Déclaration Des NU Sur Le Droit Des Peuples Autochtones

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APF et HCDH

La Déclaration des
Nations Unies sur les droits

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones :  Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme
des peuples autochtones

Asia Pacific Forum of National Human Rights Institutions


GPO Box 5218
Sydney NSW 1042
Australia
Email: [email protected]
Web: www.asiapacificforum.net

Haut-Commissariat aux droits de l’homme


Section des Peuples Autochtones et des Minorités
Palais des Nations
CH 1211 Genève 10
Suisse
E-mail: [email protected]
www.ohchr.org

Un manuel à l’intention des institutions nationales


des droits de l’homme
Note
Les appellations employées dans la présente publication et la présentation des données qui y figurent
n’impliquent de la part du Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies aucune prise de position quant
au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs
frontières ou limites.

Les cotes des documents de l’Organisation des Nations Unies se composent de lettres majuscules et de
chiffres. La simple mention d’une cote dans un texte signifie qu’il s’agit d’un document de l’Organisation.

HR/PUB/13/2

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des
institutions nationales des droits de l’homme

© Forum Asie-Pacifique des institutions nationales des droits de l’homme et le Haut-Commissariat des
Nations Unies aux droits de l’homme, août 2013

L’APF et le HCDH autorisent la libre reproduction d’extraits de cette publication sous réserve que les éditeurs
soient dûment mentionnés et qu’un exemplaire de la publication comprenant l’extrait soit envoyé aux adresses
suivantes :

Asia Pacific Forum of National Human Rights Institutions


GPO Box 5218
Sydney NSW 1042
Australie

Haut-Commissariat aux droits de l’homme


Section des Peuples Autochtones et des Minorités
Palais des Nations
CH 1211 Genève 10
Suisse

Crédits
Les photographies des Nations Unies sont la propriété de l’Organisation des Nations Unies, qui détient
l’ensemble des droits liés à leur utilisation.

Photographies de la couverture
À gauche : Femmes autochtones Hmong semant des pousses de riz au Vietnam. Photographie ONU/
Kibae Park.

Au centre : Femmes autochtones Yiaku, à Laikipia, au Kenya. Photographie ONU/Samia Slimane.

Rangée inférieure, de gauche à droite : Femme Saami de Norvège pendant la onzième session de
l’Instance permanente des Nations Unies ; photographie ONU/Mark Garten. Enfants autochtones du peuple
Embera, en Colombie ; photographie ONU/Mark Garten. Un frère et une sœur autochtones d’Australie ;
© April Pyle/Amnesty International Australie. Danseur Apache Yellow Bird pendant la cérémonie d’ouverture
de la quatrième session du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones ; photographie
ONU/Jean-Marc Ferré.
La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Table des matières


Remerciements ii
Avant-propos iii
Liste des abréviations iv
Introduction à l’intention des utilisateurs v

Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples
autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre 1

Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration 3


Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination,
intégrité culturelle et droits collectifs 11
Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie,
ainsi que la participation, la consultation et le consentement 21
Chapitre 4 : Le contenu de la Déclaration : les terres, les territoires et les
ressources, le développement respectueux de l’identité, et la
réparation et l’indemnisation 33
Chapitre 5 : La mise en œuvre de la Déclaration 39

Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des


droits de l’homme 45
Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones 47
Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation 61
Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration 75
Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes 87
Chapitre 10 : Enquêtes publiques 97

Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme


au plan international 105
Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme 107
Chapitre 12 : Organes conventionnels 125
Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones 139

Résumé 151

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Remerciements
La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones  : un manuel à l’intention
des institutions nationales des droits de l’homme est un document publié conjointement par le Haut-
Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) et le Forum Asie-Pacifique des
institutions nationales des droits de l’homme (APF).
Le Manuel a été écrit par Andy Gargett, avec l’aide de Katie Kiss, de l’équipe Justice sociale pour les
aborigènes et les insulaires du détroit de Torres de la Commission australienne des droits de l’homme.
Suraina Pasha (APF) et Samia Slimane (HCDH) ont contribué à la rédaction et à l’élaboration du Manuel.
L’APF et le HCDH souhaitent remercier Jesse McCormick et Aruni Jayakody pour leurs contributions
ainsi que James Iliffe et Lisa Thompson qui ont assuré l’édition et la conception du Manuel. Le HCDH
et l’APF sont particulièrement reconnaissants envers Rosslyn Noonan pour les conseils et le soutien
précieux qu’elle a apportés.
La nécessité d’inclure les points de vue et les expériences pratiques des principaux utilisateurs du
Manuel a été prise en compte grâce à l’organisation, par le HCDH, d’une série de consultations avec
des représentants d’institutions nationales des droits de l’homme (INDH) et d’organisations de peuples
autochtones.
Le HCDH et l’APF souhaitent également remercier les INDH suivantes d’avoir rempli le questionnaire qui
a permis de rassembler les informations nécessaires à la réalisation du présent manuel : Afrique du Sud,
Australie, Bolivie (État plurinational de), Canada, Danemark, El Salvador, Équateur, Guatemala, Kenya,
Malaisie, Namibie, Népal, Nouvelle-Zélande, Nicaragua, Nigeria, Panama, Paraguay, Pérou, Philippines
et Venezuela (République bolivarienne du).
Le HCDH et l’APF souhaitent également exprimer leur gratitude à tous ceux qui ont commenté le projet
de Manuel, notamment les INDH d’Afrique du Sud, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, du Swaziland
et de l’Ouganda et les organisations de peuples autochtones  : le Pacte asiatique avec les peuples
autochtones et le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee).

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Avant-propos
Adoptée en 2007 par l’Assemblée générale des Nations Unies, la Déclaration des Nations Unies sur les
droits des peuples autochtones constitue un cadre mondial pour les efforts visant à faire progresser les
droits des peuples autochtones. De même que les autres instruments des droits de l’homme et que la
jurisprudence, de plus en plus volumineuse, dans le domaine des droits des peuples autochtones, la
Déclaration contient des conseils précieux pour construire des sociétés garantissant la pleine égalité et
les droits des peuples autochtones.
La Déclaration a déjà entraîné des améliorations concrètes. Au sein des Nations Unies et des
organisations régionales, les préoccupations des peuples autochtones en matière de droits de l’homme
font désormais partie intégrante d’un grand nombre de débats, consacrés à l’environnement, au
développement, etc. Au niveau national, la Déclaration a inspiré de nouvelles législations ainsi que des
mécanismes permettant de dialoguer avec les peuples autochtones.
En dépit de ces signes positifs, la promesse de la Déclaration est loin d’avoir été universellement
tenue. Comme le démontrent les mécanismes des droits de l’homme, dans de nombreuses régions
du monde, les peuples autochtones continuent d’être systématiquement discriminés et réduits au
silence. Les droits des peuples autochtones sont fréquemment les premières victimes des activités de
développement exercées sur des terres autochtones, souvent menées sans appliquer le principe du
consentement préalable, libre et éclairé et les autres garanties de la Déclaration.
La présente publication – une initiative conjointe du Haut-Commissariat et du Forum Asie-Pacifique des
institutions nationales des droits de l’homme – s’inscrit dans le cadre des efforts constamment déployés
pour combler ces lacunes, promouvoir la Déclaration et faire avancer sa mise en œuvre pratique. Elle a
pour objet de renforcer l’obligation de l’un des principaux acteurs chargés de s’assurer que les droits de
homme, notamment les droits des peuples autochtones, deviennent une réalité : les institutions nationales
des droits de l’homme. Comme le montrent les exemples présentés dans cette publication, les institutions
nationales des droits de l’homme peuvent jouer un rôle crucial en matière de protection et de promotion des
droits des peuples autochtones. En vertu de leur statut juridique et de leur mandat, elles ont la possibilité
d’être de puissants alliés et défenseurs des peuples autochtones. Agissant tel un ciment rassemblant les
sphères nationales, régionales et internationales des droits de l’homme, les institutions nationales des
droits de l’homme sont particulièrement bien placées pour contribuer à la véritable mise en œuvre de la
Déclaration et à la réalisation progressive des droits des peuples autochtones.
La première partie de cette publication présente l’historique et le contexte de la Déclaration, alors que
les deuxième et troisième parties sont consacrées aux mesures que les institutions nationales des droits
de l’homme peuvent prendre aux niveaux national et international pour protéger et promouvoir les droits
des peuples autochtones. La publication est assortie d’un document audio-visuel comprenant des
entretiens avec des autochtones, des représentants d’institutions nationales des droits de l’homme et
des experts internationaux des droits de l’homme.
J’espère que cette publication favorisera un approfondissement de la sensibilisation aux droits des
peuples autochtones au sein des institutions nationales des droits de l’homme, qu’elle les guidera et
qu’elle les soutiendra dans cette tâche essentielle et qu’elle renforcera leur capacité et leur volonté
d’œuvrer auprès des peuples autochtones afin de réaliser les droits affirmés dans la Déclaration.

Navi Pillay
Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme
Août 2013

iii

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Liste des abréviations


APF Asia Pacific Forum of National Human Rights Institutions (Forum Asie-Pacifique des
institutions nationales des droits de l’homme)
Déclaration Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones
EPU Examen périodique universel
HCDH Haut-Commissariat aux droits de l’homme
INDH Institution nationale des droits de l’homme
OIT Organisation internationale du travail
ONG Organisation non gouvernementale

iv

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Introduction à l’intention des


utilisateurs
Le présent manuel a pour objet de soutenir et renforcer les activités menées par les institutions nationales
des droits de l’homme (INDH) – commissions des droits de l’homme ou bureaux du médiateur – en
matière de promotion, de protection et d’exercice des droits des peuples autochtones, en particulier
des INDH créées conformément aux Principes de Paris.1
Il est conçu pour aider ces institutions à approfondir leurs connaissances sur la Déclaration des Nations
Unies sur les droits des peuples autochtones (la Déclaration) en proposant une large interprétation de
la nature juridique des droits qu’il contient, ainsi que des obligations correspondantes auxquelles sont
tenus les États, afin de s’assurer que les droits des peuples autochtones sont pleinement respectés.
Nous espérons que les informations fournies aideront également les leaders des communautés
autochtones et les autres parties prenantes à comprendre comment utiliser les INDH œuvrant dans les
pays où ils vivent.

CONTEXTE
La publication de ce Manuel reflète les conclusions de la 14e Réunion annuelle du Forum Asie-Pacifique des
institutions nationales des droits de l’homme (APF) où il a été convenu que les institutions membres de l’APF
doivent travailler en partenariat afin d’élaborer une trousse à outils visant à promouvoir une compréhension
et une mise en œuvre de la Déclaration2 améliorées. Ce Manuel soutient également les stratégies en vue
d’une action future soulignées dans les conclusions de la Réunion internationale sur le rôle des institutions
nationales des droits de l’homme en matière de promotion de la mise en œuvre de la Déclaration des
Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui s’est tenue à Bangkok en décembre 2009.3 Les
recommandations émises lors de cette réunion ont mis en exergue un certain nombre de stratégies qui
prennent clairement acte du rôle essentiel des INDH en matière de promotion et de protection des droits
de l’homme des peuples autochtones aux niveaux national et local. Plus précisément, il a été indiqué que
les INDH, conjointement avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH),
doivent coopérer afin de proposer des trousses à outils conviviales, adaptées aux contextes locaux et
régionaux, visant à faciliter la mise en œuvre locale et nationale de la Déclaration.

LOGIQUE
En dépit de quelques évolutions positives, la majorité des peuples autochtones continuent d’être
confrontés à des obstacles au plein exercice de leurs droits de l’homme individuels et collectifs :
Les peuples autochtones sont plus susceptibles que les autres de se voir proposer – lorsqu’ils
peuvent y accéder – des services de santé inappropriés et des services d’éducation de mauvaise
qualité. Les plans de développement économique les ignorent fréquemment ou ne prennent
pas suffisamment en considération leurs points de vue et leurs besoins particuliers. D’autres
processus décisionnels ont également souvent tendance à les mépriser ou à être indifférents à
leur contribution. De ce fait, les lois et les politiques élaborées par des majorités qui n’ont que

1 Résolution 48/134 de l’Assemblée générale. Pour en savoir plus sur les Principes de Paris, veuillez consulter  : www.
asiapacificforum.net/members/international-standards.
2 PAF, Réunion des conseillers du Forum – Conclusions, 14e Réunion annuelle, Jordanie, Amman, 3-6 août 2009 ; par. 13.
3 HCDH, Note sur les conclusions de la Réunion internationale sur le rôle des institutions nationales des droits de l’homme en
matière de promotion de la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, Bangkok,
Thaïlande, 16-17 décembre 2009.

Introduction à l’intention des utilisateurs | v

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

peu d’égards pour les préoccupations des autochtones conduisent à des litiges fonciers et à
des conflits relatifs aux ressources naturelles qui menacent la façon de vivre, voire la survie des
peuples autochtones.4
En réponse aux obstacles permanents entravant la réalisation pleine et efficace des droits des peuples
autochtones, des progrès significatifs ont été accomplis en matière d’élaboration des normes internationales
visant à protéger les droits des peuples autochtones au niveau international. Le point d’orgue de ces
progrès a été l’adoption de la Déclaration par l’Assemblée générale en septembre 2007.5
Bien que les INDH soient investies de vastes mandats leur imposant de protéger et de promouvoir tous
les droits de l’homme de l’ensemble des personnes, il existe de bonnes raisons de souhaiter que les
INDH accordent une attention particulière à la situation des droits des peuples autochtones.
Les INDH bénéficient d’une place de choix pour contrôler la mise en œuvre de ces droits par les
États concernés. Le rôle central qu’elles peuvent jouer dans ce domaine a été souligné par plusieurs
organismes et mécanismes du système des Nations Unies, notamment le Conseil des droits de
l’homme,6 l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones,7 le Mécanisme
d’experts sur les droits des peuples autonomes8 et le Rapporteur spécial sur les droits des peuples
autochtones.9 Ce rôle peut être joué par le biais des activités régulièrement exercées par la plupart des
INDH, notamment dans les domaines du plaidoyer, du traitement des plaintes, de l’éducation aux droits
de l’homme, de l’examen et de l’élaboration des lois conformément aux normes relatives aux droits de
l’homme et du contrôle du respect des obligations de leurs États en matière de droits de l’homme.

CONTENU
Le présent Manuel est divisé en trois parties. La première partie présente la toile de fond et le contexte
juridique des droits des peuples autochtones, notamment une analyse du contenu de la Déclaration.
La seconde partie présente les étapes pratiques que les INDH peuvent franchir pour promouvoir la
réalisation des droits des peuples autochtones, en utilisant la Déclaration comme cadre normatif. Des
exemples de bonnes pratiques appliquées par différentes INDH ont été inclus afin d’illustrer des façons
efficaces de mettre en œuvre la Déclaration. Ces exemples ne sont pas exhaustifs, mais ils peuvent
donner des idées aux INDH quant à des méthodes permettant d’incorporer la Déclaration dans leurs
activités habituelles.
La troisième partie présente les actions que les INDH peuvent mener au plan international pour promouvoir
la Déclaration et sa mise en œuvre au niveau national. De nouveau, une sélection d’exemples a été
incluse afin d’illustrer les différentes façons dont les INDH peuvent utiliser le système international des
droits de l’homme pour promouvoir la Déclaration et faire progresser les droits des peuples autochtones.
Chaque chapitre comprend des questions clés, les bases juridiques de l’implication des INDH, un débat
sur les problèmes principaux et un récapitulatif des points clés.
Le DVD-ROM qui complète le Manuel comprend des entretiens avec des représentants d’INDH décrivant
leurs activités visant à protéger, promouvoir et faire respecter les droits des peuples autochtones, ainsi
que des entretiens avec d’éminents spécialistes internationaux.

4 Navanethem Pillay, Haut-Commissaire aux droits de l’homme, article d’opinion publié à l’occasion de la Journée internationale
des peuples autochtones, le 9 août 2009.
5 La Déclaration a été adoptée par l’Assemblée générale le 13 septembre 2007 (résolution 61/295). Une écrasante majorité d’États
a voté pour, mais quatre États (l’Australie, le Canada, les États-Unis d’Amérique et la Nouvelle-Zélande) ont voté contre. Onze
États (l’Azerbaïdjan, le Bangladesh, le Bhoutan, le Burundi, la Colombie, la Géorgie, le Kenya, le Nigeria, la Fédération de Russie,
les Samoa et l’Ukraine) se sont abstenus. En janvier 2012, les quatre pays qui s’étaient opposés à la Déclaration ont choisi de lui
apporter leur soutien.
6 Résolution 15/7, par. 12, du Conseil des droits de l’homme.
7 E/2010/43-E/C. 19/2010/15, par. 53 et 93.
8 A/HRC/12/32, p. 5 ; A/HRC/15/36, p. 3-4 ; et A/HRC/18/43, p. 6.
9 A/64/338, par. 7.

vi | Introduction à l’intention des utilisateurs

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Partie I
La Déclaration des Nations Unies sur
les droits des peuples autochtones :
Contexte, contenu et mise en œuvre

Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration


Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination,
intégrité culturelle et droits collectifs
Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie,
ainsi que la participation, la consultation et le consentement
Chapitre 4 : Le contenu de la Déclaration : les terres, les territoires et les ressources,
le développement respectueux de l’identité, et la réparation et l’indemnisation
Chapitre 5 : La mise en œuvre de la Déclaration

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Introduction à la Partie I
La première partie du Manuel est divisée en cinq chapitres. La Chapitre 1 commence par un bref
historique des événements concernant les peuples autochtones au niveau international et aborde la
question de la définition des peuples autochtones. Le Chapitre 2 traite du contenu de la Déclaration et
examine le droit à l’égalité et à la non discrimination, la culture et la signification des droits collectifs. Le
Chapitre 3 est consacré aux droits des peuples autochtones à l’auto-détermination et à l’autonomie
et s’intéresse également aux droits à la participation et à la consultation. Le Chapitre 4 se penche sur
les droits aux terres, territoires et ressources, ainsi qu’aux mécanismes de recours et d’indemnisation.
Le Manuel n’a pas pour objet de traiter de façon exhaustive de chacun des droits reconnus par la
Déclaration. En revanche, il cherche à présenter les éléments fondamentaux des droits et des questions
thématiques, en les regroupant pour faciliter les recherches mais sans établir de hiérarchie entre eux.
Enfin, le Chapitre 5 traite de l’importance de la Déclaration et de son statut juridique, et introduit la
deuxième partie du Manuel, centrée sur le rôle des institutions nationales des droits de l’homme.

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

Chapitre 1 :
Contexte de la Déclaration
QUESTIONS CLÉS
• Qu’entend-on par « questions relatives aux droits de l’homme des peuples
autochtones » ?
• Comment les peuples autochtones ont-ils été traditionnellement traités
par la communauté internationale ?
• Quels sont les événements qui ont modifié ce traitement traditionnel?
Quels sont les événements internationaux concernant les peuples
autochtones ?
• Quels sont les mécanismes des Nations Unies qui traitent des droits des
peuples autochtones ?
• Qui sont les peuples autochtones du monde?
• Quelles sont les caractéristiques pertinentes de l’identité autochtone ?
• Qu’entend-on par « primauté de l’auto-identification » ?

1. ÉVÉNEMENTS INTERNATIONAUX
CONCERNANT LES PEUPLES AUTOCHTONES
Les peuples autochtones sont reconnus comme les plus vulnérables, les plus désavantagés et les plus
marginalisés du monde. Dispersés dans le monde entier entre l’Arctique et le Pacifique sud, ils compteraient,
selon des estimations approximatives, 370  millions de personnes et vivent dans 90  pays. Bien qu’ils ne
représentent qu’environ cinq pour cent de la population mondiale, les peuples autochtones constituent 15
pour cent des pauvres de la planète et un tiers des personnes du monde vivant dans une extrême pauvreté.10
Chaque peuple autochtone a une culture, une langue, un système juridique et une histoire uniques et
caractéristiques. La plupart des peuples autochtones sont fortement ancrés dans l’environnement et
attachés à leurs terres et territoires traditionnels. Ils ont souvent depuis des générations été chassés
de leurs terres et territoires traditionnels, assujettis, victimes de la destruction de leurs cultures, d’une
discrimination et de violations très répandues de leurs droits de l’homme. Pendant des siècles, ils
ont souffert de la non reconnaissance de leurs institutions politiques et culturelles, et l’intégrité de
leurs cultures a été mise à mal. Par ailleurs, les peuples autochtones ont subi les effets néfastes des
processus du développement, ce qui menace sérieusement leur existence.
Pour réagir aux violations des droits de l’homme, les peuples autochtones et leurs organisations ont
fait du lobbying aux plans national et international afin qu’il soit remédié à ces violations. Après des
décennies pendant lesquelles ils ne se sont vu accorder que peu ou pas d’attention par la communauté
internationale, les peuples autochtones ont de plus en plus gagné en visibilité et se sont fait entendre au
sein des instances internationales.
L’Organisation internationale du travail (OIT) fut la première organisation internationale à s’intéresser
aux questions autochtones et tribales et à souligner la nécessité pour la communauté internationale de
s’intéresser à ces questions et de coopérer pour les traiter. Elle a œuvré en faveur de la protection et de
la promotion des droits des peuples autochtones et tribaux depuis le début des années 1920. L’OIT a
10 Fonds international de développement agricole, Engagement aux côtés des peuples autochtones – Politique, 2009.

Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration | 3

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

élaboré deux instruments internationaux exclusivement consacrés aux peuples autochtones et tribaux :
la Convention relative aux populations aborigènes et tribales, 1957 (n° 107) – désormais fermée à la
ratification – et la Convention relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989 (n° 169).11
Le mouvement moderne des droits autochtones s’est accéléré dans les années 1960 et 1970,
lorsqu’un grand nombre d’organisations non gouvernementales (ONG), dont plusieurs étaient des
organisations s’occupant spécifiquement des peuples autochtones, ont été créées aux plans national
et international. Ces organisations ont mis en lumière la discrimination systémique et les violations des
droits de l’homme auxquelles étaient confrontés les peuples autochtones dans le monde entier. En
1971, la Sous-commission sur la prévention de la discrimination et la protection des minorités a nommé
l’un de ses membres, M. Martinez Cobo, Rapporteur spécial, chargé de réaliser une étude exhaustive
sur la discrimination à l’encontre des peuples autochtones et de recommander des mesures de portée
nationale et internationale en vue d’éliminer cette forme de discrimination. L’étude est désormais
couramment dénommée « Étude de Martinez Cobo ».12
Ces travaux fondateurs ont jeté les bases du système international contemporain des droits de l’homme des
peuples autochtones et ont favorisé la création, en 1982, du premier mécanisme des Nations Unies dont le
mandat est exclusivement centré sur les questions concernant les peuples autochtones : le Groupe de travail
sur les populations autochtones. Ses fonctions principales consistaient à accorder une attention particulière à
l’élaboration de normes relatives aux droits des populations autochtones. Il a achevé l’élaboration d’un projet
de déclaration sur les droits des peuples autochtones en 1993,13 en collaboration avec des participants
gouvernementaux, autochtones et non gouvernementaux. Le projet de déclaration a été adopté en 1994
par la Sous-commission et soumis à la Commission des droits de l’homme, qui a créé son propre groupe
de travail14 en 1995 pour examiner le projet. Il a été adopté par le Conseil des droits de l’homme lors de sa
première session, en juin 2006, par 30 voix pour, 2 voix contre, et 12 abstentions.15
Simultanément, dans l’ensemble du système des Nations Unies, une série d’initiatives accordèrent
une attention accrue aux droits des peuples autochtones, parmi lesquelles la création d’un Fonds de
contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones en 1985,16 la proclamation
de l’Année internationale des peuples autochtones du monde et l’adoption des deux Décennies
internationales consécutives des peuples autochtones du monde, qui ont débuté en 1995.17
Dans la même veine, le système des Nations Unies a créé un certain nombre de mécanismes ayant
pour mandat spécifique de s’occuper des droits de peuples autochtones :
• La première session de l’Instance permanente des Nations Unies18 sur les questions autochtones
s’est tenue en 2002. Cet organe consultatif auprès du Conseil économique et social a pour
11 En faisant œuvre de pionnière, la Convention n° 107 de l’OIT promouvait une approche assimilationniste. Dans les années qui ont
suivi son adoption et à la lumière de l’Étude de Martinez Cobo et des débats tenus pendant les sessions par le mécanisme des
Nations Unies consacré aux peuples autochtones (le Groupe de travail sur les populations autochtones, 1982), les limites de la
Convention n° 107 de l’OIT devinrent évidentes et les peuples autochtones demandèrent de nouvelles normes internationales. En
1988 et en 1989, l’OIT élabora une nouvelle convention – la Convention n° 169 de l’OIT– qui établit un cadre pour la protection
des peuples autochtones relevant du droit international. Depuis, elle sert de document de référence à plusieurs organisations
internationales élaborant des politiques et des programmes concernant les peuples autochtones.
12 “Étude du problème de la discrimination à l’encontre des populations autochtones” (E/1982/34).
13 E/CN.4/Sub.2/1993/26.
14 Groupe de travail chargé d’élaborer un projet de déclaration en application du paragraphe 5 de la résolution 49/214 de l’Assemblée
générale, résolution 1995/32 de la Commission des droits de l’homme.
15 Résolution 2006/2 du Conseil des droits de l’homme.
16 Résolution 40/131 de l’Assemblée générale. Le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones
a été créé pour aider les représentants des communautés et des organisations autochtones à participer aux délibérations du
Groupe de travail sur les populations autochtones. L’Assemblée générale a élargi le mandat du Fonds – résolution 56/140,
résolution 63/161 et résolution 65/198 – afin d’aider les représentants à participer aux sessions de l’Instance permanente, du
Mécanisme d’experts, du Conseil des droits de l’homme et d’autres organes conventionnels relatifs aux droits de l’homme.
17 La résolution 48/163 de l’Assemblée générale des Nations Unies a créé la première Décennie internationale des peuples
autochtones du monde (1995-2004), coordonnée par le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. Une
seconde Décennie (2005-2014) a été créée par la résolution 59/174, et est coordonnée par le Secrétaire général adjoint aux
affaires économiques et sociales. Des fonds d’affectation spéciale ont été créés en 1995 et 2004 afin de financer les projets et
les programmes des deux Décennies.
18 Résolution 2000/22 du Conseil économique et social. Pour en savoir plus, veuillez consulter  : http://social.un.org/index/
IndigenousPeoples.aspx.

4 | Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

mandat d’étudier les questions autochtones en rapport avec le développement économique


et social, la culture, l’environnement, l’éducation, la santé et les droits de l’homme. L’Instance
permanente est également chargée, entre autres, de promouvoir la coordination des activités
liées aux questions autochtones au sein du système des Nations Unies.
• Le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones19 a été créé en 2007 afin de donner
au Conseil des droits de l’homme des conseils thématiques sur les droits des peuples autochtones.
Le Mécanisme d’experts apporte principalement son expertise sous forme d’études et de conseils
sur des questions spécifiques ayant trait aux droits des peuples autochtones. À ce jour, il a travaillé
sur des études relatives aux droits des peuples autochtones à l’éducation, au droit de participer
à la prise de décision, au rôle des langues et de la culture dans la promotion et la protection des
droits et de l’identité des peuples autochtones, et à l’accès des peuples autochtones à la justice.20
• Le mandat du Rapporteur spécial sur le droit des peuples autochtones21 a été institué par la
Commission de droits de l’homme (aujourd’hui le Conseil des droits de l’homme) en 2001.
Le Rapporteur spécial a notamment pour fonction d’examiner la manière et les moyens de
surmonter les obstacles existants à la protection pleine et efficace des droits de l’homme des
peuples autochtones ; d’identifier, échanger et promouvoir les bonnes pratiques ; de recueillir,
demander, recevoir et échanger des informations et des communications émanant de toutes les
sources pertinentes sur les violations présumées de leurs droits de l’homme et de leurs libertés
fondamentales et de formuler des recommandations et des propositions relatives aux mesures et
activités appropriées, destinées à prévenir ces violations et à y remédier.
Les trois mandats peuvent être considérés comme complémentaires. Les mécanismes chargés de ces
mandats se réunissent une fois par an pour coordonner leurs activités et partager les informations dont
ils disposent.
Outre les mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones, un certain nombre d’organes
de suivi des traités relatifs aux droits de l’homme jouent un rôle important en matière de promotion des
droits des peuples autochtones. Par exemple, le Comité des droits de l’homme (qui contrôle la mise
en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques), le Comité pour l’élimination de la
discrimination raciale (qui contrôle la mise en œuvre de la Convention internationale sur l’élimination
de toutes les formes de discrimination raciale), le Comité des droits de l’enfant (qui contrôle la mise en
œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant) et le Comité des droits économiques, sociaux et
culturels (qui contrôle la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux
et culturels) ont constitué une jurisprudence sur les droits des peuples autochtones avant l’adoption de
la Déclaration.
Enfin, l’examen périodique universel (EPU), dans le cadre duquel l’ensemble des États membres des
Nations Unies font l’objet d’un examen relatif à la réalisation de leurs obligations et engagements en
matière de droits de l’homme et effectué par le Conseil des droits de l’homme, se préoccupe de plus
en plus des questions autochtones.
Les actions que les INDH peuvent entreprendre pour promouvoir la Déclaration en interagissant avec
ces mécanismes et procédures et en tirant parti de ceux-ci sont analysées dans la troisième partie du
présent Manuel.
L’adoption de la Déclaration par l’Assemblée générale le 13 septembre 2007 fut l’aboutissement de
plus de deux décennies de négociations qui ont impliqué les États et les peuples autochtones. Elle
constitue l’instrument international le plus complet sur les droits des peuples autochtones. Elle met
l’accent sur les droits collectifs d’une façon sans précédent dans l’histoire du droit international des
droits de l’homme ; elle crée un cadre universel de normes minima pour la survie, la dignité et le bien-
être des peuples autochtones du monde ; et elle donne des précisions sur les normes relatives aux

19 Résolution 6/36 du Conseil des droits de l’homme.


20 Voir : www.ohchr.org/EN/Issues/Peoples/EMRIP/Pages/EMRIPIndex.aspx.
21 Résolution 2001/57 de la Commission des droits de l’homme. Le Conseil des droits de l’homme a poursuivi la mise en œuvre de
ce mandat et, par sa résolution 15/14, le titre « Rapporteur sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales
des populations autochtones » a été transformé en « Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones ».

Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration | 5

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

droits de l’homme et sur les libertés fondamentales existantes en ce qui concerne la situation spécifique
des peuples autochtones.
L’importance de la reconnaissance des droits des peuples autochtones par l’Assemblée générale ne
peut pas être sous-estimée. M. Wilton Littlechild, membre actuel et Président du Mécanisme d’experts
sur les droits des peuples autochtones, exprime ce sentiment :
La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones précise de quelle façon
la Déclaration universelle des droits de l’homme s’applique à notre survie, à notre dignité et à
notre bien-être. Comme un Ancien souhaitait que je vous le dise, « Désormais, je ne suis pas un
objet, je ne suis pas un sujet, je suis un être humain ! »22
Le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-moon, a souligné qu’avec l’adoption de la
Déclaration, le moment est désormais venu de passer à l’action pour faire respecter les droits des
peuples autochtones :
La Déclaration est un geste visionnaire visant à prendre en compte les droits de l’homme des
peuples autochtones. Elle définit un cadre permettant aux États de construire ou reconstruire leurs
relations avec les peuples autochtones. Résultat de plus de deux décennies de négociations,
elle constitue pour les États et les peuples autochtones une occasion importante de renforcer
leurs liens, de promouvoir la réconciliation et de s’assurer que le passé ne se reproduira pas.
J’encourage les États membres et les peuples autochtones à se rassembler dans un esprit de
respect mutuel et à utiliser la Déclaration comme le document vivant qu’elle constitue, de façon
à ce qu’elle ait un effet réel et positif dans le monde entier.23
Le présent Manuel montrera de quelle façon les INDH peuvent jouer un rôle constructif dans ce
processus permanent.

2. QUI SONT LES PEUPLES AUTOCHTONES ?


Un certain nombre d’études ont été consacrées, au sein des instances internationales, à la définition du
concept de « peuples autochtones ».24 Les peuples autochtones se sont opposés à l’adoption d’une
définition officielle applicable au plan international, en soulignant qu’il était nécessaire de faire preuve de
souplesse et de respecter le désir et le droit de chaque peuple autochtone de se définir eux-mêmes.
Tenant compte de cette position, Mme Erica Daes, ancienne Présidente-Rapporteuse du Groupe de
travail sur les populations autochtones, a noté que « les peuples autochtones ont souffert des définitions
qui leur ont été imposées par d’autres ».25
De ce fait, aucune définition officielle n’a été adoptée dans le droit international. Une stricte définition
n’est considérée comme ni nécessaire, ni souhaitable.
L’Étude Martinez Cobo fournit la « définition de travail » des peuples autochtones la plus fréquemment citée :
Par communautés, populations et nations autochtones, il faut entendre celles qui, liées par une
continuité historique avec les sociétés antérieures à l’invasion et avec les sociétés précoloniales
qui se sont développées sur leurs territoires, se jugent distinctes des autres éléments des sociétés
qui dominent à présent sur leurs territoires ou parties de ces territoires. Ce sont aujourd’hui des
22 «  When Indigenous Peoples Win, The Whole World Wins: Address to the United Nations Human Rights Council on the 60th
Anniversary of the Universal Declaration on Human Rights » in Making the Declaration Work : The United Nations Declaration on
the Rights of Indigenous Peoples, C. Charters et R. Stavenhagen (éd.) (2009), p. 374.
23 Secrétaire général des Nations Unies, «  Protect, promote endangered languages, Secretary-General urges in message for
international Day of World’s Indigenous Peoples », 23 juillet 2008 ; disponible à l’adresse suivante : http://www.un.org/News/
Press/docs/2008/sgsm11715.doc.htm
24 Document de travail du Président-Rapporteur, Mme Erica-Irene A. Daes, sur la notion de «peuple autochtone» (E/CN.4/Sub.2/
AC.4/1996/2), par. 68. Voir également le document de travail préparé par le Secrétariat de l’Instance permanente des Nations
Unies sur les questions autochtones (PFII/2004/WS.1/3).
25 Note de la Présidente-Rapporteuse sur les critères qui pourraient être appliqués lors de l’examen de la notion de peuples
autochtones (E/CN.4/Sub.2/AC.4/1995/3/), p. 4.

6 | Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

éléments non dominants de la société et elles sont déterminées à conserver, développer et


transmettre aux générations futures les territoires de leurs ancêtres et leur identité ethnique qui
constituent la base de la continuité de leur existence en tant que peuple, conformément à leurs
propres modèles culturels, à leurs institutions sociales et à leurs systèmes juridiques.26
Elle note également qu’une personne autochtone est :
... la personne qui appartient à une population autochtone par auto-identification (conscience de
groupe) et qui est reconnue et acceptée par cette population en tant que l’un de ses membres
(acceptation par le groupe). Cela laisse aux communautés autochtones le droit et le pouvoir
souverain de décider quels sont leurs membres, sans ingérence extérieure.27
Selon la Convention de l’OIT n° 169, les peuples autochtones sont des descendants de populations « qui
habitaient le pays, ou une région géographique à laquelle appartient le pays, à l’époque de la conquête
ou de la colonisation ou de l’établissement des frontières actuelles de l’Etat » et qui « conservent leurs
institutions sociales, économiques, culturelles et politiques propres ou certaines d’entre elles ».28
Bien qu’elle n’ait pas fourni de définition, la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur les
populations autochtones a dressé la liste des facteurs suivants qui ont été considérés comme utiles à
la compréhension de la notion d’« autochtone » :
a) L’antériorité s’agissant de l’occupation et de l’utilisation d’un territoire donné ;
b) Le maintien volontaire d’un particularisme culturel qui peut se manifester par certains aspects
de la langue, une organisation sociale, des valeurs religieuses ou spirituelles, des modes de
production, des lois ou des institutions ;
c) Le sentiment d’appartenance à un groupe, ainsi que la reconnaissance par d’autres groupes ou
par les autorités nationales en tant que collectivité distincte ; et
d) Le fait d’avoir été soumis, marginalisé, dépossédé, exclu ou victime de discrimination, que cela
soit ou non encore le cas.29
La Présidente-Rapporteuse a souligné que ces facteurs ne constituent pas et ne peuvent pas constituer
une définition exhaustive, qu’il n’est peut être pas souhaitable d’en déduire une définition plus précise
des peuples autochtones mais qu’il est préférable de faire en sorte que, dans la pratique, il existe une
possibilité d’évolution raisonnable et une spécificité régionale de la notion d’« autochtone ».30
Le débat sur la définition des peuples autochtones s’est souvent focalisé sur les peuples africains
et asiatiques. Dans le contexte asiatique, on entend généralement par «  peuples autochtones  » des
groupes culturels distincts, tels que les « Adivasi », les « peuples tribaux », les « tribus montagnardes »
ou les «  tribus répertoriées  », alors qu’en Afrique, certains peuples autochtones sont appelés
«  peuples  pastoraux  », «  groupes vulnérables  » ou  «  chasseurs-cueilleurs  ». En Afrique, on affirme
souvent que tous les peuples africains sont des peuples autochtones d’Afrique. Ceci a fait l’objet d’un
débat au sein du Groupe de travail d’experts sur les peuples/communautés autochtones en Afrique qui
a noté qu’une approche moderne devrait accorder « moins d’importance aux précédentes définitions,
axées sur l’appartenance à la population autochtone, » et être centrée sur :
1) l’auto-identification en tant qu’autochtone et que peuple nettement différent des autres groupes
vivant dans un État ;
2) l’attachement spécial à leurs terres traditionnelles et l’utilisation de ces terres en vertu desquels
leurs terres et territoires ancestraux revêtent une importance fondamentale pour leur survie
collective – physique et culturelle – en tant que peuples ;
26 E/CN.4/Sub.2/1986/7/Add.4, par. 379.
27 Ibid, par. 381 et 382.
28 Article 1(1).
29 E/CN.4/Sub.2/AC.4/1996/2, par. 69.
30 Ibid., par. 70.

Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration | 7

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

3) les expériences d’assujettissement, de marginalisation, de dépossession, d’exclusion ou de


discrimination en raison de leurs cultures, façons de vivre ou modes de production différents du
modèle dominant.31
Il n’existe donc aucune définition universellement admise des peuples autochtones. Bien que le débat
ne soit pas clos, le critère principal de l’auto-identification en tant qu’expression du droit à l’auto-
détermination des peuples autochtones est aujourd’hui largement reconnu.
La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples convient que les Endorois se
considèrent eux-mêmes comme un peuple distinct, partageant une histoire, une culture et une
religion communes. La Commission africaine se réjouit que les Endorois soient un « peuple »,
statut les autorisant à bénéficier des dispositions de la Charte africaine qui protège les droits
collectifs. La Commission africaine estime que les violations présumées de la Charte africaine
sont celles qui s’attaquent aux droits fondamentaux des autochtones, notamment au droit de
préserver leur identité grâce à leur identification aux terres ancestrales.32
Ceci a été réaffirmé dans la Déclaration. L’article 33 stipule que « les peuples autochtones ont le droit
de décider de leur propre identité ou appartenance conformément à leurs coutumes et traditions ». La
Convention de l’OIT n° 169 affirme également que le sentiment d’appartenance indigène est un « critère
fondamental pour déterminer les groupes33 » qui sont autochtones.
Il est important que la compréhension de l’auto-identification informe la pratique des INDH. Cela est
particulièrement important dans les États où les gouvernements ne reconnaissent pas les revendications
légitimes d’un peuple se considérant lui-même comme autochtone. Au-delà de la controverse autour
des questions relatives à la définition, il est indispensable de prendre en compte les problèmes liés aux
droits de l’homme auxquels sont confrontés les peuples autochtones. La deuxième partie du présent
Manuel donne des exemples d’implications d’INDH dans des situations où des gouvernements ne
respectent pas les droits des peuples autochtones ou ne reconnaissent pas l’existence de peuples
autochtones. L’absence d’une définition officielle ne doit pas constituer un obstacle à la résolution des
problèmes liés aux droits de l’homme affectant les peuples autochtones. 34

Lors du vote sur la Déclaration, le Bangladesh s’est abstenu. Expliquant


sa position après le scrutin, le Bangladesh a précisé que la Déclaration
contenait certaines ambiguïtés, notamment que les « peuples autochtones »
n’avaient été en aucune façon identifiés ou explicitement définis.
La Commission bangladaise des droits de l’homme a été créée en 2009.
Les activités de lobbying sur les questions relatives aux droits de l’homme
intéressant les Adivasi (peuples autochtones) constituent l’un des piliers
du plan stratégique de cinq ans adopté par la Commission. La Commission
est en mesure de faire entendre sa voix et d’attirer l’attention du public
sur les questions relatives aux droits de l’homme intéressant les peuples
autochtones.34

31 Rapport du Groupe de travail d’experts sur les peuples/communautés autochtones de la Commission africaine, adopté par la
Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (2003), p. 92-93.
32 Centre for Minority Rights Development (Kenya) and Minority Rights Group International on behalf of Endorois Welfare Council v
Kenya, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 276/2003 (4 février 2010), par. 162.
33 Article 1(2).
34 Commission nationale bangladaise pour les droits de l’homme, Strategic Plan of the National Human Rights Commission 2010-
2015 ; disponible à l’adresse suivante : www.nhrc.bd.

8 | Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

POINTS CLÉS : CHAPITRE 1


• Les peuples autochtones ont des cultures, langues, systèmes juridiques
et histoires uniques et distincts. La plupart ont des liens étroits avec
l’environnement et leurs terres et territoires traditionnels. Il est également
fréquent qu’ils aient hérité d’un déplacement hors des terres et territoires
traditionnels, d’un assujettissement, d’une destruction de leurs cultures,
d’une discrimination et de violations récurrentes de leurs droits de
l’homme.
• Après des décennies pendant lesquelles ils ne se sont vu accorder que
peu ou pas d’attention par la communauté internationale, les peuples
autochtones ont gagné en visibilité et se sont fait entendre au sein des
instances internationales.
• L’Étude Martinez Cobo a contribué à jeter les bases du système moderne
et international des droits de l’homme des peuples autochtones.
• La Déclaration est l’instrument le plus complet sur les droits des peuples
autochtones.
• Le système des Nations Unies n’a pas élaboré une définition stricte
des « peuples autochtones » qui pourrait ne pas fonctionner dans tous
les contextes et pourrait s’avérer, selon les cas, insuffisamment ou
démesurément inclusive.
• L’auto-identification est un critère clé de la détermination d’un groupe de
personnes ou d’un individu en tant qu’autochtone.

Chapitre 1 : Contexte de la Déclaration | 9

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

Chapitre 2 :
Le contenu de la Déclaration :
égalité et non discrimination,
intégrité culturelle et droits collectifs
QUESTIONS CLÉS
• Qu’entend-on par « discrimination formelle » et par « discrimination de fait » ?
• Pourquoi est-il nécessaire d’adopter des mesures spéciales pour les
peuples autochtones ?
• Qu’est-ce qu’une culture autochtone ?
• En quoi les droits collectifs diffèrent-ils des droits individuels ?
• Pourquoi les droits collectifs sont-ils importants pour les peuples
autochtones ?

1. LE DROIT À L’ÉGALITÉ ET
À LA NON-DISCRIMINATION
La non-discrimination et l’égalité sont des composantes fondamentales du droit international des droits
de l’homme et sont indispensables à l’exercice et la jouissance des droits civils, politiques, économiques,
sociaux et culturels.
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a précisé que le terme « non-discrimination »
ne signifie pas qu’il soit nécessaire d’appliquer un traitement uniforme lorsqu’il existe des différences
importantes entre la situation d’une personne ou d’un groupe et celle d’une autre personne ou d’un
autre groupe, ou, en d’autres termes, s’il existe une raison objective et raisonnable d’appliquer un
traitement différencié.35 Il est important que les États prennent en considération les caractéristiques
particulières des peuples autochtones lorsqu’ils appliquent dans leur législation et dans la pratique le
principe de non-discrimination.
La Déclaration prévoit que les autochtones, peuples et individus, sont libres et égaux à tous les autres
et ont le droit de ne faire l’objet, dans l’exercice de leurs droits, d’aucune forme de discrimination.36 Elle
demande expressément aux États de prendre des mesures pour combattre les préjugés et éliminer la
discrimination ; promouvoir de bonnes relations entre les peuples autochtones et non autochtones ; et
mettre en œuvre des mécanismes efficaces visant à prévenir et à pallier toute forme de propagande
dirigée contre des peuples autochtones dans le but d’encourager la discrimination raciale ou ethnique
ou d’y inciter.37

35 Recommandation générale n° 32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention
internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination.
36 Article 2.
37 Article 15 (2)

Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs | 11

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Le droit à l’égalité et à la non-discrimination exige des États qu’ils combattent à la fois la discrimination
formelle et concrète et la discrimination de facto. L’élimination de la discrimination formelle peut exiger
d’un État que sa Constitution, sa législation, ses réglementations ou ses politiques n’exercent pas de
discrimination envers les peuples autochtones. L’élimination de la discrimination de facto exige des
États qu’ils appliquent des lois et des politiques favorisant l’égalité réelle des peuples autochtones dans
la jouissance de leurs droits. En raison de l’obligation d’éliminer la discrimination et d’organiser l’égalité,
les États sont tenus de réglementer la conduite des acteurs publics et privés, et de mettre en œuvre des
politiques assurant une réelle égalité.38
Dans le contexte des peuples autochtones, le droit à l’égalité et à la non-discrimination est considéré
comme offrant une double protection. D’une part, il concerne plus spécialement les conditions
intrinsèquement requises pour préserver le mode de vie des peuples autochtones et, d’autre part, il
accorde une attention particulière aux attitudes et comportements qui excluent les peuples autochtones
de la société au sens large ou les tiennent à l’écart de celle-ci.39
Le Mécanisme d’experts a noté, cependant, que certains États semblent percevoir un conflit entre les
droits garantis par la Déclaration et le principe d’égalité. En effet, certains d’entre eux considèrent que le
principe d’égalité interdit aux États de traiter un groupe différemment d’un autre groupe. En particulier,
certains États interprètent le droit à l’égalité comme interdisant les programmes spécialisés destinés
aux peuples autochtones. Le Mécanisme d’experts a néanmoins souligné que, pour parvenir à l’égalité
réelle, il peut s’avérer nécessaire de traiter les peuples autochtones comme un groupe distinct confronté
à des circonstances exceptionnelles.40 De même, la Commission interaméricaine des droits de l’homme
a considéré comme un principe bien établi du droit international que le traitement inégal de personnes
se trouvant dans une situation inéquitable n’est pas assimilable à une discrimination.41 Dans la même
veine, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a estimé que :
... traiter de manière égale des personnes ou des groupes dont les situations sont objectivement
différentes constituera en effet une discrimination, de même que le fait de traiter de façon inégale
des personnes dont les situations sont objectivement identiques.42
La Convention n° 169 de l’OIT, la Cour interaméricaine des droits de l’homme et les organes conventionnels
de l’Organisation des Nations Unies ont pris acte de la nécessité de « mesures spéciales » pour les
peuples autochtones. Ce sont des mesures destinées à remédier à une discrimination passée ou à
corriger des inégalités contemporaines.
Certains ont estimé que des mesures spéciales sont nécessaires pour les peuples autochtones en
raison de leur plus grande vulnérabilité, de leurs expériences historiques de marginalisation et de
discrimination et des répercussions démesurées que les violations des droits de l’homme continuent
d’avoir sur eux.43 Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a expressément considéré
que lorsque la discrimination à l’encontre d’un groupe particulier s’est généralisée, les États doivent
adopter une approche systématique visant à éliminer ladite discrimination.44

38 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, observation générale n° 20 (2009) sur la non-discrimination dans l’exercice
des droits économiques, sociaux et culturels.
39 E/CN.4/1989/, par. 5
40 A/HRC/EMRIP/2012/4, par. 87.
41 Saramaka People v Suriname, Cour interaméricaine des droits de l’homme, Jugement du 28 novembre 2007, Série C n° 172,
par. 103.
42 Recommandation générale n° 32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention
internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination.
43 Voir par exemple Comité des droits de l’homme, observation générale n° 18 (1989) sur la non-discrimination, par. 10 ; Comité
pour l’élimination de la discrimination raciale, observation générale n° 32 (2009) concernant la signification et la portée des
mesures spéciales dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination, par. 15 ; Commission
interaméricaine des droits de l’homme, Indigenous and Tribal Peoples’ Rights Over Their Ancestral Lands and Natural Resources :
Norms and Jurisprudence of the Inter-American Human Rights System (OEA/Ser.L/V/II. Doc. 56/09, 2009), par. 18. Voir également
les Preliminary Observations of the Inter-American Commission on Human Rights on its Visit to Honduras, 15-18 May 2010 (DOC
OEA/Ser.L/V/II. Doc. 68), par. 26.
44 Observation générale n° 20 (2009) sur la non-discrimination dans l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

12 | Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a attiré l’attention sur la distinction qu’il convient
d’opérer entre, d’une part, les mesures spéciales et temporaires visant au développement des groupes
ethniques et, d’autre part, les droits permanents des peuples autochtones.45 Il a précisé que les droits
des peuples autochtones, notamment les droits aux terres traditionnellement occupées par eux, sont
des droits permanents qui ne doivent pas être confondus avec des mesures spéciales et temporaires.
«  Les États parties doivent soigneusement respecter la distinction entre mesures spéciales et droits
permanents dans leur législation et leur pratique. Cette distinction signifie que les personnes qui peuvent
se prévaloir de droits permanents peuvent également bénéficier de mesures spéciales. »46
Une telle approche peut fréquemment obliger les États à consacrer davantage de ressources aux
groupes particulièrement vulnérables.47 Lorsqu’ils adoptent des mesures visant à assurer l’égalité réelle,
il est important que les États facilitent également l’exercice par les peuples autochtones de leur droit de
participer à la prise de décision sur des questions qui les concernent. Les États doivent faire en sorte
que des mesures spéciales soient conçues et mises en œuvre conformément à la consultation préalable
des communautés affectées et avec la participation active de ces communautés.48 Toutefois, l’adoption
de mesures spéciales ne doit pas compromettre la reconnaissance des droits des peuples autochtones
en tant que droits distincts et permanents.49
La reconnaissance – par certains États – des droits fonciers détenus collectivement par des peuples
autochtones fournit des exemples de mesures spéciales.50 Dans le cadre de l’affaire Endorois, la
Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a estimé que ces mesures spéciales sont
nécessaires pour remédier à la discrimination à laquelle les peuples autochtones ont été confrontés
dans le cadre d’un système de propriété qui ne reconnaissait pas les droits de propriété collectifs des
peuples Endorois.51 Dans le cadre de l’affaire Saramaka, la Cour interaméricaine a estimé que :
... l’objet et le but des mesures spéciales requises au nom des membres de communautés
tribales et autochtones sont de garantir qu’ils puissent continuer à vivre de façon traditionnelle,
et que leur identité culturelle, structure sociale, système économique, coutumes, croyances et
traditions distincts soient respectés, garantis et protégés par les États.52
Le Rapporteur spécial sur les droits des populations autochtones a fait remarquer qu’une approche
holistique doit être adoptée lorsqu’il s’agit d’élaborer des mesures spéciales visant à remédier à des
inégalités. En particulier, les politiques destinées à lutter contre les inégalités réelles ne doivent pas se
limiter aux aspects sociaux et économiques de la vie des autochtones, et doivent également prendre en
compte le droit à l’autodétermination, le droit de conserver des identités culturelles distinctes et le droit
de conserver des liens avec leurs terres ancestrales.53 Par conséquent, les efforts visant à remédier aux
inégalités réelles doivent être adoptés en collaboration avec les peuples autochtones, en leur permettant
de prendre en main leurs propres affaires, conformément à leurs cultures et à leurs croyances.

