Commentaires in The Quran Seminar Comme

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 71

Mehdi Azaiez, Gabriel S.

Reynolds, Tommaso Tesei,


Hamza M. Zafer
The Qur’an Seminar
Commentary
Le Qur’an Seminar
A Collaborative Study of 50 Qur’anic Passages
Commentaire collaboratif de 50 passages coraniques
ISBN 978-3-11-044479-7
e-ISBN (PDF) 978-3-11-044590-9
e-ISBN (EPUB) 978-3-11-044545-9

Library of Congress Cataloging-in-Publication Data


A CIP catalog record for this book has been applied for at the Library of Congress.

Bibliographic information published by the Deutsche Nationalbibliothek


The Deutsche Nationalbibliothek lists this publication in the Deutsche Nationalbibliografie;
detailed bibliographic data are available in the Internet at http://dnb.dnb.de.

© 2016 Walter de Gruyter GmbH, Berlin/Boston


Printing and binding: CPI books GmbH, Leck
Printed on acid-free paper
Printed in Germany

www.degruyter.com
Dedicated to the Memory of Patricia Crone (1945 – 2015)
Contents
Commentary Sections by Scholar XIII

Acknowledgements XV

List of Abbreviations XVII

Introduction 1

Research Statements 13

QS 1 Q 1:1 – 7 47

QS 2 Q 2:30 – 39 58

QS 3 Q 2:178 – 179 68

QS 4 Q 2:255 – 256 72

QS 5 Q 3:1 – 7 80

QS 6 Q 3:33 – 63 88

QS 7 Q 4:1 – 28 98

QS 8 Q 5:32 107

QS 9 Q 5:109 – 120 111

QS 10 Q 6:74 – 83 118

QS 11 Q 8:1 – 19 124

QS 12 Q 9:29 – 32 133

QS 13 Q 9:111 – 118 142

QS 14 Q 11:25 – 99 151

QS 15 Q 12 169
X Contents

QS 16 Q 13:1 – 17 189

QS 17 Q 13:27 – 43 196

QS 18 Q 17:22 – 39 203

QS 19 Q 17:85 208

QS 20 Q 18:9 – 26 213

QS 21 Q 20:9 – 99 221

QS 22 Q 23 233

QS 23 Q 24:1 – 17 247

QS 24 Q 24:35 252

QS 25 Q 25:1 – 10 256

QS 26 Q 26:105 – 122 263

QS 27 Q 27:15 – 44 268

QS 28 Q 29 277

QS 29 Q 30:1 – 7 288

QS 30 Q 33:40 293

QS 31 Q 36:13 – 27 296

QS 32 Q 37:6 – 11 305

QS 33 Q 37:149 – 182 318

QS 34 Q 38:17 – 26 326

QS 35 Q 43:81 – 83 333

QS 36 Q 44:43 – 57 338

QS 37 Q 46:7 – 12 344
Contents XI

QS 38 Q 48 352

QS 39 Q 53 360

QS 40 Q 55 377

QS 41 Q 72 385

QS 42 Q 75 399

QS 43 Q 85 405

QS 44 Q 90 412

QS 45 Q 96 419

QS 46 Q 97 426

QS 47 Q 105 432

QS 48 Q 106 438

QS 49 Q 108 443

QS 50 Q 112 450

A Note on Qurʾān Seminar Sessions 457

Bibliography 460

Index 479
Research Statements 15

années 1990, après des études d’arabe, j’ai voulu comprendre quelle pouvait être la
structure du texte coranique, réputé ne pas en avoir. L’analyse structurale ne me
semblait pas très pertinente pour éclairer la question. C’est dans les études bibliques
que j’ai trouvé la réponse, dans l’analyse rhétorique du texte, selon les principes de
la rhétorique sémitique, très différente de la rhétorique grecque. Après une série
d’articles sur les sourates courtes, j’ai publié une longue étude sur la sourate 5, al-
Mā’ida (Cuypers 2007), suivie d’un livre théorique expliquant la méthode de l’ana-
lyse rhétorique, appliquée au Coran (Cuypers 2012b). Un livre reprenant les articles
sur les sourates courtes est paru en 2014 (Cuypers 2014). Tous les passages analysés
pour le Séminaire reprennent des points que l’on trouve dans le premier livre et le
troisième. Les illustrations de structures montrées dans des tableaux manifestent
toutes la fréquence, dans le Coran, de la structure circulaire ABA’, à côté d’autres
structures : les parallélismes (AA’, BB’ ou AB/A’B’), les structures en miroir (AB/B’A’)
ou les structures circulaires complexes (ABCD/x/D’C’B’A’).
Cette approche du texte est commandée par l’idée que le sens du texte ne se
révèle que si ce dernier est replacé dans son contexte littéraire immédiat, c’est-à-dire,
dans sa structure rhétorique. Ce principe d’exégèse s’oppose à la pratique tradi-
tionnelle d’une exégèse « atomiste », verset par verset, ainsi qu’à l’explication du
texte par les « occasions de la révélation » (asbāb al-nuzūl), lesquelles sont le plus
souvent des constructions a posteriori.
Le contexte intégral du texte est cependant plus large que la simple structure
rhétorique et englobe aussi l’intratextualité (tafsīr al-Qur’ān bi-l-Qur’ān) (Q. 8, 49) et
l’intertextualité, chaque fois que le texte coranique manifeste une référence à
d’autres textes, antérieurs à la rédaction du Coran (Bible, littérature parabiblique,
rabbinique etc.). C’est pourquoi il convient de joindre une étude intertextuelle à
l’analyse rhétorique, chaque fois que le sens y invite.
Je me réfère aux ḥadīṯs, non comme source d’interprétation, mais éventuelle-
ment comme confirmation d’une interprétation (QS 49, ḥadīṯ de ‘Ikrama).
L’usage, par le Coran, d’une rhétorique sémitique en usage chez les scribes de
l’Antiquité du Moyen Orient, et les nombreuses relations intertextuelles du Coran
avec le monde des écrits religieux qui circulaient à l’époque de son avènement,
situent clairement le Livre dans le contexte littéraire de l’Antiquité tardive.

* Michel Cuypers est docteur, chercheur à l’Institut Dominicain d’Etudes Orientales, le Caire, et
auteur de Le Fesitn. Une lecture de la sourate al-Mâ’ida (Paris, Lethielleux, 2007) et Une apocalypse
coranique. Une lecture des trente-trois dernières sourates du Coran (Pendé : Gabalda, 2014).

Dye
Je considère le Coran comme un texte du VIIe siècle, relevant pour l’essentiel du
« monde biblique » proche-oriental. Je me propose donc de l’étudier selon des
méthodes qui ont porté leurs fruits dans des domaines comparables, comme les
études bibliques (moyennant, bien sûr, les ajustements nécessaires) – notamment la
16 Research Statements

Formgeschichte et la Redaktionskritik (une telle approche ne nie nullement le substrat


arabe préislamique). On peut présenter une esquisse de cette méthode en cinq
points.
Premièrement, d’un point de vue strictement historique: il convient de s’écarter
du lien systématiquement établi entre le Coran et la Sīra. Il est souvent plus éclairant
de lire le Coran à la lumière de ses références à la littérature biblique, à savoir non
seulement la Bible et les écrits apocryphes, mais également la littérature exégétique,
homilétique et liturgique chrétienne et juive, sans oublier bien sûr les traditions
orales et populaires, plus difficiles cependant à étudier, puisqu’elles ont naturelle-
ment laissé moins de traces écrites. C’est là un moyen plus sûr de replacer le Coran
dans son contexte historique et littéraire.
Deuxièmement, d’un point de vue linguistique : il n’y a aucune raison de penser
que l’environnement dans lequel naît le Coran n’était pas, d’une façon ou d’une
autre, multilingue (l’ensemble du Proche-Orient l’était) – autrement dit, il convient
de reconnaître la présence de nombreuses traces de bilinguisme/multilinguisme
dans la langue même du Coran (le dogme théologique de « l’arabe pur » n’a aucun
sens linguistiquement et historiquement).
Troisièmement, du point de vue de la critique textuelle : il est parfois nécessaire
de faire abstraction de la mise en place des points diacritiques et des voyelles, telle
qu’on la trouve dans le textus receptus. Même si elle est correcte la plupart du temps,
elle ne remonte pas aux plus anciens témoins matériels du texte, et il n’existe pas de
tradition orale, fiable et ininterrompue, qui nous assurerait de sa nécessaire justesse.
Idéalement, il faut donc partir du rasm seul.
Quatrièmement, du point de vue de la Formgeschichte : quels que soient les
procédés littéraires et herméneutiques destinés à accréditer l’idée d’un ouvrage doté
d’une profonde unité, le Coran est moins un livre qu’un corpus (qui plus est com-
posite et, élément remarquable, sans cadre narratif), à savoir la réunion de textes
relativement indépendants, pour ne pas dire hétérogènes (relevant de genres litté-
raires assez variés, et qui n’étaient pas initialement destinés à être réunis en un
codex), dont la signification et la fonction originelles peuvent avoir été en partie
modifiées, voire masquées, par la collecte elle-même – notamment en devenant une
partie d’un corpus clos, bien déterminé, et considéré comme canonique. Il ne faut
donc pas confondre le Sitz im Buch (dans le texte canonique) et le Sitz im Leben
originel de la (strate la plus ancienne de la) péricope ou de la sourate.
Cinquièmement, du point de vue de la Redaktionskritik : si de nombreux pas-
sages du Coran datent de l’époque du Prophète, il ne convient pas pour autant de se
limiter a priori au Hijaz du premier tiers du VIIe siècle pour comprendre l’histoire de
la composition du Coran. Il semble en effet qu’il y ait eu une activité, non seulement
éditoriale, mais aussi rédactionnelle, après la mort du Prophète. Le texte (rasm seul)
issu de cette activité éditoriale et rédactionnelle prend vraisemblablement forme,
pour l’essentiel, entre le début et la fin de la seconde moitié du VIIe siècle. En
d’autres termes, le ou plutôt les rédacteurs du Coran sont bel et bien des auteurs (et
non de simples compilateurs) qui ont pu réorganiser, réinterpréter et partiellement
Research Statements 17

réécrire des textes préexistants, voire ajouter des péricopes, selon leur propre per-
spective. Les éléments indiquant un travail de rédaction, par des interpolations,
suppressions, ou diverses interventions éditoriales, doivent systématiquement être
pris en compte (le Coran est donc un texte certes composite, mais aussi composé). Il
convient par conséquent d’envisager le Coran selon une diachronie plus large que la
chronologie traditionnelle entre sourates mecquoises et médinoises (la confiance en
cette chronologie, souvent arbitraire, constitue d’ailleurs un des moyens les plus sûrs
de stériliser la recherche).

* Guillaume Dye est Professeur d’islamologie à l’Université Libre de Bruxelles (ULB). Ses travaux
portent notamment sur les études coraniques, envisagées, aussi bien du point de vue méthodolo-
gique que thématique, comme une partie des études bibliques. Il a récemment publié Partage du
sacré : transferts, dévotions mixtes, rivalités interconfessionnelles, Isabelle Dépret et Guillaume Dye
(Bruxelles-Fernelmont : EME, 2012) ; et Hérésies : une construction d’identités religieuses édité par
Christian Brouwer, Guillaume Dye et Anja van Rompaey, (Bruxelles : Editions de l’Université de
Bruxelles, 2015).

El-Badawi
The commentaries I provide in this volume are informed by my training as a historian
and philologist at the University of Chicago. Readers seeking more detail on my
views are encouraged to consult my book on The Qurʾān and the Aramaic Gospel Tra-
ditions (2013). For me, studying the Qurʾān means paying close attention to what
Nasr Hamid Abu Zayd (d. 2010) calls the “instruments of the text” (āliyyāt al-
naṣṣ). Therefore, comprehending the Qurʾān undoubtedly requires a mastery of its
“clear Arabic language” (lisān ‘arabī mubīn), including its rhyme and rhetorical de-
vices. However, our comprehension of the Qurʾān today has also benefited a great
deal from advancements in the areas of Biblical Studies, Historical Linguistics, Pale-
ography, Archeology and other related disciplines.
Despite the pious and legal nature of later Islamic tradition, a critical reading of
some reports in the tafsīr, sīra and ḥadīṯ literature can on occasion yield what Fred
Donner refers to as a “kernel of truth,” and provide researchers with useful insights
concerning the world surrounding the text. Islamic tradition is also useful since me-
dieval exegetes sought to better understand the Qurʾān in light of the Biblical canon
and loan words, like al-Biqāʿī (d. 808/1460) and al-Suyūṭī (d. 911/1505). Such works
provide a foundation upon which modern Qurʾānic Studies can build and improve.
In sum, the Qurʾān is most fully and honestly appreciated as a bridge between the
religious traditions of Late Antiquity and that of Islam.
It is fair to accept a number of traditional views concerning the Qurʾān which are
germane to the text itself, including the fact that it is an Arabic text from an Arabian
geographical context between Yathrib, Bakkā (Mecca?; Q 3:96) and Jerusalem (Q 17:1).
The details of this context, of course, are not so clear. It is also fair to accept that the
core of its articulation goes back to a man called Muḥammad, a messenger and
QS 1 49

Dye
Poème liturgique, à connotation eschatologique (v. 4). On y trouve de nombreuses
réminiscences bibliques, par exemple autour de l’opposition entre le droit chemin,
ou le chemin des justes, et le chemin des égarés (cf. v. 6 / Ps 1:6 et Isa 35:8). Le propos
de la Fātiḥa, ainsi que son statut et son rôle dans le culte musulman, invitent à une
comparaison avec diverses prières chrétiennes ou juives : le Pater Noster, mais aussi
le Psaume 1 (comme texte liminaire d’un corpus, cf. Cuypers 2004) ou l’enarxis de la
liturgie de Jean Chrysostome (comme poème destiné à être chanté au début d’un
office religieux, cf. Neuwirth & Neuwirth 1991).
Le v. 5 opère une transition remarquable : iyyāka naʿbudu fait référence aux
vv. 1– 4, et iyyāka nastaʿīn annonce les versets suivants. Par son contenu, mais aussi
par le subtil changement rythmique et phonétique qu’il introduit, notamment dans
ses premières syllabes, ce verset évoque un répons psalmodique (cf. Van Reeth 2006:
520 – 521). Autrement dit, dans le cadre du probable Sitz im Leben originel de la
sourate, les vv. 1– 4 apparaissent comme une doxologie, psalmodiée par le célébrant
principal, à laquelle répond la prière d’invocation que constituent les vv. 5 – 7,
psalmodiés par l’assemblée, ou par un autre célébrant. Cette division de la sourate
permet de rendre compte du changement de personne dans l’adresse à Dieu : les
vv. 1– 4 parlent de Dieu à la troisième personne du singulier, alors que les versets
suivants en parlent à la deuxième personne du singulier.
Le v. 7 est nettement plus long que les versets précédents, et il marque, dans sa
seconde partie (ġayri l-maġḍūbi ʿalayhim wa-lā l-ḍāllīn), une profonde rupture de
rythme par rapport au reste de la sourate. Il est très tentant d’y voir un ajout pos-
térieur. On notera par ailleurs le raccord entre le v. 6 (ihdinā l-ṣirāṭa l-mustaqīm) et Q
2:2 (ḏālika l-kitābu lā rayba fīhi hudan li-l-muttaqīn), par des motifs thématique (la
guidance) et phonétique (mustaqīm/muttaqīn, cf. Dye 2014:155 – 158, 164).

Hilali
A large number of apocryphal Islamic traditions (mawḍūʿ pl. mawḍūʿāt) are dedicat-
ed to the interpretation and to the “extension” of the Fātiḥa. The contrast between
the length of this chapter and the expansive aspect of its exegesis is striking. It is
a closed/open text. There is a sort of amplification of its importance in the exegesis
as well as in the ritual performances that replace in a way the ambiguity of its status
in the section of the Qurʾān. In the manuscript 27.1, Ṣanʿāʾ, this chapter is missing in
the upper text as well as in the lower text.

Imbert
La plus ancienne mention épigraphique de la sourate al-Fātiḥā entière et dans l’ordre
canonique des versets remonte à la période omeyyade. Il ne s’agit pas d’une in-
scription mais d’un graffito, œuvre d’un personnage anonyme. Gravé sur un bloc de
basalte, ce graffito coranique proviendrait du site de Ḫirbat al-Samrā’ (35 kilomètres
QS 2 59

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻟﺒﻘﺮﺓ‬
ِ ِ َْ ِّ
‫ﺽ َﺧﻠِﻴ َﻔ ًﺔ َﻗﺎﻟُﻮﺍ ﺃَ َﺗ ْﺠ َﻌ ُﻞ ِﻓﻴ َﻬﺎ َﻣ ْﻦ ُﻳ ْﻔ ِﺴ ُﺪ ِﻓﻴ َﻬﺎ َﻭ َﻳ ْﺴ ِﻔ ُﻚ ﺍﻟ ّﺪ َﻣﺎ َﺀ َﻭ َﻧ ْﺤ ُﻦ ُﻧ َﺴﺒّ ُﺢ ِﺑ َﺤ ْﻤ ِﺪ َﻙ‬ ‫ﺭ‬ْ ‫ﻷ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﻲ‬ ‫ﻓ‬
ِ ٌ
‫ﻞ‬ ‫ﻋ‬
ِ ‫ﺎ‬‫ﺟ‬ َ ‫ﻲ‬ ‫ﻧ‬ ‫ﺇ‬ ‫ﺔ‬
ِ َ
‫ﻜ‬ ‫ﺋ‬
ِ ‫ﻼ‬ َ ‫ﻤ‬ ْ ‫ﻠ‬ِ ‫ﻟ‬ َ
‫ﻚ‬ ‫َﻭﺇِ ْﺫ َﻗﺎ َﻝ َﺭ ُّﺑ‬
َ
ِ ِ َِ ِ
‫ﺿ ُﻬ ْﻢ َﻋﻠَﻰ ﺍ ْﻟ َﻤ َﻼ ِﺋ َﻜ ِﺔ َﻓ َﻘﺎ َﻝ ﺃَ ْﻧ ِﺒ ُﺌﻮ ِﻧﻲ ِﺑ َﺄ ْﺳ َﻤﺎ ِﺀ َﻫ ُﺆ َﻻ ِﺀ‬ َ ‫( َﻭ َﻋﻠَّ َﻢ ﺁَ َﺩ َﻡ ﺍ ْﻷ ْﺳ َﻤﺎ َﺀ ُﻛﻠَّ َﻬﺎ ُﺛ َّﻢ َﻋ َﺮ‬30) ‫ﺱ ﻟَ َﻚ َﻗﺎ َﻝ ﺇِﻧّﻲ ﺃَ ْﻋﻠَ ُﻢ َﻣﺎ َﻻ َﺗ ْﻌﻠَ ُﻤﻮ َﻥ‬ ُ ‫َﻭ ُﻧ َﻘ ّﺪ‬
‫( َﻗﺎ َﻝ َﻳﺎ ﺁَ َﺩ ُﻡ ﺃَ ْﻧ ِﺒ ْﺌ ُﻬ ْﻢ ِﺑﺄَ ْﺳ َﻤﺎ ِﺋ ِﻬ ْﻢ َﻓﻠَ َّﻤﺎ‬32) ‫( َﻗﺎﻟُﻮﺍ ُﺳ ْﺒ َﺤﺎ َﻧ َﻚ َﻻ ِﻋﻠْ َﻢ ﻟَ َﻨﺎ ﺇِ َّﻻ َﻣﺎ َﻋﻠَّ ْﻤ َﺘ َﻨﺎ ﺇِﻧَّ َﻚ ﺃَ ْﻧ َﺖ ﺍﻟْ َﻌﻠِﻴ ُﻢ ﺍﻟْ َﺤ ِﻜﻴ ُﻢ‬31) ‫ﺻﺎ ِﺩ ِﻗﻴ َﻦ‬ َ ‫ﺇِ ْﻥ ُﻛ ْﻨﺘُ ْﻢ‬
ْ ْ َ َ ْ َ ِّ ْ َ َ َ َ َ
ُ ْ ْ ُ
‫( َﻭﺇِﺫ ﻗﻠ َﻨﺎ ﻟِﻠ َﻤ َﻼ ِﺋ َﻜ ِﺔ‬33) ‫ﺽ َﻭﺃ ْﻋﻠَ ُﻢ َﻣﺎ ُﺗ ْﺒ ُﺪﻭ َﻥ َﻭ َﻣﺎ ﻛ ْﻨ ُﺘ ْﻢ َﺗﻜ ُﺘ ُﻤﻮ َﻥ‬ ُ ُ
ِ ‫ﺃ ْﻧ َﺒﺄ ُﻫ ْﻢ ﺑِﺄ ْﺳ َﻤﺎ ِﺋ ِﻬ ْﻢ َﻗﺎ َﻝ ﺃﻟَ ْﻢ ﺃﻗﻞ ﻟَﻜ ْﻢ ﺇِﻧﻲ ﺃ ْﻋﻠَ ُﻢ َﻏ ْﻴ َﺐ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍﻷ ْﺭ‬
‫( َﻭ ُﻗ ْﻠ َﻨﺎ َﻳﺎ ﺁَ َﺩ ُﻡ ﺍ ْﺳ ُﻜ ْﻦ ﺃَ ْﻧ َﺖ َﻭ َﺯ ْﻭ ُﺟ َﻚ ﺍ ْﻟ َﺠ َّﻨ َﺔ َﻭ ُﻛ َﻼ ِﻣ ْﻨ َﻬﺎ‬34) ‫ﺲ ﺃَ َﺑﻰ َﻭﺍ ْﺳ َﺘ ْﻜ َﺒ َﺮ َﻭ َﻛﺎ َﻥ ِﻣ َﻦ ﺍ ْﻟ َﻜﺎ ِﻓ ِﺮﻳ َﻦ‬ َ
َ ‫ﺍ ْﺳ ُﺠ ُﺪﻭﺍ َِﻵ َﺩ َﻡ َﻓ َﺴ َﺠ ُﺪﻭﺍ ﺇِ ّﻻ ﺇِ ْﺑﻠِﻴ‬
‫( َﻓ َﺄ َﺯﻟَّ ُﻬ َﻤﺎ ﺍﻟ َّﺸ ْﻴ َﻄﺎ ُﻥ َﻋ ْﻨ َﻬﺎ َﻓ َﺄ ْﺧ َﺮ َﺟ ُﻬ َﻤﺎ ِﻣ َّﻤﺎ َﻛﺎ َﻧﺎ ِﻓﻴ ِﻪ َﻭ ُﻗ ْﻠ َﻨﺎ‬35) ‫َﺭ َﻏ ًﺪﺍ َﺣ ْﻴ ُﺚ ِﺷ ْﺌ ُﺘ َﻤﺎ َﻭ َﻻ َﺗ ْﻘ َﺮ َﺑﺎ َﻫ ِﺬ ِﻩ ﺍﻟ َّﺸ َﺠ َﺮ َﺓ َﻓ َﺘ ُﻜﻮ َﻧﺎ ِﻣ َﻦ ﺍﻟ َّﻈﺎﻟِ ِﻤﻴ َﻦ‬
ِ َْ
‫( َﻓ َﺘﻠَ َّﻘﻰ ﺁَ َﺩ ُﻡ ِﻣ ْﻦ َﺭﺑّ ِﻪ َﻛﻠِ َﻤﺎ ٍﺕ َﻓ َﺘﺎ َﺏ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻪ ﺇِﻧَّ ُﻪ ُﻫ َﻮ‬36) ‫ﺽ ُﻣ ْﺴ َﺘ َﻘ ٌّﺮ َﻭ َﻣ َﺘﺎ ٌﻉ ﺇِﻟَﻰ ِﺣﻴ ٍﻦ‬ ِ ‫ﺾ َﻋ ُﺪ ٌّﻭ َﻭﻟَ ُﻜ ْﻢ ِﻓﻲ ﺍﻷ ْﺭ‬ ٍ ‫ﻀ ُﻜ ْﻢ ﻟِ َﺒ ْﻌ‬ ُ ‫ﺍ ْﻫ ِﺒ ُﻄﻮﺍ َﺑ ْﻌ‬
ِّ ْ
(38) ‫ﻑ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ َﻭ َﻻ ُﻫ ْﻢ َﻳ ْﺤ َﺰ ُﻧﻮ َﻥ‬ ٌ ‫( ﻗﻠ َﻨﺎ ﺍ ْﻫﺒِﻄﻮﺍ ِﻣ ْﻨ َﻬﺎ َﺟ ِﻤﻴ ًﻌﺎ َﻓ ِﺈ َّﻣﺎ َﻳﺄ ِﺗ َﻴ ّﻨﻜ ْﻢ ِﻣﻨﻲ ُﻫ ًﺪﻯ َﻓ َﻤ ْﻦ َﺗﺒِ َﻊ ُﻫ َﺪﺍ َﻱ َﻓ َﻼ َﺧ ْﻮ‬37) ‫ﺍﻟ ّﺘَ َّﻮﺍ ُﺏ ﺍﻟ َّﺮ ِﺣﻴ ُﻢ‬
ُ َ ُ ْ ُ
َ َ
(39) ‫ﺻ َﺤﺎ ُﺏ ﺍﻟ َّﻨﺎ ِﺭ ُﻫ ْﻢ ِﻓﻴ َﻬﺎ َﺧﺎﻟِ ُﺪﻭ َﻥ‬ ْ َ‫َﻭﺍﻟّ ِﺬﻳ َﻦ َﻛ َﻔ ُﺮﻭﺍ َﻭ َﻛ ّﺬ ُﺑﻮﺍ ِﺑ َﺂ َﻳﺎ ِﺗ َﻨﺎ ﺃُﻭﻟَ ِﺌ َﻚ ﺃ‬

Azaiez
Ce passage illustre la dimension polyphonique de l’énonciation coranique. La po-
lyphonie désigne comme le suggère l’étymologie grecque la pluralité des voix qui se
font entendre dans une énonciation (Larcher 1998: 203 – 224). Cette pluralité de voix
est notamment introduite par la présence du verbe qāla qui demeure le verbe le plus
usité du Coran (ʿAbd al-Bāqī: 663 – 684). Ainsi, la présence de discours rapportés,
d’échanges de paroles, d’indications quant à l’attitude des protagonistes de ces
mêmes dialogues (qui s’apparentent à des didascalies) permet de rapprocher ce court
récit à une forme scénique et théâtrale (Ben Taïbi 2009: 155). Or cette polyphonie et
cette “mise en scène” dialoguée sont en l’occurrence le cadre privilégié où peuvent
s’exprimer des « voix » qui s’affrontent ou qui sont en désaccords. Ces confrontations
dialoguées sont l’un des aspects les plus marquants à la fois de l’argumentation et de
la polémique dans le Coran (Larcher 2000: 453 – 454) mais aussi de la narration dans
le Coran (Azaiez: QS21). Ce style dialogique est sans doute à rapprocher des soghyata
(sing. soghita) ou poèmes religieux syriaques.

Dye
Ce passage combine trois péricopes : vv. 30 – 33 ; v. 34 ; vv. 35 – 38. Les versets 30 – 33
ont de fortes affinités avec les traditions rabbiniques (qui pouvaient facilement cir-
culer entre les différentes communautés de l’époque) : dialogue entre Dieu et les
anges, et enseignement des noms des êtres à Adam (comparer Gen 2:20, où c’est
l’homme qui nomme les êtres).
Le v. 34 fait allusion à l’histoire de la prosternation des anges, que l’on trouve
dans plusieurs apocryphes chrétiens. L’épisode est narré moins allusivement ailleurs
dans le Coran (Q 7:11– 24; 15:26 – 43; 17:61– 65; 18:50 – 51; 20:115 – 124; 38:71– 85). La
question centrale est celle de la hiérarchie entre l’homme et les anges. S’y ajoutent
deux autres questions: comment Dieu a-t-il permis à Satan de tenter l’homme et de
conduire à la chute d’Adam? Quelle est l’origine des différents noms du diable? Ces
60 QS 2

questions, à des degrés divers, se retrouvent dans le Coran. La première pose tou-
tefois un problème.
Logiquement, les anges devraient être supérieurs à l’homme (ils ont été créés
avant, d’une matière plus éminente). Si Adam est supérieur, c’est parce qu’il a été
créé à l’image de Dieu. Les récits chrétiens reposent ainsi sur l’idée que l’homme est
créé à l’image de Dieu et sur une typologie Adam/Christ. Cette typologie est présente
dans le Coran, même si ce n’est pas dans le cadre d’une christologie chrétienne
« orthodoxe » (cf. Van der Velden 2007 et Reynolds 2010: 46 – 54). Mais comment
comprendre la prosternation des anges, si aucune explication de la supériorité de
l’homme n’est donnée, et si la thèse de la création de l’homme à l’image de Dieu
n’est pas affirmée ? Le Coran, et l’islam à ses débuts, ne sont pas clairs sur ce point
(cf. Q 42:11 et le ḥadīṯ ḫalaqa llāhu Ādama ʿalā ṣūratihi). Les destinataires du message
coranique étaient sans doute familiers des récits chrétiens et savaient pourquoi les
anges devaient se prosterner. Il se pourrait cependant que Q 2:30 – 33 (récit unique
dans le Coran) entende donner une explication différente : les anges ne savent pas
répondre à la question posée par Dieu, Adam si – pour des raisons qui relèvent, non
des capacités naturelles de l’homme, mais seulement de la décision divine. Le texte
insiste ainsi sur le fossé qui sépare Dieu et Adam, qui tient son savoir uniquement de
Dieu.

Grodzki
Typical of the Qurʾānic narrative is the re-telling and elaborating on well-known old
Jewish-Christian topoi circulating in the Middle East at that time. Here – the story of
creation, prostration, fall of angels and the original sin of man. A question arises: if
Adam was not created in God’s image, why would the angels of the Qurʾān bow to
him? Would the answer lie in the here enigmatic term ḫalīfa? Or simply a test of obe-
dience? Or knowledge of something that the angels wouldn’t know, but which was
revealed to Adam or inscribed into his nature (perhaps as a task for him to fulfill
through his creation and life)?

Hilali
In the core of this passage there is the element of the test given both to Adam, to the
Angels and to Iblis and by extension, to human beings. The test is a leitmotiv in re-
ligious literature and in the ancient Arabic narratives. Knowledge about the Proph-
ets, their mission and their access to legitimacy is often introduced by the “theatral-
isation” of the test. We find the same structure in ḥadīṯ literature especially in
the narratives about the dialogues between the Prophet Muḥammad and non-Mus-
lims. The function of this argumentation is related to the faith issue often presented
in Qurʾānic discourse to a matter of knowledge (Those who know and those who do
not).
QS 3 Q 2:178 – 179
. O believers, retaliation for the slain is or- . O les croyants! On vous a prescrit le ta-
dained upon you: lion au sujet des tués: homme libre pour
A free man for a free man, a slave for a slave, a homme libre, esclave pour esclave, femme
female for a female. pour femme. Mais celui à qui son frère aura par-
But if a brother is forgiven by another regarding donné en quelque façon doit faire face à une re-
what is ordained, then gracious pardon must be quête convenable et doit payer des dommages
offered, and seemly deliverance of payment de bonne grâce. Ceci est un allègement de la
made. This is an act of leniency from your part de votre Seigneur, et une miséricorde.
Lord and a mercy. Whoever aggresses thereafter, Donc, quiconque après cela transgresse, aura
painful torment awaits him. un châtiment douloureux.
. The prospect of retaliation saves lives, O . C’est dans le talion que vous aurez la
you who are possessed of minds – perhaps préservation de la vie, ô vous doués d’intelli-
you will fear God. gence, ainsi atteindrez-vous la piété.

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻟﺒﻘﺮﺓ‬
َ ُْ ُْ ِ َ
َ َ َ َ ْ َ ْ ْ ْ ّ ْ ُ ْ َ ْ َ
‫ﺹ ِﻓﻲ ﺍﻟﻘﺘﻠﻰ ﺍﻟ ُﺤ ّﺮ ِﺑﺎﻟ ُﺤﺮ َﻭﺍﻟ َﻌ ْﺒ ُﺪ ِﺑﺎﻟ َﻌ ْﺒ ِﺪ َﻭﺍﻷﻧﺜﻰ ِﺑﺎﻷﻧﺜﻰ ﻓ َﻤ ْﻦ ُﻋ ِﻔ َﻲ ﻟ ُﻪ ِﻣ ْﻦ ﺃ ِﺧﻴ ِﻪ ﺷ ْﻲٌء‬ ْ ُ ‫ﺼﺎ‬ َ ‫َﻳﺎ ِﺃَ ّﻳُ َﻬﺎ ﺍﻟّ ِﺬﻳ َﻦ ﺁ َﻣﻨﻮﺍ ﻛ ِﺘ َﺐ َﻋﻠ ْﻴﻜ ُﻢ ﺍﻟ ِﻘ‬
ْ ُ َ ُ ُ َ
ِ
ُ َ ٌ ُ
‫( َﻭﻟَﻜ ْﻢ ِﻓﻲ‬178) ‫ﻒ ِﻣ ْﻦ َﺭﺑّﻜ ْﻢ َﻭ َﺭ ْﺣ َﻤﺔ َﻓ َﻤ ِﻦ ﺍ ْﻋ َﺘ َﺪﻯ َﺑ ْﻌ َﺪ َﺫﻟِ َﻚ َﻓﻠَ ُﻪ َﻋ َﺬﺍ ٌﺏ ﺃﻟِﻴ ٌﻢ‬ َ
ٌ ‫ﻑ َﻭﺃ َﺩﺍ ٌﺀ ﺇِﻟَ ْﻴ ِﻪ ِﺑ ِﺈ ْﺣ َﺴﺎ ٍﻥ َﺫﻟِ َﻚ َﺗ ْﺨ ِﻔﻴ‬ ِ ‫َﻓﺎﺗّ َﺒﺎ ٌﻉ ِﺑﺎﻟ َﻤ ْﻌ ُﺮﻭ‬
ْ
َ َ َ ْ ُ
(179) ‫ﺹ َﺣ َﻴﺎ ٌﺓ َﻳﺎ ﺃﻭﻟِﻲ ﺍﻷ ْﻟ َﺒﺎ ِﺏ ﻟَ َﻌﻠّ ُﻜ ْﻢ َﺗ ّﺘ ُﻘﻮ َﻥ‬ ِ ‫ﺼﺎ‬َ ‫ﺍ ْﻟ ِﻘ‬

Dye
L’arrière-plan biblique et évangélique de la lex talionis est bien connu (Exod 21:24,
Lev 24:17– 22, Deut 19:21, Matt 5:38 – 42). Ce passage s’insère dans un ensemble plus
large de règles adressées aux croyants (yā-ayyuhā allaḏīna āmanū, cf. vv. 172, 183). Le
Coran choisit ici, comme souvent, une voie médiane : la règle antérieure est rappelée
– elle n’est donc pas abolie, car il convient de juger selon ce qu’Allāh a fait descendre
(Q 5:45), mais elle est allégée, ou admet des exceptions, qui peuvent être encoura-
gées. Le v. 178 et Q 5:45 paraissent complémentaires. Tous deux sont relatifs à la règle
du talion, et aux cas où elle peut être suspendue : le premier insiste sur l’attitude que
doit adopter le coupable si la famille de la victime accorde son pardon, alors que le
second encourage la victime à accorder son pardon. Cela revient in fine à une
combinaison d’attitudes rabbinique et chrétienne. Cette stratégie permet de se dis-
tinguer des juifs et des chrétiens et de proposer une voie susceptible de leur paraître
attrayante.
Le v. 178 soulève cependant une difficulté sérieuse, comme l’a bien vu Stefanidis.
Selon une certaine lecture, il permet, en représailles au meurtre d’un homme libre
(d’une femme, d’un esclave) de tuer un homme libre (une femme, un esclave) qui ne
soit pas le meurtrier. Une telle règle (qui pourrait être implicitement condamnée par
Q 17:33) serait peu conforme à la lex talionis biblique, que le Coran est pourtant censé
suivre. Je suis donc tenté d’interpréter le texte autrement, et d’y voir une allusion au
principe de compensation (qui est précisément la manière dont la lex talionis était
comprise à l’époque) : les dommages sont proportionnés au statut social de la
QS 3 69

victime, et ils doivent être payés de bonne grâce (v. 179 : par exemple, c’est le
coupable, et non une tierce personne, qui doit s’acquitter de la dette).
Plus généralement, le fait que ce verset glose des passages bibliques (rédigés
dans le cadre d’une organisation sociale bien particulière) et que les catégories
sociales invoquées (ḥurr, ʿabd, unṯā) soient extrêmement répandues (et pas qu’en
Arabie) à l’époque où est composé le Coran rend hasardeuse toute tentative de tirer
des conclusions précises, à partir de ce texte, sur l’organisation sociale de la com-
munauté à laquelle la prédication coranique s’adresse.

Grodzki
Looking at this verse with a more unconventional approach, we could perhaps have,
first, a reminiscence of Exod 21:12, then listing (in the same order): free man Exod
21:18 – 19, slave Exod 21: 20 – 21, (pregnant) woman Ex 21:22– 23. If we followed logi-
cally, we could perhaps then have the atonement of an unsolved murder (Deut 21
4– 6) which should be solved perhaps by breaking the heifer’s neck (Hebrew ʿarafa).

Pregill
Initially, it seems unclear whether the penalty of retaliation (qiṣāṣ) for murder being
simultaneously reiterated and ameliorated here is the Biblical lex talionis (Exod
21:23 – 25, Lev 24:19 – 20, Deut 19:21) or merely a tribal custom. The specific reference
to this penalty being “prescribed for you” (kutiba ʿalaykum) certainly implies a scrip-
turalist context. Moreover, taḫfīf, alleviation, is characteristically associated with the
trope of the lightening the burden of the Law imposed on Israel, and the theme is
much developed in later Islamic exegesis and jurisprudence (see Maghen 2006).
The strong discursive link to ancient Christian understandings of Israel and the
Law here – epitomized by the Didascalia Apostolorum – is undeniable, though the
theme of the amelioration of especially severe prescriptions or prohibitions of Bibli-
cal law is also found in rabbinic discourse, esp. the halakhic midrashim.
Here, the Qurʾān is not so much “borrowing” from precursors per se but rather
rehearsing their particular modes of engagement with the Pentateuch. The parallel
passage at Q 5:43 – 45 explicitly identifies the law of qiṣāṣ with the Biblical lex talionis
and terms its voluntary remission by the aggrieved party taṣadduq. Why is remission
merely recommended in these passages and not formally legislated? The most inter-
esting precedent is found in Matthew 5:38: the Law is acknowledged as binding, but
merit accrues to the one who willingly forgoes the retaliation to which they are legal-
ly entitled.

Stefanidis
Although the Qurʾānic notion of qiṣāṣ certainly draws on the Biblical talion, as Q 5:45
explicitly acknowledges, it should be noted that this passage departs in significant
QS 4 73

relation entre ces unités est celle de l’identité: les termes et les segments ont des
significations analogues, et chaque segment répond ou correspond à un segment
parallèle. Les premiers segments (A, A’) présentent chacun trois mots. Les deux
partagent un terme identique (huwa) et l’utilisation de synonymes qui correspondent
aux attributs de Dieu (al-ḥayyu al-qayyūmu répond à al-ʿaliyyu al-ʿaẓīmu). Les seconds
segments (B et B’) soulignent le rôle de Dieu comme celui qui maintient l’existence
de l’Univers (lā taʾḫuḏuhu sinatun wa-lā nawmun/ lā yaʾūduhū ḥifẓuhumā). Le par-
allélisme des troisièmes segments (C, C’) fait référence à la cosmologie et à la sou-
veraineté de Dieu (lahū mā fī-l-samāwāti wa-mā fī-l-ʾarḍi / wasiʿa kursiyyuhu as-
samāwāti wa-l-arḍa). Et enfin, le parallélisme des quatrième segments (D, D’) attire
l’attention sur la volonté de Dieu (allaḏī yašfaʿu ʿindahū ‘illā bi-ʾiḏnihī / wa-lā yuḥī-
ṭūna bi-šayʾin min ʿilmihī ʾillā bi-mā šā’a). Ces quatre attributs principaux de sujets-
Dieu, la puissance de Dieu, la souveraineté de Dieu et la volonté de Dieu, convergent
sur une idée centrale: la connaissance de Dieu embrasse toutes choses (yaʿlamu mā
bayna aydīhim wa-mā ḫalfahum). Situé dans le centre de la structure, ce segment n’a
pas de relation d’identité avec d’autres segments. Il en est le segment central et le
pivot sémantique. Dans la perspective de l’analyse rhétorique, le centre donne le
sens à toute la structure. Dans cette perspective, le sens général de ce verset peut être
compris comme la glorification de la toute connaissance de Dieu.

