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ÉQUIPES EN PRÉSENTIEL
VS ÉQUIPES EN LIGNE :
EXPLORATION DU LIEN ENTRE
ÉMOTIONS, CONFLITS ET
PERFORMANCE
Franck BRULHART
Aix Marseille Univ, CNRS, LEST, Aix-en-Provence, France
Christophe FAVOREU
TBS Business School, Toulouse, France
Marion VIEU
Aix Marseille Univ, CNRS, LEST, Aix-en-Provence, France
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de productivité, de flexibilité et de baisse des la performance d’équipe (Yang et Hung, 2014 ;
coûts, la montée en puissance de la digitalisation Stephens et Carmeli, 2016). Ces questions inter-
et des technologies de l’information sont autant pellent d’autant plus que l’on se situe dans le
de facteurs qui, combinés, expliquent le recours cadre d’équipes en ligne, dont les caractéristiques
croissant des organisations aux équipes en ligne. - dispersion géographique de leurs membres et
La crise de la COVID-19 et le recours au tra- recours à des modes de communication à domi-
vail en distanciel ont récemment très fortement nante digitale - supposent des dynamiques et
amplifié ce phénomène et les anticipations de des modes de fonctionnement spécifiques. Or
crises futures ne peuvent que l’accélérer. Bien la recherche sur les déterminants de la perfor-
que suscitant un nombre croissant de recherches mance et de l’efficacité des équipes en ligne
académiques, beaucoup de questions portant sur reste encore limitée, produisant des résultats
la dynamique et le mode de fonctionnement de non conclusifs ou contradictoires (Mysirlaki et
ce type d’équipe restent en suspens, notamment Paraskeva, 2019). En outre, les études empiriques
au regard des équipes en ligne (Ford et al., 2017). quantitatives sur cette thématique restent parti-
Les conflits, tout comme les émotions, appa- culièrement rares (Mysirlaki et Paraskeva, 2019).
raissent comme des éléments inhérents au travail Dans ce contexte, notre recherche vise à explorer
en équipe qui impactent leur dynamique et leur les liens entre conflits, émotions et performance
performance. Cependant, bien que suscitant un des équipes dans le cas des équipes en présen-
intérêt académique croissant, leur rôle demeure tiel et des équipes en ligne. Plus spécifiquement,
ambivalent. Ainsi, Chédotel et al. (2015) sou- nous testons une série d’hypothèses portant d’une
lignent l’opposition très nette entre les travaux part sur l’influence des conflits, des émotions et
affirmant d’un côté l’impact négatif des conflits du caractère virtuel des équipes sur leur perfor-
et de l’autre ceux insistant sur leur rôle moteur mance et, d’autre part, sur le rôle modérateur du
dans les projets ainsi que sur leur capacité à favo- caractère virtuel (vs. en présentiel) des équipes
riser l’exploration de solutions novatrices. Ces sur ces mêmes relations. Notre étude s’inscrit
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REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES
ainsi dans la lignée des travaux visant à mieux manière dont les individus considèrent une situa-
comprendre le rôle du contexte dans les relations tion (Frijda et Mesquita, 1994). Selon Ayoko
entre émotions-performance et conflits-perfor- et al. (2012), ces états émotionnels subjectifs
mance (Chédotel et al., 2015) en considérant le regroupent notamment des émotions de base
rôle modérateur du caractère virtuel des équipes. telles que la joie, la colère, l’anxiété, la honte et
Dans une première partie, nous présentons sont généralement catégorisés selon leur nature
l’analyse de la littérature, laquelle nous per- positive ou négative (Qiu et Scherwin, 2014).
met de revenir sur les concepts d’émotions, de Un certain nombre de bénéfices, à la fois indi-
conflits, d’équipe en ligne en lien avec la per- viduels et collectifs, sont généralement associés
formance d’équipe et d’exposer les hypothèses aux émotions (Stephens et Carmeli, 2016). Elles
de la recherche. Dans une deuxième partie, influenceraient notamment des processus clés
nous détaillons la méthodologie mobilisée pour tels que la coordination, la gestion des contri-
la construction et la validation des mesures des butions, le soutien et l’implication mutuels ainsi
variables ainsi que pour le test des hypothèses que la cohésion ; processus qui impactent direc-
par le biais d’un modèle de régression. Dans une tement la performance d’équipe (Stephens et
troisième partie, nous exposons les résultats de Carmeli, 2016). Plus précisément, les émotions
notre étude qui s’appuient sur une base de don- positives faciliteraient les communications et les
nées originale constituée de 139 équipes de cinq relations interpersonnelles entre les membres de
étudiants (de niveau Master), engagés dans une l’équipe (Stephens et Carmeli, 2016 ; Waugh et
simulation de gestion. Enfin, dans une dernière Fredrickson, 2006). Elles favoriseraient aussi
partie, nous discutons des principaux apports de l’engagement mutuel et la participation au sein
notre recherche, avant de conclure sur ses contri- du groupe, constituant ainsi un déterminant clé
butions ainsi que sur ses limites et prolongements de la cohésion de groupe (Sundararajan et al.,
futurs. 2016 ; Yang et Hung, 2014). Les émotions posi-
tives auraient également un impact plus indivi-
duel en permettant aux membres du groupe de
1. ANALYSE DE LA LITTÉRATURE ET maintenir un état d’esprit flexible et ouvert à la
MODÈLE CONCEPTUEL DE RECHERCHE prise en compte d’informations incomplètes,
confuses et contradictoires (Kaplan et al., 2013 ;
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L’analyse de la littérature est construite en Peslak, 2005). Par conséquent, les émotions posi-
deux temps : une première partie constituée tives faciliteraient la gestion de l’ambiguïté, de
de trois sous-sections, chacune croisant un des l’incertitude et, plus généralement, l’adaptation à
concepts centraux de l’étude (émotions, conflits, des situations complexes.
