Le Trouble Bipolaire
Le Trouble Bipolaire
Le Trouble Bipolaire
Département d’urgences et
post-urgences psychiatriques
Responsable de l’Unité :
Pr P. Courtet
Le trouble bipolaire
Guide à l’usage des patients et des familles
CHU de Montpellier
Hôpital Lapeyronie
Pôle Urgences
371 avenue du Doyen G. Giraud
34295 Montpellier cedex 5
www.chu-montpellier.fr
Le trouble bipolaire (également connu sous le nom de maladie maniaco-dépressive)
est un trouble biologique sévère affectant de 1 à 8% de la population
générale.
SOMMAIRE
La grossesse .......................................................................... 51
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QU’EST-CE QUE LE TROUBLE BIPOLAIRE ?
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Comment faire le diagnostic ?
• L’épisode maniaque
La manie débute souvent par un sentiment agréable d’énergie augmentée,
de créativité et d’aisance sociale.
Cependant, ces impressions progressent rapidement vers une euphorie
excessive (humeur extrêmement élevée) ou vers une importante irritabilité.
Les sujets souffrant de manie manquent typiquement d’insight (regard
critique sur soi), nient tout problème et se mettent en colère contre ceux
qui leur font des réflexions.
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L’épisode maniaque
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• L’épisode hypomaniaque
L’hypomanie est une forme de manie avec des symptômes similaires
mais moins intenses et causant moins de retentissement.
Durant un épisode hypomaniaque, la personne présente une humeur
élevée, se sent mieux que d’habitude et est plus productive.
Ces épisodes peuvent être si agréables que certains patients cherchent
à les retrouver en arrêtant leur traitement. Cependant, l’hypomanie peut
rarement être maintenue indéfiniment et elle est souvent suivie d’une
escalade vers la manie ou d’une chute vers la dépression.
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• L’épisode mixte
Les épisodes probablement les plus troublants sont ceux incluant à la
fois des symptômes de manie et de dépression, symptômes ayant lieu
en même temps ou alternant rapidement durant la journée. Les personnes
sont excitables ou agitées comme dans la manie mais se sentent aussi
irritables et déprimées. Ils sont souvent difficiles à diagnostiquer.
Du fait de la combinaison d’une énergie élevée et de dépression, les
épisodes mixtes présentent le plus grand risque de suicide.
Manie
ou Manie
mixte
Dépression
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• Dans le trouble bipolaire de type II, le patient souffre d’épisodes
hypomaniaques et dépressifs sans aucun épisode maniaque ou mixte. Il
s’agit de la forme la plus fréquente.
Cette forme est souvent difficile à reconnaître car l’hypomanie peut
sembler normale si la personne est très productive et évite d’être impliquée
dans des problèmes sérieux. Les personnes avec un trouble bipolaire ne
recherchent pas d’aide pour les hypomanies mais seulement pour les
dépressions. Malheureusement, si un thymorégulateur n’est pas prescrit
avec un antidépresseur dans le cadre d’un trouble bipolaire II non
reconnu, l’antidépresseur seul peut être responsable d’une exaltation de
l’humeur ou rendre les cycles plus fréquents.
Hypomanie Hypomanie
Dépression
Les épisodes peuvent durer quelques jours, quelques mois et parfois même
quelques années. En moyenne, sans traitement, les épisodes maniaques
ou hypomaniaques durent quelques mois alors que les dépressions durent
souvent autour de six mois.
Certaines personnes guérissent complètement entre les épisodes et
peuvent vivre plusieurs années sans aucun symptôme alors que d’autres
continuent à avoir une dépression de faible intensité mais gênante ou de
légères oscillations de l’humeur.
Cycles rapides
Manie
Dépression
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Existe t-il des troubles psychiatriques pouvant être
confondus ou coexister avec le trouble bipolaire ?
Le trouble bipolaire peut être confondu avec d’autres troubles incluant
le trouble dépressif récurrent (unipolaire), une variété de troubles anxieux
et de troubles psychotiques (comme la schizophrénie et le trouble schizo-
affectif). Ceci est dû au fait que l’anxiété et les symptômes psychotiques
ont souvent lieu durant le cours du trouble bipolaire.
Les personnes avec un trouble bipolaire souffrent par ailleurs fréquem-
ment de troubles psychiatriques dits comorbides (c’est à dire qu’ils sont
présents en plus du trouble bipolaire). Les plus fréquents sont les abus
de substances, le trouble obsessionnel compulsif et le trouble panique.
N’hésitez pas à demander à votre médecin comment il est arrivé au
diagnostic si vous avez des doutes.
• Le suicide
Le risque est élevé dans les années initiales de la maladie.
Presque un individu sur dix avec un trouble bipolaire mourra de suicide
ce qui en fait l’une des maladies psychiatriques les plus létales.