‫ﺍﻟﻠَّ ُﻪ َﻻ ﺇِ ۖﻟ َﻪ ﺇِ َّﻻ‬
A ‫ُﻫ َﻮ ﺍﻟْ َﺤ ُّﻲ ﺍﻟْ َﻘ ُّﻴﻮ ُﻡ‬
B ‫َﻻ َﺗ ْﺄ ُﺧ ُﺬ ُﻩ ِﺳ َﻨ ٌﺔ َﻭ َﻻ َﻧ ْﻮ ٌﻡ‬
َْ
C‫ﺽ‬ ِ ‫ﻟَ ُﻪ َﻣﺎ ِﻓﻲ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ َﻭ َﻣﺎ ِﻓﻲ ﺍﻷ ْﺭ‬
D ‫َﻣ ْﻦ َﺫﺍ ﺍﻟَّ ِﺬﻱ َﻳ ْﺸ َﻔ ُﻊ ِﻋ ْﻨ َﺪ ُﻩ ﺇِ َّﻻ ﺑِﺈِ ْﺫ ِﻧ ِﻪ‬
‫َﻳ ْﻌﻠَ ُﻢ َﻣﺎ َﺑ ْﻴ َﻦ ﺃَ ْﻳ ِﺪﻳ ِﻬ ْﻢ َﻭ َﻣﺎ َﺧﻠْ َﻔ ُﻬ ْﻢ‬
D’ ‫َﻭﻻ ُﻳﺤﻴﻄﻮ َﻥ ِﺑ َﺸﻲٍء ِﻣﻦ ِﻋﻠ ِﻤ ِﻪ ﺇِ ّﻻ ِﺑﻤﺎ ﺷﺎ َﺀ‬
C’ ‫ﺽ‬ َ ‫َﻭ ِﺳ َﻊ ُﻛﺮ ِﺳ ّﻴُ ُﻪ ﺍﻟ َّﺴﻤﺎﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍ َﻷﺭ‬
B’ ‫َﻭﻻ َﻳﺌﻮ ُﺩ ُﻩ ِﺣﻔ ُﻈ ُﻬﻤﺎ‬
A’ ‫َﻭ ُﻫ َﻮ ﺍﻟ َﻌﻠِ ُّﻲ ﺍﻟ َﻌﻈﻴ ُﻢ‬

Dye
V. 255 : hymne au Dieu souverain, à la puissance et à la connaissance insondables
pour les hommes. L’expression « vivant et subsistant », qui apparaît trois fois dans le
Coran (ici même, et en Q 3:2 et Q 20:111), est le calque d’une formule araméenne (qui
reprend Ps 121:4) que l’on rencontre dans le livre de Daniel araméen (6:27) et dans le
targum (palestinien) du Pseudo-Jonathan (Tg. Ps-Jon. sur Gen 16:6 – 16 et 24:62, « le
Vivant et le Subsistant, qui voit et qu’on ne voit pas ») : comparer allāhu lā ilāha illā
huwa al-ḥayyu l-qayyūm, et Dan 6:27, dī-huwa êlāhā ḥayyā w-qayyām le-ʿalēmīn
(« c’est Lui le Dieu vivant et subsistant pour toujours »). L’influence du livre de
Daniel sur le développement des premières communautés musulmanes (et du Coran)
74 QS 4

est un sujet qui n’a pas reçu l’attention qu’il mérite (voir cependant De Prémare
2000b).
Yaʿlamu mā bayna aydīhim wa-mā ḫalfahum : les traductions oscillent entre un
sens temporel (avant/après) ou spatial (devant/derrière). Si on relie le verset à
Ps 121:4, qui parle du Dieu gardien d’Israël, on préférera le sens spatial.
Par son genre littéraire, ce verset n’a que peu de rapport avec les versets qui le
précèdent et qui le suivent, même s’il s’intègre assez bien au propos des vv. 254– 257.
J’y vois un texte ayant une unité forte, et qui était sans doute récité dans des céré-
monies liturgiques avant même la compilation du Coran.
V. 256 : ce célèbre verset a fait l’objet des interprétations les plus diverses, aussi
bien dans la tradition musulmane que chez les historiens (cf. Crone 2009). La
question (politique) de la liberté religieuse ne me semble pas abordée ici. Par dīn, je
comprends plutôt le jugement (autrement dit, le jugement, ou la décision, que l’on
doit prendre sur la voie à suivre). Le texte explique que ce choix est naturel, pour ne
pas dire évident (ni contraint, ni répugnant, cf. Q 9:32– 33 et le champ sémantique de
la racine K-R-H), puisque la différence entre le droit chemin et l’égarement est claire
(comme celle entre les ténèbres et la lumière, cf. v. 257), et que le soutien de Dieu
pour les croyants est assuré (cf. v. 255 / Ps 121:4).

El-Badawi
This striking verse is generally in dialogue with numerous illustrations of God’s maj-
esty in the Bible and—if reliable—the poetry of Umayyah b. Abī al-Salṭ al-Thaqafī
(d. ca. 1/623). More specifically Q 2:255 is in dialogue with teachings from the Hebrew
Bible concerning the seriousness of ‘swearing an oath’ (2 Chronicles 9:18; Isaiah
66:1). However, this dialogue is mediated through the Syriac, CPA versions of Mat-
thew 5:33 – 35; 23:20 – 22, where ‘in the heavens’ (ba-šmayā) God sits upon ‘his throne’
(kūrsyā… d-alāhā), and where ‘on earth (b-arʿā)’ is His ‘footstool beneath his feet.’
The simultaneous use of ʿarš (cf. Aramaic ʿarsā, “bed”) and kursī (Syriac kūrsyā,
“chair, throne”) may be a result of separate traditions from which each word has
come to us (cf. Q 27:38 vv. 38:34). Also, is Q 2:255 in dialogue with Gnostic literature?

Grodzki
The expression from v. 255 Allāhu lā ilāha illā huwa al-ḥayyu al-qayyūmu is reminis-
cent of Isa 43:11 (“I, I am the Lord, and there is no deliverer besides me”), apart from
Deuteronomy. As for “neither drowsiness overtakes Him or sleep” it is a reference to
Ps 121:4 in inversed order. Also kursiyyuhu al-samāwāti is interesting. In Isa 66:1 there
are similar words in use, only in the reversed order: “The heavens are my throne, and
the earth is my footstool (ha-šamayīm kisʾi).”
QS 5 81

(…) soit il porterait sur les signes eux-mêmes – leur forme, leur sens – pour l’ex-
pliciter, les définir, soit il mentionnerait des énoncés pour les mettre à distance, les
rapporter a une autre source » (Ben Taïbi 2009: 65). Ici, le discours sur le discours
vient dans ce passage expliciter : [1] le processus de la révélation (l’acte de des-
cendre: nazzala) et ses protagonistes (Allah et un allocutaire : ʿalayka) ; [2] la nature
de la révélation (ḥaqq, ḥudā, āyāt) ; [3] l’auto-désignation de la révélation (kitāb,
furqān) ; [4] la finalité de la révélation (muṣaddiqan li-mā bayna yadayhi) ; [5] les
conditions d’interprétations (mā yaʿlamu taʾwīlahu ʾillā allāhu). On peut affirmer avec
cet exemple que le Coran se dote avec la métatextualité d’un discours pour expliquer
son code.

Dye
Les débuts (et les fins) des sourates sont souvent porteurs d’un important message
théologique, mais ce sont aussi des passages où peut transparaître une intervention
éditoriale. Leur composition peut ainsi être fort embrouillée. J’ai donc plus de
questions que de réponses. Par exemple : s’il y a ici de la métatextualité, ou la
supposée autoréférentialité du Coran, doit-on penser que ce texte a été composé du
vivant de Muḥammad, avant même la compilation du Coran – à une époque où il
n’était vraisemblablement pas question de faire un codex ? Ou la métatextualité ne
concernerait-elle que la sourate Āl ʿImrān ? Ou la rédaction de cette péricope ne
serait-elle pas postérieure, et devrait être imputée, au moins en partie, aux scribes
responsables de la collecte du Coran ?
V. 1 : Une hypothèse plausible est que les « lettres mystérieuses » soient des
abréviations de formules, possiblement syriaques (Luxenberg 2008). On pourrait lire
emar lī Māryā (ʾ-L-M), « le Seigneur m’a dit ».
V. 3 : muṣaddiqan li-mā bayna yadayhi : doit-on comprendre « confirmant ce qui
est descendu avant lui », à savoir al-kitāb, auquel cas al-kitāb est soit le Coran, soit la
sourate, soit l’ensemble des révélations antérieures (notamment la Tora et l’É-
vangile) ? Ou « confirmant ce qui est devant lui », le pronom hi faisant référence à
Dieu, et al-kitāb désignant l’Écriture céleste? Le parallèle avec Jésus et la Tora,
signalé par Reynolds, paraît pertinent : le rédacteur du texte ferait du destinataire de
la sourate un prophète annoncé par les révélations antérieures, les accomplissant,
tout en étant habilité à en donner l’interprétation juste.
V. 7 : al-kitāb est souvent identifié au Coran, et on voit dans les āyāt muḥkamāt et
les āyāt mutašābihāt des versets coraniques. Cette lecture ne va pas de soi : nor-
malement, al-kitāb ne désigne pas le Coran (cf. Q 10:37 ; noter que Q 43:4 dit qu’un
Qurʾān arabe est dans la « mère du Livre », ce qui n’implique pas qu’il lui soit
identique). Les āyāt muḥkamāt pourraient être, non les versets, mais les signes clairs,
les preuves évidentes, qui apportent la sagesse, tels qu’ils sont relatés dans l’Écriture.
Sur les āyāt mutašābihāt : le texte semble simplement condamner les chicaneurs.
QS 6 91

ِّ َ
(46) ‫ﺼﺎﻟِ ِﺤﻴ َﻦ‬ َّ ‫ﺱ ِﻓﻲ ﺍﻟْ َﻤ ْﻬ ِﺪ َﻭ َﻛ ْﻬ ًﻼ َﻭ ِﻣ َﻦ ﺍﻟ‬ َ ‫( َﻭ ُﻳ َﻜﻠ ُﻢ ﺍﻟ ّﻨَﺎ‬45) ‫ﺍﻟْ َﻤ ِﺴﻴ ُﺢ ِﻋﻴ َﺴﻰ ﺍ ْﺑ ُﻦ َﻣ ْﺮ َﻳ َﻢ َﻭ ِﺟﻴ ًﻬﺎ ِﻓﻲ ﺍﻟ ُّﺪ ْﻧ َﻴﺎ َﻭﺍ ْﻵ ِﺧ َﺮ ِﺓ َﻭ ِﻣ َﻦ ﺍﻟْ ُﻤ َﻘ َّﺮ ِﺑﻴ َﻦ‬
َ ِ ْ َ َ
(47) ‫ﻀﻰ ﺃَ ْﻣ ًﺮﺍ َﻓ ِﺈ َّﻧ َﻤﺎ َﻳ ُﻘﻮ ُﻝ ﻟَ ُﻪ ُﻛ ْﻦ َﻓ َﻴ ُﻜﻮ ُﻥ‬ َ ‫ﺖ َﺭ ّﺏ ﺃَ َّﻧﻰ َﻳ ُﻜﻮ ُﻥ ﻟِﻲ َﻭﻟَ ٌﺪ َﻭﻟَ ْﻢ َﻳ ْﻤ َﺴ ْﺴ ِﻨﻲ َﺑ َﺸ ٌﺮ َﻗﺎ َﻝ َﻛ َﺬﻟِ ِﻚ ﺍﻟﻠّ ُﻪ َﻳ ْﺨﻠُ ُﻖ َﻣﺎ َﻳ َﺸﺎ ُﺀ ﺇِ َﺫﺍ َﻗ‬ ِ ‫ﻗﺎﻟ‬
ِ ِ ِ
‫( َﻭ َﺭ ُﺳﻮ ًﻻ ﺇِﻟَﻰ َﺑ ِﻨﻲ ﺇِ ْﺳ َﺮﺍ ِﺋﻴ َﻞ ﺃَﻧّﻲ َﻗ ْﺪ ِﺟ ْﺌ ُﺘ ُﻜ ْﻢ ِﺑ َﺂ َﻳ ٍﺔ ِﻣ ْﻦ َﺭﺑّ ُﻜ ْﻢ ﺃَﻧّﻲ ﺃَ ْﺧﻠُ ُﻖ ﻟَ ُﻜ ْﻢ ِﻣ َﻦ‬48) ‫َﻭ ُﻳ ِ َﻌﻠّ ُﻤ ُﻪ ﺍ ْﻟ ِﻜ َﺘﺎ َﺏ َﻭﺍ ْﻟ ِﺤ ْﻜ َﻤ َﺔ َﻭﺍﻟ َّﺘ ْﻮ َﺭﺍ َﺓ َﻭﺍ ِْﻹ ْﻧ ِﺠﻴ َﻞ‬
ِ َْ َْ َ ّ
‫ﺹ َﻭﺃُ ْﺣ ِﻴﻲ ﺍﻟْ َﻤ ْﻮ َﺗﻰ ِﺑﺈِ ْﺫ ِﻥ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻭﺃُ َﻧﺒّﺌُ ُﻜ ْﻢ ِﺑ َﻤﺎ َﺗ ْﺄ ُﻛﻠُﻮ َﻥ‬ ُ َ
َ ‫ﺍﻟﻄﻴ ِﻦ َﻛ َﻬ ْﻴ َﺌ ِﺔ ﺍﻟ ّﻄ ْﻴ ِﺮ َﻓﺄَ ْﻧ ُﻔ ُﺦ ِﻓﻴ ِﻪ َﻓ َﻴ ُﻜﻮ ُﻥ َﻃ ْﻴ ًﺮﺍ ِﺑﺈِ ْﺫ ِﻥ ﺍﻟﻠّ ِﻪ َﻭﺃ ْﺑ ِﺮ ُﺉ ﺍﻷ ْﻛ َﻤ َﻪ َﻭﺍﻷ ْﺑ َﺮ‬
ُ ّ َ ُ َ ً ّ ِ ُ ُ ً َ َ ُ َ
‫ﺾ‬ َ ‫ﺼﺪﻗﺎ ﻟِ َﻤﺎ َﺑ ْﻴ َﻦ َﻳ َﺪ َّﻱ ِﻣ َﻦ ﺍﻟ ّﺘ ْﻮ َﺭﺍ ِﺓ َﻭ ِﻷ ِﺣﻞ ﻟَﻜ ْﻢ َﺑ ْﻌ‬ َ ‫( َﻭ ُﻣ‬49) ‫َﻭ َﻣﺎ َﺗ ّﺪ ِﺧ ُﺮﻭ َﻥ ِﻓﻲ ُﺑ ُﻴﻮ ِﺗﻜ ْﻢ ﺇِ ّﻥ ِﻓﻲ َﺫﻟِ َﻚ ﻵ َﻳﺔ ﻟَﻜ ْﻢ ﺇِ ْﻥ ﻛ ْﻨ ُﺘ ْﻢ ُﻣ ْﺆ ِﻣ ِﻨﻴ َﻦ‬
ِ ِ ِ
(51) ‫ﺻ َﺮﺍ ٌﻁ ُﻣ ْﺴ َﺘ ِﻘﻴ ٌﻢ‬ ِ ‫( ﺇِ َّﻥ ﺍﻟﻠَّ َﻪ َﺭﺑّﻲ َﻭ َﺭ ُّﺑ ُﻜ ْﻢ َﻓﺎ ْﻋ ُﺒ ُﺪﻭ ُﻩ َﻫ َﺬﺍ‬50) ‫ﺍﻟَّ ِﺬﻱ ُﺣ ّﺮ َﻡ َﻋﻠَ ْﻴ ُﻜ ْﻢ َﻭ ِﺟ ْﺌ ُﺘ ُﻜ ْﻢ ِﺑ َﺂ َﻳ ٍﺔ ِﻣ ْﻦ َﺭﺑّ ُﻜ ْﻢ َﻓﺎ ّﺗَ ُﻘﻮﺍ ﺍﻟﻠَّ َﻪ َﻭﺃَ ِﻃﻴ ُﻌﻮ ِﻥ‬
َ
(52) ‫ﺼﺎ ُﺭ ﺍﻟﻠّ ِﻪ ﺁَ َﻣ َّﻨﺎ ِﺑﺎﻟﻠّ ِﻪ َﻭﺍ ْﺷ َﻬ ْﺪ ِﺑ َﺄ َّﻧﺎ ُﻣ ْﺴﻠِ ُﻤﻮ َﻥ‬ َ َ
َ ‫ﺼﺎ ِﺭﻱ ﺇِﻟَﻰ ﺍﻟﻠّ ِﻪ َﻗﺎ َﻝ ﺍ ْﻟ َﺤ َﻮﺍ ِﺭ ّﻳُﻮ َﻥ َﻧ ْﺤ ُﻦ ﺃَ ْﻧ‬ َ ‫ﺲ ِﻋﻴ َﺴﻰ ِﻣ ْﻨ ُﻬ ُﻢ ﺍ ْﻟ ُﻜ ْﻔ َﺮ َﻗﺎ َﻝ َﻣ ْﻦ ﺃَ ْﻧ‬ َّ ‫َﻓﻠَ َّﻤﺎ ﺃَ َﺣ‬
ّ َ َ َ ْ ْ ّ َ ّ َ َ َ ّ َ
‫( ﺇِﺫ ﻗﺎﻝ ﺍﻟﻠ ُﻪ َﻳﺎ‬54) ‫( َﻭ َﻣﻜ ُﺮﻭﺍ َﻭ َﻣﻜ َﺮ ﺍﻟﻠ ُﻪ َﻭﺍﻟﻠ ُﻪ َﺧ ْﻴ ُﺮ ﺍﻟ َﻤﺎ ِﻛ ِﺮﻳ َﻦ‬53) ‫َﺭ ّﺑَ َﻨﺎ ﺁَ َﻣﻨَّﺎ ِﺑ َﻤﺎ ﺃﻧ َﺰﻟ َﺖ َﻭﺍﺗ َﺒ ْﻌ َﻨﺎ ﺍﻟ َّﺮ ُﺳﻮﻝ ﻓﺎﻛﺘ ْﺒ َﻨﺎ َﻣ َﻊ ﺍﻟﺸﺎ ِﻫ ِﺪﻳ َﻦ‬
ُ ْ َ َ َ ّ ْ ْ َ
ِ ِ ِ
‫ِﻋﻴ َﺴﻰ ﺇِﻧّﻲ ُﻣ َﺘ َﻮ ّﻓﻴ َﻚ َﻭ َﺭﺍ ِﻓ ُﻌ َﻚ ﺇِﻟَ َّﻲ َﻭ ُﻣ َﻄ ّﻬ ُﺮ َﻙ ِﻣ َﻦ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ َﻛ َﻔ ُﺮﻭﺍ َﻭ َﺟﺎ ِﻋ ُﻞ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ ﺍ ّﺗَ َﺒ ُﻌﻮ َﻙ َﻓ ْﻮ َﻕ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ َﻛ َﻔ ُﺮﻭﺍ ﺇِﻟَﻰ َﻳ ْﻮ ِﻡ ﺍﻟْ ِﻘ َﻴﺎ َﻣ ِﺔ ﺛُ َّﻢ ﺇِﻟَ َّﻲ‬
ِ
‫( َﻓ َﺄ َّﻣﺎ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ َﻛ َﻔ ُﺮﻭﺍ َﻓﺄُ َﻋ ّﺬ ُﺑ ُﻬ ْﻢ َﻋ َﺬﺍ ًﺑﺎ َﺷ ِﺪﻳ ًﺪﺍ ِﻓﻲ ﺍﻟ ُّﺪ ْﻧ َﻴﺎ َﻭﺍ َْﻵ ِﺧ َﺮ ِﺓ َﻭ َﻣﺎ ﻟَ ُﻬ ْﻢ ِﻣ ْﻦ‬55) ‫َﻣ ْﺮ ِﺟ ُﻌ ُﻜ ْﻢ َﻓ َﺄ ْﺣ ُﻜ ُﻢ َﺑ ْﻴ َﻨ ُﻜ ْﻢ ِﻓﻴ َﻤﺎ ُﻛ ْﻨ ُﺘ ْﻢ ِﻓﻴ ِﻪ َﺗ ْﺨ َﺘﻠِ ُﻔﻮ َﻥ‬
ِ
‫( َﺫﻟِ َﻚ َﻧ ْﺘﻠُﻮ ُﻩ َﻋﻠ ْﻴ َﻚ ِﻣ َﻦ‬57) ‫ﺼﺎﻟِ َﺤﺎ ِﺕ َﻓ ُﻴ َﻮ ّﻓﻴ ِﻬ ْﻢ ﺃُ ُﺟﻮ َﺭ ُﻫ ْﻢ َﻭﺍﻟﻠَّ ُﻪ َﻻ ُﻳ ِﺤ ُّﺐ ﺍﻟ َّﻈﺎﻟِ ِﻤﻴ َﻦ‬ َّ ‫( َﻭﺃَ َّﻣﺎ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ ﺁَ َﻣ ُﻨﻮﺍ َﻭ َﻋ ِﻤﻠُﻮﺍ ﺍﻟ‬56) ‫ﺻ ِﺮﻳ َﻦ‬ ِ ‫َﻧﺎ‬
ِ ِ
َ‫( ﺍﻟْ َﺤ ُّﻖ ِﻣ ْﻦ َﺭﺑّ َﻚ َﻓﻼ‬59) ‫( ﺇِ َّﻥ َﻣﺜَ َﻞ ِﻋﻴ َﺴﻰ ِﻋ ْﻨ َﺪ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻛ َﻤﺜَ ِﻞ ﺁَ َﺩ َﻡ َﺧﻠَ َﻘ ُﻪ ِﻣ ْﻦ ﺗُ َﺮﺍ ٍﺏ ﺛُ َّﻢ َﻗﺎ َﻝ ﻟَ ُﻪ ُﻛ ْﻦ َﻓ َﻴ ُﻜﻮ ُﻥ‬58) ‫ﺍ َْﻵ َﻳﺎ ِﺕ َﻭﺍﻟ ّﺬ ْﻛ ِﺮ ﺍﻟْ َﺤ ِﻜﻴﻢ‬
ِ
‫( َﻓ َﻤ ْﻦ َﺣﺎ َّﺟ َﻚ ِﻓﻴ ِﻪ ِﻣ ْﻦ َﺑ ْﻌ ِﺪ َﻣﺎ َﺟﺎ َﺀ َﻙ ِﻣ َﻦ ﺍﻟْ ِﻌﻠْ ِﻢ َﻓ ُﻘ ْﻞ َﺗ َﻌﺎﻟَ ْﻮﺍ َﻧ ْﺪ ُﻉ ﺃَ ْﺑ َﻨﺎ َﺀ َﻧﺎ َﻭﺃَ ْﺑ َﻨﺎ َﺀ ُﻛ ْﻢ َﻭ ِﻧ َﺴﺎ َﺀ َﻧﺎ َﻭ ِﻧ َﺴﺎ َﺀ ُﻛ ْﻢ‬60) ‫َﺗ ُﻜ ْﻦ ِﻣ َﻦ ﺍﻟْ ُﻤ ْﻤ َﺘ ِﺮﻳ َﻦ‬
‫ﺺ ﺍ ْﻟ َﺤ ُّﻖ َﻭ َﻣﺎ ِﻣ ْﻦ ﺇِﻟَ ٍﻪ ﺇِ َّﻻ ﺍﻟﻠَّ ُﻪ َﻭﺇِ َّﻥ ﺍﻟﻠَّ َﻪ ﻟَ ُﻬ َﻮ‬ ُ ‫ﺼ‬
َ
َ ‫( ﺇِ َّﻥ َﻫ َﺬﺍ ﻟَ ُﻬ َﻮ ﺍ ْﻟ َﻘ‬61) ‫َﻭﺃَ ْﻧ ُﻔ َﺴ َﻨﺎ َﻭﺃَ ْﻧ ُﻔ َﺴ ُﻜ ْﻢ ُﺛ َّﻢ َﻧ ْﺒ َﺘ ِﻬ ْﻞ َﻓ َﻨ ْﺠ َﻌ ْﻞ ﻟَ ْﻌ َﻨ َﺔ ﺍﻟﻠّ ِﻪ َﻋﻠَﻰ ﺍ ْﻟ َﻜﺎ ِﺫ ِﺑﻴ َﻦ‬
(63) ‫( َﻓ ِﺈ ْﻥ َﺗ َﻮﻟَّ ْﻮﺍ َﻓ ِﺈ َّﻥ ﺍﻟﻠَّ َﻪ َﻋﻠِﻴ ٌﻢ ِﺑﺎ ْﻟ ُﻤ ْﻔ ِﺴ ِﺪﻳ َﻦ‬62) ‫ﺍ ْﻟ َﻌ ِﺰﻳ ُﺰ ﺍ ْﻟ َﺤ ِﻜﻴ ُﻢ‬

Dye
Ce passage a été bien étudié dans Van der Velden 2007, qui y voit un texte de
convergence, répondant à, mais aussi cherchant un compromis avec, diverses posi-
tions christologiques (notamment nestoriennes). La nature de l’argumentation, le
profil de l’auteur, la manière dont est conduite la polémique, indiquent que le
contexte le plus plausible pour la composition de cette péricope est la Syrie-Palestine
des années 650.
Quelques remarques sur les vv. 33 – 44. Le Protévangile de Jacques se situe
clairement à l’arrière-plan, mais le texte va plus loin, et approfondit des déve-
loppements présents dans Q 19:1– 33. La mère de Marie est appelée « femme de
ʿImrān » au v. 35, ce qui fait d’elle, logiquement, la « fille de ʿImrān » (Q 66:12). Cela
rappelle le « Marie, sœur d’Aaron » de Q 19:28. On a ici un détail très important pour
comprendre la mariologie coranique. On a parfois supposé que le Coran confondait
Marie, mère de Jésus, et Miryam, sœur de Moïse et d’Aaron (les prénoms en araméen
et en grec sont identiques) – hypothèse invraisemblable. On a aussi supposé que le
Coran entendait seulement souligner le lignage de Marie, et dire qu’elle était la
descendante d’Aaron et de ʿImrān, non la sœur du premier et la fille du second. Cette
lecture est contredite par les vv. 35 – 36 (la femme de ʿImrān ne peut pas être sa
descendante). La seule solution est une identification typologique de Marie et Mi-
ryam, qui a sa source dans les traditions liturgiques de l’église du Kathisma, con-
cernant la fête de la « Mémoire de Marie ». L’une des lectures pratiquées lors de cette
fête parle d’« Aaron, le frère de Marie », exactement avec le sens typologique du
Coran (Dye 2012). La « famille de ʿImrān » au v. 33 concerne donc aussi bien Moïse et
sa fratrie que Marie et Jésus.
92 QS 6

La source de cette typologie pourrait remonter à un apocryphe de la Dormition


du VIe siècle, le Transitus grec « R . » Dans la « prière de Marie » (§ 12), on lit : « Je te
bénis, toi et tes trois serviteurs envoyés d’auprès de toi pour le service des trois
voies ». Selon Manns (1979: 514– 515), ces trois serviteurs seraient les trois chefs
d’Israël : Moïse, Aaron et Myriam. Dans la tradition juive, Miryam était morte dans
un baiser de Dieu, comme ses deux frères.

El-Badawi
This fascinating passage discusses the lineage, life and legacy of Jesus, the son of
Mary, and—more importantly—delves deep into late antique theological debates, ul-
timately asserting a Qurʾānic Christology. It is significant that Q 3:33 – 63 addresses a
broad audience known as “People of the Scripture” (ahl al-kitāb)—whose fragmenta-
tion is itself the result of theological debates centered around the person of Jesus.
Q 3:33 – 63 may be divided accordingly:
[1] Vv. 33 – 35, Jesus’ elected prophetic ancestry (cf. iṣṭafā, iǧtabā, Syriac gbā, “to
elect”). Jesus’s prophecy transcends the Davidic lineage in the Gospels, which binds
him exclusively to the tribe of Judah/Judaea and the children of Israel. By underscor-
ing his descent from Abraham and Amram, Jesus’ prophecy transcends Israel and
reaches all mankind. This is consistent with the views of the Qurʾān and select pseu-
depigrapha.
[2] Vv. 36 – 37a, The “Immaculate Conception” and honoring Saint Anne (i. e.,
Mary’s mother; see further Protoevangelium of James 2– 6).
[3] Vv. 37b-41, Angels give good news to Zachariah (Cf. Luke 1:26 – 38; Syriac ʿ-q-r,
“barren, sterile”).
[4] Vv. 42– 47, Angels give good news to Mary/“Virgin Birth” (cf. Luke 2:8 – 14).
Following up Mary’s episode with the angels immediately after that of Zachariah
means that the author knows the chapter (and verse?) sequence of Luke’s Gospel.
[5] Vv. 46, 48 – 51 Jesus’ “Ministry” and miracles (cf. esp. Infancy Gospel of Tho-
mas/Syriac/Arabic Infancy Gospel).
[6] Vv. 52– 58, An alternate “Passion.” This pericope does not explicitly state that
Jesus was saved from crucifixion, just that God [made him die? mutawaffīka] raised
and purified him. Who precisely are allaḏīna āmanū and allaḏīna kafarū in vv. 55b-
57?
[7] V. 59, Qurʾānic “Christology.” This verse responds to Paul’s doctrine of Christ
as the “second Adam” (1 Cor 15:22).
[8] Vv. 60 – 64, New “Proselytism” (daʿwah). What precisely is v. 61 referring to, a
congregational prayer or some sort of council? Furthermore, can laʿnah here be con-
strued as “anathema, excommunication?” Is v. 64 in fact some sort of binding com-
promise, contract or creed? At any rate, the early community of believers who accept
this call (daʿwah) are cast as Jesus’ apostles in v. 52, declaring “bear witness that we
are Muslims.”
QS 9 113

ِ َ ِ ِّ ُ ِّ
‫ﺱ ﺍ ّﺗَ ِﺨ ُﺬﻭ ِﻧﻲ َﻭﺃُ ّﻣ َﻲ ﺇِﻟَ َﻬ ْﻴ ِﻦ‬ َ ََ َ ّ ُ
ِ ‫( َﻭﺇِ ْﺫ َﻗﺎ َﻝ ﺍﻟﻠّ ُﻪ ٍ َﻳﺎ ِﻋﻴ َﺴﻰ ﺍ ْﺑ َﻦ َﻣ ْﺮ َﻳ َﻢ ﺃﺃ ْﻧ َﺖ ُﻗﻠْ َﺖ ﻟِﻠ ّﻨﺎ‬115) ‫َﻓ ِﺈﻧﻲ ﺃ َﻋﺬ ُﺑ ُﻪ َﻋ َﺬﺍ ًﺑﺎ َﻻ ﺃ َﻋﺬ ُﺑ ُﻪ ﺃ َﺣ ًﺪﺍ ِﻣ َﻦ ﺍﻟْ َﻌﺎﻟَ ِﻤﻴ َﻦ‬
‫ﺲ ﻟِﻲ ِﺑ َﺤ ّﻖ ﺇِ ْﻥ ُﻛ ْﻨ ُﺖ ُﻗ ْﻠ ُﺘ ُﻪ َﻓ َﻘ ْﺪ َﻋﻠِ ْﻤ َﺘ ُﻪ َﺗ ْﻌﻠَ ُﻢ َﻣﺎ ِﻓﻲ َﻧ ْﻔ ِﺴﻲ َﻭ َﻻ ﺃَ ْﻋﻠَ ُﻢ َﻣﺎ ِﻓﻲ‬ َ
َ ‫ِﻣ ْﻦ ُﺩﻭ ِﻥ ﺍﻟﻠّ ِﻪ َﻗﺎ َﻝ ُﺳ ْﺒ َﺤﺎ َﻧ َﻚ َﻣﺎ َﻳ ُﻜﻮ ُﻥ ﻟِﻲ ﺃَ ْﻥ ﺃَ ُﻗﻮ َﻝ َﻣﺎ ﻟَ ْﻴ‬
ِ َ
‫( َﻣﺎ ُﻗ ْﻠ ُﺖ ﻟَ ُﻬ ْﻢ ﺇِ َّﻻ َﻣﺎ ﺃَِ َﻣ ْﺮ َﺗ ِﻨﻲ ِﺑ ِﻪ ﺃَ ِﻥ ﺍ ْﻋ ُﺒ ُﺪﻭﺍ ﺍﻟﻠّ َﻪ َﺭﺑّﻲ َﻭ َﺭ ّﺑَ ُﻜ ْﻢ َﻭ ُﻛ ْﻨ ُﺖ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ َﺷ ِﻬﻴ ًﺪﺍ َﻣﺎ ُﺩ ْﻣ ُﺖ‬116) ‫َﻧ ْﻔ ِﺴ َﻚ ﺇِ َّﻧ َﻚ ﺃَ ْﻧ َﺖ َﻋ َّﻼ ُﻡ ﺍ ْﻟ ُﻐ ُﻴﻮ ِﺏ‬
ِ
‫( ﺇِ ْﻥ ﺗُ َﻌ ّﺬ ْﺑ ُﻬ ْﻢ َﻓﺈِﻧَّ ُﻬ ْﻢ ِﻋ َﺒﺎ ُﺩ َﻙ َﻭﺇِ ْﻥ َﺗ ْﻐ ِﻔ ْﺮ ﻟَ ُﻬ ْﻢ َﻓﺈِﻧَّ َﻚ ﺃَ ْﻧ َﺖ‬117) ‫ِﻓﻴ ِﻬ ْﻢ َﻓﻠَ َّﻤﺎ َﺗ َﻮ َّﻓ ْﻴ َﺘ ِﻨﻲ ُﻛ ْﻨ َﺖ ﺃَ ْﻧ َﺖ ﺍﻟ َّﺮ ِﻗﻴ َﺐ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ َﻭﺃَ ْﻧ َﺖ َﻋﻠَﻰ ُﻛ ّﻞ َﺷ ْﻲٍء َﺷ ِﻬﻴ ٌﺪ‬
َ َ
‫ﺿ َﻲ‬ ِ ‫ﺻ ْﺪ ُﻗ ُﻬ ْﻢ ﻟَ ُﻬ ْﻢ َﺟ ّﻨَﺎ ٌﺕ َﺗ ْﺠ ِﺮﻱ ِﻣ ْﻦ َﺗ ْﺤ ِﺘ َﻬﺎ ﺍ ْﻷ ْﻧ َﻬﺎ ُﺭ َﺧﺎﻟِ ِ ِﺪﻳ َﻦ ِﻓﻴ َﻬﺎ ﺃَ َﺑ ًﺪﺍ َﺭ‬ ِ ‫ﺼﺎ ِﺩ ِﻗﻴ َﻦ‬ َّ ‫( َﻗﺎ َﻝ ﺍﻟﻠّ ُﻪ َﻫ َﺬﺍ َﻳ ْﻮ ُﻡ َﻳ ْﻨ َﻔ ُﻊ ﺍﻟ‬118) ‫ﺍﻟْ َﻌ ِﺰﻳ ُﺰ ﺍﻟْ َﺤ ِﻜﻴ ُﻢ‬
ّ َ ْ َ ُ ‫ﺍﻟﻠَّ ُﻪ َﻋ ْﻨ ُﻬ ْﻢ َﻭ َﺭ‬
(120) ‫ﺽ َﻭ َﻣﺎ ِﻓﻴ ِﻬ َّﻦ َﻭ ُﻫ َﻮ َﻋﻠَﻰ ُﻛﻞ َﺷ ْﻲٍء َﻗ ِﺪﻳ ٌﺮ‬ ِ ‫( ﻟِﻠّ ِﻪ ُﻣ ْﻠ ُﻚ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍﻷ ْﺭ‬119) ‫ﺿﻮﺍ َﻋ ْﻨ ُﻪ َﺫﻟِ َﻚ ﺍ ْﻟ َﻔ ْﻮ ُﺯ ﺍ ْﻟ َﻌ ِﻈﻴ ُﻢ‬

Cuypers
Les vv. 5:109 – 120 contiennent trois passages, disposés de manière concentrique
(ABA’), évoquant trois temps ou moments de la vie de Jésus : [1] l’enfance et la vie
publique (vv. 109 – 111) ; [2] la promesse de la nourriture céleste, allusion à la Cène
(vv. 112– 115) ; [3] le Jugement de Jésus par Dieu (vv. 116 – 120).
Le premier passage reprend des données de deux apocryphes : la Vie de Jésus en
arabe et l’Histoire de l’enfance de Jésus.
Le deuxième passage ne doit pas être mis en relation, comme certains le font,
avec la vision de Pierre dans les Actes des Apôtres (chap. 10) ni avec les récits de la
multiplication des pains, dans les évangiles (par ex. Matt 14:13 – 21 et 15:32– 39), mais
avec le « Discours du pain de vie », dans Jean, chap. 6, dont il reprend nombre
d’éléments. Le récit coranique est un récit de discours, non d’action, comme Jn 6 :
dans aucun de ces deux récits la nourriture n’est donnée, sinon en promesse. Jn 6
cite le v. 24 du Ps 78 : « Il leur a donné à manger le pain du ciel (la manne) » ; le
Coran en cite un autre, du même psaume : « Est-il capable, Dieu, de dresser une table
au désert ? » (Ps 78:19), qui devient, dans le Coran : « Est-ce que ton Seigneur peut
faire descendre vers nous une table du ciel ? » (Q 5:112). Ces versets du Ps 78, dans les
deux textes (Jean et Coran), font allusion au livre de l’Exode. Il en va de même pour
le verset suivant du Coran : « Elle [la nourriture céleste] sera pour nous une fête, pour
les premiers d’entre nous et pour les derniers d’entre nous » (Q 5:114) // « vous le
fêterez… dans vos générations, c’est un décret perpétuel » (Ex 12:14).
Le troisième passage se situe dans l’au-delà. Au centre exact de ce passage, Jésus
atteste devant Dieu le caractère parfaitement monothéiste de son enseignement,
contre ceux qui le divinisèrent : « Je ne leur ai dit que ce que tu m’as commandé :
“Adorez Dieu, mon Seigneur et votre Seigneur.” C’est sur cette affirmation solennelle
de Jésus que se termine la sourate al-Māʾida, qui se présente comme un texte tes-
tament qui clôt la prédication mohammadienne.

Dye
Le v. 110 doit être rapproché d’autres épisodes du Coran parlant de Jésus, notamment
Q 3:42– 55 et Q 61:6. Tout se passe comme si le rédacteur du verset entendait résumer
en quelques lignes les traits saillants de la carrière prophétique de Jésus, telle que le
Coran la raconte. On peut s’interroger sur la date à laquelle ce passage a été com-
114 QS 9

posé : la tradition musulmane le situe à la fin de la période médinoise, mais je ne


serais pas surpris s’il s’avérait qu’il a été composé après la mort du Prophète, pro-
bablement peu de temps avant la collecte – ou plutôt de la composition – du Coran.
Comme l’ont remarqué Reynolds (2012a) et Cuypers (2007: 340 – 358), l’épisode
de la « table servie » fait un usage créatif de péricopes bibliques (Ps 78:19, Exod 16 –
17) et évangélique (John 6:22– 71, dont le sous-texte est précisément constitué par les
deux passages bibliques mentionnés précédemment), mais dans une perspective
antichrétienne. L’abondance de termes empruntés au guèze (inǧīl, ḥawāriyy, māʾida)
est frappante.
V. 116 : ce verset a donné lieu à de nombreuses spéculations. On a ainsi imaginé
des adorateurs arabes de Marie, qui seraient les cibles de ce verset, ou on y a vu une
preuve de la méconnaissance du christianisme de la part de l’auteur du Coran, qui
ferait de Marie une des personnes de la Trinité. Il me semble plutôt qu’il faut voir ici
un argument polémique, une réduction à l’absurde des discours chrétiens, qui peut
opérer de deux manières (on peut bien sûr aussi y voir une polémique contre les
pratiques cultuelles chrétiennes). Soit : puisque Jésus a été engendré par l’Esprit
saint, et que les chrétiens persistent à appeler Jésus « fils de Dieu », alors, si Dieu est
le père, l’Esprit saint (l’arabe rūḥ est féminin, comme le sont les termes apparentés
en hébreu ou en araméen), par lequel Jésus a été engendré (Luke 1:35), doit être la
mère (cf. Gallez 2005: 74– 83). « Soit, plus plausiblement : vous (chrétiens) » faites de
Jésus Dieu et le fils de Dieu, et par conséquent, vous devez aussi faire de Marie, dont
vous dites qu’elle est la mère de Dieu, un être divin. « L’objection rappelle les
polémiques nestoriennes contre la thèse de Marie Theotokos (Marie, mère de Dieu) »

El-Badawi
Q 5:110 – 15 is the Qurʾān’s take on the Last Supper from Christian Scripture and tra-
dition. This episode immediately shifts to narrating God’s questioning of Jesus, the
son of Mary (Q 5:116 – 20), nullifying what appears to be, on the surface, the worship
of a Trinity or Duality (?) composed of “Jesus and his mother.” This wording is strik-
ing and may point towards the devotion of ‘Mother and Child.’ Icons of the Madonna
and baby Jesus have been a staple of the Eastern Orthodox Church since Late Antiq-
uity. Since then as well, the feast known as the “Solemnity of Mary, Mother of God
(Greek theotokos)” has been celebrated in the East on January 1, just before Christmas
on January 6 or 7. How much of this is being criticized by Q 5:116 – 20 is unclear given
the brevity characteristic of such Qurʾānic language.