équipe en ligne) avec celui de la performance À l’inverse, des émotions telles que l’anxiété,
d’équipe ; une seconde partie qui intègre l’effet la peur ou la détresse détourneraient l’atten-
modérateur du caractère virtuel de l’équipe sur tion des membres des problèmes clés, rédui-
ces précédentes relations. Une synthèse de la lit- raient leur capacité à réfléchir, à travailler en
térature est proposée en annexe, sous la forme équipe et à adopter une perspective de groupe
d’un tableau (cf. Annexe 1). (Jordan et al., 2006 ; Lin et al., 2017). À ceci
s’ajoutent d’autres effets négatifs potentiels tels
que la baisse de l’enthousiasme et de la créati-
1.1. Émotions et performance d’équipe vité (Peslak, 2005 ; Glinow et al., 2004) ainsi
que la peur de s’exprimer et de parler en public
Selon Stephens et Carmeli (2016), les émo- (Troth et al., 2012). Selon Molders et al. (2019),
tions se définissent comme des formes d’expé- les émotions négatives et le manque de confiance
riences affectives et s’assimilent à des sentiments sont des phénomènes interdépendants qui se
intenses et brefs associés à des événements spé- renforcent mutuellement. En effet, les émotions
cifiques ; ils sont le résultat de l’évaluation par négatives nuisent à la cohésion sociale (Yang
un individu d’un événement en rapport avec et Hung, 2014) en dégradant les relations de
une préoccupation, un intérêt et/ou un objec- confiance entre les membres de l’équipe et en
tif particulier (Frijda, 1986 ; Lazarus, 1991). réduisant leur identification au collectif (Lin
Selon cette approche fonctionnelle et relation- et al., 2017). Pour autant, la recherche dans ce
nelle (Tcherkassof et Frijda, 2014), les émotions domaine s’avère encore limitée et conduit à des
fourniraient une information sociale clé sur la résultats contrastés (Yang et Hung, 2014) ou non
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NUMÉRO 125 - JUILLET – AOÛT – SEPTEMBRE 2022
conclusifs (Stephens et Carmeli, 2016). Ainsi, points de vue en matière d’organisation du travail
les émotions négatives apparaissent comme des et de responsabilités qui peuvent mener à une
déterminants de la créativité organisationnelle contre-performance de l’équipe (Chédotel et al.,
ou, à l’inverse, comme des facteurs la bloquant 2015). Enfin, les conflits relationnels semblent
(Yang et Hung, 2014). Qiu et Scherwin (2014) eux aussi négativement corrélés à la performance
soulignent quant à eux le faible nombre d’études d’équipe (De Dreu et Weingart, 2003 ; De Wit
empiriques portant sur la relation entre les émo- et al., 2012) car les membres de l’équipe se
tions et la performance d’équipe. détournent là aussi du fond et passent un temps
H1a : Les émotions positives ont une influence précieux à résoudre ces problèmes (Pelled, 1996).
positive sur la performance d’équipe. Les réactions négatives générées dans un conflit
affectif diminuent la volonté des membres de
H1b : Les émotions négatives ont une l’équipe de s’engager dans des conflits cognitifs
influence négative sur la performance d’équipe. productifs (conflits d’idées) au sein du groupe
(Jehn et Chatman, 2000).
Au-delà de cet apparent consensus, certaines
1.2. Conflits et performance d’équipe recherches empiriques nuancent ces affirmations
théoriques (Jehn, 1995) et mettent en évidence
Un conflit au sein d’une équipe se définit la nécessité de continuer à tester l’impact des
comme une tension entre les membres émanant différents types de conflits (Jehn et al., 2008 ;
de différences réelles ou perçues (De Dreu et Chédotel et al., 2015). Certaines considèrent par
Weingart, 2003 ; Jehn, 1997). Sur la base de exemple que les conflits d’idées sont, eux aussi,
cette définition, la littérature identifie différentes contre-performants (De Dreu et Weingart, 2003 ;
dimensions constitutives du concept (voir les tra- O’Neill et al., 2013), quand d’autres invitent à
vaux de Jehn et Mannix, 2001 ; Jehn et al., 2008 raisonner plus systématiquement en intégrant les
ou De Dreu et Weingart, 2003). Nous retenons trois types de conflits (Mannix 2003 ; Medina et
pour ce travail les trois dimensions - conflits al., 2005) pour faire avancer la recherche dans
d’idées, conflits liés au process et conflits rela- le domaine.
tionnels, proposées par Jehn et Mannix (2001) et
Jehn et al. (2008). Les conflits d’idées renvoient H2a : Les conflits d’idées ont une influence
à des désaccords en matière de contenu, par positive sur la performance d’équipe.
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exemple des désaccords relatifs à la nature des H2b/c : Les conflits relationnels/liés au pro-
tâches ou des missions à réaliser (Jehn, 1997). cess ont une influence négative sur la perfor-
Les conflits liés au process font quant à eux mance d’équipe.
écho à des désaccords en matière de répartition
des tâches et d’organisation du travail (Jehn et
Mannix, 2001). Enfin, les conflits relationnels 1.3. Équipe en ligne et performance d’équipe
sont des désaccords liés à des questions person-
nelles et sociales telles que l’aversion ou une Les équipes en ligne se définissent comme
mauvaise relation (Jehn, 1997). des groupes d’individus dispersés géographique-
Chaque type de conflits impacte différem- ment et/ou organisationnellement qui, dans la
ment la performance des équipes. Les conflits réalisation de tâches et d’objectifs communs, se
d’idées semblent positivement corrélés à la per- coordonnent et collaborent via une combinaison
formance des équipes (Ayoko et al., 2012 ; Wu de technologies de l’information et de la commu-
et al., 2017) car les membres engagés dans ce nication (Ford et al., 2017 ; Kratzer et al., 2006).
type de conflits s’intéressent au fond du pro- Si les équipes en ligne, du fait de leurs caracté-
blème. En confrontant leurs idées, ils parviennent ristiques et de leur capacité à combiner virtuel-
à mieux comprendre les enjeux incombant à lement des compétences dispersées, cumulent de
l’équipe et envisagent ainsi un ensemble de nombreux avantages, notamment d’un point de
solutions plus large pour atteindre leur objectif vue logistique et financier (Lin et al., 2008), ces
(Van Knippenberg et al., 2004). En revanche, les mêmes caractéristiques peuvent réduire et com-
conflits liés au process semblent négativement plexifier leur efficacité de fonctionnement. Le
liés à la performance d’équipe. Les échanges caractère virtuel affecterait notamment le par-
sont focalisés sur la forme, sur la façon dont tage d’information, dégradant ainsi fortement
les tâches doivent être réalisées et par qui. Ces la performance d’équipe (Connelly et Turel,
conflits mettent en évidence des divergences de 2016 ; Mesmer-Magnus et al., 2011 ; Castellano
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REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES
et al., 2021). L’absence d’interaction en face à réduit fortement la capacité des membres d’une
face engendrerait des problèmes de coordina- équipe à communiquer leurs émotions sans dis-
tion et d’ajustements mutuels (Magnusson et torsion. Ces filtres technologiques rendent com-
al., 2014 ; Orhan, 2014) et affecterait négative- plexes la détection, la perception, la diffusion et
ment certains processus clés d’équipe tels que la l’évaluation des émotions au sein des équipes
confiance, l’implication et la cohésion de groupe (Connelly et Turel, 2016 ; Cheshin et al., 2011).
