Pourquoi La France Va Faire Faillite Et Ce Que Vous Devez Faire
Pourquoi La France Va Faire Faillite Et Ce Que Vous Devez Faire
Pourquoi La France Va Faire Faillite Et Ce Que Vous Devez Faire
Simone Wapler
Note de l’éditeur :
Nous portons le plus grand soin à l’édition de nos
ouvrages et ceux-ci sont soigneusement vérifiés. Cependant nous ne sommes pas responsables des
erreurs ou oublis que vous trouveriez dans cette publication.
Attention : n’investissez jamais plus que vos moyens ne vous le permettent. La valeur de tout
investissement, et des revenus qui en découlent, peut monter aussi bien que descendre. Nous
conseillons à nos lecteurs de consulter, avant d’investir, un courtier ou un conseiller financier
indépendant agréé.
© 2012 Ixelles Publishing
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays.
D/2012/11.948/151
Ixelles Publishing
SA Avenue Molière,
Chaque jour, l’État français dépense 280 millions d’euros qu’il n’a pas.
Chaque jour, l’État français doit emprunter 800 millions d’euros.
« Ce n’est pas possible, pensez-vous, cela ne peut pas durer, c’est
absurde ! »
Vous avez raison. Cela ne peut pas durer. Non pas parce que c’est
absurde : beaucoup de situations absurdes s’éternisent pour la simple raison
qu’on les juge raisonnables. Mais cela ne va pas durer longtemps tout
simplement parce que nous allons faire faillite, ou plus exactement défaut
puisque c’est le terme technique que l’on emploie dans le cas d’un pays. Un
jour, nous ne trouverons pas les 800 M€, on refusera de nous les prêter.
« On », c’est-à-dire vous-même et votre livret de Caisse d’Épargne ou votre
assurance-vie ou bien les investisseurs étrangers. Ce jour-là, nous ferons
faillite.
C’était une situation absurde, puisque les pauvres faisaient crédit aux
riches. Cependant, peu de gens trouvaient grand-chose à redire à cet
équilibre mondial. Aux pays dits émergents les cheminées d’usine et le sale
boulot d’extraction et de transformation des matières premières. Aux pays
dits développés les nobles besognes de conception et les raffinements de
l’industrie des services avec, au sommet de la pyramide hiérarchique,
l’industrie financière. Jusqu’au jour où…
les nombreux courriers que je reçois de lecteurs avertis, des gens qui savent
ce que c’est que de gagner de l’argent et de payer des salariés, me montrent
que quatre ans après le début de la plus grave crise depuis 1929 et la Grande
Dépression, la finance reste mystérieuse. 708 000 Mds$ de produits dérivés
flottent toujours. Les véritables enjeux sont masqués par un
incompréhensible jargon : TARP, ZIRP, QE, LTRO, FESF, MES, CDS,
twist, effet de levier et LBO, alpha ou bêta, prise en pension…
Lorsqu’en automne 2008, mes collègues et moi-même écrivions les
premiers articles indiquant que le quantitative easing ou mesure
d’assouplissement monétaire n’était autre que la remise en route de la
bonne vieille planche à billets, nous recevions une volée de bois vert
(heureusement sous forme de courriers électroniques). Encore aujourd’hui
certains prétendent que les 1 000 Mds€ que la Banque centrale européenne
a fait surgir du néant seront sans conséquence (autres que bénéfiques).
Pour comprendre les vrais enjeux de ce qui nous attend, il m’a paru
indispensable de poser le décor, de partir de la base financière et
économique.
Voilà comment après avoir été sauvées par les États avec de l’argent qui
n’existait pas, les banques sauvent les États avec de l’argent qui n’existe
toujours pas.
Des États aux banques et inversement, vous voyez ainsi que nous
glissons de la finance à l’économie puis à l’économie administrée et à la
politique.
Je vous entends vous rebiffer en lisant cette phrase car vous croyez aux
vertus de l’État et de ses dévoués serviteurs. Vous avez cru aux jolis
panneaux « payés par vos impôts » qui, dans un échangeur routier en
travaux, proclament « Ici l’État et la Région investissent pour votre
avenir. »
Cela n’est jamais arrivé en trente-sept ans. On nous ment depuis trente-
sept ans. Le déficit ne finance aucun investissement. Il paie les dépenses
courantes et les promesses électorales intenables.
Mais ce n’est pas tout. La boîte à astuces des gouvernements est très bien
garnie. Ainsi, minimiser les chiffres officiels d’inflation permet de gonfler
artificiellement le PIB qui est présenté corrigé de l’inflation. Un petit
exemple pour bien comprendre la gruge.
Nous partons d’un PIB de 100 et nous arrivons l’année suivante à 106.
Les pouvoirs publics annoncent avoir mesuré 2 % d’inflation. Notre
croissance est donc de 4 %. En effet, le PIB mesuré était de 106, dont 2 sont
à retrancher car dûs à l’inflation, d’où 104 et le chiffre de croissance net de
4 %. Supposons maintenant que la véritable inflation soit non pas 2 mais 3.
La croissance réelle n’est en fait que de 3 % (106 – 3)/100.
Bref, il est malvenu de se plaindre, d’autres sont bien plus mal lotis.
L’effet qualité
Ce biais est plus subtil que le précédent. Un produit de base est remplacé par un produit
sophistiqué. Le produit sophistiqué coûte plus cher. Mais l’effet qualité fait que le produit plus
sophistiqué n’est pas plus cher.
Supposez une voiture d’entrée de gamme sans direction assistée, sans airbag et sans GPS qui
coûte 10 000 €. Si vous choisissez de rajouter ces options, vous devez débourser 3 000 €
supplémentaires. Une voiture équipée vaut donc 13 000 €. Le constructeur supprime son modèle
d’entrée de gamme et ne propose plus que la voiture avec les options direction assistée, airbag et
GPS au prix de 12 000 €. Vous calculez que le prix de la voiture d’entrée de gamme, nécessaire
au simple maintien de votre niveau de vie, a augmenté de 20 % (12 000 / 10 000). Pauvre naïf !
La voiture a baissé de 8 % puisque son prix est passé de 13 000 € à 12 000 €.
Vous protestez que ces équipements supplémentaires vous sont inutiles, que la ceinture de
sécurité vous suffit, que l’airbag vous gonfle, que vos biceps vous permettent de vous passer de la
direction assistée, que votre conjoint sait lire une carte routière et que vous voulez une voiture à
10 000 €. Peu importe…
L’effet d’auto-ascèse
Ce troisième biais est niais et cynique. Vous mettiez de la brioche au menu du petit déjeuner du
dimanche. Mais la brioche augmente. Elle passe de 1,20 € à 1,50 €, soit 25 % d’augmentation.
Courageusement, vous décidez que votre famille se passera désormais de brioche, au moins un
dimanche sur deux.
Votre organisme statistique le sait ! Votre panier moyen va contenir moins de brioche. Le poids
(statistique) de la brioche dans la consommation nationale va diminuer. Exit la brioche de l’écran
radar des prix mesurés. Si vous poussez ce raisonnement à l’extrême, vous aboutissez à l’auto-
ascèse totale et vous revenez à la case « esprit pur ».
L’effet pondération
Ce quatrième biais se sert du dosage. Les indices statistiques adorent mesurer des prix qui
baissent, mais qui concernent des objets que vous consommez peu : téléphones mobiles, tablettes,
télévisions à écran plat, gadgets divers réalisés dans des pays à bas coûts de main-d’œuvre.
En revanche, en France, par exemple, les indices estiment que vous ne consacrez que 13 % de
votre budget à l’habitation. Visiblement, aucun fonctionnaire de l’Insee n’a eu à attester que le
prix du loyer de l’appartement qu’il envisageait de louer (ou les remboursements de l’emprunt
qu’il demandait pour acheter) pesait moins de 30 % de ses revenus nets !
L’effet d’omission
Un cinquième biais évite de prendre en compte de multiples dépenses auxquelles on vous
contraint cependant, sous peine de sanction. Dépenses liées à votre sécurité ou même impôts
parfois déguisés : dans cette case, rentrez les assurances, les travaux de sécurité que votre
copropriété ou la loi vous impose pour satisfaire tel ou tel lobby. Pensez au plomb, à l’amiante,
aux termites, aux entourages de piscine, aux portes d’ascenseur, aux ramonages de cheminée aux
changements de normes électriques, aux obligations de ventilation dans les pièces humides…
tous ces dangers pour lesquels il vous faut payer.
Mais tous ces artifices trouvent maintenant leur limite. On peut mentir
longtemps à peu de monde, mais on ne peut mentir que peu de temps à
beaucoup de monde. Nous allons donc voir pourquoi la France fera faillite.
Le point de retour est maintenant dépassé pour trois raisons. Les deux
premières sont nationales : l’inertie de l’État est trop grande pour rectifier le
tir assez vite et nous avons aussi un problème démographique, nous
vieillissons. La troisième est internationale : la conjoncture s’est dégradée et
nous allons probablement vivre un autre choc pétrolier. Nous avons trop de
dettes et trop d’inertie ce qui nous empêchera de prendre notre miette du
maigre gâteau de la croissance mondiale.
Cependant, connaître un futur désagréable n’a aucun intérêt s’il n’y a rien
à faire à part s’acheter des Kleenex, du Lexomil et se tordre les mains de
désespoir. Toute une partie de ce livre donne de simples conseils de bon
sens pour vous préparer à passer au mieux cette période troublée. Il va
falloir préserver ce que vous avez de plus précieux – notamment votre
résidence principale – du naufrage national et vous préparer à recevoir une
retraite plus maigre que prévu.
En effet, il faut être masochiste pour prêter à quelqu’un dont vous pensez
que demain il pourrait être moins riche ou moins bien portant, voire pauvre
ou malade. C’est pourquoi le maintien de l’optimisme et la confiance sont
des ingrédients indispensables de l’économie du crédit dans laquelle nous
vivons. Les medias propagent donc ce parti pris nécessaire. En revanche,
vous conserverez, vous, un regard lucide et non biaisé, ce qui vous
permettra de prendre les bonnes dispositions aux bons moments.
Mais après tout, rien n’est inéluctable sauf la mort. Admettons donc
qu’un miracle se produise et que nous échappions à la faillite. Vous aurez
quand même préparé votre patrimoine à essuyer la plus grave crise depuis
1929 et revu votre allocation d’actifs à la lumière de la nouvelle donne
mondiale.
Sortez 1 € de votre poche. Posez-le sur votre bureau. Regardez-le bien.
Vous l’avez acquis à la sueur de votre front. Il correspond à votre travail, il
a dûment acquitté les charges sociales, les impôts et les taxes. Il est à vous
et l’une de vos libertés est de pouvoir le dépenser quand bon vous semble.
Le « quand » est important, il doit pouvoir conserver sa valeur, ne pas
s’éroder dans le temps.
