Etude Thermique de La Terre Stabilisee Au Ciment U
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Abdelmajid El Bouardi
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Laboratoire de Thermique, Energie Solaire & Environnement, Faculté des Sciences, Université A. Essaâdi, B.P. 2121, Tétouan, Maroc
Résumé - L’estimation des paramètres thermophysiques des matériaux de construction joue un rôle
primordial dans un grand nombre de domaines scientifiques et industriels. Notre choix s’est porté sur le
matériau terre qui connaît actuellement un regain d’intérêt suite à la crise énergétique et celle du logement.
Contrairement au ciment, au béton ou à l’acier, la terre à l’état naturel peut être utilisée comme matériau de
construction pratiquement sans dépense d’énergie, elle présente de nombreux avantages environnementaux,
sociaux et culturels. Nous présentons dans cet article, les résultats concernant les propriétés
thermophysiques de la terre extraite de la région de Larache au Nord du Maroc où le mode de mise en
oeuvre traditionnel dominant est l’adobe.
Les résultats obtenus montrent que l’humidité modifie considérablement les propriétés thermophysiques de la
terre et que la stabilisation au ciment augmente la résistance du matériau face aux variations de l’humidité.
L’influence notable de la masse volumique sur la conductivité thermique a été montrée. L’ajout de ciment au
matériau initial fait diminuer la teneur en eau de saturation des matériaux stabilisés au fur et à mesure que le
taux de ciment augmente, tout en augmentant le temps de fin de reprise d’eau lors de l’essai de capillarité.
Mots clés: Conductivité thermique - Diffusivité thermique - Méthode des boîtes - Terre stabilisée au ciment.
1. INTRODUCTION
Nos recherches menées au Laboratoire de Thermique, Energie solaire et Environnement entrent dans le cadre
des études consistant à développer la connaissance des matériaux locaux utilisés dans la construction au Nord du
Maroc, tel que : le plâtre, le liège, la brique creuse [1]. Récemment, et dans le cadre d’un projet de recherche
(Pars, Physique 012), un intérêt particulier a été donné au matériau terre [2]. L'objectif de cette étude était de
caractériser ce matériau prélevé de six différents sites du nord du Maroc et d’y mener une étude comparative. A
partir des résultats thermiques et granulométriques obtenus [3], notre choix s’est porté sur la terre prélevée du
site de Larache, où la filière de construction dominante est l’adobe : c’est une brique de terre crue stabilisée ou
pas, moulée manuellement à l’état plastique et séchée à l’air libre.
Il s’agit de présenter les résultats concernant les propriétés thermiques (conductivité et diffusivité) de ce
matériau. L’effet de la stabilisation au ciment sur ces paramètres thermiques est mis en évidence. Pour des
conditions pratiques et économiques, nous nous sommes fixés dans le cadre de notre étude à des taux de ciment
allant de 0 % à 10 %. Du fait que L’eau est le facteur principal des agents susceptibles de dégrader les
constructions en terre, nous avons choisi de mener en parallèle une étude sur l’influence de l’humidité sur les
propriétés thermophysiques de ce matériau.
La conductivité thermique apparente en régime permanent et la diffusivité thermique en régime dynamique
sont mesurées expérimentalement par 'la méthode des boîtes' [ 4].
λa =
e
S ∆T
(
q + C ∆ T' ) (1)
69
70 H. Ezbakhe et al.
avec : C : Coefficient de déperdition thermique (W.°C-1); e : Epaisseur de l'échantillon (m); q : flux de chaleur
(W); S : Surface de l'échantillon (m2); ∆T : Ecart de température entre les faces chaude et froide de l’échantillon
(°C); ∆T' : écart de température entre les ambiances extérieure et intérieure de la boîte (°C)
L’échantillon, placé entre la boîte chaude (B) à parois internes réfléchissantes et la capacité isotherme (A),
reçoit une impulsion thermique, de courte durée (t0), d’une source de rayonnement thermique à flux constant
constituée d’une lampe à incandescence de puissance (1000 W). L'analyse du thermogramme expérimental
enregistré sur la face non irradiée de l'échantillon (E) permet de déterminer, en utilisant des techniques de
dépouillement déjà existantes [5, 6], la diffusivité thermique apparente a.
Les teneurs en eau envisagées pour la terre crue non stabilisée restent faibles comparées à celles obtenues
pour la terre dosée au ciment ; en fait la terre crue retient facilement l’eau qui provoque la désagrégation et
même l’effritement de l’échantillon. Le matériau stabilisé au ciment est donc plus résistant aux effets de
l’humidité.
