These Talandier
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Magali Talandier
le 14 décembre 2007
Volume 1
COMPOSITION DU JURY :
Pierre BECKOUCHE, Professeur, Université Paris-I
Laurent DAVEZIES, Professeur, Université Paris-XII
Bernard PECQUEUR, Professeur, Université Joseph Fourier, Grenoble
Philippe PERRIER-CORNET, Directeur de Recherche, INRA
Pierre VELTZ, Professeur, École nationale des ponts et chaussées
2
Remerciements
Ma reconnaissance s’adresse à toutes celles et ceux qui m’ont aidée et soutenue durant
ces quatre années de thèse.
Mes remerciements vont en premier lieu à Laurent Davezies, mon directeur de thèse.
Je tiens à lui exprimer ma profonde gratitude pour ses conseils, ses critiques avisées, sa
disponibilité, son soutien et pour la confiance qu’il a bien voulu m’accorder tout au long de ce
travail.
Ces quatre années m’ont donné l’occasion de travailler avec différentes personnes. Ce
fut à chaque fois un plaisir et une source d’enrichissement. Mes pensées vont à Philippe
Estèbe du bureau d’études Acadie, Emmanuelle Ligouzat et Jacques Savatier de la Poste,
Nicole Rousier du PUCA, les services d’urbanisme et d’habitat des DDE du Vaucluse et de
Lozère, les responsables (et participants) des sessions de formation continue de l’École
Nationale des Ponts et Chaussées et du ministère de l’Équipement, Hervé Gumuchian et
Pierre-Antoine Landel du Cermosem, IGA de Grenoble.
Enfin, je tiens à remercier tout particulièrement Katie, Duong-Minh et Elsa, ainsi que
Sophie, Monique, Michelle, Jean et Jean-Louis pour leurs relectures. Je remercie mon proche
entourage qui aura tout mis en œuvre pour que je puisse me consacrer à ma thèse et faire en
sorte que ce travail arrive à terme.
Sans ces personnes, ce travail n’aurait tout simplement pas été possible.
3
4
Logiciels, fonds de cartes et sigles utilisés
Sigles
AAH : Allocations aux adultes handicapés
ACP : Analyse en composantes principales
ADELE : Administration électronique
AFSSET: Agence française de sécurité sanitaire, de l’environnement et du travail
ANPE : Agence nationale pour l’emploi
AOC : Appellation d’origine contrôlée
AOP : Appellation d’origine protégée
APA : Aides aux personnes âgées
APE : Aides à l’enfance
APH : Aides aux handicapés
APHEIS : Air Pollution and Health : European Information System
ASI : Allocation supplémentaire d‘invalidité
ASV : Allocation supplémentaire vieillesse
BA : Bénéfices agricoles
BIC : Bénéfices industriels et commerciaux
BNC : Bénéfices non commerciaux
BSI : Bassins de services intermédiaires
BTP : Bâtiments et travaux publics
CAF : Caisse d’allocations familiales
CAH : Classification ascendante hiérarchique
CANAM : Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes
CETE : Centre d’études techniques de l’équipement
CLAMEUR : Connaître les loyers et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux
CNAF : Caisse nationale des allocations familiales
CNAV : Caisse nationale d’assurance vieillesse
CNAVTS : Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés
5
CREDOC : Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie
DADS : Déclaration automatisée des données sociales
DATAR : Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale
DCASPL : Direction du commerce, de l’artisanat, des services et des professions libérales
DDE : Direction départementale de l’équipement
DGF : Dotation globale de fonctionnement
DGI : Direction générale des impôts
DIACT : Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires
DREES : Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques
EMS : Emplois métropolitains supérieurs
EPCI : Établissement public de coopération intercommunale
FILOCOM : Fichier des logements par commune
FPE : Fonction publique d’Etat
FPH : Fonction publique hospitalière
FPT : Fonction publique territoriale
GREMI : Groupe de recherche européen sur les milieux innovateurs
HOS : Heckscher-Ohlin-Samuelson
IAA : Industrie agroalimentaire
IDH : Indice de développement humain
IFEN : Institut français de l'environnement
IFOP : Institut français d'opinion publique
IGN : Institut géographique national
IJ : Indemnités journalières
INAO : Institut national des appellations d’origine
INED : Institut national des études démographiques
INRA : Institut national de la recherche agronomique
INSEE : Institut national de la statistique et des études économiques
MIT : Massachusetts Institute of Technology
MSA : Mutualité sociale agricole
NACE : Nomenclature des activités économiques dans la Communauté européenne
NAF : Nomenclature d’activités française
NAP : Nomenclature d’activités et de produits
NEG : Nouvelle économie géographique
NTIC : Nouvelles technologies de l’information et de la communication
OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques
ONU : Organisation des Nations Unies
PAC : Politique agricole commune
6
PACA : Provence-Alpes-Côte d’Azur
PARTHAGE : Portail des agences régionales de l'hospitalisation
PIB : Produit intérieur brut
PUCA : Plan, urbanisme, construction et architecture
RCM : Revenu de capitaux mobiliers
RF : Revenu foncier
RGP : Recensement général de la population
RMI : Revenu minimum d’insertion
RSA : Regional Science Association
SAE : Statistique annuelle des établissements de santé
SAFER : Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural
SAU : Surface agricole utile
SCEES : Service central des enquêtes et études statistiques
SFER : Société française d’économie rurale
SIRENE : Situation au répertoire des entreprises et des établissements
SIRET : Situation au répertoire des établissements
SPL : Système productif local
SYAL : Système agroalimentaire localisé
TGV : Train à grande vitesse
UE : Union européenne
UNEDIC : Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce
USA : United States of America
UU : Unités urbaines
ZAU : Zonage en aires urbaines
ZAUER : Zonage en aires urbaines et aires d’emploi de l’espace rural
ZPIU : Zone de peuplement industriel et urbain
7
8
Sommaire
Remerciements...................................................................................................................... 3
Sommaire .............................................................................................................................. 9
Chapitre 3 - Les approches par la demande. Le territoire support de la population .............. 181
Chapitre conclusif - Quels modèles pour l’étude de la revitalisation des espaces ruraux ? .. 209
9
10
Introduction générale
Pendant plus d’un siècle, les espaces ruraux se sont dépeuplés et se sont repliés sur
leur fonction de production agricole. L’exode rural1 frappa le territoire français dès la fin du
XIXe siècle et se prolongea jusqu’au début des années 1970. Les campagnes auraient perdu
plus de dix millions d’habitants entre 1872 et 1968, soit près de 40% de leur population2. Au
début des années 1970, la désertification des campagnes semble inéluctable et nul n’envisage
que ces évolutions démographiques négatives puissent cesser et s’inverser un jour.
Parallèlement au mouvement d’exode, l’espace rural va renforcer sa capacité de production
agricole dès la fin de la seconde guerre mondiale. La modernisation de l’agriculture accélère
la diminution du nombre d’agriculteurs exploitants et dessine une France rurale coupée en
deux. Dans la moitié Nord de la France, et notamment dans l’Ouest, se développe une
agriculture productiviste pendant que la plupart des espaces ruraux situés dans la moitié Sud
du pays restent condamnés au déclin économique et démographique.
À partir de 1975, les soldes migratoires deviennent positifs dans une partie des espaces
ruraux. Ces communes sont situées à proximité des pôles urbains et bénéficient de la
périurbanisation des personnes et des activités3. Ce desserrement de la population du centre
vers la périphérie permet au rural périurbain de se repeupler, mais ces migrations ne semblent
pouvoir atteindre l’ensemble des territoires ruraux. Reposant sur les navettes domicile-travail,
les migrations des actifs vers les campagnes ne s’observent que dans un rayon relativement
proche des pôles d’emploi. De plus, le contexte empirique et théorique est marqué, dès le
milieu des années 1980, par le processus de polarisation des activités qui ne permet pas
d’envisager un renversement des tendances démographiques dans les espaces ruraux éloignés
des grandes villes.
Pourtant, lors du recensement de 1999, l’INSEE annonce que le rural isolé enregistre
un solde migratoire positif entre 1990 et 1999. L’attractivité de ces espaces, qui regroupent les
communes dont moins de 20% des actifs travaillent dans une aire urbaine et moins de 40%
1
L’exode rural désigne les mouvements de population quittant la campagne pour s’installer en ville.
En France, il est statistiquement considéré comme les mouvements de population quittant une
commune rurale (commune de moins de 2 000 habitants agglomérés, définition INSEE) pour une
commune urbaine. Le retour rural décrit les mouvements inversés (de la ville vers la campagne)
(Merlin, 1971, p.3).
2
Ces chiffres reflètent le solde entre l’exode rural et le retour rural et non, de façon stricte, les
mouvements des campagnes vers les villes.
3
On peut noter que certains espaces ruraux très touristiques du Sud-Est de la France ont enregistré
très tôt des soldes migratoires positifs, comme l’atteste la monographie de Kayser en 1958 sur les
communes rurales de la Côte-d’Azur.
11
dans un pôle d’emploi rural1, constitue probablement l’un des résultats majeurs de ce
recensement. Il devient dès lors difficile d’expliquer l’attractivité de ces communes par le seul
phénomène de périurbanisation comme l’atteste la carte 1b.
Cartes 1a et 1b - Solde migratoire des communes entre (a) 1962 et 1968 et entre (b) 1990 et
1999
Solde migratoire
a) 1962/68 b) 1990/99
Solde migratoire
Négatif
Positif
Source : calculs de l’auteur d’après INSEE, recensement général de la population (RGP) de 1962,
1968, 1990 et 1999.
Ces travaux, dont le cadre théorique général proposé par Krugman (1991) marque la
naissance de la « Nouvelle Economie Géographique » (NEG) permettent d’expliquer la
polarisation des activités sur les territoires, constatée à partir des années 1980. La baisse des
coûts de transport et l’existence d’externalités positives générées par la proximité et la densité
favoriseraient ce processus de polarisation.
1
Voir définition de l’INSEE, précisée dans le premier chapitre de la partie I.
12
Selon ces modèles, les métropoles1 cumulent les avantages comparatifs productifs :
innovation2, meilleur taux de productivité, main d’œuvre qualifiée, flexibilité et optimisation
de l’appariement du marché du travail, externalités de communication et concentration de la
demande (Thisse et Van Ypersele, 1999). Les métropoles sont au cœur des mécanismes de
création de richesse et de croissance3. Selon Beaumont, « la concentration des activités
économiques favorise la croissance économique et donc tous les éléments qui conduisent à la
formation des agglomérations expliquent et conditionnent cette croissance. » (Beaumont,
1998, p.1). Ainsi, « l’agglomération des activités serait la facette territoriale de la croissance
économique. » (Thisse, Van Ypersele, 1999, p.24).
En France, ces mécanismes se traduisent par un accroissement de la capacité
productive de l’Île-de-France. Ainsi, le PIB par habitant de l'Île-de-France dépasse la
moyenne nationale de 52 % en 2006 contre 42 % en 19824. La région capitale représente
27,8 % de la valeur ajoutée nationale en 2006 (27,1 % en 1982).
1
Le terme de métropole désigne, en premier lieu, une grande ville. Pour Lacour et Puissant (1999),
passé le cap des 500 000 habitants, une collectivité urbaine ne peut plus être analysée en termes de
ville, elle acquiert le statut de métropole. La métropole correspond également au lieu où s’observent
les processus cumulatifs mis en évidence par la Nouvelle Économie Géographique. «La métropole se
distingue de la ville en ce que les processus cumulatifs d’agglomération, de concentration et
d’interaction deviennent à un certain stade, quasiment irréversibles.» (Lacour, Puissant, 1999, p.9).
Enfin, la métropole, se définit par ses fonctions politiques, économiques et culturelles.
La métropolisation désigne les dynamiques spatiales d’organisation des territoires autour de la
métropole. Pour Thisse et Van Ypersele (1999), ce terme renvoie également au rôle grandissant joué
par les métropoles dans la croissance économique.
La notion « d’espaces non métropolitains » sera employée dans ce travail pour désigner les petites
villes, les villes moyennes et plus généralement l’espace rural.
2
Aux USA, par exemple, près de la moitié des brevets américains sont déposés dans quatre zones
métropolitaines : Boston, New York, Los Angeles et San Franciso (Thisse, Van Ypersele, 1999).
3
La croissance se définit comme l’augmentation du produit intérieur brut (PIB) en volume (corrigé de
l’augmentation des prix).
4
Les données de 2006 sont issues du site de l’INSEE (www.insee.fr). Les données de 1982 sont
issues de « L'exception territoriale : un atout pour la France » - Rapport d'information n° 241 (2002-
2003) de M. Jean François-Poncet, fait au nom de la délégation à l'aménagement du territoire, déposé
le 3 avril 2003.
5
Le développement peut se définir comme l’amélioration des conditions de vie de la population. Cette
acception repose notamment sur des aspects qualitatifs qui rendent sa mesure plus complexe que celle
de la croissance économique. Appliquée aux territoires, cette notion de développement recouvre
plusieurs acceptions que l’on propose de définir dans la seconde partie de ce travail. Dans ce travail,
on propose de considérer qu’un territoire qui voit ses emplois, son revenu et sa population augmenter
13
régions. Ainsi, les régions les plus denses et les plus productives seraient les mieux équipées
pour créer de la croissance et générer du développement. Cette hypothèse justifie que le PIB
par habitant soit l’indicateur de développement régional choisi par la Commission
européenne1. Le choix de cet indicateur exprime l’idée que les régions qui présentent les plus
forts taux d’accroissement du PIB par habitant sont également celles qui se développent le
plus vite. La croissance induirait le développement. A contrario, les régions dénuées des
atouts métropolitains qui favorisent la création de valeur ajoutée se développeraient moins
vite.
Le lien supposé entre densité, croissance et développement s’illustre dans de
nombreux travaux de chercheurs et institutionnels. Deux exemples peuvent être mobilisés.
La mégalopole européenne de Brunet (1973) constitue le premier exemple. Cette
mégalopole, surnommée « la banane bleue » par les médias, décrit un axe s’étendant du
Lancashire à la Toscane. « Se trouvent là, les plus fortes densités de population et de villes,
les plus fortes productions de valeur ajoutée au kilomètre carré, les plus forts trafics
d’Europe » (Brunet, 2002, p.15). Dépassant la dimension descriptive et analytique que lui
assignait son auteur, la mégalopole devait voir les investisseurs étrangers affluer et connaître
un essor économique intense. En France, la mégalopole inclut l’Alsace, le bassin industriel du
Nord et la Lorraine. L’état socio-économique critique du Nord et de la Lorraine ne semble pas
valider le lien qu’établissent les auteurs de la NEG entre densité, création de valeur ajoutée et
développement.
Le deuxième exemple est celui des emplois métropolitains supérieurs (EMS), concept
proposé par Julien (1994) dans le même esprit que la grille d’analyse des emplois proposée
par Beckouche et Damette (1993). Les EMS désignent les emplois de cadres, d’ingénieurs, de
chercheurs intervenant dans des domaines tels que la banque, la recherche, l’informatique,
l’art, etc. Ces emplois sont surreprésentés dans les aires urbaines. Pour la DATAR, « Les
emplois métropolitains supérieurs constituent ainsi un indicateur pertinent de la connexion
des territoires avec l'innovation et le dynamisme économique. » (DATAR, 2004, p.5).
Indicateur pertinent du dynamisme économique pour la DATAR, il se trouve que les
territoires où progressent et se concentrent ces EMS créent pourtant moins d’emplois que
connaît une dynamique de développement plus favorable que celle d’un territoire où ces trois
indicateurs seraient, au contraire, en diminution.
1
Sur ce sujet, voir par exemple le Deuxième Rapport sur la Cohésion, Commission européenne ou
encore Davezies, Laurent, 2002, « Notes de lecture du Deuxième Rapport sur la Cohésion : Unité de
l'Europe, solidarité des peuples, diversité des territoires », revue Territoires 2020, Mai 2002. Sur les
biais du PIB par habitant voir : Davezies Laurent (1998). « Le PIB régional comme critère unique
d’éligibilité aux fonds structurels : une bouillabaisse avec un seul poisson? » Communication d’après
un rapport EPRC-OEIL au gouvernement portugais - Colloque ATM-CRERI - Europe-Méditerranée :
vers quel développement ? Université de Toulon et du Var. 27-29 mai 1998. Polyg. CRETEIL 11p.
14
d’autres territoires. «La croissance des EMS est plus importante pour les 78 aires urbaines de
plus de 100 000 habitants (+ 15,2%) que pour les aires dont la population est inférieure à
100 000 habitants (+10,6 %). Ces dernières ont connu cependant une augmentation de leur
emploi total (+4,6%) supérieure d'un point à celle des aires urbaines ayant plus de 100 000
habitants (+3,6%). » (DATAR, 2004, p.52).
A l’échelle des régions, ce même rapport indique que les EMS ont progressé plus
rapidement, entre 1990 et 1999, dans les régions qui en étaient les moins bien dotées en
1990 : la Corse et le Languedoc Roussillon, par exemple.
À l’échelle des aires urbaines, les EMS ont donc progressé plus vite dans les grandes
aires urbaines déjà mieux dotées en la matière. Performantes pour ce type d’emplois, ces aires
urbaines enregistrent néanmoins de plus faibles progressions de l’emploi total que les aires
urbaines de petite taille. À l’échelle des régions, les EMS (comme l’emploi total) ont
progressé plus rapidement dans les régions apparemment les moins productives.
De plus, près de 99% des entreprises françaises ont moins de 50 salariés, elles
représentent 48% des emplois et créent 40% du PIB français (source : calculs de l’auteur
d’après INSEE, SIRENE, Ministère de l’Industrie, DCASPL1). La stratégie de localisation de
ces petites entreprises est-elle toujours guidée par le souci d’innover, de bénéficier des
économies d’agglomération et de disposer d’une main-d’œuvre qualifiée ? Ne sont-elles pas,
tout simplement, créées là où souhaitent vivre l’entrepreneur et sa famille ?
Quand on sait, également, que les cent premières entreprises britanniques ont un
chiffre d’affaires qui équivaut à 85% du PIB, mais qu’elles n’assurent que 16% de l’emploi
national (Veltz, 1998), on peut s’interroger sur la corrélation supposée entre croissance et
développement.
Enfin, si l’augmentation de la population, de l’emploi, du revenu par habitant, du
nombre d’actifs occupés peut être considérée comme un marqueur du développement des
territoires, alors il semblerait que les espaces non métropolitains2 soient dans une situation
préférable à celle des grandes villes (tableau 1).
1
Direction du commerce, de l’artisanat, des services et des professions libérales (D.C.A.S.P.L.).
2
Rappel : la notion « d’espaces non métropolitains » sera employée dans ce travail pour désigner les
petites villes, les villes moyennes et plus généralement l’espace rural.
15
Tableau 1 : Données de cadrage par taille des villes
Evol.
Evol.
Solde mig. emplois Evol. Evol. actifs
Evol. pop. revenu Taux de
1990/1999 salariés chômeurs occupés
1990/1999, /hab. chômage
sur pop. privés 1990/1999, 1990/1999,
en % 1990/2002, 1999
1999, en % 1993/2002, en % en %
en %
en %
Grandes villes
>100 000 hab. 1,9 -2,7 9,5 1,8 15,8 28,8 -1,5
Villes moyennes
20 000 à 100 000 hab. 1,1 -4,9 16,5 3,6 15,1 27,6 -3,1
Petites villes
3 000 à 20 000 hab. 4,8 1,4 24,2 8,1 12,5 22,6 5,0
Très petites villes
< 3 000 hab. 4,4 3,8 25,0 12,5 10,0 20,1 8,3
France métropolitaine 3,4 0,1 18,4 6,8 12,9 24,5 3,0
Source : calculs de l’auteur d’après INSEE, DGI, UNEDIC.
Bien que très différents, les modèles de la NEG et les approches du développement
endogène et des systèmes productifs localisés (SPL) reposent sur une même idée. L’enjeu du
développement local serait en premier lieu un enjeu de production. Or, même si les SPL sont
plutôt implantés dans l’espace rural, il n’est pas certain que ces mécanismes suffisent à
expliquer les tendances actuelles que connaissent ces territoires.
Le seul poids des retraités dans les immigrants ruraux et dans la population rurale
limite déjà le pouvoir explicatif des approches productives pour comprendre la revitalisation
16
de ces espaces. Les retraités, d’une part, mais également les dépenses des touristes, les
salaires des migrants-alternants, les traitements des employés de la fonction publique, les
revenus de transferts sont autant de revenus captés à l’extérieur des territoires
indépendamment de leur système productif (Davezies, 2003a et 2003b). Ce principe de
captation des revenus, plus connu sous le nom de la théorie de la base, paraît constituer un
cadre d’analyse pertinent pour comprendre la revitalisation des espaces ruraux. Plus
précisément, l’approche renouvelée de cette théorie proposée par Davezies (2003a, 2003b)
devrait apporter quelques éléments de réponse. Cette approche par les revenus indique que les
revenus basiques1 productifs, mais également résidentiels, publics et sociaux constituent les
moteurs des économies locales. La possibilité d’intégrer ne serait-ce que les retraites, les
dépenses des touristes et les revenus de transferts dans l’analyse des facteurs de la
revitalisation rurale paraît intéressante. En effet, toutes les données disponibles et les premiers
travaux portant sur ces questions suggèrent que la composante résidentielle du développement
serait un des éléments-clés du renouveau des espaces non métropolitains (Davezies, 2003b ;
DATAR, 2003 ; Perrier-Cornet, 2002 ; Vollet, 1998). L’approche proposée par Davezies offre
à la fois un cadre conceptuel à la notion du développement « résidentiel » tout en permettant
d’étudier conjointement les autres aspects du développement local.
1
Revenus captés à l’extérieur du territoire.
17
À l’intérêt du positionnement théorique et du traitement empirique de la question,
s’ajoute l’intérêt de ces territoires qui véhiculent des images tout aussi positives que
négatives. La campagne, « ce pays du rien, ce pays du vide, ce désert français », s’est
transformée en cadre d’une vie rêvée et idéalisée. Les ruraux sont enviés, leurs maisons et
leurs terres convoitées… La campagne est devenue « tendance » et stigmatise l’envie de vert
des citadins. Ces bouleversements profonds s’inscrivent dans les modes de vie actuels où
mobilité et environnement occupent une place centrale dans les préoccupations des
populations et des acteurs.
18
approches productives. Ces auteurs s’intéressent plus particulièrement au territoire, qu’il soit
donné a priori ou construit, comme facteur de croissance. Le troisième chapitre reprend les
travaux récents qui mettent l’accent sur le territoire support de population et de
consommation. Ces approches intègrent la dimension résidentielle et la question de la
demande dans les logiques de développement local. Un chapitre conclusif revient
spécifiquement sur la question de la revitalisation des espaces ruraux et présente les réponses
théoriques disponibles aujourd’hui.
Malgré l’intérêt et l’apport de ces travaux, il semblerait que les réponses apportées ne
soient pas suffisantes.
19
20
PREMIERE PARTIE - S’INTERROGER SUR LA
REVITALISATION DES ESPACES RURAUX
21
22
REVITALISATION n.f. action de revitaliser.
REVITALISER v.t. donner une vitalité, une vigueur
nouvelle à.
Définitions du petit Larousse
23
présentent quelques spécificités économiques, sociales ou sociétales ainsi que
politiques.
Comment la revitalisation des espaces ruraux s’inscrit-elle dans le long
terme ? Marqués par cent ans d’exode rural et par l’image de désertification, les
espaces ruraux sont longtemps restés condamnés au déclin. Puis, révélée par les
recensements successifs à partir du milieu des années 1970, la revitalisation rurale
prit le nom de contre-urbanisation, rurbanisation ou périurbanisation. Le deuxième
chapitre expose ce glissement lent des faits et de la littérature, qui vécut cette
revitalisation comme impossible, puis non généralisable, jusqu’à imaginer une
rupture profonde aujourd’hui.
24
Chapitre 1 - Définitions et spécificités des espaces ruraux
25
La remise en cause du fondement sociologique de la « ruralité » repose sur la
disparition des valeurs et des modes de vie ruraux. « Le mode de vie rural n’existe
plus en France. Tous les Français, quel que soit leur lieu de résidence, tendent vers
un mode de vie unique » (Rochefort, 2002, p.230).
La ville offrirait de moins en moins de services ou de biens de consommation
que l’on ne pourrait acquérir à la campagne. Mais il n’est pas dit que la campagne ne
présente des avantages que l’on ne trouverait pas, en revanche, en ville. C’est peut-
être pour cela que le premier leitmotiv de quatre citadins sur dix qui souhaitent
s’installer à la campagne reste la quête d’une meilleure qualité de vie1 ? Même si cet
item peut recouvrir des motivations diverses telles que l’accès à la propriété, un
logement plus grand, un paysage agréable…, il révèle un sentiment qui accompagne
la revitalisation des espaces ruraux.
Ces premières remarques sur la dimension économique et sur l’acception
sociétale, peut-être plus que sociologique, des espaces ruraux seront approfondies
dans les sections suivantes. Il paraît intéressant de compléter ces trois aspects du
rural par une quatrième spécificité de ces espaces : leur poids dans les institutions
politiques.
Mais avant, il convient de présenter les définitions géographiques et
statistiques de l’espace rural.
Ce critère de faible densité est pour de nombreux auteurs le seul qui resterait
vérifié aujourd’hui, ce qui justifie la notion d’espace rural, préférée à celle de monde
rural.
1
Sondage BVA reconduit tous les deux ans pour la CNASEA : Centre National pour l’Aménagement
des Structures des Exploitations Agricoles
26
I-1 La densité pour définir l’espace rural
La densité est l’un des critères statistiques qui permet de définir le caractère
rural ou urbain d’un territoire. C’est notamment celui choisi par l’OCDE pour définir
les collectivités rurales et établir sa typologie régionale, qui se fonde sur deux
critères1.
Le premier s’appuie sur la densité de la population. Une collectivité est
considérée comme rurale si sa densité est inférieure à 150 habitants au kilomètre
carré (500 hab. /km² pour le Japon, car la densité démographique nationale y est
supérieure à 300 hab. /km²).
Le second permet de classer les régions en fonction du pourcentage de
population qui vit dans des collectivités rurales. Ainsi, on considère qu’une région
est :
- essentiellement rurale si plus de 50 % de ses habitants vivent dans des
collectivités rurales ;
- essentiellement urbaine si moins de 15 % de ses habitants vivent dans
des collectivités rurales ;
- intermédiaire, si 15 à 50 % de ses habitants vivent dans des
collectivités rurales.
La densité est également l’un des deux critères choisi par le groupe ORATE2
(Observatoire européen en réseau de l’aménagement du territoire - programme lancé
sous l’égide de l’initiative communautaire INTERREG III).
1
Définition rappelée par Vincenzo SPIEZA (2004). « Mesurer les économies régionales », Courrier
Statistique de l’OCDE, février 2004, n°6, p.2.
Disponible en ligne à l’adresse : http://www.oecd.org/dataoecd/3/61/28903287.pdf
2
La typologie harmonisée urbain – rural d’ORATE distingue deux degrés d’influences urbaines et
trois degrés d’anthropisation du territoire et définit donc 6 types de régions :
Le degré d’influence urbaine est apprécié sur la base des densités de population et de la présence dans
la région du centre d’une métropole européenne. Les régions à fortes influences urbaines sont celles
dont la densité est supérieure à la moyenne européenne (107 habitants au km²) ou celles où se situe le
centre d’une des 76 métropoles européennes d’ORATE.
Le degré d’anthropisation est déterminé à partir des parts représentées par les territoires artificialisés,
les terres agricoles et les espaces semi-naturels. Le degré est qualifié d’élevé dès lors que, dans la
région, la part des territoires artificialisés dépasse la moyenne européenne (3,48%), ou de moyen dès
lors que la part des terres agricoles dépasse la moyenne européenne (50,36%), sans que la part des
territoires artificialisés ne dépasse la moyenne européenne. Elle est faible si ni la part des territoires
artificialisés ni celle des terres agricoles n’atteint la moyenne européenne.
27
Caruso (2002) reprend ces différentes typologies et souligne les diversités
spatiales européennes. Par exemple, selon la définition de l’OCDE, quatre types de
pays se distinguent (graphique 1). Selon cette typologie, la Finlande, la Suède,
l’Irlande et le Danemark se distinguent par le poids des zones à prédominance rurale,
la France par le poids des zones significativement rurales, la Belgique, les Pays-Bas,
le Royaume-Uni, l’Italie et l’Allemagne par les espaces fortement urbanisés. Les
autres pays apparaissent moins typés1.
Source : Extrait de Caruso (2002), p.72. In Repenser les campagnes. (dir.) Philippe Perrier-Cornet,
édition de l’Aube, 279 p.
1
On peut se poser la question du biais éventuel qu’introduit la taille des communes, différente d’un
pays européen à un autre.
28
Cartes 1, 2 et 3 – Délimitation rural/urbain en 1999 selon les définitions de l’OCDE
29
Carte 4 - Densité communale en France métropolitaine, en 1999
Même s’il est révélateur d’espaces non urbains, ce critère de densité n’est pas
le plus usuel en France. En principe, la population communale et les flux d’actifs
vers les aires urbaines y sont préférés pour qualifier les communes rurales et les
espaces à dominante rurale.
30
urbaine s'étend sur une seule commune, elle est dénommée ville isolée. Remarque :
ces seuils, 200 mètres pour la continuité de l'habitat et 2 000 habitants pour la
population, résultent de recommandations adoptées au niveau international.»1
Établi selon les sources en 1846 (Malet et alii, 2003) ou en 1853 (Kayser,
1990), ce seuil de 2 000 habitants n’a jamais été justifié par l’INSEE, « mise à part
qu’il représentait, entre 1954 et 1962, le seuil moyen en deçà duquel le solde
migratoire des communes devenait négatif. » (Malet et alii, 2003, p.26). On
constatera également qu’il correspond au seuil au-dessus duquel les communes n’ont
pas enregistré de diminution de population au cours de la période de l’exode rural
(cf. chapitre 2 infra).
1
http://www.INSEE.fr/fr/nom_def_met/definitions/html/unite-urbaine.htm
31
Le croisement avec le critère de densité de l’OCDE établit que quelques
communes rurales selon la définition de l’INSEE sont des collectivités urbaines pour
l’OCDE et inversement. Ainsi, 1 051 communes rurales (INSEE) sont des
collectivités urbaines au sens de l’OCDE (soit à peine plus de 3% des communes
rurales) et 1 993 communes urbaines (INSEE) sont des collectivités rurales pour
l’OCDE (soit une commune urbaine sur trois !).
Les zones de peuplement industriel ou urbain (ZPIU) ont été utilisées pour
distinguer trois types de territoires (les villes, le rural périurbain et le rural profond)
de 1968 à 1990. Les communes classées en ZPIU devaient appartenir aux trois
catégories suivantes :
- les unités urbaines ;
- les communes rurales dites « industrielles », c’est-à-dire celles qui
accueillaient plus de 100 emplois salariés dans des établissements de 20
salariés et plus ;
- les communes rurales dites « dortoirs », dont la définition s’appuyait
sur un ensemble de critères associant un poids faible de ménages
agricoles parmi les ménages, un poids important de migrants alternants
parmi les actifs résidents et une croissance démographique (rappel
effectué par Schmitt et alii, 2002).
Les unités urbaines représentent « les villes », les communes rurales en ZPIU
le « rural périurbain » et les communes rurales hors ZPIU le « rural profond ».
32
En 1990, ces ZPIU représentaient 75% du territoire métropolitain et 96% de
la population ! Cette définition n’étant plus assez discriminante, elle fut abandonnée
en 1996 au profit du ZAU (zonage en aires urbaines).
À ce jour, le zonage en aires urbaines (ZAU) créé en 1996 n’a pas été
modifié. Il définit l’aire urbaine comme « un ensemble de communes, d’un seul
tenant et sans enclave, constitué par un pôle urbain et par des communes rurales ou
unités urbaines (couronne périurbaine) dont au moins 40% de la population
résidente ayant un emploi travaille dans le pôle ou dans des communes attirées par
celui-ci. Un pôle urbain est une unité urbaine offrant 5 000 emplois ou plus »
(définition sur le site de l’INSEE).
En 1999, on compte 354 aires urbaines et 354 pôles urbains en France
métropolitaine (le ZAU n’a pas été défini dans les DOM). Les communes dont 40%
des actifs occupés vont travailler non pas dans une mais dans deux ou plusieurs aires
urbaines sont appelées les communes multipolarisées (sous réserve de quelques
conditions de distance et de contiguïté à ces aires urbaines). Les couronnes
périurbaines et les communes multipolarisées constituent les communes périurbaines.
L’espace à dominante urbaine comprend les aires urbaines et les communes
multipolarisées. Le reste, toutes les communes non prises en compte dans l’espace à
dominante urbaine, constitue l’espace à dominante rurale1.
1
Et bien entendu, « on remarque que l’espace à dominante urbaine contient 13 000 communes
rurales (7,7 millions d’habitants) et que l’espace à dominante rurale contient près de 1 400
communes urbaines (3,9 millions d’habitants). » (Nicot, 2005, p4).
33
qui ne sont pas des pôles ruraux et dont 20% ou plus des actifs résidents
travaillent dans une aire urbaine ;
- la périphérie des pôles ruraux : ensemble des communes rurales et
des unités urbaines de l’espace à dominante rurale, n’étant ni pôle rural ni
sous faible influence urbaine, et dont 20% ou plus des actifs résidents
travaillent dans les pôles ruraux ;
- le rural isolé : ensemble des communes rurales et unités urbaines de
l’espace à dominante rurale restantes.
34
Outre l’aspect particulièrement incommode de la dénomination « les autres
communes de l’espace rural », la fusion1 du rural isolé et du rural sous faible
influence urbaine est tout à fait regrettable. Ce changement est d’autant plus
malheureux qu’il intervient à un moment-clé de l’histoire de ces espaces ruraux. Le
redressement démographique de ces autres communes de l’espace rural en 1999 peut
donc être dû à l’étalement urbain et au dynamisme des franges des espaces à
dominante urbaine ou décrire un réel retournement de situation pour des zones plus
isolées. On y reviendra ultérieurement. De plus, comme le note Schmitt et alii, « en
1999, près d’un quart du territoire national était concerné par une influence faible
des villes et un autre quart formait un rural plus à l’écart de cette influence, plus
isolé. La version 2002 considère comme indifférenciée cette moitié du territoire
national. » (Schmitt et alii, 2002, p.7).
Espace à Espace à
Total France
dominante dominante
métropolitaine
urbaine rurale
Population 1999 58 518 395 47 365 268 10 553 127
en % 100,0 80,9 18,0
Superficie 1999 (km²) 543 965 223 794 320 171
en % 100,0 41,1 58,9
Densité 1999 (hab./km²) 108 214 33
Nombre de communes en 1999 36 565 18 030 18 535
Nombre d'habitants par commune en 1999 1 600 2 660 569
Source : INSEE, RGP 1999, élaboration de l'auteur.
1
Les autres communes de l’espace rural ne regroupent pas exactement le rural isolé et le rural sous
faible influence urbaine, puisque les délimitations des pôles ruraux et de leur couronne ont également
été modifiées.
35
Tableau 3 – L’espace à dominante rurale : données de cadrage
Autres
Total :
Couronnes communes
Pôles espace à
des pôles de l'espace à
ruraux dominante
ruraux dominante
rurale
rurale
Population 1999 3 034 265 253 535 7 265 327 10 553 127
en % 28,8 2,4 68,8 100,0
Superficie 1999 (km²) 23 065 10 382 286 724 320 171
en % 7,2 3,2 89,6 100,0
Densité 1999 (hab./km²) 132 24 25 33
Nombre de communes en 1999 973 832 16 730 18 535
Nombre d'habitants par commune en 1999 3 118 305 434 569
Source : INSEE, RGP 1999 – Élaboration de l'auteur.
Plus des deux tiers de la population rurale sont concentrés dans les autres
communes de l’espace rural, qui couvrent 90% de la superficie et 90% des
communes de cet espace. Les pôles ruraux se caractérisent par des communes de
taille plus importante (3 118 habitants en moyenne). Ils accueillent 29% de la
population de l’espace rural et ne représentent que 5% des communes. Les
communes appartenant à la couronne d’emploi de ces pôles sont beaucoup plus
marginales voire trop parfois pour l’analyse statistique (2% de la population, 3% de
la superficie et 4% des communes).
Espace à
dominante
rurale
36
L’espace rural étant à présent défini, quelles sont les principales fonctions qui
le distinguent de l’espace urbain ?
1
On verra, cependant, dans le deuxième chapitre qu’historiquement, les campagnes françaises étaient
autant le lieu de l’industrie que de l’agriculture jusqu’à la fin du XIXe siècle.
37
Graphique 2 - Évolution de la force de travail agricole dans quelques pays,
1830 – 2000
14000
12000
10000
US
8000 UK
Italy
6000 France
Germany
4000
2000
Sur une période plus récente, l’évolution des unités de travail annuel non
salarié, que l’on peut prendre comme approximation du nombre d’agriculteurs,
montre un certain ralentissement de ce déclin (graphique 3). Si l’on prolongeait cette
courbe selon un modèle logarithmique, il resterait 250 ans pour voir le dernier
agriculteur français disparaître.
Graphique 3 - Évolution des unités de travail annuel non salarié dans l’agriculture, entre
1990 et 2004
1 200 000
1 000 000
800 000
600 000
0
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
Source : SCEES : Service Central des Enquêtes et Études Statistiques du ministère de l'Agriculture.
1
A titre indicatif, les ouvriers agricoles représentent moins de 1% des actifs en France.
38
8% dans l’espace à dominante rurale. Même dans les communes les plus isolées de
ces espaces ruraux, les agriculteurs sont trois fois moins nombreux que les ouvriers,
deux fois moins nombreux que les employés et près d’une fois et demi moins
nombreux que les professions intermédiaires. L’agriculteur n’est plus, tout au moins
quantitativement, l’acteur-clé de l’économie rurale.
39
Carte 6 - Part des agriculteurs exploitants dans la population régionale, en 2005
Le poids des agriculteurs dans la population est faible quelle que soit la
région (carte 6). Il dépasse 2% en Auvergne, Basse-Normandie, Poitou-Charentes,
Champagne-Ardenne, Limousin et Midi-Pyrénées.
40
Cartes 7 et 8 - Nombre d’exploitations agricoles en 1955 et 2005
N
0 200
N 100
0 200
100
Source : Agreste, calculs de l’auteur.
Note : Les échelles de ces cartes sont construites selon le même mode (en quintiles) mais les seuils
diffèrent. On les a établies de cette façon afin de faire ressortir le maintien, non pas du nombre
d’exploitations, mais de leur localisation au sein des départements métropolitains.
Note : les données pour l’Île-de-France ne sont pas renseignées en raison des changements de
découpages institutionnels de la région.
N
0 200
100
41
Si la répartition nationale des exploitations n’a finalement que peu changé en
50 ans, les diminutions ont été plus ou moins marquées selon les départements (carte
4). Les plus fortes diminutions du nombre d’exploitations sont plutôt enregistrées
dans les départements de l’Est et de Rhône-Alpes, puis dans des départements ruraux
du centre de la France, ou encore dans les Pyrénées-Orientales, l’Ariège, la Haute-
Garonne. Inversement, se dessinent trois zones de moindre effondrement : le bassin
francilien, les départements alignés le long d’un axe allant de Cherbourg à
Angoulême, enfin les Pyrénées-Atlantiques, ainsi que les départements de la région
Midi-Pyrénées, hors Ariège et Haute-Garonne. L’agriculture de montagne, que l’on
sait particulièrement fragile, a donc plus vite décliné dans les massifs alpins,
vosgiens, voire une partie du Massif Central que dans une partie des Pyrénées
(Hautes-Pyrénées et Pyrénées-Atlantiques).
N
0 200
100
Source : SCEES, calculs de l’auteur
Discrétisation centrée sur la moyenne (la SAU recouvre en moyenne 54%
de la superficie métropolitaine en 2005)
42
Les surfaces agricoles représentent entre 50% et 79% des surfaces des
départements situés à l’ouest d’une ligne allant de Metz à Vienne et au nord d’un axe
Vienne-Bordeaux (exception faite de l’Île-de-France, de la Seine-et-Marne et du
Loir-et-Cher). Au sud, les départements les plus agricoles s’étendent du Cantal et de
la Lozère aux Pyrénées-Atlantiques hors pourtour méditerranéen.
N
0 200
100
43
La similitude entre la carte des tailles d’exploitation (carte 11) et la carte du
résultat moyen par actif (carte 12) montre qu’il est délicat de tirer des conclusions
générales quant à la situation des agriculteurs. Si le monde rural n’est plus le monde
agricole, parler de monde agricole est devenu tout aussi erroné… ce sont des mondes
agricoles qui cohabitent.
N
0 200
100
44
(départements situés au sud d’une ligne allant de Bordeaux à Annecy, à
l’exception de départements très ruraux où domine une tradition
d’élevage (Cantal, Lozère) couplée à la culture de céréales pour
l’Aveyron et le Gers) ;
- les départements au nord de cette ligne Bordeaux-Annecy, où
dominent les exploitations de grandes tailles, où la culture céréalière
dessine le plus souvent des paysages monotones dans des contextes plus
ou moins ruraux, exception faite de l’Alsace (petits vignobles au sein d’un
territoire très urbanisé) et des départements de la Marne et du Nord ;
- à l’ouest de ces départements, se concentrent les exploitations de
tailles moyennes dans des départements agricoles.
Le paysage est souvent cité comme l’un des attraits résidentiels des espaces
ruraux. La notion de paysage est particulièrement complexe et ne peut être résumée à
la taille et au poids des exploitations agricoles. Cependant, le fait que les
départements de l’Ouest et du Sud de la France abritent plutôt des petites
exploitations soulève la question de l’impact de la structuration foncière agricole sur
l’attractivité résidentielle et récréative des espaces ruraux de ces départements.
45
développement de nouvelles méthodes telle que l'évaluation contingente). Enfin,
Cavailhès insiste sur le peu de croisements qui s’opèreraient entre l’analyse spatiale
et l’analyse rurale. D’un côté, les travaux sur l'environnement et ceux sur la qualité et
l'origine des produits ignoreraient paradoxalement l'Économie Spatiale alors qu'ils
traitent de questions spatialisées. D’un autre côté, les économistes régionaux ne se
seraient que très rarement intéressés aux questions rurales, alors même que les
travaux sur les districts industriels, par exemple, prennent le plus souvent des zones
rurales pour exemple (le Choletais, les vallées alpines, le Mazametois…).
46
L’agriculture : fleuron économique de la France ?
Dans cette Europe agricole, la France se classe en tête des pays producteurs.
Elle contribue pour environ 20% à la production de l’UE à vingt-cinq, suivie par
l’Italie, l’Espagne et l’Allemagne. Précédant les Pays-Bas, la France est le premier
pays exportateur et 18% des exportations sont destinées aux pays tiers en 2005. Avec
9% des importations européennes, elle se place au sixième rang des pays
importateurs.
Dans l’économie française en 2006, l’agriculture, la sylviculture et la pêche
représentent 2,5% du produit intérieur brut français et les industries agroalimentaires
(IAA) 1,8% (INSEE, production en valeur en euros constants 2000). Les industries
agroalimentaires s’appuient en France sur 12 000 entreprises implantées sur
l’ensemble du territoire national, employant 430 000 salariés et réalisant
132 milliards d’euros de chiffre d’affaires. L’essentiel de l’emploi et de l’activité se
concentre cependant dans les 3 200 unités de 20 salariés et plus. La moitié environ
des salariés des unités de 20 salariés et plus travaille dans un groupe français et 22%
dans un groupe étranger. Comme l’agriculture française, ces secteurs industriels ont
une forte productivité par rapport aux autres pays européens (tableau 4). Depuis
1980, la part de la branche agriculture dans le PIB diminue plus vite que celle des
IAA et celle d’autres industries, notamment parce que les prix relatifs des produits
agricoles baissent depuis vingt-cinq ans. En 1980, la part de l’agriculture dans le PIB
était de 4,9% et de 2,6% pour les IAA.
47
Tableau 4 - Les industries agricoles et alimentaires en Europe
Chiffre Investissements
Nombre Effectif
d'affaires hors apports
d'entreprises salarié
en millions d'euros
Allemagne 35 412 823 922 165 454 4 713
Espagne 30 094 357 490 77 927 3 723
France 68 564 615 739 155 146 5 007
Italie 69 968 339 041 110 435 3 958
Pays-Bas 45 785 131 473 53 380 1 457
Royaume-Uni 7 279 484 129 113 148 3 851
Ensemble du champ (y compris commercial)
Source : Eurostat, 2003
Source : Agreste, INSEE (2007), p.289. In L’agriculture, nouveaux défis. Edition INSEE.
Enfin, que serait l’agriculture sans les concours publics ? D’un montant de
16,5 milliards d’euros pour la France en 2005, l’UE en a financé 63,3%. De plus, ces
subventions ont progressé à un rythme élevé jusqu’à la réforme de la PAC en 1992.
Au final, compte tenu de la diminution du nombre d’actifs, le montant moyen par
actif des concours publics en faveur de l’agriculture et des territoires ruraux a
fortement progressé et atteint 13 400 euros en 2005.
1
En euros courants 2006, site INSEE :
http://www.insee.fr/fr/ffc/chifcle_fiche.asp?ref_id=NATTEF08110&tab_id=178
48
le garant de la culture rurale, des savoir-faire et/ou encore le militant
altermondialiste. La presse ne s'y trompe pas et, au lendemain de la réforme de la
PAC du 26 juin 2003, les journalistes requalifient le métier d'agriculteur. Le Monde
du 27 juin 2003 parle de « jardinier des campagnes » : « On est passé
progressivement à un besoin de qualité des légumes et des viandes tandis que le
métier de jardinier des campagnes a pris de la valeur dans une société urbanisée en
manque de ruralité. » Jean Philippe Mestre, dans l'éditorial du Progrès de Lyon du
27 juin, parle « d'animateur paysager » : « Le paysan renoncerait à l'illusion d'être
un industriel pour le rêve de devenir un animateur du paysage ».
D'un point de vue économique, le paysage n'est pourtant pas un bien public
pur (Aznar, 2002). C’est un bien public mixte, d'autant plus particulier qu'il repose
sur des surfaces « appropriables » qui sont des biens privés. Aznar souligne le
caractère non intentionnel de l'agriculteur à produire ces externalités positives, le
coût marginal de production étant proche de zéro.
Jean-Robert Pitte précise que « le paysage ne peut plus être considéré
comme un objet en soi sur lequel on agirait avec de purs critères esthétiques comme
sur un objet de musée. Cette vision utopique doit être remplacée par une réflexion
sur le rapport entre l'agriculture de qualité qui crée généralement des paysages de
qualité et les besoins variés des sociétés rurales et urbaines et qui touchent à
l'identité culturelle. Les paysages soigneusement entretenus permettent une
valorisation facile par le tourisme vert. » (Pitte, 1994, p.11)
49
« Le tourisme assure la mise en valeur du patrimoine architectural et
immobilier paysan […]. Le tourisme est un moyen puissant d'aménagement du
territoire. […] Le tourisme constitue une ressource pour les agriculteurs susceptible
de compléter un revenu de base. » (Échevin et Gerbaux, 1999, p.295)
Par ailleurs, ces auteurs ont montré à partir d’enquêtes réalisées dans le
Vercors et le Livradois-Forez que, pour un même niveau de dépenses touristiques,
l'agritourisme aurait des retombées plus efficaces sur les revenus distribués et les
emplois créés localement que le tourisme en hôtel. Le tourisme « à la ferme » serait
potentiellement plus rémunérateur localement.
L'agritourisme est un thème de recherche où les travaux abondent. Bouée de
sauvetage des agriculteurs et des zones rurales les plus reculées, il répond également
aux nouvelles aspirations récréatives de la société en quête de naturel et
d'authentique.
Les travaux de Perret (2001), spécialiste en la matière, tempèrent cependant
les discours les plus emphatiques. L'agritourisme serait une source indéniable de
revenus pour les agriculteurs qui le pratiquent (Disez, 1996). Cependant, suivant les
différentes estimations disponibles (recensement agricole, réseaux de « Tourisme à la
ferme »), Perret (2001) estime qu'il n'y aurait pas plus de 4% d'agriculteurs qui
pratiquent une activité touristique avec cependant des différences importantes d’une
région à l’autre. En région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), par exemple, la
part d'agriculteurs pratiquant une activité touristique varie de 18,5% dans les
Bouches-du-Rhône à 55,6% dans les Alpes-Maritimes (tableau 5).
Exploitations
pratiquant une Dont vente Dont Dont
activité directe restauration hébergement
d'agritourisme
Alpes-de-Hte-Prov. 27,0% 88,5% 4,5% 19,0%
Hautes-Alpes 28,5% 81,1% 6,2% 30,9%
Alpes-Maritimes 55,6% 98,4% 2,1% 4,7%
Bouches-du-Rhône 18,5% 91,5% 2,8% 7,9%
Var 22,4% 88,3% 2,5% 10,7%
Vaucluse 19,9% 78,1% 3,6% 20,8%
Source : L'information agricole, n°765, avril 2003, d'après le RGA 2000.
50
l'agritourisme s'affiche. L'agritourisme a également permis de faire prendre
conscience aux agriculteurs et à la population rurale de la valeur patrimoniale du bâti
et du non-bâti rural, des savoir-faire, de la culture paysanne, des paysages.
Les demandes d'AOC sont instruites par l'INAO (Institut national des
appellations d'origine) et doivent répondre à trois catégories de critères :
- le facteur naturel (particularités environnementales et écologiques de
la zone d'origine) ;
- le facteur humain (savoir-faire particulier à la zone d'origine) ;
- le facteur historique (notoriété dûment établie dans la zone d'origine).
En 2005, près d’un quart des exploitations agricoles françaises produisent sous
un signe de qualité (SCEES, 2005), avec de fortes disparités selon les produits. 85%
de la valeur produite par la viticulture passe, par exemple, par des vins et alcools
AOC.
51
récentes. Ces produits de terroir seraient donc une représentation du passé, sous-
entendu regretté. Barham pense qu'une part de cette fascination pour le passé peut
s'expliquer par les changements profonds et rapides que la France a connus. On peut
rajouter que ce changement profond et rapide est également intervenu plus
tardivement que dans d'autres pays européens. Ce n'est qu'autour de 1930 que la
population urbaine devient plus nombreuse que la population rurale. Les racines
rurales d'une large majorité de Français sont donc encore très proches. Mais, quelle
qu'en soit la raison, « notre société a besoin d'une identité culturelle, et les produits
alimentaires y contribuent » (Pitte, 1994, p.114).
L'attrait des espaces ruraux semble être dominé par la question des paysages,
du patrimoine, de l'environnement, c’est-à-dire par des éléments non marchands. Ces
territoires ont été façonnés et dessinés durant des siècles par le travail agricole de
l'homme. Une part des aménités que l'on peut trouver dans le rural sont des
externalités positives de cette agriculture. A travers le tourisme et la vente de
produits du terroir, ces aménités peuvent générer une rente territoriale (Mollard,
2001)1.
1
On reviendra sur ces travaux dans la deuxième partie de ce travail sur les approches théoriques.
52
négligé. Et même si le producteur n'est plus un « paysan », si les tomates ne poussent
plus dans la terre1, si la vente en bord de route chère aux vacanciers n'est que
rarement de la « vente directe »2, si certaines pêches et nectarines de Provence
poussent déjà sur des « murs végétaux »3, les connotations de terroir et d’authenticité
attachées au monde rural participent et entretiennent l’envie des citadins de vivre à la
campagne. Si ces nouvelles fonctions de l’agriculture amènent à reconsidérer
l’éventuelle disparition de la fonction économique des espaces ruraux, se pose
également la question des autres activités rurales.
1
Production dite « hors-sol ».
2
Vente directement du producteur au client, sans intermédiaire.
3
Les murs végétaux sont constitués d'arbres fruitiers « plats » pour faciliter la récolte mécanisée. On
« force » cette pousse « plane » des arbres par la taille et l'accrochage des branches le long d'un
grillage mural.
4
On reviendra sur l’économie résidentielle de ces espaces. On se limite, ici, aux activités productives
puisque ce sont elles que privilégient les analystes pour tenter de qualifier le rural.
53
Par ailleurs, le nombre relativement plus élevé d’ouvriers dans le rural que
dans l’urbain semble se vérifier dans plusieurs secteurs industriels. « La part d’actifs
occupés dans un grand nombre de branches des activités industrielles apparaît plus
élevée que dans l’espace urbain mais aussi que dans les communes périurbaines, à
l’exception des biens d’équipements et de l’industrie automobile » (Malet et alii,
2003, p.44).
Enfin, ces emplois ont progressé dans l’espace rural entre 1990 et 1999 alors
qu’il diminuait ailleurs. Ceci s’expliquerait par deux phénomènes complémentaires
(Malet et alii, 2003) : un recul moins rapide des spécialités déclinantes dans le rural
que dans l’urbain, accompagné d’un dynamisme plus accentué des branches en
expansion (matières plastiques, électronique, parfumerie et pharmacie, imprimerie).
Cette dichotomie entre vie urbaine et vie rurale se serait même estompée au
sein des familles d’agriculteurs. Aujourd’hui, les familles d'agriculteurs de moins de
40 ans ont en moyenne deux enfants ; la cohabitation avant le mariage s’est
54
généralisée ; le contrôle social est moins prégnant ; les comportements
s’individualisent (Le Duigou, 1994).
Jouvenot-Jacques et Tripier (1994) étudient la modernisation de la famille
rurale d'agriculteurs à travers le travail des femmes. À l'heure du productivisme, de la
modernisation, les femmes ont été écartées de l'exploitation agricole par souci de
rentabilité (il fallait réduire la main-d'œuvre), mais aussi pour sortir du modèle de la
ferme familiale qui véhiculait une image rétrograde. Les femmes vont alors peu à
peu chercher du travail dans les villes voisines. Souvent salariées, elles contribuent à
stabiliser les revenus du foyer et font le lien entre la ville et la campagne. Elles
introduisent les éléments d'une vie citadine dans leur quotidien. La mobilité est
devenue un trait culturel majeur de notre société. Loin d'être resté à l'écart du
phénomène, le monde rural participe à ce mouvement et, de toutes les catégories
socioprofessionnelles, ce sont les femmes d'agriculteurs qui effectuent le plus de
kilomètres par an (Hervieu et Viard, 2001). Jouvenot-Jacques et Tripier (1994)
montrent également comment les femmes d'agriculteurs ont contribué à développer
les nouvelles fonctions rurales. Dans les zones difficiles, par exemple où la
polyculture domine, les revenus agricoles sont de plus en plus faibles, l'exode est
massif et le tissu économique se disloque. Par souci de « survie », les femmes vont
souvent être les initiatrices d'activités nouvelles, connexes à l'exploitation et générant
de nouveaux revenus : vente directe, vente de produits élaborés à la ferme (jus de
fruits, confitures…) et tourisme rural.
Finalement, pour Rochefort (2002), les différences observées entre les modes
de consommation rurale et urbaine sont liées à la structure de la population. Les
personnes âgées sont, par exemple, surreprésentées dans la population rurale. Ces
effets de structure neutralisés, les modes de consommation sont alors les mêmes.
Pour Lévy (1994), le rural n’existe plus, tout du moins, cet espace structuré par
l’agriculture et les modes de vie qu’elle engendre. Cet espace que défendent les
syndicats serait bel et bien mort.
55
relations y sont plus humaines, etc. (Hervieu et Viard, 1996, p.140-141)1. Dans ces
campagnes convoitées et idéalisées, le rapport à la nature et à la mobilité ainsi que le
rythme de vie sont très différents de ceux vécus dans les grandes agglomérations. Les
temporalités quotidiennes sont différentes et la notion de proximité y prend tout son
sens. L’habitat et les formes d’habiter divergent également (taille des logements,
accès à la propriété).
L’impact sur la santé peut aussi être un élément qui distingue aujourd’hui
l’urbain du rural. Des études récentes réalisées en France et dans plusieurs pays
européens mesurent la surmortalité urbaine qui serait imputable à la pollution
atmosphérique. Künzli et alii (2000) ont été parmi les premiers à faire une estimation
quantitative du nombre de décès dû à la pollution atmosphérique dans trois pays
(20 000 décès pour la France, la Suisse et l’Autriche soit 6 % des décès totaux).
L’AFSSET2 (2004) a estimé l’impact sur la santé d’une exposition chronique aux
particules fines présentes dans l’air dans 76 agglomérations françaises. Un total de
6 000 à 9 000 décès, toutes causes confondues, pourrait également lui être attribué
(soit 3 % à 5 % de la mortalité totale pour la population concernée). En 2004, dans
les 26 villes européennes (36 millions d’habitants) du programme APHEIS3, 17 000
décès seraient causés par la pollution atmosphérique, ce qui se traduit par une
diminution de l’espérance de vie d’environ un an pour une personne de 30 ans.
1
La relecture des résultats de ce sondage CSA/Cévipof, réalisé en 1994, et analysé par Hervieu et
Viard (1996), laisse songeur quant à l’avenir d’une société pour qui les mots progrès, travail, peur et
ville sont associés alors que la campagne ressort avec une image très positive et très archaïque à la
fois. La campagne symbolise la tradition, la religion, le conservatisme, la retraite, la tranquillité, la
beauté, la santé, la solidarité, la liberté.
2
Agence française de sécurité sanitaire, de l’environnement et du travail
3
Air Pollution and Health : European Information System
56
IV LE POIDS POLITIQUE DES ESPACES RURAUX
Sans revenir ici sur le rôle que joua la troisième République (et les régimes
précédents1) pour les campagnes et les agriculteurs, l’une des bases du déséquilibre
urbain/rural dans la représentation politique réside, selon Estèbe, dans le gel du
découpage communal. « Alors que jusqu’au début des années 1870 les grandes villes
absorbaient régulièrement les petites communes limitrophes, ce processus
s’interrompt brusquement. La carte communale ne sera plus touchée en France, ou
de manière marginale, à compter de l’établissement durable de la République. »
(Estèbe, 2001, p.3)
1
Voir à ce sujet Mendras (1967) p.251.
57
Mais aujourd’hui, les politiques publiques semblent désireuses
d’accompagner la montée des fonctions résidentielles et récréatives des espaces
ruraux. Même si la politique de parcs naturels n’est pas nouvelle, elle s’est intensifiée
au cours des deux dernières décennies. Aujourd’hui, 10% de l’espace national est
protégé. Selon Estèbe (2001), cette part pourrait s’accroître jusqu’à près de 40%, ce
qui marginaliserait, peut-être, modifierait, sûrement, le rôle de l’agriculteur dans la
gestion de l’espace national.
Parallèlement, la politique des pays vise à confier la gestion de l’espace aux
1
EPCI plutôt qu’aux communes, à des instances où les agriculteurs sont beaucoup
moins représentés, mais où les retraités occupent une place prépondérante (49% des
présidences d’EPCI de moins de 10 000 habitants sont assurés par des retraités). Or,
au rythme où le nombre d’agriculteurs diminue depuis 50 ans et au rythme où les
retraités migrent vers l’espace rural en France, le poids des agriculteurs, retraités ou
non, ne peut que s’altérer.
Enfin, le « coup de grâce » aurait été donné, toujours selon Estèbe, par la loi
« solidarité et renouvellement urbain » qui impose des schémas de cohérence
territoriale couvrant la majeure partie des surfaces agricoles utiles. « Le monde
agricole va se trouver intégré dans des modes urbains de gestion de l’espace,
partagé entre une urbanisation diffuse et des espaces naturels protégés où les
activités agricoles seront marginales. » (Estèbe, 2001, p.8).
À l’heure de la revitalisation rurale, ce n’est donc « pas par évidement que les
campagnes rentrent dans le rang de l’ordinaire politique, c’est par repeuplement et
incorporation dans l’orbite urbaine » (Estèbe, 2001, p.8).
Ainsi, le rural constitue encore une réalité ou plutôt une exception politique,
qui, il est vrai, disparaît peu à peu sous son caractère agricole, mais qui semble se
renforcer sous sa qualité de cadre de vie et de paysages à préserver. Cette fonction de
l’espace rural tend d’ailleurs à prendre le dessus sur toutes les dimensions de la
ruralité… La fonction économique agricole introduit la dimension paysagère dans le
métier d’agriculteur, la notion de mode de vie spécifique a été supplantée par celle de
cadre de vie spécifique, la dimension politique semble se faire également rattraper
par ces enjeux de gestion environnementale. Si le rural et l’urbain se complètent plus
qu’ils ne s’opposent, il semble qu’il soit encore pertinent de les distinguer.
1
Établissements public de coopération intercommunale.
58
Finalement, coincés entre des centres-villes qui s’embourgeoisent (ou se
« boboïsent ») et se « muséifient » parfois et un rural qui ne serait plus qu’un paysage
sur le modèle des campagnes anglaises, seuls les espaces périurbains seraient des
lieux de vie, de mixité, d’urbanité. L’analyse de la revitalisation rurale peut nuancer
ce portrait un peu caricatural.
59
60
Chapitre 2 - Le repeuplement des espaces ruraux :
nouveauté ou processus de longue période ?
Depuis les années 1990, les espaces ruraux ont toujours fait couler beaucoup
d’encre. Depuis quelques années, c’est sur le renouveau de ces espaces que les
chercheurs se sont penchés. Ce renouveau parut, pendant très longtemps, impossible
et inimaginable. Le contexte de l’exode rural, la désertification des campagnes et la
« fin des paysans1 » dominaient les discours. Puis, face à l’internationalisation du
regain démographique rural et aux résultats des recensements successifs,
« renaissance » et « renouveau » supplantèrent « désert » et « abandon ». La
périurbanisation gagnait des espaces périphériques toujours plus éloignés du centre.
Les définitions se sont également adaptées : le concept de « rural profond » a laissé
place à celui de « rural isolé », pour devenir « les autres communes de l’espace
rural ». Cette période, encore d’actualité, fut marquée par l’idée d’un monde rural à
deux vitesses : l’un rattrapé par la dynamique des espaces périurbains, l’autre bel et
bien en déprise. Ce dernier, qui n’est autre que la diagonale aride, ne pouvait se
relever (trop d’handicaps d’accessibilité, d’éloignement par rapport aux métropoles).
Abandonnés, ces espaces perdus deviendraient des musées de la nature et du
paysage. Puis, arrivèrent les tout derniers recensements de la population 2004/2006.
Et là, que peut-on lire ? C’est la fin du désert français2… Si les carcans des théories
et de l’histoire collective avaient, peut-être en leur temps, fermé les yeux des experts
sur ces questions, le changement de méthodologie de ces derniers recensements et les
bonds spectaculaires des tendances ne semblent plus effrayer grand monde. La
revitalisation des espaces ruraux isolés serait une véritable rupture dans le processus
de dépeuplement qui les touchait jusque-là.
1
Référence à l’ouvrage de Mendras, 1967.
2
Référence au titre du chapitre 5 : La fin du désert français, dans l’ouvrage de 2007 de Le Bras (Les
quatre mystères de la population française, paru chez Jacob), mais aussi aux annonces des médias
quant au repeuplement du Limousin et de l’Auvergne dès la sortie des premiers chiffres de l’INSEE
en 2005.
61
I SPECIFICITE DE L’HISTOIRE RURALE FRANÇAISE
Dès la fin du XIIe siècle, les marchands en quête de gains, ce qui est un
phénomène nouveau dans ce monde féodal, établissent leurs entrepôts dans les villes
où ils luttent pour obtenir des franchises et pour s'administrer eux-mêmes. Ces
centres urbains attirent les paysans qui s'y établissent comme artisans et espèrent
obtenir ainsi leur émancipation. Bien que freiné et même parfois stoppé par les
guerres (Guerre de cent ans en France), ce dynamisme économique du XIIe et du
XIIIe siècle est bien réel et suscite une véritable renaissance urbaine qui s'appuit
largement sur une activité rurale intense.
1
On reprend dans cette section des éléments présentés par Hervieu à l’IHEDATE (Institut des Hautes
Études de Développement et d’Aménagement des Territoires Européens), lors du séminaire du 15
novembre 2006 : « Quel avenir pour les espaces peu denses ? ».
62
réglementations corporatives urbaines et aux salaires élevés des artisans, les
marchands commanditent des travailleurs qui résident à la campagne et produisent à
domicile. Ce modèle qualifié de « Domestic System » donne naissance aux
manufactures qui n’étaient au départ qu’un regroupement de petits ateliers familiaux
indépendants. Peu à peu, le bâtiment devient un lieu de production où le fabricant
emploie des ouvriers salariés. Ainsi, émerge à côté du « Domestic System » un «
Factory System ». Le milieu rural est le siège principal de cette activité économique
encouragée par la royauté qui voit dans ces manufactures une opportunité pour créer
une industrie nouvelle. Des dispositions accordent des privilèges aux patrons de ces
établissements (pensions, titres de noblesse, droit d'exercer sa religion …). Ces
manufactures royales se multiplient.