(Zhu et Lee, 2017). Ainsi, face aux enjeux de la Ainsi, la communication dégradée et asynchrone,
confiance, de la création d’un esprit d’équipe et résultant des médias électroniques et de l’éloigne-
du partage de connaissances (Castellano et al., ment géographique, viendrait interférer et réduire
2021), les équipes virtuelles s’avèreraient plus l’influence des émotions sur la performance des
complexes à gérer (Ford et al., 2017), en géné- équipes.
rant des coûts et des temps de coordination plus H4a/b : Le caractère virtuel de l’équipe
élevés et, in fine, des niveaux de performance constitue un mécanisme modérateur négatif de
plus faibles. la relation entre les émotions positives/négatives
H3 : Le caractère virtuel de l’équipe a une et la performance d’équipe.
influence négative sur la performance d’équipe.
1.4.2. Conflits-performance et caractère
virtuel de l’équipe
1.4. L’effet modérateur du caractère virtuel La littérature actuelle consacrée aux conflits
de l’équipe soulève clairement la question du contexte et de
son impact (amélioration ou détérioration) sur
Au-delà des précédentes influences directes, le lien entre conflits et performance (Chédotel
nous explorons le rôle modérateur du caractère et al., 2015 ; Jiang et al., 2013 ; O’Neill et al.,
virtuel de l’équipe. Ce positionnement nous ins- 2013 ; Weingart et Jehn, 2010). De précédentes
crit dans la lignée des travaux qui tentent de recherches relatives au travail à distance tendent
mieux comprendre le rôle du contexte (cf. Jiang à montrer que cet environnement de travail per-
et al., 2013 ; O’Neill et al., 2013 ; Todorova et turbe la gestion des conflits entre les membres
al., 2014) en introduisant le caractère virtuel de de l’équipe (Axtell et al., 2004 ; Wegge et al.,
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l’équipe, qui pourrait influencer les relations 2006 ; Ayoko et al., 2012), la technologie néces-
émotions-performance et conflits-performance. saire au travail à distance étant à l’origine de la
(Chédotel et al., 2015). perturbation (Martinez-Moreno et al., 2009). Les
médias pauvres, prédominants dans les équipes
1.4.1. Émotions-performance et caractère en ligne, auraient ainsi un impact sur la relation
virtuel de l’équipe entre conflits et performance car ils généreraient
davantage d’incertitude, une carence en commu-
Un c e r t a i n nomb r e d e r e ch e r ch e s nication (Mannix et al., 2002 ; Liu et al., 2011)
(Gauducheau, 2008 ; Cheshin et al., 2011), ainsi qu’une connaissance instable. Ils auraient
qui s’inspirent de la théorie de la richesse des donc tendance, en générant un environnement
médias de Daft et Lengel (1986), suggèrent que plus complexe, à amplifier l’impact négatif des
les échanges médiatisés par des technologies de conflits (Chédotel et al., 2015) et à, de fait, dimi-
l’information et des médias électroniques modi- nuer l’impact positif des conflits. Les membres
fient et perturbent la diffusion des émotions et d’équipes en ligne auraient plus de difficultés à
l’information qu’elles véhiculent. En effet, les s’engager dans des interactions collaboratives, à
interactions en ligne opèrent selon des rythmes être efficace dans la répartition des responsabi-
plus rapides et des durées plus courtes que les lités et prendraient plus de temps pour résoudre
interactions en face à face (Huang et al., 2008). les conflits que les membres d’équipes en présen-
En outre, le caractère asynchrone des échanges, tiel (Martinez-Moreno et al., 2009). Les consé-
et leur nature à dominante textuelle, limitent la quences suggérées par la littérature concernent
communication non verbale basée sur la ges- donc les trois dimensions des conflits : les
tuelle, les attitudes et les expressions. Or ces conflits d’idées, a priori positifs, seraient moins
signaux visuels et auditifs remplissent à la fois nombreux (cf. la difficulté à s’engager dans des
des fonctions de diffusion des émotions et d’in- interactions collaboratives), les conflits liés au
dicateurs de leur nature. Ainsi, selon Connelly et process, a priori négatifs, seraient amplifiés
Turel (2016), la dimension virtuelle des équipes (cf. la tendance à une mauvaise répartition des
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NUMÉRO 125 - JUILLET – AOÛT – SEPTEMBRE 2022
responsabilités) tout comme les conflits relation- et al., 2015), des émotions (Black et al., 2019 ;
nels (cf. la carence en communication). Ainsi le Macht et al., 2019), de la performance des
caractère virtuel de l’équipe semble impacter équipes (Boone et Van Witteloostuijn, 2005 ;
négativement la relation entre conflits et perfor- Mathieu et Schulze, 2006 ; Brulhart et al.,
mance d’équipe (Hinds et Bailey, 2003). 2019), en ayant recours à des populations d’étu-
H5a : Le caractère virtuel de l’équipe consti- diants. Notre étude ne prétend pas à généraliser
tue un mécanisme modérateur négatif de la ses résultats à toutes les situations de travail
relation entre conflits d’idées et performance en équipe. Cependant, nos résultats visent à
d’équipe. apporter un éclairage sur le fonctionnement et
la dynamique des équipes de travail en général.
H5b/c : Le caractère virtuel de l’équipe Pour cela, nous faisons le choix d’observer le
constitue un mécanisme modérateur positif de la cas spécifique d’équipes composées d’étudiants,
relation entre conflits relationnels/ liés au process confrontés à une obligation de résultat sur une
et performance d’équipe. mission de nature professionnelle. Les études
expérimentales auprès d’étudiants dans un envi-
ronnement contrôlé sont appropriées lorsque
2. MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE l’objectif est de limiter les facteurs de confu-
EMPIRIQUE sion et de mettre l’accent sur la validité interne
de la recherche (Kruglanski, 1975 ; Guthrie et
Cette partie revient successivement sur Hollensbe, 2004), pour établir, à un niveau fon-
l’échantillon retenu, la mesure des variables de damental, la relation entre émotions, conflits et
l’étude et sur les méthodes d’analyse et de traite- performance dans les deux contextes différents
ment des données recueillies. d’équipes en ligne et en présentiel.
