2008 Dumay A
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2008 Dumay A
Contact : [email protected]
LIENS
THESE
Présentée par :
Alexis DUMAY
Je dois dire un grand merci à tous les membres du laboratoire pour avoir plus ou moins
contribué à ce travail, en particulier : Sylvie Migot pour la formation au MET ainsi que sa
disponibilité, Pascal Martin pour ses conseils techniques avisés, Daniel Perrin, Christine
Bellouard, Jean-Marie Hiver.
Finalement, ce sont mes proches que je voudrais mettre en avant. Mes parents et mes
frères et sœurs ont étés présents pendant ces trois ans et m'ont encouragé, je les remercie
grandement. Et surtout merci à Fanny pour sa patience et son soutien sans faille.
1
2
SOMMAIRE
! " ) (
1.6.1 Cristallographie du maclage dans les structures CFC ................................................25
1.6.2 Genèse des macles............................................................................................................25
1.6.3 Activation séquentielle des macles et taux d’écrouissage .......................................27
* ! +) %
1.7.1 Martensite ε ..........................................................................................................................30
1.7.2 Martensite α’........................................................................................................................32
, - .
1.8.1 Influence sur les modules d'élasticité..............................................................................33
1.8.2 Modèle de prévision de la température de Néel pour l’austénite ..........................34
/ 0 1 2 3 4
%
5)
! "
+
2.2.1 Compositions visées ...........................................................................................................54
2.2.2 Analyses chimiques ............................................................................................................56
2.2.3 Caractérisation de la microstructure avant déformation ..........................................58
2 - .
2.3.1 Mesure de susceptibilité magnétique ............................................................................62
0 3
0
1 ,
*
2.6.1 Série X20,622 ..........................................................................................................................72
2.6.2 Série X20,422 ..........................................................................................................................79
* 0 3 3 4 " 3 (
6%7 68 ,
3
, 9 2 3 ,
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3.2.1 Structure du carbure de vanadium ..............................................................................100
3.2.2 Contrainte induite par des précipités cohérents .......................................................101
3.2.3 Taille critique de perte de cohérence .........................................................................103
7 ) %*
0 - :
3.4.1 Contrastes de déformation ............................................................................................111
3.4.2 Relation d'orientation précipités / matrice..................................................................116
3.4.3 Macles de recuit et précipitation ..................................................................................119
3.4.4 Discussion............................................................................................................................120
3
3.5.1 Essai de traction ................................................................................................................121
3.5.2 Microscopie électronique à transmission.....................................................................125
) 3 ; 1 /
3.6.1 Principe du modèle ..........................................................................................................129
3.6.2 Comparaison des modèles numérique et analytique ..............................................131
3.6.3 Influence de la forme des précipités sur le stockage de l’hydrogène ..................132
*
, 5)
' () &
/
) 3 %
4.2.1 Introduction à l'élaboration d'un acier biphasé : similitude avec Ni/TiC...............140
4.2.2 Expérience préliminaire : FeMnC + TiC .........................................................................143
4.2.3 Compositions choisies ......................................................................................................145
4.2.4 Caractérisation de la microstructure à l’état brut de coulée .................................146
4.2.5 Caractérisation de la microstructure à l’état laminé à chaud ...............................149
4.2.6 Observation de la microstructure intragranulaire au MET ........................................154
4.2.7 Discussion............................................................................................................................163
4.2.8 Particules TiC intragranulaires.........................................................................................164
4
Introduction
5
6
Introduction
Les aciers TWIP, pour TWinning Induced Plasticity, font partie de ces actions de
recherche pour le développement d’aciers à hautes performances. Cette famille de produit est
en cours d’industrialisation sous le nom commercial X-IP 1000TM. Le développement de ces
aciers fait l’objet d’un accord de collaboration avec TKS depuis février 2005 et les
développeurs de ce produit sont Scott C., Cugy P., Roscini M., Dez A.E. et Cornette D. En
parallèle, des travaux de compréhension plus fondamentaux sont entrepris en collaboration
avec le LPM, depuis la thèse de S. Allain, présentée en 2004. Ces aciers atteignent une
résistance supérieure à 1000 MPa pour des allongements supérieurs à 50%. Les éléments les
constituants sont fer-manganèse-carbone plus des éléments micro-alliés, à haute teneur en
manganèse ; ils ont la particularité d’être austénitique à température ambiante. Ces aciers
austénitiques se caractérisent par une très faible énergie de faute d’empilement (EFE). Elle
contrôle les mécanismes de déformation et la nuance Fe 22%Mn 0,6%C (massique), ayant
une EFE proche de 20 mJ/m², est optimale en terme de compromis allongement/résistance
mécanique. Les mécanismes de la plasticité de cet acier sont particuliers. En effet, en plus du
glissement des dislocations, la faible EFE implique la présence de dislocations dissociées et la
formation de macles mécaniques de façon dynamique au cours de la déformation.
7
Les propriétés mécaniques optimales d'un matériau pour l'industrie automobile sont :
- une résistance mécanique élevée, afin de réduire l’épaisseur des pièces à tenue mécanique
égale,
- un fort module d'Young, qui limite le retour élastique lors de la mise en forme et augmente
la rigidité spécifique,
- de forts allongements à rupture et taux d’écrouissage, qui améliorent l'emboutissabilité et
l'absorption d’énergie de pièces de renfort en cas de choc,
- une limite d’élasticité élevée après mise en forme, pour les parties destinées à l’anti-
intrusion.
Ce sont non seulement les propriétés mécaniques mais aussi la densité, le recyclage et la tenue
dans le temps qui doivent être pris en compte dans l’ « alloy-design ». Les développeurs
produit se sont portés vers l’ajout d’éléments d’alliage afin d’améliorer les propriétés de ces
aciers. L’objectif du présent travail est d’étudier l’influence de l’ajout d’éléments d’alliage sur
ces propriétés et d’identifier les phénomènes physiques expliquant celle-ci. Trois pistes
différentes ont été étudiées (figure 0-1) : du cuivre en solution solide, du vanadium précipité
sous forme de carbures intragranulaires et un composite carbure de titane à matrice FeMnC.
Figure 0-1 Schéma de présentation des trois matériaux quaternaires étudiés et des propriétés qu’on
souhaite améliorer pour chacun des trois.
Le chapitre 1 présente l’état actuel des connaissances sur le ternaire FeMnC dont nous
avons besoin pour l’étude des quaternaires au cuivre, vanadium et titane. Les propriétés
8
mécaniques de la nuance de référence Fe22Mn0,6C en traction sont présentées et discutées en
fonction de l'EFE et des modes de déformation activés : glissement, maclage mécanique et
transformation martensitique ε. Nous rappelons ensuite l'influence des propriétés magnétiques
sur les modules élastiques. Enfin, deux modèles de prévision de la température de transition
de Néel et de l’EFE en fonction de la composition sont présentés pour plusieurs éléments
d'alliage.
Nous étudions le cuivre comme élément modèle pour modifier la solution solide dans
le système FeMnC. Le chapitre 2 présente les nombreuses expériences réalisées dans
l’objectif de mesurer l’influence de cet élément d’alliage sur les propriétés physiques :
caractérisation des phases en présence avant et après déformation, mesure des propriétés
mécaniques et mesure des propriétés magnétiques. Les résultats de ces mesures sont par la
suite interprétés en partie à l’aide du modèle d’EFE présenté au chapitre 1. L’étude de
l’éventuelle précipitation du cuivre conclut ce chapitre.
9
10
Chapitre 1
Propriétés mécaniques et physiques des
FeMnC
11
12
1 Propriétés mécaniques et physiques des FeMnC
1.1 Introduction
Les aciers à effet TWIP -pour TWinning Induced Plasticity- ont des performances en
rupture avec le compromis classique allongement/résistance maximale en traction pour les
aciers (figure 1-1). Ces aciers sont de bons candidats pour réaliser des pièces de structure
embouties dans l’industrie automobile. Ces aciers sont connus depuis Sir Robert Hadfield
(1859 - 1940) et ont fait l’objet de nombreuses études, en particulier pour la réalisation de
pièces de forge. L’adaptation de ce principe aux produits plats est plus récente et anime la
communauté scientifique depuis les travaux de L. Rémy [1-1 Rémy 75] principalement. On
notera comme autres documents de référence sur le sujet les thèses de S. Allain [1-2 Allain
04] et L. Bracke [1-3 Bracke 07], ainsi que les publications de Karaman [1-4 Karaman 00-01],
Vercammen [1-5 Vercammen et al. 02] et Schumann [1-6 Schumann 72]. Nous proposons ici
une simple revue des concepts de base utiles dans la suite de l’étude.
Emboutis à chaud
Multiphasés
TRIP TWIP
Dual Phase
Rephosphoré, BH
HSLA
Extra-doux
Figure 1-1 Diagramme allongement/résistance en traction pour les différentes gammes d'aciers. Les aciers
TWIP ont un comportement en rupture avec le comportement classique.
La nuance à 22% Mn et 0,6%C (massique) présente, pour une taille de grain de 3µm,
une résistance mécanique supérieure à 1000 MPa pour un allongement à rupture supérieur à
13
50%. Cette nuance a été longuement étudiée et s’avère être un optimum en terme de
performances mécaniques à température ambiante. Elle servira de référence pour évaluer les
autres compositions étudiées dans cette étude. La connaissance des paramètres et propriétés
importantes sera un support à l’analyse des résultats observés pour les aciers FeMnCX.
Le diagramme de Schumann (figure 1-2, [1-6 Schumann 72]) représente les phases en
présence dans le système FeMnC après trempe à température ambiante en fonction de la
composition. Les droites délimitant les différents domaines ont été déterminées par Schumann
à partir de ses résultats expérimentaux de résultats issus de la littérature. Le manganèse en
substitution et le carbone en insertion sont gammagènes, c’est à dire qu’ils stabilisent la phase
austénitique γ (de structure cubique à faces centrées CFC). A plus faible teneur en manganèse
ou en carbone apparaissent des phases de trempe martensitiques ε (de structure hexagonale
compacte HC) puis α’ (de structure quadratique centrée QC, proche de la structure de la
ferrite α cubique centrée CC). Ces phases apparaissent durant la trempe lorsque la température
devient inférieure à une température caractéristique notée Ms (martensite start) pour la
14
martensite α' et Es (ε-martensite start) pour la phase ε. Dans le domaine de stabilité de
l'austénite, Ms et Es sont en dessous de la température ambiante.
La nuance à Fe 22Mn 0,6C a été choisie pour être entièrement austénitique tout en
évitant la précipitation de carbures (Fe,Mn)3C (cémentite) à haute température au cours de
l’élaboration.
Figure 1-2 Diagramme des phases présentes après trempe à température ambiante en fonction des teneurs
en Mn et C (teneurs en % massique), déterminé par Schumann [1-6 Schumann 72]. Le domaine de
précipitation de la cémentite à 700°C est également indiqué.
La nuance Fe 22Mn 0,6C a été optimisée vis-à-vis de l’effet TWIP tout en évitant la
formation de martensite ε au cours de la déformation en traction. La compétition entre le
15
glissement et le maclage ou les transformations martensitiques donne à ces aciers leurs
excellentes caractéristiques mécaniques.
Figure 1-3 Diagramme des phases présentes après trempe puis mise en forme à température ambiante
dans le système FeMnC (teneurs en % massique) , déterminé par Schumann [1-6 Schumann 72]. Le
domaine où se produit le maclage est indiqué. Les domaines de la figure 1-2 sont rappelés en pointillés.
16
a)
b)
Figure 1-4 Courbes a) conventionnelles et b) rationnelles de traction pour un échantillon Fe22Mn0,6C de
taille de grains 3 µm (d’après [1-2 Allain 04]).
17
synthétisées par Allain [1-2 Allain 04]. Quels que soient les modes de déformation activés, le
maclage et les transformations martensitiques ne se déclenchent qu'après une certaine
déformation, de sorte que la limite d'élasticité relative est caractéristique du glissement seul.
Au-dessus de 300K, l'activation thermique du glissement est faible et ne dépend pas de la
teneur en carbone. En dessous de 300K, le glissement est fortement activé thermiquement
avec une pente qui augmente avec la teneur en carbone [1-2 Allain 04][1-7 Tomota et al. 87].
Figure 1-5 Evolution de la limite d'élasticité de différentes nuances FeMnC en fonction de la température
(d'après une synthèse de [1-2 Allain 04]). Les courbes ont été normalisées en soustrayant la valeur à
température ambiante afin d'éliminer les différences de microstructure initiale.
ii) la taille de grain. La loi de Hall et Petch traduit le fait qu’un polycristal a une limite
d’élasticité macroscopique σe plus élevée qu’un monocristal du fait de la présence des
joints de grains qui bloquent le glissement des dislocations :
a
σe = σ0 + 1.3-1
d
18
Les joints de macles de recuit sont comptés par convention comme des joints de grains dans la
mesure de la taille de grains.
d ln(σ )
n= 1.3-2
d ln(ε )
Figure 1-6 Coefficient d'écrouissage instantané en fonction de la déformation pour l'acier Fe22Mn0,6C de
taille de grains 3µm aux différentes températures (d'après [1-2 Allain 04]).
19
Il caractérise en particulier la capacité d’un matériau à durcir suffisamment pour
retarder l’apparition d’une striction en traction. Selon le critère de Considère, l'apparition de
la striction correspond au sommet de la courbe conventionnelle de traction et s’écrit :
ε dσ
ε= = n(ε ) . 1.3-3
σ dε
La droite n = ε a été reportée sur la figure 1-6. Pour toutes les températures, la rupture
ou l'apparition d'une striction est en bon accord avec le critère de Considère. A haute
température (> 200°C), il y a une striction diffuse, accompagnée d'une réduction locale de la
section des éprouvettes. A basse et moyenne température, la rupture intervient par striction
localisée sans réduction de section.
Allain S. a montré que cet acier avait une sensibilité à la vitesse de déformation
légèrement négative à température ambiante, qui s'accompagne d'instabilités de déformation
plastique visibles sur les courbes de la figure 1-4. Cette sensibilité négative explique que la
rupture ductile intervienne dès le critère de Considère à cette température. L’origine de ces
instabilités et leur rôle dans les mécanismes de durcissement est encore controversé dans la
littérature. Allain et al. proposent les conclusions suivantes grâce à des expériences originales
[1-8 Allain et al. 08]. Les instabilités observées présentent les principales caractéristiques
d’un processus de vieillissement dynamique (dynamical strain ageing) :
• elles augmentent avec la teneur en atomes de carbone interstitiels,
• à faible vitesse de déformation, on observe à température ambiante des instabilités de
type A (grands décrochements associés à la propagation quasi-continue de bandes de
localisation de la déformation) et une transition vers des instabilités de type B
(décrochements réguliers associés à la formation de bandes de localisation statiques
corrélées) à haute température (>473K),
• la déformation critique d’apparition des instabilités de type A augmente avec la vitesse
de déformation et lorsque la température diminue,
• il y a corrélation entre l’existence de ces instabilités et la propagation de bandes de
déformation localisées le long de l’éprouvette de traction pendant l’essai.
Cependant, une analyse thermique du phénomène révèle une très faible énergie d’activation
en comparaison de l’énergie d’activation de la diffusion du carbone.
20
Les instabilités observées sur les courbes sont, d’après Dastur & Leslie pour des
aciers Hadfield (Fe-Mn-C austénitiques à forte teneur en manganèse), causées par l’épinglage
de dislocations aux dipôles Mn-C [1-9 Dastur & Lesli 81]. Les données thermodynamiques
montrent que le manganèse réduit l’activité du carbone dans l’austénite sans former de
carbures. La formation de dipôles Mn-C est donc favorable énergétiquement et Scott & al.,
par ses expériences en Electron Energy Loss Spectroscopy (EELS) sur des aciers Fe-22Mn-
0,7C montrent la co-ségrégation du manganèse et du carbone [1-10 Scott & al. 05].
La contribution de ce mécanisme au durcissement est limitée et reste très secondaire par
rapport à la contribution du maclage. Ces instabilités plastiques n’induisent pas de défauts
d’aspect de surface malgré les bandes de localisation observées en cours de déformation.
L’EFE augmente avec la température, à composition fixe [1-1 Rémy 75]. Cette
augmentation influe sur les mécanismes de déformation et donc sur les propriétés mécaniques
des aciers FeMnC. A température, et donc à EFE, décroissantes, ces mécanismes sont :
- le glissement de dislocations parfaites,
- le glissement de dislocations parfaites et dissociées (>200°C voir 1.5),
- le maclage mécanique et le glissement de dislocations (température ambiante voir 1.6),
- le maclage mécanique, la transformation martensitique et le glissement de dislocations
(voir 1.7),
- la transformation martensitique et le glissement de dislocations (activé thermiquement
dans Fe22Mn0,6C).
21
1.4 Energie de faute d'empilement
Dans une structure CFC soumise à une déformation plastique, les dislocations
parfaites glissent dans les plans denses de type {111} et ont un vecteur de Bürgers de type
a/2<110>. Les dislocations parfaites peuvent se dissocier dans leur plan de glissement en
partielles de Shockley glissiles afin de minimiser l’énergie de ligne totale, selon une réaction
du type :
a
[011](111) → a [121](111) + a 112 (111)
[ ]
2 6 6
Il se crée entre les deux partielles un défaut plan appelé défaut d’empilement ou faute
d’empilement. L’énergie par unité de surface associée à ce défaut est l’énergie de faute
d’empilement (EFE). La création de ce défaut est énergétiquement défavorable et limite la
dissociation des dislocations. Les partielles de tête et de queue sont donc soumises à deux
forces opposées : la force élastique de répulsion entre elles et une force de rappel due à la
création de la faute d’empilement. La distance de dissociation est définie par l’équilibre de ces
deux forces [1-11 Friedel 64][1-12 Byun 03] :
2
µ ⋅ b112
ζ≈ 1.4-1
4πΓ
a
où Г est l’EFE (J/m²), le module isotrope de cisaillement (Pa) et b112 = la norme du
6
vecteur de Burgers d’une partielle de Shockley (m), avec a le paramètre de maille de
l’austénite (m). Lorsque Г/ b est élevé, la distance (exprimée en b112) est faible et les
dislocations sont peu dissociées. Pour Г/ b faible, les fautes d’empilement sont étendues sur
les plans {111}.
22
position à l’autre, par exemple A devient B ou C. Il en résulte qu’un défaut d’empilement
dans un cristal parfait ABCABC correspond soit à un plan manquant localement (on parle
alors de défaut intrinsèque figure 1-7a) soit à un plan supplémentaire (on parle de défaut
extrinsèque figure 1-7b). Un défaut intrinsèque se déplace sur un seul plan tandis qu’un défaut
extrinsèque se déplace sur deux plans [1-13 Olson et Cohen 76].
ABCABCABCA ABCABCABCA
a) b)
ABCACABCAB ABCACBCABC
Figure 1-7 Représentation schématique du réarrangement des plans compacts après le passage de
dislocations partielles traînant une faute d'empilement (a) intrinsèque et (b) extrinsèque. La faute
d’empilement est représentée par les lignes en pointillés.
Dans la nuance Fe22Mn0,6C à haute température, l’EFE est élevée et les dislocations
sont parfaites ou faiblement dissociées. La déformation se fait uniquement par glissement
dans les plans denses. Les systèmes de glissement dans la structure CFC sont de type {111}
<110>. Il existe donc 24 systèmes de glissement possibles.
σ i = Mαµb ρ 1.5-1
23
où M = 3,06 est le facteur de Taylor qui prend en compte une orientation moyenne des grains
et les autres paramètres sont les mêmes que ceux introduits dans la loi de Hall et Petch.
Figure 1-8 Micrographie en champ sombre obtenue sur un échantillon Fe22Mn0,6C déformé en traction à
673 K. Structure de dislocations parfaites en forte densité. D’après [1-2 Allain 04].
24
1.6.1 Cristallographie du maclage dans les structures CFC
Une macle mécanique dans une structure CFC est créée par le passage de dislocations
partielles de Shockley identiques traînant des fautes d'empilement intrinsèques tous les plans
atomiques {111}. Une macle est une lamelle de structure CFC ayant une symétrie par rapport
au plan de type {111} (A, B ou C) frontière entre la matrice et la macle (appelé plan de
macle). Elle produit un glissement égal à 1/ 2 . La figure 1-9 présente une coupe d’une
macle selon un plan de type {110}, plan contenant le vecteur de Bürgers des partielles.
A
C
B
A
B
*
C macle
A
B
A
C
B
A
Figure 1-9 Représentation selon une coupe {110} de l’empilement ABC des plans denses {111} dans un
cristal CFC et d'une macle produite par le passage de 4 partielles de Shockley identiques. Les fautes
d'empilement successives reconstituent une structure CFC miroir.
De nombreux mécanismes à l’échelle des dislocations ont été proposés pour expliquer
la germination et la croissance des macles mécaniques pour les matériaux CFC, mais les
différences de matériaux et de conditions de sollicitation ne permettent pas de conclure de
façon unanime. Deux grandes familles de mécanismes sont présentes dans la littérature :
- les mécanismes de pôle, dans lesquels une macle est produite par une seule et unique
dislocation partielle tournant autour d’une dislocation vis de la forêt en émettant à
chaque tour une partielle sur un plan différent grâce au caractère vis de la dislocation
pôle (figure 1-10a) [1-16 Venables 74][1-15 Venables 64] [1-17 Song & Gray
95][1-18 Weertman & Weertman 70][1-19 Azzaz et al. 96]. Ce type de modèle
n’explique pas la rapidité de développement d’une macle. Différents auteurs ont par
25
ailleurs critiqué une configuration trop particulière des dislocations et des
dissociations énergétiquement défavorables pour ces modèles [1-20 Cohen &
Weertman 63a][1-21 Cohen & Weertman 63b][1-22 Venables 63],
- les mécanismes basés sur la dissociation des dislocations dans un plan dévié en tête
d'empilement sous l'action des fortes concentrations de contrainte (figure 1-10b). [1-20
Cohen & Weertman 63a][1-22 Venables 63][1-23 Mori & Fujita 80][1-24 Fujita &
Ueda 72][1-25 Christian & Mahajan 95a].
