Kamukuny - Droit Const Congolais II
Kamukuny - Droit Const Congolais II
Kamukuny - Droit Const Congolais II
FACULTE DE DROIT
INTRODUCTION GENERALE
Cette expression a été employée dans trois sens différents. D’abord, elle
désigne un droit, une faculté qui appartient à une personne ou à une collectivité, en
vertu de la Constitution. Ainsi, la faculté de refuser de payer un impôt n’ayant pas
été régulièrement établi fait partie des « droits constitutionnels » des Américains.
1
Sur l’apparition et le sens de l’expression « droit constitutionnel », voy. FAVOREU, L. et alii, Droit
constitutionnel, 2ème édition, Paris, Dalloz, 1999, p. 19.
3
A ses débuts, le droit constitutionnel, tel qu’il apparaît dans les manuels
et qu’il est enseigné, est uns discipline dont la structure est très liée à celle de la
Constitution et du régime constitutionnel en vigueur. Il s’agit essentiellement
d’étudier les institutions et la pratique parlementaire et gouvernementale.
2
Le maître de l’Encyclopédie, le philosophe Diderot, se plaint notamment qu’on ne dise rien des constitutions de
l’Etat, rien des droits souverains, rien de celui des sujets. Tout en assurant que « la chimère de la science du
gouvernement, c’est une Constitution parfaite » et en comparant cette chimère à la quadrature du cercle, il
déplore que le jeunes français soient privés d’une enseignement déjà en honneur dans les pays germaniques.
3
Au-delà de l’exemple congolais qui bat le record de production constitutionnelle hors pair, nous pouvons citer
le cas de la France qui, en l’espace de six ans, de 1789 à 1795, par l’effet des tensions politiques et sociales, est
dotée de trois Constitutions.
4
4
NEZARD, De la méthode dans l’enseignement du droit, Mélanges Carré de Malberg, 1933, cité par
FAVOREU, L. et alii, Droit constitutionnel, op. cit., p. 40.
5
C’est le cas de Georges BURDEAU, Charles CADOUX, Jean GICQUEL, André HAURIOU, Charles
DEBBASCH, pour ne citer que cet échantillon.
6
Maurice DUVERGER, Philippe ARDANT, Pierre PACTET, Marcel PRELOT sont de ceux-là.
Comme il en fut pour PARINI, Ph., Institutions politiques, Paris, Armand Colin, 1984.
5
8
Sur cette notion, voy. notamment TROPER, M., « La théorie dans l’enseignement du droit constitutionnel »,
RDP, 1984, pp. 263-275.
7
1. Intérêt théorique
2. Justification pratique
9
« Peut-on encore enseigner le droit constitutionnel ? », s’inquiétait déjà LECUYER dans les Annales de la
Faculté de Droit de Clermont-Ferrand en France, matière que Georges BURDEAU trouvait tout de même, dans
les Mélanges offerts à Trotabas, cités par LECLERCQ, Cl., Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris,
Librairie technique, 1981, p. 23, « impossible » d’être enseignée !
10
Cette trilogie a également été suivie par André MBATA BETUKUMESU MANGU en vue de justifier
l’intérêt d’une thèse dans un domaine semblable, The Road to Constitutionalism and Democracy in Post-colonial
Africa: the Case of the Democratic Republic of Congo, Doctoral thesis, University of South Africa, June 2002,
pp. 21-34.
8
et trouvent une part importante de leur fondement dans le refus délibéré du respect
des textes11.
La « révolution » de Laurent Désiré Kabila, elle-même a commencé sur
une crise institutionnelle due à la prise de pouvoir par les armes12. Son propre décret-
loi faisant office de loi fondamentale a fini par lui attribuer à lui seul l’ensemble des
pouvoirs d’Etat13. La crise institutionnelle s’est amplifiée et a gravement affecté les
autres domaines de la vie nationale, dont tous les paramètres affichent rouge.
Au début d’un mandat obtenu, comme d’aucuns le savent, en violation
de toute règle pertinente en matière d’acquisition des pouvoirs d’Etat, Joseph Kabila
n’a pas manqué d’accentuer la même crise de légitimité.
11
Outre les sécessions du Katanga et du Sud-Kasai, les maquis mulélistes du Kwilu et la rébellion des simba à
l’Est contribuèrent à entretenir une crise politique que les diverses tables rondes (Brazzaville, Léopoldville,
Tananarive, Coquilathville, Lovanium), ne parvinrent à éponger qu’en surface. Sa persistance actuelle, malgré la
Conférence nationale dite souveraine et l’Accord global et inclusif, est à la hauteur de l’immensité de sa
profondeur et de l’inadéquation des remèdes jusque-là administrés.
12
Les armes ne sont pas le mode démocratique d’accession au pouvoir.
13
Certains auteurs ont même considéré que depuis la chute de la dictature de Mobutu, à cause de la
concentration de tous les pouvoirs entre les mains de Laurent Désiré Kabila, est intervenue au Congo une
« éclipse constitutionnelle ». Voy. BOSHAB, E., « République Démocratique du Congo : le décret-loi n° 003 du
27 mai 1997 face aux critères de démocratie », Rev. de Dr. Afric., n° 3, juillet 1997, pp. 52-63.
14
Les libertés et la prise en charge de chacun par soi-même auraient pu amener tous à se sentir concernés par le
fonctionnement constitutionnellement harmonieux des institutions représentatives et participatives.
15
L’instauration de l’Etat de droit aurait pu sûrement désamorcer la tendance de la prise de pouvoir par la force
et juguler la crise des institutions.
16
La tentation des seigneurs de guerres d’en imposer par la puissance de leurs armes n’ayant plus comme
résultat d’obtenir le pouvoir comme prime de guerre, tout le monde se désintéresserait de ce schéma catastrophe.
17
Le renforcement du contrôle du pouvoir légal sur les ressources du pays et autres potentialités aurait
certainement inspiré la bonne gouvernance et apporté le mieux-être en faveur des populations congolaises.
9
Selon que l’on se sert du langage dans lequel est exprimé le texte, du
contexte de sa création, de l’objectif poursuivi par son auteur, de la fonction que doit
objectivement remplir le texte ou de l’ensemble des dispositions d’un texte,
l’interprétation peut être sémiotique ou exégétique, téléologique ou contextuelle,
génétique, fonctionnelle et systématique ou holistique20.
18
COHENDET, M.A., Droit public. Méthodes de travail, 3ème édition, Paris, Montchrestien, 1998, p. 13.
19
Ibidem.
20
COHENDET, M.A., Droit public. Méthodes de travail, op. cit., p. 28. Sur l’utilisation concrète de ces
approches en droit constitutionnel congolais, voy. KAMUKUNY MUKINAY, A., Contribution à l’étude de la
fraude en droit constitutionnel congolais, Thèse de doctorat, Université de Kinshasa, 2007, pp.
10
21
D’après Raymond GASSIN, « Une méthode de la thèse de doctorat en droit », RRJ, PUAM., 1996, p. 1169,
« le juriste qui fait une recherche, en l’espèce une thèse de doctorat, n’est pas dans une position très différente de
celle du sociologue ou du psychologue qui opère sur la réalité humaine sociale ou individuelle pour l’expliquer.
Comme eux, il amasse des données sur le sujet de sa thèse, données qui ont pour nom solutions législatives,
décisions de jurisprudence, opinions doctrinales : c’est sa réalité à lui, celle sur laquelle il opère ».
22
L’expression est empruntée à DELPEREE, F., L’élaboration du droit disciplinaire de la fonction publique,
Paris, LGDJ, 1969, p. 10.
11
Section 1 : Le constitutionnalisme23
23
Les développements sur ce concept sont tirés de notre contribution à l’ouvrage collectif : KAMUKUNY
MUKINAY, A., « La Constitution de la transition congolaise à l’épreuve du constitutionnalisme », in BULA-
BULA SAYEMAN (dir.), Pour l’épanouissement de la pensée juridique congolaise, Liber Amicorum Marcel
Antoine LIHAU, Kinshasa, PUK et Bruxelles, Bruylant, 2006, pp. 156-168.
24
C’est dans ce sens que semblent l’utiliser CABANIS, A.G. et MARTIN, M.L., Les Constitutions d’Afrique
francophone. Evolutions récentes, Paris, Karthala, 1999, p. 115, lorsqu’ils déplorent le manque d’impact et
l’inefficacité du constitutionnalisme africain, malgré « son cycle de production soutenue ».
25
DE VILLIERS, M., Dictionnaire de droit constitutionnel, 4ème éd., Paris, Armand Colin, 2003, p. 57, situe
ainsi la naissance de cette technique au 18ème siècle, bien après le mouvement historique d’apparition des
Constitutions.
26
GREGOR, M.J., “Kant’s Approach to Constitutionalism”, in ROSENBAUM, A.S. (ed.), Constitutionalism:
The Philosophical Dimension, New York, Westport, Greenwood Press, 1988, p. 69; ZOETHOUT, C.M. &
BOON, P.J., “Defining Constitutionalism and Democracy: An Introduction” in ZOETHOUT, C.M & alii (eds.),
Constitutionalism in Africa. A quest for autochthonous principles, Gouda Quint-Deventer, 1996, p. 28.
27
MBATA BETUKUMESU MANGU, A., Constitutions sans constitutionnalisme, ‘démocraties autoritaires’ et
responsabilité sociale des intellectuels en Afrique centrale : quelle voie vers la renaissance africaine ?,
Communication faite au Sommet du CODESRIA : 30 années de recherche et de production de connaissances en
sciences sociales en Afrique, 1973-2003, Conférence sous-régionale de l’Afrique centrale, Douala, 4-5 octobre
2003. p. 6.
12
28
Outre la vague des Constitutions écrites appelées à se substituer aux coutumes existantes qui laissaient de très
grandes possibilités d’action discrétionnaire aux souverains, il est significatif de constater avec quel
empressement les nouveaux Etats se sont mis à se doter des Constitutions écrites, souvent très protectrices des
gouvernés, au moins sur le papier. Sur l’importance historique du constitutionnalisme, voy. PACTET, P.,
Institutions politiques. Droit constitutionnel, 13ème éd., Paris, Masson, 1994, pp. 67-68.
29
La foi naïve des hommes de la Révolution française qui avaient cru en la vertu des textes et des principes
qu’ils avaient défendus avec acharnement, avait fini par s’émousser à l’épreuve des expériences politiques et
constitutionnelles.
13
Fort souvent d’une majorité politique dont il est issu et qu’il dirige,
l’organe exécutif s’impose face au parlement, fréquemment affaibli dans l’exercice de
sa fonction de contrôle. Le renforcement de ce pouvoir31 dans les démocraties
contemporaines tient successivement à un regain de légitimité des exécutifs, au
phénomène de plus en plus marqué de personnalisation du pouvoir, à la disposition
privilégiée des soutiens et moyens nécessaires à l’exercice du pouvoir et au
changement de la conception même de l’exercice du pouvoir.
30
Sur les causes et les manifestations du renforcement de l’Exécutif dans les démocraties occidentales, voy.
notamment CHANTEBOUT, B., Droit constitutionnel et science politique, 18ème éd., Paris, Armand Colin, 2001,
pp. 290-346 ; PACTET, P., Institutions politiques. Droit constitutionnel, op. cit., pp. 164-239.
31
Sur la montée en puissance des exécutifs contemporains, lire avec intérêt FAVOREU, L. et alii, Droit
constitutionnel, op. cit., pp. 583-600.
32
C’est pourquoi, PACTET, P., Institutions politiques. Droit constitutionnel, op. cit., pp. 150-151, estime que le
régime parlementaire est désormais, au moins au cours d’une législature, un régime de concentration des
pouvoirs au profit d’un parti ou d’une coalition bien davantage qu’un régime d’équilibre, l’assemblée
n’apparaissant plus que comme la chambre d’enregistrement des volontés d’un Cabinet jouissant de la plénitude
du pouvoir.
33
Voy. PACTET, Institutions politiques. Droit constitutionnel, op. cit., pp. 112-117 ; FAVOREU, L. et alii,,
Droit constitutionnel, op. cit., pp 374 - 405.
14
Selon que l’on met l’accent sur un aspect ou un autre, l’on procède à
plusieurs classifications des régimes politiques : régimes pluralistes ou de parti
unique, régimes totalitaires38 ou démocratiques39. Parmi ces derniers, les
classifications abondent également. Ainsi le régime parlementaire, le régime
présidentiel, le régime semi-présidentiel, etc sont quelques types de régimes
politiques.
Section 3 : La démocratie
37
MPONGO-BOKAKO BAUTOLINGA, Institutions politiques et Droit constitutionnel, Institutions politiques
et Droit constitutionnel, t 1, Théorie générale des institutions de l’Etat, Kinshasa, EUA, 2001, p. 4.
38
Tout régime autoritaire rêve d’une manière ou d’une autre à réaliser l’unanimité de la société qu’il gouverne.
39
Sur la démocratie, voy. Les développements qui suivent.
40
HOFFMAN, J., State, Power, and Democracy: Contentious Concepts in Practical Political Theory, Sussex,
Wheat sheaf Books, 1988, p. 31.
16
C’est dans cette logique que des auteurs, comme Maurice Duverger et
André Hauriou, abondent pour définir la démocratie et n’hésitent pas à en construire
des équations aussi simplistes que « multipartisme égale démocratie ; parti unique
égale dictature »44.
41
WISEMAN, J.A., The New Struggle for Democracy in Africa, Avebury, 1996, pp. 7-8.
42
SORENSEN, G., « Democracy and the Developmental State », in NYANG’ORO, J.E. (ed.), Discourses on
Democracy: Africa in Comparative Perspective, Dar-Es-Salaam, Dar-Es-Salaam University Press, 1996, p. 42.
43
SANDBROOK, R., « Liberal Democracy in Africa: A socialist-Revisionist Perspective”, in NYANG’ORO,
J.E., Discourses on Democracy: Africa in Comparative Perspective, Dar-Es-Salaam, Dar-Es-Salaam University
Press, 1996, pp. 137-138.
44
Certains politistes occidentaux ont contribué à répandre des illusions qui ont donné naissance à la diffusion des
formes particulières de la démocratie. Parmi celles-ci, celle de l’algèbre politique consiste à considérer la
démocratie comme pouvant être synonyme des partis politiques multiples. Ces genres d’équations ont été vite
remises en question par les dirigeants africains qui ont tenté d’accoupler les termes « partis uniques » et
« démocratie ». Sur cet important débat, voy. avec intérêt GONIDEC, P.F., « Traditionalisme et modernisme en
matières d’institutions publiques africaines », Revue juridique et politique Indépendance et coopération, 1966, p.
81 ; MAHIOU, A., L’avènement du parti unique en Afrique noire, l’expérience des Etats d’expression française,
Paris, LGDJ, 1969, p. 24 ; NZONGOLA NTALAJA, Introduction à la science politique, Lubumbashi, éd. Du
Mont-Noir, 1972, p. 31; GONIDEC, P.F., Les systèmes politiques africains, Paris, LGDJ, 1974, p. 30.
45
Nous nous contenterons de citer ici quelques uns comme SHIVJI, I.G., « Contradictory Class Perspectives in
Debate on Democracy », in SHIVJI, I.G. (ed.), State and Constitutionalism: An African Debate on Democracy,
1st Ed., Harare, SAPES, 1991, pp. 254-255; SHIVJI, I.G., Fight My Beloved Continent: New Democracy in
Africa, Harare, SAPES Books, 1992, pp. 2, 44; AMIN, S., “The Issue of Democracy and Development in
Contemporary Third Word”, in NYANG’ORO, J.E. (ed.), Discourses on Democracy: Africa in Comparative
Perspective, op. cit., pp. 70-71; AKE, Cl., Democracy and development in Africa, Washington, DC: The
Brookings Institution, 1996, pp. 132, 137.
17
46
Sous cette catégorie, on peut notamment citer NYANG’ORO, J.E. (ed.), Discourses of Democracy….op. cit.,
pp. XII-XIII ; AKE, Cl., Democracy and development in Africa, op. cit., pp. 132-134, 137, 139 ; GLASER, D.,
« Discourses of Democracy in the South Africa Left : A Critical Commentary », in NYANG’ORO, J .E. (ed.),
Discourses on Democracy: Africa in Comparative Perspective, op. cit., p. 251.
47
SANDBROOK, R., « Liberal Democracy in Africa: A socialist-Revisionist Perspective”, in NYANG’ORO,
J .E. (ed.), Discourses on Democracy: Africa in Comparative Perspective, op. cit., p. 138; WISEMAN, J.A., The
New Struggle for Democracy in Africa, Avebury, 1996, p. 9.
48
Pour CHANTEBOUT, B., Droit constitutionnel et science politique, op. cit., p. 355, commentant l’article 2 de
la Constitution française du 4 octobre 1958, « si le but recherché par la démocratie n’était vraiment que le
« gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple » , il n’y aurait aucune raison de vouloir limiter les
pouvoirs des gouvernants dès lors qu’ils sont librement élus. Choisis par le peuple souverain et agissant en son
nom, ils devraient être libérés de toute entrave dans leur action. Ce n’est pas le cas. Bien qu’Hitler soit arrivé au
pouvoir dans le strict respect des règles démocratiques et que Staline ait été adulé par le peule russe, nul ne
s’avise à déclarer démocratiques leurs gouvernements ».
49
C’est la formule forgée par Abraham LINCOLN, président des USA, le 19 novembre 1863, lors du célèbre
discours qu’il prononça sur le champ de bataille de Gettysburg où 6 000 hommes avaient été tués quatre mois
auparavant. Dans des mots qui sont passés à la postérité, le président américain déclara : « Nous proclamons
aujourd’hui notre haute résolution que ces morts ne seront pas morts en vain – que cette nation, grâce à Dieu,
connaîtra une nouvelle naissance de liberté – et que ce gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple,
ne disparaîtra pas de la surface de la terre » ( « The Gettysburg Address », in An American Primer, New York,
Daniel J. Boortin, ed., A Meridian Classic, New American Library, 1985, p. 437.) .
50
MBATA BETUKUMESU MANGU, A., Constitutions sans constitutionnalisme, ‘démocraties autoritaires’ et
responsabilité sociale des intellectuels en Afrique centrale : quelle voie vers la renaissance africaine ?, op. cit.,
p. 11.
51
CHANTEBOUT, B., Droit constitutionnel et science politique, op. cit., p. 355.
52
DELPEREE, F., “Réflexions de l’étranger sur le projet de Constitution de la III ème République du Zaïre »,
Rev. Dr. Afric., n° 2, avril 1997, p. 5.
18
53
DE VILLIERS, Dictionnaire du droit constitutionnel, op. cit, p. 107.
54
Eux-mêmes héritiers de la pensée philosophique et politique des Lumières, ils ont forgé la théorie du
Rechsstaat.
55
Ne pas la respecter, ce serait, écrit CHEVALLIER, J. cité par DE VILLIERS, M., Dictionnaire du droit
constitutionnel, op. cit , « saper les fondements de son institution ».
56
Comme en témoigne le paragraphe introductif de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, depuis la
Révolution, l’idée de la soumission de l’Etat au droit est acquise.
57
La philosophie de la loi qu’exprime l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ajoutée
à la méfiance du juge judiciaire expliquent que, selon des voies d’ailleurs détournées, on n’ira pas au-delà du
contrôle de la légalité de l’administration, exercé par un juge spécifique, le juge administratif.
58
Pour les tenants de ce courant en effet, l’Etat et le droit sont deux réalités différentes, l’une extérieure à l’autre.
59
Dans la théorie de la souveraineté nationale, la loi est l’apanage du parlement, émanation de la nation. La
norme fondamentale est à trouver en dehors des organes de l’Etat parce qu’elle est censée provenir du souverain
primaire, le peuple.
19
60
A travers des principes comme la non-retroactivité de la loi, la tendance à une séparation dans les pouvoirs et
l’indépendance judiciaire, la responsabilité de la puissance publique, l’égalité devant la loi, la légalité des
infractions, la personnalité des peines, le respect des droits de la défense et des règles de procédure ainsi que le
principe de recours qui, selon Walter J. GANSHOF van der MEERCH , « Le problème de la sécurité de l’Etat et
la liberté », Rapport général, V ème Congrès international de droit comparé, Bruxelles, 1958, p. 11, concourent à
la protection des libertés individuelles et par lesquels se reconnaît un Etat de droit, Evariste BOSHAB, La
contractualisation du droit de la fonction publique Une étude de droit comparé Belgique-Congo, Louvain-la-
Neuve, Bruylant Academia s.a., 1998, pp. 215 extirpe l’idée de primauté et celle d’effectivité du droit qui, selon
lui, les résument tous.
61
Les éléments constitutifs du constitutionnalisme entrecoupent ceux de l’Etat de droit et de la démocratie au
point de faire paraître, à la fin, les trois concepts comme des synonymes ! Pareil exercice permet à Edouard
MPONGO-BOKAKO BAUTOLINGA, Institutions politiques et Droit constitutionnel, op. cit., p. 3, de résumer
les éléments d’un modèle du régime démocratique en « l’élection des gouvernants par le peuple ; la séparation
des pouvoirs et le contrôle juridictionnel des gouvernants ». C’est d’ailleurs ici que la référence au concept
anglais « rule of Law » trouve sa véritable place.
62
DE VILLIERS, M., Dictionnaire du droit constitutionnel, op. cit, p. 108.
63
D’après BADINTER, R., « Quelques réflexions sur l’Etat de droit en Afrique », in CONAC, G. (dir.),
L’Afrique en transition vers le pluralisme politique, Paris, Economica, 1993, p. 9, cela ne veut pas dire que l’on
a un Etat de droit démocratique. Or, c’est l’adjectif qui donne toute sa signification à un Etat de droit. On peut
aussi avoir des Etats de droit qui n’ont guère à avoir avec une démocratie.
64
Joseph Kabila n’a pas dérogé à la règle lorsqu’il s’est empressé de promettre dans son discours d’investiture
du 26 janvier 2001 « de renforcer l’Etat de droit, de consolider la démocratie et la bonne gouvernance, de
garantir le droits de l’homme et la justice», parmi les objectifs immédiats de son mandat. Voy. KABUYA
LUMUNA, C., Histoire du Congo. Les quatre premiers présidents, Kinshasa, SECCO & CEDI, 2002, p. 248.
20
Section 5 : La République
65
C’est le titre du livre de Platon, traduit en français « République ».
66
Cité par DE VILLIERS, M., Dictionnaire du droit constitutionnel, op. cit, p. 211.
67
Dictionnaire Hachette encyclopédique illustré, op. cit., p. 1615.
68
GUILLIEN, R. et VINCENT, J. (dir.), Lexique de termes juridiques, 14ème éd., Paris, Dalloz, 2003, p. 398.
69
La numérotation des républiques doit-elle suivre le changement des dirigeants à la tête de l’Etat, les révisions
constitutionnelles, l’établissement de nouvelles Constitutions ou le changement des fondements philosophiques
des régimes ? La question est fortement controversée et demeure ouverte au débat.
21
70
GUILLIEN, R. et VINCENT, J. (dir.), Lexique des termes juridiques, op. cit., p. 227.
71
C’est le cas lorsqu’il s’agit de déterminer les règles dans un conflit qui oppose des conjoints relevant des
législations différentes.
72
GUILLIEN, R. et VINCENT, J. (dir.), Lexique des termes juridiques, op. cit, p. 227.
73
Commet une fraude fiscale, le contribuable qui soustrait à la loi fiscale tout ou partie de la matière imposable.
74
DEBBASCH, C., PONTIER, J.M, BOURDON, J., RICCI, J.C., Droit constitutionnel et institutions
politiques., p. 111.
75
Sans doute, toute révision ne corrige pas toujours le texte constitutionnel, elle peut même le rendre pire.
76
DEBBASCH, C., PONTIER, J.M, BOURDON, J., RICCI, J.C., Droit constitutionnel et institutions politiques,
op. cit., p. 106.
22
77
LIET-VEAUX (M), Essai d’une théorie juridique des révolutions. La continuité du droit interne, Thèse de
doctorat, Paris, Recueil Sirey, 1942, p. 225.
78
DEBBASCH, C., PONTIER, J.M, BOURDON, J., RICCI, J.C., Droit constitutionnel et institutions politiques,
op. cit., p. 111.
79
Les révisions constitutionnelles intervinrent à travers toute l’Europe centrale afin d’instaurer des régimes
totalitaires de parti unique (communiste) imposés par les autorités de la défunte Union Soviétique.
23
C’est vrai qu’il est facile de confondre les violations d’une règle précise
de la Constitution avec la fraude. Toute fraude à une disposition constitutionnelle
matérielle renferme une violation constitutionnelle cachée. Mais toute violation ne
constitue pas nécessairement une fraude. Celle-ci amène son auteur à se référer au
texte concerné, à une forme constitutionnelle admise, quitte à la contourner par des
moyens détournés, bien préparés dans l’intention, en vue d’obtenir un résultat
opposé à celui attendu par l’usage conforme de ces dispositions. Il s’agit des actes
comportant des violations tellement détournées et malicieuses qui, le commun des
mortels n’étant pas capable de les déceler, pourraient facilement échapper à la
condamnation de l’histoire, faute par la communauté d’en attribuer la responsabilité
aux acteurs publics apparemment couverts par les textes en vigueur.
24
80
ROBERT, P., Le Nouveau Petit Robert, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française,
Dictionnaires Le Robert, Paris, 1996, p. 668.
25
Décrire l’histoire d’un Etat suppose que l’Etat concerné existe. Pour en
faire une démonstration rassurante, il nous a semblé utile de traiter d’abord de la
naissance de l’Etat congolais (première section), qui ne s’est pas accompli sans
douleur d’accouchement, avant d’ouvrir le débat ensuite sur l’évolution politique
(deuxième section) et enfin sur l’évolution constitutionnelle (troisième section).
Dans ce chapitre, le terme « Etat » sera surtout entendu dans son sens
large. L’Etat, forme perfectionnée de société, n’a pas toujours existé, il est à beaucoup
d’égards, le fruit d’une longue évolution.
L’antiquité avec les cités grecques et surtout avec Rome, a connu une
organisation sociale qui approchait de notre Etat moderne. Mais à partir des
invasions barbares et de la féodalité, cette ébauche s’est dissout dans une multitude
des liens sociaux, à la fois patrimoniaux et politiques au milieu desquels il est
impossible de découvrir l’institution de l’Etat. C’est en réalité à partir du XVème siècle
que la notion d’Etat, cadre des institutions politiques, au sens où nous entendons
cette organisation à l’heure actuelle, est née.
81
Pour l’inventaire de ces théories, voy. BALANDIER, G., Anthropologie politique, Paris, PUF, 2ème éd., 1969,
pp. 177-185.
82
Il suffit de se référer aux théories sur l’origine conventionnelle de l’Etat, comme le contrat social de Thomas
Hoppes et Jean Jacques Rousseau ou le contrat politique de John Locke, aux théories extra-juridiques, comme
celle du conflit, la thèse marxiste, la thèse socio-historique ou celle du positivisme historique sur découvrir
comment la naissance de l’Etat pose des problèmes demeurés irrésolus à ce jour.
26
83
BALANDIER, G., « Les mouvantes frontières de l’Afrique », Le Monde, n° 4656, du 10 au 11 janvier 1961.
84
De HEUSCH, L., « Aspects de la sacralité du pouvoir en Afrique », Le pouvoir et le sacré, Bruxelles, 1962,
138-158 (Annales du Centre d’Etude des Religions, I), p. 140.
85
Sur ce point, voy. MARLIER, M., Le Congo : de la colonisation belge à l’indépendance, Paris, Cahiers libres,
n° 32-33, François Maspero, 1962, p. 47.
86
Tenue du 15 novembre 1884 au 26 février 1885, la réunion de la Conférence de Berlin se situe dans la logique
des prétentions allemande, anglaise, française, belge, portugaise et hollandaise sur l’Afrique.
27
87
Pour l’histoire, au moment de la proclamation de l’indépendance de Belgique en novembre 1830, le Congrès
national, agissant comme corps constituant, avait décidé de confier la couronne belge à une famille étrangère. En
l’occurrence, Léopold 1er, d’origine allemande, fut intronisé le 21 juillet 1831, Roi des Belges et non Roi de
Belgique, pays qui appartient au peuple belge.
88
Au cas où le Roi n’arrivait pas à gérer le grand territoire congolais, il le céderait en priorité à la France.
89
D’aucuns soutiennent même que l’Etat congolais est une création artificielle de la communauté internationale.
90
A chaque étape de la vie de l’Etat congolais, la plupart des grandes décisions prises au pays semblent avoir
d’abord été concoctées à Bruxelles, Washington et Paris.
28
Les difficultés de gestion d’un territoire quatre-vingt fois plus vaste que
son propre pays et les abus de plus en plus nombreux dénoncés par des
observateurs92 contraignirent le roi Léopold II à céder son patrimoine congolais à la
Belgique, au détriment de la France, qui jouissait du droit de préemption sur ce
territoire. Est-ce à cause de ce manquement de Léopold II que la France s’est toujours
sentie autorisée à intervenir dans les affaires du Congo et que sa langue a fini par
prendre solidement racine au Congo ? L’observation du comportement des autorités
françaises dans les affaires congolaises tant au niveau de la fragile sécurité du
territoire93 que de la vacillante économie du pays94 le laissent penser.
Au sujet de la cession du territoire congolais par le roi à la Belgique,
deux thèses s’affrontent pour donner la nature de l’acte ayant fondé cette volonté de
l’ancien propriétaire de l’EIC : certains soutiennent que la cession est testamentaire,
d’autres avancent la thèse de la donation95.
91
Du fait de la conception patrimoniale du pouvoir, L’EIC était géré par voie de décrets en toutes matières. La
distinction de ces décrets en décrets constitutionnels, décrets législatifs et décrets administratifs est due à la
doctrine selon qu’ils organisaient l’Etat ou posait des actes concrets d’application ou non des premiers.
92
Les missionnaires protestants furent les plus virulents dans cette dénonciation.
93
Il suffit de considérer les différentes interventions de l’armée française à chaque fois que la sécurité du Congo
est menacée pour s’en rendre compte.
94
Les autorités congolaises de tous les temps n’ont-elles pas coutume de recourir à la France pour appuyer les
démarches de soutien financier à son économie malade, comme cela apparait dans le cadre du Club de Paris ?
95
VUNDUAWE te PEMAKO, F., Traité de droit administratif, Bruxelles, Larcier, 2007, pp.186 et 188, revient
sur cette question avec force détails..
96
Les effets du Traité du 28 novembre 1907 ont dû être atténués par un avenant pris le 5 mars 1908 tendant à
réserver au domaine de la Couronne une partie du territoire, notamment le Maï-Ndombe et l’Equateur.
29
97
Aux termes de ces dispositions constitutionnelles, la Belgique ne pouvait pas annexer un territoire étranger. Il
avait donc fallu procéder à une révision constitutionnelle avant d’autoriser cette annexion. L’alinéa 4 ajouté à
l’article 1er est ainsi libellé : « Les colonies, possessions d’outre-mer ou protectorats que la Belgique peut
acquérir sont régis par des lois particulières… ».
98
La Charte coloniale est entrée en vigueur le 15 novembre 1908.
99
En cette date fatidique du 18 octobre 1908, le parlement prit en réalité trois lois dont la première approuvait le
traité de cession du 28 novembre 1907, la seconde, l’acte additionnel du 5 mars 1908 et la dernière est dite charte
coloniale.
100
Le premier à être nommé ministre des colonies par le Roi le 30 octobre 1908 fut Jules Renkin, le dernier à
être nommé le 16 mai 1960 ministre sans portefeuille chargé des affaires générales en Afrique fut Van Der
Meersch.
101
Constitué tel que fixé par Arrêté royal du 28 juillet 1914.
102
Institué par l’Arrêté royal du 7 novembre 1927.
103
Article 21 de la Charte coloniale.
104
Article 22 de la Charte coloniale.
105
PEPY, D., Les nouveaux Etats et le modèle de l’ancienne métropole, in Les nouveaux Etats dans les relations
internationales, Paris Armand Colin, 1962, p. 131.
30
106
Guy de BOSSCHERE, Les deux versants de l’histoire : Perspectives de la décolonisation, Paris, Albin
Michel, 1969, p. 31, considère même le 20 ème siècle, avant tout autre, comme le siècle de la décolonisation.
107
Le mouvement qui permet aux colonies anglaises de trouver leur propre équilibre est aussitôt imité par Paris
qui entreprend un cortège des réformes par la loi-cadre de 1956. Sur ce processus des indépendances des Etats
africains, voy. GUILLAUME, P. et LAGROYE, J., La naissance des Etats d’Afrique noire, in L’Afrique noire
contemporaine, Paris, Armand Colin, 1968, pp. 136 à 177.
108
C’est en effet les 4 et 5 janvier 1959 qu’ont lieu les émeutes à Léopoldville, capitale du Congo belge.
109
PAMBOU TSHIVOUNDA, G., L’Etat africain postcolonial, Paris, LGDJ, 1982, p. 35.
110
DELPEREE, F., Préface de l’ouvrage de BOSHAB, E., La contractualisation du droit de la fonction
publique, Louvain-la-Neuve, 2001, p. 13.
31
En effet, mises à part les Lois fondamentales du 19 mai 1960 relative aux
structures du Congo et du 17 juin 1960 relative aux libertés publiques léguées par la
colonisation belge au nouvel Etat congolais et le décret-loi constitutionnel n° 003 du
27 mai 1997 octroyé par les princes de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la
Libération du Congo (AFDL), les principaux textes constitutionnels, comme la
Constitution du 1er août 1964, la Constitution du 24 juin 1967 et la Constitution du 18
février 2006, ont connu l’intervention du souverain primaire, qui les a approuvés par
voie référendaire114.
111
Si en 1831, la Constitution de la Belgique crée l’Etat belge aux comportements unitaires, c’est à partir de
1970 qu’elle lui donne une organisation inspirée des principes du fédéralisme ; celle-ci prend une importance
particulière avec la Constitution du 17 février 1994. Dans l’un ou l’autre cas, les réformes s’inscrivent dans la
continuité constitutionnelle de plus d’un siècle et demi. Voy. DELPEREE, F., Le droit constitutionnel de la
Belgique, Bruxelles, Bruylant, 2000 et Paris, LGDJ, 2000, p. 6.
112
Le régime constitutionnel français actuel et son fonctionnement ne peuvent être compris qu’en remontant à la
Révolution de 1789 certes. Mais malgré l’instabilité qui a caractérisé les institutions françaises de 1789 à 1870,
celles de la Troisième République (de 1870 à 1946) et de la Quatrième République (1946 à 1958) ont été plus
durables et plus libérales. De 1958 à ces jours, la République française dispose d’un régime politique établi par
la Constitution du 4 octobre 1958 et dont, de l’avis de beaucoup d’auteurs, l’évolution n’a nullement dénaturé
ses fondements initiaux.
113
Après près de trois siècles de vie, plus ou moins 26 amendements ratifiés et définitifs ont été portés à la
Constitution américaine du 17 septembre 1787.
