Procedure
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Procedure
Monsieur Tony MOUSSA
Docteur en Droit
Conseiller à la Cour de cassation française
Le terme “exécution” vient du latin “exsecutio” qui est le substantif du verbe “exsequi”
lequel signifie “suivre jusqu’au bout”. Et de fait, le seul prononcé d’un jugement ne suffit
pas à remplir son bénéficiaire de ses droits car, sauf exécution volontaire et spontanée,
le jugement doit être suivi d’actes de contrainte afin que le droit consacré par le
jugement trouve son accomplissement, son effectivité. A quoi serviraient, en effet, les
droits subjectifs reconnus par un système juridique si les titulaires de ces droits ne
devaient pas pouvoir en obtenir le respect par des voies, le cas échéant, coercitives ?
Sous cet angle, il a toujours été affirmé un devoir d’exécuter à la charge du débiteur
mais l’accent n’était pas mis sur le droit du créancier à l’exécution qui est pourtant un
droit préexistant et prééminent. Cette prééminence a été consacrée par la Cour
européenne des droits de l’homme dans son célèbre arrêt Hornsby contre Grèce du 19
mars 1997 qui a érigé le droit à l’exécution en un droit de l’homme au sens de l’article 6-
1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,
en en faisant une partie intégrante de l’exigence d’un procès équitable, au même titre
que le droit à un tribunal et à un procès équitable. On ne comprendrait pas, dit la Cour
européenne dans cet arrêt, que l’article 6 par. 1 (art. 6 1) décrive en détail les garanties
de procédure équité, publicité et célérité accordées aux parties et qu’il ne protège pas la
mise en oeuvre des décisions judiciaires. Si cet article (art. 6 1) devait passer pour
concerner exclusivement l’accès au juge et le déroulement de l’instance, cela risquerait
de créer des situations incompatibles avec le principe de la préeminence du droit.
L’exécution d’un jugement ou arrêt, de quelque juridiction que ce soit, doit donc être
considérée comme faisant partie intégrante du "procès" au sens de l’article 6.
Dans des arrêts postérieurs, la Cour européenne a décidé, d’une part, que le délai mis
pour obtenir l’exécution d’un jugement devait être pris en compte pour l’appréciation du
délai raisonnable prévu à l’article 6 de la Convention, d’autre part, que le droit à
l’exécution s’étendait aux actes notariés exécutoires, ce qui détachait le droit à
l’exécution du droit au procès équitable pour en faire un droit fondamental autonome.
Cependant, pour pouvoir invoquer devant la Cour européenne la méconnaissance du
droit à l’exécution d’une décision de justice, il faut qu’il s’agisse d’une décision
définitive, en ce sens qu’elle n’est pas ou n’est plus susceptible de recours ordinaires.
Mais ce droit, fondamental, à l’exécution, quelles qu’en soient la force et la légitimité,
doit lui-même s’exercer dans le strict respect des droits fondamentaux du débiteur. Un
équilibre doit donc être instauré afin que la loi du plus fort ne triomphe pas. Les
législations modernes, dans les Etats de droit, veillent à établir cet équilibre en instituant
des règles dont l’ensemble compose le droit de l’exécution. Pour exposer l’essence de
ce droit sans rester dans la théorie, j’ai choisi l’exemple du droit français car il a fait
l’objet de réformes récentes (1991 et 2006), qui satisfont aux standards européens en
la matière et qui ont inspiré, notamment, l’acte uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, adopté le 10 avril
1998 par l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires, (OHADA).
Avant de passer en revue les grandes lignes de ce droit français de l’exécution, quatre
observations doivent être faites :
C’est un droit où les procédures civiles sont en principe déjudiciarisées, en ce sens
que, sauf en matière de saisie immobilière, de saisie des rémunérations du travail et de
saisie des aéronefs et navires, qui comportent une phase judiciaire, les procédures
peuvent être engagées et menées jusqu’à leur terme sans l’intervention d’un juge.
