Argu Halimiveil

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SEQUENCE 4

GT/Les luttes pour l’émancipation féminine

Luttes féminines et combats féministes : quelle place pour les


femmes au XXIème siècle ?

Séance 2 : Un combat, des combats → discours de femmes


Supports : Discours de S. Veil (loi sur l’avortement)
Plaidoirie de G.Halimi

1ère étape :

→ DISTRIBUTION du document de travail sur la plaidoirie de G. Halimi


→ Préparer la lecture expressive de ce texte

2ème étape :
→ Ecoute du discours de S. Veil (le début)
• En relevez les différentes parties
• Distribution d’une note synthétique sur les différentes parties d’un discours

https://youtu.be/45MOc6PYoY8
→ Relever ce qui les a frappés dans le discours prononcé, du point de vue de l’oralisation

Ethos, logos et pathos : le trio de la communication


Ethos, c’est l’attribut du locuteur, son caractère, la manière d’être, en bref, c’est ce qu’il renvoie. Sa crédibilité
et son autorité.
Logos, c’est la logique. Les arguments et les idées concrètes du message que l’on souhaite faire passer.
Enfin, Pathos, c’est la sensibilité. L’art de la persuasion plutôt que celui de la conviction. Peu importe ce que
l’on dit. L’important c’est ce que va ressentir l’auditoire.

ETHOS → Elle définit sa posture


→ Elle présente le paradoxe : comment présenter un acte que la société doit encourager
→ Elle met en avant son statut de femme et sa conviction → cela légitime son rôle de ministre qui
présente une nouvelle loi
LOGOS : Arguments de S. Veil
- l'avortement doit rester exceptionnel
- aucune femme n'est joyeuse à l'idée d'avorter : l'avortement est un drame et restera toujours un drame
(détresse)
- admettre/légaliser l'IVG permet de les contrôler (et en amont des mesures doivent être mises en place
pour éviter aux femmes d'avoir recours à l'avortement) car voter pour cette loi, c'est donner un cadre légal
à ce qui se fait dans la clandestinité avec des roques médicaux (double peine : illégalité + complications
fréquentes)
- il ne faut pas voter au nom de la morale ou de convictions religieuses mais il faut considérer les femmes
comme ayant besoin du soutien et de l'appui de l'Etat (qui est alors dans son rôle d'aider les citoyens)

3ème étape :
→ Quizz égalité fille garçon
Emancipation des femmes, combats de femmes
Le droit à l'avortement

Plaidoirie au Procès de Bobigny (extrait)


En 1972, Marie-Claire, 16 ans, avorte clandestinement après un viol. Dénoncée par son violeur, elle est relaxée par le
tribunal pour enfants. Mais Michèle Chevalier, sa mère est poursuivie avec deux autres femmes pour "complicité
d'avortement". Elle est défendue par Gisèle Halimi, avocate qui fait de ce procès une tribune politique dont le
retentissement a contribué à la dépénalisation de l'avortement en 1975.

