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Core aat ic cy__ Introduction
a la psychologie
des emotions
Sommaire
| Historique
2 Qu'est-ce qu'une émotion?
3) processus universel ou variations culturelles?
4 Emotion, humeur et tempérament
Dans ce chapitre, vous allez apprendre
A reconnatre le orgies histoiques des conceptions actuelles de émotion
A clstinguer les visions fonctonneles et dysfonctionnelies de témotion
A Gittérencier les approches bioloiques et cgnitives de Iémotion
A éistinguer 'emotion de thumeur et du tempérament16
Chapitre 1 — Introduction 4 la psychologie des émotions
[: Ce premier chapitre a pour but doffrir au lecteur un apercu général de
approche psychologique des émotions. i! ne vise en aucune facon @
exhaustivité. Nous avons plutét voulu extraire de cette vaste littérature
certains éléments essentiels pour la compréhension des chapitres ultérieurs
de cet ouvrage. Nous avons également sélectionné certains faits ou certai-
nnes observations particuligrement frappants. Nous entamerons fexposé
Par un apercu historique de la notion d'émotion*” depuis "Antiquité jusqu’a
Taube du 20 siécle. On est saisi de constater la pertinence de notions
roposées par exemple par Aristote en vue de répondre aux questions les
plus contemporaines que nous nous posons quotidiennement afin de
comprendre le fonctionnement émotionnel. Descartes représente égale-
‘ment un penseur essentiel dans la compréhension de 'émotion. Sion retient
en général de son essai «Des passions de l'ame» la proposition d'un
dualisme entre corps et esprit qui marquera la pensée occidentale jusquié
émergence de la médecine psychosomatique® au milieu du XX* siécle, une
~ lecture attentive révéle une vision beaucoup plus large des choses et qui
intégre les aspects cognitifs de l'émotion & ses compasantes physiologi-
ques et comportementales-expressives*. Darwin et Freud ont également
apporté & la psychologie des émotions une série de propositions fonda-
‘mentales qui sont toujours d'actualité. Avec James, on se situe véritable-
‘ment dla charniére entre la partie historique et fa partie contemporaine des
recherches sur l'émotion, Son «Principles of psychology » paru en 1890
constitue sans doute le premier ouvrage que Ion peut qualifier de stricte-
ment dédié G la psychologie des émotions. Les critiques de Cannon aux
propositions de James permettront de situer deux points de vue opposés
concemant les rapports entre aspects cognitifs et biolagiques de motion.
Dans la suite de ce chapitre, nous tenterons de spécifier la maniére dont les
chercheurs contemporains appréhendent les émotions. Les réponses ne pour-
ront qu’étre succinctes vu ampleur de la question. Des ouvrages récents tels
que celui publié par Oatley et Jenkins en 1996 offrent au lecteur avide a'in-
formations complémentaires une perspective plus exhaustive. Pour notre
art, nous nous limiterons a la présentation de quelques définitions et au
développement de trois notions fondamentales. Tout d’abord, pour étre
comprise de maniére complete, 'émotion doit étre envisagée comme un
systéme a trois composantes qui inclut des réponses physiologiques, compor-
tementales-expressives* et cognitives-expérientielles*. Les perspectives
contemporaines de motion insistent également sur importance de léva-
uation cognitive d'une situation qui déterminera entre autres le type d'état,
émotionnel ressenti et son intensité subjective. Enfin, une émotion est
accompagnée par un état de préparation mentale action qui précéde
directement la mise en ceuvre de comportements d'attaque comme dans la
colére ou de fuite comme dans la peur.
Un débat oppose souvent les tenants d'une approche universelle de ’émotion
suivant laquelle les différents états émotionnels se retrouveraient de maniére
identique a travers les sociétés humaines et ceux qui privilégient une appro-
che différentialiste suivant laquelle le ressenti et expression des émotions
varient en fonction de lappartenance culturelle de lindividu. A défaut de
consensus sur cette question, nous présenterons trois points de vue, l'un en
1. Chaque terme suivi du signe * est défini dans le glossaire en fin de volume,1. Historique
faveur d'une conception universelle des émotions (Ekman), un autre qui
Priviliégie les variations culturelles (Averill) et un troisiéme qui tente de rap-
procher les deux perspectives précédentes (Scherer).
Nous terminerons ce chapitre par la distinction entre les concepts d’émotion,
d'humeur et de tempérament. Différents points de vue seront présentés afin
de clarifier cette question. Nous tenterons d’établir les zones de consensus
entre différents auteurs qui se sont intéressés a cette question (Davidson,
Ekman, Frijda, Lazarus, Watson et Clark). Cette derniére partie permettra
diaffiner la notion d'émotion* par contraste avec des concepts proches, mais al
néanmoins distincts,
1 Historique
1.1 L’Antiquité grecque
Platon (427-358 av. J-C.) est sans le doute le premier penseur dont on
ait conservé des écrits qui offrent une analyse des processus émotionnels. La
vision platonicienne de lémotion est fort négative puisque, selon lui, elle ne
fait que pervertir la raison et 'empéche de se développer de maniére fruc-
tueuse. Cette vision est proche d'une conception naive de l’émotion, toujours
présente de nos jours, suivant laquelle nos passions doivent étre contrdlées et,
maitrisées, La perspective d'Aristote (384-324 av. J-C.) est beaucoup plus
optimiste. L’homme ne subit pas ses états émotionnels comme des manifesta
tions biologiques face auxquelles il se sent impuissant. Au contraire, il cons-
truit un univers émotionnel 4 partir de ses cadres de référence (croyances) et
deses préférences personnelles (attitudes). Dans I'Ethique, Aristote s'intéresse
aux caractéristiques qui perm« de construire des arg suasifs.
