Etude de L'action Des Phosphates Présents Dans L'eau de Gâchage Sur L'hydratation D'un Ciment Portland
Etude de L'action Des Phosphates Présents Dans L'eau de Gâchage Sur L'hydratation D'un Ciment Portland
Etude de L'action Des Phosphates Présents Dans L'eau de Gâchage Sur L'hydratation D'un Ciment Portland
Thèse de doctorat
Discipline : Sciences
Spécialité : Chimie-Physisque
Philippe BENARD
-1-
Remerciements
Je suis très reconnaissant envers l’ATILH et particulièrement Mme Angélique Vichot pour
avoir permis la réalisation de ce travail. Je tiens également à remercier Mme Vichot pour
l’intérêt qu’elle a portée à mon travail durant ces trois années ainsi que pour l’organisation
des journées de présentations et de visites très instructives chez les différents cimentiers.
J’adresse tous mes remerciements à Jean-Claude Mutin pour avoir accepté de présider mon
jury de thèse mais également pour l’intérêt qu’il a porté à mon travail et pour ses conseils
avisés. J’adresse également mes remerciements à Mr Gilles Bertrand pour m’avoir accueilli
au sein du LRRS.
Au laboratoire, les journées sont parfois longues (surtout en hiver) mais l’on s’y ennuie
rarement. Dans ces bureaux distribués le long d’un interminable couloir, on a toujours un
petit quelque chose à partager avec ceux qui les occupent (des discussions scientifiques,
des idées de manips, des commentaires sur le temps, un café, une tranche de bonne
humeur…). C’est donc avec regrets mais pas sans espoir que je vais quitter ces lieux qui ont
fait vivre mon quotidien ces quatre dernières années.
Dans ces lieux, j’ai eu la chance de croiser André Nonat dès le début de mon DEA. Merci
André pour m’avoir intégrer dans ton équipe et pour m’avoir guider tout au long de ces
-2-
années. Je ne suis pas près d’oublier les idées et les nombreux conseils de toute nature que
tu m’as donné. La co-direction de cette thèse a été assurée par Sandrine Garrault que je
tiens à remercier chaleureusement pour tout le temps et tout l’intérêt qu’elle a pu consacrer à
ce travail. Merci pour m’avoir soutenu et épaulé tout au long de ces années. Le travail et
l’étudiant n’étaient pas facile, tu t’en es sortie comme un chef.
Dans l’équipe ‘ciment’, je voudrais également remercier Danièle Perrey pour son
dévouement auprès de tous les thésards mais aussi pour sa force de caractère et pour sa
bonne humeur quotidienne. Merci également à Isabelle Pochard et à Sylvie Pourchet pour
leurs sourires et leurs encouragements tout au long de cette thèse. Merci à Agnès (Hercule
woman) pour sa sympathie, son énergie, et pour tous les services qu’elle m’a rendues.
Merci à Pierre Bracconi pour avoir rappelé à mes papilles le goût de la cuisine du sud-est
asiatique qui me manque tant.
Je remercie tous mes collègues du bureau Laure, Maciej, Yannick pour m’avoir encouragé
jusqu’à l’épreuve ultime et pour l’ambiance décontractée qui a régnée dans le CR17. J’ai une
pensée toute particulière pour mon p’tit Luc avec qui j’ai partagé rires et angoisses pendant
une grande partie de mon séjour au labo. J’ai hâte de visionner le chef d’œuvre qu’il nous
prépare ‘Un entêté chez les teutons’. J’ai également une pensée pour les anciens parti(e)s
avant moi, Hélène, Jean-Phi, Cédric, Teuf et Marta avec qui j’ai eu la chance de soutenir et
pour ceux qui partiront plus tard Lin, Lan-Tam... Je n’oublie pas les autres thésard(e)s et
ami(e)s des autres équipes avec qui j’ai passé des moments forts sympathiques : Yoyo et
Mag, Gwen, Alexis, Aude, Anne, Vincent, Jérôme, Garruch, Seb, Jean-Louis, les pépettes du
3ème Véro, Edith et Armelle, Jack B…
Elle est longue la liste de celles et ceux que j’ai croisé tous les jours pendant ces quatre
années. Un grand merci à Sylvie B., Valérie, Carmen, Grand Luc, Bruno, Peter, Michel, Paul
et les autres….
-3-
Enfin je voudrais dire combien je suis reconnaissant à toute ma famille et en particulier à
mon père, ma mère et ma sœur pour leur soutien indéfectible et quotidien. Qu’ils trouvent
dans ce travail le témoignage de mon affection.
-4-
Table des matières
INTRODUCTION...........................................................................................................................................- 10 -
-5-
Table des matières
80 -
IV.3. DETERMINATION DES QUANTITES DE PHOSPHATE A INTRODUIRE EN SOLUTION .............................. - 82 -
IV.4. EVOLUTION DE LA VITESSE DE DISSOLUTION DU C3S EN PRESENCE DE PHOSPHATE EN SUSPENSION
DILUEE A DIFFERENTS RAPPORTS LIQUIDE SUR SOLIDE .................................................................................. - 84 -
IV.5. DISCUSSION SUR L’INFLUENCE DES IONS ORTHO PHOSPHATE SUR LA DISSOLUTION DU SILICATE
TRICALCIQUE ................................................................................................................................................ - 87 -
-6-
Table des matières
I.2.a. Evolution temporelle de la cohésion pour différentes solutions phosphate / nitrate...............- 107 -
I.3. DISCUSSION .................................................................................................................................. - 115 -
-7-
Table des matières
II.1. CAS DES EPROUVETTES HYDRATEES AVEC DES SOLUTIONS NE CONTENANT QUE DES SELS DE NITRATES
ALCALINS .................................................................................................................................................... - 131 -
II.2. CAS DES EPROUVETTES HYDRATEES AVEC LE SYSTEME COMPLEXE PHOSPHATE / NITRATE........... - 132 -
III.1. CAS DES EPROUVETTES HYDRATEES AVEC DES SELS DE NITRATE ALCALIN ................................... - 133 -
III.2. CAS DES EPROUVETTES HYDRATEES AVEC DIFFERENTES SOLUTIONS DE PHOSPHATE AVEC ET SANS
NITRATE - 135 -
-8-
Table des matières
-9-
Introduction
Introduction
Contexte :
L’industrie nucléaire génère un certain nombre de déchets radioactifs qu’il est nécessaire de
retraiter et de conditionner avant d’envisager leur stockage sur sites1,2. Les objectifs des
opérations de conditionnement sont de mettre les déchets sous une forme solide, stable,
monolithique (réduction de la surface accessible et élimination des vides à l’intérieur des
colis) et confinante de manière à constituer un colis qui satisfasse aux différentes normes en
vigueur.
En France, les déchets radioactifs sont classés en quatre catégories (TFA, FA,MA,HA)3 en
fonction de leur niveau de radioactivité et de la nature des radionucléides qu’ils contiennent4,5.
Les déchets à l’origine de ce travail sont des concentrâts d’évaporation riches en phosphates
provenant de la station de traitement des effluents liquides du C.E.N. de Saclay. Ils
appartiennent à la catégorie FA qui regroupe les déchets de faible activité ne contenant que
des radionucléides dont la période radioactive est inférieure à 30 ans.
1
Physique, S. F. d. (1997). les déchets nucléaires,ed. R. Turlay; Paris.
2
Guillaumont, R. (1997). "La gestion des déchets radioactifs. Cas de la France." L'Actualité Chimique, 8-9, 4-10.
3
TFA : très faible activité ; FA : faible activité , MA : moyenne activité, HA : haute activité
4
Ouzounian, G. (1998). "Les déchets radioactifs en France. Nature, classification et modalités de gestion."
Colloque Radioactivité, Nucléaire et Environnement, 51-61.
5
www.andra.fr
- 10 -
Introduction
La teneur particulièrement élevée en ions ortho phosphate de ces déchets est due à l’utilisation
en quantité importante d’acide phosphorique pour la décontamination du matériel ayant été en
contact avec des éléments radioactifs.
Après avoir utilisé des matrices à base de bitume pour le conditionnement de ces déchets, les
ciments silico-calciques sont apparus comme étant des matrices d’enrobage potentiellement
6
Le pH d’une pâte de ciment est compris entre 12,5 et 13,5
- 11 -
Introduction
plus intéressantes pour ce type de déchets7,8. Les raisons à cela sont nombreuses : la sûreté du
procédé associé à leur disponibilité, leur simplicité de mise en forme, leur bonne résistance
mécanique, leur stabilité dans le temps et leur basicité qui permet d’insolubiliser la plupart des
radionucléides sont leurs principales qualités. De plus, d’un point de vue économique, le
matériau ciment est l’un des moins onéreux. Il a donc naturellement été retenu pour remplir le
rôle de matrice pour l’immobilisation des concentrâts d’évaporation en question.
En leur temps, les romains furent les premiers à fabriquer un liant hydraulique capable de
faire prise sous l’eau en mélangeant de la chaux à des cendres volcaniques. Bien que connues
depuis l’antiquité, les propriétés d’hydraulicité de ce mélange sont restées inexpliquées
pendant des siècles. Ce n’est qu’en 1817 que Louis Vicat en établit la théorie et révéla les
principes de fabrication du ciment artificiel que nous utilisons encore aujourd’hui. En 1824,
l’écossais Aspdin augmente la température de cuisson du ciment jusqu’en début de fusion des
matériaux de base et donne au ciment le nom de Portland en référence à la pierre de cette
région dont les propriétés étaient comparables.
Le constituant principal du ciment est le clinker. Ce dernier est issu de la cuisson à 1450°C
d’un mélange de calcaire et d’argile dans les proportions respectives d’environ 80 et 20 %. A
ce clinker est ajouté une faible quantité de sulfate de calcium (moins de 5%) pour obtenir le
ciment. Cet ajout est destiné à augmenter le temps d’ouvrabilité du ciment en modifiant
l’hydratation des phases aluminates.
D’un point de vue chimique, le ciment est un matériau comportant quatre phases
principales qui constituent le clinker et dont les proportions varient selon son origine de
production (Tableau 2).
7
Jorda, M., and Revertégat, E. (1995). "Les ciments pour le conditionnement et le stokage des déchets
radioactifs." Clefs CEA, 30, 47-61.
8
Atkins, M., and Glasser, F. P. (1992). "Application of Portland cement-based materials to radioactive waste
immobilization." Waste Management, 12, 105-131.
- 12 -
Introduction
(% massique
Notation des différentes
Constituant Nom Formule brute
cimentaire9 phases dans le
clinker)
Silicate
Alite C3S Ca3SiO5 60-65
tricalcique
Silicate
Bélite C2S Ca2SiO4 10-20
bicalcique
Aluminate
Célite C3A Ca3Al2O6 8-12
tricalcique
Aluminoferrite
Célite II C4AF Ca4Al2O10Fe2 8-10
tétracalcique
Dans le cadre de notre étude, nous avons choisi de travailler avec le même ciment que celui
utilisé dans la formulation établie pour le conditionnement des concentrâts. Ce ciment (CEM I
PM-ES 52,5 R) a la caractéristique de contenir une forte proportion de phases silicates et par
conséquent une teneur réduite en phases aluminates. Ce choix permet de limiter les risques de
gonflement ettringitique10 qui pourrait intervenir suite aux réactions entre les phases
aluminates et l’importante quantité de sulfates (Tableau 1) présente dans les déchets à
immobiliser. Le Tableau 3 et le Tableau 4 présentent la composition du ciment utilisé.
9
Notation cimentaire : C = CaO, S = SiO2, A = Al2O3, F = Fe2O3, H = H2O
10
Taylor, H. F. W. (1997). Cement Chemistry, ed. Thomas Telford; London.
- 13 -
Introduction
Composition
SiO2 Al2O3 Fe2O3 CaO MgO K2O Na2O SO3
du ciment HTS
Proportion
massique des
22,95 2,70 1,90 68,05 0,80 0,16 0,17 2,25
différentes
phases
Objectif et contraintes
11
Cau Dit Coumes, C., and Courtois, S. (2003). "Cementation of a low-level radioactive waste of complex
chemistry investigation of the combined action of borate, chloride, sulfate and phosphate on hydration using
response surface methodology." Cement and Concrete Research, 33(3), 305-316.
- 14 -
Introduction
travaillé sur des pâtes de ciment sauf dans certains cas particuliers signalés à l’avance. Les
différentes propriétés que nous avons étudiées sont en relation directe avec le comportement
de la pâte de ciment tout au long de sa vie, tant dans les premiers instants suivant le gâchage
de la pâte que sur des temps beaucoup plus long, correspondant au début du stockage.
Compte tenu du taux de salinité particulièrement élevé des concentrâts d’évaporation (300
g.L-1) mais également dans le but de se rapprocher au maximum du système réel qu’il
représente, nous avons décidé d’étudier l’influence des ions ortho phosphate en ajoutant aux
solutions d’hydratation une quantité de sel variable permettant de travailler à salinité
constante de 300 g.L-1. La présence importante de nitrate alcalin dans les concentrâts
d’évaporation (160 g.L-1 en moyenne) nous a conduit à ajouter, en fonction du but recherché,
soit du nitrate de sodium soit du nitrate de potassium.
Afin de distinguer l’influence de la concentration en phosphates et celle de la concentration en
nitrates alcalins sur les différentes propriétés étudiées, nous détaillerons séparément
l’influence de chacune de ces deux espèces puis nous nous focaliserons sur l’influence
qu’elles peuvent avoir lorsqu’elles sont introduites conjointement dans les solutions
d’hydratation.
Au cours de ce travail, deux phosphates différant uniquement par leur contre ion associé ont
été utilisés : le phosphate de sodium et le phosphate de potassium. La raison à cela est double.
Premièrement, l’objectif est de mettre en évidence un éventuel effet du contre ion sur les
effets observés et donc de prévoir les conséquences d’une neutralisation des effluents à la
potasse plutôt qu’à la soude, ensuite la solubilité du phosphate de sodium étant limitée, un
domaine plus large de concentrations en phosphate pourra être balayé avec le phosphate de
potassium.
- 15 -
Introduction
Méthode
- Les pulvérulents (ciment + sable) sont gâchés dans un malaxeur avec les concentrâts
d’évaporation. L’eau nécessaire à l’hydratation du ciment est l’eau non évaporée
encore contenue dans les concentrâts.
- Le mortier est alors transféré dans un conteneur en béton fibre équipé d’une paroi en
polyéthylène. Ce conteneur a également pour rôle de constituer une barrière de
confinement vis à vis du milieu extérieur.
- Le colis que constitue le conteneur et le déchet enrobé qu’il contient est alors destiné à
être expédié sur le Centre de Stockage de l’Aube (CSA) géré par l’ANDRA.
L’une d’entre elles porte sur le temps de prise de l’enrobé. Entre le début et la fin de prise, le
colis ne doit subir aucun choc violent qui risquerait de provoquer la fissuration de la matrice
au jeune âge. De plus, il est souhaitable que le temps de prise n’excède pas 24 heures afin
d’assurer un rendement de la chaîne de conditionnement, et qu’il reste supérieur à 6 heures
pour éviter tout risque de prise dans le malaxeur en cas de disfonctionnement.
La mise en œuvre d’un tel procédé en ‘continu’ (préparation de l’enrobé dans le malaxeur et
vidange dans le conteneur) nécessite également que l’enrobé possède une fluidité suffisante et
constante le plus longtemps possible. Lors d’une intervention sur le malaxeur en raison d’une
panne du système de motorisation ou de vidange, il faut être assuré de pouvoir malaxer
l’enrobé après l’intervention. Par ailleurs, la vidange d’un enrobé fluide est aisée, ce qui limite
la rétention dans le malaxeur et permet de minimiser l’eau de rinçage. Enfin, à l’issue des 24
heures qui suivent le gâchage, le ressuage, qui se manifeste par l’apparition d’une pellicule
d’eau à la surface du matériau suite à un tassement de l’ensemble de la structure solide doit
être nul, ce phénomène étant préjudiciable à l’homogénéité de l’enrobé.
- 16 -
Introduction
Pour cela, nous examinerons dans un premier temps la cinétique d’hydratation des pâtes de
ciment en fonction de la nature et de la concentration des ajouts présents dans les solutions
d’hydratation. Les suivis seront réalisés avec un microcalorimètre isotherme, technique très
bien adaptée et largement utilisée dans les laboratoires pour ce genre de manipulations. Ils
nous permettront de conclure sur le caractère accélérateur ou retardateur des différents ajouts,
caractéristique importante à connaître .
Dans un deuxième temps, une étude rhéologique des pâtes de ciment en fonction de ces
mêmes ajouts sera réalisée. Cette étude nous permettra de juger des propriétés mécaniques des
pâtes de ciment au jeune âge. La technique utilisée pour ce travail est la rhéométrie en mode
dynamique. Les conditions expérimentales (déformation, fréquence…) sont exposées dans
l’annexe I.
Enfin, nous terminerons ce travail par un point important concernant la durabilité des colis et
qui a trait à l’évolution dimensionnelle des matrices cimentaires au fil du temps. En effet, le
déchet, une fois coulé et durci, ne doit pas exercer sur son conteneur des contraintes
susceptibles de l’endommager. C’est pourquoi une étude des variations dimensionnelles
d’éprouvettes de mortiers hydratées avec différentes quantités de phosphates ou de nitrates a
été réalisée. Les suivis se sont déroulés dans deux milieux différents, l’air en milieu confiné et
l’eau, afin de simuler dans le premier cas les conditions normales de stockage et dans le
second, une situation accidentelle avec intrusion d’eau dans le conteneur.
Ces différents points seront abordés dans ce manuscrit que nous avons scindé en quatre
parties. Dans la première, nous rappellerons les bases de la réactivité et de la cohésion du
ciment Portland en y incluant les conséquences que les fortes concentrations en nitrate des
solutions d’hydratation sont susceptibles d’engendrer. Dans la seconde partie, nous nous
concentrerons exclusivement sur l’influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et les
- 17 -
Introduction
propriétés mécaniques au jeune âge des pâtes de ciment. La troisième partie sera consacrée à
l’influence des solutions de phosphates additionnées de nitrates (que nous appellerons
solutions complexes) sur les mêmes caractéristiques que précédemment. Enfin dans une
quatrième et dernière partie, nous traiterons des problèmes de variations dimensionnelles
d’éprouvettes de mortiers en fonction des concentrations en phosphate et en nitrate introduites
dans les solutions d’hydratation.
12
PO43- ainsi que toutes les formes acido-basiques.
- 18 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
L’hydratation du silicate tricalcique procède selon une succession de trois réactions qui
deviennent rapidement simultanées. Nous allons nous attacher à les décrire dans les
paragraphes qui vont suivre.
Dès la mise en contact du ciment avec l’eau, le silicate tricalcique se dissout de façon
congruente13 suivant l’équation :
13
Barret, P., Ménétrier, D., and Bertrandie, D. (1983). "Mechanism of C3S dissolution and problem of the
congruency in the very initial period and later on." Cement and Concrete Research, 13, 728-738.
- 19 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
Figure 1):
4 H2O(l) 4 OH-
solution
Ca2+ Ca2+ SiO44- O2- Ca2+ Ca2+ Ca2+ H3SiO4- OH- Ca2+
solide
Ca2+ SiO44- O2- Ca2+ Ca2+ Ca2+ SiO44- O2- Ca2+ Ca2+
2 Ca2+aq + 4 OH-
3 Ca2+aq + 5 OH- aq + H3SIO4- aq
Ca2+ H3SiO4- OH-
Ca2+ SiO44- O2- Ca2+ Ca2+ Ca2+ SiO44- O2- Ca2+ Ca2+
Dans le cas général, les espèces silicate peuvent se présenter sous forme polymérisée ou non
et sous divers degrés d’ionisation suivant les caractéristiques du milieu dans lequel elles se
trouvent (pH, concentration…)15. Le caractère fortement basique de la solution interstitielle
d’une pâte de ciment (pH compris entre 12,5 et 13,5) conduit les espèces silicatées à être
14
Barret, P. (1979). "Sur l'existence d'un stade d' hydroxylation superficielle dans le processus de dissolution du
silicate tricalcique 3CaO,SiO2 et son influence sur la solubilité de ce constituant du ciment." C. R. Acad. Sc.
Paris, 288(C), 461-464.
15
Greenberg, S. A. (1958). "The nature of silicate species in sodium silicates solutions." J.Am Chem Soc, 80,
6508-6511.
- 20 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
La stoechiométrie des C-S-H est variable. Le rapport C/S (CaO/SiO2) qui caractérise ces
hydrates évolue de façon discontinue avec l’augmentation de la concentration en hydroxyde
de calcium de la solution interstitielle16,17,18. Il ne dépasse jamais la valeur 2.
16
Greenberg, S. A., and Chang, T. N. (1965). "Investigation of the colloid hydrated calcium silicates II)
Solubility relationships in the calcium oxyde-silica-water system at 25 C." Journal of Physical Chemistry, 69(1),
182-188.
17
Lecoq, X. (1993). "Etude de l'hydratation à concentration controlée du silicate tricalcique Ca3SiO5 et des
caractéristiques de ses produits de réaction," Thèse de doctorat, Université de bourgogne, Dijon.
18
Taylor, H. F. W. (1997). Cement Chemistry, ed. Thomas Telford; London.
19
Barret, P., and Bertrandie, D. (1986). "Fundamental hydration kinetic features of the major cement
constituents: Ca3SiO5 and bCa2SiO4." Journal de Chimie Physique, 83(11/12), 765-775.
- 21 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
qu’après avoir atteint un degré de sursaturation suffisant (point b). Les C-S-H se forment alors
instantanément. On assiste à une chute importante de la concentration en silice (segment bc).
Cette chute est proportionnelle à la quantité de germes de C-S-H qui se forment. A partir du
point b, les réactions de dissolution (1) et de précipitation (2) deviennent simultanées. Quant à
la concentration en calcium, elle reste quasiment constante durant la précipitation des C-S-H.
Ceci impose que pendant cette période, la vitesse de précipitation des hydrates est environ
trois fois plus grande que celle de dissolution du silicate tricalcique.