Figure 1-10 Formation d'une macle selon a) les mécanismes de pôle, b) les mécanismes de dissociation
dans un plan dévié en tête d'empilement.
Les auteurs s’accordent cependant sur le fait que les macles mécaniques n’apparaissent
qu’au dessus d’une certaine valeur critique de contrainte durant la déformation des matériaux
CFC. Cette contrainte critique de maclage dépend des paramètres thermomécaniques tels que
le type de chargement ou la température [1-26 Christian & Mahajan 95b][1-27 Meyers et al.
01][1-28 Bouaziz et al. 08]. Les expériences menées montrent qu’une faible EFE est une
condition nécessaire mais non suffisante pour activer le maclage mécanique dans les alliages
austénitiques.
26
correspond donc à la formation de la première partielle, i.e. à la contrainte nécessaire au
développement d’une boucle de dislocation de Shockley traînant une faute
d’empilement [1-29 Franciosi et al. 93][1-30 Lubenets et al. 85][1-31 Christian 69]. Elle est
d’autant plus faible que l’EFE est faible :
Γ b
τ C −int = + 112 1.6-1
b112 RC
où RC est le rayon critique d’émission de la boucle, qui dépend du mécanisme considéré pour
la création du germe.
a)
27
b)
Figure 1-11 a) Micrographie optique après attaque électrolytique sur la nuance Fe22Mn0,6C de taille de
grains 20 µm déformé de 26% en traction à température ambiante, d’après [1-2 Allain 04] b) Image MET
en champ sombre g=<200> de la nuance FeMnVC étudiée au chapitre 3 après rupture, d'après cette
étude ; sélection des deux systèmes de macles mécaniques sécants en condition de diffraction.
28
a)
b)
c)
Figure 1-12 a) Évolution du libre parcours moyen des dislocations en fonction de la déformation vraie.
Mesure réalisée en microscopie optique après attaque électrolytique, selon la méthode des interceptes, en
prenant en compte les joints de grains et les macles. b) Evolution du coefficient d’écrouissage instantané
en fonction de la déformation vraie pour la même nuance. c) Évolution de la proportion de grains non
maclés, ou maclés avec 1 ou 2 systèmes de maclage activés. D’après [1-2 Allain 04].
29
Par une étude statistique en EBSD, Allain et Bracke [1-2 Allain 04][1-3 Bracke 07]
ont montré que les systèmes de maclage suivaient également une loi de Schmid. Le facteur de
Schmid est calculé à partir des vecteurs de Bürgers des dislocations partielles. Pour tout
système de maclage, il existe un système de glissement dans un plan parallèle ayant un facteur
de Schmid proche (les directions de glissement ne différant alors que de 30°), de sorte que
dans la majorité des cas, le premier système de maclage activé est parallèle au système de
glissement primaire. A l’activation du premier système de maclage, le libre parcours moyen
des dislocations produisant la majorité de la déformation plastique diminue donc peu en
moyenne sur tous les grains [1-2 Allain 04]. Le système de maclage primaire se développe et
est bloqué aux joints de grains, ce qui créé un champ de contrainte interne en retour. Ce
champ de contrainte relaxe les contraintes appliquées de sorte qu’on peut parvenir à une
saturation du premier système de maclage.
1.7.1 Martensite ε
30
participe à la déformation. Allain a montré qu'elle apparaissait pour une valeur de l"EFE
inférieure à 18mJ/m² dans FeMnC.
Figure 1-13 Micrographie en champ sombre d’une éprouvette déformée à rupture à 77 K. les deux
variants de martensite ε (S1 et S2) sont en conditions de diffraction. D’après [1-2 Allain 04].
31
faire passer une partielle tous les plans plutôt que tout les deux plans. C’est pourquoi la
martensite ε se forme à EFE et donc à température inférieure [1-34 Blanc 90][1-37 Allain et
al. 04b].
C
B
A
B
A martensite ε
B
A
B
A
C
B
A
Figure 1-14 Représentation selon une coupe {110} de l’austénite des plans denses {111} et d’une latte de
martensite ε produite par le passage de trois partielles de Shockley identiques dans un cristal CFC.
1.7.2 Martensite α’
32
77]. Dans les aciers inoxydables austénitiques, la relation d’orientation observée est [1-34
Blanc 90] :
La martensite α’ est une phase très dure qui provoque des concentrations de
contraintes importantes autour des îlots de martensite. Cette localisation de la contrainte est
susceptible de favoriser la rupture par localisation de l'endommagement. La martensite α’ est
donc une phase fragilisante pour le matériau. Elle est ferromagnétique à température
ambiante, contrairement à l’austénite γ et à la martensite ε (qui sont paramagnétiques ou
antiferromagnétiques). Il est donc possible de la détecter à l’aide d’un simple test
d’aimantation. Cette martensite n’a pas été observée dans la nuance Fe22Mn0,6C.
L'ordre des spins atomiques à l'échelle locale n'a pas seulement une influence sur les
propriétés magnétiques mais aussi sur les propriétés élastiques des matériaux. L'évolution du
module de cisaillement autour de la température de Néel pour la nuance Fe22Mn0,6C est
présentée figure 1-15. Ces mesures ont étés réalisées grâce à une analyse DMTA (Differencial
Mechanical Thermal Analysis) dont le principe est de soumettre un échantillon sous forme de
lamelle à une oscillation constante et de mesurer la réponse élastique à température variable.
On observe une anomalie de modules élastiques à la transition magnétique, le maximum étant
atteint environ 50°C au-dessus de TN. Il en résulte un faible module d’Young pour un acier à
température ambiante, d'environ 160 GPa.
33
Figure 1-15 Évolution du module de cisaillement de la nuance Fe22Mn0,6C en fonction de la température.
D’après [1-2 Allain 04].
où xMn est la fraction atomique de manganèse et TNε en K. Ce qui donne TNε = 128 K pour
Fe22Mn0,6C. Cette transition est donc difficile à observer.
34
révèle une forte interaction carbone-manganèse. Nous avons donc remplacé le terme simple
du carbone par un terme croisé Mn/C. Cette nouvelle formulation permet d’étendre le
domaine de validité à un intervalle de 10 à 45% atomiques de manganèse. Les éléments
supplémentaires sont insérés simplement par des effets linéaires en solution solide.
L’ajustement des paramètres a été réalisé par la méthode des moindres carrés.
avec xMn, xC, xCu, xCr, xAl, xSi, les fractions atomiques des éléments concernés et TN en K.
La figure 1-16 présente les écarts entre le modèle et les données expérimentales. La
prévision est particulièrement performante pour les basses températures de Néel, inférieures à
350K.
Figure 1-16 Comparaison des prévisions du modèle et de la mesure des températures de Néel pour les
aciers FeMnXC (X = Cr, Al, Si) et les aciers FeMnCuC (22-0,6-X, X-0,6-2 et X-0,4-2 du chapitre 2). La
droite représente TN modèle = TN expérimental.
35
données expérimentales concernant des quaternaires FeMnTiC ne nous a pas permis de
prédire l’influence du titane sur la température de Néel.
Figure 1-17 Variation de la température de Néel par ajout des éléments Cu, Si, Al et Cr (% massique)
en faible quantité dans un acier Fe22Mn0,6C.
Nous avons montré que l’EFE avait une influence sur la contrainte critique
d’apparition du maclage. Or les matériaux FeMnC étudiés tirent leurs propriétés mécaniques
de l'écrouissage provoqué par la cinétique de maclage. Dans une démarche d’ « alloy-design »
il est essentiel de pouvoir estimer l’EFE pour anticiper l'effet d'un élément d'alliage sur le
comportement mécanique. Nous avons élaboré un modèle thermochimique de prévision de
l’EFE. La gamme de compositions pour laquelle ce modèle thermochimique a été réalisé est :
Mn entre 10 et 40%, C entre 0 et 1% et Cr, Si, Al, Cu et Ti entre 0 et 5% (massique).
Olson et Cohen [1-48 Hirth 1970] proposent un concept fondamental pour le calcul de
l’EFE. Une faute d’empilement peut être vue comme deux plans de martensite ε hexagonale
36
compacte dans la matrice austénitique CFC. L’EFE qui en résulte est la somme de l’énergie
nécessaire à la formation de ces deux plans et de l’énergie de l’interface créée :
γ
γ →ε
Γ = 2ρ∆G m + 2σ ε
1.9-1
où ρ est la densité surfacique molaire d’atomes dans les plans {111}, G mγ→ε l’enthalpie libre
γ
molaire de la transformation γ → ε, et σ ε l’énergie par unité de surface de l’interface {111}
γ / ε.
Selon le modèle élaboré pour le système FeMnC [1-2 Allain 04] l’enthalpie libre
d’une phase φ (ε ou γ) prend en compte deux termes :
- un terme chimique,
- un terme magnétique dans lequel intervient la température de Néel.
G γ→ε = G FeMnX
γ →ε
+ x c G FeMnX/C
γ →ε
+ G mag
γ →ε
1.9-3
G FeMnX
γ →ε
est la contribution des éléments en substitution sur le réseau CFC. Elle est
estimée selon le modèle des solutions régulières. Le modèle est appliqué à une solution solide
FeMn comportant les éléments X = Cu, Cr, Al, Si et Ti.
G FeMnX/C
γ →ε
exprime le fait que l’effet du carbone en insertion est simplement introduit
comme une perturbation du terme précédent, proportionnelle à la teneur en carbone.
G mag
γ →ε
est la contribution magnétique, qui dépend de l’état paramagnétique ou
37
Le premier terme G FeMnX
γ →ε
du modèle correspond à la variation des enthalpies libres
molaires des éléments dans chaque phase ainsi que des interactions entre éléments pendant la
transformation :
G FeMnX
γ →ε
= ∑ x i G iγ →ε + ∑ x n x m G γnm→ε 1.9-4
i n, m
G FeMn
γ →ε
( ) ( )
= Lε − Lγ + M ε − M γ (x Fe − x Mn ) 1.9-5
G FeMnX
γ →ε
= ∑ x i G iγ →ε + x Fe x Mn [C + D(x Fe − x Mn )] + x Fe x Si [E + F(x Fe − x Si )] 1.9-6
i
avec G iγ→ε = A i + Bi T pour i = Fe, Mn, Cu, Cr, Al, Si et Ti et xi la fraction molaire de
l’élément i et T la température.
38
a
G FeMnX/C
γ →ε
=
xC
( )
1 − e − bx C + cx Mn 1.9-7
G mag
γ →ε
= G εm − G γm 1.9-8
T
( ϕ
)
avec G m = RT ⋅ ln 1 + β ⋅ f
ϕ ϕ
T
ϕ
ϕ = γ, ε 1.9-9
N
où R est la constante de des gaz parfaits, βφ le moment magnétique de la phase φ calculé par
une loi de mélange (exprimé en µB, le magnéton de Bohr), TNφ la température de Néel de la
phase φ, et fφ une fonction polynomiale reprise par exemple par [1-50 Li & Hsu 97].
Cotes et al. [1-36 Cotes 95][1-52 Cotes et al. 98] ont proposé d’écrire βγ de manière
empirique :
avec β Fe et β Mn les termes valables pour les corps purs proposés par Huang [1-43 Huang 89]
et β FeMn le terme d’interaction, ajustable. Il a été pris égal à 0,64, valeur choisie par Allain
T −1 T 3 T 9 T 15
79 ϕ ϕ ϕ 1.9-11
Tϕ T T
T
f ϕ ϕ = 1 −
1 N + 474 1
1
N + N + TN
−
TN D mag 140p mag 497 p mag 6 135 600
39
−5 −15 −25
T T
T
T Tϕ Tϕ Tϕ
Si
T
> 1 alors : f ϕ =− 1 N + N +
N
TNϕ Tϕ D mag 10 315 1500
N
avec pmag = 0,28 et Dmag = 2,34 pour les deux phases compactes γ et ε.
Les paramètres du modèle peuvent alors être ajustés sur les mesures de ces deux
températures Es et As pour différentes compositions de sorte à obtenir des enthalpies de
transformation proches de ces valeurs théoriques (As : G mγ→ε = 80 J/mol et Es : G mγ→ε = -
100 J/mol). Une large base de données est donc nécessaire pour inclure les différents éléments
d’alliage au modèle : [1-6 Schumann 72][1-1 Rémy 75][1-47 Chen et al. 99][1-53 Ishida &
Nishizawa 74][1-54 Baik et al. 97][1-55 Jun et al. 99][1-56 Jun & Choi 98][1-57 Lee et al.
97][1-58 Tomota et al. 98][1-59 Dai et al. 04][1-60 Jiang et al. 95]. Le tableau 1-1 indique les
paramètres du modèle, ajustés sur ces données expérimentales par une méthode des moindres
carrés.
40
Densité surfacique 4
ρ= 2 2,94.10-5 m-2
dans les plans {111} aγ Ν 3
Energie de
8 mJ/m²
γ
l’interface γ/ε
σ ε
a 1246
Paramètres lié au
b -24,29
carbone en insertion
c -17175
Le calcul de l’EFE donne une valeur de 22 mJ/m² pour la nuance Fe22Mn0,6C ce qui
correspond à la valeur calculée par S. Allain. Sur la figure 1-18 est représentée l’influence de
quelques pourcents d’éléments d’alliage (en %massique) sur une base Fe22Mn0,6C. Petrov
[1-61 Petrov 03] a mesuré l’EFE par spectrométrie de perte d’énergie des électrons (EELS) et
en a déduit l’influence du chrome sur l’EFE d’aciers FeMnCrC. On constate que ses mesures
sont en bon accord avec les prédictions du modèle thermochimique d’EFE.
41
Ti Al
Cu
Si
Cr
Cr Petrov
Figure 1-18 Influence de la teneur (massique) en éléments d'alliage sur l'EFE d’un acier quaternaire
contenant 22%Mn et 0,6%C calculée par le modèle thermochimique.
1.10 Conclusion
Les aciers austénitiques FeMnC ont une faible EFE et sont métastables. Ils peuvent
être le siège de transformations martensitiques thermiques au cours d'un refroidissement ou
athermiques en cours de déformation. La nuance Fe22Mn0,6C est optimisée pour être 100%
austénitique sans carbures et présentant une forte activité du maclage à température ambiante.
La figure 1-19 présente une synthèse des propriétés mécaniques qui dépendent fortement de la
température :
- les modes de déformation activés dépendent de l'EFE qui augmente avec la
température,
- le glissement est fortement activé thermiquement en dessous de 0°C à cause du
carbone, comme le montre l'évolution de limite d'élasticité.
42
Figure 1-19 Evolution des caractéristiques mécaniques de l'acier Fe22Mn0,6C (taille de grains 3 µm).
D'après [1-2 Allain 04]. Existence de 3 domaines distincts de température selon les mécanismes de
déformation activés.
A haute température (domaine I), l'EFE est élevée et la déformation se produit par
glissement seul. Le durcissement résulte des interactions entre dislocations parfaites. Le taux
d'écrouissage est relativement faible. A température ambiante (domaine II), l'EFE est proche
de 20 mJ/m2. L'activation séquentielle de deux systèmes de maclage selon une loi de Schmid
réduit progressivement le libre parcours moyen des dislocations. Le durcissement qui en
résulte par effet Hall et Petch dynamique s'ajoute à l'écrouissage latent. Le taux d'écrouissage
est optimal, l'allongement maximal et la résistance mécanique élevée. L'EFE contrôle la
cinétique de maclage, via la contrainte critique de formation des macles, et donc l'écrouissage.
A basse température (domaine III), lorsque l'EFE est environ inférieure à 18 mJ/m2, la
formation de martensite ε athermique se substitue au maclage et le glissement est difficile. Le
coefficient d'écrouissage est plus faible, l'allongement diminue et la résistance mécanique est
maximale en raison de l'augmentation de la limite d'élasticité. La martensite ε est
potentiellement fragilisante, mais cet effet ne peut être dissocié de la plus faible mobilité des
dislocations pour expliquer la diminution d'allongement.
43
régression de TN pour différentes compositions dans les systèmes quaternaires FeMnXC (X =
Cu, Cr, Al et Si). Le modèle de prévision de l'EFE en fonction de la température et de la
composition, développé précédemment pour FeMnC, a été étendu aux mêmes systèmes
quaternaires (plus Ti) et paramétré grâce aux données sur les températures de transition Es et
As disponibles dans la littérature. Ces deux outils supplémentaires d'alloy design permettent
d'anticiper l'influence qu'aura l'ajout de ces éléments d'alliages sur les propriétés mécaniques.
44
1.11 Bibliographie
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49
50
Chapitre 2
Influence de l’ajout de cuivre sur les
propriétés physiques du FeMnC
51
52
2 Influence de l’ajout de cuivre sur les propriétés
physiques du FeMnC
2.1 Introduction
Nous avons vu au chapitre 1 que les excellentes propriétés mécaniques des aciers
FeMnC en traction étaient dues à un fort taux d'écrouissage provoqué par l'activation
séquentielle de deux systèmes de maclage. L'EFE est le paramètre qui influence au premier
ordre la cinétique de maclage. D'autre part, les modules élastiques chutent en dessous de la
température de Néel. A température ambiante, la nuance Fe22Mn0,6C a un comportement
plastique optimal, contrairement à son module d'Young qui est faible par rapport celui des
aciers ferritiques. Il est possible de modifier les propriétés mécaniques de ces aciers en
ajoutant certains éléments en solution solide, susceptibles de jouer sur ces deux paramètres.
Dans une démarche d'alloy design, il est nécessaire de prévoir l'influence de ces éléments
d'addition. Des modèles de prévision de l'EFE et de TN développés pour différents éléments
d'addition (Cu, Cr, Al, Si et Ti) ont été présentés.
Nous étudions ici l'influence de l'ajout de cuivre sur les propriétés mécaniques, en
relation avec ces modèles. Le cuivre a été choisi parce qu'il est actuellement un polluant dans
les aciers recyclés par l'industrie automobile. Il est responsable d'un phénomène fragilisant
aux joints de grains, appelé faïençage, qui apparaît au laminage à chaud, notamment dans les
aciers ferritiques. Disposer de nouvelles nuances d'acier dans lesquelles le cuivre est un
élément d'alliage, dont on maîtrise les apports, serait un atout important en terme de maîtrise
des cycles de vie et de recyclage.
53
possible. Cette étude a été menée en collaboration avec les personnes responsables de l’étude
sur les aciers FeMnCuC à Arcelormittal : Olivier Bouaziz et Mohamed Gouné.
Les compositions visées ont été choisies dans l’objectif premier de paramétrer le
modèle d’énergie de faute d’empilement qui a été présenté au chapitre précédent. La
littérature ne fournissant que très peu de données sur le quaternaire FeMnCuC, les teneurs en
manganèse, cuivre et carbone sont variables pour notre étude. Comme nous le verrons, les
nuances ont étés choisies en prenant en compte l’effet gammagène du cuivre, permettant de
réduire la teneur en manganèse ou la teneur en carbone. L’objectif est de garder un alliage
complètement austénitique après laminage à chaud. La notation utilisée dans la suite du
chapitre est la suivante : %Mn-%C-%Cu (massique), par exemple 22-0,6-3 désigne la nuance
contenant 22% de manganèse, 0,6% de carbone et 3% de cuivre et le complément en fer. La
nuance de référence à Fe22Mn0,6C sera notée 22-0,6.
54
Figure 2-1 Diagramme des phases présentes après trempe, en fonction des teneurs en Mn et C (d’après
[2-1 Schumann 72]). Les teneurs en manganèse et carbone visées dans les nuances contenant du cuivre
sont indiquées.
- La série 22-0,6-X est la première série de nuances élaborées par simple ajout de 0, 1,5
et 2,8% de cuivre dans la nuance de référence 22-0,6. Cette nuance est assez éloignée
du domaine de mélange des phases austénite γ et martensite ε, le cuivre gammagène
accentuant cet écart. Une étude préliminaire en dilatomètrie n’a pas permis de
déterminer les températures de début de transformation de l’austénite en martensite ε
(Es) ni de la transformation inverse (As) [2-2 Meyer 04]. Cet échec a été attribué à une
trop grande stabilité de l’austénite pour cette nuance. C’est pourquoi des nuances à
teneurs plus faibles en éléments gammagènes (Mn et C) on été réalisées afin de faire
remonter Es dans la plage de température étudiée en dilatomètrie : jusqu’à -196°C, la
température d’ébullition de l’azote liquide.
- La série X-0,6-2 est une série de nuances de compositions visées 12, 14, 16 et 18% de
manganèse, 0,6% de carbone et 2% de cuivre. Les deux nuances à plus faibles teneurs
en manganèse sont dans le domaine de stabilité de la martensite, ceci afin d’anticiper
l’effet gammagène du cuivre.