On fabrique à la femme un destin : un destin


biologique, un destin auquel aucune d’entre nous ne peut ou
n’a le droit d’échapper. Notre destin à toutes, ici, c’est la
maternité. Un homme se définit, existe, se réalise, par son
travail, par sa création, par l’insertion qu’il a dans le monde
social. Une femme, elle, ne se définit que par l’homme qu’elle
a épousé et les enfants qu’elle a eus.
Telle est l’idéologie de ce système que nous récusons.
Savez-vous, Messieurs, que les rédacteurs du Code civil, dans
leur préambule, avaient écrit ceci et c’est tout le destin de la
femme : « La femme est donnée à l’homme pour qu’elle fasse
des enfants… Elle est donc sa propriété comme l’arbre à fruits
est celle du jardinier. » Certes, le Code civil a changé, et nous
nous en réjouissons. Mais il est un point fondamental, absolument fondamental sur lequel la
femme reste opprimée, et il faut, ce soir, que vous fassiez l’effort de nous comprendre.
Nous n’avons pas le droit de disposer de nous-mêmes.
S’il reste encore au monde un serf, c’est la femme, c’est la serve, puisqu’elle comparaît
devant vous, Messieurs, quand elle n’a pas obéi à votre loi, quand elle avorte. Comparaître devant
vous. N’est-ce pas déjà le signe le plus certain de notre oppression ? Pardonnez-moi, Messieurs,
mais j’ai décidé de tout dire ce soir. Regardez-vous et regardez-nous. Quatre femmes
comparaissent devant quatre hommes… Et pour parler de quoi ? De sondes, d’utérus, de ventres,
de grossesses, et d’avortements !...
Croyez-vous que l’injustice fondamentale et intolérable n’est pas déjà là ?
Ces quatre femmes devant ces quatre hommes !
Ne croyez-vous pas que c’est là le signe de ce système oppressif que subit la femme ?
Comment voulez-vous que ces femmes puissent avoir envie de faire passer tout ce qu’elles
ressentent jusqu’à vous ? Elles ont tenté de le faire, bien sûr, mais quelle que soit votre bonne
volonté pour les comprendre – et je ne la mets pas en doute – elles ne peuvent pas le faire. Elles
parlent d’elles-mêmes, elles parlent de leur corps, de leur condition de femmes, et elles en parlent
à quatre hommes qui vont tout à l’heure les juger. Cette revendication élémentaire, physique,
première, disposer de nous-mêmes, disposer de notre corps, quand nous la formulons, nous la
formulons auprès de qui ? Auprès d’hommes. C’est à vous que nous nous adressons.
Nous vous disons : « Nous, les femmes, nous ne voulons plus être des serves ».
Est-ce que vous accepteriez, vous, Messieurs, de comparaître devant des tribunaux de femmes
parce que vous auriez disposé de votre corps ?... Cela est démentiel !
Gisèle HALIMI, 8 novembre 1972.
Emancipation des femmes, combats de femmes
Le droit à l'avortement

Plaidoirie au Procès de Bobigny (extrait)


On fabrique à la femme un destin : un destin biologique, un destin auquel aucune d’entre
EXORDE
la femme n’a
nous ne peut ou n’a le droit d’échapper. Notre destin à toutes, ici, c’est la maternité. Un homme
qu’un se définit, existe, se réalise, par son travail, par sa création, par l’insertion qu’il a dans le monde
destin :enfanter social. Une femme, elle, ne se définit que par l’homme qu’elle a épousé et les enfants qu’elle a
eus.
Telle est l’idéologie de ce système que nous récusons.
NARRATION Savez-vous, Messieurs, que les rédacteurs du Code civil, dans leur préambule, avaient écrit ceci
Annonce de la et c’est tout le destin de la femme : « La femme est donnée à l’homme pour qu’elle fasse des
thèse : la
enfants… Elle est donc sa propriété comme l’arbre à fruits est celle du jardinier. » Certes, le
femme n’est
pas libre de
Code civil a changé, et nous nous en réjouissons. Mais il est un point fondamental, absolument
disposer de son fondamental sur lequel la femme reste opprimée, et il faut, ce soir, que vous fassiez l’effort de
corps. nous comprendre.
Nous n’avons pas le droit de disposer de nous-mêmes.
S’il reste encore au monde un serf, c’est la femme, c’est la serve, puisqu’elle comparaît
devant vous, Messieurs, quand elle n’a pas obéi à votre loi, quand elle avorte. Comparaître devant
CONFIRMATION
vous. N’est-ce pas déjà le signe le plus certain de notre oppression ? Pardonnez-moi, Messieurs,
mais j’ai décidé de tout dire ce soir. Regardez-vous et regardez-nous. Quatre femmes
- Les femmes comparaissent devant quatre hommes… Et pour parler de quoi ? De sondes, d’utérus, de
sont
ventres, de grossesses, et d’avortements !...
assujetties aux
hommes
Croyez-vous que l’injustice fondamentale et intolérable n’est pas déjà là ?
- ce système Ces quatre femmes devant ces quatre hommes !
est injuste : Ne croyez-vous pas que c’est là le signe de ce système oppressif que subit la femme ?
jugées par des Comment voulez-vous que ces femmes puissent avoir envie de faire passer tout ce
hommes, leurs
qu’elles ressentent jusqu’à vous ? Elles ont tenté de le faire, bien sûr, mais quelle que soit votre
corps jugés,
elles ne
bonne volonté pour les comprendre – et je ne la mets pas en doute – elles ne peuvent pas le
peuvent être faire. Elles parlent d’elles-mêmes, elles parlent de leur corps, de leur condition de femmes, et
comprises elles en parlent à quatre hommes qui vont tout à l’heure les juger. Cette revendication
élémentaire, physique, première, disposer de nous-mêmes, disposer de notre corps, quand nous
la formulons, nous la formulons auprès de qui ? Auprès d’hommes. C’est à vous que nous nous
adressons.
PERORAISON Nous vous disons : « Nous, les femmes, nous ne voulons plus être des serves ».
Cela doit Est-ce que vous accepteriez, vous, Messieurs, de comparaître devant des tribunaux de femmes
changer car parce que vous auriez disposé de votre corps ?... Cela est démentiel !
c’est injuste Gisèle HALIMI, 8 novembre 1972.