1400
b
1200
1000
[SiO2] / µmol.L-1
solubilité de C3S
800
600 a
b2
400 c courbe S
courbe C
courbe I
200
a2 c2
0 O O2
0 5 10 15 20 25
[Ca(OH)2] / mmol.L-1
A partir du point c, les concentrations en ions calcium et silice suivent alors la courbe C que
Barret a nommée chemin cinétique19. Cette courbe représente un état stationnaire entre la
précipitation des C-S-H et la dissolution interfaciale du silicate tricalcique. Si le système
venait à s’écarter de ce chemin en augmentant la vitesse de précipitation des C-S-H par
exemple, le fait de se rapprocher de la courbe de solubilité des C-S-H entraînerait une
réduction de l’écart à l’équilibre des hydrates par rapport à leur solubilité et provoquerait une
réduction de leur vitesse de précipitation. Au contraire, le fait de s’éloigner de la courbe de
solubilité du silicate tricalcique entraînerait une augmentation de l’écart à l’équilibre de ce
réactif vis-à-vis de sa solubilité et provoquerait en retour une augmentation de sa vitesse
- 22 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
interfaciale de dissolution. Le système tend donc toujours vers ce chemin associé situé entre
les deux courbes de solubilité.
Quelques mots sur la structure des C-S-H : Les C-S-H sont des entités cristallines
présentant un ordre à courte distance. Cette caractéristique, déduite des diagrammes de
diffraction X, a pu être imagée par microscopie à force atomique et a révélé des tailles de
particules de l’ordre de 60*30*5 nm20. Les C-S-H présentent une structure en feuillets dérivée
de celle d’un autre silicate de calcium hydraté naturel : la tobermorite21. Le feuillet est
constitué d’une couche d’ions calcium intercalée entre des chaînes linéaires de silicates. La
longueur des chaînes silicatées varie avec la concentration en hydroxyde de calcium. Quand
cette concentration est faible, les chaînes sont longues (de l’ordre du pentamère) ; lorsque la
concentration est importante, les silicates sont essentiellement sous forme de dimère22,23,24.
Le rapport C/S maximal des C-S-H étant de 2 (cf. paragraphe précédent), leur précipitation
consomme une quantité d’ions calcium toujours inférieure à celle fournie par la dissolution du
silicate tricalcique. Ce qui a pour effet d’enrichir en hydroxyde de calcium la solution
interstitielle. Le système va donc se déplacer le long du chemin cinétique jusqu’à atteindre la
sursaturation maximale par rapport à la portlandite (30-36 mmol.L-1) qui va alors précipiter :
Ca 2+ + 2OH − → Ca(OH ) 2 (3)
20
Garrault-Gauffinet, S. (1998a). "Direct observation of the growth of calcium silicate hydrate on alite and silica
surfaces by atomic force microscopy." Compte Rendu de l'Académie des Sciences de Paris, 327(4), 231-236.
21
Hamid, S. A. (1981). "The cristal structure of the 11A natural tobermorite Ca2.25[Si3O7.5(OH)1.5] 1 H2O."
Zeitshrift fur kristallographie, 154, 189.
22
Grutzeck, M., Benesi, A., and Fanning, B. (1989). "Silicon29 magic angle spinning nuclear magnetic resonance
study of calcium silicate hydrates." J.A.C.S, 72(4), 665-668.
23
Nonat, A., and Lecoq, X. (1996). "The structure, stoichiometry and properties of C-S-H prepared by C3S
hydration under controlled solution." Nuclear Magnetic Resonance Spectroscopy of cement based materials,
Bergamo, Italie, 197-207.
24
Klur, I., Pollet, B., Virlet, J., and Nonat, A. (1996). "C-S-H structure evolution with calcium content by
multinuclear NMR." 2nd international conference on NMR-spectroscopy of cement-based materials, Bergamo,
Springer 119.
- 23 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
Les trois réactions de dissolution du C3S (1), de précipitation des C-S-H (2) et de précipitation
de la portlandite (3) deviennent alors simultanées. Cette situation perdure tant qu’il reste de
l’anhydre à dissoudre, ce qui peut prendre plusieurs années.
Remarque importante : Cet enchaînement de réactions ne peut avoir lieu que si le rapport
massique l/s (liquide / solide) initial est suffisamment faible, ce qui est toujours vrai dans le
cas d’une pâte. En effet, dans ce cas, la concentration en calcium augmente rapidement
jusqu’à la précipitation de l’hydroxyde de calcium et reste ensuite quasiment constante. En
revanche, dans le cas de suspensions très diluées (l/s supérieur à 5000), le système ne se
trouve jamais sursaturé par rapport aux C-S-H ni à la portlandite et seule la dissolution du C3S
est observée. La portlandite nécessite un l/s inférieur à 300 pour précipiter.
25
Damidot, D. (1990). "Etude de l'hydratation du silicate tricalcique en suspensions diluées par
microcalorimétrie isotherme," Thèse de doctorat, Université de Bourgogne, Dijon.
- 24 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
10 0,2
Croissance libre Croissance limitée par la diffusion
avancement de la réaction / %
Germination des C-S-H
flux thermique / mW.g de 8
des C-S-H
0,16
-1
6 0,12
C3 S
4 0,08
2 0,04
0 0
0 500 1000 1500 2000 2500 3000
temps / min
26
Garrault-Gauffinet, S. (1999). "Experimental investigation of calcium silicate hydrate (C-S-H) nucleation."
Journal of Crystal Growth, 200, 565-574.
- 25 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
Elle ne permet donc pas dans le cas des ciments, de suivre une réaction particulière mais
donne un aperçu général de l’activité thermique. Néanmoins, l’effet thermique mesuré
provenant essentiellement de l’exothermicité de la dissolution des anhydres et le fait que le
pourcentage de silicate tricalcique dans les ciments CEM I classiques est proche de 60 % et de
75 % pour le ciment riche en silice, nous permet d’affirmer que le flux thermique enregistré
est essentiellement dû à l’hydratation de cette phase (Figure 4). L’utilisation de cette
technique va donc nous permettre de suivre qualitativement les vitesses générales de
l’hydratation du ciment Portland et principalement celle de son composant majoritaire le
silicate tricalcique, en présence d’additifs minéraux. Elle nous sera notamment précieuse pour
rendre compte des modifications liées aux vitesses d’hydratation et aux retards ou aux
accélérations engendrées par ces ajouts.
27
Garrault-Gauffinet, S. (1998). "Etude expérimentale et par simulation numérique de la cinétique de croissance
et de la structure des hydrosilicates de calcium, produits d'hydratation des silicates tricalcique et dicalcique,"
Thèse de doctorat, Université de Bourgogne, Dijon.
- 26 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
8 1,6E+05
Flux thermique
6 Flux cumulé 1,2E+05
ciment
ciment
4 8,0E+04
2 4,0E+04
0 0,0E+00
0 500 1000 1500 2000 2500
Temps / min
- 27 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
40
35
22 mmol.L-1
30
avancement / %
25
20 16 mmol.L-1
15
10 11 mmol.L-1
0
0 200 400 600 800 1000 1200
temps / min
28
Garrault-Gauffinet, S. (2001). "Hydrated Layer Formation on Tricalcium and Dicalcium Silicate Surfaces:
Experimental Study and Numerical Simulations." Langmuir, 17, 8131-8138.
- 28 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
Croissance perpendiculaire
Figure 6 : Schéma illustrant le mode de croissance des C-S-H à la surface des grains
d’anhydre pour des concentrations en hydroxyde de calcium respectivement faible et
élevée. Les îlots de croissance sont formés par l’agrégation de nano particules de C-S-H.
La longueur des flèches donne une indication grossière des vitesses de croissance
parallèle et perpendiculaire (d’après Nicoleau29).
Les travaux menés au Laboratoire dans les années 1990 par Jiang30,31 et Nachbaur32 ont
permis de mieux comprendre la relation existant entre l’hydratation et la prise du silicate
tricalcique ou du ciment. Celle-ci procède suivant un mécanisme en deux étapes. La première
fait intervenir la coagulation des particules de silicate tricalcique et la deuxième conduit à un
29
Nicoleau, L. (2004). "Interactions physico-chimiques entre le latex et les phases minérales constituant le
ciment au cours de l'hydratation," Thèse de doctorat, Université de Bourgogne, Dijon.
30
Jiang, S. P., Mutin, J. C., and Nonat, A. (1995). " Studies on mechanism and physico-chemical parameters at
the origin of the cement setting, I." Cement and Concrete Research, 25(4), 779.
31
Jiang, S. P., Mutin, J. C., and Nonat, A. (1996). " Studies on mechanism and physico-chemical parameters at
the origin of the cement setting, II." Cement and Concrete Research, 26(3), 491-500.
32
Nachbaur, L. (1997). "Etude de l'influence d'électrolytes sur l'hydratation et la prise du silicate tricalcique,
composant principal du ciment Portland. Caractérisation des interactions à l'origine de la prise," Thèse de
doctorat, Université de Bourgogne, Dijon.
- 29 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
renforcement de la structure coagulée résultante par précipitation des C-S-H à la surface des
particules d’anhydres. Cette deuxième étape porte le nom de rigidification.
I.2.a. La coagulation
Une pâte de ciment est assimilée à une suspension aqueuse concentrée de particules. Dans le
cas général, la stabilité d’une suspension est liée aux interactions qui existent entre les
particules d’une part et aux propriétés du milieu dans lequel elles baignent d’autre part. Si la
résultante des forces qui s’exercent entre les particules est attractive, ces dernières vont se
rapprocher les unes des autres pour former des agrégats, on assiste alors à un phénomène de
coagulation. Si au contraire la résultante des forces est répulsive, les particules vont se
repousser et rester dispersées dans la solution.
Dans le cas d’une suspension diluée de particules de ciment ou d’une pâte, sous l’effet de
l’agitation et de la pesanteur les particules de ciment rentrent en contact et forment
respectivement des agrégats stables ou une structure connexe. Cette évolution n’est toutefois
pas indépendante de la réactivité intrinsèque du système. En effet, Jiang a montré à partir
d’expériences en suspension diluée que la coagulation des particules de ciment n’est effective
que si la solution contient une concentration minimale de 2 mmol.L-1 d’hydroxyde de
calcium31, ce qui est très rapidement le cas pour une pâte de ciment.
La coagulation des particules dans une pâte de ciment peut être mise en évidence par
rhéométrie dynamique33 en suivant l’évolution des modules élastique et visqueux.
33
Une description de cette technique est fournie en annexe
- 30 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
3,E+04
module / Pa
2,E+04
comportement comportement
liquide solide
1,E+04
module élastique
module visqueux
0,E+00
0 1 2 3 4 5
temps / min
Figure 7 : Evolution des modules élastiques et visqueux d’une pâte de ciment (l/s=0,35),
le croisement des modules illustre le changement de structure de la pâte dû à la
coagulation des particules. La pâte évolue d’un comportement liquide à un
comportement solide.
D’un point de vue temporel, l’augmentation du module élastique dans les premières dizaines
de minutes suivant le gâchage est majoritairement due à l’étape de coagulation. Cette durée
peut varier suivant la composition du ciment utilisé (notamment selon sa teneur en
aluminates29), le rapport eau sur ciment, la température…. Une fois cette période passée, on
observe la contribution apportée par la rigidification. L’augmentation du module élastique
ainsi que les deux domaines de prédominance des phénomènes de coagulation et de
rigidification sur le module sont illustrés Figure 8.
- 31 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
1,2E+06
1,0E+06
la rigidification est la contribution
principale au module
module élastique / Pa
8,0E+05 la coagulation
est la
contribution
principale au
6,0E+05 module
4,0E+05
2,0E+05
0,0E+00
0 50 100 150 200 250
temps / min
Figure 8 : Evolution du module élastique d’une pâte de ciment hydratée avec de l’eau
(e/c=0,3). Les deux domaines délimitent la prédominance de l’étape de coagulation ou de
l’étape de rigidification sur l’augmentation du module élastique.
I.2.b. La rigidification
La structure connectée engendrée par la coagulation de la pâte de ciment va être renforcée par
la précipitation des C-S-H à la surface des particules de ciment. Cette étape va conduire au
durcissement progressif du matériau : c’est la rigidification.
- 32 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
30
avancement réactionnel / % module élastique
3,E+09
25
module élastique / Pa
20
avancement
2,E+09
15
10
1,E+09
0 1,E+07
0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000
temps / min
34
Nachbaur, L. (2001). "Dynamic mode rheology of cement and tricalcium silicate pastes from mixing to
setting." Cement and Concrete Research, 31(2), 183-192.
35
Schultz, M. A., and Stuble, L. J. (1993). "Use of oscillatory shear to study flow behaviour of fresh cement
paste." Ibid., 23, 273-282.
- 33 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
forces à l’origine de la cohésion entre les grains coagulés de C3S et celles entre les
nanoparticules de C-S-H sont les mêmes. Les surfaces développées par les C-S-H36 étant
beaucoup plus grandes que celles développées par le C3S18, la multiplication des surfaces de
C-S-H en contact se traduit par une augmentation de la cohésion. En rhéométrie dynamique,
ce phénomène se traduit par l’augmentation progressive du module élastique de la pâte de
ciment (Figure 8 et 9).
Des travaux récents ont permis de mieux comprendre l’origine de la cohésion des pâtes de
ciment.
Les C-S-H possèdent une structure en feuillets (paragraphe I.1.a.ii). L’approche classique
(modèle DLVO, PB), basée sur la théorie du champs moyen et habituellement utilisée pour
décrire ce type de système, prévoit une répulsion de double couche électrique entre les
surfaces fortement chargées des particules de C-S-H qui n’a pas lieu d’être. Il est donc
nécessaire de prendre en compte les corrélations ioniques dans la description du modèle
utilisé pour décrire les interactions entre surfaces de C-S-H en vis-à-vis.
Les résultats obtenus par Jonsson37 par simulation Monte Carlo en tenant compte de cette
hypothèse montrent que les forces d’interaction entre les particules résultent de la compétition
entre la force entropique répulsive et la force attractive issue des corrélations ioniques. Les
résultats des simulations révèlent que l’augmentation de la densité de charge de surface des
particules de C-S-H rend cette dernière contribution dominante et permet de justifier
l’attraction entre particules de C-S-H en présence de contre ions multivalents.
Au contraire, la compensation des charges de surface par des ions monovalents à la place
d’ions multivalents conduit à une augmentation des forces répulsives37, néanmoins ces
dernières restent toujours inférieures aux forces attractives, ce qui permet au matériau de
36
Jennings, H. M. (2000). "A model for the microstructure of calcium silicate hydrate in cement paste." Cement
and Concerte Research, 30(1), 101-116.
37
Jönsson, H., Wennerström, H., Nonat, A., and Cabane, B. (2004). "Onset of Cohesion in Cement Paste."
Langmuir, 20, 6702-6708.
- 34 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
rester cohésif. Ces résultats sont en accord avec les mesures de force réalisées par Lesko38,39
et Plassard40 par microscopie à force atomique.
Un raisonnement similaire peut être transposé pour le ciment Portland puisque l’hydratation
des phases silicate qui le composent conduit majoritairement à la précipitation de C-S-H.
Néanmoins, il n’est pas inutile de rappeler que le ciment est constitué d’un éventail d’espèces
(aluminates, sulfates, alcalins…), dont la présence peut entraîner une modification des
propriétés cohésives suivant différents mécanismes (substitution d’éléments dans les C-S-H,
adsorption à leur surface, précipitation de composés dans leur voisinage…).
38
Lesko, S. (2005). "Mesure des forces interparticulaires par Microscopie à Force Atomique : Application à la
cohésion du ciment," Thèse de doctorat, Université de Bourgogne, Dijon.
39
Lesko, S. (2001). "Investigation by atomic force microscopy of forces at the origin of cement cohesion."
Ultramicroscopy, 42(1-2), 11-21.
40
Plassard, C., Pochard, I., Lesniewska, E., and Nonat, A. (2005). "Nanoscale Experimental Investigation of
Particles Interactions at the Origin of the Cohesion of Cement." Langmuir, 21(16), 7263_7270.
- 35 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
Le but de l’étude présentée dans cette partie a été d’identifier l’influence des grandes
concentrations en nitrate de sodium (ou potassium) sur l’hydratation des pâtes de ciment.
Dans cette optique, nous avons réalisé une étude systématique de l’hydratation par
microcalorimétrie isotherme. Deux séries d’expériences ont été menées (l’une avec le nitrate
de sodium, l’autre avec le nitrate de potassium) en faisant varier la concentration en nitrate de
0 à 300 g.L-1.
Pour permettre une comparaison simple des différentes évolutions de l’hydratation avec
l’augmentation de la concentration en nitrates, nous avons choisi de présenter les résultats à
partir de deux critères relevés sur les courbes de flux thermiques et de chaleurs cumulées et
qui permettent une bonne caractérisation de l’évolution chimique des pâtes de ciment.
- Le second critère retenu est la quantité de chaleur totale dégagée par la réaction
d’hydratation au moment où les îlots d’hydrates commencent à coalescer à la surface
des particules de ciment. Cette valeur est relevée au niveau du point d’inflexion de la
courbe de chaleur cumulée, ce dernier correspondant également au temps où la vitesse
d’hydratation est maximale (Figure 11). Ce critère renseigne sur la quantité d’hydrates
qui a précipité avant la coalescence. Il nous permettra de donner des indications sur le
mode de croissance de ces hydrates à la surface des particules en fonction de la
concentration en nitrates.
Avant d’exposer les résultats obtenus, nous avons réalisé une étude préliminaire sur
l’évolution de la solubilité de l’hydroxyde de calcium dans des solutions concentrées en
nitrate de sodium et en nitrate de potassium. En effet, la solubilité de la portlandite est
- 36 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
4
flux thermique / mW.g de ciment
0 tacc
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600
temps / min
Figure 10 : Exemple d’évolution du flux thermique dégagé par l’hydratation d’une pâte
de ciment HTS en fonction du temps (e/c=0,3). Sur la figure est indiqué comment a été
déterminée la valeur du temps indicatif tacc.
- 37 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
250000 8
7
chaleur cumulée en début de coalescence
chaleur cumulée / mJ.g-1 de
5
150000
ciment
ciment
4
100000
3
2
50000
1
0 0
0 500 1000 1500 2000 2500 3000
temps / min
La solubilité d’un sel est fortement dépendante de la force ionique de la solution dans laquelle
il est dissout. De ce fait, l’augmentation de la concentration en nitrates alcalins dans les
solutions de gâchage est susceptible de faire évoluer la concentration maximale en hydroxyde
de calcium des solutions interstitielles des pâtes de ciment. La germination et la croissance
des hydrates étant fortement dépendante de la concentration en hydroxyde de calcium de la
solution interstitielle (paragraphe I.1.b.ii), il convenait de s’intéresser à cette évolution afin
d’en déterminer les conséquences éventuelles. Dans cette optique, nous avons étudié
l’évolution de la solubilité de la portlandite dans des solutions de concentrations croissantes
en nitrate de sodium et en nitrate de potassium.
Les différentes solubilités ont été déterminées à partir de la concentration en calcium
déterminée à l’équilibre dans des solutions de concentrations croissantes en nitrate de sodium
ou potassium, saturées par rapport à la portlandite et préalablement filtrées. Le dosage des
solutions a été réalisé par spectroscopie d’émission (Annexe II). La gamme de concentrations
en nitrates alcalins balayée est comprise entre 0 et 300 g.L-1. Ceci correspond à des
- 38 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
35
solubilité de la portlandite / mmol.L-1
30
25
20
15
NaNO3 KNO3
10
0
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4
-1
concentration en nitrate alcalin / mol.L
Les résultats obtenus montrent une variation non monotone de la solubilité de la portlandite
avec l’augmentation de la concentration en nitrates alcalins. Une augmentation a lieu jusqu’à
1 mol.L-1 pour le nitrate de potassium et 2 mol.L-1 pour le nitrate de sodium, passées ces
concentrations la solubilité de l’hydroxyde de calcium diminue.
- 39 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
L’analyse des courbes calorimétriques des différentes hydratations (cf. annexe V) nous a
permis de mettre en évidence deux phénomènes distincts lorsque la concentration en nitrates
alcalins augmente :
Pour des raisons de clarté, ces deux effets seront définis et traités séparément dans les deux
paragraphes qui vont suivre.
Avant d’exposer les résultats obtenus, nous allons définir ce que nous entendons par effet
accélérateur et effet retardateur. Nous dirons que l’ajout d’un sel provoque un effet
accélérateur lorsque le temps indicatif tacc (défini précédemment) est inférieur à celui obtenu
avec la pâte de ciment référence hydratée uniquement avec de l’eau. L’effet sera au contraire
retardateur lorsque le temps indicatif tacc est supérieur à celui de la pâte de ciment référence.
- 40 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
les résultats de Justnes obtenus avec un nitrate mixte de calcium et ammonium sur un
intervalle de concentrations similaire41.
300
effet retardateur
250
temps indicatif tacc / min
200
150
50
0
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4
-1
concentration en nitrate alcalin / mol.L
Les différentes périodes d’une courbe de chaleur cumulée permettent de rendre compte de la
manière dont l’hydratation des silicates de calcium se déroule dans une pâte de ciment. Le
point d’inflexion de cette courbe est un point caractéristique ; au-delà, la vitesse ralentit car
les hydrates coalescent. Si l’on connaît la quantité de chaleur totale dégagée par la réaction au
temps où ce phénomène apparaît, il est alors possible d’évaluer les quantités d’hydrates
précipités à cet instant précis et donc de les comparer en fonction des conditions
d’hydratation. Nous serons alors en mesure d’émettre des hypothèses sur l’évolution des
vitesses de croissance parallèle et perpendiculaire des C-S-H avec l’augmentation des
concentrations en nitrates alcalins.
41
Justnes, H. (1993). "Technical nitrate as set accelerator for cement." Nordic Concrete Research, 13(2), 70-87.
- 41 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
La méthode utilisée pour déterminer les valeurs des chaleurs dégagées entraînent néanmoins
quelques incertitudes. En effet, ces valeurs incluent la totalité des chaleurs mesurées depuis
l’introduction de la pâte de ciment dans le microcalorimètre (voir annexe III) jusqu’au point
d’inflexion de la courbe de chaleur cumulée (Figure 11). Cette valeur inclut par conséquent
une quantité de chaleur non désirée due à l’introduction de la canne dans le calorimètre, qui
diffère pour chaque expérience et qu’il nous a fallu corriger. Pour cela, l’ensemble des
courbes de chaleurs cumulées ont été ajustée à une même valeur unique au temps t=30
minutes pour s’affranchir de cet effet. Cependant, déchargés de la chaleur dégagée par
l’introduction, celle réellement dégagée par la réaction s’en trouve de fait légèrement
tronquée. Nous avons estimé l’incertitude maximale à 5000 mW.g-1 de ciment.