Les données nécessaires à la recherche ont
été collectées de plusieurs manières. Avant que
2.1. Échantillon et collecte de données la simulation ne débute, les informations rela-
tives aux membres des équipes (âge, spécialisa-
Pour mener à bien ce travail, nous avons eu tion académique, sexe, notes de tronc commun
recours à une base de données originale consti- des étudiants) ont été obtenues via les services
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tuée de 139 équipes, 81 en ligne et 58 en pré- pédagogiques de l’école. Les données relatives
sentiel, de cinq étudiants de niveau Master (soit aux variables d’émotions et de conflits ont été
695 individus), engagées dans une simulation collectées par questionnaires électroniques
de gestion multi-périodes (cf. Annexe 2). Les auto administrés entre le trimestre simulé 7
équipes sont formées par la scolarité dans le but et le trimestre simulé 8. Il a été demandé aux
d’assurer une répartition identique des groupes en membres des équipes de renseigner les ques-
matière de « spécialités académiques » des étu- tionnaires individuellement. 695 questionnaires
diants (finance, contrôle de gestion, marketing, ont été collectés sur un total de 706 étudiants,
ressources humaines, stratégie). Ainsi, la scola- soit un taux de retour de 98,4 %. Enfin, les
rité affecte dans chaque groupe de cinq étudiants données relatives à la performance des équipes
un étudiant issu de chaque grande catégorie de ont été collectées à partir du logiciel de simu-
spécialité ; les équipes sont donc « imposées » lation à l’issue du trimestre simulé 8, à la fin
aux étudiants qui ne choisissent pas leurs parte- de l’exercice.
naires de travail.
Si cette population induit un certain nombre
de limites, notamment de généralisation des 2.2. Mesure des variables
résultats, elle offre un terrain « d’expérimenta-
tion » pertinent. La littérature en management Mesurer la performance nécessite toujours
mobilise fréquemment, et depuis longtemps, de faire un choix (Brulhart, 2002 ; Brulhart et
des populations d’études composées d’étudiants Montcef, 2010). Pour rendre compte de la per-
afin d’explorer des situations qui existent dans formance d’équipe, nous retenons la concep-
des populations de salariés, de dirigeants ou de tion de Hackman (1990) fondée sur la capacité
créateurs d’entreprises (Guthrie et Hollensbe, de l’équipe à atteindre ses objectifs. Dans le
2004). Certains articles ont d’ailleurs exploré contexte de la simulation, l’équipe se voit fixer
spécifiquement le rôle des conflits (Chédotel un objectif de maximisation de la rentabilité
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torielle nous a également conduits à écarter
ligne et 0 pour les équipes en présentiel. quatre items des neuf initialement prévus pour
Plusieurs variables, classiquement considé- mesurer les trois dimensions du conflit iden-
rées dans ce type de recherche (Certo et al., tifiées dans la littérature. Pour des raisons de
2006), sont contrôlées par le choix de notre popu- validité, nous avons été contraints d’écarter tous
lation d’étude. Dans notre cas, les variables de les items relatifs aux conflits d’idées ainsi qu’un
taille des équipes, de cursus académique et d’âge item relatif au conflit de process. Le construit
(Kor, 2003 ; Boone et Van Witteloostuijn, 2005 ; de conflit finalement obtenu regroupe ainsi trois
Carson et al., 2007) sont neutralisées et n’ont items relatifs aux conflits relationnels5 et deux
1. Chaque équipe est composée de cinq membres, présentant le même profil d’étude et le même âge. On y trouve la
même proportion d’étudiants issus des diverses spécialisations proposées au sein de l’école ; le degré d’hétérogénéité
fonctionnel est ainsi identique sur l’ensemble des équipes.
2. L’existence de liens antérieurs a été mesurée en utilisant une mesure mono item mobilisant une échelle bornée en 7
points (« pas du tout d’accord » / « tout à fait d’accord ») : « J’ai eu l’occasion de travailler à plusieurs reprises au cours
des dernières années avec au moins deux des membres de mon équipe » (Kor, 2003). L’existence de liens antérieurs
est définie comme un construit additif. De ce fait, l’agrégation des données au niveau de l’équipe ne nécessitait pas de
test de cohérence intra groupe (Chan, 1998 ; Collins et al., 2016).
3. Cette variable est définie comme une variable composite additive, c’est-à-dire une ressource globale disponible pour les
membres de l’équipe mais qui ne préjuge pas de la distribution ou du caractère homogène des compétences au sein de
l’équipe (Eddy et al., 2013). Pour opérationnaliser la variable de moyenne de compétences académiques individuelles,
nous nous appuyons, pour chaque équipe, sur la moyenne des notes de tronc commun (composé des notes relatives
aux cours fondamentaux liés à la simulation de gestion : stratégie, finance, ressources humaines, contrôle de gestion,
marketing) obtenues par les étudiants de chaque équipe au cours de l’année précédant la participation à la simulation.
4. Ce dernier adjectif présente un loading négatif au construit et pourrait être interprété comme une émotion de type
« passionné ».
5. « Il y a beaucoup de conflits émotionnels au sein de notre groupe de travail » ; « Des membres de notre groupe de travail
se mettent souvent en colère » ; « Il y a beaucoup de tensions relationnelles au sein de notre groupe de travail ».
