Cours Strabologie LAOUAMRI-Chapitre I
Cours Strabologie LAOUAMRI-Chapitre I
Cours Strabologie LAOUAMRI-Chapitre I
Dr. LAOUAMRI H.
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Chapitre I : Vision binoculaire normale
I.1. Introduction
I.2. Vision monoculaire
I.2.1. Points rétiniens (éléments récepteurs)
I.2. 2. Les lignes de direction
I.2. 3. Champs
a. Champ de regard
b. Champ visuel monoculaire
I.2. 4. Projection de l'image visuelle sur la rétine
I.3. Vision binoculaire
I.3.1. Champs
a. Champ visuel binoculaire
b. Champs d’action des muscles oculomoteurs
I.3.2. Mouvements oculaires binoculaires
a. Position primaire
b. Mouvements de version
c. Mouvement de vergence
I.3.3. Lois de l’oculomotricité
I.3. 4.Théorie des points correspondants
I.3.5. Œil cyclope de Hering
I.3.6. Aire de Panum
a. Seuil de stéréopsie et seuil de diplopie
b. Diplopie physiologique
I.3.7. Les trois degrés de la vision binoculaire
a .1er degré : la vision simultanée ou bi-ocularité
b.2éme degré : la fusion (vision simple) ou binocularité
c.3éme degré : la vision stéréoscopique ou stéréocularité
I.3.8. Anomalies de la vision binoculaire
I. 3.9. Synoptophore
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I. Introduction :
La strabologie est un terme employé pour désigner l’étude de tout ce qui touche à la
vision binoculaire et à la pathologie des muscles oculomoteurs.
Un strabisme est un défaut d’alignement des yeux causé par des erreurs de focalisation
et/ou un déséquilibre des muscles oculaires. Il se définit selon Lanthony (1983), comme un
syndrome oculomoteur avec deux composantes :
- Une composante motrice : caractérisée par une déviation des axes oculaires l’un par rapport
à l’autre. La déviation peut être constante ou intermittente, concomitante ou non.
- Une composante sensorielle : caractérisée par une altération de la vision binoculaire,
primitive ou secondaire à la déviation des axes visuels.
Un strabisme peut être classé selon différents critères :
- Sa direction : strabisme horizontal (convergent ou divergent), vertical ou cyclo,
- Sa latéralité : strabisme unilatéral ou alternant,
- Son degré de comitance : strabisme concomitant (syndrome fonctionnel) ou
incomitant (syndrome organique (paralytique)),
- Sa fréquence : strabisme constant, intermittent ou occasionnel (au loin ou au pré,
n’apparaissant qu’avec la fatigue).
Avant tout examen d’un déséquilibre oculomoteur, il est essentiel de procéder à deux étapes
importantes, un interrogatoire précis du sujet (ou des parents), et un examen ophtalmologique
complet. Le traitement comporte trois volets essentiels : la correction optique, le traitement de
l’amblyopie et enfin la chirurgie musculaire.
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Chapitre I : Vision binoculaire normale
I.1. Introduction :
La vision humaine se caractérise par l’existence d’une vision binoculaire, qui résulte
de la position frontale des yeux, mais qui impose d’avoir une vision correcte de chaque œil et
un fonctionnement normal des structures neurologiques intracérébrales, pour la fusion des
images monoculaires. La vision binoculaire possède différents degrés de raffinement, dont le
plus achevé est la vision du relief ou stéréoscopie.
En effet, l’œil n’est pas un organe isolé : il est directement en relation avec le système
nerveux central, par l’intermédiaire du nerf optique et des nerfs oculomoteurs. De plus, l’œil
exprime la plupart des dysfonctionnements de l’ensemble de l’organisme. Il est important de
préciser quelques définitions concernant les coordonnées d’un objet dans l’espace et de la
vision de chaque œil avant d’étudier la vision binoculaire.