60000
coalescence des C-S-H / mJ.g-1 de ciment
chaleur cumulée totale en début de
50000
40000
30000
20000
NaNO3
10000 KNO3
0
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4
-1
concentration en nitrate / mol.L
Figure 14 : Evolution de la chaleur cumulée dégagée par des pâtes de ciment hydratées
avec des concentrations croissantes de nitrate de sodium ou de nitrate de potassium
(e/c=0,3) au moment où les hydrates commencent à coalescer.
Les résultats obtenus sont présentés Figure 14. Les courbes de chaleur cumulée dont sont
issus ces résultats sont présentées dans l’annexe V (Figure 90 et Figure 91). La quantité de
chaleur dégagée lorsque les hydrates commencent à coalescer, et donc la quantité d’hydrates
précipités, reste quasi constante dans le cas du nitrate de potassium et diminue dans le cas du
nitrate de sodium lorsque la concentration en nitrates de la solution de gâchage augmente. La
présence de nitrate de potassium semble donc avoir peu d’effet sur le mode de croissance des
- 42 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
hydrates alors que le nitrate de sodium semble soit favoriser celui-ci dans la direction
parallèle à la surface soit le défavoriser dans la direction normale soit les deux en même
temps.
A l’image de ce que nous avons fait avec ciment Portland, une analyse analogue a été réalisée
avec le silicate tricalcique. Les résultats obtenus sur l’évolution des temps indicatifs tacc sont
présentés Figure 15 et ceux traduisant l’évolution du mode de croissance des hydrates à la
surface des particules du silicate tricalcique Figure 16.
Dans un premier temps, ces résultats montrent que l’ajout de nitrate de sodium ou de nitrate
de potassium retarde l’hydratation du silicate tricalcique quelle que soit la concentration
utilisée. Cet effet est à l’opposé de celui observé sur l’hydratation des silicates de calcium du
ciment Portland où un effet globalement accélérateur était observé. Nous remarquons que
l’évolution de ces retards n’est pas monotone et varie selon le nitrate alcalin utilisé. Le retard
42
Medala, M. (2005). "Etude de l'intéraction des phases minérales constituant le ciment Portland et des solutions
salines concentrées," Thèse de doctorat, Université de Bourgogne, Dijon.
- 43 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
maximum est observé pour une concentration de l’ordre de 1 mol.L-1 avec le nitrate de
sodium et pour une concentration comprise entre 0,5 et 1 mol.L-1 pour le nitrate de potassium.
D’autre part, nous constatons que l’évolution des chaleurs cumulées au début de la
coalescence des hydrates avec l’augmentation de la concentration en nitrates alcalins n’est pas
monotone et diffère légèrement pour les deux nitrates utilisés. Elle passe par un maximum
dans les deux cas étudiés avant de diminuer en dessous de la valeur référence pour une
concentration de l’ordre de 1 mol.L-1 pour le nitrate de sodium et de 2 mol.L-1 pour le nitrate
de potassium. Ce comportement est également en opposition avec celui observé dans le cas
des silicates de calcium du ciment Portland où l’effet inverse a été mis en évidence. La
présence des nitrates alcalins entraîne donc une modification du mode de croissance des
hydrates à la surface des particules de silicate tricalcique. Leur croissance est soit favorisée
dans la direction normale ou soit défavorisée dans la direction parallèle, comportement qui
semble s’inverser pour les très grandes concentrations en nitrates alcalins (supérieures à 2
mol.l-1).
160
140
temps indicatif tacc / min
120
100
80
60
40 NaNO3
KNO3
20
0
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4
-1
concentration en nitrate alcalin / mol.L
Il est possible que ces deux comportements puissent s’expliquer à partir de l’évolution de la
solubilité de l’hydroxyde de calcium avec l’augmentation de concentration en nitrates alcalins
(voir Figure 12). En effet, comme nous l’avons déterminé au paragraphe II.1.a, la solubilité de
- 44 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
50000
chaleur cumulée totale en début de
coalescence / mJ.g-1 de C3S
40000
30000
20000
NaNO3
KNO3
10000
0
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4
-1
concentration en nitrate alcalin / mol.L
Figure 16 : Evolution de la chaleur cumulée dégagée par des pâtes de C3S hydratées
avec des concentrations croissantes de nitrate de sodium et de nitrate de potassium
(e/c=0,3) au moment où les hydrates commencent à coalescer.
- 45 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
l’hydratation de ce type de mélange est présenté dans la thèse d’Hélène Minard43. Dans le
cadre de notre travail, le critère retenu pour juger du caractère accélérateur ou retardateur des
nitrates alcalins sur ce système est le temps nécessaire pour consommer l’intégralité des
sulfates apportés par le gypse ajouté. Ce temps est relevé entre la fin du gâchage et
l’apparition du second pic d’hydratation (Figure 17). La réaction d’hydratation de l’aluminate
tricalcique en présence de gypse conduit principalement à la précipitation d’éttringite (4) tant
que l’intégralité des ions sulfate présents n’est pas consommée.
160
flux thermique / mW.g-1 de mélange
140
120
100
temps nécessaire à la
80
consommation des
sulfates
60
40
20
0
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200
temps / min
Les résultats présentés Figure 18 montrent que la présence du nitrate de sodium ou du nitrate
de potassium conduit à une consommation accélérée des ions sulfate (sauf dans le cas d’une
hydratation avec une solution de nitrate de sodium de concentration 5 mol.L-1). Les nitrates
utilisés se comportent donc comme des accélérateurs de l’hydratation de mélanges aluminate
43
Minard, H. (2003). "Etude intégrée des processus d'hydratation , de coagulation, de rigidification et de prise
pour un système C3S-C3A-sulfates-alcalins," Thèse de doctorat, Université de Bourgogne, Dijon.
- 46 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
140
temps nécessaire pour consommé la
NaNO3
120
KNO3
totalité des sulfates / min
100
80
60
40
20
0
0 1 2 3 4 5 6
-1
concentration en nitrate alcalin / mol.L
Figure 18 : Evolution du temps nécessaire pour consommer la totalité des sulfates sous
forme d’ettringite à partir d’un mélange C3A / 6 % gypse hydraté avec des différentes
concentrations en nitrate de sodium et nitrate de potassium (e/c=0,5).
II.1.d. Discussion
Les résultats obtenus dans cette partie ont montré que l’influence des nitrates alcalins est
différente suivant le système considéré. Leur présence entraîne un comportement qui peut
sembler paradoxal dans le cas du ciment Portland et du silicate tricalcique. En effet,
l’hydratation de la partie silicate du ciment Portland se trouve accélérée par la présence de
nitrates alcalins alors que l’hydratation du silicate tricalcique pur s’en trouve au contraire
retardée. Les raisons de cette différence de comportement ne sont donc pas à rechercher dans
les interactions qui peuvent exister entre les silicates et les nitrates alcalins. Au contraire, nous
avons pu mettre en évidence un effet accélérateur des nitrates alcalins sur l’hydratation de
l’aluminate tricalcique. Ces observations nous laissent donc légitimement penser que ce sont
bien les interactions entre la partie aluminate du ciment Portland (par ailleurs principalement
composée de C4AF) et les nitrates alcalins qui sont à l’origine du comportement plutôt
accélérateur observé sur le silicate de calcium du ciment.
- 47 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
La complexité des résultats obtenus lors de cette étude montrent clairement qu’il est difficile
de prévoir le comportement des pâtes de ciment dans de telles conditions. La conjugaison des
divers paramètres (nature et proportion des anhydres, interaction entre ces anhydres dans le
cas de mélange, interaction entre les anhydres et les nitrates alcalins, solubilité des anhydres
et des hydrates, nature et concentration des ajouts…) qui interviennent rend d’autant plus
aléatoire leur prédiction.
De la même manière que nous l’avons fait pour l’étude de l’hydratation, nous nous sommes
intéressés aux conséquences de l’ajout de nitrate de sodium ou de nitrate de potassium sur
l’évolution des propriétés rhéologiques des pâtes de ciment au jeune âge. Les pâtes de ciment
hydratées avec le nitrate de potassium ayant montré un comportement particulier aux fortes
concentrations, nous avons décidé de présenter séparément les résultats obtenus pour chaque
nitrate alcalin. Les deux premiers paragraphes seront consacrés à la présentation des
évolutions rhéologiques des pâtes en fonction de l’augmentation des concentrations en nitrate
dans les solutions de gâchage. Nous exposerons dans le dernier paragraphe l’hypothèse
avancée pour expliquer le changement de comportement observé aux fortes concentrations en
nitrate de potassium.
La Figure 19 présente l’évolution des propriétés élastiques d’une pâte de ciment hydratée avec
de l’eau uniquement et de deux autres pâtes hydratées respectivement avec des solutions
concentrées à 150 et 300 g.L-1 en nitrate de sodium, ce qui correspond à des concentrations
molaires de 1,76 et 3,53 mol.L-1. L’évolution des modules élastiques pendant la période de
coagulation (cf. paragraphe I.2.a) est quasi similaire que l’hydratation démarre dans l’eau ou
dans des solutions concentrées en nitrates alcalins. A partir de deux heures d’hydratation, au
contraire, le module de la pâte référence augmente plus vite que ceux des pâtes hydratées en
- 48 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
présence de nitrate de sodium. Deux raisons peuvent être avancées pour expliquer cette
augmentation plus lente des propriétés élastiques :
- La première fait référence à l’effet retardateur des nitrates alcalins sur les pâtes de
ciment pour des concentrations en nitrate de sodium supérieures à 200 g.L-1.
L’incrustation de la Figure 19 montre clairement que les flux thermiques sont plus
faibles lorsque l’hydratation se déroule en présence de nitrates alcalins. La réaction
étant moins avancée, la précipitation des C-S-H est moins importante. Il est donc a
priori normal d’obtenir des modules élastiques qui augmentent moins vite lorsque
l’hydratation se déroule en présence de concentrations croissantes de nitrate de
sodium.
- 49 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
1,2E+06
référence
NaNO3 150 g/L
1,0E+06
NaNO3 300 g/L
module élastique / Pa
8,0E+05
6,0E+05
5
ciment
2
1
2,0E+05
0
0 200 400 600 800 1000
temps / min
0,0E+00
0 50 100 150 200 250 300
temps / min
L’étude précédente a été répétée avec du nitrate de potassium en place du nitrate de sodium.
Le domaine de concentrations balayé s’étend également de 0 à 300 g.L-1, ce qui en terme de
concentrations molaires (0 – 2,97 mol.L-1) est un domaine plus restreint que celui utilisé avec
le nitrate de sodium. Les résultats sont présentés sur la Figure 20. L’évolution générale des
modules élastiques avec l’augmentation de la concentration en nitrate de potassium présente
une différence notable par rapport à celle observée avec le nitrate de sodium. Les pâtes de
ciment gâchées avec des solutions contenant plus de 200 g.L-1 de nitrate de potassium
présentent une brusque augmentation de leur module dès les premiers instants suivants le
gâchage. Après cette hausse rapide, les modules observent un palier avant de réaugmenter
beaucoup plus lentement. La courbe à 150 g.L-1, elle, présente au contraire une allure très
proche de celle observée avec le nitrate de sodium pour une concentration massique identique.
On peut également remarquer que toutes les pâtes gâchées en présence de sels, et quelle que
- 50 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
soit leur concentration, tendent à retrouver un module élastique similaire vers 150 minutes
d’hydratation.
1,2E+06
1,0E+06
module élastique / Pa
8,0E+05
6,0E+05
référence
4,0E+05 KNO3 150 g/L
KNO3 200 g/L
KNO3 250 g/L
2,0E+05 KNO3 300 g/L
0,0E+00
0 50 100 150 200 250 300
temps / min
Figure 20: Evolution au cours du temps des modules élastiques de pâtes de ciment
hydratées avec des concentrations croissantes en nitrate de potassium (e/c=0,3).
Les deux paragraphes précédents ont mis en évidence une différence de comportement
rhéologique des pâtes de ciment entre celles gâchées avec de fortes concentrations en nitrate
de sodium et celles gâchées avec de fortes concentrations en nitrate de potassium. Il est
difficile d’imaginer que l’augmentation brutale du module élastique observée pour des
concentrations supérieures à 150 g.L-1 dans le cas du nitrate de potassium puisse s’expliquer
par une coagulation plus ‘performante’ des particules de ciment. En effet, la différence entre
les valeurs de module mesurées après 20 minutes pour la référence (gâchée dans l’eau) et les
pâtes contenant du nitrate de potassium est beaucoup trop importante. La rigidification par
une précipitation rapide d’une quantité importante de C-S-H n’est pas plausible non plus
- 51 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
puisque l’analyse thermique de ces pâtes n’a pas révélé d’accélération significative de
l’hydratation à cette échelle de temps (Figure 89).
L’hypothèse la plus probable pour expliquer ce comportement réside dans une précipitation
rapide de nitrate de potassium après le gâchage. En effet, les concentrations en nitrate de
potassium des solutions d’hydratation sont proches de la solubilité du produit (360 g.L-1 à la
température ambiante, 921 g.L-1 pour le nitrate de sodium)∗. La consommation d’eau initiale
liée au gâchage du ciment est donc susceptible d’induire une augmentation de la concentration
en nitrate de potassium de manière à ce qu’elle atteigne sa limite de solubilité, entraînant du
même coup sa précipitation. Une augmentation de la masse de solide en gardant la masse de
liquide constante a pour effet de faire diminuer le rapport liquide sur solide et par conséquent
d’augmenter la viscosité du milieu44,45. Cette hypothèse est privilégiée pour expliquer la
‘rigidification’ prématurée du système. Elle est également étayée par le fait que le même
phénomène apparaît lorsque la pâte est gâchée avec une solution de nitrate de sodium de
concentration proche de la solubilité (700 g.L-1) (Figure 21).
∗
Ces valeurs sont tirées du Handbook of chemistry 57ème édition
44
Struble, L., and Sun, G. K. (1995). "Viscosity of Portland cement paste as a function of concentration." "Advn
Cem Bas Mat, 1995; 2:62-69".
45
Mansoutre, S., Colombet, P., and Van Damme, H. (1999). "Water retention and granular rheological behaviour
of fresh C3S paste as a function of concentration." Cement and Concerte Research, 29, 1441-1453.
- 52 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
1,2E+06
1,0E+06
module élastique / Pa
8,0E+05
6,0E+05
4,0E+05
référence
NaNO3 700 g/L
2,0E+05 KNO3 300 g/L
0,0E+00
0 50 100 150 200 250 300
temps / min
Figure 21 : Evolution des modules élastiques au cours du temps pour des pâtes de
ciment gâchées avec de l’eau et des solutions de nitrate de sodium et potassium
respectivement concentrées à 700 et 300 g.L-1.
Nous avons également vérifié cette hypothèse en réalisant des expériences complémentaires
avec d’autres sels (chlorure de sodium, chlorure de potassium et nitrate de lithium). Le choix
de ces composés a été guidé par le fait qu’ils possèdent des ions communs à ceux dont on
étudie la réactivité avec le ciment. Ils présentent en outre l’avantage d’avoir une solubilité
voisine de celle du nitrate de potassium. Les différentes expériences ont été réalisées avec une
concentration de 300 g.L-1, concentration proche de la solubilité de chacun des composés
(Tableau 6). Les résultats présentés Figure 22 confirment le comportement déjà observé avec
le nitrate de potassium et le nitrate de sodium lorsque ces derniers sont introduits dans des
proportions proches de leur limite de solubilité.
Tableau 6 : Solubilité des différents sels utilisés, les températures auxquelles sont
mesurées les solubilités sont indiquées en exposant. Ces valeurs sont tirées du Handbook
of chemistry 72th edition.
- 53 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
1,E+06
8,E+05
module élastique / Pa
6,E+05
4,E+05 témoin
KNO3
LiNO3
2,E+05 KCl
NaCl
0,E+00
0 50 100 150 200 250 300
temps / min
Figure 22: Evolution des modules élastiques de pâtes de ciment gâchées avec des
solutions de différents sels à une concentration identique de 300 g.L-1.
A noter : Dans le cas de l’hydratation avec le nitrate de potassium, les calculs de spéciation
en phase liquide révèlent que le système se trouve également sursaturé par rapport à la
syngénite (CaK2(S04)2,H2O). Ce sulfate double de calcium et de potassium est donc
également susceptible de précipiter et de contribuer au raidissement de la pâte.
L’hydratation des pâtes de ciment avec des solutions aussi concentrées en sels que le sont
celles utilisées dans cette étude (la salinité peut atteindre 300 g.L-1) est très inhabituelle.
Cependant, si la rhéologie des pâtes hydratées avec des nitrates alcalins introduits dans des
concentrations proches de leur solubilité est affectée par la précipitation de ces derniers,
l’hydratation générale n’est pas notablement modifiée malgré les conditions ‘extrêmes’
utilisées. Un léger effet accélérateur du nitrate de sodium et du nitrate de potassium sur
l’hydratation du ciment Portland peut simplement être signalé aux faibles concentrations en
nitrates (< 1 à 2 mol.L-1 selon la nature du contre-ion), effet qui devient légèrement
retardateur aux concentrations plus grandes. D’un point de vue plus théorique, il faut retenir
que l’hydratation des phases silicate d’un ciment est fortement influencée par la présence des
- 54 -
I. Réactivité et cohésion du ciment Portland : influence des fortes concentrations en nitrates
phases aluminate en présence de nitrates alcalins. En effet, le silicate tricalcique pur voit son
hydratation retardée en présence des nitrates alcalins utilisés alors que les phases silicate du
ciment sont au contraire accélérée dans des conditions d’hydratation similaires.
- 55 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
46
Ben-Dor, L., and Rubinsztain, Y. (1979). "The influence of phosphate on the hydration of cement minerals
studied by DTA and TG." Thermochimica Acta, 30, 9-14.
47
Ma, W., and Brown, P. W. (1994). "Effect of phosphate additions on the hydration of Portland cement."
Advances in Cement Research, 21, 1-12.
48
Nurse, W. (1952). "The Effect of Phosphate on the Constitution and Hardening of Portland Cement." Journal
of Applied Chemistry, 2(12), 708-716.
49
Lieber, W. (1974). "The influence of phosphates on the hydration of Portland cement." the VI International
congress on the chemistry of cement, Moscow.
50
Lieber, W. (1973). "L'effet des additions minérales sur la prise et le durcissement des ciments Portland."
Zement KalK Gips, 26(2), 75-79.
51
Cau Dit Coumes, C., and Courtois, S. (2003). "Cementation of a low-level radioactive waste of complex
chemistry investigation of the combined action of borate, chloride, sulfate and phosphate on hydration using
response surface methodology." Cement and Concrete Research, 33(3), 305-316.
- 56 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
qu’à des concentrations très élevées (50 g.L-1) le phosphate de sodium agissait comme un
accélérateur de l’hydratation51 et que ce dernier pouvait conduire à une prise rapide50.
L’objectif de ce travail a été d’éclaircir ces derniers points et de comprendre les mécanismes
qui régissent ces comportements. Pour cela, nous avons déterminé l’influence des fortes
concentrations en ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment au
jeune âge. La gamme de concentrations en phosphates étudiée s’étend de 0 à 50 g.L-1 ; elle
correspond aux concentrations susceptibles d’être rencontrées dans les concentrâts
d’évaporation. Deux séries d’expériences ont été menées, l’une avec du phosphate de sodium,
l’autre avec du phosphate de potassium. Les résultats obtenus à concentration en ions
phosphate identique mais avec des contre-ions différents ont alors pu être comparés.
En préalable, il convient de s’intéresser à la physico-chimie des ortho phosphates de calcium
en solution. En effet, la littérature regroupe un grand nombre d’articles faisant état de la très
faible solubilité des composés phosphocalciques52. Cette introduction est nécessaire puisque
le système qui nous concerne fait intervenir la dissolution d’un anhydre calcique dans des
solutions concentrées en ions phosphate.
En solution aqueuse, les ions ortho phosphate prennent une forme plus ou moins protonée
suivant l’acidité du milieu dans lequel ils se trouvent. La valeur du pH détermine la forme
majoritairement présente dans la solution selon les équilibres suivants donnés pour une
température de 298 K:
→ H2PO4- + H+
H3PO4 ←
pKa1 = 2,15
→ HPO42- + H+
H2PO4- ←
pKa2 = 7,20
52
Elliot, J. C. (1994). Structure and Chemistry of the Apatites and Other Calcium Orthophosphates, Elsevier,
London.
- 57 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
→ PO43- + H+
HPO42- ←
pKa3 = 12,35
Le pH de la solution interstitielle d’une pâte de ciment étant généralement compris entre 12,5
et 13,5, les ions phosphate se retrouveront dans notre cas principalement sous forme d’ions
PO43-.
Les isothermes de solubilité des principaux phosphates de calcium présentés par Chow53
montre que l’hydroxylapatite (OHAp) est le composé thermodynamiquement le plus stable
dans la gamme de pH d’une pâte de ciment (entre 12,5 et 13,5).
53
Chow, L. C. (1991). "Development of Self-Setting Calcium Phosphate Cements." Journal of Japan Ceramic
Society, 99(10), 954-964.
- 58 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
La solubilité des phosphates de calcium étant très faible, nous avons déterminé avec le
programme de spéciation PHREEQC la quantité de silicate de calcium qu’il est nécessaire de
dissoudre pour que l’hydroxylapatite précipite selon l’équation suivante :
54
Parkurst, D. L., Thorstenson, D. C., and Plummer, L. N. (1980, Revised and reprinted August, 1990).
"PHREEQE, A computer program for geochemical calculations: U.S. Geological Survey Water-Ressources
Investigations Report 80-96."
- 59 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
au fil des ans à partir de données expérimentales et d’autres tirées de la littérature. Les
différentes constantes et équilibres auxquels nous avons fait appel sont reportés dans l’ annexe
X.
