70
1 100 0,00 0,00 0,06 0,14 0,22 0,45 0,72
1 120 0,00 -0,01 0,02 0,12 0,29 0,51 0,60
0,75 45 0,00 0,02 0,09 0,31 0,66 0,89 0,98
0,75 80 0,00 0,00 0,04 0,21 0,38 0,75 0,82
0,75 100 0,00 0,02 0,04 0,15 0,36 0,59 0,81
0,75 120 0,00 -0,01 0,02 0,09 0,16 0,19 0,33
140
Table 8.3 – Valeurs du taux de conversion du dioxyde de carbone dans les différentes
conditions expérimentales testées.
Qe T (°C)
CH4 : CO2
(mL/min) 30 300 400 500 600 700 800
1,7 45 0,00 0,00 0,13 0,37 0,55 0,85 1,00
1,7 80 0,00 0,00 0,06 0,28 0,45 0,65 0,84
1,7 100 0,00 -0,01 0,03 0,20 0,42 0,70 0,90
1,7 120 0,00 0,00 0,05 0,21 0,37 0,46 0,69
1,3 20 0,00 -0,01 0,13 0,38 0,75 0,91 0,97
1,3 45 0,00 0,00 0,06 0,26 0,57 0,86 1,00
1,3 80 0,00 0,00 0,09 0,30 0,45 0,60 0,80
1,3 100 0,00 0,06 0,08 0,22 0,43 0,52 0,68
1,3 120 0,00 0,01 0,05 0,21 0,41 0,55 0,50
1 20 0,00 -0,01 -0,01 0,20 0,79 0,57 0,84
1 45 0,00 0,04 0,06 0,28 0,59 0,87 0,97
1 80 0,00 0,01 0,11 0,39 0,60 0,69 0,87
1 100 0,00 0,00 0,09 0,14 0,29 0,60 0,87
1 120 0,00 0,00 0,05 0,20 0,43 0,68 0,76
0,75 45 0,00 0,00 0,08 0,30 0,64 0,81 0,91
0,75 80 0,00 0,00 0,05 0,23 0,42 0,70 0,73
0,75 100 0,00 0,01 0,05 0,16 0,40 0,61 0,77
0,75 120 0,00 0,01 0,05 0,18 0,29 0,45 0,67
141
1 1
0.8 0.8
0.7 0.7
2
Conversion de CH4
Conversion de CO
0.6 0.6
0.5 0.5
0.4 0.4
0.3 0.3
0.2 0.2
0.1 0.1
0 0
0 100 200 300 400 500 600 700 800 0 100 200 300 400 500 600 700 800
Température (°C) Température (°C)
Figure 8.7 – Taux de conversion du méthane (à gauche) et du dioxyde de carbone (à
droite) en fonction de la température pour un ratio CH4 : CO2 = 1.3 et un débit volumique
d’alimentation de 20 mL/min.
142
1
0.9
0.8
0.7
Conversion de CH4
0.6
0.5
0.4
0.3
0.2 800
0.1 600
400
0
120
100 200 Température (°C)
80
60
40
20 0
Débit volumique d’entrée (mL/min) 0
300°C
600°C
1 800°C Equilibre à 800°C
0.8
Conversion de CH4
Equilibre à 600°C
0.6
0.4
0.2
Equilibre à 300°C
0
0 0.02 0.04 0.06 0.08 0.1 0.12 0.14 0.16 0.18 0.2
Temps de passage τ (s)
143
1
0.9
0.8
0.7
2
Conversion de CO
0.6
0.5
0.4
0.3
0.2 800
0.1 600
400
0
120
100 200 Température (°C)
80
60
40
20 0
Débit volumique d’entrée (mL/min) 0
On peut en conclure que pour obtenir une conversion maximale, un temps de pas-
sage d’au moins 80 ms est nécessaire, ce qui correspond à un débit d’alimentation de 45
mL/min. C’est l’un des résultats imputables à l’utilisation d’un système de faibles dimen-
sions. Pour un même temps de passage modifié (τ ′ = Mcatalyseur /Qe ), les performances
sont meilleures que dans un système de dimensions plus importantes [91], [92]. La valeur
qui permet ici d’obtenir une conversion maximale des deux réactifs est de :
τ ′ = 9,3 g.h/m3
144
1.2
Equilibre à 800°C
1
0.8
Conversion de CO2
Equilibre à 600°C
0.6
0.4 300°C
600°C
800°C
0.2
Equilibre à 300°C
0
0 0.02 0.04 0.06 0.08 0.1 0.12 0.14 0.16 0.18 0.2
Temps de passage τ (s)
La figure 8.12 présente les valeurs des taux de conversion du méthane et du dioxyde
de carbone en fonction du ratio CH4 : CO2 pour un débit de 45 mL/min et différentes
températures. Les résultats obtenus s’inscrivent dans la tendance dessinée par les calculs
d’équilibre (figure 8.4). Le taux de conversion du méthane diminue lorsque R augmente,
tandis que celui du dioxyde de carbone augmente dans le même temps. Ceci est bien
entendu lié au fait que pour R > 1, le méthane est en excès et alternativement que pour
R < 1, le dioxyde de carbone est en excès. La tendance est d’autant plus visible pour
le méthane que les ratios testés sont en majorité supérieurs à 1. De plus, la réaction
inverse de Water-Gas-Shift consomme du CO2 si bien que, même lorsqu’il est en excès,
sa conversion reste importante.
