Nature Culture 17
Nature Culture 17
Nature Culture 17
CULTURE
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pace ; comment ne pas croire que, bien qu’issus de la nature, I.2 L’homme est-il un animal
nous ne soyons désormais extra-naturels et surnaturels ? De-
puis Descartes, nous pensons contre nature, assurés que notre comme les autres ?
mission est de la dominer, la maîtriser, la conquérir. (…)
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I. 3 Existe-il une nature humaine ? sant éclore avec les siècles ses lumières et ses erreurs, ses vi-
ces et ses vertus, le rend à la longue le tyran de lui-même, et
J.J Rousseau de la nature.
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Mais (…) sur cette différence de l’homme et de l’animal, il y a
une autre qualité très spécifique qui les distingue, et sur la-
quelle il ne peut y avoir de contestation c’est la faculté de se J.P Sartre (1905-1980)
perfectionner; , au lieu qu’un animal est, au bout de quelques
mois, ce qu’il sera toute sa vie, et son espèce, au bout de mille Ecrivain et philosophe français. Il a
ans, ce qu’elle était la première année de ces mille ans. Pour- profondément marqué le vie intel-
quoi l’homme seul est-il sujet à devenir imbécile ? N’est-ce lectuelle et politique de la 2° moitié
point qu’il retourne ainsi dans son état primitif, et que, tandis du XX°. Pour lui, l’homme est libre,
que la bête, qui n’a rien acquis et qui n’a rien non plus à per- et même « condamné à être libre »,
dre, reste toujours avec son instinct, l’homme, reperdant par responsable. En fait l’homme est
la vieillesse ou d’autres accidents, tout ce que sa perfectibilité condamné à choisir sa vie et à s’engager.
* lui avait fait acquérir, retombe ainsi plus bas que la bête
même ? Il serait triste pour nous d’être forcés de convenir que
cette faculté distinctive, et presque illimitée, est la source de
tous les malheurs de l’homme ; que c’est elle qui le tire, à force
de temps, de cette condition originaire dans laquelle il coule- “S’il est impossible de trouver en chaque homme une essence
rait des jours tranquilles et innocents ; que c’est elle, qui fai- universelle qui serait la nature humaine, il existe pourtant une
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universalité humaine de condition. Ce n’est pas par hasard
que les penseurs d’aujourd’hui parlent plus volontiers de la
condition de l’homme que de sa nature. Par condition ils en-
tendent avec plus ou moins de clarté l’ensemble des limites a
priori qui esquissent sa situation fondamentale dans l’univers.
Albert Camus
Les situations historiques varient: L’homme peut naître es- Né en 1913, en Algérie. C’est à Al-
clave dans une société païenne ou seigneur féodal ou prolé- ger, dans le quartier populaire de
taire. Ce qui ne varie pas, c’est la nécessité pour lui d’être dans Belcourt, qu’Albert Camus passe
le monde, d’y être au travail, d’y être au milieu d’autres et d’y son enfance et son adolescence,
être mortel… Et bien que les projets puissent être divers, au sous le double signe, qu’il n’oublie-
moins aucun ne me reste-t-il tout à fait étranger parce qu’ils ra jamais, de la pauvreté et de
se présentent tous comme un essai pour franchir ces limites l’éclat du soleil méditerranéen. Phi-
ou pour les reculer ou pour les nier ou pour s’en accommo- losophe, romancier, journaliste…C’est un homme en-
der.” gagé. Il reçoit le prix No-
bel de Littérature en
Jean-Paul SARTRE, L’Existentialisme est un humanisme
1957 et meurt en 1960
p.67,69
dans un accident de voi-
ture.
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son qu’il n’est pas de punition plus terrible que le travail in- A chacun de ces instants, où il quitte les sommets et s’enfonce
utile et sans espoir. peu à peu vers les tanières des dieux, il est supérieur à son des-
tin. Il est plus fort que son rocher.