Les calculs que nous avons réalisés en rapport avec le système étudié ont été effectués en
simulant le ciment par sa phase majoritaire : le silicate tricalcique. La simulation a donc
consisté à déterminer la quantité de C3S nécessaire pour être sursaturé par rapport à
l’hydroxylapatite. De la même manière, l’évolution de l’indice de saturation β des C-S-H est
également calculé. Pour cela nous avons simulé différentes gâchées avec des quantités
croissantes de C3S et une solution de concentration en phosphates de 50 g.L-1. L’indice β est
produit des activités en solution
défini comme suit : β =
produit de solubilité du produit
10
le système est sursaturé par
rapport à l'hydroxylapatite
0
log ( )
-10 hydroxylapatite
le système est soussaturé C-S-H
par rapport à
l'hydroxylapatite
-15
La Figure 24 montre qu’en simulant des pâtes de ciment hydratées avec cette solution et un
rapport e/c de 0,3, le pourcentage d’anhydre qu’il faut dissoudre pour être sursaturé par
rapport à l’hydroxylapatite est de 2,3.10-5 %. Ce pourcentage représente une partie infime de
la quantité de C3S initiale qui est susceptible de se dissoudre très rapidement dans les
conditions de l’expérience. Le système se trouve donc très rapidement thermodynamiquement
- 60 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
saturé par rapport à ce phosphate de calcium qui sera donc susceptible de précipiter. De plus,
il est très clair sur la Figure 24 que la sursaturation par rapport à l’hydroxylapatite est atteinte
bien avant celle de C-S-H, ce qui indique que l’hydroxylapatite est susceptible de précipiter
avant les C-S-H.
Une étude expérimentale du système CaO / SiO2 / P2O5 / H2O a été entreprise. En effet,
compte tenu du fait que les C-S-H formés lors de l’hydratation du ciment sont aussi des
produits très peu solubles et que les phosphates de calcium possèdent également des
solubilités très faibles, il nous a paru nécessaire d’étudier plus en détail ce système afin
d’identifier les produits les plus susceptibles de précipiter. Pour cela, des mélanges de chaux,
silice et solutions phosphatées ont été effectués, filtrés et les produits de réaction analysés à
différentes échéances (10 jours ou 1 heure). Les mélanges ont été préparés de telle sorte que le
système se trouve sursaturé à la fois par rapport aux C-S-H et à l’hydroxylapatite.
- 61 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Résultats :
Les diagrammes de diffraction des différents produits filtrés sont présentés Figure 25. Pour
une concentration nulle en phosphate, un diffractogramme caractéristique des C-S-H est
enregistré. Lorsqu’on ajoute des quantités croissantes de phosphate à la solution de synthèse,
on observe sur le diagramme de diffraction une diminution du principal pic caractéristique des
C-S-H et une apparition suivie d’une augmentation progressive des pics caractéristiques de
l’hydroxylapatite. A partir d’une concentration en phosphates de 10 g.L-1, la solution contient
suffisamment d’ions phosphate pour faire précipiter tout le calcium sous forme
d’hydroxylapatite. La contribution due au C-S-H sur le diagramme de diffraction devient alors
nulle. Ces observations montrent sans ambiguïté que l’hydroxylapatite précipite
préférentiellement aux C-S-H. De plus, une expérience identique à celle conduite avec une
solution de phosphate de concentration 10 g.L-1 conservée pendant dix jours, a été arrêtée au
bout d’une heure et révèle que l’hydroxylapatite précipite et cristallise rapidement dans les
conditions de l’expérience.
7000
Hap
C-S-H
6000
intensité / u.a.
Hap
Hap
C-S-H
C-S-H
5000
Hap
Hap
Hap
Hap
4000
d
3000 c
2000 b
1000 a
0
10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60
2 théta
- 62 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
250000
chaleur cumulée / mJ.g-1 de ciment
200000
150000
100000 référence
10 g/L
20 g/L
50000 30 g/L
40 g/L
50 g/L
0
0 1000 2000 3000 4000 5000 6000
temps / min
Figure 26 : Evolution des chaleurs cumulées lors de l’hydratation de pâtes de ciment
avec différentes concentrations de phosphate de sodium (e/c=0,3).
- 63 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
250000
chaleur cumulée / mJ.g-1 de ciment
200000
150000
100000 référence
10 g/L
20 g/L
50000 30 g/L
40 g/L
50 g/L
0
0 1000 2000 3000 4000 5000 6000
temps / min
2000
1600
temps indicatifs tacc / min
1200
800
Na3PO4
400 K3PO4
0
0 10 20 30 40 50 60
-1
concentration en phosphate / g.L
Figure 28 : Evolution des temps indicatifs tacc de la réaction d’hydratation pour des
pâtes de ciment hydratées avec des concentrations en phosphate de sodium (et
potassium) variant de 0 à 50 g.L-1 (e/c=0,3).
- 64 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Les différentes évolutions ont été comparées à partir des mêmes temps indicatifs tacc que ceux
définis lors de l’étude concernant les nitrates alcalins dans la partie précédente. L’évolution en
fonction de la concentration en phosphates des temps tacc représentatifs de l’accélération de
l’hydratation (Figure 28) montre que, quel que soit le phosphate utilisé (sodium ou
potassium), un retard à l’accélération de l’hydratation des pâtes de ciment est observé.
Les retards évoluent de façon non monotone avec la concentration en phosphates. Ils
augmentent proportionnellement à la concentration en phosphates jusqu’à une valeur proche
de 30 g.L-1. A partir de cette concentration, une inversion de comportement apparaît : le retard
à l’accélération de l’hydratation diminue et ce également de manière linéaire. D’autre part, on
remarque que pour une même concentration en phosphates, le retard change suivant que l’on
associe au phosphate l’ion potassium ou l’ion sodium. En présence de ce dernier, les retards
mesurés peuvent être jusqu’à 30 % supérieurs à ceux obtenus avec l’ion potassium. Cette
remarque suggère que le contre ion associé au phosphate a une influence sur le système en
présence de phosphate. Nous reviendrons sur ce point dans la suite de ce manuscrit.
Les chaleurs cumulées en début de coalescence des hydrates enregistrées lors de l’hydratation
des pâtes de ciment avec différentes concentrations de phosphate de sodium ou de potassium
ont été comparées. Rappelons qu’une plus grande quantité de chaleur libérée en début de
coalescence indique qu’une plus grande quantité d’hydrates a précipité et donc que le rapport
de la vitesse de croissance parallèle sur la vitesse de croissance perpendiculaire de ces
derniers est plutôt défavorisé par rapport à l’échantillon de référence. C’est ce que nous
observons dans le cas de l’hydratation avec le phosphate de potassium où les chaleurs
cumulées en début de coalescence sont plus importantes que pour l’échantillon de référence
(Figure 29). L’hydratation en présence de phosphate de sodium conduit à des chaleurs
cumulées inférieures à celles déterminées avec le phosphate de potassium et de l’ordre de
grandeur de celle de l’échantillon référence. Nous observons donc ici une différence de mode
de croissance des hydrates due à la différence de contre-ion des phosphates. De plus, nous
remarquons que l’évolution des chaleurs cumulées ne semble pas être monotone dans les deux
cas étudiés et que la discontinuité, dans un cas comme dans l’autre intervient pour des
- 65 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
100000
chaleur cumulée en début de coalescence
80000
/ mJ.g-1 de ciment
60000
40000
20000 Na3PO4,12H2O
K3PO4
0
0 10 20 30 40 50 60
-1
concentration en phosphate / g.L
Nous avons superposé ces résultats avec ceux obtenus lors de l’hydratation des pâtes de
ciment en présence de nitrate de sodium ou de potassium en prenant la concentration molaire
en alcalins comme axe des abscisses (Figure 30).
Dans les deux cas où le phosphate et le nitrate sont associés au contre-ion sodium, le rapport
vitesse de croissance parallèle sur vitesse de croissance perpendiculaire est défavorisé en
comparaison aux deux cas où le phosphate et le nitrate sont associés au contre-ion potassium.
- 66 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
100000
NaNO3
chaleur cumulée totale en début de KNO3
coalescence / mJ.g-1 de ciment
80000 Na3PO4
K3PO4
60000
40000
20000
0
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4
- 67 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
8,E+05
référence
module élastique / Pa
6,E+05
10 g.L-1
4,E+05
20 g.L-1
2,E+05 30 g.L-1
0,E+00
0 50 100 150 200
temps / min
Figure 31 : Evolution des modules élastiques pour des pâtes de ciment HTS hydratées
avec des solutions de phosphate de sodium dont la concentration varie de 0 à 30 g.L-1
(e/c=0,3).
8,E+05
référence
6,E+05 50 g.L-1
module élastique / Pa
4,E+05
40 g.L-1
30 g.L-1
2,E+05
0,E+00
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200
temps / min
Figure 32 : Evolution des modules élastiques pour des pâtes de ciment HTS hydratées
avec des solutions de phosphate de sodium dont la concentration varie de 30 à 50 g.L-1
(e/c=0,3).
- 68 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
8,E+05
référence
6,E+05
module élastique / Pa
10 g.L-1
4,E+05
20 g.L-1
2,E+05
0,E+00
0 50 100 150 200
temps / min
Figure 33 : Evolution des modules élastiques pour des pâtes de ciment HTS hydratées
avec des solutions de phosphate de potassium dont la concentration varie de 0 à 20 g.L-1
(e/c=0,3).
8,0E+05
référence
module élastique / Pa
6,0E+05 50 g.L-1
4,0E+05 30 g.L-1
40 g.L-1
2,0E+05
0,0E+00
0 50 100 150 200
temps / min
Figure 34 : Evolution des modules élastiques pour des pâtes de ciment HTS hydratées
avec des solutions de phosphate de potassium dont la concentration varie de 30 à 50 g.L-1
(e/c=0,3).
- 69 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
L’analyse des courbes de rhéologie des pâtes hydratées dans les conditions décrites
précédemment a permis de mettre en évidence les deux comportements
caractéristiques suivants:
- Une augmentation rapide des modules élastiques des pâtes de ciment est observée dès
les premières minutes suivant le gâchage pour des concentrations en phosphate
supérieures à 30 g.L-1 dans le cas de l’hydratation en présence de phosphate de
sodium. Cette augmentation rapide est suivie d’une période où les modules élastiques
évoluent peu avant qu’ils ne réaugmentent. Dans le cas du phosphate de potassium,
nous ne retrouvons pas cette augmentation rapide des modules élastiques hormis pour
la concentration 30 g.L-1. Néanmoins, l’apparition d’un phénomène, dans cette gamme
de concentration, est quand même identifié.
Le premier comportement met en évidence une augmentation rapide des modules élastiques
de la pâte dans les premières minutes suivant le gâchage pour des concentrations en phosphate
supérieures à 30 g.L-1 avec le phosphate de sodium. Cette augmentation est d’autant plus
importante que la solution d’hydratation est plus concentrée en phosphates. La Figure 35 met
en évidence une proportionnalité entre l’intensité de cette augmentation et la concentration en
phosphates introduite. Au terme de cette augmentation, le module élastique garde une valeur
quasi constante pendant une durée qui s’allonge quand la concentration en phosphates
augmente.
- 70 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
3,E+05
module élastique au plateau / Pa
2,E+05
1,E+05
0,E+00
0 10 20 30 40 50 60
Intuitivement, le lecteur fera ici un parallèle direct avec le comportement rhéologique observé
dans la partie précédente avec le nitrate de potassium aux fortes concentrations pour expliquer
ce raidissement prématurée des pâtes de ciment. Ceci ne semble pourtant pas être le cas ici.
En effet, bien que l’écart entre les quantités de phosphate de sodium utilisées (120 g.L-1 de
Na3PO4,12H2O pour une concentration en phosphate de 30 g.L-1, 160 g.L-1 pour 40 g.L-1 et
200 g.L-1 pour 50 g.L-1) et sa solubilité (413 g.L-1) (Tableau 8) puisse paraître assez faible, les
phosphates présents initialement en solution semblent plus prompts à perturber l’hydratation
du ciment (des retards à l’accélération de l’hydratation sont observés) qu’à précipiter sous
forme de phosphate de sodium.
- 71 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Tableau 8 : Solubilité des différents phosphates utilisés lors de cette étude. La solubilité
à 25°C du Na3PO4,12H2O a été déterminé à l’aide de plusieurs valeurs issues de la
littérature à différentes températures (voir annexe VI).
- 72 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
2
référence
composante
exothermique
1
0
0 500 1000 1500 2000
temps / min
Figure 36: Evolution des flux thermiques en début de réaction pour les pâtes hydratées
avec de l’eau uniquement et avec des concentrations en phosphate de sodium de 40 et 50
g.L-1 (e/c=0,3).
référence
flux thermique / mW.g-1
3 30 g/L
40 g/L
50 g/L
0
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000
temps / min
Figure 37 : Evolution des flux thermiques en début de réaction pour les pâtes hydratées
avec de l’eau uniquement et avec des concentrations en phosphate de potassium de 30,
40 et 50 g.L-1 (e/c=0,3).
- 73 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
- 74 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
5,E+05
3,E+05
2,E+05
1,E+05 Na3PO4,12H20
K3PO4
0,E+00
0 10 20 30 40 50 60
Figure 38 : Evolution des valeurs des modules élastiques relevées 100 minutes pour des
pâtes de ciment hydratées avec du phosphate de sodium et du phosphate de potassium.
Compte tenu de la période de 100 minutes considérée, la contribution des C-S-H à la cohésion
est encore très faible. De ce fait, l’augmentation plus lente des modules avec l’augmentation
de la concentration en phosphate (jusqu’à 30 g.L-1) témoigne plutôt d’une diminution
croissantes des forces attractives entre les particules avec l’augmentation de la concentration
en phosphates. Rappelons toutefois que nous sommes dans le cas d’une pâte de ciment, où
contrairement à la pâte de silicate tricalcique tous les phénomènes rhéologiques ne sont pas
identifiés. Pour les concentrations supérieures à 30 g.L-1, les module élastiques réaugmentent
avec la concentration en phosphates, nous expliquons ce phénomène par l’apparition du
phosphate de calcium que nous supposons précipiter. Toutefois, une structuration différente
de la pâte liée à la présence des ions ortho phosphate et du précipité de phosphate de calcium
n’est également pas à exclure.
Au paragraphe précédent, nous avons mis en évidence une brusque augmentation des
propriétés mécaniques immédiatement après le gâchage pour des pâtes de ciment hydratées
- 75 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Dans le but de vérifier cette hypothèse, nous avons étudié le comportement rhéologique d’un
système modèle dans lequel nous avons fait précipiter des quantités croissantes d’un
phosphate de calcium. Ce système modèle a été préparé à partir de 3 grammes de chaux
(CaO) obtenu par décarbonatation de carbonate de calcium pendant une nuit à 1000°C, de 14
ml de solution de concentration croissante en phosphate de sodium et de 26 grammes de silice
non réactive en guise de matrice. Ces proportions ont été choisies pour représenter le plus
fidèlement possible le système ciment / phosphate étudié. Pour cela, la quantité de phosphate
introduite dans le modèle est du même ordre de grandeur que celle introduite dans les pâtes de
ciment. Seule la quantité d’eau utilisée est supérieure à celle du système ciment / solution de
phosphate, dans le but d’assurer une fluidité suffisante pour la mesure de modules élastiques.
Les particules de silice non réactives sont destinées à simuler les particules de ciment, leur
granularité a donc été choisie en rapport.
81000
10 g.L-1
61000
module élastique / Pa
2,5 g.L-1
41000
0 g.L-1
21000
1000
0 50 100 150 200
temps / min
- 76 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Le calcul des quantités d’hydroxylapatite susceptibles de précipiter dans ces conditions a été
réalisé à partir du logiciel PHREEQC. Il montre bien qu’une augmentation de la concentration
en phosphate provoque une précipitation plus importante de ce composé phosphocalcique
(Tableau 9).
Les résultats des suivis rhéologiques effectués sur les différents mélanges sont présentés sur la
Figure 39. Dans le cas où l’hydratation de la chaux est réalisée dans l’eau uniquement,
l’augmentation de la cohésion n’est due qu’à la coagulation des particules lors des premiers
instants et à la précipitation d’hydroxyde de calcium par la suite et suivant la réaction
suivante:
CaO + H 2O → Ca(OH ) 2
Lorsque le système est gâché avec des solutions de concentration croissante en phosphate de
sodium, une augmentation rapide des modules élastiques est observée. Nous supposons
fortement que cette augmentation des propriétés rhéologiques soit liée à la précipitation
croissante d’un phosphate de calcium en début de réaction ; phosphate de calcium qui pourrait
être l’hydroxylapatite. En effet, il est probable qu’à l’image de la cohésion apportée par la
précipitation de C-S-H dans les pâtes de ciment, la précipitation d’un phosphate de calcium,
jouant un rôle similaire, puisse reproduire des effets cohésifs voisins de ceux des C-S-H. Cette
hypothèse est d’autant plus plausible que les phosphates de calcium sont bien connus du
milieu médical pour être à la base des ciments apatitiques utilisés comme matériau
- 77 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Dans la partie qui va suivre, nous nous attacherons à expliquer l’évolution non monotone des
retards d’hydratation ainsi que la rigidification prématurée des pâtes mise en évidence par
rhéométrie dynamique. Pour cela, plusieurs séries d’expériences réalisées en suspension
diluée ont été menées à l’aide d’un système simplifié du ciment : le silicate tricalcique.
L’avantage du travail en suspension diluée est de permettre un suivi temporel de l’évolution
des concentrations des différentes espèces présentes dans la suspension en effectuant des
dosages sur des prélèvements après filtration. Cette méthode nous permettra dans un premier
temps d’évaluer l’impact de la concentration en phosphates et des contre ions alcalins sur la
dissolution du C3S. Dans un deuxième temps, nous discuterons des raisons qui amènent les
retards d’hydratation à diminuer au-delà d’une certaine concentration seuil en phosphate.
L’ensemble des résultats présentés ci-après a été obtenu à partir d’un montage spécialement
conçu au Laboratoire pour étudier la dissolution au cours du temps de phases anhydres dans
des conditions aussi différentes que variées. Une description exhaustive de cet appareillage est
fournie dans l’annexe II.
55
Brown, W. E., and Chow, L. C. (1986). "A new calcium phosphate water setting cement." Cements research
progress, P. W. Brown, ed., Westerville, 352-379.
56
Legros, R. Z., and Chohayeb, A. (1982). "Apatitic calcium phosphates: possible restorative materials." Journal
of Dental Research(61), 343.
- 78 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
120
100
Concentration / µmol.L-1
80 calcium
silice
60 3*silice
40
20
0
0 2 4 6 8 10 12 14
Temps / min
- 79 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
8
7
1ère période
concentration / mmol.L-1
- 80 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Contrairement à l’expérience réalisée avec un rapport liquide sur solide de 100000, dans le
cas des expériences menées à un l/s de 200, l’évolution des concentrations en calcium et silice
conduit rapidement à la sursaturation par rapport aux C-S-H. Le calcul des indices de
sursaturation par rapport à ces hydrates montre que la solution devient sursaturée dès la
première minute (Figure 42).
1
log (indice de saturation)
-1 0 1 2 3 4 5 6
temps / min
-3
-5
domaine soussaturé domaine sursaturé par rapport
-7 par rapport aux C-S-H
aux C-S-H
-9
-11
-13
Figure 42 : Evolution au cours du temps des indices de sursaturation par rapport aux C-
S-H calculés avec le logiciel PHREEQC à partir des concentrations mesurées lors de
l’hydratation d’1 gramme de silicate tricalcique dans 200 ml d’eau (l/s=200).
Le laps de temps qui précède cette sursaturation correspond à la première période définie plus
haut où seule la dissolution du silicate tricalcique intervient. Il devient alors possible de
déterminer les valeurs des tangentes aux courbes de concentration des ions calcium et silicate
qui traduisent la vitesse d’apparition de ces mêmes espèces (Figure 43). Nous pourrons ainsi
par la suite comparer les vitesses d’apparition des différentes espèces en fonction des
concentrations en phosphates introduites initialement. En utilisant des phosphates possédant
des contre ions différents, il sera également possible de mettre en évidence l’influence
éventuelle de ces derniers.
- 81 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
4,5
4
concentration / mmol.L-1
3,5
3 calcium
silice
2,5
1,5
0,5
0
0 2 4 6 8 10
temps / min
Figure 43 : Détermination des vitesses d’apparition des ions calcium et silicate à partir
des valeurs des pentes initiales aux courbes de variations des concentration de ces
espèces.
- 82 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
comparable par rapport une masse d’anhydre fixée. Le Tableau 10 présente les différentes
quantités de phosphates utilisées en fonction des rapports liquide sur solide auxquels nous
avons travaillé ainsi que les concentrations en phosphates correspondantes.
Tableau 10: Récapitulatif des différentes quantités de phosphates utilisées pour les
expérimentations à différents rapports liquide sur solide et des concentrations en
phosphates correspondantes.
- 83 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Comme indiqué au paragraphe III.4.b, nous avons comparé les vitesses d’apparition des ions
calcium, silicate et phosphate en solution en fonction de la concentration en phosphates
initiale. Les concentrations en phosphate retenues pour les expériences réalisées avec un
rapport liquide sur solide de 200 ont varié de 155 à 1260 µmol.L-1. Les solutions
d’hydratation sont préparées en dissolvant la quantité de phosphate de potassium ou de
phosphate de sodium voulue dans de l’eau distillée et permutée.
5 2,4
calcium 1,6
silice
3
mmol.L-1
mmol.L-1
phosphate
potassium 1,2
2
0,8
1
0,4
0 0
0 5 10 15 20
temps / min
A titre d’exemple, nous avons représenté sur la Figure 45 l’évolution des concentrations en
ions calcium, silicate, phosphate et potassium pour une hydratation de C3S avec une solution
de concentration initiale en phosphate de potassium de 945 µmol.L-1. Cet exemple est
représentatif de l’évolution des concentrations de ces ions dans le cas général. Il permet de
rendre compte du fait que la concentration en alcalins (ici le potassium) reste quasi constante
au cours du temps et que par conséquent, ces ions ne semblent pas entrer pas dans la
- 84 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
composition des produits de réaction. La légère ‘bosse’ observée dans les cinq premières
minutes est attribuée aux effets de matrice qui peuvent avoir lieu lorsque l’ensemble des
concentrations des éléments varie fortement comme c’est le cas dans cette période. Nous
remarquons également que la concentration en phosphates chute très rapidement jusqu’à
devenir nulle.
