Resen Tchad 2007
Resen Tchad 2007
Resen Tchad 2007
D O C U M E N T D E T R AVA I L D E L A B A N Q U E M O N D I A L E N O . 1 1 0
BANQUE MONDIALE
D O C U M E N T D E T R AVA I L D E L A B A N Q U E M O N D I A L E N O. 1 1 0
BANQUE MONDIALE
Washington, D.C.
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1818 H Street, N.W.
Washington, D.C. 20433 (États-Unis d’Amérique)
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Premier tirage: juin 2007
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iii
IV Tables des Matières
ANNEXES
1. Note sur les Données Démographiques Concernant la Population
d’Âge Scolaire 181
2. Note Concernant l’Utilisation des Enquêtes de Ménages Pour l’Analyse
de la Couverture Scolaire 187
3. Analyse de la Cohérence de l’Allocation des Enseignants du Primaire
aux Niveaux Département et Inspections 189
4. Analyse de la Cohérence de l’Allocation des Enseignants du Collège
au Niveau Département 197
C ette étude sur le secteur de l’éducation au Tchad s’ajoute à la liste croissante des
Rapports d’Etat des Systèmes Educatifs Nationaux (RESEN) que la Banque a soutenu
dans la Région Afrique. Comme dans les rapports similaires, le RESEN pour le Tchad est
le produit de la collaboration entre une équipe de la Banque mondiale, une équipe
nationale composée de cadre du Ministère de l’Education et d’autres ministères partenaires
aussi bien que les membres de la communauté de développement local. Le Pôle de Dakar
d’Analyse Sectorielle (UNESCO-BREDA) a également eu une contribution significative. Le
rapport est destiné à établir une photographie exacte de l’état actuel de l’éducation au
Tchad, et donc d’offrir aux décideurs locaux et à leurs partenaires au développement une
base analytique solide pour instruire le dialogue politique et le processus de prise de
décision.
Un dialogue étendu qui engage tous les acteurs pertinents de la société sur les questions
de la politique éducative est très important au moment où le Tchad, comme d’autres
pays sub-sahariens, s’efforcent d’atteindre les objectifs de Développement du Millénaire
(ODMs). Deux des huit ODMs sont directement reliés à l’éducation : parvenir à l’éducation
primaire universelle (ODM2) et promouvoir l’égalité du genre en éliminant les disparités
de genre dans l’éducation primaire et secondaire (ODM3). Mais il y a également des béné-
fices importants dérivant de l’éducation qui contribue à l’atteinte des autre ODMs. L’édu-
cation est un facteur majeur dans la lutte contre la pauvreté (ODM1) et dans les efforts pour
améliorer la santé globale (ODMs 5 et 6) et la santé infantile en particulier (ODM4).
La performance du Tchad est relativement médiocre par rapport à la plupart des indi-
cateurs ODMs. L’année butoir 2015 est encore assez éloignée pour permettre aux politiques–
entreprises aujourd’hui- d’avoir un impact, mais aussi assez proche pour impartir un sen-
timent d’urgence pour l’action. Ce RESEN arrive à un moment opportun. Grâce aux détails
qu’il offre, les décideurs et leurs interlocuteurs disposent d’une richesse de connaissances
exceptionnelles sur lesquelles ils peuvent engager un dialogue instruit et organiser des débats
sur l’avenir de l’éducation au Tchad.
Le Gouvernement tchadien reconnait le rôle important de l’éducation pour stimuler
la croissance économique et encourager le développement social. Durant la décennie passée,
il a augmenté progressivement les dépenses publiques en faveur de l’éducation et le résultat
est ressorti dans les taux croissants de scolarisation à tous les niveaux d’enseignement et
dans presque le doublement de la durée moyenne des études d’une génération d’enfants
tchadiens. Malgré ces avancées très positives, beaucoup reste à faire. Le Tchad fait face à
deux sortes de défis dans les années à venir : l’assurance d’un progrès global continu en ter-
mes de couverture et de qualité des services éducatifs offerts; les questions d’équité devront
aussi faire l’objet d’une attention particulière, de même que la nécessaire amélioration de
l’allocation des ressources financières et leur utilisation efficace. Pour atteindre les ODMs,
les questions suivantes devront nécessairement être abordées:
xiii
XIV Avant Propos
seront perdus, cependant, si les élèves n’achèvent pas leurs études. Actuellement,
seulement un peu moins d’un tiers d’enfants en âge scolaire parviennent à la fin du
cycle primaire, une constante qui place le Tchad parmi les pays ayant le taux
d’achèvement le plus bas dans toute l’Afrique sub-saharienne.
■ En ce qui concerne la qualité de l’éducation, le système laisse beaucoup à désirer.
Du faible nombre de diplômés du cycle primaire que le Tchad produit, seulement
la moitié des élèves ont une connaissance de base suffisante pour demeurer instruit
au cours de leur vie adulte.
■ En ce qui concerne l’équité, il y beaucoup de place pour l’amélioration. Des déséquili-
bres importants existent dans le système en termes de disparités selon le genre, de
répartition géographique et de revenus des ménages. A la fin du cycle primaire,
il y a une fille pour deux garçons à l’école ; et les disparités sont mêmes plus larges
entre les enfants dans les zones rurales et urbaines et entre ceux des familles riches
et pauvres.
Ces défis avancés sont importants, mais ne sont pas impossibles à surmonter. Avec la
préparation de ce rapport, un premier pas a été réalisé—celui du développement d’une base
Avant Propos XV
de connaissances spécifiques au pays sur laquelle une compréhension commune par les
parties prenantes clés concernant tant les faiblesses principales du système éducatif et les
options potentielles pour les surmonter. Comme d’autre RESEN, ce rapport pour le Tchad
est préparé selon cette approche. Par conséquent il repose sur un format standard visant à
consolider l’information disponible sur un ensemble de questions génériques qui ont été
trouvées cruciales pour le dialogue de politique éducative, et mettant des indices figuratifs
sur les points prometteurs pour l’intervention.
Ce RESEN présente plusieurs éléments saillants. Il va au-delà des indicateurs de base de
scolarisation et de la rétention pour offrir une vue élargie et des aperçus plus approfondis
dans les aspects clés de la performance du système. Dans ces secteurs grands consomma-
teurs de ressources dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, l’identification des
inefficacités est essentielle, aussi bien que la recherche de moyens coûts-efficaces pour les
surmonter. Dans la mesure où l’analyse, et les conclusions qu’elle soutient, dépendent
d’abord de la qualité des donnés de base, un grand soin a été porté dans la mobilisation de
l’ensemble des sources de données disponibles i) pour instruire l’analyse—données admin-
istratives du Ministère aussi bien que les données des enquêtes de ménages—et ii) pour
vérifier la robustesse et la cohérence entre les sources de données. Le processus adopté pour
préparer ce rapport est aussi à noter. L’idée que les bénéficiaires de l’assistance au développe-
ment devraient être des agents actifs forgeant leur propre destinée plutôt que des malades
passifs attendant d’être guéris, est en train d’être de plus en plus reçue. En accord avec cette
idée, le RESEN a été préparé avec l’idée que le rapport représente non pas une évaluation
externe du système éducatif, mais un exercice conjoint entre le gouvernement et ses parte-
naires au développement pour atteindre une compréhension partagée des enjeux et défis.
Etant donné que le rapport est destiné principalement à instruire la conception de
politique sectorielle, il n’offre ni des solutions, ni des recommandations. Au contraire, il
cherche à faire à la fois une collecte de données pertinentes et une analyse, afin de doter les
lecteurs d’informations nécessaires pour un engagement informé concernant l’avenir de
l’éducation au Tchad. Mon espoir est que le délai approchant rapidement des objectifs de
développement du millénaire (année 2015) prêtera un sentiment d’urgence pour la réflex-
ion et les débats sur le sujet. Toutefois, idéalement, ce RESEN peut déceler l’état inadéquat de
l’éducation au Tchad aujourd’hui, mon espoir sincère est que la plupart des informations
dans le rapport deviendront bientôt passées au fur et à mesure que le Tchad progresse vers
les Objectifs de Développement du Millénaire (ODM). J’espère que les progrès rendront
bientôt nécessaires la préparation d’un nouveau rapport sectoriel, à la fois pour mettre à
jour les indicateurs du secteur de l’éducation au Tchad et pour tirer des leçons de l’expéri-
ence du pays pour surmonter les nombreux défis de développement auxquels il est con-
fronté aujourd’hui.
Yaw Ansu
Directeur
Département Développement Humain
Région Afrique
Banque mondiale
Foreword
T his study on the education sector in Chad adds to the growing list of Country Sector
Reports (CSRs) which the World Bank has been sponsoring in the Africa Region. As
with other similar reports, the CSR for Chad is the product of collaboration between World
Bank staff, a national team from the Chadian Ministry of Education, staff from other
government ministries as well as members of the local development community. The
report is intended to provide an accurate snap-shot of the current status of education in
Chad, and thus to offer policy makers in Chad and their development partners a solid
analytical foundation to inform policy dialogue and the decision-making process.
A broad dialogue that engages all relevant sectors of society on education policy issues
is very important at a time when Chad along with other Sub-Saharan countries are striv-
ing to attain the 2015 Millennium Development Goals (MDG). Two of the eight MDGs
directly relate to education: achieving universal primary education (MDG 2) and promot-
ing gender equality by eliminating gender disparity in primary and secondary education
(MDG 3). But there are also important positive spillovers from education that contribute
to attainment of the other MDGs. Education is a major factor in the fight against poverty
(MDG 1) and in the effort to improve overall health (MDGs 5 and 6) and child health in
particular (MDG 4).
Chad performs poorly on most of the MDG indicators. The 2015 deadline is still far
enough away to allow policies—undertaken today—to have an impact, and yet near
enough to impart a sense of urgency for action. This CSR therefore comes at an opportune
time. Thanks to the details it offers, policy makers and their interlocutors have an excep-
tional knowledge asset upon which to engage in an informed dialogue and debate on the
future of education in Chad.
The Chadian government recognizes the important role of education in boosting eco-
nomic growth and fostering social development. Over the past decade, it has progressively
increased public spending on education, and the result shows up in rising enrollment rates
at all levels and in a near doubling of average years of schooling that each Chadian child
might expect to receive. This highly positive record notwithstanding, much remains to be
done. Chad faces two kinds of challenges in the years ahead: assuring continued overall
progress in terms of coverage, quality of services; and equity of access; and improving the
allocation of financial resources and their effective utilization. In order to attain the MDGs,
the following issues warrant priority and explicit attention:
Overall development of the education system:
■ On coverage, Chad has made spectacular progress. The primary gross enroll-
ment ratio, for example, rose from one of the lowest in the world ten years ago,
to 87% in 2004. The benefits from this expansion would be lost, however, if
pupils failed to complete their schooling. Currently only a little more that a third
of Chad’s school-age children reach the end of the primary cycle, a pattern that
puts Chad among countries with the lowest completion rates in all of Sub-Saharan
Africa.
xvii
XVIII Foreword
■ On quality, the system leaves much to be desired. Of the already few primary school
graduates which Chad produces, only half have sufficient basic knowledge to remain
literate into adulthood.
■ On equity, there is also much room for improvement. Significant imbalances exist
in the system in terms of gender, geographical and income disparities. At the end
of the primary cycle, there is only one girl for every two boys in school; and the
disparities are even wider between children in rural and urban areas and between
those from rich and poor families.
■ On expenditure, the education sector absorbs a quarter of the state budget, but the
exteme thinness of the tax base translates into very limited aggregate pubic budget,
and hence also into relatively low levels of public expenditure on education. Gov-
ernment spending on education averages only 2% of the GDP, one of the lowest
rates in the world. Fortuitously, the country has oil revenues which offer a huge
and unique opportunity to boost investment in education. If well allocated and
managed efficiently, the reources can help the country progress expeditiously
toward the MDGs.
■ On secondary and higher education, the shares that these sub-sectors absorb of the
government’s meager resources for education is large relative to the share of pri-
mary education. The imbalance in allocation is particularly striking when one con-
siders that the primary school completion rate is still amongst the lowest in the
world and that Chad’s labor market does not currently have the capacity to absorb
a big portion of the graduates from secondary and higher education.
■ On community teachers, the CSR documents the sizable increase in their number
in recent years and the fact that pupils taught by these teachers achieve significantly
higher test scores than those taught by civil servant teachers. Yet such teachers
receive much smaller salaries than civil servant teachers: depending on whether or
not they are subsidized by the state, community teachers earn between 4 to 24 times
less than those of their civil service counterparts. The disparity is so great as to
emphasize the need for a major review and possible overhaul of the government’s
policy regarding the status, career development and pay of community teachers—
a task that is essential for continued progress toward the country’s development
goals in education.
The foregoing challenges are daunting, but not impossible, to overcome. With the prepa-
ration of this report, a first step has been taken—that of developing a country-specific
knowledge base on which to establish a common understanding among key stakeholders
regarding the key weaknesses in the education system and possible options for overcoming
them. Like other CSRs, this report for Chad is prepared with this precise scope in mind. It
therefore relies on a standard format aimed at consolidating the available information on
a generic set of issues that have been found to be highly relevant for policy dialogue, and
putting figurative markers on promising areas for intervention.
This CSR has a number of noteworthy features. With regard to content, it goes beyond
the basic indicators of enrollment and retention to offer a wider view and a deeper insight
into key aspects of the system’s performance. In the resource-starved contexts of most
Foreword XIX
Yaw Ansu
Director
Human Development Department
Africa Region
The World Bank
Remerciements
C e rapport a été produit de façon collaborative entre une équipe nationale et une
équipe internationale composée de membres de la Banque Mondiale et du Pôle de
Dakar d’Analyse Sectorielle en Education de l’UNESCO-BREDA/Ministère français des
Affaires Etrangères.
L’équipe nationale a été dirigée d’abord par Mr Djidenfas Bassa, puis par Mr Dibe Gali
actuel Directeur Général de la Planification et de l’Administration du Ministère de l’Edu-
cation Nationale. Cette équipe est composée de Mrs Mahamat Seid Ali, Aaron Patalé,
Yobom Ben Naïti, Taher Brahim, Guindja Abdoulaye, Kiwilhou Tossi Awdou, Nadjingar
Golaou, Baningaye M’brayana, Ahmad Doungous, et de Mmes Nguekadjila Noubara et
Midebel Germaine.
L’équipe de la Banque Mondiale a été composée de Mr Alain Mingat, Economiste Prin-
cipal de l’Education (puis consultant) et de Mr Ramahatra Rakotomala, Spécialiste de
l’Education. Mr. Mahamat Louani (Specialiste en Deveopment Humain) et Mr. Marcelo
Becerra (Spécialiste de l’Education et responsable pour le secteur de l’éducation pour le
Tchad) ont aussi participe des débats.
L’équipe du Pôle de Dakar a été composée de Mrs Mathieu Brossard, Kokou Amélé-
wonou et de Jean Bosco Ki. Mrs. Nicolas Reuge et Borel Foko ont également contribué à
l’élaboration de ce rapport.
Ce rapport a bénéficié également d’un appui financier, de la Coopération Française et
du Programme d’Appui à la Réforme du Système Educatif Tchadien (PARSET). Il a béné-
ficié aussi d’un appui logistique et de transfert d’informations de Mr Serge Ferrara et de
Mr Emmanuel Bailles, assistants techniques mis à disposition par la France auprès du Min-
istère de l’Education Nationale.
Enfin, le rapport a bénéficié d’une relecture critique et des commentaires de l’ensem-
ble des participants de l’atelier de finalisation qui s’est tenu à Bakara du 18 au 22 juillet
2005. Outre les membres de l’équipe nationale, cet atelier a vu la participation de Mrs
Adoumbé Maoura, Mahamat Alboukhari Oumar Mahamat Moctar Doungous, Mahamat
Djibrine Ab-Rasse, Ngarmadjal Gami, Ngourné Djona Tira, Issa Nassour, Alfa Bah Ben
Angaïkoko, Monbé Danngar, Housserbé Philippe, Teguidé Sig Doréba, Remadji Nangodjal,
Yadji Djimingue Marius, Hamit Mouctar, Ahmed Ngartoloum, Ahmed Ngartoloum, Altolna
Ndigngnar, Hassan A. Katchalla, Mahamat Louani, Mahamat Nour Brahim, Koumassem
Ndolémadji, Charfadine Issa, Angles Karine, Saleh Youssouf Abdel Manane, Nébé
Alndingalaouel, Bichara Ringore, Doromon Michel, Abakar M. Amande, Ngarabi Samuel
et de Mmes Makambaye Mibaye et Karine Angles.
xxi
Résumé Exécutif
A lors que les chapitres du présent rapport sont construits dans une perspective
analytique et détaillée examinant le fonctionnement du système éducatif tchadien selon
des angles d’observation spécifiques et assez indépendants, ce résumé exécutif adopte une
perspective plus synthétique. Il s’agit d’explorer de façon transversale des questions
envisagées séparément dans les chapitres de ce rapport afin de parvenir à un diagnostic plus
synthétique, et par là même plus proche de la prise de décision de politique éducative, qui est
par nature au carrefour de l’ensemble des objectifs, informations et contraintes. Il est clair que
le diagnostic présenté dans ce rapport a des conséquences sur la formulation de la politique
éducative du pays. Notons que nous restons toutefois ici au niveau du diagnostic factuel sans
aborder de façon directe des recommandations en termes d’actions de politique éducative,
même si, bien sûr, la distance est parfois faible.
Pour aller dans cette direction, il sera sans doute nécessaire que les acteurs nationaux
en charge de la politique éducative du pays i) apprécient la pertinence des éléments factuels
du diagnostic, ii) identifient les options susceptibles d’être proposées en tant que réponses
possibles aux questions que pose le diagnostic et iii) construisent une stratégie de développe-
ment du secteur (du pré-scolaire à l’Université).
Le défi est que cette stratégie d’une part assure des progrès globaux dans le système
(notamment en termes de couverture, sur la qualité des services offerts et sur le degré
d’équité du système) et d’autre part soit inscrite dans un contexte de soutenabilité physique
et financière à moyen terme (sur la base à la fois des ressources nationales, y compris
pétrolières, des arbitrages intersectoriels anticipés et des ressources extérieures qui pour-
raient être mobilisées pour le secteur). Compte tenu des inévitables contraintes de ressources,
cela impliquera un certain nombre d’arbitrages ; pour cela, le modèle de simulation du
secteur, établi en accompagnement de ce rapport, pourra être d’une aide précieuse, tant
pour définir les contours de la politique éducative choisie que pour la faire insérer dans les
arbitrages intersectoriels et le DSRP.
Après un rappel succinct sur les problèmes de données rencontrés et sur la nécessité
d’améliorer le système d’informations, ce résumé exécutif s’articule autour de quatre parties :
i) les principaux résultats quantitatifs et qualitatifs du système, ii) le diagnostic sur les ques-
tions d’efficacité, interne et externe, avec un accent particulier sur les questions de gestion,
iii) les questions d’équité prises sous différentes perspectives, questions particulièrement
importantes dans la perspective de réduction de la pauvreté et iv) une synthèse des pistes
pour reformuler l’architecture de la politique sectorielle tchadienne dans un cadre fin-
ancier soutenable.
xxiii
XXIV Résumé Exécutif
internes. Ceci peut conduire à pénaliser le Tchad dans son dialogue avec les financeurs
internes et extérieurs, les indicateurs scolaires pouvant être sujets à des variations aléatoires,
uniquement du fait des données de population. Les analyses effectuées suggèrent qu’un
effort particulier devra être fait pour améliorer la qualité des projections des données
démographiques ; ce travail aura une dimension technique mais aussi politique. La consol-
idation des données démographiques agrégées, commencée dans le cadre du RESEN, devra
s’étendre aux niveaux désagrégés (par région, par préfecture . . .) par année et être validée
officiellement (notamment par le Ministère du Plan) pour utilisation d’un jeu unique de
données par l’ensemble des ministères et de leurs partenaires.
Données Scolaires
■ Le travail du RESEN sur les fichiers scolaires a mis en exergue les difficultés rencon-
trées par la DAPRO pour collecter, traiter et produire des données scolaires cohérentes
en interne et avec les autres sources d’informations.
■ Les taux de scolarisation calculés à partir des données de l’Enquête Démographique
et Santé (EDS 2003) s’écartent considérablement de ceux calculés avec les données
administratives. Ces écarts ne s’expliquent pas uniquement par les problèmes liés
aux données démographiques.
globale, pour positive qu’elle soit, pose tout de même quelques interrogations et notam-
ment celle du degré de priorité accordée à l’enseignement de base dans la mesure où ce sont
les effectifs (et taux) de ce cycle qui ont progressé le moins vite.
1. Le taux supérieur à 100% s’explique par l’entrée à l’école de cohortes de plusieurs âges.
2. Programme d’Analyse des Systèmes Educatifs de la CONFEMEN (Conférence des Ministres de
l’Education ayant le français en partage)
XXVI Résumé Exécutif
■ malgré un taux d’achèvement du cycle primaire parmi les plus faibles du monde,
seuls 46% des dépenses publiques courantes d’éducation sont alloués à l’enseigne-
ment de base, alors que dans les pays avec un taux d’achèvement similaire (Burkina
Faso, Burundi, Ethiopie, Madagascar, Mali et Niger) la part allouée au cycle primaire
s’établit à 56% en moyenne.
■ Inversement, l’enseignement supérieur jouit d’une allocation relative plus généreuse
que dans les autres pays. La part des dépenses courantes qui est allouée à l’enseigne-
ment supérieur atteint 23%, une valeur nettement supérieure à celle observée dans
les pays comparables (18% en moyenne). Cette générosité ne trouve pas de justifi-
cation dans l’efficacité externe du sous-secteur : la majorité des sortants de l’en-
seignement supérieur sont sans emploi ou occupent un emploi sous qualifié en
référence à la formation reçue.
titatifs et les dépenses publiques est relativement bon au Tchad ; on estime la durée moyenne
de scolarisation à 4,9 années pour 1,9% du PIB alloué au secteur de l’éducation, soit envi-
ron 2,7 années de scolarisation pour chaque pourcent de PIB, une valeur supérieure à la
moyenne observée en Afrique subsaharienne (1,9 années par pourcent du PIB alloué).
L’analyse dynamique de cette efficience quantitative du système montre que des pro-
grès notables ont été réalisés, notamment du fait de l’accroissement massif du nombre
d’enseignants communautaires, peu coûteux pour le système mais permettant de scolariser
en 2004 la majorité des enfants tchadiens. En 1995/96 la durée moyenne de scolarisation
ne valait que 2,9 années pour 1,5% du PIB alloué au secteur de l’éducation, soit environ
1,9 années de scolarisation pour chaque pourcent de PIB.
Mais une Efficacité Interne du Système Parmi les Plus Faibles d’Afrique
Les redoublements et abandons coûtent cher au système et ne produisent pas de résultats.
Les rendements internes du système éducatif tchadien (le rapport entre sa production en
termes d’élèves achevant chaque cycle et son coût en termes d’années-élèves consommées)
sont parmi les plus faibles observés sur le continent. Le coefficient d’efficacité interne du
cycle primaire s’établit à seulement 49%, ce qui signifie que plus de la moitié des ressources
sont “gaspillées” par le système soit pour payer des années redoublées soit pour payer des
années de scolarisation d’élèves abandonnant avant le CM2. Au niveau secondaire, les coef-
ficients d’efficacité interne sont légèrement meilleurs (64% au collège et 68% au lycée) mais
sont malheureusement stables et très en-deçà i) de ce qui est observé en moyenne dans les
autres pays et ii) de ce qui est souhaitable dans un contexte de rareté des ressources.
Les deux encadrés qui suivent insistent sur l’amélioration possible du rendement
interne du système éducatif tchadien par le traitement spécifique des deux problèmes du
redoublement et de l’abandon :
Le problème:
En 2004, on observe au Tchad 25% de redoublants au cycle primaire, 18% au collège et 24%
au lycée. Ces chiffres sont particulièrement élevés en comparaisons de ce qui est observé
dans les autres pays (au primaire : 16% en moyenne en Afrique et 10% en moyenne sur
l’échantillon des pays les plus performants pour atteindre la scolarisation universelle). Ces
taux élevés de redoublants sont le résultat i) d’habitudes prises par le système (notamment
issues de l’héritage colonial) et ii) du pré-supposé que le redoublement est lié à la qualité et
que faire plus redoubler les élèves permet in fine d’améliorer les acquisitions scolaires.
La recherche internationale et l’analyse au Tchad faite dans le chapitre 4 montrent que :
i) la décision de redoublement n’est pas toujours juste. Le niveau de l’élève n’explique pas
à lui seul la décision de redoublement. Les décisions de redoublement dépendent sou-
vent de facteurs ‘subjectifs’ comme la position relative de l’élève dans la classe, le milieu
et les conditions d’enseignement, la qualification du maître.
ii) l’efficacité pédagogique du redoublement n’est pas prouvée. Les analyses au niveau pays
montrent que l’argument selon lequel des redoublements élevés pourraient être justi-
fiés pour des raisons liées à la qualité de l’éducation, n’est pas empiriquement vérifié.
Au Tchad l’analyse a montré que autres choses égales par ailleurs, les résultats au CEPE
étaient meilleurs dans les écoles où les redoublements étaient les moins fréquents.
(continued )
XXVIII Résumé Exécutif
iii) le redoublement exerce un effet négatif important sur les abandons. Les études aux
niveaux pays, école et individus coïncident également sur ce point. Les redoublements
exacerbent les abandons en cours de cycle, qui demeure le principal frein pour attein-
dre la scolarisation primaire universelle (cf partie 1.2). Au niveau international on estime
que 1% de plus de redoublants est associé à 1,2% de plus d’abandons.
iv) le redoublement a un impact important sur les coûts. Le redoublement fait payer deux
années d’étude au système pour une seule année validée.
Le problème:
La deuxième raison principale de la faiblesse de l’efficacité interne du système réside dans l’am-
pleur des abandons en cours de cycle. Pour le cycle primaire en particulier, les abandons avant
le terme constituent un gaspillage important de ressources dans la mesure où les années avant
abandon sont payées par le système mais ne permettent pas d’asseoir des acquis suffisants
pour une alphabétisation irréversible. Par exemple seuls 3,5% de ceux qui ont abandonné
au CE1 sont alphabétisés à l’âge adulte (11% pour ceux abandonnant au CE2). Comme déjà
mentionné dans la partie 1.2, le taux de rétention des élèves en cours de cycle primaire est
au Tchad parmi les plus faibles d’Afrique. Agir pour améliorer cette situation n’est pas une
option mais bien une obligation si le Tchad veut être au rendez-vous de l’achèvement uni-
versel du cycle primaire en 20151.
Une mauvaise transformation des ressources en résultats. En plus d’une grande variabil-
ité dans les moyens reçus, les écoles différent grandement de par leurs résultats (réussite au
CEPE, test PASEC d’acquis scolaires, rétention des élèves en cours de cycle, % de redoublants).
L’analyse statistique a permis, sur une base empirique d’identifier les facteurs scolaires les
plus influents pour expliquer les différences de résultats entre écoles.
i) Certains facteurs scolaires sont plus efficaces que d’autres. En fonction de l’intensité de
l’impact des facteurs scolaires et des coûts qui leur sont associés, il est possible de mettre en
place une stratégie sélective dans l’utilisation des facteurs associés à l’amélioration des
résultats (en termes de rétention et d’apprentissages). La réduction des redoublements a
un impact positif sur la rétention et sur les acquisitions sans engendrer de coûts supplé-
mentaires (en fait cela réduirait la dépense, cf partie 2.3.1). Les manuels scolaires (sur la
rétention et sur les apprentissages), l’appui alimentaire (sur les apprentissages) l’équipement
de la classe en mobilier (sur la rétention) sont des facteurs montrant une bonne efficacité.
Pour ce qui est des caractéristiques des enseignants, ce sont les enseignants jeunes (de
moins de 30 ans), les femmes et ceux de niveau académique inférieur au Bac qui, toutes
autres choses égales par ailleurs font moins abandonner les élèves et ce sont les enseignants
communautaires, les femmes et ceux de niveaux Bac qui ont les meilleurs résultats en ter-
mes d’apprentissages de leurs élèves. Contrairement aux idées reçues l’impact sur les
apprentissages des enseignants fonctionnaires et des bâtiments construits en dur ne sont
pas avérés alors qu’ils ont des coûts plus importants que les solutions alternatives.
ii) L’importance du temps scolaire effectif. Neuf années de scolarisation sont nécessaires au
Tchad pour donner les mêmes chances d’alphabétisation qu’avec six années dans d’autres pays
africains. Ceci montre l’importance du temps scolaire effectif, facteur essentiel des appren-
tissages qui peut sans doute être augmenté dans le cas tchadien notamment en progressant
i) pour assurer que l’année scolaire commence en tous lieux le jour où cela est prévu (ce qui
suppose que toutes les affectations soient faites en temps utile et que tous les enseignants
aient regagné leur poste), ii) pour que les enseignements effectifs se poursuivent jusqu’à la
fin officielle de l’année scolaire et iii) en agissant pour réduire l’absentéisme des enseignants
en cours d’année scolaire et iv) en contextualisant l’emploi du temps scolaire en référence
à la vie locale (par exemple au niveau provincial adaptation de l’année scolaire au calendrier
Résumé Exécutif XXXI
agricole, et au niveau local adaptation de la semaine scolaire au calendrier des marchés). Bien
qu’il soit difficile de faire un décompte précis du temps global perdu, il est possible que ceci
se monte en moyenne à 30% du temps en principe prévu pour les apprentissages (l’analyse
PASEC indique que le nombre moyen de jours d’absence du maître s’établirait à 3,6 par
mois). Des améliorations sur ce plan n’impliquent pas de coûts additionnels.
iii) Un besoin d’améliorer la gestion pédagogique. L’ensemble des différents facteurs dont
l’impact a pu être établi sur la qualité des enseignements, n’explique qu’une faible partie de
la variabilité observée dans les résultats. Des écoles disposant de ressources comparables peu-
vent avoir des résultats extrêmement différents. Ceci suggère que l’amélioration de la qualité
de l’enseignement passera certes par une augmentation des moyens et du temps d’apprentis-
sage, mais elle le sera sans doute davantage encore par l’amélioration de la gestion péda-
gogique et de la capacité du système à mieux transformer, au niveau local, les ressources
existantes en résultats scolaires effectifs. L’introduction d’un pilotage par les résultats, large-
ment absent de l’organisation actuelle de l’école au Tchad, constitue un point fondamental
pour l’amélioration des apprentissages. Ceci passe certainement par i) la mise en place ou le
renforcement de mécanismes et de structures instrumentées d’incitations, de suivi et de con-
trôle des pratiques et ii) le renforcement du mandat des communautés locales (APE et com-
munautés villageoises). Les meilleurs résultats des enseignants communautaires, pourtant
non formés, très peu payés et très peu diplômés trouvent probablement une explication du
côté de la proximité plus importante entre les utilisateurs (les élèves et leurs parents) et les
fournisseurs du service éducatif (des enseignants bien souvent issus des parents d’élèves).
Une Pyramide Scolaire Déséquilibrée Par Rapport Aux Demandes de l’Économie. Seuls
36% des sortants de l’université exercent un emploi correspondant à leur formation alors
que 50% sont sans emploi et que les 14% restant exercent une activité sous-qualifiée par
rapport à la formation reçue. Parmi les sortants du lycée, seuls 26% exercent un emploi cor-
respondant à leur niveau de qualification. Le bilan formation-emploi pour les années
récentes suggère pour sa part que la production de diplômés dans la partie haute du sys-
tème est entre 7 et 8 fois excédentaire par rapport aux demandes de l’économie (on estime
à environ 3000 le nombre annuel de sortants de l’enseignement supérieur et à seulement
400 le nombre annuel de nouveaux emplois de cadres).
Cet excédent en quantité de l’offre de la partie haute des systèmes éducatifs par rap-
port aux capacités d’absorption du marché du travail se justifie d’autant moins que les
ressources manquent dans la partie basse des systèmes éducatifs pour fournir à l’immense
majorité des actifs, ceux qui occupent les emplois agricoles et du secteur informel, une
alphabétisation durable. Il est estimé que 62% des individus entrent dans la vie active sans
avoir un enseignement primaire complet, alors que ceci constitue le socle minimum pour
permettre des gains de productivité du travail dans le secteur informel de l’économie.
XXXII Résumé Exécutif
Des Valeurs Ajoutées pour le Développement Social Variables Selon Les Cycles. Concernant
la sphère sociale, les analyses effectuées sur les diverses enquêtes de ménages récentes
disponibles montrent sans ambiguïté que c’est dans la partie basse du système, et notamment
dans le primaire, que se jouent la production des compétences sociales qui comptent, en par-
ticulier dans une perspective de lutte contre la pauvreté. Ceci vaut d’abord pour la rétention
de l’alphabétisation à l’âge adulte, et plus fondamentalement pour la prévention contre le
risque de pauvreté. Dans ces deux cas, les mesures disponibles montrent que la scolarisation
au primaire et au premier cycle secondaire constitue l’investissement social de base. Ces effets
bénéfiques de l’éducation de base ont également une dimension intergénérationnelle : les par-
ents analphabètes ayant beaucoup moins tendance à scolariser leurs enfants alors que ce n’est
plus le cas avec une scolarité primaire complète. Concernant les effets sur la santé maternelle
et les chances de survie de l’enfant, on constate des effets positifs tant pour le primaire que
pour le secondaire, mais c’est de nouveau dès l’achèvement du primaire qu’une part sub-
stantielle des effets sociaux positifs sont obtenus.
. . . Qui Incitent à Revoir les Investissements Publics par Cycle. Ces observations
empiriques des effets des investissements éducatifs tant dans la sphère économique que
sociale convergent de façon claire vers l’identification que, dans la situation présente, i) trop
est fait dans la partie haute du système (enseignement technique et surtout supérieur) dont
la cible est le secteur de l’emploi moderne et qui doit répondre sans excès à ses demandes
tant en quantité qu’en qualité, et ii) pas suffisamment est fait dans la partie basse pour
assurer que tous les jeunes puissent disposer au moins d’une scolarité primaire complète
(davantage si cela est possible). Ce dernier point est essentiel pour que la société puisse
envisager des progrès significatifs dans la productivité du travail dans le secteur tradition-
nel, dans la réduction de la pauvreté, dans la réduction de l’analphabétisme des popula-
tions, ainsi que des progrès dans les domaines de la population et de la santé.
3. Une deuxième conséquence importante de l’évolution de la pandémie sur le système éducatif Tcha-
dien concerne les enseignants. Il est estimé qu’en 2015, il sera nécessaire de recruter et former 400
enseignants additionnels (en plus de ceux nécessaires pour l’expansion du système) par an pour remplacer
les malades et décédés.
XXXIV Résumé Exécutif
des valeurs deux fois supérieures à ce qui est observé en moyenne dans les pays compara-
bles. Une année d’études d’un étudiant du supérieur (en grande partie du fait des bourses)
coûte à l’Etat tchadien autant que la scolarisation annuelle de 59 enfants du primaire.
. . .Qui Induit une Concentration Très Marquée des Ressources Publiques d’Éducation. La
combinaison de la structure de la pyramide scolaire (environ 100% des enfants entrent au
CP1 mais seul 2% accède au supérieur) et de celle des coûts unitaires (structure très crois-
sante selon les cycles d’enseignement) fait que la concentration des ressources publiques
par l’élite tchadienne est très importante :
■ 64% des ressources publiques d’éducation sont appropriés au cours de leur par-
cours scolaire par les 10% les plus éduqués (à comparer à 50% en moyenne dans les
pays à taux d’achèvement du primaire similaire, et à 38% en moyenne en Afrique)
■ A l’autre bout du spectre, les établissements communautaires des niveaux bas du
système (au primaire où ces écoles sont majoritaires et au secondaire où le mode
communautaire s’étend de plus en plus) sont financées par les familles, souvent
parmi les plus pauvres du pays.
Qui Induisent Une Sélectivité Sociale Très Importante dans l’Accès aux
Ressources, Peu Conforme Avec Une Stratégie Nationale de Réduction
de la Pauvreté
Du fait de la grande appropriation des ressources par les plus éduqués et d’un accès aux
niveaux hauts du système réservé aux plus favorisés (riches, urbains, garçons), la sélectiv-
ité sociale dans l’accès aux ressources publiques d’éducation est plus grande qu’ailleurs. On
estime au final que les garçons captent 2 fois plus de ressources publiques d’éducation que
les filles, les urbains captent 3,8 fois plus de ressources d’éducation que les ruraux et les plus
riches captent 7 fois plus de ressources que les plus pauvres.
d’une part par des taux effectifs de transition entre cycles qui ont progressé entre 1990 et
2003 (de 58 à 72% entre le primaire et le collège et de 57 à 80% entre le collège et le lycée)
et d’autre part par des taux de transition qui, en 2003, sont spécialement élevés tant dans
l’absolu qu’en termes comparatifs internationaux. Pour les 14 pays de la région pour
lesquels les données sont disponibles, la moyenne des taux de transition est respectivement
de 66 et 60% entre le primaire et le collège et entre le collège et le lycée ; le Tchad fait par-
tie des pays pour lesquels les transitions sont les plus généreuses.
Une Tendance à la Continuité au Sein du Système Éducatif. Dans tous les systèmes éducat-
ifs, il y a une tendance naturelle (du fait des demandes familiales comme de l’organisation des
programmes d’enseignement) à la continuité, les élèves qui ont achevé un cycle envisageant
essentiellement l’accès au cycle suivant. Cette tendance est très prononcé au Tchad avec les
conséquences négatives qui ont été soulignées ci-dessus. Ces conséquences sont spécialement
apparentes du fait que le pays est fondamentalement caractérisé par la dualité de son
économie, avec un secteur moderne limité en nombre d’emplois (il représente environ 5,7%
de la population active, ce chiffre n’augmentant que de façon très lente) et un secteur tradi-
tionnel (agro-pastoral et informel) qui assure (et assurera encore pour les 25 prochaines
années) la très grande proportion des emplois au sein de la population active du pays (ce même
secteur traditionnel dont l’amélioration de la productivité est freinée par le déficit de scolari-
sation de base). Dans ces conditions, la continuité au sein du système d’enseignement n’est pas
durablement compatible avec la structure de l’économie qui, elle (et même si elle évolue et qu’il
est pertinent d’anticiper son évolution) est caractérisée par la discontinuité. Il est important
de noter que les difficultés notées plus haut, si rien n’est fait, créeront des tensions encore plus
graves à l’avenir si l’augmentation (souhaitée) de la proportion de la classe d’âge qui achève le
primaire augmente sans que pour autant ne s’installe une régulation des flux entre les cycles.
Des Inconvénients Clairement Perceptibles dans la Qualité des Services Offerts au Niveau
Secondaire. Au cours des dernières années, il y a eu une pression forte pour l’extension des
effectifs dans les deux cycles secondaires ; ainsi entre 1997/98 et 2003/04, les effectifs au col-
lège et au lycée ont plus que doublé. Le Gouvernement a effectivement donné des chances
nouvelles de scolarisation à sa population mais l’a fait sans pouvoir mobiliser les ressources
nécessaires pour assurer que les services offerts conservaient une qualité adéquate. Au col-
lège on fait appelle de plus en plus aux enseignants vacataires, communautaires du sec-
ondaire, payés par les parents d’élèves et au lycée les tailles de classe ont augmenté pour
atteindre en moyenne 54 dans les établissements publics, soit une des valeurs les plus
élevées observées en Afrique. La dépense unitaire au lycée est estimée à 36% du PIB par
habitant, près de deux fois moins que la moyenne régionale (64 % du PIB par habitant).
La Nécessité de Réguler les Flux Scolaires et les Arbitrages Entre Quantité et Qualité. Les
problèmes dont il a été fait mention dans les sections précédentes et beaucoup de ceux relat-
ifs à l’iniquité du système actuel trouvent leur source dans l’absence de régulation des flux des
élèves au niveau secondaire, et il sera sans aucun doute indispensable que la politique éduca-
tive du secteur considère cet aspect. Sur le plan concret, cela pourra être opéré potentielle-
ment à trois niveaux : i) entre le primaire et le collège, ii) entre le collège et le lycée et iii) dans
l’accès au supérieur. Le poids donné à chacun de ces niveaux de transition doit bien sûr faire
l’objet de discussion, mais il semble que les principes suivants pourraient être retenus :
■ les effectifs du supérieur devront être contrôlés pour être raisonnablement en ligne
avec les demandes du marché de l’emploi moderne tant en quantité (même s’il est
Résumé Exécutif XXXVII
sans doute souhaitable de laisser des marges au-delà des demandes strictes du
marché qui sont par ailleurs connues seulement de façon incertaine) qu’en qualité
(ce qui impliquera sans doute des équilibres nouveaux entre enseignement court et
long, professionnel et académique, scientifique et littéraire/juridique, . . .). Dans ce
contexte, il importe de souligner qu’il n’est probablement ni politiquement ni
économiquement souhaitable d’opérer une sévère régulation des flux entre la fin
du lycée et l’accès au supérieur. L’essentiel de cette régulation serait à la fois plus
équitable, plus rationnelle et moins difficile à gérer opérée à des niveaux antérieurs.
■ sur cette base, le lycée constituerait alors de façon principale une préparation à l’en-
seignement supérieur. Les effectifs visés devraient alors anticiper les nombres qui
auraient accès au supérieur; de nouveau, il sera évidemment pertinent de ne pas agir
de façon stricte car il est souhaitable d’une part qu’il reste une sorte de compétition
entre les élèves pour réussir et d’autre part qu’une certaine proportion des sortants
entre sur le marché du travail sans avoir accès au supérieur. Sur le plan de la qualité,
des améliorations très substantielles devraient être visées (notamment par référence
à la situation actuelle) pour assurer une formation dans laquelle les études scien-
tifiques auraient une part plus grande, les tailles de classe seraient réduites et où lab-
oratoires, bibliothèques et informatique feraient partie intégrante des services
offerts. Au lycée, la quantité serait contrôlée, mais l’accent serait placé sur la qualité.
■ Au collège, des progrès devraient sans doute être faits pour améliorer la qualité des
services, mais l’objectif premier serait de faire progresser la couverture autant qu’il est
possible pour donner des chances de poursuite d’études à la plus grande proportion
des jeunes qui achèvent le cycle primaire. La définition plus précise de ce qui sera effec-
tivement possible dépendra d’une part des choix faits aux autres niveaux d’études
et de la mobilisation des ressources pour le secteur et d’autre part des possibilités logis-
tiques d’étendre les scolarisations à ce niveau d’études (construction de collèges,
recrutement des enseignants). Ce dernier aspect est susceptible de jouer un rôle tant
seront probablement intenses les pressions des jeunes sortant du primaire au fur et à
mesure de l’amélioration du taux d’achèvement du primaire d’ici 2015. Ainsi le main-
tien du taux de transition à sa valeur actuelle supposerait qu’on puisse multiplier, en
12 années et par un facteur proche de 5, le nombre actuel des élèves scolarisés au niveau
du collège; ceci constituerait une progression tout à fait considérable et sans doute peu
vraisemblable, même dans l’hypothèse où les ressources financières le permettraient.
Accompagner la Régulation et Faciliter l’Insertion dans le Secteur Informel. Sans anticiper
sur les choix structurels de politique éducative qui seront effectivement effectués par le Gou-
vernement, il ne fait pas de doute que la politique de régulation des flux aura pour con-
séquence que certains des jeunes du pays devront mettre un terme à leurs études académiques
soit après le primaire soit après le collège. On pourrait sans doute arguer que, par référence à
la situation actuelle où près de la moitié d’une cohorte n’achève pas le primaire, ce serait déjà
un progrès sensible que tous les enfants puissent au moins disposer d’une scolarité primaire
complète. Cela dit, le point fait plus haut sur la tendance à la continuité suggère que ceux qui
devraient mettre un terme à leurs études en fin de primaire ou de collège (ainsi que leurs sou-
tiens familiaux) percevront cela comme une frustration. Dans ce contexte et dans la perspec-
tive tout à la fois i) de rendre plus acceptable la nécessaire politique de régulation des flux et
ii) de contribuer à leur insertion réussie dans le secteur informel de l’économie, il pourrait
être pertinent de prévoir des formations professionnelles courtes. Ce point demandera
à être travaillé davantage et sans doute faire l’objet d’expérimentations; il s’agira ainsi
XXXVIII Résumé Exécutif
ulation qui a été construit dans le contexte de ce travail. Dans cette perspective, il pourra
être intéressant de s’appuyer sur une matrice de hiérarchisation et de préparation des choix
de politique éducative qui résume un certain nombre des points discutés ci-dessus et dont
une version de base est proposée ci-dessous :
Objectifs
Qualité.
Niveau/Type Quantité Général Spécifique
Pré-scolaire Développement de la Favoriser le mode
couverture communautaire
Primaire Achèvement Universel Améliorer 1. Subventionnement
Tx d’accès au CM2 = et formation de
100% tous les commu-
nautaires
2. Choix sélectifs des
intrants
PARTIE 3. Allocation des
BASSE moyens
DU
SYSTEME 4. Gestion péda-
gogique
Collège Accroissement des Améliorer 1. Subventionnement
effectifs autant qu’il et formation de
est possible en tous les vacataires
référence à l’augmen- 2. Réduire la taille
tation des effectifs qui des classes
achèvent le primaire
3. Polyvalence des
enseignants
Lycée Accroissement des Améliorer très 1. Réduire la taille
effectifs maîtrisé pour fortement des classes
anticiper les besoins (Sciences,
en effectifs du laboratoire,
supérieur informatique,
langues)
Technique 1. Développer en Rationalisation 1. Rationalisation
et Profes- fonction des des filières des coûts
sionnel demandes du (par secteur 2. Améliorer les
marché du travail économique) mécanismes
moderne d’insertion
2. Faciliter la régula- professionnelle
PARTIE tion des flux par
HAUTE des formations
DU professionnelles
SYSTEME courtes
Supérieur et Effectifs pour corre- 1. Rationalisa- Rationalisation des
recherche spondre aux deman- tion des coûts (notamment du
scientifique des quantitatives du filières système de bourses)
marché du travail (long/court,
public/privé,
acad./prof,
sur place/
distance)
2. Assurer une
production
de recherche
Executive Summary
W hereas the chapters of this report focus on a detailed and analytical perspective
of the Chadian education system, in accordance with specific and independent
observation from various points of view, this executive summary adopts a more synthetic
perspective. It addresses the question put forward separately in the chapters of the report in
a transversal way in order to arrive at a synthetic diagnosis, thus closer to decision-making
related to an education policy where all objectives, information, and constraints are
considered collectively. It is clear that the diagnosis put forward in this report has
consequences for the formulation of the education policy of the country. However, it should
be noted that we have to remain at the factual diagnosis level, without touching, in a direct
manner, recommendations in terms of actions to be pursued in the education policy, even
though, at times, the two can be quite similar.
In order to go in that direction, it will be necessary for the national actors in charge of
the country’s education policy: i) to appreciate the pertinence of the factual elements of the
diagnosis; ii) to identify options that can be suggested as possible answers to the questions
raised through the diagnosis; iii) to build up a development strategy for the education
sector (from pre-school to university level).
The challenge consists of, on one hand, assuring overall progress in the system (in
terms of coverage, quality of services provided, and of the level of equity of the system) and,
on the other hand, including in the strategy a context of physical and financial sustainabil-
ity in the mid-term (based on national resources, including oil revenues, anticipated across
sector arbitrations and external resources that could be generated for the sector). Given
unavoidable constraints on resources, some arbitration will be required; for that, the sim-
ulation model of the sector that is meant to accompany this report could be very helpful in
defining the outlines of the education policy as well as to include it in the across sectors
arbitrations and the DSRP.