Pregill
Contains many details featured in the description of Jesus’ life in Q 3:45 – 57, but what
was prophecy in that sūra is now a retrospective narration of a conversation between
God and Jesus – one that will, however, take place in the eschatological future (a
120 QS 10

question que pose explicitement Ettinghaussen (1933: 6) dès l’introduction de son


ouvrage consacré à la polémique dans le Coran.

Dye
Récit de la conversion d’Abraham. D’autres passages reviennent sur son combat
contre l’idolâtrie et la dispute avec son père (Q 19:41– 50; 21:51– 73; 26:69 – 104;
37:83 – 113). Ce texte est cependant à part. Si on suit le textus receptus, c’est le seul
passage où le nom du père d’Abraham est indiqué. Or le prénom Āzar ne correspond
pas au Têraḥ de la Bible. Il s’agit probablement d’une erreur de lecture : Bellamy
(2001: 3 – 4) suggère de lire izrāʾan, « contemptuously » (c’est paléographiquement
plausible). Par ailleurs, c’est le seul texte coranique qui reprenne le thème de l’ob-
servation des astres comme voie vers le monothéisme. Cet épisode apparaît, parmi
d’autres histoires, dans le « cycle d’Abraham », dont le Livre des Jubilés est l’un des
plus anciens témoins. Comme souvent, le Coran propose une variation sur un sujet
bien connu dans les milieux juifs et chrétiens du Proche-Orient tardo-antique.
Le récit est très allusif et présuppose la connaissance d’une version plus détaillée
de l’histoire (ainsi, on ne sait pas à quel moment de la vie d’Abraham se déroule cet
épisode, et presque rien n’est dit du raisonnement qui mène Abraham au mono-
théisme). On notera plusieurs points remarquables. Premièrement, les vv. 76 – 79 ne
suivent pas, chronologiquement, le v. 74 (Abraham, avant de s’être lui-même con-
verti, peut difficilement reprocher à son père d’adorer des idoles avant de s’être
converti). Deuxièmement, il est plausible que le v. 75 fasse référence à un voyage
céleste. Est-ce durant ce voyage qu’Abraham se convertit ? C’est une lecture possible,
mais on peut aussi comprendre que le v. 75, comme le précédent, est seulement le
rappel d’un épisode de la vie d’Abraham, sans que cela ait de rapport direct avec
l’histoire narrée ensuite. Troisièmement, l’ordre lune/soleil (vv. 77– 78) suit une
progression « logique », de l’astre le plus petit à l’astre le plus grand, et un ordre
chronologique : dans le judaïsme et l’islam, le jour commence au coucher du soleil,
pas au lever. Quatrièmement, dans les récits pré-coraniques, Abraham découvre
l’unicité de Dieu par son seul raisonnement, en autodidacte. Or l’insistance du Coran
sur le secours que Dieu lui apporte crée une tension entre la morale de l’histoire, telle
que le Coran l’emprunte, et la modification qui y est apportée.
Sur ḥanīf : non pas « païen », mais Gentil, c’est-à-dire non lié par la loi juive,
mais monothéiste, voir De Blois (2002: 16 – 25) et Reynolds (2010: 80 – 87).

Pregill
The theme of the idolatry of Abraham’s people is common in the midrash, appearing
as early as Genesis Rabbah (3rd c. CE), but the most pertinent parallel to this Qurʾānic
passage is actually pre-rabbinic. Josephus’ Jewish Antiquities 1.154– 168 is one of the
earliest portrayals of Abraham’s rejection of his ancestral polytheism on account of
his observation of the heavenly bodies. As Reed (2004) has shown, Josephus here
134 QS 12

groupes humains (les peuples réfractaires) ou d’un être surnaturel (Iblīs). Quant aux
contre-discours présents, ils constituent l’ensemble des énoncés qui se laisse entre-
voir comme contemporain à la prédication supposée du Coran. Il regroupe les dis-
cours des détracteurs, suppose-t-on, de Muḥammad. Enfin, les contre-discours futurs
concerne l’ensemble des propos tenus par les damnés qui déniaient la croyance et
qui sont promis aux affres de l’enfer. Dans cette perspective, les deux énoncés du
v. 30 se définissent donc comme deux contre-discours présents (ou contre-discours
rapportés directs présents). Selon notre nomenclature, ils constituent le 80ème con-
tre-discours du groupe des contre-discours présents qui en compte 270 dans le
Coran (cf. Azaiez 2012).

Dye
Passage obscur, qui a visiblement subi plusieurs remaniements.
V. 29 : l’expression ʿan yadin a fait couler beaucoup d’encre. Rubin (2006) exam-
ine son usage dans la poésie des VIIe-IXe siècles. Trois sens se dégagent : generously,
voluntarily, submissively. Ce dernier sens conviendrait dans le Coran, mais Kropp a
raison de rappeler le caractère tardif ou douteux des vers supposés justifier cette sig-
nification. L’idée selon laquelle la seconde moitié du v. 29 (à partir de min allaḏīna)
serait une interpolation est plausible.
Sur ǧizya : comparer moyen-perse gazîdag/gazîtag, qui est très exactement le
nom de la poll-tax dont s’inspire la ǧizya. Il semble que le mot et l’institution
aient été empruntés (Gignoux 2012: 484) : sous les Sassanides, les hommes entre
vingt et cinquante ans devaient payer la gazîdag, une taxe de 4, 6, 8 ou 12 drachmes
(montant calculé selon leur moyens – ʿan yadin !), à l’époque de Khusrô I (531– 579).
Au VIIe siècle, cette taxe s’applique à tous les non-zoroastriens en échange de la li-
berté religieuse. Le principe de la ǧizya n’a guère de sens dans l’Arabie de l’époque
du Prophète ; il est en revanche naturel après les conquêtes, lorsqu’il s’agit d’admi-
nistrer un empire.
V. 30 : il n’y a aucune commune mesure entre le statut de ʿUzayr dans le ju-
daïsme et celui du Christ dans le christianisme. La mise en parallèle paraît forcée.
Sur l’identité de ʿUzayr (seule occurrence de ce nom dans le Coran), état de la ques-
tion chez Comerro (2005). Je doute que la figure visée soit Esdras. Comerro suggère
une hypothèse intéressante : ʿAzarya, l’un des compagnons de captivité de Daniel
(Dan 1:6 et Dan 3:25, où on peut facilement croire que « l’ange du Seigneur qui a l’as-
pect d’un fils de Dieu » est justement ʿAzarya). Une certaine mauvaise foi polémique
de la part de l’auteur du texte n’est pas exclue…
V. 31 : D’un strict point de vue grammatical (a fortiori si l’arabe du Coran est à
l’origine sans iʿrāb), il faudrait lire wa-l-masīḥi – ce qui change radicalement le
sens du propos. On peut donc se demander si wa-l-masīḥa ne serait pas une interpo-
lation.
QS 13 143

with Him, it was then that God turned towards repentir pour qu’ils reviennent [à Lui], car Allah
them in pardon that they might turn to Him. It est l’accueillant au repentir, le Miséricordieux.
is God who is All-Pardoning, Compassionate to
each.

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻟﺘﻮﺑﺔ‬
‫ﺇِ َّﻥ ﺍﻟﻠَّ َﻪ ﺍ ْﺷ َﺘ َﺮﻯ ِﻣ َﻦ ﺍﻟْ ُﻤ ْﺆ ِﻣ ِﻨﻴ َﻦ ﺃَ ْﻧ ُﻔ َﺴ ُﻬ ْﻢ َﻭﺃَ ْﻣ َﻮﺍﻟَ ُﻬ ْﻢ ِﺑﺄَ َّﻥ ﻟَ ُﻬ ُﻢ ﺍﻟْ َﺠ ّﻨَ َﺔ ُﻳ َﻘﺎ ِﺗﻠُﻮ َﻥ ِﻓﻲ َﺳ ِﺒﻴ ِﻞ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻓﻴَ ْﻘ ُﺘﻠُﻮ َﻥ َﻭﻳُ ْﻘ َﺘﻠُﻮ َﻥ َﻭ ْﻋ ًﺪﺍ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻪ َﺣ ًّﻘﺎ ِﻓﻲ‬
‫( ﺍﻟ ّﺘَﺎ ِﺋ ُﺒﻮ َﻥ‬111) ‫ﺍﻟ ّﺘَ ْﻮ َﺭﺍ ِﺓ َﻭﺍ ِْﻹ ْﻧ ِﺠﻴ ِﻞ َﻭﺍ ْﻟ ُﻘ ْﺮﺁَ ِﻥ َﻭ َﻣ ْﻦ ﺃَ ْﻭ َﻓﻰ ِﺑ َﻌ ْﻬ ِﺪ ِﻩ ِﻣ َﻦ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻓﺎ ْﺳ َﺘ ْﺒ ِﺸ ُﺮﻭﺍ ِﺑ َﺒ ْﻴ ِﻌ ُﻜ ُﻢ ﺍﻟَّ ِﺬﻱ َﺑﺎ َﻳ ْﻌ ُﺘ ْﻢ ِﺑ ِﻪ َﻭ َﺫﻟِ َﻚ ُﻫ َﻮ ﺍ ْﻟ َﻔ ْﻮ ُﺯ ﺍ ْﻟ َﻌ ِﻈﻴ ُﻢ‬
‫ﻑ َﻭﺍﻟ َّﻨﺎ ُﻫﻮ َﻥ َﻋ ِﻦ ﺍ ْﻟ ُﻤ ْﻨ َﻜ ِﺮ َﻭﺍ ْﻟ َﺤﺎ ِﻓ ُﻈﻮ َﻥ ﻟِ ُﺤ ُﺪﻭ ِﺩ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ‬ ِ ‫ﺍ ْﻟ َﻌﺎ ِﺑ ُﺪﻭ َﻥ ﺍ ْﻟ َﺤﺎ ِﻣ ُﺪﻭ َﻥ ﺍﻟ َّﺴﺎ ِﺋ ُﺤﻮ َﻥ ﺍﻟ َّﺮﺍ ِﻛ ُﻌﻮ َﻥ ﺍﻟ َّﺴﺎ ِﺟ ُﺪﻭ َﻥ ﺍ َْﻵ ِﻣ ُﺮﻭ َﻥ ِﺑﺎ ْﻟ َﻤ ْﻌ ُﺮﻭ‬
ِ
‫( َﻣﺎ َﻛﺎ َﻥ ﻟِﻠﻨَّ ِﺒ ِّﻲ َﻭﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ ﺁَ َﻣﻨُﻮﺍ ﺃَ ْﻥ َﻳ ْﺴ َﺘ ْﻐ ِﻔ ُﺮﻭﺍ ﻟِﻠْ ُﻤ ْﺸ ِﺮ ِﻛﻴ َﻦ َﻭﻟَ ْﻮ َﻛﺎﻧُﻮﺍ ﺃُﻭﻟِﻲ ُﻗ ْﺮ َﺑﻰ ِﻣ ْﻦ َﺑ ْﻌ ِﺪ َﻣﺎ َﺗ َﺒ ّﻴَ َﻦ ﻟَ ُﻬ ْﻢ ﺃَﻧَّ ُﻬ ْﻢ‬112) ‫َﻭ َﺑ ّﺸ ِﺮ ﺍﻟْ ُﻤ ْﺆ ِﻣ ِﻨﻴ َﻦ‬
‫( َﻭ َﻣﺎ َﻛﺎ َﻥ ﺍ ْﺳ ِﺘ ْﻐ َﻔﺎ ُﺭ ﺇِ ْﺑ َﺮﺍ ِﻫﻴ َﻢ َِﻷ ِﺑﻴ ِﻪ ﺇِ َّﻻ َﻋ ْﻦ َﻣ ْﻮ ِﻋ َﺪ ٍﺓ َﻭ َﻋ َﺪ َﻫﺎ ﺇِ َّﻳﺎ ُﻩ َﻓﻠَ َّﻤﺎ َﺗ َﺒ َّﻴ َﻦ ﻟَ ُﻪ ﺃَ ّﻧَ ُﻪ ِ َﻋ ُﺪ ٌّﻭ ﻟِﻠَّ ِﻪ َﺗ َﺒ َّﺮﺃَ ِﻣ ْﻨ ُﻪ ﺇِ َّﻥ‬113) ‫ﺻ َﺤﺎ ُﺏ ﺍﻟْ َﺠ ِﺤﻴ ِﻢ‬ ْ َ‫ﺃ‬
ّ َ َ ِ َ َ َ َ
‫( ﺇِ َّﻥ‬115) ‫ﻀ ّﻞ َﻗ ْﻮ ًﻣﺎ َﺑ ْﻌ َﺪ ﺇِ ْﺫ َﻫ َﺪﺍ ُﻫ ْﻢ َﺣ ّﺘﻰ ُﻳ َﺒﻴّ َﻦ ﻟَ ُﻬ ْﻢ َﻣﺎ َﻳ ّﺘ ُﻘﻮ َﻥ ﺇِ َّﻥ ﺍﻟﻠّ َﻪ ِﺑ ُﻜﻞ َﺷ ْﻲٍء َﻋﻠِﻴ ٌﻢ‬ ِ ‫( َﻭ َﻣﺎ َﻛﺎ َﻥ ﺍﻟﻠّ ُﻪ ﻟِ ُﻴ‬114) ‫ﺇِ ْﺑ َﺮﺍ ِﻫﻴ َﻢ ﻷ َّﻭﺍ ٌﻩ َﺣﻠِﻴ ٌﻢ‬
ٍ َْ
‫( ﻟَ َﻘ ْﺪ َﺗﺎ َﺏ ﺍﻟﻠَّ ُﻪ َﻋﻠَﻰ ﺍﻟ َّﻨ ِﺒ ِّﻲ‬116) ‫ﺼﻴ ٍﺮ‬ ِ َ ‫ﻧ‬ َ
‫ﻻ‬ ‫ﻭ‬ ‫ﻲ‬ ‫ﻟ‬ ‫ﻭ‬
َ ّ َِ ِ ِ ِ ‫ﻦ‬ ْ ‫ﻣ‬ ‫ﻪ‬ ّ َ ‫ﻠ‬ ‫ﻟ‬‫ﺍ‬ ‫ﻥ‬ ‫ﻭ‬‫ﺩ‬ُ ْ
‫ﻦ‬ ‫ﻣ‬ ‫ﻢ‬‫ﻜ‬ُ
ِ ْ َ َ َ ‫ﻟ‬ ‫ﺎ‬‫ﻣ‬ ‫ﻭ‬ ‫ﺖ‬ُ ‫ﻴ‬‫ﻤ‬ِ ‫ﺽ ُﻳ ْﺤ ِﻴﻲ َﻭ ُﻳ‬ ِ ‫ﺍﻟﻠّ َﻪ ﻟَ ُﻪ ُﻣ ْﻠ ُﻚ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍﻷ ْﺭ‬
َ
ٌ ‫ﺼﺎ ِﺭ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ ﺍﺗَّ َﺒ ُﻌﻮ ُﻩ ِﻓﻲ َﺳﺎ َﻋ ِﺔ ﺍﻟْ ُﻌ ْﺴ َﺮ ِﺓ ِﻣ ْﻦ َﺑ ْﻌ ِﺪ َﻣﺎ َﻛﺎ َﺩ َﻳ ِﺰﻳ ُﻎ ُﻗﻠُﻮ ُﺏ َﻓ ِﺮﻳ ٍﻖ ِﻣ ْﻨ ُﻬ ْﻢ ﺛُ َّﻢ َﺗﺎ َﺏ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ ﺇِﻧَّ ُﻪ ِﺑ ِﻬ ْﻢ َﺭ ُﺀﻭ‬ َ ْ
‫ﻑ‬ ِ َ ‫َﻭﺍﻟْ ُﻤ َﻬﺎ ِﺟ ِﺮﻳ َﻦ َﻭﺍﻷ ْﻧ‬
َ‫ﺿﺎ َﻗ ْﺖ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ ﺃَ ْﻧ ُﻔ ُﺴ ُﻬ ْﻢ َﻭ َﻇ ّﻨُﻮﺍ ﺃَ ْﻥ َﻻ َﻣﻠْ َﺠﺄ‬ َ ْ
ُ ‫ﺿﺎ َﻗ ْﺖ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ُﻢ ﺍﻷ ْﺭ‬ َ ّ ّ َ َ ّ
َ ‫ﺽ ِﺑ َﻤﺎ َﺭ ُﺣ َﺒ ْﺖ َﻭ‬ َ ‫( َﻭ َﻋﻠَﻰ ﺍﻟﺜ َﻼ َﺛ ِﺔ ﺍﻟ ِﺬﻳ َﻦ ُﺧﻠ ُﻔﻮﺍ َﺣ ّﺘﻰ ﺇِ َﺫﺍ‬117) ‫َﺭ ِﺣﻴ ٌﻢ‬
(118) ‫ِﻣ َﻦ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ ﺇِ َّﻻ ﺇِﻟَ ْﻴ ِﻪ ُﺛ َّﻢ َﺗﺎ َﺏ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ ﻟِ َﻴ ُﺘﻮ ُﺑﻮﺍ ﺇِ َّﻥ ﺍﻟﻠَّ َﻪ ُﻫ َﻮ ﺍﻟ ّﺘَ َّﻮﺍ ُﺏ ﺍﻟ َّﺮ ِﺣﻴ ُﻢ‬

Dye
Passage déroutant, à de nombreux égards. Le texte fait allusion à des épisodes dont
nous ne connaissons rien (par exemple les vv. 117– 118, voir aussi un peu avant,
vv. 107– 110), mis à part ce qu’en dit la tradition musulmane – ce qui ne nous est pas
forcément d’un grand secours.
V. 111 : ceux qui combattent dans le chemin de Dieu échangent leur vie et les
biens de ce monde contre la vie (éternelle) dans le Paradis – telle est la promesse de
Dieu. Le point curieux est bien sûr le vocabulaire utilisé (ištarā). Ce genre de mé-
taphore n’est pas totalement inconnu du christianisme syriaque. Cf. Synodicon Ori-
entale, ou Recueil de synodes nestoriens: les fidèles doivent distribuer leurs biens et
leurs aumônes pour la rémission des péchés (Syn. 585, Canon XV, p. 182) ; les fidèles
prélèvent une part de leur bien pour la donner à Dieu (et à l’Église), en vue de la
rémunération lucrative dans l’autre monde (Syn. 585, Canon VII, p. 143). Mais il y a
une différence importante avec le verset coranique, où Dieu apparaît comme un
partenaire actif, comme s’il avait l’initiative dans la transaction, et où ce ne sont pas
certains biens, mais tous les biens, et la personne même du croyant, qui sont l’objet
de « l’achat ».
D’une certaine manière, le Coran, dans la manière dont il conçoit Dieu et ses
liens avec les créatures, est éminemment politique. La façon dont il insiste sur la
toute-puissance divine institue un rapport de dominateur à dominé. Le thème est
certes aussi présent dans le judaïsme et le christianisme, mais le christianisme
souligne tout autant l’idée de paternité divine – idée que le Coran rejette résolument.
Ce qui compte est l’obéissance à Dieu, et l’installation du règne terrestre de cette
volonté (Q 11:19 – 20). Il me semble que l’on a ici des échos de cette idée, dans un
contexte très fortement eschatologique.
144 QS 13

Vv. 113 – 114 : sur Abraham, comparer Q 19:47; 60:4. Contrairement à d’autres
passages du Coran, ces versets (et l’ensemble de la sourate) s’opposent à toute
tentation de convergence avec les autres confessions.

Grodzki
I wonder whether v. 111, with the here very enigmatic verb ištarā, succeeded by a
seemingly quite unorthodox usage of bi-anna (in the meaning of li-kay) introducing
an adverbial purpose clause (in reverse order of the ḫabar and ism of a nominal sen-
tence), followed by (textually with no clear semantic continuity) fighting in the way
of Allah, killing and being killed (?), may be better understood through its back
translation into Syriac or Hebrew, perhaps revealing a helpful syntactical or semantic
hint or reference? Otherwise we face here a quite original image of making a bargain
with God for entering paradise.

Hilali
This passage does not appear in the manuscript 27.1 DAM, Yemen. Nevertheless, the
expression fī sabīl Allāh (in God’s way) occurs two times in the same chapter with
differences from the Cairo edition of the Qurʾān. This expression occurs often in
order to specify the character of the action of fighting the enemies: qitāl, ǧihād.
The fight is qualified as a fight “in God’s way” and is most of the time associated
with the verb ǧāhada. There is a superposition of a certain number of adjectives
that designate the believers (v. 112). In the context of this verse, the category of the
believers announced (v. 111) seeks a precision introduced by a number of adjectives.
I am not suggesting that a part of the text is “original” and another part contains “ad-
ditions” but I propose to consider the process of textual composition implied in every
text. The composition of the passage is built on the specification of the category of
the believers and the category of “fighting”. The expression fī sabīl Allāh, like the
list of adjectives of the believers, contextualizes the content of the passage (the cat-
egory of “fighting” and the category of “believers”) and gives to the passage a Qu-
rʾānic meaning in harmony with the rest of the occurrences of the same expression.

Pregill
Another passage that seems to require heavy interpolation of details from the sīra
tradition in order to be rendered comprehensible. The context of the emergence of
ǧihād fī sabīl Allāh as the central ideology or ethos of the community after the
Hijra seems to be writ large here, but unmoored from the particular (hiero‐)history
of what Muslim tradition claims about the Medinan period, what is the context?
Why is the authority of Torah, Gospel, and Qurʾān alike invoked to guarantee
posthumous reward for those who kill and are killed? When does the Gospel as
we know it ever command believers to kill anyone? Placed in a larger context, one
QS 14 159

َْ
‫( َﺑ ِﻘ َّﻴ ُﺔ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﺧ ْﻴ ٌﺮ ﻟَ ُﻜ ْﻢ‬85) ‫ﺽ ُﻣ ْﻔ ِﺴ ِﺪﻳ َﻦ‬ ِ ‫ﺱ ﺃ ْﺷ َﻴﺎ َﺀ ُﻫ ْﻢ َﻭ َﻻ َﺗ ْﻌ َﺜ ْﻮﺍ ِﻓﻲ ﺍﻷ ْﺭ‬
َ َ ‫َﻭ َﻳﺎ َﻗ ْﻮﻡ ﺃَ ْﻭ ُﻓﻮﺍ ﺍﻟْ ِﻤ ْﻜ َﻴﺎ َﻝ َﻭﺍﻟْ ِﻤﻴ َﺰﺍ َﻥ ِﺑﺎﻟْ ِﻘ ْﺴ ِﻂ َﻭ َﻻ َﺗ ْﺒ َﺨ ُﺴﻮﺍ ﺍﻟ ّﻨَﺎ‬
ِ
ْ
‫ﺻ َﻼ ُﺗ َﻚ َﺗﺄ ُﻣ ُﺮ َﻙ ﺃَ ْﻥ َﻧ ْﺘ ُﺮ َﻙ َﻣﺎ َﻳ ْﻌ ُﺒ ُﺪ ﺁَ َﺑﺎ ُﺅ َﻧﺎ ﺃَ ْﻭ ﺃَ ْﻥ َﻧ ْﻔ َﻌ َﻞ ِﻓﻲ ﺃَ ْﻣ َﻮﺍﻟِ َﻨﺎ َﻣﺎ‬ َ َ‫( َﻗﺎﻟُﻮﺍ َﻳﺎ ُﺷ َﻌ ْﻴ ُﺐ ﺃ‬86) ‫ﺇِ ْﻥ ُﻛ ْﻨ ُﺘ ْﻢ ُﻣ ْﺆ ِﻣ ِﻨﻴ َﻦ َﻭ َﻣﺎ ﺃَ َﻧﺎ َﻋﻠَ ْﻴ ُﻜ ْﻢ ِﺑ َﺤ ِﻔﻴ ٍﻆ‬
ِ ِ
‫( َﻗﺎ َﻝ َﻳﺎ َﻗ ْﻮ ِﻡ ﺃَ َﺭﺃَ ْﻳ ُﺘ ْﻢ ﺇِ ْﻥ ُﻛ ْﻨ ُﺖ َﻋﻠَﻰ َﺑﻴّ َﻨ ٍﺔ ِﻣ ْﻦ َﺭﺑّﻲ َﻭ َﺭ َﺯ َﻗ ِﻨﻲ ِﻣ ْﻨ ُﻪ ِﺭ ْﺯ ًﻗﺎ َﺣ َﺴ ًﻨﺎ َﻭ َﻣﺎ ﺃُ ِﺭﻳ ُﺪ ﺃَ ْﻥ‬87) ‫َﻧ َﺸﺎ ُﺀ ﺇِ َّﻧ َﻚ َﻷ ْﻧ َﺖ ﺍ ْﻟ َﺤﻠِﻴ ُﻢ ﺍﻟ َّﺮ ِﺷﻴ ُﺪ‬
‫( َﻭ َﻳﺎ َﻗ ْﻮ ِﻡ َﻻ‬88) ‫ﺻ َﻼ َﺡ َﻣﺎ ﺍ ْﺳ َﺘ َﻄ ْﻌ ُﺖ َﻭ َﻣﺎ َﺗ ْﻮ ِﻓﻴ ِﻘﻲ ﺇِ َّﻻ ِﺑﺎﻟﻠَّ ِﻪ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻪ َﺗ َﻮ َّﻛﻠْ ُﺖ َﻭﺇِﻟَ ْﻴ ِﻪ ﺃُ ِﻧﻴ ُﺐ‬ ْ ‫ﺃُ َﺧﺎﻟِ َﻔ ُﻜ ْﻢ ﺇِﻟَﻰ َﻣﺎ ﺃَ ْﻧ َﻬﺎ ُﻛ ْﻢ َﻋ ْﻨ ُﻪ ﺇِ ْﻥ ﺃُ ِﺭﻳ ُﺪ ﺇِ َّﻻ ﺍ ِْﻹ‬
ُ ُ
‫( َﻭﺍ ْﺳ َﺘ ْﻐ ِﻔ ُﺮﻭﺍ‬89) ‫ﺻﺎﻟِ ٍﺢ َﻭ َﻣﺎ َﻗ ْﻮ ُﻡ ﻟﻮ ٍﻁ ِﻣ ْﻨﻜ ْﻢ ﺑِ َﺒ ِﻌﻴ ٍﺪ‬ َ َ
َ ‫ﺻﺎ َﺏ َﻗ ْﻮ َﻡ ُﻧﻮ ٍﺡ ﺃ ْﻭ َﻗ ْﻮ َﻡ ُﻫﻮ ٍﺩ ﺃ ْﻭ َﻗ ْﻮ َﻡ‬ َ َ‫ﺼﻴ َﺒ ُﻜ ْﻢ ِﻣ ْﺜ ُﻞ َﻣﺎ ﺃ‬ِ ‫َﻳ ْﺠ ِﺮ َﻣ ّﻨَ ُﻜ ْﻢ ِﺷ َﻘﺎ ِﻗﻲ ﺃَ ْﻥ ُﻳ‬
ِ
‫ﺿ ِﻌﻴ ًﻔﺎ َﻭﻟَ ْﻮ َﻻ َﺭ ْﻫ ُﻄ َﻚ‬ َ ‫( َﻗﺎﻟُﻮﺍ َﻳﺎ ُﺷ َﻌ ْﻴ ُﺐ َﻣﺎ َﻧ ْﻔ َﻘ ُﻪ َﻛ ِﺜﻴ ًﺮﺍ ِﻣ َّﻤﺎ َﺗ ُﻘﻮ ُﻝ َﻭﺇِ َّﻧﺎ ﻟَ َﻨ َﺮﺍ َﻙ ِﻓﻴ َﻨﺎ‬90) ‫َﺭ َّﺑ ُﻜ ْﻢ ُﺛ َّﻢ ُﺗﻮ ُﺑﻮﺍ ﺇِﻟَ ْﻴ ِﻪ ﺇِ َّﻥ َﺭﺑّﻲ َﺭ ِﺣﻴ ٌﻢ َﻭ ُﺩﻭ ٌﺩ‬
ِ
‫( َﻗﺎ َﻝ َﻳﺎ َﻗ ْﻮ ِﻡ ﺃَ َﺭ ْﻫ ِﻄﻲ ﺃَ َﻋ ُّﺰ َﻋﻠَ ْﻴ ُﻜ ْﻢ ِﻣ َﻦ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻭﺍ َّﺗ َﺨ ْﺬ ُﺗ ُﻤﻮ ُﻩ َﻭ َﺭﺍ َﺀ ُﻛ ْﻢ ِﻇ ْﻬ ِﺮ ّﻳًﺎ ﺇِ َّﻥ َﺭﺑّﻲ ِﺑ َﻤﺎ َﺗ ْﻌ َﻤﻠُﻮ َﻥ‬91) ‫ﻟَ َﺮ َﺟ ْﻤ َﻨﺎ َﻙ َﻭ َﻣﺎ ﺃَ ْﻧ َﺖ َﻋﻠَ ْﻴ َﻨﺎ ِﺑ َﻌ ِﺰﻳ ٍﺰ‬
ِ ِ
‫ﻑ َﺗ ْﻌﻠَ ُﻤﻮ َﻥ َﻣ ْﻦ َﻳ ْﺄ ِﺗﻴ ِﻪ َﻋ َﺬﺍ ٌﺏ ُﻳ ْﺨ ِﺰﻳ ِﻪ َﻭ َﻣ ْﻦ ُﻫ َﻮ َﻛﺎ ِﺫ ٌﺏ َﻭﺍ ْﺭ َﺗ ِﻘ ُﺒﻮﺍ ﺇِﻧّﻲ‬ َ ‫( َﻭ َﻳﺎ َﻗ ْﻮ ِﻡ ﺍ ْﻋ َﻤﻠُﻮﺍ َﻋﻠَﻰ َﻣ َﻜﺎ َﻧ ِﺘ ُﻜ ْﻢ ﺇِﻧّﻲ َﻋﺎ ِﻣ ٌﻞ َﺳ ْﻮ‬92) ‫ُﻣ ِﺤﻴ ٌﻂ‬
َ َ
‫ﺻ َﺒ ُﺤﻮﺍ ِﻓﻲ‬ ْ َ‫ﺼ ْﻴ َﺤ ُﺔ َﻓﺄ‬ َّ ‫( َﻭﻟَ َّﻤﺎ َﺟﺎ َﺀ ﺃَ ْﻣ ُﺮ َﻧﺎ َﻧ َّﺠ ْﻴ َﻨﺎ ُﺷ َﻌ ْﻴ ًﺒﺎ َﻭﺍﻟّ ِﺬﻳ َﻦ ﺁَ َﻣ ُﻨﻮﺍ َﻣ َﻌ ُﻪ ِﺑ َﺮ ْﺣ َﻤ ٍﺔ ِﻣ ّﻨَﺎ َﻭﺃَ َﺧ َﺬ ِﺕ ﺍﻟّ ِﺬﻳ َﻦ َﻇﻠَ ُﻤﻮﺍ ﺍﻟ‬93) ‫َﻣ َﻌ ُﻜ ْﻢ َﺭ ِﻗﻴ ٌﺐ‬
(96) ‫( َﻭﻟَ َﻘ ْﺪ ﺃَ ْﺭ َﺳ ْﻠ َﻨﺎ ُﻣﻮ َﺳﻰ ِﺑ َﺂ َﻳﺎ ِﺗ َﻨﺎ َﻭ ُﺳ ْﻠ َﻄﺎ ٍﻥ ُﻣ ِﺒﻴ ٍﻦ‬95) ‫( َﻛ َﺄ ْﻥ ﻟَ ْﻢ َﻳ ْﻐ َﻨ ْﻮﺍ ِﻓﻴ َﻬﺎ ﺃَ َﻻ ُﺑ ْﻌ ًﺪﺍ ﻟِ َﻤ ْﺪ َﻳ َﻦ َﻛ َﻤﺎ َﺑ ِﻌ َﺪ ْﺕ َﺛ ُﻤﻮ ُﺩ‬94) ‫ِﺩ َﻳﺎ ِﺭ ِﻫ ْﻢ َﺟﺎ ِﺛ ِﻤﻴ َﻦ‬
‫ﺲ ﺍ ْﻟ ِﻮ ْﺭ ُﺩ‬ َ ‫( َﻳ ْﻘ ُﺪ ُﻡ َﻗ ْﻮ َﻣ ُﻪ َﻳ ْﻮ َﻡ ﺍ ْﻟ ِﻘ َﻴﺎ َﻣ ِﺔ َﻓ َﺄ ْﻭ َﺭ َﺩ ُﻫ ُﻢ ﺍﻟ َّﻨﺎ َﺭ َﻭ ِﺑ ْﺌ‬97) ‫ﺇِﻟَﻰ ِﻓ ْﺮ َﻋ ْﻮ َﻥ َﻭ َﻣﻠَ ِﺌ ِﻪ َﻓﺎ َّﺗ َﺒ ُﻌﻮﺍ ﺃَ ْﻣ َﺮ ِﻓ ْﺮ َﻋ ْﻮ َﻥ َﻭ َﻣﺎ ﺃَ ْﻣ ُﺮ ِﻓ ْﺮ َﻋ ْﻮ َﻥ ِﺑ َﺮ ِﺷﻴ ٍﺪ‬
ِ ُ
(99) ‫ﺲ ﺍﻟ ّﺮ ْﻓ ُﺪ ﺍﻟْ َﻤ ْﺮ ُﻓﻮ ُﺩ‬ َ ‫( َﻭﺃ ْﺗ ِﺒ ُﻌﻮﺍ ِﻓﻲ َﻫ ِﺬ ِﻩ ﻟَ ْﻌ َﻨ ًﺔ َﻭ َﻳ ْﻮ َﻡ ﺍﻟْ ِﻘ َﻴﺎ َﻣ ِﺔ ِﺑ ْﺌ‬98) ‫ﺍﻟْ َﻤ ْﻮ ُﺭﻭ ُﺩ‬

Dye
Il faut replacer ce passage dans le contexte de l’ensemble de la sourate. Les vv. 1– 24
se focalisent sur le châtiment à venir et le statut d’avertisseur (naḏīr) du destinataire
du message. Il est donc logique que la suite de la sourate insiste sur le récit de
châtiment par excellence, à savoir le déluge. L’histoire de Noé occupe ainsi les
vv. 25 – 49. Elle est suivie par des récits comparables, relatifs à Hūd (vv. 50 – 60), Ṣāliḥ
(vv. 61– 68), Abraham/Loth (vv. 69 – 83), Šuʿayb (vv. 84– 95), Moïse (vv. 96 – 99).
On a souvent affaire, dans le Coran, à la même histoire qui se répète : 1) envoi
d’un prophète ou d’un messager, qui appelle un peuple à reconnaître le dieu unique,
2) incrédulité du peuple, 3) punition divine, qui anéantit le peuple. Tous les pro-
phètes apparaissent comme des prophètes de l’islam, appelant à reconnaître l’uni-
cité divine et l’obligation d’observer les commandements divins. Il semble que la
présentation de ces histoires soit adaptée à l’image qui veut être donnée de la
carrière prophétique de Muḥammad. On peut parler d’une vision de l’histoire,
apocalyptique (elle révèle le sens du passé selon les événements actuels) et escha-
tologique (il est toujours question du Jour du jugement) (De Prémare 1988).
L’identité de trois figures pose problème : Hūd, Ṣāliḥ, Šuʿayb. Hūd est envoyé au
ʿĀd, tribu sur laquelle on ne sait rien – si tant est qu’il faille interpréter ʿĀd comme
un nom propre. Ṣāliḥ (mais n’est-ce pas plus un surnom qu’un prénom ?) est envoyé
au Ṯamūd, tribu historiquement bien attestée. Les récits sur la chamelle appartien-
nent manifestement à une forme de mythologie préislamique qui, bien avant l’é-
poque du Prophète, avait pu être réinterprétée dans une perspective biblique. Deux
partis s’opposent autour de Ṣāliḥ et du dieu qu’il proclame. Le conflit autour de la
chamelle (animal nomade par excellence) et de son droit à paître suggère fortement
que l’origine de cette légende doit être cherchée dans une rivalité entre nomades et
sédentaires.
Le contenu des récits coraniques montre bien que leur sous-texte doit souvent
être cherché dans les récits populaires, et dans les différentes réinterprétations et
160 QS 14

réactualisations des histoires bibliques, telles que les littératures homilétiques


peuvent parfois nous les faire connaître.