- La série X-0,4-2 est une série de nuances de compositions visées 18, 20, 22 et 24% de
manganèse, 0,4% de carbone et 2% de cuivre. Cette série de nuances plus pauvres en
55
carbone a été élaborée d’une part pour pouvoir paramétrer l’effet du carbone dans le
modèle de prévision de l’EFE et d’autre part afin d’éviter la formation de carbures
durant les recuits de précipitation envisagés, les nuances X-0,6-2 étant proches du
domaine de précipitation de la cémentite à 700°C. Les teneurs en manganèse sont plus
élevées pour rester dans le domaine austénitique du diagramme de Schumann.
Les échantillons des séries X-0,6-2 et X-0,4-2 étudiés sont bruts de laminage à chaud
(LAC) avec une température de fin de laminage supérieure à 930°C. L’un des points délicats
fréquemment rencontré dans les aciers contenant du cuivre en solution est le faïençage. Il
s’agit d’un mécanisme d’oxydation préférentiel du fer et du manganèse du fait que le cuivre
est un métal plus noble. A la surface de la tôle, pendant le laminage à chaud, le cuivre ne
s’oxyde pas, se liquéfie et pénètre aux joints de grain, induisant ainsi une grande fragilité
intergranulaire après refroidissement. Aucun faïençage n’a toutefois été observé pour les
compositions étudiées car le manganèse augmente la solubilité du cuivre dans l’austénite.
L’analyse chimique a été réalisée par spectroscopie d’émission optique (S.E.O.) sur les
deux séries X-0,6-2 et X-0,4-2 afin de valider les compositions des coulées synthétiques de
l’étude, réalisées sur four VIM (Vaccum Induction Melting) sous flux d’argon. Le résultat est
présenté tableau 2-1. La teneur en cuivre est bien de 2% massique environ pour tous les
échantillons. Les teneurs en manganèse sont en revanche plus faibles que celles visées. Pour
la série à 0,6% de carbone visé, les teneurs sont plus faibles de 0,57 à 0,5% C. Pour les
nuances X-0,4-2, les 0,4% de carbone visés sont atteints.
56
Mn (%) C (%) Cu (%)
10-0,6-2 9,80 0,57 1,93
13-0,6-2 12,7 0,55 1,90
16-0,6-2 15,6 0,53 1,89
18-0,6-2 18,2 0,51 1,82
18-0,4-2 18,0 0,40 1,98
20-0,4-2 19,8 0,40 1,94
21-0,4-2 21,3 0,38 1,91
23-0,4-2 22,8 0,37 1,85
Tableau 2-1 Analyse chimique S.E.O. des nuances X-0,6-2 et X-0,4-2 (% massique).
Sur la figure 2-2, les compositions réelles ont été reportées dans le diagramme de
Schumann des mécanismes de déformation activés en fonction des teneurs en manganèse et
en carbone. En l’absence de cuivre, toutes les nuances seraient dans le domaine de
transformation en martensite ε athermique au cours de la déformation. Les nuances 10-0,6-2
et 13-0,6-2 sont susceptibles de contenir de la martensite α’. A moins d’un effet gammagène
très fort du cuivre, les échantillons risquent de ne pas être dans le domaine où se produit le
maclage.
Figure 2-2 Situation des nuances dans le diagramme d’existence des phases et du maclage après trempe
puis déformation dans le système FeMnC (d’après [2-1 Schumann 72]). Les domaines des phases
présentes après trempe de la figure 2-1 sont rappelés en pointillés.
57
propriétés mécaniques. L’estimation de l’influence de l’ajout de 2% de cuivre sur la stabilité
des phases avant et après déformation (donc sur les diagrammes de Schumann) sera alors
possible.
2.2.3.1 Métallographie
La figure 2-3 présente les micrographies optiques réalisées sur la série X-0,6-2 après
préparation de la surface en 3 étapes : polissage mécanique jusqu’au grain 1200 (SiC),
polissage diamant 6, 3 puis 1 µm et attaque chimique au Nital 2% pendant 5 à 10 secondes.
La direction de laminage est horizontale sur ces micrographies. En sortie de laminage à
chaud, les échantillons semblent recristallisés. La taille de grains recristallisés a été mesurée
par procédure planimétrique [2-3 ASTM], procédure adaptée pour des morphologies équiaxes
telles que celles observées. La méthode consiste à compter le nombre de grains placés dans un
cercle de rayon donné puis d’en déduire la taille de grain. Les macles de recuit sont
comptabilisées conventionnellement comme des grains. La mesure a été effectuée pour plus
de 50 grains par cercle mesuré, ce que préconise la méthode. La taille de grains est d’environ
6 µm pour les nuances à 10, 13 et 18%Mn et de 8 µm pour la nuance à 16%Mn. On remarque
sur la figure 2-3a la présence de gros précipités MnS allongés dans la direction de laminage à
chaud. Ces précipités sont présents en faible quantité sur chacune des nuances observées. Le
problème de rupture prématurée provoqué par la présence de précipités de MnS est récurent
dans les alliages Fe-Mn et a déjà été observé par Tomota et al. [2-4 Tomota et al. 87].
58
MnS
Bande ségrégée
Direction de
laminage
Comme pour la nuance X-0,6-2, les échantillons de la série X-0,4-2 à 0,4% de carbone
semblent entièrement recristallisés (figure 2-4). La taille de grains est d’environ 6 µm pour
toutes les nuances. La nuance 23-0,4-2, à plus forte teneur en manganèse, présente une forte
ségrégation, visible sur la micrographie sous forme de lignes noires horizontales.
59
(a) 18-0,4-2 (5,9 µm) (b) 20-0,4-2 (5,9 µm)
2.2.3.2 Spectrométrie RX
Nous avons mené une étude détaillée des phases en présences sur les échantillons de la
série X-0,6-2 par spectrométrie RX afin de détecter si possible les deux types de martensite
susceptibles d’être présents sur ces nuances.
La caractérisation des phases présentes dans les échantillons de la série X-0,6-2 non
déformés a été réalisée grâce à un diffractomètre (θ, 2θ), 2θ variant de 14 à 125°. Le rayon
60
incident provient d’une électrode de cobalt caractérisée par un rayonnement Kα1 = 1.78919 Å.
Les échantillons de taille 10x10 mm² sont polis mécaniquement jusqu’au grain 1000.
Le tableau 2-2 présente les distances inter-réticulaires diffractantes de plus bas indices
pour les structures des phases susceptibles d’apparaître : austénite γ (CFC), martensite ε (HC),
martensite α’ (quadratique centré proche de la structure cubique centré CC). La martensite α’
ayant un paramètre de maille variant entre 0,286 et 0,3 nm en fonction de la teneur en
carbone, les distances inter-réticulaires sont données pour ces deux valeurs du paramètre de
maille.
Structure hc
Structure cfc
avec a = 0,2538 nm Structure cc
avec a = 0,3605 nm
et c = 0,4080 nm
a = 0,286 nm a = 0,3 nm
Distance inter- Distance inter- Distance Distance
Plans Plans Plans
réticulaire réticulaire inter- inter-
(hkl) (hkil) (hkl)
(nm) (nm) réticulaire réticulaire
(nm) (nm)
(111) 0,208 (10-10) 0,220 (110) 0,202 0,212
(200) 0,180 (0002) 0,204 (200) 0,143 0,150
(220) 0,127 (10-11) 0,193 (211) 0,117 0,122
(311) 0,108 (10-12) 0,150 (220) 0,101 0,106
(222) 0,104 (11-20) 0,127 (222) 0,082 0,086
(400) 0,090 (11-21) 0,121 (310) 0,090 0,095
Tableau 2-2 Tableau récapitulatif des plus grandes distances inter-réticulaires diffractantes pour les
structures cristallographiques cfc, hc, et cc. Les paramètres de maille sont donnés en en-tête. Les distances
spécifiques des structures cfc et hc sont surlignées en gris.
Figure 2-5 Spectre de diffraction (θ, 2θ) de l'échantillon 10-0,6-2 brut de laminage à chaud.
61
Les spectres obtenus pour les quatre nuances sont équivalents à celui présenté figure
2-5 pour la nuance 10-0,6-2 ; l’indexation des pics de diffraction montre que l’échantillon est
uniquement composé d’austénite et ne présente pas de pics secondaires. Les résultats
confirment le travail de métallographie qui montrait une structure parfaitement recristallisée.
La présence du cuivre stabilise donc bien l’austénite en décalant les domaines du diagramme
de Schumann de la figure 2-1 vers le bas. L’influence du cuivre sur l’état physique du
matériau sera étudiée dans la suite.
Des essais de susceptibilité magnétique ont étés réalisés pour déterminer TN. Un
suscéptomètre de type SQUID a été utilisé. Les échantillons polis grossièrement ont une
dimension de 10 x 5 x 2,5 mm et sont insérés dans une paille au centre du champ magnétique.
Le suscéptomètre soumet l’échantillon à un champ magnétique et détecte les variations de ce
champ causées par le matériau, à différentes températures. En partant de 350 K (77°C), le
matériau est refroidi jusqu’à la température de l’hélium liquide, 4 K (-269°C). La mesure est
faite à intervalles de 2 °C et après stabilisation en température.
La figure 2-6 présente l’aspect caractéristique des courbes obtenues pour chacune des
nuances (moment magnétique en fonction de la température). Au dessus de la température de
Néel, le matériau est paramagnétique (l’état magnétique le plus désordonné) et le moment
magnétique varie lentement avec la température. En dessous de TN, dans l’état anti-
62
ferromagnétique, le moment magnétique augmente avec la température. La température de
Néel correspond à un maximum du moment magnétique [1-44 Zhang et al. 2002].
TN austénite
Figure 2-6 Mesure de susceptibilité magnétique en fonction de la température sur la nuance 16-0,6-2. Le
maximum de moment magnétique est obtenu à TN.
Les résultats obtenus sont présentés tableau 2-3 et figure 2-7. Ce sont ces résultats qui
ont servi à l'ajustement des paramètres liés au cuivre dans la loi de prédiction de TN présentée
au chapitre 1 et qui ont été reportés sur la figure 1-16. Le cuivre et le manganèse ont des effets
opposés sur la température de Néel : l’ajout de cuivre diminue TN tandis que le manganèse
l’augmente.
X-0,4-2
X-0,6-2
a) b)
Figure 2-7 Influence sur la température de Néel de a) la teneur en manganèse des séries X-0,6-2 et X-0,4-2
et b) la teneur en cuivre de la série 22-0,6-X.
63
Composition (% atomique)
Fe Mn C Cu TN Exp (K)
10-0,6-2 85,1 10,4 2,8 1,7 160
13-0,6-2 82,4 13,2 2,7 1,7 209
16-0,6-2 79,9 15,8 2,6 1,7 238
18-0,6-2 77,6 18,2 2,4 1,7 270
Des mesures de module d’élasticité ont été effectuées sur un appareil de DMTA
(Differential Mechanical Thermal Analysis) de type Netzsch 242C. L’appareil sollicite en
flexion une lamelle du matériau étudié encastrée à une extrémité. Il enregistre pour différentes
fréquences de sollicitation les parties réelles et imaginaires de la réponse élastique en fonction
de la température. Les échantillons sont découpés puis polis pour atteindre une forme de
lamelle à faces parallèles de taille 1x5x28 mm3. La procédure est la même que celle utilisée
par S. Allain dont le travail sur le sujet a été présenté en bibliographie. Les fréquences
utilisées sont de 0,5, 1 et 10 Hz. La vitesse de refroidissement et de chauffage est de 2 K/mn.
Toutes les nuances présentées sont à l’état brut de laminage à chaud. Le cycle thermique
choisi est le suivant :
- chauffage depuis la température ambiante jusqu’à 400°C,
- refroidissement lent par azote liquide jusqu’à -150°C,
64
- chauffage jusqu’à 100°C,
- refroidissement jusqu’à -150°C,
- chauffage jusqu’à la température ambiante.
Le résultat de la mesure des parties réelles est donné sur la figure 2-8. Les variations
de module s’avérant être les mêmes quelle que soit la fréquence utilisée, nous avons choisi
arbitrairement la fréquence 1 Hz pour représenter nos résultats. Le fait que la variation de
module ne soit pas sensible à la fréquence signifie que la réponse est purement élastique : le
matériau ne présente pas de relaxations internes (comme les polymères par exemple). On
observe bien une chute de module d’Young à la transition magnétique quelles que soient les
nuances étudiées.
TN TN TN TN
0,5 °C/min
barre d’erreur
10-0,6-2
13-0,6-2
16-0,6-2
18-0,6-2
Figure 2-8 Variation relative du module d'Young des nuances X-0,6-2 et 22-0,6 en fonction de la
température, mesurée par DMTA et ajustés en valeur absolue sur la mesure effectuée par ultrasons à
température ambiante. Le modèle empirique de Ghosh & Olson pour la nuance 22-0,6 paramagnétique
est reporté, ainsi que les températures de Néel de chaque nuance mesurées précédemment. La barre
d’erreur de la mesure par ultrasons est de 15 GPa.
65
est due à la cinétique du cycle thermique, la mesure a été effectuée une deuxième fois sur
l’échantillon 10-0,6-2 à une vitesse de 0,5 K/mn plus lente. On constate que l’hystérèse
associée est moins large, ce qui prouve que celle-ci est liée au temps nécessaire pour atteindre
l’équilibre thermique. Cette hystérèse est donc la conséquence de l’écart entre le lieu de la
mesure en température et l’échantillon. En effectuant un essai quasi-statique à plus faible
vitesse de refroidissement et de chauffage, l’hystérèse disparaîtrait.
La mesure par DMTA ne donne pas des valeurs absolues suffisamment précises du fait
de sa trop grande sensibilité à la mesure de l’épaisseur de l’échantillon, mais la méthode est
bonne pour décrire les variations relatives du module en fonction de la température. Afin de
comparer les différentes nuances, des mesures complémentaires par ultrasons à température
ambiante ont été effectuées avec l’aide de S. Testu au laboratoire de l’EEIGM (INPL). La
mesure utilise un transducteur piézo-électrique émettant des ondes ultrasoniques de
composante longitudinale ou transversale. On applique cet émetteur/récepteur sur une face de
l’échantillon en établissant un contact à l’aide d’un fluide visqueux.
Figure 2-9 Schéma d'une expérience de mesure des vitesses de propagation des ondes sonores dans un
matériau d'épaisseur Ep. L'émetteur/récepteur piézo-électrique mesure le temps entre l'émission de l'onde
et sa réception après réflexion sur la face opposée.
66
peuvent alors se déduire des vitesses de propagation des ondes longitudinales Vl (m/s) et
transversales Vt (m/s) et de la densité ργ :
E=
(
ρ γ Vt 2 3Vl 2 − 4Vt 2 ) le module d’Young,
(Vl 2
− Vt 2
)
= ρ γ Vt 2 le module de cisaillement,
et ν =
(
0,5 Vl 2 − 2Vt 2 )
le coefficient de poisson.
(Vl 2 − Vt 2 )
La densité est calculée à partir du paramètre de maille de l’austénite FeMnC (qui
dépend peu de la composition [2-6 Ono et al. 98][1-2 Allain 04]) et du poids atomique d’une
solution solide 22-0,6 ce qui correspond à 22% atomiques de manganèse, 2,7% atomiques de
carbone et le complément en fer : ργ = 7,91 kg/m3.
E (GPa) (GPa) ν
10-0,6-2 205 80 0,27
13-0,6-2 199 78 0,28
16-0,6-2 203 80 0,27
18-0,6-2 198 79 0,26
18-0,4-2 198 78 0,27
20-0,4-2 179 70 0,28
21-0,4-2 170 66 0,29
23-0,4-2 171 66 0,29
22-0,6 160 59 0,35
Tableau 2-4 Mesures des constantes élastiques par méthode ultrasons. E : module d’Young, : module de
cisaillement et ν : coefficient de Poisson.
Nous observons une dispersion des valeurs du module d’Young des échantillons dans
le domaine paramagnétiques à haute température sur la figure 2-8. Les tôles utilisées pour la
mesure par ultrasons sont de faible épaisseur (≈ 2,5 mm) et la précision du palmer utilisé étant
de 0,01 mm, le calcul de marge d’erreur donne 15 GPa. La dispersion peut donc provenir de
l’erreur sur la mesure mais aussi de l’influence de la composition sur le module élastique, qui
67
peut également expliquer la plus faible valeur du module d'Young pour la nuance 22-0,6. Les
aciers austénitiques paramagnétiques suivent, d’après Ghosh & Olson [2-8 Ghosh & Olson
02] une loi linéaire du module élastique en température dépendant de la composition qui est
reportée sur la figure 2-8 pour la nuance 22-0,6. Au dessus de 100°C, les mesures par DMTA
présentent bien la même dépendance en température que le modèle de Ghosh et Olson.
68
de déplacement. L’instrumentation se fait par un thermocouple de type K soudé au centre de
l’échantillon (figure 2-10b).
capteur de
2 mm déplacement échantillon
2 mm four image
maintenu sous vide
ou flux gazeux
28 mm Thermocouple
K
a)
b)
Figure 2-10 a) Dimensions des échantillons de dilatomètrie, b) schéma simplifié du DCR.
Segment 1
Segments 2 et 3
Segment 4
69
Segment 1 : montée à 1050°C en 1h puis palier de 10 min à 1050°C. A
Austénitisation
cette température, l’acier est 100% austénitique.
Segment 2 : trempe sous flux d’hélium jusqu’à 400°C et ensuite sous flux
d’air comprimé jusqu’à la température ambiante.
Détection de Es
Segment 3 : refroidissement à -196°C sans régulation par immersion de
l’échantillon dans un bécher d’azote liquide.
Les résultats pour tous les alliages sont similaires à celui obtenu pour l’échantillon 10-
0,6-2 (contenant le moins d’éléments gammagènes) présenté en figure 2-12 et ne présentent
aucun changement de volume caractéristique d’une transformation de phase. D’après une
étude métallographique réalisée après l'essai sur l’échantillon 10-0,6-2 (figure 2-13a), des
réseaux de fines plaquettes parallèles sont pourtant observables dans les grains. Ce sont
certainement des plaquettes de martensite ε, puisqu’il ne peut s’agir de macles mécaniques
(les échantillons n’ont pas été déformés) ni de macles thermiques qui n’ont pas cette
morphologie. Sur l’échantillon 16-0,6-2, de rares zones contiennent même de la martensite α’
reconnaissable à sa forme en aiguilles disposées en chevrons (figure 2-13b) et sont confirmées
par l’aimantation de l’échantillon. Il est possible que ces zones dans lesquelles la martensite
α’ est plus stable soient des zones appauvries en carbone/manganèse suivant les
microségrégations. Il semble donc que les faibles variations de volume induites par la
transformation et/ou que les faibles fractions volumiques de phase transformée soient en deçà
de la précision de mesure de l’appareil. Ces essais n’ont donc pas permis d’obtenir de
résultats exploitables pour paramétrer le modèle thermochimique. Nous nous sommes donc
basés uniquement sur les données de la littérature pour le paramétrage présenté précédemment
au chapitre 1.
70
3
2,5
1,5
Déformation (%)
0,5 As
Es
0
-200 0 200 400 600 800 1000
-0,5
-1
Température (°C)
aiguilles
plaquettes
a) b)
Figure 2-13 Métallographie après attaque au Nital sur les échantillons après dilatomètrie a) nuance 10-
0,6-2 : présence de plaquettes ressemblant à de la martensite ε et b) nuance 16-0,6-2 : présence d’aiguilles
de martensite α’ dans un grain.
Des essais de traction quasi-statiques ont étés réalisés à vitesse de traverse constante,
imposant une vitesse de déformation nominale de 8,3.10-3 s-1. Trois éprouvettes de type ISO
12,5x50mm² (figure 2-14) de 2,5 mm d’épaisseur ont été déformées par nuance, sur une
71
machine Zwick 3R. Les éprouvettes ont été découpées dans le sens transverse du sens de
laminage. La découpe à été réalisée par usinage à ultra-haute vitesse par une entreprise
extérieure.
La figure 2-15 présente les courbes conventionnelles et la figure 2-16 présente les
courbes rationnelles de traction pour les nuances X-0,6-2. Pour chaque courbe, l’éprouvette
ayant atteint la plus grande déformation parmi les trois a été prise en compte. Cette sélection
permet d’éliminer les problèmes éventuels de dispersion des résultats due à la présence de
MnS qui peut provoquer une rupture prématurée. En pointillé est représenté sur la figure 2-16
l’essai de traction de la nuance 22-0,6 sans cuivre et ayant une taille de grain de 20µm
(laminage à froid puis recuit 10 min à 1100°C), à vitesse de déformation de 7.10-3 s-1 [1-2
Allain 04].
72
Figure 2-15 Courbes conventionnelles de traction à température ambiante de la série X-0,6-2. Les
symboles indiquent la rupture des échantillons.
Figure 2-16 Courbes rationnelles de traction à température ambiante de la série X-0,6-2 et comparaison
avec la nuance 22-0,6. Les symboles indiquent la rupture des échantillons.
Le tableau 2-5 ci-dessous donne les caractéristiques mécaniques des aciers étudiés et
l’EFE calculée par le modèle du chapitre 1. Les résistances maximales atteintes sont
intéressantes, de l’ordre de 900 MPa pour 65% d’allongement.