On a compris déjà que Sisyphe est le héros absurde. Il l’est au-
tant par ses passions que par son tourment. Son mépris des Si ce mythe est tragique, c’est que son héros est conscient. Où
dieux, sa haine de la mort et sa passion pour la vie, lui ont va- serait en effet sa peine, si à chaque pas l’espoir de réussir le
lu ce supplice indicible où tout l’être s’emploie à ne rien ache- soutenait? L’ouvrier d’aujourd’hui travaille, tous les jours de
ver. C’est le prix qu’il faut payer pour les passions de cette sa vie, aux mêmes tâches et ce destin n’est pas moins absurde.
terre. Mais il n’est tragique qu’aux rares moments où il devient con-
scient. Sisyphe, prolétaire des dieux, impuissant et révolté con-
On ne nous dit rien sur Sisyphe aux enfers. Les mythes sont
naît toute l’étendue de sa misérable condition: c’est à elle qu’il
faits pour que l’imagination les anime. Pour celui-ci, on voit
pense pendant sa descente. La clairvoyance qui devait faire
seulement tout l’effort d’un corps tendu pour soulever
son tourment consomme du même coup sa victoire. Il n’est
l’énorme pierre, la rouler et l’aider à gravir une pente cent fois
pas de destin qui ne se surmonte par le mépris.
recommencée; on voit le visage crispé, la joue collée contre la
pierre, le secours d’une épaule qui reçoit la masse couverte de A. Camus, Le Mythe de Sisyphe, 1942
glaise, d’un pied qui la cale, la reprise à bout de bras, la sûreté
toute humaine de deux mains pleines de terre. Tout au bout
de ce long effort mesuré par l’espace sans ciel et le temps sans
profondeur, le but est atteint. Sisyphe regarde alors la pierre
dévaler en quelques instants vers ce monde inférieur d’où il
faudra la remonter vers les sommets. Il redescend dans la
plaine.
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Emmanuel KANT dire Je ; avant, il parle de soi à la troisième personne (Charles
veut manger, marcher, etc.) ; et il semble pour lui qu’une lu-
Philosophe allemand (1724-1804). mière vienne de se lever quand il commence à dire Je ; à par-
Kant a exercé une influence considé- tir de ce jour, il ne revient jamais à l’autre manière de parler.
rable sur l’idéalisme allemand, la Auparavant il ne faisait que se sentir ; maintenant il se pense.
philosophie analytique, la phénomé-
E. KANT, Anthropologie du point de vue pragmatique
nologie et la philosophie postmo-
derne. Son œuvre, considérable et di-
verse est centrée autour des trois Cri-
tiques, à savoir la Critique de la rai-
son pure, la Critique de la raison pra-
tique et la Critique de la faculté de juger
Il faut remarquer que l’enfant, qui sait déjà parler assez correc-
tement ne commence qu’assez tard (peut-être un an après) à
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En fait, il n’y a pas l’homme d’un côté et la nature de l’autre l’Homme. Il Se pourrait-il qu’il soit dans la nature de l’homme d’être un être de culture
est un produit de la nature,il en fait partie. Il est régi par les lois de la na- ? En fait la culture lui serait aussi naturelle que de voler pour les oi-
ture au même titre que n’importe quelle autre espèce. seaux…
Pourtant le naturel s’oppose généralement au culturel. Et l’on a tendance Il y aura donc une grande difficulté, voire une impossibilité à distinguer ce
à considérer que seul l’homme acquiert une culture, c’est à dire des ac- qui appartient à la nature et ce qui appartient à la culture chez l’homme.
quis (techniques, langagiers, artistiques) qui se transmettent d’une généra- Merleau-Ponty, ou François Jacob le soulignent.(Voir textes).
tion à l’autre. On sait aujourd’hui, grâce aux découvertes en éthologie que
les espèces animales sont aussi capables d’apprentissage, que les cor-
beaux communiquent entre eux pour se prévenir d’un danger, que les élé-
phants se reconnaissent dans un miroir et que chez certaines espèces, il
y a des pratiques qui s’apparentent aux rites funéraires. Alors, qu’est-ce
que l’homme a de particulier ?