Fondateur de la Rhétorique, Aristote tente d'atteindre la vérité par la parole.
est des lors essentiel pour lui d’en savoir plus sur la personne a laquelle on
s'adresse, sur ses valeurs et sur les effets que notre discours peut exercer sur
autrui, Parmi les éléments essentiels retenus pour étre persuasif, deux élé-
ments concernent directement l'univers émotionnel. Tout dabord, on croira
plus volontiers quelqu’un qui touche nos sentiments personnels que quel-
qu'un dont le contenu du discours est uniquement empreint de raison.
Ensuite, on suivra plus volontiers les arguments d'une personne qui semble
présenter des caractéristiques émotionnelles similaires aux nétres. Atteindre
un état d'empathie* avec son audience constitue dés lors une condition
importante pour convaincre du bien-fondé de sa position, Publicitaires et
politiciens semblent dailleurs avoir retenu la lecon ! L’élément primordial
qui demeure de l'analyse des émotions par Aristote concerne la nécessité de
considérer leur dimension cognitive: ce que nous ressentons subjectivement.
dépend en grande partie des choses auxquelles nous croyons et de nos
connaissances personnelles. Son analyse permet également de montrer que
les émotions possédent une valence. II distingue en effet les états qui sont
percus subjectivement comme plaisants ou agréables de ceux qui sont déplai-
sants ou désagréables. Les émotions impliquent également un besoin d'action,18
1.1. Eclairage historique
—
Chapitre 1 — Introduction 4 la psychologle des émotions
La philosophie de Platon et d’Aristote
Disciple de Socrate, laton sestintéressé de nombreuses autres
questions que celle des émotions (comme la vertu, fa connais-
‘sance ou la politique). l voyagea en Egypte et en Sicile avant de
revenir 3 Athénes pour fonder une école, "Académie. Son ceuvre
est constituée d'une série de dialogues entre disciples et adver-
saires de son maitre, Socrate, Cet échange, ou dialectique,
permet de faire émerger, au travers de leurs contradictions,
des idées que es interlocuteurs avaient en eux sans le savoir, de
les faire progresser vers un idéal oi le beau, le juste et le bien
sont des vérités uikimes de Fexistence terrestre et. de fame
humaine. Limputsion qui pousse homme vers Fétre al et le
bien éveille en li le désir de sadonner a la contemplation des
ides, Pour Platon la cialectique représente la démarche a suivre
‘de toute science qui a pour objet Tétre véritable, en opposition
avec la physique qui soccupe uniquement des phénoménes du
monde empirique, Un autre but de Platon est de fire naire dans
le monde une citéidéale, ol ordre de justice sera garant par les
philosophes.
Platon favorise une vision dualiste de fexistence dans
laquelle Time et le corps constituent deux entités:séparées,
‘mais oi Tame domine le corps, Or, "me enfermée dans le corps
‘serait semblable a une maladie. Le but dela vie terestreseraitle
retour de lame a son état originel, Cest'-ire une éme ration-
nelle et dépourvue de sa dépendance au corps et a ses appetits.
decompose Tame en trois parties: la. raison, le courage et les
appétits. La rason, qui est essence divine, doit contribue 8 la
‘sagesse. Le courage appartient au monde des perceptions, dit
se lier et obéir ia yalson fidéal a atteindreestla persévérance.
Enfin, les appétits, que Platon ‘désigne, de maniére imagée
‘comme lecheval rétif par opposition au cheval docile courage)
et au cofiducteur du char (la raison), doivent aussise conformer.
aux demandes dé la raison et par conséquent étre exprimés avec
‘moderation. Sans cesse, thomme se doit d’échapper a la prison.
‘que constitue le monde du sensible et de ses réactions corpo:
relles. Ce monde du sensible ne permet pas de connaissance
‘ral, mais ne fournit qulune opinion incertaine. La vie ideale est
“celle qui est conforme a la raison et a la connaissance pure. Seule
concession au monde rationne, a contemplation des idées eta
beauté. qui leur est conférée sont des activités permises. Dans
‘Cette optique, tout plaisir n’est pas banni, pour autant toutefois:
quill apporte une contribution au bien. La Vie la plus désirable
serait. celle « qui mélange harmonieusement le miel du plaisir et
-Feau simple de la connaissances, Les ceuies de Platon ont.
cexercé une influence considérable su la pensée,autant dans le
‘monde occidental et chrétien que dans le monde istamique.
‘istote naquit a Stagire en Macédoine et fu, pendant vingt
ans, éléve de Paton. Ise vit confer Péducation Alexandre le
Grand et, en 335 av. J-C, il fonda sa propre école a Athénes, le
Aycée, Arstote est tout dabord le premier pilosophe & sinté-
resser aux éléments formels de la fagique. On lui doit, par
exemple, le développement des syllogismes, tel cel répété
cde manire dassique dans tout cours de base: tous les hommes
sont mortals, Socrate est un homme, DONC Socrate est morte,
Contrairement a Paton, aristote ne limite pas le développement.