Vous devez savoir que depuis le 1er mars 2012, votre pauvre petit euro
est désormais en concurrence avec 1 000 000 000 000 de clones
supplémentaires. Problème : ces clones ne correspondent à aucun travail,
aucun argent gagné et épargné, aucune création de richesse, aucun impôt.
Rien. Ils correspondent simplement aux 1 000 Mds€ (mille milliards
d’euros) de LTRO de la Banque centrale européenne. LTRO signifie Long
Term Refinancement Operation, c’est un des nombreux noms récemment
trouvés pour désigner la création monétaire. Les 1 000 Mds€ ont été mis à
disposition des banques commerciales européennes. Ils n’ont rien à voir
avec les divers plans de sauvetage des pays périphériques (Grèce, Irlande et
Portugal qui se sont échelonnés depuis 2010) auxquels ils s’ajoutent.
Pour le moment, ces clones sont inertes, ils ne font pas encore de mal à
votre pauvre petit euro à vous. Ils restent dans le circuit banques
commerciales – banques centrales – obligations souveraines. En effet, le
marché interbancaire est gelé, car les banques ne veulent plus se prêter entre
elles par défiance, et les banques réduisent leurs prêts à l’économie privée.
Mais dès que ces clones ressortiront sur le marché, circuleront, que va-t-il
se passer ?
Essuyez votre larme, n’oubliez pas de reprendre votre pauvre 1 € sur le
coin de votre bureau et essayez d’éviter qu’il ne soit tué par ces
1 000 000 000 000 de mercenaires. Ce livre est là pour vous y aider.
La monnaie est une chose étrange et familière, à la fois très simple dans
sa manipulation quotidienne et très complexe dans ce qu’elle recouvre.
Vous souvenez-vous encore précisément du passage à l’euro ?
Vous receviez des factures et des relevés de banque libellés dans cette
monnaie. Le solde de votre livret d’épargne faisait apparaître ce nouveau
symbole sympathique et rondouillard « € ».
Dans ces trois constats, vous retrouvez les trois fonctions essentielles de
la monnaie : instrument d’échange, instrument comptable, instrument
de stockage.
Lorsqu’une monnaie remplit bien son rôle, ces trois fonctions sont
assurées et personne ne cherche plus loin. Mais dès qu’une des fonctions se
détériore et qu’on se penche sur les questions monétaires, tout devient
infiniment complexe.
« Si quelqu’un a compris quoi que ce soit à ce que je viens de dire, c’est
que je me suis mal exprimé »9 a dit Alan Greenspan, alors président de la
Fed américaine, en juillet 1998. Nous étions deux ans avant l’éclatement de
la bulle Internet. De bulle en bulle, le langage et la terminologie se font de
plus en plus obscurs, mais l’arrogance ne diminue pas.
C’est ce qui est amusant avec l’Histoire : toutes les bêtises ont déjà été
faites par le passé.
Hélas, la peine de mort n’endiguera pas une inflation ravageuse. Or, blé,
verre, chevaux, huile, olives… augmentèrent de 17 % à 20 % par an durant
plus de quarante ans.
L’euro est une monnaie fiduciaire qui n’est garantie par rien, si ce n’est la
confiance en l’autorité qui l’émet. D’habitude derrière le mot autorité on
trouve un État souverain, mais – et c’est là la particularité de la monnaie
unique –, ce n’est pas le cas de l’euro. Il n’y a pas d’État fédéral européen
garant de l’euro.
Imaginez trois frères, patrons d’un restaurant. L’un vit en Grèce, l’autre
en France, le troisième en Allemagne. Chacun gagne l’équivalent de
100 000 € par an. Celui qui est en Allemagne a emprunté 150 000 € pour
acheter un yacht. Celui qui est en France, 170 000 €, et celui qui est en
Grèce, 200 000 €. La crise survient. Les gens dépensent moins et préfèrent
faire la cuisine chez eux plutôt que d’aller au restaurant. Les chiffres
d’affaires de nos trois restaurateurs baissent. Le frère qui habite en
Allemagne réduit son budget, vend son yacht et taille dans quelques
dépenses. Le frère qui réside en France annonce à son banquier qu’il va
bientôt réduire ses dépenses et peut-être louer son yacht durant un mois
l’été prochain. Le frère qui est en Grèce demande de l’aide aux autres…
Vous savez maintenant que l’euro est une monnaie qui n’est plus capable
de stocker de la valeur, que les autorités en impriment sans retenue et que le
taux du livret A qui rémunère l’épargne est inférieur à l’inflation officielle.
Ce n’est pas l’euro qui est la cause de nos soucis mais bien l’endettement
de la France. Qui crée la monnaie et prête ? Les banques – et c’est bien pour
cela qu’il faut nous pencher sur leur cas.
« Autrefois, les gens savaient ce que les banques faisaient. Les banquiers
prenaient leurs dépôts et les prêtaient, rémunérant l’épargne de court terme
moins que ce qu’ils prenaient pour des prêts plus risqués ou moins liquides.
Le risque était endossé par les banquiers, pas par les déposants ou les
gouvernements. Les banques se sont tellement éloignées du financement de
la croissance industrielle et du développement économique qu’elles
prospèrent aux dépens de l’économie à la façon de prédateurs et non en
13
faisant des prêts productifs. » Michael Hudson
Le papier est bien plus souple, au sens propre comme au sens figuré.
Pour ajuster la masse monétaire à la richesse d’un pays, il suffit d’imprimer
un peu plus de papier. C’est quand même plus facile, avouons-le, que
d’essayer de se procurer de l’or supplémentaire.
Aujourd’hui, le procédé est un tout petit peu plus raffiné et les banques
centrales délèguent la création monétaire aux banques commerciales
par la création de crédit. La banque centrale fixe le prix de l’argent frais à
court terme avec son taux directeur. Un taux directeur de 1 % signifie que
les banques commerciales peuvent aller chercher de l’argent auprès de leur
banque centrale en payant 1 % d’intérêt. Ce taux directeur est censé diriger
l’économie. S’il est bas, l’argent est facile à obtenir. S’il est élevé, l’argent
devient une denrée plus rare, plus coûteuse à se procurer. Le taux directeur
rythme la marche du crédit sur laquelle reposent la création monétaire et
toute notre économie.
Comme vous le savez, le taux du livret A varie dans le temps et il est lié
au fameux taux directeur donné par la Banque centrale. Supposons que le
taux du livret A soit à 2 % et que la banque prête à 5 %, sa marge de
transformation est de 3 %. Dans cette activité, la banque doit gérer deux
risques : le temps et l’évolution du taux directeur dans le temps. Le risque
temps est réel et sérieux : les dépôts et l’épargne peuvent se retirer à tout
instant, alors que l’argent octroyé pour le prêt est immobilisé pour
longtemps.
Cependant, l’argent se crée bien quand « les crédits font les dépôts ».
Imaginez le scénario suivant : M. et Mme Michu viennent d’acheter
100 000 un appartement à M. Tartampion. Pour cela, ils ont obtenu un prêt
de leur banque qui a bien 100 000 en contrepartie de dépôts à court terme et
d’épargne de ses autres clients. M. et Mme Michu jouissent de leur
appartement sans avoir l’épargne correspondante puisque, justement, ils ont
emprunté. M. Tartampion, le vendeur, va recevoir 100 000 sur son compte.
Ce dépôt va permettre à la banque de M. Tartampion de prêter encore
100 000.
14
Ludwig von Mises , un économiste non keynésien, appartenant à
l’école dite autrichienne, distinguait deux crédits :
Avec ça, vous en savez déjà plus que le conseiller financier du guichet de
votre banque. Vous pouvez maintenant butiner le chapitre suivant qui va
vous montrer comment se finance l’État providence engagé sur la voie
fatale de l’insolvabilité.
La dette publique française est due pour les trois quarts à « trente ans de
17
petites lâchetés gouvernementales » constate Alain Minc.
2000, « L’État ne peut pas tout », lâche Lionel Jospin à des salariés
licenciés de Michelin. Malheureux ! Crime de lèse État providence ! Elle lui
aurait coûté sa place à l’Élysée pensent certains politologues. C’est dire si
les Français sont attachés à ce principe. L’assistanat s’est tellement bien
développé qu’à chaque canicule ou tempête de neige, on entend « que fait
l’État ? ».
« Nos finances publiques sont dans une situation très préoccupante. (…) Cette situation ne nous a
pas été imposée : nous n’avons cessé de l’accepter. (…) Cette dette n’est pas le résultat d’un
effort structuré pour la croissance et la préparation de l’avenir (…). En réalité, le recours à
l’endettement a été le choix de la facilité : il a permis de compenser une gestion insuffisamment
rigoureuse des dépenses publiques (…). Les lourdeurs et les incohérences de notre appareil
administratif sont une première explication de la gestion peu rigoureuse des dépenses (…). Mais
ce sont fondamentalement nos pratiques politiques et collectives, notamment notre préférence
pour la dépense publique, qui sont à l’origine de notre situation financière actuelle (…).
2007, « Je suis à la tête d’un État qui est en situation de faillite sur le plan
financier… », déclare François Fillon au cours de son premier déplacement
officiel en Corse.
2012, Jacques Attali déplore « le budget de la Banque de France qui est
tout de même, bizarrement, six fois supérieur à celui de la Banque
d’Angleterre ! D’un côté 16 000 employés et de l’autre 3 000, tout est dit.
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Et ces 3 000 employés-là gèrent une monnaie indépendante » .
d’assurance-vie.
Les fonds propres d’une banque sont, comme pour une entreprise,
l’argent qui lui appartient en propre. Pour une banque, il s’agit du capital
versé par les associés et des bénéfices dégagés mais non distribués.
Cher lecteur perspicace, dès que vous entendez « risque », votre système
d’alerte interne doit se mettre en éveil. Nul besoin d’un doctorat en finance
des marchés pour comprendre que tout ce qui concerne les calculs de
risques en finance est pour le moins douteux. Sinon comment expliquer que
nous voguions de krach en crise et de crise en krach ?
Chaque actif détenu par les banques – créance, obligation, action – a un
niveau de risque différent assigné par la réglementation.
C’est ici même que se trouve la racine de la collusion entre les États et
les banques. C’est aussi pour cette raison que les uns s’empressent de
sauver les autres de leurs propres erreurs et vice versa. C’est toujours
gagnant-gagnant entre banques et États et s’il faut un perdant, ce sera vous,
le contribuable.
Le ratio tier one est donc capitaux propres tier one / actifs pondérés des risques.
Si vous mettez 10 Mds€ de fonds propres tier one en haut et que la somme des actifs pondérés
des risques est de 200 Mds€, le ratio tier one est de 5 %.