La vision monoculaire : est la vision d’un seul œil possédant une fovéa. C’est la
vision dans un plan de l’espace, plan passant par la normale (perpendiculaire) à l’axe de visée.
Le référentiel oculo-centrique est déterminé par la fovéa. La qualité de la vision va dépendre
de la valeur sensorielle de l’œil (en particulier de la valeur fonctionnelle de la fovéa).
Lorsqu’un œil pris isolément, perçoit un objet non ponctuel, ce dernier projette son
image sur la rétine, en passant par le point nodal de l’oeil, et stimule de nombreux
photorécepteurs. Le message visuel est transmis jusqu'au cortex. Les points rétiniens stimulés
permettent à un oeil considéré isolément de déterminer la direction dans laquelle sont
localisés les objets perçus.
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I.2. 2. Les lignes de direction :
Chaque point rétinien a une direction visuelle qui lui est propre. La stimulation d’un
point rétinien entraîne une réponse que le cerveau localise toujours au même endroit et dans la
même direction. Les coordonnées d’un objet dans l’espace sont déterminées par les
coordonnées du point rétinien stimulé.
Une ligne peut en effet être tracée entre un objet ponctuel vu dans le champ visuel, le
point nodal de l’oeil et un point rétinien particulier. Cette ligne est appelée ligne de direction
(La direction visuelle peut être représentée par une ligne reliant l’objet et la projection
de son image sur un point spécifique de la rétine).
Quand le point rétinien correspond à la fovéa il s’agit de la ligne de direction
principale. En monoculaire, la localisation d’un objet dans l’espace peut être définie par
rapport à la direction visuelle principale qui est celle de la fovéa. Un point rétinien
quelconque, autre que la fovéa, a une direction visuelle dite secondaire.
I.2. 3. Champs
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l’acuité est maximale, le champ visuel quant à lui correspond aux différents cadrans autour
(nasal sup/inf et temporal sup/inf).
a. Champ de regard : L’ensemble de points de l'espace vus nettement par l'oeil qui tourne
dans son orbite en accommodant, la tête immobile. L'image de l'objet se produit dans la fovéa.
Chaque point de ce champ est fixé par la fovéa et de ce fait procure une acuité visuelle
maximale. Il s’étend à 45° en nasal, 47° en temporal, 43° vers le haut et 50° vers le bas. Ces
bornes s’expliquent par les limites des muscles oculomoteurs dans leur champ d’action.
b. Champ visuel monoculaire : C’est le volume de l’espace perçu par un œil lorsque le sujet
immobile (tête fixe et regarde droit devant : position primaire de regard) regarde un point de
fixation. Il est légèrement plus grand que le champ de regard. Ce champ visuel renseigne sur
la fonctionnalité des différentes zones de la rétine. Valeurs moyennes: 60° côté nasal, 90° côté
temporal. L’œil gauche et l’œil droit ont un champ visuel différent.
Le champ de vision est l’ensemble des champs visuels, pour toutes les directions de regard
possibles.
La rétine de chaque oeil peut être divisée en 2 hémi-rétines: la moitié située du côté
du nez est appelée hémi-rétine nasale, la moitié située du côté de la tempe est appelée hémi-
rétine temporale. Ainsi, pour l’œil gauche, la rétine nasale est à droite tandis que la rétine
temporale est à gauche. Lorsque les yeux ne bougent pas, l'hémi-rétine nasale de l'oeil gauche
et l'hémi-rétine temporale de l'oeil droit reçoivent l'information visuelle provenant du champ
visuel gauche et l'hémi-rétine nasale de l'oeil droit et l'hémi-rétine temporale de l'oeil gauche
reçoivent l'information visuelle provenant du champ visuel droit.
De même, chaque hémi-rétine, qu'elle soit nasale ou temporale, comporte à la fois:
• une partie centrale (= fovéaire, maculaire) qui assure donc la perception de l'hémi-champ
visuel central.