63
I-2 La campagne devient paysanne et républicaine
Le déclin démographique et économique des campagnes va cependant
s’accompagner, tout au long de la troisième République, d’une valorisation
symbolique extrême des campagnes et des paysans1.
Alors, quand Gambetta déclare « Faisons chausser aux paysans les sabots de
la République, lorsqu’ils les auront chaussés la République sera invincible », l’enjeu
est considérable. La mission est de taille : rassurer ces petits propriétaires, protéger la
production agricole et les prix, assurer l’équipement routier, ferroviaire, postal,
scolaire, administratif au fin fond de la France rurale. Les sabots, c’est d’abord
Gambetta qui les chausse pour aller prêcher la bonne parole sur les places de marché,
vanter les bienfaits de la propriété et rassurer ainsi les paysans.
« La propriété dont on nous présente comme les ennemis, sans jamais
justifier en quoi que ce soit cette calomnie, la propriété est, à nos yeux, le signe
supérieur et préparateur de l’émancipation morale et matérielle de l’individu »
(Gambetta, discours d’Auxerre, 1er juin 1874, cité dans Histoire et Patrimoine, 2007,
n°5).
La création du ministère de l’Agriculture par Gambetta en 1881, jusque-là
confondu avec le ministère du Commerce, renforce cette idée que l’espace rural
appartient désormais aux agriculteurs. Gambetta le qualifiera d’ailleurs « de
ministère de l’Intérieur et de la Paysannerie » (Hervieu et Viard, 2001).
1
Mendras (1967) souligne que ce soutien au monde paysan était déjà à l’œuvre avant la troisième
République (Mendras, 1967, p.251).
64
sénateur pendant vingt ans). D’ailleurs, ses lois garantirent les intérêts des cotonniers
vosgiens face à la concurrence du Royaume-Uni et du Nouveau Monde.
Créée entre une défaite et une victoire, la République paysanne aux origines
si troublées n’a plus jamais vacillé. Et la troisième République a bien été cette
République paysanne que Gambetta et Ferry voulaient bâtir et voir durer. Cette
période constitue même une sorte d’harmonie fantasmée entre une terre, un mode de
vie, une école, une République.
65
des discours multiples, une charge symbolique unique qui font d’elles, de leurs
habitants et de leurs productions l’un des objets des passions bien françaises. »
(Hervieu, 2006, p.5)
1
Date à laquelle la population rurale est à son maximum.
66
Carte 14 - Date du « plein rural » dans les départements métropolitains
Source : élaboration de l’auteur d’après la carte de Merlin (1971). L’exode rural, p.15.
Carte 15 - Évolution de la population rurale depuis la date du « plein rural » jusqu’en 1962
Source : élaboration de l’auteur d’après la carte de Merlin (1971). L’exode rural, p.15.
La population rurale décline avant 1860 dans tout le Sud-Ouest et dans une
partie des départements du Sud-Est, de la Picardie, de la Normandie ainsi que dans
une majorité des départements du Nord-Est. Cette diminution se produit vingt ans
plus tard, voire plus, dans le Centre, la Bretagne, la Vendée, la Gironde, l’Aude et la
Lozère.
67
La carte 15 permet de distinguer les territoires où cette diminution de la
population rurale a été la plus marquée : tous les départements situés dans une large
diagonale allant des Ardennes aux Vosges jusqu’aux Hautes-Pyrénées et à l’Ariège,
s’étendant sur les massifs alpins et jusqu’au Var. Les départements les moins touchés
sont en partie ceux qui ont également eu un exode plus tardif, mais pas
systématiquement. Par exemple, l’Oise perd sa population rurale dès 1856 mais ses
pertes sont limitées. En revanche, la Nièvre ou l’Allier ne se dépeuplent qu’à partir
de la fin du XIXe ou début du XXe siècle mais vont perdre jusqu’à la moitié de leur
population rurale.
Merlin (1971) construit son analyse sur une délimitation du rural qui varie
dans le temps. Les communes rurales, selon le seuil de 2 000 habitants agglomérés,
varient, donc, d’un recensement à l’autre. Définies ainsi, les communes rurales ont
enregistré un solde migratoire de -7,5 millions, entre 1872 et 1931. Sur la période
1954-1962, ce solde était de -1 million, décomposé, cette fois, en 2,3 millions de
départs et 1,3 million d’arrivées. Ces chiffres ainsi que ceux de l’évolution de la
population rurale (graphique 5) montrent une accélération des départs après les
années 1950. La fin de l’exode rural ne paraît pas envisageable à cette époque.
68
Graphique 5 - Évolution de la population rurale et de la population urbaine 1856-1962
35 000 000
30 000 000
25 000 000
20 000 000
15 000 000
10 000 000
population rurale
5 000 000 population urbaine
0
1856 1861 1866 1872 1876 1881 1886 1891 1896 1901 1906 1911 1921 1926 1931 1936
Source : calculs de l’auteur d’après Merlin (1971). L’exode rural, INED, travaux et documents,
cahiers n°59, PUF.
Population rurale : population des communes de moins de 2 000 habitants non agglomérées, champ
redéfini à chaque recensement.
Population urbaine : population totale moins la population rurale.
Sur près d’un siècle, la population rurale est donc passée de 25 millions (en
1872) à 17 millions (en 1962). Dans le même temps, la population urbaine passait de
13 millions à 30 millions. La perte de près de 10 millions de personnes dans les
communes rurales signifie aussi qu’en 1872 66% de la population était rurale pour
36% en 1962 !
Le basculement d’une France rurale en une France urbaine n’a eu lieu que
très tardivement. Ce n’est qu’entre 1926 et 1931 que la population urbaine dépasse la
population rurale. Au Royaume-Uni ou en Allemagne, cette inversion s’est produite
avant la fin du XIXe siècle.
69
Ce travail repose sur une base de données historiques que l’on est parvenu à
constituer à l’échelle communale sur la quasi-totalité des départements
métropolitains à l’aide de données de l’INSEE et de l’INED. Ce recueil
d’informations et l’homogénéisation des données se heurtent à d’importantes
difficultés. Ces difficultés et la méthode d’estimation choisie pour évaluer les
données manquantes sont décrites dans l’annexe 2. La base de données ainsi
reconstituée porte sur les populations communales de 1872 à 1999 en France
métropolitaine, exception faite des départements de l’Eure et de ceux de la Corse
pour lesquels on n’a pu obtenir les informations.
La date de 1872 comme point de départ de l’analyse, date imposée par les
données historiques recueillies, est proche de l’année du « plein rural ». Le plein
rural correspond à la date où la population rurale était à son maximum, soit en 1861
selon Merlin (1971).
35 000 000
30 000 000
25 000 000
20 000 000
15 000 000
10 000 000
Communes Rurales
5 000 000
Communes Urbaines
0
1872 1881 1891 1901 1911 1921 1931 1936 1946 1954 1962 1968 1975 1982 1990 1999
70
Graphique 7 - Évolution de la population rurale et de la population urbaine entre 1872 et
1999 – délimitation des communes rurales établie en 1872
Délimitation sur la base de 2 000 habitants dans la commune en 1872
50 000 000
45 000 000
40 000 000
35 000 000
30 000 000
25 000 000
20 000 000
15 000 000
10 000 000 Communes pseudo-rurales
5 000 000 Communes pseudo-urbaines
0
1872 1881 1891 1901 1911 1921 1931 1936 1946 1954 1962 1968 1975 1982 1990 1999
71
croissance de la population de ces communes n’a cessé de croître, elles rattrapent
rapidement les communes qui étaient urbaines en 1872. Ces graphiques soulignent la
complexité des zonages actuels qui font que le dynamisme d’une commune rurale la
transforme en commune urbaine. Enfin, même lorsque l’on raisonne selon une
délimitation qui pénalise les chiffres du rural (communes qui sont encore rurales en
1999), on observe un accroissement démographique à partir de 1975.
250 Espace à
dominante rurale
Pôle urbain
200
Couronne
150 périurbaine
Communes
multipolarisées
100
Pôle rural
50 Couronne pôle
rural
0 autre rural
1872 1881 1891 1901 1911 1921 1931 1936 1946 1954 1962 1968 1975 1982 1990 1999
Sans surprise, les pôles urbains voient leur population progresser rapidement
dès 1872 (graphique 8). La périurbanisation va engendrer la hausse de la population
des couronnes périurbaines dès 1968, puis des communes multipolarisées en 1975,
mais aussi à partir de cette date celle des couronnes des pôles ruraux. Enfin, il
semblerait que les autres communes de l’espace rural aient cessé de se dépeupler.
L’allure du graphique incite à formuler l’hypothèse d’un repeuplement de ces autres
communes rurales dans les années qui viennent.
Ainsi, ce serait donc plus en termes de processus démographique qu’il
faudrait appréhender le « renouveau » rural qu’en termes de rupture ou de
renversement. La revitalisation de ces espaces s’inscrit dans un long cheminement et
non dans un bouleversement récent.
72
L’évolution de la population des pôles ruraux est particulièrement
intéressante (graphique 8). Les pôles ruraux ne connaissent pas l’essor
démographique des pôles urbains, mais ils ne se sont jamais dépeuplés. Le maintien
de la population rurale de ces bourgs confirme, entre autres, que l’exode rural se fait
en premier lieu sur de très courtes distances et vers des petites villes (Merlin, 1971).
Les migrations vers de très grandes villes s’étalent ainsi généralement sur plusieurs
générations. Les enfants iront un peu plus loin et dans des villes de plus grande
envergure que leurs parents.
de 1 000 à 1 999
200 hab.
de 2 000 à 4 999
150 hab.
de 5 000 à 9 999
hab.
100
de 10 000 à
49 999 hab.
50
de 50 000 à
99 999 hab.
0
plus de 100 000
1872 1881 1891 1901 1911 1921 1931 1936 1946 1954 1962 1968 1975 1982 1990 1999
hab.
On voit très clairement apparaître cet effet taille entre 1872 et 1936. La
croissance de la population est d’autant plus forte que la commune est grande. La
régression réalisée entre la variation de la population sur la période 1872-1936 et la
population des communes en 1872 confirme cet effet taille de la ville (annexe 3).
Après 1936, le périurbain en délimitation 1999 se repeuple et les tendances
diffèrent de la période (1872-1936). Par ailleurs, entre 1936 et 1946, apparaît un
point d’inflexion dû bien évidemment à la guerre. Cette chute de population est
73
relativement plus importante dans les plus grandes villes de France (plus de 100 000
habitants en 1872) qu’ailleurs. Ces communes, prises ensemble, n’ont d’ailleurs
jamais retrouvé le niveau de population qu’elles avaient en 1936. Dans le détail, on
note que Toulouse et Nantes sont les deux seules communes de ce groupe à être plus
peuplées aujourd’hui qu’avant la guerre.
Enfin, au-dessous du seuil de 2 000 habitants en 1872, les communes perdent
de la population (graphique 9). Ainsi, le seuil inflexible de 2 000 habitants en 1872
influence fortement l’analyse. S’il délimite bien les communes qui ont perdu des
habitants de celles qui sont restées stables ou qui en ont gagnés, ce seuil rend-il
compte du caractère rural ? Ou dit autrement, le rural serait donc défini par la perte
de population.
Si l’on suit les conseils de Mendras et que l’on applique un seuil de 15 000
habitants pour délimiter les communes rurales des communes urbaines en 1954 (30
ans avant la parution de son ouvrage comme il le préconise), il est vrai que l’exode
rural prend une autre allure (graphique 10).
74
Graphique 10 - Évolution de la population rurale et population urbaine, définie par un seuil
de 15 000 habitants en 1954.
45 000 000
Communes rurales seuil de 15 000 habitants
40 000 000
Communes urbaines seuil de 15 000 habitants
35 000 000
30 000 000
25 000 000
20 000 000
15 000 000
10 000 000
5 000 000
0
1872 1881 1891 1901 1911 1921 1931 1936 1946 1954 1962 1968 1975 1982 1990 1999
Source : INED, INSEE, estimations de l’auteur.
Population rurale : population des communes ayant moins de 15 000 habitants en 1954.
Population urbaine : population des communes ayant plus de 15 000 habitants en 1954.
Attention : les départements de l’Eure et ceux de la Corse ne sont pas pris en compte dans ce
graphique (données manquantes).
75
La faible distance parcourue par les migrants ruraux lors de l’exode rural a été
soulignée. Trois autres points semblent également intéressants à relever.
Les migrations des villes vers les communes rurales au cours de cette période
d’exode rural sont assez peu étudiées. Entre 1954 et 1962, 1,3 million de personnes
ont quitté une commune urbaine pour s’installer dans une comme rurale (Merlin,
76
1971). Ces migrations « inversées » ne compensent pas le mouvement d’exode rural,
hormis dans quelques départements et régions touristiques (PACA, Savoie, Hérault).
Dans une monographie de 1958 sur la région PACA1, Kayser montre que ces citadins
qui choisissent de s’installer dans le rural sont majoritairement des retraités et des
personnes sans activité, non systématiquement originaires de la région. Enfin, des
populations étrangères sont venues combler les besoins en main-d’œuvre des
campagnes françaises et atténuer ainsi l’hémorragie démographique. Sur la Côte
d’Azur, Kayser (1958) estime qu’en 1936 un quart de la population rurale était une
population étrangère récemment installée.
Ce mouvement en deux temps n’est pas sans rappeler celui qui s’opère
aujourd’hui en sens inverse. Ainsi, des retraités, par exemple, choisissent la
campagne comme lieu d’installation non pas tant parce qu’ils en sont originaires,
1
Monographie citée par Merlin 1971.
77
mais parce qu’ils s’y rendaient régulièrement en vacances, dans leur résidence
secondaire ou non (Cribier et Kych, 1999). Ces mobilités répétées lors des congés
sont le pendant des migrations temporaires de l’époque. On pourrait même établir un
parallèle entre le leitmotiv de l’époque et celui d’aujourd’hui : « tenir le coup »
durant le reste de l’année, financièrement à la fin du XIXe siècle, psychologiquement
aujourd’hui. Mais, sans aller jusque-là, le fait est que ces migrations temporaires se
transforment, en partie, en migrations définitives vers les campagnes depuis la fin
des années 1960.
1
Caisse nationale d’assurance vieillesse.
2
Se pose la question du coût réel de la vie. Ces ouvriers qui perdent en salaire en migrant de l’Île-de-
France vers les régions de l’Ouest ou du Sud, ont peut-être finalement un pouvoir d’achat accru à
l’arrivée.
3
Secteurs en tension selon l’arrêté du 2 août 2005 (JO du 3/08/2005) sont les suivants :
Agriculture : maraîchers, jardiniers, viticulteurs
78
homogène sur le territoire national, voire très implantées dans les espaces ruraux. Il
serait intéressant d’approfondir le débat en travaillant avec des ANPE locales qui
connaissent ces chiffres de « tension » du marché de l’emploi. Si les études
sectorielles sur le marché du travail existent, elles ne sont généralement pas réalisées
à des échelles infra-départementales et n’apportent pas de réponse claire à cette
question.
Un troisième facteur de l’exode cité par Merlin (1971) est la stabilité des
emplois urbains par rapport aux emplois ruraux lors de ces mouvements d’exode.
Aujourd’hui, il semblerait que ce soit l’inverse. La stabilité de la main-d’œuvre
rurale serait un critère décisif dans le choix d’installation des entrepreneurs
industriels ruraux (Jayet, 1996 ; Huiban, 2003). La difficulté de trouver un emploi
dans les espaces ruraux rend la main-d’œuvre « captive » et donc stable. De même,
les entreprises ont du mal à recruter, ce qui les incite à peu licencier. Les spécificités
de la main-d’œuvre rurale seront détaillées dans la deuxième partie de ce travail.
Enfin, une des motivations au départ venait aussi de l’attrait pour le mode de
vie urbain. Les femmes, par exemple, voyaient la ville comme le lieu de leur
émancipation et de leur ascension sociale, même si finalement elles occupaient des
emplois parfois difficiles, non déclarés, qu’elles étaient mal logées voire maltraitées.
Aujourd’hui, les enquêtes menées auprès des citadins soulignent systématiquement la
qualité de la vie à la campagne comme premier facteur d’installation des néo-ruraux
79
ou aspirants à cette « néo-ruralité ». Le mot « liberté » cristallise parfaitement ce jeu
de miroir. Symbole même de la ville durant des décennies, le mot « liberté » est
associé, par 68% des Français, à la campagne. Seulement 21% des Français
l’associent à la ville (Hervieu et Viard, 1996).
Ce sentiment de liberté à la campagne est probablement né avec l’arrivée des
néo-ruraux à partir de l’été 1968. Ces « baba cool » s’installèrent dans les fermes
isolées du Larzac, des Cévennes, du Gard, de l'Ariège… Porteurs d'idéaux
écologiques et pacifistes, opposés à la société de consommation, ces néo-ruraux
voyaient dans la campagne un lieu de rupture avec la ville et la société de
consommation. Même si beaucoup de ces « doux rêveurs » désertèrent la campagne
au bout du troisième hiver, les plus résistants ont certainement joué un rôle important
dans l'image de la vie à la campagne.
L’exode rural a laissé ses traces, rendues quasi indélébiles dans les esprits par
des ouvrages phares au titre percutant tel que celui de Gravier qui oppose Paris et le
désert français en 1947, ou encore celui de Mendras et la fin des paysans en 1967.
Ainsi, alors que les soldes migratoires s’inversent dans certaines campagnes
françaises dès 1960, l’idée même d’une fin de l’exode rural semble inconcevable.
Comme le souligne Kayser (1993), la mort des campagnes est sans nul doute l’une
des idées les plus médiatisées et répandues de l’époque. « L’exode rural si intense
qu’il ait été depuis plus d’un siècle, est loin d’être achevé » Merlin (1971, p.137). Il
l’était pourtant quand cette phrase a été publiée.
Mais peu à peu, face aux résultats des recensements, la fin de l’exode et le
renouveau rural vont s’imposer dans les travaux. Deux axes très liés dominent ces
80
analyses : le thème de la périurbanisation et celui du regain démographique. Ainsi,
rares sont les auteurs qui se sont penchés sur l’existence d’un éventuel nouveau
modèle de développement rural hors périurbanisation, rares également sont ceux qui
ont poussé l’analyse au-delà des seuls chiffres de population.
81
planification foncière de ce processus d’éparpillement de la ville, leur
livre sera un succès, le terme de rurbanisation aussi.
- Depuis les années 1990, c’est l’expression de périurbanisation qui
s’est imposée en France. Le regain démographique des espaces ruraux
serait entièrement imputable à l’étalement urbain, dû au reflux des centres
vers leur périphérie. Ces mécanismes de la déconcentration résultent des
coûts fonciers élevés de la ville-centre, de ses nuisances en termes de
congestion, de pollution ; ils sont favorisés par la baisse des coûts de
transports, leur essor, le développement des infrastructures routières, la
hausse des revenus des ménages, mais aussi par les politiques de
logements des années 1970/1980 (Bontron, 1993 ; Le Jeannic, 1997 ;
Anas et alii, 1998 ; Bruekner, 2000 ; Cavailhès et Schmitt, 2002).
L’augmentation de la population nationale ainsi que la structure des
ménages sont également des facteurs à prendre en compte (Cavailhès et
Schmitt, 2002).
Mais, quels que soient la définition et les termes employés, l’idée est bien
celle d’un développement des espaces ruraux intimement lié à l’étalement urbain.
« Le rural fait le plein à l’ombre des villes dynamiques … et il se vide lorsque le
semis urbain est clairsemé » (Bessy-Pietri et alii, 2000).
1
En France, on parle d’aire urbaine, en Belgique, des complexes résidentiels urbains, en Angleterre,
des local labour market areas.
82
touche le rural isolé en France, le remote rural1 anglais, le rural extérieur aux
Metropolitan Statistical Areas américaines » (Cavailhès et Schmitt, 2002, p.49).
En France, la périurbanisation, dont les limites géographiques ne cessent de
s’enfoncer dans l’espace rural, et les migrations des retraités restent les arguments
privilégiés pour tenter d’expliquer le renouveau du rural isolé2. En Angleterre, il
semblerait que l’on observe également une déconcentration des emplois qui
suivraient les travailleurs. « En Angleterre, par exemple, des entreprises se localisent
dans le remote rural pour offrir ses aménités à des travailleurs qu'elles peuvent ainsi
attirer par des avantages hors salaires » (Cavailhès et Schmitt, 2002, p.49)3.
1
Remote rural : rural isolé ou éloigné
2
Dans un second temps, les retraités ont besoin de services qui génèrent des emplois offerts à des
jeunes, locaux ou non (Cavailhès, Schmitt, 2002).
3
Il n’y a pas à notre connaissance d’études similaires en France sur le rural isolé.
83
entretenues par les grands-parents jusqu'à leur mort, fermeront définitivement leurs
volets » (Kayser, 1993, p.8).
C’est pour Hervieu et Viard (2001) deux mondes ruraux en tous points
différents qui se profilent pour les années à venir, la diagonale aride vieillissante, en
déprise et condamnée sans appel et les espaces ruraux de communication et de
« périurbanité ».
Comme le souligne aussi Le Bras (2007), cette diagonale du vide est
synonyme de désert français, et ne pouvait, selon avis d’experts, que s’enfoncer dans
cette spirale de dépeuplement : moins de personnes, moins de services publics et
privés, moins de dynamisme économique et ceux qui sont encore là partent dès qu’ils
le peuvent, dégradant ainsi un peu plus la situation démographique de ces espaces.
84
Meuse jusqu’aux Pyrénées en passant par le Massif Central, le Morvan…
(Hervieu, 2006), la Bretagne centrale, les collines de Normandie et du
Perche (Kayser, 1993) ;
- les concepts du renouveau, regain, naissance ou renaissance… des
campagnes sont essentiellement étudiés sous l’aspect démographique.
Très rares sont les études qui portent sur les autres aspects de cette
revitalisation, encore plus évocateurs des changements en cours (à
l’exception de quelques travaux sur lesquels on reviendra : Schmitt et alii,
2002, Aubert et Blanc, 2002).
85
86
Chapitre 3 - La vitalité des espaces ruraux
87
Par ailleurs, même si les espaces sous faible influence urbaine participent
certainement à la périurbanisation, ils correspondent peu aux critères et
représentations qui alimentent la littérature sur la métropolisation. Avec une densité
de 31 habitants au km² et une moyenne d’à peine 373 habitants par commune, cet
espace a un « air » statistique très rural. En outre, on est bien en-deçà des seuils de
densité qui prévalent à l’OCDE ou à l’UE pour qualifier le rural.
88
gagner des espaces isolés interroge l’hypothèse de périurbanisation pour comprendre
ces tendances.
1,5
SN54-62 / pop62 SN62-68 / pop68
1,3
SN68-75 / pop75 SN 75/82 / pop82
1,1 SN82/90 / pop90 SN90-99/pop99
0,9
0,7
0,5
0,3
0,1
-0,1
-0,3
-0,5
pôle urbain com. com. pôle rural cour. pôle rural ss rural isolé*
périurb. multipol. rural faible influ
urbaine*
0,5
-0,5
-1
-1,5
pôle urbain com. com. pôle rural cour. pôle rural ss rural isolé*
périurb. multipol. rural faible influ
urbaine*
89
Graphique 12 - Évolution démographique, entre deux recensements, pour les communes
enquêtées depuis 2004
100 000
50 000
-50 000
pôle urbain com. com. pôle rural cour. pôle rural ss rural isolé*
périurb. multipol. rural faible influ
urbaine*
90
Graphique 13 - Évolution démographique, entre deux recensements, pour les communes de
l’espace à dominante rurale, enquêtées depuis 2004
10 000
-10 000
-20 000
-30 000
pôle rural cour. pôle rural rural ss faible influ rural isolé*
urbaine*
20 000
1962/1968 1968/1975 1975/1982
15 000 1982/1990 1990/1999 1999/2005
10 000
5 000
-5 000
-10 000
pôle rural cour. pôle rural rural ss faible influ rural isolé*
urbaine*
20 000
10 000
-10 000
-20 000
-30 000
pôle rural cour. pôle rural rural ss faible influ rural isolé*
urbaine*
91
Les graphiques 12 et 13 reprennent les dernières données des recensements
2004, 2005 et 2006. Le champ des enquêtes menées depuis 2004 par l’INSEE couvre
aujourd’hui 60% des communes et de la population métropolitaine. Le changement
de méthode rend bien entendu le calcul des évolutions 1999/2004, 2005 ou 2006 très
délicat. L’observation des résultats obtenus sur ces 22 000 communes enquêtées tend
à renforcer notre prudence sur les résultats de ces calculs.
Le graphique 12 est peu lisible car il est construit sur des valeurs et non sur
des pourcentages1. Ce graphique reprend les variations de la population en ZAUER
(2002). Selon ces chiffres, les variations annuelles de la population seraient de plus
de 117 000 personnes dans les pôles urbains sur la période 1999/20052, soit près du
double des gains annuels enregistrés sur la période 1990/1999. Ce regain
démographique résulte d’un excédent naturel annuel à hauteur de celui de 1962/1968
et d’une légère réduction du déficit migratoire déjà amorcée entre 1982 et 1990.
1
Les évolutions en pourcentage sont moins rigoureuses puisque la population totale 2004 ou 2005 ou
2006 reste inconnue, les dates d’enquêtes variant d’une commune à l’autre. Lorsque l’analyse
l’impose, on travaille sur une population totale estimée en 2004, 2005 ou 2006, comme pour l’analyse
de ratios (annexe 1).
2
Il s’agit bien des évolutions 1999/2004, 1999/2005 ou 1999/2006 selon les communes, mais pour
une meilleure lisibilité on notera 1999/2005.
92
Issus de deux types de recensements, ces résultats confirmeraient, néanmoins,
le processus de repeuplement des espaces ruraux déjà évoqué et que l’on propose de
localiser plus précisément.
Le zonage introduit, à présent, est celui des bassins de vie de l’INSEE1. La
définition du bassin de vie est la suivante : « Le bassin de vie est le plus petit
territoire sur lequel ses habitants ont un accès aux principaux services et à l’emploi»
(INSEE, 2003, p.13). Ces bassins de vie sont au nombre de 1 916 en France
métropolitaine. Ils sont construits autour d’une commune qui polarise les
déplacements de la population en termes d’accès à l’emploi et aux « services
intermédiaires »2. Cette commune, qui polarise les déplacements des habitants du
bassin, peut être :
- un pôle urbain, on parlera pour plus de commodité de « bassins pôles
urbains » ;
- une commune du périurbain, on emploiera le terme de « bassins
périurbains » ;
- un pôle rural ou une autre commune de l’espace à dominante rurale,
on les qualifiera de « bassins ruraux ».
1
On reviendra plus en détail sur la construction de ces bassins ainsi que les intérêts et les limites de ce
maillage dans le premier chapitre de la troisième partie de ce travail.
2
Les services « intermédiaires », définis comme tels, par l’INSEE correspondent à des services qui ne
sont pas des services de proximité (commerces de détail par exemple) et qui ne sont pas, non plus,
trop élitistes (opéra, par exemple). Le détail des services considérés et leur pondération dans la
construction de ces bassins est indiqué dans l’annexe 1 de la troisième partie.
93
- les bassins de vie qui ont un solde naturel positif insuffisant pour
compenser les soldes migratoires négatifs sont appelés bassins « en
déclin » (diminution de la population) ;
- les bassins de vie qui ont un solde naturel excédentaire suffisant pour
compenser leur déficit migratoire sont appelés bassins
« saturés » (augmentation la population) ;
- les bassins de vie dans lesquels la population augmente grâce à
l’excédent migratoire et naturel sont appelés bassins « dynamiques ».
Les choix des qualificatifs de ces six situations possibles ont été guidés par
les types de territoires concernés et les évolutions constatées depuis 1962.
Plus précisément, les trois premières catégories (« en crise », « en
transition », « attractif ») sont représentatives des « bassins ruraux »1. En effet entre
75% et 85% des bassins connaissant ce type de situation démographique sont des
bassins ruraux. Par exemple, sur 212 bassins de vie « en crise » démographique, 181
sont des bassins ruraux.
Le qualificatif « en transition » a été choisi au vu de la dynamique de ces
espaces. En effet, les trois quarts des bassins en transition, très majoritairement
ruraux, étaient dans une situation qualifiée de « crise » lors des recensements
précédents celui de 1999. Leur solde migratoire est donc devenu positif. De plus,
deux tiers des bassins « attractifs » en 1999 sont passés d’une situation de « crise » à
une situation d’attractivité migratoire qui leur permet aujourd’hui de voir leur
population progresser. Le terme de « transition » renvoie donc à ce mécanisme de
repeuplement qui passe par un renversement et un accroissement des soldes
migratoires. Les soldes migratoires deviennent positifs, progressent jusqu’à
compenser les soldes naturels qui restent déficitaires.
Les « bassins pôles urbains » sont eux surreprésentés parmi les bassins dits
« en déclin » et « saturés ». Là encore, le qualificatif de « déclin » correspond à une
situation de dégradation démographique sur les dernières décennies. La majorité de
ces bassins avait encore une croissance démographique lors des recensements
antérieurs. Déjà déficitaires en termes de migrations, ils voient aujourd’hui leurs
soldes naturels se dégrader (même s’ils restent positifs). Certains de ces bassins
caractéristiques du Nord-Est de la France ont, à présent, un solde naturel négatif et
sont passés dans une situation qualifiée de « crise » démographique. « En déclin »
1
Rappel : bassins de vie polarisés par un pôle rural ou une autre commune de l’espace à dominante
rurale.
94
fait référence aux soldes naturels qui en chutant cessent de compenser le déficit
migratoire, jusqu’à devenir, eux aussi, négatifs. Le terme « saturé » est employé pour
rendre compte de l’amoindrissement du solde migratoire des « bassins pôles
urbains », surreprésentés dans ce type de dynamique démographique.
Enfin, les bassins de vie « dynamiques » (les trois variables sont positives)
sont majoritairement des bassins polarisés par une commune du périurbain, 30%
d’entre eux sont des bassins ruraux et 20% sont polarisés par un pôle urbain. Les
deux tiers des bassins ruraux aujourd’hui dynamiques bénéficient depuis 1962 de
soldes naturels positifs. Leur attractivité migratoire s’est renforcée fortement à partir
de 1975. Ces bassins ruraux « dynamiques » sont plutôt concentrés dans le Nord-
Ouest.
95
Cartes 16 à 21 - Caractéristiques démographiques des bassins ruraux
entre deux recensements depuis 1962
1962/68
1968/75
1975/82
1982/90
1990/99
Source : Calculs de l’auteur d’après INSEE, recensements 1962, 1968, 1975, 1982, 1990, 1999.
96
Les cartes 16 à 21 reprennent cette segmentation à partir de 1962, uniquement
pour les « bassins ruraux » afin d’isoler le fait rural et d’illustrer le processus de
repeuplement de ces espaces.
Entre 1962 et 1968, la quasi-totalité des bassins ruraux ont un solde
migratoire négatif. Seuls quelques bassins du Sud-Est, du pourtour méditerranéen, du
littoral Atlantique au sud de la Rochelle, ou encore en périphérie de la région
francilienne enregistrent une croissance de leur population. De nombreux bassins
ruraux présentent encore des soldes naturels positifs dans l’Ouest, le Nord, le Nord-
Est, mais également dans le Cantal, l’Aveyron et la Lozère.
Entre 1968 et 1975, le dépeuplement rural se poursuit. Plus précisément, alors
que les bassins ruraux du Nord-Est, du Nord et du Nord-Ouest (hors pointe bretonne)
conservent des soldes naturels positifs (mais la population décroît), les bassins du
Sud-Ouest et du Massif Central cumulent à présent déficit migratoire et naturel.
À partir de 1975/1982, la situation évolue sous l’effet des mouvements
migratoires. Ces migrations s’accompagnent d’un solde naturel toujours positif dans
l’Ouest. Une partie des bassins situés au sud de l’Île-de-France, dans le Sud-Ouest, le
Sud-Est et sur le pourtour méditerranéen deviennent attractifs et voient peu à peu leur
population augmenter. Ce processus de repeuplement rural par migrations se poursuit
jusqu’à dessiner une France rurale en 1999 très différente de celle des années 1960.
Seuls quelques départements du Nord-Est, de la Bourgogne et le Cantal concentrent
des bassins ruraux en crise pour la période 1990/1999.
Ainsi entre 1990 et 1999, 70% des bassins ruraux ont un solde migratoire
positif. 50% d’entre eux ont un solde migratoire qui progresse sur la dernière période
par rapport à la précédente (1982/1990) (cf. carte 22). Les 20% restants sont donc
toujours très attractifs mais moins que sur la période antérieure. La géographie de ces
« 20% restants » peut amener à formuler l’hypothèse d’une certaine saturation
foncière dans ces régions très convoitées (Sud-Est, Pyrénées-Orientales, Dordogne).
Enfin, dans les bassins ruraux qui présentent toujours des soldes migratoires négatifs,
la situation s’est tout de même améliorée dans un cas sur deux.
97
Carte 22 - Comparaison des soldes migratoires des bassins ruraux entre 1982/90 et 1990/99
Source : calculs de l’auteur, d’après INSEE, recensements de la population 1982, 1990 et 1999.
Source : calculs de l’auteur, d’après INSEE, recensements 1999, 2004, 2005, 2006.
98
Pour la période 1999/20051, en tenant compte des dates d’enquêtes du
nouveau recensement, on obtient, toujours selon la même segmentation, la carte 23.
Les résultats par bassin reprennent les chiffres des 22 000 communes enquêtées
jusqu’en juin 2007. Le rapprochement des deux recensements conclurait à la quasi-
résorption des bassins ruraux en crise et à la généralisation des bassins dits attractifs
(la population augmente grâce aux soldes migratoires). Si les dynamiques constatées
depuis 1975 amènent à penser que c’est probablement dans ce sens qu’évoluent les
bassins ruraux, le résultat, en l’espace de six ans, paraît très « spectaculaire ». Le
dynamisme démographique généralisé sur tout le Nord du pays, ainsi que dans le
Nord-Est, où les soldes migratoires seraient tout à coup devenus positifs2, peut
étonner. Il semble que la prudence s’impose non pas tant sur les nouveaux chiffres ou
sur les anciens, mais sur un travail visant à comparer 1999 et 2005. Le repeuplement
généralisé des campagnes auquel veut croire Le Bras (2007) d’après ces chiffres ne
semble pas encore d’actualité.
1
Pour le détail des calculs de la population estimée, voir en annexe 1.
2
Ceci est d’autant plus troublant que la cartographie des migrants régionaux lors de ces derniers
recensements fait clairement apparaître le Nord-Est comme terre d’exil plutôt que comme terre
d’accueil (cf. carte 19 de la première partie).
3
Voir aussi le site de Christophe Terrier : www.christophe-terrier.com
99
l’atout touristique de la ville comble le déficit de consommation des Parisiens. À
l’échelle de l’Île-de-France, la région est déficitaire (Davezies, 2007).
Autre exemple, la Lozère qui mise sur 90 000 habitants en 2010 (en 1999,
elle en comptait 70 000) a finalement déjà atteint son objectif. Elle bénéficie , en
effet, d’un taux de présence de 125. Ce taux est le rapport entre la population
présente à l’année et la population résidente, il est indiqué en indice. Un indice égal à
100 signifie que la population présente est égale à la population résidente. Un indice
égal à 125, comme en Lozère, indique qu’il y a, par rapport à la population recensée,
25% de personnes en plus à l’année dans le département. La Lozère aurait donc 94
000 personnes présentes à l’année en 1999. L’incidence sur les besoins en services
publics, médecins, commerces et équipements divers est directement liée à cette
population présente.
1
Revenu imposable par habitant, source DGI, en euro constant 2005.
100
Carte 24 - Taux de présence en 2003 dans les communes métropolitaines
Source : Calculs de l’auteur d’après les données du ministère du Tourisme, de l’INSEE et de la DGI.
Discrétisation en quintiles.
Le taux de présence est le rapport entre la population présente estimée et la population résidente
recensée. Il est exprimé en indice. Un indice égal à 100 signifie que la population présente est égale à
la population résidente. Un indice de 110, par exemple, indique que la population présente à l’année
est supérieure de 10% à la population résidente ou recensée (cf. annexe 4).
Pop. présente
Taux de Population équivaut à la
présence présente en population
2003 2003 recensée dans
les années…
Pôles urbains 98 35 445 832 (jamais atteint)
Communes périurbaines 100 9 659 350 (jamais atteint)
Communes multipolarisées 104 3 093 774 (jamais atteint)
Pôles ruraux 115 3 505 081 (jamais atteint)
Couronnes pôle rural 108 275 162 1930
Rural ss faible influence urbaine 113 4 662 840 1940
Rural isolé 127 4 015 769 1950
Plus précisément, d’après ces estimations, les pôles ruraux comptent 15% de
personnes présentes en plus que de personnes résidentes, leurs couronnes 8%, le rural
101
sous faible influence urbaine 13% et le rural isolé 27% ! Soit, pour ce dernier type de
territoire, plus d’un quart de population en plus à l’année, certes non résidente mais
bel et bien présente. D’après ces estimations, les communes du rural isolé auraient
finalement retrouvé leur population des années 1950, date à laquelle ces campagnes
étaient encore très peuplées. En effet, les spécialistes s’accordent à dire que la
deuxième vague de l’exode rural amorcée au sortir de la guerre a particulièrement
touché les espaces ruraux les plus isolés (cf. chapitre 2 de cette partie).
1
Dans le cadre d’un rapport de recherche réalisé pour la Poste, on avait mis en évidence le lien
significatif entre les chiffres d’affaires réalisés dans les activités du courrier et ces taux de présence.
L’impact était d’autant plus fort que la demande se situait dans les zones rurales, zones où, en
raisonnant uniquement sur des populations recensées, en statique qui plus est, la Poste avait oublié
qu’elle bénéficiait, certes d’un réseau de bureaux peut-être trop lourd et trop dense, mais d’un réseau
hautement envié par les prestataires de services de proximité (Talandier, 2005).
102
II-1 Restructuration de l’emploi rural
103
Graphique 15 - Contribution aux diminutions et aux augmentations de l’emploi total en
province et dans l’ensemble des autres communes rurales (ZAUER 2002)
ouv. qualif.
techniciens
employ. de comm.
ouv. agri.
cadres d'ent.
Agric. Exploit.
Une analyse plus fine et plus récente devrait permettre de préciser ces
premiers éléments.
104
Tableau 8 - Évolution de l’emploi salarié du secteur privé entre 1993 et 2005
1
Le graphique qui détaille les évolutions année par année est donné en annexe 5 pour montrer la
régularité des courbes, exception faite des couronnes des pôles ruraux, confirmant, là encore, le trop
faible effectif de ce groupe.
105
mixtes recouvrent « la reproduction sociale élargie » et « les services de circulation
et d’intermédiation ».
Tableau 9 - Structure et évolution de l’emploi salarié privé basique pur, domestique pur et
mixte entre 1993 et 2005 par type de communes
Secteurs basiques purs Secteurs domestiques purs Secteurs mixtes
Emplois Emplois Emplois
Evol. Evol. Evol.
Part, pour Part, en pour Part, pour
1993/2005, 1993/2005, 1993/2005,
en % 1 000 % 1 000 en % 1 000
en % en % en %
hab. hab. hab.
Pôles urbains 18,2 61 -14,0 27,3 92 24,7 54,6 183 30,0
Communes périurbaines 28,3 41 9,2 24,5 35 47,9 47,2 68 58,2
Communes multipolarisées 36,2 49 -8,9 24,2 33 33,3 39,6 53 38,8
Pôles ruraux 34,1 100 -10,0 30,0 88 33,3 36,0 105 41,9
Couronnes pôle rural 33,0 25 -2,0 21,3 16 24,1 45,8 35 24,5
Rural ss faible influence urbaine 32,2 47 -6,3 31,9 47 36,3 35,9 53 34,2
Rural isolé 34,6 43 -1,1 26,4 33 34,2 38,9 48 37,7
France métropolitaine 21,4 57 -10,2 27,2 72 27,7 51,4 136 32,8
Source : calculs de l’auteur d’après UNEDIC.
En bleu : les valeurs supérieures à la moyenne nationale.
Définition du basique pur, du domestique pur et du mixte donnée en annexe 6.
Le tableau 9 indique que les activités basiques pures occupent une part plus
importante dans l’emploi des espaces ruraux que dans celui des aires urbaines. Le
nombre d’emplois basiques pour 1 000 habitants en 20051 est particulièrement élevé
dans les pôles ruraux. Enfin, alors que ces emplois diminuent en France (-10,2% en
12 ans), ils progressent dans les communes périurbaines selon la logique de
périurbanisation des activités. Ils se maintiennent dans le rural sous faible influence
urbaine et diminuent moins rapidement dans les couronnes des pôles ruraux et dans
le rural isolé qu’en moyenne en France.
Les emplois domestiques purs qui comprennent toutes les activités de
commerce de détail, le secteur médical de ville (médecins, infirmières,
kinésithérapeutes…), les services à la personne, etc. sont logiquement mieux
implantés dans les pôles urbains ou ruraux que dans les autres types de communes.
Cependant, ce type d’emplois progresse plus rapidement dans les communes
périphériques ou le rural isolé que dans les pôles (hors couronne d’un pôle rural).
Enfin, les activités mixtes du type services aux entreprises mais aussi
bâtiments et travaux publics (BTP) sont des activités caractéristiques des pôles
urbains. Les évolutions montrent que ces secteurs progressent plus rapidement dans
1
La population 2005 est estimée à partir des nouveaux recensements de la population INSEE sur les
communes enquêtées et les montants départementaux consolidés. La population des communes non
enquêtées est obtenue par différence entre population départementale et population enquêtée, répartie
au prorata du poids de ces communes dans la population départementale de 1999.
106
les espaces périurbains, les pôles ruraux ou les autres communes rurales que dans les
pôles urbains.
Des différences entre le rural isolé et le rural sous faible influence urbaine
sont également à noter (annexe 8). Le rural isolé enregistre de plus fortes
augmentations des emplois dans les activités domestiques et touristiques que la
moyenne française, ce qui n’est pas le cas du rural sous faible influence urbaine.
Inversement, le rural sous faible influence urbaine est beaucoup plus performant que
le rural isolé et que la moyenne française dans des activités du secteur secondaire
(fabrication du verre, industrie du meuble, chaudronnerie, industrie laitière, etc.). Ces
deux types d’espace voient leurs emplois progresser moins vite ou diminuer plus
rapidement que la moyenne française dans cinq secteurs (industrie du textile,
réparation automobile, commerce de voiture, pharmacie, commerce de gros
1
Les tableaux commentés ici sont présentés dans l’annexe 7. Ces tableaux indiquent les quinze
secteurs qui ont enregistré les plus fortes progressions de l’emploi salarié privé entre 1993 et 2005
ainsi que les quinze secteurs qui enregistrent les plus faibles progressions ou les plus fortes
diminutions. Ces résultats sont indiqués pour chaque type de territoire.
107
alimentaire). En revanche, ils sont plus performants pour l’ensemble des autres
secteurs.
108
L’emploi salarié privé a progressé rapidement entre 1993 et 2005 dans les
espaces ruraux, en raison principalement de l’essor des secteurs domestiques, puis
des secteurs mixtes. Comment ont évolué les emplois des travailleurs indépendants ?
Les résultats en termes de nombre d’emplois pour 100 000 habitants sont plus
instructifs.
109
Tableau 12 - Nombre de travailleurs indépendants pour 100 000 habitants, en 2005
Les professions libérales les mieux implantées dans les pôles urbains sont les
auxiliaires de santé, les médecins, les dentistes et les divers conseillers en entreprises.
Du point de vue de l’offre médicale, les communes rurales isolées et sous faible
influence urbaine n’ont, en revanche, rien à envier aux communes périurbaines.
Derrière les évolutions négatives de l’emploi total rural entre 1990 et 1999 se
cachaient bien de profondes mutations et un dynamisme significatif de l’emploi local
110
hors agriculteurs. Les communes sous faible influence urbaine semblent par ailleurs
plus à même d’attirer et/ou de retenir des activités des secteurs industriels tandis que
le rural isolé renforce son offre de commerces et services à la population résidente et
touristique. Enfin, le maillage de ces espaces peu denses par les entrepreneurs
locaux, constitue très certainement une force économique vitale.
Sans surprise, le tableau 13 indique que 80% des emplois publics sont
regroupés dans les pôles urbains avec un taux proche de 90% pour la fonction
1
Ces données sont disponibles à l’adresse suivante :
http://www.sae-diffusion.sante.gouv.fr/Collecte_2004/dwd_dwsgen3.aspx
111
publique hospitalière et 73% pour la fonction publique territoriale. L’ensemble des
espaces ruraux ne regroupent que 11% de ces emplois pour 18% de la population.
Avec 103 fonctionnaires pour 1 000 habitants (soit 1 pour 10), les pôles
urbains se distinguent clairement des autres espaces. Les pôles ruraux bénéficient
d’un emploi de la fonction publique pour 12 habitants. Ce taux passe à environ un
emploi pour 30 habitants dans le périurbain et le rural hors pôle rural, il est plus
faible dans la couronne des pôles ruraux.
Ainsi, les espaces périurbains qui connaissent les plus fortes progressions
démographiques et économiques ne paraissent pas mieux « équipés » en termes
d’emplois publics que les espaces ruraux les plus isolés.
112
Cartes 25 et 26 - Nombre d’emplois de la fonction publique pour 1 000 habitants, en 2004
A la commune Au département
La carte 25 confirme la présence des emplois publics dans les pôles urbains
mais aussi ruraux. La carte 26 souligne les mécanismes de solidarité territoriale au
profit des départements ruraux de la diagonale aride et des départements montagneux
ainsi que le poids du chef-lieu de région.
113
III FORTE CROISSANCE DES REVENUS DANS LES ESPACES RURAUX
140
cour. pôle
130 rural
120 rural isolé
110
100 rural ss influ
urbaine
1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004
Source : DGI, élaboration de l’auteur.
Les données DGI seront toujours considérées en euro constant 2005. Cette note ne sera pas reprise.
Graphique 17 - Évolution du revenu imposable par habitant, en indice base 100 en 1984
indice
160 pôle urbain
pôle rural
130
cour. pôle
120
rural
rural isolé
110
rural ss influ
100 urbaine
1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004
1
Les données de revenu sont systématiquement issues des sources de la DGI et sont présentées en
euro constant 2005.
114
Étant données les tendances démographiques de ces espaces sur les vingt
dernières années, on observe une plus forte croissance du revenu par habitant1 dans
les communes de l’espace à dominante rurale hors pôle rural et, en premier lieu, dans
le rural isolé. On est donc face à un rattrapage ou une convergence des niveaux de
revenus entre ces territoires.
1
La population est estimée à partir des recensements de 1982, 1990, 1999 et 2004/2006 par trend
entre deux recensements. Pour les recensements partiels de 2004 à 2006, on réaffecte la différence
entre les populations départementales de l’INSEE et la population des communes enquêtées aux
communes des départements non enquêtées au prorata de leur poids en 1999.
115
Les écarts les plus importants entre revenu déclaré et RDB estimé sont
enregistrés dans les pôles ruraux, le rural isolé, le rural sous faible influence urbaine
puis dans les pôles urbains. Ces territoires bénéficient d’importants revenus sociaux
cumulés à de plus faibles reversements d’impôts par habitant pour le rural. Par
exemple, avant transferts et avant impôts, le revenu par habitant dans le rural isolé
est inférieur de près de 24% à la moyenne française, l’écart en termes de RDB « n’est
plus que de » 20%. Dans les pôles ruraux, on passe ainsi d’un écart de près de
-14,5% à -7% par rapport à la moyenne nationale. Inversement, le périurbain est
plutôt perdant au jeu de la solidarité territoriale que permettent les budgets publics et
sociaux. Des fortes différences existent cependant d’une région à l’autre qu’il
conviendra de préciser dans l’analyse plus territorialisée des espaces ruraux
(troisième partie).
Traitements Allocations
Retraites BA BIC BNC RF RCM Total
et salaires ASSEDIC
Pôles urbains 63,2 3,9 24,0 0,1 1,8 3,4 2,6 1,0 100,0
Communes périurbaines 66,0 3,4 21,3 0,9 2,6 2,2 2,6 0,9 100,0
Communes multipolarisées 62,4 3,6 24,3 1,5 2,8 2,0 2,6 0,8 100,0
Pôles ruraux 53,4 3,7 32,2 0,7 3,5 2,7 2,9 1,0 100,0
Couronnes pôle rural 59,1 3,3 27,1 2,4 3,1 1,2 2,7 1,0 100,0
Rural ss faible influence urbaine 53,8 3,6 30,1 2,7 3,7 2,2 2,9 1,0 100,0
Rural isolé 48,8 3,4 33,5 3,5 4,3 2,5 3,1 1,0 100,0
France métropolitaine 62,0 3,7 24,7 0,7 2,3 3,0 2,7 1,0 100,0
Source : DGI, élaboration de l’auteur.
En bleu : valeurs supérieures à la moyenne.
BA : bénéfices agricoles ;
BIC : bénéfices industriels et commerciaux ;
BNC : bénéfices non commerciaux ;
RF : revenus fonciers ;
RCM : revenus de capitaux mobiliers.
La structure des revenus déclarés aux impôts, par type de territoire, fait
apparaître des différences auxquelles on pouvait s’attendre. Les traitements et
salaires d’activités pèsent relativement plus lourd dans l’espace urbain que rural.
Alors que dans les communes périurbaines, plus des deux tiers des revenus sont de
cette nature, ils n’en représentent pas la moitié dans le rural isolé. Dans ce rural isolé,
comme dans les autres communes de l’espace rural, le poids des retraites est plus
marqué (environ un tiers des revenus pour moins d’un quart dans l’urbain) ainsi que
le poids des bénéfices des travailleurs indépendants (hors BNC). On retrouve ici le
résultat déjà évoqué précédemment, à savoir la plus forte présence de travailleurs
indépendants (et des agriculteurs bien sûr) dans les espaces ruraux.
116
Là encore, de fortes disparités apparaissent entre les départements français en
structure comme en tendance (cf. annexe 11). Les traitements et salaires pèsent plus
fortement dans les revenus des départements situés au nord d’une ligne
Cherbourg/Briançon mais augmentent plus vite au sud de cette ligne. Le poids des
retraites est plus marqué dans les départements ruraux et progresse vite dans le Sud
et l’Ouest. Les bénéfices non commerciaux sont plus importants sur le pourtour
méditerranéen (médecins) et à Paris. Ils progressent fortement au sud de la Loire et
dans l’Ouest. Les bénéfices industriels et commerciaux sont plus importants dans les
revenus locaux des départements ruraux. Ils progressent essentiellement dans le Sud
et l’Ouest (ils diminuent ailleurs).
117
Tableau 17 - Poids des immigrants régionaux entre 1990 et 1999, dans la population de
1999 par type de communes
Part des immigrants
régionaux dans la
population, en %
Pôles urbains 12,2
Communes périurbaines 10,0
Communes multipolarisées 9,7
Pôles ruraux 11,7
Couronnes pôle rural 8,8
Rural ss faible influence urbaine 11,6
Rural isolé 11,1
France métropolitaine 11,6
1
Cela ne signifie pas qu’ils ont changé de type de territoire mais seulement qu’ils ont changé de
région.
118
L’attractivité auprès des ouvriers et des artisans-commerçants est concordante
avec les conclusions précédentes sur la structure des emplois ruraux (présence et
maintien des secteurs industriels et plus forte présence de travailleurs indépendants).
Enfin, on note que 36% des retraités qui ont changé de région entre 1990 et 1999
habitent en 1999 dans l’espace à dominante rurale dont 25% dans une autre
commune de l’espace rural. à savoir principalement dans le rural isolé ou dans le
rural sous faible influence urbaine. Cette attractivité auprès des retraités constitue un
atout et une spécificité de ces espaces. Parmi les motivations des retraités, se
confirme statistiquement un résultat bien connu des sociologues, à savoir
l’installation dans sa résidence secondaire à l’âge de la retraite.
Les travaux de Cribier et de Kych (1999) sur les migrations des retraités
parisiens ont marqué les esprits. Dans cette étude, les auteurs montrent que les
migrations de retraite sont liées aux lieux de villégiature que l'on a fréquentés par le
passé. La commune de migration est connue par 88% des migrants (76% y ont passé
des vacances, alors que seuls 20% en sont originaires et 13% y ont travaillé). Le tiers
des enquêtés possédait auparavant une résidence secondaire sur place et, pour les
deux tiers d'entre eux, l'achat avait été fait précisément pour la retraite.
Dans un interview accordé au Monde Initiative en 2003, Jean Viard explique
que la résidence secondaire est tout aussi déterminante que les souvenirs d'enfance
dans le choix d’un lieu de vie campagnard. Pour Viard, « L'établissement à la
campagne apparaît comme une manière de prolonger ses vacances. Par ailleurs, que
la France détienne la record mondial de résidences secondaires par habitant joue
sans doute un grand rôle dans l'importance de la migration que l'on constate
aujourd'hui » (Viard, 2003, Interview dans Le Monde Initiative, p.7-11).
Plus généralement, une enquête menée dans le Luberon (Bachimon, 2000),
montre qu’un résident secondaire sur cinq envisage à moyen terme de s'installer
définitivement dans sa résidence secondaire, 25% des propriétaires prévoient d'y
passer plus de temps plus souvent, 35% ne changeront pas leur rythme et seulement
5% veulent la revendre.
119
Carte 27 - Part des retraités dans les immigrants 1990/1999
Carte 28 - Taux de résidences secondaires dans le parc de logement 1990
Carte 27 Carte 28
Les cartes 27 et 28 représentent la part des retraités dans les immigrants entre
1990 et 1999 pour la première, le poids des résidences secondaires dans le parc de
logements en 1990, pour la seconde. Ce qui ressort visuellement de ces deux cartes
est confirmé par l’analyse statistique (cf. annexe 12). Les résultats de la régression
entre la part des retraités dans les immigrants et la part des résidences secondaires
dans le parc de logements sont significatifs. La part des résidences secondaires
explique 30% de la variance des migrations des retraités sur l’ensemble des bassins
de vie. Les bassins qui s’écartent de ce modèle sont les bassins de vie des massifs
alpins (stations de ski). Le taux de résidence secondaire y est parmi le plus élevé de
France sans pour autant que les migrations de retraite y soient massives. On ne va
pas nécessairement vivre à plus de 1 500 mètres d’altitude à l’année même si l’on y
possède un bien immobilier. La même régression appliquée cette fois aux seuls
bassins ruraux est similaire. Le plus faible coefficient de détermination obtenu sur
l’ensemble des bassins ruraux (R²=0.18) est lié à la présence de ces stations de ski.
Une fois ces bassins ruraux montagneux ôtés (altitude supérieure à 1 500 mètres), le
taux de résidence secondaire explique près de 40% de la variabilité des migrations de
retraites.
120
Il y aurait donc un lien entre les lieux où l'on passe ses vacances et
l'implantation des retraités mais aussi des « néo-ruraux » plus généralement. Sylvie
Le Calvez, rédactrice en chef de Village magazine1 constate, en effet, que les gens
qui veulent s'installer à la campagne pensent d'abord aux régions qu'ils ont connues
en vacances.
Tableau 19 - Poids des immigrants régionaux sur les cinq dernières années
dans la population 2005
Part des immigrants
régionaux dans la
population, en %
Pôles urbains 6,2
Communes périurbaines 6,0
Communes multipolarisées 6,4
Pôles ruraux 7,7
Couronnes pôle rural 6,0
Rural ss faible influence urbaine 8,4
Rural isolé 7,8
France métropolitaine 7,1
Source : INSEE, élaboration de l’auteur.
Les données du nouveau recensement portent sur les personnes qui habitaient
dans une autre région cinq ans avant la date de l’enquête. Selon les derniers résultats,
il semble que l’attractivité migratoire auprès de ce type de migrants se soit renforcée
dans les espaces ruraux et notamment dans le rural isolé. En effet, en moyenne en
France, 7,1% de la population résidente habitait dans une autre région cinq ans
auparavant. Ils sont 8,4% dans le rural isolé, 7,8% dans le rural sous faible influence
urbaine et 7,7% dans les pôles ruraux.
1
Journal destiné à ceux qui veulent quitter la ville pour s’installer à la campagne.
121
Carte 29 - Part des immigrants régionaux sur cinq ans dans la population
communale recensée entre 2004 et 2006
122
avantage pour la Bourgogne (plus de communes concernées par des taux
d’immigrants plus élevés).
On s’intéresse aux émigrants des aires urbaines. Il s’agit des personnes qui
résidaient en 1990 dans une aire urbaine et qui en 1999 résident en dehors d’une aire
urbaine. La distance prise en compte est celle qui sépare le centre2 de la nouvelle
1
Voir graphique de ces flux repris du texte de Sencébé, Le Picier en annexe 13.
2
Le centre est déterminé à partir des coordonnées x et y du fond de carte. Il correspond au point dont
les coordonnées x et y sont égales à la moyenne des x et y du pourtour de la commune ou zone
considérée.
123
commune de résidence du centre de l’aire urbaine quittée (distance à vol d’oiseau1).
Le traitement croisant les distances entre les 36 000 communes françaises étant
particulièrement lourd, on2 a « allégé »3 le fichier en conservant l’information
kilométrique pour toutes les communes distantes deux à deux de moins de 200 km.
Pour les communes séparées par plus de 200 km, on ne connaît pas la distance
précise. On sait, seulement, qu’elles se situent à plus de 200 km l’une de l’autre.
Pour le graphique 18, on a préféré conservé les flux intra-aire urbaine avec
comme point d’arrivée une commune périurbaine (population résidente dans une aire
urbaine en 1990 ayant changé de commune et résidant aujourd’hui dans une
commune périurbaine).
Graphique 18 - Part dans la population 1999 des immigrants venant d’une aire urbaine selon
la distance à cette aire urbaine (migration 1990/1999)
%
45
40
35
rural ss faible influence urbaine
30
communes multipolarisées
25 rural isolé
pôles ruraux
20 communes périurbaines
couronnes des pôles ruraux
15
10
0
10 km 30 km 50 km 70 km 90 km 110 km 130 km 150 km 170 km 190 km >=200km
1
La distance réelle par la route est toujours préférable pour ce genre d’analyse mais malheureusement
on ne disposait pas de cette donnée, pour ce travail.
2
Le « on » fait plutôt référence à B.H. Nicot qui m’a été d’un grand secours pour la constitution de
cette base.
3
A titre indicatif, ce fichier allégé pèse 2,5 Go compressé soit l’équivalent de plus de trois cédéroms.
124
Les émigrants d’aire urbaine qui s’installent dans le périurbain sont
majoritairement venus d’une aire urbaine proche (graphique 18). Près de 60% de ces
immigrants viennent d’une aire urbaine située à moins de 30 km pour les communes
périurbaines, près de 45% pour les multipolarisées. Le rural sous faible influence
urbaine est également concerné par ces desserrements de la population à partir de
l’aire urbaine la plus proche ou des aires urbaines les plus proches (20%
d’immigrants ayant parcouru moins de 30 km). Mais dans ces communes, 30% de
ces immigrants viennent aussi d’une aire urbaine située à plus de 200 km. Les autres
espaces ruraux semblent plus attractifs auprès de migrants d’aires urbaines éloignées.
Ce premier graphique jette un doute sur le seul phénomène de desserrement pour
expliquer le regain démographique des campagnes.
125
Carte 30 - Part des immigrants venus d’une aire urbaine située à plus de 200 km dans le
total des immigrants venus d’une aire urbaine pour les communes hors aires urbaines
(migration 1990/1999)
L’effet du choix des 200 km est clairement visible sur la carte 30. À défaut de
pouvoir améliorer cette base de données pour ces premières estimations comment
interpréter ce résultat ? Dans un rayon de 200 km autour de l’aire urbaine de Paris, la
part des immigrants venant d’une aire urbaine située à plus de 200 km est faible
(inférieure à la moyenne française qui est de 29%). Dans cette zone limitrophe de
Paris, les mouvements migratoires sont dominés par l’effet de périurbanisation du
centre vers la périphérie même éloignée. Ces migrations de desserrement se font plus
massivement vers le sud de la région (cf. carte des distances moyennes parcourues en
deçà de 200 km en annexe 14).
Certains territoires semblent plus concernés par la périurbanisation de la
population que par une forte attractivité auprès des migrants de longue distance. Il
s’agit de la périphérie des aires urbaines des Pays-de-la-Loire et des aires urbaines de
l’Est s’étendant de la Lorraine à Rhône-Alpes.
126
Sur la carte 30, l’orange foncé désigne les territoires où près de la moitié des
immigrants viennent d’une aire urbaine située à plus de 200 km. Il s’agit des
territoires ruraux du Centre, d’une partie de l’Auvergne, du Sud-Ouest, du littoral
Atlantique, de l’intérieur de la pointe bretonne, du massif alpin, de la Corse.
127
Carte 31 - Typologie des communes hors aires urbaines selon la part des immigrants dans la
population 1999 venant d’une aire urbaine située à moins de 200 kilomètres ou à plus de 200
kilomètres.
128
Sur la carte 31, les communes en bleu clair sont peu attractives tant auprès
des urbains de la zone (étendue à 200 km) qu’auprès des migrants de longue distance
(distance supérieure à 200 km). On retrouve les communes au solde migratoire
négatif du Nord-Est, le cordon à l’est de la Bretagne, la Saône-et-Loire, une partie
des Pyrénées-Atlantiques.
Les communes du Grand Bassin parisien, celles du pourtour de l’aire urbaine
de Lyon, de Nantes, de Rennes, de Lille, de Metz, de Nancy, de Strasbourg, de
Mulhouse sont dans une situation de forte attractivité périurbaine et de plus faible
attractivité auprès des migrants de longue distance que la moyenne. Le regain
démographique de ces espaces ruraux est impulsé par l’étalement urbain.
Les communes en rose pâle sont intéressantes. Plus de la moitié des
communes de ce type appartiennent au rural isolé, 35% au rural sous faible influence
urbaine. Elles constituent donc un groupe typiquement rural qui est très attractif
auprès des migrants de longue distance mais peu auprès des urbains ou périurbains
proches. Certes, ces communes se situent dans des zones où la saturation de l’aire
urbaine n’est pas encore à l’ordre du jour et où le phénomène de périurbanisation ne
peut être que moindre par rapport à la moyenne française. Il n’empêche qu’il est
difficile de comprendre la dynamique de ces espaces à la seule lecture de l’étalement
des populations. La majorité des urbains venus s’y installer ont donc fait plus de 200
km et résidaient en 1990 dans une autre aire urbaine que celles qui jouxtent ces
territoires. Plus précisément, dans ces communes situées plutôt dans le Centre, le
Sud-Ouest, en Bretagne, sur le pourtour méditerranéen ou encore dans les Alpes,
37% de ces urbains nouvellement installés viennent de l’aire urbaine de Paris. De
plus, sur les cinq dernières années et dans la quasi-totalité des cas, ces nouveaux
arrivants représentent déjà plus de 10% de la population locale (rappel carte 29).
Même si ces communes ne constituent pas l’essentiel des espaces ruraux et ne
représentent peut-être pas la principale cause de ce regain démographique rural, les
englober dans les mêmes modèles que les espaces périurbains serait une erreur. Par
ailleurs, minoritaires aujourd’hui et sans doute demain, il n’en demeure pas moins
que ces communes semblent confirmer leur revitalisation sur la période 2004/2006.
Ainsi d’autres dynamiques, d’autres modèles, d’autres facteurs ou avantages
comparatifs que ceux avancés habituellement doivent participer et expliquer ces
mobilités.
Enfin, la dernière catégorie regroupe des communes très attractives auprès
des urbains proches et des urbains venant de plus loin. Elles sont clairement situées
dans les départements languedociens, le Sud-Est en général, ainsi qu’au pourtour
d’aires urbaines dynamiques comme Toulouse, Rennes, Bordeaux. La concentration
129
de ce type de communes dans le Sud-Est est notable. Elle illustre l’attractivité
conjointe auprès de migrants franciliens ou étrangers par exemple, mais également le
reflux des capitales régionales vers les arrière-pays. On sait, par exemple, que le
Luberon est avant tout un lieu de villégiature devenu lieu de vie pour les retraités de
la région PACA.
1
Une forte corrélation existe entre la distance moyenne parcourue par les émigrants des aires urbaines
et le nombre d’émigrants allant à plus de 200 km. Par exemple, pour Paris, la distance moyenne
parcourue par les émigrants de l’aire urbaine est de 123 km à partir du centre. La proportion
d’émigrants à plus de 200 km ne peut donc être que plus importante pour cette aire urbaine.
On a effectué les calculs et une nouvelle segmentation en tenant compte de ce biais. Ces résultats
figurent en annexe 16.
