Thèse de Doctorat: Lauren PERIERES
Thèse de Doctorat: Lauren PERIERES
Thèse de Doctorat: Lauren PERIERES
THÈSE DE DOCTORAT
Soutenue à Aix-Marseille Université
le 09 novembre 2021 par
Lauren PERIERES
Epidémiologie de l’hépatite B chez les
enfants au Sénégal
Je soussigné, Lauren Périères, déclare par la présente que le travail présenté dans ce
manuscrit est mon propre travail, réalisé sous la direction scientifique de Cheikh Sokhna
et Sylvie Boyer, dans le respect des principes d’honnêteté, d'intégrité et de responsabilité
inhérents à la mission de recherche. Les travaux de recherche et la rédaction de ce
manuscrit ont été réalisés dans le respect à la fois de la charte nationale de déontologie
des métiers de la recherche et de la charte d’Aix-Marseille Université relative à la lutte
contre le plagiat.
Ce travail n'a pas été précédemment soumis en France ou à l'étranger dans une version
identique ou similaire à un organisme examinateur.
Cette œuvre est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative
Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0
International.
2
Résumé
Sources de données : Ce travail de recherche s’appuie sur les données du projet AmBASS
(ANRS 12356), une enquête transversale sur l’ampleur et les conséquences de l’infection
chronique par le VHB menée d’octobre 2018 à mai 2019 à Niakhar, au Sénégal. De plus,
une revue systématique de la littérature a été effectuée en utilisant les bases de données
PubMed, Web of Science, PsycINFO, African Index Medicus et African Journals Online.
4
Abstract
Background: The World Health Organisation (WHO) has set the goal of eliminating
hepatitis B by 2030. Sub-Saharan Africa (SSA) is one of the most affected regions, and
elimination of hepatitis B in this region relies on the prevention of infection in young
children. Indeed, infection at a young age is associated with a higher risk of progression
to chronic infection and liver cancer and in SSA, hepatitis B virus (HBV) is mainly
transmitted during childhood. In Senegal, a country aiming to eliminate hepatitis B, there
are no data on the epidemiology of HBV in children in the general population, and in rural
areas. In this context, epidemiological data in this population are needed.
Objectives: The main objective of this thesis is to describe the epidemiology of hepatitis B
in children born after the introduction of the hepatitis B vaccine in Senegal. This main
objective is broken down into four specific objectives:
1) Estimate the prevalence of chronic HBV infection in the general population and
according to age groups, as well as treatment needs
2) Identify the factors associated with HBV infection in children
3) Estimate hepatitis B vaccination coverage in children and the factors
associated with non-adherence to the vaccination schedules (incomplete or
untimely vaccination)
4) Identify the reasons of non-vaccination and under-vaccination of children and
adolescents in SSA
Data sources: This research is based on data from the AmBASS project (ANRS 12356), a
cross-sectional survey on the burden and impact of chronic HBV infection in rural Senegal,
conducted from October 2018 to May 2019 in Niakhar, Senegal. In addition, a systematic
review of the literature was performed using PubMed, Web of Science, PsycINFO, African
Index Medicus and African Journals Online databases.
Results: The prevalence of chronic HBV infection was 6.9% [95% confidence interval: 5.6-
8.1] in the general population of the Niakhar area. The prevalence varied markedly
according to age group: the prevalence was very low in children under five (<1%), but
high in adults born before the introduction of the HBV vaccine (>10%). Analyses showed
that older age, tattoos, stitches, home birth, and having a sibling infected with HBV were
associated with HBV infection in children.
Despite an increase in birth dose vaccine coverage in children born ≥2016 (67% in
2017-2018), nearly half did not receive ≥3 doses according to the WHO-recommended
schedule and several factors, including home birth, birth during the dry season, and living
far from a healthcare post, were associated with non-adherence to the vaccination
5
schedule. Reasons for incomplete vaccination of children and adolescents in SSA were
identified in the literature review. These were mainly related to parents’ time constraints,
their beliefs and knowledge about vaccination, as well as the organisation of vaccination
services.
Conclusion: The results of this thesis provide the first epidemiological data on HBV
infection in children in the general population in Senegal. These results show the success
of the hepatitis B vaccination program and suggest that the country is close to meeting the
WHO’s target of reducing the incidence of chronic HBV infection by 90% by 2030. In
addition, interventions to improve and strengthen HBV prevention and control measures
are suggested.
6
Remerciements
Qu’il me soit d’abord permis d’avoir une pensée particulière envers Yolande Obadia
pour m’avoir incitée à entreprendre un travail de thèse immédiatement après mon master
puis présentée aux équipes de VITROME et du SESSTIM, ainsi que pour sa bienveillante
attention et ses encouragements au cours de ces trois années.
Mes remerciements vont tout spécialement à Cheikh Sokhna qui a accepté de diriger ce
travail de thèse, qui m’a fait confiance et laissé beaucoup d’autonomie pour mener à bien
ce projet, tout en sachant être présent dans les moments cruciaux. Merci de m’avoir
accueillie au sein de l’équipe de VITROME à Dakar.
J’adresse également mes sincères remerciements à Sylvie Boyer, qui a co-dirigé cette
thèse. Malgré la distance, j’ai toujours pu compter sur son aide et sa réactivité. Sa rigueur
scientifique et ses relectures attentives m’ont permis de structurer mes réflexions
scientifiques et d’améliorer ce travail.
Je remercie vivement les membres extérieurs de mon jury de thèse pour leur
disponibilité et l’intérêt qu’ils ont bien voulu porter à ce travail : Stéphanie Gentile,
Christian Laurent, Maud Lemoine, Valériane Leroy et Christian Pradier. C’est un honneur
pour moi de pouvoir bénéficier d’un entourage d’une telle qualité pour juger de mon
travail, et vos observations et suggestions contribueront à son amélioration.
Mes remerciements vont également aux membres extérieurs de mon comité de thèse :
Philippe Colson, Antoine Jaquet, et Maud Lemoine pour leurs précieux conseils.
J’adresse mes remerciements à toute l’équipe du projet AmBASS sans qui ce travail
n’aurait pas pu se concrétiser, en particulier : Aldiouma Diallo, Elhadji Ba, Marion Coste,
7
Morgane Bureau, Bilal Faye, Baba Sow, Marie Nishimwe, Gwenaelle Maradan, les équipes
partenaires de l’IRESSEF et de l’Hôpital Européen. Je tiens à remercier toute l’équipe
terrain pour leur travail de qualité et tous les moments partagés à Niakhar : Assane
Ndiaye, Assane Diouf, Fatima Sène, Khadija Ba Gaye, Fadiène Ndiaye, Khadim Gueye,
Ibrahima Ndaw, Modou Diome, Ndèye Selbé Diouf, Moussa Gueye, Mayé Ndour, Coumba
Sandiane Sène, Assane Faye et Etienne Silmang Ndong. Un grand merci à tous les
participants du projet AmBASS et aux personnels de santé de la zone de Niakhar.
Mes remerciements vont aussi aux membres l’équipe de VITROME à Dakar et aux
autres membres du campus de l’Institut de Recherche pour le Développement pour leur
accueil chaleureux. Mes remerciements vont aussi aux membres de l’équipe VITROME à
Marseille, et en particulier à Sacy Nadaradjane pour son appui administratif et sa
bienveillance tout au long de cette thèse.
Enfin, je souhaite remercier de tout cœur mes proches pour leur soutien sans failles et
leurs encouragements. Merci à mes cousines, mes cousins, mes amies et mes amis d’avoir
toujours été présents, à mes côtés de près ou de loin, que ce soit dans la vie quotidienne,
les sorties de surf, d’escalade, ou autour d’un bon repas, … merci de m’avoir permis de me
sentir toujours chez moi aussi bien à Dakar qu’à Marseille ! Enfin, merci à mes parents,
d’avoir été présents à chaque instant et de m’avoir toujours encouragée et soutenue.
8
Table des matières
Affidavit 2
Résumé 3
Abstract 5
Remerciements 7
Table des matières 9
Liste des tableaux et figures 11
Définition des sigles et abréviations 12
Valorisation scientifique 13
Introduction 15
1. Contexte 17
1.1. Epidémiologie de l’hépatite B en Afrique sub-Saharienne 17
1.1.1. Poids de l’hépatite B 17
1.1.2. Principaux modes de transmission en Afrique sub-Saharienne 19
1.2. Mesures de contrôle de l’hépatite B 22
1.2.1. Prévention 22
1.2.2. Dépistage et traitement 27
1.3. La réponse de l’Organisation Mondiale de la Santé en Afrique 29
1.4. Etat des lieux et enjeux du contrôle de l’hépatite B en Afrique sub-Saharienne
32
1.4.1. Etat des lieux de l’élimination de l’hépatite B 32
1.4.2. Enjeux du contrôle de l’hépatite B 33
1.5. Contexte de l’hépatite B au Sénégal 37
1.5.1. Epidémiologie de l’hépatite B 37
1.5.2. La lutte contre l’hépatite B 38
2. Justification et objectifs de la recherche 41
2.1. Problématique 41
2.2. Objectifs de recherche 42
3. Méthodes 45
3.1. L’étude AmBASS (ANRS 12356) 45
3.1.1. Objectifs de l’étude 45
3.1.2. Schéma de l’étude 46
3.1.3. Lieu de l’étude 47
3.1.4. Population d’étude et sélection des participants 48
3.1.5. Recueil de données 50
3.1.6. Gestion des données 54
3.1.7. Contribution personnelle à la collecte de données 54
9
3.2. Utilisation des données AmBASS 55
3.2.1. Données AmBASS utilisées 55
3.2.2. Analyses statistiques 57
3.3. Revue systématique de la littérature 58
4. Résultats 60
4.1. Article 1 – Hépatite B au Sénégal : Succès du programme de vaccination mais un
besoin urgent d’améliorer l’accès au dépistage et au traitement à grande échelle 60
4.2. Article 2 – Le statut VHB de la fratrie, la naissance à domicile, les tatouages et
les points du suture sont des facteurs de risque de l’infection par le VHB chez les enfants
Sénégalais : Une enquête transversale 79
4.3. Article 3 – Vaccination contre l’hépatite B chez les enfants Sénégalais :
Couverture vaccinale, délais de vaccination et déterminants socio-démographiques du non-
respect des schémas vaccinaux (ANRS 12356) 91
4.4. Article 4 – Raisons de non-vaccination et de sous-vaccination des enfants et
adolescents en Afrique sub-Saharienne : Une revue systématique de la littérature 110
5. Discussion 134
5.1. Synthèse des résultats 134
5.2. Forces et limites des études réalisées 135
5.2.1. Forces 135
5.2.2. Limites 136
5.3. Implications en santé publique 137
5.3.1. Vers l’élimination de l’hépatite B : Le succès de la vaccination chez les enfants
137
5.3.2. Renforcer la prévention de l’hépatite B 138
5.3.3. Mettre à niveau le dépistage, les soins et le traitement de l’hépatite B 145
5.4. Perspectives de recherche 147
Conclusion générale 148
Bibliographie 149
Annexes 160
A. Rappels sur l’hépatite B : histoire naturelle et complications 160
B. Dépistage de l’hépatite B 164
C. Annexes article 1 165
D. Annexes article 2 168
E. Annexes article 3 173
F. Annexe article 4 179
10
Liste des tableaux et figures
11
Définition des sigles et abréviations
12
Valorisation scientifique
Lauren Périères, Fabienne Marcellin, Gora Lo, Camelia Protopopescu, El Hadji Ba, Marion
Coste, Coumba Touré Kane, Gwenaëlle Maradan, Aldiouma Diallo, Cheikh Sokhna, Sylvie
Boyer. Hepatitis B Vaccination in Senegalese Children: Coverage, Timeliness, and
Sociodemographic Determinants of Non-Adherence to Immunisation Schedules (ANRS
12356 AmBASS Survey). Vaccines (Basel). 2021 May 15;9(5):510. doi:
10.3390/vaccines9050510.
Lauren Périères, Camelia Protopopescu, Gora Lo, Fabienne Marcellin, El Hadji Ba, Marion
Coste, Coumba Touré Kane, Aldiouma Diallo, Cheikh Sokhna, Sylvie Boyer. Sibling status,
home birth, tattoos and stitches are hepatitis B virus infection risk factors in Senegalese
children: a cross-sectional study. J Viral Hepat. 2021 Aug 6. doi: 10.1111/jvh.13589.