• et une partie périphérique qui assure la perception de l'hémi-champ visuel périphérique.
Ainsi, la plus grande partie du champ visuel se projette sur les deux yeux (vision
binoculaire). Cependant, la portion de l'espace la plus périphérique ne se projette que sur un
seul oeil (vision monoculaire) car le nez arrête les rayons lumineux et ainsi empêche une
vision binoculaire (voir Figure 2). La périphérie droite du champ visuel est donc uniquement
perçue par l'hémi-rétine nasale droite et la périphérie gauche n'est perçue que par l'hémi-rétine
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nasale gauche (L’hémisphère cérébral droit voit l’hémi-champ gauche alors que l’hémisphère
gauche voit l’hémi-champ droit).
Enfin, l'image est inversée sur la rétine, la partie supérieure du champ visuel se
projetant sur la moitié inférieure de la rétine, la partie inférieure du champ visuel se projetant,
quant à elle, sur la moitié supérieure de la rétine.
Figure 2 : Représentation schématique de la projection d'un point du champ visuel gauche sur
l'hémi-rétine nasale de l'oeil gauche et sur l'hémi-rétine temporale de l'oeil droit, puis de la
transmission de l'information, des hémi-rétines au corps genouillé latéral droit, puis au cortex
visuel primaire de l'hémisphère droit.
La vision binoculaire est un processus cérébral complexe qui nous permet de voir une
seule et unique image malgré la présence de nos deux yeux. Les images vues par chaque oeil
sont intégrées par le cerveau puis fusionnées entre elles pour aboutir à une perception unique.
La vision binoculaire nécessite le parallélisme des deux yeux, et une bonne vision
de chaque œil. Chaque oeil doit avoir une acuité visuelle « satisfaisante» témoignant d’une
normalité oculaire, des voies visuelles et des structures visuelles corticales. La V. B. impose
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également un bon équilibre oculomoteur, permettant un alignement des objets perçus sur des
points rétiniens correspondants. La V.B. permet d’avoir un champ de vision plus large, et une
vision stéréoscopique. Ce mode de vision donne au sujet la capacité de percevoir la
profondeur et d’évaluer les distances.
La vision binoculaire est plus performante que la vision monoculaire. Ainsi on constate que :
L’acuité visuelle binoculaire est plus performante que l’acuité visuelle monoculaire
car l’éclairement d’un objet parait plus important.
L’appréciation de la distance séparant deux objets est plus fine. La coordination
motrice du sujet est donc améliorée.
Une bonne vision binoculaire ne nécessite pas une acuité excellente. Ce qui importe surtout,
c’est qu’il n’y ait pas une différence trop importante entre les deux yeux. N'oublions pas que
ce processus de fusion se développe dans les premières années de la vie de l'enfant et que si à
ce moment le cortex ne dispose pas d'images de qualité assez voisine, il ne pourra se mettre en
place, un œil deviendra amblyope.
I.3.1. Champs
Lorsque les deux yeux fixent un même point M, une grande partie des deux
champs monoculaires se recouvrent. Les points appartenant à cet espace sont vus par les
deux yeux à la fois. Cet espace constitue le champ visuel binoculaire, il correspond à
l'espace perçu par les deux yeux immobiles fixant droit devant. Il s'étend sur 120 degrés,
encadré de part et d'autre d'un croissant de perception monoculaire de 30°. Il s’étend à 60°
coté temporale gauche, 60° coté temporal droit, 65° vers le haut et 75° vers le bas.
Il subsiste de chaque côté un croissant temporal qui n'est vu que par un seul
œil. A partir des informations de l'espace provenant soit d'un seul œil (pour les croissants
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monoculaires) soit des deux yeux pour la partie du champ binoculaire, nous ne percevons
qu'une seule forme.