0,4
0,35 Calcium
vitesse d'apparition / mmol.min-1.g-1
Silice
0,3
3*Silice
0,25 Phosphate
0,2
0,15
0,1
0,05
0
0 200 400 600 800 1000 1200 1400
-0,05
-0,1
Figure 46 : Evolution des vitesses d’apparition des ions calcium, silicate et phosphate en
solution en fonction de la concentration en phosphate de potassium initiale dans les
solutions d’hydratation. Les points de couleur orange représentent la concentration en
silice multiplié par un facteur 3 (l/s=200).
L’analyse des résultats obtenus (Figure 46) avec le phosphate de potassium montre que
globalement la vitesse d’apparition des ions calcium et silicate diminue lorsque l’on augmente
la concentration initiale en phosphates. Cette diminution est néanmoins marquée par une
discontinuité intervenant pour une concentration en phosphate initiale d’environ 500 µmol.L-
1
. Il est alors intéressant de remarquer qu’avant l’apparition de cette discontinuité le rapport
stoechiométrique 3:1 entre le calcium et la silice est conservé bien que la vitesse d’apparition
diminue. Ce qui n’est plus le cas au-delà. En effet, pour les concentrations en phosphates
initiales supérieures à 500 µmol.L-1, un déficit d’ion calcium est clairement mis en évidence.
- 85 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Par ailleurs, la vitesse de disparition des ions phosphate augmente jusqu’à la discontinuité et
diminue ensuite.
0,4
calcium
0,35 silice
3* silice
vit. d'apparition / mmol.min-1.g-1
0,3
Phosphate
0,25
0,2
0,15
0,1
0,05
0
0 200 400 600 800 1000
-0,05
-0,1
-0,15
concentration en phosphate / µmol.L-1
Figure 47 : Evolution des vitesses d’apparition des ions calcium, silicate et phosphate en
solution en fonction de la concentration en phosphate de sodium initiale dans les
solutions d’hydratation. Les points de couleur orange représentent la concentration en
silice multiplié par un facteur 3 (l/s=200).
Dans le cas où les solutions d’hydratation sont préparées avec du phosphate de sodium, un
comportement analogue est observé. Les vitesses d’apparition diminuent avec l’augmentation
de la concentration initiale en phosphates et une discontinuité est également mise en évidence
pour une concentration en phosphates comprise entre 400 et 500 µmol.L-1. Le déficit en ions
calcium se retrouve également une fois la discontinuité dépassée.
La même série d’expériences a été réalisée avec un rapport liquide sur solide de 50 avec le
phosphate de potassium. Les concentrations en phosphates initiales ont été augmentées
jusqu’à une valeur de 1600 µmol.L-1. L’évolution des vitesses d’apparition des différentes
- 86 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
espèces ioniques est identique à celle observée pour un rapport liquide sur solide de 200. La
discontinuité se produit cette fois pour une concentration en phosphates initiale proche de 700
µmol.L-1.
0,1
calcium
silice
vit. d'apparition / mmol.min-1.g-1
0,08 3* silice
phosphate
0,06
0,04
0,02
0
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800
-0,02
Figure 48 : Evolution des vitesses d’apparition des ions calcium, silicate et phosphate en
solution en fonction de la concentration en phosphate de potassium initiale dans les
solutions d’hydratation. Les points de couleur orange représentent la concentration en
silice multiplié par un facteur 3 (l/s=50).
Dans cette partie, nous allons tenter de relier et d’interpréter les différents résultats obtenus à
partir des différentes expériences réalisées en suspension diluée et de faire un parallèle avec
ceux obtenus dans les conditions de la pâte.
- 87 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Quel que soit le rapport liquide sur solide de la suspension diluée (50 ou 200), nous
observons, avant la discontinuité, une diminution de la vitesse d’apparition des espèces
calcium et silicate dans la suspension. Ce phénomène s’accompagne d’une disparition rapide
des ions phosphate de la suspension. Cette diminution est proportionnelle à l’augmentation de
la concentration initiale en phosphates, ce qui indique clairement que la réaction de
dissolution est ralentie par la présence initiale croissante des ions phosphate dans la
suspension. L’hypothèse avancée pour expliquer un tel comportement est une adsorption de
plus en plus importante des ions phosphate à la surface des particules de silicate tricalcique
avec l’augmentation de la concentration initiale en phosphates. Cette adsorption aurait lieu sur
des sites de dissolution préférentiels, entraînant un ralentissement de la dissolution de
l’anhydre proportionnel aux nombres de sites bloqués, ce qui expliquerait la diminution
linéaire de la vitesse d’apparition des ions calcium et silicate en solution ainsi que la
disparition des ions phosphate de cette même solution.
Le fait d’avoir réalisé les expériences d’hydratation du silicate tricalcique avec deux
phosphates différant uniquement par leur contre ion, nous a permis d’évaluer l’influence de
ces derniers. Pour cela, nous avons comparé l’évolution des vitesses d’apparition des ions
calcium dans les suspensions de rapport l/s=200 pendant la période où l’effet de l’adsorption
est supposé être prépondérant (Figure 49).
- 88 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
0,4
Na3PO4
vitesse d'apparition / mmol.min-1.g-1 K3PO4
Linéaire (Na3PO4)
Linéaire (K3PO4)
0,3
0,2
0,1
0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500
-1
concentration en phosphate / µmol.L
Figure 49 : Comparaison des vitesses d’apparition en solution des ions calcium lors de la
période de dissolution pure pour des hydratations de silicate tricalcique dans des
solutions de phosphate de sodium ou de phosphate de potassium (l/s=200).
Les résultats montrent que la dissolution semble se faire moins rapidement en présence de
phosphate de sodium qu’en présence de phosphate de potassium. Il ne nous est pour le
moment pas possible d’expliquer ce comportement surprenant. En effet, les expériences
présentées ici ne diffèrent uniquement que par la nature du contre-ion associé aux phosphates
qui comme l’a montré la Figure 45 ne s’adsorbe pas.
De plus, ces résultats sont à mettre en parallèle avec ceux obtenus dans le cas de l’hydratation
de pâtes de ciment et présentés Figure 28 qui révèlent que le retard à l’accélération de
l’hydratation, pour une concentration en phosphates donnée, est supérieur si le phosphate est
associé au sodium plutôt qu’au potassium. La comparaison (Tableau 11) entre le rapport des
pentes traduisant le ralentissement de la dissolution (Figure 49) dans le cas des expériences
réalisées en suspension diluée (l/s=200) et le rapport des pentes traduisant les retards mesurés
en pâte (e/c=0,3) (Figure 49) montre une concordance qui supporte l’hypothèse selon laquelle
le contre ion associé au phosphate influence l’évolution du système étudié et que les retards
d’hydratation observés avec les pâtes de ciment résultent de la réduction de vitesse de
dissolution des anhydres.
- 89 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
2000
1600
temps indicatifs tacc / min
1200
800
400 Na3PO4
K3PO4
0
0 5 10 15 20 25 30 35
-1
concentration en phosphate / g.L
Figure 50 : Evolution des temps auxquels la réaction d’hydratation s’accélère pour des
pâtes de ciment hydratées avec des concentrations en phosphate de sodium (et
potassium) variant de 0 à 50 g.L-1 (e/c=0,3).
Tableau 11 : Rapport des pentes des vitesses d’apparition des espèces pour les
expériences réalisées en suspension diluée et rapport des pentes de l’évolution des
retards mesurées en pâte.
57
Barret, P., Ménétrier, D., and Bertrandie, D. (1983). "Mechanism of C3S dissolution and problem of the
congruency in the very initial period and later on." Cement and Concrete Research, 13, 728-738.
- 90 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
due aux sursaturations locales par rapport aux C-S-H qui existent autour des particules de C3S
en solution. En effet, l’environnement ionique local de la particule qui se dissout est
susceptible d’être légèrement différent de celui qui constitue la solution même. Il est alors
possible, dans ces conditions, d’observer des sursaturations locales qui sont susceptibles
d’entraîner une précipitation de C-S-H et ainsi d’expliquer la légère différence de
stoechiométrie mesurée au cœur de la solution, et ce d’autant plus que la concentration
augmente rapidement.
Quel que soit le rapport liquide sur solide utilisé (50 et 200 en suspension diluée, 0,3 en pâte),
les phénomènes étudiés (la dissolution pour les suspensions et le retard à l’accélération de
l’hydratation en pâte) ont tous été marqués par une discontinuité (suspensions diluées) ou par
une inversion du comportement (pâte). Il nous a alors semblé opportun de comparer les
- 91 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Il apparaît que les changements de comportement n’interviennent pas pour des concentrations
initiales en phosphates identiques (315 mmol.L-1 pour un l/s de 0,3 et 631 µmol.L-1 pour un
l/s de 50) mais que la quantité de phosphates introduite rapportée à la masse d’anhydre est
voisine dans les trois cas étudiés. Cette observation suggère que la précipitation du phosphate
de calcium, ne peut se faire qu’après la saturation d’un nombre déterminé de sites de
dissolution du silicate tricalcique par l’adsorption d’ions phosphate.
◆ Parallèle entre les résultats obtenus en suspensions diluées et ceux obtenus en pâte.
Les résultats obtenus en suspension diluée peuvent être transposés au cas des pâtes. En effet,
une limitation de la dissolution des particules de ciment provoquée par l’adsorption d’ions
phosphate sur des sites de dissolution privilégiés de ce réactif est fortement suggérée par les
résultats obtenus. Cette adsorption, comme nous l’avons montré par une série
d’expérimentations réalisées en suspensions diluées, est susceptible de ralentir
considérablement l’augmentation des concentrations en calcium et silicate nécessaires pour
atteindre la sursaturation par rapport aux C-S-H dans la solution interstitielle. La période de
germination et de début de croissance des C-S-H s’en trouverait donc d’autant plus allongée
- 92 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
que la concentration en phosphate initiale est importante ; ce qui par voie de conséquences
entraînerait le retard à l’accélération de l’hydratation qui est effectivement observé jusqu’à
une certaine concentration en phosphates.
- 93 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
0
0 1000 2000 3000 4000 5000
temps / min
Figure 51 : Evolution du flux thermique de pâtes de ciment hydratées avec une même
solution de phosphate de sodium (20 g.L-1) et différentes quantités d’hydroxylapatite
(e/c=0,3).
1400
1200
temps indicatifs tacc / min
1000
800
600
400
200
0
0 0,005 0,01 0,015 0,02 0,025 0,03
-1
quantité d'hydroxylapatite ajoutée / g.g de ciment
- 94 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
0
0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 4000
temps / min
Figure 53 : Evolution du flux thermique de pâtes de ciment hydratée avec une solution
de phosphate de sodium de concentration 20 g.L-1 auquel ont été ajouté une même
quantité d’hydroxylapatite à des temps différents (e/c=0,3).
V. Discussion générale
Les suivis des vitesses d’hydratation et de l’évolution des propriétés rhéologiques des pâtes
de ciment en présence de quantités croissantes de phosphate de sodium ou de potassium ont
permis de mettre en évidence un comportement atypique de ce système. Un ralentissement
non monotone de l’hydratation et de l’augmentation des modules élastiques au jeune âge ont
été observés. Le changement de comportement intervient dans les deux cas pour une
concentration en phosphates voisine de 30 g.L-1. Pour expliquer l’origine de l’augmentation
des retards avec l’accroissement de la concentration en phosphates, nous avons montré dans la
discussion précédente que les ions ortho phosphate sont susceptibles de s’adsorber à la surface
des particules de ciment et de ralentir leur dissolution ce qui expliquerait l’augmentation des
retards observés avec la concentration en phosphates. Cette même hypothèse avait déjà été
proposée par Lieber49,50 au milieu des années 70 pour expliquer le comportement retardateur
des ions phosphate sur l’hydratation des pâtes de ciment. Elle est par ailleurs en accord avec
- 95 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
d’autres travaux portant sur des systèmes proches de celui étudié58,59. Par exemple, Efthimios
et House ont montré que l’adsorption d’ions phosphate à la surface de calcite peut bloquer la
croissance de ces cristaux60.
Le système que nous étudions ne fait sûrement pas exception à la règle. En effet, des
différences importantes ont été observées sur des systèmes chimiquement très proches. Nous
avons par exemple pu constater que la rhéologie des pâtes de ciment pour des concentrations
supérieures à l’inversion des comportements différait suivant le contre-ion associé au
phosphate. Le phosphate de sodium conduisant à des augmentations significatives des
58
Plant, L. J., and House, W. A. (2002). "Precipitation of calcite in the presence of inorganic phosphate."
Colloids and Surfaces, 203, 143-153.
59
House, W. A. (1987). "Inhibition of Calcite Growth by Inorganic Phosphate." Journal of Colloid and Interface
Science, 119(2).
60
Efthimios, K. (1987). "The Crystallization of Calcite in the Presence of Orthophosphate." Journal of Colloid
and interface Science, 116(2).
61
Boistelle, R. (1990). "growth units and nucleation: the case of calcium phosphates." Journal of Crystal
Growth, 102, 609-617.
62
Boskey, A. L., and Posner, A. S. (1975). "Formation of Hydroxyapatite at Low Supersaturation." Journal of
Physical Chemistry, 80, 40-45.
63
Christoffersen, J. (1989). "A Contribution to the Understanding of the formation of Calcium Phosphates."
Journal of Crystal Growth, 94, 767-777.
- 96 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
propriétés mécaniques dans les premiers instants suivant le gâchage, ce qui n’est pas le cas
avec le phosphate de potassium.
De plus, une composante exothermique a été observée dans cette gamme de concentration
avec le phosphate de sodium et ne l’a pas été avec le phosphate de potassium. Dans l’état
actuel des choses, nous ne pouvons attribuer cette composante à une réaction donnée mais elle
est sans aucun doute liée à une réaction chimique faisant intervenir les ions ortho phosphate
ou les composés précipités à partir de ces derniers.
8
référence
Na3PO4 10 g/L
flux thermique / mW.g-1 de C3S
Na3PO4 20 g/L
6 Na3PO4 30 g/L
Na3PO4 50 g/L
K3PO4 30 g/L
0
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600
temps / min
Figure 54 : Evolution du flux thermique de pâte de silicate tricalcique hydratée avec des
solutions de phosphate de sodium et de potassium de différentes concentrations en
phosphates (e/c=0,5).
Nous avons par ailleurs suivi par microcalorimétrie l’évolution de l’hydratation de pâtes de
silicate tricalcique gâchées avec des solutions de phosphate de sodium et potassium de
différentes concentrations. Nous retrouvons sur le silicate tricalcique un effet non monotone
des ions ortho phosphate sur le temps auquel la réaction s’accélère. Aux faibles
concentrations en phosphates, nous retrouvons un effet retardateur mais nous remarquerons
également un effet accélérateur pour les grandes concentrations. En outre, les courbes de flux
thermique présentent toujours cette composante exothermique dans le cas où l’hydratation est
réalisée avec le phosphate de sodium (Figure 54). Cette composante se révèle être beaucoup
plus nette dans le cas de l’hydratation du silicate tricalcique que dans le cas du ciment
- 97 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
Portland, ce qui laisse supposer une influence des phases aluminates sur l’hydratation des
phases silicates du ciment Portland et plus précisément l’influence d’interactions entre les
phosphates et les phases aluminates. De plus, l’aire des composantes augmente avec la
concentration en phosphates, ce qui confirme que les ions ortho phosphate doivent être
impliqués dans le phénomène. D’autre part, une composante exothermique est également
observée dans le cas de l’hydratation avec le phosphate de potassium contrairement aux
expériences réalisées avec le ciment Portland pour lesquelles cette composante n’était pas
décelable sur les courbes de flux thermiques. Cette dernière se trouve néanmoins être
beaucoup moins importante que celle observée avec le phosphate de sodium pour une
concentration en phosphate identique. On peut donc supposer que le phénomène traduisant
l’apparition de cette composante exothermique se produit également avec le phosphate de
potassium mais qu’il se produit avec une cinétique beaucoup plus lente. Ces observations
confirment que la ou les réactions qui se déroulent dans cette période sont dépendantes de la
nature du contre-ion associé au phosphate. Ces résultats peuvent laisser supposer que le
phosphate de calcium qui précipite soit un précurseur de l’hydroxylapatite qui pourrait être de
même nature dans les deux cas mais dont la vitesse de formation est différente selon la nature
du milieu. La composante exothermique pourrait alors être associée à une recristallisation du
ou des précurseurs en hydroxylapatite. Cette hypothèse est par ailleurs en accord avec la
littérature qui fait état de la formation plus difficile d’une apatite carbonatée en présence de
potassium qu’en présence de sodium. La raison de cette différence tient au fait que le
diamètre de l’ion potassium est plus important que celui du sodium et se substitue moins
facilement dans le squelette de l’apatite considérée64.
64
R.Z., LeGeros. (1967). "Crystallographic Studies of the Carbonate Substitution in the Apatite Structure," New
York.
- 98 -
II. Influence des ions ortho phosphate sur l’hydratation et la rhéologie des pâtes de ciment
également été confirmé avec un ciment riche en aluminate lors d’une étude non présentée
dans ce mémoire.
Nous avons pu mettre en évidence que le ralentissement de l’hydratation peut s’expliquer en
partie par une adsorption croissante des ions ortho phosphate à la surface des particules de
silicate tricalcique du ciment, ralentissant ainsi leur dissolution. Il apparaît qu’une fois un
certain nombre de sites de dissolution préférentiels bloqués, la quantité d’ions phosphate
restante précipite sous la forme d’un phosphate de calcium dont la nature n’a pu être
déterminée. Cette précipitation entre en compétition avec le phénomène d’adsorption des ions
phosphate. Les expériences ayant été réalisées avec des sels de phosphates différents, nous
avons pu également mettre en évidence une influence non négligeable des contre ions sur la
capacité des ions phosphate à s’adsorber à la surface des particules de ciment et donc à
retarder l’hydratation des pâtes de ciment. Par ailleurs, selon que les expériences sont
réalisées avec du phosphate de sodium ou du phosphate de potassium, le comportement
rhéologique est modifié pour les concentrations en phosphates supérieures à 30 g.L-1. Cette
différence pourrait être associée à des vitesses de précipitation différente suivant la nature du
milieu comme semble le confirmer les suivis de l’hydratation réalisées sur le silicate
tricalcique. Il est donc vraisemblable, que le système passe par un ou plusieurs précurseurs de
l’hydroxylapatite avant que cette dernière, thermodynamiquement plus stable, ne se forme.
- 99 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Les concentrâts d’évaporation produits par les stations de traitement des effluents liquides
sont caractérisés par une salinité élevée de 300 g.L-1. Dans les déchets à l’origine de cette
étude, le sel majoritaire est le nitrate de sodium qui contribue à lui seul à plus de la moitié de
la salinité des concentrâts étudiés. Dès lors, ce travail bien que consacré à l’étude des
interactions ciment / phosphate devait, pour se rapprocher un peu plus du système réel, tenir
compte des ions nitrate. Les solutions de phosphate de sodium ou de potassium ont donc été
additionnées d’une quantité de nitrate de sodium ou de potassium telle que la salinité totale de
la solution d’hydratation rejoigne celle du déchet étudié. Cette addition de nitrates nous a
permis de simuler la salinité des concentrâts et de déterminer les effets éventuels sur
l’hydratation et les propriétés mécaniques des pâtes de ciment en présence de phosphates.
Dans un premier temps, nous regarderons l’influence de ces ajouts sur le déroulement de
l’hydratation du ciment et nous confronterons ces résultats à ceux obtenus antérieurement sur
les pâtes de ciment hydratées uniquement avec des sels de phosphate. La deuxième moitié de
cette partie sera consacrée à l’étude de l’influence de ces solutions phosphate / nitrate sur
l’évolution des résistances mécaniques au cours du temps.
Les deux premières parties de ce mémoire ont permis d’évaluer l’influence des ions ortho
phosphate et de certains ions nitrate pris séparément sur l’évolution cinétique et rhéologique
des pâtes de ciment. Désormais, nous allons chercher à comprendre comment le système
réagit lorsque ces deux espèces sont introduites conjointement dans des conditions de salinité
fixées. Ce travail sera présenté en gardant à l’esprit que le paramètre d’étude principal reste la
concentration en phosphates.
- 100 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
I.1. Influence du système complexe sur l’hydratation du ciment
Dans le but de rendre compte également de l’influence des contre ions sodium ou potassium
associés au nitrate et au phosphate, trois types de mélanges ont été préparés. Le premier
contient phosphate de sodium et nitrate de sodium, le second phosphate de potassium et
nitrate de potassium et le troisième, dans lequel les contre ions ont été croisés, phosphate de
potassium et nitrate de sodium. Le Tableau 13, le Tableau 14 et le Tableau 15 indiquent les
compositions massiques et molaires des différentes solutions utilisées. Nous remarquons que
pour une même concentration en phosphates, les quantités molaires de nitrates ajoutées
diffèrent suivant le phosphate et le nitrate utilisé.
- 101 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Nous avons suivi l’hydratation de pâtes de ciment en présence de solutions complexes de sels
de phosphate et de nitrate de contre ions différents. Ce travail nous a permis de comparer
l’influence des différentes solutions sur les retards d’hydratation. Ces derniers ont été estimés
de la même manière que précédemment : l’évolution des retards a été déduite des temps
- 102 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
indicatifs tacc de l’accélération de la réaction d’hydratation. Cette méthode nous a conduit à
relever un certain nombre de similitudes mais aussi de différences entre les différents cas
étudiés (Figure 55). Toutes les courbes de flux thermique utilisées pour ce travail sont
regroupées dans l’annexe n°VII.
3000
2500 Na3PO4,12H2O;NaNO3
temps indicatifs tacc / min
K3PO4;KNO3
K3PO4;NaNO3
2000
1500
1000
500
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80
-1
concentration en phosphate / g.L
Figure 55: Evolution des temps auquel la réaction d’hydratation s’accélère en fonction
de la concentration en phosphate introduite dans des solutions mélanges contenant du
phosphate de sodium ou de potassium et du nitrate de sodium de potassium (e/c=0,3).
- 103 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
ralentir l’hydratation en présence du contre ion sodium qu’en présence du contre-ion
potassium.
- 104 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
- Pour les hydratations réalisées en présence de phosphate uniquement : le retard est
défini comme le temps indicatif tacc pour une concentration en phosphate donnée,
retranchée du temps indicatif tacc pour la pâte de ciment référence.