Procédés rhétoriques
Questions rhétoriques Répétitions (et passage de « un destin » à
Discours direct « notre destin)
Exclamations Les multiples marques du locuteur
//isme de construction Négation restrictive (et absence
Énumération d’énumération)
Anaphores Jeu sur les longueurs de phrases
Anadiplose Gradation
Emancipation des femmes, combats de femmes

COMPRÉHENSION/INTERPRÉTATION
1/ Que pensez-vous du contexte qui a conduit l’avocate Gisèle Halimi à déclamer cette
plaidoirie ? Quelles réactions ce texte suscite-t-il en vous ?
2/ Que fait comprendre l’avant-dernière phrase ?
3/ Comment comprenez-vous l’emploi du mot « serf » ? Quelle est son intention ?
4/ Que dénonce précisément G. Halimi ?
5/ Découpez ce texte en différentes parties et donnez-leur un titre pertinent.
6/ Quels outils de rhétorique Gisèle Halimi utilise-t-elle ?
7/ Cherche-t-elle davantage à vous convaincre (toucher à votre raison) ou à vous persuader
(toucher à votre cœur ?)

COMPÉTENCES ORALES
Vous proposerez une lecture très expressive de cette plaidoirie qui en soulignera la force de
persuasion. Vous déposerez votre lecture sur Pearltrees dans la collection « Luttes pour
l’émancipation féminine »

Emancipation des femmes, combats de femmes

COMPRÉHENSION/INTERPRÉTATION
1/ Que pensez-vous du contexte qui a conduit l’avocate Gisèle Halimi à déclamer cette
plaidoirie ? Quelles réactions ce texte suscite-t-il en vous ?
2/ Que fait comprendre l’avant-dernière phrase ?
3/ Comment comprenez-vous l’emploi du mot « serf » ? Quelle est son intention ?
4/ Que dénonce précisément G. Halimi ?
5/ Découpez ce texte en différentes parties et donnez-leur un titre pertinent.
6/ Quels outils de rhétorique Gisèle Halimi utilise-t-elle ?
7/ Cherche-t-elle davantage à vous convaincre (toucher à votre raison) ou à vous persuader
(toucher à votre cœur ?)

COMPÉTENCES ORALES
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persuasion. Vous déposerez votre lecture sur Pearltrees dans la collection « Luttes pour
l’émancipation féminine »

Emancipation des femmes, combats de femmes

COMPRÉHENSION/INTERPRÉTATION
1/ Que pensez-vous du contexte qui a conduit l’avocate Gisèle Halimi à déclamer cette
plaidoirie ? Quelles réactions ce texte suscite-t-il en vous ?
2/ Que fait comprendre l’avant-dernière phrase ?
3/ Comment comprenez-vous l’emploi du mot « serf » ? Quelle est son intention ?
4/ Que dénonce précisément G. Halimi ?
5/ Découpez ce texte en différentes parties et donnez-leur un titre pertinent.
6/ Quels outils de rhétorique Gisèle Halimi utilise-t-elle ?
7/ Cherche-t-elle davantage à vous convaincre (toucher à votre raison) ou à vous persuader
(toucher à votre cœur ?)

COMPÉTENCES ORALES
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l’émancipation féminine »
Discours de Simone Veil pour la loi sur l'avortement
Sous Valéry Giscard d'Estaing, la France, six ans après les événements de mai 1968, prend le train de la modernité. Si la
pilule est légalisée dans l'Hexagone depuis 1967, l'interruption volontaire de grossesse, elle, reste interdite. Devant une assemblée
constituée à 95% d'hommes, Simone Veil, magistrate nommé ministre de la santé, prononce un discours historique présentant son
projet de loi pour la légalisation de l'avortement.