Lauren Périères, Aldiouma Diallo, Fabienne Marcellin, Marie Libérée Nishimwe, El Hadji
Ba, Marion Coste, Gora Lo, Philippe Halfon, Coumba Touré Kane, Gwenaëlle Maradan,
Patrizi Carrieri, Assane Diouf, Yusuke Shimakawa, Cheikh Sokhna, Sylvie Boyer. Hepatitis
B in Senegal: Successful infant vaccination program but urgent need to scale up screening
and treatment (ANRS 12356) [soumis à BMJ Global Health]
Lauren Périères, Valérie Séror, Patrick Peretti-Watel. Reasons given for non-vaccination
and under-vaccination of children and adolescents in sub-Saharan Africa: A systematic
review [en cours de finalisation]
Ndiaw Goumballa, Van Thuan Hoang, Lauren Périères, Tran Duc Anh Ly, Papa
Mouhamadou Gaye, Fatou Samba Diouf, Philippe Parola, Cheikh Sokhna, Philippe Gautret.
Respiratory infections among pilgrims at the Grand Magal of Touba: A comparative cohort
controlled survey. Travel Med Infect Dis. 2021 Jun 4;43:102104. doi:
10.1016/j.tmaid.2021.102104.
13
Ndiaw Goumballa, Van Thuan Hoang, Lauren Périères, Philippe Parola, Cheikh Sokhna,
Philippe Gautret. Lack of Neisseria meningitidis among pilgrims during the 2017, 2018
and 2019 Grand Magal of Touba, Senegal. Clin Microbiol Infect. 2020 Dec;26(12):1697-
1698. doi: 10.1016/j.cmi.2020.06.010. Epub 2020 Jun 21.
Tchadine Djaogol, Fabienne Marcellin, Lauren Périères, Gora Lo, Maria Patrizia Carrieri,
Aldiouma Diallo, Sylvie Boyer. Hepatitis B prevention, care, and treatment needs in
women in rural West African women (ANRS 12356 AmBASS survey, Senegal) [soumis à
Liver International]
Lauren Périères, Marion Coste, Samba Ndiour, Halfon P, Sokhna C, Ba E, Diallo A, Boyer S.
Impact de l’introduction du vaccin contre l’hépatite B dans le Programme Elargi de
Vaccination sur l’épidémiologie de l’infection chez les enfants dans la zone de Niakhar,
Sénégal. 10e Conférence Internationale Francophone VIH Hépatite Santé Sexuelle. 19-22
Avr 2020. Dakar, Sénégal.
Lauren Périères, Marion Coste, Samba Ndiour, Philippe Halfon, Cheikh Sokhna , Elhadji
Ba, Aldiouma Diallo, Sylvie Boyer. Statut vaccinal et immunité vaccinale contre l’hépatite
B chez les enfants. XXI èmes Journées de Gastroentérologie d'Afrique Francophone ; II
èmes Journées de la Société Sénégalaise de Gastroentérologie et d'Hépatologie. 28-30 Nov
2019. Dakar, Sénégal
Assane Diouf, Lauren Périères, Marion Coste, Elhadji Ba, Gora Lo, Sylvie Boyer, Aldiouma
Diallo. Caractéristiques cliniques et biologiques des porteurs chroniques du virus de
l’hépatite B en population générale à Niakhar au Sénégal. 10e Conférence Internationale
Francophone VIH Hépatite Santé Sexuelle. 19-22 Avr 2020. Dakar, Sénégal.
14
Introduction
Au Sénégal, pays où l’hépatite B est endémique, les données sur cette infection
proviennent majoritairement d’études en milieu urbain parmi des population d’adultes
spécifiques ou à risque. Afin d’informer et/ou d’orienter les politiques de santé publique
nationales visant à éliminer l’hépatite B d’ici 2030, des données épidémiologiques chez
les enfants en population générale et en milieu rural sont nécessaires.
Ainsi, ce travail de thèse a pour objectif de décrire l’épidémiologie de l’hépatite B chez
les enfants nés après l’introduction du vaccin contre l’hépatite B au Sénégal. Pour ce faire,
15
cette thèse s’appuie sur les données du projet AmBASS (ANRS 12356), une enquête
transversale sur l’ampleur et les conséquences de l’infection chronique par le VHB à
Niakhar, au Sénégal.
16
1. Contexte
L’infection par le VHB est un problème de santé publique majeur, affectant 296 millions
d’individus (soit 3.8% de la population mondiale).1 Cependant, l’infection est inégalement
répartie dans le monde (voir figure 1). L’Afrique est la région la plus touchée (82 millions
d’individus infectés) après le Pacifique occidental (116 millions).1 Les sous-régions
d’Afrique Centrale et de l’Ouest sont particulièrement concernées, avec une prévalence de
l’antigène de surface de l’hépatite B (AgHBs) en population générale de 10.1% et de 9.8%
respectivement.8 L’hépatite B est endémique (prévalence en population générale ≥8%9)
en République centrafricaine (12.1%), au Nigeria (11.2%), au Tchad (10.5%), au Ghana
(10.3%), en Angola (10.2%), en Mauritanie (9.3%), en Côte d’Ivoire (8.9%) et au Sénégal
(8.1%).8 Selon les estimations de 2019, 990 000 personnes en Afrique contractaient une
nouvelles infection par le VHB chaque année.1
17
Les complications liées à une infection chronique par le VHB (ex : cirrhose, carcinome
hépatocellulaire) entrainent une charge de morbidité et une mortalité importante en ASS.
En 2019, l’infection par le VHB a causé 2 938 516 Disability Adjusted Life Years en
Afrique.10 Dans la région, la prévalence de la cirrhose varie de 4 à 13% chez les individus
AgHBs-positif sans traitement11 et le cancer du foie est le quatrième cancer avec
l’incidence la plus élevée (deuxième chez les hommes et quatrième chez les femmes). 12
L’infection chronique par le VHB est la cause principale de carcinome hépatocellulaire en
ASS ; 50-60% des patients avec un carcinome hépatocellulaire sont AgHBs-positifs.13
En terme de mortalité, l’hépatite B a causé 80 000 (Intervalle de confiance [IC] à 95%,
47 000-110 000] décès en 20201 et 2 890 401 années de vie perdues10 en 2019 en Afrique.
Le cancer du foie est le troisième cancer avec la mortalité la plus élevée sur le continent.12
Néanmoins, le véritable fardeau des complications liées à l’infection par le VHB est sous-
estimé. En effet, la cause virale d’une cirrhose ou d’un carcinome hépatocellulaire chez les
patients avec des stades avancés d’infection par le VHB est rarement renseignée sur les
certificats de décès.14
Les rappels sur l’histoire naturelle et les complications liées au VHB sont présentés
dans l’Annexe A.
1.1.1.2. Enfants
Figure 2. Prévalence de l’AgHBs dans le monde chez les enfants de cinq ans en 2016
19
frères et sœurs AgHBs-positifs.25 Au Ghana, le nombre d’individus infectés par le VHB
dans le ménage était associé à une augmentation de la prévalence des marqueurs du VHB
chez les enfants. Cette association n’a pas été retrouvée au niveau de la concession.26
La transmission horizontale du VHB est liée à un contact répété direct avec les liquides
biologiques d’une personne infectée, ou par l’intermédiaire d’objets (ex : serviette de bain,
brosse à dent) ou d’aliments (ex : chewing-gum, bonbons) partagés.4,26–28 Cependant, les
mécanismes exacts de la transmission horizontale ne sont pas encore bien définis.4
Dans la majorité des cas, la TME s’effectue pendant la période périnatale, au moment
de l’accouchement. La transmission intra-utérine transplacentaire et pendant la période
post-natale sont rares.20,37,38 L’incidence de la TME dépend de la prévalence de l’AgHBs
chez les mères, du risque de transmission d’une mère à son enfant, et de la disponibilité
des soins préventifs.37
En ASS, la prévalence de l’AgHBs chez les femmes enceintes et les femmes en âge de
procréer varie d’un pays à l’autre (allant de 2.4% à 25%), et est la plus élevée en Afrique
20
de l’Ouest.39 Chaque année, environ 367 250 nourrissons nés en ASS (soit 1%) sont
infectés par le VHB, soit deux fois plus que par le VIH.37 Le risque de TME d’une mère avec
une infection chronique par le VHB à son enfant dépend de la présence de l’antigène HBe
(AgHBe) (marqueur d’une forte réplication virale) et du niveau d’ADN VHB (indique la
quantité de virus) dans le sang de la mère.37,40 D’après une revue systématique de la
littérature, le risque de TME du VHB en ASS est de 38.3% (IC à 95% 7.0-74.4) chez les
femmes AgHBe-positives et de 4.8% (IC à 95% 0.1-13.3) chez les femmes AgHBe-
négatives, en l’absence de prophylaxie chez les nourrissons.37
Plusieurs études de prévalence en ASS ont mis en évidence la présence de la TME.39
Une étude hospitalière au Ghana a estimé que la prévalence de la TME était de 5.9%.41 En
effet, 3/51 enfants nés de mères AgHBs-positives étaient AgHBs-positifs à leur naissance.
Les mères des trois enfants étaient toutes AgHBe-positives. Parmi les 51 enfants, 67% ont
reçu la dose à la naissance (le statut vaccinal des trois enfants AgHBs-positifs n’a pas été
rapporté séparément), 60% ont reçu les immunoglobulines spécifiques de l’hépatite B et
un seul avait une mère qui a reçu le traitement antiviral. Par ailleurs, en Gambie, une étude
longitudinale a estimé que 16% des porteurs chroniques du VHB étaient infectés via la
TME.42 Parmi les 977 participants non vaccinés inclus entre 1974 et 2008, 230 ont
développé une infection chronique par le VHB parmi lesquels 32.2% avaient une mère
AgHBs-positive. En analyses multivariées, avoir une mère AgHBs-positive était associé à
une infection par le VHB (odds ratio [OR] 2.0, IC à 95% 1.3-3.1%), la population
attributable fraction était donc de 16% (IC à 95% 8.6-22.9%).
Des études transversales sur les facteurs associés à une infection par le VHB chez les
enfants ont identifié des pratiques à risques pour la transmission du VHB en ASS.
Les pratiques traditionnelles, telles que la scarification et les tatouages, sont des
pratiques associées à l’hépatite B. Au Burkina Faso,43 une étude en milieu rural a montré
que les enfants scarifiés étaient plus à risque d’être exposés au VHB (AgHBs ou anticorps
anti-HBc [Ac anti-HBc] positifs) que les enfants non-scarifiés (OR ajusté [aOR] 2.7, IC à
95% 1.1-6.7). Des résultats similaires ont été mis en évidence au Nigeria,44 mais
uniquement en analyses univariées (les auteurs n’ont pas effectué d’analyses
multivariées). De plus, deux études au Nigeria ont montré que les enfants avec des
tatouages avaient plus de risque d’être infectés par le VHB (analyses univariées).27,44
Par ailleurs, certaines pratiques de soins sont également associées à une infection par
le VHB. Par exemple, une étude en population générale au Nigeria45 a mis en évidence que
les adultes et les enfants ayant eu recours à des interventions dentaires en dehors d’un
centre de santé avaient un risque plus élevé d’être infectés par le VHB que ceux qui
n’avaient pas eu recours à ces interventions (aOR 3.32, IC à 95% 1.38-7.97). De plus, des
études ont également montré que la chirurgie27,44 et la transfusion sanguine,27 sont des
facteurs à risque de transmission (en analyses univariées). Enfin, dans une étude en
21
Ethiopie, les enfants ayant eu des médicaments injectables avaient un risque plus élevé
d’être AgHBs-positifs que ceux n’en n’ayant pas eu (aOR 5.02, IC à 95% 1.14-22.07).
1.2.1. Prévention
Les premières années de vie sont critiques pour prévenir l’hépatite B car : (i) la majorité
des infections en ASS sont acquises pendant la petite enfance, (ii) la proportion d’infections
attribuables à la TME est en train d’augmenter, et (iii) le jeune âge au moment de l’infection
par le VHB est un des principaux facteurs de progression vers l’infection chronique et les
complications liées au VHB.
En effet, le risque d’évolution vers une infection chronique après une exposition au
VHB est de 80-90% chez les individus infectés pendant les six premiers mois de vie, alors
que ce risque n’est que de 30% chez les 1-6 ans et de 5% chez ceux infectés à l’âge
adulte.4,5 Par ailleurs, le jeune âge au moment de l’infection est associé à un risque plus
élevé de réplication virale persistante, ainsi que de progression vers la cirrhose et le
carcinome hépatocellulaire.6 Enfin, la majorité des cas qui nécessitent un traitement
antiviral en ASS sont infectés par voie périnatale.42
22
également nécessaires mais ne seront pas traitées ici, car elles concernent principalement
des modes de transmission chez les adultes.