Firestone
The Qurʾānic Noah story, as well as the Qurʾānic depictions of other prophets living
prior to Muḥammad, has occasionally been considered by scholars in light of Mu-
ḥammad’s experience as a prophet scorned by his own people. The psychological as-
sociation has been duly noted, but the ethical implication has yet to be explored
fully. Note in 11:27 how the elite of the community scorn Noah and claim that he
can only attract the riffraff among the people. They do not accept his prophetic status
and consider him no more than a bothersome troublemaker. In verse 32, the people
challenge him on his warnings and say (I paraphrase in what follows), “so enough
with the threats, let us have the punishment if you are really truthful!” Noah then
has to respond, “Well, God will bring the punishment, and then you will be in
real trouble!” And then, in another wonderful premonition (or retrovision) to the sit-
uation that Muḥammad found himself in, verse 35 acknowledges the anxiety and
painful reality of the Prophetic role when God says to Noah, “They claim that you
made this all up. Fine. If you did not tell the truth regarding your claim to prophet-
hood, then you must bear your punishment. But even if you are not a prophet (which
in this context is absurd and impossible), the people to whom you are preaching are
not in any way excused from the evil of their acts.” Prophet or not, the people who
counter Noah must assume responsibility for their lives and behavior. In this section
the issue at the end of the day is not whether or not Muḥammad was a prophet, but
that humanity is held responsible to live according to God’s ethical teachings. This
moral-ethical aspect is sometimes lost in the discussion.
Abraham’s wife laughs in 11:71 when she hears the divine promise of progeny.
This is typical of the Hebrew Bible narrative in which humans, even heroes, do
not epitomize the faith expectations that are assumed for heroes in later scriptures.
In Genesis 17:17, for example, Abraham falls flat on his face and laughs in amazement
and skepticism when God informs him at the age of ninety nine years that he would
soon have a son through Sarah. And Sarah laughs for the same reason in Genesis
18:11– 15, when informed that she would soon have a child despite the fact that
she was old and barren. Yet they would indeed have a son together, and God com-
mands Abraham to name that divinely promised son Isaac.
The root meaning of Isaac in the Hebrew language is laughter, which immediate-
ly calls to mind Abraham and Sarah’s laughter when hearing the divine annunciation
of the promised son. The association is suggestive of the deep and conflicting emo-
tions that the episode evokes. Although the linguistic basis for the link between
Abraham and Sarah’s incredulous response to God’s annunciation and Isaac’s
name is lost in the Qurʾānic rendering of the parallel story, the laughter motif re-
mains nevertheless. This is interesting. The play on words in the Biblical rendering
rests on the common root in Hebrew for laughter and the name of the promised
QS 15 181

‫( َﻭ َﻣﺎ َﺗ ْﺴﺄَﻟُ ُﻬ ْﻢ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻪ ِﻣ ْﻦ ﺃَ ْﺟ ٍﺮ ﺇِ ْﻥ ُﻫ َﻮ ﺇِ َّﻻ ِﺫ ْﻛ ٌﺮ‬103) ‫ﺻ َﺖ ِﺑ ُﻤ ْﺆ ِﻣ ِﻨﻴ َﻦ‬ ْ ‫ﺱ َﻭﻟَ ْﻮ َﺣ َﺮ‬ َ َ َ


ِ ‫( َﻭ َﻣﺎ ﺃ ْﻛ َﺜ ُﺮ ﺍﻟ ّﻨﺎ‬102) ‫ﺃ ْﺟ َﻤ ُﻌﻮﺍ ﺃ ْﻣ َﺮ ُﻫ ْﻢ َﻭ ُﻫ ْﻢ َﻳ ْﻤ ُﻜ ُﺮﻭ َﻥ‬
َ
َ‫( ﻭﻣﺎ ﻳ ْﺆ ِﻣ ُﻦ ﺃَ ْﻛ َﺜﺮ ُﻫﻢ ﺑﺎﻟﻠّ ِﻪ‬105) ‫ﺿﻮ َﻥ‬ َ ْ ِ َ
ِ ْ ُ ُ َ َ ُ ‫ﺽ َﻳ ُﻤ ُّﺮﻭ َﻥ َﻋﻠَ ْﻴ َﻬﺎ َﻭ ُﻫ ْﻢ َﻋ ْﻨ َﻬﺎ ُﻣ ْﻌ ِﺮ‬ ِ ‫( َﻭ َﻛﺄﻳّ ْﻦ ِﻣ ْﻦ ﺁَ َﻳ ٍﺔ ِﻓﻲ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍﻷ ْﺭ‬104) ‫ﻟِ ْﻠ َﻌﺎﻟَ ِﻤﻴ َﻦ‬
‫( ُﻗ ْﻞ َﻫ ِﺬ ِﻩ‬107) ‫( ﺃَ َﻓ َﺄ ِﻣ ُﻨﻮﺍ ﺃَ ْﻥ َﺗ ْﺄ ِﺗ َﻴ ُﻬ ْﻢ َﻏﺎ ِﺷ َﻴ ٌﺔ ِﻣ ْﻦ َﻋ َﺬﺍ ِﺏ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ ﺃَ ْﻭ َﺗ ْﺄ ِﺗ َﻴ ُﻬ ُﻢ ﺍﻟ َّﺴﺎ َﻋ ُﺔ َﺑ ْﻐ َﺘ ًﺔ َﻭ ُﻫ ْﻢ َﻻ َﻳ ْﺸ ُﻌ ُﺮﻭ َﻥ‬106) ‫ﺇِ َّﻻ َﻭ ُﻫ ْﻢ ُﻣ ْﺸ ِﺮ ُﻛﻮ َﻥ‬
‫( َﻭ َﻣﺎ ﺃَ ْﺭ َﺳﻠْ َﻨﺎ ِﻣ ْﻦ َﻗ ْﺒﻠِ َﻚ ﺇِ َّﻻ ِﺭ َﺟﺎ ًﻻ‬108) ‫ﺼﻴ َﺮ ٍﺓ ﺃَ َﻧﺎ َﻭ َﻣ ِﻦ ﺍﺗَّ َﺒ َﻌ ِﻨﻲ َﻭ ُﺳ ْﺒ َﺤﺎ َﻥ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻭ َﻣﺎ ﺃَ َﻧﺎ ِﻣ َﻦ ﺍﻟْ ُﻤ ْﺸ ِﺮ ِﻛﻴ َﻦ‬ ِ ‫َﺳ ِﺒﻴﻠِﻲ ﺃَ ْﺩ ُﻋﻮ ﺇِﻟَﻰ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻋﻠَﻰ َﺑ‬
َ ّ َ َ ْ ّ َ ُ َ ْ َ َ
ُ
‫ﻒ َﻛﺎ َﻥ َﻋﺎ ِﻗ َﺒﺔ ﺍﻟ ِﺬﻳ َﻦ ِﻣ ْﻦ َﻗ ْﺒﻠِ ِﻬ ْﻢ َﻭﻟَ َﺪﺍ ُﺭ ﺍﻵ ِﺧ َﺮ ِﺓ َﺧ ْﻴ ٌﺮ ﻟِﻠ ِﺬﻳ َﻦ ﺍ ّﺗ َﻘ ْﻮﺍ‬ َ ‫ﺽ َﻓ َﻴ ْﻨﻈ ُﺮﻭﺍ َﻛ ْﻴ‬ ِ ‫ُﻧﻮ ِﺣﻲ ﺇِﻟَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ ِﻣ ْﻦ ﺃ ْﻫ ِﻞ ﺍﻟْ ُﻘ َﺮﻯ ﺃ َﻓﻠَ ْﻢ َﻳ ِﺴﻴ ُﺮﻭﺍ ِﻓﻲ ﺍﻷ ْﺭ‬
ْ ِ ُ َ
‫ﺼ ُﺮ َﻧﺎ َﻓ ُﻨ ّﺠ َﻲ َﻣ ْﻦ َﻧ َﺸﺎ ُﺀ َﻭ َﻻ ُﻳ َﺮ ُّﺩ َﺑﺄ ُﺳ َﻨﺎ َﻋ ِﻦ ﺍ ْﻟ َﻘ ْﻮ ِﻡ‬ ْ ‫ﺲ ﺍﻟ ُّﺮ ُﺳ ُﻞ َﻭ َﻇ ّﻨﻮﺍ ﺃَ َّﻧ ُﻬ ْﻢ َﻗ ْﺪ ُﻛ ِﺬ ُﺑﻮﺍ َﺟﺎ َﺀ ُﻫ ْﻢ َﻧ‬ َ ‫( َﺣ ّﺘﻰ ﺇِ َﺫﺍ ﺍ ْﺳ َﺘ ْﻴ َﺌ‬109) ‫ﺃَ َﻓ َﻼ َﺗ ْﻌ ِﻘﻠُﻮ َﻥ‬
َْ
‫ﺼﻴ َﻞ ُﻛ ّﻞ‬ ْ
‫ﻔ‬ َ ‫ﺗ‬ ‫ﻭ‬ ‫ﻪ‬
ِ َ ِ ََْ َ َْ ِ‫ﻳ‬ ‫ﺪ‬‫ﻳ‬ ‫ﻦ‬‫ﻴ‬ ‫ﺑ‬ ‫ﻱ‬‫ﺬ‬ّ َ ‫ﻟ‬ ‫ﺍ‬ َ
‫ﻖ‬ ‫ﻳ‬‫ﺪ‬ ‫ﺼ‬
ِ ْ َ ‫ﺗ‬ ‫ﻦ‬ْ ‫ﻜ‬ َ ‫ﻟ‬ ‫ﻭ‬ ‫ﻯ‬
ِ َ َ ُ ِ َ َ‫ﺮ‬ َ ‫ﺘ‬ ْ
‫ﻔ‬ ‫ﻳ‬ ‫ﺎ‬ ً ‫ﺜ‬ ‫ﻳ‬‫ﺪ‬ ‫ﺣ‬ ‫ﻥ‬‫ﺎ‬ َ
‫ﻛ‬ ‫ﺎ‬ ‫ﻣ‬ ‫ﺏ‬
َ ِ َ ‫ﺎ‬ ‫ﺒ‬ ْ ‫ﻟ‬‫ﻷ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﻲ‬ ‫ﻟ‬ ‫ﻭ‬ ُ
ِ ِ َِْ ِْ ِ ‫ﺼ‬
‫ﻷ‬ ٌ
‫ﺓ‬ ‫ﺮ‬ ‫ﺒ‬‫ﻋ‬ ‫ﻢ‬ ‫ﻬ‬‫ﺼ‬ َ ‫( ﻟَ َﻘ ْﺪ َﻛﺎ َﻥ ِﻓﻲ َﻗ‬110) ‫ﺍ ْﻟ ُﻤ ْﺠ ِﺮ ِﻣﻴ َﻦ‬
(111) ‫َﺷ ْﻲٍء َﻭ ُﻫ ًﺪﻯ َﻭ َﺭ ْﺣ َﻤ ًﺔ ﻟِ َﻘ ْﻮ ٍﻡ ُﻳ ْﺆ ِﻣﻨُﻮ َﻥ‬

Dye
Plus long récit du Coran – mais cependant bien trop allusif pour pouvoir être compris
sans la connaissance de l’histoire biblique sous-jacente. Analyse textuelle chez De
Prémare (1989) et examen des sources syriaques chez Witztum (2011a).
L’existence d’une telle sourate soulève une question. Il n’est guère contestable
que les trois figures bibliques les plus importantes dans le Coran soient Abraham,
Moïse et Jésus. Or aucune sourate ne porte le nom de Moïse ou de Jésus (il y a certes
la sourate 19, mais elle n’est pas entièrement consacrée à Marie et Jésus – et elle est
de toute façon, comme son titre l’indique, centrée sur Marie), et si la sourate
14 s’intitule bien Ibrāhīm, elle ne porte que très marginalement sur Abraham (les
titres sont bien sûr des additions postérieures à la rédaction des sourates, mais ils ne
sont pas arbitraires, en principe). En revanche, les sourates 12 et 71 s’intitulent
respectivement Joseph (Yūsuf) et Noé (Nūḥ), et elles portent, dans leur totalité, sur
ces personnages. Autrement dit, un personnage biblique secondaire a droit à une
sourate qui lui est entièrement consacrée, alors que les personnages bibliques les
plus importants (du point de vue même du Coran) n’ont pas de sourate qui leur soit
explicitement consacrée. Il y a sans doute ici un indice à creuser concernant la nature
et les intentions du travail éditorial qui a pu être fait lors de la collecte et de la
rédaction du Coran.

Firestone
One repeated question is why, given what appears to be the unique nature of the Jo-
seph story from a variety of perspectives, does it appear in such detail in the Qurʾān?
I would like to consider the question in terms of the particular nature of revealed
scriptures.
Of the three great scriptural revelations in the Hebrew Bible, New Testament and
Qurʾān, only the latter seems to be consistently self-defining as revelation. One does
not need to repeat the well-known linguistic and rhetorical language used in the
Qurʾān to stress that it is authentic divine revelation, despite allegations to the con-
trary that it records from skeptical individuals among its audience. The Qurʾān re-
peatedly states that it is authentic scripture – the word of God. The Hebrew Bible,
192 QS 16

Dye
Hymne sur les preuves de la résurrection et les signes de Dieu. Le texte se situe dans
le droit fil de l’apologétique chrétienne, notamment l’homilétique syriaque (voir par
exemple Aphraate, Dem. VIII). Les vv. 2– 4, 8 – 10 décrivent l’omnipotence et la sol-
licitude divines. Ils fournissent ainsi les arguments susceptibles de répondre à la
question posée au v. 5 : comment la résurrection est-elle possible ?
Les arguments principaux sont les suivants : si Dieu a pu créer le monde une
première fois, il pourra aussi procéder à une nouvelle création lors de la Résurrection
(Q 7:54, verset parallèle à Q 13:2; 17:98; 29:19: 36:81; 46:33; 50:15) ; c’est Dieu qui est à
l’origine de la vie, et qui fournit ce dont les êtres vivants ont besoin pour vivre – en
premier lieu, l’eau (Q 25:48 – 50; 30:48 – 49; 36:33 – 35).
Des versets relatifs à la menace du châtiment sont intercalés dans le propos,
formant ainsi une habile polyphonie. Les deux lignes mélodiques convergent tou-
tefois vers la même idée : la folie des infidèles, incapables de reconnaître la puis-
sance et la bonté divines, et insensibles aux menaces des châtiments qui les atten-
dent, alors qu’ils ont pourtant été dûment avertis (v. 7).

Grodzki
Another sūra introduced by the ḥurūf muqaṭṭaʿa (Arab: disconnected letters) or mu-
qaṭṭaʾāt, however the only one having this very combination of alif, lā, mīm and rāʾ
letters. Al-Ṭabarī lists in his Tafsīr fourteen different hypotheses elucidating the pos-
sible functions of these letters. Three centuries later, al-Rāzī already mentions about
twenty ways of interpreting them. Later, we have dozens of other creative and inven-
tive attempts to explain this mystery (inter alia, vocative forms used by the Islamic
prophet to address representatives of different tribes; signs to be understood through
different mnemonic and semiotic techniques; abbreviations used in pre-Islamic po-
etry; “names and attributes of” creation; part of the “mathematical miracle of the
Qurʾān”; alternative names for Qurʾānic sūras commonly used in different cultural/
geographic milieus; initials of Qurʾānic editors; battle cries used by the Prophet
Muḥammad to communicate with his army; oath formulas of allegiance pledged in
the Arabic dialect of Hijaz; hints indicating the proper rhythm in which given
sūras of the Qurʾān should be recited; or – following the Syriac liturgical tradition
– a reminiscence of some customary letter abbreviations and other notations intend-
ed as reference marks to liturgical doxological formulas, psalms, responsorial
chants, antiphons, intonation of hymns in appropriate tones and reading passages
from the scripture. According to this theory (Luxenberg 2008) alif, lām, mīm and
rāʾ introducing Q 13 are supposed to mean: emar lī Māryā rabbā (Arab. qāla lī l-
Rabb al-ʿAẓīm, Eng. the almighty Lord spoke to me).
204 QS 18

. Follow not what you have no knowledge . Et n’approchez les biens de l’orphelin que
of: hearing, sight and the heart – all of these, a de la façon la meilleure, jusqu’à ce qu’il atteigne
person shall be questioned about. sa majorité. Et remplissez l’engagement, car on
. Do not stride forth jauntily on earth: you sera interrogé au sujet des engagements.
will not thereby traverse the earth, nor reach up . Et donnez la pleine mesure quand vous
to the mountains in height. mesurez, et pesez avec une balance exacte.
. All these are a sin in God’s sight, and C’est mieux [pour vous] et le résultat en sera
hateful. This is part of what your Lord has re- meilleur.
vealed to you of Wisdom. . Et ne poursuis pas ce dont tu n’as aucune
. Take not with God another deity, else you connaissance. L’ouïe, la vue et le cour: sur tout
will be cast in hell, blameworthy and thwarted. cela, en vérité, on sera interrogé.
. Et ne foule pas la terre avec orgueil: tu ne
sauras jamais fendre la terre et tu ne pourras ja-
mais atteindre la hauteur des montagnes!
. Ce qui est mauvais en tout cela est détesté
de ton Seigneur.
. Tout cela fait partie de ce que ton Sei-
gneur t’a révélé de la Sagesse. N’assigne donc
pas à Allah d’autre divinité, sinon tu seras jeté
dans l’Enfer, blâmé et repoussé.

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻹﺳﺮﺍﺀ‬
‫ﻀﻰ َﺭ ُّﺑ َﻚ ﺃَ َّﻻ َﺗ ْﻌ ُﺒ ُﺪﻭﺍ ﺇِ َّﻻ ﺇِ َّﻳﺎ ُﻩ َﻭ ِﺑﺎﻟْ َﻮﺍﻟِ َﺪ ْﻳ ِﻦ ﺇِ ْﺣ َﺴﺎ ًﻧﺎ ﺇِ َّﻣﺎ ِ َﻳ ْﺒﻠُ َﻐ َّﻦ ِﻋ ْﻨ َﺪ َﻙ‬ َ ‫( َﻭ َﻗ‬22) ‫َﻻ َﺗ ْﺠ َﻌ ْﻞ َﻣ َﻊ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ ﺇِﻟَ ًﻬﺎ ﺁَ َﺧ َﺮ َﻓ َﺘ ْﻘ ُﻌ َﺪ َﻣ ْﺬ ُﻣﻮ ًﻣﺎ ٍ َﻣ ْﺨ ُﺬﻭ ًﻻ‬
‫ﺾ ﻟَ ُﻬ َﻤﺎ َﺟ َﻨﺎ َﺡ ﺍﻟ ُّﺬ ّﻝ ِﻣ َﻦ ﺍﻟ َّﺮ ْﺣ َﻤ ِﺔ‬ ْ ‫( َﻭﺍ ْﺧ ِﻔ‬23) ‫ﻑ َﻭ َﻻ َﺗ ْﻨ َﻬ ْﺮ ُﻫ َﻤﺎ َﻭ ُﻗ ْﻞ ﻟَ ُﻬ َﻤﺎ َﻗ ْﻮ ًﻻ َﻛ ِﺮﻳ ًﻤﺎ‬ ّ ُ‫ﺍ ْﻟ ِﻜﺒﺮ ﺃَﺣ ُﺪ ُﻫﻤﺎ ﺃَﻭ ِﻛ َﻼ ُﻫﻤﺎ َﻓ َﻼ َﺗ ُﻘ ْﻞ ﻟَ ُﻬﻤﺎ ﺃ‬
َ َ ْ َ َ ََ
َ ِ
(25) ‫ﺻﺎﻟِ ِﺤﻴ َﻦ َﻓ ِﺈ َّﻧ ُﻪ َﻛﺎ َﻥ ﻟِ ْﻸ َّﻭﺍ ِﺑﻴ َﻦ َﻏ ُﻔﻮ ًﺭﺍ‬ َ ‫( َﺭ ّﺑُ ُﻜ ْﻢ ِ ﺃَ ْﻋﻠَ ُﻢ ِﺑ َﻤﺎ ِﻓﻲ ُﻧ ُﻔﻮ ِﺳ ُﻜ ْﻢ ﺇِ ْ ِﻥ َﺗ ُﻜﻮ ُﻧﻮﺍ‬24) ‫ﺻ ِﻐﻴ ًﺮﺍ‬ َ ‫َﻭ ُﻗ ْﻞ َﺭ ّﺏ ﺍ ْﺭ َﺣ ْﻤ ُﻬ َﻤﺎ َﻛ َﻤﺎ َﺭ ّﺑَ َﻴﺎ ِﻧﻲ‬
ِّ
‫( ﺇِ َّﻥ ﺍﻟْ ُﻤ َﺒ ّﺬ ِﺭﻳ َﻦ َﻛﺎﻧُﻮﺍ ﺇِ ْﺧ َﻮﺍ َﻥ ﺍﻟ َّﺸ َﻴﺎ ِﻃﻴ ِﻦ َﻭ َﻛﺎ َﻥ ﺍﻟ َّﺸ ْﻴ َﻄﺎ ُﻥ ﻟِ َﺮﺑ ِﻪ‬26) ‫َﻭﺁَ ِﺕ َﺫﺍ ﺍﻟْ ُﻘ ْﺮ َﺑﻰ َﺣ َّﻘ ُﻪ َﻭﺍﻟْ ِﻤ ْﺴ ِﻜﻴ َﻦ َﻭﺍ ْﺑ َﻦ ﺍﻟ َّﺴ ِﺒﻴ ِﻞ َﻭ َﻻ ﺗُ َﺒ ّﺬ ْﺭ َﺗ ْﺒ ِﺬﻳ ًﺮﺍ‬
ِ
‫( َﻭ َﻻ َﺗ ْﺠ َﻌ ْﻞ َﻳ َﺪ َﻙ َﻣ ْﻐﻠُﻮﻟَ ًﺔ ﺇِﻟَﻰ‬28) ‫ﺿ َّﻦ َﻋ ْﻨ ُﻬ ُﻢ ﺍ ْﺑ ِﺘ َﻐﺎ َﺀ َﺭ ْﺣ َﻤ ٍﺔ ِﻣ ْﻦ َﺭﺑّ َﻚ َﺗ ْﺮ ُﺟﻮ َﻫﺎ َﻓ ُﻘ ْﻞ ﻟَ ُﻬ ْﻢ َﻗ ْﻮ ًﻻ َﻣ ْﻴ ُﺴﻮ ًﺭﺍ‬ َ ‫( َﻭﺇِ َّﻣﺎ ُﺗ ْﻌ ِﺮ‬27) ‫َﻛ ُﻔﻮ ًﺭﺍ‬
ِ
‫( ﺇِ َّﻥ َﺭ َّﺑ َﻚ َﻳ ْﺒ ُﺴ ُﻂ ﺍﻟ ّﺮ ْﺯ َﻕ ﻟِ َﻤ ْﻦ َﻳ َﺸﺎ ُﺀ َﻭ َﻳ ْﻘ ِﺪ ُﺭ ﺇِ َّﻧ ُﻪ َﻛﺎ َﻥ ِﺑ ِﻌ َﺒﺎ ِﺩ ِﻩ َﺧ ِﺒﻴ ًﺮﺍ‬29) ‫ُﻋ ُﻨ ِﻘ َﻚ َﻭ َﻻ َﺗ ْﺒ ُﺴ ْﻄ َﻬﺎ ُﻛ َّﻞ ﺍ ْﻟ َﺒ ْﺴ ِﻂ َﻓ َﺘ ْﻘ ُﻌ َﺪ َﻣﻠُﻮ ًﻣﺎ َﻣ ْﺤ ُﺴﻮ ًﺭﺍ‬
ِ
‫( َﻭ َﻻ َﺗ ْﻘ َﺮ ُﺑﻮﺍ ﺍﻟ ّﺰ َﻧﺎ ﺇِ َّﻧ ُﻪ َﻛﺎ َﻥ‬31) ‫( َﻭ َﻻ َﺗ ْﻘ ُﺘﻠُﻮﺍ ﺃَ ْﻭ َﻻ َﺩ ُﻛ ْﻢ َﺧ ْﺸ َﻴ َﺔ ﺇِ ْﻣ َﻼ ٍﻕ َﻧ ْﺤ ُﻦ َﻧ ْﺮ ُﺯ ُﻗ ُﻬ ْﻢ َﻭﺇِ ّﻳَﺎ ُﻛ ْﻢ ﺇِ َّﻥ َﻗ ْﺘﻠَ ُﻬ ْﻢ َﻛﺎ َﻥ ِﺧ ْﻄ ًﺌﺎ َﻛ ِﺒﻴ ًﺮﺍ‬30) ‫ﺼﻴ ًﺮﺍ‬ ِ ‫َﺑ‬
ِّ ِّ َ َ َ َ
ْ َ َ ً َ ْ ْ َ َ ُ ْ َ ُ
‫ﺲ ﺍﻟ ِﺘﻲ َﺣ َّﺮ َﻡ ﺍﻟﻠ ُﻪ ﺇِﻻ ِﺑﺎﻟ َﺤﻖ َﻭ َﻣ ْﻦ ﻗ ِﺘﻞ َﻣﻈﻠﻮ ًﻣﺎ ﻓﻘ ْﺪ َﺟ َﻌﻠ َﻨﺎ ﻟِ َﻮﻟِﻴ ِﻪ ُﺳﻠﻄﺎﻧﺎ ﻓﻼ ُﻳ ْﺴ ِﺮﻑ ِﻓﻲ‬ ْ ّ ّ ّ ْ ُ ُ ْ
َ ‫( َﻭﻻ َﺗﻘﺘﻠﻮﺍ ﺍﻟﻨﻔ‬32) ‫َﻓﺎ ِﺣﺸﺔ َﻭ َﺳﺎ َﺀ َﺳ ِﺒﻴﻼ‬
ّ َ ً ً َ
ً‫( َﻭ َﻻ َﺗ ْﻘ َﺮ ُﺑﻮﺍ َﻣﺎ َﻝ ﺍﻟْ َﻴ ِﺘﻴﻢ ﺇِ َّﻻ ﺑِﺎﻟَّ ِﺘﻲ ِﻫﻲ ﺃَ ْﺣ َﺴ ُﻦ َﺣ ّﺘَﻰ َﻳ ْﺒﻠُ َﻎ ﺃَ ُﺷ َّﺪ ُﻩ َﻭﺃَ ْﻭ ُﻓﻮﺍ ﺑِﺎﻟْ َﻌ ْﻬ ِﺪ ﺇِ َّﻥ ﺍﻟْ َﻌ ْﻬ َﺪ َﻛﺎ َﻥ َﻣ ْﺴ ُﺌﻮﻻ‬33) ‫ﺼﻮ ًﺭﺍ‬ ُ ‫ﺍﻟْ َﻘ ْﺘ ِﻞ ﺇِ ّﻧَ ُﻪ َﻛﺎ َﻥ َﻣ ْﻨ‬
َ ِ
‫ﺲ ﻟَ َﻚ ِﺑ ِﻪ ِﻋ ْﻠ ٌﻢ ﺇِ َّﻥ ﺍﻟ َّﺴ ْﻤ َﻊ‬ ْ
ُ ‫( َﻭ َﻻ َﺗ ْﻘ‬35) ‫ﺱ ﺍ ْﻟ ُﻤ ْﺴ َﺘ ِﻘﻴﻢ َﺫﻟِ َﻚ َﺧ ْﻴ ٌﺮ َﻭﺃَ ْﺣ َﺴ ُﻦ َﺗﺄ ِﻭﻳ ًﻼ‬ َ
َ ‫ﻒ َﻣﺎ ﻟَ ْﻴ‬ ِ ِ ‫( َﻭﺃ ْﻭ ُﻓﻮﺍ ﺍ ْﻟ َﻜ ْﻴ َﻞ ﺇِ َﺫﺍ ِﻛ ْﻠ ُﺘ ْﻢ َﻭ ِﺯ ُﻧﻮﺍ ِﺑﺎ ْﻟ ِﻘ ْﺴ َﻄﺎ‬34)
َ َْ ُّ ‫ﻭﺍ ْﻟﺒﺼﺮ ﻭﺍ ْﻟ ُﻔﺆﺍﺩ ُﻛ‬
‫ﺽ َﻭﻟَ ْﻦ َﺗ ْﺒﻠُ َﻎ ﺍ ْﻟ ِﺠ َﺒﺎ َﻝ‬ َ ‫ﺽ َﻣ َﺮ ًﺣﺎ ﺇِ َّﻧ َﻚ ﻟَ ْﻦ َﺗ ْﺨ ِﺮ َﻕ ﺍ ْﻷ ْﺭ‬ ِ ْ‫ﺭ‬ ‫ﻷ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﻲ‬ ‫ﻓ‬ ‫ﺶ‬
ِ ِ ْ َ ‫ﻤ‬َ ‫ﺗ‬ َ
‫ﻻ‬ ‫ﻭ‬ (36 ) ً
‫ﻻ‬ ‫ﻮ‬ُ ‫ﺌ‬ ‫ﺴ‬ ‫ﻣ‬
ْ َ َ َ ُ
‫ﻪ‬ ْ
‫ﻨ‬ ‫ﻋ‬ ‫ﻥ‬ ‫ﺎ‬ َ
‫ﻛ‬ َ
‫ﻚ‬ ‫ﺌ‬
ِ َ ‫ﻟ‬ ‫ﻭ‬ُ ‫ﺃ‬ ‫ﻞ‬ َ َ َ َ َ َ َ
ِ ِ
‫( َﺫﻟِ َﻚ ِﻣ َّﻤﺎ ﺃَ ْﻭ َﺣﻰ ﺇِﻟَ ْﻴ َﻚ َﺭ ّﺑُ َﻚ ِﻣ َﻦ ﺍﻟْ ِﺤ ْﻜ َﻤ ِﺔ َﻭ َﻻ َﺗ ْﺠ َﻌ ْﻞ َﻣ َﻊ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ ﺇِﻟَ ًﻬﺎ ﺁَ َﺧ َﺮ‬38) ‫( ُﻛ ُّﻞ َﺫﻟِ َﻚ َﻛﺎ َﻥ َﺳﻴّﺌُ ُﻪ ِﻋ ْﻨ َﺪ َﺭﺑّ َﻚ َﻣ ْﻜ ُﺮﻭ ًﻫﺎ‬37) ‫ُﻃﻮ ًﻻ‬
(39) ‫َﻓ ُﺘﻠْ َﻘﻰ ِﻓﻲ َﺟ َﻬ ّﻨَ َﻢ َﻣﻠُﻮ ًﻣﺎ َﻣ ْﺪ ُﺣﻮ ًﺭﺍ‬

Dye
Comme pour d’autres passages étudiés précédemment, nous avons affaire ici à un
texte d’instruction, ou d’édification morale, encadré par deux versets condamnant le
širk (vv. 22, 39), et énonçant plusieurs règles morales, dans la lignée de l’éthique
biblique (notamment certains aspects du Décalogue). On peut rapprocher ce texte de
Q 6:151– 153, et d’autres versets épars (cf. Günther 2007).
La transition entre le v. 22 et le v. 23 évoque très directement celle entre le
premier commandement et les suivants (Ex 20:3, Dt 5:7) même si, comme le note
QS 18 205

Hawting, on rencontre ici (comme souvent) le problème de l’identité exacte du lo-


cuteur.

Pregill
Although it does not explicitly mention Moses or the Torah, this passage is the main
version of the Biblical Decalogue in the Qurʾān, although novel elements are found
here in addition to the more familiar rules; thus, infanticide, infringing on orphans’
property, and cheating with regard to weights and measures are specifically prohib-
ited as well as idolatry and murder. See the discussion in Günther 2007, where this
passage is linked to the kalima sawāʾ of 3:64 – that is, the “common word” is the
Decalogue itself, which all monotheists share and by which they should all abide.
This argument seems especially plausible to me given the distinct echo of the First
Commandment found in the latter half of 3:64.
The Israelite context of the sūra is clear, given the well-known allusion to Jeru-
salem at its opening (the identification of al-masǧid al-aqṣā in v. 1 as the Temple is
confirmed by the reference to the destruction of both the Solomonic and the Second
Temple in vv. 4– 7 following).

Stefanidis
In contrast to Q 4:36 – 38 and Q 6:151– 52, most of the injunctions in this passage are
addressed to the second person singular. Bell (1937: 262) suggests that the original
passage was intended for the Prophet and that the prohibitions addressed to the
“people” (vv. 31– 35) were inserted later, probably at Medina.
The passage is framed by two strong menaces: v. 22 lā taǧʿal maʿa llāhi ilāhan
āḫara fa-taqʿuda maḏmūman maḫḏūlan and v. 39 lā taǧʿal maʿa llāhi ilāhan āḫara
fa-tulqā fī ǧahannama malūman madḥūran. The notion that the Prophet was capable
of committing the greatest sin and liable to be punished in hell was offensive to
many exegetes. Muslim scholars devised a special category of Qurʾānic address
(ḫiṭāb ʿayn wa-l-murād bihi ġayruhu; cf. Zarkašī 2009: 151) to characterize passages
such as these. By holding that a verse formally addressed to the Prophet is in fact
destined to humankind, they preserved the dogma of the Prophet’s infallibility as
well as the general understanding that the Qurʾān is primarily addressed to Muḥam-
mad. Beyond these theological considerations, the singular address recalls the con-
spicuous use of the singular second person in the Biblical commandments (Exod 20
and Deut 5). This parallel does not, however, shed much light on the alternation of
the singular and the plural address in the Qurʾānic passage.

Stewart
The reference to the inquiry on the Day of Judgment about one’s hearing, eyesight,
and heart is striking. Does the heart (fuʾād) refer to one’s innermost thoughts, to
QS 19 Q 17:85
. They ask you about the soul. . Et ils t’interrogent au sujet de l’âme, –
Say: “The soul belongs to the realm of my Lord, Dis: «L’âme relève de l’Ordre de mon Seigneur».
and of knowledge you have been granted but lit- Et on ne vous a donné que peu de connais-
tle.” sance.

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻹﺳﺮﺍﺀ‬
َ ُ ِّ
(85) ‫َﻭ َﻳ ْﺴﺄَﻟُﻮ َﻧ َﻚ َﻋ ِﻦ ﺍﻟ ّﺮﻭ ِﺡ ﻗ ِﻞ ﺍﻟ ّﺮﻭ ُﺡ ِﻣ ْﻦ ﺃ ْﻣ ِﺮ َﺭﺑﻲ َﻭ َﻣﺎ ﺃﻭ ِﺗﻴﺘ ْﻢ ِﻣ َﻦ ﺍﻟ ِﻌﻠ ِﻢ ﺇِﻻ ﻗﻠِﻴﻼ‬
ً َ ّ ْ ْ ُ َ ُ ُ ُ

Dye
Le propos est mis en scène (wa-yasʾalūnaka ʿan), comme un discours de Dieu au
Prophète, fournissant la réponse à une question qui lui aurait été posée. Il me paraît
impossible de savoir s’il s’agit seulement d’un procédé littéraire et rhétorique, ou si
cela traduit un événement réel (l’identité des questionneurs restant de toute façon
mystérieuse).
Le passage est très obscur, rūḥ et amr étant très polysémiques (étude classique
sur ce dernier terme : Baljon 1958), et pouvant donc recevoir des significations
différentes selon les contextes. On peut le rapprocher de Q 16:2 et Q 40:15, et y voir
une brève explication de la vision coranique de la prophétie. Rūḥ ne désigne pas ici
le souffle de vie (Q 15:28), l’ange Gabriel (Q 19:17), ou le contenu du message inspiré
(Q 42:52), mais bien plutôt l’esprit de Dieu censé parler à travers les propos du
prophète (à rapprocher, bien sûr, de l’Esprit saint, cf. Q Baqara 2:87, 253). Amr (qui
peut avoir une connotation eschatologique, mais pas nécessairement dans le présent
contexte) me paraît simplement désigner ici l’ordre, la décision, divine – qui peut
s’exprimer dans une parole (cf. par exemple Q 3:59). La préposition min peut être
ambiguë : elle paraît signifier ici l’origine (l’esprit vient de l’ordre divin, il descend
selon la décision divine).
On rencontre sans doute ici une référence à une conception de la prophétie très
courante dans l’Antiquité : une seule et même essence divine, l’Esprit saint, s’est
personnifiée dans les prophètes ou les a inspirés, jusqu’à trouver en Christ sa ré-
vélation pleine et entière (ce qui pourrait expliquer que le terme rūḥ apparaisse
souvent dans des versets relatifs à Jésus). Mais on trouve aussi l’idée selon laquelle le
bénéficiaire de l’Esprit, après Jésus, sera le Paraclet, ou que le Paraclet parlera à
travers ses propos : ainsi, Dieu envoie, accorde l’Esprit, à qui il le décide (Q 40:15 ;
Voir aussi Hebr/Hé 2:3).

Kropp
There are two difficult terms ruḥ (allāh) and amr (allāh). There is the suspicion that
both of them are ambiguous and that their actual meaning in the context may be
‫‪QS 20‬‬ ‫‪215‬‬

