Lounatcharsky Lénine 1924

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Lénine

A. Lounatcharsky

Lénine et Lounatcharsky sur la Place rouge à Moscou le 1er Mai 1920

Source : A. Lounatcharsky, Lénine tel qu’il fut. Moscou, éditions de l’Agence de Presse Novosti,
1981, pp. 16-37. Première publication : « Un combattant pour le bonheur de l’Humanité » a été
publié pour la première fois dans le journal « Goudok » du 27 janvier 1924. Le second texte est
l’oraison funèbre prononcée par Lounatcharsky le 27 janvier 1924 à l’assemblée de l’Union des
travailleurs des arts de Russie pour honorer la mémoire de Lénine. Il a été publié dans la
brochure « Lénine », éditée par les éditions « Krasnaïa nov » en 1924, ainsi que dans le premier
numéro de la revue « Petchat i Revolutsia » de 1924.

Un combattant pour le bonheur de l’Humanité


Bien des choses ont été dites et écrites sur Lénine. Il est difficile de manquer une telle figure et de ne
pas en ressentir la grandeur. Mais si vous demandez à quelqu’un qui n’est pas concerne comment il se
représente Lénine, il vous répondra que c’est un matérialiste, un esprit pratique, un homme sans
illusions, saisissant parfaitement toutes les attaques et toutes les ruses échafaudées contre lui par son
adversaire et sachant y riposter, que c’est une force énorme agissant au plus épais de la réalité.

Or, quiconque a approché Lénine, quiconque a respiré le même air que lui et vécu dans la même
atmosphère pourra dire que rarement la terre a porté un tel idéaliste.

Vladimir Ilitch ne parle jamais de son idéal, de sa foi en l’homme, de son amour infini pour lui, et il

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n’aime pas que d’autres en parlent. Il estime que cela va de soi. À quoi Lénine aspire-t-il ? Aux
honneurs ou au pouvoir ? Nous savons qu’il ne s’agit pas de cela. Il ne pense jamais à lui. C’est un
homme et c’est un chef. Il ne fait pas partie de ces idéalistes plongés, béats, dans leurs douces rêveries
ou qui cherchent à se conformer à un avenir idéal qu’ils confondent avec la réalité d’aujourd’hui.

Non, Vladimir Ilitch sait fort bien que le but est une chose et que les efforts pour y parvenir en sont une
autre. Il sait fort bien que le royaume de la paix, de la fraternité et du bonheur ne peut être gagné que
par une lutte implacable contre les forces qui se dressent en travers du chemin. Et là, pas le moindre
idéalisme, un esprit froid à l’extrême pénétrant les traits les plus cachés et les plus repoussants de
cette réalité, une totale absence d’illusions.

Lorsque j’avais l’occasion d’observer Lénine, je m’étonnais de l’atmosphère qui régnait autour de lui,
l’atmosphère des hautes cimes. Tout ce qu’il y a de personnel est balayé. Cela ne signifie pas qu’il ne
comprenne pas la nature humaine, et dans tous ses détails, mais au premier plan, chez lui, se dressent
l’idéal, une connaissance solide et la volonté inflexible de travailler à l’accomplissement de cet idéal.
Tout Lénine est là. Il veut et peut, par ailleurs, être un homme comme tout le monde, mais cela est sans
importance, cela ne touche nullement son personnage social, qui est tout entier taillé dans ce bois.

Ses traits principaux sont une psychologie prolétarienne, une activité rationnelle, un travail accompli
avec une dépense minimale de forces, un travail concret réalisé pour atteindre le but que le cœur et
l’esprit de l’homme se proposent. C’est la parenté profonde de Lénine et du prolétariat et c’est aussi sa
parenté avec le parti Communiste, car le parti communiste est le maillon par lequel le prolétariat
s’unit, dans sa masse, au chef de la révolution mondiale.

Et chacun de nous, quoiqu’à un degré bien moindre, vit à peu près la vie que Lénine a menée jusqu’à
son apogée. Tous, nous respirons le même air que lui.

Nous avons le droit de dire : Vive notre guide, mais il faut dire aussi : Vive le prolétariat qui a su se
donner un tel guide ! Seul le prolétariat pouvait, seul le prolétariat devait le faire, car tous les traits qui
constituent l’essence du prolétariat ; la puissance créatrice, la faculté de lutter avec acharnement et
jusqu’au bout pour réaliser ses idéaux, tous ces traits sont exprimés de la façon la plus complète chez
cette puissante figure. Un tel guide est un grand honneur pour le mouvement et les masses qu’il dirige.

Le 27 janvier 1924

Lénine
I.

Camarades, je veux vous décrire à grands traits la place qui est celle de Lénine dans l’histoire de notre
patrie, la Russie, celle qu’il tient dans l’histoire en général, et je vous ferai part de quelques souvenirs
personnels ou, plus exactement, j’essayerai de vous faire un croquis, de vous brosser la silhouette de
Vladimir Ilitch vivant, puisqu’il m’a été donné de l’observer.