1.2.1.1. Vaccination
(a) Schéma vaccinal multidoses
Des vaccins sûrs et efficaces contre le VHB sont disponibles depuis 1982.17 La dose
d’AgHBs (substance active des vaccins) nécessaire pour induire une réponse immunitaire
protectrice est de 5-10µg pour la dose pédiatrique et de 10-20µg pour la dose adulte.17 Le
vaccin est disponible sous forme monovalent pour les doses à la naissance, et en
combinaison avec d’autres vaccins pour la vaccination des nourrissons.17
Efficacité
L’efficacité du vaccin anti-hépatite B est mesuré par la concentration d’anticorps anti-
HBs (Ac anti-HBs) dans le sang. Une concentration ≥10 UI/mL dans les deux mois suivant
la dernière dose du schéma vaccinal est considéré comme un marqueur sérologique de
protection longue durée contre le VHB.17
Trois doses de vaccin induisent un taux d’Ac anti-HBs protecteurs chez 95% des
individus en bonne santé.17 Une revue systématique de la littérature n’a montré aucune
différence dans la proportion d’enfants avec une séroprotection lorsqu’ils reçoivent deux
ou trois doses de primovaccination après la dose à la naissance.48
23
En ASS, la majorité des données sur l’efficacité de la vaccination anti-hépatite B
pendant l’enfance sur la réduction de la prévalence de l’AgHBs et de l’infection chronique
par le VHB proviennent de la Gambia Hepatitis Intervention Study.13 Quelques études au
sein de la Gambia Hepatitis Intervention Study ont montré qu’un schéma vaccinal avec
plusieurs doses de vaccin est efficace à 95% contre l’infection chronique par le VHB, et à
85% contre l’infection par le VHB.49,50
Les conséquences d’un schéma vaccinal incomplet n’ont pas encore été évaluées en
ASS.13 A Taiwan, une étude de cohorte sur 3.8 millions d’individus vaccinés a montré
qu’un schéma vaccinal incomplet était associé à un risque plus élevé d’insuffisance
hépatique fulminante, de maladie hépatique chronique et de carcinome
hépatocellulaire.51
L’efficacité de la dose à la naissance a été démontrée dans des études comparant le risque
de TME chez les enfants nés de mères AgHBs-positives ayant reçu la dose à la naissance et le
risque chez ceux ne l’ayant pas reçu.
24
D’après une méta-analyse d’essais contrôlés randomisés, les enfants nés de mères
AgHBs-positives et vaccinés à la naissance ont moins de risque relatif d’être infecté
(positif à l’un des marqueurs suivants : AgHBs, AgHBe ou Ac anti-HBc) comparé à ceux qui
ont reçu un placebo ou n’ont pas reçu de vaccin (risque relatif 0.28, IC à 95% 0.20-0.40).57
La dose à la naissance réduit significativement le risque de TME chez les enfants nés de
mères AgHBe-négatives.
Une méta-analyse d’études observationnelles et interventionnelles en ASS a montré
que l’administration de la dose à la naissance était associée à une réduction du risque de
TME chez les enfants nés de mères AgHBe-négatives.37 En effet, parmi les enfants nés de
mères AgHBe-négatives, le risque de TME était plus faible chez les enfants ayant reçu la
dose à la naissance (>1 semaine après la naissance, 0.0%, IC à 95M 0.0-0.0% ; ≤24 heures
0.0%, IC à 95% 0.0-0.0%) comparé à ceux qui n’avaient pas reçu de prophylaxie (38.3%,
IC à 95% 7.0-74.4%, p=0.01 et 0.02 respectivement).
Parmi les enfants nés de mère AgHBe-positives, le risque de TME était similaire entre
ceux qui avaient reçu la dose à la naissance et ceux qui ne l’avaient pas reçu. En effet, le
risque de TME parmi ceux ayant reçu la dose à la naissance >1 semaine après la naissance
(36.6%, IC à 95% 8.3-69.9%) et ceux l’ayant reçu ≤24 heures (32.4%, IC à 95% 10.2-
58.3%) n’était pas différent du risque de transmission sans mesure de prévention (38.3%,
IC à 95% 7.0-74.4%, p=0.9 et 0.8 respectivement). Comparé aux enfants nés de mères
AgHBe-négatives, les enfants nés de mère AgHBe-positives ont donc un risque plus élevé
de TME en absence de prophylaxie, mais également lorsque la dose à la naissance est
administrée. Malgré la dose à la naissance, le risque résiduel d’infection est plus important
dans ce groupe.
Des études ont montré une diminution de l’efficacité vaccinale lorsque la dose à la
naissance est reçue plus d’une semaine après la naissance.
Par exemple, en Chine, la prévalence de l’AgHBs était plus basse chez les enfants qui
avaient reçu la première dose de vaccin dans les 24 heures après la naissance suivi de
deux ou trois doses additionnelles, que chez les enfants qui avaient reçu la dose à la
naissance plus de sept jours après. Cependant, la prévalence de l’AgHBs était similaire
25
chez les enfants ayant reçu la dose dans les 24 heures et ceux l’ayant reçu 1-7 jours après
la naissance.59
La vaccination à la naissance seule ne suffit pas pour prévenir la TME et doit être
combinée à d’autres stratégies de prévention.23
26
immunoglobulines ne peuvent pas être recommandées au niveau mondial et ne sont pas
recommandées en Afrique.61
27
Tableau 1. Indications au traitement antiviral selon les recommandations de l’OMS
OMS
Doivent être traités -Patients atteints d’une hépatite B chronique et présentant
des signes cliniques de cirrhose (ou un score APRI>2)a ,
quel que soient les taux ALAT, statut AgHBe ou le niveau
ADN VHB
Peuvent être traités -Patients atteints d’une hépatite B chronique avec des taux
d’ALAT élevés de façon persistante.b
Peu de recherches ont été menées sur les stratégies de dépistage et de traitement de
l’hépatite B chez les enfants et adolescents. En effet, il y’a peu de données sur le VHB chez
les enfants dans les pays à ressources limitées pour informer la gestion pédiatrique du
VHB, alors que les cas pédiatriques sont nombreux.16
La majorité des enfants ne nécessitent pas de traitement antiviral. Le traitement par
analogues nucéos(t)idiques avec une haute résistance, tels que le ténofovir ou l’encétavir
sont recommandés chez les plus de 12 ans. Chez les enfants de 2-11 ans, l’encétavir est
recommandé.9
28
1.3. La réponse de l’Organisation Mondiale de
la Santé en Afrique
Les hépatites virales ont longtemps été négligées au niveau international. En effet,
celles-ci ne figuraient pas dans les Objectifs du millénaire pour le développement (2000-
2015) et ne sont pas considérées comme des maladies tropicales négligées. Les premières
mesures visant à contrôler les hépatites virales au niveau mondial ont été développées à
partir des années 1990. Certaines de ces mesures incluent la première résolution de l’OMS
sur un vaccin contre l’hépatite B en 1992, l’estimation de la mortalité liée aux hépatites
virales dans le Global Burden of Disease à partir de 2000, et le financement des premiers
vaccins anti-hépatite B par Gavi en 2001.14
En 2010, l’Assemblée Mondiale de la Santé a adopté une résolution qui prenait acte de
la gravité des hépatites virales en tant que problème mondial de santé et appelait les états
membres à instaurer des mesures de prévention, de diagnostic et de traitement.65 Cette
résolution a été un tournant dans la lutte contre les hépatites virales. Par la suite, l’OMS a
créé le Programme mondial de lutte contre l’hépatite en 2011.14
En parallèle, les hépatites virales ont bénéficié d’une plus grande visibilité dans
l’agenda de la santé en ASS depuis les années 2010. Suite à l’appel de Dakar de 2011,
l’Initiative Panafricaine de Lutte contre les Hépatites a été créée en juillet 2012.66 Celle-ci
regroupe une vingtaine de pays dans le but de rassembler les acteurs de la lutte contre les
hépatites dans les pays africains francophones. En juillet 2013, l’Initiative Panafricaine de
Lutte contre les Hépatites a organisé la Conférence Internationale sur les Hépatites à
Dakar, à la suite de laquelle a été publié Le Consensus de Dakar. Les points focaux du
Consensus de Dakar étaient : le calendrier vaccinal inadapté pour la prévention de la TME
en ASS, le manque de ressources financières en faveur de la lutte contre les hépatites
virales, et le manque de moyens pour une prise en charge convenable des porteurs
chroniques du VHB et du virus de l’hépatite C (VHC).66 Les acteurs de la lutte contre
l’hépatite B se sont prononcés en faveur de l’adoption d’une approche intégrée pour lutter
contre les hépatites, une mutualisation de moyens, une approche régionale pour
développer des stratégies pertinentes ainsi que l’amélioration des outils de diagnostic et
des programmes de traitement appropriés aux malades.66
29
intensifier les activités de prévention ; (v) former les agents de soins de santé primaires
au diagnostic, aux soins et au traitement ; et (vi) élargir l’accès au dépistage, aux conseils
et au traitements.68 Un plan stratégique pour la vaccination a également été publié.69
Cependant, ce n’est qu’en 2015 que le contrôle des hépatites virales a été reconnu
comme une nécessité pour la santé et le développement dans le monde. Dans le cadre du
Programme de Développement Durable à l’horizon 2030, l’Organisation des Nations
Unies a intégré l’objectif suivant dans les Objectifs de Développement Durable : « D’ici à
2030, mettre fin à l’épidémie de sida, à la tuberculose, au paludisme et aux maladies
tropicales négligées et combattre l’hépatite, les maladies transmises par l’eau et autres
maladies transmissibles ».70
Par la suite, l’Assemblée Mondiale de la Santé a adopté la première Stratégie mondiale
du secteur de la santé contre l’hépatite virale 2016-2021 en mai 2016. 7 Cette stratégie est
la première stratégie mondiale sur les hépatites virales, et couvre les six premières années
du Programme de Développement Durable à l’horizon 2030. En août 2016, les 47 états
membres de l’OMS en Afrique ont approuvé la Stratégie mondiale du secteur de la santé
contre l’hépatite virale 2016-2021.
La vision de la Stratégie mondiale du secteur de la santé contre l’hépatite virale 2016-
2021 est celle d’un monde où la transmission de l’hépatite virale est stoppée et où toute
personne atteinte d’hépatite virale a accès à des soins et des traitements sûrs, abordables
et efficaces. L’objectif général est d’éliminer l’hépatite virale en tant que grave menace
pour la santé d’ici 2030.7
En 2017, les états membres de l’OMS en Afrique ont publié le rapport Prévention, soins
et traitement de l’hépatite virale dans la région Africaine : cadre d’action 2016-2020,71 en
reprenant les cibles de la Stratégie mondiale du secteur de la santé contre l’hépatite virale
2016-2021. Les cibles sont présentées dans le tableau 2.
30
Tableau 2. Cibles pour l’élimination de l’hépatite B en Afrique d’ici 2030
Domaine ciblé Cibles pour 2020 Cibles pour 2030
Cibles d’impact
Réduction de 30%
Incidence : nouveaux cas Réduction de 90% (équivalent à une
(Équivalent à une
d’hépatites virales B et C prévalence de 0.1% des AgHBs chez
prévalence de 1% des
chroniques les enfants)
AgHBs chez les enfants)
Sources : Prévention, soins et traitement de l’hépatite virale dans la région Africaine : cadre d’action
2016-202071 et Stratégie mondiale du secteur de la santé contre l’hépatite virale 2016-2021 7
31
Réponse de l’OMS en Afrique : points clés
Les parties ci-dessous exposent les enjeux liés au contrôle de l’hépatite B en ASS.