45 CERD/C/NZL/CO/17 (2007), par. 15.


46 Recommandation générale n° 32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention
internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination.
47 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, observation générale n° 20 (2009) sur la non-discrimination dans l’exercice
des droits économiques, sociaux et culturels, par. 39.
48 Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, “Final study on indigenous peoples and the right to participate in
decision-making” (A/HRC/EMRIP/2011/2).
49 Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, « Etude sur le Rôle des langues et de la culture dans la promotion
et la protection des droits et de l’identité des peuples autochtones» (A/HRC/EMRIP/2012/3), par. 87. Voir également Comité pour
l’élimination de la discrimination raciale, observation générale n° 32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures
spéciales dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination, par. 15.
50 Saramaka People v Suriname, Cour interaméricaine des droits de l’homme, Jugement du 28 novembre 2007, Série C n° 172 ;
Yakye Axa Indigenous Community v Paraguay, Cour interaméricaine des droits de l’homme, Jugement du 17 juin 2005, Série C
n° 125 ; Mayagna (Sumo) Awas Tingni Community v Nicaragua, Cour interaméricaine des droits de l’homme, Jugement du 31
août 2001, Série C n° 79.
51 Centre for Minority Rights Development (Kenya) and Minority Rights Group International on behalf of Endorois Welfare Council v
Kenya, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 276/2003 (4 février 2010), par. 196.
52 Saramaka People v Suriname, Cour interaméricaine des droits de l’homme, Jugement du 28 novembre 2007, Série C n° 172,
par. 32.
53 Rapporteur spécial sur la situation des peuples autochtones en Australie, « The situation of indigenous peoples in Australia »
(A/HRC/15/37/Add.4, 2010), par. 53.

Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs | 13

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

La Déclaration accorde également une attention particulière à la situation des femmes et des enfants
autochtones et exige qu’ils soient pleinement protégés contre toutes les formes de discrimination.54 En
particulier, tous les droits reconnus dans la Déclaration doivent être garantis de la même façon à tous
les autochtones, hommes et femmes.55 Il est important de souligner que les politiques discriminatoires
à l’égard des peuples autochtones peuvent avoir des répercussions démesurées sur les femmes
autochtones en raison de leur sexe.56 Le Mécanisme d’experts a salué les programmes nationaux
qui, non contents de chercher à remédier aux déséquilibres entre les peuples non autochtones et les
peuples autochtones, visent tout particulièrement à garantir l’égalité entre les hommes et les femmes
autochtones.57 À cet égard, il est important que les États aident les femmes autochtones à prendre leur
destin en main, qu’ils veillent à les faire participer à la conception, à la mise en œuvre et au suivi des
programmes, et qu’ils s’appuient sur les initiatives prises par les femmes autochtones.
Parfois, des tensions ont été perçues entre le droit à l’égalité et le droit des peuples autochtones à
la culture. Il a été affirmé que les traditions et coutumes autochtones peuvent être discriminatoires,
notamment à l’égard des femmes. Par exemple, certaines pratiques culturelles peuvent faire obstacle
à l’éducation des filles ou empêcher les femmes d’hériter de terres ou de participer aux processus de
prise de décisions.58Le Mécanisme d’experts a prévenu que de telles pratiques ne doivent pas être
évaluées d’un point de vue non autochtone. Ce qui peut être perçu comme une discrimination doit être
replacé dans les contextes historiques et les pratiques culturelles autochtones. Lors de l’évaluation de
telles pratiques, il faut accorder la priorité au point de vue de la victime de la pratique discriminatoire
présumée. De fait, le point de vue des femmes autochtones est souvent unique et différent de ceux des
femmes non-autochtones. Néanmoins, la discrimination à l’encontre des personnes doit être éliminée.59

Des femmes Wayuu – peuple faisant partie du groupe autochtone le plus important de Colombie – subviennent à leurs besoins grâce à l’artisanat,
dans le village de Pessuapa, près de la frontière avec le Venezuela. Photo ONU/Gill Fickling.

54 Article 22 (2).
55 Article 44.
56 Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, recommandation générale n° 25 (2000) sur la dimension sexiste de la
discrimination raciale, par. 2.
57 A/HRC/EMRIP/2012/4, par. 69.
58 Organisation internationale du travail, Indigenous & Tribal Rights in Practice, A Guide to ILO Convention No. 169 (2009).
59 A/HRC/EMRIP/2012/3, par. 86-87.

14 | Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

L’article 46(2) de la Déclaration stipule que toute restriction doit être «  conforme aux obligations
internationales relatives aux droits de l’homme  ». Elle doit par ailleurs être «  non discriminatoire et
strictement nécessaire à seule fin d’assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d’autrui
et de satisfaire aux justes exigences qui s’imposent dans une société démocratique ».

2. IDENTITÉ DISTINCTE ET INTÉGRITÉ


CULTURELLE
La culture des peuples autochtones fait partie intégrante de leur identité. Dans de nombreux cas, l’impact
des politiques assimilationnistes sur les langues et les cultures des peuples autochtones a été extrêmement
préjudiciable, et a menacé la continuation de l’existence culturelle des peuples autochtones.
La Déclaration prévoit la protection de l’identité distincte et de l’intégrité culturelle des peuples
autochtones par l’intermédiaire :
• Du droit de maintenir et de renforcer leurs institutions culturelles distinctes60
• Du droit d’appartenir à une communauté ou à une nation autochtone, conformément aux
traditions et coutumes de la communauté ou de la nation considérée61
• Du droit d’observer, de revivifier et de transmettre leurs traditions culturelles et leurs coutumes62
• Du droit de contrôler leurs propres systèmes et établissements scolaires où l’enseignement est
dispensé dans leur propre langue63
• Du droit de promouvoir, de développer et de conserver leurs structures institutionnelles et leurs
coutumes, spiritualité, traditions et systèmes juridiques64
• Du droit de préserver, de contrôler, de protéger et de développer leur patrimoine culturel et leur
savoir traditionnel65
• Du droit de ne pas subir d’assimilation forcée ou de destruction de leur culture.66
• Dans ce contexte, il convient de souligner que l’article 8 (j) de la Convention sur la diversité biologique
exige de chaque Partie contractante qu’elle « respecte, préserve et maintien[e] les connaissances,
innovations et pratiques des communautés autochtones et locales qui incarnent des modes de
vie traditionnels présentant un intérêt pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité
biologique et en favorise l’application sur une plus grande échelle, avec l’accord et la participation
des dépositaires de ces connaissances, innovations et pratiques et encourage le partage équitable
des avantages découlant de l’utilisation de ces connaissances, innovations et pratiques ».
Les États sont également tenus de mettre en place des mécanismes de prévention et de réparation
efficaces visant tout acte qui prive les autochtones de leur intégrité en tant que peuples distincts, de
leurs valeurs culturelles ou leur identité ethnique et toute forme d’assimilation ou d’intégration forcée.67
Le Mécanisme d’experts a fourni la définition suivante, non exhaustive, des cultures autochtones :
Les cultures des peuples autochtones comprennent les expressions matérielles et immatérielles
de leurs modes de vie, réalisations et créativité et sont la manifestation de leur autodétermination
et de leurs relations spirituelles et physiques avec leurs terres, territoires et ressources. La culture
autochtone est une notion holiste reposant sur des valeurs matérielles et spirituelles communes
et elle comprend des expressions qui lui sont uniques du point de vue de la langue, de la
60 Article 5.
61 Article 9.
62 Article 11.
63 Articles 14 et 15. Voir également A/HRC/EMRIP/2012/3.
64 Article 34.
65 Article 31.
66 Article 8 (1).
67 Article 8 (2).

Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs | 15

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

spiritualité, de l’appartenance, des arts, de la littérature, des savoirs traditionnels, des coutumes,
des rituels, des cérémonies, des modes de production, des fêtes, de la musique, des sports et
des jeux traditionnels, du comportement, des habitudes, des outils, du logement, du vêtement,
des activités économiques, de la morale, des systèmes de valeur, des cosmologies, des lois et
des activités telles que la chasse, la pêche et la cueillette.68
Le Comité des droits de l’homme a jugé que, pour les peuples autochtones, le droit à la culture peut
exiger qu’un ensemble d’autres droits soient également respectés. Ceux-ci peuvent inclure le droit de
participer à des activités coutumières ;69 le droit d’accéder à des terres, territoires et ressources ;70 le
droit à la famille ;71 et le droit de participer aux processus décisionnels qui affectent leurs droits culturels.72
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a demandé aux États de «  reconnaître que
la culture, l’histoire, la langue et le mode de vie propres des populations autochtones enrichissent
l’identité culturelle d’un État, de les respecter en tant que telles, et de promouvoir leur préservation »,
d’« offrir aux populations autochtones un environnement se prêtant à un développement économique
et social durable, qui soit compatible avec leurs caractéristiques culturelles » et de « veiller à ce que
les collectivités autochtones puissent exercer leurs droits d’observer et de revitaliser leurs traditions
culturelles et leurs coutumes, ainsi que de préserver et d’utiliser leurs langues. »73
Par ailleurs, la notion de spiritualité autochtone est intrinsèquement liée à la culture. L’adoption de
politiques qui promeuvent certaines religions ou qui interdisent les pratiques spirituelles autochtones, ou
l’incapacité des dispositions législatives ou d’autres institutions gouvernementales, telles que la police
et les tribunaux, à respecter les pratiques spirituelles autochtones, peuvent compromettre le droit à la
culture. Le Mécanisme d’experts a attiré l’attention sur le droit des peuples autochtones au rapatriement
de leurs objets de culte et restes humains, ce qui peut exiger la coopération de personnes ou
d’organisations œuvrant sur les lieux où ces objets et restes sont entreposés, par exemple les musées.74
Tout en saluant les efforts déployés pour promouvoir la diversité culturelle grâce à des politiques et des
programmes qui cherchent à soutenir les aspects esthétiques de l’expression culturelle, le Rapporteur
spécial sur les droits des peuples autochtones a souligné que les États doivent s’engager de la même
façon à reconnaître la diversité culturelle sous toutes ses formes, y compris les structures politiques et
sociales, les modes d’utilisation des terres et les approches du développement.75
Le Mécanisme d’experts a par ailleurs souligné que les femmes et les enfants autochtones sont
souvent d’importants dépositaires de la culture.76 Néanmoins, ils peuvent aussi être affectés de façon
disproportionnée par des violations du droit à la culture. De ce fait, le Comité des droits de l’enfant a
jugé que les États peuvent être contraints d’adopter des mesures spéciales visant à faciliter la réalisation
du droit à la culture des peuples autochtones.77 En adoptant de telles mesures, les États doivent tenir
compte de l’importance du caractère collectif de la jouissance – par les enfants autochtones – du droit
68 A/HRC/EMRIP/2012/3, par. 51-52. Voir également Comité des droits de l’homme, observation générale n° 23 (1993) sur l’article
27 (les droits des minorités), par. 7 ; et Comité des droits économiques, sociaux et culturels, observation générale n° 21 (2009)
sur le droit à la culture, par. 10.
69 Lansman v Finland, Communication n° 511/1992, points de vue adoptés le 26 octobre 1994.
70 Bernard Ominayak, Chief of the Lubicon Lake Band v Canada, Communication n° 167/1984, points de vue adoptés le 26 mars
1990. Voir également Comité des droits de l’homme, observation générale n° 23 (1993) sur l’article 27 (les droits des minorités),
par. 3.2 et 7.
71 Hopu & Bessert v France, Communication n° 549/1993, points de vue adoptés le 29 juillet 1997.
72 Mahuika v New Zealand, Communication n° 547/1993, points de vue adoptés le 15 novembre 2000. Le Comité des droits
de l’homme a jugé que le droit à l’autodétermination est lié de façon intrinsèque au droit à la culture. Le Comité a jugé qu’afin
de faciliter l’application des articles 1 et 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, les États sont tenus
d’accorder aux peuples autochtones davantage d’influence sur les processus décisionnels relatifs aux questions qui affectent leur
environnement naturel, leurs moyens de subsistance et leur culture. Voir également Comité des droits de l’homme, « Observations
finales sur les États-Unis d’Amérique » (15 septembre 2006), par. 37 ; et Comité sur les droits économiques, sociaux et culturels,
observation générale n° 21 (2009) sur le droit de chacun à prendre part à la vie culturelle, par. 3, 7 et 36-37.
73 Recommandation générale n° 23 (1997) sur les peuples autochtones.
74 A/HRC/EMRIP/2012/3, par. 56-61.
75 « La situation des peuples autochtones au Botswana » (A/HRC/15/37/Add.2), par. 30.
76 A/HRC/EMRIP/2012/3, par. 79.
77 Comité des droits de l’enfant, observation générale n° 11 (2009) sur les enfants autochtones et leurs droits au titre de la
Convention.

16 | Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

à leurs cultures et de la nécessité d’inclure les peuples autochtones dans les décisions concernant
les intérêts supérieurs des enfants, y compris de la nécessité de respecter la sensibilité culturelle.78
L’enseignement des langues est l’un des piliers de la préservation des cultures des peuples autochtones.
Il est important de prendre des mesures efficaces pour préserver les langues autochtones et de veiller
à ce que les enfants autochtones apprennent dans leur langue pendant leurs premières années de
scolarisation et bénéficient d’une éducation multiculturelle qui ne dévalorise pas leur identité culturelle
autochtone.

3. IMPORTANCE DES DROITS COLLECTIFS


Les articles 1 et 2 de la Déclaration stipulent que les peuples autochtones ont le droit, à titre collectif
ou individuel, de jouir pleinement de l’ensemble des droits de l’homme et des libertés fondamentales et
de ne faire l’objet d’aucune forme de discrimination. La déclaration accorde la prééminence aux droits
collectifs à un degré sans précédent dans le droit international des droits de l’homme.
Il est fréquent que les peuples autochtones organisent leurs sociétés en tant que groupe. Le Mécanisme
d’experts a expliqué la dimension collective du mode de vie des peuples autochtones :
Les valeurs de responsabilité collective et de respect des anciens, des ancêtres, des esprits et
de la communauté sont souvent au cœur des cultures autochtones et guident le comportement
quotidien des autochtones […] Les peuples autochtones sont dotés de structures et d’institutions
uniques qui ont évolué au fil du temps. Ces structures partent souvent de la famille, l’unité de
base, pour s’étendre aux institutions communautaires et sociales, et sont généralement régies
par le droit autochtone et les enseignements sacrés.79

Père et fille Squamish. Bella Bella, nation Heiltsuk, Canada. Photo ONU/John Isaac.

78 Ibid.
79 A/HRC/EMRIP/2012/3, par. 53-54.

Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs | 17

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Compte tenu du caractère collectif inhérent aux cultures autochtones, les droits individuels ne sont
pas toujours suffisants pour refléter pleinement les droits des peuples autochtones. Les droits énoncés
dans la Déclaration cherchent à protéger, outre les droits individuels, les droits collectifs des peuples
autochtones car la reconnaissance de ces droits est nécessaire pour assurer la continuation de
l’existence, du développement et du bien-être des peuples autochtones en tant que peuples distincts.
L’expérience suggère que si les droits collectifs des peuples autochtones ne sont pas respectés, ces
cultures risquent de disparaître sous le joug de l’assimilation que leur inflige la société dominante.
La notion selon laquelle les peuples autochtones peuvent détenir des droits – tels que le droit à la
propriété – en tant que groupe est conforme au principe de non-discrimination et au droit à la culture.
Par exemple, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a demandé à un État partie des
informations relatives à la protection des droits collectifs des peuples autochtones liés à leurs savoirs
traditionnels et leur patrimoine culturel, y compris leurs terres ancestrales, en tant que partie intégrante
de leur identité culturelle.80 La Cour interaméricaine et la Commission des droits de l’homme ont
confirmé dans un certain nombre de cas que les peuples autochtones détiennent des droits collectifs à
la propriété de leurs terres et de leurs ressources.
Par exemple, dans l’affaire Mayagna (Sumo) Awas Tingni vs Nicaragua, la Cour a jugé que :
… parmi les peuples autochtones, il existe une tradition communautaire relative à une forme
commune de propriété collective de la terre, selon laquelle la propriété de la terre ne s’articule
pas autour d’une personne mais plutôt d’un groupe et de sa communauté. Du fait même de leur
existence, les groupes autochtones ont le droit de vivre librement sur leur territoire ; les liens étroits
des peuples autochtones avec la terre doivent être reconnus et compris comme constituant la
base de leurs cultures, de leur vie spirituelle, de leur intégrité et de leur survie économique.81
La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a abondé dans le même sens et a
reconnu les droits collectifs aux terres dans l’affaire Endorois.82
Les organes conventionnels des Nations Unies et le Mécanisme d’experts ont reconnu la nécessité de
faciliter le respect des droits collectifs. Par exemple, l’élément collectif inhérent aux cultures autochtones
trouve un écho dans leur éthique traditionnelle du travail, leurs valeurs communes et leurs structures
sociétales fondées sur l’unité familiale. Au sein des communautés autochtones, ces valeurs se sont
notamment exprimées par le truchement de mécanismes tels que le conseil des anciens, qui est
traditionnellement habilité à résoudre les problèmes de la communauté.
Le Mécanisme d’experts a noté que les contraintes imposées par les instances gouvernementales et
administratives ont fragilisé les mécanismes traditionnels qui donnent corps à l’aspect collectif sous-
jacent aux cultures autochtones.83 En effet, les exigences des gouvernements visant à ce que les
peuples autochtones s’organisent d’une façon acceptable pour les gouvernements peuvent ne pas
être adaptées aux formes d’organisation autochtones et peuvent porter atteinte à leurs cultures.
Par ailleurs, la Déclaration cherche à protéger et à préserver les savoirs traditionnels des peuples autochtones,
notamment les expressions culturelles, ainsi que les ressources génétiques. En matière de propriété
intellectuelle, de nombreux cadres juridiques actuels privilégient la défense des individus au détriment
des intérêts des communautés ou des groupes de personnes, et ne réussissent donc pas à protéger de
façon appropriée les droits collectifs des peuples autochtones.84 Le Mécanisme d’experts a souligné la
nécessité – pour les mécanismes juridiques internationaux – de combler ces lacunes et d’accorder toute
leur attention à la protection des droits des peuples autochtones relevant de la Déclaration.85

80 « Observations finales sur l’Argentine » (14 décembre 2011), par. 12 et 25.


81 Mayagna (Sumo) Awas Tingni Community v Nicaragua, Cour interaméricaine des droits de l’homme, Jugement du 31 août 2001,
Série C n° 79, par. 149.
82 Centre for Minority Rights Development (Kenya) and Minority Rights Group International on behalf of Endorois Welfare Council v
Kenya, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 276/2003 (4 février 2010).
83 A/HRC/EMRIP/2012/3, par. 52 et 55.
84 Ibid., para. 62.
85 Ibid.

18 | Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

Des problèmes d’ordre pratique peuvent se poser lorsqu’il s’agit de déterminer qui peut représenter les
bénéficiaires des droits collectifs. Les difficultés peuvent s’avérer particulièrement difficiles à surmonter
pour remplir les obligations liées à l’acquisition d’un consentement préalable, libre et éclairé, mettre en
place un partage des avantages juste et équitable ou exploiter les voies de recours légales. Le Mécanisme
d’experts a souligné que, lorsqu’il est difficile de déterminer qui sont les représentants légitimes, les
communautés autochtones devraient être autorisées à résoudre ces problèmes conformément à leurs
coutumes, à leur culture et à leurs institutions décisionnelles.86

Enfant jouant avec le poster de la Journée internationale des peuples autochtones du monde. Siège des Nations Unies, New York.
Photo ONU/Stephenie Hollyman

86 Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, «  Rapport de suivi sur les peuples autochtones et le droit de
participer à la prise de décisions, l’accent étant mis sur les industries extractives » (A/HRC/EMRIP/2012/2), par. 15-16.

Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs | 19

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones a identifié des mécanismes juridiques
prévoyant la consultation générale des peuples autochtones pour toutes les questions affectant
directement leurs intérêts, ainsi que l’obligation de fournir des informations complètes à tous les stades
du processus décisionnel, comme étant des pratiques exemplaires susceptibles de garantir les droits
collectifs des peuples autochtones.87 La reconnaissance juridique des villages autochtones en tant
qu’unités administratives est une autre pratique exemplaire saluée par le Rapporteur spécial.88

POINTS CLÉS : CHAPITRE 2


• L’élimination de la discrimination formelle peut exiger d’un État que
sa constitution, sa législation et/ou ses politiques n’exercent pas de
discrimination envers les peuples autochtones.
• L’élimination de la discrimination de facto peut exiger des États qu’ils
appliquent des lois et des politiques favorisant l’égalité réelle des peuples
autochtones dans la jouissance de leurs droits et qu’ils adoptent des
mesures spéciales.
• Le Mécanisme d’experts a approuvé les programmes nationaux qui, outre
le fait qu’ils cherchent à remédier aux déséquilibres entre les peuples
non autochtones et les peuples autochtones, cherchent expressément à
garantir l’égalité entre les hommes et les femmes autochtones
• La Déclaration ne définit pas expressément le mot « culture ». Le
Mécanisme d’experts a noté qu’il n’était pas nécessaire et peut-être
même pas approprié de définir la culture. Il convient d’envisager les
cultures autochtones dans une vaste perspective.
• Les peuples autochtones organisent souvent leurs sociétés comme un
groupe et c’est la raison pour laquelle les droits collectifs sont essentiels
pour les peuples autochtones.

87 « La situation du peuple sami dans la région Sápmi de la Norvège, de la Suède et de la Finlande » (A/HRC/18/35/Add.2), par. 16.
88 « La situation des peuples autochtones en République du Congo » (A/HRC/18/35/Add.5), par. 42.

20 | Chapitre 2 : Le contenu de la Déclaration : égalité et non discrimination, intégrité culturelle et droits collectifs

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

Chapitre 3 :
Le contenu de la Déclaration :
l’autodétermination ; l’autonomie ;
ainsi que la participation,
la consultation et le consentement
QUESTIONS CLÉS
• Qu’est-ce que l’autodétermination ?
• Pourquoi le droit à l’autodétermination est-il important pour les peuples
autochtones ?
• Que peuvent faire les peuples autochtones pour promouvoir et exercer
leur droit à l’autodétermination ?
• Quelles procédures devraient être utilisées pour consulter les peuples
autochtones ? Qu’entend-on par consentement préalable, libre et éclairé ?
• Quand le droit au consentement est-il applicable ?

1. LE DROIT À L’AUTODÉTERMINATION,
L’AUTONOMIE GOUVERNEMENTALE ET LES
INSTITUTIONS AUTOCHTONES
Les peuples autochtones ont de longues traditions d’autonomie gouvernementale, de processus
décisionnel indépendant et d’autosuffisance institutionnelle. Bien qu’il existe des variations selon les
circonstances particulières, les peuples autochtones du monde entier exercent ce qui est désormais
décrit comme le droit à l’autodétermination, à savoir un droit intrinsèque qui découle de leurs structures
politiques, économiques et sociales, ainsi que de leurs cultures, traditions spirituelles, histoires et
philosophies, tout au long de leurs histoires.89
Des formes historiques et, dans de nombreux cas, contemporaines de discrimination ont entravé le
libre exercice du droit à l’autodétermination des peuples autochtones et ont empiété sur leur capacité
à contrôler les décisions qui ont un impact sur leurs vies quotidiennes. Dans de nombreux cas,
l’absence de participation active des peuples autochtones aux processus décisionnels a eu des effets
préjudiciables, a entraîné leur marginalisation et a pérennisé un ensemble de problèmes économiques,
sociaux, culturels et physiques.
Les droits des peuples autochtones à être autonomes et à s’administrer eux-mêmes sont évoqués tout
au long de la Déclaration, mais principalement dans les articles 3 et 4. Ces dispositions affirment que :
Les peuples autochtones ont le droit à l’autodétermination […] dans l’exercice de leur droit à
l’autodétermination, [les peuples autochtones] ont le droit d’être autonomes et de s’administrer
eux-mêmes pour tout ce qui touche à leurs affaires intérieures et locales.

89 Déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones, septième paragraphe du préambule.

Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement | 21

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Reflétant l’état actuel du droit international, l’affirmation de l’autodétermination dans la Déclaration


est considérée comme compatible avec le principe d’intégrité territoriale et d’unité politique des États
souverains et indépendants.90 Dans l’article 3, la Déclaration présente le droit des peuples autochtones
à l’autodétermination dans des termes qui font écho aux dispositions communes à l’article premier des
deux Pactes internationaux de 1966 relatifs aux droits civils et politiques, et aux droits économiques,
sociaux et culturels. La déclaration articule son application autour des circonstances particulières des
peuples autochtones.
Par conséquent, les peuples autochtones ont le droit de définir leur propre développement économique,
social et culturel et de gérer, dans leur propre intérêt, leurs ressources naturelles. Les obligations
consistant à consulter les peuples autochtones et à obtenir leur consentement préalable, libre et éclairé
sont des éléments cruciaux du droit à l’autodétermination.91
Il convient de souligner que les Comités qui assurent le suivi de la mise en œuvre de l’article premier
commun aux Pactes ont confirmé que ce droit est applicable aux peuples autochtones, entre autres
peuples. Par exemple, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels s’est déclaré « préoccupé
par la situation précaire des communautés autochtones dans l’État partie, qui se répercute sur leur droit
à l’autodétermination garanti par l’article premier du Pacte  » et a exhorté «  l’État partie à redoubler
d’efforts pour améliorer la situation des peuples autochtones et s’assurer qu’ils ne sont pas privés de
leurs moyens de subsistance ».92
Le droit à l’autodétermination est un droit collectif détenu par l’ensemble des membres d’une
communauté ou d’une nation autochtone en tant que groupe et doit être exercé conformément aux
principes de justice, de démocratie, de respect des droits de l’homme, d’égalité, de non-discrimination,
de bonne gouvernance et de bonne foi.93 Comme pour tous les droits présentés dans la Déclaration,
le droit à l’autodétermination est universel, inaliénable et indivisible. Il est également interdépendant
et étroitement liés avec tous les autres droits de la Déclaration.94 Bien que tous les droits inclus dans
la Déclaration soient censés avoir un statut égal, le droit à l’autodétermination a été décrit comme un
droit « fondateur », sans lequel les autres droits des autochtones, qu’ils soient collectifs ou individuels,
ne peuvent s’exercer pleinement.95 Par conséquent, le droit à l’autodétermination doit être une
préoccupation constante de la mise en œuvre effective de la Déclaration et revêt une importance vitale
pour la pérennisation de l’existence des peuples autochtones en tant que peuples distincts.96
Les structures politiques, économiques et sociales autonomes des peuples autochtones facilitent
l’exercice réel de leur droit à l’autodétermination. La Déclaration reconnaît le droit des peuples
autochtones à être autonomes et à s’administrer eux-mêmes pour tout ce qui touche à leurs affaires
intérieures et locales (article 4), ainsi que le droit de maintenir et de renforcer leurs institutions politiques,
juridiques, économiques, sociales et culturelles distinctes, tout en conservant le droit, si tel est leur
choix, de participer pleinement à la vie politique, économique, sociale et culturelle de l’État (article 5). La
Déclaration reconnaît également que les peuples autochtones ont le droit de promouvoir, de développer
et de conserver leurs structures institutionnelles et leurs coutumes, spiritualité, traditions, procédures ou
pratiques particulières et, lorsqu’ils existent, leurs systèmes ou coutumes juridiques, en conformité avec
les normes internationales relatives aux droits de l’homme (article 34).
La Déclaration affirme que les peuples autochtones ont le droit de disposer des moyens de financer
leurs activités autonomes (article 4) et que les peuples autochtones ont le droit d’avoir accès à une
90 Article 46 (1).
91 Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, « Rapport final sur l’Étude sur les peuples autochtones et le droit
de participer à la prise de décisions » (A/HRC/EMRIP/2011/2).
92 « Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels : Fédération de Russie » (E/C.12/1/Add.94), par.
11 et 39.
93 Article 46 (3).
94 Groupe d’appui interorganisations sur les questions autochtones, United Nations Development Group Guidelines on Indigenous
Peoples’ Issues (22 octobre 2009), p. 27.
95 Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, « La situation des peuples autochtones au Brésil » (A/HRC/12/34/
Add.2, 2009), par. 22.
96 Groupe d’appui interorganisations sur les questions autochtones, United Nations Development Group Guidelines on Indigenous
Peoples’ Issues (22 octobre 2009), p.17.

22 | Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

assistance financière et technique, de la part des États et dans le cadre de la coopération internationale,
pour jouir des droits énoncés dans la Déclaration (article 39). Le Rapporteur spécial sur les droits des
peuples autochtones a recommandé à un État de prévoir un financement suffisant de façon à ce que les
peuples autochtones puissent efficacement exercer leurs fonctions d’autogouvernance.97
Il a été souligné que les peuples autochtones sont « distincts, tout en étant rattachés à de plus grandes
unités d’interaction sociale et politique ».98 L’autodétermination est la base sur laquelle reposent ces
interactions et la participation active des peuples autochtones facilite le dialogue réel et de bonne foi :
La condition fondamentale de la réalisation, dans la pratique, du droit à l’autodétermination est
la confiance entre les peuples. Il est impossible d’établir la confiance sans coopération, sans
dialogue et sans respect. Les gouvernements n’ont rien à redouter des peuples autochtones ; ils
peuvent apprendre à respecter et à faire confiance […] pour être en mesure de vivre ensemble
paisiblement, sans exploitation ou domination, [les peuples autochtones et les gouvernements]
doivent continuellement renégocier les modalités de leur relation.99
Par conséquent, la reconnaissance et la promotion du droit des peuples autochtones à l’autodétermination
étayent les processus d’élaboration et de maintien de relations constructives entre les peuples
autochtones et les États et facilitent les efforts déployés de part et d’autre pour surmonter l’héritage des
injustices historiques :
[L]e droit à l’autodétermination des peuples autochtones devrait en général être interprété comme
étant leur droit de négocier librement leur statut et leur représentation au sein de l’Etat dans lequel
ils vivent. La meilleure définition qu’on puisse en donner est celle d’une sorte de “construction
tardive de l’Etat” en vertu de laquelle les peuples autochtones - après avoir été longtemps isolés
et exclus - seraient à même de s’associer à tous les autres peuples qui constituent l’Etat, dans
des conditions justes et acceptées par tous. Ce qui revient non pas à faire de l’autochtone un
citoyen comme tous les autres, mais bien plutôt à reconnaître que le tissu de l’Etat est constitué
de peuples distincts qui s’y trouvent incorporés dans des conditions qu’ils ont acceptées.100

Jeunes Indiens Salaseca, à Ambato, Équateur. Photo ONU/Milton Grant.

97 A/HRC/18/35/Add.2, par. 78.


98 J. Anaya, “The right of indigenous peoples to self-determination in the post-Declaration era” in Making the Declaration Work: The
United Nations Declaration on the Rights of Indigenous Peoples, p. 193.
99 E. Daes, “Striving for self-determination for indigenous peoples” in In pursuit of the right to self-determination, Y. Kly et D. Kly, éd.
(2000), p. 57.
100 E/CN.4/Sub.2/1993/26/Add.1, par. 26.

Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement | 23

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Il existe de nombreuses approches permettant de parvenir à la mise en œuvre efficace du droit à


l’autodétermination dans le contexte de l’État et les plus efficaces sont celles qui sont élaborées en
coopération avec les peuples autochtones.

RAPPORT PROVISOIRE DU RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LA


SITUATION DES DROITS DE L’HOMME ET DES LIBERTÉS
FONDAMENTALES DES PEUPLES AUTOCHTONES (A/65/264, 2010)
Le renforcement de l’autodétermination des peuples autochtones est une
question de dignité humaine fondamentale et tend également à donner de
bons résultats. Au nombre des objectifs à atteindre figurent les objectifs
suivants :
a) Améliorer l’éducation et les compétences des autochtones dans les
domaines les intéressant de façon que les peuples autochtones eux-
mêmes aient la possibilité de s’impliquer et de participer aux diverses
composantes des programmes et des projets de développement qui
les concernent dans le monde contemporain, y compris les projets
liés à l’extraction des ressources naturelles ;
b) Renforcer les propres institutions et systèmes d’administration
autonome des peuples autochtones afin de leur donner les moyens
d’exercer un contrôle sur leurs propres affaires touchant à tous les
aspects de leur vie et de veiller à ce que leurs modèles culturels,
valeurs, coutumes et points de vue soient pris en considération dans
les processus du développement ;
c) Donner aux peuples autochtones la possibilité de participer en tant
que partenaires égaux au processus du développement lorsque à la
fois leurs intérêts particuliers et ceux de l’ensemble de la société dont
ils font partie sont concernés, leur permettant d’exercer une véritable
influence sur les décisions liées aux activités de développement,
de participer pleinement à leur conception et à leur mise en œuvre
et de bénéficier directement des avantages économiques et autres
avantages ;
d) Donner aux peuples autochtones la possibilité de poursuivre et
d’améliorer la prise de décision concernant le développement en
des termes qui leur sont propres et de remédier à toute carence
dans le cadre de leurs propres systèmes de réglementation et de
responsabilisation internes. À cet égard, les peuples autochtones
devraient avoir la possibilité de commettre des erreurs, d’en tirer
les leçons, de renforcer leurs capacités et de développer la sagesse
nécessaire pour réaliser leurs propres objectifs de développement et
faire des choix pour l’avenir.

Les peuples autochtones peuvent exercer leur droit à l’autodétermination en participant aux processus
législatif et décisionnel de l’État et en influant sur ces processus. On citera par exemple la Loi n° 5-2011
relative à la promotion et à la protection des droits des populations autochtones de la République du
Congo, que le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones a décrite comme ayant été
élaborée d’une façon participative et qui constitue « une importante bonne pratique dans la région pour
la reconnaissance et la protection des droits des peuples autochtones. »101
Les peuples autochtones peuvent également exercer un contrôle sur les fonctions législatives et
administratives de l’État dans les domaines qui affectent leurs nations ou communautés grâce à un

101 A/HRC/18/35/Add.5, par. 41.

24 | Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

transfert des pouvoirs de gouvernance de l’État. Des exemples de transfert du pouvoir décisionnel ont
été donnés, notamment, par des représentants des Parlements sami norvégien, suédois et finlandais.102
Une autre option de mise en œuvre du droit à l’autodétermination est la reconnaissance effective,
par l’État, des institutions politiques et juridiques des peuples autochtones et l’exercice de pouvoirs
décisionnels directs conformément à leurs propres lois, traditions et coutumes.
Outre ces approches, certains États, en collaboration avec des peuples autochtones, ont franchi des
étapes significatives visant à renforcer les pouvoirs législatifs et administratifs des peuples autochtones
en leur donnant la garantie d’être représentés au sein des organes législatifs, en concluant des ententes
d’autonomie gouvernementale protégés par la Constitution et en exigeant que l’État soit officiellement
tenu de consulter les peuples autochtones lorsque des décisions administratives et législatives sont
susceptibles d’avoir un impact sur les intérêts des peuple autochtones.103
Par exemple, le Parlement néo-zélandais comprend des sièges qui ont été spécialement réservés aux
autochtones maori, le nombre de «  sièges maori  » étant déterminé sur la base du rapport entre la
population maori et la population totale. De même, la Constitution du Burundi réserve six sièges de
l’Assemblée nationale et du Sénat aux populations autochtones batwa. La Constitution de l’Inde prévoit
également de réserver des sièges du Parlement aux tribus autochtones répertoriées.
Comme indiqué précédemment, le droit à l’autodétermination est un sujet à multiples facettes et il se
rattache à l’exercice significatif de l’ensemble des droits protégés par la Déclaration, notamment le
droit de conserver et de développer les structures institutionnelles visant à soutenir l’exercice du droit à
l’autodétermination. La Déclaration reconnaît expressément le droit des peuples autochtones d’établir
et de contrôler leurs systèmes et établissements scolaires (article 14) et le droit de promouvoir, de
développer et de conserver leurs systèmes ou coutumes juridiques (article 34). L’exercice du droit à
l’autodétermination s’exprime souvent par le biais de l’élaboration de traités, accords et arrangements
constructifs reposant sur un accord commun conclu entre les peuples autochtones et les États.104 Il
convient également de souligner que la Déclaration stipule expressément que l’exercice des droits
énoncés dans la Déclaration ne couvre pas les activités ou les droits qui auraient pour effet de
compromettre l’intégrité territoriale ou l’unité politique d’un État souverain et indépendant.105
La jurisprudence des organes et des mécanismes des Nations Unies donne des orientations importantes
sur la mise en œuvre du droit à l’autodétermination. Par exemple, le Rapporteur spécial sur les droits
des peuples autochtones a recommandé aux États de procéder à la reconnaissance effective des
institutions, des compétences et du droit coutumier des peuples autochtones, dans la mesure où ils sont
compatibles avec les normes universelles des droits de l’homme. Il a également recommandé que les
peuples autochtones disposent de plus amples pouvoirs décisionnels sur les prestations des services
gouvernementaux mises en œuvre au sein de leurs communautés, qu’ils soient mieux représentés au
sein des institutions législatives, exécutives et judiciaires aux niveaux local, national et fédéral, et que
soient organisées des consultations appropriées des peuples autochtones pour toutes les décisions
législatives ou administratives susceptibles de les affecter.106
Le droit à l’autodétermination est également intrinsèquement lié aux droits des peuples autochtones sur
les terres et les ressources naturelles, qui ont été identifiés par le Rapporteur spécial comme la condition
préalable de la continuité de l’existence des peuples autochtones dans le monde en tant que peuples
distincts.107
La promotion et l’exercice du droit à l’autodétermination exigent également que les peuples autochtones
participent activement à l’élaboration et au renforcement des institutions autochtones et des autres
102 A/HRC/18/35/Add.2.
103 Union interparlementaire, Implementing the United Nations Declaration on the Rights of Indigenous Peoples: A Handbook for
Parliaments (2012).
104 Voir article 37 de la Déclaration, et avis n° 2 (2011) du Mécanisme d’experts : Les peuples autochtones et le droit de participer à
la prise de décisions, par. 34.
105 Article 46 (1).
106 A/HRC/12/34/Add.2, par. 78-82.
107 A/HRC/18/35/Add.2, par. 79.

Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement | 25

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

facettes du droit à l’autodétermination. Le Rapporteur spécial a souligné que les « peuples autochtones
doivent veiller à renforcer leurs capacités à contrôler et à gérer leurs propres affaires et à participer
efficacement à toutes les décisions les affectant, dans un esprit de coopération et de partenariat avec
les autorités gouvernementales et les ONG avec lesquelles ils ont choisi de travailler ».108 Renforcer les
institutions et l’autonomie gouvernementale des peuples autochtones est une étape importante sur la
voie d’une autonomisation qui leur permettra de prendre le contrôle de leurs propres affaires dans tous
les aspects de la vie et de assurer que les processus du développement sont conformes à leurs propres
modèles culturels, valeurs, coutumes et points de vue.

2. PARTICIPATION ET CONSULTATION
Le droit international relatif aux droits de l’homme fait référence au droit à la participation sous une
forme générale ou détaillée.109 La Déclaration contient plus de 20 dispositions affirmant le droit des
peuples autochtones de participer à la prise de décisions et s’articulant, notamment, autour (a) du droit
à l’autodétermination ; (b) du droit à l’autonomie ou à l’autonomie gouvernementale ; (c) du « droit de
participer » ; (d) du « droit à être activement impliqué » ; (e) de l’obligation des États d’« obtenir leur
consentement préalable, libre et éclairé » ; (f) de l’obligation de tenter d’obtenir le « libre accord » des
peuples autochtones ; (g) de l’obligation de « consulter les peuples autochtones et de coopérer avec
eux » ; (h) de l’obligation de prendre des mesures « de concert » avec les peuples autochtones ; et (i) de
l’obligation de « respecter les coutumes » des peuples autochtones.110
L’article 18 de la Déclaration établit que « les peuples autochtones ont le droit de participer à la prise
de décisions sur des questions qui peuvent concerner leurs droits, par l’intermédiaire de représentants
qu’ils ont eux-mêmes choisis conformément à leurs propres procédures, ainsi que le droit de conserver
et de développer leurs propres institutions décisionnelles ».
La Déclaration exige que les États se concertent et coopèrent de bonne foi avec les peuples
autochtones intéressés – par l’intermédiaire de leurs propres institutions représentatives – avant
d’adopter et d’appliquer des mesures législatives ou administratives susceptibles de concerner les
peuples autochtones, afin d’obtenir leur consentement préalable, donné librement et en connaissance
de cause (article 19).
Le droit à la participation est également présent dans les articles de la Déclaration affirmant les droits
des peuples autochtones à être consultés sur les décisions qui affecteront leurs intérêts ou à consentir
à ces décisions.
Le Mécanisme d’experts s’est intéressé au lien entre le droit à l’autodétermination et la participation
des peuples autochtones à la prise de décisions. Il a souligné que l’autodétermination est un processus
en cours qui permet de s’assurer que les peuples autochtones continuent de participer à la prise
de décisions et d’avoir le contrôle sur leurs propres destinées. En d’autres termes, cela signifie que
les institutions décisionnelles devraient être conçues de façon à permettre aux peuples autochtones
de prendre les décisions liées à leurs affaires internes et locales, et de participer collectivement aux
processus décisionnels externes conformément aux normes relatives aux droits de l’homme.111
D’autres organes des Nations Unies se sont intéressés à des éléments du droit des peuples autochtones à
l’autodétermination dans le contexte de la consultation et de la participation. Le Comité pour l’élimination
de la discrimination raciale a souligné l’importance de la participation des représentants librement
choisis de populations autochtones aux processus de négociation constitutionnelle et a recommandé le

108 A/HRC/18/35/Add.5, par. 90.


109 Pour une présentation résumée du cadre international des droits de l’homme se rapportant au droit de participer à la prise de
décisions, voir le rapport d’étape sur l’étude sur les peuples autochtones et le droit de participer à la prise de décisions (A/
HRC/15/35, 2010) préparé par le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones.
110 Ibid., par. 8.
111 Ibid., par. 31.

26 | Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

respect – dans le cadre de ces négociations – du principe du consentement préalable, libre et éclairé.112
Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a également émis une observation générale sur
le droit à la culture soulignant la dimension collective de la culture des peuples autochtones ainsi que
l’importance que revêtent les terres des peuples autochtones pour ces cultures. Dans son observation
n° 21, le Comité traite de l’obligation :
… [d’]autoriser et [d’]encourager la participation de personnes appartenant à d[…]es peuples
autochtones [..] à l’élaboration et à la mise en œuvre des lois et politiques les concernant.113
Le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones a recommandé aux États de donner
davantage d’occasions aux peuples autochtones de participer aux processus décisionnels et de
reconnaître, renforcer et prendre en compte les propres institutions et autorités décisionnelles des
peuples autochtones.114 Il a par ailleurs souligné que l’implication des peuples autochtones dans les
processus décisionnels se traduit par une amélioration des résultats des projets et des programmes. Il
a constaté que si l’on n’implique pas les autochtones par voie de consultation dès le lancement d’une
initiative officielle, les programmes publics, même ceux qui se veulent particulièrement avantageux
pour les autochtones, perdent dès le départ de l’efficacité. Tout déficit de consultations conduit
immanquablement à des situations conflictuelles, dans lesquelles les autochtones expriment leur colère
et leur méfiance, et qui dans certains cas dégénèrent en violences.115
Le Mécanisme d’experts a achevé une étude sur le droit des peuples autochtones de participer au
processus décisionnel et a émis un avis sur le sujet à l’intention du Conseil des droits de l’homme.116 Il a
souligné les occasions spéciales dont disposent les INDH pour promouvoir la participation des peuples
autochtones aux débats et aux décisions qui les concernent. 117

MÉCANISME D’EXPERTS SUR LES DROITS DES PEUPLES


AUTOCHTONES : RAPPORT FINAL SUR L’ÉTUDE SUR LES PEUPLES
AUTOCHTONES ET LE DROIT DE PARTICIPER À LA PRISE DE
DÉCISIONS117
Les institutions nationales des droits de l’homme, en tant qu’organes
indépendants, doivent largement contribuer à réunir les représentants du
gouvernement et des peuples autochtones, favorisant ainsi la participation
des peuples autochtones aux discussions et aux décisions sur les
questions qui les concernent. Les institutions nationales des droits de
l’homme peuvent également insister sur la nécessité, pour toutes les
parties prenantes, de veiller à ce que les représentants autochtones soient
associés à la prise de décisions. Ces institutions, dans le cadre de leurs
propres programmes, peuvent également associer activement les peuples
autochtones à la prise de décisions sur des questions connexes.

112 Par exemple, le Comité a envoyé le 13 mars 2009 une lettre d’avertissement sur ce sujet au gouvernement du Népal, disponible
à l’adresse suivante : www2.ohchr.org/english/bodies/cerd/docs/early_warning/Nepal130309.pdf.
113 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, observation générale n° 21 (2009) sur le droit de chacun de participer à la
vie culturelle, par. 55 e).
114 A/HRC/18/35/Add.5, par. 83.
115 A/HRC/12/34, par. 36.
116 Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, « Rapport d’étape sur l’étude sur les peuples autochtones et le
droit de participer à la prise de décisions » (A/HRC/15/35, 2010), « Rapport final sur l’étude sur les peuples autochtones et le
droit de participer à la prise de décisions » (A/HRC/18/42, 2011), comprenant également l’avis n° 2 sur les peuples autochtones
et le droit de participer à la prise de décisions, et le « Rapport de suivi sur les peuples autochtones et le droit de participer à la
prise de décisions, axé sur les industries extractives » (A/HRC/EMRIP/2012/2), comprenant également l’avis n° 4 sur les peuples
autochtones et le droit de participer à la prise de décisions, axé sur les industries extractives. La question de la participation
des peuples autochtones au système de l’Organisation des Nations Unies a également été examinée dans un rapport du
Secrétaire général, « Moyens de promouvoir la participation de représentants de peuples autochtones reconnus aux travaux de
l’Organisation des Nations Unies portant sur des questions les intéressant » (A/HRC/21/24, 2012).
117 A/HRC/EMRIP/2011/2, annexe, par. 37.

Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement | 27

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Le Mécanisme d’experts a également identifié l’extraction des ressources comme un domaine


thématique exigeant une attention particulière en ce qui concerne le droit des peuples autochtones de
participer à la prise de décisions. Il a noté que c’est aux États qu’il incombe au premier chef de veiller
à ce que le droit de participation des peuples autochtones soit respecté ; toutefois, pour s’acquitter
de leur propre obligation de respecter les droits de l’homme, les sociétés minières devraient veiller au
respect du droit des peuples autochtones de participer à la prise des décisions et procéder à leur propre
évaluation à cet égard. De fait, des expériences positives montrent que les sociétés minières devraient
travailler en partenariat avec les États et les peuples autochtones à tous les stades de la planification
et de l’exécution des activités minières susceptibles d’avoir un impact sur les intérêts des peuples
autochtones.118
Le droit des peuples autochtones de participer à la prise de décisions est un élément clé de la réussite
de la réconciliation entre les peuples et les États. S’il est réellement appliqué, il constitue un moyen
efficace de combattre l’héritage d’exclusion et de marginalisation qui affecte les peuples autochtones
dans le monde entier.
La consultation des peuples autochtones s’apparente davantage à un processus qu’à un événement
ponctuel et les procédures grâce auxquelles les consultations sont entreprises dépendront des
circonstances qui exigent la consultation. En tout état de cause, les consultations doivent être guidées
par l’exigence fondamentale de la bonne foi.119 Elles doivent être entreprises dans le but de parvenir à
un accord ou à un consentement concernant la mesure proposée. Comme l’a souligné le Rapporteur
spécial, les principes de consultation « visent à instaurer un dialogue auquel l’État et les autochtones
concourent de bonne foi pour réunir un consensus en s’efforçant sincèrement d’aboutir à un accord
mutuellement satisfaisant ».120
Les organes conventionnels ont également appelé de nombreux gouvernements à procéder à des
consultations auprès de peuples autochtones sur les questions affectant leurs droits et leurs intérêts. À
la lumière de sa recommandation générale n° 23 (1997), le Comité pour l’élimination de la discrimination
raciale a exhorté les États à créer des mécanismes pratiques visant à mettre en œuvre le droit à la
consultation d’une façon qui respecte le consentement préalable, libre et éclairé des peuples et des
communautés affectées et à s’assurer que ces consultations sont effectuées systématiquement et
de bonne foi.121 Il a également recommandé que des consultations efficaces soient menées auprès
des communautés susceptibles d’être affectées par les projets visant à promouvoir et à exploiter les
ressources naturelles, dans le but d’obtenir un consentement préalable, libre et éclairé à chacune des
étapes du processus, notamment dans le cas des projets miniers.122
De même, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a recommandé que préalablement
à la construction de projets hydro-électriques, un État procède à des analyses d’impact complètes et
à de vastes consultations auprès des communautés affectées, en leur donnant de réelles occasions
de présenter leurs points de vue et d’influer sur le prise de décisions.123 Le Comité des droits de
l’enfant a également recommandé que les sociétés soient tenues de procéder à des évaluations, à
des consultations et à une divulgation publique complète des effets de leurs activités économiques sur
l’environnement, la santé et les droits de l’homme et de leurs plans pour remédier à ces effets.124 Bien
que l’obligation de consulter relève de la responsabilité des États, les sociétés et les autres acteurs du
secteur privé sont également tenus de respecter les droits de l’homme des peuples autochtones. Ils

118 A/HRC/EMRIP/2012/2, annexe : avis n° 4 sur les peuples autochtones et le droit de participer à la prise de décisions, axé sur les
industries extractives, par. 40. Voir également le rapport du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des
droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises (A/HRC/17/31) et la résolution 17/4 du Conseil des droits
de l’homme.
119 Voir articles 19, 32 et 46 de la Déclaration. Voir également A/HRC/12/34, par. 46-53.
120 A/HRC/12/34, par. 46 et 49.
121 Voir les observations finales du Comité sur la Bolivie (État plurinational de) (CERD/C/BOL/CO/17-20) et l’Équateur (CERD/ECU/
CO/20-22).
122 Observations finales sur le Mexique (CERD/C/MEX/Q/16-17).
123 Observations finales sur l’Éthiopie (E/C.12/ETH/CO/1-3).
124 Observations finales sur la Namibie (CRC/C/NAM/CO/2-3).

28 | Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

peuvent également jouer un rôle important dans la promotion et la protection des droits des peuples
autochtones.125
Les objectifs de ces consultations peuvent varier considérablement. En conséquence, le Rapporteur
spécial sur les droits des peuples autochtones a invité les États et le secteur industriel à aller au-delà des
ententes de compensation et, lorsque les peuples autochtones en expriment le souhait, à encourager
la participation au capital et le partage des bénéfices des sociétés extractives. Le Rapporteur spécial
a également recommandé diverses formes d’interaction entre les peuples autochtones, les États et
les entreprises. Par exemple, en rapport avec un vaste projet de développement hydroélectrique, il a
recommandé la création d’un groupe d’experts indépendants afin de faciliter la consultation qui sera
menée sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies.

3. CONSENTEMENT PRÉALABLE,
LIBRE ET ÉCLAIRÉ
Le consentement préalable, libre et éclairé va au-delà de la consultation. Les États ont l’obligation
d’obtenir le consentement – qui est l’objectif de la consultation – avant que les actions suivantes ne
soient menées :
• L’adoption de mesures législatives ou administratives susceptibles de concerner les peuples
autochtones (article 19)
• La mise en œuvre de projets ayant des incidences sur les terres, territoires et ressources des
peuples autochtones, notamment en ce qui concerne l’utilisation ou l’exploitation des ressources
minérales ou autres (article 32).