Si les calculs de risque financier étaient si affûtés qu’on veut bien le faire
miroiter, nous n’aurions pas connu les krachs de 1987, 2000, 2008 ; Bear
Stearns et Lehman Brothers ne seraient pas morts ; ni l’Islande ni la Grèce
n’auraient fait défaut ; ni le Portugal, ni
Ce tour de cimetière (non exhaustif, nous n’avons visité que les tombes
les plus fraîches) vous montre bien que le risque est une chose loin d’être
maîtrisée. Pire encore, les récents développements de la finance comme la
titrisation font que le risque essaime au lieu d’être cloisonné. Enfin, le
recours à des effets de levier disproportionnés l’amplifie. Les actifs
pondérés des risques sont une simple formule rassurante qui ne recouvre
rien de justifié par l’expérience.
C’est avec ce ratio-là, et celui-là seulement, que vous devez soupeser les
véritables risques. Il a en plus un immense avantage : il est universel et ne
dépend d’aucune norme comptable ou de méthode d’évaluation des risques.
Supposons que 2 ou 3 % des actifs d’une banque soient détruits, tous
ses fonds propres sont consommés. La banque est donc en faillite. Elle
n’a plus le droit de poursuivre ses activités.
Que faut-il pour que les actifs soient détruits ? Que certains emprunteurs
ne remboursent pas, que des actions en portefeuille ne cotent plus, qu’un
produit dérivé se désintègre en vol, que des entreprises dans lesquelles la
banque a pris des participations fassent faillite, qu’un État même petit et
mineur comme la Grèce fasse défaut… Les banques n’ont que 2 à 3 % de
marge d’erreur.
Banque Effet de levier
Deutsche Bank 60
JP Morgan Chase 32
UBS 31
BNP Paribas 30
Citigroup 20
Maintenant, vous devez réaliser que vos dépôts en banque sont à la fois
un prêt que vous avez vous-même octroyé à votre banque et les prêts que
votre banque a consentis. Dans le cas d’une crise nationale, plusieurs
banques peuvent se retrouver en difficulté simultanément. Si votre banque
fait faillite, il vous sera très difficile de remettre la main sur votre argent.
20
Jean Peyrelevade , ex-Crédit Lyonnais.
Dans la Bible, le péché originel fait déchoir Adam et Ève qui étaient en
principe voués à une vie pépère de gardiens d’un square dans lequel il ne se
passait pas grand-chose. Ce péché originel consista à vouloir goûter le fruit
de l’arbre de la connaissance du Bien et du Mal, arbre que se réservait Dieu,
vu que lui seul peut juger du Bien et du Mal.
N’ayez pas peur, vous n’êtes pas en train de lire un traité sur la religion et
ce livre était classé dans le bon rayon de votre libraire. Je veux simplement
introduire le propos suivant : les financiers sont arrivés au pied du mur en
refusant l’incertitude et en minimisant systématiquement les risques.
Nous avons vu que les banques transforment des dépôts à court terme en
prêts à long terme, leur métier est de prendre un pari sur le temps et
d’apprécier le risque. Pour cela, elles ont recours à des modèles
mathématiques.
L’écart type se définit comme la moyenne quadratique des écarts autour de la moyenne.
Dit comme cela, c’est un peu ésotérique, mais c’est en fait assez simple.
La probabilité pour que vous rencontriez sur votre chemin des Français
adultes de plus de 125 kg ou de moins de 35 kg est donc infime. Plus
précisément, elle est inférieure à 0,4 %.
La cuisine financière gaussienne considère que le prix d’un actif est une
caractéristique (ou variable) indépendante, mais c’est une erreur grossière !
Le prix que vous accordez à une chose dépend du prix que votre voisin,
qui la convoite également, lui accorde. Pour soutenir le contraire, il ne faut
jamais avoir mis les pieds dans une criée ou une vente aux enchères. Que
sont les marchés financiers si ce n’est une gigantesque vente aux enchères ?
En outre, les prix ont une mémoire. Tout le monde se souvient que le
pétrole a valu 150 $ le baril, que l’or a frôlé 1 900 $ l’once et que le m2
parisien vaut plus de 10 000 €. Une fois qu’un prix a été atteint, il y a un
phénomène psychologique qui freine le retour à l’état antérieur. M. Michu
ne se séparera pas de son m2 parisien pour 6 000 €, « puisque,
scrogneugneu, ça en a valu 10 000 ».
Malgré tout, sur cette erreur initiale – le prix est une caractéristique
indépendante – repose toute la pyramide des mathématiques financières.
Ayant assuré des risques connus, je peux augmenter mes effets de levier
en toute quiétude. Et voilà pourquoi nous parlons de milliers de milliards de
dollars et d’euros qui sont partis en fumée alors que d’autres sont en voie de
désintégration.
« Si ce n’est une loi gaussienne, quelle est la loi qui régit la finance ? »,
vous demandez-vous haletant, les yeux brillants de convoitise à l’idée de
posséder la martingale qui vous rendra riche avant de retomber en poussière
pour l’éternité ?
Pour ceux qui ont usé des bancs de terminale S ou de maths sup, ces lois sont du type a.ebx ou
encore a.xk.
C’est ainsi que les avions ne se crashent pas trop souvent et que les centrales nucléaires ne se
transforment pas couramment en volcans radioactifs.
Je vois à ce stade que votre sens critique se réveille. « Si c’est si simple
que cela, pourquoi diable, les financiers ne corrigent-ils pas le tir ? »
Plus d’un demi-siècle d’erreurs ne se corrige pas en une minute. Cela
prend du temps. Considérez les algorithmes et les programmes de trading
automatique tournant avec les modèles gaussiens (plus ou moins tripotés et
ajustés pour les faire coller – a posteriori – aux événements). Imaginez les
ordinateurs et la puissance de calcul mobilisée. S’il fallait tout revoir à la
lumière des fractales, il faudrait des Cray, ces supercalculateurs et non plus
de vulgaires PC avec un tableur Excel.
Le danger est énorme mais très peu de voix s’élèvent pour alerter.
Comment est-ce possible ?
Je sais que ces accusations sont sévères et que vous allez exiger des
preuves.
Pour en prendre conscience, c’est très simple. L’année 2012 est une
année bissextile. À ce titre, elle comprend un jour supplémentaire, le
mercredi 29 février qui est un jour ouvré. Sachant qu’une année calendaire
moyenne est de 218 jours ouvrés, un supplément de 1 jour représente 1/218,
soit 0,46 %. L’arithmétique nous indique donc que l’évolution du PIB serait
en fait de 0,40 (croissance prévue) auquel il faut retrancher 0,46
(supplément bissextile) soit -0,06 %. Peut-être conviendrait-il plutôt de
s’interroger sur le fait que la France puisse se retrouver en dépression de
0,06 % ?
Mais le message est clair. Pour ce journaliste, ce n’est pas la dette qui est
mauvaise, ce sont les marchés qui sont méchants…
Mais dès qu’il s’agit d’économie et de finance, c’est une tout autre
affaire. Quiconque rapporte des observations dérangeantes est qualifié de
pessimiste, pire encore, de saboteur… À mort, l’empêcheur de ronronner à
l’unisson ! Qu’on le tue, comme le messager de mauvaises nouvelles de
l’Antiquité.
Cela permet d’éviter les questions qui dérangent ou qui feraient prendre
conscience aux lecteurs et auditeurs qu’on va les plumer par l’inflation ou
par la faillite. Aucun media ne vous dira que la France est en route pour un
désastre car c’est mauvais pour le business. Cependant, ne croyez pas que
tout ceci soit un mal français. La presse anglo-saxonne n’est pas d’une
virginité exemplaire en ce domaine. Elle aussi vit de ses annonceurs.
Eh oui, mieux vaut se tromper avec tout le monde que d’avoir raison tout
seul. C’est plus confortable de jouer « the trend is your friend » (la tendance
est votre amie) que de faire sienne la devise « quand tout le monde pense la
même chose, c’est que personne ne pense ».
« Il est impossible de faire usage de franc-parler face aux autorités » étant
donné que « les gouvernements sont les actionnaires de l’entreprise (…) il
est arrivé que des autorités adoptent des méthodes insistantes, exerçant des
pressions explicites pour atténuer des messages critiques ».
Le FMI semble donc mal parti pour nous alerter de notre prochaine crise.
Il lui manque « l’impulsion intellectuelle nécessaire pour effectuer du
travail de haute qualité ».
Vous avez compris que pour vous tenir informé du sort de la France, il
vaut mieux ne pas s’en remettre aux journaux et aux autorités. La situation
est désespérée mais on va continuer à vous enfumer.
20 Challenges n° 292.
21 Franck Knight, Risk, Uncertainty and Profit, Nabu Press, 2010.
22 Selon Philippe Herlin dans Finance, le nouveau paradigme. D’autres
sources estiment 44 x 1099 ans, tout dépend si on prend un cours moyen de
journée ou des extrêmes.
23 Ce qui correspond à 95,4 % - 68,2 %.
24 Ce qui correspond à 99,6 % - 95,4 %.
25 Le Cygne noir – La puissance de l’imprévisible, Éditions Les Belles
Lettres, 2008.
26 Finance – Le nouveau paradigme, Eyrolles éditions d’Organisation,
2010.
27
http://online.wsj.com/article/SB10001424052748704422204576130192457
252596.html
28 www.ieo-imf.org/ieo/files/completedevaluations/Crisis %20FRE.pdf
5
Pourtant, j’ai pesé ce mot : la France est un zombie financier. Notez que
le propre du zombie est qu’il ignore son état. Votre sentiment de révolte
citoyenne est donc compréhensible. Bien sûr, la France, ses medias, ses
politiques ne le savent pas non plus. Tant mieux, car nos créanciers baignent
également dans cette bienheureuse ignorance. Sinon ces mêmes créanciers
ne nous prêteraient plus d’argent (ou plus difficilement) et la France serait
déjà en défaut de paiement. Nous donnons toujours l’illusion de la vie et
tout est fait pour entretenir cette illusion.
Qui suis-je pour établir un diagnostic aussi grave ? Quelles sont mes
lettres de créances ? J’avoue, misérablement, n’en avoir aucune.
Simplement, dans le monde de tous les jours, de la vraie vie, des
entreprises, comment nommer quelqu’un qui ne parviendra jamais à
rembourser ses dettes ? Vous savez, le bon client qui est mis en liquidation,
vous laissant une grosse ardoise, mais qui garait sa Ferrari au parking
visiteurs de votre entreprise quand il venait vous voir…
Les apparences de la vie financière sont là, car la France rembourse les
intérêts de sa dette. Le problème, c’est qu’elle arrive à honorer ses
engagements en contractant une autre dette. C’est le principe bien connu de
la « cavalerie » en français, récemment renommé « pyramide de Ponzi »
dans les medias français qui se sont alignés sur la terminologie anglo-
saxonne. Nous en sommes arrivés à ce stade. La France vit de crédit
revolving, elle emprunte toujours plus, notamment pour rembourser les
intérêts de la dette, mais pas la dette, qui grossit toujours.