32
1.4.2. Enjeux du contrôle de l’hépatite B
1.4.2.1. Vaccination
Tous les pays d’ASS ont inclus le schéma vaccinal multidoses chez les nourrissons dans
leur Programme Elargi de Vaccination (PEV).22 La majorité ont recours au vaccin
pentavalent (combinant les vaccins contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche,
l’Haemophilus influenzae de type B, et l’hépatite B) avec des doses administrées 6, 10 et 14
semaines après la naissance.22 Cependant, en 2015, seul 74% des enfants en Afrique
avaient reçu trois doses de vaccin contre l’hépatite B, alors que la moyenne mondiale était
de 84%.14 La couverture est la plus faible en Afrique de l’Ouest (autour de 66%).8
La mise en place de la dose à la naissance en ASS est très lente. En 2019, seulement 10
pays avaient introduit la dose à la naissance dans leur PEV (l’Angola, le Botswana, le Cap
Vert, la Gambie, la Mauritanie, l’Ile Maurice, la Namibie, le Nigeria, Sao Tome et Principe
et le Sénégal).72
Peu de données sur la couverture de la dose à la naissance en ASS sont disponibles, et
les études menées jusqu’à présent montrent que très peu d’enfants reçoivent le vaccin
dans les délais recommandés. Une méta-analyse publiée en 2021 a montré que dans trois
pays d’ASS ayant introduit la dose à la naissance (Nigeria, Gambie, Afrique du Sud), seul
1.3% des enfants recevaient le vaccin dans les 24 heures suivant la naissance (IC à 95%
0.0-4.5%) et 21.5% (IC à 95%9.4-36.8%) dans les sept jours suivant la naissance.73 Par
exemple, dans le système de surveillance de santé et de démographie de Farafenni en
Gambie, 1.1% des enfants étaient vaccinés dans les 24 heures après la naissance, 5.4%
dans les sept jours, 58.4% dans les 28 jours, 93.1% dans les six mois et 93.6% dans l’année
suivant la naissance.74
34
(a) Dépistage
Selon les recommandations de l’OMS,60 une stratégie de dépistage en population
générale devrait être adoptée en ASS. Cependant, les programmes de dépistage et de
traitement de l’infection chronique par le VHB en population général sont quasi-
inexistants sur le continent,83 et peu de personnes sont dépistées en dehors des études
cliniques.82 De plus, la plupart des individus sont dépistés et pris en soins à un stade
avancé de la maladie.60,84
Les obstacles principaux au dépistage sont le coût des tests et le manque de
connaissance du personnel de santé vis-à-vis du dépistage. En effet, les tests sont souvent
coûteux76 et à la charge du patient.82 Dans une étude en milieu urbain au Sénégal, seul
24% des médecins savaient que les tests de diagnostic rapide pouvaient être utilisés pour
dépister le VHB.85
Inflammation du foie
Il est possible de mesurer l’ALAT et l’aspartate aminotransférase (ASAT) dans la
plupart des structures de soins primaires en ASS. Ces mesures sont donc incluses dans
tous les critères de mise sous traitement.82
Evaluation de la fibrose
La biopsie hépatique est l’examen de référence pour détecter une fibrose. Cependant,
cet examen n’est pas disponible dans beaucoup de pays à faible revenu en raison de son
coût élevé, ainsi que la nécessité d’avoir du personnel formé et une infrastructure dédiée.
De plus, l’examen peut être inconfortable pour le patient et peut entrainer des
complications.82
L’élastographie transitoire (Fibroscan) est actuellement la meilleure alternative pour
la biopsie du foie en raison de son excellente capacité à quantifier la fibrose hépatique et
la cirrhose. Le Fibroscan peut être utilisé par du personnel de santé non-spécialiste mais
il est peu utilisé dans les pays à ressources limitées en raison de son coût élevé.82
Lorsque la biopsie hépatique ou le Fibroscan ne sont pas disponibles, l’OMS
recommande d’utiliser des tests non-invasifs basés sur des marqueurs sériques.9 Le score
APRI et le score FIB-4 ont été validés par l’OMS. Le score APRI est le test non-invasif à
utiliser de préférence et se base sur la mesure de marqueurs facilement disponibles dans
les contextes à ressources limités : les ASAT et les plaquettes.9 Le score FIB-4 se base sur
la mesure des ALAT, ASAT, des plaquettes et l’âge du patient.9 Cependant, ces tests non-
invasifs n’ont pas été suffisamment évalués en ASS et des études ont montré que leur
35
performance était limitée dans certains contextes.76 Une étude en Ethiopie a montré que
ces tests avaient une bonne capacité à détecter les fibroses et cirrhoses chez les patients
avec une infection chronique par le VHB, mais que les tests avaient une faible sensibilité.86
Le score Gamma-glutamyl transpeptidase-to-platelet ratio a récemment été développé
en Gambie et semble plus fiable que les scores APRI et FIB-4 chez des patients en Afrique
de l’Ouest87 et en Ethiopie.86 Néanmoins, ce score n’a pas encore été testé et validé dans
d’autres pays d’ASS.
(c) Traitement
36
Accès au traitement
Le ténofovir disporixil fumarate est disponible gratuitement pour les individus co-
infectés par le VIH, mais pour les individus mono-infectés le traitement est payant.76
37
En 2020, le cancer du foie était le troisième cancer avec l’incidence la plus élevée dans
le pays (deuxième chez les hommes et troisième chez les femmes) et le deuxième cancer
avec la mortalité la plus élevée.107 En 2019, 1190 individus (IC à 95% 799-1671) sont
décédés suite à une infection par le VHB en 2019 : 70 (IC à 95% 22-184) dû à une hépatite
B aiguë, 96 (IC à 95% 67-128) dû à un cancer de foie et 1024 (IC à 95% 663-1523) dû à
une cirrhose ou une autre maladie du foie.108
Saafara Hépatites
L’Association communautaire de patients atteints par le VHB Saafara Hépatites Sénégal
a été créée en novembre 2011. L’association a pour but de sensibiliser la population à
l’hépatite B et d’apporter un soutien à ceux testés positif. L’objectif est d’inciter les
groupes à risque à se faire dépister. Les activités de l’association incluent la prévention et
le dépistage des groupes à risque, la sensibilisation de l’opinion publique sur les hépatites,
la préparation de supports de communication, le développement de campagnes
spécifiques pour les populations cibles, et l’accompagnement des personnes infectées par
une hépatite.110
38
1.5.2.2. Politiques de santé mises en place
(a) Prévention
Bien que le Sénégal ait été le site d’essais vaccinaux concluants en 1979-1981, la
vaccination systématique contre l’hépatite B au sein du PEV a été mise en place à partir
de 2004 seulement.111 Entre 1999 et 2004, le PNLH a assuré la vaccination contre
l’hépatite B à la naissance des nouveau-nés, à travers les structures de santé publiques et
privées et des enfants de 24 à 59 mois dans les établissements préscolaires publics et
privés.109 Cependant, l’action était très ciblée et surtout effectuée en ville. Depuis 2004, la
vaccination contre le VHB a été incluse dans le PEV, avec l’administration de trois doses
de vaccin pentavalent 6, 10 et 14 semaines après la naissance. La dose à la naissance a été
ajoutée au PEV en 2016.
Les travailleurs de santé en cours de formation sont dépistés et vaccinés contre le VHB
si besoin.112
(c) Traitement
Les recommandations nationales de mise sous traitement ont été élaborées par un
groupe de travail en 2019 sur la base des recommandations de la European Association
for the Study of the Liver de 2012 et adaptées au contexte (par exemple le recours à la
biopsie n’est pas recommandé). Néanmoins, ces recommandations n’ont pas encore été
officiellement validées.
Les patients avec les critères suivants doivent être mis sous traitement :
Le ténofovir doit être utilisé chez les adultes et enfants de plus de 12 ans éligibles au
traitement. Chez les moins de 12 ans, l’entécavir est recommandé.
L’accès au traitement antiviral pour les patients mono-infectés par le VHB a été long au
Sénégal. Ce n’est qu’en 2017 que le Ministère de la Santé a officiellement autorisé la mise
39
à disposition du ténofovir pour le VHB.82 Actuellement, le ténofovir est disponible à la
Pharmacie Nationale d’Approvisionnement, dans les principaux hôpitaux de Dakar et au
PNLH. 109 Le ténofovir coûte 5000 FCFA/mois (7,6€) pour les individus disposant d’une
couverture médicale, 2500 FCFA (3,8€) pour les malades n’ayant pas de couverture
médicale et est gratuit pour les indigents figurant dans la base de données des
bénéficiaires de bourses familales.109
40
2. Justification et objectifs de la recherche
2.1. Problématique
L’hépatite B a longtemps été un problème de santé publique négligé, tant au niveau
local qu’international. Ce n’est que récemment, et plus particulièrement depuis que les
hépatites virales ont été incluses dans les objectifs du Programme de Développement
Durable à l’horizon 2030 en 2015, que l’hépatite B a été mise sur l’agenda international et
a gagné en visibilité.
Malgré l’ampleur de l’infection par le VHB en ASS, les données sur l’hépatite B sont
insuffisantes et les recherches cliniques et épidémiologiques se développent
lentement.71,82 En effet, peu d’études ont évalué la mise en œuvre et l’efficacité des
stratégies de prévention de l’hépatite B39 et les programmes de surveillance sont peu
performants sur le continent.71 Par ailleurs, peu de pays ont défini des stratégies ou des
plans nationaux de lutte contre l’hépatite virale,71 et la plupart des outils actuellement
disponibles pour le diagnostic et le suivi de l’infection sont inaccessibles ou trop coûteux.
Le dépistage des individus infectés (en particulier ceux infectés pendant l’enfance),
leur suivi, et leur traitement, sont essentiels pour éliminer l’hépatite B.
Les jeunes enfants sont une population clé dans la lutte contre l’hépatite B ; c’est
la prévention et le contrôle de l’infection par le VHB dans cette population qui
permettra l’élimination de l’hépatite B en ASS sur le long-terme car :
Afin d’évaluer et d’orienter les politiques de santé publique en ASS, il est nécessaire
d’avoir des données sur :
41
- La couverture vaccinale du vaccin anti-hépatite B et plus particulièrement de la dose
à la naissance. D’après l’OMS, la proportion d’enfants recevant la dose à la naissance
dans les 24 heures suivant la naissance doit être considérée comme une mesure de
performance de tous les programmes d’immunisation ou de performance des
systèmes d’immunisation.17
- Les principaux déterminants épidémiologiques et cliniques de l’hépatite B,82 afin
d’orienter les mesures de prévention et de contrôle.
- L’estimation du nombre d’individus infectés et nécessitant un traitement antiviral,114
afin de proposer une offre de soins adaptée.
- Quelle est la prévalence de l’infection chronique par le VHB chez les adultes et les
enfants à l’ère de la vaccination ?
- Qui sont les enfants les plus susceptibles d’être infectés ?
- Quelle est la couverture vaccinale du vaccin contre l’hépatite B chez les enfants et
qui sont les enfants à risque de ne pas être vaccinés ?
- Quelles sont les raisons de non-vaccination et de sous-vaccination des enfants ?
42
La prévalence de l’infection par le VHB au Sénégal est actuellement estimée à partir
d’échantillons de populations spécifiques et/ou à risque en zone urbaine, non
représentatives de la population générale. Les données disponibles sont parcellaires et
nécessitent d’être confirmées et complétées par des données en milieu rural et en
population générale afin de disposer de données de prévalence fiables permettant
d’évaluer les besoins de prise en charge et de traitement.
Les résultats de cet objectif permettront d’établir un état des lieux de l’épidémie de
l’hépatite B au Sénégal, en particulier dans la population cible de cette recherche : les
enfants.
2. Identifier les facteurs associés à une infection par le VHB chez les enfants
L’objectif est d’identifier les facteurs associés à une infection par le VHB chez les
enfants nés après la mise en place de la vaccination au Sénégal.
Peu d’études en ASS ont identifié les facteurs associés à une infection par le VHB chez
les enfants. Cependant, l’identification des comportements et facteurs socio-
démographiques associés à l’hépatite B est une des clés pour adapter les politiques de
santé publique et prévenir l’infection par le VHB. Les résultats de ces analyses vont
également permettre d’identifier des modes probables de transmission du VHB au
Sénégal, particulièrement concernant la transmission horizontale.
Des études menées en ASS ont montré que la mesure seule de la couverture vaccinale
(proportion d’enfants recevant les doses de vaccins) masquait des délais importants dans
l’administration des vaccins. Or, recevoir des doses de vaccin de manière trop rapprochée,
ou trop éloignée peut avoir un impact sur l’efficacité de la vaccination. Les résultats de ces
analyses vont permettre d’estimer la couverture vaccinale complète (proportion
d’enfants ayant reçu toutes les doses) et la couverture vaccinale correcte (proportion
d’enfants ayant reçu toutes les doses dans les délais recommandés) du programme de
vaccination contre l’hépatite B.
Par ailleurs, s’intéresser aux enfants à risque de vaccination incomplète ou incorrecte
permet d’identifier les facteurs en cause et d’élaborer des stratégies pour améliorer
l’efficacité des programmes de vaccination.
43
4. Identifier les raisons de non-vaccination ou de sous-vaccination des
enfants et adolescents en ASS
44
3. Méthodes
45
4. Estimer l'impact de santé publique de l'infection chronique par le VHB au
niveau de la population et la faisabilité de la mise en place d’un modèle
décentralisé de prise en charge de l’hépatite B.
46
3.1.2.2. Enquête en population générale
La deuxième phase de l’étude a porté sur la conduite d’une enquête à domicile dans les
ménages, comprenant : (i) la sensibilisation des ménages sélectionnés et le recueil du
consentement individuel pour participer à la recherche ; (ii) des conseils et des
informations sur l’infection par le VHB ; (iii) le dépistage de l’hépatite B reposant sur la
détection de l’AgHBs sur papier buvard Dried Blood Spot (DBS) ; (iv) l’administration d’un
questionnaire socio-économique mené en face à face avec les participants et ; (v) et
l’administration d’un questionnaire portant sur les caractéristiques du ménage au chef du
ménage.
