Extrait 42707210
Extrait 42707210
Extrait 42707210
Spectrométrie atomique
et spectrométrie moléculaire
III
Cet ouvrage fait par tie de
Techniques d'analyse
(Réf. Internet ti630)
composé de :
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
IV
Cet ouvrage fait par tie de
Techniques d'analyse
(Réf. Internet ti630)
Gwenola BURGOT
Professeur à l'université de Rennes 1
Pierre LE PARLOUËR
Docteur Ingénieur, Consultant société Thermal Consulting
Gérard DURAND
Professeur honoraire à l'École Centrale de Paris, Consultant
Patrick MAUCHIEN
Chef du Service de Chimie Physique au Commissariat à l'Énergie Atomique
Saclay
Philippe QUEVAUVILLER
Commission Européenne, DG Environnement
Jean-François HENNINOT
Professeur, université d'Artois, unité de Catalyse et de Chimie du Solide, équipe
Couches Minces et Nanomatériaux
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
VI
Spectrométrie atomique et spectrométrie moléculaire
(Réf. Internet 42707)
SOMMAIRE
Avancées technologiques des sources et capteurs térahertz. Vers le transfert industriel P2145 101
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
VII
Ondes électromagnétiques térahertz. Applications AF3255 115
Spectromètres RMN de paillasse pour l’analyse en ligne de réactions en flux continu J8015 121
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
Spectrométrie atomique et spectrométrie moléculaire
(Réf. Internet 42707)
1
1– Spectrométrie atomique Réf. Internet page
2– Spectrométrie moléculaire
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
9
1
10
Référence Internet
P2655
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 655 − 1
11
Référence Internet
P2655
1. Les différents processus évident : chaque substance, à l’état atomique ou moléculaire, pré-
sentant un spectre caractéristique, tant en émission qu’en absorp-
d’interaction rayonnement- tion (ou éventuellement en diffusion ou en fluorescence), il suffit de
reconnaître la présence de ce spectre pour avoir la preuve de la pré-
matière sence de la substance correspondante dans un mélange.
L’analyse quantitative est évidemment basée sur des lois qui
relient, de façon plus ou moins précise, l’intensité du rayonnement
L’interaction du rayonnement électromagnétique avec la matière
1
émis ou, plus souvent, absorbé, à la concentration de la substance
peut prendre différentes formes ; nous distinguerons ainsi successi- correspondante. La plus simple est la loi de Beer-Lambert.
vement les processus d’émission, d’absorption, de fluorescence et
de diffusion. Cette loi exprime la fraction d’énergie qui est absorbée lorsqu’un
rayonnement traverse une substance en solution, en fonction d’une
L’émission de rayonnement, s’accompagnant du transfert d’un part de l’épaisseur traversée z, d’autre part de la concentration C.
certain flux d’énergie de la source vers le milieu extérieur, exige que
la matière constituant cette source ait été préalablement excitée, Seules interviennent, naturellement, les pertes d’énergie corres-
c’est-à-dire qu’elle ait elle-même reçu une quantité correspondante pondant effectivement à l’absorption du rayonnement par la
d’énergie. Cette excitation peut revêtir de nombreuses formes (exci- matière, en excluant tout phénomène accessoire tel que la réflexion
tations thermique, électrique, par bombardement électronique, sur les faces de la cuve contenant la solution ou éventuellement la
etc.). Dans tous les cas, on dit qu’il s’agit d’une émission spontanée diffusion.
de rayonnement, caractérisée par le fait que les vibrations émises À la traversée d’une épaisseur élémentaire dz d’une substance
par les différents points de la source sont incohérentes. absorbante, l’énergie transportée par un faisceau parallèle subit une
Dans le cas de l’absorption, c’est au contraire le rayonnement diminution relative proportionnelle à dz. La variation correspon-
incident qui apporte au matériau absorbant une certaine quantité dante dI de l’intensité de ce faisceau est donc :
d’énergie. Il faut noter que l’absorption s’accompagne toujours, en dI = − k Idz
fait, d’une certaine émission de rayonnement, mais dont le proces-
sus est tout à fait différent de celui évoqué précédemment. Il s’agit Si I0 est l’intensité incidente, l’intensité émergente après traver-
de l’émission induite (ou stimulée), phénomène intimement lié à sée de l’épaisseur z de substance est alors :
l’absorption et qui, contrairement à l’émission spontanée, est carac- I = I0 e−kz
térisé par la parfaite cohérence des vibrations émises par les diffé-
rents points de la source. L’émission stimulée n’apparaît pas Cette relation traduit la loi de Lambert, qui s’applique à toute
directement dans une expérience classique, car elle ne fait que se substance absorbante ; k est le coefficient d’absorption de celle-ci.
retrancher de l’absorption, qui reste prépondérante et qui la mas- Dans le cas des solutions, on a cherché à relier ce coefficient k à la
que. Mais c’est le phénomène qui est à la base du fonctionnement concentration. Si l’on admet que, dans un élément de volume,
des lasers et, de façon générale, des sources cohérentes de rayon- l’énergie absorbée est proportionnelle au nombre de molécules ren-
nement électromagnétique. Son importance est donc considérable ; contrées par le rayonnement, on obtient la loi de Beer, selon
nous n’aurons cependant pas la possibilité de l’évoquer dans le laquelle le coefficient d’absorption k d’une solution est proportion-
cadre de cet article, malgré le rôle actuellement joué par les lasers nel à sa concentration C :
en spectroscopie (cf. article spécialisé [21] de ce traité).
k=a·C
Indépendamment du cas de l’émission induite, non directement
observable dans une expérience classique, la matière soumise à un a étant un facteur constant pour une substance et un rayonnement
rayonnement primaire peut réémettre un rayonnement secondaire, monochromatique donnés.
de même longueur d’onde ou de longueur d’onde différente. Si le L’intensité transmise par une épaisseur z de solution devient
processus de réémission est précédé d’une absorption du rayonne- donc :
ment excitateur, on dit qu’il s’agit de fluorescence, tandis que s’il
n’y a pas absorption préalable, on parle de diffusion. I = I0 e−aCz
C’est la loi de Beer-Lambert.
Le spectre électromagnétique s’étend sur un très vaste Le facteur de transmission T de la substance est :
domaine de fréquences (ou de longueurs d’onde), depuis les ondes
hertziennes les plus longues jusqu’aux rayons γ. Dans ce qui suit, T = I/I0 = e−aCz
nous rencontrerons successivement :
et sa densité optique D :
— les spectres optiques des atomes, qui s’étendent de l’ultravio-
let à l’infrarouge proche, c’est-à-dire très approximativement depuis D = − lg T = KCz
des longueurs d’onde inférieures à 100 nm jusqu’à quelques avec K ≈ 0,434 a.
micromètres ;
— les spectres de rayons X, dans le domaine de longueurs Contrairement à la loi de Lambert qui est rigoureuse, la loi de Beer
d’onde compris entre environ 0,01 nm et 10 nm ; n’est qu’approximative et l’on doit, dans chaque cas, s’assurer que
— les spectres moléculaires qui s’étendent de l’ultraviolet au sa validité est suffisante, compte tenu des autres causes d’erreur
domaine hertzien. possibles.
L’étude des différents types d’interaction que nous venons d’évo- En principe, cette loi s’applique bien aux solutions diluées de
quer − émission, absorption, fluorescence, diffusion −, constitue substances formées de molécules non polaires. En effet, en solution
l’objet de la spectroscopie des rayonnements électromagnétiques, diluée, les molécules polaires ont tendance à s’associer à celles du
qui joue un rôle capital dans la connaissance des caractéristiques de solvant, d’où résulte une modification du moment dipolaire, donc
la matière. Cette connaissance se situe d’ailleurs aux deux niveaux de l’absorption. En solution concentrée, elles ont tendance à s’asso-
microscopique et macroscopique. cier entre elles. Dans le cas des solutions électrolytiques, la loi de
Beer s’applique en général assez bien aux électrolytes forts, tant que
Au niveau microscopique, il s’agit d’études de structure de la la concentration ne dépasse pas une valeur de l’ordre de 1 mol/litre.
matière. Il en va différemment pour les électrolytes faibles, avec lesquels la
Du point de vue macroscopique, la spectroscopie est également loi de Beer ne s’applique à peu près correctement que pour des
utilisée de façon intensive pour faire des analyses qualitatives et solutions très diluées (10−2 mol/litre par exemple), car le degré de
quantitatives (dosages). Le principe de l’analyse qualitative est dissociation varie avec la concentration.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 655 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
12
Référence Internet
P2655
atomiques 1 1
1 ⁄ λ = R H -------- Ð ------ = T m Ð T n
m2 n2
dans laquelle m et n sont deux nombres entiers.
2.1 Généralités Il apparaît ainsi une suite de nombres Ti ou termes spectraux,
dépendant d’un seul indice, et le nombre d’ondes de toute raie du
spectre est la différence Tm − Tn de deux de ces termes. Cette règle
1
Les spectres d’émission et d’absorption des atomes sont formés ne s’applique d’ailleurs pas qu’à l’atome d’hydrogène, mais est très
d’un certain nombre de raies qui sont plus ou moins fines suivant générale en spectroscopie.
l’état du milieu considéré. Chaque atome est caractérisé par un ensemble de termes spec-
traux et le nombre d’ondes de toute raie, tant en émission qu’en
Le plus simple des atomes, celui de l’hydrogène, émet un spectre absorption, est la différence de deux de ces termes. C’est le principe
qui est lui-même relativement simple, tandis que les spectres des de combinaison de Ritz (1908).
atomes lourds sont extrêmement complexes. Le spectre de l’atome
d’hydrogène fut ainsi celui sur lequel portèrent les premières tenta- Mais le nombre d’ondes d’une radiation étant proportionnel à sa
tives d’interprétation théorique et il a joué un rôle extrêmement fréquence ν, donc à l’énergie E = hν des photons correspondants, le
important de ce point de vue. principe de combinaison s’applique aussi aux énergies, sous la
forme :
Le lecteur pourra trouver des informations complémentaires dans
les ouvrages de référence [3, 4, 5, 6, 7, 8]. E = hν = hc/λ = hc (Tm − Tn)
avec h constante de Planck,
c vitesse de lumière.
2.2 Spectre de l’atome d’hydrogène Le lecteur peut trouver dans le tableau 1 les valeurs des principa-
les constantes physiques fondamentales utilisées dans cet article.
2.2.1 Généralités
Tableau 1 – Valeurs des principales constantes
Dans sa partie visible, le spectre de l’atome H comprend quatre de physique utilisées (1)
raies dites de Balmer, respectivement rouge, bleue, indigo et vio-
lette, et notées Hα, Hβ, Hγ, Hδ. Cette série se prolonge dans l’ultravio- Grandeur Valeur Unité
let et comporte en fait une infinité de raies qui se resserrent au fur et
à mesure que la longueur d’onde diminue et dont la position tend Charge de l’électron e = 1,602 177 33 (49) x 10−19 C
vers une limite située à λ = 364,5 nm. Masse de l’électron me = 9,109 389 7 (54) x 10−31 kg
Les nombres d’ondes de toutes ces raies sont représentés, avec Masse du proton mp = 1,672 623 1 (10) x 10−27 kg
une exactitude remarquable, par la relation de Balmer :
Rapport des masses mp/me mp/me = 1 836, 152 701 (37)
1 1
σ B = ( 1 ⁄ λ ) B = R H ------ Ð ------ Vitesse de la lumière c = 299 792 458 m/s
22 n2
Constante de Planck h = 6,626 075 5 (40) x 10−34 J·s
avec RH constante de Rydberg (pour l’hydrogène),
Constante de Planck h/2π = 1,054 572 66 (63) x 10−34 J·s
n entier supérieur ou égal à 3. réduite
En étendant les études vers l’ultraviolet et vers l’infrarouge, on a Permittivité du vide ε0 = 8,854 187 817 x 10−12 F/m
pu vérifier que les autres raies du spectre de H pouvaient aussi se
grouper en séries et que, dans chaque série, les nombres d’ondes Perméabilité du vide µ0 = 12,566 370 614 x 10−7 N · A−2
étaient parfaitement représentés par une relation du type précédent. Constante de Rydberg R∞ = 10 973 731,534 (13) m−1
On a ainsi, dans l’ultraviolet, la série de Lyman, avec n b 2 :
Magnéton de Bohr µB = 9,274 015 4 (31) x 10−24 J/T
1 1 Magnéton nucléaire µN = 5,050 786 6 (17) x 10−27 J/T
σL = ( 1 ⁄ λ )L = RH ------ Ð ------
12 n2 (1) Source : Handbook of Chemistry and Physics, 74th ed. 1993, CRC Press.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 655 − 3
13
Référence Internet
P2655
1 50 000
de Balmer rience. Il a ainsi trouvé que le module du moment cinétique σ de
l’électron devait être un multiple entier de la quantité h/2π.
Il est commode de représenter sur un diagramme les différents Nous considérons maintenant, non plus spécialement l’atome
niveaux d’énergie (ou les termes spectraux correspondants) d’un d’hydrogène, mais un atome quelconque. Du fait du mouvement
atome et les transitions correspondantes. On porte en ordonnée les des électrons autour du noyau, cet atome possède à la fois un
valeurs de l’énergie et on trace une droite horizontale pour chacun moment cinétique et un moment magnétique. Ces deux grandeurs,
des niveaux énergétiques possibles de l’atome considéré. Les tran- qui sont qualifiées respectivement de moment cinétique orbital et
sitions sont schématisées par des flèches verticales joignant deux de moment magnétique orbital, sont liées par une simple relation
niveaux (figure 1). de proportionnalité.
Il faut d’ailleurs noter que, en général, toutes les transitions que Chacun des électrons, de masse me, animé d’une vitesse v i , pos-
l’on peut imaginer en associant deux niveaux arbitraires ne corres-
pondent pas effectivement à une émission de rayonnement. Il sède en effet le moment cinétique m e r i ∧ v i , le vecteur r i = OA i
existe, pour chaque atome, de nombreuses transitions interdites ;
les transitions permises, qui donnent naissance à une raie spectrale, repérant la position de l’électron par rapport à un point fixe O.
sont indiquées par des règles de sélection. L’ensemble des électrons de l’atome considéré possède donc le
moment cinétique orbital :
Appliquant à l’atome d’hydrogène les règles précédentes de
quantification des niveaux d’énergie, Bohr en a bâti un modèle qui
a joué un très grand rôle dans le développement de la physique ato-
σ L = me ∑ ri ∧ vi
i
mique. Certes, ce modèle ne peut plus être considéré comme satis-
faisant à l’heure actuelle, car il associe, de façon contradictoire, des Par ailleurs, chaque électron, au cours de son mouvement, est
hypothèses de nature quantique et une description classique du assimilable à un petit circuit électrique ; or, on sait que les effets
système atomique. La théorie de Bohr reste néanmoins une étape d’un tel circuit, à des distances suffisamment grandes par rapport à
capitale dans la compréhension des phénomènes atomiques. ses dimensions, sont caractérisés, dans une approximation du pre-
mier ordre, par un moment magnétique µ (moment dipolaire
magnétique). Dans le cas d’une charge ponctuelle qi, on montre
2.3 Théorie de Bohr de l’atome que :
d’hydrogène ú
1
µ = --- q i r i ∧ v i
2
Bohr (1913) utilise le modèle planétaire d’atome, en se restrei-
gnant au cas où l’orbite de l’électron est circulaire. Mais il constate Le moment magnétique orbital de l’atome est donc :
que l’expérience lui impose une condition qui est d’ailleurs en
1
contradiction avec les lois classiques de l’électromagnétisme ; c’est M = Ð --- e ∑ r i ∧ v i
le fait que, malgré le mouvement de l’électron autour du noyau, 2 i
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 655 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
14
Référence Internet
P2655
1
F = M ⋅ ------- = M z ⋅ -------
dz dz
si le champ a la direction O z , se déduit facilement de la déviation
observée, ce qui permet une mesure directe de la composante Mz
O du moment magnétique des atomes sur la direction du champ.
L’expérience montre que, lors de la traversée du champ magnéti-
Figure 2 – Précession de Larmor que, les atomes sont déviés dans un petit nombre de directions bien
définies, ce qui signifie que la composante Mz de leur moment
magnétique sur la direction du champ appliqué ne peut prendre
Les deux vecteurs moment cinétique et moment magnétique elle-même que quelques valeurs particulières. Il en est donc de
sont donc colinéaires, de sens opposés : même pour la composante σz du moment cinétique.
Au cours de leur mouvement de précession autour de B , les vec- Le lecteur se reportera utilement à l’article Mécanique quantique
[22] du traité Sciences fondamentales, ainsi qu’aux ouvrages de
teurs M et σ L font, avec le champ appliqué, un angle θ (figure 2) référence [1] [2].
qui dépend de l’énergie d’interaction entre l’atome et l’induction
appliquée ; cette énergie est en effet :
2.5.1 Notions sur le formalisme
de la mécanique quantique
W = Ð M ⋅ B = Ð M ⋅ B ⋅ cos θ
Des expériences, notamment l’expérience célèbre de Stern et Si la théorie de Bohr a marqué une étape importante dans le déve-
Gerlach (1921) décrite dans l’article [22] des Techniques de l’Ingé- loppement de la physique atomique, elle s’est avérée impuissante à
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 655 − 5
15
1
16
Référence Internet
P2660
Systèmes dispersifs
en spectrométrie atomique
1
par Jean-Michel MERMET
Ingénieur de l’École nationale supérieure de chimie de Strasbourg
Docteur ès sciences
Directeur de recherche au CNRS
Laboratoire des sciences analytiques de l’université Claude-Bernard (Lyon I)
Pour pouvoir utiliser une raie d’un spectre, il est nécessaire de pouvoir l’isoler
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 660 − 1
17
Référence Internet
P2660
1. Spectromètres : Intensité
définitions et types Imax
Profil
En spectrométrie atomique, le système dispersif est un spectro-
mètre c’est-à-dire un instrument spectral qui disperse dans
Imax /2
l’espace une lumière émise par une source de radiation, qui isole ∆λ
une ou des bandes (ou fenêtres) spectrales spécifiques contenant Aile de raie
les raies des analytes, ou des régions contenant le fond spectral
(background ) et qui mesure l’intensité des raies et du fond spectral 0,01 Imax
au moyen d’un ou de plusieurs détecteurs. Continuum
Un spectrographe diffère d’un spectromètre dans la mesure où
tout le domaine spectral permis par le système est enregistré à λ
l’aide d’une plaque ou d’un film photographique. Lorsque l’on uti-
lise des spectrographes, l’analyse qualitative est obtenue en véri- Figure 1 – Profil d’une raie avec l’intensité maximale Imax ,
fiant la présence de plusieurs raies de l’élément concerné, l’analyse la largeur de raie ⌬ , et l’aile de raie
quantitative s’effectue en mesurant l’intensité des raies avec un
densitomètre. Historiquement, les spectroscopes étaient utilisés
pour l’observation visuelle des spectres. Le domaine idéal de longueur d’onde en spectrométrie d’émis-
sion serait de 120 à 770 nm. Le domaine allant de 580 à 770 nm est
Les spectromètres sont classés en deux catégories : les mono-
utilisé pour les alcalins. Le domaine inférieur à 190 nm ne peut être
chromateurs et les polychromateurs. Un monochromateur est un
utilisé qu’en l’absence d’oxygène, celui-ci absorbant les radiations.
spectromètre qui isole une seule bande spectrale spécifique à un
Il est alors nécessaire soit de purger le système avec de l’azote soit
moment donné. Cette bande peut être fixe, ou bien le mono-
d’utiliser le vide. La région entre 160 et 190 nm est utilisée pour
chromateur peut balayer de façon continue un domaine donné de
des éléments comme Al, P et S, alors que la région en dessous de
longueur d’onde, ou encore le monochromateur peut se déplacer
160 nm est utilisée pour des éléments comme Cl, Br, O et N. Dans
séquentiellement d’une bande à une autre. Dans ce dernier cas, le
le cas de la spectrométrie d’absorption atomique, le domaine spec-
monochromateur est appelé système séquentiel. Un poly-
tral est généralement situé entre 180 ou 190 nm et 900 nm.
chromateur est un spectromètre qui isole simultanément plusieurs
bandes spectrales spécifiques. Le système est aussi appelé sys- Tous les spectromètres commerciaux utilisés en analyse sont
tème à lecture directe pour différencier l’utilisation de détecteurs pilotés par ordinateur aussi bien pour l’acquisition des données
de celle de la plaque photographique. Avant l’introduction de la que pour le déplacement de la bande spectrale.
détection multicanal, la position de ces bandes spectrales était fixe.
L’introduction de détecteurs à transfert de charge a modifié la
classification des spectromètres dans la mesure où le détecteur
multicanal est situé à l’emplacement d’une plaque photographi- 2. Réseaux de diffraction
que. On a ainsi sur le même appareillage un spectrographe (acqui-
sition du spectre) et un spectromètre (mesure de l’intensité de
n’importe quelle partie du spectre). Deux différents types de composants ont été utilisés pour la
dispersion de la lumière : le prisme et le réseau de diffraction. La
Il faut noter qu’il peut être nécessaire de mesurer l’intensité du plupart des systèmes commercialisés font appel au réseau à
fond spectral à la longueur d’onde de la raie de l’analyte ou dans cause de ses meilleures caractéristiques de dispersion. Un réseau
le voisinage de la raie pour obtenir l’intensité nette de la raie de de diffraction consiste en une série de traits périodiques et parallè-
l’analyte, tout particulièrement quand l’intensité du fond contribue les sur une surface plate ou concave. Ces traits imposent une
de façon significative à l’intensité brute de la raie (voir § 7). Rappe- variation périodique, en amplitude et phase, à une onde incidente.
lons que l’on appelle largeur de raie ∆ λ la largeur du profil de la Le premier réseau a été conçu par Fraunhofer et le premier réseau
raie qui correspond à la moitié de l’intensité maximale (figure 1). concave a été gravé par Rowland en 1890. Bien que des réseaux
L’aile d’une raie est la partie du profil qui est au-delà de 1 % de puissent travailler par transmission, seuls les réseaux par réflexion
l’intensité maximale. sont actuellement utilisés.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 660 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
18
Référence Internet
P2660
1
sin α – sin β = k λ /a
puisque n = 1/a.