Une bergère mongolienne trait des yaks à Must, dans la province du Khovd, en Mongolie. Photo ONU/ Eskinder Debebe.

125 Voir A/HRC/17/31 et la résolution 17/4 du Conseil des droits de l’homme. Pour un examen approfondi de la responsabilité des
entreprises en matière de respect des droits des peuples autochtones, voir le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des
droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones (A/HRC/15/37).

Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement | 29

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Dans certaines circonstances, l’État a l’obligation d’obtenir un consentement des peuples autochtones
concernés qui va au-delà de l’obligation générale susmentionnée. Par exemple, la Déclaration exige
explicitement des États qu’ils obtiennent le consentement des peuples autochtones dans les cas de :
Réinstallation des peuples autochtones après enlèvement de force à leurs terres ou territoires (article 10)
• Stockage ou la mise au rebut de matières dangereuses sur les terres ou territoires des peuples
autochtones (article 29)
• Par ailleurs, les peuples autochtones qui ont – contre leur gré – perdu possession de leurs terres,
et dont ces terres ont été « confisquées, prises, occupées, exploitées ou dégradées sans leur
consentement préalable » ont droit à une restitution ou à une autre réparation appropriée qui peut
prendre la forme de terres équivalentes par leur qualité et leur étendue ou d’une indemnisation
juste, correcte et équitable (article 28). En outre, les peuples autochtones ont droit à réparation
en ce qui concerne les biens culturels, intellectuels, religieux et spirituels qui leur ont été pris sans
leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause (article 11).
D’autres circonstances peuvent également exiger le consentement préalable, libre et éclairé, selon la
nature de la mesure proposée et la portée ou l’ampleur de ses effets sur les peuples autochtones. Selon
le Mécanisme d’experts, le droit au consentement préalable, libre et éclairé fait «  partie intégrante  »
du droit à l’autodétermination et obtenir ce consentement est exigé pour les questions qui sont d’une
importance fondamentale pour les droits, la survie, la dignité et le bien-être des peuples autochtones.126
De même, le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones a souligné que « si les effets
sur la vie ou les terres des autochtones sont directs et sensibles, on est presque certain que la décision
ne doit pas être prise sans le consentement des intéressés. Dans certains contextes, cette éventualité
peut se renforcer jusqu’à devenir une interdiction de lancer la mesure ou d’entreprendre le projet si les
autochtones n’y consentent pas. »127
Dans son interprétation des droits des peuples autochtones en vue de l’application de la Convention
internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Comité pour l’élimination
de la discrimination raciale demande également les processus de consultation et de consentement
éclairé. Dans sa recommandation générale n° 23, le Comité exige des États parties qu’ils s’assurent
que les peuples autochtones jouissent des droits égaux de participer à la vie publique et qu’aucune
décision directement liée aux peuples indigènes ne soit prise sans leur consentement éclairé. En ce qui
concerne les droits spécifiques aux terres et aux ressources, le Comité demande la restitution dans
les situations où les décisions ont été prises sans le consentement préalable et éclairé des peuples
autochtones concernés. Il a également souligné l’obligation des États de s’assurer que le droit des
peuples autochtones au consentement préalable, libre et éclairé est respecté lors de la planification
et de la mise en œuvre des projets affectant l’utilisation de leurs terres et de leurs ressources.128
Plus récemment, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a encore élargi la portée du
consentement préalable, libre et éclairé dans son observation générale n° 21. Dans son interprétation
des droits culturels, le Comité souligne que le droit de participer à la vie culturelle inclut les droits des
peuples autochtones à la restitution ou au retour des terres, territoires et ressources traditionnellement
utilisés et possédés par les communautés autochtones si ils ont été pris sans le consentement préalable
et éclairé des peuples concernés. Il demande également aux États parties de « respecter le principe
du consentement préalable des peuples autochtones, librement donné et en connaissance de cause,
pour toutes les questions visées par leurs droits spécifiques » et d’« obtenir leur consentement libre et
éclairé lorsque la préservation de leurs ressources culturelles, notamment celles qui sont associées à
leurs mode de vie et expression culturelle, est menacée ».129

126 Avis n° 2 (2011) sur les peuples autochtones et le droit de participer à la prise de décisions.
127 A/HRC/12/34, par. 47.
128 Voir, par exemple, les observations finales du Comité sur la République démocratique populaire lao (CERD/LAO/CO/16-18) et sur
le Canada (CERD/CAN/CO/19-20).
129 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, observation générale n° 21 (2009) sur le droit de chacun de participer à la
vie culturelle.

30 | Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

Dans le même ordre d’idées, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a jugé dans l’affaire Saramaka
que l’État a non seulement l’obligation de consulter les peuples autochtones, mais aussi d’obtenir leur
consentement préalable, libre et éclairé, conformément à leurs coutumes et traditions, dans les cas de
projets de développement ou d’investissement de grande envergure susceptibles d’avoir un impact
majeur sur le territoire des peuples autochtones.130
En ce qui concerne l’application pratique du consentement préalable, libre et éclairé, l’orientation
suivante a été donnée :
Libre suppose l’absence de coercition, d’intimidation ou de manipulation, et Préalable suppose
que le consentement a été sollicité suffisamment longtemps avant toute autorisation ou début
d’activité et que les délais nécessaires aux processus autochtones de consultation et de
recherche d’un consensus ont été respectés. Éclairé suppose que l’on dispose des informations
qui couvrent (au moins) […] la nature, l’ampleur, l’évolution, la réversibilité et la portée de tout
projet ou activité proposé ; la (les) raison(s) ou objectif(s) du projet ou de l’activité ; leur durée ;
la localisation des zones concernées ; une évaluation préliminaire des incidences économiques,
sociales, culturelles et environnementales probables, y compris les risques potentiels  ; […] le
personnel susceptible de contribuer à l’exécution du projet  […]  ; et les procédures possibles
dans le cadre du projet. […] Ce processus peut prévoir la possibilité d’un consentement différé.
[…] La consultation et la participation sont des éléments essentiels du consentement.131
Un certain nombre d’organismes intergouvernementaux d’aide au développement et d’institutions
financières internationales ont intégré le consentement préalable, libre et éclairé dans leurs politiques et
programmes relatifs aux peuples autochtones. La politique du Programme des Nations Unies pour le
développement sur les peuples autochtones « encourage et soutient le droit des peuples autochtones
à donner librement un consentement préalable informé concernant la planification et la programmation
du développement quand ils risquent d’en être affectés  ».132 La Operational Policy on Indigenous
Peoples and Strategy for Indigenous Development [Politique opérationnelle relative aux peuples
autochtones et la stratégie pour le développement autochtone] adoptées par la Banque interaméricaine
de développement promeut «  les mécanismes et les processus de participation qui doivent tenir
compte du principe général du consentement préalable, libre et éclairé des peuples autochtones »133 et
stipule qu’« avant d’approuver les opérations qui pourraient avoir des effets néfastes particulièrement
significatifs sur les peuples autochtones, la Banque exigera la preuve que le promoteur du projet est
parvenu à des accords satisfaisants et dûment documentés avec les peuples concernés, ou qu’il a
obtenu leur consentement.  »134 La Banque européenne pour la reconstruction et le développement
reconnaît également la nécessité d’obtenir le consentement préalable, libre et éclairé des peuples
autochtones avant de commencer toute activité sur les terres traditionnelles, de réinstaller les peuples
autochtones ou de réaliser tout projet proposant d’utiliser les ressources culturelles, les connaissances,
les innovations ou les pratiques des peuples autochtones à des fins commerciales.135
La question de savoir auprès de qui l’État peut obtenir le consentement est fondamentale. À cet égard,
plusieurs communautés autochtones à travers le monde ont créé leurs propres protocoles sur la façon
dont les gens de l’extérieur devraient communiquer avec elles pour obtenir leur consentement préalable,
libre et éclairé. Le consentement des peuples autochtones devrait être accordé conformément à leurs
lois et pratiques coutumières. Cela ne signifie pas nécessairement que chacun des membres doit être
d’accord, mais plutôt que le processus de consentement sera entrepris par le biais de procédures et

130 Saramaka People v Suriname, Cour interaméricaine des droits de l’homme, Jugement du 28 novembre 2007, Série C n° 172.
131 Instance permanente de l’Organisation des Nations Unies sur les questions autochtones, « Rapport sur les travaux de l’Atelier
international sur le consentement préalable, libre et éclairé et les peuples autochtones, New York, États-Unis d’Amérique, 17-19
janvier 2005 » (E/C.19/2005/3), par. 46-49.
132 Programme des Nations Unies pour le développement, Le PNUD et les Peuples Autochtones  : Une Politique d’Engagement
(2001).
133 Banque interaméricaine de développement, Operational Policy on Indigenous Peoples and Strategy for Indigenous Development
(2006), p. 34.
134 Ibid., p. 39.
135 Banque européenne pour la reconstruction et le développement, Performance Requirement PR-7 (2008).

Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement | 31

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

d’institutions définies par les peuples autochtones eux-mêmes. Les peuples autochtones devraient
spécifier quelles institutions représentatives sont habilitées à exprimer le consentement au nom des
peuples ou des communautés concernées.
Par ailleurs, des mécanismes et des procédures devraient être créés pour vérifier que le consentement
préalable, libre et éclairé a été recherché. Pour que ces mécanismes puissent fonctionner de façon
appropriée, les peuples autochtones doivent participer à leur élaboration. Les États doivent prévoir des
mécanismes de réparation efficaces pour les situations où le consentement préalable, libre et éclairé n’a
pas été recherché. Cette réparation peut prendre la forme d’une restitution ou d’une indemnisation. S’il
est déterminé que les éléments d’un consentement préalable, libre et éclairé n’ont pas été respectés, la
procédure peut déboucher sur une révocation du consentement accordé.
Les États disposent de multiples possibilités pour s’assurer que les peuples autochtones bénéficient
de la pleine application du principe du consentement préalable, libre et éclairé, mais encore faut-il que
ces peuples s’impliquent réellement et d’une façon qui corresponde à leur culture et à leurs institutions.

POINTS CLÉS : CHAPITRE 3


• Le droit à l’autodétermination est un droit collectif détenu par l’ensemble
des membres d’une communauté ou d’une nation autochtone en tant
que groupe et doit être exercé conformément aux principes de justice,
de démocratie, de respect des droits de l’homme, d’égalité, de non-
discrimination, de bonne gouvernance et de bonne foi.
• Les structures politiques, économiques et sociales autonomes
des peuples autochtones facilitent l’exercice réel de leur droit à
l’autodétermination.
• Les peuples autochtones ont le droit de participer à la prise de décisions
sur des questions qui peuvent concerner leurs droits, par l’intermédiaire
de représentants qu’ils ont eux-mêmes choisis conformément à leurs
propres procédures, ainsi que le droit de conserver et de développer leurs
propres institutions décisionnelles.
• La Déclaration exige que les États se concertent et coopèrent de bonne
foi avec les peuples autochtones intéressés – par l’intermédiaire de leurs
propres institutions représentatives – avant d’adopter et d’appliquer des
mesures législatives ou administratives susceptibles de concerner les
peuples autochtones, afin d’obtenir leur consentement préalable, donné
librement et en connaissance de cause.
• La consultation et la participation sont des éléments essentiels du
consentement.

32 | Chapitre 3 : Le contenu de la Déclaration : l’autodétermination, l’autonomie, ainsi que la participation, la consultation et le consentement

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

Chapitre 4 :
Le contenu de la Déclaration :
les terres, les territoires et les
ressources ; le développement
respectueux de l’identité ; et la
réparation et l’indemnisation
QUESTIONS CLÉS
• Qu’entend-on par terres, ressources et territoires des peuples
autochtones ?
• Quels types de relations les peuples autochtones entretiennent-ils avec
leurs terres, leurs ressources et leurs territoires ?
• Existe-t-il des protections pour les terres, les ressources et les territoires
des peuples autochtones ?
• Quelles sont les possibilités de réparation dont disposent les peuples
autochtones concernant leurs droits à des terres, territoires et
ressources ?
• Qu’entend-on par développement respectueux de la culture et de
l’identité ?

1. DÉFIS AUXQUELS SONT CONFRONTÉS LES


PEUPLES AUTOCHTONES CONCERNANT LES
TERRES ET LES RESSOURCES NATURELLES
Depuis des temps immémoriaux, les peuples autochtones entretiennent un lien particulier avec la terre,
leur moyen de subsistance et leur gagne-pain, et le fondement même de leur existence en tant que
communautés. Les questions relatives aux terres, aux territoires et à l’accès aux ressources naturelles
sont au cœur de la problématique du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales des
peuples autochtones.
La nature et l’importance de ces liens sont fondamentales pour la subsistance économique et l’intégrité
culturelle de nombreux peuples autochtones.136 L’Instance permanente a commenté l’importance du
lien entre les peuples autochtones et leurs terres :
La terre est en effet l’élément sur lequel repose la vie et la culture des peuples autochtones
partout dans le monde.  C’est pourquoi la protection du droit à des terres, territoires et ressources
naturelles est une revendication fondamentale du mouvement international des peuples
autochtones et des organisations de peuples autochtones de par le monde. Il est également

136 Commission interaméricaine des droits de l’homme, Indigenous and Tribal Peoples’ Rights Over Their Ancestral Lands and
Natural Resources: Norms and Jurisprudence of the Inter-American Human Rights System (OEA/Ser.L/V/II. Doc. 56/09, 2009),
par. 56.

Chapitre 4 : Le contenu de la Déclaration : les terres, les territoires et les ressources, le développement respectueux de l’identité, | 33
et la réparation et l’indemnisation, | 33

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

clair que la plupart des mouvements locaux et nationaux de peuples autochtones sont nés des
luttes contre les politiques et mesures qui portaient atteinte aux régimes fonciers et systèmes
de gestion des ressources coutumiers, ou étaient discriminatoires à leur égard, comme les
expropriations et l’exploitation des ressources sans le consentement des peuples autochtones,
qui ont contraint ceux-ci à se déplacer et les ont dépossédés de leurs territoires. La survie des
cultures spécifiques propres aux peuples autochtones dépend du libre accès de ces peuples aux
terres, territoires et ressources naturelles et du respect de leurs droits en la matière.
Les droits fonciers et l’accès à la terre, ainsi que le contrôle de la terre et de ses ressources sont
décisifs pour les peuples autochtones de par le monde. Leur survie économique et culturelle
dépend de ces droits et de cet accès. Pour survivre en tant que peuples distincts, les peuples
autochtones et leurs communautés doivent être en mesure de posséder, de conserver et de
gérer leurs territoires, terres et ressources naturelles.137
Priver les peuples autochtones des ressources naturelles dont sont dotées leur terres et territoires
reviendrait à les priver de tout droit significatif à l’autodétermination et à un développement autonome et,
dans de nombreux cas, à les priver effectivement de leurs cultures et de la jouissance d’autres droits de
l’homme en raison de leur extrême pauvreté et de l’absence d’accès à leurs moyens de subsistance.138
Deux des principales contraintes pesant sur la libre et pleine jouissance des droits des peuples
autochtones aux terres, territoires et ressources naturelles sont liées d’une part à la non-reconnaissance
par les États de l’existence de l’usage, de l’occupation et de la propriété autochtones et, d’autre part,
au non-octroi par les États aux peuples autochtones du statut et de la capacité juridiques ainsi que des
autres droits légaux appropriés à la propriété foncière.139
D’autres groupes autochtones sont confrontés à des défis liés à l’abrogation de traités et à la non-
démarcation des terres par les États.
Les questions relatives aux droits fonciers et aux peuples autochtones peuvent être à l’origine d’un
certain nombre de difficultés et de désaccords lorsque les dispositions du droit national ont été élaborées
sans tenir compte de l’appropriation, de la reconnaissance ou de la protection des droits des peuples

Femme autochtone Bakoya devant sa maison, dans le village d’Imbong, dans la province d’Ogooué-Ivindo, au nord-est du Gabon.
Photo ONU/Gill Fickling.

137 E/2007/43 et E/C.19/2007/12, par. 5-6.


138 E/CN.4/Sub.2/2004/30, par. 58.
139 E/CN.4/Sub.2/2001/21, par. 34.

34 | Chapitre 4 : Le contenu de la Déclaration : les terres, les territoires et les ressources, le développement respectueux de l’identité,
34 | Chapitre 4 : et la réparation et l’indemnisation

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

autochtones à des terres, territoires et ressources naturelles. De nombreux peuples autochtones font
l’expérience de la perte de leurs terres en raison d’expropriations liées à des intérêts nationaux et les
mesures d’éloignement et de réinstallation qui en découlent ont de multiples effets négatifs sur le bien-
être des communautés autochtones et sur l’exercice de leurs droits.140
Les impacts sociaux, environnementaux et culturels des projets de développement de vaste envergure
et des industries extractives constituent également une préoccupation croissante pour les peuples
autochtones. Le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones a identifié le sujet des
industries extractives comme devant faire l’objet d’une attention particulière pendant son mandat.141

2. LES DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES À


LEURS TERRES, RESSOURCES ET TERRITOIRES
Ce qui constitue les terres, les ressources et les territoires d’un peuple autochtone particulier dépend
des circonstances spécifiques de la communauté en question. La Déclaration reconnaît les droits des
peuples autochtones à leurs terres, territoires et ressources, y compris les droits à des terres, territoires
et ressources traditionnellement détenus par des peuples autochtones mais désormais contrôlés par
d’autres de fait et, également, de droit.
La Déclaration prévoit une large reconnaissance des droits des peuples autochtones à des terres,
territoires et ressources naturelles, notamment :
• Le droit de renforcer leurs liens spirituels particuliers avec les terres, territoires et ressources
(article 25)
• Le droit de posséder, d’utiliser, de mettre en valeur et de contrôler les terres, territoires et
ressources qu’ils possèdent parce qu’ils leur appartiennent traditionnellement (article 26)
• Le droit à réparation, par le biais, notamment, de la restitution ou, lorsque cela n’est pas possible,
d’une indemnisation juste, correcte et équitable pour les terres, territoires et ressources qu’ils
possédaient traditionnellement ou occupaient ou utilisaient et qui ont été confisqués, pris,
occupés, exploités ou dégradés sans leur consentement préalable, donné librement et en
connaissance de cause (article 28)
• Le droit à la préservation et à la protection de leur environnement et de la capacité de production
de leurs terres ou territoires et ressources (article 29)
• Le droit de définir et d’établir des priorités et des stratégies pour la mise en valeur et l’utilisation
de leurs terres ou territoires et autres ressources (article 32)
La Déclaration exige des États qu’ils prennent des mesures pour protéger et promouvoir les droits
des peuples autochtones relatifs aux terres, territoires et ressources, par exemple en imposant des
restrictions sur le stockage ou l’élimination des matières dangereuses sur les terres ou territoires des
peuples autochtones (article 29) ou sur l’utilisation des terres et territoires des peuples autochtones pour
des activités militaires (article 30).
Le système des droits de l’homme interaméricain a une jurisprudence très développée dans le domaine
des droits des peuples autochtones aux terres et ressources. Dans un certain nombre de cas, il a
tranché en faveur de la possession des terres par les peuples autochtones. Par exemple, la Cour a
souligné que la possession des terres devrait suffire aux communautés autochtones qui n’ont pas de
véritable titre de propriété sur les terres pour obtenir la reconnaissance officielle de ce droit à la propriété
et de l’enregistrement qui en résulte.142

140 Ibid., par. 48-84.


141 A/HRC/18/35.
142 Mayagna (Sumo) Awas Tingni Community v Nicaragua, Cour interaméricaine des droits de l’homme, Jugement du 31 août 2001,
Série C N0. 66, par. 151.

Chapitre 4 : Le contenu de la Déclaration : les terres, les territoires et les ressources, le développement respectueux de l’identité, | 35
et la réparation et l’indemnisation, | 35

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a confirmé que les peuples autochtones
détiennent des droits de propriété sur les terres et les ressources naturelles qu’ils utilisaient
traditionnellement. À partir d’un point de vue exposé par la Commission africaine dans le cadre de
l’affaire Endorois, les conclusions suivantes peuvent être tirées :
1) La possession traditionnelle de terres par des peuples autochtones a un effet équivalent à celui
d’un plein titre de propriété accordé par un État ;
2) La possession traditionnelle donne aux peuples autochtones le droit d’exiger la reconnaissance
officielle du tire de propriété et son enregistrement ;
3) Les membres des peuples autochtones qui, pour des raisons indépendantes de leur volonté,
ont quitté leurs terres traditionnelles ou en ont perdu la possession, conservent leurs droits de
propriété sur ces terres même en l’absence de titre légal, sauf si les terres ont été légalement et
de bonne foi transférées à des tiers ; et
4) Les membres des peuples autochtones qui ont perdu la possession de leurs terres pour des
raisons indépendantes de leur volonté et dont les terres ont été légalement transférées à des tiers
innocents, ont droit à la restitution des terres ou à l’obtention d’autres terres, équivalentes par
leur qualité et leur étendue. En conséquence, la possession n’est pas une condition préalable à
l’existence de droits des autochtones à la restitution de leurs terres.143
Dans l’affaire Endorois, la Commission africaine a jugé que, dans sa volonté de créer une réserve
animalière, l’État a illégalement expulsé les Endorois de leurs terres ancestrales et détruit leurs
possessions. Elle a également considéré que les bouleversements et les déplacements subis par les
Endorois ainsi que le déni de leurs droits à la propriété sur les terres ancestrales étaient disproportionnés
par rapport à l’intérêt qu’était censé représenter pour le public la création de la réserve animalière.
Le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones a activement promu les droits des peuples
autochtones sur les terres et les ressources naturelles grâce à des rapports thématiques ou relatifs à des
visites dans les pays.144 Les droits autochtones liés à la protection des terres, territoires et ressources
ont des implications qui vont au-delà de la simple protection des terres. Les préoccupations qui s’y
rattachent ont été examinées par plusieurs détenteurs de mandat au titre des procédures spéciales.
Le Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant
et, dans ce contexte, du droit à la non discrimination, a recommandé que des mesures soient prises
pour protéger les terres autochtones dans le cadre de la protection du droit à un niveau de vie suffisant.
Le Rapporteur spécial a également noté que les « mesures visant à la réalisation du droit des peuples
autochtones à un logement convenable devraient inclure le respect de leurs terres traditionnelles et
l’élaboration de politiques en matière de terres et de logements sensibles à leur culture ».145
À plusieurs reprises, le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation a recommandé aux États de
prendre des mesures visant à protéger les droits des peuples autochtones à des terres afin de s’assurer
qu’ils puissent exercer leur droit à l’alimentation.146
Les droits des peuples autochtones à des terres et à des ressources découlent de leurs droits à l’intégrité
culturelle, à la non discrimination, à l’autodétermination et à la propriété, notamment de leur droit à la
propriété ou à l’utilisation collective. La consultation et le droit au consentement sont également des
éléments fondamentaux des droits des peuples autochtones à des terres et à des ressources naturelles.
L’interprétation de ces droits par les organes régionaux et internationaux des droits de l’homme, ainsi
que leur application en rapport avec les droits des peuples autochtones à des terres et à des ressources
naturelles sont examinées aux Chapitres 2 et 3 du présent Manuel.

143 Centre for Minority Rights Development (Kenya) and Minority Rights Group International on behalf of Endorois Welfare Council v
Kenya, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 276/2003 (4 février 2010), par. 209.
144 Voir, par exemple, les rapports soumis par le Rapporteur spécial au Conseil des droits de l’homme sur les industries extractives
exerçant leurs activités sur des territoires autochtones ou à proximité de ces territoires (A/HRC/18/35 et A/HRC/21/47).
145 E/CN.4/2006/41/Add.3, p. 22.
146 A/HRC/13/33/Add.5.

36 | Chapitre 4 : Le contenu de la Déclaration : les terres, les territoires et les ressources, le développement respectueux de l’identité,
36 | Chapitre 4 : et la réparation et l’indemnisation

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

3. LE DÉVELOPPEMENT RESPECTUEUX DE LA
CULTURE ET DE L’IDENTITÉ
Bien que les peuples autochtones aient le droit de se développer de concert avec les communautés
et les sociétés plus larges au sein desquelles ils vivent, il existe souvent des problèmes particuliers
qui doivent être pris en considération à l’occasion des initiatives de développement susceptibles de
les affecter.147 Le concept de développement respectueux de la culture et de l’identité reconnaît que
les peuples autochtones peuvent évaluer le bien-être de leurs communautés ainsi que l’utilisation
appropriée de leurs terres, territoires et ressources d’une façon distincte de celles des communautés
non autochtones.
Dans de nombreux cas, les paradigmes du développement de la modernisation et de l’industrialisation
se sont souvent traduits par la destruction de tout système économique, social, éducatif, culturel,
spirituel ou encore de santé, de gouvernance ou de connaissances des peuples autochtones ainsi que
par l’appauvrissement des ressources naturelles. Par ailleurs, les peuples autochtones ont également
été confrontés à des défis lorsqu’ils on tenté de préserver les stratégies et politiques qu’ils utilisaient pour
leurs terres, territoires et ressources, notamment parce que leurs cultures et identités sont considérés
comme des « obstacles » au progrès. Le développement respectueux de la culture et de l’identité se
caractérise par une approche holistique qui tente de s’appuyer sur les droits collectifs, la sécurité ainsi
qu’un plus large contrôle et l’autogouvernance des terres, des territoires et des ressources.148
La Déclaration constitue un cadre normatif complet, favorable au développement respectueux de la
culture et de l’identité, principalement traité dans les articles 3 et 32. Ces articles reconnaissent le droit
des peuples autochtones à définir et élaborer des priorités et des stratégies relatives à la mise en valeur
de leurs terres, territoires et ressources, et s’appuyant sur leur droit à l’autodétermination. Le droit des
peuples autochtones à préserver leurs propres institutions représentatives et à veiller à ce qu’elles soient
respectées et consultées par les États et les sociétés est au cœur de l’exercice de l’autodétermination.
Les savoirs traditionnels et les langues sont des éléments essentiels d’un développement vu sous
l’angle de la culture et de l’identité, et les intérêts, les savoirs et les expériences des peuples autochtones
doivent être au centre des méthodologies visant à construire des connaissances relatives aux peuples
autochtones.149
Les INDH sont bien placées pour promouvoir un développement respectueux de la culture et de
l’identité. Les difficultés liées aux terres, territoires et ressources peuvent être portées à l’attention des
INDH et, grâce à l’application de la Déclaration, les INDH peuvent contribuer aux efforts déployés pour
s’assurer que les stratégies et les priorités des peuples autochtones sont respectées. Les INDH peuvent
également participer à la recherche et à l’élaboration des politiques ayant pour objet de renforcer les
connaissances relatives aux droits des peuples autochtones, notamment le droit à l’autodétermination,
et donner des conseils en vue de la création de structures institutionnelles destinées à soutenir la mise
en œuvre de ces droits.

4. RÉPARATION ET INDEMNISATION
Les INDH sont également bien placées pour promouvoir et protéger les droits des peuples autochtones
grâce à l’application et à la promotion des articles de la Déclaration relatifs aux terres, territoires et
ressources. La Déclaration reconnaît différents droits à réparation et indemnisation au titre de la violation
des droits des peuples autochtones à des terres, ressources et territoires.

147 A/65/264, par. 25.


148 Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones, « Les peuples autochtones : développement, culture et
identité : les articles 3 et 32 de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, Rapport de la réunion du groupe d’experts
internationaux », New York, États-Unis d’Amérique (E/C.19/2010/14), par. 19-22.
149 Ibid., par. 40, 42 et 44.

Chapitre 4 : Le contenu de la Déclaration : les terres, les territoires et les ressources, le développement respectueux de l’identité, | 37
et la réparation et l’indemnisation, | 37

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

L’article 28 présente les droits des peuples autochtones à réparation et indemnisation auxquels ils
peuvent prétendre lorsque leurs terres, territoires et ressources ont été pris, exploités ou dégradés
sans leur consentement. Ces droits prévoient une voie de recours pour les peuples autochtones qui ne
possèdent plus leurs terres et territoires de façon à ce que :
• Dans la mesure du possible, les terres, territoires et ressources que les peuples autochtones ne
possèdent plus leur soient restitués
• Lorsque cela n’est pas possible, une indemnisation juste leur soit versée, qui peut prendre la
forme d’autres terres, territoires et ressources, d’une indemnité pécuniaire, d’opportunités de
développement (en d’autres termes des opportunités d’emploi) ou de tout autre avantage que
les peuples autochtones jugeront approprié.
Reproduisant l’approche adoptée par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale dans sa
recommandation générale n° 23, la restitution des terres et des territoires doit être considérée comme
la principale réparation. Les autres formes de réparation et d’indemnisation ne doivent être envisagées
que lorsque la restitution n’est pas possible.150

POINTS CLÉS : CHAPITRE 4


• Ce qui constitue les terres, les ressources et les territoires d’un peuple
autochtone particulier dépend des circonstances spécifiques de la
communauté en question.
• Deux des principales contraintes pesant sur la libre et pleine jouissance
des droits des peuples autochtones à des terres, territoires et ressources
naturelles sont liées d’une part à la non-reconnaissance par les États
de l’existence de l’usage, de l’occupation et de la propriété autochtones
et, d’autre part, au non-octroi par les États aux peuples autochtones
du statut et de la capacité juridiques ainsi que des autres droits légaux
appropriés à la propriété foncière.
• Les États doivent prévoir des mécanismes de réparation efficaces pour
les situations où le consentement préalable, libre et éclairé n’a pas été
recherché.

150 Voir également J. Gilbert et C. Doyle, “A New Dawn over the Land: Shedding Light on Collective Ownership and Consent” in
Reflections on the UN Declaration on the Rights of Indigenous Peoples, S. Allen et A. Xanthaki, éd. (2011), p. 299.

38 | Chapitre 4 : Le contenu de la Déclaration : les terres, les territoires et les ressources, le développement respectueux de l’identité,
38 | Chapitre 4 : et la réparation et l’indemnisation

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

Chapitre 5 :
La mise en œuvre de la Déclaration
QUESTIONS CLÉS
• Quel est le statut juridique de la Déclaration ?
• Quels types de liens existe-t-il entre la Déclaration et les autres normes
internationales ?
• Quel rôle peuvent jouer les INDH pour faire progresser les droits des
peuples autochtones ?

1. LE STATUT JURIDIQUE DE LA DÉCLARATION


La Déclaration a été adoptée par la résolution 61/295 de l’Assemblée générale. Contrairement aux
traités ou aux conventions, les résolutions ne créent pas en tant que telles des obligations juridiques
pour les États. Néanmoins :
[…] en tant que résolution adoptée par l’Assemblée générale à l’écrasante majorité des États
membres, la Déclaration engage l’Organisation des Nations Unies et ses États Membres, eu
égard aux obligations définies par la Charte des Nations Unies.151
La Déclaration ne crée pas de droits nouveaux ou spéciaux pour les peuples autochtones ; en revanche,
elle s’inspire des normes existantes en matière de droits de l’homme et cherche à les appliquer à la situation
particulière des peuples autochtones. Par conséquent, la Déclaration illustre la nature interdépendante et
indivisible des normes et engagements internationaux en matière de droits de l’homme :
La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones traduit une
conception commune autorisée, au niveau mondial, du contenu minimum des droits
des peuples autochtones, fondée sur diverses sources tirées du droit international des droits
de l’homme. Aboutissement d’un très long processus au cours duquel les peuples autochtones
eux-mêmes ont pu faire valoir leurs revendications, la Déclaration reflète et développe des
normes en matière de droits de l’homme d’application générale, telles qu’elles sont interprétées
et appliquées par les organes conventionnels des Nations Unies et les organes conventionnels
régionaux, ainsi que les normes énoncées dans la Convention n° 169 de l’OIT et d’autres
instruments et processus applicables.
De ce fait, la Déclaration ne vise pas à conférer aux peuples autochtones des droits fondamentaux
spéciaux ou nouveaux ; elle développe plutôt des principes et des droits généraux dans le domaine
des droits de l’homme en les situant dans le contexte historique, culturel et social propre aux
peuples autochtones. Les normes énoncées dans la Déclaration tendent essentiellement à remédier
aux obstacles et discriminations structurels auxquels les peuples autochtones se sont heurtés
dans l’exercice de leurs droits de l’homme fondamentaux. Dans ce sens, elles sont rattachées aux
obligations incombant aux États en vertu d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme.152
Dans un communiqué commun célébrant en 2008 la Journée internationale des peuples autochtones
du monde, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme par intérim, Mme Kyung-
wha Kang, et le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales
des populations autochtones, M. James Anaya, ont appelé de leurs vœux un engagement politique en
faveur de la Déclaration :

151 A/64/338, par. 48.


152 A/HRC/9/9, par. 85-86.

Chapitre 5 : La mise en œuvre de la Déclaration | 39

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Cependant, l’adoption de la Déclaration sur les droits des populations autochtones, aussi
importante soit-elle, ne changera pas en elle-même la vie quotidienne des hommes, des femmes
et des enfants dont elle défend les droits. [Nous jugeons donc] nécessaire l’engagement politique
des Etats, la coopération internationale ainsi que le soutien et la bonne volonté de l’opinion
publique pour créer et mettre en œuvre une série de programmes intensément politiques, conçus
et entrepris en consultation avec les populations autochtones elles-mêmes.153
La Déclaration est le reflet d’une approche qui impose aux États des obligations et des responsabilités.154 En
conséquence, le système de l’Organisation des Nations Unies recommande de plus en plus fréquemment
aux États de prendre des mesures concrètes et ciblées à cet égard. Par exemple, le Rapporteur spécial
sur les droits des peuples autochtones a fait des recommandations aux États afin qu’ils examinent les lois
et les politiques ayant un impact sur les peuples autochtones à la lumière de la Déclaration.155
Comme indiqué précédemment, les droits des peuples autochtones sont fondés sur les instruments
internationaux des droits de l’homme. Les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils
et politiques, du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et de la
Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale s’appliquent
tout particulièrement aux questions relatives aux peuples autochtones. Dans leurs rapports et leurs
recommandations, les organes conventionnels ont proposé des interprétations générales des droits
énoncés dans ces traités et de leur application aux peuples autochtones :
• Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a émis la recommandation générale
n° 23 qui demande aux États parties de s’assurer que les droits des peuples autochtones à
la culture, aux terres et à la participation politique sont reconnus. Il a également spécifié dans
une observation générale sur les mesures spéciales que les droits des peuples autochtones,
qui sont des droits permanents, ne doivent pas être confondus avec les « mesures spéciales »
temporaires – qui sont des mesures ayant pour objet de remédier à une discrimination passée ou
de rectifier des inégalités contemporaines.
• Le Comité des droits de l’enfant a adopté une observation générale importante et complète
sur les droits de l’enfant autochtone et a fait référence à la Déclaration dans son examen des
rapports des États parties.
• Le Comité des droits de l’homme continue d’invoquer le droit à l’autodétermination en rapport
avec les peuples autochtones, notamment l’article 1 (2) (le droit à librement disposer des richesses
naturelles et le droit de disposer en toute sécurité de leurs moyens de subsistance). Il a également
souligné que les États ont l’obligation de « s’assurer du fait que les peuples autochtones sont
effectivement en mesure d’exercer leur droit à un consentement préalable, libre et informé ».156
Par ailleurs, le Comité a considéré que l’article 27 (le droit à la culture) constitue une base légitime
pour les revendications des peuples autochtones en matière de terres et de ressources.
• Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a également fait référence à l’article 1
pour ce qui concerne l’exercice effectif, par les peuples autochtones, de leurs droits aux
domaines, terres et ressources naturelles ancestraux. Il a adopté une observation générale sur
la non discrimination en matière de droits économiques, sociaux et culturels qui présente un
intérêt particulier pour les peuples autochtones. Le Comité a également adopté une observation
générale importante sur le droit à prendre part à la vie culturelle qui contient un texte substantiel
sur les peuples autochtones et qui réitère les droits reconnus dans la Déclaration. Il rattache
les droits territoriaux à l’identité culturelle en utilisant les propres termes de la Déclaration sur le
droit des peuples autochtones à posséder et à contrôler leurs terres, territoires et ressources, et

153 Communiqué commun du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme par intérim et du Rapporteur spécial sur
la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones (9 août 2008), disponible en anglais à
l’adresse suivante : www.un.org/events/indigenous/2008/hcmessage.shtml.
154 Voir, par exemple, les articles 38, 41 et 42 de la Déclaration.
155 Par exemple, le Rapporteur spécial a recommandé à la Fédération de Russie de «  procéder à un examen complet des lois
et des politiques de la Fédération de Russie afin de s’assurer de leur compatibilité avec la Déclaration, et de prendre des
mesures coordonnées supplémentaires pour mettre en œuvre les règles de la Déclaration dans le contexte particulier des peuples
autochtones de Russie » (A/HRC/15/37/Add.5), par. 82.
156 CCPR/C/TGO/CO/4, par. 21.

40 | Chapitre 5 : La mise en œuvre de la Déclaration

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

61e session de l’Assemblée générale, 13 septembre 2007. Photo ONU/Paulo Filgueiras

souligne également que les États doivent respecter le principe du consentement préalable, libre
et éclairé pour toutes les questions affectant les droits des peuples autochtones.
Un certain nombre de facteurs supplémentaires donnent du poids à l’importance de la Déclaration et à
son potentiel en matière d’influence sur les normes des droits de l’homme :
Lors de son adoption, la Déclaration a été soutenue par la plupart des États. Seulement quatre États
ont voté contre (l’Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis) et onze États se sont
abstenus.157 Depuis, les quatre États qui avaient voté contre ont changé d’avis. Ce soutien mondial
témoigne de l’existence d’un consensus international sur une expression normative des droits des
peuples autochtones qui est conforme aux normes internationales existantes en matière de droits de
l’homme. La référence constante à la Déclaration dans le processus de l’examen périodique universel
(EPU) témoigne également de l’existence de ce consensus international.158
• L’élaboration de la Déclaration a duré 20 ans. Pendant cette période, les peuples autochtones et les
États ont activement participé à ce que les États ont appelé les « négociations ».159 En conséquence,
la Déclaration est la preuve du terrain d’entente auquel ont pu parvenir les peuples autochtones du
monde et les États membres de l’Organisation des Nations Unies.160 Comme l’a noté le Rapporteur
spécial sur les droits des peuples autochtones, la défense et la participation des peuples autochtones
entreprises depuis des décennies confèrent une très haute légitimité à la Déclaration et les normes
qu’elle contient « reflètent, pour l’essentiel, les propres aspirations des peuples autochtones ».161
• Il est de plus en plus fréquemment avancé que la Déclaration fait déjà partie du droit coutumier
international.162

157 “General Assembly adopts Declaration on the Rights of Indigenous Peoples; ‘Major step forward’ towards human rights for all,
says President, 61st session of the General Assembly, 107th and 108th Plenary Meeting” (GA/10612), 13 septembre 2007.
158 Voir, par exemple, A/HRC/12/8/Add.1, par. 6 ; et A/HRC/11/17, par. 86 ainsi que les recommandations 45 et 52.
159 E. Voyiakis, “Voting in the General Assembly as Evidence of Customary International Law?” in Reflections on the UN Declaration
on the Rights of Indigenous Peoples, 216.
160 E/C.19/2009/14, annexe, par. 9.
161 A/65/264.
162 E/C.19/2009/14, annexe, par. 6-13  ; et J. Anaya et S. Wiessner, “OP-ED: The UN Declaration on the Rights of Indigenous
Peoples: Towards Re-empowerment” in Jurist, 3 octobre 2007, disponible en anglais à l’adresse suivante  : http://jurist.org/
forum/2007/10/un-declaration-on-rights-of-indigenous.php.

Chapitre 5 : La mise en œuvre de la Déclaration | 41

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

2. LE RÔLE DES INSTITUTIONS NATIONALES DES


DROITS DE L’HOMME
Les INDH sont extrêmement bien placées pour fonctionner comme des passerelles jetées entre le
système des droits de l’homme et la réalité concrète à laquelle sont confrontés les peuples autochtones.
Les INDH constituent l’un des éléments fondamentaux de tout système national de protection des
droits de l’homme solide et jouent un rôle clé dans la mise en adéquation de la protection nationale avec
les normes internationales.
Il existe des différences significatives entre les structures et les fonctions des différentes INDH. Ces
différences sont le reflet de la diversité des contextes nationaux dans le cadre desquels fonctionnent
les INDH. Cependant, les Principes de Paris constituent un vaste cadre normatif auquel s’adossent les
INDH pour entreprendre leurs programmes de travail particuliers. C’est grâce à ce cadre que les INDH
peuvent faire progresser la protection, la promotion et la réalisation des droits de l’homme des peuples
autochtones.

PRINCIPES DE PARIS
Compétences et attributions
1. Une institution nationale est investie de compétences de protection et
de promotion des droits de l’homme.
2. Une institution nationale est dotée d’un mandat aussi étendu que
possible, et clairement énoncé dans un texte constitutionnel ou
législatif, déterminant sa composition et son champ de compétence.
3. Une institution nationale a, notamment, les attributions suivantes :
a) Fournir à titre consultatif au gouvernement, au parlement et à tout autre organe
compétent, soit à la demande des autorités concernées, soit en usant de sa faculté
d’autosaisine, des avis, recommandations, propositions et rapports concernant toutes
questions relatives à la protection et à la promotion des droits de l’homme. L’institution
nationale peut décider de les rendre publics. Ces avis, recommandations, propositions
et rapports ainsi que toute prérogative de l’institution nationale se rapportent aux
domaines suivants :
i) Toutes dispositions législatives et administratives, ainsi que celles relatives à
l’organisation judiciaire destinées à préserver et étendre la protection des droits
de l’homme. A cet égard, l’institution nationale examine la législation et les textes
administratifs en vigueur, ainsi que les projets et propositions de lois, et fait les
recommandations qu’elle estime appropriées en vue de s’assurer que ces textes
soient respectueux des principes fondamentaux des droits de l’homme. Elle
recommande, si nécessaire, l’adoption d’une nouvelle législation, l’adaptation de la
législation en vigueur, et l’adoption ou la modification des mesures administratives ;
ii) Toute situation de violation des droits de l’homme dont elle déciderait de se saisir ;
iii) L’élaboration des rapports sur la situation nationale des droits de l’homme en
général, ainsi que sur des questions plus spécifiques ;
iv) Attirer l’attention du gouvernement sur les situations de violations des droits de
l’homme dans tout pays, lui proposer toutes initiatives tendant à y mettre fin et, le
cas échéant, émettre un avis sur les positions et réactions du gouvernement.
b) Promouvoir et veiller à l’harmonisation de la législation, des règlements et des pratiques
nationaux avec les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, auxquels
l’Etat est partie, et à leur mise en œuvre effective ;

42 | Chapitre 5 : La mise en œuvre de la Déclaration

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Partie I La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Contexte, contenu et mise en œuvre

c) Encourager à la ratification desdits instruments ou à l’adhésion à ces textes et s’assurer


de leur mise en œuvre ;
d) Contribuer aux rapports que les Etats doivent présenter aux organes et comités des
Nations Unies, ainsi qu’aux institutions régionales, en application de leurs obligations
conventionnelles, et le cas échéant, émettre un avis à ce sujet, dans le respect de leur
indépendance ;
e) Coopérer avec l’Organisation des Nations Unies et toute autre institution de la famille
des Nations Unies, les institutions régionales et les institutions nationales d’autres
pays, compétentes dans les domaines de la protection et de la promotion des droits de
l’homme ;
f) Être associée à l’élaboration de programmes concernant l’enseignement et la recherche
sur les droits de l’homme et participer à leur mise en œuvre dans les milieux scolaires,
universitaires et professionnels ;
g) Faire connaître les droits de l’homme et la lutte contre toutes les formes de
discrimination, notamment la discrimination raciale, en sensibilisant l’opinion publique
notamment par l’information et l’enseignement, en faisant appel à tous organes de
presse.

Principes complémentaires concernant le statut des commissions ayant des


compétences à caractère quasi juridictionnel
Une institution nationale peut être habilitée à recevoir et examiner des plaintes et requêtes
concernant des situations individuelles. Elle peut être saisie, par des particuliers, leurs
représentants, des tierces parties, des organisations non gouvernementales, des associations
et syndicats et toutes autres organisations représentatives. Dans ce cas, et sans préjudice
des principes ci-dessus concernant les autres compétences des commissions, les fonctions
qui leur sont confiées peuvent s’inspirer des principes suivants :
a) Rechercher un règlement amiable par la conciliation ou, dans les limites fixées par la loi,
par des décisions contraignantes, ou, le cas échéant, en ayant recours en tant que de
besoin à la confidentialité ;
b) Informer l’auteur de la requête de ses droits, notamment des voies de recours qui lui
sont ouvertes, et lui en faciliter l’accès ;
c) Se saisir des plaintes ou requêtes ou les transmettre à toute autre autorité compétente
dans les limites fixées par la loi ;
d) Faire des recommandations aux autorités compétentes, notamment en proposant des
adaptations ou réformes des lois, règlements et pratiques administratives, spécialement
lorsqu’ils sont à l’origine des difficultés rencontrées par les auteurs des requêtes pour
faire valoir leurs droits.

Ce vaste mandat permet aux INDH de s’impliquer auprès de l’ensemble des acteurs pertinents au niveau
national, ainsi que d’interagir avec les mécanismes internationaux, afin de contribuer à la promotion, à la
protection et à la réalisation des droits de l’homme des peuples autochtones tout en les faisant progresser.
Par exemple, les INDH peuvent utiliser leurs compétences techniques pour contrôler et conseiller les
gouvernements afin de s’assurer que leurs lois et leurs politiques sont conformes avec les droits énoncés
dans la Déclaration et qu’elles garantissent leur protection. Par ailleurs, les fonctions éducatives des
INDH peuvent contribuer à la sensibilisation aux droits de l’homme des peuples autochtones et à la
façon dont ils peuvent être exercés.
Généralement, les INDH disposent également de pouvoirs quasi-judiciaires qui leur permettent
d’examiner et quelquefois de déposer des plaintes, ainsi que de tenir des audiences publiques ou de
mener des enquêtes nationales sur des violations des droits de l’homme des peuples autochtones.

Chapitre 5 : La mise en œuvre de la Déclaration | 43

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

POINTS CLÉS : CHAPITRE 5


• La Déclaration est une résolution de l’Assemblée générale. Les résolutions
ne créent pas en tant que telles des obligations juridiques pour les États.
• La Déclaration ne crée pas de nouveaux droits pour les peuples
autochtones. Elle s’inspire des normes existantes en matière de droits
de l’homme et cherche à les appliquer à la situation des peuples
autochtones.
• La Déclaration est le reflet d’une approche qui impose aux États des
obligations et des responsabilités.
• Les organes conventionnels utilisent la Déclaration dans leurs travaux et
pour les recommandations qu’ils émettent à l’intention des États.
• les Principes de Paris constituent un vaste cadre normatif auquel
s’adossent les INDH pour faire progresser la protection, la promotion et la
réalisation des droits des peuples autochtones.

44 | Chapitre 5 : La mise en œuvre de la Déclaration

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Partie II
Activités et fonctions nationales
des institutions nationales des droits
de l’homme

Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones


Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation
Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration
Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes
Chapitre 10 : Enquêtes publiques

45

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Introduction à la Partie II
Les États sont les principaux responsables de la promotion et de la protection des droits de l’homme
des peuples autochtones.163
Par définition, les INDH jouent le rôle clé consistant à aider leur État à remplir ses obligations en matière
de droits de l’homme. Elles peuvent jouer un rôle majeur, notamment en défendant et en conseillant l’État
et d’autres acteurs, tels que les sociétés, mais aussi en faisant pression sur eux afin qu’ils assument
leurs responsabilités.164
Les INDH peuvent jouer un rôle important en matière de sensibilisation du public aux questions relatives
aux droits de l’homme et disposent d’opportunités stratégiques pour collaborer avec les organisations
de peuples autochtones et d’autres ONG dans le but de prendre en compte les questions relatives aux
droits de l’homme des peuples autochtones.
Par ailleurs, les INDH contrôlent le respect, par les États, des normes nationales et internationales
relatives aux droits de l’homme et nombre d’entre elles ont pour fonction de traiter des plaintes et
d’enquêter sur des plaintes.
Enfin, les INDH sont très bien placées pour s’impliquer auprès du système international des droits de
l’homme et contribuer ainsi aux processus internationaux d’établissement de rapports et à la diffusion
des informations pertinentes au plan national.
La deuxième partie du présent Manuel décrit les actions concrètes que peuvent mener les INDH pour
faire progresser les droits des peuples autochtones, tels qu’ils sont énoncés dans la Déclaration.

163 Il convient de souligner que le rôle des sociétés – et tout particulièrement des sociétés transnationales – est un sujet auquel la
sphère des droits de l’homme porte un intérêt croissant. Voir, par exemple, A/HRC/15/37, par. 26-91.
164 APF, Advisory Council of Jurists Reference on Human Rights, Corporate Accountability and Government Responsibility (2008).

46

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Chapitre 6 :
Accessibilité des INDH aux peuples
autochtones
QUESTIONS CLÉS
• Comment les INDH peuvent-elles se positionner et se mettre en avant afin
d’être accessibles aux peuples autochtones?
• Comment les INDH peuvent-elles effectivement tendre la main aux
peuples autochtones ?
• Comment les INDH peuvent-elles construire une présence autochtone au
sein de leur institution ?

PRINCIPES FONDATEURS DE L’IMPLICATION DES INDH


Principes de Paris
Compétences et attributions
3. Une institution nationale a, notamment, les attributions suivantes :
a) Fournir à titre consultatif au gouvernement, au parlement et à tout
autre organe compétent, soit à la demande des autorités concernées,
soit en usant de sa faculté d’autosaisine, des avis, recommandations, propositions et
rapports concernant toutes questions relatives à la protection et à la promotion des
droits de l’homme. L’institution nationale peut décider de les rendre publics. Ces avis,
recommandations, propositions et rapports ainsi que toute prérogative de l’institution
nationale se rapportent aux domaines suivants :
iv) Attirer l’attention du gouvernement sur les situations de violations des droits de
l’homme dans tout pays, lui proposer toutes initiatives tendant à y mettre fin et, le
cas échéant, émettre un avis sur les positions et réactions du gouvernement.
g) Faire connaître les droits de l’homme et la lutte contre toutes les formes de
discrimination, notamment la discrimination raciale, en sensibilisant l’opinion publique
notamment par l’information et l’enseignement, en faisant appel à tous organes de
presse.

Composition et garanties d’indépendance et de pluralisme


1. La composition de l’institution nationale et la désignation de ses membres, par voie
élective ou non, doivent être établies selon une procédure présentant toutes les garanties
nécessaires pour assurer la représentation pluraliste des forces sociales (de la société
civile) concernées par la protection et la promotion des droits de l’homme, notamment par
des pouvoirs permettant d’établir une coopération effective avec, ou par la présence, de
représentants :
a) Des organisations non gouvernementales compétentes dans le domaine des droits de
l’homme et de la lutte contre la discrimination raciale, des syndicats, des organisations
socio-professionnelles intéressées, notamment de juristes, médecins, journalistes et
personnalités scientifiques ;

Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones | 47

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Modalités de fonctionnement
Dans le cadre de son fonctionnement, l’institution nationale doit :
e) Constituer en son sein en tant que de besoin des groupes de travail et se doter de
sections locales ou régionales pour l’aider à s’acquitter de ses fonctions ;
f) Entretenir une concertation avec les autres organes juridictionnels ou non, chargés
de la protection et de la promotion des droits de l’homme (notamment ombudsmen,
médiateurs, ou d’autres organes similaires) ;
g) Compte tenu du rôle fondamental que jouent les organisations non gouvernementales
pour amplifier l’action des institutions nationales, développer des rapports avec les
organisations non gouvernementales qui se consacrent à la protection et la promotion
des droits de l’homme, au développement économique et social, à la lutte contre le
racisme, à la protection des groupes particulièrement vulnérables (notamment les
enfants, les travailleurs migrants, les réfugiés, les handicapés physiques et mentaux) ou
à des domaines spécialisés.