Intéressants, ils sont tout de même plus difficiles à lire que les résultats commentés ici : par exemple
Paris est finalement moins émettrice de migrants de longue distance que ce que l’on pourrait attendre
au vu des 123 km parcourus en moyenne par les urbains nouvellement installés dans ces espaces
ruraux. Pourtant 60% des émigrants de l’aire urbaine partent pour une commune située à plus de 200
km, ce qui est tout de même beaucoup plus que la moyenne des aires urbaines françaises.
On a donc privilégié pour ces premiers résultats, qui pourraient être grandement améliorés en
supprimant ce seuil de 200 km et en raisonnant sur des distances réelles, une approche plus simple et
plus lisible qui ne prend pas en compte ces effets de taille.
La taille de l’aire urbaine rentre également en compte mais pas de façon aussi linéaire que ce que l’on
pourrait croire.
130
Nantes, Bordeaux, Lyon, Toulouse, Montpellier, Clermont-Ferrand. Aucune aire
urbaine du Nord-Est n’y figure.
On passe dans la catégorie des plus petites aires urbaines dont l’étalement est
plus modéré mais qui peuvent être plus ou moins émettrices de migrants de longue
distance.
Ces petites aires urbaines qui voient partir leurs habitants à plus de 200 km
(de façon plus marquée que la moyenne des aires urbaines françaises) sont situées
dans le Nord (Saint-Omer, Boulogne-sur-Mer, ou encore Rouen, Beauvais, Reims,
Châlons-en-Champagne, Charleville-Mézières…). Ces aires urbaines sont très
certainement pénalisées par la proximité de l’aire urbaine de Paris qui offre des
potentialités d’emplois sans doute meilleures. On y trouve également Montbéliard,
Annecy, Ajaccio et de toutes petites aires urbaines du Sud-Est comme Apt ou
Draguignan. Aucune aire urbaine de ce type ne figure dans l’Ouest ce qui souligne
l’attractivité bien connue de cette région.
Enfin, les dernières constituent un ensemble d’aires urbaines de petite taille,
moins concernées que la moyenne par l’étalement urbain, mais aussi, contrairement
aux précédentes, par le départ de migrants de longue distance. Dans cette catégorie, on
trouve par exemple : Avignon, Perpignan, La Rochelle, Vannes, Bourges, Colmar,
Amiens, etc.
131
132
Conclusion
Ces premiers éléments tendent à supposer qu’il n’y aurait pas un, mais des
modèles de développement non métropolitain, du rural en l’occurrence ici.
133
confirme ; les emplois progressent rapidement, les niveaux de revenus tout autant.
Ces espaces ruraux isolés bénéficient d’aménités naturelles et d’infrastructures
touristiques qui leur assurent des taux de présence parmi les plus élevés de France, ils
perçoivent également d’importants revenus de transferts qui alimentent leur
économie locale. Ils attirent des urbains indépendamment du seul fait de
desserrement de la population et tout particulièrement des Franciliens et des retraités.
134
DEUXIEME PARTIE - LE DEVELOPPEMENT TERRITORIAL :
UN ENJEU DE PRODUCTION OU DE POPULATION ?
LES APPROCHES THÉORIQUES DE
LA QUESTION TERRITORIALE
Step back and ask what striking feature of the geography of economic
Paul Krugman
135
136
Quels sont les modèles théoriques et empiriques qui traitent aujourd’hui de la
question du développement des territoires et en quoi ces modèles permettent ou non
d’expliquer la revitalisation des espaces non métropolitains ?
1
Grille proposée au PUCA par Talandier, Davezies (2006). Ce travail théorique s’appuie sur des
éléments mobilisés dans l’étude : « Croissance et développement territorial : un examen des
phénomènes et des représentations dans les pays industriels », rapport pour le PUCA, 205p.
137
sur la comparaison des agrégats des espaces sub-nationaux. C’est en ce sens que l’on
peut parler de « macroéconomie locale » Davezies (2005). Ces agrégats peuvent être
le capital, le niveau de qualification de la main-d’œuvre, la flexibilité du marché du
travail, l’ensoleillement, les aménités, etc. du côté de l’input ; le PIB par habitant, le
revenu, le chômage, la pauvreté, la démographie, etc. pour l’output. Les disciplines
maîtresses sont l’Économie, la Statistique, la Géographie « quantitative ». Les
méthodes quantitatives et la modélisation sont mobilisées. Cette branche de la
Science Régionale est largement dominée par les travaux anglo-saxons et s’inscrit,
majoritairement, dans le prolongement de l’école néoclassique pour les économistes.
Dans cette acception du développement territorial, on peut distinguer les
approches pour lesquelles le territoire est un facteur de croissance de celles pour
lesquelles le territoire est le support de la population inductrice de développement.
Pour les premiers, l’enjeu principal du développement serait la production, pour les
seconds, l’enjeu pourrait être celui de la population. En effet, ce ne sont pas les
entreprises qui créent, dans ce cas, l’essentiel du développement mais la population
qui consomme. La consommation est au cœur de l’acception du territoire comme
support. « Territoire-facteur » versus « territoire-support » évoque l’opposition
« croissance » versus « développement ». L’indicateur du développement serait, par
exemple, le PIB par habitant dans le cas du « territoire-facteur » tandis que, pour
rester dans les références internationales, l’indice de développement humain (IDH)1
serait préféré dans le cas du « territoire-support ». Dans le premier cas, il semblerait
que les mécanismes soient chaînés « croissance = emplois = revenus = etc. =
développement ». Dans le second cas, le déchaînage des agrégats est, au contraire,
mis en avant (Davezies, 2004). Ces deux visions (espace-facteur / espace-support) se
complètent. Sous forme d’équation, on aurait dans le premier cas les caractéristiques
spatiales comme variables explicatives de la croissance, dans le second cas, les
caractéristiques spatiales constitueraient plutôt la variable à expliquer.
Enfin une troisième distinction pourrait être introduite, toujours au sein du
développement comme état. Certains auteurs se préoccupent de l’espace comme
facteur de croissance nationale, d’autres privilégient l’étude de la croissance locale.
Ces deux finalités peuvent s’opposer. Ce qui est bon à une échelle territoriale peut ne
plus l’être à l’échelon supérieur ou inférieur. Par exemple, l’attractivité migratoire
des régions du Sud de la France est de bon augure pour ces régions méridionales. En
revanche, ces mouvements altèrent la compétitivité du pays, puisque les migrants
1
Sous la direction de Jean Gadrey, des travaux émergent à l’université de Lille 1 sur cette question
d’un indicateur spatialisé de développement.
138
quittent, principalement, la région Île-de-France, région motrice de la croissance
française.
1
Les travaux de Julien (1994), sur les emplois métropolitains, ou de Brunet (1973), sur la mégalopole
européenne, sont des exemples.
139
Au sein de ces deux types d’approches, on peut enfin distinguer :
- les modèles globaux ou généraux : il s’agit d’un cadre ou concept
général de compréhension des questions territoriales (la NEG, la théorie
de la base, le développement endogène) ;
- les études partielles ou spécifiques : on creuse un aspect particulier de
la question (les effets de débordement de la Recherche et Développement,
l’économie des retraités en Floride, l’impact des dépenses touristiques sur
les territoires, les monographies).
Cette deuxième partie se structure autour de ces différentes acceptions du
développement territorial.
1
Les approches des politistes et sociologues qui rendent compte des formes de « gouvernance » plus
que des dynamiques des « fondamentaux » du développement local (emploi, pauvreté, revenu,
peuplement...) ne seront pas présentées. Malgré tout l’intérêt que l’on porte par ailleurs à ces auteurs
et à leurs travaux, il n’y a pas lieu de reprendre ici cette abondante littérature.
140
Chapitre 1 - Les fondements de la Science Régionale
1
Pagination de la version électronique disponible à l’adresse :
http://www.core.ucl.ac.be/staff/thisse_combes_mayer/chapitre2.pdf , version du 7/12/2005.
141
principales œuvres des grands économistes de la fin du XIXe, début du XXe siècle1 :
Keynes, Fisher, Say, Ricardo, Walras, Schumpeter. Ces termes y sont soit totalement
absents, soit utilisés dans des expressions courantes telles que « en l’espace de cinq
années ». En 1911, par exemple, dans La théorie de l’évolution économique, œuvre
phare de la pensée économique du XXe siècle, Schumpeter évoque au mieux un
espace « exploité économiquement » (chap. I à III, p.692) pour reprendre ses termes
ou un territoire « économiquement donné » (chap. IV à VI, p.812). L’espace ne
semble jouer aucun rôle en Économie, il serait absolument neutre.
1
Œuvres disponibles dans leur version française sous format électronique consultables dans la
collection « Les classiques des sciences sociales » à l’adresse :
http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html
2
Pagination de la version électronique de : Schumpeter J. Théorie de l’évolution économique (1911).
Traduction française de 1935, introduction de François Perroux ; consultable à l’adresse :
http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/classiques/Schumpeter_joseph
/theorie_evolution/theorie_evolution_1.pdf
3
Marshal A. Principes d’Économie Politique (1890). Traduction française de 1906 ; consultable à
l’adresse :
http://www.uqac.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/classiques/marshall_alfred/principes_e
co_pol_1/principes_eco_pol_1_2.pdf
142
de petites entreprises d'un caractère semblable dans certaines localités, ou, comme
on dit d'ordinaire, par la localisation de l'industrie. » (Marshall, 1890, livre IV,
chap. IX, p.115.)
On peut noter le rôle de l’espace dans les choix de localisation des industries.
« Lorsqu'une industrie a ainsi choisi une localité, elle a des chances d'y
rester longtemps, tant sont grands les avantages que présente, pour des gens
adonnés à la même industrie qualifiée, le fait d'être près les uns des autres. Les
secrets de l'industrie cessent d'être des secrets ; ils sont pour ainsi dire dans l'air, et
les enfants apprennent inconsciemment beaucoup d'entre eux.
[…] De plus, l'emploi économique de machines coûteuses peut être parfois
possible à des conditions très avantageuses dans une région où se trouve groupée
une grande production d'une certaine espèce, alors même que les capitaux
individuels qui y sont employés ne seraient pas très considérables.
[…] De plus, toujours, sauf aux époques primitives du développement
économique, une industrie localisée tire un grand avantage du fait qu'elle est
constamment un marché pour un genre particulier de travail. » (Marshall, 1890,
livre IV, chap. IX, p.119)
Marshall, sans les nommer ainsi, décrit les différents aspects que peuvent
revêtir les économies d’agglomération, qui amèneront les auteurs à considérer
l’espace comme un facteur de croissance principalement à partir des années 1990.
Marshall précise aussi que, par ces localisations, la ville connaît un progrès
incessant.
« Les avantages qu'offre la variété d'occupations se combinent avec ceux de
la localisation de l'industrie dans certaines de nos grandes villes manufacturières, et
c'est là l'une des principales causes de leur progrès continu. Mais, d'un autre côté, la
valeur que les quartiers centraux d'une grande ville possèdent pour les commerçants
permet à ceux-ci d'y payer le sol bien plus cher qu'il ne vaut pour des fabriques,
même en tenant compte de ce concours d'avantages : et une compétition semblable,
au sujet du logement, a lieu entre les employés des maisons de commerce et les
ouvriers de fabrique. Le résultat est que, maintenant, les fabriques se groupent dans
les faubourgs des grandes villes et dans les régions manufacturières avoisinantes,
plutôt que dans les villes elles-mêmes. » (Marshall, 1890, livre IV, chap. IX, p.120.)
Marshall va également souligner le rôle antagoniste des coûts de transport
comme force centripète des activités, d’une part, mais centrifuge des individus,
d’autre part.
143
« Toute diminution de prix des moyens de communication, toute facilité
nouvelle d'échanger librement des idées entre lieux éloignés, font obstacle aux forces
qui tendent à localiser les industries. En nous plaçant à un point de vue général,
nous pourrions dire qu'une diminution des tarifs de transport ou des frets tend à
pousser chaque localité à acheter au loin beaucoup plus de choses ; elle tend ainsi à
concentrer les industries particulières dans certaines localités. Mais, d'un autre côté,
tout ce qui permet aux gens d'émigrer plus facilement d'un lieu à un autre amène les
ouvriers spécialisés à travailler près des consommateurs qui achètent leurs
marchandises. Ces deux tendances opposées apparaissent très bien dans l'histoire
récente du peuple anglais. » (Marshall, 1890, livres IV, chap. IX, p.121.)
Il ne s’agit pas ici de dire que tout est déjà dans Marshall, mais de
souligner que l’espace1 y est déjà décrit dans quelques-unes de ces acceptions phares
de la Science Régionale. Il aura fallu attendre plus d’un demi-siècle pour voir ces
« prémices » de l’Économie Régionale formulées et modélisées. Isard, par exemple,
reprendra cette notion d’économie externe en 1956, en distinguant les économies
externes de localisation (proximité d’activités d’un même secteur), des économies
d’urbanisation (proximité d’activités de secteurs diversifiés).
1
On pourrait employer systématiquement le mot espace pour qualifier le territoire des économistes
par rapport à celui des géographes. L’accent a été plutôt mis dans ce travail sur les fonctions des
territoires que sur leur dimension construite ou non, selon les auteurs.
144
Pour ce qui est du manque de formalisation, on peut préciser que le modèle
mathématique de Weber était si complexe à son époque qu’il a dû avoir recours à
Georg Pick, fameux mathématicien, proche collaborateur d’Albert Einstein.
Pour ce qui est de la démarche scientifique « hypothético-déductive », on
propose de développer ce point en s’appuyant sur les travaux de Nussbaumer (2002)
consacrés à l’école historique allemande. À la fin du XIXe siècle, une querelle de
méthode oppose les tenants de l’approche hypothético-déductive (école autrichienne,
mais aussi et surtout depuis, anglaise) aux partisans d’une approche historique et
multi-causale qui se voulait plus réaliste (école allemande). Deux approches des
questions spatiales s’en dégageront :
- l’une déductive qui s’intéresse aux causes purement économiques de
la localisation des activités ;
- l’autre historique qui se soucie de comprendre comment se constitue
historiquement la configuration spatiale des activités.
1
On lui doit notamment une explication « territorialisée » du déclin de l’empire romain qu’il voit
comme une vengeance posthume d’Hannibal qui, lors de sa longue et violente occupation de l’Italie, a
totalement modifié la structure de la propriété foncière de l’Italie, mettant un coup d’arrêt à son
développement économique : une nouvelle classe de grands propriétaires autarciques ayant remplacé,
après guerre, la multitude de petits propriétaires, agriculteurs ou artisans vivant de la spécialisation et
de l’échange, et que les Carthaginois avaient massacrés...
145
dernier, il est en effet important de distinguer la « théorie historique qui rend compte
de la réalité économique [… et la] théorie pure qui n’est qu’un outil qui peut aider à
comprendre certains éléments complexes de la réalité économique » (cité par
Nussbaumer, 2005, p.16). « Ce n’est pas le principe de localisation des activités qui
permet de construire un système économique, mais c’est l’analyse du système
économique construit historiquement qui permet de comprendre la localisation des
activités. » (Sombart, 1910, cité par Nussbaumer 2005, p.18). Enfin, tout en félicitant
Weber pour son effort de conciliation, Sombart souligne les limites de son modèle. Il
critique notamment la réduction du choix de localisation à la prise en compte du coût
direct et évoque l’importance de la proximité, des interactions entre la firme et ses
partenaires, entre la firme et sa clientèle.
1
Ces aspects-là du développement territorial seront réintroduits plus tard dans les travaux des
régulationnistes ou encore des auteurs du développement endogène.
146
Thisse (1997) propose deux autres raisons pour expliquer le manque d’intérêt
des économistes vis-à-vis de l’espace.
La première porte sur la faible prise en compte des coûts engendrés par la
distance. « L’explication la plus courante de cette négligence est que les frais de
transport ont diminué de manière considérable depuis le début de la révolution
industrielle, de sorte que la distance compte moins et contraint moins. » (Thisse,
1997, p.4).
Le second souligne la position des économistes pour lesquels « plusieurs
questions économiques fondamentales n’ont pas besoin de la dimension spatiale pour
être étudiées avec pertinence, les coûts de transport n’étant que des coûts parmi
d’autres » (Thisse, 1997, p.5).
Ces deux explications, comme l’indique Thisse, sont peu satisfaisantes tant la
distance occupe encore un rôle majeur dans la localisation des agents.
Par ailleurs, réduire l’oubli de l’espace à l’oubli de la mesure des coûts paraît
peu satisfaisant. Le territoire, même si on le nomme « espace » comme chez les
économistes, ne peut se résumer à une mesure de distance traduite en coût.
Considérer l’espace, c’est certes considérer la distance, la densité, mais c’est aussi
intégrer les fonctions de ce territoire, la population, les paysages et tout ce qui
compose ces espaces et qui les rend si singuliers.
147
cette réalité. On raisonnait alors en rendements constants. Or, avec des rendements
non croissants, il serait toujours au moins aussi efficace de diviser les activités de
production jusqu’au point où les coûts de transport sont nuls. Or, ce résultat va à
l’encontre de la polarisation existante des hommes et des activités. Les rendements
ne peuvent donc être que croissants. Mais modéliser ces mécanismes dans le cadre de
référence des économistes qu’est la concurrence parfaite demeurait complexe. En
effet, si les rendements sont continuellement croissants et que la concurrence est
parfaite (parfaite connaissance des prix et comportements rationnels des agents),
alors à terme une seule entreprise subsiste puisque dès la première unité produite ses
coûts n’ont cessé de diminuer. Si ce résultat n’est finalement pas constaté, c’est que
l’on est en situation de concurrence imparfaite (c’est-à-dire que les entreprises n’ont
plus une parfaite connaissance de ce qui se passe chez le voisin et peuvent fixer leur
prix librement et donc continuer à produire). Les modèles de Dixit-Stiglitz (1977),
puis celui de Krugman (1991), que l’on reprendra plus loin, parviennent à modéliser
ces mécanismes de rendements croissants et de concurrence imparfaite. Krugman
(1995) montre comment les sciences sont contraintes d’ignorer des travaux
antérieurs, au risque de perdre des informations précieuses, afin de développer de
nouvelles méthodes, indispensables pour aller plus loin. Il cite l’exemple de la
météorologie, de la cartographie, pour terminer par l’exemple de l’Économie
Régionale.
Une autre idée, développée par Jane Jacobs (1984) reprise par Thisse (1997),
paraît particulièrement pertinente. Jacobs montre comment le concept de nation n’a
jamais été remis en cause. L’étude des pays ou blocs de pays, entités de la vie
économique, a perpétué cette négligence des territoires sub-nationaux. Elle cite
notamment Adam Smith qui discute et conteste de nombreuses idées de l’époque et
qui argumente chaque concept qu’il choisit, à l’exception de celui de nation. Les
nations seraient des entités homogènes et la seule dimension spatiale qui prime serait
la frontière nationale.
D’un autre côté, jusque dans les années 1970-1980, les mécanismes
économiques qui prévalaient à l’échelle des nations pouvaient être transposés à
l’échelle de territoires sub-nationaux. Ainsi, pour se préoccuper de la question locale,
les outils et les indicateurs des mécanismes de la macroéconomie convenaient.
Aujourd’hui, il semble qu’il faille réadapter les outils à la spécificité des questions
territoriales actuelles.
148
Enfin, le contexte géographique et historique des pays a joué également un
rôle majeur dans la façon dont l’espace allait être considéré (Thisse, 1997). Les
particularités géographiques de l’Angleterre et l’importance des échanges fluviaux à
l’échelle internationale (finalement peu coûteux) minimisaient le rôle de la distance
et des échanges intra-nationaux. Ce qui se répercuta sur la recherche anglo-saxonne,
pionnière et fort influente sur l’Économie moderne. A contrario, l’histoire de la
construction de l’Allemagne, son unification et l’élargissement de son marché
intérieur à la fin du XIXe siècle, le développement d’un commerce terrestre coûteux
en frais de transport, l’importance du concept de territoire dans la philosophie
politique allemande sont autant d’éléments qui tissèrent un environnement propice
aux travaux des spatialistes. Quant à la France, sa position serait intermédiaire : une
sensibilité moindre que l’Allemagne en raison de son unification territoriale mais
plus que l’Angleterre de par ses réseaux et échanges terrestres. L’Économie Spatiale
était présente en France au XIXe siècle, mais était le fait d’ingénieurs des chemins de
fer, d’ingénieurs des Ponts et Chaussées, d’auteurs qui évoluèrent en dehors des
cercles académiques de la science économique et dont les travaux demeurent encore
aujourd’hui au premier plan des analyses de tarification publique 1.
Tous les économistes n’avaient pas occulté l’espace de leurs travaux. On peut
évoquer Marshall ou les spatialistes allemands, mais rappeler également que les
classiques intégraient l’espace dans leurs analyses. De plus, raisonner à l’échelle des
nations introduit finalement une dimension territoriale dans les analyses, celle de la
nation.
En réaction à cet « oubli », qui serait donc à relativiser, et dans un souci de
fédérer les approches existantes, naît en 1954, sous la houlette de Walter Isard, la
Regional Science Association (RSA).
1
Pour plus de détails, le lecteur peut se référer aux travaux cités par Thisse (1997), à savoir ceux de
Ekelung et Shieh (1986) qui soulignent l’apport des travaux de Jules Dupuit sur la tarification spatiale,
ou encore à Hebert (1972) qui cite parmi les spatialistes français le nom d’Émile Cheysson pour sa
théorie des aires de marché.
149
II NAISSANCE DE LA SCIENCE REGIONALE
La Science Régionale aurait pour objet « l’espace », l’intégrer n’est pas juste
un détail de l’analyse, comme le précise Ponsard (1988), car l’espace n’est pas
économiquement neutre et sa prise en compte change tout.
Pour Davezies (1995), trois principales orientations se dégagent dès le
départ en Science Régionale :
«i) Expliquer le rôle de certaines caractéristiques de l'espace dans le
comportement des agents économiques (entreprises, ménages, pouvoirs publics)
[...] ; ii) éclairer l'économie particulière d'un secteur local (transports urbains,
logement, finances publiques...)[…] ; iii) « spatialiser » des mécanismes macro-
économiques (répartition spatiale de la croissance, des fonds publics, impact de
l'internationalisation de l'économie sur les économies locales, application à l'espace
local, pour le qualifier, de lois économiques générales...etc.) » (Davezies, 1995, p.1).
150
Expenditures », argumentait au contraire en faveur de l’intervention
gouvernementale dans la production de biens publics » (Estèbe, Talandier, 2005, p.4
et p.11).
L’influence de ces travaux sur les questions actuelles est évidente. Le débat
engagé par ces auteurs se poursuit et ces thématiques de recherche restent au cœur
des sujets phares de la discipline.
Toujours dans les années 1950, les travaux de deux autres auteurs paraissent
importants pour la suite. Tout en travaillant autour de la question du choix de
151
localisation des entreprises, Perroux et Vernon introduisent l’hétérogénéité de
l’espace de façon, peut-être, plus significative que les travaux précédents.
Le concept de croissance polarisée chez Perroux (1950) reprend l’hypothèse
d’une croissance déséquilibrée, chère à Schumpeter. La croissance est impulsée par
des firmes motrices puis se propage aux autres industries via les échanges
interindustriels. Les implications spatiales de la thèse de Perroux sont mises en avant
par Boudeville en 1966 (sur le cas de la France notamment) : le pôle de croissance
est le lieu où est implantée la firme motrice, son essor génère celui des régions où
sont implantées les industries ou les secteurs entraînés. L’espace n’est pas homogène
puisque certaines régions vont être motrices de croissance et de développement
tandis que d’autres seront induites. Hirschman (1958) distingue deux types d’effets
d’entraînement des pôles moteurs sur les autres secteurs industriels :
- l’effet amont décrit la diffusion par les achats (l’industrie de
l’automobile à Boulogne-Billancourt dynamise par exemple l’industrie du
verre à Lyon, du pneu à Clermont-Ferrand etc.) ;
- l’effet aval décrit la diffusion par les ventes (le développement de
l’énergie électrique aura des incidences majeures sur l’ensemble des
activités industrielles).
Hirschman va un peu plus loin dans son analyse puisqu’il étudie également
les conditions dans lesquelles ce mécanisme de croissance polarisée peut bénéficier
aux régions en retard de développement. Les régions développées achètent les biens
produits dans les régions plus pauvres et favorisent l’emploi d’une main-d’œuvre peu
onéreuse. Ainsi, la croissance se diffuse par effet de « percolation » ou trickle down,
soit une propagation lente et diffuse.
L’hétérogénéité de l’espace est, implicitement dans ces modèles, une
condition nécessaire à la croissance et au développement. Les facteurs spatiaux de
croissance et de développement restent, cependant, exogènes au modèle.
152
disparaît, remplacé par un nouveau. C’est ainsi qu’en France, s’industrialisèrent et se
développèrent les régions au sud de la ligne Le Havre – Marseille. Aujourd’hui, cette
théorie peut être en partie reprise pour comprendre le développement de certains
pays via les délocalisations. Cependant, la durée de vie d’un produit s’est
considérablement réduite et la déconnexion entre lieu de création des concepts et lieu
de production est parfois impossible.
L’essor des services, ou disons plutôt l’interpénétration des services et de
l’industrie (Beckouche 1997) rend ce modèle difficilement mobilisable. Comme le
souligne Beckouche (1997), IBM vendait des ordinateurs, puis des ordinateurs et des
logiciels, l’entreprise propose aujourd’hui des solutions informatiques. « La
« servicialisation » de l’industrie » renvoie au changement « organisationnel » de la
production énoncé par Veltz (1992) (Beckouche, 1997, p.18). De la même façon, la
distinction entre les services de direction et de conception qu’introduisent ces
modèles n’est plus de mise. Le partage du territoire entre concentration des cadres
dans la capitale et des ouvriers en province est de moins en moins vrai (Beckouche,
Damette, 1993). Enfin l’égalisation des salaires au sein des pays développés annule
une partie des bénéfices que retirent les entreprises en s’implantant dans les régions
périphériques. Storper (1996) pense même que cette théorie du cycle du produit
« ignore dangereusement la diversité et la complexité du développement sectoriel
qu’on rencontre dans le capitalisme moderne » (Storper, 1996, p.228).
Tous ces éléments qui rendent, aujourd’hui, obsolètes ces modèles participent
à la polarisation des activités constatée depuis les années 1980. L’ensemble des
travaux référents dans ces années 1950-1980 reposent sur des acceptions de l’espace
peut-être trop restrictive. Peut-on y voir une des explications possibles à la crise de la
Science Régionale au début des années 1990 ?
153
l’interrogation de Jensen en 1991, alors président de la RSA, « Quo vadis Regional
Science ? », ainsi que celle de Lacour sur « l’identité de la Science Régionale » en
1992.
Dès lors, « les tables rondes se multiplient dans les colloques et les
associations pour cerner l’objet d’une Science Régionale de plus en plus diffuse,
envahissante et pourtant menacée. Un numéro spécial des Papers in Regional
Science, tribune de la Science Régionale mondiale, est consacré en 1994 à la crise
de la « Regional Science » avec des contributions d’Anas, Bailly, Coffey, Gibson,
Plane et Vickerman. Les uns plaident pour une démarche plus abstraite ; les autres
pour une attention plus grande apportée aux problèmes concrets et aux politiques
régionales ; la majorité entend réintroduire l’homme au centre d’une Science
Régionale jugée trop désincarnée. » (Derycke, 2001, p.10).
154
externalités générées par l’agglomération de ces agents. Ce nouveau courant de
pensée sur la croissance endogène croisera les travaux de l’Économie Internationale
pour faire émerger ce que Krugman va nommer la Nouvelle Économie Géographique
(NEG). Ces travaux sont présentés dans le prochain chapitre.
1
Le revenu réel, dit revenu en volume, correspond au revenu nominal, en valeur, une fois l’effet de
l’inflation pris en compte. Ce revenu réel, revenu rapporté au niveau général des prix, est parfois
appelé pouvoir d’achat.
2
Cet aspect de la question, qui quelque part inverse et interroge la relation origines et conséquences
de la pauvreté, n’est pas sans rappeler les travaux d’Amartaya Sen sur cette idée de « capabilities »
des individus.
155
travaux d’économistes mais aussi de géographes, de sociologues se multiplient
jusqu’à aujourd’hui (cf. le succès de l’ouvrage d’Éric Maurin en 2004 sur Le ghetto
français. Enquête sur le séparatisme social ou bien encore celui de Christophe
Guilluy et Christophe Noyé en 2004 : Atlas des nouvelles fractures sociales en
France).
Ces travaux replacent donc l’homme au cœur de la problématique et corrigent
le caractère devenu « trop désincarné » et dénoncé de la Science Régionale (cf.
citation de Derycke plus haut).
Sur la base de discussions1 avec quelques chercheurs ayant travaillé dans les
décennies passées, on a pu glaner quelques arguments permettant de mieux
comprendre les raisons des inflexions qu’auraient connus les travaux dans ce
domaine. L’une des approches les plus convaincantes est celle de Lester Thurrow,
professeur d’Économie au MIT.
1
Entretiens réalisés dans le cadre d’un rapport pour le PUCA : Talandier M., Davezies L. (2006).
Croissance et développement territorial : un examen des phénomènes et des représentations dans les
pays industriels, rapport pour le PUCA, 205p.
156
sur les territoires. A posteriori, on pourrait donc penser que la science servait plus
encore à trouver l’argent qu’à le dépenser : dès lors qu’il est déboursé
automatiquement, les acteurs locaux se débrouillent seuls pour l’utiliser. Du coup,
les chercheurs se seraient retranchés dans leurs campus et dans un univers théorique.
1
Entretiens avec Rémy Prud’homme
157
Les données du revenu disponible des ménages ne sont publiées partiellement
que depuis peu de temps par Eurostat et il est pratiquement impossible de trouver des
informations chiffrées sur les consommations dans les territoires des pays industriels
(le Bureau of Census américain fournit des statistiques spatialisées pour les seules
ventes de détail). Idem pour les indices de prix régionalisés, ou des parités régionales
de pouvoir d’achat1, qui ne semblent exister aujourd’hui qu’au Canada, alors qu’ils
pourraient aider à mieux comprendre les mécanismes migratoires entre les régions
des pays industriels, comme l’avancent, d’un point de vue théorique, de nombreux
auteurs (Gonnard, 2006, par exemple).
1
L’Europe utilise massivement des PIB régionaux par habitant mesurés en parité de pouvoir d’achat,
mais ces parités sont en fait nationales.
158
Chapitre 2 - Les approches par la production.
Le territoire facteur de croissance
1
Ces approches du « territoire-support » sont présentées dans le chapitre suivant.
159
Toujours, selon les distinctions proposées dans la grille d’analyse, on
s’intéressera en premier lieu aux modèles généraux avant d’aborder les travaux plus
spécifiques.
160
échange, ces spécialisations entraînent l’égalisation interrégionale de la rémunération
des facteurs de production, dont les salaires des travailleurs à qualification égale1.
La théorie de la base, que l’on ne doit pas à Tiebout ou à North2, comme il est
courant de le lire, mais à Cantillon (1725) et à Sombart (1916) (Gonnard, 2001),
conclue également à la convergence des niveaux de revenu. Dans cette théorie, les
revenus basiques, à savoir les revenus captés à l’extérieur du territoire considéré,
sont les véritables moteurs d’une économie locale et alimentent le secteur
domestique (activités tournées vers la demande locale des ménages en biens et
services). Ce modèle implique qu’avec le développement de la région, les
exportations s’intensifient, la base exportatrice se diversifie. La mobilité des facteurs
de production permet une diffusion du développement entre les régions, et, à la
manière du théorème HOS, les revenus par tête des travailleurs vont donc converger.
1
On peut prendre l’exemple de l’Angleterre et de l’Australie. L’Angleterre est fortement dotée en
capital à la fin du XVIIIe siècle, mais pauvre en surface cultivable. Le prix du capital est donc faible,
celui de la terre élevé. L’Australie est, au contraire, pourvue en terre et pauvre en capital physique.
L’Angleterre se spécialise donc dans la production de biens manufacturés. La production augmente et
mobilise de plus en plus le capital physique qui face à cette demande accrue voit son prix augmenter ;
il en va de même pour les salaires. En Australie, c’est par ce même mécanisme de spécialisation et
d’augmentation de la production que le prix de la terre va augmenter ainsi que la rémunération des
travailleurs… Les différences entre les deux pays quant à la rémunération des facteurs de production
vont donc s’estomper peu à peu…
2
Tel que l’annonce Dawkins par exemple.
161
plus forte probabilité de convergence entre les régions qu’entre les nations, en raison
d’une plus forte mobilité des facteurs de production interrégionale qu’internationale.
L’influence qu’eurent (et qu’ont encore), sur les questions territoriales, ces
trois modèles n’est rien à côté de l’écho qu’eut la critique. Ce concept de
convergence fut attaqué de tous côtés. En premier lieu de façon empirique. Ces
travaux accompagnent, d’ailleurs, l’essor de l’Économie du Développement après la
seconde guerre mondiale, discipline qui souligne la pauvreté persistante dans de
nombreux pays et l’écart de développement croissant entre les pays industrialisés et
les pays pauvres. Si cette branche de l’Économie et les institutions qui y sont
associées occupent l’avant-scène, les critiques au sujet de la convergence cette fois
interrégionale émergent également.
Une des critiques, fructueuse pour la suite, porte sur les hypothèses de
décroissance du rendement marginal du capital, de la stabilité des mécanismes de
croissance et des processus de convergence qu’elles induisent. Plus précisément,
c’est la conciliation entre rendements croissants et concurrence qui conditionnera
l’émergence de la NEG.
162
lorsqu’un choc exogène provoque une forte demande pour un bien industriel. Au
départ, les salaires monétaires sont identiques mais les salaires efficients (salaires
monétaires / productivité du facteur travail) sont plus faibles dans les pays
industrialisés de par l’existence justement de rendements d’échelle croissants. Les
régions qui bénéficient du meilleur salaire efficient sont les mieux parées pour
répondre à cette hausse de la demande. En effet, elles vont pouvoir augmenter leur
production plus rapidement que les autres, améliorer ainsi un peu plus leurs salaires
efficients, et pourront donc augmenter à nouveau leur production, et ainsi de suite…
À Myrdal ou Kaldor pourraient être ajoutés plusieurs noms d’économistes,
Perroux par exemple, pour qui la croissance n’est pas un phénomène équilibré mais
au contraire polarisé (cf. supra), ou encore Friedmann pour son modèle centre-
périphérie (1966) dans lequel il reprend des arguments de Myrdal (croissance
régionale déséquilibrée) et des éléments de la théorie de la base (la croissance ne
peut être générée que par des éléments extérieurs). Il souligne le rôle des migrations
des travailleurs dans la convergence des revenus interrégionaux et insiste sur
l’importance des exportations de la région et de sa capacité à répondre à la hausse
d’une demande extérieure pour se développer. Finalement, ce sont les grandes aires
urbaines, les centres régionaux, qui auraient l’avantage initial en raison des
économies d’échelle que crée l’urbanisation.
163
Développement (Romer, 1990). Les rendements d’échelle croissants sont donc le fait
de l’agglomération des activités de la collectivité. Lucas (1988) souligne que les
agglomérations urbaines favorisent, notamment, l’accumulation du capital humain
grâce à la diffusion de l’information entre les travailleurs, en raison de leur proximité
géographique.
Comme le note Catherine Beaumont (1998), le capital spatial devient un
facteur de croissance. Dans ces modèles, l’hypothèse de rendement marginal
décroissant pour chaque entreprise permet de respecter le cadre de la concurrence. En
effet, si chaque entreprise produit à rendement croissant, on tombe alors dans une
situation de monopole. La première entreprise a toujours « une longueur d’avance »
sur les autres, par exemple en termes de salaires efficients, et peut donc pratiquer des
prix toujours plus compétitifs que la concurrence qui se trouve peu à peu évincée du
marché. Le principe des externalités positives et l’existence d’économie
d’agglomération permettent d’introduire l’hypothèse de rendement croissant,
indispensable pour expliquer la polarisation des activités sur le territoire ou
l’existence des villes, tout simplement. L’espace ne peut plus être ignoré et il devient
un facteur endogène de la croissance.
164
Le modèle de Dixit-Stiglitz (1977)1 étudie une économie à deux secteurs :
- un secteur agricole où les rendements sont constants, qui produit un
bien homogène et qui fonctionne en concurrence pure et parfaite ;
- un secteur manufacturier, à rendement croissant, qui produit un bien
composite (un bien décliné en plusieurs variétés) et qui fonctionne en
concurrence monopolistique.
1
Pour plus de détails sur le contenu et la formalisation des modèles voir par exemple : Thisse, Mayer,
Combes ; « Textbook in Economic Geography » chez Economica 2006 pour la version française ou
Princeton University Press pour la version anglaise.
2
Deux faiblesses sont couramment admises dans ce modèle :
- l’entrée d’une nouvelle variété (soit d’une nouvelle firme puisque chaque firme produit une variété)
fragmente la demande en une unité de plus. Il n’y a pas substitution et donc pas de disparition des
« anciennes » variétés dans ce modèle ;
- l’hypothèse est faite que tous les consommateurs sont identiques, homogènes, qu’ils consomment
toutes les variétés proposées s’ils le peuvent.
3
Une autre limite de ce modèle est l’absence de comportement stratégique des entreprises, c’est-à-dire
que l’entrée de nouvelles firmes ne change rien au comportement des premières installées. Il n’y a pas
non plus d’effet d’échelle : la quantité produite est indépendante du salaire des travailleurs et de leur
nombre, donc indépendante de la demande.
165
le revenu réel des consommateurs supérieur, ce qui renforce l’attrait de la ville
auprès des travailleurs
1
Coût de type « iceberg » - Samuelson (1954) : si l’on doit transporter un bien entre A et B et que l’on
souhaite avoir la quantité q de ce bien à l’arrivée, il faut alors faire voyager une quantité Tq du bien,
avec T>=1. Ce que l’on perd pendant le parcours (à savoir (T-1)*q) correspond au coût du transfert.
Ceci permet d’introduire la notion de coût de transport dans un modèle sans avoir à considérer le
secteur du transport à part entière. Cette façon de procéder était déjà présente dans les travaux de Von
Thünen (1826).
166
localisation de la firme). Ces migrations sont dictées dans le modèle par les
différentiels de salaires nominaux et de coût de la vie1 entre les régions.
Par ailleurs, dans ce modèle, « le nombre de firmes dans une région est ici lié
de manière univoque au nombre de travailleurs qualifiés qui y résident : firmes et
travailleurs qualifiés bougent main dans la main. Il n’est donc pas nécessaire de
décrire l’évolution de la distribution des firmes : celle-ci suit automatiquement celle
des travailleurs qualifiés, ce qui simplifie considérablement l’analyse des équilibres
[…] Malgré son caractère restrictif, cette hypothèse est en accord avec les travaux
empiriques qui ne peuvent discriminer entre cause et effet dans l’analyse des
mouvements de firmes et de travailleurs : le fameux “do people follow jobs or do
jobs follow people ?” mis en évidence par Muth (1971). » (Combes, Mayer, Thisse,
2005, chap. 6, p.14).
Ce modèle d’économie géographique souligne le mécanisme de Cumulative
Causation mis en évidence par Myrdal. En effet, la hausse du nombre de travailleurs
et donc de consommateurs entraîne une hausse de la demande locale de biens
manufacturés et incite les entreprises à venir s’implanter. Or quand la taille du
marché augmente, les profits augmentent, l’attractivité auprès de nouvelles entreprise
est renforcée (c’est l’effet taille du marché). Le nombre de firmes augmente donc, le
nombre de variétés produites augmente et l’indice de prix diminue, donc les salaires
réels augmentent ce qui attire de nouveaux travailleurs qui bénéficient d’un niveau
de vie plus élevé et d’une offre diversifiée de biens et services, etc. jusqu’à ce qu’une
seule région regroupe toutes les firmes et tous les travailleurs consommateurs.
1
Le coût de la vie correspond au prix du panier moyen représentatif de ce que chaque résident
consomme.
167
profitabilité des investissements. C’est ce mécanisme d’encombrement du
marché qui vient freiner l’agglomération des firmes. » (Combes, Mayer,
Thisse (2006), chapitre 4, p.12) ;
- l’existence d’une main-d’œuvre agricole immobile qui consomme
favorise le maintien de firmes en périphérie ;
- une hausse des coûts de transferts peut engendrer une baisse des
exportations. Certaines firmes vont alors être incitées à partir (ou à ne pas
venir) et à se rapprocher de la demande existante en périphérie puisque à
présent de forts coûts de transferts vont les protéger de la concurrence des
firmes de l’agglomération ;
- la congestion foncière (ou encore environnementale…) génère une
hausse du coût de la vie pour le travailleur et altère son degré de
satisfaction à résider dans une agglomération.
Selon ces modèles, l’avenir des espaces non métropolitains (villes moyennes
ou petites, ou encore espace rural) semble compromis. La revitalisation des espaces
168
ruraux pourrait, certes, être en partie due aux forces de dispersion du modèle, mais
les premiers éléments d’analyse ne semblent pas entièrement confirmer cette
hypothèse. Les déplacements touristiques, l’impact des retraités sur la consommation
locale, le poids des revenus de transferts dans les économies rurales sont autant
d’éléments qui paraissent importants pour comprendre la vitalité des espaces ruraux
et qui ne sont pas introduits dans ces modèles.
169
ajoutée. Dans ces approches, le territoire est plutôt un espace sur lequel se
développent des activités qu’une construction des acteurs. D’autres modèles
proposent une définition différente du territoire tout en privilégiant, comme les
auteurs de la NEG, l’aspect productif des économies locales pour identifier les
processus de développement.
1
D’autres régions sont également le support de constat analogue ; notamment la Silicon Valley au sud
de San Francisco et ses entreprises technologiques (Saxenian 1985, 1994) – Hollywood en Californie
et ses entreprises cinématographiques (Christopherson et Storper, 1986).
170
dynamiques internes propres aux régions (Aydalot, 1984 ; Maillat et Lecoq, 1992 ;
Benko et Lipietz, 1992).
Vu d’un peu plus près, ce qui ce passe dans ces régions n’est pas sans
rappeler un concept déjà repéré au début du XXe siècle par Marshall : le district
industriel. Ainsi, ce concept auquel on prêta peu d’attention n’était pas simplement
destiné à décrire un phénomène passager, mais rendait bel et bien « visible une
dimension permanente, bien que souvent cachée, du développement (et du non
développement), à savoir la dimension territoriale» (Beauviala et alii, 1993, p. 13,
cité par Maillat, 1996).
Vers la fin des années 1970, Becattini reprend cette notion pour décrire
l’organisation industrielle des régions de la « Troisième Italie ». Pour Becattini, le
district industriel est « une entité socio-territoriale caractérisée par la présence
active d’une communauté de personnes et d’une population d’entreprises dans un
espace géographique et historique donné » (Becattini, 1992, p.36).
Une vague italienne va alors s’emparer du sujet (Bagnasco, 1977 ; Garofoli,
1981 et 1992 ; Piore et Sabel, 1984) et se propage. Garofoli (1981) inventorie 200
districts en Europe, Courlet et Pecqueur (1992) une quarantaine sur la France, Reis
(2000) en repère également au Portugal.
Le district industriel devient un modèle d’organisation productive et serait
une alternative possible au fordisme et à la métropolisation. Les entreprises
pourraient s’organiser en réseaux pour résoudre les problèmes de cycles de
surcapacité et pour répondre à la demande de flexibilité accrue (Amin et Thrift, 1992,
cité par Markusen, 2000).
Comme le souligne Peyrache-Gadeau (1995) ou encore Maillat (1996), les
districts industriels marshalliens sont souvent nés du processus d’externalisation de
certaines tâches par les grandes entreprises. « En Italie, cette politique
[d’externalisation] a ouvert la voie au développement de l’économie informelle et à
la création de nombreuses petites entreprises locales sous-traitantes. Peu à peu, la
division du travail entre les diverses petites entreprises a poussé à leur spécialisation
dans différentes phases du processus de production ainsi qu’à leur interdépendance.
[…] Ainsi, se sont constitués des systèmes de production, organisés sur une base
territoriale, dégagés de l'influence des grandes entreprises qui leur avaient donné
naissance au fur et à mesure de leur capacité à se créer de nouveaux débouchés »
(Maillat, 1996, p.6).
Comme le précise également Pecqueur (1989), les systèmes productifs locaux
(SPL) ne naissent pas de la crise, ils ré-émergent. « Ils ressurgissent comme
171
témoignage de la permanence d’une osmose entre les savoir-faire, l’activité de
production et les caractéristiques humaines du lieu. » (Pecqueur, 1989, 2e éd. 2000,
p.73).
Aux formes différenciées que revêtent ces districts, s’apparente une multitude
de termes distincts visant à désigner ces formes d’organisations productives
localisées : système territorial de production, tissu industriel local, système industriel
localisé, système de production localisé ou local, écosystème localisé, méso-système
productif, système de production localisé et d'innovation, district technologique… ou
encore clusters1. Au final, la notion de systèmes productifs localisés (SPL) ou
territorialisés décrit un ensemble d’activités interdépendantes, techniquement et
économiquement organisé, et territorialement aggloméré (Peyrache-Gadeau, 1995;
Courlet et Pecqueur, 1992).
Ce terme de SPL chapeaute, en quelque sorte, les concepts de district
industriel, de technopôle (Planque, 1985), de milieu innovateur (Maillat, Quévit,
Senn, 1993), de spécialisation flexible (Piore et Sabel, 1984). Pour Grosjean et
Crévoisier (1997), ces différents types de SPL distinguent la structure des relations
(à l'intérieur et à l'extérieur de la région) ainsi que la nature de ces relations (relations
avec le marché, avec les institutions de recherche et de formation, de production avec
d'autres entreprises, etc.). Markusen (2000) y distingue des types
d’organisation différenciés. Dans tous les cas, les différents éléments énoncés par
Pecqueur en 1989 comme points communs à ces systèmes restent vrais dans ces
modèles (spécialisation, entreprises de petites ou moyennes tailles, concentration
d’une multitude d’entreprises sans réel leadership de l’une d’entre-elles, densité,
quantités produites importantes pour le secteur).
Parallèlement, voire conjointement à ces premiers travaux, se développent,
dans les années 1980, les approches spatialisées des régulationnistes2. Trois
éléments caractérisent cette école de pensée (Benko et Demazières, 2000) :
- le territoire est un construit social, historique. La dimension
temporelle est au cœur de ces approches. Cette acception se distingue de
1
Cités par Maillat (1996).
2
Au départ (Aglietta, 1976 ; Boyer et Mistral, 1978 ; Lipietz, 1979), cette approche privilégia la
dimension temporelle à la dimension spatiale du développement économique (Benko et Demazières,
2000)
172
celle des économistes orthodoxes pour qui l’espace demeure un morceau
de sol caractérisé notamment par la distance1 ;
- l’organisation industrielle et sociale propre à chaque régime
d’accumulation, et donc à chaque période historique, a des implications
spatiales (selon les modes de production, certaines villes se retrouvent au
cœur du système alors que d’autres en sont exclues etc.). Mais surtout, un
nouveau régime d’accumulation s’articule toujours avec le précédent,
décrivant ainsi une dynamique spatiale temporelle plus complexe que
l’analyse des formes territoriales canoniques : la ville fordiste, la
technopole, les nouveaux espaces industriels, etc. ;
- une attention particulière est portée sur les modes de régulation de
l’espace notamment parce que ces modes de régulation peuvent s’opposer
aux logiques d’accumulation. Ce dilemme entre équité et efficacité dans
la mise en place des politiques d’aménagement du territoire a été
particulièrement bien décrit par Gérard-Varet et Mougeot (2000).
1
En revanche, cette acception n’est pas sans rappeler celle de l’école historique allemande menée par
Roscher, Schaeffle ou encore Sombart, cf. chapitre 1.
2
Expression choisie dans le rapport pour parler des SPL (district industriel, milieu innovateur et
cluster).
173
fragilité de leurs chers districts » (Benko et Lipietz, 2000, p.11). Le caractère non
reproductible et non généralisable est également mis en évidence par Pecqueur, qui
note au passage que l’ « on peut d’ailleurs rencontrer l’expression de dynamiques
territoriales sans être nécessairement dans une configuration pure de système
productif local » (Pecqueur, 1989, 2e éd. 2000, p.96).
Colletis et Rychen (2004) inversent le lien de cause à effet en précisant que
« l’ancrage territorial des activités industrielles correspond à une valorisation
localisée de l’activité d’une entreprise. Toutefois, ce mode de valorisation du
territoire par l’entreprise ne signifie pas que l’entreprise contribue forcément au
développement du territoire. » (Pecqueur, Zimmermann (dir.), 2004).
174
II LES APPROCHES SPECIFIQUES DU « TERRITOIRE FACTEUR DE
CROISSANCE »
175
population active. Dans ces travaux empiriques, le développement territorial renvoie
directement au phénomène de croissance puisqu’il est mesuré en termes de niveaux
de salaires (Rauch, 1991), somme des gains des travailleurs (Kusmin et alii, 1996),
PIB par habitant (Barro, 1991 ; Glaeser, 1994). Glaeser et Shapiro (2001)
reconnaissent que l’évolution de l’emploi ou de la population serait préférable pour
mesurer le développement des villes que le seul PIB par habitant. Cependant, ces
auteurs rajoutent que ces trois variables étant naturellement corrélées, le PIB par
habitant apparaît comme un indicateur tout aussi satisfaisant que les deux autres pour
mesurer le développement des villes. La corrélation dont parlent les auteurs ne
semble pourtant plus se vérifier à l’échelle infranationale (Davezies, 1993b).
L’innovation est également un thème récurrent de ces approches sur les
facteurs de croissance des villes. C’est notamment le lien entre innovation,
croissance, capital humain et effets de débordement (influence géographique) qui est
mis en avant. L’innovation nécessite évidemment la mobilisation du capital humain.
Le capital humain est à la fois concentré mais aussi plus efficace dans les
agglomérations (Sonn et Storper, 2004).
Les travaux pionniers de Jaffe (1989) ont mis en évidence les « effets de
débordement » de la Recherche et Développement (R&D). Le nombre de brevets
déposés par les firmes est corrélé aux dépenses de R&D faites dans un même Etat
américain. De nombreux travaux confirment ces effets de débordement de la
Recherche universitaire sur le monde des affaires (Audretsch et Feldman, 1996 ;
Breschi et Lissoni, 2001) ou plus généralement des effets de débordement des
innovations entre-elles (Anselin, Varga et Acs, 1997). Dit autrement, l’inventeur est
d’autant plus inventif que son voisin l’est aussi. La formule reste vraie si l’on
remplace l’inventeur par le créateur ou l’artiste (effets de débordements du « talent »
chez Florida, 2002b). Via le processus d’innovation, ces différents auteurs expliquent
donc comment la proximité, et donc les espaces denses en matière grise (en capital
humain) constituent ce que Chinitz appelait déjà les milieux incubateurs, ou ce que le
GREMI1 nomme les milieux innovateurs. Pour les chercheurs du GREMI, ce milieu
constitue finalement une ressource spécifique en soi. Elle n’est peut-être pas
directement territoriale, mais elle est constituée d’acteurs eux-mêmes susceptibles de
mobiliser les ressources locales. On voit là la difficulté de séparer clairement les
différentes « Écoles » d’analyse dans ces approches de plus en plus
pluridisciplinaires.
1
Groupe de recherche européen sur les milieux innovateurs.
176
Hormis donc pour les auteurs du GREMI, ou proches de celui-ci, on voit que
le territoire est considéré principalement pour introduire l’existence des économies
d’agglomération. Le concept de développement associé à ces travaux s’apparente,
voire se confond, à celui de croissance. La ressource demeure générique. Le territoire
peut, néanmoins, être un facteur de croissance tout en n’étant pas réduit à la seule
capacité à agglomérer les facteurs de production. Les approches du « développement
comme processus » mobilisent l’acception « géographique » du territoire. Elles
considèrent que les spécificités de celui-ci peuvent être une source de croissance et
de développement.
177
Ce surplus que le consommateur consent à payer reflèterait un double
processus d’évolution de la demande. Tout d’abord, l’augmentation du niveau moyen
de pouvoir d’achat entraînerait une relative saturation des besoins de base,
stimulerait une demande tournée vers des biens de meilleure qualité (effet AOC par
exemple), mais stimulerait aussi la dimension immatérielle de la demande (effet de
rente paysagère) (Mollard, 2001 ; Mollard et alii, 2001).
La combinaison paysage-qualité-demande du consommateur crée des
conditions favorables à la production et à la vente de produits locaux très spécifiques
et participe ainsi à la production de richesse locale.
Pour passer de l’aspect choix du consommateur, gain pour le producteur à
l’aspect développement local, ces auteurs se réfèrent à la notion de proximité
organisationnelle qui pour Gilly et Torre (2000) repose sur deux types de logiques
dans les territoires : la similitude et l'appartenance.
Mollard et alii (2001) soulignent que « Les acteurs réagissent par similitude
d'intérêt dans la mesure où ils concourent à la réalisation commune d'une même
image globale […] et qu'il y a solidarité entre les acteurs pour que l'image
construite et communément partagée soit préservée. De même pour la logique
d'appartenance, l'image à préserver repose sur la référence commune à un territoire
« baronniard1 » qui, à travers son histoire longue et sa construction patiente du
paysage, constitue un invariant dans lequel les acteurs non seulement se
reconnaissent mais fondent leur unité ».
Ici, le développement local est clairement perçu comme un processus de jeu
d’acteurs. Les dix ans de travaux de recherche de cette équipe ont aussi fait émerger,
au regard des différents territoires et produits étudiés, le concept de « panier de
biens » (Mollard, Pecqueur, Lacroix 1997). En effet, l’impact économique et la
valeur ajoutée territoriale d’un produit, dit leader, peut se répercuter sur d’autres
biens. Toujours dans le cas de l’huile d’olive, les auteurs montrent comment les
produits dérivés (tapenade, savon etc.) mais également la lavande, les vins, les gîtes
touristiques… profitent de l’image qui se construit autour d’un produit, l’olive, et de
ses paysages.
Le territoire construit historiquement et culturellement constitue donc une
ressource dans la production d’offres spécifiques et non reproductibles. Afin de
synthétiser les différents travaux en la matière, François et alii (2006) proposent une
définition de la ressource territoriale qui repose sur quatre principes :
1
Il s’agit ici de la zone drômoise des Baronnies.
178
« - la ressource territoriale se construit sur une ressource spécifique ;
- le passage de l’une à l’autre est lié à un processus de révélation ;
- ce processus est intentionnel ;
- il s’appuie sur plusieurs étapes interdépendantes.
[…] Une ressource territoriale est une ressource spécifique qui peut être
révélée selon un processus intentionnel, engageant une dynamique collective
d’appropriation par les acteurs du territoire, de nature différente selon qu’elle
emprunte ou non le circuit de la valorisation. » (François, Hirczak, Sénil, 2006,
p.696).
Bien que très différentes dans leurs hypothèses et conclusions, les deux
approches présentées dans ce chapitre ont en commun la prise en compte des
capacités ou systèmes productifs comme principal, voire seul moteur possible du
développement des territoires. Les espaces ruraux ne sont introduits qu’à la marge
dans les modèles de la NEG (ils peuvent bénéficier, voire créer des forces de
dispersion). Au contraire, ils sont très souvent au cœur de l’observation et de l’étude
des systèmes locaux de production. La mobilisation des acteurs autour d’une
ressource spécifique semble pouvoir générer du développement et participer à la
revitalisation des espaces ruraux.
179
180
Chapitre 3 - Les approches par la demande. Le territoire
support de la population
181
Les approches générales qui permettent de comprendre ces mécanismes sont,
selon nos investigations et celles d’autres équipes de recherche1, très rares2. En
revanche, les études partielles ou spécifiques sont nombreuses et viennent nourrir la
réflexion en cours.
Les lignes qui suivent reprennent les travaux de Laurent Davezies sur le sujet,
synthétisés dans un rapport récent (Davezies 2005). La théorie de la base
économique3 constitue le cadre conceptuel de ces travaux. Selon cette théorie le
développement des villes dépend de revenus externes qui viennent l’irriguer.
L’économie locale peut se décomposer en deux secteurs, l’un contribuant à capter les
revenus de l’extérieur, l’autre travaillant à satisfaire la demande locale. Le premier
secteur, dit basique, est inducteur du développement entraînant, par effets
multiplicateurs, la croissance du revenu, de l’emploi et du peuplement. Le second, dit
domestique, est induit par le premier.
1
Nos investigations ont été menées dans le cadre d’un travail pour le PUCA qui s’interrogeait sur
l’existence de travaux similaires à ceux de Laurent Davezies dans les autres pays européens ou
américains. Le constat d’un réel manque en la matière paraît indiscutable. Aucune approche générale
ou globale n’a été réellement repérée. En revanche, de nombreuses études spécifiques sur un territoire
ou sur une problématique existent. Elles sont présentées dans le deuxième paragraphe de ce chapitre.
Une équipe pluridisciplinaire de chercheurs spécialistes des questions urbaines et de développement
régional à l’université de Louvain-la-Neuve a lancé un programme de recherche autour de l’économie
résidentielle. En amont de leur démarche, leurs investigations pour trouver des travaux de référence
sur lesquels s’appuyer au départ ont été aussi vaines que les nôtres. La seule référence qu’ils ont
également trouvée est celle de la théorie de la base revisitée par Laurent Davezies
2
Il semblerait qu’une thèse vienne d’être soutenue à l’université du Minnesota sur cette question. Les
travaux de Katherine Nesse semblent porter principalement sur l’estimation des retraités. Le titre de la
thèse est : Retirement Income: A New Model of Economic Base. Markusen (2006) cite ce travail pour
montrer que d’après Nesse, les retraites, les dividendes et les revenus de transferts représenteraient
60% des revenus des espaces non métropolitains, 49% dans les espaces métropolitains. Même s’il ne
s’agit pas directement de la part de ce type de revenus dans l’ensemble des revenus basiques mais par
exemple dans le total des revenus des ménages, le raisonnement et la démarche sont très certainement
proches du raisonnement tenu ici.
3
A qui doit-on cette théorie ? Formulée initialement, selon les auteurs, par Cantillon (1725) dans son
Essai sur la nature du commerce en général, pour d’autres par Sombart (1916) dans son Der Moderne
Kapitalismus ou encore par Homer Hoyt (1954) qui l’a dotée d’une méthodologie, Gonnard (2001)
nous apprend que Sombart lui-même attribuait l’idée initiale, avant Cantillon, à Het Welvaren van
Leiden (1695) dans son Handschrift uit het Jaar... On trouvera dans Gonnard (2001) le récit du
parcours tourmenté de cette théorie dans l’histoire de la pensée économique jusqu’à la fin du XXe
siècle.
182
Cette théorie a été fort mobilisée jusque dans les années 1980, par Hoyt,
North ou encore Tiebout pour les travaux les plus retentissants. Mais, en 1985,
Richardson tire le bilan de ces décennies de travaux en déclarant que les « modèles
issus de la théorie de la base doivent être enterrés sans espoir de résurrection »
(Richardson, 1985, p.646, cité par Gonnard, 2001, p.3).
183
- la base résidentielle : revenus extérieurs captés grâce à la résidence et
à la présence de certains agents, à savoir les retraités, les migrants
alternants, les touristes.
Les résultats sont saisissants. La base productive privée qui focalise le débat
et la Recherche ne représenterait que 25% des revenus basiques moyens des aires
urbaines françaises. La base résidentielle, qui n’avait jusque-là aucun retentissement,
alimenterait majoritairement les économies locales (50% des revenus basiques). La
base publique et la base sociale représenteraient les 25% restants, soit autant que les
revenus productifs privés.
En moyenne donc, et si l'on accepte l'idée que ce sont les flux de revenus
basiques qui déterminent le développement des territoires, ce ne sont pas les « firmes
en compétition » qui constituent l'enjeu le plus lourd du développement local mais
les individus qui consomment. D'emblée, l'idée que l'acteur local est impuissant face
à une mondialisation qui se joue des territoires peut être, de nouveau, discutée. Dès
lors, résumer l’économie locale à la production serait insuffisant.
1
Poids de la base productive privée dans le total des revenus basiques, toujours selon les estimations
de Davezies (2003b).
184
Louis) ou des petites villes proches de métropoles (Villefranche-sur-Saône, par
exemple).
Les territoires les plus pénalisés, avec une forte sur-représentation de la base
sociale, étant, sans surprise, les zones peu attractives sur le plan résidentiel en même
temps que les plus affectées par une crise de reconversion productive : Lens-Hénin,
Nord-Deux-Sèvres, Sambre-Avesnois, Angoulême, Nord-Poitou ou Valenciennois…
185
et soulignent les intérêts de plus en plus divergents entre l’entrepreneur et le
consommateur.
Bien que peu étudiée par les économistes, c’est sur cette problématique du
tourisme que l’on trouve le plus de travaux. Trois grandes familles méthodologiques
permettent de mesurer l’impact du tourisme sur les territoires :
- les modèles d’estimation des revenus basiques et/ou des emplois liés à
l’activité touristique via les méthodes de multiplicateurs (Fletcher et
Archer, 1996 ; Vollet, 1998 ; Lejoux, 2006) ;
- les modèles d’équilibre général ou d’analyse input/output ;
- les comptes satellites du tourisme.
186
assorti d’une enquête destinée à pallier le manque d’information en matière
d’échanges interrégionaux1.
Ce sont les approches du type multiplicateur keynésien qui dominent
l’analyse territoriale sur la question touristique.
Ces travaux sont le plus souvent réalisés à partir d’enquêtes auprès des
touristes (afin de déterminer le montant des dépenses, ventilé par secteur) puis auprès
des entreprises du secteur et des fournisseurs. L’analyse de l’impact économique se
conclut au final par l’estimation du nombre d’emplois créés et de revenus générés
grâce aux dépenses des touristes. On distingue le plus souvent les effets directs et
indirects, les effets induits dans la mesure du possible2. Ces enquêtes sont largement
répandues et facilement accessibles aux USA (Wisconsin3, Floride4, Michigan5,
parcs californiens6). Sur l’Europe, on peut citer le cas d’une étude sur la Finlande7,
ou sur des zones rurales françaises (Vollet, 1998 ; Échevin, Gerbaux, 1999). Un
rapport au ministère délégué au Tourisme (2005) sur l’impact des meublés et
chambres d’hôtes en France s’appuie sur cette méthode d’analyse.
1
Cette méthode a été utilisée pour la localité de Washington (Mark, 1989 ; Fuller, 1995 ; Frechtling et
Horvath, 1999) ; sur deux comtés du Wisconsin et de Pennsylvanie (Fletcher, 1989) ; sur Miami
(Mescon et Vozikis, 1985). Frechtling et Horvath (1999) présentent un tableau récapitulatif des
résultats de ces études.
2
Les effets directs mesurent les effets sur l’emploi et les revenus des dépenses réalisées directement
dans les activités de tourisme. Les effets indirects déterminent les effets qui se répercutent sur les
fournisseurs (ou activités dépendantes) des secteurs touristiques. Les effets induits sont les effets
générés par les dépenses des salariés (ou bénéficiaires) du secteur du tourisme et des activités
dépendantes (fournisseurs).
3
http://agency.travelwisconsin.com/Research/EconomicImpact_Active/2005_TourismWorks.pdf : les
dépenses des touristes s’élèvent à 11,8 milliards de dollars en 2004, génèrent 309 000 emplois (dont
203 000 emplois directs) et 6,65 milliards de dollars de salaires et revenus (dont 3,4 milliards de
revenus directs).
4
http://www.cefa.fsu.edu/florida_tourism03.pdf : 75 millions de visiteurs en Floride génèrent 889 000
emplois directs et 1,2 million d’emplois au total (voir le document pour les prévisions du modèle, les
impacts en termes de taxes, d’impôts sur le revenu, de consommation etc.)
5
http://web4.canr.msu.edu/MGM2/econ/michigan/ecimpest.html : ce site détaille les étapes de calculs
des impacts du tourisme dans cet État. Des liens renvoient vers des études plus précises, nombreuses
en l’occurrence pour cet État, grâce au travail d’une équipe universitaire menée par Daniel Stynes,
spécialiste en la matière.
6
http://www.npca.org/across_the_nation/npca_in_the_field/pacific/economic_report/default.asp : 280
millions de visiteurs sur les 388 sites, dépensent 10,6 milliards de dollars, ce qui génère 4,5 milliards
de salaires, revenus, bénéfices et 67 000 emplois directs et indirects.
7
http://tourism.rovaniemi.fi/includes/file_download.asp?deptid=6918&fileid=17103&file=2006020709
5401.pdf
187
Il existe également des travaux sur l’impact fiscal du tourisme, des analyses
coûts-bénéfices (qui intègrent généralement les effets positifs et négatifs non
marchands ou non matériels pour la population), des études d’impact
environnemental, des études de faisabilité (plutôt liées à un projet précis)1.