‫‪dehors de Lui et Il n’associe personne à Son‬‬


‫‪commandement.‬‬

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻟﻜﻬﻒ‬
‫ﻒ َﻓ َﻘﺎﻟُﻮﺍ َﺭ ّﺑَ َﻨﺎ ﺁَ ِﺗ َﻨﺎ ِﻣ ْﻦ ﻟَ ُﺪ ْﻧ َﻚ َﺭ ْﺣ َﻤ ًﺔ‬ ‫ْ ِ‬‫ﻬ‬ ‫ﻜ‬‫َ‬ ‫ْ‬ ‫ﻟ‬‫ﺍ‬ ‫ﻰ‬ ‫َ‬ ‫ﻟ‬ ‫ﺇ‬ ‫ُ‬
‫ﺔ‬ ‫ﻴ‬ ‫ْ‬
‫ﺘ‬ ‫ﻔ‬‫ْ‬ ‫ﻟ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﻯ‬ ‫ﻭ‬ ‫َ‬ ‫ﺃ‬ ‫ْ‬
‫ﺫ‬ ‫ﺇ‬ ‫(‬ ‫)‬ ‫ﺎ‬ ‫ﺒ‬ ‫ﺠ‬ ‫ﻋ‬ ‫ﺎ‬ ‫َ‬ ‫ﻨ‬‫ﺗ‬ ‫ﺎ‬ ‫ﻳ‬‫َ‬ ‫ﺁ‬ ‫ﻦ‬ ‫ْ‬ ‫ﻣ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﻮ‬ ‫ُ‬ ‫ﻧ‬‫ﺎ‬ ‫َ‬
‫ﻛ‬ ‫ﻢ‬ ‫ﻴ‬ ‫ﻗ‬ ‫ﺮ‬‫َ‬ ‫ﻟ‬ ‫ﺍ‬‫ﻭ‬ ‫ﻒ‬ ‫ﻬ‬ ‫َ‬
‫ﻜ‬ ‫ْ‬ ‫ﻟ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﺃَ ْﻡ َﺣ ِﺴ ْﺒ َﺖ ﺃَ َّﻥ ْ َ َ‬
‫ﺏ‬ ‫ﺎ‬ ‫ﺤ‬ ‫ﺻ‬ ‫َ‬ ‫ﺃ‬
‫ِ َ ِ‬ ‫ِ َ‬ ‫‪9‬‬ ‫ِ َ ِ َ ًَ‬ ‫ْ ِ َ ِّ ِ‬
‫َ‬ ‫ِ‬
‫ﺼﻰ ﻟِ َﻤﺎ‬ ‫َ‬ ‫ْ‬ ‫ْ‬ ‫ُ‬ ‫َ‬ ‫ْ‬ ‫ُ‬
‫ﻒ ِﺳ ِﻨﻴ َﻦ َﻋ َﺪ ًﺩﺍ )‪ (11‬ﺛ َّﻢ َﺑ َﻌﺜ َﻨﺎ ُﻫ ْﻢ ﻟِ َﻨ ْﻌﻠ َﻢ ﺃ ّﻱ ﺍﻟ ِﺤﺰ َﺑ ْﻴ ِﻦ ﺃ ْﺣ َ‬ ‫َ‬ ‫ْ‬ ‫َ‬ ‫َ‬
‫ﻀ َﺮ ْﺑ َﻨﺎ َﻋﻠﻰ ﺁﺫﺍ ِﻧ ِﻬ ْﻢ ِﻓﻲ ﺍﻟﻜ ْﻬ ِ‬ ‫َ‬ ‫َﻭ َﻫﻴّ ْﺊ ﻟَ َﻨﺎ ِﻣ ْﻦ ﺃَ ْﻣ ِﺮ َﻧﺎ َﺭﺷ ًﺪﺍ )‪ (10‬ﻓ َ‬
‫َ‬ ‫َ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬
‫ﺺ َﻋﻠَ ْﻴ َﻚ َﻧ َﺒﺄَ ُﻫ ْﻢ ﺑِﺎﻟْ َﺤ ّﻖ ﺇِ ّﻧَ ُﻬ ْﻢ ِﻓ ْﺘ َﻴ ٌﺔ ﺁَ َﻣ ُﻨﻮﺍ ﺑِ َﺮﺑّ ِﻬ ْﻢ َﻭ ِﺯ ْﺩ َﻧﺎ ُﻫ ْﻢ ُﻫ ًﺪﻯ )‪َ (13‬ﻭ َﺭ َﺑ ْﻄ َﻨﺎ َﻋﻠَﻰ ُﻗﻠُﻮﺑِ ِﻬ ْﻢ ﺇِ ْﺫ َﻗﺎ ُﻣﻮﺍ َﻓ َﻘﺎﻟُﻮﺍ‬ ‫ﻟَﺒِﺜُﻮﺍ ﺃَ َﻣ ًﺪﺍ )‪َ (12‬ﻧ ْﺤ ُﻦ َﻧ ُﻘ ُّ‬
‫ْ‬ ‫َ‬ ‫َْ‬
‫ﺽ ﻟَ ْﻦ َﻧ ْﺪ ُﻋ َﻮ ِﻣ ْﻦ ُﺩﻭ ِﻧ ِﻪ ﺇِﻟَ ًﻬﺎ ﻟَ َﻘ ْﺪ ُﻗ ْﻠ َﻨﺎ ﺇِ ًﺫﺍ َﺷ َﻄ ًﻄﺎ )‪َ (14‬ﻫ ُﺆ َﻻ ِﺀ َﻗ ْﻮ ُﻣ َﻨﺎ ﺍ ّﺗ َﺨ ُﺬﻭﺍ ِﻣ ْﻦ ُﺩﻭ ِﻧ ِﻪ ﺁَﻟِ َﻬ ًﺔ ﻟَ ْﻮ َﻻ َﻳﺄ ُﺗﻮ َﻥ‬ ‫َﺭ ُّﺑ َﻨﺎ َﺭ ُّﺏ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍﻷ ْﺭ ِ‬
‫َ‬ ‫َ‬ ‫ِ‬
‫ﻒ َﻳ ْﻨ ُﺸ ْﺮ‬ ‫َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ ِﺑ ُﺴ ْﻠ َﻄﺎ ٍﻥ َﺑﻴّ ٍﻦ َﻓ َﻤ ْﻦ ﺃَ ْﻇﻠَ ُﻢ ِﻣ َّﻤ ِﻦ ﺍ ْﻓ َﺘ َﺮﻯ َﻋﻠَﻰ ﺍﻟﻠّ ِﻪ َﻛ ِﺬ ًﺑﺎ )‪َ (15‬ﻭﺇِ ِﺫ ﺍ ْﻋ َﺘ َﺰ ْﻟ ُﺘ ُﻤﻮ ُﻫ ْﻢ َﻭ َﻣﺎ َﻳ ْﻌ ُﺒ ُﺪﻭ َﻥ ﺇِ َّﻻ ﺍﻟﻠّ َﻪ َﻓ ْﺄ ُﻭﻭﺍ ﺇِﻟَﻰ ﺍ ْﻟ َﻜ ْﻬ ِ‬
‫َ‬ ‫ِ‬
‫ﺲ ﺇِ َﺫﺍ َﻃﻠَ َﻌ ْﺖ َﺗ َﺰﺍ َﻭ ُﺭ َﻋ ْﻦ َﻛ ْﻬ ِﻔ ِﻬ ْﻢ َﺫﺍ َﺕ ﺍﻟْ َﻴ ِﻤﻴ ِﻦ َﻭﺇِ َﺫﺍ َﻏ َﺮ َﺑ ْﺖ‬ ‫ﻟَ ُﻜ ْﻢ َﺭ ّﺑُ ُﻜ ْﻢ ِﻣ ْﻦ َﺭ ْﺣِ َﻤ ِﺘ ِﻪ َﻭ ُﻳ َﻬﻴّ ْﺊ ﻟَ ُﻜ ْﻢ ِﻣ ْﻦ ﺃَ ْﻣ ِﺮ ُﻛ ْﻢ ِﻣﺮ َﻓ ًﻘﺎ )‪َ (16‬ﻭ َﺗ َﺮﻯ ﺍﻟ ّﺸ ْﻤ َ‬
‫ﻀﻠِﻞ َﻓﻠَ ْﻦ َﺗ ِﺠ َﺪ ﻟَ ُﻪ َﻭﻟِ ًّﻴﺎ ُﻣ ْﺮ ِﺷ ًﺪﺍ )‪(17‬‬ ‫ْ‬ ‫ﺿ ُﻬ ْﻢ َﺫﺍ َﺕ ﺍﻟ ّﺸ َﻤﺎ ِﻝ َﻭ ُﻫ ْﻢ ِﻓﻲ َﻓ ْﺠ َﻮ ٍﺓ ِﻣ ْﻨ ُﻪ َﺫﻟِ َﻚ ِﻣ ْﻦ ﺁَ َﻳﺎ ِﺕ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻣ ْﻦ َﻳ ْﻬ ِﺪ ﺍﻟﻠ ُﻪ َﻓ ُﻬ َﻮ ﺍﻟ ُﻤ ْﻬ َﺘ ِﺪ َﻭ َﻣ ْﻦ ُﻳ ْ‬
‫ْ‬ ‫ّ‬ ‫َ‬ ‫َﺗ ْﻘ ِﺮ ُ‬
‫َ‬ ‫َ‬ ‫ِ‬ ‫ّ‬ ‫ِ‬
‫ﺻﻴ ِﺪ ﻟَ ِﻮ ﺍ ّﻃﻠَ ْﻌ َﺖ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ ﻟَ َﻮﻟّ ْﻴ َﺖ ِﻣ ْﻨ ُﻬ ْﻢ‬ ‫ّ‬
‫َﻭ َﺗ ْﺤ َﺴﺒُ ُﻬ ْﻢ ﺃَ ْﻳ َﻘﺎ ًﻇﺎ َﻭ ُﻫ ْﻢ ُﺭ ُﻗﻮ ٌﺩ َﻭ ُﻧ َﻘﻠﺒُ ُﻬ ْﻢ َﺫﺍ َﺕ ﺍ ْﻟ َﻴ ِﻤﻴ ِﻦ َﻭ َﺫﺍ َﺕ ﺍﻟﺸ َﻤﺎ ِﻝ َﻭ َﻛ ْﻠﺒُ ُﻬ ْﻢ َﺑﺎ ِﺳ ٌﻂ ِﺫ َﺭﺍ َﻋ ْﻴ ِﻪ ِﺑﺎ ْﻟ َﻮ ِ‬
‫ﺾ َﻳ ْﻮ ٍﻡ َﻗﺎﻟُﻮﺍ‬ ‫ِﻓ َﺮﺍ ًﺭﺍ َﻭﻟَ ُﻤﻠِ ْﺌ َﺖ ِﻣ ْﻨ ُﻬ ْﻢ ُﺭ ْﻋ ًﺒﺎ )‪َ (18‬ﻭ َﻛ َﺬﻟِ َﻚ َﺑ َﻌ ْﺜ َﻨﺎ ُﻫ ْﻢ ﻟِ َﻴ َﺘ َﺴﺎ َﺀﻟُﻮﺍ َﺑ ْﻴ َﻨ ُﻬ ْﻢ َﻗﺎ َﻝ َﻗﺎ ِﺋ ٌﻞ ِﻣ ْﻨ ُﻬ ْﻢ َﻛ ْﻢ ﻟَ ِﺒ ْﺜ ُﺘ ْﻢ َﻗﺎﻟُﻮﺍ ﻟَ ِﺒ ْﺜ َﻨﺎ َﻳ ْﻮ ًﻣﺎ ﺃَ ْﻭ َﺑ ْﻌ َ‬
‫َﺭ ّﺑُ ُﻜ ْﻢ ﺃَ ْﻋﻠَ ُﻢ ﺑِ َﻤﺎ ﻟَﺒِ ْﺜﺘُ ْﻢ َﻓﺎ ْﺑ َﻌﺜُﻮﺍ ﺃَ َﺣ َﺪ ُﻛ ْﻢ ﺑِ َﻮ ِﺭ ِﻗ ُﻜ ْﻢ َﻫ ِﺬ ِﻩ ﺇِﻟَﻰ ﺍﻟْ َﻤ ِﺪﻳ َﻨ ِﺔ َﻓﻠْ َﻴ ْﻨ ُﻈ ْﺮ ﺃَ ّﻳُ َﻬﺎ ﺃَ ْﺯ َﻛﻰ َﻃ َﻌﺎ ًﻣﺎ َﻓﻠْ َﻴ ْﺄ ِﺗ ُﻜ ْﻢ ﺑِ ِﺮ ْﺯ ٍﻕ ِﻣ ْﻨ ُﻪ َﻭﻟْ َﻴ َﺘﻠَ َّﻄ ْﻒ َﻭ َﻻ ُﻳ ْﺸ ِﻌ َﺮ َّﻥ‬
‫ِﺑ ُﻜ ْﻢ ﺃَ َﺣ ًﺪﺍ )‪ (19‬ﺇِ ّﻧَ ُﻬ ْﻢ ﺇِ ْﻥ َﻳ ْﻈ َﻬ ُﺮﻭﺍ َﻋﻠَ ْﻴ ُﻜ ْﻢ َﻳ ْﺮ ُﺟ ُﻤﻮ ُﻛ ْﻢ ﺃَ ْﻭ ُﻳ ِﻌﻴ ُﺪﻭ ُﻛ ْﻢ ِﻓﻲ ِﻣﻠَّ ِﺘ ِﻬ ْﻢ َﻭﻟَ ْﻦ ُﺗ ْﻔﻠِ ُﺤﻮﺍ ﺇِ ًﺫﺍ ﺃَ َﺑ ًﺪﺍ )‪َ (20‬ﻭ َﻛ َﺬﻟِ َﻚ ﺃَ ْﻋ َﺜ ْﺮ َﻧﺎ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ ﻟِ َﻴ ْﻌﻠَ ُﻤﻮﺍ‬
‫ﺃَ َّﻥ َﻭ ْﻋ َﺪ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﺣ ٌّﻖ َﻭﺃَ َّﻥ ﺍﻟ َّﺴﺎ َﻋ َﺔ َﻻ َﺭ ْﻳ َﺐ ِﻓﻴ َﻬﺎ ﺇِ ْﺫ َﻳ َﺘ َﻨﺎ َﺯ ُﻋﻮ َﻥ َﺑ ْﻴ َﻨ ُﻬ ْﻢ ﺃَ ْﻣ َﺮ ُﻫ ْﻢ َﻓ َﻘﺎﻟُﻮﺍ ﺍ ْﺑ ُﻨﻮﺍ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ ُﺑ ْﻨ َﻴﺎ ًﻧﺎ َﺭ ُّﺑ ُﻬ ْﻢ ﺃَ ْﻋﻠَ ُﻢ ِﺑ ِﻬ ْﻢ َﻗﺎ َﻝ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ َﻏﻠَ ُﺒﻮﺍ‬
‫َﻋﻠَﻰ ﺃَ ْﻣ ِﺮ ِﻫ ْﻢ ﻟَ َﻨ َّﺘ ِﺨ َﺬ َّﻥ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻬ ْﻢ َﻣ ْﺴ ِﺠ ًﺪﺍ )‪َ (21‬ﺳ َﻴ ُﻘﻮﻟُﻮ َﻥ َﺛ َﻼ َﺛ ٌﺔ َﺭﺍ ِﺑ ُﻌ ُﻬ ْﻢ َﻛ ْﻠ ُﺒ ُﻬ ْﻢ َﻭ َﻳ ُﻘﻮﻟُﻮ َﻥ َﺧ ْﻤ َﺴ ٌﺔ َﺳﺎ ِﺩ ُﺳ ُﻬ ْﻢ َﻛ ْﻠ ُﺒ ُﻬ ْﻢ َﺭ ْﺟ ًﻤﺎ ِﺑﺎ ْﻟ َﻐ ْﻴ ِﺐ َﻭ َﻳ ُﻘﻮﻟُﻮ َﻥ‬
‫ِ‬
‫َﺳ ْﺒ َﻌ ٌﺔ َﻭﺛَﺎ ِﻣﻨُ ُﻬ ْﻢ َﻛﻠْ ُﺒ ُﻬ ْﻢ ُﻗ ْﻞ َﺭﺑّﻲ ﺃَ ْﻋﻠَ ُﻢ ِﺑ ِﻌ َّﺪ ِﺗ ِﻬ ْﻢ َﻣﺎ َﻳ ْﻌﻠَ ُﻤ ُﻬ ْﻢ ﺇِ َّﻻ َﻗﻠِﻴ ٌﻞ َﻓ َﻼ ﺗُ َﻤﺎ ِﺭ ِﻓﻴ ِﻬ ْﻢ ﺇِ َّﻻ ِﻣ َﺮﺍ ًﺀ َﻇﺎ ِﻫ ًﺮﺍ َﻭ َﻻ َﺗ ْﺴ َﺘ ْﻔ ِﺖ ِﻓﻴ ِﻬ ْﻢ ِﻣ ْﻨ ُﻬ ْﻢ ﺃَ َﺣ ًﺪﺍ )‪(22‬‬
‫ِ‬ ‫ِ‬
‫َﻭ َﻻ َﺗ ُﻘﻮﻟَ َّﻦ ﻟِ َﺸ ْﻲٍء ﺇِﻧّﻲ َﻓﺎ ِﻋ ٌﻞ َﺫﻟِ َﻚ َﻏ ًﺪﺍ )‪ (23‬ﺇِ َّﻻ ﺃَ ْﻥ َﻳ َﺸﺎ َﺀ ﺍﻟﻠَّ ُﻪ َﻭﺍ ْﺫ ُﻛ ْﺮ َﺭ َّﺑ َﻚ ﺇِ َﺫﺍ َﻧ ِﺴﻴ َﺖ َﻭ ُﻗ ْﻞ َﻋ َﺴﻰ ﺃَ ْﻥ َﻳ ْﻬ ِﺪ َﻳ ِﻦ َﺭﺑّﻲ َِﻷ ْﻗ َﺮ َﺏ ِﻣ ْﻦ َﻫ َﺬﺍ‬
‫َْ‬ ‫َ َ‬
‫ﺼ ْﺮ‬ ‫ﺽ ﺃَ ْﺑ ِ‬ ‫َﺭ َﺷ ًﺪﺍ )‪َ (24‬ﻭﻟَ ِﺒ ُﺜﻮﺍ ِﻓﻲ َﻛ ْﻬ ِﻔ ِﻬ ْﻢ َﺛ َﻼ َﺙ ِﻣ َﺌ ٍﺔ ِﺳ ِﻨﻴ َﻦ َﻭﺍ ْﺯ َﺩﺍ ُﺩﻭﺍ ِﺗ ْﺴ ًﻌﺎ )‪ُ (25‬ﻗ ِﻞ ﺍﻟﻠّ ُﻪ ﺃ ْﻋﻠَ ُﻢ ِﺑ َﻤﺎ ﻟَ ِﺒ ُﺜﻮﺍ ﻟَ ُﻪ َﻏ ْﻴ ُﺐ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍﻷ ْﺭ ِ‬
‫ِﺑ ِﻪ َﻭﺃَ ْﺳ ِﻤ ْﻊ َﻣﺎ ﻟَ ُﻬ ْﻢ ِﻣ ْﻦ ُﺩﻭ ِﻧ ِﻪ ِﻣ ْﻦ َﻭﻟِ ٍّﻲ َﻭ َﻻ ُﻳ ْﺸ ِﺮ ُﻙ ِﻓﻲ ُﺣ ْﻜ ِﻤ ِﻪ ﺃَ َﺣ ًﺪﺍ )‪(26‬‬

‫‪Dye‬‬
‫‪Version coranique de la célèbre légende chrétienne des Sept Dormants (étude clas-‬‬
‫‪sique : Huber 1910). Les vv. 8 à 17 semblent combiner deux versions de l’histoire.‬‬
‫‪Je reprends ici l’analyse de Tardieu 2011.‬‬
‫‪Plusieurs traits de la légende chrétienne se retrouvent dans le Coran : des jeunes‬‬
‫‪gens (en nombre incertain), persécutés pour leur foi en un Dieu unique, trouvent‬‬
‫‪refuge dans une caverne où ils « dorment » très longtemps ; le soleil ne les atteint‬‬
‫‪pas ; l’entrée de la caverne a été murée puis démolie ; de retour en ville, après leur‬‬
‫‪réveil, ils sont découverts par leur monnaie périmée ; ils sont la preuve de la ré-‬‬
‫‪surrection des morts. Le Coran sous-entend qu’ils sont l’objet d’un culte de la part‬‬
‫‪des chrétiens.‬‬
‫‪D’autres éléments coraniques sont absents de la légende chrétienne : la caverne‬‬
‫‪est un lieu non clos ; elle est orientée sud-nord (fond-entrée) – le parcours du soleil‬‬
‫‪ne passe jamais à l’intérieur de la caverne – ; l’ange de Dieu tourne les jeunes gens‬‬
‫‪côté droit, puis côté gauche, selon, peut-on supposer, que le soleil est à l’est ou à‬‬
‫‪l’ouest. La résurrection des corps passe apparemment par leur soustraction au ray-‬‬
‫‪onnement solaire. Les éléments qui distinguent le récit coranique des récits chrétiens‬‬
‫‪concernent l’espace-temps des Dormants, notamment la symbolique de l’espace.‬‬
‫)‪Les Homélies de Jacques de Saroug (plus ancien témoignage littéraire conservé‬‬
‫‪parlent d’un veilleur (ange), non d’un chien. Cela ne signifie pas que le veilleur des‬‬
216 QS 20

homélies est devenu un chien dans le Coran. Il convient de voir les choses à l’inverse.
Au début du VIe siècle, Theodosius (De situ Terrae sanctae p. 148, § 26 Geyer), dans
son guide de pèlerinage, mentionne la légende et parle du chien, dont le nom serait
Viricanus. On peut penser que le conte oral, antérieur à la mise par écrit, mentionnait
la présence du chien, qui a été supprimée par Jacques de Saroug, pour des raisons
dogmatiques évidentes (incompatibilité avec le dogme de la résurrection de la chair).
Moins tatillon, plus proche des récits populaires, l’auteur du récit coranique conserve
le chien.
La légende des Dormants fait partie de la classification internationale des contes
de tradition orale (n°766 Aarne-Thompson). Un autre passage de cette sourate
(vv. 59 – 81, où Moïse rencontre un mystérieux personnage), appartient aussi au genre
des contes de tradition orale (celui du sage ou du prophète déconcerté par les
cheminements de la justice divine).

Grodzki
The Islamic tradition, followed by some Western scholars, attempts to explain the
ambiguity of the numerals 300 and 9 in verse Q 18:25 as the difference between
the solar and lunar calendars. Interestingly, the phrase wa-izdādū tisʿan may also
well mean an imperative form: “and add nine [more to that number]” apart from
its understanding as “and they added nine [more to that number]” which doesn’t
seem to make much sense. Would this mean an instruction to the editors/readers?
What is its sense being mentioned here? The wa-izdādū tisʿan is not a later insertion,
because it plays well with the rhyme of the preceding and following verses.

Pregill
The treatments of Griffith (2008) and more recently Reynolds (2010: 167– 185) are
convincing to me. This passage is of prime interest from a methodological perspec-
tive because it illustrates the variety and scope of late antique literary materials
drawn into and evoked by Qurʾānic discourse, repurposed in pursuit of its particular
goals and message. The clear Syriac precursors for the story of the aṣḥāb al-kahf are
particularly interesting given the compelling argument of van Bladel (2008) about
the dependence of the subsequent narrative about Ḏū’l-Qarnayn on the Syriac
Alexander Legend and the particular time and place the latter seems to have been
produced. The proximate sources of both of the main narratives in the sūra seem un-
usually transparent.
Vv. 21– 26: A striking expression of intertextual self-consciousness; those who
have tarried uselessly over superfluous details of the story are condemned, while be-
lievers are enjoined to cleave to the clear essence of the story’s message and not in-
vestigate the obscurities too deeply (cf. Q 3:7?). The pioneering study of Madigan
(2001) gives us a clear idea of the Qurʾān’s self-conception, but a comprehensive ex-
amination of inner-Qurʾānic hermeneutics – that is, of the metatextual passages in
QS 22 241

Azaiez
Les versets 82 et 83 se définissent comme des contre-discours eschatologiques (cf. QS
16). Ce sont des discours rapportés des adversaires au sujet de l’eschatologie. Il s’agit
du cent quarante-deuxième contre-discours dans l’ordre du muṣḥaf. Sa structure est
simple avec un Contre-Discours Citant introductif (« ils disent ») suivi d’un contre-
discours (« Lorsque nous serons morts et que nous serons poussière et os, comment
serions-nous ressuscités? ») Ce contre-discours est une réfutation questionnante qui
du point de vue argumentatif peut être considéré comme une objection. Elle est em-
ployée dans un traité du Talmud, le Sanhédrin: « Un hérétique (min) disait au rabbi
Gamaliel : Vous prétendez que les morts revivront, mais ils sont réduits en poussière ;
la poussière peut-elle prendre vie ? » (cf. QS 16). Ce contre discours est à mettre en
lien avec le verset qui lui succède d’autant plus qu’il s’apparente à un autre contre-
discours présent dans le Nouveau Testament (2 P 3, 4). On y lit: « (Ils [les faux doc-
teurs] dirent : Où est la promesse de son avènement ? Depuis que les Pères sont
morts, tout demeure comme au début de la creation). [καὶ λέγοντες (legontes), Ποῦ
ἐστιν ἡ ἐπαγγελία (epangelia) τῆς παρουσίας (parousias) αὐτοῦ; ἀφ’ ἧς γὰρ οἱ πα-
τέρες (pateres) ἐκοιμήθησαν, πάντα οὕτως διαμένει ἀπ’ ἀρχῆς κτίσεως (archēs kti-
seōs)] .” Il est frappant de constater que le Coran ne désigne jamais ces opposants
dans le cadre des contre discours eschatologiques. Dans le cas du Talmud, ils sont
ici désignés par le terme min. D’autres passages indiquent les termes suivants (Cae-
sar, Cléopâtre, Antoine, un Officier de Rome). Pour ces désignations, il faut y voir des
noms dénués de toute valeur historique et qui renvoient probablement à un contexte
de querelles contre le paganisme gréco-latin. Plus difficile à saisir est le terme min
(pl. minim) dont l’identité reste sujette à caution et qui peut désigner éventuellement
des chrétiens, des païens, des zoroastes ou des manichéens (Mimouni 2004: 60 – 71).
Ces contre-discours similaires inviteraient-ils à penser que les opposants non dé-
signés des contre-discours coraniques feraient références non à des protagonistes sit-
ués à la Mecque ou à Médine mais à des personnages fictifs empruntés à la littérature
biblique et parabiblique ?

Dye
On notera la structure concentrique des vv. 1– 11 (Cf. Dye 2014: 159 – 163). Le vv. 1 re-
nvoie aux vv. 10 – 11 : les croyants sont appelés au Paradis à condition d’adopter le
comportement défini aux vv 2– 9. Il s’agit donc d’un texte d’édification morale. Le
croyant doit pratiquer la prière avec humilité et rigueur, il doit se détourner des pa-
roles vaines et futiles et adopter un rapport juste et honnête à l’argent. Le v. 5 recom-
mande la continence.
On pourrait presque penser à la version arabe d’un texte de direction spirituelle
syriaque, tant ce passage paraît influencé par la piété monacale syrienne, que ce soit
sur l’importance de la prière, de la continence, de l’aumône, ou sur la nécessité d’un
genre de vie paisible et humble, loin des futilités et de la malhonnêteté : cela vaut
évidemment pour les moines, mais aussi pour les laïcs, cf. par exemple le Testamen-
242 QS 22

tum Domini (II : 1, p. 110 – 112 ed. Rahmani), dont l’esprit est assez proche des vv. 1– 11
– à condition, bien sûr, que l’on ne prenne pas en compte les vv. 6 – 7, qui posent
quelques problèmes. Ils rompent le rythme de la psalmodie, ainsi que l’harmonie
syntaxique de la sourate, les versets avoisinants commençant tous par wa-llaḏīna.
Leur contenu pose problème : on peut admettre que le Coran n’exclue pas le bonheur
domestique, et ne recommande pas nécessairement une vie ascétique, mais l’excep-
tion que ces versets accordent à la continence est quand même suffisamment large
pour qu’un libertin résolu puisse la trouver attrayante…
L’hypothèse la plus plausible est qu’il s’agit, au moins en partie, d’une interpo-
lation, qui modifie substantiellement l’esprit du texte. Peut-être une version antéri-
eure du texte s’arrêtait-elle à ʾillā ʿalā ʾazwāǧihim, en entendant par-là, non que cha-
que croyant a plusieurs épouses, mais que les différents croyants auquel le texte
s’adresse ont chacun une épouse ?
V. 50 : l’allusion s’explique bien si l’on suit quelques hypothèses récentes (Shoe-
maker 2003 et Dye 2012), selon lesquelles le récit coranique de la Nativité, et les ver-
sets décrivant le retour de Marie vers son peuple, sont directement tributaires des tra-
ditions populaires et liturgiques de l’église du Kathisma (église aujourd’hui disparue,
située à mi-chemin entre Jérusalem et Bethléem), qui rapprochent le récit de la Na-
tivité du miracle du palmier. La zone dans laquelle est située l’église du Kathisma est
en effet très précisément marquée par la présence d’eau (citernes, puits, et même
plus anciennement, un aqueduc) et de collines.

Grodzki
The debate on the identity and beliefs of the Qurʾānic mušrikūn continues. I don’t
think that it can be easily proved or disproved that mušrikūn are historically or dog-
matically identifiable with one specific religious community of the late antique or
early Islamic period – in the Qurʾān there is simply too wide a range of their manifold
beliefs and disbeliefs (with elements sometimes contradictory to each other), and
often – to make it worse – put into polemical frames. In the recent article of Patricia
Crone (2012:449 – 50), she suggests that the mušrikūn were not really polytheists, but
“monotheists of the inclusive type (monists), that is to say they believed in one God
and saw the lesser gods, also called angels, as manifestations of Him rather than as
false deities who had to be renounced in His favour. They may still have been pagans
in the sense of not being Jews or Christians, but there were too many gradations be-
tween Bible-based monotheism and gentile paganism in Late Antiquity for this to tell
us very much.”

Khalfallah
Ce passage dépeint davantage un portrait idéal contenant les éléments devant ca-
ractériser le « vrai » muʾmin, qu’une règle normative. Le terme clé qui condense, à
mon sens, l’intégralité de cette sourate est falāḥ. Souvent traduit par « félicité », cette
QS 24 Q 24:35
. God is the light of the heavens and the . Allah est la Lumière des cieux et de la
earth. terre. Sa lumière est semblable à une niche où
His light is like a niche in which is a lantern, se trouve une lampe. La lampe est dans un (ré-
The lantern in a glass, cipient de) cristal et celui-ci ressemble à un
The glass like a shimmering star, astre de grand éclat; son combustible vient
Kindled from a blessed tree, d’un arbre béni: un olivier ni oriental ni occi-
An olive, neither of the East nor of the West, dental dont l’huile semble éclairer sans même
Its oil almost aglow, though untouched by fire. que le feu la touche. Lumière sur lumière.
Light upon light! Allah guide vers Sa lumière qui Il veut. Allah
God guides to His light whomever He wills, propose aux hommes des paraboles et Allah
And strikes parables for mankind. est Omniscient.
God has knowledge of all things.

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻟﻨﻮﺭ‬
ِ َْ َ
‫ﺼ َﺒﺎ ُﺡ ِﻓﻲ ُﺯ َﺟﺎ َﺟ ٍﺔ ﺍﻟ ُّﺰ َﺟﺎ َﺟ ُﺔ َﻛﺄَ ّﻧَ َﻬﺎ َﻛ ْﻮ َﻛ ٌﺐ ُﺩ ّﺭ ٌّﻱ ُﻳﻮ َﻗ ُﺪ ِﻣ ْﻦ‬ ْ ‫ﺼ َﺒﺎ ٌﺡ ﺍﻟْ ِﻤ‬ْ ‫ﺽ َﻣ َﺜ ُﻞ ُﻧﻮ ِﺭ ِﻩ َﻛ ِﻤ ْﺸ َﻜﺎ ٍﺓ ِﻓﻴ َﻬﺎ ِﻣ‬ ِ ‫ﺍﻟﻠّ ُﻪ ُﻧﻮ ُﺭ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍﻷ ْﺭ‬
َ
‫ﻀﻲُء َﻭﻟَ ْﻮ ﻟَ ْﻢ َﺗ ْﻤ َﺴ ْﺴ ُﻪ َﻧﺎ ٌﺭ ُﻧﻮ ٌﺭ َﻋﻠَﻰ ُﻧﻮ ٍﺭ َﻳ ْﻬ ِﺪﻱ ﺍﻟﻠّ ُﻪ ﻟِ ُﻨﻮ ِﺭ ِﻩ َﻣ ْﻦ َﻳ َﺸﺎ ُﺀ‬ ِ ‫َﺷ َﺠ َﺮ ٍﺓ ُﻣ َﺒﺎ َﺭ َﻛ ٍﺔ َﺯ ْﻳ ُﺘﻮ َﻧ ٍﺔ َﻻ َﺷ ْﺮ ِﻗ َّﻴ ٍﺔ َﻭ َﻻ َﻏ ِ ْﺮ ِﺑ َّﻴ ٍﺔ َﻳ َﻜﺎ ُﺩ َﺯ ْﻳ ُﺘ َﻬﺎ ُﻳ‬
َْ َ
(35) ‫ﺱ َﻭﺍﻟﻠَّ ُﻪ ِﺑ ُﻜ ّﻞ َﺷ ْﻲٍء َﻋﻠِﻴ ٌﻢ‬ َ
ِ ‫ﻀ ِﺮ ُﺏ ﺍﻟﻠّ ُﻪ ﺍﻷ ْﻣ َﺜﺎ َﻝ ﻟِﻠ ّﻨﺎ‬ ْ ‫َﻭ َﻳ‬

Azaiez
Le segment maṯalu nūrihī ka-miškātin fīhā miṣbāḥun al-miṣbāḥu fī zuǧāǧatin al-
zuǧāǧatu s’apparente, sans l’être intégralement, à une anadiplose. Il s’agit d’une
figure de style consistant à la reprise du dernier mot d’une proposition à l’initiale de
la proposition qui suit. Cette forme rhétorique qui procède d’une forme d’oralisation
fixe l’attention sur les mots importants qui se trouvent être tous des hapax (miškāt),
(miṣbāḥ), (zuǧāǧa).

Dye
Sur ce verset, voir notamment Böwering (2011).
On notera la présence, dans le cotexte du verset, des notions de maṯal (v. 34), de
lumière (vv. 40, 44 – jour et nuit), et de direction, de guide (v. 46). Surtout, le cotexte
le plus immédiat nous indique que ce verset parle implicitement de formes de dé-
votion chrétienne, notamment celles des moines (vv. 34, 36 – 37). On peut considérer
que les vv. 34– 37 constituent une unité littéraire (même si on ne peut exclure
quelques interpolations).
L’arrière-plan chrétien du « verset de la lumière » nous donne la clé pour en
comprendre les belles métaphores. Durant leurs vigiles nocturnes, les moines fai-
saient briller des lampes dans leurs cellules, lampes dont la lumière pouvait guider
les voyageurs. Le phénomène est souvent relevé dans la poésie arabe (voir par
exemple Imruʾ al-Qays, al-Muʿallaqa, v. 40 : tuḍīʾu l-ẓalāma bi-l-išāʾi ka-ʾannahā
manāratu mumsā rāhibin mutabattil).
QS 24 253

Un phénomène physique simple explique l’imagerie coranique : en plaçant la


lampe (miṣbāḥ, un hapax dans le Coran), ou plutôt la mèche (allumée), dans une
niche (miškāt – mot emprunté à l’éthiopien maskot, « fenêtre », un autre hapax),
derrière un verre (zuǧāǧā, encore un hapax), on augmente fortement sa luminosité.
La mention de l’olivier se comprend mieux si on pense à Zeck/Za 4:2– 3 :
Zacharie décrit sa vision à l’ange, parlant notamment d’un lampadaire avec un
réservoir à son sommet, et sept lampes tout en haut. Près de cette lampe se trouvent
deux oliviers, l’un à la droite du réservoir, l’autre à sa gauche. L’ange explique
ensuite à Zacharie la signification de cette vision, et notamment des oliviers : « Ce
sont les deux Oints qui se tiennent devant le Seigneur de toute la terre » (Zech/Za
4:13, les deux Oints sont sans doute Josué et Zorobabel). On retrouve cette imagerie
dans l’Apocalypse de Jean : « Ce sont les deux oliviers et les deux flambeaux qui se
tiennent devant le Maître de la terre » (Rev/Ap. 11:4, il s’agit ici de Moïse et d’Élie). Il
faudrait suivre le développement de cette métaphore dans la littérature chrétienne
préislamique, et saisir l’enjeu du passage de deux à un olivier.

Grodzki
The Qurʾānic Allāhu nūr al-samāwāti wa-l-arḍi, “God is the Light of the heavens and
the earth,” also finds a parallel in another verse of the Apocalypse of John 21:23 – 24
(aside from the one mentioned above 11:4 by Dye) when describing the new promised
(heavenly-earthly) Jerusalem: “And the city hath no need of the sun, neither of the
moon, to shine upon it: for the glory of God did lighten it, and the lamp thereof is
the Lamb. And the nations shall walk amidst the light thereof.” Together with other
Biblical references (Zech 4:2– 3; 4:13, Exod 27:20 – 21 – and not only) it seems to
sketch out a mysterious image of a mystical reality circulating amongst ancient peo-
ples of Middle Eastern traditions.

Hilali
In the manuscript 27.1 DAM, Yemen (the so-called Ṣanʿāʾ palimpsest), we can read a
large part of chapter 24. V. 35 presents textual issues. We note a difference with the
Cairo edition of Qurʾān. We read min qabli an tamsashu nār (“Before any fire touches
it”) while in the Cairo edition we read wa law lam tamsashu nār (“even when no fire
touches it”). This difference is interesting if we consider the distinction between nūr
(light) and nār (fire). In the Ṣanʿāʾ palimpsest, the distinction between light and fire
focuses on the opposite order of the succession in time: light is anterior to its own
source, fire. The divine is submitted to a certain temporality, a progression in
which the element of fire occupies the last step or the very condition of light.
258 QS 25

‫ﻟَ ْﻮ َﻻ ﺃُﻧ ِﺰ َﻝ ﺇِﻟَ ْﻴ ِﻪ َﻣﻠَ ٌﻚ َﻓ َﻴ ُﻜﻮ َﻥ َﻣ َﻌ ُﻪ َﻧ ِﺬﻳ ًﺮﺍ‬


(ème assertion)
‫ﺃَ ْﻭ ُﻳﻠْ َﻘﻰ ﺇِﻟَ ْﻴ ِﻪ َﻛﻨ ٌﺰ ﺃَ ْﻭ َﺗ ُﻜﻮ ُﻥ ﻟَ ُﻪ َﺟﻨَّ ٌﺔ َﻳ ْﺄ ُﻛ ُﻞ ِﻣ ْﻨ َﻬﺎ َﻭ َﻗﺎ َﻝ ﺍﻟ َّﻈﺎﻟِ ُﻤﻮ َﻥ‬
(ème assertion)
‫ﺇِﻥ َﺗ َّﺘ ِﺒ ُﻌﻮ َﻥ ﺇِ َّﻻ َﺭ ُﺟ ًﻼ َّﻣ ْﺴ ُﺤﻮ ًﺭﺍ‬
(ème assertion)
. Thèse (Assertion théologique)
َ
‫ﻀﻠُّﻮﺍ َﻓ َﻼ َﻳ ْﺴ َﺘ ِﻄﻴ ُﻌﻮ َﻥ َﺳ ِﺒﻴ ًﻼ‬
َ ‫ﺿ َﺮ ُﺑﻮﺍ ﻟَ َﻚ ﺍ ْﻷ ْﻣﺜَﺎ َﻝ َﻓ‬ َ ‫ﺍﻧ ُﻈ ْﺮ َﻛ ْﻴ‬
َ ‫ﻒ‬
(ème assertion)
. Epilogue (Louange)
َ َ ِ َ
ُ ‫َﺗ َﺒﺎ َﺭ َﻙ ﺍﻟّ ِﺬﻱ ﺇِﻥ َﺷﺎ َﺀ َﺟ َﻌ َﻞ ﻟَ َﻚ َﺧ ْﻴ ًﺮﺍ ّﻣﻦ َﺫﻟِ َﻚ َﺟ ّﻨَﺎ ٍﺕ َﺗ ْﺠ ِﺮﻱ ِﻣﻦ َﺗ ْﺤ ِﺘ َﻬﺎ ﺍ ْﻷ ْﻧ َﻬﺎ ُﺭ َﻭ َﻳ ْﺠ َﻌﻞ ﻟّ َﻚ ُﻗ‬
‫ﺼﻮ ًﺭﺍ‬
(ème assertion)

Dye
L’ambiance psalmique est manifeste dans le contenu, le style et la phraséologie.
Deux formules liturgiques (et stéréotypées), introduites par tabāraka (vv. 1– 2 / v. 10),
encadrent les sections polémiques, qui reprennent des topoi bien présents, pour la
plupart, ailleurs dans le Coran, les réponses au « contre-discours » (pour reprendre
l’expression d’Azaiez) se trouvant aux vv. 6 et 9.
V. 1 : Sur l’étymologie de furqān, voir le débat récent entre Donner 2007 et Rubin
2009. Du strict point de vue de la linguistique historique, la question ne me semble
pas réglée, pour diverses raisons qu’il est impossible d’expliquer ici. Mais on peut au
moins penser que furqān signifie ici soit « salut », soit « guidance », soit « lumière ».
Le verset est suffisamment ambigu pour pouvoir désigner Muḥammad ou un autre
messager (par exemple Moïse) ayant antérieurement reçu une révélation.
Vv. 3 – 4 : On retrouve le vaste problème des informateurs de Muḥammad (voir
par exemple Q 16:103). Voir à ce sujet Gilliot: 1998. La question est très délicate, et il
reste difficile de déterminer ce qui a quelque chance d’être historiquement avéré. Le
contre-discours parle d’informateurs (donc d’individus précis) informant un individu
(Muḥammad) jouant un rôle décisif dans l’énoncé du message, et le discours cora-
nique réfute ce contre-discours. il me semble qu’il s’agit là d’une idéalisation, une
stylisation, d’une situation, et d’une histoire de la composition du Coran, beaucoup
plus compliquées.

Grodzki
Does the list of the limitations of the mušrikūn’s gods in v. 3 reflect the real doctrine
of an existing religious group, or is it to be understood solely in the polemical sense
(gnostics, monists, polytheists etc.)? Are the Qurʾānic kuffār or mušrikūn always
meant to be the same specific religious group of non-Muslims, or is it – primarily
– a rhetorical device to highlight the Qurʾānic dogmatic message, and – only secon-
darily – perhaps a distant distorted allusion to a specific group of disbelievers in the
Qurʾānic mesage ? Here the ironic formulation wa-lā yamlikūna li-anfusihim ḍarran
QS 27 271

Azaiez
V. 42: “On nous a donné la science…” (… wa-ūtīnā al-ʿilma min qabliḥā wa-kunnā
muslimīna). La dimension dialogique du récit ne permet pas de déterminer qui parle
précisément. Est-ce la Reine de Saba? Dans ce cas, le verset suivant pose difficulté. Il
serait donc plus logique d’attribuer ces propos rapportés à Salomon. Cette hésitation
serait-elle le résultat d’une intention délibérée (ce que nous croyons) ou le fruit d’un
remaniement ou d’une lacune du texte (Blachère 1957: 407)?

Dye
On peut rappeler l’arrière-plan biblique (1Kgs 10:1– 13 ; 2Chr 9:1– 12), targoumique
(Targum Sheni d’Esther, mais la mise par écrit du texte est postérieure au Coran) et
surtout midrashique (Mischlé, ha-Hefets, Ma’aseh Malkat Sheba…) de l’épisode co-
ranique. Les données préislamiques restent cependant assez maigres, surtout si on
les compare à celles qui sont à notre disposition pour d’autres personnages bi-
bliques. Il est possible que certains aspects de la légende aient été considérés comme
tabous, ou en tout cas comme ne relevant pas du genre de récit qu’il convient
d’inclure dans la littérature homilétique. Quoi qu’il en soit, on peut penser qu’à la fin
de l’Antiquité, et même avant, les récits midrashiques dont le Coran présuppose ici
la connaissance étaient fort bien connus hors des communautés juives, notamment
en Arabie, où la figure de Salomon jouissait sans doute d’un certain prestige : ainsi,
selon le poète al-Nābiġa al-Dubyānī (m. 604), Salomon aurait construit Tadmor
(Palmyre) avec l’aide des ǧinns.
On notera la capacité de Salomon à communiquer avec toutes les créatures (cf.
l’usage de ʿilm au v. 15). Cette grâce (faḍl) concerne la connaissance du langage des
oiseaux (v. 16). Salomon est par ailleurs souverain sur l’ensemble des créatures d’ici-
bas – hommes, animaux, ǧinns (v. 17). D’autres passages coraniques vont plus loin :
le vent, et certains des démons (šayāṭīn), sont soumis à Salomon (Q 21:81– 82; 34:12–
13; 38:36 – 39).
Ce qu’il y a peut-être de plus frappant dans le récit coranique, c’est ce qui ne s’y
trouve pas, à savoir l’épisode des questions de la reine à Salomon. C’est au contraire
Salomon qui sonde les connaissances de la reine. Autre différence intéressante entre
les sources juives et le Coran : lorsque la reine arrive à Jérusalem, Salomon la reçoit
dans les thermes royaux, selon les sources juives, ou dans son palais pavé de cristal.
La reine prend le sol de l’entrée pour un plan d’eau, et soulève un pan de sa robe
pour ne pas la mouiller, découvrant ainsi ses jambes, dont le roi admire la beauté,
mais regrette l’excessive pilosité. C’est alors que la reine, blessée par les remarques
peu galantes de Salomon à son sujet, lui pose une série d’énigmes, évidemment
résolues par Salomon. Ce dernier aspect de l’histoire est absent du Coran.
284 QS 28

Dye
L’ordre de présentation des prophètes relève des intentions homilétiques du (ou des)
rédacteur(s) de la sourate, et non de considérations chronologiques. Ce phénomène
n’a rien d’exceptionnel dans la littérature homilétique. Un ordre fixe apparaît dans
certaines sourates, ainsi la succession (dont on ne peut savoir si elle suit ou non la
chronologie) Noé – Hūd – Ṣāliḥ – Loth – Šuʿayb que l’on trouve dans les sourates 7, 11
(avec ajout de versets relatifs à Abraham dans la péricope relative à Loth) et 26 (une
étude comparée de ces sourates selon la méthode utilisée par Pohlmann 2012 serait
d’ailleurs bienvenue). L’ordre de la présente sourate est un peu différent : Noé –
Abraham/Loth (les mentions d’Isaac et de Jacob ne constituent pas des histoires
séparées, mais simplement des exemples de la grâce de Dieu accordée à Abraham) –
Šuʿayb – Hūd et Ṣāliḥ (v. 38) – Moïse.
Point important : dans les vv. 36 à 40, ce n’est pas, contrairement à ce qui est le
cas précédemment, le nom du prophète que le Coran mentionne en premier, mais le
nom du peuple ou des individus auxquels le prophète est envoyé. L’accent est donc
mis sur l’identité des mécréants, qui sont ainsi placés au premier plan, ce qui pré-
pare, d’un point de vue rhétorique, la parabole de l’araignée (v. 41).

Grodzki
Among the more recent unorthodox theories on deciphering the meaning of alif, lām,
mīm prefixing sūras 29 – 32 we have Luxenberg (2007b) arguing for the Syro-Aramaic
phrase emar lī Māryā (Arab. qāla lī al-Rabb, Eng. God spoke to me) which occurs fre-
quently in the Biblical sources in relation to prophets. A similar assumption regard-
ing the meaning of these letters was put forward in the late 70′s of the last century by
a scholar hiding under the pseudonym of Abū Mūsā al-Ḥarīrī (1979) in his study Qass
wa-nabī (in the French edition – entitled Le Prêtre et le Prophète. Aux Sources du
Coran – published under his real name: Joseph Azzi). Luxenberg saw analogically
in the letters alif, lām, rāʾ the Syro-Aramaic emar lī [ar-Rabb] (Arab. qāla lī [ar-
Rabb] al-ʿAẓīm, Eng. the almighty [Lord] spoke to me) (Luxenberg 2007b: 449 – 50)
They both argue that it can be seen in old Arabic Qurʾānic manuscripts that above
these letters (as well as above other enigmatic letter abbreviations preceding the re-
maining sūras) there is a short horizontal wavy dash which in the Syriac tradition
would normally represent an abbreviation.

Hawting
Again the invitation to comment on a whole sūra suggests questions about structure
and cohesion. This sūra seems possible to break down into distinct sections, but the
thematic or logical connections between them are not apparent. The first section
(vv. 1– 13) seems to focus on the difficulties and temptations facing Believers, the re-
wards awaiting those who stand firm and the punishment for those who do not. Then
vv. 14– 40 allude to the stories of a series of messengers and the peoples to whom
QS 29 Q 30:1 – 7
. Alif Lam Mim . Alif, Lâm, Mîm.
. The Byzantines have been defeated . Les Romains ont été vaincus,
.in the nearer part of the land, and yet, after . dans le pays voisin, et après leur défaite ils
their defeat, they shall be victorious – seront les vainqueurs,
. in a few years. . dans quelques années. A Allah appartient
It is God who decides – as it was in the past, so le commandement, au début et à la fin, et ce
it shall be in future. jour-là les Croyants se réjouiront
That day the believers shall rejoice . du secours d’Allah. Il secourt qui Il veut et
. at God’s victory, for He grants victory to Il est le Tout Puissant, le Tout Miséricordieux.
whomever He wishes. He is Almighty, Compas- . C’est [là] la promesse d’Allah. Allah ne
sionate to each. manque jamais à Sa promesse mais la plupart
. This is God’s promise, and God does not des gens ne savent pas.
renege on His promise. But most people are ig- . Ils connaissent un aspect de la vie pré-
norant. sente, tandis qu’ils sont inattentifs à l’au-delà.
. They know only the externals of this pres-
ent life, but as for the hereafter they are totally
heedless.