145
400°C
600°C
1 800°C
4
Conversion de CH
0.8
0.6
0.4
0.2
0
0 0.5 1 1.5 2
Ratio CH4 : CO2
400°C
1 600°C
800°C
2
Conversion de CO
0.8
0.6
0.4
0.2
0
0 0.5 1 1.5 2
Ratio CH : CO
4 2
Figure 8.12 – Taux de conversion du méthane (en haut) et du dioxyde de carbone (en
bas)en fonction du ratio CH4 : CO2 à différentes températures
146
0.9
0.8
0.7
0.6
0.5
H /CO
2
0.4
0.3
0.2
0.1 1.7
1.3
0
800 700 1 Ratio CH : CO
600 4 2
500 400 300 0.75
200 100
Température (°C) 0
H2 + CO2 = CO + H2 O (8.15)
C’est cette dernière réaction qui permet d’expliquer la faiblesse du ratio H2 /CO.
0
Cependant, cette réaction étant endothermique (∆H298 = 41 kJ/mol), le ratio devrait
diminuer avec la température au contraire de la tendance observée ici. La mesure de la
147
quantité d’eau produite serait utile pour évaluer l’importance de cette réaction mais elle
n’a pas été possible dans notre système. D’autres auteurs [134] font le même constat et
expliquent l’augmentation du ratio H2 /CO par l’occurrence de la réaction de reformage
à la vapeur :
CH4 + H2 O = 3H2 + CO (8.16)
L’augmentation de la quantité de méthane dans l’alimentation a un effet positif sur
le ratio H2 /CO surtout pour R > 1 car la quantité d’atomes d’hydrogène disponible
devient de plus en plus importante. D’après les calculs d’équilibre de [72], la production
d’hydrogène diminue pour des températures supérieures à 900°C si R est inférieur à 1. Le
même raisonnement est valable pour la disponibilité de l’oxygène lorsqu’on fait varier la
quantité de dioxyde de carbone dans l’alimentation.
Ainsi, si l’on raisonne sur une tranche de réacteur de volume ∆V variable mais suffi-
samment mince pour que l’on puisse la considérer comme parfaitement agitée, la vitesse
de formation du produit j peut s’écrire :
1 dnj
rj = (8.17)
∆V dts
Avec
– rj (mol/m3 /s) : vitesse de production nette de j
– ∆V (m3 ) : volume du réacteur fermé
– nj (mol) : quantité de matière de j
– ts (s) : temps de séjour dans le réacteur.
Le volume de la tranche est noté ∆Ve et ∆Vs respectivement à l’entrée et à la sortie
du réacteur (voir figure 8.14). L’abscisse décrit la position de la tranche dans le réacteur
(elle varie entre 0 et V).
La tranche étant parfaitement agitée, on peut écrire :
′ 1 d(Cj ∆V )
rj (V ) = (8.18)
∆V dts V′
148
V
V'
Qe Qs
ΔVe ΔV ΔVs
Figure 8.14 – Schéma du réacteur piston avec les notations utilisées dans le
développement.
∆V
!
1 d(Cj ∆Ve )
rj (V ′ ) = ∆V
(8.19)
∆Ve
dts
V′
L’expansion du volume du réacteur fermé, représentée par le rapport ∆V /∆Ve , peut
être remplacée par le rapport Q/Qe du débit volumique courant au débit volumique
d’entrée par analogie entre le réacteur piston et une suite de petits réacteurs à volumes
variables.
∆Q
!
1 d(C j ∆Q
)
rj (V ′ ) = ∆Q e
(8.20)
∆Q
dt s ′
e V
Finalement, si l’on se réfère aux définitions établies au paragraphe 8.1.2, on constate
que :
∆Q
dτ = dts (8.21)
∆Qe
Ainsi, en introduisant le débit molaire Fj égal au produit de la concentration molaire
Cj et du débit volumique Q, on obtient une expression utile de la vitesse à l’abscisse V ′ :
F
d Qje
′
rj (V ) = (8.22)
dτ
V′
Naturellement, cette définition est aussi valable pour la vitesse de consommation d’un
réactif au signe près.