Due to the data problems encountered and the necessity of improving the system of
information, this executive summary will focus on four parts: i) principal quantitative and
qualitative results of the system; ii) diagnosis about questions of efficiency, internal and
external, with particular emphasis on management issues; iii) issues of equity considered
under different perspectives, which are particularly important in poverty reduction;
iv) synthesis of ways to fit Chadian sector policy in a sustainable financial framework.
xli
XLII Executive Summary
data. The analysis carried out reveals that a special effort should be made to improve the
quality of demographic data projections; this work will have not only a technical dimen-
sion but a political one as well. Consolidation of aggregated demographic data begun pre-
viously, within the framework of RESEN, will be extended to disaggregated levels (regions
and prefectures) on a yearly basis and will be officially validated (mainly by the Ministry
of Planning) so that one set of data is used by all ministries and their partners.
School Data
■ Countries Status Report’s work on school files has resulted in exposing the diffi-
culties encountered by DAPRO to collect, deal with and produce school data inter-
nally consistent together with other sources of information.
■ The level of schooling rates calculated from demographic and health surveys (EDS
2003) basis deviate considerably from the one calculated based on administration
data. These discrepancies are not due solely to problems associated with the demo-
graphic data.
The multiplicity of tools used to collect information (DAPRO, DEB, DESG and DRH), the
length of the school questionnaire, the poor management of school identifying codes, and
dependence on foreign financial assistance needed to cover information collection are all
factors that negatively affect the reliability of the data and indicators. This shortcoming
affects the education partners at the same time by weakening the case file of the education
sector regarding justification for access to public resources. It should be noted that there is
much competition among sectors vying for access, mainly in the area of oil and external
resources.
Furthermore, these results point out widespread disparities based on areas (this applies to
standardized tests at all grade levels as well as national exams), showing the possibility of
improvement for less well performing schools.
Despite the Oil Resources, A Very Difficult Macroeconomic Context. The Chadian
macroeconomic context has drastically changed in recent years with the arrival of oil
resources. Nevertheless, even if the oil changes the economy, it is no guarantee for a sus-
tained growth over the long term, nor for an increase in the short and mid terms of the abil-
ity of the State to handle a greater part of national resources. The resources of the State
represent only 7.5 percent of the GDP (the weakest fiscal pressure in the world). The pub-
lic resources that finance partially the education sector are therefore scarce.
. . . That the Budgetary Priority is not Sufficient to Compensate. Despite a high budg-
etary priority for education (the current education expenditures represent 25 percent
of the state domestic resources in 2003); the extreme weakness of the fiscal pressure
(cf, point 2.1.2) translates to low public expenditures for education, representing only
2 percent of the GDP, one of the lowest in the world. This result indicates that a very
important task remains to be done i) at the macroeconomic level, to improve the fiscal
pressure and ii) to maintain and eventually increase the priority given to education in
the budget. Based on initial information, it is known that the budget implementation
for 2005 is worrisome.
. . . And a Lack of Priority for Primary Education. The allocation of public resources for
all education levels is not in line enough with the stated priority goals:
■ despite a primary cycle completion rate among the lowest in the world, only 46 per-
cent of the current public expenditures on education are allocated for basic schooling,
whereas in other countries with similar completion rates (Burkina Faso, Burundi,
Ethiopia, Madagascar, Mali and Niger) the share allocated to the primary sector is
an average 56 percent;
■ inversely, higher education benefits from a relatively generous allocation as com-
pared to the other countries. The share of current expenditures allocated to higher
education reaches 23 percent, which is higher than that observed in other compara-
ble countries (average 18 percent). This generosity cannot be justified in the exter-
nal efficiency of the sub-sector—most university graduates are either unemployed
or under employed.
is relatively good in Chad; the average duration of schooling is estimated at 4.9 years for
1.9 percent of the GDP allocated to the education sector, thus about 2.7 years of schooling
for each percent of the GDP, a value higher than the average observed in sub-saharan Africa
(1.9 years per percentage of allocated GDP).
The dynamic analysis of the quantitative efficiency of the system reveals that good
progress has been made, mainly regarding the gross increase of the number of commu-
nity teachers, costing very little, but permitting the majority of Chadian children to be
educated in 2004. In 1995/96, the average duration of schooling was only 2.9 years for
1.5 percent of the GDP allocated to the education sector, about 1.9 years of schooling for
each percent of GDP.
The problem:
In 2004, it was noted in Chad, 25% of repeaters are in the primary grades, 18% in the lower
secondary level and 24% in the upper secondary level. These figures are particularly high
compared to what is observed in the other countries (an average of 16% in the primary level
in Africa and an average of 10% of the sample of highest performing countries to achieve uni-
versal schooling). Those high rates of repeaters are the result: i) Of habits acquired by the system
(mainly inherited from the colonial system) and ii) it is presumed that repeating is linked to
quality and that having pupils repeat would improve school achievements). The international
research and the analysis conducted in Chad in chapter 4 show that:
(i) The decision about repeating is not always a just one. The grade level of the student does
not by itself explain a decision to repeat. Decisions about repeating are often based on
“subjective” reasons, such as the position of the pupil in the class, the environment and
learning conditions, and the qualifications of the teacher.
(ii) The pedagogical efficiency of repeating is not proven; the argument that repeating often
could be justified by the quality of education offered is not verified. The in-country
analysis has shown, that all things being equal, the results in grades 1 and 2 were better
than in schools where repeating was less frequent.
(continued )
XLVI Executive Summary
(iii) Repeating grades is a major factor in dropping out. Country Status reports, schools and
individuals agree as well on this point. Repeating grades enhances dropping out in the
course of schooling and remains the main hurdle in reaching universal primary education
(cf part 1.2). At the international level, it is estimated that more than 1% of repeaters is
associated with more than 1.2% of drop outs.
(iv) Repeating has an important impact on the cost. Repeating gets the system to pay for two
years of studies for only one validated year.
Conceivable solutions:
In Chad, the analysis does not suggest a policy of generalized automatic promotion (creating
problems indeed), but leads to consider the figure of 10% of repeaters as desirable and pos-
sible (it is in fact the referential value of the indicating framework Fast Track). Knowing this
need to reduce repeating, many African countries have chosen:
(i) to put in place three sub-cycles of two years each at primary level, corresponding to a
set of competencies that are well defined
(ii) not to allow repeating within sub-cycles, and
(iii) to limit the frequency of repeating between consecutive sub-cycles. This strategy has
shown its efficiency, mainly in Niger and in Guinea. It is obviously up to the Chadian
authorities to think about whether to implement such a strategy and assure that it is bol-
stered by: i) a strategy to inform and explain to teachers and parents alike the negative
effect of repeating and ii) mechanisms of evaluation and remedy to identify deficient
students.
Drop-Outs Out in the Middle of the Cycle: Problem and Conceivable Solutions
The problem:
The second main reason for the weakness of the internal efficiency of the system lies
in the number of drop outs in the course of the cycle. At the primary level, in particular,
dropping out before the end of the term wastes system resources because the pupil leaves
the system without achieving an acceptable level of literacy. For example only 3.5% of
those who leave in the third grade are literate when they reach adulthood (11% for those
who leave in fourth grade). As already mentioned in part 1.2, the rate of retention of
pupils in primary school in Chad is among the lowest in Africa. Improving this situation is
critical and, therefore, an obligation if Chad wishes to meet the universal primary school
target in 2015.
Conceivable solutions:
(i) Classic measures of expanding schools (to complete mainly incomplete schools). Still 15%
of the pupils are in incomplete schools which prevent them from reaching the sixth
grade. It is to be equally noted that 16% of the pupils live more than 2 km from their
school and which hinders attendance and leads to dropping out.
(ii) Alternative measures for stimulating demand for schools. Even when schools are com-
pleted, the dropout rate during the cycle is on average 50%; thus, the problem of sus-
taining demand for school is related to poor retention. In addition to repeating grades
(moving from 25% to 10% could help get a 10% increase in retention) the cost incurred
by the families (mainly to pay the salaries of community teachers) impacts school
demand negatively. This situation could be partially improved by subsidizing community
teachers.
Executive Summary XLVII
■ the allocation to decentralized units and school facilities of national resources (this
concerns the management of all human, physical and financial resources), and
■ when resources trickle down to the local level, each school benefits greatly (practice
in class, pedagogical management). The results in these two aspects are particularly
weak in Chad.
An Inefficient Allocation of Resources.
i) Too many administrative and support staff. Support staff within the education sys-
tem (in schools but mainly in central and decentralized services) represents about 23 per-
cent of total staff working at the primary level, whereas the corresponding figure is on
average less than 15 percent in the other countries of the region. It appears fair to conclude
that this percentage (including many people with the status of civil servant teachers) should
be reduced, mainly to provide much-needed teachers in the country and to improve the
efficiency of public debts’ utilization.
ii) Inconsistent Allocation of Resources
■ Allocation Level to the DDEN. It is very logical to state that the more pupils in
the department, the higher the operating budget of its school facilities should be.
The reality is quite different; budgetary allocations based on the number of
pupils represent only 23 percent among different DDEN. For example the DDEN
of Mandoul claimed in 2003 three times more students than the DDEN at
Ndjamena, yet received only half of the allocation.
■ At the School Facility Level. When analyzing school facilities at a more detailed
level, the observation is the same: the relationship between resource allocations
(human or material) to schools and number of pupils is inconsistent. In 34 per-
cent of the cases, the allocation of teachers does not relate to the number of pupils
per school. This places Chad among the countries where the ratio of teachers to
pupils is the lowest.
At the secondary level, the situation is worse: more than half of the discrepancies between
the numbers of allocated teachers cannot be explained through differences between the
numbers of pupils. Concerning the other school inputs, results are similar: for example,
the level of coherence is only 35 percent for reading texts books at the primary level. The
consequences of this bad management in the distribution of resources are flagrant dis-
crepancies in teaching conditions.
iii) Resources that do not always reach their intended destination. One of the reasons behind
the lack of coherence between resources received by schools and the number of their pupils
is due to problems regarding transferring the resources from the central office to the schools.
The analysis has exposed problems regarding the subsidy to the APEs for community teach-
ers’ salaries. In order for subsidies to reach the intended beneficiaries it is necessary that:
■ the planned budgetary line item for education be effectively executed (which is
not the case for the year 2003 according to national administrative accounts) and
XLVIII Executive Summary
■ The subsidies reach the community teachers, knowing that the distance is long
between the central office and the schools (a great number of intermediaries and
long distances to the most remote areas)
It would be helpful to use the Public Expenditure Tracking Survey to evaluate the propor-
tion of subsidies reaching the beneficiaries.
iv) Very expensive school buildings. In comparison with other countries, the classrooms
built in concrete and semi-concrete are particularly expensive in Chad. This will encour-
age consideration of greater use of alternative means of building (even if lifespan of these
facilities is shorter, they are by far more affordable) since the analysis has shown a lack of
impact of the type of building on school completion.
A Bad Conversion of Resources Into Results. In addition to great variability in the avail-
able means, results vary greatly among schools (success at the CEPE, PASEC’s test of school
achievements, retention of pupils for the entire cycle, percentage of repeating). Statistical
analysis has shown, based on empirical data, the possibility of identifying the most influ-
ential school factors to explain the differences in results among schools.
i) Some school factors are more efficient than others. Depending on the intensity of the
impact of the school factors and related costs, it is possible to put in place a selective strat-
egy in the use of factors associated with the improvement of results (in terms of retention
and learning). The reduction of repeating has a positive impact on the retention and on
the achievements without causing extra costs (in fact that could reduce the expenditures,
(cf, part 2.3.1). School textbooks (on retention and learning), food support (on learning)
furnishing classroom (on retention) are factors that reflect good efficiency. As for teachers’
characteristics, it is young teachers (less than 30 years old), women and those who have not
completed upper secondary school, who generally encourage pupils to stay in school and
it is community teachers, women and those with an upper secondary school degree who
obtain the best results from their pupils. Contrary to customary belief, the impact of civil
servant teachers and building quality did not have a great impact on learning although they
are more expensive than alternative solutions.
ii) the importance of effective school time. Nine years of schooling in Chad are necessary
to give the same opportunities for illiteracy eradication as 6 years in other African coun-
tries. This shows the importance of the effective school time, essential factor of learning
that should be certainly increased in the Chadian case by:
■ ensuring that the school year begins everywhere on the same day (meaning that
all transfers be made on time and that all teachers be at their location),
■ making sure that effective teaching is conducted throughout the school year,
iii-) reducing absenteeism on the part of teachers during the school year, iv-)
adjusting the school timetable to local conditions (e.g., at the provincial level,
adapt the school year to the farm work calendar and, at the local level, adapt the
school week to the market calendar).
Even though it is difficult to assess the total amount of time wasted, it is possible that this
amounts to as much as 30 percent of expected learning time (the PASEC analysis, estimates
the average number of missed days by teachers is 3,6/ per month). Improvements in that
area do not call for any additional expenditure.
Executive Summary XLIX
iii) need to improve pedagogical management. The impact of all variety of factors on the
quality of teaching has been established and it explains only a slight part of the changes in
the variability of results. Schools with comparable resources can have extremely different
results. Meaning that the improvement of the quality of teaching will certainly require an
increase of resources and training time for teachers. The improvement of pedagogical man-
agement will improve learning as well as transform existing resources into positive school
results at the local level. Introduction of a piloting system, largely absent in Chad, would
improve learning procedure. That will certainly require: i) the setting up or the reinforce-
ment mechanisms and incentive structures, monitoring and evaluation of practices ii) the
reinforcement of the power of local communities (APE and village communities). The best
results from community teachers’ even though under-trained, under-paid, and under-
qualified is derived from their proximity to both pupils and parents and to the providers
of the education service (in most cases, they are parents of pupils themselves).
The Added Value for Social Development Varies According to the Cycles. In the social
sphere, the analysis conducted recently on household surveys clearly indicates that it is in
the lower part of the system, and mainly at the primary level, that social competence
matters the most, mainly in the objective of poverty reduction. This is good, first of all, for
illiteracy elimination upon reaching adulthood, and more so to prevent poverty risks. In
both cases, available measures indicate that schooling at the primary level and at the first
stage of the lower secondary level, constitute the basic social investment. Those beneficial
effects of the basic education have also an intergenerational dimension: illiterate parents
tend less to send their children to school whereas that is no longer the case with someone
with a full primary education. About maternal health and chances of infant survival,
L Executive Summary
positive effects are noted for both primary secondary levels. Yet, as soon as the primary level
is completed, a substantial part of the social and positive effects are registered.
. . . Which Suggest Looking Back at Public Investment by Cycle. These empirical obser-
vations of the effect of education investments as well as in the economic and social sphere
clearly agree on identifying that in the present situation. i) Quite a lot has been done as far
as the upper part of the system is concerned (technical and mainly higher education) which
targets the modern employment sector, thus satisfying, without excess, both quantity and
quality demands, and ii) Not enough has been done in the lower part to insure that all
youth obtain at least a full primary education (as much as possible). This last point is essen-
tial for the society to envisage significant progress in labor productivity in the traditional
sector, in order to reduce poverty and illiteracy, as well as to progress in the field of pop-
ulation and health.
Geographical Disparities, Urban–Rural and Rich–Poor, Too Evident. Living area (urban/
rural) is more a source of disparity than gender. It is estimated that urban children are more
than twice likely to attain the sixth grade, than a rural child (53 percent in urban areas
against 20 percent in rural areas). The gap is even greater when crossing the urban/rural
dimension with gender. The chance of a boy attaining sixth grade is estimated at 63 per-
cent versus 12 percent for a rural girl. The differences between departments are also too
obvious: if the completion rate in primary school is on average 38 percent in Chad, it ranges
from 10 percent in the departments of East Batha and West to nearly 80 percent in West
Tanjile. The children of the Southern departments are more schooled than the others;
there, the problem of getting to first grade is resolved and completion is, on average, higher
than elsewhere.
The level of income is even a greater source of disparity in terms of schooling than gen-
der and living area. Beginning in primary school, it is observed that there are twice more
children from better off households than poor ones. These disparities are yet more pro-
nounced beyond primary school so that at the university level, 92 percent of students are
from the wealthiest 20 percent of households (no student is from the 40 percent of the
poorest households).
Executive Summary LI
■ Sixty-four percent of the public resources for education are appropriated to the
most educated 10 percent from primary school through the university level (com-
pared to 50 percent on average in countries with similar primary completion rates
and 38 percent on average in Africa).
7. A second important consequence of the effect of a pandemic on the Chadian education system con-
cerns teachers. It is estimated that by 2015, 400 additional replacement teachers will be needed annually
for schools to cover the expected loss of teachers due to HIV-related illnesses and death (beyond this, the
system will require additional teachers for school expansion.)
LII Executive Summary
■ At the other end of the spectrum, community schools at the lower level of the sys-
tem (at the primary levels where these schools are more numerous and at the second-
ary level where the community system is expanding more and more) are financed
by families, often among the poorest in the country.
■ The pupil to teacher ratio is on average 72 but varies from 40 to more than 100 in
the majority of schools.
■ On average, community teachers are 57 percent and, while they are absent in some
schools, they constitute the entire teaching staff in other schools.
■ On average, the same thing holds for 43 percent of trained teachers.
■ The availability of reading and math textbooks is estimated at only 1 to 2.6 pupils
on average, but this ratio varies depending on the school from 1 textbook for every
1.4 pupils to 1 for every 20 pupils.
These disparities are among the most significant ones. Its exist as well with other indicators
related to school inputs such as teaching conditions at every level of the system.
Differences that are not Justified by Better Results on the Part of Pupils Taught by Civil
Servants Teachers. Considering the magnitude of disparities in the treatment of different
categories of teachers, it is pertinent to ask oneself if those differences can be justified by
better results of civil servant teachers. Whether you take the analysis done through data
on national exams or data based on the survey with the standardized tests of PASEC8 it
appears, that all things being equal, the pupils of civil servant teachers do not achieve
better results than the pupils taught by community teachers. To the contrary, PASEC’s
analyses show that the pupils of community teachers achieve significantly better results
than those of civil servant teachers (teachers or substitutes).
These two results (inequity in treatment and poorer performance by the best paid
teachers) suggest certainly a need to readjust the policy regarding salaries mainly on the
basis of a generalization and increase of subsidy to community teachers. To say the least, it
is necessary that salaries effectively reach the beneficiaries, which: i) does not seem to be
common in Chad and ii) would reduce strikes by teachers—strikes that penalize the pupils
(the results of PASEC’s analysis show that pupils who attend schools where strikes take
place do not have as good a result as those in schools in which strikes do not occur).
A Tendency for Continuity Inside the System of Education. In all education systems there
is a natural tendency (due to family demands as well as of the organization of teaching pro-
grams) to advance to a higher level for continuity sake. This tendency is very remarkable in
Chad and fraught with negative consequences which have been underlined above (cf part 2.5).
Those consequences are particularly apparent because of the fact that the country operates
on a dual economy, with a modern sector limited in employment opportunities (representing
8. Programme d’Analyse des Systemes Educatifs de la CONFEMEN: these are interim results while the
official report is being prepared.
LIV Executive Summary
about 5.7 percent of the active population, this figure increases at a very slow pace) and
a traditional sector (agricultural, pastoral and informal) which provides (and will insure
for the next 25 years) the largest proportion of employment among the active population
of the country (this same traditional sector whose improvement in productivity is ham-
pered by the deficit in basic schooling). In those conditions, continuity within the system
of teaching is not compatible over the long term with the structure of the economy which
(even if it changes and it is pertinent to anticipate its evolution) is characterized by a dis-
continuity. It is important to note that difficulties mentioned above, if nothing is done, will
create more serious tensions in the future if the increase (desired) of the proportion of
those that complete the primary cycle increases while a regulation of the flow between
cycles is stagnant.
Clear and Perceptible Disadvantages in the Quality of Services Offered at the Secondary
Level. During the past years, there has been strong pressure for the increase of the num-
bers in the two secondary cycles; so, between 1997/98 and 2003/04, the numbers in the
lower secondary and upper secondary levels have more than doubled. The Government has
offered new opportunities for education to its population but did it without having the
necessary resources on hand to insure that the services offered were of adequate quality. At
the lower secondary level, the services of substitute and community teachers paid by pupils’
parents are more in demand and at the upper secondary level, class size has increased to an
average of 54 in public schools, which is the highest levels known in Africa. The unitary
expenditure at the high school level is estimated at 36 percent of the GDP per Capita, nearly
twice less than the regional average (64 percent of the GDP per Capita).
Necessity to Regulate School Flow and to Balance Quantity and Quality. The lack of flow
regulation at the secondary level is the reason for the problems mentioned in the preceding
sections and many of those concerning the inequity of the current system (cf part 3).
And it will be without a doubt necessary for the education policy to consider that aspect.
On a concrete plan, that could operate on three levels:
The weight given to each of the levels of transition must of course, give way to discussions,
but it seems that the following principles could be retained:
■ on that basis, upper secondary level attendance would constitute, in a major way,
the requisite for higher learning. The number targeted to attend university should
anticipate the number of students who might be qualified to enter. It will be
important not to act in a strict manner because it is desirable, on one hand, to
encourage competition between pupils to succeed and, on the other hand, there is
a certain proportion of pupils who leave to join the job market without pursuing
university-level education. As far as quality is concerned, substantial improve-
ments should be aimed at (mainly with reference to the present situation) placing
more emphasis on scientific training, reduction of class size and inclusion of lab-
oratories, libraries and computer science courses as part of the services offered. At
the upper secondary level, the quantity would be controlled, but stress will be put
on the quality.
■ at the lower secondary level, progress should certainly be made in order to improve
the quality of services, but the first objective should be to push forward greater cov-
erage as much as possible in order to give opportunities to a greater proportion of
youth to complete the primary school cycle. A more precise definition of what is
effectively possible will depend, on one hand, on the choice made about other levels
of study and on the mobilization of resources for the sector and, on the other hand,
on the logistical possibilities to expand the recruitment of students (building of sec-
ondary schools, recruitment of teachers). This last aspect is likely to play a role
because intense pressure will probably come from the primary school level as the
rate of completion of primary schools improves between now and 2015. So, to main-
tain the rate of transition at its present value assumes that we are able to multiply in
12 years and by a factor close to 5, the present number of pupils in school at the
lower secondary level; this would constitute quite a considerable progression and it
is unlikely, even with the assumption that financial resources would allow.
Support of the Regulation and Facilitating the Insertion in the Informal Sector. Without
anticipating the structural choices of education policy that will be implemented by the gov-
ernment, there is no doubt that the policy of flow regulation would cause some youth in
the country to leave school prematurely, either after the primary or after the lower second-
ary level. We could conclude that with reference to the present situation, where more than
half of pupils do not complete primary school, it would be reasonable to ensure that all
children complete their primary education. As such, the point raised above about the ten-
dency for continuity suggests that those who would drop-out at the end of primary or
lower secondary level (family supports as well) would perceive it as a failure
In this context and from the perspective of:
The technical teaching and the professional training would then have a double role, on one
hand, preparing the youth for technical professions of the modern sector with numbers
compatible with foreseeable demands of the labor market and, on the other hand, con-
tribute to the Chadian economy by integrating successfully into the formal sector a certain
proportion of youth affected by the flow regulation of pupils at the secondary level.
Mechanism of Incentives or Disincentives for Access to Different Levels to Put in Place the
Perspective of Improving Equity. From the perspective of flow regulation, issues of equity
are particularly problematic in Chad (in part 3). It is important to treat these problems with
flexibility. It would be harmful for the system to enforce greater strictness regarding access
to secondary cycles and to higher institutions. Enrollment in higher institutions is extremely
limited for disadvantaged children.
It is then probably convenient to think and put in place some incentive or disincentive
mechanisms based on a differentiated approach by level of teaching.
■ On the basic teaching level, the objective of universal completion is without ambi-
guity and the principal problem is clearly identified by the diagnosis: dropouts
during the cycle are widespread and, in most cases, they are due to the fragility of
school demand, especially in the poorest areas. It is therefore necessary to stimulate
school demand that can certainly be brought about by training and generalization,
education and subsidizing all community teachers.
■ As for lower secondary schools, the diagnosis has shown clearly that it is at the time
of admission that most disadvantaged pupils leave school (only 11 percent of
pupils at the secondary level are from families who are among 40 percent of the
poorest of the country). If a positive discrimination is implemented (in the form
of a scholarship, for example) it is certainly at the lower secondary level that it will
be more pertinent given that few very poor children reach upper secondary school
or university.
■ At the university level, the present system of scholarships is particularly inefficient
because it stimulates a demand already in excess compared to the needs of the
economy and it is particularly inequitable because only the richest students in
Chad can profit from it (no student is from a family among the 40 percent of the
poorest of the country). Even if the political difficulties surrounding this question
are understandable, there is no doubt that a reform of the system of scholarship
is necessary in order to put individual behavior more in line with the collective
interest over the long term.
Given the fact that the current education system operates with a reduced volume of
public resources, it should by all means experience some substantial development in both
quantity and quality. It will mobilize additional resources, especially those from oil. How-
ever, it is also obvious that those have limited elasticity in order to remain in a perspective
of financial sustainability in the mid term:
this work. From that perspective, it could be interesting to rely on the hierarchical
matrix and preparation of choices of education policy which summarize a num-
ber of points raised above and whose basic version is suggested below.
Objectives
Quality
Level/Type Quantity General Specific
Pre-school Coverage development To support the com-
munity mode
Primary Universal completion To improve 1. subsidizing & train-
rate of access to sixth ing of all commu-
grade = 100% nity teachers
2. selective choices of
inputs
Lower 3. allocation of means
Part 4. pedagogical
of the management
System
Lower Increase the number To improve 1. subsidizing & train-
Secondary as much as it is possi- ing of all substitute
ble by reference of teachers
increase in number of 2. reduce the size of
those who completed classrooms
the primary level
3. multi-purpose
teachers
Upper Control numbers of To improve
Secondary students to better greatly (sciences,
anticipate the needs lab, information
in higher institutions technology)
Technical & 1. to develop accord- Rationalization of 1. Rationalization of
Professional ing to demands of subjects (per eco- costs
modern employ- nomic sector) 2. improve mecha-
ment on the market nisms of profes-
Upper 2. to facilitate the sional insertion
Part regulation of the
of the flow through short
System professional courses
Higher Numbers to corre- 1. Rationalization Rationalization of
Education & spond to quantitative of subjects costs (mainly in the
Scientific demands of the (long/short system of awarding
Research employment n market public/private scholarships)
acad./prof.) on
the spot/
distance
2. insure produc-
tion of research
C HAP ITR E 1
Le Contexte Démographique,
Économique et des
Finances Publiques pour
l’Évolution du Secteur
Généralités
Le Tchad dont la superficie s’étend sur 1.284.000 Km2 pour une population d’environ
9,3 millions d’habitants en 2005 (dont une proportion proche d’hommes et de femmes)
avec un taux de croissance annuel de l’ordre de 3,1 % par an, est situé entre le 8ème et le 14ème
degré de latitude Nord et le 14ème et le 24ème degré de longitude Est. Le pays est enclavé et les
ports les plus proches de la Capitale N’Djamena, située au Centre-Sud-Ouest du pays, sont
ceux de Douala au Cameroun (1 500 Km) et de Port Harcourt au Nigeria (1 700Km). Il est
l’un des dix pays les plus pauvres du monde. Son PNB par habitant était de 230 US$ en
2002, contre une moyenne de 440 US$ en Afrique subsaharienne. En 2003, son Indice de
développement humain (PNUD) classe le pays au 166ème rang parmi les 173 pays pour les-
quels le calcul de cet indice a été fait. Le niveau éducatif est relativement bas : plus de trois
quarts de la population est analphabète.
1
2 Document de Travail de la Banque Mondiale
sûr pas les plus favorables pour obtenir des projections précises; cela dit, l’existence com-
plémentaire des données d’enquêtes de ménages (EDS de 1997 et MICS de 2000) permet
tout de même aux institutions (Ministère du Plan du Tchad, Division de la Population des
Nations-Unies) en charge de produire ces projections d’aboutir à des estimations raison-
nables. Dans le cadre de ce rapport, nous avons utilisé les données fournies par la Direc-
tion de la Coordination des Activités en matière de Population. Nous avons toutefois
apporté quelques ajustements qui ont été jugés nécessaires, en particulier pour la popula-
tion d’âges compris entre 5 et 25 ans (qui nous intéresse de façon spécifique en matière sco-
laire); ils sont décrits dans la note jointe en annexe de ce chapitre.
Le tableau I.1, ci-après, donne les évolutions globales ainsi que celle de la population
d’âge scolaire. Selon ces estimations, le Tchad demeure l’un des pays africains où la pres-
sion démographique est très forte (en fait l’une des plus fortes de la région). Selon l’hypo-
thèse moyenne sur les paramètres démographiques structurels, la population tchadienne
était estimée à 7,916 millions d’habitants en 2000, alors qu’elle se situait à 5,829 millions
d’habitants en 1990, manifestant un taux de croissance annuel global de 3,11 %. Les pro-
jections à l’horizon de l’année 2015 concernant l’hypothèse moyenne conduisent à plus ou
moins maintenir cette valeur du taux de croissance annuel.
orphelins de mère ou de leurs deux parents dont le décès est dû au SIDA pourrait s’accroître
pour atteindre un chiffre compris entre 90 et 100 000 en 2015. En termes relatifs, cela signi-
fie que ce serait environ 5 % de la population d’âge scolaire dans le primaire qui seraient
concernés. Au cours de cette même période, les besoins annuels de remplacement de maîtres
du primaire pour maladie, comme le nombre annuel de décès du fait de la maladie, pour-
raient progressivement augmenter pour atteindre, chacun, un chiffre annuel de l’ordre de
400 en 2015, compte tenu du stock d’enseignants nécessaires pour atteindre les objectifs
de l’EPT à cette date.
9. En 1995, le Gouvernement s’est lancé dans un vaste programme d’ajustement structurel. Ce pro-
gramme, appuyé par les institutions multilatérales et bilatérales visait à mettre en œuvre des mesures de
libéralisation économique, notamment : (i) l’abolition du contrôle des prix; (ii) l’abolition des licences
d’importation et d’exportation; (iii) la révision du code de travail avec l’abolition du salaire minimum;
(iv) la libéralisation du commerce extérieur; (v) la suppression des taxes d’exportation; (vi) la simplification
du code des investissements en vue d’inciter les investisseurs nationaux et étrangers, ainsi que (vii) la libé-
ralisation des activités bancaires. Le Gouvernement a adopté les actes d’uniformisation de l’OHADA. Il a
été procédé à la privatisation de toutes les banques et presque toutes les entreprises publiques ainsi qu’à
la liquidation de certaines autres. Le déficit des finances publiques (dons exclus) a été réduit de 14,2 % du
PIB réel en 1994 à 9 % en 1998.
Tableau I.2. Les Principaux Agrégats Macro-Économiques et les Revenus de l’Etat, 1990–2007
Revenus de l’Etat(1) (en milliards Fcfa)
Produit intérieur brut—PIB(1) PIB/Tête (Fcfa) Source nationale
Prix Prix Prix Par Par
courants constants constants Totaux habitant habitant Source extérieure
(milliards Déflateur (milliards Population Prix (Fcfa de prix (Fcfa en Fcfa de En % Appui
Années Fcfa) du PIB Fcfa de 2003) (millions) courants 2003) courants courants) 2003 du PIB budgétaire Investissement
1990 473 1,98 937 5,829 81 146 160 801 31,6 5 421 10 743 6,68 0,0 38,0
1991 530 1,92 1019 5,939 89 246 171 580 32,2 5 422 10 424 6,08 15,2 11,1
1992 498 2,21 1099 6,050 82 310 181 695 31,4 5 190 11 456 6,31 8,1 16,2
1993 414 2,24 926 6,280 65 924 147 461 29,2 4 650 10 401 7,05 3,7 15,4
1994 655 1,56 1 021 6,491 100 906 157 321 31,9 4 914 7 662 4,87 17,8 44,2
1995 718 1,43 1 029 6,709 107 013 153 372 44,8 6 677 9 570 6,24 14,5 39,2
1996 821 1,28 1 054 6,935 118 384 151 944 59,6 8 594 11 030 7,26 16,2 34,4
1997 880 1,25 1 099 7,168 122 763 153 322 68,4 9 542 11 917 7,77 6,6 49,8
1998 1 027 1,13 1 163 7,409 138 609 157 024 76,1 10 271 11 635 7,41 12,8 38,1
1999 943 1,23 1 157 7,658 123 132 151 036 78,0 10 185 12 493 8,27 1,3 42,9
2000 991 1,16 1 150 7,916 125 189 145 230 73,0 9 222 10 698 7,37 7,2 48,0
*Estimations
5
6 Document de Travail de la Banque Mondiale
estimation de 2 608 milliards Fcfa en 2005). En monnaie constante, l’impact est tout à
fait semblable. Le graphique I.1, ci-après, qui montre l’évolution du PIB par habitant en
monnaie constante, illustre de façon frappante le changement de régime de l’économie
tchadienne : entre 1993 et 2001, il y a globalement une stagnation du PIB par habitant
entre 140 et 160 000 Fcfa de 2003, alors que l’année 2004 marque la véritable rupture.
Les projections macroéconomiques actuelles suggèrent toutefois qu’il s’agit davantage
d’une modification du palier auquel se situe l’économie tchadienne que d’un nouveau
régime dans lequel il y aurait une croissance économique annuelle régulière. Bien sûr le
contexte nouveau va toutefois créer des conditions nouvelles favorables au développe-
ment éventuel d’une nouvelle dynamique; mais ceci reste évidemment plus incertain.
240000
220000
200000
180000
160000
140000
120000
100000
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
Années
170
150
Fcfa de 2003)
130
110
90
70
50
30
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
Années
considère en premier lieu le déficit budgétaire courant calculé comme la différence entre
les dépenses courantes du gouvernement et ses recettes domestiques propres, on trouve
(tableau I.3) des valeurs qui étaient fortes au début des années 90 (4 à 5 % du PIB) et qui
se réduisent pour se situer autour de 2 à 3 % dans la période récente. Si on examine main-
tenant l’ensemble des dépenses du gouvernement, y compris les dépenses en capital pour
lesquelles l’aide extérieure apporte une contribution très substantielle (souvent plus de la
moitié des sommes concernées), le déficit annuel global est sensiblement plus important
puisqu’il s’est situé entre 6 et 8 % du PIB du pays entre 2000 et 2003.
Si on s’attache maintenant au volume des dépenses du gouvernement, on observe
bien sûr une forte augmentation entre 1990 et 2003 puisqu’en valeurs courantes, il s’agit
plus ou moins d’un triplement sur la période (de 45,9 milliards Fcfa en 1990 à 138,1
milliards en 2003). En termes de pouvoir d’achat pour les activités du gouvernement
tchadien (hors intérêts de la dette), l’évolution est évidemment moindre, le chiffre pas-
sant alors seulement de 91 milliards de Fcfa de 2003 en 1990 à 138 milliards Fcfa en 2003
(une progression tout de même de l’ordre de 50 %). Par contre lorsqu’on tient compte
du fait que la population tchadienne a elle-même augmenté sur la même période (il est
estimé qu’elle est passée de 5,8 millions à 7,9 millions d’habitants), il s’ensuit que le rap-
port entre le volume des dépenses courantes et le nombre des habitants du pays a connu
une évolution beaucoup moins favorable, comme l’illustre les données consignées dans
le graphique I.3, ci-après.
Graphique I.3. Evolution du Rapport Entre les Dépenses Courantes hors Dette en Prix de
2003 et la Population du Pays, 1990–2004
20000
Dépenses courantes hors dette par
18000
habitant (Fcfa de 2003)
16000
14000
12000
10000
8000
6000
1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004
Années
Il apparaît donc que les possibilités budgétaires effectives de l’Etat de rencontrer les
besoins de financement des activités collectives du pays (éducation, santé, justice, . .) ne se
sont pas améliorées. Alors que l’indicateur se situait au dessus de 16 000 Fcfa (de 2003) au
début des années 90, celui-ci baisse sensiblement pour atteindre seulement 10 500 Fcfa en
1998 (une baisse de 40 % par rapport à l’année 1992) et progresser ensuite mais sans avoir
encore retrouvé les niveaux observées 10 années auparavant. C’est dans ce contexte global
que se situe l’évolution des dépenses publiques pour le secteur de l’éducation.
10 Document de Travail de la Banque Mondiale
11
12 Document de Travail de la Banque Mondiale
Graphique I.4. Evolution des Dépenses Courantes d’Éducation par Jeune 6–15 Ans en Fcfa
de 2003, 1993–2003
14000
par jeune 6-15 ans (Fcfa de 2003)
Dépenses courantes d'éducation
12000
10000
8000
6000
4000
1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004
Années
de noter que la faiblesse de la proportion des dépenses publiques d’éducation dans le PIB
tient pour une part essentielle à la faiblesse de la collecte de revenus publics dans le pays
et dans une mesure beaucoup moindre à une priorité défaillante pour l’éducation au sein
des arbitrages intersectoriels. A cet égard, les perspectives ouvertes par l’économie pétro-
lière sont donc susceptibles de permettre, dans la période à venir, une mobilisation accrue
de ressources publiques pour le secteur, dans l’hypothèse, bien sûr, où le degré de prio-
rité pour le secteur ne serait pas réduit.
C HAP ITR E 2
C
e chapitre propose tout d’abord une description de la structure des scolarisations
par niveau d’enseignement ainsi que son évolution au cours des 10 dernières
années. Il aborde ensuite l’analyse des scolarisations selon plusieurs angles : i) de
façon globale en rapportant les effectifs scolarisés aux populations en âge de l’être, ce qui
conduit à l’estimation des taux de scolarisation; ii) de façon plus fine par l’estimation et
l’analyse des profils de scolarisation qui fournissent une image plus juste du parcours sco-
laire d’une cohorte à chacun des niveaux et à chacune des classes du système éducatif. En
liaison avec l’identification des profils de scolarisation, le chapitre abordera également la
question de l’identification et de l’estimation du poids relatif des facteurs situés respecti-
vement du côté de l’offre et la demande dans l’explication des problèmes de scolarisation,
en distinguant notamment les dimensions de l’accès à l’école et de rétention en cours de
cycle d’études.
Par ailleurs ce chapitre examine aussi la couverture agrégée du système éducatif tchadien
(espérance de vie scolaire) du point de vue de son efficience globale, en mettant en regard la
durée moyenne de scolarisation avec les ressources publiques mobilisées pour le secteur.
13
14 Document de Travail de la Banque Mondiale
ii) l’enseignement secondaire est composé de deux cycles : le premier cycle comprend
4 année d’études et est sanctionné par le Brevet d’Etudes du Premier Cycle (BEPC);
le second cycle dure 3 années et est sanctionné par le baccalauréat. L’enseignement
secondaire est par ailleurs réparti en deux branches, la formation générale qui
regroupe la majorité des élèves du secondaire et la formation technique; cette der-
nière est dispensée d’une part dans les collèges techniques pour une formation de
3 ans sanctionnée par le Certificat d’Aptitude Professionnelle (CAP) et d’autre part
dans les lycées techniques pour une formation de 3 années sanctionnée par le bac
technique. Par ailleurs, pour les sortants du primaire, il existe aussi des formations
en centres d’apprentissages pour une durée de 3 années.
iii) l’enseignement supérieur comprend des formations diversifiées dont la durée
d’études varie de 2 à 7 années. Ces formations sont organisées principalement au
sein du Ministère de l’enseignement supérieur, mais d’autres formations, de
nature professionnelle sont organisées sous la tutelle d’autres ministères (Santé
publique, Agriculture, Travaux publics . . .).
En plus de ces trois cycles d’études, la formation des instituteurs est assurée par les
Écoles Normales d’Instituteurs (ENI) délivrant le Certificat Elémentaire de Fin d’Etudes
Normales (CEFEN, formation de 2 ans) et le Certificat de Fin d’Etudes Normales (CFEN),
formation d’une année dispensée aux titulaires du CEFEN ou du baccalauréat.
i) en premier lieu, le pays n’a pas réussi à uniformiser la collecte de ses données sco-
laires de base. En effet, outre le service installé au sein de la DAPRO (Direction de
l’analyse et de la prospective), la Direction de l’enseignement de base (DEB) et la
Direction de l’enseignement secondaire général (DESG) ont toujours continué de
façon parallèle la collecte des mêmes données. Mise à part le gaspillage évident de
ressources dans un pays où les moyens font cruellement défaut, cette double col-
lecte entraîne aussi de querelles sur la qualité des données collectées, chaque ser-
vice estimant moins fiables et/ou moins légitimes les résultats de l’autre. Le fait est
que les chiffres proposés par ces trois directions peuvent différer de façon non
anecdotique, y compris sur des éléments aussi centraux que le nombre des élèves
scolarisés ou celui des écoles. Cette question de dualité de la collecte des informa-
tions vaut à la fois pour les enseignements primaires et secondaires.
ii) en second lieu, il convient de noter les difficultés de nature logistique liées à l’opé-
ration même de collecte; deux types de problèmes sont alors identifiés : i) le pre-
Le Système Éducatif Tchadien 15
son expansion et qui peuvent toucher efficacement des populations rurales ou désavanta-
gées. Dans le cas du Tchad, le fait qu’il existe des services préscolaires de type communau-
taire en milieu rural constitue un aspect qu’il sera intéressant de documenter de façon plus
précise, notamment dans la perspective de développement du système.
Tableau II.2. Proportion des Enseignants Communautaires Selon le «Type» des Écoles au
Niveau Primaire, 2003–04
«Type» déclaré des écoles 0 1–29 30–49 50–69 70–99 100
Publiques
% des écoles 13 7 5 34 15 26
% des élèves 14 15 7 30 19 15
Communautaires
% des écoles 13 0 0 4 2 81
% des élèves 29 1 1 4 5 60
Publiques/Communautaires
% des écoles 13 4 4 23 10 46
% des élèves 18 12 6 24 15 26
Ce tableau est intéressant en ce sens qu’il montre les imprécisions évidentes dans les
appellations et de la distinction des écoles dites publiques et celles qui sont dites com-
munautaires. En effet, sur les données de 2003–04 dont la qualité de la distinction entre
écoles publiques et communautaires est meilleure que celle des données de l’année sco-
Le Système Éducatif Tchadien 19
laire 2002–0310, on trouve que 29 % des élèves scolarisés dans des écoles dites commu-
nautaires sont en fait scolarisés dans des écoles où tous les enseignants sont payés par
l’Etat; de même, on trouve que 64 % des élèves scolarisés dans des écoles dites publiques
sont scolarisés dans des écoles où la majorité des enseignants sont payés par les commu-
nautés (parfois même où tous les enseignants sont payés par la communauté).
10. Ainsi la fréquence des enseignants communautaires dans les écoles dites «publiques» en 2002–03
est-elle de 72 %, alors qu’elle n’est que de 69 % dans les écoles dites «communautaire»; en 2003–04, les
chiffres respectifs sont de 62 et 85 %.
20 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau II.3. Taux Annuel de Croissance (%) des Effectifs par Niveau Éducatif et Période
Période
1990–91 à 1990–91 à 1998–99 à
2003–04 1998–99 2003–04
Primaire 6,7 6,0 7,9
Secondaire général 1 10,3 8,8 12,7
Secondaire général 2 12,4 11,9 13,1
Enseignement technique (hors ENI) 1,6 –4,1 11,5
Enseignement supérieur 9,6 8,2 16,1
Les données du tableau II.3 rappellent tout d’abord que si la croissance des effectifs
a certes été vive pour le niveau primaire, elle a toujours été inférieure, quelle que soit la
période considérée ici, à celle des niveaux du secondaire général et du supérieur. On
remarquera par ailleurs que ceci est spécialement vrai pour la période récente (allant de
1998–99—2003–04). Ces observations, qui seront confortées par les analyses conduites
dans la section III de ce chapitre, suggèrent une forte tendance à la continuité «naturelle»
dans les flux d’élèves au sein du système éducatif tchadien et in fine l’absence d’une véri-
table priorité pour l’enseignement primaire. Nous examinerons ultérieurement l’impact
de ce type de structure pour la dynamique implicite du système dans la décade à venir en
absence d’un changement de politique de régulation des flux d’élèves.
manière habituelle de procéder consiste à calculer des taux bruts de scolarisation (TBS),
rapport du nombre des élèves scolarisés à un niveau d’enseignement avec le nombre des
jeunes d’âge correspondant normalement à ce niveau d’enseignement dans la population
du pays à la même date. Le tableau II.4 (qui utilise les données démographiques ajustées
selon les procédures présentées dans la note en annexe du chapitre 1) propose l’estimation
des taux bruts de scolarisation aux différents niveaux du système et leur évolution au cours
des 15 dernières années.
Tableau II.4. Evolution des Taux Bruts de Scolarisation (%) aux Différents Niveaux
Scolaires, 1990–91 to 2003–04
TBS (%) Années
Niveau éducatif 1990–91 1995–96 1998–99 2000–01 2002–03 2003–04
Préscolaire* 1,2 1,4
Primaire 54,5 53,1 69,4 76,9 83,9 87,7
Secondaire Général 1 9,9 12,4 14,6 17,5 21,9 22,7
Secondaire Général 2 4,1 5,9 7,5 9,5 11,2 11,7
Technique** 48 32 26 29 40
Supérieur** 53 49 75 81 94 116
mais la distinction entre le premier et le second cycle secondaire n’est disponible que pour
une proportion d’entre eux. Par ailleurs, la comparabilité directe de l’ensemble de ces
chiffres est mal assurée d’une part en raison de durées différentes des cycles primaire et
secondaire (il peut durer entre 5 et 8 années) et d’autre part en raison de la signification
même des premier et second cycles au niveau secondaire (d’une part compte tenu du point
précédent et d’autre part parce que certains pays n’ont en fait qu’un cycle secondaire alors
que d’autres qui ont deux cycles, peuvent présenter en fait des configuration structurelle
assez différentes). Pour ces raisons, il semble préférable de limiter la comparaison aux 15
pays francophones d’Afrique subsaharienne pour lesquels des informations statistiques
détaillées et récentes sont disponibles. Le tableau II.5, ci-après, propose les chiffres princi-
paux pour cette comparaison.
Tableau II.5. Situation Comparée des TBS (%) aux Différents Niveaux d’Enseignement du
Tchad et des Pays Africains Francophones; Année la Plus Récente
(2001–02 à 2003–04)
Secondaire Secondaire
général général
Préscolaire Primaire 1er cycle 2nd cycle Supérieur*
Ensemble des 15 pays
africains francophones
Moyenne des 15 pays 3,5 80,4 26,9 11,3 283
Plage de variation [1–14] [40–102] [11–50] [3–18] [116–602]
Tchad 1,4 87,7 22,7 11,7 116
Bien que la moyenne des pays francophones ne constitue pas en soi une norme sur
laquelle il serait souhaitable pour le Tchad de s’ajuster, l’existence éventuelle d’une diffé-
rence substantielle entre la situation d’un pays et la situation moyenne sur un aspect par-
ticulier signale qu’il serait intéressant d’explorer cet aspect de façon plus approfondie en
référence aux éventuelles spécificités du contexte national. Si on examine maintenant la
valeur du TBS des différents niveaux d’enseignement au Tchad dans cette perspective com-
parative, on observe que :
■ Le profil de scolarisation transversal identifie les taux d’accès dans chacune des
classes du système à la date de l’observation, en référence aux populations en âge de
les fréquenter. Si on se situe dans le présent, il donne une photographie instantanée
actuelle du système et nécessite pour son calcul des données démographiques fiables.
■ Le profil longitudinal cible les jeunes qui, à un moment donné du temps sont en fin
de cycle, en reconstruisant (de façon rétrospective) leur carrière scolaire depuis leur
accès (quelques années auparavant) dans la première classe du cycle d’études. Il
fournit les taux d’accès à chaque classe effectivement observé tout au long du cycle
écoulé pour cette cohorte et constitue à ce titre une photographie ancienne de l’état
du système. Il nécessite d’avoir des données scolaires sur au moins 6 ans pour ce qui
est de l’enseignement primaire ainsi que des données démographiques pour caler le
profil sur le taux d’accès observé à la date ou la cohorte est entrée dans le cycle.