À la fin de l’année 2011, la Cades (un machin créé pour résorber le trou
de la Sécurité sociale et classifié « agence gouvernementale »
ou government agency, donc équivalent en qualité d’emprunteur à l’État
lui-même) empruntait déjà au taux de 7,5 %, un intérêt largement supérieur
à celui d’une signature officiellement encore triple A (qui empruntait à cette
même date plutôt à 3 %). Le vendredi 13 janvier 2012, la France perdait son
triple A accordé par l’agence Standard & Poors. C’est bien évidemment le
signe que les créanciers commencent à s’agiter, même s’ils sont encore loin
de penser à fermer le robinet.
Ceux qui ont connu les affres du doute sur la santé du gros client qui a
une ardoise importante comprendront très bien cette réaction. Lorsque le
gros client revient frapper à la porte, on est d’abord presque soulagé, il n’est
pas mort ! Bien sûr, il ne revient jamais pour rembourser. Il va expliquer
qu’il a un petit problème passager de trésorerie, et qu’il lui faut encore de
l’argent…
En revanche dans le cas d’un État, c’est bien plus difficile. Comment
saisir le Louvre, la tour Eiffel ou un hôpital ? C’est pourquoi, d’ailleurs, on
ne dit pas qu’un État « « fait faillite », on dit qu’il « fait défaut ». C’est plus
chic, mais c’est au fond la même chose.
En revanche, les États ont en général trois atouts dans leur manche : ils
sont immortels, ils ont une planche à billets, c’est-à-dire la faculté de créer
leur propre argent, et ils disposent d’une force publique qui leur permet de
lever l’impôt.
L’immortalité justifie l’endettement illimité
Dans l’économie privée, le bailleur de fonds prête attention à l’âge de son
créancier et ne va pas consentir un prêt d’une durée qui n’a aucun rapport
avec l’espérance de vie du débiteur. Mais les vieilles démocraties passent
pour immortelles. Récemment, elles ont mis sur le marché des obligations à
trente, cinquante et même cent ans pour le Royaume-Uni.
Cela peut vous paraître absolument aberrant compte tenu des maigres
facultés de prévision du monde économique et politique, notamment pour
des données aussi basiques que sont l’inflation et la croissance, mais c’est
ainsi. Des fonds de pension, qui gèrent l’argent de futurs retraités, prennent
ce papier à rendement fixe sur trente, cinquante ou même cent ans et
considèrent que leurs projections économiques sont fiables sur plus d’un
demi-siècle. L’immortalité facilite ainsi la « zombification » financière par
l’endettement.
« Tant mieux, semblent ainsi penser ses sauveteurs déclarés. Si les impôts
rentrent normalement, la Grèce pourrait redevenir solvable. » Deux ans plus
tard, on peut en douter. Le régime est tellement corrompu que l’argent
n’arrive toujours pas dans les caisses.
Mais bien sûr, ce n’est pas le cas de notre douce France. Une grosse
administration fiscale, capable de ponctionner efficacement le contribuable
en cas de besoin, voilà qui réconforte les créanciers étrangers. La confiance,
c’est le maître mot. De ce point de vue, Bercy, avec ses
30
139 495 fonctionnaires , rassure, et c’est très important.
Que constatez-vous ?
À première vue, tout a l’air d’aller pour le mieux dans le meilleur des
mondes possibles, comme disait le Candide de Voltaire. « La dette
augmente, mais elle finance bien la croissance, puisque le PIB augmente
aussi. C’est de la dette utile », pensez-vous.
Que constatez-vous ?
Il y a quelque chose qui cloche… Peut-être que tout n’est pas pour le
mieux dans le meilleur des mondes possibles, finalement.
À vrai dire, la dette publique devient stérile, elle coûte plus cher que la
croissance qu’elle est censée acheter.
Dans le cas de la France, entre 2000 et 2011, 865 Mds€ de dettes ont
acheté seulement 548 Mds€ de PIB supplémentaires. Autrement dit, c’est
un retour sur investissement négatif puisque 1 € de dette n’achète que
0,63 € de PIB.
La réalité est évidemment encore pire, car la dette a un coût : ses intérêts.
Ceci explique d’ailleurs que, une fois passées les années de forte inflation,
la dette s’est révélée de moins en moins efficace. En effet, l’État s’endette
principalement à taux fixe. Lorsque les taux augmentent moins vite que
l’inflation – ce qui s’est produit de 1973 à 1981 –, la dette s’allège. Ceux
qui ont eu la chance de contracter un prêt immobilier en 1975 se
souviennent de ce type de situation où le temps joue pour le débiteur (et
contre le créditeur).
« Historiquement, les pays qui ont échappé à des ratios dette extérieure
sur PNB élevés, que ce soit par une croissance rapide ou par des
remboursements importants et prolongés, font plutôt figure d’exception. »
Hum ! Pas bon, ça ! Reinhart et Rogoff ont l’air de suggérer qu’au-delà
d’un certain ratio de dette extérieure sur PNB, la croissance rapide se fait
rare.
32
Charles Gave , l’auteur d’un des premiers livres prophétiques sur la
faillite de la France, économiste et fondateur en Asie de la société en
conseil de gestion de portefeuille GaveKal, a démontré pour la France que
la dette ralentissait la croissance. Ses travaux ont été repris par John
33
Mauldin et Jonathan Tepper.
Nous sommes dans une situation absurde. Les données prouvent que la
dette publique est devenue un frein à l’expansion économique, mais les
grands prêtres de l’économie keynésienne ont bien fait leur travail.
Personne n’ose remettre en cause un dogme pourtant nié par les chiffres.
Nous venons de voir que la dette nationale augmente plus vite que les
revenus et que plus la dette augmente, moins les revenus augmentent.
Transposons cette situation dans le monde du privé. Imaginez une
entreprise qui emprunte chaque année un peu plus. Son activité ne change
pas fondamentalement. Son chiffre d’affaires grossit moins vite que son
passif, c’est-à-dire ce qu’elle doit. À l’échelle individuelle, imaginez un
ménage dont les revenus augmentent moins vite – ou même stagnent – mais
qui recourt de plus en plus à l’emprunt. Quelle serait, selon vous, l’attitude
du banquier vis-à-vis de cette entreprise ou de ce ménage ? Le doute et la
méfiance finiraient par s’infiltrer. Pourquoi n’est-ce pas le cas pour la
France ? Parce que nous sommes dans le domaine de l’économie et de la
politique et que la pensée rationnelle n’y est pas de mise.
Force est de constater qu’avec l’économie, il n’en est rien. Il ne s’agit pas
d’hypothèses qu’on valide soigneusement, il s’agit de dogmes qu’on
applique à des populations entières de malheureux bipèdes qui en subissent
ensuite les effets néfastes.
En réalité, l’économie est une religion avec ses chapelles, ses églises, ses
prêtres et évêques et ses fidèles. La religion dominante est keynésienne ou
d’obédience keynésienne.
Pour vous montrer à quel point la situation actuelle est absurde, imaginez
un entrepreneur allant voir son banquier. Oubliez les milliards, parlons en
millions et supposons que le PIB soit un chiffre d’affaires.
– Oui, oui, bien sûr. J’ai quand même un petit souci avec votre dossier.
En regardant votre historique, je vois que Cigale SA a avec nous un passif
qui a gonflé dans la même période de 82 M€ à 169 M€. Donc votre
endettement a augmenté de 87 M€. Ce qui me chiffonne un peu, voyez-
vous, c’est que pour 87 M€ de prêts supplémentaires que nous vous avons
accordés, vous n’avez réalisé que 55 M€ de chiffre d’affaires
supplémentaires. Hum… Bien sûr, hum hum, j’imagine que votre résultat
net a dû bondir ?
– Mon résultat ? Euh oui, enfin peut-être, je ne sais pas très bien. Ce n’est
pas le plus important, vous savez. Je n’ai pas la politique du tiroir-caisse.
J’investis, moi. Le plus important c’est de rester fort face à ses concurrents.
Et aussi de bien traiter le comité d’entreprise, surtout pas de grève ; vous
savez bien que les Chinois ne nous feront pas de cadeaux…
– Hum… euh, bon, enfin… oui. Mais voyez-vous, compte tenu des
circonstances, pour cette facilité de trésorerie que vous me demandez, je
vais devoir augmenter mes conditions et vous demander 1 % d’intérêt en
plus.
Dans cette affaire, celui qui dormira le moins bien dans les nuits à venir
ne sera pas Madame France. Ce sera plutôt Monsieur Banquetout…
Elles sont remboursées et on n’en parle plus. Dans ce cas, il s’agit des
dettes soutenables, raisonnables, justifiées, d’investissement.
Elles sont répudiées et c’est la faillite (ou « défaut » pour un État, avec
rééchelonnement).
Elles sont dissoutes dans l’inflation. C’est le privilège des États qui
battent monnaie.
La première voie s’est fermée depuis longtemps. Nous verrons qu’il nous
faudrait des taux de croissance dignes de la Chine, de l’Inde ou du Brésil
pour nous sortir d’affaire et nous verrons pourquoi ce n’est hélas pas
possible.
29 http://www.insee.fr/fr/themes/theme.asp?theme=16&sous_theme=3
30 Loi de finance 2012.
31 Éditions Pearson pour l’édition française parue en 2010. This Time is
different – Eight Centuries of Financial Folly, Princeton University Press,
pour les amateurs de version originale.
32 Charles Gave, L’État est mort, vive l’état ! – Pourquoi la faillite étatique
qui s’annonce est une bonne chose, Bourin Éditeur, 2010.
33 J. Mauldin et J. Tepper, Endgame : The end of the debt supercycle and
how it changes everything, Wiley, 2011.
34 Economics need a revolution, Nature n° 4.
6
L’impossible retour à
On doit à Hubbard dans les années 1960 d’avoir théorisé le peak oil, ou
déplétion pétrolière. Son idée : si l’on agrège l’ensemble des puits en
production et des réserves, on voit que les réserves se renouvellent moins
vite que ce qui est tiré des puits. Nous allons donc arriver à une époque où
le pétrole se tarit.
en récolte
Pétrole et gaz découverts avant les chocs 1/60
pétroliers
Pétrole et gaz découverts dans les années 1/30
1970
Pétrole et gaz conventionnels actuels 1/20
Sables pétrolifères 1/5
Énergie photovoltaïque 1/4
Énergie des biocarburants 1/2
Le pétrole est bien en fin de vie, mais il est encore rentable ! Voilà aussi
de quoi relativiser les discours écologiques concernant les bienfaits des
énergies renouvelables. Il y a encore du chemin à parcourir et des
subventions à engloutir pour rendre ces énergies vertes concurrentielles.
Faut-il vous rappeler que, justement, il va y avoir un petit problème pour
semer l’argent public ?
Pour le WTI américain, c’est 95 $, soit un peu moins que le maximum de
2008 (98,50 $), année qui reste encore la plus chère des annales. C’est très
lourd à porter pour les consommateurs. Les Américains ont ainsi dépensé
en carburant 200 Mds$ de plus qu’en 2010.