1
Pour des exemples pédagogiques de méthodes et de calculs voir Stynes (1999).
2
Serge Sschmitz, géographe belge, a entrepris une étude comparative des travaux portant sur la
résidence secondaire en Europe. Son papier (Colloque : Étrangers dans les campagnes. Organisé par
le CERAMAC à Vichy les 18 et 19 mai 2006) ne porte que sur les motivations à l’achat d’une
résidence secondaire, au choix du lieu, aux attentes en termes de cadre de vie possible à l’âge de la
retraite etc.… mais nullement sur les impacts économiques. L’auteur nous a confirmé l’impossibilité
qu’il avait eu à traiter ce thème de façon comparée puisque ce type d’étude sur l’impact économique
des résidents secondaires est quasi inexistant en Europe. Cf. annexe 2 : bibliographie de Serge
Schmitz en la matière.
On note l’existence de deux travaux d’étudiants en France et d’une étude en Autriche qui abordent la
question :
Goujard, A. (2003). Résidences secondaires des étrangers et territoire français. Localisation et
retombées économiques locales, la valorisation d’un capital symbolique, mémoire de DEA – Institut
d’Urbanisme de Paris, laboratoire du C.R.E.T.E.I.L., Paris 12, sous la direction de Laurent Davezies.
Lejoux, P. (2002). Les ressorts non productifs du développement territorial. Analyse de l'impact
économique des séjours en résidence secondaire en France métropolitaine - mémoire de DEA –
Institut d’Urbanisme de Paris, laboratoire du C.R.E.T.E.I.L., Paris 12, sous la direction de Laurent
Davezies.
188
En Grande-Bretagne et aux États-Unis, parallèlement à ce type de travaux
sociologiques, existe tout un pan de littérature qui tente de mesurer les impacts
économiques et fiscaux des retraités sur les territoires d'accueil. La méthodologie
employée s’inspire dans la plupart des cas de la méthode du multiplicateur de la base
économique ou du multiplicateur keynésien. Les dépenses des retraités favorisent la
demande locale de biens et services, et créent ainsi des emplois. On cherche donc à
mesurer combien un retraité, via ses dépenses, génère d’emplois, en fonction des
secteurs d’activité mais aussi de l’âge du retraité, etc.
Hodge (1991) à partir du modèle keynésien trouve qu’un retraité génère 0,5
emploi. Pour Deller (1995), dans le cas de l’État du Maine, ce taux est de 0,55. Il est
également possible d’intégrer l’impact fiscal (le solde entre ce que rapporte et ce que
coûte un retraité) et d’en déduire là encore l’impact net sur la création d’emploi.
Cette fois, les études concluent à un multiplicateur variant de 0,2 à 0,34
(respectivement Shields et alii, 1999 puis 2001). Ainsi, selon les cas, il faudrait de
deux à cinq retraités pour créer un emploi.
Hiebl U. (1997). Freitzeitwohnsitze auf dem Imobilienmarkt in Östereich : eine Analyse zur
Geographie des östereichischen Immobilienmarktes. Mitteilungen der Österreichischen
geographischen Gesellschaft, 139 : 145-170
189
Les conclusions seraient-elles les mêmes dans le cas des pays européens, de
la France par exemple ? Les études disponibles actuellement ne permettent pas de le
savoir.
Un dernier cas est présenté pour souligner la sensibilité de ce sujet. Ce cas est
celui de la Floride où la part des plus de 65 ans est la plus élevée des USA (18% de
la population – avec des taux allant jusqu’à 35% dans certains comtés). Les
principaux résultats des travaux du bureau d’étude Fishkind & Associates soulignent
l’impact positif considérable des retraités sur l’économie, mais aussi sur la fiscalité
de la Floride. Les dépenses des plus de 65 ans résidant en permanence en Floride
atteignent 37 milliards de dollars en 1997 (les dépenses des touristes 42 milliards) et
induiraient 1,3 million d’emplois, soit 20% de la force de travail de Floride. Les
auteurs de l’étude insistent sur le fait que ces chiffres prennent en compte
uniquement les dépenses des résidents permanents âgés de plus de 65 ans (incorporer
les non-permanents et les 60 - 65 ans amplifierait encore ce phénomène) ; et que l’on
ignore le poids des dépenses faites par la famille et les amis qui rendent visite à ces
retraités.
Mais c’est surtout le contexte de réalisation de l’étude qui est intéressant. Le
poids des retraités en Floride, déjà considérable, ne cesse d’augmenter sous l’effet du
vieillissement et de la forte attractivité migratoire de la région auprès de ces
populations. Face à cette situation, certains présidents de comtés ou politiciens
locaux tirent la sonnette d’alarme et dénoncent les dérives possibles de ce Grey
Power (par exemple pour approvisionner les secteurs industriels en main-d’œuvre).
En réaction à ces accusations et pour prouver leur utilité, la compagnie Villages of
Lake Sumter, un village « privé » géré par et pour les retraités, a commandité l’étude
citée ci-dessus pour un coût de 100 000 dollars ! L’utilité et l’impact économique des
retraités ont pu être mesurés et leur pouvoir de pression démontré (en témoigne
l’article qui donne les résultats de l’étude, publié dans le Wall Street Journal
Interactive Edition, March 4, 1998 intitulé Gray is Green : Retirees have Huge
Fiscal Impac).
Pour Davezies (2002), ce Grey Power renvoie aux réflexions de Tiebout. Dès
1956, Tiebout part du principe que la société est structurée en communautés dont les
caractéristiques et les préférences diffèrent. La situation optimale, à savoir qui
maximise la satisfaction des individus, est obtenue par la décentralisation. C’est en
quelque sorte le marché électoral local qui régule la demande des électeurs
contribuables et l’offre de biens et services publics. Les gouvernements locaux sont
190
en compétition puisque l’électeur local « vote avec ses pieds ». Cependant, dans les
faits, la théorie de Tiebout semblait jusqu’à peu, trop extrême. Kobielski (1978) et
Orange (1991)1 ont montré l’étonnante homogénéité des politiques publiques locales
en France. Il semble cependant que les choses changent et Tiebout a peut-être
finalement fini par traverser l’Atlantique (voir Davezies (2002) sur la question des
retraités, ou encore, Estèbe, Talandier (2005) sur l’intercommunalité). On peut
craindre, en effet, que ce Grey Power conduise les autorités locales à mettre en
œuvre des politiques qui, servant l’électorat âgé, évincent, directement ou
indirectement, du fait de la contrainte budgétaire, celles qui sont tournées vers les
services aux familles de jeunes actifs : crèches, zones d’activités, etc.
1
Cités par Davezies (2002).
2
Pour les plus curieux, voir aussi une bibliographie sur ce sujet établie par l’European Science
Foundation, disponible à l’adresse suivante :
http://www.shef.ac.uk/sisa/esf/EW_Bibliography.shtml#Introduction.
191
Une question posée par Shields et alii (1998) amène au troisième socle de la
base résidentielle. Shields et alii (1998) se demandent si le bilan des nouveaux
arrivants retraités est positif pour le territoire, mais surtout si cet impact est plus ou
moins important que celui généré par l’arrivée d’actifs ?
Les méthodes utilisées pour mettre en avant les retombées des dépenses de
ces migrants alternants sont la plupart du temps identiques à celles employées pour
les retraités et les touristes (multiplicateur keynésien, multiplicateur de la base
économique, parfois tableau input/output). Ainsi, la question posée porte sur le
nombre d’emplois que créent ces résidents grâce à leurs revenus (perçus en dehors de
la zone où ils habitent) dépensés, en partie, localement.
La plupart de ces travaux sont monographiques et sont parfois issus de
bureaux d’études privés ou d’agences locales d’urbanisme. Là encore, les études
d’impacts économiques à l’échelle des territoires sub-nationaux restent extrêmement
rares en Europe contrairement aux USA, où elles sont, très souvent, commanditées
par les collectivités locales. Janet McBride et Claudia Albano (1999), deux Regional
Planner de San Francisco ont calculé, par exemple, les flux de revenus qui irriguent
les comtés limitrophes de San Francisco. 10 billions de dollars seraient versés à des
actifs travaillant à San Francisco mais résidant ailleurs. Les navetteurs travaillant à
San Francisco mais résidant à Contra Costa apporteraient 5 billions de dollars,
potentiellement consommables à Contra Costa. Le modèle est bouclé par le calcul
des emplois que généreraient ces flux monétaires (25 000 emplois pour Contra
Costa).
L’ensemble de ces travaux effectués sur des populations distinctes, dans des
pays différents, selon des méthodologies diverses concluent à l’impact positif et
192
significatif des retraités, touristes et migrants alternants pour les économies locales.
Ces flux de revenus résidentiels sont indépendants de la capacité productive
exportatrice des territoires et constituent des facteurs majeurs de développement
local. Ces études partielles ou spécifiques confirment donc les conclusions du
modèle général. S’intéresser uniquement à la production locale ne semble plus
suffire pour comprendre les mécanismes économiques locaux.
Alors que près de la moitié du revenu national des pays industrialisés est
aujourd'hui canalisée par des budgets publics (budget de l'État, budgets des
collectivités locales, assurances sociales...), cette question des effets redistributifs des
fonds publics est relativement peu traitée par rapport à d’autres domaines de
l’Économie Spatiale.
Davezies (1993b) relève les travaux précurseurs et fondateurs portant sur
cette question. En France, l'INSEE et la direction de la Prévision (1966) ou encore
Jeanneney et Quiers-Valette (1968), Prud’homme, Rochefort et Nicol (1973) et
Fréville (Rapport Mac Dougall, 1977) ont apporté des réponses à cette question. À
l'étranger, Mushkin (1957), Havemann et alii (1976) et Catsambas (1978) ont mené
des travaux de ce genre sur le cas États-Unis. Ils montrent tous un fort financement
implicite des régions plus pauvres par les régions riches. En Belgique, Van Rompuy
et Verheirstraeten (1979) répartissent le budget belge entre les trois régions du pays
et montrent que la Wallonie bénéficie de très importants transferts implicites.
L’étude indique que si les deux régions étaient deux pays distincts, chacun doté de sa
propre monnaie, et donc sans mécanisme implicite de transferts, la monnaie wallonne
aurait dû, entre 1970 et 1976, dévaluer de 8% par rapport à la monnaie flamande. En
Grande-Bretagne, une étude de Coopers et Lybrand (1985) montre que le Grand-
Londres, qui contribue en 1984 pour 17% des impôts, ne bénéficie que de 13,2% des
dépenses du budget de l'État, assurant par là une subvention au reste du pays, de
l'ordre de 10% du revenu des Londoniens. La CEE s'est aussi intéressée à cette
question, et a produit un rapport intégrant l'étude de ces mécanismes dans chacun des
pays européens mais aussi en Australie, au Canada et aux États-Unis (Rapport Mac
Dougall, 1977).
193
Ces différentes études ont eu l'avantage de mieux mettre en lumière ces
mécanismes, mais ont la plupart du temps eu l'inconvénient de se fonder sur des
hypothèses de répartition et des méthodologies réductrices (pour une analyse critique
de ces différentes études, voir Davezies, 1984). Cependant, elles ont toutes en
commun de dégager une sorte de loi : le budget de l'État est un puissant élément de
redistribution, des régions les plus riches vers les autres !
194
retraites et des revenus de transferts atteindrait 490 milliards en 20051. Ainsi, pour
100 de salaires privés perçus par les ménages en France, on aurait un indice de 130
en termes de salaires de la fonction publique, de revenus de transferts et de retraites.
Au sein des départements français, cet écart de 30% en faveur des revenus de la
redistribution peut varier (carte 1). Cependant, seuls six départements présentent des
montants de salaires privés supérieurs aux revenus issus de la redistribution publique
et sociale (Paris, Hauts-de-Seine, Seine-et-Marne, Yvelines, Haute-Savoie et l’Ain).
Partout ailleurs, les montants des revenus de la redistribution publique et sociale sont
supérieurs aux montants des salaires du secteur privé.
Carte 1 - Rapport entre les salaires publics, les retraites, les revenus de transferts
et les salaires du secteur privé dans les départements métropolitains, en 2005
Source : Calculs de l’auteur d’après DGI, UNEDIC, INSEE, SAE, DREES, CAF, MSA.
1
Ces calculs sont réalisés à partir des données de la DGI, de l’INSEE, de la SAE, de l’UNEDIC pour
les salaires du privé et du public, de la DGI pour les montants des retraites, de la CAF, MSA, DREES,
Ecosanté, pour les revenus de transferts qui comprennent les remboursements de soins de santé. Le
détail des sources de données et des méthodes de calcul est indiqué en annexe 2 de la partie 3. Ces
différents revenus participent aux calculs des revenus basiques des territoires que l’on se propose
d’estimer dans la troisième partie et qui seront présentés de façon détaillée.
195
Malgré le poids prépondérant de ces revenus non productifs privés dans le
revenu des ménages, la question des mécanismes de redistribution spatiale des
revenus publics et sociaux n’occupe peut-être pas la place qu’elle mériterait. De plus,
cette question peut aussi avoir des implications sur les équilibres nationaux. Les
régions productives sont, en effet, à la fois de plus grandes pourvoyeuses de fonds
publics et sociaux qu’elles n’en sont bénéficiaires, mais fournissent également en
grande partie les revenus résidentiels des navetteurs ou encore les dépenses des
touristes. On peut se demander jusqu’à quand les métropoles pourront alimenter le
système.
1
Les références données ici sont issues de la version réactualisée en 1968.
196
La consommation est clairement identifiée comme un marqueur de distinction
sociale mais pas ou peu spatiale. Il est vrai que certains éléments soulignés par
Georges (1963) ne sont plus aujourd’hui d’actualité. Ce n’est malheureusement pas
tant son chapitre consacré aux problèmes de sous-alimentation des pays en voie de
développement qui paraît daté, mais celui qui décrit et analyse les modes de
consommation ruraux par opposition aux modes de consommation urbains. Encore
très marquées dans les années 1960, ces différences de mode de vie entre les ruraux
et les urbains se sont peu à peu estompées au point d’être aujourd’hui inexistantes
(Rochefort, 2002).
Par ailleurs, Georges (1963) insiste sur la « distinction sociale » que procure
la possession d’une voiture, l’accès aux soins de santé et aux soins à la personne ou
encore l’habillement. On retrouve l’idée de Baudrillard (1970) qui précise : « On ne
consomme jamais l'objet en soi (dans sa valeur d’usage) ; on manipule toujours les
objets (au sens le plus large) comme signes qui vous distinguent, soit en vous
affiliant à votre groupe pris comme référence idéale, soit en vous démarquant de
votre groupe par référence à un groupe de statut supérieur » (Baudrillard, 1970,
réed. 1996, p.79).
La possession de ces biens et l’accès à ces services était discriminante à la
fois socialement mais aussi spatialement. Les inégalités départementales en la
matière étaient encore prégnantes dans les années 1960, tout comme les différences
selon les pays d’Europe, ou encore et de façon plus aiguë pour l’auteur, selon le type
de villes (villes minières du Nord, élégantes capitales régionales, bourgs ruraux…).
La démocratisation du marché de la consommation a rendu obsolètes les exemples
pris par Georges (1963).
197
essentiellement) correspond à un véritablement déplacement du centre de gravité de
la consommation et des dépenses » (Ibid. p.100). En 1966, les dépenses affectées à la
culture et aux loisirs représentent 14 à 15% du budget individuel des Français, un
montant « bien supérieur à celui consacré au loyer »1 (Ibid. p.78).
Et, « ce sont les citadins en effet, et presque exclusivement les citadins, qui
animent les grands courants saisonniers de déplacements et qui, ce faisant,
répartissent sur un certain nombre de régions privilégiées à cet égard une partie
notable du revenu urbain : phénomène de report géographique de consommation et
de transfert de revenu » (Ibid. p.100). À ces flux de revenus liés au tourisme estival
principalement, s’ajoutent les dépenses générées par la possession d’une résidence
secondaire (phénomène qui se démocratise et se développe dans ces années-là,
notamment dans la région parisienne). Pour l’auteur, le reproche le plus sérieux que
l’on peut faire (et que l’on a fait) aux ensembles urbains, c’est de « ne pas être
conçus pour retenir dans leur cadre la population en dehors de ses heures et travail
ou de sommeil [… provoquant] ce désir irrésistible de déplacement qui met en
mouvement chaque fin de semaine des millions de citadins » (Ibid. p.77).
1
Cette remarque de l’auteur renforce notre propos précédent sur l’importance qu’a pris le logement,
l’adresse, l’ancrage territorial dans le quotidien des individus (en 1999, les dépenses des ménages en
loyer brut s’élèvent à plus de 20% de leur budget).
198
sociologues de l’urbain serait plutôt l’interaction entre le mode de vie urbain et la
forme de la ville, entre l’identité sociale, la consommation et la forme urbaine, que
l’impact de la consommation sur le développement socio-économique des villes (et
des territoires en général).
1
Ce constat souligne le peu d’intérêt que portent les économistes, même les économistes régionaux,
sur cette question et nullement le peu de place qu’occupent les travaux économiques dans cette revue
(souvent représentés).
2
L’un poursuit les travaux de Castells sur la consommation collective, consommation publique,
consommation privée (Clarke, David B., Braford Michael, G. (1998). « Public and private
consumption and the city », Urban Studies, pp. 865-888), l’autre s’intéresse plutôt à l’histoire de la
consommation dans la ville, au passage de la ville moderne à la ville post-moderne (Glennie, Paul
(1998). « Consumption, consumerism and urban form : Historial perspectives », Urban Studies, pp.
927-951).
199
Consommer la ville
À juste titre, Glaeser et alii (2001) soulignent dans leur article intitulé
« Consumer City » que l’Économie Urbaine se focalise uniquement sur la
compétitivité des villes face à la mondialisation et sur la question des localisations
des activités. La ville comme centre de consommation a toujours été négligée, la
production primant sur la dépense. Or, la ville semble de moins en moins contrainte
par les attentes d’hier en matière d’emplois et de production. En revanche, la ville
semble s’intéresser de plus en plus aux aménités qui permettraient d’attirer et de
retenir les travailleurs qualifiés. Pour Glaeser et alii (2001), ces aménités urbaines
sont de quatre grands types :
- une offre variée de biens et services, non pas manufacturiers – le
développement d’Internet rend tout objet disponible en tout lieu – mais
culturels (restaurants, théâtres, scènes de spectacles en tous genres).
L’auteur montre que les villes qui ont connu les plus forts taux de
croissance au cours des vingt dernières années sont celles qui sont les
mieux dotées en restaurants, théâtres, concerts par habitant, que ce soit
aux USA et ou en Europe (France, Angleterre) ;
- l’esthétisme architectural (la beauté de la ville) ;
- l’offre de services publics (des écoles à la sécurité) ;
- la vitesse : l’efficacité et le réseau de transports publics en Europe, la
circulation en voiture autour des villes aux USA constituent deux
agréments majeurs dans la vie quotidienne des résidents.
Pour les auteurs, seules les villes qui parviennent à attirer des résidents,
consommateurs, hautement qualifiés seront en expansion. La souveraineté du
consommateur est aujourd’hui indéniable. Et, in fine, installer des secteurs
manufacturiers dans les villes deviendrait même pénalisant. Ces politiques urbaines,
visant à séduire les classes les plus favorisées, devraient, pour l’auteur, bénéficier
également aux plus pauvres (plus de mixité et plus de services offerts aux
populations). On peut souligner que ce point est à peine évoqué et que la mesure des
conséquences de la consommation locale (positives comme négatives) pour les
populations pauvres ou les classes moyennes n’est pas réalisée.
200
qu’augmenter. Or, la ville étant la meilleure pourvoyeuse en la matière, l’essor de ce
type de demande ne bénéficierait qu’aux agglomérations urbaines.
Deuxièmement, la hausse des revenus engendrerait une hausse du prix du
temps. Les agents seraient alors prêts à dépenser plus pour aller plus vite et se
déplacer plus facilement ; ils investiraient dans les nouveaux biens de consommation
(portable, ordinateur, Internet, transports plus rapides etc.). Ces nouveaux outils
rendraient bien entendu les populations plus mobiles et la ville plus vivable. Née du
besoin de réduire les coûts de transports des biens, des personnes et des idées, la ville
demeurerait un lieu privilégié pour ce gain de temps si précieux.
On connaît largement les principes qui font que la ville est un lieu privilégié
pour la production. Mais ce qui rend la ville plus productive n’est pas nécessairement
ce qui la rend plus agréable. Ici les motivations des consommateurs diffèrent de
celles de l’entrepreneur, contrairement aux modèles de la NEG. Le prix du logement
reflèterait, à la fois, la qualité de la ville comme lieu de vie et l’effet de la ville sur la
productivité (liée à des salaires plus élevés). L’écart entre les prix des logements et
les salaires reflèterait les aménités de consommation : qualité du site, diversité de
l’offre culturelle, offre de biens et services publics, de transports, mais aussi la plus
grande possibilité de socialisation… pouvant aller jusqu’au mariage (Costa et Kahn,
2000).
Ces aménités de consommation seraient aujourd’hui de puissants facteurs
explicatifs du développement local. Les études empiriques reportées dans cet article
« Consumer City » montrent que les villes qui croissent (population, emplois ou
revenus par exemple) sont bien celles qui sont les mieux dotées en la matière : climat
d’une part, offre culturelle d’autre part.
Finalement, Glaeser et alii (2001) distinguent trois grands types de villes :
- les villes denses dynamiques : New York, San Francisco, Boston mais
également la plupart des capitales européennes (Londres et Paris tout
particulièrement) qui cumulent aménités, capital humain, bon niveau de
production ;
- les villes anciennes et déclinantes, qui étaient prospères à l’époque de
la révolution industrielle (Detroit, Philadelphie, Saint-Louis ou encore
pour l’Europe le nord de l’Angleterre, Manchester) ;
- les edge cities qui continuent à se développer aux USA (mais aussi en
Amérique latine, Australie, Nouvelle-Zélande, etc.), mais qui n’ont pas le
même retentissement en Europe, notamment en raison des politiques de
transports (coût élevé de la voiture et infrastructures moins adaptées).
201
Il devient donc primordial pour la ville de prendre en compte les nouvelles
attentes de ceux qui assurent le développement de la cité, à savoir non plus
uniquement les entrepreneurs mais, aussi et surtout, les consommateurs.
À partir des éléments présentés par Glaeser et alii (2001), on peut envisager
l’impact de ces nouvelles attentes du consommateur non plus sur la ville mais sur les
espaces ruraux. En effet, la « course au temps » et le besoin de quitter rapidement la
ville qu’évoquent ces auteurs sont autant d’atouts urbains qui profitent également au
rural. Le rural ne bénéficie des dépenses des touristes urbains, voire de l’installation
des retraités, franciliens par exemple en France, que parce qu’il reste relié à la ville.
Il est probablement d’autant plus attractif qu’il conjugue aménités paysagères et
naturelles et temps de parcours réduit au départ, notamment, de Paris.
Par ailleurs, si les prix élevés de l’immobilier urbain reflètent l’attractivité
résidentielle et la productivité des villes, ils génèrent un différentiel de prix avec le
foncier rural qui peut profiter aux espaces ruraux. Les ménages aisés peuvent
facilement, aujourd’hui, vivre à la ville et à la campagne (TGV, résidence
secondaire). En revanche, face aux prix de l’immobilier en ville, les ménages plus
modestes privilégieraient de plus en plus la campagne. Ces installations toujours plus
loin des centres ne sont pas, cependant, sans effets négatifs pour les plus modestes.
Le poids des déplacements quotidiens dans le budget des ménages peut devenir, par
exemple, problématique (Guilluy et Noyé, 2004).
202
La classe créative : consommatrice des aménités urbaines
Richard Florida défend dans son best seller « The Rise of Creative Class »
(2002a) la thèse selon laquelle l’essor économique régional ne dépend plus de la
présence de matières premières ou de ports naturels, ni même des entreprises, mais
d’un ensemble d’individus qui constitue la classe créative. Les villes « branchées »
attirent et sont constituées d’ingénieurs, chercheurs, artistes, romanciers, architectes
etc., bref des créatifs du monde des sciences, de l’art, des médias et du sport1. Les
entreprises soucieuses de séduire ces personnes de talent vont donc avoir tendance,
selon l’auteur, à s’installer dans ces villes « sexy ».
Être compétitif dans ces différents domaines serait donc la clé du succès pour
une ville, mais apparemment aussi pour un pays. Florida et Tinagli (2004) calculent
les indices des « trois T » pour les pays européens, établissant ainsi un classement
des pays qu’ils confrontent aux données de PIB/habitant (les deux indicateurs
semblent corrélés positivement). Les pays les mieux classés, tous critères confondus
(technologie, talent et tolérance), sont la Suède, la Finlande et les Pays-Bas. Au bas
du tableau, on trouve l’Italie, la Grèce et le Portugal. En évolution cette fois,
l’Irlande se place en tête devant la Finlande et le Portugal. En fin de liste, on trouve
l’Italie, le Royaume-Uni et la France.
1
Pour Florida, le noyau super créatif est composé des professionnels créatifs œuvrant dans les
domaines de l’informatique et des mathématiques, de l’architecture et de l’ingénierie, des sciences
sociales, des sciences de la vie et des sciences physiques, de l’éducation, de la formation et des
bibliothèques, des arts, du design, du divertissement, des sports et des médias.
203
d’Amérique du Nord (Baltimore, Memphis, Montréal, ou encore l’État du Michigan,
l’Ontario s’en inspirent).
Enfin, Kotkin (2005) souligne le risque que peut représenter ces stratégies de
développement pour une collectivité. Il prend l’exemple de Cleveland, bonne élève,
qui a essayé de se construire de toute pièce une nouvelle image, plus créative donc.
Le taux de chômage y est actuellement à son niveau record. En oubliant les
fondamentaux de ce qui fait l’essor économique et qui améliore les conditions de vie
des populations (écoles, services publics, emplois, sécurité…), Cleveland aurait
manifestement choisi une voie qui ne lui était pas adaptée. Ainsi, pour Kotkin, ces
modèles ne seraient ni généralisables, ni transposables et éloigneraient des véritables
préoccupations urbaines.
Pour se défendre, Florida1 réplique que son message n’est pas aussi ambitieux
que ce qu’on lui assigne. Il tend juste à prouver que la créativité humaine est le
1
Voir Florida 2004 par exemple ou sur son site http://www.creativeclass.org
204
principal moteur de la croissance économique, que chaque personne est créative à sa
manière et que, pour exploiter pleinement cette créativité, nous devons nous montrer
tolérants, accueillants et ouverts à la diversité. Il affirme n’avoir jamais prétendu que
les homosexuels et les artistes faisaient littéralement démarrer la croissance
régionale, mais simplement que leur présence en grand nombre est un gage de
tolérance et signifie donc qu’une culture favorable à la créativité existe.
Si la thèse de Florida a eu autant de succès, c’est bien parce qu’elle a un côté
séduisant indéniable et un aspect marketing urbain efficace. Se brosser une image de
ville branchée, tolérante, créative, festive, correspond plus aux aspirations
d’aujourd’hui qu’une ville intolérante, laborieuse et industrieuse. Outre leur aspect
séduisant, les travaux de Florida reflètent également, tout au moins en partie, une
réalité que décrit fort bien David Brooks (2002), à savoir la « boboïsation » de la
société et notamment des centres-villes. Par ailleurs, comme le soulignent les travaux
portant sur le capital humain, il paraît indéniable que la créativité (l’innovation, la
Recherche…) est un facteur de croissance et de compétitivité. Le succès de ces
travaux réside, peut-être, dans leur capacité à rendre accessibles des idées pas si
nouvelles que ça.
1
Estimations reprises des études de Florida sur le poids de la population gay aux USA.
205
Par ailleurs, la problématique reste « urbano-centrée », comme si les
individus ne se déplaçaient pas. D’autant que, là encore, la population prise en
compte est constituée des individus qui sont les plus mobiles. La ville est peut-être
d’autant plus vivable et attractive que l’on peut la quitter facilement pour passer
quelques jours plus au calme. Ou, plus précisément, les créatifs ne se concentreraient
dans les villes que parce qu’ils ont les moyens de se disperser une grande partie de
l’année. L’analyse effectuée dans la première partie sur les taux de présence en
France montrait la forte corrélation entre les niveaux de revenu par habitant et les
faibles taux de présence des départements. On passe d’autant moins de temps chez
soi que l’on a les moyens d’en partir. Ce qui caractériserait peut-être aujourd’hui les
plus « riches » serait le comportement de « quasi-ubiquité » que ne souligne jamais
Florida ou Glaeser, par exemple. Cette possibilité de combiner les attraits de la ville
et ceux de la campagne en ayant deux résidences ne concerne qu’une partie, sans
doute minoritaire, de la population, mais une partie, peut-être, majoritaire des
« créatifs » dont parle Florida. Pour le rural, ces ménages sont porteurs de revenus.
Ils viennent dépenser les revenus qu’ils ont pu percevoir en ville.
206
les propriétaires de résidences secondaires, mais un endroit où l’on peut vivre à
l’écart des autres tout en étant un « ailleurs familier » (Urbain, 2002, p.373). Selon
Urbain (1991), « Socialement et écologiquement, la campagne, espace pur, s'oppose
désormais aux tumultes, périls et pollutions que recèle la ville » (Urbain, 1991,
p.158).
207
208
Chapitre conclusif - Quels modèles pour l’étude de la
revitalisation des espaces ruraux ?
Les modèles et conclusions présentés dans ce chapitre portent sur les espaces
ruraux. Ils sont néanmoins souvent transposables à d’autres types d’espaces non
métropolitains comme les petites villes ou les villes moyennes.
L’articulation du chapitre repose sur les trois grands thèmes de recherche mis
à jour dans la grille d’analyse : le territoire comme facteur de croissance dans les
approches qui traitent du développement comme un état, puis dans celles qui
considèrent que le développement est un processus et, enfin, dans l’acception du
territoire comme support de la population. À la lecture, la question des avantages
comparatifs des espaces ruraux s’est révélée comme essentielle pour distinguer ces
travaux. Elle est, en effet, déclinée dans les trois types d’approches.
C’est donc tout d’abord à travers les forces de dispersion du modèle de la
NEG, puis via la mobilisation d’une ressource spécifique, et enfin sur les attraits
résidentiels du rural que ce chapitre conclusif1 est articulé.
1
Un quatrième aspect aurait pu être développé, celui de la campagne-nature (Perrier-Cornet, 2001).
L’usage n’est ici ni productif, ni résidentiel, ni récréatif. La nature est « objectivée », pour reprendre
les termes de Perrier-Cornet. Ici, ce ne sont ni les paysages, ni les préoccupations esthétiques qui
comptent, mais la préservation d’un espace naturel par souci sécuritaire (santé humaine, préservation
de la faune et de la flore, prévention des risques naturels). Malgré l’importance de ce quatrième point,
de son implication sur les politiques publiques et, par voie de conséquence, sur les autres usages de
l’espace rural, la réflexion introduite par Perrier-Cornet au croisement du développement local, de
l’action publique et de l’environnement, semble faire figure d’exception, ou renvoie, sinon, aux
travaux sur le développement durable, non développés dans ce travail.
209
implantées dans le rural. L’agroalimentaire, les cimenteries ou encore l’industrie du
bois sont données en exemple par Aubert et Blanc (2002). Parallèlement à ces
mécanismes fort anciens, se développe une industrie spécifique, misant cette fois sur
l’ancrage territorial des activités. Les produits AOC constituent sans doute l’exemple
le plus explicite sur lequel on reviendra. Toujours selon Aubert et Blanc (2002), le
rural doit donc résister aux forces de l’agglomération et tenter de bénéficier des
forces de dispersion en s’appuyant sur ses propres avantages comparatifs.
Les forces de dispersion du modèle métropolitain sont de plusieurs natures
(Gaigné 2000, Gaigné et alii, 2003) :
- la pression foncière ;
- la congestion et les externalités négatives de type technologique ;
- la hausse du salaire ;
- les NTIC1 ;
- la présence d’une demande rurale.
1
Nouvelles technologies de l’information et de la communication.
210
Les aménités rurales constitueraient un facteur d’attractivité résidentielle
rurale principalement vis-à-vis des retraités. Les migrations des actifs vers le rural ne
seraient pas significatives et ne constitueraient pas une force de dispersion de
l’activité industrielle (Clark et Hunter, 1992 et Détang-Dessendre et Molho, 1999 –
cités par Gaigné et alii, 2003).
1
Cité par Ganne et Bertrand (1996).
211
C’est également la question de la main-d’œuvre qui détermina, dans les
années 1960-1970, l’installation massive d’entreprises dans le Sud et l’Ouest de la
France. Les grandes entreprises, séduites notamment par une main-d’œuvre
abondante, non syndiquée et de faible coût dans ces régions, profitèrent également
des politiques interventionnistes du moment, pilotées par la DATAR. Véritable
succès pour ces régions, le rural resta néanmoins à l’écart de ces délocalisations. Les
agglomérations et villes moyennes profitèrent de ces mouvements. Le rural, trop
handicapé en termes d’accessibilité, n’a finalement que peu bénéficié de ces
tendances. Mais parallèlement, va émerger une autre organisation du tissu industriel
rural, conforme aux modèles repérés en Italie. Les systèmes productifs locaux
constitués de PME sont mis en évidence dans des territoires comme le Choletais,
l’Anjou, la Vendée, le Jura et les monts du Lyonnais (Ganne et Bertrand, 1996).
212
départ distingue cette production locale d’une production banale (François et alii.,
2007). La frontière entre la réussite et la réussite qui serait nuisible
(« folklorisation ») paraît néanmoins délicate à établir.
La concurrence entre produits et la saturation du marché peut éroder la rente à
terme. La multiplication des AOC, par exemple dans le cas de l’huile d’olive, peut
finir par minimiser la rente territoriale (Mollard, 2001). Ces limites ou risques se
retrouvent d’ailleurs dans la problématique du développement résidentiel qui repose
aussi sur une rente de qualité paysagère, fragile et altérable, et qui exacerbe la
concurrence possible entre les territoires d’accueil. Le territoire devient finalement
un véritable objet de consommation avec les effets positifs et négatifs que cela
génère.
213
préférences des consommateurs vont également influer sur le volume demandé en
biens manufacturés typiquement ruraux. Quant à l’impact sur les migrations, il
dépend, dans ce travail, du dynamisme du marché de l’emploi local et des niveaux de
salaires. L’image véhiculée par ces produits et sa probable attractivité sur les inactifs
ne sont pas réellement testées.
Peut-être, à cause de l’imbrication entre production spécifique et activité
récréative, les études d’impacts de ces systèmes localisés sur le développement rural
sont-elles apparemment trop rares.
214
Les travaux qui soulignent peut-être le mieux ces dynamiques résidentielles
sont ceux qui ont mis l’accent sur les avantages comparatifs résidentiels souvent
qualifiés d’aménités rurales.
Ce terme « aménité » est emprunté à l’anglais amenity, synonyme
d’agrément, de tout ce qui peut rendre un endroit agréable1. Plus précisément, les
aménités sont une sorte de biens publics locaux non produits (on pourrait dire non
nécessairement produits2) et pouvant être appréciés et consommés directement par
les personnes. Un paysage agréable, le climat, peuvent ainsi être recherchés par les
individus mais aussi par les entreprises. Plusieurs méthodes existent pour tenter
d’évaluer, d’estimer la valeur marchande de ces aménités (les prix hédoniques3 et
l’évaluation contingente4 principalement)5. Des indices ou échelles d’aménités sont
également proposés pour tester l’impact de ces agréments sur le développement
territorial (Boyer et Savageau, 1985 ; Mc Granaham, 1999).
1
À ne pas confondre donc avec sa définition française, où aménité est synonyme d’affabilité.
2
Un paysage est le résultat de la production agricole. Une culture, un environnement… un patrimoine
sont également des notions à apparenter avec la production humaine, le climat en revanche non, etc.
3
La méthode des prix hédoniques consiste à décomposer le prix d’un bien (logement, mais aussi
produit de terroir, etc.) selon ses caractéristiques matérielles (la surface, le nombre de pièces, sa
qualité organoleptique) et immatérielles ou liées aux aménités du lieu (l’adresse, la région de
production… facteurs que l’on décompose également en proximité d’un parc public, du centre, d’une
école renommée pour le logement par exemple).
4
L’évaluation contingente est une méthode d’estimation qui s’appuie sur des enquêtes auprès
d’individus auxquels on va demander le prix qu’ils seraient prêts à payer pour conserver un paysage
tel qu’il est par exemple.
5
Voir à ce sujet la thèse d’Anne Siriex (2003) ou bien encore les actes du colloque « L’évaluation du
paysage, une utopie nécessaire ? » – CNRS, université Montpellier III, sous la direction de Daniel
Puech et Anne Rivière-Honegger, 2004.
215
directement corrélés au business, à l’activité économique de la région. On retrouve
bien l’idée que le développement territorial n’est appréhendé qu’à travers la lorgnette
des activités productives. Mais aucun de ces facteurs ne semble vraiment à même
d’expliquer ce renouveau rural américain. Kusmin et Aldrich (1997) reprennent alors
certains de ces facteurs « économiques » auxquels ils ajoutent un indice climatique,
des éléments topographiques (présence de montagne mais aussi de points d’eau1), ou
encore le taux de retraités, des indicateurs du système éducatif … La croissance
rurale est mesurée à partir d’un indicateur approximant le PIB ou le revenu total local
(tenant compte des niveaux de salaires par emploi et du produit créé par la masse
salariale). Les régressions sont faites sur deux périodes, avant le renversement de
tendance observé dans les comtés ruraux américains et après, à savoir 1979-1989 et
1989-1994. Les auteurs soulignent l’importance que prennent, entre les deux
périodes, les facteurs non économiques ou non productifs comme moteurs de la
croissance locale (notamment l’indice des aménités). Ainsi, les aménités semblent
jouer un rôle majeur dans le renversement des tendances observé dans les espaces
ruraux américains.
1
On a testé la proximité d’un point d’eau sur les bassins ruraux français. A partir du logiciel Mapinfo,
on a sélectionné les bassins ruraux qui étaient à moins de 15 kilomètres à vol d’oiseau d’une rivière,
fleuve, lac ou étang. Ces bassins ne sont pas apparus plus attractifs ou plus dynamiques que les autres.
2
Délimitation faite en fonction des migrations alternantes. Les bassins sous influence urbaine sont
ceux qui dépendent de pôles urbains de plus de 20 000 habitants. Les bassins ruraux s’articulent
autour de pôles urbains de moins de 20 000 habitants.
3
Les résultats obtenus pour les premiers types de bassins, de nature plus périurbaine, montrent
notamment qu’en deçà d’un seuil de 200 000 habitants, le pôle urbain joue le rôle de capteur
d’emplois sur les bassins périphériques. L’étalement de la population ne se solde pas
systématiquement par un dynamisme sur l’emploi local. C’est parfois le contraire. On voit ici
apparaître le phénomène des cités dortoirs.
216
des emplois jouerait plus favorablement sur la hausse de population que l’inverse. Le
niveau d’équipements est également un critère distinctif du dynamisme
démographique. Cette variable peut révéler, pour l’auteur, l’attractivité qu’exercent
ces bassins sur les migrations autres que professionnelles. La capacité d’accueil
touristique est également positivement corrélée aux évolutions de population et
d’emplois, soulignant l’impact des activités récréatives sur le développement rural.
La proximité d’une grande agglomération est également importante. L’auteur y voit
là un réservoir de consommateurs des activités récréatives rurales. Cette hypothèse
est intéressante dans la mesure où les avantages comparatifs de nature résidentielle
sont peu ou pas mobiles. Leur mise en valeur ou consommation nécessite donc,
comme le précise Schmitt, un déplacement des populations vers ces zones. En
revanche, la proximité d’une sortie ou d’une entrée d’autoroute n’est pas
significative. Parallèlement, la densité des activités industrielles et agricoles seraient
plutôt pénalisantes.
À travers l’étude de ces variables, l’auteur met en avant le rôle positif que
peut avoir l’économie résidentielle sur le développement des emplois et de la
population des bassins ruraux.
Une étude similaire réalisée sur les cantons américains (Reeder, Brown,
2005) montre l’impact positif des activités récréatives et touristiques sur les cantons
ruraux. Ce type de cantons voit en effet les emplois, les salaires et les revenus
augmenter et la pauvreté se réduire plus rapidement que dans les autres cantons non
métropolitains. Ces mécanismes de développement s’accompagnent néanmoins
d’une hausse des coûts fonciers.
Cependant, il ne faudrait pas non plus conclure trop vite que seuls les espaces
ruraux bénéficieraient de ces nouvelles priorités dans les motifs d’installation.
Les enquêtes réalisées auprès de chefs d’entreprises non spécifiquement
ruraux confirment l’importance de la qualité de l’environnement dans le choix de
localisation des firmes (Foster, 1977 ; McLoughlin, 1983 ; Lyne, 1988 ; Gotlieb,
1994). Dans toutes les études, ce critère arrive dans le trio de tête des facteurs de
localisation qui comptent (après l’approvisionnement en main-d’œuvre et la
proximité du marché).
Par ailleurs, il semble que le poids accordé à ces facteurs environnementaux
est d’autant plus important que la firme intervient dans des secteurs à haute
technologie, secteurs qui requièrent du personnel à la fois mobile et très qualifié
(Stafford, 1983 ; Lund, 1986 ; Schmenner, 1982 ; Blair et Premus, 1987 ; cités par
Gotlieb, 1994 et Malecki, 1984 ; Herzog et Schlottmann, 1991 ; cités par Gilli,
217
2004). Dans ces secteurs, les préférences des travailleurs en termes de lieu de
résidence et de travail pèsent de plus en plus lourd dans les stratégies d’implantations
des firmes.
Certains travaux économétriques, testant la validité de ces modèles, se sont
pourtant avérés insatisfaisants ou non significatifs. Charney (1983) affirme que ce
manque de clarté provient du fait que dans les aires métropolitaines, les aménités ne
peuvent être des facteurs décisifs de localisation pour les entreprises. Les employés
et dirigeants peuvent, en effet, se loger dans des quartiers plaisants et résidentiels,
envoyer leurs enfants dans les meilleures écoles et continuer à travailler dans des
quartiers n’offrant pas ces caractéristiques. Ces critères ne sont sans doute pas
pertinents à l’échelle infra-aire urbaine.
L’observation de telles tendances ne semble pas à l’ordre du jour en France.
Si ce type de comportement venait à exister et à se densifier dans notre pays, nous
assisterions à un bouleversement profond des équilibres régionaux. Les régions
résidentielles se verraient attractives auprès des entreprises High Tech, les régions
productives conserveraient les activités de production plus banales et moins
créatrices de valeur ajoutée, « une industrie essentiellement fabricante » pour
reprendre les termes explicites de Beckouche (1997, p.7). Envisager ce scénario pour
le prévenir ne semble pas totalement aberrant dans le contexte de baisse de la
population active annoncée (même s’il semble tarder à infléchir les chiffres du
chômage).
Quels intérêts ont les entreprises à se localiser dans ces endroits, certes
agréables, mais souvent aux antipodes des recommandations des experts en la
matière ? Gotlieb (1994) en relève plusieurs. Tout d’abord, un chef d’entreprise peut
choisir de s’installer dans un lieu qu’il apprécie afin de maximiser son « revenu
psychique » à défaut de maximiser son profit. C’est particulièrement le cas pour les
travailleurs indépendants. Mais, les aménités peuvent aussi avoir un effet indirect sur
le profit des firmes. Les firmes implantées dans ces sites privilégiés peuvent recruter
plus facilement mais également mieux retenir leur main-d’œuvre (Gottlieb, 1995).
On retrouve ici un des arguments avancés pour les espaces ruraux français. De plus,
les travailleurs semblent accepter un salaire moindre pour vivre dans ces endroits
plaisants (Roback, 1982). À long terme, la diminution des salaires versés dans ces
zones compense le coût ou le manque à gagner d’une situation géographique
pénalisante.
Pour Roback (1982), dans le prolongement des travaux de Rosen (1979), les
différences de salaires entre les territoires révèlent ou mesurent les différences
218
d’aménités. Les migrations des travailleurs peuvent être motivées par le choix d’un
cadre de vie privilégié, en contrepartie de quoi les travailleurs acceptent un salaire
moindre. L’écart entre le prix du foncier et les salaires perçus serait alors un bon
indicateur des aménités locales.
À partir de plusieurs études, Gotlieb (1994) montre que les priorités des
ménages en termes d’aménités résidentielles se portent par ordre décroissant, aux
États-Unis, sur : une bonne école, un endroit sûr, un environnement de qualité, les
aménités culturelles, la proximité et la facilité d’accès entre lieu de résidence et lieu
de travail, le coût du logement, les aménités de loisir, le climat, les services publics,
et enfin, le coût de la vie (Gotlieb, 1994, p. 276). Gyorko et Tracy (1991) ajoutent à
ce type de liste, un ensemble d’aménités fiscales (taxes locales et offres de services
publics) qui sont tout aussi significatives que les premières1.
1
Leur modèle s’appuie sur les travaux de Rosen/Roback. Le différentiel entre le prix des logements et
des niveaux de salaires s’explique donc par les aménités d’environnement, de sécurité… mais aussi
par des aménités fiscales (on retrouve l’idée chère à Tiebout selon laquelle l’offre de service public
influence le choix de localisation des agents.)
219
Pour Vollet (2007), la théorie de la base est particulièrement féconde pour
établir le lien complexe qu’entretiennent le tourisme et le développement territorial.
Là encore, l’auteur souligne les différences fondamentales en termes d’avantages
comparatifs pour les territoires vivant du « secteur basique traditionnel » (industrie,
agriculture) et les territoires plus résidentiels. Selon Vollet, la théorie de la base serait
à même d’établir les activités motrices d’une zone ainsi que ses avantages
comparatifs.
Cependant, Vollet (1997 ; 2007) concentre son attention sur les emplois
induits par les fonctions résidentielles et récréatives. Ainsi, d’une conceptualisation
formulée en termes de revenu, l’auteur passe, pour des raisons de disponibilité de
données, à un calcul réalisé sur les emplois. Il s’intéresse plus particulièrement donc
aux emplois basiques touristiques (hôtels, syndicats d’initiative et sur une part
estimée des emplois de commerces et services de proximité consommés par les
touristes). L’approche diffère ici de celle proposée par Davezies (2003a et 2003b)
que l’on propose d’appliquer aux espaces ruraux dans la partie suivante1. En effet,
dans le modèle de Davezies, l’hôtellerie n’est pas une activité basique ou exportatrice
comme l’est par exemple l’industrie textile ou encore certains services aux
entreprises très concurrentiels. Ce n’est pas, en effet, l’hôtelier qui attire le touriste
mais le territoire (un paysage, le climat, la mer etc.). Formuler en termes de revenus
le modèle est plus explicite. Les dépenses des touristes sont des revenus basiques (le
salaire de l’hôtelier non) qui alimentent directement les emplois domestiques (et
donc le salaire domestique de l’hôtelier par exemple). De la même manière, les
remboursements de soin de santé constituent des flux de revenus basiques (versés par
des organismes extérieurs : la sécurité sociale, les mutuelles…) qui alimentent
directement l’emploi domestique médical (et donc le revenu du praticien).
Ceci étant, il est en effet intéressant de tenter d’estimer l’impact de ces
dépenses touristiques sur l’emploi local et de les comparer à d’autres types
d’activités. Les travaux menés par Vollet (1998), Vollet et Dion (2001) ou encore
(Pacaud et alii, 2007) portent sur des zones rurales de la Côte-d’Or, la région de
Laon, le périurbain dijonnais, la région d’Avallon, d’Aix-les-Bains, le sud de
l’Ardèche, l’Aubrac et le Cézallier. Quelle que soit la zone d’étude, l’effet
multiplicateur des activités touristiques sur l’emploi local serait supérieur à l’effet
1
Une étude réalisée par Philippe Estèbe, Yves Janvier et Sophie Tievant sur la région Midi-Pyrénées
met en œuvre les principes de la base revisitée par Davezies, notamment sur les espaces ruraux de
cette région. Estèbe, Janvier, Tievant (2007). « L’économie résidentielle et le développement local :
conséquence ou levier ? », Rapport pour la préfecture de région Midi-Pyrénées, juillet 2007.
220
multiplicateur des activités traditionnelles (agriculture et industrie). Cependant, selon
l’auteur, les activités touristiques ne compenseraient les pertes d’emplois des secteurs
traditionnels que dans les zones extrêmement touristiques (Sud Ardèche par
exemple).
Malgré tout l’intérêt de ces travaux, très proches de notre propos, l’analyse
par les emplois paraît compliquer les conclusions. Il est en effet très difficile de
discerner l’impact réel du tourisme sur l’emploi local. Les secteurs considérés sont
souvent trop restrictifs même en incluant le commerce de proximité. Une étude
réalisée à la DDE du Vaucluse met par exemple en avant le poids du tourisme dans
l’activité médicale locale, ou encore auprès des garagistes locaux… L’entretien
d’une résidence secondaire génère également une demande qui dépasse le cadre strict
des emplois habituellement considérés. Par ailleurs, le choix de son lieu de vie en
zone rurale serait très fortement conditionné par le lieu où l’on a passé ses vacances
(en résidence secondaire ou non). Même s’il s’agit d’un impact éventuel et différé du
tourisme, ces interactions dessinent des processus de développement résidentiel plus
complexes peut-être qu’il n’y paraît.
Enfin, si le tourisme est une base résidentielle essentielle, elle n’est pas la
seule. Les retraites, les salaires des migrants alternants, les revenus de transferts, les
traitements des salariés du public sont autant de moteurs possibles pour le rural. Ils
s’additionnent aux revenus issus des activités productives et exportatrices du secteur
privé. Les interactions entre ces différents modes possibles de développement
territorial ne sont, certes, pas toujours évidentes à révéler ou à concevoir mais il
semble important de les étudier conjointement pour tenter de comprendre la
revitalisation des espaces ruraux. Mobiliser la théorie de la base et travailler sur
l’ensemble des espaces ruraux devraient permettre de voir comment ces mécanismes
s’imbriquent et génèrent ou pas du développement.
221
l’accent sur l’enjeu de population. Les entreprises ne seraient pas les seules à pouvoir
générer une hausse des emplois, des revenus etc. ; la population, parce qu’elle
consomme, peut aussi dynamiser les économies locales. Les premières estimations
de Davezies (2003a ; 2003b) tendraient même à prouver que l’enjeu de population
l’emporterait sur l’enjeu de production.
Les premiers éléments d’analyse de la vitalité rurale semblent confirmer,
voire même accentuer, ce résultat. Il convient, à présent, de le valider pour les
espaces ruraux. La question pourrait se formuler ainsi : certains appariements de
revenus basiques sont-ils plus aptes à créer du développement et à expliquer la
revitalisation des espaces ruraux que d’autres ?
222
TROISIEME PARTIE - LA THEORIE DE LA BASE COMME
CADRE D’ANALYSE DE LA REVITALISATION
DES ESPACES RURAUX
Oscar Wilde
223
224
Les premières analyses ont permis de souligner la vitalité des espaces ruraux,
mais aussi, la diversité des situations. Tous les territoires ruraux ne connaissent pas
une croissance des emplois, des revenus et des soldes migratoires. Pour analyser ces
mécanismes, l’importance et le maintien des activités de production pourraient
inciter à privilégier l’étude des systèmes productifs. Cependant, l’essor des emplois
domestiques, l’attractivité auprès des retraités et les taux de présence de certains
territoires soulignent l’intérêt de considérer également les dynamiques résidentielles.
Par ailleurs, le calcul des revenus de transferts a montré l’importance de la
redistribution sociale pour les espaces ruraux. Enfin, l’emploi public peut constituer
un levier de développement économique pour le rural.
Face à ces chiffres, l’analyse de la littérature souligne :
- le décalage entre les conclusions de la NEG et la revitalisation rurale ;
- le manque de travaux qui intègrent les divers aspects du
développement des espaces ruraux ou non métropolitains. De nombreuses
études traitent de l’un des aspects du développement non productif, mais
aucune ne s’appuie sur un concept théorique qui permettrait d’analyser
conjointement les différents facteurs de cette revitalisation rurale.
225
donc induit1. Le premier chapitre sera consacré à la question du choix d’un zonage et
à la présentation des territoires sur lesquels la théorie de la base sera appliquée.
1
Un salarié habite Aix-en-Provence et travaille à Marseille. En raisonnant à l’échelle de la commune,
ce salarié importe, sur Aix-en-Provence, un revenu qu’il a gagné à Marseille. Ce revenu est basique.
Si l’on raisonne, à présent, sur l’aire urbaine d’Aix-Marseille, ce même salarié n’est plus
« importateur » et son revenu n’est plus basique, puisqu’il travaille et réside dans la même aire
urbaine.
2
Selon la théorie de la base, la « base » regroupe l’ensemble des revenus basiques.
226
Chapitre 1 - Délimitation du zonage d’étude
C’est avant tout le caractère « non métropolitain » plus que rural qui guide ce
travail. L’objectif étant de décrire et de comprendre la revitalisation d’espaces situés
à l’écart des dynamiques métropolitaines.
Le zonage en aires urbaines et emplois de l’espace rural (ZAUER), proposé
par l’INSEE/INRA, répond en partie à nos attentes. En partie seulement car une fois
l’espace à dominante rurale délimité, se pose la question de la « taille » pertinente du
territoire d’analyse.
Notre choix, forcément critiquable, est en partie guidé par la logique qui
prévaut dans le modèle de la théorie de la base que l’on souhaite mobiliser. Quel
pourrait-être ce guide ? Une zone « assez large » pour ne pas considérer le moindre
flux intercommunal de revenu comme basique, ou venant de l’extérieur. La notion de
bassin d’emploi a été préconisée, par exemple, par Loeiz Laurent. Elle n’a cependant
pas de réalité statistique nationale. Mais il faut également que le territoire étudié ne
soit pas non plus trop « vaste » pour cerner au plus près la partie domestique des
économies locales. On se rapproche de l’idée d’un bassin de consommation. En
réalité, il n’y a pas de frontières optimales pour appliquer la théorie de la base. Elle
peut même permettre de souligner les divergences d’enjeux selon les échelles. La
politique et les préoccupations d’une mairie ne sont pas celles d’un conseil général,
qui peuvent aussi diverger de celles de la région etc. Il est, en revanche, très
important de travailler sur des territoires comparables, non pas en termes de taille ou
de population, mais en termes de fonctionnement. Là encore, les perspectives
offertes sont nombreuses et complexes… Fonctionnement, au sens de fonction pour
l’emploi, pour la consommation quotidienne, ou occasionnelle ? Ou bien encore
fonctionnement et rapport avec l’extérieur… en termes de migrants alternants, de
mobilités résidentielles, d’attractivité touristique ? Liens avec l’aire urbaine la plus
proche, le pôle équipé le plus proche ?
Face à ces interrogations, il semble préférable de faire un choix de « bon
sens », un choix qui colle au mieux à la réalité quotidienne des habitants d’un
territoire et se limiter, peut-être, à deux éléments essentiels de leur quotidien :
l’emploi et la consommation courante. La notion la plus pertinente semble être celle
des bassins de vie. Depuis 2003, cette notion est à présent délimitée statistiquement
par l’INSEE.
227
Avant de préciser le contour, l’intérêt et les limites éventuelles des bassins de
vie élaborés par l’INSEE (en collaboration avec l’INRA, le SCEES, l’IFEN), on peut
montrer en quoi le choix du zonage peut modifier les conclusions d’une analyse.
Deux types de zonage sont très souvent distingués : les zonages de pouvoir et
les zonages de savoir (Le Gléau, 2000 ; Terrier, 1998).
228
- les territoires en transition ont un solde migratoire excédentaire mais
non suffisant pour compenser le déficit naturel, la population diminue ;
- les territoires attractifs voient leur population augmenter grâce à leur
excédent migratoire, les soldes naturels demeurent négatifs ;
- les territoires en déclin ont un solde naturel positif qui ne suffit pas à
compenser les soldes migratoires négatifs, la population décroît ;
- les territoires saturés ont un solde naturel excédentaire suffisant pour
compenser leur déficit migratoire, la population augmente ;
- les territoires dynamiques cumulent excédent migratoire et naturel, la
population augmente.
229
Cartes 1 à 6 - Évolutions démographiques 1990-1999 selon les zonages considérés
Commune Pseudo-canton
Avec :
SM=solde migratoire ;
SN=solde naturel ;
VP=variation pop.
En crise : VP et SM et
EPCI Bassin de vie
SN <0 ;
En transition : SM>0 ;
VP et SN <0 ;
Attractifs : SM et
VP>0 ; SN<0 ;
En déclin : SN>0 ; VP
et SM<0 ;
Saturés : SN>0 et
VP>0 ; SM<0 ;
Dynamiques : SN et
SM et VP >0.
230
La comparaison de ces six cartes amène à faire trois remarques préliminaires.
Tout d’abord, globalement, elles ont plutôt un « air de famille » et heureusement.
Ainsi, on voit apparaître des territoires systématiquement dynamiques d’un point de
vue démographique, à savoir les espaces périurbains, ou encore les territoires de
l’Alsace et de la vallée du Rhône. Globalement, les territoires du Massif Central sont
plutôt caractérisés par une crise démographique. Ensuite, si la carte à l’échelle de la
commune est intéressante, elle est tout de même assez difficile à lire. Le gain en
lisibilité lors du passage, ne serait-ce qu’aux pseudo-cantons, est appréciable. Enfin,
la carte des départements offre une lecture aisée mais conduit à une perte regrettable
d’informations. Les différences démographiques que l’on peut voir entre les pôles
urbains et leur périphérie à une échelle plus grande sont, par exemple, invisibles ici.
231
communes aux soldes naturels positifs, mais en déficit migratoire, qui finit par
donner le caractère de crise démographique au département.
Le département du Puy-de-Dôme enregistre une hausse des trois indicateurs
démographiques, alors même que la moitié de ses communes perd des habitants, tout
comme la moitié de ses cantons, de ses bassins de vie, de ses EPCI ou encore les
trois quarts de ses zones d’emplois ! Le solde migratoire positif des unes (mais ayant
un solde naturel négatif), compense la faible attractivité des autres (mais ayant un
solde naturel positif, comme Clermont-Ferrand). Finalement, le département est bien
dans une situation de dynamisme démographique assise sur des cas très contrastés.
Si les bassins de vie proposés par l’INSEE constituent un zonage fort utile et
une avancée indéniable pour l’étude des territoires ruraux, il n’en demeure pas moins
soumis à quelques limites qu’il faudra relever. Mais auparavant, précisons comment
se définissent ces bassins de vie.
Comme dans le zonage en aires urbaines, l’accès à l’emploi est déterminé par
les flux des navettes domicile-travail des actifs (recensement de 1999).
232
Les services à la population pris en compte ne sont ni de l’ordre du quotidien
(services de proximité), ni trop « élitistes » ou utilisés par trop peu de personnes
(université, opéra, palais des congrès…). Les liens entre les communes d’un même
bassin sont donc déterminés par l’accès aux services dits intermédiaires1 dans
lesquels on trouve :
- des services concurrentiels (commerces, services bancaires, etc.) ;
- des services non concurrentiels (services publics ou assimilés, hors
éducation) ;
- des services de santé ;
- des services d’éducation.
Les bassins de vie regroupent des communes2 qui se structurent autour d’un
pôle attractif à la fois en termes d’emplois et de services intermédiaires3. Ils
constituent en ce sens, le territoire de vie des actifs occupés et des personnes ne
travaillant pas, tout au moins pour le volet accès aux « services intermédiaires ».
1
Ces services intermédiaires avaient déjà permis de construire la carte des territoires vécus de
l’INSEE.
2
La méthode consiste à agréger les bassins de services intermédiaires (BSI) définis par l’INSEE,
selon la méthode décrite dans la note ci-après.
3
Les scores choisis par les auteurs du rapport attribuent le même poids aux quatre services :
concurrentiels, non concurrentiels, santé, éducation et affecte l’emploi d’un poids compris entre le
tiers et la moitié de l’ensemble. A savoir : 3-3-3-3 pour chacun des services et 8 pour l’emploi.
Les BSI du référentiel rural restreint de moins de 5 000 habitants ayant un score global strictement
inférieur à 8 sur 20 ont été rattachés, sur la base des attractions concernant les 5 mêmes postes, à un
autre BSI (n’appartenant pas éventuellement au référentiel restreint).
233
En réalité, seule la première notion est véritablement utilisable afin de
travailler sur un maillage homogène permettant de comparer les territoires.
234
En s’affranchissant des limites administratives et en se calant au plus près des
territoires vécus par les habitants, ces bassins de vie constituent un maillage fin et
pertinent pour l’étude des dynamiques territoriales non métropolitaines. Quelques
limites peuvent, néanmoins, être soulignées.
235
surtout un zonage de référence. S’il est vrai que ce découpage a aussi ses lacunes,
l’occulter dans la construction des bassins de vie semble être une erreur, en quelque
sorte pédagogique, même si elle se justifie parfaitement.
236
Est-ce pour cela que les bassins de vie n’ont peut-être pas eu l’impact
attendu ? Le fait est que les acteurs locaux, les services de la DDE, les conseils
généraux etc. y préfèrent souvent leur propres délimitations appelées « bassin
d’habitat », « bassin d’emploi », « zone d’influence » ou autres. Le recours à ces
notions « non officielles » apporte le savoir local mais nuit à l’analyse par manque de
cohérence pour établir des comparaisons ne serait-ce qu’avec les moyennes
nationales.
La deuxième limite de ce zonage pourrait être la non prise en compte des
commerces de proximité et le faible poids accordé aux services les plus courants. Il
semble que la présence de ce type de commerces et de services à la population
résidente et touristique peut constituer un facteur-clé, en même temps qu’un
marqueur, du maintien de la population mais aussi de l’attractivité rurale.
Les commerces et services considérés par l’INSEE pour construire ses
bassins de vie ainsi que leur pondération respective sont donnés dans l’annexe 11. Le
principe ayant guidé le choix des pondérations étant le suivant : « Le calcul du
niveau d’une catégorie d’équipement se fait en pondérant les équipements de façon
inversement proportionnelle à l’intensité de leur présence sur le référentiel rural
restreint (équipement f) : un équipement rare est ainsi davantage pondéré qu’un
équipement fréquent. » (INSEE, 2003, annexe 4, p.7).
Dans les services concurrentiels ne figurent pas les commerces alimentaires
de détail (boulangerie, boucherie, etc.), les supérettes, les tabacs ou bien encore les
cafés. Parmi les services non concurrentiels, figurent la poste et les crèches, mais leur
pondération est si faible face à celle des agences ANPE, piscines couvertes et
cinémas, que leur présence est négligeable. Côté éducation, seuls les collèges et
lycées apparaissent. Enfin, du côté de la santé, toutes les professions sont
représentées mais seules les activités hospitalières ont un poids significatif. On note
également l’absence d’activités « touristiques » telles que les restaurants et les hôtels.
La logique étant de construire des bassins autour de l’emploi et des services
intermédiaires, le choix des auteurs est entièrement justifié. Cependant, dans le cadre
d’une recherche pour la Poste (Talandier, 2005), la question de la quotidienneté des
déplacements et de l’impact des commerces et services de proximité sur les
dynamiques territoriales avait été abordée. Les premières conclusions allaient dans le
sens d’une moindre attractivité résidentielle, de moindres performances en termes
d’emplois pour les territoires sous-équipés en commerces et services de proximité.
1
Pour plus de détails sur la méthode de calculs voir le rapport pour la DATAR 2003, cité op.cit.,
annexe 4, p.6.
237
Par ailleurs, 16% des bassins de vie de l’INSEE comprennent des communes
situées à plus de 20 kilomètres à vol d’oiseau1 du pôle de services intermédiaires
(bien plus de 20 kilomètres donc en distance par la route). Les personnes ne
travaillant pas dans ce pôle, les retraités et les touristes, par exemple, ne fréquentent
peut-être pas régulièrement le pôle de ces bassins de vie. Il semble pertinent
d’introduire, par la suite, cette notion de proximité.
1
Distances orthodromiques calculées par l’auteur entre les centres de gravité respectifs des communes
et du pôle du bassin de vie.
238
- certains bassins de vie du rural restreint ne contiennent aucune
commune de l’espace à dominante rurale. On ne retient pas ces 452
bassins de vie pour l’analyse ;
- certaines communes de l’espace à dominante rurale sont par définition
faiblement connectées aux aires urbaines en termes d’emplois mais ne
sont pas « autonomes » en termes d’accès aux services. Ces communes
sont, en effet, rattachées à des bassins de vie polarisés par une commune
(ou unités urbaines) de l’espace à dominante urbaine. Malgré la
perception que peuvent avoir les habitants de ces communes à vivre à la
campagne, on préfère ne pas inclure ces 243 bassins de vie dans la zone
d’étude. Ces bassins de vie constitués autour d’un pôle urbain ou d’une
commune du périurbain sont des « sous-parties » d’aires urbaines ou des
aires urbaines entières qui débordent sur l’espace à dominante rurale.