73
Allongement
d Re Rm EFE
homogène
(µm) (MPa) (MPa) (mJ/m2)
(%)
10-0,6-2 6 337 825 37,7 10
13-0,6-2 7 343 914 64,4 12
16-0,6-2 8 345 908 62,7 15
18-0,6-2 6 351 883 68 17
22-0,6 20 300 900 69 22
Tableau 2-5 Tailles de grains, caractéristiques mécaniques et énergie de faute d’empilement calculée par
le modèle thermochimique pour les nuances de la série X-0,6-2.
Le taux d’écrouissage a été calculé en ajustant un polynôme de degré six sur la partie
plastique des courbes de traction puis en calculant le coefficient d’écrouissage instantané :
d ln (σ )
n=
d ln (ε ) . Son évolution est donnée figure 2-17 pour les 5 nuances précédentes.
74
10-0,6-2
13-0,6-2
16-0,6-2
18-0,6-2
22-0,6
Mn croissant
Figure 2-17 Coefficients d’écrouissage instantané au cours de l’essai de traction des nuances X-0,6-2 et
EFE calculée par le modèle thermochimique. Les courbes sont décalées en déformation pour une
meilleure lisibilité. Les droites n = ε sont indiquées en pointillé et une étoile repère le critère de Considère.
75
2.6.1.1 Phases en présence après déformation
Toutes les nuances étaient 100% austénitiques avant déformation. L’analyse aux
rayons X a été réalisée à nouveau sur les échantillons après traction afin de déterminer les
phases en présence dans le matériau (figure 2-18). L’interprétation du spectre n’a pu être faite
qu’à partir des positions des pics et non de leurs intensités relatives. Elle montre la présence
de pics supplémentaires correspondant à de la martensite ε (identifiée avec certitude par le pic
{10-10} ε) sur tous les échantillons après traction. L’intensité de ces pics reste faible, ce qui
indique qu’une faible fraction volumique de martensite ε s’est formée.
Figure 2-18 Spectres de diffraction (θ, 2θ) des échantillons de la série X-0,6-2 après essai de traction.
En utilisant les fiches théoriques d’intensité des pics de chacune des phases nous
pouvons estimer la fraction de phase ε de façon indicative. Ce résultat présenté tableau 2-6
n’est qu’une indication car le matériau déformé est hautement texturé. En effet, l’objectif
premier de la mesure était d’établir la présence ou non des phases et aucune précaution n’avait
été prise pour palier l’effet de texture. Or, la face diffractante est parallèle à l’axe de traction
et l’échantillon est statique ce qui implique un nombre réduit de grains en position de
diffraction. La proportion de martensite ε est inférieure ou égale à 10% après déformation.
76
Fraction de phase ε
10-0,6-2 5%
13-0,6-2 8,5 %
16-0,6-2 10,5 %
18-0,6-2 6%
Tableau 2-6 Fractions de phase ε calculées à partir des intensités des pics de diffraction.
2.6.1.2 Discussion
Des allongements à rupture faibles et ayant une forte dispersion ont été observés à
basse température (77 K) sur la nuance 22-0,6 durant le travail de S. Allain [1-2 Allain 04] et
ont été interprétés par la présence de précipités de sulfure de manganèse MnS initiant une
localisation anormale de la déformation. Deux explications sont données.
- une plus grande difficulté pour accommoder la déformation plastique autour des
précipités MnS, l’activation thermique du glissement des dislocations en dessous de la
température ambiante à cause du carbone rendant le glissement plus difficile à basse
température,
- la formation de martensite ε se substituant au maclage du fait de la basse EFE à cette
température, qui serait une phase dure fragilisante.
77
allongements à rupture. Il semble donc que les plaquettes de martensite ε jouent le même rôle
que les macles et produisent un fort durcissement par effet Hall & Petch dynamique sans effet
fragilisant et que la réduction d’allongement à basse température dans la nuance 22-0,6 soit
due à l’activation thermique du glissement.
Les mécanismes de déformation seraient donc les suivants, à EFE croissante et pour
des nuances austénitiques à l’état LAC :
- EFE inférieure à 12 mJ/m² : activation d’un premier puis d’un second variant de
martensite ε (entre 10 et 20% de déformation). Formation de martensite α’ aux
intersections entre les deux variants de martensite ε, réduisant d’autant plus
l’allongement que l’EFE est faible,
78
- EFE entre 12 et 17 mJ/m² : activation d’un premier puis d’un second variant de
martensite ε (au-delà de 20% de déformation). Pas de martensite α’ détectée,
- EFE supérieure à 18 mJ/m² : activation séquentielle de deux systèmes de maclage
(vers 12% de déformation, échantillon 22-0,6, EFE = 22 mJ/m²).
Figure 2-19 Schéma représentant les mécanismes de déformation prépondérants en fonction de l’EFE.
La même méthode de mesure que pour la série de nuances X-0,6-2 a été mise en place.
Les résultats des essais de traction sont présentés figure 2-20 et figure 2-21.
79
Figure 2-20 Courbes conventionnelles de traction à température ambiante de la série X-0,4-2. Les
symboles indiquent la rupture des échantillons.
Figure 2-21 Courbes rationnelles de traction à température ambiante de la série X-0,4-2 et comparaison
avec la nuance 22-0,6. Les symboles indiquent la rupture des échantillons.
Le tableau 2-7 présente les caractéristiques mécaniques des aciers étudiés et l’EFE
calculée par le modèle thermochimique. On remarque que la limite d’élasticité est plus faible
que pour les nuances X-0,6-2, en accord avec un moins fort durcissement de solution solide,
80
compte tenu d’une plus faible teneur en carbone. Les nuances à 0,4%C ont une contrainte
d’écoulement plus faible que la nuance 22-0,6 à partir d’environ 20% de déformation. Aucune
nuance ne présente d'allongement réduit. Les résistances maximales atteintes sont moins
intéressantes, de l’ordre de 800 MPa pour 65% d’allongement et diminuent avec la teneur en
manganèse (augmentation de l’EFE). Ceci est dû à un taux d’écrouissage plus faible (figure
2-22).
Re Rm A% EFE
d (µm)
(MPa) (MPa) (%) (mJ/m2)
18-0,4-2 6 313 813 65,2 11
20-0,4-2 6 307 800 66,9 14
21-0,4-2 6 309 780 64,1 15
23-0,4-2 6 312 764 60 17
22-0,6 20 300 900 69 22
Tableau 2-7 Tailles de grains, caractéristiques mécaniques et EFE calculée par le modèle thermochimique
pour les nuances de la série X-0,4-2.
10-0,6-2
13-0,6-2
16-0,6-2
18-0,6-2
22-0,6
Mn croissant
Figure 2-22 Coefficients d’écrouissage instantané au cours de l’essai de traction des nuances X-0,4-2 et
EFE calculée par le modèle thermochimique. Les courbes sont décalées en déformation pour une
meilleure lisibilité. Les droites n = ε sont indiquées en pointillé et une étoile repère le critère de Considère.
Cette fois, la forme même de la courbe d’écrouissage est différente : il n’y a pas de
point d’inflexion. Les nuances de la série X-0,4-2 et la nuance 22-0,6 ont le même
comportement en début d’essai puis les courbes de taux d’écrouissage se séparent entre 10 et
15% de déformation, domaine d’activation du second système de maclage pour l’acier 22-0,6.
81
Seul l’échantillon 18-0,4-2 s’aimante faiblement en fin d’essai, il contient une faible fraction
volumique de phase α’. Selon cette étude et en accord avec les diagrammes de Schumann, la
série de nuances X-0,4-2 se situe dans le domaine γ avant déformation et γ + ε après
déformation. La nuance 18-0,4-2 se situe, elle, à la frontière du domaine γ + ε + α’ après
déformation (figure 2-2). Aucune rupture n'intervient avant le critère de Considère, ce qui
correspond bien à l’absence (ou la très faible présence) de phase α’.
Malgré des énergies de faute d’empilement proches de celles calculées pour la série X-
0,6-2, la série X-0,4-2 a des propriétés mécaniques sensiblement inférieures. C'est pourquoi
l'étude de cette série de nuances a été moins poussée que celle de la série X-0,6-2. La
différence entre les deux séries est la concentration en carbone. Le carbone semble donc avoir
un effet plus complexe sur le taux décrouissage qu’une simple modification de l’EFE.
Les instabilités de déformation plastique observées sur les nuances précédentes sont
moins visibles sur les nuances à 0,4% de carbone. Bien que la vitesse de diffusion du carbone
dans l’austénite soit trop faible à température ambiante pour expliquer ces instabilités par un
mécanisme de type Portevin-Le Chatelier, leur diminution avec la teneur en carbone confirme
que celui-ci joue cependant un rôle. Certains auteurs ([2-14 Dastur & Lesli 81][2-15 Zuidema
et al. 87][2-16 Shun & al. 92]) font l’hypothèse que pour les alliages Fe-Mn-C à forte teneur
en manganèse, les forts taux d’écrouissage sont dus au vieillissement dynamique (épinglage
des dislocations par des dipôles Mn-C). Les expériences de cette étude confirment que les
atomes de carbone en insertion influencent le durcissement des aciers Fe-Mn-C. Une autre
hypothèse est que le carbone en insertion diminue la restauration dynamique.
Les tests d'aimantation montrent que seules les nuances 10-0,6-2, 13-0,6-2 et 18-0,4-2
contiennent de la martensite α’ après traction. Nous pouvons donc reporter sur le diagramme
de Schumann le domaine de formation de martensite α’ après déformation dans le système
FeMnC + 2% Cu (figure 2-23). L’effet du cuivre en substitution est plus complexe qu’une
simple translation de la limite de formation de martensite α’, comme le ferait une
augmentation de manganèse.
82
γ + ε / γ + ε + α’
(2%Cu)
Figure 2-23 Modification de la frontière du domaine d'apparition de la martensite α' sur le diagramme de
Schumann des phases présentes après déformation, par ajout de 2% de cuivre dans le système FeMnC
(d'après cette étude).
Nous présentons ici une méthode assez simple à mettre en œuvre pour estimer des
variations de l’EFE dans des nuances de compositions proches à partir de l’essai de traction
dans le cas où le mode de déformation activé est le maclage. Elle est fondée sur l'activation
séquentielle de deux systèmes de maclage selon une loi de Schmid et sur l’estimation de la
contrainte critique d’activation du maclage. La méthode est présentée pour les trois nuances
de composition 22-0,6, 22-0,6-1,6, 22-0,6-2,8. L’EFE augmentant avec la teneur en cuivre, le
maclage mécanique est activé dans les trois. Le protocole d’élaboration (LAC, LAF, recuit de
recristallisation) est le même pour chaque composition, de sorte que les paramètres
microstructuraux (taille de grains…) sont identiques.
Nous avons vu au chapitre 1 que la cission critique de maclage est la cission nécessaire
à l’émission d’une boucle de partielle de Shockley traînant une faute d’empilement :
83
Γ
τ c = τ 0c + 2.7-1
b
τ 0c dépend du mécanisme de germination des macles proprement dit qui dépend des
paramètres du glissement. Les compositions étant proches, nous supposons que ce terme est
identique dans les trois nuances. Nous faisons donc l’hypothèse que pour estimer la variation
d’EFE avec la teneur en cuivre, il suffit d’estimer la variation de cission critique de maclage :
Γ = τ ×b 2.7-2
c
Allain a montré que l’activation du maclage était séquentielle dans la nuance 22-0,6,
selon une loi de Schmid. A l’activation du second système (vers 10% de déformation), la
courbe du coefficient d’écrouissage présente un point d’inflexion (cf figure 1-12 p. 25). La
figure 2-24 présente les courbes n = f(ε) pour les trois nuances, après lissage de la partie
plastique de la courbe rationnelle de traction par un polynôme de degré six. En déterminant le
point d’inflexion on obtient la déformation moyenne ε2nd à laquelle le second système est
activé, puis la contrainte d’écoulement σ2nd correspondante lue sur la courbe rationnelle de
traction (Figure 2-25).
d(ln σ )
n=
d(ln ε)
22-0,6
22-0,6-1,5
22-0,6-2,8
ε2nd
Figure 2-24 Coefficient d'écrouissage en fonction de la déformation pour la série 22-0,6-X. Le point
d’inflexion permet de déterminer la déformation à laquelle le second système de maclage est activé en
moyenne dans tous les grains.
84
σ2nd
22-0,6
22-0,6-1,5
22-0,6-2,8
ε2nd
Figure 2-25 Courbe rationnelle de traction pour la série 22-0,6-X. Le report de la déformation
d’apparition du second système permet de lire la contrainte de traction correspondante.
Les trois nuances sont polycristallines non texturées. Connaissant les 12 systèmes de
maclage intrinsèques {111}<112> possibles, on peut calculer le deuxième plus fort facteur de
Schmid pour une direction cristallographique de traction donnée. Sur 100 directions de
traction prises au hasard, nous avons calculé numériquement la valeur moyenne du facteur de
Schmid pour le second système de maclage, qui vaut mt2nd = 0,325. mt2nd est l’équivalent pour
le second système de maclage de l’inverse du facteur de Sachs pour le système de glissement
primaire dans les CFC (égal à 2,24). La cission critique est alors reliée à la contrainte
macroscopique de traction par la relation : τ = mt 2nd × σ 2nd .
c
Le tableau 2-8 présente les valeurs lues aux différentes étapes de la méthode.
τ Г Г
ε2nd σ2nd τc
(= 0,325 σ) (= τcb) (mJ/m
(d²n/dε² = 0) (MPa) (MPa)
(MPa) (mJ/m²) ²)
22-0,6 0,09 470 150 21,7*
22-0,6-1,5 0,13 550 180 30 4,4 26,1
22-0,6-2,8 0,19 670 220 70 10,3 32
Tableau 2-8 Méthode d'estimation de l'EFE appliquée à la série 22-0,6-X. * valeur de l’EFE calculée par le
modèle thermochimique.
85
La valeur à 0% de cuivre est celle donnée par le modèle thermochimique. Le modèle
thermochimique est comparé aux résultats obtenus par cette méthode d’estimation de l’EFE
(figure 2-26). L’éstimation simplifiée est assez proche des résultats du modèle
thermochimique plus complet.
(% massique)
Figure 2-26 Variation de l’EFE en fonction de la teneur en cuivre (série 22-0,6-X) estimée selon le modèle
thermochimique et à partir de l’essai de traction.
Cette méthode peut être utilisée pour estimer les variations d’EFE lorsqu’on introduit de
faibles écarts de composition dans une nuance de référence d’EFE connue, dans le cas où le
maclage mécanique est activé.
86
Une lame mince a dans un premier temps été préparée par amincissement
électrolytique à Arcelormittal par D.Bouleau.
a) b)
Figure 2-27 a) Cliché MET et b) diagramme de diffraction de la nuance 22-0,6-2,8 après traitement de
précipitation. La lame mince a été préparée par amincissement électrolytique.
Pour vérifier ce résultat, une lame mince du même matériau a été préparée par
bombardement ionique (PIPS) au LPM. Cette lame mince a été prélevée dans une tête
d’éprouvette après traction, c’est pourquoi on remarque la présence de nombreuses
dislocations et de faisceaux de macles (figure 2-28).
87
Figure 2-28 Cliché MET de la nuance 22-0,6-2,8 après traitement de précipitation. La lame mince a été
préparée par amincissement ionique
Une deuxième expérience similaire a donc été réalisée dans un four AET à lampes
infra-rouges fonctionnant sous atmosphère d’argon. Le traitement réalisé est un maintien
d’homogénéisation à 1200°C pendant 15 min puis un refroidissement à 2°C/min jusqu’à
450°C.
88
Figure 2-29 Cliché MET en champ clair de l’échantillon 22-0,6-2,8 après maintien court à 1200°C puis
refroidissement de 2°C/min jusqu’à 450°C.
Une fois de plus, aucun précipité intragranulaire n’a pu être observé au MET. La
figure 2-29 montre cependant la présence de gros précipités de cuivre aux joints de grains.
Un troisième traitement thermique a donc été réalisé avec le four AET et dans les
mêmes conditions. Le refroidissement a été réalisé jusqu’à 500°C, puis l’échantillon a été
maintenu à cette température. L’objectif de ce recuit était de favoriser la précipitation
homogène par un maintien prolongé à basse température. Les clichés MET en champ clair
après traitement sont présentés figure 2-30. On constate encore une fois la présence de
précipités aux joints de grains, ceux-ci se formant en îlots (a) ou en amas (b). Là encore on
n’observe pas de précipités intragranulaires.
89
Précipités de cuivre
Joint de
grain
a) b)
Figure 2-30 Clichés MET en champ clair de l’échantillon 22-0,6-2,8 après traitement d’homogénéisation à
1200°C, refroidissement à 2°C/min et recuit à 500°C pendant 3h.
90
γ
γ + précipités
Figure 2-31 Calcul Thermocalc de la solubilité du cuivre en fonction de la température pour une nuance
22-0,2.
2.9 Conclusion
91
module d'Young d'environ 200 GPa à température ambiante, soit un gain de 20% par rapport à
la nuance 22-0,6.
Les essais de traction montrent que ces nuances présentent un fort allongement à
rupture (> 60%) et une résistance mécanique élevée (≈ 900 MPa), excepté pour la nuance 10-
0,6-2 dont l'allongement est faible. Même si leur EFE et leur allongement sont comparables à
ceux des nuances X-0,6-2, les nuances X-0,4-2 ont une résistance mécanique plus faible de
100 MPa à taille de grain équivalente, due à un taux d’écrouissage plus faible. Ceci montre
que le rôle du carbone dans les mécanismes de durcissement est plus complexe qu'un simple
effet thermochimique. Les instabilités de déformation plastique sont moins marquées lorsque
la teneur en carbone diminue. Un plus faible vieillissement dynamique ou une augmentation
de la restauration dynamique peuvent expliquer le moins bon durcissement.
Le comportement mécanique de ces nuances à faible EFE (< 18mJ/m²) a été interprété
grâce aux résultats de l’analyse aux rayons X, à la détection de martensite α’ par aimantation,
aux calculs d’EFE et aux courbes d'écrouissage. Le rôle de la martensite ε qui est présente
dans toutes les nuances après traction, s’avère être le même que celui des macles en terme de
durcissement par diminution progressive du libre parcours moyen des dislocations. Cette
phase ne s’avère pas fragilisante : la rupture intervient au critère de Considère pour toutes les
nuances où seule la martensite ε est présente. La diminution de l'allongement à rupture de la
nuance de référence 22-0,6 à basse température est donc due à la forte activation thermique du
glissement due au carbone en dessous de la température ambiante. On peut donc obtenir le
comportement optimum en traction avec de la martensite ε à la place des macles, ce qui a déjà
été observé par Rémy [2-17 Rémy 75], mais pour une raison inconnue, le laminage à froid est
impossible à réaliser en présence de martensite ε.
Le manganèse et le cuivre augmentent l'EFE mais leurs effets sur TN sont opposés. En
substituant une partie du manganèse par du cuivre, il est alors possible de faire varier ces deux
paramètres séparément, ce qui n'était pas le cas dans le ternaire FeMnC. La nuance 16-0,6-2
92
(TN = -35°C, EFE = 15 mJ/m2) possède des caractéristiques mécaniques optimales parmi les
nuance étudiées : E ≈ 200 GPa, Re = 345 MPa, Rm = 900 MPa et A% = 63%. Elle est la
nuance à plus forte teneur en carbone dont le pic de modules élastiques est à température
ambiante, et ayant une cinétique de transformation martensitique ε maximale sans formation
de martensite α'.
93
2.10 Bibliographie
94
Zuidema B.K., Subramanyam D.K. & Leslie W.C., Metallurgical Transactions A, 18 (1987)
p1629-1639
[2-16 Shun & al. 92]
Shun T., Wan C.M. & Byrne J.G., Acta Metallurgica et Materialia, 40 (1992) p3407-3412
[2-17 Rémy 75]
Rémy L., Thèse, Université de paris-Sud centre d’Orsay (1975)
95
96
Chapitre 3
Durcissement structural par précipitation
intragranulaire de carbures de vanadium
97
98
3 Durcissement structural par précipitation intragranulaire
de carbures de vanadium
3.1 Introduction
Les excellentes propriétés mécaniques de ces aciers à température ambiante sont dues
au maclage mécanique. Il est essentiel de ne pas perturber la cinétique de maclage (i.e.
l'évolution de la distance moyenne entre faisceaux de micromacles au cours de la
déformation) pour conserver un fort coefficient d'écrouissage tout au long de la déformation.
Or des précipités peuvent bloquer les macles ou à l’inverse constituer des sites de germination
et il n'y a pas eu d'étude systématique des interactions entre macles et précipités dans la
littérature.
N’ayant pas réussi à obtenir une précipitation homogène de cuivre dans FeMnC, nous
disposons d’une nuance contenant des carbures de vanadium, la nuance X-IP industrielle
élaborée par Arcelormittal dont les développeurs produits sont Colin Scott et Philippe Cugy.
99
Il s'avère que la précipitation obtenue réunit les besoins de notre étude : une matrice
austénitique proche de la nuance de référence 22-0,6 et des précipités intragranulaires
observables au MET. Dans un premier temps nous présenterons la structure des carbures de
vanadium au sein d’une matrice austénitique. Puis, nous présenterons la nuance étudiée et
caractériserons sa microstructure. L'observation au MET permettra de déterminer la
cohérence ou non des précipités ainsi que leur relation d'orientation avec la matrice. Les
propriétés en traction seront ensuite comparées à la nuance de référence 22-0,6 et discutées en
fonction des observations microstructurales. Enfin, la présence de carbures de vanadium
s'accompagnant d'une plus faible sensibilité à la casse différée due à l'hydrogène, nous
étudierons la possibilité de stockage de l'hydrogène dans le champ de contrainte autour des
précipités.