La troisième phase de l’enquête s’est déroulée dans les postes de santé de la zone de
Niakhar. Tous les participants ont reçu le résultat de leur test de dépistage accompagné
d’un counseling post-test (informations sur les mesures de prévention de l’hépatite B, le
traitement et les soins). De plus, les participants dépistés avec une infection chronique
par le VHB (AgHBs-positifs) ayant donné leur consentement ont bénéficié d’un bilan
clinique et biologique pour évaluer le stade de l’infection et l’atteinte hépatique.
47
Initialement développé afin de produire des indicateurs démographiques de qualité,
l’observatoire est devenu une base solide en santé publique pour le développement
d’études cliniques et épidémiologiques. La station de Niakhar dispose d’infrastructures et
de personnel sur place, comprenant notamment des enquêteurs et des techniciens formés
à la passation de questionnaires et à la réalisation des prélèvements biologiques
nécessaires selon les études. La population est suivie régulièrement et les évènements
comme les migrations, mariages, grossesses, vaccinations et décès sont enregistrés dans
la base de données de l’observatoire.
La zone de l’observatoire de Niakhar comprend quatre postes de santé (structures de
santé de niveau primaire) dans trois villages. Les structures de référence de ces postes de
santé sont situées à proximité de la zone : à Niakhar pour le centre de santé (référence au
niveau district) et à Fatick, à une quinzaine de kilomètres, pour l’hôpital régional (centre
de référence au niveau régional).
Par ailleurs, bien qu’il n’existe pas de données permettant de déterminer si la zone de
l’observatoire est davantage touchée par l’hépatite B que d’autres régions du pays, celle-
ci présente plusieurs facteurs de risque d’évolution de l’hépatite vers la cirrhose ou le
carcinome hépatocellulaire, dont notamment une forte consommation locale d’arachides
à concentration élevée d’aflatoxine. Une analyse des causes de mortalité chez les adultes
de la zone, effectuée dans le cadre du développement du projet de recherche, a également
montré que les tumeurs malignes du foie et des voies biliaires intrahépatiques
représentent la première cause de mortalité identifiée dans cette zone (données non
publiées, issues de l’analyse des autopsies verbales collectées sur une longue période
auprès de la population de la zone de Niakhar).
De plus, bien que l’observatoire soit le site d’une surveillance démographique et de
nombreuses recherches, il est assez représentatif d’une zone rurale intermédiaire au
Sénégal en termes de structure démographique, d’activité économique (reposant
majoritairement sur l’agriculture et l’élevage) et d’infrastructures sanitaires. Il n’existe
pas de services de santé spécifiques liés à l’observatoire, ni d’intervention particulière
dans le domaine de l’hépatite B qui pourraient impacter les résultats de l’étude.
La région de Fatick, dans laquelle se trouve l’observatoire de Niakhar, a été choisie par
le PNLH comme région pilote pour la décentralisation des soins et du traitement de
l’hépatite B.
48
de façon à être représentatif de la zone de l’observatoire de Niakhar, en termes de
localisation géographique et de classes d’âges ; (iii) afin d’être de taille suffisante pour
pouvoir fournir une estimation de la prévalence du VHB chronique dans la population
générale de la zone avec une précision d’au moins 1,2% et une estimation de la prévalence
du VHB chronique chez les femmes en âge de procréer (15-49 ans) et dans les tranches
d’âge 0-14 ans ; 15-34 ans ; ≥35 ans avec une précision d’au moins 3%. L’hypothèse d’un
taux de participation de 90% et d’un taux de déperdition des prélèvements DBS de 3% a
également été prise en compte.
- Au premier degré, les villages dans lesquels s’est déroulée la recherche ont été tirés
au sort. Les 30 villages situés dans la zone de Niakhar se répartissent en deux
strates (milieu rural et milieu semi-urbain) selon leurs infrastructures et
équipements. Les trois villages de la strate « milieu semi-urbain » ont été
sélectionnés et huit villages de la strate « milieu rural » ont été tirés au sort.
- Au second degré, un échantillon de ménages dans les villages sélectionnés a été tiré
au sort par tirage systématique à probabilités égales. La taille moyenne des
ménages de la zone étant de 11 individus, le nombre de ménages à tirer au sort était
estimé à 3200/11 = 291 ménages.
49
3.1.5. Recueil de données
Le projet AmBASS-ANRS 12356 est une étude multidisciplinaire combinant des
données biologiques, cliniques et socio-comportementales.
La collecte de données du projet AmBASS a eu lieu entre octobre 2018 et mai 2019.
L’équipe terrain présente à l’observatoire de Niakhar était constituée d’un coordinateur
terrain, d’un médecin, de deux infirmières, de huit enquêteurs et de deux chauffeurs.
L’OMS recommande l’utilisation des DBS dans les zones où il n’y a pas de structure ou
d’expertise pour effectuer des prélèvements de sang total, où les tests de diagnostic
rapides ne sont pas disponibles ou leur utilisation n’est pas envisageable, ou lorsqu’il est
compliqué d’effectuer un prélèvement veineux chez les individus.60 Les DBS ont une
bonne sensibilité (92.9%, IC à 95% 86.2-96.5%) et spécificité 99.9% (IC à 95% 96.2-
99.7%) comparé aux prélèvements sur plasma ou sur sérum pour détecter l’AgHBs.60
Pour l’étude AmBASS, un seuil de positivité de l’AgHBs a été fixé à 1.5 UI/L sur DBS,
d’après les données de doubles mesures sur DBS et sur sérum de 36 participants de
l’enquête pilote. Un prélèvement capillaire de cinq gouttes de sang total sur DBS
Whatman 903 a été effectué à domicile auprès de l’ensemble des participants à la
recherche.
Chez les individus AgHBs-positifs, le niveau d’ADN VHB ainsi que la présence
d’AgHBe/Ac anti-HBe ont été mesurés sur DBS. Lors de l’enquête en dispensaire, les
infirmières du projet ont également effectué un prélèvement veineux de sang total afin
d’évaluer l’atteinte hépatique chez les patients ayant donné leur consentement.
Les DBS et les prélèvements veineux ont été conditionnés selon les procédures définies
et acheminés à la fin de chaque journée d’enquête à la station l’Institut de Recherche pour
le Développement (IRD) à Niakhar, où ils ont été conservés. Les échantillons ont été
transportés à l’IRESSEF chaque semaine pour les analyses. Le tableau 3 présente les
différents marqueurs biologiques mesurés auprès des participants.
50
Tableau 3. Marqueurs biologiques du projet AmBASS (ANRS 12356)
Marqueurs biologiques Signification en cas de positivité
Dépistage du VHB pour tous les participants
AgHBs Infection chronique par le VHB
Examens complémentaires chez les individus AgHBs-positifs
AgHBe Réplication virale très active, risque de transmission élevé
Arrêt de la réplication virale (ou virus mutant si réplication
Ac anti-HBe
virale en cours)
ADN VHB Niveau élevé = réplication virale en cours
VIH Co-infecté par le VIH
VHD Co-infecté par le VHD
Numération formule
Thrombopénie = symptôme de l’aggravation de la maladie
sanguine (NFS)/ plaquettes
ALAT/ ASAT Niveau élevé = marqueur de maladie chronique du foie
Taux de prothrombine (TP) Allongement du TP = probable insuffisance hépatocellulaire
51
3.1.5.3. Données socio-économiques
52
Tableau 6. Données du questionnaire adulte (nés avant le 1 septembre 2003) (AmBASS ANRS
12356)
Thème principal Thèmes spécifiques
Sexe, âge, situation matrimoniale, nombre d’enfants,
Information générale études/formations au cours des 12 derniers mois, niveau
d’instruction
Santé perçue et qualité de Santé perçue (échelle EQ-5D), la fatigue ressentie (échelle de
vie Piper abrégée), handicap
Pour les enfants (nés après le 1er septembre 2003), un questionnaire spécifique a été
administré à la mère ou au tuteur légal de l’enfant, avec l’assentiment de ce dernier. Le
questionnaire a permis d’évaluer leur état de santé, la vaccination ainsi que leur
exposition à des pratiques/comportements favorisant la transmission horizontale du
VHB (voir tableau 7).
Tableau 7. Données du questionnaire enfant (nés après le 1 septembre 2003) (AmBASS ANRS
12356)
Thème principal Thèmes spécifiques
53
3.1.6. Gestion des données
Les données biologiques ont été saisies par l’équipe de l’IRESSEF sur Excel et
contrôlées par les gestionnaires de données de l’équipe de VITROME.
Le questionnaire médical a été renseigné sous format papier par le médecin du projet,
qui a ensuite saisi les données sous Access. Un contrôle qualité a été fait par les
gestionnaires de données de l’équipe VITROME.
Les questionnaires à domicile ont été saisis sur tablette à l’aide du logiciel Voxco par
les enquêteurs. Le paramétrage imposait une réponse systématique à toutes les questions.
Tous les soirs, le coordinateur terrain récupérait les tablettes et transmettait les données
au data manager de la plateforme logistique du SESSTIM via une connexion internet. Une
vérification des identifiants et du suivi des questionnaires a été effectuée régulièrement
pour s’assurer du bon déroulement du recueil des données socio-économiques.
Les données ont été nettoyées et les bases de données élaborées par les gestionnaires
de base de VITROME et du SESSTIM.
J’ai effectué des missions régulières à l’observatoire de Niakhar avec l’équipe terrain, à
raison de deux semaines par mois, afin :
54
- De veiller à la disponibilité du matériel nécessaire à la collecte de données et à
l’approvisionnement des équipes sur le terrain.
En parallèle, j’ai effectué le contrôle qualité des tableaux de bord et des outils de suivi :
vérification de la correspondance entre les identifiants des participants inclus (outil
Access) et les questionnaires complétés, suivi des informations manquantes en lien avec
le coordonnateur terrain, et le contrôle du tableau de bord du suivi de l’enquête.
3.1.7.3. Pilotage
J’ai participé aux réunions de suivi du projet AmBASS dont les réunions hebdomadaires
de coordination, le comité de pilotage, les conseils scientifiques, l’atelier à Marseille avec
les équipes de VITROME et du SESSTIM pour échanger sur les premiers résultats de
l’étude (décembre 2019), et à la restitution des résultats du projet à Dakar et à Fatick
auprès d’acteurs impliqués dans la lutte contre l’hépatite B au Sénégal (juillet 2021).
55
Tableau 8. Données AmBASS (ANRS 12356) utilisées pour la thèse
Données
Données du projet AmBASS
utilisées
Données biologiques
AgHBs (tous les participants) ✓
AgHBe (AgHBs-positifs) ✓
Ac anti-HBe (AgHBs-positifs) ✓
ADN VHB (AgHBs-positifs) ✓
VIH (AgHBs positifs) ✓
VHD (AgHBs positifs) ✓
NFS/ plaquettes (AgHBs positifs) ✓
Transaminases ALAT/ ASAT (AgHBs positifs) ✓
TP (AgHBs positifs)
Données cliniques
Examen clinique ✓
Antécédents médicaux individuels et familiaux ✓
Facteurs de risque d’évolution de l’infection par le VHB (chez les participants
« adultes »)
Données socio-économiques (questionnaire ménage)
Information générale ✓
Production agricole ✓
Bétail ✓
Autres sources de revenu ✓
Sécurité alimentaire ✓
Caractéristiques du ménage ✓
Type d’habitat ✓
Données socio-économiques (questionnaire adulte)
Information générale ✓
Activité économique ✓
Santé perçue et qualité de vie
Santé maternelle (pour les femmes en âge de procréer 15-49 ans)
Dépistage VHB et maladies du foie
Des données de la base de l’observatoire de Niakhar ont également été utilisées pour
corriger et compléter certaines données du projet AmBASS (date de naissance, sexe,
numéro de cuisine ou de concession, identifiants de la mère ou du père de l’enfant, …).
Afin d’avoir des données de vaccination les plus complètes possibles, trois sources de
données ont été utilisées : (i) les données renseignées sur les carnets de vaccination des
enfants collectées lors de l’enquête principale ; (ii) les données de l’observatoire de
Niakhar (au moins deux fois par an, les données de vaccination des enfants résidant dans
au sein de l’observatoire sont collectées et mises à jour à partir des carnets de
vaccination) ; (iii) les données des registres de vaccination des postes de santé de la zone.
56
3.2.2. Analyses statistiques
J’ai mené et effectué les analyses statistiques avec l’appui des équipes du SESSTIM.
Les données du projet AmBASS ont été pondérées et redressées afin d’être
représentatives des résidents de la zone de Niakhar en termes de sexe (masculin, féminin)
et d’âge (0-14 ans ;15 à 34 ans ; ≥35 ans).
Le poids de sondage P1 a été corrigé sur le temps de présence dans le ménage (P2).
Pour les enfants, une hypothèse d’une présence en continu sur les 12 derniers mois de
l’année a été retenue.