Il est un être doté d’une intelligence qui lui permet d’adapter son environ-
nement, de se rendre « comme maitre et possesseur de la nature »(Des-
cartes). Mais en réalité, il suffit de voir les effets dévastateurs d’un oura-
gan pour comprendre que ce pouvoir est très limité…
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l’empereur Alexandre venu le rencontrer de s’écarter de son soleil, mange
II. L’HOMME et… avec les mains, urine et aboie comme un chien, se masturbe en public,
Rappelons que la culture est « l’ensemble des acquisi- Mais est-cela que respecter la nature de l’homme si précisément sa na-
tions faites par les hommes et le fait de les acquérir » ture est précisément d’être un être de culture ?
mais qu’elle est aussi « un ensemble de normes collec-
tives propre à un groupe ». Et qu’adviendrait-il de l’homme si chacun se laissait aller à ses penchants
? Freud par exemple considérera la civilisation (la culture) comme étant le
seul barrage à notre agressivité naturelle qui nous pousse à éliminer, utili-
Êtres de culture , les hommes peu- ser, détruire notre prochain !
vent-ils être naturels ? A quoi res-
A vous d’y réfléchir….
semblent-ils quand ils essaient de
l’être et que veut dire « être natu-
rel »?
Pour lui, puisque les cultures, varient d’un lieu à l’autre, d’une époque à
l’autre, c’est qu’elles sont arbitraires et corruptrices. Il n’y a donc qu’une
Voir les autres vidéos sur
voie possible, se conformer à la nature universelle[1] et imiter les animaux.
Diogène prône donc le rejet de toute règle: il vit dans un tonneau, dit à
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II. L’Homme est-il , par nature, un L’homme est, en effet, le seul être qui s’impose des règles, qui exige la rè-
Qu’est-ce qui pourrait sans conteste faire de nous Parce que les cultures sont diverses, les règles le sont aussi.
des êtres de culture ?
Presque tout chez l’homme relève de la diversité : notre alimentation, notre
façon de nous vêtir, nos attitudes affectives, nos mœurs, notre concep-
Claude LEVI-STRAUSS tion du bien et du mal et même notre perception varient énormément
d’une société à une autre. Ce qui caractérise l’homme est la variabilité cul-
Claude Lévi-Strauss, (1908-2009)
est un anthropologue et ethnolo- turelle.
gue français qui a grandement in-
fluencé les sciences humaines et so- Or un fait avait retenu l’attention des anthropologues avant Lévi-Strauss :
ciales dans la seconde moitié du il existe une règle universelle, un interdit universel, celui de l’inceste.
xxe siècle.
Par son universalité la prohibition de l’inceste semble relever de la nature,
Claude Lévi-Strauss ne croit pas à l’inexistence d’une nature humaine,
mais par la diversité de ses modalités, par le fait qu’elle relève de la règle,
mais souligne qu’il est difficile de distinguer les domaines respectifs de la
elle semble plutôt relever de la culture. Lévi-Strauss y voit alors ce qui fait
nature et de la culture.
l’articulation entre la nature et la culture, ce qui fait de l’homme naturel un
Il propose une définition méthodologique des deux termes : être culturel.
• la nature est caractérisée par l’universalité, « La prohibition de l’inceste est le processus par lequel la nature se dé-
passe elle-même… » à la fois universelle elle existe partout, et réglée : elle
• la culture est caractérisée par la règle.
existe partout différemment.
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«La prohibition de l’inceste n’est ni purement d’origine cultu- grant, aux structures plus simples de la vie psychique, comme
relle, ni purement d’origine naturelle ; et elle n’est pas, non ces dernières se superposent, en les intégrant, aux structures,
plus, un dosage d’éléments composites empruntés partielle- plus simples qu’elles-mêmes, de la vie animale. Elle opère, et
ment à la nature et partiellement à la culture. Elle constitue la par elle-même constitue, l’avènement d’un ordre nouveau».