V
C
Figure 3-1 Structure B1 du carbure de vanadium. Les atomes de carbone occupent tous les sites
octaédriques du réseau CFC de vanadium.
100
Avant de décrire les expériences, nous allons introduire les notions de cohérence des
précipités et calculer la taille critique de perte de cohérence pour le carbure de vanadium dans
l’austénite.
Le paramètre de maille des nuances proches de la nuance référence 22-0,6 (qui dépend
peu des teneurs en manganèse et en carbone) est aγ = 0,361 nm. Il y a donc un fort désaccord
paramétrique δ entre les précipités et la matrice dans laquelle on souhaite les introduire :
δ = a/aγ = 15,4%, ce qui correspond environ à 6 plans de carbure de vanadium pour 7 plans
d’austénite. S'ils sont cohérents, ces précipités induisent donc de fortes contraintes internes.
δ: différence relative de
paramètres de maille. δ': déformation du précipité
à l'équilibre mécanique dans
la matrice.
Précipité Matrice
R(1+δ)
R R(1+δ')
Figure 3-2 Introduction d’un précipité non contraint de rayon R(1+δ) dans un trou de rayon R dans la
matrice. A l’équilibre mécanique le précipité et le trou ont un rayon R(1+δ’) (δ’< δ).
101
Dans le repère des coordonnées sphériques dont l'origine est prise au centre de
l'inclusion, le champ de déplacement de la transformation est purement radial. Les équations
d'équilibre conduisent dans ce cas à une solution générale de la forme :
B
u r = Ar + 3.2-1
r2
Les conditions aux limites en déplacement ur(0) = 0 et ur(R) = δ’- δ pour l'inclusion et
ur(R) = δ’ et ur(∞) = 0 pour la matrice conduisent à :
Les déformations dérivant de ces déplacements sont principales dans le repère de coordonnées
sphériques :
ε r = ε θ = ε ϕ = δ′ − δ dans le précipité 3.2-4
R3
ε r = −2ε θ = −2ε ϕ = −2δ′ dans la matrice 3.2-5
r3
102
−1
4µ γ
δ′ = δ1 +
3.2-9
3λ vc + 2µ vc
Dans le cas d'une inclusion ayant les mêmes constantes élastiques que la matrice, on
retrouve le résultat obtenu par Mura [3-8 Mura 87] :
1+ ν R3
ur = δ dans la matrice 3.2-10
3(1 − ν ) r 2
Zhang et al ont mesuré les constantes élastiques de VCx pour x variant de 0,75 à 0,88
[3-9 Zhang et al. 98]. En négligeant l'anisotropie de VC et par extrapolation à x = 1, nous
obtenons 3λvc+2µvc = C11+2C12 = 750 GPa. µγ = 60 GPa conduit à δ’ = 0,75 x δ = 11,5% (la
déformation de la matrice est la même que celle que produirait une inclusion infiniment rigide
ayant un désaccord paramétrique de 11,5%). Alors les contraintes internes à la surface du
précipité ne dépendent pas de R et valent -0,5.σr = σθ = σϕ = 14 GPa.
Compte tenu des contraintes internes élevées autour de précipités cohérents, des
dislocations d'interface vont se créer au cours de la croissance des précipités pour relaxer ces
contraintes. Ce processus de nucléation de dislocations à l’interface est appelé perte de
cohérence : à partir d'une certaine taille, les distorsions de la matrice autour du précipité
deviennent trop grande pour que celui-ci garde sa cohérence. La taille critique de perte de
cohérence peut être estimée en considérant que l’énergie totale est réduite par la formation
d’une boucle de dislocations, selon le critère de Brooks [3-10 Kelly & Nicholson 63].
Kelly [3-11 Kelly 66] a estimé la cission nécessaire à la nucléation d’une boucle de
dislocation dans un cristal parfait à µ/20 = 3,1 GPa. Le calcul précédent montre que la
contrainte de cisaillement maximale autour d'un précipité cohérent vaut (σθ - σr)/2 = 21 GPa.
Comme la contrainte critique de nucléation d'une boucle est largement dépassée, on peut
s’attendre à voir de nombreuses dislocations à l’interface des précipités. Cependant la
contrainte ne dépend pas de la taille du précipité. Un bilan énergétique permet de déterminer
le rayon à partir duquel le précipité perd sa cohérence. Une méthode de ce type, basée sur le
103
travail de Jesser [3-12 Jesser 68], a été utilisée pour déterminer le rayon de perte de cohérence
Rcrit.
1
w=
2 ∑σ ε
i, j
ij ij 3.2-11
3
w vc = (3λ vc + 2µ vc )(δ − δ′)2 dans le précipité 3.2-12
2
R3
w γ = 6µ γ δ′ 2 dans la matrice 3.2-13
r3
et par intégration dans les volumes concernés, l'énergie élastique totale stockée vaut :
L’énergie élastique stockée autour d’un précipité cohérent est donc proportionnelle au
volume du précipité alors que l’énergie élastique d’un précipité semi-cohérent est
sensiblement proportionnelle à la surface de l’interface. En effet, les dislocations d’interface
sont associées à un champ de contrainte qui est proche de celui d'un joint de grain de faible
désorientation [3-13 Brooks 62]. Il en découle qu’il existe une taille critique au dessus de
laquelle l’état semi-cohérent aura une plus faible énergie. Lorsqu’un précipité a une taille
supérieure à cette taille critique, il aura tendance à perdre sa cohérence, mais il faut une
contrainte suffisamment forte pour que la première dislocation soit nucléée.
104
dislocations d'interface sera estimée avec ces hypothèses. L'énergie élastique stockée sera
estimée avec les relations présentées précédemment.
σ0 = 8 mJ/m2 (d’après Jesser) est l’énergie des liaisons entre les deux mailles cristallines par
unité de surface lorsqu’il y a cohérence ; elle est considérée comme constante et indépendante
de la contrainte élastique. R est le rayon du précipité, Wvc(δ) et Wγ(δ) sont les énergies
stockées dans le précipité calculées précédemment pour le désaccord paramétrique δ. Lorsque
des dislocations d'interface apparaissent, elles relaxent une partie des déformations dues au
désaccord paramétrique. Notons δ* < δ le désaccord paramétrique relaxé par les dislocations :
du point de vue des contraintes nous supposons que le précipité semi-cohérent se comporte
comme un précipité cohérent dont la structure aurait un désaccord paramétrique δ* avec la
matrice (voir figure 3-3). Avec les mêmes notations que précédemment le rayon du précipité
relaxé par des dislocations d’interface, à l’équilibre mécanique avec la matrice vaut R(1+ δ*’)
où δ*’ = 0,75 x δ*.
R(1+δ*)
R R(1+δ*’)
Figure 3-3 Introduction d’un précipité non contraint de rayon R(1+δ*) relaxé par des dislocations
d'interface, dans un trou de rayon R dans la matrice. A l’équilibre mécanique le précipité et le trou ont un
rayon R(1+δ*’) (δ*’ = 0,75 x δ*).
105
L'énergie d'un précipité semi-cohérent s'écrit alors :
( )
E semi −coherent = 4πR 2 (σ 0 + σ dis ) + Wvc δ* + Wγ δ* ( ) 3.2-17
Les expressions de Wvc(δ∗) et Wγ(δ∗) sont les mêmes que précédemment, en remplaçant δ par
δ*. On suppose que σ0 n'est pas modifié par la présence des dislocations. σdis est l’énergie du
réseau de dislocations d’interface, qui s’exprime par [3-12 Jesser 68] :
µ γb
σ dis =
2
2π
(
1 + β − 1 + β2
1/ 2
) ( )
− β ln 2β(1 + β² )1 / 2 − 2β²
3.2-18
avec β=
(
π δ − δ* )
1− ν
σdis est une fonction décroissante de δ* ; plus il y a de dislocations qui relaxent le précipité,
plus l'énergie d'interface augmente.
Le rayon critique de perte de cohérence est défini comme celui pour lequel
Ecohérent = Esemi-cohérent. Comme le montre la figure 3-4, en dessous l'état cohérent est plus
stable, au-dessus c'est l'état semi-cohérent.
Rcrit
Figure 3-4 Energies comparées de précipités cohérents et semi-cohérents en fonction du rayon pour
δ* = 2,9%. Au-dessus de Rcrit, l'état semi-cohérent est le plus stable.
106
Figure 3-5 Energie d'un précipité semi-cohérent en fonction de δ* pour R = 0,275 nm.
Le calcul de Rcrit dépend de la valeur de δ* choisie qu'on ne connaît pas. La figure 3-5
montre qu’il existe une valeur de δ* qui minimise l’énergie d’un précipité semi-cohérent de
rayon R donné. La méthode de calcul de Rcrit consiste donc à déterminer cette valeur de δ*
pour une valeur initiale arbitraire de R et à injecter le résultat dans le calcul de Rcrit. Par
itérations successives, le calcul converge vers δ* = 0,029 et Rcrit = 0,275 nm. La déformation
tangentielle de la matrice à l’interface avec le précipité vaut δ*’= 2,18%. Cette valeur faible de
Rcrit est due au fort désaccord paramétrique initial δ et signifie que :
- le résultat est en dehors de l’application du modèle dans notre cas précis (Rcrit est de
l’ordre du vecteur de Burgers des dislocations dans l’austénite, on ne peut donc pas
assimiler "la" dislocation d'interface à un joint de faible désorientation),
- quoi qu’il en soit, on ne doit pas pouvoir obtenir de carbures VC parfaitement
cohérents avec la matrice.
107
La coulée a subi un laminage à chaud avec une température de fin de laminage de
900°C suivie d'un refroidissement à l'air à une vitesse de 20°C/s. Les calculs de précipitation
ont été effectués par Arcelormittal grâce au modèle de précipitation des particules tri-
atomiques V(C,N) proposé par [3-14 Maugis & Gouné 05]. Ce modèle prédit l’état de
précipitation en fonction des paramètres des procédés thermomécaniques subis par le
matériau. D’après ce modèle, la quantité de vanadium précipité après laminage à chaud est
très faible, de l'ordre de 50 ppm à comparer aux 2100 ppm présents en solution. La
recristallisation a été vérifiée par métallographie et s'avère complète à ce stade.
La tôle a ensuite subit un laminage à froid l’amenant à une épaisseur de 1,2 mm puis un
recuit optimisé afin d'obtenir une recristallisation complète ainsi qu'une précipitation
intragranulaire homogène dans les grains. Le vanadium, de par sa présence en solution à haute
température, diminue la vitesse des joints de recristallisation. Le recuit est donc réalisé à plus
haute température que pour d'autres aciers FeMnC dont la température de recuit est proche de
700°C. Concernant les précipités VC, le nez de précipitation sur le diagramme de la
proportion de précipité en fonction du temps et de la température de recuit se trouve à 800°C
d'après le modèle de précipitation et les résultats expérimentaux réalisés par Arcelormittal. Le
recuit optimal permettant une recristallisation complète et une précipitation intragranulaire est
de 800°C pendant 180 s avec refroidissement de 2,5°C/s.
La figure 3-7 montre l'intérieur des grains observée au MET en champ clair. Les lames
minces sont préparées par polissage mécanique parallèle au Tripod jusqu'au diamant 1 µm
puis amincissement ionique (PIPS). De nombreuses macles de recuit sont visibles (figure
3-7b), comme pour les aciers FeMnCuC étudiés dans le chapitre précédent. Nous constatons
la présence de nombreux précipités sphériques de quelques nanomètres à quelques dizaines de
nanomètres de diamètre à l'intérieur des grains. On peut remarquer l'épinglage d’une
dislocation sur ces précipités sur la figure 3-7a.
108
Figure 3-6 Métallographie au MEB en contraste cristallin de l'acier 22-0,6+VC après laminage à froid
suivi d’un recuit à 800°C durant 180 s. La structure est entièrement recristallisée.
a) b)
Figure 3-7 Clichés MET en champ clair montrant la présence de précipités intragranulaires dans la
matrice austénitique. a) épinglage d'une dislocation par deux précipités (flèches), b) plus fort
grossissement d'une autre zone montrant la présence d'un joint de macle de recuit (flèche).
109
Figure 3-8 Schéma des principales étapes d'une extraction par réplique de carbone.
Le résultat de l'analyse de distribution de taille est présenté figure 3-9. La plupart des
précipités ont un rayon allant de 1 à 10 nm, la fréquence maximale est obtenue pour un rayon
de 2,5 à 3 nm. Environ 3% des précipités ont un rayon supérieur à 10 nm, pouvant aller
jusqu'à 50 nanomètres (figure 3-10). Le rayon moyen calculé est de 3,4 nm.
120
Number of precipitates counted : 493
100
Mean radius : 3,4nm
80
Frequency
60
40
20
0
More
0-1
1 - 1.5
1.5 - 2
2 - 2.5
2.5 - 3
3 - 3.5
3.5 - 4
4 - 4.5
4.5 - 5
5 - 5.5
5.5 - 6
6 - 6.5
6.5 - 7
7 - 7.5
7.5 - 8
8 - 8.5
8.5 - 9
Radius (nm)
Figure 3-9 Distribution de taille des précipités dans l'acier 22-0,6+VC mesurée au MET par la méthode
d'extraction de réplique.
110
Figure 3-10 Précipité de grande taille observé au MET en champ clair multi-onde.
111
111
111
a) b)
Figure 3-11 a et b : Contrastes de déformation autour de précipités cohérents observés au microscope
électronique à transmission en champ clair, g = <111>.
La figure 3-11b montre des précipités de différentes tailles. On remarque que pour les
plus gros précipités, il n’y a plus de contrastes ayant ces caractéristiques. Ceci est dû au fait
que plus le diamètre des précipités augmente, plus leur degré de cohérence diminue. Au-delà
de 25 nm toute cohérence disparaît progressivement (absence de lobes).
112
Il est possible de mesurer la taille des lobes à 2, 20 ou 50% du contraste entre le fond
et le précipité. Les figure 3-12 b et c montrent la méthode de mesure de la taille des lobes à
20% de contraste utilisée.
πa 3γ cosθ
ξg = 3.4-1
λFhkl
Pour l’austénite CFC le facteur de structure vaut : Fhkl = 4. f(θ)γ.m/m0 avec f(θ)γ
l’amplitude de dispersion atomique (atomic scattering amplitude) calculée par une loi de
mélange des éléments constituant l’austénite : f(θ)γ = 0,753 f(θ)Fe + 0,22.f(θ)Mn + 0,027.f(θ)C.
Les valeurs f(θ)Fe, f(θ)Mn et f(θ)C se trouvent dans les tables [3-16 Edington 75]. Le facteur de
m Ue
correction relativiste
m0
(
= 1 − (v/c)
2
)
−1/2
=
m0c2
+ 1 est le rapport entre la masse m de
l’électron accéléré par la tension U et sa masse au repos m0, avec c la vitesse de la lumière et e
la charge élémentaire. On obtient m/m0 = 1,39 pour U = 200 kV et ξg = 374 Å pour
g = <111>.
113
a)
10 nm
14 nm
111
b)
Distance entre lobes à
20% de contraste : 33 nm
Intensité du
fond de l’image
100
80
c)
Figure 3-12 Mesure de la taille des lobes à 20% de contraste par rapport au fond de l’image. a) Carte de
contraste calculée autour d’un précipité formant des lobes en grain de café, ajustée à la taille du précipité
observé [3-17 Ashby & Brown 63], b) Détail des lobes de contraste de déformation autour d’un précipité
(R = 7 nm) en champ clair deux ondes g = <111> et c) intensité de l’image le long du diamètre
perpendiculaire à la ligne de non-contraste.
114
Pour le précipité observé figure 3-12, de taille R = 7 nm, la largeur des lobes à 20% de
contraste est de 33 nm donc (taille des lobes à 20%)/ξg = 0,88. En extrapolant la courbe
calculée par Ashby et Brown donnant la relation entre la taille des lobes et la déformation de
la matrice δ*’ (figure 3-13), le logarithme vaut -1,5 et on obtient δ*’ = 0,6%. La barre d’erreur
est de ± 0,1% pour une erreur de ± 2 nm dans la mesure de la taille des lobes.
Taille des lobes / ξg
δ*' gR 3
log
ξ3
g
Figure 3-13 Variations estimées de la largeur des lobes à 2, 20 et 50% de contraste en fonction de ξg (Å),
δ*’, g la norme du vecteur diffracté de coordonnées hkl en Å-1 et R le rayon du précipité en Å mesuré le
long de la ligne de non-contraste. D’après Ashby & Brown [3-17 Ashby & Brown 63].
La déformation mesurée est très inférieure au désaccord paramétrique entre les deux
phases. Comme attendu, les précipités sont donc semi-cohérents : δ* = 0,6/0,75 = 0,83%.
C'est-à-dire que la grande majorité du désaccord initial δ = 15,4% est relaxé et on peut estimer
les contraintes maximales près de ce précipité (équation 3.2-7) à -σr = 2σθ = 2σϕ = 720 MPa
et décroissant rapidement (ces contraintes valent 80 MPa à une distance d'un précipité égale à
son diamètre, 1,6 MPa à une distance de 10 fois son diamètre).
La figure 3-14 montre la mesure de δ*’ pour plusieurs précipités de tailles différentes
(mesures effectuées sur la même micrographie MET) ainsi que le calcul de cette valeur à la
taille critique de perte de cohérence. On observe une diminution de δ*’ avec la taille des
précipités. Une régression linéaire donne δ*’ = 0,0124 - 8,03.10-4 R avec R en nm, qui prévoit
une perte totale de cohérence à partir d'un diamètre d’environ 30 nm, en accord avec nos
115
observations. La cohérence résiduelle calculée pour le rayon critique de début de perte de
cohérence est du même ordre de grandeur que ce que donne les mesures, mais surestimée par
rapport à la loi linéaire.
Figure 3-14 Mesure de la cohérence résiduelle δ*’ pour plusieurs tailles de précipités. L’étoile indique la
cohérence résiduelle calculée pour un précipité à la taille critique de perte de cohérence.
La figure 3-15 présente des micrographies en MET deux ondes sur lesquelles des
franges de moiré sont observables dans les précipités, qui sont caractéristique d'une relation
d'orientation privilégiée entre les précipités et la matrice. Ces moirés sont la conséquence
d’interactions entre les électrons et les deux réseaux cristallins superposés. Les conditions
pour obtenir ces moirés sont :
- des conditions de structure et/ou d'orientation entre précipités et matrice,
- des condition de diffraction comportant un vecteur diffraction de forte intensité,
- un écart à la loi de Bragg caractérisé par un vecteur s (i.e. une position de la ligne de
Kikushi soulignant le vecteur diffracté choisi), à ajuster pour chaque image (les franges
apparaissent ou disparaissent en fonction de s ). Les taches de diffraction étant issues d’une
transformée de Fourrier de l’échantillon sous forme de lame mince, ces taches ne sont pas
ponctuelles mais forment des volumes en batonnets représentés figure 3-16 qui permettent de
définir le vecteur s .
116
111
111
a) b)
Figure 3-15 Moirés obtenus au MET en deux ondes g = <111>.
θ l’écart à
θB l’angle de Bragg
θ < θB
O s
O G ghkl + s
ghkl
Figure 3-16 Définition du vecteur s , provoqué par un écart à l’angle de Bragg. O est la trace du faisceau
incident, G est la trace du faisceau diffracté. La forme ovale correspond aux diffractions rendues possible
par l’incertitude d’Heisenberg.
Il existe deux types de moirés: les moirés parallèles et les moirés de rotation qui sont
schématisés figure 3-17.
a)
b)
Figure 3-17 Schéma représentant les 2 types de moirés : a) moiré parallèle, b) moiré de rotation.
117
La largeur des franges dépend des distances inter-réticulaires des plans concernés et/ou
de la relation d’orientation précipité-matrice [3-16 Edington 75] :
- moirés parallèles : les plans diffractants des deux cristaux sont parallèles mais ont
des distances inter-réticulaires d1 et d2 légèrement différentes. Les franges produites par ce
d 1d 2
type de moirés sont espacées de D = et sont parallèles aux plans concernés (figure
d1 − d 2
3-17a).
- moiré de rotation: les plans diffractants des deux cristaux ont des distances inter-
réticulaires identiques mais présentent un léger angle de désorientation β. Les franges du
π β
moiré font un angle ± avec les plans des deux cristaux (Figure 3-17b) et sont espacées de
2 2
d
D= .
2 sin (β 2)
Les moirés que nous observons sont toujours perpendiculaires au vecteur diffraction,
donc il s'agit de moirés de type parallèle. Ils sont observés sur les micrographies MET pour
g = <111>γ. La distance entre franges mesurée sur ces images (figure 3-15 a et b) ainsi que sur
toutes les images réalisées dans les mêmes conditions d’orientation <111>γ (plus de 20
moirés) est de 1,6 nm. En considérant les plans {111}γ (d111γ = 0,209 nm) la seule famille de
plans de la structure VC pouvant produire des interférences avec cette distance interfranges
sont les plans {111}VC (d111VC = 0,240 nm pour VC non contraint). La distance interfranges
théorique correspondante vaut D = 1,55 nm, très proche de la valeur mesurée, en raison des
faibles déformations de cohérence résiduelle δ*' mesurées par la méthode d’Ashby. Une
correction du paramètre de maille de VC compte tenu de cette déformation augmente
faiblement la distance interfranges théorique (D = 1,64 nm pour δ*' = 0,6%).