114
Ces trois Constitutions furent adoptées par référendum organisé du 25 juin au 10 juillet 1964, pour celle de
1964, du 4 au 24 juin 1967 pour celle du 24 juin 1967 et du 18 au 19 décembre 2005 pour al Constitution du 18
février 2006. Bien que le référendum de 1967 ait été plus proche du plébiscite en faveur de son initiateur qui
tenait beaucoup au renforcement et à la consolidation des ses prérogatives présidentielles, le peuple congolais fut
tout de même appelé aux urnes.
32
115
Avec l’Ordonnance-loi n° 70-025 du 17 avril 1970, les Loi n° 70-001 du 23 décembre 1970, Loi n° 71-006
du 29 octobre 1971, Loi n° 71-007 du 19 novembre 1971, Loi n° 71-008 du 31 décembre 1971, Loi n° 72-003
du 5 janvier 1972, Loi n° 72-008 du 3 juillet 1972, Loi n° 73-014 du 5 janvier 1973, Loi n° 74-020 du 15 août
1974, Loi n° 78-010 du 15 février 1978, Loi n° 80-007 du 19 février 1980, Loi n°80-012 du 5 novembre 1980,
Loi n° 82-004 du 31 décembre 1982, Loi n° 88-004 du 27 janvier 1988, Loi n°88-009 du 27 juin 1988, Loi n°
90-002 du 5 juillet 1990 et Loi n° 90-008 du 25 novembre 1990, la Constitution du 24 juin 1967 aura en effet
été modifiée et complétée dix-sept fois en vingt-trois ans !
116
Ce sont des Constitutions issues du virus qui avait contaminé et secoué l’Afrique à une certaine époque et que
le doyen Charles Cadoux appelle « une véritable épidémie constitutionnelle des régimes de transition »
(« Remarques sur le provisoire en droit constitutionnel », in Présence du droit public et des droits de l’homme,
Mélanges offerts à J. VELU, t. 1, Bruxelles, Bruylant, 1992, p. 231.
33
117
Il suffit de lire le préambule de la charte française du 4 juin 1814 pour comprendre ce mode d’établissement
d’une constitution concédée : « Nous avons volontairement et par le libre exercice de notre autorité royale
accordé et accordons, fait concession et octroi à nos sujets de la charte qui suit ».
118
VUNDUAWE te PEMAKO, F., Traité de droit administratif, op. cit., p. 189, l’appelle, sans expliquer
pourquoi, la « première Constitution intérimaire de l’Etat du Congo ».
119
VANDERLINDEN, J., La crise congolaise, Bruxelles, Ed. Complexe, 1985, p. 20.
120
Il n’était certainement pas prudent pour eux de dissimuler au colonisateur la vérité afin d’éviter de perturber
la quiétude qu’il continuait à afficher quant au sort de sa colonie.
34
En vue de comprendre le sens des textes qui vont régir le nouvel Etat
indépendant, il s’avère utile de connaître la nature juridique des lois fondamentales
de 1960 en rapport avec le contexte de leur élaboration, avant d’en expliquer les
grandes options politiques et structurelles.
121
C’est le cas du « Plan de trente ans pour l’émancipation politique de l’Afrique belge» du professeur Jef Van
Bilsen de l’Institut universitaire des Territoires d’Outre-Mer d’Anvers, paru en février 1956.
122
Voy. Divers commentaires dans « La déclaration gouvernementale sur l’avenir du Congo. Réactions
congolaises et européennes », Courrier hebdomadaire du CRISP, Bruxelles, n° 5, février 1959.
123
Ce sont les termes mêmes du discours du roi du 13 janvier 1959.
124
Des partis régionaux comme le CEREA dans le Kivu, le Parti Solidaire Africain (PSA) dans la province de
Léopoldville, au Kwango et au Kwilu, le Parti du Peuple à Léopoldville, le Parti National du Progrès (PNP) dans
tout le pays et la Mouvement Nationaliste Congolas (MNC) dans les Provinces Orientale, du Kasaï et de
Léopoldville côtoient des partis à assise ethnique comme ABAKO de Bakongo, BALUBAKAT des Luba du
Katanga, UNIMONGO des Mongo, Parti de la Défense du Peuple Lulua des Lulua, FEDEKA des ethnies du
Kasaï au Katanga, ASSORECO de diverses ethnies non Kongo, CONAKAT de divers groupes poltiques à base
ethnique non-luba du Katanga et Inter-Fédérale de divers autres groupes politiques à base ethnique à
Léopoldville.
125
Ils étaient 44 membres effectifs et 39 membres suppléants choisis parmi les élus au scrutin de décembre 1959,
les leaders politiques représentant les grandes tendances de l’opinion et les chefs coutumiers.
126
Pour LECLERCQ, Cl., L’ONU et l’affaire du Congo, Paris, Payot, 1964, p.30, les projets de résolution de la
table ronde économique étant élaborés dans un cadre immuable où l’encadrement économique belge devait
garder une place prépondérante, la dépendance économique dans laquelle se trouverait le Congo indépendant
viderait la substance l’indépendance politique que les Congolais nationalistes considéraient comme une panacée
universelle.
35
C’est sans doute la Loi fondamentale relative aux structures qui a été
appelée à régir les institutions politiques du nouvel Etat jusqu’à l’élaboration de la
Constitution définitive du Congo. Néanmoins, à la suite de la crise politique
découlant de la révocation du premier ministre Lumumba le 4 septembre 1960 par le
chef de l’Etat et de l’envoi en congé sine die du parlement, trois textes d’une nature
127
Loi Fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo, MC, 1ère année, Léopoldville, n° 21 bis
du 27-28 mai 1960, pp. 353-389 et MB, 27-28 mai 1960.
128
Loi Fondamentale du 17 juin 1960 relative aux libertés publiques, MC, 1er année, Léopoldville, n° 26 du 27
juin 1960.
129
A cet égard, l’éventualité du maintien du roi des Belges comme chef du nouvel Etat à la manière de l’Etat
Indépendant du Congo semble avoir été caressé et même envisagé par les Belges. C’est ce qui explique
l’omission délibérée, par les rédacteurs de la Loi fondamentale qui semblaient caresser encore l’espoir de voir à
nouveau le Congo uni à la Belgique par une union personnelle, de l’expression « président » d’une République
du Congo pourtant baptisée ainsi dès son indépendance.
36
130
En raison d’une politique voulue par le colonisateur, la formation des élites congolaises capables d’atteindre
un haut niveau d’instruction universitaire fut le moindre de ses soucis.
131
Dans d’autres régimes parlementaires dans lesquels cette qualité n’est pas héréditaire, comme en Grande
Bretagne et en Belgique, par exemple, la désignation du chef de l’État est l’œuvre du parlement. C’est le cas en
37
Les tendances fédéralistes tirent leur origine tantôt des facteurs socio-
économiques développés par les tendances centrifuges des mouvements katangais,
tantôt des facteurs socioculturels résultant de l’extrémisme ethnique kongo135.
Conscients de l’apport important des ressources de leurs contrées au budget de
l’Etat, sans qu’il ne soit besoin de se concerter préalablement quant à ce, les leaders
katangais de la CONAKAT136 et kongo de l’ABAKO137 rêvaient, en faveur de leur
province, d’un Etat autonome, contrôlé politiquement et administrativement par les
Katangais authentiques pour les uns et par le peuple kongo pour les autres. Alors
que le Katanga compte sur ses richesses minières pour renforcer l’autonomie de son
futur Etat, le Congo central semble lorgner sur sa situation géographique privilégiée
par son accès à la mer pour réclamer l’autonomie.
138
Sans doute, à l’époque, la vocation réelle de beaucoup des provinces n’étant pas encore découverte, la
pauvreté se mesurait par rapport aux préoccupations économiques du colonisateur qui se contentait d’exploiter
uniquement les richesses déjà à sa portée.
139
L’expression est de DJELO EMPENGE OSAKO, Contribution à l’étude des tendances fédéralistes et
unitaristes dans l’évolution politique et constitutionnelle du Zaïre, op. cit., p. 140.
140
BIEBUYCK, D. et DOUGLAS, M., Congo : Tribes and Parties, Londres, Royal Anthropological Institute,
1961,
141
C’est ce qui explique l’implantation relativement rapide du MNC et autres partis unitaristes dans des
provinces comme le Kasaï, l’Equateur, le Kivu et la Province Orientale.
39
Lorsque Laurent Désiré Kabila et son AFDL, appuyés par les forces
gouvernementales rwandaises, burundaises et ougandaises prennent Kinshasa le 17
mai 1997, ils décident d’asseoir leur révolution sur la suspension de « tous les actes
pseudo constitutionnels existants ainsi que les institutions qu’ils organisent ». Ils
promettent de convoquer « une Assemblée constituante dans un délai de 60 jours en
vue d’élaborer une Constitution provisoire devant régir la période de transition ».
b. Un texte unidimensionnel
Dans une scène dans laquelle les différentes partitions sont connues
d’avance, espérer voir un membre du gouvernement disposer d’un pouvoir propre
relèverait du domaine des dangereuses pulsions spirituelles. Simples collaborateurs
du chef de l’Etat, les ministres doivent se soumettre à la volonté du chef de l’Etat et la
traduire en actes. A défaut de se soumettre, il ne leur reste plus, voulant manifester
quelque velléité d’indépendance, qu’à se démettre. Ce simple constat augure d’un
absolutisme qui renforce, si besoin en était encore, le caractère exclusivement
personnel des pouvoirs concédés par le décret-loi constitutionnel du 27 mai 1997.
Quel est ce magistrat qui aurait pris le courage d’aller à contre courant
de l’histoire pour refuser d’exécuter des injonctions, même sans fondement du chef
de l’Etat, sans subir le sort des 315 magistrats révoqués sans avoir été ni incriminés,
ni entendus .
47
constitutionnel aurait placé tous les hommes sur un pied d’égalité et une symbiose
utile à sa redynamisation se serait probablement tissée, comme une araignée, autour
des principes démocratiques aux contours clairement définis, susceptibles de
propulser le texte au-dessus de tous.
142
C’est pour faire échec à l’application de l’Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de
transition du 4 août 1992 que fut élaborée la loi n° 93/001 du 2 avril 1993 portant Acte harmonisé relatif à la
période de transition.
143
Contestée par les tenants du multipartisme intégral, ladite loi fut révisée et remplacée par la loi n° 90-008 du
25 novembre 1990 portant révision d’une disposition de la Constitution du 24 juin 1967.
51
144
Discours prononcé par le maréchal Mobutu à N’sele le 24 avril 1990, tiré du résumé repris dans l’exposé des
motifs de la loi n° 90-002 du 5 juillet 1990 portant révision de certaines dispositions de la Constitution, JO, op.
cit.
145
Nous nous souvenons encore, comme si c’était hier, de la répression sanglante de la marche organisée le 16
février 1993 par les chrétiens de Kinshasa et d’autres villes du pays pour exiger la réouverture de la CNS.
146
C’est en effet le 24 avril 1990 que le maréchal Mobutu avait pris « congé » de son parti, le MPR et avait
décidé de démocratiser son régime en supprimant le parti unique par l’admission d’un multipartisme à trois et la
réhabilitation de trois pouvoirs traditionnels.
147
La confrontation quoi en résulta eut un impact très négatif sur cet acte mort-né.
52
148
Loi n° 93/001 du 2 avril 1993 portant Acte constitutionnel harmonisé relatif à la période de transition, JO,
34ème année, numéro spécial, avril 1993.
149
L’on sait ce qui arrive lorsque l’on met le bon vin dans des vieilles huîtres. La suppression du dédoublement
conduit à un mélange indigeste de dirigeants politiques et à des compromissions de tous genres.
53
150
Le constituant assigne ainsi aux animateurs de la transition tout un programme susceptible de conduire le
pays, en posant déjà les jalons pour ce faire, vers un régime démocratique. Voy. Acte constitutionnel de la
transition du 09 avril 1994, JO, numéro spécial, avril 1994, p.9.
151
BOSHAB, E., «République Démocratique du Congo : Le spectre d’une Constitution virtuelle devant la
commission constitutionnelle », op. cit., pp. 120-121.
152
VUDISA MUGUMBUSHI, J.-N., « Changement de Constitutions et déconstitutionnalisation des droits et
libertés en République Démocratique du Congo (Examen de la portée d’une constance de l’ordonnancement
juridique depuis 1960), op. cit., p. 44.
153
Ce dédoublement institutionnel a une origine qu’il convient de retenir : le refus de Mobutu de voir la
Conférence nationale souveraine (CNS) empiéter sur ses « compétences régaliennes » et d’être confiné
notamment à l’inauguration des chrysanthèmes a amené les partis politiques et associations favorables à sa
mouvance, dits forces du « statu quo ante » à tenir le conclave politique de Kinshasa d’où sortira l’Acte
constitutionnel harmonisé relatif à la période de transition qui remettait en scelle les institutions antérieures à la
tenue de ces assises.
54
154
Des nominations au gouvernement ou à de hautes fonctions de l’armée se font tantôt par décret-loi, tantôt par
simple décret, selon l’humeur du jour.
155
Le décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 relatif à l’organisation et à l’exercice du pouvoir en
République Démocratique du Congo, JO, 38ème année, Kinshasa, numéro spécial, mai 1997 n’en fait pas état.
55
C’est en vue de mettre fin à une longue guerre qui a mis aux prises les
anciens et nouveaux alliés du gouvernement de Kinshasa depuis août 1998 qu’un
accord fut signé à Lusaka pour la mise en place d’un nouvel ordre politique au
Congo159.
156
Parmi les composantes et entités belligérantes, on note le gouvernement de la RDC, le RCD, le MLC, le
RCD/KML, le RCD/N et les Maï Maï, Accord global et inclusif sur la transition en RDC, JO, 44ème année,
Kinshasa, numéro spécial, 5 avril 2003, p. 51.
157
Constitution de la République Démocratique du Congo, JO, 47ème année, Kinshasa, numéro spécial du 18
février 2006.
158
Constitution de la transition du 04 avril 2003, JO, 44ème année, Kinshasa, numéro spécial, 5 avril 2003.
159
Il s’agit de l’accord de cessez-le-feu signé les 10, 30 et 31 juillet 1999 à Lusaka en Zambie.
160
Outre quatre composantes (le gouvernement de la RDC, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie, le
Mouvement de Libération du Congo, l’Opposition politique et les Forces vives), il a existé au dialogue trois
entités (Rassemblement Congolais pour la Démocratie - Mouvement de libération, Rassemblement Congolais
pour la Démocratie - National et les Mai Mai).
161
C’est ainsi que l’on peut lire dans le préambule de ladite Constitution :
« RESOLUS à édifier un Etat de droit durable fondé sur le pluralisme politique, la séparation des pouvoirs entre
« l’exécutif, le législatif et le judiciaire, la participation des citoyens à l’exercice du pouvoir, le contrôle des
« gouvernants par les gouvernés, la transparence dans la gestion des affaires publiques, la subordination de
« l’Autorité militaire à l’Autorité civile, la protection des personnes et de leurs biens, le plein épanouissement
« tant spirituel que moral de chaque citoyen congolais, ainsi que le développement harmonieux de la
« communauté nationale ;
« REAFFIRMANT solennellement notre attachement aux principes de la démocratie et des droits de l’homme
« tels qu’ils sont définis par la Déclaration universelle des droits de l’Homme du 10 décembre 1948, la Charte
« africaine des droits de l’Homme et des Peuples adoptée le 18 juin 1981, ainsi que tous les instruments
« juridiques internationaux et régionaux adoptés dans la cadre de l’Organisation des Nations Unies et de
« l’Union Africaine, dûment ratifiés par la République Démocratique du Congo ;
« DETERMINES à garantir les libertés et les droits fondamentaux du citoyen congolais et, en particulier, à
« défendre ceux de la femme et de l’enfant ; … »
56
162
Sous la coordination de l’éminent constitutionnaliste sénégalais, le Professeur El Hadj MBODJ, ce comité
était composé en outre du professeur suisse Alain Sigg et d’un magistrat de la même nationalité, Maître Cédric
Mizel en plus de quelques experts juridiques de composantes et entités.
163
Article 1, Constitution de la transition du 4 avril 2003 et Accord global et inclusif, point VII -a. Voy. Journal
Officiel de la RDC, numéro spécial, 5 avril 2003, p. 52.
164
Ainsi se présentent les préambules des Constitutions du 1er août 1964, du 24 juin 1967 et du 18 février 2006.
165
Cela apparaît d’ailleurs clairement dans le préambule même du texte constitutionnel, qui reprend : « Nous,
Délégués des composantes et entités au Dialogue intercongolais… »
166
Ses initiateurs s’en défendent en s’abritant derrière la précarité de vie et les objectifs limitativement
déterminés du régime instauré. Voy. Communication présentée devant les sénateurs par le professeur El Hadj
MBODJ, « Le contexte de l’élaboration de la Constitution de la transition », au Séminaire de réflexion sur la
future Constitution de la RDC, inédit, Palais du peuple, Kinshasa, août 2004, p. 2.
167
Il s’agit de l’Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de transition accouché par la
Conférence nationale souveraine, ou encore de l’Acte constitutionnel harmonisé relatif à la période de transition
que lui opposait le Conclave politique de Kinshasa regroupant les forces politiques fidèles aux pouvoirs sans
limites du Maréchal Mobutu, ou enfin l’Acte constitutionnel de la transition, qui fusionnait les deux premiers
afin de mettre fin au dédoublement institutionnel découlant de l’application de ces textes. Dans ces « Actes », la
formule introductive « Nous, Peuple…. » est élaguée du terme « Peuple » au profit d’une catégorie plus
restreinte de représentants déterminés par la catégorie des assises qui y donnent lieu.
57
168
El Hadj MBODJ, op. cit., pp. 2 – 3.
169
Ibidem. C’est ce qui arriva au Congo Brazza et au Bénin.
170
Le point VII –a. de l’Accord de Pretoria du 17 décembre 2002 parle expressément de la « Constitution de la
transition »
171
Article 2, point 1, litera a, de la Convention de Vienne sur le droit de traité adopté le 23 mai 1969 et entrée en
vigueur le 27 janvier 1980.
58
172
C’est ainsi que la population congolaise en réclamait et en exigeait le respect et l’application toutes les fois
que l’occasion lui en était donnée. En sont des preuves supplémentaires les controverses qui avaient opposé les
animateurs des institutions de la transition et les acteurs politiques restés en dehors des institutions, par la
population interposée, autour des dispositions de l’article 196 de la Constitution du 4 avril 2003 sur la durée
constitutionnelle de ladite transition.
173
Selon un rapport de l’International Rescue Committee (IRC), une ONG américaine basée à New York et de
l’Institut Barnett, un centre australien de recherche médicale, rendu public le 9 décembre 2004, le conflit en
RDC est le plus meurtrier depuis la seconde guerre mondiale avec 3,8 millions de morts recensés depuis 1996.
Des calculs simples donnent environ mille victimes civiles par jour, dont la majorité ont péri de faim et de
maladie en tentant de fuir les zones de combats.
174
Il suffisait d’écouter les populations congolaises qui ne juraient plus que par la fin de la transition et
l’organisation des élections à tous les milieux dans les délais constitutionnels pour comprendre ce qu’elles
pensaient du texte.
175
Outre les dispositions de l’article 3 de la Constitution de la transition qui redéfinissent de leur manière la
souveraineté du peuple en lui reconnaissant le pouvoir de contrôle sur les détenteurs du pouvoir, un long titre
trois étale de longues dispositions destinées à promouvoir les droits et libertés de tous.
59
176
En effet le pouvoir constituant originaire, unique pouvoir qui puisse établir une nouvelle Constitution est
initial (aucun autre n’étant au dessus de lui), autonome ( ne pouvant dépendre d’aucun autre) et inconditionné
par aucun texte. Voy. Tous les ouvrages classiques de droit constitutionnel, notamment JEANNEAU, B., Droit
constitutionnel et institutions politiques, Paris, Dalloz, 1968, p. 61 ; BURDEAU, G., Droit constitutionnel et
institutions politiques, Paris, L.G.D.J, 1974, pp. 80 et ss ; PRELOT, M. & BOULOUIS, J., Institutions
politiques et Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 1980, p. 210.,
177
La Constitution a en effet été élaborée sur la base de l’Accord global et inclusif comme l’indiquent les
dispositions de l’alinéa premier de son article 1. Le point VII de cet Accord relatif aux dispositions finales en
fait même partie intégrante.
178
Alinéas 2 et 3 de l’article 1 de la Constitution de la transition.
179
La répartition des responsabilités pendant la période de transition se fait en tenant compte des composantes et
entités au Dialogue inter congolais conformément à l’Annexe I de l’Accord global et inclusif. Voy. Journal
Officiel de la RDC, N° spécial, 5 avril 2003, pp. 61-66.
60
illogique que pareille compétence lui soit dévolue180. Le cas aurait pu cependant être
reconsidéré s’il s’agissait d’une norme prise ultérieurement en vue de réviser le texte
adopté à Sun City. Dans cette hypothèse imaginaire, une fois certifiée conforme à
l’Accord par la Cour suprême de justice, la norme constitutionnelle continuerait-elle
d’être inférieure à la norme conventionnelle ? La question est demeurée sans
réponse.
180
Aux termes de l’article 150 de la Constitution de la transition, la Cour suprême de justice n’est compétente
que pour connaître de la constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi et non de juger de la conformité
des dispositions constitutionnelles à l’Accord global et inclusif qui en est le géniteur.
181
Devant l’impossibilité prouvée des parties belligérantes de gagner la guerre, la seule possibilité de réunifier le
pays et instaurer un nouvel ordre politique était d’obtenir un consensus négocié de partage des responsabilités
pendant une période limitée nécessaire à la recherche d’une source de pouvoir démocratique, la dévolution des
mandats publics par le peuple par la voie des urnes. L’argument que nous faisons nôtre vient de MBODJ, op. cit,
p. 2.
182
Geneviève Koubi et Raphaël Romi considèrent qu’il s’agit là, selon l’impact de nouvelles dispositions sur
l’ordre institutionnel précédent, du pouvoir constituant « révolutionnaire » ou « réformateur », Etat, Constitution,
Loi, Paris, Litec, 1993, pp. 96-100.
183
En ce sens, lire BOSHAB, E., « Du principe de l’immutabilité des dispositions matricielles dans une
Constitution de transition », in Le Potentiel, n° 3098, de mercredi 14 avril 2004, pp.19-20.
184
Contrairement à l’exemple sud-africain dans lequel le partage des responsabilités au sein du gouvernement
était déterminé par le poids électoral des partis, la RDC a adopté la formule 1 + 4 mettant à la tête du pays les
quatre composantes jugées importantes (Gouvernement, RCD, MLC et Opposition politique) sous la surveillance
de la composante Société civile qui préside le Sénat et les cinq Institutions d’appui à la démocratie.
61
Après la chute de l’empire soviétique, les pays de l’Europe de l’Est ont eu recours à
la même pratique pour asseoir des régimes démocratiques. A la suite de la
contestation presque générale de leurs régimes dans les années 1990, des dictateurs
africains ne manquèrent pas de convoquer des conférences nationales dont sortirent
des textes provisoires destinés à mettre en place un nouvel ordre politique185.
185
Cette épidémie des Conférences nationales a permis à certains pays, comme le Bénin, d’adopter finalement
des Constitutions définitives mettant en place un nouvel ordre politique stable et démocratique.
186
Articles 65 à 96 de la Constitution de la transition du 4 avril 2003.
187
Articles 97 à 103 de la Constitution de la transition du 4 avril 2003.
188
Articles 146 à 153 de la Constitution de la transition du 4 avril 2003.
189
Les articles 69 à 79 de la Constitution de la transition lui reconnaissent de multiples prérogatives exécutives
(présidence du Conseil des ministres, promulgation et exécution des lois).
190
Article 147, alinéa 3 de la Constitution du 4 avril 2003.
62
191
Aux termes des articles 131, 132 et 133 de l’ordonnance-loi n°82-017 relative à la procédure devant la Cour
suprême de justice, qui organisent, en effet, le contrôle de la constitutionnalité à travers l’appréciation de la
conformité des lois et actes ayant force de loi, l’interprétation de la Constitution et le sort des exceptions
d’inconstitutionnalité, la compétence de saisir la Cour appartient au seul Procureur général de la République
agissant, soit à la demande du Chef de l’Etat, à celles du Bureau du Parlement ou des juridictions de jugement
saisies d’une exception d’inconstitutionnalité.
192
C’est l’ordonnance-loi n° 88-056 du 29 septembre 1988 qui continue, après abrogation de l’ordonnance-loi
n° 82-018 du 31 mars 1982, de régenter le statut des magistrats avec les mentalités du militantisme et de la
fidélité au guide enseignés par le Mouvement Populaire de la Révolution et les rémunérations de misère.
193
Articles 15 à 63 de la Constitution de la transition du 4 avril 2003.
63
Parmi des droits nouveaux introduits par le texte sous examen, on peut,
à titre exemplatif, citer le droit de refus d’exécution d’ordre manifestement illégal de
l’article 25, les droits reconnus à l’enfant (articles 44 et 45), l’égalité de sexe par la
protection des droits économiques, sociaux, culturels et politiques en faveur de la
femme que consacrent les dispositions de l’article 51.
194
Dans la loi fondamentale du 17 juin 1960, le colonisateur belge n’a eu recours qu’à seize dispositions (de
articles 2 à 17) pour consacrer les libertés publiques. Par rapport au constituant de 1964 qui sembla davantage se
préoccuper de la protection des droits fondamentaux en consacrant trente-trois dispositions à leur promotion
(articles 13 à 45), le régime de Mobutu Sese Seko privilégia la tendance de les maintenir en baisse avec quatorze
dispositions dans la Constitution du 24 juin 1967 (articles 5 à 18), quinze dans la fameuse « révision » du 15
août 1974 (articles 12 à 26), vingt dans la loi du 15 février 1978 destinée à « permettre au peuple de s’exprimer
démocratiquement » (articles 12 à 31). Même l’Acte constitutionnel de la transition du 9 avril 1994, qui avait la
prétention de conduire le pays vers une « Troisième République véritablement démocratique » n’y consacre que
vingt-huit dispositions (articles 9 à 36).
195
Ce droit aussi clairement précisé dans le texte constitutionnel (article 21), contrairement aux textes
précédents, qui renvoyaient les modalités de l’exercice de ce droit à leur détermination par une loi, consacre la
fin des abus de tout bord perpétré au niveau de la police et même du Parquet où, au nom du secret de
l’instruction pré-juridictionnelle mal compris, les officiers de police judiciaire, inspecteurs judiciaires et même
certains officiers du Ministère public ne toléraient pas « l’immixtion » des Conseils à l’instruction, méfiance sans
doute justifiée par le souci de certains instructeurs « d’opérer » loin des yeux indiscrets des avertis des
procédures légales.
196
En attendant de signer et de ratifier le Protocole à la Charte Africaine des droits de l’homme et des peuples,
relatif aux droits de la femme adopté le 11 juillet 2003 à la Deuxième session ordinaire de la Conférence de
l’Union Africaine tenue à Maputo (Mozambique), qui prévoit la participation paritaire des femmes dans la vie de
leurs pays, notamment au processus politique et à la prise de décision, la RDC est néanmoins membre à la
Convention de la SADC sur les droits de la femme qui préconise le quota de 30% dans la participation aux
institutions. C’est ainsi que des dispositions ont été prises pour assurer la représentation significative de la
femme tout au moins dans toutes les institutions d’appui à la démocratie. Si l’on s’en tient à la Déclaration
solennelle sur l’égalité entre les hommes et les femmes en Afrique faite à la Troisième session de la Conférence
de l’Union Africaine tenue à Addis-Abeba (Ethiopie) du 6 au 8 juillet 2004, dans laquelle les Chefs d’Etat et de
gouvernements de l’Union s’engagent à signer et à ratifier ce Protocole « d’ici à la fin de 2004 » et d’assurer son
entrée en vigueur avant fin 2005, on serait tenté de croire à une véritable révolution imminente en faveur de la
femme africaine en général et congolaise en particulier.
64
197
L’une des institutions d’appui à la démocratie prévue par la Résolution n° DIC/CHSC/08 du Dialogue inter
congolais, reprise dans l’Accord global et inclusif, Point V, voy. Journal Officiel de la RDC, N° spécial, 5 avril
2003, p. 54 et mise en place par l’article 154 de la Constitution de la transition en vue de « promouvoir et de
protéger les droits de l’homme » (article 155, quatrième trait), l’ONDH est organisé et fonctionne conformément
à la loi n° 04/019 du 30 juillet 2004.
198
C’est la mission que lui confèrent les dispositions de l’article 5 de la loi n° 04/019 du 30 juillet 2004.
199
Les nombreuses attributions que lui reconnaissent les dispositions de l’article 7 de sa loi organique l’amènent
autant à influer sur la conduite des autres institutions publiques à l’égards des droits de la personne humaine qu’à
renforcer les capacités d’intervention des organisations de défense des droits de l’homme.
200
ZOLLER, E., op., cit., p. 497.
201
Ces écueils sont tantôt d’ordre législatif à cause du retard pris dans l’élaboration des lois essentielles à la
tenue des élections, tantôt d’ordre matériel ou d’ordre sécuritaire.
65
cause de la sanction latente certes, mais efficace qui peut résulter de l’exerce libre,
transparent et démocratique de ce droit.
partis politiques, les syndicats, les organisations de défense des droits de l’homme,
les organes de presse tant audio-visuelle qu’écrite dans la protection des droits de
l’homme.
Lorsque l’on considère ce qu’a toujours été le respect des principes qui
président à l’élaboration d’une Constitution, à la séparation des pouvoirs et à la
protection des droits de l’homme depuis l’indépendance du Congo, il y a lieu de se
réjouir de la tournure que semblent prendre les événements après analyse concrète
de la situation pratique des institutions du pays. En effet, la majorité des textes
constitutionnels congolais ont été imposés par le fait de prince202. L’élaboration de la
Constitution de la transition a bénéficié d’un peu plus de consensus et d’un cadre
plus élargi de tendances dont il était tenu compte.
202
C’est le cas de la Loi fondamentale, elle-même œuvre du parlement belge ; de toutes les Constitutions du
régime Mobutu, y compris la Constitution du 24 juin 1967 malgré le bénéfice du plébiscite constitutionnel qui
avait couronné son adoption ainsi que le Décret-loi constitutionnel institué par Laurent Désiré Kabila.
203
Les articles 9 et 30 de la Loi n° 74-20 du 15 août 1974 portant révision de la Constitution du 24 juin 1967.
204
L’article 5 du décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 relatif à l’organisation et à l’exercice du
pouvoir en République Démocratique du Congo.
205
Le peuple semble s’être approprié de la Constitution, la séparation des pouvoirs est à l’ordre du jour, la liberté
est plus réelle que formelle et l’impunité préoccupe tant les acteurs politiques que sociaux.
206
Ce sont deux des objectifs assignés à la transition par l’Accord global et inclusif, Point II, voy. Journal
Officiel de la RDC, N° spécial, 5 avril 2003, p. 52.
207
Outre le Sénat qui est chargé par l’alinéa 2 de l’article 104 de la Constitution d’élaborer l’avant-projet de la
Constitution et l’Assemblée nationale qui en adopte le projet (article 98, quatrième trait), la Commission
électorale indépendante est chargée par l’article 7, litera e, de sa loi organique de « traduire en langues
nationales et rendre public [en vue de le vulgariser] le projet de Constitution à soumettre au référendum
populaire.
67
consacrer une réelle séparation des pouvoirs, il lui importe de veiller à assurer une
véritable indépendance du pouvoir judiciaire par la suppression de sa garantie par le
chef de l’Etat, cordon ombilical qui le lie au pouvoir exécutif, de garantir
l’inamovibilité des juges à travers un statut des magistrats non empreint des
séquelles tant dénoncées des régimes précédents. Enfin, le maintien des droits
protégés par la Constitution de la transition, voire leur augmentation, ainsi que le
renforcement du pluralisme politique et syndical, de la liberté de la presse,
d’association et d’expression, la multiplication des corps intermédiaires rejailliront
sûrement sur la protection des droits humains.
208
En mettant sur pied par O n° 298 du 27 novembre 1963 une Commission constitutionnelle chargée d’élaborer
la Constitution, le chef de l’Etat violait non seulement les dispositions de l’article 4 de la Loi fondamentale, qui
n’attribuent le pouvoir constituant qu’au « chef de l’Etat et aux deux chambres », mais aussi celles des 98 à 101
qui en fixent la procédure d’élaboration et d’adoption.
68
209
L’initiative de révision, la procédure d’adoption, soumise à une stricte condition de majorité, et celle
d’approbation sont prescrites par les dispositions des articles 175 à 177 de la Constitution du 1 er août 1964, MC,
op. cit., pp. 44-45.
210
Selon la proclamation des autorités militaires, les institutions démocratiques de la République, telles qu’elles
étaient prévues par la constitution du 1er août 1964, étaient maintenues.
211
De novembre 1965 à octobre 1966, le nouveau chef de l’Etat avait finit par acquérir le pouvoir législatif
ordinaire.
212
En ce sens, voy. VUDISA MUGUMBUSHI, J.-N., « Changement de constitutions et déconstitutionnalisation
des droits et libertés politiques en République Démocratique du Congo », Rev. de Dr. Afric., n° 3, juillet 1997, p.
43.
213
Aux termes de l’article 28 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 568. « Le président de la
République peut, après en « avoir informé l’Assemblée nationale par un message et après avoir pris avis du
bureau de celle-ci, soumettre « au référendum tout texte qui lui paraît devoir exiger la consultation directe du
peuple.
« Lorsque le référendum a conclu à l’adoption du projet, el président de la République le promulgue dans les
« délais prévus à l’article 51.
« La loi ainsi adoptée ne pourra au cours de la législature durant laquelle le référendum a été organisé, être
modifiée que moyennant accord du président de la République ».
214
Les députés et sénateurs ont été désignés par les composantes et entités au dialogue inter congolais.
69
215
Cette procédure est ainsi prévue aux articles 104, 98 et 70 de la Constitution de la transition du 04 avril 2003,
JO, 44ème année, Kinshasa, numéro spécial, 5 avril 2003, pp. 26, 24 et 19.
216
Il faut noter que cette procédure a été modifiée par la loi du 21 septembre 1963 qui abrogeait les articles 99 à
101 et modifiait l’article 98 en donnant compétence d’élaborer la Constitution à la chambre des représentants et
au sénat réunis en assemblée constituante.
70
trois ans au minimum et quatre ans au maximum217. Quelque soit la situation sur le
plan juridique, la nécessité d’élaborer une Constitution se fit sentir, en raison des
tendances centrifuges déclenchées par la sécession, de plus en plus comme un besoin
politique de stabilisation.
222
Par l’ordonnance n° 226 du 29 septembre 1963, MC, n° 17, p. 842, le chef de l’Etat dissout les chambres et
transfert la compétence d’élaborer le projet de Constitution à une commission constitutionnelle.