démarche fondamentale grâce à laquelle, par laquelle, mais
Claude Lévi-Strauss, Les Structures élémentaires de la paren-
surtout en laquelle, s’accomplit le passage de la nature à la cul-
té (1947)
ture. En un sens, elle appartient à la nature, car elle est une
condition générale de la culture, et par conséquent il ne faut
pas s’étonner de la voir tenir de la nature son caractère for-
mel, c’est-à-dire l’universalité. Mais en un sens aussi, elle est “L’homme est un être culturel par nature parce qu’il est un être na-
déjà la culture, agissant et imposant sa règle au sein de phéno- turel par la culture” Edgar Morin, Sociologue
mènes qui ne dépendent point d’abord d’elle. Nous avons été
amené à poser le problème de l’inceste à propos de la relation
entre l’existence biologique et l’existence sociale de l’homme,
et nous avons constaté aussitôt que la prohibition ne relève
exactement, ni de l’une, ni de l’autre. Nous nous proposons,
dans ce travail, de fournir la solution de cette anomalie, en
montrant que la prohibition de l’inceste constitue précisément
le lien qui les unit l’une à l’autre.
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MERLEAU-PONTY François JACOB
Philosophe français (1908 -1961) Biologiste, prix Nobel de méde-
cine en 1965 pour ses travaux sur
Distinguer nature et culture chez l’homme suppose- la génétique. Il est notamment
rait que nous puissions différencier ce que nous l’auteur de Le Jeu des possibles,
1981
avons acquis de ce qui nous est inné !
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III. LA CULTURE NOUS oisif, et l’ataraxie même du Stoïcien n’approche pas de sa pro-
fonde indifférence pour tout autre objet. Au contraire le ci-
REND-ELLE PLUS « HUMAIN » ? toyen toujours actif sue, s’agite, se tourmente sans cesse pour
chercher des occupations toujours plus laborieuses : il tra-
Si beaucoup ont vu dans les progrès de la civilisation, la promesse d’une
vaille jusqu’à la mort, il y court même pour se mettre en état
humanité meilleure (La plupart des philosophes des Lumières notamment), de service, on renonce à la vie pour acquérir l’immortalité. Il
d’autres comme J.J Rousseau voit là une source de corruption et de mal- fait sa cour aux grands qu’il hait et aux riches qu’il méprise, il
n’épargne rien pour obtenir l’honneur de les servir, il se vante
heur. Partant du postulat que l’homme est naturellement bon et que c’est
orgueilleusement de sa bassesse et de leur protection, et fier
la société qui le corrompt, voici ce qu’ écrit Rousseau : de son esclavage, il parle avec dédain de ceux qui n’ont pas
l’honneur de les partager. Quel spectacle pour un Caraïbe, que
les travaux pénibles et enviés d’un Ministère Européen ! Com-
bien de morts cruelles ne préfèrerait pas cet indolent sauvage
Jean-Jacques ROUSSEAU à l’horreur d’une pareille vue qui souvent n’est pas même
1712 à Genève – 1778 à Ermenon- adoucie par le plaisir de bien faire ? Mais pour voir le but de
ville, est un écrivain, philosophe tant de soins, il faudrait que ces mots, puissance et réputation,
et musicien genevois de langue eussent un sens dans son esprit, qu’il apprît qu’il y a une sorte
française. d’hommes qui comptent pour quelque chose les regards du
reste de l’univers, qui savent être heureux et contents d’eux-
Il est l’un des plus illustres philoso- mêmes, sur le témoignage d’autrui plutôt que sur le leur pro-
phes du siècle des Lumières et l’un pre. Telle est, en effet, la véritable cause de toutes ces différen-
des pères spirituels de la Révolu- ces : le sauvage vit en lui-même ; l’homme sociable toujours
tion, même s’il se distingue par la hors de lui ne sait vivre que dans l’opinion des autres, et c’est,
vision pessimiste qu’il a de la société et du progrès.. pour ainsi dire, de leur seul jugement qu’il tire le sentiment de
sa propre existence.
