Lutte Contre La Pollution Chapitre 55
Lutte Contre La Pollution Chapitre 55
Lutte Contre La Pollution Chapitre 55
l'environnement
PRÉVENIR ET COMBATTRE LA POLLUTION DE
L’ENVIRONNEMENT
Jerry Spiegel et Lucien Y. Maystre
Le présent chapitre vise à donner un aperçu général des méthodes utilisées pour
prévenir et combattre la pollution. On y exposera les principes fondamentaux suivis
pour éliminer les conséquences préjudiciables à la qualité de l’eau, de l’air ou de la
terre; on verra comment la primauté est désormais accordée à la prévention et non
plus à la lutte et l’on examinera les limitations auxquelles on se heurte lorsqu’on
formule des solutions pour les divers milieux de l’environnement. Ainsi, pour
protéger l’air, il ne suffit pas d’éliminer les traces de métaux des gaz de cheminée
en se contentant de transférer ces contaminants aux sols par des méthodes
inappropriées de gestion des déchets solides. Il faut des solutions intégrées prenant
en compte les transferts de milieu à milieu.
Avant que l’on ne fasse un effort concerté pour restreindre l’impact de la pollution,
la gestion de l’environnement n’allait guère au-delà d’une politique de laisser-faire
tempérée par l’élimination des déchets pour éviter des nuisances locales graves
considérées dans une optique à court terme. La nécessité de mesures correctrices
était admise à titre exceptionnel lorsque les dommages étaient jugés inacceptables.
A mesure que l’activité industrielle s’intensifiait et que l’on comprenait mieux les
effets cumulatifs, le principe de lutte contre la pollution s’est imposé avec force
dans la gestion de l’environnement.
L’application des méthodes de lutte contre la pollution s’est révélée très efficace
dans la maîtrise des problèmes — en particulier ceux de caractère local. Elle repose
sur une analyse systématique de la source et de la nature de l’émission ou du rejet
en question, de son interaction avec l’écosystème et du problème de pollution
ambiante à résoudre, ainsi que sur la mise au point de techniques appropriées pour
atténuer et surveiller les impacts sur l’environnement.
Dans leur article sur la lutte contre la pollution de l’air, Dietrich Schwela et
Berenice Goelzer expliquent combien il est important de concevoir l’évaluation et
la maîtrise des sources ponctuelles et non ponctuelles de cette pollution dans une
perspective globale, et montrent les implications de cette démarche. Ils exposent
également les problèmes — et les possibilités d’action — des pays qui connaissent
une industrialisation rapide sans que leur développement antérieur ait été
accompagné de solides mesures antipollution.
John Elias présente une vue d’ensemble des types de mesures antipollution que l’on
peut appliquer et des questions qu’il faut aborder pour choisir les formules
adéquates de la gestion de la lutte contre la pollution atmosphérique.
Le défi soulevé par la lutte contre la pollution de l’eau est traité par Herbert Preul
dans un article qui montre le processus par lequel les eaux naturelles du globe
peuvent être polluées par des sources ponctuelles, non ponctuelles ou intermittentes
et les fondements de la réglementation en la matière, ainsi que les différents critères
à appliquer pour définir les programmes de lutte. Cet auteur explique comment les
effluents pénètrent dans les masses d’eau et peuvent être analysés et évalués en vue
d’apprécier et de gérer les risques. Enfin, il donne un aperçu des techniques
employées pour appliquer à grande échelle le traitement des eaux usées et la lutte
contre la pollution de l’eau.
Pour finir, une étude de cas offre un exemple éloquent de la façon dont les eaux
usées peuvent être réutilisées, question d’une grande importance dans la recherche
d’un emploi efficace des ressources de l’environnement, spécialement lorsqu’elles
sont rares. Alexander Donagi expose la méthode suivie pour traiter les eaux usées
municipales d’une population de 1,5 million d’habitants en Israël et pour recharger
la nappe souterraine.
Dans l’optique de la lutte contre la pollution, les déchets sont considérés comme un
sous-produit indésirable du processus de production qu’il faut limiter pour éviter de
contaminer les ressources en sols, en eau et en air au-delà du niveau jugé
acceptable. Lucien Maystre donne un aperçu des problèmes à résoudre dans la
gestion des déchets, ce qui permet de comprendre l’importance croissante de la
prévention de la pollution et du recyclage.
Comme il est largement attesté que la mise en décharge sauvage des déchets donne
lieu à une grave contamination, les gouvernements ont fixé des normes pour les
pratiques acceptables de collecte, de traitement et d’élimination, afin d’assurer la
protection de l’environnement. Ils ont accordé une attention particulière aux
critères d’élimination sans danger pour l’environnement par l’utilisation de
décharges contrôlées, de l’incinération et du traitement des déchets dangereux.
Pour éviter les contraintes que l’élimination des déchets pourrait faire peser sur
l’environnement et les coûts qu’elle entraîne et pour encourager une gestion plus
avisée des ressources peu abondantes, on fait une place croissante à la réduction de
la production des déchets et à leur recyclage. Niels Hahn et Poul Lauridsen
décrivent succinctement les problèmes qui se posent lorsqu’on donne la préférence
au recyclage comme stratégie de gestion des déchets et ils examinent les
conséquences que cette solution pourrait avoir sur le plan de l’exposition des
travailleurs.
La priorité à la prévention
Thomas Tseng, Victor Shantora et Ian Smith prennent comme exemple une étude
de l’impact multimilieux exercé par la pollution sur un écosystème vulnérable
soumis à de nombreuses agressions — les Grands Lacs d’Amérique du Nord. Ils
examinent en particulier l’efficacité limitée du modèle de lutte contre la pollution
dans le cas des substances toxiques rémanentes qui se dispersent dans
l’environnement. En mettant l’accent sur la solution adoptée dans un pays et ses
conséquences pour l’action internationale, cette étude montre la portée des mesures
qui s’attachent à la prévention aussi bien qu’à la lutte contre la pollution.
Comme les techniques de lutte sont devenues plus complexes et plus coûteuses, on
s’est intéressé davantage aux moyens d’incorporer la prévention à la conception des
procédés industriels, en vue d’éliminer les effets nocifs sur l’environnement tout en
améliorant la compétitivité des entreprises. La prévention de la pollution, les
techniques propres et la réduction de l’utilisation des substances toxiques ont
notamment pour avantage d’offrir la possibilité de supprimer l’exposition des
travailleurs aux risques qui pèsent sur leur santé.
David Bennett expose les raisons pour lesquelles on privilégie de plus en plus la
prévention et comment elle se rattache aux autres méthodes de gestion de
l’environnement. Cette approche joue un rôle capital dans l’instauration d’un
développement durable, objectif dont l’importance a été largement reconnue depuis
la parution du rapport de la Commission des Nations Unies sur l’environnement et
le développement en 1987 et confirmée à la Conférence des Nations Unies sur
l’environnement et le développement (CNUED) tenue à Rio de Janeiro en 1992.
Les sources de la pollution résultant des activités humaines (ou sources des
émissions) sont fondamentalement de deux ordres:
Il faut aussi tenir compte des sources naturelles de pollution (par exemple, les
régions érodées, les volcans, certaines plantes qui libèrent de grandes quantités de
pollen, les sources de bactéries, de spores et de virus). Les sources naturelles ne
seront pas examinées dans le présent article.
Si l’on sait que certaines odeurs peuvent être causées par des agents chimiques
déterminés, comme le sulfure d’hydrogène (H2S), le sulfure de carbone (CS2) et les
mercaptants (R-SH ou R1-S-R2), d’autres sont difficiles à définir chimiquement.
On trouvera au tableau 55.1 des exemples des principaux polluants atmosphériques
industriels et de leurs sources.
L’inventaire des émissions est une liste très complète des sources dans une zone
donnée et des émissions de chacune d’elles, estimées avec autant de précision que
possible pour toutes les sources ponctuelles, linéaires et dispersées (diffuses). En
comparant ces émissions aux normes fixées pour une source donnée, on obtient une
première idée des mesures antipollution possibles dans le cas où ces normes ne sont
pas respectées. L’inventaire permet aussi de dresser une liste prioritaire des sources
importantes en fonction de la quantité de polluants émise et il indique l’influence
relative des différentes sources, par exemple le trafic par rapport aux sources
industrielles ou résidentielles. Il sert enfin à faire une estimation des concentrations
de polluants atmosphériques dans le cas des polluants pour lesquels il est difficile
ou trop onéreux de mesurer les concentrations ambiantes.
• dioxyde de soufre;
• oxydes d’azote;
• particules en suspension;
• monoxyde de carbone;
• ozone;
• métaux lourds (Pb, Cd, Ni, Cu, Fe, As, Be);
• hydrocarbures polycycliques aromatiques: benzo[a]pyrène, benzo[e]pyrène,
benzo[a]anthracène, dibenzo[a,h]anthracène, benzo[ghi]pérylène, coronène;
• composés organiques volatils: n-hexane, benzène, 3-méthylhexane, n-
heptane, toluène, octane, éthylbenzène, xylène (o-, m-, p-), n-nonane,
isopropylbenzène, propylbenzène, n-2-/3-/4-éthyltoluène, 1,2,4-/1,3,5-
triméthylbenzène, trichlorométhane, 1,1,1-trichloroéthane,
tétrachlorométhane, trichloroéthylène, tétrachloroéthylène.
Une autre source importante d’information est l’inventaire des effets (Ministerium
für Umwelt, Raumordnung und Landwirtschaft des Landes Nordrhein-Westfalen,
1993) qui regroupe les résultats des études épidémiologiques réalisées dans une
zone donnée et les effets de la pollution de l’air observés sur les récepteurs
biologiques et matériels, par exemple les plantes, les animaux, les métaux utilisés
dans la construction et les pierres des bâtiments. Les effets observés attribués à la
pollution atmosphérique doivent faire l’objet d’une analyse causale pour rechercher
le constituant responsable d’un effet donné — par exemple, une prévalence accrue
de la bronchite chronique dans une zone polluée. Si un ou plusieurs composés ont
été repérés dans une analyse des causes (analyse composé-cause), il faut en faire
une deuxième pour trouver les sources responsables (analyse source-cause).
Les dépoussiéreurs par voie humide peuvent servir à recueillir en même temps les
polluants gazeux et les particules. Par ailleurs, certains types de dispositifs à
combustion peuvent brûler les gaz et vapeurs combustibles aussi bien que certains
aérosols combustibles. Selon le type d’effluent, on peut utiliser un ou plusieurs
types de séparateurs.
La lutte contre les odeurs qui peuvent être identifiées chimiquement repose sur la
maîtrise de l’agent ou des agents chimiques dont elles émanent (par exemple, par
absorption ou par incinération). Lorsqu’une odeur n’est pas définie chimiquement
ou que l’agent l’émet à des niveaux extrêmement faibles, on peut recourir à
d’autres techniques, notamment pour la masquer (par un agent plus fort, mieux
accepté et inoffensif) ou pour la contrecarrer (par un additif qui contrarie ou
neutralise partiellement l’odeur désagréable).
Il ne faut pas oublier qu’il est indispensable de bien utiliser et entretenir les
séparateurs pour en obtenir l’efficacité attendue. Il faut s’en assurer au stade de la
planification, sur le plan du savoir-faire comme sur celui du financement. Il ne faut
pas négliger les besoins en énergie. Lors du choix d’un dispositif d’épuration de
l’air, il faut prendre en considération non seulement son coût initial, mais aussi les
frais de fonctionnement et d’entretien. Lorsqu’il s’agit de polluants très toxiques, il
faut veiller à obtenir une grande efficacité et à adopter des procédures spéciales
pour l’entretien et l’élimination des déchets.
Remplacement d’une matière par une autre . Exemples: remplacer les solvants très
toxiques employés dans certains procédés industriels par des produits moins
toxiques; utiliser des combustibles à teneur plus faible en soufre (charbon lavé, par
exemple) qui produisent donc moins de composés du soufre, etc.
Entretien . Exemple: les moteurs à combustion interne qui sont bien entretenus et
bien réglés produisent moins de monoxyde de carbone et d’hydrocarbures.
Comme pour les méthodes sur le lieu du travail, l’adoption de bonnes pratiques au
niveau de la collectivité peut contribuer à réduire la pollution de l’air, par exemple
en modifiant l’utilisation des véhicules automobiles (recours accru aux transports
en commun, aux voitures de petite cylindrée, etc.) et en agissant sur les installations
de chauffage (meilleure isolation des bâtiments qu’il faudra de ce fait moins
chauffer, meilleurs combustibles, etc.).
Pour lutter contre la pollution par les émissions des véhicules automobiles, on peut
adopter des programmes efficaces d’inspection et d’entretien obligatoires pour le
parc de voitures existant, imposer des convertisseurs catalytiques dans les nouvelles
voitures, remplacer résolument les automobiles utilisant des carburants par des
voitures fonctionnant à l’énergie solaire/électrique, réglementer la circulation
routière et se doter d’une bonne politique des transports et d’aménagement du
territoire.
On réduit la pollution causée par les véhicules à moteur en diminuant les émissions
par kilomètre parcouru par véhicule (km/v) et en abaissant le nombre de km/v
(Walsh, 1992). On peut réduire les émissions par km/v en améliorant la
performance du véhicule — matériel, entretien — pour les nouvelles voitures
comme pour celles en circulation. On peut agir sur la composition de l’essence au
plomb en diminuant la teneur en plomb ou en soufre, ce qui a également pour
avantage de réduire les émissions d’hydrocarbures (HC) provenant des véhicules.
Abaisser la teneur en soufre du carburant diesel pour réduire les émissions de
particules présente en outre l’avantage d’augmenter les possibilités de limitation
catalytique des émissions de particules diesel et d’HC organiques.
Bien que ces solutions conduisent à économiser le carburant, elles ne sont pas
encore acceptées par le grand public, et les gouvernements n’ont pas encore tenté
sérieusement de les appliquer.
L’estimation du coût des effets sur la santé publique et l’environnement est la partie
la plus difficile d’un plan de préservation de la qualité de l’air, étant donné qu’il est
très difficile d’évaluer le prix de la réduction de durée de la vie causée par les
maladies invalidantes, les taux d’hospitalisation et les heures de travail perdues.
Pourtant, il est absolument nécessaire de procéder à cette estimation et de la
comparer au coût des mesures antipollution si l’on veut le mettre en regard de ce
que coûterait l’inaction en termes d’effets sur la santé publique et l’environnement.