223
Une deuxième ordonnance n° 227 de la même date, MC, n° 17, p. 849 transfert le pouvoir législatif à
l’exécutif.
224
Outre son président, Iléo et son secrétaire, Lihau, la commission était composée des représentants du
gouvernement central, de chaque gouvernement et de chaque assemblée provinciaux, de chaque syndicat
reconnu, de chaque association des employeurs reconnue, des coopératives, du conseil national de la jeunesse, de
la presse, des organisations estudiantines, de l’église catholique, de l’église protestante et de l’église
kimbanguiste.
225
Sur les controverses sur la valeur à accorder aux travaux de la commission constitutionnelle de Luluabourg,
voy. DJELO EMPENGE OSAKO, Contribution à l’étude des tendances fédéralistes et unitaristes dans
l’évolution politique et constitutionnelle du Zaïre, op. cit., pp. 292-298.
72
Le droit étant non seulement le fond, mais surtout la forme, ce vice est
bien sûr critiquable. Mais le recours au référendum constitutionnel pouvait remédier
au vice dans la mesure où l’intervention du titulaire de la souveraineté dans le
processus peut être considérée comme un mécanisme correcteur. Mais il reste à se
poser la question de savoir si, en raison du niveau de culture sociopolitique de
l’époque, tous les votants avaient pu apprécier dans toute sa dimension la portée du
choix opéré. C’est là une autre question, dont l’actualité demeure vivante à ce jour au
regard de l’organisation du processus lui-même qui se réduit à répondre par oui ou
par non l’acceptation ou le rejet du texte proposé.
226
Sur ces opinions de la presse, voy. Le courrier d’Afrique, 14, 17, 18 et 20 avril 1964 ; Présence congolaise,
18 avril 1964 et Voix du Katanga, 18 avril 1964.
73
Bien que le constituant de 1964 tente d’éviter les pesanteurs qui auront
empêché la Loi fondamentale de régir normalement les institutions, il soumet
l’entrée en fonction du gouvernement à l’approbation du parlement réuni en congrès
national comme si l’ancien système dans lequel le gouvernement répondait de sa
responsabilité devant le parlement subsistait encore. Les vestiges du
parlementarisme de 1960, qui permettent au parlement d’intervenir dans l’investiture
du gouvernement nommé librement par le chef de l’État, ne compensent
malheureusement pas la dangereuse immixtion de l’exécutif dans le travail de
législation. Celle-ci facilite, par contre, la dépendance du parlement au chef de l’État,
qui demeure seul maître à bord.
227
C’est le résumé qu’en fait Raymond SCHEYVEN, ministre chargé des affaires économiques du Congo dans
son discours prononcé le mercredi 27 avril 1960 à la Conférence financière, économique et sociale, cité par
BOMANDEKE BONYEKA, Le parlement congolais sous le régime de la Loi fondamentale, op. cit., p. 359.
74
228
Art. 90, 86 et 60, Constitution du 1er août 1964, MC, op. cit., pp. 23 et 24, 23, 16 et 17.
229
Art. 95, Constitution du 1er août 1964, MC, op. cit., p. 25.
230
Art. 96, Constitution du 1er août 1964, idem.
231
O n° 66-612 du 27 octobre 1966 conférant au président de la République les pouvoirs du premier ministre,
MC, 7ème année, n° 21 du 15 novembre 1966, pp. 846-847.
75
232
OL n° 65-7 du 30 novembre 1965 accordant des pouvoirs spéciaux au président de la République, MC, 7ème
année, n° 1 du 1er janvier 1966, p. 2.
233
OL n° 66-92 du 7 mars 1966 relative aux pouvoirs du président de la République et du parlement, MC, 7ème
année, n° 7 du 15 avril 1966, p. 158.
234
OL n° 66-621 du 21 octobre 1966 relative aux pouvoirs du président de la République et du parlement, MC,
8ème année, n° 1 du 1er janvier 1967, p. 601.
235
Cette ordonnance-loi confère au président de la République la compétence de prendre, par ordonnance-loi,
des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.
236
Non seulement les ordonnances-lois prises sous le régime de l’ordonnance-loi du 30 novembre 1965 devaient
être déposées sur le bureau de l’une des chambres dans les deux mois de leur signature, même si l’on ne sait pas
trop bien pourquoi faire, mais ladite ordonnance-loi ne dépossédait pas le parlement de son pouvoir législatif
ordinaire.
237
Le parlement semble déposséder totalement de son pouvoir législatif même si les ordonnances-lois à prendre
par le chef de l’État dans le cadre de ce nouveau pouvoir devaient être « transmises pour information à la
chambre des députés et au sénat dans les deux mois qui suivent la date de leur signature ».
76
239
L’initiative de révision, la procédure d’adoption, soumise à une stricte condition de majorité, et celle
d’approbation sont prescrites par les dispositions des articles 175 à 177 de la Constitution du 1 er août 1964, MC,
op. cit., pp. 44-45.
240
Selon la proclamation des autorités militaires, les institutions démocratiques de la République, telles qu’elles
étaient prévues par la constitution du 1er août 1964, étaient maintenues.
241
De novembre 1965 à octobre 1966, le nouveau chef de l’Etat avait finit par acquérir le pouvoir législatif
ordinaire.
242
En ce sens, voy. VUDISA MUGUMBUSHI, J.-N., « Changement de constitutions et déconstitutionnalisation
des droits et libertés politiques en République Démocratique du Congo », Rev. de Dr. Afric., n° 3, juillet 1997, p.
43.
243
Art. 56 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 574.
244
L’article 4 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. dispose : « Les partis politiques concourent à
l’expression du suffrage. Il ne peut être créé plus de deux partis politiques dans la République. Les partis
politiques s’organisent et exercent leurs activités librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté
nationale, de la démocratie et des lois de la République ».
245
Déjà l’une des premières révisions, la loi n° 70-001 du 23 décembre 1970, MC, n° 1 du 1er janvier 1971,
institue le Mouvement populaire de la révolution comme parti unique et l’érige en une des principales
institutions de la République.
78
246
Aux termes de l’article 28 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 568. « Le président de la
République peut, après en « avoir informé l’Assemblée nationale par un message et après avoir pris avis du
bureau de celle-ci, soumettre « au référendum tout texte qui lui paraît devoir exiger la consultation directe du
peuple.
« Lorsque le référendum a conclu à l’adoption du projet, el président de la République le promulgue dans les
« délais prévus à l’article 51.
« La loi ainsi adoptée ne pourra au cours de la législature durant laquelle le référendum a été organisé, être
modifiée que moyennant accord du président de la République ».
247
Avec l’OL n° 70-025 du 17 avril 1970, les Loi n° 70-001 du 23 décembre 1970, Loi n° 71-006 du 29
octobre 1971, Loi n° 71-007 du 19 novembre 1971, Loi n° 71-008 du 31 décembre 1971, Loi n° 72-003 du 5
janvier 1972, Loi n° 72-008 du 3 juillet 1972, Loi n° 73-014 du 5 janvier 1973, Loi n° 74-020 du 15 août 1974,
Loi n° 78-010 du 15 février 1978, Loi n° 80-007 du 19 février 1980, Loi n°80-012 du 5 novembre 1980, Loi n°
82-004 du 31 décembre 1982, Loi n° 88-004 du 27 janvier 1988, Loi n°88-009 du 27 juin 1988, Loi n° 90-002
du 5 juillet 1990 et Loi n° 90-008 du 25 novembre 1990, dont les sources sont déjà citées dans l’introduction de
ce travail, p. 10, la Constitution du 24 juin 1967 aura en effet été modifiée et complétée dix-sept fois en vingt-
trois ans. Toutes ces modifications les unes plus importantes que les autres ont en commun d’avoir tenu le peuple
à l’écart tant de leur élaboration que de leur approbation.
248
OL n° 82-006 du 25 février 1982 portant organisation territoriale, politique et administrative de la République
du Zaïre.
249
Ce sont les objectifs de la transition prescrits par l’Accord global et inclusif signé à Pretoria le 17 décembre
2002 et adopté à Sun City le 1er avril 2003, JO, 44ème année, Kinshasa, numéro spécial, 5 avril 2003, p. 52.
79
Dans cet intervalle, en effet, les acteurs politiques se sont donné à cœur
joie à agiter, s’appuyant sur l’émergence des idées sécessionnistes, la prolifération
des rébellions et des guerres civiles à peine maîtrisées, le spectre de la partition du
pays au lendemain d’un processus constitutionnel mal négocié. Le compromis devait
donc logiquement être pris en compte en vue de maintenir la stabilité politique et
l’équilibre nécessaire entre les forces politiques et sociales en présence.
250
Sur le processus d’élaboration et d’adoption de la Constitution du 18 février 2006, voy. ESAMBO
KANGASHE, J.-L., La Constitution du 18 février 2006 à l’épreuve du constitutionnalisme. Contraintes
pratiques et perspectives, Louvain-La-Neuve, Academia-Bruylant, 2010, pp. 39-99.
251
C’est parmi les principaux objectifs assignés à la transition par l’Accord global et inclusif sur la transition de
la République Démocratique du Congo.
252
Art. 104, al. 2 de la Constitution du 4 avril 2003, JO, op. cit., p. 26.
253
Art. 98, al.1 de la Constitution du 4 avril 2003, JO, op. cit., p. 24.
254
Aucun acteur politique majeur n’était disposé à offrir au concurrent le pouvoir politique à travers un texte qui
semblait taillé sur mesure. Il fallait donc, à travers ce texte, fondement de l’organisation prochaine des élections,
gérer les ambitions des uns et des autres.
80
255
Voy. BASUE BABU KAZADI, G., “Relecture de certaines conditions d’existence de l’Etat », in BULA-
BULA SAYEMAN (dir.), Pour l’épanouissement de la pensée juridique congolaise, Liber Amicorum Marcel
Antoine LIHAU, Kinshasa, PUK et Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 113.
256
ESAMBO KANGASHE, J.-L., La Constitution du 18 février 2006 à l’épreuve du constitutionnalisme.
Contraintes pratiques et perspectives, op. cit., p. 83.
257
C’est ce que Joseph Kabila soutient dans son message à la nation transmis par son discours devant les deux
chambres du parlement réuni en congrès le 16 mai 2006, dont l’extrait est publié dans Congo-Afrique, n° 397,
Kinshasa, septembre 2005, p. 2.
258
Commentaire repris par ESAMBO KANGASHE, J.-L., La Constitution du 18 février 2006 à l’épreuve du
constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives, op. cit., p. 70.
81
259
MUKADI BONYI, Projet de Constitution de la République Démocratique du Congo. Plaidoyer pour une
relecture, Kinshasa, CRDS, 2005, pp. 7-35.
260
MAMPUYA KAN’UNKA TSHIABU, A., Espoirs et déception de la quête constitutionnelle congolaise. Clés
pour comprendre le processus constitutionnel du Congo-Kinshasa, Nancy-Kinshasa, AMA-BNC, 2005, pp. 99-
112.
261
Voy. Lettre ouverte adressée le 15 décembre 2005 à la nation congolaise et à la communauté internationale,
notamment à partir de laq page 152, citée par ESAMBO KANGASHE, J.-L., La Constitution du 18 février 2006
à l’épreuve du constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives, op. cit., p. 71.
262
DJOLI ESENG’EKELI, J., « Problématique de l’identité du projet constitutionnel », Congo-Afrique, n° 397,
op. cit., pp. 23-26.
263
ESAMBO KANGASHE, J.-L., La Constitution du 18 février 2006 à l’épreuve du constitutionnalisme.
Contraintes pratiques et perspectives, op. cit., p. 89.
82
264
Art. 10, al. 3, de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 13.
265
ROUVILLOIS, F., Droit constitutionnel. Fondements et pratiques, Paris, Flammarion, 2002, p. 167.
83
« La pouvoir législatif ne peut ni statuer sur les différends juridictionnels, ni modifier une
décision de justice, ni s’opposer à son exécution.
« Toute loi dont l’objectif est manifestement de fournir une solution à un procès en cours est
nulle et de nul effet. »
266
Art. 130, al. 1 et 2, de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 46.
267
Art. 218, al. 1, point 1 et 2, de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 74.
268
Art. 91, al. 1 et 2 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 32.
269
Art. 100, al. 1 et 2 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 35.
270
Art. 146 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 50.
84
271
Composée du président de la République, du premier ministre, du président de l’assemblée nationale, du
président du sénat, du ministre de la justice, du premier président de la cour suprême de justice, du procureur
général de la République, du premier président de la haute cour militaire et de l’auditeur général des forces
armées de la République Démocratique du Congo.
272
Dans son alinéa 7, l’article 197 de la Constitution telle que modifiée par la loi n° 11/022 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo, JO, 52ème
année, n° 3 du 1er février 2011, p.5, prévoit que « lorsqu’une crise politique grave et persistante menace
d’interrompre le fonctionnement régulier des institutions provinciales, le président de la République peut, par
une ordonnance délibérée en conseil des ministres et après concertation avec les bureaux de l’assemblée
nationale et du sénat, dissoudre l’assemblée provinciale. Dans ce cas, la commission électorale nationale
indépendante organise les élections provinciales dans un délai de soixante jours à compter de la dissolution ».
273
L’alinéa 10 du nouvel article 198 de la Constitution telle que modifiée par la loi n° 11/022 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo, JO, op. cit., p.
6, dispose que « lorsqu’une crise politique grave et persistante menace d’interrompre le fonctionnement régulier
des institutions provinciales, le président de la République peut, par une ordonnance délibérée en conseil des
ministres et après concertation avec les bureaux de l’assemblée nationale et du sénat, relever de ses fonctions de
gouverneur d’une province. Dans ce cas, la commission électorale nationale indépendante organise l’élection du
nouveau gouverneur dans un délai de trente jours ».
85
Parmi les spécialités les plus visibles, la richesse et la variété des droits
fondamentaux de l’homme sont à l’avantage de la Constitution du 18 février 2006.
D’après Marcel Wetsh’okonda Senga Koso, la Constitution congolaise du 18 février
2006 contient une gamme importante d’outils de promotion et de protection des
droits de l’homme274.
Cette richesse des droits pris en compte par le constituant de 2006 peut
être recherchée et finalement découverte non seulement dans une énumération
presqu’exhaustive des droits civils et politiques275 dits de la première génération, des
droits économiques, sociaux et culturels276 dits de la deuxième génération et des
droits collectifs277 dits de la troisième génération, mais aussi dans l’apparition des
droits nouveaux. Ces droits sont nouveaux par rapport non seulement à l’histoire
constitutionnelle de la République Démocratique du Congo, mais aussi des
instruments traditionnels relatifs à la protection des droits de l’homme.
274
WETSH’OKONDA SENGA KOSO, M., Les perspectives des droits de l’homme dans la Constitution
congolaise du 18 février 2006, Kinshasa, CDHC, 2006, p. 68.
275
De l’article 16 à l’article 33 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., pp. 13-19.
276
De l’article 34 à l’article 49 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., pp. 19-23.
277
De l’article 50 à l’article 61 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., pp. 23-25.
278
Art. 14 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., pp. 13-14.
279
Art. 8 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 12.
280
Art. 26 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 17.
86
d. De la protection de la démocratie
281
Art. 19, al. 3 et 4 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 16.
282
Art. 48 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 23.
283
Art. 47 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 23.
284
Art. 51 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 23.
285
Art. 60 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p.25.
286
Art. 220, al. 2 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 75.
287
Art. 150, al. 1 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 52.
288
Art. 218, al. 1 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 74.
289
Art. 218, al. 3 de la Constitution du 18 février 2006, JO, idem
290
Art. 218, al. 4 de la Constitution du 18 février 2006, JO, idem.
291
Art. 218, al. 2 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., ibidem
87
pluralisme politique et syndical ainsi que toute révision ayant pour objet ou pour
effet de réduire les droits et libertés de la personne ou de réduire les prérogatives des
provinces et des entités territoriales décentralisées292.
La meilleure analyse nous parait être celle qui tiendra compte des
diverses périodes de vagues grasses comme des vaches maigres qui résultent de
l’évolution politique du pays. Parmi ces périodes, l’on retient respectivement celles
qui ont connu la forme républicaine du gouvernement (§1), les autres périodes
charnières auront effleuré tantôt la monarchie (§2), tantôt les longues transitions vers
des régimes démocratiques (§3).
292
Art. 220, al. 1 et 2 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p.74.
88
293
Depuis l’indépendance, la dénomination du Congo est demeurée celle d’une République du Congo, d’une
République démocratique du Congo ou d’une République du Zaïre sans que l’attribution de ce vocable ne soit
effectivement justifié.
294
La lecture combinée des articles 67, 71 et 76 de la Loi fondamentale, MC, op. cit., p. 6, donne à penser la
première législature des Chambres parlementaires congolaises avait comme tâche essentielle la mise en place
d’une Constitution définitive. C’est d’ailleurs leur carence à cette obligation qui fonda leur dissolution par
Joseph Kasavubu.
89
nationale congolaise, nous sommes d’avis que, un accord tacite semble même l’avoir
approuvé, cette République a continué, malgré les violations répétées dont était
l’objet la Constitution en vigueur299, jusqu’à la promulgation de la Constitution du 24
juin 1967.
Bretagne et d’Israël, assisté à une messe d’action de grâce en commémoration de la prise de Stanleyville par les
troupes de Léopoldville. Le coup d’Etat aura donc lieu le 25 novembre 1965 par l’annonce faite à 5 heures du
matin à la radio nationale congolaise. Voy. notamment, KAMITATU, C., La grande mystification du Congo-
Kinshasa. Les crimes de Mobutu, 2ème éd., Paris, Maspero, 1971, pp.145-148 ou encore VANDERLINDEN, J.,
La République du Zaïre, Paris, Berger-Levrault, 1975, pp. 27-29.
299
Conformément au point 4° de la Proclamation du Haut Commandement de l’Armée nationale congolaise du
24 novembre 1965, « les institutions démocratiques de la République, telles que qu’elles sont prévues par la
Constitution du 1er août 1964, continueront à fonctionner et à siéger en exerçant leurs prérogatives ».
300
Dans d’autres régimes parlementaires dans lesquels cette qualité n’est pas héréditaire, comme en Grande
Bretagne et en Belgique, par exemple, la désignation du chef de l’Etat est l’œuvre du parlement. C’est le cas en
Allemagne, en Italie ou en Grèce où ce pouvoir appartient respectivement à l’Assemblée fédérale, à la réunion de
deux Chambres ou à la Chambre des députés.
301
Art. 19, Loi Fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo, MC, op. cit., p. 354.
302
Art. 35, al. 2, Loi fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo, MC, op. cit., p. 355.
303
Les articles 42 à 46, Loi fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo, MC, op. cit., pp.
355-356, démontre à suffisance comment ils peuvent obtenir confiance du parlement ou la perdre.
304
En ce sens, MBATA BETUKUMESU MANGU, A., The Road to Constitutionalism and Democracy in Post-
colonial Africa: the Case of the Democratic Republic of Congo, op. cit., p. 126.
91
305
Nous avons laissé de côté la Cour constitutionnelle, les Conseils économiques et sociaux ainsi que les
institutions provinciales en raison de leur faible impact sur la matière qui nous concerne.
306
Art. 35, 36 et 37, Loi fondamentale du 19 mai 1960, MC, op. cit., p. 355.
307
La responsabilité solidaire du gouvernement est engagée par motion de défiance (art. 43, Loi fondamentale du
19 mai 1960, MC, op. cit., p. 355).
308
Chaque ministre peut engager sa responsabilité individuelle devant le parlement à la suite d’une motion de
censure (art. 45, Loi fondamentale du 19 mai 1960, MC, p. 356).
309
Articles 42 à 46, Loi fondamentale du 19 mai 1960, MC, pp. 355-356).
310
L’avantage recherché normalement dans ce genre de régime est le fonctionnement harmonieux des
institutions grâce à l’équilibre du jeu de poids et contrepoids.
92
Dans cette étude, il faut remonter aux travaux de la table ronde belgo-
congolaise de 1959 pour comprendre les difficultés pour le constituant de déterminer
avec précision la forme de l’Etat qu’il entendait mettre en place. Aussi, cette question,
qui interfère dans les débats politiques congolais depuis les assises de Bruxelles, a
investi cette scène jusqu’à ce jour. Il apparaît clairement que les découpages
consécutifs à l’indépendance nationale sont à la fois le fruit des compromis politiques
entre les tenants du fédéralisme et ceux de l’unitarisme et même de la victoire des
uns sur les autres. Cette marche dialectique sera teintée des controverses
opposant les deux camps tout au long de la vie de cette jeune République.
311
Aux termes de l’article 7, alinéa 1 de ladite loi, «l’Etat est constitué de six provinces dotées chacune de la
personne civile », MC, op. cit., p. 1.
312
L’article 160, alinéa 1, de la Loi fondamentale relative aux structures du Congo donne pouvoir à chaque
assemblée provinciale d’élaborer « dans le plus bref délai » une Constitution provinciale organisant la structure
administrative et politique de chaque province, MC, op. cit., p. 15.
313
Art. 107 de la Loi fondamentale, MC, op. cit., p. 9. Cette élection des conseillers provinciaux au suffrage
universel direct ou au second tour, selon le choix de chaque province, doit rester conforme aux dispositions de la
loi électorale du 23 mars 1960.
314
Telle qu’elle ressort des dispositions de l’article 123 de la Loi fondamentale, MC, op. cit., p. 123, l’élection
respective et séparée du président et des membres du gouvernement provincial est de nature à ne pas faciliter le
fonctionnement au sein duquel l’équipe risque de manquer de solidarité n’ayant en principe rien en commun.
93
319
En réalité, tous ces principes se réduisent aux seuls principes de participation et d’autonomie assurée à chaque
province.
320
La Constitution américaine du qui met en place un Etat fédéral type ne répartit nullement les compétences
entre le gouvernement fédéral et les gouvernements des Etats fédérés.
321
L’article 209, alinéa 2, de la Loi fondamentale, MC, op. cit., p. 19, confirme même l’unicité de la hiérarchie
des normes lorsqu’il considère comme abrogées de plein droit les dispositions des édits en contradiction avec la
loi (prise par les autorités centrales).
322
Les résultats électoraux qui vont suivre sont puisés chez BOMANDEKE BONYEKA, Le Parlement
congolais sous le régime de la Loi Fondamentale, Kinshasa, PUZ, 1992, pp. 64-71.
95
Le MNC remporta, avec ses trente-trois sièges pour lui et huit pour ses
alliés directs (Cartel MNC, COAKA, UNC) sur cent trente-sept sièges à pourvoir, un
succès considérable et rassembla 30% des élus originaires de cinq provinces sur six.
Le PNP, qui, avec ses alliés, ambitionnait de surpasser le MNC sur le plan national,
ne vint finalement qu’en seconde position avec ses quinze élus323.
Avec ces résultats qui lançaient de nouveaux élus appelés à devenir des
députés congolais, l’autorité coloniale avait enfin les moyens de constituer les
institutions du nouvel Etat.
323
Le MNC et le PNP semblaient eux miser sur l’ensemble du territoire national.
324
En Angleterre où il a pris naissance, ce régime fut plutôt l’œuvre des notables et fut lié au suffrage censitaire
comme le confirme PACTET, P., Institutions politiques. Droit constitutionnel, op. cit., p. 145.
96
325
Art. 87, Loi Fondamentale du 19 mai 1960, M.C., op. cit., p. 358. Les sénateurs élus ne purent s’adjoindre des
membres cooptés trop préoccupés qu’ils étaient à tenter de ramener leurs collègues sécessionnistes à la légalité et
en raison de la création de nombreuses nouvelles provinces.
326
En effet, au soir du 27 janvier 1960, alors que le 30 juin 1960 avait été concédé par l’autorité coloniale
comme date de l’indépendance, Lumumba offrit une soirée à tous et tint un discours vraiment rassembleur et
modéré.
327
Kasavubu se distingua par des déplacements assez osés à travers le territoire national (Katanga, Kasaï,
Kivu…) et des incessantes interventions dans les diverses crises sanglantes survenues à cause notamment des
conflits entre Tshombe et Sendwe, Lumumba et Kalonji, Lulua et Luba, par exemple…
328
L’exclusion de l’un d’eux aurait réellement mis en péril l’existence de l’Etat congolais. Voy. Congo 1960,
Tome I, Bruxelles, CRISP, 1960, p. 307.
97
329
Aux termes de l’art. 21, al. 1 de la Loi fondamentale, « le chef de l’Etat n’a d’autres pouvoirs que ceux que
lui attribue formellement la présente loi ».
330
Alors que Lumumba était unitariste et prônait, en conséquence, un pouvoir centralisé, Kasavubu défendait les
vues de son parti politique et de son milieu d’origine qui visaient l’autonomie de sa province et du peuple Kongo
et entendait donc exercer le pouvoir de l’Etat dans le cadre fédéral et même confédéral.
98
331
Ce discours dont la substance aurait pu provenir du gouvernement qui devait normalement élaborer son
programme provoqua des remous dans la classe politique congolaise étonnée de cette distorsion.
332
En conformité avec l’art. 42 de la Loi Fondamentale du 19 mai 1960.
333
Dans ce sens, DJELO EMPENGE, Contribution à l’étude des tendances fédéralistes et unitaristes dans
l’évolution politique et constitutionnelle du Zaïre, op. cit., p. 207. Ce gouvernement répondait également au
critère « d’union nationale » que semblait découler de l’alinéa premier de l’article 35 de la Loi Fondamentale qui
exigeait la représentation de chaque province en son sein.
99
334
Art. 71, Loi fondamentale du 19 mai 1960, MC, op. cit., p. 357.
335
O n° 226 du 29 septembre 1963, MC, op. cit., p. 842.
100
336
Pendant la crise qui a secoué le Congo au lendemain de l’indépendance, on a pu constater combien les
responsables politiques étaient d'autant plus jaloux de leurs prérogatives qu’ils étaient incapables d’utiliser les
forces de l’ordre mises à leur disposition.
337
Alors que le pouvoir personnalisé est l’individualisation de l’action gouvernementale contenue dans les
limites constitutionnelles, le pouvoir personnel est ici entendu comme l’omnipotence, consacrée par les textes
ou usurpée, d’un individu qui ne donne pas de limites à son action. La personnalisation du pouvoir est donc un
phénomène qui affecte plus la modalité du pouvoir que son intensité.
338
MC, 6ème année, numéro spécial du 5 octobre 1965, p. 51.
339
Aux termes de l’art. 43 de la Loi fondamentale du 19 mai 1960, « le vote sur les motions de défiance contre le
gouvernement ne peuvent intervenir que 48 heures après le dépôt de la motion. Celle-ci ne peut être adoptée que
si elle recueille les deux tiers des voix des membres présents d’une des deux chambres, la majorité absolue des
voix de tous les membres qui la composent ».
101
population au régime mis en place. Il était donc prévisible que les responsables
politiques avaient plus besoin d’un exécutif fort qui leur permettrait d’exercer le
pouvoir sans entraves et de réaliser un plan qui leur permettrait de recouvrer la
confiance de la population dans les institutions. C’est donc dans cet état d’esprit que
devait s’élaborer la nouvelle Constitution.
Ces éléments majeurs de régime présidentiel sont vite atténués par les
vestiges du parlementarisme de 1960, qui se manifestent par une collaboration tant
organique que fonctionnelle. En tant qu’organe indépendant, le parlement intervient
dans la formation même de l’exécutif. Contrairement aux régimes présidentiels
340
Nommés par le président de la République devant lequel ils prêtent serment comme indiqué à l’art. 65 de la
Constitution du 1er août 1964, le premier ministre et les ministres sont investis par des chambres réunies en
congrès. Cette pesanteur au pouvoir du président sur la nomination des membres du gouvernement imposée par
les dispositions de l’art. 66, alinéas 1, 2 et 3 de la Constitution du 1 er août 1964 ne semble pas peser sur le
pouvoir de révocation du premier ministre et des ministres que le président peut librement exercer en vertu des
dispositions de l’art. 62 de ladite Constitution, en dépit de l’incise « Sans préjudice des autres dispositions de la
présente Constitution, les membres du gouvernement central exercent leurs fonctions jusqu’à la fin du mandat du
président de la République », introduite par l’alinéa 4 du même article.
341
Art. 71, Constitution de la RDC du 1er août 1964, MC, op. cit., pp. 19-20.
342
Dans ce sens, PACTET, P., Institutions politiques …op. cit., p. 152 ; KOUBI, G., et ROMI, R., Etat,
Constitution, Loi, Paris, Litec, 1993, p. 208.
102
343
Titulaire exclusif du pouvoir exécutif, le président fait normalement fonction à la fois de chef de l’Etat et de
chef du gouvernement. Ses ministres ne forment en réalité pas un gouvernement (organe collégial et solidaire,
ayant des tâches et une responsabilité propres). Chacun d’eux est chargé de mettre en œuvre la politique du
président, qui peut toujours mettre fin aux fonctions d’un ministre s’il l’estime nécessaire.
344
A telle enseigne que l’on croirait que ce gouvernement répondrait de sa responsabilité devant le parlement qui
l’investit ; que non, les ministres relèvent uniquement du président de la République alors que le premier
ministre n’apparaît que comme un simple coordonnateur de l’action de ce gouvernement.
345
Art. 56 et 66, Constitution du 1er août 1964, MC, pp. 15 et 18.
346
DECHEIX, P., « La nouvelle constitution du Congo Léopoldville », Revue juridique et politique, 1964, p.
604.
347
ILUNGA, A., KALONJI, B., VERHAEGEN, B. et WEMBI, A., „Le projet de constitution de Luluabourg“,
in Etudes congolaises, Bruxelles, Vol. VI, n° 5, mai 1964, p. 26.
348
DJELO EMPENGE O., Contribution à l’étude des tendances fédéralistes et unitaristes dans l’évolution
politique et constitutionnelle du Zaïre, op. cit., p. 304.
349
DABIN, P., « L’idée fédérale dans le processus constitutionnel congolais », Etudes congolaises, Bruxelles,
Vol. VII, n° 4, avril 1964, p. 57.
350
Telle qu’elle est régie par la Constitution du 4 octobre 1958.
103
351
Du nom de la ville où se réunit la commission qui en élabora le projet. IL s’agit de l’actuel Kananga.
352
Art. 48, 49 et 50 de la Constitution du 1er août 1964, MC, op. cit., pp. 12-13.
353
L’article 117, alinéa 1, de la Constitution du 1 er août 1964, MC, op. cit., p. 40, donne compétence à chaque
province, par son assemblée provinciale, d’adopter sa constitution propre.
354
Les principales institutions provinciales sont le gouvernement provincial et l’assemblée provinciale qui
exercent respectivement le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.
355
Aux termes de l’article 75, alinéa, de la Constitution du 1 er août 1964, MC, op. cit., p. 22 chaque province est
représentée par six sénateurs élus par les assemblées provinciales.
356
Art. 167, alinéa 1, point 2, de la Constitution du 1er août 1964, MC, op. cit., p.
357
Art. 146 et 192 de la Constitution du 1er août 1964, MC, op. cit., pp. 58 et 83.
358
La cour suprême de justice, le conseil supérieur de la magistrature et la cour constitutionnelle.
359
Le conseil économique et social, la commission paritaire spéciale fixant les indemnités et traitements, le
conseil de législation et la cour des comptes.
360
Art. 73 de la Constitution du 1er août 1964, MC, op. cit., p. 21
361
Art. 101de la Constitution du 1er août 1964, MC, op. cit., p. 32
104
Malgré que toutes les conditions soient réunies pour mettre en place un
Etat fédéral, le constituant de 1964 a estimé que l’heure n’avait pas encore sonné pour
traverser le Rubicon. C’est ce que la Constitution précise à son article 178. Les esprits
congolais n’étant pas encore préparés à accepter sans conséquence la terminologie
fédérale correspondant aux structures politiques y relatives, celle-ci ne serait utilisée
dans les actes officiels qu’à partir de la troisième législature suivant l’entrée en
vigueur du texte sans cette terminologie. Comme pour en faire prendre acte, un texte
de la Constitution de la République Fédérale du Congo était annexé et présenté au
référendum du 25 juin au 10 juillet en même temps que celui de la République
Démocratique du Congo, les deux textes étant promulgués au même moment.
362
Moïse Tshombe remplaça Adoula, ancien premier ministre, dont le gouvernement devenait, en vertu de
l’article 185, démissionnaire à la date de l‘adoption de la Constitution.
363
Beaucoup de politiciens opportunistes – y compris des unitaristes - avaient adhéré à la CONACO, les uns
pour profiter d’immenses moyens financiers détenus par Tshombe, les autres y trouvant le seul moyen d’accéder
au pouvoir.
364
Malgré une majorité confortable, le candidat de Tshombe n’a pu se faire élire lors de l’élection du président
du sénat. La CONACO se contenta de la présidence de la chambre des députés.
105
Deux blocs presqu’à égalité au parlement se font désormais face : le FDC revigoré par
les défections provoquées par le mouvement de Nendaka, appuyé par Kasavubu
affronte la CONACO conduite par Tshombe.
365
Proclamation du Haut commandement de l’Armée nationale congolaise, paragraphe 3, point 4.
106
366
Le président de la République dispose désormais sur chaque membre d’un pouvoir discrétionnaire de
nomination (art. 62, al. 1 et 65, al. 2 de la Constitution de 1964) et de révocation (art. 62, al. 3 de la Constitution
de 1964) ainsi la répartition sans entrave des portefeuilles ministériels (art. 65, al. 3 de la Constitution de 1964),
MC, op. cit., pp. 17 et 18.
367
Puisque la réunion y relative s’est tenue dans la nuit du 24 au 25 novembre 1965, l’on serait plus fondé de
parler de l’aube du 25 novembre.
368
Il s’agit de la loi n° 74-020 du 15 août 1974 portant « révision» de la Constitution du 24 juin 1967.
107
369
Le législatif, l’exécutif et le judiciaire.
370
Art. 4 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, 8ème année, n° 14 du 17 juillet 1967, p. 549.
371
Art. 2 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, ibidem.
372
PACTET, P., Institutions politiques. Droit constitutionnel, op. cit. , p. 143, répond par l’affirmative à cette
question réflexive.
373
Art. 36 et 45 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., pp. 557 et 560.
374
Art. 20 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 554.
375
Art. 31 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 557.
376
Art. 58 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 562.
108
377
Des nombreux auteurs, tels que CHANTEBOUT, B., Droit constitutionnel et science politique, Armand
Colin, Paris, 15e éd., 1998, p. 111, PACTET, P., Institutions politiques. Droit constitutionnel, op. cit., p. 213,
FAVOREU, L. et alii, Droit constitutionnel, op. cit., p. 373, ZOLLER, E., Droit constitutionnel, 2ème éd., Paris,
PUF, 1999, p. 297, KOUBI, G., et ROMI, R., Etat, Constitution, Loi, Paris, Litec, 1993, p. 210, - pour ne citer
qu’eux -, trouvent dans le régime présidentiel américain l’unique expérience réussie de régime de séparation
bénéfique des pouvoirs, toute imitation ailleurs ayant conduit à des « déviances ».