L’homme sauvage et l’homme civilisé diffèrent tellement par
le fond du cœur et des inclinations que ce qui fait le bonheur Rousseau, Discours sur l’origine et les fondements de l’inégali-
suprême de l’un réduirait l’autre au désespoir. Le premier ne té parmi les hommes, II
respire que le repos et la liberté, il ne veut que vivre et rester
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A priori, on pourrait penser que la civilisation nous rend meilleur au sens semble de représentations, de croyances, de savoir-
où elle nous permet d’accéder à la connaissance, de soigner, de faciliter faire, de coutumes acquis en tant que membre de telle
ou telle société, de telle ou telle communauté et non en
la vie des hommes… Certes, il y a à n’en pas douter des aspects positifs.
tant que membre de l’espèce humaine. On parlera donc
Mais sommes-nous pour autant plus humains ? de culture occidentale, africaine, orientale…
Les hommes ont mis d’autres hommes en esclavage, les ont trai-
tés plus mal que des bêtes, ont douté de leur appartenance à l’hu-
Particularismes culturels et ethnocentrisme manité, ont exterminé ou tenté de le faire- des peuples entiers, au
Il n’y a pas une culture mais des cultures. Et l’homme a bien du mal à con- nom de l’homme, de la religion, de croyances, coutumes…. En
sidérer que celui qui ne vit pas comme lui, est néanmoins un homme d’une quelque sorte, au nom de la culture !
égale importance.
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Les zoos humains et leurs variants
Les expositions colonia-
les furent organisées au
XIXe siècle et dans la
p re m i è re m o it i é d u
XXe siècle dans les
pays européens ( Pre-
mière en France: 1906
à Marseille) Elles avaient pour but de montrer aux habitants de la Métro-
pole les différentes facettes des colonies.Les expositions coloniales don-
naient lieu à des reconstitutions spectaculaires des environnements natu-
rels et des monuments d’Afrique, d’Asie ou d’Océanie. La controverse de Valladolid :
Tous les hommes sont-ils des hom-
La mise en situation d’habitants des colonies, souvent déplacés de force,
mes ?
les fera plus tard qualifier de zoos humains
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tres ? En conséquence, méritent-ils d’être traités comme des humains ou De l’ethnocentrisme au relati-
sont-ils nés pour être soumis ? visme…
En présence d’un légat du pape, le cardinal Roncieri, d’un représentant Qu’est-ce que le relativisme ?
de Charles-Quint et devant une assemblée attentive, le chanoine Sepulve-
En simplifiant beaucoup, c’est l’idée qu’aucune culture ne peut être
da et le dominicain Las Casas s’opposent parfois violemment. Pour Sepul-
dite supérieure à une autre : chaque culture répond, par des
veda, il existe dans le monde des sous catégories d’humains, faites pour
moyens différents, à des problèmes différents. C’est l’idée défen-
être dominées, les Indiens sont nés pour être des esclaves ; pour Las Ca-
due par Levi-Strauss dans Race et Histoire.
sas, les Indiens sont des hommes, « nos frères », créatures de Dieu.
Ce relativisme a toutefois des limites dont nous traiterons ensuite.
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raître chez chacun de nous quand nous sommes placés dans missions d’enquête pour rechercher si les indigènes possé-
une situation inattendue, consiste à répudier purement et sim- daient ou non une âme, ces derniers s’employaient à immer-
plement les formes culturelles : morales, religieuses, sociales, ger des blancs prisonniers afin de vérifier par une surveillance
esthétiques, qui sont les plus éloignées de celles auxquelles prolongée si leur cadavre était, ou non, sujet à la putréfaction.
nous nous identifions. « Habitudes de sauvages », « cela n’est
Cette anecdote à la fois baroque et tragique illustre bien le pa-
pas de chez nous », « on ne devrait pas permettre cela », etc.,
radoxe du relativisme culturel (que nous retrouverons ailleurs
autant de réactions grossières qui traduisent ce même frisson,
sous d’autres formes) : c’est dans la mesure même où l’on pré-
cette même répulsion, en présence de manières de vivre, de
tend établir une discrimination entre les cultures et les coutu-
croire ou de penser qui nous sont étrangères. Ainsi l’Antiquité
mes que l’on s’identifie le plus complètement avec celles qu’on
confondait-elle tout ce qui ne participait pas de la culture grec-
essaye de nier. En refusant l’humanité à ceux qui apparaissent
que (puis gréco-romaine) sous le même nom de barbare ; la
comme les plus « sauvages » ou « barbares » de ses représen-
civilisation occidentale a ensuite utilisé le terme de sauvage
tants, on ne fait que leur emprunter une de leurs attitudes typi-
dans le même sens. Or derrière ces épithètes se dissimule un
ques. Le barbare, c’est d’abord l’homme qui croit à la barbarie.