Certes, un juge existe au sein de chaque tribunal de grande instance : c’est le juge de
l’exécution, juge unique, spécialisé, ayant de très larges pouvoirs et une compétence
exclusive, renforcée. Mais il n’intervient , en règle générale, que pour trancher les
contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée ou pour autoriser, en cas
de besoin, les mesures conservatoires et régler les contestations nées de la mise en
oeuvre de ces mesures. Afin de trancher les difficultés dont il est saisi, il peut examiner
le fond du droit, à condition de ne pas remettre en cause l’autorité de la chose jugée.
Le jugement n’est pas le seul titre exécutoire. D’autres titres exécutoires sont
reconnus par la loi française, notamment les actes notariés revêtus de la formule
exécutoire et les titres délivrés par les personnes morales de droit public qualifiés
comme tels par la loi, ou les décisions auxquelles la loi attache les effets d’un jugement.
Les obligations que le débiteur est tenu d’exécuter peuvent être des obligations de
faire, des obligations de ne pas faire ou des obligations de payer. Faute de temps,
seules les règles relatives à ces dernières seront principalement concernées par mon
exposé.
Ces observations étant faites, les procédures civiles d’exécution en droit français
apparaissent comme un garant de l’équilibre entre les droits des parties à l’exécution
(I). Cependant, le droit français laisse place à de nombreux facteurs déséquilibrants (II).
Le créancier doit pouvoir obtenir l’exécution effective de ses droits (A) mais le débiteur
doit pouvoir défendre ses intérêts légitimes (B). Ce sont les deux objectifs que doivent
permettre d’atteindre les procédures civiles d’exécution.
La loi française du 9 juillet 1991 qui a réformé les procédures civiles d’exécution a
consacré la prééminence du droit du créancier à l’exécution, en énonçant dès son
article 1er que “tout créancier peut, dans les conditions prévues par la loi, contraindre
son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard”. Ce pouvoir de contrainte
trouve sa traduction dans les différentes dispositions dont la loi fait bénéficier le
créancier et dont je vais exposer rapidement les plus importantes.
Ces mesures conservatoires doivent cependant être autorisées par le juge qui est saisi
par voie de simple requête, sans représentation obligatoire et qui statue selon une
procédure non contradictoire. Le créancier doit justifier seulement de la réunion de deux
conditions : une créance paraissant fondée en son principe et des circonstances
susceptibles de menacer le recouvrement de cette créance. L’autorisation préalable du
juge n’est même pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d’un titre exécutoire,
d’une décision de justice qui n’a pas encore force exécutoire, du défaut de paiement
d’une lettre de change acceptée, d’un billet à ordre, d’un chèque ou d’un loyer resté
impayé dès lors qu’il résulte d’un contrat écrit de louage d’immeubles.
Il existe naturellement des délais, prévus à peine de caducité, pour informer le débiteur
de la mesure conservatoire prise et de l’autorisation éventuelle du juge et pour
introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre
exécutoire.
2 - Le créancier a un droit de gage général sur tous les biens de son débiteur.
Le code civil (art. 2284) dispose que quiconque s’est obligé personnellement est tenu
de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à
venir. Ce principe trouve naturellement sa meilleure illustration dans le droit de
l’exécution qui prévoit que, à l’exception des biens déclarés insaisissables par la loi, les
saisies peuvent porter sur tous les biens appartenant au débiteur alors même qu’ils
seraient détenus par des tiers et qu’elles peuvent porter également sur les créances
conditionnelles, à terme ou à exécution successive. Et la Cour de cassation a jugé
qu’une saisie pratiquée au siège social situé en France d’une banque produisait ses
effets sur le compte ouvert par le débiteur auprès d’une succursale située à l’étranger
de cette banque lorsque cette succursale n’a pas la personnalité morale .