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items relatifs aux conflits de process6. Ce résul- d’émotions négatives et de conflits organisation-
tat nous empêche donc de tester la déclinaison nels sont respectivement de 0,27, 0,34 et 0,17 ce
de nos hypothèses H2 et H5 relatives aux trois qui est satisfaisant. L’indicateur d’ICC (2) éva-
catégories de conflit. En revanche, il permet lue la fiabilité du score moyen du groupe (Chen
de faire émerger un construit qui rend compte et al., 2004 ; Collins et al., 2016). Les valeurs
d’une variable de conflit composite que nous d’ICC (2) pour les variables d’émotions positives,
nommons « conflit organisationnel ». Ce résul- d’émotions négatives et de conflits organisation-
tat semble confirmer la proposition de raisonner nels sont respectivement de 0,64, 0,52 et 0,78, ce
plus systématiquement en intégrant les différents qui est dans la norme d’acceptabilité.
types de conflits (Mannix 2003 ; Medina et al.,
Ces résultats confirment que la fiabilité et
2005) et non de distinguer les trois catégories.
le degré d’accord inter-membres sont suffisants
En revanche, il permet seulement de tester l’in-
fluence des conflits organisationnels sur la per- pour garantir l’agrégation des scores des membres
formance d’équipe. Ce résultat étant relatif aux au niveau de l’équipe. Les variables d’émotions
conflits relationnels et aux conflits de process, positives, négatives et de conflits organisationnels
nous conservons l’hypothèse d’une influence sont alors construites en calculant la moyenne des
négative du conflit organisationnel sur la per- réponses des membres de l’équipe.
formance d’équipe (H2) et d’un effet modérateur Du fait de la collecte de données en deux
positif du caractère virtuel sur la relation entre séquences, à un an d’intervalle, la première relative
conflit organisationnel et performance (H5). aux équipes en présentiel et la seconde relative aux
Les scores d’émotions positives, négatives équipes en ligne, il est nécessaire de s’assurer que
et de conflits organisationnels sont composés les différences éventuelles attribuées au caractère
des réponses des membres de chaque équipe et virtuel vs. en présentiel des équipes n’est pas lié à un
doivent être agrégés au niveau de l’équipe car autre phénomène (risque d’endogénéité). Pour cela
ce sont des construits de « consensus direct » nous avons testé les différences de moyennes sur
(Chan, 1998). Agréger des perceptions indivi- les variables de l’étude pour les deux séquences de
duelles est justifié lorsque les items du question- collecte de données. Nos résultats montrent que les
naire sont écrits de manière à présenter l’équipe différences de moyenne entre les deux échantillons
comme un ensemble (Chan, 1998). Cependant, fusionnés ne sont pas statistiquement significatives
pour l’ensemble de ces variables.
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avant de pouvoir réaliser cette agrégation, un
certain nombre de tests doivent être réalisés
(Collins et al., 2016). Dans ce cadre, nous cal-
culons les valeurs des corrélations intra-classe 3. RÉSULTATS
(ICC (1) et ICC (2)) ainsi que l’indicateur de fia-
bilité inter-évaluateurs (James et al., 1984) ou L’annexe 4 présente, pour chaque variable
rwg (Bliese, 2000), pour les items concernés. (calculée à l’échelle de l’équipe), la moyenne,
La valeur de rwg est une mesure d’accord intra- l’écart type ainsi que les corrélations entre les
groupe. Une valeur médiane supérieure à 0,70 est variables.
généralement considérée comme suffisante pour
justifier l’agrégation au niveau du groupe (Chen Pour tester les hypothèses de recherche,
et al., 2004). Les valeurs moyennes de rwg pour nous avons eu recours à une analyse de régres-
les variables d’émotions positives, d’émotions sion hiérarchique menée en trois étapes succes-
négatives et de conflits organisationnels sont sives (modèles 1 à 3) avec le logiciel SPSS. Le
respectivement de 0,81, 0,72 et 0,89. L’indicateur modèle 1 présente les résultats de l’influence
d’ICC (1) évalue la fiabilité des scores individuels des variables de contrôle sur la performance, le
en donnant la part de variance du construit du modèle 2 intègre les variables indépendantes à
groupe attribuable à l’appartenance au groupe l’équation, et le modèle 3 teste les effets modé-
(Bliese, 2000). Les valeurs obtenues indiquent rateurs du caractère virtuel des équipes. Les
un effet réduit (valeur de l’ordre de 0,01), un effet variables indépendantes ont été préalablement
moyen (valeur de l’ordre de 0,10) ou un effet centrées pour éviter les risques de multicollinéa-
important (valeur de l’ordre de 0,25). Les valeurs rité (Aiken et al., 1991). Les résultats obtenus
d’ICC (1) pour les variables d’émotions positives, sont présentés dans le tableau 1 ci-après.
6. « Il y a fréquemment des désaccords au sein de notre groupe de travail concernant l’organisation du travail à réaliser » ;
« Il y a beaucoup de conflits au sein de notre groupe de travail concernant la responsabilité des tâches à réaliser dans
le cadre de notre mission ».
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REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES
Les variables de contrôle testées dans le d’équipe, ce qui représente une augmentation
modèle 1 ne sont pas significatives. Le modèle significative de la variance expliquée de la
2 a permis de tester les hypothèses H1, H2 et performance d’équipe (p<0,01). Nos résultats
H3. Il met en évidence l’influence positive montrent un effet négatif significatif du terme
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significative des émotions positives (β= 0,26 ; d’interaction pour les émotions positives (β=
p<0,01) et l’influence négative significative des -0,34 ; p<0,01), ce qui permet de valider l’hypo-
émotions négatives (β=-0,35 ; p<0,01) et des thèse H4a. Cependant, l’influence non significa-
conflits organisationnels (β=-0,32 ; p<0,01). Il tive sur la performance des termes d’interaction
montre également une influence négative signi- pour les émotions négatives et les conflits orga-
ficative du caractère virtuel de l’équipe (β= nisationnels ne permet pas de valider respective-
-0,24 ; p<0,01). Ce modèle explique 44 % de ment les hypothèses H4b et H5.
la variance de la performance d’équipe, ce Nous avons représenté graphiquement le
qui apparaît très important et nous permet de phénomène modérateur observé (H4a) afin de
valider les hypothèses H1, H2, H3. Le modèle préciser la nature de son influence (cf. Figure 1
3 a permis de tester les hypothèses H4 et H5 ci-dessous). Le coefficient négatif du terme d’in-
d’un effet modérateur du caractère virtuel de teraction « Émotions positives x caractère virtuel
l’équipe sur les relations entre émotions, conflits de l’équipe » témoigne du fait que dans le cas
et performance d’équipe. Ce modèle explique des équipes en ligne, l’influence des émotions
près de 47 % de la variance de la performance positives sur la performance d’équipe diminue.