Le grand-père de Vladimir Ilitch était un paysan qui labourait la terre dans le gouvernement
d’Astrakhan. Le père de Vladimir Ilitch était un intellectuel-roturier, issu du peuple, très préoccupé de
la vie des paysans, et qui jouissait de l’amour et de la confiance des enseignants qu’il dirigeait. À la fin
de sa vie, il occupait dans l’enseignement une place assez en vue, qui n’en fit pas pour autant un
homme de bureau. C’était un instituteur du peuple, très dévoué, il sympathisait avec les
révolutionnaires et éduqua ses enfants dans un esprit révolutionnaire [1].

[
1] Il a été bien établi que le père de Lénine ne sympathisait nullement avec les révolutionnaires de son temps et qu’il n’a donc
pas pu « éduquer ses enfants dans un esprit révolutionnaire » (Note MIA).

2
Son fils aîné, Alexandre Oulianov, était très brillant. Beaucoup de ceux qui le connurent étudiant
affirment qu’il n’était pas moins génial que Vladimir Ilitch. Ce dernier était encore enfant quand
Alexandre Oulianov entra dans le mouvement révolutionnaire, fut membre de la « Narodnaïa Volia » [2]
et devint l’âme d’une grande conspiration visant à tuer le tsar. Mais le complot fut découvert et
Alexandre fut pendu.

Quelques jours après l’exécution d’Alexandre, Mendéléev [3], l’un des plus grands savants russes,
prononça avec regret dans une de ses conférences : « Ces maudites questions sociales, cette fougue,
inutile à mon avis, pour la révolution, combien elle emporte de dons remarquables ! » Mais Alexandre
Oulianov ne périt pas en vain. Il ne nous a pas seulement, comme membre de l’héroïque « Narodnaïa
Volia », laissé en héritage une tradition héroïque, il a allumé, dans le cœur du jeune Vladimir qui brû lait
déjà d’une haine révolutionnaire pour l’iniquité, d’un amour révolutionnaire pour le peuple qui souffre,
une flamme nouvelle et Vladimir Ilitch jura de consacrer toute sa vie au peuple et à la lutte contre les
Romanov et leurs suppô ts.

De cette façon, par son père et par son frère, Vladimir Ilitch était étroitement lié à la révolution
d’autrefois, celle de la « Narodnaïa Volia ». Son esprit était tourné tout entier vers la recherche des
moyens d’aider l’humanité souffrante.

Dans un vaste mouvement du cœur et de l’esprit, Vladimir Ilitch embrassa toute la souffrance de la
terre, il aspirait à servir de la façon la plus rationnelle, efficace, pour mettre fin à cette souffrance. Il
cherchait la voie qui mènerait avec certitude à ce but. C’est là qu’il fit une double rencontre, celle de la
doctrine de Karl Marx et celle du développement du prolétariat en Russie. Objectivement, comme
l’étude des astres par l’astronome, la doctrine de Karl Marx établissait de quelle façon le capital
apparaît, mû rit et meurt, prédisait le processus par lequel le prolétariat, engendré par le capital même
et uni par lui, parviendrait à vaincre le capital.

Cette doctrine qui fit du rêve socialiste une science fut saisie à l’époque par les meilleurs esprits de la
Russie et, parmi eux, par un grand penseur, Gueorgui Plekhanov [4]. Dans la presse russe publiée à
l’étranger, Plekhanov avait déjà développé l’idée que le marxisme était applicable à la Russie. C’était
une grande chose.

Avançant dans le sillage des grands révolutionnaires de « Narodnaïa Volia », mais ayant déjà renonce à
la lutte authentique, diminués, ayant substitué la phrase à l’ardeur révolutionnaire, les populistes,
épigones dégénérés de la « Narodnaïa Volia » étaient des amis du peuple plus en parole qu’en acte, ils
vivaient des intérêts du capital immense accumulé par les penseurs et les militants des années d’essor
mouvement, les Tchernychevskis [5], les Jéliabov [6], et affirmaient que la Russie suivait un chemin à
part, que le capitalisme ne pouvait pas s’y déployer car son marché intérieur était pauvre et qu’elle
était incapable de conquérir un marché extérieur, que le prolétariat serait toujours une minorité
[
2] « Narodnaïa VoIia » (Volonté du peuple), forte organisation révolutionnaire du début des années 1880 qui avait pour but
d’organiser la lutte contre l’autocratie tsariste. Le comité exécutif à la tête de la « Narodnaïa Volia » était composé de
révolutionnaires professionnels. Alexandre Oulianov s’efforçait d’introduire dans son programme certaines thèses marxistes
(N.R.).
[
3] Mendéléev, Dmitri Ivanovitch (1834-1907), chimiste de renommée mondiale, auteur de la table périodique des éléments
chimiques. Professeur et personnalité de la vie sociale (N.R.).
[
4] Plekhanov, Guéorgui Valentinovitch (1856-1918), personnalité importante du mouvement ouvrier et socialiste russe et
international, théoricien et propagandiste du marxisme, savant d’une culture encyclopédique (N.R.).
[
5] Tchernychevskí, Nikolaï Gavrilovitch (1828-1889), éminent démocrate révolutionnaire et penseur russe, il a voué sa vie à
la lutte contre l’autocratie et le servage. « Il savait, disait Lénine, exercer une action d’orientation révolutionnaire sur tous les
événements politiques de son époque. » (V. Lénine. Œuvres, t. 18, p. 19) (N.R.).
[
6] Jéliabov, Andréï Ivanovitch (1851-1881), membre du Comité exécutif de « Narodnaïa Volia ». Il participa à la création de
ses organisations ouvrières, estudiantine et militaire. Organisateur avec d’autres de l’attentat contre Alexandre II, il fut arrêté à
la veille de l’attentat et exécuté. Lénine avait une grande estime pour Jéliabov qu’il plaçait sur le même rang que Robespierre
et Garibaldi (N.R.).