6 - L’huissier de justice mandaté par le créancier est en droit d’avoir accès aux
informations nécessaires à l’exécution.
La loi prévoit que les administrations de l’Etat, des régions, des départements et des
communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l’Etat, les régions, les
départements et les communes, les établissements publics ou organismes contrôlés
par l’autorité administrative doivent communiquer à l’huissier de justice chargé de
l’exécution, porteur d’un titre exécutoire, les renseignements qu’ils détiennent
permettant de déterminer l’adresse du débiteur, l’identité et l’adresse de son employeur
ou de tout tiers débiteur ou dépositaire de sommes liquides ou exigibles et la
composition de son patrimoine immobilier, à l’exclusion de tout autre renseignement,
sans pouvoir opposer le secret professionnel.
De même, les établissements habilités par la loi à tenir des comptes de dépôt
(essentiellement les banques) doivent indiquer à l’huissier de justice chargé de
l’exécution, porteur d’un titre exécutoire, si un ou plusieurs comptes, comptes joints ou
fusionnés sont ouverts au nom du débiteur ainsi que les lieux où sont tenus les
comptes, à l’exclusion de tout autre renseignement, sans pouvoir opposer le secret
professionnel.
7 - Les tiers et les tiers saisis sont tenus de collaborer aux mesures d’exécution.
L’effectivité du droit à l’exécution est souvent conditionnée par l’attitude de tiers
étrangers à l’obligation inexécutée et à la procédure d’exécution (les penitus extranei) et
de tiers saisis, ceux entre les mains desquels une saisie est pratiquée contre le
débiteur, soit parce qu’ils sont débiteurs à l’égard du débiteur saisi, soit parce qu’ils
détiennent des biens pour le compte de ce dernier. S’agissant des tiers, la loi précise
qu’ils ne peuvent faire obstacle aux procédures engagées en vue de l’exécution ou de
la conservation des créances et qu’ils doivent y apporter leur concours lorsqu’ils en sont
légalement requis. Il ne s’agit pas là de simples affirmations de principe puisque la loi
ajoute que celui qui, sans motif légitime, se soustrait à ces obligations peut être
contraint d’y satisfaire, au besoin à peine d’astreinte, sans préjudice de dommages
intérêts. Quant au tiers saisi, il peut être condamné au paiement des causes de la
saisie, sauf recours contre le débiteur. Plus précisément, le tiers saisi est tenu de
déclarer au créancier l’étendue de ses obligations à l’égard du débiteur ainsi que les
modalités qui pourraient les affecter et, s’il y a lieu, les cessions de créances,
délégations ou saisies antérieures. Cette déclaration doit être faite sur-le-champ et le
tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements en question peut
être condamné à payer au créancier les sommes dues à ce dernier. Le tiers saisi peut
aussi être condamné à des dommages-intérêts en cas de négligence fautive ou de
déclaration inexacte ou mensongère. En particulier, en cas de saisie-attribution entre
les mains d’un établissement bancaire, l’établissement est tenu de déclarer le solde du
ou des comptes de sommes dargent du débiteur au jour de la saisie, même si l’acte de
saisie ne vise qu’un seul compte et même si l’huissier de justice ne précise pas le
numéro du ou des comptes.
Il peut aussi, et en principe, demander au juge le prononcé d’une astreinte pour vaincre
la résistance du débiteur à l’exécution d’un jugement exécutoire, astreinte dont il pourra
demander la liquidation à son profit et qui ne se confond pas avec les dommages-
intérêts. Il n’est pas inutile de mentionner en outre qu’en cas de condamnation
pécuniaire par décision de justic, le taux de l’intérêt légal est majoré de cinq points à
l’expiration d’un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est
devenue exécutoire, fût-ce par provision (art. L. 313-3 c.mon.fin.)
9 - Les frais de l’exécution forcée sont, en principe, à la charge du débiteur, sauf s’il est
manifeste qu’ils n’étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés.