On en déduit donc qu'il s'agit bien de précipités ayant une relation d'orientation cube-
cube : {111}γ // {111}VC. Cette relation d'orientation n'a pas pu être confirmée par un cliché
de diffraction, la petite taille des précipités concernés impliquant un faible volume diffractant
insuffisant pour être observable.
118
3.4.3 Macles de recuit et précipitation
La figure 3-18 montre une macle de recuit contenant des précipités VC. Comme nous
l’avons vu dans la littérature, les plans qui définissent l’interface macle-matrice sont des plans
de type {111}. Le vecteur diffraction g = <111> utilisé est commun à la macle et à la matrice
et est perpendiculaire aux plans d’interface. Il en résulte un angle très faible entre le faisceau
diffracté et le plan d’interface (figure 3-19). L'angle de Bragg vaut θ = 0,006° pour <111>
d’après les calculs effectués pour la méthode d’Ashby. La macle est donc vue "debout". Il est
alors possible de mesurer précisément son épaisseur qui est de 67 nm. En considérant que la
macle traverse la lame mince en épaisseur, il est donc possible de distinguer ce qui est dans la
macle de recuit et ce qui est en dehors. On peut observer que les précipités dans la macle de
recuit présentent le même contraste de déformation que ceux en dehors. Etant semi-cohérents,
ils se sont donc formés après la macle de recuit au cours du traitement de
précipitation/recristallisation.
Interface
matrice/macle
Précipité VC
111
Figure 3-18 Cliché MET champ clair deux ondes g = <111> sur l’échantillon 22-0,6+VC déformé de 10%,
macle de recuit et précipités VC.
119
Figure 3-19 Schéma de représentation de l'orientation particulière : plan {111} commun à la macle et à la
matrice parallèle au faisceau transmis.
3.4.4 Discussion
120
- de gros précipités incohérents et n'ayant aucune relation d'orientation issus de la
précipitation initiale.
Figure 3-20 Description de l'état de précipitation aux différentes étapes de l'élaboration d'un acier
FeMnC+VC. D'après [3-3 Yazawa et al. 04]. OR = orientation, C.R. = laminage à froid, W.Q. = trempe à
l’eau.
Des essais de traction ont étés réalisés sur la nuance 22-0,6+VC, selon la même
procédure que pour les nuances au cuivre. La figure 3-22a présente la courbe de traction
conventionnelle, la figure 3-22b la courbe rationnelle comparée à celle de la nuance de
référence 22-0,6 de petite taille de grains. On observe une augmentation de la contrainte
d’écoulement de 220 MPa que l’on retrouve sur toute la courbe. La déformation à rupture est
identique à celle de la nuance 22-0,6.
121
Figure 3-21 Courbe de traction conventionnelle uniaxiales de la nuance 22-0,6+VC de taille de grains
1,7 µm.
Figure 3-22 Courbes de traction rationnelles comparées des nuances 22-0,6+VC et 22-0,6 de tailles de
grains respectives 1,7 et 3µm.
122
La cission résolue nécessaire au franchissement d’un précipité incohérent par
formation d’une boucle autour du précipité a été d’abord établie par Orowan [3-19 Brown &
Ham 71]:
b
τc = 3.5-1
L
avec L la distance moyenne entre deux précipités voisins le long de la ligne de dislocation,
lorsque la taille des précipités est négligeable devant L.
Connaissant le rayon moyen < r > des précipités, il est possible de relier Ls à la
fraction volumique fv. La fraction volumique est également la fraction surfacique dans le plan
de glissement :
où π<rs²> est la surface moyenne des intersections entre les précipités sphériques et le plan de
glissement. <rs²> est relié au rayon moyen des précipités par la relation :
2
< rs2 >= < r >2 3.5-4
3
123
La fraction volumique se déduit de la fraction atomique :
3
a VC
fv = f 3 3.5-7
aγ
Si on suppose que tout le vanadium a précipité, une teneur de 0,21% conduit à fv = 3,2 ‰, soit
pour µ = 60 GPa, b = 0,255 nm et < r > = 3,4 nm (figure 3-9), σ VC = 430 MPa .
La figure 3-23 présente les coefficients d’écrouissage instantanés des deux nuances.
L’écrouissage de la nuance 22-0,6+VC est fort mais plus faible que celui de la nuance 22-0,6.
Ce faible taux d’écrouissage peut s’expliquer du fait que la limite d’élasticité est plus élevée.
En pré-écrouissant la nuance 22-0,6 à un niveau de contrainte égal à la limite d’élasticité de la
nuance 22-0,6+VC, on constate que les taux d’écrouissage sont très proches, ce qui montre
qu'à contrainte d'écoulement égale, les carbures de vanadium ne modifient l’écrouissage.
124
Figure 3-23 Coefficient d'écrouissage instantané des nuances 22-0,6, 22-0,6 pré-écrouie et 22-0,6+VC.
Une déformation d’environ 10% a été réalisée par pliage sur la nuance 22-0,6+VC. Le
matériau a ensuite été observé au MET avec pour objectif l’étude des interactions précipités-
macles.
Les figure 3-24 a et b ont été prises le long d’une macle de déformation. L’image a)
nous permet de détecter la présence d’un précipité de 15 à 20 nm de diamètre sur le trajet de
la macle de déformation. La figure 3-24b est prise dans les mêmes conditions que la figure
3-18, c'est-à-dire les plans de macle {111} sont perpendiculaires au plan de l’image. Cette
image permet :
- de constater, que la macle n'est pas bloquée par le précipité, mais a franchi celui-ci (en
admettant qu'elle occupe toute l’épaisseur de la lame mince),
- de mesurer l’épaisseur de la macle : 2,7 nm. Cette épaisseur correspond à 13 plans
{111} de la matrice et environ 11 plans {111} de carbure de vanadium non contraint,
125
- de constater la présence de dislocations autour du précipité.
Macle
mécanique
Précipités
VC
220
a)
Macle
mécanique
Précipité
VC
111
Dislocation
b)
Figure 3-24 Clichés champ clair deux ondes sur un précipité en interaction avec une macle a) g = <220> b)
g = <111> commun à la macle et à la matrice.
126
- même s'il existe une relation d'orientation cube-cube entre le précipité et la matrice, il
a été montré que les précipités étaient semi-cohérents avec une très faible cohérence.
Ceci interdit le cisaillement du précipité par toutes les dislocations partielles du front
de macle qui nécessiterait la continuité de 13 plans denses consécutifs entre le
précipité et la matrice,
- la dislocation observable près du précipité peut être une dislocation secondaire émise
pour relaxer les contraintes dues aux incompatibilités de déformation entre le précipité
et la phase maclée.
Les clichés figure 3-25 ont été réalisés en choisissant une tache de diffraction
commune aux macles (qui appartiennent au même système) et à la matrice, comme
précédemment, ce qui nous permet de bien définir les zones maclées et non maclées. Sur la
figure 3-25b on observe qu’une des macles est en contact avec un précipité incohérent de
grande taille (80 nm de diamètre). Ce précipité est proche d’un joint de grains. La figure
3-25c est un cliché en champ sombre en sélectionnant simultanément deux faisceaux
diffractés proches. L’un est un faisceau diffracté par le précipité, l’autre par la matrice du
grain voisin de ce précipité. Comme attendu, le précipité n’a pas de relation d’orientation avec
le grain dans lequel il se trouve. Les deux taches de diffraction sont proches par pur hasard
des orientations du précipité et du grain voisin.
127
111
111
a) b)
c)
Figure 3-25 a) et b) : Clichés MET en champ clair deux ondes g = <111> commun à la matrice et à la
macle après déformation de 10%. c) cliché MET champ sombre g = <111> en sélectionnant une tache
diffractée par le précipité et une tache voisine, diffractée par le grain voisin.
De même que pour un précipité de petite taille, il n’y a pas de preuve d’interaction
forte entre le précipité de grande taille et la macle. Trois macles mécaniques appartenant au
même système de maclage sont visibles sur la figure 3-25a. On n’observe pas de différence de
morphologie entre celle en contact avec le précipité et les deux autres. Le précipité n’apparaît
pas comme un site privilégié de germination de la macle ni comme un obstacle fort à son
développement. Une explication possible est son contournement par les partielles du front de
macle, mais qui devraient laisser des boucles de dislocations qu’il nous a été difficile
d’observer. Il est à noter que chaque macle est d’épaisseur variable, en raison d’une activité
128
d’un second système sécant ou de la déviation de certaines partielles du front (des fautes
d’empilement sont observables entre les trois macles). Là encore, le précipité ne semble pas
jouer de rôle majeur dans ce mécanisme.
Un des problèmes industriels posés par le développement des aciers TWIP est une casse
différée due à l’hydrogène, observée sur des pièces embouties en retreint après vieillissement
à température ambiante. Une solution à ce problème est de piéger l’hydrogène libre en
solution par les précipités de carbure de vanadium [3-22 Brevet Arcelormittal 05]. Les études
menées sur ce sujet ne permettent pour l’instant pas de déterminer la nature de l'origine du
piégeage (chimique ou élastique) ni le lieu de stockage (dans ou autour des précipités). Une
des analyses possibles à partir de ce qui a été présenté précédemment est l'étude du piégeage
de l'hydrogène dans le champ de contrainte autour des précipités. Cette étude a été faite par
éléments finis.
L'hydrogène diffuse dans l'austénite dans les sites octaédriques et distord le réseau.
D'un point de vue des déformations produites dans la matrice, chaque atome d'hydrogène peut
être considéré comme une source ponctuelle d'expansion. L'hydrogène est donc sensible aux
gradients de contraintes hydrostatiques qui interviennent dans les lois de diffusion [3-23
Chateau et al. 02]. Il diffuse des zones en compression vers les zones en dépression. Dans un
milieu infini contenant une concentration volumique initiale uniforme C0 (mol/m3) en
129
hydrogène, un champ de contraintes hydrostatiques σ H ( r ) conduit au profil de
concentration :
V* 2E γ V *
C( r ) = C 0 exp σ H ( r ) − (C(r ) − C 0 ) 3.6-1
RT (
9 1− νγ )
C( r ) V *σ H ( r )
≈ exp 3.6-2
C0 RT
Le calcul des contraintes autour d'un précipité sphérique cohérent dans le cas de
matériaux isotropes montre que la contrainte hydrostatique σH = 1/3 (σr + σθ + σϕ) est
négative dans le précipité (expressions 3.2-6) et nulle en tout point dans la matrice
(expressions 3.2-7). Même si les précipités que nous avons observés semblent sphériques au
MET, des précipités en forme d'ellipsoïde aplati ont été observés à Arcelormittal. Nous avons
calculé le champ de contrainte autour de tels précipités, avec les désaccords paramétriques
précédents, par éléments finis.
La figure 3-26 présente le maillage utilisé dans le cas général d'un précipité ellipsoïdal.
Le problème est axi-symétrique autour de l'axe horizontal et la section du précipité est
modélisée par un quart d'ellipse. La boîte de simulation est de 40 nm x 40 nm. Les surfaces
externes sont laissées libres, le résultat dépendant peu des conditions aux limites tant que
l'inclusion est relativement petite comparée à la boîte de simulation. Le chargement appliqué
est une dilatation isotrope du précipité afin de simuler un désaccord paramétrique (relaxé ou
non par des dislocations d'interfaces). Le résultat du calcul est celui de l'inclusion d'Eshelby.
La méthode numérique offre simplement l'avantage d'être rapide à mettre en œuvre. Les
constantes d'élasticité des deux matériaux sont celles données précédemment (Eγ = 160 GPa,
130
νγ = 0,3, EVC = 520 GPa, νVC = 0,15). Le calcul réalisé est un calcul de contraintes
thermiques. La déformation non contrainte δ du précipité a été simulée en affectant
artificiellement un coefficient de dilatation de 1 K-1 à l'inclusion, de 0 K-1 à la matrice et un
élévation de température de +δ K.
Figure 3-26 Maillage autour d'un précipité ellipsoïdal en axi-symétrique. Les conditions aux limites sont
des frontières libres.
La figure 3-27 présente la comparaison des résultats par éléments finis et ceux du
calcul analytique (expressions 3.2-6 et 3.2-7) pour un précipité sphérique de rayon 10 nm
cohérent (δ = 15,4%). Les résultats sont exprimés dans le repère de coordonnées polaires dans
le plan de simulation et sont donc directement comparables aux résultats analytiques dans le
repère de coordonnées sphériques. Les deux modèles sont en très bon accord. Le précipité
subit une compression hydrostatique, la matrice une compression radiale et une traction
tangentielle, mais une contrainte hydrostatique négligeable.
131
Figure 3-27 Evolution des contraintes en fonction de la distance au centre d'un précipité sphérique le long
de l'axe de symétrie cylindrique du calcul par éléments finis (δ
δ = 15,4%) ; comparaison avec le modèle
analytique.
132
celle sur la boîte de simulation entière (40 nm x 40 nm) une diminution moyenne de 0,18%
non significative. La capacité de stockage d'hydrogène autour du précipité est donc limitée et
localisée dans le proche voisinage du précipité.
Figure 3-28 a) Cartographie des contraintes hydrostatiques autour d'un précipité ellipsoïdal, b) profil de
ségrégation d'hydrogène correspondant.
Les contraintes hydrostatiques autour d'un précipité qui varient en 1/r3 sont peu
efficaces pour piéger l'hydrogène à longue distance. Il apparaît donc que la diminution de la
sensibilité à la casse différée soit due vraisemblablement à un piégeage de l'hydrogène de
nature chimique par le carbure de vanadium.
3.7 Conclusion
133
matrice autour d'un précipité semi-cohérent. Les précipités de petite taille présentent des
contrastes de déformation au MET caractéristiques d’un certain degré de cohérence. La
mesure de la déformation de la matrice à partir de ces lobes de contraste par la méthode
d’Ashby & Brown sur des précipités de différentes tailles montre qu'elle est de quelques
dixièmes de pourcents et qu'elle diminue lorsque la taille du précipité augmente. Une
régression linéaire sur ces mesures prévoit une perte totale de cohérence à partir d'environ
30 nm de diamètre.
134
3.8 Bibliographie
135
Edington J. W., Practical Electron Microscopy in Material Science, (1975) T3 p81-84 publié
par Philips Technical Library
[3-17 Ashby & Brown 63]
Ashby M.F. & Brown L.M., Philosophical magazine, 8 (1963) p1649
[3-18 Howie & Whelan 1961]
Howie A., Whelan M.J., Proc. roy. Society A, 263 (1961) p217
[3-19 Brown & Ham 71]
Brown L.M. & Ham K., Strengthening by dislocations substructures in Strengthening
Methods in Crystals by Kelly and Nicholson Chap. 6 (1971) p9-135, Elsevier Pub. Cie. LTD
[3-20 Foreman & Makin 66]
Foreman A.J.E. & Makin M.J., Philosophical Magazine, 14 (1966) p911-924
[3-21 Ardell 85]
Ardell A.J., Metallurgical Transactions A, 16A (1985) p2131-2165
[3-22 Brevet Arcelormittal 05]
Scott C., Cugy P., Roscini M., Dez A.E. & Cornette D., brevet n° 2 881 144 (21/01/2005)
déposé pour la France, l’Europe et le Monde
[3-23 Chateau et al. 02]
Château J.P., Delafosse D. & Magnin T., Acta Materialia, 50 (2002) p1507-1522
[3-24 Chêne & Brass 90]
Chêne J. & Brass A.M., Corrosion Sous Contrainte, phénoménologie et mécanismes,
Desjardins D. et Oltra R. eds., les éditions de physique (1990)
136
Chapitre 4
Comportement mécanique d’un acier
composite FeMnC/TiC
137
138
4 Comportement mécanique d’un acier composite
FeMnC/TiC
4.1 Introduction
L’introduction d’une phase rigide et dure comme TiC dans une matrice plus molle
permet d’augmenter sa tenue mécanique par transfert de charge et en produisant un fort
durcissement en début de déformation plastique par incompatibilités de déformation autour
des particules. En fonction de la fraction volumique de TiC, il est aussi possible d’augmenter
le module d’Young selon une loi de mélange et, en fonction de la fraction volumique et de la
taille des particules, d’augmenter la contrainte d’écoulement. D’autre part le carbure de titane
a une densité de 4,93 g.cm-3 (contre 7,91 g.cm-3 pour l’austénite FeMnC). Il est donc
également un bon candidat pour diminuer la densité de l’alliage. Contrairement aux carbures
de vanadium du chapitre précédent, le but est ici de faire précipiter des particules de TiC
ayant une taille proche de la taille des grains austénitiques. Nous étudions l’influence de
particules dures sur la déformation plastique de la matrice FeMnC et en particulier la capacité
d’accommodation des incompatibilités de déformation par effet TWIP.
139
Nous présentons dans un premier temps la solidification d’un alliage ternaire nickel-
titane-carbone à titre de comparaison et l’élaboration d’une nuance FeMnC + TiC
préliminaire à notre étude, permettant d’identifier quelques précautions à prendre au cours de
l’élaboration. Nous présentons ensuite les compositions choisies et caractérisons la
microstructure de l’acier composite aux différentes étapes de l’élaboration : matériau brut de
coulée et brut de laminage à chaud. La microstructure intragranulaire est ensuite caractérisée
au MET. Les résultats des essais de tractions sont enfin présentés et discutés en fonction des
observations en microscopie optique et électronique avant et après déformation.
D. Strzęciwilk et al. [4-3 Strzęciwilk et al. 03] ont étudié la précipitation à haute
température du TiC dans une matrice CFC dans le cas du nickel. L’objectif de leur étude était
d’étudier de nouvelles possibilités de production de monocristaux TiC en utilisant le nickel
comme solvant à haute température. Les auteurs ont donc étudié plusieurs compositions du
ternaire Ni-Ti-C et caractérisé chacune d’elle après solidification quasi-statique par
métallographie optique, MET et diffraction de rayons X. Le nickel est un matériau CFC de
paramètre de maille 0,352 nm [4-4 Taylor 50], proche de celui de l’austénite FeMnC. Le
diagramme de solidification TiC/Ni est présenté figure 4-1. Ce diagramme présente un point
pseudo-eutectique, point où le liquide se transforme en TiC + Ni à température constante et de
façon homogène dans le matériau.
140
microstructure solidifiée correspondante. Lorsque le liquide eutectique se solidifie, il y a
initialement germination de l’une des deux phases solides (figure 4-2). La formation de la
première phase s’accompagne du rejet des éléments constituant la deuxième phase dans le
liquide environnant. Lorsque la concentration de ces éléments est suffisamment
importante il y a germination de la deuxième phase. On assiste alors à la formation de
lamelles de phases alternées. En fonction des systèmes métallurgiques, ces lamelles
s’organisent parfois avec des angles entre elles pour former une structure en « labyrinthe »
telle qu’on l’observe figure 4-3B.
Figure 4-1 Diagramme de solidification pseudo-binaire TiC/Ni. D’après [4-3 Strzęciwilk et al. 03].
Fe + Mn
Ti + C
TiC
germe γ plaquette γ
TiC
Ti + C
Fe + Mn
Figure 4-2 Schéma de solidification eutectique en plaquettes alternées, germination d’une plaquette
d’austénite suivie de plaquettes TiC.
2. les compositions de teneur en nickel plus faibles que l’eutectique (C < CEx) sont
représentées par la ligne de composition Cx sur la figure 4-1. Entre les températures TL et
TEx (eutectique), il y a formation de particules TiC pré-eutectiques selon la réaction
141
liquide → liquide + TiC. On parle de TiC primaires. La structure finale est donc
composée d’une part de particules TiC de grande taille pré-eutectiques, en haut de lingot,
qui ont flotté dans le liquide de part leur faible densité et d’autre part de TiC transformés à
la température eutectique, répartis de façon homogène. Il en résulte la microstructure de la
figure 4-3A.
3. pour les compositions plus riches en nickel que l’eutectique (C > CEx), lors de la
solidification, la première réaction qui se produit est : liquide → liquide + Ni. Le nickel
solide n’a pas une densité très différente du liquide et ne flotte pas. A la température
eutectique, le liquide résiduel se transforme en Ni + TiC de façon homogène.
Une partie du travail de Strzęciwilk et al. a consisté à déterminer CEX sur la base de ses
observations microstructurales pour différentes compositions.
Cette étude du ternaire NiTiC est un cas plus simple que l’étude du quaternaire
FeMnTiC. Il nous permet d’anticiper la problématique de l’élaboration de l’acier composite γ
+ TiC. Il faut noter que les diagrammes de solidification binaires sont habituellement
présentés avec la phase majoritaire (pour nous l’austénite) à gauche alors que le diagramme
de solidification de la figure 4-1, TiC est à gauche.
142
Dans notre cas, nous parlerons de compositions hypo-eutectiques pour les aciers
formant de l’austénite avant la température eutectique (cas 3) et de composition hyper-
eutectique pour les aciers formant des TiC primaires (cas 2). Il faut éviter les compositions
hyper-eutectiques (cas de la figure 4-3A) puisqu’une telle hétérogénéité dans l’épaisseur du
lingot se retrouvera dans la tôle après laminage à chaud et favoriser la formation d’austénite
pré-eutectique pour éviter la flottaison des particules TiC dans le liquide.
Une expérience préliminaire a été réalisée (par Christine Colin à Arcelormittal) afin
d’estimer la faisabilité des aciers FeMnC + TiC. L’objectif était d’avoir une base pour la
conception des compositions de l’étude de ces aciers. La composition de la coulée (coulée
expérimentale de 1 kg) est de 22%Mn, 1,35%C, 3%Ti (% massique) et le complément en fer.