β D
L’équation du réseau devient, dans le cas de la figure 2, c’est-
C à-dire quand les faisceaux incident et diffracté sont de part et
d’autre de la normale au réseau :
A θ B sin α – sin β = k n λ
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 660 − 3
19
1
20
Référence Internet
P2895
Détecteurs de photons
en spectrométrie atomique
1
par Jean-Michel MERMET
Ingénieur de l’École nationale supérieure de chimie de Strasbourg
Docteur ès sciences
Consultant
Spectroscopy Forever
21
Référence Internet
P2895
1. Historique hν
Dynode
Historiquement, l’œil a été le premier détecteur utilisé (spectros-
copie). Sa sensibilité est limitée par définition au domaine du
visible (400-700 nm) et si l’œil peut comparer des intensités entre e
elles, il ne peut évaluer de façon précise une intensité absolue. Anode
Fenêtre
Néanmoins, l’œil est un détecteur sensible, en particulier à la
1
Cathode
lumière jaune, et au XIXe siècle, on a pu détecter quelques mg/L de
Na dans une flamme. La spectrométrie atomique analytique, en
l’occurrence la spectrométrie d’émission, n’a pu devenir quantita-
tive qu’avec l’utilisation de la plaque photographique (spectrogra-
phie). La plaque photographique présente beaucoup d’avantages, HT
en particulier le nombre d’informations qui peuvent y être sto-
ckées. Il est facile d’enregistrer plusieurs spectres complets dans
une large gamme de longueurs d’onde. En revanche, la plaque
nécessite un développement pour révéler l’information, sa dyna-
mique de mesure est très faible et son utilisation pour de l’analyse Cathode Dynodes
quantitative nécessite l’emploi d’un densitomètre et la détermi-
Anode
nation d’une courbe caractéristique. La plaque photographique a
été progressivement abandonnée au profit de détecteurs effec-
tuant une conversion photons-électrons, ce qui permet de générer Figure 1 – Schéma de principe d’un tube photomultiplicateur
un courant proportionnel au nombre de photons (spectrométrie).
Parmi ces détecteurs, le tube photomultiplicateur a connu une
expansion rapide après la seconde Guerre mondiale, ce qui a for- et le fluorure de magnésium. La sélection se fait selon la limite
tement contribué au développement commercial, tout d’abord de inférieure du domaine de longueur d’onde d’intérêt, c’est-à-dire
la spectrométrie d’émission, et ensuite de la spectrométrie 300 nm pour le verre, 185 nm pour le verre spécial UV, 160 nm
d’absorption atomique. Plus récemment, la détection multicanal, pour la silice fondue et 115 nm pour le fluorure de magnésium. Le
fondée sur les détecteurs à transfert de charge, a connu un déve- fluorure de magnésium est utilisé de préférence aux autres halogé-
loppement important et est actuellement implantée dans la majo- nures d’alcalins, car il est le moins sensible à l’humidité,
rité des systèmes commerciaux de spectrométrie d’émission c’est-à-dire aux phénomènes de déliquescence.
fondés sur l’utilisation d’un Plasma à Couplage Inductif (ICP) ou
produit par LIBS (Laser-Induced Breakdown Spectrometry ), et
d’étincelles, et sur quelques appareils de spectrométrie d’absorp- 2.2 Photocathode
tion atomique.
Quel que soit le détecteur, le domaine idéal de longueur d’onde Les premières photocathodes sont apparues dans les années
se situe entre 120 et 770 nm en spectrométrie d’émission atomique 1920. Le principe de la photocathode est fondé sur l’effet photo-
et entre 190 et 900 nm en spectrométrie d’absorption atomique. électrique. L’énergie cinétique maximale des électrons émis par
une photocathode éclairée par un rayonnement de longueur
d’onde λ est donnée par la relation d’Einstein :
2. Tubes E=
hc
− W0
λ
photomultiplicateurs
avec E (J) énergie cinétique maximale,
Un tube photomultiplicateur [1] est un détecteur qui, d’une part, h constante de Planck,
convertit les photons émis par la source de rayonnement en élec- c vitesse de la lumière,
trons, et d’autre part, amplifie ces électrons pour produire un cou-
rant proportionnel au nombre de photons incidents. Cette W0 fonction de travail photoélectrique caractéristique du
technologie date de 1936. Un tube photomultiplicateur est matériau utilisé (varie entre 2,14 eV pour le césium et
constitué d’une enceinte sous vide (10–4 ·Pa) qui comprend 5,9 eV pour le sélénium).
(figure 1) : Il existe deux types principaux de photocathodes : les photoca-
– une fenêtre d’entrée transparente au rayonnement à étudier ; thodes situées en bout du tube (head-on ) et les photocathodes
– une cathode photoémissive qui convertit par effet photo- situées latéralement (side-on ). La plupart des fenêtres en bout
électrique des photons en électrons ; sont du type à transmission, c’est-à-dire que la photocathode est
– des électrodes de focalisation électrostatique pour diriger les semi-transparente (les électrons sont émis de l’autre côté par rap-
électrons ainsi produits vers le multiplicateur d’électrons ; port aux photons incidents) et est produite par dépôt sur la partie
– un multiplicateur d’électrons, constitué d’une série de dynodes intérieure de la fenêtre d’entrée. Elles sont de forme circulaire. Les
portées à des hautes tensions positives et croissantes, et où les photocathodes latérales sont généralement de forme rectangulaire
électrons sont multipliés par émission secondaire ; et opaques pour obtenir un mode par réflexion, les électrons étant
– une anode qui collecte les électrons à la sortie de la dernière émis du même côté que les photons incidents.
dynode. Une caractéristique importante d’une photocathode est sa
réponse spectrale. Elle est généralement exprimée en efficacité
quantique (QE ), qui est le rapport entre le nombre d’électrons pro-
2.1 Fenêtre duits et le nombre de photons incidents. On exprime cette efficacité
quantique en pourcentage. Le maximum de l’efficacité quantique
Son matériau dépend du domaine de longueur d’onde d’intérêt, est de l’ordre de 30 à 40 %. Une autre manière d’exprimer la réponse
en particulier de la réponse spectrale dans l’UV. Les quatre princi- spectrale est la sensibilité radiante S (radiant sensitivity ) qui
paux matériaux utilisés sont le verre, le verre spécial UV, la silice compare le courant I (mA) produit par les photoélectrons à la
22
Référence Internet
P2895
Pλ
I= QE × e
1
de la cathode
I QE × λ
S= =
P 124 10
avec S en mA/W, QE en pourcentage et λ en nm. R928
23
1
24
Référence Internet
P2695
Spectrométrie d’émission
des rayons X. Fluorescence X
1
par Jacques DESPUJOLS
Ingénieur E.C.P., Ingénieur-Docteur, Docteur ès sciences
Ancien Professeur à l’Université de Reims-Champagne-Ardenne
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 695 − 1
25
Référence Internet
P2695
1 ■ Mais ce sont les spectres d’émission qui ont conduit aux techniques les plus
performantes pour l’analyse qualitative et quantitative élémentaire de la matière
solide ou liquide ; les appareils correspondants diffèrent suivant le procédé
d’excitation des spectres :
— l’excitation électronique (on dit aussi cathodique) est utilisée actuellement,
essentiellement, dans les microsondes électroniques et dans les microscopes
électroniques analytiques, notamment dans les microscopes électroniques à
balayage (voir les articles correspondants dans ce traité) ;
— l’excitation à l’aide d’un tube à rayons X ou de radioéléments a donné lieu
à toute une constellation d’appareils d’analyse que nous étudierons dans cet
article. Nous verrons que ces appareils, utilisés tout d’abord principalement
dans les industries métallurgiques, minières, pétrolières et dans les cimenteries,
sont devenus maintenant universels ;
— enfin d’autres procédés d’excitation, demandant des installations plus lour-
des [79] [80], sont aussi utilisés avec succès pour l’analyse.
1. Principes de la Les énergies des niveaux internes sont très peu modifiées par la
liaison chimique.
spectrométrie d’émission X
1.1.2 Transitions entre niveaux
Concernant les études de structures par rayons X, le lecteur
Sous l’influence d’un événement venant de l’extérieur (arrivée
pourra se reporter aux articles [76] [77] [78] [79].
d’une particule chargée ou d’un rayonnement d’énergie suffisante),
un électron du cortège électronique d’un atome, situé sur un certain
niveau d’énergie Ex (rappelons que cette énergie est négative), peut
être arraché de la couche à laquelle il appartient. La place libre est
1.1 Raies d’émission X susceptible d’être comblée par un électron situé sur un autre niveau
d’énergie Ey > Ex , avec émission d’un rayonnement électromagnéti-
que ; la fréquence ν de celui-ci, est telle que :
On trouvera la description des spectres d’émission X dans l’article
[81] de ce traité. Nous nous contenterons de rappeler ici ce qui est hν = Ey – Ex = |Ex| – |Ey|
nécessaire pour la compréhension de la suite de cet article.
avec h (6,626 × 10–34 J · s) constante de Planck.
ν étant donc bien défini, cette émission donne lieu à une « raie ».
1.1.1 Niveaux d’énergie des électrons atomiques À chaque couche correspond une « série » de raies (tableau 1).
Les transitions correspondant aux raies les plus intenses sont cel-
Les électrons constituant le cortège électronique des atomes les qui obéissent aux règles de sélection optiques. Le lecteur pourra
libres sont situés sur des niveaux d’énergie bien définis, correspon- se reporter utilement à l’article [83] dans le traité Constantes phy-
dant aux différentes couches (K, L, M, etc.) et sous-couches : sico-chimiques. On désigne les raies soit par la dénomination des
— deux électrons, au maximum, sont sur la couche K (la plus niveaux Ex et Ey (par exemple, K-L3 [18]), soit par un symbole débu-
énergétique en valeur absolue) ; tant par la dénomination de la série (K, L, M...) dont il fait partie ; les
— huit, au maximum, se trouvent sur la couche L, subdivisée en raies les plus intenses des séries K et L sont les raies Kα1 et Lα1.
sous-couches L1 , L2 et L3 ;
— dix-huit, au maximum, remplissent la couche M, subdivisée en
sous-couches M1 , M2 , M3 , M4 , M5 , etc. 1.1.3 Longueurs d’onde. Loi de Moseley
Ces niveaux ont une certaine largeur, en général négligeable sauf
pour les sous-couches les plus externes (c’est-à-dire les moins éner- À chaque raie, pour un atome donné, correspond une fréquence ν,
gétiques en valeur absolue) qui interviennent dans la liaison chimi- donc une longueur d’onde λ = c/ν bien définie, c étant la vitesse des
que. ondes électromagnétiques dans le vide.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 695 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
26
Référence Internet
P2695
1 eV = 1,602 × 10–19 J.
Tous calculs faits, cette relation est :
λ (nm) = 1 239,85/E (eV) ;
la relation approchée
λ (nm) = 1 240/E (eV)
est en général suffisante.
Les longueurs d’onde de presque toutes les raies des éléments
connus ont été mesurées avec précision et tabulées (cf. article [82]
dans le traité Constantes physico-chimiques) ; on les exprime sou-
vent encore en angströms (Å) ; l’unité X (uX) n’est plus utilisée [18] :
1 Å = 10–10 m = 0,1 nm Figure 1 – Longueurs d’onde et énergies des raies d’émission Kα1,
Lα1 et Mα, ainsi que des discontinuités d’absorption K, L1 et M3,
1 uX = 1,002 1 × 10–4 nm pour les différents éléments en fonction de leur numéro atomique Z
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 695 − 3
27
Référence Internet
P2695
pent à la liaison : ce sont les moins profonds ; les transitions partant de Soller sont alors inutiles ; le domaine de longueurs d’onde
de ces niveaux correspondent aux raies proches des discontinuités exploré et la luminosité sont relativement faibles, et les réglages
d’absorption. On peut donc mesurer les déplacements de certaines sont délicats ; les spectromètres à deux cristaux sont donc réservés
raies, notamment dans le domaine des grandes longueurs d’onde, à des études de spectrométrie fine.
avec des spectromètres de résolution suffisante [16]. De nombreu-
ses applications, notamment en chimie analytique, en découlent 1.2.1.2 Spectromètres à cristal courbé
(cf. § 5.3).
Conçus à l’origine pour des enregistrements de spectres sur des
1
émulsions photographiques, sans aucune pièce mobile, ils ont été
modernisés et sont utilisés notamment dans les microsondes. Le
1.2 Différents types de spectromètres X cristal est courbé suivant une portion de cylindre de rayon R, ce qui
permet une focalisation du rayonnement réfléchi sur un cylindre de
L’analyse d’un faisceau de rayons X polychromatique exige la pré- rayon R/2, analogue au cylindre de Rowland bien connu en spectro-
sence d’un système dispersif ; deux types de systèmes se font métrie optique. Les faisceaux incident et réfléchi peuvent être du
concurrence : l’un utilise les phénomènes de diffraction des rayons même côté du cristal (spectromètres de Johann et de Johansson) ou
X par les cristaux (dispersion en longueur d’onde), et l’autre la sen- de part et d’autre (spectromètre de Cauchois). Ces spectromètres
sibilité de certains capteurs à l’énergie des photons détectés (disper- sont lumineux et possèdent une très bonne résolution. Leur réalisa-
sion en énergie, appelée encore, de manière plus correcte, sélection tion est cependant moins simple que celle des spectromètres à cris-
d’énergie). tal plan, car la distance entre cristal et détecteur doit être asservie à
l’angle θ.
Certains appareils combinent ces deux types de dispersion (on
parle alors de fluorescence multidispersive) ; la dispersion en éner- Un cristal courbé suivant un arc de spirale logarithmique donne
gie est alors employée de préférence pour les éléments de numéro une focalisation rigoureuse ; mais à chaque longueur d’onde doit
atomique élevé (Z > 20). correspondre alors un pas de spirale différent ; on a alors affaire à
un monochromateur plutôt qu’à un spectromètre. Cependant, dans
Sont commercialisés aussi des appareils utilisant un seul type de
certains appareils, le cristal est à courbure variable.
dispersion mais configurés en vue d’analyses spécifiques (minerais,
céramiques, huiles et produits pétroliers, plaquettes de silicium...).
1.2.1.3 Détecteurs
1.2.1 Spectromètres à dispersion en longueur Ces spectromètres sont toujours équipés d’un détecteur (comp-
teur) de photons. Le compteur Geiger, bien que peu coûteux et
d’onde d’emploi facile, n’est plus guère utilisé ; on lui préfère le compteur à
Le sigle anglais correspondant est WDS (Wave-length Dispersive scintillations et surtout le compteur proportionnel ; celui-ci peut être
Spectrometry ). Leur principe repose sur la réflexion sélective d’un soit de type scellé (pour les longueurs d’onde faibles ou moyennes),
faisceau de rayons X par un cristal avec utilisation de la loi de soit à flux gazeux (pour les grandes longueurs d’onde). Les détec-
Bragg : teurs linéaires ne sont pas encore utilisés de manière courante en
spectrométrie X.
n λ = 2d sinθ
Les impulsions électriques issues du compteur sont préampli-
avec d distance réticulaire du cristal analyseur pour la fiées, puis traitées comme un signal par une électronique associée.
réflexion utilisée,
λ longueur d’onde,
1.2.2 Spectromètres à dispersion d’énergie
2θ angle du faisceau réfléchi avec le faisceau
incident, Le sigle anglais correspondant est EDS (Energy Dispersive
n (nombre entier positif souvent égal à l’unité) Spectrometry ) ; ces spectromètres sont aussi quelquefois appelés
ordre de la réflexion. spectromètres non dispersifs. Ils ne comportent pas de pièce
mobile. L’organe essentiel est le détecteur ; celui-ci est sensible non
Ces spectromètres peuvent être à cristal plan ou à cristal courbé
seulement au flux mais encore à l’énergie hν des photons reçus : il
[19].
délivre des impulsions électriques de hauteur proportionnelle à hν ;
1.2.1.1 Spectromètres à cristal plan un sélecteur d’amplitude permet donc l’analyse en énergie du
rayonnement.
Le principe en a été donné il y a fort longtemps par W.L. Bragg. Le
cristal analyseur est taillé de manière que les plans réticulaires utili- Les détecteurs les plus utilisés sont le compteur proportionnel
sés soient parallèles à sa surface utile. Le faisceau incident étant et surtout le « silicium-lithium » (monocristal de silicium compensé
fixe, le balayage en longueur d’onde est effectué à l’aide d’une rota- partiellement au lithium), en abrégé Si (Li) ; ce dernier doit être
tion du cristal à vitesse angulaire ω, constante, associée à une rota- conservé de préférence au réfrigérateur en dehors des périodes
tion du détecteur à vitesse angulaire double 2ω. La direction du de fonctionnement et refroidi à l’azote liquide pendant les périodes
faisceau incident et très souvent celle du faisceau réfléchi sont défi- de fonctionnement. On peut cependant se contenter souvent d’un
nies à l’aide de canaliseurs dits fentes de Soller constitués par des refroidissement par effet Peltier.
ensembles de lames absorbantes parallèles et équidistantes, plus La résolution du spectromètre dépend essentiellement de la réso-
ou moins resserrées suivant la précision désirée sur l’angle θ. lution énergétique du détecteur ; soit E0 l’énergie nécessaire pour
Ce sont des considérations sur le pouvoir réflecteur, la résolution ioniser (ou créer une paire électron-trou dans le cas d’un semicon-
désirée et surtout le domaine de longueurs d’onde exploré qui ducteur) la partie active du détecteur ; un photon d’énergie E
déterminent le choix du cristal ; pour les très grandes longueurs absorbé par celle-ci crée en moyenne N = E/E0 charges ; la distribu-
d’onde, celui-ci peut être remplacé par un système formé par un tion du nombre de charges créées n’est pas tout à fait poisson-
empilement de monocouches orientées de sels d’acides gras (cou- nienne, car elle est adoucie par le facteur de Fano F < 1, qui tient
ches de Langmuir-Blodgett) ou de couches constituées alternative- compte des corrélations entre événements. L’écart type σN de la dis-
ment d’éléments de numéros atomiques très différents, par tribution des charges ainsi que l’écart type σ pour l’énergie sont
exemple, du carbone et du tungstène (systèmes « multicouches »). donnés par :
Des spectromètres de très grande résolution peuvent être obte- 2
nus à l’aide de deux cristaux ; le premier cristal est fixe, et les fentes σN = FN et σ 2 = FEE0
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 695 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
28
Référence Internet
P2825
Spectrométrie d’absorption
atomique
1
par Jacques VANDEGANS
Docteur en sciences de l’université de l’État à Liège
Professeur et chef du service de Chimie analytique à l’Institut Meurice, Bruxelles
Anne-Marie de KERSABIEC
Docteur de l’université Pierre-et-Marie-Curie
Ingénieur au Laboratoire de géochimie et métallogénie à l’université Pierre-et-Marie-Curie
(CNRS, URA 1762), Paris
et Michel HOENIG
Docteur en sciences de l’université des Sciences et Techniques de Lille-Flandres-Artois
Chef de travaux agrégé au Centre d’études et de recherches vétérinaires et agronomiques
du ministère de l’Agriculture (CERVA), Tervuren
L e choix d’une méthode analytique de dosage est avant tout conditionné par
la nature de l’échantillon à analyser, par la concentration présumée de l’ana-
lyte, par les interférences potentielles dues à la matrice. À cela, il faut ajouter les
besoins associés à la cadence des analyses ainsi que le coût et les moyens dis-
ponibles pour l’investissement. Aucune technique ne pourra satisfaire tous ces
critères.
Parmi toutes les techniques disponibles à ce jour pour l’analyse minérale des
éléments en solution, les plus répandues sont la spectrométrie d’absorption
atomique (SAA), la spectrométrie d’émission atomique avec plasma induit (SEA/
ICP) auxquelles nous pouvons ajouter les méthodes électrochimiques ainsi que
la chromatographie ionique et l’électrophorèse capillaire.
En termes de sensibilité la SAA électrothermique (SAAE) offre des performan-
ces comparables à celles de l’électrochimie, polarographie et voltamétrie. Dans
la plupart des cas, les limites de détection avoisinent le µg/dm3 et, à l’heure
actuelle, la maîtrise des interférences permet de réaliser l’analyse de milieux fort
complexes et chargés en sel.
C’est grâce au développement de systèmes efficaces de correction des absorp-
tions non spécifiques (ANS), à l’apport considérable de l’informatique et à une
Parution : mars 1997
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 825 − 1
29
Référence Internet
P2825
_____________________________________________________________________________________________________________________________________
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
PE 2 825 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
30
Référence Internet
P2825
______________________________________________________________________________________________________________________________________
A = K , N0
1
, longueur du chemin optique dans l’atomiseur,
N0 nombre d’atomes à l’état fondamental par unité
de volume dans l’atomiseur.
Évolution de la méthode
À la fin des années 1950, le chimiste ne disposait guère de Parallèlement à ces développements du four, l’usage et les per-
méthodes d’analyse de traces en solution et il était extrêmement fectionnements des correcteurs d’absorptions non spécifi-
difficile de doser un élément dont la concentration avoisinait ques (ANS), ont contribué à augmenter la qualité des mesures.
1 mg/dm3. Si les services de développement des constructeurs ont joué un
rôle primordial, il ne faut certes par négliger l’apport de l’électroni-
Quoique connues depuis fort longtemps, puisque découvertes
que et de l’informatique modernes. Au niveau de l’électronique,
par Bunsen au milieu du siècle passé, les applications analytiques
c’est surtout l’amélioration du traitement du signal par abaisse-
de la spectrométrie d’absorption atomique ne firent leur apparition
ment de la constante de temps qui est remarquable. L’informati-
qu’un siècle plus tard. Il fallut notamment attendre les travaux de
que a surtout permis la visualisation des signaux d’absorption en
Walsh [1] et de Alkemade [2] pour assister aux premiers dévelop-
fonction du temps.
pements de l’analyse quantitative par spectrométrie
d’absorption atomique avec flamme (SAAF). Avec cette tech- Enfin, toujours pour réduire les interférences, l’addition de
modificateurs s’est avérée être un excellent moyen.
nique, le dosage de concentrations de l’ordre de 1 mg/dm3 devient
facilement réalisable. À l’origine, la SAA était une méthode d’analyse essentiellement
monoélémentaire. La cadence analytique était donc relativement
Ce sera l’apparition du four en graphite dans les années 1970, et faible. Sans atteindre dans ce domaine les performances de l’émis-
donc de la spectrométrie d’absorption atomique électrother- sion atomique dans un plasma induit, l’introduction récente sur le
mique (SAAE), qui permettra d’atteindre des teneurs bien plus marché d’appareils multiélémentaires a permis d’augmenter
basses. cette cadence de façon remarquable.