L'oeil dispose de six muscles externes qui lui permettent de tourner autour de son
centre de rotation. Le champ d’action d’un muscle représente la zone du champ de
regard entrainant son action principale. Dans cette direction, le muscle engagé est le plus
sollicité des 6 muscles ; par conséquent, une faiblesse de ce muscle limitera probablement le
mouvement dans son champ d'action.
Chacun des 6 muscles exerce une action distincte lors de sa contraction.
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Oblique supérieur Regard en bas et en dedans
Droit latéral externe Regard horizontal et en dehors
(abduction de l'oeil)
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Figure 5 : Représentation des plans.
b. Mouvements de version
Ce sont des mouvements conjugués dans lesquels les yeux vont dans le même sens. Ils
peuvent être rapides (saccades) ou lents (mouvements de poursuite).
c. Mouvement de vergence
Ce sont des mouvements disjoints dans lesquels les yeux vont en sens opposé,
(convergence, divergence). Le sujet est alors en position secondaire. Celle-ci est définie par la
posture que prend un sujet qui regarde sans contrainte un objet rapproché, situé dans le plan
médian de son corps.
I.3.3. Lois de l’oculomotricité
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Les points correspondants de la rétine sont deux points (un sur chaque rétine) qui,
lorsqu’ils sont stimulés simultanément, permettent une perception unique (simple et
fusionnée) de l’objet. La fovéa de l'oeil droit et celle de l'oeil gauche sont des points
correspondants.
Ainsi lorsque le sujet regarde un objet ponctuel éloigné, les mouvements de chaque
œil sont coordonnés pour que l'image optique de cet objet se situe sur la fovéa de l'oeil droit
est sur la fovéa de l'oeil gauche.
L’horoptère est le lieu géométrique des points stimulant des points rétiniens
correspondants.
L’horoptère est le lieu des points objets de l’espace dont les images se forment sur des points
correspondants des deux rétines. C’est une courbe passant par le point de fixation, l’aspect de
cette courbe dépend de la distance d’observation.
Deux points sont correspondants s'ils ont les mêmes coordonnées sur la rétine droite est
sur la rétine gauche. (En principe, les points correspondants sont situés à égale distance de la
fovéa)
-L’ensemble des points de l'horoptère sont des points stimulants des points rétiniens
correspondants, et seront vus simple ;
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- L’ensemble des points contenus entre les limites interne et externe (incluses) sera vu simple,
mais il existe une disparité des images rétiniennes, et si elle est suffisante, ces points seront
perçus en avant ou en arrière du point de fixation (F), c’est le relief binoculaire ou
stéréoscopique ;
-Lorsque le couple oculaire fixe le point objet F, L’ensemble des points en dehors de ces
zones sera vu double.
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L’axe d'extériorisation d'un objet est un axe qui débute de l'image rétinienne de l'objet
et qui passe par le centre de rotation de l'oeil cyclope.
Si l'objet est vu simple, l’axe d'extériorisation de l'oeil droit et celui de l'oeil gauche sont
identiques.
Si l'objet est vu double, l’axe d'extériorisation de l'oeil droit et celui de l'oeil gauche sont
différents. L’axe d'extériorisation de chaque œil indique la direction de chacune des images
diplopiques.
L’angle formé par les deux axes d'extériorisation est nommé disparité angulaire.
C’est la différence angulaire qu’il existe entre les deux images diplopiques.
Si la fixation fovéale est bonne :
-Tous les points de l'horoptère théorique sont des points rétiniens correspondants, et sont vus
simple ;
-l'ensemble des points contenus entre les limites interne et externe (incluses) est vu simple,
mais il existe une disparité des images rétiniennes et, si elle est suffisante, ces points sont
perçus en avant ou en arrière de F : c'est « le relief binoculaire » ou stéréoscopie;
La fusion sensorielle est un processus neurophysiologique qui permet la fusion des
projections rétino-corticales de deux images rétiniennes tombant dans des zones de
correspondances. Si la disparité entre ces deux images est trop grande, l'une d'elles est
théoriquement neutralisée ; mais s'il y a extériorisation des deux images, la vision sera double.