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insignifiante et que, par conséquent, comme auparavant, on ne pouvait tabler que sur la campagne, sur
la communauté paysanne. Et, comme il était clair que ni la campagne, ni la communauté paysanne, ni
l’intelligentsia ne pourraient sortir la Russie de l’ornière par la propagande ou le terrorisme, cette
doctrine d’épigones ne satisfaisait personne.

À l’époque où Vladimir Ilitch entra dans l’arène de l’activité, l’intelligentsia s’écartait massivement de
la révolution ou même ne lui était plus favorable. C’était la période où régnait la doctrine de Tolstoï et
les idées petites-bourgeoises qui entraînaient dans le bourbier de la doctrine qui voulait « contribuer
au progrès culturel par les petites choses », où le pessimisme prenait le dessus. Ce dont avaient vécu
les années 1860 et 1870 était mort. Dans les années 1880, la vie était morne et sans espoir.

On comprend pourquoi la jeunesse d’alors, celle des collèges et des universités, tendit immédiatement
l’oreille lorsqu’elle entendit dire qu’il existait une autre issue que le populisme, d’autres voies
révolutionnaires. Avec plus d’empressement que les autres, la plus grande figure de la jeune
génération, Vladimir Oulianov, s’y engagea. Il passe immédiatement de la lecture des exposés de
Plekhanov et de l’étude attentive des œuvres de Marx et d’Engels à des recherches statistiques
fondamentales. Il n’avait que 23 ans.

Le premier ouvrage légal de Plekhanov sur le développement de la conception moniste de l’histoire et


le livre sensationnel de Piotr Strouvé sur le capitalisme en Russie n’avaient pas encore été publiés
quand Lénine écrivit un ouvrage important, une œuvre qui vient d’être publiée pour la première fois ;
Ce que sont les amis du peuple, pamphlet mordant contre les populistes et leurs thèses périmées,
preuve éclatante, limpide, convaincante, scientifique, que c’est précisément la classe ouvrière qui peut
et doit prendre en main la direction de l’ensemble du mouvement révolutionnaire.

Dès cette époque, ce jeune homme, cet étudiant prévoyait que la paysannerie sans le prolétariat ne
ferait pas la révolution, car elle a besoin d’un chef et ce chef collectif ne peut être pour elle que la classe
ouvrière, et que la classe ouvrière ne pourrait la faire d’elle-même et pour elle seule, mais seulement
en tant qu’avant-garde de la paysannerie, fidèle aux intérêts des paysans, en tant que représentant de
tous les travailleurs. Dans cette union naturelle d’une classe qui dirige et d’une classe représentant
l’énorme majorité de la population, Vladimir Ilitch voyait le gage indubitable de la victoire.

Cette brochure ne pouvait évidemment être éditée légalement. Mais à présent, quand nous la lisons
(beaucoup, et même parmi les marxistes de vieille date, le font pour la première fois, car elle était
tenue sous le boisseau ; je ne l’ai moi-même lue qu’après la révolution), nous sommes tous frappés par
la clarté des vues qui y sont exposées et nous saisissons l’importance qu’eut l’entrée de Vladimir Ilitch
dans la révolution russe.

Peu après, il essaya de publier légalement sous le nom de Touline un livre [7] dans lequel il faisait la
critique du livre marxiste de Piotr Strouvé, qui donnait dans l’évolutionnisme, dans l’apologie du
capital, le pseudo-marxisme, conciliateur, émasculé, dépourvu d’énergie révolutionnaire. En la
personne de Piotr Strouvé, Vladimir Ilitch voyait le précurseur d’une dégénérescence petite-
bourgeoise du marxisme dont se couvriraient des intellectuels éloignés du peuple mais désireux
d’utiliser dans leurs buts mesquins la classe ouvrière elle-même ; leurs objectifs allaient peut-être
jusqu’à un coup d’É tat, mais à un coup d’É tat libéral, dans un cadre purement bourgeois. Et dans son
article signé Toulíne, Vladimir Ilitch attaquait à travers Strouvé tout le réformisme et le menchévisme.

