Les Pouvoirs de La Parole: Thème 1
Les Pouvoirs de La Parole: Thème 1
Les Pouvoirs de La Parole: Thème 1
Les pouvoirs
de la parole
Introduction générale 9
Bibliographie indicative
• L’art de la parole
Gorgias, Protagoras, Antiphon [extraits]. Eschyle, Sophocle, Euripide, Aristophane [extraits
de tragédies et de comédies]. Thucydide, Guerre du Péloponnèse [livre 5, dialogue des
Athéniens et des Méliens] (ve s. av. J.-C.). Isocrate, Sur l’Echange [éloge du logos], Platon,
Phèdre [les procédés de la rhétorique]. Aristote, Rhétorique [premier et troisième livres].
Orateurs attiques [Lysias, Démosthène] (ive s. av. J.-C.). Cicéron, De l’invention, Brutus,
L’orateur [extraits] (Ier s. av. J.-C.). Quintilien, Institution oratoire [extraits] (Ier s.). Jean
de Salisbury, Metalogicon [I.17, Éloge de l’éloquence] (1148). Guillaume de Machaut,
Prologue, Le Veoir Dit (vers 1364). François Villon, Le Testament, et Ballades (milieu
xve s.). Sermons joyeux et parodiques [par ex. saint Hareng ou sainte Andouille] (xve s.)
• L’autorité de la parole
Homère, Iliade, chant II [discours d’Agamemnon] ; chant VIII [l’ambassade]. Hésiode,
Théogonie [invocation des Muses] (viiie -viie s. av. J.-C.). Solon, Élégies, IV [« Notre
cité »]. Xénophane, fr. 2 [le savoir dans la cité] (vie s.). Parménide, Poème [rencontre de
la déesse]. Pindare [extraits]. Hérodote, Enquête, I.1. Thucydide, Guerre du Péloponnèse
[livre 2, oraison funèbre de Périclès] (ve s.) ; Platon, Apologie de Socrate, Ménexène,
Théétète [digression sur l’orateur et le philosophe] (ive s.). Cicéron, Catilinaires, Phi-
lippiques (ier s. av. J.-C.). Tite-Live, Histoire romaine [21 et 34, discours insérés dans la
trame du récit historique] (ier s. av. J.-C. – Ier s.). Tacite, Dialogue des orateurs, Annales
[I.31-52, révolte des légions de Germanie et allocution de Germanicus] (ier-iie s.). Saint
Augustin, Les Confessions [extraits] (ive-ve s.).
La Chanson de Roland [extraits, discours épiques] (xiie s.). Rutebeuf, Le miracle de
Théophile (xiiie s.). Jean de Meung, Roman de la Rose [2e partie] (xiiie s.). Thomas
d’Aquin, Somme contre les Gentils [extraits]. Vincent de Beauvais, Miroir de la doctrine
[Prologue, livre 1] (xiiie s.).
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Introduction générale 11
L’art de la parole La
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Synthèse de cours –
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Introduction
Ce chapitre tente de tracer les grandes lignes de l’élaboration d’un art de la
parole ; c’est-à-dire, pour le dire très simplement, de tout ce qui peut per-
mettre d’exprimer quelque chose en son nom, en prenant donc en compte :
qui parle ? Pour dire quoi ? À qui ? Et dans quelle intention ? Nécessairement,
cette mise en place de longue haleine pose une multitude de questions, eu
égard à la nature des paramètres convoqués par le simple fait de parler.
Le chapitre est donc organisé en 5 points ainsi coordonnés :
• la parole est originellement confondue avec la vérité de ce qui est, elle
est de nature divine (1)
• les aspirations de l’homme à fonder sa propre parole procèdent d’une
laïcisation du monde et vont de pair avec une structure politique d’un
genre nouveau : l’art de discourir s’invente sur ces bases (2)
• parler cependant ne se conçoit pas seul : l’adresse à autrui conditionne les
moyens mis en œuvre, qui eux-mêmes se subordonnent à une intention
(3). De là, deux conséquences s’articulent :
• parler peut devenir le lieu de la constitution d’une image de soi proposée
à l’autre (4)
• parler à quelqu’un est la condition de possibilité de toute littérature, au
sens large (5)
Zoom notion
L’art de la parole 13
Il
ɴɴ Cette parole particulière transforme le verbe en être, pourrait-on le
encore dire. Plus encore, elle ne relève pas d’une quelconque co
transcendance, elle existe bien sur le plan de la réalité comme en
force agissante ici et maintenant. Une persistance de cette qualité di
performative et sacrée de la parole se trouve, par exemple, dans co
la formule religieuse « Je te baptise » ou « Je vous déclare unis par le
les liens sacrés du mariage » : ce type de formule fait advenir ce es
qui est dit à l’instant même où cela est dit.
so
ɴɴ On pourra se reporter sur ce point à l’ouvrage essentiel de Marcel sa
Détienne, Les maîtres de vérité dans la Grèce archaïque, Paris, di
Pocket, 1995.
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A. Extraits/citations
us
L’Iliade et l’Odyssée sont émaillées d’invocations aux Muses ; en voici les Pl
exemples : cu
• Invocation initiale dans l’Iliade – traduction Paul Mazon, Les Belles Lettres, la
1972 : so
« Chante, déesse, la colère d’Achille, le fils de Pélée ; détestable colère, qui év
aux Achéens valut des souffrances sans nombre et jeta en pâture à Hadès C
tant d’âmes fortes de héros, tandis que de ces héros mêmes elle faisait la co
proie des chiens et de tous les oiseaux du ciel – pour l’achèvement du des- fo
sein de Zeus. Pars du jour où une querelle tout d’abord divisa le fils d’Atrée, fo
protecteur de son peuple, et le divin Achille. Qui des dieux les mit donc aux ni
prises en telle querelle et bataille ? Le fils de Létô et de Zeus. C’est lui qui, qu
courroucé contre le roi, fit par toute l’armée grandir un mal cruel, dont les pa
hommes allaient mourant. » (I, 1-10) ; co
• Rappel au chant suivant : do
au
« Et maintenant, dites-moi, Muses, habitantes de l’Olympe – car vous êtes,
do
vous, des déesses : partout présentes, vous savez tout ; nous n’entendons
le
qu’un bruit, nous, et ne savons rien. » (II, 485-486).
te
• De même, l’Odyssée commence par ces vers – traduction de Victor Bérard,
Les Belles Lettres, 1924 : En
« C’est l’Homme aux mille tours, Muse, qu’il faut me dire, Celui qui tant erra de
quand, de Troade, il eut pillé la ville sainte, Celui qui visita les cités de tant so
d’hommes et connut leur esprit, Celui qui, sur les mers, passa par tant d’an- pa
goisses, en luttant pour survivre et ramener ses gens. Hélas ! même à ce prix, A
tout son désir ne put sauver son équipage : ils ne durent la mort qu’à leur du
propre sottise, ces fous qui, du Soleil, avaient mangé les bœufs ; c’est lui, le se
Fils d’En Haut, qui raya de leur vie la journée du retour. Viens, ô fille de Zeus, et
nous dire, à nous aussi, quelqu’un de ces exploits. » (I, 1-10).