Pour que les INDH contribuent effectivement à la protection, à la promotion et à la réalisation des droits
de l’homme des peuples autochtones, elles doivent être structurées et fonctionner d’une façon qui soit
aisément accessible aux peuples autochtones et au grand public.

1. ACCESSIBILITÉ
1.1. PROMOUVOIR LA SENSIBILISATION À L’INDÉPENDANCE DES INDH
Il est important que les INDH se mettent en avant et qu’elles promeuvent leurs fonctions auprès de la société.
Cette autopromotion devient plus importante lorsque les INDH ciblent une minorité ou des groupes
marginalisés, tels que les peuples autochtones. Si les peuples autochtones ignorent l’existence et les
fonctions des INDH, ils estimeront qu’elles ne sont pas accessibles.
Les formes de communication habituelles peuvent s’avérer insuffisantes lorsqu’il s’agit de mettre en
œuvre des activités d’information censées tendre la main aux peuples autochtones. Conformément
aux principes des droits de l’homme, il est de la responsabilité des INDH d’adapter leurs messages
promotionnels afin de répondre aux besoins de ses différents interlocuteurs, notamment aux besoins
des peuples autochtones. En conséquence, les INDH devront élaborer des méthodes d’information
souples et culturellement appropriées et, le cas échéant, utiliser des langues autochtones.
Un message important qu’il convient de communiquer aux peuples autochtones est que les INDH
qui ont le «  statut A  » – c’est-à-dire celles qui appliquent les Principes de Paris – sont des organes
indépendants. Les activités promotionnelles ciblées qui soulignent l’indépendance des INDH par rapport
à l’État peuvent aider les peuples autochtones à prendre conscience de cette indépendance.

1.2. PROMOUVOIR LA SENSIBILISATION AUX ACTIVITÉS DES INDH


Les INDH doivent également reconnaître que, tout en étant des organes indépendants, elles sont aussi
des corps de leurs États. Ceci pourrait écorner l’image des INDH que se forgent les peuples autochtones.
Compte tenu des héritages historiques légués par des États qui ont approuvé la discrimination, il n’est
pas rare que les peuples autochtones soient fort peu enclins à coopérer avec les INDH. Par conséquent,
il est important que les INDH fassent passer des messages clairs quant à leur rôle, notamment en ce
qui concerne leur indépendance par rapport au Gouvernement, et qu’elles œuvrent activement auprès
des peuples autochtones pour gagner leur confiance.165
165 National Human Rights Institutions: History, Principles, Roles and Responsibilities, Série sur la formation professionnelle, N° 4/
Rev.1 (Publication des Nations Unies, numéro de vente : E.09.XIV.4), p. 13.

48 | Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

166

Le site Web du Défenseur du peuple du Pérou est disponible en espagnol et


en langue autochtone (quechua). Certains matériels de sensibilisation sont
également disponibles dans des langues autochtones.166

Pour en savoir plus sur les stratégies de promotion des INDH, veuillez consulter le Chapitre 7.

1.3. ACCESSIBILITÉ
Les INDH doivent également être physiquement accessibles à leurs interlocuteurs. Les peuples
autochtones vivent souvent dans des lieux géographiquement isolés et l’inaccessibilité physique des
INDH peut poser de sérieux problèmes. 167

La Commission kenyane des droits de l’homme dispose de deux bureaux


régionaux situés dans des régions reculées du pays et ces deux bureaux
sont accessibles à des groupes significatifs de peuples autochtones. La
Commission prévoit de créer d’autres bureaux régionaux.167

Il n’est pas rare que les INDH aient un bureau dans la capitale du pays ou dans un autre lieu central où
vivent un grand nombre d’habitants. Les contraintes budgétaires rendent parfois cette réalité inévitable.
Néanmoins, il est important que les INDH n’excluent pas involontairement les peuples vivant dans des
régions reculées. Parmi les possibilités dont disposent les INDH pour améliorer le rayonnement de leurs
activités d’information, il convient de citer :
• La décentralisation géographique
• Le déploiement d’agents œuvrant sur le terrain
• La création de « centres de consultations »
• Le dialogue avec les organisations de peuples autochtones, les organisations professionnelles et
les organes représentatifs
• L’utilisation créative des technologies, notamment Internet et les réseaux sociaux
• Des expositions itinérantes dans les régions rurales
Il est particulièrement important que la capacité des INDH à recevoir les plaintes et à enquêter sur les
violations des droits de l’homme de façon appropriée ne soit pas entravée par la situation géographique
des peuples autochtones. En tant que de besoin, les INDH peuvent élaborer d’autres procédures visant
à faciliter l’examen et le traitement efficaces des plaintes sans qu’il soit nécessaire que les personnes se
rendent personnellement dans les bureaux des INDH.168

166 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.
167 Ibid.
168 National Human Rights Institutions: History, Principles, Roles and Responsibilities, p. 82-83.

Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones | 49

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

169

Le Bureau du médiateur en Namibie a pris une série de mesures visant à ce


que ses services deviennent plus accessibles aux personnes vivant dans des
régions reculées. Outre la création de deux bureaux régionaux, 152 « points
de visite » ont été créés à travers le pays. En fonction du budget, ces points
sont visités deux ou trois fois par an afin d’y recueillir les plaintes.
Pour compléter les programmes régionaux de réception des plaintes dans
les cliniques, le médiateur visite également les communautés autochtones
dans le cadre de « réunions communautaires ». L’objectif est de rencontrer
les chefs traditionnels et d’informer ces chefs et les membres de la
communauté des fonctions et des obligations du médiateur et de s’occuper
des questions portées à l’attention du Bureau.
Le médiateur utilise également la radio comme un instrument permettant
d’informer les communautés autochtones du pays – isolées et en grande
partie analphabètes. La Namibia Broadcasting Corporation diffuse dans
toutes les langues autochtones. Des spots radiophoniques donnent des
informations sur les droits de l’homme et le rôle du médiateur, présentées
par un membre du personnel de la station dans une langue autochtone.169

Outre l’accessibilité physique, les INDH doivent être culturellement accessibles aux peuples autochtones.
Les INDH peuvent prendre une série de mesures afin de s’assurer que les peuples autochtones
se sentent culturellement sécurisés lorsqu’ils dialoguent avec elles. Certaines de ces mesures sont
présentées en détail dans les sous-sections suivantes.

2. GAGNER LA CONFIANCE DES ORGANISATIONS


DE PEUPLES AUTOCHTONES 170

Pour favoriser un engagement effectif au côté des peuples autochtones, les INDH ne doivent pas se
contenter de s’assurer que leurs structures sont accessibles. Tisser des liens de coopération reposant sur la
confiance et le respect mutuel doit être considéré comme une priorité par les INDH, les peuples autochtones
et les organisations qui se consacrent aux peuples autochtones. L’obligation de consulter et le principe du
consentement préalable, libre et éclairé doivent présider à la création et à la pérennisation de ces liens.

La Commission canadienne des droits de la personne participe aux assemblées


générales annuelles des Premières nations et des autres groupements
autochtones. Lors de ces réunions, la Commission distribue des matériels
éducatifs et de sensibilisation sur les droits de l’homme et les fonctions de la
Commission. Cette participation contribue à instaurer un climat de confiance et
de loyauté entre la Commission et les peuples des Premières nations.
La Commission organise également des Forums sur la prévention de la
discrimination afin de contribuer au renforcement des partenariats et des
réseaux. En 2010, le Forum Circle of Awareness, Cycle of Growth s’est plus
particulièrement intéressé aux droits des peuples autochtones, notamment aux
questions relatives au lieu de travail.170 Le Forum a permis aux participants qui
représentaient des autochtones, des sociétés, le gouvernement et des ONG
d’échanger leurs points de vue dans un cadre informel, notamment dans des
ateliers pratiques et lors de sessions plénières.

169 Présentation dans le cadre de l’atelier du HCDH, Toward an Operational Guide for National Human Rights Institutions: Possible
good practices in addressing the rights of Peuples Indigenous peoples, Geneva, Switzerland, 11 July 2011.
170 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.chrc-ccdp.ca/preventing_discrimination/forum_2010_forum/archives-eng.aspx.

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Les organisations des peuples autochtones peuvent apporter leur expertise à la INDH et lui permettre
ainsi de s’assurer que ses activités visant à établir des contacts avec les peuples autochtones sont
correctement ciblées et qu’elles sont culturellement et linguistiquement appropriées. Par ailleurs, les
liens de coopération avec les organisations des peuples autochtones peuvent contribuer à instiller l’idée
de la légitimité de l’INDH et de ses activités dans l’esprit des peuples autochtones concernés. Ceci peut
aider à dissiper l’éventuelle réticence à entamer le dialogue avec l’INDH.
La nécessité d’établir des liens de coopération avec les organisations des peuples autochtones est
présentée de façon plus approfondie au Chapitre 7, dans le contexte des activités promotionnelles des
INDH.

3. CRÉER UNE PRÉSENCE AUTOCHTONE AU SEIN


DES INDH
Au-delà du dialogue constructif noué entre les INDH et les organisations des peuples autochtones,
la composition des effectifs des INDH doit refléter la diversité des partenaires de leurs pays. Il est
particulièrement important que les groupes vulnérables, notamment les peuples autochtones, soient
représentés au sein du personnel des INDH et qu’ils soient consultés sur les activités et les politiques
des INDH qui ont un impact sur les droits des autochtones et les communautés autochtones. La
représentation des autochtones doit être effective à tous les niveaux de l’institution, y compris aux
échelons décisionnels.171
Dans la mesure du possible, les INDH doivent publier les offres de poste bien au-delà des capitales de
façon à ce que les candidats autochtones vivant dans des zones rurales aient la possibilité de postuler.
Une fois nommé, le personnel autochtone peut constituer, pour les INDH, une source précieuse
d’informations sur les questions, coutumes et sensibilités culturelles des peuples autochtones.
Parallèlement, le personnel autochtone de l’INDH peut aider les communautés autochtones à mieux
comprendre le rôle et les fonctions de l’INDH. Cependant, la simple présence d’autochtones au sein du
personnel ne suffit peut-être pas à gagner la confiance des communautés autochtones. Pour que les
membres autochtones du personnel soient plus largement considérés comme des agents crédibles, les
INDH doivent veiller à ce que le recrutement des autochtones soit effectué de façon ouverte, équitable
et consultative. 172

Le Bureau pour la protection des droits des peuples autochtones est un


service du Procurador de los Derechos Humanos de Guatemala. Le Bureau
a été créé en 1968 dans le but de définir – à l’intention du médiateur – des
politiques et stratégies générales visant à lutter contre les violations des
droits de l’homme des peuples autochtones. L’objectif inclut également les
violations des droits collectifs.
Le médiateur emploie 51 membres autochtones du personnel qui peuvent
s’exprimer dans leur langue maternelle et qui aident l’institution à recevoir
les plaintes déposées par les autochtones dans leur propre langue.172

Les programmes pour l’emploi et les politiques d’embauche ciblées peuvent devenir des instruments
efficaces de la présence « autochtone » au sein des INDH.

171 Voir les New Delhi Guidelines on the establishment of National Institutions on the Rights of Indigenous Peoples, disponibles à
l’adresse suivante : www.aitpn.org/NIRIPS/new_delhi_guidelines.pdf.
172 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.

Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones | 51

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

173

La Commission néozélandaise des droits de l’homme173 a pour mandat


spécifique de « promouvoir – par la recherche, l’éducation et le débat –
l’amélioration de la compréhension des questions relatives aux droits de
l’homme dans le Traité de Waitangi ainsi que de leurs liens avec le droit
international et national des droits de l’homme ».
La Commission promeut la Déclaration au même titre que ses travaux
relatifs au Traité. L’équipe au sein de la Commission qui est chargée de
diriger ces travaux s’appelle « Ahi Kaa » ce qui, en langue maori signifie
« maintenir allumés les feux de la maison ».
Dans la pratique, son rôle consiste à :
• Faciliter les relations entre la Commission et les communautés maori
• Défendre et définir le rôle de la Commission en matière de promotion du
respect et de compréhension des droits autochtones
• Faire comprendre à un large public que le Traité de Waitangi est porteur
de la promesse de voir un jour les deux peuples prendre soin l’un de
l’autre du mieux qu’ils le peuvent
• Aider la Commission à inclure les droits autochtones et le Traité dans
l’ensemble des travaux de la Commission.

Créer une présence autochtone au sein des INDH est un objectif qui peut également être atteint
grâce à des programmes de travail spécifiques. Les INDH peuvent chercher à créer des unités ou des
programmes spécialement centrés sur les progrès à accomplir en matière de protection, de promotion
et de réalisation des droits de l’homme des peuples autochtones. 174

PRINCIPES DIRECTEURS DE NEW DELHI RELATIFS À LA CRÉATION


DES INSTITUTIONS NATIONALES RESPONSABLES DES DROITS DES
PEUPLES AUTOCHTONES174
En octobre 2008, des représentants des peuples autochtones ont participé à
la conférence régionale organisée par l’Asian Indigenous and Tribal Peoples
Network. La conférence a adopté des principes directeurs en vue de la
création de toute Institution nationale responsable des droits de peuples
autochtones.
Ces principes directeurs s’articulent autour des domaines suivants :
• Création ; mandat, composition et désignation du personnel et structure
• Fonctions et pouvoirs ; fonctions quasi-judiciaires, pouvoirs
d’investigation
• Procédures ; enquêtes et élaboration des rapports
• Autonomie financière.
Ces principes directeurs peuvent aider les INDH à créer en leur sein des
unités spécifiquement chargées des droits des peuples autochtones.

173 Information fournie par la Commission néozélandaise des droits de l’homme.


174 Disponibles à l’adresse suivante : www.aitpn.org/NIRIPS/new_delhi_guidelines.pdf.

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Un programme de travail peut être d’ordre général (centré sur la situation globale des peuples
autochtones d’un État spécifique) ou être focalisé sur un domaine thématique particulier (par exemple,
les droits des peuples autochtones sur les terres, territoires et ressources). Le personnel employé dans
le cadre de ces programmes doit répondre à des critères de sélection supplémentaires, de façon à
ce qu’il soit dûment qualifié et habitué à travailler de manière sensible et appropriée avec les peuples
autochtones.175
S’il s’avère difficile de sélectionner un personnel approprié, les INDH peuvent recruter des consultants
dûment qualifiés et expérimentés afin de les faire travailler sur les programmes ou projets pertinents. De
nouveau, les partenariats et les collaborations avec les organisations de peuples autochtones joueront
un rôle important. 176 177

Le Commissaire à la justice sociale auprès des autochtones et des


insulaires du détroit de Torres de la Commission australienne des droits
de l’homme176 a pour mandat de promouvoir, défendre et contrôler la
jouissance et l’exercice des droits de l’homme des autochtones et des
insulaires du détroit de Torres (les peuples autochtones d’Australie).
Ses fonctions incluent la soumission d’un rapport annuel au parlement
australien qui émet des recommandations relatives à la jouissance et à
l’exercice des droits de l’homme des autochtones et des insulaires du
détroit de Torres ainsi que d’un rapport annuel sur l’impact du Native Title
Act [la loi sur les titres fonciers autochtones] sur l’exercice et la jouissance
de ces droits.
Le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones a déclaré :
... la position du Commissaire à la justice sociale auprès des autochtones
et des insulaires du détroit de Torres de la Commission australienne des
droits de l’homme [fait figure de] modèle exceptionnel en matière de
progrès de la reconnaissance et de la protection des droits des peuples
autochtones.177
Le Commissaire est soutenu par une petite équipe du personnel chargé des
politiques au sein de l’Unité de la justice sociale de la Commission. Tous
les membres du personnel travaillant au sein de l’Unité de la justice sociale
doivent satisfaire à deux critères de sélection supplémentaires :
• Ils doivent avoir de bonnes connaissances et une bonne compréhension
des questions relatives aux droits de l’homme auxquelles les autochtones
et les insulaires du détroit de Torres sont confrontés dans la société
australienne contemporaine et de la diversité des circonstances
spécifiques aux autochtones et aux insulaires du détroit de Torres
• Ils doivent avoir témoigné de leur aptitude à communiquer de manière
sensible et efficace avec les autochtones et les insulaires du détroit de
Torres.
Ces critères contribuent à s’assurer que le personnel de l’Unité de la justice
sociale peut travailler efficacement au côté du Commissaire et qu’il a les
compétences nécessaires pour établir un dialogue approprié avec les
peuples autochtones et leurs organisations.

175 Ibid.
176 Informations fournies par la Commission australienne des droits de l’homme.
177 A/HRC/15/37Add.4, par. 78.

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Rituel du Hongi, salut Maori exécuté nez contre nez. Il est le symbole du partage de la force de vie et du souffle de la vie. Photo ONU/Evan Schneider.

4. NOUER LE DIALOGUE AVEC LES PEUPLES


AUTOCHTONES
Il est fondamental que les INDH tendent effectivement la main aux peuples autochtones et à leurs
organisations lorsqu’elles cherchent à faire progresser la protection, la promotion et la réalisation des
droits de l’homme des peuples autochtones. Sans coopération significative des peuples autochtones
et de leurs organisations, les INDH ne pourront pas résoudre les questions des droits de l’homme qui
taraudent les peuples autochtones. 178

Le Centre norvégien des droits de l’homme a créé un comité consultatif


qui contribue à orienter et à enrichir ses activités. Le comité consultatif
est composé d’une large palette de médiateurs, de groupes d’intérêt et
de participants de la société civile. Le comité consultatif désigne deux
représentants de la société civile qui participent au conseil du Centre. Un
représentant du parlement sami siège au sein du comité consultatif.178

4.1. APPROCHE FONDÉE SUR LES DROITS DE L’HOMME


Pour être efficaces, les programmes doivent tenir compte des normes relatives aux droits de l’homme,
ainsi que des cultures et des aspirations des peuples autochtones, et chercher à les renforcer.179 En
substance, les INDH doivent adopter une approche de l’élaboration des programmes fondée sur les
droits de l’homme. La Déclaration de Vienne et le Programme d’action180 ont souligné le caractère
interdépendant des droits de l’homme et du développement. Ensuite, les institutions des Nations
Unies ont adopté une position commune de l’approche du développement fondée sur les droits de
l’homme. Cette position commune peut fournir aux INDHI un cadre de référence utile à leur élaboration
d’approches fondées sur les droits de l’homme et susceptible d’orienter leurs travaux.

178 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.jus.uio.no/smr/english/about/national-institution/about/advisory-committee.html.


179 Groupe des Nations Unies pour le développement, Directives sur les questions relatives aux peuples autochtones (2009), p. 26.
180 Résolution 48/121 de l’Assemblée générale.

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

181

L’APPROCHE FONDÉE SUR LES DROITS DE L’HOMME DANS LE


DOMAINE DE LA COOPÉRATION POUR LE DÉVELOPPEMENT :
VERS UNE POSITION COMMUNE181
Position commune
1. Tous les programmes, toutes les politiques et toute l’assistance
technique au service de la coopération pour le développement devraient
promouvoir la réalisation des droits de l’homme, tels qu’ils sont énoncés
dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans les autres
instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.
2. Les normes relatives aux droits de l’homme contenues dans la Déclaration
universelle des droits de l’homme et autres instruments internationaux
relatifs aux droits de l’homme, ainsi que les principes qui découlent de
cette déclaration et de ces instruments, doivent guider toutes les activités
de coopération et de programmation pour le développement, dans tous les
secteurs et toutes les phases de programmation.
3. La coopération pour le développement contribue au renforcement des
capacités des “détenteurs de devoirs” de s’acquitter de leurs obligations
et/ou des “titulaires de droits” de faire valoir ceux-ci.
Les éléments suivants sont nécessaires, spécifiques et propres à une
approche fondée sur les droits de l’homme :
a) L’évaluation et l’analyse déterminent les prétentions des titulaires de droits
et les obligations correspondantes des détenteurs de devoirs en matière
de droits de l’homme, ainsi que les causes immédiates, sous-jacentes et
structurelles de la non-réalisation des droits.
b) Les programmes évaluent la capacité des titulaires de droits de faire valoir
ceux-ci, et celle des détenteurs de devoirs de s’acquitter de ceux-ci. Ensuite,
ils mettent au point des stratégies de renforcement de ces capacités.
c) Les programmes contrôlent et évaluent les résultats et les processus
dictés par les normes et principes relatifs aux droits de l’homme.
d) L’élaboration des programmes s’inspire des recommandations des
organes et mécanismes internationaux de défense des droits de l’homme.
D’autres éléments sont également essentiels à une approche du
développement fondée sur les droits de l’homme :
1. Les personnes sont les principaux acteurs de leur propre développement,
et non les bénéficiaires passifs d’avantages et de services.
2. La participation est tout ensemble un moyen et un but.
3. Les stratégies doivent responsabiliser et non pas dé-responsabiliser.
4. Il faut contrôler et évaluer les résultats et les processus.
5. L’analyse doit porter sur toutes les parties prenantes.
6. Les programmes doivent être centrés sur les groupes marginalisés,
défavorisés et exclus.
7. Les communautés locales doivent s’approprier le processus de
développement.
8. Les programmes doivent viser à combler les disparités.
9. Il faut utiliser à la fois des approches ascendantes et descendantes, le tout
en synergie.

181 Groupe des Nations Unies pour le développement, L’approche fondée sur les droits de l’homme dans le domaine de la coopération
pour le développement (2003).

Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones | 55

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

10. L’analyse de situation doit permettre de déterminer les causes immédiates, sous-jacentes
et essentielles des problèmes de développement.
11. Il est important, lorsqu’on établit des programmes, de fixer des objectifs et des cibles
mesurables.
12. Il faut mettre au point et maintenir des partenariats.
13. Les programmes doivent promouvoir l’obligation de rendre compte à toutes les parties
prenantes.

Coopérer avec les peuples autochtones exige de reconnaître et de respecter la nature collective des
communautés autochtones. Par conséquent, pour exercer leurs activités de plaidoyer en faveur des
droits de l’homme des peuples autochtones, il est important que les INDH :
• Reconnaissent et ne négligent pas la nature collective des droits de l’homme des peuples
autochtones
• Fassent preuve de respect à l’égard des cultures et des particularités autochtones, notamment
en ce qui concerne les processus décisionnels
• Se conforment au principe du consentement préalable, libre et éclairé (voir Chapitre 3 pour
de plus amples détails). Le consentement préalable, libre et éclairé est enraciné dans le droit
à l’autodétermination et exige la participation active des peuples autochtones aux actions
susceptibles d’avoir un impact sur leurs vies. 182

La vulnérabilité des peuples autochtones aux violations des droits de


l’homme a servi de catalyseur à un projet bilatéral réalisé entre 2008 et
2010 par la Commission philippine des droits de l’homme et la Commission
néozélandaise des droits de l’homme. Le projet avait pour objectif principal
de renforcer les capacités des communautés autochtones des Philippines
à identifier, vérifier, documenter et contrôler les violations des droits de
l’homme affectant leurs propres communautés et à enquêter sur ces
violations. Le projet visait également à les doter des compétences et des
connaissances susceptibles de les aider à militer plus efficacement en
faveur de leurs propres droits.
Le projet a utilisé une approche du développement communautaire fondée sur
les droits de l’homme cherchant à répondre aux priorités des communautés
autochtones qui s’est focalisée sur un développement des compétences et des
connaissances des peuples autochtones visant à leur permettre d’agir en tant
qu’acteurs du changement de leurs propres communautés. La Déclaration et la
Convention n° 169 de l’OIT ont servi de cadre relatif aux droits de l’homme.
Au terme de la phase d’établissement des contacts avec les communautés
autochtones et d’adoption d’un processus reposant sur le principe de
l’engagement préalable, libre et éclairé, trois groupes autochtones ont été
sélectionnés dans le but de participer au projet. Ces groupes autochtones
ont dirigé le processus d’identification des sujets de préoccupation relatifs
aux droits de l’homme intéressant leurs propres communautés et ont joué un
rôle central dans l’élaboration et la mise en œuvre des plans d’action visant
à répondre à ces sujets de préoccupation. Avec le soutien de la Commission
néozélandaise des droits de l’homme, la Commission philippine des droits
de l’homme a aidé les trois groupes autochtones et leur a apporté un soutien
constant afin de s’assurer de la concrétisation et de la durabilité du projet.182

182 Commission philippine des droits de l’homme et Commission néozélandaise des droits de l’homme, Building Human Rights
Communities: The experience of three indigenous peoples in the Philippines (2011).

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Famille Cakchique dans le hameau de Patzutzun, Guatemala. Photo ONU/F. Charton.

Outre l’adoption d’une approche fondée sur les droits de l’homme, la coopération des INDH avec les
peuples autochtones doit être conforme aux principes suivant qui coïncident avec les thèmes clés de
la Déclaration :
• La non-discrimination
• L’égalité des sexes
• L’autodétermination
• Les droits collectifs
• Le droit de définir les priorités en matière de développement et de décider de leur mise en
œuvre.183 184

4.2. COOPÉRATION EFFECTIVE AVEC LES PEUPLES AUTOCHTONES

Mettre en œuvre le droit à la consultation des peuples autochtones a été


une priorité du Défenseur du peuple du Pérou (Bureau du médiateur). En
2009, le Bureau a publié un rapport sur les droits des peuples autochtones à
la consultation.184
Suite à la publication dudit rapport, le Bureau du médiateur a travaillé à
l’élaboration d’un projet de loi sur la consultation des peuples autochtones.
Ce projet englobait des stratégies de diffusion et de coopération intéressant
les peuples autochtones et d’autres parties prenantes. Le Bureau a
également participé à un groupe de travail composé de responsables
du gouvernement et de représentants des organisations nationales des
peuples autochtones, qui a préparé une matrice facilitant la prise en compte
des contributions à l’élaboration du projet de loi.
En juillet 2009, le Bureau du médiateur a soumis le projet de loi sur le droit à
la consultation au Congrès péruvien. Le projet a été approuvé en août 2011.

Les étapes décrites ci-après apportent une aide pratique aux INDH souhaitant nouer un dialogue
efficace avec les peuples autochtones.

183 Groupe des Nations Unies pour le développement, Directives sur les questions relatives aux peuples autochtones (2009), p. 12-16.
184 Défenseur du peuple du Pérou, Department Report No. 011-2009-DP/AMASPPI-PPI (2009).

Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones | 57

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

4.2.1. Créer un profil communautaire


Connaître la communauté aidera considérablement l’INDH à nouer un véritable dialogue. La consultation
et la coopération ne se mettent pas en place en un jour et les communautés autochtones n’ont pas
l’habitude de tout mettre entre parenthèses pour faciliter une visite, une consultation ou un programme
prévus par l’INDH.
Les stratégies suivantes doivent être envisagées avant d’entamer le dialogue avec la communauté
autochtone :
• Esquisser un portrait sommaire de la communauté englobant l’histoire, la culture, la langue, les
événements actuels, les principaux défis en matière de droits de l’homme ainsi que les effets des
lois et politiques gouvernementales sur la communauté
• Tenter d’accéder à une compréhension des politiques de la communauté
• Identifier les organisations et les personnes clés de la communauté, car établir un contact régulier
avec ces organisations et ces personnes permettra d’acquérir de précieuses connaissances et
facilitera la coopération avec la communauté.

4.2.2. Visiter la communauté


Dans la mesure du possible, la consultation des peuples autochtones et l’établissement des contacts
doivent se produire à la convenance de la communauté. Pour s’assurer d’y parvenir, il est fondamental
d’obtenir l’assentiment des organisations et personnes clés.
Les stratégies suivantes doivent être envisagées :
• S’assurer que les consultations sont organisées à point nommé et que, de préférence, elles
coïncident avec d’autres événements communautaires mais pas avec des activités ou cérémonies
culturelles
• Identifier les protocoles culturels – y compris les questions liées aux spécificités de chaque sexe –
qui doivent être respectés
• Identifier les codes vestimentaires appropriés qui doivent être respectés au sein de la communauté
• Veiller à assimiler les modes de communication adoptés par la communauté (par exemple, les
contacts visuels sont-ils appropriés ?)
• Établir le profil linguistique de la communauté : ne pas partir du principe que la langue officielle de
l’État est parlée et, le cas échéant, faire appel à des interprètes
• Utiliser un langage simple et éviter le jargon bureaucratique
• Encourager la participation de l’ensemble des personnes de la communauté  ; dans les cas
appropriés, travailler avec des groupes constitués par genre ou par tranche d’âge
• Identifier s’il existe des lieux au sein de la communauté où il n’est possible d’accéder que sur
autorisation
• Gagner la confiance des membres de la communauté et chercher préalablement à obtenir leur
autorisation pour toutes les activités prévues  ; ne pas partir du principe que la communauté
autochtone souhaite votre visite
• Rester réaliste quant aux résultats que la visite, la consultation ou le programme permettront
d’obtenir.

4.2.3. Après la visite


Pour gagner la confiance des membres de la communauté et établir de bonnes relations de travail, il est
important que les INDH assurent le suivi des visites effectuées au sein des communautés autochtones.

58 | Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

POINTS CLÉS : CHAPITRE 6


• Pour faire efficacement progresser la protection, la promotion et la
réalisation des droits de l’homme des peuples autochtones, les INDH
doivent être accessibles aux peuples autochtones.
• Il est important que les INDH veillent à informer les peuples autochtones
de leur existence et de leur fonction. Il pourra donc s’avérer nécessaire de
mettre en place des campagnes promotionnelles ciblées.
• Les INDH doivent reconnaître que les peuples autochtones ne sont peut-
être pas disposés à établir des contacts avec elles.
• Les INDH doivent prendre des mesures de façon à nouer le dialogue avec
les peuples autochtones vivant dans des zones reculées.
• Les collaborations et les partenariats avec les organisations de peuples
autochtones peuvent favoriser le rapprochement des INDH et des peuples
autochtones.
• Les INDH sont encouragées à créer les conditions d’une présence
autochtone au sein de leur organisation. Il est important d’impliquer
les peuples autochtones et leurs organisations dans le processus de
recrutement des membres autochtones du personnel.
• Les programmes de travail spécifiquement axés sur les autochtones
favoriseront la présence d’autochtones au sein des INDH. Les membres
du personnel qui travaillent au sein de ces unités doivent satisfaire à des
critères de sélection supplémentaires de façon à ce qu’ils soient dûment
qualifiés et habitués à travailler de manière sensible et appropriée avec les
peuples autochtones.
• Lorsqu’elles travaillent avec des peuples autochtones, les INDH doivent
être guidées par une approche fondée sur les droits de l’homme.

Chapitre 6 : Accessibilité des INDH aux peuples autochtones | 59

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Chapitre 7 :
Sensibilisation et éducation
QUESTIONS CLÉS
• Que peuvent faire les INDH pour sensibiliser un large public à la
Déclaration et aux droits des peuples autochtones ?
• Quelles activités éducatives et de formation les INDH peuvent-elles mettre
en œuvre en rapport avec la Déclaration?

NORMES INTERNATIONALES UTILES À L’IMPLICATION DES INDH


Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones
Article 15
1. Les peuples autochtones ont droit à ce que l’enseignement et les
moyens d’information reflètent fidèlement la dignité et la diversité de
leurs cultures, de leurs traditions, de leur histoire et de leurs aspirations.
2. Les États prennent des mesures efficaces, en consultation et en coopération avec les
peuples autochtones concernés, pour combattre les préjugés et éliminer la discrimination
et pour promouvoir la tolérance, la compréhension et de bonnes relations entre les peuples
autochtones et toutes les autres composantes de la société.
Article 16
1. Les peuples autochtones ont le droit d’établir leurs propres médias dans leur propre langue
et d’accéder à toutes les formes de médias non autochtones sans discrimination aucune.
2. Les États prennent des mesures efficaces pour faire en sorte que les médias publics
reflètent dûment la diversité culturelle autochtone. Les États, sans préjudice de l’obligation
d’assurer pleinement la liberté d’expression, encouragent les médias privés à refléter de
manière adéquate la diversité culturelle autochtone.
Article 39
Les peuples autochtones ont le droit d’avoir accès à une assistance financière et technique,
de la part des États et dans le cadre de la coopération internationale, pour jouir des droits
énoncés dans la présente Déclaration.
Article 42
L’Organisation des Nations Unies, ses organes, en particulier l’Instance permanente sur les
questions autochtones, les institutions spécialisées, notamment au niveau des pays, et les
États favorisent le respect et la pleine application des dispositions de la présente Déclaration
et veillent à en assurer l’efficacité.

Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation | 61

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

185

Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels


Article 13
1. Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute
personne à l’éducation. Ils conviennent que l’éducation doit viser au plein
épanouissement de la personnalité humaine et du sens de sa dignité et
renforcer le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Ils conviennent en outre que l’éducation doit mettre toute personne
en mesure de jouer un rôle utile dans une société libre, favoriser la
compréhension, la tolérance et l’amitié entre toutes les nations et tous les
groupes raciaux, ethniques ou religieux et encourager le développement
des activités des Nations Unies pour le maintien de la paix.

Principes de Paris
Compétence et attributions
3. Une institution nationale a, notamment, les attributions suivantes :
f) Être associée à l’élaboration de programmes concernant l’enseignement et la recherche
sur les droits de l’homme et participer à leur mise en œuvre dans les milieux scolaires,
universitaires et professionnels;
g) Faire connaître les droits de l’homme et la lutte contre toutes les formes de discrimination,
notamment la discrimination raciale, en sensibilisant l’opinion publique notamment par
l’information et l’enseignement, en faisant appel à tous organes de presse.
Modalités de fonctionnement
Dans le cadre de son fonctionnement, l’institution nationale doit :
c) S’adresser directement à l’opinion publique ou par l’intermédiaire de tous organes de
presse, particulièrement pour rendre publics ses avis et recommandations.

Observation générale n° 17, Comité pour l’élimination de la discrimination raciale


1. Recommande que les États parties, compte tenu, mutatis mutandis, des Principes
concernant le statut des institutions nationales figurant en annexe à la résolution 1992/54 du
3 mars 1992 de la Commission des droits de l’homme, créent des commissions nationales ou
d’autres organismes appropriés entre autres pour atteindre les objectifs suivants :
a) Promouvoir le respect sans aucune discrimination de la jouissance des droits
de l’homme, tels qu’ils sont expressément énoncés à l’article 5 de la Convention
internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.185

Pour jouir de leurs droits, les peuples doivent y avoir été sensibilisés et comprendre comment les
exercer. À cet égard, les programmes de sensibilisation et d’éducation sont essentiels. Afin d’en tenir
compte, le système international des droits de l’homme oblige les États à promouvoir la sensibilisation et
l’éducation aux normes relatives aux droits de l’homme.186 Ces obligations concernent aussi directement
les activités promotionnelles et éducatives sur la Déclaration et en relation avec les questions des droits
de l’homme intéressant les peuples autochtones.
Par exemple, le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones a fait la recommandation
suivante au gouvernement du Brésil :
En partenariat avec les peuples autochtones, et avec le soutien des Nations Unies […] élaborer et
mettre en œuvre une campagne nationale d’éducation sur les questions autochtones et le respect
185 Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, observation générale n° 17 (1993) concernant la création d’organismes
nationaux pour faciliter l’application de la Convention.
186 Voir, par exemple, l’article 13 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

62 | Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

de la diversité, faisant référence à la Convention n° 169 de l’OIT, à la Déclaration des Nations


Unies sur les droits des peuples autochtones et à l’engagement du gouvernement concernant
ces instruments. Cette campagne doit cibler l’ensemble des responsables de l’élaboration des
politiques, le grand public, les établissements d’enseignement et les médias et chercher à les
impliquer.187
Promouvoir la sensibilisation aux droits de l’homme des autochtones ainsi que le respect des droits de
ces populations est l’une des fonctions fondamentales de toutes les INDH. Ce mandat autorise de fait
les INDH à aider leur État à remplir ces obligations.
En matière de sensibilisation et d’éducation, les INDH ont trois objectifs principaux 
• Sensibiliser à l’existence et à la nature des droits
• Favoriser les valeurs et les attitudes qui consacrent et respectent les droits de l’homme
• Encourager le public à faire valoir ses droits de l’homme et les institutions à soutenir leur
application.188

1. SENSIBILISATION DU GRAND PUBLIC


Sensibiliser le grand public à une question relative aux droits de l’homme peut favoriser un changement
d’attitude dans l’ensemble de la communauté. Ceci peut en outre avoir des effets positifs en termes de
prise de décision et de réforme législative.

1.1. L’ENSEMBLE DE LA POPULATION


Dans de nombreux cas, les peuples autochtones constituent une minorité de la population des États
et sont souvent géographiquement isolés. De ce fait, il n’est pas rare que le grand public ignore les
problèmes de droits de l’homme auxquels sont confrontés les peuples autochtones, notamment :
• La discrimination
• La dépossession des terres et territoires
• Le déni de la culture
• La pauvreté
• L’abus de substances
• La violence.
Par ailleurs, il arrive parfois que les personnes qui vivent dans des régions autochtones ou à proximité
de communautés autochtones expriment leur opposition aux droits et revendications des peuples
autochtones. Dans les cas où existent de telles situations, il est important que les activités de
sensibilisation soient précisément ciblées.
L’ignorance peut aggraver les idées reçues sur les peuples autochtones et celles-ci sont souvent
alimentées par des préjugés défavorables, notamment par les médias. Ces stéréotypes ont parfois
tendance à légitimer des points de vue – partagés par un large public – qui sont racialement
discriminatoires. Les articles 15 et 16 de la Déclaration font directement allusion à cette problématique.
La protection, la promotion et la réalisation des droits de l’homme des peuples autochtones est un objectif
qui ne saurait être atteint sans s’attaquer aux stéréotypes négatifs et à l’ignorance du large public. Les
INDH peuvent jouer un rôle clé en matière de sensibilisation et de présentation du contexte historique des
défis contemporains auxquels sont confrontés les peuples autochtones dans le domaine des droits de
l’homme. Les campagnes de sensibilisation menées auprès d’un large public constituent l’un des moyens
efficaces pour impliquer l’ensemble de la population dans la réponse à apporter aux difficultés.

187 A/HRC/12/34/Add.2, par. 77.


188 National Human Rights Institutions: History, Principles, Roles and Responsibilities; p. 57.

Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation | 63

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

189

La Commission néozélandaise des droits de l’homme mène une enquête


annuelle sur les attitudes des Néozélandais à l’égard des droits de peuples
autochtones.189

1.2. PEUPLES AUTOCHTONES


Connaître les normes relatives aux droits de l’homme, comprendre comment les exercer et savoir
comment obtenir réparation pour des violations sont les conditions préalables fondamentales sans
lesquelles les peuples autochtones ne peuvent exercer leurs droits de l’homme. Étant donné que
les peuples autochtones ont été historiquement marginalisés par la société dominante, il n’est guère
étonnant que dans de nombreux cas, ils soient exclus des réseaux publics d’information ainsi que
des mécanismes qui promeuvent les droits de l’homme. Les INDH peuvent élaborer et mener des
campagnes ciblées à l’intention des peuples autochtones. Cependant, il est important que les activités
de sensibilisation ne soient pas exclusivement menées dans les zones urbaines ; elles doivent également
atteindre les communautés autochtones installées dans les zones rurales et reculées. Comme indiqué
au Chapitre 6, il est également important que les peuples autochtones soient sensibilisés à l’existence
et aux fonctions des INDH. 190

La Commission canadienne des droits de la personne a élaboré un guide


en langage clair de la législation fédérale en matière de droits de l’homme
à l’intention des personnes qui travaillent pour les organes directeurs
des Premières nations. L’objectif de ce guide est d’aider les directeurs
des Premières nations à comprendre et à résoudre les problèmes de
droits de l’homme qui se posent au sein de leurs organisations et de leurs
communautés.
Le guide fournit des informations dans les domaines suivants de la
législation sur les droits de l’homme :
• Comprendre la discrimination et les pratiques discriminatoires
• Empêcher la discrimination et respecter les droits de l’homme, notamment
en élaborant des politiques relatives à la protection des droits de l’homme
et en organisant des formations dans le domaine des droits de l’homme
• Processus de règlement des différends de la Commission
• Préparer les réponses aux plaintes pour discrimination, notamment en
utilisant les traditions juridiques des Premières nations et les droits des
autochtones issus de traités
• Processus communautaires de règlement des différends existants
susceptibles d’aider les communautés des Premières nations à élaborer
leurs propres processus de règlement des différends.190

189 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.
190 Commission canadienne des droits de la personne, Guide des droits de la personne à l’intention des Premières nations  :
droits – responsabilité – respect (2011), disponible à l’adresse suivante  : http://www.nwac.ca/sites/default/files/imce/
WEBSITES/201107-12/guide_pn.pdf

64 | Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

1.3. AGENTS PUBLICS


Les INDH peuvent jouer un rôle fondamental dans la sensibilisation des agents publics à la Déclaration
et à son contenu. Les activités consistant à diffuser la Déclaration auprès des agents publics doivent
être nombreuses et ne doivent pas se limiter à ceux qui travaillent au sein des services s’occupant des
affaires autochtones. Par exemple, les agents publics employés au sein d’organismes dont les activités
sont en rapport avec l’environnement ou la démarcation des terres doivent être sensibilisés aux droits
de l’homme des peuples autochtones.

2. ÉDUCATION ET FORMATION
Le mandat des INDH va au-delà des activités promotionnelles et inclut l’élaboration et la mise en œuvre
de programmes d’éducation et de formation aux droits de l’homme adaptés aux différents groupes de
la collectivité.

2.1. LE GRAND PUBLIC


Les activités pédagogiques relatives aux droits de l’homme des peuples autochtones à l’intention du
grand public peuvent contribuer à combattre l’ignorance et aider la collectivité à faire face aux problèmes
difficiles en connaissance de cause. 191

Le Commissaire aux droits de l’homme de la Fédération de Russie a


organisé un concours dans le cadre duquel des étudiants étaient invités à
écrire sur la situation actuelle et à venir des peuples autochtones en matière
de droits de l’homme.191

2.2. PEUPLES AUTOCHTONES


Les INDH sont extrêmement bien placées pour aider les États à remplir leurs obligations au titre de
l’article 39 de la Déclaration en apportant une assistance technique aux peuples autochtones adaptée
à l’exercice des droits énoncés dans la Déclaration.
Les campagnes éducatives peuvent prolonger les activités promotionnelles. Amnesty International a
noté qu’« une population qui a bénéficié d’une éducation centrée sur ses droits de l’homme est un atout
qui aide les INDH à accomplir leur tâche ».192 Une éducation aux droits de l’homme qui est dispensée
grâce à des méthodes de formation adaptées peut responsabiliser les peuples autochtones et leur
donner ainsi la possibilité d’exercer leurs droits et de faire évoluer la société.

191 Présentation dans le cadre de l’atelier du HCDH, Towards an Operational Guide for National Human Rights Institutions: Possible
good practices in addressing the rights of Indigenous Peoples.
192 Amnesty International, National Human Rights Institutions: Recommendations for Effective Protection and Promotion of Human
Rights (2001).

Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation | 65

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

193

La Commission australienne des droits de l’homme a produit à l’intention


des communautés un ensemble de matériels pédagogiques et de
sensibilisation relatifs à la Déclaration. Ces matériels comprennent :
• Un guide en langage clair et imagé qui comprend des études de cas sur la
façon dont les droits énoncés dans la Déclaration peuvent être utilisés
• Un bref aperçu de la Déclaration
• Un poster double face avec, d’un côté, le texte de la Déclaration et, de
l’autre, une interprétation artistique de la Déclaration
• Un bref documentaire vidéo sur la Déclaration.
Ces matériels ont été produits en tenant compte des réactions et
commentaires des peuples autochtones.193

2.3. AGENTS PUBLICS


Les agents publics jouent un rôle clé car ils s’assurent que l’État accomplit ses obligations internationales
en matière de droits de l’homme, notamment celles qui sont présentées dans la Déclaration. Par
conséquent, offrir aux agents publics des programmes de formation et de développement professionnel
consacrés aux peuples autochtones et à leurs droits de l’homme est un élément nécessaire de la
réalisation des objectifs de la Déclaration.
Tous les agents publics dont les fonctions ont un impact direct ou indirect sur la réalisation des droits de l’homme
des peuples autochtones doivent bénéficier de programmes de formation et de développement professionnel.
Ces programmes doivent concerner les agents qui travaillent au sein des services gouvernementaux ayant
précisément pour mission de s’occuper des questions relatives aux peuples autochtones, mais aussi les
agents des autres services gouvernementaux dont les activités ont un impact inévitable sur les droits des
peuples autochtones, tels que les agents des services chargés de l’environnement et des forêts, de la
gestion des terres et des territoires ou s’occupant des affaires culturelles.
Tous les agents dont les activités ont des effets sur la réalisation des droits de l’homme des peuples
autochtones doivent :
• Suivre une formation générale sur les droits de l’homme
• Suivre une formation ciblée spécifiquement consacrée aux droits de l’homme des peuples
autochtones.
Les INDH peuvent, à cet égard, adopter un certain nombre de stratégies. Ces travaux doivent être
réalisés en coopération avec les autorités concernées. 194

Depuis sa création en 2009, la Commission bangladaise des droits de


l’homme s’est employée à créer une culture des droits de l’homme au
profit de la bureaucratie et du grand public. Les droits des Adivasi (peuples
autochtones) ont été identifiés par la Commission comme un domaine
prioritaire. L’un des principaux axes d’activité a consisté à travailler avec
des responsables du gouvernement autour des réponses fondées sur les
droits de l’homme à apporter aux Adivasi lors de l’élaboration et de la mise
en œuvre des politiques gouvernementales.194

193 Informations fournies par la Commission australienne des droits de l’homme.


194 Présentation à l’intention de la consultation sous-régionale organisée par le HCDH, The Operationalization of the United Nations
Declaration on the Rights of Indigenous peoples by National Human Rights Institutions, Auckland, Nouvelle-Zélande, 1-3
décembre 2010.

66 | Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

En premier lieu, les INDH peuvent promouvoir, élaborer et mettre en œuvre des programmes de
formation à l’intention des agents publics dont les travaux ont des effets sur les peuples autochtones.
Ces activités doivent veiller à intégrer les principes et les normes relatifs aux droits de l’homme dans
tout programme de formation sur les peuples autochtones actuellement dispensé à l’intention d’agents
publics.
Lorsqu’il n’existe pas de matériels de formation destinés aux agents publics sur les activités en rapport
avec les peuples autochtones, les INDH doivent chercher à élaborer des matériels qui reposent sur une
approche fondée sur les droits de l’homme et qui incluent les normes présentées dans la Déclaration.

Le Procureur nicaraguayen pour la défense des droits de l’homme a élaboré


et publié 14 modules de formation sur différentes questions relatives aux
droits de l’homme, et l’un d’entre eux est plus spécifiquement consacré
aux droits de l’homme des peuples autochtones. Un module de formation
de base sur les droits de l’homme a également été élaboré à l’intention
des agents publics et des employeurs, et s’intéresse plus particulièrement
à la non discrimination et à l’égalité. Le Bureau a conduit plus d’un millier
d’ateliers de formation destinés aux agents publics.195

Les INDH doivent être conscientes du fait que leurs programmes de formation peuvent être perçus
par les agents publics comme une intrusion dans leur travail, sans prise en compte de l’importance du
contexte. Pour faire face à la résistance que les agents publics sont susceptibles de leur opposer, les
INDH auront intérêt à établir des contacts avec la direction des institutions d’État. Le soutien apporté aux
programmes de formation par la hiérarchie d’une organisation peut leur conférer la légitimité nécessaire
pour encourager un changement de comportement au sein de l’organisation. Cette approbation
donnée par les hiérarques est doublement nécessaire, car si la direction de l’institution d’État n’est pas
convaincue du bien-fondé de la protection, de la promotion et de la réalisation des droits de l’homme
des peuples autochtones, il est peu probable que la formation reçoive un accueil favorable ou qu’elle
soit efficace. 195
Il est important que les INDH adoptent une stratégie qui va présider à la conception et à la mise en œuvre
des programmes de formation. Lors de l’élaboration, de la révision ou de l’utilisation des matériels, les
INDH doivent s’assurer qu’ils s’articulent autour de questions pratiques et opérationnelles.
Dans les cas où un programme de formation est susceptible de se voir opposer une résistance
importante, l’INDH peut préférer en élaborer le contenu et veiller à le tester en interne.196 L’INDH peut
également choisir d’élaborer elle-même les matériels et programmes de formation des formateurs, et
exploiter ainsi efficacement des ressources financières et humaines limitées.

195 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.
196 APF, Association pour la prévention de la Torture et HCDH, Preventing Torture: An Operational Guide for National Human Rights
Institutions (2010), p. 56.

Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation | 67

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

3. EXERCER DES ACTIVITÉS PROMOTIONNELLES


ET ÉDUCATIVES
3.1. COMMENT LES INDH PEUVENT-ELLES REMPLIR LEUR MISSION EN MATIÈRE DE
SENSIBILISATION ET D’ÉDUCATION ?
Une campagne efficace doit reposer sur une stratégie de communication concertée, un objectif
spécifique et un message clair.
Les INDH doivent disposer d’un large éventail de matériels de recherche et d’information sur les droits
de l’homme, prêts à être diffusés. Ces matériels doivent contenir des informations sur :
• Le rôle, les fonctions et les activités de l’INDH
• Les normes et les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme
• Les liens de l’État avec les normes et instruments relatifs aux droits de l’homme
• Les rapports de l’État soumis aux organes conventionnels
• La législation nationale en matière de droits de l’homme
• Les décisions judiciaires en rapport avec des droits de l’homme
• Les mécanismes nationaux et internationaux de protection des droits de l’homme
• Les recherches menées par l’INDH sur des questions précises touchant aux droits de l’homme
• Les informations relatives aux mécanismes de plainte et l’éventail des recours en cas de violations
des droits de l’homme, notamment des droits énoncés dans la Déclaration.

Femme Masai (Kenya) participant à l’exposition In Celebration of Indigenous Peoples, aux Nations Unies. Photo ONU/Stephenie Hollyman.

68 | Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Les INDH doivent avoir un plan d’éducation aux droits de l’homme établi en corrélation avec le plan
stratégique et le plan d’action annuel des INDH. Les activités pédagogiques que peuvent mener les
INDH sont nombreuses  : séminaires, ateliers et sessions de formation professionnelle destinés, soit
à l’ensemble de la population, soit à des groupes spécifiques. Les initiatives en matière d’éducation
qui ciblent un large public peuvent comprendre l’élaboration de programmes scolaires et universitaires
centrés sur les droits de l’homme, les campagnes nationales menées dans les médias et les publications
sur les droits de l’homme.
Les activités de sensibilisation et d’information qui s’articulent autour de la Déclaration peuvent
comprendre :
• La direction d’ateliers et de formations à l’intention de peuples autochtones et de leurs
organisations
• La direction d’ateliers et de formations à l’intention d’agents de l’État et de bureaucrates
• La traduction de la Déclaration dans des langues autochtones
• L’élaboration d’outils et de matériels pédagogiques rédigés dans un langage simple
• La production de matériels par le biais d’un large éventail de supports, notamment les sites Web,
les documentaires, les programmes audio et les réseaux sociaux
• La diffusion de communiqués de presse lorsque des activités menées dans le pays peuvent être
liées à des droits énoncés dans la Déclaration ou avoir un impact sur l’exercice de ces droits
197
• L’évocation de la Déclaration et de son impact dans les discours, documents et publications.

