051 055drplourde0608
051 055drplourde0608
051 055drplourde0608
Urgence hyperglycémique 4
réagir avant que le sucre ne gâche la sauce !
Simon Plourde
M.Sans-Soucy,64 ans,est légèrement obèse et sédentaire et a un début de diabète.Comme son médecin de
famille est parti en vacances,il vous consulte aujourd’hui pour des étourdissements.
Il urine beaucoup,car il dit boire en grande quantité et a l’impression de toujours avoir la bouche sèche.Il prend
régulièrement de la metformine,à raison de 850 mg,2 f.p.j.,et du glyburide,à raison de 10 mg,2 f.p.j.Il dit
ne pas aimer se piquer au bout des doigts.Lorsque vous mesurez sa glycémie capillaire,elle est à 21 mmol/l.
Devant un tel tableau,quels sont vos premiers réflexes?
Deux complications doivent être éliminées d’emblée, soit un début d’acidocétose diabétique et un
état hyperosmolaire.
Repère
52 Urgence hyperglycémique : réagir avant que le sucre ne gâche la sauce !
Tableau IV
Formation continue
Les types d’insuline et leurs paramètres pharmacocinétiques5,9
Types d’insuline Début d’action (h) Pic d’action (h) Durée (h)
Aspart (NovoRapid) 0,15 – 0,25 1 – 1,5 4–5
Lispro (Humalog)
Insuline régulière (Humulin-R, Novolin ge Toronto) 0,5 – 1 2–4 5–8
NPH (Humulin-N, Novolin ge NPH) 1–3 5–8 13 – 18
Détémir (Levemir) 1 – 1,5 Non 12 – 24*
Glargine (Lantus) 1,5 Non ~ 24
* La durée augmente en fonction de la dose (voir la monographie).
perglycémie ne vous saute pas aux yeux (tableau III), Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour en-
vous pouvez présumer sans risque qu’il s’agit ici d’un treprendre une insulinothérapie chez un patient atteint
« vieux problème ». de diabète de type 26,7 (tableau IV). Celle qui semble la
Si vous pouvez établir que le dérèglement est récent, plus populaire est l’utilisation d’insuline intermédiaire
vous devez en trouver la cause la plus probable. Premiè- (N ou NPH) ou basale (Levemir ou Lantus) au cou-
rement, il faut vérifier que le patient respecte son trai- cher, à raison de 0,1 U/kg à 0,2 U/kg. Vous pouvez par
tement et prend ses hypoglycémiants oraux ou son in- la suite augmenter de 1 U à 2 U par jour ou par deux
suline conformément à la prescription. Un appel à son jours jusqu’à l’obtention d’une glycémie satisfaisante
pharmacien, une discussion avec les proches et la vé- au lever (⬍ 7 mmol/l).
rification des dates de renouvellement de ses ordon- L’ajout d’insuline à action rapide (Humalog, Novo-
nances nous apportent habituellement la réponse. Rapid, R ou Toronto) avant les repas est également
une option. Cette approche doit être envisagée de fa-
Que faire pour éviter le pire ?
çon transitoire et nécessite une surveillance plus étroite,
Même en l’absence d’acidose et d’un état hyperos- car elle est associée à davantage d’hypoglycémie8. Les
molaire, il faut stabiliser la glycémie. Selon les recom- échelles d’insuline que nous avons tous apprises pour
mandations 2003 de l’Association canadienne du dia- nous dépanner lors de nos gardes en résidence ont
bète6, la présence d’hyperglycémie marquée nécessite davantage leur place en milieu hospitalier, de façon
soit la potentialisation du traitement par des hypo- transitoire, en attendant de mieux définir les besoins
glycémiants par voie orale, soit l’ajout d’insuline6. quotidiens en insuline du patient9,10.
L’hyperglycémie marquée est alors définie par un taux La prescription d’insuline nécessite la transmission
d’HbA1C supérieur à 9 % alors que les valeurs idéales de certains renseignements essentiels au patient, ce qui
ne doivent pas dépasser 7 %. Si le patient ne prend pas peut difficilement être fait de façon convenable au
déjà des hypoglycémiants et qu’il y a hyperglycémie cours d’une consultation sans rendez-vous. Vous pou-
marquée, il serait acceptable de commencer d’emblée vez vous faire aider par votre infirmière en GMF, le
le traitement par l’insuline. centre d’enseignement aux diabétiques de l’hôpital où
Formation continue
Sites Internet d’intérêt pour les patients How to manage the case of a hyperglycemic patient in a
O www.diabete.qc.ca walk-in clinic: Two hyperglycemic states should be distin-
Site de Diabète Québec guished and eliminated when a diabetic patient arrives at
your clinic.You have to recognize ketoacidosis (often found
O www.passeportsante.net in patients suffering from Type 1 diabetes) from the hy-
Site d’information générale sur la santé perosmolar state (mostly found in Type 2 diabetes) in case
contenant un chapitre intéressant sur le diabète there is a need for an emergency transfer to the hospital.
