Douleur ATM
Douleur ATM
Douleur ATM
1. Articulation
temporo-mandibulaire.
Douleurs de l’ATM
avec ou sans signe radiologique
A propos de deux cas
L’
articulation temporo-mandibulaire
L’articulation temporo-mandibulaire (ATM) est (ATM) fait partie intégrante de l’appa-
définie comme une diarthrose, bicondylienne, reil manducateur. Cet appareil complexe
fait intervenir divers éléments osseux,
à ménisque (ou disque) interposé (fig. 1)
musculaires, fibro-cartilagineux et neurologiques
[11, 13, 15]. Les deux ATM fonctionnent (proprioception) [10, 22, 34, 46]. Le dysfonction-
en synergie [41] et interviennent dans nement d’un ou plusieurs de ces éléments peut
les fonctions de déglutition, mastication être à l’origine de différentes pathologies [1, 18,
et phonation [9, 12]. 20, 29, 33, 35, 43, 44], dont nous rapportons ici
deux exemples représentatifs qui peuvent être fré-
quemment rencontrés.
Les patients atteints de désordres occlusaux
peuvent parfois présenter un risque plus élevé
d’algies dysfonctionnelles de l’articulation man-
dibulaire (ADAM) ou de dysfonctionnements de
l’articulation mandibulaire (DAM), également
appelés « temporomandibular disorders » dans la
- relation inter-maxillaire (RIM) ; si la RIM en note une désocclusion complète ; sauf un glisse-
relation centrée (RC) est souhaitable, nous déci- ment difficile de la cuspide palatine de 17, sur la
dons toutefois de garder une RIM en occlusion face « occlusale » puis « vestibulaire » de 47. En
de convenance ; ouverture et fermeture de la bouche, il existe un
- mise en place du modèle mandibulaire. mouvement en baïonnette, avec déviation de la
Les résultats montrent une linguoversion des 37 mandibule vers la droite beaucoup plus prononcée
et 47 (fig. 3). On note un blocage lors de la pro- au retour (fermeture). Tous ces mouvements sont
pulsion qui est limitée et ne peut être effectuée accompagnés de craquements et de douleurs arti-
en totalité, avec une désocclusion complète en fin culaires estimées à 8/10 à droite et 4/10 à gauche
de course. La rétrusion est impossible ; le mou- selon l’échelle visuelle analogique.
vement génère une douleur aiguë et importante. • Examen radiologique : des clichés bouche
En diduction droite, il existe une fonction canine ouverte et bouche fermée, recommandés par
côté travaillant, avec intervention de l’incisive les experts [23, 25, 39], ont été réalisés par le
latérale droite. On constate également un glis- Centre d’Imagerie Médicale à Saint-Chamond,
sement de la cuspide vestibulo-mésiale de 17 sur en ut ilisant un générateur radiologique
la face vestibulaire de 47. Du côté non travail- Orthopantomograph OP 100, de catégorie E2
lant, on remarque quelques contacts en début de (Trophy, Stephanix). L’examen radiologique n’a
mouvement, avec désocclusion complète en fin pas permis d’objectiver de lésion ostéo-articulaire
de course. En diduction gauche, côté travaillant, morphologique ou dynamique (fig. 4 et 5).
il existe une fonction canine, accompagnée par
l’incisive latérale. Il n’existe pas de contact favo-
rable entre 27 et 37. Du côté non travaillant, on Cas clinique 2
Il concerne une jeune femme de 26 ans,
ayant eu deux enfants. La patiente n’a
aucun antécédent médical ni chirurgi-
cal, à l’exception de l’extraction de ses
4 dents de sagesse et de 26. Aucun acci-
dent préalable n’a été signalé, et aucun traitement
orthodontique n’a été effectué.
• Motifs de consultation : la patiente consulte
pour des douleurs de l’ATM droite avec blocages
occasionnels, accompagnées de myalgies au niveau
des muscles masséter et temporal droits ainsi que
des cervicalgies. Les signes cliniques existent
depuis cinq ans, avec des périodes de douleurs plus
ou moins intenses intercalées par des périodes de
4. Orthopantomographie. rémission. La patiente décrit une nette augmenta-
tion récente des douleurs qui irradient à la région
cervicale, voire vers les ceintures scapulaires.