Les résultats sont présentés en fonction du système phosphate / nitrate considéré dans le
Tableau 16, le Tableau 17 et le Tableau 18.
- 105 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Retard dû au
Concentration Retard dû au Retard
nitrate de Retard
en phosphate / phosphate / expérimental /
-1
potassium / théorique / min
g.L min min
min
0 49 49 49
10 400 36 436 311
20 721 24 745 885
30 1326 19 1345 930
Plusieurs constatations peuvent être tirées de ces données. D’une part, il est clair que
l’additivité des retards est une hypothèse à rejeter. D’autre part, le retard expérimental observé
dans le cas des systèmes complexes est également très différent de celui observé pour les
hydratations en présence de phosphate uniquement. Dans les deux cas où le nitrate de sodium
est utilisé, les retards d’hydratation engendrés sont beaucoup plus importants. Dans le cas où
le nitrate de potassium est utilisé, l’évolution des résultats ne permet pas d’en attribuer
l’origine à la présence seule du nitrate de potassium. L’addition de nitrates aux différentes
- 106 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
solutions d’hydratation perturbe donc de manière importante le temps auxquel la réaction
d’hydratation s’accélère dans les différents cas étudiés.
Après avoir étudié les conséquences sur l’hydratation des pâtes de ciment des solutions
complexes phosphate / nitrate, nous allons désormais nous intéresser à l’influence de ces
mêmes solutions complexes sur la rhéologie des pâtes de ciment au jeune âge.
Un protocole identique à celui utilisé pour caractériser les pâtes de ciment gâchées avec des
solutions de phosphates a été mis en œuvre dans le cas des systèmes complexes de façon à
suivre l’évolution de leurs propriétés mécaniques au jeune âge. La composition des mélanges
est la même que précédemment ; à savoir phosphate de sodium / nitrate de sodium, phosphate
de potassium / nitrate de potassium et phosphate de potassium / nitrate de sodium.
Les résultats obtenus avec le système phosphate de sodium / nitrate de sodium sont présentés
Figure 56, ceux obtenus avec le système phosphate de sodium / nitrate de sodium Figure 57 et
ceux obtenus avec le système phosphate de potassium / nitrate de potassium Figure 58.
1,2E+06
1,0E+06 50 g.L
-1
40 g.L-1
module élastique / Pa
2,0E+05
2,0E+05
0,0E+00 0,0E+00
0 50 100 150 200 250 300 0 50 100 150 200 250 300
temps / min
temps / min
Figure 56 : Evolution des modules élastiques de pâtes de ciment hydratées avec des
solutions de phosphate de sodium additionnées de nitrate de sodium et dont la
concentration en phosphate varie de 0 à 50 g.L-1 (e/c=0,3).
- 107 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
1,E+06
6,E+05
300 g/L nitrate de sodium
300 g/L nitrate de sodium
8,E+05
50 g/L
module élastique / Pa
module élastique / Pa
4,E+05
6,E+05
10 g/L
4,E+05 40 g/L
2,E+05
20 g/L
2,E+05 30 g/L
0,E+00 0,E+00
0 50 100 150 200 250 300 0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200
temps / min temps / min
Figure 57 : Evolution des modules élastiques de pâtes de ciment hydratées avec des
solutions de phosphate de potassium additionnées de nitrate de sodium et dont la
concentration en phosphate varie de 0 à 50 g.L-1 (e/c=0,3).
1,4E+06
1,4E+06
10 g.L-1
1,2E+06
1,2E+06
module élastique / Pa
1,0E+06 80 g.L-1
module élastique / Pa
0,0E+00 0,0E+00
0 50 100 150 200 250 300 0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200
temps / min temps / min
Figure 58 : évolution des modules élastiques de pâtes de ciment hydratées avec des
solutions de phosphate de potassium additionnées de nitrate de potassium et dont la
concentration en phosphate varie de 0 à 100 g.L-1 (e/c=0,3).
- 108 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Cas du système phosphate de sodium / nitrate de sodium :
Comme nous l’avions mis en évidence avec les solutions de phosphate de sodium exemptes
de nitrates, les deux comportements caractéristiques suivants sont à nouveau observés :
- Une augmentation brutale des modules élastiques des pâtes de ciment est observée dès
les premières minutes suivant le gâchage pour les concentrations en phosphates
supérieures à 20 g.L-1. Cette augmentation a été attribuée à la précipitation progressive
d’un phosphate de calcium.
- De plus, la comparaison des temps indicatif tacc pour les systèmes complexes et
simplifiés montre que pour des concentrations en phosphates de 40 et 50 g.L-1, le
retard d’hydratation est plus faible pour les systèmes complexes (Tableau 19).
Autrement dit, une partie des ions ortho phosphate adsorbés et qui favorise le retard
dans le cas de l’hydratation avec des solutions de phosphates uniquement a pu être
consommée pour former du phosphate de calcium dans le cas du système complexe.
- 109 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Temps indicatif tacc avec les
Concentration en Temps indicatif tacc avec le
solutions de phosphate
phosphate / g.L-1 système complexe / min
uniquement / min
40 1074 1310
50 548 946
4,E+05
module élastique au plateau / Pa
Na3PO4 uniquement
3,E+05 Na3PO4 / NaNO3
2,E+05
1,E+05
0,E+00
0 10 20 30 40 50 60
-1
concentration en phosphate / g.L
- 110 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
2
référence
1
50 g.L-1
40 g.L-1
0
0 100 200 300 400 500 600 700 800
temps / min
Figure 60 : Flux thermique enregistré sur des pâtes de ciment hydratées avec des
solutions complexes de phosphate de sodium et de nitrate de sodium. Sur les courbes à
40 et 50 g.L-1, les composantes endothermiques sont clairement visibles.
Le système couplé avec les deux alcalins différents phosphate de potassium / nitrate de
sodium présente un comportement intermédiaire à celui des systèmes phosphate de sodium /
nitrate de sodium et phosphate de potassium uniquement (Figure 61). Contrairement au
comportement des pâtes de ciment hydratées seulement avec du phosphate de potassium,
l’addition d’une quantité de nitrate de sodium entraîne une augmentation des modules
élastiques en début de réaction analogue à celle observée sur les pâtes hydratées avec le
système phosphate de sodium / nitrate de sodium. Toutefois, cette augmentation des modules
est deux fois moins importante en intensité (Figure 61). Ces observations montre une fois de
plus que la présence du contre-ion sodium favorise l’augmentation rapide des modules
élastiques pour des concentrations en phosphates supérieures à 30 g.L-1 contrairement à l’ion
potassium.
- 111 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
4,E+05
Na3PO4,12H2O / NaNO3
module élastique au plateau / Pa
K3PO4 / NaNO3
3,E+05 K3PO4 uniquement
2,E+05
1,E+05
0,E+00
0 10 20 30 40 50 60
-1
concentration en phosphate / g.L
- 112 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
référence
flux thermique / mW.g-1 de ciment
composantes
exothermiques 40 g/L
50 g/L
80 g/L
2
0
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600
temps / min
Figure 62 : Flux thermique enregistré sur des pâtes de ciment hydratées avec des
solutions complexes de phosphate de potassium et de nitrate de sodium. Les courbes à
40, 50 et 80 g.L-1 sont présentées (e/c=0,3).
- 113 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
supérieure à celle observée lorsque la pâte est hydratée uniquement avec du nitrate de
potassium. Ce phénomène reste inexpliqué.
En l’absence de précipitation de nitrate de potassium, nous retrouvons pour des concentrations
en phosphates de 50 et 60 g.L-1, une absence d’augmentation brutale de modules élastiques
conforme aux résultats obtenus avec les solutions ne contenant que du phosphate de
potassium. Par contre, cette rigidification prématurée apparaît pour des concentrations en
phosphates de 80 et 100 g.L-1.
1,4E+06
module élastique à 80 minutes / Pa
8,0E+05
6,0E+05
4,0E+05
2,0E+05
0,0E+00
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
-1
concentration en phosphate / g.L
La comparaison des valeurs des modules élastiques relevés au bout de 80 minutes (Figure 63)
permet de rendre compte une fois de plus du comportement non monotone des pâtes de
ciment hydratées lorsque la concentration en phosphates augmente. De la même manière que
pour le suivi de l’hydratation, la concentration en phosphates pour laquelle le changement de
comportement intervient est différente suivant le système complexe phosphate / nitrate utilisé.
Le système phosphate de sodium / nitrate de sodium reste le premier à s’inverser suivi du
système phosphate de potassium / nitrate de sodium et du système phosphate de potassium /
nitrate de potassium.
- 114 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
I.3. Discussion
La comparaison des vitesses d’hydratation et des propriétés rhéologiques au jeune âge des
pâtes de ciment hydratées avec différentes solutions complexes phosphate / nitrate et des pâtes
hydratées avec des solutions simplifiées de phosphates a permis de dégager un certain
nombres de similitudes mais également des différences.
- 115 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
contre ion associé aux phosphates et aux nitrates. Les expériences réalisées avec le sodium
présentent les augmentations les plus fortes, celles réalisées avec le potassium les plus faibles
et celles avec la combinaison des deux contre-ions un comportement intermédiaire. Cette
remarque va comme nous l’avons suggéré dans la discussion précédente dans le sens que le
phosphate de calcium qui précipite puisse le faire avec des vitesses différentes selon le contre-
ion associé aux phosphate et aux nitrates. De plus, dans le cas du système complexe au
sodium, les augmentations initiales sont plus importantes que dans les systèmes simplifiés, ce
qui suppose également qu’une plus grande quantité de phosphate de calcium précipite dans
ces conditions.
D’autre part, nous avons pu remarquer que pour les faibles concentrations en phosphates,
l’addition de nitrates aux solutions de phosphates accroît les retards à l’accélération de
l’hydratation (sauf pour la concentration en phosphate de 30 g.L-1 avec le système phosphate
de potassium / nitrate de potassium). L’addition de nitrate de sodium ou de potassium pourrait
dans ce cas avoir un rôle à jouer.
Pour des concentrations supérieures à la concentration d’inversion et dans le cas du phosphate
de sodium, nous avons montré que les retards étaient plus faibles avec le système complexe
qu’avec le système simplifié. Nous avons donc suggéré que la précipitation de phosphate de
calcium est plus importante, ce qui est également cohérent avec l’augmentation initiale des
modules dans ces cas-là.
Nous pouvons également remarqué que dans le cas du système complexe au potassium, une
augmentation rapide des modules qui semble de même nature que celle observée avec les
systèmes au sodium est observée pour des concentrations en phosphates à partir de 80 g.L-1.
- 116 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Dans le cadre du cahier des charges défini par l’ANDRA, il est exigé que la matrice
cimentaire destinée à immobiliser les effluents radioactifs respecte une valeur limite en terme
de résistance mécanique à la compression. En l’occurrence, la contrainte à la rupture
minimale est fixée à 8 MPa. Notre travail a donc consisté à déterminer l’influence de
l’augmentation des concentrations en phosphates dans les solutions d’hydratation ainsi que de
l’impact des nitrates sur les résistances mécaniques. Cette étude a été réalisée en mesurant les
contraintes à la rupture d’éprouvettes fabriquées à partir de pâtes de ciment et de mortiers et
hydratées avec des solutions de gâchage de différentes concentrations en phosphates et de
nitrates. Les mesures ont été réalisées sur des périodes pouvant aller jusqu’à trois mois. Dans
ces conditions, il nous sera possible d’estimer de manière fiable la résistance finale du
matériau. En complément, nous avons déterminé, pour chaque échéance, le taux d’hydratation
des pâtes et des mortiers en déterminant la quantité de portlandite contenue dans les
échantillons à partir de mesures thermo gravimétriques. Cette analyse supplémentaire nous a
permis de relier l’évolution des résistances avec l’avancement de la réaction d’hydratation et
de détecter les effets éventuels de certaines espèces sur cette évolution.
Cette partie est décomposée en trois points. Dans un premier temps, nous présentons les
détails techniques de la partie expérimentale, ensuite nous analysons les résultats des mesures
de résistances obtenues, enfin nous tentons de les mettre en relation avec les avancements
réactionnels.
Des essais mécaniques en compression ont été réalisés sur des micro éprouvettes de pâtes
pures et de mortiers afin d’évaluer leur contrainte à la rupture à différentes échéances. Les
- 117 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
micro éprouvettes utilisées sont de forme cylindrique, de diamètre respectivement 6 mm pour
les pâtes pures et 8 mm pour les mortiers et de hauteur 10 mm dans les deux cas.
En règle générale, les cimentiers ne procèdent pas à d’essais mécaniques sur pâtes pures. Le
dimensionnement des éprouvettes qu’ils utilisent (4x4x16 cm3) combiné à l’exothermicité de
la réaction d’hydratation provoquent en effet des problèmes de fissuration qui conduisent à
une trop grande dispersion des mesures. La taille réduite des micro éprouvettes utilisées au
laboratoire permet une meilleure dissipation de la chaleur libérée au cours de l’hydratation, ce
qui permet de s’affranchir de cette contrainte. Pour une échéance, la valeur de contrainte
retenue est la moyenne des mesures de contraintes à la rupture obtenue, sur au moins 7
échantillons. La dispersion des mesures a été calculée pour chaque série et est en moyenne
inférieure à 8%.
La préparation des micro éprouvettes est réalisée selon la procédure suivante : la pâte de
ciment est gâchée manuellement pendant trois minutes. Elle est ensuite introduite en plusieurs
étapes dans des moules en téflon qui ont été spécialement confectionnés au laboratoire. Entre
chaque étape, les moules sont vibrés afin de prévenir la formation de bulles d’air, néfastes à
une bonne répétabilité des résultats.
Les moules sont ensuite conservés dans une enceinte à 100% d’humidité pendant trois jours.
Passé ce délai, les micro éprouvettes sont démoulées et mises en cure dans des solutions de
nitrate de sodium (ou potassium) de même concentration en nitrate que les solutions
d’hydratation et saturée en chaux. Ces précautions permettent d’éviter le séchage des pâtes de
ciment ainsi que la lixiviation des nitrates dans la solution de cure.
Avant chaque essai, une rectification des faces par polissage est effectuée de manière à
obtenir un parallélisme parfait entre les faces de l’échantillon65.
65
Boulay, C., Le Maou, F., and Renwez, S. (1999). "Quelques pièges à éviter lors de la détermination de la
résistance et du module en compression sur cylindres de béton." Bulletin des laboratoires des Ponts et
Chaussées, 220, 63-74.
- 118 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
II.1.c. La presse
Une presse mécanique a été utilisée pour réaliser les essais en compression. Cet appareil,
conçu et développé au laboratoire par Jean-Philippe Pérez, est spécialement adapté pour la
mesure des contraintes à la rupture de micro éprouvettes de pâte pure ou de mortiers. Elle est
équipée d’un capteur de force dont la limite d’utilisation est fixée à 500 daN. Les essais ont
été réalisés avec une vitesse de montée de contrainte constante de 0,25 MPa.s-1. Une
photographie de l’appareillage est présentée sur la Figure 64.
Les résistances à la compression ont été mesurées sur des pâtes de ciment hydratées avec des
solutions de gâchage préparées à partir de phosphate et nitrate de sodium et de phosphate et
nitrate de potassium. Les caractérisations à la rupture ont été effectuées aux échéances de 3, 7,
- 119 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
14, 28 jours et 3 mois avec la presse présentée au paragraphe précédent. Les résultats obtenus
sont présentés sur la Figure 65 pour les pâtes de ciment gâchées avec les solutions de
phosphate et de nitrate de sodium et sur la Figure 66 pour les pâtes gâchées avec les solutions
de phosphate et nitrate de potassium.
L’analyse des résultats montre qu’au bout de trois mois, l’ensemble des échantillons a atteint
une résistance qui semble stabilisée. La comparaison des différents cas étudiés conduit à
plusieurs remarques :
- Les pâtes de ciment hydratées avec de l’eau présentent les contraintes à la rupture les
plus élevées quelles que soient les échéances.
- Dans le cas où les pâtes de ciment sont hydratées avec les solutions phosphate /
nitrate, l’augmentation de la concentration en phosphate ralentit le durcissement. A
titre d’exemple, les pâtes de ciment hydratées avec les solutions de concentration en
phosphates 50 g.L-1 présentent à toutes les échéances les contraintes à la rupture les
plus faibles (50% de réduction par rapport à la pâte de ciment référence).
- 120 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Les résultats sont présentés Figure 67. Ils montrent aux incertitudes près que dans ces
conditions, la présence d’hydroxylapatite n’influe pas sur les résistances à la compression.
120
contraintes à la rupture / MPa
100
80
60
40
référence 300 g/L nitrate de sodium
10 g/L 20 g/L
20 30 g/L 40 g/L
50 g/L
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
échéances / jours
Figure 65 : Evolution des contraintes à la rupture pour des pâtes de ciment hydratées
avec des solutions de différentes concentrations en phosphate et nitrate de sodium
(e/c=0,3).
120
contrainte à la rupture / MPa
100
80
60
40
référence 300 g/L nitrate de potassium
10 g/L 30 g/L
20
40 g/L 50 g/L
0
0 20 40 60 80 100
échéance / jours
Figure 66 : Evolution des contraintes à la rupture pour des pâtes de ciment hydratées
avec des solutions de différentes concentrations en phosphate et nitrate de potassium
(e/c=0,3).
- 121 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
140
120
contrainte à la rupture / MPa
100
80
60 référence
avec hydroxylapatite
40
20
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
échéance / jours
Figure 67: Evolution des contraintes à la rupture pour des pâtes de ciment hydratées
avec de l’eau et dont l’une des pâtes a été additionnée d’une certaine quantité
d’hydroxylapatite (e/c=0,3).
Un suivi des contraintes à la rupture identique à celui effectué sur les pâtes de ciment a été
réalisé sur des micro éprouvettes de mortiers. Dans le but d’étudier l’influence des grandes
concentrations en phosphates, cette étude a été uniquement réalisée avec le système complexe
phosphate de potassium / nitrate de potassium qui présente une solubilité permettant
d’atteindre des valeurs de concentrations élevées (80 g.L-1) contrairement au système
complexe phosphate de sodium / nitrate de sodium. La composition des micro éprouvettes de
mortiers (Tableau 20) est identique à celle des éprouvettes dont nous avons suivi l’évolution
des variations dimensionnelles (partie suivante). Cette formulation a été retenue en raison de
sa proximité avec celle du matériau d’enrobage du concentrât réel.
- 122 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Masse de sable de
Masse de ciment / g Fontainebleau / g Rapport liquide sur solide
(granulométrie 0-300 µm)
1000 374 0,35
Les résultats des mesures de contraintes à la rupture obtenus sur les éprouvettes de mortiers
sont présentés Figure 68. Ils présentent la même évolution que ceux obtenus sur pâtes de
ciment : les mortiers hydratés avec de l’eau détiennent les résistances les plus fortes et
l’augmentation de la concentration en phosphates dans les solutions de gâchage conduit à
réduire continûment les performances mécaniques. Il est important de souligner que les très
fortes concentrations en phosphate réduisent considérablement la résistance des mortiers. Ces
résistances sont diminuées de plus de la moitié par rapport à la référence pour des
hydratations avec une concentration en phosphate de 50 et 80 g.L-1.
Les éprouvettes hydratées avec une forte concentration en nitrate de potassium présentent
elles aussi des résistances plus faibles que les éprouvettes références. Nous pouvons donc
penser que l’addition de ce sel contribue à affaiblir les résistances mécaniques.
80
70
contraintes à la rupture / MPa
60
50
40
30
20
référence 300 g/L nitrate de potassium
10 10 g/L 20 g/L
50 g/L 80 g/L
0
0 5 10 15 20 25 30
echéance / jours
Figure 68 : Evolution des contraintes à la rupture pour des mortiers de ciment hydratés
avec des solutions de différentes concentrations en phosphate et nitrate de potassium
(e/c=0,35).
- 123 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
Après avoir mesuré les résistances mécaniques des micro éprouvettes de pâtes de ciment et de
mortiers à différentes échéances, nous avons déterminé leur avancement réactionnel respectif.
Ces derniers ont été estimés par thermogravimétrie à partir de la quantité de portlandite
contenue dans les différents échantillons après broyage66. Cette opération a été réalisée
immédiatement après la mesure des contraintes à la rupture et sans aucun traitement préalable
de manière à obtenir des résultats comparables sans intervention de produit extérieur destiné à
bloquer l’hydratation.
Dans la littérature, la décomposition de l’hydroxyde de calcium intervient pour des
températures comprises entre 425 et 550°C66. Dans le contexte de notre étude, la quantité de
portlandite précipitée à une échéance précise a été déterminée à partir des thermogrammes de
la façon suivante :
Les bornes du domaine de déshydratation de la portlandite ont été fixées grâce à la courbe
dérivée de la perte de masse (Figure 69), au début et à la fin du deuxième pic correspondant à
ce phénomène. La marge d’erreur sur la mesure de perte de masse due à la déshydratation de
la portlandite a été estimée en répétant la mesure quatre fois sur le même échantillon et
conduit à une erreur inférieure à 5 %.
Remarque : Il existe d’autres méthodes (comme celle de l’eau liée) pour déterminer
l’avancement réactionnel d’une réaction d’hydratation d’un matériau cimentaire. Celle que
nous avons utilisée n’est sans doute pas la plus précise et pourrait être discutée. Néanmoins,
elle donne une idée correcte de l’évolution générale de l’avancement réactionnel.
66
Taylor, H. F. W. (1997). Cement Chemistry, London.
- 124 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
-100
-150
-2
-200
-250
0 100 200 300 400 500 600
température / °C
Les avancements réactionnels des différentes pâtes de ciment hydratées avec le système
complexe phosphate de sodium / nitrate de sodium ont été estimés à partir de leur pourcentage
de portlandite. Les résultats de ces mesures sont présentés Figure 70. Ils indiquent clairement
que les pâtes de ciment gâchées avec l’eau uniquement présentent les taux d’hydratation les
plus élevés à chaque échéance. Les échantillons hydratés avec les solutions complexes
phosphate / nitrate présentent des taux d’hydratation décroissants avec l’augmentation de la
concentration en phosphate. Compte tenu de l’évolution des contraintes à la rupture avec
l’augmentation de la concentration en phosphate exposée au paragraphe II.2.a, ces résultats
sont en parfaite cohérence. Ils indiquent que la diminution des résistances mécaniques peut
s’expliquer en partie par un avancement réactionnel plus faible.