I.3.6. Aire de Panum
La vision stéréoscopique ou stéréocularité est le résultat de la perception de la profondeur
induite par la disparité des images rétiniennes. Le cerveau unifie les deux images et donne la
sensation du relief. L’écart pupillaire permet à chaque oeil de voir l’objet regardé sous un
angle différent. Cette différence de perception entraîne la stéréopsie. L’espace visuel d’un
sujet normal pour un point de fixation donné va se diviser en plusieurs zones :
une zone de vision simple : c’est un plan, l’horoptère, le lieu de coïncidence des
points rétiniens correspondants ;
l’aire de Panum : Où l’objet continue à être vu simple par le sujet même si celui-
ci n’est pas rigoureusement sur l'horoptère. elle a une certaine épaisseur avec une
limite antérieure et une limite postérieure; On parle aussi d'aire de Panum rétinienne.
Dans ce cas, pour un point d'une rétine, l'aire de Panum est l'aire qui entoure le point
correspondant, et qui permet à la fusion de se réaliser.
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deux zones de diplopie : ce sont les zones de la diplopie dite « physiologique » ; elles
sont situées en avant et en arrière de l’horoptère ; la diplopie est physiologiquement
non perçue (neutralisée dans la vie courante) mais suffisante pour stimuler la fixation.
Zone de
diplopie
Zone de
Horoptère stéréopsie
Aire de Panum
Zone de
diplopie
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a. Seuil de stéréopsie et seuil de diplopie
L’interprétation de la disparité angulaire ou binoculaire (notée ε) est le résultat d’un
apprentissage et d'une maturation que le sujet acquiert lors de son développement visuel
spontanée. La finesse d’interprétation de la disparité angulaire varie entre les personnes.
La stéréoscopie est fondée sur l’analyse d’une disparité. Cette disparité d’un même
objet est liée à la différence d’angle géométrique sous lequel un même objet d’attention est vu
par chacun des deux yeux. Le calcul de cet angle donne l’angle de disparité, c’est-à-dire la
valeur de la stéréoscopie.
-Seuil de diplopie : disparité angulaire existant entre le point de fixation et un point situé à la
limite entre la zone de stéréopsie et la zone de diplopie (en avant ou en arrière du point de
fixation). Elle correspond au seuil à partir duquel il ya diplopie. Cette disparité angulaire
nommée ε d correspond à un angle d’environ 6' lorsque la vision binoculaire est normale.
Perception de l'espace : acuité stéréoscopique
La diplopie physiologique est un phénomène normal qui survient en vision binoculaire pour
des objets dont les images se forment en dehors des aires de Panum correspondantes à l'objet
fixé.
Explications
Un test simple suffit à la mettre en évidence, chez des sujets dont la vision binoculaire est
normale. Si le sujet fixe un point objet T1éloigné (par exemple la tête d'un clou), le point objet
T2 rapproché (qui est la tête d'un autre clou) sera perçu en diplopie croisée : l'extériorisation
droite de T2 se fait à gauche de l'extériorisation de T1, et l'extériorisation gauche de T2 se fait à
droite de l'extériorisation de T1. Le point objet T2 en avant de T1 est perçu en diplopie croisée.
T'2D et T'2G ne sont pas des points rétiniens correspondants lorsque le sujet fixe T1.
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Position 1
Si le sujet fixe le point objet T2, le point objet T1sera perçu en diplopie homonyme:
l'extériorisation droite de T1se fait à droite de l'extériorisation de T2, et l'extériorisation gauche
de T1se fait à gauche de l'extériorisation de T2.
Le point objet T1en arrière de T2 est perçu en diplopie homonyme. T'ID et T'IG ne sont pas des
points rétiniens correspondants lorsque le sujet fixe T2.