■ Le profil pseudo-longitidunal permet d’avoir par anticipation une photographie du
parcours scolaire des individus qui viennent de rentrer dans le système en consi-
dérant les conditions actuelles de scolarisation. Sa méthode de calcul (qui sera
24 Document de Travail de la Banque Mondiale
détaillée plus loin dans le corps de ce chapitre) nécessite en plus des données sco-
laires sur deux années consécutives, des données de la population en âge d’entrée
en première année du cycle.
Le tableau II.6 donne les principaux éléments concernant ces estimations empiriques pour
la période récente. Il s’agit des années 1997–98 et 2003–04 pour le profil transversal et des
années 2002–03 et 2003–04 pour le profil pseudo-longitudinal; pour le profil longitudinal du
primaire, il s’agit de l’année 2003–04 pour la classe de CM2 et des années 1997–98 et 1998–99
(années d’entrée à l’école pour la cohorte en CM2 en 2003–04) pour la classe de CP1.
11. Sur le plan numérique, on peut vérifier que la valeur du taux brut de scolarisation de 87,7 % est
compatible avec celle du taux d’achèvement de 37,8 %. En effet, avec un taux d’accès de 103 % et un taux
d’achèvement de 37,8 %, on obtient une valeur moyenne sur le cycle (hypothèse de linéarité) de 70,2 %; en
tenant compte d’un facteur d’alourdissement de 1,25 (eu égard au fait qu’on trouve 25 % de redoublants
au sein des effectifs scolarisés), on aboutit à une valeur de 87,7 % (=70,2 × 1,25), qui est la même que celle
estimée pour le TBS.
Tableau II.6. Profil Transversal de Scolarisation pour les Années 1997 et 2003–04
Nombre d’èlèves non-redoublants Population Profil transversal (%)
Classes 1996–97 1997–98 2002–03 2003–04 Age 1997 2003 1997 2003–04
CP1 158 322 185 434 246 442 264 561 7 ans 219 509 256 203 84,5 103,3
CP2 103 798 125 431 180 159 187 555 8 ans 209 601 246 322 59,8 76,1
CE1 78 112 93 862 151 681 160 001 9 ans 200 141 236 822 46,9 67,6
CE2 53 275 62 825 121 416 130 444 10 ans 191 107 227 689 32,9 57,3
CM1 39 940 44 897 93 943 104 689 11 ans 182 481 218 907 24,6 47,8
CM2 29 458 32 889 72 485 79 867 12 ans 174 735 211 501 18,8 37,8
6ème 20 079 21 944 48 265 52 347 13 ans 165 802 201 117 13,2 26,0
5ème 17 050 17 322 32 096 35 789 14 ans 157 325 191 243 11,0 18,7
4ème 13 173 16 273 25 083 28 823 15 ans 149 282 181 854 10,9 15,8
3ème 10 912 13 270 19 980 22 926 16 ans 141 650 172 926 9,4 13,3
2nde 8 169 8 780 13 428 15 964 17 ans 134 409 164 435 6,5 9,7
*le taux calculé pour la classe de Terminale est supérieur à celui calculé pour la classe de 1ère car la dernière année du cycle (la classe de terminale au
cours de laquelle est préparé le baccalauréat) accueille un certain nombre d’élèves qui appartiennent à des cohortes antérieures et qui cherchent à
tenter leur chance de nouveau au baccalauréat
25
26 Document de Travail de la Banque Mondiale
100
% de la population
80
60 1997
2003
40
20
0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Classes
le profil de scolarisation transversal (utile pour mesurer la proportion des enfants d’âge
donné dans le pays ayant accès à n’importe quelle classe dans le système) offre une image
instantanée qui présente une vision déformée de la réalité du système éducatif lorsque le
taux d’accès en première année du cycle évolue dans le temps (dans le cas du Tchad, on a
vu que le taux d’accès en CP1 avait sensiblement augmenté au cours des années récentes).
En effet, dans un contexte de ce type, les élèves qui sont actuellement (en 2003–04) au CM2
étaient moins nombreux, six ans ou sept ans (pour tenir compte de la fréquence élevée des
redoublements dans le pays) auparavant (en 1997–98 ou 1998–99) que ne le sont ceux qui
entrent au CP1 au cours de l’année 2003–04.
la comparaison est de 64 % (seulement trois pays sur les quatorze ont une valeur proche de
celle du Tchad). Le chiffre moyen pour les autres pays demande certes à être sensiblement
améliorée dans la perspective de l’achèvement universel du primaire en 2015, mais il sou-
ligne aussi combien le Tchad doit faire des progrès sur le plan de la rétention des élèves
dans son cycle d’enseignement primaire pour atteindre ce même objectif.
tage encore de celle intervenant entre les deux cycles d’enseignement secondaire (chiffre
respectivement de 80 et de 60 % pour le Tchad et la moyenne des pays comparateurs).
Il est probable que ces transitions généreuses étaient relativement faciles à soutenir il y
a encore quelques années, lorsque le taux d’achèvement du primaire se situait à un niveau
très modeste (seulement 21 % de la classe d’âge atteignaient la dernière classe du cycle pri-
maire en 1998–99); les observations actuelles indiquent que le maintien de ces taux de tran-
sition généreux devient de plus en plus difficile à soutenir au fur et à mesure que le nombre
de ceux qui achèvent le primaire augmente. Rappelons qu’ils étaient 33 000 à le faire en
1998–99 avec un taux d’achèvement du primaire de l’ordre de 20 %, alors que le nombre de
jeunes dans cette situation est de 80 000 en 2004, une multiplication par un facteur 2,4 en
l’espace de 6 années. Il ne fait pas de doute que les améliorations nécessaires de la rétention
en cours de cycle primaire, associées à la pression démographique toujours forte, créeront
des pressions croissantes sur le développement du secondaire12, pressions qui vont néces-
sairement devenir de plus en plus difficile à organiser et à financer. Il conviendra pour le
Gouvernement d’anticiper ces évolutions et de mettre en place des politiques éducatives
appropriées. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point dans le chapitre 5 de ce rapport.
12. Il est anticipé que le nombre des jeunes qui atteindraient la fin du primaire serait de l’ordre de 300 000
en 2015 si le Tchad atteint l’objectif du millénaire d’achèvement universel du primaire à cette date.
30 Document de Travail de la Banque Mondiale
parental, avec pour conséquence, une probabilité très forte d’abandon des études, notam-
ment pour les individus qui n’ont pas une forte demande scolaire (filles, pauvres, . .). Cela
dit, dans ces conditions, il y a bien arrêt prématuré des études, mais il serait plus pertinent
de dire que c’est l’école qui abandonne les élèves, plutôt que ce sont les élèves qui aban-
donnent l’école.
Il faut donc évaluer dans quelle mesure ces situations, dans lesquelles la continuité
éducative jusqu’en fin de cycle n’est pas assurée, peuvent contribuer à rendre compte du
faible niveau de rétention en cours d’études primaires. On peut d’abord penser à caracté-
riser chaque école selon le nombre des années d’études offertes, et calculer au cours d’une
année scolaire donnée, la proportion des élèves qui sont scolarisés dans une école à cycle
incomplet. Le tableau II.9, ci-après, présente l’état des lieux de ces situations.
Tableau II.9. Distribution (%) des Écoles Primaires Selon le Nombre de Classes Offertes
Année 1998–99 Année 2002–03 Année 2003–04
Nombre de % des % des % des % des % des % des
classes offertes écoles élèves écoles élèves écoles élèves
1 3 1 3,7 1,3 3,5 1,2
2 9 3 9,2 3,6 8,2 2,9
3 12 5 9,5 5,1 8,2 4,2
4 17 8 15,7 8,2 14,3 7,3
5 8 5 7,1 4,7 7,9 5,1
Ecoles Complètes— 52 77 54,9 77,2 57,9 79,3
6 classes
Ensemble 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0
Toutes les écoles primaires tchadiennes n’offrent pas les six classes du cycle primaire,
mais la proportion des écoles qui offrent les six classes est en augmentation. Ainsi, alors que
seulement 52 % des écoles étaient complètes en 1998–99, c’est le cas de 58 % au cours de
l’année scolaire 2003–04. Du fait même que les écoles complètes offrent tous les classes (alors
que ce n’est pas le cas des écoles incomplètes) et que les écoles complètes sont plus souvent
localisées en milieu urbain et sont de plus grande taille que la moyenne des écoles du pays,
79 % des élèves tchadiens sont scolarisés dans des écoles proposant l’ensemble des niveaux ;
ces écoles offrent par définition la continuité de l’offre éducative sur l’ensemble du cycle pri-
maire. Cela ne veut pas dire pour autant que 21 % (100–79 %) des élèves (écoles qui n’ont
pas les six classes) sont en situation de pénurie d’offre éducative à un moment de leur sco-
larité car une école peut ne pas proposer l’ensemble des niveaux d’un cycle mais « suivre »
ses élèves et créer des nouvelles classes au fur et à mesure et/ou utiliser un système de recru-
tement d’élèves en année alternée. Il convient donc d’aller plus loin dans l’analyse.
Une méthode plus pertinente consiste à utiliser les données individuelles d’écoles du
recensement scolaire sur deux années successives (2002–03 et 2003–04)13. Elle se fonde sur
13. En effet, il peut ne pas être pertinent de qualifier une école qui n’offrirait pas toutes les classes du
cycle au cours d’une année scolaire déterminée comme n’assurant pas la continuité éducative à ses élèves.
Le Système Éducatif Tchadien 31
le calcul, pour chaque école, d’une série de taux de transition entre cours successifs sur deux
années successives (rapport du nombre des nouveaux entrants de CP2 au cours de l’année
2003–04, et du nombre des nouveaux entrants de CP1 au cours de l’année 2002–03, . . . .).
Si un de ces taux de transition vaut 0, cela signale une situation de discontinuité édu-
cative dans cette école. On peut alors identifier (par sommation des données des différentes
écoles) dans chaque classe du cycle la proportion des élèves qui peut poursuivre ses études
localement. Par agrégation multiplicative de ces taux sur les différentes classes du cycle, on
obtient une estimation de la proportion des élèves qui a la possibilité d’atteindre la der-
nière année du cycle (mais qui ne le fait pas forcément) car l’offre éducative locale assure
la continuité éducative. Le tableau II.10, ci-après, présente les résultats obtenus.
Tableau II.10. Proportion des Élèves de Chaque Classe qui Peuvent Poursuivre Dans la
Classe Immédiatement Plus Élevée au Cours de l’Année Scolaire Suivante
% d’élèves ayant eu la possibilité de passer dans la
classe supérieure dans la même école
1998/1999 —> 1999/2000 2002–03 —> 2003–04
CP1–CP2 99,6 99,6
CP2–CE1 98,2 98,6
CE1–CE2 98,1 97,8
CE2–CM1 95,3 96,3
CM1–CM2 97,9 97,8
% d’élèves dans une école qui propose la continuité
éducative sur tout le cycle élémentaire
CP1–CM2 89,6 89,5
Sur cette base, deux informations peuvent être construites : i) la première consiste à
identifier le nombre des élèves qui sont (seront) exposés à la discontinuité dans le cours de
leurs études primaire; ii) la seconde consiste à cibler les écoles qui assurent la continuité
éducative et à mesurer quelle est, dans ces circonstances favorables du point de vue de
l’offre quantitative, la rétention des élèves sur le cycle primaire.
Il convient de noter que si la recherche de la continuité éducative peut certes nécessiter, dans
certains cas, de réaliser des constructions scolaires additionnelles et/ou d’allouer à l’école
des enseignants supplémentaires, ce n’est pas toujours nécessaire car des organisations en
cours multiples peuvent souvent être utilisées pour assurer la continuité éducative dans une
école (sur les six classes du cycle) qui ne compte que 2 ou 3 maîtres (2 ou 3 salles de classe).
Dans la section précédente nous avons identifié que le taux de rétention du primaire était
de 43 % pour la période actuelle et nous avons évidemment regretté que ce chiffre soit aussi
bas. Les analyses effectuées montrent que dans les situations où la continuité éducative est
assurée (pour environ 85 % des élèves), la rétention entre le CP1 et le CM2 n’est que de
50,1 %, ce qui reste un chiffre extrêmement faible. Cela signifie que les politiques éduca-
tives classiques fondées sur le développement quantitatif standard de l’offre scolaire, bien
que devant être mises en place pour assurer effectivement la continuité éducative dans
toutes les écoles du pays, seront utiles mais très insuffisantes pour améliorer de façon signi-
ficative la rétention globale dans le cycle primaire; d’autres voies devront être envisagées.
Considérons maintenant les facteurs qui sont susceptibles d’être responsables de cette
partie des abandons en cours d’études qui interviennent dans un contexte où une école
existe effectivement.
sont pour une part pas totalement compétents pour juger de la réussite de l’enfant,
ils ont tout de même des signaux; le plus tangible de ces signaux est sans doute le
fait que l’enfant progresse sans encombre d’un niveau au niveau suivant, ou bien
est contraint de redoubler. Au Tchad, les redoublements sont relativement fré-
quents avec un taux global de 25 % pour le cycle primaire. Chaque année, plus d’un
enfant sur quatre est invité à redoubler. Pour ces enfants qui doivent redoubler, ceci
a la double conséquence d’une part de faire prendre à l’enfant une année d’âge sans
progresser dans sa scolarité et d’autre part, outre d’impliquer des coûts directs sup-
plémentaires tant pour les parents que pour le gouvernement, de donner aux
parents un signal négatif sur la capacité de l’enfant à tirer profit de l’enseignement
auquel il est exposé. Sans équivoque, cela ne peut qu’inciter les parents à réviser à
la baisse les bénéfices que leur enfant est susceptible de retirer de l’école.
■ le second point est que lorsque l’enfant accède au CP1, il/elle est relativement jeune
(en moyenne 8,1 ans14), âge où les coûts d’opportunité liés à sa présence scolaire sont
encore relativement faibles. Par contre il est généralement observé que ces coûts
d’opportunité sont croissants avec l’âge et avec le développement physique des
enfants. Pour les filles, l’âge de la puberté (12–13 ans) constitue par ailleurs une
période à laquelle la vigilance des parents s’exerce de façon toute particulière,
notamment dans les segments les plus traditionnels de la société. Ces deux éléments
ensemble font que les coûts d’opportunité à envoyer un enfant à l’école sont globa-
lement croissants avec l’âge et par conséquent avec le niveau scolaire; de façon jointe,
cet argument milite, évidemment, pour faire en sorte que les enfants puissent entrer
à l’école primaire à un âge le plus jeune possible (probablement 6 ans).
Si donc en cours de scolarité, les coûts pour les parents (coûts directs et d’opportunité) ont
tendance à augmenter alors que les bénéfices de l’école doivent de fait être revus à la baisse
(en particulier pour ceux qui ont été exposés à un ou plusieurs redoublements), on com-
prend qu’il y ait une baisse de demande scolaire. Si la demande initiale n’était pas très forte,
il devient compréhensible que la détérioration des bénéfices concomitante à l’augmenta-
tion des coûts conduise aux fait que certains parents retirent leurs enfants de l’école.
Si, sur un plan théorique, on conçoit qu’une grande fréquence des redoublements
puisse, par ailleurs, avoir une incidence négative sur la rétention des élèves en cours de cycle
primaire, il n’est pas immédiat de déterminer de façon quantitative quelle pourrait être, dans
le cas du Tchad, l’incidence des 25 % de redoublement sur le taux de rétention (du moins
pour cette partie de la rétention qui n’est pas déterminée par une offre locale défaillante).
Une première approche consiste à mobiliser des analyses internationales comparatives
pour avoir une idée de la réponse à la question. Ainsi un modèle économétrique internatio-
nal cherchant à rendre compte de la variabilité du taux de rétention dans les études primaires
en fonction de la fréquence des redoublements (ainsi que du niveau de développement éco-
nomique du pays et du coût unitaire des études) indique qu’en moyenne dans l’échantillon
d’une cinquantaine de pays (dont le Tchad), un point de redoublement en plus est associé
à une diminution du taux de rétention de 0,8 points. Nous disposons aussi de données
tchadiennes spécifiques sous forme d’un modèle économétrique (voir chapitre 4) qui, sur
la base des données des écoles individuelles, met en regard le taux de rétention et la fré-
quence des redoublements, les données utilisées étant celle de chacune des écoles primaires
du pays. Cette analyse conduit à estimer qu’au Tchad, un point de pourcentage de redou-
blement en plus serait associé à 0,53 points de pourcentage en moins dans la rétention en
cours de cycle primaire. On montrera dans le chapitre 4 de ce rapport combien il serait
important de réduire la fréquence des redoublements; l’analyse de la rétention en cours de
cycle primaire apporte des arguments complémentaires à cet aspect de la politique éduca-
tive du pays, car si le pays réussissait à réduire le taux moyen de redoublement de 25 à 10%15,
il est estimé que cette mesure pourrait à elle seule améliorer la rétention en cours d’études
primaires de l’ordre de 8 points [=0,53 × (25 − 10)]16; ceci constituerait un progrès tout à
fait appréciable.
Au point où nous en sommes, nous anticipons que, par référence à la situation obser-
vée en 2003–04 où le taux de rétention (pseudo-longitudinal) est estimé à 43 %, on pour-
rait porter ce taux i) en premier lieu au niveau de 50,1 % en assurant la continuité
éducation dans tous les lieux d’enseignement du pays et ii) en second lieu à 58,1 % (50,1 +
8) en réduisant la fréquence des redoublements de 25 à 10 %. Ceci constituerait une avan-
cée significative par rapport à la situation actuelle (un gain de 15,5 points) mais laisserait
un niveau de rétention encore très inférieur aux attentes.
Pour progresser dans la recherche de causes additionnelles (et d’instruments addi-
tionnels pour la politique éducative nouvelle) pour le faible niveau de la rétention dans
l’école primaire tchadienne, deux éléments complémentaires peuvent être potentiellement
mobilisés; ils se trouvent génériquement du côté de la demande :
■ le premier est que, bien qu’une école existe, elle n’est pas fréquentée suffisamment
longtemps par les élèves parce que les parents n’aiment pas vraiment l’école qui leur
est proposée. Cette école peut par exemple offrir des programmes que les parents
jugent mal adaptés à leurs besoins ou bien les offrir selon un calendrier sur l’année
ou des horaires sur la journée qui leur conviennent pas eu égard à l’utilisation des
enfants comme agents de la production familiale. L’école peut aussi être éloignée
du domicile familial (il est estimé qu’environ 16 % des enfants scolarisés habitent
à plus de deux kilomètres de l’école), ce qui est une autre façon d’augmenter les
coûts d’opportunité de la scolarisation (et ceci d’autant plus que les horaires de
classe pourraient eux-mêmes être perçus comme étant mal adaptés).
■ le second élément est que la scolarisation des enfants repose pour une partie
notable sur la contribution directe des familles au financement des services édu-
catifs, notamment en raison du grand nombre des enseignants communautaires.
On a vu dans de nombreux pays que l’abolition des frais de scolarité pouvait résul-
ter en une augmentation très substantielle de la fréquentation scolaire et qu’il exis-
tait une valeur relativement forte de l’élasticité de la demande d’éducation par
rapport à son prix pour les usagers.
15. Le chiffre de 10% de redoublants correspond à la valeur référence du cadre indicatif de l’initiative
EPT Procédure Accélérée (Fast-Track en anglais). Cette valeur correspond à la moyenne observée dans les
pays ayant été les plus performants pour atteindre ou se rapprocher de la scolarisation primaire universelle.
16. Même de 12 points si on utilisait la valeur internationale de l’impact des redoublements sur la
rétention en cours de cycle primaire.
Le Système Éducatif Tchadien 35
Nous ne disposons pas de toutes les informations empiriques pour traiter ces questions de
façon totalement satisfaisante; une possibilité était de calculer pour chaque école du pays
un indicateur de rétention et d’examiner comment la variabilité dans cet indicateur pou-
vait être reliée à celle des caractéristiques des écoles dont en particulier la proportion des
ressources totales qui étaient financées par les parents et les communautés. Bien qu’il existe
sans doute des biais de sélection, une telle analyse aurait pu être tentée. Cela aurait néces-
sité une fusion des données individuelles d’écoles sur au moins deux années successives.
Une telle procédure a été conduite mais a été infructueuse car l’utilisation du code des
écoles pour réaliser cette fusion s’est révélé totalement inopérant pour appairer les don-
nées des fichiers d’écoles des années 2002–03 et 2003–04.
Des travaux complémentaires utilisant une méthodologie appropriée seront donc
nécessaires pour traiter cette question de mesure de l’élasticité de la demande de scolarisa-
tion en fonction du prix pour les usagers. Cette question est pourtant cruciale i) pour com-
prendre pourquoi la rétention resterait aussi faible que 58 % même après avoir assuré la
continuité éducative et réduit substantiellement la fréquence des redoublements et ii) pour
instruire sur des bases factuelles avérées une politique de soutien public au financement
des nombreux enseignants communautaires du pays.
Il est toutefois certes probable qu’on ne se tromperait pas vraiment à poursuivre une
telle politique d’une part pour des raisons d’équité et de qualité des services offerts (notam-
ment si cette politique est assortie de formation et de suivi des enseignants), et d’autre part
compte tenu de l’expérience internationale qui indique qu’il existe bien en général une élas-
ticité négative de la demande de scolarisation par rapport au prix pour les usagers; mais on
aimerait bien sûr disposer d’information fiables concernant spécifiquement le contexte
tchadien. A défaut de celles-ci, une évaluation sur l’impact de la mise en application de la
mesure de subventionnement public des maîtres communautaires sera la bienvenue.
souhaiter que cet indicateur permette à la fois 1) d’incorporer les aspects de quantité et de
qualité et 2) d’agréger les résultats obtenus au niveau de l’ensemble du système éducatif.
Cet objectif est évidemment trop ambitieux aussi bien sur le plan conceptuel (encore qu’au
niveau conceptuel des indicateurs mixtes ont été imaginés) que sur celui de la disponibi-
lité des données. La pratique consiste à accepter une perspective plus modeste dans laquelle
on se limite à la dimension quantitative de la couverture du système.
17. On notera que le coefficient moyen d’efficience du groupe des pays francophones (2,0) est proche
de celui des pays anglophones (1,9). Ce résultat est compatible avec le fait que d’une part les pays anglo-
phones mobilisent en moyenne plus de ressources pour le financement public du secteur de l’éducation
(4,7 %) que ne le font les pays francophones (2,7 %) et d’autre part ont aussi une couverture scolaire glo-
bale meilleure (7,6 années) que leurs homologues francophones (5,1 années).
Le Système Éducatif Tchadien 39
Graphique II.2. Ressources Publiques Pour le Secteur et Espérance de Vie Scolaire Dans
les Pays d’Afrique Subsaharienne, 2003
11.0
10.0 Ouganda
Espérance de vie scolaire, 2003 (nette
Zimbabwe
9.0 Malawi Lesotho
une courbe sur le graphique, appelée pseudo courbe d’efficience qui correspond approxi-
mativement au meilleur niveau de résultat qui est obtenu pour chaque niveau de ressources
(ou le niveau minimum de ressources pour obtenir un niveau donné de résultat).
Les pays proches de la pseudo courbe d’efficience sont ceux qui font le meilleur usage
(qui offrent la plus grande couverture éducative, sur le plan de la quantité, à leur popula-
tion) de leurs ressources publiques d’éducation. Les pays qui sont éloignés de cette courbe
sont ceux qui obtiennent peu de résultats quantitatifs compte tenu des ressources
publiques qu’ils mobilisent pour leur secteur scolaire.
La position du Tchad pour l’année 2003–04 confirme les observations faites aupara-
vant selon lesquelles le pays dépense très peu et obtient des résultats moyens. Cette posi-
tion place toutefois le Tchad en position relativement proche de la courbe d’efficience
(mais dans sa partie basse). Cela suggère que si des gains d’efficience sont sans doute pos-
sibles, c’est tout de même principalement avec des ressources additionnelles que des résul-
tats quantitatifs meilleurs pourront, dans le futur, être obtenus. La comparaison de la
position du Tchad d’une part en 1995–96 et d’autre part en 2003–04, confirme cette pro-
position en suggérant par ailleurs que les ressources additionnelles mobilisées entre 1995
et 2003 (la part des dépenses courantes d’éducation dans le PIB est passée de 1,5 % en 1995
à 1,9 % en 2003) ont sans doute été utilisées de façon relativement efficiente.
C HAP ITR E 3
41
42 Document de travail de la Banque Mondiale
public, le Ministère de l’Education Nationale qui regroupe les niveaux primaire et secondaire
et le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de la Formation profession-
nelle qui regroupe les niveaux supérieurs. Il existe d’autres établissements d’enseignement
supérieur et de formation professionnelle qui dépendent directement d’autres ministères sur
le plan budgétaire : c’est le cas de l’Ecole Nationale des Services de Santé (Ministère de la
Santé), l’Ecole Nationale d’Elevage (Ministère de l’Elevage), L’Ecole Nationale de Police,
l’Ecole Nationale des Travaux Publiques (Ministère des Travaux Publics et Transports),
l’Ecole Technique de Formation Agricole (Ministère de l’Agriculture), l’Ecole Nationale
d’Administration et de Magistrature (Présidence de la République), l’Ecole Nationale des
Télécommunications (Ministère des Postes et Télécommunications), l’Ecole des Officiers
Inter–Armées (Ministère de la Défense). Ces établissements, tout comme ceux de l’ensei-
gnement supérieur (Université de N’Djaména, Université Fayçal de N’Djaména, Institut des
Sciences Agronomiques de Sarh, Institut Supérieur des Sciences de Gestion de Moundou,
Institut Minier de Mongo, Institut des Sciences et Techniques d’Abéché) reçoivent des sub-
ventions accordées par l’Etat en plus de dons et recettes propres et possèdent une relative
autonomie de gestion. Le Ministère de la Culture, de la Jeunesse et Sport par la mise à dis-
position et la prise en charge des professeurs d’éducation physique et sportive apporte éga-
lement une contribution substantielle au secteur de l’éducation.
L’étude détaillée des comptes administratifs des ministères concernés (particulièrement
ceux spécifiquement en charge de l’éducation) permet pour chaque dépense ordonnancée
soit (i) de l’associer à un niveau d’enseignement donné (par exemple les salaires imputés
dans la rubrique Direction de l’enseignement de base sont associés au cycle primaire) soit
(ii) de la considérer comme une dépense commune à plusieurs niveaux (par exemple les
dépenses d’administration du MEN ne sont pas spécifiques à un niveau d’enseignement
donné mais concernent l’ensemble des niveaux gérés par le MEN). L’utilisation d’une clé de
répartition (celle observée sur les masses salariales) pour les dépenses communes permet
alors d’estimer les dépenses par niveau d’enseignement pour les dernières années.
■ En prix courants, les dépenses de chaque grand niveau d’enseignement ont pro-
gressé suivant un rythme annuel moyen compris dans une fourchette allant de
11,9% (pour le secondaire général) à 14,4% (pour l’enseignement technique). Les
évolutions des dépenses depuis 10 ans ont donc été tendanciellement similaires
pour l’ensemble des grands niveaux.
Tableau III.1. Distribution et Évolution des Dépenses Publiques Courantes par Niveau d’Enseignement (en milliards de Francs CFA, prix
courants, base ordonnancement), hors Dépenses des Établissements d’Enseignement Supérieur non Gérés par le MEN et le MESRFP
Acc.
annuel moyen
1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004** 1995–2004
Maternelle 0,1* 0,1* 0,1* 0,1* 0,2* 0,2* 0,2* 0,2 0,3 0,4
Primaire 4,8 5,8 7,0 7,1 7,9 9,4 12,3 13,0 13,5 15,0 13,4%
Alphabétisation 0,2* 0,3* 0,3* 0,3* 0,4* 0,4* 0,6* 0,6 0,6 0,6
Secondaire Général 2,8 2,9 3,4 3,6 4,1 4,6 4,7 6,4 7,5 7,6 11,9%
Secondaire Technique 0,7 0,7 1,5 1,6 1,8 1,7 1,7 2,2 2,0 2,4 14,4%
Hors enseignement normal 0,3 0,2 0,3 0,5 0,6 0,6 0,5 0,7 0,5 0,5 8,4%
Normal (form des maîtres) 0,5 0,5 1,2 1,2 1,2 1,1 1,2 1,5 1,5 1,9 16,8%
Supérieur 2,2 2,4 3,0 3,0 3,3 3,4 4,2 3,4 4,7 6,1 12,1%
Total 10,8 12,2 15,3 15,7 17,7 19,7 23,7 25,7 28,6 32,1 12,9%
43
44 Document de travail de la Banque Mondiale
Les chiffres en valeurs monétaires et leur évolution sont intéressants mais il est encore
plus important d’examiner la distribution des dépenses en pourcentage et son évolution
au cours du temps. Notons aussi que les chiffres précédents sous-estimaient les dépenses
publiques allouées à l’enseignement supérieur dans la mesure où étaient exclues les dépenses
des établissements non gérés par les deux grands ministères du secteur de l’éducation.
L’étude des comptes administratifs des ministères ayant la charge du financement public
de ces institutions, permet d’estimer les dépenses d’enseignement supérieur ‘oubliées’ dans
le tableau III.1 et de présenter des estimations consolidées de l’évolution de la distribution
intra-sectorielle des dépenses publiques courantes d’éducation (cf graphique III.1).
A la lecture du graphique, il se dégage principalement :
Graphique III.1. Distribution et Évolution des Dépenses Publiques Courantes par Niveau
d’Enseignement (en %), y Compris Dépenses des Établissements
d’Enseignement Supérieur non Gérés par le MEN et le MESRFP
Evolution de la distribution des dépenses publiques par niveau d'enseignement
50%
45%
40%
Primaire
35% Secondaire général
Secondaire technique et ens. normal
30%
Supérieur
25%
20%
15%
10%
5%
0%
1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004
NB: les dépenses pour l’enseignement maternel et pour les programmes d’alphabétisation ne
sont pas présentées dans ce graphique du fait d’un poids très faible parmi l’ensemble des
dépenses. C’est la raison pour laquelle la somme des pourcentages présentés dans le graphique
est légèrement inférieure à 100%.
Le Système Éducatif Tchadien 45
■ Le degré de priorité pour le cycle primaire est resté entre 1995 et 1999 stable (la part
des dépenses pour le primaire se situait autour de 43%), puis a augmenté entre
1999 et 2001 (50%) mais a connu une baisse durant les dernières années (autour
de 45% pour 2003 et 2004). La baisse récente de priorité budgétaire pour le cycle
primaire s’est faite au bénéfice du secondaire général (dont la part a augmenté
de 19 à 25% entre 2001 et 2003) et de l’enseignement supérieur (de 17 à 22%
entre 2002 et 2004).
Comparaisons Internationales
Il est généralement difficile d’avoir un jugement techniquement fondé sur l’observation de
la distribution des dépenses courantes par niveau d’enseignement dans un pays particu-
lier, ici le Tchad18. En effet, il y a toujours des arguments pour faire davantage à chacun des
niveaux d’études, si bien que ce qui est observé à un moment donné du temps correspond
d’une part à la sédimentation des habitudes du passé et d’autre part à une mesure des rap-
ports de force existants dans la société ou au sein de l’équipe ministérielle. La perspective
comparative peut alors apporter un éclairage intéressant. Le tableau III.2 présente la situa-
tion tchadienne en référence à 20 autres pays africains.
La comparaison internationale proposée ici montre que :
Comparaison n’est pas raison, mais ces chiffres suggèrent sans ambiguïté en premier lieu
plutôt une priorité budgétaire insuffisante accordée au primaire eu égard :
18. Une approche qui se révèle souvent utile est celle de l’analyse des relations entre la production de
diplômés et le marché du travail; cette approche sera abordée dans le chapitre 5 de ce rapport.
46 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau III.2. Distribution des Dépenses Publiques Courantes par Grand Niveau
d’Enseignement, Comparaisons Internationales, Année 2004 ou Proche
Pays % Primaire % Secondaire % Supérieur
Tchad 2004 46 31 23
Tchad 2001 51 27 22
Tchad 1995 44 32 24
Bénin 51 28 22
Burkina Faso 62 19 19
Burundi 43 32 25
Cameroun 40 46 14
Comores 46 47 8
Côte d’Ivoire 47 37 16
Ethiopie 55 26 19
Guinée 44 31 25
Guinée B. 33 43 24
Lesotho 44 38 19
Madagascar 58 25 17
Mali 57 28 15
Mauritanie 44 39 17
Mozambique 48 30 22
Niger 60 27 13
Rwanda 43 20 37
Sénégal 54 19 28
Sierra Leone 56 11 33
Togo 45 36 19
Zambie 46 35 19
Moyenne des 20 pays comparateurs 49 31 21
Rapport Tchad 2004/moyenne des 0,95 1,00 1,12
pays comparateurs
Rang du Tchad 2004 11/21 11/21 7/21
En effet, il importe de distinguer les pays suivant leur niveau d’avancement vers l’objectif.
S’il est certainement nécessaire pour les pays éloignés de la SPU d’allouer une part impor-
tante de leurs ressources au cycle primaire, ceci n’est plus vrai pour les pays ayant atteint
ou proches de la SPU dans la mesure où ces pays doivent maintenant plus développer les
niveaux post-primaire et donc allouer une part plus importante à ces niveaux. Le graphique
Le Système Éducatif Tchadien 47
III.5 nous permet de classer les pays et de positionner le Tchad suivant les deux dimen-
sions, le niveau d’avancement en termes de scolarisation primaire et le degré de priorité
accordée à ce cycle. Les pays sont classés en quatre catégories représentées par les quatre
quadrants du graphique.
Le Tchad se situe dans le quadrant Sud-Ouest (SO), celui qui contient les pays n’affi-
chant pas une véritable priorité budgétaire au cycle primaire (part du primaire inférieure
à 50%) malgré un éloignement par rapport à l’objectif de scolarisation primaire univer-
selle (TAP inférieur à 75%). Cette absence de priorité pour le cycle primaire se fait en faveur
soit de l’enseignement secondaire, soit de l’enseignement supérieur, soit des deux. Comme
on dit au Congo “le chien a beau avoir quatre pattes, il ne peut emprunter deux chemins à
la fois” ; un réajustement pour ces pays de l’arbitrage intra-sectoriel en faveur du cycle pri-
maire est certainement une piste à considérer sérieusement. L’objectif d’une part allouée
au primaire de 50% semble à la fois souhaitable et réaliste, d’autant plus réaliste qu’il cor-
respond à ce qui s’observait aux débuts des années 2000.
Graphique III.2. Avancement vers la SPU et Priorité Pour le Cycle Primaire, Année 2003 Proche
65
NO NE
% des dépenses courantes pour le primaire (ajusté sur 6 années), 2002
Burkina Faso
Zimbabwe
60
Niger
Madagascar
Mali Tanzanie
55 Namibie
Ethiopie Sénégal
Bénin Gambie
50
Mozambique
Ouganda
Tchad 2004 Côte d'Ivoire Malawi
Comores Soudan Zambie Algérie
45
ou proche
25
Swaziland
SO SE
20
25 35 45 55 65 75 85 95 105
Taux d'achèvement du primaire (en %), 2002/03
Les données comparatives suggèrent en second lieu que, avec 23 % des ressources cou-
rantes affectées au secteur, l’enseignement supérieur est spécialement favorisé dans les arbi-
trages intra-sectoriels (plus largement inter-ministériels d’ailleurs puisqu’un ministère
assure la responsabilité spécifique de l’enseignement supérieur). Il sera intéressant d’exa-
miner avec attention tant les questions du coût unitaire et de sa composition à ce niveau
d’enseignement (voir plus avant dans ce chapitre) que celles concernant la dimension de
l’équité (voir le chapitre 6 de ce rapport) et la justification externe des investissements
publics à ce niveau d’enseignement (voir le chapitre 5).
48 Document de travail de la Banque Mondiale
*uniquement MESRFP (les dépenses des établissements non gérés par le MESRFP ne sont pas considérées ici); **en 2003 aucune dépenses en capital n’a été exécutée
pour l’enseignement supérieur (en 2002 sur financement extérieur, la dépense s’élevait à 3,4 milliards de F CFA)
NB: les chiffres pour l’enseignement normal contiennent l’ensemble des dépenses courantes imputées à la direction de la formation des maîtres et de l’action
pédagogique. Cependant il apparaît qu’une partie des agents payés par cette direction ne travaille pas effectivement pour l’enseignement normal. Nous verrons
plus loin (à partir du tableau III.6) comment rectifier cette sur-estimation.
50 Document de travail de la Banque Mondiale
(continued )
51
52 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau III.4. Etat des Lieux des Personnels par Fonction aux Différents Niveaux d’Enseignement (public et communautaire), Estimations,
Année 2003 (Continued )
Contr/
décisionnaires/
Fonctionnaires Volontaires/ Communautaires/
A B C Moniteurs Vacataires TotalABC %ABC Total
Enseignants
Primaire 0 3141 2306 57 8800 5447 38% 14304
Secondaire général (hors MEPS) 1454 758 0 444 1637 2212 52% 4293
Secondaire 1er cycle 861 724 0 338 1499 1585 46% 3422
Secondaire 2ème cycle 593 34 0 106 138 627 72% 871
Technique 191 28 0 29 17 219 83% 265
Formation des maîtres 39 19 0 58 100% 58
MESRFP
Services centraux (Ministère) 30 3 2 33 94% 35
Etablissements
Non enseignants 66 31 2 89 99 53% 188
Enseignants 338 217 338 61% 555
Total MEN 2939 5443 3017 2476 10454 11399 47% 24329
Total MESRFP 434 34 2 91 217 470 60% 778
Total Education 3373 5477 3019 2567 10671 11869 47% 25107
NB: les 166 maîtres d’EPS du secondaire ne sont pas comptabilisés (ils sont payés par le ministère de la jeunesse et des sports)
Le Système Éducatif Tchadien 53
De façon complémentaire, les questions de gestion du personnel sont traitées plus spécifi-
quement dans le chapitre 7 de ce rapport.
■ Il est estimé qu’au total environ 25 100 personnes travaillent dans le secteur de l’édu-
cation, environ 24 300 pour le Ministère de l’Education Nationale (tous les niveaux
d’enseignement excepté le supérieur) et environ 800 au service de l’enseignement
supérieur.
■ 47% de ces agents (47% au MEN et 60% au MESRFP) sont des fonctionnaires de
catégorie A, B ou C, les grades les plus hauts de la Fonction publique. Les autres
personnels sont soit des fonctionnaires de grade D (les moniteurs, en très faible
nombre et en voie d’extinction), soit des contractuels-décisionnaires ou volontaires
du service national, soit des enseignants communautaires ou vacataires (8800 au
niveau primaire, 1600 dans le secondaire et environ 200 au supérieur).
■ En termes de répartition des agents suivant la fonction occupée, le tableau III.5 per-
met d’affiner l’analyse en distinguant par niveau d’enseignement, les enseignants (de
fonction) des non-enseignants. Les agents des services centraux (tous non ensei-
gnants et non directement associés à un niveau d’enseignement spécifique) ont été
répartis par niveau d’enseignement en utilisant la distribution des autres agents. Sur
l’ensemble du secteur de l’éducation, 78% des personnels occupent une fonction
d’enseignant. Cette proportion varie grandement d’un niveau à l’autre. Au niveau
primaire, on estime à 18% la proportion des non-enseignants (23% si l’on ne consi-
dère que les agents fonctionnaires A, B et C). En termes comparatifs, ce chiffre est
relativement élevé ; la moyenne calculée sur 5 pays comparables (le Cameroun,
Madagascar, la Mauritanie, le Niger et le Togo) pour lesquels le même genre d’ana-
lyse a été effectué est inférieure significativement (14,7%). Au niveau de l’enseigne-
ment secondaire général, la proportion des non enseignants est comme dans les
autres pays plus élevé et s’établit à 33% (43% parmi le groupe des fonctionnaires
ABC). Par rapport aux autres pays cette valeur est également relativement élevée
(29% en moyenne dans les pays pour lesquels l’information est disponible). Au
niveau de l’enseignement technique (hors formation des maîtres) la part des non
enseignants est estimée à 39%. C’est dans le sous-secteur de la formation des maîtres
que la proportion des non-enseignants est la plus importante, ils sont mêmes majo-
ritaires (56%). Enfin pour ce qui est de l’enseignement supérieur la part des non
enseignants est estimée à 23%. En conclusion, il apparaît nécessaire de réfléchir à la
pertinence de disposer d’autant de personnels non-enseignants. Dans cette perspec-
tive il pourrait être utile de conduire une analyse détaillée des fonctions à réaliser et
de la confronter à l’activité effective des personnes employées ; cette analyse reste
cependant à faire.
■ Pour ce qui concerne les enseignants, ce sont les communautaires (recrutés et payés
par les parents d’élèves) qui constituent le principal moteur de l’expansion du sys-
tème, leur effectif pour le cycle primaire a progressé d’environ 1900 entre 2000/01
et 2003/04. Au niveau du secondaire le phénomène est similaire, on observe une
progression des enseignants vacataires (payés essentiellement par les associations
de parents d’élèves); ils représentent en 2002/03 un tiers de l’ensemble des ensei-
gnants. La question de ces enseignants sera traitée plus en profondeur plus en avant
dans ce rapport.
54 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau III.5. Etat des Lieux des Personnels par Fonction aux Différents Niveaux d’Enseignement
(public et communautaire), Estimations, Année 2003
Contractuels-décisionnaires-
Fonctionnaires ABC communautaires-vacataires Total
Non Non Non
Enseignants enseignants Enseignants enseignants Enseignants enseignants
Primaire 77% 23% 86% 14% 82% 18%
Secondaire général 57% 43% 84% 16% 67% 33%
1er cycle 57% 43% 86% 14% 70% 30%
2ème cycle 57% 43% 69% 31% 60% 40%
Technique 62% 38% 58% 42% 61% 39%
Formation 53% 47% 0% 100% 44% 56%
des maîtres
Supérieur 72% 28% 100% 0% 71% 29%
Total tous niveaux 70% 30% 85% 15% 78% 22%
NB: les non enseignants des services centraux ont été répartis par niveau d’enseignement en
utilisant une clé de répartition (la distribution des personnels enseignants + non enseignants dans les
établissements)
Tableau III.6. Distribution des Dépenses Publiques Courantes par Grand Niveau d’Enseignement
et Nature de Dépenses (en milliards de F CFA), Année 2003
Dépenses
Masse courantes
Masse salariale Biens, Total hors salaires
salariale non services et dépenses enseignants
enseignants enseignants Transferts courantes en % du total
Primaire 7,0 2,9 2,8 12,7 44,9%
Secondaire Général 4,3 3,2 1,5 9,0 52,3%
1er cycle 3,0 2,2 1,0 6,3 52,5%
2ème cycle 1,3 1,0 0,5 2,7 51,8%
Secondaire Technique 0,6 0,4 0,5 1,4 60,9%
Hors enseignement normal 0,4 0,2 0,2 0,9 49,9%
Enseignement normal 0,1 0,1 0,4 0,6 82,8%
Supérieur 0,8* 0,3 3,6* 4,7 82,7%
Total tous niveaux 12,6 6,8 8,4 27,8 54,6%
NB: les chiffres sont affinés par rapport à ceux présentés dans le tableau III.3 pour rectifier les imputa-
tions budgétaires de personnel effectuées à un niveau d’enseignement alors que les agents travaillent
pour le service d’un autre niveau (notamment pour ce qui concerne l’enseignement normal). Beau
coup de dépenses de personnel sont imputées budgétairement à la direction de l’enseignement normal
(la direction de la formation et de l’action pédagogique) alors qu’elles correspondent à des rémunérations
d’agents travaillant sur les questions pédagogiques du niveau primaire ou secondaire général.
*Du fait d’un détail insuffisant sur l’information disponible, la rémunération des 217 enseignants
vacataires du supérieur (payés à l’heure par les établissements) n’est pas comptabilisée dans les
dépenses de salaires des enseignants mais dans les dépenses de fonctionnement (biens et services
et transferts).
gnants sont certainement à préconiser à l’ensemble des niveaux. Une réallocation de cer-
tains agents d’une fonction administrative à une fonction enseignante est une piste à consi-
dérer sérieusement.
Tableau III.7. Les Coûts Unitaires Publics Récurrents aux Différents Niveaux d’Enseignement
dans le Public/Communautaire, 2003
Dépenses Nombre
courantes des élèves Coût unitaire public
Niveau d’études (milliards F CFA) ou étudiants F CFA Indice PIB/habitant
Primaire 12,7 1 024 551 12 351 1,0 7,0%
Secondaire général 9,0 177 271 50 782 4,1 28,9%
1er cycle 6,3 133 873 46 814 3,8 26,6%
2ème cycle 2,7 43 398 63 022 5,1 35,8%
Enseignement 1,4 3 921 360 275 29,2 204,7%
technique
Hors formation 0,9 2 634 338 038 27,4 192,1%
des maîtres
Formation 0,6 1 287 483 485 39,1 274,8%
des maîtres
Enseignement Supérieur 4,7 6 546 725 155 58,7 412,1%
Tableau III.8. Eléments de Comparaison Internationale des Coûts Unitaires (publics) par
Niveau d’Études (2003 ou proche)
Dépenses/élève Technique et
(% du PIB/tête) Primaire Secondaire 1 Secondaire 2 professionnel Supérieur
Tchad 7,0 (2/18)19 26,6(7/17) 35,8(5/17) 205(10/11) 412(10/15)
Bénin 10,8 15,8 56,2 78 149
Burkina Faso 19,2 39,0 84,0 nd Nd
Burundi 14,0 64,0 64,0 nd 1206
Cameroun 7,1 31,6 37,1 61 83
Congo 4,0 12,7 36,8 nd Nd
Côte-d’Ivoire 13,0 35,0 72,0 111 126
Ethiopie 10,7 28,2 46,8 284 1080
Guinée 8,7 13,4 17,6 140 231
Madagascar 11,0 26,7 64,4 83 190
Mali 12,5 36,1 124,0 118 237
Mauritanie 12,0 39,6 33,8 188 120
Niger 20,0 49,0 157,0 nd 515
Rwanda 8,1 47,4 64,3 nd 787
Sénégal 10,7 14,7 70,3 95 257
Tchad 9,8 nd nd nd Nd
Togo 11,0 22,0 34,1 104 215
Zambie 10,4 25,3 21,7 nd 670
Médiane des 11 30 60 108 234
pays comparateurs
Intervalle de variation [4–20] [13–64] [18–157] [61–284] [83–1206]
Sources: RESENs, Modèles de simulation, Banque Mondiale, Pôle de Dakar. nd : non disponible.
19. Les chiffres entre parenthèses indiquent la position (sur une échelle croissante de coûts unitaires)
du Tchad parmi l’ensemble des pays considérés.
Le Système Éducatif Tchadien 57
scolarisation; deux observations émergent toutefois d’emblée sur la base d’une comparai-
son interne entre les différents niveaux d’enseignement:
Comparaisons Internationales
Pour aller au-delà de ces constats, il est intéressant de placer l’examen des coûts unitaires
de scolarisation dans une perspective comparative élargie.
L’observation des coûts unitaires avec une perspective de comparaisons inter-pays
permet d’affiner l’analyse. Plusieurs commentaires se dégagent :
■ Le Tchad se situe parmi les pays où la dépense par élève du cycle primaire (en com-
paraisons des ressources nationales) est la plus faible. La dépense par élève vaut 7 %
du PIB par tête au Tchad contre une médiane20 de 11% dans les pays comparateurs.
Parmi les 18 pays considérés, seul le Congo présente un coût unitaire plus faible.
Cependant il est important de souligner que la faiblesse du coût unitaire public
tchadien est en grande partie due à la présence majoritaire d’enseignants commu-
nautaires, au mieux subventionnés très faiblement par l’Etat. Le coût unitaire dans
une école primaire ne comptant que des enseignants publics est estimé à 18,2%21
du PIB par tête, soit la troisième valeur la plus élevée parmi l’ensemble des pays
comparateurs.
