Le Manteau

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Le Manteau.
Il y a de l’audace à marcher nu!
Tous les livres traitant de l’histoire de l’humanité nous apprennent que nos
ancêtres ont commencé par se vêtir de peaux de bêtes pour se protéger des
intempéries, du froid, c’est en partie vrai naturellement, mais ça n’est pas tout!
Les vêtements en peau, ou tissés s’orneront de coquillages, de motifs dessinés
qui préciseront au sein du groupe un rang, une fonction. La coquetterie
ornementale fera partie d’une autre étape, sera un nouveau pas dans le processus
de l’évolution touchant au phénomène sociétal.
Le manteau dans les Ecritures:
En lisant les Ecritures, le port du manteau, ou de la cape apparaît relever de
raisons psychologiques qui s’articulent autour de la pudeur, du tabou, de la
magie, de l’initiation. Avant que l’Eternel fasse monter Elie au ciel, Elisée lui
demanda qu’il lui fasse don d’une « portion » de son esprit. « Marchant en
parlant, voici, qu’un char de feu et de chevaux les séparèrent l’un de l’autre, et
Elie monta au ciel dans un tourbillon ». Dans un geste de colère et
d’impuissance, « saisissant ses vêtements Elisée les déchira en deux morceaux,
releva le manteau qu’Elie avait fait tomber, et s’arrêta au bord du Jourdain, il
frappa du manteau les eaux du fleuve et dit: Où est l’Eternel, le Dieu d’Elie?
Les eaux se partagèrent et Elisée passa. Les fils des prophètes qui étaient à
Jéricho, vis è vis, l’ayant vu, dirent: L’esprit d’Elie repose sur lui ».
Roi 2.13/15.
Ainsi Elisée pu continuer la tradition spirituelle de son Maître et bénéficia
de tous ses dons grâce à la possession de son manteau.
Quand Enoch monte au ciel Dieu lui ordonne de quitter ses vêtements,
Enoch prendra de cette façon le caractère du monde nouveau dans lequel il
arrive.
Les prophètes se transmettent leur manteau persuadés que le flux de l’aura
d’un homme passe dans son manteau.
Le manteau ne peut tromper… A un philosophe cynique qui exhibait sa
pauvreté, Socrate dit: « Je vois ta vanité à travers les trous de ton manteau de
lin».
« Sa cape est forteresse entourant les viscères
Du ventre chasse vive où se terrent les dieux,
Son manteau est muraille autour du tabernacle »
Paul Verlaine
Fréquemment on note une adéquation dans l’Ancien Testament entre des
états intérieurs et la manière de traiter le manteau. On le lacère, ou on le jette à
terre en signe de colère, de tristesse ou de deuil, on le lave quand on veut se
présenter sous son meilleur jour; on offre un manteau plus ou moins richement
décoré, qu’on a porté, pour faire don d’une partie de soi même:
« Les serviteurs dirent à l’empereur, c’est Haman ministre d’Assuérus qui
se tient dans la cour, qu’il entre ordonna l’empereur, et il demanda:
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- Que faut-il faire pour un homme que l’empereur veut honorer?