Si le four en graphite a apporté une amélioration considérable Quelles que soient les performances de l’appareillage, la qualité
des limites de détection, il a malheureusement compliqué l’ana- du résultat ne sera valable que si la préparation et l’introduction de
lyse en favorisant l’apparition d’interférences de tout type. Les l’échantillon sont correctement effectuées. L’introduction directe
développements de la SAAE sont tous dirigés vers la maîtrise et la de solides en SAAE, développée dans les années 1970 à 80, dispa-
correction de ces interférences. La qualité du graphite servant à la raît au profit de l’introduction d’échantillons solides en suspen-
confection des fours, l’introduction d’une plate-forme dans le tube sion. Dans ce cas, les étapes de préparation de l’échantillon sont
de graphite, la géométrie de l’atomiseur ainsi que son mode de fortement réduites. Enfin, l’usage de passeurs automatiques
chauffage, ont déjà considérablement abaissé le niveau des inter- d’échantillons permet d’améliorer la répétabilité des mesures, que
férences. ce soit pour les solutions ou les suspensions.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 825 − 3
31
Référence Internet
P2825
_____________________________________________________________________________________________________________________________________
1
Dans la flamme, il y a toute une série d’espèces présentes. Soit N,
le nombre d’atomes présents sous quelque forme que ce soit :
N = N0 + Nn + Nmol + Nion + ...
avec Nn nombre d’atomes dans un état excité,
Nmol nombre d’atomes combinés sous une forme
moléculaire, Figure 3 – Schéma de base d’un appareil de spectrométrie
Nion nombre d’ions de l’analyte, d’absorption atomique
plus toute autre espèce pouvant exister dans la flamme.
On en déduit :
N0 = α N 2. Appareillage
où α est un coefficient de proportionnalité dépendant de la tempéra-
ture et, par conséquent, de la composition de la flamme ainsi que de
la hauteur d’observation. 2.1 Schéma général d’une installation
Les atomes arrivent dans la flamme sous forme de gouttelettes
produites lors de la nébulisation. Seule une fraction β de la solution
est utile à la mesure, le reste étant évacué par le drain. On peut en Tout instrument d’absorption atomique contient les mêmes élé-
déduire que : ments de base (figure 3), à savoir :
N = β NT — une source de lumière (source primaire) qui produit une radia-
tion caractéristique de l’élément à doser à la longueur d’onde λ0 ;
où NT est le nombre d’atomes d’analyte aspirés dans le nébuliseur
— un système pour moduler le rayonnement provenant de la
par unité de temps. Ce nombre NT est directement relié à la concen-
source ;
tration C de la solution étudiée par un facteur γ :
— un atomiseur dont le rôle est de produire un nuage d’atomes à
NT = γ C l’état fondamental ;
— un monochromateur qui sert à éliminer toutes les radiations
Nous pouvons donc en déduire que :
autres que celle à la longueur d’onde λ0 ;
N0 = α β γ C — un détecteur couplé à un système électronique pour enregis-
trer et traiter les signaux.
et, par conséquent, que :
À côté de ces éléments essentiels, nous trouvons l’un ou l’autre
I = I 0 exp – ( K , α β γ C ) complément suivant le degré de perfectionnement de l’appareil. Il
peut s’agir :
Si tous les paramètres d’aspiration, de nébulisation et de condi-
tions de flamme sont maintenus constants : — d’un diviseur de faisceau lumineux dans les appareils à double
faisceau ;
I = I0 exp − (K′ C ) — d’un correcteur d’absorptions non spécifiques (cf. § 4.1.1) ;
et, après transformation : — d’un système permettant la visualisation des signaux spécifi-
ques et non spécifiques.
A = lg (I0 /I) = k1 C
L’absorbance est directement proportionnelle à la concentration
de la solution et indépendante de l’intensité incidente. 2.2 Sources de lumière
Cela est vrai pour un rayonnement monochromatique, mais la loi
n’est vérifiée que dans un petit domaine de concentrations, rare-
ment plus d’un ordre de grandeur. 2.2.1 Rôle de la source et ses caractéristiques
En spectrométrie d’absorption atomique électrothermique de base
(SAAE), la loi de proportionnalité peut être prouvée de façon simi-
laire en tenant compte du mode différent d’introduction de
Le rôle de la source primaire est de produire une radiation lumi-
l’échantillon :
neuse à la longueur d’onde caractéristique de l’élément à doser
N0 = α′ NT (raie d’émission). Les photons émis à cette longueur d’onde caracté-
ristique pourront être absorbés dans l’atomiseur par la raie
avec α′ coefficient de proportionnalité dépendant des d’absorption. La raie d’émission doit répondre à deux critères de
conditions d’atomisation, base :
NT nombre total d’atomes introduits dans le four en — son intensité lumineuse doit être la plus élevée possible ;
graphite :
— sa largeur spectrale doit être très faible, la raie d’émission
NT = γ ′ C devant être plus étroite que la raie d’absorption.
avec γ ′ coefficient tenant compte du volume de solution introduit. ■ Premier critère : intensité lumineuse
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
PE 2 825 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
32
Référence Internet
P2825
______________________________________________________________________________________________________________________________________
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 825 − 5
33
Référence Internet
P2825
_____________________________________________________________________________________________________________________________________
Les vapeurs métalliques confinées dans la cathode sont soumises 2.3 Atomiseurs
à un flux intense d’ions argon (ou néon) mais aussi d’électrons. Il en
résulte un grand nombre de collisions avec, pour conséquence, le
passage à l’état excité des atomes métalliques. De l’état excité, ils 2.3.1 Rôle de l’atomiseur
vont redescendre à l’état fondamental en émettant chacun un pho-
ton dont l’énergie dépendra de l’état excité auquel l’atome aura été
porté. La lumière émise par la lampe n’est donc pas monochromati- La lumière émise par la source primaire passe au travers de la cel-
que, mais est constituée de plusieurs raies caractéristiques de l’élé- lule d’absorption (l’atomiseur) où une partie de la lumière incidente
1 ment. Parmi celles-ci, la plus intense sera celle qui correspond à la est absorbée. Étant donné que la rayonnement incident provient de
transition la plus probable, c’est-à-dire celle qui fait intervenir le pre- transitions atomiques d’un élément, il ne peut être absorbé que par
mier niveau excité, à la longueur d’onde λ0. À ces raies s’ajoutent des atomes de cet élément (ou une autre espèce qui absorbe à la
celles du gaz de remplissage. même longueur d’onde, cf. § 3.1). Or, dans pratiquement tous les
cas, et surtout si l’échantillon est en solution, l’élément à doser n’est
pas à l’état atomique, mais bien à l’état ionique ou combiné.
2.2.3 Lampes à décharge sans électrode Le rôle de l’atomiseur est de produire des atomes, mais ceux-ci
doivent se trouver à l’état fondamental pour pouvoir absorber les
Il s’est rapidement avéré que les lampes à cathode creuse avaient photons provenant de la source. On distingue essentiellement deux
des performances réduites pour toute une série d’éléments volatils : types d’atomiseurs : la flamme et le four en graphite (électrothermi-
soit l’intensité lumineuse émise était trop faible, soit le rapport que).
signal sur bruit était trop mauvais, soit la durée de vie de la lampe
était trop courte.
2.3.2 Flamme
Bien qu’il existe des lampes à décharge sans électrode (Electrode-
less Discharge Lamps, EDL) pour une cinquantaine d’éléments, cel-
les pour lesquelles les résultats sont les meilleurs sont celles pour La technique de spectroscopie d’émission atomique de flamme
As, Bi, Cd, Ge, Pb, Sb, Se, Sn, Te, Tl et Zn. avait montré depuis longtemps qu’une flamme produite par la com-
bustion d’un gaz (le plus courant étant l’acétylène) avec de l’air pro-
Le principe de fonctionnement des lampes EDL est très proche de duisait des atomes dont une faible proportion est à l’état excité. La
celui d’un plasma induit (ICP), si ce n’est que les courants, les pres- majorité des atomes, en vertu de la loi de Maxwell-Boltzmann, s’y
sions et, par conséquent, les températures sont beaucoup plus fai- trouvent à l’état fondamental.
bles.
En émission atomique de flamme, il fallait concentrer la zone
Les lampes HCL et EDL sont parfaitement complémentaires, les d’émission de façon à récupérer un maximum de photons et la
premières donnant d’excellents résultats pour les métaux non vola- flamme avait donc une forme conique. En absorption atomique
tils, les secondes s’adressant particulièrement bien à l’étude des (SAAF), il est nécessaire d’augmenter la probabilité de rencontre
métaux volatils. d’un photon avec un atome. Le temps de séjour d’un atome dans le
faisceau lumineux est extrêmement court, environ 5 ms. Pour aug-
menter la probabilité de rencontre, il a fallu allonger le chemin opti-
2.2.4 Super-lampes et ultra-lampes que au travers de l’atomiseur. C’est la raison pour laquelle les
flammes d’absorption atomique ont une forme laminaire, mince
Un des inconvénients des lampes à cathode creuse est que, lors (1 mm) mais fort longue (5 à 15 cm).
d’une augmentation de courant, non seulement la lampe s’échauffe
trop, mais un phénomène de renversement de raie apparaît. On ne ■ Chemin suivi par la solution
peut donc pas infiniment augmenter ce courant dans le but d’aug- Prenons à titre d’exemple un échantillon de NaCl. En solution,
menter l’intensité lumineuse. celui-ci est sous forme de Na+ et de Cl−. La solution est aspirée par
Un nouveau type de lampes, dérivées de cathodes creuses, est effet Venturi au travers d’un fin capillaire. Le gaz responsable de
apparu sur le marché il y a quelques années. Il s’agit des super-lam- cette aspiration est le plus souvent de l’air, c’est-à-dire le comburant.
pes et des ultra-lampes. Dans ce type de lampe, on provoque, grâce Le capillaire amène la solution dans le nébuliseur dont le rôle est de
à une alimentation électrique séparée, une décharge dans le nuage produire un aérosol solution-gaz dans lequel les gouttes sont les
atomique juste devant la cathode creuse. Cette décharge excite les plus fines possible. Le nébulisat est mélangé avec un complément
atomes à l’état fondamental, qui émettent ensuite les photons carac- d’air et avec le combustible dans une chambre de prémélange. C’est
téristiques. Ces photons fort nombreux s’ajoutent à ceux déjà pro- ce mélange qui va arriver à la base du brûleur et pénétrer ensuite
duits dans la cathode, augmentant ainsi l’intensité lumineuse d’un dans la flamme.
facteur allant de 3 à 5 avec, pour conséquences directes, une dimi- La flamme comporte deux zones principales, le dard et le pana-
nution importante de la limite de détection, une légère amélioration che. Le dard, zone d’émission lumineuse intense, est aussi une zone
de la sensibilité et une plus grande zone de linéarité. relativement froide. C’est là que la combustion des gaz démarre. Le
Ces lampes n’apportent cependant aucun gain à l’analyse des élé- panache apparaît juste au-dessus. La zone la plus chaude de la
ments à bas potentiel d’excitation (alcalins et Al), ni à celle des flamme se situe environ 3 à 4 cm au-dessus du brûleur (figure 6), et
réfractaires (W, V, Ta, Zr). Pour les premiers, les lampes convention- c’est à cette hauteur que passe le faisceau lumineux provenant de la
nelles produisent déjà suffisamment d’atomes excités ; pour les source primaire et qu’a lieu l’absorption des photons. Étant donné la
seconds, les lampes opèrent déjà à la limite de leurs possibilités, et vitesse des gaz, qui est d’environ 10 m · s−1, nous disposons de 3 ms
il est impossible d’augmenter la densité du nuage atomique. pour passer du nébulisat à l’état d’atome. Le temps nécessaire pour
passer d’une goutte de solution à un atome en phase vapeur dépend
de la taille de la goutte et de la température de la flamme.
2.2.5 Lampes à vapeur de mercure Lorsque l’aérosol liquide-gaz arrive dans la flamme, l’évaporation
de l’eau a lieu, et il se forme un aérosol solide-gaz (microcristaux de
Certains appareils d’absorption atomique sont spécifiques au NaCl dans ce cas).
dosage du mercure. Ils utilisent une lampe à décharge de vapeur de Toujours sous l’influence de la température, les microcristaux
mercure. Ces lampes émettent des raies assez larges et il faut les ali- fondent pour reformer un aérosol liquide-gaz, puis le liquide se
menter par un très faible courant, ce qui peut entraîner un manque vaporise pour produire des molécules de NaCl en phase vapeur. À
de stabilité. partir de là, toute une série de problèmes peuvent apparaître, pro-
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
PE 2 825 − 6 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
34
Spectrométrie atomique et spectrométrie moléculaire
(Réf. Internet 42707)
1– Spectrométrie atomique 2
2– Spectrométrie moléculaire Réf. Internet page
Avancées technologiques des sources et capteurs térahertz. Vers le transfert industriel P2145 101
Spectromètres RMN de paillasse pour l’analyse en ligne de réactions en flux continu J8015 121
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
35
2
36
Référence Internet
P2656
2
Chef du Laboratoire de Spectroscopie et d’Interaction Laser-matière (DEN/DPC/SPAL)
Centre d’Études de Saclay
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 656 − 1
37
Référence Internet
P2656
2 (0)
1. Potentiels interatomiques V
Pour des molécules simples, R0 est de l’ordre de 0,4 à 0,6 nm et D0 Les courbes en pointillé donnent l'énergie électronique des orbitales
de l’ordre de quelques électronvolts. liante et antiliante, et les courbes en trait plein montrent l'effet de la
répulsion internucléaire (représentée par la courbe en tirets).
La figure 1 fait référence à deux atomes dans leurs états fonda-
mentaux. Si un atome est dans un état excité, la courbe de potentiel Figure 1 – Potentiel interatomique (contributions nucléaire
est déplacée vers les énergies plus élevées, sa forme est parfois dif- et électronique)
férente et la distance R0 est généralement différente. En fait, plu-
sieurs potentiels interatomiques sont possibles pour une
configuration électronique donnée de chaque atome, comme dans Les énergies vibrationnelles et rotationnelles sont quantifiées,
le cas d’un seul atome où différentes valeurs de L, S, J donnent nais- comme cela est décrit dans les paragraphes 4 et 5, et les fonctions
sance à plusieurs niveaux d’énergie. d’onde décrivant le système sont fonctions des nombres quantiques
rotationnels, vibrationnels et électroniques.
L’énergie totale d’une molécule diatomique est une fonction de
l’énergie électronique, mais aussi du mouvement nucléaire. Deux
atomes isolés ont chacun trois degrés de liberté, par rapport aux
trois axes de coordonnées x, y, z. Quand les deux atomes sont liés, 2. Approximation
trois degrés de liberté décrivent le mouvement du centre de masse
du système entier ; les trois autres sont représentés par le mouve- de Born-Oppenheimer
ment relatif : un par la vibration le long de l’axe internucléaire et les
deux autres par la rotation le long des deux axes perpendiculaires à L’équation de Schrödinger pour une molécule implique des fonc-
l’axe internucléaire. tions d’onde dépendant des coordonnées nucléaires et électro-
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 656 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
38
Référence Internet
P2656
2
Ψe seulement et l’autre χN seulement. La solution de l’équation en mer, on résout l’équation de Schrödinger pour les électrons dans le
Ψe donne une énergie Ee, qui dépend des valeurs particulières de RN champ des deux noyaux. La méthode du champ central est évidem-
choisies. Cette énergie Ee(RN) forme une partie du potentiel à intro- ment inappropriée pour deux centres de forces, mais on peut tou-
duire dans la deuxième équation impliquant la partie nucléaire χN jours utiliser l’approche du champ autoconsistant (self consistent
pour donner l’énergie totale. field) : on suppose une fonction d’onde initiale impliquant les deux
atomes A et B ; on utilise la distribution électronique résultante pour
Cette approximation (approximation de Born-Oppenheimer) est calculer une distribution potentielle ; on résout l’équation de
justifiée par le fait que les noyaux bougent beaucoup plus lentement Schrödinger avec ce potentiel pour trouver une nouvelle fonction
d’onde et ainsi de suite... Les valeurs d’énergie, ainsi trouvées, per-
que les électrons, à cause de leur masse plus élevée.
mettent de tracer les courbes de potentiel du type de celle donnée
(courbe en trait bleu plein appelée « liante ») sur la figure 1.
Une simplification peut être faite en écrivant χN comme le produit
de deux fonctions, Ψv(R) représentant les changements des posi- La puissance des ordinateurs actuels a conduit à des déve-
tions relatives des noyaux (vibration le long de l’axe internucléaire loppements significatifs dans le domaine de la chimie quantique
dans le cas d’une molécule diatomique) et Ψr(θ, ϕ) représentant la (calcul des fonctions d’onde moléculaires). Pour ce type de calcul,
deux approches peuvent être utilisées (cf. références [4] pour une
rotation de la molécule. On peut ainsi écrire :
description complète de ce type de traitement et [12] pour une revue
des méthodes de calcul) :
Ψ = Ψe Ψ v Ψ r —l’approche orbitale moléculaire qui traite chaque électron de
valence comme appartenant aux deux noyaux, généralement en
écrivant sa fonction d’onde comme une combinaison linéaire de
et E = Ee + Ev + Er (avec Ee >> Ev >> Er)
deux orbitales atomiques uA et uB (Linear Combination of Atomic
Orbitals LCAO). Il existe nécessairement deux combinaisons satis-
La condition entre parenthèses est toujours vérifiée car les quan- faisant la condition que la densité électronique soit invariante par
tas vibrationnels représentent quelques milliers de cm−1 ou quel- rapport à l’échange des électrons. Une de ces combinaisons aug-
ques dixièmes d’eV, tandis que les quantas rotationnels sont mente la probabilité de trouver l’électron entre les deux noyaux,
tandis que l’autre concentre la densité électronique en dehors de la
généralement environ deux ordres de grandeur plus petits. Puisque
région internucléaire et a l’effet inverse. Ces deux combinaisons
les premiers états excités des atomes simples sont généralement sont respectivement appelées orbitales liante et antiliante. La
situés quelques eV au-dessus de leur état fondamental, la sépa- dépendance en R des énergies ainsi calculées a la forme des deux
ration des fonctions d’onde correspondant aux parties électronique, courbes en pointillé données sur la figure 1. En ajoutant la répulsion
vibrationnelle et rotationnelle est justifiée. Cependant, l’approxima- nucléaire en ZAZBe2/(4πε0R) (courbe en tirets), on obtient les cour-
tion de Born-Oppenheimer n’est pas valable quand les courbes de bes en trait plein donnant les énergies résultantes. Dans le cas de
potentiel provenant de différentes configurations électroniques l’orbitale liante, l’énergie passe par un minimum pour la valeur R0
excitées sont proches ou se croisent (§ 8). correspondant à une molécule stable.
Un simple traitement « LCAO » n’est pas entièrement une des-
Les fonctions d’onde électroniques et les énergies électroniques cription satisfaisante de la molécule, puisqu’elle ne permet pas que
ne sont pas celles des atomes isolés. Les différentes approches pour les électrons retournent à leurs atomes parents lorsque la distance
R augmente. Pour obtenir une fonction d’onde ayant un comporte-
les calculer sont données dans le paragraphe 3. Si elles sont con-
ment correct quand R devient grand, il est nécessaire d’ajouter une
nues suffisamment précisément, elles peuvent être utilisées pour fraction de la fonction antiliante dans la partie liante. La fraction
calculer Ee( R ). En tenant compte de la répulsion nucléaire nécessaire peut être prise comme un paramètre à ajuster pour mini-
Z AZ Be 2/(4πε 0R ), on forme la courbe de potentiel de la figure 1 miser l’énergie, la meilleure fonction d’onde étant celle qui a la plus
(courbe en trait plein), qui régit le mouvement nucléaire. basse énergie ;
— l’approche par la méthode Heitler-London, qui démarre avec
Un potentiel semi-empirique est souvent utilisé comme cela est des atomes séparés, mais qui ajoute un échange des électrons entre
montré au paragraphe 4. Au contraire, l’énergie rotationnelle, qui eux. À nouveau, on obtient un état liant et un état antiliant. Cette
est déterminée en première approximation par les moments d’iner- approche n’est pas non plus entièrement satisfaisante, mais cette
tie de la molécule autour des axes de rotation, dépend seulement fois pour une raison opposée : à savoir qu’elle ne permet pas un
des séparations internucléaires d’équilibre et non de la forme du échange suffisant des électrons. Il est possible de corriger ce défaut
potentiel interatomique. La rotation est discutée au paragraphe 5. en ajoutant une partie de la configuration ionique avec les électrons
liés à un noyau.
Vu le rapport de masse, les vitesses des électrons sont beaucoup
Cet article est consacré principalement aux molécules diato- plus grandes que celles des noyaux et l’on peut admettre avec une
miques, du fait de la complexité des vibrations et rotations dans bonne approximation que leur mouvement se fait dans le champ
les molécules polyatomiques. Néanmoins quelques remarques électronique constant des noyaux considérés comme fixes (cf. § 2,
concernant ces molécules sont données au paragraphe 9. hypothèse de Born-Oppenheimer). Dans une molécule diatomique,
ce champ a la symétrie de révolution autour de la droite joignant les
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 656 − 3
39
Référence Internet
P2656
2
moment cinétique orbital sur l’axe nucléaire ; c’est donc l’équivalent
du nombre quantique m ᐉ et il peut prendre toute valeur entière 2s 2s
positive, négative ou nulle comprise entre – ᐉ et + ᐉ .
Vu l’importance de λ dans la description des états électroniques
des molécules diatomiques, on a l’habitude de symboliser sa valeur 2σg+
absolue par une lettre de la suite σ, π, δ, ϕ... (analogue à la suite s, p,
d, f... pour le nombre quantique ᐉ en atomistique).
1σu+
Dans le cas des atomes, les fonctions d’onde multiélectroniques
sont construites à partir des orbitales qui sont peuplées par les élec-
1s 1s
trons selon le principe de Pauli. Pour les molécules, il est possible
d’adopter une approche analogue dans laquelle les fonctions
d’onde moléculaires multiélectroniques sont construites à partir
d’un ensemble d’orbitales moléculaires qui ont les caractéristiques 1σg+
suivantes :
Figure 2 – Diagramme des niveaux d’énergie d’une molécule
— une orbitale moléculaire est une fonction propre de l’hamilto-
diatomique homonucléaire
nien monoélectronique, qui dépend des coordonnées d’un seul
électron ;
— une orbitale moléculaire peut s’étendre à n’importe quel nom-
bre d’atomes de la molécule. En conséquence un électron dans une V
orbitale moléculaire n’est pas localisé, mais peut avoir une densité
de probabilité non nulle dans différentes parties de la molécule ;
— une orbitale moléculaire ne peut pas être occupée par plus de
deux électrons qui, dans ce cas, doivent avoir un spin opposé [prin-
cipe d’exclusion de Pauli (cf. article [P 2 655], § 2.6.2) ; O(1D) + O(3P)
— les orbitales moléculaires reflètent la symétrie de base de la
molécule. Chaque orbitale appartient à une représentation irréducti-
ble du groupe de symétrie de la molécule qui est le groupe de trans-
formations qui laissent l’hamiltonien moléculaire invariant ;
— une orbitale moléculaire multipliée par une fonction de spin R
0
est appelée une spin-orbitale moléculaire. O(3P) + O(3P)
La figure 2 donne le diagramme des niveaux d’énergie d’une
molécule diatomique homonucléaire.