La Commission néozélandaise des droits de l’homme a produit une version


bilingue de la Déclaration. Elle présente le texte de la Déclaration en anglais
et en maori.197

3.2. DIFFUSION
Pour que les informations produites par l’INDH puissent être utilisées de façon efficace et efficiente, il est
fondamental qu’elle adopte une stratégie de diffusion. Les informations peuvent cibler des destinataires
très variés – services gouvernementaux, ONG, grand public et peuples autochtones – et il est donc
important que la stratégie tienne compte de leurs spécificités.
Dès lors que public ciblé a été sélectionné, l’INDH doit identifier les opportunités de diffusion les plus
appropriées. Les médias généralistes et spécialisés sont des vecteurs de diffusion utiles. Cependant,
les diffusions à grande échelle doivent également s’appuyer sur les services et réseaux existants, tels
que les écoles, les universités, les bibliothèques, les bureaux gouvernementaux, les organisations
communautaires, les organisations professionnelles, les organismes représentatifs et les organisations
de peuples autochtones.

197 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.hrc.co.nz/human-rights-and-the-treaty-of-waitangi/united-nations-declaration-on-


the-rights-of-indigenous-peoples.

Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation | 69

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 69 22/10/2014 11:32:30


La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

198

DoCip
DoCip est un centre de documentation et d’information créé en 1978 à
l’initiative des délégations autochtones qui participaient à la première
Conférence internationale des ONG s’intéressant aux questions
autochtones qui se soit tenue aux Nations Unies.
En tant que centre d’information, le doCip :
[…] publie une revue trimestrielle - l’Update/Informativo - qui rend
compte des principaux processus internationaux concernant les
questions autochtones : résumés des interventions, agendas,
présentation de rapports, déclarations des peuples autochtones et
annonces, notamment. Publié en quatre langues, l’Update/Informativo
permet à chacun de disposer de la même information, condition de
base pour l’élaboration de consensus. Envoie des messages collectifs
à 2500 adresses autochtones lorsque l’information ne peut attendre la
publication de la revue. Maintient à jour son site Internet. Répond à toute
autre demande d’information.198
Le site Web du centre doCip comprend une vaste collection de documents
internationaux historiquement importants pour les organisations
autochtones et de textes recueillis auprès des instances internationales
correspondantes.
Les INDH peuvent utiliser les ressources publiées sur le site Web
et promouvoir son utilisation par les peuples autochtones et leurs
organisations au sein de leur juridiction.

Les événements promotionnels jouent un rôle important en matière de sensibilisation du grand public
à la problématique des droits de l’homme et de présence de l’INDH au sein de la communauté. Les
INDH ne doivent pas se limiter à un type d’événement et doivent sélectionner les événements les plus
adaptés à leurs publics cibles. Des occasions de collaboration avec des initiatives ou programmes
communautaires existants peuvent également se présenter. Les événements promotionnels peuvent
inclure :
• Les événements s’articulant autour de thèmes en rapport avec les droits de l’homme et
organisés à l’intention d’enfants en âge de fréquenter l’école, tels que les concours de dessin ou
de photographie
• Les conférences universitaires et les autres événements organisés dans des établissements de
l’enseignement supérieur
• Les événements publics célébrant des dates importantes, telles que l’anniversaire de l’adoption
de la Déclaration (13 septembre) et la Journée internationale des peuples autochtones (9 août)
• Les récompenses et les prix dans le domaine des droits de l’homme
• Le lancement des publications importantes
• Les concours artistiques ou musicaux organisés autour de thèmes en rapport avec les droits de
l’homme.
Les organisations des peuples autochtones et les organisations professionnelles seront les vecteurs
essentiels de la diffusion des produits et des informations réalisés par les INDH auprès des peuples
autochtones et des communautés.

198 Pour en savoir plus, veuillez consulter : http://www.docip.org/Our-Organization.26+M52087573ab0.0.html.

70 | Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

3.3. PARTENARIATS
Les travaux des INDH bénéficient énormément des partenariats et collaborations visant à mener des
activités de sensibilisation et d’information. Ces partenariats contribuent à s’assurer que les efforts
déployés par les INDH ont un impact maximal. 199

L’Alliance nationale des peuples autochtones d’Indonésie a conclu un


accord de partenariat avec la Commission indonésienne des droits
de l’homme afin de remédier à la situation des droits de l’homme en
Indonésie.199

3.3.1. L’État
Dans la mesure du possible, les INDH doivent chercher à établir des relations de travail coopératives
avec l’État. Comme indiqué précédemment, l’agrément donné par l’État aux programmes éducatifs
destinés aux agents publics renforcera leur adoption et leur efficacité.
Par ailleurs, les INDH peuvent chercher à obtenir auprès de l’État des financements supplémentaires
qui leur permettront d’élaborer et de mettre en place des matériels de sensibilisation et d’information
destinés au grand public et aux peuples autochtones.

3.3.2. Les organisations des peuples autochtones


Il est particulièrement important que les INDH collaborent avec les organisations des peuples autochtones
pour les activités de sensibilisation et d’information centrées sur la Déclaration et les droits de l’homme
des peuples autochtones.
Conformément aux normes relatives aux droits de l’homme, les organisations des peuples autochtones
doivent être impliquées à tous les stades du processus, de la conception au suivi en passant par
l’élaboration et la mise en œuvre.
Les organisations des peuples autochtones peuvent mobiliser l’expertise nécessaire aux contenus,
s’assurer de l’adéquation culturelle des activités ou des matériels et donner des conseils sur les
aspects linguistiques et les méthodes de communication. La participation active des organisations des
peuples autochtones contribuera également à légitimer les activités de l’INDH aux yeux des peuples
autochtones. Par ailleurs, les organisations des peuples autochtones peuvent fonctionner comme des
centres importants de réseautage et de diffusion. 200

Un certain nombre d’INDH d’Amérique latine ont créé un Bureau permanent


des questions autochtones. Ces bureaux réunissent des leaders et des
organisations autochtones ainsi que le personnel de l’INDH afin qu’ils se
mettent d’accord sur des priorités. L’initiative a permis d’établir la confiance
entre les peuples autochtones et les INDH et a également contribué à
faciliter la mise en œuvre d’activités et de stratégies communes visant à
faire progresser les droits de l’homme des peuples autochtones.200

199 HCDH, Note on the outcome of the subregional consultation, The Operationalization of the United Nations Declaration on the
Rights of Indigenous Peoples by National Human Rights Institutions.
200 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.

Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation | 71

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

L’implication des organisations de peuples autochtones ne se limite pas nécessairement aux activités
ciblant les peuples autochtones. Ces organisations peuvent présenter le contexte, fournir des études de
cas et donner des conseils sur des sujets de préoccupation précis ainsi que d’autres renseignements
précieux pour les responsables des activités de sensibilisation et d’information de l’ensemble de la
population soucieux de s’assurer que, généralement, la promotion des droits de l’homme répond aux
attentes de peuples autochtones.

3.4. MÉDIAS
Les médias constituent l’un des piliers de l’élaboration et de l’expression des idées et des points de
vue. La mesure dans laquelle les médias traditionnels peuvent être utilisés comme partenaires de la
promotion des droits de l’homme des peuples autochtones dépend en grande partie des structures
sociales et politiques à l’œuvre dans la juridiction de chacune des INDH.
Néanmoins, les INDH doivent chercher – si possible – à travailler de façon constructive avec les médias.
Les médias peuvent jouer un rôle important en matière d’information du grand public sur les normes
relatives aux droits de l’homme, de sensibilisation à la problématique des droits de l’homme et aux
violations de ces droits et peuvent attirer l’attention sur les activités des INDH. 201

Le Centre Jordanien des droits de l’homme est actif sur les principaux
réseaux sociaux. Il a un compte Twitter, Facebook et YouTube, et publie
également un bulletin d’information électronique. Il utilise ces différentes
formes de médias comme un mécanisme permettant de diffuser des
rapports, des communiqués de presse et d’autres nouvelles et informations
sur l’institution auprès d’un vaste public.201

Les nouvelles technologies ont créé de nouveaux modes de communication, notamment par
l’intermédiaire des réseaux sociaux tels que Facebook, Twitter et YouTube. Ces technologies permettent
aux INDH de communiquer rapidement et à moindres frais avec différents groupes de personnes.
Elles peuvent également constituer un moyen efficace de nouer le dialogue avec des populations
géographiquement isolées. Cependant, il convient de ne pas perdre de vue que l’accès à ces formes
de communication n’est pas toujours possible dans les zones reculées. 202

WITNESS est une organisation internationale de défense des droits


fondamentaux qui établit des partenariats avec des organisations locales des
droits de la personne afin de les former et de les aider à utiliser la vidéo pour
leurs campagnes de sensibilisation aux droits de l’homme.
Ces vidéos peuvent sensibiliser aux questions humaines et argumenter en
faveur de la réforme des lois, politiques et programmes mis en œuvre par
l’État. Par exemple, des vidéos réalisées grâce à ces collaborations ont
permis de lever un coin de voile sur la situation des droits de l’homme au
Myanmar, ont été utilisées pour confondre des recruteurs d’enfants soldats
en République démocratique du Congo et ont contribué à faciliter l’adoption
de la première loi, aux États-Unis, protégeant les anciens contre les abus.202

201 Pour en savoir plus, veuillez consulter le site à l’adresse suivante : www.nchr.org.jo/english/home.aspx.
202 Pour en savoir plus, veuillez consulter le site à l’adresse suivante : www.witness.org.

72 | Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Un débat réunissant des représentants de médias autochtones du monde entier sur le thème « Les médias autochtones – Responsabiliser les autochtones en
leur donnant la parole » a été organisé en 2012 à l’occasion de la Journée mondiale des peuples autochtones. Sur l’écran géant, on reconnaît M. Ban Ki-moon,
Secrétaire général des Nations Unies (à gauche) et le Grand Chef Edward John, Président de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions
autochtones. Photo ONU/Devra Berkowitz.

Pour nouer efficacement le dialogue avec les médias, les INDH doivent élaborer une stratégie de
communication. Cette stratégie doit identifier les initiatives qui peuvent bénéficier de l’implication des
médias et peut comprendre des mesures visant, par exemple, à recruter des responsables des relations
publiques ou des attachés de presse, à former le personnel aux techniques de la communication et/ou
à tisser des liens avec les personnages clés des médias.

POINTS CLÉS : CHAPITRE 7


• Promouvoir la sensibilisation aux droits de l’homme et le respect des
droits de l’homme est une fonction essentielle des INDH.
• La sensibilisation aux droits de l’homme des peuples autochtones est
d’une importance fondamentale pour leur protection, leur promotion et
leur réalisation.
• Il existe un large éventail d’activités pédagogiques et de formation que
les INDH peuvent mener sur la Déclaration et les droits de l’homme des
peuples autochtones : les activités pédagogiques formelles et informelles
sur les droits de l’homme, les partenariats avec les médias et l’utilisation
des réseaux sociaux pour sensibiliser et informer le grand public aux
questions relatives aux droits de l’homme affectant les communautés
autochtones.

Chapitre 7 : Sensibilisation et éducation | 73

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Chapitre 8 :
Promouvoir le respect de la
Déclaration
QUESTIONS CLÉS
• Comment les INDH peuvent-elles promouvoir la réforme des lois,
politiques et pratiques qui affectent la jouissance des droits de l’homme
des peuples autochtones?
• Comment les INDH peuvent-elles utiliser la Déclaration pour plaider en
faveur de la réforme des lois, politiques et pratiques affectant les droits
des peuples autohcotnes ?

PRINCIPES FONDATEURS ET NORMES INTERNATIONALES PRÔNANT


L’IMPLICATION DES INDH
Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones
Article 39
Les peuples autochtones ont le droit d’avoir accès à une assistance
financière et technique, de la part des États […] pour jouir des droits énoncés
dans la présente Déclaration.
Article 40
Les peuples autochtones ont le droit d’avoir accès à des procédures justes et équitables pour
le règlement des conflits et des différends avec les États ou d’autres parties et à une décision
rapide en la matière, ainsi qu’à des voies de recours efficaces pour toute violation de leurs
droits individuels et collectifs. Toute décision en la matière prendra dûment en considération
les coutumes, traditions, règles et systèmes juridiques des peuples autochtones concernés et
les normes internationales relatives aux droits de l’homme.
Article 42
[…] les États favorisent le respect et la pleine application des dispositions de la présente
Déclaration et veillent à en assurer l’efficacité.
Principes de Paris
Compétences et attributions
3. Une institution nationale a, notamment, les attributions suivantes :
a) Fournir à titre consultatif au gouvernement, au parlement et à tout autre organe
compétent, […] à la demande des autorités concernées, […] des avis, recommandations,
propositions et rapports concernant toutes questions relatives à la protection et à la
promotion des droits de l’homme […] [qui] se rapportent aux domaines suivants :
i) Toutes dispositions législatives et administratives, ainsi que celles relatives à
l’organisation judiciaire destinées à préserver et étendre la protection des droits
de l’homme. A cet égard, l’institution nationale examine la législation et les textes
administratifs en vigueur, ainsi que les projets et propositions de lois, et fait les
recommandations qu’elle estime appropriées en vue de s’assurer que ces textes
soient respectueux des principes fondamentaux des droits de l’homme. Elle
recommande, si nécessaire, l’adoption d’une nouvelle législation, l’adaptation de la
législation en vigueur, et l’adoption ou la modification des mesures administratives ;

Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration | 75

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

203

ii) Toute situation de violation des droits de l’homme dont elle déciderait de se saisir ;
iii) L’élaboration des rapports sur la situation nationale des droits de l’homme en
général, ainsi que sur des questions plus spécifiques ;
iv) Attirer l’attention du gouvernement sur les situations de violations des droits de
l’homme dans tout pays, lui proposer toutes initiatives tendant à y mettre fin et, le
cas échéant, émettre un avis sur les positions et réactions du gouvernement.
b) Promouvoir et veiller à l’harmonisation de la législation, des règlements et des pratiques
nationaux avec les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, auxquels
l’Etat est partie, et à leur mise en oeuvre effective ;
c) Encourager à la ratification desdits instruments ou à l’adhésion à ces textes et s’assurer
de leur mise en œuvre.

Recommandation générale n° 17, Comité pour l’élimination de la discrimination


raciale
1. Recommande que les États parties, compte tenu, mutatis mutandis, des Principes
concernant le statut des institutions nationales figurant en annexe à la résolution 1992/54 du
3 mars 1992 de la Commission des droits de l’homme, créent des commissions nationales ou
d’autres organismes appropriés entre autres pour atteindre les objectifs suivants :
b) Examiner les politiques gouvernementales concernant la protection contre la
discrimination raciale ;
c) S’assurer de la conformité de la législation avec les dispositions de la Convention ;
2. Recommande également que, lorsque de telles commissions sont créées, elles soient
associées à l’établissement des rapports et éventuellement fassent partie des délégations
des gouvernements afin de favoriser le dialogue entre le Comité et l’État partie concerné.203

La plupart des INDH exercent une fonction de surveillance et font régulièrement rapport au gouvernement
sur la situation des droits de l’homme dans le pays.
Généralement, la législation fondatrice de l’INDH dresse les limites de ses fonctions de suivi. Par
exemple, les INDH dont les mandats sont étroitement définis peuvent ne disposer que d’une autorité
indépendante limitée pour conseiller le gouvernement, alors que les INDH disposant de mandats plus
étendus peuvent être en mesure d’élaborer des points de vue plus sophistiqués et de jouir ainsi d’une
autorité leur permettant d’influer davantage sur les réformes politiques et législatives entreprises par le
gouvernement.204

1. NOUER LE DIALOGUE AVEC L’ÉTAT


Les INDH sont encouragées à favoriser le dialogue, dans un esprit de coopération, avec toutes les
branches et tous les niveaux de leur gouvernement, notamment les branches législatives et exécutives,
et le pouvoir judiciaire. Les informations et les données recueillies par les INDH sur les droits de l’homme
constituent une ressource essentielle pour les gouvernement, notamment lorsqu’ils élaborent les
politiques, car elles constituent des données périodiques, leur fournissent des détails sur les progrès
accomplis et leur permettent d’identifier les domaines exigeant des mesures prioritaires.205

203 Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, Recommandation générale n° 17 (1993) concernant la création d’organismes
nationaux pour faciliter l’application de la Convention.
204 National Human Rights Institutions: History, Principles, Roles and Responsibilities, p. 105.
205 Manuel de formation sur le monitoring des droits de l’homme, Série sur la formation professionnelle n° 7/Rév.1 (Publication des
Nations Unies, à paraître).

76 | Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Natalya Komarova, Gouverneur de l’Okrug autonome de Khanty-Mansiysk, Vladimir Lukin, Médiateur de la Fédération de Russie et Ryszard Komenda, Conseiller
principal pour les questions relatives aux droits de l’homme auprès des équipes de pays des Nations Unies en Fédération de Russie lors de la réunion régionale
organisée au Khanty-Mansiysk pour débattre des droits et des affaires des peuples autochtones, le 19 juin 2013. Photo : Olesia Minyaylo.

1.1. OUTILS DU DIALOGUE


Pour nouer le dialogue avec leur État, les moyens que les INDH utiliseront le plus couramment sont les
suivants :
• Porter les questions relatives aux droits de l’homme à l’attention du ministre concerné
• Soumettre des rapports annuels et faire des recommandations au gouvernement
• Examiner la législation existante et les projets de lois afin de déterminer s’ils respectent les droits
de l’homme
• Plaider en faveur de la ratification et de la mise en œuvre des instruments internationaux en
matière de droits de l’homme et aider les gouvernements à remplir leurs obligations au titre des
traités internationaux
• Mener des enquêtes publiques sur les violations des droits de l’homme et soumettre au
gouvernement les recommandations qui en résultent
• Encourager l’élaboration de mécanismes et de procédures permettant de recevoir et de mettre
en œuvre les recommandations internationales et les conseils relatifs à la situation nationale en
matière de droits de l’homme.206 207

Le Défenseur du peuple du Pérou a produit un rapport – Un défi pour l’État :


Contributions à une politique nationale relative à l’éducation bilingue et
interculturelle des peuples autochtones du Pérou – qui rassemble des
observations de suivi élaborées par le Bureau chargé de la mise en œuvre
de la politique d’éducation.207

206 Programme des Nations Unies pour le développement et Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, Toolkit
for Collaborating with National Human Rights Institutions (2010), p. 34-35.
207 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.

Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration | 77

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

1.2. RELATIONS CONSTRUCTIVES


La façon dont les INDH nouent le dialogue et communiquent avec leur État aura un impact sur leur
capacité à induire un réel changement. Il est important que les INDH entreprennent leurs programmes
de travail en veillant à ce que leur indépendance soit strictement respectée, conformément aux Principes
de Paris :
Les INDH doivent veiller à faire respecter leur position officielle au sein des structures de l’État
et doivent communiquer leurs recommandations à titre confidentiel et en s’attendant à ce que
les instances exécutives du gouvernement, ou le ministère public, les mettent en œuvre. Les
INDH doivent adopter des méthodes de communication solides et efficaces avec l’ensemble des
organes du gouvernement, le ministère public et les instances judiciaires afin de promouvoir leurs
recommandations, et […] ne doivent pas tolérer que ces recommandations soient ignorées.208
La nature précise des contacts établis sera fortement influencée par le climat politique national
contemporain. Si l’État et ses organes déploient des efforts pour coopérer, il est évident qu’il sera plus
facile, pour l’INDH, de faire respecter ses recommandations.
Bien que les relations entre les INDH et leur parlement soient importantes, les INDH doivent également
tisser des liens avec d’autres organes de l’État :
• Les organes chargés de l’application de la législation et de la sécurité, tels que la police, l’armée
et les établissements correctionnels et pénitentiaires
• Les organismes de protection du patrimoine et de l’environnement
• Les organismes chargés des régimes fonciers et du développement
• Les services gouvernementaux spécialisés et sectoriels.
Les INDH peuvent utiliser ce dialogue pour renforcer la visibilité des questions relatives aux droits de
l’homme des peuples autochtones au sein de l’appareil de l’État, ce qui peut influer sur les décisions
prises par le gouvernement ayant un impact sur les droits de l’homme des peuples autochtones.

Participantes à la cinquième session de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones. Photo ONU/Paulo Filgueiras

208 National Human Rights Institutions: Recommendations for Effective Protection and Promotion of Human Rights, recommandation 3.7.

78 | Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

209 210

LES DIRECTIVES D’ABUJA209


Les Directives d’Abuja constituent un exemple de la façon dont les INDH
peuvent gérer leurs liens avec l’État. Ces directives ont été élaborées pour
encourager la création de liens constructifs entre les parlements des États du
Commonwealth et leurs INDH.210 Les directives présentent les mesures que les
parlements et les INDH peuvent prendre pour tisser des liens constructifs et
faire progresser la protection et la promotion des droits de l’homme.
Mesures que peuvent prendre les parlementaires pour soutenir les INDH :
• S’assurer que des ressources et des installations appropriées sont
mises à la disposition des INDH afin de leur permettre d’accomplir leurs
fonctions efficacement
• Débattre rapidement du rapport annuel et des autres rapports soumis par
les INDH au parlement et déposer rapidement au parlement la réponse du
gouvernement auxdits rapports
• Convier les commissaires/médiateurs à des rencontres régulières afin de
débattre de questions d’intérêt commun
• S’assurer que leurs citoyens sont sensibilisés aux activités des INDH
• S’assurer qu’une partie du mandat des INDH consiste à conseiller le
parlement sur la conformité ou la non conformité de toute législation
susceptible d’affecter la jouissance des droits de l’homme dans le pays
• Envisager de réviser leurs règlements internes afin de leur permettre de
tisser des liens plus efficaces avec les INDH
• S’assurer que les recommandations de mesures émises par les INDH
sont suivies d’effet et mises en œuvre.
Mesures que peuvent prendre les INDH pour soutenir les parlements :
• Créer des mécanismes de liaison avec les parlementaires
• Les commissaires/médiateurs doivent acquérir une connaissance
approfondie du rôle, des fonctions et des contraintes du parlement et des
parlementaires
• Les commissaires/médiateurs doivent régulièrement donner aux
parlementaires des conseils éclairés et indépendants, sur les questions,
instruments et mécanismes nationaux, régionaux et internationaux
relatifs aux droits de l’homme
• Soumettre des rapports annuels sur leurs travaux et sur la situation des
droits de l’homme dans le pays
• Conseiller les parlements sur la création, au parlement, de comités des
droits de l’homme, et coopérer avec ces comités.

2. PROMOUVOIR L’ADOPTION DES NORMES


INTERNATIONALES
Le cadre juridique d’un État et l’existence d’une culture des droits de l’homme au sein des organes
d’un État constituent les fondements de la protection, de la promotion et de la réalsiation des droits de
l’homme des peuples autochtones. Ce cadre juridique comprend l’adoption ou le fait de devenir partie
209 Abuja Guidelines on the Relationship Between Parliaments, Parliamentarians and Commonwealth National Human Rights
Institutions (2004), disponibles à l’adresse suivante : www.agora-parl.org/node/1514.
210 Ibid.

Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration | 79

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

des instruments internationaux contenant des normes relatives aux droits de l’homme, ainsi que la mise
en œuvre ultérieure de ces normes, au plan national.

2.1. LA DÉCLARATION
D’abord et avant tout, les INDH doivent évaluer si leur État a officiellement apporté son soutien à la
Déclaration, soit à la date de son adoption à l’Assemblée générale, soit par le biais d’une annonce
ultérieure. 211

À la date de son adoption, le Canada a voté contre la Déclaration.


En soumettant un certain nombre de documents et grâce à d’autres
processus, la Commission canadienne des droits de la personne a incité
le gouvernement à changer d’avis et à adopter la Déclaration. En 2010,
le gouvernement canadien a franchi le pas et a officiellement soutenu la
Déclaration.211

Lorsque leur État n’a pas encore clairement indiqué qu’il soutient la Déclaration, les INDH peuvent
élaborer une stratégie qui débouchera sur un soutien officiel. Différentes approches peuvent être
utilisées :
• Sensibiliser le public grâce à des campagnes, communiqués de presse et discours
• Faire du lobbying auprès du gouvernement, tant au niveau des parlementaires que des
représentants de l’exécutif
• Émettre des recommandations officielles à l’intention du gouvernement
• Plaider auprès des mécanismes internationaux des droits de l’homme, tels que les organes
conventionnels, et faire des recommandations grâce à des processus parallèles d’établissement
de rapports.
• Conformément à la Déclaration, les INDH doivent élaborer ces stratégies en travaillant
conjointement avec les organisations de peuples autochtones. 212

La Commission malaisienne des droits de l’homme a traduit la Déclaration


dans la langue nationale afin de sensibiliser un large public aux droits des
peuples autochtones énoncés dans la Déclaration.212

2.2. AUTRES INSTRUMENTS INTERNATIONAUX


La Déclaration ayant le statut d’un instrument qui collationne des normes internationales relatives aux
droits de l’homme existantes et qui les interprète dans la mesure où elles s’appliquent aux peuples
autochtones, il est fondamental que les INDH vérifient si leur État est partie aux principaux traités
internationaux relatifs aux droits de l’homme.

211 L’Énoncé du Canada appuyant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (12 novembre 2010) est
disponible à l’adresse suivante : http://www.aadnc-aandc.gc.ca/fra/1309374239861/1309374546142.
212 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.

80 | Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Les INDH doivent également évaluer si leur État a formulé des réserves213 concernant ces traités relatifs
aux droits de l’homme. Les INDH peuvent faire du lobbying auprès de leur État s’il n’est pas partie aux
principaux traités internationaux relatifs aux droits de l’homme ou afin qu’il lève toute réserve qu’il est
susceptible d’avoir émise.
Les INDH doivent également examiner la position de leur État quant aux instruments régionaux
pertinents. 214

La Commission bangladaise des droits de l’homme a contribué à


promouvoir la ratification de la Convention n° 169 de l’OIT en organisant un
séminaire principalement consacré à la Convention et à sa pertinence au
regard des droits des peuples autochtones. Une déclaration du Président
de la Commission, le professeur Mizanur Rahman, a insisté sur le lien
entre le respect des droits des peuples autochtones et la réalisation d’une
démocratie véritablement inclusive : « Une vraie démocratie exige d’assurer
à tous des droits égaux et la possibilité de développer son identité. C’est
cela la démocratie inclusive. »214

3. MISE EN ŒUVRE DES TRAITÉS


INTERNATIONAUX
La protection nationale qu’apportent les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme est fonction
du contexte juridique et politique de chaque État. Généralement, les États se subdivisent en deux
catégories :
• Les États monistes, où les traités sont directement incorporés dans la loi nationale lorsque l’État
en devient partie
• Les États dualistes, où les obligations découlant d’un traité international ne peuvent être
incorporées dans le droit national que sous réserve de l’adoption d’une législation de mise en
œuvre.215
Les INDH qui fonctionnent dans des États dualistes doivent préconiser l’adoption de dispositions
nationales permettant d’intégrer les obligations internationales. La stratégie de lobbying peut être
similaire à celle – déjà évoquée – ayant pour objet de devenir partie à des traités relatifs aux droit de
l’homme. Les INDH peuvent également donner des conseils pour aider les parlementaires à élaborer
ladite législation ou à en vérifier l’élaboration.

213 On entend par réserve « une déclaration unilatérale, […] faite par un État […] à la signature, à la ratification, à l’acte de confirmation
formelle, à l’acceptation ou à l’approbation d’un traité ou à l’adhésion à celui-ci, par laquelle cet État ou cette organisation vise à
exclure ou à modifier l’effet juridique de certaines dispositions du traité dans leur application à cet État ou à cette organisation » ;
Convention de Vienne sur le droit des traités, article 2 (1) (d). On notera également que l’article 19 de la Convention de Vienne
stipule qu’un État peut formuler une réserve à moins que la réserve ne soit interdite par le traité ou que la réserve ne soit
incompatible avec l’objet et le but du traité.
214 Commission Bangladaise des droits de l’homme, National seminar on ILO convention 169 and human rights of Indigenous
Peoples in Bangladesh, Dhaka, Bangladesh, 8 June 2011. Pour en savoir plus, veuillez consulter le document à l’adresse
suivante : www.nhrc.org.bd/PDF/seminar%20on%20169.pdf.
215 Le système juridique et politique d’un État détermine si celui-ci est moniste ou dualiste. Voir The International Covenant on Civil
and Political Rights: Cases, Materials and Commentary (2e éd.) ; S. Joseph, J. Schultz et M. Castan, éd. (2004) ; p. 14.

Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration | 81

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

216 217

En 2007, la Commission népalaise des droits de l’homme a organisé


un atelier sur les droits et les traités internationaux relatifs aux peuples
autochtones. Les participants de l’atelier, notamment les représentants
des organisations de peuples autochtones, ont exhorté le gouvernement à
ratifier la Convention n° 169 de l’OIT.216
Le Népal a ratifié la Convention n° 169 de l’OIT en septembre 2007. Depuis
cette date, la Commission a promu la mise en œuvre de la Convention,
notamment en examinant le rapport de l’État partie relatif à la Convention
n° 169 de l’OIT.217

L’intégration des traités relatifs aux droits de l’homme dans les dispositions nationales aura un effet
démesurément positif pour les peuples autochtones en raison de leur vulnérabilité aux violations des
droits de l’homme. Il convient de souligner que l’intégration dans les législations nationales de la
Convention n° 169 de l’OIT sera particulièrement bénéfique pour les peuples autochtones parce qu’elle
s’intéresse tout particulièrement à la problématique des peuples autochtones.
Outre leurs activités classiques de lobbying, les INDH doivent encourager leur État à réfléchir précisément
à la façon dont la mise en œuvre nationale des normes internationales peut faire positivement progresser
la promotion, la protection et la réalisation des droits de l’homme des peuples autochtones. À cet
égard, la consultation des peuples autochtones et l’établissement de liens réels avec ces peuples seront
extrêmement importants.

MISE EN ŒUVRE NATIONALE DES DROITS DE L’HOMME


Le droit international des droits de l’homme impose aux États de mettre
en œuvre au plan national les normes contenues dans les traités auxquels
ils sont parties. Néanmoins, l’État est libre de décider de quelle manière et
sous quelle forme ces normes seront mises en œuvre. Cette mise en œuvre
peut être réalisée par le biais de différents mécanismes :
• Une protection des droits de l’homme garantie par la Constitution
• Une loi sur les droits de l’homme
• L’exigence d’assortir l’adoption de la nouvelle législation de déclarations
garantissant le respect des droits de l’homme
• Des plans d’action nationaux relatifs aux droits de l’homme.

Même lorsqu’elles ne sont pas mises en œuvre au plan national, les normes internationales peuvent
avoir un impact indirect sur le droit national, car les normes peuvent être utilisées par l’appareil judiciaire
pour interpréter les dispositions ambiguës de la législation.218 Si leur mandat les y autorise, les INDH
peuvent jouer un rôle stratégique de premier plan en donnant des conseils aux tribunaux (en qualité
d’amicus curiae) sur les normes relatives aux droits de l’homme pertinentes et applicables.

216 Commission népalaise des droits de l’homme, NHRC e-bulletin, Vol. 5, No. 3 (13 juin 2007), p. 4, disponible à l’adresse suivante :
http://nhrcnepal.org/nhrc_new/doc/newsletter/Ebulletin-Vol5-5.pdf.
217 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.
218 Voir R v Secretary of State for the Home Department ex parte Brind (1991) AC 696, p. 747 ; Attorney General of Botswana v Dow
(1994) (6) BCLR 1, par. 29-30 ; et The International Covenant on Civil and Political Rights: Cases, Materials and Commentary, p.
16.

82 | Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

219

En 2007, la Cour suprême du Belize a utilisé la Déclaration pour orienter son


interprétation de la Constitution du Belize dans le but de faire respecter les
droits des peuples autochtones maya à leurs terres traditionnelles.219

Les réformes législatives ne suffisent pas, à elles seules, pour réaliser la mise en œuvre efficace
des normes internationales.220 Un certain nombre d’instruments, de politiques, de pratiques et de
programmes législatifs ont une incidence sur l’efficacité ou l’inefficacité de la mise en œuvre. Les
activités de promotion exercées par les INDH doivent mettre l’accent sur le fait que la législation n’est
que le début du processus de mise en œuvre au plan national et qu’elle ne doit pas être considérée
comme une fin en soi.221
Les INDH peuvent également promouvoir un plan d’action national sur les droits de l’homme, qui peut
faire expressément référence aux obligations internationales de l’État. Ce plan peut présenter les étapes
stratégiques nécessaires pour assurer la protection, la promotion et la réalisation des normes relatives
aux droits de l’homme. Les INDH peuvent fournir à l’État une assistance technique pendant la phase
d’élaboration de son plan d’action national sur les droits de l’homme.

4. MISE EN ŒUVRE DE LA DÉCLARATION


Les INDH sont extrêmement bien placées pour jouer un rôle important au niveau des progrès réalisés
par l’État en matière de mise en œuvre de la Déclaration au plan national.
En premier lieu, il convient de souligner que mener des actions conformes au présent Manuel aidera les
INDH à faire progresser de façon significative la mise en œuvre nationale de la Déclaration. Les actions
spécifiques supplémentaires que les INDH peuvent mener sont présentées ci-après.

4.1. UTILISER LA DÉCLARATION COMME NORME DE RÉFÉRENCE


L’un des moyens les plus efficaces, pour les INDH, de faire progresser la mise en œuvre nationale de la
Déclaration consiste à l’utiliser comme norme de référence commune. 222

La Commission kenyane des droits de l’homme organise des forums


nationaux visant à promouvoir les droits des peuples autochtones.
La Déclaration est utilisée pour orienter ces activités de plaidoyer.222

Plus les normes énoncées dans la Déclaration sont utilisées pour contrôler la capacité des États à
honorer leurs engagements en matière de droits de l’homme des peuples autochtones, plus ces normes
ont tendance à devenir des instruments de référence.

219 Manuel Coy et al v The Attorney General of Belize et al, Cour suprême du Belize, Demandes n° 171 et 172 (2007). Voir également
A/HRC/9/9, par. 54.
220 Comité des droits de l’homme, observation générale n° 3 (1981) sur la mise en œuvre du Pacte dans le cadre national (article 2).
221 Toolkit for Collaborating with National Human Rights Institutions, p. 38.
222 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.

Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration | 83

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

223

La Commission malaisienne des droits de l’homme utilise la Déclaration


comme un cadre et un point de référence importants pour élaborer et
mettre en œuvre les programmes de son Comité national des droits des
peuples autochtones.223

4.2. PLAINTES
L’article 40 de la Déclaration oblige les États à élaborer des « procédures justes et équitables » ainsi que
des « voies de recours efficaces » pour toute violation des droits de l’homme des peuples autochtones.
Les Principes de Paris prévoient également que les INDH doivent traiter et résoudre les plaintes relatives
aux droits de la personne. Il est indiqué au Chapitre 9 que, en fonction de leur mandat, les INDH
connaissent et règlent un maximum de plaintes issues de peuples autochtones. Sont notamment visées
toutes les plaintes directement liées à la Déclaration.
Lorsque les INDH ne disposent pas d’un mandat suffisamment large pour connaître et résoudre les
plaintes déposées par des autochtones au titre de violations de leurs droits de l’homme, notamment
des violations énoncées dans la Déclaration, elles peuvent procéder à des activités de lobbying auprès
de leur État en rapport avec cette question.

4.3. PLAN NATIONAL DE MISE EN ŒUVRE DE LA DÉCLARATION


Étant donné que la Déclaration est le fruit d’un collationnement de normes existantes sur les droits
de l’homme, la « mise en œuvre efficace » exigera de privilégier une approche holistique au détriment
d’une approche ad hoc. À cet égard, il est important que la mise en œuvre soit réalisée dans tous les
organismes et services de l’État. Le défi commun aux représentants des peuples autochtones consiste
à nouer le dialogue avec les différents services gouvernementaux.
Pour refléter la nature interdépendante des droits de l’homme, il est nécessaire d’adopter une approche
intégrée qui témoigne également du vécu et de la réalité des peuples autochtones : par exemple, les
droits sur les terres, les territoires et les ressources sont intégralement liés aux droits à la santé, à
l’éducation et à la culture. En plaidant en faveur de l’élaboration d’un plan de mise en œuvre national
et en faisant du lobbying à cette fin, les INDH peuvent donner à l’État l’impulsion cruciale qui l’incitera
à adopter une approche holistique.
Par ailleurs, il est important que les INDH plaident en faveur de l’élaboration d’un plan de mise en œuvre
national conçu en concertation avec les peuples autochtones. D’ailleurs, l’article 38 de Déclaration
exige des États qu’ils « prennent, en consultation et en coopération avec les peuples autochtones, les
mesures appropriées, y compris législatives, pour atteindre les buts de la présente Déclaration ». Par
conséquent, un objectif de la stratégie pourrait consister à adopter une législation qui donnerait un effet
juridique national aux dispositions de la Déclaration. 224

En novembre 2007, l’État plurinational de Bolivie a adopté une législation


visant à intégrer la Déclaration dans les lois nationales. La Déclaration a
également été utilisée comme cadre normatif des processus de révision des
constitutions de l’État plurinational de Bolivie, de l’Équateur et du Népal.224

223 Ibid.
224 A/HRC/9/9, par. 52-53.

84 | Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Comme pour la mise en œuvre des traités, généralement, la législation ne suffit pas – à elle seule – à
assurer la protection, la promotion et la réalisation des droits de l’homme des peuples autochtones. Par
conséquent, un plan national efficace doit inclure les éléments suivants :
• La participation active des peuples autochtones à chacune des phases de conception,
d’élaboration, de mise en œuvre, de contrôle et d’évaluation
• Une forme de protection législative
• Un mécanisme visant à examiner les lois et politiques existantes (voir ci-après)
• Un mécanisme de plaintes efficace
• Une éducation aux droits de l’homme des peuples autochtones à l’intention des législateurs et
des responsables de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques
• Un mécanisme visant à examiner le plan national et, le cas échéant, à faciliter les amendements.

4.4. EXAMEN DES LOIS, POLITIQUES ET PROGRAMMES


Afin de s’assurer de l’efficacité de la mise en œuvre, il sera nécessaire d’examiner si les lois, politiques
et programmes existants qui ont un impact sur les droits de l’homme des peuples autochtones sont
conformes à la Déclaration. Comme indiqué au Chapitre 13, le Rapporteur spécial sur les droits des
peuples autochtones a émis des recommandations visant à ce que les États procèdent à ces examens.
Par exemple, suite à sa mission en Australie en 2009, le Rapporteur spécial a recommandé que :
Le gouvernement du Commonwealth et les États examinent à la lumière de la Déclaration
l’ensemble des législations, politiques et programmes qui affectent les autochtones et les
insulaires du détroit de Torres.225
Les travaux d’examen peuvent prendre différentes formes, notamment :
• L’examen systématique de la législation et des politiques grâce à une enquête ou une commission
• L’examen d’une législation existante alors qu’elle est portée devant le parlement en vue d’être
amendée
• L’examen des politiques et programmes élaborés par des services de l’État et ayant un impact
sur les peuples autochtones
• L’examen de lois et de politiques thématiquement ciblées (c’est-à-dire le réexamen de lois et de
politiques ayant un impact sur les terres, les territoires et les ressources).
Grâce à ces mesures, les INDH peuvent apporter à leur État une assistance technique de première
importance. Parallèlement aux travaux qu’elles mènent de concert avec leur État, les INDH peuvent être
à l’initiative de leurs propres examens des lois, politiques et programmes dans le cadre de leurs activités
de suivi ordinaires. 226

Le Centre norvégien des droits de l’homme publie chaque année un


annuaire qui examine la situation des droits de l’homme en Norvège.226

225 A/HRC/15/37/Add.4, par. 74.


226 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.jus.uio.no/smr/english/about/national-institution/.

Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration | 85

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Déléguées autochtones Saami lors de l’ouverture de la douzième session de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones.
Photo ONU/Rick Bajornas

POINTS CLÉS : CHAPITRE 8


• Les INDH ont pour mandat de donner des conseils et de faire des
recommandations à leur gouvernement, ainsi qu’aux autres parties
prenantes.
• Les INDH peuvent utiliser leurs mandats pour promouvoir la réforme des
lois, politiques et pratiques de l’État qui violent ou restreignent les droits
peuples autochtones.
• Les INDH sont encouragées à utiliser la Déclaration comme norme de
référence commune pour leurs travaux visant à promouvoir les droits des
peuples autochtones.

86 | Chapitre 8 : Promouvoir le respect de la Déclaration

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Chapitre 9 :
Enquêtes et plaintes
QUESTIONS CLÉS
• Les INDH sont-elles habilitées à enquêter sur des plaintes individuelles et
collectives concernant des violations de droits de l’homme des peuples
autochtones ?
• Que peuvent faire les INDH pour encourager la mise en place de voies de
recours à l’intention des peuples autochtones dont les droits de l’homme
ont été violés ?

PRINCIPES ET NORMES INTERNATIONALES FONDATEURS DE


L’IMPLICATION DES INDH
Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones
Article 40
Les peuples autochtones ont le droit d’avoir accès à des procédures justes
et équitables pour le règlement des conflits et des différends avec les États
ou d’autres parties et à une décision rapide en la matière, ainsi qu’à des voies
de recours efficaces pour toute violation de leurs droits individuels et collectifs. Toute décision
en la matière prendra dûment en considération les coutumes, traditions, règles et systèmes
juridiques des peuples autochtones concernés et les normes internationales relatives aux
droits de l’homme.
Article 42
[…] les États favorisent le respect et la pleine application des dispositions de la présente
Déclaration et veillent à en assurer l’efficacité.

Principes de Paris
Modalités de fonctionnement
Dans le cadre de son fonctionnement, l’institution nationale doit :
a) Examiner librement toutes questions relevant de sa compétence, qu’elles soient
soumises par le gouvernement ou décidées par autosaisine sur proposition de ses
membres ou de tout requérant ;
Principes complémentaires concernant le statut des commissions ayant des compétences à
caractère quasi juridictionnel
Une institution nationale peut être habilitée à recevoir et examiner des plaintes et requêtes
concernant des situations individuelles. Elle peut être saisie, par des particuliers, leurs
représentants, des tierces parties, des organisations non gouvernementales, des associations
et syndicats et toutes autres organisations représentatives. Dans ce cas, et sans préjudice
des principes ci-dessus concernant les autres compétences des commissions, les fonctions
qui leur sont confiées peuvent s’inspirer des principes suivants :
a) Rechercher un règlement amiable par la conciliation ou, dans les limites fixées par la loi,
par des décisions contraignantes, ou, le cas échéant, en ayant recours en tant que de
besoin à la confidentialité ;
b) Informer l’auteur de la requête de ses droits, notamment des voies de recours qui lui
sont ouvertes, et lui en faciliter l’accès ;

Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes | 87

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 87 22/10/2014 11:32:40


La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

c) Se saisir des plaintes ou requêtes ou les transmettre à toute autre autorité compétente
dans les limites fixées par la loi ;
d) Faire des recommandations aux autorités compétentes, notamment en proposant des
adaptations ou réformes des lois, règlements et pratiques administratives, spécialement
lorsqu’ils sont à l’origine des difficultés rencontrées par les auteurs des requêtes pour
faire valoir leurs droits.

Enquêter sur les allégations de violations des droits de l’homme et résoudre ces allégations sont des
fonctions essentielles des INDH. La façon dont elles s’acquittent de leur tâche en matière de traitement
des plaintes varie en fonction de la spécificité de leur mandat. Les INDH peuvent être habilitées à :
Examiner les plaintes individuelles et recommander des voies de recours et des mécanismes de
réparation aux autorités compétentes
• Examiner les plaintes déposées par des groupes ou des communautés et donc à reconnaître les
droits collectifs détenus par les peuples autochtones
• Renvoyer les affaires devant les autorités compétentes, notamment les organismes
gouvernementaux, le parlement, les autorités judiciaires et le ministère public
• Chercher à obtenir des recours ou une réparation au nom des plaignants par l’intermédiaire des
cours et des tribunaux
• Conseiller les cours et les tribunaux en tant qu’amicus curiae
• Donner des instructions juridiquement contraignantes et prendre des décisions ayant force
obligatoire
• Ordonner que les autorités qui ont violé les droits indemnisent les victimes
• Pour les INDH situées à l’extérieur de la région Asie-Pacifique, ester en justice devant des
instances régionales telles que les cours internationales des droits de l’homme.227

Danseur autochtone des Philippines lors de la cérémonie d’ouverture de l’Année internationale des peuples autochtones. Photo ONU/John Isaac

227 Toolkit for Collaborating with National Human Rights Institutions, p. 32.

88 | Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

228

En 2011, la Présidente de la Commission philippine des droits de l’homme,


Loretta Ann Rosales, a convoqué une conférence de presse afin de présenter
les constatations auxquelles avait procédé la Commission au terme des
enquêtes sur les plaintes pour violations des droits de l’homme des peuples
autochtones perpétrées par Oceana Gold, une compagnie minière étrangère
exerçant des activités aux Philippines.
La Présidente Rosales a déclaré : « L’histoire du développement des
Philippines est entachée de graves dégradations de l’environnement causées
par des activités économiques assorties de violations de droits civils et politiques et en rapport
avec ces violations. En effet, ceux qui s’élèvent contre l’agression du développement s’exposent
au harcèlement des gouvernements ou des autorités responsables des projets. Néanmoins, ceci
n’est nullement comparable avec les souffrances endurées par les peuples autochtones vivant
sur les terres communautaires où ces projets sont réalisés. Ils perdent leurs maisons, leurs
moyens de subsistance, leurs biens et, ce qui est encore plus grave, leurs liens avec les terres et
leur identité. Lorsque de telles choses se produisent, la Commission des droits de l’homme – et
le gouvernement – ne doivent pas rester les bras croisés. »
En juin 2008, des rapports et des plaintes ont été soumis à la Commission alléguant qu’Oceana
Gold avait « illégalement et violemment démoli 187 maisons appartenant à des peuples
autochtones de Didipio ». Selon la Présidente Rosales, les démolitions « auraient été perpétrées
sans qu’aient été obtenus des avis ou des ordres spéciaux de démolition auprès du tribunal,
en l’absence du Sheriff, sans paiement d’une juste indemnité et sans que soit proposée une
quelconque solution de déménagement et de réinstallation. Selon les rapports, ces démolitions
ont été assorties d’actes de violence et de destruction inutiles : les résidents qui ont résisté
et essayé de sauver leurs maisons ont été frappés, y compris les voisins qui les ont aidés ; les
maisons ont été anéanties par des bulldozers et incendiées. Oceana Gold aurait également
clôturé d’importants tronçons de routes et de chemins que les résidents de la communauté
utilisaient depuis une trentaine d’années pour transporter les produits de leurs fermes jusqu’au
marché. Oceana Gold aurait également créé des postes de contrôle autour des barangays,
entravant la circulation des autochtones et ayant pour effet de restreindre injustement leurs
activités sociales et économiques. Par ailleurs, il a été allégué que le Groupe mobile régional de
la Police nationale des Philippines est utilisé comme force de sécurité privé d’(Oceana Gold) et
que ses officiers étaient stationnés dans les installations d’(Oceana Gold). »
S’appuyant sur l’exercice de ses pouvoirs d’investigation et sur son mandat, la Commission
a découvert suffisamment d’éléments probants pour conclure qu’Oceana Gold avait « violé le
droit de résidence, le droit à un logement décent et les droits de propriété, le droit à la liberté
de mouvement et le droit de ne pas subir d’entraves arbitraires, le droit à la sécurité de la
personne des résidents visés et le droit de la communauté autochtone de manifester sa culture
et son identité ». La Commission a également conclu que le Groupe mobile régional de la Police
nationale des Philippines avait violé ses procédures opérationnelles internes en « portant des
armes à feu très puissantes et en faisant un usage de la force inutile et irraisonné ».
À la lumière des constatations réalisées dans le cadre de ses enquêtes, la Commission a
émis une résolution unanime recommandant au gouvernement d’« examiner l’éventuelle
résiliation de l’Accord d’assistance technique et financière conclu avec la société étrangère
au vu des violations flagrantes des droits de l’homme qu’elle a perpétrées ». La Commission a
également demandé à l’ensemble des organismes gouvernementaux de lui soumettre dans les
30 jours suivant la date de la résolution de la Commission des rapports « relatifs aux mesures
concrètes qu’ils ont prises pour respecter, protéger et réaliser les droits des peuples affectés
de Didipio ». La Commission a également conseillé à la société minière d’ « examiner les
constatations de la Commission et de procéder à une réorientation de sa politique en matière
d’exploitation minière tenant pleinement compte du respect des droits de l’homme de la
communauté concernée ». Par ailleurs, il a été demandé au bureau régional de la Commission
de « plaider activement en faveur des droits de l’homme de la communauté concernée et de
prendre toutes les mesures possibles pour éviter que ne se reproduisent d’autres actes de
violence et d’oppression ».

228 Commission philippine des droits de l’homme, “Statement on the human rights situation in Barangay Didipio, Kasibu, Nueva Vizcaya”
(17 janvier 2011), disponible à l’adresse suivante : www.chr.gov.ph/MAIN%20PAGES/news/PS_17Jan2011_didipio.htm.

Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes | 89

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Les principales caractéristiques des mécanismes d’enquête efficaces sur les plaintes déposées sont
les suivantes :
• La capacité juridique appropriée
• Un ensemble de priorités défini et approprié
• Des compétences organisationnelles
229 230
• La volonté politique de mener ses travaux à bien.

RECEVOIR LES PLAINTES COLLECTIVES229


En 2008, la Loi canadienne sur les droits de la personne a été modifiée pour
inclure la disposition suivante :
Dans une plainte déposée conformément à la Loi canadienne sur les
droits de la personne […] cette Loi sera interprétée et appliquée d’une
façon qui accorde l’attention nécessaire aux traditions juridiques et au
droit coutumier des Premières nations, notamment à l’équilibre des droits
et intérêts individuels et des droits et intérêts collectifs, dans la mesure où
ils sont conformes au principe de l’égalité des sexes.230
La Commission canadienne des droits de la personne a élaboré des
lignes directrices opérationnelles relatives à la façon dont elle appliquera
l’amendement. Les lignes directrices reposent sur la recherche menée
par des experts du dialogue avec les anciens et des praticiens du droit, et
facilitée par l’Indigenous Bar Association.

AMICUS CURIAE OU PARTIE INTERVENANTE DANS LES


PROCÉDURES JUDICIAIRES
La Commission nigériane des droits de l’homme est intervenue dans le
cadre d’une affaire judiciaire afin de demander une injonction visant à
empêcher la destruction de terres appartenant à des peuples autochtones.
Le Défenseur du peuple de la République d’Équateur a fait part de ses
préoccupations aux tribunaux concernant un certain nombre de procédures
pénales introduites à l’encontre de dirigeants ou de militants autochtones qui
ont été accusés de terrorisme ou d’autres délits après avoir participé à des
manifestations. Ceci s’est traduit par un changement de comportement dans
les cas où des violations du droit à une procédure régulière ont été décelées.

1. RECEVOIR DES PLAINTES ET ENQUÊTER SUR


LES PLAINTES
Il est toujours préférable que les pouvoirs dont disposent les INDH pour enquêter sur les plaintes soient
inscrits dans la loi et que les responsabilités procédurales soient clairement définies. Sur cette base,
les INDH peuvent définir la portée et le rôle du mécanisme d’enquête sur les plaintes et identifier les
questions qu’il convient d’examiner en priorité.
Les INDH doivent également préciser quel est le critère retenu pour les plaintes recevables. Des problèmes
de droits de l’homme peuvent se poser dans presque tous les domaines de l’activité humaine. Afin
d’éviter une mauvaise répartition des ressources, les INDH doivent hiérarchiser les plaintes et veiller à
229 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.
230 Projet de loi C-21 2008 (Canada), s. 1.22.