Cette étude revêt une importance particulière pour les pays qui élaborent des projets
dans le cadre de la réorientation et de la restructuration de leur économie. Elle est
prévue par la loi dans un grand nombre de pays développés et est aujourd’hui
appliquée de plus en plus largement dans les pays en développement et les
économies en transition.
Selon les normes de qualité de l’air définies pour un polluant donné, il est
intéressant de connaître les valeurs annuelles moyennes ou les concentrations de
pointe sur une courte période. D’ordinaire, il faut calculer les concentrations là où
la population est active, c’est-à-dire près de la surface, à 2 mètres environ au-dessus
du sol.
Les paramètres météorologiques qui influent sur la dispersion des polluants sont la
vitesse et la direction du vent, ainsi que la stratification thermique horizontale. La
concentration du polluant est fonction inverse de la vitesse du vent, ce qui
s’explique principalement par l’accélération du transport. En outre, le brassage
turbulent augmente avec la vitesse du vent. Etant donné que les inversions
(situations dans lesquelles la température augmente avec l’altitude) empêchent le
brassage turbulent, on observe des concentrations maximales au sol en cas de
stratification extrêmement stable. Inversement, les situations de convection
intensifient le brassage vertical et produisent par conséquent les concentrations les
plus faibles.
Les normes de qualité de l’air — par exemple, les valeurs moyennes annuelles ou
les 98e percentiles — reposent habituellement sur des statistiques. Il faut donc des
séries chronologiques de données pour les paramètres météorologiques pertinents.
L’idéal serait d’avoir des statistiques qui reposent sur 10 années d’observation. Si
l’on dispose seulement de données portant sur une période plus courte, il faudrait
s’assurer qu’elles soient représentatives pour une période plus longue. On peut le
faire notamment par l’analyse des séries chronologiques plus longues provenant
d’autres sites d’observation.
Il faut aussi que les séries météorologiques chronologiques dont on se sert soient
représentatives du site considéré, c’est-à-dire qu’elles traduisent les caractéristiques
locales. C’est particulièrement important pour les normes de qualité de l’air qui
reposent sur les fractions de crête de la distribution, comme les 98 e percentiles. Si
l’on ne dispose pas de séries chronologiques de ce genre, on peut utiliser un modèle
météorologique d’écoulement pour en calculer une à partir d’autres données,
comme on le verra plus loin.
Comme on l’a signalé plus haut, la dispersion des polluants dépend des conditions
d’émission, du transport et du brassage turbulent. On appelle modélisation de la
dispersion de type eulérien (Pielke, 1984) l’emploi de l’équation complète qui
décrit ces caractéristiques. Avec cette méthode, il faut déterminer les gains et pertes
du polluant considéré à chacun des points d’une grille spatiale fictive et à des
intervalles de temps distincts. Comme cette méthode est très complexe et exige
beaucoup de temps d’ordinateur, elle ne peut pas être utilisée de façon courante.
Toutefois, pour de nombreuses applications, on peut la simplifier à l’aide des
hypothèses suivantes:
Dans ce cas, l’équation visée plus haut peut être résolue analytiquement. La
formule obtenue décrit un panache avec une distribution gaussienne des
concentrations, dénommé modèle de panache gaussien (VDI, 1992a). Les
paramètres de distribution dépendent des conditions météorologiques et de la
distance sous le vent, ainsi que de la hauteur de la cheminée. Ils doivent être
déterminés empiriquement (Venkatram et Wyngaard, 1988). On peut décrire à
l’aide du modèle de bouffée gaussienne (VDI, 1996) les situations dans lesquelles
les émissions et les paramètres météorologiques varient fortement dans le temps et
dans l’espace. Dans cette méthode, des bouffées distinctes sont émises à intervalles
de temps fixes, chacune suivant sa propre trajectoire en fonction des conditions
météorologiques existantes. Le long de son parcours, chaque bouffée grandit selon
le brassage turbulent. Les paramètres qui décrivent cette croissance doivent, là
encore, être déterminés à partir de données empiriques (Venkatram et Wyngaard,
1988). Il convient cependant de souligner que, pour atteindre cet objectif, il faut
disposer de paramètres présentant la répartition voulue dans l’espace et dans le
temps.
Pour les rejets accidentels ou les études de cas isolées, il est recommandé d’utiliser
un modèle lagrangien ou particulaire (VDI, 1999). L’idée est de calculer les
trajectoires d’un grand nombre de particules, représentant chacune une quantité fixe
du polluant considéré. Les différentes trajectoires sont déterminées par le transport
dû au vent moyen et par les perturbations stochastiques. En raison de l’élément
stochastique, ces trajectoires ne concordent pas entièrement, mais décrivent le
brassage dû à la turbulence. En principe, les modèles lagrangiens sont capables de
prendre en considération des conditions météorologiques complexes, en particulier
le vent et la turbulence; les champs calculés à l’aide des modèles de circulation
décrits ci-dessous peuvent être utilisés dans la modélisation lagrangienne de la
dispersion.
S’il faut calculer les concentrations de polluants dans un terrain accidenté, il peut
être nécessaire de tenir compte dans la modélisation des effets de la topographie sur
la dispersion. Ces effets sont, par exemple, le transport suivant la structure
topographique, ou les systèmes de vents thermiques comme les brises de mer ou les
vents de montagne qui modifient la direction du vent au cours de la journée.
Si ces effets se produisent à une échelle beaucoup plus vaste que la zone du
modèle, leur influence peut être étudiée à l’aide de données météorologiques qui
reflètent les caractéristiques locales. En l’absence de données de ce genre, on peut
se représenter la structure en trois dimensions imposée par la topographie à la
circulation étudiée en utilisant un modèle de circulation correspondant. A l’aide de
ces données, on peut modéliser la dispersion elle-même en prenant pour hypothèse
une homogénéité horizontale, comme on l’a vu plus haut dans le cas du modèle de
panache gaussien. Toutefois, dans les cas où les conditions de vent changent
sensiblement dans la zone du modèle, la modélisation de la dispersion doit prendre
en considération le courant à trois dimensions influencé par la configuration
topographique. Comme on l’a signalé ci-dessus, on peut y parvenir en utilisant une
bouffée gaussienne ou un modèle lagrangien. On peut aussi procéder par une
modélisation de type eulérien, qui est plus complexe.
Si l’on doit examiner plus en détail les régimes de vents thermiques, il faut alors
utiliser des modèles pronostiques. Selon l’échelle et la déclivité de la zone prise
comme modèle, on choisira une approche hydrostatique, ou l’approche non
hydrostatique qui est encore plus complexe (VDI, 1992b). Les modèles de ce type
exigent un ordinateur puissant et une grande expérience. Ils ne permettent pas de
déterminer les concentrations en se fondant sur des moyennes annuelles de
caractère général. En revanche, on peut réaliser des études pour les conditions les
plus défavorables en examinant uniquement une direction du vent, ainsi que les
paramètres de vitesse du vent et de stratification qui donneront les concentrations
les plus élevées au sol. Si les valeurs ainsi obtenues dans les conditions les plus
défavorables n’excèdent pas les normes de qualité de l’air, il n’est pas nécessaire de
procéder à des études plus détaillées.
Les polluants émis par une cheminée de faible hauteur située sur un bâtiment seront
retenus dans la circulation sur le côté du bâtiment qui est sous le vent. L’extension
de cette circulation sous le vent dépend de la hauteur et de la largeur du bâtiment,
ainsi que de la vitesse du vent. C’est pourquoi on ne peut généralement utiliser les
méthodes simplifiées pour décrire la dispersion des polluants en pareil cas, en se
fondant seulement sur la hauteur d’un bâtiment. On a pu connaître l’extension
verticale et horizontale de cette circulation sous le vent grâce à des études faites en
soufflerie (Hosker, 1985) et on peut l’appliquer à des modèles de diagnostic basés
sur la conservation de la masse. Dès que l’on a déterminé le champ du vent, on peut
s’en servir pour calculer le transport et le brassage turbulent du polluant émis. On
peut utiliser pour ce faire le modèle lagrangien ou eulérien de dispersion.
Des études plus détaillées — concernant les rejets accidentels, par exemple — ne
peuvent être réalisées qu’à l’aide de modèles de circulation et de dispersion non
hydrostatiques, et non par un modèle diagnostique. Comme ce travail exige en
général un ordinateur puissant, il est recommandé d’utiliser la méthode pour les
conditions les plus défavorables décrites ci-dessus avant la modélisation statistique
complète.
La Veille de l’atmosphère globale (VAG) (Miller et Soudine, 1994) fournit des données et d’autres
informations sur la composition chimique et les caractéristiques physiques connexes de
l’atmosphère, ainsi que sur leurs tendances, pour permettre de comprendre les liens entre les
modifications de la composition de l’atmosphère et les changements climatiques mondiaux et
régionaux, le transport et le dépôt à grande distance dans l’atmosphère de substances chimiques
potentiellement toxiques au-dessus des écosystèmes terrestres, d’eau douce et marins, et le cycle
naturel des éléments chimiques dans le système mondial atmosphère/ océans/biosphère, ainsi que
les effets des activités humaines sur ce système. La VAG comprend quatre domaines d’activité: le
Système mondial d’observation de l’ozone (SMOO3), la surveillance mondiale de la composition
de fond de l’atmosphère, y compris le Réseau de surveillance de la pollution atmosphérique de
fond (BAPMoN); la dispersion, le transport, la transformation chimique et le dépôt des polluants
atmosphériques sur terre et en mer à différentes échelles de temps et d’espace, l’échange des
polluants entre l’atmosphère et d’autres compartiments de l’environnement, et la surveillance
intégrée. L’un des aspects les plus importants de la VAG est l’établissement de centres d’activité
scientifiques chargés de l’assurance de la qualité des données recueillies dans le cadre de la VAG.
Les concentrations de polluants dans l’air ambiant sont influencées par la variation
dans l’espace ou dans le temps des émissions de substances dangereuses et par la
dynamique de leur dispersion dans l’air. On observe donc des variations
journalières et annuelles marquées des concentrations. Il est pratiquement
impossible de déterminer de façon unifiée toutes ces variations de la qualité de l’air
(en langage statistique, la population des états de qualité de l’air). Les mesurages
des concentrations de polluants dans l’air ambiant ont donc toujours le caractère
d’échantillons aléatoires dans l’espace ou dans le temps.
Pour planifier les mesurages, la première chose à faire est de formuler l’objectif
avec autant de précision que possible. Dans la surveillance de la qualité de l’air, les
questions et domaines d’activité importants sont:
Le tableau 55.2 expose le cas d’un réseau de mesurage qui est censé surveiller de
façon aussi représentative que possible la qualité de l’air dans une zone déterminée
pour la comparer aux limites fixées. Cette méthode repose sur l’idée que l’on
choisit au hasard les sites de mesurage de manière à prendre en compte la
variabilité des emplacements situés dans une zone où la qualité de l’air est variable
(espaces habitables, rues, zones industrielles, parcs, centres urbains, banlieues).
Dans des zones étendues, cette méthode peut se révéler très coûteuse en raison du
nombre de sites de mesurage requis.
Une troisième méthode consiste à faire les mesurages là où l’on pense que
l’exposition est la plus élevée (par exemple, dans les couloirs de rue urbains pour le
NO2 et le benzène). Si cet emplacement répond aux normes d’évaluation, il existe
une probabilité suffisante pour qu’il en soit de même pour tous les autres. En se
focalisant sur les points critiques, cette méthode exige relativement peu
d’emplacements d’échantillonnage, mais ceux-ci doivent être choisis avec un soin
particulier. En effet, on risque de surestimer l’exposition réelle.
L’assurance qualité
Il peut être coûteux de mesurer les concentrations de polluants dans l’air ambiant,
et les résultats obtenus peuvent influer sur des décisions importantes qui peuvent
avoir de graves conséquences économiques et écologiques. Les mesures de
l’assurance qualité font donc partie intégrante du processus. Deux domaines sont à
distinguer ici.
• accepter les méthodes prescrites et les mettre en œuvre selon les bonnes
pratiques de laboratoire;
• entretenir correctement le matériel de mesurage, prendre les précautions
voulues pour éliminer les perturbations et assurer les réparations;
• procéder aux étalonnages et aux vérifications régulières pour garantir un bon
fonctionnement;
• procéder aux essais interlaboratoires.
Il existe un grand nombre de méthodes de mesurage pour une large gamme de gaz
inorganiques. Nous examinerons séparément les méthodes manuelles et les
procédures automatisées.
Les méthodes manuelles
Dans le cas des méthodes manuelles dont on se sert pour les gaz inorganiques, la
substance à mesurer est habituellement absorbée lors de l’échantillonnage dans une
solution ou une matière solide. Dans la plupart des cas, on fait un dosage
photométrique après une réaction colorante appropriée. Plusieurs méthodes
manuelles de mesurage ont une importance spéciale en tant que pratiques de
référence. Etant donné que leur coût en personnel est relativement élevé, elles ne
sont que rarement appliquées aujourd’hui pour les mesurages sur le terrain, car des
procédures automatisées existent. Les méthodes manuelles les plus importantes
sont brièvement exposées au tableau 55.3.
Une variante spéciale des prélèvements, utilisée principalement en liaison avec les
méthodes manuelles, est celle du tube de séparation par diffusion (le «dénudeur»).
La technique du dénudeur vise à séparer les phases gazeuses des phases
particulaires en se fondant sur leurs taux différents de diffusion. Cette technique est
utilisée souvent pour les problèmes difficiles de séparation, par exemple: ammoniac
et composés de l’ammonium; oxydes d’azote, acide nitrique et nitrates; oxydes de
soufre, acide sulfurique et sulfates; ou halogénures d’hydrogène/halogénures. Dans
la méthode classique du dénudeur, l’air à analyser est aspiré à travers un tube de
verre possédant un revêtement spécial, selon la ou les matières à recueillir. Cette
technique a été perfectionnée en un grand nombre de variantes et a aussi été
partiellement automatisée. Elle a fortement élargi les possibilités de
l’échantillonnage différencié, mais elle peut être très laborieuse, selon la variante,
et il faut une grande expérience pour l’utiliser convenablement.
Les procédures automatisées
Il faut souligner que toutes les procédures automatisées reposant sur des principes
physico-chimiques doivent être étalonnées à l’aide des procédures de référence
(manuelles). Etant donné que le matériel automatique des réseaux de mesurage
fonctionne souvent pendant de longues périodes (plusieurs semaines, par exemple)
sans supervision humaine directe, il est indispensable de contrôler régulièrement et
automatiquement son bon fonctionnement. On le fait généralement au moyen de
gaz témoins et de gaz d’essai qui peuvent être produits par plusieurs méthodes
(préparation de l’air ambiant, bouteilles de gaz sous pression, imprégnation,
diffusion, dilution statique et dynamique).