Quand les orbitales de plus basses énergie (liantes) sont remplies,
les électrons de valence supplémentaires doivent aller dans les orbi-
tales antiliantes.
Uniquement quelques états connus sont représentés sur cette figure
Exemple : pour la molécule d’hydrogène, les deux électrons 1s des
deux atomes d’hydrogène vont tous les deux dans une orbitale liante Figure 3 – États électroniques inférieurs de la molécule O2
Ψ(1σ) = uA(1s) + uB(1s) avec des spins opposés ; l’état moléculaire
s’écrit : ( 1 σ g+ ) 2 .
peut montrer que plusieurs états moléculaires stables peuvent être
Par contre, les deux électrons 1s supplémentaires dans le cas de la déduits de chaque paire d’états atomiques : cela provient des
combinaison He+He doivent aller dans l’orbitale antiliante manières différentes dont leurs moments angulaires peuvent être
Ψ(1σ) = uA(1s) − uB(1s) ; l’état moléculaire s’écrira : ( 1 σ g+ ) 2 ( 1 σ u+ ) 2 . couplés. Une description de ce couplage est nécessaire pour com-
prendre la désignation de ces états et les règles de sélection gouver-
Les électrons 2p peuvent former trois orbitales liantes distinctes nant les transitions entre ces états.
correspondant à la dégénérescence de la fonction d’onde p ( ᐉ = 1 ,
m ᐉ = 0, ± 1 ). Ainsi l’atome d’oxygène a quatre électrons de valence
2p, de sorte que 6 électrons de valence vont dans deux orbitales 3.2 Configuration électronique, état
liantes et deux dans une orbitale antiliante ; deux des orbitales lian-
tes remplies constituent la double liaison, l’état moléculaire s’écrit :
moléculaire
( 1 σ g+ ) 2 ( 1 σ u+ ) 2 ( 2 σ g+ ) 2 ( 2 σ u+ ) 2 ( 3 σ g+ ) 2 ( 1 π u ) 4 ( 1 π g ) 2
La situation d’une molécule est sensiblement similaire à celle d’un
Si l’un des atomes ou les deux sont dans un état excité, de nou- atome, dans lequel une configuration électronique donnée
veaux ensembles d’orbitales liantes et antiliantes peuvent être cons- ( n 1 ᐉ 1, n 2 ᐉ 2 ... ) donne lieu à différents niveaux d’énergie caractéri-
truits donnant l’allure de la figure 3 pour la molécule d’oxygène. On sés par les vecteurs moment angulaire L, S et J ; il existe néanmoins
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 656 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
40
Référence Internet
P2656
2
3
lettre capitale de la suite : Σ, Π, ∆... (équivalents des notations atomi-
ques S, P, D...) : 2
Λ 0 1 2 3 ... 1
0
état Σ Π ∆ Φ ... De
L’ensemble des spins électroniques a aussi une résultante carac-
térisée par un nombre quantique S. Or, comme dans les atomes, le
mouvement orbital des électrons crée un champ magnétique dont la La partie en trait plein de la courbe de potentiel est supposée
direction moyenne est celle de l’axe de la molécule ; il y a donc cou- parabolique. Les courbes en noir représentent 兩Ψv (R)兩2, la probabilité
plage entre le moment orbital et le spin, sauf lorsque Λ = 0. Donc de trouver les noyaux à une distance R.
pour tout état tel que Λ ≠ 0, l’orientation relative du spin et du
Figure 4 – Énergie vibrationnelle d’une molécule diatomique.
moment orbital est quantifiée, ce qui signifie que le spin résultant a,
Niveaux d’énergie vibrationnelle et fonctions d’onde associées
sur l’axe moléculaire, une composante quantifiée de la forme
1/2 , Σ . Le nombre quantique Σ caractérisant la projection du spin
résultant peut prendre 2S + 1 valeurs différentes entre − S et + S.
par rapport à un tel plan, aussi bien dans les molécules homonu-
En effet, la composante constante MS du spin électronique résul- cléaires que dans les molécules hétéronucléaires, mais Ψ peut pren-
tant S est une valeur entière ou demi-entière selon qu’il y a un nom- dre les valeurs + Ψ ou − Ψ. Seulement une de ces options est
bre pair ou impair d’électrons dans la molécule. Dans le cas où possible pour tout état Σ donné, et un indice + ou − est utilisé pour
Λ ≠ 0, la non-conservation du spin électronique total S est due au désigner l’état en question. Les états Σ pour H2 sont tous des états
champ magnétique interne dans la direction de l’axe internucléaire Σ+. Les symétries + et − existent dans les états avec Λ ≠ 0, mais les
résultant du mouvement orbital des électrons. Ce champ cause un niveaux + et − sont dégénérés tant que la molécule ne tourne pas.
mouvement de précession du vecteur S autour de la direction du L’origine de cette dégénérescence est essentiellement la même que
champ avec une composante constante MS = Σ le long de l’axe inter- celle rencontrée dans les atomes en présence d’un champ
nucléaire. électrique : + M et − M ont la même énergie. Cette dégénérescence
Le moment cinétique total Ω pour l’ensemble des électrons de la est levée par couplage entre les moments angulaires rotationnel et
molécule est donc en unité , : orbital, ce qui conduit à une faible séparation des niveaux désignée
par dédoublement Λ.
Ω = Λ + Σ (2)
D’autres types de couplage peuvent exister (cf. § 6), en particulier
Pour chaque état d’énergie électronique correspondant à une analogues au couplage jj des atomes (cf. article [P 2 655], § 2.7.3.3).
valeur de Λ et à une valeur de S déterminées, Ω peut prendre 2S + 1
valeurs différentes auxquelles correspondent 2S + 1 sous-niveaux
d’énergie. La grandeur 2S + 1 est la multiplicité de l’état considéré.
Comme avec les atomes (cf. article [P 2 655], § 2.7), on a donc des
état singulets, doublets, triplets... ; par analogie aussi avec la 4. Énergie vibrationnelle
nomenclature des termes spectroscopiques dans les atomes, un
terme moléculaire est représenté par le symbole 2S + 1ΛΩ (comme :
des molécules diatomiques
2Π , 3∆ ...).
1/2 2
Exemple : un état avec S = 0 et Λ = 0 s’écrit 1Σ : un état avec S = 1 Les courbes d’énergie électronique (figure 1) sont les courbes de
et Λ = 1 s’écrit : 3Π avec la valeur de Ω en indice (3Π2...). potentiel régissant le mouvement nucléaire. De manière classique,
si les noyaux ont une énergie cinétique nulle, ils doivent être au
Mais, dans le cas des états moléculaires, il existe deux difficultés repos à la position R0, tandis que, s’ils possèdent une énergie ciné-
supplémentaires qui concernent la symétrie des orbitales électroni- tique Ev, ils peuvent osciller entre les positions R1 et R2 (figure 4).
ques. La première affecte uniquement les molécules homonucléai- Les principes sur lesquels les calculs de la courbe de potentiel sont
res. La densité électronique Ψ2 dans une molécule basés ont été décrits au paragraphe 3. Dans la pratique, une
homonucléaire doit toujours être symétrique par rapport au point approximation du potentiel est fréquemment donnée par une
milieu entre les noyaux, mais la fonction d’onde elle-même peut expression empirique (potentiel de Morse) :
être symétrique (Ψ → Ψ) « gerade » ou antisymétrique (Ψ → − Ψ)
« ungerade ». La symétrie s’indique par l’indice g ou u. V = De [1 − exp (−βx)]2 (3)
Exemple : dans le cas de la molécule H2, les états moléculaires
avec V énergie par rapport au minimum de la
liants (stables) formés à partir des atomes H(1s) et H(2p) sont :
courbe,
1Σ , 1 Σu , 1 Π u , 3 Σg , 3 Σu , 3 Π u
g De profondeur du puits,
Deuxièmement, on doit prendre en compte la symétrie par rap- x (≡ R − R0) déplacement des noyaux à partir de leur
port à la réflexion dans n’importe quel plan passant par les deux distance d’équilibre,
noyaux. Là encore la densité Ψ2 est nécessairement symétrique β constante.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 656 − 5
41
2
42
Référence Internet
P2685
43
Référence Internet
P2685
encore avec une grande résolution spatiale. À la source laser, il faut joindre des
éléments indispensables dans les systèmes d’analyse, à savoir les optiques et
les détecteurs. Il est aussi important de bien réaliser le rôle grandissant joué
par l’informatique capable de gérer les mesures et d’interpréter les résultats en
un temps de plus en plus court. Les progrès des concepts dont découle ce type
d’instrumentation sont constants, grâce à une technologie de plus en plus
sophistiquée et performante, et nous permettent de mieux appréhender les
différents problèmes analytiques des sciences modernes. Ils contribuent au
développement d’une meilleure vision, toujours plus rapide et plus large du
monde, grâce au progrès scientifique. Nous allons énumérer et introduire les
différentes techniques couramment utilisées, en essayant d’en illustrer les
1. Notions de base
sur les lasers hν
E2
E1
Pour plus d’information le lecteur pourra se reporter à la
Absorption Émission Émission
référence [1]. spontanée stimulée
44
Référence Internet
P2685
Absorption des ions Cr+++ Nom, Longueur d’onde, Énergie, Pulse, Fréquence, Utilisation
Laser à gaz
3
HeNe, 632 nm, ≈ 100 mW, continu, mesure
Relaxation
Ar+, 448 nm, ≈ 100 mW, continu, très diverses
Transmissio
ransmission
Transitions CO2 , 10,6 µm, kW, continu et pulsé µs, usinage
2 radiat ves
radiative
non radiatives
Excimère KrF, 248 nm, ≈ 100 W, 25 ns, kHz, ablation
États métastables Laser à solide
Laser
1
Vert
Pompa
ompage
Pompage
Bleu
694,3 nm
Rubis, 694 nm, 100 mJ/pls, 10 ns, diverses
Nd/YAG, 1,06 µm, 1 à 100 J/pls, 1 à 1 000 Hz, très diverses 2
Saphir-dopé au titane, 800 nm, µJ/pls, fs, kHz, ablation
Laser à semi-conducteur
État fondamental
0 AsGa, 904 nm, mW, continu et pulsé, kHz, très diverses
0 Laser à rubis : Al2O3–Cr2O3 0,05 %
Laser à colorant
Rhodamine, 400 à 800 nm, µJ/pls, pulsé, mesure
Figure 3 – Les niveaux d’énergie des ions chrome
Laser femtoseconde (5 à 500 fs)
dans le cristal de rubis, le premier laser de Maiman (1960),
toujours d’intérêt actuellement TiSa (Ti :Al2O3), 800 nm, nJ/pls, kHz à MHz, très diverses
Yb :KGd(WO4)2 , 1 030 nm, 100 µJ/pls, kHz à MHz, diverses
pls : impulsion
Rapide
Les lasers à solide récents ont intégré des améliorations comme
Transition
Transition laser
des réflecteurs pour concentrer la lumière de pompe vers le
de pompage barreau, des refroidisseurs. Souvent les faces sont taillées pour
permettre une incidence dite de Brewster et le faisceau laser est
Rapide polarisé linéairement. Il est de coutume de classer certains grands
types de lasers suivant leurs caractéristiques principales
(tableau 1). Il est clair que les lasers récents, pour leur besoin de
Figure 4 – Milieu à quatre niveaux d’énergie lumière de pompage, font une grande utilisation de ces lasers de
avec le schéma cinétique des transitions base dans des montages plus ou moins complexes. On s’attardera
sur le cas des lasers femtoseconde, apparus dans les années 1980,
qui par la durée ultrabrève d’impulsion apportent un potentiel
d’applications prometteur et encore peu développé.
1.2 Principe et propriétés du laser [3]
Les propriétés intéressantes des faisceaux lasers sont :
Le laser à rubis, tel que dans les premières expériences, présente — la directivité (capacité de pointage) et la faible divergence
un barreau cristallin Al2O3-Cr2O3 0,5 % qui est pompé par une (élargissement du faisceau dans la direction de propagation)
lampe flash au Xe pendant environ 400 µs. L’émission laser se pro- seulement limitée par la diffraction de la lumière et l’existence des
duit alors en mode relaxé, c’est-à-dire sous la forme d’une série de modes transversaux de la cavité, qui ont tendance à s’opposer à la
petites impulsions (figure 5). (0) focalisabilité ;
0 t
Alimentation électrique HT
Figure 5 – Schéma du premier laser à rubis
dont le principe se retrouve dans tous les lasers
45
Référence Internet
P2685
Intensité
Spectre d’émission
Modes Modes
permis amplifiés
δω δω ω
2 L
t
2π /δω
m λ = 2L → résonance de la cavité
Figure 6 – Les modes longitudinaux (m) de la cavité laser amplifiés Figure 8 – Le blocage des modes (synchronisation de la phase)
(en gras) sont nécessairement de longueur d’onde génère des impulsions de courte durée. Ici trois modes donnent
dans le spectre de l’émetteur des impulsions de largeur 2 ⁄ ␦
46
Référence Internet
P2755
1. Principes..................................................................................................... P 2 755 – 2
1.1 Excitation et ionisation................................................................................ — 2
1.1.1 Influence des phénomènes majeurs dans l’espace
interélectrode ...................................................................................... — 3
1.1.2 Extraction et excitation des particules de la matière....................... — 3
1.1.3 Évolution temporelle des phénomènes d’extraction
et d’excitation ..................................................................................... — 4
1.1.4 Évolution du taux de vaporisation .................................................... — 4
1.1.5 Excitation optimale............................................................................. — 4
1.2 Spectres d’émission .................................................................................... — 5
2. Appareillage .............................................................................................. — 6
2.1 Statif d’étincelage........................................................................................ — 6
2.2 Sources d’excitation .................................................................................... — 7
2.2.1 Arc électrique ...................................................................................... — 7
2.2.2 Étincelle pilotée .................................................................................. — 8
2.2.3 Analyse du signal d’émission............................................................ — 9
2.2.4 Sources d’excitation numériques...................................................... — 10
2.3 Système optique de mesure....................................................................... — 10
2.3.1 Montages spectrométriques.............................................................. — 11
2.3.2 Montage Paschen-Runge ................................................................... — 11
2.3.3 Montage Czerny-Turner...................................................................... — 11
2.3.4 Montages mixtes ................................................................................ — 11
2.3.5 Ambiances sous vide et gazeuses..................................................... — 12
2.4 Détection ...................................................................................................... — 12
2.4.1 Photomultiplicateur ............................................................................ — 12
2.4.2 Barrette de photodiodes .................................................................... — 13
2.4.3 Composants CCD................................................................................ — 13
2.5 Mesure du signal détecté............................................................................ — 13
2.5.1 Intégrateur analogique....................................................................... — 14
2.5.2 Mesures par impulsions .................................................................... — 14
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. P 2 757
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur P 2 755 − 1
47
Référence Internet
P2755
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 755 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
48
Référence Internet
P2755
Température (K)
Électron
Wi = 0 15 000
Absorption
+ h νji Wi Wj
Émission 10 000
Noyau
5 000
État fondamental État excité
2
1 000
Figure 2 – Émission et absorption atomique
Cathode Distance Anode
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur P 2 755 − 3
49
2
50
Référence Internet
P2756
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur P 2 756 − 1
51
Référence Internet
P2756
1. Appareils commerciaux
La nature des spectromètres d’émission par étincelle proposés
permet de résoudre des problèmes très divers. Le laboratoire cen-
tral ou de recherche est souvent équipé de systèmes complexes et
complets alors que le contrôle des produits sur parc de stockage
peut être fait avec un appareil porté à dos. Entre ces extrêmes, il
existe une gamme de produits adaptés à chaque type de besoin.
2
1.1 Appareils en poste fixe
2. Performances des appareils — un instrument suffisamment robuste pour ne pas dériver trop
rapidement et induire des recalibrations fréquentes.
actuels Le tableau 1 reprend les valeurs de LDD (limites de détection)
qu’il est usuel d’obtenir aujourd’hui avec les spectromètres du mar-
Les performances des spectromètres d’émission optique à étin- ché. Quel que soit le constructeur, il n’y a pas à ce jour un appareil
celle ont fortement évolué, notamment dans le domaine de l’ana- qui se détache vraiment. On ne peut en dire autant pour les BEC
lyse des basses teneurs et de l’amélioration de la justesse et des (background equivalent concentration) dont les valeurs du tableau 2
limites de détection. représentent l’état de l’art en la matière.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 756 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
52
Référence Internet
P2756
(0)
(0)
Tableau 2 – BEC de différents éléments obtenues avec les spectromètres actuels exprimée selon 3 fois l’écart-type
résiduel de la mesure du fond, pour une matrice en acier 2
Élément ................................. C C C N Mn P S Si Al Ni Cr Cu Mo As Nb Ti B Co Sn
Longueur d’onde .......... (nm) 156 133 193 149 293 178 180 212 396 231 267 324 281 189 319 337 182 228 189
BEC .............................. (ppm) 33 5 233 140 90 23 32 103 55 92 124 56 199 29 283 35 13 41 86
Le tableau 3 reprend les niveaux de répétabilité qu’il est courant 3.1.1 Échantillons métalliques
d’obtenir avec les spectromètres actuels. Un échantillon d’acier faible-
ment allié est considéré, sur lequel dix analyses ont été faites consé-
cutivement. Répétabilité « min » correspond aux meilleures valeurs Dans le domaine des métaux ferreux, une évolution importante a
de l’écart-type obtenu sur la moyenne des mesures et Répétabilité eu lieu en matière de prélèvement des échantillons. Pour éviter les
« max » correspond aux résultats les plus dispersés. Ces essais ont réactions entre le métal liquide et l’air, les lingotins obtenus par cou-
été menés avec les principaux spectromètres du marché. lée dans un moule à partir d’une louche ont été remplacés par des
prélèvements résultant de l’immersion du moule dans le bain.
On remarque qu’il n’y a pas de différence notoire entre les valeurs
minimum et maximum des écarts-types de mesure sur les moyen- Cette technique, très largement adoptée dans l’industrie de l’acier,
nes obtenues, quel que soit le spectromètre considéré. À ce titre, on a donné naissance à des échantillons de géométrie différente selon
peut considérer que ces analyseurs sont relativement équivalents. le réacteur d’élaboration et la nature du métal produit. Le modèle le
La démarche menée pour la reproductibilité est similaire. Le plus utilisé est une sonde dont le démoulage après immersion déli-
tableau 4 présente les résultats obtenus. De même que pour la répé- vre un échantillon qui a la forme d’une sucette (figure 2). Actuelle-
tabilité, les analyseurs du marché ne se différencient pas réellement. ment, des sondes de prélèvement sous soufflage suivi d’une
aspiration par l’argon permettent d’optimiser la qualité et la repré-
sentativité de l’échantillon. La sonde est consommable et ne sert
que pour un seul prélèvement. La tige de l’échantillon est coupée et
3. Caractéristiques peut servir au dosage par combustion du carbone et du soufre. Ce
type de prélèvement permet un refroidissement rapide de l’échan-
de mesures tillon et conduit à une structure métallurgique reproductible.
La languette, de 8 ou 12 mm d’épaisseur, sert à l’analyse par SEO.
Certains modèles disposent d’une double languette, la partie amin-
cie (4 mm) étant destinée au poinçonnage. Les lopins ainsi réalisés
3.1 Échantillons sont exploités pour l’analyse des gaz N2 et O2 ainsi que pour C et S.
L’analyse par SEO est faite après ablation de 0,5 à 0,7 mm à la sur-
Les échantillons et leur préparation constituent une partie délicate face de l’une des deux faces. En plus des sondes courantes, d’autres
de la procédure analytique. Dans le processus de prélèvement, de modèles adaptés aux fontes et aux prélèvements dans des jets de
mise en forme de l’éprouvette et de surfaçage de celle-ci, un nombre coulée sont commercialisés par les sociétés SOLED, Electro-Nite,
important de paramètres interviennent pour lesquels il ne faut pas Minco.
sous-estimer l’incidence sur la qualité des dosages. On peut aussi utiliser des échantillons plus massifs tels que des
Le spectrométriste doit aussi prendre en compte l’origine du lingotins cylindriques prélevés par la même technique d’immersion
métal, car un échantillon prélevé en cours d’élaboration et un maté- du moule dans le métal liquide. Le refroidissement plus lent conduit
riau de référence certifié n’ont pas, sur le plan de la structure et de la à une décantation dans l’échantillon et à une retassure centrale à la
répartition des constituants, une similitude complète. Chaque type partie supérieure. Le lingotin est tronçonné à 25 mm de sa base. La
d’échantillon présente ses caractéristiques propres. La nature locale surface résultante est utilisée pour l’analyse par SEO. Les prélève-
et destructive de l’analyse par SEO suppose, pour obtenir un résul- ments par immersion avec moule ouvert aboutissent à des
tat correct, que l’échantillon soit représentatif de son milieu d’ori- « bombes » qui sont également coupées à 25 mm du pied. Les
gine (liquide ou solide) et que la partie consommée lors de échantillons peuvent également se présenter sous forme de pro-
l’étincelage ait la même composition en tout point de l’échantillon. duits finis : forgés, étirés ou laminés. Les copeaux métalliques com-
Cette dernière exigence n’est malheureusement pas toujours réali- pressés dans des bagues permettent de reconstituer un échantillon
sée. Les éprouvettes obtenues par prélèvement dans un bain liquide massif qui peut sous certaines conditions être analysé par SEO. Les
sont étudiées en fonction de leur forme pour fournir une analyse morceaux de métal non normalisés peuvent être refondus dans des
spectrale la plus représentative de la composition chimique fours spécialisés pour donner un « bouton » massif. Des systèmes
moyenne de l’échantillon. Dans la zone choisie sur l’échantillon, on de fixation particuliers sont utilisés sur le statif des spectromètres
effectue deux, voire trois impacts pour atténuer, par la moyenne des pour l’analyse des échantillons existant sous forme de gros fils ou
valeurs, une hétérogénéité résiduelle acceptable. de baguettes.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur P 2 756 − 3
53
2
54
Référence Internet
P2795
Spectrophotométrie d’absorption
dans l’ultraviolet et le visible
1. Principes..................................................................................................... P 2 795v2 - 2
1.1 Absorption du rayonnement dans le domaine UV-VIS ............................ — 2
1.2 Spectres obtenus, analyse qualitative ....................................................... — 3
1.3 Lois de l’absorption, analyse quantitative................................................. — 4
2. Instrumentation........................................................................................ — 6
2.1 Organisation des composants.................................................................... — 6
2.2 Sources de rayonnement............................................................................ — 7
2.3 Monochromateurs et spectrographes (polychromateurs) ....................... — 7
2.4 Cellules d’absorption................................................................................... — 8
2.5 Détecteurs .................................................................................................... — 9
2.6 Traitement des données.............................................................................. — 9
3. Paramètres instrumentaux .................................................................... — 9
3.1 Domaine spectral......................................................................................... — 9
3.2 Résolution des spectrophotomètres .......................................................... — 9
3.3 Lumière parasite .......................................................................................... — 10
3.4 Dynamique de mesure ................................................................................ — 11
4. Vérification des performances, validation des données, BPL..... — 12
4.1 Exactitude du réglage en longueur d’onde ............................................... — 12
4.2 Exactitude photométrique .......................................................................... — 13
4.3 Lumière parasite .......................................................................................... — 13
4.4 Résolution spectrale .................................................................................... — 14
4.5 Bruit et rectitude de la ligne de base ......................................................... — 14
5. Conduite d’une analyse.......................................................................... — 15
5.1 Cas simple ou classique : utilisation d’une seule longueur d’onde ........ — 15
5.2 Cas des mélanges, spectres dérivés, analyse multivariable.................... — 16
6. Domaines d’application ......................................................................... — 19
Parution : mars 2007 - Dernière validation : mars 2019
55
Référence Internet
P2795
2
— travail entre deux « bornes » : 0 et 100 % de transmission, facilement
vérifiables ;
— de nombreuses espèces à l’état gazeux, liquide ou solide absorbent dans
l’UV-VIS, soit directement, soit après développement d’espèces absorbantes ;
— on dispose d’une abondante bibliographie et de notes d’applications dans
de nombreux domaines ;
— on peut obtenir de bonnes sensibilités, soit par préparation des échan-
tillons, soit en modifiant des paramètres physiques comme la longueur du trajet
optique par exemple ;
— les temps de réponse peuvent être très courts, même pour l’enregistrement
de spectres complets ;
— on trouve sur le marché des composants miniatures, des fibres optiques et
des cellules couplées qui permettent de faire des mesures déportées, ce qui
permet d’adapter facilement la technique à des problèmes particuliers ;
— les méthodes modernes de traitement des données permettent de résoudre
des problèmes difficiles d’analyse multi-composants ou de suppression des
interférences ;
— on peut coupler la spectrométrie UV-VIS avec d’autres techniques comme
la chromatographie.