- 125 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
12
pourcentage de portlandite / %
11
10
7 témoin NaNO3
10 g/L 20 g/L
6 30 g/L 40 g/L
50 g/L
5
0 5 10 15 20 25 30
échéance / jours
Néanmoins, une remarque importante s’impose : le pourcentage de portlandite mesuré sur les
micro éprouvettes de pâte pure hydratées avec de l’eau uniquement est très supérieur à ceux
relevés sur les micro éprouvettes hydratées en présence de sel. Cette différence est bien plus
importante que ce à quoi nous pouvions nous attendre compte tenu des différences observées
sur les contraintes à la rupture de ces mêmes échantillons. Il apparaît donc clairement que la
présence de sel a une influence non négligeable sur les quantités de portlandite précipitée. Il
ne faut donc pas voir dans ces résultats des mesures absolues mais plutôt une tendance
représentative de la réalité.
De la même manière que nous l’avons fait pour les pâtes de ciment, les avancements
réactionnels des éprouvettes de mortiers ont été déterminés par analyse thermogravimétrique.
Les résultats des mesures sont présentés Figure 71. Bien que le nombre d’échantillons soit
réduit, les résultats obtenus sont dans la continuité de ceux obtenus avec les pâtes de ciment.
Il apparaît clairement que les éprouvettes hydratées avec les solutions complexes phosphate /
- 126 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
nitrate de concentration croissante en phosphate présentent, pour une même échéance, les
avancements réactionnels les plus faibles. Ces résultats sont également en cohérence avec
l’évolution des résistances à la compression présentée au paragraphe II.2.b.
7
reference
pourcentage de portlandite / %
20 g/L
6 50 g/L
80 g/L
2
0 5 10 15 20 25 30
échéance / jours
II.4. Conclusion
- 127 -
III. Influence du système complexe phosphate / nitrate sur l’hydratation et les propriétés
mécaniques des pâtes de ciment
concentration étudiée, n’est pas susceptible de faire diminuer les résistances mécaniques en
dessous de la limite de 8 MPa requise pour la matrice d’enrobage des concentrâts.
- 128 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
Avant de présenter les résultats obtenus, nous allons commencer par détailler le mode de
préparation des éprouvettes ainsi que le dispositif de suivi des variations dimensionnelles.
- 129 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
gâché à l’aide d’un malaxeur. Il a ensuite été coulé dans des moules pouvant contenir trois
éprouvettes puis vibré après remplissage, pour prévenir la formation de bulles d’air. Les
éprouvettes sont ensuite recouvertes d’une plaque de verre et conservées en chambre humide
pendant trois jours avant d’être démoulées. Le suivi de leur dimension débute le jour même
du démoulage après installation des éprouvettes dans leur cellule respective. Deux séries de
suivis ont été opérées à une année d’intervalle. Elles ont duré entre 2 et 3 mois suivant les cas.
L’évolution des variations dimensionnelles des éprouvettes de mortiers a été suivie à l’aide
d’un dispositif particulier conçu et réalisé au C.E.A.. Il permet de suivre l’évolution des
dimensions de manière continue et non de manière occasionnelle comme c’est le cas dans la
plupart des laboratoires. L’avantage principal de ce montage est de pouvoir détecter les
comportements rapides et inattendus dans l’évolution des dimensions et qui ne pourrait l’être
avec le type de suivi occasionnel généralement effectué.
- 130 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
Le dispositif se présente en deux parties. La première est constituée d’une cellule munie d’un
plot de soutien destiné à recevoir l’éprouvette. Cette cellule est hermétiquement close et peut
être remplie de liquide (l’eau par exemple). Au cours de notre travail, le volume d’eau utilisé
pour la conservation des éprouvettes sous eau a toujours été de 700 ml. La seconde partie se
compose du capteur de déplacement ainsi que du système d’acquisition des mesures auquel il
est relié. La Figure 72 représente une photographie des montages utilisés.
Compte tenu du nombre limité de cellules permettant un suivi en continu des variations
dimensionnelles d’éprouvettes de mortiers, nous n’avons pu réaliser une étude systématique
pour toutes les concentrations en phosphate avec les différents systèmes phosphate / nitrate
dans toutes les conditions de conservation. Nous avons donc dû faire des choix entre les
éprouvettes conservées sous eau et celles conservées sous air et avec quelles solutions
d’hydratation. La première série de suivis ayant donné des résultats plus intéressant avec le
mode de conservation sous eau, les expériences avec conservation sous air ont donc été
limitées lors de la deuxième campagne expérimentale.
Dans ce premier cas, nous avons choisi de suivre l’évolution dimensionnelle d’éprouvettes de
mortiers hydratées en présence de nitrate de sodium ou de nitrate de potassium. Les
concentrations en nitrate utilisées sont de 300 g.L-1, ce qui correspond à 3,52 mol.L-1 pour le
nitrate de sodium et 2,97 mol.L-1 pour le nitrate de potassium. Les courbes de variations
dimensionnelles obtenues dans ces deux cas ainsi que la courbe de l’éprouvette référence sont
présentées Figure 73. Elles mettent en évidence dans les trois cas un retrait (allongement
négatif) des éprouvettes de mortier au cours du temps. Nous remarquerons que les retraits ne
sont toujours pas stabilisés au bout de trois mois de suivi, ce qui suppose que le phénomène se
poursuive encore quelques semaines. De plus, il apparaît que ce retrait n’a pas la même
- 131 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
importance suivant la solution d’hydratation utilisée. L’éprouvette hydratée avec le nitrate de
sodium présente le retrait le plus faible. L’échantillon référence présente lui un retrait
intermédiaire tandis que celui hydraté avec le nitrate de potassium présente le retrait le plus
important.
0
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 80
allongement dl/L0 / µm.m-1
-200
-400
-600
-800
référence
-1000 NaNO3 300 g/L
KNO3 300 g/L
-1200
-1400
Le choix des solutions d’hydratation des éprouvettes de mortiers pour le suivi des variations
dimensionnelles conservées sous air s’est porté sur les solutions complexes phosphate de
sodium / nitrate de sodium et phosphate de potassium / nitrate de potassium, toutes les deux
avec une concentration en phosphate de 50 g.L-1. Ce choix a été motivé par le fait que nous
voulions observer un effet éventuel de la concentration en phosphate (d’où une concentration
en phosphate suffisamment élevée) et éventuellement un effet dû à la nature des contre ions
associés au phosphate et au nitrate. Les courbes des variations dimensionnelles associées à ces
deux cas sont présentées Figure 74. Elles montrent que l’éprouvette référence présente le
- 132 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
retrait le plus faible tandis que l’éprouvette hydratée avec la solution complexe phosphate de
potassium / nitrate de potassium présente le retrait le plus fort. Il existe par ailleurs une
différence importante de retrait entre les éprouvettes hydratées avec les deux systèmes
complexes. Un retrait plus important est observé sur l’éprouvette hydratée avec le système
complexe au potassium tout comme il l’avait été en présence de nitrate de potassium seul
(voir paragraphe précédent).
200
temps / jours
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80
allongement dL/L0 / µm.m-1
-200
-400
-600
-800
-1000
référence
-1200 Na3PO4 / NaNO3 50 g/L
K3PO4 / KNO3 50 g/L
-1400
III.1. Cas des éprouvettes hydratées avec des sels de nitrate alcalin
Le même type d’expériences qu’au paragraphe précédent a été réalisé en conservant les
éprouvettes de mortiers dans des solutions de cure d’eau distillée (700 mL). Cette fois ci, cinq
éprouvettes ont été suivies. Parmi elles, une éprouvette référence hydratée avec de l’eau, deux
éprouvettes hydratées avec une même concentration molaire de nitrate de sodium et de nitrate
- 133 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
de potassium (2 mol.L-1) et deux éprouvettes hydratées avec une concentration massique de
300 g.L-1 (concentration molaire : 3,52 mol.L-1 pour le nitrate de sodium et de 2,97 mol.L-1
pour le nitrate de potassium). Les résultats obtenus sont présentés Figure 75.
Dans les cinq cas étudiés, les éprouvettes de mortier présentent un gonflement (allongement
positif). Ce gonflement présente deux périodes. Une première période, très brève,
correspondant aux premières heures d’immersion dans la solution de cure et qui indique un
gonflement rapide de toutes les éprouvettes (environ 80 µm.m-1 en quelques heures). La
seconde période concernent le reste du temps où les gonflements augmentent de manière plus
lente mais différente suivant les concentrations molaires en sels des solutions d’hydratation.
En effet, les résultats montrent que plus les éprouvettes sont hydratées avec une solution
concentrée, plus leur gonflement est important. Nous pouvons également remarquer que les
gonflements sont identiques lorsque les concentrations molaires en nitrate de sodium et en
nitrate de potassium sont les mêmes (2 mol.L-1).
700
référence
NaNO3 2 mol/L
600 KNO3 2 mol/L
KNO3 2,97 mol/L
allongement / µm.m-1
400
300
200
100
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80
échéance / jours
Figure 75 : Evolution des variations dimensionnelles pour des éprouvettes de mortiers
conservées sous eau et hydratées avec différentes concentrations de nitrate de sodium ou
de nitrate de potassium.
Remarque : Il existe une différence de bruit de fond entre les différentes courbes présentées.
Cette différence est due au fait que deux campagnes expérimentales ont été réalisées à une
année d’intervalle dans des conditions légèrement différentes. Les éprouvettes ayant été
conservées dans deux salles différentes dont l’une était climatisée, l’autre non. L’amplitude
- 134 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
du bruit de fond sur certaines courbes s’explique par les variations de température entre le
jour et la nuit.
Dans le cas des éprouvettes hydratées avec différentes solutions contenant des ions ortho
phosphate et conservées sous eau, plusieurs cas de figure ont été étudiés. Nous avons dans un
premier temps comparé l’évolution des variations dimensionnelles d’éprouvettes de mortiers
hydratées avec les deux solutions complexes phosphate / nitrate (sodium et potassium) de
concentration en phosphate de 50 g.L-1 avec une éprouvette hydratée avec une solution de
phosphate de potassium uniquement et de même concentration en phosphate (Figure 76).
900
800 référence
Na3PO4 / NaNO3 50 g/L
700 K3PO4 / KNO3 50 g/L
allongement dL/L0 / µm.m-1
K3PO4 50 g/L
600
500
400
300
200
100
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80
-100
temps / jours
Cette comparaison a permis de montrer que l’éprouvette hydratée avec la solution complexe
phosphate de sodium / nitrate de sodium présente le gonflement le plus important, suivie par
- 135 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
celle hydratée avec la solution complexe phosphate de potassium / nitrate de potassium et
enfin de celle hydratée avec le phosphate de potassium uniquement. Nous constatons ici
encore que les éprouvettes hydratées avec les solutions les plus concentrées en sel présentent
les gonflements les plus importants ; ce qui est à rapprocher des résultats des gonflements
obtenus avec les éprouvettes hydratées avec des concentrations croissantes en sel de nitrate
(paragraphe III.1).
Cette série de suivis a également permis de mettre en évidence un phénomène intervenant dès
le premier jour suivant la mise des éprouvettes en solution de cure. Nous avons pu observer
après un gonflement rapide dans les premières heures suivant la mise en solution, un retrait
des éprouvettes lorsque celles-ci sont hydratées avec des solutions contenant des ions ortho
phosphate ; retrait qui n’est ni observé sur l’éprouvette référence ni sur celles hydratées avec
les solutions ne contenant que des sels de nitrates alcalins (Figure 77). Nous pouvons
également remarquer que ce retrait est plus important dans le cas de l’hydratation avec la
solution complexe phosphate / nitrate dont le contre ion est le potassium.
200
référence
Na3PO4 / NaNO3 50 g/L
150 K3PO4 / KNO3 50 g/L
allongement dL/L0 / µm.m-1
K3PO4 50 g/L
100
50
0
0 5 10 15 20
-50
temps / jours
Dans un deuxième temps, nous avons suivi l’évolution des variations dimensionnelles
d’éprouvettes dont nous avons fait varier la concentration en phosphate dans les solutions
- 136 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
d’hydratation complexes phosphate de potassium / nitrate de potassium de salinité constante
300 g.L-1 (Figure 78).
800
K3PO4 / KNO3 30 G/L
700
K3PO4 / KNO3 50 g/L
500
400
300
200
100
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80
-100
temps / jours
L’évolution des courbes de variations dimensionnelles montrent une nouvelles fois que plus
les solutions d’hydratation sont chargées en nitrate alcalin, plus les éprouvettes ont un
gonflement important. En effet, les solutions les moins concentrées en phosphate sont celles
les plus concentrées en sel alcalin. De plus, nous retrouvons dans ces différents cas le retrait
initial des premiers jours observés ci-dessus lorsque les solutions d’hydratation contiennent
des ions ortho phosphate. A la vue des résultats, le retrait semble augmenter avec la
concentration en phosphate initiale.
IV. Discussion
Dans des systèmes tels que les mortiers de ciment, le retrait du matériau au cours du temps
peut être lié à la conjugaison de plusieurs paramètres. Les mortiers de ciment étant des
- 137 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
matériaux poreux dont une partie de ces pores est remplie de solution, il existe des tensions
capillaires qui apparaissent en limite des phases liquide et vapeur. Ces tensions ont
naturellement tendance à augmenter au fur et à mesure que la solution contenue dans les pores
est consommée par l’hydratation du ciment. Cette consommation de solution fait en effet
déplacer le front des tensions capillaires des plus gros pores vers les plus petits, ce qui à pour
effet de faire augmenter ces tensions capillaires et donc de provoquer un retrait progressif du
matériau. Ce phénomène est généralement appelé retrait endogène. L’importance des tensions
dépendant de la taille des pores, l’importance des retraits sera également fonction de la
microstructure initiale du matériau.
Dans le cas des éprouvettes hydratées avec des sels de nitrate alcalin uniquement,
l’augmentation de la salinité des solutions d’hydratation va engendrer une augmentation de la
tension liquide-vapeur et augmenter l’importance des forces capillaires ce qui toutes choses
étant égales par ailleurs devrait conduire à un retrait plus important en présence de sel qu’en
leur absence. Or, les observations faites ne confirment pas cette prédiction dans le cas de
l’hydratation en présence de nitrate de sodium. L’hypothèse d’une erreur expérimentale peut
être écartée compte tenu que cette expérience ainsi que l’expérience référence ont été
doublées et donnent des résultats comparables. L’évolution des retraits des différents
échantillons ne peut donc pas s’expliquer uniquement par l’augmentation des tensions
capillaires liées à l’augmentation de la salinité des solutions d’hydratation. Il est donc
fortement probable que cette évolution soit également liée à la structuration du matériau en
fonction des solutions d’hydratation utilisées. Ces structures n’ont pu être déterminées avec
les moyens que nous possédons. Même si la technique de porosimétrie par intrusion de
mercure permet d’estimer la porosité ainsi que la taille d’entrée des pores, elle ne permet pas
d’en avoir une idée structurale suffisante.
Les expériences réalisées avec les éprouvettes hydratées avec les solutions complexes
phosphate / nitrate ont montrées quant à elles un retrait supérieur à ceux observés en présence
de nitrate uniquement. La substitution d’une partie des sels de nitrate par des sels de
phosphate a donc eu pour effet de favoriser le retrait des éprouvettes. Ceci suggère que les
ions ortho phosphates initialement présents dans les solutions de cure et qui ont dû précipiter
sous forme de phosphate de calcium comme nous l’avons suggéré dans les parties précédentes
puissent provoquer une augmentation des tensions capillaires à l’intérieur des éprouvettes.
- 138 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
Nous pouvons également remarquer que la différence de retrait semble rester constante entre
les deux séries d’expériences avec et sans phosphate (∆=500 µm.m-1). Il est donc probable
que l’addition de phosphate favorise le retrait du matériau et que cet effet soit additif à celui
engendré par les sels de nitrate.
Pour plus de clarté, nous commencerons par discuter des éprouvettes hydratées avec des
solutions uniquement concentrées en sels alcalins avant d’en venir à celles hydratées avec des
ions ortho phosphate.
Nous avons observé précédemment que plus les solutions d’hydratation des éprouvettes
étaient concentrées en sels et plus le gonflement était important. Nous avons également
remarqué que l’immersion en solution de cure des éprouvettes hydratées avec une même
concentration molaire mais avec deux sels différents (nitrate de sodium et nitrate de
potassium) occasionne un gonflement identique ; ce qui suggère que le gonflement soit
davantage lié à un effet de concentration qu’à un effet spécifique des ions introduits.
400 5
Dl/l (µm/m)
350 Dl/l (µm/m)
allongement dL/Lo / µm.m-1
concentration interstitielle
KNO3 2 mol/L 4
en alcalin / mmol.L-1
250
3
200
2
150
100
1
50
0 0
0 10 20 30 40 50 60 70 80
temps / jours
- 139 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
Nous avons également pu suivre grâce à une analyse chimique des solutions de cure à
différentes échéances, la lixiviation des ions alcalins (sodium et potassium) contenus dans les
éprouvettes vers les solutions de cure ; ces ions alcalins proviennent des solutions
d’hydratation des éprouvettes (nitrate de sodium ou nitrate de potassium) et de ceux
naturellement contenus dans le ciment sous forme de sulfate alcalin en général. Ce suivi nous
a permis de remonter à l’évolution des concentrations en sels des solutions interstitielles des
différents échantillons après avoir déterminer leur volume poreux par porosimétrie à intrusion
de mercure. Nous avons remarqué que pour une même concentration en sel, l’évolution des
concentrations interstitielles en alcalins étaient très proches (Figure 79). Ces observations
vont également dans le sens d’un effet de concentration plutôt que d’un effet spécifique des
sels alcalins pour expliquer les différences de gonflement des éprouvettes.
La lixiviation des sels alcalins dans la solution de cure s’explique par le gradient de
concentration en sel qui existe entre la solution interstitielle et la solution de cure constituée
initialement d’eau pure. Dès l’immersion des éprouvettes, les ions alcalins vont diffuser en
direction de la solution de cure de manière à équilibrer les concentrations en sels dans
l’ensemble du système.
π=C*R*T (équation 4)
- 140 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
Le calcul des concentrations a nécessité de déterminer le volume poreux des éprouvettes. Ces
derniers ont été estimés par porosimétrie à intrusion de mercure (voir annexe IV). Les
concentrations en alcalins des différentes solutions interstitielles ont été estimées par
différence entre la quantité contenue dans les solutions d’hydratation additionnée de celle
présente initialement dans le ciment et de celles retrouvées dans les solutions de cure. Le
Tableau 21 présente les résultats des calculs des différentes concentrations interstitielles et le
Tableau 22 les valeurs des pressions osmotiques calculées.
- 141 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
700
600
allongement / µm.m-1
500
400
300
200
100
0
0,E+00 1,E+07 2,E+07 3,E+07
différence entre pressions osmotiques interne et externe / Pa
- 142 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
En représentant Figure 80, le gonflement de chaque éprouvette au terme des mesures en
fonction de la différence de pressions osmotiques entre solutions interstitielles et solutions de
cure, il vient que ces deux paramètres peuvent être considérés comme dépendants bien que les
valeurs des différentes concentrations et d’allongement n’aient pas été pris rigoureusement à
l’équilibre final du système. Il est donc très probable que les différences de gonflements
observées entre les éprouvettes hydratées avec des solutions de différentes concentrations en
sel de nitrate alcalin puissent s’expliquer par une différence entre les pressions osmotiques des
solutions interstitielles et des solutions de cure.
Dans le cas où les éprouvettes sont hydratées avec des solutions contenant des ions ortho
phosphate, nous avons mis en évidence un retrait initial sur toutes les éprouvettes dès le
premier jour suivant l’immersion. Ce n’est qu’après ce retrait initial que le gonflement est
observé. A l’instar de ce qui a été observé avec les éprouvettes hydratées uniquement avec les
sels alcalins, le gonflement semble également dépendre de la concentration en sel initiale des
solutions d’hydratation. Compte tenu des deux effets antagonistes (retrait et gonflement), il ne
nous a pas semblé judicieux de représenter pour cette série l’évolution des différences de
pressions osmotiques en fonction de l’allongement.
D’autre part, nous avons remarqué un retrait initial trois fois moins important dans le cas du
mortier hydraté avec la solution complexe au sodium par rapport à celle hydratée avec la
solution complexe au potassium pour une concentration en phosphate identique de 50 g.L-1.
Compte tenu des effets antagonistes de retrait et de gonflement pendant cette période, il est
probable que cette différence soit liée à une compétition entre ces deux effets. Le retrait plus
faible observé avec le système au sodium ne serait dû qu’à un gonflement plus important
engendré par une concentration en sel plus importante.
Pour expliquer le retrait initial observé des éprouvettes hydratées avec des solutions contenant
des ions ortho phosphate, plusieurs hypothèses en cohérence avec ce qui a été dit tout au long
de ce manuscrit peuvent être évoquées.
- 143 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
Hypothèse 1 :
Dans le cas des pâtes de ciment hydratées avec des fortes concentrations en phosphates, nous
supposons fortement la précipitation d’un phosphate de calcium en début de réaction. Dans le
cas où ce phosphate de calcium précipité en début de réaction ne soit pas l’hydroxylapatite
(phosphate de calcium le plus stable) mais soit au contraire un précurseur de celle-ci, alors il
est raisonnable de penser que la transformation de ce précurseur en hydroxylapatite initié par
l’immersion dans l’eau puisse être responsable du retrait observé dans les premières heures
suivant la mise des éprouvettes en solution de cure.
Hypothèse 2 :
Dans la deuxième et la troisième partie, nous avons suggéré que le phosphate de calcium qui
précipite initialement à partir d’une certaine concentration en phosphates soit un précurseur de
l’hydroxylapatite. Nous avons également émis l’hypothèse que la recristallisation de ce
précurseur en hydroxylapatite soit à l’origine des composantes exothermiques précédant la
composante de l’hydratation des silicates pour les grandes concentrations en phosphates
(Figure 54). Dans le cas où ce précurseur serait donc intégralement transformé en
hydroxylapatite avant la mise en solution des éprouvettes, il est probable qu’une désorption
des ions ortho phosphate adsorbés à la surface des particules de ciment puisse se produire
suite à l’arrivée d’eau dans le réseau poreux. La présence d’ions ortho phosphate dans une
solution également riche en calcium conduirait alors à une nouvelle formation d’un phosphate
de calcium qui pourrait être responsable du retrait initial.
