Séance - Le Blanchiment
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Séance - Le Blanchiment
PROFESSIONNELS DE L’IMMOBILIER
Depuis 1998, les agents immobiliers sont tenus de lutter contre le blanchiment d’argent et le
financement du terrorisme.
Ainsi, en 2016, les immobiliers ont transmis 84 déclarations de soupçons à TRACFIN, et 178
en 2017. Cette hausse des déclarations de soupçons semble se confirmer en 2018.
L’article 324-1 du code pénal comme un délit qui consiste à faciliter, par tout moyen, la justification
mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à
celui-ci un profit direct ou indirect.
- le placement,
- l'empilage
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- l'intégration.
Tout d'abord, le placement consiste à introduire dans le système financier d'un pays des fonds provenant
d'opérations délictueuses. L’infraction de blanchiment est donc une infraction commise à la suite d’une première
infraction.
L'empilage, ensuite, permet de brouiller les pistes de l'origine des fonds par la multiplication des opérations
bancaires ou financières successives faisant intervenir divers comptes, établissement, personnes, produits et
pays.
Enfin, l'intégration vise à investir les fonds d’origine frauduleuse dans les circuits légaux de l’économie et en
tirer des bénéfices. Évidemment, la réalité est souvent beaucoup plus complexe.
8° Les personnes exerçant les activités mentionnées aux 1°, 2°, 4°, 5°, 8° et 9° de l’article 1er de la loi n° 70-9
du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur
les immeubles et les fonds de commerce ;
Dans l’exercice de leurs activités, les personnes mentionnées à l’article 1er agissent dans le strict respect des lois
et textes réglementaires en vigueur ainsi que des dispositions du présent code.
2° A veiller au respect des obligations qui leur incombent en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux
et le financement du terrorisme en application de l’article L. 561-2 du code monétaire et financier
TRACFIN est un service de renseignement financier placé sous l’autorité du Ministère de l’Economie, des
Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique. TRACFIN recueille et enrichit les informations
relatives à des opérations financières suspectes qu’il reçoit notamment sous forme de déclarations de soupçon.
Ces informations sont transmises par les différents organismes publics ou chargés d’une mission de service
public (administrations d’Etat, collectivités territoriales, établissements publics ou toute autre personne chargée
d’une mission de service public).
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Pour tout renseignement sur TRACFIN, clique sur ce lien : https://www.economie.gouv.fr/tracfin/declarants
TRACFIN donne une liste de points de vigilance à destination des agents immobiliers :
d’une discordance entre le profil du client (âge, revenu, catégorie socio-professionnelle) et la valeur du
bien objet de l’opération ;
d’une discordance entre la valeur de marché du bien immobilier et le montant de la transaction ;
d’une présence d’un tiers au côté du client, dont le comportement tend à faire penser qu’il s’agit du
bénéficiaire réel de l’opération ;
d’un client qui procède à des achats et reventes dans un temps bref ;
de fonds émis à partir d’un compte différent du compte de l’acquéreur ;
d’un recours à l’interposition de plusieurs sociétés qui tend à opacifier l’identification du bénéficiaire
réel de l’opération ;
de la provenance des fonds, et notamment des fonds provenant de secteurs d’activité sensibles (BTP,
restauration, téléphonie, etc.) ;
d’un comportement insolite ou atypique du client ;
d’une connivence supposée entre le vendeur et l’acquéreur ;
d’un montage anormalement complexe au regard de l’opération ;
de la présence d’une personne politiquement exposée (PPE) ;
de fonds provenant d’une zone géographique sensible.
L’agence immobilière est tenue de dénoncer à TRACFIN tout comportement suspect en matière de fraude ou de
blanchiment.
Une plateforme web, sur laquelle des échanges avec Tracfin sont dématérialisés, à savoir le portail « ERMES »
(https://tracfin.finances.gouv.fr), est mis à la disposition des agents immobiliers pour leur permettre de saisir les
formulaires de déclaration et de les envoyer à Tracfin de manière sécurisée.
La déclaration écrite donne lieu à la délivrance d’un accusé de réception, à conserver par le professionnel comme
preuve de sa déclaration et de sa bonne foi.
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Une déclaration orale, bien que prise en compte, ne peut pas donner lieu à un accusé de réception. L’absence de
preuve de déclaration risquerait de mettre en difficulté professionnel, en cas de contrôle ou d’enquête judiciaire.
La déclaration de soupçon a un caractère confidentiel : elle est couverte par le secret absolu, tant par le déclarant
que par TRACFIN. Le législateur a particulièrement insisté sur la nécessité de préserver l’anonymat du déclarant
et la confidentialité des informations pour assurer une protection maximale des déclarants.
Ainsi, suite à la réception d’une déclaration de soupçon, TRACFIN peut s’opposer à l’exécution de l’opération
déclarée (c’est le droit d’opposition).
TRACFIN peut aussi demander à tout agent immobilier la communication des pièces et documents relatifs à une
opération dans le délai qu’il fixe (c’est le droit de communication
Si l’agent immobilier ne respecte pas ses obligations, il peut être condamné par la justice.
Le contrôle du respect de ces obligations est assuré par la Direction Départementale de la Protection des
Populations (ex DGCCRF), chargée également de faire respecter la loi Hoguet et le Code de la consommation.