Enfin, en utilisant une expression de la vitesse plus adaptée à une réaction hétérogène,
on peut obtenir un autre résultat utile. En effet, si l’on utilise comme extensité la masse
de catalyseur et non le volume du réacteur, on peut définir la vitesse de formation du
produit j comme :
1 dnj
rj′ = (8.23)
m dt
149
Le développement présenté plus haut reste valable en remplaçant le temps de passage
τ par le temps de passage modifié τ ′ (voir paragraphe 8.1.2), aboutissant à l’expression
de la vitesse par unité de masse de catalyseur :
F
d Qje
′ ′
rj (V ) = (8.24)
dτ ′
V′
8.5.2 Résultats
Les formules données ci-dessus nous permettent d’évaluer la vitesse de formation (resp.
de disparition) de l’espèce j en mesurant la dérivée de la courbe représentant Fj /Qe (resp.
-Fj /Qe ) en fonction de τ ou τ ′ . Un exemple de ce raisonnement est proposé à la figure
8.15.
Il est important de noter que cette méthode permet d’accéder exclusivement à la
vitesse en sortie de réacteur. Pour connaitre les vitesses le long du réacteur, il faudrait
avoir accès à l’évolution des concentrations.
Au contraire, à 800°C, le rapport F/Qe augmente avec le temps de passage pour les
produits et diminue pour les réactifs. Dans les deux cas, il semble tendre vers une valeur
asymptotique pour des temps de passage importants. Cette observation confirme que
pour les débits les plus faibles, la conversion des réactifs atteint un maximum fixé par
l’équilibre chimique. De plus, le fait que la pente de la courbe diminue vers les temps
de passage importants indique que la vitesse de réaction devient plus faible, ce qui est
cohérent si l’on s’approche de l’équilibre. A l’inverse, pour des valeurs de τ faibles, la
pente est plus grande, indiquant une vitesse de réaction plus importante. Lorsque τ tend
vers 0 (c’est-à-dire, à volume constante, lorsque Qe tend vers l’infini), la vitesse est la
même dans tout le réacteur qui agit alors comme un réacteur parfaitement agité. Par
conséquent, le débit molaire de sortie d’un produit j est égal à rj ∗ V et le rapport Fj /Qe
tend vers rj ∗ τ = 0.
150
12
10
F/Q (mol/m )
3
6 T=300°C
e
CO
2
4 CH
4
CO
2
H
2
0
0 0.05 0.1 0.15 0.2
Temps de passage τ (s)
25
CO T=800°C
2
CH
20 4
CO
F/Q (mol/m )
3
H2
15
e
10
0
0 0.05 0.1 0.15 0.2
Temps de passage τ (s)
Figure 8.15 – Valeur du rapport Fj /Qe en fonction de τ pour un ratio CH4 : CO2 = 1.3
à deux températures différentes.
151
26
CO expériences
24
CO régression
H expériences
22 2
H régression
2
20
F/Q (mol/m )
3
18
16
e
14
12
10
8
−3.6 −3.4 −3.2 −3 −2.8 −2.6 −2.4 −2.2 −2 −1.8
ln( τ (s))
Figure 8.16 – Exemple de régression pour un ratio CH4 : CO2 = 1.3 à 800°C.
Pour ces deux produits majoritaires, on constate que, pour chaque débit testé, la
vitesse augmente avec la température jusqu’à 700°C. Ce comportement était prévisible
car il est lié à l’augmentation des constantes cinétiques des réactions impliquées dans le
mécanisme de reformage. Cependant, cette augmentation de la vitesse cesse lorsque la
température dépasse 700°C. Cette tendance, observée pour tous les débits testés, n’a pas
pu être expliquée.
On peut également observer que les vitesses de formation de CO et H2 sont d’autant
plus importantes que le débit d’entrée est fort. Ceci s’interprète en terme de diminution
du temps de séjour des molécules dans le réacteur : si les réactifs ont moins de temps
pour réagir, leur concentration reste élevée jusqu’à la sortie du réacteur, contribuant
à entretenir une vitesse de réaction importante. Cependant, établir des relations entre
débit de réactifs et vitesse de réaction peut mener à des erreurs d’interprétation dues à
l’éventuelle existence de limitations diffusionnelles.
152
250
Vitesse de formation de CO (mol//m /s)
3
200
150
100
50
0
120
100
800
80 750
700
60 650
3 600
Débit volumique (m /s) 40 Température (°C)
550
20 500
153
250
Vitesse de formation de H (mol//m3/s)
200
2
150
100
50
0
120
100
800
80 750
700
60 650
3 600
Débit volumique (m /s) 40
Température (°C)
550
20 500
154
Table 8.4 – Valeurs de la vitesse de formation (en mol/m3 /s) du monoxyde de carbone
dans les différentes conditions expérimentales testées.