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fort d’émotions positives, la performance est plus (Stephens et Carmeli, 2016), la cohésion, l’identi-
élevée dans les équipes en présentiel que dans les fication au groupe (Lin et al., 2017) et, plus géné-
équipes en ligne. ralement, la communication au sein des équipes.
Notre recherche, en validant l’influence néga-
tive des émotions négatives sur la performance,
4. DISCUSSION contredit un certain nombre de travaux récents
qui affirment leur rôle positif dans le fonction-
La discussion est construite en deux temps : nement et l’efficacité des équipes (Peralta et al.,
une première partie relative aux effets directs 2020). Nos résultats confortent au contraire les
testés dans l’étude ; une seconde partie relative thèses selon lesquelles ce type d’émotions nuirait
aux effets modérateurs. au fonctionnement des équipes en réduisant la
cohésion de groupe, la confiance et la capacité
des membres de l’équipe à adopter une perspec-
4.1. Impact des émotions, des conflits tive collective et un esprit d’équipe (Molders et
et du caractère virtuel de l’équipe sur al., 2019 ; Yang et Hung, 2014). Les émotions
négatives mobiliseraient et neutraliseraient donc
la performance des ressources cognitives clés qui pourraient être
utilisées pour soutenir l’efficacité de l’équipe
Notre étude empirique confirme l’importance
(Kaplan et al., 2013).
de l’influence des émotions, quelle que soit leur
nature, sur la performance d’équipe. Concernant Notre étude met également en avant un résul-
les émotions positives, notre étude montre leur tat qui ne ressort pas à notre connaissance des
influence positive, confirmant et complétant un études empiriques sur le sujet, à savoir un impact
certain nombre de travaux antérieurs (Lin et plus fort des émotions positives (par rapport aux
al., 2017 ; Qiu et Scherwin, 2014). Ces résultats émotions négatives) sur la performance d’équipe
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Nos résultats montrent également que le virtuel sur la relation émotions négatives-perfor-
caractère virtuel des équipes réduit leur niveau mance d’équipe va à l’encontre de nos hypothèses
de performance. Ceci validerait l’idée de coopé- et semble contre-intuitif. La théorie du filtrage
ration réduite, de difficultés de communication des indices sociaux de Sproull et Kiesler (1986)
et de coordination (Connelly et Turel, 2016), et permet néanmoins d’apporter des éléments de
d’un moindre partage de l’information (Mesmer- réponse à cette absence d’effet modérateur. Selon
Magnus et al., 2011). Plus généralement, notre cette dernière, la diffusion d’émotions via les
étude conforterait l’idée d’un management médias électroniques est fortement perturbée
d’équipes en ligne plus complexe et plus exigeant voire empêchée. L’absence de signaux sociaux et
(Mysirlaki et Paraskeva, 2019 ; Castellano et al., émotionnels rend difficile les inférences sociales
2021), et donc différent, voire dégradé, de celui sur les autres, générant du doute et de l’incerti-
des équipes en présentiel. tude et conduisant in fine à une perception plus
négative des partenaires que dans les cas de rela-
tions en face à face. Cette différence conduirait
les participants à ressentir davantage les émo-
4.2. Effet modérateur du caractère virtuel tions négatives dans les équipes en ligne (Kato
de l’équipe et al., 2007 ; Gauducheau, 2008). Cependant, ces
effets, susceptibles de conduire à un effet modé-
Notre étude met en évidence l’impact modé- rateur négatif du caractère virtuel, sont probable-
rateur négatif du caractère virtuel des équipes ment compensés par le filtre des médias pauvres
7. En effet alors que dans le modèle 2, le coefficient relatif à l’influence des émotions positives est inférieur (en valeur
absolue) à celui des émotions négatives, l’introduction dans l’équation des modérateurs (modèle 3), augmente la
valeur du coefficient relatif à l’influence des émotions positives, le rendant supérieur à celui des émotions négatives.
Cela signifie que le coefficient 0,511 du modèle 3 correspond à l’influence des émotions positives pour les équipes
en présentiel (relation modérée par le terme d’interaction significatif), alors que le coefficient de 0,261 du modèle 2
correspond à l’influence des émotions positives pour l’ensemble des équipes.
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qui limite l’influence des émotions négatives sur équipes en ligne. Aux cadres classiques - notam-
la performance. Ces deux effets antagonistes ment la théorie des évènements affectifs (Weiss
conduiraient ainsi à notre résultat d’absence d’ef- et Cropanzano, 1996), la théorie de la régulation
fet modérateur au final. émotionnelle (Gross et John, 2003), la théorie de
Le caractère virtuel de l’équipe n’influence l’évaluation cognitive (Smith et Ellsworth, 1985)
pas la relation entre conflits organisationnels ou encore la théorie des conflits organisation-
et performance. L’impact négatif des conflits nels (Jehn, 1995), doivent s’ajouter la théorie de
organisationnels n’est donc pas amplifié, comme la richesse des médias (Daft et Lengel, 1986)
nous l’avions anticipé, par le caractère virtuel de ou la théorie du filtrage des indices sociaux
l’équipe. Ces résultats confirment ainsi la littéra- (Sproull et Kiesler, 1986) qui permettent une
ture selon laquelle les conflits sont un processus lecture plus approfondie des mécanismes en jeu
critique à manager pour l’atteinte des objectifs au sein des équipes en ligne. L’un des apports
(Aubert et Kelsey, 2003 ; Baba et al., 2004 ; de cette recherche est aussi de montrer que la
Montoya-Weiss et al., 2001 ; Ayoko et al., 2012), portée explicative de ces deux derniers cadres
ceci, quelle que soit la nature des équipes. Cette théoriques varie selon le type d’émotion et s’ap-
recherche apporte ainsi un éclairage nouveau sur plique principalement aux émotions positives.
le fonctionnement des équipes en ligne en mon- Ensuite, notre travail, par le biais d’une étude
trant qu’en distanciel, les conflits organisation- empirique quantitative qui demeure rare sur ce
nels demeurent, sans pour autant que leur impact type de sujet, contribue à enrichir les connais-
soit exacerbé. Les équipes en ligne sont donc tout sances sur la dynamique de fonctionnement des
aussi susceptibles que les équipes en présentiel équipes en ligne (comparativement aux équipes
de subir le caractère contre-performant, négatif, en présentiel) et sur l’influence de la dimension
des conflits organisationnels. Dans ce contexte, virtuelle sur l’une des composantes clés des
et à l’instar des résultats obtenus par Chédotel équipes à savoir les émotions.