La figure 4-4a montre une organisation du TiC dans le lingot brut de coulée sous forme de
plaquettes organisées, caractéristiques d’une transformation eutectique (figure 4-3B). La
présence d’un grain d’austénite ne contenant pas de particule TiC indique que cette zone est
de composition hypo-eutectique, ce grain ayant germé dans le liquide avant la température
eutectique. La figure 4-4b montre une distribution de TiC qui serait homogène en l’absence
des quelques particules de grande taille (>50 µm) observées. Ce sont des TiC primaires
solidifiés à un endroit où le liquide était de composition hyper-eutectique.
TiC primaires
10 µm
100 µm
a) b)
Figure 4-4 Métallographie de l'échantillon préliminaire FeMnC + TiC a) micrographie MEB sur
l’échantillon brut de coulée, structure eutectique et grain hypo-eutectique. b) microscope optique sur
l’échantillon brut de laminage à chaud ; présence de TiC primaires.
143
Cette hétérogénéité de composition dans le matériau brut de coulée est due à un
mélange insuffisant lors de l’élaboration de cette faible quantité de matière (1 kg). On
retrouve donc des particules de grande taille de TiC primaires à la surface de la tôle après
laminage à chaud. Comme le montre l’étude de la surface de rupture des éprouvettes de
traction figure 4-5, la rupture est amorcée par les TiC primaires qui provoquent une
localisation de la déformation. Les propriétés en traction de cette nuance sont dégradées par
cette hétérogénéité de taille des particules : Re = 447 MPa, Rm = 889 MPa et A% = 20%. Si
la limite d’élasticité est augmentée, l’allongement est nettement réduit.
20 µm
Figure 4-5 Fractographie effectuée au MEB d'une éprouvette de traction de l'échantillon FeMnC + TiC
préliminaire. On distingue les facettes des particules de grande taille.
Suite au laminage à chaud, la stoechiométrie des particules TiC a été vérifiée par
microsonde de Castaing. La moyenne des 4 mesures réalisées est de 80 % Ti en masse, ce qui
correspond à 50,1 % Ti et 49,9 % C atomiques. Les TiC étudiés sont donc stœchiométriques :
Ti1C1. La même expérience a été effectuée sur la matrice austénitique de l’acier composite.
Elle nous a permis d’avoir la teneur en titane résiduel en solution solide dans le matériau brut
de laminage à chaud. La teneur en carbone n’est pas mesurable avec exactitude pour cause de
contamination sous le faisceau électronique. La mesure donne 0,17% massique de titane en
solution dans l’austénite (0,19% at). Le volume d’austénite dosé est de l’ordre du µm3 et la
présence éventuelles de précipités intragranulaires (comme observée au MET sur les autres
nuances présentées dans la suite du chapitre) fausse ce résultat. On peut donc seulement
considérer qu’il y a au maximum 0,17% massique de titane en solution solide.
144
4.2.3 Compositions choisies
Coulée (% massique)
EFE (mJ/m²)
Mn C Ti
La teneur en titane résiduel en solution mesurée pendant l'étude préliminaire est faible
devant les quantités introduites. Les compositions en carbone ont été calculées de manière à
obtenir une matrice austénitique avec des teneurs en carbone résiduel proche de 0,4% pour la
nuance 18-0,8-1,6 et 0,6% pour les trois autres. Les matrices austénitiques ont donc des
compositions proches de 18-0,4, 18-0,6 et 21-0,6, plus du titane en quantité non maîtrisée. Les
nuances 18-0,8-1,6 et 18-1-1,6 ont des teneurs en manganèse et carbone plus faibles afin
d’anticiper l’effet gammagène du titane restant en solution solide. En fraction atomique, le
titane représente environ 3 % pour la nuance 21-1,2-2,7 et 2 % pour les trois autres. La
nuance 21-1,2-2,7 contient plus de titane et de carbone pour obtenir une fraction volumique
de TiC supérieure, à matrice austénitique visée proche de celle de la nuance 21-1-1,6.
Une mesure de chimie locale par microsonde de Castaing sur la nuance 18-0,8-1,6
donne environ 0,4% Ti massique pour un volume contenant des précipités TiC
145
intragranulaires (voir figure 12 dans la suite). Les valeurs d’EFE données à titre indicatif dans
le tableau 4-1 sont les bornes maximales (0,4%Ti en solution solide) et minimales (0%Ti en
solution solide) calculées par le modèle thermochimique présenté au chapitre 1.
La distribution des TiC à l’état brut de coulée des quatre nuances est présentée figure
4-6. Les particules TiC sont réparties de façon homogène dans le volume du lingot. Quelques
amas sont visibles, notamment sur les nuances 18-1-1,6 et 21-1,2-2,7 mais on ne constate pas
de particules de taille supérieure à 50 µm comme on a pu le voir sur la nuance préliminaire à
cette étude. Quelques micro-retassures sont observables. Deux populations de TiC sont
observées : une population de particules cubiques et une population de particules de forme
allongée. Lors de la solidification il y a croissance d’austénite sous forme de dendrites à cause
de la vitesse de solidification élevée. Le coefficient de partage conduit à un enrichissement
progressif du liquide interdendritique en titane et carbone. La précipitation a ensuite lieu dans
le liquide interdendritique lorsque les concentrations de ces deux éléments sont suffisamment
importantes. Cette précipitation prend alors deux formes : précipités TiC primaires cubiques
ou précipités TiC eutectiques de forme allongée. La forme cubique des TiC primaires est due
à une croissance latérale favorisée pour les plans de type {001} d’après [4-3 Strzęciwilk et al.
03].
146
Structure
dendritique
a) 18-0,8-1,6
TiC
primaires
Précipités
eutectiques
b) 18-1-1,6
147
Précipités
eutectiques
c) 21-1-1,6
Micro
retassures
d) 21-1,2-2,7
Figure 4-6 Micrographies optiques à deux échelles différentes pour chaque nuance brute de coulée ; TiC
primaires et eutectiques. a) canaux dendritiques, d) microretassures.
148
4.2.5 Caractérisation de la microstructure à l’état laminé à chaud
Passe de laminage
TFL
Figure 4-7 Température et effort de laminage mesurés au cours du laminage à chaud de la nuance
18-0,8-1,6. La mesure de température est effectuée avec un pyromètre d'un seul coté de la cage de
laminage, raison pour laquelle la mesure est partielle.
149
4.2.5.1 Formes et tailles des particules TiC
Direction de Laminage
a) 18-0,8-1,6
Direction de Laminage
Sens travers Sens long
b) 18-1-1,6
150
Direction de Laminage
c) 21-1-1,6
Direction de Laminage
d) 21-1,2-2,7
Figure 4-8 Micrographies optiques des échantillons FeMnTiC bruts de laminage à chaud. Le sens de la
prise de vue est indiqué.
151
Laminoir Surface en sens
long
Tôle
Surface en sens
travers
Figure 4-9 Schéma de la tôle en sortie de laminage, représentation des sens long et travers de laminage.
La figure 4-10 présente les distributions de tailles des particules pour chaque nuance,
mesurée par analyse d’image sur les micrographies optiques. Les distributions d’aire sont
centrées sur une valeur trop faible pour être détectée. La taille moyenne des particules (en
aire) ainsi que leur fraction surfacique dans le plan d’observation a été mesurée par analyse
d’image (tableau 4-2). La taille moyenne des particules est de 4 à 6 µm2, la nuance 21-1,2-2,7
présente bien une fraction surfacique de TiC plus importante.
18-0,8-1,6 18-1-1,6
21-1-1,6 21-1,2-2,7
Figure 4-10 Distribution d'aires des précipités TiC des quatre nuances à l'état laminé à chaud sur des
zones de taille supérieure à 20.104 µm². La population mesurée est supérieure à 1000 particules de TiC.
152
Taille moyenne des Fraction surfacique Fraction volumique
particules TiC (µm²) de TiC (%) théorique (%)
18-0,8-1,6 6,46 3,7 4,3
18-1-1,6 6,21 3,6 4,2
21-1-1,6 4,7 4,7 3,9
21-1,2-2,7 4,26 9,6 6,7
Tableau 4-2 Taille moyenne des particules TiC et fractions surfaciques mesurées par analyse d'image et
fraction volumique théorique maximale.
153
Traces d’oxydation
18-0,8-1,6 10 µm 18-1-1,6
21-1-1,6 10 µm 21-1,2-2,7
Figure 4-11 Métallographie optique après attaque Bechet-Beaujart des échantillons FeMnTiC laminés à
chaud.
L'intérieur des grains a été observée au MET afin de détecter la présence ou non de
macles, de fautes d’empilement, de dislocations ou de précipités intragranulaires. Les lames
minces ont été préparées par polissage mécanique parallèle au Tripod jusqu'au diamant 1 µm
puis par amincissement ionique (PIPS).
154
4.2.6.1 Echantillon 18-0,8-1,6
Fautes
d’empilement
200 nm
Figure 4-12 Micrographie MET en champ clair deux ondes g=<111> de l’échantillon 18-0,8-1,6 après
laminage à chaud. Les précipités intragranulaires et les fautes d’empilement sont désignés par des flèches.
Les lignes pointillées indiquent l’alignement de plusieurs précipités.
155
111 Précipités
incohérents
Figure 4-13 Micrographie MET en champ clair deux ondes g=<111> de l’échantillon 18-0,8-1,6 après
laminage à chaud.
156
111
Fautes
d’empilement
Figure 4-14 Micrographie MET en champ clair deux ondes g=<111> de l’échantillon FeMnTiC 18-0,8-1,6
après laminage à chaud.
Dislocations
TiC
Figure 4-15 Micrographie MET en champ clair multi-ondes de l’échantillon 18-0,8-1,6 après laminage à
chaud. Particule intergranulaire cubique de grande taille.
157
4.2.6.2 Echantillon 18-1-1,6
Fautes 111
Dislocations d’empilement
Macles
Précipité
Figure 4-16 Micrographie MET champ clair deux ondes g=<111> de l’échantillon 18-1-1,6 après laminage
à chaud. Les précipités, les macles, les dislocations et les fautes d’empilement sont indiqués.
158
111
Précipités
Macles
Précipités
franchis par une
macle
Figure 4-17 Micrographie MET champ clair deux ondes g=<111> de l’échantillon 18-1-1,6 après laminage
à chaud. Macles mécaniques ayant franchi plusieurs précipités.
Aucune faute d’empilement ni aucune macle n’a été observée dans la lame mince de
cette nuance (figure 4-18). En revanche, une forte densité de dislocations a pu être observée.
Ces dislocations sont organisées en parois (figure 4-19). L'observation d’un de ces sous-joints
en faisceau faible révèle le réseau des dislocations (figure 4-20). De nouveau, on constate la
présence de précipités TiC intragranulaires.
159
Précipité
TiC
Forte densité
de dislocations
Particule TiC
Figure 4-18 Micrographie MET en champ clair multi-ondes de l’échantillon 21-1-1,6 après laminage à
chaud. Un précipité intragranulaires, une particule TiC et les dislocations sont indiqués.
Parois de dislocations
111
Figure 4-19 Micrographie MET en champ clair deux ondes g=<111> de l’échantillon 21-1-1,6 après
laminage à chaud. Les parois de dislocations sont indiquées.
160
Joint de grain
Précipité
TiC
Zoom
200 nm
220
Distance entre
dislocations
Figure 4-20 Micrographie MET en champ sombre, faisceau faible g=<220> de l’échantillon 21-1-1,6 après
laminage à chaud. Réseau de dislocations organisées en sous-joint. L'observation permet de mesurer la
distance entre dislocations dans le réseau.
161
4.2.6.4 Echantillon 21-1,2-2,7
111
a)
Dislocations
b)
162
220
c)
Figure 4-21 Micrographies MET de l'échantillon 21-1,2-2,7, a) champ clair deux ondes g = <111> sur un
précipité intragranulaire de petite taille semi-cohérent, b) champ clair multi-onde sur un précipité
incohérent de grande taille et c) faisceau faible g=<220> montrant un réseau de dislocations.
4.2.7 Discussion
Le tableau 4-3 résume l’étude sur les échantillons non déformés qui a porté sur les
éléments de microstructure (précipités, taille de grains) et les défauts cristallins (dislocations,
fautes d’empilement, macles).
163
l’effet du titane en solution solide qui augmente la température de non recristallisation et la
présence de précipités intragranulaires qui freinent la migration des joints de recristallisation.
Aucune évidence d’augmentation locale du taux de germination (PSN Particule Stimulated
Nucleation) de nouveaux grains recristallisés autour des particules grâce à une déformation
plastique plus grande n'a été observée.
Les dislocations (et plus généralement les autres défauts cristallins) observés sur toutes
les nuances ont donc deux origines : l’absence de recristallisation en fin de laminage à chaud
et une densité de dislocations nécessaires à l’accommodation de la différence de coefficient de
dilatation entre carbure et matrice austénitique lors du refroidissement.
Lors du refroidissement on constate que pour les nuances à plus faible teneur en
manganèse ou en carbone et plus faible énergie de faute d’empilement, l’accommodation des
contraintes internes se fait par création de fautes d’empilement voir de macles mécaniques.
Pour les nuances à plus forte EFE on observe une forte densité de dislocations non dissociées,
organisées en parois.
La figure 4-22 montre un cliché de diffraction réalisé sur une particule TiC faisant
l’épaisseur de la lame. Il a été indexé comme étant du carbure de titane sans autre structure
diffractée. Le paramètre de maille obtenu est de 4,38 Å. D’après la littérature [4-3
Strzęciwilk et al. 03], cette valeur correspond à un très faible écart à la stœchiométrie et
confirme l’analyse chimique effectuée au début de ce chapitre.
164
-13-1
220
3-11
Figure 4-22 Cliché de diffraction obtenu au MET sur une particule TiC, axe de zone [-114].
La figure 4-23 présente des micrographies réalisées au MET sur des particules TiC
cubiques. On observe la présence de dislocations à l’intérieur des TiC, due à leur déformation
au cours du laminage à chaud. TiC étant une céramique ayant une forte friction de réseau à
température ambiante, on vérifie que les particules ne se déforment pas au cours des essais de
traction présentés dans la suite. La microstructure de dislocations est similaire avant et après
traction.
220
220
a) b)
Figure 4-23 Micrographies MET deux-ondes g = <220> dans une particule TiC a) échantillon 18-1-1,6
avant traction et b) échantillon 21-1-1,6 après traction.
165
4.3 Comportement mécanique en traction
Les essais de traction quasi-statiques ont étés effectués avec la même procédure que
les essais effectués sur les nuances étudiées dans les chapitres précédents, à une vitesse de
traverse constante imposant une vitesse de déformation nominale de 8,3.10-3 s-1. Trois
éprouvettes de type ISO 12,5x50 d’épaisseur d’environ 2,5 mm ont été déformées par nuance.
Les éprouvettes ont été usinées par usinage à ultra-haute vitesse dans la direction transverse à
la direction de laminage (figure 4-24).
Direction de
traction
Direction de
Eprouvette de laminage
traction
Tôle laminée
Figure 4-24 Découpe des éprouvettes de traction dans les tôles laminées à chaud. La direction de traction
est perpendiculaire à la direction de laminage.
166
Figure 4-25 Courbes conventionnelles de traction pour les nuances FeMnTiC de taille de grains 12 µm.
Figure 4-26 Courbes rationnelles de traction pour les nuances FeMnTiC de taille de grains 12 µm.
Comparaison avec la nuance 22-0,6 de même taille de grains.
167
Allongement
Limite d'élasticité Résistance
homogène
(MPa) mécanique (MPa)
(%)
18-0,8-1,6 372 935 35,9
18-1-1,6 378 1010 44,9
21-1-1,6 506 996 33,9
21-1,2-2,7 469 946 26,3
22-0,6 285 889 56,5
Tableau 4-4 Mesure des caractéristiques mécaniques en traction des nuances FeMnTiC et comparaison
avec la nuance de référence.
Les nuances 21-1-1,6 et 21-1,2-2,7 contiennent à l'état brut de laminage à chaud des
dislocations organisées en parois formant des obstacles supplémentaires à la plasticité. Cette
organisation de dislocations explique la limite d'élastique plus élevée pour ces nuances,
comparée aux deux autres. En effet, des murs de dislocations en configuration stable
contrôlent la contrainte d’écoulement [4-8 Embury 71]. Il est possible d'estimer, à partir des
densités de dislocations dans les sous-joints observés au MET, le gain en limite d'élasticité
apporté par ces dislocations. En faisant l’hypothèse, validée par Hull [4-9 Hull et al. 63] ainsi
que Keh et Weissman [4-10 Keh & Weissman 63] que la densité de dislocations dans les
parois de dislocations ρ parois est de l’ordre de 10 à 20 fois la densité moyenne de dislocations,
Embury [4-8 Embury 71] propose d’écrire la limite d’élasticité σ e comme suit :
168
L'échantillon 18-1-1,6 a une limite d'élasticité sensiblement égale à celle de
l'échantillon 18-0,8-1,6 et plus faible que les deux précédentes. Cela signifie que
l’organisation en sous-joints est un obstacle plus fort à la plasticité que la structure de macles
et de fautes d’empilement observée sur ces échantillons de plus faibles teneurs en manganèse
et en carbone et de plus faible EFE.
La figure 4-27a présente les courbes de coefficient d’écrouissage pour les aciers
FeMnTiC calculées de la même manière que dans les chapitres précédents, c'est-à-dire en
ajustant un polynôme de degré 6 sur l’ensemble de la partie plastique de la courbe de traction.
La figure 4-27b présente les courbes de coefficient d’écrouissage en ajustant cette fois-ci un
polynôme de degré 6 sur les 20 premiers pourcent de déformation afin de mieux prendre en
compte les fortes pentes observées figure 4-25 et figure 4-26 en début d’essai. Les nuances au
titane ont toutes des coefficients d’écrouissage plus faibles que la nuance de référence 22-0,6,
excepté en début d'essai.
a)
169
b)
Figure 4-27 Courbes de coefficient d'écrouissage des nuances FeMnTiC et 22Mn0,6C : a) calculées à
partir de polynômes ajustés sur toute la partie plastique des courbes de traction (la première bissectrice
est représentée en pointillés afin de situer le critère de Considère) et b) calculées à partir de polynômes
ajustés sur les 20 premiers pourcents.
Le coefficient d’écrouissage est plus fort pour les nuances au titane en début de
déformation du fait de la forte pente de la courbe rationnelle et est caractéristique d'un effet
composite. En effet, si le matériau composite est soumis à une déformation et que les
particules TiC dures ne se déforment pas, il y a création d’un gradient de déformation dans la
matrice dû aux incompatibilités avec les particules. Les dislocations introduites dans la
matrice afin d’accommoder ce gradient de déformation entre particule et matrice induisent un
fort écrouissage [4-11 Kelly 71]. La figure 4-28 montre que l'effet TWIP participe à ce
durcissement par effet composite : près des particules, des macles privilégiant une orientation
parallèle aux interfaces particule/matrice se développent. Ce durcissement dû aux particules
sature lorsque la contrainte augmente, de sorte qu'il ne se manifeste sur l’écrouissage qu’en
début de déformation.
170
Particule
TiC
Figure 4-28 Micrographie MET en champ clair utour d'une particule TiC cubique dans la nuance 18-1-1,6
après rupture (les lignes pointillées indiquent la trace de macles mécaniques.
Comme cela a été fait pour l'acier contenant des carbures de vanadium au chapitre
précédent, nous avons comparé l'écrouissage de la matrice austénitique de la nuance 21-1-1,6
à celle de la nuance 22-0,6 pré-écrouie à un niveau de contrainte égal à la limite d'élasticité de
la nuance 21-1-1,6 (506 MPa). Elle nous permet de comparer les taux d’écrouissage au cours
de la déformation, à contrainte d'écoulement égale (figure 4-29). Les coefficients
d'écrouissage résultants sont très proches. La présence des particules TiC ne semble donc pas
modifier l'écrouissage par effet TWIP de l'austénite après saturation du durcissement par effet
composite. Les micrographies optiques (figure 4-30) et au MET (figure 4-31) après
déformation montrent une structure de maclage similaire à celles observées dans la nuance
22-0,6 (activation dans les grains de 2 systèmes de maclage). L’angle entre les traces des
macles et la direction de traction varie entre 20 et 45° sur la figure 4-30, ce qui est compatible
avec une sélection de plusieurs systèmes de maclage dans chaque grain selon une loi de
Schmid comme pour la nuance 22-0,6.
171
tend à montrer que leurs EFE se situeraient dans la partie haute des intervalles calculés au
tableau 4-1 et donc qu'une proportion non négligeable du titane est présent en solution.
Figure 4-29 Courbes du coefficient d'écrouissage de la nuances 21-1-1,6 et de l'acier 22-0,6 pré-écroui de
8,5% de sorte à avoir la même contrainte d'écoulement à ε = 0.
172
a) 18-0,8-1,6
b) 18-1-1,6
173
c) 21-1-1,6
Trace des
macles
Particules
endommagées
d) 21-1,2-2,7
Figure 4-30 Métallographie optique après attaque Bechet-Beaujart des échantillons après rupture. La
direction de traction est horizontale. La trace des macles et les particules TiC ayant subi un
endommagement fragile sont indiquées.