378
Au lendemain de leur accession à l’indépendance conquise sur les Espagnols et les Portugais entre 1808 et
1825, les Etats d’Amérique latine se butèrent à la même équation lorsqu’ils voulurent adopter dans leurs pays
une Constitution inspirée de leur puissant voisin, les Etats-Unis d’Amérique.
379
Dans sa contribution, « Pour une théorie du présidentialisme : quelques réflexions sur les présidentialismes
latino-américains », Mélanges à l’honneur de Georges BURDEAU, Paris, 1977, p. 115, CONAC, G., estime que
la première préoccupation des dirigeants du Tiers Monde n’était pas de limiter le pouvoir, mais de le rendre
effectif.
380
Art. 45 et 74 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., pp. 559 et 575.
381
Art. 52 et 54 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 560.
382
Art. 43 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p.558.
383
Art. 48 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p.559.
384
Il ressort en effet des dispositions de l’art. 54 de la Constitution du 24 juin 1967 que, dans « l’état
d’urgence », le président « prend les mesures exigées par les circonstances ». Il peut même aller jusqu’à
suspendre, dit l’article 58, alinéa 1, l’action répressive des cours et tribunaux et y substituer celle des juridictions
militaires pour la durée et les infractions qu’il détermine.
109
C’est vrai que les constituants américains de Philadelphie, qui sont les
premiers initiateurs de ce modèle, ne se méprirent pas sur la portée exacte de
l’expression « séparation des pouvoirs » de Montesquieu. Ils comprirent d’emblée
que le problème était moins de cloisonner les pouvoirs de manière étanche que
d’instituer entre eux un équilibre fondé sur la capacité de se neutraliser
mutuellement385.
387
Art. 21, alinéa 1, de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 554.
111
Chose rare est l’unanimité qui semble régner entre les chercheurs et les
politiques sur la détermination de la date de la naissance de la troisième République.
Tout le monde la situe à la date de la promulgation de la Constitution actuelle, le 18
février 2006. Cette unanimité semble être encouragée par l’exceptionnelle mise en
place de son texte fondateur selon un schéma préétabli par un texte antérieur.
388
Art. 98 et 104, al. 2 de la Constitution de la transition du 4 avril 2003, JO, 44ème année, Kinshasa, numéro
spécial, 5 avril 2003, pp. 24 et 26.
389
Article 91, al. 1 et 2 de la Constitution du 18 février 2006, JO, 47ème année, Kinshasa, numéro spécial du 18
février 2006, p. 32.
390
Le gouvernement peut engager sa responsabilité en posant une question de confiance à l’Assemblée nationale
sur son programme, une déclaration de politique générale ou sur le vote d’un texte de loi. La responsabilité
112
collective du gouvernement peut être engagée par une motion de censure et la responsabilité individuelle d’u n
membre du gouvernement, par une motion de défiance. Art. 146 de la Constitution du 18 février 2006, JO, p. 50.
391
Art. 91, al. 3 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p.32.
392
En ce sens, VUNDUAWE te PEMAKO, F., Traité de Droit administratif, op. cit., p.799.
393
Art. 148 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 51.
394
Pour plus de détails sur la comparaison entre ces deux régimes, voy. KALOMBO TAMBWA, F., Etude
comparés des régimes politiques institués par les Constitutions française du 4 octobre 1958 et congolaise du 18
février 2006, Mémoire de licence, Faculté de Droit, Université Libre de Kinshasa, 2008-2009.
395
Pour paraphraser André MBATA BETUKUMESU MANGU, "Suprématie de la Constitution, indépendance
du pouvoir judiciaire et gouvernance démocratique en République Démocratique du Congo", in Grégoire
BAKANDEJA wa MPUNGU, André MBATA B. MANGU et Raoul KIENGE-KIENGE INTUDI (dir.),
113
feu professeur Félicien Assani Mpoyo, sans donner une qualification quelconque,
mais s’inspirant de l’expérience de l’évolution de la forme de l’Etat belge,
contestent le point de vue des tenants du régionalisme constitutionnel403. Il y en a
même qui n’ont pas hésité, comme le professeur Jean Louis Esambo, à qualifier l’Etat
congolais de 2006, d’un Etat quasi-fédéral404.
403
ASSANI MPOYO KALEMA, F., "Réflexion sur les rapports juridiques entre le pouvoir central et les
provinces dans la Constitution du 18 février 2006 en République Démocratique du Congo", in PNUD, op.cit,
pp.111-118.
404
405
Aux termes de l’article 2, alinéa 1 de la constitution du 18 février 2006, «La République Démocratique du
Congo est composée de la ville de Kinshasa et de 25 provinces dotées de la personnalité juridique », JO, op. cit.,
p. 10.
406
Telle qu’elle ressort des dispositions de l’article 195 de ladite constitution.
407
Art. 197 de la constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p.63.
408
Telle qu’elle ressort des dispositions de l’article 198, alinéa 1 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op.
cit., p. 64.
409
C’est le cas du professeur MBATA B. MANGU, A., « Perspectives du constitutionnalisme et de la
démocratie en République Démocratique du Congo sous l’empire de la Constitution du 18 février 2006 », in
BULA-BULA SAYEMAN (dir.), Pour l’épanouissement de la pensée juridique congolaise, Liber Amicorum
Marcel Antoine LIHAU, Kinshasa, PUK et Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 212, estime que « même si le mot
fédéral n’est pas utilisé (dans le texte constitutionnel), l’Etat de la RDC apparait comme un Etat quasi-fédéral ».
115
415
Il suffit d’avoir à l’idée le rôle que joue le pouvoir central face aux autres centres de décisions ou autres
entités qui ont l’autonomie politique, les différentes interventions du ministère ayant les affaires intérieures dans
ses attributions à l’intérieur de provinces tel est le cas de la fermeture des Assemblées provinciales de l’Equateur
de Kinshasa et du Katanga ou la rétention inconstitutionnelle du Gouverneur Trésor Kapuku du Kasaï Occidental
à Kinshasa pour comprendre le reflexe centralisateur des autorités centrales.
416
Loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République
Démocratique du Congo du 18 février 2006, JO, 52ème année, Kinshasa, n° 3 du 1er février 2011, pp. 5-6.
417
Loi organique n° 08/016 du 7 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des entités
territoriales décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les provinces, JO, 49ème année, numéro spécial, 10
octobre 2008.
418
Pour des détails quant au fonctionnement de pareille forme de l’Etat, voy. KAMUKUNY MUKINAY, A. et
CIHUNDA HENGELELE, J., “Régionalisation, décentralisation et naissance effective des vingt-cinq nouvelles
provinces en RD Congo : Défis et perspectives de prévention des conflits », Congo - Afrique, n° 434, Kinshasa,
avril 2009, pp. 295-310..
117
419
Voir les témoignages de KABAMBA MBWEBWE K., La R.D.Congo malade de sa classe politique. Les
coulisses du Dialogue Inter-Congolais (DIC), Coll. Mémoires lieux de savoir, Paris, L’Harmattan, 2005 ;
Mohammed El Hacen Ould LEBATT, Facilitation dans la tourmente. Deux ans de médiation dans l’imbroglio
congolais, Paris, Ed. L’Archipel, 2005. Une analyse dans Paule BOUVIER en collaboration avec Francesca
Bomboko, Le dialogue intercongolais. Anatomie d’une négociation à la lisière du chaos, Cahiers Africains 63-
64, Tervuren/Paris, MRAC-L’Harmattan, 2004.
420
Dans le contexte éminemment instable de la sortie de guerre, ce qui restait de l’État congolais était placé en
situation de « souveraineté contrôlée » par la communauté internationale. L’accord de Pretoria avait formalisé
cela en créant le Comité international d’accompagnement de la transition (CIAT) qui joua le rôle de la « main
qui guide la transition puisqu’il définissait presque le travail gouvernemental ».
421
La politique de la « communauté internationale » par rapport aux élections paraît contradictoire, notamment
dans l’exigence simultanée de stabilité, qui impose la cooptation des principaux chefs de guerre dans les
118
les incertitudes sur lesquelles s’est joué le processus électoral. Ce dernier fut
finalement sauvé par la constance de la Commission électorale indépendante (CEI),
qui s’est efforcée de faire respecter les règles du jeu électoral – chose inouïe en RDC.
Autour de la CEI se sont cristallisés plusieurs enjeux majeurs de la situation actuelle
de la RDC. Chargée à la fois d’identifier et d’enrôler les électeurs pour les opérations
de vote, la CEI était en charge de la distribution des Cartes d’électeurs, qui servent
aussi de document d’identité : ainsi elle s’inscrivait dans le délicat dossier de la
nationalité, et elle faisait par endroits figure d’arbitre qui, en contrôlant le processus
d’inscription, semblait influencer d’avance la victoire lorsque, en certains endroits, le
nombre d’électeurs acceptés par la CEI pouvait laisser présumer du camp gagnant. 422
Le R.P. De Saint Moulin compare les taux d’enrôlement réels avec les chiffres de
population attendue sur base des projections démographiques et en tenant compte
des données disponibles depuis le dernier recensement de 1984. Le Nord-Kivu a un
taux d’enrôlement de 101,3 % contre 87,6% pour l’Équateur423. Il est fort possible
qu’un nombre d’immigrés ougandais et rwandais se soient enrôlés. Mais la province
partage cette caractéristique avec toutes les régions et territoires frontaliers, partout
dans le pays. Le territoire de Zongo en Équateur a un taux d’enrôlement de 362,6 % !
La difficulté d’accès de certaines régions (Sankuru, Équateur mais aussi le Sud-Kivu
avec un taux d’enrôlement de 81,4%, inférieur à l’Équateur) a contribué aussi à des
taux d’enrôlement bas.
structures du gouvernement, et de légitimité, qui présuppose le risque de mettre au pouvoir une élite politique
différente à travers le processus électoral. Le gouvernement de transition avait pour vocation la stabilisation
avant de procéder à une légitimation par les urnes. Cependant, cette stabilisation ne fut que partielle, car les
principaux belligérants étaient conscients du fait que le principal moyen de pression sur le déroulement des
élections était le contrôle des moyens de la violence, ce qui motivait les acteurs extérieurs à faire appel à un
« gouvernement d’union nationale ». Ensuite, puis qu’une des causes de la guerre fut un problème d’exclusion
sur base ethnique, une pression fut exercée sur le gouvernement pour qu’il garantisse une représentation des
banyaMulenge. La population congolaise ne pouvait pas ne pas avoir l’impression que l’issue des élections
devait satisfaire les « parrains » étrangers plus que le « peuple souverain ».
422
Dans certains territoires tels Nyirangongo, Rutshuru, Masisi ou Kalehe, un grand enrôlement des populations
de culture banyarwanda impliquait la victoire des candidats du RCD sur ceux soutenus par les « autochtones »
Kumu, Hunde ou Tembo. En effet, la CEI a été accusée d’avoir multiplié des bureaux d’enrôlement dans l’Est
du pays (à cause de la démographie) et de sacrifier les vastes provinces de l’Équateur et de Bandundu où il y en
aurait eu moins, multipliant ainsi les distances pour se faire enrôler. Au Kivu, l’enrôlement était perçu par la
population comme un enjeu majeur comparé à l’Ouest où la question de la nationalité était peu importante.
Aujourd’hui, la « carte d’enrôlement » de la CEI est mieux considérée au Rwanda par le service d’immigration
pour identifier un visiteur venant de la RDC que le passeport ou tout autre document d’identité.
423
L. DE SAINT MOULIN, Analyse par territoire et ville des résultats de l’enrôlement des électeurs du
référendum sur le projet de Constitution, in Congo-Afrique, n°s 402-403, février-mars 2006, p. 9-34.
L’enrôlement au Bandundu et en Équateur s’est d’ailleurs poursuivi jusqu’en février 2006.
119
Mais par sa position d’« arbitre des élections », dans le contexte de sortie de guerre et
les échecs répétés dans le passé, Malu Malu semble avoir été aussi important que
Monsengwo dans sa mission de « régenter » l’État congolais, mission dans laquelle
Monseigneur Monsengwo avait échoué. Cela explique en partie l’opposition de la
haute hiérarchie catholique du Congo, pour diverses raisons, à l’action du prêtre du
Kivu, qui refusera pourtant d’abdiquer à sa mission. Dans sa stratégie, et
contrairement à l’évêque Monsengwo, Malu Malu affiche son hostilité à toute idée de
négociation politique avant les élections, ce qui fera de lui quelqu’un de suspect
accusé d’être influencé par la « communauté internationale » et/ou les acteurs au
pouvoir. En fait, ce prêtre du Kivu dont la montée se dessine à partir du DIC en
Afrique du Sud veut incarner la dynamique provinciale de l’intérieur du pays qui
affirme que la RDC est bloquée à partir de Kinshasa. A ce point son audace est
remarquable, même J.-P. Bemba faisait l’éloge du personnage qu’il avait découvert
lors de la table ronde de mars 2001 rassemblant « les forces vives du Nord-Kivu » en
pleine guerre.424 Dans ses déclarations souvent publiques et usant d’un langage
tranché, Malu Malu aime rappeler que Kinshasa « ville capitale » n’est qu’une
province du pays. Les résultats des élections qu’il a présidées ont-ils été l’occasion
de réconforter cette thèse? 425
En RDC, aucun dispositif ne paraît mineur, tant les ambiguïtés
semblent nombreuses. Nous venons de citer deux partenaires à vouloir des élections :
l’Occident et le peuple congolais. Mais ces partenaires se méfient l’un de l’autre
autant qu’ils s’entendent : l’Occident bouscule les autorités congolaises qui traînent
les pieds devant les élections et l’opinion congolaise suspecte l’Occident d’imposer
ses choix comme dans le passé426. En effet, dans le contexte instable de la sortie de
conflit, la communauté internationale avait placé ce qui restait de l’État congolais en
situation de souveraineté contrôlée. L’accord de Pretoria (17 décembre 2002) avait
formalisé cela en créant le Comité international d’accompagnement de la transition
(CIAT) qui a joué le rôle de « guide » de la transition. Pour la communauté
internationale, les élections étaient la solution pour l’établissement d’un régime
424
J.-P. Bemba, Le Choix de la liberté, Gbadolite, éd. Venus, 2001, p. 199.
425
Les observateurs de l’Union Européenne (UE), tout en se disant satisfaits, ont noté au
second tour de l’élection présidentielle « l’utilisation parfois intempestive » de listes
électorales « spéciales », de listes d’électeurs « omis » au premier tour pour raisons
techniques et de « registres de dérogation ». Les observateurs européens ont constaté dans
certains bureaux de vote à travers le territoire, dans le fief de Bemba tout comme de Kabila,
des « chiffres anormaux » d’électeurs ayant voté par dérogation, sans toutefois que l’on puisse
conclure qu’il s’agissait de « fraudes » dont la question (fraudes directes) au niveau de la CEI
a été régulièrement soulevée et a nourri bien des craintes. Même pour des questions de détail,
la crainte d’une réaction négative de la rue hantait fortement la CEI. Si des fraudes ont eu lieu,
elles auraient été d’une ampleur bien moindre que prédit et il ne s’est pas agi d’un système
délibéré, mais plutôt d’actes localisés, comme ce fut le cas dans certains bureaux à Kinshasa.
Ainsi, quelques candidats proclamés élus ont vu leur mandat de député invalidé par la Cour
Suprême de Justice. Il ne s’agit pas uniquement de fraude, mais aussi d’erreurs de comptage.
426
Allusion est souvent faite à Lumumba, applaudi par l’opinion mais farouchement combattu par l’Occident,
jusqu’à organiser son assassinat.
120
stable et légitime. Encore faut-il signaler une contradiction dans sa position, dans son
exigence simultanée de stabilité, qui imposait la cooptation des principaux chefs de
guerre dans les structures du gouvernement, et de légitimité, qui présupposait le
risque que les élections aboutissent à l’exclusion de ces chefs de guerre. La transition
visait certes à la stabilisation, prélude à une légitimation par les urnes, mais la
stabilisation n’a été que partielle : les principaux belligérants étaient parfaitement
conscients du fait que leur principal moyen de pression résidait dans la manipulation
des moyens de la violence qu’ils ne voulaient pas abandonner, même pas dans une
armée nationale unifiée. Ce problème fut particulièrement épineux pour les
Banyamulenge, « groupe ethnique » de culture rwandaise, instrumentalisé par le
gouvernement de Kigali et partiellement regroupé dans le RCD, dont l’exclusion
politique avait été une des causes de la guerre. Face à la pression internationale
d’assurer une représentation des « Banyarwanda » (même au-delà du résultat
électoral)427, une bonne partie de la population congolaise ne pouvait pas ne pas avoir
l’impression que l’issue des élections devait satisfaire moins le « peuple souverain »
que les « parrains » étrangers, toujours soupçonnés de poursuivre leurs intérêts
économiques au détriment de la volonté populaire.
427
La communauté internationale avec en tête la Belgique et particulièrement Louis Michel était préoccupé de
la position des populations « Banyarwanda » dans le cadre d’un vote individuel direct. Le résultat des élections
confirment leur crainte : un seul Tutsi, Dunia Bakarani a été élu député national et l’assemblée provinciale du
Nord-Kivu n’en compte aucun. C’est dire que la position politique des Tutsi a été fortement régressive comparer
à leur représentation à l’avènement de l’ADFL en mai 1997 ou surtout pendant la transition 2003-2006. Cf.
Autres commentaires infra.
121
a. De l’élection présidentielle
J. Kabila s’est inscrit plus tôt que la plupart de ses concurrents dans la
dynamique des élections. C’est probablement surtout parce qu’il se voyait en
428
Cf. L. de Saint Moulin, Analyse par territoire et ville des résultats de l’enrôlement des électeurs et du
référendum sur le projet de Constitution, in Congo-Afrique, n°s 402-403, février-mars 2006, pp.9-34.
429
Suite à des questions de méthode et à la précipitation, la CEI a parfois fait perdre beaucoup d’argent. Par
exemple, elle s’est égarée dans l’impression de millions de bulletins inutiles, ayant commandé pour le
premier tour des bulletins avant la décision de la Cour Suprême de Justice qui viendra rajouter un dernier
candidat à l’élection présidentielle; lors du second tour, les premiers bulletins imprimés furent annulés parce que
Kabila portait le n°1 et Bemba le n°2, alors que principe arrêté était l’ordre alphabétique, donc Bemba avant
Kabila.
122
430
Dans la formule « 1+4 », J. Kabila était sensé partager le pouvoir avec 4 Vice-présidents qui tous étaient ses
aînés et, surtout avaient sur lui l’avantage de posséder un parcours universitaire, ce que lui n’a pas.
123
431
Bemba a fini par être interpellé par la CPI dans le cadre de crimes de guerre ayant été perpétrés par ses
troupes en République Centre Africaine et que, en Belgique, il a été condamné par contumace en mai 2003 à une
peine d’emprisonnement ferme d’un an pour « traite des êtres humains ». À cause de son opposition à J.-P.
Bemba et Azarias Ruberwa, Alexis Thambwe (dignitaire sous le régime Mobutu, cofondateur du RCD avant de
passer au MLC – qui fait de lui un ministre de la transition – et enfin, en 2006, un proche de Kabila en vue des
élections) s’était démené dans la foulée des débats de la constitution et de la loi électorale pour bloquer la
demande des Vice-présidents de devenir sénateurs à vie, une voie qui ouvre à l’immunité. Par rancœur à ses ex-
chefs de rébellions et comptant parmi les membres zélés de l’AMP, il parvient à bloquer tout projet de loi et/ou
de résolution allant dans ce sens. Mais un décret aurait été pris par J. Kabila le 13 novembre 2006, accordant
aux membres de l’ex-espace présidentiel une indemnité mensuelle équivalent aux trois quarts de leur dernier
salaire. L’information a été livrée par le Journal du Citoyen de la semaine du 5 au 11 février 2007. A en croire la
même source, les présidents de quatre commissions de la transition auront, en outre droit, à une résidence, à un
véhicule, à une garde rapprochée d’une douzaine d’éléments de la Police nationale et à deux titres de voyage par
an, en first ou en business class, sur le réseau international. Ce n’est pas tout. Ils vont, par ailleurs, disposer d’un
passeport diplomatique et leurs soins médicaux au pays ou à l’étranger seront pris en charge par l’actuel
gouvernement. Il en sera de même pour les membres de famille à leur charge.
124
originaire de la même province que lui432. Mais après le premier tour, début octobre,
Gizenga a obtenu que le gouvernement lui paie 400 000 dollars US de «dommages et
intérêts pour les pillages de ses biens» subis sous la « Transition » de Mobutu et lors
de l’arrivée de l’AFDL en 1997 - il n’y a eu aucune expertise ni jugement officiels, et
surtout, aucune indemnité versée aux familles des militants du PALU tués alors
qu’ils étaient venus à son secours.
Pay Pay, premier à annoncer sa candidature, aurait pu être rangé dans la troisième
catégorie ci-dessus. Divers observateurs voyaient en lui le challenger favori face à
J. Kabila, en raison tant de son expérience et de sa fortune que de ses origines 433.
Certes, il se porte candidat à la fois à la présidentielle et aux législatives, mais ce qu’il
paraît viser vraiment, c’est moins le pouvoir que les avantages liés à un poste. Parfait
technocrate, peu politique, Pay Pay vient brouiller les cartes, il arrange des rendez-
vous incognito avec Kabila (le dernier a lieu fin juillet 2006, à quelques jours du
premier tour); alors il fait une campagne peu appuyée et très localisée
(principalement dans sa région d’origine), bref une campagne insignifiante comparée
aux attentes ; ce qui désorientant ses partisans (mobilisés derrière lui souvent pour
profiter de son aura et de son argent dans leur propre conquête de postes divers). 434
Le cas du fils de Mobutu, Nzanga, est également particulier. Sa
candidature a été suscitée dès le départ par Kabila afin d’affaiblir Bemba dans les
bastions mobutistes. Même au premier tour, Nzanga ne fera pas réellement
campagne, mais son nom a suffi pour gagner des voix. Son ralliement officiel à
Kabila au second tour des élections lui a coûté sa popularité, surtout dans la province
de l’Équateur.
432
Cette version est parfois récusée par les partisans de Gizenga qui se sont cotisés pour réunir la même caution.
Mais les deux sources de financement auraient été exploitées par le «patriarche» ; lui seul en détient le secret.
433
Son père est Nande du Nord-Kivu et sa mère Shi du Sud-Kivu.
434
Quelques anciennes figures du temps de Mobutu (Atundu Liongo…) ont soutenu Pay Pay. Mais la CODECO
n’est pas au départ une structure créée pour être gérée par le candidat Pay Pay, plutôt celle-ci avait pour but de
consolider la position d’un groupe d’acteurs comme 3 ème voie entre Kabila et les autres candidats dont les ex
chefs rebelles. Cela explique, par exemple, la présence de gens comme Mwando Nsimba (et son fils) qui
cherchaient à demeurer indépendants par rapport à Kabila et, aussi, pour placer leur territoire d’origine, Moba, à
l’avant plan. C’est Olivier Kamitatu qui aurait dû prendre la tête de la CODECO, mais au moment de sa création,
il a rejoint (avec Ch. Lutundula) le camp Kabila - d’où le manque total d’organisation et de stratégie qui va
caractériser cette coalition.
125
A en croire les sondages, Bemba semble avoir refait une partie de son
retard sur Kabila durant les derniers jours qui ont précédé le scrutin: ses moyens, la
faiblesse de la campagne de plusieurs candidats et la désorientation de l’UDPS de
Tshisekedi lui ont permis d’incarner la principale alternative au chef de l’État sortant.
Utilisés respectivement par Bemba et par Kabila, « congolité » et « paix » sont les
deux thèmes qui ont dominé la campagne. Bemba et Kabila, tous deux cités dans les
rapports de l’ONU sur le pillage des richesses du Congo, doivent leur pouvoir à la
guerre, mais Bemba se construit l’image de «Mwana Mboka» (enfant du pays) ou
encore d’«Igwé» (chef coutumier protecteur/maître de la terre ancestrale, selon le
surnom venu du Nigeria435.
Il y a lieu de mieux préciser la thèse de la «congolité» sur laquelle les
partisans de Bemba insistent au détriment de Kabila, et à l’opposé celle de « facteur
de paix » pour Kabila contre Bemba. Le fait que Joseph Kabila s’exprime mieux en
anglais et que son swahili est nettement de l’Est africain, milieu où il a grandi, une
rumeur entretenue le présente, surtout dans l’ouest du Congo, comme étranger
d’origine tutsi adopté par Laurent Kabila436. L’opinion congolaise a également été
sensible à la manière d’agir de Kabila, qui a signé trop facilement des contrats
aliénant le sol et les richesses du pays. Bemba est perçu dans la lignée de Mobutu
435
Ces dernières années, des séries télévisées populaires produites en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso ou au
Nigeria sont largement diffusées en Afrique subsaharienne. « Igwé » est le personnage d’une série nigériane.
436
Cf. Cf. J. Omasombo et É. Kennes, République Démocratique du Congo : Biographies des acteurs de la
transition (juin 2003-juin 2006), Kinshasa-CEP, Tervuren-MRAC et Lubumbashi-CERDAC, 2006, pp.68-70.
126
dont il imite le sens de l’autorité; dans l’héritage de Mobutu, puisé chez Lumumba, la
terre des ancêtres est inaliénable. Mais dans l’est du pays, l’image de Bemba qui
prime est celle de la «brute de guerre»437. Plutôt que la simple explication ethnique, à
l’ouest, l’échec de Kabila s’explique d’abord par des éléments de trois ordres : son
triomphalisme; la focalisation de son discours sur les zones qui ont vécu sous les
rébellions; la structure et les responsables de l’AMP, généralement déjà en place
pendant la guerre et la «Transition».
437
C’est l’image qu’on se fait de lui dans le milieu Nande au Nord Kivu où il eut à diriger pendant un laps de
temps le « Front de Libération du Congo » (fusion momentanée du MLC et du RCD/aile Mbusa) en 2001;
divers témoignages font état de sa responsabilité dans des extorsions de biens.
438
Entretien réalisé à Bruxelles en novembre 2006.
439
Il peut s’agir de soldats de Mobutu réfugiés au Congo-Brazzaville. Quoi qu’en disent les versions et les
arguments avancés, ces affrontements sont dus en partie au manque de contrôle des soldats, tant par Kabila que
par Bemba.
127
l’abri d’une perte rapide du leadership. Pour attirer des partisans, les partis n’ont pas
d’abord pour objectif l’ambition de construire durablement la société, mais ils lient
les adhésions des membres à des bénéfices à distribuer, à des postes à pourvoir, à
leurs relations avec l’élite ou avec les réseaux d’influence. Conséquence néfaste de
cette stratégie, l’on renonce à se donner une structure durable. Dès la fin confuse de
la domination coloniale belge survient une lutte entre la volonté de l’opinion de
choisir ses dirigeants et celle de l’élite qui veut un pouvoir sans contrôle. La classe
politique congolaise est généralement dominée depuis 1960 par des hommes ou des
réseaux d’influence qui accèdent au pouvoir grâce à des appuis extérieurs et par la
cooptation; ceux-ci préfèrent, pour le partage des postes, les négociations plutôt que
les élections, dont ils parlent souvent mais qu’ils ne souhaitent jamais vraiment. 440
440
Cette situation explique la focalisation exclusive de la campagne sur le thème « Kabila rwandais » et non ou
très peu sur sa gestion et les pillages.
441
Dans cette seule province, les camps Kabila et Bemba se retrouvent dans le bureau de l’Assemblée
provinciale.
129
442
Il s’agit de deux lettres d’Anicet Kashamura, ancien ministre de l’information du gouvernement Lumumba,
adressées à l’avocat belge Jules Chomé. La 1ère lettre est écrite à Rome le 14 janvier 1964 et la 2 ème à Paris le 21
mai 1964. Cf. Farde archives J. Chomé à la section d’Histoire du Temps Présent du MRAC/Tervuren.
443
Calcul fait en comparant la liste des nouveaux élus à celle des membres de l’Espace présidentiel « 1+4 », du
gouvernement et des assemblées (Parlement et Sénat) de la dernière phase de transition. Cf. J. Omasombo et E.
Kennes, République Démocratique du Congo : Biographies des acteurs de la transition (juin 2003-juin 2006),
op.cit.
130
(309 sièges contre 132 à la coalition de J.P. Bemba), ce qui lui offre la direction du
Parlement et la formation du gouvernement. Au niveau provincial, c’est aussi la
victoire du camp Kabila qui domine 7 assemblées provinciales sur 11, mais il n’a pas
la majorité dans la ville de Kinshasa, siège des institutions, qui échoit entièrement à
la coalition de J.-P. Bemba.
Mais les deux niveaux des élections sont liés : la présidentielle a fourni les moyens et
les législatives ont occupé le terrain. Comment cela s’est-il articulé?
Stratégies nationales face aux dynamiques locales
444
Au second tour, Kabila et Bemba ne feront pas eux-mêmes campagne, chacun craignant pour sa sécurité.
131
être « distribuées » entre les composantes de la « Transition 1+4 » et ne l’ont été que
fort tardivement.
Le prix payé par cette politique est important : c’est celui de la
négligence de l’intérieur. Le gouvernement de transition n’a pas gouverné, et Kabila,
s’il a consenti quelques « dons » plutôt symboliques aux structures locales durant
cette campagne, a par contre réussi à bien « arroser » ses candidats parlementaires,
dont plusieurs pèsent en province (le prestige local renforcé par l’argent) 445. Ces
personnalités ont apporté des voix à Kabila et, inversement, elles ont pu s’établir
et/ou s’imposer face à leurs concurrents, grâce aux aides de la Présidence. Kabila a
ainsi placé une partie de ses hommes de confiance dans les nouvelles assemblées.
Mais ce qui est remarquable (conséquence de la guerre), c’est que les hommes-
intermédiaires de Kabila ne sont en général pas des leaders locaux influents, mais des
« nouveaux venus » qui se sont imposés uniquement grâce à l’argent rapidement
accumulé, et même pas par un bilan de gestion. La pauvreté explique beaucoup de
choses.
Des facteurs qui ont influencé le vote
Durant les élections, les candidats se sont fait remarquer de la population par
de nombreux « dons » (argent, biens, T-shirts, etc.) afin de gagner des votes,
dépassant généralement l’ensemble des interventions des pouvoirs publics
pendant toute la période de la «Transition», mais souvent opportunistes et
ponctuels, chaque « geste » visant d’abord à frapper l’opinion pour gagner
des voix. Un vice-gouverneur de province dit : « chaque fois que nous
inaugurons une route ou faisons un don médical à une clinique, ça devient une
opportunité pour la campagne ».446 Les MLC, RCD… en ont tous distribué, mais
sans commune mesure avec le camp présidentiel qui aurait dépensé plusieurs
millions de US$447, par l’entremise de quatre sources principales de financiers :
on cite le PPRD qui se servait directement à la Banque centrale, les entreprises
publiques (SNEL, MIBA…), les entreprises privées (brasseries, associations de
Libanais, Pakistanais ou Ouest-africains, sociétés Rawji, Forrest,...) et J. Kabila
lui-même.
445
Pour une information précise des sommes d’argent engagées par le camp Kabila, citons l’exemple de la
province du Katanga où les candidats députés nationaux et provinciaux AMP avaient reçu au 1 er tour de
l’élection présidentielle 12.000$Us chacun, pour ceux de la ville de Lubumbashi et 6.000$Us pour les autres de
l’intérieur (de la province) ; au second tour de l’élection présidentielle, le montant était de 6.000$Us pour chaque
candidat de la ville de Lubumbashi et 3.000*Us pour celui l’intérieur. A noter que ces sommes d’argent avaient
été remises aux candidats plus ou moins 2 semaines avant le 30 juillet 2006 (1 er tour) puis une semaine avant le
29 octobre 2006 (2ème tour); cela aurait causé des perturbations dans la campagne.
446
Cité par International Crisis Group « Congo’s elections : making or breaking the peace », Africa report
n°108-27 april 2006, p.8
447
Les estimations varient entre 40 et 160 millions de US$, selon les sources.
132
448
Le barrage de Moba fut ouvert pendant la guerre, et ce fut le résultat de l’initiative de Ch. Mwando avec le
chef Manda et le prédécesseur de Mgr. Kimpinde. Au deuxième tour de l’élection présidentielle, Mwando a
valorisé son capital politique auprès de Kabila. Remarquez qu’en plus de son élection en juillet comme député
national, Ch. Mwando viendra raflé la première place pour les provinciales d’octobre à Kalemie.
449
Sauf dans les îlots dominés par les Banyarwanda.
450
N.B.: un lien est fait entre le PALU et l’«Église des Noirs en Afrique» dite «Nzambi Mpungu», implantée en
province de Bandundu, surtout dans les territoires d’Idiofa et Gungu d’où Gizenga est originaire; des partisans
du PALU sont membres de la secte, qui veut le retour de Gizenga. L’ouverture du pays au multipartisme,
concédée par Mobutu en 1990, a amené la résurgence de cette secte, surtout au Kwilu : certains pensaient le
temps venu de se libérer à la fois du joug de l’Église catholique et de Kinshasa (pouvoir politique confisqué
depuis l’indépendance par Mobutu et ses alliés occidentaux, contre Lumumba et ses alliés Gizenga et Mulele).
451
M. Bura fait ainsi la bonne affaire, remportant un des huit sièges de ce territoire; cependant deux partisans de
Lubanga arrivent en tête en nombre de voix; un autre siège est remporté par le RCD.
133
référer à la fois aux résultats des élections passées et aux difficultés de formation du
gouvernement. Chaque opération crée des perdants qui cherchent d’autres
opportunités. Ensuite, il y a la compétition qui s’annonce entre les nouvelles
provinces. De par leur taille, les membres des assemblées provinciales constituent
des groupes d’électeurs relativement petits, ce qui augmente à la fois le risque des
influences directes de la corruption, la pression des logiques de partis et des ethnies.
Au vu des résultats, une mutation importante s’est produite, en
défaveur du camp présidentiel et plus particulièrement de « son » parti le PPRD,
membre constituant de l’Alliance pour la Majorité Présidentielle AMP. L’Union pour
la Nation, coalition autour du MLC de Bemba, se défend encore bien : elle progresse
même en gagnant des sièges sénatoriaux dans les bastions de l’AMP ; mais des
tensions apparaissent autour de certains choix de candidats opérés par la direction
du mouvement de Bemba. L’AMP continue à l’emporter par le nombre, mais recule
lors de l’élection sénatoriale dans l’ensemble de ses bastions de l’Est. Dans la
Province orientale, le RCD gagne des sièges. Dans les 4 nouvelles provinces qui vont
composer l’actuel Katanga, le PPRD ne prend qu’un seul siège par province, et sans
parvenir à évincer Lunda Bululu (ex-RCD, ex-MLC), lui aussi élu. Au Sud-Kivu, tous
les sièges reviennent à l’AMP mais le PPRD n’en occupe aucun. Dans le Maniema, le
PPRD n’enlève qu’un siège, ses candidats qui comptaient jusque là parmi les
dignitaires importants de la province (A.-R. Kithima, P. Lokombe, etc.) échouent.