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Quelques décisions ayant sanctionné des agences pour manquement à leurs obligations de
lutte contre le blanchiment …
La Commission nationale des sanctions (CNS) a mis en ligne plusieurs décisions sanctionnant des agences
immobilières pour manquements aux obligations de lutte contre le blanchiment. Outre le rappel classique des
obligations de vigilance, de déclaration de soupçons et de formation, plusieurs précisions ont attiré notre attention :
l'agent immobilier est tenu d'accomplir les vérifications imposées par le niveau de risque de blanchiment
même si ces vérifications sont également réalisées par le notaire et par la banque (CNS déc. 9-6-2022 n°
2021-02) ; il s'agit d'une confirmation, la Commission ayant déjà jugé que l'identité des clients s'impose à tous
les professionnels au cours de la vente (CNS déc. 22-7-2015 n° 2015-09) ;
les documents diffusés par un syndicat professionnel ne peuvent servir de document interne d'approche par
les risques au sein d'une agence, car ils ne sont ni personnalisés ni adaptés aux transactions immobilières
réellement effectuées par l'agence (CNS déc. 12-5-2022 n° 2020-08) ; la solution avait déjà été posée par la
Commission (CNS déc. 17-6-2021 n° 2019-54) ;
la cartographie des risques doit être complète ; est insuffisante la cartographie qui ne comprend pas
d'évaluation ni de classification des risques propres à l'agence (tels que la nationalité des clients, leur
résidence, le mode de financement de l'opération), et qui ne prévoit pas les actions correspondant à chaque
risque accompagnées d'un scoring (CNS déc. 11-4-2022 n° 2020-12) ; est également insuffisante une simple
liste informatisée de points de contrôle (CNS déc. 13-5-2022 n° 2020-09) ;
la conclusion rapide d'une vente n'exclut pas la nécessité de procéder aux mesures de vigilance
supplémentaires exigées par le Code monétaire et financier (CNS déc. 1-3-2022 n° 2020-16) ;
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Projet de lignes directrices pour le secteur immobilier du GAFI :
consultation publique
IP/IT ET COMMUNICATION | PÉNAL
AFFAIRES | Compliance
IMMOBILIER | Professions
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Grandes lignes du projet
• Le projet de lignes directrices, uniquement disponible à ce jour en anglais, rappelle, dans un premier
temps, les concepts clefs des politiques étatiques consacrées à la LCB-FT. Rappelons pour le lecteur
français que ce projet de texte dit de soft law, non contraignant pour les États, s’inscrit dans un corpus
de rapports, recommandations, guides de bonnes pratiques etc. établis par le GAFI afin d’aider tant
les régulateurs que les personnes privées à prévenir, remédier et sanctionner les pratiques de
blanchiment et financements douteux. En France, sous l’impulsion de l’Union européenne, se
succèdent les directives européennes, dont la dernière en date, la 6 e Directive (UE) 2018/1673 du
Parlement européen et du Conseil en date du 23 octobre 2018 vise à lutter contre le blanchiment de
capitaux au moyen du droit pénal. Dans le secteur immobilier, la Direction générale de la concurrence,
de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et Traitement du renseignement et
action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN) ont émis, le 6 novembre 2018, leurs
propres Lignes directrices relatives à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme
(LCB-FT) pour les professionnels du secteur de l’immobilier.
• Puis, le projet de lignes directrices traite de l’approche par les risques consistant, en partant d’un
standard d’obligations de vigilance, à appliquer à la clientèle, en des obligations simplifiées de
vigilance par rapport à ce standard lorsque le risque de blanchiment ou de financement du terrorisme
est faible, et en des obligations complémentaires, ou renforcées, lorsque ce risque est plus élevé. Le
secteur immobilier est majoritairement considéré comme un secteur à risques par la plupart des pays
membres du GAFI, même si ce constat n’est pas partagé par tous. L’investissement immobilier
présente des avantages appréciables pour le blanchiment. Il permet de sécuriser les gains illicitement
perçus, d’être sources de revenus, tout en pouvant contribuer à développer des activités frauduleuses.
Le projet de lignes directrices insiste sur la nécessité de ne pas limiter l’approche par les risques au
seul immobilier résidentiel, mais à être tout aussi vigilant dans le secteur de l’immobilier commercial.
• Dans un troisième temps, les acteurs du secteur privé sont invités à mettre en œuvre les bonnes
pratiques en détectant le caractère suspicieux d’une transaction, lequel peut résulter d’une sous-
évaluation / surévaluation du bien immobilier, de la complexité à identifier le bénéficiaire effectif des
parties à la transaction immobilière / des éléments d’extranéité de la transaction etc. Comme toujours
la culture de la conformité (compliance) doit être inculquée et promue par l’équipe dirigeante des
acteurs de l’immobilier, ce qui passe, par exemple, tant par la mise en place de mesures de diligences
adaptées aux risques identifiés que par la formation constante et renouvelée du personnel au
procédure applicable en matière de LCB-FT.
• Dans un quatrième temps, sont détaillées les bonnes pratiques en matière de régulation à l’intention
des autorités de supervision (qu’elles soient étatiques ou privées). Outre le caractère primordial des
pouvoirs d’investigation et de sanctions des autorités de supervision, dont sont dotées en France la
DGCCRF et la Commission nationale des sanctions, l’accent est mis sur la pédagogie et la
communication des autorités pour promouvoir encore et toujours cette culture de la conformité.
En dépit de quelques exemples tirés des pratiques promues dans certains pays, peu de cas
typologiques viennent illustrer les recommandations, dont l’abstraction rend, à notre avis, mal aisée
leur maniement opérationnel. Malgré un délai bref pour émettre des observations pertinentes et
constructives à ce projet, il est à espérer que les syndicats des professionnels de l’immobilier, ainsi
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que les ordres des professions réglementées, se saisiront de la possibilité qui leur est offerte de
réagir.