Tableau 55.5 Procédures les plus importantes de mesurage pour les particules
en suspension (SPM)
Enfin, il faut signaler la procédure à la fumée noire pour la mesure des SPM.
Originaire de Grande-Bretagne, elle a été incorporée dans les directives de l’Union
européenne pour le SO2 et les poussières en suspension. Avec cette méthode, on
mesure le noircissement du filtre avec un photomètre réflexe après
l’échantillonnage. Les valeurs de fumée noire ainsi obtenues par photométrie sont
converties en unités gravimétriques (µg/m3) à l’aide d’une courbe d’étalonnage.
Comme cet étalonnage dépend dans une large mesure de la composition de la
poussière, spécialement de sa teneur en suie, la conversion en unités gravimétriques
est problématique.
Aujourd’hui, les composés métalliques sont souvent dosés d’office dans les
échantillons d’immissions de poussières en suspension. En général, la collecte des
poussières en suspension sur les filtres est suivie d’une dissolution chimique des
poussières retenues, étant donné que les étapes finales les plus courantes de
l’analyse présupposent la conversion des composés métalliques et métalloïdes dans
une solution aqueuse. En pratique, les méthodes de loin les plus importantes sont la
spectroscopie à absorption atomique (AAS) et la spectroscopie d’émission optique
à plasma inductif (ICP-OES). Les autres procédures de dosage des composés
métalliques dans les poussières en suspension sont l’analyse par fluorescence X, la
polarographie et l’analyse par activation des neutrons. Bien que l’on mesure depuis
maintenant plus de 10 ans les composés métalliques en tant que composants des
SPM dans l’air à l’extérieur sur certains sites de mesurage, d’importantes questions
n’ont pas encore trouvé de réponse. L’échantillonnage classique effectué par
séparation des poussières en suspension sur les filtres suppose que la séparation des
composés de métaux lourds sur le filtre soit complète. Or, on trouve des indications
plus anciennes qui en font douter. En tout état de cause, les résultats sont très
hétérogènes.
Un autre problème tient au fait que l’on ne peut distinguer les différentes formes de
composés métalliques, ou les composés simples des divers éléments, dans l’analyse
réalisée à l’aide des procédures classiques de mesurage. Si, dans de nombreux cas,
on peut faire des dosages totaux adéquats, il serait souhaitable de procéder à une
différenciation plus poussée pour certains métaux particulièrement cancérogènes
(As, Cd, Cr, Ni, Co, Be). Il y a souvent de grandes différences dans les effets
cancérogènes des éléments et de leurs composés (par exemple, composés du
chrome dans les niveaux d’oxydation III et VI — seuls ceux du niveau VI sont
cancérogènes). En pareil cas, il serait souhaitable de mesurer séparément les divers
composés (analyse par substance). En dépit de l’importance de ce problème, on
commence seulement à faire l’analyse par substance dans la technique de
mesurage.
Le mesurage des particules en suspension et des composés métalliques dans les SPM
Parmi les autres procédures de collecte des retombées, on peut citer le système
Liesegang-Löbner et les méthodes qui recueillent la poussière déposée sur des
feuilles adhésives.
Tous les résultats des mesurages des retombées de poussière sont des valeurs
relatives qui dépendent de l’appareil utilisé, étant donné que la séparation est
fonction des conditions d’écoulement au voisinage du dispositif mais aussi d’autres
paramètres. Les écarts entre les valeurs obtenues avec les différentes procédures
peuvent atteindre 50%.
La composition de la poussière déposée a également son importance, notamment
les teneurs en plomb, en cadmium et en autres composés métalliques. Les
procédures d’analyse utilisées sont fondamentalement les mêmes que pour la
poussière en suspension.
Le mesurage des matières spéciales sous forme de poussières
La suie sous forme de particules émises par les moteurs diesel doit être prise en
considération, étant donné qu’elle a également été classée parmi les matières
cancérogènes. En raison de sa composition changeante et complexe et du fait que
plusieurs de ses composants sont également émis par d’autres sources, il n’existe
pas de procédure de mesurage propre à la suie du diesel. Néanmoins, si l’on veut
une indication concrète sur les concentrations dans l’air ambiant, la suie est définie
classiquement comme un carbone élémentaire, faisant partie du carbone total. Elle
est mesurée après prélèvement et une étape d’extraction et de désorption thermique.
On détermine ensuite la teneur en carbone par combustion dans un flux d’oxygène
et par titrage coulométrique ou détection IR non dispersive du dioxyde de carbone
formé lors de ce processus.
Avec les dépôts secs, les dépôts humides dans la pluie, la neige, le brouillard et la
rosée constituent les modes les plus importants de pénétration des matières nocives
en provenance de l’air dans le sol, l’eau ou les végétaux.
Pour distinguer clairement les dépôts humides dans la pluie et la neige (brouillard
et rosée soulèvent des problèmes spéciaux) du dépôt total (dépôt brut, voir ci-
dessus «Le mesurage des particules en suspension et des composés métalliques
dans les SPM») et des dépôts secs, on se sert pour les prélèvements de collecteurs
de précipitations dont l’ouverture est couverte lorsqu’il ne pleut pas
(échantillonneur réservé aux matières humides). Dans ces appareils, qui
fonctionnent généralement selon le principe des variations de conductivité, le
couvercle s’ouvre lorsqu’il commence à pleuvoir et se referme lorsque la pluie
cesse.
Les échantillons sont transférés par un entonnoir (surface à l’air libre d’environ 500
cm2 ou davantage) dans un récipient obscurci et, si possible, isolé (en verre ou en
polyéthylène pour les composants inorganiques exclusivement).
Pour l’analyse, les procédures suivies sont celles dont on dispose en général pour
les solutions aqueuses, comme la conductométrie pour la conductivité, les
électrodes pour les valeurs du pH, la spectroscopie par adsorption atomique pour
les cations (voir ci-dessus «Le mesurage des matières spéciales sous forme de
poussières») et, de plus en plus, la chromatographie à échange d’ions avec la
détection par conductivité pour les anions.
Les composés organiques sont extraits de l’eau de pluie à l’aide, par exemple, du
dichlorométhane, ou en sont aspirés avec de l’argon et adsorbés avec des tubes
Tenax (seulement pour les matières très volatiles). Les matières sont ensuite
soumises à une analyse chromatographique en phase gazeuse (voir ci-après «Les
procédures de mesurage des polluants atmosphériques organiques»).
Les dépôts secs sont directement fonction des concentrations dans l’air ambiant.
Les différences de concentration des matières nocives transportées par l’air dans la
pluie sont cependant relativement faibles, de sorte que, pour mesurer les dépôts
secs, on peut se servir de réseaux à maillage large. A titre d’exemple, on peut citer
le réseau de mesurage EMEP en Europe, formé d’environ 90 stations qui
recueillent les données concernant les ions de sulfate et de nitrate, certains cations
et le pH des précipitations. Il existe aussi de vastes réseaux de mesurage en
Amérique du Nord.
Les systèmes indiqués au tableau 55.6 sont les plus employés dans la pratique.
Tableau 55.7 Aperçu des procédures courantes de mesurage de la qualité de l'air par
chromatographie des composés organiques (avec des exemples d'applications)
Pour mesurer les dépôts totaux, on utilise les dispositifs normalisés pour la
précipitation des poussières (procédure Bergerhoff, par exemple), qui ont été
légèrement modifiés et obscurcis pour les protéger contre la pénétration d’une
lumière intense. D’importants problèmes techniques, comme la remise en
suspension de particules déjà séparées, l’évaporation ou même la décomposition
photolytique, font maintenant l’objet de recherches systématiques afin d’améliorer
les procédures d’échantillonnage des composés organiques, lesquelles ne sont pas
encore optimales.
On utilise de par le monde les types les plus variés de réseaux de surveillance de la
qualité de l’air. Il faut établir une distinction entre les réseaux de mesurage
composés de stations automatiques commandées par ordinateur (récipients de
mesure) et les réseaux virtuels, qui ne font que définir les emplacements pour
divers types de mesurage des concentrations des polluants atmosphériques sous la
forme d’une grille préalablement définie. Les types de réseaux et leur rôle ont été
décrits plus haut.
En règle générale, les stations de mesurage sont reliées au moyen de lignes fixes de
transmission des données, de liaisons téléphoniques ou d’autres systèmes de
transfert de données à un ordinateur (ordinateur de traitement, poste de travail ou
PC, selon la portée du système), qui reçoit, traite et affiche les résultats. Les
ordinateurs du réseau et, si nécessaire, un personnel spécialement formé effectuent
une surveillance continue pour s’assurer que les valeurs seuils ne sont pas
dépassées. On peut ainsi déceler à tout moment les situations critiques. C’est très
important, surtout pour surveiller les cas de smog massif en hiver et en été (photo-
oxydants) et pour donner au public des informations à jour.
* Lorsqu’on fixe les niveaux d’exposition dans l’étape 3, il ne faut pas oublier qu’il
s’agit d’expositions totales et non seulement de celles qui proviennent de l’usine.
Une fois le niveau admissible établi, il faut soustraire les niveaux de fond et les
apports d’autres usines pour déterminer le volume maximal que l’usine peut
émettre sans dépasser le niveau d’exposition admissible. Si on ne le fait pas et que
trois usines par exemple soient autorisées à émettre le volume maximal, les groupes
cibles seront exposés à un niveau triple du niveau admissible.
Certaines autorités se sont acquittées d’une partie de ce travail en fixant des normes
fondées sur la concentration maximale d’un contaminant que peut recevoir une
cible vulnérable. Avec ce type de normes, le gestionnaire ne doit pas s’occuper des
étapes 2 et 3 puisque l’organisme de réglementation l’a déjà fait. Dans ce système,
il doit seulement fixer la norme pour les émissions non réglementées de chaque
polluant (étape 1) et décider des mesures nécessaires pour respecter cette norme
(étape 4).
Tableau 55.11 Eventail des normes américaines de qualité de l'air pour un contaminant
moins couramment réglementé (benzène)
Les niveaux ont été normalisés sur une durée moyenne de 24 heures pour faciliter
les comparaisons. (D’après Calabrese et Kenyon, 1991.)
Il arrive que cette approche par étape dans le choix des mesures antipollution soit
court-circuitée et que les organes de réglementation comme les concepteurs optent
directement pour une «solution universelle». L’une de ces solutions est ce que l’on
appelle la meilleure technique de maîtrise disponible (MTMD). On suppose qu’en
utilisant la meilleure combinaison d’épurateurs, de filtres et de bonnes méthodes de
travail pour une source d’émission, on obtiendra un niveau d’émission
suffisamment bas pour protéger le groupe cible le plus vulnérable. Bien souvent, le
niveau d’émission obtenu sera inférieur au minimum requis pour protéger ce
groupe. De cette façon, on devrait éliminer toutes les expositions inutiles. On
trouvera au tableau 55.12 des exemples de la MTMD.
La MTMD ne garantit pas en soi des niveaux de réduction appropriés. Bien que ce
soit le meilleur système de maîtrise fondé sur des mesures d’épuration des gaz et de
bonnes pratiques opératoires, la MTMD peut ne pas suffire si la source est une
grande usine ou si elle est située à proximité d’une cible sensible. La meilleure
technique de maîtrise disponible doit être mise à l’épreuve pour s’assurer qu’elle
est vraiment suffisante. Il faut vérifier les normes d’émission ainsi obtenues pour
voir si elles ne resteraient pas nocives malgré tout, même avec les meilleures
mesures d’épuration des gaz. Si elles le sont encore, il faudra peut-être envisager
d’autres solutions de base, comme le choix de procédés ou de matières plus sûrs, ou
la réimplantation de l’usine dans une zone moins sensible.
Une autre «solution universelle», qui évite certaines des étapes, est celle des
normes d’efficacité à la source. De nombreuses autorités fixent des normes
d’émission à ne pas dépasser. Celles-ci reposent sur les émissions à la source.
D’ordinaire, cela donne de bons résultats, mais, tout comme la MTMD, ces normes
peuvent ne pas être fiables. Les niveaux devraient être suffisamment bas pour
contenir les émissions maximales à un niveau assez faible pour protéger les
groupes cibles vulnérables contre les émissions typiques. Toutefois, tout comme
dans le cas de la MTMD, cela ne suffira pas toujours à protéger tout le monde
lorsque les sources d’émission sont importantes ou situées près de populations
vulnérables. En pareil cas, il faut d’autres procédures pour garantir la sécurité de
tous les groupes cibles.
Les systèmes d’épuration des gaz sont placés à la source, avant la cheminée, pour
éliminer les contaminants du flux gazeux avant de le lâcher dans l’atmosphère.
Le tableau 55.13 résume les différentes catégories de systèmes d’épuration des gaz.
Tableau 55.13 Méthodes d'épuration des gaz par élimination des vapeurs, particules et
gaz nocifs des émissions industrielles
Il convient de noter que le rendement du système varie largement pour chaque type
d’épurateur en fonction de sa conception, de l’énergie utilisée et des
caractéristiques du flux gazeux et du contaminant. Par conséquent, les rendements
donnés à titre d’exemple au tableau 55.13 ne sont que des approximations. La
variation du rendement est illustrée par les laveurs au tableau 55.13. Le rendement
de collecte d’un laveur varie entre 98,5% pour des particules de 5 µm et 45% pour
des particules de 1 µm pour la même perte de charge au droit du laveur (hauteur
d’eau de 17 cm dans la jauge de pression d’eau (CE)). Pour une particule de même
dimension, 1 µm, l’efficacité varie entre 45% pour une hauteur d’eau de 17 cm et
99,95% pour une hauteur d’eau de 130 cm. Par conséquent, les épurateurs de gaz
doivent être adaptés au flux en question. Il n’est pas recommandé d’utiliser des
dispositifs génériques.
L’élimination des déchets
Lorsqu’on choisit et conçoit un système d’épuration des gaz, il faut veiller avec
soin à l’élimination sans danger des matières recueillies. Comme le montre
le tableau 55.14, certains procédés produisent de grandes quantités de
contaminants. Si la plupart de ces contaminants sont recueillis par l’équipement
d’épuration des gaz, l’élimination des déchets dangereux peut soulever un
problème.