T(°C)
CH4 : CO2 Qe (mL/min)
500 600 700 800
1,7 45 31,7 47,0 102,3 82,2
1,7 80 55,0 81,6 178 143
1,7 120 82 121 265 213
1,3 20 10,7 26,6 37,2 35,2
1,3 45 25,5 63,7 89,0 84,1
1,3 80 44,8 112 156,3 148
1,3 120 67,3 168 234 222
1 20 - 21,2 24,0 23,5
1 45 - 53,4 60,9 59,8
1 80 - 93,5 105,7 104
1 120 - 143 162 159
0,75 45 94,7 109 150 141
0,75 80 - 187 - 243
0,75 120 171 291 400 377
155
Table 8.5 – Valeurs de la vitesse de formation (en mol/m3 /s) du dihydrogène dans les
différentes conditions expérimentales testées.
T(°C)
CH4 : CO2 Qe (mL/min)
500 600 700 800
1,7 45 21,1 45,4 91,1 80,5
1,7 80 36,6 78,7 158 140
1,7 120 54,7 118 236 209
1,3 20 9,77 26,2 34,1 31,8
1,3 45 23,3 62,6 81,4 75,9
1,3 80 41,0 110 143 133
1,3 120 61,5 165 215 200
1 20 - 15,9 21,0 17,1
1 45 - 40,3 53,2 43,5
1 80 - 69,9 92,3 75,4
1 120 - 107 141 116
0,75 45 69,4 91,6 124 111
0,75 80 - 157 - 191
0,75 120 126 245 332 197
156
8.6 Limitations diffusionnelles
La réaction catalytique prend place sur des sites actifs situés à la surface des particules
de ruthénium elles-mêmes dispersées sur la surface interne des grains d’alumine. Pour
pouvoir réagir, les réactifs présents dans le flux de biogaz doivent donc d’abord diffuser
à travers la couche limite pour atteindre la surface du grain de catalyseur (transfert
externe) puis diffuser dans le solide poreux (transfert interne). Les molécules peuvent alors
s’adsorber sur un site pour réagir. La désorption des produits leur permet de ressortir
du grain par diffusion dans une nouvelle étape de transport interne. Finalement, après
diffusion à travers la couche limite, ils rejoignent le gaz en écoulement. Ces étapes sont
représentés schématiquement sur la figure 8.19.
Ce
Couche limite
Transport externe
Surface d'un grain
Cs
de catalyseur
Solide poreux
Transport interne
Lieu de la
réaction
Réactifs Produits
Figure 8.19 – Schéma des différentes étapes de transport nécessaires à la réaction cata-
lytique hétérogène.
C’est la plus lente de ces étapes qui détermine la vitesse mesurée expérimentalement.
En étudiant ces étapes, on peut savoir si l’une d’elles provoque un ralentissement tel qu’il
serait susceptible de limiter la vitesse de la réaction.
NOTE :
Dans notre cas, il est souhaitable d’ajouter une étape de transport car le flux de gaz
ne traverse pas à proprement parler le lit de catalyseur dont la hauteur ne dépasse pas
un cinquième de la profondeur du canal. La disposition du catalyseur est rappelée à la
figure 8.20.
157
Etant donnée cette disposition particulière, il convient de se demander si les molécules
présentes dans le flux de gaz ont accès facilement à la couche de catalyseur. Le régime
d’écoulement laminaire dans le canal (le nombre de Reynolds ne dépasse jamais 50)
peut, en effet, entraı̂ner la présence d’un gradient de concentration sur la hauteur du
canal. Il apparait difficile d’accéder au gradient de concentration mais il est possible de
comparer le temps caractéristique de diffusion tdiffj de l’espèce j au temps de séjour dans
le réacteur qui peut-être sous-estimé par le temps de passage τ . Si on définit la longueur
caractéristique de diffusion comme étant égale à la hauteur du canal, on surestime le
temps caractéristique de diffusion. On compare ainsi un temps de séjour sous-estimé et
d’un temps de diffusion surestimé.
h2
tdiff
j = (8.25)
Dj
Avec :
– h (m) : longueur de diffusion caractéristique (profondeur du canal, égale à 1 mm),
– Dj (m2 /s) : diffusivité de l’espèce j dans le gaz.
Avec :
– DAB (cm2 /s) : diffusivité de A dans B,
– T (K) : température du gaz,
– P (atm) : pression du gaz,
– ΩD,AB (−), σAB (Å) : paramètres des potentiels de Lennard-Jones,
– MA , MB (g/mol) : masses molaires des constituants du mélange.
Avec les valeurs de la littérature [137], on calcule les diffusivités et les temps ca-
ractéristiques de diffusion à 300°C et 700°C. Les résultats sont rassemblés dans le tableau
8.6.