Un pétrole cher, malgré un ralentissement économique en Occident, voilà
qui n’est pas très prometteur de lendemains qui chantent. Cela sentirait
même la stagflation (stagnation + inflation en jargon économique)…
Avec cette année de pétrole cher, la France a affiché en 2011 une balance
commerciale dans le rouge de 70 Mds€, un record absolu… notamment à
cause du pétrole. Selon les douanes, deux tiers du déficit supplémentaire
constaté entre 2010 et 2011 proviennent principalement des importations
d’hydrocarbures et produits pétroliers et nous ont plombés de 14 Mds€.
La vision cynique serait de conclure que des prix de pétrole élevés, c’est
plus de TIPP (Taxe d’importation sur les produits pétroliers), soit une
manne budgétaire de plus de 14 Mds€ en 2010. La vision sensée serait de
dire qu’il convient d’arrêter l’hémorragie et que la conception de l’État
Vampire (puisqu’il tire profit de l’hémorragie) est particulièrement
malsaine.
J’ai des photos de famille qui datent de la fin des années 1950 avec un
fermier (on ne disait pas encore agriculteur) guidant une charrue tractée par
un cheval dans le pays nantais. Il est facile d’imaginer le progrès que
pouvait amener l’arrivée du premier tracteur, puis de la première
moissonneuse-batteuse dans cette pourtant petite exploitation. Si vous
écoutez les agriculteurs d’aujourd’hui vous égrener les gains de productivité
faits jusque dans les années 1970, vous réalisez ce que cette expression
recouvre. Mais aujourd’hui ? Un nouveau tracteur, un nouveau système
d’arrosage automatique ou d’épandage d’engrais ne se traduira pas par un
bond des rendements agricoles. Les progrès ne sont maintenant plus que
marginaux.
Entre 1900 et 1970, les fruits des branches basses ont tous été cueillis.
Puis l’énergie a commencé à devenir plus chère, puis la population a
commencé à vieillir et la croissance a ralenti dans tous les pays développés.
Ce n’est donc pas un phénomène propre à la France et le Japon survit avec
une croissance nulle depuis maintenant plus de vingt ans. Mais ce qui est
propre à la France, c’est son aveuglement sur ces questions et l’ignorance
des grandes tendances économiques.
Les grands bonds en avant, comme ceux que nous avons connus avec les
Trente Glorieuses, ne sont pas légion dans l’Histoire. Probablement 1495 et
la découverte du Nouveau Monde, puis l’exploitation des énergies fossiles
en commençant par le charbon au xixe, puis le pétrole au xxe et enfin
l’automatisation. Nous n’avons pas de données économiques chiffrées
concernant la découverte du feu ou du fer, mais il semble logique d’avancer
que l’Humanité progresse par bonds et qu’entre chaque bond, c’est plutôt le
calme plat.
Supposons que nous ayons passé le grand sommet, que nous soyons sur
le versant de la descente, vous arrivez à trois conclusions effrayantes : le
recours à l’endettement devient parfaitement inutile, la dette contractée
pèsera de plus en plus lourd, la conquête des parts de marché deviendra de
plus en plus violente : pas de quartier…
Bien entendu, je vous accorde encore que tout cela est politiquement
difficile à vendre et que c’est probablement pour cela que des autruches se
succèdent pour occuper le pouvoir.
Par ailleurs, sans croissance robuste assurée, c’est bien toute l’économie
du crédit qui s’effondre, ce que le lobby bancaire qui subventionne les
gouvernements dispendieux risque de ne pas apprécier du tout. En effet,
pourquoi diable, les entreprises emprunteraient-elles dans un jeu à somme
nulle ? À croissance nulle, les parts de marché et les chiffres d’affaires ne
progressent plus dans leur ensemble. Pour chaque gagnant, il y a un
perdant.
« Les marchés verront d’un mauvais œil un pays qui ne voterait pas la
39
règle d’or. »
Parce que personne n’a le courage de prendre le taureau par les cornes.
Les élus infantilisent leurs électeurs et se dérobent devant la vraie question :
comment faire avec ce que nous avons ? L’effort à fournir demande un
gouvernement légitimement élu avec des propositions pour sabrer plus de
12,7 % dans les dépenses sans recourir à l’impôt. D’où sort ce chiffre ?
Vous avez vu qu’il nous fallait durant dix ans 9,6 % d’économie rapportées
au PIB. Comme les ponctions de l’État représentent en gros la moitié du
PIB, vous doublez la dose et vous arrivez à 19,2 %. Puis vous appliquez la
règle Attali des deux tiers/un tiers et vous arrivez royalement à 12,7 %,
d’économie. Aucun gouvernement n’a été légitimement élu sur un tel effort.
Tout ceci place la compétitivité sur des échelles mais ne nous dit toujours
pas ce que c’est.
Les États sont comme des porte-avions ou des pétroliers. Il leur faut
beaucoup de temps pour s’arrêter ou même tout simplement changer de
direction. Il est très facile de voir que la trajectoire emmène un bâtiment
droit au naufrage, mais en raison de son inertie, il va continuer sur son erre,
comme disent les marins, dans la mauvaise direction. Même lorsque l’ordre
« machine arrière toute » a été donné, le bateau va poursuivre sa route.
C’est seulement sa vitesse qui va être modifiée.
Dans ces trois premiers critères, vous voyez le mot fiscal. Effectivement,
pour payer ses dettes et rembourser, l’État ne peut prendre que sur ses
recettes : ce qu’il nous prend comme impôts en tant que citoyen et ce qu’il
prélève sur les entreprises.
Première force d’inertie : le ratio dette sur
recette fiscale
La mesure de la dette par rapport au PIB, telle qu’elle est couramment
présentée dans les medias ou telle qu’elle est mentionnée par le célèbre
critère de Maastricht fausse les idées. De même que le chiffre d’affaires
d’une entreprise n’a rien à voir avec l’argent dont elle peut disposer, le PIB
ne correspond aucunement à l’argent dont l’État peut disposer.
Notre ratio dette sur recette fiscale est donc de 6,7. Si l’on y inclut la
dette cachée, le « hors bilan » qu’a eu l’honnêteté de mentionner François
Fillon, ce ratio est probablement de 25. Comme l’État doit au minimum
assurer ses fonctions régaliennes (police, justice, armée), vous voyez qu’au
moins une génération est réduite en esclavage : la majeure partie de son
travail devrait un jour payer la dette. Le travail sans rémunération, c’est
bien la définition de l’esclavage, non ?
Mais ce seul ratio, quoique plus utile que le ratio dette / PIB utilisé par le
fameux critère de Maastricht, n’est pas une mesure suffisante de notre
surendettement.
Rouler sa dette est exquis lorsque les taux d’intérêt baissent, mais il ne
vous a pas échappé que le butoir avait été atteint, les taux d’intérêt sont en
dessous de l’inflation (2,7 % à fin 2011 en Europe) ; le balancier va repartir
de l’autre côté et les taux augmentent déjà pour les pays dits faibles.
Si vous raisonnez à l’échelle d’un individu, vous ressentez toute l’absurdité de la situation. Vous
avez pris l’habitude de dépenser 25 % de plus que ce que vous gagnez.
Vous avez contracté des crédits dont les intérêts absorbent 16,5 % de vos revenus (c’est la charge
de la dette). Vos revenus baissent. Vos dépenses augmentent. Vous contractez un nouveau crédit.
Avec ce nouveau crédit dont les échéances s’ajoutent aux autres, au lieu de dépenser 25 % de plus
que ce que vous pouvez, vous dépensez maintenant 29,4 % de plus…
La pression fiscale en France est déjà l’une des plus élevées d’Europe.
46
Les dépenses publiques de notre pays représentent 56 % du PIB . Ces
dépenses publiques sont financées par les impôts. La pression fiscale est
donc de 56 %, un triste record mondial.
47
Selon l’étude de l’Institut économique Molinari et d’Ernst & Young ,
Dans six pays, plus de la moitié des revenus liés au travail sont prélevés
au titre des impôts et taxes retenus dans le périmètre de notre étude
(Belgique, Hongrie, France, Autriche, Allemagne, Suède).
Cela signifie que le salarié lambda de ces pays n’a pas de maîtrise
directe sur plus de la moitié des fruits de son travail, son influence sur la
prise de décision étant au mieux indirecte. »
Dit autrement, la machine État est devenue tellement grande que plus de
la moitié de notre énergie passe à nourrir le dinosaure. L’influence de
chaque individu dans l’économie privée est devenue marginale.
Pour classer la pression fiscale qui s’exerce sur les salariés, l’Institut
Molinari a procédé au calcul du jour de libération fiscale : jour de l’année
civile où chacun commence à travailler « pour son compte ». Attention, il
ne s’agit là que des revenus du travail, bien sûr.
Le constat est sans appel. En France, vous ne travaillez pour vous qu’à
partir du 26 juillet. Nous sommes classés 25e sur 27 pays selon ce critère de
date de libération fiscale.
Pour éviter que les moutons n’aillent voir si l’herbe est plus verte
ailleurs, la France vient même de se doter d’une exit tax, premier pas vers
l’enclos fiscal, préalable à la tonte. Si vous voulez partir, il faudra payer
votre rançon ! Cette taxe (19 % d’impôts + 13,5 % de prélèvements
sociaux) a été instaurée en 2011 par la loi de finance rectificative. Et elle
envisage également de taxer les expatriés sur le différentiel d’impôt entre la
France et leur pays d’accueil. Ces premiers pas vers le totalitarisme est la
marque d’un État déjà aux abois.
fait retoquer car jugée incompatible avec la liberté d’établissement prévue par le droit européen.
Nous sommes déjà à ce niveau.
La France a connu ce régime après la Première Guerre mondiale, puis de 1939 à 1984 avec une
courte interruption en 1967. Bien entendu, ces mesures liberticides sont prises dans l’intérêt du
bien public : c’est pour lutter contre la spéculation, la fuite des capitaux, etc. Nous allons
probablement être à nouveau soumis à de telles mesures dès que la situation va s’aggraver.
Le débat de l’été 2011 sur la taxe des revenus des riches a ranimé la
polémique. Si le pauvre est statistiquement bien identifié, le riche nage dans
le flou. Son opulence est variable.
Selon la chaîne télévisée TF1, voici ce que donne l’idée d’une taxe de
3 % sur les revenus des présumés riches :
Désormais, la seule autre façon de rembourser les dettes serait que l’État
augmente ses recettes fiscales grâce à la croissance.
Année après année, les budgets ont été élaborés comme si le baby-boom
et les gains de productivité de l’automatisation puis de l’informatisation
étaient éternellement garantis. Ce n’est pas le cas. La population vieillit et
les gains de productivité sont désormais devenus marginaux.
Jamais un pays n’est devenu riche en levant des impôts. Mais comme
l’absence de croissance ne permet pas d’augmenter les recettes, c’est la
seule voie possible. Hélas, comme nous partons d’une pression fiscale
record, l’effort deviendra vite insoutenable.