Quant aux frais occasionnés par une mesure conservatoire, ils sont aussi à la charge
du débiteur sauf décision contraire du juge à l’issue de la procédure.
10 - Le créancier a droit au concours du ministère public pour les besoins de
l’exécution.
L’Etat est tenu, non seulement de prévoir dans sa législation des mesures d’exécution
efficaces, mais aussi de prêter son concours à l’exécution des jugements et des autres
titres exécutoires. C’est pourquoi, l’huissier de justice chargé de l’exécution peut
requérir le concours de la force publique et le refus de l’Etat de prêter son concours
ouvre droit à réparation. Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs rappelé que la règle
selon laquelle tout jugement peut donner lieu à une exécution forcée est le corollaire de
la séparation des pouvoirs et qu’elle ne peut être écartée que pour des circonstances
exceptionnelles tenant à la sauvegarde de l’ordre public. En pratique, la responsabilité
de l’Etat est souvent mise en cause pour refus de concours de la force publique à
l’exécution des jugements ordonnant l’expulsion des logements mais l’Etat évite d’être
condamné en accordant amiablement aux propriétaires des indemnités équivalentes au
montant des loyers ou des indemnités d’occupation impayés à compter du refus de
concours de la force publique.
L’un des objectifs de la réforme du droit de l’exécution en France a été d’humaniser les
procédures d’exécution dans le sens d’une plus grande protection du débiteur de bonne
foi, partie supposée être la plus faible et la plus fragile. Cette protection s’applique à la
vie privée et familiale du débiteur ainsi qu’à ses droits procéduraux et à ses biens. Elle
lui permet aussi d’obtenir des délais de grâce et réparation du préjudice à lui causé
indûment à l’occasion de l’exécution. Elle tend ainsi à lui assurer le respect de ses
droits fondamentaux susceptibles d’être menacés par la mise en oeuvre de mesures
d’exécution.
1 - La protection de la vie privée et familiale du débiteur
Il convient aussi de signaler que lorsqu’il s’agit d’une créance autre qu’alimentaire dont
le montant n’excède pas la somme de 535 euros en principal, il ne peut être procédé à
la saisie des meubles meublant le local d’habitation du débiteur que sur autorisation du
juge de l’exécution ou si le recouvrement de cette créance n’est pas possible par voie
de saisie d’un compte de dépôt ou des rémunérations du travail. A cet effet, un
commandement préalable doit être signifié au débiteur, lui faisant injonction de
communiquer les nom et adresse de son employeur et les références de ses comptes
bancaires ou l’un de ces deux éléments seulement. Ces dispositions visent
manifestement à épargner au débiteur et à sa famille une saisie traumatisante.
Enfin, nous avons vu que, pour parvenir à l’exécution forcée, l’huissier de justice
pouvait obtenir de toute administration ou banque l’adresse du débiteur, l’identité et
l’adresse de son employeur ou de tout tiers débiteur ou dépositaire de sommes liquides
ou exigibles et la composition de son patrimoine immobilier. Cependant, la loi précise
que les renseignements ainsi obtenus ne peuvent être utilisés que dans la seule
mesure nécessaire à l’exécution du ou des titres pour lesquels ils ont été demandés,
qu’ils ne peuvent, en aucun cas, être communiqués à des tiers ni faire l’objet d’un fichier
d’informations nominatives et que toute violation de ces dispositions est passible de
peines délictuelle, sans préjudice, le cas échéant, de poursuites disciplinaires et de
condamnation à dommages intérêts.
2 - La protection des droits procéduraux du débiteur
Cette protection est capitale car elle relève du procès équitable et permet au débiteur
de vérifier le bien-fondé de la mesure d’exécution, d’en connaître l’objet exact et
l’étendue, d’être informé sur ses propres droits, de contester tout comportement illégal
du créancier ou de l’huissier de justice mandaté par ce dernier et de se prévaloir,
devant le juge, de la nullité ou de la caducité des actes ou des opérations d’exécution.