Ces caractéristiques seront développées dans ce dossier, ainsi que les
limitations qui sont principalement que :
— la dynamique (gamme de mesures) est réduite par la loi logarithmique et la
lumière parasite ; il existe, de plus, les phénomènes de diffusion et de
fluorescence ;
— les interférences spectrales ne sont pas toujours maîtrisées, de même que
les effets physico-chimiques comme le pH, les effets du solvant, la tempéra-
ture... ;
— c’est une méthode d’analyse essentiellement quantitative, surtout lorsque
plusieurs espèces absorbent, ce qui rend difficile la reconnaissance de la
signature spectrale ;
— les logiciels ont tendance à présenter des résultats qui donnent confiance,
mais attention à l’effet « boîte noire », surtout quand la composition des échan-
tillons varie : les méthodes d’analyse multivariable ne permettent plus de tracer
la bonne vieille loi de Beer-Lambert. Il faudra donc vérifier les données fournies
avec des échantillons de caractéristiques connues, et dans tout le domaine de
concentrations que l’on risque de trouver dans les échantillons inconnus.
56
Référence Internet
P2795
Fréquence (Hz)
1022 1015 1012 106 1 000 1
UV VIS
190 nm 800 nm
2
Rayons X Figure 1 – Domaine spectral du rayonnement
électromagnétique
rayons cosmiques aux ondes radios. Dans l’UV-VIS, le domaine de La figure 2 représente un schéma simplifié de l’absorption du
190-800 nm correspond à des fréquences allant de 1,6 · 1015 Hz à rayonnement UV-VIS par les atomes et les molécules :
3,8 · 1014 Hz, et des énergies de l’ordre de quelques électrons-volts • Pour les atomes, il n’existe que des états électroniques
(1 eV correspond à une longueur d’onde de 1 230 nm environ, donc quantifiés susceptibles d’absorber des photons. L’absorption du
l’UV-VIS de 200 à 800 nm correspond à des énergies de 6,5 à 1,5 eV rayonnement se traduit par un spectre de raies pratiquement
environ.) Ces énergies correspondent aux énergies de transition monochromatiques, absorption qui est mise en œuvre dans la
électronique des molécules : à température ambiante, la plupart spectrophotométrie d’absorption atomique.
des molécules sont dans leur état électronique et leur état de vibra-
tion fondamental, plusieurs états de rotation pouvant être occupés • Pour les molécules, même simples comme les molécules
conformément à la répartition de Boltzmann. Ces molécules vont diatomiques, les niveaux d’énergie quantifiés sont plus nombreux :
donc pouvoir absorber des photons UV-VIS et changer leurs états — les niveaux électroniques : les écarts d’énergie entre ces
énergétiques électroniques, de vibration et de rotation – comme le niveaux sont de l’ordre de quelques électrons-volts, conduisant à
montre la figure 2 – ce qui explique la complexité des spectres des absorptions dans le domaine UV-VIS, comme pour les
d’absorption, même pour des molécules simples à l’état gazeux. atomes ;
On comprend aussi que le nombre de photons absorbés entraînant — les niveaux de vibration : les écarts d’énergie de quelques
une diminution de l’intensité du rayonnement UV-VIS transmis par dixièmes d’eV correspondent à des absorptions dans le domaine
le milieu, cette diminution va dépendre du nombre de molécules de l’infrarouge moyen, soit de 2,5 à 40 µm (ou 4 000 à 50 cm–1,
traversées par le rayonnement. Ceci va se traduire par une loi avec σ cm–1 = 104/λ µm) ;
d’absorption : la loi de Beer-Lambert. — les niveaux de rotation : les écarts d’énergie sont de l’ordre
de quelques millièmes d’eV, correspondant à l’infrarouge lointain.
Quand les molécules sont soumises à un rayonnement du
domaine UV-VIS – à température ambiante, ce qui suppose qu’elles
se trouvent dans leur état fondamental, aussi bien électronique
que vibrationnel – les transitions (absorptions) se produisent pour
E2 tous les niveaux d’énergie supérieurs permis par les règles de
E2 sélection, aussi bien électroniques, vibrationnels et rotationnels, ce
Niveaux J qui explique la complexité des spectres d’absorption, même pour
(rotation) des molécules simples.
J = 1, 2, 3... On remarque sur la figure 3 que la structure fine des spectres,
observée à l’état gazeux, disparaît quand la même molécule – ici le
v=1 benzène – est mise en solution dans l’éthanol.
E1 Pour toutes les molécules mises en solution, les spectres UV-VIS
v=0 E1 se présentent sous forme de bandes plus ou moins larges, les
interactions avec les solvants venant masquer la structure fine.
Transition Transition Cette structure fine n’apparaît que pour les gaz, à condition d’avoir
E1 → E2 E1 → E2
des spectrophotomètres possédant une résolution suffisante (voir
v = 0 → v = 1 la figure 13), et aussi que les gaz ne soient pas photodissociés par
v = 1 → v = 2 etc. le rayonnement, comme le montrent les spectres de l’ozone et du
∆J = – 1 ∆J = 0 ∆J = + 1 dioxyde d’azote de la figure 3.
a atome b molécule diatomique Ces deux gaz sont en effet dissociés par le rayonnement UV : un ou
des électrons sont éjectés de la molécule et emportent une partie de
l’énergie des photons incidents. L’énergie des photons n’étant pas
quantifiée, la structure fine du spectre disparaît, ce qui explique la
présence de larges bandes d’absorption.
57
Référence Internet
P2795
0,8
Absorbance
0,7
et p = 1 atm (ppm–1 · m–1)
Coefficient d'absorption à 16 °C
0,006
10 0,6
0,005
12 0,5
8
0,004
0,4
0,003
0,3
6 11
0,002
9 13 0,2
2
0,001 7
4 5
1 23 14 0,1
0
0
220 230 240 250 260 270 280 290 220 238 255 272 290
Longueur d'onde (nm) Longueur d'onde (nm)
1
Absorbance
Absorbance
NH3 100 ppm
0,9 0,19
0,8
O3 1
108
08 ppm
0,7
NO 1 000 ppm 0,14
0,6
NO2 1 00
0000 ppm
0,5
0,09
0,4
0,3 000
NO 1 00 0 ppm
NO2 500 ppm
0,2 0,04
0,1 Blanc
0 – 0,01
202 212 222 200 220 240 260 280 300 320 340 360 380 400
Longueur d'onde (nm) Longueur d'onde (nm)
de ces molécules, si le spectromètre a une résolution suffisante. On une longueur d’onde où la molécule absorbe, il existe une loi
peut donc les reconnaître facilement, même dans un mélange, simple entre quantité de rayonnement transmis par le milieu et
comme le montrent les spectres de la figure 3. concentration des molécules qui absorbent (on suppose que seule
l’espèce à doser absorbe à cette longueur d’onde).
■ Dans le cas des liquides et des solutions, les interactions molé-
culaires viennent masquer les structures fines observées pour les C’est la loi de Beer-Lambert qui relie absorption, à une longueur
gaz : on ne retrouve alors que des bandes plus ou moins larges qui d’onde λ, et concentration c des molécules qui absorbent. Si
peuvent rendre plus douteuse l’identification des molécules, ce qui l’intensité du rayonnement à la longueur d’onde λ, avant traversée
explique que la spectrométrie d’absorption dans l’ultraviolet et le o
de la cellule, est I λ , l’intensité, après traversée de la cellule, sera
visible est surtout une méthode d’analyse quantitative. o
Iλ , reliée à I λ par la relation :
■ Dans le cas de mélanges simples avec peu de constituants qui
absorbent, on peut cependant identifier des espèces. Cette identi- o
I λ = I λ exp ( – ε λ L c )
fication est rendue plus performante avec l’analyse multivariable
des données qui sera vue au paragraphe 5.2. ou encore :
o
Iλ
- = ελ L c
A λ = lg ------- (2)
1.3 Lois de l’absorption, Iλ
analyse quantitative avec Aλ absorbance du milieu à la longueur d’onde λ,
exprimée en nm dans l’UV-VIS,
L’absorption du rayonnement UV-VIS par les molécules permet o
Iλ
de mesurer le nombre (ou plutôt la concentration) de ces molécu- lg -------
- logarithme en base 10,
les présentes dans le trajet du rayonnement. On ne mesure pas Iλ
directement ce nombre, mais on procède à un étalonnage en utili- ελ coefficient spécifique d’absorbance molaire (ex–coef-
sant des mélanges étalons de concentrations connues des molécu- ficient d’extinction moléculaire) en L · mole–1 · cm–1,
les que l’on veut doser. Ces étalons sont placés dans des cellules
L trajet optique de la cellule en cm,
d’absorption traversées par le rayonnement UV-VIS. La quantité de
rayonnement absorbée dans les zones d’absorption spécifiques c concentration en mole · L –1 des molécules qui
des molécules à doser est déterminée par le spectrophotomètre. À absorbent à la longueur d’onde λ.
58
Référence Internet
P2795
3,5
Absorbances
3
Absorbance
2,5
2
Aéch
1,5 [(I ° + I p ) / (I
lg [(I (I + I p )]
2
0
0 2 4 6 8 10 12
Concentrations (ua)
Solution de concentration c
Figure 5 – Tracé de la droite d’étalonnage
et détermination des concentrations inconnues
59
2
60
Référence Internet
P2850
Spectrométrie d’absorption
dans l’infrarouge
par Bernard HUMBERT
Habilité à diriger des recherches , professeur des Universités
2
Université de Nantes, IMN Institut des matériaux Jean Rouxel, UMR 6502 CNRS-Univ Nantes
Jean-Yves MEVELLEC
Docteur, Ingénieur de recherche CNRS
Université de Nantes, IMN Institut des matériaux Jean Rouxel, UMR 6502 CNRS-Univ Nantes
Jérôme GRAUSEM
Docteur, Ingénieur d’études CNRS
Université de Lorraine, LCPME UMR 7564 CNRS-Univ de Lorraine
Manuel DOSSOT
Docteur, Maître de Conférences
Université de Lorraine, LCPME UMR 7564 CNRS-Univ de Lorraine
et Cédric CARTERET
Habilité à diriger des recherches, Professeur des Universités
Université de Lorraine, LCPME UMR 7564 CNRS-Univ de Lorraine
61
Référence Internet
P2850
2
En pratique, les spectromètres actuels dits à transformée de Fourier (FTIR)
possèdent des qualités permettant une large gamme de possibilités d’analyse.
L’analyse sera qualitative pour identifier un composé à partir de sa signature
spectrale (empreinte complète spectrale) ou établir, en utilisant des évolutions
d’une zone restreinte de cette empreinte, des changements fins de structure ou
d’interactions moléculaires dépendant des niveaux d’énergie « sondés » par le
rayonnement. Outre l’identification, l’analyse sera quantitative permettant le
dosage d’une substance, grâce à l’évolution de sa signature spectrale en fonc-
tion de la quantité de matière mesurée.
Cet article est spécifiquement dédié à la spectroscopie d’absorption infra-
rouge ou spectroscopie d’absorption de vibration. Après un bref rappel des
notions générales sur l’interaction matière-rayonnement, une seconde partie
présente les principaux modes d’enregistrement d’un spectre infrarouge, en
comparant leurs avantages et leurs inconvénients. Dans une troisième partie,
les méthodes actuellement facilement accessibles d’enregistrement d’un
spectre selon que l’échantillon étudié est solide (massif, film ou pulvérulent),
liquide ou gazeux, seront détaillées pour leurs applications courantes. La qua-
trième partie conclura sur quelques méthodes d’exploitation analytique
qualitative des données spectrales infrarouges ou de prédiction quantitative
d’une variable, telle qu’évidemment la concentration, mais aussi des grandeurs
physico-chimiques comme l’acidité, l’hygrométrie, le degré d’organisation d’un
assemblage, la pression intrinsèque subie par un échantillon, etc. Ce type de
traitement informatique est intégré à un grand nombre de logiciels d’acquisi-
tion et est de plus en plus répandu dans l’industrie pour des utilisateurs sans
préformation particulière.
1. Notions générales tribution de radiations dont les fréquences s’écartent peu d’une
valeur moyenne, soit polychromatiques, pour une source composée
d’une distribution large de fréquences. Le formalisme reliant toutes
Les notions générales survolées ici, seront à compléter par la lec- ces grandeurs lors de la propagation d’une onde électromagnétique
ture d’autres chapitres proposés dans les Techniques de l’ingénieur, dans un milieu, a été établi par Maxwell. Le champ s’y exprime sui-
autour des spectrométries optiques soit moléculaires [P 2 656], vant les grandeurs ω pulsation (en rad · s–1), et k , vecteur d’onde (en
[P 2 795] soit instrumentales [P 2 865], [R 6 310] et [P 2 660]. Nous rad · m–1) dont l’amplitude est proportionnelle à l’inverse de la pério-
invitons aussi les lecteurs à se retourner vers des ouvrages complets
dicité spatiale λ, la longueur d’onde. Les relations dans le vide reliant
qui détailleront les aspects moléculaires ou de la matière [1] [2], les
aspects instrumentaux [3] [4] [5] ou applications [6]. ces grandeurs sont :
2π
ω= = 2 πν (1)
1.1 Nature du rayonnement T
avec T la période (en s) et ν la fréquence (en s–1 ou Hz) et :
Le rayonnement électromagnétique (transport d’énergie sans
transport de matière) se décrit à l’aide de la propagation d’un champ 2π
électrique E et d’un champ magnétique H interdépendants (souvent k= e (2)
λ k
l’induction magnétique B est utilisée en place et lieu de H ). Leurs
variations périodiques, temporelle T (l’inverse de la fréquence ν ), et Ce dernier vecteur donne l’orientation de la propagation. Sa
spatiale, définissant la longueur d’onde λ, définissent l’onde électro- norme correspond au nombre d’onde, que l’on donne par habitude
magnétique. L’onde est dite « monochromatique » lorsqu’une et une en cm–1 :
seule fréquence ν la caractérise. En réalité, les radiations sont soit
« quasi monochromatiques », quand elles sont composées d’une dis- ν = ν /c0 (3)
62
Référence Internet
P2850
IR lointain
Agitation
thermique
2
Niveaux
diance représente aussi un flux de particules : des photons, possé- rotationnels
0
dant une masse au repos nulle et se déplaçant à une vitesse égale à
celle de la lumière dans le vide, c0 . L’énergie E d’un photon associée Rappel : 1 cal = 4,18J
à l’onde électromagnétique de fréquence ν a pour expression :
E = hν (6) Figure 1 – Niveaux énergétiques moléculaires aux fréquences
(ou énergies) des différents domaines spectraux de photons
avec h constante de Planck.
Le domaine spectral de l’infrarouge correspond au domaine de
longueurs d’onde s’étendant de 0,8 à 100 µm. Ce domaine est sub-
divisé en proche (PIR de 0,8 à 2,5 µm ou 12 500 à 4 000 cm–1), 4000
Énergie potentielle de la liaison chimique
63
Référence Internet
P2850
dV 0,3
1 d2V 1 d3V
V = Véq + ℓ+ ℓ2 + ℓ3 + ... (7)
d ℓ ℓ =0 2 dℓ2 ℓ =0 6 dℓ3 ℓ =0 ᐍ'
0,2
64
Référence Internet
P2850
En = (n + 1/ 2)h ν 0 (11)
2
polynômes d’Hermite, de parité identique à celle de n. L’absorp-
tion d’un photon par la molécule quantifiée en énergie de vibration
correspond au transfert d’énergie suivant le bilan :
1 k
h νphoton = h (n′ − n)ν 0 = h (n′ − n) (12)
2π µ
65
Référence Internet
P2850
chimiques repose sur le fait que la nature d’une liaison chimique ceux d’autres atomes. Le mouvement de vibration est essentielle-
particulière semble transférable d’une molécule à une autre et ment localisé dans un groupe chimique, qui se comporte comme
donc aussi les constantes de force des ressorts représentant cette un oscillateur indépendant. Ce constat est d’autant plus juste qu’il
liaison. Ainsi, s’il est vrai que pour un mode donné, un grand s’agit de fréquence élevée.
nombre d’atomes de la molécule vibrent à la même fréquence, les Les tableaux 1 à 8 donnent les fréquences caractéristiques des
amplitudes des oscillations diffèrent de telle manière que seuls les différentes fonctions organiques les plus fréquemment rencon-
atomes de ce groupement ont des déplacements plus amples que trées dans l’analyse.
2
BH CH NH OH FH
2 500 3 000 3 400 3 600 3 960
AIH SiH PH SH CIH
1 820 2 150 2 350 2 580 2 890
GeH AsH SeH BrH
2 070 2 150 2 300 2 560
SnH SbH IH
1 850 1 890 2 230
Les atomes X sont considérés dans un état de plus haute hybridation.
66
Référence Internet
P2865
Spectrométrie Raman
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 865 − 1
67
Référence Internet
P2865
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 865 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
68
Référence Internet
P2865
2
1. Rappels théoriques x
et principes
m1 m2
La spectrométrie de diffusion Raman, à l’instar de l’absorption
infrarouge est une technique permettant l’observation des états
vibrationnels (et également rotationnels dans le cas des gaz) d’une m1, m2 masses des atomes
molécule. Nous allons donc tout d’abord rappeler quelques notions x distance séparant les atomes
de dynamique moléculaire vibrationnelle avant de voir comment un
rayonnement électromagnétique peut interagir avec la matière, afin Figure 1 – Molécule diatomique : modèle de l’oscillateur libre
de donner une information quantitative sur la nature de cette dyna-
mique (fréquence, symétrie des vibrations, etc.).
l’énergie potentielle V du système. Pour ce faire, un développement
en série selon la coordonnée x peut ainsi être effectué :
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 865 − 3
69
Référence Internet
P2865
d ∂T ∂V
------ -------.- + -------
-=0 z
d t ∂ q i ∂ q i
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 865 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
70
Référence Internet
P2865
2
h νv h νv h νv
diffusion, lié à la polarisabilité moléculaire, qui est prépondérant.
h νv
Cette polarisabilité exprime la faculté du nuage électronique à
acquérir un moment dipolaire électrique induit P sous l’effet du b absorption IR c émission stimulée
P = αE
où α est un tenseur de rang 2, représenté par une matrice d’ordre 3 ν Ⰷ νv
symétrique : hν h (ν + νv )
α xx α xy α xz
hν hν hν h (ν – νv )
α = α xy α yy α yz
α xz α yz α zz
d diffusion e diffusion f diffusion Raman
Si le champ E oscille à la fréquence ν : Rayleigh Raman Stokes anti-Stokes
E = E 0 cos (2πνt)
Figure 3 – Interaction entre un photon et la matière caractérisée
et si la molécule vibre à la fréquence νv et que cette vibration de par des niveaux d’énergie vibrationnelle
coordonnée normale Q fasse intervenir une variation d’un élément
αij du tenseur α , nous pouvons écrire au 1er ordre :
∂α Dans ce formalisme où nous savons que l’énergie de vibration est
α ij = ( α ij ) 0 + ---------ij- Q quantifiée en niveaux discrets, l’interaction entre la lumière caracté-
∂Q 0
risée par un photon d’énergie h ν et une molécule se trouvant dans
avec Q = Q0 cos (2πνv t) un état donné peut engendrer différents phénomènes (figure 3).
L’expression du champ électrique diffusé Ediff , proportionnel à P, Si ≈ v , la transition la plus probable est la transition v → v + 1.
comporte donc, outre un terme en cos (2πνt) qui correspond à une C’est le phénomène d’absorption infrarouge. Notons également la
diffusion sans changement de fréquence et que l’on appelle diffu- possibilité v → v – 1 qui est l’émission stimulée, base du rayonne-
sion Rayleigh ou diffusion élastique, un produit de deux fonctions ment laser. Toutes les autres transitions seraient interdites dans
sinusoïdales de fréquences différentes qui peut s’écrire sous forme l’approximation harmonique.
d’une somme de deux termes : Si est très grand par rapport à tous les v , le phénomène le plus
probable est alors une diffusion pour laquelle le mécanisme peut
1 ∂ α ij
Ediff ~ P = (αij )0 E0 cos (2πνt) + --- ---------- Q 0 E 0 être décrit, de façon très schématique, de la manière suivante : lors
2 ∂Q 0 de l’excitation par le photon d’énergie h ν, la molécule transite dans
un état virtuel et redescend sur un niveau réel. On montre une nou-
[cos 2π (ν + νv)t + cos 2π(ν – νv)t]
velle fois que seuls les niveaux v – 1, v et v + 1 sont possibles, ce qui
Le symbole ~ signifie ici proportionnel à. amène à une diffusion de photons d’énergie h ν (diffusion Rayleigh),
h (ν – νv) (diffusion Raman Stokes) et h (ν + νv ) (diffusion Raman
Ces deux termes indiquent un rayonnement diffusé inélastiquement anti-Stokes). La diffusion Rayleigh est la plus probable, alors que les
aux fréquences ν + νv et ν – νv . C’est cette diffusion que l’on appelle diffusions Stokes et anti-Stokes sont très peu favorisées.
diffusion ou effet Raman respectivement anti-Stokes et Stokes. Ce
À une température donnée, la répartition en niveaux d’énergie
phénomène n’aura lieu que si la dérivée (∂αij /∂Q )0 est non nulle,
d’un ensemble de molécules obéit à une distribution de
c’est-à-dire uniquement pour les mouvements donnant lieu à une
Maxwell-Boltzmann et seules celles se trouvant dans un état excité
variation de la polarisabilité de la molécule.
pourront donner une transition anti-Stokes de type v → v – 1. Cela
explique le fait expérimentalement observé que les raies Stokes
sont plus intenses que les raies anti-Stokes.