Ce que les autorités n’ont pas compris dans la gestion de la crise, c’est
que la dette est le problème. Elles ont aggravé la crise en pensant que la
dette était la solution.
Nous avons déjà vu ce point lorsque nous avons ausculté notre zombie
France : plus de dette implique moins de croissance.
Une politique de taux faible a, par ailleurs, rendu le déficit facile puisque
l’emprunt ne coûtait pas cher.
Imaginez un ratio dette / PIB aux environ de 80 % (la réalité est pire,
49
elle est de 85,8 % pour 2011 ).
Un ratio déficit fiscal / PIB (ce que l’on nomme couramment « le
déficit ») de 3 % (ce qui est devenu inaccessible, on parle seulement de
réduire le chiffre actuel qui est de 5,2 %).
Une croissance du PIB de 2 % (ce qui est devenu un Graal, on sait que
la croissance de la zone euro sera quasi nulle en 2012 et l’OCDE
prévoit une récession de 0,2 % pour la France).
Nous partons donc d’un PIB de 100 qui devient 102 puisque la
croissance vaut 2.
La dette (qui valait 80) passe à 83 puisque le déficit vaut 3.
Votre ratio dette sur PIB devient 83 / 102 = 0,8137. Ou encore 81,37 %
comme vous l’avez appris sur les bancs de l’école primaire. Ce ratio
d’endettement a encore augmenté puisque nous partions de 80 % !
« Les intérêts de la dette ont pour leur part fortement augmenté, de 9,5 %
sur l’année. En cause, la hausse de la dette, mais aussi celle de l’inflation.
Une partie des emprunts étant indexée sur la progression des prix, cela a
provoqué une augmentation des intérêts à verser aux créanciers. »50
Nos grands argentiers ont émis de la dette indexée sur l’inflation. Celle-ci
risque bien de devenir totalement incontrôlable. Le renchérissement du
pétrole et les créations monétaires américaines et européennes vont faire
redécoller l’inflation.
La perte de notre triple A ne s’est d’ailleurs pas traduite par une montée
brutale des rendements obligataires de la France, ils avaient déjà commencé
à monter auparavant et nous nous détachons progressivement de
l’Allemagne depuis le milieu de l’année 2011.
43 http://www.performance-publique.budget.gouv.fr/ressources-
documentaires/documentation-budgetaire/la-situation-mensuelle-du-budget-
de-letat.html
44 http://www.wansquare.com/fr/article/exclusif/8361:quelle-contribution-
de-la-france-au-fesf.html
45 France, La faillite ? Les scénarios de la crise de la dette, Eyrolles
éditions d’Organisation, 2010.
46 Valérie Pécresse, interviewée sur France Bleue le 17 février 2012.
47 James Rogers et Cécile Philippe, Fardeau fiscal de l’employé lambda au
sein de l’UE, juin 2011.
48 http://www.franceinfo.fr/france-politique-2011-09-28-la-charge-de-la-
dette-devient-le-premier-poste-budgetaire-de-la-565089-9-10.html
49 http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2012/03/30/20002-
20120330ARTFIG00359-france-la-dette-culmine-a-17173-milliards-d-
euros.php
50 http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2012/03/30/20002-
20120330ARTFIG00359-france-la-dette-culmine-a-17173-milliards-d-
euros.php
8
C’est à la fois bien plus simple et bien plus terrible. L’État se disloque.
Le défaut est un processus relativement long. Un peu d’argent vous manque
et tout déraille. Tout va probablement commencer par un placement
d’emprunt sur le marché qui va mal se passer. Souvenez-vous que nous
devons emprunter 800 M€ tous les jours, que nous sommes en concurrence
avec du beau monde et que les prêteurs ont le choix puisque 9 Mds€ leur
sont tous les jours proposés. Et je ne vous parle même pas des émissions en
dollars.
Lorsque vous entendez que les taux sur ces pays atteignent 10 ou 15 %,
n’imaginez pas une minute qu’ils empruntent vraiment dans ces conditions.
Ils n’empruntent plus à ce tarif, car ils n’en ont pas les moyens. En réalité,
le marché est gelé. Ces chiffres sont ceux auxquels s’échangent leurs
emprunts souverains sur le marché secondaire. C’est complètement
différent.
Mais non, comme nous l’avons vu, l’État emprunte soit pour rembourser
le principal d’une ancienne obligation venue à maturité (il « roule sa
dette »), soit pour ses dépenses courantes.
Toute famille au sens large compte ses agents de l’État. La rue se remplit
de mécontents. Les salariés du secteur privé viennent soutenir leurs frères,
sœurs, cousins, parents qui ne sont pas payés depuis plusieurs mois (un
soutien d’autant plus empressé qu’ils commencent à en avoir assez de leur
avancer de l’argent).
Toute cette agitation sociale fera mauvais effet, et les rendements des
vieilles obligations vont monter. Au-delà de 7 %, le marché obligataire sera
fermé. Ce sera l’appel à la Troïka, le trio Fonds monétaire international,
Banque centrale européenne et Commission européenne.
Pour le premier cas, nous sommes maîtres de la manœuvre mais pour les
deux autres, la décision ne nous appartiendra pas vraiment. Ce sera
l’Allemagne et les rescapés de l’euro qui choisiront de nous garder ou de
nous mettre à la porte avec les canards boiteux.
On peut même envisager, comme nous l’avons vu, que l’Allemagne nous
simplifie l’accès à cette voie. Elle décide magnanimement de ne pas nous
imposer quoi que ce soit et revient au mark en nous laissant notre libre
arbitre.
Le premier cas de figure peut aller très vite, les deux seconds peuvent
prendre des mois et deux ou trois référendums que, comme d’habitude, on
ignorera s’il ne sort pas du scrutin la réponse attendue. Le troisième
scénario paraît, à ce stade de la crise, le plus probable.
dévalorisation de la parité
eurodollar
Activité -20 % la première Très sévère récession Très sévère
économique année la première année récession la
-10 à -15 % première année
-10 à -15 %
Salaire réel Baisse de 30 % Baisse de 20 % Baisse de 20 %
moyen
Réquisition Oui et plus de Très probable et Probable pour une
de votre 40 % de décote sur 20 % de décote sur durée déterminée
épargne l’obligataire l’obligataire
(assurance-vie) (assurance-vie)
Hausse
Oui. Probablement Oui. Probablement Oui, mais plus
immédiate
de 5 à 10 % si on de l’ordre de 5 % modérée
de la TVA se réfère à
l’expérience du
Royaume-Uni
Scénario Sortie honteuse et L’euro sans L’arrimage à
excommunication l’Allemagne l’Allemagne et la
de la zone euro vertu imposée à
la schlague
Mise en place Oui Peut-être Peut-être
de contrôle
des changes
Fonction- Panique et Erratique Quasi normal pour
nement des fermeture les petits
banques Gel de toutes les établissements peu
opérations de chargés en dette
change publique
Évolution des Suspension de la -30 % et krach sur -10 % à -20 %
marchés
cotation puis baisse les actions bancaires Krach sélectif sur
actions de 30 % pour les et les assureurs les actions
grandes valeurs
bancaires et les
industrielles. assureurs
Actions bancaires
ravalées au stade
de « penny stocks »
Inflation Plus de 20 % 10 à 15 % 10 %
prévi-sible
Acquis Retraites laminées Remise en cause en Alignement
sociaux par l’inflation raison du chômage immédiat sur
de masse qui l’Allemagne,
dépasserait 20 % notamment pour la
retraite (64 ans)
Système de Remise en cause de Alignement sur le Dépenses ultra
santé la CMU moins-disant encadrées
Prises en charge Accélération des
limitées aux cas déremboursements
graves et coûteux Prises en charge
Que vous faut-il pour survivre à une période trouble comme celle qui va
arriver ? De l’argent, de la nourriture, des produits d’hygiène, du carburant
et des deux-roues, une trousse médicale d’urgence et votre stock de
médicaments, quelques produits susceptibles de s’avérer indispensables. De
quoi tenir un à trois mois, c’est l’idéal.
Enfin, ayez de l’or physique sous forme de pièces, chez vous bien sûr et
hors circuit bancaire. En Grèce en 2010, lorsque l’or cotait 1 100 $ l’once,
au fixing de Londres, il se négociait l’équivalent de 1 700 $ l’once.
57
Le Potager anti-crise . C’est le titre du livre de Rodolphe Grosléziat
dont le sous-titre est « Manger sain en dépensant peu ». Ce pionnier picard
s’est astreint à consigner dépenses et production de son potager de
3 000 m2. Pour 175 € de dépenses annuelles et 30 minutes de travail
quotidien, il affirme pouvoir nourrir cinq personnes et réaliser 3 500 €
d’économies.
De tout temps, en période troublée, ceux qui avaient de quoi faire pousser
quelques denrées s’en sont toujours mieux tirés que les autres. Les jardins
ouvriers en France ont refleuri lors de la crise de 1929.
Cultivez l’amitié
C’est évident, mais en cas de crise ceux qui ont de bons amis, se
montrent sociables et serviables souffrent moins que les ours mal léchés.
Cultivez donc l’amitié. En plus, il vous faudra des petites mains pour
éplucher vos légumes…
Vous avez donc décidé de faire front, de ne pas prendre vos jambes à
votre cou pour émigrer dans un paradis fiscal. Au fond, vous êtes réaliste,
car il ne faut pas rêver, les paradis ne sont pas de ce monde.
Faire face, c’est bien, il faut des héros et les époques troublées sont riches
d’actes héroïques. On a sa dignité tout de même et ce n’est pas une raison
pour vous faire plumer par les autruches, ces autorités qui nous gouvernent
la tête dans le sable et n’ont jamais vu venir la crise, ni su en évaluer les
conséquences. Gouverner c’est prévoir et on ne vous a pas encore privé de
la liberté de gouverner vos propres finances.
Plus précisément, voici les deux points sur lesquels vous devez vous
pencher :
Mon but est bien évidemment de vous donner des pistes pour traverser au
mieux la période trouble.
Pour votre information « En France, selon le code civil, les enfants sont
tenus à une obligation alimentaire envers leurs parents “qui sont dans le
besoin” ainsi qu’envers leurs autres ascendants. Cette obligation n’est
donc pas limitée par le degré de parenté : le cas échéant, les petits-enfants
doivent aider leurs grands-parents, et les arrière-petits-enfants leurs arrière-
grands-parents. L’obligation alimentaire s’applique également aux gendres
et aux brus à l’égard de leur belle-mère et de leur beau-père. (…) Bien que
le champ d’application de l’obligation alimentaire s’étende en principe à
toutes les prestations de l’aide sociale, il s’est réduit au fil du temps avec la
mise en place de prestations à la personne, de sorte qu’il se limite
désormais essentiellement à la prise en charge des frais d’hébergement
dans les établissements pour les personnes âgées. »58
La France va faire faillite mais beaucoup d’autres États sont dans une
grave situation d’endettement, les États-Unis en tête. Pour tenter de gagner
en compétitivité, ils vont recourir à la planche à billets afin de dévaloriser
leurs monnaies. Ce sera, un « concours de laideur monétaire », selon
l’expression d’un gérant suisse. Ne vous trouvez pas dans un jeu que vous
ne maîtrisez pas.