L’on comprend ainsi que, pour être efficace, cette protection implique nécessairement
une information minimale du débiteur à l’occasion de chaque acte d’exécution. D’où les
importantes conditions de forme imposées par la loi à propos de chaque acte ou
opération d’exécution et qui ne doivent pas étonner. Ihéring n’a-t-il pas écrit que la
forme est la soeur jumelle de la liberté ?
Il est cependant impossible de faire ici une énumération complète des informations
devant être portées à la connaissance du débiteur. Je me bornerai donc à indiquer que
chaque mesure d’exécution forcée ou conservatoire pratiquée contre le débiteur doit lui
être signifiée par un acte d’huissier de justice comportant généralement, à peine de
nullité, les éléments d’identification du créancier et du débiteur, l’énonciation du titre en
vertu duquel la mesure est pratiquée, s’il s’agit d’une obligation monétaire, le décompte
distinct des sommes réclamées en principal, intérêts et frais, la nature de la mesure
pratiquée et ses effets, les obligations découlant de cette mesure, la désignation de la
juridiction devant laquelle les contestations pourront être portées, le délai, quand il est
limité, avant l’expiration duquel les contestations doivent être soulevées. En outre,
lorsqu’une saisie a été pratiquée entre les mains d’un tiers, une copie du procès-verbal
de saisie, comportant notamment la réponse du tiers saisi, doit être signifiée au
débiteur. S’il s’agit d’une saisie immobilière, le commandement valant saisie doit
indiquer, en outre et notamment, que le débiteur, personne physique, peut demander le
bénéfice de l’aide juridictionnelle s’il en remplit les conditions et qu’il a la faculté de
saisir la commission de surendettement des particuliers s’il estime être en situation de
surendettement. Il faut ajouter que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux
auxquels ils sont opposés qu’après leur avoir été notifiés, à moins que l’exécution n’en
soit volontaire.
b) Lorsqu’un compte bancaire fait l’objet d’une saisie, le tiers saisi doit laisser à la
disposition du débiteur personne physique, sans qu’aucune demande soit nécessaire,
et dans la limite du solde créditeur au jour de la saisie, une somme à caractère
alimentaire d’un montant fixé pour 2011 à 466,99 euros, et ce, même si le solde
créditeur ne provient pas de sommes insaisissables.
c) En cas de saisie-vente, le débiteur dispose d’un délai d’un mois pour trouver et
proposer un acquéreur à l’amiable et éviter ainsi la vente des biens saisis aux enchères
publiques.
f) Que la saisie soit mobilière ou immobilière, elle doit être précédée de publicités
destinées à attirer les enchérisseurs et, donc, à obtenir le prix de vente le plus élevé
possible, ce qui éteindrait d’autant les droits du ou des créanciers et permettrait de
remettre le solde restant éventuellement disponible au débiteur, lequel doit toujours être
informé des date et lieu de la vente.
e) En cas de saisie de son véhicule, le débiteur peut toujours demander au juge de
l’exécution d’ordonner la mainlevée de cette saisie en invoquant tout motif dont la
légitimité sera appréciée par le juge.
D’une manière générale, le débiteur peut former des demandes en réparation fondées
sur l’exécution dommageable des mesures d’exécution forcée ou des mesures
conservatoires. La loi prévoit en effet que le juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner
la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des
dommages intérêts en cas d’abus de saisie. Il en va de même en cas de nullité ou de
caducité d’une mesure. Plus spécialement, lorsque le juge ordonne la mainlevée d’une
mesure conservatoire, le créancier peut être condamné à réparer le préjudice causé par
cette mesure et selon la Cour de cassation, cette réparation n’est pas soumise à la
preuve d’une faute. Il peut être ajouté que l’huissier de justice chargé de l’exécution
peut lui-même être condamné à payer des dommages-intérêts au débiteur s’il
méconnaît ses propres obligations.