𝑃1
𝑃2 =
𝑛𝑏. 𝑚𝑜𝑖𝑠 𝑑𝑒 𝑝𝑟é𝑠𝑒𝑛𝑐𝑒 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑎 𝑐𝑢𝑖𝑠𝑖𝑛𝑒 𝑎𝑢 𝑐𝑜𝑢𝑟𝑠 𝑑𝑒 𝑙′𝑎𝑛𝑛é𝑒
Les données ont ensuite été redressées post-stratification. D’abord, six post-strates ont
été définis selon les caractéristiques choisies (sexe en 2 modalités et âge en 3 modalités) :
1. hommes 0-14 ans
2. hommes 15 à 34 ans
3. hommes ≥ 35 ans
4. femmes d’âge 0-14 ans
5. femmes d’âge 15 à 34 ans
6. femmes d’âge ≥ 35 ans
Toutes les analyses utilisant les données du projet AmBASS ont été effectuées avec les
données pondérées et redressées.
57
3.2.2.2. Analyses descriptives et univariées/multivariées
Le premier article de cette thèse sur la prévalence de l’infection chronique par le VHB
et les besoins en traitement dans la zone de Niakhar utilise uniquement des analyses
descriptives. Des analyses univariées et multivariées ont été effectuées dans le deuxième
article sur les facteurs associés à une infection par le VHB chez les enfants et le troisième
article sur la couverture vaccinale contre le VHB et les facteurs associés au non-respect
des schémas vaccinaux.
Pour les analyses descriptives, les données catégorielles ont été présentées sous forme
de proportion, et les données continues sous forme de moyenne. Les comparaisons entre
les proportions ont été effectuées par les tests du Chi2 ou le test exact de Fischer. Le t-test
de Student a été utilisé pour comparer les moyennes.
Des analyses univariées ont permis de croiser l’ensemble des variables explicatives
(socio-démographiques, comportementales, …) avec les variables d’intérêts. Différentes
méthodes de régression ont été utilisées.
Pour le deuxième article sur les facteurs associés à une infection par le VHB chez les
enfants, un modèle de régression binomial négatif a été utilisé en raison du faible effectif
de la variable d’intérêt (n=17/1327 enfants AgHBs-positifs). Les résultats sont présentés
en incidence risk ratio.
Dans le troisième article sur la couverture vaccinale contre le VHB et les facteurs
associés au non-respect des schémas vaccinaux, un modèle Heckman a permis de vérifier
s’il y’avait un biais de sélection dans la population d’étude (si les enfants avec des données
de vaccination disponibles avaient des caractéristiques différentes de ceux sans données
de vaccination, et si cela biaisait les estimations des associations). Etant donné qu’il n’y
avait pas de biais de sélection, un modèle de régression logistique a été utilisé et les
résultats sont présentés en OR.
Les variables explicatives avec une p-valeur<0.25 dans l’analyse univariée ont été
testées dans le modèle multivarié. Les variables significatives au seuil de 5% et au seuil
de 10% ont été retenues dans les modèles multivariés finaux pour le deuxième et le
troisième article, respectivement. La méthode descendante (backward stepwise
regression) a été utilisée pour obtenir le modèle multivarié final dans les deux articles.
Toutes les analyses ont été effectuées avec le logiciel STATA version 14.2 pour
Windows (StataCorp, College Station, TX, USA).
58
(en collaboration initiale avec Dr Valérie Séror) sur les raisons de non-vaccination et de
sous-vaccination des enfants et adolescents en ASS.
Le protocole de la revue a été publié sur la base de données de revues systématiques
de la littérature PROSPERO (CRD42020178123).116 La revue a été effectuée en suivant les
critères Preferred Reporting Items for Sytematic Reviews and Meta-Analyses.117
Les bases de données PubMed, Web of Science, African Index Medicus et African
Journals Online ont été utilisées pour identifier les articles publiés entre 2010 et 2020 sur
les raisons de non-vaccination et de sous-vaccination des enfants et adolescents, telles
qu’exprimées par les communautés en ASS. Les références des articles éligibles ont
également été examinées.
Les critères étaient les suivants :
Les titres et abstracts ont d’abord été filtrés. Etant donné que très peu d’articles ont
étudié les raisons de vaccination incorrecte, cette variable d’intérêt a été exclue. Les
articles publiés avant 2010 ont aussi été exclus car une revue de Rainey et collègues sur
les raisons de non-vaccination et de sous-vaccination des enfants dans les pays à faible et
moyen revenu, en utilisant les données d’articles publiés entre 1999 et 2009, a déjà été
publiée.118 Après avoir sélectionné les abstracts éligibles, le texte intégral des articles a
été évalué.
Pour sélectionner les articles de la revue, un score de pertinence basé sur 5 critères a
été développé : 1) un des objectifs de l’étude était d’étudier les raisons de non-vaccination
et/ou de sous-vaccination ; 2) l’étude s’est déroulée en milieu communautaire ; 3) le
statut vaccinal de l’enfant/adolescent était connu ; 4) les résultats étaient suffisamment
détaillés, et 5) les résultats de l’étude ont été comparés aux résultats d’autres études.
Seules les études avec un score d’au moins 3 sur 5 ont été inclus dans la revue de
littérature.
Nous avons ensuite classé les raisons de non-vaccination et de sous-vaccination en 11
thèmes, en utilisant une version modifiée des catégories de la revue de Rainey et
collègues,118 qui étaient basées sur la “Classification of Factors Affecting Receipt of
Vaccines” de Vaccines (5ème edition).119
59
4. Résultats
Les objectifs de cet article sont : (i) de documenter la prévalence de l’infection chronique
par le VHB en population générale dans la zone de Niakhar au Sénégal, et (ii) d’estimer la
proportion d’individus nécessitant un traitement antiviral.
Pour répondre à ces objectifs, nous avons utilisé les données du projet AmBASS. Tous
les participants ont été dépistés pour l’infection par le VHB (détection de l’AgHBs sur DBS)
et ont répondu à un questionnaire socio-économique. Les participants AgHBs-positifs ont
effectué un bilan clinique et biologique. Nous avons évalué leur éligibilité au traitement
antiviral en utilisant les recommandations nationales et de l’OMS.
60
2030. Néanmoins, la prévalence élevée chez les adultes souligne la nécessité d’un
dépistage communautaire à large échelle et de l’amélioration de l’accès aux soins et au
traitement contre l’hépatite B.
L’article a été soumis à BMJ Global Health. Les annexes de l’article sont présentées
dans l’annexe C.
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4.2. Article 2 – Le statut VHB de la fratrie, la
naissance à domicile, les tatouages et les
points du suture sont des facteurs de risque
de l’infection par le VHB chez les enfants
Sénégalais : Une enquête transversale
L’épidémie de l’hépatite B en ASS est principalement due à des infections acquises
pendant l’enfance. En effet, l’infection par le VHB à un jeune âge est le principal facteur de
progression vers l’infection chronique et le cancer du foie et en ASS, le VHB se transmet
surtout pendant l’enfance. Cependant, peu d’études en ASS ont identifié les facteurs de
risques associés à une infection par le VHB chez les enfants.
Nous avons pris comme population d’étude les enfants inclus dans le projet AmBASS
nés entre 2004 et 2015 ; après l’introduction du vaccin pentavalent dans le PEV (2004) et
avant la mise en place de la dose à la naissance (2016). Des DBS ont été utilisés pour
identifier les enfants AgHBs-positifs. Un questionnaire socio-économique a été administré
à un parent ou tuteur légal. Nous avons utilisé un modèle de régression binomial négatif
pour identifier les facteurs de risque associés à une infection par le VHB.
Parmi les 1327 enfants inclus, 17 étaient AgHBs-positifs (prévalence 1.23%, IC à 95%
0.61-1.85%). Les enfants plus âgés, ayant un tatouage, ayant eu des points de suture, ayant
un frère ou une sœur (issu de la même mère) infecté par le VHB et les enfants nés à la
maison (plutôt qu’en structure de santé) étaient plus à risque d’être infectés par le VHB.
L’article a été publié dans Journal of Viral Hepatitis. Les annexes de l’article sont
présentées annexe D.
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4.3. Article 3 – Vaccination contre l’hépatite B
chez les enfants Sénégalais : Couverture
vaccinale, délais de vaccination et
déterminants socio-démographiques du non-
respect des schémas vaccinaux (ANRS 12356)
La vaccination est la principale mesure de prévention de l’hépatite B. L’OMS
recommande l’administration d’un vaccin monovalent à la naissance suivi d’au moins
deux doses additionnelles. Cependant, peu d’études en ASS ont estimé la couverture de la
dose à la naissance, outil majeur pour la prévention de la TME. De plus, les estimations de
la couverture du vaccin pentavalent au Sénégal ne prennent pas en compte le respect des
délais de vaccination, alors que le non-respect de ces délais impacte l’efficacité du vaccin.
Les objectifs de ce troisième article étaient : (i) d’estimer la couverture des vaccins contre
l’hépatite B au Sénégal en prenant en compte le respect des délais de vaccination, ainsi que
(ii) d’identifier les facteurs associés au non-respect des schémas vaccinaux.
Pour répondre à ces objectifs, nous avons pris comme population d’étude les enfants
inclus dans le projet AmBASS nés après la mise en place de la dose à la naissance en 2016.
Nous avons estimé leur statut vaccinal à partir des données des carnets de vaccination, de
la base de l’observatoire de Niakhar et des registres de vaccination dans les postes de
santé. Un questionnaire socio-économique a été complété par un parent ou le tuteur légal
des enfants.
Les deux variables d’intérêt étaient : (i) le non-respect du schéma vaccinal de la dose à
la naissance, et (ii) le non-respect du schéma vaccinal à trois doses (dose à la naissance
suivie d’au moins deux doses de pentavalent). L’OMS recommande d’administrer (i) la
dose à la naissance ≤24 heures suivant la naissance, (ii) la première dose de pentavalent
≥6 semaines après la naissance, et (iii) la deuxième dose de pentavalent ≤4 semaines
après la première dose. Nous avons identifié les facteurs associés à la non-respect des
deux schémas vaccinaux à partir d’un modèle de régression logistique.
Parmi les 241 enfants avec des données de vaccination disponibles, pour 2016 et 2017-
2018 respectivement, 31.0% et 66.8% avaient reçu la dose à la naissance dans les 24
heures suivant la naissance, et 24.3% et 53.7% avaient reçu le schéma vaccinal à trois
doses dans les délais recommandés. La naissance à la maison, la naissance pendant la
saison sèche et la naissance en 2016 étaient associés au non-respect des deux schémas
vaccinaux. Vivre à plus de 3 kilomètres du centre de santé le plus proche, être l’aîné de la
91
fratrie et vivre dans un ménage agricole pauvre étaient associés au non-respect du schéma
vaccinal à trois doses.
En conclusion, la proportion élevée d’enfants non vaccinée selon les schémas vaccinaux
recommandés montre qu’il est important de prendre en compte le respect des délais de
vaccination dans les estimations de couverture vaccinale. Afin d’améliorer la couverture
de la dose à la naissance, des incitations pour amener les enfants nés à domicile au centre
de santé dans les 24 heures suivant la naissance devraient être mises en place. Par ailleurs,
les stratégies avancées de vaccination pourraient être renforcées afin d’améliorer la
couverture vaccinale des enfants vivant dans les villages les plus éloignés, ceux nés à
domicile et ceux vivant dans des ménages agricoles pauvres.
L’article a été publié dans Vaccines. Les annexes de l’article sont présentées dans
l’annexe E.
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4.4. Article 4 – Raisons de non-vaccination et
de sous-vaccination des enfants et
adolescents en Afrique sub-Saharienne : Une
revue systématique de la littérature
Bien que les taux de couverture vaccinale des enfants en ASS aient nettement augmenté
depuis les années 2000, ceux-ci restent en dessous des objectifs de l’OMS. En
conséquence, les maladies évitables par la vaccination demeurent un problème de santé
publique majeur sur le continent. Afin de maitriser davantage ces maladies, il est essentiel
de comprendre les causes sous-jacentes d’une couverture vaccinale insuffisante en
identifiant les obstacles à la vaccination au niveau local.
Ce quatrième article avait pour objectif de passer en revue les raisons de non-vaccination
et de sous-vaccination des enfants et adolescents, telles qu’exprimées par les communautés
en ASS.
Pour répondre à cet objectif, nous avons réalisé une revue systématique de la
littérature. Nous avons utilisé les bases de données PubMed, Web of Science, African Index
Medicus et African Journals Online pour identifier les articles publiés entre 2010 et 2020
sur les raisons de non-vaccination et de sous-vaccination des enfants et adolescents en
ASS, telles qu’exprimées par les communautés. Nous avons développé un score de
pertinence, et seules les études avec un score d’au moins 3 sur 5 ont été sélectionnées
pour l’analyse finale. Nous avons classé les raisons de non-vaccination et de sous-
vaccination en 11 thèmes différents.