174
Particule
TiC
Macles
a)
Macles
Précipités
TiC
b)
Macles
c)
Figure 4-31 Micrographies MET en champ clair des échantillons après rupture : a) 18-0,8-1,6, b) 18-1-1,6
et c) 21-1-1,6. Les lames minces ont été découpées perpendiculairement à la direction de traction pour la
figure a) et parallèlement pour les figures b) et c).
175
4.3.3 Allongement à rupture
4.4 Conclusion
Nous avons étudié l'influence de particules de carbure de titane microniques sur les
propriétés mécaniques du FeMnC par effet composite. Quatre nuances à teneur en manganèse,
carbone et titane variable ont été élaborées, testées en traction et caractérisées en
métallographie et au MET.
176
La métallographie après attaque chimique sur l’état laminé à chaud semble indiquer un
bon état de recristallisation du matériau biphasé. La taille moyenne des particules TiC est
d’environ 6 µm et la taille de grains de 12µm. Les particules TiC sont réparties de façon
homogène dans la tôle laminée à chaud et se divisent en deux populations :
- des particules primaires, de forme cubique due à une cinétique de solidification
favorisant la croissance des plans {001},
- des particules allongées, sous forme de plaquettes suite à une précipitation de type
eutectique.
Les résultats des essais de traction en relation avec les observations au MET montrent
que la limite d’élasticité est contrôlée par la présence de dislocations organisées en sous-
joints. La contrainte d'écoulement est augmentée par effet composite qui se traduit par un plus
fort coefficient d’écrouissage que sur la nuance 22-0,6 en début d'essai dû aux
incompatibilités de déformations et auquel participe l'effet TWIP. Cet effet sature ensuite et le
coefficient d'écrouissage est comparable à celui de la nuance 22-0,6. L’activité du maclage est
similaire à ce qui est observé sur la nuance de référence. Comme pour le durcissement
structural au chapitre 3, l'augmentation de la contrainte d'écoulement par effet composite ne
détériore pas l'écrouissage par effet TWIP.
177
qu'observé en microscopie optique après rupture. Cet endommagement est rédhibitoire pour
une utilisation industrielle. Néanmoins, il n’a pas été observé de décohésion aux interfaces
TiC/austénite et seules les particules de taille supérieure à 5 µm sont endommagées. Il
conviendrait donc d'éviter la formation de TiC primaires interdendritiques de grande taille en
diminuant la vitesse de solidification lors de l'élaboration.
178
4.5 Bibliographie
179
180
Conclusion
181
182
Conclusion
Les aciers austénitiques FeMnC durcis par effet TWIP présentent un compromis
allongement / résistance mécanique exceptionnel qui en font de bons candidats pour
l'allègement dans la construction des véhicules automobiles. Cette caractéristique résulte
principalement d’un fort taux d'écrouissage. Par rapport à des aciers ferritiques dits à très
haute résistance, ils souffrent toutefois de leurs faibles limites d’élasticité et faible module
d’Young pour répondre pleinement aux cahiers des charges de plus en plus strictes et
contradictoires des constructeurs automobiles. Le travail présenté dans ce mémoire consiste
dans l’étude des différentes possibilités d'amélioration de ces aciers, sans que cette
amélioration ne se fasse au détriment du compromis allongement / résistance initial obtenu
grâce à l’effet TWIP.
Ce travail s'inscrit donc dans une démarche d'alloy design visant à fournir à
Arcelormittal des outils de compréhension et de prévision de l'influence d'un élément d'alliage
donné sur les propriétés physiques et mécaniques des aciers TWIP. Nous avons d'abord étudié
l'influence de la composition de la solution solide en développant des modèles de prévision de
deux paramètres essentiels : la température de Néel TN et l'Energie de Faute d'Empilement
(EFE). Une application au cas du cuivre, qui est actuellement un élément nuisible pour le
recyclage des aciers dans l'industrie automobile, a été présentée. La possibilité de
durcissement structural par précipitation intragranulaire de carbures de vanadium a ensuite été
étudiée dans une deuxième partie, ainsi que la possibilité d'élaborer un composite avec des
particules endogènes de carbure de titane dans la troisième partie.
Au-delà des résultats spécifiques obtenus au cours de cette étude pour chacun des
concepts, le tableau C offre une vue synthétique des différentes propriétés physiques et
mécaniques clefs pour l'industrie automobile, sur lesquels ce travail propose des réponses en
termes d’alloy design. Les colonnes reprennent successivement les mécanismes physiques
dont elles découlent, les actionneurs métallurgiques et les références aux éléments de
compréhension et modèles s’y rattachant. Les actionneurs métallurgiques doivent être compris
comme l’ensemble des moyens dont disposent les développeurs produits (métallurgistes) pour
contrôler les microstructures et agir sur les propriétés précitées. Les cases grisées permettent
de mieux distinguer les thématiques abordées dans ce mémoire.
183
Propriétés
Elément de compréhension /
physiques et Mécanismes Actionneurs Métallurgiques
Modélisation
mécaniques
Nature des liaisons atomiques dans Composition de la solution
[C-1 Ghosh & Olson 02]
Module d’Young le domaine paramagnétique solide
E Composition de la solution
Transition magnétique de Néel Chapitre 1
solide
Module Micromécanique
spécifique Transfert de charge
[C-2 Bouaziz & Buessler 02]
E/ρ Composite γ / céramique
Diminution de la densité Loi de mélange
Composition de la solution
EFE Dissociation des dislocations Chapitre 1
solide
Composition de la solution
Friction de réseau [C-3 Pickering]
solide
Activation thermique du glissement %C en solution [C-4 Allain 04]
Loi de Hall et Petch
Effet Hall et Petch Taille de grains recristallisée
Chapitre 1
Limite
Loi d’Orowan
d’élasticité Contournement de type Orowan Précipitation intragranulaire
Chapitre 3
Prédéformation
Structure initiale de dislocations Restauration Chapitre 4
Non recristallisation
Incompatibilités de déformation [C-5 Bouaziz et al. 00]
Composite γ / céramique
phase dure/phase molle [C-6 Ashby 70]
Activation thermique du glissement %C en solution [C-4 Allain 04]
De nombreuses publications
dont :
[C-7 Bouaziz et al. 08]
EFE et état de contrainte
Effet Hall et Petch dynamique : (maclage)
- maclage [C-8 Kirindi & Dikici 06]
Coefficient - martensite ε (martensite ε)
d'écrouissage Précipitation intragranulaire Chapitre 3
184
Les aciers FeMnC présentent une anomalie d’évolution des modules d’élasticité en
fonction de la température en dessous de la transition magnétique de Néel, avec pour
conséquence un faible module d'Young dans le domaine antiferromagnétique (à température
ambiante par exemple pour la nuance de référence 22-0,6). Nous proposons un modèle
permettant de prévoir TN pour le système FeMnXC lorsque du cuivre, de l’aluminium, du
silicium ou du chrome sont ajoutés en faible teneur en solution solide. L’influence du
manganèse et du carbone a aussi été revisitée. Ce modèle a été paramétré sur les données
bibliographiques disponibles et sur nos mesures de susceptibilité magnétique. Tous ces
éléments ont un effet opposé à celui du manganèse en diminuant TN, notamment le cuivre. Le
modèle de prévision de l'EFE précédemment développé par S. Allain pour FeMnC à été
étendu à ces mêmes éléments et au titane. Le point faible de ce modèle reste le calage, compte
tenu du peu de données sur les températures de transformations martensitiques disponibles
dans la littérature mise à part pour les effets du silicium. Nous en avons conclu que tous les
éléments étudiés sauf le chrome augmentent l'EFE, notamment le titane. L'EFE contrôlant la
cinétique de maclage ou de transformation martensitique ε et donc directement l'écrouissage,
nous avons montré qu’en substituant une partie du manganèse par du cuivre dans une nuance
de référence, il était possible de diminuer TN sans détériorer l'écrouissabilité (iso-EFE). Les
nuances de la série X-0,6-2 présentent en effet un gain de module d'Young de 20% par
rapport à la nuance 22-0,6 pour des propriétés mécaniques équivalentes (à la taille de grains
près).
185
avons conclu que les précipités de grande taille mobilisent une grande fraction du vanadium
précipité mais participent peu au durcissement et qu’une partie du vanadium reste en solution
solide (négligée toutefois dans le calcul d’EFE). A ce titre, une des perspectives de ce travail
est de continuer le développement des deux modèles présentés (TN et EFE) afin de les élargir
aux autres éléments d'addition possibles.
Toutes les nuances étudiées présentent un taux d'écrouissage élevé, pour la plupart
similaire à celui de la nuance 22-0,6 de référence. Les nuances au cuivre, à manganèse et
carbone variable (séries X-0,6-2 et X-0,4-2), ont une EFE calculée par le modèle inférieure à
18 mJ/m2. Conformément aux résultats antérieurs de S. Allain, la transformation
martensitique ε athermique se substitue au maclage mécanique dans ces nuances. Le
comportement en traction montre que les plaquettes de martensite ε jouent le même rôle que
les micromacles dans les mécanismes de durcissement, en réduisant progressivement le libre
parcours moyen des dislocations. Nous confirmons ainsi les résultats de L. Rémy [C-11 Rémy
75] qui montrent qu’un comportement mécanique optimal peut être obtenu dans le domaine
186
TRIP ε (TRansformation Induced Plasticity) (et non TWIP) pour une nuance donnée à
condition que le glissement soit non thermiquement activé à la température souhaitée.
Les résultats obtenus sur la nuance 22-0,6+VC montrent que la présence de précipités
intragranulaires ne perturbe pas l'effet Hall et Petch dynamique produit par le maclage : la
courbe de traction est simplement translatée vers les contraintes élevées. Les observations au
MET montrent qu'en effet, les précipités n'agissent ni comme des obstacles forts au
développement des macles, ni comme des sites privilégiés de germination. Il en est de même
pour les particules TiC dans les aciers composites. Après un fort durcissement initial dû aux
incompatibilités de déformation entre les particules dures et l'austénite et auquel participe
l'effet TWIP, le durcissement et la microstructure de maclage observée en microscopie
optique après essai de traction sont similaires à ceux de la nuance 22-0,6. Il convient
cependant d'être prudent avec cette analyse, l'EFE n'ayant pu être estimée précisément dans
ces nuances (Ti résiduel en solution solide).
Nous avons mis en évidence le rôle particulier joué par le carbone dans les
mécanismes de durcissement de ces aciers en comparant le comportement des nuances au
cuivre X-0,4-2 par rapport à la série X-0,6-2. Cette influence ne se limite pas à un simple effet
sur l’EFE ou sur l’activation thermique du glissement. Deux mécanismes supplémentaires
viendraient s’ajouter : le vieillissement dynamique, dont la contribution reste controversée
dans la littérature, et une modification de la restauration dynamique (incluant un effet sur la
planéité du glissement). La clarification de cette question est une des perspectives très
motivantes de ce travail.
187
froid, pour de fortes réductions d'épaisseur. La compréhension de ce changement de
comportement en fonction de la sollicitation est une autre perspective importante.
Les aciers composites γ / TiC ont également un faible allongement à rupture. Les
observations au microscope optique après traction montrent qu'il est dû dans ce cas à un
endommagement fragile (clivage) des particules TiC perpendiculairement à la direction de
traction. Cet endommagement est observé dans les précipités primaires lorsque leur taille
dépasse 5 µm. Ce critère nous offre donc des possibilités pour améliorer la résistance à
l’endommagement de ces nuances en supprimant par exemple la précipitation des TiC
primaires par un contrôle des modalités de solidification.
L’introduction des carbures de vanadium (ou de niobium et titane) permet, outre une
augmentation des limites d’élasticité, de réduire significativement la sensibilité des nuances
FeMnC à la casse différée après emboutissage, dans les zones des pièces déformées en
rétreint. On attribue cette amélioration à leur capacité de piégeage fort de l’hydrogène diffusif,
autrement fragilisant pour les joints de grains. Malgré les déformations induites par la
cohérence résiduelle des carbures observée au MET, les calculs par éléments finis montrent
que les contraintes hydrostatiques autour d'un précipité ellipsoïdal restent faibles. Elles ne
semblent pas suffisantes pour stocker de l'hydrogène en grande quantité dans le voisinage des
précipités, ni pour piéger l'hydrogène par interactions élastiques à longue distance. Cette étude
a donc permis de conclure que c’est avant tout les affinités de nature chimique qui peuvent
expliquer les améliorations observées expérimentalement. Des travaux complémentaires
d'observations à la sonde atomique et de calculs ab initio sont nécessaires pour clarifier cette
question.
188
[C-1 Ghosh & Olson 02]
Ghosh G. & Olson G.B., Acta Materialia, 50 (2002) p2655-2675
[C-2 Bouaziz & Buessler 02]
Bouaziz O. & Buessler P. La Revue de Métallurgie CIT (2002) p71-77
[C-3 Pickering]
Pickering F.B., Physical metallurgy and the design of steels. Applied Science Publishers Ltd,
London.
[C-4 Allain 04]
Allain S., Thèse, Institut national polytechnique de Lorraine (2004)
[C-5 Bouaziz et al. 00]
Bouaziz O., Iung T., Kandel M., Physical modelling of microstructure and mechanical
properties of dual-phase steel, 4th Euromech, Metz, Frnce, (June 26–30, 2000)
[C-6 Ashby 70]
Ashby M.F., Phil. Mag. 21 (1970) p399.
[C-7 Bouaziz et al. 08]
Bouaziz O., Allain S. and Scott C., Scripta Materialia 58 (2008) p484–487
[C-8 Kirindi & Dikici 06]
Kirindi T. & Dikici M., Journal of alloys and compounds, Volume 407 Issue 1-2 (2006)
p157-162
[C-9 Scott et al. 05]
Scott C., Guelton N., Allain S., Faral M., Materials Science and Technology (2005)
[C-10 Brevet Arcelormittal 05]
Scott C., Cugy P., Roscini M., Dez A.E. & Cornette D., brevet n° 2 881 144 (21/01/2005)
déposé pour la France, l’Europe et le Monde
[C-11 Rémy 75]
Rémy L., Thèse, Université de paris-Sud centre d’Orsay (1975)
189
190
ANNEXE
Expérience de co-diffusion
191
192
ANNEXE : Expérience de co-diffusion
Le contact cuivre-FeMnC a été forcé par mouillage du FeMnC dans le cuivre fondu.
Dans un creuset en alumine ont été disposés un échantillon de nuance 22-0,6 et des copeaux
de cuivre (figure A-1). Le creuset est ensuite soumis à un traitement thermique de 1150°C
pendant 15 min, supérieur à la température de fusion du cuivre (1080°C) puis à un maintien à
900°C pendant 10h sous atmosphère d’argon afin d’éviter toute oxydation.
Copeaux de cuivre
Échantillon FeMnC
Creuset
Des essais de microdureté Vickers (1kg, 15s) ont étés effectués à différents endroits de
cette microstructure particulière. La dureté de l’austénite (un seul grain concerné) est de 174
HV, celle du cuivre est de 86 HV.
193
174 HV 22 Mn
0 Cu
15 Mn
174 HV 3 Cu
372 HV
10 Mn
7 Cu
50 µm 6.9 Mn
86 HV
92 Cu
Figure A-2 Métallographie après attaque chimique colorante de la zone entre cuivre et austénite après
traitement de co-diffusion. La flèche indique la coupe selon laquelle a été réalisé le profil de composition
de la figure a-332. Les données de compositions en poids-pourcent sont tirées de l'analyse par microsonde
de Castaing.
Au cœur de l’échantillon, la teneur en cuivre est nulle, les grains sont de grande taille
du fait du long maintien en température. Les contrastes chimiques révélés par l’attaque
colorante s’expliquent par la croissance dendritique des grains.
194
25 40
35
20
teneur en Mn (%)
30
teneur en Cu (%)
Joints de grains
15 25
W %(Mn) 20
10 W %(Cu) 15
10
5
5
0 0
3
4
0
12
24
36
48
60
72
84
96
10
12
13
14
15
16
18
19
20
21
22
24
25
26
distance en µm
a)
11,5 50
teneur en Mn (%)
teneur en Cu (%)
11
40
10,5
10 30
W%(Mn)
9,5 20
9 W%(Cu)
10
8,5
8 0
0
8
12
16
20
24
28
distance en µm
b)
Figure A-332 Profils des concentrations en manganèse et en cuivre mesurés par microsonde de Castaing.
a) profil le long de la flèche figure A-2, b) profil à l’intérieur d’un grain austénitique à proximité du cuivre
pur.
La zone de transition entre cuivre et austénite pure se compose de cuivre aux joints de
grains et de grains d’austénite. Ces grains d’austénite ont une composition de 15 % Mn et 3 %
Cu (figure A-3 a). L’énergie de faute d’empilement calculée par le modèle thermochimique à
température ambiante pour cette composition (en considérant le carbone à 0,6 %) est de 18,7
mJ/m². La proportion maximale de cuivre en solution solide mesurée dans l’austénite est de
7,5 % (figure A-3 b). Les pics de concentration en cuivre constatés dans le profil sont dus à
des joints de grains ou d’éventuels précipités de taille importante. Cette constatation prouve la
très grande stabilité du cuivre dans l’austénite et explique la grande difficulté pour le faire
précipiter dans cette phase. De plus, cette expérience corrobore l’absence de faïençage.
Dans la zone proche du cuivre, on constate la présence d’une phase foncée à l’intérieur
des grains décorés de cuivre aux joints. La phase sombre formée dans l’austénite a une dureté
de 372 HV, il s’agit donc d’une phase très dure, probablement de la martensite α’.
195
L’aimantation de l’échantillon confirme cette hypothèse, le cuivre n’étant pas
ferromagnétique. Pour une composition de 10-0,6-7 le modèle thermochimique donne une
EFE = 16 mJ/m² ce qui n’est pas suffisamment faible pour expliquer l’apparition de
martensite α’. Par contre, pour peu que l’on considère une déplétion en carbone, l’EFE chute
et passe à 8 mJ/m² pour 0,4% C ce qui peut cette fois expliquer la présence de martensite α’.
196
197
Amélioration des propriétés physiques et mécaniques d’aciers TWIP FeMnXC :
influence de la solution solide, durcissement par précipitation et effet composite.
Les aciers TWIP se déforment par maclage et par glissement de dislocations, avec pour conséquence de forts
taux d’écrouissage. Les mécanismes de déformation sont contrôlés par l’énergie de faute d’empilement (EFE).
Un modèle de prévision de l’EFE et une régression de TNéel (transition antiferro/paramagnétique) de l’austénite
sont proposés pour les systèmes FeMnXC (X = Cu, Cr, Al, Si et Ti).
Les nuances FeMnCuC étudiées ont une EFE plus faible que la nuance de référence Fe22Mn0,6C. La formation
de martensite ε se substitue au maclage, sans dégradation des caractéristiques mécaniques en traction. La
contrainte d'écoulement diminue avec la teneur en carbone et la formation de martensite α' aux plus basses EFE
réduit l'allongement à rupture. La substitution d'une partie du manganèse par du cuivre permet un gain de 20%
sur le module d'Young à température ambiante, en abaissant TNéel en dessous de 0ºC.
La précipitation intragranulaire de carbures de vanadium augmente la limite d’élasticité mais n’influence pas le
taux d’écrouissage. Aucune interaction entre précipités et macles n'a été observée en microscopie. Les calculs de
cohérence et les mesures au MET montrent que les carbures ont une relation d'orientation avec l'austénite et sont
semi-cohérents avec une faible cohérence résiduelle. Les contraintes induites ne semblent pas suffisantes pour
piéger de grandes quantités d'hydrogène.
Les alliages FeMnC + TiC présentent un fort durcissement par effet composite en début de déformation, tandis
que l'écrouissage par effet TWIP n'est pas modifié par la présence des particules TiC. Cependant, le clivage des
précipités primaires de grande taille réduit l'allongement à rupture.
Mots clés : FeMnC, TWIP, maclage, martensite ε, énergie de faute d’empilement, température de Néel,
précipités, semi-cohérence, effet composite
TWIP steels deformation occurs by twinning and by dislocations gliding which leads to high a strain hardening.
The deformation mechanisms are controlled by the stacking fault energy (SFE). A model for the prediction of
the SFE and a law for TNéel (antiferro to paramagnetic transition) for austenite are proposed in FeMnXC systems
(X = Cu, Cr, Al, Si et Ti).
The studied FeMnCuC grades have a lower SFE than the Fe22Mn0,6C reference. The formation of ε-martensite
replaces twinning without any deterioration of the mechanical properties. The flow stress decreases with the
carbon content and the formation of α'-martensite at the lowest SFEs reduces the elongation to fracture.
Substituting a part of the manganese content by copper leads to a 20% increase of the Young's Modulus at room
temperature by decreasing TNéel below 0ºC.
The precipitation of intragranular vanadium carbide increases the yield stress but does not influence the strain
hardening rate. No interaction between precipitates and twins has been observed by microscopy. The coherency
calculations and the TEM observations show that the carbides have an orientation relation with the austenite and
are semi-coherent with a low residual coherency. The resulting stresses do not seem to be high enough to trap
large quantities of hydrogen.
The FeMnC + TiC alloys exhibit a strong hardening by composite effect at the beginning of deformation, while
the strain hardening due to TWIP effect is not modified by the presence of the TiC particles. Meanwhile,
cleavage occurs in the largest primary precipitates, which reduces the elongation to fracture.
Keywords: FeMnC, TWIP, twinning, ε-martensite, stacking fault energy, Néel's temperature, precipitates, semi-
coherency, composite effect