Les temps de diffusion diminuent lorsque la température augmente à cause de l’aug-
mentation de la diffusivité. Ces temps de diffusion sont plus faibles que tous les temps de
passage expérimentaux. Cependant, pour un débit de 120 mL/min, le temps de passage
est de 0.03 s : les temps de diffusion et les temps de séjour sont alors assez proches. Dans
ces circonstances extrêmes (temps de passage le plus faible) le transport des réactifs sur la
hauteur du canal pourrait être problématique. Notamment, la consommation des réactifs
sur la couche de catalyseur fait chuter la concentration locale si les molécules de méthane
et de dioxyde de carbone ont des difficultés à y accéder.
158
Paramètre 300°C 700°C
DCH4 −N2 (cm2 /s) 0,68 0,75
DCO2 −N2 (cm2 /s) 0,49 0,53
tdiff
CH4 (s) 0,015 0,013
tdiff
CO2 (s) 0,021 0,020
Avec :
– kD (m/s) : coefficient de transfert de matière,
– Cje , Cjs (mol/m3 ) : concentration de l’espèce j respectivement à l’extérieur de la
couche limite et à la surface du grain de catalyseur.
kD d p
Sh = = 2 + 1.8 Re1/2 Sc1/3 (8.28)
Dj
Avec :
– dp (m) : diamètre de la particule de catalyseur,
– Dj (m2 /s) : diffusivité de l’espèce j dans le gaz,
– Re (-) : nombre de Reynolds,
– Sc (-) : nombre de Schmidt.
159
Le calcul de la viscosité des gaz purs en fonction de la température est réalisé à partir
des potentiels de Lennard-Jones [139] selon la formule :
√
MT
µ = 2,6693.10−5 (8.30)
σ2Ω
Avec :
– µ (g/cm/s) : viscosité du gaz pur,
– M (g/mol) : masse molaire du gaz pur,
– T (K) : température,
– Ω (−), σAB (Å) : paramètres des potentiels de Lennard-Jones,
A partir des données sur les constituants majeurs du mélange (N2 , CO2 , CH4 ) on peut
estimer la viscosité du mélange à l’aide de la relation semi-empirique de Wilke [140] :
3
X xi ,µi
µmelange = P3 (8.31)
i=1 j=1 xj Φij
Avec :
– µi (Pa.s) : viscosité de i pur,
– xi (-) : fraction molaire de i,
– Mi (g/mol) : masse molaire de i,
Les données utilisées dans les calculs sont répertoriées au tableau 8.7.
Table 8.7 – Valeurs numériques pour le calcul des nombres adimensionnels à 700°C.
Constituant x µ (P a.s) ρ (kg/m3 ) D (m2 /s)
CH4 0,20 2,68.10−5 0,20 7,46.10−5
CO2 0,20 2,31.10−5 0,55 5,35.10−5
N2 0,60 2,89.10−5 0,35 -
Mélange 2,72.10−5 0,36 -
Les calculs sont menés pour un débit total d’alimentation de 100 mL/min et à une
température de 700°C. Il en résulte une vitesse de 1,67 m/s. Le diamètre moyen des
particules mesuré à l’aide d’un granulomètre laser (les détails de la mesure sont en annexe)
est de 17 µm. Dans ces conditions, le nombre de Reynolds vaut :
Re = 0,38
160
Calcul du nombre de Schmidt
Le nombre de Schmidt est calculé séparément pour le méthane et le dioxyde de carbone
car leurs diffusivités sont différentes :
µ
Sc = (8.33)
ρDj
Les données utilisées dans les calculs sont répertoriées dans le tableau 8.7. A la
température de 700°C, les valeurs obtenues sont :
ScCH4 = 1,0
ScCO2 = 1,4
Table 8.8 – Résumé des valeurs utilisées pour le calcul de la fraction de résistance externe
au transfert pour Qe = 100 mL/min et T =700°C, r = 400 mol/m3 .
Espèce D (m2 /s) Re Sc Sh kD (m/s) Cje (mol/m3 ) fe
CH4 7,46.10−5 0,38 1,0 3,1 14 3,9 2.10−5
CO2 1,07.10−4 0,38 1,4 3,2 10 3,7 3.10−5
161
8.6.2 Transport interne
On assimile ici le grain de catalyseur à un milieu pseudo-homogène dans lequel le
transfert de matière est contrôlé par un coefficient de diffusion effectif Df :
ǫp Dj
Djeff = (8.36)
τp
Avec :
– Djeff (m2 /s) : diffusivité effective de l’espèce j dans le solide poreux,
– ǫp (−) : porosité interne du catalyseur,
– τp (−) : tortuosité des pores du solide,
– Dj (m2 /s) : diffusivité de l’espèce j dans un pore.