■ Le constat d’une faible dépense publique par élève est également valable, dans une
moindre mesure, au niveau du secondaire général. Pour le premier cycle, avec 26,6%
du PIB par tête la dépense par élève est, au Tchad, inférieure à la médiane des pays
considérés (30%). Le Tchad se situe parmi les 17 pays comparateurs en 7ème position
sur une échelle croissante de coût unitaire. Pour le second cycle du secondaire, la
situation est encore plus frappante. Le Tchad est, parmi les 17 pays considérés, le 5ème
pays ayant la dépense unitaire la plus faible (36% du PIB par tête au Tchad contre
une médiane de 60% pour les pays comparateurs). La remarque faite précédemment
sur le niveau primaire (effet des enseignants communautaires/vacataires sur le coût
unitaire) est également valable pour le niveau secondaire. Dans les établissements
sans enseignants vacataires, les coûts unitaires s’établissent autour de 45% du PIB/tête
pour chacun des deux cycles, soit le 4ème pays le plus cher.
20. La médiane d’une série de valeurs (ici les coûts unitaires des différents pays) est la valeur qui se
trouve au milieu : la moitié des pays comparateurs ont une valeur supérieure à la médiane et l’autre
moitié une valeur inférieure. La médiane est préférée à la moyenne lorsqu’il existe des valeurs extrêmes.
21. Le coût unitaire d’une école sans enseignants communautaires est estimé en divisant le coût
unitaire global par le % d’enseignants publics.
58 Document de travail de la Banque Mondiale
Conclusions
Les coûts unitaires élevés des niveaux terminaux de l’éducation (enseignements technique,
professionnel et supérieur) peuvent se justifier par une volonté de qualité des formations.
La qualité des formations des niveaux terminaux se jugent à l’aune :
■ de l’efficacité interne : est ce que les redoublements et les abandons ne sont pas trop
fréquents?
■ de l’efficacité externe : est ce que les formations proposées correspondent quanti-
tativement et qualitativement aux besoins du marché du travail ? Le chapitre 5 de
ce rapport étudiera cette question. Si la proportion de formés ne trouvant pas un
emploi (ou trouvant un emploi ne correspondant pas à la formation reçue) est éle-
vée il y aura lieu de poser la question de la pertinence de dépense par élève si éle-
vée pour ces niveaux d’enseignement (et corrélativement de la part budgétaire qui
est alloué à ces cycles d’enseignement).
Même si nous reviendrons sur ce sujet d’une façon plus propositionnelle, l’analyse permet
déjà de pointer que la question des arbitrages dans l’utilisation des ressources est une ques-
tion importante. Pour le secteur de l’éducation, les arbitrages se situent essentiellement à trois
niveaux : 1) dans la distribution des ressources entre les différents niveaux d’enseignement,
2) à l’intérieur de chaque niveau, entre la quantité d’élèves/étudiants et la dépense unitaire
(que l’on espère liée à la qualité) et 3) entre les différents facteurs influant la dépense unitaire.
Sur les deux premiers points, les éléments d’analyse ont été présentés, étudions main-
tenant le troisième. Pour analyser les facteurs composant la dépense unitaire, l’approche
méthodologique la plus appropriée consiste à étudier le coût unitaire sous une forme micro
(de façon décomposée).
un niveau d’éducation donné et du nombre des élèves scolarisés (dans les établissements
publics et communautaires) à ce niveau. Nous allons maintenant aborder l’estimation du
coût unitaire en partant des conditions de l’enseignement et des ressources mobilisées en
moyenne directement au niveau de l’élève. Pour cela, il est commode d’utiliser une for-
mule de décomposition du coût unitaire telle que la suivante :
Dans cette expression, CU est le coût unitaire, SE le salaire moyen des enseignants,
REM le rapport élèves-maîtres, SNE le salaire moyen des non-enseignants, RENE le rap-
port entre le nombre des élèves et des non-enseignants, FONCU les dépenses moyennes de
fonctionnement (biens et services et transferts aux établissements) par élève et SOCU les
dépenses sociales moyennes par élève. Dans la mesure où i) il y a au Tchad une forte pré-
sence d’enseignants communautaires (au primaire et secondaire 1er cycle, principalement
payés par les parents d’élèves22) et ii) la frontière entre écoles publiques et écoles commu-
nautaires est floue, il convient de considérer pour cette analyse l’ensemble d’écoles
publiques/communautaires et d’ajuster la formule précédente :
avec %EC est le % d’enseignants communautaires (ou vacataires pour le secondaire), Sep le
salaire moyen des enseignants publics (non communautaires/vacataires), sachant que tous les
éléments sont calculés sur l’ensemble des écoles public+communautaire. On considère qu’il n’y
a pas de non enseignant communautaire/vacataire.
Pour conduire cette analyse, il convient de mobiliser des informations sur les différents
éléments contenus dans la formule proposée ci-dessus pour le coût unitaire, et notamment
sur les barèmes de rémunération des enseignants et sur les rapports entre le nombre des élèves
et des personnels, enseignants et non-enseignants. Il est alors possible de proposer une
reconstitution analytique du coût unitaire à chacun des différents niveaux d’enseignement.
Le tableau III.9, ci-après, présente les résultats obtenus pour l’année 2003 (les effectifs
scolarisés d’élèves ou d’étudiants, comme ceux des personnels, sont ceux de l’année sco-
laire 2002–03).
Les données du tableau III.9 permettent de décrire la structure du coût unitaire dans
ses différentes composantes; c’est ce que synthétise le tableau III.10.
A la lecture du tableau III.10 on observe, tout comme dans les autres pays où l’ana-
lyse a été faite, que la structure du coût unitaire est très similaire pour les trois niveaux
d’enseignement général primaire, secondaire 1er cycle et secondaire 2ème cycle. Autour de 50 %
du coût unitaire est dépensé pour les salaires des enseignants (55 % au primaire, 48 % au
collège et au lycée), environ 30 % est utilisé pour les salaires des non-enseignants (23% au
primaire, 36% au collège et 35% au lycée) et les 20 % restants sont dépensés pour les biens
et services (22% au primaire, 17% au collège et au lycée).
22. Nous verrons plus loin dans ce chapitre, lorsque nous traiterons spécifiquement la question de la
rémunération des enseignants, qu’il est prévu budgétairement chaque année que l’Etat rémunère les ensei-
gnants communautaires (à hauteur de 25 000 F CFA par mois via une subvention aux associations de
parents d’élèves) mais, qu’excepté en 2002, ces subventions ne sont pas transférées.
60 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau III.9. Reconstitution du Coût Unitaire aux Différents Niveaux d’Enseignement, 2003
Secondaire Secondaire Technique/
Primaire 1er cycle 2nd cycle Professionnel Supérieur
% d’enseignants 61,5 43,8 15,8 5,3 39,1
communautaires/vacataires
Salaire moyen annuel 1267 1548 1722 1807 2430
enseignant ‘public’ (000 F CFA)
Elèves par enseignant 71,6 39,1* 47,7* 12,1 11,8
(public + communautaire)
Coût unitaire enseignant 6,8 22,4 30,4 141,0 125,5**
(000 F CFA)
Salaire moyen annuel 936 1499 1633 1422 1460
non enseignant (000 F CFA)
Elèves par non-enseignant 333 89 74 15 29
Coût unitaire non enseignant 2,8 16,8 22,2 91,7 49,7
(000 F CFA)
Coût unitaire salarial 9,6 39,0 52,5 232,8 175,2
total (000 F CFA)
Fonctionnement 2,7 7,8 10,5 127,5 213,9**
(Biens et services 000 F CFA)
par élève/étudiant
Dépenses sociales par 0 0 0 0 336,1
étudiant (000 F CFA)
Coût unitaire courant total 12,3 46,8 63,0 360,3 725,2
(000 F CFA)
*Les chiffres des enseignants du secondaire 1 et du secondaire 2 reposent sur une estimation de la
distribution entre 1er et 2nd cycle des enseignants des établissements offrant à la fois le 1 er et le 2nd cycle.
L’estimation faite s’appuie sur les informations connues des enseignants des établissements n’offrant
qu’un des deux cycles (collège seul et lycée seul). Il y a lieu de regarder ces estimations avec précaution
dans la mesure où elles indiquent un meilleur taux d’encadrement au 1er cycle qu’au 2nd cycle, situation
contraire aux autres pays étudiés. Ceci peut être mis en rapport avec la forte proportion d’enseignants
communautaires et vacataires dans le 1er cycle ; sans ces enseignants, les taux d’encadrement sont de
84,5 élèves par maître pour le 1er cycle et de 69,4 élèves par maître pour le 2nd cycle.
**Du fait d’un détail insuffisant sur l’information disponible, la rémunération des 217 enseignants
vacataires du supérieur (payés à l’heure par les établissements) n’est pas comptabilisée dans les
dépenses de salaires des enseignants mais dans les dépenses de fonctionnement (biens et services).
Tableau III.10. La Structure du Coût Unitaire aux Différents Niveaux d’Enseignement, 2003
Secondaire Secondaire Technique/
Primaire 1er cycle 2nd cycle Professionnel Supérieur
Coût unitaire enseignant 55 48 48 39 17
Coût unitaire non-enseignant 23 36 35 25 7
Coût unitaire salarial 78 84 83 65 24
Fonctionnement (Biens et 22 17 17 35 29
services et transferts)
Dépenses sociales 0 0 0 0 46
Total 100 100 100 100 100
Le Système Éducatif Tchadien 61
Comparaisons Internationales
La comparaison internationale (voir tableau III.11) permet d’affiner l’analyse pour les trois
nivaux d’enseignement général considérés. Les résultats sont éloquents :
Dépenses courantes hors salaires enseignants. Comme le montre le graphique III.4 pour
le cycle primaire, comparativement aux autres pays, la part des dépenses courantes allouée à
autre chose que les salaires enseignants est particulièrement élevée au Tchad. Pour le primaire
cette part s’établit à 45% du total des dépenses courantes ; parmi les 32 pays africains pour
lesquels les données sont disponibles, seuls le Mali et la Guinée affichent une part des
62 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau III.11. Eléments de Comparaisons Internationales, Autour de 2003
Primaire Secondaire 1er Cycle Secondaire 2nd Cycle
Salaire % Dépenses Salaire Salaire
Elèves/ enseignants hors salaire Elèves/ enseignants Elèves/ enseignants
Pays enseignant (PIB/tête) enseignants enseignant (PIB/tête) enseignant (PIB/tête)
Tchad 72 (10/10) 7,2 (9/10) 44,9 (9/10) 39,1 (6/10)* 8,8 (8/9) 47,7(10/10)* 9,8 (8/9)
Burkina Faso 47 7,6 26,4 42 — 14 —
Bénin 54 3,8 30,7 38 4,3 17 5
Cameroun 63 3,4 32,5 31 6,5 29 6,8
Côte-d’Ivoire 46 5,7 22,5 38 6,8 24 7,5
Guinée 47 2,3 46,2 40,4 2,9 35,6 3,2
Madagascar 50 3,3 42,4 22 3,7 12 5
Mauritanie 42 5,1 18,2 36 7,1 23 9,1
Niger 43 5,9 35,9 39,7 9,1 12,9 10,7
Togo 37 4,5 25,2 53 7,7 30 7,9
Moyenne des 9 pays comparateurs 47,7 4,6 31,1 37,8 6,0 21,9 6,9
Afrique 42 4,6 24,1 — — — —
*: voir la note du tableau III.9. Sources : RESENs, Modèles de simulation, Etats des lieux des systèmes et politiques d’éducation de base (Banque Mondiale,
UNESCO/BREDA, Pôle de Dakar).
Le Système Éducatif Tchadien 63
70
Secondaire
60
Primaire
50
40
30
20
10
Seychelles
Tunisie
Namibie
Maurice
Botswana
Algerie
Cap Vert
Soudan
Maroc
Swaziland
Ghana
Djibouti
AfSud
Togo
Gambie
Comores
RDC
Mauritanie
Gabon
Niger
Zambie
Côte d’lvoire
Guinée
Lesotho
Erythrée
Sénégal
Madagascar
Burundi
Tanzanie
Bénin
Ouganda
Mali
Cameroun
Mozambique
Tchad
dépenses hors salaires enseignants supérieure à celle observée au Tchad. Par rapport à la
valeur référence du cadre indicatif de l’initiative Fast Track (33%), la valeur tchadienne est
également très élevée.
Cette analyse incite à poser la question d’une rationalisation de ces dépenses hors
salaires enseignants. Parmi ces dépenses, il y a lieu de distinguer entre 1) celles dédiées à la
fourniture de biens et services (22% de l’ensemble des dépenses courantes) et 2) celles des-
tinées à payer les non-enseignants du système (23%).
Les dépenses du premier type doivent certainement être protégées dans la mesure où elles
servent à fournir les écoles en intrants scolaires, sous réserve que les intrants en question
(notamment les manuels scolaires) arrivent effectivement dans les établissements (ce qui n’
est pas évident à la lecture des analyses sur la disponibilité en intrants scolaires faites dans le
chapitre 4).
Les dépenses du second type posent plus de questions ; dans la mesure où, en termes
comparatifs elles sont particulièrement élevées au Tchad, il y a lieu de se demander si dans
un contexte global de rareté des ressources, il n’est pas raisonnable de revoir à la baisse
(ou au moins de stopper la progression) les dépenses salariales des non-enseignants, par
exemple par un redéploiement de certains agents dans les salles de classe.
Salaires Enseignants
i) Rémunération moyenne et comparaisons internationales. En termes de salaires des
enseignants, la situation tchadienne est également particulière. Quel que soit le
niveau d’enseignement, les salaires moyens des enseignants, exprimés en unités
de PIB par tête, sont, au Tchad, parmi les plus hauts des pays considérés pour la
comparaison. Au niveau primaire, comme le montre le graphique III.5, parmi les
64 Document de travail de la Banque Mondiale
45
Référence Fast
40 Track : 33%
35
30
25
20
15
10
0
Kenya
Nigéria
Maroc
Tanzanie
Malawi
Sénégal
Mauritanie
Congo
Mozambique
Zambie
Gambie
Burundi
Soudan
Côte d’lvoire
Zimbabwe
Togo
Ouganda
Ghana
Burkina Faso
Rwanda
Erythrée
Guinée B.
Ethiopie
Bénin
Lesotho
Cameroun
Sierra Leone
Seychelles
Niger
Madagascar
Tchad
Mali
Guinée
32 pays pour lesquels des données sont disponibles, seuls l’Erythrée et le Burkina
Faso rémunèrent en moyenne leurs enseignants publics à un niveau moyen
(exprimé en unités de PIB par tête) supérieur à celui observé au Tchad. Le salaire
moyen des enseignants publics (on ne considère pas les enseignants communau-
taires) tchadiens, estimé à 7,2 unités de PIB par habitant s’établit à plus du double
de la valeur de référence du cadre indicatif de l’initiative Fast Track (3,5 unités de
PIB par habitant, valeur observée en moyenne dans les pays les plus performants
pour atteindre la scolarisation primaire universelle).
Au niveau du secondaire (1er cycle et 2nd cycle), la situation est similaire. Même si la dis-
ponibilité des données comparatives est plus faible, le Tchad présente des niveaux moyens de
rémunération des enseignants publics nettement supérieurs à ce qui est observé en moyenne
dans les autres pays (au 1er cycle : 8,8 unités de PIB par habitant contre 6 en moyenne dans
les pays comparateurs considérés et au 2nd cycle : 9,8 unités de PIB par habitant contre 6,9).
Pour les enseignements technique/professionnel et supérieur, même si nous ne dispo-
sons pas de données suffisantes pour effectuer la comparaison des niveaux de rémunération
des enseignants, le fait que le Tchad se situe parmi les pays où la dépense par élève/étudiant
est la plus élevée pour ces niveaux d’enseignement (cf tableau III.8) est très probablement
le résultat de niveaux de rémunération plus important que dans les autres pays.
6
valeur de
référence Fast
5
Track : 3,5
4
0
Seychelles
Guinée B.
Soudan
Congo
Guinée
Zambie
Ouganda
Madagascar
Cameroun
Maroc
Tanzanie
Gambie
Bénin
Rwanda
Ghana
Malawi
Sénégal
Sierra Leone
Mali
Togo
Nigéria
Mauritanie
Mozambique
Kenya
Burundi
Côte d’lvoire
Niger
Zimbabwe
Lesotho
Ethiopie
Tchad
Burkina Faso
Erythrée
le montre le tableau III.12. Pour une même fonction (celle d’enseigner), le salaire
mensuel perçu de l’Etat par un enseignant instituteur (cadre B de la Fonction
publique) est estimé en moyenne à 120 000 F CFA (8,2 unités de PIB par tête pour
l’année 2003) soit 24 fois plus que le salaire moyen perçu des parents d’élèves par un
enseignant communautaire non subventionné par l’Etat (environ 5 000 F CFA par
mois, soit 0,34 unités de PIB par tête). On observe des situations encore plus
extrêmes dans les zones les plus pauvres où le niveau de richesse de l’association des
parents d’élèves ne permet même pas d’assurer un salaire mensuel de 5 000 F CFA
à l’enseignant.
auxquels l’APE doit ajouter 9 000 F CFA. Le tableau III.13 donne les informations sur le
nombre de bénéficiaires, le montant du budget programmé et son ordonnancement pour
les années 2001 à 2005.
Même si cette initiative est certainement à encourager et à généraliser, certains points
de vigilance demeurent :
pas être davantage réduits dans la mesure où l’avantage comparatif des enseignants
fonctionnaires en termes d’acquisitions scolaires de leurs élèves n’est pas prouvé
empiriquement (cf. chapitre 4 de ce rapport).
■ Comme le montre le tableau III.14 (fait à partir des données scolaires de la DAPRO
de l’année 2002/03 et le rapport narratif et financier des activités du Comité de ver-
sement des subventions aux associations de parents d’élèves pour l’année 2002), la
proportion des communautaires pour lesquels une subvention a été versée à la délé-
gation départementale varie énormément d’un département à l’autre (de 0% dans les
trois départements du B.E.T. à 25% à Batha Est). Les résultats présentés incitent à ce
que, tant que la généralisation de la subvention à l’ensemble des maîtres commu-
nautaires n’est pas réalisée, les critères utilisés pour le choix des enseignants commu-
nautaires (et d’abord du nombre de subventions par délégations départementales)
ayant droit à la subvention soient consolidés rationnellement.
Tableau III.14. % des Maîtres Communautaires Pour Lesquels Une Subvention a été
Versée à la Délégation Départementale, par Département
(subvention 2002 et année scolaire 2002/03)
DDEN % DDEN % DDEN %
Batha Est 25% Dababa 9% Sila 5%
Batha Ouest 20% Bahr Koh 9% Tandjile Ouest 5%
Assongha 15% Mayo Boneye 8% Logone Occidental 5%
Hadjer Lamis 13% Kabbia 8% Tandjile Est 5%
Guera 11% Kanem 7% Salamat 4%
Baguirmi 10% Mandoul 7% N’Djamena 2%
Lac Iro 10% Bahr El Gazal 7% Borkou 0%
Mayo Dallah 10% Logone Oriental 6% Ennedi 0%
Biltine 10% Monts de Lam 6% Tibesti 0%
Lac 10% Ouaddai 6% Total 7%
La subvention budgétisée doit effectivement atteindre ses bénéficiaires. Pour cela il est
nécessaire 1) que la ligne budgétaire programmée soit effectivement exécutée (ce qui ne
semble pas avoir été le cas pour l’année 2003 d’après les Comptes administratifs nationaux)
et 2) que les ressources financières atteignent effectivement les maîtres communautaires,
sachant que la route entre le niveau central et les écoles est longue (grand nombre d’inter-
médiaires et distance importante pour les zones les plus reculées). L’analyse de ce dernier
point sort du cadre de ce rapport mais il serait probablement utile de disposer d’une
enquête de traçabilité de la dépense publique (Public Expenditure Tracking Survey en
anglais) pour évaluer la proportion des subventions atteignant les bénéficiaires.
Au niveau du cycle secondaire (général et technique) les disparités salariales sont éga-
lement très marquées. Un enseignant fonctionnaire de grade A est payé en moyenne un
peu plus de 2 millions de F CFA par an (11,6 unités de PIB par tête), soit 4 fois plus qu’un
enseignant contractuel et 6 fois plus qu’un enseignant vacataire moyen (les enseignants
communautaires du secondaire).
68 Document de travail de la Banque Mondiale
Enfin, au niveau de l’enseignement supérieur le constat semble similaire même s’il est
plus difficile de comparer les salaires des différentes catégories dans la mesure où le travail
d’enseignement des non fonctionnaires est payé à l’heure (vacations). Cependant il est utile
d’analyser l’évolution récente de la masse salariale de l’enseignement supérieur (utilisée
pour rémunérer les enseignants et administrateurs fonctionnaires, les enseignants vaca-
taires étant payés sur les dépenses de transferts aux universités et instituts). Elle est passée
de 1,1 milliard de F CFA en 2003 (dépenses exécutées) à 1,5 milliards de F CFA en 2005
(projet de budget), soit une augmentation de 36% en l’espace de deux ans. Cette évolution
est la résultante d’une part de l’augmentation forte du personnel de l’enseignement supé-
rieur (d’après les données de la division de la solde du Ministère des Finances, le nombre
de personnels émargeant sur le compte du MESRFP est passé de 368 à 592 entre 2002 et
2004) et d’autre part de l’augmentation salariale de 8% suite à l’accord en 2005 entre le
Gouvernement et les syndicats. Il y a certainement lieu de s’interroger sur la pertinence
d’une telle évolution compte tenu :
■ Pour ne pas pénaliser la quantité d’offre éducative, le coût unitaire est relativement
faible au Tchad (7% du PIB par habitant, cf tableau III.8)
■ Le haut niveau i) de la rémunération des enseignants publics du système et ii) des
dépenses hors salaires enseignants a tendance à élever le coût unitaire
■ La résultante des deux premiers points est que le système éducatif s’ajuste de lui-
même et essentiellement de deux façons :
● Par la prépondérance croissante des enseignants communautaires (qui “tirent”
le coût unitaire vers le bas) qui conduit l’éducation au Tchad dans un système
dual (une école publique avec des enseignants fonctionnaires dans les centres
urbains et une école communautaire avec des enseignants encore essentiellement
à la charge des familles les plus pauvres dans les zones rurales)
● Par des conditions d’enseignement très mauvaises et qui se dégradent (le taux
d’encadrement moyen est passé de 61 élèves par maître en 1993/94 à 72 en
2003/04)
Le Système Éducatif Tchadien 69
Autrement dit la communautarisation et les taux d’encadrement record sont les prix
payés par le système pour équilibrer le niveau de rémunération élevé des enseignants
fonctionnaires et l’utilisation importante des ressources pour des dépenses salariales de
non-enseignants.
Cycle Primaire
Après nettoyage des données d’établissements et apurement du fichier pour ne garder
que les écoles pour lesquelles les informations sont cohérentes entre elles, le fichier final
d’analyse duquel sont extraits les résultats qui suivent, compte environ 40 écoles privées
et 300 écoles publiques/communautaires.
70 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau III.15. Ressources Financières Reçues par les Établissements, par Source et Statut de
l’Établissement, Année 2001
Public–Communautaire Privé
F CFA Variations F CFA Variations
par élève (80% des en % du par élève (80% des en % du
(moyenne) écoles) total (moyenne) écoles) total
Cotisations APE (parents) 1034 [469–1655] 88% 1455 [0–3156] 23%
Frais de scolarité et autres 83 [0–203] 7% 3012 [0–10657] 48%
contributions (parents)
Autres sources (ONG, Etat, 59 [0–0] 5% 1784 [0–1458] 29%
extérieur . . .)
Total 1176 [526–2000] 100% 6251 [708–14161] 100%
Tableau III.16. Utilisation des Ressources Financières Reçues par les Établissements, par Nature
de Dépenses et Statut de l’Établissement, Année 2001
Public– Communautaire Privé
F CFA Variations F CFA Variations
par élève (80% des en % du par élève (80% des en % du
(moyenne) écoles) total (moyenne) écoles) total
Enseignants 881 [343–1513] 77% 2754 [263–6354] 45%
Autres personnels 9 [0–0] 1% 309 [0–494] 5%
Livres, fournitures 100 [0–243] 9% 457 [0–1012] 7%
scolaires et équipement
pédagogique
Fonctionnement courant 80 [0–235] 7% 315 [0–544] 5%
Construction, rénovation, 57 [0–94] 5% 2035 [0–3969] 33%
mobilier
Restauration 12 [0–0] 1% 69 [0–324] 1%
Autres 10 [0–0] 1% 212 [0–147] 3%
Total 1149 [524–1929] 100% 6151 [504–18856] 100%
Les principaux enseignements qui ressortent de la lecture des tableaux III.15, III.16
et III.17 sont les suivants :
■ Quelles que soient les sources de financement et le statut de l’école, les différences
entre écoles sur les ressources financières reçues sont très importantes (les écoles
publiques/communautaires les mieux dotés reçoivent 4 fois plus de ressources finan-
cières que les moins bien dotés, pour les écoles privées le différentiel est encore plus
important : 20 fois plus de ressources financières pour les mieux lotis), dénotant un
problème substantiel d’équité.
■ Le coût unitaire de fonctionnement d’une école privée est en moyenne relativement
faible (autour de 6000 F CFA en moyenne et de 14 000 F CFA pour les écoles les
plus “riches”). Même si ces coûts unitaires sont probablement légèrement sous-
estimés (les salaires des enseignants fonctionnaires en poste dans les écoles privées
ne sont pas comptés et les ressources financières sont probablement légèrement
sous déclarées), ces estimations confirment la cherté de l’école primaire tchadienne
uniquement publique (sans enseignants communautaires). Pour mémoire le coût
unitaire public (hors contributions des familles) d’une école sans enseignants com-
munautaires, s’établit, du fait du niveau de salaire élevé des enseignants fonction-
naires, à plus de 30 000 F CFA (18% du PIB par tête).
■ Les ressources reçues par les écoles en dehors des ressources de l’Etat sont essen-
tiellement celles des familles.
● Pour les écoles publiques/communautaires : 95% des ressources financières
reçues sont issues des parents, 88% sous forme de cotisations APE et 7% sous
forme de frais de scolarité (même si ceux-ci n’existent plus officiellement). Addi-
tionnement, les familles contribuent au fonctionnement des écoles par des
appuis en nature : 79% des écoles reçoivent un appui sous forme de travail béné-
vole et 42% d’entre elles du matériel.
● Pour les écoles privées : les frais de scolarité représentent près de la moitié des
ressources financières reçues par les établissements, les cotisations APE 23% et
le reste (29%) est perçue d’autres sources. Notons que pour cette dernière source
il s’agit probablement (comme dans les autres pays) en grande partie de la
contribution financière du créateur de l’établissement qui a souvent la fonction
de parrain.
■ Les ONG et organismes internationaux ne fournissent que très peu de ressources
financières aux écoles mais leur appui sous forme de contributions en nature
touche une proportion substantielle des établissements. 35% des écoles publiques/
communautaires (respectivement 26% des écoles privées) reçoivent un appui en
nature d’une ONG, 37% (respectivement 30%) reçoivent l’appui du PAM et 34%
(respectivement 21%) reçoivent l’appui de l’UNICEF.
■ L’utilisation qui est faite des ressources financières reçues diffère largement entre
écoles publiques/communautaires et écoles privées. Dans les écoles publiques/
communautaires près de 80% des dépenses sont effectuées pour rémunérer les ensei-
gnants (ceux qui ne sont pas fonctionnaires), 9% pour le matériel pédagogique et seu-
lement 5% pour les constructions/rénovation/mobilier. Dans les écoles privées la part
allouée à la rémunération des enseignants est moindre (45%, même si en volume cela
représente 3 à 4 fois plus dans les écoles publiques/communautaires du fait de res-
72 Document de travail de la Banque Mondiale
Cycle Secondaire
Après apurement du fichier pour ne garder que les écoles pour lesquelles les informations
sont cohérentes entre elles, le fichier final d’analyse duquel sont extraits les résultats qui
suivent, compte environ 46 établissements privées et 164 établissements publics.
Tableau III.18. Ressources Financières Reçues par les Établissements, par Source et Statut de
l’Établissement, Année 2001
Public Privé
F CFA Variations F CFA Variations
par élève (80% des en % du par élève (80% des en % du
(moyenne) écoles) total (moyenne) écoles) total
Contributions des 11150 [2330–22299] 76% 102409 [8672–193568] 50%
parents (frais de
scolarité, cotisations
APE . . .)
Etat 2433* [0–6849] 17% 0 [0–0] 0%
Autres sources 996 [0–278] 7% 102460 [0–268298] 50%
(ONG, extérieur . . .)
Total 14579 [3867–28393] 100% 204869 [8876–552374] 100%
*les montants reçus provenant de l’Etat sont déjà comptabilisés dans les coût unitaires publics tels
qu’analysés dans les sections précédentes
Tableau III.19. Utilisation des Ressources Financières Reçues par les Établissements, par Nature
de Dépenses et Statut de l’Établissement, Année 2001
Public Privé
F CFA Variations F CFA Variations
par élève (80% des en % du par élève (80% des en % du
(moyenne) écoles) total (moyenne) écoles) total
Enseignants 4511 [0–11444] 33% 101819 [2130–266638] 49%
Autres personnels 532 [0–1398] 4% 18695 [0–61950] 9%
Livres, fournitures 2505 [0–6893] 18% 19355 [0–49983] 9%
scolaires
et éq.péda.
Fonctionnement 2417 [0–5589] 18% 19675 [62–85138] 9%
courant
Construction, 2813 [0–6110] 21% 39274 [0–101753] 19%
rénovation,
mobilier
Restauration 119 [0–0] 1% 6051 [0–1431] 3%
Autres 701 [0–2043] 5% 2548 [0–8688] 1%
Total 13598 [3169–27243] 100% 207417 [8133–555551] 100%
Le Système Éducatif Tchadien 73
■ Enfin, les ONG n’appuient que faiblement (et les organisations internationales
pas du tout) le fonctionnement des établissements secondaires. Seuls 6% des éta-
blissements (qu’ils soient publics ou privés) reçoivent un appui en nature de la part
des ONG.
CA = ⎡ D0 ⋅ k (1 + k ) ⎤ ⎡(1 + k ) − 1⎤
n n
⎣ ⎦ ⎣ ⎦
où CA est le coût annualisé de l’investissement initial (valeur annuelle d’usage d’une salle de
classe pendant un an), D0 est la dépense initiale pour la construction et l’équipement d’une salle
de classe, k est le coût d’opportunité du capital, et n la durée de vie anticipée de la structure con-
struite.
Il est évidemment utile de conduire les calculs pour plusieurs options alternatives de
construction dans le pays. Il est également utile, dans la mesure du possible, d’inscrire les
résultats obtenus dans une perspective comparative internationale. Les résultats de l’analyse
sont présentés dans le tableau III.21.
Les principaux enseignements sont les suivants :
Tableau III.21. Comparaison Internationale du Coût Unitaire d’Une Salle de Classe Équipée,
Cycle Primaire, Année 2003 ou Proche
Coût Unitaire d’Une Salle de Classe Équipée
En nombre En nombre d’années
Valeur d’Années de de salaires d’un
annualisée23 en % salaires d’un enseignant
du coût unitaire enseignant communautaire
en $ des E.U. public courant fonctionnaire subventionné24
Tchad
Dur (durée de vie : 16737 (9 millions 82% 7,1 25,0
10–20 ans) de FCFA)
Semi-dur 9299 (5 millions 73% 3,9 13,9
(7–10 ans) de F CFA)
Poto-Poto 930 (500 000 F CFA) 21% 0,4 1,4
(1–3 ans)
Burkina Faso 7000 — — —
Gambie 8000 — — —
Ghana 9000 — — —
Guinée 9000 — — —
Madagascar 7200 16% 2,2 —
Mozambique 10000 133% 20,0 —
Niger 8000 30% — —
Sénégal 7455 29% 3,9 —
Tanzanie 4611 — — —
Moyenne pays 7807 52%
comparateurs
■ Malgré le niveau très élevé des salaires des enseignants fonctionnaires au Tchad, le
coût global d’une salle de classe en dur représente plus de 7 années de salaires d’un
enseignant fonctionnaire (3,9 années pour une salle en semi-dur), une valeur très
supérieure à ce qui est observée à Madagascar (2,2 années de salaires) et au Sénégal
(3,9 années) mais inférieure à la situation du Mozambique (20 années de salaires),
pays pour lequel les coûts de constructions scolaires sont reconnus comme étant
trop élevés. Exprimé par rapport à la subvention accordée aux enseignants com-
munautaires (qui rappelons le constituent la majorité du corps enseignant), le coût
d’une salle de classe paraît encore plus élevé. La construction d’une salle de classe
en dur est équivalente financièrement à 25 années de salaires d’une communautaire
subventionné (13,9 années pour une salle de classe en semi-dur).
23. Pour le calcul de la valeur annualisée, il a été choisi de prendre un coût d’opportunité égal à 5%
(k=0,05)
24. Une moyenne de 30 000 FCFA par mois a été utilisée comme estimation du salaire d’un ensei-
gnant communautaire subventionné
76 Document de travail de la Banque Mondiale
où
PF (pression fiscale) représente les ressources publiques domestiques en % du PIB
EDU représente les dépenses courantes de l’éducation en % des ressources publiques domestiques
PRIM est la part des dépenses courantes de l’éducation allouée au cycle primaire
où
MSE = masse salariale des enseignants payés par le gouvernement
ENS = nombre d’enseignants publics (payés par le gouvernement)
EL = nombre d’élèves scolarisés
ELPUB = nombre d’élèves scolarisés dans le public
POPSCOL = Population d’âge scolaire
POP = Population Totale
%PRIVCOM = % d’élèves scolarisés dans le privé (y compris écoles communautaires),
a = rapport entre les dépenses courantes hors salaires des enseignants et la masse salariale des
enseignants,
SALPIBT = salaire moyen des enseignants en unités de PIB par habitant,
REM = rapport élèves-maître dans les écoles publiques
TBS = taux brut de scolarisation
RAPDEP = part des enfants d’âge scolaire dans la population totale (pseudo taux de dépen-
dance démographique)
Le Système Éducatif Tchadien 77
Cette égalité mathématique, toujours exacte, permet de faire apparaître les facteurs qui
sous-tendent l’offre de scolarisation primaire que le système peut fournir (TBS)25. Ces fac-
teurs sont relatifs i) au contexte macro-économique (pression fiscale et pseudo rapport de
dépendance démographique), ii) à la mobilisation des ressources domestiques (arbitrages
inter et intra sectoriels) et iii) à la production de services éducatifs (salaires, taux d’enca-
drement, dépenses hors salaires enseignant, privatisation). Ces paramètres sont dans une
large mesure descriptifs de la politique éducative nationale, en termes de priorité accordée
à l’éducation [primaire] et d’efficience du système et constituent à ce titre les principaux
indicateurs du cadre indicatif de l’initiative Fast-Track.
L’analyse de ces paramètres, suivant une approche comparative à la fois par rap-
port à des pays comparables et par rapport aux valeurs de référence du cadre indicatif
Fast-Track (qui ont été choisi sur la base de ce qui était observé dans les pays les plus
performants pour atteindre la scolarisation primaire universelle) est intéressante à deux
points de vue.
■ cela permet d’avoir une idée synthétique des contraintes et des marges de manœuvres
présentes dans le système actuel.
■ cela fournit des pistes pour s’approcher de la scolarisation universelle, grâce à
quelques simulations très agrégées, même si cela ne remplace pas l’élaboration d’un
modèle de simulation sectoriel affiné et plus complet (qui sera fait en complément
du présent rapport)
A la lecture du tableau III.22, on peut tirer plusieurs conclusions quant aux contraintes et
marges de manœuvre du système éducatif tchadien pour atteindre une scolarisation pri-
maire universelle de qualité :
25. La pénurie du côté de la demande d’éducation constitue également, comme cela a été identifié
dans le chapitre 2, un frein à la scolarisation universelle mais cet aspect, même s’il est important, ne peut
être traité de la même façon (sous forme d’équation budgétaire) que la mesure d’offre.
78 Document de travail de la Banque Mondiale
Arbitrages Budgétaires
Contexte Edu/ressources Primaire/
6–11 ans/pop. (%) Pression fiscale (%) publiques (%) secteur (%)
(RAPDEP) (PF) (EDU) (PRIM)
Tchad 17,9 8 25 47
Bénin 18 16 17 49
Burkina Faso 18 15 17 62
Cameroun 17 19 14 42
Guinée 18 11 19 44
Mauritanie 16 28 15 46
Niger 17 9 32 58
Sénégal 16 18 27 44
Togo 17 16 26 45
Afrique 16 19 19 49
Cadre indicatif — 14-16-18 % 20 50
Fast Track
Rapport Tchad/ — 0,57 1,25 0,94
cadre indicatif
■ Une contrainte sur l’arbitrage inter sectoriel mais une marge de manœuvre intéressante
sur l’arbitrage intra sectoriel. Avec un niveau de dépenses courantes pour l’éduca-
tion égal à 25% des ressources publiques domestiques, il existe peu de marges de
manœuvre pour augmenter la part budgétaire allouée au secteur. En revanche, il
existe une marge de manœuvre budgétaire intéressante à l’intérieur de l’enveloppe
globale allouée à l’éducation. La part des dépenses courantes d’éducation allouée
au cycle primaire n’est que de 47%, ce qui est faible en termes comparatifs et cer-
tainement insuffisant pour un pays si loin de la scolarisation primaire universelle.
Porter cette proportion à 50% (respectivement 55%) permettrait, toutes choses
égales par ailleurs, de faire augmenter le TBS de 4 points (respectivement 13 points).
Ce sont certainement des pistes à considérer sérieusement au moment des discus-
sions budgétaires.
■ Des arbitrages à l’intérieur du coût unitaire qui pourraient évoluer. Comparative-
ment aux autres pays, et comme cela a déjà été analysé précédemment dans ce cha-
pitre, les arbitrages à l’intérieur de la dépense unitaire sont, très en faveur des
salaires des enseignants fonctionnaires et des dépenses d’administration aux détri-
ments de la taille des classes et des enseignants communautaires (qui constituent
la majorité du système). Une logique d’amélioration de la qualité pourrait se situer
à l’articulation de 1) une réduction de la taille des classes, 2) la prise en charge
totale par l’Etat des enseignants communautaires sur la base d’une rémunération
à la fois plus valorisante et acceptable sur le plan budgétaire (pour ne pas pénali-
Le Système Éducatif Tchadien 79
Ces conclusions ne sont que des simulations grossières qui devront être affinées au
moment de l’élaboration du modèle de simulation financière de l’ensemble du secteur édu-
catif, mais elles apportent néanmoins des pistes intéressantes pour donner des chances au
système éducatif d’atteindre une scolarisation primaire universelle. Ces pistes de réformes
sont résumées sous la forme des scénarii présentés dans le tableau III.23 qui suit.
Sous réserve
26. Le chiffre de 65% est une estimation du % d’élèves dans les écoles privé et communautaires. Même
si le statut d’écoles communautaires est floue (cf. chapitre 2), pour les besoins du calcul l’estimation a été
faite en ajoutant au 10% des effectifs scolarisés dans le privé une estimation du % d’élèves faite sur la base
du % d’enseignants communautaires (8 800 sur un total de 14 304)
27. Le chiffre de 79% est légèrement inférieur à ce qui est donné par les statistiques scolaires (cf. cha-
pitre 2) mais l’on sait grâce à l’enquête EDS que le TBS calculé avec les statistiques scolaires est légèrement
sur-estimé
80 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau III.23. Simulations sur les Paramètres Structurels de la Politique Éducative Pour
Atteindre la Scolarisation Primaire Universelle en 2015
Politiques de production
Contexte Arbitrages de services èducatifs Résultats
RAPDEP PF EDU PRIM REM SALPIBT a PRIV TBS
Situation 2003 17,9% 8% 25% 47% 72 7,2 81% 65% 79%
Scénario 1 2015 17,9% 14% 25% 50% 50 3,5 50% 15% 109%28
Scénario 2 2015 17,9% 14% 25% 55% 45 3,5 50% 15% 108%
fonctionnaires) pour faire passer le salaire moyen des enseignants de 7,2 unités de
PIB par tête (calculé uniquement sur les enseignants fonctionnaires) à 3,5 unités
de PIB par tête (l’estimation actuelle en intégrant tous les communautaires se situe
autour de 3 unités de PIB par tête),
■ 3-d’économies à faire sur les dépenses d’administration (diminution de la part des
dépenses hors salaires enseignants de 84% à 50% de la masse salariale enseignants) et
■ 4-d’une augmentation de la priorité budgétaire accordée au cycle primaire à hau-
teur de 50% du total alloué au secteur de l’éducation,
28. Avec une hypothèse de 8 (resp 9%) de redoublement (ce vers quoi le Tchad doit vraisemblablement
se diriger, cf. chapitre 4), la scolarisation primaire universelle (taux d’achèvement de 100%) est équivalent
financièrement à un TBS égal à 108% (resp. 109%)
C HAP ITR E 4
D
ans tous les systèmes éducatifs et à chacun des niveaux d’enseignement, il existe des
possibilités variées d’utiliser les ressources mobilisées. On peut par exemple avoir
une organisation scolaire dans laquelle il y a en moyenne 25, 40 ou bien 60 élèves
par classe; on peut aussi choisir ou bien refuser des groupements d’élèves tels que le cours
multiple ou la double vacation. On peut aussi souhaiter recruter des maîtres avec 9 ou
12 années d’éducation générale suivie d’une formation professionnelle de 3 mois, d’une
année ou de 3 années; on peut choisir que les constructions scolaires soient des bâtiments
modernes et de qualité «internationale», ou bien que ces constructions soient faites selon
des modalités traditionnelles par les communautés. On peut encore accepter, ou non, que
le système soit caractérisé par un niveau élevé de redoublements de classe. Sur la plupart
de ces points, il existe dans la communauté éducative des opinions contradictoires. Il est
donc important de disposer de données empiriques objectives pour départager ces opin-
ions contradictoires.
Il existe a priori de nombreuses façons alternatives d’organiser le fonctionnement de
l’école. Ces possibilités sont bien sûr variées si on autorise des changements dans le volume
des ressources unitaires mobilisées; elles sont variées aussi même si on se situe à un niveau
de coût unitaire fixé. C’est l’analyse en terme d’efficacité interne qui s’attache à ce qui se
passe à l’intérieur des différents cycles scolaires; elle le fait selon deux perspectives complé-
mentaires : d’une part et de façon classique en examinant les flux d’élèves, redoublements
et abandons, et d’autre part en examinant comment les facteurs de l’organisation scolaire
influencent les résultats tangibles des processus éducatifs mis en place, à savoir, la rétention
des élèves en cours de cycle, les redoublements et les acquisitions cognitives. Nous présen-
terons les informations qu’il a été possible de rassembler successivement sur ces deux points.
81
82 Document de Travail de la Banque Mondiale
Parmi ceux qui ont fréquenté l’école formelle, 48 % (917 / 1 910) savent lire aisément,
alors qu’ils ne sont que 1 % (34 / 4 437) parmi ceux qui n’ont pas fréquenté l’école formelle
ni un enseignement non-formel. Dans cette population des personnes ayant suivi le non
formel (elle représente 7,1 % de la population adulte du Tchad), la proportion de ceux qui
savent lire sans difficulté est de 27 %, un chiffre relativement faible certes, mais tout de
même appréciable. Si on s’attache aux populations selon leur fréquentation scolaire, on
trouve respectivement les chiffres de 78 % pour ceux qui ont fréquenté l’école formelle,
39 % pour ceux qui ont bénéficié d’un enseignement non-formel et 2% pour ceux qui n’ont
reçu aucune forme de scolarisation.
Au total, même si la fréquentation de l’enseignement non-formel laisse des traces pos-
itives sur les chances des adultes de savoir lire, il est clair que c’est par l’intermédiaire de la
fréquentation de l’école formelle aux âges jeunes que les chances de savoir lire à l’âge adulte
sont les meilleures. Cela dit, si on peut considérer que la scolarisation formelle est positive
pour savoir lire à l’âge adulte, il faut aussi clairement souligner que ce n’est pas en soi, ni
une condition nécessaire ni une condition suffisante. Ce n’est en effet pas une condition
suffisante dans la mesure où 22 % de ceux qui ont fréquenté l’école formelle ne savent pas
du tout lire à l’âge adulte et que 52 % ne savent pas lire de manière aisée.
Cela dit, le tableau IV.1 donne une information générique sur la fréquentation de
l’école (formelle et non-formelle) sans qualifier en particulier la durée pendant laquelle les
individus ont bénéficié de cet enseignement. Pour l’enseignement non-formel, l’enquête ne
donne aucune indication. Par contre, pour l’école formelle, il est possible d’identifier, parmi
ceux qui ont été scolarisés, quelle a été la durée de leurs études, ou plus précisément la plus
haute classe atteinte quand ils sont sortis du système scolaire. Le tableau IV.2, ci-après,
présente les résultats obtenus; le graphique IV.1 joint illustre la relation entre la classe la plus
élevée atteinte pendant la jeunesse et la capacité de lire correctement à l’âge adulte.
La structure des données est très apparente. Si on cible la proportion de ceux qui savent
lire de façon aisée, on voit qu’elle reste très faible (inférieure ou égale à 11 %) jusqu’à la
classe de CE2, pour augmenter progressivement ensuite.
On voit que la proportion des adultes qui savent lire aisément n’atteint 50 % que si la
personne a au moins une scolarité primaire complète (du CP1 au CM2). Il faudrait en fait
une scolarité au collège (jusqu’à la classe de 4ème) pour que l’alphabétisation durable soit
acquise plus ou moins par toute la population. Si on accepte de considérer les adultes qui
savent lire même avec difficultés, la même structure, un peu décalée, est observée. On voit
alors qu’avec une scolarité au moins jusqu’au CM1, on obtient un chiffre de plus de 90 %
pour la proportion des adultes qui ont cette capacité.
84 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau IV.2. Niveau de Lecture des Adultes Selon la Plus Haute Classe Formelle Atteinte
Pendant la Jeunesse (22–44 ans)
70
60
50
40
30
20
10
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
Nombre d'années d'études
féminin), iii) la zone géographique de résidence (1 si urbain; 0 si rural), et enfin iv) le nom-
bre d’années depuis la fin des études. L’analyse est limitée aux individus qui ont suivi un
enseignement formel.
On peut à priori faire l’hypothèse que les rôles et comportements sociaux des hommes
et des femmes étant différents, il est possible que cela induise, à niveau d’éducation égal,
des différences dans la rétention de l’alphabétisation. Concernant la distinction entre le
milieu urbain et rural, on peut s’attendre à une meilleure rétention des capacités de lecture
en milieu urbain eu égard à la plus grande disponibilité de documents écrits et à la plus
grande fréquence des occasions de parler le français. Enfin, la variable mesurant le nom-
bre d’année depuis la sortie des études vise à tester la structure éventuelle de rémanence ou
d’oubli des acquis initiaux. Les résultats de l’estimation économétrique sont donnés dans
le tableau IV.3.
Comme cela était évidemment prévisible, la variable la plus importante est la classe la
plus haute atteinte (de 1/CP1 à 17/Maîtrise) atteinte. Cela dit, le sexe et la zone géo-
graphique de résidence exercent aussi, à la marge, des impacts tout à fait appréciables.
Autres choses égales par ailleurs (mêmes études et même zone de résidence), les hommes,
avec un coefficient de +0,837, ont, au point moyen, une probabilité de l’ordre de 15%
[(0,23)×(1−0,23)× 0,84] plus élevée que celle des femmes de savoir lire correctement à l’âge
adulte. De même, les adultes résidant en zone urbaine ont un avantage au point moyen de
l’ordre de 13 %.