Ainsi, le dynamisme des communes de l’espace rural situées dans ces
bassins peut être lié aux mécanismes des économies d’agglomération
même si l’agglomération en question est de taille limitée1 ;
- par précaution, afin d’aboutir à un corpus de zones rurales « pures »,
on ne retient finalement que les communes de l’espace à dominante rurale
qui appartiennent à des bassins de vie polarisés par une commune (ou
unités urbaines) de l’espace à dominante rurale. Ces bassins de vie
s’organisent soit autour d’un pôle rural, soit d’une « autre commune » de
l’espace à dominante rurale. On les qualifiera de « bassins ruraux ».
1
La taille maximale d’un de ces bassins de vie est de 62 000 habitants.
239
9,5 millions de personnes résidaient en 1999 dans ces bassins. Pour rappel, l’espace à
dominante rurale, défini par le zonage en aires urbaines et son complément rural,
regroupait, en 1999, 10,5 millions de personnes.
Deux questions se posent à propos de ces « bassins ruraux » :
- a-t-on raison de conserver les pôles ruraux et leur périphérie dans
l’étude ? L’analyse ne devrait-elle pas porter uniquement sur les autres
communes de l’espace à dominante rurale ?
- Les 1050 bassins de vie sélectionnés contiennent des communes
périurbaines et multipolarisées (qui ne sont jamais les pôles des bassins
ruraux). Cela ne va-t-il pas biaiser les résultats ?
Ces traits illustrent la nature « polarisante » de ces communes. Mais ces pôles
sont également typiquement caractéristiques des espaces ruraux et présentent des
similitudes avec les autres communes rurales sur les points suivants :
- une hausse modérée de la population impulsée uniquement par des
soldes migratoires excédentaires. Ces soldes migratoires progressent sur
les deux dernières périodes « inter-recensements » (1990/99 par rapport à
1982/90) ;
- des soldes naturels toujours plus négatifs ;
- une part plus importante de retraités dans la population ;
240
- une part bien plus importante que dans les espaces urbains de
travailleurs indépendants ;
- une attractivité migratoire très marquée auprès de migrants non
régionaux, ou d’habitants situés à plus de 200 km, notamment auprès des
retraités.
Les spécificités de la revitalisation rurale sont donc bien représentées par ces
pôles ruraux. Les supprimer de l’analyse serait finalement dommage, au titre de
l’homogénéité du maillage, mais aussi au titre de leur effet structurant sur les espaces
ruraux. De façon plus générale, il conviendra de prendre en compte les différences,
déjà observées, entre ces pôles et les autres communes, mais également entre le rural
sous faible influence urbaine et le rural isolé.
241
urbaines) ont en moyenne moins de 500 habitants. Amputer les bassins ruraux de ce
type de communes serait finalement plus dommageable pour la cohésion du maillage
établi par l’INSEE que de les conserver, au vu de leur poids et de leur taille.
C’est donc sur 1 050 bassins de vie organisés autour d’une commune de
l’espace à dominante rurale que l’analyse des revenus basiques et des dynamiques
territoriales sera effectuée. Ces 1 050 bassins ruraux regroupent plus de 9,5 millions
de personnes, environ 16 500 communes et recouvrent plus de la moitié de la
superficie du territoire métropolitain (cf. cartes 8 et 9).
242
Carte 8 - Les bassins ruraux ou les bassins de vie retenus pour l’analyse spatiale des
espaces ruraux
243
Carte 9 - Les pôles des bassins ruraux
244
Chapitre 2 - Les revenus basiques des espaces ruraux
1
Cf. Davezies, 2003, op. cit., qui distingue les secteurs basiques, domestiques et mixtes. Les secteurs
domestiques regroupent l’ensemble des secteurs qui répondent à la demande locale de biens et
services.
245
temps de loisir, les progrès technologiques (TGV, portable…) ont eu raison de la
logique « un individu - un territoire ». La « multi-appartenance » territoriale des
populations explique, qu’aujourd’hui, la production et la consommation peuvent être
déterminées par des « lois » géographiques et économiques différentes. En termes de
dotations factorielles et d’avantages comparatifs, ces deux pendants des économies
locales peuvent également diverger. L’économie résidentielle s’attache à ce qui
motive les choix résidentiels et récréatifs des individus ; l’économie productive
s’inscrit dans une lecture plus classique de localisation des firmes et des travailleurs
(proximité des facteurs de production, économies d’agglomération…). Les deux
concordent parfois, divergent souvent.
246
I LA THEORIE DE LA BASE : CONCEPT ET METHODE DE CALCUL
La base résidentielle regroupe des revenus captés par les territoires grâce à
leurs « atouts » résidentiels. Il s’agit plus précisément :
- des salaires « rapatriés » au lieu de domicile par les migrants
alternants. Les territoires bénéficient d’un apport de revenu qui ne
correspond pas à une production faite sur place ;
- des retraites dépendant évidemment du nombre de retraités vivant sur
le territoire. Ces revenus sont financés par la solidarité nationale ou par
des fonds privés nationaux ou internationaux. Ils ne correspondent donc
pas à la rémunération tirée de la production « vendue » à l’extérieur du
territoire ;
247
- des dépenses des touristes. On pourrait discuter ici de l’aspect
productif du tourisme. On considérerait alors les salaires et bénéfices tirés
de ces activités comme de la base productive privée. Cependant, la
richesse produite repose sur la qualité résidentielle et l’attractivité du
territoire (paysage, patrimoine, ensoleillement…) et non sur la présence
hôtelière par exemple. Les dépenses des touristes constituent la base
captée par le territoire qui alimente les emplois domestiques liés au
tourisme. Ces emplois répondent, en effet, à une consommation locale et
non exportée.
La base publique est constituée des traitements des trois fonctions publiques :
État, hospitalière et territoriale1. Ces revenus sont financés par le budget de l’État et
sont liés à la « résidence » plus ou moins volontaire des agents de l’État.
Au total, les revenus perçus par un territoire sont liés à la fois à ce que ce
territoire est capable d’exporter, mais aussi à ce qu’il est capable de « capter » en
raison de son attractivité résidentielle et récréative. Se pose alors la question de la
base publique et de la base sociale et sanitaire : ces revenus ne participeraient-ils pas
à l’économie résidentielle des territoires ? Ils ne correspondent pas à la contrepartie
marchande d’activités productives et sont, finalement, captés grâce à la résidence des
individus. Dans le cas de la base publique, ces revenus sont tout de même liés à la
présence d’un établissement public. À la fois l’offre publique est conditionnée par la
1
Les traitements de la fonction publique territoriale sont financés en grande partie par les dotations de
l’État. En concertation avec des experts de la question, la part basique de ce type de salaires est
estimée à 70%. 30% seraient donc financés directement par les collectivités territoriales.
248
population du territoire. Derrière la simplicité du principe de la théorie de la base, se
posent de nombreuses questions conceptuelles. Il paraît important de retenir les deux
principaux types d’enjeux pour le développement des territoires :
- un enjeu de production : le développement dépendrait de la qualité du
système productif local, de la capacité à attirer les entreprises et à
favoriser leur essor ;
- un enjeu de population : le développement dépendrait de la population
locale importatrice de revenus qui alimentent l’économie locale,
indépendamment de la capacité productive du territoire.
De la même façon qu’au jeu de captation des revenus, tous les territoires ne
sont pas égaux, la propension à consommer localement peut varier d’une zone à
l’autre. L’existence d’un tissu préexistant de services, par exemple dans les bourgs
ruraux, peut constituer un atout à partir duquel peuvent se développer de nouvelles
activités pour desservir la demande locale.
249
Graphique 3 - Schéma du développement territorial
LA DEMANDE
+ de personnes qui consomment et/ou des
personnes qui consomment plus
CONSOMMATION
Le principe du développement local proposé ici est donc simple. Des revenus
extérieurs alimentent la demande locale, exprimée par plus de personnes, résidentes
ou présentes, qui consomment et/ou des personnes qui consomment en plus grande
quantité, effet revenu par exemple. « La boîte noire » (la consommation) fonctionne
250
plus ou moins bien selon le niveau de demande, qui se mesurerait idéalement par des
propensions à consommer localement. Si la demande joue, localement, son rôle de
levier, l’emploi domestique progresse. Si ces emplois profitent principalement aux
résidents, ils peuvent induire une baisse de la pauvreté, du chômage, attirer des actifs,
favoriser la natalité etc. La situation de la population locale a donc tendance à
s’améliorer, la demande va s’en trouver dynamisée … le processus de
développement se poursuit.
Pour faciliter la lecture, toutes les options de calculs ne sont pas détaillées
dans les pages qui suivent. La description complète se trouve en annexe 2. Cette
présentation plus succincte reprend les quatre grands types de base.
251
La base productive privée
1
Les données issues de la DGI sont systématiquement considérées en euro constant 2005.
2
Ceci implique que la ventilation sectorielle (privé - basique et domestique / public – État, territorial
et hôpital) des actifs résidant et travaillant dans la zone d’étude suit celle des emplois. Autrement dit,
ceci implique, par exemple, qu’un territoire qui enregistre une part importante d’emplois publics
hospitaliers aura également une part importante de ses résidents qui y travaillent et donc une part
importante de ses revenus basiques qui sera issue de cette fonction publique hospitalière.
3
Estimation réalisée en collaboration avec Rémy Prud’homme, expert sur ces questions.
4
Les salaires moyens de la fonction publique sont légèrement supérieurs à ceux du privé. Cependant,
la variété des situations aux échelles où l’on travaille ne permet pas d’appliquer le différentiel
national.
De la même façon, les calculs portant uniquement sur les salaires privés montrent un écart de 7% en
2004 pour les activités basiques par rapport aux activités domestiques au niveau national. L’Île-de-
France biaise très certainement ce résultat. Les données n’étant pas exploitables à une échelle
252
Les bénéfices des indépendants sont donnés par la DGI, en distinguant les
bénéfices agricoles (BA), les bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et les
bénéfices non commerciaux (BNC). Le fichier SIRENE permet de distinguer les
indépendants travaillant dans des secteurs basiques ou domestiques (toujours selon la
méthode proche de celle des coefficients de localisation). Les bénéfices agricoles
sont considérés comme entièrement basiques (même si une part de ces activités peut
être destinée à une consommation locale, via la vente directe par exemple, ces
circuits demeurent marginaux dans l’ensemble des bénéfices issus de l’agriculture).
La base résidentielle
Les salaires des migrants alternants sont calculés à partir des salaires DGI et
des fichiers Mirabelle de l’INSEE. Le taux des navetteurs pour un territoire est connu
en 1990 et 1999 (fichiers Mirabelle, INSEE). On aurait pu appliquer le trend annuel
constaté entre 1990 et 1999 sur la période suivante et estimer ainsi les migrants
alternants en 2004. Cependant, rien n’indique à ce jour, si l’explosion des migrations
vers les périphéries et le rural constatée entre 1990 et 1999 par rapport à la période
antérieure (1982/1990) s’est accélérée ou ralentie. De plus il est difficile de caler ces
trends sur les évolutions de l’emploi au cours de la période 1999/2004 (période
régionale, il paraît impossible de préciser ce différentiel de salaire pour la province. Face à tant
d’incertitude, l’hypothèse, certes abusive, d’égalité des salaires demeure finalement la plus
raisonnable.
1
Le salaire moyen annuel d’après les sources DGI serait de 23 163 euros net, celui des ouvriers
agricoles de 1 200 euros brut (source MSA), soit d’un peu moins de 1 000 euros par mois.
2
Là encore, les données permettant de connaître le lieu de résidence du propriétaire pour un bien loué
n’est pas à disposition (filocom par exemple). Par ailleurs, le traitement des plus-values issues des
ventes de biens immobiliers soulèvent également une part d’incertitude quant à la destination finale de
ces revenus qui contraint finalement à ne pas intégrer ces sommes dans les bases.
253
marquée par une embellie suivie d’un ralentissement). Pour ce travail, on a donc
conservé les taux de migrants alternants dans les bassins de vie en 19991.
Le montant de cette base est donc obtenu en retirant au total des salaires DGI
la part qui revient aux navetteurs2 au prorata de leur nombre dans l’ensemble des
salariés. Le montant de cette base est très sensible au zonage choisi. Plus le territoire
est petit (l’échelle grande) plus la part des migrants alternants est importante.
La base publique
Les salaires perçus par les fonctionnaires de l’État, des hôpitaux et des
collectivités territoriales (en partie) constituent la base publique. Les emplois publics
de l’État (FPE) et des collectivités territoriales (FPT) à la commune en 2004 sont
issus des fichiers INSEE, corrigés du secret statistique (cf. annexe 2). Les emplois
des titulaires de la fonction publique hospitalière sont obtenus par extraction des
données de la base SAE (statistique annuelle des établissements de santé) disponible
en ligne.
Comme indiqué précédemment, le montant des traitements et salaires hors
indemnités journalières et hors migrants alternants est ventilé entre revenu basique
public et revenu basique et domestique privé au prorata des emplois respectifs. Pour
rappel, on retire 30% des salaires des agents de la fonction publique territoriale que
l’on considère comme domestiques car directement couverts par les budgets locaux.
1
On espère actualiser ces données à partir des fichiers DADS pouvant être fournis par l’INSEE à
l’échelle cantonale.
2
L’hypothèse d’égalité de salaire entre les migrants alternants et les non migrants alternants est posée.
254
La base sanitaire et sociale
255
1. On considère le revenu basique des ménages qui habitent le territoire étudié.
Aucune considération fiscale n’est introduite à ce stade (taxes perçues par les
collectivités territoriales ou autres).
2. Ces revenus basiques ne constituent pas le total des revenus des ménages
d’un territoire. Ils ne constituent que les revenus captés à l’extérieur du
territoire.
3. En ce sens, ils ne constituent pas un modèle comptable des économies
locales. L’accent est mis sur les bases, revenus importés, et non sur les
équilibres entrée-sortie ou tableaux input/output territoriaux.
4. Les montants des bases varient selon les zonages choisis. Tout déplacement
de la frontière d’un territoire fait varier le montant et la nature des flux de
revenus venus de l'extérieur. Plus l’échelle géographique est grande, le
territoire petit, plus la base résidentielle est importante. Inversement, à
l’échelle d’une région ou plus encore d’un pays, l’essentiel des revenus
basiques est alors productif. Il est donc important de travailler sur des
maillages homogènes, non pas tant en termes de population ou de taille, mais
en termes de fonctionnement (cf. chapitre I).
5. Les données présentées n'ont de sens que vis à vis de l'espace local. Une
addition des différents types de bases visant à obtenir un total national n'a que
peu ou pas de sens en raison des flux de revenus interterritoriaux.
6. Ne serait-ce qu’en raison du choix méthodologique qui permet de distinguer
les emplois basiques des emplois domestiques, le calcul des évolutions des
bases est délicat à réaliser. Par ailleurs, l’accent n’a pas été mis sur cet axe là,
en raison de la relative inertie des économies locales tout au moins en termes
de revenus basiques. Un territoire touristique, ou agricole, ou encore un chef-
lieu mieux doté en base publique ne change pas de nature d’une année à
l’autre. Les premières estimations réalisées en 2003 sur les données 1999
coïncident d’ailleurs avec celles réalisées sur les données 2004/2005 et ce
malgré les changements de sources de données.
7. Le calcul de ces bases ne donne aucune indication immédiate quant au
dynamisme du territoire. Elles permettent de préciser la nature du
développement économique de ces territoires sans jugement de valeur.
Différencier les conséquences territoriales des différents types de base est une
seconde étape de l’analyse.
8. Enfin, à ce niveau de l’analyse, rien n’indique les propensions locales à
consommer. Le montant de ces revenus moteurs des économies locales est
256
connu mais pas la part qui est consacrée à la consommation locale, à une
consommation extérieure, à l’épargne etc. Des pistes de travail en ce sens
sont en cours et ont déjà donné lieu à quelques estimations locales (Talandier,
Davezies, 2007). C’est donc pour l’instant en termes d’impact sur les emplois
domestiques que la partie consommation du modèle a été approchée.
Dans ce cadre conceptuel et selon ces choix de calculs, quels sont aujourd’hui
les principaux revenus basiques ou « moteurs économiques » des espaces ruraux ?
257
II LES REVENUS BASIQUES A L’ECHELLE DU BASSIN DE VIE
Les calculs sont effectués pour l’ensemble des bassins de vie de l’INSEE. La
catégorie du pôle de ces bassins est indiquée, toujours selon le zonage en aires
urbaines et emplois de l’espace rural (ZAUER). La distinction au sein des « autres
communes de l’espace à dominante rurale » entre rural isolé et rural sous faible
influence urbaine a été réintroduite. La comparaison des bases de ces différents
bassins peut permettre d’identifier les spécificités des espaces ruraux dans leur
ensemble.
La lecture de ces chiffres est facilitée par le recours aux pourcentages (tableau
4). La base résidentielle représente entre 40,7% (pôle urbains > 30 000 habitants) et
plus de 70% (communes périurbaines) des revenus basiques. Ainsi, même dans les
pôles urbains de plus de 30 000 habitants, la première source de revenus n’est pas
issue de son système productif, mais de ses retraités ! Cette approche révèle le poids
de l’économie résidentielle dans l’analyse des dynamiques territoriales, quel que soit
le territoire étudié. En moyenne pour l’ensemble des bassins de vie métropolitains,
près de la moitié des revenus basiques provient de la base résidentielle. Viennent
258
ensuite, avec plus de 20%, la base sociale et sanitaire (12% pour le social et 10%
pour la santé), puis la base productive (19,7%) et enfin la base publique (9,1%).
Les retraites sont la première source de revenus des pôles urbains, des pôles
ruraux et du rural sous faible influence urbaine. Ces territoires se distinguent
néanmoins les uns des autres, avec une bien plus importante base productive pour les
premiers, base touristique et revenus des migrants alternants pour les seconds.
Le périurbain fonctionne en premier lieu grâce aux revenus des migrants
alternants, puis des retraites.
Enfin, le tourisme est le premier moteur économique du rural isolé, soit plus
d’un tiers des revenus basiques de ces territoires. Le tourisme constitue une activité
majeure pour ces espaces.
Pour le rural, plus spécifiquement, on note que les bénéfices agricoles sont
logiquement plus important dans les économies locales rurales que dans le reste des
bassins de vie. Cependant, même dans le rural isolé les bénéfices agricoles
n’atteignent pas 2% de la base. Globalement, les pôles ruraux apparaissent plus
productifs que le rural sous faible influence urbaine, lui-même plus productif que le
rural isolé. La base publique est relativement faible dans le rural (entre 4 et 5%).
Enfin, le poids des revenus sociaux tourne autour de 11%, celui des remboursements
de soins de santé entre 7 et 8%, soit moins qu’en moyenne dans les bassins de vie
français.
259
supérieures à celles des autres types d’espaces, passant de 15 778 à 15 242 €/hab. En
supprimant ces bassins d’altitude, la base touristique passe de 5 164 à 4 539 €/hab.
Les communes périurbaines, puis les pôles ruraux présentent des revenus
basiques moyens par habitant autour de 14 000 €/hab. Viennent ensuite le rural sous
faible influence urbaine et les communes multipolarisées. Derniers de la course, les
pôles urbains présentent des revenus basiques moyens de l’ordre de 13 600 €/hab.
Concernant les pôles urbains, cette faiblesse des bases par habitant reflète leur
moindre « touristicité » et le fait qu’ils ne sont pas le lieu de résidence des migrants
alternants, et que les retraités les fuient. Ces deux aspects ne sont compensés ni par
leur plus grande capacité productive, ni par leur meilleur équipement public, ni par
leurs revenus de transferts plus importants. En revanche, il est probable que ces pôles
urbains bénéficient de la consommation des ruraux et des périurbains en biens et
services domestiques. Cette consommation constitue alors une fuite pour les espaces
périphériques et un revenu basique pour les pôles urbains. Aujourd’hui, la méthode
choisie pour déterminer les emplois basiques et domestiques ne permet pas
d’introduire ces revenus dans la base des pôles urbains. L’amélioration de cet aspect
là, liée à la formalisation de la deuxième partie du modèle sur la consommation, est
encore à l’étude.
Concernant les espaces ruraux, on peut noter que :
- le poids de la base productive par habitant est plus élevé dans les bassins
ruraux que dans les espaces périurbains. Ces chiffres confirment le maintien
d’une activité industrielle rurale ou disons exportatrice ;
- le profil plutôt périurbain du rural sous faible influence urbaine (les
revenus basiques des migrants alternants y sont plus importants) ;
- les trois types de bassins ruraux sont plutôt équivalents pour ce qui est des
retraites (légèrement plus élevées dans le rural isolé) ;
- les bases sociales et sanitaires sont relativement proches d’un type de
bassin rural à l’autre ;
- le rural isolé est clairement identifié comme un espace de tourisme et de
retraite. La base productive y est, par exemple, trois fois moins importante
que la base touristique. Ces espaces dégagent grâce à ces activités récréatives
des revenus potentiels bien plus importants que dans les autres espaces.
L’enjeu autour de la demande et de l’offre de services et de commerces
apparaît crucial ;
- la base publique affirme le rôle centralisant des pôles ruraux. Ces bassins
apparaissent d’ailleurs comme des territoires plus « harmonieux » en termes
de base. Plus productifs que les autres bassins ruraux, ils sont également
260
mieux dotés en base publique, apparaissent comme plus touristiques que le
rural sous faible influence urbaine et bénéficient plus fortement des salaires
des migrants alternants que le rural isolé.
261
Cartes 10 à 13 - Poids des différents revenus basiques dans les bassins de vie
métropolitains, en 2004/2005
262
Tableau 3 - Montants des revenus basiques par bassin de vie selon le type de pôle du
bassin, en M€ (en 2004/2005)
Rural sous
Pôle urbain
Pôle urbain Commune Commune Pôle Rural faible
<30.000 Ensemble
>30.000 hab périurbaine multipolarisée rural isolé influence
hab
urbaine
Salaires base productive privée 611,2 53,3 11,4 10,7 19,0 5,3 7,2 69,5
Bénéfices agricoles 7,0 5,0 1,1 1,2 3,0 1,6 1,7 2,7
Bénéfices industriels et commerciaux 8,8 2,3 0,6 0,6 1,1 0,5 0,5 1,6
Bénéfices non commerciaux 22,1 0,8 0,5 0,2 0,4 0,2 0,1 2,3
Revenu des capitaux mobiliers 30,5 3,7 1,4 1,0 1,5 0,6 0,7 4,0
Revenus fonciers 40,0 5,4 2,0 1,5 2,2 0,8 1,1 5,4
Total base productive 719,7 70,5 16,9 15,2 27,0 8,9 11,4 85,4
Salaires des migrants-alternants 218,5 67,5 73,0 49,8 31,0 9,1 21,7 55,9
Retraites 707,2 111,0 33,6 30,2 45,8 19,6 23,3 100,7
Dépenses touristiques totales 306,6 75,8 17,7 15,4 40,7 27,1 16,3 56,4
... en hôtels et campings 109,2 18,3 4,5 2,8 9,7 6,8 2,8 16,6
… en Résid. Secondaire et location 80,4 33,8 7,5 7,7 20,8 15,3 8,7 21,5
… chez famille et amis 117,1 23,6 5,7 4,9 10,2 5,1 4,8 18,3
Total base résidentielle 1 232,4 254,3 124,3 95,3 117,5 55,9 61,3 213,0
Base publique territoriale 97,2 9,5 2,4 2,0 3,3 1,3 1,6 11,5
Base publique d'Etat 171,4 15,6 3,0 2,6 4,5 1,6 1,9 19,2
Base publique hospitalière 80,8 9,0 0,6 0,5 1,9 0,4 0,3 8,8
Total base publique 349,3 34,0 5,9 5,1 9,7 3,3 3,8 39,6
Allocations ASSEDIC 115,8 14,2 5,5 4,5 5,5 1,9 2,8 15,2
Indemnités Journ. maladie / maternité 37,8 5,0 2,0 1,5 1,9 0,7 0,9 5,1
RMI 21,4 2,0 0,4 0,4 0,7 0,3 0,3 2,5
Minimum vieillesse et invalidité 5,7 1,0 0,2 0,2 0,4 0,2 0,2 0,8
Alloc. aux adultes handicapés 16,7 2,8 0,6 0,6 1,1 0,5 0,5 2,3
Prestations fam. et alloc. logts 140,4 22,3 6,9 6,5 9,5 4,0 5,1 20,3
aides des dépts aux pers. âgées (APA) 15,9 2,9 0,7 0,7 1,3 0,7 0,7 2,4
aides des dépts aux pers. handi. (APH) 8,6 1,3 0,5 0,4 0,5 0,2 0,3 1,2
aides des dépts à l'enfance (APE) 13,8 1,8 0,7 0,6 0,7 0,2 0,3 1,8
Pratiques médicales 110,7 13,3 2,8 2,3 3,6 1,3 1,4 13,2
Actes auxilliaires 21,7 2,7 0,9 0,7 1,1 0,5 0,5 2,9
Actes biolo. et prélèvements 18,0 2,6 0,5 0,4 0,8 0,1 0,1 2,2
Pharmarcie 95,2 14,1 4,2 3,9 5,4 2,4 2,7 13,1
Autres biens médicaux 40,2 5,6 1,1 0,9 1,9 0,7 0,6 5,1
Cliniques privées (dép. des locaux) 53,3 6,9 2,6 2,2 2,7 1,1 1,4 7,2
Cliniques privées (dép. importées) 13,3 0,6 0,2 0,1 0,2 0,1 0,1 1,4
Total base sanitaire et sociale 728,5 99,0 29,7 25,9 37,5 14,8 17,8 96,7
dont social 376,1 53,3 17,4 15,5 21,6 8,7 11,0 51,7
dont médical 352,4 45,7 12,2 10,4 15,8 6,1 6,8 45,0
Total revenus basiques 3 029,9 457,9 176,9 141,6 191,8 82,8 94,3 434,7
Source : calculs de l’auteur d’après DGI, INSEE, CAF, SAE, MSA, DREES, Ecosanté, ministère du
Tourisme.
Rappel : la distinction entre rural isolé et rural sous faible influence urbaine a été réintroduite par
l’auteur selon la méthode suivante :
- rural sous faible influence urbaine : autres communes rurales du ZAUER dont 20% des actifs
ou plus travaillent dans une aire urbaine ;
- rural isolé : communes restantes.
Rappel : les bassins de vie sont ceux délimités par l’INSEE, 2003.
Note : ces deux derniers rappels ne seront plus précisés dans la suite du texte.
263
Tableau 4 - Répartition des revenus basiques par bassin de vie selon le type de pôle du
bassin, en % (en 2004/2005)
Rural sous
Pôle urbain Pôle urbain
Commune Commune Pôle Rural faible
>30.000 <30.000 Ensemble
périurbaine multipolarisée rural isolé influence
hab hab
urbaine
Salaires base productive privée 20,2 11,6 6,4 7,6 9,9 6,3 7,7 16,0
Bénéfices agricoles 0,2 1,1 0,6 0,9 1,6 1,9 1,8 0,6
Bénéfices industriels et commerciaux 0,3 0,5 0,3 0,4 0,5 0,6 0,6 0,4
Bénéfices non commerciaux 0,7 0,2 0,3 0,1 0,2 0,2 0,1 0,5
Revenu des capitaux mobiliers 1,0 0,8 0,8 0,7 0,8 0,7 0,7 0,9
Revenus fonciers 1,3 1,2 1,1 1,1 1,1 1,0 1,1 1,3
Total base productive 23,8 15,4 9,6 10,7 14,1 10,7 12,1 19,7
Salaires des migrants-alternants 7,2 14,8 41,3 35,2 16,2 11,0 23,0 12,9
Retraites 23,3 24,2 19,0 21,3 23,9 23,7 24,7 23,2
Dépenses touristiques totales 10,1 16,5 10,0 10,9 21,2 32,7 17,3 13,0
... en hôtels et campings 3,6 4,0 2,6 2,0 5,1 8,2 3,0 3,8
… en Résid. Secondaire et location 2,7 7,4 4,2 5,5 10,8 18,4 9,2 4,9
… chez famille et amis 3,9 5,1 3,2 3,4 5,3 6,1 5,1 4,2
Total base résidentielle 40,7 55,6 70,3 67,3 61,3 67,5 65,0 49,0
Base publique territoriale 3,2 2,1 1,3 1,4 1,7 1,6 1,7 2,6
Base publique d'Etat 5,7 3,4 1,7 1,8 2,4 1,9 2,0 4,4
Base publique hospitalière 2,7 2,0 0,3 0,4 1,0 0,5 0,3 2,0
Total base publique 11,5 7,4 3,4 3,6 5,1 4,0 4,0 9,1
Allocations ASSEDIC 3,8 3,1 3,1 3,2 2,9 2,3 2,9 3,5
Indemnités Journ. maladie / maternité 1,2 1,1 1,1 1,1 1,0 0,8 1,0 1,2
RMI 0,7 0,4 0,2 0,3 0,4 0,4 0,4 0,6
Minimum vieillesse et invalidité 0,2 0,2 0,1 0,1 0,2 0,3 0,2 0,2
Alloc. aux adultes handicapés 0,6 0,6 0,3 0,4 0,6 0,6 0,5 0,5
Prestations fam. et alloc. logts 4,6 4,9 3,9 4,6 5,0 4,8 5,4 4,7
aides des dépts aux pers. âgées (APA) 0,5 0,6 0,4 0,5 0,7 0,8 0,7 0,6
aides des dépts aux pers. handi. (APH) 0,3 0,3 0,3 0,3 0,3 0,3 0,3 0,3
aides des dépts à l'enfance (APE) 0,5 0,4 0,4 0,4 0,3 0,3 0,4 0,4
Pratiques médicales 3,7 2,9 1,6 1,6 1,9 1,6 1,5 3,0
Actes auxilliaires 0,7 0,6 0,5 0,5 0,6 0,6 0,6 0,7
Actes biolo. et prélèvements 0,6 0,6 0,3 0,3 0,4 0,1 0,1 0,5
Pharmarcie 3,1 3,1 2,4 2,7 2,8 2,8 2,8 3,0
Autres biens médicaux 1,3 1,2 0,6 0,6 1,0 0,9 0,6 1,2
Cliniques privées (dép. des locaux) 1,8 1,5 1,5 1,5 1,4 1,3 1,5 1,6
Cliniques privées (dép. importées) 0,4 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,3
Total base sanitaire et sociale 24,0 21,6 16,8 18,3 19,5 17,8 18,9 22,2
dont social 12,4 11,6 9,9 10,9 11,3 10,5 11,7 11,9
dont médical 11,6 10,0 6,9 7,4 8,2 7,3 7,2 10,4
Total revenus basiques 100 100 100 100 100 100 100 100,0
Source : calculs de l’auteur d’après DGI, INSEE, CAF, SAE, DREES, MSA, Ecosanté, ministère du
Tourisme.
264
Tableau 5 - Montants des revenus basiques par bassin de vie
selon le type de pôle du bassin, en €/hab. (en 2004/2005)
Rural sous
Pôle urbain Pôle urbain
Commune Commune Pôle Rural faible
>30.000 <30.000 Ensemble
périurbaine multipolarisée rural isolé influence
hab hab
urbaine
Salaires base productive privée 2 744 1 584 959 1 046 1 418 1 001 1 068 2 213
Bénéfices agricoles 31 147 91 121 223 296 256 85
Bénéfices industriels et commerciaux 40 67 49 57 79 97 77 51
Bénéfices non commerciaux 99 25 39 20 26 33 20 73
Revenu des capitaux mobiliers 137 111 120 96 111 106 104 127
Revenus fonciers 180 161 169 150 165 161 160 174
Total base productive 3 231 2 095 1 427 1 489 2 022 1 694 1 684 2 722
Salaires des migrants-alternants 981 2 015 6 149 4 872 2 320 1 741 3 200 1 780
Retraites 3 175 3 300 2 834 2 950 3 422 3 740 3 441 3 209
Dépenses touristiques totales 1 377 2 245 1 492 1 506 3 046 5 164 2 409 1 797
... en hôtels et campings 490 542 383 273 726 1 293 418 529
… en Résid. Secondaire et location 361 1 003 630 758 1 554 2 908 1 278 685
… chez famille et amis 526 700 479 475 766 963 713 583
Total base résidentielle 5 533 7 560 10 475 9 327 8 789 10 646 9 050 6 786
Base publique territoriale 436 282 200 199 245 254 241 366
Base publique d'Etat 769 462 250 250 338 299 277 613
Base publique hospitalière 363 266 49 51 144 71 37 281
Total base publique 1 568 1 010 500 500 727 624 555 1 261
Allocations ASSEDIC 520 422 462 444 410 366 406 484
Indemnités Journ. maladie / maternité 170 150 167 150 140 124 136 161
RMI 96 60 36 41 56 57 49 80
Minimum vieillesse et invalidité 26 29 19 20 34 47 32 27
Alloc. aux adultes handicapés 75 82 50 59 79 90 72 75
Prestations fam. et alloc. logts 631 661 583 639 712 760 746 646
aides des dépts aux pers. âgées (APA) 71 87 59 69 97 127 99 77
aides des dépts aux pers. handi. (APH) 38 40 39 37 41 43 40 39
aides des dépts à l'enfance (APE) 62 52 56 56 50 41 52 58
Pratiques médicales 497 397 234 221 270 248 212 421
Actes auxilliaires 97 81 79 73 83 90 79 91
Actes biolo. et prélèvements 81 76 41 35 63 17 13 71
Pharmarcie 428 417 355 378 407 448 395 418
Autres biens médicaux 180 165 89 87 142 135 87 162
Cliniques privées (dép. des locaux) 240 204 219 214 201 212 207 228
Cliniques privées (dép. importées) 60 19 13 10 16 10 8 43
Total base sanitaire et sociale 3 271 2 943 2 498 2 534 2 800 2 814 2 630 3 081
dont social 1 689 1 584 1 469 1 514 1 618 1 655 1 630 1 647
dont médical 1 582 1 359 1 029 1 019 1 182 1 159 1 000 1 434
Total revenus basiques 13 604 13 609 14 900 13 850 14 338 15 778 13 920 13 851
Source : calculs de l’auteur d’après DGI, INSEE, CAF, SAE, DREES, MSA, Ecosanté, ministère du
Tourisme.
Note : la population 2005 a été estimée d’après les données des recensements partiels en cours et des
montants départementaux consolidés pour les communes non renseignées (cf. annexe 1 de la partie I).
265
II-2 Typologie des bassins ruraux en fonction de leurs revenus
basiques
La typologie réalisée sur les 1 050 bassins ruraux a été réalisée sur les
montants des bases par habitant. Pour plus de lisibilité, tous les revenus sociaux1
n’ont pas été retenus et les divers postes de remboursements de soins de santé ont été
agrégés. Une analyse en composantes principales (ACP) a permis de mettre en
évidence les corrélations entre les variables (c’est-à-dire entre les revenus basiques).
La classification ascendante hiérarchique (CAH) réalisée sur les trois premières
composantes principales de l’ACP débouche finalement sur six classes distinctes
(résultats détaillés en annexe 3).
L’ACP oppose sur le premier axe les territoires touristiques aux territoires
productifs et « migrants alternants », ces deux derniers types de revenus étant
corrélés positivement. Le second axe oppose des territoires plutôt « jeunes » ou
d’actifs aux espaces où dominent les retraites, le minimum vieillesse et le RMI.
L’axe trois, enfin, permet de distinguer les bassins où les bénéfices agricoles
occupent un poids plus important dans la base. Les autres axes n’apportent pas
d’informations complémentaires utiles. Ainsi, les bassins ruraux se distinguent les
uns des autres principalement en fonction de leur « touristicité », de leur capacité à
attirer des activités productives et des migrants alternants (les deux étant corrélés), du
profil des résidents (jeunes actifs ou plutôt retraités ou au RMI), du poids de
l’agriculture. Par ailleurs, la sélection des trois premiers axes principaux permet de
résumer près de 50% de l’information contenue dans l’ensemble des vingt variables
ou revenus basiques. La perte d’information est compensée par la simplicité
d’analyse et de calculs, intérêts et limites propres à ces méthodes de l’analyse de
données.
1
Les aides des départements et l’allocation aux adultes handicapés, qui n’apportaient rien à la
classification, ont été supprimées.
266
- les bassins « productifs, migrants alternants et ASSEDIC » : il s’agit de
bassins ruraux pour lesquels les revenus productifs des salariés d’entreprises
exportatrices, les salaires des migrants alternants et les allocations versées par
les ASSEDIC (principalement l’allocation de chômage) sont plus importants
qu’ailleurs ;
Quel est la localisation de ces bassins, leur taille, la nature de leurs pôles, leur
base ?
267
Carte 14 - Typologie des bassins ruraux
établie selon les montants de revenus basiques par habitant en 2004/2005
268
La carte 14 localise les résultats de la typologie pour l’ensemble des 1 050
bassins ruraux. On voit clairement apparaître deux types de France rurale, l’une
productive au nord de l’axe La Rochelle-Annecy, l’autre résidentielle au sud.
Dans la moitié Nord du territoire, les bassins ruraux du type « productifs -
migrants alternants et ASSEDIC » se situent plutôt à proximité d’une aire urbaine et
sur le pourtour francilien. Les départements dans lesquels plus de trois bassins ruraux
sur quatre sont de ce type sont concentrés dans les régions ou départements du Nord
et de l’Est (Alsace, Lorraine, Picardie, Nord-Pas-de-Calais, Ardennes et Loiret (cf.
cartes départementales en annexe 4)). À l’Ouest, l’Eure, le Calvados, la Sarthe et la
Vendée voient également les trois quarts de leurs bassins ruraux fonctionner grâce à
ce type de revenus basiques.
Le type « productif et agricole » domine à l’Ouest ainsi que dans certains
départements agricoles ou viticoles des régions de l’Est : Champagne-Ardenne,
Bourgogne et Franche-Comté.
Toujours dans cette moitié Nord, on observe que certains bassins ruraux sont
moins attractifs auprès de jeunes actifs (ou peut-être plus attractifs auprès de
retraités) puisque leur base est dominée par les retraites. Ces bassins de retraités sont
également plus touristiques que la moyenne près du littoral des Côtes-d’Armor, de la
Manche ou encore de la Somme. C’est également le cas de quelques bassins de
l’Yonne, de la Nièvre, de l’Allier, du Cher et de l’Indre. Enfin, on note que certains
de ces bassins sont encore très agricoles. Ces bassins « retraites et agriculture » se
situent au cœur de la pointe bretonne, aux frontières du Limousin, du Centre et de
Poitou-Charentes ou encore dans la Nièvre et en Côte-d’Or.
Les profils les plus touristiques sont quasiment absents de cette moitié Nord
métropolitaine.
269
Les bassins « retraites, tourisme et minima sociaux » sont typiques des
départements méditerranéens, allant jusqu’au sud de l’Ardèche et à l’est de l’Ariège.
Ce type de bassin apparaît aussi sur le littoral de la Gironde ou des Landes.
Les bassins quasi exclusivement touristiques décrivent les bassins ruraux
alpins, pyrénéens, ou bien encore l’arrière-pays varois et certaines stations balnéaires
de l’Atlantique.
Enfin, au sein de cette France rurale du Sud, résidentielle et récréative, se
distinguent quelques bassins plus productifs. Ils se situent dans la vallée du Rhône et
aux alentours de Lyon, dans la périphérie éloignée de Toulouse, à la jointure des
aires urbaines de Nîmes et Montpellier, ou encore de façon plus éparpillée dans
l’extrême Sud-Ouest de la France.
Cette géographie souligne la diversité des espaces ruraux français. Les atouts
et les préoccupations des uns divergent des atouts et des préoccupations des autres.
1
Société d’études géographique et sociologique.
2
« Après plusieurs analyses factorielles et de corrélation, 24 critères relativement indépendants (et
issus des grandes enquêtes RGP, Inventaire communal) ont été retenus couvrant essentiellement les
données de peuplement, la structure démographique, les caractéristiques de l'emploi, les groupes
socioprofessionnels et le logement. » (La France rurale en 2020, DATAR 2003, p.59).
270
basiques. Les bassins ruraux productifs (« agricoles » ou « migrants alternants et
ASSEDIC ») recouvrent les types « rural en transition » et « rural ouvrier » de la
SEGESA. Le caractère agricole qui ressort des analyses en termes de revenu n’est
donc pas validé par l’analyse sociodémographique. Ce point révèle la qualité
intensive de l’agriculture présente dans ces espaces. En effet, dotés de moins
d’agriculteurs que le centre de la France (d’où la typologie SEGESA), ces bassins du
Nord-Ouest créent pourtant largement plus de bénéfices agricoles. Le caractère
« ouvrier » du Nord-Est se matérialise en termes de revenu basique par un poids plus
important des salaires issus d’activités exportatrices dans la base. Enfin, les deux
typologies s’accordent sur les espaces fortement touristiques.
Malgré ces divergences, les grands traits de la composition des espaces
ruraux demeurent identiques : campagne productive au Nord, campagne résidentielle
et touristique dans les zones littorales et frontalières au Sud, campagne où dominent
les retraités au centre.
Sur les 1 050 bassins ruraux, plus de la moitié sont dits productifs, soit
« productifs - migrants alternants et ASSEDIC » (356 bassins), soit « productifs et
agricoles » (230 bassins) (annexe 5). Près de 400 bassins sont caractérisés par
l’importance des retraites, dont 212 du type « retraites et tourisme », 123 du type
« retraites et agriculture », 62 associent « retraites, tourisme et revenus sociaux ».
Enfin, 67 bassins sont « quasi exclusivement touristiques ».
Les pôles ruraux sont surreprésentés dans les bassins productifs et quasi
exclusivement touristiques (annexe 5). Le rural sous faible influence urbaine
concerne de façon plus prégnante les territoires productifs et migrants alternants,
confortant leur profil à tendance périurbaine. On constate également que ce type de
pôles est plus présent dans les bassins « retraites, tourisme et revenus sociaux ».
Enfin, le rural isolé caractérise très fortement les bassins dominés par les retraites,
l’agriculture et le tourisme. On retrouve l’idée d’une moindre attractivité productive
de ces bassins, hormis pour les activités agricoles.
En termes de répartition de la population, plus de la moitié des habitants de
ces bassins ruraux résident dans des territoires productifs (36% dans les « productifs
- migrants alternants et ASSEDIC » et 22,8% dans les « productifs agricoles »). Près
de 20% de la population des bassins ruraux réside dans un bassin où dominent les
retraites et le tourisme, 10% dans les bassins « retraites et agriculture ». Les bassins
quasi exclusivement touristiques (4,9%) et ceux qui associent tourisme, retraites et
revenus sociaux (6,5%) représentent, à eux deux, 11,4% de la population des bassins
ruraux.
271
L’analyse des montants des différents revenus basiques par habitant permet
d’affiner le profil de ces six types de bassins (tableau 6).
Tableau 6 - Montants des revenus basiques par habitant dans les six types de bassins
ruraux, en €/hab. (en 2004/2005)
Productif, Retraites,
Retraites Moy.
migrants Productif et Retraites et tourisme et
et Tourisme Bassins
alternants et agricole agriculture revenus
tourisme ruraux
ASSEDIC sociaux
Salaires base productive privée 1 562 1 548 970 917 854 849 1 294
Bénéfices agricoles 171 407 378 194 93 75 240
Bénéfices industriels et commerciaux 62 73 100 93 176 86 81
Bénéfices non commerciaux 17 11 17 26 184 32 26
Revenu des capitaux mobiliers 99 118 113 99 195 99 109
Revenus fonciers 142 164 167 160 301 179 163
Total base productive 2 053 2 322 1 746 1 490 1 802 1 319 1 914
Salaires des migrants-alternants 3 177 2 211 1 289 1 764 1 739 2 283 2 364
Retraites 3 147 3 138 3 622 3 931 4 542 4 150 3 478
Dépenses touristiques totales 1 759 1 656 3 070 3 860 18 212 5 160 3 295
... en hôtels et campings 320 273 592 976 5 026 1 529 771
… en Résid. Secondaire et location 899 780 1 576 1 868 11 220 2 506 1 734
… chez famille et amis 539 603 902 1 016 1 966 1 124 790
Total base résidentielle 8 083 7 005 7 981 9 555 24 493 11 592 9 136
Base publique territoriale 206 213 267 292 358 328 246
Base publique d'Etat 284 337 428 345 294 269 322
Base publique hospitalière 68 138 248 139 66 59 115
Total base publique 557 688 944 776 718 656 683
Allocations ASSEDIC 434 344 293 393 529 535 402
Indemnités Journ. maladie / maternité 144 144 122 120 163 120 136
RMI 47 39 49 76 49 109 55
Minimum vieillesse et invalidité 24 29 54 50 35 47 36
Alloc. aux adultes handicapés 70 77 99 95 54 84 80
Prestations fam. et alloc. logts 709 749 733 728 646 774 725
aides des dépts aux pers. âgées (APA) 83 97 136 126 88 116 102
aides des dépts aux pers. handi. (APH) 40 41 46 43 34 38 41
aides des dépts à l'enfance (APE) 54 49 40 45 42 51 49
Pratiques médicales 230 236 283 282 330 317 257
Actes auxilliaires 72 67 88 101 115 126 83
Actes biolo. et prélèvements 38 46 57 55 49 68 47
Pharmarcie 382 383 443 444 513 461 412
Autres biens médicaux 100 102 130 165 356 150 132
Cliniques privées (dép. des locaux) 186 186 214 224 224 280 204
Cliniques privées (dép. importées) 10 8 15 20 42 14 14
Total base sanitaire et sociale 2 622 2 597 2 801 2 966 3 272 3 291 2 776
dont social 1 605 1 569 1 572 1 676 1 641 1 875 1 626
dont médical 1 017 1 028 1 228 1 291 1 631 1 416 1 150
Total revenus basiques 13 315 12 611 13 471 14 786 30 285 16 859 14 509
Source : calculs de l’auteur d’après DGI, INSEE, CAF, SAE, DREES, MSA, Ecosanté,
ministère du Tourisme
En bleu : montant par hab. supérieur à la moyenne des bassins ruraux.
Les deux types de bassins « productifs » présentent une base productive par
habitant de plus de 2 000 €/hab., équivalente à celle des bassins polarisés par un pôle
urbain de moins de 30 000 habitants (cf. tableau 5). Le poids relatif des allocations
ASSEDIC, indemnités journalières, prestations familiales et allocations logement, et
272
de l’aide des départements à l’enfance souligne le caractère plus jeune des résidents
de ces bassins1. Les bassins « productifs et agricoles » sont, par ailleurs, plutôt mieux
dotés en base publique, que la moyenne, les bassins « productifs, migrants alternants,
ASSEDIC » plutôt moins bien dotés. Enfin, ces deux types de bassins se distinguent
des autres types par leur faible attractivité touristique.
Les bassins « retraites et agriculture » ont une base productive moindre que
les précédents mais pas négligeable pour autant. Les bénéfices des travailleurs
indépendants, dont les bénéfices agricoles, ainsi que les revenus capitaux mobiliers et
fonciers sont plus importants que dans les autres bassins. En 1999, les travailleurs
non salariés représentaient 25% de la population active de ces bassins (cf. annexe 6).
Ces bassins sont moins touristiques que les suivants mais près de deux fois plus que
les précédents. Par ailleurs, ce sont les bassins les mieux dotés en emplois publics,
alors même qu’une large majorité d’entre eux est polarisée par une commune du
rural isolé. Le poids des minima et des aides destinées aux personnes âgées est lié au
poids des plus de soixante ans dans la population (près d’un habitant sur trois avait
plus de 60 ans en 1999, cf. annexe 6) Les dépenses de santé par habitant sont
légèrement supérieures à la moyenne des bassins ruraux, mais inférieures à la
moyenne métropolitaine (1 434 €/hab. cf. tableau 5).
1
Résultats confirmés par le croisement de ces six types de bassins et les caractéristiques
sociodémographiques de leurs habitants en 1999, cf. annexe 6.
2
La pension de retraite perçue, en moyenne, par les retraités y est plus élevée.
273
Enfin, les bassins dits quasi exclusivement touristiques ont en effet 60% de
leurs revenus basiques qui proviennent des dépenses des touristes. Ces territoires
sont également caractérisés par l’importance relative des bénéfices des travailleurs
indépendants, des revenus de capitaux mobiliers et des revenus fonciers.
L’interaction éventuelle entre tourisme et petites entreprises locales de commerces,
de services et d’artisanat pourrait bien expliquer le poids des bénéfices des
indépendants (hors agriculteurs)1. Par ailleurs, ces territoires présentent la plus
importante base de retraites, qui cumulée à la base touristique font de ces bassins une
sorte de « parangon » du bassin résidentiel et récréatif. On peut noter, enfin,
l’importance des allocations ASSEDIC et indemnités journalières. La question de la
saisonnalité de l’emploi se pose naturellement dans ces espaces touristiques.
L’importance des dépenses de santé peut être, en partie, liée à la présence des
touristes. Dans ces bassins, qui incluent souvent les stations de ski, les dépenses en
autres biens médicaux (ambulances, ventes de prothèses, de béquilles etc.) sont, en
effet, trois fois plus élevées qu’ailleurs2.
Globalement, on retrouve le résultat déjà souligné plus haut, à savoir que les
bassins les plus touristiques sont également ceux qui bénéficient d’un revenu basique
par habitant supérieur à la moyenne. Le tourisme semble pouvoir être un facteur de
développement majeur pour les espaces ruraux. Faut-il encore que les revenus perçus
soient dépensés localement et que les emplois soient occupés par les résidents du
bassin.
L’espace rural n’est pas homogène. Les bassins ruraux ne connaissent pas
tous une revitalisation démographique, économique et sociale. La structure des bases
de ces bassins diffèrent. Peut-on établir un lien entre les bases et les dynamiques
territoriales ? Existe-t-il des appariements de revenus basiques qui créent plus de
développement que d’autres et qui expliqueraient la revitalisation de certains espaces
ruraux ?
1
Plus de 20% des actifs de ce type de bassins étaient non salariés en 1999.
2
En revanche, les données qui permettent d’établir les bases en pratiques médicales, actes auxiliaires,
actes de biologie, prélèvements, pharmacie sont les montants de remboursements des soins de santé
par département de résidence et le nombre de pratiquants ou d’établissements pondérés par le nombre
de salariés de ces structures. Les remboursements de soins de santé des non résidents du département,
touristes, ne sont pas pris en compte pour ce type d’activité. Ces montants sous-estiment donc
l’éventuel impact des touristes sur les activités de soins de ville. Ils rendent compte en revanche des
sur-dépenses des locaux et des touristes du département qui viennent skier, par exemple, ou faire de la
randonnée dans ces bassins.
274
Chapitre 3 - Les moteurs de la revitalisation rurale
La structure et les montants des bases des bassins ruraux diffèrent. Peut-on
établir un lien entre ces revenus basiques et les « performances territoriales » des
bassins ruraux ? Le terme de « performance territoriale » est préféré à celui de
« revitalisation rurale » pour qualifier la situation d’un bassin rural selon les trois
fondamentaux du développement : le revenu, l’emploi et la démographie. La
« performance » peut être mauvaise alors que l’utilisation du terme de revitalisation
renvoie à une évolution positive qui ne touche pas l’ensemble des bassins. Par
ailleurs, il paraît important de prendre en compte les évolutions de ces trois variables,
mais, également, de réaliser des comparaisons en termes de niveaux : niveaux de
revenu, par exemple, taux d’équipements en emplois dans les commerces et services,
ou encore, taux d’immigrants et d’émigrants dans la population pour l’aspect
migratoire.
Le raisonnement est construit à partir des divers « modes de développement »
des bassins ruraux. La typologie établie à partir des revenus basiques permet de
distinguer six types de bassins qui correspondent à six « modes de développement ».
Les atouts et moteurs socio-économiques des uns divergent des atouts et moteurs
socio-économiques des autres.
L’analyse comparative de la situation socio-économique des différents types
de bassins est détaillée dans une première section. Cette analyse a pour objectif de
mettre en évidence les spécificités des six « modes de développement » identifiés et
d’étudier leur éventuel impact en termes de « performance territoriale ». La synthèse
des résultats, établie par bassin, est accompagnée d’un tableau synoptique qui facilite
la lecture. L’analyse des corrélations statistiques entre les revenus basiques et les
variables, qui se seront révélées essentielles dans l’analyse comparative, devrait
permettre de tirer quelques conclusions sur les moteurs de la revitalisation rurale que
connaissent certains bassins ruraux.
275
I ANALYSE COMPARATIVE DES PERFORMANCES TERRITORIALES DES
BASSINS RURAUX
1
Revenus basiques
2
Le revenu déclaré aux impôts est calculé à partir de la somme des différents revenus déclarés :
traitements et salaires, allocations ASSEDIC, retraites, BIC, BNC, BA, revenus fonciers et plus-
values foncières, revenus de capitaux mobiliers. Il diffère du revenu imposable qui inclut les
abattements et déductions fiscales.
3
Le revenu réel, dit revenu en volume, correspond au revenu nominal, en valeur, une fois l’effet de
l’inflation pris en compte. Ce revenu réel, revenu rapporté au niveau général des prix, est parfois
appelé pouvoir d’achat.
276
spatialisées sur le budget des ménages en France, il semble que la prise en compte
des prix de l’immobilier et du foncier pourrait ajuster la variable revenu. Le revenu
disponible brut « déflaté » de l’indice des prix de l’immobilier se rapprocherait de la
notion de revenu réel. Le logement est, en effet, le premier poste de consommation
des ménages (24,7% des dépenses en 2005, INSEE 2006), mais il se répercute
également sur le prix des autres postes de dépenses via le coût de l’immobilier et du
foncier supporté par une entreprise qui peut l’inclure dans son prix de vente.
Tableau 7 - Revenu imposable par habitant en 2004 par type de bassins ruraux
Revenu
Indice 100
imposable/hab.
moyenne
en €
Productif - migrants alternants - Assedic 8 208 101
Productif et agricole 7 976 98
Retraites et agriculture 7 507 93
Retraites et tourisme 7 778 96
Tourisme 10 477 129
Retraites, tourisme et revenus sociaux 8 181 101
Moyenne bassins ruraux 8 109 100
Source : calculs de l’auteur d’après DGI et INSEE.
Note : la population 2004 est estimée à partir des résultats d’enquêtes partielles du nouveau
recensement et des montants départementaux consolidés (cf. annexe 1 de la partie I).
Le revenu imposable moyen par habitant est indiqué dans le tableau 7 (la
cartographie de ces revenus est donnée en annexe 7). Si des écarts apparaissent
clairement ici entre les bassins, il convient de valider statistiquement ces résultats.
1
Informations produites avec les logiciels SAS.
277
minima sociaux » et « productifs, migrants alternants et ASSEDIC ». L’écart du
revenu par habitant entre ces deux derniers types n’est pas significatif. Ce résultat est
intéressant, dans la mesure où il rend compte d’une performance équivalente entre
deux types d’espaces ruraux très différents.
Tableau 8 - Revenu déclaré par habitant en 2004 par type de bassins ruraux
Revenus Indice 100
déclarés/hab. en € moyenne
Productif - migrants alternants - Assedic 11 713 102
Productif et agricole 11 193 98
Retraites et agriculture 10 556 92
Retraites et tourisme 11 053 96
Tourisme 14 118 123
Retraites, tourisme et revenus sociaux 11 799 103
Moyenne bassins ruraux 11 472 100
Source : calculs de l’auteur d’après DGI et INSEE.
Note : le revenu déclaré correspond à la somme des différents revenus déclarés avant abattements et
déductions fiscales.
On avait remarqué le poids des bases de retraites dans les bassins touristiques.
Une première analyse sur les données du recensement montrait que ce poids serait
1
Rappel : le revenu déclaré est égal à la somme des différents revenus déclarés avant abattements
2
Informations produites avec les logiciels SAS
278
plus le fait de retraites élevées que du nombre de retraités. La question de l’impact de
ces retraites sur les revenus moyens des bassins ruraux se pose.
La part des retraites représente 30,3% des revenus déclarés dans les bassins
ruraux (tableau 9). Ce taux varie de 26,9% dans les bassins les plus productifs à
35,6% dans les bassins alimentés principalement par les retraites et les dépenses
touristiques.
Par ailleurs les niveaux de retraites diffèrent d’un bassin à l’autre, comme le
laissaient suggérer les montants des bases de retraites et le nombre de retraités en
1999. Les pensions de retraites perçues en moyenne par un retraité sont plus élevées
dans les bassins quasi exclusivement touristiques (+21% par rapport à la moyenne
des bassins ruraux) ainsi que dans les bassins « retraites, tourisme et revenus
sociaux » (+9% par rapport à la moyenne ; cf. annexe 10). L’attractivité migratoire
de ces zones auprès de retraités plus aisés que les retraités locaux peut expliquer ces
résultats.
Les écarts sont moins marqués pour les salaires mais il est intéressant de
noter que ce sont, cette fois, les bassins les plus productifs qui bénéficient des
salaires moyens1 les plus élevés (cf. annexe 10). Les écarts entre bassins sont encore
plus frappants pour les revenus des indépendants (BIC, BNC ou BA), toujours en
faveur des espaces productifs (voir aussi annexe 7 pour la cartographie). Les BNC
par travailleur en profession libérale sont également supérieurs à la moyenne dans les
bassins « retraites, tourisme et revenus sociaux ».
1
Traitements et salaires par personne ayant déclaré un tel salaire (inclus les salariés à temps partiel, ou
saisonnier etc.). On ne raisonne donc pas sur le salaire horaire. Là encore, le recours aux données
DADS pourrait éventuellement permettre de préciser ces éléments.
279
Globalement les revenus perçus par les travailleurs, ou revenus du travail,
sont donc supérieurs de 5% à la moyenne dans les bassins « productifs - migrants
alternants et ASSEDIC ». Les niveaux de revenus particulièrement élevés dans les
bassins dits touristiques sont imputables au niveau des retraites ainsi qu’aux revenus
de capitaux mobiliers et aux revenus fonciers. L’impact des bases touristiques et des
retraites ne semble pas se répercuter sur la rémunération des salariés ou des
indépendants dans ces zones1.
1
Le facteur saisonnier des emplois peut, en partie, influencer ces résultats. On ne raisonne pas en
salaire ou revenu horaire mais sur les montants effectivement perçus et déclarés au cours d’une année
d’activité.
280
Carte 16 - Écart entre le revenu disponible brut par habitant
et le revenu déclaré par habitant en 2004, en %
Ensemble des bassins ruraux
Source : calculs de l’auteur d’après INSEE, DGI, DREES, CAF, MSA, Ecosanté.
Discrétisation construite autour de la moyenne des bassins ruraux : 16,7% d’écart entre les deux types
de revenus.
Source : calculs de l’auteur d’après INSEE, DGI, DREES, CAF, MSA, Ecosanté.
Discrétisation construite autour de la moyenne des bassins de vie : 14,7% d’écart entre les deux types
de revenus.
281
Tableau 10 - Récapitulatif des écarts de revenu selon les bassins ruraux, en 2004
282
À défaut d’avoir un indice spatialisé des prix, on peut tenter d’introduire les
différences de prix de l’immobilier et du foncier pour ajuster les analyses
précédentes sur les revenus. Les informations recueillies sur les prix de l’immobilier
ne sont pas entièrement satisfaisantes pour la zone d’étude. L’extraction de la base
des notaires pour 2003/20041, par exemple, indique de façon « homogène » le prix au
mètre carré des appartements anciens vendus dans 559 communes françaises. La
base de données CLAMEUR2 indique, de son côté, le prix moyen au mètre carré du
parc locatif privé par département en 2006. Ces données ne correspondent
malheureusement pas aux bassins ruraux. En revanche, ces informations peuvent
servir de repère pour tester une source de données dont on dispose à l’échelle
communale : les revenus fonciers.
1
Disponible en ligne : http://www.lexpress.fr/services/immobilier/dossier/immobilier/ow/index.htm
2
CLAMEUR : Connaître les loyers et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux, données
disponibles en ligne : http://www.clameur.fr/lpd.htm. Les données sont à relever « à la main » à partir
d’une carte interactive.
3
On notera « revenus fonciers ». Il s’agit des revenus perçus et déclarés par les propriétaires pour la
location d’un bien foncier bâti ou non bâti.
283
On a confronté ces revenus fonciers déclarés par les propriétaires aux prix
immobiliers de la base des notaires portant sur 559 communes ainsi qu’aux
moyennes départementales des prix locatifs (source CLAMEUR).
La régression réalisée sur les 559 communes renseignées par la base des
notaires, qui porte sur le prix des ventes au mètre carré des appartements anciens, et
le montant des revenus fonciers par déclarant dans ces mêmes communes est donné
en annexe 121. La relation établie entre ces deux variables est plus satisfaisante que
celle réalisée entre la base des notaires et les bases brutes de taxe d’habitation par
habitant (voir également annexe 12). Elle est autant significative que celle réalisée
entre cette base des notaires et le revenu par habitant.
Par ailleurs, la régression entre le prix du marché locatif privé au mètre carré
obtenu pour l’ensemble des départements et la variable revenu foncier par
propriétaire est également très satisfaisante2. Seuls la Corse et Paris divergent du
modèle. La Corse fait apparaître un niveau de revenu foncier bien supérieur à ce qu’il
devrait être au vu des loyers, Paris est dans une situation opposée. La Corse, très
touristique, peut bénéficier d’une prime à la location saisonnière qui ne figure pas
dans les loyers locatifs du parc privé. L’écart dans le cas de Paris pourrait être
expliqué par le fait que les Parisiens tirent une partie de leurs revenus fonciers de
logements situés en dehors de la capitale ou bien encore par un effet revenu. Les
Parisiens propriétaires loueraient leurs biens à des prix plus élevés (car propriétaires
d’appartements plus grands etc.) que le prix locatif moyen de Paris.
Ces prix locatifs départementaux sont également corrélés au revenu par
habitant. Cependant, les résultats de cette régression sont conditionnés par les
extrêmes, à savoir les données pour l’Île-de-France. Hors Île-de-France, le revenu
par habitant devient un « indicateur » moins satisfaisant pour représenter les prix des
loyers que le revenu foncier déclaré par les propriétaires.
1
Précisons que la base des notaires indique des prix pour l’année 2003/2004, tandis que les revenus
fonciers déclarés pris en compte sont ceux de 2004. Il serait préférable de travailler sur des années
similaires, mais on n’a pas pu les obtenir. L’hypothèse sous-jacente est donc que les écarts de prix et
de revenus entre les 559 villes ne sont pas bouleversés en un an.
2
Précisons que les prix locatifs sont ceux de 2006 alors les revenus DGI sont ceux de 2004. Il serait
préférable de travailler sur des années similaires, mais on n’a pas pu les obtenir. L’hypothèse sous-
jacente est donc que les écarts de prix et de revenus entre les départements métropolitains ne sont pas
bouleversés en un an.
284
vendues à des non agriculteurs (source SAFER, publié par le Conseil économique et
social, 2005). Ces comparaisons confortent le choix du revenu foncier déclaré par les
propriétaires comme indicateur du prix du sol (cartes en annexe 13).
Les revenus fonciers par déclarant dessinent une géographie très proche de
celle obtenue sur les prix locatifs. Ils sont plus élevés en Île-de-France et
départements limitrophes à l’Ouest jusqu’au Calvados, en Rhône-Alpes et
généralement dans le Sud-Est, sur le pourtour méditerranéen (hors Aude), en Alsace,
dans le Nord. Cependant des décalages apparaissent entre les deux indicateurs. Les
niveaux de revenus fonciers déclarés par les propriétaires divergent de ceux des prix
de location dans des bassins ruraux touristiques (location de gîtes etc.). C’est le cas
de la Lozère, du Cantal et de l’Aveyron qui apparaissent comme « modérément
chers » en revenu foncier et « faibles » en prix des locations. Ceci reflète cependant
l’attractivité de ces départements auprès de vacanciers, mais aussi de résidents
secondaires. Les prix du parc locatif privé y sont apparemment relativement faibles,
mais finalement l’achat d’une maison ancienne y est, peut-être, plus coûteux que ne
laissent suggérer les prix locatifs. Le prix des biens agricoles vendus à des non
agriculteurs va dans ce sens. Ces trois départements apparaissent, en effet, dans la
moyenne supérieure des prix de vente.
Le revenu foncier par propriétaire est plutôt faible au regard des données de la
SAFER dans les bassins ruraux des départements suivants : Manche, Mayenne,
Sarthe, Maine-et-Loire, Deux-Sèvres, Vienne et Indre-et-Loire. Ainsi, le prix des
biens agricoles achetés par des non agriculteurs dans ces départements serait modéré
selon la SAFER alors que l’indicateur des revenus fonciers signale plutôt des prix
faibles. Ces départements sont, pourtant, très peu attractifs, y compris auprès d’une
population étrangère1. Finalement, la faiblesse des prix fonciers dans ces espaces
ruraux ne paraît pas incohérente.