Comme je l’ai déjà dit, Vladimir Ilitch était paysan d’origine et intellectuel de formation. Il était
également ouvrier d’adoption. Il partageait son temps entre ses livres d’étudiant et les cercles ouvriers.
Dans ces cercles, l’impression qu’il produisait était inoubliable. Sa pensée captivait les prolétaires. Une
fois qu’ils l’avaient rencontré, ils étaient acquis pour toute la vie à la lutte révolutionnaire.
[
7] Il s’agit de l’ouvrage de Lénine Le contenu économique du populisme et la critique qu’en fait dans son livre M. Strouvé
(Influence du marxisme sur la Littérature bourgeoise). A propos du livre de P. Strouvé « Notes critiques sur le développement
économique de la Russie, Saint-Pétersbourg, 1894, ouvrage écrit à Pétersbourg fin 1894-début 1895 (N.R.).

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Il fut chassé de l’Université de Kazan pour son esprit révolutionnaire. A Pétrograd, il fut arrêté et
déporté en Sibérie. Pendant son exil, il écrivit un ouvrage décisif, tout a fait légal (Le développement du
capitalisme en Russie) dans lequel il démontrait tout ce qu’avaient d’erroné les idées populistes sur
l’impossibilité pour le capitalisme de se développer en Russie, ouvrage si fondamental, utilisant avec
une telle maîtrise une énorme quantité de données statistiques, qu’il mit immédiatement Vladimir
Ilitch, connu jusqu’alors des seuls cercles révolutionnaires, au premier rang des statisticiens russes,
des chercheurs dans le domaine de l’économie russe.

Vladimir Ilitch s’enfuit de son lieu de déportation et passa à l’étranger [8]. Sa première pensée fut de
rejoindre Plekhanov, de rassembler l’émigration de pensée marxiste et de commencer à publier un
journal. Ce journal, il l’intitula Iskra (l’É tincelle) et mit en épigraphe les paroles d’un décembriste [9]
« De l’étincelle jaillira la flamme ». Et de cette étincelle que Vladimir Ilitch envoyait de l’étranger, de
Suisse en Russie, une flamme s’alluma si bien qu’on vit des quatre coins du monde, une flamme telle
qu’il n’en avait encore jamais brillé de pareille.

Vladimir Ilitch devint l’un des principaux guides de la classe ouvrière et d’une partie de l’intelligentsia,
rassemblées dans le parti social-démocrate. Bientô t, deux grands courants se dessinèrent dans ce
parti : un courant qui voulait en fait accomplir une révolution bourgeoise en se servant des ouvriers et
un courant qui voulait la révolution socialiste et qui la croyait possible.

La polémique était la suivante. L’aile petite-bourgeoise, qui en fait aspirait à la révolution bourgeoise
et, sans en avoir conscience, ne représentait que l’aile gauche de la bourgeoisie flirtant avec la classe
ouvrière comme force motrice de la révolution bourgeoise ; cette tendance affirmait : la Russie n’est
pas mû re, elle est économiquement arriérée et si nulle part au monde il n’y a pas jusqu’à présent de
révolution socialiste, comment serait-elle possible en Russie ? Ce n’est pas sérieux ! L’autre aile
purement ouvrière disait : la Russie possède une charge extraordinaire d’énergie révolutionnaire, sa
paysannerie exige la révolution agraire ; si la classe ouvrière est capable de s’unir à la paysannerie, si
elle donne aux paysans les terres des propriétaires fonciers et s’assure ainsi leur soutien fraternel, elle
deviendra si puissante, cette classe ouvrière russe, que non seulement elle mènera à  bonne fin la
révolution démocratique, mais elle pourra occuper des positions socialistes révolutionnaires de
premier plan.

Le désaccord principal était là  : ou bien soutenir les libéraux et jouer les seconds violons pour s’asseoir
ensuite dans les fauteuils de gauche du parlement en qualité d’opposition à la manière autrichienne ou,
au mieux, à la manière allemande, ou bien briser l’autocratie, chercher à briser aussi la bourgeoisie,
s’appuyer sur la paysannerie, mener la révolution aussi loin que possible et faire savoir au monde
entier que le passage au socialisme avait commencé. C’est sur ce point que mencheviques et
bolcheviques se séparaient et Vladimir Ilitch se mit a la tête de l’aile bolchevique, cette fois non plus
comme l’un de ses dirigeants, mais comme son chef indiscutable, jouissant de l’autorité la plus grande
et, alors déjà , littéralement adoré de l’aile révolutionnaire.