Tableau 55.14 Exemples de taux d'émission non contrôlés pour quelques procédés
industriels
Dans certains cas, les déchets contiennent des produits utiles susceptibles d’être
recyclés, comme les métaux lourds provenant d’une fonderie ou les solvants d’une
fabrique de peinture. Les déchets peuvent servir de matière première dans un autre
procédé industriel, tel le dioxyde de soufre extrait de l’acide sulfurique qui sert à la
fabrication d’engrais.
Lorsque les déchets ne peuvent être ni recyclés, ni réutilisés, l’élimination n’est pas
toujours simple. Non seulement leur volume peut poser problème, mais ils sont
parfois dangereux en eux-mêmes. Ainsi, quand l’acide sulfurique récupéré d’une
chaudière ou d’une fonderie ne peut être réutilisé, il faudra lui faire subir de
nouveaux traitements pour le neutraliser avant de l’éliminer.
La dispersion
La dispersion devrait être utilisée avec prudence. Il faut tenir compte des conditions
météorologiques locales et des conditions à la surface du sol. Dans les climats plus
froids, par exemple, particulièrement avec couverture de neige, il peut y avoir
fréquemment des inversions de température qui peuvent emprisonner les polluants
à proximité du sol, donnant lieu à des expositions anormalement élevées. De même,
si l’usine est implantée dans une vallée, les panaches peuvent monter et descendre
le long de celle-ci, ou rester bloqués par les collines avoisinantes, si bien qu’ils ne
s’étalent pas et ne se dispersent pas comme prévu.
L’une des méthodes d’hygiène les plus employées pour réduire les dangers
environnementaux sur le lieu de travail consiste à remplacer une matière ou une
méthode dangereuse par une autre qui l’est moins. S’il est possible de le faire et si
l’on évite des émissions nocives, on n’a plus à se poser de questions sur le type ou
l’efficacité des mesures de lutte. Il est préférable en effet d’éviter le problème
plutôt que de chercher à corriger une première décision qui était mauvaise. A titre
d’exemple, on citera l’emploi de combustibles plus propres, la pose de bâches sur
les matières stockées en vrac et la réduction des températures dans les séchoirs.
Cette règle s’applique aux achats peu importants aussi bien qu’aux principaux
critères de conception de l’usine. Si l’on utilise uniquement des matières ou des
méthodes qui ne nuisent pas à l’environnement, il n’y aura aucun risque, ni à
l’intérieur, ni à l’extérieur. En revanche, quand on a fait le mauvais choix, le reste
du programme consistera à essayer de remédier à cette décision première. Si l’on
utilise un produit ou un procédé bon marché, mais dangereux, on devra peut-être
recourir à des procédures et matériels spéciaux de manipulation, ainsi qu’à des
méthodes spéciales d’élimination. L’article bon marché peut alors se révéler
coûteux à utiliser et à éliminer, alors qu’une matière ou une méthode plus sûre,
mais plus chère, aurait peut-être été plus économique à long terme.
La ventilation localisée
Des mesures doivent être prises pour tous les problèmes recensés qui n’ont pu être
évités par la substitution de matières ou de méthodes plus sûres. Les émissions
prennent naissance à chaque poste de travail et non à la cheminée. Un système de
ventilation bien conçu qui capte et maîtrise les émissions à la source aidera à
protéger la collectivité. Les hottes et conduits du système de ventilation font partie
du dispositif total de lutte contre la pollution atmosphérique.
Il est préférable d’opter pour une ventilation localisée. Un tel système ne dilue pas
les contaminants et fournit un flux gazeux concentré qu’il est plus facile d’épurer
avant son rejet dans l’environnement. L’équipement d’épuration des gaz est plus
efficace s’il traite un air où les concentrations de contaminants sont plus élevées.
Ainsi, une hotte de captage au-dessus du chenal de coulée d’un haut fourneau
empêchera les contaminants de se propager dans l’environnement et dirigera les
fumées vers le système d’épuration des gaz. Le tableau 55.13 montre que
l’efficacité des épurateurs par absorption et adsorption augmente avec la
concentration du contaminant, et que les épurateurs par condensation ne sont pas
recommandés pour de faibles niveaux de concentration (< 2 000 ppm).
Si les polluants ne sont pas captés à la source et peuvent s’échapper par les fenêtres
et les ouvertures de ventilation, ils se transforment en fuites et émissions fugaces
non maîtrisées. Dans certains cas, ces émissions peuvent avoir un impact important
sur le voisinage immédiat.
L’isolement
Tel que présenté ci-dessus, l’isolement est un moyen de séparer une installation
donnée de cibles vulnérables. Un autre système d’isolement est celui du zonage
utilisé par les pouvoirs locaux pour séparer certaines catégories d’industries des
cibles vulnérables. Une fois les industries séparées des populations cibles, il ne
faudrait pas permettre à la population de se réinstaller à proximité d’une usine. Bien
que cette méthode semble aller de soi, elle ne se pratique pas aussi souvent qu’il le
faudrait.
Les méthodes de travail
Il faut adopter des méthodes de travail qui garantissent que le matériel est utilisé
correctement et en sécurité, sans risque pour les travailleurs ni pour
l’environnement. Les systèmes antipollution complexes doivent être correctement
entretenus et utilisés s’ils doivent remplir leur fonction. Un autre facteur important
est celui de la formation du personnel; celui-ci doit apprendre à utiliser et à
entretenir le matériel installé pour réduire ou éliminer la quantité de matières
dangereuses rejetée sur le lieu du travail ou à l’extérieur. Dans certains cas, la
MTMD s’en remet aux bonnes pratiques pour garantir des résultats acceptables.
La surveillance en temps réel
Le système fondé sur la surveillance en temps réel n’est pas populaire et n’est pas
utilisé de façon courante. Selon cette méthode, on peut combiner l’émission en
continu et la surveillance météorologique avec la modélisation de la dispersion
pour prédire les expositions sous le vent. Lorsque les expositions prévues
approchent les niveaux tolérables, cette information sert à réduire les cadences de
production et les émissions. Il s’agit d’une méthode peu efficace, mais elle peut
représenter un procédé provisoire acceptable de lutte pour une installation
existante.
L’inverse consiste à avertir le public lorsque les conditions sont telles que des
concentrations excessives de contaminants pourraient se produire, afin que la
population puisse prendre les dispositions voulues. Ainsi, si l’on signale que les
conditions atmosphériques rendent excessifs les niveaux de dioxyde de soufre sous
le vent d’une fonderie, les personnes vulnérables comme les asthmatiques sauront
qu’elles ne doivent pas sortir. Là encore, cela peut offrir une mesure provisoire
acceptable en attendant la mise en place de dispositifs antipollution permanents.
Dans tous les cas, l’efficacité des dispositifs antipollution dépend d’un bon
entretien; le matériel doit fonctionner comme prévu. En plus des dispositifs eux-
mêmes, les procédés de fabrication qui peuvent donner lieu à des émissions doivent
être utilisés correctement. A titre d’exemple d’un procédé industriel, on peut citer
un séchoir de copeaux de bois dont le dispositif de contrôle de la température est
défaillant; si le séchoir fonctionne à une température trop élevée, il émettra
davantage de matières et, peut-être, des matières d’un type différent, arrachées au
bois en train de sécher. Pour un épurateur de gaz, un exemple d’entretien qui
influerait sur les émissions serait celui d’un filtre à manches défectueux dont les
sacs seraient troués, laissant ainsi passer les poussières.
Les travaux de maintenance jouent aussi un rôle important dans la réduction des
émissions totales. Les poussières qui ne sont pas enlevées rapidement à l’intérieur
de l’usine peuvent être remises en suspension et présenter un risque pour le
personnel. Si elles sont transportées à l’extérieur de l’usine, elles sont un risque
pour la collectivité. Des matières en vrac non couvertes, des déchets végétaux ou la
poussière soulevée par les véhicules peuvent permettre aux polluants d’être
entraînés par le vent vers la collectivité. Pour réduire les émissions totales, il est
important de nettoyer les cours d’usine et d’utiliser des conteneurs ou des sites de
stockage appropriés. Il ne suffit pas de bien concevoir un système, encore faut-il
l’utiliser correctement si l’on veut protéger la collectivité.
• Pour caractériser les émissions. Il faut savoir ce qui est émis pour concevoir
un système rationnel de lutte contre la pollution de l’air. Il faut connaître non
seulement le volume des gaz, mais la quantité, la nature et, dans le cas des
particules, la répartition granulométrique des matières émises. Les mêmes
informations sont nécessaires pour inventorier les émissions totales dans le
voisinage.
• Pour tester l’efficacité du matériel. Une fois le dispositif antipollution
acheté, il faut le tester pour s’assurer qu’il remplit bien ses fonctions.
• Pour perfectionner le dispositif antipollution. Lorsque les émissions sont
continuellement surveillées, les données peuvent servir à perfectionner le
système de lutte contre la pollution de l’air ou le fonctionnement de l’usine
elle-même.
• Pour savoir si les normes sont respectées. Lorsque des normes
réglementaires comprennent des limites d’émission, l’échantillonnage
permet de savoir si ces normes ont été respectées ou non.
Les émissions visibles sont composées de petites particules ou de gaz colorés. Plus
un panache est opaque et plus il y a de matières rejetées. Cette caractéristique est
visible à l’œil nu et des observateurs entraînés peuvent évaluer les niveaux des
émissions. Il y a plusieurs avantages à employer cette méthode pour évaluer les
émissions:
L’échantillonnage in situ
Figure 55.6 Transmissomètre simple pour mesurer les particules dans une cheminée
Etant donné que la méthode in situ donne une lecture en continu, elle peut servir à
documenter les émissions ou à procéder au réglage fin du système d’exploitation.
Les bassins versants sont le domaine d’origine de la pollution des eaux de surface.
Un bassin versant est défini comme une aire dans laquelle les eaux hydrologiques
tombent, s’accumulent, sont utilisées, évacuées et, en fin de compte, déversées dans
les fleuves et les cours d’eau ou autres masses d’eau. Il se compose d’un réseau de
drainage qui aboutit au ruissellement ou à la collecte dans un fleuve ou un cours
d’eau. Les bassins versants des grands cours d’eau sont habituellement appelés
bassins hydrographiques. La figure 55.9 représente le cycle hydrologique d’un
bassin versant régional. Pour une région, l’évacuation des diverses eaux peut se
représenter sous la forme d’une équation simple, à savoir l’équation fondamentale
de l’hydrologie proposée par Viessman, Lewis et Knapp (1989):
P-R-G-E-T=±S
dans laquelle:
G = eaux souterraines
E = évaporation
T = transpiration
S = accumulation en surface
Bien que l’étendue des bassins hydrographiques soit très variable, certains systèmes
de drainage sont classés, sur le plan de la pollution des eaux, comme urbains ou
non urbains (agricoles, ruraux, non aménagés). La pollution à l’intérieur de ces
systèmes de drainage provient des sources ci-après:
Sources ponctuelles: déchets rejetés dans une masse d’eau réceptrice à un
emplacement déterminé, en un point comme un tuyau d’égout ou un type
quelconque d’exutoire d’un réseau concentré.
Sources non ponctuelles (dispersées): pollution pénétrant dans une masse d’eau
réceptrice à partir de sources dispersées dans le bassin hydrographique; un exemple
typique est celui du drainage dans un cours d’eau des eaux de ruissellement
provenant des pluies non recueillies. On les appelle parfois aussi eaux «diffuses»,
mais l’expression «dispersées» est considérée comme plus descriptive.
Sources intermittentes: pollution provenant d’un point ou d’une source qui rejette
des effluents dans certaines circonstances, comme en cas de surcharge; un exemple
caractéristique est celui du déversoir des égouts lors de pluies abondantes.
Lorsque des matières nocives provenant des sources précitées sont rejetées dans les
cours d’eau ou autres masses d’eau, elles entrent dans la catégorie des polluants
classés et décrits précédemment. Les polluants ou contaminants qui pénètrent dans
une masse d’eau peuvent en outre être subdivisés comme suit:
Le but ultime de la lutte contre la pollution de l’eau est de réduire à zéro le rejet de
polluants, mais il n’est généralement pas possible d’atteindre complètement cet
objectif en raison de son coût. La méthode adoptée de préférence consiste à
imposer des limitations aux rejets de déchets de manière à protéger
raisonnablement la santé humaine et l’environnement. Bien que ces normes
puissent varier fortement selon les juridictions, on prend généralement comme base
la désignation de l’utilisation de masses d’eau déterminées, comme on le verra
brièvement ci-dessous.
L’approvisionnement en eau comprend:
Les ressources publiques en eau sont définies comme les masses d’eau qui se
trouvent dans les parcs, les zones humides, les zones protégées de la faune et de la
flore sauvages, les rivières à l’état sauvage, celles qui présentent un intérêt pour le
tourisme ou les loisirs et les lacs du domaine public, ainsi que les eaux d’une
importance exceptionnelle sur le plan récréatif ou écologique.
Les habitats de la faune et de la flore aquatiques
Les désignations varient selon les climats, mais elles se rapportent aux conditions
nécessaires à la vie de certains organismes aquatiques dans les masses d’eau,
spécialement les diverses espèces de poissons. Les désignations de l’utilisation
dans un climat tempéré, telles que définies dans la réglementation de l’Agence de
protection de l’environnement (EPA) pour l’Etat de l’Ohio, sont indiquées ci-après,
sans être précisées davantage:
• eaux chaudes;
• eaux moyennement chaudes;
• eaux chaudes dans des conditions exceptionnelles;
• eaux chaudes modifiées;
• eaux saisonnièrement salmonifères;
• eaux froides;
• eaux de ressources limitées.
Les eaux naturelles et les eaux usées sont caractérisées par leur composition
physique, chimique et biologique. Les principales propriétés physiques et les
composants chimiques et biologiques des eaux usées et de leurs sources forment
une longue liste qui figure dans le manuel de Metcalf and Eddy, Inc. (1991). Les
méthodes analytiques utilisées pour ces définitions sont données dans un ouvrage
largement utilisé publié par l’Association américaine de santé publique (American
Public Health Association (APHA)) sous le titre Standard Methods for the
Examination of Water and Wastewater (APHA, 1995).
Chaque masse d’eau définie devrait faire l’objet d’une réglementation comportant
des critères fondamentaux et des critères numériques plus précis comme on le verra
brièvement plus loin.
Les critères applicables aux rejets d’eaux usées concernent les limites imposées aux
polluants présents dans ces effluents et constituent une autre méthode de
réglementation. Ils peuvent être fixés en fonction des désignations d’utilisation des
masses d’eau et dans le cadre des catégories de critères chimiques ci-dessus.