Quand l’obligation à exécuter est une obligation de payer, le débiteur peut solliciter des
délais pour s’en acquitter, sauf s’il s’agit d’une dette d’aliments et sauf si le créancier a
déjà pratiqué une saisie attributive couvrant la totalité de sa créance. Le juge peut alors,
compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier,
reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, dans la limite de deux années.
Avantage supplémentaire : Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que
les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit
qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le
capital. En tout cas, la décision du juge, quand il accorde des délais, suspend
l’exécution du jugement et les procédures d’exécution mobilières et immobilières qui
auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités
encourues à raison du retard cessent d’être dues pendant le délai fixé par le juge.
En matière d’expulsion d’un local d’habitation, des règles spécialement protectrices sont
prévues car l’expulsion heurte de front le droit au logement, reconnu par la loi française.
En résumé :
Sauf disposition spéciale, l’expulsion ou l’évacuation d’un immeuble ou d’un lieu
habité ne peut être poursuivie qu’en vertu d’une décision de justice ou d’un procès
verbal de conciliation exécutoire. Les autres titres exécutoires sont ainsi exclus.
L’expulsion ne peut être réalisée qu’après signification d’un commandement d’avoir à
libérer les locaux.
Si l’expulsion porte sur un local affecté à l’habitation principale de la personne
expulsée ou de tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un
délai de deux mois qui suit le commandement. Toutefois, par décision spéciale et
motivée, le juge peut, notamment lorsque les personnes dont l’expulsion a été
ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait ou lorsque la procédure de
relogement effectuée en application de l’article L. 442 4 1 du code de la construction et
de l’habitation n’a pas été suivie d’effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce
délai.
Ils sont nombreux. Certains neutralisent le droit à l’exécution (A). D’autres en limitent la
portée (B). D’autres, enfin, l’anéantissent (C)
Le débiteur qui s’estime être en situation de surendettement peut saisir d’une demande
de traitement de sa situation une commission qui se prononce d’abord sur la
recevabilité de cette demande. En cas de recevabilité, la commission peut, suivant une
procédure contradictoire par rapport à tous les créanciers du débiteur, élaborer un plan
conventionnel de redressement, comportant des mesures de report ou de
rééchelonnement des paiements des dettes, de remise des dettes, de réduction ou de
suppression du taux d’intérêt, de consolidation, de création ou de substitution de
garantie. A défaut de conciliation, elle peut imposer diverses mesures de traitement,
sous réserve du droit de contestation devant le juge ou recommander d’autres mesures
pouvant aller jusqu’à l’effacement partiel des créances. Enfin, une procédure de
rétablissement personnel peut aboutir à la liquidation judiciaire du débiteur et, donc, à la
vente de ses biens saisissables et à la distribution du prix de vente entre ses
créanciers.
Cela dit, et c’est ce qui nous importe ici, la décision déclarant la recevabilité de la
demande emporte suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à
l’encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunération consenties par
celui ci et portant sur les dettes autres qu’alimentaires. En outre, Si la commission
déclare le dossier du débiteur recevable, elle peut saisir le juge aux fins de suspension
des mesures d’expulsion du logement du débiteur. Plus défavorable au créancier : A la
demande du débiteur, la commission peut saisir, avant la décision de recevabilité, le
juge aux fins de suspension des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des
biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunération consenties par celui ci et
portant sur les dettes autres qu’alimentaires. Cependant, lorsqu’en cas de saisie
immobilière la vente forcée a été ordonnée, le report de la date d’adjudication ne peut
résulter que d’une décision du juge chargé de la saisie immobilière, saisi à cette fin par
la commission, pour causes graves et dûment justifiées.