À partir de ce moment, l’importance de Vladimir Ilitch dans l’histoire russe est liée à son rô le de
dirigeant du bolchevisme russe. Grâ ce aux bolcheviques et à Lénine, la révolution russe a été une
grande révolution, beaucoup plus importante que la Révolution française, une révolution qui dépassa
toutes les précédentes au sens où elle balaya toutes les survivances féodales, toutes les survivances du
régime bureaucratique et seigneurial et fit faire au pays un pas décisif dans le sens du communisme.

[
8] La déportation de Lénine prenait fin le 29 janvier (10 février) 1900. Ce jour-là, Lénine quitta le village de Chouchenskoïé
avec sa femme, N. K. Kroupskaïa et la mère de celle-ci. Lénine partit pour l’étranger avec l’autorisation des autorités le 16
(29) juillet 1900 (N.R.).
[
9] Les décembristes, aristocrates révolutionnaires russes exigeant un gouvernement constitutionnel qui déclenchèrent en
décembre 1825 (d’où leur nom) une insurrection contre le pouvoir autocratique despotique. Le soulèvement fut cruellement
réprimé (N.R.).

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La Russie a accompli une révolution qui l’a mise à la limite des mondes. Elle a accompli la première
révolution socialiste et elle invite l’Occident à en faire autant. Elle a fait la dernière révolution
démocratique d’Europe et elle y convie l’Orient. Ayant uni ces deux révolutions en une seule, elle a
conquis le droit d’unir la grande révolution des peuples colonisés non européens soulevés contre leur
asservissement à la grande révolution des prolétaires européens et américains en train de transformer
les destinées de l’humanité du capitalisme au communisme. Tous ces événements grandioses
déterminent le rô le joué par Vladimir Ilitch dans l’histoire.

II.
Nous sommes marxistes et nous nous nommons ainsi parce que nous reconnaissons en Karl Marx le
grand homme qui a formulé la loi du mouvement de l’histoire mondiale et dont la personnalité s’est
faite l’expression de la lutte prolétarienne, autant que les événements mondiaux peuvent s’incarner
dans un être humain.

Karl Marx a transformé les aspirations libératrices de l’humanité en une théorie exacte, il a
scientifiquement justifié la lutte pour la liberté, il a montré par mille exemples où et comment avancer,
c’est pourquoi nous le considérons comme le plus grand homme de l’histoire mondiale.

Aujourd’hui, une autre figure, celle de Vladimir Lénine, vient se placer à cô té de ce géant. Vladimir
Ilitch a mis en œuvre la doctrine de Marx. À quoi sont arrivés les marxistes occidentaux, les sociaux-
démocrates ? Après avoir juré, avant la guerre de 1914, de s’abstenir de tout soutien au militarisme
bourgeois et de répondre par le boycott ouvrier à chaque tentative de la bourgeoisie pour entraîner les
peuples dans la guerre, ils ont, en fait, chacun dans leur pays poussé les ouvriers, comme de la chair à
canon, à défendre les intérêts du capital de leur pays sous les drapeaux-chiffons d’un faux patriotisme.
Ce fut une banqueroute épouvantable et honteuse. Seules quelques voix protestèrent, les voix
d’hommes refusant d’obéir à la vague de chauvinisme qui submergeait même les ouvriers ; seuls
quelques-uns surent rester fidèles à l’humanité et au socialisme, et parmi eux, Lénine fut
immédiatement au premier plan.

Aux conférences social-démocrates de Zimmerwald [10] et de Kienthal [11] et dans la presse de gauche de
l’époque, ils déclarèrent : nous ne sommes ni du cô té de l’Angleterre et de ses alliés, ni du cô té de
l’Allemagne et des siens, nous sommes la grande puissance mondiale du travail et les ennemis de tous
les impérialistes quels qu’ils soient. Et au sein de cette puissance mondiale du travail, dis-je, Lénine
s’est montré immédiatement un dirigeant décisif, un chef reconnu de tous.

Jusqu’alors, on ne voyait en Lénine que le chef d’une seule moitié, la plus faible peut-être, du
mouvement russe lui-même encore faible. Mais dès lors, le monde vit en lui un rempart, le dirigeant,
l’organisateur du véritable internationalisme. Un océan de bras et de cœurs monta alors de tous cotés
vers Lénine. Tous ceux qui haïssaient la guerre, tous ceux qui croyaient à la force des ouvriers
reconnurent en lui le héraut de la plus grande des luttes mondiales.

Non seulement Lénine donna aux combattants révolutionnaires contre l’impérialisme le


commandement de lutter dans chaque pays contre leur gouvernement, mais il donna lui-même sur-le-
champ l’exemple de cette lutte : Lénine combattit implacablement le tsarisme et le gouvernement
bourgeois qui poursuivit la guerre impérialiste après la chute du pouvoir tsariste. Les partis ouvriers
d’Europe reçurent ainsi un modèle de tactique juste.