90 | Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes

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Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

ne pas s’occuper de questions qui ne relèvent pas de leur mandat. Généralement, les plaintes doivent
être en rapport avec des droits de la personne garantis par la Constitution, la législation ou tout autre
instrument considéré comme faisant partie intégrante du droit national.
Étant donné que les INDH sont d’une nature relativement récente et «  non contraignante  »,231 elles
peuvent ne pas avoir un mandat spécifique et bien défini leur permettant d’enquêter sur les violations
relevant de la Déclaration. Cependant, il convient de rappeler que la Déclaration s’appuie sur des
normes relatives aux droits de l’homme existantes et qui s’appliquent aux peuples autochtones. De ce
fait, si une plainte est recevable au titre d’un autre instrument, l’INDH est néanmoins habilitée à examiner
la plainte et à utiliser la Déclaration comme outil d’interprétation. 232

En 2010, le Bureau guatémaltèque pour la protection des droits des


peuples autochtones a reçu 4155 plaintes émanant de peuples autochtones
probablement victimes de violations des droits de l’homme. Pendant cette
période, 91 cas de violations de droits de l’homme perpétrées à l’encontre
de peuples autochtones ont été enregistrés.231

Afin d’optimiser la capacité des INDH à recevoir les plaintes des peuples autochtones concernant des
droits de l’homme et afin d’optimiser les chances de voir la Déclaration stimuler le traitement de ces
plaintes, il est important que les agents des INDH soient formés de façon appropriée. À cet égard, le
présent Manuel et les matériels de formation dont il est assorti procureront des avantages pratiques
au sein des INDH ainsi qu’aux membres du personnel responsables de la gestion des plaintes et des
enquêtes auxquelles elles donnent lieu.
Lorsque les INDH ont pour mission de conduire des modes de règlement alternatifs des différends, il est
souhaitable que les agents responsables des plaintes bénéficient d’une formation de développement
professionnel. Dans le cadre de cette formation, l’accent pourrait être placé sur les modèles autochtones
de modes de règlement alternatifs des différends.
Par ailleurs, les INDH peuvent jouer un rôle précieux dans les situations de conflit ou de conflit qui
s’intensifie entre des communautés autochtones et l’État ou d’autres groupes, notamment des sociétés
privées. Les situations de conflit peuvent être assorties de menaces potentielles ou réelles :
• D’une utilisation de terres et de territoires par des industries extractives
• D’un usage de la force à l’encontre de manifestations pacifiques organisées par des communautés
autochtones
• D’une arrestation illégale ou arbitraire de dirigeants autochtones.
Les INDH peuvent exercer un certain nombre d’activités visant à promouvoir la résolution pacifique de
ces problèmes, notamment les efforts visant à :
• Promouvoir le dialogue entre les parties
• Promouvoir la création et le développement de mécanismes de construction de la paix
• Encourager les concessions acceptables et nécessaires afin de traiter les questions relatives aux
droits de l’homme qui ne sont peut-être pas à l’origine du conflit.233
Les INDH peuvent également jouer un rôle important en contribuant à remédier aux désavantages ou
inégalités entravant les négociations ou les dialogues avec l’État ou des sociétés privées.

231 Pour une analyse plus approfondie de cette question, voir Chapitre 5.
232 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.
233 National Human Rights Institutions: History, Principles, Roles and Responsibilities, p. 93-95.

Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes | 91

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

2. CRÉER UN MÉCANISME DE PLAINTES


EFFICACE ET ACCESSIBLE
Créer un mécanisme de plaintes efficace exige des compétences en matière d’organisation. Pour
bénéficier de ces compétences, il est également nécessaire de disposer d’un système de gestion
efficace. Dans certains cas, l’Équipe de pays des Nations Unies234 peut aider les INDH à renforcer leurs
capacités internes pour enquêter sur les plaintes. 235

La Commission indienne des droits de l’homme a été créé en 1993. Entre


1993 et 1994, la Commission a reçu 498 plaintes. En 2000, la Commission
avait reçu environ 50 000 plaintes.
Afin de faire face à l’augmentation du nombre des plaintes et d’améliorer
la rapidité, l’efficacité et l’efficience de son processus de plaintes, la
Commission a introduit un mécanisme de plaintes en ligne.235

Un mécanisme de gestion des plaintes rigoureux peut être divisé en trois étapes fondamentales :
• La résolution précoce
– Le tri
– Le conseil
– Les autres mécanismes de règlement des litiges ou de médiation (s’ils sont du ressort de
l’INDH)
• L’enquête sur la plainte
– Les stratégies de gestion des cas
– L’enquête
– La communication des constatations
– L’examen des possibilités en matière de recours national et international
• Les recommandations et les voies de recours
– La diffusion des rapports, résultats et recommandations relatifs aux cas de violation
– Les efforts déployés pour que soit appliquée une voie de recours, notamment un règlement,
une décision judiciaire ou une intervention confidentielle
– La communication avec les organes conventionnels et les organismes régionaux lorsque les
voies de recours internes et nationales ont été épuisées.236
Il est particulièrement important que les INDH veillent à ce que leurs mécanismes de plainte soient
accessibles aux peuples autochtones. Comme nous l’avons souligné aux Chapitres 6 et 7, les INDH
doivent exercer des activités de sensibilisation ciblant les peuples autochtones afin de s’assurer que
leurs fonctions et leur mandat en matière de gestion des plaintes sont bien compris. Par ailleurs, les
processus doivent être souples afin de s’assurer que la participation des peuples autochtones sera
optimale. Les INDH devront notamment s’assurer que :
• Le dépôt d’une plainte est gratuit
• Des capacités suffisantes sont disponibles pour recevoir les plaintes orales et écrites

234 L’Équipe de pays des Nations Unies (UNCT) existe dans 136 pays et couvre l’ensemble des 180 pays où sont mis en oeuvre
des programmes des Nations Unies, principalement dans les pays en développement. L’UNCT assure la coordination et la prise
de décision interinstitutions au niveau des pays. Leur principal objectif est de veiller à ce que les différents organismes aient des
projets et des activités en commun qui garantissent l’obtention de résultats concrets et conformes à l’agenda du développement
des gouvernements. Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.undg.org/index.cfm?P=1257.
235 Pour en savoir plus, veuillez consulter le site de la Commission à l’adresse suivante : www.nhrc.nic.in/nhrc.htm.
236 Toolkit for Collaborating with National Human Rights Institutions, p. 33.

92 | Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 92 22/10/2014 11:32:42


Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

• Des interprètes et/ou des agents de liaison autochtones sont utilisés


• Les mécanismes ne sont pas inutilement formels
• Les mécanismes ne violent pas les traditions culturelles des peuples autochtones concernés
(par exemple, on veillera à ce que ce soit un agent de sexe féminin qui entende les plaintes
concernant des questions culturelles qui ne sont pas débattues en présence des hommes)
• Si une plainte est rejetée, les plaignants sont clairement informés des raisons – d’une façon
détaillée et compréhensible – et, le cas échéant, ils sont informés des autres voies de recours.237
Par ailleurs, il est important que les INDH maintiennent la victime au centre de tout processus de plainte. Les
victimes ont besoin d’accéder aux informations et ressources nécessaires. Elles doivent être consultées
de façon appropriée et les explications détaillées des décisions doivent leur être fournies.238 239

La Commission coréenne des droits de l’homme traduit l’ensemble de ses


formulaires de plainte dans les langues principales des communautés de
travailleurs migrants installées en République de Corée. Les membres du
personnel distribuent également des brochures d’information en plusieurs
langues sur la Commission, sa fonction de gestion des plaintes et les droits
des travailleurs migrants dans les banlieues et communautés où vivent les
travailleurs migrants. La Commission exerce ses activités de sensibilisation
en partenariat avec les associations de migrants et les communautés
de migrants. Elle a également établi des partenariats avec des agences
de traduction de façon à ce que des traducteurs professionnels soient
disponibles pour assurer des services d’interprétariat lorsque des
travailleurs migrants cherchent à déposer une plainte.239

Femme cuisinant du riz dans le village de Melsanakuppam, dans le Tamil Nadu, au sud de l’Inde. Photo ONU/P. Sudhakaran.

237 Ibid., p. 30-31.


238 National Human Rights Institutions: Recommendations for Effective Protection and Promotion of Human Rights.
239 APF, Promoting and Protecting the Rights of Migrant Workers: The Role of National Human Rights Institutions (2012), p. 89.

Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes | 93

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

3. MENER LES ENQUÊTES


Un certain nombre d’étapes pratiques peuvent être franchies pour favoriser la mise en œuvre d’une
enquête efficace sur les allégations de violations de droits de l’homme dont peuvent être victimes des
personnes ou des peuples autochtones.240
Lorsqu’une plainte est déposée, il est important de recueillir toutes les informations susceptibles d’étayer
l’allégation. Cependant, la collecte de ces informations ne doit pas être effectuée d’une façon qui viole
les protocoles culturels des peuples autochtones concernés.

3.1. ENTRETIEN
La première étape consiste à rapidement interroger le plaignant, en personne de préférence, et avec un
interprète, si nécessaire. L’étape suivante consiste à vérifier les informations recueillies dans le cadre de
l’entretien. Il est important d’examiner si :
• Le témoignage est conforme aux autres sources indépendantes (par exemple, les organisations
de peuples autochtones ou les ONG concernées)
• Le témoignage correspond à des politiques et schémas de comportement connus qui ont un
impact sur les peuples autochtones
241
• D’autres témoignages et éléments probants corroborent la déclaration du plaignant
• Le témoignage est compris par l’agent de l’INDH en dépit des barrières linguistiques et culturelles.

Dans la mesure du possible, la Commission nigériane des droits de l’homme


fournit des interprètes qui interviennent pendant le processus de plainte
impliquant des peuples autochtones.241

3.2. CONSERVER LES DOCUMENTS


Enregistrer les informations susceptibles d’être utilisées est une étape nécessaire de l’enquête. Toutes
les informations recueillies en rapport avec une allégation de violation de droits de l’homme dont a
été victime une personne ou un peuple autochtone doivent être enregistrées de façon appropriée,
notamment :
• Les témoignages
• Les déclarations ou les plaintes
• Les documents pertinents
• Les photographies
• Les affidavits
• Les informations et les réponses fournies par les autorités
• Les autres informations pertinentes (par exemple, les informations fournies par les organisations
de peuples autochtones).

240 Les informations présentées dans cette section proviennent essentiellement du document suivant : Prévenir la torture – Guide
pratique à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme, p. 36-42.
241 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.

94 | Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 94 22/10/2014 11:32:44


Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

En outre, les rapports pertinents sur les violations de droits de l’homme auxquelles ont été confrontés
des peuples autochtones doivent être conservés, notamment :
• Les données sur le nombre de plaintes reçues et résolues en rapport avec des peuples autochtones
• Les décisions prises dans le cadre d’affaires judiciaires pertinentes (c’est-à-dire dans le même
pays, dans d’autres juridictions et par des organismes intergouvernementaux)
• Les rapports préparés par des ONG et des organisations de peuples autochtones
• Les rapports d’organismes régionaux et internationaux (c’est-à-dire du Rapporteur spécial sur les droits
des peuples autochtones, de l’Instance permanente ou du Mécanisme d’experts) et d’autres INDH
• Les rapports établis par des médias sur des violations de droits des peuples autochtones.
Ces informations supplémentaires peuvent être utilisées pour contribuer au recoupement des allégations
et identifier les ensembles de violations de droits de l’homme.
Toutes les informations doivent être systématiquement compilées dans un format d’enregistrement
officiel permettant à d’autres agents ou services de l’INDH d’analyser et d’utiliser les données de façon
appropriée. Les données comprenant des informations confidentielles doivent être conservées dans un
lieu sûr et, dans la mesure du possible, être dépersonnalisées.
Lorsqu’elles enregistrent et stockent ces informations, les INDH doivent être conscientes du fait que
les peuples autochtones ont souffert pendant des décennies du détournement de leur identité, de leur
culture et de leurs pouvoirs décisionnels. Ce détournement a souvent pris la forme d’archives d’État.
La propriété et le contrôle de ces documents sont entre les mains de leur créateur, à savoir l’État.
Cependant, ces archives peuvent contenir des images de formes importantes d’expression culturelle et
de savoirs autochtones (par exemple de danses ou de cérémonies).242
Cet héritage a deux impacts principaux sur la capacité des INDH à créer un compte rendu efficace de
l’enquête menée sur une plainte déposée par une personne ou un peuple autochtone. Premièrement,
il peut y avoir une hésitation à fournir des informations que l’INDH va enregistrer. Deuxièmement, il
peut s’avérer nécessaire d’élaborer – en commun avec les peuples autochtones – un protocole
permettant d’enregistrer et d’archiver les documents relatifs aux peuples autochtones. Les principes de
la Déclaration peuvent servir de base à l’élaboration de ce protocole, notamment :
• L’autodétermination
• La participation au processus décisionnel
• Le consentement préalable, libre et éclairé
• Les droits à la culture.243
Si un protocole est élaboré puis promu auprès des communautés autochtones, il est probable qu’il contribuera
à faire reculer les hésitations des plaignants à fournir des informations que les INDH enregistreront.

4. RECOMMANDATIONS ET VOIES DE RECOURS


OU MÉCANISMES DE RÉPARATION
Selon le mandat dont elle est investie, l’INDH peut être habilitée à présenter des « constatations » ou
des recommandations au terme de l’enquête qu’elle a menée sur la plainte pour violation de droits
de l’homme. Dans certaines situations, les INDH peuvent demander à ce qu’une indemnisation soit
versée aux victimes. Certaines INDH ont utilisé cet aspect de leur mandat après avoir enquêté sur des
plaintes relatives à des droits économiques, sociaux et culturels, y compris pour des affaires concernant
spécifiquement des peuples autochtones.
242 L. Iacovino, “Rethinking archival, ethical and legal frameworks for records of Indigenous Australian communities: a participant
relationship model of rights and responsibilities” in Archival Science, Vol. 10 (4) (30 juin 2010).
243 M. Gooda, “The practical power of human rights: how international human rights standards can inform archival and record
keeping practices” in Archival Science, Vol. 12 (2) (1er juin 2012), p. 141.

Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes | 95

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 95 22/10/2014 11:32:44


La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

La Commission indienne des droits de l’homme a pour mandat d’enquêter


sur les plaintes relatives à des violations de droits de l’homme, soit en
réponse à des plaintes, soit de sa propre initiative (c’est-à-dire suo moto).
Elle est également habilitée à enjoindre la police et d’autres autorités
chargées de l’application des lois de lui fournir des cassettes vidéo post-
mortem et des rapports d’autopsie établis par des médecins de l’État sur
des décès en situation de garde à vue ou d’autres violations de droits
perpétrées en situation de garde à vue.
Le mandat de la Commission en matière d’investigation ne se limite pas
aux violations des droits civils et politiques ; la Commission peut également
utiliser ses pouvoirs pour enquêter sur les violations de droits économiques,
sociaux et culturels.
Lorsqu’elle établit que les autorités gouvernementales concernées ont violé
les droits des victimes, la Commission utilise régulièrement ses pouvoirs
pour recommander le versement d’une indemnisation financière aux
victimes de violations de droits de l’homme.
Dans un cas de ce type, la Commission a recommandé le versement d’une
indemnisation financière à 125 familles tribales de l’État de l’Orissa dont
les enfants avaient trouvé la mort des suites des effets de la malnutrition
causée par le déni du droit à l’alimentation opposé par l’État à la population
affectée. Les rapports indiquent que désormais pratiquement toutes
les autorités des États respectent à la lettre les recommandations de la
Commission concernant le versement d’une indemnisation financière aux
victimes de violations.244

244

POINTS CLÉS : CHAPITRE 9


• Selon leur mandat, les INDH peuvent examiner les plaintes individuelles
et collectives relatives à des violations de droits de l’homme et
recommander des voies de recours et des mécanismes de réparation aux
autorités compétentes.
• Certaines INDH disposent de mandats leur permettant de transmettre
les plaintes relatives à des violations de droits de l’homme aux autorités
compétentes, notamment aux organismes gouvernementaux, au
parlement, aux autorités judiciaires et aux ministères publics, et de
recommander les voies de recours et les mécanismes de réparation au
nom des plaignants.

244 Ce cas a été évoqué dans un document préparé par Mario Gomez sur les Commissions nationales des droits de l’homme et
les droits économiques, sociaux et culturels pour Circle of Rights, Economic, Social and Cultural Rights Activism: A Training
Resource, disponible à l’adresse suivante : www1.umn.edu/humanrts/edumat/IHRIP/circle/modules/module23.htm#_edn13.

96 | Chapitre 9 : Enquêtes et plaintes

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 96 22/10/2014 11:32:44


Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Chapitre 10 :
Enquêtes publiques
QUESTIONS CLÉS :
• Quels sont les avantages et les inconvénients, pour les INDH, de
mener des enquêtes publiques sur les droits de l’homme des peuples
autochtones ?
• Quelles sont les étapes qui doivent être franchies pour préparer et mener
une enquête publique ?

PRINCIPES FONDATEURS DE L’IMPLICATION D’UNE INDH


Principes de Paris
Compétences et attributions
3. Une institution nationale a, notamment, les attributions suivantes :
a) Fournir à titre consultatif au gouvernement, au parlement et à tout
autre organe compétent, soit à la demande des autorités concernées,
soit en usant de sa faculté d’autosaisine, des avis, recommandations, propositions et
rapports concernant toutes questions relatives à la protection et à la promotion des
droits de l’homme. L’institution nationale peut décider de les rendre publics. Ces avis,
recommandations, propositions et rapports ainsi que toute prérogative de l’institution
nationale se rapportent aux domaines suivants

Mener une enquête publique – également dénommée enquête nationale – sur des violations systémiques
ou extrêmement graves de droits de l’homme peut s’avérer une stratégie efficace pour les INDH.
Une enquête publique permet aux INDH d’enquêter au-delà d’une plainte individuelle et d’identifier
des questions structurelles ou des causes sous-jacentes en rapport avec des violations de droits de
l’homme. Des données efficacement recueillies dans le cadre de plaintes individuelles peuvent fournir
les preuves nécessaires pour justifier une enquête publique.
Si des INDH ne parviennent pas à faire état de violations graves ou systémiques de droits de l’homme,
cela peut porter atteinte à leur crédibilité. Pour les peuples autochtones, cela peut donner lieu à une
certaine méfiance et se traduire par un désengagement vis-à-vis de l’INDH.
Une enquête publique est particulièrement importante lorsqu’il devient évident qu’une INDH ne peut pas
résoudre un problème de droits de l’homme par l’intermédiaire de son programme de suivi ou de ses
mécanismes de plainte habituels.
Les enquêtes publiques sont également utiles car elles attirent souvent l’attention des médias, ce
qui favorise la sensibilisation et le soutien du public et peut déboucher sur une réforme législative ou
politique.
Pour en savoir plus sur la préparation et la tenue d’une enquête publique, on se référera au Manual on
Conducting a National Inquiry into Systemic Patterns of Human Rights Violation [Manuel sur la tenue
d’enquêtes publiques sur les ensembles systémiques de violations de droits de l’homme] publié par
l’APF et l’Institut Raoul Wallenberg des droits de l’homme et du droit humanitaire.245
245 Le Manuel a été publié en 2012 et est disponible en anglais à l’adresse suivante : www.asiapacificforum.net/support/resources.

Chapitre 10 : Enquêtes publiques | 97

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

246 247 248

En 1995, le gouvernement australien a demandé à la Commission


australienne des droits de l’homme246 de mener une enquête nationale sur
la séparation d’enfants autochtones et insulaires du détroit de Torres de
leurs familles. En 1997, l’enquête a publié un rapport intitulé Bringing them
home247 [Les faire rentrer à la maison].
L’enquête a permis d’organiser des auditions et des consultations dans
toutes les régions du pays. Elle a donné lieu à l’examen d’un grand nombre
de plaintes et à l’analyse des lois et politiques antérieures qui ont conduit au
retrait forcé d’enfants autochtones et insulaires du détroit de Torres de leurs
familles.
Le rapport Bringing them home a considérablement amélioré la
sensibilisation du grand public australien aux retraits forcés et à leurs effets
persistants sur les peuples autochtones et insulaires du détroit de Torres.
Ensuite, une série de matériels pédagogiques a été élaborée à l’intention
des écoles et du grand public.248
Le rapport de la Commission a émis un certain nombre de
recommandations à l’intention du gouvernement australien, demandant
notamment aux parlements australiens de présenter des excuses publiques.
En 2007, le gouvernement australien a présenté des excuses officielles.

1. AVANTAGES DE L’ENQUÊTE PUBLIQUE


L’enquête publique est un processus complet qui permet aux INDH d’accomplir plusieurs fonctions en
même temps.

1.1. GÉRER UN GRAND NOMBRE DE PLAINTES


Une enquête publique sur les droits de l’homme de peuples autochtones, ou sur un aspect thématique
des droits des peuples autochtones (par exemple, leurs droits aux terres, territoires et ressources)
permet à l’INDH de traiter un grand nombre de plaintes individuelles d’une manière économique. Par
ailleurs, la nature proactive de l’enquête publique peut inciter des personnes qui n’auraient peut-être
jamais contacté l’INDH à déposer des plaintes ou à communiquer des informations. De nouveau,
ceci est particulièrement important pour les peuples autochtones qui vivent souvent dans des zones
géographiquement isolées, qui peuvent être tenus à l’écart des stratégies en matière d’information du
public et qui peuvent nourrir une certaine méfiance à l’égard des organismes publics.

1.2. ENQUÊTER SUR LES CAUSES SYSTÉMIQUES DES VIOLATIONS DES DROITS DE
L’HOMME
Les violations des droits de l’homme auxquelles sont confrontés les peuples autochtones sont
fréquemment causées par des problèmes sous-jacents et systémiques, telle que l’exclusion du
processus décisionnel. Une enquête publique peut devenir un moyen efficace d’examiner les causes
sous-jacentes des désavantages et des violations des droits de l’homme dont souffrent les autochtones.

246 Information fournie par la Commission australienne des droits de l’homme.


247 Le rapport est disponible en anglais à l’adresse suivante : www.humanrights.gov.au/social_justice/bth_report/index.html.
248 Pour en savoir plus, veuillez consulter le site de la Commission à l’adresse suivante  : www.humanrights.gov.au/education/
bringing_them_home/index.html.

98 | Chapitre 10 : Enquêtes publiques

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 98 22/10/2014 11:32:45


Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

1.3. ANALYSER LES LOIS ET LES POLITIQUES NATIONALES


Les enquêtes publiques donnent l’occasion aux INDH d’analyser les lois et les politiques existantes et
de vérifier si elles sont conformes à la Déclaration.

1.4. INFORMER ET SENSIBILISER


Une enquête publique est un outil pédagogique puissant qui permet de sensibiliser le grand public
et les peuples autochtones aux questions relatives aux droits de l’homme des peuples autochtones.
Les enquêtes publiques ont tendance à attirer l’attention des médias et produisent des ressources qui
peuvent être utilisées pour élaborer de nouveaux programmes éducatifs. Par conséquent, une enquête
publique est un facteur important de l’amélioration de la compréhension – au sein des pays – des défis
auxquels sont confrontés les peuples autochtones.

1.5. ÉLABORER DES RECOURS EFFICACES


Se fondant sur les preuves, l’analyse et la recherche, les recommandations d’une enquête publique
doivent être crédibles et présenter des étapes claires et pratiques visant à élaborer des stratégies
appropriées qui essaient de résoudre les problèmes systémiques de droits de l’homme auxquels sont
confrontés les peuples autochtones.

2. INCONVÉNIENTS DE L’ENQUÊTE PUBLIQUE


Bien que l’enquête publique s’avère souvent un mécanisme très efficace, elle présente une série de
défis que les INDH doivent examiner avec la plus grande attention avant de prendre leur décision.

2.1. RESSOURCES
Une enquête publique efficace exige de réaliser un investissement significatif en termes de temps,
d’expertise et de ressources humaines et financières que l’on devra lui consacrer. Les ressources
nécessaires dépendront de la portée de l’enquête (par exemple, sera-t-elle focalisée sur les droits de
l’homme des peuples autochtones en général ou sur aspect thématique précis  ?) Des membres de
la Commission ainsi que des agents de l’INDH spécialistes des politiques, des médias et questions
administratives devront être habilités à exercer les activités relevant de l’enquête. Lorsque l’INDH ne
disposera pas de l’expertise nécessaire, elle devra faire appel à des consultants externes.

2.2. COOPÉRATION DES TÉMOINS ET ACCÈS AUX INFORMATIONS NÉCESSAIRES


Comme indiqué au Chapitre 6, il n’est pas exclu que les peuples autochtones hésitent à participer à
l’enquête car l’INDH peut être perçue comme un organe de l’État. Certaines questions de droits de
l’homme examinées dans le cadre de l’enquête sont sensibles et les témoins autochtones peuvent
hésiter à en parler publiquement. Par ailleurs, la peur des représailles peut faire craindre aux personnes
concernées de partager des informations ou de fournir des preuves. La langue peut également constituer
un obstacle à l’accès aux informations nécessaires pour mener l’enquête.
Dans certains cas, des organes et des représentants de l’État peuvent chercher à empêcher l’accès à
des informations et à des preuves pertinentes dont l’INDH a besoin pour mener une enquête exhaustive.

2.3. UNE ACTIVITÉ PONCTUELLE PLUTÔT QU’UN PROCESSUS


L’enquête publique place les droits de l’homme des peuples autochtones sous les feux des projecteurs
pendant une période déterminée. Cependant, la nature profonde et systémique de nombre des questions
relatives aux droits de l’homme auxquelles sont confrontés les peuples autochtones exige une stratégie
à long terme et un processus de suivi continu, seuls en mesure de garantir un changement durable.

Chapitre 10 : Enquêtes publiques | 99

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

3. ÉTAPES À FRANCHIR POUR MENER UNE


ENQUÊTE PUBLIQUE
3.1. DÉFINIR LE MANDAT
La première étape de l’enquête publique consiste à définir l’objectif, la portée et le calendrier de l’enquête.
Dans la mesure du possible, il est important d’impliquer les peuples autochtones dans cette phase de
planification. La meilleure façon de procéder consiste probablement à travailler avec les organisations
des peuples autochtones et leurs organisations professionnelles.
Bien que cela exige d’entrer dans les détails du processus, parvenir à une définition précise du mandat
de l’enquête qui emporte l’adhésion des peuples autochtones est l’étape essentielle d’une enquête
légitime, ciblée et efficace. 249

Depuis sa création, la Commission malaisienne des droits de l’homme


(SUHAKAM) a reçu un certain nombre de plaintes alléguant des violations
des droits des peuples autochtones. En réponse à ces plaintes, la SUHAKAM
a mené plusieurs enquêtes, études et recherches qui ont conduit l’institution
à déceler des indications d’un ensemble systémique de préoccupations
relatives aux droits fonciers coutumiers des peuples autochtones. En
2010, la SUHAKAM a décidé de mener une enquête nationale sur les droits
fonciers des peuples autochtones de Malaisie.
Avant de mener l’enquête nationale, la SUHAKAM a bénéficié des conseils techniques et d’une
formation fournis par l’APF et et l’Institut Raoul Wallenberg des droits de l’homme et du droit
humanitaire.
Pendant la première phase du processus de l’enquête, la SUHAKAM a élaboré un document
qui présentait les informations contextuelles relatives aux peuples autochtones de Malaisie
ainsi que la base juridique sur laquelle s’appuyait la SUHAKAM pour mener l’enquête
nationale.249 Le document présentait également le mandat de l’enquête nationale :
i) Déterminer la reconnaissance constitutionnelle, juridique, administrative et politique
du droit sur les terres des peuples autochtones et la capacité de ces dispositions à
protéger et à promouvoir le droit sur les terres des peuples autochtones.
ii) Enquêter sur la situation des peuples autochtones en matière de droits fonciers et sur
l’impact de la reconnaissance ou de la non reconnaissance du droit sur les terres des
peuples autochtones sur leurs droits sociaux, économiques, culturels et politiques, en
tenant compte du droit international et des législations nationales pertinentes.
iii) Identifier les contraintes qui empêchent les peuples autochtones de jouir pleinement de
leur droit sur les terres conformément à leurs besoins et à leurs exigences.
iv) Créer et promouvoir une prise de conscience, des connaissances et une compréhension
accrues du droit sur les terres des peuples autochtones et de leur mode de vie.
v) Élaborer – sur la base des faits et des conclusions tirées de l’enquête nationale – des
recommandations à l’intention du gouvernement fédéral et des gouvernements des
États concernant, notamment, les points suivants :
a) l’examen de la législation nationale relative au droit foncier ainsi que des lois et
politiques connexes dans le but d’y incorporer des éléments visant à favoriser le respect
des droits de l’homme et, en particulier, de résoudre les problèmes auxquels sont
confrontés les peuples autochtones dans le cadre de leurs revendications territoriales ; et

249 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.suhakam.org.my/web/682315/1.

100 | Chapitre 10 : Enquêtes publiques

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 100 22/10/2014 11:32:45


Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

250

b) l’élaboration de stratégies et d’un plan d’action ayant pour objet de protéger et de


promouvoir le droit sur les terres des peuples autochtones en tant que partie intégrante
et indivisible de la protection et de la promotion de leurs autres droits de l’homme.
La SUHAKAM a organisé un certain nombre de consultations publiques, de visites
d’information et de séances de discussion dans le cadre du processus de l’enquête nationale,
qui a commencé en décembre 2010 et qui s’est poursuivie jusqu’en 2012. La SUHAKAM
a également mis en place un processus qui lui a permis de recevoir les documents écrits
soumis par les membres du public et les parties prenantes concernées. Par ailleurs, la
SUHAKAM a recruté des chercheurs qui ont soutenu le processus de l’enquête en menant des
études ciblées sur des sujets spécifiques, tels que les cas de conflits fonciers ou l’adéquation
des lois et politiques locales ayant un impact sur les terres des autochtones aux normes
internationales relatives aux droits de l’homme. Dans son communiqué de presse annonçant
le début de l’enquête nationale, la SUHAKAM a déclaré avoir l’intention de mener une « étude
de cartographie SIG » des frontières et territoires revendiqués par les autochtones.250
L’un des éléments essentiels du processus de l’enquête nationale a été la collecte des preuves
rendue possible grâce aux audiences publiques. La SUHAKAM a utilisé ses pouvoirs quasi-
judiciaires pour tenir des audiences publiques dans plusieurs lieux de Malaisie, et recueillir
les témoignages de témoins essentiels qui avaient été invités ou assignés à participer aux
audiences. Les audiences ont été dirigées par une commission d’enquête présidée par le
Président de la SUHAKAM, M. Tan Sri Hasmy Agam. Les audiences se sont déroulées dans
des lieux ouverts au public auxquels ont pu accéder les médias et les membres du public.

3.2. LANCER L’ENQUÊTE


Afin d’optimiser l’attention et la participation du public, il est nécessaire que l’enquête publique bénéficie
d’un lancement officiel. Des informations précises sur le mandat, les buts, les objectifs et la réalisation
de l’enquête doivent être fournies aux parties prenantes concernées.

Un autochtone s’exprime lors d’une audience publique organisée dans le cadre de l’Enquête nationale sur les droits aux terres des peuples autochtones
de Malaisie. Photo : Commission malaisienne des droits de l’homme.

250 Commission malaisienne des droits de l’homme, “SUHAKAM to conduct a national inquiry into the land rights of indigenous
peoples in Malaysia”, disponible à l’adresse suivante : www.suhakam.org.my/web/682315/13.

Chapitre 10 : Enquêtes publiques | 101

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 101 22/10/2014 11:32:45


La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Femmes Yaku, Lapikia, Kenya. Photo : ONU/HCDH/Samia Slimane.

Le lancement public doit communiquer les informations aux peuples autochtones dans un format
culturellement approprié et accessible et dans une langue aisément compréhensible, notamment par
les personnes et les communautés concernées par l’enquête.

3.3. RECHERCHE ET ANALYSE


Toutes les lois et réglementations nationales pertinentes doivent être compilées, de même que les
normes régionales et internationales relatives aux droits de l’homme et la jurisprudence y afférente.
Cette recherche permettra d’analyser si l’État remplit ses obligations au titre des normes internationales.

3.4. PLAINTES INDIVIDUELLES


Toutes les plaintes pertinentes reçues dans le cadre du processus de l’enquête doivent être analysées
afin d’y déceler les facteurs systémiques qui contribuent au déni des droits de l’homme des peuples
autochtones ou qui les perpétuent.

3.5. AUDIENCES PUBLIQUES


Dans la mesure où les ressources financières le permettent, l’enquête publique doit aller à la rencontre
des peuples autochtones au sein de leurs communautés plutôt que de leur imposer de venir participer
à l’enquête. À cet égard, il sera peut-être nécessaire d’organiser les audiences publiques à l’extérieur
des grands centres urbains.
Il sera également important de nouer le dialogue avec des agents publics, des organisations de peuples
autochtones, les ONG concernées, des défenseurs des droits de l’homme et des universitaires.

102 | Chapitre 10 : Enquêtes publiques

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 102 22/10/2014 11:32:47


Partie II Activités et fonctions nationales des institutions nationales des droits de l’homme

Pour renforcer la participation du public à l’enquête, il conviendra d’explorer des méthodes innovantes
de réception des informations et des déclarations écrites. L’enquête pourra notamment recourir aux
médias sociaux, courriels et autres entretiens vidéo.

3.6. ENTRETIENS AVEC LES PEUPLES AUTOCHTONES


Pour que l’enquête s’inscrive dans une approche fondée sur les droits de l’homme, il est important que
les points de vue des autochtones transparaissent du rapport. Par conséquent, les entretiens avec les
peuples autochtones constituent l’un des éléments centraux de l’enquête publique.
Les organisations de peuples autochtones joueront un rôle essentiel dans l’organisation de ces
entretiens, qui devront être réalisés dans le respect des différences culturelles.

3.7. PRÉPARATION DU RAPPORT ET DES RECOMMANDATIONS


Préparer le rapport final est une étape importante de l’enquête publique. Il est fondamental de réfléchir
à la structure du rapport pendant les premières phases de l’enquête car elle peut avoir une incidence
sur la nature de l’enquête.
Un rapport efficace et de qualité devra tenir compte des éléments suivants :
• Style et langue : Le rapport doit être écrit pour un public cible (dans la plupart des cas des
responsables de l’élaboration des politiques et des agents publics). Il doit cependant être accessible
à un large public, notamment aux peuples autochtones. Il conviendra d’utiliser un langage simple.
Les INDH doivent également envisager de produire une version « communautaire » du rapport,
rédigée dans la langue locale, plus succincte et facile à comprendre. Les recommandations
doivent être rédigées de façon à être aisément répercutées, mises en œuvre et facilement
traduites dans les lois et les politiques.
• Contenu : Le rapport doit répondre aux questions soulignées dans le mandat. Il doit comprendre
les détails relatifs au déroulement des faits ainsi que l’analyse ultérieure, fondée sur les droits de
l’homme. Les constatations et les conclusions doivent être étayées par des preuves.
• Format et publication : Le format d’un rapport aura une influence sur son impact et sa capacité
à générer de la publicité. Les INDH doivent envisager d’utiliser le contenu du rapport pour créer
des ressources connexes, notamment des matériels pédagogiques. Pour optimiser l’attention, le
rapport doit être diffusé auprès d’un public le plus large possible.

3.8. SUIVI
Les INDH doivent établir un dialogue avec les autorités compétentes afin de discuter des étapes de la
mise en œuvre des recommandations du rapport. Ces étapes devront faire l’objet d’un suivi.
Les INDH doivent également assurer un suivi auprès des peuples autochtones et des communautés
qui ont participé à l’enquête publique et leur transmettre un rapport sur la mise en œuvre des
recommandations.

Chapitre 10 : Enquêtes publiques | 103

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

251 252

En 2004, suite à de nombreuses plaintes relatives à des violations des


droits de l’homme au sein de la communauté (autochtone) khomani san, la
Commission sud-africaine des droits de l’homme a lancé une enquête.
L’enquête s’est déroulée en trois phases clés :
La phase initiale a consisté en une étude menée par le personnel de
la Commission, ainsi que par des chercheurs externes lorsque des
compétences spécifiques se sont avérées nécessaires. L’étude s’est fondée
sur une approche holistique et a utilisé différentes sources et disciplines.
La seconde phase a consisté en consultations menées par le personnel de
la Commission auprès de la communauté khomani san. Veiller au respect
des différences culturelles et à gagner la confiance de la communauté ont
été les priorités de cette phase.
La troisième phase a consisté en trois journées consacrées aux
audiences publiques des représentants de la communauté khomani san.
Les audiences ont eu lieu au sein de la communauté afin de faciliter
la participation des intervenants. Des personnes, des organisations
communautaires, des ONG ainsi que d’autres parties prenantes et des
organismes publics ont participé aux audiences publiques.251
L’un des résultats importants de l’enquête a été que les membres de la
Commission lui ont indiqué qu’elle avait constitué :
[…] la première occasion réelle qu’ils ont eue de s’exprimer sur des
questions qui les affectent, qui menacent leur survie, leur culture, leur
langue, leur prospérité économique et leur avenir en temps que peuple.252
L’enquête a cherché à identifier les causes systémiques et sous-jacentes
des violations des droits de l’homme
Le rapport relatif à l’enquête a émis un certain nombre de
recommandations qui s’adressent à différentes parties prenantes et
niveaux de gouvernements. Depuis l’enquête, les recommandations
sont devenues la pierre angulaire des travaux de la Commission visant
à promouvoir les droits des peuples autochtones en Afrique du Sud. La
Commission joue à présent un rôle important en matière de contrôle,
notamment en vérifiant si les recommandations sont suivies d’effet et
en demandant des informations et des rapports actualisés aux différents
services gouvernementaux.

POINTS CLÉS : CHAPITRE 10


• Mener une enquête publique sur les droits de l’homme des peuples
autochtones permet aux INDH d’accomplir plusieurs fonctions
simultanément. L’enquête peut avoir des effets positifs en termes de
réforme des lois et des politiques. Néanmoins, les enquêtes posent
également un certain nombre de problèmes qui doivent être pris en
considération avant d’enclencher le mécanisme.
• Mener une enquête publique sur les droits de l’homme des peuples
autochtones exige de franchir un certain nombre d’étapes, notamment la
définition du mandat de l’enquête, une étude et une analyse, la collecte
des plaintes, l’organisation d’audiences publiques, des entretiens avec
des représentants des peuples autochtones, la préparation d’un rapport et
le suivi des recommandations.

251 Commission sud-africaine des droits de l’homme, Report on the Inquiry into Human Rights Violations in the Khomani San
Community (2004), p. 9-10, disponible à l’adresse suivante  : www.sahrc.org.za/home/21/files/Reports/KHOMANI_SAN_
ENGLISH_FINAL.pdf.
252 Ibid., p. 4.

104 | Chapitre 10 : Enquêtes publiques

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Partie III
L’action des institutions nationales des
droits de l’homme au plan international

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme


Chapitre 12 : Organes conventionnels
Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones

105

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Introduction à la Partie III


L’un des rôles essentiels des INDH consiste à servir de passerelle entre le système international des
droits de l’homme et la réalité nationale au sein de leur État. Une partie indispensable de cette activité
a pour objet de contrôler la mise en œuvre, par leur État, de ses obligations internationales en matière
de droits de l’homme. Ainsi, les efforts déployés au plan international renforcent les activités nationales
des INDH.
Les INDH sont particulièrement bien placées pour fournir aux mécanismes et organes internationaux
les preuves et l’analyse objectives et fiables de la situation des peuples autochtones au sein de leur
juridiction.
Elles sont également bien placées pour informer le grand public sur les constatations et les
recommandations de ces organes internationaux et pour promouvoir la mise en œuvre de leurs
recommandations au plan national.
Le Chapitre 11 s’intéresse au Conseil des droits de l’homme et à ses mécanismes, notamment à
l’examen périodique universel et aux procédures spéciales. Le Chapitre 12 est consacré aux organes
conventionnels relatifs aux droits de l’homme et le Chapitre 13 se penche sur trois mécanismes
des Nations Unies qui tavaillent exclusivement dans le domaine des droits de l’homme des peuples
autochtones.

106

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Chapitre 11 :
Le Conseil des droits de l’homme
QUESTIONS CLÉS
• Comment les INDH peuvent-elles utiliser les mécanismes du Conseil
des droits de l’homme pour faire progresser les droits des peuples
autochtones ?
• Est-il possible d’établir des liens entre les mécanismes internationaux des
droits de l’homme et les activités nationales des INDH afin de protéger et
de promouvoir les droits des peuples autochtones ?

PRINCIPES FONDATEURS DE L’IMPLICATION DES INDH


Principes
Compétences et attributions
3. Une institution nationale a, notamment, les attributions suivantes :
d) Contribuer aux rapports que les Etats doivent présenter aux organes
et comités des Nations Unies, ainsi qu’aux institutions régionales, en
application de leurs obligations conventionnelles, et le cas échéant, émettre un avis à
ce sujet, dans le respect de leur indépendance ;
e) Coopérer avec l’Organisation des Nations Unies et toute autre institution de la famille
des Nations Unies, les institutions régionales et les institutions nationales d’autres
pays, compétentes dans les domaines de la protection et de la promotion des droits de
l’homme.

Résolution 60/251 de l’Assemblée générale : Conseil des droits de l’homme


5. Décide que le Conseil aura pour vocation, notamment :
h) D’œuvrer en étroite coopération avec les gouvernements, les organisations régionales,
les organismes nationaux de défense des droits de l’homme et la société civile dans le
domaine des droits de l’homme ;
11. Décide que le Conseil appliquera les dispositions du Règlement intérieur relatives aux
grandes commissions de l’Assemblée générale à moins que, par la suite, cette dernière ou
le Conseil lui-même en décide autrement ; et décide aussi que des observateurs, y compris
les États qui ne sont pas membres du Conseil, les institutions spécialisées, les autres
organisations intergouvernementales, les institutions nationales de défense des droits
de l’homme et les organisations non gouvernementales, pourront participer aux travaux
du Conseil et être consultés par ce dernier selon les modalités, notamment la résolution
1996/31 du Conseil économique et social, en date du 25 juillet 1996, et les pratiques
observées par la Commission des droits de l’homme, de sorte qu’ils puissent y apporter la
meilleure contribution possible.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 107

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l’homme est un organe permanent des Nations Unies qui a pour objectif de
renforcer la promotion et la protection des droits de l’homme à travers le monde. Il a été créé en 2006
par adoption de la résolution 60/251 de l’Assemblée générale afin de remplacer la Commission des
droits de l’homme. Il a pour mandat d’exercer ses activités en se fondant sur les principes d’égalité,
d’universalité, d’objectivité et de non-sélectivité.
Le Conseil des droits de l’homme est établi à Genève. Il est composé de 47 États membres élus par
l’Assemblée générale par un vote secret. La situation des droits de l’homme des États candidats, tout
comme les engagements qu’ils ont pris volontairement en la matière, doivent être pris en considération
pour élire les États membres.
L’ancienne Commission des droits de l’homme était un organe subsidiaire du Conseil économique et
social, tandis que le Conseil des droits de l’homme est un organe subsidiaire de l’Assemblée générale.
Une nouvelle dimension a ainsi été conférée au Conseil des droits de l’homme au sein du système des
Nations Unies.
Les INDH qui ont été dotées d’une accréditation de « statut A » conformément aux Principes de Paris
se sont vu reconnaître les droits de participation suivants au Conseil des droits de l’homme :
• Un statut d’accréditation distinct (différent de celui des États et des ONG)
• Le droit de s’exprimer sur l’ensemble des points de l’ordre du jour
• Le droit de s’exprimer immédiatement après l’État lors du dialogue interactif
• Le droit de faire des déclarations écrites qui seront incluses dans les comptes rendus officiels
des réunions
• La possibilité d’utiliser la vidéo-conférence pour participer au dialogue interactif
• L’attribution de places spéciales.
Le Conseil des droits de l’homme prévoit un certain nombre de mécanismes auxquels les INDH peuvent
recourir, notamment :
• L’examen périodique universel
• Les procédures spéciales, y compris le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones
(voir Chapitre 13)

Ouverture de la 21e session du Conseil des droits de l’homme. Photo : ONU/Jean-Marc Ferré.

108 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

• La procédure de plainte
• Le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones (voir Chapitre 13)
• Le Forum social.

1. EXAMEN PÉRIODIQUE UNIVERSEL


L’examen périodique universel est un mécanisme qui permet au Conseil des droits de l’homme
d’examiner tous les quatre ans et demi les bilans en matière de droits de la personne de l’ensemble des
États membres de l’Organisation des Nations Unies. Il a été créé par adoption de la résolution 60/251
de l’Assemblée générale et les principes, processus et modalités qui encadrent son fonctionnement
ont été créés par la résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme, le 18 juin 2007. La résolution 5/1
prévoit également la participation active des INDH au processus de l’EPU.253
L’examen donne l’occasion à l’ensemble des États de présenter les étapes qu’ils ont franchies pour
améliorer la situation en matière de droits de l’homme dans leurs pays et pour surmonter les obstacles
à la jouissance des droits de l’homme.
Entre fin 2007 et 2011, le Conseil des droits de l’homme a examiné les résultats en matière de droits
de l’homme de l’ensemble des 192 États membres. En 2010 et 2011, vers la fin du premier cycle
d’examens, le Conseil des droits de l’homme a vérifié les modes et modalités du processus de l’EPU,
et après avoir apporté d’infimes modifications, a décidé de commencer le second cycle en juin 2012.254
Le second cycle de l’EPU, qui concernera 193 États membres255, durera quatre ans et demi et s’achèvera
fin 2016. Les cycles suivants seront également d’une durée de quatre ans et demi.

1.1. PRINCIPES
• Universalité  : L’ensemble des 193 États membres de l’Organisation des Nations Unies sont
examinés et toutes les questions relatives aux droits de l’homme sont examinées.
• Périodique  : Les examens sont effectués régulièrement et ne sont pas des événements non
récurrents.
• Égal : Le processus de l’examen suit un cadre convenu d’un commun accord et qui garantit le
traitement égal de l’ensemble des États.
• Coopératif  : L’examen repose sur des informations fiables et objectives et sur un dialogue
interactif. L’implication totale de l’État faisant l’objet de l’examen est essentielle.
• Examen par les pairs : L’EPU est un processus d’examen des États intergouvernemental et
effectué par les pairs.
• Axé sur l’action : Les recommandations émises par les États ont pour objectif de promouvoir
des actions positives.

1.2. PÉRIODICITÉ256
• Le premier cycle de l’EPU a duré quatre ans ; le second cycle et les cycles suivants dureront
quatre ans et demi.
• Trois sessions de l’EPU sont organisées chaque année  ; chacune des sessions dure deux
semaines.
• 14 États sont examinés à chacune des sessions ; 42 États sont examinés chaque année.

253 Résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme, par. 3 (m).


254 Résolution 16/21 du Conseil des droits de l’homme, telle que complétée par la résolution 17/119 du Conseil des droits de
l’homme.
255 Le 14 juillet 2011, l’Assemblée Générale a admis le Sud-Soudan en tant que 193e membre de l’Organisation des Nations Unies.
256 Résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme et résolution 16/21 du Conseil des droits de l’homme.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 109

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

1.3. OBJECTIFS ET PROCÉDURES


Les objectifs de l’EPU sont les suivants :
• L’amélioration de la situation des droits de l’homme sur le terrain
• L’accomplissement des obligations et des engagements des États en matière de droits de
l’homme, ainsi que l’évaluation des évolutions positives et des défis auxquels les États sont
confrontés
• Le renforcement des capacités des États et de l’assistance technique qui leur est apportée, en
consultation avec les États concernés et avec leur consentement
• Le partage des meilleures pratiques entre les États et les autres parties prenantes
• Le soutien de la coopération en matière de promotion et de protection des droits de l’homme
• L’encouragement de la coopération et de l’implication totales du Conseil des droits de l’homme,
des autres organes de défense des droits de l’homme et du HCDH.257
Bien qu’il ne cible pas spécifiquement les peuples autochtones, l’EPU comprend généralement un
examen de leur situation en matière de droits de l’homme lorsque l’État faisant l’objet de l’examen abrite
des groupes identifiés en tant qu’autochtones au sein de ses frontières ou dans sa juridiction. Selon le
Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones :
Le système nouvellement lancé de l’Examen périodique universel, qui relève du Conseil des
droits de l’homme, est un moyen fort utile de promouvoir les droits affirmés dans la Déclaration.
Compte tenu de la complémentarité et de l’interdépendance du droit international relatif
aux droits de l’homme, ainsi que de la doctrine, établie et en gestation, d’organismes et
mécanismes internationaux touchant divers instruments relatifs aux droits de l’homme, il est
évident que les dispositions de la Déclaration devraient jouer dans l’interprétation des obligations
internationales à l’égard des droits de l’homme incombant aux États et dans l’évaluation des
succès et des problèmes qu’ils ont rencontrés à l’occasion de leur exécution. Il est à prévoir
que la Déclaration, à mesure qu’elle sera effectivement intégrée dans la pratique des États
et des organismes et mécanismes de défense des droits de l’homme, s’enracinera dans
le processus de l’Examen périodique universel, contribuant par là à définir les obligations
des États soumis à l’Examen à l’égard des droits de l’homme et à éclairer le Groupe de travail sur
l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme lorsqu’il sera appelé à formuler
des recommandations concernant les peuples autochtones.258
Dans la pratique, la Déclaration est de plus en plus souvent utilisée comme référence lors de l’examen
des résultats obtenus par un pays en matière de droits de l’homme des peupes autochtones.259

257 Résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme, par. 4.


258 A/HRC/9/9, par. 63.
259 J. Anaya, International Human Rights and Indigenous Peoples (2009), p. 106.

110 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

260

Afin de procéder au suivi du processus de l’EPU dont fait l’objet son


gouvernement, la Commission sud-africaine des droits de l’homme260
intègre dans ses travaux l’intégralité des recommandations de l’EPU. Les
recommandations émises pendant l’EPU constituent l’une des sources qui
aident la Commission à élaborer son plan stratégique et à définir ses priorités.
La Commission tisse des liens entre des domaines précis de ses travaux et
les recommandations de l’EPU à l’attention de l’Afrique du Sud. Un Comité,
un programme ou un coordinateur de sujet de la Commission se sont vu
attribuer la responsabilité de l’ensemble des 22 recommandations. Les
travaux de la Commission sont soit spécifiquement alignés sur chacune
des recommandations ou le comité ou le membre du personnel compétent
est chargé des questions de suivi liées aux recommandations que la
Commission leur a attribuées. Le plan stratégique de la Commission prévoit
que l’ensemble des recommandations et des travaux y afférents feront
l’objet d’une procédure de suivi.
Par exemple, l’Afrique du Sud a reçu des recommandations selon lesquelles
elle devait continuer de promouvoir et de faciliter le droit à l’éducation, en
particulier en faveur des enfants économiquement désavantagés, et continuer
de diffuser une culture des droits de l’homme dans ses établissements
d’enseignement. Dans son plan stratégique, la Commission continuera
d’accorder la priorité aux travaux dans ce domaine, en menant des enquêtes
et en fournissant des informations aux responsables du gouvernement en
charge de l’éducation. La Commission procédera également à une analyse
parlementaire des défis du pays en matière d’éducation et créera un comité
chargé des questions en rapport avec l’éducation.