Haman répondit:
- Qu’on lui apporte un manteau que l’empereur a déjà porté …»
Autre
Goar, naquit peu après la mort de Clovis, c'est-à-dire vers 511, tout enfant il
manifestait une charité extraordinaire, devenu homme, il combattit les passions
grossières et chercha Dieu dans la solitude. Accusé devant son évêque de crimes
imaginaires il parut humblement au palais épiscopal et déposa son manteau, par
respect, en présence du prélat, mais en croyant le suspendre à une tige de métal,
il le suspendit à un rayon de soleil.
Le manteau du Christ avait la réputation de guérir, « Tous ceux qui
touchèrent les franges de son manteau furent sauvés ».
Bar-Timée est aveugle à la lumière et sourd à la raison, il s’adresse à Dieu
les bras tendus vers le Ciel, et l’interpelle « Jusqu’à quand courberas-tu ton
serviteur sous le poids de ton courroux aveugle […] Retire de mes épaules le
manteau brûlant de ta malédiction ». Jésus, passant entendit, s’arrêta et dit:
« Appelez-le ». On appela l’aveugle en lui disant: « Aie confiance lève toi il
t’appelle ». L’aveugle jeta son manteau, image de son corps physique et vint à
Jésus. Ici le manteau est le symbole de l’obstacle dont il faut se débarrasser pour
se lever, guérir, retrouver la vue dans tous les sens du terme, il est le fardeau des
préjugés, des attachements dont il faut s’extirper, alors qu’ils sont l’expression
d’un confort facile. Retrouvant la vue Bar-Timée s’écria: « Le Maître m’a
débarrassé du manteau d’iniquité que mes frères avaient tissé. Je n’ai plus
besoin de personne pour me conduire, je vois! 1»
Lorsque Jésus dépose son manteau pour laver les pieds de ses disciples et
ne garde que la tunique du serviteur, il enseigne à laisser de côté les artifices et
les ostentations pour aller vers la pureté.
Le manteau est devenu avant tout un uniforme, il a marqué l’appartenance à
un groupe, à une confrérie, à l’entrée dans un ordre. Exemple d’un moment,
plein d’émotion, celui où celui qui va devenir moine rejette son individualité
pour reconnaître dans son prochain son semblable, il se couvre alors d’un
manteau; nous sommes là devant l’expression d’une coupure, d’une
métamorphose. Le manteau est ici le symbole d’un retrait du monde, il rend
celui qui s’en revêt, imperméable aux pressions dévorantes de
la Société, étranger aux frivolités mondaines, son geste indique
qu’il va se fondre dans le silence intérieur, la méditation, et en
Dieu.
Le récit de Saint Martin:
« En cette année 337, l’hiver est glacial, en garnison à
Amiens, j’aperçois, aux portes de la ville, un pauvre hère à
moitié nu, tremblant de froid. Pris d’une grande compassion,
devant cet homme implorant, je saisis mon épée, attrape ma
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« Il jeta son manteau » pièce en 1 acte de Pierre Mariel/1932.
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cape, la coupe en deux et lui tend une moitié, afin qu’il se couvre. De retour
dans mes quartiers, je n’ai plus qu’un regret, ne pas avoir donné en entier mon
manteau. L’autre moitié est la propriété de l’armée romaine ». Ce partage a fait
dire à Jacques Prévert: « Saint Martin a donné la moitié de son manteau à un
pauvre: comme ça, ils ont eu froid tous les deux! » Mise à part cette plaisanterie,
ce partage est un acte qui se situe au-delà du simple élan de charité, car donner
son manteau signifie, donner une partie de soi même, nous l’avons dit. Dans un
songe le Christ va lui apparaître vêtu de la moitié du manteau, il le remercie de
son acte de charité, Martin troublé par cette vision décide de quitter l’armée
romaine pour se convertir. Saint François d’Assise, le fondateur de l’ordre des
Franciscains donnera son manteau à un nécessiteux.
Dans « l’Anneau des Nibelungen » qui est un mythe fondateur de
l’Allemagne profonde, Siegfried, utilise une cape magique, la Tarkappe afin de
se substituer à la vue d’un de ses amis dans une série d’épreuves, ceci dans le
but de le faire triompher. Ce manteau n’est pas sans rappeler celui d’Odin, le
borgne, Wotan, le dieu de « Tout ». Une diablerie vraiment prise au hasard!
Sainte Radegonde épouse de Clotaire 1 er s’enfuit de la cour, les soldats partent à
sa recherche. Elle est vêtue d’un riche manteau d’hermine constellé d’étoiles et
sur le point d’être rattrapée par les sbires de son époux elle demanda à Dieu de
lui venir en aide. Sa prière fut entendue: les pommiers du verger où elle s’était
réfugiée courbèrent leurs branches pour la dissimuler. Elle passa ainsi la nuit et
au matin, les soldats ayant continué leur chemin, libre, elle quitta les lieux,
abandonnant son manteau. Depuis, chaque nuit les étoiles de son manteau
brillent dans le ciel.
A travers les civilisations aucun effort ne fut épargné pour permettre au
corps tant féminin que masculin de marquer une époque. Avant d’être un signe
d’élégance, manteaux ou capes demeurèrent le signe d’une autorité à la fois
spirituelle et matérielle, un symbole de métamorphoses réelles, ou supposées,
symbolico-initiatiques. Le manteau vêtement dit de « dessus », généralement
long est porté indifféremment par les deux sexes il prit au cours des civilisations
de nombreuses formes et eût nombre d’appellations. Le manteau le plus répandu
fut certainement le pallium dont se paraient les grecs; c’était un manteau dans
lequel le corps était drapé, il était maintenu par une fibule à l’épaule droite. Il
subsistera en vêtement religieux et sera le symbole du plus haut rang du
ministère sacerdotal. Le pallium fut la marque, l’uniforme des philosophes, et, il
ne manquait pas de mendiants et d’aventuriers qui courraient le
monde méditerranéen vêtus d’un pallium en triste état ce qui leur
donnait un air de philosophes retirés du monde et les nimbait de
respectabilité, ils abusaient de cette ressemblance pour demander
l’aumône avec insolence au nom de la philosophie. « L’habit ne
fait pas le philosophe ! ». Tertullien, figure emblématique du
christianisme primitif convient que bien des gens ne méritaient pas
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de porter le « pallium ». Il est l’auteur d’un opuscule assez obscur dont le titre
est : « L’Eloge du manteau ».
Citons la chlamyde, manteau d’une pièce, sans couture, avec ou sans couleur
à l’usage des cavaliers, des voyageurs et des jeunes gens, elle deviendra pourpre
et royale à partir d’Alexandre le Grand. Et traditionnellement, ce manteau, sera
un signe de royauté à la fois spirituel et matériel. D’un galop sautons au Moyen
Age où va régner le « manteau à chevaucher », je le cite en préférence parce
qu’il va marquer la vêture des épopées chevaleresques, il est fendu devant et
derrière pour faciliter les chevauchées. Le manteau du Chevalier souvent appelé
à tort « cape » est béni, ce « vêtement de dessus » va prendre une forte co
notation spirituelle. On parle souvent de ce qui circule sous le manteau pour
exprimer des pratiques secrètes. Les psychanalystes l’expliquent comme un
symbole de protection et de secret.

L’Initié,
c’est celui qui se fraie la route de la découverte.
Prenons pour illustrer cette phrase la lame VIIII du tarot :
l’Initié cache sous un pan de son manteau la lumière qu’il porte
de manière à ne pas aveugler celui qui n’est pas préparé à la
voir. Son manteau, extérieurement sombre le
dérobe aux yeux des méchants, protège son
savoir. Peut-on définir cet ermite, dire qui il est
précisément?... C’est celui qui possède à la fois
la lampe de Trismégiste, le manteau
d’Apollonius et le bâton des Patriarches. Le manteau de notre
initié est plié trois fois, il est la marque de la possession pleine et
entière de soi même, ses plis sont une armure contre les bas
instincts, ils rendent insensibles aux attaques de l’ignorance; ils
maintiennent celui qui porte ce manteau dans le calme de sa
conscience. Grâce à lui, la science de l’initié ne débouche pas comme les
fameuses perles dans la porcherie. Celui qui se revêt de ce manteau se prépare à
la venue du jour où toute la Création retrouvera sa condition d’avant la Chute

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