dela connaissance & la méthode déductive (qui va de Funiversel
‘au particuli ‘connaissance peut aussi procéder par’ induc-
tion, partant de cas inividuels vers des énoncés universels,
De sa métaphysique (ou étude des premiers principes et des
causes premiéres) on tetiendra que tout développement pré-
suppose un but, une fin en soi, Quatre causes permettraient
expiquer les buts :1a cause formelle (tout objet se définit par sa
forme Par exemple, une maison par sn plana cause finale (la
‘maison est fa pour nous protéer des intempéries), la cause
effciente (le moteur de Faction comme les.macons qui vont
effectivement téaliser la maison) et Ja cause matérelle (les
‘matériaux qui constituent la maison) -Aistote sintéresse aussi
aux partitions de Came, qui comprend une partie végétatve (qui
assure la subsistancel, une parte sensible (qui permet 'éprouver
des sensations)-et une pattie rationnelle (qué permet. activité
-intelectuele
Au veau ethique (Cesc lsfondements del inva
“Thomme terdrat par nature vers un bien propre dans leque i
‘trouvera son, accomplissement ‘et cé, grace a des’ activités
‘conformes a la raison, Lexercice de la raison permet a homme
ide découvrir le bonheur et ce, indépendamment des circons-
Kes evtrieues, Latitude éthique Sacquiert grace 3 la pr
que, Le jugement de celui quia déj fexpérience permet donc
“(approche au mieux de'fa vertu. Le contenu de la vertu se
‘aractérise en toutes circonstances par-le juste ‘entre les,
‘extrémes. On cholsra donc le courage par opposition aia licheté
tala témérité ou la générosté par oppostion Tavarce et aa
Drodigalté. est auss! important de noter que contrirement a
Paton, Fthique dAistote nest pas imposée den haut par un.
See elle nait du contact entre hommes Hibs.1. Historique
sous forme de comportements. Ainsi dans la colére, un état émotionnel
fondamental auquel Aristote stest particuligrement intéressé, on observe
souvent une volonté plus ou moins exprimée de revanche. Enfin, les émotions
ressenties face & une situation bien particuliére vont a leur tour affecter les
jugements et les actions que nous entreprenons par la suite. Il montre ainsi
quien plus de posséder des déterminants cognitifs, les motions exercent des
effets sur le fonctionnement cognitif.
1.2. Descartes
Descartes (1596-1650) n'est pas seulement un philosophe, lest également.
unmathématicien et un physicien. A l’époque, il n'est pas rare de voir réuniechez
‘une méme personne une expertise dans des domaines d’apparence sidifférents. Il
réve daailleurs d'édifier une science capable d'unifier toutes les connaissances.
Dans cette présentation, nous nous limiterons & Yexposé des idées qui ont un
rapport directavecle domaine émotionnel, et cea travers un ouvrage qui illustre
parfaitement les conceptions de Descartes, Des passions de I'éme.
Lorsqu’il publie cet ouvrage en 1649, Descartes ne se doute pas que son
‘ceuvre sera considérée quatre siécles plus tard comme une apologie de la
dualité entre le corps et lesprit. Toute la pensée occidentale sera marquée par
cette dualité jusqu’a 'émergence des travaux de Freud, puis de la médecine
psychosomatique®, qui mettent en évidence le-rdl
ques dans’ emergence de troubles somatiques. Descartes affirme que les
émotions «ont lieu» dans la partie pensante de notre étre, a savoir son
ame: « Les perceptions qu’on rapporte seulement a lame sont celles dont on
sent les effets comme en lame méme, et desquelles on ne connait communément
aucune cause prochaine d laquelle on puisse es rapporter; tels sont les sentiments
de joie, de colére, et autres semblables.» (Art. 23 «Des perceptions que nous
Tapportons 4 notre me») En contraste, les sensations corporelles se limitenta
des étatsmotivationnels:< Les perceptions que nous rapportons d notre corps ou
4 quelques unes de ses parties sont celles que nous avons de la faim, dela soif et de
nos autres appétits naturels; & quoi on peut joindre la douleur, la chaleur, et les
autres affections que nous sentons comme dans nos membres, et non pas comme
dans les objets qui sont. hors de nous.» (Art. 24 «Des perceptions que nous
rapportons a notre corps»)
L’me et le corps constituent deux entités séparées qui entretiennent peu de
relations entre elles en vue de lémergence des émotions: «Il n’est pas plus
nécessaire que notre dme exerce immédiatement ses fonctions dans le cceur pour
y sentir ses passions qu'il est nécessaire qu’elle soit dans le ciel pour y voir les
astres.» (Art. 33 «Que le siége des passions n’est pas dans le coeur», Voir
aussi Art. 34 « Comment I’éme et le corps agissent I'un contre l'autre») Cette
suprématie de l'ame sur le corps signifie également pour Descartes que
Yanimal ne ressent, pas d’émotions car, dépourvu d'une ame, celui-ci ne
posséde pas la faculté d'éprouver de maniére subjective les modifications
corporelles et expressives associées 4 une situation émotionnelle.
Comme bon nombre de ses contemporains, Descartes propose une liste d’états
émotionnels qui seraient fondamentaux ou émotions fondamentales: « Mais
le nombre de celles qui sont simples et primitives n'est pas fort grand. (.) On peut20.
CChapitre 1 — Introduction 4 la psychologie des émotions
aisément remarquer quill n'y en a que six qui soient telles; @ savoir: admiration,
Yamour, la haine, le désir, la joie et la tristesse; et que toutes les autres sont
composées de quelques-unes de ces six.» (Art. 69 « Quill n'y a que six passions,
primitives ») Il ajoute que I'intensité et les effets des motions sont déterminés
par la maniére dont nous pensons aux événements qui les ont causées, ce qui
™montre sa préoccupation pour la dimension cognitive de ’émotion.