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Cette théorie d’une vulnérabilité innée (voir ci-dessous) interagissant avec
l’environnement est similaire aux théories proposées pour d’autres
troubles médicaux. Par exemple, dans les maladies cardiaques, une
personne peut hériter d’une tendance à avoir un taux de cholestérol
élevé ou une pression artérielle élevée, ce qui peut causer des diffi-
cultés croissantes d’oxygénation de son cœur. Durant un stress, comme
un effort physique ou une émotion, cette personne peut brutalement
développer une douleur de la poitrine ou avoir une crise cardiaque si
son oxygénation devient trop basse.
Le traitement dans ce cas est de prendre un médicament pour abaisser
le cholestérol ou la pression artérielle (c’est à dire traiter la maladie sous-
jacente) et dans le même temps changer de style de vie (par exemple :
exercice physique, régime, réduction du stress, qui peuvent enclencher des
épisodes aigus). De la même manière, dans le trouble bipolaire, nous
utilisons des thymorégulateurs pour traiter la maladie biologique
sous-jacente et dans le même temps nous recommandons des chan-
gements de style de vie (par exemple réduire le stress, avoir de bonnes
habitudes de sommeil, éviter l’abus de substance) de manière à réduire les
risques de rechute.
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Comment soigne t-on
le trouble bipolaire ?
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Comment soigne-t-on le trouble bipolaire ?
Types de traitements
• L’hygiène de vie.
Etapes du traitement
• Phase aiguë
Le traitement tend à mettre fin à l’épisode actuel maniaque, hypoma-
niaque, dépressif ou mixte.
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Les médicaments
• La carbamazépine (Tégrétol®)
La carbamazépine est originellement un anticonvulsivant.
Bien que moins d’études cliniques aient été réalisées, elle semble avoir un
profil similaire à l’acide valproïque. La carbamazépine cause couramment
une sédation et des effets secondaires gastro-intestinaux. Du fait d’un
risque rare d’atteinte de la moelle osseuse et d’une atteinte hépatique,
des tests sanguins réguliers sont également nécessaires durant le
traitement.
Parce que la carbamazépine a des interactions compliquées avec
d’autres médicaments, il est important de la surveiller lorsqu’elle est
combinée à d’autres traitements. La carbamazepine peut être remplaçée
par l’oxcarbamazepine (Trileptal®), molécule soeur qui présente moins
de problème de ce genre mais n’a pas l’Autorisation de Mise sur le Marché
(AMM) dans l’indication Trouble Bipolaire.
Les antidépresseurs
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Autres médicaments
• Les antipsychotiques (ou neuroleptiques), en dehors de leur action
régulatrice de l’humeur (voir plus haut) sont utilisés pour contrôler les
symptômes psychotiques comme les délires ou les hallucinations qui ont
parfois lieu dans les dépressions ou les épisodes maniaques sévères. Les
neuroleptiques peuvent aussi être utilisés comme sédatifs, en particulier
durant les premières étapes du traitement, contre l’insomnie, l’anxiété
et l’agitation. Il existe deux types de neuroleptiques : les anciens (souvent
appelés «typiques» ou conventionnels) et les nouveaux (ou «atypiques»).
Un des problèmes sérieux concernant les anciens neuroleptiques est
le risque d’un trouble moteur permanent appelé dyskinésie tardive,
risque bien plus faible pour les neuroleptiques atypiques.
C’est pourquoi ces derniers sont actuellement utilisés en première intention
quand un neuroleptique est nécessaire.
Il s’agit de : la clozapine (Léponex®), l’olanzapine (Zyprexa®), la rispéridone
(Risperdal®), l’aripiprazole (Abilify®).
Parmi les neuroleptiques conventionnels, nous noterons l’halopéridol
(Haldol®), la cyamémazine (Tercian®) ou la lévomépromazine (Nozinan®).
Ces médicaments ne sont pas prescrits en première intention.
Episode dépressif
L’hospitalisation
Les patients avec un trouble bipolaire de type I sont le plus souvent
hospitalisés à un moment de leur maladie parce que l’accès maniaque
affecte l’évaluation de leur propre état et leur jugement. Les personnes
ayant une manie sont souvent hospitalisées contre leur volonté (Hos-
pitalisation à la demande d’un Tiers (HDT)), plus rarement Hospitalisation
d’Office (HO), ce qui peut être très éprouvant pour les patients comme
pour leurs proches. Cependant, la plupart des personnes maniaques sont
reconnaissantes après-coup des soins reçus même si à ce moment là
cela a été donné contre leur volonté. L’hospitalisation devrait être consi-
dérée lors des circonstances suivantes quand :
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Cependant, la recherche montre très clairement qu’arrêter un traitement
de maintenance aboutit presque toujours à une rechute, souvent dans
les semaines ou les mois suivant l’arrêt.