Estimation de D
La valeur de Dj est conditionnée par le régime de diffusion dans les pores du catalyseur.
En effet, si le libre parcours moyen des molécules est du même ordre de grandeur que la
taille des pores, les collisions ont lieu avec la paroi plutôt qu’avec les autres molécules du
milieu. La valeur du libre parcours moyen est déterminée par la relation :
RT
l= √ (8.37)
π 2P N σ 2
Avec :
– R (J/mol/K) : constante des gaz parfaits,
– T (K) : température du gaz,
– P (P a) : pression du gaz,
– σ (Å) : diamètre moyen des molécules.
lCH4 = 2,1.10−7 m
lCO2 = 1,7.10−7 m
Quant au diamètre moyen des pores du catalyseur, il a été mesuré par une méthode
d’adsorption (les détails sont présentés en annexe) et vaut environ 1,4.10−8 m. Puisque le
libre parcours moyen des molécules est largement supérieur au diamètre moyen des pores,
la diffusivité des gaz est la diffusivité de Knudsen :
r
1 8RT
DK = δ (8.38)
3 πM
Soit, à 700°C :
DK,CH4 = 1,7.10−7 m2 /s
DK,CO2 = 1,0.10−7 m2 /s
162
Estimation de ǫ et τp
La valeur de la tortuosité τp est difficile à obtenir. Pour les besoins du calcul, nous
utiliserons des valeurs classiques pour des catalyseurs à base d’alumine [141] : ǫ = 0,5 et
τp = 7,5.
Critère de Weisz
Avec :
– r (mol/m3 /s) : vitesse de réaction,
– dp (m) : diamètre des particules de catalyseur,
– Deff (m2 /s) : diffusivité effective,
– Cs (mol/m3 ) : concentration en surface.
Le tableau 8.9 résume les valeurs utilisées pour les calculs. Le fait que le critère de
Weisz soit largement inférieur à 1 indique que la demande chimique est moins importante
que les possibilités de transport diffusionnel, de sorte que le processus de diffusion interne
ne limite pas la vitesse de réaction.
Table 8.9 – Résumé des valeurs utilisées pour le calcul de la fraction de résistance externe
au transfert pour Qe = 100 mL/min et T =700°C, r = 400 mol/m3 .
Espèce Df (m2 /s) Cs (mol/m3 ) Φ
CH4 1,11.10−8 3,9 0,07
CO2 6,73.10−9 3,7 0,12
163
Figure 8.21 – Images MEB d’un échantillon de catalyseur usagé.
Parmi les causes de désactivation se trouvent la fusion des particules de métal qui
conduit à la diminution de la surface active, la réaction du métal avec le support et
la formation de couches de carbone recouvrant les particules de métal [133]. L’absence
de désactivation ne signifie pas l’absence de carbone solide qui peut prendre des formes
filamenteuses qui ne participent pas à la désactivation.
La formation de coke peut être détectée par l’intermédiaire d’un bilan sur le carbone.
S’il n’y a pas de formation de carbone, on doit vérifier le bilan suivant :
e e s s s
FCH 4
+ FCO2
= FCH 4
+ FCO2
+ FCO (8.40)
L’indicateur BC défini par l’équation 8.41 doit alors être égal à 1. S’il est inférieur, il
atteste de la formation de carbone :
ye
s s s
N2
s
yN
yCH 4
+ yCO 2
+ yCO
BC = 2
e e
(8.41)
yCH 4
+ y CO2
Dans le cas de nos expériences, la valeur de BC est toujours supérieure à 0,95 (en
moyenne BC = 1,03) ce qui indique une faible formation de carbone.
8.8 Conclusion
La conception rigoureuse et l’exploitation d’un réacteur original a rendu possible
l’étude du reformage catalytique direct du biogaz. Les nombreux paramètres expérimentaux
considérés (température, débit d’alimentation, composition de l’alimentation) ont permis
une caractérisation précise du système. Les conditions optimales (qui permet d’atteindre
les conversions maximales des deux réactifs) déterminées sont un débit volumique d’entrée
de 45 mL/min, une température d’au moins 700°C et un ratio CH4 : CO2 proche de 1.
A partir de la mesure de la vitesse de réaction en fin de canal, on a pu estimer que le
164
système est exempt de limitations diffusionnelles. Enfin, le comportement à long terme
du catalyseur semble être favorisé par l’absence de carbone solide, ce qui doit encore
être confirmé par l’expérience. L’absence de contaminants aide aussi au maintien de la
performance catalytique. Le biogaz synthétique utilisé est en effet exempt d’ammoniac et
de sulfure d’hydrogène qui sont généralement considérés comme des poisons pour le cata-
lyseur. Une étude à long terme doit donc nécessairement évaluer l’effet de leur présence
sur le processus de reformage.