L’élu qui a eu le plus de voix appartient au camp Bemba et parmi les autres élus
figure Ngongo Luwowo, un opposant aux Kabila père et fils. On constate également
que le PALU d’A. Gizenga ne cesse de reculer depuis qu’il s’est allié à Kabila : dans
ses fiefs du Kwilu et du Kwango, le PALU ne compte aucun élu sénateur.
Si le PPRD de Kabila recule voire s’efface à certains endroits, ce n’est
pas d’abord à cause de la montée du camp Bemba, mais parce qu’il se confronte déjà
à la montée des tensions avec ses alliés dans l’AMP. Divers acteurs regroupés dans
l’AMP ou autour de Kabila commencent à afficher leurs stratégies propres. Leur
attitude est liée aux réalités locales et aux insatisfactions liées aux premiers partages
des postes opérés par Kinshasa (ou de la direction qu’ils prennent) depuis les votes
de 2006.
Au Sud-Kivu, les sièges sont partagés entre ressortissants de divers
territoires mais la direction idéologique dominante reste encore l’hostilité au RCD :
on n’y trouve pas d’élu banyaMulenge (M. Nyarugabo se fait élire à Kinshasa) ni
même d’élu Lega. Au Sankuru, l’AMP enlève les quatre sièges de sénateur : c’est une
sanction contre les territoires, les ethnies et les regroupements qui ont voté contre
Kabila. Les quatre élus appartiennent à des partis différents (dont un au RCD) mais
tous sont Atetela, deux du territoire de Lodja et deux de Katako-Kombe (un élu passe
à la fois pour originaire de ce dernier territoire et de celui de Lubefu, selon les
opportunités !).
Au Nord-Kivu, la stratégie est différente. L’AMP, le PPRD en tête,
échoue à faire élire ses hommes; E. Mwanga-Chuchu du RCD (il se montre moins
radical dans ses positions ethniques), obtient le plus de voix, alors même qu’il est
135
tutsi et que l’assemblée provinciale ne compte aucun membre de son ethnie455. Parmi
les candidats de la liste AMP pour l’assemblée provinciale, seul E. Hamuli (Hunde
du territoire de Masisi) est élu, grâce à l’appui obtenu des Forces du Renouveau de
Mbusa Nyamwisi et de la Confédération des Fédéralistes et Démocrates Chrétiens
(COFEDEC) de V. Tshipasa qui, elles, misent sur la logique ethnique interne à la
province plutôt que sur des intérêts dictés et liés à l’équilibre du pouvoir de
Kinshasa. Quelques jours auparavant, ces deux partis avaient assuré l’élection d’un
candidat Hutu du territoire de Rutshuru (et qui est opposé au gouverneur RCD de la
Transition, E. Serufuli) à la tête de l’assemblée provinciale et ils ont soutenu comme
Vice-président un Nande autochtone, formellement membre du MSR - sans requérir
au préalable l’aval de ce dernier regroupement politique. Le PPRD ne sort qu’avec le
poste de porte-parole, mais c’est parce que le candidat désigné représente l’ethnie
Nyanga (mais il a grandi et étudié chez les Nande) et, aussi, parce qu’il s’agit d’un
élément peu radical dans ses prises de position dans la province. Ce processus
prouve encore le pouvoir du vainqueur des élections législatives au Nord-Kivu,
Mbusa Nyamwisi, Ministre d’État chargé des affaires étrangères et de la coopération
internationale.
L’AMP est ainsi majoritaire au Sénat, mais sa victoire n’assure pas son
leadership dans cette assemblée, qui compte plusieurs faucons tirant leur expérience
politique des régimes antérieurs. La preuve de cette évolution est l’élection de
Kengo wa Dondo, un des piliers du régime Mobutu, comme président du Sénat le 11
mai 2007456. Les deux vice-présidents sont un ancien chef de la sûreté de Mobutu
(Mokolo wa Mpombo) et un membre du collège des commissaires généraux et
ministre de Mobutu des années 1960 (Mario Cardoso Losembe). Mais, répétons-le,
les stratégies des conservations du pouvoir de J. Kabila et l’organisation/réaction des
oppositions à la position du chef de l’Etat seront plus déterminantes que leur
aptitude à la bonne gouvernance du pays, ce qui n’est pas sans dérouter les analyses
objectives appuyées sur les objectifs de développement du pays.
455
L’AMP avait soutenu la candidature de C. Rwakabuba qui échoue. Ce dernier, un tutsi, a marqué l’histoire du
Nord-Kivu depuis l’indépendance du pays en 1960.
456
Cette élection est d’autant plus remarquable que Kengo est considéré dans l’opinion congolaise comme
« Rwandais » - même s’il n’y a que sa grand-mère maternelle qui est d’origine Tutsi du Rwanda.
136
457
La marginalisation des Luba-Kasai, orphelins de représentation politique après l’exclusion de l’UDPS, risque
d’hypothéquer la stabilité du régime Kabila. C’est sans doute la raison de la nomination de Raymond Tshibanda
(muLuba – Kasai) comme directeur de cabinet du président, le 17 mars 2007.
137
l’habileté de Kabila à manœuvrer, déjà son leadership est de plus en plus mis en mal
par ses propres alliés à ce moment où le camp de l’opposition s’effrite. Plusieurs
membres influents de l’AMP sont mécontents pour avoir été exclus ou obtenu des
postes de moindre importance et attendent la mise en place dans le portefeuille de
l’Etat. Mais ces contradictions et/ou faiblesses pourront devenir des atouts sur
lesquels Kabila et Gizenga s’appuieront pour garder chacun, le plus longtemps
possible le pouvoir, au détriment de la bonne gestion du pays qui importe peu.
Le cas le plus flagrant est sans aucun doute celui de la province du Bas-
Congo, où le candidat gouverneur de l’AMP, Mbatshi Batshia, est élu contre le
candidat UN, le populaire Fuka Unzola, secondé par le chef du très influent
mouvement politico-religieux Bundu dia Kongo, Ne Muanda Nsemi. Cette élection,
survenue le 27 janvier 2007, déclenche des marches de protestation organisées par ce
dernier mouvement. Ces protestations violentes sont réprimées dans le sang : le bilan
est d’au moins 137 morts.
L’élection des gouverneurs de province dans les deux Kasaï avait été
perturbée lorsque l’AMP s’était vu en position de les perdre au profit des candidats
proches de Bemba. Après près d’un mois de report, le camp Kabila les a remporté.
Au Kasaï Oriental, il s’est résolu à soutenir le candidat « indépendant » Alphonse
Ngoyi Kasaji, propriétaire de la société Ngokas Trading ayant son siège à Mbuji-
Mayi et, aussi président de la Fecodi (Fédération congolaises des diamantaires) et du
Conseil provincial des diamantaires du Kasaï Oriental.458
458
Cf. G. de Villers, L’affaire Ngokas, in Chasse au diamant au Congo/Zaïre, Cahiers Africains n°s 45-46, Paris,
L’Harmattan, 2000, pp. 233-240.
459
Laurent Kabila a installé des Luba-Katanga du nord de la province dans l’armée ; le Nord a dominé le
gouvernorat depuis 1991, à l’exception du règne de Katumba Mwanke. C’est ce dernier qui est devenu l’homme
puissant derrière Joseph Kabila.
139
c. Fonctionnement du régime
En fait, et à ce que l’on ce que l’on peut en savoir, il semble bien qu’à la
pratique dominante correspond mieux une inversion des termes, tant la volonté
présidentielle est apparue déterminante dans le choix des ministres et en tout cas
dans leurs démissions.
Nous avons essayé de comprendre une chose à travers tout cela. En effet,
l’AMP n’était qu’une plate forme fabriquée par le président lui-même afin de ne pas
se retrouver en face d’un premier ministre issu d »une majorité qui lui est de
tendance politique opposée.
Tous les partis politiques sont assoiffés du pouvoir, et veulent à tout prix
l’exercice pour imposer leur vision, contraire à la démocratie. Alors qu’ils sont tenus
au respect des principes de démocratie pluraliste, d’unité et de souveraineté
nationale.
Le lien étroit existant entre la démocratie et les partis politiques n’est pas
seulement historique. En effet, devenus les acteurs essentiels du débat politique, les
partis sont par leur nombre, leur mode de fonctionnement, une unité de mesure du
degré démocratique d’un régime politique.
142
Toutes ces caractéristiques nous laissent dans le bain d’un régime semi-
présidentiel à pouvoir majoritaire, et exclusivement en période de coïncidence des
majorités.
Nous savons que chaque régime répartit les compétences et c’est dans la
répartition de ces compétences qu’on peut trouver les forces et les faiblesses. Pour
des pays africains comme le notre ou la culture démocratique n’est pas encore
intériorisée, il est vraiment difficile de déceler les forces et les faiblesses. Parce que les
faiblesses actuelles sont entretenues par les hommes politiques qui sont chargées
d’animer les institutions.
460
Elle est d’ailleurs dénommée par ses géniteurs «Loi n° 74-020 du 15 août 1974 portant révision de la
Constitution du 24 juin 1967 », JO, 14ème année, numéro spécial, 1er janvier 1975.
461
Il s’agit de la fameuse période dite apolitique fixée d’abord à cinq ans, mais qui se réduira avec la création du
MPR le 20 mai 1967 à moins de deux ans.
462
Le mouvement est créé par des politiciens en mal de positionnement, qui ne veulent pas manquer l’occasion
d’emboîter le pas aux militaires, parmi lesquels des anciens étudiants actifs comme N’KANZA DOLUMINGO,
président du Comité exécutif de l’UGEC et Paul KABAYIDI, conseiller communal, ancien étudiant des
universités belges. Sur la création du CVR, voy. VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…,
op. cit., pp. 140-141.
145
C’est sur les cendres du CVR464 que naîtra le parti qui va accaparer
toute la vie politique du pays, le MPR, malgré les dénégations de son géniteur qui
annonçait déjà dans son discours du 20 mars 1967 à Kisangani465 son intention de
créer « un mouvement et non un parti unique, un mouvement qui serait animé par le
chef de l’Etat lui-même, un mouvement dont le CVR n’est nullement l’embryon ».
Dès que le MPR se dote des organes467, dont l’un, le Bureau politique,
est appelé à jouer un rôle déterminant dans l’avenir politique du pays, le
fonctionnement des institutions en est fortement infecté. On peut dès ce moment
constater une coïncidence annonciatrice des difficultés présageant l’avenir entre le
personnel gouvernemental et celui du mouvement. Les méfaits du dualisme
institutionnel qui va en résulter ne sont plus à démontrer.
463
Ce mouvement est, dans le chef de ses créateurs, une machine chargée d’assurer la communication entre le
pouvoir et la masse et d’organiser la « vigilance » en faveur du nouveau régime. Le président de la République,
qui avait interdit la politique des partis, s’appuiera sur cette organisation, à laquelle il adhéra d’ailleurs dès le 5
février 1966, pour la liaison avec les masses. Voy. « Le Corps des Volontaires de la République (CVR) »,
Courrier Africain du CRISP, TA 62-63 du 27 mars 1967, 34 p. cité par DJELO EMPENGE OSAKO,
Contribution à l’étude…, op. cit., p. 312.
464
Le CVR continuait à souligner son apolitisme fondamental, tout en esquissant, dans certains documents de
son séminaire national tenu à Léopoldville du 13 au 21 décembre 1966, à l’occasion du premier bilan de son
activité, son éventuel rôle futur : celui d’un parti unique, qu’il soit dit d’avant-garde ou de masse. Sur ce secret
dessein du CVR, voy. . VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 140.
465
C’est en fait moins d’un mois plus tard, soit le 17 avril 1967, qu’est officiellement annoncée la création du
MPR.
466
Sur le discours du président de la République à Kisangani, voy. DJELO EMPENGE OSAKO, Contribution à
l’étude…, op. cit., p. 313.
467
Au début mai 1967, le MPR se dote de trois organes : le Congrès, le Bureau politique et le Comité exécutif
national. D’emblée le Bureau politique apparaît comme le centre nerveux du nouveau système.
468
La population se prononça par une majorité de 97,8 % de OUI. Sur les résultats de ce référendum, voy.
VERHAEGEN, B. (sous la direction de -), Congo 1967, Bruxelles, CRISP, 1967, pp. 55-57.
469
Certains ont cru soutenir que la Constitution instaurait un bipartisme rigide. En réalité, ce fut une faculté
insérée en vue de camoufler les véritables objectifs du MPR qui se voulait l’unique mouvement de
146
jamais question d’en admettre un et, dès sa création, le MPR jouira d’un monopole de
fait dans la vie politique zaïroise.
Le coup de poker réussi par le maréchal Mobutu n’a pas empêché les
chercheurs de s’empoigner sur la valeur juridique réelle de la loi constitutionnelle du
15 août 1974. S’agissait-il d’une simple révision constitutionnelle ou encore, en raison
des profonds bouleversements que cette loi semblait apporter sur la scène politique
congolaise, d’une nouvelle Constitution ? La loi constitutionnelle de 1974 met en
présence deux thèses et soulève une controverse non dépourvue d’intérêt. Dans cette
rassemblement des masses. Dans le sens d’une simple faculté, d’un cadre, d’un maximum fixé par la
Constitution, voy. LIHAU, M., « La nouvelle Constitution de la République Démocratique du Congo », Etudes
congolaises, vol. XI-3, Léopoldville, INEP, 1968, p. 33.
470
La loi n° 70-001 du 23 décembre 1970, MC, 12ème année, n°1 du 1er janvier 1971, pp. 5-6, porte révision de la
Constitution en changeant la disposition de l’art. 4 par l’érection du MPR comme « le seul parti politique de la
RDC » et en adjoignant un art. 19 bis qui dispose : « Le MPR est l’institution suprême de la République. Il est
représenté par son président. Toutes les autres institutions lui sont subordonnées et fonctionnent sous son
contrôle. ».
471
Pour VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 151, le phénomène de fusion
totale entre l’Etat et le parti unique a atteint une perfection telle qu’il devient banal de s’interroger si l’on est
encore dans le cadre d’un phénomène partisan.
472
Aux termes de l’art. 43 de la loi du 15 août 1974, « Les organes du MPR sont le Bureau politique, le Congrès,
le Conseil législatif, le Conseil exécutif, le Conseil judiciaire ». Notez que le président de la République,
ancienne institution étatique, s’est, lui, identifié au MPR, portant à l’Etat, dont il exerce la plénitude du pouvoir,
conformément à l’article 30 de ladite loi.
473
Outre l’art. 8 aux termes desquels « Le peuple zaïrois est organisé au sein du MPR », l’art. 29 de la loi de
1974 dispose : « Le MPR est la nation zaïroise politiquement organisée ».
474
Le mobutisme, doctrine qui « guide » le peuple zaïrois est entendu par l’exposé des motifs de la loi susvisée
comme étant « la pensée, les enseignements et l’action du président fondateur du MPR, qui ont fait du Zaïre et
des Zaïrois ce qu’ils sont aujourd’hui. » (Exposé des motifs, al. 3).
475
Le pays troqua son « drapeau bleu ciel, orné d’une étoile jaune dans le coin supérieur gauche et traversé en
biais d’une bande rouge finement encadrée de jaune » de l’art. 1er de la Constitution de 1967 contre un « drapeau
vert clair, orné au centre d’un cercle jaune dans lequel figure une main droite tenant un flambeau rouge » (art. 4,
loi de 1974).
147
Les plus sceptiques devraient être convaincus par les termes de l’article
premier de la loi elle-même pour se rassurer qu’il s’agit bel et bien de la modification
de la Constitution du 24 juin 1967479, soutiennent-ils.
476
La substance de la controverse est largement inspirée de DJELO EMPENGE OSAKO, Impact de la
coutume…, op. cit., pp. 69-76.
477
Les rédacteurs du texte eux-mêmes soutiennent cette position dans l’exposé des motifs de ladite loi. D’après
les auteurs de Histoire du Mouvement populaire de la révolution, Institut MAKANDA KABOBI, Kinshasa,
1975, « cette révision tendait à faire disparaître des lacunes provenant du dualisme institutionnel et de la
présence désormais inutile de deux textes fondamentaux : la Constitution régissant l’Etat et les statuts du MPR »,
p. 67.
478
Le texte tel que publié dans l’organe officiel, JO, 14ème année, numéro spécial du 1er janvier 1975, est bel et
bien dénommé « Loi n° 74-020 du 15 août 1974 portant révision de la Constitution du 24 juin 1967 ».
479
En effet, la teneur de la loi susvisée dispose en son article premier : « La Constitution du 24 juin 1967 est
modifiée conformément au texte annexé à la présente loi ».
148
la révision ne peut certes être que partielle et porter ainsi sur une ou un certain
nombre de dispositions constitutionnelles481. Ainsi la révision peut avoir pour objet
et pour résultat d’abroger entièrement un article de la Constitution, d’ajouter une
disposition482 à un article ou d’en modifier une partie ou d’en changer complètement
la rédaction.
A ceux qui avancent que la loi de 1974 semble avoir procédé à une
modification totale de la Constitution de 1967, usurpant ainsi les prérogatives du
pouvoir constituant originaire, à qui revient seul la compétence de mettre en place
une nouvelle Constitution, les tenants de la thèse révisionniste rétorquent que toute
Constitution est révisable en fonction d’une certaine situation politique et sociale du
pays483.
L’immutabilité de la Constitution n’est-elle pas contraire au principe de
la souveraineté, le peuple souverain ne pouvant renoncer à son droit de changer la
Constitution ? Les révisionnistes répondent à cette interrogation réflexive, avec
certains auteurs484, en s’appuyant sur la disposition de la Déclaration des droits de
l’homme de 1793 selon laquelle : « Un peuple a toujours le droit de revoir, réformer
et de changer sa Constitution. Une génération ne peut assujettir à ses lois les
générations futures ».
Ce principe sur lequel les révisionnistes s’appuient peut être admis sans
qu’aucune réponse acceptable ne vienne cependant satisfaire la curiosité scientifique
qu’éveille un triple questionnement :
- La génération qui avait, sept ans plutôt, pris plaisir à mettre en place la
Constitution de 1967 a-t-elle changé au point de se trouver en porte-à-faux
face à une autre génération sept ans plus tard ?
480
En ce sens, DEBBASCH, C. et alii, Droit constitutionnel…, op. cit., p. 106.
481
C’est la position de VELU, J., Notes de Droit public, polycopié, 1978-1979, pp. 434-436 reprise par DJELO
EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit., p. 70.
482
Le terme « disposition » n’est pas synonyme d’article. Il est des articles qui renferment deux ou plusieurs
dispositions.
483
DEBBASCH, C. et alii, Droit constitutionnel…, op. cit., p. 106.
484
Ibidem.
149
Ainsi, les tenants de cette thèse politique, pour qui l’impression semble
plus importante que l’action, privilégient l’apparence destinée à la perpétuelle
recherche de la légitimité plutôt que la substance du texte constitutionnel. Or, il ne
suffit pas, conclut Djelo Empenge Osako, d’affirmer que le nouveau texte n’est que
l’amendement de l’ancien pour refuser à la nouvelle loi constitutionnelle son
caractère nouveau489. En effet, le constituant peut en modifier profondément l’esprit
en ne recourant pas aux techniques appropriées pour éviter la rigueur de la
procédure.
Passer par une technique plus facile, celle de simple révision des
dispositions constitutionnelles, afin d’atteindre un objectif opposé à celui
prétendument visé est une fraude à la Constitution.
485
Les révisionnistes feront certainement valoir le maintien des articles relatifs aux droits fondamentaux et des
devoirs des citoyens qui constituent généralement des fausses fenêtres, des dispositions passe-partout qui ne
permettent pas de qualifier un régime politique.
486
C’est l’argument logique que tire DJELO EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit., p. 70,
visiblement de l’exposé des motifs de la loi n° 74-020 du 15 août 1974, al. 1, qui dispose : « La présente
révision constitutionnelle vise à tirer toutes les conséquences de l’institutionnalisation du MPR décidée lors de
premier congrès extraordinaire qui a eu lieu à N’sele en mai 1970 afin d’adapter le texte de base qui régit notre
pays à nos réalités ».
487
Cette « équation » reprise par DJELO EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit., p. 71, voulait
dire qu’il était stratégiquement moins payant d’entreprendre une révolution dans une autre révolution sans se
dédire.
488
Cette affirmation relève de l’exposé des motifs de la loi du 15 août 1974, titre I, al. 1, JO, op. cit., p. 1.
489
DJELO EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit., p. 71.
150
490
La session fut, en effet, clôturée par l’ordonnance n° 74-207 du 10 août 1974.
491
Parmi ceux-ci, on peut citer DJELO EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit., pp. 72-76.
492
D’après Paul BASTID, L’idée de Constitution, Paris, Economica, 1985, p. 184, cette idéologie, qui est en
relation intime avec la situation ou avec les besoins d’un milieu donné, c’est ce que la Constitution présente de
véritablement fondamental.
493
Ce sont ces conditions qui résument d’ailleurs, par les mécanismes qu’elles créent, les principes qui dominent
la vie publique.
494
Depuis l’indépendance du Congo, rebellions et insurrections avaient décidé de relayer les menaces de
sécessions qui continuaient à hanter la jeune République.
495
L’on se rappellera de la tentative déclenchée par Jean SCHRAMME et Bob DENARD, appuyés par les
anciens gendarmes katangais, le 5 juillet 1967, deux semaines à peine après la promulgation de la nouvelle
Constitution, en de s’emparer de Kisangani.
151
C’est donc dans ce document que le MPR essaie de présenter les idées-
forces le soubassement philosophique de son action, celui qui va inspirer la
Constitution du 24 juin 1967 : « Sa [c’est-à-dire celle du MPR] doctrine est le
nationalisme »499. En décidant de suivre les options fondamentales définies dans le
Manifeste de la N’sele500, le constituant de 1974 aurait été logique de retenir, comme
soubassement politique du nouveau régime, le nationalisme zaïrois authentique, que
ce manifeste consacrait comme doctrine. A la place, le préambule de la loi
constitutionnelle du 15 août 1974 érige en guide le mobutisme comme ensemble
d’idées-forces qui fondent la pensée du parti-Etat501. Même plus, il ressort du
contenu tant de l’exposé des motifs que du préambule de la loi constitutionnelle de
1967502 que c’est en reconnaissance des mérites exceptionnels que « la grande famille
zaïroise »503 aurait décidé de considérer que toute la philosophie politique du régime
serait conçue, développée, exprimée, systématisée et réalisée dans « la pensée, les
enseignements et l’action » d’un homme : Mobutu504.
496
Certains allèrent jusqu’à assimiler le général MOBUTU à un second LUMUMBA. En ce sens,
VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 152.
497
Manifeste de la N’sele, MPR, Kinshasa, sd.
498
VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 142 estiment d’ailleurs que le
Manifeste de la N’sele constitue un point de départ essentiel en vue de dresser le bilan des gouvernements de la
seconde République.
499
Avant-propos du Manifeste de la N’sele, op. cit., p. 6.
500
Ce sont elles qui convainquent, parait-il, le peuple congolais en ce moment-là. Voy. Préambule de la loi n°
74-020 du 15 août 1974, JO, op. cit.
501
Bien que l’exposé des motifs de la loi n° 74-020 du 15 août 1974, JO, op. cit. réduise son contenu en « la
pensée, les enseignements et l’action du président fondateur du MPR », les idéologues du parti le prétendent plus
englobant que le nationalisme congolais authentique. Sur ces prétentions, voy. DJELO EMPENGE OSAKO,
Impact de la coutume…, op. cit., p. 72.
502
Le préambule de la loi n° 74-020 du 15 août 1974, al. 3, JO, op. cit., p. 3, y ajoute la politique du recours à
l’authenticité.
503
Exposé des motifs, al. 7, de la loi n° 74-020 du 15 août 1974, JO, op. cit., p. 1.
504
Exposé des motifs, al. 3, de la loi n° 74-020 du 15 août 1974, ibidem.
152
505
NGUZ KARL-I-BOND, « Résumé succinct des idées-forces du mobutisme », Conférence donnée à l’Ecole
du parti, Institut MAKANDA KABOBI, lors de la session de septembre - octobre 1974, p. 26, cité par DJELO
EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit., p. 72. Voy. également MUDIMBE, V.Y., Autour de la
« Nation ». Leçons du civisme. Introduction, Kinshasa – Lubumbashi, éd. du Mont – Noir, 1972, p. 95.
506
Petit Larousse illustré. Dictionnaire encyclopédique pour tous, Paris, Librairie Larousse, 1986, p. 323.
507
En 1967, il n’est pas encore question de donner une étiquette à la doctrine du MPR, le programme d’action
repris dans le Manifeste se contente d’un contenu idéologique relativement mince mettant un accent particulier
sur le nationalisme. Voy. à ce sujet VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., pp.
148-149.
508
NGUZ KARL-I-BOND, « Résumé succinct des idées-forces du mobutisme »…, op. cit., p. 27 reprend les
termes du célèbre discours que prononça le président MOBUTU le 4 octobre 1973 à la tribune de l’Assemblée
générale de l’ONU.
509
La conclusion est de DJELO EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit., p. 73.
510
DJELO EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit., p. 73.
511
NGUZ KARL-I-BOND, « Résumé succinct des idées-forces du mobutisme »…, op. cit., p. 28.
153
une doctrine, le nationalisme zaïrois authentique et une méthode pour réussir cette
politique, le recours à l’authenticité512.
512
Sur les trois composantes du mobutisme, voy. DJELO EMPENGE OSAKO, Impact de la coutume…, op. cit.,
p. 72. Pour VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 150, si l’authenticité a
supplanté le nationalisme, elle a, à son tour, cédé plus tard le pas au mobutisme consacré dans les textes
constitutionnel de 1974. Le mobutisme aura donc avalé les deux premières doctrines.
513
L’art. 2, al. 1, de la Constitution du 24 juin 1967, M.C, op. cit., p. 565, dispose : « Tout pouvoir émane du
pouvoir qui l’exerce par ses représentants ou par voie de référendum ».
514
Aux termes de l’art. 29 de la loi n° 74-020 du 15 août 1974, JO, op. cit., p. 5, « Le Mouvement populaire de
la Révolution est la nation zaïroise politiquement organisée ». Cette globalisation politique touche tous les
secteurs de la vie nationale en vertu du principe « olinga olinga te, ozali se na MPR »
515
Si l’on compare la disposition de l’art. 9, al. 1, de la loi n° 74-020 du 15 août 1974, JO, op. cit., p. 3, selon
laquelle « le pouvoir émane du peuple qui l’exerce par le président du MPR, qui est de droit président de la
République, avec le concours des organes du MPR », avec celle de l’article 30 de la même loi aux termes de
laquelle, « le président du MPR est de droit président de la République et détient la plénitude de l’exercice du
pouvoir », on a l’impression de se trouver en face qu’une équivoque heureusement vite dissipée dès lors que les
autres organes du MPR n’agissent que par délégation.
516
Face aux importants organes du MPR, comme le Bureau politique et le Congrès, le Conseil législatif, le
Conseil d’exécutif et le Conseil judiciaire ne sont que de petites caisses de résonance sans pouvoir propre.
154
517
C’est à tort que d’aucuns pensent que la deuxième République commence le 24 novembre 1965, car à partir
de cette date jusqu’au 24 juin 1967, date à laquelle la République est rétablie, le pays, officiellement régi par la
Constitution du 1er août 1964, comme le souligne la proclamation du Haut Commandement de l’Armée nationale
congolaise, vit une période de confusion au profit d’une dictature militaire. Dans ce sens, BOSHAB, E.,
«République Démocratique du Congo : Le spectre d’une Constitution virtuelle devant la commission
constitutionnelle », Rev. de Dr. Afric., n° 6, Bruxelles, avril 1998, pp. 294-295. En sens opposé,
VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 139, qui situent la seconde
République au 24 novembre 1965.
518
A la suite du professeur Jean-Louis QUERMONNE, « L’équilibre général de la Constitution », La révision de
la Constitution, Journées d’études du 20 mars et du 16 décembre 1992, Association française des
Constitutionnalistes, Aix-en-Provence, Paris, PUAM, Economica, 1993, pp. 165-166, Evariste BOSHAB,
«République Démocratique du Congo : Le spectre d’une Constitution virtuelle devant la commission
constitutionnelle », », Rev. de Dr. Afric., n° 6, Bruxelles, avril 1998, p. 123, explicite cette double expression en
précisant que changer de République, c’est changer de régime politique, par contre changer la République
signifie « réviser la Constitution pour l’adapter aux exigences contemporaines, sans porter atteinte à son
équilibre général ».
155
519
BURDEAU, G., Traité de science politique, 2ème éd., t. 1, Paris, LGDJ, 1969, p. 98.
520
Sur le mariage entre le roi et la nation dans le cadre monarchique, voy. CHEVALLIER, J.-J., Histoire des
institutions et des régimes politiques de la France de 1789 à nos jours, 4ème éd., Paris, Dalloz, 1971, p. 12.
521
Voy. BOSHAB MABUDJ, « Quelles institutions pour la Troisième République ? », Le Diagnostic, vol. 1, n°
00, Kinshasa, 1992, pp. 11-12 : « C’est donc un régime autocratique qui est mis en place et qui n’a, de ce fait,
rien de commun avec le régime présidentiel du 24 juin 1967 ».
522
BOSHAB, E., “République Démocratique du Congo: le spectre d’une Constitution virtuelle devant la
Commission constitutionnelle », op. cit., p. 135 : « Sans être exhaustif, il suffit de rappeler, sur le plan des
principes, que le Zaïre était constitutionnellement une monarchie absolue où un seul homme, le chef de l’Etat,
au dessus de la Constitution pouvait tout » et aussi, « Quelles institutions pour la troisième République ? », Le
Diagnostic, vol. 1, n° 00, Kinshasa, 1992, pp. 11-12. Voy. également dans le même sens, NAIPUL, V.-S., « Un
nouveau roi pour le Congo », Le Débat, n° 8, janvier 1981 ; KAMTO, Le pouvoir et le droit en Afrique noire.
Essai sur les fondements du constitutionnalisme dans les Etats d’Afrique noire francophone, Paris, LGDJ, 1987,
pp. 302-305 ; WILLIAME, J.-C., « L’automne d’une monarchie », Politique africaine, n° 41, 1991, pp. 10-21 ;
GONIDEC, P.-F., « A quoi servent les Constitutions africaines ? Réflexion sur le constitutionnalisme africain »,
RJPIC, Paris, 1987, pp. 860-861.
523
Il s’agit véritablement d’une Charte et non d’une Constitution car, en réalité, le peuple n’a aucun droit. Seul le
monarque, comme du temps du Roi Soleil, peut affranchir ses sujets, accorder certains privilèges, anoblir,
condamner, gracier… D’ailleurs les formules d’usage pendant ce règne conforte cette analyse : « Il a plu au
président fondateur de vous nommer ministre… Il a plu au maréchal de vous élever au rang de Général… Il a
plu au président fondateur d’augmenter les salaires des fonctionnaires et travailleurs… Il a plu au président
fondateur de créer l’UNAZA… Il a plu au président fondateur de vous attribuer la maison sise n° 24, Avenue des
Trois Z, Kinshasa/Gombe…. ». Voy. BOSHAB, E., « République Démocratique du Congo : Etat unitaire à
régionalisation constitutionnelle ou fédéralisme assourdi ?", Rev. de Dr. Afric., n° 7, Bruxelles, 1998, p. 295.
156
524
L’article unique du Titre VIII, Dispositions spéciales, de la loi n° 74-020 du 15 août 1974 portant révision de
la Constitution du 24 juin 1967, JO, op. cit., p. 7, dispose : « Les dispositions des art. 31, 39, al. 2 et 3, et 46 de la
présente Constitution ne s’appliquent pas au président fondateur du MPR. De même, l’avis conforme dont il est
question à l’alinéa premier de l’article 78 n’est pas requis en ce qui concerne le président fondateur du MPR ».
525
Plusieurs tentatives, encouragées depuis 1990 tant par l’environnement international caractérisé par la fin de
la guerre froide à la chute du mur de Berlin et de l’implosion de l’URSS et ses satellites ainsi que la montée en
force de l’opposition intérieure, ne parviendront pas à anéantir l’absolutisme du régime du maréchal Président et
à rétablir la République apparemment abattue et même enterrée par la loi du 15 août 1974.
526
NWABUEZE, B.O., Constitutionalism in the Emergent States, London, C. Hurst & CO, 1973, p. 2, considère
que « une Constitution peut être utilisée pour d’autres buts que de limiter le gouvernement… Loin d’imposer un
frein une telle Constitution peut en vérité faciliter ou même légitimer l’usurpation de pouvoirs dictatoriaux par le
gouvernement ».
527
OWONA, J., Droit constitutionnel et régimes politiques africains, Nancy, Berger Levrault, Coll. Mondes en
devenir, 1985, p. 269, considère le régime institué au Zaïre par la loi du 15 août 1974 comme une chefferie
modernisée.
157
Différents par leur nature, les deux éléments que l’on prétend
« associer » s’opposent également par leur finalité. Le premier tend, en effet, à
assurer l’unité de la puissance publique, tandis que le second vise, au contraire, à
institutionnaliser le pluralisme interne du pouvoir.
528
L’observation est faite par BASTID, P., L’idée de constitution …, op. cit., p. 22.
529
Lorsque, par exemple, la Constitution de la transition du 4 avril 2003 mentionne dans son article 11 : « Les
partis politiques concourent à l’expression du suffrage, à la formation de la conscience nationale et à l’éducation
civique. Ils se forment et exercent librement leurs activités dans le respect de la loi, de l’ordre public et des
bonnes mœurs. Les partis politiques sont tenus au respect des principes de démocratie pluraliste, d’unité et de
souveraineté nationales… », elle nous fixe sur ce qui est permis, mais nullement sur la force qu’ils représentent.
530
On les voit à certains moments influer sur les décisions des autorités publiques, voire renverser des
gouvernements à force d’ultimatums.
531
Préface de Charles GOOSSENS, in DJELO EMPENGE OSAKO, L’Impact de la coutume…, op. cit., p. 16.
158
a. La consécration du MPR
532
Sans doute que l’art. 4, al. 2 de la Constitution du 24 juin 1967 qui fixe le nombre maximum des partis
politiques à deux ne signale pas déjà le nom du MPR, mais, l’on ne peut oublier que, créé le 17 avril 1967 et
proclamé officiellement le 20 mai de la même année, le MPR existait déjà avant la promulgation de la
Constitution comme unique forme politique agréée.
533
C’est ce qu’affirment les art. 1 et 4 des statuts du MPR.