Pour ce premier travail, malgré les nombreuses limites de cet indicateur, les
écarts de revenu foncier déclaré par les propriétaires sera considéré comme une
approximation des différences spatiales du coût du sol.
1
C’est ce qui apparaît sur les cartes des installations de migrants interrégionaux présentées en
première partie, ou bien encore dans l’analyse des installations d’étrangers dans les espaces ruraux
présentée plus loin.
285
moyenne des bassins de vie en termes de revenu foncier par propriétaire. Cette prise
en compte des écarts de prix ne porte que sur un quart du RDB, estimant ainsi que les
différences de prix du sol pèsent sur un quart du revenu des ménages1.
Les écarts de revenus indiqués dans le tableau 11 portent sur l’ensemble des
bassins de vie, en fonction de la nature du pôle de ces bassins. Sans grande surprise,
après prise en compte de l’impôt sur le revenu, des transferts et de l’indice des prix,
les écarts de revenu entre bassins de vie se réduisent au détriment des pôles urbains
de plus de 30 000 habitants mais aussi des communes périurbaines, au profit
principalement du rural isolé, du rural sous faible influence urbaine, des pôles ruraux
ou encore des pôles urbains de moins de 30 000 habitants.
Tableau 11 - Revenus déclarés, revenu disponible brut estimé, revenu réel estimé, en 2004
Ecart
Revenus Revenu
Revenus RDB par d'indice :
Revenus déclarés réels par
RDB par réels hab. indice revenus
déclarés par par hab. hab. indice
hab. en € estimés par 100 réels -
hab. en € indice 100 100
hab. en € moyenne revenus
moyenne moyenne
Type de pôle du bassin de vie déclarés
Pôle urbain >30.000 hab. 14 162 15 822 15 251 105,6 104,9 101,1 -4,5
Pôle urbain <30.000 hab. 12 041 13 916 14 548 89,8 92,2 96,4 6,7
Commune périurbaine 13 668 14 852 14 987 101,9 98,5 99,3 -2,5
Commune multipolarisée 12 481 13 914 14 387 93,0 92,2 95,4 2,3
Pôle rural 11 620 13 445 14 227 86,6 89,1 94,3 7,7
Rural isolé 10 727 12 702 13 762 80,0 84,2 91,2 11,3
Rural ss faible influ. urbaine 11 613 13 306 14 273 86,6 88,2 94,6 8,0
Moyenne bassins de vie 13 414 15 086 15 086 100,0 100,0 100,0 0,0
Source : calculs de l’auteur d’après INSEE, DGI, DREES, CAF, MSA, Ecosanté.
1
Pour rappel, les ménages consacrent 18% de leur revenu aux dépenses de logement (hors chauffage
et électricité). On choisit 25% afin de tenir compte de l’impact du coût du sol sur les autres types de
dépenses (répercussion sur les prix de vente).
286
Carte 18 - Écart entre les revenus déclarés par habitant et le revenu réel estimé
dans les bassins de vie, en 2004
Les bassins où le revenu réel est inférieur au revenu déclaré des habitants sont
situés en Île-de-France (hors partie Est de la Seine-et-Marne), aux alentours
d’Épernay, de Bar-sur-Seine, de Chablis ou encore dans des lieux très prisés des
Alpes ou du Var (Courchevel, Val d’Isère, Saint-Tropez, Fréjus) (carte 18). Cet écart
négatif signifie qu’à salaire égal, on est finalement moins « riche » en Île-de-France
que dans d’autres bassins de vie. Ou plus précisément, dans le cas de Saint-Tropez
(écart négatif maximal dû à de faibles revenus de transferts, des impôts élevés et des
prix fonciers très élevés), un salarié bénéficie finalement d’un revenu réel inférieur
de 30% à celui qu’il a perçu. Ou encore, un salaire mensuel de 1 000 euros
correspond à un pouvoir d’achat mensuel de 650 euros à Saint-Tropez, 870 euros à
Paris, 1 150 euros à Saint-Gervais-en-Auvergne1. À qualification égale, un salarié
1
Les allocations logement comblent certainement une part des écarts de prix du foncier, mais ces
calculs ne tiennent pas compte non plus des impôts locaux qui peuvent contrebalancer les effets des
287
parisien devrait donc gagner 30% de plus que son homologue auvergnat pour
bénéficier du même revenu réel.
allocations logement… Ces premières estimations reposent de toute manière sur un indicateur très
critiquable, introduire des sophistications complémentaires n’était pas réellement envisageable.
1
Le revenu nominal exprime le revenu en valeur sans prise en compte de l’inflation (contrairement au
revenu réel, dit revenu en volume, qui intègre l’inflation). Ce terme de « nominal » est employé, ici,
pour qualifier le revenu en valeur sans prise en compte des écarts de prix entre territoires.
288
Carte 19 - Écart entre les revenus déclarés par habitant et le revenu réel estimé dans les
bassins ruraux, en 2004
La carte 19 met en avant les écarts existant entre les bassins ruraux. Ainsi,
malgré un gain en termes de pouvoir d’achat qui pourrait être supérieur dans certains
bassins ruraux, leur attractivité demeure très faible (bassins du Nord-Est, par
exemple). Inversement, certains espaces ruraux sont très attractifs, malgré de
moindres gains possibles (littoral Atlantique, Sud-Est). La comparaison entre les
écarts de revenus réels et l’attractivité des territoires pourrait être un indicateur des
aménités « paysagères » rurales recherchées.
289
Tableau 12 - Revenus déclarés et revenus réels estimés par habitant en 2004 par type de
bassins ruraux
Finalement, les écarts de revenus réels paraissent très faibles d’un type de
bassin rural à l’autre (tableau 12). On peut voir dans ce résultat l’impact du système
de redistribution publique et du rééquilibrage par le marché sur les disparités
territoriales.
La supériorité des revenus par habitant dans les bassins quasi exclusivement
touristiques, qui ne provient pas d’une meilleure rémunération du facteur travail, est
en partie absorbée par l’effet prix. L’indicateur de prix choisi introduit des biais et, là
encore, c’est plus le raisonnement qui est important que le chiffre en soi. La
distorsion entre le niveau très élevé des bases par habitant de ces espaces très
touristiques et, au final un revenu réel quasi équivalent à la moyenne rurale, renvoie
à l’hétérogénéité sociale de ces bassins où retraites élevés et salaires plutôt faibles se
côtoient dans une ambiance de pression foncière. « Déflatés » de l’indice des prix,
les revenus du travail déclarés sont plus faibles dans les bassins résidentiels que dans
les bassins les plus productifs. On touche là, probablement, à une des limites du
développement résidentiel.
Ces situations ont-elles tendance à se confirmer ? Les bassins les plus pauvres
voient-ils leur revenu progresser ?
290
Par ailleurs, raisonner sur le revenu par habitant en 2004 avec une population
2004 estimée pour les communes non enquêtées est certes moins convenable que de
raisonner sur le revenu par habitant en 1999, par exemple. Cependant, le biais
qu’introduit éventuellement ces estimations est le même pour tous les bassins. La
comparaison entre bassins à une date donnée reste possible. En revanche, comparer
de façon fine le revenu par habitant en 1999 à celui de 2004 est plus aléatoire. On
privilégiera l’évolution 1990/1999 et on introduira, avec plus de réserve, les
évolutions 1999/2004.
Sur la période 1999/2004, avec toute la prudence qui s’impose, les résultats
sont sensiblement différents. Ce serait, à présent, les bassins les plus résidentiels et
non les plus pauvres qui enregistreraient les plus fortes progressions du revenu par
habitant. L’attrait de ces bassins auprès de retraités plus aisés pourrait expliquer ce
résultat.
Le tableau 13 détaille les évolutions des retraites et des traitements et salaires
en volume (montant global), en nombre de foyers fiscaux concernés et en volume
rapporté au nombre de foyers fiscaux déclarant ces revenus1. Les comparaisons
1999/2004 portent cette fois uniquement sur des données DGI et n’introduisent
aucun biais qui proviendrait des recensements.
1
A noter : pour les analyses précédentes, réalisées sur 2004, on considérait le nombre exact de
personnes déclarant les différents revenus. Ici, sur l’ensemble de la période 1999/2004, on n’a plus ce
détail d’analyse mais uniquement le nombre de foyers fiscaux déclarant des retraites et des salaires.
Raisonner en revenu par foyers fiscaux est moins satisfaisant, dans la mesure où l’on ne connaît pas le
nombre de personnes dans le foyer.
291
Tableau 13 - Évolution des retraites et des traitements et salaires sur la période 1999/2004
Evol. Evol.
Evol. nombre Evol. Evol. nombre
Evol. montant montant trait.
de foyers montant total de foyers
montant total retraites/ et salaires/
fiscaux de des trait. et fiscaux de
des retraites foyer fiscal foyer fiscal
retraités salaires salariés
retraité salarié
Productif - migrants alternants - Assedic 13,9 4,8 8,7 15,5 10,9 4,2
Productif et agricole 13,6 2,5 10,9 14,8 9,5 4,9
Retraites et agriculture 12,7 1,2 11,3 11,4 7,2 4,0
Retraites et tourisme 12,6 3,5 8,8 14,6 10,0 4,1
Tourisme 21,5 11,2 9,2 21,1 14,2 6,1
Retraites, tourisme et revenus sociaux 17,4 8,9 7,8 23,2 17,7 4,7
Moyenne bassins ruraux 14,1 4,2 9,6 15,6 10,7 4,4
Source : calculs de l’auteur d’après DGI.
En bleu : supérieur à la moyenne des bassins ruraux.
Ces chiffres semblent confirmer les estimations des évolutions du revenu par
habitant entre 1999 et 2004. Il semblerait que le revenu imposable par habitant ait
progressé plus rapidement dans les bassins ruraux résidentiels et touristiques que
dans les bassins ruraux productifs.
Finalement, les revenus par habitant paraissent plutôt plus élevés dans les
bassins très touristiques. Néanmoins, ce niveau élevé du revenu est principalement
lié à la présence de retraités plus aisés dans ces bassins. En effet, les revenus du
travail y sont quasi équivalents à la moyenne rurale, c’est-à-dire inférieurs à la
292
moyenne française. Par ailleurs, les prix immobiliers de ces bassins touristiques
semblent plus élevés que les prix moyens des autres espaces ruraux. Une fois cet
« effet prix » pris en compte, les habitants des bassins très touristiques ne semblent
plus si « riches » que cela. Le revenu réel du travail y serait même inférieur à celui
des bassins productifs. Des résultats semblables sont également repérés dans les
bassins de « retraites, tourisme et minima sociaux » présents sur le pourtour
méditerranéen et sur la façade Atlantique. Ces bassins relativement touristiques
subissent également des pressions foncières qui se répercutent sur les salaires et les
revenus réels d’activité. Globalement, les actifs occupés des bassins plus productifs,
qui pouvaient paraître pénalisés, semblent finalement « plus riches » que les actifs
occupés des bassins résidentiels. Il serait intéressant de savoir si ces écarts constatés
sur les revenus du travail s’accentuent ou au contraire diminuent. Les premières
estimations sur les évolutions récentes des salaires semblent profiter aux bassins les
plus résidentiels. Si tel était le cas, il se pourrait que l’avantage que semblent avoir
les bassins productifs en termes de revenus réels s’amenuise. Ces différences, enfin,
peuvent cacher des effets de structure et il conviendrait d’approfondir ces résultats en
tenant compte des profils des actifs (niveau de qualification1, temps complet ou
temps partiel…). Les données de la DGI ne permettent pas d’apporter de réponses
précises sur ce point. L’analyse du marché de l’emploi peut, peut-être, nous éclairer.
1
Le détail des catégories socioprofessionnelles indiqué en annexe 6 n’est pas assez explicite.
2
Les résultats obtenus en termes d’évolution sur les différents bassins ruraux paraissent peu fiables.
293
distinction entre emplois basiques purs, emplois domestiques purs et emplois mixtes
proposée par Davezies (2003a, 2003b)1.
Tableau 14 - Évolution et structure des emplois UNEDIC par type de bassins ruraux
1
Pour rappel, les emplois basiques purs se localisent pour produire et exporter (secteurs plutôt
industriels), les emplois domestiques purs se localisent pour répondre à la demande locale de biens et
services (commerces de détail, services à la personne, médecins etc.), les secteurs mixtes peuvent
répondre à une demande locale et extérieure (secteur de la construction, commerce de gros, services
aux entreprises…). Voir aussi l’annexe 2 de cette partie.
294
de montagne). La non significativité des écarts peut provenir de l’hétérogénéité des
situations au sein même de ces bassins. Une analyse plus détaillée s’impose.
Les bassins ruraux où l’emploi basique progresse, alors qu’il est globalement
en diminution, sont plutôt situés en dehors des zones traditionnellement industrielles
du Nord-Est. Ils se concentrent dans les espaces encore fortement agricoles de
l’Ouest, dans des départements très ruraux et plutôt touristiques tels que le Cantal, la
Lozère, la Drôme, les Alpes-de-Haute-Provence, la Corse. Ils apparaissent de façon
dispersée mais globalement dans une dynamique plus favorable au sud de la Loire
que dans le Nord-Est (hors Doubs et Haute-Marne).
La carte 22 apporte une précision sur les départements industriels du Nord-
Est. Si l’industrie rurale y est en déclin, elle semble néanmoins mieux s’y maintenir
que dans les espaces urbains.
295
Carte 20, 21 et 22 : Évolution de l’emploi UNEDIC basique pur entre 1993 et 2005 dans les
bassins de vie ruraux et dans les départements métropolitains
296
L’analyse détaillée par secteur peut apporter quelques précisions. Elle portera
sur l’évolution des emplois basiques entre 1993 et 2005 dans les bassins ruraux des
quelques départements où ce type d’emplois a été le plus dynamique.
Les emplois basiques des bassins ruraux dans les départements de l’Ouest
progressent dans l’industrie agroalimentaire (entre 40% et 55% des progressions de
l’emploi basique sont le fait de ces industries dans le Morbihan, l’Ille-et-Vilaine, la
Loire-Atlantique, la Vendée, les Deux-Sèvres, la Mayenne et l’Orne). Toujours à
l’Ouest, dans la Manche, le Maine-et-Loire et la Vienne, l’industrie agroalimentaire,
tout comme celle du textile déclinent au profit d’une industrie peut-être plus
générique telle que le travail du métal, du plastique, la mécanique, l’industrie
pharmaceutique. C’est aussi le cas, plus au Sud, de la Gironde.
Les cas de la Charente-Maritime et des Pyrénées-Atlantiques sont
intéressants. Leur industrie semble assise sur des ressources spécifiques, la mer et le
bois pour le premier, la gastronomie pour le second (charcuterie, fromages, viandes,
spiritueux). On retrouve le même type d’observation pour les bassins ruraux de
l’Aveyron (viandes, fromages, coutellerie), du Cantal (viandes, fromages, cuir), de la
Drôme (huiles essentielles, parfums et savons, biscuiterie, céramique), des Hautes-
Alpes (savons et parfums, conserves de fruits, charcuterie) ou encore de la Corse-du-
Sud (fromages, charcuterie, biscuiterie). Dans ces départements ruraux et
touristiques, l’économie résidentielle et l’économie productive entretiennent des liens
étroits. Les produits du terroir, gastronomiques ou non, participent à l’attractivité de
ces espaces. Les images positives associées à ces produits peuvent participer à
l’attrait touristique, entretenir la venue de résidents secondaires ou de retraités qui
pourront être, à leur tour, catalyseurs de la production locale.
Enfin, deux départements de l’Est se détachent du contexte plutôt morose de
la région : le Doubs et la Haute-Marne. Les emplois progressent dans l’industrie
agroalimentaire puis essentiellement dans la métallurgie, la fabrication de machines
et d’équipements, le travail des métaux, du plastique et du caoutchouc.
Ces analyses partielles semblent valider la coexistence de plusieurs types de
bassins ruraux industriels et d’avantages comparatifs en la matière. On peut retenir
les associations entre tradition agricole et industrie agroalimentaire dans l’Ouest,
ressources spécifiques et aménités touristiques dans des départements très ruraux et
attractifs, ressources génériques et probablement coût de la main-d’œuvre, stabilité
de l’emploi et disponibilité foncière dans le Nord-Est.
297
L’analyse détaillée des autres secteurs d’activités (en NAF220, complétée par
la NAF700 au besoin) apporte quelques précisions sur les emplois mixtes et
domestiques purs.
Les secteurs mixtes les plus en expansion dans ces bassins ruraux sont
globalement les mêmes : fourniture de personnel (intérim), transports urbains et
routiers, bâtiment et travaux publics, activités juridiques et comptables.
L’essor d’un commerce de proximité dans ces bassins ruraux renverse les
tendances de la distribution des dernières décennies. Alors que la mort du petit
commerce était devenu quasi inéluctable, ce développement encore faible et plus
concentré dans des espaces résidentiels et récréatifs tend à prouver le contraire. La
proximité, ou la commodité d’avoir « tout sous la main » pour les achats quotidiens
peut constituer un atout pour les bassins ruraux déjà attractifs auprès des retraités et
des touristes, notamment.
298
rapidement dans les bassins ruraux que dans le périurbain, ainsi que dans les pôles
urbains (respectivement +33%, +30% et +19% entre 1993 et 2005).
Tableau 15 - Emplois salariés privés dans les commerces et services de proximité des
bassins ruraux : emplois pour 1 000 habitants en 2005 et évolution 1993/2005
Emplois salariés privés dans Evolution des emplois salariés
les commerces et services de privés dans les commerces et
proximité pour 1 000 hab. en services de proximité
2005 1993/2005, en %
Productif - migrants alternants - Assedic 16,2 31,6
Productif et agricole 17,2 30,8
Retraites et agriculture 17,3 28,7
Retraites et tourisme 18,4 35,2
Tourisme 27,1 43,5
Retraites, tourisme et revenus sociaux 18,8 43,4
Moyenne bassins ruraux 17,7 33,4
Source : UNEDIC, calculs de l’auteur.
Cf. annexe 15 pour la liste des commerces et services de proximité en NAF700.
Au sein des bassins ruraux, l’impact des forts taux de dépenses touristiques
mais aussi certainement des niveaux de retraites plus élevés favorisent certainement
ce type d’activité. Les bassins ruraux résidentiels et touristiques bénéficient d’un plus
grand nombre d’emplois salariés dans les commerces et services de proximité que les
bassins plus productifs. La progression de ce type d’emplois est également plus
soutenue dans les espaces résidentiels et touristiques que dans les territoires
productifs. Le taux de présence suffirait-il à expliquer cette offre d’emplois de
proximité ?
La régression réalisée entre les emplois salariés en commerces et services de
proximité et les taux de présence montrent qu’il y a, en effet, corrélation (annexe 16).
La présence n’explique pas entièrement la répartition de ces emplois (R² = 0.28),
mais elle a un impact plus grand, par exemple, que la nature du pôle d’un bassin qui
est également significative1.
1
La population des bassins polarisés par un pôle rural profite d’une meilleure offre de commerces et
services de proximité que les autres.
299
domestiques de proximité. Ces résultats sont-ils confirmés par l’analyse des emplois
des travailleurs indépendants ?
Carte 23 - Nombre de travailleurs indépendants hors agriculteurs pour 100 000 habitants
dans les bassins de vie en 2005
1
Rappel : les bassins urbains désignent les bassins qui sont polarisés par un pôle urbain ; les bassins
périurbains, par une commune périurbaine ou multi-polarisée.
300
Carte 24 - Nombre de travailleurs indépendants hors agriculteurs pour 100 000 habitants
dans les bassins ruraux en 2005
301
positive et significative. Le seul taux de présence explique ainsi 56% des variations
de ce type d’emploi dans la population des bassins ruraux1 (cf. résultats de la
régression en annexe 17). Par ailleurs, la cartographie des résidus de la régression
montre que le nombre d’indépendants est encore plus important que le suggèrent les
taux de présence dans les bassins de la moitié Sud de la France, notamment dans les
bassins alpins2. Ce biais, appelé hétéroscédasticité, rend compte d’un double résultat
concernant les bassins les plus touristiques (cf. annexe 18). On constate que dans les
bassins touristiques des Alpes, le nombre d’indépendants dépasse largement celui
que l’on aurait pu attendre au vu de leur taux de présence. Inversement, dans les
bassins côtiers, se concentrent moins d’indépendants que leur seul taux de présence
pourrait le suggérer. Les hypothèses pour tenter d’expliquer ces écarts sont
nombreuses : le tourisme de montagne serait plus propice aux petites structures que
le tourisme balnéaire ; les stations de montagne seraient plus attractives auprès de
cette population de chefs d’entreprises ; le taux de présence pourrait être surestimé
sur les côtes ; le taux de présence pourrait être sous-estimé dans les Alpes où la
population résidente y serait surestimée pour des raisons fiscales3.
1
Résultats similaires pour l’ensemble des bassins de vie.
2
Il y a un biais qualifié d’hétéroscédasticité. La relation entre les deux variables est réelle mais
supérieure à ce que mesure une simple régression linéaire.
3
Certains territoires sont en effet propices à ces fausses déclarations. Les propriétaires déclarent leur
résidence secondaire en résidence principale afin de ne pas payer d’impôts sur les plus-values
réalisées lors de la vente. La résidence principale est alors déclarée en résidence secondaire, signifiant
également que c’est plutôt le premier bien dont on se défera en premier lieu. Les stations de montagne
pourraient bien bénéficier de cet artefact « fiscalo-statistique ».
302
L’impact positif des revenus résidentiels basiques sur l’installation d’entrepreneurs
indépendants (artisans, commerçants, petits chefs d’entreprise, professions libérales)
est une hypothèse tangible. Le cumul des aménités naturelles des bassins ruraux
résidentiels et récréatifs et l’importance d’une population à fort pouvoir d’achat
(touristes dont résidents secondaires, retraités) favoriseraient l’emploi privé local des
salariés et des indépendants. Les emplois basiques purs ou industriels ne sont pas non
plus en reste de ces dynamiques. Plus précisément, il semble que certaines zones
touristiques de montagne (Pyrénées, Massif Central, Alpes du Sud) ou encore la
Drôme associent une ressource territoriale, un savoir-faire industriels spécifiques et
une valorisation par le tourisme. Les bassins plus typiquement productifs de la moitié
Nord de la France parviennent à conserver un certain dynamisme industriel. Mais,
l’impact global des revenus basiques issus de la production paraît inférieur à celui
que semblent créer les retraites et les dépenses des touristes. L’étude des propensions
locales à consommer apporterait des éléments de réponses plus précis.
1
Trois catégories sont prises en compte dans ce que Davezies appelle les titulaires de revenu : les
actifs occupés, les retraités et les chômeurs indemnisés. A défaut de connaître le statut précis des
chômeurs, selon qu’ils sont indemnisés ou non, dans les recensements on ne retient que les actifs
occupés et les retraités.
303
Cartes 25, 26 et 27 - Évolution de la population, du nombre de ménages et des titulaires de
revenus dans les bassins ruraux entre 1990 et 1999
304
Tableau 17 - Évolution de la population, solde naturel et solde migratoire par type de bassins
ruraux, entre 1990 et 1999
Evolution de la Solde naturel Solde migratoire
population 1990/99 sur pop. 1990/99 sur pop.
1990/99, en % 1999, en % 1999, en %
Productif - migrants alternants - Assedic 2,7 0,6 2,0
Productif et agricole -0,5 -0,7 0,2
Retraites et agriculture -4,1 -5,2 0,9
Retraites et tourisme 0,0 -4,1 4,0
Tourisme 9,9 -0,1 9,1
Retraites, tourisme et revenus sociaux 5,1 -2,0 6,8
Moyenne bassins ruraux 1,1 -1,4 2,5
Source : INSEE, recensements de 1990 et 1999, calculs de l’auteur.
En bleu : supérieur à la moyenne des bassins ruraux.
305
L’attractivité résidentielle semble être au cœur du processus de revitalisation
rurale. Il convient de préciser le profil des migrants, leur provenance, leur poids dans
la population.
1
Selon l’Organisation mondiale du Tourisme (OMT), le secteur touristique est devenu la première
industrie mondiale, représentant 12 % du produit intérieur brut (PIB) mondial et 200 millions
d’emplois en 2005.
306
Carte 28 - Part des immigrants 1990/99 dans la population des bassins ruraux de 1999
Carte 29 - Part des émigrants 1990/99 dans la population des bassins ruraux de 1990
307
Carte 30 - Profil des bassins ruraux en termes d’attractivité (% d’immigrants dans la pop.
1999) et de « répulsivité » (% d’émigrants dans la pop. 1990) (migration 1990/1999)
Carte 31 - Profil des bassins ruraux selon la part d’émigrants dans la population 1990
et les prix fonciers
308
Flux intra-nationaux
En moyenne, les migrants venus s’installer entre 1990 et 1999 dans un bassin
de vie métropolitain représentent 19,6% de la population de ce bassin en 1999. Ce
taux est moindre dans les bassins polarisés par un pôle urbain (17.2%), supérieur
pour les bassins périurbains (31,3%), puis ruraux (24.0%).
Au sein des bassins ruraux, on trouve en tête des territoires attractifs les trois
bassins résidentiels et touristiques ainsi que les bassins « productifs migrants
alternants » (cf. tableau 18). Il peut être intéressant de décomposer ces soldes en
entrées et sorties. L’attractivité résidentielle dépend à la fois de la capacité à attirer
mais aussi à retenir la population. On peut remarquer que les bassins « productifs,
migrants alternants et ASSEDIC », tout comme les bassins ultra-touristiques sont
également en tête du classement des territoires « répulsifs ». La part des émigrants
dans la population est plus importante dans ces bassins qu’en moyenne dans les
bassins ruraux.
Les cartes 28 et 29 précisent ces chiffres. Les bassins ruraux les plus attractifs
se situent sur le pourtour du bassin francilien étendu vers l’Ouest et vers le Sud, le
long du littoral Atlantique ou encore sur le pourtour méditerranéen ainsi que dans le
Sud-Est. Les bassins qui sont fortement pourvoyeurs d’émigrants sont situés dans le
Nord-Est, la Bourgogne, mais également dans le Nord-Ouest, dans les Pyrénées-
Orientales ou bien encore dans les départements de l’extrême Sud-Est.
Ces données sont « croisées » pour obtenir la carte 30. Cette carte repère les
différents bassins ruraux selon leur part d’immigrants et d’émigrants dans la
population. Les territoires ruraux du Nord, de l’intérieur de la pointe bretonne et ceux
de la diagonale aride sont à la fois moins récepteurs et moins émetteurs de migrants
309
que la moyenne rurale. Quelques bassins éparpillés dans le Nord-Est et en retrait du
littoral pour l’Ouest apparaissent à la fois moins attractifs mais aussi plus
« répulsifs » que la moyenne des autres bassins. On retrouve là les bassins ruraux aux
soldes migratoires négatifs. Les bassins qui parviennent à attirer et retenir le plus
d’individus sont repérables à différents endroits du territoire français, à l’exception
notable de tout le Nord-Est. Ils sont plutôt concentrés dans les bassins de l’arrière-
pays méditerranéen, dans la Drôme ou les Hautes-Alpes, puis au sein de
départements ruraux et touristiques (Dordogne, Lot, Tarn). Enfin, certains bassins
attirent mais retiennent peu. On retrouve les bassins plutôt productifs et migrants
alternants situés dans un large périmètre de la région Île-de-France, ainsi que les
bassins les plus touristiques des côtes Atlantiques et du Sud-Est. On ne peut
s’empêcher de penser aux écarts des prix fonciers estimés précédemment.
310
Tableau 19 - Répartition des bassins ruraux selon le taux d’émigration
et le niveau des prix fonciers
Taux Taux Taux Taux
d'émigration d'émigration et d'émigration et d'émigration
Total
élevé et prix prix fonciers prix fonciers faible et prix
fonciers faibles élevés faibles fonciers élevés
Productif - migrants alternants - Assedic 37,4 28,4 21,6 12,6 100,0
Productif et agricole 47,4 9,1 35,7 7,8 100,0
Retraites et agriculture 18,7 6,5 58,5 16,3 100,0
Retraites et tourisme 22,6 17,9 34,4 25,0 100,0
Tourisme 0,0 65,7 3,0 31,3 100,0
Retraites, tourisme et revenus sociaux 9,7 43,5 11,3 35,5 100,0
Moyenne bassins ruraux 30,4 22,8 29,8 17,0 100,0
Source : calculs de l’auteur d’après INSEE et DGI.
En bleu : supérieur à la moyenne des bassins ruraux.
311
A ces nouveaux arrivants s’ajoute annuellement une population non
recensée : les touristes.
Source : Calculs de l’auteur d’après les chiffres du Ministère du tourisme, INSEE et DGI.
Taux de présence = population présente / population estimée en 2005 * 100 (annexe 4, partie I).
Discrétisation centrée sur la moyenne.
312
Très logiquement, les bassins quasi exclusivement touristiques se détachent
avec une population présente égale à plus du double de la population résidente. Les
bassins « retraites, tourisme et revenus sociaux » affichent un taux de plus de 135
(35% de population présente en plus que de population recensée). Les bassins un peu
moins touristiques mais non productifs (« retraites et tourisme » et « retraites et
agriculture ») présentent un taux de présence autour de 115. Enfin, les bassins
productifs confirment leur moindre attractivité auprès des touristes.
Ces données pondèrent les analyses en termes d’équipements en commerces
et services de proximité. Les bassins résidentiels et touristiques étaient
particulièrement bien dotés en termes de commerces et services de proximité (ratio
nombre d’emplois pour 1 000 habitants supérieur à celui des autres bassins). Le
même travail effectué sur la population présente et non résidente inverse les
conclusions. Ce sont à présent les bassins les plus productifs qui paraissent les mieux
équipés.
Si les nouveaux arrivants et les touristes ne sont pas toujours les bienvenus
dans les espaces ruraux, la question de l’installation des étrangers préoccupe encore
plus les acteurs locaux des communes rurales. Parmi ces nouveaux arrivants, une
nationalité cristallise particulièrement le débat : les Britanniques. Espoir, ouverture,
régénération démographique, entretient du patrimoine font le pendant aux craintes
sur les coûts du foncier, sur l’expropriation des locaux, sur la perte d’identité
culturelle… Ces arrivées, à la fois, flattent et titillent l’ego national. Derrière ces
sentiments, quels sont les chiffres et l’impact de ces migrations ? À titre comparatif,
on présentera, également, les chiffres de présence des touristes étrangers dans les
bassins ruraux. En effet, le déséquilibre entre les discours « braqués » sur les
migrations permanentes et l’impact pour les territoires des migrations récréatives
paraît intéressant à souligner.
Flux internationaux
1
Il s’agit de la variable : nombre d’étrangers résidant en France en 1999 et qui résidaient à l’étranger
en 1990.
313
La première remarque porte sur les lieux d’installation de ces migrants : 85%
de ces nouveaux arrivants vivent en 1999 dans un bassin de vie polarisé par un pôle
urbain, 5% dans un bassin de vie périurbain et 10% dans un bassin rural. Pour rappel,
74% de la population française vit dans un « bassin pôle urbain », 9% dans un bassin
périurbain et 17% dans un bassin rural. L’immigration des étrangers est donc, avant
tout, un phénomène urbain, voire francilien. Le seul bassin de vie de Paris accueille
38% de ces migrants, suivent les grandes villes : Lyon, Marseille, Nice, Strasbourg,
Toulouse, Lille. Cette réalité migratoire n’est évidemment pas celle qui préoccupe les
acteurs ruraux mais elle relativise le phénomène pour le rural.
La deuxième remarque s’attache au faible poids de ces migrants dans la
population locale. Là, le rural, moins peuplé, fait jeu égal avec les pôles urbains
puisque ces nouveaux arrivants représentent 2% de la population dans les bassins
ruraux comme dans les bassins urbains et 1% pour les bassins périurbains. Ces
faibles différences entre catégories de bassins masquent les disparités régionales.
314
Les cartes 33 et 34 repèrent les territoires d’installation des nouveaux
arrivants étrangers en proportion de la population résidente. Au-delà du fait urbain
déjà évoqué et de l’effet frontalier dans le Nord-Est, se détachent certains espaces
ruraux, reconnus et appréciés pour leurs aménités naturelles. N’ayant pas
d’informations sur les nationalités à l’échelle communale, il est difficile d’estimer la
part des immigrants motivés par le cadre de vie rural français de ceux qui immigrent
dans des conditions économiques en tout point différentes. Mais, même dans les
bassins les plus attractifs, le poids de ces immigrants dans la population demeure
relativement faible (5% des bassins ruraux présente une proportion d’immigrants
étrangers dans la population supérieure à la moyenne rurale qui est de 2%).
Parmi les bassins ruraux, les espaces productifs (agricoles ou non) sont deux
fois moins concernés par ces flux de population que les campagnes méditerranéennes
et du Sud-Ouest (0,5% de la population pour les premières, 1% en moyenne pour les
secondes).
Qu’en est-il à présent des touristes ? Les données mobilisées ici sont celles du
ministère du Tourisme portant sur la présence des touristes étrangers dans les
départements français, toujours en équivalent homme/année,. En 2005, les touristes
étrangers représentent l’équivalent d’une population de 1,5 million de personnes
présentes à l’année, soit deux communes comme Marseille. Ce 2,6% de population
supplémentaire lissé sur l’année varie de moins de 1% à plus de 7% selon le
calendrier. Les écarts géographiques sont encore plus frappants que les écarts
temporels.
Les touristes représentent moins de 2% de la population des bassins centrés
sur un pôle urbain, un peu moins de 4% pour le périurbain et 5,5% pour les bassins
ruraux. Ces touristes représentent un accroissement de population de 518 000
personnes sur l’année pour les bassins ruraux. Un tiers de la population annuelle des
touristes étrangers en France (1,5 million) « réside » temporairement dans les bassins
ruraux. Les écarts sont également très marqués d’un type de bassin rural à un autre.
315
Tableau 21 - Nombre de touristes étrangers dans les bassins ruraux en 2005
% touristes
Touristes étrangers
Population 2005 étrangers par
en équivalent
estimée rapport à la
homme/année
pop. 2005
Productif - migrants alternants - Assedic 97 580 3 623 424 2,7
Productif et agricole 43 999 2 272 131 1,9
Retraites et agriculture 35 978 1 007 878 3,6
Retraites et tourisme 111 375 1 929 451 5,8
Tourisme 169 821 484 078 35,1
Retraites, tourisme et revenus sociaux 58 968 645 284 9,1
Moyenne bassins ruraux 517 720 9 962 244 5,2
Source : Calculs de l’auteur à partir des données du ministère du Tourisme et de l’INSEE.
Dans les bassins ruraux les plus touristiques qui englobent les stations de ski
des Alpes, le nombre de touristes étrangers en équivalent homme/année représente
l’équivalent de 35% de la population locale ! Ce chiffre élevé, typique des zones
ultra-touristiques, ne doit pas masquer la réalité des autres bassins. Ainsi, dans les
bassins de retraités, de tourisme et bénéficiant de forts minima sociaux, ces touristes
étrangers représentent 9% de la population locale, près de 6% dans les bassins plus
reculés mais également touristiques, ou encore 3,6% dans les bassins de « retraites et
d’agriculture ». Les bassins les plus productifs bénéficient moins de cette présence et
donc de ces revenus.
316
Carte 35 - Part des touristes étrangers en équivalent homme/année dans la population
estimée de 2005.
Le poids des dépenses de ces touristes étrangers dans les économies locales
est colossal. Les 34 milliards d’euros dépensés en France par les touristes étrangers
en 2005 sont répartis entre les bassins de vie, au prorata de leur présence annuelle
estimée dans chacun des bassins. Ces premières estimations ne prennent pas en
compte les différences éventuelles de comportement de consommation selon les
territoires et les différences de prix. Malgré ces limites, on peut estimer que les
dépenses des touristes étrangers représentent un potentiel de consommation pour les
317
économies locales équivalent à 4% des revenus déclarés des ménages. Dans les
bassins ruraux, cette part passe à 10%.
Au sein des bassins, les écarts se creusent avec des proportions dépassant les
50% dans les bassins quasi exclusivement touristiques, 12% et plus dans les bassins
ruraux de retraités et touristiques, près de 8% dans les bassins de retraités et
agricoles, autour de 5% et moins dans les bassins productifs.
Tableau 22 - Rapport entre les dépenses des touristes étrangers et les revenus déclarés des
ménages dans les bassins ruraux, en 2004/2005.
Poids des dépenses des touristes
étrangers par rapport aux
revenus déclarés de la
population, en %
Productif - migrants alternants - Assedic 5,2
Productif et agricole 3,9
Retraites et agriculture 7,6
Retraites et tourisme 11,8
Tourisme 56,0
Retraites, tourisme et revenus sociaux 17,5
Moyenne bassins ruraux 10,2
Source : calculs de l’auteur d’après ministère du Tourisme et DGI.
Rappel : revenus déclarés = somme des revenus déclarés aux impôts par les individus avant
abattements en 2004.
Note de lecture : en moyenne dans les bassins ruraux, les dépenses des touristes étrangers représentent
l’équivalent de 10,2% des revenus déclarés.
318
par la présence de retraités semblent pouvoir concilier une activité touristique
modérée avec des activités de production qui mobilise une ressource territorialement
ancrée. Les situations sont diverses et il convient de ne pas faire de synthèse trop
hâtive qui risquerait de montrer, à tort, qu’une seule solution est possible pour
assurer le développement des espaces ruraux.
319
Productifs Migrants- Productifs et Retraites et Retraites et Tourisme, retraites
Source : calculs de l’auteur d’après INSEE, DGI, UNEDIC, SIRENE, ministère du Tourisme
Tableau 23 - Tableau synoptique ; synthèse des résultats par type de bassins ruraux
Population en 1999 3 498 584 2 228 304 1 006 585 1 881 363 450 744 605 967 9 671 547
% 36,2 23,0 10,4 19,5 4,7 6,3 100,0
Localisation
Evol. Population 1990/1999, en % 2,7 -0,5 -4,1 0,0 9,9 5,1 1,1
Solde naturel 1990/99 sur pop. 1999, en % 0,6 -0,7 -5,2 -4,1 -0,1 -2,0 -1,4
Solde migratoire 1990/99 sur pop. 1999, en % 2,0 0,2 0,9 4,0 9,1 6,8 2,5
% d'immigrants 1990-99 dans la population 1999 24,7 22,3 20,3 24,1 30,0 27,3 24,0
% d'émigrants 1990-99 dans la population 1990 22,5 21,7 19,4 20,6 23,2 21,5 21,6
Evol. revenu imposable/ hab. 1990/99, en % 13,6 13,9 17,6 15,5 15,8 14,7 14,8
Evol. volume revenu imposable 1984/2004, en % 52,5 48,1 42,8 51,1 96,8 72,9 53,6
Evol. des montants de salaires par foyer déclarant
des salaires, 1999/2004 en % 4,2 4,9 4,0 4,1 6,1 4,7 4,4
Evol. des montants de retraites par foyer déclarant
des retraites, 1999/2004 en % 8,7 10,9 11,3 8,8 9,2 7,8 9,6
Revenu basique / hab., en € 13 315 12 611 13 471 14 786 30 285 16 859 14 509
Revenu imposable / hab., ind 100 moy. 101 98 93 96 129 101 100
Revenu déclaré / hab., ind 100 moy. 102 98 92 96 123 103 100
RDB / hab., ind 100 moy. 100 97 95 99 120 105 100
RDB pondéré par les prix / hab., ind 100 moy. 101 100 97 99 104 99 100
Revenu du travail / travailleur, ind 100 moy. 105 101 92 94 101 96 100
Montant retraite / retraité, in 100 moy. 101 93 92 101 121 109 100
Evol. emploi salarié privé 1993/2005, en % 12,7 19,1 22,6 21,2 40,0 24,6 18,6
Evol. emploi salarié privé BASIQUES 1993/2005, en
% -8,5 -1,1 -2,6 -12,0 19,7 -19,9 -6,7
Evol. emploi salarié privé DOMESTIQUES
1993/2005, en % 31,3 26,9 32,9 37,3 45,1 48,8 34,6
Evol. emploi salarié privé MIXTES 1993/2005, en % 40,1 41,7 34,3 35,9 37,5 42,6 39,2
Salariés dans commerces et serv. de proximité pour
1000 hab. 16,2 17,2 17,3 18,4 27,1 18,8 17,7
Evol. salariés dans commerces et services de
proximité 1993/2005, en % 31,6 30,8 28,7 35,2 43,5 43,4 33,4
Nb de travailleurs indépendants hors agriculteurs
pour 1000 hab. 19,8 20,0 26,1 27,3 53,4 27,9 24,1
320
321
Tableau 24 - Résultats des régressions linéaires
322
Les régressions1 entre ces variables indiquent que la population augmente
plus rapidement dans les bassins résidentiels, notamment dans ceux où se
concentrent les salaires des migrants alternants (tableau 24) . La population diminue
dans les bassins polarisés par une commune du rural isolé. Plus précisément, sur les
évolutions démographiques, on note l’attractivité des bassins résidentiels où
dominent les salaires des migrants alternants, les retraites et les dépenses
touristiques. On peut noter l’impact négatif des bases productives sur les soldes
migratoires. En termes de solde naturel, les bases productives et les salaires de
migrants alternants sont corrélés positivement au variation du solde naturel. Les
soldes naturels sont au contraire négatifs dans les bassins de retraités et dans ceux qui
sont polarisés par une commune rurale isolée. On voit également apparaître une
corrélation significative entre la présence d’enfants en bas âge et les revenus sociaux
perçus.
L’emploi UNEDIC est finalement assez difficile à expliquer avec les
variables sélectionnées. En effet, le R² est faible, même si les variables sont
significatives dans leur ensemble (test de Fisher) et individuellement (test de
Student). Ainsi, ressort le faible dynamisme des bassins productifs. En revanche, le
tourisme semble favoriser la croissance des emplois salariés du secteur privé.
Globalement, les migrants alternants n’influent pas significativement sur les
évolutions de l’emploi local, exception faite des bassins de migrants alternants mieux
équipés en commerces et services de proximité que la moyenne. Cette variable
qualitative a été introduite pour souligner l’importance de la dépense locale sur le
développement. En effet, ces bassins « équipés » semblent maximiser la propension à
dépenser localement et parviendraient à freiner les évasions de consommation qui
pénalisent, en général, ces bassins de navetteurs. L’analyse portant uniquement sur
les emplois domestiques confirme la remarque précédente. De façon plus générale,
l’emploi domestique progresse d’autant plus que le bassin paraît déjà bien équipé en
la matière.
Enfin, le revenu imposable par habitant a évolué entre 1990 et 1999
indépendamment des critères sélectionnés ici. En revanche, on retrouve le résultat
mis en évidence par Davezies (1993) et signalé à plusieurs reprise ; à savoir la
1
Les biais de colinéarité entre variables étaient importants, on a eu recours à la sélection d’un modèle
selon la méthode « stepwise », sous critère du meilleur coefficient de détermination (R²). Enfin, ces
résultats seraient très certainement améliorés en considérant les biais d’autocorrélation spatiale et en
calculant d’autres coefficients que ceux des moindres carrés ordinaires. Ces résultats sont uniquement
introduits pour confirmer ou non et éventuellement compléter les analyses et conclusions précédentes.
Ils restent très perfectibles.
323
convergence territoriale des niveaux de revenu et ce même lorsque l’on raisonne sur
les bassins ruraux. En effet, plus les niveaux de revenu étaient faibles en 1990 et plus
la variation 1990/99 a été importante.
324
supérieurs, mais les retraites restent faibles. La plus faible augmentation du revenu
imposable par habitant entre 1990 et 1999, semble se confirmer entre 1999 et 2004.
L’emploi salarié privé est nettement moins dynamique qu’ailleurs. Les
emplois basiques purs, cruciaux pour ces espaces, sont en forte diminution. Les
emplois salariés dans les commerces et services de proximité y sont à la fois moins
présents et en moindre progression que dans les autres bassins.
La population, en revanche, progresse rapidement, tirée notamment par des
soldes migratoires et naturels positifs. Ce sont d’ailleurs les seuls bassins ruraux où
les soldes naturels sont globalement positifs. Par ailleurs, l’attractivité migratoire de
ces bassins cache des taux élevés d’émigrants. Ces flux importants de sortants se
conjuguent avec des prix immobiliers et fonciers relativement élevés sur le pourtour
francilien. Dans le Nord-Est, en revanche, la concomitance de prix faibles et de taux
d’émigration importants souligne le manque d’attraits de ces bassins.
Ces bassins sont majoritairement polarisés par un pôle rural. Ils regroupent
23% de la population étudiée et se situent dans le Nord-Ouest ainsi qu’à l’Est entre
les Ardennes à la Haute-Loire.
Leur localisation n’est pas celle d’espaces périurbains, leurs bases issues des
migrations alternantes est d’ailleurs plus faible que dans les bassins précédents. Ce
sont les bassins les plus productifs de la zone d’étude. Mais, même dans ces bassins
très productifs, la base reste dominée par les retraites et par les revenus résidentiels
en général (55% de la base, 18,4% pour les revenus basiques productifs). On note
également une plus forte base publique.
Les revenus des habitants sont inférieurs à la moyenne notamment en raison
de la faiblesse des niveaux des retraites. Les revenus du travail sont, eux, équivalents
à la moyenne rurale. Bénéficiant plutôt peu des revenus de transferts, l’écart à la
moyenne se creuse lorsque l’on raisonne en revenu disponible brut. Les prix fonciers
325
et immobiliers étant très faibles, le revenu réel converge finalement vers la moyenne
des bassins. Le revenu par habitant a progressé plus lentement, entre 1990 et 1999,
qu’en moyenne dans les bassins. On note cependant une amélioration, entre 1999 et
2004, pour les salaires et les retraites.
L’emploi y est plus dynamique que dans les espaces précédents, notamment
grâce à la moindre diminution de l’emploi basique et à l’essor des emplois mixtes.
L’analyse détaillée des secteurs basiques purs a montré le poids et l’impact positif
des industries agroalimentaires et de l’industrie mécanique, du métal ou de biens
intermédiaires dans certains départements. Le faible coût du foncier peut constituer
un avantage comparatif pour ces bassins, avantage qui s’est, peut-être, amenuisé dans
les bassins précédents, sous l’effet de la pression résidentielle des migrants
alternants. Par ailleurs, on note un meilleur taux d’équipements en commerces et
services de proximité que dans les bassins précédents. Le maintien de la main-
d’œuvre dans des activités locales semble limiter les évasions de consommation qui
accompagnent la présence de navetteurs. Les emplois salariés pour 1 000 habitants
dans les commerces et services de proximité ne sont pas, non plus, parmi les plus
élevés. Très peu touristiques, ces bassins ne bénéficient pas d’importants taux de
présence.
En revanche, la population diminue. Les soldes migratoires sont très faibles et
ne compensent pas les soldes naturels négatifs (faibles également). Cette situation est
assez récente. En effet, ces bassins bénéficiaient de soldes naturels jusqu’en 1990,
mais également de soldes migratoires négatifs. Le solde migratoire s’est donc
amélioré, pendant que le solde naturel devenait au contraire déficitaire. L’attractivité
auprès des retraités peut, en partie, expliquer ce double renversement.
326
Les bassins « retraites et agriculture »
Plus de la moitié de ces bassins sont polarisés par une commune du rural
isolé. Ils sont particulièrement représentatifs des bassins ruraux du Cantal, de
l’Aveyron, de la Lozère et du Gers. Ils apparaissent également dans les autres
départements d’Auvergne, dans les Pyrénées-Atlantiques, en Corse, au cœur de la
pointe bretonne ou encore en Côte-d’Or. Ces bassins regroupent 10% de la
population étudiée.
Les revenus basiques qui les caractérisent sont les retraites, puis les bénéfices
agricoles, relativement aux autres bassins. La base publique y est également plus
importante. L’importance de certains revenus sociaux sont clairement corrélés à l’âge
et à la précarité de certains habitants de ces bassins (minima vieillesse, aides des
départements aux personnes âgées, allocations pour les handicapés). Une personne
sur trois a plus de 60 ans. Globalement, les revenus basiques par habitant sont plus
faibles que la moyenne des bassins ruraux.
Ces bassins sont finalement caractérisés par leurs retraités, une agriculture
encore présente, la présence d’entrepreneurs indépendants (BIC), un maintien de la
base publique et un peu d’activité touristique.
Ce sont ces bassins qui présentent les niveaux de revenus les plus faibles.
Cependant, bénéficiant des revenus de transferts et bénéficiant de prix plus bas, selon
ces premières estimations, les écarts se réduiraient en termes de revenu réel. Par
ailleurs, ce sont ces bassins qui ont connu les plus fortes hausses du revenu
imposable par habitant sur la période 1990 et 1999. Sur une période récente, on note
la forte progression des niveaux de retraites.
L’emploi salarié privé y est dynamique (hausse supérieure à la moyenne entre
1993 et 2005). Cette évolution positive est notamment due à l’essor des emplois
domestiques purs et des emplois mixtes, ainsi qu’à un faible retrait des activités
basiques. L’analyse sectorielle des activités de production a souligné la présence
d’activités spécifiques basées sur une ressource territorialement ancrée. La
valorisation par le tourisme des produits tels que les fromages, la coutellerie, les
huiles essentielles… semble possible.
L’emploi progresse, le revenu progresse et pourtant ces bassins subissent les
plus fortes pertes de la population. Cependant, le nombre de ménages ou encore de
titulaires de revenus progresse. Par ailleurs, ils bénéficient d’un taux de présence de
14% (14% de personnes présentes en plus que de personnes recensées).
327
garantes des savoir-faire locaux en font des espaces ruraux moins pénalisés que ne le
laisserait penser la seule variable population ou encore la littérature. Ici la
revitalisation passe par les retraites et le tourisme, mais la présence d’activités
productives, même modestes, peut être un facteur de maintien d’actifs et de ménages
jeunes. Ce maintien est nécessaire, ne serait-ce que pour pouvoir répondre aux
besoins des plus âgés.
Là encore, les communes du rural isolé polarisent près d’un bassin sur deux
de ce type. Les départements tels que la Dordogne, la Creuse, le Lot en sont les plus
représentatifs. Situés donc plutôt dans le Sud-Ouest, ces bassins sont également
présents dans l’arrière-pays méditerranéen, dans le Sud-Est (Drôme, Alpes-de-Haute-
Provence), en Corse, dans la Nièvre. Ils regroupent près de 20% de la population des
bassins ruraux.
Plus de tourisme et moins d’activités productives distinguent ces bassins des
précédents. Leur première source de revenu basique demeure les retraites, talonnées
par les dépenses des touristes. Ils bénéficient également d’importants revenus de
transferts et de remboursements de santé. Le revenu basique moyen par habitant y est
légèrement supérieur à la moyenne des bassins ruraux.
Les revenus sont globalement plus faibles dans ces bassins. Après transferts
et en tenant compte de l’indice des prix, les revenus disponibles réels sont finalement
quasi équivalents au revenu moyen des bassins ruraux. L’évolution des revenus a été
légèrement supérieure à la moyenne des bassins ruraux entre 1990 et 1999.
Beaucoup plus touristiques que les bassins précédents, les emplois salariés
privés y progressent pourtant moins vite. Ce résultat provient des fortes diminutions
des emplois basiques purs. Ici, tous les bassins ne sont pourtant pas logés à la même
enseigne. Certains bassins enregistrent une évolution positive des emplois basiques
purs, d’autres non. Les derniers étant finalement plus nombreux que les premiers. En
détaillant ces secteurs d’activités en NAF700, on s’aperçoit que les bassins touchés
par de fortes pertes d’emplois basiques purs sont ceux qui étaient encore « un peu »
industrialisés. On voit clairement les secteurs du textile ou de la chaussure expliquer
la majeure partie de ces pertes d’emplois (Dordogne, Corrèze, Indre). Dans les
bassins où n’existe pas ou plus cette industrie traditionnelle, on note une évolution
positive des emplois basiques purs tirée soit par des productions spécifiques (Drôme
et Aveyron par exemple), soit par de la production générique (Gironde par exemple).
Ce tissu industriel est donc très hétéroclite.
328
Les emplois domestiques purs se développent rapidement, notamment les
commerces et services de proximité. Pourtant la population n’a pas progressé entre
1990 et 1999 dans ces bassins. En effet, les soldes migratoires très positifs
parviennent à peine à hauteur des soldes naturels qui restent négatifs. Ces territoires
attirent globalement beaucoup d’immigrants sans voir partir pour autant sa
population (faibles taux d’émigration). L’attractivité de ces bassins auprès des
retraités et des étrangers constitue une des spécificités de ces bassins.
Le nombre de bassins de ce type est beaucoup plus faible que les précédents
(62 bassins) et couvrent 6,5% de la population des bassins ruraux. Ces bassins sont
relativement plus dépendants de communes sous faible influence urbaine que la
moyenne rurale.
Ce sont les bassins les moins productifs. Les revenus basiques sont dominés à
présent par les dépenses touristiques, puis par les retraites. Ce sont également dans
ces bassins que l’on enregistre les plus fortes bases sanitaires et sociales. Les
montants de RMI perçus y sont par exemple deux fois plus importants qu’en
moyenne dans les bassins ruraux. Leur localisation est très clairement identifiée sur
le pourtour méditerranéen, allant jusqu’au sud de l’Ardèche et l’est de l’Ariège. Ils se
situent également le long de la côte atlantique, au sud de La Rochelle.
Les revenus imposables ou déclarés par habitant se situent à la moyenne des
bassins de vie ruraux. On note cependant de forts écarts à la moyenne pour les
retraités et les salariés. En effet, les retraites sont supérieures de 9% à la moyenne des
bassins ruraux tandis que les salaires moyens y sont inférieurs de 4%. Les revenus de
transferts importants, perceptibles dans le calcul du revenu disponible brut, sont
finalement absorbés par des niveaux de prix du foncier plutôt élevés. Ainsi, le revenu
réel serait plutôt inférieur à la moyenne rurale. Le revenu imposable par habitant a
augmenté moins rapidement entre 1990/1999 que dans l’ensemble des autres bassins.
Par contre, à partir de 1999, on note une hausse des volumes et des niveaux de
salaires et de retraites par foyer fiscal.
329
Les soldes migratoires sont positifs et compensent largement les pertes dues
au solde naturel ; la population augmente. De plus, ces bassins attirent et retiennent.
Très attractifs, ils présentent également de faibles taux d’émigration. A ces
migrations définitives, s’ajoute une forte présence touristique. La population présente
est supérieure de 35% à la population recensée ; les seuls touristes étrangers
représentent l’équivalent de 9% de la population.
Les emplois progressent très rapidement, et ce malgré les fortes diminutions
des emplois basiques purs, qui ne pèsent cependant plus que 21% de l’emploi total.
Les emplois domestiques, mais également mixtes (BTP) compensent largement ces
pertes. On note, notamment, une croissance très forte des emplois salariés dans les
commerces et services de proximité (+43% en 12 ans).
La dynamique cumulée des revenus (sur une période récente), des emplois,
notamment domestiques et de la population est directement liée aux ressources
résidentielles de ces bassins. Touristiques, attractifs également auprès de nouveaux
résidents, situés non loin des villes importantes ou moyennes, ces bassins bénéficient
d’aménités naturelles et d’un climat agréable. Ils sont également bien équipés en
services de proximité et en infrastructures routières, ferroviaires et aéroportuaires
(dont lignes aériennes low cost). La pression foncière de ces régions gagne ces
espaces ruraux, mais ne semble pas encore être à même de freiner leur dynamisme.
Les besoins en services à la personne qui accompagnent ces mouvements semblent
être d’importants pourvoyeurs d’emplois pour une population souvent peu qualifiée,
mais peut-être faiblement rémunérée. Les conflits d’usage en la matière sont
soulevés par les experts de ces questions (Perrier-Cornet (2001) ou encore voir les
travaux du groupe Manon pour le Commissariat au plan).
330
du tourisme rural dans le Var, l’Ardèche, les Alpes-de-Haute-Provence, ou encore
sur la façade Atlantique.
Les revenus déclarés par les habitants sont supérieurs de plus de 20% à la
moyenne des bassins. Cependant, derrière ces revenus très élevés, se cachent des
situations contrastées. Ce sont les retraites, principalement, les revenus de capitaux
mobiliers et revenus fonciers qui expliquent ces niveaux de revenu. Les revenus réels
du travail sont, en revanche, plus faibles qu’en moyenne dans les bassins ruraux. On
notera que l’analyse n’a pas été faite sur un revenu horaire. La saisonnalité de
l’activité peut induire des biais, notamment pour les indépendants. Ils correspondent
néanmoins aux revenus perçus et déclarés sur une année.
Par ailleurs, l’emploi salarié privé a augmenté de 40% en 12 ans ! Ce sont les
emplois domestiques purs qui dominent l’activité locale (60% des emplois
UNEDIC), et qui progressent le plus rapidement. On constate également un essor des
activités productives, mais elles ne représentent que 9% des emplois. L’analyse de
ces secteurs est plutôt délicate et les dynamiques à l’œuvre semblent plus liées à un
type d’industrie, voire à une entreprise locale, qu’à un phénomène généralisé.
Logiquement, avec des taux de présence qui triplent la population recensée,
on observe un plus grand nombre d’emplois pour 1 000 habitants dans les services et
commerces de proximité. Le tissu d’entrepreneurs individuels est également très
important.
Enfin, c’est aussi dans ces bassins que la population progresse le plus
rapidement (+10% entre 1990 et 1999). Les soldes migratoires sont positifs,
importants et les soldes naturels à peine négatifs. Cependant si ces bassins continuent
à attirer beaucoup de migrants, ils enregistrent aussi de forts taux d’émigrations.
Faut-il y voir un rapport avec le coût du foncier supporté par des salariés ou des
indépendants pas nécessairement mieux rémunérés qu’ailleurs ?
331
332
Conclusion
La difficulté repose sur la prise en compte des tendances mais aussi des
niveaux. On avait envisagé de créer un indicateur tridimensionnel1 de développement
local qui reposait sur l’évolution de l’emploi, du revenu imposable et de la
population. Cet indicateur est graphiquement représentable puisqu’il s’agit d’un
triangle, avec à chaque extrémité les trois variables choisies. L’aire de triangle est
d’autant plus grande que le territoire est dynamique. Aucune préférence ou
pondération n’est attribuée à ces axes ou variables. La méthode est simple, le calcul
aisé, l’introduction des azimuts pouvait même être envisagée pour préciser si la taille
de l’aire du triangle était plutôt conditionnée par la population, le revenu ou les
emplois. Bien que séduisant, cet indicateur n’a pas été introduit dans l’analyse. Les
résultats en termes de tendance sont certes révélateurs de la dynamique des territoires
mais les conclusions risquaient d’être erronées en termes de développement. Il ne
s’agit pas ici de dire que le développement ne peut pas se définir, ne peut pas se
1
Des essais ont d’abord été réalisés sur six dimensions, prenant en compte l’emploi, le revenu, la
population, le solde naturel et migratoire, les bases brutes de taxe professionnelle par habitant, les taux
de présence. La configuration graphique autour de six axes n’est pas opérationnelle car la
modification du placement des variables induit une modification de l’aire de la figure. Ainsi, en jouant
sur le placement des variables on pouvait induire les résultats au profit d’un modèle plutôt qu’un autre
etc. En ne retenant que les trois variables fondamentales, le biais n’existe plus.
333
mesurer, mais d’insister plutôt sur sa multi-dimensionnalité et notamment sur ses
composantes dynamiques et statiques.
334
L’attractivité auprès des retraités et des touristes s’accompagne
incontestablement d’une dynamique très positive sur l’emploi local et notamment sur
les emplois domestiques. La demande émanant de ce public, finalement peu mobile,
est génératrice de commerces et services de proximité qui permettent de maximiser
la dépense localement. Les bassins résidentiels mais à caractère plus périurbains, en
tout cas où dominent les actifs navetteurs sont à ce titre moins pourvoyeurs
d’emplois pour le territoire. Le syndrome de la cité dortoir peut s’avérer réel. La
population croît, les soldes naturels sont positifs mais le développement escompté
n’a peut-être finalement pas lieu. La présence de communes polarisant les
déplacements quotidiens de consommation paraît importante. Les bassins les plus
productifs sont ceux qui accueillent des industries agroalimentaires et des industries
plutôt « génériques » en termes de ressources mobilisées. Si l’emploi industriel y est
en effet en moindre recul qu’en moyenne en France, ces bassins semblent tout de
même en délicate posture. Il ne semble pas que leurs atouts productifs suffisent à en
assurer le développement. Par ailleurs, les territoires misant sur une production peut-
être plus spécifique, assise sur des produits territorialement « marketés » semblent
s’en sortir d’autant mieux qu’ils bénéficient des effets de levier du tourisme. Ces
deux activités semblent difficilement dissociables.
335
336
Conclusion générale
Face à cette problématique, la thèse a été structurée en trois parties, avec au cœur du
développement comme au cœur de la problématique, les modèles théoriques de la Science
Régionale (deuxième partie). Au préalable, il convenait d’établir qu’il y avait revitalisation
des espaces ruraux (première partie). Dans ce contexte empirique et théorique, l’approche
renouvelée de la théorie de la base apportait quelques éléments de réponse à la question de la
revitalisation rurale (troisième partie).
* *
337
La première partie de ce travail avait pour objectif de valider, ou non, la thèse de la
revitalisation des espaces ruraux. Le terme de revitalisation recouvre deux aspects à
considérer. L’un comparatif, la vitalité des espaces ruraux ne pouvait être révélée qu’en la
comparant à celle des espaces urbains, l’autre « autocentré » et temporel, la situation des
espaces ruraux serait nouvelle, les tendances se seraient inversées.
Après avoir précisé les définitions de l’espace rural, nous avons étudié, dans un
premier chapitre, les différentes fonctions qui semblent distinguer, encore aujourd’hui, les
espaces ruraux des espaces urbains.
Les agriculteurs sont, certes, de moins en moins représentatifs de la population et de
l’emploi rural, mais l’agriculture occupe encore une majorité des surfaces rurales. En outre, le
poids de l’agriculture et des industries agroalimentaires dans le PIB français est deux fois plus
important que celui du secteur énergétique, ou encore quatre fois plus important que celui du
secteur automobile. Dans un pays où les dépenses touristiques ont atteint 108 milliards en
2005, le fait qu’une agriculture qualitative entretienne des paysages et l’image gastronomique
de la France ne peut être négligé. Une deuxième spécificité de l’économie de ces espaces a
également été soulignée, à savoir le maintien d’une industrie rurale.
Sociologiquement le rural aurait disparu. Les modes de vie urbains et ruraux seraient,
à présent, les mêmes. Face à ce constat, on a voulu mettre l’accent sur les différences qui
expliquent que pour 80% des Français, la vie serait plus agréable à la campagne. Le cadre de
vie, mais également les conditions d’accès à la propriété, la taille de l’habitation, le rythme
quotidien, l’environnement sont autant d’éléments qui distinguent encore le rural de l’urbain.
Enfin, le rural constitue une réalité ou plutôt une exception politique qui tend à
disparaître sous son caractère agricole, mais se renforce sous celui de la préservation des
paysages. Cette fonction de l’espace rural tendrait à prendre le pas sur toutes les dimensions
de la notion de ruralité. Le rural, espace de production, se ferait dépasser par le rural, espace
de consommation et de préservation1.
Ce premier chapitre a permis de souligner que les espaces urbains et les espaces ruraux
n’étaient pas similaires même si l’on aborde la question sous un autre angle que la seule
dimension géographique. Si l’étude de la société rurale n’a plus grand sens, la notion de rural
comme catégorie opératoire de description des territoires demeure pertinente (Perrier-Cornet
et Hervieu, 2002).
1
La problématique des conflits d’usage n’a pas été introduite dans ce travail, elle n’en demeure pas
moins au cœur de ces nouvelles dynamiques.
338
Dans le deuxième chapitre, nous avons abordé l’aspect « temporel » de la
revitalisation démographique rurale : rend-elle compte d’une rupture de tendance ou décrit-
elle un processus long de repeuplement ?
Les travaux d’Hervieu (2001, 2006) permettent de souligner le dynamisme des
campagnes jusqu’à la révolution industrielle, tardive en France. La spécificité de l’histoire des
campagnes françaises et le soutien politique et économique dont elles ont bénéficié
conditionnent, probablement, leur repeuplement actuel. Équipées, desservies, accessibles, les
campagnes françaises offrent un paysage diversifié et entretenu. Elles sont situées à des temps
de parcours relativement brefs d’une grande ville, ce qui est exceptionnel en Europe.