Position 2
I.3.7. Les trois degrés de la vision binoculaire
La coopération binoculaire, classiquement classée en trois degrés selon Worth, est
fondée sur la perception simultanée des images et, à partir de celle-ci, sur la fusion des images
(moyennant l’amplitude de vergence fusionnelle) et sur la vision stéréoscopique.
Sur la base de la vision simultanée, la fusion est l’élément clef de la vision binoculaire.
Elle résulte du réflexe psycho-optique qui intègre les informations séparées et disparates (du
fait de la différence de parallaxe) des deux yeux en une seule image de l’environnement.
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Les trois degrés de la vision binoculaire sont :
-1er degré : la vision simultanée ou bi-ocularité : définit la capacité de chaque oeil de
percevoir une image qui lui est propre simultanément (ou la capacité des deux yeux à
extérioriser simultanément une image).
On met la vision simultanée en évidence lors de tests dissociant la vision des deux yeux
(synoptophore, test d’équilibre binoculaire, test de Worth, filtre rouge...)
Exemple : Le couple oculaire fixe un objet F situé sur l'horizontal et dans le plan médian à
l'infini, l'image rétinienne de l'oeil gauche est totalement neutralisée : seule l'image rétinienne
de l'oeil droit sera donc extériorisée.
Remarque : généralement, la neutralisation (suppression) n'est que partielle et ne concerne
que la partie du champ visuel commun aux deux yeux.
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Figure 9: Tests dissociant la vision
Si le premier degré n'est pas présent, c'est qu'il y a suppression ou neutralisation de l'image
rétinienne d'un oeil, la vision binoculaire n'existe pas.
La neutralisation centrale, totale ou partielle, d'une des images rétiniennes est le résultat d'une
inhibition corticale lorsque ces images diffèrent trop. La neutralisation intervient pour éviter
la diplopie.
-2éme degré : la fusion ou binocularité : La fusion est le résultat d'un processus sensoriel
qui permet l'unification des images rétiniennes de l'oeil droit et de l'oeil gauche. La
vision binoculaire est alors simple.
C’est la capacité d’ajuster les mouvements oculaires de façon à constamment diriger les deux
fovéas sur l’objet fixé, par exemple en convergeant sur un objet qui se rapproche, et d’intégrer
les images droite et gauche, vues simultanément, en une seule image : la fusion est donc à la
fois motrice et sensorielle. On la met en évidence en induisant une légère différence d’aspect
entre les deux images perçues par chaque œil (tests de phories associés).
Exemple : Le couple oculaire fixe un objet F situé sur l'horizontal et dans le plan médian à
l'infini, F est perçu simple par le sujet : les extériorisations droite et gauche de F sont donc
confondues.
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Remarque : Si le deuxième degré de la vision binoculaire n'est pas présent, et que le premier
persiste, il y a vision double ou diplopie, la vision binoculaire est anormale.
Vision en relief
Ce terme regroupe différents notions comme :
-L’appréciation d'une distance absolue c'est à dire la capacité d'un sujet à quantifier
l'éloignement d'un objet ; ceci est réalisée grâce à la convergence des lignes de regard ;
- La différence de profondeur d’un objet par rapport à un autre ;
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- L’appréciation du déplacement d’un objet, le sujet pouvant lui aussi être en déplacement ou
immobile ;
-La perception de l’aspect de surface d’un objet ;
-L’interprétation de l’éclairement de l’objet pour apprécier sa forme.
Sur le schéma ci-dessus, le décalage en profondeur Δd entre les deux plans de front passant
respectivement par M et K est proportionnel au décalage horizontal entre les deux images
rétiniennes de K ou à sa disparité angulaire.
η(K) = |ηd(K) ± ηg(K)|. Si celle-ci est suffisamment petite (η(K) < εd) pour qu’il n’y ait pas
diplopie (croisée ici), alors le point K est perçu simple et en avant du point M. Par contre, si
η(K) devient trop petite (Δd étant devenu trop faible) K est alors perçu dans le même plan que
M.