Les critères biologiques reposent sur les conditions d’habitat des masses d’eau qui
sont nécessaires aux organismes aquatiques.
Le carbone organique total (COT): cet essai s’applique spécialement aux faibles
concentrations de matières organiques dans l’eau; c’est une mesure de la quantité
de matières organiques qui sont oxydées pour former du dioxyde de carbone.
La réglementation antidégradation
Cette réglementation offre une autre solution pour empêcher la pollution de l’eau
de progresser au-delà de certaines limites. A titre d’exemple, on citera les trois
niveaux de protection contre la dégradation définis dans les normes de qualité de
l’eau de l’EPA de l’Etat de l’Ohio:
Niveau 2: il faut ensuite maintenir une qualité de l’eau meilleure que celle qui est
indispensable pour protéger les utilisations, sauf s’il est attesté qu’une qualité
inférieure est nécessaire pour des raisons économiques ou sociales importantes, qui
sont déterminées par le directeur de l’EPA.
Niveau 3: enfin, il faut maintenir et protéger la qualité des eaux qui constituent les
ressources hydriques. Leur qualité ambiante existante ne peut ni être dégradée par
aucune substance jugée toxique ni gêner aucune utilisation désignée. Des charges
accrues de polluants ne pourront être rejetées dans les masses d’eau que si elles
n’ont pas pour effet d’abaisser la qualité existante.
Les zones de mélange des polluants rejetés dans l’eau et la modélisation de la charge
autorisée de matières
Les zones de mélange sont les étendues d’une masse d’eau qui permettent aux eaux
usées, traitées ou non traitées qui y sont déversées d’atteindre des conditions
stables, comme le montre la figure 55.10 pour un cours d’eau. Les effluents se
trouvent d’abord dans un état transitoire, puis se diluent progressivement par
rapport à leur concentration à la source pour atteindre l’état de l’eau du récepteur.
Ces zones ne doivent pas être considérées comme un lieu de traitement et elles
peuvent être délimitées et soumises à des restrictions bien précises. En général, les
zones de mélange ne doivent pas:
Les études sur les concentrations autorisées d’eaux usées pour éviter
l’eutrophisation (définie ci-après) ont pris de l’importance en raison du coût élevé
de la lutte contre les nutriments contenus dans les eaux usées déversées. Ces études
utilisent généralement des modèles informatisés pour simuler la qualité de l’eau
dans un courant, particulièrement en ce qui concerne les nutriments sous forme
d’azote et de phosphore, qui influent sur la dynamique de l’oxygène dissous. Le
modèle QUAL2E de l’EPA, aux Etats-Unis, décrit par Brown et Barnwell (1987)
est un exemple typique de ces outils classiques. Un instrument plus récent proposé
par Taylor (1995) est le modèle OMNI diurne (OMNI Diurnal Model (ODM)) qui
comporte une simulation de l’impact des plantes aquatiques sur les nutriments dans
le cours d’eau et la dynamique de l’oxygène dissous.
Une démarche qui gagne en popularité consiste à évaluer et à gérer les risques
écologiques pour fixer des règles antipollution. Ce principe repose sur une analyse
des coûts et avantages écologiques du respect des normes ou limites. Parkhurst
(1995) propose de recourir à l’évaluation des risques écologiques pour faciliter la
définition des limites de la pollution de l’eau, particulièrement en ce qui concerne
la protection des organismes aquatiques. Ces méthodes d’évaluation des risques
peuvent servir à estimer les effets écologiques des concentrations chimiques dans
un large éventail de cas de pollution des eaux de surface, notamment:
La méthode envisagée comporte trois étapes, comme l’indique la figure 55.11 qui
en donne une illustration.
Les lacs et les réservoirs assurent le stockage de l’eau apportée par le bassin versant
et peuvent avoir de longs temps de résidence par rapport au flux qui entre et sort
rapidement d’un tronçon de rivière. Ils revêtent donc une importance spéciale pour
la rétention de certains composants, en particulier les nutriments comprenant des
formes d’azote et de phosphore qui favorisent l’eutrophisation. Celle-ci est un
processus de vieillissement naturel dans lequel l’eau s’enrichit organiquement, ce
qui aboutit à la prolifération des plantes aquatiques indésirables comme les algues,
la jacinthe d’eau, etc. L’eutrophisation tend à réduire la faune et la flore aquatiques
et a des effets nocifs sur l’oxygène dissous. Les sources de nutriments, d’origine
naturelle ou humaine, peuvent toutes deux faciliter ce processus, comme le montre
Preul (1974) à la figure 55.12, où l’on trouve une liste schématique des sources et
réservoirs de nutriments du lac Sunapee, dans l’Etat du New Hampshire, aux Etats-
Unis.
Figure 55.12 Liste schématique des sources et puits de nutriments (azote et phosphore)
du lac Sunapee, New Hampshire (Etats-Unis)
Ce bilan de base peut être élargi par l’inclusion des diverses sources, comme on le
voit à la figure 55.12.
Le temps de résidence est une indication des divers paramètres de la rétention d’un
système lacustre donné. Les lacs peu profonds comme le lac Erié ont des temps de
résidence relativement brefs et connaissent une eutrophisation prononcée parce
qu’ils sont souvent plus propices à la croissance des plantes aquatiques. Les lacs
profonds comme le lac Tahoe et le lac Supérieur ont de très longs temps de
résidence, qui sont généralement caractéristiques des lacs à eutrophisation minime
parce qu’ils n’ont pas été surchargés jusqu’à présent et parce que leur grande
profondeur n’est pas propice à une croissance étendue des plantes aquatiques,
exception faite de l’épilimnion (couche supérieure). Les lacs de cette catégorie sont
généralement considérés comme oligotrophiques, du fait qu’ils sont relativement
pauvres en nutriments et donnent lieu à une prolifération aquatique minime, par
exemple celle des algues.
Il est intéressant de comparer les temps de résidence de certains grands lacs des
Etats-Unis indiqués par Pecor (1973) à l’aide de la formule suivante:
Voici certains exemples: lac Wabesa (Michigan), TRL = 0,3 an; lac Houghton
(Michigan), 1,4 an; lac Erié, 2,6 ans; lac Supérieur, 191 ans; lac Tahoe, 700 ans.
L’estuaire est la voie de passage intermédiaire des eaux entre l’embouchure d’un
fleuve et la côte. Cette voie est formée d’un chenal d’embouchure qui reçoit l’eau
venue d’amont (eau douce) et la déverse en aval dans l’eau de mer (eau salée) du
cours inférieur dont le niveau change constamment. Les estuaires sont
continuellement influencés par les fluctuations dues aux marées et ils forment l’une
des masses d’eau les plus complexes sur le plan de la lutte contre la pollution de
l’eau. Ils ont pour caractéristiques dominantes une salinité variable, une «langue»
salée ou interface entre l’eau salée et l’eau douce et, souvent, de vastes étendues
aquatiques peu profondes et troubles qui recouvrent des replats boueux et des
marais saumâtres. Les nutriments leur sont fournis essentiellement par l’eau
d’amont et se combinent au milieu marin pour donner naissance à une production
prolifique de biotes et d’organismes marins. Les fruits de mer récoltés dans les
estuaires sont particulièrement appréciés.
Sous l’angle de la pollution des eaux, les estuaires sont d’une complexité qui varie
avec chacun d’eux et exigent généralement des enquêtes spéciales faisant appel à
de vastes études sur le terrain et à la modélisation informatisée. Pour en savoir
davantage, on se reportera à Reish, 1979, au sujet de la pollution marine et
estuarine, et à Reid et Wood, 1976, quant à l’écologie des eaux intérieures et des
estuaires.
On peut considérer les océans comme le récepteur ou réservoir ultime, puisque les
déchets charriés par les cours d’eau finissent par être rejetés dans le milieu marin.
Même si les océans sont de vastes étendues d’eau salée à capacité d’assimilation
apparemment illimitée, la pollution tend à dégrader leur littoral et elle perturbe en
outre la faune et la flore marines.
L’épuration à grande échelle des eaux usées est généralement réalisée par les
municipalités, les agences de bassin, l’industrie, les entreprises commerciales et
diverses commissions de lutte contre la pollution. Nous nous attacherons ici à
décrire les méthodes actuelles de traitement des eaux usées municipales et à donner
ensuite quelques précisions sur celui des déchets industriels et sur les méthodes
plus perfectionnées.
Dans l’ensemble, tous les procédés de traitement des eaux usées appartiennent à
l’un des trois types ci-après: physique, chimique ou biologique, et l’on peut
employer un ou plusieurs d’entre eux pour obtenir l’effluent voulu. Cette
classification, très utile pour comprendre les méthodes de traitement des eaux
usées, est présentée au tableau 55.15.
La figure 55.13 présente le schéma d’un système classique d’épuration des eaux
usées. On trouvera ci-après un aperçu des procédés mentionnés ci-dessus.
Le traitement primaire
Le traitement primaire des eaux usées municipales, y compris les eaux usées
domestiques mélangées dans une certaine mesure à des effluents industriels ou
commerciaux, a principalement pour objectif d’éliminer les solides en suspension
et de clarifier les eaux pour qu’elles se prêtent à un traitement biologique. Après un
traitement tel que tri, dessablage et dilacération, le principal procédé de
sédimentation primaire est la décantation des eaux usées brutes dans de grands
bassins pendant une période pouvant atteindre plusieurs heures. Ce procédé extrait
de 50 à 75% du total des solides en suspension, soutirés sous forme de boues qui
seront soumises à un traitement distinct. L’eau décantée est alors dirigée vers un
traitement secondaire. Dans certains cas, on peut utiliser des produits chimiques
pour améliorer le rendement du traitement primaire.
Le traitement secondaire
Systèmes à biomasse fixée . Les lits bactériens sont l’une des formes les plus
anciennes de cette méthode de traitement secondaire et sont encore largement
employés en liaison avec certains procédés améliorés d’épandage. Par ce
traitement, les effluents provenant des bassins primaires sont répandus
uniformément sur un lit de matériaux tels que cailloux ou éléments en plastique
synthétique. On obtient une répartition uniforme en arrosant le lit par un dispositif
rotatif de tuyaux perforés qui tournent de façon intermittente ou continue au-dessus
du lit, en fonction du procédé désiré. Selon le taux de concentration en matières
organiques et la charge hydraulique, les filtres percolateurs peuvent extraire jusqu’à
95% des matières organiques, habituellement déterminées comme demande
biologique en oxygène (DBO). Il existe de nombreux autres systèmes plus récents à
disques biologiques qui peuvent assurer une épuration du même ordre; certaines de
ces méthodes présentent des avantages particuliers, intéressants lorsqu’il existe des
facteurs limitatifs, comme la place disponible, le climat, etc. Il convient de noter
qu’un bassin secondaire de décantation est nécessaire pour compléter le processus.
On en soutire la boue biologique ou secondaire, tandis que l’eau décantée est
rejetée en tant qu’effluent secondaire.
Boues activées . C’est le procédé biologique le plus courant. Les effluents qui ont
subi le traitement primaire s’écoulent dans un bassin contenant déjà une biomasse
en suspension appelée boue activée. Ce mélange ou «matières en suspension de la
liqueur mixte», est laissé en contact pendant une période qui varie de plusieurs
heures à 24 heures ou davantage, selon les résultats désirés. Pendant cette période,
le mélange est fortement aéré et agité pour favoriser l’activité biologique aérobie.
En fin de processus, une partie du mélange est soutirée et remise en circulation en
tête de bassin pour entretenir l’activation biologique. Une décantation secondaire
suit le passage par les boues activées, et les eaux décantées se déversent sous forme
d’effluents. Grâce à ce processus, on peut extraire jusqu’à 95% de la DBO des
affluents.
Le traitement tertiaire
Un troisième niveau de traitement peut avoir lieu s’il faut parvenir à une
élimination plus complète des polluants. En général, il prend la forme de filtration
sur sable, dans des bassins de stabilisation, par épandage sur les terres et les terres
humides et par d’autres systèmes qui stabilisent davantage les effluents
secondaires.
Les eaux usées contiennent une grande variété de composants qui sont
généralement subdivisés en solides en suspension et matières en solution, en
composants inorganiques et en composés organiques.
Les rejets industriels (non ménagers) sont nombreux et d’une composition très
variée; ils peuvent être très acides ou très alcalins et exigent souvent une analyse
approfondie en laboratoire. Un traitement spécialisé peut s’imposer pour les rendre
inoffensifs avant leur rejet. La toxicité revêt une grande importance dans
l’évacuation des eaux résiduaires industrielles.
Le traitement des effluents industriels est plus spécialisé que celui des déchets
ménagers; lorsqu’ils se prêtent à l’épuration biologique, ils sont toutefois traités
selon des méthodes semblables à celles décrites précédemment (traitement
biologique secondaire/ tertiaire) pour les systèmes municipaux.
Les bassins de stabilisation des effluents sont une méthode courante de traitement
des eaux usées organiques lorsqu’on dispose d’assez de terrain. Les bassins à
écoulement continu sont généralement classés en fonction de leur activité
bactérienne en bassins aérobies, facultatifs ou anaérobies. Les bassins aérés sont
alimentés en oxygène au moyen de systèmes d’aération par diffusion ou
mécanique.
Les figures 55.14 et 55.15 présentent des schémas de bassins de stabilisation des
déchets.
Figure 55.14 Bassin de stabilisation à deux compartiments: coupe transversale
Figure 55.16 Diagramme de flux d’un système de recyclage des eaux usées
d’une tannerie
Pour trouver des exemples plus récents et novateurs de cette technique, le lecteur
est invité à se reporter à une publication de la Water Environment Federation
(1995) sur la prévention de la pollution et la réduction des rejets.
Le choix du procédé qui convient le mieux à une situation donnée doit être fait en
fonction de la qualité et de la quantité des eaux usées brutes, des exigences des
eaux réceptrices et, bien entendu, des coûts. Pour avoir plus de précisions, se
reporter à Metcalf and Eddy, Inc., 1991, qui contient un chapitre sur les techniques
avancées de traitement des eaux usées.
L’étude de cas du Projet de régénération des eaux usées dans la région de Dan,
décrit dans l’article suivant du présent chapitre, offre un excellent exemple de
méthode novatrice de traitement et de valorisation des eaux usées.