La situation actuelle est mauvaise. Je dirai même qu'elle est déplorable et


dramatique. Elle est mauvaise parce que la loi est ouvertement bafouée, pire
même, ridiculisée. Lorsque l'écart entre les infractions commises et celles qui
sont poursuivies est tel qu'il n'y a plus à proprement parler de répression, c'est le
respect des citoyens pour la loi, et donc l'autorité de l'Etat, qui sont mis en cause.
Lorsque les médecins, dans leurs cabinets, enfreignent la loi et le font
connaître publiquement, lorsque les parquets, avant de poursuivre, sont invités à
en référer dans chaque cas au ministère de la Justice, lorsque des services sociaux
d'organismes publics fournissent à des femmes en détresse les renseignements
susceptibles de faciliter une interruption de grossesse, lorsque, aux mêmes fins,
sont organisés ouvertement et même par charter des voyages à l'étranger, alors
je dis que nous sommes dans une situation de désordre et d'anarchie qui ne peut
plus continuer. Mais ? me direz-vous, pourquoi avoir laissé la situation se
dégrader ainsi et pourquoi la tolérer. Pourquoi ne pas faire respecter la loi ?
Parce que si des médecins, si des personnels sociaux, si même un certain
nombre de citoyens participent à ces actions illégales, c'est bien qu'ils s'y sentent
contraints ; en opposition parfois avec leurs convictions personnelles, ils se trouvent confrontés à des
situations de fait qu'ils ne peuvent méconnaître. Parce qu'en face d'une femme décidée à interrompre sa
grossesse, ils savent qu'en refusant leur conseil et leur soutien ils la rejettent dans la solitude et l'angoisse
d'un acte perpétré dans les pires conditions, qui risque de la laisser mutilée à jamais. Ils savent que la même
femme, si elle a de l'argent, si elle sait s'informer, se rendra dans un pays voisin ou même en France dans
certaines cliniques et pourra, sans encourir aucun risque ni aucune pénalité, mettre fin à sa grossesse. Et
ces femmes, ce ne sont pas nécessairement les plus immorales ou les plus inconscientes. Elles sont 300.000
chaque année. Ce sont celles que nous côtoyons chaque jour et dont nous ignorons la plupart du temps la
détresse et les drames.
C'est à ce désordre qu'il faut mettre fin. C'est cette injustice qu'il convient de faire cesser. Je le dis
avec toute ma conviction : l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans
issue. Mais comment le tolérer sans qu’il perde ce caractère d’exception, sans que la société paraisse
l’encourager ?
Je voudrais tout d’abord vous faire partager une conviction de femme – je m’excuse de le faire
devant cette Assemblée presque exclusivement composée d’hommes : aucune femme ne recourt de gaieté
de cœur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes. C’est toujours un drame et cela restera toujours un
drame. C’est pourquoi, si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s’il
admet la possibilité d’une interruption de grossesse, c’est pour la contrôler et, autant que possible, en
dissuader la femme. Nous pensons ainsi répondre au désir conscient ou inconscient de toutes les femmes
qui se trouvent dans cette situation d’angoisse, si bien décrite et analysée par certaines des personnalités
que votre commission spéciale a entendues au cours de l’automne 1973. Actuellement, celles qui se
trouvent dans cette situation de détresse, qui s’en préoccupe ? La loi les rejette non seulement dans
l’opprobre, la honte et la solitude, mais aussi dans l’anonymat et l’angoisse des poursuites. Contraintes de
cacher leur état, trop souvent elles ne trouvent personne pour les écouter, les éclairer et leur apporter un
appui et une protection.
Parmi ceux qui combattent aujourd’hui une éventuelle modification de la loi répressive, combien
sont-ils ceux qui se sont préoccupés d’aider ces femmes dans leur détresse ? Combien sont-ils ceux qui au-
delà de ce qu’ils jugent comme une faute, ont su manifester aux jeunes mères célibataires la compréhension
et l’appui moral dont elles avaient grand besoin ?
(...) Ainsi, conscient d’une situation intolérable pour l’Etat et injuste aux yeux de la plupart, le
gouvernement a renoncé à la voie de la facilité, celle qui aurait consisté à ne pas intervenir. C’eût été cela
le laxisme. Assumant ses responsabilités, il vous soumet un projet de loi propre à apporter à ce problème
une solution à la fois réaliste, humaine et juste.
Discours prononcé le 26 novembre 1974
Discours de Simone Veil pour la loi sur l'avortement

La situation actuelle est mauvaise. Je dirai même qu'elle est déplorable et dramatique. Elle est
mauvaise parce que la loi est ouvertement bafouée, pire même, ridiculisée. Lorsque l'écart entre les
infractions commises et celles qui sont poursuivies est tel qu'il n'y a plus à proprement parler de
répression, c'est le respect des citoyens pour la loi, et donc l'autorité de l'Etat, qui sont mis en cause.