165
166
Cinquième partie
Conclusion et perspectives
167
Les travaux réalisés au cours de cette thèse et présentés dans ce document ont per-
mis d’étudier plusieurs voies de valorisation pour le biogaz issu du procédé de digestion
anaérobie. Le potentiel de production de biogaz à travers le monde est très important et
il est judicieux de chercher les moyens de l’utiliser au mieux. La première voie de valorisa-
La seconde option est la production de gaz de synthèse par reformage direct du bio-
gaz. Le procédé de reformage au CO2 du méthane a été largement étudié durant les
dernières années car il présente l’intérêt de convertir deux gaz à effet de serre en produits
169
intéressants pour l’industrie chimique. Un réacteur en forme de canal carré de côté 1
mm a été développé pour tester la réaction. L’ensemble de l’installation expérimentale a
été le sujet d’une analyse de risque de type AMDEC simplifiée. Les résultats montrent
qu’une conversion totale des réactifs peut être obtenue pour une température supérieure
à 700°C et un débit volumique de réactifs inférieur ou égal à 45 mL/min. L’influence
de la composition d’alimentation a aussi été évaluée : un ratio stœchiométrique est idéal
pour la réaction. Le gaz de synthèse produit dans ces conditions contient légèrement
plus de monoxyde de carbone que d’hydrogène ce qui est intéressant si l’on souhaite
mettre en place un procédé de type Fischer-Tropsch pour la production de carburants.
Le catalyseur utilisé n’a pas montré de signe de désactivation pendant les durées -plutôt
courtes- d’utilisation. Des expériences de longue durée seraient nécessaires pour évaluer
plus précisément ce dernier point. D’autres points d’amélioration méritent d’être cités :
la mise en place du catalyseur (notamment par imprégnation sur la surface du canal) et
la forme du canal de réaction (des canaux plus étroits pourraient permettre d’utiliser des
temps de passage encore plus faibles).
170
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180
Sixième partie
Annexes
181
Annexe A
Analyseur de biogaz
Comme indiqué à la figure A.1, deux faisceaux sont envoyés simultanément dans la
cellule. L’un des deux faisceaux possède une longueur d’onde qui n’est pas absorbée par
183
le gaz à mesurer. Il permet donc de mesurer le bruit, c’est à dire la partie du signal qui
n’est pas liée à la présence du gaz d’intérêt. En soustrayant les deux signaux, on obtient
une réponse plus claire et qui varie moins dans le temps.
184
– Fonction auto-zéro sur air ambiant programmable
– Raccords air/gaz en acier inoxydable
– Conformité EN 60529
En terme de qualité de mesure, les chiffres suivants sont avancés par le constructeur.
où FS signifie ≪ Full Scale ≫, soit ≪ Pleine Echelle ≫ et T90 est le temps nécessaire
pour obtenir 90% de la vraie valeur.
185
186
Annexe B
Chromatographe
187
B.2 Spécifications complètes
L’appareil est équipé d’un canal d’acquisition sur lequel sont reliés :
– un filtre (de type ≪ genie membrane separator ≫) retenant l’humidité et les éventuelles
particules,
– une pompe qui permet l’admission de l’échantillon,
– une ligne de gaz porteur (argon),
– la colonne COX de dimension 0.7 mm ID x 1 m,
– un détecteur de type TCD.
188
Annexe C
AMDEC simplifiée
189
10
10.1 10.2 40
N2 réseau Bain
10.3 Thermostaté
50
40.1 Event 50.2
10.4
T
40.3
190
50.1
C C 40.2
H O
30.2
Régulation
30.1
20 20.1 20.2
30
C.1.2 Evaluation des risques
Les risques sont listés pour chaque sous ensemble du montage et le mode ainsi que
l’effet de la défaillance sont précisés. L’évaluation des risques est ensuite basée sur 3
critères :
– la probabilité d’apparition notée de 1 (extrêmement rare) à 6 (très fréquent)
– la sévérité notée de 1 (n’occasionne de dommages ni aux personnes ni au système)
à 6 (accident dont les effets dépassent les limites du laboratoire
– la probabilité de détection notée de 1 (présence de signes avant coureurs de défaillance
facilement détectables) à 4 (aucun signe avant coureur de la défaillance)
L’analyse se fait donc par étape successive et la mise à jour d’une défaillance problématique
pour la sécurité permet d’améliorer le système (par exemple en ajoutant une sécurité pas-
sive qui peut faire baisser la probabilité d’apparition ou la sévérité).
C.2 Résultats
La figure C.2 résume l’état de l’AMDEC à la fin de la procédure. Ce travail a conduit
au remplacement de certains éléments du montage (tubes) et à la mise en place de
sécurités passives (barrières physiques) ainsi qu’au respect de plusieurs listes de contrôle
conditionnant le démarrage, l’arrêt et l’utilisation à long terme du pilote.