La durée qui sépare le moment de l’enquête de la sortie des études (elle varie de 5 à 35 ans)
a un impact plus limité sur la rétention de l’alphabétisation, puisque entre 5 ans et 20 ans
après la sortie des études, il n’y a, au point moyen, que 5 % d’obsolescence des acquis ini-
tiaux. Tout se passe donc comme si, une fois établies, les capacités l’étaient dans une large
mesure de façon définitive (si les compétences ne sont pas bien établies, elles vont dis-
paraître très rapidement). Pour rendre les résultats économétriques plus facilement inter-
prétables, il est commode de les présenter sous formes de simulations numériques. Le
tableau IV.4 propose les résultats obtenus.
En croisant le sexe et la zone géographique de résidence, les différences sont relative-
ment spectaculaires. Alors que le taux estimé de rétention de l’alphabétisation, pour des
études conduites jusqu’en fin de CM2, est de 71 % pour les hommes de milieu urbain, il
n’est que de l’ordre de 54 % pour les hommes ruraux et 51 % pour les femmes urbaines,
86 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau IV.4. Simulation du Pourcentage d’Adultes (22–44 ans) Capables de Lire Correctement
Selon la Plus Haute Classe Atteinte, le Sexe et le Milieu de Résidence
Plus haute classe atteinte 0 CP1 CP2 CE1 CE2 CM1 CM2 6ème 5ème 4ème 3ème
Ensemble de la population 0,5 1,2 2,8 6,3 13,6 27,1 46,6 67,2 82,8 91,9 96,4
Hommes Urbains 1,4 3,2 7,3 15,6 30,3 50,5 70,6 84,9 93,0 96,9 98,7
Femmes Urbaines 0,6 1,4 3,3 7,4 15,9 30,7 51,0 71,0 85,2 93,1 96,9
Hommes Ruraux 0,7 1,6 3,7 8,2 17,4 33,1 53,8 73,2 86,5 93,8 97,3
Femmes Rurales 0,3 0,7 1,6 3,7 8,4 17,7 33,5 54,2 73,6 86,7 93,9
mais seulement de 34 % pour les femmes résidant en milieu rural. On sait qu’il n’y a
aujourd’hui que de l’ordre de 15 % des filles rurales qui atteignent la classe de CM2. Si on
ajoute que seulement 34 % d’entre elles auront conservé la capacité de lire correctement
10 ans après, on arrive à un chiffre misérable pour l’impact durable de la scolarisation pri-
maire pour cette population.
Si on veut atteindre une alphabétisation durable des adultes dans les conditions de
qualité de l’école prévalant au milieu des années 80, il faudrait que les hommes urbains
aient une scolarité jusqu’à la classe de 4ème et que les autres groupes aient en fait une sco-
larisation complète jusqu’à la fin du premier cycle secondaire. Cette argumentation sup-
pose qu’on se situe dans un cadre où le niveau de qualité des services éducatifs serait
considéré comme une donnée exogène. Or, comme nous le verrons plus avant dans ce
chapitre, le niveau global de la qualité de l’éducation au Tchad est relativement modeste.
Il s’ensuit qu’il conviendra de situer la recherche de la rétention universelle de l’alphabéti-
sation à l’âge adulte dans une interaction entre des politiques visant à faire en sorte d’une
part que tous les jeunes du Tchad puissent avoir une durée d’études suffisamment longue
et d’autre part bénéficient de services éducatifs de qualité sensiblement améliorée29.
Des Redoublements Trop Fréquents et sans Effets Positifs sur la Qualité des
Services Offerts
Le tableau IV.5, en présentant l’évolution de la proportion des redoublants par année
d’études permet d’évaluer l’ampleur et la dynamique des redoublements au Tchad.
Le système éducatif tchadien a toujours été marqué par une fréquence élevée des redou-
blements. Pour le cycle primaire par exemple, la proportion moyenne de redoublants valait
27 % en 1970 et 37 % en 1975. Au cours des 13 dernières années, on observe une part de
redoublants variant dans le cycle primaire, entre 25 et 32 % selon les années considérées.
Le CP1 et le CM2 sont les classes du cycle que l’on redouble le plus, même si on note une
légère homogénéisation du niveau de redoublement dans les différentes classes au cours
des dernières années.
Dans le secondaire (collège et lycée), la fréquence des redoublements, bien qu’in-
férieure à celle observée dans le cycle primaire, demeure cependant importante. Au col-
lège, la proportion moyenne de redoublants est restée relativement stable sur la décennie,
29. Sachant que cette durée, de façon générale, devrait être d’autant plus longue que la qualité des ser-
vices éducatifs offerts sera plus faible.
Le Système Éducatif Tchadien 87
Même si la fréquence des redoublements paraît très élevée à la vue des chiffres
nationaux, il importe de compléter l’analyse avec une approche comparative afin de
nuancer ou de confirmer le diagnostic avec le positionnement relatif du Tchad sur cette
question par rapport à des pays comparables. Pour ce faire, deux niveaux de comparaisons
sont possibles, une entrée par grandes régions du monde et une autre par pays de niveau
comparable. Le tableau IV.6, ci-après, présente la fréquence moyenne des redoublements
dans le primaire par grandes régions du monde.
La lecture de ce tableau dresse un constat assez alarmant en ce qui concerne la pra-
tique du redoublement sur le continent Africain eu égard à ce qui se passe dans les autres
régions du monde. En effet, le contient est celui où le redoublement est le plus élevé depuis
deux décennies, et où, il semble rigide à la baisse alors qu’il connaît des diminutions sen-
sibles dans les autres régions du monde. A l’échelle du continent, il est à souligner aussi, la
très grande différence qui existe entre les pays anglophones et les francophones par rapport
88 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau IV.6. Redoublements (%) Dans le Primaire Dans les Différentes Régions du
Monde (1980–2000)
Début années 80 Début années 90 Début années 2000
Pays de l’OCDE 3,4 2,4 1,7
Pays d’Asie 13,5 10,3 9,6
Pays d’Afrique 18,0 18,1 17,0
Afrique francophone 23,6 23,7 22,8
Afrique anglophone 6,8 7,1 8,8
Pays d’Amérique Latine 12,8 10,2 6,7
Pays du Moyen-Orient 13,5 10,0 7,3
Graphique IV.2. % de Redoublants Dans les Pays à bas Revenu, Année 2002 ou Proche
30
Burkina Faso
Togo
25 Sao Tomé
Bénin Congo
Niger Erythrée Mozambique
Cycle secondaire
20
Tchad Comores
Guinée Côte d'IvoireGuinée-Bissau
Mauritanie Cameroun Madagascar
15 Rwanda
Bhutan Swaziland
Yemen Ethiopie Nepal
Namibie
10
Lesotho
Bangladesh Cambodge
Inde
Djibouti Malawi
5 Zambie Senegal
Ghana
Bolivie Ouganda Laos
Viet Nam Gambie
0
Tanzanie
0 5 10 15 20 25 30 35
Cycle primaire
ant ses proportions de redoublants dans les cycles primaire et secondaire, par rapport à
celle des autres pays à faible revenu pour lesquels les données récentes sont disponibles. A
la lumière du graphique il apparaît que : le système éducatif tchadien se classe parmi ceux les
plus enclins au redoublement que ce soit dans le cycle primaire (position horizontale) ou dans
le secondaire (position verticale). Ce résultat vient confirmer ce qui a été suggéré plus haut
dans ce texte.
Examinons maintenant la pertinence empirique de l’idée (répandue) selon laquelle les
redoublements seraient un mal nécessaire pour assurer une école de qualité compte tenu
Le Système Éducatif Tchadien 89
des ambitions attribuées au contenu des programmes. Pour cela, nous examinons la rela-
tion existant entre la fréquence des redoublements et la qualité telle qu’on peut l’apprécier
par les apprentissages effectifs des élèves.
Dans le cas du Tchad, les données de l’enquête d’évaluation du PASEC30 ont été util-
isées pour explorer l’existence de cette relation. Les données de cette enquête montrent que
les écoles sont caractérisées à la fois par des niveaux moyens assez différents d’apprentis-
sage de leurs élèves (il varie de 11 à 66 dans l’échelle retenue) ainsi que par des situations
extrêmement variables quand à la fréquence des redoublements (elle varie entre 0 et 50 %).
Mais, en mettant en regard le score moyen aux tests de fin d’année en français et en math-
ématiques des élèves de 5ème par école et le pourcentage de redoublants par classe, c’est une
absence totale de relation qui ressort de l’analyse. Il n’y a aucune relation statistique entre
les deux grandeurs : i) des écoles ayant un niveau comparable d’acquisitions de leurs élèves
peuvent avoir des pratiques très différentes en matière de redoublement et ii) des écoles
avec une pratique plus active de redoublement ne sont pas non plus caractérisées par de
meilleurs scores d’acquisitions de leurs élèves.
Il est utile de rappeler aussi, que toutes les analyses disponibles, celles menées sur don-
nées individuelles dans des enquêtes nationales (programme PASEC) et celles menées sur
données comparatives internationales (Mingat et Sosale, 2000), corroborent les résultats
précédents en montrant que l’argument selon lequel les redoublements pourraient être justi-
fiés pour des raisons liées à la qualité de l’éducation, n’est pas empiriquement valide. Il existe
ainsi de bons systèmes scolaires (bon niveau d’apprentissage des enfants) qui ont des taux
de redoublement faibles ou élevés. De même, au niveau individuel (sauf pour ceux qui sont
spécialement faibles), les élèves qu’on fait redoubler en principe pour leur bien, ne pro-
gressent pas mieux en redoublant que s’ils avaient été promus dans la classe supérieure.
Par contre, si les redoublements n’entretiennent pas de liaison positive avec la qualité
des systèmes, ils sont connus i) pour produire un gaspillage de ressources publiques (deux
années d’études payées par le système pour une seule année validée par l’élève), et ii) pour
exacerber les abandons précoces en cours d’études. En effet, les familles voient dans le
redoublement imposé à leur enfant, que celui-ci n’est pas performant et ne profite pas bien
de sa présence à l’école. Ceci conduit d’une part à réduire les bénéfices attendus de la sco-
larisation et à d’autre part à en augmenter les coûts avec une tendance des parents à retirer
leur enfant de l’école. Les observations empiriques montrent que ces impacts négatifs du
redoublement sont spécialement forts lorsque la demande scolaire est par ailleurs fragile
(filles, enfants de milieu défavorisé).
Notons par ailleurs que les travaux préliminaires à l’initiative EPT Procédure Accélérée
effectués par la Banque Mondiale31 ont montré que dans les pays africains ayant été les plus
performants durant la décennie 1990–2000 pour se rapprocher de la scolarisation primaire
30. Un échantillon d’élèves des classes de 2ème et de 5ème année a ainsi été soumis à des tests standard-
isés en français et en mathématiques, au cours de l’année scolaire 2003/2004 dont l’administration et la
correction ont été effectuées de façon homogène. Environ 1600 élèves de la 5ème année dans 110 écoles ont
subi ces tests.
31. Le financement de l’Education Pour Tous en 2015: Simulations pour 33 pays d’Afrique sub-
saharienne, Alain Mingat, Ramahatra Rakotomalala, Jee-Peng Tan, Equipe d’appui à l’analyse sectorielle
et au développement des politiques, Département du Développement Humain, Région Afrique, Banque
Mondiale.
90 Document de Travail de la Banque Mondiale
universelle la proportion moyenne de redoublants valait 10%, soit très en deçà de la situ-
ation tchadienne actuelle (25%). Au total, ces observations empiriques, si elles n’invitent
pas à suggérer une politique de promotion automatique généralisée (qui pose des prob-
lèmes par ailleurs), conduisent toutefois à souligner que des chiffres de l’ordre de 10 %
pour la proportion des redoublants dans le cycle primaire, doivent sans doute être consid-
érés comme un objectif autant souhaitable que possible.
Il est enfin utile de mentionner que nombre de pays africains (essentiellement francoph-
ones) cherchent aujourd’hui à réduire la fréquence des redoublements dans leur système
scolaire. Tous ces pays ont considéré que dans cette perspective, une bonne façon de faire
consistait i) à mettre en place trois sous-cycles au sein du niveau primaire (CP1/CP2,
CE1/CE2, CM1/CM2) correspondant à des blocs de compétences bien identifiées, ii) à ne
pas autoriser de redoublement au cours de chacun des sous-cycles et iii) à en limiter la
fréquence entre sous-cycles consécutifs. Cette structure, associée à la mise en place d’une
instrumentation pour aider les enseignants à i) comprendre les effets négatifs des redou-
blements et ii) détecter les déficiences des élèves en cours de sous-cycle et à y remédier de
manière pertinente, est en fait porteuse d’une gestion pédagogique mieux maîtrisée et
d’une amélioration de la qualité des services éducatifs offerts.
On peut alors distinguer la part du gaspillage due aux abandons et celle due aux redouble-
ments de deux façons différentes :
♦ Soit en comparant le nombre d’années-élèves perdues du fait des abandons seuls de celui
du nombre d’années-élèves perdues du fait des redoublements seuls
♦ Soit en comparant les indices d’efficacité partiels : indice d’efficacité sans redoublement
et indice d’efficacité sans abandon (le produit des deux étant égal à l’indice global d’effi-
cacité interne
cacité interne dans ses deux composantes est illustrée dans le graphique IV.3, ci-après
(données compilées pour l’année 2002).
Parmi tous les pays dont les données sont disponibles, le Tchad et le Rwanda sont les
pays qui présentent le plus faible degré d’efficacité dans les flux d’élèves du fait des aban-
dons (pays le plus à gauche sur le graphique), alors que le pays se classe aussi parmi les cinq
pays les plus inefficaces sur la question des redoublements (pays dans la partie basse du
graphique).
Le diagnostic établi ci dessus nous invite à réfléchir urgemment sur les possibilités
d’améliorer l’efficacité dans l’utilisation des ressources pour le cycle primaire, tant par une
92 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau IV.7. Indicateurs d’Efficacité Interne aux Différents Niveaux d’Études, 1990 et 2003
1990–91 2003–04
Primaire
Efficacité Interne globale 40,9 48,6
Efficacité interne avec seulement les abandons 60,2 64,6
Efficacité interne avec seulement les redoublements 67,9 75,2
Secondaire 1er cycle
Efficacité Interne globale 63,0 63,7
Efficacité interne avec seulement les abandons 78,2 77,2
Efficacité interne avec seulement les redoublements 80,5 82,5
Secondaire 2ème cycle
Efficacité Interne globale 68,2
Efficacité interne avec seulement les abandons 89,2
Efficacité interne avec seulement les redoublements 76,4
Maurice
Ethiopie Niger Zambie
90 Afrique du Sud
Guinée Maroc
redoublements
60
50 60 70 80 90 100
Efficacité interne avec uniquement les abandons
Tableau IV.8. Score Moyen Estimé des Acquis des Élèves Dans un Échantillon
de Pays Africains
Niveau acquis Niveau acquis
Pays equivalent MLA Pays equivalent MLA
Afrique du Sud 49,6 Mozambique 53,9
Botswana 51,7 Namibie 48,1
Burkina Faso 52,7 Niger 40,8
Cameroun 60,0 Nigeria 30,0
Côte-d’Ivoire 51,3 Ouganda 58,0
Gambie 40,4 République Centre Africaine 42,5
Guinée 51,6 Sénégal 42,5
Kenya 68,8 Tchad 34,5
Madagascar 58,4 Togo 52,1
Malawi 48,5 Zanzibar 41,7
Mali 50,8 Zambie 43,3
Maurice 64,1 Zimbabwe 57,7
Mauritanie 28,0 Moyenne 48,8
Tableau IV.9. (%) des Adultes (22–44 ans) Pouvant Lire Aisément Selon la Durée des
Études initiales (autour de l’année 2000)
Durée des études au cours de la jeunesse
Pays Pas école 2 années 3 années 4 années 5 années 6 années 8 années
Burundi 7,5 29,4 48,1 67,2 83,1 91,1 98,2
Cameroun 8,5 23,7 36,2 50,9 65,5 77,7 92,1
Côte-d’Ivoire 6,5 22,4 35,5 51,2 66,6 79,2 93,2
Guinée-Bissau 6,6 18,5 28,8 42,4 56,6 70,3 87,9
Niger 1,1 5,0 10,2 19,7 34,8 53,6 84,5
Nigeria 16,7 37,9 51,5 65.0 76,4 84,9 94,5
République 0,5 6,5 13,0 25,0 48,0 64,0 90,0
Centre Africaine
Rwanda 6,3 34,7 59,9 80,6 92,0 97,0 99,6
Sénégal 12,1 25,9 35,8 46,9 58,5 69,1 84,9
Sierra Leone 3,8 10,4 16,6 25,5 37,1 50,3 75,0
Tchad 0,5 2,8 6,3 13,6 27,1 46,6 82,8
Togo 2,4 12,0 24,0 43,0 64,0 81,0 96,0
Moyenne 6,0 19,1 30,5 44,3 59,1 72,1 89,9
lesquels l’information existe. Dans la mesure où il s’agit d’adultes dont la moyenne d’âge
est un peu supérieure à 30 ans (autour de l’année 2000), la performance mesurée ici ren-
voie au fonctionnement de l’école primaire entre 1980 et 1985. On constate toutefois qu’il
existe une forte corrélation entre les mesures présentées dans les tableaux IV.8 et IV.9, sug-
gérant que les différences (fortes) observées entre pays renvoient à des caractéristiques plus
ou moins structurelles de l’éducation dans les différents pays.32
Dans chaque pays, plus le temps de scolarisation est long, plus grandes sont les chances
d’assurer la pérennité de l’alphabétisation à l’âge adulte (en moyenne 19 % après deux
années, 44 % après quatre années et 72 % après six), mais, si le temps scolaire est bien un
ingrédient fondamental de l’apprentissage on voit aussi que la productivité du temps peut
être très différente selon l’efficacité avec laquelle il est utilisé. Les chiffres utilisés ici sug-
gèrent que les années de scolarisation ont, au Tchad, une faible productivité et qu’il serait
sans doute pertinent de chercher à l’augmenter. Il y a à cela deux voies possibles i) aug-
menter le temps effectif (par une rentrée scolaire dans les temps, un absentéisme faible des
enseignants pendant l’année et un fonctionnement effectif de l’école jusqu’à la fin officielle
de l’année) et ii) par une meilleure utilisation du temps scolaire lorsque l’école fonctionne
(par de meilleurs intrants scolaires ou une meilleure gestion pédagogique).
C’est ce point que nous allons maintenant aborder en cherchant à identifier quels fac-
teurs de l’organisation scolaire seraient à même de favoriser les apprentissages des élèves.
32. On observe que la proportion des adultes qui savent lire aisément après des études initiales de durée
comparable varie fortement d’un pays à l’autre. Par exemple, avec 5 années d’études validées, on trouve
92 % des adultes qui savent lire aisément au Rwanda, 83 % au Burundi, environ 65 % au Cameroun, en
Côte-d’Ivoire ou au Togo, contre seulement 35 % au Niger et 27 % au Tchad.
96 Document de Travail de la Banque Mondiale
Pour cela, nous mobiliserons tout d’abord les données de statistiques scolaires disponibles
pour analyser en second lieu les données du PASEC sur les acquisitions standardisées des
élèves de deuxième et de cinquième année du cycle primaire.
■ de décrire l’ampleur des disparités entre établissements qui peuvent exister tant
dans les moyens mobilisés que dans les résultats obtenus (rétention et redouble-
ments en cours de cycle, résultats aux examens en fin de cycle) et
■ ii) d’examiner les relations qui peuvent exister entre ces deux sphères (celle des
ressources mobilisées et celle des résultats obtenus) en identifiant quels facteurs se
révèlent plus cruciaux que d’autres. Pour cela, le recours à des analyses économétriques
multi variées est une nécessité. Ces travaux peuvent potentiellement concerner le
niveau primaire comme le niveau secondaire.
33. Il serait bien sûr préférable que ce rapprochement puisse dans l’avenir être fait à la fois pour toutes
les écoles et d’autre part de façon régulière pour pouvoir contribuer à un meilleur pilotage du système.
Le Système Éducatif Tchadien 97
bureaux du maître ou de tableaux en bon état par rapport au nombre d’enseignants) et des
variables de caractéristiques des enseignants (âge, niveau académique, statut, formation
reçue, sexe). Les différentes variables, calculées pour chaque école de l’échantillon et util-
isées dans l’analyse sont présentées dans le tableau IV.10, ci-après.
La première observation qui émerge de l’analyse du tableau IV.10 est qu’au-delà des sit-
uations moyennes qui peuvent caractériser de façon globale n’importe quel phénomène et
n’importe quel système éducatif, c’est l’existence d’une très grande diversité entre les dif-
férentes écoles qui, ensemble, composent le système. Cette diversité concerne d’abord la
sphère des résultats obtenus. Concernant les résultats en matière de flux d’élèves dans le sys-
tème, on constate que si la valeur moyenne du taux de rétention et de la fréquence des redou-
blements est respectivement de 32 et 26 %, on trouve une plage de variation allant de 3 à
74 % pour la rétention en cours de cycle alors que la proportion des redoublants varie dans
une fourchette allant de 13 à 40 %. Une diversité d’une certaine façon plus forte encore con-
cerne la valeur du taux de réussite au CEPE (en ne comptant que les écoles dans lesquelles
il y a eu plus de 10 candidats); en effet, si la moyenne du taux de réussite se situe à 64 %, la
statistique varie en fait entre 30 et 100 % d’une école à l’autre sur l’ensemble du pays.
Ces informations suggèrent fortement une grande faiblesse dans le pilotage du sys-
tème, ce pilotage au niveau des écoles étant de fait quasiment absent.
Cette grande diversité du système éducatif tchadien concerne aussi les moyens mobil-
isés et, in fine, les conditions d’enseignement offertes aux élèves. Il y a bien sûr des éléments
tels que le contexte urbain ou rural de l’école ou le fait que la population de sa zone de
recrutement soit plutôt riche ou pauvre qui exercent sans doute une influence sur les con-
ditions de scolarisation, mais ces éléments sont exogènes pour la politique éducative; ils ne
sont pas considérés ici. Par contre nous examinons les éléments qui relèvent de la politique
éducative et/ou des façons dont celle-ci est mise en œuvre sur le territoire national.
En mettant de côté pour un temps le cas des écoles privées (où les enseignants sont
payés sur la base des frais de scolarité acquittés par les parents d’élèves), un premier élé-
ment fort de distinction entre écoles est la proportion des enseignants qui sont des maîtres
communautaires. Cette statistique est importante car elle renvoie directement à la pression
financière exercée sur les familles dans la mesure où une école où tous les enseignants sont
des fonctionnaires coûte évidemment beaucoup moins aux parents d’élèves qu’une école
dans laquelle tous les maîtres seraient payés par la communauté (il peut y avoir en outre
des conséquences sur le plan de la qualification des enseignants). En moyenne, une école
primaire compte 57 % de ses enseignants qui sont payés par la communauté mais, pour
46 % des écoles ce sont 100 % des enseignants qui sont communautaires alors que pour 13 %
des écoles (majoritairement urbaines) tous les enseignants sont des enseignants fonction-
naires payés par l’Etat.
Du point de vue des constructions scolaires, environ 30 % des élèves sont scolarisés
dans une salle de classe en dur (ou en semi-dur) alors que 70 % le sont dans un bâtiment
construit en matériaux locaux. La question reste bien sûr de savoir dans quelle mesure les
constructions en dur, plus coûteuses, sont effectivement plus favorables pour la produc-
tion des résultats scolaires; ceci sera examiné dans la section suivante. Contentons nous ici
d’observer l’existence de différences physiques dans les conditions des salles de classe.
Concernant l’équipement des salles de classe, on observe aussi de substantielles dis-
parités entre écoles quant aux conditions de travail des élèves, notamment en regard de la
disponibilité d’une place assise sur une table-banc pour travailler. Ces disparités s’étendent
98 Document de Travail de la Banque Mondiale
34. L’indice d’équipement des classes en mobilier d’une école est la moyenne de i) le nombre de places
sur une table-banc en bon état par rapport au nombre d’élèves, ii) le nombre de tableaux en bon état par rap-
port au nombre d’enseignants et iii) le nombre de bureaux du maître par rapport au nombre d’enseignants.
Le Système Éducatif Tchadien 99
Analyse des Relations Existant Entre Moyens et Résultats. Dans la mesure où il existe un
assez grand nombre de variables qui peuvent être utilisées (au sein des variables disponibles
dans l’enquête scolaire annuelle) pour rendre potentiellement compte de la variabilité des
résultats obtenus au niveau des écoles, il est nécessaire d’avoir recours à des méthodes de
100 Document de Travail de la Banque Mondiale
l’analyse multi variée ; c’est pourquoi, nous utiliserons de façon préférentielle la régression
multiple comme forme fonctionnelle pour examiner les relations existant entre conditions
de scolarisation et résultats observables chez les élèves (et en identifiant quelles variables ont
les impacts dont l’ampleur est la plus forte et qui sont statistiquement les plus significatifs).
Ceux-ci seront analysés dans une triple dimension : i) les deux premières concernent les flux
d’élèves au cours du cycle avec d’une part le taux de rétention (mesurant la proportion en
nouveaux entrants en première année qui atteignent la dernière année du cycle, éventuelle-
ment en un plus grand nombre d’années qu’il ne serait strictement nécessaire) et d’autre
part la fréquence des redoublements; ii) la troisième dimension concerne la proportion des
reçus l’examen de fin de cycle (CEPE). Evidemment on préfère que les carrières scolaires des
élèves des différentes écoles soient les plus harmonieuses possible (peu d’abandons en cours
de cycle et peu de redoublements) et que les chances de réussite au CEPE pour ceux qui
atteignent la fin du cycle soient aussi les plus élevées possible. Le tableau IV.11, ci-après,
présente les résultats des estimations économétriques qui ont été conduites.
Ces résultats sont intéressants selon une triple perspective : i) la première concerne les
variables qui se révèlent (parfois de façon contraire aux attentes) ne pas exercer d’impact
statistiquement significatif, ou bien n’exercer qu’un impact très modeste sur les résultats
obtenus, ou bien encore exercer un impact dans un sens inattendu; ii) la seconde concerne
les variables qui exercent un impact attendu, la modélisation permettant d’en évaluer
l’ampleur; iii) enfin ces résultats sont intéressants en raison même des limites de l’exercice
de modélisation.
Au titre du premier groupe de variables, on n’observe globalement que peu de dif-
férences selon que l’école est localisée en milieu urbain ou rural; mais la rétention des élèves
en cours de cycle primaire apparaît meilleure et le redoublement plutôt moins fréquent dans
les écoles privées ou communautaires que dans les écoles publiques (bien qu’on sache que la
distinction entre écoles publiques et communautaires n’est pas parfaite). Un résultat de
l’analyse qui est conforme à ce qui est observé dans toutes les autres études est que la nature
des bâtiments scolaires n’implique que très peu de différences sur les résultats obtenus ; ce n’est
que sur le redoublement que les constructions en dur se montrent un peu plus perfor-
mantes. Au total, ce qui se passe dans la classe est plus important que la nature des con-
structions qui la délimitent.
Au titre du second groupe de variables, on trouve d’abord le rapport élèves-maîtres.
Mais son impact est à la fois limité à la seule rétention (pas d’effets significatif ni sur la
fréquence des redoublements ni sur les chances de réussite au CEPE) et son intensité reste
relativement modeste. L’organisation en cours multiples n’est pas favorable à la rétention des
élèves en cours de cycle (entre une école où toutes les classes sont multigrades et une autre
où aucune ne le serait, l’écart estimé en faveur de la seconde sur la rétention est de l’ordre
de 9 %; en revanche le groupement des élèves dans la formule en cours multiples ne sem-
ble pas avoir d’incidences négatives ni sur le redoublement de classe ni sur la réussite au
CEPE. La disponibilité en manuels scolaires apparaît globalement positive pour le fonc-
tionnement de l’école, mais sur ce plan de nouveau, les impacts quantitatifs sont relative-
ment limités. Par ailleurs, on note que la proportion des redoublements dans une école (elle
varie de 13 à 40 % dans les écoles primaires tchadiennes) est très significativement et très
négativement associée tant à la rétention des élèves en cours de cycle primaire qu’au taux de
réussite au CEPE. Ce résultat n’est pas spécifique du Tchad; il remet clairement en cause
Tableau IV.11. Modélisation des Résultats Dans l’Enseignement Primaire
Rétention Redoublement Réussite au CEPE
M1 M2 M3 M4 M5
Constante + 0,339*** + 0,330*** + 0,306*** + 0,025*** + 0,657***
% de redoublants − 0,427*** − 0,402*** — — − 0,290***
Contexte
Rural (référence) — — — — —
Urbain — — − 0,019* — + 0,035 ns
Type d’Ecole
Publique (référence) — — — — —
Privée + 0,090*** + 0,076*** − 0,080*** − 0,098*** + 0,002 ns
Communautaire + 0,075*** + 0,084*** − 0,025*** − 0,021** + 0,019 ns
Type de Constructions Scolaires
% de salles construites en dur ou semi-dur − 0,011 ns − 0,017 ns − 0,019** − 0,024*** + 0,016 ns
Appui Alimentaire
Aide du PAM — — — — 0,192***
(continued )
101
102 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau IV.11. Modélisation des Résultats Dans l’Enseignement Primaire (Continued)
Rétention Redoublement Réussite au CEPE
M1 M2 M3 M4 M5
Enseignants
% de femmes dans le corps enseignant + 0,100** + 0,075* − 0,045** − 0,076*** − 0,044 ns
Structure du corps enseignant par diplôme
% enseignants de l’école avec CEPE/sans diplôme — —
% enseignants de l’école avec BEPC − 0,001 ns − 0,031***
% enseignants de l’école avec BAC et + − 0,088*** − 0,074***
Structure du corps enseignant par statut
% enseignants de l’école qui sont instituteurs — — —
% enseignants de l’école qui sont instituteurs-adjoints + 0,027 ns + 0,055*** − 0,032 ns
% enseignants de l’école qui sont communautaires − 0,007 ns + 0,036** − 0,056 ns
Structure du corps enseignant par âge
% enseignants de l’école de moins de 30 ans — — — — —
% enseignants de l’école entre 30 et 49 ans − 0,030* − 0,040** − 0,003 ns − 0,006 ns + 0,014 ns
% enseignants de l’école de 50 ans ou plus − 0,428 ns − 0,054 ns − 0,018 ns + 0,017 ns − 0,037 ns
Nombre d’observations (écoles) 1 371 330
% Variance expliquée 11,9 11,2 16,7 15,1 24,5
Le Système Éducatif Tchadien 103
ceux qui croient voir dans un niveau élevé de redoublement une pratique de contrôle de la
qualité des services éducatifs offerts (la réalité est toute contraire).
Les résultats suivants concernent les caractéristiques des enseignants : i) les enseignants
femmes (peu nombreuses au Tchad avec une proportion de 7 % contre un peu plus de
30 % comme moyenne des pays d’Afrique sub-saharienne) sont associées à la fois à une
meilleure rétention et à une moindre fréquence des redoublements. Les enseignants qui
ont le bac se révèlent plutôt meilleurs que ceux qui ont le BEPC ou le CEPE tant sur le plan
de la rétention que des redoublements. Ce résultat est un peu différent de ce qu’on observe
dans d’autre pays où le BEPC constitue en général un niveau adéquat pour les acquisitions
des élèves du primaire; il est possible que le niveau généralement modeste de la qualité de
l’école tchadienne (selon ce qui a été montré précédemment dans ce chapitre) explique
qu’il soit nécessaire de pousser les études jusqu’au bac pour atteindre le niveau académique
pertinent pour l’enseignement primaire. En revanche, on trouve très peu de différences
systématiques selon que les enseignants sont des instituteurs, des instituteurs adjoints ou des
communautaires ; cela indique que la formation professionnelle initiale des enseignants est
globalement très peu performante et que les problèmes de formation initiale ne concernent
pas uniquement les maîtres communautaires (très souvent sans formation et auxquels il
faudrait en donner une) mais aussi les enseignants fonctionnaires (qui ont reçu une for-
mation mais qui ne laisse que trop peu de traces dans les apprentissages des élèves qui leurs
sont confiés). Ce point est vérifié par ailleurs dans l’analyse économétrique.
Enfin, il est important de noter que les faibles parts de variance expliquée par ces mod-
èles, ce qui suggère qu’il existe de vastes différences dans le niveau des résultats obtenus par
des écoles pourtant à priori dotées de moyens et de ressources comparables. Ce point est par
ailleurs soutenu par le fait qu’il y ait un faible impact i) des caractéristiques statutaires des
enseignants, ii) du rapport élèves-maîtres et iii) des caractéristiques des bâtiments scolaires.
Comme ces trois éléments sont à la base de la variabilité des coûts unitaires de scolarisa-
tion, on en vient nécessairement à anticiper une très faible relation entre le volume des
moyens mobilisés par élève au niveau d’une école et les résultats tangibles qu’elle produit
chez ses élèves. Cela signifie que dans les stratégies pour améliorer la qualité effective de l’école
(perçue du côté des résultats effectivement obtenus par les élèves), l’amélioration de cette
gestion pédagogique est probablement incontournable. Ce point sera repris de façon plus sys-
tématique dans le chapitre 7 de ce rapport sur les aspects de gestion (ici gestion péda-
gogique) du système éducatif tchadien.
(ns): non significatif; *: significatif au seuil de 10%; **: significatif au seuil de 5%; ***: significatif
au seuil de 1%
modèle 1 et 37 dans le modèle 2) dans les chances de réussite au BEPC. Quand on passe du
BAC/DEUG à la licence (ou davantage), les effets marginaux deviennent quantitativement
faibles ou même négatifs (statistiquement non significatifs dans le modèle 1 et inférieurs
de 6 points dans le modèle 2).
Ce résultat ne signifie pas que les enseignants avec la licence ne seraient pas plus qual-
ifiés que ceux avec le BAC ou le DEUG; ils signifient que pour ce qui concerne la trans-
mission des connaissances visées dans le premier cycle du secondaire, le fait qu’ils aient
plus de connaissances ne se traduit pas en meilleurs apprentissages chez les élèves à ce
niveau d’études. En d’autres termes, cela suggère que ce qui est maîtrisé chez les titulaires du
DEUG (voire même du bac) correspond à ce qui est nécessaire pour le collège; utiliser davan-
tage de compétences pour ce niveau apparaît superflu, voire contre-productif.
Tous les autres facteurs analysés n’exercent pas d’influence significative sur la réussite
au BEPC. Corrélativement, les variations entre écoles dans les facteurs d’organisation sco-
laire ou de contexte n’expliquent que très faiblement la variété observée dans les résultats
au BEPC (14 % de variance expliquée dans le modèle 1 et 8 % dans le modèle 2).
Plus que les conditions logistiques d’enseignement dans les collèges, c’est ce qui se
passe dans les classes qui est déterminant pour les apprentissages. Ce résultat est évidem-
ment de première importance pour la politique éducative. Nous ne l’interpréterons pas en
disant que puisque les ressources n’ont pas d’importance, mieux vaut en limiter le mon-
tant ! Nous l’interpréterons par contre en suggérant que si des ressources additionnelles
seront évidemment nécessaires pour revitaliser le système, il faudra significativement améliorer
leur transformation effective en résultats tangibles chez les élèves. Ce point sera repris dans le
chapitre 7 sur la gestion du système en soulignant avec vigueur la faiblesse extrême de la
gestion pédagogique du système éducatif tchadien et la nécessité impérieuse d’améliorer
cet aspect de son fonctionnement.
35. Nous tenons à remercier le PASEC d’avoir mis les informations à disposition du RESEN avant que
le rapport du PASEC ne soit lui-même public et d’avoir produit des analyses spécifiquement pour la pro-
duction du RESEN.
Le Système Éducatif Tchadien 107
par nature confrontée. Pour cela une question principale est de déterminer les meilleurs
arrangements et les meilleurs arbitrages entre le nombre des jeunes qu’il est possible de
scolariser et le volume de ressources qu’il est possible de leur allouer en moyenne pour leur
scolarisation. Cet arbitrage vaut surtout au-delà du primaire car à ce niveau d’études, une
contrainte supplémentaire est l’atteinte de l’achèvement universel des six années du cycle
avec un niveau d’acquisitions acceptable (c’est-à-dire meilleur que celui observé aujour-
d’hui). L’arbitrage entre quantité et qualité se transcrit alors en objectif d’efficience
(l’organisation des services doit être coût-efficace pour un niveau minimum de qualité des
apprentissages effectifs) et d’équité (tous les enfants doivent pouvoir être scolarisés
indépendamment de leurs caractéristiques personnelles ou sociales avec un niveau min-
imum de qualité pour tous).
CHAPITRE 5
D ans ce chapitre, l’angle que nous prenons est celui de l’efficacité externe. Contrai-
rement à l’efficacité interne (cf. chapitre 4 du rapport) qui s’intéresse au fonction-
nement et aux modes d’organisation des institutions éducatives, en privilégiant les
résultats observables au sein même de la sphère scolaire (acquisitions des élèves en référence
aux contenus de programme, redoublements et abandons en cours d’études, . .), l’efficacité
externe prend comme référence l’usage que vont faire les formés de leurs connaissances
acquises à l’école pendant leur vie adulte. On a donc la perspective des effets différés et dis-
tanciés de l’éducation pendant la vie économique et sociale des individus après qu’ils aient
quitté les systèmes de formation initiale. En quoi ce qu’ils ont reçu à l’école est-il le plus
utile possible tant pour la société que pour eux-mêmes ?
Dans cette perspective, on peut distinguer d’une part des effets sociaux et des effets
économiques, et d’autre part des effets individuels et des effets collectifs. Les effets sociaux
peuvent recouvrir des aspects tels que la santé (on a ainsi souvent observé que les mères
plus éduquées avaient tendance à être plus efficaces vis-à-vis de la santé de leurs enfants,
ou plus généralement de leur famille), la citoyenneté (les personnes plus éduquées pouvant
avoir une plus grande participation à la vie publique et faire des choix mieux informés dans
le domaine politique) ou la population (une société plus éduquée pouvant, par exemple,
être mieux à même de contrôler les évolutions démographiques). Parmi les effets écono-
miques, les dimensions de l’impact de l’éducation sur l’emploi, le revenu ou la croissance
sont évidemment présentes. Ces effets sociaux et économiques peuvent eux-mêmes être
lus au niveau individuel (revenus ou gains plus élevés que peut obtenir un individu du fait
de sa scolarisation) ainsi qu’au niveau collectif (croissance économique de la société, état
sanitaire de la population). On peut mentionner que les effets collectifs vont au delà de ce
qui est personnellement approprié par les individus, en raison de ce que les économistes
appellent effets externes ou externalités. Il y a ainsi externalité lorsque par exemple un agri-
109
110 Document de travail de la Banque Mondiale
culteur qui a été à l’école modifie ses façons de faire (choix de nouvelles cultures, utilisa-
tion de meilleures semences ou de produits phytosanitaires, . .) et que cela lui permet
d’améliorer son revenu (effet individuel), mais quand cela conduit aussi ses voisins à l’imi-
ter et à améliorer le leur (externalité positive).
Les questions abordées dans ce chapitre concernent au sens large d’une part i) l’allo-
cation des ressources à l’intérieur du secteur entre les différents niveaux et types d’éduca-
tion et de formation, de sorte à maximiser les bénéfices que recueille la société dans son
ensemble des ressources qu’elle confie globalement au secteur, et d’autre part ii) l’identifi-
cation des mécanismes qui permettraient de mettre en ligne les comportements individuels
avec ce qui apparaît souhaitable d’un point de vue agrégé. Sans anticiper sur le contenu du
chapitre, on peut noter que la situation du Tchad pour les prochaines décennies sera celle
d’une économie de nature duale dans laquelle il y a coexistence d’un secteur économique
traditionnel (agro-pastoral et informel) d’une part, d’un secteur dit moderne ou de l’em-
ploi formel, d’autre part. Toute stratégie de développement du secteur de l’éducation et de
la formation devra prendre en compte cette donnée structurelle qui sera de fournir des res-
sources humaines capables d’alimenter de façon efficace ces deux secteurs de l’économie.
Il conviendra ainsi de faire en sorte i) que le secteur de l’emploi moderne puisse se déve-
lopper aussi vite qu’il le peut (en fonction notamment des politiques macro-économiques
mises en œuvre) sans avoir à souffrir de manques quantitatifs ou qualitatifs de main-d’œuvre,
et ii) que le secteur traditionnel puisse bénéficier également de la ressource humaine capable
de générer les nécessaires gains de productivité en son sein.
(5 ou 10 ans par exemple) et à utiliser des techniques de prévision des besoins en main-
d’œuvre ; ii) une autre consiste à se positionner dans le passé (récent), à évaluer comment
s’est opéré l’équilibre quantitatif offres-demandes et à en tirer des indications pour le futur.
Cela peut supposer des ajustements, car il est bien sur possible que la conjoncture écono-
mique future soit différente de celle que le pays a connu au cours des dernières années.
Dans ce rapport, nous suivrons seulement la seconde approche, et cela pour deux rai-
sons complémentaires : i) la méthode prospective des besoins de l’économie en main d’œuvre
qualifiée demande des travaux spécifiques qu’il n’est pas possible de considérer dans le cadre
de ce rapport; ii) d’une certaine façon plus fondamentale, l’expérience des analyses de prévi-
sion des besoins en main d’œuvre s’est en général révélée spécialement décevante.
Les données sur l’emploi et l’insertion professionnelle des sortants du système éduca-
tif sont en général peu nombreuses dans le contexte tchadien. Cela dit, à très grands traits,
on peut souligner que la population active est dans une très large mesure employée dans le
secteur agro-pastoral (83,6 % de la population active au recensement de 1993; le secteur
informel non agricole comptait alors pour environ les trois-quarts de population active
non agricole (12,2 % de la population active totale) ne laissant que 4,2 % pour le secteur
de l’emploi moderne.
Depuis 1993, il y a sans doute eu des évolutions de l’emploi au Tchad, mais il convient
ici de distinguer les évolutions de nature structurelle et celles qui ont une dimension conjonc-
turelle, notamment pour la période récente et qui sont en relation avec la construction des
infrastructures pétrolières. Concernant l’emploi dans le secteur agro-pastoral, on peut tabler
sur une certaine contraction (probablement limitée) en termes relatifs au cours des dix der-
nières années. Il semble que cette contraction résulte principalement de l’extension relative
de l’emploi informel non agricole alors que le secteur de l’emploi moderne a connu aussi une
évolution quantitative positive, mais une partie de celle-ci a été liée au recrutement de tra-
vailleurs, généralement peu qualifiés, pour les activités pétrolières au cours de la période
2000–2003, une partie de ces recrutements s’étant révélée temporaire. Le développement
structurel du secteur moderne dans lequel prédominait traditionnellement le secteur public
a été limité, et cela pour deux raisons complémentaires : i) les contraintes macroéconomiques
et des finances publiques ont fortement limité le recrutement de nouveaux agents, les sec-
teurs prioritaires de l’éducation et de la santé ayant en fait bénéficié de la grande majorité des
recrutements au cours des dix dernières années; ii) la seconde est que l’évolution structurelle
des emplois dans le secteur moderne non public a été aussi extrêmement réduite du fait
de l’exiguïté de ce sous-secteur dans l’économie tchadienne36.
Face à ces évolutions quantitatives caractérisées par une forte structure de dualité de
l’économie du pays et des évolutions relativement modeste de l’économie au cours des dix
dernières années, le système d’éducation et de formation s’est, pour sa part, fortement déve-
loppé, comme cela a été décrit dans le chapitre 2 de ce rapport. Sans anticiper maintenant
sur les évolutions futures, il importe d’abord d’examiner les éventuelles conséquences de ces
deux évolutions distinctes (de la production du capital humain et de l’économie nationale)
sur la productivité du travail et l’équilibre du marché de l’emploi. Plusieurs sources de
données et/ou d’analyse peuvent alors être mobilisées pour apporter des éclairages à cette
36. Les choses sont éventuellement susceptibles d’évoluer positivement avec l’avènement de l’écono-
mie pétrolière, mais cela demandera des travaux spécifiques pour en anticiper l’ampleur de façon raison-
nablement fiable.
112 Document de travail de la Banque Mondiale
question. Nous examinerons cette question successivement selon trois angles : le premier
est celui du bilan formation emploi, le second est celui de l’emploi occupée par la popula-
tion au début de sa vie active et le troisième est celui de la confrontation quantitative des
offres et des demandes d’emplois.
Tableau V.1. Bilan Quantitatif Éducation-Emploi, Flux en Base Annuelle; Moyenne vers 2000
Distribution des sortants du système éducatif Distribution des emplois offerts
Niveau de sortie Nombre % Secteur Profession Nombre %
Supérieur complet 3 300 2,2 Cadres 400 0,3
et incomplet supérieurs
Moderne
incomplet
Emploi 101 000 72,1
Primaire complet 18 000 12 agro-pastoral
Jamais fréquenté 93 300 62,2
l’école primaire
et Primaire
incomplet
Total de la cohorte 150 000 100 Ensemble des emplois offerts 140 000 100
*Le nombre des emplois offerts est un peu inférieur à celui des sortants eu égard au chômage
Le Système Éducatif Tchadien 113
Une première mise en garde au sujet des chiffres du tableau V.1 est qu’ils ne doivent
bien sûr n’être considérés que comme des ordres de grandeur et non comme des chiffres
précis ; il s’agit tout de même d’ordres de grandeur raisonnables.
De façon globale, le bilan quantitatif du système présente une structure relativement
déséquilibrée dans laquelle pas assez est fait dans la partie basse du système, et trop dans sa
partie haute. Cette conclusion est forte et n’est pas susceptible d’être affecté par le degré
d’imprécision des chiffres proposés.
Dans la partie basse du système, on voit qu’environ 93 000 jeunes (représentant 62 %
de la cohorte) entrent dans la vie active sans une scolarisation primaire complète. Ceci n’est
pas satisfaisant car on sait qu’une scolarisation primaire menée à son terme constitue
(outre un droit de la personne) le minimum pour assurer l’alphabétisation durable à l’âge
adulte et équiper les individus du capital humain de base «à tout faire» nécessaire pour per-
mettre les gains de productivité du travail dans le secteur informel de l’économie; de façon
jointe, ce capital humain de base est essentiel dans la perspective de faciliter l’inclusion
sociale des individus et réduire leurs risques de marginalisation dans la pauvreté.
Dans la partie haute du système, on observe que l’augmentation considérable des effec-
tifs de l’enseignement supérieur (ils ont plus que doublé entre 1997 et 2003) s’est faite sans
étroite relation avec les demandes de l’économie qui ont été, pour ce niveau de qualifica-
tion, très réduites. Ainsi, il est estimé qu’au cours de la période proche de l’année 2000, ce
serait au mieux un chiffre de l’ordre de 400 emplois de cadres qui ont été disponibles
annuellement alors que le système produit en moyenne par année environ 3 000 sortants
de l’enseignement supérieur (dont certains non diplômés). Cela fait une production très
excédentaire en référence au niveau d’absorption du marché du travail37. Si on examine de
façon plus large les emplois offerts au total dans le secteur moderne de l’économie tcha-
dienne, on observe que ceux-ci sont en nombre sensiblement inférieur à celui des jeunes
qui ont une scolarisation secondaire de second cycle ou davantage.
Une conséquence vraisemblable de cette situation de sur-production relative est l’exis-
tence d’un nombre croissant de jeunes sortants du supérieur qui se retrouvent sans un
emploi correspondant à leur formation et à leurs attentes, comme on le verra directement
dans le point suivant (parfois avec une activité peu rentable dans le secteur informel et par-
fois aussi sans emploi du tout).
37. Les progrès dans la couverture éducative dans le supérieur sont donc à relativiser si ils ne se trans-
forment pas en emplois et/ou en productivité pour ceux qui ont fréquenté ce niveau d’enseignement.