Lorsque les médecins, dans leurs cabinets, enfreignent la loi et le font connaître publiquement,
lorsque les parquets, avant de poursuivre, sont invités à en référer dans chaque cas au ministère de la
Justice, lorsque des services sociaux d'organismes publics fournissent à des femmes en détresse les
renseignements susceptibles de faciliter une interruption de grossesse, lorsque, aux mêmes fins, sont
organisés ouvertement et même par charter des voyages à l'étranger, alors je dis que nous sommes dans
une situation de désordre et d'anarchie qui ne peut plus continuer. Mais ? me direz-vous, pourquoi avoir
laissé la situation se dégrader ainsi et pourquoi la tolérer. Pourquoi ne pas faire respecter la loi ?

Parce que si des médecins, si des personnels sociaux, si même un certain nombre de citoyens
participent à ces actions illégales, c'est bien qu'ils s'y sentent contraints ; en opposition parfois avec leurs
convictions personnelles, ils se trouvent confrontés à des situations de fait qu'ils ne peuvent méconnaître.
Parce qu'en face d'une femme décidée à interrompre sa grossesse, ils savent qu'en refusant leur conseil et
leur soutien ils la rejettent dans la solitude et l'angoisse d'un acte perpétré dans les pires conditions, qui
risque de la laisser mutilée à jamais. Ils savent que la même femme, si elle a de l'argent, si elle sait
s'informer, se rendra dans un pays voisin ou même en France dans certaines cliniques et pourra, sans
encourir aucun risque ni aucune pénalité, mettre fin à sa grossesse. Et ces femmes, ce ne sont pas
nécessairement les plus immorales ou les plus inconscientes. Elles sont 300.000 chaque année. Ce sont
celles que nous côtoyons chaque jour et dont nous ignorons la plupart du temps la détresse et les drames.
C'est à ce désordre qu'il faut mettre fin. C'est cette injustice qu'il convient de faire cesser. Je le dis
avec toute ma conviction: l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans
issue. Mais comment le tolérer sans qu’il perde ce caractère d’exception, sans que la société paraisse
l’encourager ?
Je voudrais tout d’abord vous faire partager une conviction de femme – je m’excuse de le faire
devant cette Assemblée presque exclusivement composée d’hommes : aucune femme ne recourt de gaieté
de cœur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes. C’est toujours un drame et cela restera toujours un
drame. C’est pourquoi, si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s’il
admet la possibilité d’une interruption de grossesse, c’est pour la contrôler et, autant que possible, en
dissuader la femme. Nous pensons ainsi répondre au désir conscient ou inconscient de toutes les femmes
qui se trouvent dans cette situation d’angoisse, si bien décrite et analysée par certaines des personnalités
que votre commission spéciale a entendues au cours de l’automne 1973. Actuellement, celles qui se
trouvent dans cette situation de détresse, qui s’en préoccupe ? La loi les rejette non seulement dans
l’opprobre, la honte et la solitude, mais aussi dans l’anonymat et l’angoisse des poursuites. Contraintes de
cacher leur état, trop souvent elles ne trouvent personne pour les écouter, les éclairer et leur apporter un
appui et une protection.
Parmi ceux qui combattent aujourd’hui une éventuelle modification de la loi répressive, combien
sont-ils ceux qui se sont préoccupés d’aider ces femmes dans leur détresse ? Combien sont-ils ceux qui
au-delà de ce qu’ils jugent comme une faute, ont su manifester aux jeunes mères célibataires la
compréhension et l’appui moral dont elles avaient grand besoin ?