La pollution thermique
La pollution thermique est une forme de rejet industriel, défini comme une
augmentation ou une réduction nocive des températures normales de l’eau dans les
eaux réceptrices causée par l’évacuation de la chaleur provenant des installations
techniques. Les industries grandes productrices de rejets thermiques sont les
centrales fonctionnant aux combustibles fossiles (pétrole, gaz et charbon) et les
centrales nucléaires, les aciéries, les raffineries de pétrole, les usines chimiques, les
papeteries, les distilleries et les blanchisseries. Particulièrement préoccupantes sont
les centrales électriques qui fournissent l’énergie dans un grand nombre de pays
(aux Etats-Unis, par exemple, à raison d’environ 80%).
La figure 55.17 illustre les diverses formes d’échanges naturels de chaleur aux
limites d’un milieu aquatique récepteur. Lorsque la chaleur est rejetée dans une eau
réceptrice comme celle d’une rivière, il est important d’analyser la capacité qu’a
cette rivière de recevoir de la chaleur supplémentaire. Le profil de température
d’une rivière peut se calculer en établissant un bilan thermique analogue à celui qui
sert à calculer la courbe d’affaissement de l’oxygène dissous. Les principaux
facteurs de ce bilan sont indiqués à la figure 55.18 pour un tronçon de cours d’eau
entre les points A et B. Il faut calculer séparément chacun des facteurs en fonction
de certaines variables thermiques. Comme dans le cas de l’oxygène dissous, le
bilan est simplement la somme des apports et des pertes de température pour un
tronçon donné. On trouve d’autres méthodes analytiques plus complexes dans les
publications sur la question. Les résultats fournis par le calcul du bilan thermique
peuvent être utilisés pour déterminer les limites à imposer aux rejets thermiques et,
éventuellement, certaines restrictions d’usage à imposer au milieu aquatique
considéré.
Figure 55.17 Echange thermique aux frontières d’une masse d’eau réceptrice
Figure 55.18 Capacité d’un cours d’eau à recevoir de la chaleur
Etant donné que l’eau consommée dans le monde provient en grande partie des
aquifères, il est très important de protéger ces sources d’approvisionnement. On
estime que plus de 95% de l’eau douce disponible sur la planète est souterraine;
aux Etats-Unis, 50% environ de l’eau de boisson provient de puits, selon l’enquête
géologique américaine (US Geological Survey) de 1984. Etant donné que la
pollution et les mouvements des eaux souterraines sont de nature subtile et
invisible, on accorde parfois à l’analyse et à la maîtrise de cette forme de
dégradation moins d’attention qu’à celle des eaux de surface, qui est beaucoup plus
évidente.
La figure 55.19 décrit le cycle hydrologique avec les sources de contamination des
eaux souterraines qui l’affectent. Une liste complète des sources possibles de
pollution souterraine serait très longue; nous n’indiquerons ci-après que les plus
évidentes:
• rejets industriels;
• cours d’eau pollués en contact avec les aquifères;
• industries extractives;
• élimination de déchets solides et dangereux;
• réservoirs de stockage en sous-sol (par exemple, pour le pétrole);
• systèmes d’irrigation;
• réalimentation artificielle;
• envahissement par les eaux de mer;
• déversements;
• bassins pollués à fond perméable;
• puits d’injection;
• champs d’épandage septiques et puits d’infiltration;
• forages inconsidérés de puits;
• travaux agricoles;
• sels de déneigement des routes.
Figure 55.19 Cycle hydrologique et sources de contamination des eaux souterraines
V =K (dh/dl)
dans laquelle:
Au premier abord, on pourrait penser que les polluants réactifs sont les plus nocifs,
mais ce n’est pas toujours le cas du fait que les réactions bloquent ou retardent les
déplacements des concentrations de polluants, alors que les migrations de polluants
non réactifs peuvent se faire en grande partie sans obstacle. Il existe maintenant
certains produits «doux» pour le ménage et l’agriculture qui se dégradent
biologiquement après un certain temps et évitent par conséquent de contaminer les
eaux souterraines.
La prévention de la pollution
La protection de la zone située autour du champ de captage d’un puits est une
approche plus précise et plus limitée qui s’applique à la zone de recharge de ce
puits. Le gouvernement fédéral des Etats-Unis exige maintenant, par les
amendements apportés en 1986 à la loi américaine de 1984 sur l’eau potable (Safe
Drinking Water Act (SDWA)), que des zones précises soient délimitées en amont
du champ de captage pour les puits publics. La zone de protection en tête du champ
de captage des pluies est définie dans cette loi comme «la zone en surface et sous la
surface entourant un puits ou un champ de captage de puits qui alimente un réseau
public de distribution d’eau, à travers laquelle il est raisonnablement probable que
des contaminants se déplaceront en direction de ce puits ou de ce champ de captage
et l’atteindront». L’objectif principal de ce programme tel qu’esquissé par l’EPA
(EPA, 1987) est de délimiter les zones de protection des puits sur la base des
critères choisis, de l’exploitation des puits et de considérations hydrogéologiques.
LE PROJET DE RÉGÉNÉRATION ET DE
VALORISATION DES EAUX USÉES DE LA RÉGION
DE DAN: UNE ÉTUDE DE CAS
Alexander Donagi
La conception
Figure 55.20 Installation de régénération des eaux usées de la région de Dan: plan
On sait que les installations de traitement des eaux usées créent une multitude de
problèmes pour l’environnement et la santé des travailleurs. Le projet de la région
de Dan est unique en son genre et revêt un intérêt pour tout le pays; il permet de
réaliser des économies considérables sur les ressources en eau, a une grande
efficacité de traitement et produit de l’eau à peu de frais, sans présenter de risques
excessifs pour les travailleurs.
Lors de la première étape du projet, les eaux usées ont été traitées biologiquement
dans un ensemble de bassins d’oxydation avec recirculation et par un procédé de
traitement chimique additionnel au calcaire-magnésium, suivi du séjour des
effluents à pH élevé dans des «bassins de polissage». Les effluents partiellement
traités ont été rechargés dans l’aquifère régional au moyen des bassins d’épandage
sur le site de Soreq.
Autour des sites d’alimentation se trouvent des réseaux de puits d’observation qui
permettent de repomper l’eau qui a été rechargée. Les 74 puits en exploitation en
1993 n’ont pas tous été actifs pendant toute la durée du projet. En 1993, le réseau
des puits a permis de récupérer au total environ 95 millions de m3 d’eau qui ont été
pompés dans la troisième conduite du Néguev.
L’eau extraite par pompage des différents puits de récupération est envoyée dans le
réseau de transport et de distribution de la troisième conduite. Le réseau de
transport se compose de 3 sections d’une longueur totale de 87 km et d’un diamètre
variant entre 120 cm et 175 cm. Le long de ce réseau, on a construit 6 réservoirs
d’exploitation «à l’air libre» sur la conduite principale, pour régler le débit du
système. Le volume utile de ces réservoirs est compris entre 10 000 et 100 000 m3.
Le système de chloration
La chloration réalisée dans le dispositif de la troisième conduite vise à «couper la
connexion humaine», c’est-à-dire à éliminer toute possibilité d’existence de micro-
organismes d’origine humaine dans l’eau de cette conduite. Tout au long de la
surveillance exercée, on a constaté une augmentation considérable des micro-
organismes fécaux pendant le séjour de l’eau régénérée dans les réservoirs d’eau. Il
a donc été décidé d’ajouter de nouveaux points de chloration le long de la
canalisation et, dès 1993, 3 points distincts fonctionnaient régulièrement. Deux
autres vont être ajoutés au système dans un proche avenir. La teneur résiduelle
varie de 0,4 à 1,0 mg/litre de chlore libre. Cette méthode, qui consiste à maintenir
de faibles concentrations de chlore libre à différents points du système, plutôt
qu’une dose unique massive à l’entrée de la conduite, assure la coupure de la
connexion humaine tout en permettant aux poissons de vivre dans les réservoirs. En
outre, cette méthode de chloration désinfecte l’eau dans les sections situées en aval
du réseau de transport et de distribution au cas où des polluants pénétreraient dans
le système à un endroit situé en aval du point de chloration initial.
Le système de surveillance
Ag Argent µg/l
Al Aluminium µg/l
ALG Algues Nb/100 ml
ALKM Basicité exprimée par CaCO3 mg/l
As Arsenic µg/l
B Bore mg/l
Ba Baryum µg/l
Br Bromures mg/l
Ca Calcium mg/l
Cd Cadmium µg/l
Cl Chlorures mg/l
CLDE Demande de chlore mg/l
CLRL Chlorophylle µg/l
CN Cyanures µg/l
Co Cobalt µg/l
COLR Couleur (cobalt platine)
Cr Chrome µg/l
Cu Cuivre µg/l
DBO Demande biochimique en oxygène mg/l
DCO Demande chimique en oxygène mg/l
DO Oxygène dissous (en O2) mg/l
DOC Carbone organique dissous mg/l
DS105 Solides dissous à 105 °C mg/l
DS550 Solides dissous à 550 °C mg/l
EC Conductivité électrique µmhos/cm
ENTR Entérocoques Nb/100 ml
F– Fluorures mg/l
FCOL Coliformes fécaux Nb/100 ml
Fe Fer µg/l
HARD Dureté sous forme de CaCO3 mg/l
HCO3– Bicarbonates sous forme de HCO3– mg/l
Hg Mercure µg/l
K Potassium mg/l
Li Lithium µg/l
MBAS Détergents µg/l
Mg Magnésium mg/l
Mn Manganèse µg/l
Mo Molybdène µg/l
Na Sodium mg/l
NH4+ Ammoniac sous forme de NH4+ mg/l
Ni Nickel µg/l
NKJT Azote total Kjeldahl mg/l
NO2– Nitrites sous forme de NO2– mg/l
NO3– Nitrates sous forme de NO3– mg/l
ODOR Nombre-seuil d’odeur
OG Huiles et graisses µg/l
Pb Plomb µg/l
PHEN Phénols µg/l
PHFD pH mesuré in situ
PO4 Phosphates sous forme de PO4–2 mg/l
PTOT Phosphore total sous forme de P mg/l
RSCL Chlore libre résiduel mg/l
SAR Rapport d’adsorption du sodium
Se Sélénium µg/l
Si Silice sous forme de H2SiO3 mg/l
Sn Etain µg/l
SO4 Sulfates mg/l
Sr Strontium µg/l
SS100 Solides en suspension à 100 °C mg/l
SS550 Solides en suspension à 550 °C mg/l
STRP Streptocoques Nb/100 ml
T Température °C
TCOL Total des coliformes Nb/100 ml
TOTB Total des bactéries Nb/100 ml
TS105 Total des solides à 105 °C mg/l
TS550 Total des solides à 550 °C mg/l
TURB Turbidité NTU
UV UV (absorption à 254 nm)(/cm x 10)
Zn Zinc µg/l
Résumé
Le projet de la région de Dan fournit une eau régénérée de haute qualité pour
l’irrigation sans restriction du Néguev israélien.
Le système fonctionne depuis la fin des années soixante sous la surveillance étroite
du ministère de la Santé d’Israël et du département de la sécurité et de la santé au
travail de la société Mekoroth. Aucun cas de maladie professionnelle liée au
fonctionnement de ce système complexe n’a été signalé jusqu’ici.
Les principes modernes de gestion des déchets reposent sur l’idée qu’il existe une
relation déterminée entre la biosphère et l’anthroposphère. Un modèle général
(voir figure 55.22) reliant ces deux sphères se fonde sur l’hypothèse que toutes les
matières extraites de l’environnement finissent comme déchets soit directement
(venant du secteur de la production), soit indirectement (venant du secteur du
recyclage), en gardant à l’esprit que tous les déchets produits par la consommation
retournent à ce dernier secteur pour être recyclés ou éliminés.
Dans cette perspective, le recyclage doit être défini en termes généraux: recyclage
d’objets entiers (consignés) jusqu’à celui d’objets dont on récupère certaines pièces
détachées (voitures, ordinateurs, par exemple), ou production de matières nouvelles
(papiers et cartons, boîtes de conserve) ou d’objets similaires (recyclage, recyclage
sous forme de matières moins nobles, etc.). A long terme, ce modèle peut être
considéré comme un état d’équilibre stable dans lequel les biens finissent sous
forme de déchets au bout de quelques jours ou souvent de quelques années.
Figure 55.23 Fonction d'utilité montrant les compromis entre production et recyclage
Dans le passé, l’industrie s’est développée dans le sens d’une augmentation de
l’efficacité de la production, p. A la fin des années quatre-vingt-dix, le prix de
l’élimination des déchets par leur dispersion dans l’atmosphère, les masses d’eau
ou les sols (mise en décharge non contrôlée) ou par leur mise en dépôt en milieu
confiné a augmenté très rapidement, du fait que les normes de protection de
l’environnement devenaient de plus en plus sévères. Dans ces conditions, il est
devenu économiquement attrayant d’augmenter le rendement du recyclage
(autrement dit d’augmenter r). Cette tendance persistera au cours des décennies à
venir.
Les déchets peuvent être groupés en trois grandes catégories, en fonction de leur
origine:
Ramassés par camion, ces déchets peuvent être transportés (directement ou par des
stations de transfert route-route, route-rail, ou route-voie d’eau et des moyens de
transport à longue distance) vers une décharge ou une installation de traitement en
vue de la récupération des matières (par tri mécanique, compostage,
biométhanisation) ou de l’énergie (incinérateur à grille ou à four rotatif, pyrolyse).
Les déchets spéciaux. Les déchets chimiquement dangereux doivent être traités par
la neutralisation, la minéralisation, l’insolubilisation ou doivent être inertisés avant
de pouvoir être déposés dans des décharges spéciales. Les déchets infectieux seront
de préférence brûlés dans des incinérateurs spéciaux. Les déchets radioactifs font
l’objet d’une législation très rigoureuse.
On décrit traditionnellement les déchets solides comme des produits résiduels, qui
représentent un coût lorsqu’il faut les éliminer.
Il ne faut pas oublier que les risques pour la sécurité et la santé se présenteront
d’abord là où les déchets sont produits, c’est-à-dire dans l’usine ou chez le
consommateur. C’est pourquoi il peut être dangereux pour l’entourage immédiat de
stocker les déchets là où ils sont produits — spécialement lorsqu’ils sont triés à la
source. Dans le présent article, on exposera les grandes lignes de la gestion des
déchets solides et on tentera de cerner les risques que font naître, pour la sécurité et
la santé des travailleurs, les entreprises chargées de la collecte, du transport, du
traitement et de l’élimination des déchets solides.
Pourquoi gérer les déchets solides?
Tout système de gestion des déchets solides devrait reposer sur des études
techniques et sur une planification d’ensemble comprenant:
Les sources de déchets peuvent être décrites par les différentes activités qui
s’exercent dans une société moderne (voir tableau 55.18).