Dans le cas du lithium, le taux de suicide augmente de manière importante
après cessation du traitement. Il existe des preuves montrant que l’arrêt
brutal du lithium peut progressivement conduire à un plus grand risque
de rechute.
Donc, si vous devez interrompre votre traitement, cela doit être fait de
manière progressive sous supervision médicale rapprochée.
Même ces conditions ne sont pas des raisons absolues d’arrêt et des
traitements de remplacement peuvent être trouvés.
Vous devez discuter chacune de ces situations avec votre médecin.
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La psychoéducation :
apprendre à vivre avec un trouble bipolaire
Une autre part importante du traitement est l’éducation.
Le centre expert bipolaire Languedoc Roussillon propose aux patients
souffrant d’un trouble bipolaire diagnostiqué et suivi par un psychiatre
référent ainsi que leurs familles des groupes de psychoéducation. Ces
séances permettent de mieux connaître le trouble bipolaire et sa prise en
charge afin de mieux y faire face.
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De légers changements d’humeur, de sommeil, d’énergie, d’estime de
soi, d’intérêt sexuel, de concentration, de volonté de s’investir dans de
nouveaux projets, des pensées de mort ou au contraire un optimisme
soudain, même des modifications d’habillage et de soins peuvent être
des avertissements précoces d’une rechute imminente. Faites particu-
lièrement attention aux modifications du sommeil car c’est un indice
fréquent de début d’un trouble. N’hésitez pas à demander à votre famille
de surveiller ces signes précoces qui peuvent vous échapper.
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A quelle fréquence dois-je voir mon docteur ?
Durant les accès aigus, dépressifs ou maniaques, la plupart des patients
voient leur médecin au moins une fois par semaine afin de contrôler
l’évolution des symptômes, les doses de médicaments et les effets se-
condaires. Au fur et à mesure de votre amélioration, les contacts sont
moins fréquents. Une fois la récupération complète, vous voyez votre
médecin pour un bref bilan selon un rythme de plusieurs mois.
Tenir à jour un journal est un bon moyen d’aider votre docteur, vous-
même et vos proches à gérer votre maladie. Ceci consiste en un relevé
de vos sensations quotidiennes, vos activités, l’état de votre sommeil,
vos traitements et leurs éventuels effets secondaires, et les événements
importants de votre vie. Le plus souvent, quelques mots suffisent.
Beaucoup de gens aiment utiliser un diagramme de l’humeur s’étendant
du «plus déprimé» au «plus maniaque» que vous ayez connu, le «nor-
mal» se trouvant au milieu. Noter les modifications du sommeil, les
stress de la vie et ainsi de suite peut vous aider à identifier les signes
d’appel d’une dépression ou d’une manie et les types de déclencheurs
qui vous concernent.
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Que peuvent faire votre famille et vos amis
pour vous aider ?
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• Partagez la responsabilité de prendre soin du patient avec d’autres
proches. Cela vous aidera à réduire les effets stressants que la maladie
provoque chez les soignants et préviendra lassitude et amertume.
Les personnes ayant un trouble bipolaire ont comme les autres de bons
et de mauvais jours. L’expérience et la conscience du trouble vous per-
mettront de faire la différence.
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Hygiène de vie
Vous pouvez également réduire les petites variations d’humeur et les
stress qui conduisent parfois à de plus sévères épisodes en faisant atten-
tion à ce qui suit. Ces conseils permettent aussi d’améliorer votre santé
physique ce qui important en général, mais particulièrement pour les
patients bipolaires qui tendent à être en moins bonne santé physique que
la population générale.
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La psychothérapie
La psychothérapie dans le trouble bipolaire aide la personne à gérer les
problèmes de la vie, à faire face aux changements de l’image de soi ou
des projets d’avenir, et à comprendre les effets de la maladie sur les re-
lations importantes. Elle est un complément au traitement et ne remplace
pas les médicaments.
Quand elle est utilisée en phase aiguë, la psychothérapie est plus
adaptée aux dépressions qu’aux manies. Il est en effet difficile pour un
patient maniaque d’écouter le psychothérapeute.
Les psychothérapies au long cours peuvent aider à prévenir les manies
et les dépressions en réduisant les stress qui déclenchent les accès et en
augmentant l’adhésion au traitement.
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Notes personnelles sur ce chapitre
Pensez à noter les médicaments que vous avez reçus, leur posologie
(doses), leur efficacité, leurs effets secondaires éventuels et la durée
du traitement. Notez les mesures que vous avez prises pour améliorer
votre humeur et votre santé physique (rythmes réguliers, alimentation,
activité physique…).