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻟﺮﻭﻡ‬
ُ َ َ ْ ّ َ ْ َ َ ْ َ ُ
‫ﻀ ِﻊ ِﺳ ِﻨﻴ َﻦ ﻟِﻠ ِﻪ ﺍﻷ ْﻣ ُﺮ ِﻣ ْﻦ ﻗ ْﺒﻞ َﻭ ِﻣ ْﻦ َﺑ ْﻌ ُﺪ‬ ْ ‫( ِﻓﻲ ِﺑ‬3) ‫ﺽ َﻭ ُﻫ ْﻢ ِﻣ ْﻦ َﺑ ْﻌ ِﺪ َﻏﻠ ِﺒ ِﻬ ْﻢ َﺳ َﻴﻐﻠِ ُﺒﻮ َﻥ‬ ِ ‫( ِﻓﻲ ﺃ ْﺩ َﻧﻰ ﺍﻷ ْﺭ‬2) ‫( ُﻏﻠِ َﺒ ِﺖ ﺍﻟ ّﺮﻭ ُﻡ‬1) ‫ﺍﻟﻢ‬
َ ّ َ ّ َ ْ َ
ْ َ َ
‫ﻒ ﺍﻟﻠ ُﻪ َﻭ ْﻋ َﺪ ُﻩ َﻭﻟ ِﻜ ّﻦ ﺃﻛ َﺜ َﺮ‬ ُ ِ‫( َﻭ ْﻋ َﺪ ﺍﻟﻠ ِﻪ َﻻ ُﻳ ْﺨﻠ‬5) ‫ﺼ ُﺮ َﻣ ْﻦ َﻳ َﺸﺎ ُﺀ َﻭ ُﻫ َﻮ ﺍﻟ َﻌ ِﺰﻳ ُﺰ ﺍﻟ َّﺮ ِﺣﻴ ُﻢ‬ ُ ‫ﺼ ِﺮ ﺍﻟﻠّ ِﻪ َﻳ ْﻨ‬
ْ ‫( ِﺑ َﻨ‬4) ‫َﻭ َﻳ ْﻮ َﻣ ِﺌ ٍﺬ َﻳ ْﻔ َﺮ ُﺡ ﺍﻟْ ُﻤ ْﺆ ِﻣ ُﻨﻮ َﻥ‬
َ ْ
(7) ‫( َﻳ ْﻌﻠَ ُﻤﻮ َﻥ َﻇﺎ ِﻫ ًﺮﺍ ِﻣ َﻦ ﺍ ْﻟ َﺤ َﻴﺎ ِﺓ ﺍﻟ ُّﺪ ْﻧ َﻴﺎ َﻭ ُﻫ ْﻢ َﻋ ِﻦ ﺍﻵ ِﺧ َﺮ ِﺓ ُﻫ ْﻢ َﻏﺎ ِﻓﻠُﻮ َﻥ‬6) ‫ﺱ َﻻ َﻳ ْﻌﻠَ ُﻤﻮ َﻥ‬ َ
ِ ‫ﺍﻟ ّﻨﺎ‬

Dye
Texte extrêmement ambigu, pour de nombreuses raisons.
On sait que les plus anciens témoins matériels du texte coranique ne connaissent
ni points diacritiques ni voyelles. Or si la mise en place, par la tradition musulmane,
des points diacritiques et des voyelles est souvent correcte, elle ne l’est pas toujours,
car il n’existe pas de tradition orale fiable et ininterrompue qui en garantirait l’e-
xactitude. Il peut donc être légitime, au moins d’un point de vue méthodologique, de
la remettre en question.
Concernant le présent passage, on est face à au moins deux problèmes. Pre-
mièrement, comment comprendre le verbe à l’accompli (quelle que soit la vocali-
sation) du v. 2 ? Pour en rester au textus receptus : ġulibat al-rūmu signifie-t-il « les
Romains ont été vaincus » ou « Que les Romains soient vaincus ! » ?
Deuxièmement, doit-on suivre le textus receptus, et comprendre que les Romains
ont été vaincus, puis qu’après leur défaite, ils vaincront fī biḍʿi sinīna ? La référence
aux guerres byzantino-sassanides serait alors évidente, et on aurait affaire à une
prophétie ex eventu (et rédigée, par conséquent, après 629). Ou doit-on lire plutôt
sayuġlabūna, comme le suggère Kropp, et voir ici une malédiction prophétique
(même si Q 30 ne commence pas par des serments, contrairement à Q 85:1– 3) ? Ou
peut-on lire ġalabati al-rūmu… sayuġlabūna, et comprendre que les Romains ont
QS 29 289

vaincu, mais qu’ils seront défaits dans un avenir proche ? Dans ce dernier cas, on
verra dans ce passage un oracle du Prophète destiné à remobiliser et encourager ses
troupes après la défaite de Muʾtah (dans les tous les cas, cela s’accorde mal avec
l’idée qu’il s’agit d’une sourate mecquoise – ce qui me paraît être plutôt un argument
supplémentaire contre la chronologie traditionnelle que contre les interprétations
proposées ici). Je serais tenté de rester fidèle au textus receptus, mais j’avoue n’avoir
aucune certitude sur la question.
V. 4 : pourquoi les croyants se réjouissent-ils? Parce qu’ils se sentent plus pro-
ches des Byzantins que des Sassanides? Cela reste à prouver (la suite des événements
ne le confirme guère), même si Bowersock (2012: 60 – 77) argumente en ce sens. Ou
plus probablement, parce que la victoire byzantine confirme leurs espérances
eschatologiques, en rapport avec les apocalypses que mentionne Tesei?

Hawting
The conventional understanding that this passage alludes to the fighting between By-
zantines and Sasanids seems plausible, in spite of the lack of reference to the Persi-
ans. Since the accepted vocalizations of ġulibat and sayaġlibūna could just as well be
reversed (ġalabat and sa yuġlabūna), the conventional interpretation that the pas-
sage refers to Byzantine defeat at the start of the long war and a prophetic prediction
that the Byzantines would win in the end is not the only one possible.
Whatever the background to the allusion, it is made to emphasize God’s power in
the determining of events. The rejoicing of the believers “on that day,” although it
seems to relate to the foretold victory (of the Byzantines?), has an eschatological
ring to it. The apparent break in the sentence at the end of v. 3 and the start of
v. 4 is disconcerting. Is the fact that the Byzantines have been defeated (?) “in the
nearest land” (v. 3) relevant to the issue of the geographical origins of the materials
collected in the Qurʾān?

Imbert
Sur le site syrien du Ǧabal ʾUsays, se trouve un isolat coranique (un verset coranique
gravé isolément, sans aucun contexte): li-llāh al-amr min qabl wa-min baʿd wa-
yawmaʾiḏin yafraḥu l-mu’minūn (cf. al-ʿUšš 1964: 249, n. 23). Le verset souffre d’une
totale décontextualisation; le Coran muṣḥaf rappelle l’omnipotence de Dieu et son
action sur la destinée humaine dans le cadre précis d’une prédiction concernant la
défaite puis la victoire des Byzantins sur les armées perses qui devait advenir vers
624. Cet épisode est totalement effacé dans le graffito d’Usays, ce qui paraît étrange
sur un site occupé par les Romains et les Ghassanides pour le compte des Byzantins.
La péricope d’Usays écarte totalement ce contexte et nous sommes en droit de nous
demander à quoi réfère la seconde partie où il est question d’un jour précis où les
croyants se réjouiront. Dans le texte du Coran, ils se réjouissent du secours apporté
par Dieu (bi naṣri Llāh) ; sur le rocher d’Usays, rien n’est sûr.
QS 30 Q 33:40
. Muhammad is not the father of any man . Muhammad n’a jamais été le père de l’un
among you, but he is the Prophet of God and de vos hommes, mais le messager d’Allah et le
the Seal of Prophets. God has knowledge of all dernier des prophètes. Allah est Omniscient.
things.

ِ ‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻷﺣﺰﺍﺏ‬
ِ
(40) ‫َﻣﺎ َﻛﺎ َﻥ ُﻣ َﺤ َّﻤ ٌﺪ ﺃَ َﺑﺎ ﺃَ َﺣ ٍﺪ ِﻣ ْﻦ ِﺭ َﺟﺎﻟِ ُﻜ ْﻢ َﻭﻟَ ِﻜ ْﻦ َﺭ ُﺳﻮ َﻝ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ َﻭ َﺧﺎ َﺗ َﻢ ﺍﻟ ّﻨَ ِﺒﻴّﻴ َﻦ َﻭ َﻛﺎ َﻥ ﺍﻟﻠَّ ُﻪ ِﺑ ُﻜ ّﻞ َﺷ ْﻲٍء َﻋﻠِﻴ ًﻤﺎ‬

Dye
Si le verset s’arrêtait après riǧālikum, on pourrait penser que le propos de cette
péricope est de légitimer le mariage de Muḥammad et de Zaynab. La suite du verset
montre que l’enjeu de ce passage est totalement différent – et plus profond.
Un détour est ici nécessaire. Il me semble qu’il faut prendre très au sérieux l’idée
défendue par Casanova (1911: 8), et reprise par divers collègues récemment, selon
laquelle Muḥammad considérait qu’il était le dernier prophète, choisi par Dieu pour
présider, conjointement avec le Messie revenu sur terre, à la fin du monde, à la
résurrection universelle et au Jugement dernier. Rappelons que cette conception du
message de Muḥammad ne dépend pas nécessairement de l’interprétation que l’on
fait de la formule ḫātam al-nabiyyīn.
Or si Muḥammad se considérait comme le prophète de la fin du monde, alors la
question de la continuité de la prophétie ne se posait pas de son vivant… Une fois le
Prophète mort, et les espérances eschatologiques déçues, cette question ne pouvait
que resurgir. Les héritiers de la prophétie étaient précisément les descendants mâles
de Muḥammad, autrement dit les alides. En d’autres termes, ce verset pourrait être,
dans son état actuel, une addition tardive, destinée à contrer les prétentions des
alides.
L’expression « sceau des prophètes » se trouve chez Tertullien (Adv. Judaos 8:12),
où elle désigne le Christ, appelé signaculum omnium prophetarum (Jean Baptiste est
qualifié de clausula prophetarum). L’idée pourrait venir de Dan 9:24, où l’idée de
clôture, de fin, semble plus importante que celle de confirmation. Noter que juste
avant (Dan 9:23), Daniel est appelé « [l’homme] des prédilections » (iš-ḥamudot), ce
qui ressemble beaucoup au surnom Muḥammad, (sur Muḥammad comme épithète,
surnom, et non comme prénom, cf. Reynolds 2011a et Gilliot (2011)).
Post-scriptum sur les enfants du Prophète : c’est un sujet sur lequel beaucoup de
légendes se sont développées (cf. Kister 1993). Il me semble à peu près impossible de
retrouver la réalité historique derrière tous ces récits, mais l’idée traditionnelle selon
laquelle le Prophète aurait eu sept enfants (un chiffre qui n’est pas anodin dans la
culture biblique) ne paraît pas être une information historique. Par ailleurs, quel que
soit l’avis que l’on a sur Ibrāhīm, il est clair que Māriya la Copte n’est pas un
personnage historique, mais une fiction littéraire (cf. Cannuyer 2008).
QS 31 297

‫( َﻭ َﻣﺎ َﻋﻠَ ْﻴ َﻨﺎ ﺇِ َّﻻ ﺍﻟْ َﺒ َﻼ ُﻍ‬16) ‫( َﻗﺎﻟُﻮﺍ َﺭ ُّﺑ َﻨﺎ َﻳ ْﻌﻠَ ُﻢ ﺇِ ّﻧَﺎ ﺇِﻟَ ْﻴ ُﻜ ْﻢ ﻟَ ُﻤ ْﺮ َﺳﻠُﻮ َﻥ‬15) ‫َﺑ َﺸ ٌﺮ ِﻣ ْﺜﻠُ َﻨﺎ َﻭ َﻣﺎ ﺃَ ْﻧ َﺰ َﻝ ﺍﻟ َّﺮ ْﺣ َﻤ ُﻦ ِﻣ ْﻦ َﺷ ْﻲٍء ﺇِ ْﻥ ﺃَ ْﻧ ُﺘ ْﻢ ﺇِ َّﻻ َﺗ ْﻜ ِﺬ ُﺑﻮ َﻥ‬
ِ
‫( َﻗﺎﻟُﻮﺍ َﻃﺎ ِﺋ ُﺮ ُﻛ ْﻢ َﻣ َﻌ ُﻜ ْﻢ ﺃَ ِﺋ ْﻦ ُﺫ ّﻛ ْﺮ ُﺗ ْﻢ َﺑ ْﻞ‬18) ‫( َﻗﺎﻟُﻮﺍ ﺇِ َّﻧﺎ َﺗ َﻄ َّﻴ ْﺮ َﻧﺎ ِﺑ ُﻜ ْﻢ ﻟَ ِﺌ ْﻦ ﻟَ ْﻢ َﺗ ْﻨ َﺘ ُﻬﻮﺍ ﻟَ َﻨ ْﺮ ُﺟ َﻤ َّﻨ ُﻜ ْﻢ َﻭﻟَ َﻴ َﻤ َّﺴ َّﻨ ُﻜ ْﻢ ِﻣ َّﻨﺎ َﻋ َﺬﺍ ٌﺏ ﺃَﻟِﻴ ٌﻢ‬17) ‫ﺍ ْﻟ ُﻤ ِﺒﻴ ُﻦ‬
‫( ﺍ َّﺗ ِﺒ ُﻌﻮﺍ َﻣ ْﻦ َﻻ َﻳ ْﺴ َﺄﻟُ ُﻜ ْﻢ ﺃَ ْﺟ ًﺮﺍ‬20) ‫ﺼﻰ ﺍ ْﻟ َﻤ ِﺪﻳ َﻨ ِﺔ َﺭ ُﺟ ٌﻞ َﻳ ْﺴ َﻌﻰ َﻗﺎ َﻝ َﻳﺎ َﻗ ْﻮ ِﻡ ﺍ َّﺗ ِﺒ ُﻌﻮﺍ ﺍ ْﻟ ُﻤ ْﺮ َﺳﻠِﻴ َﻦ‬ َ ‫( َﻭ َﺟﺎ َﺀ ِﻣ ْﻦ ﺃَ ْﻗ‬19) ‫ﺃَ ْﻧ ُﺘ ْﻢ َﻗ ْﻮ ٌﻡ ُﻣ ْﺴ ِﺮ ُﻓﻮ َﻥ‬
ٍ
ْ ُ
‫ﻀﺮ ﻻ ﺗﻐ ِﻦ‬ َ ّ ُ ‫( ﺃﺃﺗ ِﺨﺬ ِﻣ ْﻦ ُﺩﻭ ِﻧ ِﻪ ﺁﻟِ َﻬﺔ ﺇِ ْﻥ ُﻳ ِﺮ ْﺩ ِﻥ ﺍﻟ َّﺮ ْﺣ َﻤ ُﻦ ِﺑ‬22) ‫( َﻭ َﻣﺎ ﻟِ َﻲ َﻻ ﺃَ ْﻋ ُﺒ ُﺪ ﺍﻟَّ ِﺬﻱ ﻓﻄ َﺮ ِﻧﻲ َﻭﺇِﻟ ْﻴ ِﻪ ﺗ ْﺮ َﺟ ُﻌﻮ َﻥ‬21) ‫َﻭ ُﻫ ْﻢ ُﻣ ْﻬ َﺘ ُﺪﻭ َﻥ‬
ً َ ُ َ ّ َ َ ُ َ َ َ
ِ ِ ِ ِ
َ
‫( ِﻗﻴ َﻞ ﺍ ْﺩ ُﺧ ِﻞ ﺍﻟْ َﺠ ّﻨ َﺔ َﻗﺎ َﻝ َﻳﺎ‬25) ‫( ﺇِﻧّﻲ ﺁَ َﻣ ْﻨ ُﺖ ِﺑ َﺮﺑّ ُﻜ ْﻢ َﻓﺎ ْﺳ َﻤ ُﻌﻮ ِﻥ‬24) ‫ﺿ َﻼ ٍﻝ ُﻣ ِﺒﻴ ٍﻦ‬ َ ‫( ﺇِﻧّﻲ ﺇِ ًﺫﺍ ﻟَ ِﻔﻲ‬23) ‫َﻋﻨّﻲ َﺷ َﻔﺎ َﻋ ُﺘ ُﻬ ْﻢ َﺷ ْﻴ ًﺌﺎ َﻭ َﻻ ُﻳ ْﻨ ِﻘ ُﺬﻭ ِﻥ‬
ِ
(27) ‫( ِﺑ َﻤﺎ َﻏ َﻔ َﺮ ﻟِﻲ َﺭﺑّﻲ َﻭ َﺟ َﻌﻠَ ِﻨﻲ ِﻣ َﻦ ﺍ ْﻟ ُﻤ ْﻜ َﺮ ِﻣﻴ َﻦ‬26) ‫ﻟَ ْﻴ َﺖ َﻗ ْﻮ ِﻣﻲ َﻳ ْﻌﻠَ ُﻤﻮ َﻥ‬

Azaiez
Ce passage se caractérise par une narration dialoguée avec échange de points de vue
contradictoires. La présence de plusieurs protagonistes dans l’échange de paroles
n’est pas inédite. La singularité de ce passage viendrait plutôt de l’absence d’une
voix divine (sauf peut-être l’ellipse v. 26 notée par Guillaume Dye) et qui rapproche ce
récit de ceux mettant en scène Noé face à son peuple (sourate 71). Par ailleurs, ce
passage révèle une des fonctions argumentatives du maṯal: suggérer que la mission
de l’allocutaire coranique est à l’image de la mission des messagers antérieurs. Cette
relation est possible selon trois modalités que sont 1. la concomitance des dési-
gnations (la désignation de mursalīn donnée à fois à l’allocutaire coranique au v. 3 et
aux protagonistes du récit, v. 13) ; 2. la concomitance du message transmis (on
remarque, en l’occurrence, une forme de métatextualité implicite avec l’expression
balāġ al-mubīn au verset 17 qui vient en écho des expressions imām mubīn au v. 2 et
Qurʾān al-mubīn au v. 68) ; et enfin, la concomitance des formes de contre-discours
(les objections des adversaires sont de même nature pour l’allocutaire coranique et
les adversaires des envoyés, cf. QS 10).

Dye
Texte extrêmement allusif et, hormis sa morale, difficilement compréhensible. Le
sous-texte exact reste mystérieux. La tradition musulmane rapproche souvent cet
épisode du martyre d’Agabus (devenu Ḥabīb al-Naǧǧār), mais cela ne semble pas
très convaincant. Il est peu probable que les « envoyés » soient des disciples de
Jésus : on attendrait plutôt ici ḥawāriyy au lieu de mursal. Le lien avec Gen 19 est
peut-être plus naturel, mais il reste très hypothétique, et cela ne nous dit rien sur la
personne qui vient min aqṣā al-madīna (v. 20). Il paraît donc difficile de rapprocher
ce passage (qu’il conviendrait, comme l’indiquent d’autres commentaires, de pour-
suivre jusqu’au v. 32) d’épisodes bibliques précis et reconnaissables.
L’hypothèse de la jonction de deux récits initialement séparés (vv. 13 – 19 et
vv. 20 – 27), voire trois récits, n’est pas à écarter, mais elle ne s’impose pas vraiment
non plus. Plus généralement, il s’agit d’un « exemple » (sens de matal dans ce
contexte) de l’anéantissement d’un peuple – topos qui revient constamment dans le
Coran (cf. vv. 28 – 29). D’une certaine manière, l’identité exacte des protagonistes
298 QS 31

importe peu : ce qui compte, c’est l’attitude des uns et des autres, et les consé-
quences qui en découlent.
Comment comprendre le contraste entre qarya (v. 13) et madīna (v. 20) ? « Ville »
versus « région » (district administratif), ou « village » versus « ville » ?
On notera l’ellipse au début du v. 26. Qui dit à l’homme d’entrer au Paradis ?
L’homme s’adresse aussi bien aux habitants de la cité qu’aux envoyés. Si ce sont les
habitants de la cité qui parlent, c’est une façon cynique de lui annoncer qu’ils
entendent le mettre à mort. Si ce sont les envoyés : est-ce dit comme une promesse
d’entrée au Paradis pour sa foi ?

El-Badawi
I would extend this passage to include vv. 28 – 32, in which case the entire narration
seems to merge the function of parable (maṯal; e. g. Q 18:32) with that of didactic sto-
ries (qaṣaṣ; cf. Q 26; 37). The passage’s lesson concerning a people who reject simul-
taneous messengers, to their own peril, retells the parable of the ‘landowner and his
vineyard’ (Matthew 21:33 – 41; Mark 12:1– 11; Thomas 65). Parallels made to Acts 11:27–
30 are secondary at best.
The terminology is striking in places. Is the function of mursalūn (messengers; cf.
Q 6:48) the same as rusul (apostles? Cf. Q 2:87, 253)? It seems the “village people”
(aṣḥāb al-qarya) and messengers both worship al-Raḥmān—acknowledged by the
messengers as “our Lord” (rabbanā) and by the believing man in v. 22 as “the one
who originated me” (allaḏī faṭaranī)—where the former disbelieve in the prophecy
of the latter because they are human (bašar), i. e. not angels. Q 14:10 – 11 illustrates
a similar scene where Allah is evoked instead of al-Raḥmān. What change took
place in the audience or author to allow for the shift from al-Raḥmān to Allah, or
vice versa (cf. Q 1:1; 27:30; 17:110)? Is al-Raḥmān Himself the savior, i. e., the only
source of “abundance/intercession” (afāʿa; cf. Syr. sēpʿā) without whom we are all
“lost” (ḍalāl, ḍalāla) as implied by Q 19:95 (cf. Q 78:38)? If so, then this passage
and others may provide clues to a rather intricate Qurʾānic soteriology.
The trope of “the man running out of the city” occurs in Q 28:20 where he cau-
tions Moses about the conspiracy to kill him and stands in contradistinction, as An-
drew Rippin implies, to the “village.” (This further resembles the story of city warn-
ers who precede the capitulation of cities to the Muslim armies in the tārīḫ/
maġāzī literature.) In the didactic stories of the Qurʾān, good people often live in
the “city” (madīna) and evil people live—without exception—in “villages/towns”
(qarya, pl. qurā; i. e., destroyed cities?, ruins?; e. g., Q 2:58; 21:74). V. 26 suggests
the believing man entered paradise after dying; his martyrdom is not explicit in
this passage although it is suggested in the Tafsīr literature.
The word mukramūn here means “pruned” (i. e., hand-picked, special; cf. Syr. K-
R-M) and points back to the parable in the Gospels. More specifically it describes
those who believe and are rewarded in paradise (al-ǧanna) by al-Raḥmān. This im-
agery is confirmed by Q 21:26 (which implies that al-Raḥmān occupies the place of
312 QS 32

and mixed it with falsehood. But God put an end to this by having the ǧinn chased
away, and so soothsaying disappeared. This is also widely told in the exegetical tra-
dition. The ancient Arab fear of falling stars does get a mention in Ibn Hišām (I:206;
trans. 91), but the rest of the traditional accounts first encountered in Ibn Isḥāq illus-
trate the discontinuity between, on the one hand, the Arabian and Syrian traditions
(if we may take Balīnūs to represent the Syrian tradition) and, on the other hand, that
of ʿAbbāsid Iraq, including the Medinese heritage patronized there. It was from the
Iraqi tradition, not that of western Arabia and Syria, that classical Islamic culture
was formed.

Dye
Ce passage doit être rapproché de textes parallèles, notamment Q 15:16 – 18, Q 21:32,
Q 41:12, Q 67:5, Q 72:8 – 9. Certes, le Coran est moins un livre qu’un corpus (au
demeurant fort composite), et on court parfois le risque, en interprétant le Coran par
lui-même, de postuler une cohérence et une systématicité qui peuvent être étrangères
aux textes originellement épars et indépendants qui, réunis en un codex, ont fini par
constituer le Coran. Néanmoins, dans le cas présent, l’ensemble des passages pa-
rallèles permet de dégager une image cohérente, à savoir : Dieu empêche les démons
(vv. 6 – 10, Q 15:16 – 18, Q 67:5) ou les ǧinns (Q 72:8 – 9) de pénétrer les cieux, mettant
une protection, une barrière, au niveau du ciel le plus bas ; les démons et les ǧinns ne
peuvent donc pas entendre ce qu’ils voudraient entendre, en l’occurrence les chants
de louange des anges, et le conciliabule divin.
Il semble bien que les ginns soient assimilés à des démons (et peut-être aussi à
des anges déchus). Il faut voir là un phénomène d’acculturation, similaire à ce qu’il
s’est passé ailleurs dans le monde antique : on interprète des croyances et des entités
pré-juives, pré-chrétiennes, pré-islamiques…, selon une nouvelle cosmologie – on ne
nie pas l’existence de ces entités (tout le monde croyait aux démons et aux esprits
dans l’Antiquité), mais on en donne une autre interprétation, dans un nouveau cadre
hiérarchique. De ce point de vue, le Coran se situe à la fin d’une longue histoire, celle
des traditions énochiennes sur les anges déchus (cf. le Livre des Veilleurs, dans 1
Enoch 1– 36), et de leurs réinterprétations, notamment dans la littérature hérésio-
graphique et démonologique chrétienne. C’est probablement une confiance excessive
dans la tradition musulmane, et dans le « grand récit » (master narrative) qu’elle met
en place pour rendre compte de l’émergence de l’islam, qui explique l’incapacité de
nombreux commentateurs à placer cette polémique coranique dans sa juste per-
spective, à savoir la démonologie et l’angélologie.
V. 7 : mārid est un hapax, vraisemblablement justifié par des raisons de rime. On
rencontre plutôt, dans ce contexte, l’expression kull šayṭān raǧīm (Q 15:17 ; Q 16:98 ;
Q 81:25), « tout diable (ou démon) maudit », selon le sens de l’éthiopien rəgəmt (cf.
Kropp 2005).
QS 34 327

‫( َﻓ َﻐ َﻔ ْﺮ َﻧﺎ ﻟَ ُﻪ َﺫﻟِ َﻚ َﻭﺇِ َّﻥ ﻟَ ُﻪ ِﻋ ْﻨ َﺪ َﻧﺎ‬24) ‫ﺼﺎﻟِ َﺤﺎ ِﺕ َﻭ َﻗﻠِﻴ ٌﻞ َﻣﺎ ُﻫ ْﻢ َﻭ َﻇ َّﻦ َﺩﺍ ُﻭﻭ ُﺩ ﺃَ ّﻧَ َﻤﺎ َﻓ َﺘ ّﻨَﺎ ُﻩ َﻓﺎ ْﺳ َﺘ ْﻐ َﻔ َﺮ َﺭ َّﺑ ُﻪ َﻭ َﺧ َّﺮ َﺭﺍ ِﻛ ًﻌﺎ َﻭﺃَ َﻧﺎ َﺏ‬َّ ‫َﻭ َﻋ ِﻤﻠُﻮﺍ ﺍﻟ‬
َ َ ِّ َ َ ْ َ
‫ﻀﻠّ َﻚ َﻋ ْﻦ َﺳ ِﺒﻴ ِﻞ‬ ِ ‫ﺱ ِﺑﺎ ْﻟ َﺤﻖ َﻭ َﻻ َﺗ ّﺘ ِﺒ ِﻊ ﺍ ْﻟ َﻬ َﻮﻯ َﻓ ُﻴ‬ ِ ‫( َﻳﺎ َﺩﺍ ُﻭﻭ ُﺩ ﺇِ ّﻧﺎ َﺟ َﻌ ْﻠ َﻨﺎ َﻙ َﺧﻠِﻴ َﻔ ًﺔ ِﻓﻲ ﺍﻷ ْﺭ‬25) ‫ﻟَ ُﺰ ْﻟ َﻔﻰ َﻭ ُﺣ ْﺴ َﻦ َﻣ َﺂ ٍﺏ‬
ِ ‫ﺽ َﻓﺎ ْﺣ ُﻜ ْﻢ َﺑ ْﻴ َﻦ ﺍﻟ ّﻨﺎ‬
(26) ‫ﻀﻠُّﻮ َﻥ َﻋ ْﻦ َﺳ ِﺒﻴ ِﻞ ﺍﻟﻠَّ ِﻪ ﻟَ ُﻬ ْﻢ َﻋ َﺬﺍ ٌﺏ َﺷ ِﺪﻳ ٌﺪ ِﺑ َﻤﺎ َﻧ ُﺴﻮﺍ َﻳ ْﻮ َﻡ ﺍ ْﻟ ِﺤ َﺴﺎ ِﺏ‬ ِ ‫ﺍﻟﻠَّ ِﻪ ﺇِ َّﻥ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ َﻳ‬

Azaiez
Cette péricope autour de la figure davidique est l’occasion d’interroger la spécificité
formelle et structurelle de la narration coranique. On relève plusieurs caractéristi-
ques qu’il est très fréquent de retrouver dans nombre de textes narratifs :
[1] Présence d’un allocutaire (injonction de patienter: āṣbir ʿalā mā yaqūlūna et
interpellation interrogative : wa-hal ʾātāka nabaʾu al-ḫasmi).
[2] Formulation introductive type (injonction de se remémorer : wa-āḏkur).
[3] Dialogisme (échange de paroles au style direct omniprésence de la racine Q-
W-L).
[4] Disdacalies (description minimaliste de l’action, ʾIḏ daḫalū ʿalā Dāwūda fa-
faziʿa minhum).
[5] Formulations répétitives et partagées dans d’autres récits coraniques. Les
similarités lexicales sont frappantes avec le récit de marial (Q 19:18) et adamique (Q
2:30 – 39). L’effet est double : donner une unité stylistique au récit coranique, relier
les récits entre-eux en créant une histoire continue du salut.
Récit marial: sabbiḥū bukratan wa ʿašīyā (Q 19:11) / Récit davidique : yusabbiḥna
bi-l-ʿašīyi wa-l-išrāqi (38 :18) ; Récit adamique: ʾinnī ǧāʿilun fī-l-ʾardi ḫalīfatan (Q 2:30)
/ Récit davidique : ʾinnā ǧaʿalnāka ḫalīfatan (Q 38:26).
[6] Langage performatif (l’acte de pardonner : faǧafarnā lahu).
[7] Absence ou rareté des toponymes (miḥrāb)
[8] Temporalités multiples et unifiées (Temps du récit et de l’action des per-
sonnages liés aux didascalies, Temps référé et mythique induits par le pardon donné
par Dieu, Temps eschatologique avec la mention de yawma l-ḥisāb).
Il serait, en l’occurrence, très utile de comparer ces formes déterminées et ré-
pétitives avec les structures et formes des poèmes liturgiques syriaques que l’on
appelle les soghyata (Brock 1991: 109 – 119).

Dye
Les caractéristiques structurelles et formelles de ce passage ont été bien analysées
par Azaiez. Le texte fait écho à 2 Sam 12:1– 16, avec bien sûr des différences. Ce n’est
plus Nathan qui s’adresse à David, au moyen d’une parabole, mais « deux dis-
puteurs » (v. 21) – justement les personnages de la parabole de Nathan – qui vont
directement porter leur querelle auprès de David (situation qui évoque celle d’un
autre personnage biblique, Salomon). Noter que David n’est pas présenté comme
étant simplement chez lui (2 Sam 12:1), mais (implicitement) comme se trouvant dans
le miḥrāb (v. 21).
328 QS 34

Vv. 18 – 19 : l’idée selon laquelle les montagnes et les oiseaux louent Dieu en
compagnie de David apparaît à plusieurs reprises dans le Coran (Q 21:79 ; Q 34:10).
Comme le note Madigan, on a là une référence très nette à Ps 148:9 – 10 (voir aussi
Dan 3:75, 80).
V. 21 : miḥrāb désigne très clairement le Temple de Jérusalem dans trois autres
passages du Coran. Au singulier, le terme concerne soit Marie (Q 3:37), soit Zacharie
(Q 3:39 ; Q 19:11). Ce sens pourrait bien être évoqué ici, même si c’est Salomon, et non
David, qui est censé avoir construit le Temple. Naturellement, l’idée qu’il s’agisse de
la « Tour de David » est pertinente, mais pourquoi le Coran emploie-t-il alors ce
terme? Ce n’est peut-être pas un hasard si David est rapproché ici de Marie et
Zacharie (intéressant rapprochement David/Jésus : Q 5:78).
V. 26 : ḫalīfa me semble dans ce verset avoir le sens de « lieutenant, vicaire de
Dieu », et non celui de « successeur » (sur cette question, cf. Crone & Hinds 1986: 4–
23). L’homme reçoit délégation de Dieu pour administrer la terre : l’insistance, dans
ce contexte, sur les notions de péché et de repentance est à rapprocher, bien sûr, de
« l’épisode inaugural » – à savoir la faute puis le repentir d’Adam, qui sont le
« modèle » des fautes et repentirs postérieurs (on a là un autre exemple du mono-
prophétisme du Coran).
Les vv. 17– 30 sont suivis, dans les vv. 31– 40, d’une péricope sur Salomon.
Comme souvent dans le Coran, la figure de David est liée à celle de Salomon (Q 4:163;
Q 6:84; Q 21:78 – 82; Q 34:10 – 14).

Grodzki
The recurring refrain-like fa-inna lahu ʿindanā la-zulfā wa-husna maʾābin of v. 25 and
v. 40 is not very smooth in terms of language or grammatical structure. Zulfā here is
generally understood (mostly through its contextual juxtaposition with nine other
Qurʾānic uses of this stem) as “a station of nearness” (translation by Ali Quli
Qara’i), “a Near Approach” (Yusuf Ali), “access to [Our] presence” (Pickthall). Its odd-
ity made some scholars raise the conjuncture (as Lüling 2003: 216 – 7) that in some of
these instances it is a misread Z-L-Q stem, as suggested by the readings of Ibn
Masʿud, Ubayy, and Ibn ʿAbbās in regard to Q 26:64 and 26:90. However, because
of the peculiarity of Q 38:25, neither zulfā nor zulqā seem to help much with clarify-
ing the semantic stratum of this verse.

Hawting
Why this story of David, with its – in the Qurʾānic perspective – unusual content,
should occur here is not easy to understand. Earlier verses in this sūra have focused
on the theme of the rejection of the Qurʾānic messenger by his opponents and refer-
ences to earlier messengers who had been rejected by their people, presumably to
comfort and reassure him. The opening of the passage under consideration with
its imperative iṣbir suggests that more words of comfort will follow, but the story
QS 36 339

aurait pour rôle unique de fonctionner comme rime tout en ayant la particularité de
frapper l’esprit par son obscurité sémantique.

Dye
Discours eschatologique, construit en deux parties : les vv. 43 – 49 décrivent le sort
des pécheurs, les vv. 50 – 57 celui des pieux. Noter le parallélisme ḏuq (v. 49) /
yaḏūqūna (v. 56).
Le texte est composé de manière spéculaire. Les vv. 43 – 44 décrivent la nourri-
ture (élément solide) des pécheurs, et le v. 55 celle des justes. Les vv. 47– 48 décrivent
la demeure des pécheurs (une fournaise dans laquelle on verse un liquide bouillant
sur les condamnés), et les vv. 51– 52 celle des pieux, où se trouvent jardins et sources.
On a probablement exagéré le caractère proprement « arabe » de ces des-
criptions. Après tout, la description coranique du paradis est très proche de celle des
Hymnes sur le paradis d’Éphrem (Andrae 1955: 151 ff.). Quant à celle de l’enfer, elle se
fonde sur des topoi bibliques et évangéliques bien connus. Restent deux problèmes.
D’abord, l’arbre de Zaqqūm (v. 43), que l’on rencontre dans d’autres passages
(Q 37:62– 68, Q 56:52—à l’indéfini; voir aussi Q 17:60). L’étymologie est obscure. Est-
ce un mot rare, ou étranger, voire un terme inventé ? La rareté du mot contribue à
frapper l’imagination de l’auditoire.
Ensuite, les fameuses houris (v. 54). Je ne sais si Luxenberg (2007a: 247– 283) a
raison dans ses émendations: la principale difficulté de son hypothèse (ou de celle,
peut-être plus convaincante, de Van Reeth 2006) est qu’il faut réinterpréter un
nombre assez conséquent de passages différents, dont tous ne contiennent pas
l’expression ḥūr ʿīn (Q 78:31– 34 ; Q 55:56 – 58). D’un autre côté – et cela ne relève ni
du puritanisme ni de la polémique interreligieuse –, il faut reconnaître que la thèse
des houris a quelque chose de saugrenu (quid des croyantes qui entreront au paradis
avec leur époux ?). Leur présence dans les passages concernés (ici-même, et en Q
52:19 – 20) est étrange, puisqu’elles apparaissent, de manière assez inattendue, dans
un propos insistant sur la quiétude, les fruits et la boisson, comme chez Éphrem
(Hymnes sur le paradis 5:6 ; 9:6). La possibilité que les images d’Éphrem (notamment
Hymnes sur le paradis 7:18) aient été mal comprises (sous l’influence de conceptions
zoroastriennes ?), soit par le rédacteur du texte (les houris seraient alors bien dans le
Coran), soit par la tradition musulmane postérieure, dans la mise en place des points
diacritiques et des voyelles, et dans l’interprétation du texte, me paraît une hypo-
thèse plausible.

El-Badawi
A characteristic description of hell and paradise, with the phrases šaǧarat al-zaqqūm
and ḥūr ʿīn of particular interest. Do we know what the word zaqqūm means?
Luxenberg’s analyisis of ḥūr ʿīn as “white grapes” is too reductionist (or polem-
ical) and problematic to be accepted as is. While it is quite clear that the Qurʾānic
QS 37 345

dans un contre-discours à 7 reprises dans l’ensemble du Coran (Q 10:38; 11:13, 15; 21:5
; 25:4; 42:24; 46:8). L’intérêt est ici de comparer pour un même contre-discours
(l’accusation de forger un Coran) les différentes ripostes que le Coran engage dans
cette polémique. On découvre ainsi trois formes de réponses (on laissera ici les
évolutions thématiques) : l’injonction donnée aux adversaires de produire un même
discours, l’intervention de l’allocutaire qui prend la parole, l’intervention exclusive
du locuteur coranique qui s’adresse en premier lieu à son allocutaire pour le con-
soler et le rassurer sur sa mission. Ces trois formes conduisent à définir différentes
stratégies de communication dans le cadre de la polémique que l’on peut (rapide-
ment) définir par trois mots clés : contre ‐argumenter (face à l’adversaire), justifier (le
discours coranique) et soutenir (l’allocutaire). Cf. Azaiez 2012.

Dye
Sur ce passage très concis, et passablement obscur, on peut avoir plus de questions
que de réponses.
Qui sont exactement les protagonistes ? S’agit-il de polémiques réelles, re-
montant par exemple à la prédication du Prophète, et si oui, de quand datent-elles
(le v. 10 semble impliquer un conflit avec les Juifs) ? Ou ne s’agirait-il pas plutôt de la
mise en scène, par les rédacteurs du Coran, de la figure d’un prophète, d’un aver-
tisseur, en butte à l’incroyance de certains ? Dans ce dernier cas, est-il possible (je
crains que non) de faire le départ entre ce qui relève d’une mise en scène rhétorique
et littéraire, et ce qui relève de débats ayant eu lieu effectivement, du vivant du
Prophète, ou éventuellement après les conquêtes, entre les conquérants et les po-
pulations conquises ?
Vv. 7– 8 : il est remarquable que les deux objections adressées au messager
(magie, invention) ne reçoivent pas de réponse satisfaisante – absence de réponse
pure et simple dans le cas de la magie, et manœuvre dilatoire dans le cas de
l’invention.
V. 9 : l’idée que ce que doit dire le destinataire du message (Muḥammad, selon la
lecture la plus naturelle) est la même chose que ce qui a été dit par les messagers
précédents se retrouve par exemple en Q 41:43. Par ailleurs, on trouve dans le Coran
l’idée qu’il ne convient pas de faire de distinction ou de hiérarchie entre les mes-
sagers (Q 2:136, 285). Comme le note Wansbrough (1977: 55 – 56), cette position est
contredite par d’autres passages coraniques, notamment Q 17:21, 55. Est-il possible de
réconcilier ces thèses apparemment divergentes ?
V. 10 : que désigne exactement kitāb ici? Les sourates dites al-Ḥawāmīm (Q 40 –
46) sont axées, dans leurs versets liminaires, sur la révélation (tanzīl, kitāb) que
reçoit le destinataire du message. Que kitāb doive être identifié au muṣḥaf coranique
– autrement dit, que le Coran soit, purement et simplement, un texte autoréférentiel
– ne va nullement de soi (sauf à considérer que ces versets sont contemporains de la
composition-collecte du Coran, auquel cas la thèse de l’autoréférentialité est plus
plausible) : kitāb pourrait-il simplement désigner « les révélations » reçues par le
346 QS 37

Prophète (sans que l’on sache clairement l’étendue des révélations concernées, ni si
elles ont déjà été mises par écrit) ?