Chaque type de déchet est caractérisé par son origine ou par le type de produit dont
il est issu. Par conséquent, les risques qu’il présente pour la sécurité et la santé
devraient être définis au moment où l’on impose des restrictions à la manipulation
du produit par le producteur du déchet. De toute manière, le stockage des déchets
peut créer des risques nouveaux et plus importants (activité chimique ou biologique
pendant la période de stockage).
Dans les sociétés à faible revenu et les pays non industrialisés, le recyclage des
déchets solides représente un revenu essentiel pour ceux qui en font la collecte. En
général, on ne se pose, dans ces pays, aucune question concernant les risques pour
le personnel exposé et la collectivité.
De nos jours, les autorités chargées de la sécurité et de la santé au travail dans les
pays industriels se préoccupent de conditions qui passaient inaperçues il y a
quelques années encore et étaient tacitement acceptées, consistant par exemple à:
Les raisons du recours au recyclage peuvent varier selon les conditions nationales
et locales. Les principaux arguments en sa faveur peuvent se résumer comme suit:
Comme on l’a vu plus haut, le recyclage peut se faire à n’importe quelle étape du
système, mais il peut être conçu pour prévenir la formation des déchets. C’est le cas
lorsque les produits sont destinés au recyclage ou au rachat après utilisation finale,
par exemple, par la consignation des récipients de boissons (bouteilles en verre,
etc.).
Le recyclage peut donc aller plus loin que la simple mise en œuvre de la
régénération ou de la récupération des matières extraites des déchets.
Dans la plupart des cas, il faut séparer ou trier les déchets en fractions ayant un
degré minimal de finesse pour pouvoir les utiliser en lieu et place des matières
premières vierges ou d’origine.
Le tri peut être fait par les producteurs des déchets (séparation à la source) ou après
la collecte, c’est-à-dire dans une installation centrale de tri.
La séparation à la source
Avec les techniques actuelles, la séparation à la source donne lieu à des fractions de
déchets qui sont «conçues» pour être traitées. Un degré minimal de séparation à la
source est inévitable, étant donné que certains mélanges de catégories de déchets ne
peuvent être séparés en fractions de matières réutilisables qu’au prix d’un grand
effort (économique). Lorsqu’on définit la séparation à la source, il faut toujours
tenir compte du type final de recyclage envisagé.
Le tri centralisé
Compte tenu des techniques actuelles, le tri central mécanique avec séparation à la
source n’a pas donné de bons résultats du fait qu’il est difficile d’atteindre une
efficacité suffisante. Lorsque les caractéristiques des fractions de déchets triées
seront plus clairement définies et lorsqu’elles seront reconnues à l’échelle nationale
ou internationale, on pourra s’attendre à ce que des techniques nouvelles
appropriées et efficaces soient mises au point. Le succès de ces techniques sera
étroitement lié aux précautions qui seront prises pour instaurer des conditions de
travail acceptables.
Le tri centralisé manuel suppose une séparation préalable à la source afin d’éviter
les risques pour la sécurité et la santé au travail (poussières, bactéries, substances
toxiques, etc.). Il devrait se limiter à un certain nombre de «caractéristiques» des
fractions de déchets de manière à éviter les erreurs prévisibles dans le tri à la source
et à faciliter le contrôle à la zone de réception de l’usine. Au fur et à mesure que les
fractions de déchets seront définies plus clairement, il deviendra possible
d’imaginer des dispositifs de plus en plus nombreux et performants pour les
procédures de tri automatique, afin de réduire l’exposition directe de l’humain à des
substances nocives.
Pourquoi recycler?
Il convient de noter que le recyclage n’est pas une méthode de traitement des
déchets qui devrait être considérée indépendamment des autres pratiques. Pour
compléter le recyclage, il faut avoir accès à une décharge convenablement gérée et,
peut-être, à des installations plus traditionnelles de traitement des déchets, comme
les usines d’incinération et les installations de compostage.
Le recyclage devrait être évalué en liaison avec:
Le défi
Les Grands Lacs — ils sont au nombre de cinq — sont une ressource partagée entre
le Canada et les Etats-Unis (voir figure 55.24). Ils contiennent plus de 18% des
eaux de surface de la planète. Dans ce bassin vivent un Canadien sur trois (environ
8,5 millions) et un Américain sur neuf (27,5 millions). C’est aussi le cœur
industriel des deux pays puisqu’il regroupe le cinquième de la puissance
industrielle des Etats-Unis et la moitié de celle du Canada. Les activités
économiques menées autour du bassin des Grands Lacs créent chaque année une
richesse estimée à mille milliards de dollars. Avec le temps, l’accroissement de la
population et des activités industrielles a soumis ces lacs à une série d’atteintes,
jusqu’à ce que les deux pays reconnaissent au milieu du XXe siècle la nécessité
d’une action concertée pour les protéger.
Depuis les années cinquante, les deux pays ont mis en place des programmes
nationaux et bilatéraux pour résoudre les problèmes de pollution les plus flagrants
et pour répondre à des préoccupations plus complexes concernant la qualité de
l’eau. Grâce à ces mesures, les eaux des Grands Lacs sont visiblement plus pures
qu’elles ne l’étaient vers le milieu du siècle dernier, les concentrations de métaux
lourds et de matières chimiques organiques ont diminué et les niveaux de
contaminants chez les poissons et les oiseaux aquatiques ont sensiblement baissé.
Par leur succès, les mesures prises par le Canada et les Etats-Unis pour restaurer et
protéger les Grands Lacs offrent un modèle de coopération bilatérale pour la
gestion des ressources, même s’il reste encore beaucoup à faire.
Aperçu de l’étude de cas
Les menaces que font peser les substances toxiques rémanentes (dites aussi
persistantes) ne se font sentir qu’à long terme et leur gestion exige une approche
multimilieux englobant toutes les sources de pollution. Pour atteindre l’objectif de
longue haleine qui est d’éliminer pratiquement les substances toxiques des Grands
Lacs, les autorités chargées de l’environnement, les industries et les autres parties
intéressées du bassin ont dû mettre au point de nouvelles approches et de nouveaux
programmes. Cet exposé sur l’étude de cas vise à donner un bref résumé des
programmes canadiens de lutte contre la pollution et des progrès accomplis
jusqu’en 1995, et à décrire les initiatives de gestion des substances toxiques
rémanentes dans les Grands Lacs. Les initiatives et programmes analogues adoptés
par les Etats-Unis ne seront pas examinés ici. Les lecteurs qui le désirent peuvent
s’adresser au Great Lakes National Program Office de l’Agence américaine de
protection de l’environnement (Environmental Protection Agency (EPA)) à
Chicago pour obtenir des renseignements sur les programmes américains, fédéraux
et d’Etat, concernant la protection des Grands Lacs.
Dans les années soixante, on s’était aperçu que le lac Erié souffrait d’un
enrichissement par les nutriments, ou eutrophisation, phénomène qui posait un
grave problème. Devant la nécessité d’une action bilatérale, le Canada et les Etats-
Unis ont signé, en 1972, le premier accord relatif à la qualité de l’eau dans les
Grands Lacs. Cet accord esquissait les mesures de réduction de la pollution à
prendre pour abaisser les concentrations de phosphore provenant principalement
des détergents de lessive et des eaux usées municipales. Pour concrétiser cet
engagement, le Canada et l’Ontario ont adopté une législation et des programmes
visant à enrayer la pollution par les sources ponctuelles. Entre 1972 et 1987, le
gouvernement fédéral et celui de cette province ont investi plus de 2 milliards de
dollars dans la construction d’installations de traitement des eaux usées et
l’amélioration du bassin des Grands Lacs.
Outre les mesures plus strictes appliquées aux sources ponctuelles, le Canada et
l’Ontario ont élaboré et renforcé les mesures de réglementation des pesticides, des
produits chimiques commerciaux, des déchets dangereux et des sources de
pollution non ponctuelles, comme les décharges et les incinérateurs. Les initiatives
des autorités ont été conçues davantage dans une optique multimilieux, et l’idée
que les substances chimiques devaient être suivies «du berceau jusqu’à la tombe» a
inspiré la nouvelle politique du gouvernement comme de l’industrie en matière de
gestion de l’environnement. Un certain nombre de pesticides toxiques rémanents
ont été interdits par la loi fédérale sur les produits antiparasitaires (Pest Control
Products Act) (DDT, aldrine, mirex, toxaphène, chlordane) et la loi sur les
contaminants de l’environnement (Environmental Contaminants Act) a servi à: 1)
interdire l’emploi de substances toxiques rémanentes (CFC, PPB, PCB, PPT,
mirex, plomb) dans le commerce, les industries manufacturières et les industries de
transformation; 2) à limiter les substances chimiques rejetées par certaines
opérations industrielles (mercure, chlorure de vinyle, amiante).
Au début des années quatre-vingt, ces mesures, ainsi que les efforts analogues des
Etats-Unis, ont commencé à porter leurs fruits. Les niveaux de contamination
relevés dans les sédiments et chez la faune des Grands Lacs étaient en diminution et
l’amélioration notable de l’environnement était attestée par le retour du pyrargue à
tête blanche sur les rives canadiennes du lac Erié, par une augmentation de 200%
de la population de cormorans, par la réapparition du balbuzard pêcheur dans la
baie Georgienne et le rétablissement des sternes communes dans la région du port
de Toronto; toutes ces espèces avaient souffert dans le passé des niveaux atteints
par les substances toxiques rémanentes et leur rétablissement montre bien que les
efforts déployés ont porté leurs premiers fruits.
La tendance à la réduction des concentrations de certaines des substances toxiques
rémanentes dans la faune et les sédiments s’est stabilisée vers le milieu des années
quatre-vingt (voir, par exemple, la figure 55.26). Les scientifiques en ont conclu
que:
La décennie quatre-vingt-dix
Figure 55.27 Processus de prise de décisions pour l'élimination virtuelle des substances
toxiques rémanentes dans les Grands Lacs
Les gouvernements du Canada et de l’Ontario ont agi de plusieurs manières pour
combattre ou réduire les rejets de substances toxiques rémanentes. Les initiatives et
programmes importants sont brièvement exposés ci-après.
Figure 55.28 Choix des objectifs au titre de la politique de gestion des substances
toxiques
Outre les deux initiatives nationales décrites ci-dessus, le Canada et les Etats-Unis
élaborent actuellement une stratégie bilatérale pour coordonner leur action et fixer
des objectifs communs pour les substances toxiques rémanentes dans le bassin des
Grands Lacs. Ils adopteront des buts et objectifs analogues à ceux de l’accord
Canada-Ontario pour les substances des étapes I et II et une liste américaine
similaire. Des projets conjoints seront élaborés et réalisés pour faciliter l’échange
d’informations au sujet des substances prioritaires comme les PCB et le mercure.
En se montrant résolu à parvenir à une élimination pratiquement totale comme
décrit plus haut, le Canada pourra jouer un rôle de chef de file par la promotion de
l’action internationale dans le domaine des substances toxiques rémanentes. Il avait
d’ailleurs accueilli, en juin 1995, à Vancouver, une conférence des Nations Unies
pour mettre l’accent sur une concertation mondiale dans le domaine des polluants
organiques persistants (POP) et pour explorer des formules de prévention en vue de
réduire les émissions de ces polluants dans le monde. Le Canada est également
coprésident du groupe de travail de la Commission économique des Nations Unies
pour l’Europe (CEE) chargée d’élaborer un protocole pour les polluants organiques
persistants dans le cadre de la convention sur la pollution atmosphérique
transfrontières.
Depuis plus d’une décennie, on sait que les dibenzodioxines chlorées et les
dibenzofurannes chlorés forment un groupe de substances toxiques rémanentes qui
sont une source de préoccupation pour l’environnement du Canada et des Grands
Lacs. Le tableau 55.20 expose sommairement les mesures prises au niveau fédéral
et les diminutions de rejets obtenues jusqu’ici, montrant comment la panoplie de
programmes et d’initiatives a permis de réduire sensiblement ces substances
toxiques. En dépit de ces résultats impressionnants, dioxines et furannes continuent
d’occuper la première place dans la politique de gestion des substances toxiques, le
plan d’action pour le chlore, l’accord Canada-Ontario et la stratégie bilatérale
esquissée ci-dessus.
Résumé
La qualité de l’eau des Grands Lacs s’est sensiblement améliorée grâce aux
mesures de lutte contre la pollution prises depuis le début des années soixante-dix
par les gouvernements et les parties intéressées au Canada et aux Etats-Unis. La
présente étude de cas donne un résumé des efforts et des succès du Canada dans la
lutte contre la pollution générale et les polluants classiques. Elle décrit en outre une
nouvelle approche qui se dessine (la politique de gestion des substances toxiques, le
plan d’action pour le chlore, la prévention de la pollution, l’action volontaire, les
consultations entre parties intéressées, etc.) pour aborder les problèmes beaucoup
plus difficiles que posent les substances toxiques rémanentes dans les Grands Lacs.
Elle décrit aussi brièvement les programmes d’ensemble (COA, NPRI, SOP, PSL,
etc.) mis en place en vue d’atteindre l’objectif d’une élimination pratique de ces
substances. On trouvera, dans les références bibliographiques à la fin du présent
chapitre, de plus amples renseignements sur l’approche canadienne.
La prévention de la pollution
Une stratégie souvent utilisée pour prévenir la pollution est celle de l’interdiction,
de l’élimination ou de la réduction progressive de substances ou de catégories de
substances chimiques (on peut aussi imposer des restrictions aux utilisations). Ces
stratégies font l’objet de lois ou de règlements nationaux, plus rarement d’accords
internationaux (conventions ou traités) ou de règlements locaux.
La lutte antipollution
Les mesures de lutte contre la pollution ne peuvent pas éliminer celle-ci; tout ce
qu’elles peuvent faire, c’est en atténuer les effets sur l’environnement. Ces mesures
s’appliquent aux rejets en fin de cycle de fabrication. Leur utilité dépend du
polluant et des conditions propres à l’industrie. Les principales méthodes de lutte,
rangées sans ordre particulier, sont:
L’assainissement
Pour atteindre son but, la décontamination doit être efficace à 100% et protéger
intégralement les travailleurs, les personnes de passage et le grand public. Il faut
aussi veiller à ce que les matériaux, les méthodes et les techniques de
décontamination ne créent pas de nouveaux risques. Bien qu’il soit préférable que
la protection des travailleurs qui en sont chargés soit assurée par des procédés
intégrés en amont, un équipement de protection individuelle approprié sera presque
toujours nécessaire. Normalement, les personnels chargés de travaux
d’assainissement sont classés parmi les travailleurs spécialisés dans le traitement
des déchets dangereux, bien que certaines de ces tâches puissent être effectuées par
les sapeurs-pompiers ou par des employés municipaux.