Lénine était d’une grande patience. Jamais il ne proféra un seul mot de reproche quand les appels que
[
10] Conférence de Zimmerwald. Conférence internationale socialiste qui se tint en septembre 1915 à Zimmerwald, en Suisse.
La principale question discutée fut celle de la lutte du prolétariat international contre l’impérialisme et la guerre. La
conférence a adopté un manifeste correspondant (N.R.).
[
11] La conférence de Kienthal. Conférence internationale socialiste qui se tint en avril 1916 à Kienthal, en Suisse. La
principale question à l’ordre du jour fut la lutte pour mettre fin à la Première Guerre mondiale (N.R.).

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nous lancions a l’Occident ne rendaient qu’un faible écho. Nous escomptions que la révolution russe,
qui avait décidé de mettre fin au pouvoir des banquiers, des patrons et des propriétaires fonciers, que
cette révolution serait rapidement entourée de toute une famille de nouvelles révolutions dans les pays
mieux préparés que nous à la victoire du communisme. Six ans passent. Ces révolutions mû rissent,
leur marche se poursuit, les renversements s’approchent à pas feutrés ; en Allemagne, par exemple, ils
sont nettement discernables. Ils frappent déjà à la porte [12]. Le monde change et, sous nos yeux, se
partage deux : d’un cô te, le fascisme qui arrache a la dictature bourgeoise le masque de la culture et de
la démocratie ; de l’autre, le communisme à la pensée claire.

Lénine est un guide à l’échelle mondiale, car il est la personnification et l’un des principaux moteurs
d’un bouleversement gigantesque, comme l’histoire n’en avait jamais connu.

III.
Camarades, je voudrais vous tracer maintenant une brève esquisse de la personne qu’était Vladimir
Ilitch.

La première chose qui frappait, c’était son immense intelligence. C’était une joie que de siéger au
Conseil des Commissaires du peuple et de regarder Lénine écouter avec la plus grande attention,
réfléchir, soupeser, examiner tout ce qui touchait à la question abordée, et il y en avait beaucoup, puis
en faire ensuite la synthèse. Cette synthèse ô te aux polémiques, aux divergences tout objet : s’il prenait
le parti des uns contre les autres et s’il conciliait les vues des uns et des autres d’une façon inattendue,
c’était avec des arguments tels que personne ne pouvait les réfuter.

Les problèmes qui se posaient alors engageaient les destinées du pays, leur solution exigeait une
gigantesque tension des forces. Cette tension n’était pas visible chez Vladimir Ilitch. Est-ce que cela
veut dire qu’il ait traité à la légère ne serait-ce qu’une seule question ? Jamais. Jamais le moindre
dilettantisme. Quand il ne savait pas, il posait des questions, il se documentait. Il ressentait sans cesse
l’immense responsabilité qui pesait sur lui mais cela ne l’empêchait pas de rester joyeux, alerte, de
faire tout ce qu’il fallait avec un charme qui nous tenait tous, immanquablement, sous son emprise.

C’est également sa force d’esprit qui, outre les traits particuliers de son tempérament, rendait possible
cette tension gigantesque sans efforts apparents, sans signes extérieurs de fatigue, d’épuisement ou
d’abattement.

Le cœur de Lénine, lui, s’exprimait surtout dans un amour profond. Ce n’était pas l’amour-bonté dans
le sens habituel. Quand il parlait, et c’était rare, de la vérité, de la morale humaine éternelle, du bien, on
sentait combien ce sentiment était ancré en lui, il le réchauffait et lui donnait cette force qui le faisait
puissant et dur comme l’acier dans l’exécution de sa volonté. S’il haïssait, – il haïssait ses ennemis
politiques, il n’avait pas d’ennemis personnels ; il haïssait les classes, non les personnes ; – s’il haïssait,
c’était donc au nom de l’amour, de cet amour qui excédait le moment présent et les relations présentes.

Cela ne signifie pas pour autant que Vladimir Ilitch était sec ou fanatique, et que seule la cause existait
pour lui. Quand il pouvait manifester sa tendresse, sa cordialité, il le faisait d’une façon touchante.

Le jour viendra où les amis proches de Vladimir Ilitch diront quel homme il était dans ses rapports
personnels. je veux ne m’arrêter, pour l’instant, que sur quelques traits. Il faut vous dire qu’on ne
saurait imaginer de camarade aussi plein de sollicitude, aussi gentil, aussi dévoué que lui. Et il n’en
[
12] Lounatcharsky pense sans doute à l’insurrection de Hambourg de 1923 qui devait marquer le début de la grève générale et
de l’insurrection armée de toute l’Allemagne pour mettre fin à la domination de la bourgeoisie monopoliste et fonder un
gouvernement ouvrier et paysan. Mais, au moment décisif, les social-démocrates de gauche refusèrent de soutenir la
proposition de grève générale faite par les communistes. Les social-démocrates de droite continuaient à soutenir activement la
bourgeoisie. La trahison des leaders de la social-démocratie, qui sapèrent l’unité d’action du prolétariat, a causé la défaite de
l’insurrection (N.R.).