114 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau V.2. La Formation et l’Activité Productive des Hommes Entre 25 et 35 Ans, 2004
Performance d’insertion
Activité % Chômage
Niveau Profession Ouvrier/ Agriculteur/ Sans % et sous % Emplois
éducatif Cadre intermédiaire Employé Artisan Non-qualifié Eleveur emploi Indéterminé Total Chômage qualification attendus
Sans école 2 2 4 12 16 67 6 179 288 5,5
Coranique 4 0 3 7 8 47 2 2 73 2,8
Primaire 2 3 4 8 15 76 2 1 111 1,8
Secondaire 1 4 3 5 17 7 22 6 0 64 9,4
Secondaire 2 10 2 0 4 10 7 13 0 46 28,3 73,9 26,1
Supérieur 12 4 1 1 4 0 22 0 44 50,0 63,6 36,4
Ensemble 34 14 17 49 60 219 51 182 626
Le Système Éducatif Tchadien 115
Il est certes vrai qu’il aurait été préférable de disposer d’une enquête plus large pour
avoir une plus grande confiance dans les indicateurs de performance d’insertion des for-
més sur le marché du travail ; cela dit, d’une part, les chiffres ne sont pas exagérément petits
et d’autre part les tendances sont suffisamment fortes pour que l’on puisse tirer des conclu-
sions raisonnablement valides.
Les résultats sont extrêmement clairs : si les emplois les plus qualifiés sont bien tenus
par les individus qui ont le meilleur bagage en matière de formation initiale (et si ceux qui
exercent un emploi agro-pastoral sont très majoritairement ceux qui ont le bagage éduca-
tif le plus modeste), on observe aussi que 50 % des formés dans le supérieur sont au chô-
mage et qu’environ 70 % de ceux qui ont été dans le second cycle secondaire ou dans
l’enseignement supérieur se retrouvent sans emploi ou exercent un emploi sous-qualifié
en référence à leur formation initiale. Ces chiffres manifestent l’existence de très substan-
tielles difficultés d’insertion des formés dans la partie haute du système. Ces conclusions
sont dans une large mesure en convergence globale avec celles qui avaient émergé de l’ana-
lyse précédente sur la base du bilan formation-emploi. Elles sont en outre d’une force plus
grande eu égard au fait qu’il s’agit d’informations collectées au cours de l’année 2004.
une réflexion pour la politique éducative future du pays; ii) la seconde est de savoir dans
quelle mesure les difficultés d’insertion enregistrées par les sortants de la partie haute du sys-
tème (second cycle secondaire général et technique, supérieur) tiennent à des inadéquations
qualitatives (on n’a pas identifié les bonnes filières ou les types pertinents de formation) ou
à des inadéquations quantitatives (on a formé des individus en trop grand nombre par rap-
port aux capacités effectives d’absorption du marché du travail national). Nous reviendrons
sur ces questions dans la troisième partie de ce chapitre. Abordons maintenant les effets
sociaux de l’éducation.
Revenu
Education
Comportements et
résultats sociaux
estimation directe du degré de pauvreté. Par contre, sur la base des divers éléments de patri-
moine et de conditions de vie de chaque ménage, il est possible, sur la base d’analyses de
type factorielle, de construire un indicateur qui classe les ménages selon quelque chose qui
se révèle être raisonnablement corrélée avec le niveau de consommation dans les enquêtes
où les informations permettent de confronter la mesure directe et l’indicateur indirect éta-
bli selon la méthode factorielle. C’est la procédure qui a été suivie ici. Cela dit, l’analyse des
résultats montre que si on peut certes bien identifier les cinq quintiles classiques de revenu,
il y a assez peu de différenciation dans l’indicateur entre les deux quintiles les plus pauvres.
Pour cette raison, nous avons analysé la probabilité qu’à un ménage d’appartenir au groupe
des 40 % les plus pauvres de la population en fonction du nombre des années d’éducation
qu’a eu le chef de ménage dans sa jeunesse, de son âge et de son sexe. Le tableau V.3, ci-
après, présente la simulation marginale de la relation entre la probabilité d’appartenir à
ce groupe et la durée des études du chef de ménage. Le graphique V.1, ci-après, en donne
une illustration visuelle.
Tableau V.3. Probabilité (%) d’Être Dans les 40 % les Plus Pauvres Selon la Durée des Études
et le Sexe du Chef de Ménage
Nombre d’années d’études
du chef de ménage 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Probabilité d’être dans le
2 premiers quintiles (%)
Ensemble 45,7 42,9 40,1 37,3 34,7 32,1 29,7 27,3 25,1 23,0 21,0
Homme 48,5 45,3 42,2 39,2 36,2 33,4 30,6 28,0 25,6 23,2 21,1
Femme 37,3 33,7 30,4 27,2 24,3 21,6 19,1 16,8 14,8 12,9 11,3
Graphique V.1. Probabilité d’Ête Dans les 40% les Plus Pauvres Selon la Durée des
Études et le Sexe du Chef du Ménage
60
50
Probabilité en % d'être
Homme
Femme
40
Ensemble
pauvre
30
20
10
0 2 4 6 8 10
Années d'êtudes
118 Document de travail de la Banque Mondiale
Bien qu’il s’agisse sans doute d’une équation réduite d’un modèle structurel plus
complexe, il apparaît clairement que les chances (malchances) de se retrouver dans la pau-
vreté (telle que définie ici) sont assez clairement liées au niveau d’éducation du chef de
ménage; le coefficient de la variable d’éducation (nombre d’années d’études) est en effet
statistiquement significatif au seuil de 1 % et l’utilisation de spécifications alternatives (sur
la forme de l’impact de cette variable) montre que la relation ci-dessus est robuste. Si un
individu (sans distinguer à ce niveau si le chef de ménage est un homme ou une femme)
qui n’est pas allé à l’école a 45,7 % de chances d’être dans le groupe identifié comme
pauvre, cette probabilité tombe à 29,7 % avec une scolarité primaire complète et à 21 %
avec une scolarité poussée jusqu’au terme du premier cycle secondaire. Ces différences
sont très appréciables. Il est par ailleurs intéressant de noter que le sexe du chef de ménage
exerce une influence. Les ménages dont le chef est une femme (21 % des ménages sont
dans ce cas dans l’enquête) ont, pour un même niveau d’études, des risques significative-
ment moindres de se situer dans les deux quintiles les plus pauvres de la population. En
revanche, comme les chiffres du tableau V.3 le montrent, et comme on peut le voir dans
le graphique qui lui est associé, on retrouve la même relation (décalée) entre la durée des
études et le risque d’être en situation de pauvreté lorsqu’on a segmenté l’analyse selon le
sexe du chef de ménage.
Enfin, il est important de souligner que le revenu des ménages n’est pas distribué de
façon homogène sur le territoire national avec une situation dans laquelle la plupart des
ménages du quintile le plus riche sont urbains alors que la plupart des ménages les plus
pauvres sont localisés en milieu rural. Dans ces conditions, la localisation du ménage est
une variable importante à considérer. Deux cas typiques sont toutefois à distinguer sachant
que la réalité est quelque part entre ces deux cas extrêmes : i) la localisation de la famille est
exogène au niveau de scolarisation des parents et il est alors important d’utiliser la locali-
sation géographique comme variable de contrôle pour évaluer correctement l’impact de la
scolarisation du chef de ménage sur les risque de pauvreté; et ii) la localisation de la famille
est déterminée par les parents, et ceux qui sont plus éduqués décident plus souvent de
s’installer en ville où les conditions de vie sont meilleures et où ils peuvent mieux valori-
ser leur capital humain. Sous cette hypothèse, le choix de la localisation est endogène et
une partie de l’effet de la durée des études du chef de ménage provient de la décision qu’il
a prise de s’installer en zone urbaine ou rural, sachant qu’à l’intérieur de la zone dans
laquelle il réside, une durée des études plus longue peut aussi avoir une incidence sur le
risque d’être pauvre.
Pour progresser dans cette analyse, il est intéressant de comparer la valeur numérique
du coefficient de la durée des études du chef de ménage dans un modèle explicatif de la pro-
babilité d’être dans les deux quintiles les plus pauvres avec cette seule variable explicative
avec la valeur du même coefficient dans un modèle où on utilise en outre le milieu de vie
(urbain ou rural). Dans le premier modèle le coefficient de notre variable cible (durée des
études du chef de ménage) est de – 0,11538, alors qu’il n’est que de − 0,053 (également sta-
tistiquement significatif au seuil de 1 %) dans le second. On conclut alors d’une part à
38. Une année d’études supplémentaire du chef de ménage est associée à une baisse de 11,5 % de la
probabilité d’être dans les deux quintiles les plus pauvres.
Le Système Éducatif Tchadien 119
l’existence d’un effet net avéré de la durée des études à l’intérieur d’un même contexte géo-
graphique, et d’autre part à l’observation que cet effet net vaut environ la moitié de l’effet
statistique brut global : environ la moitié de l’effet de la durée des études du chef de ménage
sur le degré de pauvreté de la famille passe par le fait que les ménages dont le chef est plus
éduqué résident plus souvent en milieu urbain. Au total, et indépendamment du fait de
savoir si la décision de localisation est fortement, ou non (degré d’endogénéité réel au-delà
de la relation statistique avérée), sous la dépendance du niveau d’études du chef de ménage,
il paraît raisonnable de conclure à un effet de l’éducation de son chef sur les risques d’un
ménage d’être en situation de pauvreté. Cet effet est déjà substantiel avec les six années
d’une scolarisation primaire complète; il s’accentue avec des durées de scolarité plus
longues au niveau de l’enseignement secondaire.
39. Une spécification quadratique signifie que l’on ajoute dans les variables explicatives en plus de la
variable (Nbre d’études de la mère) la même variable exprimée au carré (Nbre d’études de la mère)2.
120 Document de travail de la Banque Mondiale
On observe aussi que la valeur numérique de l’impact de la variable cible varie très peu
lorsqu’on passe du modèle 1 au modèle 2 et au modèle 3 suggérant peu d’endogénéité entre
les variables explicatives et donc une bonne robustesse de l’estimation de base. En se fon-
dant sur les coefficients estimés dans les modèles 3, 4 et 5, le tableau V.5 propose une simu-
lation de la probabilité d’accès à l’école des filles et des garçons selon la durée des études de
la mère. Le graphique V.2, ci-après, illustre la structure des résultats obtenus.
Tableau V.5. Simulation de la Probabilité d’Accès à l’École des Garçons et des Filles,
Selon la Durée des Études de la Mère
Années d’études de la mère 0 1 2 3 4 5 6 10
Ensemble 61,1 77,2 88,0 94,0 97,1 98,7 99,4 99,9
Garçons 74,1 85,8 92,1 95,3 97,0 97,9 98,3 98,5
Filles 47,6 64,9 77,8 86,1 91,1 94,1 95,8 98,1
Graphique V.2. % d’Accès à l’École des Garçons et des Filles Selon la Durée des Études
de la Mère
100
90
% d'accès à l'école
80
70
Ensemble
60 Garçon
Fille
50
40
30
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Années d'étude de la mère
On peut observer i) l’existence d’une relation forte entre la durée des études de la mère
et les chances des enfants d’être scolarisés, ii) l’existence d’une saturation autour de 5 à 6
années d’études de la mère, iii) l’existence de disparités fortes entre garçons et filles (au
détriment de ces dernières) dans l’accès à l’école lorsque la mère n’a pas elle-même été sco-
larisée (ou si la fréquentation scolaire de la mère a été limitée à 2 ou 3 années), ce qui est le
cas de la majorité des mères dans l’enquête, et iv) que ces disparités entre genre dans l’ac-
cès à l’école ont tendance à disparaître lorsque la mère a une scolarité primaire complète.
Sur la base de ces informations, une structure intergénérationnelle mère-fille dans la sco-
larisation semble empiriquement bien établie.
autres, résulter d’une augmentation de l’âge de la première grossesse et d’un plus grand espa-
cement des naissances, lui-même facilité par l’utilisation de méthodes contraceptives appro-
priées. Pour ces raisons, nous analysons quatre variables de résultat ou de comportement à
savoir i) l’âge de la mère à la première naissance, ii) l’espacement des naissances (mesuré par
le rapport entre le nombre d’années entre le premier et le dernier enfant au moment de l’en-
quête et le nombre de naissances sur cette période), iii) le recours à une méthode contra-
ceptive (quelle qu’elle soit) ainsi que iv) le nombre d’enfants nés vivants. Le tableau V.6,
ci-après, donne les résultats des estimations statistiques obtenues, ainsi qu’une simulation
de l’impact de la durée des études sur chacun des quatre aspects retenus.
En premier lieu, on observe que l’éducation de la mère exerce un certain impact sur
l’âge à la première naissance ; mais la relation est de forme quadratique avec des effets
qui sont inexistants pour les études primaires (pas de différence entre les femmes qui
n’ont pas été scolarisées et celles qui ont une scolarité primaire complète) et qui ne se
manifestent qu’au niveau des scolarités dans l’enseignement secondaire. En moyenne, il
y a environ 2 années de différence dans l’âge de la première naissance entre une femme
qui n’a jamais fréquenté l’école et une autre qui a fait des études au niveau du second
cycle secondaire.
En ce qui concerne l’espacement des naissances, l’éducation de la mère exerce aussi un
impact qui est statistiquement significatif, mais celui-ci est quantitativement limité. En
effet, entre une femme qui n’a pas été scolarisée et une qui a une scolarité au second cycle
secondaire, l’augmentation de l’intervalle moyen entre deux naissances consécutives n’est
que d’environ 2 mois, passant de 2,12 années pour la première à 2,27 pour la seconde.
La troisième variable concerne l’utilisation d’une méthode contraceptive, la décla-
ration étant faite par la mère. Au niveau national, les données de l’enquête indiquent que
seulement 7,5 % des femmes de 20 à 49 ans utilisent une telle méthode. La modélisation
montre que l’utilisation de telles méthodes est plus fréquente en milieu urbain que rural.
Pour ce qui est de l’influence du nombre d’années d’études de la mère, la relation est certes
globalement positive mais elle est peu intense pour se manifester seulement au niveau de
l’enseignement secondaire.
Ces trois variables sont supposées concourir à la production de cette variable de résul-
tat qui est le nombre de naissances vivantes par femme. En moyenne dans l’enquête, les
femmes du groupe d’âge entre 20 et 49 ans ont 4,8 enfants; mais il ne s’agit pas d’une valeur
correspondant à une fécondité finale car si les femmes de 49 ans ne vont certes pas avoir de
nouveaux enfants, ce n’est pas le cas de celles qui ont par exemple 22 ans au moment de
l’enquête. Ceci ne limite pas l’intérêt qu’il y a à analyser dans quelle mesure le nombre de
naissances qu’a eu une femme d’âge moyen donné dépend du nombre d’années d’études
effectuées au cours de sa jeunesse.
Le modèle (colonne de droite du tableau V.6) donne des éléments de réponse à cette
question. Autres choses égales par ailleurs, le nombre des enfants nés-vivants est un peu
moindre en milieu urbain que rural (0,2 enfants de moins en milieu urbain). De façon glo-
bale, le nombre des enfants est d’autant plus petit que la mère a fait des études plus longues ;
la relation avec la durée des études présente une forme quadratique qui est telle qu’il n’y a
pratiquement aucun effet au niveau des études primaires alors que l’impact est appréciable
dans les études secondaires. Alors qu’une femme de 29 ans (âge moyen des femmes dans
l’échantillon) a eu en moyenne 4,8 enfants si elle n’a jamais été à l’école, ce chiffre passe à
seulement 4,6 enfants avec une scolarité jusqu’au CM2, à 4,0 enfants avec une scolarité
conduite au niveau secondaire jusqu’en classe de 3ème et à 3,5 enfants pour une scolarité
poussée jusqu’en classe de première. Le graphique V.3, ci-après, illustre cette relation.
Nombre d'enfants
4
3.5
3
2.5
2
0 2 4 6 8 10 12
Années d'études de la mère
La Santé de la Mère. Nous examinerons ici les aspects suivants : i) la prise de vitamine
A au cours de la période de grossesse, ii) le suivi prénatal et l’utilisation de soins préven-
tifs prénataux, iii) les conditions de l’accouchement, iv) le degré des connaissances des
femmes par rapport au VIH-SIDA et aux manières de s’en prémunir. Examinons dans
quelle mesure la durée des études faites par la mère pendant sa jeunesse influence ces dif-
férents aspects. Le tableau V.7, ci-après, présente les résultats obtenus. De façon très glo-
bale, le même type de relation est observé qu’avec les variables de population.
La prise de vitamine A pendant la grossesse (valeur moyenne de 13 % dans l’échantillon)
est sensiblement plus fréquente en milieu urbain que rural (l’effet marginal est de l’ordre de
+ 12 % au point moyen) ; elle est aussi positivement associée à la durée des études initiales
de la femme. L’effet est substantiel lorsque l’on passe de femmes qui n’ont pas fréquenté
l’école à des femmes qui ont eu une scolarité primaire complète (de 11 à 24 %), mais il
semble se saturer ensuite.
Le suivi médical pendant la grossesse (dont la valeur moyenne est de 41 % dans
l’échantillon) est également beaucoup plus fréquent en milieu urbain qu’en milieu rural
(l’effet marginal est de l’ordre de 25 % au point moyen), manifestant l’existence d’un
effet d’offre40 ; mais la durée des études initiales de la femme exerce aussi une influence
très notable (la fréquence de suivi médical passe de 35 à 78 % lorsque la femme a eu une
scolarité primaire complète plutôt qu’aucune scolarisation). La même structure de satura-
tion est observée que pour la prise de vitamine A, avec peu d’effets marginaux additionnels
lorsque la femme a eu une scolarité secondaire plutôt que primaire.
Les naissances assistées par un personnel moderne, médecin, sage-femme ou infir-
mière (dont la fréquence globale est de 17 % dans l’échantillon) sont certes sensiblement
plus fréquentes en milieu urbain (l’effet marginal est estimé à + 28 % au point moyen
dans l’échantillon), dénotant sur ce point également l’existence des disparités spatiales
en matière d’offre de services, mais elles sont aussi complémentairement d’autant plus fré-
quentes que la mère a eu une scolarité plus longue. L’impact quantitatif est substantiel
puisque si une femme n’a pas du tout fréquenté l’école n’a qu’une probabilité de 10,5 %
d’avoir une assistance de type moderne pour ses naissances, ce chiffre devient 32,2 % si
la mère a eu une scolarité primaire complète ; si elle a eu une scolarité jusqu’en fin de
40. L’offre de services de santé est moins importante en milieu rural qu’en milieu urbain.
124 Document de travail de la Banque Mondiale
Tableau V.7. Modèles Rendant Compte de la Variabilité des Résultats et Comportements en Matière de Santé de la Femme
% Prise de vitamine A % Suivi médical % Naissances Indice [0–12] des
pendant la pendant la assistées par un connaissances sur le SIDA
Variable dépendante grossesse grossesse personnel moderne M=5,6 ; σ= 4,7
Constante −2,355*** −0,829*** −2,595*** 3,155***
Nombre d’années d’études 0,277*** 0,449*** 0,330*** 0,873***
(Nombre d’années d’études)2 −0,019** −0,024*** −0,016** −0,047***
Age — — — −0,049***
Urbain (/rural) 1,048*** 1,080*** 2,045*** 2,061***
Nombre d’observations 1 303 1 303 1 228 5 903
R2 (linéaire ou de Nagelkerke1) 0,091 0,171 0,291 0,13
% Prise de vitamine A % Suivi médical % Naissances Indice [0–12] des
pendant la pendant la assistées par un connaissances sur le SIDA
Nombre d’années d’études grossesse grossesse personnel moderne M=5,6 ; σ= 4,7
0 10,6 35,6 10,5 5,1
2 16,1 55,2 17,5 6,6
4 20,9 69,5 25,3 7.8
6 23,7 77,6 32,2 8,6
8 23,9 81,4 36,8 9,0
10 21,3 82,0 38,7 9,1
12 16,6 79,6 37,4 8,8
Le Système Éducatif Tchadien 125
35
30
la moyenne est de 5,6 avec
25 un écart-type (assez large)
20 de 4,7. L’analyse statistique
15 de cet indice montre un
10 degré de connaissance qui
5 augmente globalement avec
0
0 2 4 6 8 10 12
le nombre d’années d’études
Années d'études de la mère. Cependant, on
observe également sur cet
aspect une saturation de l’ef-
fet au-delà de la fin des études primaires (le graphique V.6, ci-après, donne une illustration
de la relation observée). On ne connaît pas bien la métrique de l’indice utilisé ; de même
on ne connaît pas bien dans quelle mesure la connaissance a un impact sur le risque d’être
infecté (ni par exemple, à partir de quel niveau de connaissance il y a une influence posi-
tive sur les comportements de prévention). Pourtant, il apparaît globalement bien établi,
sur le contexte tchadien de l’année 2000, que la connaissance du VIH-SIDA par les mères
i) est significativement meilleure en milieu urbain qu’en milieu rural (+ 2 points dans
l’échelle retenue), et ii) est significativement meilleure chez les mères qui ont eu une sco-
larité primaire complète (+ 3 points par rapport aux mères sans éducation).
126 Document de travail de la Banque Mondiale
Graphique V.6. Indice de Connaissances sur le VIH/SIDA Selon la Durée d’Études de la Femme
10
Indice de connaissance du
9
8
7
SIDA 6
5
4
3
2
0 2 4 6 8 10 12
Années d'études
reçoivent une couverture vaccinale complète est assez substantiel (voir le graphique V.7 ci-
après) ; on ne trouve que 12,6 % des enfants dans ce cas lorsque leur mère n’a pas fréquenté
l’école alors que cette proportion monte à 31 % si la mère a une scolarité primaire com-
plète, 42,5 % si elle a poursuivi ses études jusqu’au brevet et près de 50 % si ses études l’ont
conduite en second cycle secondaire.
Les chances de prise de vitamine A par le jeune enfant (41 % en moyenne dans l’échan-
tillon) sont également meilleures en milieu urbain qu’en milieu rural (impact marginal de
+ 16 % au point moyen) comme elle sont croissantes avec la durée des études de la mère. La
relation est telle que la proportion d’enfants qui reçoivent de telles vitamines passe de 38 %
avec une mère qui n’a pas fréquenté l’école à 61 % si elle a eu une scolarité primaire com-
plète ; l’impact est aussi caractérisé par une saturation, l’augmentation des chances avec un
premier cycle secondaire plutôt qu’une scolarité primaire complète n’étant que de 5 %.
Examinons maintenant dans quelle mesure la durée des études de la mère peut exercer
une influence sur la taille et le poids des enfants de moins de cinq ans. Ces deux variables
sont évidemment sous l’influence principale de l’âge de l’enfant et la question de l’influence
éventuelle de la scolarité initiale de la mère n’a bien sûr de sens qu’à la marge de cette
128 Document de travail de la Banque Mondiale
% vaccination
lequel le poids moyen est de 40
10,7 kg et la taille moyenne 30
est de 82,3 cm; les écarts type 20
de la taille et du poids pour 10
les enfants d’âge moyen 0
dans l’échantillon (qui n’est 0 2 4 6 8 10 12
bien sûr pas les écart-type Années d'études de la mère
globaux de ces deux gran-
deurs dans l’échantillon)
sont respectivement de Graphique V.8. % Qu’une Mère Connaisse le Décès d’Un
2,4 kg et de 5,7 cm. Les résul- Enfant Avant 5 Ans Selon la Durée
tats obtenus montrent que de ses Études
la durée des études de la 65
mère exerce une influence
% d'un décès avant 5ans
60
favorable sur les deux gran-
55
deurs. Cette influence est
50
relativement forte pour une
45
scolarité primaire complète
40
pour se saturer fortement
35
ensuite. Entre une mère qui
30
n’a pas été scolarisée et une 0 2 4 6 8 10 12
mère qui a eu une scolarité Années d'études de la mère
primaire complète, le gain
marginal représente 21 %
d’écart-type pour le poids et 17 % pour la taille ; ces écarts sont significatifs. Au-delà du
primaire, les gains supplémentaires sont modestes (+ 4 % additionnels pour chacune des
deux grandeurs lorsqu’on passe du primaire complet à des études jusqu’à la fin du premier
cycle secondaire.
On sait enfin que le Tchad est aussi caractérisé par une proportion élevée de morta-
lité des enfants avant l’âge de 5 ans (240 pour 1 000 au Tchad contre une valeur moyenne
de 160 pour 1 000 dans les pays d’Afrique sub-saharienne). La variable qui a été analysée
dans ce texte n’est pas directement le risque de mortalité avant cinq ans d’un enfant mais
la probabilité qu’a une mère de connaître le décès d’un (ou plus) de ses enfants avant qu’il
n’atteigne l’âge de cinq ans. La valeur moyenne de cet indicateur dans l’échantillon est de
55 %. Cette probabilité est un peu plus faible en milieu urbain (environ 5 % au point
moyen) et diminue dans les ménages où la mère a fait davantage d’études dans sa jeunesse,
la réduction du risque pour une mère d’être exposée au décès d’un de ses enfants étant glo-
balement proportionnelle à la durée de ses études au cours de sa jeunesse. Pour une mère
qui n’a pas fréquenté l’école, le risque (très élevé) est de 60 %. Il baisse à 51 % si elle a été
jusqu’au terme de la scolarité primaire, et à 45 % si elle a eu une scolarité complète au
niveau du premier cycle secondaire, soit une baisse d’un quart par rapport à l’absence de
Le Système Éducatif Tchadien 129
scolarisation initiale. Ces résultats suggèrent que les femmes plus éduquées sont, au sens
large, davantage susceptibles d’adopter des pratiques plus efficaces sur ce plan, sachant qu’il
peut s’agir de comportements bien identifiables (la vaccination des enfants, le suivi médi-
cal pendant la grossesse ou la réponse à une situation de maladie de l’enfant), mais qu’il
peut aussi s’agir de nombreux petits comportements de la vie quotidienne.
ajoutant la variable de revenu. Dans le principe, on doit s’attendre à une certaine baisse
potentielle des coefficients mesurant l’impact de la durée des études de la mère. Comme
ceci correspond à une vue nécessairement excessive (il y a une certaine dose de causalité
entre scolarisation de la mère et revenu du ménage), on anticipe que le coefficient de la
variable de scolarisation de la mère dans cette dernière spécification corresponde à une cer-
taine sous-estimation de l’impact réel de notre variable explicative cible. Il faut toutefois
souligner que ceci serait potentiellement d’autant plus vrai que la variable de revenu du
ménage serait bien mesurée ; il n’en est évidemment pas ainsi, notamment parce que,
comme nous l’avons indiqué au début de ce texte, la mesure du revenu est une estimation
factorielle et non une mesure directe, prétendument de meilleure qualité. Dans ces condi-
tions, l’argument de la sous-estimation perd un peu de sa pertinence empirique.
Cela dit, il reste évidemment intéressant de tester comment se comporte le coefficient
de notre variable cible avec l’introduction additionnelle de la variable de revenu (score fac-
toriel) dans la spécification statistique des différents modèles estimés. Ce sera ainsi, au mini-
mum, un test de robustesse de l’effet mesuré dans la spécification choisie dans le corps du
texte. Les résultats obtenus montrent que l’introduction de la variable de revenu modifie la
valeur du coefficient de notre variable cible. Dans un certain nombre de cas, cette variation
est faible ou inexistante; dans d’autres cas, la variation (dans le sens de la baisse de l’inten-
sité de la variable cible) est plus importante, mais il est essentiel de noter i) que l’impact
reste toujours statistiquement significatif lorsque la variable cible l’était dans la spécifica-
tion initiale et ii) que la baisse de la valeur numérique du coefficient est toujours inférieure
à un tiers de la variable numérique initiale. En conséquence, on peut conclure à une bonne
robustesse des résultats présentés dans les sections précédentes de ce texte.
Le tableau V.9, ci-après, récapitule les résultats obtenus; il donne une mesure qualita-
tive de l’impact de la variable caractérisant la durée des études initiales de la mère sur les
différents aspects étudiés a) en distinguant les impacts associés respectivement aux ensei-
gnements primaire et secondaire, et b) en mesurant la robustesse des coefficients de cette
variable entre la spécification initiale avec le milieu géographique comme variable de contrôle
(effets notés «bruts» dans le tableau, et la spécification incorporant en outre le revenu fami-
lial (effets notés «nets» dans le tableau ci-après).
Si on a une vision globale des informations contenues dans le tableau V.9, on peut
d’abord observer qu’outre les situations dans lesquelles l’impact de la durée des études
n’était pas significatif dans la spécification initiale, il y a cinq cas dans lesquels l’intégration
du revenu ne change pas significativement l’effet de la durée des études de la mère. Dans les
onze autres cas, la prise en compte du revenu du ménage diminue l’impact de la durée des
études de la mère. Mais celui-ci reste significatif avec un coefficient dont la valeur numé-
rique est toujours supérieure aux deux-tiers de celle estimée dans la spécification initiale.
Une seconde observation globale est l’existence d’effets très notables i) de la durée des
études du chef de famille sur les risques de pauvreté, ii) de la durée des études initiales du
père et de la mère sur la rétention du savoir lire à l’âge adulte, iii) de la durée des études ini-
tiales de la mère sur a) sa propre santé et b) celle de ses enfants. L’impact de la scolarisation
des mères sur les variables de population existe mais semble moins intense.
Une troisième observation, importante pour la politique éducative, est que générale-
ment les effets de la scolarité de la mère sont importants dès la scolarité primaire. Ceci ne
veut pas dire que la scolarité secondaire n’apporte rien au-delà des effets du primaire; il y
a même des dimensions pour lesquelles les effets de la scolarité ne sont avérés que pour les
Le Système Éducatif Tchadien 131
Tableau V.9. Tableau Récapitulatif de l’Effet de la Durée des Études de la Mère sur les
Divers Résultats et Comportements Sociaux Étudiésa)
Niveau primaire Niveau secondaire
Durée des études du chef de ménage et de la mère Effet brut Effet net Effet brut Effet net
Impact sur le risque d’être dans les *** ***
2 quintiles les plus pauvres
Impact scolaire intergénérationnel *** *** — —
Impact sur la rétention de l’alphabétisation *** —
à l’âge adulte
Impact sur la mère
Age à la première naissance — — ** **
Espacement des naissances * * * *
Usage d’une méthode contraceptive — — — —
Nombre de naissances — — *** **
Prise de vitamine A pendant la grossesse ** * — —
Suivi médical pendant la grossesse *** *** — —
Accouchement assisté par personnel médical *** ** — —
Connaissances relatives au VIH/SIDA *** *** — —
Impact sur les enfants
Probabilité de vaccination complète *** ** *** **
Prise de vitamine A *** ** *** **
Poids à la naissance ** * — —
Taille à la naissance ** * — —
Mortalité avant 5 ans *** ** *** **
Mesure qualitative d’un effet global consolidé (b) 34 27 18 14
a) Les effets dits ici «bruts» caractérisent la prise en compte du milieu géographique, urbain/rural
(outre le genre, l’âge ou le nombre d’enfants selon les modèles) comme variable de contrôle, alors que
les effets dits «nets» sont les effets de la durée des études de la mère dans une équation où le contexte
géographique et le niveau de revenu du ménage sont pris en compte.
b) Mesuré comme la somme des étoiles sur l’ensemble des dimensions retenues
études effectuées au niveau secondaire. C’est le cas de l’âge de la mère à sa première nais-
sance et du nombre de ses enfants, mais il ne s’agit que des seuls cas parmi les différentes
dimensions qui ont été étudiées. Les autres cas, au nombre de 13 peuvent être classés en deux
catégories : pour huit d’entre eux on observe une effet significatif des études de la mère au
niveau primaire et pas d’impact additionnel des études au niveau secondaire; pour cinq
autres cas, il y a un effet d’intensité plus ou moins comparable pour les études au niveau pri-
maire et secondaire, ce qui signifie qu’il y a un impact significatif avec une scolarité primaire
complète, impact qui s’approfondit lorsque la mère a fait des études secondaires.
Sur la base de l’indicateur global consolidé (qui n’est toutefois qu’une mesure qualita-
tive), on retrouve d’une part que les effets nets sont d’une intensité substantielle et relative-
ment proche de celle des effets dits bruts, et d’autre part que si l’enseignement secondaire
permet certes d’approfondir les effets sociaux de l’éducation (dont ceux relatifs à la popu-
lation), c’est tout de même le primaire qui prime, dans la mesure où sur les effets imputables
132 Document de travail de la Banque Mondiale
aux niveaux primaire et secondaire, environ les deux tiers sont déjà obtenus avec une sco-
larité primaire complète. Une priorité à l’achèvement universel du primaire apparaît donc
incontournable.
■ du point de vue économique, on souligne d’une part la très forte dualité de l’écono-
mie tchadienne et d’autre part l’existence d’une structure déséquilibrée dans laquelle
la production de formés dans la partie haute du système (second cycle secondaire
tant général que technique, enseignement supérieur) ne produit pas de façon opti-
male du capital humain dans la mesure où une proportion notable des formés ne
trouve pas à s’employer efficacement dans les structures productives nationales.
Dans le même temps, plus de la moitié d’une classe d’âge n’a pas une scolarité pri-
maire complète, sachant que le niveau d’apprentissages de ceux qui achèvent effec-
tivement le cycle laisse par ailleurs à désirer (voir chapitre 4 sur la qualité des services
offerts). On sait enfin que la croissance économique devra s’appuyer à la fois sur l’ex-
pansion du secteur de l’emploi moderne où la productivité du travail est meilleure
(mais cette expansion dépend d’abord des politiques macroéconomiques41) et sur
des gains de productivité du travail dans le secteur informel sachant qu’une condi-
tion nécessaire pour cela est que les individus disposent d’un bagage de connais-
sances opérationnelles et cognitives minimales, telles que celles qui peuvent être
imparties par un enseignement primaire de qualité raisonnable.
Concernant la partie haute du système, et même si l’émergence de la société
pétrolière est susceptible de modifier un peu la donne, il ne fait pas de doute que les
choix implicites qui ont été faits conduisent à produire un nombre trop important
d’individus qui ne réussissent pas à s’insérer harmonieusement sur le marché de
l’emploi. S’il est sans doute probable qu’une partie du problème réside dans des
insuffisances de nature qualitative, le système offrant trop de formations mal adap-
tées aux demandes de l’économie tchadienne, il ne fait par contre pas de doute que
les quantités de formés sont aussi fondamentalement incompatibles avec les capa-
cités d’absorption du secteur de l’emploi moderne. L’attention doit être porté sur
un arbitrage renouvelé entre la quantité et la qualité-pertinence des services offerts.
■ du point de vue social, il y a une forte convergence des analyses pour souligner com-
bien est essentiel l’enseignement de base, et en particulier l’achèvement du pri-
maire, pour atteindre des impacts significatifs dans le domaine, qu’il s’agisse de
41. Taux d’intérêt du capital, code des investissements, taux de change, législation du travail, . . . Les
politiques de formation doivent être capables de répondre aux demandes de ce secteur tant en quantité
qu’en qualité, mais ce n’est pas dans les lieux de formation qu’on décide des emplois offerts.
Le Système Éducatif Tchadien 133
Au total, les éléments empiriques mobilisés dans ce chapitre convergent donc en terme de
politique éducative structurelle concernant les parties haute et basse du système.
42. Ceci permettra de mettre en place les actions nécessaires visant notamment à i) traiter la ques-
tion de la dualité excessive du système et de ses personnels, ii) améliorer les conditions pédagogiques de
l’enseignement (y compris les aspects de gestion comme nous le verront dans le chapitre 7 de ce rapport)
et iii) mettre en place des mécanismes adaptés pour stimuler la demande de solarisation de la part des familles.
43. Si on allait vers un cycle de base de 10 ans à couverture universelle, c’est par un facteur de l’ordre
de 6 qu’il faudrait multiplier les effectifs du premier cycle secondaire entre 2004 et 2015.
134 Document de travail de la Banque Mondiale
très peu développé au Tchad, a offert des emplois qui ont été en nombre très inférieurs à la
production du système d’éducation et de formation. L’économie tchadienne est fondamen-
talement duale (et donc marquée par la discontinuité entre un secteur informel très large et un
secteur moderne très étroit du point de vue de l’emploi44) alors que le système éducatif est
structurellement marqué par la continuité entre cycle d’études; par exemple, on peut observer
la forme effectivement sans discontinuité du profil de scolarisation, en général, entre les
deux cycles secondaires en particulier (graphique II.1 dans le chapitre 2 de ce rapport) ainsi
que l’existence d’un taux de transition entre les deux cycles secondaire dont la valeur est
proche de 80 % et semble stable à ce niveau très élevé (beaucoup plus élevé que la moyenne
des pays de la région) depuis près de 10 ans. Avec une telle structure de continuité dans le
système, tout développement de la partie basse du système (qui est évidemment très sou-
haitable comme on l’a vu par ailleurs) porte en lui-même les germes de l’explosion des effec-
tifs dans la partie haute du système (comme cela a été souligné dans le chapitre 2). La
régulation des flux devient alors quelque chose d’incontournable pour éviter un engorge-
ment accru de la partie haute du système qui serait alors associé à la fois à la baisse de la qua-
lité des services et à un nouvel accroissement du chômage des formés à ce niveau.
Etant face à la perspective d’avoir une base scolaire large (universel jusqu’au terme du
cycle primaire) et un sommet étroit, le contrôle des effectifs est alors une question incon-
tournable; il peut alors i) prendre des formes variées selon la répartition de la régulation
aux différents paliers du système, ii) s’appuyer sur des mécanismes différents en articulant
à des doses diverses une régulation par les prix et une régulation par les quantités, et iii) en
introduisant, ou non, des mécanismes d’accompagnement qui pourraient être à la fois effi-
caces pour la régulation des flux et pour l’insertion professionnelle des jeunes et équitable
dans son fonctionnement. Examinons successivement ces trois points.
Une Régulation Répartie. Une première question est celle de savoir par quelles voies on
passe de la base large au sommet étroit dans le système éducatif. Ce passage peut être plus
ou moins fractionné entre les différents paliers du système, sachant qu’on considère qu’un
bon système éducatif est caractérisé par i) une rétention forte des élèves au cours de chacun
des cycles d’enseignement et ii) une transition gérée entre cycles successifs pour ajuster la
dynamique des effectifs aux besoins de l’économie d’une part, aux capacités physiques et
de financement de services éducatifs de qualité raisonnable de l’autre. Le système tchadien
est aujourd’hui très éloigné de cette référence, mais c’est sans doute dans cette direction
qu’il doit évoluer le long de son chemin d’amélioration.
Ce passage entre l’universel à la base et le relativement sélectif au sommet peut se
faire de façon plus ou moins fractionnée. Quelle part de cette réduction sélective des
effectifs est-elle susceptible de prendre place i) entre le primaire et le premier cycle secon-
daire, ii) entre les deux cycles secondaires et iii) entre le baccalauréat et l’accès à l’ensei-
gnement supérieur. Il n’y a sans doute pas de règles à priori qui détermineraient le meilleur
dosage de ce fractionnement et cela est affaire de politique éducative, de contraintes bud-
gétaires et de préférences sociales, c’est-à-dire doivent être étudiées dans le contexte de
chaque pays. On peut toutefois souligner que plus on sélectionne en amont, moins on
doit le faire en aval à des moments où cela est en général politiquement plus difficile; par
44. Même un triplement du secteur moderne en dix ans laisserait un secteur informel qui représen-
terait alors encore plus de 80 % de l’emploi dans le pays.
Le Système Éducatif Tchadien 135
exemple, l’expérience montre qu’il est politiquement plus difficile de réguler les flux entre les
deux cycles secondaires que dans l’accès à l’enseignement supérieur sachant que le contrôle
des flux dans l’accès au second cycle secondaire permet de cibler plus aisément une poli-
tique de qualité avec des ressources raisonnables. De même, l’expérience montre qu’une
certaine régulation des flux après le primaire peut s’avérée nécessaire, pour des raisons tant
pratiques que financières, lorsque le pays (c’est et sera le cas du Tchad) est exposé à une
grande amélioration du nombre de ses jeunes qui achèvent le cycle primaire; dans ce contexte,
cette régulation entre le primaire et le secondaire soulage celle qui devra être opérée plus
avant dans le système.
■ pour un même type d’études, il peut exister simultanément des segments pour les-
quels l’accès est gratuit, limité et régulé par concours, alors qu’il existe aussi des
structures (privées, . .) qui admettent des élèves ou étudiants sur une base payante;
■ dans l’hypothèse où le principe de la régulation par les prix serait retenue, l’expé-
rience internationale montre que cela peut se réaliser dans des structures publiques
(qui imposent des frais de scolarité) et/ou dans des structures privées ou commu-
nautaires (qui imposent des frais de scolarité et qui peuvent par ailleurs être par-
tiellement subventionnées par l’Etat);
■ enfin, le principe de régulation par un concours d’accès n’implique pas nécessai-
rement la gratuité des études (ou la gratuité pour tous indépendamment des
filières ou des caractéristiques académiques ou sociales des individus concernés)
sachant que la régulation par les prix n’implique pas qu’on demande un recou-
vrement intégral des coûts;
Au total, il existe de nombreuses options qui demandent à être étudiées dans chaque
contexte national par les autorités publiques, sachant qu’il est évidemment préférable
que le système général de régulation soit inscrit dans une politique nationale globale qui
articule les dispositions valant de façon spécifique pour l’ensemble des structures.
136 Document de travail de la Banque Mondiale
Une Régulation Accompagnée pour Tenir Compte de l’Équité et d’Une Insertion Sociale
Harmonieuse. Dès qu’on envisage une régulation formelle des flux, le responsable de poli-
tique éducative est confronté au traitement de questions concernant non seulement ceux
qui poursuivent leurs études mais aussi ceux qui les arrêtent.
Pour ceux qui continuent leurs études, on souhaite en général pour des raisons d’effica-
cité pouvoir recruter les meilleurs éléments car ce sont eux qui seront les meilleurs agents du
progrès social du pays; et on souhaite aussi pour des raisons d’équité que ces éléments
brillants qui pourraient poursuivre leurs études, ne soient pas empêchés en raison de leurs
éventuelles conditions sociales défavorables. Une modulation ciblée des aides (croisement
de critères académiques et sociaux) est alors sans doute envisageable;
Pour ceux qui ne pourront pas continuer leurs études, et qui sont vraisemblablement
déçus de cette situation, c’est l’entrée dans la sphère productive qu’il convient de préparer.
Dans la situation actuelle et compte tenu de la forme du profil de scolarisation, la régula-
tion existe de façon implicite et se distille sans dire son nom à l’issue de chaque classe des
différents cycles (et sans revendication car l’abandon est perçu comme un échec individuel
plus que comme un échec du système) sans qu’existe de réelles activités pour aider ces
jeunes à s’insérer. Dans la situation où une régulation positiviste et ouverte sera introduite,
des pressions vont exister pour demander qu’on offre quelque chose à ces jeunes. Ce peut
alors être une occasion intéressante de proposer des formations courtes facilitant l’accès de
ces jeunes à des emplois dans le secteur informel en favorisant la productivité de leur tra-
vail; une réflexion qui reste à faire pourra être engagée pour identifier ce que pourraient
recouvrir ces activités de formation-insertion sachant qu’il s’agira de formations courtes
dont les modalités pourront sans doute être variées sans recours nécessaire à l’usage de
structures formelles, les opérateurs de ces formations n’étant généralement pas l’Etat.
Notons enfin à titre de conclusion de ce chapitre que les réflexions pour l’action qui
viennent d’être présentées n’ont été faites qu’à titre illustratif; elles n’ont pas en soit valeur
de recommandations. La seule recommandation ferme qui ressort toutefois de l’analyse est
que la politique éducative nouvelle du pays devra faire face à des questions structurelles très
claires et que si différentes options peuvent être proposées pour y répondre, toute politique
implicite de statu quo est fondamentalement vouée à l’échec dans le temps. Comme cela a
été dit de façon spécifique pour la stratégie concernant la partie basse du système, l’usage du
modèle de simulation sera sans doute d’une grande utilité pour structurer les choix concer-
nant la stratégie pour la partie haute du système et de façon plus large encore, l’ensemble de
la politique sectorielle dans un contexte de soutenabilité financière à moyen terme.
C HAP ITR E 6
D
ans la mesure où on assigne à l’éducation des objectifs en matière d’équité et
d’égalité des chances, il importe de traiter de ces aspects lorsqu’on décrit un sys-
tème éducatif national. L’analyse de l’équité s’attache à la dispersion qui peut exis-
ter autour des situations moyennes lorsqu’on représente un système éducatif. Cette
dispersion, ou ces disparités, peuvent concerner aussi bien les conditions d’enseignement
(d’un lieu à un autre de scolarisation), que les carrières scolaires des individus (accès, réten-
tion, acquisitions dans les différents cycles d’enseignement) selon leurs caractéristiques
sociales (genre, milieu géographique, niveau de revenu des parents).
Ne sont abordées dans ce chapitre que les disparités dans les scolarisations individuelles
(accès et rétention) concernant aussi bien la dimension géographique que la dimension
sociale. Les disparités liées aux autres aspects (conditions d’enseignement et d’acquisitions
scolaires) sont abordées dans les chapitres 4 (efficacité interne et qualité des services offerts)
et 7 (gestion administrative et pédagogique du système).
Deux parties principales composent ce chapitre: la première compare les scolarisations
individuelles selon des caractéristiques telles que le genre et le milieu de résidence (urbain
ou rural) et le revenu. Cette première partie aborde également les disparités entre les dif-
férentes délégations départementales de l’éducation45. La seconde partie analyse la ques-
tion de la répartition des ressources publiques pour l’éducation dans le pays au sein d’une
génération d’enfants.
45. Pour cette dimension, l’étude estimera le poids relatif des facteurs situés du côté de l’offre et de la
demande dans l’explication des problèmes de scolarisation.
137
138 Document de Travail de la Banque Mondiale
46. En faisant une lecture longitudinale du tableau VI.1, on constate que l’indice de parité est de 0,45
dans le primaire en 1990 et de 0,26 dans le secondaire en 1995; or les élèves du premier cycle secondaire
en 1995 sont en majorité des élèves de la cohorte du cycle primaire de 1990.
Tableau VI.1. Taux Brut de Scolarisation (%) par Genre et Indice de Parité, 1990–91 à 2003– 04
1990–91 1995–96 2002– 03 2003–04
TBS (%) Indice de TBS (%) Indice de TBS (%) Indice de TBS (%) Indice de
Filles Garçons parité F/G Filles Garçons parité F/G Filles Garçons parité F/G Filles Garçons parité F/G
Préscolaire 0,4 0,5 0,78 0,9 0,9 1,00
Primaire 33,8 75,8 0,45 34,5 70,6 0,49 60,6 93,1 0,65 65,3 97,4 0,67
Collège 3,0 14,6 0,21 4,7 18,1 0,26 10,5 31,0 0,34 11,3 31,8 0,35
Lycée 0,7 6,0 0,11 1,4 7,8 0,17 4,4 16,8 0,26 4,4 17,8 0,25
Supérieur 0,6 1,1 0,15 0,17
perdraient d’impor-
Graphique VI.1. Indice de Parité Garçons Filles du TBS
tance avec la moder- aux Différents Niveaux d’Enseignement,
nisation de la société 1990–2003
et en conséquence
Préscolaire
Primaire
Collège
Lycée
Supérieur
Sans dire que ces facteurs sont
totalement sans importance, Niveau d'enseignement
il reste toutefois que leur in-
fluence est sans doute large-
ment surestimée et que des facteurs plus mécaniques (moins culturels et moins favorables
aux actions spécifiques entreprises pour la scolarisation des filles) jouent un rôle structurel
essentiel dans l’explication des tendances constatées. En effet, des analyses complémentaires
montrent que d’une part l’accroissement des disparités avec le niveau éducatif et d’autre part
leur réduction dans le temps s’expliquent presque exclusivement par le niveau de couver-
ture global (filles + garçons) du système. La loi sociologique commune, bien établie par
ailleurs, selon laquelle pour tout bien désirable, plus il est rare, plus grandes sont les dispa-
rités sociales dans son appropriation, s’applique presque parfaitement aux données scolaires
tchadiennes. Au total, on n’a pas vraiment besoin d’un argument culturel pour expliquer
l’approfondissement des inégalités avec le niveau éducatif ni d’arguments concernant l’im-
pact éventuel des actions entreprises en faveur des filles, pour expliquer les structures
diachroniques et synchroniques des données du tableau VI.1. C’est dans le niveau de cou-
verture différencié du système à un moment du temps et dans le développement quantita-
tif global du système aux différents niveaux d’enseignement que se déterminent de façon
quasi mécanique les disparités garçons-filles en son sein.