Nous avons inclus 37 articles dans la revue. Cependant, moins de la moitié des articles
ont rapporté séparément les raisons de non-vaccination et de sous-vaccination. Nous
avons donc regroupé ces deux variables d’intérêt en « vaccination incomplète ».
Les raisons de vaccination incomplète les plus couramment citées étaient liées au
manque de temps des parents (ex : dû au travail, aux files d’attente dans les centres de
vaccination, ou aux horaires de vaccination inconvénients), aux croyances et
connaissances des communautés vis-à-vis de la vaccination (ex : manque de
connaissances sur les vaccins ou les horaires/lieu de vaccination, peur des effets
secondaires) ainsi qu’à des problèmes liés aux services de vaccination (ex : occasions
manquées de vaccination, personnel absent, matériel insuffisant).
Cette revue est la première revue systématique de la littérature à identifier les raisons
de vaccination incomplète des enfants et adolescents en ASS, telles qu’exprimées par les
communautés. Nos résultats montrent que peu d’études séparent les raisons de non-
110
vaccination et de sous-vaccination, alors que les raisons sous-jacentes, et donc les
interventions requises, sont différentes dans ces deux situations. Les résultats mettent
également en évidence que les raisons de vaccination incomplète sont multiples. Une
communication efficace et pertinente autour de la vaccination, ainsi que l’adaptation de
l’organisation des services de vaccination au contexte local sont deux interventions clés
pour améliorer la vaccination en ASS.
L’article est en cours de finalisation. Les annexes de l’article sont présentées dans
l’annexe F.
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5. Discussion
Les résultats montrent que la prévalence de l’hépatite B était très basse chez les enfants
de moins de cinq ans (<1%), mais restait élevée chez les adultes nés avant l’introduction
du vaccin contre l’hépatite B (>10%).
Les enfants plus âgés, ayant un tatouage, ayant eu des points de suture, ayant un frère
ou une sœur infecté(e) par le VHB et les enfants nés à domicile présentaient un risque
plus important d’être infectés par le VHB. Ces résultats montrent l’importance de la
transmission intrafamiliale (notamment par les contacts étroits entre enfants d’une
même fratrie) et mettent en évidence, pour la première fois, les risques liés à certaines
pratiques tels que les tatouages, les points de suture et les accouchements à domicile.
Malgré la faible prévalence de l’infection par le VHB chez les enfants, près de la moitié
n’était pas vaccinée (≥3 doses) selon les recommandations de l’OMS. Néanmoins, la
proportion d’enfants ayant reçu la dose à la naissance ≤24 heures suivant la naissance a
augmenté entre 2016 (31%, année d’introduction du vaccin dans le PEV) et 2017-2018
(67%). Plusieurs caractéristiques socio-démographiques, telles que la naissance à
domicile, la naissance pendant la saison sèche et vivre à plus de trois kilomètres du poste
de santé le plus proche, étaient associées au non-respect du schéma vaccinal.
La revue de la littérature a également permis de compléter ces résultats en identifiant
les raisons de vaccination incomplète des enfants et adolescents en ASS. Celles-ci étaient
principalement liées aux contraintes de temps des parents (ex : dû au travail ou aux tâches
134
ménagères), aux croyances et connaissances des parents et de la communauté vis-à-vis
de la vaccination (ex : manque de connaissances sur les vaccins ou les horaires/lieu de
vaccination) ainsi qu’à des problèmes liés aux services de vaccination (ex : occasions
manquées de vaccination, personnel absent).
et mis en évidence
- L’importance de la transmission intrafamiliale et pour la première fois, les
risques liés à certaines pratiques (tatouages, points de suture,
accouchements à domicile)
- Une couverture insuffisante du schéma vaccinal complet (≥3 doses)
- Des facteurs socio-démographiques (ex : naissance à domicile, naissance
pendant la saison sèche, vivre ≥3 km du poste de santé le plus proche, …) et des
raisons (ex : contraintes de temps, connaissances et croyances vis-à-vis de la
vaccination, problèmes liés aux services de vaccination) de vaccination
incomplète et/ou incorrecte
135
- Nous avons également pu identifier des facteurs de risque qui n’avaient pas été
identifiés dans la littérature auparavant.
- Nous avons effectué plusieurs analyses de sensibilité afin de voir si les facteurs
associés à une infection par le VHB et ceux associés au non-respect des schémas
vaccinaux variaient en fonction de la population d’étude ou des délais de
vaccination choisis, respectivement.
- Dans le troisième article, l’utilisation d’un modèle Heckman nous a permis de
vérifier s’il y’avait un biais de sélection (si les enfants avec des données de
vaccination manquantes avaient des caractéristiques différentes de ceux avec des
données de vaccination disponibles et si cela biaisait les résultats des estimations).
- La revue systématique de la littérature était consacrée aux raisons de vaccination
incomplète des enfants telles qu’exprimés par les communautés, alors que la
majorité des revues publiées jusqu’à présent se concentrent sur les facteurs
associés à une vaccination incomplète.
5.2.2. Limites
Cependant, il y’a plusieurs limites à ces études.
Une des limites principales des études basées sur les données du projet AmBASS
concerne la validité externe des résultats. En effet, bien que la zone de Niakhar soit
représentative d’une zone rurale intermédiaire au Sénégal (zone dans laquelle 20-50% de
la population habite l’espace rural), les résultats de l’étude ne peuvent pas être extrapolés
au niveau national. Par ailleurs :
136
de vaccination incomplète ne peuvent pas capturer la multi-causalité des raisons. De plus,
nous n’avons pas classé les raisons par type de vaccin, pays ou contexte.
137
5.3.2. Renforcer la prévention de l’hépatite B
5.3.2.1. Prévenir la transmission mère-enfant
Comparé à d’autres pays d’ASS, la proportion d’enfants ayant reçu la dose à la naissance
≤24 heures après la naissance dans l’observatoire de Niakhar (67% en 2017-2018) est
relativement élevée.
En effet, une méta-analyse publiée en 2020 a montré qu’au Nigeria, en Gambie et en
Afrique du Sud, seul 1.3% des enfants recevaient le vaccin ≤24 heures après la naissance
(IC à 95% 0.0-4.5%) et 21.5% (IC à 95%9.4-36.8%) le recevaient ≤7 jours.73 Une autre
étude a également rapporté une faible couverture de la dose à la naissance ≤24 heures
après la naissance en Gambie (7%) et au Nigeria (13%).79
Bien que, dans ces pays, la couverture de la dose à la naissance soit bien plus faible
qu’au Sénégal, ces études ne permettent pas d’identifier avec certitude les raisons pour
lesquelles la couverture est meilleure au Sénégal. Par exemple, ces études ont évoqué des
barrières telles que la proportion élevée de naissances à domicile et la distance des
ménages aux postes de santé, mais ces facteurs ont également été mis en évidence dans
nos travaux au Sénégal. Cependant, à l’inverse de ces études, nous n’avons pas exploré
l’importance d’autres barrières telles que le manque de communication entre les services
de vaccination et de maternité.
Dans une des études, la couverture de la dose à la naissance au Botswana (74%) était
élevée, et comparable à celle que nous avons trouvé à Niakhar. La couverture élevée au
Botswana pouvait s’expliquer par le fait que beaucoup de femmes (presque 100%)
accouchaient en structure de santé et assitaient aux consultations prénatales, comparé
aux autres pays de l’étude (Nigeria, Gambie, Sao Tome et Principe, Naminie).79 De plus, les
structure de santé avaient la capacité d’administrer la dose à la naissance tous les jours.79
Une des cibles de la Stratégie mondiale du secteur de la santé contre l’hépatite virale
2016-2021 et des états de l’OMS en Afrique est d’atteindre une couverture de la dose à la
naissance de 50% d’ici 2020.7 Les résultats de cette thèse suggèrent que cet objectif a été
atteint dans la zone de Niakhar et que la proportion d’enfants ayant reçu la dose à la
naissance dans les 24 heures suivant la naissance est en train d’augmenter depuis 2016.
Néanmoins, afin d’atteindre une couverture du vaccin à la naissance de 90% d’ici 2030,
il est important de poursuivre les efforts pour augmenter le taux de couverture vaccinale.
Nous proposons ci-dessous quelques actions clés, notamment : (i) encourager les
accouchements en structure de santé, et (ii) pour les femmes accouchant à domicile,
mettre en place des interventions complémentaires pour les encourager à amener leur
nouveau-né en structure de santé le plus rapidement possible après la naissance et pour
vacciner les nouveau-nés à domicile dans les meilleurs délais.
138
I- Encourager les accouchements en structure de santé
Dans nos analyses, nous avons montré qu’une proportion significative d’enfants était
née à domicile (plus de 15%) et que la naissance à domicile était associée au non-respect
du schéma vaccinal de la dose à la naissance.
Ce problème est connu dans la zone de Niakhar. En effet, les accouchements à domicile
ont été évoqués par les personnels de santé de la région de Fatick comme un obstacle
principal à l’administration de la dose à la naissance (lors des ateliers de restitution des
résultats du projet AmBASS en juillet 2021). De plus, une enquête qualitative menée avant
la mise en place du projet AmBASS dans la région a également mis en évidence cette
barrière.77
Dans certains pays d’Afrique, l’accouchement en structure de santé et l’accouchement
médicalement assisté étaient associés à l’administration du vaccin dans les 24 heures
suivant la naissance.121
Bien que nous n’ayons pas directement étudié l’influence d’un accouchement
médicalement assisté sur l’administration de la dose à la naissance, quasiment tous les
enfants nés à domicile dans le projet AmBASS ont été mis au monde par des proches
(famille, amis de la famille). Nous avons donc raisonnablement fait l’hypothèse que les
naissances à domicile n’étaient pas médicalement assistées dans les ménages du projet
AmBASS.
139
Ainsi, encourager les accouchements en structure de santé pourrait permettre
d’améliorer la couverture de la dose à la naissance et réduire les risques d’infection par le
VHB.
Certains éléments contextuels s’y prêtent particulièrement :
140
Pour inciter les femmes à amener leur nouveau-né en structure de santé le plus tôt
possible après la naissance, plusieurs actions peuvent être entreprises.
Premièrement, dans les centres de santé de l’observatoire de Niakhar, les femmes qui
accouchent à domicile sont incitées à se rendre au poste de santé le plus tôt possible après
l’accouchement (≤48 heures) pour vacciner leur nouveau-né contre l’hépatite B. Il faut
donc maintenir et si besoin, renforcer cette sensibilisation.
Deuxièmement, sensibiliser davantage les parents et les communautés sur les
bénéfices de la dose à la naissance pourrait encourager les parents à venir rapidement au
poste de santé après la naissance. En effet, bien que des causeries aient été organisées
dans la zone pour sensibiliser les femmes à la dose à la naissance (en particulier l’année
de l’introduction de la dose dans le PEV), seul 11.6% des femmes en âge de procréer (15-
49 ans) incluses dans le projet AmBASS savaient qu’il existe un vaccin contre l’hépatite B
(article de Djaogol et al. en cours de revue).
Enfin, les agents de santé communautaires pourraient informer les personnels de
santé dès qu’il y’a une naissance à domicile et encourager les familles à amener l’enfant
au poste de santé le plus rapidement possible.121
Il est également essentiel d’avoir des stratégies innovantes pour vacciner les nouveau-nés
en dehors des structures de santé.
En effet, la possibilité de conserver le vaccin monovalent en dehors de la chaine du
froid pourrait permettre au personnel de santé (ou les agents de santé communautaires,
accoucheuses traditionnelles, …) d’aller vacciner le nouveau-né à domicile ≤24 heures
après la naissance.
Cependant, peu de pays en Afrique ont des programmes pour vacciner les nouveau-nés
nés en dehors des structures de santé.79 Une étude menée dans cinq pays (Botswana,
Gambie, Namibie, Nigeria, Sao Tome et Principe) a montré qu’aucun des centres de santé
enquêtés n’effectuait de stratégies avancées de vaccination pour les enfants nés à
domicile.79 Dans la zone de l’observatoire de Niakhar, les nouveau-nés qui n’ont pas reçu
la dose à la naissance peuvent la recevoir lors des stratégies avancées de vaccination ou
des vaccinations de rattrapages qui ont lieu mensuellement, mais la dose est
généralement reçue plus de 24 heures après la naissance.