1.4. DOCUMENTATION UTILISÉE DANS LE CADRE DU PROCESSUS DE L’EXAMEN


L’examen d’un État repose sur trois documents :
• Les informations préparées par l’État concerné, ne dépassant pas vingt pages
• Une compilation, préparée par le HCDH, des informations contenues dans les rapports et les
documents officiels des organes et agences compétents de l’Organisation des Nations Unies, ne
dépassant pas dix pages
• Un résumé, préparé par le HCDH, « [d’]autres informations crédibles et dignes de foi émanant
d’autres parties prenantes », ne dépassant pas dix pages .261
La préparation du rapport sur l’État relève de la responsabilité du gouvernement et les INDH ne doivent
pas se charger de cette tâche au nom de leur gouvernement. Cependant, le gouvernement est encouragé
à préparer le rapport sur l’État en procédant à une vaste consultation organisée au plan national avec
l’ensemble des parties prenantes concernées.262 Les INDH peuvent encourager leur gouvernement à
organiser des consultations nationales et « prendre des mesures pour s’assurer que ces consultations
rendent compte de la diversité des expériences vécues dans le pays »,263 en particulier en rapport avec
les groupes marginalisés, tels que les peuples autochtones.

260 Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme, National
Human Rights Institutions and Universal Periodic Review Follow-up, p. 1-2, disponible à l’adresse suivante : http://nhri.ohchr.org/
EN/IHRS/UPR/Pages/default.aspx.
261 Résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme, partie I.D, par. 15.
262 Résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme, partie I.D, par. 15 (a).
263 APF, UPR Good Practice Compilation (2010), par. 3, disponible à l’adresse suivante : www.asiapacificforum.net/working-with-
others/un/human-rights-council/upr.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 111

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Les INDH peuvent également encourager leur gouvernement à diffuser un projet de rapport national
pour commentaires, comprenant notamment les commentaires de l’INDH.
Par ailleurs, les INDH doivent élaborer leur propre rapport en s’appuyant sur « [d’]autres informations
crédibles et dignes de foi ». Pendant le premier cycle de l’EPU, les informations fournies par les INDH ont
généralement été intégrées dans les informations fournies par les ONG et « d’autres parties prenantes ».
Néanmoins, pendant le second cycle et les cycles suivants, le « résumé des informations fournies par
les autres parties prenantes concernées devrait contenir, selon qu’il conviendra, une section distincte
consacrée aux contributions de l’institution nationale des droits de l’homme de l’État examiné dont
l’accréditation s’est faite en pleine conformité avec les Principes de Paris ».264

1.5. EXAMEN DE L’ÉTAT


Sur la base de la documentation fournie, la situation de l’État en matière de droits de l’homme est
examinée lors d’une session de trois heures et demie du Groupe de travail sur l’examen périodique
universel du Conseil des droits de l’homme réunissant l’ensemble des 47 États membres.
L’examen prend la forme d’un « dialogue interactif » avec la délégation de l’État et n’est ouvert qu’aux
États membres et aux États observateurs du Conseil des droits de l’homme. L’examen est facilité par
un groupe de trois rapporteurs, que l’on appelle « la troïka ».
L’État peut anticiper les recommandations en présentant des engagements volontaires lors de sa
déclaration liminaire. Il s’agit de promesses de mesures qu’il prendra pour renforcer le respect de ses
obligations en matière de droit international relatif aux droits de l’homme. Les INDH qui ont le « statut A »
peuvent assister au dialogue interactif mais elles ne sont pas habilitées à y prendre part.
Suite au dialogue interactif, un rapport est préparé par la troïka et débattu lors d’une session d’une
heure et demie du Groupe de travail sur l’examen périodique universel.
Le rapport du Groupe de travail sur chacun des États faisant l’objet de l’examen comprend un résumé
des débats, des conclusions, des recommandations et des engagements pris volontairement par l’État
intéressé.265
Le Groupe de travail ne débat pas des recommandations émises par les différents États et n’adopte
pas ses propres recommandations. Par conséquent, le rapport comprend seulement l’ensemble des
recommandations émises par les différents États.

1.6. DÉBAT EN PLÉNIÈRE ET ADOPTION DU RAPPORT


Le rapport du Groupe de travail sur chacun des États examinés est analysé puis adopté lors d’une
session ordinaire du Conseil des droits de l’homme qui se tient peu après l’achèvement de la session
du groupe de travail.
L’État examiné est le premier à s’exprimer pendant la session plénière d’une heure. Il est tenu de
répondre aux recommandations émises dans le rapport du Groupe de travail, soit avant, soit pendant
le débat en plénière.266
L’INDH de «  statut A  » de l’État examiné a un statut spécial. Elle est «  habilitée à prendre la parole
immédiatement après l’État examiné, pendant la séance consacrée à l’adoption du document final de
l’examen par le Conseil en séance plénière ».267

264 Résolution 16/21 du Conseil des droits de l’homme, part I.C.1, par. 9.
265 Résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme, part I.E, par. 26.
266 La liste des recommandations que chaque État a acceptées ou refusées est disponible à l’adresse suivante : www.upr-info.org.
267 Résolution16/21 du Conseil des droits de l’homme, part I.C.2, par. 13.

112 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Les autres INDH de « statut A » sont également autorisées à faire des déclarations orales pendant la
session, si le temps le permet. Cependant, les déclarations doivent porter sur le projet de rapport et non
pas sur le dialogue interactif avec l’État examiné.

1.7. MISE EN ŒUVRE ET SUIVI


La mise en œuvre des recommandations est l’objectif principal du processus de l’EPU. Les États doivent
en principe suivre les recommandations qu’ils acceptent et examiner de nouveau celles qu’ils n’ont pas
acceptées.
Pendant le second cycle de l’EPU, les États sont tenus de faire rapport sur leur suivi et sur la mise en
œuvre des recommandations acceptées dans le cadre du premier cycle.268 Pendant le cycles suivants,
ils seront tenus de faire rapport sur le suivi et la mise en œuvre des recommandations présentes dans
l’ensemble des rapports d’examen antérieurs.
La communauté internationale peut aider les États à mettre en œuvre les recommandations en renforçant
des capacités et en apportant une assistance technique. Les INDH peuvent elles aussi apporter une
assistance technique. Par ailleurs, les INDH peuvent :
• Faire du lobbying auprès de leur État afin de s’assurer que des mesures sont prises en rapport
avec les recommandations de l’EPU
• Lancer leurs propres initiatives de mise en œuvre
• Sensibiliser le grand public au processus et aux recommandations de l’EPU
• Suivre les progrès accomplis en matière de mise en œuvre des recommandations de l’EPU.

Suivi de
l’examen

Débat et
adoption du Processus
document final national
en plénière Cycle de
l’EPU

Examen au sein
Déclarations du Groupe
écrites après de travail
la session sur l’EPU

1.8. RÔLE DES INDH AU SEIN DE L’EPU


Le rôle spécifique joué par les INDH dans le cadre de l’EPU a été reconnu et pris en compte. Les INDH
constituent une source importante d’informations indépendantes sur la situation des droits de l’homme
dans les pays, notamment sur les droits des peuples autochtones. Il est par conséquent important que
les INDH utilisent la possibilité dont elles disposent de contribuer au processus de l’EPU.

268 Résolution16/21 du Conseil des droits de l’homme, part I.C.1, par. 6.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 113

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

269

En mars 2010, l’APF a organisé un atelier de deux jours sur l’EPU en


partenariat avec la Commission australienne des droits de l’homme.
L’atelier, qui s’est tenu à Sydney, en Australie, a rassemblé des
représentants d’un certain nombre d’institutions membres de l’APF qui
avaient déjà participé au processus de l’EPU.
L’atelier a donné l’occasion aux institutions membres de l’APF d’échanger
leurs expériences de l’EPU dans le but d’élaborer de bonnes pratiques et
d’explorer comment améliorer la contribution des INDH au processus de
l’EPU.
Les travaux ont débouché sur l’élaboration d’un document important,
UPR Good Practice Compilation, qui peut être utilisé pour aider les INDH à
participer aux différentes étapes du processus de l’EPU. Ce document a été
présenté au Conseil des droits de l’homme.269

19e session du Conseil des droits de l’homme. Pendant la session, les membres se sont penchés sur les rapports de l’examen périodique universel consacrés,
notamment, à l’Irlande, au Swaziland, à la Syrie et à la Thaïlande, dans le cadre du processus du Conseil consistant à examiner périodiquement les bilans en
matière de droits de l’homme de l’ensemble des 193 États membres de l’Organisation des Nations Unies. Photo : ONU/Jean-Marc Ferré.

269 A/HRC/14/NI/10.

114 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 114 22/10/2014 11:32:55


Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

270

LE COMITÉ INTERNATIONAL DE COORDINATION DES INSTITUTIONS


NATIONALES POUR LA PROMOTION ET LA PROTECTION DES
DROITS DE L’HOMME (CIC)270
Les Principes de Paris investissent les INDH d’un mandat, de pouvoirs et de
fonctions qui les transforment en parfaits collaborateurs du processus de
l’EPU […] Les rôles des INDH dans le processus de l’EPU consistent à :
• Agir en tant que passerelle entre les systèmes nationaux et
internationaux des droits de la personne
• Fournir des informations indépendantes et fiables sur les situations
nationales
• Partager les exemples de bonnes pratiques et les enseignements tirés
• Donner des conseils au gouvernement sur la mise en œuvre des
recommandations et contrôler leur suivi
• Renforcer la sensibilisation à l’EPU au niveau national et encourager les
acteurs nationaux
• S’assurer de la mise en œuvre des recommandations, dans la mesure où
cette tâche est compatible avec leurs fonctions.
En ce qui concerne l’EPU, dans sa résolution 5/1, le Conseil des droits de
l’homme a confirmé que les parties prenantes, y compris les INDH, avaient
la possibilité de contribuer à l’EPU en :
• Soumettant des informations afin qu’elles soient incluses dans
le résumé des informations fournies par les parties prenantes
compétentes préparé par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux
droits de l’homme (HCDH)
• Participant à l’examen de leur pays, à Genève, par le Groupe de travail
sur l’examen périodique universel
• Faisant des observations générales, devant le Conseil des droits de
l’homme, avant l’adoption du rapport du Groupe de travail sur leur pays
en plénière, et en
• Travaillant à la mise en œuvre des recommandations de l’EPU, même si
l’État en demeure le principal responsable.
Très récemment, suite à l’examen du Conseil et aux activités de plaidoyer
connexes exercées par le CIC, le Conseil a élargi l’éventail des possibilités
de contribution à l’EPU offertes aux INDH. Dans sa résolution 16/21, le
Conseil a confirmé que :
• Les INDH qui respectent les Principes de Paris se verront attribuer une
section distincte des futurs résumés des informations fournies par les
parties prenantes préparés par le HCDH, et
• Les INDH qui respectent les Principes de Paris seront habilitées à
intervenir immédiatement après leur État lors de l’adoption par le
Conseil du rapport de l’EPU sur cet État, soit en personne, soit par
vidéo-conférence.

270 National Human Rights Institutions and Universal Period Review Follow-Up, p. 1-2.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 115

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 115 22/10/2014 11:32:57


La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

1.8.1. Préparation du rapport


Selon leur mandat, les INDH sont en mesure de collecter et de compiler des informations indépendantes,
fiables et bien documentées sur la situation en matière de droits de l’homme dans leur pays. Ces
informations serviront de base à l’établissement du rapport qu’elles soumettront à l’EPU.
Le Conseil des droits de l’homme a publié des directives détaillées sur la structure et la longueur des
rapports, ainsi que sur les dates limites à respecter pour la soumission des documents.271 Dans leurs
documents, les INDH peuvent proposer des questions et des sujets qui pourraient être abordés dans
le cadre de l’examen de l’État, et suggérer des recommandations concrètes que le processus de l’EPU
pourrait faire à l’État concerné.
Les documents soumis par les INDH et les autres parties prenantes nationales sont intégralement
disponibles sur le site Web du Conseil des droits de l’homme. L’INDH peut également imprimer et
distribuer publiquement son rapport au niveau national pendant la préparation de l’examen. Ces activités
peuvent contribuer à sensibiliser un large public au processus de l’EPU.
Le document compilé par le HCDH et contenant les informations fournies par les parties prenantes, y
compris les INDH, ne dépasse pas une dizaine de pages. Généralement, les INDH se voient accorder
cinq pages et les autres groupes, les cinq autres pages. 272

En 2010, l’Australie a participé au Conseil des droits de l’homme dans le


cadre de l’EPU. Préalablement, la Commission australienne des droits de
l’homme272 avait travaillé avec un large éventail d’ONG – notamment avec
des organisations de peuples autochtones – afin de réfléchir à une approche
stratégique de la soumission des documents. Alors que les différentes
ONG étaient encouragées à soumettre leurs propres rapports, une coalition
a réuni les ONG et la Commission et a coordonné l’établissement d’un
rapport unique - « de référence » - composé de cinq pages. La Commission
a également convenu d’établir un rapport ne dépassant pas cinq pages
et l’a élaboré en consultation avec la coalition des ONG. Grâce à cette
collaboration, les deux rapports ont été complémentaires, ont évité les
redondances et ont respecté les limites de l’EPU en matière de nombre de
pages.
La Commission a imprimé des exemplaires de son rapport et l’a distribué
au plan national afin de sensibiliser un large public au processus de l’EPU.
Les questions liées aux droits de l’homme des autochtones et des peuples
insulaires du détroit de Torres ont été incluses dans les deux rapports.

1.8.2. Examen de l’État


Comme indiqué précédemment, la situation en matière de droits de l’homme est examinée par le
Groupe de travail sur l’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme, ce qui prend la
forme d’un dialogue interactif avec la délégation de l’État. Seuls les États membres et les observateurs
du Conseil des droits de l’homme peuvent assister à ce dialogue. Les INDH peuvent assister au dialogue
en tant qu’observateurs, mais ne peuvent pas y participer. Assister à la session procure aux INDH une
occasion précieuse de faire du lobbying auprès des États membres, de les sensibiliser aux questions
relatives aux droits de l’homme affectant les peuples autochtones et de proposer des questions et des
recommandations.
Les INDH peuvent également faire du lobbying auprès de leur État afin qu’il prenne des engagements
volontaires pendant le processus de l’EPU.
271 Ces informations sont disponibles à l’adresse suivante : www.ohchr.org/EN/HRBodies/UPR/Pages/NoteNHRIS.aspx.
272 Informations fournies par la Commission australienne des droits de l’homme.

116 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

1.8.3. Adoption du rapport


Les INDH peuvent participer au débat général sur le rapport du Groupe de travail. Celui-ci se tient
pendant la session suivante du Conseil des droits de l’homme. Étant donné que les INDH ne peuvent
pas contribuer au dialogue pendant l’examen de l’État, il est important qu’elles profitent de l’occasion
pour participer au débat de la session plénière.
1.8.4. Suivi des recommandations et des engagements volontaires
Le rôle des INDH va au-delà de la participation à l’établissement du rapport de l’EPU et au processus
d’examen. Parties prenantes essentielles au plan national, les INDH sont extrêmement bien placées pour
contrôler la mise en œuvre des recommandations émises par le Conseil des droits de l’homme. Elles
peuvent travailler avec l’État et la société civile sur les façons les plus efficaces et les plus appropriées
de contrôler la mise en œuvre et de faire le suivi de la procédure de l’EPU.
Les INDH sont également bien placées pour diffuser les résultats du processus de l’EPU au niveau
national en élaborant des programmes de sensibilisation et de formation appropriés.
Les activités que les INDH sont susceptibles d’exercer peuvent également consister à :
• Traduire et diffuser largement le rapport et les recommandations de l’EPU
• Identifier de façon holistique les questions dont le suivi est prioritaire, c’est-à-dire en associant les
recommandations de l’EPU à celles des autres mécanismes des droits de l’homme des Nations
Unies, des mécanismes nationaux et, le cas échant, des organismes régionaux des droits de
l’homme
• Élaborer des initiatives de suivi spécifiques, adaptées aux questions prioritaires qui ont été
identifiées
• Participer activement aux processus de consultation mis en œuvre par l’État et les autres parties
prenantes sur les résultats de l’EPU
• Coopérer avec les entités étatiques et les autres parties prenantes responsables de la mise en
œuvre des recommandations de l’EPU aux niveaux national et local
• Encourager ou faciliter la mise en œuvre des recommandations de l’EPU par les autres parties
prenantes, y compris les organisations de la société civile
• Définir des critères ainsi que les objectifs des activités de communication du rapport et de suivi
de la mise en œuvre par l’État des résultats de l’EPU
• Entrer en liaison et échanger les bonnes pratiques avec d’autres réseaux régionaux et
internationaux d’INDH sur le suivi de l’EPU
• Inclure la mise en œuvre des résultats de l’EPU de façon à ce qu’elle fasse partie intégrante de
leurs propres documents soumis en vue des examens ultérieurs.
Par ailleurs, les parties prenantes peuvent pérenniser le mécanisme de consultation créé à l’occasion
de la préparation du rapport national afin de le réutiliser pour les activités de contrôle des résultats de
l’EPU et d’établissement des rapports sur le suivi de ces résultats.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 117

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

273 274

LE COMITÉ INTERNATIONAL DE COORDINATION DES INSTITUTIONS


NATIONALES POUR LA PROMOTION ET LA PROTECTION DES DROITS DE
L’HOMME (CIC)273
Les contributions des INDH au processus de suivi de l’EPU peuvent prendre
une multitude de formes :
• Faire connaître et diffuser les résultats de l’EPU
• Utiliser les recommandations de l’EPU pour informer et stimuler les
activités nationales, notamment les plans stratégiques et opérationnels
des INDH
• Organiser des débats, après l’EPU, avec le gouvernement et la société
civile afin de dynamiser la mise en œuvre
• Contrôler la mise en œuvre des résultats de l’EPU et établir des rapports
sur la mise en œuvre
• S’il s’agit d’une institution respectant les Principes de Paris, faire
régulièrement rapport sur la mise en œuvre des recommandations de
l’EPU aux sessions du Conseil, et
• Intégrer les recommandations de l’EPU dans les rapports soumis aux
autres mécanismes des droits de l’homme des Nations Unies.
Suite à l’adoption en 2010, par le Conseil des droits de l’homme, du rapport
de l’EPU sur le Kenya, la Commission kenyane des droits de l’homme,274 ainsi
que la Coalition des parties prenantes kenyanes sur l’Examen périodique
universel (KSC-UPR), ont préparé un outil de plaidoyer mettant en exergue
les recommandations que le Kenya a acceptées en tant qu’engagements et
qu’il doit remplir pendant la période de quatre ans et demi le séparant du
prochain examen de l’EPU, qui se tiendra en 2014.
La « Charte des résultats » donne à l’État et aux acteurs non étatiques des
orientations visant à la mise en œuvre des recommandations de l’EPU et des
engagements pris par le Kenya pendant le processus de l’EPU. Elle définit les
principaux objectifs, indicateurs, mesures et acteurs dont les interventions
sont nécessaires pour garantir une mise en œuvre couronnée de succès.
La Charte des résultats :
• Consigne les interprétations des engagements pris par l’État devant le
Conseil des droits de l’homme qui ont été adoptées par la Commission et
la KSC-UPR
• Propose une feuille de route de quatre ans sur la façon dont les
recommandations acceptées par le Kenya peuvent être transformées en
mesures visant à améliorer la situation kenyane en matière de droits de
l’homme
• Convertit les recommandations de l’EPU et les engagements pris par le
Kenya en actions basées sur des indicateurs que le gouvernement et les
autres acteurs du pays peuvent entreprendre pendant le cycle actuel de
l’EPU (2010–2014)
• Crée un cadre que la Commission et la KSC-UPR peut utiliser pour
surveiller la mise en œuvre des engagements pris par le Kenya au terme
de l’EPU.
Cet outil de plaidoyer a été utilisé en mars 2011 pour aider les services du
gouvernement pendant qu’ils préparaient leur plan d’action en rapport avec l’EPU.

273 National Human Rights Institutions and Universal Periodic Review Follow-up, p. 3.
274 Ibid., p. 6.

118 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

2. PROCÉDURES SPÉCIALES
Les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme sont des experts indépendants spécialistes
des droits de l’homme qui ont pour mandat de faire rapport et de donner des conseils sur la situation
en matière de droits de l’homme d’un point de vue thématique ou dans une perspective spécifique à
un pays.
Le système des procédures spéciales est un élément central du dispositif de l’Organisation des Nations
Unies relatif aux droits de l’homme et couvre l’ensemble des droits de l’homme  : civils, culturels,
économiques, politiques et sociaux. Au 1er janvier 2013, il y avait 36 mandats thématiques et 12 mandats
concernant un pays particulier.275

2.1. FONCTIONS DES PROCÉDURES SPÉCIALES


Bien que les mandats confiés au titre des procédures spéciales varient sensiblement, leurs méthodes
de travail sont relativement uniformes.
La plupart des procédures spéciales :
• Mènent des études grâce auxquelles elles contribuent au développement du droit international
des droits de l’homme
• Enquêtent sur des situations en matière de droits de l’homme relevant de leur mandat
• Font des visites dans les pays
• Reçoivent et examinent les plaintes des victimes de violations des droits de l’homme et
interviennent en leur nom auprès des États en leur lançant des appels urgents et en leur adressant
des lettres d’allégations
• Font rapport au Conseil des droits de l’homme et autres organes gouvernementaux, tels que
l’Assemblée générale, sur leurs constatations, conclusions et recommandations.

2.2. PROCÉDURES SPÉCIALES ET PEUPLES AUTOCHTONES


La plupart des détenteurs de mandat thématique au titre des procédures spéciales ont examiné
la situation de peuples autochtones en ce qui concerne la promotion et la protection des droits de
l’homme. Par exemple, des Rapporteurs spéciaux ont fait état de la situation de peuples autochtones
en relation avec leurs mandats sur le logement approprié, l’éducation, l’alimentation et l’élimination des
substances et déchets dangereux.
Soulignant la nature unique des droits de l’homme des peuples autochtones, la Commission des droits
de l’homme a créé en 2001 le mandat de Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones
(voir Chapitre 13 pour de plus amples détails).

2.3. CONTRIBUTION DES INDH AUX PROCÉDURES SPÉCIALES


Les INDH peuvent contribuer à chacune des facettes d’un mandat au titre des procédures spéciales.
En particulier, les INDH peuvent attirer l’attention sur les questions relatives aux droits de l’homme
des peuples autochtones dans la mesure où elles sont en rapport avec les mandats des différentes
procédures spéciales.
La coopération des INDH et des procédures spéciales peut renforcer leur propre fonctionnement ainsi
que la contribution qu’elles s’apportent mutuellement. Une solide coopération est souvent de bon
augure pour la protection et la promotion de la réalisation des droits de l’homme au niveau national.276

275 La liste des procédures spéciales est disponible à l’adresse suivante : www.ohchr.org/EN/HRBodies/SP/Pages/Welcomepage.
aspx.
276 APF, Position Paper: Engagement of National Human Rights Institutions with Special Procedures (2007), par. 24.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 119

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

2.4. VISITES DE PAYS277


Conduire une visite de pays est l’une des fonctions les plus importantes des procédures spéciales. Les
visites de pays ne peuvent pas être réalisées sans l’approbation de l’État concerné.
Adoptées en 1998, les modalités applicables aux visites de pays stipulent que les procédures spéciales
et le personnel qui leur apporte son concours doivent avoir :
• La liberté de circulation sur l’ensemble du pays, y compris dans les zones d’accès limité
• La liberté d’enquêter et, plus précisément :
– L’accès à l’ensemble des prisons, centres de détention et lieux d’interrogatoire
– Les contacts avec les autorités centrales et locales de l’ensemble des secteurs
gouvernementaux
– Les contacts avec les représentants des ONG, des autres institutions privées et avec les médias
– Les entretiens confidentiels et sans surveillance avec les témoins et d’autres particuliers,
notamment avec les personnes privées de leur liberté
– Le plein accès à toute la documentation sur les questions relevant du mandat
• L’assurance, donnée par le gouvernement, que les personnes qui ont été en contact avec les
procédures spéciales ne seront pas pénalisées et ne subiront aucunes représailles
• L’assurance de bénéficier de dispositions appropriées en matière de sécurité qui n’entraveront
pas, cependant, la liberté de circulation et d’enquête des procédures spéciales.278
Pendant une visite de pays, le détenteur de mandat au titre des procédures spéciales rencontrera des
responsables du gouvernement, l’INDH, les ONG locales et les experts locaux, y compris les victimes
et les autres personnes ou groupes les plus affectés par la situation, afin de recueillir leurs points de vue
sur la question. Dans les cas appropriés, le détenteur de mandat devra rencontrer les organisations de
peuples autochtones afin d’obtenir leurs points de vue et de rassembler des données complémentaires.
Une visite de pays effectuée par un détenteur de mandat au titre des procédures spéciales est l’un
des moyens les plus efficaces de porter une situation en matière de droits de l’homme à l’attention
de la communauté internationale. Cela peut donc constituer un moyen important, pour l’INDH, de
voir ses travaux soutenus par la communauté internationale et, par la même occasion, de renforcer
son efficacité. Généralement, un détenteur de mandat qui effectue une visite sur le terrain n’a qu’une
connaissance limitée du pays et a besoin d’accéder à l’expertise locale. L’INDH peut proposer ses
connaissances et son expérience dans le but de soutenir et de conseiller le détenteur de mandat.
Après la visite, le détenteur de mandat finalise et publie le rapport sur la visite et participe au dialogue
interactif pendant la session ordinaire du Conseil des droits de l’homme. Lorsque le rapport est présenté,
l’INDH de «  statut A  » du pays visité peut s’exprimer devant le Conseil des droits de l’homme – en
personne ou grâce à la vidéo-conférence – immédiatement après l’État concerné.279
Les INDH jouent un rôle important dans le suivi du rapport publié par le détenteur de mandat. Elles
doivent largement diffuser le rapport, notamment auprès de peuples autochtones. Par ailleurs, elles
peuvent surveiller les mesures prises par l’État pour mettre en œuvre les recommandations du rapport.
Les INDH peuvent également organiser des séminaires ou des tables rondes consacrés au suivi du
rapport et de ses recommandations avec les principales organisations des peuples autochtones et des
responsables des autorités publiques.
Le rapport est une source d’informations de référence sur lesquelles les INDH peuvent s’appuyer
pour faire des recommandations au gouvernement et à d’autres instances sur la situation des peuples
autochtones en matière de droits de l’homme. Il peut également être très utile aux INDH pour enrichir
leurs plans de travail et les aider à élaborer des plans d’action nationaux sur les droits de l’homme.
277 APF, International Human Rights and the International Human Rights System: A Manual for National Human Rights Institutions
(2012), p. 52.
278 E/CN.4/1998/45.
279 Résolution16/21 du Conseil des droits de l’homme, part II.B, par. 28.

120 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Chef autochtone de l’Amazonie occidentale (Brésil) prononçant une invocation à l’occasion de la Semaine mondiale de l’harmonie interconfessionnelle.
Photo : ONU/Devra Berkowitz.

Enfin, les INDH peuvent régulièrement communiquer avec le détenteur de mandat et lui fournir des
informations sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations du rapport. 280

SOUTENIR LES VISITES DE PAYS EFFECTUÉES PAR DES DÉTENTEURS DE


MANDAT AU TITRE DES PROCÉDURES SPÉCIALES280
Pour soutenir les visites sur le terrain des détenteurs de mandat au titre des
procédures spciales, l’INDH peut :
• Encourager son gouvernement à émettre une invitation permanente à
l’ensemble des détenteurs de mandat au titre des procédures spéciales
afin qu’ils visitent le pays
• Proposer que son gouvernement émette une invitation et encourage
la visite d’un détenteur de mandat particulier au titre des procédures
spéciales dont le mandat est en rapport avec la situation du pays
• Informer les responsables du gouvernement, les ONG, les autres
experts, les autorités juridiques et les victimes sur les objectifs, la
nature et les modalités de la visite
• Conseiller le détenteur de mandat sur le programme de la visite, y
compris sur les personnes ou groupes à rencontrer pendant la visite
• Donner des instructions au détenteur de mandat et à son personnel,
avant et pendant la visite
• Diffuser largement tout communiqué de presse ou déclaration publique
émanant du détenteur de mandat au terme de sa visite

280 International Human Rights and the International Human Rights System: A Manual for National Human Rights Institutions,
p. 53-54.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 121

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

• Participer au dialogue interactif – lors de la session plénière du Conseil


des droits de l’homme – sur le rapport du détenteur de mandat en
répondant aux constatations et recommandations du rapport
• S’assurer que le rapport sur la visite, notamment ses constatations et
ses recommandations, bénéficie d’une large diffusion dans le pays, y
compris auprès de responsables gouvernementaux, de parlementaires,
d’ONG et de groupes de la société civile sélectionnés
• Tenir compte des recommandations pertinentes du détenteur de mandat
lorsqu’elle soumet ses points de vue, recommandations, propositions et
rapports au gouvernement, au parlement et aux autres autorités
• Suivre la sécurité et le bien-être des défenseurs des droits de l’homme,
victimes de violations et autres personnes ou groupes qui ont coopéré
avec le détenteur de mandat pendant la visite et en faire rapport
• Promouvoir et contrôler la mise en œuvre des recommandations du
rapport et en rendre compte publiquement, y compris au détenteur de
mandat et au Conseil des droits de l’homme.

3. PROCÉDURE DE REQUÊTE DU CONSEIL DES


DROITS DE L’HOMME
La procédure de requête a été créée par le Conseil des droits de l’homme afin de traiter tout ensemble
de violations flagrantes et attestées par des éléments dignes de foi de tous les droits de l’homme,
quelles que soient la région du monde et les circonstances dans lesquelles elles sont commises. Ses
modalités et procédures ont été établies par la résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme.
La résolution 1503 du Conseil économique et social adoptée en 1970 a servi de base à la création de
cette procédure confidentielle. Cependant, elle exige du plaignant d’épuiser toutes les voies de recours
internes avant de déposer une plainte en recourant à la procédure de requête du Conseil des droits de
l’home. La procédure de requête a pour objet de traiter tout « ensemble » systémique de violations des
droits de l’homme. Néanmoins, elle ne débouche pas sur un jugement individuel ou sur une voie de
recours individuelle.
La procédure de requête s’appuie sur deux groupes de travail distinct  : le Groupe de travail des
communications et le Groupe de travail des situations.
Composé de cinq experts indépendants, le Groupe de travail des communications évalue la recevabilité
et le bien-fondé des communications qu’il reçoit. Toutes les communications et recommandations
recevables sont transmises au Groupe de travail sur les situations.
Le Groupe de travail des situations est composé de cinq membres nommés par les groupes régionaux
parmi les États membres du Conseil des droits de l’homme. Il présente un rapport au Conseil sur tout
ensemble de violations flagrantes et attestées par des éléments dignes de foi de tous les droits de
l’homme et fait des recommandations sur les mesures à prendre. Le Conseil prend ensuite une décision
concernant chacune des situations portées à son attention.

122 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

3.1. LA CONTRIBUTION DES INDH À LA PROCÉDURE DE REQUÊTE


Les INDH peuvent sensibiliser un large public, au niveau national, à la procédure de requête, à son
fonctionnement, à ses résultats potentiels et au fait qu’il s’agit d’une procédure confidentielle. Les INDH
peuvent également être en mesure de déposer des plaintes ou de soumettre des communications au
nom des victimes lorsqu’elles ont la preuve d’ensembles de violations flagrantes de droits de l’homme
affectant des peuples autochtones.281

Participants à la réunion plénière de la cinquième session de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones.
Photo ONU/Paulo Filgueiras

281 International Human Rights and the International Human Rights System: A Manual for National Human Rights Institutions,
p. 50-54.

Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme | 123

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 123 22/10/2014 11:33:00


La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

POINTS CLÉS : CHAPITRE 11


• Les INDH peuvent saisir l’occasion de l’examen périodique universel pour
encourager leur gouvernement à respecter, protéger, promouvoir et faire
progresser les droits des peuples autochtones.
• Les INDH peuvent interagir avec les détenteurs de mandat appropriés
pour soumettre des informations relatives à des violations de droits de
l’homme de peuples autochtones, aider les détenteurs de mandat lors des
visites de pays et apporter leur contribution aux recherches qu’ils mènent.
• Les INDH peuvent envisager d’utiliser la procédure de requête du Conseil
des droits de l’homme pour déposer une plainte au nom de peuples
autochtones.

124 | Chapitre 11 : Le Conseil des droits de l’homme

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 124 22/10/2014 11:33:02


Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Chapitre 12 :
Organes conventionnels
QUESTIONS CLÉS
• Comment les organes conventionnels peuvent-ils contribuer à la
promotion et à la protection des droits de l’homme des peuples
autochtones ?
• De quelles façons les INDH peuvent-elles interagir avec les organes
conventionnels pour attirer l’attention sur la situation des peuples
autochtones en matière de droits de l’homme ?

PRINCIPES FONDATEURS DE L’IMPLICATION DES INDH


Principes de Paris
Compétences et attributions
3. Une institution nationale a, notamment, les attributions suivantes :
(d) Contribuer aux rapports que les Etats doivent présenter aux organes
et comités des Nations Unies, ainsi qu’aux institutions régionales, en
application de leurs obligations conventionnelles, et le cas échéant, émettre un avis à
ce sujet, dans le respect de leur indépendance ;
(e) Coopérer avec l’Organisation des Nations Unies et toute autre institution de la famille
des Nations Unies, les institutions régionales et les institutions nationales d’autres
pays, compétentes dans les domaines de la protection et de la promotion des droits de
l’homme

Les organes conventionnels relatifs aux droits de l’homme sont des comités d’experts indépendants
qui procèdent au suivi de la mise en œuvre des traités internationaux. Ils sont créés par le traité dont ils
assurent le suivi282 et leur principale fonction consiste à étudier les rapports des États parties.
Outre leur obligation de mettre en œuvre d’importantes dispositions du traité, chaque État partie doit
soumettre des rapports périodiques à l’organe conventionnel compétent sur la façon dont les droits
sont mis en œuvre. Par exemple, les États parties à la Convention internationale sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination raciale sont régulièrement tenus de soumettre des rapports au
Comité pour l’élimination de la discrimination raciale.
Pour en savoir plus sur l’interaction des INDH avec le système des organes conventionnels, voir la Note
d’information du HCDH283 et le manuel de formation de l’APF sur le système international des droits de
l’homme.284

282 Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a été créé par la résolution 1985/17 du Conseil économique et social.
283 Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, Information Note: National Human Rights Institutions (NHRIs)
interaction with the UN Treaty Body System (2011), disponible en anglais à l’adresse suivante  : http://nhri.ohchr.org/EN/
ICC/AnnualMeeting/24/4NHRI%20Treaty%20Bodies%20Engagement/NHRIs%20and%20the%20Treaty%20Bodies.
Infonote.11.4.2011.doc.
284 International Human Rights and the International Human Rights System: A Manual for National Human Rights Institutions, chap.
10-11 et 12.

Chapitre 12 : Organes conventionnels | 125

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

285

Organe conventionnel Traité Examen des Plaintes


rapports individuelles

Comité des droits de Pacte international sur les Oui Premier Protocole
l’homme droits civils et politiques facultatif (1966)
(1966)

Comité des droits Pacte international sur les Oui Protocole facultatif
économiques, sociaux et droits économiques, sociaux (2008)
culturels et culturels (1966)

Comité pour l’élimination Convention internationale Oui Article 14


de la discrimination raciale sur l’élimination de toutes
les formes de discrimination
raciale (1965)

Comité pour l'élimination Convention sur l’élimination Oui Protocole facultatif


de la discrimination à de toutes les formes de (1999)
l'égard des femmes discrimination à l'égard des
femmes (1979)

Comité contre la torture Convention contre la Oui Article 22


torture et autres peines
ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants
(1984)

Comité des droits de Convention relative aux Oui Protocole facultatif


l’enfant droits de l’enfant (1989) (2011) ; pas encore
en vigueur285

Comité des droits des Convention internationale Oui Article 77 ; pas


travailleurs migrants sur la protection des droits encore en vigueur
de tous les travailleurs
migrants et de leur famille
(1990)

Sous-Comité pour la Protocole facultatif se Non Non


prévention de la torture rapportant à la Convention
contre la torture et autres
peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants
(2002)

Comité des droits des Convention relative aux Oui Protocole facultatif
personnes handicapées droits des personnes
handicapées (2006)

Comité sur les disparitions Convention internationale Oui Article 31


forcées pour la protection de toutes
les personnes contre les
disparitions forcées (2006)

285 Le troisième Protocole facultatif établissant une procédure de présentation des communications a été ouvert à la signature en 2012.

126 | Chapitre 12 : Organes conventionnels

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Les activités des organes de traités chargés des droits de l’homme sont exercées par l’intermédiaire
d’un certain nombre de fonctions, conformément au traité spécifique dont elles relèvent. Ces activités
comprennent :
• Le système de présentation de rapports de l’État partie
• La réception des plaintes/communications individuelles
• L’élaboration des observations générales et des recommandations générales
• La conduite des enquêtes.
Les constatations et les recommandations des organes conventionnels fournissent des interprétations
et des déclarations de référence sur le contenu et la mise en œuvre du traité correspondant. Par
conséquent, ces travaux contribuent à l’élaboration de la jurisprudence internationale.
Les INDH peuvent jouer un rôle important dans ces fonctions en fournissant des informations utiles aux
organes conventionnels. Les INDH peuvent également utiliser les constatations et les recommandations
des organes conventionnels lorsqu’elles font du lobbying auprès de leurs gouvernements afin qu’ils
mettent en œuvre leurs obligations internationales et pour contrôler le respect – par les États – des
dispositions des traités.286
Afin de s’acquitter de leur responsabilité en matière de sensibilisation et d’éducation, les INDH peuvent
faire connaître et diffuser le texte des principaux instruments internationaux relatifs aux droits de
l’homme, ainsi que les conclusions, les points de vue et les décisions ayant trait aux communications et
observations générales des organes de traités.
Il est également nécessaire que les INDH sensibilisent un large public aux procédures de communications
des différents organes conventionnels. Elles soutiennent ainsi l’utilisation de ces procédures par les
victimes de violations des droits de l’homme et jouent un rôle stratégique dans la promotion des cas
susceptibles de créer une jurisprudence spécifique. Par ailleurs, les INDH peuvent élargir leur fonction
éducative afin d’y intégrer une formation professionnelle au processus d’établissement de rapports et
de mise en œuvre destinée aux principales parties prenantes nationales et internationales.

Villageoises de Kyauk Ka Char, dans l’État du Shan, au Myanmar. Photo ONU/Mark Garten.

286 Déclaration de Marrakech sur le renforcement de la relation entre les INDH et le système des organes de traités chargés des
droits de l’Homme (10 juin 2010), p. 4, cl. 17.

Chapitre 12 : Organes conventionnels | 127

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Pour chacune des fonctions des organes de traités, les INDH peuvent promouvoir la Déclaration en tant
qu’outil interprétatif permettant de comprendre comment le traité approprié est applicable aux peuples
autochtones de l’État partie. 287

Dans son observation générale sur les droits des enfants autochtones287,
le Comité des droits de l’enfant a explicitement utilisé la Déclaration
pour interpréter la façon dont la Convention est applicable aux enfants
autochtones :
10. En 2007, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté la
Déclaration sur les droits des peuples autochtones, qui donne des
orientations importantes sur les droits des peuples autochtones
et fait expressément référence aux droits des enfants autochtones
dans un certain nombre de domaines.
45. Le Comité appelle l’attention des États sur le paragraphe 2 de
l’article 8 qui dispose que, si un enfant a été illégalement privé des
éléments constitutifs de son identité ou de certains d’entre eux,
l’État doit lui accorder une assistance et une protection appropriées,
pour que son identité soit rétablie aussi rapidement que possible.
Le Comité encourage les États parties à garder à l’esprit l’article
8 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples
autochtones qui dispose que les États doivent mettre en place des
mécanismes de prévention et de réparation efficaces visant tout
acte qui priverait les autochtones, y compris les enfants, de leur
identité ethnique.
82. Enfin, le Comité invite instamment les États parties à adopter une
approche des enfants autochtones qui soit fondée sur les droits
et repose sur la Convention et d’autres instruments internationaux
pertinents comme la Convention no 169 de l’OIT et la Déclaration
des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Afin de
garantir le suivi effectif de la mise en œuvre des droits des enfants
autochtones, les États parties devraient renforcer leur coopération
directe avec les communautés autochtones et, si besoin, solliciter
la coopération technique d’organisations internationales, dont
les entités des Nations Unies. L’autonomisation des enfants
autochtones et l’exercice effectif de leur droit à leur propre culture,
leur propre religion et leur propre langue constituent l’un des
fondements essentiels d’un État pluriculturel qui s’acquitte de ses
obligations en matière de droits de l’homme.

1. RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES


Lorsqu’un État partie ratifie un traité relatif aux droits de l’homme ou y adhère, il s’engage à soumettre
un rapport initial et des rapports périodiques à l’organe conventionnel sur la mise en œuvre nationale du
traité. Ces travaux s’inscrivent dans un processus de dialogue.
Certains organes de traités organisent des réunions informelles avant la session dans le cadre desquelles
ils adoptent une liste de questions auxquelles l’État sera tenu de répondre. Le rapport est ensuite
examiné dans le cadre d’une session publique de l’organe de traité, en présence d’une délégation
de l’État partie, qui prend en considération toutes les informations fournies par l’État ainsi que les

287 Comité des droits de l’enfant, observation générale n°11 (2009) sur les enfants autochtones et leurs droits en vertu de la
Convention.

128 | Chapitre 12 : Organes conventionnels

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

informations transmises par d’autres sources. S’appuyant sur ce processus, l’organe de traité adopte
des observations finales qui font référence aux aspects positifs de la mise en œuvre effectuée par l’État
et aux domaines pour lesquels elles recommandent que l’État prennent des mesures supplémentaires.
Pour chacune des phases de la procédure d’établissement et de présentation des rapports, les INDH
doivent utiliser la Déclaration afin d’interpréter la façon dont le traité approprié est applicable aux peuples
autochtones de leur pays et dans quelle mesure il a été mis en œuvre à cet égard. Les INDH doivent
défendre l’idée que l’organe de traité et leur État utilisent également la Déclaration à cette fin.

1.1. PHASE PRÉALABLE À LA PRÉSENTATION DES RAPPORTS


Les INDH peuvent jouer un rôle important pendant la phase préalable à l’établissement des rapports.
En particulier, elles peuvent discuter de la procédure d’établissement et de présentation des rapports
avec leur gouvernement et œuvrer à ce que le rapport de leur État soit soumis dans les délais requis.
Les INDH doivent également déployer des efforts pour s’assurer que les informations spécifiques et
ventilées sont continuellement collectées par leur État de façon à ce qu’elles puissent être utilisées dans
les futurs rapports. 288

La Commission philippine des droits de l’homme a créé un « Bureau des


liens avec le gouvernement » (GovLink) afin d’établir des liens avec des
institutions gouvernementales dans le but de contrôler et de promouvoir
plus efficacement le respect par l’État de ses obligations au titre des traités.
GovLink a préparé les documents de la Commission et a organisé des
ateliers et des publications pour sensibiliser les parties prenantes et répartir
les responsabilités de la mise en œuvre des recommandations faites aux
Philippines par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (le
Comité) entre les organismes gouvernementaux, les organisations non
gouvernementales et les organisations de la société civile concernés.
Soutenu par le Programme des Nations Unies pour le développement et
en partenariat avec l’ONG Philrights, GovLink a poursuivi un programme
d’activités ayant pour objet de s’assurer que ces responsabilités sont
comprises et assumées par le gouvernement et les organisations de la
société civile, et qu’elles peuvent ensuite être contrôlées par la Commission
de façon appropriée, conformément à son mandat.
Ces activités ont inclus :
• La production d’un manuel sur la façon de coopérer à la procédure
d’établissement des rapports destinés au Comité, qui a pour objet
d’être un document accessible au plan international à « l’ensemble des
détenteurs d’obligations, organismes gouvernementaux, organisations
de la société civile et institutions nationales des droits de l’homme et
soulignant l’importance du respect des recommandations du Comité »
• La production d’un prospectus destiné au grand public présentant
les observations finales comme des recommandations « que le
gouvernement des Philippines doit suivre » pour améliorer le respect –
par ses autorités – du Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels
• L’élaboration d’un outil de suivi afin de faciliter la répartition et le
contrôle des responsabilités.288

288 International Human Rights and the International Human Rights System: A Manual for National Human Rights Institutions, p. 121.

Chapitre 12 : Organes conventionnels | 129

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

1.2. PROCÉDURE D’ÉTABLISSEMENT DES RAPPORTS


Le rôle des INDH dans la procédure d’établissement des rapports peut varier d’un organe conventionnel
à un autre. Cependant, au minimum, les INDH peuvent :  
• Être consultées sur le contenu des rapports de l’État partie
• Soumettre leur rapport alternatif sur le respect et la mise en œuvre – par l’État – du traité, et plus
précisément, sur les questions relatives aux droits de l’homme des peuples autochtones
• Assister à la session lorsque l’État présente son rapport à l’organe conventionnel.

1.3. RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES


De plus en plus souvent, les organes conventionnels s’attendent à ce que les INDH soient consultées
pendant la préparation des rapports établis par les États parties.
Les INDH doivent faire du lobbying auprès de leur État afin de s’assurer que les peuples autochtones et
leurs organisations soient également consultés de façon appropriée lors de la préparation des rapports
des États parties. Elles peuvent également profiter de cette occasion pour encourager leur État à faire
rapport sur la mise en œuvre de la Déclaration.
En ce qui concerne le contenu, les INDH peuvent travailler avec leur État afin de s’assurer que les
questions relatives aux peuples autochtones se voient accorder une attention spéciale et proportionnée.
Cependant, à tout moment, les INDH doivent s’assurer de conserver leur indépendance. En tant que
telles, elles ne doivent pas préparer ou élaborer de rapports au nom de l’État.

1.4. RAPPORTS ALTERNATIFS


Les INDH peuvent préparer un rapport alternatif ou « parallèle » et le soumettre directement à l’organe
conventionnel. S’il reste suffisamment de temps pour le faire, les INDH peuvent inclure dans ce rapport
parallèle des commentaires sur le rapport de l’État.
Un rapport alternatif peut suivre la structure du traité approprié en prenant chaque article en considération
et en soulignant les domaines dans lesquels la mise en œuvre de ses dispositions par l’État a progressé
ou a donné lieu à des préoccupations. Un rapport alternatif peut également se décliner autour d’un axe
thématique, avec une section du rapport consacrée à l’analyse des questions relatives aux droits de
l’homme des peuples autochtones en rapport avec le traité. Il est recommandé que les INDH se réfèrent
également aux sections pertinentes de la Déclaration pour interpréter la façon dont les obligations relevant
du traité s’appliquent et sont mises en œuvre en ce qui concerne les peuples autochtones du pays.

Aborigènes et insulaires du détroit de Torres lors de la cérémonie d’ouverture de l’exposition Indigenous Peoples: Honouring the Past, Present and
Future. Photo ONU/Mark Garten

130 | Chapitre 12 : Organes conventionnels

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

289

LA PRÉPARATION D’UN RAPPORT ALTERNATIF289


Les rapports parallèles de l’INDH doivent :
• Être objectifs et fondés sur des sources factuelles ; ne doivent pas
s’appuyer sur de simples assertions ou des points de vue subjectifs
• Être fiables
• Ne pas être rédigés en des termes insultants ou sur un ton partisan
• Fournir des informations en lien direct avec le traité
• Être structurés conformément aux lignes directrices des rapports soumis
par l’État
• Donner de claires indications quant aux dispositions qui ont été
enfreintes et sur la façon dont elles l’ont été
• Proposer des recommandations que l’organe de traité doit faire à l’État
au terme de l’examen.
La préparation et la soumission d’un rapport parallèle par l’INDH ont des
effets précis et positifs car :
• Elles encouragent l’État à établir des rapports plus impartiaux
• Elles favorisent une meilleure représentation de l’État lors du dialogue
interactif entre l’État et l’organe de traité
• Elles permettent de dresser une liste de questions et de problèmes plus
précise et plus appropriée et de les soumettre à l’État avant le dialogue
interactif
• Elles soulèvent des questions plus importantes qui peuvent être
débattues pendant le dialogue.

Le rapport doit être équilibré et prendre en considération les effets positifs et négatifs. Si l’État a déployé
des efforts constructifs pour promouvoir et protéger les droits de l’homme, ces efforts doivent être pris
en compte.
Les rapports alternatifs doivent également suggérer des questions et des problèmes que l’organe de
traité peut soulever afin d’en débattre avec l’État, et proposer des recommandations que l’organe de
traité pourrait examiner dans le cadre de ses observations finales. 290

La Commission néozélandaise des droits de l’homme soulève


systématiquement des questions autochtones dans les rapports alternatifs
qu’elle soumet aux organes conventionnels. Dans son dernier rapport
soumis au Comité des droits économiques, sociaux et culturels en 2012, la
Commission a fourni des informations sur un certain nombre de sujets qui
ont des effets négatifs sur les droits autochtones en Nouvelle-Zélande. En
particulier, la Commission a attiré l’attention du Comité sur les inégalités
profondes affectant un certain nombre de domaines, tels que la santé, le
logement, l’emploi et l’éducation.290

289 Ibid., p. 73.


290 Informations fournies par la Commission néo-zélandaise des droits de l’homme.

Chapitre 12 : Organes conventionnels | 131

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

1.5. AUTRES ACTIONS


Certains organes conventionnels donnent aux INDH des occasions supplémentaires de participer à la
procédure d’établissement des rapports, notamment en :
• Organisant une réunion privée avec l’organe de traité
• Soumettant des informations afin de contribuer à l’élaboration de la liste écrite des questions
envoyée à l’État avant la session
• Faisant une déclaration pendant la session plénière
• Faisant du lobbying informel auprès de membres de l’organe de traité pendant la session.
• Le site Web de chaque organe de traité fournit des informations sur les opportunités de
participation à la procédure d’établissement des rapports offertes aux INDH (et aux ONG).291 292

En 2010, la Commission australienne des droits de l’homme s’est rapprochée


du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale afin d’examiner
conjointement les 15e, 16e et 17e rapports de l’Australie soumis en vertu
de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination raciale.
La Commission a tiré de nombreux enseignements de ce rapprochement. Elle
a notamment pris conscience de l’importance du dialogue préparatoire avec
le gouvernement et les ONG ainsi que de la nécessité de tisser des liens avec
les personnes et les groupes sur lesquels le traité peut avoir l’impact le plus
considérable.
Les représentants de la Commission ont découvert qu’il est fondamental
de s’assurer que, outre les membres de la délégation des ONG, les anciens
autochtones qui faisaient partie du groupe d’ONG responsable du rapport
parallèle bénéficient d’un soutien adéquat leur permettant de s’approprier la
procédure d’établissement des rapports.
Participer aux sessions parallèles organisées par la délégation des ONG,
qui comprenait des organisations de peuples autochtones, a convaincu
les représentants de la Commission du bien-fondé de cette initiative qui
a renforcé la confiance ainsi que les liens tissés pendant la procédure
d’établissement des rapports.
La Commission a observé les techniques de participation utilisées par la
délégation des ONG australiennes, notamment l’organisation de sessions
parallèles avec le Comité. Elle a découvert qu’organiser des déjeuners
de travail et des sessions d’une durée approximative de 45 minutes était
un moyen utile d’impliquer plusieurs membres du Comité mais qu’il était
important de s’assurer que les membres disposaient de suffisamment de
temps pour poser des questions. Les représentants des ONG ont distribué
des prospectus qui résumaient leurs présentations orales, un effort que les
membres du Comité ont apprécié, commentant à plusieurs reprises à quel
point ils ont été utiles.
Depuis, la Commission a entrepris des activités visant à jeter les bases
d’une mise en œuvre permanente de la Convention. Elle a continué à tisser
des liens avec les services gouvernementaux concernés. Grâce au dialogue
qui s’est instauré, la Commission a découvert que le personnel de ces
services ne se sentait pas bien placé pour procéder à cette mise en œuvre.
En réponse, la Commission a commencé à rechercher des possibilités de
collaboration avec les services gouvernementaux sur un modèle de mise en
œuvre nationale des traités. Ces travaux ont donné lieu à des débats sur la
conception d’un tel modèle en concertation avec les différentes ONG et ont
débouché sur la volonté de continuer à travailler sur ce sujet en partenariat
avec les ONG. La Commission intègrera une partie de ces travaux dans ses
activités principales.292

291 Un liste des organes de traités est disponible à l’adresse suivante : www.ohchr.org/EN/HRBodies/Pages/HumanRightsBodies.aspx.
292 International Human Rights and the International Human Rights System: A Manual for National Human Rights Institutions,
p. 118-119.

