Abc-301677-26296-Interference de Lhemolyse Sur Le Dosage de Vingt Deux Parametres Biochimiques-G
Abc-301677-26296-Interference de Lhemolyse Sur Le Dosage de Vingt Deux Parametres Biochimiques-G
Abc-301677-26296-Interference de Lhemolyse Sur Le Dosage de Vingt Deux Parametres Biochimiques-G
L’hémolyse des échantillons biologiques a depuis long- plasma est de 0,02 g/L (1,2 mol/L) et de 0,05 mg/L
temps été considérée comme impactant les résultats des (3,1 mol/L) dans le sérum [7]. Visuellement décelable à
examens biochimiques classiques pour diverses raisons. partir d’une concentration en hémoglobine libre d’environ
Depuis quelques années les fournisseurs d’automates et 0,1 à 0,3 g/L (6,2 à 18,6 mol/L), l’hémolyse est clairement
réactifs de biochimie fournissent les seuils ou index pour visible à partir d’une lyse de 0,5 % des globules rouges
l’hémolyse, l’ictère et la lactescence au-delà desquels les [7, 8].
résultats ne sont plus fiables [1-3]. L’index d’hémolyse Les causes d’hémolyse sont très majoritairement (98 % des
est déterminé comme étant la plus haute concentration cas) liées à des problèmes pré-analytiques nombreux et de
en hémoglobine présente dans l’échantillon donnant un causes diverses. De façon non exhaustive on peut citer les
résultat compris entre plus ou moins 10 % par rapport au hémolyses liées au patient : veines fragiles, ponction diffi-
même échantillon non hémolysé. Cet index est toutefois cile, prélèvement capillaire ; au système de prélèvement :
défini pour une seule valeur (le plus souvent normale) du calibre des aiguilles inférieur à 21 G, pression négative
paramètre testé considéré. Notre objectif dans ce travail a élevée dans le tube, sous remplissage des tubes ; au pré-
consisté à s’assurer que les index fournis par le fournisseur lèvement : agitation trop vigoureuse des tubes prélevés ;
étaient applicables quelle que soit la plage de mesure du aux conditions de transport : pneumatique, température
paramètre et également de définir l’impact (en % de varia- excessive ; aux conditions de centrifugation : vitesse trop
tion) de l’hémolyse pour l’index fixé par le fournisseur et importante, re-centrifugation des tubes avec gel sépara-
au-delà, sur le résultat obtenu. En effet, s’il ne fait aucun teur [9, 10]. Cependant, dans 2 % des cas l’hémolyse est
doute que l’hémolyse liée soit aux conditions de prélève- intravasculaire, là encore les causes sont très nombreuses :
ment soit à la phase pré-analytique entraîne des résultats héréditaires, acquises ou iatrogènes [11].
erronés, dans les cas d’hémolyse intravasculaire les résul- L’hémolyse n’étant visible qu’après la centrifugation et
tats du prélèvement hémolysés sont informatifs et doivent l’impact sur les paramètres biochimiques potentiellement
pouvoir être rendus [4-6]. important, certains laboratoires adoptent des procédures
L’hémolyse intravasculaire aiguë ou chronique est ren- d’exclusion de ces prélèvements sans distinction et parfois
contrée plus spécialement chez les sujets présentant des à tort.
anémies hémolytiques, mais aussi dans certaines conditions Les mécanismes possibles des interférences liées à
chirurgicales comme la chirurgie cardiaque réalisée sous l’hémolyse peuvent être classés en interférences d’apport,
circulation extracorporelle (CEC), les sujets ayant bénéfi- interférences spectrales ou physiques et interférences chi-
cié d’un remplacement valvulaire, ou chez les patients sous miques.