Toutes les devises fiduciaires des pays endettés sombrent. Entre deux
bâtiments qui coulent, il est très difficile de distinguer celui qui va sombrer
le plus vite. L’investissement sur le forex et la spéculation sur les devises
sont réservés aux investisseurs très avertis.
Le cash, ce sont des liquidités dans la monnaie dans laquelle vous réglez
vos dépenses courantes. La majeure partie de votre position liquide doit se
trouver dans cette monnaie.
Pays Banque
France BNP Paribas
* hors caisses locales et régionales Crédit Agricole S.A.*
** franco-belge en cours de démantèlement Société Générale
Dexia**
BPCE
Pays Banque
États-Unis Bank of America
Bank of New York Mellon
Citigroup
Goldman Sachs
JP Morgan Chase
Morgan Stanley
Wells Faro
State Street
Royaume-Uni Barclays
HSBC
Lloyds Banking Group
Royal Bank of Scotland
Allemagne Commerzbank
Deutsche Bank
Suisse Crédit Suisse
UBS
Japon Mitsubishi UFJ
Mizuho
Sumitomo Mitsu
Chine Bank of China
Pays-Bas ING
Suède Nordea
Espagne Santander
Italie Unicredit
Vous me direz « autant être dans une de ces banques trop grosses pour
disparaître pour laquelle le contribuable devra remettre inlassablement au
pot plutôt qu’une plus petite banque qu’on laissera faire faillite dans
l’indifférence ». C’est vrai dans la mesure où l’euro et les pays critiques
sont placés sous tente à oxygène et le resteront éventuellement dans un
contexte de faillite ordonnée, mais ce ne sera plus vrai en cas de défaut
brutal. Vous n’aurez probablement plus accès à vos comptes et peut-être à
votre coffre. Souvenez-vous de ces photos de file indienne devant les
agences de la Royal Bank of Scotland en 2008. Vous n’aimeriez pas vous
retrouver dans ce cas de figure.
Ce que nous ne savons pas, c’est l’importance des “credit default swaps”
détenus par les banques en couverture de dettes souveraines et contre les
banques européennes, nous ne connaissons pas plus le nombre de CDS
détenus par les banques britanniques, comme nous ne savons avec précision
quelle est l’exposition des banques anglaises aux risques de la dette
souveraine irlandaise. » Octobre 2011, Robert Shapiro, conseiller du FMI
parlant de la crise de la dette souveraine.
Dans ces établissements, vous pouvez espérer que la direction traque les
Kerviel et ait échappé à la folie des produits structurés incompréhensibles.
En général, prêter à des gens qu’on connaît limite les dégâts.
Bien sûr, votre banque ne vous facilitera pas la tâche. Elles sont, comme
vous le savez, obligées de conserver un certain rapport entre les dépôts
(votre argent) et ce qu’elles prêtent (leurs engagements). Lorsque vous
retirez vos dépôts, elles doivent baisser leurs engagements. Quand il faut
matérialiser des pertes, parce qu’il faut qu’elles vendent quelque chose
tandis que les marchés baissent, elles détestent ça… Mettez-vous à leur
place, cela consomme des fonds propres (l’argent que les banques
possèdent vraiment). Bref, armez-vous de patience pour transférer même un
simple livret. Mais encore une fois, la sécurité est dans la diversification !
Très rares sont les investisseurs activistes qui réussissent. Le mieux est
d’avoir une grande idée claire à long terme de la situation, de s’y tenir et de
faire le moins de mouvements possibles. Les grandes tendances sont assez
faciles à discerner, mais faute de timing, ou noyé par la désinformation
ambiante, on a tendance à oublier le tableau général, à prendre peur en
raison de mouvements violents des marchés et à avoir de mauvaises
réactions à chaud.
Du coup, on achète trop haut, on vend trop bas et on fait le bonheur des
intermédiaires tout en s’appauvrissant. Rappelez-vous que les brasseurs
d’argent ne vivent pas de plus-values ou de l’argent qu’ils vous font gagner,
ils vivent de menues rapines, des frais qu’ils vous prélèvent à chaque aller
et retour, à chaque mouvement.
Ce qu’il vous faut, c’est une grande idée, une ligne claire à laquelle vous
vous tenez sans vous laisser désemparer ou dérouter par de menus accidents
de parcours, bref une vraie stratégie.
La grande idée
On n’a jamais, jamais, jamais, jamais, jamais, jamais, jamais, jamais,
(j’aurai voulu aligner une page de « jamais », mais mon éditeur n’était pas
d’accord) vu dans l’Histoire une création monétaire fondée sur aucune
richesse rester impunie. La sanction est l’inflation, voire l’hyperinflation.
Dans notre cas, l’heure de la punition n’est pas encore venue, mais elle
est simplement retardée. L’inflation sera probablement importée au travers
des produits et matières premières dont nous ne pouvons pas nous passer.
Nos fournisseurs ajusteront leur prix et ne se laisseront pas payer en
monnaie de singe.
Appelez le 01 42 79 50 39
Cette affiche vous prouve bien que l’État a choisi son camp, celui des
locataires, ce sont eux qui sont « face aux impayés », et non vous le
propriétaire et ce sont eux qui seront aidés à être maintenus dans les lieux.
Enfin, Bercy va sortir la matraque fiscale puisque vous ferez partie des
riches et que l’immobilier est difficilement transportable.
Dans ces conditions, il vous faudra tenir vos biens « à bout de bras » en
attendant des jours meilleurs. Croyez-moi, tenir de la pierre à bout de bras,
c’est pénible. On ne se nourrit pas de plus-values latentes (car il y en aura
lorsque l’inflation montera) et il est difficile de vendre un bien pierre par
pierre ou brique à brique pour subsister.
L’autre immobilier
Enfin, il y a autre chose dans une vie d’investisseur que l’immobilier
d’habitation. L’immobilier de boutique et les parkings offrent encore des
rendements acceptables.
Certes, n’attendez pas les rendements des années passées, la crise va faire
son effet, les consommateurs moins consommer et plus épargner. Mais avec
des parts de SCPI, vous aurez quelque chose d’autre que de l’immobilier
acheté en direct et des titres adossés à des biens tangibles.
2- Souvent le fisc varie et bien fol qui s’y fie ! Prenez éventuellement les avantages immédiats.
Mais sachez que pour les avantages à venir, l’État sera le plus souvent renégat. Des exemples
récents ?
les avantages sur la fiscalité et les transmissions dans le cadre des contrats d’assurance-vie
63
remis en cause . Jusqu’à présent, les réformes n’ont jamais été rétroactives, mais ne dit-
on pas que nécessité fait loi… ;
64
le changement du régime d’imposition à la plus-value sur l’immobilier fait fondre les
65
avantages du Scellier comme neige au soleil.
Le foncier forestier
La forêt résiste à l’inflation. Les rendements des investissements
forestiers ont progressé au rythme de l’inflation augmentée de 3,3 % depuis
cent ans, selon Greenwood Management, une société danoise
d’investissement forestier pour le compte de fonds de pension et de
particuliers souhaitant investir en direct.
Les arbres n’ont pas de « sentiment de marché », ils grandissent au fil des
saisons. Les sous-produits du bois trouvent des débouchés dans des filières
très différentes : énergie, immobilier et ameublement, textile (la cellulose
permet de fabriquer la viscose) et bien sûr paperasserie administrative. La
récolte n’est pas obligatoire, elle peut attendre tranquillement sur pied, sans
frais de stockage, si les prix sont trop bas. On n’est pas obligé de prendre
ses pertes, simplement, on va différer son rendement escompté.
Le risque 0 n’existe pas. Si vous êtes très riche, vous multipliez les
massifs dans des régions différentes. Si vous êtes moins riche, vous vous
orientez vers des parts de groupements de foncier forestier situés dans des
endroits différents et vous alternez feuillus et résineux. Et si nous recevons
un missile chinois sur la tête parce que le gouvernement français est
mauvais payeur et que tous les arbres de la France sont morts, vous aurez
probablement d’autres soucis que la disparition (provisoire) de votre
rendement forestier.
Sans rentrer dans tous les détails qui n’intéressent que les investisseurs en
direct, sachez que la fiscalité est avantageuse :
Ne vous acharnez pas à garder votre contrat que s’il est très avantageux
pour vos héritiers. Dans ce cas, vous pouvez profiter dès maintenant du
système d’avance ou contracter un emprunt du type « prêt lombard » ou
prêt in fine pour aller chercher du rendement ailleurs.
Oui, les actions c’est risqué, mais il existe malgré tout quelques fonds
actions éligibles à l’assurance-vie qui sont bien gérés. De plus, vous cédez
un risque majeur – 100 % obligations souveraines et donc non-
diversification absolue – contre un risque moindre – panachage de votre
exposition aux actions et aux obligations. Enfin, vous échapperez à la
menace de confiscation-réquisition de votre épargne placée en obligataire
pour sauver l’État.
Ce ne sont pas des bureaucrates qui gèrent des deniers publics ou privés
sur lesquels ils ne seront pas sanctionnés si les choses tournent mal. La
gestion des risques est de bonne qualité.
Les pays émergents asiatiques sont définis comme ceux qui sont
considérés, au moment de l’investissement, comme des pays
industriellement en voie de développement par le Fonds monétaire
international, la Banque mondiale, l’International Finance Corporation
(IFC) ou l’une des grandes banques d’investissement. Ces pays sont, de
façon non exhaustive, les suivants : Hong Kong, Singapour, Philippines,
Thaïlande, Corée du Sud, Taiwan, Indonésie, Inde, Chine, Malaisie.
Enfin, oui, les fonds demandent des frais d’entrée et de sortie. Vous
devez les négocier, souvent vous obtiendrez même l’exonération. Ils ont
aussi des frais de gestion (décomptés le plus souvent à chaque valeur
liquidative) donc indolores. Mais souvenez-vous qu’on n’a rien sans rien.
63 « Il faut bien dire que ces avantages fiscaux ont été progressivement
réduits. Les gouvernements successifs ont toujours cherché à taxer
davantage les immenses encours d’assurance-vie inscrits au bilan des
assureurs… » http://www.info-assurance-vie.fr
64 30 ans de détention, au lieu de 15 ans de détention, pour être exempté de
plus-value depuis le 1er février 2012.
65 Plafonnement du prix au m2 pour bénéficier de l’avantage fiscal depuis
le 1er janvier 2012 avec cependant un décret datant du 5 mars 2012.