Trait marquant des espaces ruraux, l’exode rural s’est étalé en France sur un siècle
(1870-1970), contribuant à réduire de près de 40% la population dans les campagnes pendant
que la population urbaine progressait. Ainsi, 66% de la population française était rurale en
1872, pour 36% en 1962 (Merlin, 1971). Si ces chiffres sont officiellement ceux de l’exode
rural, nous avons vu qu’ils étaient conditionnés par les délimitations et définitions choisies.
En reconstituant une base historique des données de la population communale
française, on a pu souligner que les communes qui étaient rurales en 1872 ont retrouvé, dès
1962, leur niveau de population de la fin du XIXe siècle. Les bourgs ruraux, ou pôles
d’emplois de l’espace rural selon l’INSEE, n’ont, dans leur ensemble, jamais perdu de
population. Par ailleurs, au-dessous du seuil de 2 000 habitants en 1872, les communes
perdent de la population. Le choix du seuil de 2 000 habitants pour qualifier le rural influence
fortement l’analyse. On peut se demander si le rural n’aurait pas été défini par la perte de
population. En prenant 15 000 habitants comme seuil distinctif des communes rurales et
urbaines en 1954, selon les conseils de Mendras (1967, réed. 1984), la population urbaine
n’aurait, finalement, jamais dépassé la population rurale ! Si les communes rurales se
définissaient par un seuil de moins de 15 000 habitants, on verrait qu’elles stabilisent leur
population à partir de 1921 et qu’elles connaissent à partir de 1946 une croissance
démographique plus marquée que celle des villes de plus de 15 000 habitants.
Au-delà de la question de la sensibilité des seuils statistiques, ces résultats interrogent
l’idée de revitalisation rurale. L’allure qu’aurait eu l’exode rural si le seuil n’avait pas été
celui de 2 000 habitants et le maintien de la population dans les bourgs ruraux suffisent à
amoindrir les discours alarmistes des années 1970-1990 sur la désertification rurale. Enfin,
l’analyse, par type de territoire du zonage en aires urbaines et aires d’emplois de l’espace
rural de l’INSEE, montre que le repeuplement des campagnes françaises n’aurait rien d’une
rupture, mais serait le résultat d’un long processus démographique.
Selon les auteurs, spécialistes de la question rurale, ce processus de repeuplement
serait principalement expliqué par la périurbanisation. Le rural se développerait à l’ombre des
grandes villes et resterait condamné au déclin lorsqu’il s’en trouve trop éloigné. La diagonale
339
aride, notamment, serait trop handicapée et trop isolée pour connaître le même phénomène de
repeuplement que les autres espaces.
L’analyse comparative des principaux agrégats du développement (population, emploi,
revenu) et des migrations a confirmé, dans un troisième chapitre, la vitalité des espaces
ruraux et en a précisé quelques composantes. L’analyse des évolutions démographiques
depuis 1962 souligne le processus long de repeuplement, impulsé par les migrations vers les
espaces ruraux. Il semblerait que certains territoires qui continuent de perdre des habitants
puissent se repeupler. L’accroissement des soldes migratoires de ces espaces depuis les
années 1980-1990 et le taux d’immigrants dans la population de 2004-2006 permettent
d’envisager une hausse de la population dans ces espaces non périurbains, situés dans la
moitié Sud et Sud-Ouest de la diagonale aride. Les migrations à l’âge de la retraite,
conditionnées en partie par la possession d’une résidence secondaire, profiteraient à ce rural
non périurbain. L’analyse plus précise des émigrants des aires urbaines vers les espaces
ruraux a permis de souligner que l’attractivité rurale ne résultait pas systématiquement de
l’étalement de la population du centre vers les périphéries. Par ailleurs, si l’on considère non
plus la population recensée, mais la population présente, on peut alors affirmer que les
communes rurales isolées sont finalement aussi vivantes aujourd’hui qu’au sortir de la 2e
guerre mondiale.
Mais la revitalisation des espaces ruraux est peut-être encore plus frappante en termes
d’emplois et de revenus. Concernant l’emploi, les espaces ruraux vivent une profonde
restructuration. Les diminutions du nombre d’agriculteurs sont encore assez importantes pour
donner une image de territoires dépressifs. Or, sans cet effet structurel, l’emploi rural apparaît,
au contraire, très dynamique. L’emploi hors agriculture ou bien encore l’emploi salarié privé
progresse plus vite dans les espaces ruraux que dans les pôles urbains. Le périurbain reste en
tête de ces évolutions. L’emploi salarié privé est dynamisé par les emplois domestiques et les
emplois mixtes. Le maintien des activités industrielles ne s’observe pas dans tous les espaces
ruraux. Il ne concernerait que les espaces sous faible influence urbaine, soulignant un des
aspects des forces de dispersion des modèles de la NEG. En termes d’emplois par habitant, la
surreprésentation des travailleurs indépendants constitue une des spécificités des espaces
ruraux. Enfin, la hausse du revenu, et notamment du revenu par habitant, souligne la
convergence qui s’opère depuis au moins vingt ans entre les espaces ruraux et les espaces
urbains. Les écarts de revenu par habitant qui subsistent entre les ruraux, au revenu plus
faible, et les urbains est en partie comblée si l’on inclut dans le revenu des habitants
l’ensemble des revenus de transferts.
On assisterait donc à une revitalisation des territoires ruraux à la fois démographique
et économique. La diversité des situations complexifie l’analyse et le choix des modèles pour
tenter de l’expliquer. Certes, les emplois basiques purs, les emplois de production pèsent plus
340
lourd dans l’économie locale de ces espaces que dans l’urbain, mais ils régressent.
L’agriculture et les industries agroalimentaires demeurent des activités importantes pour
l’économie de ces territoires, mais elles régressent aussi. Le développement s’observerait sans
véritable signe d’une croissance de la production locale. Parallèlement, l’attractivité auprès
des retraités, le poids des touristes, l’importance de l’emploi public et des revenus de
transferts soulignent l’existence d’autres enjeux de développement local.
* *
Quels modèles offre la Science Régionale pour tenter de comprendre la revitalisation
des espaces ruraux ? La revue de la littérature proposée dans cette seconde partie repose sur
une grille d’analyse des principaux courants théoriques. La première distinction introduite
porte sur l’acception du développement territorial. Le développement est appréhendé, soit en
tant qu’état d’un territoire à un moment donné et dans le temps, soit comme un processus de
jeu d’acteurs. Par ailleurs, l’acception du territoire diffère également. Nous avons relevé,
d’une part, les travaux qui considèrent le territoire comme un facteur de croissance et, d’autre
part, ceux qui considèrent le territoire comme le support de la population. Pour les premiers,
l’enjeu principal du développement local serait la production, pour les seconds la population
constituerait également un enjeu majeur de développement, et ce, indépendamment du
système productif local.
341
et le territoire est construit et non donné a priori. Bien que très différents en termes
d’hypothèses et de conclusions, la NEG et ces modèles endogènes ont en commun de
considérer que la production demeure l’enjeu principal du développement local.
Le troisième chapitre traite des approches du développement local pour lesquelles le
territoire est à présent le support de la population. La population devient un enjeu du
développement, la consommation un facteur-clé des économies locales. Au modèle de l’offre
se substitue théoriquement un modèle de la demande. Ces approches sont très largement
sous-représentées dans la littérature. Plus précisément, le seul cadre conceptuel général
proposé aujourd’hui semble être celui de la théorie de la base renouvelée (Davezies, 2003a et
2003b). En revanche, de nombreuses études spécifiques et empiriques portent sur l’un des
aspects de la base. Toutes ces études spécifiques s’accordent à souligner l’importance des
dépenses touristiques, des retraités voire des salaires migrants-alternants sur l’économie
locale. La redistribution des fonds publics semble, en revanche, sous-représentée face au
poids qu’occupent ces revenus dans les territoires. Sur la question de l’impact de la
consommation sur les territoires, des travaux très proches du propos développé dans ce
chapitre émergent actuellement. Néanmoins, les auteurs de ces travaux mettent, pour l’instant,
en évidence des corrélations positives entre les aménités urbaines des grandes villes,
susceptibles de maximiser la consommation locale des travailleurs qualifiés et le
développement de ces villes (Glaeser et alii, 2001 ; Florida, 2002). Ils soulignent l’importance
des effets de la consommation sur le développement sans proposer véritablement de cadre
théorique pour l’analyse de ces mécanismes.
Le chapitre conclusif porte uniquement sur la mobilisation de ces modèles dans le
cadre des espaces ruraux. Les travaux de la NEG permettent de comprendre quelles sont les
forces de dispersion des agglomérations qui favoriseraient, aujourd’hui, l’implantation de
certaines entreprises dans les espaces ruraux (Gaigné et alii, 2003). La spécificité de la main-
d’œuvre rurale serait également un facteur explicatif du maintien de l’industrie rurale (Aubert
et Blanc, 2002 ; Ganne et Bertrand, 1996 ; Janvier 1994). L’étude des systèmes productifs
locaux portent très souvent sur des espaces ruraux. La mobilisation d’une ressource
territorialement ancrée, non délocalisable, semble pouvoir constituer une solution pour les
producteurs locaux (Mollard et alii, 2001). Cette organisation productive locale repose sur des
coopérations d’acteurs favorisant les processus de développement (Colletis et Pecqueur,
1993). Cependant, l’impact de ces systèmes productifs sur les dynamiques du développement
socio-économique paraît difficile à révéler. Stricto sensu, la vente de ces produits profite à
une poignée de producteurs et de commerçants ; de plus la coopération d’acteurs n’entraîne
pas toujours une dynamique de développement (Callois 2004, Perrier-Cornet, 2006). La
valorisation de ces produits est intimement liée aux activités de tourisme et à l’attractivité des
territoires. Le rôle qu’ils peuvent jouer sur l’image de ces territoires ne doit pas être minimisé
342
mais paraît difficile à distinguer des autres aménités rurales éventuelles. En termes d’action
publique, ces « fabrications » peuvent également permettre de conserver un certain équilibre
dans l’économie locale rurale, de plus en plus tournée vers les emplois domestiques et de
diversifier ainsi les possibilités d’emplois et de profil des actifs.
Bien que susceptibles de jouer un rôle stimulant localement, il semble que ces
systèmes de production ne suffisent pas, non plus, à comprendre la revitalisation rurale. Le
poids des retraités, des touristes, des migrants-alternants, des revenus de transferts dans les
économies locales rurales sont autant de caractéristiques de ces espaces qui révèlent
l’existence d’autres moteurs que la seule production. Les travaux proposant d’analyser
l’aspect non productif du développement rural sont intéressants. Ils soulignent l’existence
d’avantages comparatifs territoriaux non productifs (Schmitt, 1996). Le tourisme créerait plus
d’emplois que les activités traditionnelles (Vollet, 1998 et 2007). De nombreuses études
montrent, également, le rôle des aménités rurales sur l’attractivité rurale (cf. étude de Reeder
et Brown, 2005, sur les cantons ruraux).
Les premières analyses statistiques proposées dans cette étude et les conclusions des
travaux qui traitent du développement rural soulignent la multiplicité des situations, des
dynamiques rurales et des modes de développement. En effet, certains territoires bénéficient
du desserrement des industries, d’autres s’organisent autour des « produits de terroir »,
d’autres semblent plutôt résidentiels et touristiques ; enfin, les revenus de transferts et le
maintien d’une offre publique peuvent également être des leviers de développement. Ces
différents types de mécanismes de développement local peuvent-ils se combiner ? Lequel de
ces modes de développement est susceptible d’expliquer et de favoriser la revitalisation des
espaces ruraux ?
* *
La troisième partie de ce travail a pour objectif de mettre en œuvre l’approche
renouvelée de la théorie de la base proposée par Davezies (2003a, 2003b) sur le cas des
espaces ruraux afin de déterminer les principaux facteurs de la revitalisation rurale. Le
premier chapitre s’interroge sur le choix d’un zonage pertinent pour ce travail. L’implication
du zonage sur les résultats de l’analyse est un problème constant des analyses spatiales, il
paraît encore plus déterminant dans le cas de la théorie de la base. L’approche par les bassins
de vie de l’INSEE a été privilégiée. Au sein de ces bassins, il a été décidé que l’analyse du fait
rural serait réalisée sur la base des bassins uniquement polarisés par une commune de l’espace
à dominante rurale. Ces 1 050 bassins, appelés bassins ruraux, regroupent plus de 9,5 millions
de personnes, environ 16 500 communes et recouvrent plus de la moitié de la superficie du
territoire métropolitain.
343
Le deuxième chapitre expose le principe de la théorie de la base, ainsi que la
méthodologie choisie pour le calcul des revenus basiques. Le principe est simple et repose sur
la captation de revenus. Pour qu’un territoire se développe, il faut donc qu’il capte des
revenus extérieurs mais, également, qu’il parvienne à maximiser la dépense locale de ces
revenus. L’impact sera d’autant plus grand que les emplois ainsi générés seront occupés par
des résidents. La deuxième composante du modèle qui porte sur la propension à consommer
localement n’est pas à ce jour formalisée. C’est à travers l’observation des emplois
domestiques et autres variables socio-économiques que l’impact des revenus basiques sur la
consommation locale est appréhendé.
Le calcul des différents revenus basiques sur l’ensemble des bassins de vie permet de
repérer les éventuelles spécificités rurales. Si les revenus résidentiels constituent la principale
source de revenus de tous les types de bassins de vie (urbains, périurbains, ruraux), des
différences apparaissent. Les pôles urbains1 sont plutôt plus productifs et mieux dotés en base
publique que la moyenne. Les bassins périurbains sont essentiellement alimentés par les
revenus des migrants-alternants. La première spécificité des espaces ruraux tient à
l’importance des retraites mais également des dépenses touristiques. Le rural apparaît
également plus productif, en termes de base, que les espaces périurbains. L’espace rural n’est,
cependant, pas homogène. L’analyse statistique a permis d’établir six types de bassins ruraux,
différenciés par leurs appariements de revenus basiques. A ce stade de l’analyse, on sait que
les bassins ruraux ne connaissent pas tous une revitalisation démographique, économique et
sociale et qu’ils diffèrent en termes de base. La formulation de la question de départ sur la
revitalisation se précise. Peut-on établir un lien entre les bases et les dynamiques
territoriales des bassins ruraux ? Existe-t-il des appariements de revenus basiques qui
favoriseraient le développement et qui expliqueraient la revitalisation rurale ? Pourrait-on,
dans ce cas, envisager l’existence d’un modèle optimal pour les espaces ruraux ?
Le troisième chapitre propose une analyse comparative entre les six types de bassins
identifiés. Les trois variables retenues pour rendre compte de l’éventuelle revitalisation de ces
bassins sont le revenu, l’emploi et la population. Comme dans la première partie, la
composante migratoire de la « variable population», qui conditionne le repeuplement rural, a
été détaillée. Il nous est apparu important de comparer la situation des six modes de
développement révélés par l’analyse typologique en termes d’évolutions, mais également en
termes de « niveaux » des revenus des habitants, d’emplois par habitant et, pour l’attractivité,
en termes de poids des immigrants et des émigrants dans la population.
1
Bassins polarisés par un pôle urbain.
344
Un tableau synoptique synthétisant l’ensemble des résultats fait apparaître très
distinctement le réel dynamisme des bassins les plus touristiques et résidentiels. Globalement,
les dépenses des touristes associées aux dépenses des retraités, plutôt plus aisés dans les
bassins résidentiels et touristiques que dans les autres bassins ruraux, semblent être les
catalyseurs de la revitalisation rurale. L’attractivité de ces bassins auprès de ces deux
populations s’accompagne d’une dynamique très positive sur l’emploi local et notamment sur
les emplois domestiques. La demande émanant de ces deux populations, finalement peu
mobiles, permet l’essor des commerces et services de proximité dont la présence conditionne
la propension à dépenser localement. Un effet cumulatif semble se mettre en place puisque les
emplois domestiques progressent d’autant plus que le bassin paraît bien équipé en commerces
et services de proximité. On peut également noter que les territoires plus reculés1, dans
lesquels il existe une production territorialement spécifique, semblent se développer d’autant
mieux qu’ils bénéficient des effets de levier du tourisme. Ces deux activités, tourisme et
production de produits spécifiques, semblent difficilement dissociables.
Les bassins résidentiels à la limite du périurbain sont ceux où dominent les actifs
navetteurs. Ils sont moins bien équipés en commerces et services de proximité et sont moins
pourvoyeurs d’emplois pour le territoire. Le syndrome de la « cité-dortoir » peut s’avérer réel.
La population croît, les soldes naturels sont positifs mais le développement escompté n’a
peut-être finalement pas lieu. La présence de communes polarisant les déplacements
quotidiens de consommation paraît primordiale. L’analyse économétrique a permis de
souligner que, globalement, les migrants-alternants n’ont pas d’impact significatif sur les
évolutions de l’emploi local, exception faite des bassins de migrants-alternants mieux équipés
en commerces et services de proximité, dans lesquels l’emploi progresse. Ces bassins
« équipés » parviendraient donc à maximiser la propension à dépenser localement et à freiner
les évasions de consommation qui semblent pénaliser les autres bassins de navetteurs.
Les bassins les plus productifs sont ceux qui accueillent des industries
agroalimentaires et des industries plutôt « génériques » en termes de ressources mobilisées. Si
l’emploi industriel y est en effet en moindre recul qu’en moyenne en France, ces bassins
paraissent dans une situation plus fragile que les bassins de « migrants-alternants » en termes
de population et de revenu, mais ils créent, en revanche, plus d’emplois et notamment plus
d’emplois domestiques. On retrouve l’idée que les navetteurs induisent des évasions de
consommation qui se répercutent sur l’emploi local, alors que dans des bassins « moins
ouverts », comme ces bassins très productifs, la consommation a plutôt tendance à se faire
localement.
1
Il s’agit des bassins que l’on a qualifiés de « retraites et agriculture » et « retraites et tourisme ».
345
Il convient d’affiner ces réponses qui induiraient que le modèle optimal serait celui du
« tout résidentiel » et du « tout touristique ». La part importante d’émigrants dans les bassins
ultra-touristiques interdit d’affirmer que les tendances très positives des dernières années
dureront. Par ailleurs, la relative faiblesse des revenus réels des travailleurs dans les bassins
résidentiels et touristiques nuance les conclusions. Il paraît difficile d’attribuer le qualificatif
« d’exemple à suivre » à ces modèles. Si le développement se définit comme l’amélioration
des conditions de vie de la population, il est important de considérer l’impact de la pression
foncière sur les revenus ainsi que les inégalités sur lesquelles reposent, en partie, ces
dynamiques.
* *
Ces différentes considérations nous amènent à proposer quelques pistes de recherche
pour améliorer ces premiers résultats et poursuivre ce travail.
L’amélioration de ces résultats dépendra des analyses spatialisées que le nouveau
recensement de la population de l’INSEE permettra de faire ou de ne pas faire. On peut, par
contre, envisager d’affiner rapidement l’analyse des mobilités domicile-travail et des
différences de rémunérations entre salariés en utilisant les données DADS. Plus délicate,
l’amélioration d’un indice de prix spatialisé et du calcul des revenus réels des populations
mériterait plus d’attention de la part des chercheurs, des institutionnels et des pouvoirs
publics.
En forte progression, les emplois domestiques mériteraient, également, des analyses
plus fines. S’accorder sur ce que sont les emplois domestiques reste une question ouverte et
délicate. Ces emplois peuvent offrir une réponse au chômage des jeunes peu qualifiés et
constituer une réelle opportunité pour les territoires. Mais, il conviendrait d’affiner, aussi, les
corrélations négatives qui ressortent de ce travail entre les niveaux de revenu des travailleurs
et la part importante de ces emplois domestiques dans l’emploi local.
346
Plusieurs éléments et résultats mobilisés dans ce travail devraient permettre
d’approfondir la notion d’aménités et d’avantages comparatifs résidentiels des territoires. Des
hypothèses ont été formulées qu’il conviendrait d’approfondir et de tester.
La consommation est apparue à plusieurs reprises dans cette étude comme un facteur
essentiel de l’analyse territoriale. L’émergence de travaux qui se rapportent à ce sujet aux
États-Unis et en France confirme l’intérêt de la question et la montée en puissance des
mécanismes de la demande dans le développement territorial. Bien que l’impact de la
consommation sur le développement des territoires soit encore marginalement étudié, ces
premiers travaux laissent penser que des avancées théoriques et empiriques devraient
apparaître dans les prochaines années.
347
348
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367
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Liste des tableaux
Tableau 1 - Population et superficie des communes urbaines et des communes rurales en France
métropolitaine, 1999 .................................................................................................... 31
Tableau 7 - Taux de présence par type de communes du ZAUER 2002 ...................................... 101
Tableau 8 - Évolution de l’emploi salarié du secteur privé entre 1993 et 2005 ............................. 105
Tableau 9 - Structure et évolution de l’emploi salarié privé basique pur, domestique pur et mixte
entre 1993 et 2005 par type de communes............................................................... 106
Tableau 10 - Résultats de l’analyse « shift-share » portant sur l’évolution de l’emploi salarié privé
en NAF220, entre 1993 et 2005 ................................................................................ 108
Tableau 12 - Nombre de travailleurs indépendants pour 100 000 habitants, en 2005 .................. 110
Tableau 15 - Revenu déclaré aux impôts, revenus de transferts et montants des impôts versés, en
2004 ........................................................................................................................... 115
Tableau 16 - Structure des revenus catégoriels déclarés aux impôts, en 2004, en %.................. 116
Tableau 17 - Poids des immigrants régionaux entre 1990 et 1999, dans la population de 1999 par
type de communes..................................................................................................... 118
369
Tableau 18 - Répartition des immigrants régionaux de 1990/1999 selon leur profil
sociodémographique entre les différents types de communes ................................. 118
Tableau 19 - Poids des immigrants régionaux sur les cinq dernières années
dans la population 2005............................................................................................. 121
Tableau 1 - Répartition des bassins de vie contenant des communes de l’espace à dominante
rurale selon la caractéristique de leur pôle ................................................................ 239
Tableau 2 – Population des bassins ruraux selon le type de la commune de résidence .............. 241
Tableau 3 - Montants des revenus basiques par bassin de vie selon le type de pôle du bassin,
en M€ (en 2004/2005) ............................................................................................... 263
Tableau 4 - Répartition des revenus basiques par bassin de vie selon le type de pôle du bassin, en
% (en 2004/2005) ...................................................................................................... 264
Tableau 5 - Montants des revenus basiques par bassin de vie selon le type de pôle du bassin,
en €/hab. (en 2004/2005) .......................................................................................... 265
Tableau 6 - Montants des revenus basiques par habitant dans les six types de bassins ruraux,
en €/hab. (en 2004/2005) .......................................................................................... 272
Tableau 7 - Revenu imposable par habitant en 2004 par type de bassins ruraux ........................ 277
Tableau 8 - Revenu déclaré par habitant en 2004 par type de bassins ruraux ............................. 278
Tableau 10 - Récapitulatif des écarts de revenu selon les bassins ruraux, en 2004..................... 282
Tableau 11 - Revenus déclarés, revenu disponible brut estimé, revenu réel estimé, en 2004 ..... 286
Tableau 13 - Évolutions des retraites et des traitements et salaires sur la période 1999/2004 .... 292
Tableau 14 - Évolution et structure des emplois UNEDIC par type de bassins ruraux ................. 294
Tableau 15 - Emplois salariés privés dans les commerces et services de proximité des bassins
ruraux : emplois pour 1 000 habitants en 2005 et évolution 1993/2005.................... 299
370
Tableau 16 - Nombre de travailleurs indépendants pour 1 000 habitants
par type de bassins ruraux, en 2005 ......................................................................... 301
Tableau 18 - Part des immigrants et des émigrants dans la population (1990/1999) ................... 309
Tableau 21 - Poids des touristes étrangers dans la population des bassins ruraux en 2005 ....... 316
Tableau 22 - Rapport entre les dépenses des touristes étrangers et les revenus déclarés des
ménages dans les bassins ruraux, en 2004/2005. .................................................... 318
Tableau 23 - Tableau synoptique ; synthèse des résultats par type de bassins ruraux ................ 320
371
Liste des graphiques
Graphique 2 - Évolution de la force de travail agricole dans quelques pays, 1830 – 2000 ............. 38
Graphique 3 - Évolution des unités de travail annuel non salarié dans l’agriculture,
entre 1990 et 2004 .................................................................................................... 38
Graphique 14 - Évolution de l’emploi total 1990/1999 par type d’espace (ZAUER 2002) ............. 103
Graphique 16 - Évolution du volume du revenu imposable, en indice base 100 en 1984............. 114
Graphique 17 - Évolution du revenu imposable par habitant, en indice base 100 en 1984 .......... 114
372
Graphique 18 - Part dans la population 1999 des immigrants venant d’une aire urbaine selon la
distance à cette aire urbaine (migration 1990/1999)............................................... 124
Graphique 1 - Détermination des deux référentiels ruraux des bassins de vie ............................. 234
373
Liste des cartes
Carte 5 - Zonage en aires urbaines et aires d’emploi de l’espace rural (ZAUER) ........................... 36
Carte 10 - Poids des surfaces agricoles utilisées dans la superficie des départements,
en 2005, en % ................................................................................................................ 42
Carte 15 - Évolution de la population rurale depuis la date du « plein rural » jusqu’en 1962......... 67
Carte 22 - Comparaison des soldes migratoires des bassins ruraux entre 1982/90 et 1990/99 ..... 98
Cartes 25 et 26 - Nombre d’emplois de la fonction publique pour 1 000 habitants, en 2004 ........ 113
374
Carte 29 - Part des immigrants régionaux sur cinq ans dans la population communale recensée
entre 2004 et 2006 ....................................................................................................... 122
Carte 30 - Part des immigrants venus d’une aire urbaine située à plus de 200 km dans le total des
immigrants venus d’une aire urbaine pour les communes hors aires urbaines (migration
1990/1999) ................................................................................................................... 126
Carte 31 - Typologie des communes hors aires urbaines selon la part des immigrants dans la
population 1999 venant d’une aire urbaine située à moins de 200 kilomètres ou à plus
de 200 kilomètres. ........................................................................................................ 128
Carte 1 - Rapport entre les salaires publics, les retraites, les revenus de transferts et les salaires
du secteur privé dans les départements métropolitains, en 2005................................ 195
Cartes 1 à 6 - Évolutions démographiques 1990-1999 selon les zonages considérés ................. 230
Carte 8 - Les bassins ruraux ou les bassins de vie retenus pour l’analyse spatiale
des espaces ruraux ...................................................................................................... 243
Cartes 10 à 13 - Poids des différents revenus basiques dans les bassins de vie métropolitains,
en 2004/2005................................................................................................................ 262
Carte 14 - Typologie des bassins ruraux selon les montants de revenus basiques par habitant,
2004/2005..................................................................................................................... 268
Carte 15 - Typologie des cantons ruraux proposée par la DATAR et SEGESA............................ 268
Carte 16 - Écart entre le revenu disponible brut par habitant et le revenu déclaré par habitant
en 2004, en % .............................................................................................................. 281
Carte 17 - Écart entre le revenu disponible brut par habitant et le revenu déclaré par habitant
en 2004, en % .............................................................................................................. 281
Carte 18 - Écart entre les revenus déclarés par habitant et le revenu réel estimé
dans les bassins de vie, en 2004 ................................................................................. 287
375
Carte 19 - Écart entre les revenus déclarés par habitant et le revenu réel estimé
dans les bassins ruraux, en 2004 ................................................................................ 289
Carte 20, 21 et 22 - Évolution de l’emploi UNEDIC basique pur entre 1993 et 2005 dans les
bassins de vie ruraux et dans les départements métropolitains .................................. 296
Carte 23 - Nombre de travailleurs indépendants hors agriculteurs pour 100 000 habitants dans les
bassins de vie en 2005................................................................................................. 300
Carte 24 - Nombre de travailleurs indépendants hors agriculteurs pour 100 000 habitants dans les
bassins ruraux en 2005 ................................................................................................ 301
Carte 28 - Part des immigrants 1990/99 dans la population des bassins ruraux de 1999 ............ 307
Carte 29 - Part des émigrants 1990/99 dans la population des bassins ruraux de 1990 .............. 307
Carte 30 - Profil des bassins ruraux en termes d’attractivité (% d’immigrants dans la pop. 1999) et
de « répulsivité » (% d’émigrants dans la pop. 1990) (migration 1990/1999).............. 308
Carte 31 - Profil des bassins ruraux selon la part d’émigrants dans la population 1990
et les prix fonciers ........................................................................................................ 308
Carte 32 - Taux de présence en 2005 dans les bassins ruraux .................................................... 312
376
TABLE DES MATIERES
VOLUME I
Remerciements...................................................................................................................... 3
Sommaire .............................................................................................................................. 9
377
II-2 Les travailleurs indépendants de l’espaces rural .......................................................... 109
II-3 L’emploi public : le rural mieux équipé que le périurbain ? ........................................ 111
III Forte croissance des revenus dans les espaces ruraux ....................................................... 114
IV L’attractivité résidentielle des espaces ruraux se confirme................................................ 117
V Une revitalisation indépendante de l’étalement urbain...................................................... 123
Conclusion...................................................................................................................................... 133
Chapitre 2 - Les approches par la production ou le territoire facteur de croissance ..................... 159
I Les modèles globaux du « territoire facteur de croissance » ............................................. 160
I-1 La Nouvelle Économie Géographique .......................................................................... 160
I-2 Développement endogène et systèmes productifs localisés .......................................... 170
II Les approches spécifiques du « territoire facteur de croissance » ..................................... 175
II - 1 Les ressources génériques de la croissance locale ..................................................... 175
II - 2 Les ressources spécifiques de la croissance locale..................................................... 177
Chapitre 3 - Les approches par la demande ou le territoire support de la population ................... 181
I Une approche globale du « territoire support ».................................................................. 182
II Les approches spécifiques du « territoire support ».......................................................... 185
II-1 Détail sur les éléments de la base non productive........................................................ 186
II-2 Consommation et territoires......................................................................................... 196
Chapitre conclusif - Quels modèles pour l’étude de la revitalisation des espaces ruraux ? .......... 209
I Le rural et les forces de dispersion des modèles de la Nouvelle Économie Géographique 209
II Le rural et les systèmes productifs locaux ......................................................................... 212
III Les espaces ruraux : un lieu de consommation.................................................................. 214
378
III Délimitation des bassins ruraux étudiés............................................................................. 238
Conclusion...................................................................................................................................... 333
379
UNIVERSITÉ PARIS-XII – VAL DE MARNE
INSTITUT D’URBANISME DE PARIS
C.R.E.T.E.I.L.
(Centre de recherche sur l'espace, les transports, l'environnement et les institutions locales)
Magali Talandier
le 14 décembre 2007
Volume 2 : Annexes
COMPOSITION DU JURY :
Pierre BECKOUCHE, Professeur, Université Paris-I
Laurent DAVEZIES, Professeur, Université Paris-XII
Bernard PECQUEUR, Professeur, Université Joseph Fourier, Grenoble
Philippe PERRIER-CORNET, Directeur de Recherche, INRA
Pierre VELTZ, Professeur, École nationale des ponts et chaussées
2
Logiciels, fonds de cartes et sigles utilisés
Sigles
AAH : Allocations aux adultes handicapés
ACP : Analyse en composantes principales
ADELE : Administration électronique
AFSSET: Agence française de sécurité sanitaire, de l’environnement et du travail
ANPE : Agence nationale pour l’emploi
AOC : Appellation d’origine contrôlée
AOP : Appellation d’origine protégée
APA : Aides aux personnes âgées
APE : Aides à l’enfance
APH : Aides aux handicapés
APHEIS : Air Pollution and Health : European Information System
ASI : Allocation supplémentaire d‘invalidité
ASV : Allocation supplémentaire vieillesse
BA : Bénéfices agricoles
BIC : Bénéfices industriels et commerciaux
BNC : Bénéfices non commerciaux
BSI : Bassins de services intermédiaires
BTP : Bâtiments et travaux publics
CAF : Caisse d’allocations familiales
CAH : Classification ascendante hiérarchique
CANAM : Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes
CETE : Centre d’études techniques de l’équipement
CLAMEUR : Connaître les loyers et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux
CNAF : Caisse nationale des allocations familiales
CNAV : Caisse nationale d’assurance vieillesse
CNAVTS : Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés
3
CREDOC : Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie
DADS : Déclaration automatisée des données sociales
DATAR : Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale
DCASPL : Direction du commerce, de l’artisanat, des services et des professions libérales
DDE : Direction départementale de l’équipement
DGF : Dotation globale de fonctionnement
DGI : Direction générale des impôts
DIACT : Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires
DREES : Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques
EMS : Emplois métropolitains supérieurs
EPCI : Établissement public de coopération intercommunale
FILOCOM : Fichier des logements par commune
FPE : Fonction publique d’État
FPH : Fonction publique hospitalière
FPT : Fonction publique territoriale
GREMI : Groupe de recherche européen sur les milieux innovateurs
HOS : Heckscher-Ohlin-Samuelson
IAA : Industrie agroalimentaire
IDH : Indice de développement humain
IFEN : Institut français de l'environnement
IFOP : Institut français d'opinion publique
IGN : Institut géographique national
IJ : Indemnités journalières
INAO : Institut national des appellations d’origine
INED : Institut national des études démographiques
INRA : Institut national de la recherche agronomique
INSEE : Institut national de la statistique et des études économiques
MIT : Massachusetts Institute of Technology
MSA : Mutualité sociale agricole
NACE : Nomenclature des activités économiques dans la Communauté européenne
NAF : Nomenclature d’activités française
NAP : Nomenclature d’activités et de produits
NEG : Nouvelle économie géographique
NTIC : Nouvelles technologies de l’information et de la communication
OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques
ONU : Organisation des Nations Unies
PAC : Politique agricole commune
4
PACA : Provence-Alpes-Côte d’Azur
PARTHAGE : Portail des agences régionales de l'hospitalisation
PIB : Produit intérieur brut
PUCA : Plan, urbanisme, construction et architecture
RCM : Revenu de capitaux mobiliers
RF : Revenu foncier
RGP : Recensement général de la population
RMI : Revenu minimum d’insertion
RSA : Regional Science Association
SAE : Statistique annuelle des établissements de santé
SAFER : Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural
SAU : Surface agricole utile
SCEES : Service central des enquêtes et études statistiques
SFER : Société française d’économie rurale
SIRENE : Situation au répertoire des entreprises et des établissements
SIRET : Situation au répertoire des établissements
SPL : Système productif local
SYAL : Système agroalimentaire localisé
TGV : Train à grande vitesse
UE : Union européenne
UNEDIC : Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce
USA : United States of America
UU : Unités urbaines
ZAU : Zonage en aires urbaines
ZAUER : Zonage en aires urbaines et aires d’emploi de l’espace rural
ZPIU : Zone de peuplement industriel et urbain
5
6
Sommaire
Sommaire ............................................................................................................................................... 7
Annexe 2 – Présentation de la base reconstituée des données des populations historiques .......................... 12
Annexe 3 – Régression linéaire entre la variation de la population entre 1872 et 1936 et la population
communale en 1872..................................................................................................................... 15
Annexe 4 – Méthode d’estimation des taux de présence communaux en 2003 et 2005 ................................. 16
Annexe 8 – Tableau comparatif des évolutions de l’emploi salarié privé dans le rural isolé, le rural sous faible
influence urbaine et la moyenne française entre 1993 et 2005 .................................................... 27
Annexe 9 – Nombre de travailleurs indépendants pour 100 000 habitants par secteur d’activité et par type
d’espace en 2005......................................................................................................................... 28
Annexe 11 – Structure départementale des revenus catégoriels DGI et évolution 2000/2004 ........................ 31
Annexe 12– Régression linéaire entre la part de retraités dans les immigrants 1990/1999 et le taux de
résidences secondaires dans le parc de logement en 1990......................................................... 36
7
Annexes de la troisième partie .......................................................................................................... 51
Annexe 1 – Commerces et services pris en compte dans l’élaboration des bassins de vie de l’INSEE .. 53
Annexe 2 – Protocole pour le calcul des revenus basiques sur données 2003/2005............................... 54
Annexe 5 – Nombre et taille des bassins ruraux selon leur typologie établie
d’après les revenus basiques................................................................................................ 75
Annexe 7 – Cartes des revenus catégoriels déclarés dans les bassins ruraux ........................................ 77
Annexe 8 – Analyse des variances réalisée sur le revenu imposable des habitants
des différents types de bassins ruraux .................................................................................. 79
Annexe 9 – Analyse des variances réalisée sur le revenu déclaré des habitants
des différents types de bassins ruraux .................................................................................. 81
Annexe 10 – Niveau des différents revenus déclarés par bassin rural .................................................... 83
Annexe 12 – Régression linéaire entre les prix immobiliers et différents indicateurs .............................. 85
Annexe 13 – Comparaison cartographique des prix immobiliers du parc locatif privé, des prix de vente
des bâtiments agricoles vendus à des non agriculteurs et du revenu foncier déclaré
par les propriètaires............................................................................................................... 87
Annexe 14 – Analyse des variances réalisée sur l’évolution du revenu imposable par habitant 1990/1999
par type de bassins ruraux .................................................................................................... 89
Annexe 15 – Liste des secteurs retenus pour qualifier l’offre de commerces et services de proximité ... 91
Annexe 16 – Régression linéaire entre les emplois salariés privés dans les commerces et services de
proximité, le taux de présence et la polarisation du bassin par un pôle rural........................ 92
Annexe 17 – Régression linéaire entre le nombre de travailleurs indépendants pour 1 000 habitants et le
taux de présence................................................................................................................... 94
Annexe 18 – Tableau des bassins ruraux qui s’écartent du modèle défini entre les travailleurs
indépendants et le taux de présence .................................................................................... 97
Annexe 19 – Profil des migrants venus s’installer entre 1990 et 1999 dans les bassins ruraux, selon le
type de bassins ..................................................................................................................... 98
8
ANNEXES DE LA PREMIÈRE PARTIE
9
10
Annexe 1 – Estimation de la population 2005
Depuis janvier 2004, le recensement de la population résidant en France est réalisé par
enquête annuelle. Chaque commune de moins de 10 000 habitants est recensée tous les cinq
ans, à raison d'une commune sur cinq chaque année. Dans les communes de 10 000 habitants
ou plus, une enquête est réalisée chaque année auprès d'un échantillon de 8 % des logements.
En 2008, l'ensemble des habitants des communes de moins de 10 000 habitants et 40 % de la
population des communes de 10 000 habitants ou plus auront donc été pris en compte dans le
cadre du nouveau recensement.
À partir de la fin de l'année 2008, à l'issue des cinq premières enquêtes de recensement,
l'Insee publiera pour la première fois la population légale de chaque commune, puis, à partir
de 2009, les résultats statistiques complets sur les habitants et leurs logements.
Cependant, avant 2008, l'INSEE diffuse des résultats provisoires issus des enquêtes annuelles
de recensement. Ces résultats provisoires portent, à la date du 15 juin 2007, sur 21 329
communes métropolitaines de moins de 10 000 habitants et 416 communes de plus de 10 000
habitants. Ces populations correspondent à la population communale de 2004, de 2005 ou de
2006, selon l’année d’enquête. Données disponibles à l’adresse suivante :
http://www.insee.fr/fr/recensement/nouv_recens/resultats/commune.htm
Par ailleurs, l’INSEE fournit les populations départementales de 1990 à 2005. Les estimations
au 1er janvier 2005 tiennent compte des résultats des enquêtes annuelles de recensement 2004
à 2006 au niveau départemental ainsi que des estimations basées sur le recensement de 1999
et mises à jour chaque année à partir des données d'état civil et de plusieurs sources
administratives. Données disponibles à l’adresse suivante :
http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/elp_reg_dep.htm
La population 2005 est estimée, dans ce travail, à partir des nouveaux recensements de la
population INSEE sur les communes enquêtées et sur les montants départementaux
consolidés. La population des communes non enquêtées est obtenue par différence entre la
population départementale et la population enquêtée, répartie au prorata du poids de ces
communes dans la population départementale de 1999.
Afin de prendre en compte les décalages des années d’enquêtes (2004, 2005 ou 2006), on a
calculé les évolutions annuelles respectives depuis 1999. Pour l’année 2005, la population des
communes enquêtées en 2004 est corrigée en additionnant une année d’évolution annuelle,
pour l’année 2006 on soustrait une année d’évolution annuelle.
11
Annexe 2 – Présentation de la base reconstituée
des données des populations historiques
La base de données des populations historiques indique, pour la quasi-totalité des communes
de France métropolitaine, la population communale de 1872 à 1954. A partir de 1962, les
données sont celles mises, par exemple, en ligne sur le site de l’INSEE1.
1
http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/psdc.htm
2
http://www.insee.fr/fr/insee_regions/languedoc/zoom/chif_cles/composition_communale.htm
3
http://www.insee.fr/fr/insee_regions/provence/rfc/detail.asp?theme=2
4
http://www.insee.fr/fr/insee_regions/auvergne/rfc/detail.asp?theme=2
5
Consulter le site passionnant : http://cassini.ehess.fr/cassini/fr/html/1_navigation.php
12
relevés à partir des archives départementales, n’est pas mise à la disposition du public, ce qui
est compréhensible.
On a pu néanmoins acquérir auprès de ce laboratoire les données pour quatre régions
françaises (Rhône-Alpes, Aquitaine, qui n’existent pas à l’INSEE, Lorraine et Centre que l’on
avait sous format papier)1.
Les données des communes de Champagne-Ardenne et de Franche-Comté ont été finalement
saisies à la main.
Concernant la période d’étude, l’année 1872 est apparue comme le seul début de période
possible. Avant cette date, seule une minorité de régions sont renseignées.
A partir de cette date, des vides subsistent néanmoins, comme l’indique le tableau :
REGIONS RP1872 RP1876 RP1881 RP1891 RP1901 RP1911 RP1921 RP1931 RP1936 RP1946 RP1954
nord
bourgogne
languedoc-
roussillon
paca
auvergne
Limousin
Poitou-Charentes
Picardie
ILE-DE-France
normandie
alsace
pays de la loire
bretagne 1841-1861
Midi-Pyrenees
centre
Lorraine
Rhone-alpes
aquitaine
ChampAgne-ardenne
franche-comte
haute-normandie 1821-1851 ts
(Seine Maritime) les 5 ans
années renseignées
années non renseignées
1
L’auteur remercie Mme Claude Motte pour ses conseils et sa disponibilité.
13
On a, par ailleurs, les données départementales sur l’ensemble des dates comprises entre 1872
et 1954 (source INSEE).
Les données manquantes communales ont été estimées à partir des trends constatés avant
(lorsque c’était possible) et après la date manquante, calés sur les tendances et totaux
départementaux. La base départementale nous a été fournie par Nicot, responsable du SIRIUS
(Service informatique de recherches interdisciplinaires, urbaines et spatiales) de l’Université
Paris-12.
Le cas du Languedoc-Roussillon et des Pays de la Loire posent problème puisque les séries ne
débutent qu’en 1891 pour la première, 1901 pour la seconde. On a hésité à estimer les années
manquantes à partir de 1872 pour ces deux régions. Cependant, l’observation des tendances
locales obtenues par la méthode d’estimation par trend, calée sur les montants
départementaux, semblait réaliste. On a décidé de les inclure dans la base.
Pour les régions où ce travail sur les codes géographiques des communes n’avait pas été fait,
on a procédé en deux étapes :
1) Les communes qui étaient séparées avant 1999, mais fusionnées en 1999, ont été
regroupées sans problème majeur.
2) Les communes séparées en 1999, mais agrégées à des dates antérieures, ont été
« désagrégées » au prorata de leur poids respectif en 1999. Cette méthode sous-tend
que ces deux ou trois, ou quatre communes parfois, aient connu les mêmes évolutions
de population sur l’ensemble de la période.
Ceci est très certainement faux mais ne perturbe pas les résultats dans la mesure où ces
données ne sont jamais mobilisées à l’échelle communale. Elles sont ré-agrégées dans
les analyses par type d’espace dans le zonage en aires urbaines et son complément
rural, ou à l’échelle des bassins de vie. Leur regroupement rend finalement bien
compte de la population locale du territoire étudié.
La base de données historiques porte sur l’ensemble des communes métropolitaines de 1999,
hormis celles de la Corse et du département de l’Eure, pour la période 1872-1954.
14
Annexe 3 – Régression linéaire entre la variation
de la population entre 1872 et 1936 et la population
communale en 1872
Avec :
Var. p1872/p1936 = variation du poids de la commune dans la population nationale
entre 1872 et 1936.
p1872 = poids de la commune dans la population nationale en 1872
Les résultats de la régression effectuée sur le logiciel XLstat sont les suivants :
Observations 35069,000
Somme des poids35069,000
DDL 35067,000
R² 0,759
R² ajusté 0,759
MCE 0,000
RMCE 0,008
MAPE 607,485
DW 1,969
Cp 2,000
AIC -342363,797
SBC -342346,867
PC 0,241
Paramètres du modèle :
Borne Borne
inférieure supérieure
Source Valeur Ecart-type t Pr > |t| (95%) (95%)
Constante -0,001 0,000 -34,337 < 0,0001 -0,001 -0,001
p1872 0,490 0,001 332,012 < 0,0001 0,488 0,493
Equation du modèle :
Var. p1872/p1936 = -1,399E-03+0,491*p1872
15
Annexe 4 – Méthode d’estimation
des taux de présence communaux en 2003 et 2005
Le passage des taux de présence départementaux au taux de présence communaux repose sur
les variables suivantes :
- TXPRES : le taux de présence départemental en 2003 (présence annuelle/population
2003*100) – source ministère du Tourisme ;
- REV/HAB : le revenu par habitant en 2003 :
o Revenu imposable DGI 2003 ;
o Population 2003 estimée à partir des trends 1990/1999 ;
- IPAT : indice de potentiel d’accueil touristique construit comme suit :
o le nombre de chambres d’hôtels en 2003 dans une commune pondéré par 2
(deux personnes par chambre) + le nombre d’emplacements de camping en
2003 pondéré par 3 + le nombre de résidences secondaires en 1999 pondéré
par 2,5 ;
o le tout divisé par la population 2003 estimée à partir des trends 1990/1999.
Le taux de présence est une fonction décroissante du revenu (plus on est « riche » et plus on
part en vacances) et croissante de l’indice de potentiel d’accueil touristique (plus le territoire
est touristique et plus la présence de touristes est importante).
Les résultats de la régression linéaire réalisée sur le logiciel XLStat sont les suivants :
Coefficients d'ajustement :
Observations 95,00
Somme des poids 95,00
DDL 92,00
R² 0,87
R² ajusté 0,87
MCE 10,90
RMCE 3,30
MAPE 2,30
DW 1,79
Cp 3,00
AIC 229,85
SBC 237,51
PC 0,14
16
Paramètres du modèle :
Borne Borne
inférieure supérieure
Source Valeur Ecart-type t Pr > |t| (95%) (95%)
Constante 69,87 2,79 25,03 < 0,0001 64,33 75,42
REV/HAB -0,0008 0,00 -3,12 0,00 0,00 0,00
IPAT 29,44 1,20 24,46 < 0,0001 27,05 31,83
Equation du modèle :
On applique ensuite les coefficients de l’équation sur l’ensemble des communes françaises
afin d’obtenir les taux de présence communaux. Les taux de présence ainsi obtenus
permettent de connaître le nombre de personnes présentes par commune d’après le modèle.
Ces données communales sont enfin consolidées sur les totaux départementaux.
La présence communale en 2005 est estimée selon la même méthode, en prenant cette fois, les
revenus 2005, la population estimée 2005 (cf. Annexe 1), l’hébergement touristique marchand
2005. Les résultats varient très peu entre 2003 et 2005. Cette actualisation a été introduite afin
de travailler sur des données à dates identiques selon les variables mobilisées.
17
Annexe 5 – Évolution de l’emploi salarié privé,
par type d’espace
Évolution de l’emploi UNEDIC par type d’espace (ZAUER 2002 – délimitation communale 1999), en
indice base 100 en 1993)
18
Annexe 6 – Secteurs basiques, domestiques et mixtes
Les qualificatifs employés par Laurent Davezies (2003a, 2003b) pour désigner les emplois
basiques purs, domestiques purs et mixtes reposent sur le principe suivant :
- les secteurs purement basiques se localisent pour produire ;
- les secteurs purement domestiques se localisent pour répondre à une demande locale ;
- les secteurs mixtes peuvent être amenés à répondre à une demande locale et extérieure.
19
Annexe 7 – Tableaux des 15 premiers
et 15 derniers secteurs en évolution 1993-2005
Il s’agit ici de distinguer les 15 secteurs en NAF220 qui ont créé le plus d’emplois dans les six
types de territoires définis dans le ZAUER (2002), dans lequel on distingue le rural isolé et le
rural sous faible influence urbaine.
L’ensemble de ces tableaux est construit à partir des données UNEDIC 1993 et 2005, en NAF
220.
PÔLES URBAINS
Variation 1993-
Intitulés secteurs 2005 de l'emploi
UNEDIC
Sélection et fourniture de personnel 390 839
Action sociale 197 263
d'emplois
Activités d'architecture et d'ingénierie 65 594
Transports urbains et routiers 60 962
Activités immobilières pour compte de tiers 60 708
Services divers fournis principalement aux entreprises 49 014
Activités pour la santé humaine 47 426
Construction d'ouvrages de bâtiment ou de génie civil 37 709
Activités liées au sport 29 158
Commerce de détail de produits pharmaceutiques et de parfumerie 25 030
Autres organisations associatives 22 167
Production de métaux non ferreux -5 639
Les 15 derniers secteurs (perte ou faible
Tissage -7 269
Fabrication d'autres machines d'usage spécifique -8 717
Fabrication d'équipements mécaniques -8 934
Fabrication d'autres ouvrages en métaux -8 968
Fabrication de meubles -8 983
Fabrication d'articles en papier ou en carton -12 306
Chaudronnerie -12 597
Imprimerie -24 527
Préparation des sites -28 417
Fabrication de vêtements en textile -63 065
Source : UNEDIC 1993-2005, calculs de l’auteur.
20
COMMUNES PÉRIURBAINES
Variation 1993-
Intitulés secteurs 2005 de l'emploi
UNEDIC
Action sociale 34 465
Construction d'ouvrages de bâtiment ou de génie civil 28 789
d'emplois
Activités juridiques, comptables et de conseil de gestion 13 691
Restaurants 13 657
Travaux de finition 13 482
Travaux d'installation 13 421
Commerce de gros d'équipements industriels 11 566
Manutention et entreposage 9 944
Commerce de gros de produits intermédiaires non agricoles 8 011
Services divers fournis principalement aux entreprises 7 079
Activités d'architecture et d'ingénierie 6 362
Fabrication de meubles 248
gain d'emplois)
Commerce de détail alimentaire en magasin spécialisé -114
Autres moyens d'hébergement de courte durée -150
Fabrication de charpentes et de menuiseries -159
Fonderie -510
Industrie laitière -528
Extraction de sables et d'argiles -544
Production de métaux non ferreux -550
Ennoblissement textile -645
Tissage -2 083
Fabrication de vêtements en textile -4 358
Source : UNEDIC 1993-2005, calculs de l’auteur.
21
COMMUNES MULTIPOLARISÉES
Variation 1993-
Intitulés secteurs 2005 de l'emploi
UNEDIC
Action sociale 8 962
Construction d'ouvrages de bâtiment ou de génie civil 6 354
d'emplois
Travaux d'installation 2 828
Activités juridiques, comptables et de conseil de gestion 2 785
Manutention et entreposage 2 326
Autres industries alimentaires 2 101
Activités de nettoyage 1 870
Activités d'architecture et d'ingénierie 1 364
Services personnels 1 346
Commerce de détail de produits pharmaceutiques et de parfumerie 1 303
Activités pour la santé humaine 1 226
Commerce de gros de produits agricoles bruts 54
gain d'emplois)
Ennoblissement textile -253
Industrie laitière -281
Chaudronnerie -398
Fabrication d'autres ouvrages en métaux -630
Transformation des matières plastiques -1 133
Fabrication d'articles en papier ou en carton -1 457
Tissage -1 661
Production de métaux non ferreux -1 741
Fabrication de verre et d'articles en verre -1 963
Fabrication de vêtements en textile -2 792
22
PÔLES RURAUX
Variation 1993-
Intitulés secteurs 2005 de l'emploi
UNEDIC
Sélection et fourniture de personnel 29 009
Commerce de détail en magasin non spécialisé 18 906
d'emplois
Construction d'ouvrages de bâtiment ou de génie civil 4 906
Activités immobilières pour compte de tiers 4 897
Autres industries alimentaires 4 295
Activités pour la santé humaine 3 995
Industrie des viandes 3 887
Transformation des matières plastiques 3 810
Travaux de finition 3 658
Services divers fournis principalement aux entreprises 3 551
Commerce de gros de produits intermédiaires non agricoles 3 353
Fabrication de machines agricoles 160
gain d'emplois)
Chaudronnerie -438
Ennoblissement textile -545
Préparation des sites -659
Commerce de gros de produits agricoles bruts -764
Commerce de gros de produits alimentaires -840
Commerce de véhicules automobiles -1 406
Tissage -1 949
Fabrication d'autres ouvrages en métaux -3 038
Fabrication de meubles -4 348
Fabrication de vêtements en textile -11 679
23
COURONNES D’UN PÔLE RURAL
Variation 1993-
Intitulés secteurs 2005 de l'emploi
UNEDIC
Production de métaux non ferreux 451
Travaux d'installation 343
d'emplois
Restaurants 185
Autres commerces de détail en magasin spécialisé 175
Préparation des sites 143
Traitement des métaux ; mécanique générale 116
Commerce de gros d'équipements industriels 114
Entretien et réparation de véhicules automobiles 111
Action sociale 88
Commerce de gros de produits intermédiaires non agricoles 78
Tissage 73
Forge, emboutissage, estampage ; métallurgie des poudres -26
gain d'emplois)
Commerce de gros de produits alimentaires -59
Fabrication d'éléments en métal pour la construction -61
Fabrication d'autres ouvrages en métaux -68
Ennoblissement textile -79
Fabrication d'ouvrages en béton ou en plâtre -85
Fabrication de vêtements en textile -129
Industrie laitière -178
Fabrication de meubles -200
Imprimerie -203
Industrie des viandes -209
24
RURAL SOUS FAIBLE INFLUENCE URBAINE
Note : Le rural sous faible influence urbaine en délimitation 1999 a été reconstitué en prenant en considération
les communes de l’espace à dominante rurale qui ne sont ni des pôles ruraux, ni des couronnes d’un pôle rural et
dont 20% ou plus des actifs travaillent dans une aire urbaine.
Variation 1993-
Intitulés secteurs 2005 de l'emploi
UNEDIC
Action sociale 16 437
Construction d'ouvrages de bâtiment ou de génie civil 9 528
d'emplois
Transformation des matières plastiques 3 880
Activités juridiques, comptables et de conseil de gestion 3 456
Sélection et fourniture de personnel 3 192
Activités pour la santé humaine 2 720
Traitement des métaux ; mécanique générale 1 991
Manutention et entreposage 1 716
Autres industries alimentaires 1 712
Commerce de gros d'équipements industriels 1 685
Activités de nettoyage 1 643
Fabrication d'articles en papier ou en carton 144
25
RURA L ISOLÉ
Le rural isolé est constitué des communes de l’espace à dominante rurale qui ne sont ni des pôles ruraux, ni des
couronnes d’un pôle rural, ni des communes sous faible influence urbaine.
Variation 1993-
Intitulés secteurs 2005 de l'emploi
UNEDIC
Action sociale 16 367
Transports urbains et routiers 8 456
d'emplois
Travaux de finition 2 899
Travaux d'installation 2 799
Activités pour la santé humaine 2 360
Autres commerces de détail en magasin spécialisé 2 357
Sélection et fourniture de personnel 2 302
Autres industries alimentaires 2 078
Activités immobilières pour compte de tiers 1 941
Autres moyens d'hébergement de courte durée 1 839
Hôtels 1 627
Fabrication d'autres machines d'usage spécifique 56
26
Annexe 8 – Tableau comparatif des évolutions
de l’emploi salarié privé dans le rural isolé,
le rural sous faible influence urbaine
et la moyenne française entre 1993 et 2005
En NAF220, le tableau indique les secteurs où le rural isolé et le rural sous influence urbaine
apparaissent comme plus performants soit l’un, soit l’autre, que la moyenne française ainsi
que les secteurs pour lesquels ces deux types d’espace sont sous-performants :
Restaurants
Fabrication de machines d'usage général
Autres organisations associatives Le rural isolé est plus performant
Autres commerces de détail en magasin spécialisé que le moyenne française quand le
Action sociale rural sous infuence urbaine est
Hôtels sous-performant
Transformation des matières plastiques
Industrie laitière
Forge, emboutissage, estampage ; métallurgie des poudres
Fabrication d'ouvrages en béton ou en plâtre
Fabrication d'équipements mécaniques
Fabrication de verre et d'articles en verre
Fabrication de meubles Le rural sous influence urbaine est
Fabrication de matériel médico-chirurgical et d'orthopédie plus performant que le moyenne
Fabrication d'autres ouvrages en métaux française quand le rural isolé est
Activités liées au sport sous-performant
Fabrication de vêtements en textile
Entretien et réparation de véhicules automobiles Rural isolé et rural sous influence
Commerce de véhicules automobiles urbaine voient leurs emplois
Commerce de gros de produits alimentaires progresser moins vite ou diminuer
Commerce de détail de produits pharmaceutiques et de parfumerie plus vite que la moyenne française
Pour l'ensemble de autres secteurs en NAF 220 significatifs les progressions sont plus importantes dans ces
espaces ruraux qu'en France métropolitaine
Source : UNEDIC 1993-2005, calculs de l’auteur.
27
Annexe 9 – Nombre de travailleurs indépendants pour
100 000 habitants par secteur d’activité et par type
d’espace en 2005
28
Les travailleurs indépendants en BNC (bénéfices non commerciaux)
rural ss
pôle comm. com. pôle couronne rural moy.
influ
urbain périurb. multipol. rural pôle rural isolé France
NAF700 Libellé urb.
85.1G Activités des auxiliaires médicaux 220 136 133 246 44 139 149 193
85.1C Pratique médicale 230 78 76 163 16 75 90 174
85.1E Pratique dentaire 67 31 31 75 2 28 31 54
74.1A Activités juridiques 82 6 6 18 2 7 8 53
74.1G Conseil pour les affaires et la gestion 45 22 15 12 11 13 10 34
74.2A Activités d'architecture 43 17 16 29 10 16 18 33
92.6C Autres activités sportives 18 16 13 120 22 29 119 29
92.3A Activités artistiques 27 17 18 20 24 25 28 24
74.2C Ingénierie, études techniques 18 14 11 8 9 9 8 15
80.4D Autres enseignements 17 10 9 11 7 8 8 14
74.1C Activités comptables 20 5 2 8 2 2 2 14
74.8F Secrétariat et traduction 16 9 7 5 5 7 8 13
93.0N Autres services personnels 13 7 7 10 5 8 6 11
80.4A Ecoles de conduite 10 7 8 22 0 7 7 10
74.8K Services annexes à la production 12 5 5 4 3 4 4 9
80.4C Formation des adultes et formation continue 11 8 6 4 6 5 5 9
72.1Z Conseil en systèmes informatiques 12 6 4 2 3 3 2 9
85.2Z Activités vétérinaires 7 6 6 18 0 9 12 8
85.1H Soins hors d'un cadre réglementé 9 5 4 7 5 5 5 7
74.2B Métreurs, géomètres 4 3 3 7 2 3 3 4
74.4B Agences, conseil en publicité 4 2 1 1 1 2 1 3
72.2C Autres activités de réalisation de logiciels 3 2 1 2 1 1 2 3
92.4Z Agences de presse 2 2 3 3 2 3 3 3
85.1K Laboratoires d'analyses médicales 3 1 1 5 0 0 1 2
93.0L Autres soins corporels 3 1 1 2 1 1 1 2
74.8A Studios et autres activités photographiques 3 1 1 1 0 1 1 2
22.2J Activités graphiques auxiliaires 2 1 0 1 0 1 0 2
92.3K Activités diverses du spectacle 2 1 1 1 0 1 1 1
70.3A Agences immobilières 2 1 1 1 2 1 1 1
74.6Z Enquêtes et sécurité 1 1 1 1 2 1 1 1
74.3B Analyses, essais et inspections techniques 1 1 1 1 1 1 1 1
73.1Z Recherche-développement en sciences phys. 2 1 0 1 0 0 0 1
74.1E Etudes de marché et sondages 2 1 1 0 0 0 0 1
93.0E Soins de beauté 1 0 0 1 0 0 0 1
29
Annexe 10 – Base de données sur l’emploi public
Les emplois publics de l’État (FPE) et des collectivités territoriales (FPT), à la commune, en
2004, sont fournis pour 3500 communes environ pour la FPT (55% des emplois sont
couverts) et 4500 pour la FPE (94% des emplois sont couverts) par le fichier INSEE des
emplois publics. On a, par ailleurs, les montants départementaux pour ces mêmes variables.
Les autres communes sont soumises au secret statistique, soit parce que les effectifs de la FPT
ou de la FPE sont inférieurs à 5, soit parce qu’il y a moins de trois établissements employeurs
dans la commune, soit, enfin, parce qu’un seul établissement représente 85% des effectifs.
Les emplois FPT et FPE pour ces communes soumises au secret statistique sont estimés
comme suit :
- les communes qui n’avaient pas d’emploi public en 1999 demeurent sans emploi
public en 2004 ;
- les emplois à répartir au sein de chaque département sont obtenus par différence entre
l’emploi départemental total et les sommes des emplois pour les communes non
soumises au secret statistique ;
- ce nombre d’emplois est réparti entre les communes en fonction du poids de la
commune dans le département (hors communes non soumises au secret statistique) en
termes de population estimée en 2004 ;
- ces calculs sont effectués distinctement pour la FPT puis pour la FPE, les communes
soumises au secret statistique n’étant pas les mêmes.
Note : Sur le département du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône, on a pris en compte, dans ces
correctifs, le nombre d’emplois d’enseignants par commune (données du rectorat). Les données ainsi
améliorées sont finalement équivalentes à celles que l’on obtient en s’en tenant à une clé de
répartition au prorata de la population.
Les emplois des titulaires de la fonction publique hospitalière sont obtenus par extraction des
données de la base SAE (statistiques annuelles d’établissements de santé) pour le personnel
médical et non médical. Les montants obtenus grâce à cette base peuvent être légèrement
biaisés : doubles comptes1 qui créent un écart de +8% par rapport aux chiffres publiés par le
ministère de la Fonction publique à l’échelle départementale. Les résultats finaux sont donc
consolidés par rapport aux montants départementaux du ministère de la Fonction publique.
1
Un établissement principal peu déclarer les effectifs de ses établissements secondaires, alors que ces mêmes
établissements secondaires ont également déclaré leurs effectifs.
30
Annexe 11 – Structure départementale
des revenus catégoriels DGI et évolution 2000/2004
31
LES RETRAITES
32
LES BÉNÉFICES NON COMMERCIAUX
33
LES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
34
LES BÉNÉFICES AGRICOLES
35
Annexe 12 – Régression linéaire entre la part de retraités
dans les immigrants 1990/1999 et le taux de résidences
secondaires dans le parc de logements en 1990
La régression linéaire a été réalisée sur le logiciel XLStat pour l’ensemble des 1916 bassins
de vie de l’INSEE.
Variables explicatives :
RS90 : taux de résidence secondaire dans le parc de logements en 1990, en % (Source INSEE,
RGP 1990).
Coefficients d'ajustement :
Observations 1916,000
Somme des poids 1916,000
DDL 1914,000
R² 0,313
R² ajusté 0,312
MCE 2,017
RMCE 1,420
MAPE 49,957
DW 1,303
Cp 2,000
AIC 1345,894
SBC 1357,010
PC 0,689
36
Analyse de la variance :
Paramètres du modèle :
Borne Borne
inférieure supérieure
Source Valeur Ecart-type t Pr > |t| (95%) (95%)
Constante 1,976 0,047 41,895 < 0,0001 1,884 2,069
RS90 0,065 0,002 29,516 < 0,0001 0,060 0,069
Equation du modèle :
retraités = 1,976+6,468E-02*RS90
37
La régression linéaire est à présent réalisée pour l’ensemble des 1 050 bassins ruraux
(réalisée sur le logiciel XLStat).
Estimation des coefficients selon la méthode des moindres carrés ordinaires
RÉSULTATS DE LA RÉGRESSION
Avec
Variable à expliquer :
retraitesRU : part des retraités dans l’ensemble des immigrants venus s’installer dans le bassin
rural entre 1990 et 1999, en % (Source INSEE, RGP 1999) ;
Variables explicatives :
RS90 : taux de résidence secondaire dans le parc de logement en 1990, en % (Source INSEE,
RGP 1990).
Coefficients d'ajustement :
Observations 1050,000
Somme des poids 1050,000 R² moins satisfaisant que dans la
DDL 1048,000 régression précédente qui porte
sur l’ensemble des bassins de vie.