On trouve chez Descartes de véritables prémices aux notions contemporaines
de l'approche cognitive de 'émotion. Tout d'abord, il souligne ’émergence de
tendances automatiques & réagir par des comportements lorsqu'une situation
émotionnelle apparait. dans notre environnement. Cette notion sera reprise
par les théories contemporaines de 'émotion sous la terminologie de «ten:
dances 4 laction »* (voir plus loin dans ce chapitre): « Car il est besoin de
remarquer que le principal effet de toutes les passions dans les hommes est qu‘lles
incitent et disposent Fame @ voulotr les choses auxquelles elles préparent le corps;
en sorte que le sentiment de la peur Tincite & vouloir fuir, celui de la hardiesse &
vouloir combattre, et ainsi des autres.» (Art. 40 « Quel est le principal effet des
passions ?») Descartes indique ensuite que 'apparition de sentiments* est
précédée par une évaluation cognitive de la situation (voir plus loin dans ce
chapitre): « L'admiration est une subite surprise de ame, qui fait qu’elle se porte
4 considérer avec attention les objets qui lui semblent rares et extraordinaires.
Ainsi elle est causée premiérement par 'impression qu‘on a dans le cerveau qui
représente objet comme rare et par conséquent digne détre fort considéré.»
(Art. 70 «De admiration: sa définition et sa cause »)
Pour Descartes, une fonction importante des émotions concerne leur pouvoir
informatif. En effet, les émotions nous renseignent sur les éléments de notre
existence auxquels nous attachons de limportance. Pour prendre un exemple
contemporain, éprouver de la joie face & 'annonce de la fin de la dictature en
Yougoslavie m‘informe sur le fait que je considére cette nouvelle comme
importante pour moi-méme et pour les valeurs auxquelles je tiens.
Enfin, les émotions possédent comme propriété de pouvoir étre régulées:
«Par exemple, si la colére fait lever la main pour frapper, la volonté peut
ordinairement la retenir; si la peur incite les gens a fuir, la volonté peut les
arréter, et ainsi des autres.» (Art. 46 «Quelle est la raison qui empéche que
YAme ne puisse entigrement disposer de ses passions») Les processus de
régulation ne permettent toutefois pas de contrdler totalement Vapparition
détats émotionnels: « L’ame peut aisément surmonter les moindres passions,
‘mais non les plus violentes et les plus fortes (..). Le plus que la volonté puisse faire
pendant que cette émotion est en sa vigueur, c'est de ne pas consentir d ses effets.»
(Art. 46 «Quelle est la raison qui empéche que 'ame ne puisse entigrement
disposer de ses passions»)
Soulignons qu'une fonction importante des émotions selon Descartes est leur
pouvoir de fixer les souvenirs en mémoire: « Or il est aisé d connaitre que
Tutilité de toutes les passions ne consiste qu‘en ce qu‘eles fortifient et font durer
en Tame des pensées lesquelles il est bon qu’elle conserve, et qui pourraient
facilement sans cela étre effacées.» (Art. 74 «A quoi servent toutes les pas
sions, et & quoi elles nuisent »)
Enfin, Descartes se situe dans la continuité de Platon quand il considére
Témotion avant tout. comme une cause de perturbation du jugement rationnel:1. Historique
SS
1.1 Exemple
xe
La régulation émotionnelle
Par sa maniére de concevoir mentalement une situation émo-
tionnelle, Findvidu peut modifier fintensité et le type détats
émotionnels quil éprouve. La régulation peut aller dans le sens
d'une amplifcation-des.réponses:émotionnelles tout comme
dans le sens de leur inhibition,
Ani face ala perspective de passer un examen oral qui peut
étre vécu comme une expérience-terrfiante, la plupart des
tudiants peuvent en général mettre‘en place’ des’ stratégies
).
La premiére propriété de Thumeur est de moduler le contenu cognitif: Un état
fhumeur particulier va accentuer Vaccessibilité de certains contenus cognitifS
et réduire laccessibilité d'autres. L’humeur constitue en ce sens un mécanisme
essentiel en vue de changer les priorités du traitement de Tinformation. Ces
changements auront des conséquences importantes sils se maintiennent & long
terme. Par exemple, dans un état dhumeur dépressif, les souvenirs d’événe-36 sue
Chapitre 1 ~ Introduction a la psychologie des émotions
a
1.4 Exemple
oe
La plaque de verglas
‘ous roulez paisiblement sur une route de campagne avec des
amis. Le soleil est radieux, la journée sannonce splendide, Les
discussions vont bon train, la soirée de la veil, une bonne blague
uiaitrire tout le monde, avec en prime votre chanson préférée
‘Qui passe & la radio, Malheureusement, nous sommes en hiver et
mmalgré ce soleil, ila plu la velle et gelé fort pendant la nuit.
Soudain, votre voiture glisse sur une plaque de verglas.
Instantanément, cet élément nouveau de l'environnement pro-
voque un sentiment subjectif de peur, accompagné par des
changements physiologiques importants et par un rapide char
‘gement des priorités afin de faire face au danger: vous étiez
perdu dans vos discussions et dans une ambiance feutrée et
détendue, aussitét toute votre attention se concentre sur la
maniére la plus efficace d'immobiliser votre véhicule. La
séquence de réponses produites en réaction a ce changement
soudain et brusque des conditions de environnement est vaste
(palpitations, sueur, gorge nouée, cris, mouvements brusque:
muscles crispés, sentiment de danger, de perte de control
angoisse, de frayeur.Pourtant, quelques fractions de seconde
4 peine se sont écoulées entre le moment oti vous avez apercu la
plaque de verglas et activation de toutes ces composantes de
emotion, Heureusement, vous redevenez maitre de la voiture
‘qui simmobilse, a fenvers, mais toujours sur la chaussée. Vous
serez encore sous le choc de Iémotion pour quelques heures
(voir chapitre 2). Mais d'autres processus stencienchent immé-
diatement. Vous éprouvez un besoin pressant de parler de cet
événement avec vos amis (voir chapitre 4) et tous ls sors, ous
Pensez a cette situation et méme parfos lorsque vous vous y
attendez le moins, en plein mifeu du cours auquel vous assstez
(voir chapitre 3). Vous remarquez aussi que deux de vos amis
semblentbien plus éprouves par ce qui est passé. ls expliquent
duils rravaient aucun contréle sur ce qui se passat contraire-
ment é vous gui, au volant,aviez la possibilité 'éviter faccdent.