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allait pas ainsi qu’avec ses collaborateurs les plus proches, mais avec tout membre du parti et plus
simplement avec toute personne entrant dans son cabinet. Pourquoi donc ces gens « simples » qu’il
aimait, des conversations desquels il tirait tant que nous autres, pauvres pécheurs, nous n’aurions pas
tiré de dix volumes ce qu’il obtenait d’un entretien avec un moujik de Tver ou de Riazan, pourquoi
sortaient-ils tous de chez lui avec un tel sourire de bonheur sur les lèvres ?

Ils venaient nous voir aussi sans qu’il se passâ t rien de spécial, peut-être pouvaient-ils seulement noter
une certaine différence avec les fonctionnaires de l’ancien régime. Mais quand ils avaient été reçus par
Vladimir Ilitch, ils sortaient de chez lui métamorphosés. « Nous avons été jusqu’au plus grand, disaient-
ils. Tout à fait simple ! Il a posé des questions sur tout et il a tout expliqué. » Et si Vladimir Ilitch l’avait
pu, sans doute n’aurait-il rien fait d’autre que plonger dans ce monde ouvrier et paysan. Il profitait de
chaque occasion, de chaque moment libre pour le faire.

Il disait souvent : à telle heure, il faudra que je fasse ceci ou cela mais ensuite il y aura un intervalle et je
recevrai les délégués de paysans du gouvernement de Simbirsk, de Sibérie ou du Turkestan. Bien
entendu, il aurait pu les recevoir en 15 minutes, mais il les gardait parfois une heure ou une heure et
demie. Puis il disait, comme s’il avait un peu honte : « Excusez-moi, je me suis attardé, c’était très
intéressant. »

Il savait que chaque erreur était dangereuse et pouvait conduire à de nombreuses victimes, aussi était-
il toujours d’un grand sérieux lorsqu’il s’agissait de prendre des décisions. Mais il avait aussi la
certitude que nos ennemis seraient finalement vaincus et c’est cela qui lui inspirait sa confiance
inébranlable et ce fin sourire malicieux et plein d’esprit. Il savait que l’histoire serait plus maligne que
tous les malins, qu’elle vaincrait tous les ennemis, et qu’elle était avec lui, qu’il était son fils chéri, son
confident, qu’il avait écouté sur son cœur ce qu’elle voulait et où elle allait.

Camarades, la figure de Lénine dans l’histoire russe est immense. Il a fait de la Russie la république du
monde la plus avancée, la plus proche du communisme. Il nous a lavés de la honte d’un esclavage
séculaire, il a placé la Russie en tête de tous les peuples du monde.

Plus que tout autre, c’est lui qui a donné la liberté aux minorités nationales, uni par des liens
indissolubles les ouvriers et les paysans, créé le pouvoir soviétique, et c’est lui aussi qui a indiqué qu’à
mesure que s’éteindraient les mentalités contre-révolutionnaires, il faudrait accorder les droits
soviétiques à toute la population sans exception, qu’il faudrait comprendre le Pouvoir soviétique
comme le moyen de faire participer tout le monde, jusqu’au paysan le plus arriéré, à une activité d’É tat
vivante et réelle.

Lorsque nous parlons de la grandeur de Lénine dans l’histoire russe, de sa grandeur dans l’histoire
mondiale, nous ne renonçons pas à notre enseignement marxiste sur les limites du rô le de la
personnalité. Lénine a été formé par toute la marche de la révolution russe, par la puissante volonté
d’un prolétariat russe sur le chemin de la maturité.

Lénine est le produit des événements du monde actuel. Lénine est le reflet, la création, l’incarnation de
la grande lutte des ouvriers et des paysans du monde entier. Nous sommes entrés dans une grande
époque et c’est pourquoi nous comptons de grands hommes dont Lénine est le premier.

Cependant, je voudrais dire tout de suite que, malgré sa valeur historique, c’était un homme dans
lequel la grandeur historique allait de pair avec beaucoup de charme personnel, un homme chez qui les
aspects moraux et intellectuels s’harmonisaient de façon exceptionnelle. C’était un être si libre, si
dévoué à notre grande cause, si bon intérieurement, si pur dans ses idées, si merveilleux dans le
moindre de ses gestes qu’auprès de son tombeau, la mémoire pleine de son souvenir, l’on se demande
s’il avait quelques petits défauts, on cherche dans sa mémoire un signe de vanité, de suffisance peut-
être, une certaine recherche de satisfaction personnelle aux dépens de son devoir. On ne se souvient de
rien de pareil, jamais, nulle part.