4. RESULTATS ET COMMENTAIRES
L’observation des figures 3 et 4 montre que le comportement thermique des matériaux étudiés est fonction de
la teneur en eau au sein de ces matériaux et l’on peut distinguer trois domaines :
- A l’état sec et pour des teneurs en eau faibles, le transfert de chaleur se fait essentiellement au niveau des
points de contact entre les grains formant le matériau, d’où la faible augmentation de la valeur de la conductivité
thermique.
- L’augmentation de la teneur en eau, entraîne la formation des ponts thermiques ou ponts de conduction de
la chaleur au sein du matériau ; d’où l’augmentation de la conductivité et de la diffusivité thermiques du
matériau.
- On ne peut déterminer le comportement thermique du matériau terre crue dans le domaine des fortes teneurs
en eau. L’état de saturation absolue n’a pu être atteint que pour des matériaux en terre stabilisée au ciment. Pour
ces derniers, lorsque la teneur en eau atteint une valeur maximale correspondant à l’état de saturation ou état de
formation de chemins continus, la conductivité thermique tend à se stabiliser.
Des résultats similaires ont été observés sur la terre stabilisée et compressée prélevée de différents sites au
sud du Maroc [8].
5. CONCLUSION
Le regain d’intérêt que connaît actuellement le matériau terre est largement justifié; c’est un matériau local
par excellence. Lorsqu’il est stabilisé au ciment, il peut servir comme isolant porteur pour des constructions
individuelles.
A l’issue des résultats expérimentaux obtenus, nous pouvons dégager certaines conclusions :
- Les paramètres thermiques évoluent considérablement avec la teneur en eau pour la terre crue (0 % de
ciment) et la terre stabilisée au ciment (de 4 à 10 % de ciment).
- Les teneurs en eau envisagées pour la terre non stabilisée restent faibles comparées à celles utilisées pour
les matériaux dosés au ciment, ceci est dû au fait que le matériau stabilisé est plus résistant aux effets de
l’humidité.
- Les propriétés thermiques du matériau ne sont pas à elles seules un critère de choix, il faut également tenir
compte de l'état du matériau, de sa disponibilité et de ses propriétés mécaniques.
Hormis son utilisation dans la construction, à l'état brute ou stabilisé au ciment, la terre peut servir, une fois
stabilisée avec la margine (résidu, polluant et non utilisé, de l'huile des olives), à la formation des chaussées des
pistes agricoles par exemple. Un projet dans ce cadre, a été présenté pour financement, au Centre National de
Recherche Scientifique Marocain.
REFERENCES
[1] A. El Bakkouri, 'Caractérisation Thermophysique et Mécanique de Quelques Matériaux Locaux Utilisés dans l’Isolation et la
Construction au Maroc: le Plâtre, le Liège, la Brique Creuse', Thèse de Diplôme d’Etudes Supérieures de 3ième Cycle, Université
Abdelmalek Essaâdi, Faculté des Sciences de Tétouan, 1996.
[2] S. Boussaid, A. El Bakkouri, H. Ezbakhe, A. El Bouardi et T. Ajzoul, 'Méthode Générale d’Identification des Paramètres
Thermophysiques du Matériau Terre Utilisé dans la Construction dans le Nord du Maroc', 4ième Congrès de Mécanique, pp. 137-138,
Mohammadia, Maroc,13-16 avril 1999.
[3] H. Ezbakhe, S. Boussaid, A. El Bakkouri, A. El Bouardi et T. Ajzoul, 'Etude Thermophysique du Matériau Terre Utilisé dans la
Construction dans le Nord du Maroc', 9ièmes JITH, pp. 91-98, Liège, Belgique, 15-18 septembre 1999.
[4] H. Ezbakhe, 'Caractéristiques Thermiques et Mécaniques des Matériaux Poreux Utilisés comme Isolants Simples ou Porteurs', Thèse de
Doctorat d’Etat, U.C.B Lyon I, 1986.
[5] A. Degiovanni, 'Diffusivité et Méthode Flash', Revue Générale de Thermique, 185, pp. 420-442, 1977.
[6] R. Yezou, 'Contribution à l’Etude des Propriétés Thermophysiques des Matériaux de Construction Cohérents et non Cohérents', Thèse
de Docteur-Ingénieur, INSA, Lyon, 1978.
[7] -, 'Terre Cuite et Construction', N°83, 2/97, Editée par le Groupement National de l’Industrie de la Terre Cuite.
[8] M. El Kortbi, 'Energie et Bâtiment - Etude Thermophysique des Matériaux Locaux : la Terre', La Recherche Appliquée au LPEE, Bilan
97/98, juin 1999.