Meme sils étaient dans le méme vehicule, cette position de non-
contréle les mettait dans une situation dfférente de la votre.
Enfin, le dernier entre vous, ne manifest que peu de réactions
ete parle pas de ce qui sest passé. Cela ne vous étonne gueére, i
ne réagit jamais beaucoup aux situations émotionnelles (voir
chapitre 6).
ments tristes seront plus facilement accessibles, tandis que les souvenirs
d'événements joyeux seront moins accessibles (e.g, Teasdale & Fogarty, 1979).
Ensuite, une humeur module les processus cognitifs. Un état dhumeur positif
posséde comme propriété de faciliter la flexibilité des réponses de I'individu,
Face a un probleme complexe et: mis dans un état d’humeur positive, Vindividu
fournira plus de réponses créatives, plus d’associations entre éléments éloignés
sémantiquement, et.développera une perception aignisée des relations entre les
concepts qui lui auront été présentés (eg, Isen, 1987, 1993). Ensuite, un état
dhumeur est en permanence présent en arriére fond de notre fonctionnement
cognitif. L’état d'humeur du moment affecte par conséquent la maniére dont
nous analysons, dont nous pensons, et dont nous agissons face aux situations
quise présentent 4 nous. Enfin, méme si les états d/humeur exeroent des effets a
Jong terme, leur intensité subjective est moindre que les états émotionnels. Par
exemple, le temps affecte notre état d’humeur. Un temps gris, froid, pluvieux
peut produire un état dhumeur dépressif, un jour ensoleillé et chaud peut
induire une humeur positive. Si notre enfant nait par un jour pluvieux, les
émotions positives que ce type d'événement engendre prendront cependant le
dessus sur Fhumeur négative induite par le temps maussade,
Quand un type de réponse se maintient & trés long terme, Davidson propose la
notion de styles affectifs qui font référence aux differences individuelles dans la4, Emotion, humeur et tempérament
maniére de réagir aux situations émotionnelles. Nous reviendrons plus en
détails sur ces aspects dans le chapitres 6. Finalement, il distingue le style
affectif du tempérament qui concerne des différences individuelles qui appa-
raissent de maniére précoce et qui sont sous le contréle de facteurs génétiques.
La part des composantes génétiques dans les traits de personnalité est dés-
ormais acquise et représente une part importante des variations observées
entre individus (eg, Plomin, 1994). La distinction qui était proposée entre style
affectif et tempérament perd par conséquent de sa pertinence & 'heure actuelle.
4.2. Ekman
Diaprés Ekman, le premier critére distinctif entre humeur et émotion
concerne leur durée respective. On parlera d'émotion si les effets durent
quelques secondes ou quelques minutes. Un état d’humeur qualifie des répon-
ses qui se prolongent pour plusieurs heures ou plusieurs jours. Le terme de
trouble affectif désigne des réponses qui se maintiennent pour plusieurs
semaines ou plusieurs mois.
Ensuite, un état d’humeur aurait une influence sur le seuil de déclenchement
motions qui possédent un contenu proche. Dans un état d'humeur irritable,
on se met en colére beaucoup plus rapidement que lorsque notre état d’hu-
meur est gai, Dans un état d'irritation, la personne construit le monde envi-
ronnant d'une maniére qui permet, ou méme incite la réponse de colére.
Parfois, la personne irritée peut méme donner impression qu'elle provoque
des situations qui permettent de satisfaire les Emotions associées 4 son état
“Thumeur. Par exemple, si vous @tes heurté par la voiture qui vous suit un
feu rouge, un état dirritation pré-existant & cet incident risque fort de vous
inciter naturellement & ajouter une remarque provocante a l'égard de Yautre
conducteur. Cette attitude risque 4 son tour de déclencher de la colére de sa
part, ce qui ne fera qu'exaspérer la vétre un peu plus.
Pour Ekman, un état d’humeur interfére avec le processus habituel de régulation
émotionnelle*. On contrélera mieux sa colére sion est dans un état d’humeur
neutre que si on est dans un état d’humeur irritable. Les effets des états
humeur sexerceront a la fois sur Vintensité des réponses émotionnelles (le
ton dela voix, amplitude des gestes, les tendances a l'action), sur les capacités
e contréle (combien de temps allez-vous résister avant que votre colére ne se
manifeste ouvertement?) et sur la vitesse de résorption de l'état émotionnel,
cn dautres termes sur le temps durant lequel cet état se maintiendra
Autre critére distinctif, seules les émotions sont associées a des expressions
{aciales spécifiques, alors qu‘il n’existerait, pas de pattern distinctif pour les
Gats dhumeur. Ce point de vue est. cependant. discutable (voir ci-dessus la
partie consacrée 4 Davidson), Enfin, Ekman postule que les éléments déclen
cheurs de Yémotion sont plus facilement identifiables que ceux de rhumeur.