R² 0,186
Ces moins bons résultats dans les
R² ajusté 0,185
bassins ruraux proviennent des
MCE 2,549 bassins d’altitude (stations de
RMCE 1,597 ski). La régression suivante porte
MAPE 45,280 sur les bassins ruraux hors bassins
DW 1,282 d’altitude.
Cp 2,000
AIC 984,466
SBC 994,379
PC 0,817
Analyse de la variance :
Somme des Moyenne des
Source DDL carrés carrés F Pr > F
Modèle 1 609,056 609,056 238,943 < 0,0001
Erreur 1048 2671,305 2,549
Total corrigé 1049 3280,361
Calculé contre le modèle Y=Moyenne(Y)
Paramètres du modèle :
Borne Borne
inférieure supérieure
Source Valeur Ecart-type t Pr > |t| (95%) (95%)
Constante 2,616 0,078 33,330 < 0,0001 2,462 2,770
RS90 0,047 0,003 15,458 < 0,0001 0,041 0,053
Equation du modèle :
retraitesRU = 2,616+4,706E-02*RS90
38
La régression est à présent réalisée sur l’ensemble des bassins ruraux hors bassins d’altitude,
soit les bassins dont le pôle se situe à une altitude maximale de 1 500 mètres (réalisée sur le
logiciel XLStat).
Estimation des coefficients selon la méthode des moindres carrés ordinaires
RÉSULTATS DE LA RÉGRESSION
Avec
Variable à expliquer :
retraitesRUalti : part des retraités dans l’ensemble des immigrants venus s’installer dans le
bassin rural entre 1990 et 1999, en % (Source INSEE, RGP 1999) ;
Variables explicatives :
RS : taux de résidence secondaire dans le parc de logement en 1990, en % (Source INSEE,
RGP 1990).
Coefficients d'ajustement :
Observations 994,000
Somme des poids 994,000
DDL 992,000
R² 0,403
R² ajusté 0,402
MCE 1,832
RMCE 1,354
MAPE 35,133
DW 1,480
Cp 2,000
AIC 603,872
SBC 613,676
PC 0,599
Analyse de la variance :
Somme des Moyenne des
Source DDL carrés carrés F Pr > F
Modèle 1 1226,511 1226,511 669,426 < 0,0001
Erreur 992 1817,524 1,832
Total corrigé 993 3044,034
Calculé contre le modèle Y=Moyenne(Y)
Paramètres du modèle :
Borne Borne
inférieure supérieure
Source Valeur Ecart-type t Pr > |t| (95%) (95%)
Constante 2,071 0,073 28,509 < 0,0001 1,929 2,214
RS90 0,084 0,003 25,873 < 0,0001 0,078 0,091
Equation du modèle :
retraitesRUalti = 2,071+8,448E-02*RS90
39
Annexe 13 – Flux migratoires par type de territoire
Extrait de :
« Migrations résidentielles de l’urbain vers le rural : différenciation sociale des profils et
ségrégation spatiale » de Yannick Sencébé et Denis Le Picier (CESÆR, UMR INRA-ENESAD,
Dijon)
Communication au colloque « Mobilité, différenciations et inégalités » ; 21-22 avril 2005 -
Lyon / Vaulx-en-Velin
40
Annexe 14 – Les émigrants des aires urbaines (1)
Distance moyenne parcourue par les émigrants des aires urbaines situées à moins de 200 kilomètres.
Migrations entre 1990 et 1999
41
Annexe 15 – Les émigrants des aires urbaines (2)
Distance moyenne parcourue par les émigrants des aires urbaines situées à moins de 200 kilomètres
de la commune d’installation et part des émigrants de longue distance (>200 km) dans le total des
émigrants
Segmentation construite par comparaison à la moyenne française sur ces deux indicateurs
42
Annexe 16 – Les émigrants des aires urbaines (3)
Distance moyenne parcourue par les personnes émigrants des aires urbaines à moins de
200 kilomètres et part des émigrants de longue distance (>200 km) dans le total des émigrants
%émigrants à 200km et +
90 y = 0,672x - 6,991
80 R2 = 0,6642
70
60 Série1
50
40
Paris
30 Linéaire
20 (Série1)
10
0
dist ance pondérée < 200km
0 50 100 150
Distance moyenne parcourue par les émigrants des aires urbaines à moins de 200 kilomètres et part
des émigrants de longue distance (>200 km) dans le total des émigrants avec prise en compte de
l’effet distance (ou taille des aires urbaines)
Segmentation construite par comparaison à la moyenne française sur ces deux indicateurs
Migrants entre 1990 et 1999
43
44
ANNEXES DE LA DEUXIÈME PARTIE
45
46
Annexe 1 – Construction d’une ressource territoriale
Schéma repris de :
Schéma p.688.
47
Annexe 2 – Bibliographie sur les résidences secondaires
en Europe
Bibliographie des travaux européens sur la question des résidences secondaires, établie par
Serge Schmitz pour son article à paraître dans les actes du colloque « Étrangers dans les
campagnes » - CERAMAC, Vichy les 18 et 19 mai 2006.
DE WILDE J., 1968. Résidences secondaires et tourisme de week-end en milieu rural, Revue belge de
géographie, 92/3 : 5-55.
DIJST M., LAZENDORF M., BARENDREGT A., SMIT L., 2005. Second Homes in Germany and
the Netherlands: Ownerschip and Travel Impact explained, Tijdschrift voor Economische en Sociale
Geografie, 96/2 : 139-152.
FOURNEAU F., 1983. Loisirs de proximité et résidences secondaires autour d‘une métropole
régionale : le cas de Séville, Norois, 120 : 619-624.
GALLENT N., TEWDWR-JONES M., 2001. Second Homes and the UK Planning System, Planning
Practice & Research, 16/1: 59-69.
GENTILESCHI M. L., 1991. Tourisme et peuplement de la côte en Sardaigne : les tendances en cours,
Méditerranée, 72/1 : 43-53.
GOFFIN L., 1969. Les résidences secondaires dans la province de Namur, Annales de sciences
économiques appliquées, 37/3 : 257-272.
GOJCETA D., 1978. Les résidences secondaires dans les bassins de l’Aisne et de la Lienne, enquête
géographique, Bulletin de la Société géographique de Liège, 14 : 97-116.
KOWALCZYK A., GRZESZCZAK J., 1992. Résidences secondaires en Pologne : étude de cas,
Bulletin de la Société languedocienne de géographie, 26/1-2 : 91-72.
MONTULET B., HUBERT M., JEMELIN Ch., SCHMITZ S., 2005. Mobilités et temporalités,
Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 226p.
ODERMATT A., ELSASSER H., 1991. Zweitwohnungen in der Region Basel, Berichte zur deutschen
Landeskunde, 65/2 : 421-440.
PAULY X., 2005. Les secondes résidences en province du Luxembourg, Mémoire de licence en
sciences géographiques, Université de Liège, Faculté des sciences, Liège, 138 p
PES A., 1996. Il ruolo delle seconde case nel processo di crescita urbana, problematiche e metodi di
studio, Revista geografica italiana, 103/3 : 447-462.
RENUCCI J., 1984. Les résidences secondaires en France, Revue de Géographie de Lyon, 59/1-2 : 29-
40.
SCHMITZ S., 2005. Qualité de l’environnement vs qualité de l’offre de services dans les campagnes
belges. Le bonheur est-il dans le pré ?, in S. Fleuret, Espaces, Qualité de vie et Bien-être, Presses de
l’Université d’Angers, Angers, 247-255.
48
SCHMITZ S., 2006. Monde rural : cadre de vide et de récréation, in Atlas de Belgique, Belspo,
Bruxelles, tome IV, sous presse.
SKOTNICKI M., 1992. Résidences secondaires en Pologne : données et remarques générales, Bulletin
de la Société languedocienne de géographie, 26/1-2 : 53-60.
STREEL C., 1994. Les résidences secondaires dans la commune de la Roche-en-Ardenne. Mémoire
de licence en sciences géographiques, Université de Liège, Faculté des sciences, Liège, 140 p.
TAUVERON A., 1983. Caravaniers et résidents secondaires en week-end, Norois, 120 : 525-530.
THOMAS I., 1979. Localisation des secondes résidences dans le Brabant wallon. Mémoire de
Licence en sciences géographiques, Université catholique de Louvain, Faculté des sciences, Louvain-
la-Neuve, 128 p.
URBAIN J.D., 2002. Paradis verts. Désirs de campagnes et passions résidentielles, Payot, Paris, 392 p.
49
50
ANNEXES DE LA TROISIÈME PARTIE
51
52
Annexe 1 – Commerces et services pris en compte
dans l’élaboration des bassins de vie de l’INSEE
Tableaux extrait du rapport : « Structuration de l’espace rural : une approche par les bassins de vie »,
juillet 2003, rapport de l’INSEE pour la DATAR avec la participation de IFEN, INRA, SCEES.
4 - Santé
3 - Éducation
53
Annexe 2 – Protocole pour le calcul des revenus basiques
sur données 2003/2005
L’ensemble du protocole des calculs de ces revenus basiques ainsi que les sources utilisées
sont décrites dans les pages qui suivent. Les données portent sur la période 2003/2005, selon
les sources.
La base productive privée recouvre l’ensemble des revenus captés par un territoire à
l’extérieur de son périmètre via les activités exportatrices, ainsi que des revenus issus de la
capitalisation mobilière et une partie des revenus fonciers.
Elle se décompose en :
o salaires des employés dans les entreprises exportatrices, localisées pour produire et
exporter hors de la zone d’implantation (hors salariés navetteurs qui participent eux à
la base résidentielle)
o bénéfices des indépendants, également localisés pour produire et exporter,
o revenus de capitaux mobiliers et revenus fonciers.
54
REVENUS DES RÉSIDENTS SALARIÉS DES ENTREPRISES EXPORTATRICES
DU SECTEUR PRIVÉ
La donnée de départ est le montant des traitements et salaires en 2005 à l’échelle communale
(source DGI).
Aux traitements et salaires de ces revenus d’activités sont ôtées, en premier lieu, les
indemnités journalières (cf. base sociale).
Les montants pour les communes non renseignées (secret statistique car moins de 11
déclarants) sont estimés à partir des écarts entre les montants des communes non renseignées
et les montants départementaux. Ces écarts sont répartis au prorata de la population 2005. Cet
écart est quasi-négligeable puisqu’il n’est que de 0,2% sur l’ensemble de la France
métropolitaine.
Sont ensuite soustraits les revenus des migrants alternants, qui participent à la base
résidentielle (salaires des actifs résidant dans le territoire étudié mais travaillant en dehors de
ce territoire – cf. base résidentielle).
Le montant des traitements et salaires d’activité hors indemnités journalières et hors salaires
des migrants alternants est ensuite ventilé entre revenu basique public, revenu basique privé,
revenu domestique privé (qui n’est pas inclus dans la base) au prorata des emplois1 respectifs
avec :
- pour la base publique le détail entre fonction publique territoriale, dont on retire 30%
des revenus considérés comme domestiques car directement couverts par les budgets
locaux2, fonction publique d’État et fonction publique hospitalière (voir infra pour le
détail de la base publique) ;
- pour la base privée, on retient les salaires des ouvriers agricoles ainsi que les salaires
des emplois des secteurs considérés comme basiques (voir détail des calculs ci-après).
1
Ceci implique que la ventilation sectorielle (privé - basique et domestique / public – État, territorial et hôpital)
des actifs résidant et travaillant dans la zone d’étude suit celle des emplois. Autrement dit, ceci implique, par
exemple, qu’un territoire qui enregistre une part importante d’emplois publics hospitaliers aura également une
part importante de ses résidents qui y travaillent et donc une part importante de ses revenus basiques qui sera
issue de cette fonction publique hospitalière.
2
Estimation réalisée après consultation de Rémy Prud’homme.
55
Remarque : On émet l’hypothèse d’une égalité des salaires entre secteur public et secteur
privé1. On considère en revanche que les salaires des ouvriers agricoles sont inférieurs de
moitié aux salaires moyens2.
Une partie, seulement, des salaires du secteur privé mais également des BIC et BNC sont
basiques (captés à l’extérieur du territoire via l’exportation), les autres salaires ou bénéfices
sont domestiques (activité localisée pour répondre à la demande locale).
La méthode proposée pour définir les activités basiques des activités domestiques est inspirée
des travaux de Hoyt sur le coefficient de localisation et de ses nombreuses extensions.
Ici, on distingue, dans un premier temps, trois types de secteurs au sein de la NAF700 :
- les secteurs purement basiques comprennent toutes les activités de fabrication et
d’extraction, activités plutôt industrielles donc ; l’agriculture (sylviculture, viticulture
et pêche comprises) ; les activités de recherche et développement ; la vente par
correspondance ; la production audiovisuelle… – soit 367 secteurs ;
- les secteurs purement domestiques comprennent tous les commerces de détail ; les
réparations (garagistes, cordonniers…) ; les hôtels, cafés, restaurants ; les secteurs
tournés vers les loisirs (discothèques, cinémas…) ; les services aux particuliers
(coiffeurs, teinturiers…), les activités médicales, sociales, l’enseignement primaire –
soit 106 secteurs ;
- les secteurs mixtes comprennent la construction, le commerce de gros, les services aux
entreprises, la réparation de matériel professionnel, l’enseignement secondaire et
1
Les salaires moyens de la fonction publique sont légèrement supérieurs à ceux du privé. Cependant, la variété
des situations aux échelles où l’on travaille ne permet pas d’appliquer le différentiel national.
De la même façon, les calculs portant uniquement sur les salaires privés montrent un écart de 7% en 2004 pour
les activités basiques par rapport aux activités domestiques au niveau national. L’Île-de-France biaise très
certainement ce résultat. Les données n’étant pas exploitables à une échelle régionale, il est impossible de
préciser ce différentiel de salaire pour la province. Face à tant d’incertitude, l’hypothèse, certes abusive, d’égalité
des salaires demeure finalement la plus raisonnable.
2
Le salaire moyen annuel d’après les sources DGI serait de 23 163 euros nets, celui des ouvriers agricoles de
1200 euros bruts (source MSA), soit un peu moins de 1 000 euros net par mois.
56
supérieur, les cliniques privées, les activités culturelles et récréatives… – soit 239
secteurs.
Il s’agit à présent de repérer dans les activités mixtes, la partie qui répond à une demande
extérieure (basique) ou à une demande locale (domestique).
Pour ce faire, on calcule les emplois de chaque secteur pour 1 000 habitants pour chaque zone
d’emploi en France, ainsi que la moyenne obtenue pour ces zones d’emplois.
Si l’on avait un seuil de 10 emplois juridiques pour 1 000 habitants en moyenne dans les
zones d’emplois françaises, on considèrerait que jusqu’à ce seuil, les emplois répondent à une
demande locale, ils sont domestiques et qu’au-delà, ils répondent à une demande extérieure,
ils sont basiques.
Ainsi, si un territoire compte 30 emplois juridiques pour 1 000 habitants alors que la moyenne
est de 10 pour 1 000, on considèrera que 10 de ces emplois sont domestiques et 20 sont
basiques.
Cependant, elle reste à ce jour une des approches privilégiées pour distinguer les activités sur-
représentées au sein d’un territoire et donc destinées en partie à une demande extra-
territoriale, des activités au contraire, dites domestiques.
Les emplois, et les revenus associés, dits « mixtes » sont donc au final ventilés entre revenus
basiques (ajoutés au basique pur) et revenus domestiques (ajoutés au domestique pur).
57
BÉNÉFICES AGRICOLES, BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX,
BÉNÉFICES NON COMMERCIAUX EN 2004/2005
Les données sont issues des sources DGI, à l’échelle communale pour les montants des
bénéfices 2005. Cependant, une partie des communes est soumise au secret statistique (moins
de 11 déclarants). Les sommes départementales consolidées permettent de connaître le
montant à répartir entre les communes non renseignées du département.
Par ailleurs, le fichier SIRENE 20041 indique le nombre d’entreprises gérées par une personne
physique, déclarée comme :
- artisan – commerçant (bénéfices industriels et commerciaux (BIC)) ;
- commerçant (BIC) ;
- artisan (BIC) ;
- agent commercial (BIC) ;
- profession libérale (bénéfices non commerciaux (BNC)).
La répartition des sommes manquantes (communes soumises au secret statistique) entre les
communes d’un même département se fait donc au prorata :
- du nombre d’agriculteurs exploitants dans les communes en 1999 pour les bénéfices
agricoles (BA) (un tiers des BA sont à répartir entre les communes non renseignées) ;
- du nombre de personnes physiques déclarant un BIC (SIRENE 2004) (12% des BIC
sont à répartir entre les communes non renseignées) ;
- du nombre de personnes physiques déclarant un BNC (SIRENE 2004) (14% des BNC
sont à répartir entre les communes non renseignées).
Les bénéfices agricoles sont considérés comme entièrement basiques (même si une part de ces
activités peut être destinée à une consommation locale, via la vente directe, par exemple, ces
circuits demeurent marginaux dans l’ensemble des bénéfices issus de l’agriculture).
La répartition entre montants des BIC et BNC basiques et domestiques se fait selon la
méthode décrite supra en NAF700.
1
L’harmonisation des dates entre les revenus DGI et les fichiers SIRENE sera effectuée dès que les données
SIRENE 2005 seront disponibles.
58
REVENUS DE CAPITAUX MOBILIERS ET REVENUS FONCIERS EN 2005
Les données sont issues des sources DGI, à l’échelle communale. Cependant, une partie des
communes est soumise au secret statistique (moins de 11 déclarants). Les sommes
départementales consolidées permettent de connaître le montant à répartir entre les communes
non renseignées du département, soit 2.5% des RCM et 1% des RF.
Cette répartition, marginale, se fait au prorata des cadres et professions supérieures en 1999
(forte corrélation entre ces variables).
Enfin, les RCM et la moitié des revenus fonciers (par convention1) sont considérés comme
basiques.
Remarque : les données des RCM n’incluent pas certaines déductions ou autres modes de
prélèvement tels que l’avoir fiscal.
BASE RÉSIDENTIELLE
La base résidentielle comprend l’ensemble des revenus qu’un territoire capte à l’extérieur
grâce à ses attraits résidentiels.
Cette base se décompose en :
- salaires des migrants alternants (ces personnes travaillent dans un territoire mais n’y
résident pas) ;
- les dépenses des touristes ;
- les retraites des résidents.
Les salaires des migrants alternants sont calculés à partir des salaires DGI et des fichiers
Mirabelle de l’INSEE.
Le taux des navetteurs pour un territoire est connu en 1990 et 1999 (fichiers Mirabelle,
INSEE). On aurait pu appliquer le trend annuel constaté entre 1990 et 1999 sur la période
1
Là encore, les données permettant de connaître le lieu de résidence du propriétaire pour un bien loué n’est pas
à disposition (filocom par exemple). Par ailleurs, le traitement des plus-values issues des ventes de biens
immobiliers soulève également une part d’incertitude quant à la destination finale de ces revenus qui contraint
finalement à ne pas intégrer ces sommes dans les bases.
59
suivante et estimer ainsi les migrants alternants en 2004. Cependant, rien n’indique, à ce jour,
si l’explosion des migrations constatée entre 1990 et 1999 vers les périphéries et le rural par
rapport à la période antérieure (1982/1990) s’est poursuivie, accélérée, ou ralentie. De plus il
est difficile de caler ces trends sur les évolutions de l’emploi au cours de la période 1999/2004
(période marquée par une embellie suivie d’un ralentissement). Pour ce travail, on a donc
conservé les taux de migrants alternants dans les bassins de vie en 19991.
Le montant de cette base est donc obtenu en retirant au total des salaires DGI la part qui
revient aux navetteurs2 au prorata de leur nombre dans l’ensemble des salariés.
Le montant de cette base est très sensible au zonage choisi. Plus le territoire est petit (l’échelle
grande) plus la part des migrants alternants est importante.
Le montant national de 108,1 milliards d’euros en 2005 est réparti entre les régions d’après
les pourcentages établis par le ministère du Tourisme (source : « Les chiffres-clés du tourisme
2005 »).
Ces montants régionaux sont ventilés par département au prorata des nuitées par type
d’hébergement, à savoir :
- emplacements offerts à la clientèle de passage en camping – pondéré par 1,5 (source
tableaux statistiques du ministère du Tourisme – hôtellerie de plein air) ;
- chambres d’hôtels classés et non classés – pondéré par 2 (source : tableaux statistiques
du ministère du Tourisme – hôtels) ;
- autres (hébergements non marchands et autres marchands – pondéré par 1) (obtenu par
différence entre les deux premiers points et le total des nuitées départementales
disponibles dans la publication sur la présence en 2005).
Remarque : les pondérations choisies (2 pour les dépenses des touristes en hôtels, 1,5 pour
les dépenses des touristes en camping, 1 pour les autres) correspondent aux estimations qui
ressortent des enquêtes locales (INSEE Languedoc-Roussillon, PACA par exemple) et
nationale (ministère du Tourisme).
1
On espère actualiser ces données à partir des fichiers DADS, pouvant être fournis par l’INSEE à l’échelle
cantonale.
2
L’hypothèse d’égalité des salaires entre les migrants alternants et les non migrants alternants est émise.
60
Enfin, ces montants sont répartis à la commune :
- pour les hôtels au prorata du nombre de chambres dans la commune par rapport au
département ;
- pour les campings au prorata du nombre d’emplacements pour la clientèle de passage
dans la commune par rapport au département ;
- pour le total « autres » :
- 37% des nuitées sont réalisées en résidences secondaires, location, gîtes…
(ventilées au prorata des résidences secondaires en 1999) ;
- 63% des nuitées sont réalisées dans la famille et chez les amis (ventilées au
prorata des résidences principales en 1999).
Une pondération conventionnelle a été appliquée entre ces deux types
d’hébergement pour prendre en compte les écarts de dépenses, l’hypothèse
étant que l’on dépense plus (2 fois) dans sa résidence secondaire que lors de
congés passés dans de la famille ou chez des amis.
LES RETRAITES
Le montant des retraites et pensions à la commune est issu directement des données DGI 2005
(184 milliards).
BASE PUBLIQUE
Les salaires perçus par les fonctionnaires de l’État, des hôpitaux publics et des collectivités
territoriales (en partie) constituent la base publique.
Les emplois publics de l’État (FPE) et des collectivités territoriales (FPT), à la commune, en
2004 sont donnés pour 3500 communes environ pour la FPT (55% des emplois sont couverts)
et 4500 pour la FPE (94% des emplois sont couverts) par le fichier INSEE des emplois
publics. Par ailleurs, on connaît les montants départementaux pour ces mêmes variables.
Les autres communes sont soumises au secret statistique, soit parce que les effectifs de la FPT
ou de la FPE sont inférieurs à 5, soit parce qu’il y a moins de trois établissements employeurs
dans la commune, soit, enfin, parce qu’un seul établissement représente 85% des effectifs.
61
- Les emplois FPT et FPE pour ces communes soumises au secret statistique sont
estimés comme suit :
- on fait l’hypothèse que les communes qui n’avaient pas d’emplois publics en
1999 n’en ont toujours pas en 2004 ;
- les emplois à répartir au sein de chaque département sont égaux à la différence
entre l’emploi départemental total et les sommes des emplois pour les
communes non soumises au secret statistique ;
- ce nombre d’emplois est réparti entre les communes en fonction du poids de la
commune dans le département (hors communes non soumises au secret
statistique) en termes de population estimée en 2004 ;
- ces calculs sont effectués distinctement pour la FPT puis pour la FPE, les
communes soumises au secret statistique n’étant pas les mêmes.
Les emplois des titulaires de la fonction publique hospitalière sont obtenus par extraction des
données de la base SAE (statistique annuelle des établissements de santé), pour le personnel
médical et non médical. Les montants obtenus grâce à cette base peuvent être légèrement
biaisés : doubles comptes qui se soldent par un écart de 8% par rapport aux chiffres publiés
par le ministère de la Fonction publique à l’échelle départementale. Les résultats finaux sont
donc consolidés sur les montants départementaux du ministère de la Fonction publique.
Le montant des traitements et salaires hors indemnités journalières et hors migrants alternants
est ventilé entre revenu basique public, revenu basique privé au prorata des emplois respectifs
avec pour la base publique :
- le détail entre fonction territoriale, dont on retire 30% des revenus considérés comme
domestiques car directement couverts par les budgets locaux1, fonction publique
d’État et fonction publique hospitalière.
1
Estimation réalisée en collaboration avec Rémy Prud’homme, expert sur ces questions.
62
BASE SANITAIRE ET SOCIALE
La base sanitaire et sociale regroupe l’ensemble des revenus de transferts que les habitants
d’un territoire perçoivent. Ces revenus de transferts comprennent :
- l’ensemble des allocations versées par les ASSEDIC (chômage, préretraite,
formation, allocation d’insertion etc.). Ces revenus sont à déclarer aux impôts et
sont donc fournis par la DGI ;
- les prestations familiales et allocations de logement (source Caisse d’allocations
familiales (CAF) et Mutualité sociale agricole pour les travailleurs de l’agriculture
(MSA)) ;
- le minimum vieillesse ; le minimum invalidité (ASV et ASI) ainsi que l’allocation
aux adultes handicapés (AAH) (source CAF et MSA) ;
- le revenu minimum d’insertion (RMI) (source CAF et MSA) ;
- les indemnités journalières de maladie et de maternité (source Direction de la
recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES)) ;
- les remboursements de soins de santé (hors dépenses réalisées dans les hôpitaux
publics qui sont attribuées à la base publique) (source DREES, Écosanté).
On a également inclus dans cette base une estimation de la part exportée des cliniques privées.
Il s’agit de la part des soins pratiqués en clinique privée sur un patient non résident de la zone
(ici le département à défaut de mieux). Enfin, les aides versées par les départements sont
également prises en compte car elles financent des emplois domestiques à domicile ou en
établissements. Il s’agit de l’aide aux personnes âgées (APA financée par un fond extérieur,
comme le RMI), de l’aide à l’enfance et au handicap.
Les déclarations fiscales de l’impôt sur le revenu détaillent le montant des traitements et
salaires non issus d’une activité. Il s’agit de l’ensemble des allocations versées par les
ASSEDIC. Ces allocations s’élèvent à 29 milliards d’euros en 2005.
Cependant, une partie des communes est soumise au secret statistique (moins de 11 déclarants
– pour un écart finalement d’à peine 3% avec les montants nationaux consolidés).
63
de chômeurs en 2004 dans les pseudo-cantons de l’INSEE (source ASSEDIC et ANPE - hors
chômeurs longue durée, non indemnisés), puis à la commune au prorata du nombre de
chômeurs en 1999.
Lexique des allocations versées par les ASSEDIC, autres que les allocations de chômage, et de
formation :
AI :
Allocation d’Insertion : allocation de chômage, à la charge de l’État, destinée aux anciens détenus, aux réfugiés, aux
salariés expatriés non affiliés à l’Assurance chômage et à certains salariés victimes d’un accident du travail ou d’une
maladie professionnelle. Cette allocation a remplacé l’Allocation forfaitaire en 1984.
AER :
Allocation Équivalent Retraite : allocation destinée aux demandeurs d'emploi ou Rmistes qui justifient de 160 trimestres
d'assurance vieillesse avant 60 ans. Elle a pour objectif d'assurer à ce public un minimum de ressources jusqu'à la retraite.
Elle est versée par les ASSEDIC pour le compte de l'État.
ARPE :
Allocation de Remplacement Pour l’Emploi : dispositif de cessation anticipée d’activité permettant à un salarié volontaire
de mettre fin à son activité professionnelle, sous certaines conditions, en bénéficiant d’un revenu de remplacement jusqu’à
son 60e anniversaire. L’entreprise s’engageait en contrepartie à embaucher pour remplacer le salarié qui part. Cette
allocation créée en 1995 était financée par les contributions des employeurs et des salariés. L'accès à ce dispositif n'est plus
possible depuis le 1er janvier 2003.
ASFNE :
Allocation Spéciale du Fonds National de l’Emploi : allocation de préretraite destinée aux salariés licenciés économiques
âgés d’au moins 57 ans (56 ans dans certains cas). L’entreprise envisageant de réduire ses effectifs doit conclure une
convention FNE avec les services du ministère du Travail. Ce dispositif de préretraite institué en 1980 est financé par le
budget de l’État avec une participation de l’entreprise, du salarié et de l’Assurance chômage.
ASS :
Allocation de Solidarité Spécifique : allocation de chômage, financée par le budget de l’État, destinée à venir en aide aux
demandeurs d’emploi ayant épuisé leurs droits à l’Assurance chômage. Depuis le 1er janvier 2004, elle est accordée sans
limitation de durée uniquement aux chômeurs âgés de 55 ans ou plus. Cette allocation attribuée sous condition de
ressources et de durée d’activité a remplacé l’Aide de secours exceptionnelle en 1984.
PRP :
Préretraite progressive : dispositif de préretraite destiné à venir en aide aux salariés qui acceptent de se retirer
progressivement de la vie active entre 55 et 60 ans, en travaillant à temps partiel. L’entreprise s’engage à embaucher en
contrepartie ou à compenser financièrement la réduction d’effectif. Ce dispositif créé en 1981 est financé par le budget de
l’État
64
INDEMNITÉS JOURNALIÈRES (IJ)
- Les IJ versées par la MSA s’élèvent à 207 millions au 31/12/2003. Elles sont réparties
au prorata des agriculteurs et des ouvriers agricoles en 1999.
Remarque : ces indemnités journalières sont déclarées dans les traitements et salaires
d’activités de la DGI.
Montant France métropolitaine : 1,7 milliards d’euros (dont 269 millions pour le minimum
invalidité), tous régimes confondus.
Les montants départementaux 2004 sont obtenus en multipliant le nombre de bénéficiaires par
département et par caisse en 2004 * montant moyen de l’allocation par caisse en 2004
Source : Documents de travail de la DREES - L’allocation supplémentaire du minimum vieillesse - Bénéficiaires
au 31 décembre 2004 - Franz KOHLER, n° 91 – décembre 2004
65
PRESTATIONS FAMILIALES ; ALLOCATIONS LOGEMENT ;
RMI ET ALLOCATIONS AUX ADULTES HANDICAPÉS (AAH)
Source : Prestations légales - Aides au logement - Revenu minimum d’insertion au 31 décembre 2004,
publication CAF.
RMI MSA :
- le nombre de bénéficiaires par département est multiplié par le montant moyen
mensuel du RMI par département (peu d’écart entre les départements), puis multiplié
par douze ;
- les montants départementaux sont répartis à la commune :
- au prorata du poids des ouvriers agricoles dans la commune par rapport au
département en 1999, pour les non salariés ;
- au prorata du poids des agriculteurs exploitants dans la commune par rapport
au département en 1999, pour les non salariés.
66
REMBOURSEMENTS DES SOINS DE SANTÉ
Les dépenses de santé en soins de ville1 prises en charge par la sécurité sociale
(CNAVTS, MSA, CANAM) ainsi que par les mutuelles, assurances et prévoyances
1
Les dépenses d’hôpitaux sont en réalité prises en compte dans les emplois publics hospitaliers
67
Redressements :
- aux consommations reconnues remboursées par la SS, on rajoute la part prise en
compte par les mutuelles, l’État et les collectivités territoriales (source DREES
2003) ;
- aux autres dépenses de santé, on retire au contraire cette fois la part payée
directement par les ménages (20% pour ce type de dépenses – source DREES 2003).
Au final, les bases sociales pour ces dépenses de santé en soins de ville, à savoir toutes les
dépenses de santé hors dépenses hospitalières qu’elles soient privées (cf. supra) ou publiques
(cf. base publique hospitalière) s’élèvent à environ à 70 milliards :
- 25 milliards pour les pratiques médicales ;
- 5 milliards pour les auxiliaires de santé ;
- 4 milliards pour les actes de biologie et prélèvements ;
- 25 milliards pour la pharmacie ;
- 10 milliards pour les autres dépenses de santé (ambulances, ventes d’appareils
médicaux, opticiens, cures thermales).
Le montant des dépenses de santé prises en charge par la SS, l’État, les collectivités
territoriales et les mutuelles, assurances et prévoyances, dans ce type d’établissements est égal
à 13,7 milliards en 2004 (14,5 milliards – 800 millions pris en charge par les ménages) :
- réparti aux départements au prorata des établissements de ce type et de leur emploi
salarié privé (UNEDIC, SIRET 2004) ;
- les montants départementaux sont ensuite répartis à la commune au prorata de la
population, corrigé d’un écart à la moyenne pour les plus de 60 ans.
Enfin, à ces montants de remboursements de soins des locaux, on additionne la part des soins
pratiqués sur des malades n’habitant pas la zone considérée. Ces montants sont estimés à
partir des taux d’exportation de soins hospitaliers (publics et privés) des départements (source
PARTHAGE), répartis entre les cliniques privées des départements (en fonction du nombre
de leurs salariés).
68
LES DÉPENSES SOCIALES DES DÉPARTEMENTS : APA ; APE ; APH
Les dépenses des départements d’aides aux personnes âgées (APA), à l’enfance (APE) et aux
handicapés (APH) sont publiées par la DREES à l’échelle des départements. Ces montants
sont répartis à la commune en fonction :
- du poids de la population communale en 2004 par rapport au département pour l’aide
aux personnes handicapées (3,4 milliards) ;
- du poids de la population de plus de 75 ans en 1999 dans la commune par rapport au
département pour l’aide aux personnes âgées (4,6 milliards) ;
- du poids des soldes naturels en 2004 dans la commune par rapport au département
pour l’aide aux enfants (5 milliards).
Cependant, seule l’APA et le RMI (voir supra) sont indirectement pris en charge par l’État1
(via le FFAPA pour l’APA et la TIPP pour le RMI). Même si le financement n’est pas aussi
explicitement extérieur pour les deux autres types de dépenses sociales des départements, on
les a introduites dans la base. En effet, ces revenus créent de l’emploi domestique dans les
établissements spécialisés dans l’accueil des enfants et des handicapés, ainsi que des emplois
d’aide à domicile. Leur poids est cependant très faible (0,3% en moyenne pour l’aide aux
handicapés et 0,4% pour l’enfance dans les bases moyennes des bassins de vie par exemple).
1
FFAPA : Fonds de financement de l’allocation personnalisée d’autonomie. Jusqu’en 2004, les recettes du fonds
de financement de l’APA proviennent de deux sources, une contribution versée par l’ensemble des régimes
obligatoires d’assurance vieillesse, et pour l’essentiel de 0,1 point du produit de la contribution sociale
généralisée. Depuis juillet 2004, le FFAPA est intégré à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie dont
le budget provient de la solidarité nationale (contribution sociale autonomie, contribution sociale généralisée,
contribution versée par les caisses de retraite) et des transferts de crédits de l’assurance maladie.
69
MONTANTS NATIONAUX
A titre indicatif, on donne les montants totaux à l’échelle de la France. Il ne s’agit pas des
revenus basiques, dont l’addition n’aurait pas de sens.
83,2 milliards de dépenses de santé en 2004 (hors remboursements des soins pratiqués dans
les hôpitaux publics) pris en charge par la Sécurité sociale, l’État, les collectivités territoriales,
les mutuelles, les assurances dont :
- 25 milliards en pharmacie ;
- 25 milliards pour les pratiques médicales et dentaires (généralistes et spécialistes) ;
- 5,5 milliards pour les auxiliaires médicaux (infirmières, kiné…) ;
- 4,3 milliards pour les laboratoires d’analyse et de prélèvements ;
- 9,7 milliards pour les autres biens médicaux ;
- 13,7 milliards pour les soins pratiqués en cliniques privées.
70
Annexe 3 – Résultats de l’analyse
en composantes principales
L’analyse en composantes principales (ACP) a été réalisée pour l’ensemble des 1050 bassins
ruraux sur le logiciel XLStat. Les revenus basiques pris en compte ont été calculés selon la
méthodologie décrite en Annexe 2. Les variables considérées sont les montants par habitant
des revenus basiques suivants :
Deux variables supplémentaires ont été introduites : le taux de pauvreté en 2000 (source
CNAF) et le revenu par habitant en 2004 (Source DGI, INSEE). Ces variables n’influent pas
sur le calcul et sont uniquement indiquées sur les graphiques pour faciliter l’interprétation des
axes.
71
RÉSULTATS DE L’ACP RÉALISÉES SUR XLSTAT
Analyse en Composantes Principales :
Valeurs propres :
F1 F2 F3 F4 F5 F6 F7 F8 F9 F10 F11 F12 F13 F14 F15 F16 F17 F18 F19 F20
Valeur propre 4,80 3,06 1,86 1,38 1,18 0,99 0,91 0,83 0,77 0,65 0,58 0,56 0,51 0,47 0,39 0,28 0,25 0,21 0,18 0,15
Variabilité (%) 24,00 15,29 9,31 6,91 5,90 4,93 4,53 4,15 3,86 3,26 2,88 2,82 2,56 2,34 1,95 1,40 1,23 1,04 0,90 0,74
% cumulé 24,00 39,29 48,59 55,50 61,41 66,34 70,87 75,02 78,88 82,14 85,02 87,84 90,40 92,74 94,69 96,09 97,32 98,36 99,26 100,00
Scree plot
6 100
4
60
3
40
2
20
1
0 0
F1 F2 F3 F4 F5 F6 F7 F8 F9 F10 F11 F12 F13 F14 F15 F16 F17 F18 F19 F20
axe
IJ BA
0,75 0,75
M igralt
rev/hab
0,5 prod
0,5
BNC FPE
RCM RF RF
FPH M VI RCMBIC
0,25 0,25
F2 (15,29 %)
TouRS
F3 (9,31 %)
Assedic
BA PF IJ
TouHOT BNC
0 0 FPT TouHOT
BIC prod Retr TouAM I
TouRS
M edical rev/hab
-0,25 FPH TouAM I -0,25
PF M edical pauvreté
FPE RM I
pauvreté FPT
-0,5 -0,5 M igralt
Retr
RM I
-0,75 M VI -0,75
Assedic
-1 -1
-1 -0,75 -0,5 -0,25 0 0,25 0,5 0,75 1 -1 -0,75 -0,5 -0,25 0 0,25 0,5 0,75 1
F1 (24,00 %) F1 (24,00 %)
72
ainsi qu’aux revenus issus des migrants alternants. Les bassins touristiques se distinguent des
bassins productifs et des bassins de migrants alternants.
L’axe 2 oppose les indemnités journalières, les migrants alternants (en positif) aux RMI,
minimum vieillesse, retraites (en négatif). Cet axe rend compte de l’âge des résidents, mais
également du nombre d’actifs. Les variables supplémentaires (revenu et pauvreté) indiquent
que l’axe 2 peut aussi renvoyer à une notion de niveau de revenus et de pauvreté.
L’axe 3 distingue les bénéfices agricoles (en positif) et les montants ASSEDIC (en négatif).
Cet axe permet de préciser le caractère agricole des bassins ainsi que l’importance des
allocations ASSEDIC et donc du taux de chômage.
La classification ascendante hiérarchique (CAH) est réalisée sur les coordonnées des variables
sur les trois premiers axes principaux de l’ACP (réalisée sur le logiciel XLStat), toujours pour
les 1050 bassins ruraux.
Le dendrogramme de la CAH est le suivant :
Dendrogramme Dendrogramme
700 683
600 583
500
483
Dissimilarité
Dissimilarité
400
383
300
283
200
183
100
83
C8
C5
C6
C4
C1
C7
C3
C2
0
La classe C8 ne comprenait que 7 bassins, on l’a regroupée avec la classe C5. La classe C7 ne
comprenait que 8 bassins, on l’a regroupée avec la classe C2. On a observé les montants par
habitant des différents revenus basiques de ces bassins avant les associer à d’autres classes.
Ces classes désignent les bassins suivants (repris dans l’ordre de leur apparition sur le
dendrogramme).
C5 (C8+C5) : les bassins de « tourisme »
C6 : les bassins « retraites, tourisme et revenus sociaux »
C4 : les bassins « retraites et tourisme »
C1 : les bassins « productifs, migrants alternants et ASSEDIC »
C3 : les bassins « retraites et agriculture »
C2 : les bassins « productifs et agricoles »
73
Annexe 4 – Part des différents types de bassins
par département
Productif / migrants alternants et ASSEDIC Productif et agricole
Source : calculs de l’auteur d’après DGI, INSEE, CAF, SAE, DREES, Écosanté, ministère du Tourisme.
74
Annexe 5 – Nombre et taille des bassins ruraux
selon leur typologie établie d’après les revenus basiques
Nombre de bassins et répartition de la population selon la typologie obtenue à partir des montants de
revenus basiques par habitant, 2004/2005
75
Annexe 6 – Profil sociodémographique et
caractéristiques socio-professionnelles
des résidents des six types de bassins ruraux
Productif - Retraites,
migrants Productif et Retraites et Retraites et tourisme et
Tourisme Ensemble
alternants - agricole agriculture tourisme revenus
ASSEDIC sociaux
DENSITE 51,3 35,6 20,7 28,5 30,5 48,6 35,5
AGE
% pop. de 0-19 ans 24,8 23,6 19,8 20,6 21,5 21,6 22,8
% pop. de 20-39 ans 25,4 24,6 22,5 22,3 24,4 22,8 24,1
% pop. de 40-59 ans 25,4 24,7 25,1 25,3 25,9 25,7 25,2
% pop. de 60-74 ans 15,6 17,0 19,8 19,5 18,1 18,9 17,5
% pop. de 75 ans (ou +) 8,8 10,1 12,8 12,3 10,1 11,1 10,4
ACTIVITE
% pop. active 43,5 42,9 40,6 39,7 43,2 39,5 42,1
Taux de chômage 11,8 9,8 9,9 13,8 11,6 18,3 11,9
% actifs non salariés dans pop. active 75,5 72,1 65,2 67,3 67,6 66,5 71,2
% actifs salariés dans pop. active 12,8 18,2 25,0 19,0 20,5 15,1 17,0
% agriculteurs exploitants 2,2 4,3 6,1 3,4 1,6 1,9 3,3
% artisans, commerçants, chefs d'entreprises 3,1 3,1 3,6 3,7 5,9 3,8 3,4
% cadres professions intellectuelles supérieures 2,4 2,1 2,1 2,3 3,0 2,5 2,3
% professions intermédiaires 7,3 6,5 6,0 6,4 8,3 6,9 6,8
% employés 11,2 10,8 10,9 11,5 13,9 11,9 11,3
% ouvriers 16,9 15,7 11,5 11,9 10,2 11,9 14,5
% retraités 21,4 23,7 27,6 26,9 24,2 24,9 24,0
% autres personnes sans activité professionnelle 35,6 33,8 32,2 33,8 33,0 36,3 34,4
Source : calculs de l’auteur d’après INSEE RGP 1999 pour les variables.
Typologie réalisée d’après DGI, INSEE, CAF, SAE, MSA, DREES, Écosanté, ministère du Tourisme (cf.
Annexe 4).
76
Annexe 7 – Cartes des revenus catégoriels déclarés
dans les bassins ruraux
Les cartes ci-dessous sont construites à partir des montants des différents revenus catégoriels
par nombre de déclarant de ces revenus (exemple : Montant des salaires / nombre de
personnes ayant déclaré un salaire) (Source DGI 2005). La discrétisation est réalisée en
quartile pour toutes ces variables.
Salaires Retraites
Sa laires
Sa laires
BNC
BIC
Discrétisation
en quartile
77
BA RCM
Revenus fonciers
Discrétisation
en quartile
78
Annexe 8 – Analyse des variances réalisée
sur le revenu imposable des habitants
des différents types de bassins ruraux
L’analyse des variances est réalisée sur le logiciel SAS. La procédure du modèle linéaire
général est choisi (proc GLM), car on travaille sur des données non équilibrées (les six types
de la variable « classe » ne regroupent pas le même nombre de bassins).
Variable à expliquer :
Rev/hab : revenu imposable par habitant en 2005, en euros (source DGI pour le revenu,
INSEE pour la population). L’estimation de la population 2005 est indiquée en Annexe 1 de
la première partie.
Variable qualitative :
Classe : variable qualitative indiquant le type de chaque bassin rural
bassins "productifs, migrants alternants,
prod-migralt-assedic : ASSEDIC"
prod-agric : bassins "productifs, agricoles"
retraite-agri : bassins "retraites et agricoles"
retraite-tourisme : bassins "retraites et tourisme"
tourisme : bassins "tourisme"
retraite-tour-social : bassins "retraites, tourisme, revenus sociaux"
RESULTATS - SAS®
Le test de Fisher indique que, globalement, les revenus moyens des six types de bassins sont
bien différents les uns des autres.
79
Comparaisons significatives au niveau 0.05 indiquées par ***
tourisme - retraite-tour-social ***
tourisme - prod-migralt-assedic ***
tourisme - prod-agric ***
tourisme - retraite-tourisme ***
tourisme - retraite-agri ***
retraite-tour-social - tourisme ***
retraite-tour-social - prod-migralt-assedic
retraite-tour-social - prod-agric
retraite-tour-social - retraite-tourisme ***
retraite-tour-social - retraite-agri ***
prod-migralt-assedic - tourisme ***
prod-migralt-assedic - retraite-tour-social
prod-migralt-assedic - prod-agric ***
prod-migralt-assedic - retraite-tourisme ***
prod-migralt-assedic - retraite-agri ***
prod-agric - tourisme ***
prod-agric - retraite-tour-social
prod-agric - prod-migralt-assedic ***
prod-agric - retraite-tourisme
prod-agric - retraite-agri ***
retraite-tourisme - tourisme ***
retraite-tourisme - retraite-tour-social ***
retraite-tourisme - prod-migralt-assedic ***
retraite-tourisme - prod-agric
retraite-tourisme - retraite-agri ***
retraite-agri - tourisme ***
retraite-agri - retraite-tour-social ***
retraite-agri - prod-migralt-assedic ***
retraite-agri - prod-agric ***
retraite-agri - retraite-tourisme ***
Groupe
tourisme A
retraite-tour-social B
prod-migralt-assedic B
prod-agric B C
retraite-tourisme C
retraite-agri D
Le revenu moyen des bassins touristiques diffère de celui de tous les autres bassins (rappel, le
revenu moyen par habitant est supérieur dans ces bassins touristiques). Le revenu moyen des
bassins « retraites et agricoles » diffère de celui de tous les autres bassins (rappel : le revenu
moyen par habitant est inférieur dans ces bassins « retraites et agricoles »). En revanche, les
revenus moyens des habitants des bassins « productifs, migrants alternants, ASSEDIC » et
« retraites, tourisme et revenus sociaux » ne sont pas significativement différents. Les revenus
moyens par habitant des bassins « retraites, tourisme et revenus sociaux » et « productifs
agricoles » ne sont pas significativement différents. Les bassins « retraites et tourisme » et
« retraites et agricoles » présentent également des niveaux de revenu par habitant équivalents.
80
Annexe 9 – Analyse des variances réalisée
sur le revenu déclaré des habitants
des différents types de bassins ruraux
L’analyse des variances est réalisée sur SAS. La procédure du modèle linéaire général est
choisi (proc GLM), car on travaille sur des données non équilibrées (le nombre d’effectifs
n’est pas le même pour toutes les modalités de la variable Classe).
Variable à expliquer :
Rev/hab-déclaré : revenu déclaré (avant abattements) par habitant en 2005, en euros (source
DGI pour le revenu, INSEE pour la population). L’estimation de la population 2005 est
indiquée en Annexe de la première partie.
Variable qualitative :
Classe : variable qualitative indiquant le type de chaque bassin rural
bassins "productifs, migrants alternants,
prod-migralt-assedic : ASSEDIC"
prod-agric : bassins "productifs, agricoles"
retraite-agri : bassins "retraités et agricoles"
retraite-tourisme : bassins "retraités et tourisme"
tourisme : bassins "tourisme"
retraite-tour-social : bassins "retraités, tourisme, revenus sociaux"
RESULTATS - SAS®
Somme des Carré
Source DF carrés moyen Valeur F Pr > F
Model 5 611694953 122338991 87.58 <.0001
Error 1044 1458333035 1396871
Corrected Total 1049 2070027988
Revenu
R-carré Coeff Var Racine MSE Moyenne
0.295501 10.37887 1181.893 11387.49
Le test de Fisher indique que, globalement, les revenus moyens des six types de bassins sont
bien différents les uns des autres.
81
Comparaisons significatives au niveau 0.05 indiquées par ***
tourisme - social ***
tourisme - prod-migralt-assedic ***
tourisme - prod-agric ***
tourisme - retraite-tourisme ***
tourisme - retraite-agri ***
retraite-tour-social - tourisme ***
retraite-tour-social - prod-migralt-assedic
retraite-tour-social - prod-agric ***
retraite-tour-social - retraite-tourisme ***
retraite-tour-social - retraite-agri ***
prod-migralt-assedic - tourisme ***
prod-migralt-assedic - retraite-tour-social
prod-migralt-assedic - prod-agric ***
prod-migralt-assedic - retraite-tourisme ***
prod-migralt-assedic - retraite-agri ***
prod-agric - tourisme ***
prod-agric - retraite-tour-social ***
prod-agric - prod-migralt-assedic ***
prod-agric - retraite-tourisme
prod-agric - retraite-agri ***
retraite-tourisme - tourisme ***
retraite-tourisme - retraite-tour-social ***
retraite-tourisme - prod-migralt-assedic ***
retraite-tourisme - prod-agric
retraite-tourisme - retraite-agri ***
retraite-agri - tourisme ***
retraite-agri - retraite-tour-social ***
retraite-agri - prod-migralt-assedic ***
retraite-agri - prod-agric ***
retraite-agri - retraite-tourisme ***
Groupe
tourisme A
retraite-tour-social B
prod-migralt-assedic B
prod-agric C
retraite-tourisme C
retraite-agri D
Le revenu moyen déclaré des bassins touristiques diffère de celui de tous les autres bassins
(rappel, le revenu moyen par habitant est supérieur dans ces bassins touristiques). Le revenu
moyen des bassins « retraites et agricoles » diffère de celui de tous les autres bassins (rappel :
le revenu moyen par habitant est inférieur dans ces bassins « retraites et agricoles »). En
revanche, les revenus moyens des habitants des bassins « productifs, migrants alternants,
ASSEDIC » et « retraites, tourisme et revenus sociaux » ne sont pas significativement
différents. Les bassins « retraites et tourisme » et « retraites et agricoles » présentent
également des niveaux de revenu par habitant équivalents.
82
Annexe 10 – Niveau des différents revenus déclarés
par bassin rural
Source : calculs de l’auteur d’après DGI ; d’après DGI, INSEE, CAF, SAE, MSA, DREES, Écosanté, ministère
du Tourisme pour la typologie.
En bleu, les montants supérieurs à la moyenne des bassins ruraux.
83
Annexe 11 – Écart entre revenu déclaré
et revenu disponible brut par type de bassin
Revenus déclarés et revenus disponibles bruts par habitant en 2004
Ecart
Revenus RDB/reven indice 100
déclarés / RDB / hab us moy
hab déclarés, RDB/hab
type de bassins ruraux en %
productif - migrants alternants - ASSEDIC 11 713 13 351 14,0 100
productif et agricole 11 193 12 916 15,4 97
retraites et agriculture 10 556 12 599 19,4 95
retraites et tourisme 11 053 13 130 18,8 99
tourisme 14 118 15 909 12,7 120
retraites, tourisme et revenus sociaux 11 799 14 017 18,8 105
Ensemble 11 472 13 300 15,9 100
84
Annexe 12 – Régression linéaire entre les prix immobiliers
et différents indicateurs
40000
y = 1,6934x + 4131,5
35000 R2 = 0,4529
0
euro s/m² - px appt ancien
0 2000 4000 6000 8000
Sources :
- Base des notaires pour les prix de vente des appartements anciens ;
- Fiches DGF pour les bases brutes des taxes d’habitation ;
- DGI pour le revenu imposable ;
- DGI pour le revenu foncier ;
- INSEE 2004 pour la population.
85
Comparaison dans les 96 départements métropolitains
entre les prix du parc locatif privé en 2006
1) et le revenu foncier déclaré par propriétaire (2004)
2) et la revenu imposable par habitant (2004)
0 Corse
0 2000 4000 6000 8000 10000 Rev foncier / proprio, en euros
Source : CLAMEUR pour les prix locatif du parc de logement privé 2006.
DGI pour le revenu par habitant 2004.
DGI pour le revenu foncier par propriétaire 2004.
INSEE pour l’estimation de la population 2004.
86
Annexe 13 - Comparaison cartographique
des prix immobiliers du parc locatif privé,
des prix de vente des bâtiments agricoles
vendus à des non agriculteurs
et du revenu foncier déclaré par les propriétaires
Les trois cartes présentées ci-après proviennent de publications différentes. Les échelles
utilisées sont différentes, le maillage et les dates également. Une telle analyse est donc à
réaliser avec beaucoup de prudence et ne doit pas donner lieu à des interprétations trop
ambitieuses. Malgré ces décalages spatiaux et temporels, on propose, tout de même, de mettre
en regard ces trois cartes, uniquement pour tenter d’identifier les biais que peut introduire le
revenu foncier déclaré par les propriétaires comme indicateur du prix du sol.
Prix du parc locatif privé en 2006, en €/m² Revenu foncier déclaré en 2005, en €
87
Prix des bâtiments d’habitation agricole acquis par des non-agriculteurs en 2003
88
Annexe 14 – Analyse des variances réalisée sur l’évolution
du revenu imposable par habitant 1990/1999
par type de bassins ruraux
L’analyse des variances est réalisée sur SAS. La procédure du modèle linéaire général est
choisi (proc GLM), car on travaille sur des données non équilibrées (le nombre d’effectifs
n’est pas le même pour toutes les modalités de la variable Classe).
Variable à expliquer :
EvolRev/hab : évolution du revenu imposable par habitant entre 1990 et 1999, en % (source
DGI pour le revenu, INSEE pour la population).
Variable qualitative :
Classe : variable qualitative indiquant le type de chaque bassin rural
bassins "productifs, migrants alternants,
prod-migralt-assedic : ASSEDIC"
prod-agric : bassins "productifs, agricoles"
retraite-agri : bassins "retraites et agricoles"
retraite-tourisme : bassins "retraites et tourisme"
tourisme : bassins "tourisme"
retraite-tour-social : bassins "retraites, tourisme, revenus sociaux"
RESULTATS - SAS®
Coeff Revenu
R-carré Var Racine MSE Moyenne
0.057079 56.13830 8.832674 15.73377
Le test de Fisher indique que, globalement, les évolutions du revenu sont bien différentes
entre les six types de bassins. Le R² est cependant extrêmement faible.
89
Comparaisons significatives au niveau 0.05 indiquées par ***
retraite-agri - retraite-tourisme ***
retraite-agri - tourisme ***
retraite-agri - retraite-tour-social ***
retraite-agri - prod-agric ***
retraite-agri - prod-migralt-assedic ***
retraite-tourisme - retraite-agri ***
retraite-tourisme - tourisme
retraite-tourisme - retraite-tour-social
retraite-tourisme - prod-agric
retraite-tourisme - prod-migralt-assedic ***
tourisme - retraite-agri ***
tourisme - retraite-tourisme
tourisme - retraite-tour-social
tourisme - prod-agric
tourisme - prod-migralt-assedic
retraite-tour-social - retraite-agri ***
retraite-tour-social - retraite-tourisme
retraite-tour-social - tourisme
retraite-tour-social - prod-agric
retraite-tour-social - prod-migralt-assedic
prod-agric - retraite-agri ***
prod-agric - retraite-tourisme
prod-agric - tourisme
prod-agric - retraite-tour-social
prod-agric - prod-migralt-assedic
prod-migralt-assedic - retraite-agri ***
prod-migralt-assedic - retraite-tourisme ***
prod-migralt-assedic - tourisme
prod-migralt-assedic - retraite-tour-social
prod-migralt-assedic - prod-agric
L’évolution du revenu par habitant entre 1990 et 1999 des bassins de « retraités et agricoles »
diffère de celui de tous les autres bassins.
Évolution du revenu imposable par habitant entre 1990 et 1999
Revenu Revenu
imposable par imposable par Evol.
hab. en 1990, hab. en 1999, 1990/1999, en
type de bassins ruraux en € en € %
productif - migrants alternants - Assedic 6 505 7 391 13,6
productif et agricole 6 328 7 205 13,9
retraites et agriculture 5 676 6 676 17,6
retraites et tourisme 5 999 6 929 15,5
tourisme 7 908 9 155 15,8
retraites, tourisme et revenus sociaux 6 211 7 126 14,7
Ensemble 6 316 7 250 14,8
Source : calculs de l’auteur d’après DGI et INSEE.
90
Annexe 15 – Liste des secteurs retenus
pour qualifier l’offre de commerces et services de
proximité
Liste des secteurs retenus pour qualifier l’offre en commerces et services de proximité, en NAF700
NAF700 Libellé
50.5Z Commerce de détail de carburants
52.1B Commerce d'alimentation générale
52.1C Supérettes
52.1D Supermarchés
52.2A Commerce de détail de fruits et légumes
52.2C Commerce de détail de viandes et produits à base de viande
52.2E Commerce de détail de poissons, crustacés et mollusques
52.2G Commerce de détail de pain, pâtisserie et confiserie
52.2J Commerce de détail de boissons
52.2L Commerce de détail de tabac
52.2N Commerce de détail de produits laitiers
52.2P Commerces de détail alimentaires spécialisés divers
52.3A Commerce de détail de produits pharmaceutiques
52.4R Commerce de détail de livres, journaux et papeterie
52.4X Commerce de détail de fleurs
52.6D Commerce de détail alimentaire sur éventaires et marchés
52.6E Commerce de détail non alimentaire sur éventaires et marchés
55.3A Restauration de type traditionnel
55.3B Restauration de type rapide
55.4A Cafés tabacs
80.1Z Enseignement primaire
85.1C Pratique médicale
85.1E Pratique dentaire
85.1G Activités des auxiliaires médicaux
85.3G Crèches et garderies d'enfants
85.3J Aide à domicile
93.0D Coiffure
91
Annexe 16 – Régression linéaire entre
les emplois salariés privés dans les commerces
et services de proximité, le taux de présence
et la polarisation du bassin par un pôle rural
La régression linéaire a été réalisée sur le logiciel XLStat pour l’ensemble des 1050 bassins
ruraux.
Variables explicatives :
PôleRU : variable indicatrice (dummies) pour désigner les bassins ruraux polarisés par un
pôle rural (si tel est le cas PôleRU = 1, sinon 0) (Source INSEE).
Présence : taux de présence dans le bassin rural en 2005 (le taux de présence est indiqué en
indice, soit un indice 100 si le nombre de personnes présentes est égal au nombre estimé de
personnes recensées en 2005 (cf. méthodologie en Annexe de la première partie). Un taux de
présence de 110 signifie par exemple que le nombre de personnes présentes à l’année est
supérieur de 10% au nombre de personnes recensées (cf. détail des calculs en Annexe 4 de la
première partie, source ministère du Tourisme).
Coefficients d'ajustement :
Observations 1050,000
Somme des poids
1050,000
DDL 1047,000
R² 0,306
R² ajusté 0,305
MCE 38,879
RMCE 6,235
MAPE 30,357
DW 1,673
Cp 3,000
AIC 3846,478
SBC 3861,348
PC 0,698
92
Analyse de la variance :
Paramètres du modèle :
Borne Borne
inférieure supérieure
Source Valeur Ecart-type t Pr > |t| (95%) (95%)
Constante 7,339 0,535 13,717 < 0,0001 6,289 8,389
PôleRu 2,291 0,387 5,924 < 0,0001 1,532 3,050
Presence 0,077 0,004 21,122 < 0,0001 0,070 0,084
Equation du modèle :
Proximité = 7,339+2,291*PôleRu+0,077*Presence
93
Annexe 17 – Régression linéaire entre
le nombre de travailleurs indépendants pour 1 000 habitants
et le taux de présence
La régression linéaire a été réalisée sur le logiciel XLStat pour l’ensemble des 1050 bassins
ruraux
Variables explicatives :
Présence : taux de présence dans le bassin rural en 2005 (le taux de présence est indiqué en
indice, soit un indice 100 si le nombre de personnes présentes est égal au nombre estimé de
personnes recensées en 2005 (cf. méthodologie en Annexe de la première partie). Un taux de
présence de 110 signifie par exemple que le nombre de personnes présentes à l’année est
supérieur de 10% au nombre de personnes recensées (cf. détail des calculs en Annexe 4 de la
première partie, source ministère du Tourisme).
Coefficients d'ajustement :
Observations 1050,000
Somme des poids 1050,000
DDL 1048,000
R² 0,560
R² ajusté 0,560
MCE 1770133,438
RMCE 1330,464
MAPE 19,500
DW 1,780
Cp 2,000
AIC 15107,892
SBC 15117,805
PC 0,441
94
Analyse de la variance :
Paramètres du modèle :
Borne Borne
inférieure supérieure
Source Valeur Ecart-type t Pr > |t| (95%) (95%)
Constante -828,372 103,514 -8,003 < 0,0001 -1031,489 -625,255
Présence 28,207 0,772 36,542 < 0,0001 26,693 29,722
Equation du modèle :
indépendants = -828,372+28,207*presence
20
15
Résidus normalisés
10
0
0 100 200 300 400 500 600
-5
-10
tx de présence
95
Cartographie des résidus de la régression entre travailleurs indépendants pour 1 000 habitants et taux
de présence en 2005 dans les bassins ruraux
96
Annexe 18 – Tableau des bassins ruraux
qui s’écartent du modèle défini
entre les travailleurs indépendants et le taux de présence
Le tableau ci-dessous désigne les bassins qui présentent des résidus (ou écarts au modèle)
importants dans la régression entre le nombre de travailleurs indépendants et le taux de
présence (cf. régression en Annexe 17). Le tableau indique le code du bassin (code commune
du pôle du bassin), la valeur du résidu et le nom du bassin.
97
Annexe 19 – Profil des migrants venus s’installer
entre 1990 et 1999 dans les bassins ruraux,
selon le type de bassins
Catégorie socioprofessionnelle des personnes venues s’installer dans le bassin rural entre 1990 et
1999, par type de bassin
98
99
Résumé
Les territoires éloignés des métropoles et de leur périphérie semblaient condamnés au déclin
démographique et économique. Les travaux dominants en Science Régionale permettent d’expliquer
le processus de métropolisation que connurent les pays industriels à partir des années 1980. Les
forces de dispersion proposées dans ces modèles expliqueraient la périurbanisation des hommes et
des entreprises mais semblent impuissantes face au dynamisme de territoires ruraux bien plus isolés.
Or, ces territoires éloignés des grandes agglomérations attirent de nouveaux résidents. Ce regain
démographique s’accompagne d’une progression rapide des emplois et du revenu. Cette dynamique
de développement des espaces non métropolitains interroge la théorie et les experts. La capacité
productive des espaces ne semble plus suffisante pour décrire et expliquer ces nouvelles tendances.
Selon la théorie de la base, produire et exporter des biens et services ne serait qu’un des moteurs des
économies locales. Les revenus de transferts, les salaires des agents de la fonction publique et des
migrants alternants, les retraites et les dépenses des touristes sont autant de revenus qui irriguent les
territoires indépendamment de leur capacité productive. Comment se combinent aujourd’hui ces
différents facteurs de développement local ? Face à la complexité du rapport individu-activité-territoire,
il paraît essentiel d’étudier conjointement l’ensemble des facteurs de développement et non
séparément ; mobiliser les différents modèles théoriques plutôt que de les opposer. Particulièrement
hétérogènes, encore productifs, de plus en plus résidentiels et récréatifs, les espaces ruraux français
constituent un terrain d'étude favorable pour comprendre l’émergence d’un (ou des) modèle(s) de
développement non métropolitain.
Mots clés
Développement local, Économie résidentielle, Développement rural, Théorie de la base
Resume
The regions further away from large towns and their peripheries could decline demographically and
economically. Principal Regional Science research studies show “metropolisation” in developed
countries since the 1980s. Although the forces of dispersion described in these studies explain pre-
urbanisation, they do not, however, include the development of remote rural areas, which are
attracting more and more residents. This demographic recovery accompanies a significant progression
of employment and revenue, and this development of non-metropolitan areas questions both the
theory and the experts. The productive capacity of these regions now seems insufficient to explain
these new trends. According to the economic base theory, the production of goods and services is
only one of the drivers of local economy. State transfer revenue, civil servant and commuter salaries,
retirement pensions and tourist spending are all contributing factors to the regions’ total revenue,
despite their lack of productive capacity. How are these different factors combined? Faced with the
complexity of the relationship person-activity-region, it is essential to consider all the factors as a
whole, rather than look at them separately; join together the different model theories, instead of
opposing them. Very different, still productive, more and more residential and recreational, the french
rural regions make for an area of study favourable for understanding the emergence of one or more
models of non-metropolitan development.
Keith Worth
Local Development, Residential Economy, Rural Development, Economic Base Theory