I.3.8. Anomalies de la vision binoculaire
On peut diviser les anomalies de la vision binoculaire en deux grandes catégories dont les
causes seront différentes:
- La vision binoculaire existe mais l’anomalie est source d’inconfort visuel, de stress.
- La vision binoculaire est absente ou la binocularité est anormale.
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a. Anomalies entraînant une vision binoculaire inconfortable: On peut les classer en deux
catégories en fonction de leur origine:
1. Celles d’origine sensorielle: Elles peuvent provenir de la qualité différente des deux
images rétiniennes dues à une mise au point non identique pour les deux yeux. C’est le cas
lorsque la compensation portée est mal équilibrée (équilibre bioculaire non réalisé), ça peut
aussi être la situation d’un fort anisométrope correctement compensé en vision de près
(l’accommodation nécessaire pour chaque œil étant différente). Elles peuvent provenir de la
différence de taille des images rétiniennes pour un anisométrope compensé ou des
déformations introduites dans chacune des images rétiniennes par une compensation
astigmate. On parle alors d'aniséïconie subjective.
2. Celles d’origine motrice: Le positionnement des lignes de regard des deux yeux vers le
point de fixation se fait au prix d’un effort important ou ne se fait pas avec une précision
suffisante. La cause de la gêne binoculaire est donc un fonctionnement " anormal " du
système moteur de fixation.
b. Anomalies entraînant une absence de vision binoculaire: On peut les classer en deux
catégories en fonction de leur origine:
I. 3.9. Synoptophore
Le synoptophore est un appareil servant à évaluer les troubles de la vision binoculaire,
et à les corriger en développant cette dernière par des exercices d’orthoptie. Cet examen
permet à la fois de mesurer les déviations, de définir la correspondance
rétinienne, de tester la vision binoculaire et d’établir le lien entre l’objectif et le subjectif.
Différentes mires sont utilisées et leurs images sont renvoyées par un miroir placé à 45°
à l’intérieur des deux bras mobiles qui composent le synoptophore. Il existe trois types de
mires :
-Para-maculaire : correspondant à un angle de vision de 10o,
-Maculaire : correspondant à un angle de vision de 3o à10o,
-Fovéolaire : correspondant à un angle de vision de 1o. Et de trois groupes différents.
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Figure 12 : Synoptophore.
Principe: Le sujet est assis, tête bien posée sur la mentonnière du synoptophore, les yeux en
face des oculaires dans lesquels sont placés les mires et l’examinateur est assis en face,
observant les mouvements des yeux afin de déterminer les mesures.
L’examinateur place devant chaque œil deux images différentes par exemple : l’oiseau et la
cage, il pratique la manœuvre de l’écran unilatéral puis l’écran alterné en éclairant
alternativement les tests. S’il y a un mouvement de restitution, il déplace les bras de
synoptophore dans le sens inverse de mouvement observé (vers l’extérieur pour un
mouvement à l’intérieur et vers l’intérieur pour un mouvement vers l’extérieur). L’angle
objectif est ainsi mesuré. Ensuite il détermine l’angle subjectif en demandant au sujet de
déplacer les deux bras du synoptophore pour mettre le l’oiseau dans sa cage.
-Mesure de la fusion :
L’examinateur place deux images qui sont semblables à quelques détails près : une maison
avec un sapin à droite de la porte et l’autre à gauche et il déplace les bras de synoptophore
vers l’extérieur jusqu’à ce que la maison se dédouble et il note la valeur de divergence, ou
bien vers l’intérieur et note la valeur de convergence pour laquelle les deux maisons se
séparent. Ainsi l’amplitude de fusion de loin est évaluée.
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-Mesure de la vision stéréoscopique :
L’examinateur place cette fois deux images légèrement différentes donnant une impression
de relief et il mesure l’amplitude de la fusion stéréoscopique.
Le synoptophore permet également :
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