Cette proposition ne signifie cependant pas que les individus sont conscients
de'événement quia déclenché l’émotion au moment méme, mais au moins ils
peuvent en général identifier, rétrospectivement, la cause de Févénement
Jéclencheur. Par contre, les déclencheurs sont moins clairs dans le cas de
Thumeur. Ils peuvent tout dabord étre de nature biologique, caractérisés par
des changements dans I’état des hormones sécrétées, Ensuite, Ekman propose
wd3 Brenzsaiesmn
Chapitre 1 — Introduction a la psychologie des émotions
1.5 Exemple
Se
Le collégue ou /e supérieur insupportable
Jean est ouvrer spécalisé dans une entreprise métllurgique, Les
horaires sont fatigants, les pauses de nuit étantfréquentes, Le
travail en lu-méme est lourd, il exige une force physique hors du
commun, et puis ce bruit en permanence des containers dacier
en fusion, la chaleur inouie dégagée lorsque ceuci sont ouverts
Tendent le travail encore plus pénible, En plus de ces conditions
diffciles, Albert, un collégue de Jean, rest pas une personne
facile fa pris en grippe et rhésite pas li faire des remarques
désagréables et injusifiées sur la qualité de son travail. Cette
situation le met en colére etl nhésite pas a faire savoir Albert
4uil commence sérieusement & en avoir marre de son attitude
déplacée. Malheureusement, Albert n’est pas du genre
comprendre facilement ce genre de remarques et il persiste
dans son attitude critique. Avant que Fétat de cole de Jean ne
dlisparaisse complétement, Albert en remet a chaque fois une
couche, La répétition de cette situation se traduit par un
changement chez Jean. Fini le temps ot il se fachait & certains
moments bien précis, lorsquil en avait assez des remarques
Albert. Maintenant ila développeé un état humeur irritable qui
se prolonge durant toute la journée de travall Le simple fait
«tre devant sa machine Viste, méme lorsqu Albert ne partage
pas la méme pause que lu,
Imaginons maintenant qu Albert rest pas ecollggue de Jean
‘ais son supérieur higrarchique. Dans ce cas, manifester publi
dquement sa mauvaise humeur aura un risque évident, perdre son
travail Il doit donc inhiber ses réactions de cor, sie supérieur
persiste dans ces remarques désobligeantes, inhibition répétée
de lacolére conduira également. un état d humeurritable dont
les colégues directs de Jean risquent de pati,
a
Ja notion d'expérience émotionnelle dense pour rendre compte de I'émergence
d'un état d’humeur. Selon lui, si une émotion atteint un niveau d'intensité trés
dlevé, de maniére récurrente, avec un intervalle court entre ses périodes
dapparition, un état dhhumeur risque de sinstaller, De méme, inhibition
répétée d'un état émotionnel favoriserait le développement d'un état d’hu
meur négatif (voir encadré « Le collégue ou le supérieur insupportable »).
4.3. Frijda
Pour Frijda, la notion d'intentionnalité se situe au centre des critéres qui
permettent de distinguer émotion et humeur. Une émotion implique toujours la
relation a un objet. précis. On est toujours effrayé PAR quelque chose, faché
SUR quelqu'un ou heureux A PROPOS DE quelque chose. Comme on 'a vu au
préalable, Frijda insiste sur les notions d’évaluation cognitive et de préparation,
a Faction dans sa définition de !'motion. Les états d’humeur peuvent égale-
‘ment étre décrits en fonction de ces concepts, mais ils sont dans tous les cas
dépourvus d'une relation & un objet. Par exemple, une humeur dépressive se
caractérise par des sentiments négatif’ diffus, une absence de buts et une faible
inclination a entreprendre des actions. Méme si émotion et humeur impliquent
des processus différents en termes du degré d'intentionnalité, elles ne différent
cependant pas en termes d'états. Un continuum existe entre les deux notion:
une émotion entraine en effet des changements de l'état d’humeur. Dans ce cas,
les processus correspondant 4 motion et & 'humeur alternent.
Pour Frijda, le tempérament correspond a une tendance stable a évaluer les
événements en accord avec certains patterns d'émotion. Par exemple, le trait4, Emotion, humeur et tempérament
danxiété peut étre interprété comme une tendance considérer des événe-
ments nouveaux ou incertains comme des menaces pour le Soi, ou méme &
considérer des situations familiéres comme nouvelles et comportant des impli
cations incertaines, Les dispositions de personnalité peuvent également étre
considérées comme un abaissement du seuil de réponse caractérisant différen-
tes émotions. Dans c¢ cas, le trait stable danxiété se caractérise par un seuil de
déclenchement réduit pour Vactivation du systéme nerveux autonome.
4.4. Lazarus
Pour Lazarus, un état émotionnel correspond 4 un ensemble de réac-
tions bréves en réponse a certaines caractéristiques de environnement a un
moment donné. On peut dire de quelqu'un qu'il éprouve de la colére un
moment et dans un lieu particuliers. L'émotion est donc considérée comme un
état trés passager qui apparait et disparait suivant les circonstances. Il ajoute
qu'un état émotionnel concerne I'interruption d'un but spécifique, jugé comme
important et qui nécessite une réponse rapide. Cette définition reprend le
concept d'évaluation cognitive ('événement estil est important ou non pour la
personne?) et celui de la focalisation de Vattention qui permet d'activer les
ressources de lindividu en vue de produire des réponses adaptatives.
Par contraste, 'humeur est un état diffs, dont les causes exactes sont
incertaines, mais qui comporte des implications existentielles. Quand notre
humeur est négative, ce n'est pas suite a une situation particuliére que nous
avons rencontrée, mais plutét parce que la vie de maniére générale nous
parait grise, absurde et vide de sens.
On parlera de trait émotionnel lorsqu‘on assiste a une récurrence élevée d'un,
état émotionnel dans des circonstances diverses et qui répondent a certaines
caractéristiques spécifiques. Lorsqu'on évoque une personnalité colérique,
cela n'implique pas que cette personne soit tout le temps en colére. On veut
plutét mettre en évidence le fait que cette persorine se met en colére plus
souvent que la plupart des gens, suite 4 des circonstances plus bénignes et de
maniére plus intense.