El-Badawi
This passage illustrates the dispute over the authenticity of revelation, where v. 8 ac-
cuses the prophet (Muḥammad) of “fabrication” (iftirāʾ). He replies, “I am not a nov-
elty (bidʿ) among messengers…[but rather] a clear warner” (v. 9). The prophet sup-
ports his claim by referencing—without any detail—an episode concerning the
“Children of Israel” (vv. 10 – 11). In this episode the rebels/unbelievers denounce
the truth (cf. al-ḥaqq in v. 7) as “old reversion” (ifk qadīm; cf. J.B. Aram/Syr. a-p-
k), i. e., “going back to the old ways.” These old ways were none other than the Scrip-
ture (Law?) of Moses (kitāb mūsā). Now there is a new scripture (or law?) “confirm-
ing” (muṣaddiq) earlier scripture (v. 12).
The use of the words “novelty” (bidʿ) and “confirming” (muṣaddiq) echo “We
matched” (qafaynā) and “they perverted” (ibtadaʿūhā) in Q 57:26 – 27, which I believe
illustrate the passage’s condemnation of the Church once it freed itself from the Law
of Moses. Could Q 46:7– 12, similarly, be directed to a doubting Christian audience,
reluctant to observe the outdated Jewish Law?

Hawting
Another passage that gives some insight into the views and arguments of the oppo-
nents, although the precise meaning of some of it is difficult. The opponents accuse
the Qurʾānic messenger of sorcery (siḥr) and of forgery (iftirāʾ), both accusations fa-
miliar from other passages in the Qurʾān. The former accusation echoes the distinc-
tion made in the Bible between the true prophets of Israel and the pseudo-prophets
of other nations, who are merely soothsayers, augurs and sorcerers (e. g., Deut 18:10 –
11). The charge of forgery may imply the claim that material plagiarized from other
human beings is revelation from God (cf., e. g., Q 25: 4– 6). The messenger’s defence
against the charge of forgery is hard to understand: it seems to mean that it would
have been such a serious matter that, had he committed it, nobody could avert God’s
punishment of him (cf. Q 11: 35 where Noah is told to defend himself against the
same accusation by saying, “If I had forged it, the offence would be mine (ini ftaray-
tuhu fa-ʿalayya iǧrāmī).” The remainder of the messenger’s reply is familiar from
other passages in the Qurʾān: he is a messenger like previous ones, he does not
claim to know the unknown (“what will be done with me and with you”), he merely
follows what has come to him as waḥy, and he is merely a warner.
Vv. 10 – 12 then repeat the familiar idea that what the messenger brings (called a
kitāb in v. 12) is similar to, and confirms, the earlier revelation to the children of Is-
rael, but there are allusions to some less familiar arguments. In v. 10 the authenticity
of the message is supported by the fact that a witness from the children of Israel has
testified to its similarity (ʿalā miṯlihi), presumably to their own scripture, “and has
356 QS 38

‫َﻭ َﻣ َﺜﻠُ ُﻬ ْﻢ ِﻓﻲ ﺍ ِْﻹ ْﻧ ِﺠﻴ ِﻞ َﻛ َﺰ ْﺭ ٍﻉ ﺃَ ْﺧ َﺮ َﺝ َﺷ ْﻄﺄَ ُﻩ َﻓﺂَ َﺯ َﺭ ُﻩ َﻓﺎ ْﺳ َﺘ ْﻐﻠَ َﻆ َﻓﺎ ْﺳ َﺘ َﻮﻯ َﻋﻠَﻰ ُﺳﻮ ِﻗ ِﻪ ُﻳ ْﻌ ِﺠ ُﺐ ﺍﻟ ُّﺰ َّﺭﺍ َﻉ ﻟِ َﻴ ِﻐﻴ َﻆ ِﺑ ِﻬ ُﻢ ﺍﻟْ ُﻜ َّﻔﺎ َﺭ َﻭ َﻋ َﺪ ﺍﻟﻠَّ ُﻪ ﺍﻟَّ ِﺬﻳ َﻦ‬
29)) ‫ﺕ ِﻣ ْﻨ ُﻬ ْﻢ َﻣ ْﻐ ِﻔ َﺮ ًﺓ َﻭﺃَ ْﺟ ًﺮﺍ َﻋ ِﻈﻴ ًﻤﺎ‬ ِ ‫ﺼﺎﻟِ َﺤﺎ‬ َّ ‫ﺁَ َﻣ ُﻨﻮﺍ َﻭ َﻋ ِﻤﻠُﻮﺍ ﺍﻟ‬

Dye
Cette sourate pose quelques problèmes de composition.
Le lien entre les vv. 1 et 2 est curieux : le discours à la première personne du
pluriel dans le v. 1 semble être une parole d’Allah, mais il est ensuite question
d’Allah à la troisième personne du singulier dans les versets suivants. De plus, on ne
saisit pas bien pourquoi la victoire serait octroyée au Prophète afin de lui pardonner
ses péchés : logiquement, ce serait plutôt une fois que ses péchés lui sont pardonnés,
ou parce qu’ils lui sont pardonnés (le Prophète aurait-il donc péché ?) que le Prophète
serait susceptible de bénéficier du secours d’Allah et de la victoire.
Vv. 8 – 9 : bel exemple de « discours pluri-adressé », pour reprendre une idée de
Kropp (2008: 794– 797), puisque le locuteur (censé être Dieu) s’adresse à la fois au
Prophète et aux destinataires concrets du message coranique (la communauté du
Prophète). On peut se demander qui désigne exactement wa-rasūlihī (Moïse et Jésus
sont des référents possibles, même si le texte, dans sa version reçue, entend clai-
rement désigner Muḥammad – auquel le verset précédent s’adressait pourtant à la
deuxième personne du singulier). On peut aussi se demander si wa-rasūlihī ne serait
pas un ajout postérieur.
V. 13 : il semble qu’il y ait une lacune après wa-rasūlihī.
Le v. 29, anormalement long, et dont le propos s’éloigne quelque peu des versets
précédents, pourrait lui aussi être une interpolation (quelques arguments en ce sens
chez Gallez 2005: 358 – 360).

El-Badawi
The sūra seems to be concerned with purifying the army (or community) of the
prophet Muḥammad against “those who rebelled and prevented them from entering
the sacred house of worship” in Mecca (vv. 24– 25) and precedes God’s promise that
they will “surely enter the sacred house of worship by God’s will” (v. 27)—whose im-
agery distantly resembles Jesus’ triumphal entry into Jerusalem (e. g., Matthew 21:1–
11; cf. in relation Isaiah 26:1– 3; Zachariah 14:1– 5).
Q 48’s classification of the different groups reminds me of the principle in “se-
niority of faith” (sābiqa, i. e., those who entered Islam first) employed in later Islamic
biographical works (riǧāl, tabaqāt) to create a hierarchy of companions (saḥāba) and
later generations (tābiʿūn). In this sūra, the rank of one’s faith is measurable by mili-
tary service and loyalty. The classes identified in the sūra are:
[1] Believers (muʾminūn/at; v. 4) who (v. 29) after a major military victory (naṣr;
cf. Q 110). The battle was fought with Muḥammad and his army who remained loyal
throughout.
372 QS 39

er of a second creation, and the destroyer of the people of Noah, ʿĀd and Ṯamūd, all
of which one can read in many other sūras. The passage culminates in yet another
question: “So what benefits of your lord will you dispute? This is a warner from
among the warners of old” (vv. 55 f).¹⁸
This passage is a mirror image of the first. Both contrast the fanciful ideas of the
opponents with the certainty possessed by prophets: have you polytheists seen your
alleged deities, has the miserly person seen the ġayb? (vv. 19, 34). Why then do you
dispute your ṣāḥib’s claims, why do you dispute the benefits of your lord, who has
sent you a warner? (vv. 12, 55 f). The two units are built around the same themes
of seeing and wrongly disputing, and the passage about the uncharitable person
also echoes the first by re-using the same words: nazlatan uḫrā is echoed in wizra
uḫrā and al-našʾata l-uḫrā (vv. 13, 38, 47), sidrati l-muntahā is echoed in ilā rabbika
l-muntahā (vv. 14, 42), ṭaġā in aṭġā (vv. 17, 52), yaġšā in ġašā (vv. 16, 54), and unṯā in
al-ḏakaru wa-l-unṯā (vv. 21, 45). The piece on the uncharitable person is not nearly so
striking a composition as the first oracular section, however, and it voices views that
accords with the rest of the book, suggesting that it is the Messenger himself who is
composing here. If he is citing an earlier work in part I, here he is simply imitating it,
composing a continuation in the same style.

IV. Warnings of the imminent end


The last six verses retain the oracular style but introduce new rhymes in a manner
suggesting a deliberate variation to wake people up. “The end is imminent; nobody
but God can unveil it [different translations are possible]. So do you marvel at this
talk? Will you laugh rather than weep, diverting yourselves? Rather, prostrate to
God and worship!” (vv. 57– 62). This sounds like the Messenger composing again.

Dye
Cette sourate entend répondre à l’accusation selon laquelle le messager serait fou ou
possédé. Il s’agit donc d’affirmer l’origine divine de la révélation, et d’en fournir les
preuves (même si le raisonnement est circulaire) en faisant référence aux « visions »
reçues par le messager. Le reproche de « possession » adressé à un messager (pas
nécessairement Muḥammad) n’est pas inhabituel dans le Coran (Q 23:25 ; Q 34:8 ;
Q 51:52).
Les vv. 1– 18, très ambigus, doivent être rapprochés de Q 81:15 – 29.
Vv. 1– 2 : Le sujet de hawā est-il l’étoile, ou ṣāḥibukum, comme le suggère Lu-
xenberg 2011: 282– 284 ? Le parallèle avec Q 81:15 – 16 conforte plutôt la lecture
traditionnelle. Néanmoins, le v. 3 concerne très directement ṣāḥibukum…

 The precise meaning of this is open to debate since no benefits have been mentioned, only pun-
ishments, but we can leave that aside here.
QS 39 373

V. 5 : on considère généralement qu’il est question ici d’un ange à la force


prodigieuse (Gabriel ?) qui enseigne la révélation au messager. Mais noter Q 55:2, qui
dit que c’est Dieu (al-Raḥmān) qui a enseigné al-Qurʾān (sans mentionner le des-
tinataire de cet enseignement).
V. 10 : ce verset concerne Dieu (et non l’ange), ce qui pose un problème de
composition, car les vv. 5 – 9 sont censés parler de l’ange.
V. 17 : l’usage de ṭaġā est curieux. Que signifie « la vue n’a pas outrepassé les
limites » ? Luxenberg (2011: 296) suggère de voir ici le syriaque ṭʿā, « errer, être
trompé », et il n’a peut-être pas tort.
V. 18 : quel est l’objet de la vision ? Rien ne contraint ni n’interdit de penser que
Dieu est l’objet même de la vision. Le v. 10 ne dit rien de précis sur ce qui est révélé (et
ne parle pas de vision) ; le v. 18 parle des signes du Seigneur, ce qui reste évasif. Un
sous-texte possible est la troisième Hymne sur le paradis d’Éphrem, comme le note
Tesei. J’ajoute un autre sous-texte (cf. Van Reeth 2010), également eschatologique, à
savoir le Pasteur d’Hermas 67. 8. 1 (œuvre très populaire dans l’Antiquité). Il y est
question d’un saule gigantesque auprès duquel se tient un ange immense : l’ange
coupe une partie des branches de cet arbre ; il donne une branche, un rameau, à
chacun des trépassés qui se trouvent sous l’arbre, et leur degré de sainteté et de
pureté est déterminé par l’état de la branche qu’ils ont reçue…

El-Badawi
This sūra articulates the shift away from astrolatry-syncretism towards a renewed
worship of God (Allāh) alone. Al-Lāt, Manāt, ‘Uzzā and Shu’rā were associated
with constellations worshiped throughout the Ancient Near East, cf. Venus-Aphro-
dite, Mitra, Sirius-Tishtria-Sopdet.
The vision of the speaker (presumably Muḥammad) in vv. 1– 18 is aimed at ad-
herents of these star cults, in order that they appreciate the signs (āyāt) of God,
but not worship them. V. 1 relegates these heavenly deities into mere stars that
were created stating, “by the star when it became [was created? Cf. Syr. H-W-Y].”
Vv. 19 – 30 condemn these adherents on account of their unfair (ḍīzā) identifica-
tion of angels as females (ostensibly because they and their forefathers simply made
it up), their limited knowledge (mablaġuhum min al-ʿilm) and their recourse to spec-
ulation (ẓann).
Vv. 31– 56 warns and guides these adherents by demonstrating the wonder of
God’s signs, including the stories of Arabian and Biblical prophets. V. 55 shares
most of the otherwise unique formulas articulated in Q 55, namely “so by which
of the favors of your Lord will you…?”
The rhyme in vv. 57– 62 changes along with the content, calling for the audience
to turn away from extravagance and laughter towards weeping and worship.
The structure of Q 53 appears to be composite, with longer Medinan-style verses
providing legislation and commentary inserted. This includes v. 26 which suggests at
this stage that the “intercession/abundance” (šafāʿāh, Syr. šēpʿā) of angels is still
‫‪380‬‬ ‫‪QS 40‬‬

‫‪. Lequel donc des bienfaits de votre Sei-‬‬


‫?‪gneur nierez-vous‬‬
‫‪. Ils seront accoudés sur des coussins verts‬‬
‫‪et des tapis épais et jolis.‬‬
‫‪. Lequel donc des bienfaits de votre Sei-‬‬
‫?‪gneur nierez-vous‬‬
‫‪. Béni soit le Nom de ton Seigneur, Plein‬‬
‫!‪de Majesté et de Munificence‬‬

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻟﺮﺣﻤﻦ‬
‫ﺲ َﻭﺍﻟْ َﻘ َﻤ ُﺮ ِﺑ ُﺤ ْﺴ َﺒﺎ ٍﻥ )‪َ (5‬ﻭﺍﻟ ّﻨَ ْﺠ ُﻢ َﻭﺍﻟ َّﺸ َﺠ ُﺮ َﻳ ْﺴ ُﺠ َﺪﺍ ِﻥ )‪(6‬‬ ‫َ‬ ‫َ‬
‫ﺍﻟ َّﺮ ْﺣ َﻤ ُﻦ )‪َ (1‬ﻋﻠّ َﻢ ﺍﻟْ ُﻘ ْﺮﺁَ َﻥ )‪َ (2‬ﺧﻠَ َﻖ ﺍ ِْﻹ ْﻧ َﺴﺎ َﻥ )‪َ (3‬ﻋﻠّ َﻤ ُﻪ ﺍﻟْ َﺒ َﻴﺎ َﻥ )‪ (4‬ﺍﻟ َّﺸ ْﻤ ُ‬
‫َ‬
‫ﺽ‬ ‫ﺿ َﻊ ﺍ ْﻟ ِﻤﻴ َﺰﺍ َﻥ )‪ (7‬ﺃَ َّﻻ َﺗ ْﻄ َﻐ ْﻮﺍ ِﻓﻲ ﺍ ْﻟ ِﻤﻴ َﺰﺍ ِﻥ )‪َ (8‬ﻭﺃَ ِﻗﻴ ُﻤﻮﺍ ﺍ ْﻟ َﻮ ْﺯ َﻥ ِﺑﺎ ْﻟ ِﻘ ْﺴ ِﻂ َﻭ َﻻ ُﺗ ْﺨ ِﺴ ُﺮﻭﺍ ﺍ ْﻟ ِﻤﻴ َﺰﺍ َﻥ )‪َ (9‬ﻭﺍ ْﻷ ْﺭ َ‬ ‫َﻭﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﺀ َﺭ َﻓ َﻌ َﻬﺎ َﻭ َﻭ َ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫َ ٌ َّ ْ ُ َ ُ َْ‬ ‫َْ‬
‫ﻒ َﻭﺍﻟ َّﺮ ْﻳ َﺤﺎ ُﻥ )‪َ (12‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪(13‬‬ ‫ﺼ‬
‫َ ْ ِ‬ ‫ﻌ‬ ‫ْ‬ ‫ﻟ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﻭ‬ ‫ُ‬
‫ﺫ‬ ‫ﺐ‬ ‫ُ‬ ‫َ َ ّ‬‫ﺤ‬ ‫ْ‬ ‫ﻟ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﻭ‬ ‫(‬ ‫‪11‬‬ ‫)‬ ‫ﻡ‬ ‫َ ِ‬ ‫ﺎ‬ ‫ﻤ‬ ‫ﻛ‬ ‫ْ‬ ‫ﻷ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﺕ‬ ‫ﺍ‬ ‫ﺫ‬ ‫ﻞ‬ ‫ﺨ‬ ‫ﻨ‬ ‫ﻟ‬‫ﺍ‬ ‫ﺿ َﻌ َﻬﺎ ﻟِﻸ َﻧﺎ ِﻡ )‪َ َ ِ َ ِ (10‬‬
‫ﻭ‬ ‫ﺔ‬ ‫ﻬ‬ ‫ﻛ‬ ‫ﺎ‬ ‫ﻓ‬ ‫ﺎ‬ ‫ﻬ‬ ‫ﻴ‬ ‫ﻓ‬ ‫َﻭ َ‬
‫ِّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫َ‬ ‫ْ‬ ‫ْ‬ ‫ُ‬ ‫َ‬ ‫ُ‬ ‫ُ‬ ‫ّ‬ ‫َ‬ ‫َ‬ ‫ّ‬ ‫َ‬ ‫َ‬
‫ﺼﺎ ٍﻝ ﻛﺎﻟﻔﺨﺎ ِﺭ )‪َ (14‬ﻭ َﺧﻠﻖ ﺍﻟ َﺠﺎ ّﻥ ِﻣ ْﻦ َﻣﺎ ِﺭ ٍﺝ ِﻣ ْﻦ َﻧﺎ ٍﺭ )‪ (15‬ﻓﺒِﺄﻱ ﺁﻻ ِﺀ َﺭﺑﻜ َﻤﺎ ﺗﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (16‬ﺭ ّﺏ ﺍﻟ َﻤﺸ ِﺮﻗ ْﻴ ِﻦ‬ ‫َ‬ ‫ْ‬ ‫َ‬ ‫َ‬ ‫ّ‬ ‫َ‬ ‫َ‬ ‫ْ‬ ‫َ‬ ‫ﺻﻠ َ‬ ‫ْ‬ ‫َﺧﻠَﻖ ﺍ ِﻹﻧ َﺴﺎ َﻥ ِﻣ ْﻦ َ‬ ‫ْ‬ ‫ْ‬ ‫َ‬
‫ِ‬ ‫ّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫َ‬ ‫َ‬
‫َﻭ َﺭ ُّﺏ ﺍﻟْ َﻤ ْﻐ ِﺮﺑَ ْﻴ ِﻦ )‪َ (17‬ﻓﺒِﺄ ّﻱ ﺁ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬﺑَﺎ ِﻥ )‪َ (18‬ﻣ َﺮ َﺝ ﺍﻟﺒَ ْﺤ َﺮ ْﻳ ِﻦ ﻳَﻠ َﺘ ِﻘﻴَﺎ ِﻥ )‪ (19‬ﺑَ ْﻴ َﻨ ُﻬ َﻤﺎ ﺑَ ْﺮ َﺯ ٌﺥ َﻻ ﻳَ ْﺒ ِﻐﻴَﺎ ِﻥ )‪َ (20‬ﻓﺒِﺄ ّﻱ ﺁ َﻻ ِﺀ‬
‫ْ‬ ‫ْ‬ ‫ُ‬ ‫َ‬ ‫َ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (21‬ﻳ ْﺨ ُﺮ ُﺝ ِﻣ ْﻨ ُﻬ َﻤﺎ ﺍﻟﻠُّ ْﺆﻟُ ُﺆ َﻭﺍ ْﻟ َﻤ ْﺮ َﺟﺎ ُﻥ )‪َ (22‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (23‬ﻭﻟَ ُﻪ ﺍ ْﻟ َﺠ َﻮﺍ ِﺭ ﺍ ْﻟ ُﻤ ْﻨ َﺸ َﺂ ُﺕ ِﻓﻲ ﺍ ْﻟ َﺒ ْﺤ ِﺮ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ُ‬ ‫ّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫َ‬
‫َﻛﺎ ْﻷ ْﻋ َﻼ ِﻡ )‪َ (24‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ُ (25‬ﻛ ّﻞ َﻣ ْﻦ َﻋﻠَ ْﻴ َﻬﺎ َﻓﺎ ٍﻥ )‪َ (26‬ﻭ َﻳ ْﺒ َﻘﻰ َﻭ ْﺟ ُﻪ َﺭﺑّ َﻚ ُﺫﻭ ﺍ ْﻟ َﺠ َﻼ ِﻝ َﻭﺍ ِْﻹ ْﻛ َﺮﺍ ِﻡ )‪َ (27‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫َْ‬ ‫ِّ‬ ‫ِ‬
‫ﺽ ُﻛ َّﻞ َﻳ ْﻮ ٍﻡ ُﻫ َﻮ ِﻓﻲ َﺷ ْﺄ ٍﻥ )‪َ (29‬ﻓﺒِﺄَ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ﺗُ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (30‬ﺳ َﻨ ْﻔ ُﺮ ُﻍ ﻟَ ُﻜ ْﻢ‬ ‫َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ﺗُ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (28‬ﻳ ْﺴﺄﻟُ ُﻪ َﻣ ْﻦ ِﻓﻲ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َِﻭﺍ ِﺕ َﻭﺍﻷ ْﺭ ِ‬
‫َ‬
‫ِ‬ ‫ّ‬ ‫ِ‬ ‫َ ِ‬ ‫َ‬
‫ﺲ ﺇِ ِﻥ ﺍ ْﺳ َﺘ َﻄ ْﻌ ُﺘ ْﻢ ﺃَ ْﻥ َﺗ ْﻨ ُﻔ ُﺬﻭﺍ ِﻣ ْﻦ ﺃَ ْﻗ َﻄﺎ ِﺭ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ َﻭﺍ ِﺕ‬ ‫ﺃ ُّﻳ َﻬﺎ ﺍﻟﺜّ َﻘ َﻼ ِﻥ )‪َ (31‬ﻓ ِﺒﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (32‬ﻳﺎ َﻣ ْﻌ َﺸ َﺮ ﺍﻟْ ِﺠ ّﻦ َﻭ ِﺍ ِْﻹ ْﻧ ِ‬
‫َ‬
‫ّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫َ‬ ‫َ‬ ‫ْ‬
‫ﺱ َﻓ َﻼ‬ ‫ﺽ َﻓﺎ ْﻧ ُﻔ ُﺬﻭﺍ َﻻ َﺗ ْﻨ ُﻔ ُﺬﻭ َﻥ ﺇِ ّﻻ ِﺑ ُﺴ ِْﻠ َﻄﺎ ٍﻥ )‪َ (33‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ ‪ُ ( (34‬ﻳ ْﺮ َﺳ ُﻞ َﻋﻠَ ْﻴ ُﻜ َﻤﺎ ُﺷ َﻮﺍ ٌﻅ ِﻣ ْﻦ َﻧﺎ ٍﺭ َﻭ ُِﻧ َﺤﺎ ٌ‬ ‫َﻭﺍﻷ ْﺭ ِ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫ﺼ َﺮﺍ ِﻥ )‪َ (35‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (36‬ﻓ ِﺈ َﺫﺍ ﺍ ْﻧ َﺸ َّﻘ ِﺖ ﺍﻟ َّﺴ َﻤﺎ ُﺀ َﻓ َﻜﺎ َﻧ ْﺖ َﻭ ْﺭ َﺩ ًﺓ َﻛﺎﻟ ّﺪ َﻫﺎ ِﻥ )‪َ (37‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪(38‬‬ ‫َﺗ ْﻨ َﺘ ِ‬
‫ّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫َ َ ِّ‬
‫ﺻﻲ‬ ‫َ‬ ‫ّ‬ ‫ُ‬ ‫َ‬ ‫ْ‬ ‫ُ‬
‫ﺲ َﻭﻻ ِ َﺟﺎ ّﻥ )‪ (39‬ﻓﺒِﺄﻱ ﺁﻻ ِﺀ َﺭﺑﻜ َﻤﺎ ِ ﺗﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ُ (40‬ﻳ ْﻌ َﺮﻑ ﺍﻟ ُﻤ ْﺠ ِﺮ ُﻣﻮ َﻥ ﺑِ ِﺴﻴ َﻤﺎ ُﻫ ْﻢ ﻓ ُﻴ ْﺆ َﺧﺬ ﺑِﺎﻟﻨ َﻮﺍ ِ‬ ‫َ‬ ‫ُ‬ ‫ُ‬ ‫ّ‬ ‫َ‬ ‫َ‬ ‫ٌ‬ ‫َ‬ ‫َ‬
‫َﻓ َﻴ ْﻮ َﻣ ِﺌ ٍﺬ ﻻ ُﻳ ْﺴﺄﻝ َﻋ ْﻦ ﺫﻧﺒِ ِﻪ ﺇِﻧ ٌ‬
‫ْ‬ ‫ْ‬ ‫ُ‬ ‫َ‬ ‫َ‬
‫ّ‬ ‫َ‬ ‫ّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫َ‬
‫َﻭﺍ ْﻷ ْﻗ َﺪﺍ ِﻡ )‪َ (41‬ﻓﺒِﺄَ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (42‬ﻫ ِﺬ ِﻩ َﺟ َﻬ ّﻨ ُﻢ ﺍﻟ ِﺘﻲ ُﻳ َﻜﺬ ُﺏ ﺑِ َﻬﺎ ﺍﻟ ُﻤ ْﺠ ِﺮ ُﻣﻮ َﻥ )‪َ (43‬ﻳﻄﻮﻓﻮ َﻥ َﺑ ْﻴ َﻨ َﻬﺎ َﻭ َﺑ ْﻴ َﻦ َﺣ ِﻤﻴ ٍﻢ ﺁ ٍﻥ )‪(44‬‬
‫َ‬ ‫ُ‬ ‫ُ‬ ‫ْ‬ ‫ّ‬ ‫َ‬
‫ِ‬ ‫ّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫ﻑ َﻣ َﻘﺎ َﻡ َﺭﺑّ ِﻪ َﺟ َّﻨ َﺘﺎ ِﻥ )‪َ (46‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ ) ِ‪َ (47‬ﺫ َﻭﺍ َﺗﺎ ﺃَ ْﻓ َﻨﺎ ٍﻥ )‪َ (48‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ‬ ‫َﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (45‬ﻭﻟِ َﻤ ْﻦ َﺧﺎ َ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ِ (49‬ﻓﻴ ِﻬ َﻤﺎ َﻋ ْﻴ َﻨﺎ ِﻥ َﺗ ْﺠ ِﺮ َﻳﺎ ِﻥ )‪َ (50‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ِ (51‬ﻓﻴ ِﻬ َﻤﺎ ِﻣ ْﻦ ُﻛ ّﻞ َﻓﺎ ِﻛ َﻬ ٍﺔ َﺯ ْﻭ َﺟﺎ ِﻥ )‪َ (52‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ‬
‫ِّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِّ‬ ‫ِ‬
‫ﺵ َﺑ َﻄﺎ ِﺋﻨُ َﻬﺎ ِﻣ ْﻦ ﺇِ ْﺳ َﺘ ْﺒ َﺮ ٍﻕ َﻭ َﺟ َﻨﻰ ﺍﻟْ َﺠﻨَّ َﺘ ْﻴ ِﻦ َﺩﺍ ٍﻥ )‪َ (54‬ﻓ ِﺒﺄَ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ﺗُ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ِ (55‬ﻓﻴ ِﻬ َّﻦ‬ ‫َ‬
‫ِ‬ ‫َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ﺗُ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ُ (53‬ﻣﺘّ ِﻜ ِﺌﻴ َﻦ َﻋﻠَﻰ ُﻓ ُﺮ ٍ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫ﺲ َﻗ ْﺒﻠَ ُﻬ ْﻢ َﻭ َﻻ َﺟﺎ ٌّﻥ )‪َ (56‬ﻓ ِﺒﺄَ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (57‬ﻛﺄَ ّﻧَ ُﻬ َّﻦ ﺍﻟْ َﻴﺎ ُﻗﻮ ُﺕ َﻭﺍﻟْ َﻤ ْﺮ َﺟﺎ ُﻥ )‪َ (58‬ﻓ ِﺒﺄَ ّﻱ‬
‫ِ‬ ‫ﻑ ﻟَ ْﻢ َﻳ ْﻄ ِﻤ ْﺜ ُﻬ َّﻦ ﺇِ ْﻧ ٌ‬ ‫ﺻ َﺮﺍ ُﺕ ﺍﻟ َّﻄ ْ ِﺮ ِ‬ ‫َﻗﺎ ِ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (59‬ﻫ ْﻞ َﺟ َﺰﺍ ُﺀ ﺍ ِْﻹ ْﺣ َﺴﺎ ِﻥ ﺇِ ّﻻ ﺍ ِْﻹ ْﺣ َﺴﺎ ُﻥ )‪َ (60‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (61‬ﻭ ِﻣ ْﻦ ُﺩﻭ ِﻧ ِﻬ َﻤﺎ َﺟ َّﻨ َﺘﺎ ِﻥ )‪(62‬‬
‫ّ‬ ‫َ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫ﻀﺎ َﺧ َﺘﺎ ِﻥ )‪َ (66‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ‬ ‫َﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑِّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ُ (63‬ﻣ ْﺪ َﻫﺎ َّﻣ َﺘﺎ ِﻥ )‪َ (64‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑِّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ِ (65‬ﻓﻴ ِﻬ َﻤﺎ َﻋ ْﻴ َﻨﺎ ِﻥ َﻧ َّ‬
‫ّ ُِ‬ ‫ِ‬ ‫ِّ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫ﺗُ َﻜ ِّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ِ (67‬ﻓﻴ ِﻬ َﻤﺎ َﻓﺎ ِﻛ َﻬ ٌﺔ َﻭ َﻧ ْﺨ ٌﻞ َﻭ ُﺭ َّﻣﺎ ٌﻥ )‪َ (68‬ﻓ ِﺒﺄَ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ﺗُ ِ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ِ (69‬ﻓﻴ ِﻬ َّﻦ َﺧ ْﻴ َﺮﺍ ٌﺕ ِﺣ َﺴﺎ ٌﻥ )‪َ (70‬ﻓ ِﺒﺄَ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑﻜ َﻤﺎ‬
‫ِ‬ ‫ِ‬ ‫ِ‬
‫ﺲ َﻗ ْﺒﻠَ ُﻬ ْﻢ َﻭ َﻻ َﺟﺎ ٌّﻥ )‪َ (74‬ﻓﺒِﺄَ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ‬ ‫ﺼﻮ َﺭﺍ ٌﺕ ِﻓﻲ ﺍﻟْ ِﺨ َﻴﺎ ِﻡ )‪َ (72‬ﻓﺒِﺄَ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭﺑّ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜ ّﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ (73‬ﻟَﻢ ﻳ ْﻄﻤ ْﺜﻬ َّﻦ ﺇ ْﻧ‬ ‫ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ ) ِ‪ُ (71‬ﺣﻮ ٌﺭ َﻣ ْﻘ ُ‬
‫ّ‬
‫ّ َِ‬ ‫ّ‬ ‫ِ ْ َ ِ ُِ ِ ٌِ‬ ‫ٍ‬ ‫ّ‬ ‫ِ‬
‫ﻀ ٍﺮ َﻭ َﻋ ْﺒ َﻘ ِﺮ ّﻱ ِﺣ َﺴﺎ ٍﻥ )‪َ (76‬ﻓ ِﺒ َﺄ ّﻱ ﺁَ َﻻ ِﺀ َﺭ ّﺑ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪َ (77‬ﺗ َﺒﺎ َﺭ َﻙ ﺍ ْﺳ ُﻢ َﺭﺑﻚ ِﺫﻱ‬ ‫ﻑ ُﺧ ْ‬ ‫َﺭ ّﺑ ُﻜ َﻤﺎ ُﺗ َﻜﺬ َﺑﺎ ِﻥ )‪ُ (75‬ﻣ ّﺘ ِﻜ ِﺌﻴ َﻦ َﻋﻠَﻰ َﺭ ْﻓ َﺮ ٍ‬ ‫َ‬
‫ﺍ ْﻟ َﺠ َﻼ ِﻝ َﻭﺍ ِْﻹ ْﻛ َﺮﺍ ِﻡ )‪(78‬‬

‫‪Dye‬‬
‫‪Du point de vue de la Formgeschichte, on peut dire que cette sourate a beaucoup des‬‬
‫‪caractéristiques d’un psaume – et on devrait même parler d’un psaume coranique.‬‬
‫‪Les vv. 1– 32 développent le thème des bienfaits de Dieu (thème ô combien présent‬‬
‫‪dans les Psaumes), et les versets suivants des considérations eschatologiques.‬‬
‫‪La présence d’un refrain (vv. 13, 16, 18, 21, 23, 25, 28, 30, 32, 34, 36, 38, 40, 42, 45,‬‬
‫‪47, 49, 51, 53, 55, 57, 59, 61, 63, 65, 67, 69, 71, 73, 75, 77) indique-t-elle la possibilité d’un‬‬
‫‪chant alterné ? On remarque par ailleurs, à partir du v. 46, la présence de deux‬‬
‫‪versions d’un même propos. Outre, bien sûr, les répétitions du refrain, nous avons‬‬
QS 40 381

des reprises évidentes entre les versets suivants : 46/62, 48/64, 50/66, 52/68, 54/76,
56/70 (le fait qu’il soit question de « jardins » juste avant me semble favoriser le sens
de « fruits » sur celui de « vierges », mais cela reste à discuter), 58/72, 60/76. Ce n’est
pas le seul exemple dans le Coran où deux récits parallèles, à certains égards re-
dondants, sont conservés (cf. Q 18:9 – 16). Quelles conclusions peut-on en tirer con-
cernant l’histoire de la composition du texte ? Normalement, la présence de deux
traditions parallèles dans un ouvrage indique, avec une certaine probabilité, que le
texte concerné a fait l’objet de révisions, soit parce que deux traditions originelle-
ment indépendantes ont été combinées, soit parce que le rédacteur de la tradition
parallèle la plus récente a choisi d’intégrer sa composition à la tradition originale.
Concernant le duel du v. 13, si souvent répété : l’hypothèse la plus simple me
semble être celle d’un duel avec valeur d’augmentatif, comme le note Blachère (1956:
568) et cela s’accorde bien avec la rime en –ān de la quasi-totalité de la sourate (sauf
vv. 24, 27, 41, 72 et 78, avec une rime en –ām, mais cela ne rompt pas la continuité de
la rime ; noter cependant vv. 14– 15, rime en –ār, 17, rime en –ayn, et 43, rime en –ūn).
L’autre hypothèse, fondée sur le v. 33, explique ce duel par une référence conjointe
aux hommes et aux ǧinns.

El-Badawi
The combination of rhyme (the dual faʿlān, fuʿlān form and similar nouns) and re-
frain (fa-bi-ayy ālāʾi rabbikumā tukaḏḏibān) make this sūra unique. Only Q 77,
which is much shorter, makes use of a refrain (waylun yamaʾiḏin li-l-mukaḏḏibīn);
and only Q 53:55 comes close to the wording of Q 55’s refrain.
The epistemological sequence in vv. 1– 4 is meaningful: al-raḥmān–>al-Qurʾān–
>al-insan–>al-bayān. The parallelism (taṭābuq) of the remaining verses is striking,
e. g., mankind and ǧinn; the two seas; inhabitants of hell and paradise; two gardens
etc. On ḥūr ʿīn see my comments on Q 44. For further analysis of Q 55 in light of Psalm
136 see Neuwirth 2010.

Pregill
Spectacularly evocative of the Psalms in structure and theme; see especially Neu-
wirth’s analysis comparing it to Ps 136 in particular (2010: 215 – 223). The sūra epito-
mizes the approach to the psalmic tradition found in Qurʾānic discourse: it is refer-
ential, even reverential, but stridently revisionist as well, as the classic images and
themes of the Psalter are rendered into a new linguistic register and adapted to a
new context. I would add only that it is worth considering both how the Qurʾān
may be evoking the Psalms themselves and how the forms of engagement with the
Psalms found in older literary forms that preceded the Qurʾān may have had some
impact on it as well. Antiphonal compositions are a hallmark of various branches
of late antique Christian literature, and here, as elsewhere, what we might call the
390 QS 41

72:20 – 28: In the final portion the Messenger affirms his monotheist belief, say-
ing that he has no power over his opponents, but that nobody can deliver him from
God, whose message he must deliver, namely that anyone who disobeys God will go
to hell. He does not know when this will happen since God alone knows the ġayb,
and He does not share His knowledge except with whatever messenger He is pleased
with and then equips with guards (raṣad) in front and behind, so that He may know
that they (rather than he) have delivered the message of their lord; He encompasses
(in His knowledge) everything they have and counts everything. Apart from the
raṣad, the apparent admission that the Messenger does know the ġayb or some of
it after all, and the sudden shift to the plural in v. 28, there are no surprises here.
The whole sūra is a monotheist sermon.

Dye
La sourate peut être divisée en trois parties : 1– 15, 16 – 19, 20 – 28. Les vv. 1– 15
constituent un long discours rapporté, à un double niveau (« dis », « il m’a été
révélé »). Il s’agit, d’une certaine manière, d’une apocalypse, remarquable en ce que
la prédication du message divin est transférée du monde humain à un monde non-
humain, celui des ǧinns. Pourquoi un tel dispositif littéraire et rhétorique – y aurait-il
un lien entre le contenu du texte, et sa forme ?
V. 1, qul : ajout relevant du travail éditorial et rédactionnel des scribes, destiné à
présenter le Coran comme une parole émanant de Dieu.
V. 3 : taʿālā est en principe une locution autonome, qui fait référence à Dieu, et
non à l’une de ses qualités. Kropp (2011: 259 – 260) propose de lire, non pas ǧadd,
mais l’araméen ḥad, et reconstruit une formule tripartite, anti-polythéiste et anti-
trinitaire : ‘innahū taʿālā ḥad ! / rabb(i)nā mā ttaḫaḏ / ṣāḥibatan wa-lā waladan.
Les vv. 1– 15 mettent en scène les ǧinns, qui apparaissent comme des démons et
des anges déchus (voir commentaire du QS 32) – et cela ne concerne pas que le désir
d’entendre le concile divin (vv. 8 – 9). Comparer v. 6 et Q 2:14 ; 6:71, 121 ; 7:27, 30 ; 43:37.
Les démons, et les ǧinns, enseignent un savoir trompeur (ou illicite) aux hommes.
Or il y a ici une idée centrale pour la mise en perspective historique du texte : on
assiste à une démonisation de l’hérésie (et de l’idolâtrie) chez les hérésiographes
chrétiens, à partir du IIe siècle (Athénagore, Irénée, Tertullien, plus tard Lactance,
etc. : cf. par exemple Reed (2005: 160 – 189) pour quelques références). S’inspirant de
traditions énochiennes, ces auteurs font des démons ceux qui enseignent l’idolâtrie
et les hérésies. La sourate 72 reprend à son compte ce topos chrétien mais, en faisant
témoigner certains ǧinns contre d’autres, elle le renverse – contre, notamment, les
chrétiens, puisque parmi les cibles de la profession de foi du v. 3, il y a le christia-
nisme et la thèse de Jésus fils de Dieu !
V. 18 : al-masāǧida ne désignent pas nécessairement les lieux de culte des
« musulmans » (traduire par « mosquées » est anachronique). Rapprocher de Q 9:17–
18. Gallez (2005: 250 – 251) voit là un reproche adressé aux chrétiens, qui se pros-
ternent dans leurs églises, alors que leur foi n’est pas pure. L’idée est plausible.
QS 42 401

serait-il dès lors un indice supplémentaire d’une activité rédactionnelle et de com-


position ?