assistance circulatoire. Dans notre hôpital, cette situation Pour les interférences d’apport, il s’agit en fait d’une sur-
est assez fréquemment observée liée à l’activité chirurgi- charge provenant du contenu érythrocytaire qui va entraîner
cale cardiologique importante sur le site (minimum 1 500 une surestimation de l’analyte dosé en cas d’hémolyse
chirurgies sous CEC par an). Chez ce type de patients en extravasculaire mais qui reflète la réalité en cas d’hémolyse
post-opératoire ou en soins intensifs chez qui l’hémolyse intravasculaire, l’importance de l’augmentation du para-
intravasculaire est le plus souvent aiguë, l’obtention des mètre est directement proportionnelle à sa concentration
résultats biochimiques sur les bilans biologiques réalisés intra-érythrocytaire et à l’importance de l’hémolyse (ex :
toutes les 6 à 12 h est primordiale pour permettre aux anes- potassium, sodium, phosphore, lactico déshydrogénase,
thésistes réanimateurs un suivi correct et une prise en charge aspartate amino transférase. . .).
optimale des patients. Les interférences spectrales sont liées à l’additivité de la
L’hémolyse, faisant suite à une altération ou rupture de loi de Beer-Lambert, et vont s’observer pour les para-
la membrane érythrocytaire quelle qu’en soit la cause, se mètres dont la mesure finale est spectrophotométrique et
caractérise par un relargage de l’hémoglobine et plus géné- réalisée à une longueur d’onde proche des principales
ralement du contenu intra-érythrocytaire dans le plasma. longueurs d’onde d’absorption de l’hémoglobine c’est-à-
La valeur usuelle maximale d’hémoglobine libre dans le dire : 415, 540 et 578 nm. Il peut s’agir d’une surestimation
ou sous-estimation du paramètre dosé (selon que l’on pendant 10 min permet d’éliminer les débris cellulaires.
mesure en cinétique descendante ou ascendante) et dans L’hémoglobine est mesurée sur l’hémolysat en utilisant
tous les cas l’interférence spectrale fournit un résultat l’appareil Sysmex® XE-2100D (Sysmex corporation, Vil-
« erroné ». lepinte, France) ; l’hémolysat est ensuite conservé à -20 ◦ C
Les interférences chimiques sont liées aux perturba- jusqu’à utilisation.
tions induites par l’hémoglobine ou tout autre composant La méthode de surcharge en hémoglobine utilisée consiste
érythrocytaire (protéines structurales, lipides, enzymes, à réaliser à partir de l’hémolysat décongelé une gamme de
carbohydrates) lors de la réaction chimique ou enzymatique concentration en hémoglobine variant de 0 à 2 000 mol/L
utilisée pour le dosage du paramètre. Là encore il peut donc soit de 0 à 32,2 g/L. Chaque point de cette gamme de
s’agir de surestimation ou de sous-estimation et le résultat concentration en hémoglobine est additionné volume à
fourni est erroné dans le sens où il ne correspond pas à la volume à des plasmas de concentration variable pour cha-
réalité. À titre d’exemple on peut citer l’interférence lors cun des paramètres étudiés ; un témoin servant de valeur
du dosage de la créatine kinase par libération d’adénylate de référence est réalisé en additionnant de la même façon
kinase [7]. volume à volume du sérum physiologique à chacun des
L’interférence de l’hémolyse sur les dosages immunochi- plasmas analysés. Sur chacun des différents échantillons
miques est beaucoup moins fréquente que pour les dosages ainsi préparés (avec sérum physiologique et concentrations
spectrophotométriques, cependant on retrouvera les inter- variables d’hémoglobine), la mesure des paramètres bio-
férences liées à une éventuelle surcharge. Il peut toutefois chimiques est réalisée [14].