191
Prob Prob de Acti on
Ret Fonction Composante Effet de l a défaillance Mode Détecti on Sévéri té Cri ti ci té Acti on à mettre en p lace
d'appari ti on détecti on recommandée
10
Pas d'i nertage : ri sque Respecter l e
Permet l 'apport de Problème sur l e Visue l Check list de
10.1
N2
N2 réseau d'explosi on ou
réseau (débi!mètre)
2 c 3 1 c 6 protocole.
démarrage/ arrêt
d' incend ie
Pas d'i nertaee ou
Figure C.2 – Schéma de l’installation.
Respecter le
i nertage i nsuffisant : Mauvai se Vi sue l Check list de
10.2 Permet de rêgu ler l e Débitmètre N
débi t de N2
2
ri sque d'explosi on ou régu lati on (débi tmètre)
2 c 3 1 c 6 protocole.
démarrage/ arrêt
d'i ncend ie
Permet l 'apport de Bouteille de Fui te Sonore (centra le Test Check list
20.1
CH4 CH4
Incend ie/ explosi on
manodétendeur d'a larme)
1 c 3 1 a 3
d'étanchéi té d'utilisati on à
Test Check list
Permet l'apport de Bouteille de Sonore (centra le Flexi b le
20.1
CH4 CH4
Incend ie/ explosi on Fui te fl exi b le
d'a larme)
2 c 3 1 1.] 6 d'étanchéi té d'utilisati on à
meta llique
régu lier l ong terme
Permet l 'apport de Bouteille de Sonore (central e Test Checklist
c
192
Les travaux réalisés au cours de cette thèse et présentés dans ce document ont per-
mis d’étudier plusieurs voies de valorisation pour le biogaz issu du procédé de diges-
tion anaérobie. Deux procédés innovants ont été testés pour obtenir du bio-méthane. Le
premier est l’absorption dans une émulsion, où certaines phases organiques permettent
l’amélioration des conditions de transfert. Parmi les trois produits testés, l’octanol et le
toluène se montrent efficaces pour l’absorption du dioxyde de carbone même si le co-
efficient de transfert de matière côté liquide ne présente pas de variation importante.
Les expériences réalisées permettent de montrer que selon les conditions interfaciales du
système, la phase dispersée peut se répandre sur les bulles de gaz et participer directement
à l’absorption. Le second procédé testé est un dispositif micro-structuré d’absorption qui
présente de très bonnes capacités de transfert. Le micro-mélangeur Caterpillar (IMM),
d’abord destiné au mélange de fluides, s’avère être un absorbeur performant, montrant
des coefficients volumiques de transfert de matière côté liquide allant jusqu’à 0,5 s-1 .
La seconde option est la production de gaz de synthèse par reformage direct du bio-
gaz. Le procédé de reformage au CO2 du méthane a été largement étudié durant les
dernières années car il présente l’intérêt de convertir deux gaz à effet de serre en produits
intéressants pour l’industrie chimique. Un réacteur en forme de canal carré de 1 mm de
côté a été développé pour tester la réaction. Les résultats ont montré qu’une conversion
totale des réactifs pouvait être obtenue pour une température supérieure à 700°C et un
débit volumique de réactifs inférieur ou égal à 45 mL/min. L’influence de la composition
d’alimentation a aussi été étudiée : un ratio stœchiométrique est idéal pour la réaction.
The present work is focused on biogas valorization. Two innovative processes were
investigated in order to obtain bio-methane. The first one is CO2 absorption into an
emulsion where some organic phases are responsible for an improvement of the mass
transfer. Among the product tested, octanol and toluene proved to be efficient for carbon
dioxide absorption even if the liquid side volumetric mass transfer coefficient did not show
important variations. Experiments showed that according to the interfacial properties of
the system, the dispersed phase can spread over the gas bubbles and be involved in the
transfer directly. The second process considered is a micro-structured device displaying
excellent mass transfer characteristics. Initially designed for the mixing of fluids, the
IMM Caterpillar micro-mixer, proved to be an efficient absorption device with liquid side
volumetric mass transfer coefficients up to 0.5 s-1 . The second option is the production
of syngas by direct reforming of the biogas. The dry methane reforming was extensively
studied during the past few years since it can convert two greenhouse gases into valuable
products for the chemical industries. A 1 mm side square channel reactor was designed in
order to investigate the reaction. Results showed that a total reactant conversion could
be achieved with a minimum temperature of 700°C and a maximum volumetric flowrate
of 45 mL/min. The influence of feed composition was also assessed : a stoichiometric ratio
is ideal for the reaction.
193