66 Reinhart et Rogoff, Cette fois c’est différent, Huit siècles de folie
financière, Pearson, 2010.
11
Sur les marchés financiers, la plupart des gérants de fonds font moins
bien que leur indice de référence.
Pour gérer de façon avisée, vous devez donc avoir deux priorités :
être sur les bons secteurs qui profiteront d’une tendance longue que
vous avez soigneusement identifiée et ne pas vous soucier des chaos de
court terme ;
connaître et suivre le rendement réel de chacun de vos placements. Ce
que j’appelle le rendement réel est votre retour sur investissement
moins l’inflation. Par exemple, si votre contrat d’assurance-vie vous
rapporte 2,5 %, que l’inflation est de 2,7 %, votre rendement réel avant
prélèvement est négatif de 0,2 %.
Chaque investisseur a ses dadas, ses secteurs et métiers préférés. Les uns,
comme Warren Buffett, vont aimer le secteur de l’assurance, de la
réassurance ou Coca-Cola. D’autres seront fondus de nouvelles
technologies, d’autres encore ne jureront que par les matières premières,
comme Jim Rogers. Certains, comme Benjamin Graham, moulinent les
chiffres pour débusquer de la valeur cachée.
Cependant, toutes les études menées sur la gestion active de portefeuille
montrent deux choses :
Les autorités qui nous gouvernent (ou plutôt font semblant puisque
gouverner c’est prévoir et que jusque-là, on ne peut pas dire qu’elles
aient brillé par leur clairvoyance) ont décidé d’imprimer de la
monnaie. Tôt ou tard nous aurons une forte inflation, voire de
l’hyperinflation. Il nous faut donc des investissements, même
boursiers, adossés à des biens tangibles : un outil industriel, de solides
brevets, du savoir-faire incontestable, des actifs miniers… Vous devez
avoir en portefeuille des entreprises qui seront capables d’imposer
leurs prix lorsque l’inflation va grimper. C’est ce que les Anglo-
Saxons appellent le pricing power, ce que je préfère appeler le
monopole de l’excellence.
La richesse change de camp. L’Occident s’appauvrit. Les pays
émergents s’enrichissent. Ils seront probablement frappés par notre
crise du crédit souverain subprime. Ils n’ont pas eu le temps de
totalement modifier leur appareil industriel qui doit maintenant se
tourner vers leurs propres consommateurs plutôt que vers leurs anciens
gros clients ruinés. Mais la démographie leur appartient, ils ont le
pouvoir de la jeunesse. Il nous faut donc des investissements tournés
vers ces pays émergents, les futurs riches, des entreprises dont le
chiffre d’affaires et les marges viennent de ces régions. Et pour ne pas
être déstabilisés par les turbulences de la crise, ils doivent de
préférence assouvir les besoins essentiels.
La démographie exerce une pression forte sur les matières premières.
Il y a notamment 7 milliards d’individus à nourrir alors que les
accidents climatiques se multiplient, que les surfaces cultivables se
réduisent au profit de l’urbanisation.
Par le passé, j’étais une adepte des trackers, ces fonds indiciels qui se
contentent de répliquer un indice. Par exemple le tracker Agrobusiness de
BNP Paribas est bien construit et vous permet d’acquérir en une ligne :
Bunge, Potash, Agco, Deere & Co, CF Industries, K+S, Yara, etc.
Malheureusement, si BNP Paribas fait faillite, il se volatilisera… C’est un
risque à ne pas perdre de vue. Donc, si vous prenez des trackers, vous
devrez être réactif. Le cas des fonds est différent : la société de gestion
possède réellement les titres. Préférez plutôt des sociétés de gestion hors de
France.
Passez au nominatif pur dès que vous en avez la possibilité, par exemple
avec Air Liquide. Lorsque vous êtes enregistré de cette façon – et non pas
« au porteur » qui est le mode par défaut – vous supprimez le risque de
contrepartie de la banque ou du courtier : c’est l’entreprise qui vous
enregistre comme étant actionnaire. Elle connaît votre identité, sait
comment vous joindre. Si votre banque ou votre courtier fait faillite,
l’entreprise sait que c’est vous qui êtes l’actionnaire. Bien sûr, ne prenez
cette disposition que si vous comptez rester actionnaire pour quelques
années.
Dernier volet de votre organisation : l’or. Nous avons parlé du rôle de l’or
dans cette crise lorsque nous avons parlé de la collusion entre monde
politique et monde financier (chapitre 3, pour les butineurs). Voyons
maintenant l’or en tant que placement anticrise pour stocker votre cash à
horizon deux ou trois ans.
Mais pour profiter de l’or en tant que flic des monnaies, il vous en faudra
plus.
Je vais vous livrer le secret de l’or ; il est extrêmement simple, mais peu
de gens le comprennent vraiment. L’or monte lorsque les taux d’intérêt réels
– c’est-à-dire les taux d’intérêt diminués de la hausse des prix –
Entre deux monnaies qui coulent (le dollar et l’euro), difficile de savoir
laquelle sombre le plus vite. Lorsque 1 € achète 1,32 $ comme en
mars 2012, cela nous donne une once à environ 6 100 € !
Cette fois encore, pour calmer le jeu, il suffirait que les banques centrales
placent leurs taux directeurs au-dessus de l’inflation. Seulement c’est
impossible : si les taux remontent, les États se retrouvent en faillite.
Pourtant, bien que les Français soient parmi les plus gros détenteurs d’or
privés du monde, le marché national est resté longtemps atone, en raison de
la limitation du montant des achats en espèces, de la fin de l’anonymat des
transactions et de l’absence d’acteurs dynamiques et de diversité des
produits.
Ces pièces sont conservées dans des pochettes scellées sur lesquelles
figurent toutes leurs données relatives (date et valeur d’achat et, si le client
demande à recevoir sa pièce, le cours au jour de sa sortie du coffre) ainsi
que celles du déposant. De sorte que si vous voulez négocier ces pièces
ailleurs, vous aurez en main la garantie de la qualité et la preuve que la taxe
sur les plus-values a été acquittée. Ce qui ne serait pas possible si ces pièces
étaient livrées en vrac, car elles ne seraient pas identifiables
individuellement (contrairement à un lingot, qui porte un numéro). La
traçabilité est donc totale. Un client qui a désiré recevoir ses pièces chez lui
peut, à tout moment, les réintroduire dans le système Aucoffre dans la
mesure où il a conservé leur emballage. La moitié des pièces sont
conservées en dehors de l’Union européenne, l’autre moitié en France.
La fabrication
Plus une pièce est petite, plus le coût de fabrication rentre en compte, ce
qui se traduit alors par une prime plus importante. Ainsi, les napoléons 10 F
ont une prime plus élevée que les 20 F, plus gros.
La spéculation
Dans une période durant laquelle les pièces se vendent plus qu’elles ne
s’achètent, la prime sera nulle ou légèrement négative. En revanche,
lorsqu’il y a une forte demande, qui se traduit souvent par un emballement
spéculatif, la prime grimpe en flèche.
La conservation
L’emplacement géographique
Les pièces d’or ne sont pas recherchées de la même manière dans tous les
pays. En France, les napoléons sont plus recherchés que les pandas, pièces
chinoises. Aux États-Unis ou ailleurs, ce sont plutôt les eagles ou les
krugerrands d’Afrique du Sud qui ont la faveur des investisseurs. En
période de crise, une pièce locale verra sa prime flamber, alors que celle des
pièces des pays étrangers ne bougera pas. Les spécialistes conseillent de
respecter trois règles :
Par exemple, les liberty 20$ ont une prime basse de 20 %, mais leur
prime la plus haute dépasse facilement 100 % : le différentiel est donc
énorme.
Pour résumer :
Enfin, n’oubliez pas que les actions sont dans un grand marché baissier.
N’achetez que dans les creux comme en début 2009 ou durant l’été 2011.
La règle d’Einstein
Inversement avec 10 % d’inflation, votre capital est divisé par deux en 7
ans et 4 mois.
C’est une approximation, mais assez fine (en pratique, vous pouvez aussi
utiliser 72 quand le rendement ou l’inflation deviennent supérieurs à 5 %).
Voilà, vous êtes paré pour le défaut de la France, le premier depuis 1812.
Vous pourrez raconter ces moments historiques à votre descendance avec la
nonchalance des héros qui ont su surmonter le pire avec brio et sang-froid.
Vous direz : « à chaque fois que les banques centrales créaient de l’argent
à partir de rien, j’achetais un peu d’or. Ensuite, j’ai su me débrouiller durant
une période de chaos qui a pris par surprise la plupart de mes concitoyens ;
de toute façon, on est toujours riche des choses dont on sait se passer ; mes
fraises étaient excellentes et je n’ai jamais mangé d’aussi bons petits pois
que l’année de la faillite de la France. Pendant les grandes grèves de 2013,
je circulais très bien à vélo, c’est de là que me viennent mes mollets d’acier.
Puis, lorsque tout est à peu près rentré dans l’ordre, il me restait assez de
patrimoine (et d’or) pour rebondir. C’est fou ce qu’on pouvait acheter
comme immobilier avec quelques napoléons… »
Toutefois, vous devez savoir que l’État providence n’a rien provisionné
pour les retraites de ses fonctionnaires. C’est normal, nous vivons dans un
système de répartition régi par le principe selon lequel ceux qui sont en
activité payent pour ceux qui sont à la retraite. Manque de chance, l’État est
soumis à un double squeeze : il faut diminuer le nombre de fonctionnaires –
ce qui fait moins de cotisants – et payer les retraites de ceux qui vivent de
plus en plus longtemps. Pour boucher les trous, la République procède à la
petite semaine en piochant dans ses rentrées fiscales ou dans les caisses du
secteur privé qui ne sont pas à sec.
« Mais nous pourrions être sauvés par nos camarades européens, pensez-
vous, ils ne nous laisseront pas tomber ? »
Mais nous avons une différence essentielle : l’Espagne s’est lancée dans
des réformes en profondeur pour redresser ses finances publiques. Elle est
victime de sa thérapie de choc.
la guerre ;
l’inflation, l’hyperinflation ;
le défaut, le moratoire, la faillite.
Jacques Attali s’est aussi exprimé sur les deux premières voies : « pour
réduire la dette publique, deux autres moyens sont possibles mais néfastes :
l’inflation et la guerre. Mais personne ne maîtrise l’inflation et ne sait la
déclencher. Quant à la guerre, c’est un facteur de réduction de la
consommation, d’épargne forcée de développement de
l’investissement »74.
Ce n’est pas parce que les finances publiques ont été mal gouvernées
depuis trente-sept ans qu’il faut en faire de même avec vos propres
finances. Les temps vont être durs, mais vous serez mieux armé et mieux
préparé que d’autres. Bon courage et bonne chance !
L’OCDE
L’Insee
Eurostats
Les Douanes
Gecodia
L’Agefi
Bloomberg Businessweek, Why The Debt Crisis Is Even Worse Than You
Think