exister des interférences liées à la réactivité croisée des anti-
corps utilisés vis-à-vis de protéines érythrocytaires [12, 13]. Instrumentation
L’appareil utilisé est le Cobas 6000 analyseur (Roche Diag-
nostics, Meylan, France). Les paramètres ont été mesurés
Matériels et méthodes selon les techniques et réactifs dédiés, les coefficients de
variation déterminés à partir des contrôles de qualité interne
Paramètres étudiés (CIQ) et l’incertitude de mesure déterminée à partir de
l’externalisation des CIQ de chaque paramètre sont indi-
L’interférence de l’hémolyse a été étudiée sur les para- quées dans le tableau 2. En parallèle, sur chaque échantillon
mètres suivants : alanine amino transférase (ALAT), la mesure de l’index sérique d’hémolyse est réalisée par
albumine (ALB), aspartate amino transférase (ASAT), l’automate selon la technique décrite par le fabricant : 6 L
acide urique (AUR), calcium (CA), créatine kinase (CK), de plasma dilué dans 150 L de NaCl 0,9 %, mesure de
créatinine (CRE), protéine C réactive (CRP), cholestérol l’absorbance à 570 nm pour la longueur d’onde princi-
total (CT), gamma glutamyl transférase (GGT), lactate pale et 600 nm pour la longueur d’onde secondaire. Le
déshydrogénase (LDH), lipase (LIP), myoglobine (Mb), résultat est ensuite multiplié par un facteur d’échelle de
magnésium (Mg), fragment N terminal du précurseur du manière à obtenir un résultat d’indice d’hémolyse « H »
peptide natriurétique de type B (NT-Pro BNP), phosphore affiché sur l’automate, correspondant approximativement à
(P), phosphatases alcalines (PAL), protéines totales (PT), une concentration en hémoglobine en mol/L.
protéine S100  (S100), triglycérides (TG), troponine T
cardiaque hypersensible (TNT), urée (UR). Cette interfé- Présentation des résultats - statistiques
rence a été étudiée soit sur une seule valeur (CK, LDH, Nous avons calculé pour chacun des paramètres le rap-
Mb, Mg, P) soit sur deux valeurs (ALAT, ALB, AUR, CA, port de concentration Y/X, défini comme étant le rapport
CRE, CRP, CT, GGT, NT-Pro BNP, PT, TG, TNT, UR, ou de la concentration mesurée [plasma + hémolysat] (Y)
sur 3 valeurs ou plus (ASAT, LIP, PAL, S100) (tableau 1). /concentration mesurée [plasma + NaCl] (X). Ce rapport
est représenté en ordonnée sur les graphiques présentés.
Surcharge en hémoglobine des échantillons Notre critère d’acceptabilité est représenté sur le graphique
plasmatiques par les barres horizontales (plus ou moins 10 % soit Y/X
Préparation de l’hémolysat compris entre 0,9 et 1,1).
À partir des échantillons sanguins sur tubes héparinés
effectués sur des volontaires sains, et centrifugation à
2 500 g pendant 10 min, les globules rouges sont obte- Résultats
nus après élimination du plasma et du Buffy coat. Trois
lavages en sérum physiologique froid ont été réalisés. Les L’index d’hémolyse a été converti en concentration
globules rouges sont ensuite lysés par addition d’eau dis- d’hémoglobine pour une facilité d’interprétation des résul-
tillée volume à volume, une centrifugation à 4 000 g tats (tableau 1 et figures 1 à 3) [15].
Tableau 1. Paramètres pour lesquels l’influence de l’hémolyse a été étudiée sur l’automate Cobas 6000 ce Roche.
Tableau 1. (suite)
Pour chaque paramètre sont précisés : l’acronyme, le nom du paramètre, la méthodologie utilisée (principe, méthode et longueur d’onde de mesure), le
domaine de linéarité fourni par le fabricant, ainsi que le CV de reproductibilité obtenu pendant la période de l’étude (déterminé comme la valeur la plus élevée
obtenue par passage de 3 niveaux de contrôle interne de qualité) et l’incertitude de mesure des paramètres déterminée à partir des résultats de contrôles
internes de qualité externalisés. ND = non déterminé.
Tableau 2. Paramètres pour lesquels l’influence de l’hémolyse a été étudiée sur l’automate Cobas 6000 ce Roche.