132 | Chapitre 12 : Organes conventionnels

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

1.6. SUIVI DE LA PROCÉDURE D’ÉTABLISSEMENT DU PROCESSUS DES RAPPORTS


Les INDH peuvent jouer un rôle majeur dans le suivi de la procédure d’établissement des rapports. Elles
peuvent publier, diffuser et, le cas échéant, traduire les observations finales adoptées par l’organe de
traité. Elles peuvent également encourager leur État à mettre en œuvre les recommandations faites par
l’organe de traité, ainsi que surveiller les progrès réalisés dans ce domaine.
Les recommandations émises par l’organe de traité dans ses observations finales sur les questions
relatives aux droits de l’homme des peuples autochtones peuvent enrichir les plans de travail des
INDH. Les constatations et les recommandations peuvent également être utilisées comme déclarations
de référence lorsque les INDH contrôlent les progrès accomplis par leur État en matière de droits de
l’homme et font rapport sur ces questions. 293

Le Médiateur chargé de la promotion et de la protection des droits des


peuples autochtones du Panama a pris contact avec le gouvernement afin
qu’il de procéder au suivi des recommandations émises par les organes
de traités. Grâce à ces activités de plaidoyer, le gouvernement s’est
engagé à prendre des mesures pour promouvoir les droits des peuples
autochtones.293

2. PLAINTES/COMMUNICATIONS INDIVIDUELLES
La plupart des organes de suivi des traités relatifs aux droits de l’homme294 peuvent prendre en
considération les plaintes émanant de particuliers estimant que leurs droits énoncés dans le traité
ont été violés (voir tableau ci-dessus). Il s’agit d’une fonction quasi-judiciaire. Les plaintes ne peuvent
être déposées qu’à l’encontre des États ayant reconnu l’organe de traité comme compétent pour
examiner les plaintes individuelles. Selon le traité concerné, la procédure impliquera de devenir partie à
un Protocole facultatif ou de faire une déclaration en vertu d’un article du traité.

2.1. PROCÉDURE DE REQUÊTE


Toute personne peut déposer une plainte contre l’État auprès d’un organe de traité à condition qu’elle
remplisse les conditions suivantes :
• L’État doit reconnaître que l’organe de traité a compétence pour recevoir les plaintes individuelles
• La plainte doit être déposée par la personne dont les droits ont été violés ou au nom de cette
personne
• Les voies de recours internes doivent avoir été épuisées.
En principe, il n’y a pas de date limite officielle pour déposer une plainte. Cependant, il est préférable
qu’elle soit déposée dès que possible. Dans les situations urgentes, l’organe de traité peut demander à
l’État de prendre des « mesures transitoires » afin de prévenir un « préjudice irréparable ».
Les plaintes sont prises en considération sur la base des informations écrites fournies par le plaignant
ou son représentant, et l’État, à huis clos. Les décisions de l’organe de traité relatives aux plaintes
individuelles sont incluses dans ses rapports annuels. Si une violation est constatée, l’État est tenu
d’offrir un recours effectif et de répondre à l’organe de traité dans les délais requis. La voie de recours
recommandée dépendra des violations constatées. L’État a une obligation de bonne foi de mettre en

293 Réponse au questionnaire du HCDH sur les bonnes pratiques qui peuvent être envisagées pour faire respecter les droits des
peuples autochtones.
294 Les informations relatives aux procédures de requête relevant des organes de traités sont disponibles à l’adresse suivante  :
www2.ohchr.org/english/bodies/petitions/index.htm.

Chapitre 12 : Organes conventionnels | 133

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

œuvre les constatations de l’organe de traité et d’offrir un recours approprié. Néanmoins, les points de
vue sur les communications relatives aux plaintes individuelles ne sont pas juridiquement contraignants.
L’organe de traité encourage activement l’État à mettre en œuvre sa décision, y compris par
l’intermédiaire de la procédure d’établissement des rapports de l’État partie. Le Conseil des droits de
l’homme encourage également l’État, par le biais de l’examen périodique universel, à mettre en œuvre
les décisions prises par les organes de traités.
Bien que certains États ne respectent pas les décisions des organes de traités, nombre d’entre eux ont
proposé aux plaignants différentes voies de recours. Ces décisions exercent par ailleurs une influence
sur l’élaboration des normes internationales car elles constituent un ensemble d’interprétations quasi-
judiciaires des traités.
En ce qui concerne les peuples autochtones, les décisions prises par le Comité des droits de l’homme
et le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale ont exercé une influence significative sur
l’élaboration des normes internationales en matière de droits de l’homme. Il est également envisagé que
la Déclaration donne une impulsion supplémentaire aux travaux des organes de traités.

2.2. LE RÔLE DES INDH DANS LA PROCÉDURE DE REQUÊTE AUPRÈS DE L’ORGANE DE


TRAITÉ
Si l’État a accepté la procédure de requête individuelle, l’INDH peut sensibiliser le public à cette procédure
et envisager d’aider des particuliers à déposer une plainte. Selon son mandat, l’INDH peut être habilitée
à soumettre des cas au nom de particuliers. Lorsqu’un État n’a pas reconnu à un organe de traité qu’il
est compétent pour examiner les plaintes individuelles, l’INDH peut faire du lobbying auprès de l’État
pour qu’il prenne des mesures à cet égard.
Les INDH peuvent diffuser les décisions des organes de traités concernant les plaintes individuelles,
procéder au suivi des décisions applicables et œuvrer auprès de l’État afin qu’il les respecte.
Les constatations des organes de traités constituent une source importante de jurisprudence que les
INDH peuvent utiliser dans leurs travaux, notamment pour plaider en faveur de réformes législatives et
politiques. Par conséquent, les INDH doivent contrôler et enregistrer les constatations des organes de
traités qui sont en rapport avec les droits de l’homme des peuples autochtones et les utiliser pour leurs
programmes et activités.

134 | Chapitre 12 : Organes conventionnels

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

3. OBSERVATIONS GÉNÉRALES
Les organes de traités émettent également des observations générales afin d’enrichir le contenu normatif
des obligations de procédure et de fond qu’ils comportent. Ces enrichissements font autorité et aident
les États parties à interpréter et à mettre en œuvre leurs obligations au titre des traités.

Les organes de traités se sont plus particulièrement intéressés aux questions relatives aux
droits de l’homme des peuples autochtones dans un certain nombre de leurs observations
générales ou recommandations générales, notamment :

Recommandation générale n° 23 (1997) du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale sur les
peuples autochtones.

Recommandation générale n° 31 (2005) du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale concernant


la prévention de la discrimination raciale dans l'administration et le fonctionnement du système de justice
pénale.

Observation générale n° 21 (2009) du Comité des droits économiques, sociaux et culturels sur le droit de
chacun à participer à la vie culturelle.

Observation générale n° 20 (2009) du Comité des droits économiques, sociaux et culturels sur la non-
discrimination dans l'exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

Observation générale n° 17 (2005) du Comité des droits économiques, sociaux et culturels sur le droit
de chacun de bénéficier de la protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute production
scientifique, littéraire ou artistique dont il est l’auteur.

Observation générale n° 23 (1994) du Comité des droits de l’homme sur les droits des minorités.

Observation générale n° 11 (2009) du Comité des droits de l’enfant sur les enfants autochtones et leurs
droits découlant de la Convention.

Les INDH peuvent être consultées pendant la phase d’élaboration des observations générales. Elles
peuvent également recommander qu’un organe de traité examine une question pour laquelle une
observation générale s’avère nécessaire.
Les observations générales constituent une source précieuse d’informations de référence qui permettent
d’enrichir le contenu normatif des traités relatifs aux droits de l’homme. Les INDH peuvent utiliser ces
observations générales pour orienter les recommandations faites à leur État sur la meilleure façon de
mettre en œuvre ses obligations en matière de droits de l’homme.
Les INDH doivent surveiller et enregistrer les observations générales en rapport avec les droits de
l’homme des peuples autochtones.

Chapitre 12 : Organes conventionnels | 135

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

295 296

Dans le Social Justice Report 2005,295 le Commissaire à la justice


sociale auprès des autochtones et des insulaires du détroit de Torres
de la Commission australienne des droits de l’homme a demandé au
gouvernement australien de s’engager à atteindre en une génération
l’égalité en matière de santé et d’espérance de vie entre les Australiens
autochtones et les Australiens non autochtones.
En adoptant cet appel à l’égalité en matière de santé fondé sur les droits de
l’homme, le Commissaire à la justice sociale a appliqué le droit au meilleur
état de santé possible – tel que présenté dans l’observation générale n° 14
du Comité des droits économiques, sociaux et culturels – à la crise sanitaire
à laquelle étaient confrontés les Australiens autochtones. Le rapport a incité
le gouvernement australien à prendre des mesures positives, notamment en
signant la Déclaration d’intention visant à atteindre l’égalité en matière de
santé d’ici à 2030.296

4. MESURES D’ALERTE RAPIDE ET PROCÉDURES


D’ACTION URGENTE
En 1993, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a adopté de nouvelles procédures
préventives – les mesures d’alerte rapide et les procédures d’action urgente – afin de répondre plus
efficacement aux violations de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination raciale.297 Les mesures d’alerte rapide ont pour objet d’éviter les problèmes qui risquent
de déboucher sur une escalade de la violence et les procédures d’action urgente cherchent à remédier
aux graves violations de la Convention. Il n’existe que peu de différences entre ces procédures et, dans
la pratique, elles sont utilisées simultanément.
Le Comité peut invoquer cette procédure lorsqu’il estime nécessaire de remédier de façon urgente aux
graves violations de la Convention. Étant donné que le Comité a activement utilisé la Déclaration comme
point de référence pour interpréter les obligations des États parties au titre de la Convention qui sont en
rapport avec les peuples autochtones, une grave violation de la Convention pourrait conduire le Comité
à invoquer cette procédure.
Les principes directeurs publiés par le Comité stipulent expressément que cette procédure peut être
invoquée pour répondre aux cas d’« empiètement sur les terres traditionnelles des peuples autochtones
ou d’évacuation forcée de ces peuples de leurs terres, en particulier aux fins d’exploitations des
ressources naturelles ».298 299

Dans sa procédure d’alerte rapide et d’intervention urgente auprès de la


République populaire démocratique Lao, le Comité s’est déclaré préoccupé
que le peuple Hmong soit prétendûment confronté à des actions militaires
continuelles. Il a exhorté l’État à interrompre immédiatement toute
action militaire et à retirer les forces militaires du territoire. Ce faisant, le
Comité a attiré l’attention de l’État sur l’article 30 de la Déclaration qui
stipule qu’aucune activité militaire ne doit être menée sur les terres ou les
territoires des peuples autochtones.299

295 Commission australienne des droits de l’homme, Social Justice Report 2005 (2005), chap. 2.
296 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.humanrights.gov.au/social_justice/health/index.html.
297 A/48/18, annexe III.
298 A/62/18, annexe III, par. 12 (h).
299 Voir www2.ohchr.org/english/bodies/cerd/docs/Laos_12.03.1010.pdf.

136 | Chapitre 12 : Organes conventionnels

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 136 22/10/2014 11:33:07


Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Le Comité peut décider de se saisir d’une situation particulière au titre de ses procédures d’alerte rapide
et d’intervention d’urgence en se fondant sur les informations mises à sa disposition par une INDH.300
Les INDH doivent également promouvoir la sensibilisation à ces procédures auprès des peuples
autochtones.

POINTS CLÉS : CHAPITRE 12


• Les INDH peuvent soumettre des rapports alternatifs sur la mise en
œuvre, par l’État, des obligations au titre des traités, y compris celles
qui sont en rapport direct avec les droits de l’homme des peuples
autochtones.
• Les INDH peuvent faire du lobbying auprès de leurs États afin qu’ils
acceptent de reconnaître qu’un organe de traité est compétent pour se
saisir de plaintes individuelles et peuvent aider les victimes à soumettre
leurs plaintes aux organes de traités.
• Les observations finales et les recommandations faites par les organes
de traités peuvent s’avérer particulièrement utiles aux INDH dans leurs
activités de plaidoyer visant à faire progresser les droits des peuples
autochtones.

300 A/62/18, annexe III, par. 13.

Chapitre 12 : Organes conventionnels | 137

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 137 22/10/2014 11:33:07


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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Chapitre 13 :
Mécanismes spécifiques aux droits
des peuples autochtones
QUESTIONS CLÉS
• De quelles façons les INDH peuvent-elles contribuer aux travaux de
l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones ?
• De quelles façons les INDH peuvent-elles interagir avec le Mécanisme
d’experts sur les droits des peuples autochtones?
• Comment les INDH peuvent-elles soutenir le Rapporteur spécial sur les
droits des peuples autochtones et contribuer à ses travaux ?

PRINCIPES FONDATEURS DE L’IMPLICATION DES INDH


Principes de Paris
Compétences et attributions
3. Une institution nationale a, notamment, les attributions suivantes :
d) Contribuer aux rapports que les Etats doivent présenter aux organes
et comités des Nations Unies, ainsi qu’aux institutions régionales, en
application de leurs obligations conventionnelles, et le cas échéant, émettre un avis à
ce sujet, dans le respect de leur indépendance ;
e) Coopérer avec l’Organisation des Nations Unies et toute autre institution de la famille
des Nations Unies, les institutions régionales et les institutions nationales d’autres
pays, compétentes dans les domaines de la protection et de la promotion des droits de
l’homme

Résolution 6/36 du Conseil des droits de l’homme


Le Conseil des droits de l’homme :
9. Décide également que la réunion annuelle du mécanisme d’experts sera ouverte […]
à la participation en tant qu’observateurs […] des institutions nationales des droits de
l’homme.

Les trois principaux mécanismes des Nations Unies qui œuvrent exclusivement à la promotion et à la
protection des droits des peuples autochtones sont :
• L’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones, un organe subsidiaire
du Conseil économique et social
• Le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, un organe consultatif composé
de cinq experts du Conseil des droits de l’homme
• Le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, l’une des procédures spéciales du
Conseil des droits de l’homme.

Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones | 139

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 139 22/10/2014 11:33:07


La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

1. L’INSTANCE PERMANENTE DES NATIONS


UNIES SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES
1.1. GÉNÉRALITÉS
L’Instance permanente a été créée en 2000 en tant qu’organe subsidiaire du Conseil économique et social
par sa résolution 2000/22. Elle a pour mandat de débattre des questions relatives au développement
économique et social, à la culture, à l’environnement, à l’éducation, à la santé et aux droits de l’homme.
Pour s’acquitter de sa tâche, l’Instance permanente :
• Fournit des conseils spécialisés et des recommandations sur les questions autochtones au
Conseil économique et social ainsi qu’aux programmes, fonds et institutions des Nations Unies,
par le biais du Conseil
• Fait œuvre de sensibilisation et encourage l’intégration et la coordination des activités relatives
aux questions autochtones au sein du système des Nations Unies
• Élabore et diffuse des informations sur les questions autochtones.301
L’Instance permanente a adopté la Déclaration comme cadre juridique et intègre la Déclaration dans ses
recommandations sur les six domaines d’activité pour lesquels elle est mandatée, ainsi que dans ses
travaux sur le thème spécial de ses sessions.302 303

En 2010, la neuvième session de l’Instance permanente des Nations Unies


a choisi comme thème spécial : « Peuples autochtones : développement,
culture et identité : les articles 3 et 32 de la Déclaration des Nations Unies
sur les droits des peuples autochtones ».303

L’Instance permanente tient des sessions annuelles de deux semaines au Siège des Nations Unies à
New York. Elle a tenu sa première session en mai 2002.
L’Instance permanente est composée de 16 membres qui sont des experts indépendants siégeant à
titre personnel. Chacun des membres siège pendant trois ans et peut être réélu ou reconduit pour un
mandat supplémentaire. Huit membres sont élus par des organisations de peuples autochtones et les
huit autres membres sont désignés par les États et élus par le Conseil économique et social.304
L’Instance permanente est soutenue par un secrétariat, établi au Siège des Nations Unies au sein de
la Division des politiques sociales et du développement du Département des affaires économiques et
sociales des Nations Unies qui :
• Prépare les sessions annuelles de l’Instance permanente et qui apporte son soutien aux membres
• Prône, facilite et promeut la coordination de la mise en œuvre, au sein du système des
Nations Unies, des recommandations qui émergent de chaque session annuelle et promeut la
sensibilisation aux questions relatives aux peuples autochtones au sein du système des Nations
Unies et auprès des gouvernements et du grand public
• Sert de source d’information et de coordination pour les efforts de plaidoyer déployés en rapport avec
le mandat de l’Instance permanente et les problèmes persistants relatifs aux peuples autochtones.305

301 Résolution 2000/22 du Conseil économique et social, par. 2.


302 E/C.19/2009/14, annex, par. 23.
303 E/2010/43-E/C.19/2010/15.
304 La liste des membres actuels est disponible à l’adresse suivante : www.un.org/esa/socdev/unpfii/en/members.html.
305 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.un.org/esa/socdev/unpfii/en/secretariat.html.

140 | Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 140 22/10/2014 11:33:07


Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

1.2. LE RÔLE DES INDH ET DE L’INSTANCE PERMANENTE

1.2.1. Participer aux sessions de l’Instance permanente


Historiquement, l’inscription aux sessions annuelles de l’Instance permanente est réservée aux
délégations des gouvernements, aux organisations de peuples autochtones, aux ONG bénéficiant
d’une accréditation du Conseil économique et social et aux universitaires. Cependant, en 2010, une
catégorie d’inscription a été créée pour les INDH. Les institutions suivantes peuvent participer, en tant
qu’observateurs,306 aux sessions de l’Instance permanente :
• Les institutions accréditées comme conformes aux Principes de Paris (INDH de « statut A »)
• Le Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la
protection des droits de l’homme, en tant qu’organe représentatif des INDH au niveau mondial
• Les Comités régionaux de coordination des INDH, s’exprimant au nom des institutions membres
de « statut A ».307
La participation aux sessions de l’Instance permanente donne d’excellentes occasions aux INDH de
tisser des liens avec des organisations de peuples autochtones de leur pays et de leur région.
Les sessions constituent une source importante d’informations récentes sur le grand nombre de
problèmes auxquels sont confrontés les peuples autochtones, notamment recueillies lors de l’audition
des interventions orales des peuples autochtones et de leurs organisations. Les informations obtenues
et l’expertise développée dans le cadre des sessions de l’Instance permanente peuvent être utilisées
par les INDH dans leurs travaux habituels.

Déléguée autochtone lors de la douzième session de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones.
Photo : ONU/Rick Bajomas.

306 Comme le stipule la résolution 2000/22 du Conseil économique et social au paragraphe 1, tous les participants sont des
observateurs.
307 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.un.org/esa/socdev/unpfii/en/session_faq.html#3.

Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones | 141

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

308

La Commission australienne des droits de l’homme apporte un soutien aux


représentants de la délégation des autochtones et des insulaires du détroit
de Torres qui participent aux sessions annuelles de l’Instance permanente.
Cette délégation comprend le Commissaire à la justice sociale auprès des
autochtones et des insulaires du détroit de Torres qui fait un certain nombre
d’interventions et qui soumet des rapports sur différents points de l’ordre du
jour.
Quelquefois, la Commission soutient également des interventions
communes avec des organisations de peuples autochtones d’Australie et du
Pacifique.308

Les INDH peuvent contribuer aux sessions de l’Instance permanente en faisant des déclarations orales
sur des points de l’ordre du jour, notamment sur le point permanent de l’ordre du jour qui est consacré
à la Déclaration. Elles peuvent également accueillir, indépendamment ou en partenariat avec d’autres
INDH ou organisations de peuples autochtones, des événements parallèles ayant pour objet d’attirer
l’attention sur un problème spécifique.309 Enfin, les INDH peuvent chercher à présenter des interventions
orales pendant la session.

1.2.2. Autres activités de l’Instance permanente


À divers moments, le secrétariat de l’Instance permanente organise et accueille des réunions et des
ateliers sur différents sujets. Les INDH peuvent participer à ces événements et y présenter des rapports.
Elles peuvent également chercher à travailler avec le secrétariat afin de co-accueillir un atelier. 310

En août 2005, le secrétariat de l’Instance permanente a co-organisé une


conférence avec la Commission australienne des droits de l’homme sur
les « Partenariats entre les peuples autochtones, les gouvernements et la
société civile ».310

L’article 42 de la Déclaration stipule :


L’Organisation des Nations Unies, ses organes, en particulier l’Instance permanente sur les
questions autochtones, les institutions spécialisées, notamment au niveau des pays, et les États
favorisent le respect et la pleine application des dispositions de la présente Déclaration.
L’Instance permanente a interprété que cet article lui attribue un «  nouveau mandat  » l’habilitant à
promouvoir la pleine application de la Déclaration et à procéder au suivi de son efficacité. Elle a en
outre suggéré que grâce à cet article, l’Instance permanente est habilitée à favoriser les échanges avec
les États concernant l’application nationale de la Déclaration. Elle suggère par ailleurs que les organes
de traités pourraient être considérés comme de possibles modèles lors de la mise en œuvre de ces
activités.311

308 Informations fournies par la Commission australienne des droits de l’homme.


309 Les principes directeurs relatifs à l’organisation de ces événements parallèles sont disponibles à l’adresse suivante : www.un.org/
esa/socdev/unpfii/documents/session_tenth_side_event_guidelines.doc.
310 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.humanrights.gov.au/social_justice/conference/engaging_communities/index.html.
311 E/C.19/2009/14, annexe, par. 14-25.

142 | Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Les INDH sont bien placées pour nouer un dialogue avec l’Instance permanente dans le cadre des
activités qu’elles mènent au niveau national. De la même façon que pour les organes de traités, les
INDH peuvent constituer pour l’Instance permanente une importante source d’informations crédibles et
indépendantes.
L’Instance permanente a également pour fonction de coordonner et d’intégrer les questions autochtones
au sein du système des Nations Unies. Les INDH peuvent aider l’Instance permanente à accomplir cette
tâche en travaillant avec les organismes des Nations Unies œuvrant dans leur juridiction. 312

En 2009, l’Instance permanente s’est rendue dans la région du Chaco, dans


l’État plurinational de Bolivie et au Paraguay, afin d’examiner la situation
analogue à l’esclavage dans laquelle se trouvent les peuples autochtones
guarani. Dans le cadre de cette visite, l’Instance permanente a organisé des
débats avec le Defensor del Pueblo de Bolivia.
En 2010, l’Instance permanente a organisé des débats avec le Defensor del
Pueblo de la República de Colombia concernant les massacres de peuples
autochtones awa.312

1.2.3. Diffusion
Les INDH peuvent diffuser des rapports et recommandations de l’Instance permanente, et procéder au
suivi des recommandations faites à l’intention des États.

2. MÉCANISME D’EXPERTS SUR LES DROITS DES


PEUPLES AUTOCHTONES
2.1. GÉNÉRALITÉS
Le Mécanisme d’experts a été créé en 2007 par la résolution 6/36 du Conseil des droits de l’homme. Il
est composé de cinq experts indépendants, nommés par le Conseil, qui doit tenir compte des experts
d’origine autochtone, de l’égalité entre les sexes et de la diversité de la représentation géographique. Il
se réunit une fois par an à Genève. Sa première réunion s’est tenue du 1er au 3 octobre 2008.
Sur instruction du Conseil des droits de l’homme, le Mécanisme d’experts lui donne des conseils
thématiques – sous forme d’études et de recherches – sur les droits des peuples autochtones. Il peut
également suggérer au Conseil des propositions pour examen et approbation.
Certaines INDH ont contribué à des études préparées par le Mécanisme d’experts.313

312 Présentation à l’intention de la consultation sous-régionale organisée par le HCDH, The Operationalization of the United Nations
Declaration on the Rights of Indigenous Peoples by National Human Rights Institutions.
313 Les rapports soumis par des INDH au Mécanisme d’experts sont disponibles à l’adresse suivante : www.ohchr.org/EN/Issues/
IPeoples/EMRIP/Pages/ContributionsSession3.aspx.

Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones | 143

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

314

Le Mécanisme d’experts a achevé sa première étude sur le droit des peuples


autochtones à l’éducation en 2009. Elle comprenait une série de conseils –
notamment sous forme de recommandations – sur la façon dont le droit à
l’éducation des peuples autochtones pouvait être réalisé. Sa seconde étude
sur les peuples autochtones et le droit à participer au processus décisionnel a
été achevée en septembre 2011. En septembre 2012, le Mécanisme d’experts a
soumis les études et rapports suivants au Conseil des droits de l’homme :
• Étude sur le rôle des langues et de la culture dans la promotion et la
protection des droits et de l’identité des peuples autochtones
• Rapport sur les peuples autochtones et le droit à participer au processus
décisionnel, axé sur les industries extractives
• Rapport sur son questionnaire à l’intention des États sur les meilleures
pratiques – mesures appropriées et stratégies de mise en œuvre –
susceptibles de contribuer à la réalisation des objectifs de la Déclaration.314

2.2. LE RÔLE DU MÉCANISME DES INDH ET DU MÉCANISME D’EXPERTS

2.2.1. Participation aux sessions du Mécanisme d’experts


La résolution 6/36 du Conseil des droits de l’homme stipule que les INDH peuvent participer en tant
qu’observateurs aux réunions annuelles du Mécanisme d’experts. Les INDH peuvent contribuer à ces
sessions en faisant des déclarations orales sur les points de l’ordre du jour correspondants.

Femme autochtone Amazigh, du Maroc, à la septième réunion de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones.
Photo : ONU/Paulo Filgueiras.

314 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www.ohchr.org/EN/Issues/IPeoples/EMRIP/Pages/ExpertMechanismDocumentation.aspx.

144 | Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Abordé à chacune des sessions du Mécanisme d’experts, le point de l’ordre


du jour permanent sur la Déclaration donne l’occasion d’un débat général
sur la Déclaration. Ce débat s’intéresse tout particulièrement aux bonnes
pratiques et souligne de quelles façons la Déclaration peut être utilisée aux
niveaux international, régional et national pour promouvoir et protéger les
droits des peuples autochtones. Lors de sa cinquième session, en 2012, le
Mécanisme d’experts a instauré un dialogue interactif entre le Rapporteur
spécial sur les droits des peuples autochtones, l’Instance permanente et les
participants de la session.

Comme celle de l’Instance permanente, la session annuelle du Mécanisme d’experts donne aux INDH
une excellente occasion de travailler avec des organisations de peuples autochtones et de partager des
informations sur les bonnes pratiques. Les exemples de bonnes pratiques impliquant l’utilisation de la
Déclaration pour promouvoir et protéger les droits des peuples autochtones peuvent enrichir les travaux
des INDH. 315

La Commission néo-zélandaise des droits de l’homme a fourni des


informations pour un certain nombre d’études menées par le Mécanisme
d’experts. Par exemple, la Commission a contribué à l’étude sur « les
enseignements tirés et les défis à relever pour parvenir à la mise en œuvre
des droits des peuples autochtones à l’éducation ». Sa contribution a mis
en exergue les étapes à franchir pour mettre pleinement en œuvre les doits
des peuples autochtones à l’éducation, les lacunes des cadres législatifs
et politiques actuels et les principaux défis qu’il faut encore relever.315 La
Commission a également contribué à l’étude du Mécanisme d’experts sur
« le rôle des langues et de la culture dans la promotion et la protection des
droits et de l’identité des peuples autochtones ».

2.2.2. Diffusion

Les INDHU peuvent diffuser les études et les conseils du Mécanisme d’experts, ainsi que
des rapports de suivi sur les recommandations qu’il a faites.

3. RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LES DROITS


DES PEUPLES AUTOCHTONES
3.1. GÉNÉRALITÉS
En 2001, la Commission des droits de l’homme a autorisé la création d’un Rapporteur spécial sur la
situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones. Ce mandat
– désormais dénommé Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones – fait rapport au
Conseil des droits de l’homme et à l’Assemblée générale.316 Il travaille également en coopération avec
le Mécanisme d’experts et l’Instance permanente.

315 Informations fournies par la Commission néo-zélandaise des droits de l’homme.


316 Le 30 septembre 2010, le Conseil des droits de l’homme a adopté la résolution 15/14 afin, notamment, de transformer la
dénomination du mandat en « Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones ».

Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones | 145

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

317

LE MANDAT DU RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LES DROITS


DES PEUPLES AUTOCHTONES317
Le Conseil des droits de l’homme demande au Rapporteur spécial :
a) D’examiner les moyens de surmonter les obstacles existants à la
pleine et efficace protection des droits de l’homme et des libertés
fondamentales des populations autochtones, conformément à
son mandat et d’identifier, mettre en commun et promouvoir les
meilleures pratiques.
b) De recueillir, solliciter, recevoir et échanger des renseignements et
des communications émanant de toutes les sources pertinentes,
notamment des gouvernements, des populations autochtones
elles-mêmes et de leurs communautés et organisations, sur
les violations présumées des droits de l’homme et des libertés
fondamentales dont elles sont victimes.
c) De formuler des recommandations et des propositions sur
des mesures et des activités appropriées destinées à prévenir
et réparer les violations des droits de l’homme et des libertés
fondamentales des populations autochtones.
d) De travailler en étroite coopération, en évitant les doubles
emplois, avec les procédures spéciales et les organes
subsidiaires du Conseil des droits de l’homme, les organismes
compétents des Nations Unies, les organes conventionnels et les
organisations régionales des droits de l’homme.
e) De travailler en étroite coopération avec l’Instance permanente
sur les questions autochtones et de participer à sa session
annuelle.
f) D’établir un dialogue constructif continu avec toutes les parties
prenantes, notamment les gouvernements, les organismes
compétents, les institutions spécialisées et les programmes
des Nations Unies, ainsi qu’avec les populations autochtones,
les organisations non gouvernementales et les organisations
internationales régionales ou sous-régionales, notamment
au sujet des possibilités de coopération technique dont les
gouvernements peuvent bénéficier sur demande.
g) De promouvoir la Déclaration des Nations Unies sur les droits des
peuples autochtones et les instruments internationaux favorisant
la promotion des droits des peuples autochtones, s’il y a lieu.
h) D’accorder une attention particulière aux droits de l’homme et aux
libertés fondamentales des enfants et des femmes autochtones,
et de tenir compte de la question de la parité entre les sexes dans
l’accomplissement de son mandat.
i) De prendre en considération les recommandations pertinentes des conférences,
sommets et autres réunions mondiales de l’Organisation des Nations Unies, ainsi que
des recommandations, observations et conclusions des organes conventionnels sur les
questions se rapportant à son mandat.
j) De présenter un rapport sur l’exécution de son mandat au Conseil conformément à son
programme de travail annuel.

317 Résolution15/14.

146 | Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 146 22/10/2014 11:33:11


Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

Photo : ONU/Paulo Filgueiras.

Il est important de souligner que le Rapporteur spécial est chargé de la promotion de la Déclaration et
des autres instruments internationaux pertinents. Le rapporteur spécial a également pour mandat de
travailler en étroite coopération avec les INDH.
Pour s’acquitter de ce mandat, le Rapporteur spécial :
• Promeut les bonnes pratiques, notamment les nouveaux dispositifs législatifs, programmes
gouvernementaux et accords constructifs entre les peuples autochtones et les États, visant à
mettre en œuvre les normes internationales relatives aux droits des peuples autochtones
• Fait rapport sur la situation générale des peuples autochtones en matière de droits de l’homme
dans les pays sélectionnés (on notera que le Rapporteur spécial ne peut visiter un pays que si
l’État lui a adressé une invitation officielle)
• Traite des cas spécifiques de violations présumées des droits de l’homme par le biais de
communications adressées à des États ou à d’autres organes
• Conduit des études thématiques sur des sujets particulièrement importants relatifs à la promotion
et à la protection des droits des peuples autochtones ou contribue à ces études.318

Dans son premier rapport soumis au Conseil des droits de l’homme, le Rapporteur spécial actuel a
procédé à une analyse de la Déclaration et des mesures qui doivent être prises par les parties prenantes
concernées, notamment les États, le système des Nations Unies, les peuples autochtones et la société
civile. Dans ce rapport, le Rapporteur spécial a indiqué souhaiter utiliser la Déclaration comme cadre
normatif pour orienter ses travaux.319

318 Pour en savoir plus, veuillez consulter : www2.ohchr.org/english/issues/indigenous/rapporteur/index.htm.


319 A/HRC/9/9.

Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones | 147

UNDRIP_Manual_for_NHRIs_FR.indb 147 22/10/2014 11:33:12


La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

320

Suite à sa visite en République du Congo, le Rapporteur spécial a indiqué


que la création de la Commission nationale des droits de l’homme était
une initiative majeure sur la voie de la réalisation des droits des peuples
autochtones:
La Commission nationale des droits de l’homme, organe relativement
récent créé en 2003 après l’adoption de la nouvelle Constitution, est
un organe de l’État indépendant qui opère en toute autonomie. Ses
objectifs généraux sont de contribuer à la promotion et à la consolidation
de l’état de droit au Congo ; de promouvoir une acceptation et une
compréhension aussi larges que possible des droits de l’homme ; d’aider
à concevoir et à réaliser des campagnes d’éducation pour la protection
des personnes vulnérables, y compris les populations autochtones ;
d’appuyer et d’aider le Gouvernement congolais pour la signature et
la ratification des instruments internationaux relatifs aux droits de
l’homme ; et de renforcer les relations avec les entités pertinentes du
système des Nations Unies et avec les diplomates étrangers.320

3.2. CONTRIBUTIONS DES INDH AUX TRAVAUX DU RAPPORTEUR SPÉCIAL


Pour le Rapporteur spécial, les INDH sont des interlocuteurs majeurs. Elles peuvent lui fournir des
informations indépendantes et faisant autorité, l’aider à préparer les visites dans les pays, contrôler la
mise en œuvre des recommandations et mener d’autres activités de suivi au terme de sa visite dans
le pays. Les INDH peuvent recommander à leur État d’inviter le Rapporteur à examiner la situation des
peuples autochtones en matière de droits de l’homme. Lorsqu’une INDH prépare la visite de son pays,
elle doit fournir au Rapporteur spécial un rapport faisant état des informations pertinentes. Par ailleurs,
l’INDH doit identifier et suggérer des lieux que le Rapporteur spécial doit visiter, ainsi que des peuples
et des organisations qui doivent être consultés. En général, pendant la visite, le Rapporteur spécial
rencontre des représentants de l’INDH. Pour l’INDH, cette rencontre constitue une excellente occasion
de fournir des informations mises à jour sur la situation des peuples autochtones du pays en matière
de droits de l’homme. (Voir Chapitre 11 pour une discussion générale sur la contribution des INDH aux
procédures spéciales).

En juillet 2009, le Rapporteur spécial s’est rendu au Pérou afin d’examiner la


situation d’un conflit violent entre la police et des manifestants autochtones
de la région du Bagua dans le cadre duquel un certain nombre de personnes
ont été blessées ou ont trouvé la mort. Pendant sa visite, le Rapporteur
spécial a rencontré le Défenseur du peuple du Pérou et s’est appuyé
dans son rapport sur les enquêtes initiales que l’institution avait menée
immédiatement après le conflit sur le nombre de personnes qui avaient
disparu suite à l’événement.

320 A/HRC/18/35/Add.5, par. 53.

148 | Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones

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Partie III L’action des institutions nationales des droits de l’homme au plan international

POINTS CLÉS : CHAPITRE 13


• Les INDH peuvent contribuer aux travaux de l’Instance permanente et du
Mécanisme d’experts en apportant leur contribution aux rapports et en
participant aux réunions de ces mécanismes.
• Les INDH peuvent encourager leur gouvernement à envoyer une invitation
au Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones afin qu’il
procède à une visite du pays.
• Les INDH peuvent soutenir les travaux du Rapporteur spécial de diverses
façons, notamment en soumettant des informations sur la situation des
peuples autochtones en matière de droits de l’homme, en apportant
une aide avant et pendant la visite du pays et en procédant au suivi des
recommandations faites par le Rapporteur spécial.

Chapitre 13 : Mécanismes spécifiques aux droits des peuples autochtones | 149

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

Résumé
CHAPITRE 1 : CONTEXTE DE LA DÉCLARATION
• Les peuples autochtones ont des cultures, langues, systèmes juridiques et histoires uniques
et distincts. La plupart ont des liens étroits avec l’environnement et leurs terres et territoires
traditionnels. Il est également fréquent qu’ils aient hérité d’un déplacement hors des terres
et territoires traditionnels, d’un assujettissement, d’une destruction de leurs cultures, d’une
discrimination et de violations récurrentes de leurs droits de l’homme.
• Après des décennies pendant lesquelles ils ne se sont vu accorder que peu ou pas d’attention
par la communauté internationale, les peuples autochtones ont gagné en visibilité et se sont fait
entendre au sein des instances internationales.
• L’Étude Martinez Cobo a contribué à jeter les bases du système moderne et international des
droits de l’homme des peuples autochtones.
• La Déclaration est l’instrument le plus complet sur les droits des peuples autochtones.
• Le système des Nations Unies n’a pas élaboré une définition stricte des « peuples autochtones »
qui pourrait ne pas fonctionner dans tous les contextes et pourrait s’avérer, selon les cas,
insuffisamment ou démesurément inclusive.
• L’auto-identification est un critère clé de la détermination d’un groupe de personnes ou d’un
individu en tant qu’autochtone.

CHAPITRE 2 : LE CONTENU DE LA DÉCLARATION : ÉGALITÉ ET NON DISCRIMINATION,


INTÉGRITÉ CULTURELLE ET DROITS COLLECTIFS
• L’élimination de la discrimination formelle peut exiger d’un État que sa constitution, sa législation
et/ou ses politiques n’exercent pas de discrimination envers les peuples autochtones.
• L’élimination de la discrimination de facto peut exiger des États qu’ils appliquent des lois et des
politiques favorisant l’égalité réelle des peuples autochtones dans la jouissance de leurs droits et
qu’ils adoptent des mesures spéciales.
• Le Mécanisme d’experts a approuvé les programmes nationaux qui, outre le fait qu’ils cherchent
à remédier aux déséquilibres entre les peuples non autochtones et les peuples autochtones,
cherchent expressément à garantir l’égalité entre les hommes et les femmes autochtones
• La Déclaration ne définit pas expressément le mot « culture ». Le Mécanisme d’experts a noté
qu’il n’était pas nécessaire et peut-être même pas approprié de définir la culture. Il convient
d’envisager les cultures autochtones dans une vaste perspective.
• Les peuples autochtones organisent souvent leurs sociétés comme un groupe et c’est la raison
pour laquelle les droits collectifs sont essentiels pour les peuples autochtones.

CHAPITRE 3 : LE CONTENU DE LA DÉCLARATION : L’AUTODÉTERMINATION,


L’AUTONOMIE, AINSI QUE LA PARTICIPATION, LA CONSULTATION ET LE CONSENTEMENT
• Le droit à l’autodétermination est un droit collectif détenu par l’ensemble des membres d’une
communauté ou d’une nation autochtone en tant que groupe et doit être exercé conformément
aux principes de justice, de démocratie, de respect des droits de l’homme, d’égalité, de non-
discrimination, de bonne gouvernance et de bonne foi.
• Les structures politiques, économiques et sociales autonomes des peuples autochtones facilitent
l’exercice réel de leur droit à l’autodétermination.
• Les peuples autochtones ont le droit de participer à la prise de décisions sur des questions qui
peuvent concerner leurs droits, par l’intermédiaire de représentants qu’ils ont eux-mêmes choisis

Résumé | 151

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

conformément à leurs propres procédures, ainsi que le droit de conserver et de développer leurs
propres institutions décisionnelles.
• La Déclaration exige que les États se concertent et coopèrent de bonne foi avec les peuples
autochtones intéressés – par l’intermédiaire de leurs propres institutions représentatives – avant
d’adopter et d’appliquer des mesures législatives ou administratives susceptibles de concerner
les peuples autochtones, afin d’obtenir leur consentement préalable, donné librement et en
connaissance de cause.
• La consultation et la participation sont des éléments essentiels du consentement.

CHAPITRE 4 : LE CONTENU DE LA DÉCLARATION : LES TERRES, LES TERRITOIRES


ET LES RESSOURCES, LE DÉVELOPPEMENT RESPECTUEUX DE L’IDENTITÉ, ET LA
RÉPARATION ET L’INDEMNISATION
• Ce qui constitue les terres, les ressources et les territoires d’un peuple autochtone particulier
dépend des circonstances spécifiques de la communauté en question.
• Deux des principales contraintes pesant sur la libre et pleine jouissance des droits des peuples
autochtones à des terres, territoires et ressources naturelles sont liées d’une part à la non-
reconnaissance par les États de l’existence de l’usage, de l’occupation et de la propriété
autochtones et, d’autre part, au non-octroi par les États aux peuples autochtones du statut et de
la capacité juridiques ainsi que des autres droits légaux appropriés à la propriété foncière.
• Les États doivent prévoir des mécanismes de réparation efficaces pour les situations où le
consentement préalable, libre et éclairé n’a pas été recherché.

CHAPITRE 5 : LA MISE EN ŒUVRE DE LA DÉCLARATION


• La Déclaration est une résolution de l’Assemblée générale. Les résolutions ne créent pas en tant
que telles des obligations juridiques pour les États.
• La Déclaration ne crée pas de nouveaux droits pour les peuples autochtones. Elle s’inspire des
normes existantes en matière de droits de l’homme et cherche à les appliquer à la situation des
peuples autochtones.
• La Déclaration est le reflet d’une approche qui impose aux États des obligations et des
responsabilités.
• Les organes conventionnels utilisent la Déclaration dans leurs travaux et pour les recommandations
qu’ils émettent à l’intention des États.
• les Principes de Paris constituent un vaste cadre normatif auquel s’adossent les INDH pour faire
progresser la protection, la promotion et la réalisation des droits des peuples autochtones.

CHAPITRE 6 : ACCESSIBILITÉ DES INDH AUX PEUPLES AUTOCHTONES


• Pour faire efficacement progresser la protection, la promotion et la réalisation des droits de
l’homme des peuples autochtones, les INDH doivent être accessibles aux peuples autochtones.
• Il est important que les INDH veillent à informer les peuples autochtones de leur existence et de leur
fonction. Il pourra donc s’avérer nécessaire de mettre en place des campagnes promotionnelles
ciblées.
• Les INDH doivent reconnaître que les peuples autochtones ne sont peut-être pas disposés à
établir des contacts avec elles.
• Les INDH doivent prendre des mesures de façon à nouer le dialogue avec les peuples autochtones
vivant dans des zones reculées.
• Les collaborations et les partenariats avec les organisations de peuples autochtones peuvent
favoriser le rapprochement des INDH et des peuples autochtones.

152 | Résumé

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

• Les INDH sont encouragées à créer les conditions d’une présence autochtone au sein de leur
organisation. Il est important d’impliquer les peuples autochtones et leurs organisations dans le
processus de recrutement des membres autochtones du personnel.
• Les programmes de travail spécifiquement axés sur les autochtones favoriseront la présence
d’autochtones au sein des INDH. Les membres du personnel qui travaillent au sein de ces unités
doivent satisfaire à des critères de sélection supplémentaires de façon à ce qu’ils soient dûment
qualifiés et habitués à travailler de manière sensible et appropriée avec les peuples autochtones.
• Lorsqu’elles travaillent avec des peuples autochtones, les INDH doivent être guidées par une
approche fondée sur les droits de l’homme.

CHAPITRE 7 : SENSIBILISATION ET ÉDUCATION


• Pour faire efficacement progresser la protection, la promotion et la réalisation des droits de
l’homme des peuples autochtones, les INDH doivent être accessibles aux peuples autochtones.
• Il est important que les INDH veillent à informer les peuples autochtones de leur existence et de leur
fonction. Il pourra donc s’avérer nécessaire de mettre en place des campagnes promotionnelles
ciblées.
• Les INDH doivent reconnaître que les peuples autochtones ne sont peut-être pas disposés à
établir des contacts avec elles.
• Les INDH doivent prendre des mesures de façon à nouer le dialogue avec les peuples autochtones
vivant dans des zones reculées.
• Les collaborations et les partenariats avec les organisations de peuples autochtones peuvent
favoriser le rapprochement des INDH et des peuples autochtones.
• Les INDH sont encouragées à créer les conditions d’une présence autochtone au sein de leur
organisation. Il est important d’impliquer les peuples autochtones et leurs organisations dans le
processus de recrutement des membres autochtones du personnel.
• Les programmes de travail spécifiquement axés sur les autochtones favoriseront la présence
d’autochtones au sein des INDH. Les membres du personnel qui travaillent au sein de ces unités
doivent satisfaire à des critères de sélection supplémentaires de façon à ce qu’ils soient dûment
qualifiés et habitués à travailler de manière sensible et appropriée avec les peuples autochtones.
• Lorsqu’elles travaillent avec des peuples autochtones, les INDH doivent être guidées par une
approche fondée sur les droits de l’homme.

CHAPITRE 8 : PROMOUVOIR LE RESPECT DE LA DÉCLARATION


• Les INDH ont pour mandat de donner des conseils et de faire des recommandations à leur
gouvernement, ainsi qu’aux autres parties prenantes.
• Les INDH peuvent utiliser leurs mandats pour promouvoir la réforme des lois, politiques et
pratiques de l’État qui violent ou restreignent les droits peuples autochtones.
• Les INDH sont encouragées à utiliser la Déclaration comme norme de référence commune pour
leurs travaux visant à promouvoir les droits des peuples autochtones.

CHAPITRE 9 : ENQUÊTES ET PLAINTES


• Selon leur mandat, les INDH peuvent examiner les plaintes individuelles et collectives relatives à
des violations de droits de l’homme et recommander des voies de recours et des mécanismes
de réparation aux autorités compétentes.
• Certaines INDH disposent de mandats leur permettant de transmettre les plaintes relatives à
des violations de droits de l’homme aux autorités compétentes, notamment aux organismes
gouvernementaux, au parlement, aux autorités judiciaires et aux ministères publics, et de
recommander les voies de recours et les mécanismes de réparation au nom des plaignants.

Résumé | 153

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La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des institutions nationales des droits de l’homme

CHAPITRE 10 : ENQUÊTES PUBLIQUES


• Mener une enquête publique sur les droits de l’homme des peuples autochtones permet aux
INDH d’accomplir plusieurs fonctions simultanément. L’enquête peut avoir des effets positifs
en termes de réforme des lois et des politiques. Néanmoins, les enquêtes posent également
un certain nombre de problèmes qui doivent être pris en considération avant d’enclencher le
mécanisme.
• Mener une enquête publique sur les droits de l’homme des peuples autochtones exige de
franchir un certain nombre d’étapes, notamment la définition du mandat de l’enquête, une étude
et une analyse, la collecte des plaintes, l’organisation d’audiences publiques, des entretiens
avec des représentants des peuples autochtones, la préparation d’un rapport et le suivi des
recommandations.

CHAPITRE 11 : LE CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME


• Les INDH peuvent saisir l’occasion de l’examen périodique universel pour encourager leur
gouvernement à respecter, protéger, promouvoir et faire progresser les droits des peuples
autochtones.
• Les INDH peuvent interagir avec les détenteurs de mandat appropriés pour soumettre des
informations relatives à des violations de droits de l’homme de peuples autochtones, aider les
détenteurs de mandat lors des visites de pays et apporter leur contribution aux recherches qu’ils
mènent.
• Les INDH peuvent envisager d’utiliser la procédure de requête du Conseil des droits de l’homme
pour déposer une plainte au nom de peuples autochtones.

CHAPITRE 12 : ORGANES CONVENTIONNELS


• Les INDH peuvent soumettre des rapports alternatifs sur la mise en œuvre, par l’État, des
obligations au titre des traités, y compris celles qui sont en rapport direct avec les droits de
l’homme des peuples autochtones.
• Les INDH peuvent faire du lobbying auprès de leurs États afin qu’ils acceptent de reconnaître
qu’un organe de traité est compétent pour se saisir de plaintes individuelles et peuvent aider les
victimes à soumettre leurs plaintes aux organes de traités.
• Les observations finales et les recommandations faites par les organes de traités peuvent s’avérer
particulièrement utiles aux INDH dans leurs activités de plaidoyer visant à faire progresser les
droits des peuples autochtones.

CHAPITRE 13 : MÉCANISMES SPÉCIFIQUES AUX DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES


• Les INDH peuvent contribuer aux travaux de l’Instance permanente et du Mécanisme d’experts
en apportant leur contribution aux rapports et en participant aux réunions de ces mécanismes.
• Les INDH peuvent encourager leur gouvernement à envoyer une invitation au Rapporteur spécial
sur les droits des peuples autochtones afin qu’il procède à une visite du pays.
• Les INDH peuvent soutenir les travaux du Rapporteur spécial de diverses façons, notamment en
soumettant des informations sur la situation des peuples autochtones en matière de droits de
l’homme, en apportant une aide avant et pendant la visite du pays et en procédant au suivi des
recommandations faites par le Rapporteur spécial.

154 | Résumé

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Note
Les appellations employées dans la présente publication et la présentation des données qui y figurent
n’impliquent de la part du Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies aucune prise de position quant
au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs
frontières ou limites.

Les cotes des documents de l’Organisation des Nations Unies se composent de lettres majuscules et de
chiffres. La simple mention d’une cote dans un texte signifie qu’il s’agit d’un document de l’Organisation.

HR/PUB/13/2

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones : Un manuel à l’intention des
institutions nationales des droits de l’homme

© Forum Asie-Pacifique des institutions nationales des droits de l’homme et le Haut-Commissariat des
Nations Unies aux droits de l’homme, août 2013

L’APF et le HCDH autorisent la libre reproduction d’extraits de cette publication sous réserve que les éditeurs
soient dûment mentionnés et qu’un exemplaire de la publication comprenant l’extrait soit envoyé aux adresses
suivantes :

Asia Pacific Forum of National Human Rights Institutions


GPO Box 5218
Sydney NSW 1042
Australie

Haut-Commissariat aux droits de l’homme


Section des Peuples Autochtones et des Minorités
Palais des Nations
CH 1211 Genève 10
Suisse

Crédits
Les photographies des Nations Unies sont la propriété de l’Organisation des Nations Unies, qui détient
l’ensemble des droits liés à leur utilisation.

Photographies de la couverture
À gauche : Femmes autochtones Hmong semant des pousses de riz au Vietnam. Photographie ONU/
Kibae Park.

Au centre : Femmes autochtones Yiaku, à Laikipia, au Kenya. Photographie ONU/Samia Slimane.

Rangée inférieure, de gauche à droite : Femme Saami de Norvège pendant la onzième session de
l’Instance permanente des Nations Unies ; photographie ONU/Mark Garten. Enfants autochtones du peuple
Embera, en Colombie ; photographie ONU/Mark Garten. Un frère et une sœur autochtones d’Australie ;
© April Pyle/Amnesty International Australie. Danseur Apache Yellow Bird pendant la cérémonie d’ouverture
de la quatrième session du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones ; photographie
ONU/Jean-Marc Ferré.
APF et HCDH
La Déclaration des
Nations Unies sur les droits

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des peuples autochtones

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