534
A l’occasion du voyage du Roi Baudouin en juin 1970 au Zaïre comme devant les cadres de l’Union
progressiste sénégalaise (UPS) à Dakar le 14 février, le président du MPR, le général MOBUTU n’avait pas
manqué d’expliquer que son parti était avant tout un mouvement de rassemblement des masses. Voy. DJELO
EMPENGE OSAKO, Contribution à l’étude…, op. cit., p. 327 ; L’Impact de la coutume…, op. cit., pp. 107-
109.
535
VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 150.
536
C’est le cas du Bas Congo où l’ABAKO, parti ethnique, demeurait solidement implanté.
159
Sans entrer dans les détails inutiles, il y a lieu de noter que depuis la
région jusqu’à la sous cellule, qui étaient respectivement la plus grande entité
(province actuelle) et la plus petite entité (village) territoriale, le président et le vice-
président, chargés d’assurer la permanence du parti, occupent, dans la très grande
537
DJELO EMPENGE OSAKO, Contribution à l’étude…, op. cit., p. 329.
538
Loi n° 70-001 du 23 décembre 1970 portant révision de la Constitution, MC, 12ème année, n°1 du 1er janvier
1971, pp. 5-6.
539
Art. 1er de la Loi n° 70-001 du 23 décembre 1970 portant révision de la Constitution, MC, op. cit., p. 5,
modifiant l’art. 4 de la Constitution du 24 juin 1967.
540
Art. 4 de la Loi n° 70-001 du 23 décembre 1970 portant révision de la Constitution, MC, op. cit., p. 5,
portant insertion d’un article 19 bis dans la Constitution du 24 juin 1967.
541
Idem.
542
Ibidem.
543
Art. 2 de la Loi n° 70-001 du 23 décembre 1970 portant révision de la Constitution, MC, op. cit., p. 5,
portant modification des l’article 19 de la Constitution du 24 juin 1967.
160
544
De ce fait le souci de neutralité de l’administration est remise en cause par le fait que tous les agents
deviennent politisés et ne peuvent plus rester au milieu du village.
545
DURIEUX, A., « Les institutions politiques de la République du Zaïre », Revue juridique et politique,
Indépendance et Coopération, Paris, T. XXVI, n° 3, 1972, p. 392.
546
Dans le sens inversé, DJELO EMPENGE OSAKO, Contribution à l’étude…, op. cit., p. 330, qui pense quant
à lui que c’est plutôt que c’est le parti qui serait « un rouage sans doute nécessaire, mais adjuvant, second,
subordonné au pouvoir présidentiel ».
547
Dans le même sens, DURIEUX, A., « Les institutions politiques de la République du Zaïre »…, p. 394.
548
En effet, c’est aux termes des dispositions de l’article 4 de la Loi n° 70-001 du 23 décembre 1970 portant
révision de la Constitution, MC, op. cit., qu’il est inséré, dans la Constitution du 24 juin 1967, l’article 19 bis,
dont la dernière phase est : « Les structures et organes du MPR sont déterminés par ses statuts et règlements ».
161
du parti qui, d’ailleurs, les charrient, dans une « société de juxtaposition »549 où la
notion même d’opposition politiquement organisée est inconnue550.
Face à l’armée qui avait pris le pouvoir en 1965 d’abord, puis au MPR
qui était venu, depuis 1967, à la rescousse pour rendre acceptable et même
indispensable ce pouvoir par des idées-forces qu’il véhiculait, il a existé des pouvoirs
opposés. Le pouvoir en place fait chercher autant à les identifier qu’à les éliminer
progressivement en vue de renforcer son autorité.
549
Le président MOBUTU lui-même dit que le MPR, en prônant l’union autour d’un chef à la recherche du
consensus avec les notables, par la technique de la palabre sous l’arbre », avait ainsi créé « la démocratie de
juxtaposition, à l’opposé de la démocratie conflictuelle [occidentale] ». Voy. REMILLEUX, J.-L., MOBUTU,
Dignité pour l’Afrique, Paris, Albin Michel, 1989, pp. 86-87.
550
Le président du MPR affirme pour clore : « Le fait est là, nos ancêtres ne nous ont pas légué votre philosophie
de l’opposition, ce dont on a pu prendre conscience lors de notre malheureuse expérience du multipartisme ».
Voy. REMILLEUX, J.-L., MOBUTU, Dignité pour l’Afrique…, op. cit., p. 87.
551
Dans son discours programme du 12 décembre 1965, le président Joseph Désiré MOBUTU annonce
l’interdiction des activités des partis politiques accusés de se livrer à « la stupide lutte d’influence ». Sur cette
interdiction, voy. DJELO EMPENGE OSAKO, Contribution à l’étude…, op. cit., p..309. Mais également
VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., pp. 139-140.
552
Le président de la République lui-même en devint officiellement membre le 5 février 1966 pendant que le
mouvement ne fait aucun mystère de son allégeance au nouveau chef de l’Etat, proclamé second héros national.
162
unique553. C’est quelques mois plus tard que, à la suite du CVR comme mouvement
d’avant-garde et de masse, le MPR est créé. Il demeurera parti unique malgré les
déclarations rassurantes de la coexistence annoncée de deux formations politiques554.
Ce monopole imposé par les dirigeants du MPR et subi par la force par
tous les autres citoyens congolais est l’une de violations les plus importantes des
droits de l’homme. Il est demeuré une inconstitutionnalité vis-à-vis de la
Constitution de Luluabourg, sous l’empire duquel le MPR était créé, qui prônait le
pluralisme politique, autant qu’à l’égard de la Constitution du 24 juin 1967 qui, tout
de même, ouvrait le jeu politique à plus d’une formation politique557. Le concours
des partis politiques à l’expression du suffrage consacré par l’article 4 de la
Constitution du 24 juin 1967 n’aura apparemment servi qu’à distraire l’opinion et à
gagner le temps. L’on aura ainsi glissé insensiblement vers l’unipartisme de fait
d’abord, de droit ensuite.
553
Le CVR se considère déjà comme le futur parti unique d’avant-garde ou de masse. Cela préfigure ce que sera
le MPR par la suite. Sur cette préfiguration, voy. VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-
1980…, op. cit., pp. 140 et 152.
554
Malgré la prétention déjà visible dans ses statuts du MPR de devenir l’unique force politique et sociale du
pays (art. 1 et 4 des statuts du MPR), l’art. 4 de la Constitution du 24 juin 1967 prévoyait l’existence de deux
partis politiques.
555
L’art. 30 de la Constitution du 1er août 1964, MC, op. cit., pp. 8-9, dispose : « Tout congolais a le droit de
créer un parti politique ou s’y affilier. Nul ne peut imposer de parti unique sur tout ou partie du territoire de la
République. Les partis ou regroupements politiques concourent à l’expression du suffrage. Ils se forment et
exercent leur activité librement. Ils doivent respecter le principe de la souveraineté nationale, de la démocratie
et les lois de République ».
556
Ce fut la substance du discours prononcé par Albert KIWEWA en janvier 1966 en commémoration de la mort
de Patrice Emery LUMUMBA.
557
L’art. 4 de la Constitution du 24 juin 1967, MC, op. cit., p. 549, limite certes l’existence des partis politiques
à un bipartisme figé, mais il ouvre le jeu politique à plusieurs acteurs.
163
558
Si la présence au premier gouvernement des associés au général Mobutu dans le groupe de Binza, comme
Justin Marie Bomboko, Victor Nendaka et Etienne Tshisekedi allait de soi, celle de Cléophas Kamitatu avait
suscité des réserves de certains Etats étrangers. Sur le déploiement et la disparition de la scène politique des
leaders congolais de la première République, voy. VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-
1980…, op. cit., p. 153-155.
164
tard, l’un et l’autre étant arrêtés559, il s’agit d’un véritable virage à cent quatre-vingt
degrés amorcé par le pouvoir militaire.
Avec eux disparaît également Etienne Tshisekedi qui formait, avec le
général Mobutu, Justin Bomboko et Victor Nendaka, le noyau de Binza560. Evariste
Kimba avait, quant à lui, été éliminé physiquement le 1er juin 1966 à la suite du
procès des conjurés de la Pentecôte561, en même temps que trois autres anciens
ministres Jérôme Anany, Emmanuel Bamba et Alexandre Mahamba. Avec l’abandon,
en décembre 1970, pour cause de maladie, de Cyrille Adoula de ses fonctions
officielles d’ambassadeur respectivement à Bruxelles et à Washington, il ne reste plus
à ce moment autour du chef de l’Etat aucun des « grands hommes »562 de l’ancien
régime.
559
Accusés de complot contre la sûreté de l’Etat avec des « réseaux subversifs » rattachés à des pays étrangers,
en même temps que le général Bangala, Bomboko et Nendaka sont arrêtés.
560
Il s’agit de l’un des groupements les plus importants de la vie politique de la première République.
561
Accusés d’avoir voulu renverser le régime au profit d’un retour au gouvernement civil, les quatre anciens
ministres de la première République sont surpris dans la nuit du 29 au 30 mai, jugés en public par un tribunal
militaire d’exception au cours d’un procès qui dura une heure et demie et aboutit à leur condamnation à mort.
Les condamnés sont pendus le 1er juin 1966 devant une foule estimée à des centaines des milliers de personnes.
562
C’est ainsi que les appellent VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 154.
563
C’est le cas des leaders comme Etienne Tshisekedi, Ngalula Pandanjila et autres qui seraient à la base de
premiers ennuis sérieux du régime avec la fameuse lettre des 13 parlementaires.
564
Sur le peu d’importance de la rébellion pour le régime à cette époque, voy. VANDERLINDEN, J. et alii, Du
Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., pp. 160-161.
565
A part les survivants des « gendarmes katangais » de l’aventure tshombiste qui attaqueront à deux reprises,
dont l’une aboutira à la prise de la ville de Kolwezi, les frontières du Katanga depuis l’Angola et qui seront
maîtrisés grâce à l’intervention marocaine et franco-zaïroise, les rebelles isolés n’ont réellement pas eu à secouer
le régime du président Mobutu.
165
i. L’Eglise
Contrarié par cette résistance qui remet en cause le principe selon lequel
personne au Zaïre ne doit échapper à la mobilisation du MPR, le Bureau politique
expulse plusieurs religieux étrangers, procède à l’arrestation du président de la
Conférence épiscopale, interdit les prières au bénéfice de Mgr Malula et déclenche
une vigoureuse campagne dans la presse contre l’Eglise.
De ce conflit, c’est l’Eglise qui sort perdante : elle accepte sans autre
condition que soit respectée « la spécificité de l’enseignement religieux »
566
Les autres grandes églises (protestante et kimbanguiste) n’ayant posé aucun problème ni au début, ni par la
suite, nous avons préféré ne faire mention que des relations qui se sont avérées tumultueuses avec le temps.
567
Au cours d’un Te Deum célébré le 20 décembre 1965 en présence du général Mobutu, le primat du Zaïre, Mgr
Albert Malula ne déclarai-t-il pas : « Monsieur le président, l’Eglise reconnaît votre autorité, car l’autorité vient
de Dieu. Nous appliquerons fidèlement les lois que vous voudrez bien établir ».
568
L’incident est rapporté par VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 155.
569
VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 155.
570
Le prélat est obligé de se réfugier au Vatican, loin de ses ouailles pour la défense des intérêts lesquels il allait
payer un exil forcé de plusieurs années.
571
Sur ce conflit, voy. BUTSUGUTSALA GANDAYI GABUDISA, Politiques éducatives au Congo-Zaïre. De
Léopold II à MOBUTU, Paris, Etudes africaines, 1997.
166
l’introduction des fameuses cellules contestées dans les séminaires. Ceux-ci sont
rouverts et le cardinal Malula peut rentrer au bercail, ayant donné au président « la
preuve de son repentir »572.
572
C’est VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 156, qui vient paraphraser la
propagande de la « révolution » dans la presse pour célébrer sa victoire sur l’Eglise.
573
Qu’il soit possible à la propagande officielle de comparer le « sauveur » qu’est le président MOBUTU à « un
certain enfant juif » sans entraîner de protestation publique du clergé est éclairant à cet égard et n’empêche
d’ailleurs pas que Kinshasa soit la première escale de la première visite du pape Jean Paul II en Afrique en mai
1980.
574
C’est au cours de ce discours que le nouveau chef de l’Etat annonce l’interdiction de la politique des partis
politiques pendant cinq ans. Voy. VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., pp.
139-140 et 156. Mais également, DJELO EMPENGE OSAKO, Contribution à l’étude…, op. cit., p. 309.
575
Pour comprendre l’évolution de ces nouveaux rapports, voy. DJELO EMPENGE OSAKO, Contribution à
l’étude…, op. cit., pp. 317-318. On lira également avec intérêt DEMUNTER, P., « Les relations entre le
mouvement étudiant et le régime politique congolais. Le colloque de Goma », Courrier Africain du CRISP, TA
126 du 30 avril 1971, 23 p.
576
Sur les manifestations estudiantines pendant la période de 1965 à 1980, voy. VANDERLINDEN, J. et alii, Du
Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., pp. 156-158. Voy. également DEMUNTER, P., « Analyse de la
contestation estudiantine au Congo-Kinshasa (juin 1969) et de ses séquelles », Courrier Africain du CRISP, T.A.
132 du 30 décembre 1971, 35 p.
577
Elle est d’ailleurs demeurée la plus grande, si pas l’unique force de contestation au pouvoir établi.
167
578
C’est ainsi que le Secrétaire général de la JMPR est en même temps ministre de la jeunesse et des sports et
membre du Bureau politique.
579
Sur le mouvement syndical congolais et l’unification des centrales, voy. VANDERLINDEN, J. et alii, Du
Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 158-160.
580
C’est le syndicat d’inspiration sociale dirigée par André Bo-Boliko, Union des travailleurs congolais.
581
La Confédération des syndicats chrétiens du Congo est une centrale syndicale d’inspiration chrétienne.
582
La Fédération générale des travailleurs du Kongo est un syndicat d’inspiration libérale.
583
Manifeste de la N’sele, MPR, Kinshasa, sd, p.19.
168
584
Le malheureux constat sur la fin du syndicalisme zaïrois est de VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au
Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 160.
585
La primauté du président n’est plus à démontrer. Si le MPR, institution suprême de 1970 est entrain de définir
les objectifs fondamentaux, son bureau politique sait que la source du pouvoir est le chef de l’Etat. Cette
constatation devient plus claire lorsque le constituant de 1974 arrive à élever le chef du parti, de droit chef de
l’Etat, au titre d’incarnation du MPR et adjuge la plénitude du pouvoir.
586
VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 141.
587
Idem. Ce sont ainsi le gouverneur de province, le commissaire de district et l’administrateur de territoire qui
président les comités exécutifs du MPR dans leurs circonscriptions.
169
588
Le fait et le commentaire sont rapportés par VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…,
op. cit., p. 141.
589
DJELO EMPENGE OSAKO, L’Impact de la coutume…, op. cit., p. 68.
590
Histoire du Mouvement populaire de la révolution, Kinshasa, Institut MAKANDA KABOBI, 1975, p. 65.
591
DJELO EMPENGE OSAKO, L’Impact de la coutume…, op. cit., p. 68.
592
Histoire du Mouvement populaire de la révolution, op. cit., p. 67. Voy. également DJELO EMPENGE
OSAKO, L’Impact de la coutume…, op. cit., p. 69.
593
Exposé des motifs, Titre III, al. 1 et articles 28 et 30 de la loi n° 74-020 du 15 août 1974 portant révision de la
Constitution du 24 juin 1967, J.O. de la R.Z., op. cit., pp. 1, et 5.
594
Exposé des motifs, Titre III, al. 2 et art. 43 et 30 de la loi n° 74-020 du 15 août 1974 portant révision de la
Constitution du 24 juin 1967, pp. 1, 5 et 6.
595
En ce sens également, VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., p. 148.
170
Le contraire aurait étonné, car tous les pouvoirs au sein du parti ont
toujours été détenus et exercés par le président fondateur, qui a même donné son
nom à la doctrine de son mouvement : le mobutisme n’est-il pas « la pensée, les
enseignements et l’action du président fondateur du MPR »596? Le président
MOBUTU n’a-t-il pas lui-même soutenu que son nom donné à la doctrine du parti
permettait de traduire dans le vocabulaire le rôle essentiel d’impulsion qui lui était
dévolu dans le cadre des institutions ?
596
Exposé des motifs, al. 3, de la loi n° 74-020 du 15 août 1974 portant révision de la Constitution du 24 juin
1967, JO, op. cit., p. 1.
597
Décision d’Etat n° 32/CC/83 du 1er avril 1986 du Comité central du MPR relatif au rôle dirigeant du parti,
Décisions d’Etat, directives et déclarations du Comité central, 1980-1988, Kinshasa, Comité central, 1988, p.
150.
598
Cette conviction démontrée par ailleurs par la suite des événements est émise par DJELO EMPENGE
OSAKO, L’Impact de la coutume…, op. cit., p. 85.
171
Cette primauté de l’Etat sur le parti tire également son origine de la volonté du
constituant. En effet, malgré que l’économie générale du texte constitutionnel
aménage les structures du MPR de manière à dégager la prééminence de ses
organes classiques sur ceux de l’Etat, certaines dispositions spécifiques placent
néanmoins le conseil exécutif et le conseil judiciaire à l’abri de l’action des organes
classiques du parti. De l’analyse des dispositions constitutionnelles susvantées, il
ressort que le conseil exécutif, organe d’exécution du MPR600, certes, mais
gouvernement de l’Etat, est l’organe moteur par lequel le parti tente de
matérialiser ses objectifs. Il est l’instrument mis à la disposition exclusive du
président du MPR, président de la République, qui n’est pas qu’un organe
classique du parti.
Il est utile de rappeler ici que ce conseil exécutif n’applique que le programme et
les directives du chef de l’Etat et que dans l’exercice de cette mission, ses membres
ne répondent de leurs actes que devant lui601 . Ils ne peuvent d’ailleurs faire
l’objet des poursuites judiciaires que sur sa seule autorisation et leur mise en
accusation ne peut l’être que par lui602.
Toutes les tentatives de demander les comptes à ses membres tant par
le comité central et le bureau politique que par le conseil législatif en vertu des
pouvoirs pourtant à eux dévolus par la Constitution n’ont-elles pas été vouées à
l’échec603 ?
599
Le parti unique a beau se targuer de sa supériorité, il demeurait incapable de faire exécuter ses décisions par
contrainte s’il ne recourait pas à la force publique, dont seul l’Etat détient la plénitude.
600
Art. 87 de la Constitution telle révisée par la Loi n° 78-010 du 15 février 1978 portant révision de la
Constitution, JO, 19ème année, n° 5 du 1er mars 1978.
601
Art. 91, alinéa 2 et 92, alinéa 2 de la constitution telle que révisée par la loi n°78–010 du 15 février 1978.
602
Art. 93 de la Constitution telle que révisée par la loi n°78–010 du 15 février 1978.
603
L’art. 84 de la Constitution telle que révisée par la loi n°78–010 du 15 février 1978 donne certes pouvoir de
contrôle du conseil législatif sur le conseil exécutif, mais ne réserve aucune sanction attachée à ce contrôle, qui
dépend en définitive, du pouvoir discrétionnaire du chef de l’Etat, chef de l’exécutif.
172
Les hauts cadres du parti, absorbés par les tâches répétitives de gestion
604
L’art. 67 de la loi n° 74-020 du 15 août 1974 portant révision de la Constitution du 24 juin 1967, JO, op. cit.,
dispose : « La mission de dire le droit est dévolue au Conseil judicaire. La magistrat, dans l’exercice de cette
mission, est indépendant. Il ne peut être créé de commission ni de tribunaux extraordinaires sous quelque
dénomination que ce soit… ».
605
Dans ce sens, DJELO EMPENGE OSAKO, L’Impact de la coutume…, op. cit., p. 92.
606
D’après la réalité courante confirmée par DJELO EMPENGE OSAKO, L’Impact de la coutume…, op. cit., p.
93, « bien que le comité central soit hiérarchiquement placé au-dessus du conseil exécutif, les membres du
comité central s’estiment plus heureux et fêtent avec faste lorsqu’ils sont « promus » au conseil exécutif que les
commissaires d’Etat « remaniés », qui, n’ayant pas démérité, sont nommés membres du comité central ».
607
Dans son discours prononcé à l’occasion du 20ème anniversaire du parti, le président fondateur du MPR s’en
était ému, concluant qu’il apparaissait, en conséquence, que c’est l’Etat qui avait « mangé » le parti. La pensée
du président fondateur du MPR contenue dans ce discours est résumée par DJELO EMPENGE OSAKO,
L’Impact de la coutume sur l’exercice du pouvoir en Afrique noire, op. cit., p. 93.
173
ont ainsi discrédité le parti par leur manque d’expertise et ont entraîné au sein de la
population un tel dépit que l’unique solution a consisté pour le peuple à réclamer et
à obtenir le retour du parti politique dans le même maquis que les groupes de
pression pour mieux influer sur l’exercice du pouvoir politique608, mettant ainsi fin à
un régime « de constitutionnalisation permanente des inconstitutionnalités ».
1. Le règne de l’AFDL
608
Les partis politiques et les groupes de pression sont, en effet, des pouvoirs de fait qui influent sur le pouvoir
politique.
609
Il s’agit du discours-message à la nation fait par le chef de l’Etat à l’issue de la consultation populaire sur le
fonctionnement des institutions politiques organisée de janvier à avril 1990 à travers tout le territoire national.
Pour une analyse plus fouillée de la substance du discours du 24 avril 1990, voy. BOSHAB, E., « L’idée de
démocratie dans la pensée du maréchal Mobutu à la lumière du discours du 24 avril 1990 dit de l’avènement de
la troisième République », Rev. de Dr. Afric., n° 4, Bruxelles, octobre, 1997, pp. 36-43.
610
Cette abolition avait comme conséquences la suppression du rôle dirigeant du parti, la séparation nette entre
l’Etat et le parti, qui redevient un fait privé, la réhabilitation de trois pouvoirs traditionnels à travers les quatre
institutions de l’Etat : le chef de l’Etat, le gouvernement, le parlement et les cours et tribunaux.
174
611
La tendance à la démocratisation se développe sous l’influence à la fois des facteurs internes et des facteurs
externes. Pour plus de détails, GONIDEC, P.F., Les systèmes politiques africains. Les nouvelles démocraties,
3ème éd., Paris, LGDJ, 1997, pp. 27-37. Voy. également N’GANDA NZAMBA-KO-ATUMBA, H., Afrique :
démocratie piégée, Paris, Equilibres Aujourd’hui, 1994, pp.81-89 et BOSHAB, E., « République Démocratique
du Congo : Etat unitaire à régionalisation constitutionnelle ou fédéralisme assourdi ?", Rev. de Dr. Afric., n° 7,
Bruxelles, juillet 1998, pp. 292-296.
612
La politique de la perestroïka et de la glasnost peut être définie comme une philosophie de gestion dans la
transparence et de libéralisme démocratique des institutions politiques. Elle fut initiée par l’ancien président
soviétique, Michael Gorbatchev dans l’espoir de rationaliser en vue de rentabiliser le système socialiste en
faveur d’une performance plus assurée. Cette philosophie fut probablement pensée en vue de faire face à la
puissance adverse les USA dans la guerre froide dans laquelle l’Union Soviétique semblait battre de l’aile. Le
résultat semble avoir produit le contraire, emporté l’initiateur et disloqué l’ensemble de l’empire. Voy.
N’GANDA NZAMBA-KO-ATUMBA, H., Afrique : démocratie piégée…, op. cit., p. 86.
613
Restructuration.
614
Transparence.
615
Il suffit de se rappeler le célèbre discours de la Baule au 16 ème sommet franco-africain de la Baule (20-21 juin
1990) dans lequel le français, François Mitterand n’hésite plus à exiger de ses homologues africains de
démocratiser leurs régimes afin de mériter l’aide au développement de son pays.
616
L’Acte constitutionnel de la transition du 9 avril 1994, JO, 35ème année, Kinshasa, numéro spécial, avril 1994,
était précédé par l’Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de transition du 4 août 1992,
Kinshasa, CNS, août 1992 et par la Loi n° 93/001 du 2 avril 1993 portant Acte harmonisé relatif à la période de
transition, JO, 34ème année, numéro spécial, avril 1993.
617
La Loi n° 90-002 du 5 juillet 1990 portant révision de certaines dispositions de la
Constitution, JO, 31ème année, numéro spécial, juillet 1990 est aussitôt révisée et remplacée
175
Deux événements majeurs semblent être à la base de la guerre qui allait emporter le
régime politique zaïrois du maréchal Mobutu Sese Seko.
par Loi n° 90-008 du 25 novembre 1990 portant révision d’une disposition, JO, 31ème année,
numéro spécial, novembre 1990.
618
Pour ZACHARIE, A. et JANNE D’OTHEE, F., L’Afrique centrale dix ans après le génocide, Bruxelles, éd.
Labor, 2004, p. 18, « l’attentat a certes donné le coup d’envoi, mais la solution finale était déjà dans les esprits et
les balles dans le barillet ». Le rapport de la Commission des droits de l’homme de l’ONU publié le 30 juin 1994
parle même d’un « génocide programmé et systématique ».
619
Littéralement « ceux qui se battent ensemble ».
620
Créée le 22 juin 1994 par la Résolution 929 du Conseil de sécurité des Nations Unies, l’opération
humanitaire multinationale d’assistance aux civils a été conçue pour s’étaler sur deux mois, le temps pour l’ONU
de déployer les hommes de la MINUAR II, dont l’envoi avait été décidé le 17 mai (Résolution 916) en prévision
de l’exécution des Accords d’Arusha. Placée sous commandement français, l’opération « Turquoise » est
principalement accusée d’avoir facilité, sous le couvert des populations civiles, la retraite des FAR défaites. Voy.
MUKENDI, G. et KASONGA, B., Kabila. Le retour du Congo, Quorum, 1998, pp. 252-254.
621
Le gouvernement intérimaire rwandais, dirigé par Jean Kambanda, prend aussi le chemin de l’exil emportant
au Zaïre aussi bien l’encaisse de la banque centrale du Rwanda que sa propre administration. Sur les sources et
les conséquences du génocide, voy. ZACHARIE, A. et JANNE D’OTHEE, F., L’Afrique centrale dix ans
après…, op. cit., pp. 15-36. Voy. également WILLAME, J.-C., L’Odyssée. Trajectoire pour un nouveau Congo?
Kabila, Paris, Karthala, 1998, p. 33-35.
622
Dans ce sens, MBUYI BELHAR, « De Lemera à Kinshasa, la victoire du rebelle qu’on n’attendait plus », Le
Potentiel, Spécial 16 janvier, Supplément au n° 3023, 15 janvier 2004, p. 9.
176
représente pour le FPR désormais au pouvoir à Kigali, une réelle menace 623. Toutes
les revendications tendant à voir les réfugiés civils séparés des militaires armés et
ceux-ci éloignés d’au moins 150 kilomètres des frontières de leur pays conformément
aux dispositions y relatives de la Convention de Genève se butent à la léthargie de la
communauté internationale et à l’entêtement du président Mobutu624.
623
Voy. ZACHARIE, A. et JANNE D’OTHEE, F., L’Afrique centrale dix ans après…, op. cit., p. 35.
624
Toutes les tentatives du gouvernement KENGO de les renvoyer de force dans leur pays rencontrent la
désapprobation du président MOBUTU qui souhaite leur retour dans la paix et dans la dignité. Voy. Interview de
l’ancien premier ministre KENGO wa DONDO au journal Le Potentiel, n° 2433 du 31 janvier 2002, p. 3.
625
ZACHARIE, A. et JANNE D’OTHEE, F., L’Afrique centrale dix ans après…, op. cit., p. 35. Sur les prétextes
de la guerre de l’Est, voy. également KABUYA LUMUNA, C., Histoire du Congo. Les quatre premiers
présidents, Kinshasa, SECCO & CEDI, 2002, p. 200. Sur le rôle des Banyamulenge dans le déclenchement de la
guerre de 1996 à l’Est du Zaïre, voy. RUHIMBIKA MANASSE, Les Banyamulenge (Congo-Zaïre) entre deux
guerres, Paris, l’Harmattan, 1997, pp. 43-67 et MUTAMBO JONDWE, J., Les Banyamulenge, Kinshasa, Saint
Paul, 1997, pp. 108-119.
626
A plusieurs reprises, le Vice-président et ministre de la Défense rwandais, Paul Kagame, avait averti : soit la
communauté internationale intervient dans les camps pour séparer les ex-FAR des vrais réfugiés, soit Kigali s’en
chargera lui-même. « S’ils nous attaquent à partir de leur sanctuaire, nous aurons le droit de les poursuivre
jusqu’au-delà de nos frontières », avait-il lancé le 6 décembre 1994 à l’Université libre de Bruxelles (ULB) lors
d’un de ses premiers voyages en tant que vice-président et ministre de la Défense. Pour plus de détails, voy.
ZACHARIE, A. et JANNE D’OTHEE, F., L’Afrique centrale dix ans après…, op. cit., p. 36.
627
Le maintien de la paix et de la sécurité internationales constitue l’objectif primordial que vise l’Organisations
des Nations Unies. Le principe cardinal sur lequel repose tout l’édifice onusien est donc l’interdiction de
recourir à la menace et à l’emploi de la force. Voy. Articles 1, point 1 et 2, points 3 et 4 de la Charte des Nations
Unies, Charte des Nations Unies et Statut de la Cour internationale de justice, New York, Service de
l’information des Nations Unies, 1993.
177
628
MUTAMBO JONDWE, J., Les Banyamulenge…, op. cit., pp. 120-129, y consacre même tout un chapitre.
Au-delà des Banyamulenge, tous les « citoyens zaïrois luttent pour reconquérir leurs droits fondamentaux
arrachés par le pouvoir dictatorial de MOBUTU. Pendant plus de trente ans de dictature, au Zaïre, il s’est
constitué une société d’immoralité et d’irresponsabilité » sur laquelle qu’il fallait imposait une mutation
profonde. Voy. également BAKATUSEKA KOLAMOYO, C., L’AFDL et la libération du Congo, Lubumbashi,
éd. L’Humanité, 1997, pp. 67 et ss.
629
Créé le 3 octobre 1963 à Brazzaville par les partis nationalistes d’opposition, le CNL avait comme objectif
immédiat le renversement du gouvernement ADOULA et plus tard, la réalisation de la « décolonisation totale et
effective du Congo dominé par la coalition des puissances étrangères ». Ses dirigeants constituèrent un cartel des
partis unitaristes et « nationalistes lumumbistes (MNC-L de Gbenye, PSA de Gizenga, UDA de Lubaya, PNCP
de Lonji et CEREA de Bisukiro). En vue d’intensifier les activités contre le gouvernement de Léopoldville, il fut
décidé d’ouvrir un front à l’Est : Gaston Soumialot fut chargé du Kivu et Laurent Kabila, du Nord-Katanga. Pour
plus de détails sur l’organisation de l’opposition contre le gouvernement de Léopoldville, voy.
VANDERLINDEN, J. et alii, Du Congo au Zaïre 1960-1980…, op. cit., pp. 123-127.
630
Pour survivre, le rebelle Kabila se livrait au trafic d’or, d’ivoire et de diamant avec ses partisans.
631
Combattant de lutte de Pierre Mulele, Gaston Soumialot dirigea la rébellion des simba à l’Est.
632
ZACHARIE, A. et JANNE D’OTHEE, F., L’Afrique centrale dix ans après…, op. cit., p. 35, avertissent :
« Au mois de septembre 1996 paraissent les premiers rapports de heurts entre les groupes armés Banyamulenge
et l’armée zaïroise ». Pour MUTAMBO JONDWE, J., Les Banyamulenge…, op. cit., pp. 45-46, les groupes
armés composés des militaires banyamulenge de l’APR et ceux désertés des FAZ affrontent d’abord les
militaires zaïrois avant d’être rejoints plus tard par des infiltrations plus importantes de l’APR.
633
Selon BAKATUSEKA KOLAMOYO, C., L’AFDL et la libération…, op. cit., pp. 53-56, l’armée zaïroise
commet sa première défaite à Lemera contre les groupes armés Banyamulenge face aux militaires du SARM et
perdront ensuite la ville d’Uvira que l’intervention des troupes « d’élite » de la DSP ne saura pas récupérée.
178
quelques fils congolais ambitieux sont extirpés de leur anonymat pour signer un
pacte qui les conduira vers une nouvelle épopée634.
Aux vieux rebelles Laurent Désiré Kabila avec son Parti de la révolution
populaire (PRP)635 et André Ngandu Kisase636 avec son Conseil national de résistance
pour la démocratie (CNRD)637, les « recruteurs » vont associer trois autres hommes
inconnus jusque-là du grand public. Il s’agit d’Anselme Masasu Nindaga, un
homme de troupes de l’APR transformé en acteur politique, Deogratias Bugera
Rwamakuba et Bizima Karamuheto, deux jeunes turcs ayant des entrées dans les
sphères du pouvoir rwandais. Le premier intervenait pour un mystérieux parti, dont
l’on ne connaîtra jamais les autres membres, le Mouvement révolutionnaire pour la
libération du Zaïre (MRLZ). Les deux derniers agissaient sous le label d’un autre
mouvement aussi mystérieux, l’Alliance démocratique des peuples (ADP)638.
C’est avec ces illustres inconnus que les deux maquisards congolais
vont signer les « Accords de Lemera »639. L’Alliance des forces démocratiques pour
la libération du Congo-Zaïre, en sigle AFDL, était née. Rejointes par tous les autres
groupuscules congolais et appuyées par les armées des pays frontaliers qui avaient
intérêts à jurer la perte du régime du maréchal Mobutu (Rwanda, Ouganda, Burundi
et Angola), les forces de l’AFDL volent de victoire en victoire devant les troupes
zaïroises en débandade640.
634
Sur les circonstances de la signature des « Accords de Lemera », voy. KABUYA LUMUNA, C., Histoire du
Congo. Les quatre premiers présidents…, op. cit., pp. 200-201.
635
Parti politique fondé dans le maquis le 24 décembre 1967.
636
Mort dans des circonstances jusqu’alors non élucidées quelques mois après le début de la guerre.
637
Présenté comme la branche militaire du Mouvement national congolais / Lumumba.
638
Ce mouvement semble avoir été au départ une organisation d’autodéfense montée de toutes pièces sous la
houlette du colonel James Kabarebe et restera étroitement dépendante de l’APR. Sur la création de l’ADP, voy.
MUTAMBO JONDWE, J., Les Banyamulenge…, op. cit., p. 54.
639
Il s’agit d’un protocole d’accord appelé « Acte fondateur de l’AFDL » signé le 18 octobre 1996 dans le
bureau de James Kabarebe à Kigali, selon MUTAMBO JONDWE, J., Les Banyamulenge…, op. cit., p. 55,
mais curieusement daté de Lemera (certainement en vue de lui confirmer son appartenance congolaise), dont les
décisions se résument en cinq points bien laconiques :
1. la création d’un cadre politique de collaboration ;
2. la création d’un organe de décision dénommé Conseil d’alliance ;
3. la désignation du porte-parole du cadre en la personne de Mr Laurent KABILA ;
4. la création d’un bureau de liaison ;
5. la structure de direction était renvoyée à plus tard.