Paramètre Valeur Index d’hémolyse Valeur Index Valeur Index Valeur Index
testée (exprimé en étudiée d’hémolyse étudiée d’hémolyse étudiée d’hémolyse
concentration déterminé déterminé déterminé
d’hémoglobine)
Pour chaque paramètre sont précisés : les données fabricants (valeur du paramètre pour laquelle a été déterminé l’index d’hémolyse et index d’hémolyse à
partir de laquelle une interférence est signalée), les données expérimentales (valeurs testées au laboratoire et index d’hémolyse déterminé expérimentalement
pour cette valeur). L’index d’hémolyse correspond à la concentration en hémoglobine la plus faible donnant un résultat supérieur à plus ou moins 10 % par
rapport à la valeur attendue. En italique les index expérimentaux supérieurs à ceux fournis par le fabricant, en souligné les index expérimentaux inférieurs à
ceux fournis par le fabricant. En gras les index expérimentaux identiques à ceux fournis par le fabricant. NC = données non communiquées, * sans précision.
1,4 1,4
1,3 1,3
1,2 1,2
1,1 1,1
Y/X
Y/X
1,0 1,0
0,9 0,9
0,8 0,8
0,7 0,7
0,6 0,6
0,5 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
C Calcium D CRP
1,13 mmol/L 2,44 mmol/L 35 mg/L 182 mg/L
1,5 1,5
1,4 1,4
1,3 1,3
1,2 1,2
1,1 1,1
Y/X
Y/X
1,0 1,0
0,9 0,9
0,8 0,8
0,7 0,7
0,6 0,6
0,5 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
Figure 1. Paramètres non impactés par l’hémolyse. Représentation graphique des résultats expérimentaux obtenus pour l’acide urique
(A), l’albumine (B), le calcium (C) la protéine C réactive (D), la myoglobine (E), le NT-pro BNP (F), la protéine S100 (G), et l’urée (H).
En abscisse la concentration en hémoglobine dans l’échantillon en mol/L. En ordonnée le rapport entre la valeur du paramètre obtenue
en présence d’hémoglobine et la valeur du paramètre obtenue en absence d’hémoglobine. Les traits horizontaux bleus indiquent la zone
d’acceptabilité de 10 % soit un rapport compris entre 0,9 et 1,1.
E Myoglobine F NT Pro-BNP
43 µg/L 196 ng/L 1830 ng/L
1,5 1,5
1,4 1,4
1,3 1,3
1,2 1,2
1,1 1,1
Y/X
Y/X
1,0 1,0
0,9 0,9
0,8 0,8
0,7 0,7
0,6 0,6
0,5 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
G S100 β H Urée
0,06 µg/L 0,38 µg/L 1,20 µg/L 1,96 µg/L 5,6 mmol/L 16,6 mmol/L
1,5 1,5
1,4 1,4
1,3 1,3
1,2 1,2
1,1 1,1
Y/X
Y/X
1,0 1,0
0,9 0,9
0,8 0,8
0,7 0,7
0,6 0,6
0,5 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
Figure 1. (suite)
3,0 4,0
3,5
2,5
3,0
2,0
Y/X
Y/X
2,5
1,5
2,0
1,0
1,5
0,5 1,0
0,0 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
2,0
Y/X
Y/X
1,0 1,5
1,0
0,5 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
Y/X
7,5
6,5
5,5
1,0
4,5
3,5
2,5
1,5
0,5 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
Figure 2. Paramètres impactés de façon positive par l’hémolyse. Représentation graphique des résultats expérimentaux obtenus pour
l’aspartate amino-transférase (A), le cholestérol total (B), la créatine kinase (C), la créatinine (D), la lactico-déshydrogénase (E), le magné-
sium (F), les protéines totales (G), les triglycérides (H). En abscisse la concentration en hémoglobine dans l’échantillon en mol/L. En
ordonnée le rapport entre la valeur du paramètre obtenue en présence d’hémoglobine et la valeur du paramètre obtenue en absence
d’hémoglobine. Les traits horizontaux bleus indiquent la zone d’acceptabilité de 10 % soit un rapport compris entre 0,9 et 1,1.