1.3.2 Traitement quantique
Le rapport des intensités des raies Stokes IS et anti-Stokes IAS est
Le traitement classique de la diffusion Raman reproduit bien déterminé par la relation :
l’expérience en ce qui concerne l’existence ou non des raies (règles
I AS ν 0 + ν v 4 hν
de sélection) de part et d’autre d’un pic de diffusion élastique (à la - exp – ---------v-
-------- = -----------------
même fréquence que le rayonnement incident) dont l’écart avec ce IS ν – ν kT
0 v
pic central est égal aux fréquences de vibration de la molécule. Ce avec k constante de Boltzmann (1,380658 × 10–23 J · K–1),
modèle ne reproduit pas, par contre, les intensités relatives des
raies Stokes et anti-Stokes que seul le traitement quantique permet T température thermodynamique,
d’obtenir. ν0 fréquence de l’onde excitatrice.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 865 − 5
71
Référence Internet
P2865
La connaissance de IS et IAS pour une vibration donnée peut donc c ) Si la molécule possède au moins un axe de symétrie d’ordre
être une bonne mesure de la température de l’échantillon. supérieur à deux, des modes dégénérés apparaissent. Une dégéné-
rescence double, symbolisée par E, signifie que deux modes sont
confondus en une seule raie ; une dégénérescence triple F signifie
1.3.3 Règles de sélection que trois modes sont confondus en une seule raie. Ce phénomène
et symétrie des vibrations réduit le nombre de raies ou de bandes apparentes, qui peut ainsi
devenir très inférieur au nombre 3N – 6.
Comme nous l’avons vu dans le paragraphe 1.3.1, un mode de
vibration de coordonnée normale Q est actif en spectrométrie Exemple : dans SnCl4 , au lieu des neuf modes prévus, on n’ob-
infrarouge ou en spectrométrie Raman si les dérivées (∂µ /∂Q )0 et serve que quatre raies en raison de la présence d’un mode E et de
deux modes F (tableau 1, 2e colonne).
(∂α /∂Q )0 respectivement sont non nulles. Le moment dipolaire µ et
la polarisabilité α étant respectivement un vecteur et une matrice, la d ) Les vibrations totalement symétriques (désignées par A,
2
condition se ramène à ce que l’une au moins des composantes A1 , A’1 , A1g ) sont toujours actives en Raman, pour tous les groupes
(∂µi /∂Q )0 (i = x, y ou z ) et (∂αij /∂Q )0 (i et j = x, y ou z ) soit non nulle. de symétrie. Les raies correspondantes sont polarisées et souvent
Ces conditions se visualisent aisément pour les molécules diato- intenses, ce qui permet de les repérer facilement dans le spectre
miques mais deviennent très vite impossibles à estimer pour les Raman.
molécules polyatomiques. C’est là que la théorie des groupes inter- Exemple : on peut citer la pulsation symétrique de la molécule de
vient. Nous avons vu en effet (§ 1.2.3) que chaque vibration normale benzène à 992 cm–1, vibration au cours de laquelle tous les atomes de
se transformait comme une représentation irréductible du groupe carbone et d’hydrogène s’approchent ou s’éloignent, en phase, du cen-
de symétrie de la molécule concernée. Or on montre que n’importe tre du cycle.
quelle dérivée [∂f (Q )/∂Q]0 est nulle si et seulement si f (Q ) et Q
n’appartiennent pas à la même représentation irréductible (espèce Ce mode, au cours duquel les éléments de symétrie de la molé-
de symétrie), c’est-à-dire n’ont pas la même parité, ou ne se trans- cule au repos sont conservés, est dit totalement symétrique et
forment pas de la même manière, vis-à-vis de tous les éléments de donne une raie Raman polarisée.
symétrie de la molécule.
Un mode est donc actif en infrarouge si sa coordonnée normale Q e ) Les autres modes de vibration (antisymétriques ou dégénérés)
se transforme comme µ , c’est-à-dire comme un vecteur translation donnent, lorsqu’ils sont actifs en diffusion Raman, des raies dépola-
risées.
T , ou au moins comme une de ses composantes Tx , Ty ou Tz .
Les règles de sélection établies précédemment dans le cadre du
De même, un mode est actif en Raman si sa coordonnée normale traitement classique se retrouvent en mécanique quantique où
Q ’ se transforme comme l’un au moins des éléments αij d’une l’intensité Raman IR est dictée par la valeur de l’intégrale :
matrice d’ordre 3 symétrique.
La plupart des tables de caractères indiquent à quelle espèce de
symétrie appartiennent les éléments Tx , Ty et Tz d’un vecteur et αij (i, 冕
I R ⬃ Ψ ∗f ( Q ) αΨi ( Q )d Q
j = x, y ou z ) d’une matrice symétrique ; il est donc aisé de détermi-
ner l’activité Raman ou infrarouge d’un mode donné. avec Ψi et Ψf fonctions d’onde associées à l’état initial et à l’état final.
Le nombre et le type de symétrie de tous les modes normaux On peut montrer qu’elle est non nulle si α et Q appartiennent à la
d’une molécule de symétrie donnée sont déterminables à l’aide de même espèce de symétrie.
la théorie des groupes. L’analyse vibrationnelle d’une molécule, à
savoir dénombrement et activités des modes de vibration Raman et Le raisonnement est analogue pour l’activité infrarouge.
infrarouge, peut être effectuée entièrement à partir des tables de Nous insistons également sur le fait que ces règles de sélection
caractères. sont établies dans l’hypothèse harmonique. Cependant, les spectres
Exemple : la molécule d’eau H2O possède trois modes normaux réels, Raman ou infrarouge, comportent parfois des bandes, le plus
de symétrie 2 A1 + B2 qui sont à la fois actifs en Raman et en infra- souvent peu intenses, appelées harmoniques (de fréquence n νv) ou
rouge, comme nous pouvons le voir dans la table de caractère du combinaisons (de fréquence νv + νv’ ).
groupe C2v (figure 2). L’intensité de ces bandes provient de l’anharmonicité mécanique
ou électrique.
Un exemple d’application des prévisions théoriques à des molé-
cules de formule brute AB 4 est donné dans le tableau 1. Voici, de
plus, un résumé de quelques règles importantes.
a ) Si la molécule possède un centre de symétrie, il n’existe 1.4 Différents effets Raman
aucune vibration commune aux spectres infrarouge et Raman. Les
vibrations symétriques par rapport à ce centre (indice g : gerade ) La diffusion Raman telle que nous l’avons présentée précédem-
sont actives en Raman mais inactives en infrarouge. Les vibrations ment concerne uniquement l’effet Raman linéaire que l’on appelle
antisymétriques par rapport à ce centre (indice u : ungerade ) sont également Raman classique ou conventionnel. Nous indiquerons
au contraire actives en infrarouge et inactives en Raman. dans la suite de ce paragraphe comment on peut concrètement
Cette règle est connue sous le nom de règle de mutuelle exclusion l’observer (§ 1.4.1).
(tableau 1, 1re colonne).
Exemples : O2 , H2 , N2 , CO2 , CH2 = CH2 , C6H6 , complexes carrés
plans (AB4), complexes octaédriques (AB6). 1.4.1 Effet Raman conventionnel
Si certains modes sont actifs à la fois en infrarouge et en Raman, Pour observer l’effet Raman, on éclaire un milieu matériel,
cela indique de façon certaine que la molécule ne possède pas de contenu dans un récipient transparent, par une lumière monochro-
centre de symétrie. matique, c’est-à-dire une radiation électromagnétique dont la fré-
b ) Par contre, certaines vibrations peuvent n’apparaître ni en quence est connue avec précision. Cette radiation est appelée
infrarouge ni en Raman (par exemple, mode inactif B2u sur le radiation excitatrice et provient, dans la grande majorité des cas,
tableau 1). d’une source laser.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
P 2 865 − 6 © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
72
Référence Internet
P2865
Tableau 1 – Exemple d’application des prévisions théoriques à des molécules ou ions de formule brute AB4
B 90° 90°
B B
B A
B B B A
A A B
A B
B B B B
B B B
B
2
B B 120° B
Angles entre liaisons 90° 109° 28’ ≠ 109° 28’ ≠ 109° 28’ ≠ 109° 28’
Une fraction des photons constituant cette radiation est réfléchie Il est d’usage d’utiliser non pas la fréquence du rayonnement,
ou absorbée, et une fraction bien plus faible est diffusée dans toutes mais une grandeur qui lui est proportionnelle, le nombre d’ondes :
les directions de l’espace. Parmi les photons diffusés, la plupart ont
la même fréquence ν0 que le rayonnement excitateur. Ce phéno- ν = --ν- = 1
---
mène de diffusion sans changement de fréquence est la diffusion c λ
Rayleigh.
avec c vitesse de la lumière (3 × 108 m · s–1),
Pour moins d’un millième des photons diffusés, un changement λ longueur d’onde du rayonnement.
de fréquence est observé et cela correspond à l’effet Raman. Soit νd
la fréquence des photons ainsi diffusés, deux cas peuvent se Dans la quasi-totalité des tables et des livres ou publications trai-
présenter : tant de spectroscopie de vibration, l’unité de nombre d’ondes est le
cm–1 (parfois dénommé Kayser).
νd < ν0 νd = ν0 – νv c’est la diffusion Raman Stokes ;
De plus, plutôt que de repérer les raies Raman par leur nombre
νd > ν0 νd = ν0 + νv c’est la diffusion Raman anti-Stokes. d’ondes absolu ν d = ν 0 ± ν v , on préfère mettre en évidence la gran-
deur ν v , caractéristique de la molécule, et indépendante du choix de
Dans les deux cas, les écarts de fréquence νv sont égaux aux fré- la radiation excitatrice ν 0 . C’est donc cette grandeur, égale à l’écart
quences de vibration, actives en Raman, de la molécule considérée. de nombres d’ondes (exprimé en cm–1) entre la raie Raman et la raie
Le spectre Raman contient diverses informations qu’il est souhai- Rayleigh, et appelée nombre d’ondes relatif, que l’on fait apparaître
table de présenter de la manière la plus commode pour l’utilisateur. sur les spectres pour les raies Stokes (figure 4).
Chaque raie ou bande peut être caractérisée par :
Des normes de présentation des spectres Raman ont été propo-
— sa position dans le spectre, que l’on peut relier à la fréquence
sées par l’Union internationale de chimie pure et appliquée [2].
d’un mode de vibration ;
— son intensité, liée au nombre de molécules diffusantes ainsi
qu’au mode de vibration considéré ;
— son état de polarisation, qui renseigne sur la symétrie du mode 1.4.2 Effet Raman de résonance
correspondant ;
— son profil, qui permet l’étude de mouvements ou d’interac- La diffusion Raman de résonance est un cas particulier de l’effet
tions en phases condensées ou certaines déterminations de tempé- Raman qui intervient lorsque la longueur d’onde de la radiation
rature en phase gazeuse. excitatrice est voisine de celle d’une transition électronique de la
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation P 2 865 − 7
73
2
74
Référence Internet
IN164
INNOVATION
Points clés
Domaine : techniques d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Spectroscopie de diffusion Raman, accélérateur de
particules, cyclotron
Domaines d’application : matériaux, nucléaire, géologie, hautes températures
Principaux acteurs français :
Industriels : Renishaw, Horiba Jobin Yvon, Andor Technology, Bruker Corp.,
Jasco, Thermo Scientific, BW Tech, BaySpec, Kaiser Optical System
Parution : septembre 2013
75
Référence Internet
IN164
INNOVATION
1. Contexte
2
Tridymite
(microélectronique...) du XXe siècle. 0,6
Silice
Un matériau, qu’il soit naturel ou élaboré par l’homme, est
sélectionné pour ses propriétés afin d’entrer dans la
conception d’objets plus ou moins complexes. Que l’on s’inté- 0,4
resse à ses caractéristiques mécaniques, thermiques, élec-
triques, magnétiques, optiques, ou chimiques, la connaissance
de la structure atomique du matériau est la clef de la 0,2
compréhension de ses propriétés macroscopiques.
L’utilisation de méthodes de caractérisations complémentaires
permet de remonter à l’organisation atomique d’un matériau, 0,0
afin de pouvoir relier propriétés macroscopiques et organisation
microscopique. De nombreuses techniques donnent accès à des 200 300 400 500 600
informations structurales soit locales, comme les spectroscopies Nombre d’ondes (cm–1)
RMN, soit plus globales comme la diffusion des rayons X et des
neutrons, ou encore les spectroscopies vibrationnelles (Brillouin, Figure 1 – Exemples de spectres Raman
infrarouge ou Raman).
La connaissance de l’évolution des propriétés des matériaux
en conditions d’usage permet de prévoir leur évolution dans le spectres de matériaux de compositions identiques (SiO2) mais
temps, notamment lorsqu’ils sont exposés à des environ- de structures différentes. Les modes du spectre de silice, en
nements sévères. Afin d’assurer une sécurité de fonction- noir, sont larges, caractéristiques d’une structure
nement de systèmes – qui peut être cruciale dans certains cas désordonnée : celle d’un verre. Les autres spectres repré-
(réacteurs nucléaires, procédés chimiques...) – ou de garantir sentent les polymorphes du cristal de SiO2 . Les modes sont
une qualité de fabrication optimale d’un produit (cimenteries, plus fins, caractéristiques d’une structure ordonnée.
industrie verrière, aciéries, barrières thermiques ou radiopro-
tection), il est indispensable de prévoir le comportement des En résumé, la position du pic Raman renseigne sur
matériaux lorsqu’ils sont soumis à des conditions hostiles, telles l’espèce chimique mise en jeu dans la liaison sondée sa
que température ou irradiation dans les exemples précédents. largeur caractérise l’ordre structural. Un déplacement du
La spectroscopie de diffusion Raman, méthode optique basée pic renseigne sur l’état de contrainte du matériau et sur sa
sur l’interaction lumière/matière, est particulièrement bien température.
adaptée au suivi des propriétés de matériaux en conditions
extrêmes. L’utilisation de lumière visible (ou proche du visible)
offre en effet l’avantage de pouvoir déporter la sonde d’excita- Cette technique a connu un essor lié aux innovations technolo-
tion/collection via un jeu de fibres optiques, et ainsi de ne lais- giques qui ont permis de rendre la technique plus largement
ser en zone hostile que le minimum de composants optiques, et applicable. Dans un premier temps, l’excitation a été révolution-
de réaliser l’analyse du signal collecté en zone « sûre » (loin des née par le LASER : cohérence, monochromaticité, directionnalité
conditions extrêmes, stabilisée thermiquement). De plus, l’ana- et intensité. Vint ensuite l’analyse multicanale, qui a fortement
lyse est non destructive, et les mesures se réalisent sans réduit le temps de mesure grâce à l’acquisition simultanée de la
contact : il est ainsi possible de maintenir la sonde Raman éloi- gamme spectrale sur le millier de pixels d’un détecteur multica-
gnée de l’échantillon (de quelques dixièmes de millimètres à nal (barrettes de photodiodes dans un premier temps, puis
quelques dizaines de mètres), atténuant les effets de tempéra- aujourd’hui caméras CCD). Ensuite, la microspectroscopie
ture ou de rayonnements ionisants. Raman a donné accès à l’analyse cartographique d’échantillons
avec une résolution spatiale inférieure au micromètre, grâce aux
objectifs microscopiques à forte ouverture numérique, au filtrage
2. Instrumentation Raman : confocal et aux platines de déplacement micrométriques. Des
technologies ont permis d’améliorer la fiabilité, la qualité et la
un état de l’art rapidité d’acquisition des cartographies : citons la technologie de
synchronisation du déplacement du réseau et de la lecture CCD
pour obtenir un spectre large bande haute résolution ou encore
La spectroscopie de diffusion Raman est présentée en
les méthodes de type « superpixel », développées par les princi-
détail dans l’article Spectroscopie Raman [P 2 865]. Cette
paux constructeurs de spectromètres.
technique expérimentale repose sur la diffusion inélas-
tique de la lumière par les liaisons interatomiques (vibra- Nota : CCD pour Charge-Coupled Device.
teur isolé dans les molécules, phonons dans les solides).
Elle permet de connaître la composition de la matière
ainsi que sa structure (et sa dynamique) Nous allons détailler les configurations d’études non
conventionnelles, permettant d’accéder aux bas nombres
La figure 1 présente six spectres illustrant les informations d’ondes et d’étudier les matériaux en conditions
accessibles par la méthode de caractérisation. Ce sont les extrêmes.
76
Référence Internet
IN164
INNOVATION
Unités
Lumière
collectée
Un spectre Raman est la représentation d’une intensité
diffusée en fonction de l’énergie des photons.
Monochromateur
Les ordonnées s’expriment en nombre de coups détec-
tés par le pixel du CCD correspondant à l’énergie
2
concernée (qui est en réalité un gamme d’énergie). On
utilise souvent une unité arbitraire, dont l’abréviation
peut-être confondue avec d’autres unités (unités
atomiques). On préférera l’abréviation u.arb.
En spectroscopie vibrationnelle, les abscisses
s’expriment en nombres d’ondes (n.o), en cm–1. D’autres
spectroscopies utilisent des unités comme le nanomètre
(optique visible), le GHz (Brillouin), l’eV (spectroscopies Figure 2 – Schéma d’un prémonochromateur
électroniques).
Rappelons les équivalences suivantes :
1 eV = 8 065 cm–1 = 242 THz d’atteindre une limite bas nombres d’ondes inférieure à
10 cm–1, tout en conservant l’accès aux spectres Stokes et
1 cm–1 = 30 GHz = 1,24 × 10–4 eV antiStokes. Leur prix est aujourd’hui élevé, 10 à 20 fois
Notons que fréquences et nombres d’ondes sont des supérieur à celui des filtres précédents.
grandeurs couramment utilisées.
2.1.2 Étages multiples
Il est également possible d’accéder aux bas nombres
2.1 Accès aux très bas nombres d’ondes d’ondes en utilisant un spectromètre à étages multiples
(figure 2), le plus souvent triple monochromateur [1]. Le
Les bas nombres d’ondes désignent la gamme spectrale dernier « étage » (monochromateur) est utilisé pour la dis-
inférieure à 150 cm–1 dont l’obtention est complexe en persion du signal collecté, alors que les deux premiers jouent
raison de la diffusion élastique Rayleigh (et de la réflexion le rôle d’un filtre extrêmement sélectif (la limite bas nombres
à la surface de l’échantillon en configuration de rétrodiffusion) d’ondes du spectre Raman peut atteindre les 1,5 cm–1) fonc-
et dont l’intensité dépasse de plusieurs ordres de grandeur tionnant pour toutes les longueurs d’ondes.
celle du signal Raman. Pourtant, cette gamme spectrale peut
présenter un grand intérêt, par exemple dans l’étude des Le premier monochromateur disperse la lumière analysée,
verres (pic de Boson) et dans le cas de mesure de tempéra- c’est-à-dire étale spatialement les différentes composantes
ture par méthode Stokes/antiStokes. spectrales du signal collecté depuis l’échantillon. Une fente
sélectionne physiquement les longueurs d’onde d’intérêt, en
2.1.1 Filtres empêchant le signal de diffusion élastique de pénétrer dans le
second étage de dispersion (faisceaux violets sur le schéma).
Les spectromètres commerciaux les plus courants utilisent Ce deuxième monochromateur a pour rôle de « remélanger »
un filtre interférentiel (type Edge ou Notch) pour éliminer la le faisceau (tronqué de la composante élastique) au moyen
diffusion élastique de Rayleigh. d’un réseau monté en opposition. L’ensemble de ces deux
Les filtres holographiques Notch sont obtenus par un monochromateurs constitue le « prémonochromateur »
processus d’impression photographique : un milieu photosen- soustractif du système à étages multiples. Le cas des
sible est exposé à deux sources cohérentes qui vont interférer systèmes à étages multiples où les dispersions s’ajoutent
et ainsi créer une distribution périodique de l’indice de réfra- (systèmes additifs), dont l’intérêt est d’obtenir une résolution
ction. Cette couche photo-imprimée est ensuite protégée entre spectrale maximale, n’est pas abordé ici.
deux lames minces. Ces filtres sont de type coupe-bande : ils La gamme du spectre à filtrer est sélectionnée en modifiant
permettent d’obtenir les modes Stokes et antiStokes (ces la position des réseaux. Il est ainsi possible de mesurer les
derniers sont principalement utilisés pour la mesure de la raies Stokes et antiStokes (figure 3).
température). Les filtres Notch permettent de descendre à
Ce dispositif permet l’accès aux très bas nombres d’ondes
relativement bas nombres d’ondes (80-120 cm–1), mais ont
pour toutes les longueurs d’ondes d’excitation. Cependant, le
une durée de vie limitée.
passage par deux monochromateurs diminue fortement la
La technologie Edge, également basée sur les inter- luminosité du système et par conséquent l’intensité du signal
férences, est désormais la plus répandue. Les filtres Edge sont Raman. Par ailleurs, le réglage et la stabilité du système, plus
constitués de couches minces obtenues par une pulvérisation complexes qu’un simple filtre interférentiel, réservent ce
par faisceau d’ions (IBS) qui vont, grâce aux interférences, système aux spectroscopistes Raman avertis et à une utili-
atténuer la raie Rayleigh (densité optique = 6), et transmettre sation en laboratoire.
90 % du signal Stokes (uniquement). Ce sont des filtres
passe-bas. Le front de montée et les taux de réjection sont
aujourd’hui comparables aux filtres holographiques Notch. De 2.2 Hautes températures
plus, ils offrent une très bonne résistance mécanique (bonne L’étude des propriétés des matériaux à haute température
durée de vie, seuil de dommage élevé). requiert des développements instrumentaux originaux, notam-
L’apparition récente de filtres coupe-bande très efficaces ment en raison de l’émission thermique de l’échantillon dans
(Ondax SureBlockTM) permet d’avoir accès aux très bas le visible lorsqu’il est chauffé à plus de 1 000 oC. Nous verrons
nombres d’ondes. Leur fabrication repose sur la technologie quelles sont les techniques qui permettent d’acquérir un
du filtre holographique réflectif en volume. Ils permettent spectre Raman à très haute température.