O www.diabetes.ca You should first make sure hydration is adequate and ver-
Association canadienne du diabète ify the presence of ketones in urine. If the hospital trans-
fer is not required, then you should look for the hyper-
O www.diabetes.org glycemic state aetiology in diabetes mellitus type 2:
American Diabetes Association (en anglais) compliance problem, medication and other illnesses.
O www.idf.org Treating it includes “wait and see” approach with close fol-
Fédération internationale du diabète (en anglais) low-up, upgrading oral hypoglycemic treatment or the in-
troduction of insulin.
des prélèvements. Vous convenez avec lui de le revoir à la Keywords: diabetes, hyperglycemia
fin de la semaine avec ses résultats. Il vous sera alors pos-
sible d’établir la conduite à tenir. Vous abordez brièvement
la question de l’insuline, mais voyant les réticences de votre 2. Eisenbarth GS, Polonsky KS, Buse JB. Type 1 Diabetes mellitus.
patient, vous décidez de reporter la discussion à vendredi. Dans : Larsen PR, Kronenberg HM, Melmed S et coll., rédacteurs.
Williams Textbook of Endocrinology. 10e éd. Philadelphie : Saunders ;
Vous lui prescrivez une augmentation de sa metformine
2003. 1968 p.
à 850 mg, 3 f.p.j., sans trop y croire. Votre infirmière de 3. Kitabchi AE, Haerian H, Rose BD. Clinical features and diagnosis of
GMF convient d’un suivi téléphonique avec lui. Une for- diabetic ketoacidosis and hyperosmolar hyperglycemic state in adults.
mation au centre des diabétiques de votre hôpital lui sera UpToDate, version 15.2, avril 2007. Site Internet : www.uptodate.com
proposée lorsque la crise sera passée. (Date de consultation : le 16 octobre 2007).
4. Haas L, Taboulet P, Porcher R et coll. Cétonurie et cétonémie capil-
Trois jours plus tard, à sa visite de suivi, son taux d’HbA1C laire pour le diagnostic de l’acidocétose diabétique aux urgences. J Eur
est à 0,095. Ses glycémies capillaires ne sont guère plus re- Urgences 2006 ; 19 (3) : 123-31.
luisantes. Il dit être tanné d’avoir soif et de boire autant. 5. Clay L,Michelson EA.Diabetes-related emergencies.Pepid,version 8.3,
Pensez-vous pouvoir régler son problème ? Vous lui pres- décembre 2007.Site Internet: www.pepidonline.com (Date de consulta-
tion: le 15 janvier 2008).
crivez donc de l’insuline de type NPH, à raison de 10 U 6. Harris SB, Lank CN, Capes SE et coll. Canadian Diabetes Association
au coucher avec une augmentation graduelle selon sa gly- 2003 Clinical Practice Guidelines for Prevention and Management
cémie du matin. L’infirmière avait prévu le rencontrer of Diabetes in Canada. Can J Diabetes 2003 ; 27 (suppl. 2) : S37-40,
après votre consultation. Il ne vous reste plus qu’à l’ins- S135, S21-2.
7. Sabourin A. Débuter l’insulinothérapie au cabinet. Ce qu’il faut sa-
crire à l’horaire de votre collègue dès son retour de va-
voir ! Le Clinicien 2007 ; 22 (4) : 79-83.
cances, avec la satisfaction du devoir accompli. 9 8. Holman RR, Thorne KI, Farmer AJ et coll. Addition of Biphasic,
Prandial, or Basal Insulin to Oral Therapy in Type 2 Diabetes. N Engl
Date de réception : 15 janvier 2008
J Med 2007 : 357 (17) : 1716-30.
Date d’acceptation : 13 février 2008
9. Queale WS, Seidler AJ, Brancati FL. Glycemic control and sliding
Mots clés : diabète, hyperglycémie scale insulin use in medical inpatients with diabetes mellitus. Arch
Intern Med 1997 ; 157 (5) : 545-52.
Le Dr Simon Plourde n’a signalé aucun intérêt conflictuel. 10. Umpierrez GE, Smiley D, Zisman A et coll. Randomized Study of
Basal-Bolus Insulin Therapy in the Inpatient Management of Patients
With Type 2 Diabetes (RABBIT 2 Trial). Diabetes Care 2007 ; 30 (9) :
2181-6.
Bibliographie 11. Long H. Les antidiabétiques oraux : la famille s’agrandit ! Le Clinicien
1. Kitabchi AE, Umpierrez GE, Murphy MB et coll. Hyperglycemic 2003 ; 18 (10) : 93-102.
Crises in Adult Patients With Diabetes: A consensus statement from
the American Diabetes Association. Diabetes Care 2006 ; 29 (12) : L’auteur tient à remercier le Dr Michel Baillargeon, endocri-
2739-48. nologue, pour sa révision du texte et ses précieux conseils.