A l’inverse, l’administration de la dose à la naissance à domicile a permis d’augmenter
la couverture vaccinale dans plusieurs pays d’Asie pays.121
Ainsi, une étude au Vietnam a montré que dans certains villages, la proportion
d’enfants recevant la dose à la naissance ≤24 heures après la naissance était élevée car les
agents de santé communautaires connaissaient les dates d’accouchement à domicile en
avance (par l’intermédiaire des village health workers), et pouvaient ainsi rapidement se
déplacer à domicile pour vacciner les nouveau-nés dans les plus brefs délais.126
En Indonésie, plusieurs projets ont testé et évalué des interventions pour administrer
la dose à la naissance en milieu rural, en particulier chez les enfants nés à domicile.127 Par
exemple, dans un projet, les accoucheuses traditionnelles étaient incitées à prévenir les
sage-femmes et infirmières lorsqu’un accouchement à domicile avait lieu, pour que les
sages femmes et infirmières aillent vacciner les enfants à domicile. En échange, les
141
accoucheuses recevaient du matériel pour les soins de l’accouchement (ex : soins pour le
cordon ombilical).127
Nos analyses ont montré qu’être né pendant la saison sèche était associé au non-
respect du schéma vaccinal de la dose à la naissance. Nous faisons l’hypothèse que la
migration pendant la saison sèche, particulièrement des femmes, peut expliquer cette
couverture vaccinale plus faible. En effet, lors des ateliers de restitution des résultats
AmBASS, le personnel de santé de la région de Fatick a souligné que les migrations
temporaires (notamment vers Dakar) et saisonnières ont beaucoup d’impact sur les
activités de santé dans la zone. Davantage de recherches devraient être menées pour
comprendre l’influence des saisons sur la vaccination des enfants.
142
Nos données suggèrent que cette stratégie permettrait de dépister la majorité des
personnes atteintes de l’infection chronique par le VHB.
Les résultats de nos analyses sur les facteurs associés au non-respect du schéma
vaccinal complet (≥3 doses) ont mis en évidence des interventions clés pour améliorer la
couverture vaccinale et le respect des délais de vaccination, par exemple :
Les résultats de la revue de la littérature sur les raisons de vaccination incomplète des
enfants, telles qu’exprimées par les communautés en ASS, viennent compléter les résultats
du troisième article sur les facteurs associés au non-respect des schémas vaccinaux.
Bien qu’aucun article de la revue ne présente des études menées au Sénégal, les résultats
mettent en évidence deux interventions clés qu’il faut adapter au contexte local pour
améliorer la couverture vaccinal,.
Premièrement, une communication efficace et pertinente autour de la vaccination
est essentielle pour adresser les connaissances et croyances des parents et des
communautés. Il faut également privilégier une bonne communication entre personnels
de santé pour améliorer les services de vaccination (ex : éviter les occasions manquées de
vaccination).
Deuxièmement, il est clé d’adapter l’organisation des services de vaccination au
contexte local. Par exemple, réaménager occasionnellement les horaires de vaccination
143
faciliterait l’accès aux services pour les parents occupés en journée (devant travailler ou
s’occuper des tâches ménagères). De plus, une meilleure gestion des stocks de vaccins et
des ressources permettrait d’améliorer la couverture vaccinale dans certains contextes.
Même si les tatouages (0.2%), ou les points de suture (6%) sont peu courant dans
l’observatoire de Niakhar (les tatouages sont pratiqués notamment dans certains groupes
ethniques de la zone), il faut réduire les risques d’infection pendant ces pratiques.Par
exemple, en s’assurant que le matériel est stérilisé avant l’emploi et en sensibilisant les
individus pratiquant ces activités aux mesures de prévention et de contrôle des infections.
Pour agir efficacement sur l’hépatite B, nos résultats mettent l’accent sur le besoin de
renforcer la prévention de la TME, en particulier via :
144
5.3.3. Mettre à niveau le dépistage, les soins et le
traitement de l’hépatite B
Bien que l’élimination de l’hépatite B chez les enfants semble envisageable,
l’importance de la prévalence chez les adultes pose la question de l’élargissement du
dépistage de l’hépatite B ainsi que de la facilitation de l’accès aux soins et aux traitements.
Ces actions permettraient d’obtenir une réduction significative de la morbidité et la
mortalité liées au VHB et d’atteindre les objectifs fixés par le PNLH et l’OMS dans ce
domaine.
Au Sénégal, seul 4% des individus AgHBs-positifs sont dépistés et moins d’1% de ceux
éligibles au traitement sont mis sous traitement.8 Des études en milieu rural ont montré
que la plupart des individus présentant des symptômes d’une infection hépatique ont
recours à la médecine traditionnelle en premier lieu.77,129 Ces patients se présentent dans
les systèmes de soins seulement lorsque la maladie est à un stade avancé.
Dans le cadre d’une approche communautaire, des tests de diagnostic rapide peuvent
être utilisés pour dépister rapidement un grand nombre de personnes, sans avoir à
attendre les résultats. Ce type de campagne peut aussi combiner de façon efficace le
dépistage de plusieurs infections ou pathologies afin d’optimiser l’organisation de la
campagne et de limiter les éventuelles réticences de la population. Pour cela, des outils de
diagnostiques doivent être disponibles dans les structures de soins primaires.
145
5.3.3.2. Simplifier les algorithmes de suivi et élargir l’accès
aux soins
Une fois dépistés, l’enjeu est de suivre régulièrement les individus infectés, la majorité
n’étant pas immédiatement éligible au traitement.
Pour la plupart des individus au Sénégal, le suivi est souvent rendu difficile par
l’insuffisance de ressources financières et l’éloignement des lieux de résidence.
Les examens de suivi sont généralement à la charge du patient, qui bénéficient
rarement d’une assurance santé ou d’une mutuelle. Ils occasionnent des dépenses
importantes qui peuvent constituer une réelle barrière pour l’accès aux soins.
Le second obstacle est l’inaccessibilité géographique des examens de suivi : certains
examens recommandés sont en effet peu, voire pas disponibles en zone rurale, comme la
mesure de la charge virale ou le Fibroscan.
Nos résultats montrent le besoin de repenser le modèle actuel de soins de façon à proposer
des modalités de suivi et de prise en charge adaptées aux contraintes locales.
En effet, les algorithmes de suivi médical pourraient être simplifiés, par exemple en
mesurant la charge virale lors du bilan initial puis seulement lorsqu’une anomalie de
transaminases est identifiée, ou en recourant à des outils alternatifs à la charge virale pour
mesurer la réplication virale.
Par exemple, le test Loop-mediated isothermal amplification est un test rapide (60
minutes) et peu cher (8 USD/test) permettant de diagnostiquer les patients avec une
charge virale ≥200,000 UI/L. Le test a été développé et testé dans une étude menée en
France et au Sénégal.130 La mesure du HBV core-related antigen pourrait également être
une alternative à faible coût (15 USD/test) pour identifier les patients avec une charge
virale élevée parmi les individus non traités. Une revue a montré que le test a une
sensibilité de 85.2% et une spécificité de 84.7% pour diagnostiquer les individus avec
ADN VHB≥2000 UI/L et de 91.8% et 90.5% lorsque ADN VHB≥20,000 UI/L.131
Nous avons montré que le nombre de patients éligibles au traitement variait selon les
recommandations utilisées. En effet, seulement un participant était éligible au traitement
selon les recommandations de l’OMS alors que quatre étaient éligibles selon les
recommandations nationales. D’autres études ont aussi montré que les recommandations
simplifiées de l’OMS semblent peu adaptées au contexte Africain. 86
Il est donc nécessaire d’avoir des nouvelles recommandations de l’OMS, spécifiques au
contexte Africain. Par ailleurs, les critères nationaux de mise sous traitement doivent être
146
validés officiellement car les personnels de santé sur le terrain sont actuellement
confrontés à des recommandations différentes.
147
Conclusion générale
Les travaux ont montré que l’élimination de l’hépatite B chez les enfants est
envisageable au Sénégal. En effet, grâce au programme de vaccination contre l’hépatite B,
la prévalence de l’hépatite B chez les enfants est très faible et le pays est proche
d’atteindre l’objectif national et de l’OMS d’une réduction de l’incidence de l’infection
chronique par le VHB de 90% d’ici 2030. Par ailleurs, les résultats ont mis en évidence
pour la première fois les risques d’infection liés à certaines pratiques et l’importance de
la transmission intrafamiliale. Enfin, la couverture vaccinale contre l’hépatite B (dose à la
naissance, et ≥3 doses) est encore en dessous des objectifs de 2030, malgré une
augmentation de la couverture de la dose à la naissance depuis son introduction en 2016.
Plusieurs facteurs et raisons de vaccination incorrecte et/ou incomplète ont été identifiés
(ex : naissance à domicile, vivre ≥3 kilomètres du poste de santé le plus proche, naissance
en saison sèche, contraintes de temps des parents, manque de connaissances des parents
vis-à-vis de la vaccination).
Pour agir efficacement sur l’élimination de l’hépatite B, nos données mettent l’accent
sur le besoin de renforcer la prévention de la TME, en particulier via i) l’augmentation de
la couverture de la dose à la naissance en encourageant les femmes à accoucher en
structure de santé, et en mettant en place des interventions complémentaires pour
vacciner les nouveau-nés nés à domicile dans les meilleurs délais ; ii) le développement
du dépistage des femmes enceintes et de leurs proches (notamment conjoint et enfants),
en cas de dépistage positif. Augmenter le taux d’enfants bénéficiant d’un schéma vaccinal
complet (au moins 3 doses administrées dans les délais recommandés) et améliorer
l’accès au traitement prophylactique du VHB chez les femmes dépistées AgHBs positives
et à risque élevé de TME sont d’autres stratégies essentielles pour éliminer la
transmission de l’hépatite B durant l’enfance. Les résultats de cette thèse fournissent des
données essentielles aux autorités de santé du Sénégal et des autres pays de la sous-
région pour adapter les politiques et stratégies nationales de lutte contre l’hépatite B en
vue de l’atteinte des objectifs d’élimination à l’horizon 2030.
148
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Annexes
160
L’apparition de l’AgHBe dans le sang est suivie par celle de l’AgHBe. Les Ac anti-HBc
peuvent apparaitre tôt dans l’infection, généralement une ou deux semaines après
l’apparition de l’AgHBs et les Ac anti-HBC IgM sont très élevés et disparaissent après.
161
L’histoire naturelle de l’infection chronique par le VHB peut être divisée en plusieurs
phases, en fonction de la présence de certains marqueurs du VHB (AgHBs, AgHBe, Ac anti-
HBe et ADN VHB) et de la maladie du foie (taux d’ALAT et la présence de fibrose).64 La
European Association for the Liver of the Cancer (EASL) a publié en 2017 une nouvelle
classification des phases naturelles de l’infection chronique par le VHB basée sur les
principales caractéristiques de la chronicité : l’infection et l’hépatite.64 Néanmoins, dans
la plupart des cas, la seule mesure des marqueurs ne permet pas de classer les patients
dans une de ces phases. De plus, les phases de ne sont pas toujours séquentielles et cette
nouvelle nomenclature n’a pas encore été adoptée par d’autres sociétés
professionnelles.16 Les phases naturelles de l’infection chronique sont présentées dans le
tableau A2. L’histoire naturelle et les phases de l’infection sont moins délimitées chez les
enfants.16
Source : EASL64
162
hépatocellulaire. Cependant, si l’AgHBs est perdu pendant le développement d’une
cirrhose, le risque de carcinome hépatocellulaire persiste et une surveillance des patients
est recommandé. L’immunosuppression peut induire une réactivation virale chez ces
patients.
163
B. Dépistage de l’hépatite B
Stratégies de dépistage
L’OMS recommande les approches de dépistage suivantes60 :
Pour toutes ces approches, il est important de créer des passerelles entre les services
de dépistage et les services de soins et de traitement. 60
Techniques de dépistage
Le dépistage de l’infection par le VHB chez les adultes, adolescents et enfants se fait par
la détection de l’AgHBs via un test sérologique (par immunodosage ou par un test de
diagnostic rapide).60 Le test peut être répété six mois plus tard pour confirmer une
infection chronique.16 Tester les enfants de moins de six mois n’est pas recommandé.16
L’OMS recommande d’utiliser les tests par immunodosage dans les lieux où les
laboratoires ont la capacité nécessaire. Un test de diagnostic rapide est recommandé dans
certaines situations (par exemple, lorsque les laboratoires n’ont pas le matériel ou
l’expertise requis, ou sont difficiles d’accès).60
Lorsque la séroprévalence de l’AgHBs est supérieure à 0.4% en population général, un
seul test sérologique est suffisant pour détecter l’AgHBs. Dans les lieux où la
séroprévalence de l’AgHBs est inférieure à 0.4%, un deuxième test est nécessaire pour
confirmer la positivité à l’AgHBs. 60
164
C.Annexes article 1
165
166
167
D. Annexes article 2
168
169
170
171
172
E. Annexes article 3
173
174
175
176
177
178
F. Annexe article 4
179
180
181
182
183
184
185
186
187
188
189
190