Comparaison des Profils de Scolarisation. Pour décrire plus finement les disparités de
genre dans le système éducatif tchadien, nous utilisons maintenant les profils de scolarisa-
tion et de rétention déclinés par sexe qui décrivent le parcours scolaire des élèves dans le
système. Les tableaux VI.2 et VI.3, ci-après, ainsi que le graphique VI.2, présentent le pro-
fil de scolarisation et de rétention, des garçons et des filles, au niveau national, dès leur
entrée en première année du primaire (CP1) jusqu’à la dernière année du second cycle
secondaire (classe de terminale).
Le graphique VI.2, décrit le parcours des élèves par rapport à la population d’âge sco-
laire et permet d’apprécier les différences suivant le genre dans le système.
Si on examine la structure des disparités entre garçons et filles et qu’on cherche à dis-
tinguer celles qui se constituent dans l’accès à l’école puis dans les phases de rétention à l’in-
térieur des différents cycles et de transition entre cycles consécutifs, on peut observer qu’à
chacune des étapes de la carrière scolaire, les filles sont en retard par rapport aux garçons.
Et il importe de souligner que c’est le segment de la carrière scolaire qui est le plus défavo-
rable aux filles, dès l’accès à la première année de l’école primaire. En effet, il n’y a que trois
Le Système Éducatif Tchadien 141
Tableau VI.2. Profils de Scolarisation et de Rétention CP1-Terminale par Sexe, Année 2003/04
CP1 CP2 CE1 CE2 CM1 CM2 6ème 5ème 4ème 3ème 2nde 1ère Terminale
Taux Garçons 118,6* 89,3 81,0 69,4 61,3 50,4 35,9 26,4 22,8 19,4 14,7 11,2 9,6
d’accès Filles 87,2 62,6 54,9 44,6 34,7 25,6 13,6 9,2 7,3 5,7 3,7 2,8 2,1
(%) F/G 0,73 0,70 0,68 0,64 0,57 0,51 0,38 0,35 0,32 0,29 0,25 0,25 0,22
Taux de Garçons 100 77,9 70,2 61,7 53,8 46,8 100,0 74,7 64,5 57,9 100,0 85,3 78,1
rétention Filles 100 76,2 68,7 58,1 45,9 37,6 100,0 72,6 63,7 54,6 100,0 78,8 62,7
(%) F/G — 0,98 0,98 0,94 0,85 0,80 — 0,97 0,99 0,94 — 0,92 0,80
*Le taux d’accès supérieur à 100 % s’explique par l’entrée à l’école d’enfants appartenant à plusieurs cohortes
(celle ayant accès l’âge officiel d’entrée mais également des cohortes plus ou moins âgées).
Tableau VI.3. Statistiques des Flux d’Élèves Dans le Système Éducatif par Genre, 2003–04
Total Filles Garçons Filles/Garçons
Taux d’accès au CP1 (%) 103,3 87,2 118,6 0,73
Taux de rétention primaire CP1-CM2 (%) 43,2 37,6 46,8 0,80
Taux d’accès au CM2 (%) 37,8 25,6 50,4 0,51
Taux de transition Primaire/Collège (%) 75,9 66,5 80,2 0,83
Taux d’accès au Collège (%) 24,8 13,6 35,9 0,38
Taux de rétention Collège 6 ème−3ème (%) 57,1 54,6 57,9 0,94
Taux d’accès en 3ème (%) 12,6 5,7 19,4 0,29
Taux de transition Collège/Lycée de la 3èmeen 2nd (%) 77,1 67,1 80,0 0,84
Taux d’accès au Lycée (%) 9,2 3,7 14,7 0,25
Taux de rétention Lycée 2 nd–Terminale (%) 74,9 62,7 78,1 0,80
Taux d’accès en Terminale (%) 5,9 2,1 9,6 0,22
100,0%
80,0%
Garçons
60,0%
Filles
40,0% Total
20,0%
0,0%
CP1
CP2
CE1
CE2
CM1
CM2
6ème
5ème
4ème
3ème
2nde
1ère
Terminale
142 Document de Travail de la Banque Mondiale
filles pour quatre garçons qui ont accès à l’école (ceci suggère l’existence d’un effet de
demande scolaire car garçons et filles sont globalement exposés à une même offre de ser-
vices éducatifs). Ensuite, après leur entrée à l’école (pour celles qui y ont accès), l’indice de
parité n’est que de 80 % pour ce qui concerne la rétention en cours de cycle primaire condui-
sant à ce qu’on ne trouve en fin de primaire guère plus d’une fille pour deux garçons47.
Dans la transition entre le primaire et le premier cycle secondaire (pour ceux et celles qui
atteignent la fin du primaire), les filles sont de nouveau en retrait par rapport aux garçons
avec un indice de parité de l’ordre de 83 %. Mais, lorsqu’elles accèdent au collège (elles ne
sont que 14 % de leur classe d’âge contre 36 % pour les garçons), leur rétention (qui est en
général mauvaise au collège avec un chiffre global de seulement 57 %) n’est guère différente
de celles des garçons. Enfin, tant dans la transition entre le collège et le lycée que dans la réten-
tion en cours de lycée, les filles sont en retard avec des indices de parité de l’ordre de 80 %.
47. Si de façon générale, la survie des élèves dans l’enseignement primaire est faible dans le pays, la survie
des filles est encore plus faible; seulement 38 % des filles inscrites au CP1 en 2003 atteindront le CM2 en 2008
si les conditions de scolarisations actuelles (taux de redoublement et d’abandons) restent inchangées, con-
tre 47 % de garçons. Cette extrême faiblesse de la rétention des élèves dans le système éducatif tchadien en
particulier dans l’enseignement primaire constitue un obstacle majeur à la réalisation des objectifs d’éduca-
tion pour tous.
Le Système Éducatif Tchadien 143
NB : Les chiffres affichés entre parenthèses pour chaque DDEN correspondent aux taux d’accès
au CP1 et d’achèvement du primaire (en %)
Ces observations montrent donc que les disparités départementales sont très marquées au
Tchad. Ainsi, alors qu’un enfant se trouvant dans les départements de Tandjile Ouest ou
des Monts de Lam a environ 8 chances sur 10 d’être scolarisé jusqu’au CM2, son homo-
logue du département de Batha Est a, quant à lui, moins d’une chance sur 10 d’atteindre
ce niveau de scolarisation. Ces disparités sont encore plus marquées lorsqu’on croise la
dimension géographique avec la dimension genre, comme le montrent les données du
tableau VI.4.
Le taux d’achèvement du primaire des filles varie ainsi de 5 % à Assongha et dans le
département du Lac à 68 % dans le Tandjile Ouest (celui des garçons varie de 9 % dans le
Batha Est à 88 % dans le Tandjile Ouest). L’indice de parité entre le genre calculé sur l’accès
144 Document de Travail de la Banque Mondiale
au CM2 varie de 0,20 dans le Borkou à 0,88 dans le Tandjile Ouest; ceci signifie que pour
100 garçons achevant le cycle primaire, il n’y a que 20 filles dans le Borkou dans ce cas, mais
88 filles dans le Tandjile Ouest.
Dans la mesure où les spécificités départementales (en particulier le retard de scolari-
sation) ci-dessus identifiées peuvent à priori être dues aussi bien à une insuffisance de
l’offre qu’à celle de la demande, il est utile de documenter cette question du poids de ces
deux composantes car cela peut renvoyer à des politiques éducatives très différentes pour
améliorer les situations locales. A partir des informations disponibles, nous analysons les
Le Système Éducatif Tchadien 145
différences d’offre éducative entre les départements et examiner l’influence de l’offre locale
sur l’accès et la rétention des élèves en cours de cycle. Les résultats de l’analyse concernant
l’offre éducative sont présentés dans le tableau VI.5.
Tableau VI.5. Disparités Départementales Dans l’Offre Scolaire Dans le Primaire, 2003/04
% d’élèves % d’élèves dans une école
% d’écoles dans les écoles n’offrant pas la continuité
DDEN incomplètes incomplètes éducative complète
Dababa 82 67 51
Ouaddaï 75 62 51
Kanem 71 45 33
Batha Est 61 36 32
Batha Ouest 60 48 31
Assongha 84 72 29
Ennedi 55 32 23
Sila 55 26 22
Lac 56 33 20
Borkou 33 20 16
Guera 42 26 16
Biltine 41 27 14
Baguirmi 57 28 13
Bahr El Gazal 48 21 13
Hadjer Lamis 41 17 13
Logone Oriental 35 17 13
Mayo Dallah 36 19 13
Salamat 58 23 13
Mayo Boneye 36 17 12
Tandjile Est 49 25 11
Lac Iro 45 15 10
Logone Occidental 35 14 10
Kabbia 30 15 8
Mandoul 34 14 8
Bahr Koh 31 10 7
Monts de Lam 40 19 7
Tandjile Ouest 23 10 5
Commune de N’Djamena 10 3 2
On constate que certaines DDEN sont sensiblement mieux dotées que d’autres en
écoles à cycle complet ou en écoles proposant la continuité éducative complète. Ainsi, la
proportion d’élèves ne pouvant achever le cycle primaire complet du fait d’une pénurie de
l’offre s’étend de 2 % à N’Djaména (offre présente pour la quasi totalité des élèves) à 51 %
à Dababa et à Ouaddaï (offre éducative très faible); les DDEN de Kanem, de Batha (Est et
Ouest), d’Assongha, de Borkou, du Lac, de Sila et d’Ennedi présentent également une offre
146 Document de Travail de la Banque Mondiale
60%
Monts de Lam
Mayo Dallah Kabbia
50% Bahr Koh
Log Occidental
Tandjile Est Mandoul
40%
Mayo Boney
Lac Iro
Salamat
30% Sila
Log.Orient
Hadjer Lamis
Batha Est Guera Bahr El Gazal
20% Borkou Bilitine
Kanem Lac
Dababa Baguirimi
Ennedi
Batha Ouest
10%
Ouaddaï
Assongha
0%
40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%
Offre: % d'élèves dans les écoles à offre complète
Les constats qui se dégagent à la lecture du graphique précédent sont les suivants:
■ On observe d’abord une forte variabilité entre DDEN sur les deux axes, tant pour
ce qui est de la proportion d’élèves de la DDEN scolarisés dans une école assurant
une offre complète (assurant la continuité éducative) sur le cycle que pour ce qui
est du taux moyen de rétention du CP1 au CM2 de la DDEN.
■ On observe en second lieu l’existence d’une relation positive entre les deux indica-
teurs. Plus l’offre de continuité éducative est présente et plus il y a des chances de
conserver les élèves dans le système jusqu’au CM2. Ici 54 % des différences de taux
de rétention s’expliquent par des différences d’offre de continuité éducative.
■ On remarque enfin, qu’à offre éducative comparable, certains départements obtien-
nent des résultats meilleurs que d’autres en termes de rétention des élèves. Par
exemple, pour des niveaux d’offre autour de 87 % (axe horizontal) on observe des
résultats très différents suivant les régions : par exemple, alors que le taux de survie
moyen de la DDEN de Mayo Dallah vaut 56 %, il n’est que de 19 % dans celle de
Le Système Éducatif Tchadien 147
Baguirmi; cette différence ne peut être due qu’à des différences dans la demande sco-
laire entre ces deux départements. Dans certaines DDEN, la demande scolaire des
parents pour leurs enfants semble donc beaucoup plus fragile que dans d’autres. C’est
particulièrement le cas de celles qui sont représentées en dessous de la droite oblique
sur le graphique VI.3, ci-dessus. Ces départements montrent des résultats moyens de
rétention inférieurs à ce qui est observé en moyenne nationale à niveau d’offre équi-
valente. Cette méthode permet de procéder à une catégorisation des différents dépar-
tements suivant la prépondérance du facteur explicatif dans la faiblesse de la rétention.
Les résultats sont présentés dans la carte VI.2.
Carte VI.2. Problème d’Offre et de Demande en Termes de Continuité Éducative Dans les DDEN
l’enquête MICS (Multiple Indicator Cluster Survey). Cette enquête est certes un peu
ancienne (année 2000), mais elle permet d’avoir une mesure fiable de ces disparités.
L’enquête MICS concerne 5 370 ménages et 28 750 individus et aborde les différents
aspects sociaux des familles dont l’éducation des différents membres du ménage. Elle per-
met ainsi de connaître le statut scolaire de tous les individus (scolarisés au moment de
l’enquête et dans quelle classe, scolarisés antérieurement et jusqu’à quelle classe), leurs
caractéristiques personnelles (sexe, milieu de résidence) ainsi qu’un certain nombre d’in-
formations sur les ménages (dont le niveau de vie qui permet de classer les familles par
quintile de revenu). L’analyse proposée ici se limite aux disparités dans l’accès et l’achève-
ment du cycle primaire entre les jeunes tchadiens selon qu’ils viennent du milieu urbain
ou rural ou selon qu’ils soient issus d’une famille riche ou pauvre. Les résultats des esti-
mations économétriques sur la probabilité d’accès et d’achèvement de l’enseignement pri-
maire selon le milieu et le sexe sont présentés dans le tableau VI.6.
Tableau VI.6. Probabilité (%) d’Accès et d’Achèvement du Primaire Selon le Milieu et le Sexe
Source : MICS 2000 Urbain Rural
Classes Garçons Filles Total Garçons Filles Total
CP1 (Accès) 86 71 78 70 48 59
CM2 (Achèvement) 63 42 53 27 12 20
Les disparités selon la zone de résidence sont assez importantes. En 2000, alors qu’on
estime en moyenne à 78 % les chances d’accès au CP1 en zone urbaine, la probabilité d’ac-
cès n’est que de 59 % en moyenne en zone rurale, soit une différence de 19 points de pour-
centage à l’entrée au bénéfice de la zone urbaine. Les écarts sont encore plus importants
quant à la probabilité de rester scolariser au moins jusqu’en dernière année du primaire. Il
est estimé qu’un enfant en zone urbaine a en moyenne deux fois plus de chance d’accéder
au CM2 qu’un autre se trouvant en zone rurale, la probabilité étant en moyenne de 53 %
en milieu urbain et de 20 % en milieu rural.
Les écarts sont encore plus importants en croisant la dimension urbain/rural et le sexe.
On estime à 86 % l’accès au CP1 pour les garçons en milieu urbain et à seulement 48 % pour
les filles en milieu rural. Un garçon urbain a 5 fois plus de chances d’accéder au CM2 qu’une
fille rurale (63 % des garçons
urbains atteignent le CM2
contre 12 % de filles rurales). Graphique VI.4. Profil Descolarisation Simplifié Selon le
Milieu de Résidence et le Sexe
Le graphique VI.4, ci-après,
illustre ces différences. 1,00
0,90 Garçons urbains
86%
On peut remarquer éga- 0,80
71% Filles urbaines
lement que même si un gar- 0,70
70% 63% garçons ruraux
0,60
çon en milieu rural a les 0,50 48% Filles rurales
teindre le CM2. On estime à 42 % les chances d’achèvement du cycle primaire d’une fille
urbaine contre 27 % pour un garçon rural. Ces chiffres manifestent bien le handicap de réten-
tion plus fort en milieu rural qu’en milieu urbain.
L’examen des chances d’accès suivant le revenu des familles (tableau VI.7) montre que
celui-ci généralement peu disponible dans les analyses scolaires, crée des différences sub-
stantielles en matière de scolarisation des enfants. En premier lieu, les enfants des familles
les plus pauvres (celles qui sont dans les 20 % les plus pauvres) ont de moindres chances
d’accès à l’école primaire et d’atteindre la dernière année du primaire que ceux des familles
plus riches. Les différentiels de points de pourcentage dans la probabilité d’accès au CP1 et
au CM2 sont respectivement de 34 points et de 43 points entre un enfant issu de milieu très
défavorisé et un autre issu de la frange de la population la plus riche. Un enfant issu d’un
milieu favorisé a près de 4 fois plus de chances d’être scolarisé jusqu’en dernière année du
primaire qu’un enfant d’un milieu très pauvre.
Même si les disparités entre filles et garçons sont très importantes, il apparaît claire-
ment que le milieu de résidence (urbain-rural) est une dimension encore plus discrimi-
nante pour la réalisation de l’achèvement universel du cycle primaire. Il sera certainement
pertinent d’en tenir compte dans les politiques éducatives futures du Tchad, notamment
en ciblant les interventions (d’amélioration de l’offre et/ou de stimulation de la demande)
sur les zones les plus en retard et sur les populations les plus pauvres. Nous reviendrons sur
ce point dans le point 2 de la section suivante.
d’enseignement d’une part, et à la structure des dépenses publiques par élèves d’autre
part. A ce niveau d’analyse, on ne fait référence ni aux caractéristiques personnelles
ni à l’appartenance à un groupe social ou géographique de ceux qui ont des scolari-
tés plus ou moins longues ou plus ou moins réussies. Dans cette acception, plus large
est la proportion de la classe d’âge qui a accès à l’école primaire, et plus faible est la
croissance des coûts unitaires avec le niveau éducatif, moins structurellement inégale
sera la répartition des crédits publics mis à disposition du système d’enseignement. Par
contre, plus forte est la proportion de la classe d’âge qui n’a pas accès à l’école, et plus
élevés, en termes relatifs, sont les coûts unitaires des niveaux élevés du système (par
rapport à ceux des premiers niveaux), au bénéfice donc du petit nombre qui y a accès,
plus inégale, sur un plan structurel, sera la répartition des crédits publics mobilisés
pour le secteur de l’éducation.
■ le second niveau, dit de la sélectivité sociale, prend les disparités structurelles
comme l’enveloppe au sein de laquelle les disparités dans les scolarisations entre
les différentes couches de la population (selon le sexe, l’origine sociale ou géogra-
phique) vont résulter en différenciations sociales dans l’appropriation des res-
sources publiques mises à disposition du secteur.
■ le premier correspond au calcul du coefficient de Gini, qui est égal au rapport entre
l’aire comprise entre la courbe de Lorenz et la diagonale et l’aire du triangle OAB. Par
définition, il est compris entre 0 et 1, et sa valeur est d’autant plus petite que la courbe
de Lorenz est proche de la diagonale, (distribution des ressources publiques complè-
tement égalitaire). Dans le cas du Tchad, la valeur estimée du coefficient de Gini pour
l’année 2003 est estimée à 0,72 caractérisant une situation inégalitaire forte dans la
structure de répartition des ressources publiques entre les différents individus d’une
génération.
■ le second indicateur certainement moins technique mais plus compréhensible
mesure la part des ressources publiques appropriées par les 10% les plus éduqués
au sein de la cohorte. On estime dans le cas du Tchad que les 10% les plus édu-
qués s’approprient 63,7 % des ressources publiques d’éducation.
Le tableau suivant présente la situation du pays par rapport à la moyenne des pays fran-
cophones et anglophones d’Afrique avec un niveau de PIB/tête inférieur à 1000 $ US pour
lesquels on a pu calculer les mêmes indicateurs pour l’année 2002/03.
Les résultats montrent que le Tchad a un niveau de concentration des ressources beau-
coup plus élevé que la moyenne des pays africains francophones, eux-mêmes affichant un
niveau moyen de distribution des crédits publics plus inégalitaire dans leur système éducatif
que les pays anglophones.
Le graphique précédent montre que les systèmes les plus inégalitaires sont ceux qui
sont les moins développés (pays avec un faible taux d’achèvement du primaire). Parmi
les pays avec un taux d’achèvement faible, le Tchad est celui où la distribution des cré-
dits publics est la plus inégalitaire. Et sa position sur le graphique, très au dessus de la
courbe de relation entre taux d’achèvement et niveau de concentration des crédits
publics ne fait que renforcer davantage ce constat. Par exemple le Niger, le Burkina
Faso, le Burundi et le Mali malgré des taux d’achèvement encore plus bas que celui du
Tchad, présentent une distribution des crédits publics d’éducation moins inégalitaire
que celui-ci.
Une fois établie la mesure de l’inégalité structurelle (très forte dans le cas du Tchad),
il convient en complément, de s’attacher également à celle de la sélectivité sociale qui s’ins-
crit dans cette enveloppe structurelle.
152 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau VI.8. Distribution Structurelle des Ressources Publiques en Éducation au Sein d’Une
Cohorte de 100 Enfants (données transversales de 2003)
% Cohorte
Coût
Cycles unitaire Nombre Niveau de Niveau
d’enseignement Niveaux (Fcfa) d’années acolarisation terminal
Sans scolarisation 0 0 0 0
Primaire CP1 12 351 1 10048 23,9
CP2 12 351 1 76 8,5
CE1 12 351 1 68 10,3
CE2 12 351 1 57 9,5
CM1 12 351 1 48 10,0
CM2 12 351 1 38 11,8
Collège 6ème 46 814 1 26 7,3
5ème 46 814 1 19 2,9
4ème 46 814 1 16 2,5
3ème 46 814 1 13 3,6
Lycée 1ère 63 022 1 10 2,3
2nd 63 022 1 7 1,4
Terminale 63 022 1 6 3,9
Supérieur Supérieur 725 155 4 2 2,0
Ensemble 18 100
90 63,6 % des
ressources
80
publiques
70 d'éducation
sont
60 appropriées par
les 10% les
50 plus éduqués
40
30
Les 10%
20 les plus
éduqués
10
0 A
O 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
% cumulé des individus
48. Pour les besoins du calcul, le taux d’accès au CP1 a été ramené à 100% dans la mesure où l’excé-
dent de 100% ici est dû essentiellement aux entrées tardives dans le système.
Le Système Éducatif Tchadien 153
0,7 Tchad
Rwanda
Burundi Erythrée
Mali Côte-díIvoire
0,6 Burkina Congo
Mozambique
Niger Guinée Cameroun
Madagascar Comores Bénin
0,5
Sénégal Swaziland
Mauritanie Kenya Togo
Zambie
0,4
Lesotho
Guinée-Bissau Maroc
0,3 Zimbabwé
Cap-Vert
Namibie
0,2 Maurice
Botswana
Tunisie
Afrique du Sud
0,1
25 35 45 55 65 75 85 95 105
Taux d'achèvement du primaire (en %), 2002 ou proche
Globalement les garçons sont plus favorisés que les filles. Ils accèdent plus à l’école
que ces dernières, et au fur et à mesure que l’on évolue dans le système l’écart entre gar-
çons et filles scolarisées se creuse encore plus. Ces résultats corroborent ceux obtenus dans
les précédentes analyses.
La localisation géographique, et davantage encore le revenu des familles, font appa-
raître des écarts beaucoup plus importants que le genre.
S’il est peut être plausible que dans la population des jeunes recevant une éducation non
formelle (coranique au Tchad), on ait plus de ruraux que d’urbains, par contre dans le groupe
de jeunes n’ayant pas à accès l’école, ou fréquentant le pré scolaire, on observe une sur repré-
sentation de la population rurale. Toutefois, à partir de l’enseignement secondaire, la pro-
portion des ruraux parmi les scolarisés diminue fortement et ne vaut que 9 % parmi ceux qui
accèdent à l’enseignement supérieur alors qu’ils représentent 75 % de la population.
Les disparités sont encore plus accentuées suivant le revenu des familles. Dès le primaire
l’écart dans l’accès est très important entre les enfants issus du quintile le plus pauvre et les
enfants des autres ménages. Dans le 1er cycle secondaire, les enfants issus des familles appar-
tenant aux deux quintiles les plus pauvres de la société sont très peu présents (11 % des sco-
larisés, pour 40 % de la population) alors que plus de la moitié des effectifs proviennent du
groupe des riches. Au niveau du 2nd cycle secondaire, les enfants du 1er, 2ème et du 3ème quin-
tile de revenu, sont encore moins présents (9 % des scolarisés pour 60 % de la population).
In fine, il n’y a quasiment que des jeunes issus des ménages les plus riches de la population
qui ont accès à l’enseignement supérieur. Les étudiants issus des familles les plus riches repré-
sentent 92 % des effectifs totaux de l’enseignement supérieur. Aucun enfant des ménages les
plus pauvres (les 40 % les plus pauvres du pays) n’atteint l’enseignement supérieur.
La Sélectivité Sociale Dans l’Appropriation des Ressources Publiques en Éducation. Si on
associe maintenant les coûts unitaires propres à chaque cycle d’enseignement aux résultats
du Tableau VI.10, on peut déterminer quels sont les groupes de population qui bénéficient
majoritairement des dépenses publiques allouées à l’éducation.
La première colonne du tableau précédent donne le pourcentage de ressources
publiques appropriées par les individus appartenant à chaque couche de la population. Un
Tableau VI.10. Distribution de la Population 5–25 Ans Selon le Quintile de Revenu, le Genre et la Localisation Urbaine ou Rurale Aux Différents
Niveaux d’Études MICS 2000
Groupe de Non scolarisé Non formelle Pré scolaire Primaire Secondaire 1 Secondaire 2 Supérieur Total
population Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre %
Revenu
20 % + pauvres 1 843 26 302 27 78 12 508 12 21 4 4 2 0 0 2 757 20
Q2 1 511 22 219 19 163 25 821 19 42 7 5 3 0 0 2 760 20
Q3 1 493 21 181 16 138 21 872 20 68 12 8 4 1 3 2 760 20
Q4 1 284 18 208 19 164 25 967 23 120 21 21 11 1 4 2 766 20
20 % + riches 851 12 214 19 120 18 1104 26 319 56 155 80 20 92 2 784 20
Genre
Filles 4 472 64 412 37 310 47 1861 44 191 33 54 28 5 23 7 303 53
Garçons 2 510 36 713 63 353 53 2411 56 379 67 139 72 17 77 6 524 47
155
156 Document de Travail de la Banque Mondiale
calcul intermédiaire est fait en rapportant ce pourcentage à celui de chaque sous groupe
dans la population de référence (ici les 5–25 ans), et enfin les indices d’appropriation (dernière
colonne du tableau) sont calculés en rapportant les indices R ainsi obtenus à l’indice des
individus de la catégorie de référence dans chaque segment de la population. Ces indices
(I) nous permettent de déterminer quel volume supplémentaire de ressources est capté par
une catégorie d’individus par rapport à la catégorie de référence.
Ainsi, les indices d’appropriation pour le revenu sont calculés en rapportant l’indice
R associés aux quintiles Q2, Q3, Q4 et Q5 à l’indice R associé au 20 % les plus pauvres. En
ce qui concerne le genre, l’indice R associé aux garçons est divisé par celui des filles et pour
la localisation géographique, c’est l’indice R des urbains qui est divisé par celui des ruraux.
Globalement, les résultats montrent que:
■ Dans la mesure où un garçon tchadien a plus de chance qu’une fille de parvenir aux
niveaux supérieur d’éducation, il arrive à capter le double des ressources publiques
d’éducation qu’une fille.
■ La répartition des ressources est encore plus inégalitaire entre les urbains et les ruraux,
les premiers arrivant à s’approprier 3,8 fois plus de ressources que les seconds.
■ Toutefois, c’est par rapport au revenu des familles que la répartition des ressources
publiques d’éducation est encore la plus inégalitaire. Au Tchad, ce sont les enfants
de milieu favorisé qui bénéficient de la plus grande partie des dépenses publiques
d’éducation, dans la mesure où ils accèdent à des niveaux plus hauts du système
éducatif et que ceux-ci sont caractérisés par des coûts unitaires plus élevés que les
niveaux inférieurs. Alors qu’un enfant appartenant au 2ème quintile, capte le long
de sa scolarité 1,7 fois plus de ressources qu’un enfant issu du 1er quintile, celui
appartenant au groupe des 20 % les plus riches s’approprie quant à lui 7 fois plus
de ressources que l’enfant appartenant au groupe des 20 % les plus pauvres.
C HAP ITR E 7
Questions de Gestion
157
158 Document de Travail de la Banque Mondiale
L’analyse du dysfonctionnement dans la gestion des ressources humaines révèle les causes
suivantes :
Allocation des Autres Ressources. Les établissements scolaires n’ont pas de budget pro-
pre. Le personnel, les fournitures et consommables, les matériels et équipements sont four-
nis par l’administration centrale et/ou départementale qui administrent et répartissent les
ressources. Les appuis des projets financés par des bailleurs ou donateurs parviennent aux
écoles de manière similaire soit directement du magasin central (ou de la Direction cen-
trale des Projets Education), soit d’autres structures du Ministère. Les établissements
reçoivent également des moyens financiers et matériels des associations de parents d’élèves
(APE ou groupements communautaires).
Les procédures budgétaires sont fortement centralisées. L’autonomie des DDEN, des
inspections (IEB) et des établissements reste limitée tant au niveau de l’élaboration qu’au
niveau de l’exécution du budget. Les établissements et les ministères participent activement
à la préparation du budget mais, du fait de la surévaluation des besoins exprimés par rap-
port aux ressources disponibles, des réductions sont opérées. Les budgets finalement
arrêtés correspondent alors plus à une extrapolation des tendances antérieures qu’aux
besoins réels générés par l’évolution des effectifs. De plus, les allocations en vue de l’acqui-
sition de fournitures, matériels et équipements destinés aux structures déconcentrées sont
160 Document de Travail de la Banque Mondiale
globalisées et leur exécution confiée aux directions techniques centrales en liaison avec la
Direction Générale. Les acquisitions des matériels et fournitures destinées au fonction-
nement des DDEN sont centralisées à 100 % tandis que celles destinées au fonctionnement
des écoles sont déléguées aux structures déconcentrées à hauteur de seulement 14 % du total
des dotations. Les dépenses publiques d’investissement sont également centralisées à 100 %.
Certaines fournitures sont directement livrées aux établissements scolaires par le mag-
asin central sur la base de la taille des écoles (effectifs d’élèves . . .) et des livraisons
antérieures. Des commissions centrales établissent des dotations d’office sur la base de
critères tels que le nombre de classes ou d’élèves. La première étape de l’acheminement des
fournitures et équipements aux établissements scolaires est celle de la sélection des trans-
porteurs par appel d’offres national. Cet acheminement transite par la structure départe-
mentale ou par l’inspection de l’enseignement (pour les écoles primaires) et se fait sur une
base annuelle ou bisannuelle. C’est à partir des structures intermédiaires que les fourni-
tures et équipements sont acheminés vers les établissements scolaires. Le stockage n’est pas
toujours fait dans des conditions idéales du fait de l’absence d’infrastructures appropriées
ou de faiblesse du système de gestion. La livraison à la dernière destination nécessite des
moyens de transport dont les administrations intermédiaires ne disposent souvent pas.
Beaucoup d’établissements scolaires sont contraints de mobiliser par eux mêmes les moyens
devant leur permettre d’entrer en possession de leur dotation.
Les DDEN transfèrent une partie des crédits reçus et des équipements scolaires aux
inspections (IEB). Les acquisitions sont effectuées par les administrateurs des crédits délégués
(DDENs) ou sous délégués (IEB, Chefs d’établissements). Les administrateurs départemen-
taux ont tendance à regrouper, à leur niveau, les acquisitions et à préférer les transferts de
biens aux délégations de crédits. Ce sont surtout les fournitures scolaires et les matériels péd-
agogiques qui arrivent au niveau des d’écoles. Les crédits délégués ou sous délégués arrivent
rarement au niveau des écoles car ils financent en priorité le fonctionnement des IEB.
Les délais inappropriés dans l’acheminement des ressources obligent les APE à s’in-
vestir dans le fonctionnement des écoles en achetant les fournitures essentielles. Il est ainsi
estimé que les APE assurent en moyenne la dotation de plus de 80 % des fournitures
didactiques (craies, cahiers, bics, tableaux, . .) dans le fonctionnement des établissements
scolaires.
Enfin, on peut noter que le processus d’attribution des marchés publics pour l’acqui-
sition des fournitures et équipements est affecté par de nombreux dysfonctionnements
(engagements insuffisants des dépenses à cause des notifications tardives des budgets
alloués au ministère; lenteur dans la procédure d’attribution des marchés; recours à des
fournisseurs peu qualifiés et/ou peu performants, ce qui a pour conséquence l’allongement
des délais de livraison ; non respect des procédures de passation des marchés (fractionnement
pour éviter les procédures d’appel d’offres).
■ la première consiste à déterminer les choix qui sont faits, au sens large, en matière
de carte scolaire. Il s’agit de déterminer comment les ressources sont distribuées
Le Système Éducatif Tchadien 161
avec des questions telles que celles de savoir combien d’écoles implanter sur le ter-
ritoire, de quelle taille, en quels lieux, . . .;
■ ii) la seconde dimension concerne les allocations de moyens (en particulier les per-
sonnels, mais aussi les bâtiments et les moyens de fonctionnement) entre les étab-
lissements scolaires. On s’intéresse alors aux mécanismes mis en œuvre pour
réaliser ces allocations, et surtout, in fine, à la cohérence et à l’équité dans la répar-
tition après qu’elle ait été réalisée. Nous examinerons successivement ces deux
points en commençant par l’allocation de personnels aux établissements scolaires
«qui existent», c’est à dire en considérant implicitement comme exogènes les
éléments de type carte scolaire.
Les chiffres concernant les coûts unitaires ou le rapport élèves-maîtres sont des moyennes
qui peuvent éventuellement varier d’une région à l’autre et davantage encore d’un étab-
lissement scolaire à l’autre. Dans un système qui serait organisé de manière optimale du
point de vue de la gestion administrative et financière, il devrait y avoir une relation fonc-
tionnelle entre les besoins et les ressources aux différents niveaux d’agrégation du système.
On notera qu’on cible ici l’allocation qui doit être optimale, et non pas le niveau ni la com-
binaison des ressources entre les différents intrants (qui doivent bien sûr l’être aussi mais
ces questions sont traitées dans les chapitres 3 et 4 du présent rapport).
Dans la mesure où l’on vise à ce que les conditions d’enseignement soient homogènes
sur le territoire d’un lieu à l’autre d’enseignement (pour des raisons d’efficacité mais aussi,
et surtout, d’équité), on devrait s’attendre à ce qu’il y ait une relation assez stricte entre les
effectifs scolarisés dans une école et le volume des ressources et le nombre des personnels
dont elle dispose. Cela veut dire que des écoles scolarisant le même nombre d’élèves
devraient avoir le même nombre d’enseignants et que des écoles disposant du même nom-
bre d’enseignants devraient avoir peu ou prou le même nombre d’élèves.
Sur le plan concret, l’analyse doit être conduite séparément pour chaque niveau d’en-
seignement. Nous examinerons d’abord l’enseignement primaire pour aborder ensuite le
secondaire.
Dans le cas idéal d’une cohérence parfaite de la répartition des enseignants dans les écoles, le
nombre d’enseignants dans une école donnée ne dépendrait que du nombre d’élèves de cette
école. Il existerait alors une liaison fonctionnelle entre le nombre d’enseignants et le nombre
162 Document de Travail de la Banque Mondiale
Graphique VII.1. Cohérence de l’Allocation des Enseignants Dans les Écoles Publiques,
2003–04
16
14
Nombre d'enseignants
12
10
0
0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000
Nombre d'élèves
d’élèves et les points représentants les écoles seraient tous situés sur une droite unique. On
est assez éloigné de cette situation idéale de référence car il existe des variations très impor-
tantes autour de la relation moyenne. Par exemple, parmi les écoles comptant 300 élèves, cer-
taines disposent de 10 enseignants (30 élèves par maître) alors que d’autres ne bénéficient
que de 3 (100 élèves par enseignants). De même, on trouve que des écoles qui disposent de
5 enseignants ont des effectifs d’élèves variant, dans la majorité des cas, de 100 à 600 élèves.
Bien que la relation globale entre le nombre des élèves et celui des enseignants soit
statistiquement significative sur l’ensemble du système, les écarts autour de la relation
moyenne sont donc considérables. Dans l’analyse statistique, le coefficient de détermina-
tion R2 est un indicateur49 qui mesure l’ampleur des écarts relatifs par rapport à la relation
moyenne estimée. Dans le cas du Tchad, la valeur R2 est de 0,66. Le degré d’aléa dans le
processus d’allocation des enseignants, mesuré par la valeur [1-R2], est donc égal à 0,34.
Ceci signifie que 34 % du phénomène d’affectation des enseignants dans les écoles pri-
maires publiques est dû à autre chose qu’au nombre d’élèves de ces écoles. Des progrès
notables doivent donc être réalisés dans l’affectation des personnels aux écoles.
Une façon complémentaire d’apprécier la situation du Tchad consiste à la comparer avec
celle observée dans d’autres pays. Le tableau VII.1, ci-après, présente les chiffres du degré
d’aléa dans la distribution des enseignants aux écoles primaires pour un large échantillon de
pays africains. Parmi les pays où cet indicateur a été calculé, la plage de variation va de 3 %
d’aléa à Sao Tomé à 53 % au Togo. Avec 34 % d’aléa, le Tchad se situe dans une position plus
défavorable que celle de la moyenne (peu satisfaisante) des pays du continent. Notons ici que
si le calcul de cet aléa n’est fait que sur les enseignants payés par l’Etat (en excluant les
enseignants communautaires), le degré d’aléa demeure pratiquement le même (33 %).
49. L’indicateur peut prendre une valeur comprise entre 0 et 1. La valeur 1 correspond à la relation
fonctionnelle : tous les points se trouvent sur la relation moyenne, ce qui signifie que toutes les écoles sont
traitées de la même manière et le nombre d’enseignants ne dépend que du nombre d’élèves. A contrario,
la valeur 0 correspond à l’absence totale de relation entre le nombre d’enseignants d’une école et celui de
ses élèves.
Le Système Éducatif Tchadien 163
Tableau VII.1. Degré d’Aléa (1-R2) Dans l’Allocation des Enseignants du Primaire Dans
22 Pays Africains (le chiffre du Tchad est de 2004, ceux des autres pays
autour de 2000)
Pays Degré d’aléa [1-R2] en % Pays Degré d’aléa [1-R2] en %
Sao Tome et Principe 3 Burkina Faso 28
Guinée 9 Madagascar 28
Mozambique 15 Ethiopie 29
Namibie 15 Côte-d’Ivoire 33
Guinée Bissau 16 Tchad 34
Niger 19 Malawi 34
Sénégal 19 Ouganda 34
Mauritanie 20 Bénin 39
Zambie 20 Mali 42
Rwanda 21 Cameroun 45
Gabon 26 Togo 53
Moyenne des 22 pays 26,5%
Ces résultats suggèrent que des progrès doivent être accomplis dans la situation tcha-
dienne pour améliorer la répartition des enseignants dans les écoles en rendant les alloca-
tions plus équitables et plus cohérentes entres les différents lieux d’enseignement. Les
comparaisons avec d’autres pays de la région montrent par ailleurs que des gains impor-
tants dans ce domaine sont possibles : la Guinée, qui a adopté il y a quelques années un
plan très structuré de redéploiement du personnel, peut à cet égard être considérée comme
un exemple.
Au vu du degré assez fort d’incohérence dans la distribution des enseignants dans les
écoles primaires du pays, une question assez naturelle consiste à se demander dans quelle
mesure ces sur ou sous-dotations sont réparties de façon aléatoire sur le territoire ou bien
si certaines zones ou régions apparaissent favorisées ou défavorisées. Dans cette perspec-
tive, l’analyse statistique a été étendue pour distinguer les grandes régions (quatre désignées
par les points cardinaux), le type de zone, plus ou moins urbaine (en utilisant la variable
de localisation de l’école à l’intérieur d’un chef-lieu de département, de sous préfecture ou
hors chef-lieu), enfin la langue d’enseignement utilisée (français, arabe ou bilingue). Le
tableau VII.2, ci-après, présente les résultats obtenus.
Une première observation globale au vu des résultats des quatre modèles est i) que les
variables de segmentation utilisées ici matérialisent bien des différenciations significatives
dans les allocations d’enseignants aux écoles primaires, mais ii) que la réduction de l’aléa
résultant de la prise en compte de ces variables est faible dans la mesure où le gain de R2 de
chacun des modèles 2 à 4 par rapport à celui du modèle 1 (de base) est modeste.
Le modèle 2 montre qu’il existe des disparités de dotation entre les grandes régions du
pays. La région de l’Est a été choisie arbitrairement comme la référence à laquelle on a com-
paré les dotations moyennes des autres régions. Les coefficients du modèle 2 donnent alors,
pour chaque région, le nombre moyen d’enseignants supplémentaires (ou en moins) par
rapport à la région de l’Est, pour des écoles ayant le même nombre d’élèves. Comme tous
164 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau VII.2. Modélisation du Nombre d’Enseignants Selon le Nombre d’Élèves Dans l’École, l’Implantation Géographique et la Langue
d’Enseignement, 2003/2004
Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4
Variables explicatives Coefficient Signif. Coefficient Signif. Coefficient Signif. Coefficient Signif.
Constante + 0,979 *** + 0,563 *** + 2,032 *** + 0,934 ***
Nombre d’élèves + 0,010 *** + 0,009 *** + 0,008 *** + 0,009 ***
Région
Référence :
Est —
Ouest + 1,008 ***
Nord + 0,227 **
Sud + 0,554 ***
Zone d’habitat
Réf : Chef lieu de département —
Chef lieu de sous-préfecture − 0,626 ***
Hors chef lieu (zone rurale) − 1,081 ***
Langue d’enseignement
Réf : Francophone —
Arabophone/bilingue + 0,753 ***
R 2 (%) 65,8 66,8 67,0 66,1
les coefficients des régions ainsi constituées sont positifs et statistiquement significatifs, cela
signifie que les écoles de la région Est sont en moyenne les moins favorisées en termes de
dotation en personnels enseignants. En revanche, les écoles de la région Ouest disposent
en moyenne et pour des écoles de même taille, d’un enseignant en plus que celles de la
région de l’Est.
Les résultats du modèle 3 montrent qu’en moyenne, les zones les plus urbaines
(représentées par les chef lieux de département) sont plus favorisées en termes de dotation
aux écoles (outre le fait que les urbains ont une plus grande chance que les ruraux de dis-
poser d’une école dans leur proximité). Ainsi une école située en zone rurale (hors d’un
chef lieu de département ou de sous-préfecture) dispose en moyenne d’un enseignant de
moins qu’une école de taille comparable située dans un chef-lieu de département. Enfin,
pour ce qui concerne la distinction suivant la langue d’enseignement (modèle 4), on voit
que les écoles primaires bilingues ou arabophones disposent en moyenne de 0,8 enseignant
de plus que les écoles francophones de taille comparable, une différence qui est statistique-
ment significative.
Cela dit, au-delà des différences existant en moyenne entre telle ou telle autre des caté-
gories considérées ci-dessus, il reste que le fort aléa identifié de façon globale n’est que très
peu réduit lorsque l’on prend en compte ces différences entre catégories; cela signifie que
la variabilité à l’intérieur de chacun des groupes entre les différentes écoles est sensiblement
plus importante que la variabilité qui existe entre ces groupes. Pour s’en convaincre, une
pratique habituelle consiste à conduire l’analyse de la relation entre le nombre des
enseignants et celui des élèves de façon différenciée pour chacun des groupes considérés.
Les résultats de cette analyse sont proposés dans le tableau VII.3, ci-après.
On observe que le degré d’aléa de la répartition des enseignants dans les écoles, qui
vaut 34 % au niveau global, reste à un niveau élevé au sein de chacun des groupes con-
sidérés. Cependant, on observe aussi qu’il peut varier de façon sensible d’un groupe à
l’autre. Ainsi, le groupe des écoles urbaines (celles localisées dans un Chef-lieu de départe-
ment ou une sous-préfecture) est-il caractérisé à la fois par une dotation moyenne
meilleure que celle du groupe des écoles rurales (une école de taille moyenne, 235 élèves,
dispose en moyenne de 3,71 enseignants si elle est située en milieu urbain et de seulement
3,00 enseignants si elle est située en milieu rural) et par une moindre variabilité inter-
écoles parmi les écoles de cette zone. Le degré d’aléa est en effet respectivement de 32 et
de 41 %. Cela indique l’existence d’écoles rurales spécialement mal dotées en personnels
enseignants.
Au total, si on devait retrouver la parité des conditions d’encadrement en milieu
urbain et rural, cela reviendrait à réduire le nombre des enseignants de milieu urbain de
plus de 500. On ne va sans doute pas faire ce genre de redéploiement en raison de sa diffi-
culté évidente; toutefois, cela donne des indications utiles pour les affectations d’en-
seignants nouvellement recrutés. Une même procédure suggère un déficit d’environ 700
enseignants dans l’Est du pays, de 250 enseignants dans le Nord et de 1 500 enseignants
dans le Sud pour retrouver la parité avec les conditions d’encadrement prévalant dans la
partie Ouest du Pays.
Lorsque l’on examine la cohérence des allocations dans les différentes régions, on
trouve un degré d’aléa spécialement élevé dans les régions de l’Est et du Nord (aléa respec-
tivement de 46 et de 43 %) qui sont par ailleurs celles qui sont les moins bien dotées en per-
sonnels enseignants. La question du niveau de dotation peut certes s’expliquer par le fait
166 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau VII.3. Modélisation du Nombre d’Enseignants en Fonction du Nombre d’Élèves Selon la Zone d’Habitat et le Regroupement
Géographique, Année 2003–04
Cohérence Enseignants
Constante Coefficient du nbre d’élèves 2
R Aléa [1–R2] dans une école
Valeur Significativité Valeur Significativité (%) (%) de 235 élèves
Tchad 0,979 *** 0,010 *** 65,8 34,2 3.33
Zone d’habitat
Urbain (Chefs-lieux) 1,834 *** 0,008 *** 68,3 31,7 3.71
Rural (hors chefs-lieux) 0,882 *** 0,009 *** 58,6 41,4 3.00
«Région»
Est 0,225 *** 0,012 *** 54,4 45,6 3.05
Nord 1,062 *** 0,009 *** 57,2 42,8 3.18
Ouest 0,925 *** 0,013 *** 72,1 27,9 3.98
Sud 1,351 *** 0,009 *** 69,9 30,1 3.47
que les communautés complètent moins volontiers l’action de l’Etat en éducation dans ces
régions que dans les régions situées à l’Ouest ou au Sud du pays. Par contre, le fort degré
d’aléa dans les régions de l’Est et du Nord demande sans doute à être examiné de plus près
pour identifier les moyens de sa réduction; cela dit, il s’agit surtout d’une question de degré
car le niveau d’aléa dans les zones de l’Ouest et du Sud du pays demande aussi à être réduit.
Dans cette perspective, il conviendra sans doute i) que le Ministère reconnaisse d’abord
l’existence du problème, ii) qu’il identifie les structures responsables de son amélioration
et qu’il leur en confie clairement la responsabilité, iii) que soient construits des instruments
adaptés pour que les structures auxquelles ces responsabilités sont confiées puissent effec-
tivement les exercer de façon fonctionnelle.
Une analyse complémentaire, donnée en annexe 1 à ce chapitre, permet de porter
l’analyse au niveau des départements en proposant aussi un instrument de diagnostic porté
vers l’action.
La mise en regard du nombre d’élèves et du nombre d’enseignants dans les collèges publics
de moins de 1 000 élèves montre de substantiels problèmes de cohérence dans l’allocation
des enseignants dans ces établissements. Le coefficient de détermination ne vaut que 0,46;
168 Document de Travail de la Banque Mondiale
Graphique VII.2. Cohérence de l’Allocation des Enseignants Dans les Collèges Publics
(Etablissements de moins de 1 000 élèves)
25
y = 0,0116x + 3,8525
2
R = 0,4556
20
Nombre d'enseignants
15
10
0
0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000
Nombre d'élèves
60
LAC GUERA LOG.ORIENT
0
- 10 000 20 000 30 000 40 000 50 000 60 000 70 000 80 000 90 000 100 000
tantes disparités dans l’allocation budgétaire aux départements telles qu’illustrées par la
dispersion des points autour de la droite sur le graphique précédent.