77
Référence Internet
IN164
INNOVATION
Stokes 1000 K
0,8
AntiStokes 1200 K
1400 K
0,6
2
1800 K
ν0 - νvib ν0 ν0 + νvib 2200 K
0,4
a spectre 2600 K
3000 K
0,2
Stokes
0,0
AntiStokes
105
104
ν0 - νvib ν0 ν0 + νvib
L(T)/L(1 000 °C)
102
Figure 3 – Filtrage de la raie Rayleigh au niveau de la fente
intermédiaire du prémonochromateur
101
2.2.1 Difficultés
L’émission thermique est la lumière émise par un échantillon
100
dont la température est supérieure au zéro absolu. A tempé-
1 000 1 200 1 400 1 600 1 800 2 000 2 200 2 400
rature ambiante, les radiations sont uniquement émises dans
le domaine spectral de l’infrarouge, donc ne gênent pas dans Température (°C)
la gamme spectrale d’intérêt en spectroscopie Raman. Mais
lorsque la température du matériau augmente, le maximum Figure 5 – Luminance spectrale en fonction de la température
à 532 nm [2]
d’émission se décale vers le rayonnement visible (loi de dépla-
cement de Wien).
Gardons en mémoire que l’intensité de la diffusion Raman avec C1 = 1,191 × 10–16 W · m–2,
est trop faible pour être visible à l’œil nu. Or nous avons tous C2 = 1,439 m · K,
vu un corps émettre dans le visible, du fer porté au rouge au
filament d’ampoule chauffé à blanc qui nous éclaire. Nous σ nombre d’ondes,
comprenons alors que le signal d’émission thermique de T température absolue.
l’échantillon, qui se superpose au signal Raman, va dans un La luminance spectrale d’un corps réel est reliée à celle du
premier temps (gamme 600 à 1 000 oC) détériorer le rapport corps noir par son émissivité :
signal sur bruit du spectre, puis à plus haute température va
complètement masquer le signal Raman. L (σ , T ,θ )
ε (σ , T ,θ ) =
Un corps noir idéal absorbe toute la radiation incidente. Sa L0 (σ , T )
luminance spectrale, représentée sur la figure 4, est donnée La figure 5 [2] représente l’évolution de l’intensité de la
par la loi de Planck : luminance spectrale du corps noir en fonction de sa tempé-
rature, L (T ), normalisée par rapport à la luminance spectrale
C1σ 3 à 1 000 oC, L (1 000 oC) (à 532 nm).
L0 (σ ,T ) =
C σ On peut retenir que la luminance du corps noir augmente
exp 2 − 1 approximativement d’un facteur 10 tous les 200 oC dans notre
T gamme d’intérêt.
78
Référence Internet
P2870
2
Ingénieur-chercheur
CEA Saclay, direction de l’énergie nucléaire, Département de physico-chimie, Gif-sur-Yvet-
te, France
et Jean-Baptiste SIRVEN
Ingénieur-chercheur
CEA Saclay, Direction de l’énergie nucléaire, Département de physico-chimie, Gif-sur-Yvet-
te, France
79
Référence Internet
P2870
besoin, les données spectrales recueillies, ainsi que les différents types d'infor-
mations que l'on peut en déduire. Les phénomènes physiques pouvant affecter
le signal tels que les interférences spectrales, l'auto-absorption et les effets de
matrices sont passés en revue. Enfin, un portrait non exhaustif est dressé des
nombreuses applications de la LIBS.
1. Principe, caractéristiques
2
La LIBS (figure 1) est une technique d’analyse élémentaire
et positionnement consistant à analyser le spectre d’émission optique d’un
plasma résultant de la vaporisation de la surface du matériau
par une impulsion laser. Les atomes, ions et molécules, excités
dans le plasma, se désexcitent en émettant des raies caractéris-
tiques, dans le domaine de longueurs d’onde allant de l’UV
1.1 Principe lointain au proche IR. Comme pour toutes les techniques
basées sur l’émission optique, l’étude du spectre d’émission du
Née en 1963 dans une équipe de la Société française de plasma permet de déterminer la composition chimique de
céramique [1], la LIBS (Laser-Induced Breakdown Spectroscopy ) l’échantillon : la longueur d’onde des raies permet d’identifier
est la première application du laser, apparu en 1960. Elle est les éléments présents (analyse qualitative) et l’on peut détermi-
cependant restée un champ de recherche assez peu exploré, ner les concentrations à partir de courbes d’étalonnage établies
jusqu’à ce que les lasers gagnent suffisamment en performances avec des échantillons de concentrations connues (analyse
pour répondre aux exigences de l’analyse spectrochimique. C’est quantitative).
dans les années 1980 que la LIBS a connu un regain d’intérêt sus-
cité par ses nombreuses applications potentielles [2]. En France,
dès cette époque, les études analytiques en milieu nucléaire réali-
sées par le CEA, ont donné lieu aux premières publications françai- Les lasers utilisés pour produire le plasma sont en très grande
ses sur la technique [3]. Grâce aux progrès considérables qui ont majorité des lasers de durée d’impulsion de 5 à 10 ns, typique-
eu lieu dans les domaines de l’optronique et de l’informatique, ment des lasers de type Nd:YAG. D’autres durées d’impulsion,
l’intérêt pour la LIBS s’est largement étendu. Au cours de la femtoseconde notamment, peuvent être employées mais les
période récente, on dénombre ainsi plus de 3 000 articles publiés mécanismes physiques d’ablation laser et de formation du plasma
entre 2009 et 2013. En 2014, une vingtaine d’équipes en France tra- sont différents du régime nanoseconde. Ces lasers sont à l’heure
vaillent activement sur le développement de la LIBS et de ses actuelle utilisés en LIBS de manière marginale, en partie pour des
applications. raisons de maturité industrielle.
Système
optique
Échantillon
Si
1. Impulsion laser focalisée sur un échantillon
2. Ablation laser/formation d’un plasma
3. Spectroscopie d’émission du plasma Al
Signal (ua)
Mg
80
Référence Internet
P2870
1 200
La LIBS présente l’avantage d’être une technique entièrement
fondée sur l’optique. Elle permet donc de réaliser des mesures 4 000
Intensité (ua)
sans contact entre l’instrument et le milieu analysé. Non intrusive
et rapide (de quelques secondes à quelques minutes), elle est 800
ainsi, et de manière unique si on la compare aux autres techniques
analytiques, bien adaptée à l’analyse à distance, en ligne ou in 2 000
situ, sans prélèvement ni préparation d’échantillon. Son principe 400
de fonctionnement permet, moyennant l’utilisation d’un instru-
ment dédié, la réalisation d’analyses sur tout type de matériaux
industriels ou naturels qu’ils soient sous forme solide, liquide, ou
gazeuse, et sur les aérosols. Comme toutes les méthodes basées
sur la spectroscopie d’émission, la LIBS permet de réaliser des
0
539,5 541,5 543,5
0
545,5 2
analyses chimiques multi-élémentaires simultanées, et l’instru- Longueur d’onde (nm)
mentation va du système entièrement portable jusqu’au dispositif
transportable dans un véhicule, voire entièrement robotisé, selon
60 ns 1 µs
l’application visée et les contraintes d’utilisation.
Des publications récentes [4] [5] ainsi que les ouvrages [6] [7] [8]
Figure 2 – Spectres LIBS d’un échantillon de fer obtenus 60 ns
[9] fournissent une revue détaillée des principes et des applica- et 1 qs après le tir laser
tions de la technique LIBS.
81
Référence Internet
P2870
107
Na
Ca+ Ba+
106 Li
Sc+ Rb Sr Eu+
Cu In Tl
Y+
Al
Ga Pd Ag Cs La+ Ho+ Lu+
Be+ Mo Tb+ Yb+ Pb
105 K V Mn Re
Mg Nb Rh Sn Pr+ Hf+
Os Au
Si Ti+ Cr Zn Ge Zr+ Ru Cd Ce+ Dy+ Er+Tm+ Th+
104 Fe Ni Nd+ Gd+ Hg
Co Sb Sm+ Ta+ W Bi
As Pt
2 B Te lr U+
103
O P
102 Br
H S Cl Kr
101 C
Se
Ar
N
1
F
Xe+
10–1
Ne
10–2
10–3
He
10–4
Numéro atomique
Conditions de plasma LIBS typiques : température électronique de 104 K et densité d’électrons de 4 · 1017 cm–3.
Dans la bande 200-900 nm, la raie d’émission d’intensité maximale est calculée d’après les équations de Boltzmann et de Saha (§ 2.8).
Lorsque l’intensité d’une raie ionique est plus forte que celles des atomes neutres, l’ion est indiqué à la place de l’atome neutre
sont nettement moins sensibles. Cela est illustré sur la figure 3 qui Enfin, grâce aux propriétés de focalisation des faisceaux laser, la
donne les intensités relatives théoriques du signal LIBS pour les LIBS permet de réaliser l’analyse au niveau microscopique ainsi
différents éléments chimiques. que des cartographies de matériaux, avec une résolution latérale
La limite de détection absolue de la LIBS peut descendre pouvant être inférieure à 2 µm (§ 4.5 et 6.6). De plus, en accumu-
jusqu’au femtogramme (10–15 g) dans les meilleurs cas. Cette per- lant les tirs laser au même point de l’échantillon, la LIBS permet
formance, comparable par exemple à celle de l’ablation laser cou- également d’effectuer des mesures de profils élémentaires en pro-
plée à une torche à plasma ICP (LA-ICP-OES), est importante à fondeur, avec néanmoins une résolution limitée due à la difficulté
prendre en compte lorsque la quantité de matière à analyser est de maîtriser l’évolution du cratère d’ablation.
limitée (microanalyse par exemple). Ces caractéristiques font d’elle une technique privilégiée pour
l’analyse hors du laboratoire, in situ ou à distance. En termes
d’applications, elle est donc particulièrement intéressante lorsque
1.4 Positionnement de la LIBS l’échantillon se trouve dans un environnement contraignant, ou
que le prélèvement d’échantillon est difficile ou même impossible
La LIBS se distingue comme étant la seule technique d’analyse (milieu à haute température, matières radioactives, exploration
élémentaire non intrusive, sans contact, sans prélèvement ni pré- spatiale...). Cette capacité unique se décline aussi dans le domaine
paration de l’échantillon. Elle ne nécessite pas que l’échantillon de l’analyse en ligne, en particulier dans le secteur industriel et du
soit conducteur et permet de mesurer simultanément tous les contrôle de procédé, qui est également un champ d’application pri-
éléments, y compris les plus légers jusqu’à l’hydrogène. Une autre vilégié de la LIBS.
spécificité de la LIBS est que l’instrumentation peut être très La comparaison de ses performances avec celles des techniques
compacte, car elle bénéficie de l’existence de lasers et de spectro- usuelles de laboratoire d’analyse du solide n’est pas totalement
mètres de dimension réduite, typiquement inférieure à 20 cm, et pertinente, car elle ne prend pas en compte le contexte d’applica-
dont les spécifications sont compatibles avec les besoins de la tion analytique. Cependant, pour mieux situer la LIBS vis-à-vis des
LIBS (durée d’impulsion, énergie, résolution spectrale...). On peut principales techniques d’analyse directe du solide, quelques
alors disposer de systèmes entièrement portables ayant une auto- éléments de comparaison pratiques sont présentés dans le
nomie de plusieurs heures, pour des applications d’analyse de ter- tableau 1. Ces techniques sont principalement l’ablation laser cou-
rain (§ 4.4). plée à l’ICP (détection optique, LA-ICP-OES, ou massique,
82
Référence Internet
P2870
LA-ICP-MS), la fluorescence X (XRF), la spectrométrie à source le matériau, la diffusion thermique et les paramètres thermodyna-
étincelle, la spectrométrie de décharge luminescente GD (Glow miques du matériau.
Discharge ) avec détection optique (GD-OES) ou massique (GD-MS) Pour les métaux, le modèle de Drude permet de rendre compte
et la microsonde électronique (EMPA). du chauffage du matériau entraînant l’ablation. La profondeur de
Précisons cependant que les différents avantages de la LIBS ne pénétration optique dépend de l’indice optique du milieu et peut
sont pas tous cumulables. Ainsi par exemple, la microanalyse, qui être estimée par la loi de Beer-Lambert (en supposant que le maté-
nécessite l’usage d’un microscope, est difficilement compatible riau garde ses propriétés optiques durant le chauffage laser) :
avec l’analyse en ligne, et les instruments portables ont des perfor-
mances réduites par rapport aux équipements disposant de lasers L = 1/α où α = 4πk /λ
puissants et de spectromètres à haut pouvoir de résolution. Il
existe donc une configuration instrumentale dédiée à chaque avec α coefficient d’absorption,
domaine d’utilisation. k partie imaginaire de l’indice de réfraction du milieu.
La profondeur de pénétration thermique L par conduction est
donnée par la loi [12] :
83
Référence Internet
P2870
Ionisation collisionnelle
hc 3 2
αB ,e −i ∝ 1− exp − λ Ne et multiphotonique
2
(2)
λkBT
Création des premiers
avec h constante de Planck, électrons libres
c vitesse de la lumière, Bremsstrahlung
kB constante de Boltzmann, inverse e–/neutre
T température, Accélération et
Ne densité électronique. amplification du nombre
d’électrons
Si les atomes sont une fois ionisés, αB,e–i est proportionnel au
carré de la densité électronique Ne , ce qui fait que plus Ne est éle-
vée, plus le coefficient d’absorption, à la longueur d’onde λ, aug- Bremsstrahlung
mente et donc contribue à augmenter Ne . Il y a un emballement, inverse e–/ion
on parle alors d’avalanche électronique qui conduit à la création
extrêmement rapide d’un plasma fortement ionisé. Emballement
de l’amplification = claquage
La figure 4 illustre l’enchaînement des différentes étapes qui
conduisent à la création d’un plasma.
du plasma
Le plasma créé par laser a un caractère transitoire durant lequel Figure 4 – Étapes de la création d’un plasma par laser
les grandeurs physiques évoluent continûment. La matière est
éjectée de la surface à des vitesses de l’ordre de 104 m/s. Il s’en
suit une compression du gaz entourant le plasma et la génération L’onde de choc se propage dans le gaz ambiant en suivant la loi
d’une onde de choc. Durant cette expansion, le plasma se refroidit de Sedov [14].
essentiellement par détente et par pertes radiatives. La figure 5 illustre les phénomènes mis en jeu.
Gaz ambiant
Cible
Diffusion thermique
hν
84
Référence Internet
P2875
Spectroscopie microonde
2
1. Spectroscopie de rotation ....................................................................... P 2 875 - 3
1.1 Description classique..................................................................................... — 3
1.2 Description quantique dans l’approximation du rotateur rigide ............... — 4
2. Spectromètre à impulsions microondes par transformée
de Fourier FTMW......................................................................................... — 5
2.1 Principe général ............................................................................................. — 5
2.2 Spectromètre SIMO ....................................................................................... — 6
2.2.1 Cavité Pérot-Fabry................................................................................. — 6
2.2.2 Jet supersonique................................................................................... — 8
2.3 Avantages de la spectroscopie à impulsions microondes
par transformée de Fourier ........................................................................... — 9
3. Spectromètre à impulsions microondes par dérive
de fréquences CP-FTMW .......................................................................... — 10
3.1 Nécessité d’une évolution ............................................................................. — 10
3.2 Principe général ............................................................................................. — 10
4. Exemples d’applications de la spectroscopie microonde............... — 11
4.1 Spectroscopie de rotation pour l’étude de molécules d’intérêt
atmosphérique ............................................................................................... — 12
5. Conclusion.................................................................................................... — 12
6. Glossaire ....................................................................................................... — 13
Pour en savoir plus ............................................................................................. Doc. P 2 875
utilisé comme détecteur. C’est ainsi qu’en 1655, Newton entreprend ses expé-
riences sur la dispersion de la lumière blanche à l’aide d’un prisme en verre.
Cependant, il a fallu attendre environ 1860 pour que Bunsen et Kirchhoff
construisent le spectroscope à prisme utilisable en tant qu’instrument.
En 1885 Balmer établit de façon empirique une relation mathématique qui
permet de calculer les longueurs d’ondes des raies visibles du spectre de
l’atome d’hydrogène. C’est ainsi que démarre la relation étroite entre l’expé-
rience et la théorie en spectroscopie, l’expérience fournissant les résultats et
une théorie appropriée essayant de les expliquer et de prédire des résultats
dans des expériences voisines.
Cependant, la théorie rencontre de plus en plus de difficultés tant qu’elle est
basée sur la mécanique classique de Newton, et cela jusqu’au développement de
la mécanique quantique par Schrödinger en 1926. À cette époque, les données
provenant des expériences de spectroscopie, sauf celles effectuées sur des atomes
85
Référence Internet
P2875
très simples, dépassent les prédictions de la théorie, limitée par les approxima-
tions faites pour que les calculs puissent aboutir.
La première expérience où les fréquences microondes ont été utilisées pour
étudier une molécule est réalisée par Cleeton et Williams en 1934. Ils avaient
construit des oscillateurs magnétron sur mesure pour effectuer une étude de
l’inversion du mode vibrationnel de la molécule NH3.
La spectroscopie microonde est utilisée dans le domaine de la physico-chimie
dans le but de déterminer la structure des molécules en phase de gaz avec une
grande précision. La difficulté de l’utilisation des spectres dans la détermination de
la structure géométrique d’une molécule augmente avec sa taille et sa complexité.
Les fréquences de transition de rotation pouvaient déjà être mesurées avec haute
2 précision à cette époque, mais les chercheurs n’étaient pas en mesure de fournir
des informations sur la structure des molécules avec une précision correspon-
dante à celle issue de l’expérience. Cette situation s’est améliorée grâce aux
progrès des méthodes numériques. À partir des années 1960, avec l’arrivée d’ordi-
nateurs puissants permettant de réduire les approximations, la théorie commence
à prédire des propriétés spectroscopiques avec une précision comparable à celle
que l’on peut obtenir expérimentalement.
Les améliorations apportées aux instrumentations électroniques et aux équipe-
ments à vide après 1970 permettent d’améliorer encore la technique expérimentale.
Balle et Flygare en 1979 conçoivent un spectromètre à impulsions microondes
par transformée de Fourier, FTMW (Fourier Transform Microwave Spectro-
meter). Le principe de ce type de spectromètre est d’exciter des molécules à
l’aide d’une impulsion microonde et de mesurer le signal de désexcitation
émis par celles-ci. Ensuite une transformée de Fourier du signal est effectuée
donnant lieu à un ensemble de raies qui constituent le spectre des molécules
étudiées.
L’interprétation d’un spectre à température ambiante est rendue difficile par
la superposition de raies très proches en fréquence. Si, en outre, on s’intéresse
à des systèmes où plusieurs espèces sont présentes en même temps, par
exemple des complexes moléculaires, le spectre est très dense. La mesure
d’un spectre à basses températures, de l’ordre de quelques kelvins, permet de
réduire le nombre de raies et rend donc son étude plus simple. De telles tem-
pératures sont atteintes avec la technique dite du jet supersonique, présentée
dans le paragraphe 2.2.2, qui a été couplée par Balle et Flygare en 1981 au
spectromètre à impulsions microondes.
Le spectromètre FTMW permet d’étudier une vaste gamme de molécules,
comme par exemple des molécules d’intérêt biologique, des acides aminés, des
sucres et des particules odorantes et plus récemment des composés organiques
volatils COV.
La diffusion des techniques de spectroscopie microondes n’est pas uni-
quement due aux développements techniques de l’instrumentation mais
aussi à l’augmentation d’installations de calcul qui permettent des investi-
gations théoriques approfondies avec des méthodes sophistiquées de
chimie quantique. Par exemple, le laboratoire PhLAM dispose d’un cluster
informatique doté d’une grande quantité de mémoire (jusqu’à 1536 Go). Les
méthodes de calculs quantiques se basent sur divers formalismes mathéma-
tiques dans lesquels il s’agit de résoudre l’équation de Schrödinger en
prenant en compte toutes les interactions entre les particules constituant les
systèmes étudiés. Les aspects de chimie quantique ne sont pas traités dans
cet article.
Pour les aspects de chimie quantique, les articles [AF 6 050] et [J 1 011]
peuvent être consultés.
86
Référence Internet
P2875
2
h J.s
SIMO Spectromètre à Impulsions Microondes
I kg.m2 Moment d’inertie
TEM Transverse ElectroMagnetic
Nombre quantique associé au moment
J
angulaire TWA Traveling Wave Tube Amplifier
Nombre quantique associé à la projection
k du moment cinétique selon l’axe
de symétrie de la molécule étudiée en spectroscopie d’émission et absorption et ne sera pas
traitée ici.
m kg Masse
Nombres entiers qui caractérisent le mode L’émission ou l’absorption d’un rayonnement électromagné-
m,n,q
de la cavité tique par la matière ne peut se produire que pour des fréquences
qui lui sont propres. L’ensemble des transitions observées entre
N Nombre de Fresnel
les niveaux d’énergie constitue le spectre du système étudié.
P Quantité de mouvement angulaire
Il représente en quelque sorte une empreinte digitale caractéris-
Q Coefficient de qualité
tique de l’espèce sous examen.
R m Rayon de courbure du front d’onde De façon générale, les photons des régions visible et ultraviolette
du spectre électromagnétique induisent des transitions entre les
Constante de temps de retour niveaux d’énergie électroniques d’une molécule, ceux de la lumière
T2
à l’équilibre infrarouge excitent les transitions entre les niveaux vibratoires alors
que les transitions entre les niveaux de rotation sont générées par les
w m Rayon du champ électromagnétique fréquences de la gamme 1 GHz-1 THz. Les fréquences microondes se
situent entre 1 et 30 GHz.
Repère dans la cavité (z direction
x,y,z La technique de spectroscopie d’émission consiste à stimuler un
de propagation du faisceau d’ondes)
système moléculaire dans un état excité et puis à détecter la radia-
Moment dipolaire de la molécule tion émise par le système moléculaire pendant la relaxation vers
μ D l’état fondamental [15]. À l’inverse, lorsque l’on mesure la radia-
(1D = 3,33564 × 10–30 C.m)
tion atténuée passant à travers un système moléculaire, l’on parle
v s–1 Fréquence centrale du mode de spectroscopie d’absorption [P 2 656].
L’intérêt de l’enregistrement et de la modélisation du spectre de
κ Paramètre de Ray rotation d’un système moléculaire est de conduire à l’identification
non ambiguë de sa structure. La connaissance de la géométrie
λ m Longueur d’onde
donne alors accès aux propriétés physico-chimiques du système
ω s–1 Vitesse angulaire étudié.