même jugement : il est probable que le mot barbare se réfère
étymologiquement à la confusion et à l’inarticulation du chant Lévi-Strauss, Race et histoire (1952), chap. 3
des oiseaux, opposées à la valeur signifiante du langage hu-
main ; et sauvage, qui veut dire « de la forêt », évoque aussi
un genre de vie animale, par opposition à la culture humaine.
Dans les deux cas, on refuse d’admettre le fait même de la di-
versité culturelle ; on préfère rejeter hors de la culture, dans la
nature, tout ce qui ne se conforme pas à la norme sous la-
quelle on vit.
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MONTAIGNE avons altérés par notre artifice et détournés de l’ordre com-
mun, que nous devrions appeler plutôt sauvages. […]
Michel de montaigne Michel de
Montaigne, Les Essais, XVI°
Montaigne, (Michel Eyquem, sei-
gneur de Montaigne), 1533- 1592
est un philosophe et moraliste de
la Renaissance. Rappels des définitions Nature et
Dans ses Essais (1572-1592) il fait Culture
le projet de se peindre soi-même
pour instruire le lecteur « Ce ne
sont pas mes actes que je décris,
c’est moi, c’est mon essence. » Il
s’interroge sur l’homme et affirme que « Chaque
homme porte la forme entière, de l’humaine condi-
tion. »
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Nier le donné naturel en soi » et hors de soi , c’est s’af-
CITATIONS firmer comme homme et comme un être humain qui ne
répète pas ce qu’il est comme l’animal , qui ne laisse
NATURE & CULTURE pas les choses telles qu’elles sont. Construire, c’est dé-
truire; devenir, c’est cesser d’être ce qu’on est. »
KANT (XVIII°)
ALAIN (XX°) “La nature, c’est l’existence des choses, en tant qu’elle
« Chacun de nous est vêtu de la civilisation, il ne se con- est déterminée selon des lois universelles.”
nait point dans la nudité de l’animal ». Kant, Prolégomènes à toute métaphysique future, § 14,
trad. L. Guillermit, Vrin, 1986, p. 61.
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Montaigne, Les Essais, (1580-1595), livre Ier, chapitre “Cela appartient à l’essence de la chose, qui fait que, ce-
XXXI la étant donné, la chose est donnée; et que cela étant
ôté, la chose est nécessairement ôtée.”
MORIN (XX°)
“L’homme est un être culturel par nature parce qu’il est Pour les sujets et les fiches de synthèse, voir sur
un être naturel par culture.”
Edgar Morin (sociologue), Le paradigme perdu : la na-
ture humaine, Seuil, coll. Points Essais, 1979, p. 222.
ROUSSEAU (XVIII°)
« Je ne vois dans tout animal qu’une machine ingé-
nieuse, à qui la nature a donné des sens pour se remon-
ter elle-même, et pour se garantir jusqu’à un certain
point de tout ce qui tend à la détruire. J’aperçois précisé-
ment les mêmes choses dans la machine humaine avec
cette différence que la nature seule fait tout dans les opé-
rations de la bête, alors que l’homme concourt aux sien-
nes en qualité d’agent libre. »
SARTRE (XX°)
“Ce que nous nommons liberté, c’est l’irréductibilité de
l’ordre culturel à l’ordre naturel.”
Jean-Paul Sartre, Critique de la raison dialectique, 1960,
Gallimard, p. 96.
SPINOZA (XVII°)
“La Nature n’agit pas pour une fin ; cet Etre éternel et
infini que nous appelons Dieu ou la Nature, agit avec la
même nécessité qu’il existe.”
Spinoza, Éthique, 1677, préface de la partie IV
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