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On dit qu’il existe dans les romans des personnages « purement positifs », d’ailleurs d’un ennui mortel.
Mais lui était un personnage purement positif dans la vie. Un homme d’or par l’esprit, par le cœur, dans
chacun de ses mouvements, un homme ciselé dans de l’or pur, sans aucune addition. Et l’on se dit que,
vraiment, c’était le premier socialiste. Ce n’était pas seulement le premier socialiste pour les exploits
qu’il a accomplis, mais le premier exemple de ce à quoi l’homme peut atteindre. Sa perte n’est pas
seulement la perte d’un guide, c’est la perte d’un être sans pareil, tant il dégageait de sympathie, de
charme ; nous autres, quinquagénaires presque, nous qui en avons vu de toutes les couleurs, nous ne
savons pas si nous aurons dans notre vie le bonheur d’en rencontrer un autre.

Camarades, bien sû r, c’est vrai, Lénine est vivant. Bien sû r, ses œuvres, ses traditions, son esprit nous
restent. Est-ce que de tels hommes peuvent mourir ? Bien plus, Lénine est peut-être maintenant plus
vivant que jamais. Un homme vivant, on le critique, on se mesure à lui d’une façon ou d’une autre, mais
ici, au bord de sa tombe, nous avons tous senti que cela n’a pas de sens. Un grand don nous avait été
fait : un timonier aimé, irréprochable et infaillible. Et dans son apothéose d’aujourd’hui, Lénine est
sans doute plus fort qu’il ne l’était vivant.

Et, cependant, chacun de nous se sent orphelin. Nous sommes restés seuls sur la terre, nous tous, qui
que nous soyons : gens petits, moyens, grands ou très grands, mais tous d’un calibre habituel pour
notre temps, qui d’un pouce plus haut, qui d’un pouce moins haut… Et bien sû r, nous lutterons et nous
suivrons la voie tracée par Lénine. Mais cet homme, si immensément doué qu’il semblait échapper à la
condition humaine quand en réalité il l’accomplissait pour la première fois, cet homme qui nous a
fourni le modèle de l’homme véritable, tel qu’il doit être, cet homme n’est plus. Nous restons dans
notre milieu, dans notre monde d’hommes ordinaires.

Lors de l’enterrement de Marx, Engels a dit que l’humanité avait diminué d’une tête. Nous ressentons
la même chose : il fait moins clair, le jour semble tomber. Nous n’avons plus ce flambeau brillant qui
nous aidait à mieux voir les grandes et les petites choses.

L’humanité est grande. Elle est entrée dans une période de crise et de création, douée d’une richesse
immense, inépuisable. De ses entrailles s’élèveront désormais des êtres qui, à une autre époque,
seraient restés des sages inconnus dans un village lointain et qui peuvent maintenant se hisser sur le
char de l’É tat. Nous les attendrons. Nous les éduquerons. Et nous-mêmes, dans la mesure de nos forces,
chacun à son poste, frémissants, conscients de la grandeur de l’époque, nous travaillerons dans le sens
indiqué par l’histoire mondiale tout entière et révélé par le génie de Vladimir Ilitch.

Camarades, un phénomène aussi grand que Lénine trouvera certainement son expression dans l’art
mondial. Qu’importe si les tableaux qui seront dans les musées, les thèmes musicaux, les personnages
des pièces de théâ tre ne seront pas copiés directement sur Lénine. Mais retenez que nous avons été
hissés à une très grande hauteur. Récemment encore, nous regardions autour de nous et nous nous
demandions : « Où sont les génies ? Où est l’héroïsme ? Où est le sublime ? » Or, nous l’avons vu, nous
avons vu l’Homme avec une majuscule, nous avons respiré le même air que lui, nous avons pu
l’observer dans son activité historique et dans sa vie de tous les jours. Comme un foyer, il concentrait
tous les rayons de cette lumière et de cette chaleur dont les vagues parcourent aujourd’hui la Terre
dans l’héroïsme des ouvriers, des paysans et des soldats de l’Armée Rouge.

Nous entrons dans une époque héroïque, et Lénine, sa quintessence, son foyer le plus éclatant, son
expression concentrée doit nous inspirer et nous élever dans la création artistique que, nous autres,
rassemblés ici, sommes appelés à accomplir. Oh ! si l’art qui sera le nô tre désormais pouvait être digne
de l’homme qui était à notre tête ! Ce serait un art véritablement grand.

Et ce n’est pas seulement vrai de l’art, c’est vrai aussi de tous les autres aspects de la vie. É galer Lénine,
personne ne le peut mais chacun le doit. Chacun doit tout faire pour s’élever à la hauteur de Lénine et
ce dans la pensée, dans le travail, dans la vie, dans la lutte.

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Le 27 janvier 1924

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