Ces deux hypothèses sont également cohérentes avec une dernière expérience de suivi de
variation dimensionnelle réalisée en ensemençant avec des particules d’hydroxylapatite un
mortier de ciment hydraté avec une solution de phosphate de potassium de concentration en
phosphate 50 g.L-1. Cette artifice vise à faire précipiter cette dernière directement sans passer
par un éventuel précurseur. La quantité d’hydroxylapatite que nous avons introduit est la
même que celle censée précipiter à partir d’une solution de phosphate de potassium de
concentration en phosphate 50 g.L-1 et d’un rapport e/c de 0,35. Préalablement, nous avons
vérifier que cet ajout de particules d’hydroxylapatite n’avait pas d’influence sur le gonflement
- 144 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
(Figure 81). La courbe de variation dimensionnelle de l’éprouvette hydratée avec une solution
de phosphate et ensemencée avec des particules d’hydroxylapatite est présentée Figure 82.
160
140
allongement dL/L0 / µm.m-1
120
100
80
60
40 référence
référence + HAp
20
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80
temps / jours
600
K3PO4 50 g/L
K3PO4 / KNO3 50 g/L
500
K3PO4 50 g/L + HAp
allongement dL/L0 / µm.m-1
400
300
200
100
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80
-100
temps / min
- 145 -
IV. Evolution dimensionnelle d’éprouvettes de mortiers conservées dans des milieux étanches
et aqueux
Sur cette figure, Nous pouvons remarque que les deux éprouvettes hydratées sans ajouter
d’hydroxylapatite présentent toutes les deux des retraits initiaux dès la mise en solution de
cure. L’éprouvette hydratée avec un ensemencement initial du mortier en hydroxylapatite,
susceptible d’éviter la formation d’un phosphate de calcium précurseur de l’hydroxylapatite et
d’empêcher l’adsorption des ions orthophosphate comme nous l’avons montré dans la
discussion de la seconde partie, ne présente plus ce retrait initial et part directement en
gonflement. Par conséquent, cette expérience montre que la transformation d’un précurseur de
l’hydroxylapatite en hydroxylapatite est une hypothèse qui peut être envisagée pour expliquer
le retrait initial observé en présence de phosphate mais que l’hypothèse d’une désorption des
ions orthophosphate est loin d’être à exclure. Cette hypothèse est également en accord avec le
fait que la présence initial d’hydroxylapatite dans les mortiers de gâchage n’affecte en rien le
processus de gonflement des éprouvettes conservées sous eau (Figure 81).
- 146 -
Conclusion générale
Conclusion générale
Cette étude avait pour objectif de déterminer l’influence des ions ortho phosphate présents
dans l’eau de gâchage sur la réactivité et sur les propriétés rhéologiques, mécaniques et
physiques des pâtes de ciment Portland. Nous nous sommes plus particulièrement intéressés à
une gamme de concentration en phosphates comprise entre 0 et 50 g.L-1. Cet intervalle
correspond aux concentrations en phosphates susceptibles d’être retrouvées dans les
concentrâts d’évaporation qui sont à l’origine de ce travail. L’ensemble des résultats obtenus a
permis de confirmer et de compléter un certain nombre des résultats exposés dans la
littérature mais il a également permis de proposer des mécanismes associés à l’action des ions
ortho phosphate sur les pâtes de ciment.
Les suivis calorimétriques de l’hydratation de pâtes de ciment Portland hydratées avec des
solutions de concentrations croissantes en ions ortho phosphate a permis de montrer que ces
derniers retardaient de façon non monotone l’hydratation des pâtes de ciment. Deux
phénomènes de nature différente permettent d’expliquer cette évolution discontinue. Nous
avons montré que les retards croissants observés dans la gamme basse des concentrations en
phosphates étaient liés à une adsorption croissante des ions ortho phosphate à la surface des
particules de ciment. Nous supposons que cette adsorption ait lieu sur des sites de dissolution
préférentiels des particules de ciment et qu’elle soit responsable de la diminution de la vitesse
de dissolution de l’alite. Une dissolution plus lente serait alors susceptible d’expliquer les
retards à l’accélération de l’hydratation observés. Au-delà d’une certaine concentration, un
phosphate de calcium précipite en quantité croissante avec l’augmentation de la concentration
en phosphates. Une compétition s’installe alors entre cette précipitation de phosphate de
calcium et le phénomène d’adsorption des ions orthophosphate. Nous avons pu montrer que
cette ‘compétition’ tournait à l’avantage de la précipitation du phosphate de calcium de
manière croissante avec l’augmentation de la concentration en phosphate et expliquait par là
même, la diminution des retards à l’accélération de l’hydratation.
D’autre part, nous avons pu mettre en évidence une influence non négligeable des contre-ions
associés aux phosphates sur les retards observés. A concentration en phosphates identiques,
l’association avec l’ion sodium conduit à des retards plus importants qu’avec l’ion potassium.
- 147 -
Conclusion générale
Lorsque des nitrates alcalins sont ajoutés aux solutions de gâchage de faibles concentrations
en phosphates, un retard plus important à l’accélération est généralement constaté, tandis que
l’inversion du comportement intervient pour des concentrations en phosphates différentes
selon le contre-ion alcalin associé aux différentes espèces. Dans ces conditions, la
précipitation du phosphate de calcium intervient pour des concentrations en phosphates plus
faibles en présence de sodium que de potassium. La présence croissante de chaque contre-ion
semble donc amplifier son effet : augmentation des retards, augmentation de la précipitation
du phosphate de calcium et réduction de la concentration en phosphate pour laquelle il
commence à précipiter pour l’ion sodium tandis que la présence croissante du contre ion
potassium contribue à augmenter la concentration en phosphate de précipitation du phosphate
de calcium. Il apparaît surprenant d’observer une telle influence du contre-ion sodium ou
potassium alors que les expériences de dissolution de silicate tricalcique en suspension diluée
ont mis en évidence le fait qu’ils ne s’adsorbent pas.
Les pâtes de ciment hydratées dans des conditions similaires à celles suivies en
microcalorimétrie ont également été soumises à des tests de rhéométrie dynamique. Ces
expériences ont mis en évidence une discontinuité se produisant pour des concentrations en
phosphates identiques à celles observées lors des suivis de l’hydratation. Le comportement
rhéologique montre un ralentissement de l’augmentation des modules élastiques des pâtes de
ciment aux faibles concentrations en phosphates. Aux plus grandes concentrations, c'est-à-dire
lorsque un phosphate de calcium précipite, les résultats différent suivant le contre-ion alcalin
associé. Toutefois, dans les deux cas une réaugmentation progressive des modules élastiques
avec la concentration en phosphates est observée. En revanche, en présence de sodium, une
augmentation rapide des modules élastiques est observée dès la fin du gâchage alors qu’en
présence de potassium ce phénomène n’apparaît pas. Cette différence de comportement peut
s’expliquer par des vitesses de précipitation différente d’un même précurseur de
l’hydroxylapatite mais pourrait également être attribuée à la précipitation de deux phosphates
de calcium précurseurs de l’hydroxylapatite différents selon le contre-ion alcalin utilisé.
- 148 -
Conclusion générale
- 149 -
Conclusion générale
D’un point de vue pratique, la présence d’ions ortho phosphate dans les effluents est un
paramètre non négligeable à prendre en compte dans la formulation des concentrâts
d’évaporation. Son effet retardateur sur les pâtes de ciment peut être une sécurité en cas de
problème de mise en place mais il peut devenir néfaste pour le rendement en cas de prise trop
lente. De plus, à fortes concentrations la précipitation d’un phosphate de calcium est
inévitable, celui-ci est susceptible d’augmenter la viscosité de la pâte et de poser des
problèmes de transfert dans le conteneur. Néanmoins, la précipitation de phosphates de
calcium peut être également positivée dans le sens où ils acceptent volontiers des espèces
radioactives dans leur squelette, ce qui permettrait une meilleure immobilisation et une plus
grande résistance à la lixiviation.
A l’instar de l’effet de très faibles quantités de molécules organiques telles que les
superplastifiants sur l’hydratation et la fluidité, des quantités très faibles d’ions ortho
phosphate par rapport à la masse de ciment additionnée à l’eau de gâchage peuvent perturber
de manière significative les pâtes de ciment.
- 150 -
Annexes
Annexes
Dans le cadre de notre travail, la rhéologie en mode dynamique nous a permis de suivre
l’évolution de la cohésion des particules de ciment lors de son hydratation en présence de
plusieurs additifs minéraux. Ce paragraphe a pour but d’exposer quelques généralités sur la
rhéologie et de présenter l’appareillage utilisé ainsi que le protocole expérimental suivi. Le
lecteur intéressé trouvera une présentation plus détaillée de cette technique dans de nombreux
ouvrages se référant à ce sujet67,68,69.
Le terme ‘rhéologie’, dérivé du grec ‘rhéô’ qui veut dire couler, désigne la science de
l’écoulement et de la déformation de la matière. Elle a pour objet d’établir les relations qui
existent entre les forces (ou contraintes) appliquées sur un matériau et les déformations ou
vitesses de déformation que celui-ci subit en réponse à ces forces.
67
Barnes, H. A., Hutton, J. F., and Walters, K. (1989). An Introduction to Rheology, Elsevier Science Publisher
B.V., Amsterdam.
68
Couarraze, G., Grossiord J.L. (1991). Initiation à la rhéologie, Paris.
69
Whorlow, R. W. (1992). Rheological techniques, Chischester.
- 151 -
Annexes
L’égalité entre contrainte et déformation s’écrit alors : τ(t) = G*. γ(t), où G* représente le
module complexe.
τ (t ) τ 0 iδ τ 0
G* = = e = (cos δ + i sin δ ) = G '+ iG ''
γ (t ) γ 0 γ0
La partie réelle G’ du module est appelé module élastique, la partie imaginaire G’’ est appelé
module visqueux.
Remarque : Dans le cas d’un solide hookéen, la contrainte est en phase avec la déformation
(δ=0) tandis que dans le cas d’un liquide newtonien, la contrainte est en quadrature de phase
avec la déformation et en phase avec la vitesse de déformation (δ=π/2). Quant au matériau
viscoélastique, son déphasage est comprise entre 0 et π/2, son module G’ traduira le
comportement ‘solide’ du matériau alors G’’ traduira plutôt son comportement ‘liquide’.
- 152 -
Annexes
1,00E+05
1,00E+04
Déformation appliquée
Figure 83 : Evolution du module élastique d’une pâte de ciment au cours d’un balayage
en déformation à deux temps différents. Le module élastique est plus important au bout
de 90 minutes que de 15, mais la déformation critique reste identique.
- 153 -
Annexes
Il existe à titre informatif un troisième type de balayage dit ‘en fréquence’. Il permet de
soumettre le matériau à des déformations d’amplitude constante inférieures à la déformation
critique et de fréquence croissante ou décroissante. Il donne des informations sur la structure
des matériaux et permet par exemple de déterminer le point de gel lors de réaction de
polymérisation. Ce type de balayage n’a pas été utilisé lors de cette étude.
I.3.a. Le rhéomètre
Lors de cette étude, nous avons utilisé le rhéomètre ARES commercialisé par la société
Rheometrics. Ce rhéomètre est dit à ‘déformation imposée’ : c'est-à-dire qu’une déformation
contrôlée est appliqué au matériau et l’appareil calcule ensuite la contrainte résultante à partir
du couple mesuré. Les caractéristiques de ce rhéomètre sont indiquées dans le Tableau 23.
- 154 -
Annexes
capteur
eau
ciment
cuve
ruban
Déplacement angulaire
70
Choplin, L., and Marchal, P. "Mixer-type rheometry for food products." 1st International Symposium on Food
Rheology and Structure.
- 155 -
Annexes
L’analyse de la composition des solutions ainsi que les suivis en continu de l’hydratation de
silicate tricalcique en suspension diluée ont été réalisés à l’aide d’un spectromètre ICP-OES
Inductively Coupled Plasma – Optical Emission Spectrometry. Cet appareil présente
l’avantage de pouvoir doser un large spectre des éléments du tableau périodique avec une très
grande rapidité.
II.1. Principe
- 156 -
Annexes
La cellule est composée d’un réacteur en plastique vissé sur un système de filtration pouvant
recevoir des filtres d’un diamètre de 48 mm. Les filtres utilisés ont une porosité de 0,1 µm, ce
qui permet de retenir l’intégralité des grains de C3S. L’agitation est assurée par une hélice
fixée au centre de la cellule et reliée à un moteur à vitesse variable. La cellule est
hermétiquement close et balayée par un courant d’argon, dérivé de l’alimentation du
spectromètre, pour prévenir la carbonatation de la solution. Une partie de la solution est
aspirée avec une pompe péristaltique et entraînée jusqu’au nébuliseur. Une partie infime est
ensuite dirigée vers la torche tandis que le reste est réintroduit dans la cellule via le drain
d’évacuation. Cette astuce technique permet de garder un rapport liquide sur solide constant
durant le temps de l’expérience.
71
Fourchotte, J. P. (2003). "Mise en oeuvre d'un spectromètre ICP-OES simultané pour l'étude de l'hydratation
de systèmes cimentaires. Application à l'étude de la vitesse de dissolution de phases minérales solubles,"
Université de Bourgogne, Dijon.
- 157 -
Annexes
Les conditions opératoires permettant une utilisation optimale de l’appareillage pour l’étude
des systèmes cimentaires ont été déterminés par J.P. Fourchotte dans le cadre de son stage
d’ingénieur CNAM71. Ces conditions ainsi que les longueurs d’onde des raies utilisées pour
déterminer les concentrations des différents éléments dosés sont rassemblées dans le Tableau
24 et le Tableau 25.
- 158 -
Annexes
Tableau 25 : Tableau récapitulatif des longueurs d’onde des raies utilisées pour la
détermination des concentrations de ces mêmes éléments. Suivant l’importance des
concentrations et la composition des solutions à doser, plusieurs longueurs d’onde
peuvent être utilisées.
Les effets de matrice désignent les effets perturbateurs de solutions chargées en sels sur le
dosage d’éléments mineurs. Ils constituent la principale source d’interférences en
spectrométrie ICP-OES. Pour palier à ce problème, les solutions d’étalonnage sont préparées
avec des concentrations en sel identiques à celles des solutions à doser.
- 159 -
Annexes
modification de la cinétique par des variations de température, cette dernière étant maintenue
constante à 25°C.
Dans le cadre de notre étude, un enregistrement rigoureux des flux thermiques dégagés dans
les premières minutes de la réaction s’est révélé nécessaire. Pour cela, un système particulier
d’introduction de la pâte dans le microcalorimètre a été utilisé. Il se compose d’une canne au
bout de laquelle est fixée une nacelle destinée à recevoir la pâte de ciment préalablement
gâchée. L’ensemble présente l’avantage de pouvoir être descendu au fond de l’enceinte
calorimétrique en réduisant de manière considérable l’échauffement parasite engendré lors de
la mise en place de la canne. La masse de l’échantillon introduit est de l’ordre de un gramme.
thermostat à
bouchon enceintes
multiples
ciment
cuve épaisse
- 160 -
Annexes
0,12
Volume de mercure introduit / mL.g-1
volume
poreux total
0,1
0,08
0,06
0,04
0,02
0
1000 100 10 1 0,1 0,01 0,001
Diametre des pores / µm
Avant d’être introduit dans le porosimètre, les échantillons d’éprouvettes sont gardés sous une
cloche à vide à une température de 50°C pendant 5 jours dans le but d’évacuer l’eau résiduelle
qui n’a pas encore participé à la réaction d’hydratation. Le porosimètre utilisé est le
Micrometrics Autopore III et l’angle de contact mercure / solide est fixé à 130°.
72
Beaudoin, J. J. (1979). "Porosity measurement of some hydrated cementitious systems by high pressure
mercury intrusion- microstructural limitations." Cement and Concrete Research, 9, 771-781.
73
Kumar, R., and Bhattacharjee, B. (2003). "Porosity, pore size distribution and in situ strength." Ibid., 33, 155-
164.
- 161 -
Annexes
5
flux thermique / mW.g-1 de ciment
4
0 g/L 50 g/L
100 g/L 150 g/L
200 g/L 250 g/L
3
300 g/L
0
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000
temps / min
Figure 88 : Evolution des flux thermiques lors de l’hydratation de pâtes de ciment avec
différentes concentrations de nitrate de sodium (e/c=0,3).
5
flux thermique / mWg-1 de ciment
4 0 g/L 50 g/L
100 g/L 150 g/L
200 g/L 250 g/L
3 300 g/L
0
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000
temps / min
Figure 89 : Evolution des flux thermiques lors de l’hydratation de pâtes de ciment avec
différentes concentrations de nitrate de potassium (e/c=0,3).
- 162 -
Annexes
250000
référence 50 gl
chaleur cumulée / mJ.g-1 de ciment 100 gl 150 gl
200000 200 gl 250 gl
300 gl
150000
100000
50000
0
0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 4000 4500 5000
temps / min
Figure 90 : Evolution des chaleurs cumulées pour des pâtes de ciment hydratées avec
différentes concentrations en nitrate de sodium (e/c=0,3).
250000
chaleur cumulée / mJ.g de ciment
200000
-1
150000
100000
référence 50 g/L
100 g/L 150 g/L
50000 200 g/L 250 g/L
300 g/L
0
0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 4000 4500 5000
temps / min
Figure 91 : Evolution des chaleurs cumulées pour des pâtes de ciment hydratées avec
différentes concentrations en nitrate de potassium (e/c=0,3).
- 163 -
Annexes
1800
1600
1400
1200
solubilité / g.L-1
1000
800
600
400
200
0
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
température / °C
- 164 -
Annexes
4
flux thermique / mW.g-1 de ciment
référence
10 g/L
3
20 g/L
30 g/L
40 g/L
2 50 g/L
0
0 1000 2000 3000 4000 5000 6000
temps / min
Figure 93 : Evolution des flux thermiques de pâtes de ciment hydratées avec des
solutions de concentrations croissantes en phosphate de sodium (e/c=0,3).
4
flux thermique / mW.g-1 de ciment
référence
3 10 g/L
20 g/L
30 g/L
40 g/L
2 50 g/L
0
0 1000 2000 3000 4000 5000 6000
temps / min
Figure 94 : Evolution des flux thermiques de pâtes de ciment hydratées avec des
solutions de concentrations croissantes en phosphate de potassium (e/c=0,3).
- 165 -
Annexes
10 g/L 20 g/L
3 30 g/L 40 g/L
50 g/L
0
0 1000 2000 3000 4000 5000 6000
temps / min
Figure 95 : Evolution des flux thermiques de pâtes de ciment hydratées avec des
solutions complexes de phosphate de sodium additionnées de nitrate de sodium avec
différentes concentrations en phosphate (e/c=0,3).
4
référence 300 g/L nitrate de potassium
flux thermique / mW.g-1 de ciment
10 g/L 20 g/L
30 g/L 40 g/L
3
50 g/L 80 g/L
0
0 1000 2000 3000 4000 5000
- 166 -
Annexes
4
référence 300 g/L nitrate de sodium
flux thermique / mW.g-1 de ciment
10 g/L 20g/L
3 30 g/L 40 g/L
50g/L 80 g/L
0
0 1000 2000 3000 4000 5000 6000
temps / min
Figure 97 : Evolution des flux thermiques de pâtes de ciment hydratées avec des
solutions complexes de phosphate de potassium additionnées de nitrate de sodium avec
différentes concentrations en phosphate (e/c=0,3).
- 167 -
Annexes
200000
nitrate 10 g/L
chaleur cumulée / mJ.g-1 de ciment
20 g/L 30 g/L
160000
40 g/L 50 g/L
120000
80000
40000
0
0 1000 2000 3000 4000 5000
temps / min
Figure 98 : Evolution des chaleurs cumulée pour des pâtes de ciment hydratées avec des
solutions de phosphate de sodium de concentrations croissantes additionnées de nitrate
de sodium (e/c=0,3).
250000
pur kno3
chaleur cumulée / mJ.g-1 de ciment
10 g/L 20 g/L
200000 30 g/L 40 g/L
50 g/L 80 g/L
150000
100000
50000
0
0 1000 2000 3000 4000 5000
Figure 99 : Evolution des temps / min chaleurs cumulée
pour des pâtes de ciment hydratées avec des solutions de phosphate de potassium de
concentrations croissantes additionnées de nitrate de potassium (e/c=0,3).
- 168 -
Annexes
250000
nitrate 10 g/L 20 g/L
chaleur cumulée / mJ.g-1 de ciment
30 g/L 40 g/L 50 g/L
200000
80 g/L
150000
100000
50000
0
0 1000 2000 3000 4000 5000 6000
temps / min
Figure 100 : Evolution des chaleurs cumulée pour des pâtes de ciment hydratées avec
des solutions de phosphate de potassium de concentrations croissantes additionnées de
nitrate de sodium (e/c=0,3).
CSHb
Ca2Si2O7H2 + 4H+ + H2O = 2 Ca+2 + 2 H4SiO4
log_k 29.6
delta_h -14 kcal
C1.1SH3.2
Ca1.1SiO6.3H6.4 + 2.2H+ = 1.1Ca+2 + H4SiO4 + 2.3H2O
log_k 16.82
delta_h 0 kcal
Portlandite
Ca(OH)2 + 2H+ = Ca+2 + 2H2O
log_k 22.880
- 169 -
Annexes
K2SO4
K2SO4 = 2K+ + SO4-2
log_k -1.66
delta_h 0 kcal
Syngenite
CaK2S2O8 = Ca+2 + 2K+ + 2SO4-2
log_k -7.44
delta_h 0 kcal
Gypsum
CaSO4:2H2O = Ca+2 + SO4-2 + 2 H2O
log_k -4.59
delta_h -0.109 kcal
-analytic 68.2401 0.0 -3221.51 -25.0627
Ca3SiO5
Ca3SiO5 + 6H+ = H4SiO4 + 3Ca+2 + H2O
log_k 73.867
delta_h -106.335 kcal
Hydroxyapatite
Ca5(PO4)3OH + 4 H+ = H2O + 3 HPO4-2 + 5 Ca+2
log_k -3.421
delta_h -36.155 kcal
- 170 -
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