2,5
1,5
2,0
Y/X
Y/X
1,5
1,0
1,0
0,5 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
I Triglycérides
0,99 mmol/L 2,94 mmol/L
2,5
2,0
Y/X
1,5
1,0
0,5
0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L
Figure 2. (suite)
10 % de l’activité mesurée est notée avec une concentra- Protéines totales (PT)
tion en hémoglobine de 100 mol/L soit 1,6 g/L. Cette
L’hémolyse interfère de façon positive sur le dosage des
augmentation est proportionnelle au degré d’hémolyse
protéines totales. La valeur d’hémoglobinémie à partir de
(figure 2G).
laquelle on observe une augmentation de mesure de plus
de 10 % est de 400 mol/L (6,4 g/L). Pour une valeur de
protéines totales normale, l’interférence est présente dès
Phosphatases alcalines (PAL) 250 mol/L (4,0 g/L) pour des valeurs de protéines totales
inférieures aux valeurs usuelles. Cette augmentation est
La mesure de l’activité PAL est impactée de façon néga-
ensuite proportionnelle à l’importance de l’hémolyse tant
tive par l’hémolyse, mais uniquement pour une activité
pour une valeur normale : 69 g/L que basse : 36 g/L. Cette
PAL normale. En effet pour une activité PAL à 1 kat/L,
interférence est directement liée à la surcharge protéique
il y a diminution de l’activité mesurée à partir d’une
induite par l’hémoglobine car, si on déduit de la valeur de
concentration en hémoglobine de 140 mol/L (2,3 g/L).
PT mesurée la valeur d’hémoglobine, on trouve des résultats
Cette diminution augmente proportionnellement jusqu’à
compris entre ± 10 % (figure 2H).
une hémoglobinémie de 750 mol/L (12,1 g/L), puis
devient moins importante au-delà mais reste significative.
Par contre, pour une activité PAL élevée (3,8 et 15 kat/L),
Protéine S100  (S100)
aucun impact de l’hémolyse n’est retrouvé quelle que soit la
valeur d’hémoglobine sur une gamme de 0 à 2 000 mol/L Aucune interférence de l’hémolyse (hémoglobinémie tes-
(0 à 32,2 g/L) (figure 3D). tée de 0 à 1 150 mol/L soit 18,5 g/L) n’est observée sur
Y/X
0,7 0,7
0,6 0,6
0,5 0,5
0,4 0,4
0,3 0,3
0,2 0,2
0,1 0,1
0,0 0,0
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
1,4 1,4
1,3 1,3
1,2 1,2
1,1 1,1
Y/X
Y/X
1,0 1,0
0,9 0,9
0,8 0,8
0,7 0,7
0,6 0,6
0,5 0,5
0 500 1000 1500 2000 2500 0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L Hémoglobine en µmol/L
E Troponine T hs
38,3 ng/L 272,1 ng/L
1,5
1,4
1,3
1,2
1,1
Y/X
1,0
0,9
0,8
0,7
0,6
0,5
0 500 1000 1500 2000 2500
Hémoglobine en µmol/L
Figure 3. Paramètres impactés de façon négative par l’hémolyse. Représentation graphique des résultats expérimentaux obtenus pour
l’alanine amino-transférase (A), la gamma glutamyl-transférase (B), la lipase (C), la phosphatase alcaline (D), la troponine T hypersensible
méthode stat (E). En ordonnée le rapport entre la valeur du paramètre obtenue en présence d’hémoglobine et la valeur du paramètre
obtenue en absence d’hémoglobine. Les traits horizontaux bleus indiquent la zone d’acceptabilité de 10 % soit un rapport compris entre
0,9 et 1,1.
le dosage de la protéine S100 , pour des valeurs nor- males et/ou pathologiques. L’interférence constatée au-delà
males : 0,06 g/L comme pour des valeurs élevées jusqu’à de cette limite n’est pas retrouvée pour des valeurs patho-
1,96 g/L (figure 1G). logiques de triglycérides ou de créatinine (figures 2 et 3).