Dans le débat qui oppose les tenants d'une explication situationnelle des
réponses émotionnelles 4 ceux qui privilégient leffet de caractéristiques
individuelles stables, Lazarus propose un point de vue de conciliation, Selon,
lui, une émotion n'est jamais uniquement le résultat d'un trait de personna-
Iité* ou d'une propriété de environnement. Elle dépend toujours de la
conjonction de ces deux éléments, Il insiste sur la nécessité d’évaluer soigneu-
sement les relations fonctionnelles et récurrentes qui s’établissent entre les,
variables liées a la personne et celles liées a l'environnement. Cette prise en
compte de ce quill appelle les « relational meaning> le conduit. a définir la
colére comme une agression non justifiée contre le Soi ou la tristesse comme
Texpérience d'une perte irrévocable.
4.5 Watson et Clark
Watson et Clark reprennent la conception contemporaine classique de
Yémotion, & savoir un systéme A trois composantes qui inclut un pattern
3940
Chapitre 1 — introduction a la psychologie des émotions
dexpressions typiques, des changements physiologiques consistants et un
@tat. subjectif distinct en réponse a un type spécifique d’évenement. L'humeur
quant & elle correspond a la composante cognitive expérientielle de lémotion.
Elle posséde également une durée plus conséquente. Enfin, humeur se carac
térise par un champ plus étendu. Sur une journée, le nombre et la durée des
états émotionnels distincts que nous éprouvons sont réduits. Par contre, nous
éprouvons de maniére plus fréquente un ensemble d'états qui correspondent
4 une version atténuée des émotions. Il sagit, pour Watson et Clark, du flot
des sentiments ou « stream of affect ». On peut se sentir en colére a l'une ou
Yautre reprise au cours d'une méme journée. Par contre, un état dirritation
peut persister de manigre quasi continue.
Deux facteurs permettent de rendre compte de ce «stream of affect »
Vaffectivité négative? («Negative Affect» ou NA) et laffectivité positives
(«Positive Affect» ou PA), Laffectivité négative rend compte du degré avec
Jequel une personne est contrariée ou ressent de la détresse. En cas de score
élevé, la personne décrira des sentiments de découragement, de nervosité,
dinsatisfaction, dirritabilité. En cas de score faible, elle se décrira comme
calme et relaxée. L'affectivité positive renvoie au niveau d'enthousiasme et de
plaisir subjectivement ressenti. Un score élevé d'affectivité positive sera
associé au sentiment d’avoir confiance en soi, de déborder d’énergie, et détre
alerte. En cas de score faible, la personne se décrira comme lente, sans énergie,
et peu intéressée par les caractéristiques de son environnement. Ces deux
facteurs se révélent étre indépendants, sauf aux niveaux extrémes, Donc, en
regle générale, le fait d'avoir un score élevé sur la dimension d'affectivité
négative ne présuppose en rien un score faible sur celle d'affectivité positive.
En cas de score trés élevé sur la dimension daffectivité négative, on observe
cependant une tendance a obtenir parallélement un score trés faible pour
Vaffectivité positive.
Watson et Clark définissent ensuite le tempérament comme un ensemble de
dimensions héritables observables dés la naissance. Un exemple classique
concerne les patterns d'attachement®* qui font référence au sens de sécurité
dans une relation (Bowlby, 1969, 1973). Présents dés le plus jeune ge, les
patterns d'attachement persistent 4 l'age adulte. On distingue en général trois
Patterns: assuré, évitant, et ambivalent. Selon Watson et Clark, le champ
application du tempérament est plus large que celui de rhumeur. Tandis que
Vhumeur référe spécifiquement 4 des dimensions affectives, le tempérament
couvre des caractéristiques cognitives et comportementales. Ainsi, Taffecti
vité positive et laffectivité négative représentent des aspects, certes centraux,
du tempérament, mais qui ne recouvrent pas lensemble de cette notion. Par
exemple, laffectivité négative représente un aspect essentiel d’une dimension
de tempérament comme le neuroticisme*. Un score élevé de neuroticisme
implique au niveau affectif de ressentir de maniére subjectivement. plus
intense les situations négatives, indépendamment de leurs caractéristiques
objectives. Mais au-dela de aspect affectif, le neuroticisme implique égale
ment des caractéristiques cognitives comme une propension plus élevée 4 la
rumination, un style d’explications des événements qui privilégie la sphére
négative, et une centration de lattention sur les aspects désagréables de
Yexistence,Emotion
Vitesse de déclenchemement Rapde réponse durgence)
Fréquence apparition Faible
Intensité subjective Forte
Elements déclencheurs Facilement identflabes
Durée Courte(secondes, minutes)
Effet sur Fatention Fort
Effet surfs trois composantes. Physologique: OUI
Comportementale-expressive:
ou
Cogniie-expérentiele: OU
‘Module action (agit pour
répondre &la situation nouvelle)
Proprités
Intentionnalité Présente («Je suis fiché SUR x)
Conclusions
12 parte historique a permis de montrer que des idées émises
s TAntiquit® par certains philosophes se révélentétre part-
culiérement pertinentes dans une analyse contemporaine des
motions. En plus de 2000 ans, les émotions n'ont que peu
2volue,Ressentir dela cole aujourd hui ou au V°siéce av. JC
2 Athénes se manifeste de mani similaire et est causé par une
configuration similare dévénements antécédents, Par exemple,
12 colére que provogue la perception dune injustice est mani-
tée de tout temps. Chez Arstote comme chez Descartes, les
tions dépendent pour une part importante de nos croyances
de nos connaissances. Déj selon eux, ce que nous disons d'un
émotionnel est fe fruit d'une évaluation cognitive de la
Station, Darwin représente quant a lui le courant éthologste
cui caractérise par le souc de observation minutieuse des
mmportements animaux et de leur mise en relation avec les
9onses fournes par les humains. En contraste avec ce point de
wwe, Freud indique que les émotions ne se réduisent pas & des
critiques observables. Le resenti subject, a signification
un événement et son souvenir peuvent étre transformés, voire
cits, La notion de répression, qui est developpée au chapi-
ilustre ce point de vue. De manigre générale, ensemble
Conclusions oA
Humeur . Tableau 1.2
: synthise des caractérstiques de
Lente ‘emotion et de "humeur.