640
Sur l’avancée victorieuse des forces rebelles au pouvoir du maréchal MOBUTU, voy. KABUYA LUMUNA,
C., Histoire du Congo. Les quatre premiers présidents…, op. cit., pp. 200-205.
179
641
Déclaration de prise de pouvoir de l’AFDL, JO, op. cit., pp.5-6.
642
Proclamation du Haut Commandement de l’Armée nationale congolaise, al. 4, décision 4.
643
Déclaration de prise de pouvoir de l’AFDL, JO, 38ème année, Kinshasa, numéro spécial, mai 1997, p. 6.
644
La substance de ces objectifs provient de la compilation des articles des Statuts de l’AFDL du 6 janvier 1996
tels que modifiée le 4 janvier 1997 tels que regroupés par MUTAMBO JONDWE, J., Les Banyamulenge…, op.
cit., p. 128 à partir.
180
645
Les premiers, plus formalistes, estiment que ni la Déclaration de prise de pouvoir de l’AFDL, ni les statuts de
ce groupement politico-militaire ne pouvait servir de loi fondamentale au pays, faute d’en avoir adopté la forme.
Les révolutionnaires soutiennent que la nécessité faisant la loi, la légalité se fondait sur la force-même de ladite
déclaration qui suspendait, par ailleurs textes constitutionnels et institutions qui en découlaient. En outre,
l’AFDL étant devenue la nouvelle source de tout pouvoir, ses propres statuts s’ajoutaient à la déclaration de
prise de pouvoir pour constituer le sommet de la hiérarchie des normes juridiques.
646
Par décret-loi n° 001 du 22 mai 1997 portant nomination des ministres du premier gouvernement de la IIIème
République, le chef de l’Etat nomme ses treize premiers ministres, non publié au Journal officiel.
647
Décret n° 002 du 27 mai 1997 portant nomination de quatre commandants de brigade des Forces armées
congolaises de la IIIème République, non publié au Journal officiel.
648
Point 4, Déclaration de prise de pouvoir de l’AFDL, JO, op. cit., p. 6.
181
de deux ans649, ne fut jamais respecté. L’AFDL apparut de plus en plus comme un
parti-Etat, s’accaparant tous les rouages du pouvoir étatique.
649
Délai ajouté par le calendrier politique contenu dans le programme de démocratisation rendu public le 29 mai
1997, après la prestation de serment du nouveau chef de l’Etat.
650
Il suffit d’observer les textes qui modifient ou complètent le texte de base comme le
Décret-loi constitutionnel n° 074 du 27 mai 1998 portant révision des dispositions du chapitre
II du Décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 relatif à l’organisation et à l’exercice
du pouvoir en République Démocratique du Congo, JO, 39ème année, Kinshasa, numéro
spécial, mai 1998, 28 p. ; le Décret-loi constitutionnel n° 180 du 9 janvier 1999 modifiant et
complétant le décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 relatif à l’organisation et à
l’exercice du pouvoir en République Démocratique du Congo, JO, 40ème année, Kinshasa,
numéro spécial, février 1999, pp. 6-7 ou le Décret-loi constitutionnel n° 096/2000 du 1er
juillet 2000 modifiant et complétant le Décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997
relatif à l’organisation et à l’exercice du pouvoir en République Démocratique du Congo, JO,
42ème année, Kinshasa, numéro spécial, juillet 2000, 15 p. pour s’en convaincre.
651
C’est le cas du décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999 portant institution, organisation et fonctionnement des
Comités du pouvoir populaire en République Démocratique du Congo, JO, op. cit., pp. 5-9.
652
Le décret-loi n° 194 relatif aux partis et aux regroupements politiques levait ainsi la mesure d’interdiction des
activités des partis politiques en République Démocratique du Congo.
653
Il s’agit d’une juridiction militaire d’exception créée par le nouveau pouvoir par décret-loi.
182
654
Sur les dissensions entre le secrétaire général de l’AFDL et son adjoint, voy. KABUYA LUMUNA, C.,
Histoire du Congo. Les quatre premiers présidents…, op. cit., p. 209.
655
Discours d’ouverture du congrès des Comités du pouvoir populaire de Kinshasa prononcé en avril 1999 par le
président de la République, rapporté par Evariste BOSHAB, « L’image de la deuxième République à travers les
ouvrages publics en RDC », Rev. de Dr. Afric., n° 13, Bruxelles, janvier, 2000, p. 65.
183
656
L’exposé des motifs du Décret-loi n ° 236 du 6 juillet 1999, JO, op. cit., p. 5.
657
C’est la conclusion qui ressort du même exposé des motifs, Ibidem.
658
Art. 1, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, JO, op. cit., p. 5.
659
Art. 2, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, ibidem.
660
Art. 3, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, ibidem.
184
pouvoir, le Pouvoir populaire ainsi institué par le président Kabila crée non
seulement des Assemblées populaires et des Comités du Pouvoir populaire, sans
attributions précises, mais encore ce sont ces organes qui se chargeraient d’exercer le
pouvoir à la place de l’ensemble. Pire encore, le fonctionnement même des CPP a
démontré qu’une nouvelle classe des prédateurs aura été créée. En effet, lorsque l’on
se réfère aux multiples scandales et malversations des fonds confiés pour gestion aux
CPP et à l’usurpation des pouvoirs661 que ne leur reconnaissait aucun texte juridique
en vigueur, l’on comprend aisément que l’avènement des CPP était loin d’avoir mis
fin au calvaire du souverain primaire.
661
Sur l’usurpation des pouvoirs par les CPP, il convient de lire MATADI NENGA GAMANDA, Le droit à un
procès équitable, Kinshasa, éd. DIN., et Louvain la neuve, Bruylant-Academia s.a, 2003, p. 30 lorsqu’il
dénonce l’inconstitutionnalité des tribunaux pareils, cas des CPP, en ces termes : « Les Comités de pouvoir
populaire appelés CPP ont à leur tour cru, dans certaines circonscriptions territoriales éloignées de la capitale,
que le pouvoir populaire voulait dire plénitude de l’exercice du pouvoir et donc du pouvoir judiciaire aussi ».
662
On penserait aux entités territoriales décentralisées énumérées à l’art. 7 du décret-loi n° 81 du 2 juillet 1998
portant organisation territoriale et administrative de la République Démocratique du Congo, JO, n° 14 du 15
juillet 1998 : la Province, la Ville, le Territoire, la Commune pour la Ville de Kinshasa.
663
Art. 6, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, JO, op. cit., p. 5.
664
Art. 7, litera a, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, ibidem.
665
Art. 7, litera b, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, idem, p. 6.
666
Art. 8, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, ibidem.
667
Art. 9, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, ibidem.
668
Art. 17, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, ibidem.
185
669
Art. 27, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, idem, p. 8.
670
Art. 4, in fine, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, idem, p. 5.
671
Art. 33, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, idem, p. 8.
186
Par oubli ou encore par inutilité, le décret-loi n° 236 du 6 juillet n’a pas
trouvé nécessaire d’établir un quelconque rapport du Pouvoir populaire avec les
organisations de la société civile, parmi lesquelles plusieurs organisations de défense
de droits de l’homme coupaient le sommeil aux nombreux dirigeants du nouveau
régime. La question de savoir s’il s’agit d’un simple oubli ou d’une volonté délibérée
du législateur de passer sous silence cette question pourtant annoncée dans le titre IV
y relatif du décret-loi n’a pas de chance de trouver réponse dans l’état actuel des
choses.
672
Le Décret-loi n° 194 du 29 janvier 1999, JO, 40ème année, Kinshasa, numéro spécial, février 1999, pp. 7-
16 avait abrogé la loi n°90-007 du 18 juillet 1990 telle que modifiée et complétée par la loi n° 90-009 du 18
décembre 1990 sans régler le sort des partis créés sous celle-ci.
187
673
C’est la modification introduite à l’article 8 par le Décret-loi constitutionnel n° 074 du 27 mai 1998 portant
révision des dispositions du chapitre II du Décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 relatif à
l’organisation et à l’exercice du pouvoir en République Démocratique du Congo, JO, 39ème année, Kinshasa,
numéro spécial, mai 1998, p. 7.
674
Art. 4, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, JO, op. cit., p. 5.
188
Les appréhensions atteignent leur plus haut degré lorsque l’on jette un
coup d’œil exploratoire sur les dispositions définissant le rôle du Pouvoir
populaire675 et celles établissant le rapport entre le Pouvoir populaire et les services
publics de l’Etat676.
L’une des carences les plus remarquables et les plus lourdes des
conséquences sur la qualification contestée de Constitution du décret-loi
constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 semble avoir été le déficit des règles de
dévolution du pouvoir. Comme pour prouver la pertinence de cette argumentation,
le besoin d’utiliser ces genres de règles se fit sentir à la mort inattendue du président
Laurent Désiré Kabila en janvier 2001. Avant d’évoquer la dévolution sans aucune
675
Aux termes de l’art. 3 du Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, JO, op. cit., p. 5, « les Pouvoir populaire a pour
rôle de fixer la politique à suivre par les services publics, d’en assurer l’exécution et le cas échéant, de contrôler
ladite exécution ».
676
L’art. 33, Décret-loi n° 236 du 6 juillet 1999, JO, op. cit., p. 8 donne aux organes du Pouvoir populaire la
mission d’orienter et de contrôler les services publics de l’Etat.
677
Décret-loi n° 007/2003 du 26 mars 2003 portant dissolution des Comités du pouvoir populaire en
République Démocratique du Congo, JO, 44ème année, numéro spécial du 17 avril 2003, p.6.
678
Les forces politiques et sociales du pays rassemblées dans le cadre de la Consultation nationale tenue en avril
2000 à la cathédrale protestante du Centenaire n’hésitèrent pas à dénoncer publiquement la création des CPP par
le président KABILA et la dictature qui s’instaurait. Sur cette question, voy. KABUYA LUMUNA, C., Histoire
du Congo…., op. cit.,, pp. 214-215.
189
règle préétablie du pouvoir au propre fils du défunt chef de l’Etat, il échet d’effleurer
le mystère de l’assassinat du président Laurent Désiré Kabila.
Très vite, deux coalitions vont se former autour des belligérants : pour
contrebalancer les forces rwandaises et ougandaises engagées autour des forces
rebelles, les forces zimbabwéennes, angolaises, namibiennes et même tchadiennes
appuient les forces gouvernementales. Ces alliances tissées adroitement par le
président Laurent Désiré Kabila n’empêchent malheureusement pas la moitié du
pays de tomber sous le joug des forces rebelles et alliées680.
Aux côtés des forces du RCD qui se muèrent en plusieurs factions
tantôt antagonistes tantôt alliées comme le RCD/N et le RCD/KML, s’agglutinent
d’autres forces politico-militaires créées dans le sillage de l’antagonisme entre les
Rwandais et leurs alliés ougandais autour du partage de zones d’influence, comme le
MLC. Malgré la signature en septembre 1999 de l’accord de cessez-le-feu dit de
Lusaka soutenu par le Conseil de sécurité des Nations Unies et la communauté
internationale, la tension avait continué à persister et le pays, à demeurer divisé en
autant des fiefs qu’il y avait des forces militaires en conflit. Le volet politique prévu
par cet accord tendant à établir, grâce au dialogue inter-congolais, un nouvel ordre
politique, la réconciliation nationale et la paix avait tardé à se concrétiser.
679
Le Burundi finit par désengager ses troupes plus tard de la course à la suite des arrangements particuliers avec
les autorités congolaises. Sur ce désengagement du Burundi, voy., KABUYA LUMUNA, C., Histoire du
Congo…, op. cit., p. 216.
680
Sur dix provinces, les rebelles en avaient conquis totalement quatre (le Nord-Kivu, le Sud-Kivu, le Maniema
et la Province Orientale) et partiellement quatre autres (le Katanga, le Kasaï Occidental, le Kasaï Oriental et
l’Equateur), ne laissant au gouvernement que la Capitale et les provinces voisines de Bandundu et de Bas-
Congo.
190
681
Un récit des circonstances de l’assassinat de Laurent Désiré KABILA est dressé par KABUYA LUMUNA,
C., Histoire du Congo…, op. cit., pp. 216-224.
682
Le soir même du 16 janvier 2001, RFI annonça, citant le gouvernement belge, que le président Laurent Désiré
KABILA avait succombé à ses blessures.
683
Alors qu’il était mort sur place dans son bureau de travail au Palais de Marbre et que la dépouille du président
avait été acheminée d’abord aux cliniques Ngaliema, ensuite à Harare au Zimbabwe, le suspense aurait été
délibérément entretenu, semble-t-il, afin de prévenir toute réaction intempestive de la population et des hommes
et femmes de troupes.
684
C’est ce qui ressort de l’arrêt relatif à la prestation de serment de Monsieur Joseph KABILA, en qualité de
président de la République Démocratique du Congo, JO, n° spécial de mai 2001, pp. 5-6.
685
Ces péripéties sont reprises par KABUYA LUMUNA, C., Histoire du Congo…, op. cit., pp. 217-218.
191
que l’on ne connaîtra jamais avec précision, qui l’attendraient dans une voiture
stationnée sur la Route de Matadi.
Mais ayant repris ses esprits, Emile Mota, seul témoin oculaire du
meurtre, serait sorti en courant et en criant pour alerter les autres membres de la
garde présidentielle686. L’un des gardes aurait tiré et atteint le présumé assassin dans
les jambes avant que ne vienne l’achever le colonel Eddy Kapend, aide de camp et
chef des services rapprochés du chef de l’Etat, actuellement condamné à mort par la
COM du fait de sa participation présumée dans l’assassinat du chef de l’Etat.
686
Ce sont là les dépositions d’Emile Mota tant devant la commission d’enquêtes internationale, le Parquet près
la Cour d’ordre militaire (COM) qu’aux audiences publiques durant le long procès. Bien que ces dépositions
aient été confirmées par de nombreux témoins présents sur les lieux, elles ne nous restitueront malheureusement
ni les mobiles, encore moins les commanditaires éventuels du crime.
687
Il s’agit de la décision conjointe du 17 juillet 2001 communiquée à la CSJ par le ministre de la justice et des
affaires parlementaires.
688
Par la résolution n° 003 du 24 janvier 2001, l’Assemblée constituante et législative – parlement de transition
avait investi le général-major Joseph Kabila en qualité de président de la République.
689
Arrêt RS 002/2001 du 26 janvier 2001 relatif à la prestation de serment de Monsieur Joseph Kabila en qualité
de président de la RDC, JO, 42ème année, n° spécial de mai 2001, pp. 5-6.
690
Sur l’inconstitutionnalité de l’accession au pouvoir de Joseph Kabila, voy. également ESAMBO
KANGASHE, J.-L., La République Démocratique du Congo à l’épreuve de l’alternance au pouvoir, Mémoire
de DES, Faculté de Droit, Université de Kinshasa, décembre 2005, pp. 5, 32-33 et 47.
192
691
Arrêt du 29 mai 1997 relatif à la prestation de serment de Monsieur Laurent Désiré Kabila en qualité de
président de la RDC, JO, 38ème année, n° spécial de mai 1997, p. 13.
692
Les deux arrêts vont jusqu’à déterrer, d’entre des tonnes de poussière, l’ordonnance du 14 mai 1886
autorisant l’application des principes généraux du droit à défaut d’un texte express réglementant une matière
donnée.
693
Aucune disposition de ce décret-loi constitutionnel n’indique les règles précises de prise de pouvoir ni dans le
premier, ni dans le second cas.
694
Sous prétexte de mettre fin à l‘incurie des hommes politiques, les militaires interdisent toutes les activités
politiques, suspendant du même coup la Constitution du 1 er août 1964 à laquelle pourtant ils prétendaient se
conformer. BOSHAB, E., « L’image de la deuxième République à travers les ouvrages publics en RDC », Rev.
de Dr. Afric., n°13, janvier 2000, p. 62, soutient, avec raison, que cette période ne peut être, en droit, qualifiée
de république.
695
Malgré l’origine non divine ni héréditaire de ce pouvoir d’un genre nouveau, que OWONA, J., op. cit., p.
269, qualifie de « véritable régime de chefferie modernisée ». BOSHAB, E., « L’image de la deuxième
République… », op. cit., ibidem, considère, à juste titre, que la loi de 1974 avait instauré une monarchie
absolue.
696
Si le Dictionnaire Hachette encyclopédique illustré définit la « république » comme un « Etat gouverné par
des représentants élus pour un temps et responsables devant la nation » (p. 1615), l’on ne saura trouver une
république dans un pays où les dirigeants tirent leur pouvoir éternel d’eux-mêmes et n’ont de compte à rendre à
personne.
193
701
Nous nous souvenons encore, comme si c’était hier, de la répression sanglante de la marche organisée le 16
février 1993 par les chrétiens de Kinshasa et d’autres villes du pays pour exiger la réouverture de la CNS.
702
C’est en effet le 24 avril 1990 que le maréchal Mobutu avait pris « congé » de son parti, le MPR et avait
décidé de démocratiser son régime en supprimant le parti unique par l’admission d’un multipartisme à trois et la
réhabilitation de trois pouvoirs traditionnels.
703
Contrairement à la Conférence nationale du Congo Brazzaville qui avait réussi à imposer au président Sassou
Nguesso en pleine tenue des travaux l’Acte fondamental, la Conférence nationale souveraine, minée de
l’intérieur par la frustration de beaucoup de ses membres déçus de n’avoir pas réussi à se hisser au pouvoir,
manqua le courage politique d’imposer l’Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de
transition au président Mobutu, qui refusa même de le promulguer malgré sa conformité au compromis politique
par lui accepté.
704
Loi n° 93/001 du 2 avril 1993 portant Acte harmonisé relatif à la période de transition, JO, 34ème année,
numéro spécial, avril 1993.
705
Il y eut, en effet, deux gouvernements dirigés l’un par Etienne Tshisekedi et l’autre par Faustin Birindwa,
deux anciens correligionaires de l’UDPS, le premier avec le Haut conseil de la République et le second avec
l’Assemblée nationale, composée de membres du MPR, anciens commissaires du peuple de l’ancien Conseil
législatif, en guise de parlements.
706
L’on sait ce qui arrive lorsque l’on met le bon vin dans des vieilles huîtres. La suppression du dédoublement
conduit à un mélange indigeste de dirigeants politiques et à des compromissions de tous genres.
195
707
Le constituant assigne ainsi aux animateurs de la transition tout un programme susceptible de conduire le
pays, en posant déjà les jalons pour ce faire, vers un régime démocratique. Voy. Acte constitutionnel de la
transition du 09 avril 1994, JO, numéro spécial, avril 1994, p.9.
708
BOSHAB, E., «République Démocratique du Congo : Le spectre d’une Constitution virtuelle devant la
commission constitutionnelle »,Rev. de Dr. Afric., n° 6, Bruxelles, avril 1998, pp. 120-121.
709
VUDISA MUGUMBUSHI, J.-N., « Changement de Constitutions et déconstitutionnalisation… », op. cit., p.
44.
710
Art. 40, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, 35ème année, Kinshasa, numéro spécial,
avril 1994, pp. 25-26.
711
Art. 58, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, op. cit., p. 34.
712
Art. 93, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, p. 53. Aussi, le président de la République
n’est pénalement responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison ou
de violation intentionnelle de l’ACT.
713
Art. 44, 46, 47, 48 et 77 Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, pp. 27, 28, 29 et 45.
714
Art. 42 et 45, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, p. 27.
715
Art. 75, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, p. 44.
716
Art. 55, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, p. 33.
196
717
Art. 63, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, op. cit., p. 39.
718
C’est ce qui ressort de l’exposé des motifs et des dispositions de l’art. 75 de l’ACT, JO, op. cit., pp. 6 et 44.
719
C’est ce qui ressort de la lecture combinée des art. 75 et 78 de l’ACT, JO, op. cit., pp. 75 et 78.
720
L’un des moments importants de l’histoire du déroulement controversé des travaux de la CNS demeure sans
conteste l’élection du premier Ministre qui mit aux prises le candidat de l’USOR et Alliés, Etienne Tshisekedi à
celui de la Mouvance présidentielle, devenue les FPC, Thomas Kanza.
197
Pendant la période qui suit cette élection, les forces du statu quo
augmentent des astuces destinées à empêcher le gouvernement mis en place par la
CNS de fonctionner. Comme d’habitude, foulant aux pieds la Constitution du pays,
le maréchal Mobutu va se placer en dehors du droit. Refusant de se soumettre au
cadre constitutionnel tracé par la CNS, il va d’abord, sous le fallacieux prétexte que
sa tête ne lui plaisait pas, révoquer le premier ministre issu du forum national,
Monsieur Etienne Tshisekedi. Ensuite, imitant son coup d’Etat du 14 septembre
1960721, le président Mobutu va, en violation flagrante des textes en vigueur, confier
les responsabilités gouvernementales aux Secrétaires généraux de l’Administration.
721
Le collège des commissaires généraux.
722
Loi n° 93/001 du 2 avril 1993 portant Acte harmonisé relatif à la période de transition, JO, op. cit.
723
Aux termes de l’article 78, alinéa 1, de l’ACT, « Le premier ministre est le chef du gouvernement. Il est
présenté, après concertation avec la classe politique, par la famille politique à laquelle n’appartient pas le chef
de l’Etat, dans les dix jours à compter de la promulgation du présent Acte. Passé ce délai, le Haut conseil de la
République/Parlement de transition se saisit du dossier ».
198
dès le départ par le futur candidat premier ministre et ses adeptes de l’UDI724. La
tricherie orchestrée par ces « taupes » de la mouvance présidentielle dans
l’opposition sera démontrée par le torpillage des procès-verbaux de désignation de
Monsieur Tshisekedi comme candidat premier ministre « présenté, après
concertation avec la classe politique, par la famille politique à laquelle n’appartient
pas le chef de l’Etat ».
Non seulement, un sous-groupe dirigé par Léon Kengo et Gérard
Kamanda, celui-là même qui représentait l’USOR et Alliés dans les diverses
concertations, va voir le jour et contester lesdits procès verbaux, mais aussi, Mgr
Monsengwo, qui rejetait d’un revers de la main le piège de l’incise dénoncé en son
temps, avait choisi de se laver les mains725. De là à conclure que l’incise tant contestée
était l’appât par lequel devait se concrétiser la venue aux affaires du gouvernement
Kengo en remplacement de celui de Tshisekedi il n’y a qu’un pas que beaucoup
d’analystes politiques n’hésitèrent point à franchir.
Léon Kengo wa Dongo et ses ministres sont aux affaires depuis plus de
deux ans quand la guerre de l’AFDL éclate à l’Est du Congo727. En face des
agresseurs difficilement identifiables, la déroute des troupes des FAZ - qui,
paradoxalement, sont en liesse - facilite la progression des troupes rebelles qui
occupent tout l’Est du Zaïre à moins de quelques mois. Le gouvernement qui n’a pas
pris à temps des mesures pour contrer cette avancée qui menace dangereusement le
pouvoir établi à Kinshasa est devenu tellement impopulaire qu’il en perd même le
soutien de ses plus fidèles alliés. Les mobutistes, qui avaient boutiqué l’avènement
de Kengo au pouvoir et se servaient de lui comme otage pour protéger leurs intérêts,
l’abandonnent et décident de le couler. Des dissensions au sommet de l’armée entre
724
L’Union des Démocrates Indépendants est le parti politique de Monsieur KENGO dont les membres, avec
beaucoup d’autres mobutistes des partis alimentaires, étaient parvenus à réintégrer l’opposition en vue de réussir
à renverser la dynamique de la CNS. Ils furent les vrais artisans de la troisième voie.
725
Dans un point de presse tenue en Europe où il s’était retiré peu avant la consommation du coup monté, Mgr
Monsengwo dénonçait par contre la conflictualité du premier ministre issu de la CNS et soutenait ses
« convergences parallèles ».
726
Les pouvoirs qui découlent de l’état d’urgence.
727
Elu premier ministre le 14 juin 1994 par le HCR/PT, Léon Kengo wa Dongo a vu son gouvernement
effectivement investi le 11 juillet 1994. La guerre de l’AFDL a, quant à elle, éclaté en octobre 1996.
199
les divers commandants, qui se disputent le leadership, ne permettent pas une action
concertée qui aurait permis une stratégie commune en vue au mieux de mener une
éventuelle contre-offensive sérieuse, ou du moins d’envisager une négociation pour
une capitulation dans des conditions acceptables de dignité.
728
Avec le recul de temps, il est aujourd’hui avéré que Bongombe Bohulu n’a été qu’un instrument au service
d’une stratégie savamment montée par les mobutistes pour sacrifier leur poule aux œufs d’or.
729
Dans le même sens, BOSHAB, E., « L’état d’urgence…. », op. cit., p. 16.
730
En réaction à la décision du parlement, dont pourtant il tenait le pouvoir, de démettre son gouvernement, le
premier ministre KENGO avait écrit une lettre de démission par laquelle il invitait le chef de l’Etat à faire
respecter la légalité [laquelle ?] afin de ne pas s’embarquer sur « le bateau de l’illégalité » affrété par le
parlement, ouvrant ainsi une brèche dangereuse vers l’arbitraire consacré par des années fortes du mobutisme.
200
731
Le « plan TSHISEKEDI pour la paix », adressé notamment à l’OUA, à l’UE et à l’ONU…, fut notamment
très discuté au parlement européen à Strasbourg en France, qui invita l’initiateur pour plus amples commentaires.
732
O n° 97-056 du 2 avril 1997 portant nomination d’un premier ministre, chef du gouvernement, JO, n°8 du 15
avril 1997.
733
La position du nouveau premier ministre est reprise par BOSHAB MABUDJ, E., « L’état d’urgence… », op.
cit., p. 17.
734
Le nouveau premier ministre renvoie ainsi à leurs études les partisans de la mouvance présidentielle espérant
faire partie de son gouvernement autant que ceux embusqués dans le HCR/PT, nouvelle formule à la faveur de
concertations de 1994.
735
O n° 97-060 du 9 avril 1997 portant nomination d’un premier Ministre, chef du Gouvernement, JO, 38ème
année, n° 8 du 15 avril 1997, p. 12.
201
736
O n° 97-058 du 8 avril 1997 généralisant l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire national, JO, n° 8, 15
avril 1997, pp. 10-11.
737
Du temps où le président fondateur du MPR parti-Etat, passait pour un véritable dieu, ce fut l’hymne dédié
au maréchal président.
738
Ce sont les exigences conformes à l’article 78 de l’ACT, JO, op. cit., p. 46.
739
Il s’agit de l’O n° 97-058 du 8 avril 1997 généralisant l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire de la
République, JO, op. cit., pp. 10-11.
740
Voy. Les art. 51 et 52 de la Constitution de la République du Zaïre telle que modifiée par la loi n° 90-002 du
5 juillet 1990, JO, op. cit.
741
Art. 48, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, op. cit., pp. 29-30.
742
Art. 49 et 50, Acte constitutionnel de la transition du 09 avril 1994, JO, op. cit., pp. 30-31.
202
Bien que, mis en place trois ans auparavant par fraude constitutionnelle
manifeste contre laquelle ses adversaires saisirent en vain la CSJ en vue d’obtenir
l’annulation de sa nomination743, le gouvernement Kengo ne soit pas fondé à
invoquer sa propre turpitude en donnant aux autres de leçons de respect des
principes fondamentaux de droit, sa réaction à sa destitution mérite d’être examinée.
Dans sa lettre au chef de l’Etat, le premier ministre Kengo invitait carrément celui-ci à
prendre des dispositions pour s’opposer à la décision parlementaire et refuser de
prendre acte de la démission de son gouvernement.
743
L’arrêt RA 320 du 21 août 1996, en cause USOR et Alliés, Tshisekedi wa Mulumba et crts c/ le président de
la République du Zaïre, Bulletin des Arrêts de la Cour suprême de justice, Kinshasa, Ed. du Service de
Documentation et d’Etudes du Ministère de la Justice, 2003, pp. 156-163, a amené la Haute Cour à se retrancher
derrière « l’incompétence de connaître des actes de gouvernement » pour éviter de se prononcer sur
l’appréciation des ordonnances désignant Monsieur Kengo et les membres de son gouvernement, premier
ministre et ministres.
203
744
Evariste BOSHAB, « L’état d’urgence…. », op. cit., p. 16, souligne, en effet, que « cette brèche à l’arbitraire
ouverte par le gouvernement démissionnaire sera lourde de conséquence en ce que le président de la République
s’y accrochera, à sa manière, en s’arrogeant le droit d’installer, en mettant le parlement entre parenthèses, un
nouveau gouvernement ».
745
Art. 92 de l’ACT, JO, op. cit., p. 52.
746
C’est l’appellation des « députés », membres du HCR/PT.
747
En effet cette déclaration d’état d’urgence rendue public par l’ordonnance n° 96-059 du 25 octobre 1996 avait
fait l’objet des résolutions du HCR/PT du 31 octobre 1996 et de l’avis motivé de la CSJ de la même date.
748
Le principe universel de droit public est dégagé des analyses d’Evariste BOSHAB, « L’état d’urgence… »,
op. cit., p. 20.
204
que le constituant de 1994 a adopté la forme plus élaborée des dispositions relatives à
la désignation du premier ministre dans un régime qui se voulait à tendance
parlementaire. La lecture cursive de l’article 78 de l’ACT révèle que le président de la
République ne dispose d’aucune initiative en matière de nomination ni de révocation
du premier ministre.
749
L’art. 40, ACT, JO, op. cit., pp. 25-26, accorde même pouvoir au président du HCR./PT de promulguer les
lois que le chef de l’Etat n’a pas promulguées dans les quinze jours de leur transmission à son bureau.
205
753
DELPEREE, F., « Les affaires courantes en Belgique, observations sur la loi de continuité du service
public », Mélanges offerts à R-E., CHARLIER, Paris, éd. De l’université de l’enseignement moderne, 1981, p.
64.
754
SALMON, J., « A propos des affaires courantes : état de la question », JT, 1978, p. 663.
755
VAN SOLINGE, A., « De l’expédition des affaires courantes », JT, 1979, 9. 214.
207
756
Accord global et inclusif sur la transition en République Démocratique du Congo, JO, 44ème année, numéro
spécial du 5 avril 2003, pp. 49-69.
757
Point V. Des institutions de la transition, 1. Le pouvoir exécutif, C. Les vice-présidents, Accord global et
inclusif, JO, op. cit., p. 56.
758
Annexe I : Répartition des responsabilités, JO, op. cit., pp. 61-66.
759
Ce poste fut notamment revendiqué par Monsieur Etienne Tshisekedi wa Mulumba de l’UDPS et Katebe
Katoto, homme d’affaires katangais.
760
C’est uniquement à l’annexe III, JO, op. cit., p. 66, que l’Accord précise que « la commission de suivi est
présidée par le président de la République, Son Excellence le général major Joseph KABILA ».
761
Sous la coordination de l’éminent constitutionnaliste sénégalais, le Professeur El Hadj Mbodj, ce comité était
composé en outre du Professeur suisse Alain Sigg et d’un magistrat de la même nationalité, Maître Cédric Mizel
en plus de quelques experts juridiques de composantes et entités.
762
Article 65 de la Constitution de la transition du 04 avril 2003, JO, 44ème année, Kinshasa, numéro spécial, 5
avril 2003, p. 17.
208
quelconque légitimité dont il pouvait se targuer de faire rejaillir les effets sur ceux
qui tenaient le pouvoir de par ses dispositions.
Dans la recherche de voies et moyens de mettre fin à une des crises les
plus meurtrières de tous les temps764, il a été envisagé le coulage sous forme
juridique, en vue de la mise en place du nouvel ordre politique, d’un consensus
patiemment négocié en terre sud africaine par les acteurs politiques et sociaux
congolais, en remplacement d’un décret constitutionnel unilatéralement imposé par
Laurent Désiré Kabila.
763
Cela apparaît d’ailleurs clairement dans le préambule même du texte constitutionnel, qui reprend : « Nous,
Délégués des composantes et entités au Dialogue intercongolais… »
764
Selon un rapport de l’International Rescue Committee (IRC), une ONG américaine basée à New York et de
l’Institut Barnett, un centre australien de recherche médicale, rendu public le 9 décembre 2004, le conflit en
RDC est le plus meurtrier depuis la seconde guerre mondiale avec 3,8 millions de morts recensés depuis 1996.
Des calculs simples donnent environ mille victimes civiles par jour, dont la majorité ont péri de faim et de
maladie en tentant de fuir les zones de combats.
765
Il suffisait d’écouter les populations congolaises qui ne juraient plus que par la fin de la transition et
l’organisation des élections à tous les niveaux dans les délais constitutionnels pour comprendre ce qu’elle avaient
fini par penser du texte.
766
Outre les dispositions de l’art. 3 de la Constitution de la transition qui redéfinissent de leur manière la
souveraineté du peuple en lui reconnaissant le pouvoir de contrôle sur les détenteurs du pouvoir, un long titre
III étale de longues dispositions destinées à promouvoir les droits et libertés de tous.
209
stabilité du texte que les acteurs ne peuvent modifier à loisir comme au vieux beau
temps des régimes précédents.
767
La Constitution a en effet été élaborée sur la base de l’Accord global et inclusif comme l’indiquent les
dispositions de l’alinéa premier de son article 1.
768
Alinéas 2 et 3 de l’art. 1 de la Constitution de la transition.
769
La répartition des responsabilités pendant la période de transition se fait en tenant compte des composantes et
entités au Dialogue inter congolais conformément à l’Annexe I de l’Accord global et inclusif. Voy. JO, N°
spécial, 5 avril 2003, pp. 61-66.
770
Aux termes de l’art. 150 de la Constitution de la transition, la Cour suprême de justice n’est compétente que
pour connaître de la constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi et non de juger de la conformité des
dispositions constitutionnelles à l’Accord global et inclusif qui en est le géniteur.
210
3. La forme de l’Etat
771
Devant l’impossibilité prouvée des parties belligérantes de gagner la guerre, la seule possibilité de réunifier le
pays et instaurer un nouvel ordre politique était d’obtenir un consensus négocié de partage des responsabilités
pendant une période limitée nécessaire à la recherche d’une source de pouvoir démocratique, la dévolution des
mandats publics par le peuple par la voie des urnes. L’argument que nous faisons nôtre vient de M’BODJ, op.
cit, p. 2.
772
Geneviève KOUBI et Raphaël ROMI, Etat, Constitution,…,op. cit. pp. 96-100, considèrent qu’il s’agit là,
selon l’impact de nouvelles dispositions sur l’ordre institutionnel précédent, du pouvoir constituant
« révolutionnaire » ou « réformateur ».