plasmatiques et donc où l’hémolyse impacte le résul- La qualité informative des paramètres biochimiques
tat de façon positive et proportionnelle : ASAT, CK, d’urgence est largement démontrée dans la prise en charge
LDH, Mg, P, PT. Cependant, bien que le mécanisme des patients. Les conditions de réalisation de ces exa-
causant l’interférence soit le même, les limites d’indice mens ont permis d’améliorer le temps de rendu du résultat
sont variables car elles dépendent du rapport intra- puisque, dans la liste des paramètres que nous avons étu-
érythrocytaire/plasma de l’analyte considéré. C’est pour diés, le temps maximum d’analyse est de 18 min. Associé
la LDH, dont le rapport intra érythrocytaire/plasma est à un délai d’acheminement correct des échantillons, le
égal à 750, que l’indice d’hémolyse est le plus faible laboratoire est donc à même de rendre les résultats dans
< 7 mol/L (< 0,1 g/L). Pour le phosphore et l’ASAT, un délai compatible avec une prise en charge rapide des
bien que les rapports intra-érythrocytaire/plasma soient patients, c’est-à-dire en moins d’une heure. Ceci est vrai
comparables (40 pour ASAT et 50 pour le P), l’impact de pour les échantillons qui ne présentent aucune anomalie
l’hémolyse est différent puisque l’augmentation observée post-centrifugation et en particulier l’absence d’hémolyse.
est moins importante pour le P que pour l’ASAT se tradui- Les causes d’hémolyse sont effectivement nombreuses, le
sant par un indice d’hémolyse < 7 mol/L (0,1 g/L) pour pourcentage des échantillons hémolysés est variable selon
l’ASAT contre 74 mol/L (1,2 g/L) pour le P. C’est évi- les hôpitaux et les systèmes de prélèvement utilisés. Si, dans
demment pour ces paramètres que l’on retrouve les indices la plupart des cas, cette hémolyse est extravasculaire, il n’en
fournisseurs les plus faibles mais qui s’étendent quand demeure pas moins qu’elle peut être d’origine intravascu-
même de 12 mol/L (0,2 g/L) pour ASAT à 186 mol/L laire dans environ 2 % des cas, ne devant pas conduire à
(3,0 g/L) pour le phosphore [16]. Les résultats obtenus une absence de dosage ou de rendu de résultat [19]. Une
dans notre étude sont légèrement plus faibles que les solution coûteuse consisterait à doser systématiquement
limites indiquées dans les fiches techniques fournisseurs l’haptoglobine sur les échantillons hémolysés. En effet,
[17, 18]. la diminution de l’haptoglobine est reconnue comme un
témoin de l’hémolyse in vivo (indépendamment du méca-
nisme et du lieu), et semble peu affectée par l’hémolyse in
Interférences physiques ou chimiques : vitro [20]. Ceci tient au fait que le complexe hémoglobine-
paramètres pour lesquels l’interférence sera haptoglobine est rapidement éliminé de la circulation par
variable en fonction de la valeur du paramètre les monocytes et macrophages tissulaires via la fixation du
Les problèmes d’interférence spectrale ne se manifestent ni complexe sur le récepteur CD136, ce mécanisme ne pou-
de façon proportionnelle à l’importance de l’hémolyse, ni vant donc se produire qu’in vivo. Le dosage systématique
sur l’ensemble de la gamme de mesure. Ceci est observé que de l’haptoglobine dans les échantillons présentant un index
l’interférence soit négative (sous-estimation) ou positive d’hémolyse élevé n’étant pas envisageable, il faut pouvoir
(surestimation). En règle générale, l’interférence est plus connaître les limites de dosage de chacun des analytes, et
importante pour les valeurs normales du paramètre, mais surtout de rendu des résultats, sachant qu’un patient pour
devient beaucoup plus faible voire négligeable pour des lequel l’échantillon est hémolysé parce que difficile à pré-
valeurs élevées, rendant alors tout à fait possible le rendu du lever, risque de ne jamais avoir de résultat pour certains
résultat sans risque de sur- ou sous-estimation. En effet, par paramètres impactés par l’hémolyse.