Elle signale un claquement lors de la mastication,
qui est plus important lorsqu’elle ouvre la bouche.
• Examen clinique et étude occlusale : à
l’examen clinique, on retrouve la triade BAD
(bruits, algies, dyskinésies) [2, 42]. Les bruits arti-
culaires consistent en un claquement bref et sec
avec ressaut de la mandibule côté droit lors de l’ou-
verture et plus faible lors de la fermeture buccale,
avec limitation de l’amplitude lors de l’ouverture
maximale. L’ouverture habituelle est limitée à un
travers de doigt et demi. On note un blocage par-
tiel de l’ATM droite. A la palpation, on retrouve
5. Radiologie des ATM droite et gauche bouche ouverte et fermée.
des douleurs musculaires au niveau du masséter et
7 et 8.
Occlusion
sur vues
latérales
droite
et gauche.
11. Gouttière
occlusale.
9. Orthopantomographie.
moyen t hérapeutique intéressant qui permet
de rétablir l’équilibre physiologique des com-
posants de l’appareil manducateur et l’optimisa-
tion des fonctions. Ainsi, cet outil thérapeutique
réduit les sollicitations de l’appareil manducateur
notamment pendant la nuit [19].
Il est également indispensable de rappeler l’im-
portance des règles hygiéno-diététiques. La sup-
pression de consommation de chewing-gum, une
alimentation moins dure, la limitation d’un mou-
vement excessif d’ouverture lors du bâillement par
la contention manuelle ou le positionnement de la
pointe de la langue au palais, ainsi qu’une réduc-
tion du stress [4] sont autant de mesures simples
visant à diminuer les contraintes auxquelles les
10. Radiologie des ATM droite et gauche bouche ouverte et fermée.
articulations temporo-mandibulaires peuvent
être soumises [36, 42].
La stratégie thérapeutique que nous avons choisie Chez ces deux patientes, nous avons prescrit
pour ces deux cas repose sur le traitement fonc- des séances de kinésithérapie comme traitement
tionnel associant gouttière occlusale et réédu- adjoint, pour soulager les tensions musculaires
cation. L’approche thérapeutique conservatrice cervicales hautes, moyennes et les tensions exis-
nous paraît particulièrement intéressante chez ces tantes au niveau de la ceinture scapulaire.
patientes jeunes [5, 37]. Nos résultats à court terme montrent que ce trai-
Chez ces patientes, la gouttière occlusale (fig. 11) tement combiné, associant le port d’une gouttière
a pour objectif de modifier l’occlusion et ses sché- occlusale et la kinésithérapie, mis en place six mois
mas proprioceptifs, de procurer une relaxation auparavant, a permis une disparition de la symp-
musculaire, d’augmenter la dimension verticale tomatologie douloureuse chez les deux patientes,
d’occlusion, de diminuer ainsi la pression intra- suggérant que les désordres occlusaux avaient un
articulaire, voire de permettre le replacement du rôle dans la survenue des douleurs présentées par
disque [21, 24, 47]. les patientes. Toutes deux sont actuellement sui-
L’utilisation d’une gouttière a également l’avan- vies régulièrement et, en cas de récidive algique,
tage de réduire la douleur en mettant l’articula- d’autres thérapeutiques plus invasives pourront
tion algique en position de repos. être envisagées comme :
La prescription de gouttière occlusale peut éga- - la mise en place de couronnes céramo-
lement aider au diagnostic dans des cas difficiles, métalliques au niveau de 37 et 47 pour le cas cli-
puisqu’il s’agit d’un moyen réversible de tester nique 1 ; l’avulsion de 34 suivie d’une dévitalisation
les réponses musculaires ou articulaires avant un de 35 et réalisation d’une couronne avec « exten-
changement important provoqué par des réponses sion de drapeau » et/ou d’implant et couronne en
prothétiques. Comme dans les cas décrits dans 26 sous réserve de la bonne qualité osseuse chez
cet article, la gouttière occlusale constitue un la patiente du second cas clinique. Néanmoins,
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