(...) Ainsi, conscient d’une situation intolérable pour l’Etat et injuste aux yeux de la plupart, le
gouvernement a renoncé à la voie de la facilité, celle qui aurait consisté à ne pas intervenir. C’eût été cela
le laxisme. Assumant ses responsabilités, il vous soumet un projet de loi propre à apporter à ce problème
une solution à la fois réaliste, humaine et juste.
Discours prononcé le 26 novembre 1974
Relevez les arguments utilisés par S. Veil pour défendre
l’accès à l’avortement (logos)

Discours de S. VEIL

1/ Lisez le document distribué et délimitez les 4 composantes d’un dis-


cours argumentatif :
• L'exorde (l’entrée en matière/l’introduction) qui a pour fonction d'attirer la
bienveillance de l'auditoire, d'exposer le sujet du discours et parfois d'en indiquer les
articulations essentielles.
• La narration qui expose les faits. Elle prend la forme d'un récit
• La confirmation qui présente les arguments que l'on peut tirer des faits exposés
dans la narration et cherche éventuellement à anticiper de possibles contre-
arguments.
• La péroraison qui est la conclusion du discours. Elle synthétise l'argumentation et
en appelle aux sentiments de l'auditoire (pitié, indignation, colère ...).

2/ Prenez votre fiche sur les registres. Quel(s) est(sont) le(s) registre(s)
que vous trouvez ?
Relevez les procédés, les stratégies mises en place pour
toucher la sensibilité de l’auditoire (pathos)

3/ Cherche-t-elle davantage à vous convaincre (toucher à votre raison)


ou à vous persuader (toucher à votre cœur ?)
LES DISCOURS * Utiliser les procédés de la persuasion. Un discours doit faire réagir l’auditoire. Pour cela
on utilisera :
Un discours est un texte prononcé devant un public. Celui qui parle est désigné sous – L’injonction qui donne un ordre ou l’interrogation rhétorique : l’orateur pose une
le nom d’orateur et ceux qui écoutent constituent l’auditoire. Le plus souvent, le discours a question à laquelle il apporte lui-même la réponse, conduisant le destinataire à
pour but de convaincre et/ou de persuader. Convaincre consiste à faire partager un point de réfléchir
vue en s’adressant au raisonnement, à la réflexion, à la logique du destinataire. Persuader – Les hyperboles : elles ont pour effet de renforcer le propos
vise à obtenir l’adhésion du destinataire en s’adressant à son affectivité. – Les ressources du style oratoire. Par exemple : les parallélismes, les rythmes binaires
ou ternaires qui retiennent l’attention en établissant un écho entre deux (binaires) ou
1. Les règles du genre trois (ternaires) structures dans la phrase, le paragraphe, ou le texte ; les anaphores
Ecrire un discours impose de respecter les contraintes d’écriture suivantes : qui du produisent un effet d’insistance (la liberté qui...., la liberté que..., cette liberté
* Faire apparaître l’implication de celui qui parle. Cela consiste à : dont....)
– Faire figurer les marques de l’énonciation : les pronoms, les adjectifs possessifs de la
première personne ; 2.Les différents discours
– Disposer les indices de l’espace et du temps qui situent l’énoncé par rapport à celui qui parle Le plaidoyer : au sens premier, il s’agit d’un discours prononcé devant un tribunal pour
(ici, demain, il y a mille ans..) défendre quelqu’un. Par extension de sens, un plaidoyer est un discours qui consiste à
– Utiliser les procédés de modalisation : celui qui parle évalue ce qu’il dit en le situant dans défendre un droit, une cause, un principe, une opinion. Le plaidoyer appartient au genre de
le domaine du probable (il arrivera peut-être un jour que...), du souhaitable (si tous les pays l’éloge.
du monde parvenaient à s’entendre..), du doute (il semble que ce ne soit pas pour
aujourd’hui...), du certain (il faut absolument garder confiance..) Le réquisitoire : au sens premier, il s’agit s’agir d’un discours prononcé devant un tribunal
– Inscrire les marques de la subjectivité, notamment dans l’emploi d’un vocabulaire valorisant pour accuser quelqu’un. Par extension de sens, un réquisitoire est un discours qui consiste à
(qui fait l’éloge) ou dépréciatif (qui critique, dénonce, rabaisse..) critiquer, à dénoncer, à sanctionner (à l’aide d’arguments) une réalité sociale, une institution..
Le réquisitoire appartient au genre du blâme.
* Faire apparaître la présence d’un destinataire. Un discours est censé être prononcé en
public. On ne doit donc pas hésiter à solliciter l’auditoire en l’intégrant à ce qui est dit, au Le manifeste : il est parfois classé parmi les discours. C’est un écrit par lequel un individu
moyen de : ou un groupe fait connaître ses vues sur un sujet, politique ou artistique par exemple, parfois
– L’apostrophe par laquelle on interpelle l’auditeur : mes chers amis...ces messieurs de de façon polémique et toujours avec une intention persuasive. A la différence du discours, il
l’opposition n’est pas prononcé en public.
– Les pronoms dits « de la présence » comme le « vous » (de politesse ou du pluriel)
– Les désignations de l’auditoire par des reprises nominales ou des périphrases : l’assemblée 3. Les éléments à adapter au sujet
ici présente sait bien que....Ceux qui m’écoutent se souviennent S’il existe un mode d’écriture propre au discours, il n’existe pas de discours type. Chaque
discours doit être écrit en fonction du contexte et des objectifs fixés par le sujet.
* Assurer la progression argumentative pour convaincre. Le discours doit suivre un plan Préciser le cadre dans lequel est prononcé le discours Le sujet indique en général que le
progressif. On assurera la logique interne du propos par : discours est prononcé dans une certaine occasion, devant un certain type de public (à
– Les procédés d’annonce et de rappel (annonce de l’idée avant son développement, rappel l’occasion du bicentenaire de la naissance de Victor Hugo...à l’occasion du prix décerné à
de l’idée après son développement) la meilleure nouvelle....devant un public de lycéens...) Il faut alors tenir compte de ces
– Le « balisage » de la démonstration : deux cas se présentent...pour trois raisons... un double données. Si le sujet ne précise pas ces circonstances, on aura intérêt à les imaginer et à les
objectif intégrer au propos afin de donner au discours un plus fort ancrage dans la réalité, une plus
grande vraisemblance.
– Les articulations : elles permettent de relier deux idées dans une phrase, deux phrases entre
elles, deux paragraphes. Ce sont par exemple les outils logiques : conjonctions de Attention ! Le sujet qui demande de rédiger un discours ne demande pas d’introduction
coordination –mais, donc..) ou de subordination (bien que, parce que..), adverbes ou narrative ou descriptive. Les références aux conditions de l’énonciation (lieu, temps,
locutions adverbiales (néanmoins, par conséquent..) destinataire) doivent être intégrées au discours lui-même par l’orateur : « chers amis, puisque
nous voici réunis pour fêter les dix ans du club théâtre du lycée dans les lieux mêmes où Mais, comme il en est de tout classement, ces catégories sont poreuses : un même texte peut,
il a vu le jour.... » par exemple, conjuguer les formes classiques du judiciaire et de l'épidictique.