exemple pour la PAL, la présence d’hémoglobine entraîne Il faut donc juger de l’impact de l’hémolyse non seule-
une sous-estimation du résultat mais ceci n’est observé que ment en termes d’intensité de l’hémolyse mais aussi de la
pour des valeurs normales de PAL, des valeurs de PAL éle- valeur du résultat trouvé. Ainsi, il est informatif et inté-
vées ne sont pas sous estimées jusqu’à des concentrations ressant d’observer que l’interférence n’est pas comparable
en hémoglobine > 1 000 mol/L (16,1 g/L). De même, la quelle que soit la valeur du paramètre. En cas d’absence
surestimation des TG, du CT et de la CRE n’est observée d’interférence de l’hémolyse sur une valeur pathologique,
que pour des valeurs normales ou basses, les valeurs élevées on ne peut pas utiliser l’argumentaire « impossibilité tech-
n’étant pas surestimées de plus de 10 %. Il en est de même nique ou absence de dosage de l’analyte car interférence
pour l’ASAT ou, bien que la quantité intra-érythrocytaire analytique liée à l’hémolyse ».
soit élevée, des valeurs d’ASAT à plus de 10 fois ou 20 Les limites « fournisseur » établies sont utilisées dans
fois la normale ne sont pas impactées par l’hémolyse et la programmation des automates pour signaler lorsque
peuvent être rendues jusqu’à une valeur d’hémoglobine de l’indice limite est dépassé que le paramètre en question
200 mol/L (3,2 g/L). Enfin pour l’ALAT et la lipase, est sous alarme. Une cause d’erreur possible consisterait
on observe l’effet inverse, à savoir une interférence de alors à diluer l’échantillon de manière à réduire l’indice
l’hémolyse plus importante sur les valeurs élevées que sur d’hémolyse (volume d’échantillon réduit donc diminution
les valeurs basses. de l’indice d’hémolyse), alors que l’impact de l’hémolyse
devient plus important dans cette zone de mesure [21]. C’est de rendu de résultats pour certains paramètres, particuliè-
le cas par exemple pour l’ASAT, les PAL ou la CRE où l’on rement en cas de valeurs pathologiques, que l’hémolyse
voit clairement que pour des valeurs faibles l’impact de soit liée au patient ou aux conditions pré-analytiques. Le
l’hémolyse est important alors qu’il est négligeable pour rendu de résultats des paramètres dont la mesure n’est pas
des valeurs élevées. perturbé par la présence d’hémoglobine, même sur prélè-
Enfin, l’absence de rendu de résultat par le laboratoire vement hémolysé permet un gain de temps dans la prise en
de certains analytes pour un échantillon hémolysé doit charge des patients.
être opposée à la possibilité fournie aux services de soins
équipés d’appareils de biologie délocalisée d’obtenir sur Remerciements. Nous remercions la société Roche Diag-
sang total un certain nombre de paramètres. Ces appa- nostics pour la fourniture des réactifs nécessaires à cette
reils fournissent des résultats sans mesure de l’index étude.
d’hémolyse (CA, CRE, K, GLU) et particulièrement la
kaliémie, puisque ces analyses sont réalisées sur sang total Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de
(d’où leur intérêt potentiel en urgence). Les services de lien d’intérêt en rapport avec cet article.
soins obtenant des résultats sur un appareil de biologie
délocalisée, alors qu’ils ne les obtiennent pas par le labora-
toire, pourraient alors être tentés de privilégier à tort cette Références
utilisation.
1. Lippi G, Luca Salvagno G, Blanckaert N, Giavarina D, Green S, Kitchen
Grâce à cette étude, nous avons évalué l’impact de S, et al. Multicenter evaluation of the hemolysis index in automated clini-
l’hémolyse sur différents niveaux de valeurs des para- cal chemistry systems. Clin Chem Lab Med 2009 ; 47 : 934-9.
mètres biochimiques couramment demandés en urgence.
2. Lippi G, Luca Salvagno G, Montagnana M, Brocco G, Guidi GC.
Ceci nous a permis d’établir un certain nombre de règles Influence of hemolysis on routine clinical chemistry testing. Clinl Chem
sur le rendu des résultats en cas d’échantillon hémolysé. Ces Lab Med 2006 ; 44 : 311-6.
règles permettent de garantir aux cliniciens et aux patients
3. Zumoffen C, Gerrard G, Ensinck A, D’Arrigo M. Hemolysis interfe-
le rendu de résultats fiables même en cas d’échantillon rence in routine clinical chemistry assays. M154. Clinl Chem Lab Med
hémolysé [6, 22]. Elles peuvent être résumées de la façon 2008 ; 46 : S307.
suivante.