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Le réseau national des centres
experts fondamental
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Centres Experts Troubles Bipolaires en pratique
Patients concernés
Modalités d’accès
Les Centres Experts reçoivent les patients adressés par leur psychiatre ou
leur médecin généraliste. Les évalua-tions réalisées au Centre Expert ne se
substituent pas au suivi réalisé par le médecin ou psychiatre traitant.
Cette organisation est modulable selon les patients et selon les Centres
Experts FondaMental.
Matinée Après-midi
Bilan neuropsychologique
Bilan infirmier : bilan biolo-
(attention, concentration,
gique, prise des constantes
mémoire…)
Bilan somatique : facteurs de
Pause
risque cardiovasculaires, etc.
Évaluation du fonctionnement
social/professionnel, de la
Petit-déjeuner
réactivité émotionnelle, du
sommeil et de la vigilance
Évaluation des symptômes
d’humeur, antécédents
(médicaux et psychiatriques), Auto-questionnaires
revue des traitements et des
effets secondaires
Caractérisation du trouble
bipolaire, des comorbidités
anxieuses, addictives, suicid-
aires
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3 : Au terme des évaluations, un rendez-vous est proposé au patient
afin de faire la restitution des informations obtenues lors du bilan. Des
recommandations sur le mode de prise en charge (modification du trai-
tement médicamenteux, proposition d’interventions psychothéra-peutiques, règles
de surveillance…) sont proposées. Un compte-rendu détaillé est remis au
patient et est adressé au médecin référent.
Un bilan plus restreint est proposé tous les six mois ou tous les ans. Il
vise à surveiller l’évolution des troubles et évaluer l’impact de la prise
en charge préconisée.
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Labellisés par la Fondation FondaMental et hébergés au sein de services
hospitaliers, les Centres Experts Fonda-Mental sont spécialisés dans
l’évaluation, le diagnostic et l’aide à la prise en charge d’une patho-
logie psychiatrique spécifique. Construits autour d’équipes pluri-
disciplinaires, ils utilisent tous les mêmes standards d’évaluation.
Ils sont destinés à faciliter une prise en charge person-nalisée des patients
et permettent le développement de la recherche clinique.
Ses missions
• Inserm
• Assitance Publique des Hôpitaux de Paris
• UPEC
• UPMC
•Paris DESCARTES
• CEA
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Les réseaux des Centres Experts FondaMental
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La grossesse
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52
LA GROSSESSE
Ce risque est surtout lié à une prise durant les 2 mois qui suivent la
conception. C’est le cas des dérivés de l’acide valproïque, de la carba-
mazepine et du lithium. Les antipsychotiques et la lamotrigine n’ont pas
montré de risque particulier sur le développement fœtal à ce jour. Dans
tous les cas, gardez en tête que toute grossesse expose à un risque mal-
formatif, de l’ordre de 1 à 3% en population générale.
• Vous pensez être enceinte alors que vous prenez un traitement thymo-
régulateur. Ne vous affolez pas. Parlez-en rapidement à votre médecin.
Il sera d’abord important de confirmer la grossesse et d’évaluer le terme.
La décision dépendra du traitement que vous recevez et de l’avancée de
la grossesse. Une surveillance rapprochée sans arrêt du traitement pourra
vous être proposée. Ayez à l’esprit que l’arrêt brutal du traitement ex-
pose la mère et l’enfant à des problèmes sérieux à court et long terme.
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En dehors des traitements thymorégulateurs, plusieurs types de traitements
sont possibles durant la grossesse.
• Tous les médicaments passent dans le lait maternel. Il est souvent préfé-
rable de privilégier le lait artificiel.
• Faites vous aider par votre entourage. Les perturbations des rythmes
sont normales et importantes durant les premiers mois de l’enfant, or
vous y êtes sensibles du fait de votre trouble bipolaire.
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Coordonnées utiles
Service de Post Urgences Psychiatriques (accueil 24h/24, 7j/7)
CHU de Montpellier - Hôpital Lapeyronie
Secrétariat : 04 67 33 85 81
Rendez-vous : 04 67 33 82 89
Salle de soins : 04 67 33 85 84
Urgences psychiatriques : 04 67 33 22 93
Fondation Fondamental
Pour des compléments d’information sur le trouble bipolaire
https://www.fondation-fondamental.org/les-maladies-mentales/les-
troubles-bipolaires
ARGOS 2001
Association nationale d’aide aux personnes atteintes de troubles bipolaires
et à leur entourage. Conférences, groupes de paroles.
Antenne Gard-Hérault : 08 71 21 57 00
[email protected] ou [email protected]
http://argos.2001.free.fr
JANUS 34
France Dépression
603 Avenue du Pont Tinquât
Parc des Aiguerelles
34070 Montpellier
Tél : 06 37 26 03 16
e-mail : [email protected] CENTRE HOSPITALIER
UNIVERSITAIRE