et al. (2015) au sein d’équipes en présentiel et Enfin, à notre recherche sont associées
par Martinez-Moreno et al. (2009), l’impact trois types d’implications managériales.
négatif des conflits organisationnels au sein des Premièrement, en confirmant l’impact des émo-
équipes en ligne pourrait plutôt être nuancé par tions positives et négatives sur la performance
le potentiel de résolution et la capacité à impro- d’équipe, nos résultats invitent à considérer l’in-
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viser des équipes, les types de médias utilisés telligence émotionnelle - définie comme la capa-
par les équipes en ligne ou bien encore les effets cité à percevoir, comprendre et gérer ses propres
d’expérience. émotions ainsi que celles d’autrui (Zhou et al.,
2020), comme un levier clé du management des
équipes. La sensibilisation, comme la forma-
tion des leaders et de l’ensemble de membres
5. CONCLUSION des équipes à ce type de management et de
compétence, pourraient contribuer à amélio-
Nos résultats montrent que les émotions posi- rer significativement la performance collective
tives et négatives, les conflits organisationnels et des équipes, ceci quelle que soit leur nature. En
le caractère virtuel de l’équipe impactent signi- outre, nos résultats relatifs aux émotions néga-
ficativement la performance d’équipe. Le carac- tives amplifiées par le virtuel, témoignent aussi
tère virtuel de l’équipe, en rendant plus difficile de la nécessité de développer des temps, des
la détection et la compréhension des émotions, espaces et des dispositifs permettant l’expres-
réduit également l’impact positif des émo- sion des émotions, des ressentis et, plus généra-
tions positives sur la performance d’équipe. En lement, des interactions orales et visuelles entre
revanche, ce même caractère virtuel de l’équipe les différents membres. Ceci afin de permettre le
ne semble pas impacter la relation entre émo- dévoilement des émotions positives qui semblent,
tions négatives et performance d’équipe, ni celle à l’inverse des émotions négatives, plus bridées
entre conflits organisationnels et performance dans les équipes en ligne que dans les équipes
d’équipe. en présentiel. Dans le cas d’équipes en ligne, il
Cette recherche présente plusieurs apports, s’agirait de privilégier au maximum les médias
théorique, empirique et managérial. Notre travail dits riches et une communication à dominante
confirme tout d’abord la nécessité de combiner orale, visuelle et synchrone, visant notamment à
plusieurs cadres théoriques pour appréhender améliorer la confiance (Jaakson et al., 2019). Le
correctement la dynamique et la performance des management de la confiance apparaît d’autant
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REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES
plus clé qu’il permettrait de lutter contre l’ex- al., 2006). Cette mesure permettrait de distinguer
pression et/ou la perception amplifiée d’émo- les types de médias intermédiant la relation entre
tions négatives générées par le fonctionnement les membres de l’équipe et de mieux comprendre
en ligne. Des dispositifs de type forum, réseau leur influence sur la performance de ces équipes.
social interne, visio-conférence, espace virtuel Pour finir, de futures recherches pourraient tester
de convivialité8, pourraient contribuer à instau- quantitativement et approfondir qualitativement
rer une communication, une collaboration et un un de nos résultats contre-intuitifs en discutant
partage d’informations en temps réel et à géné- le fait que l’anonymat conféré par la communi-
rer, in fine, un niveau de confiance élevé dans cation médiatisée par ordinateur favoriserait le
les équipes en ligne. Deuxièmement, concer- dévoilement des émotions négatives au détriment
nant les conflits, nos résultats montrent que les des émotions positives.
recommandations qui s’appliquent aux équipes
en présentiel restent tout autant valides pour les
équipes en ligne, notamment en ce qui concerne RÉFÉRENCES
la sensibilisation et la formation aux techniques
de gestion des conflits (Chédotel et al., 2015). AIKEN L.S., WEST S.G. et RENO R.R. (1991)
Troisièmement, au regard de l’impact négatif Multiple regression: Testing and interpreting
du virtuel confirmé par notre étude, et malgré interactions. Sage.
l’engouement actuel pour le travail à distance, il
semble nécessaire de maintenir, autant que faire AUBERT B.A. et KELSEY B.L. (2003) « Further
se peut, des réunions en présentiel, complémen- understanding of trust and performance
taires au travail à distance et d’évoluer vers un in virtual teams », Small Group Research,
mode de fonctionnement hybride. Les managers Vol. 34, No. 5, p. 575-618.
d’équipe en ligne doivent en effet garder à l’esprit AXTELL C.M., FLECK S.J. et TURNER N.
que des réunions en présentiel permettent d’amé- (2004) « Virtual teams: Collaborating across dis-
liorer les rapports positifs et les interactions entre tance », International Review of Industrial and
les membres (Ayoko et al., 2012). Organizational Psychology, Vol. 19, p. 205-248.
Ce travail n’est pas pour autant exempt de AYOKO O.B., KONRAD A.M. et BOYLE M.V.
limites, lesquelles constituent autant de prolon- (2012) « Online work: Managing conflict and
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gements potentiels. Tout d’abord, compte tenu de emotions for performance in virtual teams »,
notre population d’étude, composée d’étudiants, European Management Journal, Vol. 30,
il apparaît nécessaire de poursuivre les investiga- No. 2, p. 156-174.
tions et de valider ces premiers résultats auprès BABA M.L., GLUESING J., RATNER H. et
d’autres populations, notamment d’équipes de WAGNER K.H. (2004) « The contexts of
dirigeants d’entreprises, afin d’étendre la validité knowing: Natural history of a globally dis-
externe de ces résultats. Ensuite, nos résultats tributed team », Journal of Organizational
sont obtenus par le biais de mesures instantanées Behavior, Vol. 25, No. 5, p. 547-587.
des variables indépendantes de l’étude. L’une des
BLACK J., KIM K., RHEE S., WANG, K. et
pistes possibles de poursuite de ce travail réside
SAKCHUTCHAWAN S. (2019) « Self-
dans la mise en place d’un modèle de recherche
efficacy and emotional intelligence:
intégrant la dynamique temporelle et permettant Influencing team cohesion to enhance
de mesurer les phénomènes considérés à plu- team performance », Team Performance
sieurs étapes de leur développement. Il pourrait Management, Vol. 25, No. 1/2, p. 100-119.