4. Hawkins RC. Poor knowledge and faulty thinking regarding hemolysis
Le dosage et le rendu de résultats des paramètres non impac- and potassium elevation. Clin Chem Lab Med 2005 ; 43 : 216-20.
tés par l’hémolyse sont systématiques et ne s’accompagnent
pas de commentaire. Les valeurs élevées des paramètres 5. Plebani M, Lippi G. Hemolysis index : quality indicator or criterion for
sample rejection ? Clin Chem Lab Med 2009 ; 47 : 899-902.
ASAT, CT, CRE, TG doivent être rendues même si
l’échantillon est hémolysé, avec un commentaire signalant 6. Negri M, Facchinetti R. Results of hemolyzed samples can be useful.
la présence d’hémolyse et le sens de l’interférence. Les Clin Chem Lab Med 2008 ; 46 : 1339.
valeurs élevées des paramètres pour lesquels l’hémolyse 7. Thomas L. Haemolysis as influence and interference factor. Biochim
entraîne une sous-estimation du résultat : ALAT, GGT, Clin 2002 ; 26 : 95-7.
LIP, PAL, TNT doivent être rendues avec un commentaire
8. Dhondt J, Hayte J, Demouveaux A. Les prélèvements hémolysés. Ann
signalant la sous-estimation liée à l’hémolyse. Les résultats Biol Clin 2000 ; 58 : 639.
normaux ou élevés pour les paramètres impactés de façon
proportionnelle : ASAT, CK, LDH, MG, P, PT et bien sûr 9. Lippi G, Salvagno GL, Brocco G, Guidi GC. Preanalytical variability in
laboratory testing : influence of the blood drawing technique. Clin Chem
le potassium (K) ne doivent pas être rendus. Les résultats Lab Med 2005 ; 43 : 319-25.
des paramètres Mg, P et bien sûr K inférieurs aux normes
usuelles doivent être rendus avec un commentaire indiquant 10. Lippi G, Blanckaert N, Bonini P, Green S, Kitchen S, Palicka V, et al.
Haemolysis : an overview of the leading cause of unsuitable specimens in
que l’hémolyse surestime le résultat. clinical laboratories. Clin Chem Lab Med 2008 ; 46 : 764-72.
15. Petrova D, Cocisiu G, Eberle C, Oellerich M, Brandhorst G. Can 19. Lippi G, Banfi G, Buttarello M, Ceriotti F, Daves M, Dolci A, et al.
the Roche hemolysis index be used for automated determination of free Recommendations for detection and management of unsuitable samples
hemoglobin ? A comparison to photometric assays. Clin Chem Lab Med in clinical laboratories. Clin Chem Lab Med 2007 ; 45 : 728-36.
2012 ; 50 : A261.
20. Zerbani A, Giraudeaux V. Dosage de l’haptoglobine par immuno-
16. Zou J, Nolan DK, LaFiore AR, Scott MG. Estimating the effects néphélémétrie sur Immage®(Beckmann) : attention à l’interférence de
on hemolysis on potassium and LDH laboratory results. Clin Chim Acta l’hémoglobine. Ann Biol Clin 1999 ; 57 : 490.
2013 ; 421 : 60-1.
21. Vermeer HJ, Steen G, Naus AJ, Goevaerts B, Agricola PT,
17. Ji ZJ. Reply to «Haemoglobin, bilirubin, and lipid interference on Schoenmaker CH. Correction of patient results for Beckman Coulter LX-
Roche Cobas 6000 assays ». Clin Chim Acta 2012 ; 413 : 342-3. 20 assays affected by interference due to hemoglobin, bilirubin or lipids :
a practical approach. Clin Chem Lab Med 2007 ; 45 : 114-9.
18. Ji ZJ, Meng QH. Evaluation of the interference oh haemoglobin, bili-
rubin and lipid interference on Roche Cobas 6000 assays. Clin Chim Acta 22. Carraro P. Potassium report of hemolyzed serum samples. Clin Chem
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