Dye
Les deux premiers versets jouent le rôle de « sonnette » destiné à attirer l’attention
du destinataire du message. Sur cet aspect des serments coraniques cf. Kropp 2008:
786.
V. 1, lā ʾuqsimu : on peut comprendre le lam-alif non comme la particule de
négation lā, mais comme la particule d’insistance la, écrite avec un alif ortho-épique
indiquant l’allongement de la voyelle brève devant hamza (cf. Puin 2011: 178 – 179).
Donc : « certes, je jure… . »
Les versets suivants sont mis dans la bouche de Dieu. Topoi classiques de la
prédication syriaque et coranique (thèmes sur lesquels il convient de renvoyer, une
fois de plus, à Andrae 1955: chap. 3) : Dieu est créateur tout-puissant (donc de-
structeur et résurrecteur – c’est ce qui est implicitement indiqué dans le v. 3, et l’idée
est reprise à la fin de la sourate, vv. 37– 40) ; l’homme continue à vivre dans les
futilités et le péché (l’idée est là encore reprise à la fin de la sourate, vv. 31– 36, mais
aussi aux versets 20 – 21).
Les vv. 7– 9 décrivent quelques-uns des signes de la fin des Temps (voir aussi
vv. 22– 25). Comparer Mt 24 : 29 : « Aussitôt après la tribulation de ces jours-là, le
soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel,
et les puissances seront ébranlées ». On n’aurait aucune difficulté à trouver d’autres
sous-textes.
Les vv. 16 – 19 s’intègrent assez mal dans le déroulement général du propos. On
doit reconnaître que ce passage est extrêmement obscur : qui s’adresse à qui, et à
propos de quoi ? La tradition musulmane a bien sûr une réponse : Dieu demande au
Prophète de ne pas hâter la récitation ou la communication du Coran – or cette
réponse n’a guère de rapport avec le cotexte.

El-Badawi
Q 75 belongs to the category of so called early Meccan sūras as delineated in Theodor
Nöldeke, Geschichte des Korans and whose literary structure have been discussed by
Angelika Neuwirth, Studien zur Komposition der mekkanischen Suren and—more re-
cently—Carl Ernst, How to Read the Qurʾān. The “oath formulas” which make up
the opening verses of these sūras are the Qurʾān’s apocalyptic signature and, more-
over, are in dialogue with the Hebrew and Christian Bible, Rabbinic commentary and
Syriac Christian homiletics.
As Reynolds and Dye have alluded to in the case of Q 75, chief along ‘intertexts’
of the opening verses of the so called early Meccan sūras is the Syriac text of Matt
5:24, as well as its reception in Syriac Christian literature. The former is discussed
in Lüling 2003 and the latter in Andrae 1926. For a more detailed discussion on
406 QS 43

Cuypers
Les versets suivants (85:4– 7) ont suscité des interprétations très diverses: « Ils ont
péri les Gens d’al-Uḫdūd, du feu pourvu de combustible, tandis qu’ils sont sur lui
assis, et témoins de ce qu’ils faisaient aux croyants .” Qui sont en effet ces Gens d’al-
Uḫdūd (aṣḥāb al-uḫdūd) ? Deux lignes d’explication s’affrontent, selon que l’on
prend les v. 4– 7 en un sens historicisant (position de la tradition islamique et de
quelques orientalistes) ou un sens purement eschatologique (position d’autres ori-
entalistes).
Selon l’interprétation la plus courante chez les commentateurs musulmans, le
texte ferait allusion à la persécution des chrétiens de Naǧrān par le roi juif ḥimyārite
Ḏū Nuwās, en 523. Ils auraient été brûlés vifs dans « une fosse » (uḫdūd). Toute une
série de savants occidentaux (e. g., Grimme 1895: II, 77, n. 4; Horovitz 1926: 11– 12, 92–
93; Bell 1950: II, 646; Paret 1986: 505 – 6) ne voient, au contraire, dans ces versets
qu’une scène du Jugement dernier : les aṣḥāb al-uḫdūd seraient des incroyants qui
sont précipités dans la fosse de l’Enfer pour leurs exactions envers les croyants (v. 7).
Ces deux lignes d’interprétation ne sont en réalité pas exclusives l’une de l’autre.
La sourate est composée de trois morceaux, disposés en concentrisme (ABA’) :
vv. 1– 9, 10 – 11, 12– 22. Le sens global de la sourate doit être compris à partir du
centre (vv. 10 – 11), comme c’est le plus souvent le cas des compositions concen-
triques : « En vérité, ceux qui éprouvent les croyants et les croyantes, puis ne se
repentent, à eux le châtiment de la Géhenne et à eux le châtiment de la calcination. »
Encadrant cette assertion centrale, plusieurs exemples historiques sont donnés, dans
les morceaux extrêmes A et A’ : les Gens d’al-Uḫdūd, qui, après avoir persécuté les
chrétiens, se retrouvent en Enfer (premier morceau, vv. 1– 9), mais aussi les armées
de Pharaon, englouties dans la mer alors qu’ils poursuivaient les Israélites, et les
Ṯamūd qui, selon la tradition coranique, persécutèrent le prophète arabe Ṣāliḥ
(dernier morceau, vv. 17– 18). Autrement dit, ceux qui s’opposent aux croyants su-
biront la destinée des cités rebelles châtiées par Dieu, thème classique du Coran.
Il faut donc comprendre les versets 4– 7, comme le propose G. Gobillot (2006 :
366, 2e col.), de manière très synthétique, chose tout à fait courante dans le style
coranique : ceux qui ont jeté les chrétiens dans le feu sont déjà virtuellement dans le
feu de l’Enfer, où ils contemplent ce qu’ils ont fait.

Dye
La sourate est composée de trois parties distinctes, aisément identifiables par les
changements thématiques ou rythmiques.
Vv. 1– 9 : rythme rapide, surtout au début ; contexte de prédication orale. Le
passage est obscur. Qui sont les ʾaṣḥābu l-ʾuḫdūd ? Quels sont les référents des
pronoms personnels ? On a souvent vu, à tort, une allusion au massacre de Naǧrān.
Il s’agit plutôt d’une imprécation : plus précisément, un discours adressé aux
croyants mais maudissant les incroyants (voir le commentaire de Kropp).
QS 43 407

Vv. 10 – 11 : rythme plus lent. Il s’agit de la partie centrale de la sourate, qui en


résume l’enseignement eschatologique.
Vv. 12– 22 : retour à un rythme plus rapide. Les vv. 13 – 16 constituent une eulogie
divine. Les vv. 21– 22 posent plusieurs problèmes. Le v. 21 commence par bal, comme
le v. 19. Le bal du v. 19 est logique : il existe un récit, ou des récits bien connus, de la
puissance de Dieu et du châtiment qui attend les incroyants, et malgré cela, certains
persistent à ne pas croire. En revanche, les vv. 21– 22 s’intègrent moins harmo-
nieusement au propos, et il semble que le bal du v. 21 serve à connecter ces deux
versets à ceux qui précèdent.
Il est question d’un coran (Qurʾānun) et non pas du Coran (al-Qurʾān). Est-il donc
certain que la « table » soit la place où est conservé le Coran ? C’est ainsi que la
tradition musulmane comprend ce passage, mais ce n’est peut-être pas si simple :
quel est l’antécédent de huwa dans bal huwa Qurʾānun maǧīdun ? Manifestement,
c’est seulement le récit (ḥadīṯ) dont parle le v. 17.
Comment lire le dernier mot de la sourate : maḥfūzin ou maḥfūzun ? Les deux
lectures sont possibles : soit c’est un « coran » qui est dans (sic !) une table bien
conservée, soit il est conservé dans une table. Noter que Q 56:77– 78 parle aussi d’un
coran (Qurʾānun) et non du Coran.
Enfin, l’usage de fī (v. 22). Une table étant une surface (bidimensionnelle, et non
tridimensionnelle), on s’attendrait à ʿalā. L’usage de cette préposition avec le terme
« table » m’évoque un passage d’Éphrem où Marie est identifiée à la Table : « Moïse
avait porté les tables de pierre que son Seigneur avait écrites ! Joseph escortait la
Table pure en laquelle (b-lūḥā dkyutā) habitait le Fils du Créateur » (Hymnes sur la
Nativité XVI: 17).

Grodzki
Referring to Dye’s remark, also for J. Wansbrough, bal huwa qurʾānun maǧīdun fī law-
ḥin maḥfūzin (Q 85:21– 22) evokes a celestial archetype being part of “an ancient and
well-attested tradition, in which of course the referent was the word of God as injunc-
tion, law, even register, but not ‘scripture’ in the sense of record of revelation” (1977:
83). It seems to make sense when juxtaposing it with other verses of the Qurʾān
speaking of the qurʾān but not of the Qurʾān (cf. Q 56:77– 78) as if equated with
the Mosaic law, and/or – as Wansbrough wants it – “with the Rabbinic concept of
the pre-existent Torah as the immutable word of God” (ibidem). It was also suggested
by other scholars (inter alia, Stein 2010, 261) that the expression “heavenly tablet” –
lawḥ maḥfūz – might be linked to the idea of representative metal tablets hung in
(South) Arabian temples which might have been known also to visitors from other
regions of the peninsula
QS 44 Q 90
. No indeed! . Non!… Je jure par cette Cité!
I swear by the City, . et toi, tu es un résident dans cette cité -
. While you live in this City! . Et par le père et ce qu’il engendre!
. By a begetter and what he begot! . Nous avons, certes, créé l’homme pour une
. We created man in hardship. vie de lutte.
. Does he imagine that none can overpower . Pense-t-il que personne ne pourra rien
him? contre lui?
. He says: “I wasted abundant wealth.” . Il dit: «J’ai gaspillé beaucoup de biens».
. Does he imagine that none has seen him? . Pense-t-il que nul ne l’a vu?
. Did We not give him two eyes? . Ne lui avons Nous pas assigné deux yeux,
. A tongue and two lips? . et une langue et deux lèvres?
. And guided him to the two highways? . Ne l’avons-Nous pas guidé aux deux
. He did not storm the Steep. voies.
. But how can you know what is the Steep? . Or, il ne s’engage pas dans la voie diffi-
. The freeing of a slave, cile!
. Or feeding, in time of famine, . Et qui te dira ce qu’est la voie difficile?
. An orphan near in kin, . C’est délier un joug [affranchir un
. Or a poor man, dirt-poor, esclave],
. Then joined those who believe, . ou nourrir, en un jour de famine,
Who enjoin patience on one another, . un orphelin proche parent
Who enjoin mercy on one another. . ou un pauvre dans le dénuement.
. They are the People of the hand dextral. . Et c’est être, en outre, de ceux qui croient
. But they who blaspheme Our revelations, et s’enjoignent mutuellement l’endurance, et
These are the People of the hand sinistral, s’enjoignent mutuellement la miséricorde.
. Upon them a Fire, firmly padlocked. . Ceux-là sont les gens de la droite;
. alors que ceux qui ne croient pas en Nos
versets sont les gens de la gauche.
. Le Feu se refermera sur eux.

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻟﺒﻠﺪ‬
‫( ﺃَ َﻳ ْﺤ َﺴ ُﺐ ﺃَ ْﻥ ﻟَ ْﻦ َﻳ ْﻘ ِﺪ َﺭ َﻋﻠَ ْﻴ ِﻪ‬4) ‫( ﻟَ َﻘ ْﺪ َﺧﻠَ ْﻘ َﻨﺎ ﺍ ِْﻹ ْﻧ َﺴﺎ َﻥ ِﻓﻲ َﻛ َﺒ ٍﺪ‬3) ‫( َﻭ َﻭﺍﻟِ ٍﺪ َﻭ َﻣﺎ َﻭﻟَ َﺪ‬2) ‫( َﻭﺃَ ْﻧ َﺖ ِﺣ ٌّﻞ ِﺑ َﻬ َﺬﺍ ﺍﻟْ َﺒﻠَ ِﺪ‬1) ‫َﻻ ﺃُ ْﻗ ِﺴ ُﻢ ِﺑ َﻬ َﺬﺍ ﺍﻟْ َﺒﻠَ ِﺪ‬
‫( َﻭ َﻫ َﺪ ْﻳ َﻨﺎ ُﻩ ﺍﻟ َّﻨ ْﺠ َﺪ ْﻳ ِﻦ‬9) ‫( َﻭﻟِ َﺴﺎ ًﻧﺎ َﻭ َﺷ َﻔ َﺘ ْﻴ ِﻦ‬8) ‫( ﺃَﻟَ ْﻢ َﻧ ْﺠ َﻌ ْﻞ ﻟَ ُﻪ َﻋ ْﻴ َﻨ ْﻴ ِﻦ‬7) ‫( ﺃَ َﻳ ْﺤ َﺴ ُﺐ ﺃَ ْﻥ ﻟَ ْﻢ َﻳ َﺮ ُﻩ ﺃَ َﺣ ٌﺪ‬6) ‫( َﻳ ُﻘﻮ ُﻝ ﺃَ ْﻫﻠَ ْﻜ ُﺖ َﻣﺎ ًﻻ ﻟُ َﺒ ًﺪﺍ‬5) ‫ﺃَ َﺣ ٌﺪ‬
(15) ‫( َﻳ ِﺘﻴ ًﻤﺎ َﺫﺍ َﻣ ْﻘ َﺮ َﺑ ٍﺔ‬14) ‫( ﺃَ ْﻭ ﺇِ ْﻃ َﻌﺎ ٌﻡ ِﻓﻲ َﻳ ْﻮ ٍﻡ ِﺫﻱ َﻣ ْﺴ َﻐ َﺒ ٍﺔ‬13) ‫( َﻓ ُّﻚ َﺭ َﻗ َﺒ ٍﺔ‬12) ‫( َﻭ َﻣﺎ ﺃَ ْﺩ َﺭﺍ َﻙ َﻣﺎ ﺍ ْﻟ َﻌ َﻘ َﺒ ُﺔ‬11) ‫( َﻓ َﻼ ﺍ ْﻗ َﺘ َﺤ َﻢ ﺍ ْﻟ َﻌ َﻘ َﺒ َﺔ‬10)
َ
(18) ‫ﺻ َﺤﺎ ُﺏ ﺍﻟْ َﻤ ْﻴ َﻤ َﻨ ِﺔ‬ ْ َ‫( ﺃُﻭﻟَ ِﺌ َﻚ ﺃ‬17) ‫ﺻ ْﻮﺍ ِﺑﺎﻟْ َﻤ ْﺮ َﺣ َﻤ ِﺔ‬ َ ‫ﺼ ْﺒ ِﺮ َﻭ َﺗ َﻮﺍ‬ َ ‫( ﺛُ َّﻢ َﻛﺎ َﻥ ِﻣ َﻦ ﺍﻟّ ِﺬﻳ َﻦ ﺁَ َﻣﻨُﻮﺍ َﻭ َﺗ َﻮﺍ‬16) ‫ﺃَ ْﻭ ِﻣ ْﺴ ِﻜﻴﻨًﺎ َﺫﺍ َﻣ ْﺘ َﺮ َﺑ ٍﺔ‬
َّ ‫ﺻ ْﻮﺍ ِﺑﺎﻟ‬
َ َ
(20) ‫ﺻ َﺪ ٌﺓ‬ َ ‫( َﻋﻠ ْﻴ ِﻬ ْﻢ َﻧﺎ ٌﺭ ُﻣ ْﺆ‬19) ‫ﺻ َﺤﺎ ُﺏ ﺍﻟْ َﻤﺸﺄ َﻣ ِﺔ‬
َ ْ ْ َ‫َﻭﺍﻟّ ِﺬﻳ َﻦ َﻛ َﻔ ُﺮﻭﺍ ﺑِﺂَ َﻳﺎ ِﺗ َﻨﺎ ُﻫ ْﻢ ﺃ‬

Dye
Zellentin note à juste titre que la description du Jugement dernier en Matt/Mt 25:31–
46 constitue un des sous-textes de cette sourate (l’auteur de la sourate semble bien
combiner ce texte et Matt 7:13, ou des traditions parallèles). Outre la question des
« Gens de la droite » et des « Gens de la gauche » (à rapprocher de Q 56:1– 56, où il
est cependant question de trois catégories de personnes ; cf. v. 7), on notera le point
suivant : Matt 25:34 – 36 insiste sur l’amour du prochain, et c’est exactement ce que
QS 44 413

font les vv. 13ss. Ces versets constituent la réponse à la question wa-mā ‘adrāka mā l-
ʿaqabat (v. 12) : question brève (wa-mā ʾadrāka mā revient à de nombreuses reprises
dans le Coran : Q 74:27 ; 77:14 ; 83:8, 19 ; 86:2, 97:2 ; 101:3, 10 ; 104:5 ; très souvent dans
un contexte eschatologique ), située au centre de la sourate, après les reproches
adressés à ceux qui ont choisi « la voie facile ».
Je partage les analyses de Younes 2010 sur les problèmes de composition de cette
sourate, concernant notamment les ruptures de rime et de rythme des vv. 5 – 7, ainsi
que les difficultés sémantiques attachées à certains termes, à savoir fī kabad (v. 4) et
al-naǧdayn (v. 10). Pour reprendre une image récemment proposée par Segovia (2012:
235 – 239), le Coran fonctionne comme un palimpseste, arrangeant, retravaillant, des
textes préexistants (dans le même ordre d’idée, cf. Kropp QS 46). Il n’y a donc rien de
surprenant à ce que l’on puisse trouver différentes strates de composition à l’inté-
rieur de nombreuses sourates.
Vv. 1– 2 : sur lā ʾuqsimu, voir mon commentaire du QS 42. Si on ne se contente
pas des réponses de la tradition musulmane, la grande question est de savoir à quoi
exactement peut faire référence al-balad…

El-Badawi
This sūra is about Jerusalem, and the prophet Muḥammad’s entitlement to it.
The opening of Q 90 is probably a response and reversal of Matt 25:34– 36 (cf. in
relation to Gabriel Reynolds’ comments on Q 75; cf. further comments on Q 38),
which states “But I say to you, Do not swear at all, either by heaven, for it is the
throne of God, or by the earth, for it is his footstool, or by Jerusalem, for it is the
city of the great King” (NRSV). Vv. 1– 2 state (I use Munther Younes’ translation), “I
truly swear by this city, and you are a rightful dweller in this city.”
There is an echo in v. 3 of the ‘Qurʾānic creed’ (Q 112:3). Also, I wonder if vv. 4– 7
can be translated/interpreted as the following:
V. 4 – We have indeed created man in [a state of] respect/power? (cf. Syr. K-B-D)
V. 5 – Does he think that no one can overpower him? [Because God can!]
V. 6 – He says ‘I have given away sizeable wealth.’ […which is a lie!]
V. 7 – Does he think that no one can see him? [Because God can!]
The duality of kabad and labad is a play on words conveying the sense of
“thick.”
The quintessential Qurʾānic themes found this sūra—especially the judgment of
two people (aṣḥāb al-maymana vs. aṣḥāb al-mašʾama) and charity—are in dialogue
with Matthew 25, perhaps even through the intermediaries proposed by Holger Zel-
lintin. In this respect Q 90 should be considered along with Q 56; 74. For more on
this see El-Badawi 2013: ch. 6.
420 QS 45

Comprise ainsi, la sourate retrouve unité et cohérence, autour du thème de la prière.


Elle est en réalité composée non pas de deux parties, mais de trois (vv. 1– 5, 6 – 8 et
9 – 19). Les deux parties extrêmes développent le thème de la prière : invitation à la
louange (vv. 1– 5), encouragement à persévérer dans la prière (vv. 9 – 19). La partie
centrale qui les relie (vv. 7– 8) est une sentence de sagesse, mettant en garde contre le
danger des richesses qui détournent de Dieu, et donc aussi de la prière.
La sourate apparaît ainsi comme un psaume invitatoire, proche du Ps 95. Après
l’impératif initial invitant à la prière (v. 1), la sourate évoque la création en général
(v. 1), puis celle de l’homme en particulier (v. 2). Or, le Ps 95 présente une même
séquence : appel à la louange, à l’impératif (« Venez, crions de joie pour le Sei-
gneur », Ps 95:1) ; Dieu créateur (« à lui la mer, c’est lui qui l’a faite, la terre ferme, ses
mains l’ont façonnée », Ps 95:5) ; et créateur de l’homme (« à genoux devant le
Seigneur qui nous a faits », Ps 95:6). Cet ensemble est suivi, dans les deux textes, par
une formule de justification similaire : « Car ton Seigneur est le Très-Généreux… »
(Q 96:3) / « Car c’est lui notre Dieu » (Ps 95:7). La suite de la sourate est également
comparable à la deuxième partie du psaume. Les deux textes sont en effet des
réquisitoires : contre la rupture de l’Alliance par le peuple de Dieu (Ps 95:8 – 11),
contre les riches et contre un individu impie (Q 96:6 – 18). On notera encore la si-
militude des versets du psaume : « Entrez, courbons-nous, prosternons-nous » (Ps
95:6) et « approchons de sa face en rendant grâces » (Ps 95:2) avec « Prosterne-toi et
approche-toi » (Q 96:19).

Dye
Quelques remarques éparses, sur ce que l’on peut appeler un psaume coranique.
V. 1 : iqraʾ bi-smi rabbika: il faut comprendre « invoque (=glorifie) le nom de ton
Seigneur ». Comparer hébreu qrā ḇ-šem Yahwē et formules parallèles (Ps 105 (104) :
1 ; 116 : 13, 17) et syriaque qrā ḇ-šem māryā. La formule est équivalente à sabbiḥ bi-
sma rabbika (Q 56:74 ; 59:52), sabbiḥi sma rabbika (Q 87:1), uḏkur isma rabbika (Q
73:8 ; 76:25). D’un point de vue grammatical, le bāʾ de bi-smi rabbika est un bāʾ
zāʾida. La manière de traduire ce verset constitue d’ailleurs, à mes yeux, un véritable
schibboleth, permettant de faire le départ entre les traductions authentiquement
« historiennes » et celles qui se révèlent trop tributaires de la tradition musulmane.
Görke, Schoeler, Motzki (2012: 30 – 33), en se fondant, entre autres choses, sur
l’existence d’une version parallèle au récit musulman sur la première révélation
(Gabriel enjoignant à Muḥammad de lire le Coran, Muḥammad refusant, etc.) dans
l’Historia Ecclesiastica Gentis Anglorum de Bède le Vénérable (texte achevé en 731),
mais à propos, non bien sûr de Muḥammad, mais du moine Caedmon, affirment que
la tradition sur la première révélation du début de Q 96 existait déjà à la fin du Ier
siècle de l’Hégire (et dans la version de la Sīra d’Ibn Isḥāq). D’après eux, elle aurait
été transmise à la source de Bède. S’ils ont raison, on peut en déduire, non que la
bonne interprétation du verset serait « récite au nom de ton Seigneur », mais que le
QS 45 421

travail de réinterprétation, plus ou moins libre, des versets coraniques (en relation
avec la « vie du Prophète), a commencé assez tôt dans le milieu des quṣṣās.
V. 2 : ʿalaq s’explique ici par des raisons de rime. Il faut probablement com-
prendre ṭīn.
Vv. 6, 15 et 19 : comment comprendre kallā ? Ce ne peut pas être une négation de
ce qui précède, et pas non plus de ce qui suit (et ce n’est pas non plus une réponse à
un propos que le texte ne mentionnerait pas). Faut-il y voir simplement, sur le
modèle des serments introductifs de certaines sourates, une sorte de « sonnette »
destinée à attirer l’attention ou rythmer le discours ? Ou comme une particule des-
tinée à assurer la transition entre deux idées antithétiques (« et certes…») ?

Hawting
Vv. 1– 8 seem a self-contained unit referring to mankind (al-insān) in general, while
vv. 9 – 19 hint at concern with immediate circumstances (alladhī yanhā ʿabdan idā
ṣallā, which reminds us of Q 72:19 lammā qāma ʿabdu llāhi yadʿūhu kādū yakūnūna
ʿalayhi libadan). It is easy to see why vv. 1– 5 could be identified as the first verses of
Q to be revealed, but equally they could be understood as an introductory formula
for the sūra alone – taking the place of the introductory oath in, e. g., Q 90. (The ref-
erence to the pen in v. 4 calls to mind Q 68: 1, where the pen is the subject of the
introductory oath.) Vv. 6 – 8 then warn against assumed self-sufficiency and remind
about the inevitability of death. In vv. 9 – 14 the thrice repeated a-raʾayta appears
ironic in view of the statement in v.14 that it is God who sees (yarā). Perhaps the pas-
sage reinforces the warning against relying on human self-sufficiency when only God
can really see and know. Vv. 15 – 18 emphasise the punishment awaiting this anony-
mous individual if he persists in preventing an ʿabd from praying, and v. 19 urges the
Qurʾānic messenger to ignore him and to prostrate in prayer. The root Q-R-B in the
concluding wa-qtarib may indicate sacrifice rather than proximity: cf. Q 108:2 (fa-
ṣalli…wa-nḥar).

Hilali
The first contact between Muḥammad and Gabriel is described in various narratives
in the Muslim sources and gives to this chapter of the Qurʾān a special status. Many
remarks could be made about the peculiarities of the passage and I would suggest
understanding v. 6 as the object of the injunction iqraʾ (read!). Like many other pas-
sages of the Qurʾān, the transition from a discourse to another is not announced and
vv. 6 – 19 could be read as the text Muḥammad was ordered to read. The Muslim ex-
egetical tradition already alludes to this hypothesis but mentions other Qurʾānic pas-
sages as object of reading. Phonetically and in terms of argumentation, the preposi-
tion kallā sets the tone in this passage and introduces the atmosphere of controversy
absent in the apparent meaning of the text but present in the narratives about the
experience of the first revelation (Muḥammad resisting the order to read). I suggest
QS 46 427

S’il y a une allusion à la nuit de Noël, dans la sourate 97, comme certains l’ont
pensé, ce n’est qu’indirectement, par la réutilisation d’un texte (Sg 18:14– 16) qui
signifie au sens littéral la Pâque juive, et seulement en un sens accommodateur la
nuit de Noël, et la relecture d’un autre texte (Testament de Juda) qui, lui, porte
directement sur le Messie, mais auquel le Coran se substitue.

Dye
Je résume Dye 2011.
Quel est l’antécédent de hu (v. 1) ? Y voir le Coran paraît anachronique. Que
signifie qadr/qadar dans fī laylati l-qadri (v. 3) ? Les autres occurrences coraniques de
la racine n’aident guère. L’explication traditionnelle (fête du Nouvel an, durant la-
quelle descendent sur terre les décrets pour l’année à venir) n’a aucun rapport avec
la descente du Coran et n’explique pas salām (« paix ») au v. 5 (terme souvent présent
dans le Coran, jamais en ce sens).
On doit partir du texte. Le champ sémantique évoque la nuit de la Nativité.
Luxenberg (2004a and b) a de bonnes intuitions, qu’il faut nuancer et approfondir.
V. 1 : « destin » et « naissance » peuvent être synonymes, la position des étoiles à
la naissance déterminant le destin du nouveau-né (Homélies Ps-Clémentines IV:12.3).
Le pronom pers. 3e pers. sg., sans antécédent, est souvent utilisé dans la littérature
syriaque pour désigner Jésus. Originellement, hu=Jésus, d’où « nous l’avons fait
descendre=naître », mais le texte a pu être réinterprété (hu=Coran), voire en partie
modifié, par une communauté de lecteurs postérieure (lors de la composition du
muṣḥaf, ou postérieurement, en lien avec Q 44:1– 6 – texte peut-être pas si proche).
Ne pas confondre le Sitz im Buch (dans le texte canonique ultérieur) et le Sitz im
Leben originel (d’une strate plus ancienne) de la sourate.
V. 3, šahr : pas « mois ». Rapprocher de syriaque šahrā, « veillée », « vigile » ;
arabe sahar, « veillée », à comprendre comme vigile (phénomène de Lehnbedeutung).
Éphrem : « Ne comptons pas notre vigile comme une vigile ordinaire. C’est une fête
dont le salaire dépasse cent pour un » (Hymnes sur la Nativité, XXI:2.1– 2).
V. 4 : texte obscur en l’état. Probable syriacisme (Q 17:89 ; 31:10) : tunazzilu… min
kulli ‘amr, « les anges font descendre toutes sortes de ‘amr ». Éphrem : « les anges et
les archanges, ce jour-là, sont descendus entonner sur terre un nouveau Gloria »
(Hymnes sur la Nativité, XXI:3.1– 2), cf. Luk 2:13 – 14. ‘Amr s’explique par des raisons
de rime ou comme corruption de z(a)mar (« chants ») (Hymnes sur la Nativité,
XXI:5.1– 2, 10.1).
Le Coran décrit la nuit d’al-qadr comme Éphrem celle de la Nativité : l’hymne
d’Éphrem apparaît comme la source du texte. Selon les traditions chrétiennes, la nuit
de Noël est caractérisée par la paix, la venue du Christ mettant fin aux pouvoirs des
mages et des démons (cf. l’opposition qadr/salām ; les traditions musulmanes
substitueront le Coran à Jésus).
QS 47 433

sourate (v. 5), contient d’ailleurs une image biblique : « Le chaume dévoré » (v. 5)
désigne, dans la Bible hébraïque, les hommes impies ou infidèles, dévorés par le feu
de la colère divine (e. g. Ex 15:7; Is 5:24).

Dye
Sur cette sourate, cf. De Prémare 1998 et 2000a.
L’hypothèse d’une référence à la supposée expédition d’Abraha contre La
Mecque me paraît absurde. On peut se demander pourquoi cette explication continue
à être avancée dans la littérature (censée être) scientifique, sans même qu’on pense à
la justifier.
On retrouve ici un topos omniprésent dans le Coran : la destruction d’un peuple
ou d’un groupe (ici, aṣḥāb al-fīl) par Allah, ou al-Rabb (ici, rabbuka).
V. 1 : a-lam tara kayfa faʿala rabbuka bi- : cf. Q 89:6. Q 105 est très similaire à
Q 89:6 – 14, et il est possible que la suite du texte manque. La formule ‘a-lam tara est
très présente dans le Coran.
De Prémare (2000a, corrigeant De Prémare 1998) a proposé de voir ici un mi-
drash coranique sur la légende des éléphants de Ptolémée, narrée notamment en 3
Macc 2– 6. L’hypothèse est très plausible, et rend bien compte de nombreux détails
de la sourate (même si le sous-texte peut être une version légèrement différente de
cette légende).
Cette légende se déroule lors du règne de Ptolémée IV Philopator (r. -246/-241).
Ptolémée persécute les Juifs d’Alexandrie et veut les obliger à sacrifier aux idoles.
Ceux qui refusent sont raflés et rassemblés sur l’hippodrome. Une rumeur hostile est
également lancée contre les Juifs pour faire douter de leur loyauté envers la dynastie
au pouvoir. 3 Macc 3 décrit ainsi la manière dont les Juifs sont pris au piège, et cela
pourrait être la ruse (kayd) dont parle le Coran. Les Juifs sont destinés à être piétinés
par les éléphants de Ptolémée, auxquels on a fait boire des parfums broyés avec du
vin pur (3 Macc 5:2). Mais grâce à la prière du prêtre Eléazar (3 Macc 6), deux anges
interviennent. Paniqués, les éléphants se retournent contre les soldats et les piéti-
nent.
V. 3 : ṭayran ʾabābīl : des oiseaux de proie (Gen 15:11), en troupeau (syriaque
ebbaltā, « troupeau de chameaux »). Cf. Muth 2007: 156. On peut traduire « une horde
d’oiseaux de proie ». Il pourrait s’agir de chérubins (kerûb) – non les angelots
joufflus des peintres de la Renaissance, mais des bêtes ailées, des créatures célestes
à l’aspect féroce.
V. 5 : le « chaume dévoré » est une métaphore biblique, indiquant le sort de ceux
qui ont encouru la colère de Dieu (Exod 15:7 ; Isa 5:24).

Grodzki
The short sūra 105 is often read in the Islamic tradition together with the following
short sūra 106 as one syntactical narrative unit (although with the disjunctive basma-
QS 48 439

sourate 105, al-Fīl, manifestant ainsi l’entière unité des deux sourates. C’est ainsi que
traduit M.A.S. Abdel Haleem (2005) : “[He did this] to make the Qurayš feel secure,
secure in their winter and summer journeys.”
Comprises comme une unité, les deux sourates ont pour thématique la protec-
tion que le « Seigneur » assure à l’égard des Mecquois, en écartant d’eux la
« crainte » (Q 106, 4b) des dangers extérieurs, symbolisée par l’attaque des Gens de
l’Éléphant, et en garantissant de ce fait la sécurité des caravanes et donc la nour-
riture et la tranquillité des Qurayš. En réponse à cette double protection, ceux-ci sont
invités à adorer « le Seigneur (Rabb) de ce Sanctuaire ». Ce Seigneur est qualifié de
« ton Seigneur » (Q 105:1), car il est celui dont le Prophète a fait personnellement
l’expérience. C’est Lui que le Prophète appelle à adorer dans la Kaʿba, au lieu des
idoles qui s’y trouvaient. Car lui seul est la source de tous les bienfaits dont jouissent
les Mecquois.
Il semble bien que ces deux sourates témoignent de l’éveil d’une nouvelle
conscience religieuse, chez Muḥammad. Antérieurement ou concomitamment à la
révélation eschatologique (Q 81), c’est un Dieu bienveillant, Maître de l’Histoire, qui
s’est révélé à lui.

Dye
Certaines traditions ne séparent pas les sourates 105 et 106, faisant donc de la
présente sourate la suite de la sourate 105. Le fait que les sourates 105 et 106
diffèrent fondamentalement par le rythme, la rime et le contenu conduit à rejeter
cette hypothèse. Ajoutons qu’Ibn al-Nadīm parle dans son Fihrist d’un codex de
Ubayy, où les deux sourates sont indépendantes, la sourate al-Ṭīn suivant la sourate
al-Fīl. Les deux sourates se suivent, et sont donc séparées, dans le codex attribué à
Ibn Mas’ūd.
Ce texte, très allusif, a donné naissance à d’innombrables traditions sur le
commerce mecquois. Sur ce sujet, cf. Crone 1987: 203 – 226.
La sourate contient trois hapax : ʾīlāf (« entente »), qurayš, rabb hāḏā l-bayt (et
non rabbuka, comme dans la sourate précédente), « le seigneur de ce temple, de
cette maison ». Comme le note De Prémare 1998: 263, cette dernière expression est
typique des inscriptions préislamiques que l’on peut trouver à Petra, Hegra, et plus
généralement dans le nord de l’Arabie. En général, il est implicitement question dans
ces inscriptions de Ḏū l-Šarā (Dusarès), dieu auquel est voué un culte dans un
sanctuaire (al-bayt). Une divinité féminine (al-ʿUzza ou Manāt) lui est souvent as-
sociée. Dans le cadre de cette sourate, rabb hāḏā l-bayt pourrait-il toujours être Ḏū l-
Šarā, ou (moins plausiblement) Hubal ? En tout cas, le caractère extrêmement ar-
chaïque de cette sourate (il n’est pas impossible que le début manque), ainsi que son
style, me font penser que l’on pourrait bien avoir affaire ici, tout simplement, à un
texte préislamique. La question que l’on a alors envie de poser est : pour quelle(s)
raison(s) ce texte a-t-il été intégré dans le Coran ?
444 QS 49

La sourate exprime donc simplement le réconfort de Dieu à l’égard de son


Prophète, traité d’égaré ou de paria par ses concitoyens.

Dye
Une crux interpretum des études coraniques – et un bon moyen de tester nos prin-
cipes méthodologiques. Cette sourate, la plus brève du Coran, reste en effet très
obscure. De nombreux termes sont ambigus, et le sens que l’on donnera à l’un
influera sur celui que l’on donnera à l’autre (notamment avec le couple kawṯar/
abtar).
La tradition musulmane relie cette sourate à un épisode supposé de la vie du
Prophète. Rien n’oblige à la suivre ici. Kropp propose d’y voir une prière apo-
tropaïque, sans doute retravaillée lors de l’édition/composition du Coran. Cela me
semble plus fructueux.
Il est en effet naturel de lire, derrière kawṯar, le syriaque kūṯrā, « constance,
persévérance ». La sémantique de la racine K-T-R est, dans le Coran, influencée par
son équivalent syriaque. Cf. Q 20:33 – 34 : kay nusabbiḥaka kaṯīran/wa-naḏkuraka
kaṯīran, qui signifie « afin que nous Te glorifiions avec constance, et T’invoquions
avec constance », et non « beaucoup », qui n’a guère de sens.
Lire ngar et non nḥar, en comprenant ngar, non pas selon le sens de la racine
attesté en arabe (« raboter »), mais selon le sens le plus usité en syriaque (« persister,
persévérer »), est également défendable : on peut penser à une forme de calque, ou à
une technique de traduction dans laquelle on attribue au terme arabe toutes les
variétés sémantiques du terme syriaque qu’il traduit (ce qui explique assez bien
pourquoi le terme aurait été mal lu par la suite). Ngar et kawṯar étant presque
synonymes, on a un beau parallélisme, ce qui rend la rhétorique de la sourate plus
convaincante ; par ailleurs, on rend mieux compte du sens de šāniʾa-ka.
Il faut insister sur deux points : d’une part, il n’y a aucune raison de penser que
l’environnement dans lequel naît le Coran n’était pas, d’une façon ou d’une autre,
multilingue (l’ensemble du Proche-Orient l’était) – autrement dit, il convient de
reconnaître la présence de nombreuses traces de bilinguisme/multilinguisme dans la
langue même du Coran (il faut bien sûr sortir du dogme théologique de « l’arabe
pur », qui n’a aucun sens linguistiquement et historiquement) ; d’autre part, un tel
système de calque est un phénomène bien connu par ailleurs. Un bel exemple :
syriaque šubḥā (« gloire », cf. arabe subḥān) pour traduire grec doxa, lorsque doxa
signifie « gloire », mais aussi lorsque doxa signifie « opinion ».

Hawting
In v. 2 the explicit conjunction of prayer and (animal) sacrifice (without reference to a
locality) – ṣalāt wa-naḥr – as a means of thanking God is notable. Al-abtar is a hapax
legomenon, and although apparently a normal Arabic word, its sense is questionable
QS 50 Q 112
. Say: “He is God, Unique, . Dis: «Il est Allah, Unique.
. God, Everlasting! . Allah, Le Seul à être imploré pour ce que
. Neither begetting nor begotten, nous désirons.
. And none can be His peer.” . Il n’a jamais engendré, n’a pas été engen-
dré non plus.
. Et nul n’est égal à Lui».

‫ﺳﻮﺭﺓ ﺍﻹﺧﻼﺹ‬
َّ ‫( ﺍﻟﻠَّ ُﻪ ﺍﻟ‬1) ‫ُﻗ ْﻞ ُﻫ َﻮ ﺍﻟﻠَّ ُﻪ ﺃَ َﺣ ٌﺪ‬
(4) ‫( َﻭﻟَ ْﻢ َﻳ ُﻜ ْﻦ ﻟَ ُﻪ ُﻛ ُﻔ ًﻮﺍ ﺃَ َﺣ ٌﺪ‬3) ‫( ﻟَ ْﻢ َﻳﻠِ ْﺪ َﻭﻟَ ْﻢ ُﻳﻮﻟَ ْﺪ‬2) ‫ﺼ َﻤ ُﺪ‬

Dye
Profession de foi, centrée sur le thème de l’unicité de Dieu (la rime en –ad, dans le
Coran, est généralement réservée à ce thème). Elle est fort présente dans les « graf-
fitis coraniques », et dans les inscriptions (comme celle du Dôme du rocher), même si
c’est parfois sous une forme un peu différente. Kropp (2011) a raison de la rapprocher
des talbiya-s préislamiques, souvent tripartites. La présente sourate est donc une
talbiya quadripartite (et originellement tripartite si on considère le v. 2 comme une
insertion ultérieure : l’idée peut se défendre, mais elle reste hypothétique).
V. 1 : le qul est vraisemblablement une addition des éditeurs, dont le rôle est de
mettre dans la bouche de Dieu un texte qui est une prière – autrement dit, un texte
qui s’adresse à Dieu. La syntaxe du verset pose problème. Si on supprime huwa
(comme dans certaines traditions), alors on a une phrase nominale ; si on conserve
huwa, qui fait donc référence à l’objet de cette sourate – Dieu –, on a un problème de
congruence entre allāhu (défini) et aḥad (indéfini). Comparer de ce point de vue v. 2,
allāhu ṣ-ṣamad. Certaines traditions lisent donc al-aḥad ou al-wāḥid. Je ne vois pas
de raison de les suivre. Il faut donc soit comprendre huwa llāhu huwa aḥad, soit faire
de aḥad un nom propre, autrement dit un calque de l’hébreu e(ḥ)ḥād (cf. Deut 6:4)
ou de son équivalent araméen (ḥād). Le fait que aḥad n’ait pas, en principe, le sens
de « un, unique » va dans le sens de cette dernière solution.
V. 2 : apposition, et glose, du v. 1. Sur le sens de ṣamad, nul besoin d’aller
chercher des solutions exotiques. Comprendre allāhu ṣ-ṣamad « Allah, le Seigneur »,
sous-entendu, celui que l’on doit adorer (cf. al-mạsmūd, de même racine). Cette
interprétation s’accorde parfaitement au contexte.
V. 4 : plusieurs variantes de lecture sont attestées, et le rasm est ambigu (il
faudrait d’ailleurs aborder les questions relatives à hamza, et à la nature même de
l’arabe du Coran – très certainement un arabe parlé, sans iʿrāb, comme le remarque
Kropp dans son commentaire).

Vous aimerez peut-être aussi