Adapter le propos à l’auditoire à convaincre. Les sujets précisent en général devant


quel public est prononcé le discours. Ces données doivent orienter votre choix dans les
domaines suivants :
– Le niveau de langage : on ne parlera pas devant un groupe de jeunes comme
devant une institution officielle
– Les indices de la langue de l’époque à laquelle est prononcé le discours. Le « je
» qui prononce le discours peut appartenir à une époque historique, à une
société, différentes de celles du candidat (en 1849, vous prononcez devant
l’Assemblée un discours en faveur de la liberté de la presse)

PLAIDOYER RÉQUISITOIRE
Qui parle ? Nous, je (forte implication de Nous, je (implication de l'émetteur)
l'émetteur)
A qui ? Implication de l'auditoire à Forte implication de l'auditoire à
convaincre convaincre
De qui, D'un sujet considéré comme D'un sujet considéré comme coupable
de quoi ? victime
Vocabulair Mélioratif Péjoratif
e
Registre Pathétique Polémique
Procédés Effets pathétiques et déploratifs, Interrogations oratoires, injonctions,
oratoires longues phrases rythmées exclamations exprimant la colère,
l'indignation ; longues phrases
rythmées
Stratégie Appel à la pitié Ironie, appel à la raison

Plaidoyer et réquisitoire appartiennent au genre judiciaire. On sait que la


rhétorique classique reliait les discours à trois situations fondamentales :
• L’orateur défend ou attaque quelqu'un à cause d'un acte commis dans le
passé, pour persuader de l'innocence ou de la culpabilité : c'est le genre
judiciaire;
• Il s'adresse à une assemblée afin de la persuader de prendre une décision
qui concerne l'avenir : c'est le genre délibératif;
• Il vante les mérites ou critique les défauts d'une personne ou d'une
institution : c'est le genre épidictique.

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