773
Contrairement à l’exemple sud-africain dans lequel le partage des responsabilités au sein du gouvernement
était déterminé par le poids électoral des partis, la RDC a adopté la formule 1 + 4 mettant à la tête du pays les
quatre composantes jugées importantes (Gouvernement, RCD, MLC et Opposition politique) sous la surveillance
de la composante Société civile qui préside le Sénat et les cinq Institutions d’appui à la démocratie.
211
B. L’affaiblissement du parlement
774
Dans la doctrine fasciste, par exemple, le parti tend à se confondre à l’Etat : toutes les fonctions d’autorité
sont détenues par les membres du parti. Le parti est ainsi l’instrument du totalitarisme grâce auquel l’Etat
impose à tous son idéologie en réduisant à néant la sphère d’autonomie de chacun. Sur le plan constitutionnel,
diverses formules sont soumises à une évolution constante.
212
atteinte à la Constitution en la renversant. Mais il arrive aussi que pour des raisons
qui leur sont propres, les autorités établies puissent user du pouvoir constituant
originaire pour mettre en place une nouvelle Constitution en remplacement d’une
ancienne en vue de l’établissement d’un nouveau régime. Elles profitent
généralement de ce pouvoir constituant pour constitutionnaliser des actes
inconstitutionnels qu’elles avaient été amenées à prendre sous l’empire de l’ancienne
Constitution.
775
En droit administratif, il arrive qu’un acte irrégulier puisse être régularisé par l’autorité chargée justement de
le censurer. De même, le législateur peut utiliser son pouvoir suprême de confection des lois pour procéder à la
validation administrative d’un acte administratif irrégulier en prenant a posteriori une loi en vue de le légaliser.
776
Sans doute, toute révision ne corrige pas toujours le texte constitutionnel, elle peut même le rendre pire.
213
777
DEBBASCH, C. et alii, Droit constitutionnel …, op. cit., p. 106.
778
SCHOCHET, G.J., “Introduction: Constitutionalism, Liberalism …”, op. cit., p. 11.
779
OLUKOSHI, A., “State, Conflict, and Democracy in Africa: The Complex Process of Renewal” in JOSEPH,
R. (ed.) , State, Conflict, and Democracy…, op. cit., p. 456; ANDREWS, W.G. (ed.), Constitutions and
Constitutionalism…, op. cit., p. 22; ROSENFELD, M. (ed.), op. cit., p. 14.
780
NWABUEZE, B.O, Constitutionalism in the Emergent…op. cit, p. 2.
781
IHONVBERE, J.O, Towards a New Constitutionalism in Africa, London, CDD Occasional Papers Series
N°4, 2000, pp. 10, 15, 24-25, 27.
782
NWABUEZE, B.O, Constitutionalism in the Emergent…op. cit, p. 25.
783
RONSEFELD, “Modern Constitutionalism as Interplay …”, op. cit., p. 3.
214
Le fait qu’un pays comme la RDC ait cueilli une abondante moisson
constitutionnelle depuis son indépendance n’implique pas qu’à ce jour, il peut se
vanter d’avoir connu un certain développement du constitutionnalisme. Comme
seule l’existence d’un papier appelé « Constitution » ne conduit pas au
784
SHIVJI, I.G., « Contradictory Class Perspectives in the Debate on Democracy », in SHIVJI, I.G. (ed.), State
and Constitutionalism: An African Debate …, op. cit., p. 254.
785
OKOTH-OGENDO, H.W.O, « Constitutions Without Constitutionalism: Reflections on an African Political
Phenomenon”, op. cit., pp. 3-25.; “Constitutions Without Constitutionalism: Reflections on an African
Paradox”, in GREENBERG, D. & alii, Constitutionalism and Democracy: Transitions in the Contemporary
World, New York, Oxford University Press, 1993; pp. 65-82.
786
ANDREWS, W.G., Constitutions and Constitutionalism …, op. cit., p. 23.
787
Idem, p. 26.
788
MOJEKWU, C.C., « Nigerian Constitutionalism », in PENNOCK, J.R. & CHAPMAN, J.W. (eds.), op. cit.,
p. 164.
789
SHIVJI, I.G., « Contradictory… », op. cit., p. 254. Voy. Également BOSHAB, E , « Les droits fondamentaux
dans les nouvelles Constitutions africaines… », op. cit., pp. 55-57, lorsqu’il évoque la fonction de légitimation
que recherche les Constitutions africaines de la « troisième génération ».
790
Généralement, les règles constitutionnelles étant une chose, la pratique politique, une autre, l’on imagine sans
peine combien l’écart peut être considérable entre la réalité politique et la lettre constitutionnelle dans les pays
dépourvus de tradition en ce domaine comme les nôtres. Voy. CHANTEBOUT, B., Droit constitutionnel…, op.
cit., pp. 67-68 qui considère que « le rôle historique du constitutionnalisme est certes considérable, il contribue
encore à freiner le pouvoir mais il s’en faut de beaucoup qu’il constitue la limitation intangible qu’à une
certaine époque on avait cru y voir ».
215
791
Comme le soutient avec pertinence ROSENFELD, M. (ed.), Constitutionalism, Identity, Difference and
Legitimacy. Theoretical Perspectives, Durham and London, University Press, 1994, p. 3.
792
Sur les critères à remplir par la Constitution pour se conformer à l’idéal du constitutionnalisme, voy. MBATA
BETUKUMESU MANGU, A., The Road to Constitutionalism and Democracy in Post-colonial Africa : The
Case of the Democratic Republic of Congo, op. cit., pp. 168-170.
793
DEBBASCH, C. et alii, Droit constitutionnel et Institutions politiques, 4ème éd., Paris, 2001, p. 113.
794
Ibidem.
795
DEBBASCH, C. et alii, Droit constitutionnel…, op. cit., p. 115.
796
La synthèse est tirée de MBATA BETUKUMESU MANGU, A., Constitutions sans
constitutionnalisme….op. cit., p. 8.
797
IHONVBERE, J.O, Towards a New Constitutionalism…, op. cit., pp. 10, 15, 24-25, 27.
798
NWABUEZE, B.O, Constitutionalism in the Emergent States, London, C. Hurst & CO, 1973, p. 25.
216
799
En ce sens, NWABUEZE, B.O, op. cit., , pp. 25 et 27; IHONVBERE, J.O, Towards a New
Constitutionalism…, op. cit., pp. 10 et 15.
800
L’identification au texte et sa compréhension par le peuple faciliterait son application par les tenants du
pouvoir généralement prêts à en faire une interprétation abusive au profit de leurs intérêts.
801
On peut citer notamment dans cette catégorie la Loi fondamentale relative aux structures du Congo du 19 mai
1960, les importantes modifications de la Constitution du 24 juin 1960 sous la houlette du maréchal MOBUTU,
l’Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de Transition du 4 août 1992, l’Acte
constitutionnel harmonisé du 2 avril 1993, Acte constitutionnel de Transition du 9 avril 1994, le Décret-loi
constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 de Laurent Désiré KABILA et ses multiples révisions ainsi que la
Constitution de la transition du 4 avril 2003.
802
Mise à part la Loi fondamentale relative aux structures du Congo du 19 mai 1960 qui est le produit pur et
simple des autorités coloniales belges, l’Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de
Transition du 4 août 1992, l’Acte constitutionnel harmonisé du 2 avril 1993, l’Acte constitutionnel de
Transition du 9 avril 1994 et la Constitution de la transition du 4 avril 2003 ont tout de même joui d’un certain
consensus de la classe politique congolaise à l’opposé du Décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 et ses
futures modifications qui furent l’imposition d’un homme.
803
C’est le cas de la Constitution du 1er août 1964, de la Constitution du 24 juin 1967 et de la Constitution du 18
février 2006.
804
Les autres textes, en l’occurrence la Constitution du 1 er août 1964 et celle du 24 juin 1967, auront été soumis
au referendum populaire de façon inconstitutionnelle, par surprise et sans aucune discussion.
217
centrale de Montesquieu est que «tout homme ayant le pouvoir est porté à en abuser,
il va jusqu’à ce qu’il trouve des limites ». « Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir,
il faut que par la disposition des choses le pouvoir arrête le pouvoir ».
Cet aspect juridique est moins important que l’aspect politique. Sur ce
point, la séparation des pouvoirs a essentiellement pour objet d’empêcher les abus
qu’un titulaire unique ne manquerait pas de faire de ses pouvoirs et qui seraient
extrêmement dangereux pour les libertés des citoyens.
809
NWABUEZE, B.O, op. cit., p. 2.
810
La théorie classique subdivise les pouvoirs étatiques en pouvoir législatif, pouvoir exécutif et pouvoir
judiciaire.
811
NWABUEZE, B.O, Ibidem.
812
Voy. PACTET, P., Institutions politiques. Droit constitutionnel, 13ème éd., Paris, Masson, 1994, pp. 112-117;
FAVOREU, L. et alii, Droit constitutionnel…, op. cit., pp 374-405.
219
813
La plénitude des pouvoirs au profit du président de la République consacrée dans le texte par la « révision
constitutionnelle » du 15 août 1974 implique l’exercice, par procuration non du peuple mais bien du président
fondateur du MPR, du pouvoir par les autres organes étatiques jusqu’à la fin du règne du maréchal du Zaïre.
814
A travers le Décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1967, le président Laurent Désiré KABILA s’octroie
l’exercice de l’ensemble des pouvoirs étatiques.
815
Le titre consacré aux pouvoirs étatiques décrit scrupuleusement la répartition des compétences entres divers
organes de l’Etat dans la Loi fondamentale (art. 14 à 197), la Constitution du 1 er août 1964 (art. 53 à 130), la
Constitution du 24 juin 1960 avant 1974 (art. 20 à 64), de l’Acte constitutionnel de transition du 9 avril 1994
articles 37 à 102), de la Constitution de la transition du 4 avril 2003 ( art. 64 à 153) et de la Constitution du 18
février 2006 (art. 68 à 164).
816
Voy. nos abondants développements sur la prééminence du chef de l’Etat sur les autres organes étatiques.
817
L’on se rappellera des nominations discrétionnaires et de l’exercice dépendant de leurs attributions des
députés et des magistrats tant assis que debout autant sous MOBUTU SESE SEKO que sous Laurent Désiré
KABILA.
220
à la fraude des dispositions constitutionnelles tant il est vrai que leurs compétences
sont sans limites et leur tentation de concentrer tous les pouvoirs, sans obstacles.
Sans doute, l’on pourrait évoquer l’indépendance décrétée par
l’actuelle Constitution qui confie la gestion du pouvoir judiciaire au CSM818 sans
beaucoup convaincre, mais quelle garantie d’indépendance peut être accordée au
pouvoir de nomination et de révocation du magistrat confié au chef de l’Etat819 même
si l’organe de gestion du pouvoir judiciaire lui sert de béquille ? Il y a lieu de
continuer à parier dur pour que le souci d’une véritable justice indépendante ne soit
plus qu’un slogan.
La plus grave lacune apparaît lorsque l’organe chargé de contrôle de la
constitutionnalité des lois et actes ayant force des lois ne nous paraît être qu’une
institution politique dont la nomination des membres relève du président de la
République820, à raison de trois sur sa propre initiative, trois sur celle du parlement,
complètement acquis à sa seule cause, et trois autres, sur proposition du CSM, dont
on sait que les membres sont en majorité nommés par le chef de l’Etat à titre de chefs
de juridictions et offices. Et, en considérant que c’est la même juridiction qui est juge
pénal du chef de l’Etat et du premier ministre821, à condition d’avoir été mis en
accusation par le parlement822, nous ne sommes pas loin de penser que la mise en jeu
de la responsabilité de ces personnalités ne dépendrait que d’elles-mêmes.
818
Art. 152, al. 1 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 52.
819
Art. 82, al. 1 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 31.
820
Art. 158, al. 1 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 55.
821
Art. 162, al. 1 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 56.
822
Art. 166, al. 1 et 2 de la Constitution du 18 février 2006, JO, op. cit., p. 58.
823
BAKER, P.H., “Reflections on the Economic Correlates of African Democracy” , in RONEN, D. (ed.),
Democracy and Pluralism in Africa, Boulder & London, Lynne Rienner Publishers, 1986, pp. 53-60; ILUNGA
KABONGO, “Democracy in Africa: Hopes and Prospects”, in RONEN, D. (ed.), Democracy and Pluralism…,
op. cit., pp. 35-39; WISEMAN, J.A. (ed.), Democracy in Black Africa. Survival and Revival, New York, Paragon
House Publishers, 1990, p. 182; FRANKLIN, D.P. & BAUN, M.J., « Conclusions », in FRANKLIN, D.P. &
BAUN, M.J. (eds), Political Culture and Constitutionalism. A Comparative Approach, Armonk, New York,
London, M.E. Sharpe, 1994, p. 227; CLAPHAM, C. & WISEMAN, J.A., “Conclusion: assessing the prospects
for the consolidation of democracy in Africa”, in WISEMAN, J.A. (ed.), Democracy and Political…, op. cit., p.
227; BANGURA, Y., “Authoritarian Rule and Democracy in Africa: A Theoretical Discourse”, in
NYANG’ORO, J.E. (ed.), Discourses on Democracy…, op. cit., pp. 101-120; SANDBROOK, R., « Liberal
Democracy in Africa: A Socialist-Revisionist Perspective”, in NYANG’ORO, J.E. (ed.), Discourses on
Democracy…, op. cit., pp. 140-141; NZONGOLA NTALAJA, G. & LEE, M. (eds.), The State and
Democracy…, op. cit., pp. 19 et 22; BRAUTIAM, D., “The Mauritius Miracle: Democracy, Institutions, and
Economic Policy”, in Joseph, R. (ed.), State, Conflict…, op. cit., pp. 137-162; OLUKOSHI, A., “State, Conflict,
221
and Democracy in Africa: The Complex Process of Renewal” in JOSEPH, R. (ed.), State, Conflict…, op. cit. pp.
460-462.
824
Si dans la Loi fondamentale du 17 juin 1960 relatives aux libertés publiques, le colonisateur belge n’a eu
recours qu’à seize dispositions (art. 2 à 17) pour consacrer les libertés publiques. Par rapport au constituant de
1964 qui sembla davantage se préoccuper de la protection des droits fondamentaux en consacrant trente-trois
dispositions à leur promotion (art. 13 à 45), que le régime de MOBUTU SESE SEKO privilégia la tendance de
les maintenir en baisse avec quatorze dispositions dans la Constitution du 24 juin 1967 (art. 5 à 18), quinze dans
la fameuse « révision » du 15 août 1974 (art. 12 à 26), vingt dans la loi du 15 février 1978 destinée à « permettre
au peuple de s’exprimer démocratiquement » (art. 12 à 31), que même l’Acte constitutionnel de la transition du 9
avril 1994, qui avait la prétention de conduire le pays vers une « troisième République véritablement
démocratique » n’y consacre que vingt-huit dispositions (art. 9 à 36), la Constitution de la transition du 4 avril
2003 avant la Constitution du 18 février 2006 vient combler l’absence scandaleuse de la déclaration des droits
dans le Décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997.
825
C’est le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23
mars 1976, JO, 40ème année, Kinshasa, numéro spécial, avril 1999, pp. 21-35 ainsi que le Protocole facultatif s’y
rapportant, JO, 40ème année, Kinshasa, numéro spécial, avril 1999, pp. 36-38.
826
Les droits économiques, sociaux et culturels, eux, sont réglementés dans le Pacte international relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels de la même date, entré en vigueur le 3 janvier 1976, JO, 40ème année,
Kinshasa, numéro spécial, avril 1999, pp. 12-20.
827
Depuis la Loi fondamentale du 17 juin 1960 relative aux libertés publiques, MC, 1er année, Léopoldville, n°
22 du 24 juin 1960, pp. 390-394 jusqu’à la Constitution de la transition de la République Démocratique du
Congo du 04 avril 2003, JO, 44ème année, Kinshasa, numéro spécial, 5 avril 2003, pp. 7-63 en passant par la
Constitution de la République Démocratique du Congo du 1 er août 1964, MC, 5ème année, Léopoldville, numéro
spécial du 1er août 1964, pp. 6-11; la Constitution de la République Démocratique du Congo du 24 juin 1967,
MC, 8ème année, Kinshasa, n° 14 du 17 juillet 1967, pp. 565-567 et l’ Acte constitutionnel de la transition de la
République du Zaïre du 09 avril 1994, JO, 35ème année, Kinshasa, numéro spécial, avril 1994, pp. 13-23, le
constituant congolais n’a fait aucune distinction explicite parmi les droits de l’homme qu’il a pu promouvoir
jusque-là.
828
La Constitution de la RDC du 18 février 2006, JO., 47ème année, Kinshasa, numéro spécial du 18 février 2006,
pp. 13-25, par contre, distingue ces trois catégories.
222
829
Art. 11 à 33 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006, JO, op. cit., pp.13-19.
830
Art. 34-49 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006, JO, op. cit., pp. 19-23.
831
Art. 50-61 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006, JO, op. cit., pp.23-25.
832
Art.11 à 33 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006, JO, op. cit. pp. 12-18.
833
Art. 34 à 49, idem, pp. 19-23.
834
Art. 50 à 61, idem, pp. 23-25.
835
Art. 62 à 67, idem, p. 26.
836
Art. 15 à 63 de la Constitution de la transition du 04 avril 2003, JO, 44ème année, Kinshasa, numéro spécial, 5
avril 2003, pp. 7-17 et art. 11 à 67 de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février
2006, JO, op. cit., pp. 13-26.
837
Ce droit aussi clairement précisé dans le texte constitutionnel de la transition (art. 21) et dans le texte
constitutionnel définitif (art. 19, alinéa 4) contrairement aux textes précédents, qui renvoyaient les modalités de
l’exercice de ce droit à leur détermination par une loi, consacre la fin des abus de tout bord perpétré au niveau
de la police et même du Parquet où, au nom du secret de l’instruction préjuridictionnelle mal compris, les
officiers de police judiciaire, inspecteurs judiciaires et même certains officiers du Ministère public ne toléraient
pas « l’immixtion » des Conseils à l’instruction, méfiance sans doute justifiée par le souci de certains
instructeurs « d’opérer » loin des yeux indiscrets des avertis des procédures légales.
223
« également devant les services de sécurité »838, dont tout le monde connaît l’apport
négatif dans la protection des droits de l’homme839.
Parmi des droits nouveaux introduits par ces textes, on peut, à titre
exemplatif, citer le droit de refus d’exécution d’ordre manifestement illégal840, les
droits reconnus en faveur de l’enfant841, de la femme842 ainsi que des personnes du
troisième âge et celles vivant avec handicap843. L’exercice de certains droits comme
ceux reconnus en faveur des personnes gardées à vue ou des personnes détenues
devant le Parquet et ses branchements est conditionné par la connaissance par les
bénéficiaires de leurs droits aux fins de s’en prévaloir.
Malgré les efforts déployés par les organisations de défense des droits
de l’homme, la majorité de la population demeure encore analphabète et ignorante
de ses droits. Par contre, des efforts sont entrepris grâce à des pressions de la
communauté internationale pour que la femme retrouve sa place dans les institutions
nationales, provinciales et locales et participe effectivement à des activités
auxquelles, il y a belle lurette, elle n’avait même pas voix au chapitre844.
838
Art. 19, al. 5 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, JO, op. cit., p. 16.
839
Dans la pratique les « services secrets » continuent de résister à voir les avocats se mêler de leur champ
d’investigation et fouiner leur nez dans les tracasseries auxquelles ils continuent de soumettre ceux qui oseraient
se targuer d’avoir égard à la « sécurité politique » de leurs commanditaires.
840
Art. 25 de la Constitution de la transition du 04 avril 2003, JO, op. cit., p. 10 et art. 28 de la Constitution de la
République Démocratique du Congo, JO, op. cit p. 17.
841
Art. 44 et 46 de la Constitution de la transition du 04 avril 2003, JO, op. cit., pp. 14-15 et art. 41 et 42 de la
Constitution de la République Démocratique du Congo, JO, op. cit p. 21.
842
Article 51 de la Constitution de la transition du 04 avril 2003, JO, op. cit., p. 15 et art. 14 de la Constitution
de la République Démocratique du Congo, JO, op. cit., pp. 13-14.
843
Art. 49 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, JO, op. cit., p. 23.
844
En attendant de signer et de ratifier le Protocole à la Charte Africaine des droits de l’homme et des peuples,
relatif aux droits de la femme adopté le 11 juillet 2003 à la deuxième session ordinaire de la Conférence de
l’Union Africaine tenue à Maputo (Mozambique), qui prévoit la participation paritaire des femmes dans la vie de
leurs pays, notamment au processus politique et à la prise de décision, la RDC est néanmoins membre à la
Convention de la SADC sur les droits de la femme qui préconise le quota de 30% dans la participation aux
institutions. C’est ainsi que des dispositions ont été prises pour assurer la représentation significative de la
femme tout au moins dans toutes les institutions d’appui à la démocratie. Si l’on s’en tient à la Déclaration
solennelle sur l’égalité entre les hommes et les femmes en Afrique faite à la troisième session de la Conférence
de l’Union Africaine tenue à Addis-Abeba (Ethiopie) du 6 au 8 juillet 2004, dans laquelle les chefs d’Etat et de
gouvernements de l’Union s’engagent à signer et à ratifier ce Protocole « d’ici à la fin de 2004 » et d’assurer son
entrée en vigueur avant fin 2005, on serait tenté de croire à une véritable révolution imminente en faveur de la
femme africaine en général et congolaise en particulier. Dommage que la parité homme - femme consacrée par
les dispositions de l’alinéa 5 de l’article 14 de la Constitution du 18 février 2006 ne soit pas suivie d’une loi
d’application susceptible de faciliter sa mise en œuvre.
224
City avait voulu combler la carence manifeste du pouvoir judiciaire découlant de son
impuissance congénitale dans le domaine par l’institution de l’Observatoire national
des droits de l’homme845. Organisme de droit public congolais, l’ONDH était chargé
de la promotion et de la protection des droits de l’homme conformément aux
instruments juridiques nationaux et internationaux846.
Aussi, l’efficacité des garanties judiciaires peut être renforcée par les
garanties politiques, dont la plus importante est le bulletin de vote unanimement
considéré comme la meilleure police d’assurance contre l’oppression. C’est
l’expression concrète du principe de la souveraineté populaire au terme duquel le
pouvoir des gouvernants émane du consentement des gouvernés. Pour que les
gouvernements respectent les droits de l’homme, il n’est pas de meilleur moyen que
845
L’une des institutions d’appui à la démocratie prévue par la Résolution n° DIC/CHSC/08 du Dialogue
intercongolais, reprise dans l’Accord global et inclusif, Point V, voy. JO, n° spécial, 5 avril 2003, p. 54 et mise
en place par l’art. 154 de la Constitution de la transition en vue de « promouvoir et de protéger les droits de
l’homme » (art. 155, quatrième trait), l’ONDH était organisé et fonctionnait conformément à la loi n° 04/019 du
30 juillet 2004.
846
C’est la mission que lui conféraient les dispositions de l’art. 5 de la loi n° 04/019 du 30 juillet 2004.
847
Les nombreuses attributions que lui reconnaissaient les dispositions de l’article 7 de sa loi organique
l’amenaient autant à influer sur la conduite des autres institutions publiques à l’égard des droits de la personne
humaine qu’à renforcer les capacités d’intervention des organisations de défense des droits de l’homme.
848
Parmi les institutions d’appui à la démocratie instituées par le pouvoir de la transition, seules deux
échappèrent aux ciseaux du nouveau constituant ; il s’agit de la Commission Electorale Indépendante (CEI) à
travers la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) créée par l’art. 211 de la Constitution du 18
février 2006 et de la Haute Autorité des Médias (HAM) à travers le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la
Communication (CSAC) créé par l’art. 212 de la Constitution du 18 février 2006.
849
ZOLLER, E., Droit constitutionnel, 2ème éd., Paris, PUF, 1999, p. 497.
225
de faire en sorte qu’ils soient investis (et le cas échéant désinvestis) du pouvoir qu’ils
exercent par les titulaires de ces droits.
850
Ces écueils sont tantôt d’ordre législatif à cause du retard pris dans l’élaboration des lois essentielles à la
tenue des élections, tantôt d’ordre matériel ou d’ordre sécuritaire.
851
DEBBASCH, C. et alii, Droit constitutionnel…, op. cit., p. 92.
226
852
L’expression est utilisée pour la première fois par Charles EISENMANN en 1928 dans sa thèse et est adoptée
par FAVOREU, L. et alii, Droit constitutionnel, 2ème édition, Paris, Dalloz, 1999, p. 141. Le contrôle de
constitutionnalité consiste en la vérification de la conformité des lois et actes ayant force de lois à la
Constitution. Le principe de constitutionnalité, nouveau à beaucoup d’égards dans le langage juridique, a fini par
prendre, en droit constitutionnel moderne, la place jusque-là occupé par le principe de légalité, relégué au
langage de droit administratif. Sur l’évolution du premier concept par rapport au second et la nécessité pour les
constitutionnalistes d’utiliser un vocabulaire correspondant aux nouveaux concepts de droit constitutionnel
moderne, voy. FAVOREU, L., « Légalité et constitutionnalité », op. cit. ; « Le droit constitutionnel, droit de la
Constitution et constitution du droit », op. cit. ; voy. également ZOLLER, E., « L’enseignement du droit public
après la réforme universitaire de 1997 », D. Chr., 1998.
853
Le principe de la légalité consacre le fait que seule la loi peut déroger à la loi. Le contrôle de la légalité
implique la vérification de la conformité des actes administratifs aux textes de lois.
227
854
FAVOREU, L. et alii, Droit constitutionnel, op. cit., p. 146 considère qu’il en est ainsi de la conception
française.
855
C’est plutôt le cas en Allemagne et en Espagne.
856
KAMUKUNY MUKINAY, A., De l’effectivité du contrôle des actes des gouvernants en République
Démocratique du Congo, Mémoire de DES, Faculté de Droit, Université de Kinshasa, 2002-2003, p. 9.
857
Aux termes de l’art. 160, alinéa 1, de la Constitution de la République Démocratique du Congo, JO, 47ème
année, Kinshasa, numéro spécial du 18 février 2006, p. 55, « La Cour constitutionnelle est chargée du contrôle
de la constitutionnalité des lois et actes ayant force de loi ».
228
858
Les art. 226 à 229 de la Loi fondamentale relative aux structures du Congo, art. 165 à 169 de la Constitution
du 1er août 1964 et les art. 70 à 73 de la Constitution du 24 juin 1967 n’ont jamais été suivies des lois
d’application susceptibles de mettre en vigueur la volonté du constituant.
859
Un programme ambitieux des bailleurs des fonds et autres partenaires en développement est à pied d’œuvre
afin d’amener la Commission Permanente de Réforme du Droit congolais (CPRDC) à rédiger un avant-projet de
loi portant organisation et fonctionnement de chacune des nouvelles juridictions découlant de l’éclatement de la
Cour suprême de justice ; il s’agit de la Cour constitutionnelle, la Cour de cassation et le Conseil d’Etat.
860
L’OL n° 82-017 du 31 mars 1982 relative à la procédure devant la Cour suprême de justice, JO, 23ème année,
n° 7 du 1er avril 1982, p.11 a été inopérante quant à ce.
861
L’alinéa 5 de l’art. 161 de la Constitution du 18 février 2006 renvoie la détermination des modalités de ce
contrôle à une loi.
862
La législation antérieure consacre la compétence exclusive du Procureur général de la République en matière
de demande en inconstitutionnalité des lois et actes ayant force de loi.
863
C’est ce qui ressort des dispositions des alinéas 2 et 3 de l’article 162 de la Constitution du 18 février 2006.
229
Il est dès lors illogique, voire insensé que l’existence d’un papier baptisé
« Constitution » par ses promoteurs, généralement à l’insu et au détriment du
peuple, dont les dispositions sont rendues inapplicables par l’inefficacité d’un
contrôle simplement formel soit considéré comme un critère présageant
l’établissement d’un véritable constitutionnalisme dans le pays.
Parmi les droits dont doit jouir la Constitution, en tant que texte
fondamental, en vue de rendre ses dispositions effectives, deux méritent une
attention particulière : il s’agit d’abord du droit de la Constitution d’être connue de
ses destinataires, ensuite du droit de la Constitution d’être respectée.
Malgré la colonisation du pays par les flamands et wallons belges, la langue officielle
du Congo a toujours été le français. C’est d’ailleurs fièrement que les Congolais se
vantent d’habiter le plus grand pays francophone du monde après la France. Si cette
assertion demeure vraie uniquement en se contentant de compter le nombre des
habitants dont regorge le pays, cette affirmation devient difficile à soutenir lorsqu’il
est question de déterminer combien des membres de cette population maîtrisent les
subtilités de la langue française. Le degré d’analphabétisation atteint par les
Congolais et la baisse du niveau de l’enseignement, qui se donne généralement en
français, nous amène à revoir ces prétentions à la baisse.
865
BOSHAB, E., « Les droits de la Constitution en Afrique subsaharienne » …, op. cit., p. 74 voit se dessiner
trois axes lorsque l’on tente de répondre à ces questions.
231
866
Certaines ONG internationales comme IFES, EISA… ont tenté de faire traduire en langues nationales le
projet de Constitution en vue de faciliter les campagnes d’éducation civique menées en appui à la CEI.
867
Déjà, à l’indépendance, lors du transfert des fonctions politiques de l’autorité coloniale vers une élite
congolaise urbaine vivant en rupture avec la masse paysanne, la majorité de la population ignorait que son sort
était entrain d’être scellé à travers la Loi fondamentale.
868
D’ailleurs, malgré le niveau de formation des Congolais à l’époque de l’indépendance, aucun parti politique,
aucun leader présent à la Table Ronde de Bruxelles, ne trouva nécessaire d’exiger la vulgarisation de la Loi
fondamentale, par ne fût-ce que sa traduction en langues nationales. La dénonciation est tirée de BOSHAB, E.,
« Les droits fondamentaux dans les nouvelles Constitutions africaines… », op. cit., p. 53.
869
A tous les niveaux de la territoriale, les « experts » ont été dépêchés même dans les villages les plus reculés
afin que chacun sache le sens du « mariage » entre MOBUTU et son peuple.
870
Les « écoles AFDL » ont été ouvertes partout à travers la RDC pour expliquer la révolution paysanne et les
changements de mentalité que l’AFDL entendait imposer.
871
C’est la conclusion à laquelle aboutit l’analyse d’Evariste BOSHAB, « Les droits de la Constitution en
Afrique subsaharienne », …, op. cit., p. 76.
232
872
Sur cette notion, voy. notamment TROPER, M., « La théorie dans l’enseignement du droit constitutionnel »,
RDP, 1984, pp. 263-275.
873
Les libertés publiques constituent un cours à option intéressant une infime partie des étudiants.
874
Comme le soutient avec raison Evariste BOSHAB, « Les droits fondamentaux dans les nouvelles
Constitutions africaines… », op. cit., p. 53, à la différence des Constitutions occidentales qui ont le caractère de
permanence et, obéissent, souvent scrupuleusement aux règles préétablies pour subir des modifications, celles de
l’Afrique, ou tout au moins la plupart d’entre elles, vont fondre comme de la cire molle.
233
875
CARRE de MALBERG, R., Contribution à la théorie générale de l’Etat, t. 2, Paris, CNRS, 1962, p. 499.
876
L’intransigeance du parti-Etat était telle que celui qui tentait, par une étude sur la Constitution, de perturber
les dogmes du parti-Etat passait pour un hérétique, par conséquent, était littéralement condamné à mourir à petit
feu, bien tenu loin des conditions de vie digne d’un homme normal, pour indiscipline aux idéaux du parti.
234
humains. Et, comme l’affirme avec raison Evariste Boshab, ceux qui détiennent la
compétence nécessaire pour mener ces études préfèrent, pour assurer leur survie
économique et garantir leur ascension sociale, fermer les yeux sur des monstruosités
juridiques instituées par le pouvoir877. A ce sujet, Lafond ne s’empêche pas de
généraliser qu’il n’y a pas de chercheur heureux en Afrique878 ?
877
BOSHAB, E., « Les droits de la Constitution en Afrique subsaharienne » …, op. cit., p. 79.
878
LAFOND, M., « Problèmes et perspectives de la documentation juridique en Afrique », in L’Etat moderne à
l’horizon 2000 : aspects internes et externes, Mélanges offerts à Pierre François GONIDEC, Paris, LGDJ,
1985, p. 211.
879
G’LELE, M.A, « Pour l’Etat de droit en Afrique », L’Etat moderne : horizon 2000, aspects internes et
externes, Mélanges à P.F. GONIDEC, Paris, LGDJ, 1985, pp. 185-186.
235
880
BOSHAB, E., « Les droits de la Constitution en Afrique subsaharienne » …, op. cit., p. 82.
236
881
Si, aux USA, le contrôle de la constitutionnalité des lois n’avait été gagné qu’à la faveur d’une interprétation
jurisprudentielle hardie de la Cour suprême ; en France, il aura fallu l’audace du Conseil constitutionnel pour
faire entrer les dispositions de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et du Préambule de la
Constitution de 1946, que les rédacteurs de la Constitution de 1958 n’avaient pas entendu lui confier la
protection, dans le bloc de constitutionnalité. Voy. ARDANT, P., « Les Constitutions et les libertés », Pouvoirs,
n° 84, 1998, pp. 67-68.
882
BOSHAB, E., « Les droits de la Constitution en Afrique subsaharienne » …, op. cit., p. 82.
883
FAVOREU, L., « L’exception d’inconstitutionnalité est-elle indispensable en France ? », RFDC, 1995, p. 21.
237
quelle que soit leur nature – législative ou réglementaire – et quel que soit leur auteur
– autorité fédérale, régionale ou communautaire »884.
C’est d’ailleurs devant cette paralysie mutuelle qu’il nous parait difficile
d’envisager une certaine durabilité des règles constitutionnelles885 entendue au sens
de la garantie des droits de tous. L’instabilité chronique des dispositions
constitutionnelles qui en résulte n’est-elle pas de nature à favoriser la fraude
constitutionnelle ?
884
UYTTENDALE, M., Institutions fondamentales de la Belgique, Bruxelles, Bruylant, 1997, p. 48.
885
Il s’agit simplement ici de la stabilité de la Constitution qui ne subit aucune influence de son caractère souple
ou rigide.
238
Dans ces cas, la durabilité des textes constitutionnels sont mises en mal
au point que leur capacité d’assurer la passation pacifique du pouvoir par des
moyens démocratiques prévus devient un leurre. Comment donc ne pas considérer
que l’instabilité est ainsi savamment entretenue par les tenants du pouvoir afin de
couvrir leurs turpitudes et empêcher ainsi le droit de regard que le peuple devrait
détenir sur le fonctionnement des institutions en conformité avec le texte dont il
devrait en principe revendiquer la paternité ?
886
C’est le cas, par exemple, de la période régie par le Décret-loi dit constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997.
887
VERDUSSEN, M., « Une inviolabilité parlementaire tempérée », JT, 1997, p. 673.
239
Conclusion générale