Bleve
Fraible a modérée (impression
diffuse)
Diffcilementidentifables
Longue heures, jours)
Feible
Physiologique: NON
CComportementale-expres
sive: NON
CCognitive-expérentielle: OU!
Module Fe contenu cognitit
(eccessiilté en mémoire);
‘module les processus cognt
tits (créativité,flexbiit)
Absent (Je me sens
Aprimé en général)
de ces conceptions partagent une vision négative de émotion.t
Sagita chaque fois dune reponse dysfonctionnelle, excessive et
‘quill faut controler. Avec James,-on entre dans une vision fonc-
tionnelle de fémotion et dans une conception qui remet 4 parts
gales intervention de la dimension subjective et de la dimen-
sion corporelle de fémotion, Méme si les propositions de James
riont pas toujours recu de support empirique, elles marquent
Tavénement dune psychologie des émotions.
Des definitions proposées, on retiendra dabord que,
dans les perspectives contemporaines de lémotion, on insiste
sur la présence simultanée de trois types de réponse: physio-
logique, comportementale et expressive, cognitive et expérien-
tielle. La composante cognitive/expérientielle reste cependant
weponcévane dla {ois dans une conception naive de (mation
mais également si on considére la part des recherches qui lui
sont dévolues. Dans ce chapitre introductf, nous avons égale-
ment insisté sur le fat que nos émotions sont au centre de notre
vie et pas seulement comme on le pense souvent de notre vie
affective. Nos prises de décision, la manigre de résoudre cer-
taines ditficultés dapparence strictement matérelle et ration-
nelle sont elles aussi influencées par notre état émotionnel.42 z Chapitre 1 ~ Introduction la psychologie des émotions
Face au débat qui oppose les tenants d'une vision
universelle des réponses émotionnelles & ceux qui insistent
plutot sur leurs variations culturelles, il est sans doute prudent,
fen fabsence de consensus sur la question, de considérer les
deux aspects. || convient pour chaque situation dexaminer dans
uelle mesure une perspective peut savérer prépondérante par
rapport une autre, sans qu'une explication ne puisse exchire
Tautre.
Enfin, il convient de distinguer le terme «motion » de
termes proches. Nous avons ainsi montré une série de caracté-
ristques distinctives de emotion et de thumeur. Une émotion
représente une réponse rapide face a une situation d'urgence,
Les émotions se manifestent de maniére relativement peu
fréquente sur une journée, mais leur intensité est élevée, En
contraste, un état dhumeur se met en place plus lentement,
mais il apparait de maniére plus fréquente et plus longue qu une
Emotion et est ressenti de maniere plus diffuse, Lhumeur
riaffecte que les réponses subjectives et provoque des change-
Mots clés
Evaluation cognitive
Humeur
Préparation a l'action
Temperament
Pour en savoir plus
ments modérés dans le contenu et les processus cognitifs en
Cours. Une émotion touche nécessairement le fonctionnement
Physiologique, expressif et expérentil, et provoque des chan
‘gements radicaux dans le contenu et les processus cognitis en
‘cOUrs. Le tempérament fait référence & des composantes hérita-
bles et couvre un champ plus large, qui ne se limite pas aux
aspects affectifs mais implique également les aspects cognitifs
et comportementaux,
Ce chapitre a permis au lecteur dacquérr des connais-
sances historiques/philosophiques et des definitions de base de
Témotion, Le chapitre suivant en vient la distinction proposée
dans Fintroduction entre tenants du stoicisme® et de la cathar-
sis*, savoir opposition entre deux modes fondamentaux de
réactions suite a des événements de nature émotionnelle:
confrontation® et lévitement®. Dans le chapitre 2, on évoque
spécifiquement la nature de ces reponses court terme. Les
cchapitres 3 et 4 se centreront, quant 4 eux, sur les reponses de
confrontation et dévitement quise prolongent a plu lng terme.
Trols composantes (physiologique, comportementale-expres-
sive, cognitive-experientiele)
Variations cutturelles
Vision dysfonctionnelle vs fonctionnelle de Fémotion
Catley, K. & Jenkins, JM. (1996). Understanding emotions. Cambridge, MA : Blackwell, (Chapitre 1, « Approaches to understanding » et
chapitre 4, « What is an emotion? »)
Ekman, P. & Davidson, R,
there basic emotions?
‘constructs? »)
(1994). The nature of emotion: Fundamental questions. New York: Oxford University Press. (Question 1 « Are
Question 2 «How are emotions distinguished from moods, temperament, and other related affective
Strongman, K.T. (1996). The psychology of emotion. Theories of emotion in perspective (4° edition). Chichester : Wiley. (Chapitre 2 « Early
theory»)
Kirowac, G. (1989). Les émotions. Monographies de psychologie. Québec: Presses de l'Université du Québec.
Lelord, F. & André, C. (2001), La force des émotions. Paris: Odile Jacob.
Despret, V. 1999). Ces émotions qui nous fabriquent. Le Plessis Robinson: Institut Synthélabo pour le progrés de la connaissance.
Les revues Cognition and Emotion, Emotion, Emotion and Consciousness,