Budget départemental (millions Fcfa) = 26, 005 + 0, 0003 ⴱ Nombre d' élèves
Le R2 qui mesure l’ampleur des écarts relatifs par rapport à la relation moyenne ne vaut que
0,23. Ce qui signifie que 77 % de la forte variabilité des budgets départementaux ne s’explique
pas par le nombre des élèves scolarisés dans le département, caractérisant ainsi l’ampleur des
progrès qui pourraient être réalisés dans ce domaine. Par exemple parmi les départements
disposant d’environ 25 000 élèves dans le primaire, les budgets varient de 18 à 70 millions de
Fcfa. Le fossé est encore plus profond entre la commune de N’djamena et le département de
Mandoul. Au moment où ce dernier a trois fois plus d’élèves dans le public que N’djamena
(et où le poids du privé est par ailleurs important), il reçoit moins de la moitié du budget de
celui-ci. Les mêmes tendances de disparités sont observables pour les départements de Mayo
Dallah, Tandjile Ouest, Monts De Lam, Sila, Kabbia, Assongha et Bahr El Gazal.
■ Ceci concerne d’abord les conditions de confort des élèves avec en moyenne plus
de 4 enfants par table-banc, ce qui suggère qu’il y a un déficit global de l’ordre de
30 % dans la disponibilité en tables-bancs;
170 Document de Travail de la Banque Mondiale
■ Ceci concerne aussi les matériels les plus indispensables pour les enseignants, à
savoir la disponibilité d’un tableau en état correct et de guides pédagogiques pour
les matières principales. Pour ce qui concerne les tableaux, la valeur moyenne de
0,82 suggère un déficit global de 18 %; mais dans la mesure où on peut considérer
qu’environ 15 % des enseignants disposent de plus d’un tableau, cela suggère qu’au
moins un tiers des enseignants ne disposent pas en fait d’un tableau en état correct.
Pour ce qui est des guides pédagogiques, on peut sans doute retenir une référence
normative de 3 (trois matières fondamentales), ce qui impliquerait un déficit
moyen de plus de 50 %;
■ Ceci concerne enfin les manuels scolaires à disposition des élèves, les chiffres
moyens sont très bas avec respectivement 21 et 33 % pour le calcul et la lecture.
Ceci est préjudiciable en général, en particulier pour le livre de lecture compte
tenu de sa grande importance dans le processus d’apprentissage. On trouve que le
rapport du nombre de livres à celui des élèves est inférieur à 0,10 dans 32 % des
écoles pour ce qui est du livre de lecture et dans 52 % des écoles pour ce qui est du
livre de calcul. Ces chiffres appellent évidemment des actions concrètes appro-
priées pour améliorer les conditions d’enseignement dans l’école primaire tcha-
dienne en général et pour réduire les disparités existant sur ce plan entre les
différentes écoles du pays.
Au total, à titre de résumé des différentes analyses conduites sur l’allocation des moyens
aux établissements scolaires, il ressort que la performance du pays est globalement faible
dans la mesure où i) la distribution des moyens humains tant dans le primaire que dans le
secondaire est caractérisée par un très fort niveau d’incohérence; ii) la distribution des bud-
gets de fonctionnement aux départements pour le niveau primaire marque aussi un degré
très fort d’aléa et iii) la répartition des moyens physiques, mobiliers et pédagogiques, aux
établissements est caractérisée par de substantielles inégalités laissant un nombre notable
d’écoles sans les moyens minimaux de fonctionnement.
ment valide. En particulier, il est possible que le coût moyen par élève soit décroissant en
fonction des effectifs scolarisés. Il pourrait en être ainsi parce qu’il n’existe qu’une impar-
faite divisibilité des dépenses avec les effectifs scolarisées dans une école; par exemple, un
établissement d’enseignement dispose toujours d’une dotation minimale pour fonction-
ner (au moins un enseignant dans le primaire, ou bien au moins × enseignants pour
enseigner les matières du programme et un chef d’établissement dans le secondaire) et cela,
même si le nombre des élèves est réduit. C’est en raison de la diminution tendancielle du
coût unitaire lorsque l’on considère des effectifs plus nombreux que l’on parle d’économies
d’échelle. Pour explorer cette question de façon empirique, on peut partir de l’estimation
des relations moyennes estimées précédemment entre effectifs d’enseignants et d’élèves et
faire deux opérations complémentaires :
L’équation de base est de la forme :
On peut alors multiplier les deux membres de cette équation par le salaire moyen des per-
sonnels au niveau d’études considéré50; on obtient alors :
On peut maintenant diviser les 2 membres de l’équation par le nombre d’élèves pour
obtenir une expression du coût unitaire salarial dans une école en fonction de son effectif
d’élèves :
Coût unitaire salarial = ( b × Salaire moyen ) + ( a × Salaire moyen Nombre d' élèves )
La forme de cette relation entre le coût unitaire salarial et le nombre des élèves (au niveau
des écoles) est donc hyperbolique, le coût unitaire ayant tendance à diminuer lorsque l’on
considère des effectifs plus nombreux dans une école, et ce avec une intensité d’autant plus
importante que les coûts fixes dans la production scolaire (b × salaire moyen) sont élevés.
Cette analyse peut potentiellement être appliquée aux donnés de l’enseignement primaire
et secondaire.51
Enseignement Primaire
Rappelons que la relation (estimée plus haut dans ce chapitre) entre le nombre des élèves
et des enseignants dans une école primaire est :
50. On peut aussi calculer directement la masse salariale comme la somme du produit du salaire et du
nombre de personnels dans chacune des catégories de personnels à un niveau d’études donné.
51. Il existe bien sûr aussi des économies d’échelle dans l’enseignement supérieur mais la méthode
statistique pour les mettre en évidence n’est pas praticable en raison du nombre réduit d’unités de pro-
duction scolaire.
172 Document de Travail de la Banque Mondiale
En multipliant les deux termes de cette équation par le salaire annuel d’un enseignant du
primaire, soit 1 218 000 Fcfa52, on obtient les dépenses salariales pour les enseignants de
l’école :
(2) Dépenses salariales (en Fcfa) = 1 193 0000 +12 789 × Nombre d' élèves
Dans l’équation (2), la constante (ici égale à 1 193 000 Fcfa) représente les coûts fixes ou
de structure d’une école. Le coefficient multiplicatif de la variable explicative «Nombre
d’élèves» correspond au coût marginal par élève (ce qu’il en coûte en moyenne en termes
de dépenses salariales enseignant d’augmenter d’une unité l’effectif des élèves dans une
école). Sur la base de cette équation, on peut calculer le coût unitaire (pour un élève) salar-
ial, qui est égal aux dépenses salariales rapportées au nombre d’élèves de l’école. On obtient
l’expression suivante :
(3) Coût unitaire (par élève) salarial (en Fccfa) = 12 789 +1 193 000 / Nombre d' élèves
On peut interpréter cette expression en disant que le coût unitaire salarial est égal à la
somme du coût marginal et de la répartition des coûts fixes entre élèves. Plus la taille d’un
établissement (nombre d’élèves) est petite, plus cette dernière composante est importante.
Il s’ensuit que le coût unitaire d’une école a tendance à être plus élevé à mesure que le
nombre d’élèves est plus faible : des économies d’échelle sont par conséquent poten-
tiellement possibles dans la production scolaire. Le tableau VII.5, ci-après, indique la rela-
tion moyenne entre le coût unitaire et l’effectif scolarisé ; le graphique VII.4 en donne une
illustration :
Tableau VII.5. Relation Entre Coût Unitaire Salarial et Effectif de l’École au Niveau Primaire
Nombre 20 30 50 80 100 120 150 200 250 300 400 500
d’Élèves
Coût 72 439 52 556 36 649 27 702 24 719 22 731 20 742 18 754 17 561 16 766 15 772 15 175
unitaire
(Fcfa)
52. Nous utilisons un salaire moyen homogène (celui de l’enseignant public) pour éviter de polluer
l’analyse sur les économies d’échelles des différences de statut des enseignants (cette question est traitée par
ailleurs).
Le Système Éducatif Tchadien 173
Sur l’ensemble du territoire tchadien, 49 % des écoles primaires ont un effectif d’élèves
inférieur à 150 élèves, 38 % ont un effectif inférieur à 120 élèves et 31 % un effectif inférieur
à 100 élèves. Dans un certain nombre de cas, l’existence de ces écoles ne peut être remise en
cause dans la mesure où elle relève de la répartition spatiale des populations et où l’obliga-
tion de scolariser doit évidemment prévaloir et les considérations d’équité et de droit doivent
l’emporter sur les considérations économiques. Cela ne veut pas dire pour autant que la ques-
tion du coût doit être pour autant totalement ignorée. En effet, il est sans doute possible, par
une intensification de l’enseignement en cours multiples et par une amélioration qualitative
de la formule (formation des enseignants ciblées sur la gestion de ces classes, disponibilité en
matériels permettant aux élèves de valoriser le travail personnel ou en groupe) tout à la fois
de réduire le coût unitaire très élevé des écoles (rurales) de petite taille et d’assurer une sco-
larisation de qualité aux élèves.
Sur la base des données de la solde du ministère des finances, le salaire moyen annuel brut
d’un enseignant public chargé des classes de collège (catégorie B3) est estimé à 1 762 000
Fcfa ; pour les raisons indiquées dans l’analyse du primaire, c’est ce chiffre que nous util-
isons pour tous les enseignants quel que soient leur statut ou leur catégorie. En multipli-
ant les deux termes de cette équation par le salaire annuel moyen d’un enseignant, on
obtient les dépenses salariales enseignant de l’école :
(2) Dépenses salariales enseignant (en Fcfa) = 6 789 000 + 20 439 × Nombre d' élèves
174 Document de Travail de la Banque Mondiale
Le coût unitaire salarial enseignant s’exprime donc en fonction du nombre d’élèves de la façon
suivante :
Lors de l’analyse du cycle élémentaire, les salaires des non enseignants ont pu être négligés
dans la mesure où dans de nombreux écoles (toutes les petites en tous cas), la fonction
administrative de directeur d’école est occupée par un enseignant également chargé de
cours. Pour le cycle secondaire, il est nécessaire d’intégrer les coûts salariaux relatifs aux
administrateurs du fait i) qu’ils sont en plus grand nombre et ii) qu’ils ne sont que très
rarement chargé de cours. A partir des données écoles des nombres d’élèves et d’adminis-
trateurs, une relation peut être estimée sur le même modèle que ce qui a été fait pour les
enseignants. La relation estimée est alors la suivante :
Le salaire moyen annuel brut d’un administrateur (catégorie A2 en moyenne) étant estimé
à 2 122 000 Fcfa, on obtient alors les dépenses salariales pour les administrateurs :
(5) Dépenses salariales administrateurs (en Fcfa) = 1 994 000 + 8 064 × Nombre d' élèves
Le coût unitaire salarial pour les administrateurs s’exprime donc en fonction du nombre
d’élèves de la façon suivante :
ˆ unitaire salarial administrateur (een Fcfa) = 8 064 + 1 994 000 × Nombre d' élèves
(6) Cout
Le coût unitaire peut alors être simulé en fonction de différentes tailles d’établissement :
c’est l’objet du tableau VII.6 et du graphique VII.5, ci-après.
Alors que la question de la taille des établissements avait un intérêt pour le niveau pri-
maire, cet intérêt est en fait encore beaucoup plus fort lorsqu’il s’agit du premier cycle sec-
ondaire. Il y a à cela deux raisons convergentes :
■ La première est que la structure d’économies d’échelles est beaucoup plus intense
dans le secondaire que dans le primaire et que la taille en deçà de laquelle les coûts
Tableau VII.6. Relation Entre Coût Unitaire Salarial et Effectif d’Élèves du Collège
Nombre 50 100 150 200 250 300 350 400 500 600 1000
d’Élèves
Coût 204 163 116 333 87 056 72 418 63 635 57 780 53 597 50 461 46 069 43 141 37 286
Unitaire
salarial
total
(Fcfa)
Le Système Éducatif Tchadien 175
Graphique VII.5. Simulation du Coût Unitaire Salarial Selon le Nombre des Élèves
d’Un Collège
250000
150000
100000
50000
0
0 200 400 600 800 1000 1200
Nombre d'élèves
augmentent fortement est sensiblement plus élevée que celle prévalant dans le pri-
maire (autour de 300 à 350 élèves dans le premier cycle secondaire contre 120 à 150
dans le primaire);
■ La seconde raison est que le développement du primaire vers l’achèvement uni-
versel du cycle va nécessairement générer des pressions notables pour l’expansion
du premier cycle secondaire ; or cette expansion va forcément concerner de façon
principale le milieu rural pour lequel la distribution de la population militera pour
l’existence d’établissements scolaires de taille réduite.
à mobiliser pour créer un contexte favorable à l’enseignement. Elle est celle de la régulation
des pratiques et des incitations des acteurs engagés au niveau local. Ce qui est au centre des
questions de gestion pédagogique, c’est i) la transformation des moyens mobilisés en résul-
tats scolaires tangibles au niveau des établissements individuels et ii) de faire en sorte que
cette transformation soit à la fois homogène entre établissements et optimale (niveau max-
imum de résultats chez les élèves compte tenu des moyens disponibles dans l’établissement).
Sur le plan concret, les activités susceptibles de concourir à la réalisation d’une bonne
gestion pédagogique d’un système d’enseignement sont bien sûr potentiellement nom-
breuses, depuis le niveau de base concernant la présence des enseignants en classe jusqu’au
niveau sophistiqué des structures d’incitations, positives/négatives, des enseignants sur la
base des résultats obtenus par leurs élèves; au niveau intermédiaire, on trouve le suivi par
les directeurs d’écoles et les inspections des pratiques courantes dans la classe et des résul-
tats obtenus, sachant qu’on vise alors à ce que chaque école soit performante i) pour retenir
ses élèves sur tout le temps d’études prévu pour l’année scolaire et sur l’intégralité du cycle
d’enseignement, et ii) pour impartir à ceux-ci un niveau adéquat de connaissances en
références aux contenus identifiés dans les programmes.
Pour analyser ces questions avec une approche empirique et factuelle, une façon com-
mode consiste à examiner dans quelle mesure des établissements, comparables du point de
vue des moyens qu’ils mobilisent, produisent des niveaux de résultats comparables chez
les élèves qui leurs sont confiés. Une forte variabilité des résultats pour des moyens iden-
tiques manifeste alors une faiblesse dans la gestion pédagogique inter-établissements dans
le système. Dans cette perspective, nous pouvons ré-exploiter les données sur les résultats
mobilisées dans le chapitre 4 de ce rapport (données sur les examens et données sur les tests
standardisés du PASEC).
Graphique VII.6. Relation Entre Moyens Mobilisés et Résultats au CEPE (écoles publiques)
Ecoles publiques (échantillon de 300 écoles)
100%
Taux de réussite au CEPE
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
0 5 10 15 20 25 30
Coût unitaire salarial total (000 F CFA)
Le Système Éducatif Tchadien 177
Graphique VII.7. Relation Entre Moyens Mobilisés et Résultats au BEPC (collèges publics)
Etablissements publics du secondaire
100%
Taux de réussite au BEPC 90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
0 20000 40000 60000 80000 100000 120000 140000 160000 180000 200000
Coût unitaire total (salaires personnel + autres dépenses sur fonds propres)
Graphique VII.8. Score Moyen Ajusté de Français et Mathématiques et Coût Unitaire Dans
les Classes de 5ème Année, Échantillon PASEC
80
Score final ajusté en français et mathématiques
70
60
50
40
30
20
10
0
0 10,000 20,000 30,000 40,000 50,000
Coût unitaire de scolarisation (en Fcfa)
178 Document de Travail de la Banque Mondiale
limité d’écoles, l’utilisation de tels tests permet i) de cibler explicitement les progrès faits
au cours d’une année scolaire par les élèves en fonction des conditions précises de scolar-
isation de ces élèves au cours de cette année et ii) de contrôler l’influence des caractéris-
tiques sociales des élèves.
Le même constat que celui fait avec les résultats aux examens s’impose : i) il existe une
grande variété de situations, tant sur le plan des résultats (score compris entre 16,3 et 69,7
sur une échelle dont le maximum est 100) que des coûts unitaires (ils varient entre 4 379
et 71 192 Fcfa) ; et ii) il n’y a pas de relation marquée entre les résultats et le coût unitaire.
Pour un niveau donné de coût unitaire, il existe des différences considérables en matière
de résultats pédagogiques. Ainsi, pour un coût unitaire compris entre 15 et 20 000 Fcfa, on
obtient des scores moyens ajustés qui varient entre 15 et 60 sur 100 au sein de l’échantil-
lon d’écoles analysées.
Le fait que des élèves comparables scolarisés dans des classes disposant de moyens sen-
siblement identiques auront in fine des apprentissages radicalement différents met en exer-
gue qu’au-delà de la question de l’affectation des moyens, celle de l’utilisation effective et
efficace de ces moyens pour produire des résultats scolaires apparaît centrale pour l’amélio-
ration de la qualité dans le système éducatif tchadien.
Ces résultats renvoient à ce qui avait été observé dans le chapitre 4 : dans l’explication
des résultats des élèves, les facteurs logistiques caractérisant le contexte scolaire n’exercent
qu’un impact limité, alors que d’une classe à l’autre (en contrôlant le niveau des ressources
unitaires), les écarts sont considérables. Cette situation manifeste un niveau insuffisant de
gestion pédagogique du système. Il faut souligner que des difficultés de ce type ne sont pas
spécifiques au Tchad, mais sont partagées à des degrés divers par tous les pays de la région.
Il a été observé que le niveau global de qualité des services éducatifs dans le pays était
faible. Dans cette perspective, il ne fait pas de doute que des ressources additionnelles
devront être mobilisées; mais les résultats obtenus dans cette section soulignent avec force
deux éléments essentiels :
■ le premier est que l’apport de ressources additionnelles ne constitue pas en soi une
activité très prometteuse eu égard à l’absence de lien avéré entre les ressources
mobilisées dans une école (elles varient beaucoup d’une école à l’autre) et le niveau
de performances de ses élèves. Un travail incontournable est alors de prendre les
dispositions qui permettront au pays de faire des progrès significatifs dans la ges-
tion pédagogique de son système et de restaurer une relation positive entre
ressources mobilisées et résultats obtenus;
■ le second est que l’amélioration de la gestion pédagogique (qui d’une façon ou
d’une autre fera porter son effort sur les écoles qui disposent à priori de moyens
raisonnables et qui présentent des résultats décevants) constitue un vecteur essen-
tiel pour améliorer la qualité des services éducatifs dans le pays.
Ce n’est sans doute pas la perspective première de ce rapport d’examiner de manière précise
les réponses éventuellement pertinentes pour améliorer la gestion pédagogique du système
éducatif tchadien. Cela dit, il semble que la réflexion puisse être structurée en deux aspects :
■ la première est que si ce rapport a produit ce genre de diagnostic, c’est parce qu’un
effort spécifique d’analyse a été fait dans cette direction, sachant que les résultats
Le Système Éducatif Tchadien 179
obtenus au niveau de chacune des différentes écoles ne sont pas connus dans le
fonctionnement ordinaire du système; une condition évidemment nécessaire pour
progresser dans la correction des dysfonctionnements constatés ici consiste à pro-
duire les informations pertinentes de façon intégrée.
■ la seconde réflexion est qu’il ne suffit sans doute pas de produire l’information
pertinente pour que celle-ci soit utilisée et que les améliorations s’ensuivent. Il
convient que les problèmes constatés deviennent le problème d’acteurs bien iden-
tifiés dans le système; c’est-à-dire qu’il conviendra de raffermir la structure de
responsabilité, les acteurs responsabilisés devant en plus a) être instrumentés et
formés à l’exercice de leur nouvelles responsabilités et b) disposer des moyens appro-
priés (moyens institutionnels et moyens matériels d’action) pour apporter les
réponses adéquates aux dysfonctionnements constatés. Il faut avoir conscience que
la mise en application de ces principes demandera une réflexion préalable de la part
du Ministère pour définir les formes les plus adaptées dans le contexte tchadien53
et que ces nouvelles dispositions, pour indispensables qu’elles soient, ne seront pas
faciles à mettre en application car il s’agit en fait d’un véritable changement cul-
turel dans la manière de gérer le système.
A titre de conclusion de ce chapitre, on peut donc souligner que des progrès majeurs devront
être recherchés pour améliorer la gestion du système éducatif tchadien, aussi bien dans sa
dimension administrative (gestion des ressources, des personnels et de leur allocation aux
établissements d’enseignement) que dans sa dimension pédagogique (transformation des
ressources en résultats au niveau local). Les dispositions à prendre devront d’abord être le
fait d’une appréciation au niveau tchadien par les différentes parties concernées. Des choix,
parfois difficiles, devront être faits; mais ce n’est clairement pas une option de viser la revi-
talisation indispensable du système éducatif du pays en omettant de consacrer les efforts
nécessaires en matière de gestion.
53. Cinq pays, Madagascar, la Mauritanie, Le Mozambique, le Niger et le Sénégal sont en train,
selon ces lignes générales, de mettre en place des activités d’amélioration de leur gestion administrative
et pédagogique.
ANNEXE 1
L es données démographiques sont importantes car elles constituent une base importante
pour la mesure d’un certain nombre d’indicateurs concernant la couverture scolaire
du système éducatif national. De façon traditionnelle, on fondait les analyses de la
couverture scolaire en utilisant des indicateurs qui valaient pour des cycles d’études (taux bruts
ou nets de scolarisation). Dans la plupart des pays en développement (le Tchad ne faisant
pas exception) il a été observé qu’une proportion substantielle de ceux qui entrent à l’école
mette un terme à leurs études de façon prématurée avant d’atteindre la dernière année du
cycle. Dans ces conditions, les indicateurs calculés en moyenne pour le cycle d’étude donne
une image inappropriée de la réalité, celle-ci étant mieux appréhendée par des mesures
faites pour chaque classe du cycle et notamment la première et la dernière, définissant ainsi
respectivement des taux d’accès et d’achèvement. Pour calculer ces derniers indicateurs il
convient de disposer de données démographiques par année d’âge et ce sur la plage des âges
concernés par les activités scolaires, c’est à dire de 5 à 20 ou 25 ans. Les regroupements par
classe d’âge traditionnels (par exemple de 6 à 11 ans pour le primaire, de 12 à 15 ans pour le
premier cycle secondaire) tendent à gommer, par effet d’agrégation, les problèmes de mesure
caractéristiques des données démographiques par année d’âge; en effet, l’expérience mon-
tre que la qualité des données par année d’âge est souvent médiocre. Les données officielles
tchadiennes ne font pas exception. Le tableau I.A1 est un extrait des données originales
proposées par la DCAP.
Sur cet extrait, on voit deux des difficultés rencontrées : la première peut être observée
en se déplaçant horizontalement sur la ligne des jeunes de 11 ans. On voit que pour les cinq
données comprises entre 2000 et 2004, le nombre des jeunes reste stable au tour de 230 000,
le chiffre de 2004 étant même un peu inférieur à celui proposé pour l’année 2000, alors qu’il
y a une augmentation vigoureuse des effectifs de 11 ans dans les années ultérieures; cette
structure est très improbable dans la mesure où le nombre des jeunes de 8 ans augmente
181
182 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau I.A1. Extrait des Données Démographiques par Année d’Âge Proposées par la DCAP
Age 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2015
8 ans 225 370 231 450 240 340 251 640 264 190 276 690 286 970 367 200
9 ans 225 660 230 080 235 780 243 100 251 940 261 900 271 530 358 800
10 ans 228 130 230 750 232 800 235 450 239 890 246 830 255 730 350 600
11 ans 230 150 231 400 230 380 228 980 229 490 233 600 241 650 342 300
Total 3 955 180 4 093 000 4 238 480 4 391 960 4 550 820 4 711 760 4 866 110 6 262 500
5–25 ans
Tableau I.A2. Extrait des Données Démographiques par Année d’Âge Ajustées
Age 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2015
8 ans 242 576 249 640 256 911 264 393 272 093 280 018 288 173 367 200
9 ans 232 971 239 842 246 915 254 196 261 693 269 411 277 356 358 800
10 ans 223 747 230 427 237 307 244 393 251 690 259 205 266 944 350 600
11 ans 214 887 221 382 228 074 234 967 242 069 249 386 256 923 342 300
Total 3 955 180 4 078 407 4 205 491 4 336 556 4 471 725 4 611 127 4 754 897 6 262 500
5–25 ans
Le Système Éducatif Tchadien 183
Pour les besoins de l’analyse temporelle de la couverture scolaire, il a été jugé souhaitable
d’étendre les données démographiques aux années antérieures à l’année 2000. Nous avons
alors souhaité d’une part utiliser les données de base du recensement de 1993 (les seules don-
nées disponibles dans le cas du Tchad) et d’autre part estimer, par intrapolation, les données
pour les années intermédiaires entre 1993 et 2000. Mais avons alors été confrontés à deux
nouvelles difficultés :
■ La première est que les données du nombre de jeunes par année d’âge au recense-
ment de 1993 sont caractérisées par des variations aléatoires importantes et par une
«attraction» des âges ronds, le nombre par exemple des jeunes dont l’âge déclaré au
recensement est de 9 ans est 142 446, alors que le nombre des jeunes de 10 ans est
de 203 826 et que celui des jeunes de 11 ans est de 102 888. La faiblesse de l’Etat civil
et l’analphabétisme de nombreux parents expliquent ce genre de phénomène, qui n’est
par ailleurs pas spécifique au Tchad mais observé dans tous les pays de la région. Le
graphique 1, ci-après, illustre le phénomène; il comporte aussi la courbe correspon-
dant à un ajustement exponentiel des données observées; cette courbe gomme les
aléas des données source en respectant leur tendance globale, et on peut tenir pour
vraisemblable que la courbe ajustée donne une représentation plus réaliste (plus
précise) de la réalité tchadienne en 1993 que les données brutes du recensement,
sachant que le nombre total des jeunes de 5 à 25 ans sur la base des estimations pour
chacune des années d’âge est égal au nombre effectivement observé au recensement
(2 877 613).
Graphique I.A1. Les Jeunes 5–25 ans par Année d’Âge au RGPH de 1993
y = 225577e-0.0539x
250000
R2 = 0.512
200000
Nombre
150000
100000
50000
0
5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
Age (année)
■ La seconde difficulté rencontrée est celle du raccord entre les données lissées du
recensement de 1993 et les données de 2000 prises comme base dans les informations
proposées initialement par la DCAP. Le tableau I.A3, ci-après, propose un nouvel
extrait des données pour illustrer les problèmes auxquels nous avons été confronté.
On fait de nouveau face à un double problème :
● en premier lieu, les taux de croissance implicites entre les données proposées par la
DCAP en 2000 et celles de l’année 1993 (qu’on tient pour valides) sont d’une part
184 Document de Travail de la Banque Mondiale
Tableau I.A3. Les Évolutions Entre 1993 et 2000 dans les Données de la DCAP
1993 Recensement Taux de croissance implicite
Age après lissage 2000 DCAP entre 1993 et 2000 (%)
8 ans 189 576 242 576 3,58
9 ans 179 628 232 971 3,78
10 ans 170 203 223 747 3,98
11 ans 161 272 214 887 4,19
Si on accepte l’idée que les chiffres utilisés par la DCAP pour l’année 2000 sont surestimés,
il convient de rappeler qu’ils le sont notamment parce que les taux de croissance implicites
entre 1993 et 2000 sont sensiblement plus élevés que ceux retenus par la DCAP entre 2000
et 2015. L’application des taux implicites dans les données de la DCAP entre 2000 et 2015
aux chiffres de 1993 sur la période allant de 1993 à 2015 conduit à des chiffres pour l’an-
née 2000 qui sont inférieurs à ceux utilisés comme base par la DCAP. Ils sont aussi épurés
des incohérences identifiées précédemment.
Les nouveaux chiffres pour l’année 2000 (3 565 543 pour le groupe des jeunes de
5 à 25 ans) étant inférieurs à ceux utilisés dans l’estimation de la DCAP à la même date
(3 955 180 jeunes), l’application des mêmes taux de croissance implicites aux chiffres
de la DCAP entre les années 2000 et 2015 conduit bien sûr à des chiffres estimés pour
l’année 2015 (5 644 715 pour le groupes de 5 à 25 ans) qui sont inférieurs à ceux pro-
posés initialement par la DCAP (6 269 535); il s’agit d’une différence sensible (un écart
Le Système Éducatif Tchadien 185
de 624 821) et on doit se demander si les démarches proposées dans cette note con-
duisent effectivement à des estimations acceptables. Même si on doit reconnaître sans
ambiguïté les difficultés liées aux estimations initiales de la DCAP, il n’en demeure pas
moins qu’il n’est pas aisé de conclure de façon certaine sur ce point. Cela dit, le fait que
les chiffres estimés selon la méthode développée dans cette note soient proches de ceux
proposés par les Nations-Unies (5 517 000 pour le groupe des jeunes de 5 à 25 ans en
2015) peut sans doute permettre d’avoir une confiance raisonnable dans la démarche
et dans les estimations chiffrées proposées dans ce texte.
Sur la base des principes retenus dans cette note, on obtient une estimation complète
au niveau national par année d’âge entre 5 et 25 ans et entre les années 1993 et 2015. Le
tableau I.A4, ci-après, en donne des extraits.
Tableau I.A4. Extrait des Estimations Nationales Proposées Pour le Nombre de Jeunes
par Année d’Âge Entre 1993 et 2015
1993 Taux (%) de
Recensement croissance
Age après lissage 2000 2015 1993–2015
8 ans 189 576 225 996 347 629
9 ans 179 628 217 048 335 655
10 ans 170 203 208 454 324 093
11 ans 161 272 200 200 312 929
Si on accepte la pertinence de ces estimations, il est alors facile de les distribuer entre
hommes et femmes et selon le milieu urbain et rural, en appliquant les structures proposées
par la DCAP selon ces variables.
ANNEXE 2
D ans la mesure où nous avons des incertitudes tant i) sur les statistiques scolaires
(difficultés de collecte et de saisie, incertitude sur l’exhaustivité de couverture des
établissements et utilisation de plusieurs sources en cas d’information lacunaire) que
ii) sur les données et les projections démographiques (voir la note en annexe au chapitre 1),
une opportunité particulière était d’utiliser les donnée d’enquêtes de ménages. Ce type
d’enquête est à priori très attractif car on connaît dans une même base d’informations sta-
tistiquement représentative de la population nationale à la fois les jeunes d’âge compris entre
5 et 25 ans et leur statut scolaire (s’ils sont à l’école au moment de l’enquête et dans ce cas
dans quelle classe et pour ceux qui ne sont pas scolarisés au moment de l’enquête, s’ils l’ont été
antérieurement et, si oui, la classe la plus haute atteinte au moment où ils ont quitté l’école).
Dans le cas du Tchad, on dispose de deux enquêtes de ménages, la MICS (multiple
indicator cluster survey) conduite avec l’appui de l’Unicef en 2000 et l’EDS (enquête démo-
graphique et de santé) conduite à l’automne 2004. Compte tenu des informations contenues
dans ces enquêtes, il est possible de calculer de façon simple les indicateurs classiques de
couverture scolaire, sachant qu’on affecte habituellement une bonne confiance à la valid-
ité de ces estimations; on peut alors confronter ces valeurs avec celles obtenues sur base de
données administratives (qui mettent en regard les données de statistiques scolaires et les
données démographiques).
Il est d’abord pertinent de souligner que les chiffres obtenus dans les enquêtes de ménages
sont assortis d’une erreur standard eu égard au fait qu’il s’agit d’échantillons et non de la pop-
ulation globale. Pour cette raison, on peut tenir que l’estimation du TBS du primaire pour
l’année scolaire 1999–2000 obtenu dans l’enquête MICS (71,7 %) ne diffère pas significative-
ment de notre estimation sur données administratives pour la même année; d’une certaine
façon cela suggère que le travail qui a été effectué sur les projections démographiques est
globalement pertinent (et que les données scolaires sont sans doute aussi raisonnables).
187
188 Document de Travail de la Banque Mondiale
Analyse de la Cohérence de
l’Allocation des Enseignants
du Primaire aux Niveaux
Département et Inspections
N
ous avons considéré le découpage en 29 départements. Pour chaque départe-
ment, ont été calculés :
■ 1-le rapport élèves-maîtres moyen, qui permet de donner une mesure relative de la
priorité (ou non-priorité) donnée au département pour la dotation en enseignants et
■ 2-le niveau d’aléa (1-R2) dans l’allocation des enseignants, qui permet de donner
un indicateur sur l’équité dans l’allocation à l’intérieur du département.
Les résultats sont présentés sous forme d’un graphique, positionnant dans un même plan
tous les départements suivant ces deux dimensions.
La lecture du graphique VII.A.1 appelle à faire plusieurs commentaires :
Concernant les dotations en enseignants, les différences entre départements sont
criantes : alors que les départements de l’Ennedi, de Dababa, de Salamat, de Batha Est et la
commune de N’djamena jouissent d’un nombre d’enseignants leur permettant d’afficher
un rapport élèves maîtres moyen aux environs de 55, certains départements (Assongha et
Ouaddaï) semblent moins prioritaires pour l’allocation des enseignants et affichent des
rapport élèves-maîtres proche de 100.
On peut affiner l’analyse sur ce point en intégrant la composante du pourcentage d’en-
seignants communautaires (payés par les parents d’élèves). Dans la mesure où les autori-
tés publiques ne gèrent que les enseignants publics, les taux d’encadrement moyens des
différents départements (qui comprennent les enseignants communautaires) ne dépen-
dent que partiellement des dotations publiques en enseignants. Le graphique VII.A.2 met
189
190 Document de Travail de la Banque Mondiale
100
ASSONGHA
OUADDAI
90
LAC IRO
Ratio-Elèves-Maîtres
BATHA OUEST
80 LOG OCCIDENT
Dotation en KANEM
SILA BILTINE
enseignants LOG.ORIENT HADJER LAMIS BAHR EL GAZAL
70 plus TANDJILE OUEST TANDJILE ESTBAHR KOH
MANDOUL
importante LACMAYO DALLAH GUERA BORKOUMONTS DE LAM
KABBIA
60 BAGUIRMI
COM/NDJAMENA DABABA MAYO BONEYE
SALAMAT BATHA EST
50
ENNEDI
40
Meilleure cohérence dans l'allocation à l'intérieur des départements
30
0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1
Degré de cohérence de l'allocation
100
ASSONGHA
OUADDAI
90
écoles publiques
BATHA OUEST
80 LAC IRO
KANEM LOG OCCIDENT BAHR EL GAZAL SILA
BILTINE
LOG.ORIENT BAHR KOH
70 HADJER LAMIS MONTS DE LAM
BORKOU
TANDJILE EST TANDJILE OUEST
GUERA KABBIA
COM/NDJAMENA MANDOUL
LAC MAYO DALLAH DABABA
60
BATHA EST BAGUIRMI MAYO BONEYE
SALAMAT
50
ENNEDI
40
30
0 10 20 30 40 50 60 70
% d'enseignants communautaires
■ les départements avec des taux d’encadrement relativement bons et relativement peu
d’enseignants communautaires (partie sud-ouest du graphique): Ennedi, Baguirmi,
Lac, N’djamena, Guera, Tandjile Est, Mayo Boneye, Borkou, Batha Est et Salamat;
Le Système Éducatif Tchadien 191
■ les départements avec des taux d’encadrement relativement bons et beaucoup d’ensei-
gnants communautaires (cadrant sud-est) : Tandjile Ouest, Mayo Dallah, Kabbia,
Dababa, Monts De Lam et Mandoul;
■ les bons taux d’encadrement dans les écoles publiques de ces départements, s’expli-
quent, au moins partiellement, par un contexte marqué par une forte proportion
de maîtres communautaires. L’objectif souhaité, à moyen terme, serait de conserver
(si possible d’améliorer) cette dotation en enseignant en ligne avec des objectifs de
qualité et d’équité. Pour le moyen terme, la question qui se pose alors, et qui en fait
est générale, est celle de la faisabilité et de la soutenabilité budgétaire d’une politique
de réduction de la proportion de maîtres communautaires au sein du corps ensei-
gnant de ces départements.
■ les départements avec de mauvais taux d’encadrement et beaucoup d’enseignants
communautaires (cadrant nord-est) : Sila, Assongha, Ouaddaï, Bahr El Gazal et
Bahr Koh. Ces départements sont ceux qui doivent faire l’objet d’une priorité pour
l’allocation de nouveaux enseignants publics (en particulier pour les départements
qui gèrent bien leurs enseignants), dans la mesure où il n’existe plus de marge de
manœuvre pour plus de participation communautaire dans ces départements.
■ les départements avec de mauvais taux d’encadrement et moins d’enseignants com-
munautaires que la moyenne (cadrant nord-ouest) : Batha Ouest, Biltine, Logoene
Oriental, Kanem, Hadjer Lamis, Logone Occidental et Lac Iro. Même s’il existe
encore une marge de manœuvre pour une participation communautaire accrue dans
ces départements, ceci ne peut constituer qu’une solution par défaut, l’idéal étant que
ces départements bénéficient, tout comme ceux de la catégorie précédente, d’alloca-
tion prioritaire d’enseignants publics.
■ Des départements mieux dotés que la moyenne et affichant une bonne cohérence dans
l’allocation à l’intérieur du département (cadrant sud-est du graphique) : Salamat,
Baguirmi, Mandoul, Batha Est, Monts De Lam, Borkou, Mayo Boneye et Tandjile Est.
■ Des départements mieux dotés que la moyenne mais avec une mauvaise cohérence
dans l’allocation et donc des problèmes de gestion à régler (cadrant sud-ouest) : Lac,
N’djamena, Ennedi, Guera, Tandjile Ouest, Mayo Dallah, Kabbia et Dababa. La
situation à N’djaména est particulièrement préoccupante: la dotation en ensei-
gnants est bien au-dessous de la moyenne (environ 61 élèves par maître) et l’allo-
cation des enseignants dans les différentes écoles est très aléatoire (R2 = 0,47) :
192 Document de Travail de la Banque Mondiale
l’allocation se fait dans 53% des cas sur un critère autre que celui du nombre
d’élèves de l’école. Il est urgent de prévoir une politique ciblée dans ce département
qui scolarise environ 10% des élèves du pays.
■ Des départements moins bien dotés que la moyenne mais avec une cohérence dans
l’allocation plutôt meilleure (cadrant nord-est) : Kanem, Hadjer Lamis, Log Occident,
Bahr El Gazal, Bahr Koh et Lac Iro. Ces départements pourraient bénéficier d’une
priorité dans l’allocation de nouveaux enseignants dans la mesure où ceux-ci sont
plutôt mieux gérés que dans les autres départements.
■ Des départements à la fois mal dotés et où la cohérence dans l’allocation est faible (cadrant
nord-ouest) : Batha Ouest, Biltine, Logone Oriental, Sila, Assongha et Ouaddaï.
En résumé, il est possible de classer les différents départements dans un schéma en forme
d’arbre de classification. On peut étendre cette analyse aux Inspections d’Enseignement
de Base (IEB), ce qui a comme avantage de souligner qu’il peut exister de marges de
manœuvres au niveau déconcentré (départemental) pour régler les questions de sous
dotation en enseignants dans certaines inspections. En effet, l’arbre de classification des
inspections (graphique VII.A.4) montre bien que :
Graphique III.A.3. Arbre de Classification des Départements en Fonction du Taux d’Encadrement, du Pourcentage d’Enseignants Communautaires
et du Niveau de Cohérence dans l’Allocation des Enseignants
Bon taux d’encadrement (REM <= 68) Mauvais taux d’encadrement (REM >68)
Bon R2 ( >= 0,66) Mauvais R2 ( < 0,66) Bon R2 ( >= 0,66) Mauvais R2 ( < 0,66) Bon R2 ( >= 0,66) Mauvais R2 ( < 0,66) Bon R2 ( >= 0,66) Mauvais R2 ( < 0,66)
Tandjile Est (0,72) Lac (0,40) Monts De Lam (0,79) Tandjile Ouest (0,59) Kanem (0,66) Batha Ouest (0,33) Bahr El Gazal (0,73) Sila (0,29)
Mayo Boneye (0,73) N’djamena Mandoul (0,81) Mayo Dallah (0,60) Hadjer Lamis (0,71) Biltine (0,44) Bahr Koh (0,82)
Borkou (0,75)
Assongha (0,45)
(0,47) Kabbia (0,60) Log Occident (0,77) Logone Orient.
Batha Est (0,80)
Ennedi (0,49) Dababa (0,59) Lac Iro (0,83) (0,58) Ouaddai (0,48)
BAGUIRMI (0,82)
SALAMAT (0,82) Guera (0,62)
193
194 Document de Travail de la Banque Mondiale
Graphique III.A.4. Classification des IEB Selon le Taux d’Encadrement, le % d’Enseignants Communautaires et le Niveau de Cohérence dans
l’Allocation à l’Intérieur de l’Inspection
Dotation aux
inspections REM < = 43 dans l’inspection REM > 43 dans l’inspection
REM <= 43 dans l’inspection REM > 43 dans l’inspection
Proportion des
maîtres Moins de 38% Plus de 38% Moins de 38% Plus de 38%
Moins de 38% Plus de 38% Moins de 38% Plus de 38% communautaires
Analyse de la Cohérence de
l’Allocation des Enseignants du
Collège au Niveau Département
I
l est intéressant de voir quelles sont les localités qui sont sur ou sous-dotés en enseignant
et celles dans lesquelles il y a une meilleure répartition des enseignants. Pour ce faire
nous avons considéré les préfectures, niveau de découpage géographique et adminis-
tratif où l’on peut disposer d’un nombre assez suffisant de collèges permettant de conduire
les analyses.
Les résultats permettent de distinguer quatre catégories de préfectures :
■ Les préfecture qui sont sur dotés en enseignants avec à une meilleure cohérence de l’al-
location des enseignants : il s’agit de la commune de N’djamena, ainsi que des pré-
fectures de Batha, Lac et Salamat. Dans ces préfectures, la gestion de l’allocation des
enseignants est meilleure que la moyenne nationale. Cette meilleure gestion doit
être renforcée et consolidée.
■ Les préfectures qui sont sur dotés mais avec une mauvaise allocation des enseignants. Il
s’agit de Ouaddaï, Biltine, Borkou-Ennedi-Tibesti, Chari-Baguirmi et Kanem. Dans
ces préfectures, il y a une véritable nécessité d’améliorer la gestion des enseignants
pour corriger le déséquilibre au niveau des autres préfectures.
■ Les préfectures qui sont sous dotés avec une meilleure répartition des enseignants au
niveau des collèges. Il s’agit du Logone Occidental, du Logone Oriental, de Tandjilé
et du Moyen-Chari. Pour parer à cette faible dotation, les autres préfectures mis à
part le Logone Occidental, tentent d’équilibrer la balance en faisant recours aux
enseignants communautaires. Ces préfectures doivent être privilégiés dans l’affec-
tation de nouveaux enseignants.
■ Les préfectures sous dotés avec une mauvaise répartition des enseignants. Il s’agit des
préfectures de Guera et de Mayo-Kebbi. Ces préfectures doivent être privilégiées
197
198 Document de Travail de la Banque Mondiale
Graphique IV.A.1. Arbre de Classification des Préfectures en Fonction du Taux d’Encadrement, du Pourcentage d’Enseignants Communautaires
et du Niveau de Cohérence dans l’Allocation des Enseignants dans le Secondaire
Bon taux d’encadrement (REM <=43) Mauvais taux d’encadrement (REM >43)
Bon R2 > 0,84 Mauvais R2 <= 0,84 Bon R2 > 0,81 Mauvais R2 <= 0,81 Bon R2 > 0,84 Mauvais R2 <= 0,84 Bon R2 > 0,84 Mauvais R2 <= 0,84
N'djamena (0,88) Ouaddai (0,43) - - Logone Occident Guera (0,46) Tandjile (0,88) Mayo-Bebbi
Batha (0,96) Biltine (0,65) (0,95) Logone Oriental (0,91) (0,80)
Lac (0,96) B. E. T. (0,67) Moyen-Chari (0,91)
Salamat (0,97) Chari-Baguirmi (0,73)
Kanem (0,78)
Préfectures mieux Préfectures mieux Préfectures mieux Préfecture mieux Préfecture sous dotés en Préfectures sous Préfecture sous dotés en Préfectures sous
dotés que la moyenne dotés que la dotés en enseignants dotés en enseignants enseignants. dotés. enseignants malgré une dotés (surtout en
en enseignants moyenne en que la moyenne grâce que la moyenne Bonne gestion intra- très forte participation enseignants
publics ; enseignants à une forte grâce à une forte préfecture. Préfectures à doter en communautaire. publics).
publics. participation participation enseignants sous Bonne gestion intra- Préfectures à doter
Gestion de l’allocation communautaire. communautaire. condition d’une préfecture. en enseignants sous
intra-préfecture Nécessité d’une Gestion de amélioration de la condition d’une
meilleure que la amélioration de l’allocation intra- Nécessité d’une préfectures à doter en gestion intra- Préfectures à doter en amélioration de la
moyenne, à conserver. la gestion intra- préfecture meilleure amélioration de la seconde priorité préfecture première priorité gestion intra-
préfecture que la moyenne, à gestion intra- préfecture
conserver. préfecture
Le Système Éducatif Tchadien 199
Pour résumer, les préfectures ont été classées suivant un arbre en fonction du taux d’en-
cadrement, de la proportion d’enseignants communautaires et du degré de cohérence dans
l’allocation des enseignants (cf graphique IV.A.1).
Dans un souci d’efficience (maximiser l’utilisation des ressources en rationalisant l’allo-
cation) et d’équité (donner des conditions de scolarisations similaires à tous les collégiens
tchadiens), il sera donc important de prévoir des activités de déploiement/redéploiement des
enseignants à la fois bien structurées et conduites avec ténacité sur plusieurs années pour
améliorer cette situation.
Le système éducatif Tchadien fait partie de la série des documents de travail de la
Banque mondiale. Ces documents sont publiés pour diffuser les travaux de
recherche de la Banque mondiale et contribuer au débat public.
Cette étude sur le secteur de l’éducation au Tchad s’ajoute à la liste croissante des
Rapports d’Etat des Systèmes Educatifs Nationaux (RESEN) que la Banque a soute-
nu dans la Région Afrique. Comme dans les rapports similaires, le RESEN pour le
Tchad est le produit de la collaboration entre une équipe de la Banque mondiale, une
équipe nationale composée de cadre du Ministère de l’Education et d’autres minis-
tères partenaires aussi bien que les membres de la communauté de développement
local. Le Pôle de Dakar d’Analyse Sectorielle (UNESCO-BREDA) a également eu une
contribution significative. Le rapport est destiné à établir une photographie exacte
de l’état actuel de l’éducation au Tchad, et donc d’offrir aux décideurs locaux et à
leurs partenaires au développement une base analytique solide pour instruire le dia-
logue politique et le processus de prise de décision.
Un dialogue étendu qui engage tous les acteurs pertinents de la société sur les ques-
tions de la politique éducative est très important au moment où le Tchad, comme
d’autres pays sub-sahariens, s’efforcent d’atteindre les objectifs de Développement
du Millénaire (ODMs). Deux des huit ODMs sont directement reliés à l’éducation :
parvenir à l’éducation primaire universelle et promouvoir l’égalité du genre en élimi-
nant les disparités de genre dans l’éducation primaire et secondaire La performance
du Tchad est relativement médiocre par rapport à la plupart des indicateurs ODMs.
L’année butoir 2015 est encore assez éloignée pour permettre aux politiques – entre-
prises aujourd’hui- d’avoir un impact, mais aussi assez proche pour impartir un sen-
timent d’urgence pour l’action. Ce RESEN arrive à un moment opportun. Grâce aux
détails qu’il offre, les décideurs et leurs interlocuteurs disposent d’une richesse de
connaissances exceptionnelles sur lesquelles ils peuvent engager un dialogue ins-
truit et organiser des débats sur l’avenir de l’éducation au Tchad.
ISBN 0-8213-7135-5
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