ainsi être intéressant, à travers une étude longi-
tudinale qualitative, d’analyser dans le temps la BLIESE P.D. (2000) « Within-group agree-
relation conflits-émotions-performance au sein ment, non-independence, and reliability:
de ces équipes. De futures recherches pourraient Implications for data aggregation and analysis
également compléter nos résultats en intégrant une » In K. J. Klein et S. W. J. Kozlowski (Eds.),
mesure plus fine du caractère virtuel. La virtua- Multilevel theory, research, and methods in
lité peut en effet être considérée comme un conti- organizations, San Francisco, CA, Jossey-
nuum, dont le degré est fonction de trois facteurs : Bass, p. 349-381.
la proximité physique, les modalités de commu- BOONE C. et VAN WITTELOOSTUIJN A.
nication, les modes de coordination (Kratzer et (2005) « Team locus-of-control composition,
8. Cf. par exemple l’outil « wonder » https://www.wonder.me/
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- conflits relationnels (Mannix 2003 ; Medina et al.,
(désaccords personnels) 2005)
Équipes dynamiques Nombreux avantages Impact négatif du caractère
dont les membres sont (logistique, financier) des virtuel (H3)
géographiquement et équipes en ligne (Lin et al.,
temporairement dispersés 2008)
Travail à distance qui s’appuie Effet négatif du caractère
Caractère sur les TIC virtuel de l’équipe sur la
virtuel de communication globale
l’équipe (Ford et al., 2017), le partage
d’information (Lin et al., 2008)
et la performance d’équipe
(Connelly et Turel, 2016 ;
Mesmer-Magnus et al., 2011 ;
Castellano et al., 2021)
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une carence en communication
(Mannix et al., 2002 ; Liu et
al., 2011)
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La simulation, qui s’est déroulée sur une période de quatre jours au cours des mois d’Avril 2019 (équipes en présentiel)
et Avril 2020 (équipes en ligne), s’appuie sur un modèle économique industriel (production et commercialisation de verre
plat et creux) élaboré reposant sur plus de 1000 paramètres et met les groupes de participants dans la situation d’une
équipe de dirigeants d’une entreprise multi-produits, en compétition avec les autres équipes. Les équipes en présentiel
désignent des groupes d’étudiants qui sont regroupés physiquement dans les locaux de l’école ; les interactions entre
eux et avec leur coach s’opèrent par des contacts et des échanges directs. Les équipes en ligne désignent des groupes
d’étudiants travaillant à distance à partir de leur domicile et mobilisant les outils classiques de télétravail (mail et
logiciel Zoom) en plus de documents partagés et de l’interface web de la simulation de gestion.
Les participants doivent élaborer une stratégie en matière de positionnement pour chaque produit sur lequel ils
choisissent de se lancer (domination par les coûts, différenciation sur plusieurs dimensions possibles notamment liée
à la politique de développement durable) et en matière de choix de croissance (spécialisation ou diversification). Ils ont
également l’opportunité de faire évoluer le modèle économique de l’entreprise en introduisant une activité de négoce
en parallèle de leur activité industrielle. Une fois les choix stratégiques déterminés, les participants déclinent ces choix
par le biais de plusieurs dizaines de décisions relatives à la production, la commercialisation, la politique financière
(financement des investissements, placements, emprunts, etc.), les ressources humaines, la recherche et développement,
le développement durable ou encore la politique d’alliances.
Toutes les équipes disposent rigoureusement des mêmes informations au départ et leurs firmes respectives sont
identiques en tout point. Ils disposent d’un « manuel de la simulation » exhaustif reprenant les caractéristiques de
l’entreprise dont ils ont la charge et de l’environnement dans lequel ils évoluent. Sur le plan technique, ils disposent
d’un accès à une « interface joueur » Web spécifique. Celle-ci leur permet d’accéder aux informations de leur firme et
de leur environnement et de saisir les décisions relatives aux paramètres de gestion. La gestion de leur firme leur est
confiée immédiatement après une conférence introductive. Après une phase de test, les participants gèrent l’entreprise
sur une période équivalente à deux ans (soit huit périodes, ou trimestres). L’objectif qui leur est assigné, et sur lequel
ils sont évalués, consiste à maximiser la rentabilité financière moyenne, calculée sur les deux années de leur gestion.
Ce séminaire donne lieu à une note comptant pour la validation de l’année d’étude des étudiants participants. Cette
note est affectée à l’ensemble des membres du groupe de manière collective. Elle est automatiquement affectée par
le logiciel de simulation sur la base de l’atteinte de l’objectif de maximisation de la rentabilité financière moyenne.
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groupe de travail concernant l’organisation du
travail à réaliser.
Il y a beaucoup de conflits au sein de notre groupe 0,850
de travail concernant la responsabilité des tâches à
réaliser dans le cadre de notre mission.
Des membres de notre groupe de travail se mettent 0,844
souvent en colère.
Il y a fréquemment des désaccords au sein de notre 0,799 0,313
groupe de travail concernant la répartition des
tâches à réaliser et leur organisation**
Il y a beaucoup de tensions relationnelles au sein de 0,782
notre groupe de travail.
Il y a beaucoup de conflits d’idées au sein de notre 0,312 0,828 -
groupe de travail**
Il y a fréquemment des opinions conflictuelles 0,408 0,812
au sein de notre groupe de travail concernant la
mission que nous avons à réaliser**
Il y a fréquemment des désaccords au sein de notre 0,570 0,619
groupe de travail concernant la nature des tâches
réalisées dans le cadre de notre mission**
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M SD 1 2 3 4 5 6 7
1.Émotions positives 5,12 0,81 -
a
N=139
b
La répartition H/F dans les équipes a été évaluée par le nombre de femmes présentes dans l’équipe.
c
L’existence de liens antérieurs a été mesurée en utilisant une mesure mono item mobilisant une échelle bornée en
7 points (« pas du tout d’accord » / « tout à fait d’accord ») : « J’ai eu l’occasion de travailler à plusieurs reprises au
cours des dernières années avec au moins 2 des membres de mon équipe ». L’existence de liens antérieurs est définie
comme un construit additif. De ce fait, l’agrégation des données au niveau de l’équipe ne nécessitait pas de test de
cohérence intra groupe (Chan, 1998 ; Collins et al., 2016).
* p<0,05 ** p<0,01
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