1- Les créanciers auxquels la déclaration d’affectation est opposable et dont les droits
sont nés à l’occasion de l’exercice de l’activité professionnelle à laquelle le patrimoine
est affecté ont pour seul gage général le patrimoine affecté ;
2- Les autres créanciers auxquels la déclaration est opposable ont pour seul gage
général le patrimoine non affecté.
L’on sait que le pouvoir de contrainte est un monopole des Etats souverains. Il ne peut
donc s’exercer, en principe, que sur des biens situés sur le territoire de L’Etat et c’est la
loi de cet Etat qui s’applique aux mesures d’exécution pratiquées sur son territoire. A
l’évidence, ce principe complique la tâche du créancier lorsque les biens de son
débiteur sont situés à l’étranger. C’est la raison pour laquelle des instruments
internationaux ont été mis en place, soit pour faciliter le recouvrement des aliments,
créance hautement privilégiée (Règlement CE n 4/2009 du 18 déc. 2008, relatif au
recouvrement des créances alimentaires transfrontalières - Convention de La Haye du
23 nov. 2007 sur le recouvrement international des aliments et le Protocole de La Haye
de la même date - Convention de New-York, ONU, du 20 juin 1956 sur le recouvrement
des aliments à l’étranger), soit pour faciliter la circulation des titres judiciaires
exécutoires (Règlement CE n 805/2004 portant création d’un titre exécutoire européen
- Règlement CE n 1896/2006 du 12 déc. 2006 instituant une procédure européenne
d’injonction de payer). Mais il ne s’agit là que de solutions partielles. Voulant aller plus
loin, la Commission européenne publiera avant l’été 2011 une proposition législative
instituant une saisie européenne des avoirs bancaires. Pour 2013, il est annoncé une
proposition législative relative à la transparence du patrimoine des débiteurs. Enfin, et
c’est très important, le 4 décembre 2010, la Commission européenne a publié une
proposition de révision du Règlement 44/2001, dit Règlement Bruxelles I, qui abolira la
procédure d’exequatur des décisions judiciaires relevant du champ d’application du
Règlement, mises à part les décisions rendues dans certaines matières. Le créancier
est encore loin du compte. On peut cependant rappeler la jurisprudence de la Cour de
cassation française sur la saisie au siège social d’une banque, situé en France, de
comptes détenus à l’étranger par une succursale n’ayant pas la personnalité morale. Il
ne faut non plus perdre de vue les accords internationaux bilatéraux.
Dès son article 1er, la loi du 9 juillet 1991 énonce que l’exécution forcée et les mesures
conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d’une immunité
d’exécution. Vaste sujet ! Rappelons seulement que les immunités exécution
bénéficient :
• à toutes les personnes morales françaises de droit public, y compris les
établissements publics à caractère industriel et commercial. Le législateur a cependant
prévu des moyens de pression pour parvenir à une exécution spontanée (astreinte,
intérêts, publication des noms des récalcitrants par le Conseil d’Etat, responsabilité
personnelle du comptable public sous certaines conditions, condamnation de l’Etat
français à payer des dommages-intérêts d’un montant équivalent, en principal et
intérêts, à la dette non payée par une commune malgré de nombreuses et longues
procédures...),
2 - L’insaisissabilité des biens des banques centrales étrangères (art. L.153 1 c. mon.
fin.) :
Ne peuvent être saisis les biens de toute nature, notamment les avoirs de réserves de
change, que les banques centrales ou les autorités monétaires étrangères détiennent
ou gèrent pour leur compte ou celui de l’Etat ou des Etats étrangers dont elles relèvent.
Par exception aux dispositions du premier alinéa, le créancier muni d’un titre exécutoire
constatant une créance liquide et exigible peut solliciter du juge de l’exécution
l’autorisation de poursuivre l’exécution forcée dans les conditions prévues par la loi n
91 650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution s’il établit
que les biens détenus ou gérés pour son propre compte par la banque centrale ou
l’autorité monétaire étrangère font partie d’un patrimoine qu’elle affecte à une activité
principale relevant du droit privé.