Le plus souvent, les déchets dangereux (ou toxiques) sont traités aujourd’hui par
des travailleurs spécialisés et dans des installations conçues à cet effet. Du point de
vue de l’environnement, le critère d’efficacité d’une installation de traitement de
déchets dangereux est qu’elle ne doit rejeter que des substances inertes, ou
pratiquement inertes, telles que de la silice, des composés inorganiques insolubles,
des scories insolubles et non corrosives, de l’azote gazeux ou du dioxyde de
carbone — bien que celui-ci soit un gaz à effet de serre responsable de
modifications climatiques et qui est donc à son tour nocif pour l’environnement.
Un autre critère est que l’installation ait un bon rendement énergétique, c’est-à-dire
qu’elle soit économe en énergie, avec un rapport entre la puissance utilisée et le
volume de déchets traités aussi faible que possible. Selon une règle empirique (qui
n’est heureusement pas une loi universelle), plus la stratégie de réduction de la
pollution (ou des déchets) est efficace, plus elle consomme d’énergie, ce qui est un
autre inconvénient selon les critères du développement durable.
Même lorsque les travailleurs sont convenablement protégés, il est facile de voir les
inconvénients du traitement des déchets dangereux comme mode de lutte contre la
pollution. Les méthodes de prévention peuvent s’appliquer au processus de
traitement, mais non au principal «intrant», à savoir les déchets à traiter. Il faut à
peu près autant d’énergie pour traiter des déchets dangereux qu’il en a fallu pour les
créer, et ils produiront toujours de nouveaux déchets, même si ceux-ci sont inertes
ou non toxiques.
Les déversements et les fuites
Les mêmes considérations valent aussi pour les déversements et les fuites de
substances chimiques. Il faut aussi tenir compte des dangers liés à l’urgence des
opérations de nettoyage. Les travailleurs chargés du nettoyage des déversements et
des fuites sont presque toujours des spécialistes des opérations d’urgence. Selon
l’ampleur et la nature du polluant, les fuites et les déversements peuvent donner
lieu à des accidents industriels majeurs.
Définir la prévention de la pollution peut sembler superflu, mais cette définition est
importante, car les partisans de cette méthode voudraient, par principe, que l’on
s’en tienne à une stratégie agressive uniquement axée sur la prévention, aux dépens
des méthodes de lutte contre la pollution, et que l’on évite l’assainissement. Ils font
valoir que plus on définit la notion de prévention avec rigueur, plus elle a de
chances de réussir dans la pratique. Inversement, plus on laisse les entreprises lui
donner une acception large, plus on risque de les voir ressortir la même panoplie de
vieilles stratégies déjà appliquées sans succès. A cela, les entreprises répondent
parfois que même les déchets toxiques peuvent avoir une valeur marchande et que
les méthodes de lutte contre la pollution ont donc un rôle à jouer, si bien que la
pollution n’existe que potentiellement. En outre, la notion de rejet zéro est, à leur
avis, une impossibilité qui ne peut susciter que des espoirs fallacieux et des
stratégies mal conçues. Les partisans des méthodes de prévention répondent que,
aussi longtemps qu’on ne fixera pas le rejet zéro comme objectif ou idéal à
atteindre, on ne parviendra pas à prévenir la pollution et on ne pourra pas améliorer
la protection de l’environnement.
Les définitions les plus strictes de la prévention reposent, pour la plupart, sur un
élément unique ou central, qui est d’éviter d’utiliser des substances chimiques
susceptibles de créer des polluants. Certaines des controverses les plus vives en
matière de définition concernent le recyclage, qui sera traité ci-après dans le cadre
de la prévention.
Les objectifs
En pratique, l’objectif du rejet zéro est souvent remplacé par des objectifs de
réduction — une diminution de 50% des émissions polluantes d’ici à telle année,
par exemple. Ces objectifs intermédiaires revêtent généralement la forme de
«défis» ou de critères à l’aune desquels on peut mesurer le succès d’un programme
de prévention. Ils sont rarement le produit d’une analyse ou d’un calcul de
faisabilité et aucune sanction ne leur est associée si l’objectif n’est pas atteint. Ils ne
sont pas non plus mesurés avec précision.
Les réductions devraient être mesurées (et non pas estimées) en utilisant l’une des
formules ci-après:
Cela est très difficile en théorie et très coûteux en pratique, bien que l’on puisse en
principe le faire grâce aux techniques d’évaluation des dangers (voir ci-après). Il y
a tout lieu de penser qu’il vaudrait mieux utiliser les ressources financières à
d’autres fins — par exemple, pour obtenir qu’on établisse des plans de prévention
adéquats.
Les méthodes
Dans tous les cas, il faut procéder à une analyse pour s’assurer que les produits
substitutifs sont vraiment moins dangereux que ceux qu’ils remplacent. Une telle
initiative relève du bon sens en général et, dans le meilleur des cas, on peut
appliquer les techniques d’évaluation des dangers (voir ci-après) à la substance
chimique considérée et à celle qui doit la remplacer.
Alors que la méthode de substitution vise les matières premières et les additifs
utilisés dès le début du processus, en modifiant la composition on aborde le
problème sous l’angle du produit final.
Les programmes généraux visant à fabriquer des produits qui soient plus
respectueux de l’environnement sont des exemples de «conversion économique».
Comme exemple de modification de la composition du produit, on peut citer la
fabrication de piles rechargeables au lieu de piles jetables, ou encore l’emploi de
revêtements à base d’eau à la place de ceux qui font appel à des solvants
organiques.
Le recyclage
Dans les stratégies initiales de prévention des années quatre-vingt, on avait exclu le
recyclage sur site, mais hors processus parce qu’il n’était pas considéré comme une
véritable mesure de prévention de la pollution. On craignait que les résultats d’un
programme efficace de prévention de la pollution ne soient compromis ou que ce
programme ne perde de son efficacité si l’on mettait trop l’accent sur le recyclage.
Depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, certains décideurs ont accepté que le
recyclage sur place et hors processus soit considéré comme une méthode légitime
de prévention. Il est vrai qu’il y a de véritables «zones grises» entre la prévention
de la pollution et la lutte contre la pollution. Il est vrai aussi que certains types de
recyclage sur place répondent réellement aux attentes, même s’ils ne peuvent
techniquement être reconnus comme des mesures de prévention. Enfin, il y a la
pression des entreprises: les employeurs ne comprennent pas pourquoi l’on
refuserait de reconnaître certaines techniques si elles contribuent à la réalisation des
objectifs d’un programme de prévention.
La planification de la prévention
• les objectifs;
• l’inventaire des substances chimiques et l’estimation des rejets dans
l’environnement;
• les méthodes de prévention utilisées et proposées;
• les responsabilités et les mesures à prendre au cas où les objectifs ne seraient
pas entièrement atteints.
Les plans élaborés peuvent être de nature très diverse. Certains sont d’application
facultative, même s’ils sont prévus par la loi en tant que code de bonne pratique
(d’application volontaire). D’autres sont obligatoires en ce sens qu’ils doivent: 1)
être conservés dans l’usine aux fins d’inspection; ou 2) être soumis à un organe de
réglementation et de contrôle une fois réalisés; ou 3) être soumis à un organe de
réglementation et de contrôle aux fins d’examen ou d’approbation. Il existe aussi
d’autres variantes, comme l’obligation d’avoir un plan au cas où le dispositif
facultatif serait à certains égards insuffisant ou inefficace.
Le caractère normatif des plans d’application obligatoire varie lui aussi, notamment
du point de vue des pénalités et des sanctions applicables. Rares sont les autorités
qui ont le pouvoir d’exiger que des modifications précises soient apportées à la
teneur des plans de prévention; presque toutes disposent par contre d’un pouvoir au
cas où des exigences formelles n’ont pas été satisfaites — par exemple, si certaines
parties du plan ont été ignorées. Il n’existe pratiquement pas d’exemple de pénalité
ou de sanction au cas où des exigences concrètes du plan n’auraient pas été
respectées. C’est dire qu’en matière de planification de la prévention, les
obligations juridiques sont encore rares.
Les questions qui peuvent se poser à propos de la présentation des plans concernent
leur caractère confidentiel: dans certains cas, seul un résumé est publié, tandis que
dans d’autres, les plans ne sont divulgués que si le producteur omet d’une façon ou
d’une autre de se conformer à la loi. Il n’existe pratiquement aucun exemple de cas
où les exigences relatives à la planification l’aient emporté sur les dispositions
relatives au secret des affaires ou au caractère confidentiel des facteurs de
production, des procédés de fabrication ou des matières entrant dans la composition
des produits. Dans un petit nombre de cas, les associations de défense de
l’environnement ont accès au processus de planification, mais on ne connaît guère
d’exemples où la loi l’exige ou qu’elle prévoie le droit, pour les travailleurs, de
participer dans tous les cas à l’établissement de ces plans.
La législation
La plupart du temps, c’est à cause de leur impact sur les communautés humaines
(risques liés à l’environnement) que l’on s’est préoccupé des polluants qui
présentent un danger pour les travailleurs, les collectivités et le milieu physique.
Même si ce sont souvent les travailleurs qui sont le plus fortement exposés pendant
leur activité (pollution du lieu du travail), ce ne sont pas eux qui sont jusqu’à
présent les principales cibles des mesures de prévention. La loi du Massachusetts,
par exemple, vise à réduire les risques pour la santé des travailleurs, des
consommateurs et de l’environnement sans déplacer les dangers d’une de ces
catégories à l’autre (il en va de même au New Jersey). Toutefois, le législateur n’a
rien fait pour mettre l’accent sur la pollution du lieu de travail, en tant que préjudice
majeur, pas plus qu’il n’a prévu l’obligation d’accorder la primauté aux personnes
les plus exposées aux dangers, c’est-à-dire souvent les travailleurs. Il n’a pas non
plus prévu l’obligation de former les travailleurs à la prévention de la pollution.
Cette carence s’explique par plusieurs raisons. La première est que la prévention de
la pollution est une discipline nouvelle par rapport à l’optique traditionnelle qui ne
voit pas que la protection de l’environnement dépend des procédés mis en œuvre
sur le lieu du travail. Une deuxième raison est que les travailleurs ne sont encore
que rarement associés aux décisions prises par la direction en matière de protection
de l’environnement. Dans de nombreux pays, la loi leur donne le droit de faire
partie de comités mixtes sur la sécurité et la santé au travail, de refuser un travail
dangereux ou insalubre, d’être informés des questions de prévention et d’être
formés aux problèmes et procédures de sécurité et de santé, mais elle leur accorde
rarement des droits dans le domaine parallèle et commun à bien des égards de la
protection de l’environnement, comme celui de siéger dans des comités mixtes
syndicat-direction, celui d’alerter le public lorsque l’employeur recourt à des
pratiques dommageables pour l’environnement, celui de refuser de polluer ou de
dégrader l’environnement extérieur, celui d’être informé et celui de participer aux
audits d’environnement réalisés sur le lieu de travail (voir ci-après).
En gros, un audit sur le lieu du travail peut porter sur trois domaines du
développement durable et de la protection de l’environnement:
D’autres systèmes reposent sur des critères d’évaluation du danger. Pour ce faire,
ils fixent un certain nombre de paramètres de l’environnement, comme la
persistance et la bioaccumulation dans l’environnement, ainsi que certains
paramètres de la santé humaine qui servent de mesure de la toxicité, comme la
toxicité aiguë, le pouvoir cancérogène, le pouvoir mutagène, l’effet toxique sur la
reproduction, etc.
Bien que ces systèmes soient parfois conçus dans un but spécifique, par exemple
évaluer la priorité des mesures de lutte ou d’élimination (interdiction), ils servent
souvent de systèmes abstraits utilisables pour une grande variété de mesures de
protection de l’environnement, notamment la prévention de la pollution. Ainsi, des
substances chimiques qui ont reçu la cote la plus élevée pourraient être les
premières à figurer dans un programme obligatoire de prévention ou être inscrites
dans un programme d’élimination graduelle ou de substitution. En d’autres termes,
ces systèmes ne nous disent pas dans quelle mesure nous devons réduire les
dangers pour la santé liés à l’environnement; ils nous disent seulement que toute
mesure prise doit l’être en fonction du système d’évaluation des dangers.
Si nous prenons, par exemple, la décision de remplacer une substance chimique
dangereuse par une autre qui l’est moins, nous pouvons utiliser le système pour
savoir si, à première vue, la décision de remplacement est bonne: nous soumettons
les deux substances au système pour déterminer s’il existe un écart important ou
seulement minime entre leur degré de danger respectif.
Les systèmes d’évaluation des dangers tiennent rarement compte de deux sortes de
considérations. Les premières concernent les données d’exposition, ou le risque
d’une exposition de l’humain à la substance. Celui-ci est difficile à calculer et l’on
peut faire valoir qu’il biaise le «danger intrinsèque» des substances concernées.
Ainsi, on pourrait accorder à une substance une priorité artificiellement faible parce
qu’elle présente un risque d’exposition mineur, alors qu’en réalité elle est fortement
toxique et relativement facile à traiter.
Les systèmes d’évaluation des dangers sont cependant extrêmement utiles pour
mesurer le succès des programmes de prévention (ils sont aussi relativement
nouveaux, tant par leur impact que par leur utilité). Ainsi, il est possible de les
appliquer sans se référer à des évaluations de risque, à des analyses de risque et,
sous certaines réserves, à une analyse coûts-avantages. Auparavant, pour lutter
contre la pollution, on commençait par faire une évaluation des risques et l’on
décidait ensuite du type et de l’ampleur des mesures à prendre pour les réduire à un
niveau «acceptable». Les résultats étaient rarement impressionnants. En revanche,
l’évaluation des dangers peut être utilisée très rapidement et de manière à ne pas
retarder ni compromettre l’efficacité d’un programme de prévention. La prévention
de la pollution est avant tout un programme pragmatique qui doit permettre de
remédier rapidement et en permanence aux problèmes, au fur et à mesure qu’ils se
présentent, voire avant même qu’ils n’apparaissent. On peut soutenir que les
mesures traditionnelles de lutte ont atteint leurs limites et que seule la mise en
œuvre de programmes complets de prévention permettra de passer à la phase
suivante de la protection de l’environnement de manière pratique et efficace.
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