1. Spectroscopie de rotation
1.1 Description classique
La spectroscopie exploite l’émission, l’absorption et la diffusion Dans cet article, les concepts théoriques essentiels à la compré-
du rayonnement électromagnétique pour l’étude d’atomes ou de hension de la technique de spectroscopie microonde [15] [16] sont
molécules. L’émission a lieu lorsqu’un atome ou une molécule présentés.
perd de l’énergie en rayonnant de la lumière. L’absorption est le Les transitions entre les niveaux d’énergie de rotation peuvent être
processus inverse. observées de façon isolée par spectroscopie rotationnelle dite pure
ou peuvent accompagner des changements des niveaux d’énergie
Dans le cas de la diffusion, le rayonnement électromagnétique vibrationnels et/ou électroniques. La spectroscopie microonde est
est dévié de sa trajectoire au moment où il interagit avec la matière. généralement concernée par les spectres de rotation pure et ceux-ci
Il s’agit d’une interaction de nature différente de celle observée et sont les seuls traités dans cet article.
87
2
88
Référence Internet
P2890
Spectrométrie photoacoustique
Application à l’analyse de gaz
par Virginie ZENINARI
Docteur en physique de l’université de Reims Champagne Ardenne (URCA)
2
Maître de conférences, habilitée à diriger des recherches à la faculté des sciences exactes
et naturelles de Reims (URCA)
89
Référence Internet
P2890
(0)
Notations et symboles
Symbole Désignation
co Vitesse du son
Eo État d’énergie fondamental
E1 État d’énergie excité
G Facteur géométrique
H Chaleur produite par l’absorption de lumière
Kυ Coefficient d’absorption d’un gaz
2 N
Q
Concentration des molécules par cm3
Facteur de qualité acoustique
RM Sensibilité du microphone
U Signal du microphone
V Volume de la cuve PA
W Puissance du faisceau laser
a Rayon du cylindre de la cuve
c Concentration d’un gaz absorbant
hν Photon d’énergie
ᐉ Longueur de parcours optique
m Indice du mode azimutal
n Indice du mode radial
nz Indice du mode longitudinal
p Pression acoustique
u Vitesse
α Coefficient d’absorption du gaz
γ Rapport des capacités thermiques
θ Température
ω Pulsation en relation avec la fréquence de modulation
ωi Pulsation de résonance
90
Référence Internet
P2890
dans laquelle la lumière interfère avec des ondes acoustiques dans un tique, il mesurait la variation de tension entre les diaphragmes du
cristal. Le terme générique actuellement employé est donc la microphone capacitif chargé. Viengerov était capable de mesurer des
méthode photoacoustique (PA). concentrations de CO2 dans N2 jusqu’à environ 0,2 % en volume en
utilisant cette méthode PA. Les mesures de concentrations plus bas-
ses étaient limitées, à la fois par la sensibilité relativement basse de
son microphone et par l’absorption du fond continu du rayonnement
2. Principe d’ensemble incident par les parois et les fenêtres de la cuve. De plus, ces mesu-
res PA sur un échantillon gazeux étaient sérieusement perturbées par
la présence d’un effet PA parasite dans les fenêtres.
2.1 Historique de la technique Une amélioration majeure dans la sensibilité de l’analyse de la con-
centration de gaz intervient, en 1943, quand Luft décrit un analyseur
2
de gaz commercial à enregistrement automatique qui employait deux
cuves PA et un montage différentiel. Une cuve contenait le mélange
Expériences originelles : les essais de Bell de gaz à analyser, tandis que l’autre contenait le mélange de gaz sans
l’espèce intéressante. Dans cet instrument, le signal était proportion-
L’effet photoacoustique (PA), à la fois dans la matière gazeuse nel à la différence de pression acoustique entre les deux cuves. Cet
ou non gazeuse, fut découvert au 19e siècle et, en 1880, Bell rap- instrument possédait une sensibilité qui permettait la mesure de CO2
porta brièvement la découverte accidentelle de l’effet PA dans dans N2 jusqu’à quelques parties par million (ppm). Les recherches en
les solides. Durant ces expériences avec le photophone, Bell PA des gaz incluaient, à la fois, la spectrométrie et l’analyse des
découvrit qu’il était possible d’obtenir un signal audible directe- constituants.
ment. Il démontra que l’effet PA dans les solides dépendait de
l’absorption de lumière et que la force du signal acoustique En plus de la détection de gaz, l’effet PA fut utilisé pour étudier la
dépendait de la puissance absorbée. Ainsi, Bell déduisit correc- désexcitation et les processus de transferts d’énergie dans les gaz.
tement la dépendance optique intrinsèque d’absorption de Le signal PA était essentiellement une mesure calorimétrique de la
l’effet PA. En plus de l’étude de l’effet PA dans les solides, Bell quantité d’énergie radiative, absorbée par l’échantillon gazeux, dissi-
travailla aussi sur l’effet PA dans les liquides et dans les gaz. Il pée à travers des processus non radiatifs de production de chaleur.
observa que seuls des signaux faibles étaient produits quand la Ainsi, l’effet PA peut être utilisé pour étudier cette voie de désexcita-
cuve contenait un liquide absorbant la lumière, mais que l’on tion de niveaux d’énergie. La mesure de la phase du signal PA pouvait
obtenait des signaux assez importants quand celle-ci était rem- être utilisée pour chercher la vitesse du transfert d’énergie entre les
plie de gaz absorbant la lumière. degrés de liberté vibrationnel-translationnel des molécules de gaz.
En effet, cela s’explique par le fait que le coefficient d’expan- L’utilisation de l’effet PA pour étudier les temps de vie vibrationnels
sion de volume des liquides est de 10 à 100 fois plus petit que des molécules gazeuses devint rapidement une technique établie.
celui des gaz. Dans les expériences de Bell, le détecteur était un Entre 1950 et 1970, l’effet PA fut employé pour étudier les temps de
dispositif sensible au déplacement : l’oreille. L’échantillon était vie vibrationnels et les autres aspects de la désexcitation de gaz sans
quelquefois un solide ou un liquide mais, la plupart du temps, rayonnement.
c’était un gaz, coloré afin d’absorber le rayonnement visible, ou
bien incolore mais absorbant l’infrarouge (IR). Le signal produit
dans la chambre fermée était détecté par l’oreille comme un son
audible, à travers un tube d’écoute connecté à la chambre. De 2.1.2 Seconde renaissance avec l’invention
l’absorption de lumière par l’échantillon résultaient clairement du laser
des fluctuations de pression de l’air dans le tube d’écoute, puis-
que ces fluctuations avaient la même fréquence que la fré-
quence de modulation. Ainsi, la situation pour les échantillons Les études réalisées étaient limitées par l’emploi de lumières blan-
gazeux était, déjà, très bien comprise au 19e siècle, puisque les ches et de filtres. La puissance, à une longueur d’onde considérée,
lois de base des gaz étaient bien connues. L’échantillon gazeux était relativement faible. L’arrivée du laser, rayonnement monochro-
absorbait tout ou partie du rayonnement incident modulé et matique et puissant, provoqua un regain d’intérêt de la spectrométrie
s’échauffait périodiquement. L’échauffement périodique du gaz PA, dans les années 1970. À nouveau, les analyseurs de gaz PA et
produisait à la fois des variations de pression et de volume. les spectromètres trouvèrent de nombreuses applications intéressan-
Celles-ci étaient transmises par le diaphragme du tube d’écoute tes. De nombreux brevets basés sur cette technique sont déposés
à sa propre colonne d’air, puis à l’oreille. tous les ans. Les lasers à semi-conducteurs miniatures, accordables
Après l’agitation due à l’intérêt autour du travail originel de continûment en longueur d’onde et appelés souvent diodes lasers,
Bell, l’expérimentation avec l’effet PA cessa. On prit l’effet PA sont particulièrement adaptés pour effectuer de la spectrométrie
pour une curiosité intéressante, mais sans grande valeur pratique moléculaire des gaz à très haute résolution.
ou scientifique. De plus, les expériences étaient difficiles à met-
tre en œuvre et à quantifier, puisqu’elles requéraient l’oreille du
chercheur comme détecteur du signal.
L’effet PA fut complètement oublié, pendant environ 50 ans, En spectrométrie PA des gaz, la lumière modulée en intensité d’une
jusqu’à l’invention du microphone. En 1938, Viengerov du « State source thermique ou d’un laser entre dans une cuve PA contenant
Optical Institute » de Leningrad commença, en utilisant le phéno- l’échantillon gazeux. Tout ou partie du rayonnement incident est
mène, à étudier l’absorption lumineuse IR dans les gaz et à évaluer les absorbé par le gaz, ce qui provoque une variation de pression conver-
concentrations des espèces gazeuses dans les mélanges de gaz. Ses tie en un signal électrique au moyen d’un microphone. Le principe
sources de lumière étaient des corps noirs infrarouges tels que des général d’une expérience de spectrométrie PA des gaz est présenté
filaments de Nernst. À partir d’un montage microphonique électrosta- sur la figure 1.
91
2
92
Référence Internet
RE143
RECHERCHE
Spectro-imagerie térahertz
Voir autrement
2
par Patrick MOUNAIX
Chargé de recherches CNRS au Centre de physique moléculaire optique et hertzienne
(CPMOH UMR 5798) à Talence (33)
Abstract : The terahertz electromagnetic waves arouse the curiosity and the craze of
the scientists and the manufacturers because they allow a chemical analysis of mate-
rials in surface and in volume. Additional of the existing technologies, the
spectro-imaging at terahertz wavelength offers an important potentiality for the
domains of the biology, the security and the environment for example. This paper
reminds the basic principles, the limits and the last evolutions of this domain in full
emergence.
Points clés
Domaine : Techniques d’imagerie et d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Parution : juin 2010 - Dernière validation : février 2020
93
Référence Internet
RE143
RECHERCHE
2 cate et pas toujours maîtrisée. Ces développements et trans- unique, couplée à une caractérisation de la réponse diélec-
ferts vers l’industrie ne pourront s’accomplir sans être trique sur une très grande plage de fréquences (typiquement
accompagnés d’une étude du comportement électromagné- entre 100 GHz et 4 THz), permet de faire de la reconnaissance
tique des matériaux utilisés à ces fréquences extrêmes et de ou bien de la différenciation d’espèces chimiques sans contact.
la validité d’une imagerie active. Dans ce contexte, la Cette propriété intéresse particulièrement les domaines soit
spectro-imagerie térahertz répond à cette problématique. Elle du contrôle qualité, soit de la défense et de la sécurité.
apporte une potentialité de contraste optique novateur, sensi-
ble aux niveaux vibrationnels et rotationnels des matériaux.
Il convient de rappeler quelques conversions d’unités
L’aspect spectroscopique dans ce domaine de fréquence peut
pour l’utilisateur. Un térahertz (THz) correspond à une lon-
dès lors mener à une caractérisation très large bande et à une
gueur d’onde de 300 µm dans le vide (figure 1), soit à un
identification unique des matériaux ou d´échantillons. De plus,
écart entre deux niveaux énergétiques de ∆E = 4,1 meV ou
le très fort pouvoir pénétrant de ces ondes permet d’envisager
encore une température équivalente de 48 K. Le rayon-
une visualisation d’objets invisibles en surface, en volume ou
nement térahertz présente l’avantage, comme les ondes
opaques dans le visible. Nous rappelons dans un premier
radio, de passer au travers de multiples obstacles mais
temps les caractéristiques de ce rayonnement ainsi que les
aussi, comme les ondes optiques, de pouvoir être focalisé
moyens de le générer et de le détecter. Ensuite nous présen-
pour fournir une image. En outre, la plupart des molécules
terons la mise en place d’une technique de spectro-imagerie
organiques ont une fréquence de résonance fondamentale
térahertz bidimensionnelle et son application à la visualisation
(de rotation ou de vibration) dans le domaine térahertz.
d’objets opaques.
Elles émettent donc naturellement dans ces fréquences, ce
qui permet d’utiliser des techniques d’imagerie totalement
passives et donc indétectables, avantage décisif pour les
2. Présentation du domaine applications militaires par rapport aux radars.
térahertz Jusqu’à l’horizon des années 1980, la production efficace et
la détection des ondes électromagnétiques (couplage d’un
2.1 Pourquoi le rayon T champ électrique et d’un champ magnétique qui oscillent et
s’induisent l’un l’autre en se propageant dans l’air à la vitesse
L’infrarouge lointain ou rayonnement térahertz est un de la lumière) dans cette plage du spectre électromagnétique,
domaine spectral complémentaire par rapport aux techniques restaient laborieuses. La plupart des sources THz étaient soit
employées actuellement (optique, RF, etc.). Son emploi se des émetteurs de faible brillance comme des sources ther-
démocratise depuis l’avènement simultané de lasers miques soit des lasers encombrants de type gaz moléculaires,
« femtoseconde », mais aussi grâce aux progrès constants dont la radiation en infrarouge lointain présente un choix de
dans la conception et la fabrication de nouveaux composants longueur d’onde sélectif dû à une largeur de bande étroite.
micro- voire nanoélectroniques. Pour les applications Conventionnellement, des détecteurs dits incohérents, comme
susceptibles d’être transférées, ces nouvelles techniques rem- des bolomètres et des détecteurs pyroélectriques, ont été
placent les moyens classiques de l’infrarouge lointain, qui uti- employés pour mesurer l’intensité de radiations THz, mais
lisent par exemple des corps noirs comme source de leurs inconvénients étaient un seuil de détectivité bas, des
rayonnement et des bolomètres comme détecteurs (avec de exigences cryogéniques et du bruit causé par la radiation ther-
longs temps de mesure). mique de fond. De plus, la perte de cohérence temporelle
L’intérêt d’employer ce rayonnement est multiple. En pre- réduisait fortement les possibilités d’application industrielle.
mier lieu par opposition aux rayons ionisants comme les Avec l’apparition de la spectroscopie temporelle térahertz au
rayons X bien connus, les radiations térahertz sont en effet milieu des années 1980, ces difficultés ont été surmontées
capables de pénétrer la matière organique ou inorganique rapidement. Le caractère multidisciplinaire du secteur de
sans causer de dommage. En second lieu, la radiation téra- recherche traitant les térahertz exige une connaissance pro-
hertz traverse certains milieux autrement opaques dans le fonde d’optique et photonique, d’ingénierie des micro-ondes et
domaine visible : vêtements, papier, bois, carton et plastiques de la physique des semi-conducteurs. Bien que la technologie
et la liste est non exhaustive. Cette transmission de l’onde progresse, peu de dispositifs sont disponibles dans le
térahertz sur plusieurs centimètres par divers matériaux est commerce.
THz gap
Radio Microwave IR Visible UV
300 MHz 3 GHz 30 GHz 300 GHz 3 THz 30 THz 300 THz
1m 10 cm 1 cm 1 mm 1 µm 10 µm 1 µm
94
Référence Internet
RE143
RECHERCHE
2.2 Comment générer un tel rayonnement picoseconde. Dans les deux cas, les rendements de conversion
sont encore très faibles, et décroissent au fur et à mesure que
Les sources constituent actuellement la principale limitation la fréquence ciblée augmente.
de la technologie THz en termes de transfert industriel. Les Le laser à cascade quantique est probablement la source
moyens techniques dont on dispose aujourd’hui permettent de continue la plus prometteuse. Cette solution consiste à bénéfi-
réaliser des études en laboratoire, mais ne sont pas encore cier du comportement des électrons libres dans des structures
adaptés à des applications industrielles ou grand public. Leur quantiques. Les techniques de croissance cristalline, comme
encombrement, leur fiabilité et aussi leur coût ne sont pas l’épitaxie par jets moléculaires, permettent la fabrication d’un
2
encore compétitifs et attractifs pour des applications en empilement de couches semi-conductrices nanométriques de
PME-PMI. compositions différentes (multipuits quantique).
Les sources THz peuvent être réparties en différentes Dans un laser classique à semi-conducteur, la lumière est
familles, suivant qu’elles sont continues ou impulsionnelles, produite par la recombinaison de charges négatives et posi-
cohérentes ou incohérentes, basées sur des techniques élec- tives (les électrons et les trous) à travers la bande d’énergie
troniques ou optiques. interdite existant entre les bandes de conduction et de valence
du cristal. La séparation énergétique entre les deux bandes
2.2.1 Sources continues détermine la longueur d’onde du laser.
Historiquement, c’est le domaine de l’astronomie qui a Le laser à cascade quantique, ou laser QCL (Quantum Cas-
développé les sources millimétriques et submillimétriques. Le cade Laser ), est basé sur une approche diamétralement oppo-
moyen le plus simple reposait sur l’emploi de corps noirs. Ils sée. Dans un laser QCL, les électrons font des transitions
ne sont malheureusement pas adaptés à l’imagerie THz. Pour entre des états liés, créés par confinement quantique dans
pallier la faible puissance générée du corps noir, les tubes des couches alternées ultraminces de matériaux semi-
électroniques à ondes progressives (de type BWO – Back conducteurs. Comme ces couches ultraminces, appelées puits
Wave Oscillator – où les électrons sont accélérés dans un quantiques, ont une taille comparable à la longueur d’onde de
potentiel périodique) ont émergé avec des niveaux de puis- Broglie de l’électron, elles imposent son mouvement à l’élec-
sance disponibles importants, mais généralement limités à tron dans la direction perpendiculaire au plan des couches. À
moins de 200 GHz. Actuellement, on peut se procurer dans le cause de cet effet, appelé confinement quantique, l’électron
commerce des sources BWO térahertz de haute puissance (1 à ne peut passer d’un état d’énergie à l’autre que par pas dis-
100 mW), de largeur spectrale étroite (1 à 10 MHz) sur de lar- crets, en émettant des photons de lumière. L’espacement
ges domaines spectraux (0,035 à 1,25 THz). L’obtention de entre les états, donc la longueur d’onde ou bien, de manière
signaux THz nécessite toutefois une multiplication de la fré- équivalente, la fréquence, dépend de la largeur du puits.
quence de base par des dispositifs non linéaires. Pratiquement, par application d’une tension extérieure, la
Enfin, de par l’explosion technologique dans la microélectro- structure de potentiel obtenue forme « un escalier » comme
nique, des nouvelles sources issues des hétérostructures à illustré sur la figure 2 qui présente schématiquement le prin-
base de semi-conducteurs comme des diodes à effet de transit cipe de la cascade quantique. Les électrons descendent alors
(Gunn, RTD, IMPATT...), des transistors ultrarapides, sont en cascade, émettant un photon à chaque marche de poten-
capables de générer directement en bande millimétrique. Ces tiel. Par une ingénierie de bande très poussée, il est possible
composants sont moins puissants que les BWO mais plus de choisir les temps de vie et les probabilités de passage par
compacts et simples d’emploi. On les retrouve dans de nom- effet tunnel pour chaque niveau afin d’obtenir l’effet laser.
breux dispositifs commerciaux. Grâce à leur faible taille, leur haute fiabilité et leur facilité
Le positionnement charnière entre le domaine des d’usage, ces composants vont probablement bousculer les
micro-ondes et de l’optique permet de bénéficier des avancées champs applicatifs autour de l’emploi des ondes térahertz
du côté optique du spectre, pour générer un rayonnement en dans les prochaines années.
bande térahertz. On va donc retrouver de nombreux concepts
développés pour les applications optiques avec une adaptation 2.2.2 Sources impulsionnelles
aux longueurs d’onde térahertz. Pour la génération d’un rayonnement térahertz, dans les
En premier lieu, les oscillateurs laser, plus particulièrement laboratoires américains dès la fin des années 1980, des cher-
les lasers moléculaires (où l’on profite d’une inversion de cheurs avaient compris l’intérêt des impulsions laser ultra-
population entre deux niveaux rotationnels d’une molécule brèves pour générer des rayons en infrarouge lointain. Par
gazeuse, par exemple, le méthanol), peuvent délivrer plus de exemple, par des effets d’optique non linéaire, on convertit
100 mW avec une très grande accordabilité mais au détriment l’impulsion optique sub-picoseconde focalisée dans un cristal
d’un encombrement important. ou un composant non linéaire pour récupérer – avec un faible
rendement certes – un faisceau térahertz. Ce pulse électroma-
La seconde solution optique consiste à faire battre, dans un gnétique rayonne dans l’espace libre ou est guidé par des dis-
dispositif non linéaire, deux lasers continus asservis en lon- positifs optiques adaptés. Comme le spectre térahertz généré
gueurs d’onde légèrement différentes. La différence de fré- est inversement proportionnel à la largeur temporelle du
quences est égale à la fréquence THz désirée. Cette technique pulse, si on dispose d’une impulsion d’une durée à l’échelle de
est très attirante car le faisceau THz généré est quasi mono- la picoseconde (10–12 s) alors, en conséquence, le spectre
chromatique et accordable en fréquence en changeant la lon- atteint le domaine térahertz. Les mesures peuvent être
gueur d’onde des faisceaux de pompe. conduites à température ambiante. La combinaison des
Le mélange de fréquences peut s’effectuer par des cristaux méthodes optiques et microélectroniques a été très féconde
non linéaires, qui sont de la même famille que ceux employés depuis et les principes de base se sont enrichis par de très
pour le doublement de fréquence optique puisque les deux nombreuses techniques établissant ce que l’on surnomme
phénomènes sont complémentaires. aujourd’hui l’optoélectronique THz.
On emploie aussi des détecteurs en semi-conducteurs où Par exemple, un système efficace repose sur l’emploi
l’énergie est convertie par un dispositif couplé à une antenne conjugué de laser femtoseconde (10–15 s) de manière directe
à condition que sa réponse soit plus rapide que la période du pour initier des effets d’optique non linéaire dans des cristaux
signal THz à générer, c’est-à-dire de l’ordre ou inférieure à la qui seront la source du rayonnement. L’autre possibilité
95
2
96
Référence Internet
RE144
RECHERCHE
Spectroscopie térahertz
Fiche de synthèse
Domaine : Techniques d’analyse et spectroscopie
Degré de diffusion de la technologie : Émergence / Croissance / Maturité
Technologies impliquées : Optique, électronique, optronique, traitement du signal
Domaines d’application : Biologie, environnement, sécurité
Parution : juin 2010 - Dernière validation : février 2020
97
Référence Internet
RE144
RECHERCHE
2
tions particulières autour des ondes THz qui ont le plus mar- source la plus répandue de rayonnement, et de rayonnement
qué l’actualité scientifique. Outre les techniques de production THz en particulier : le corps noir. Dans un tel corps idéal,
et de détection de rayonnement THz cohérent, les méthodes chaque élément de surface en équilibre à la température T
d’extraction des spectres (statiques ou dynamiques) consti- émet par rayonnement électromagnétique une puissance
tuent un volet important du savoir-faire propre à ce domaine égale à celle qu’il reçoit provenant du reste de la surface des
de fréquence particulier. parois. La puissance rayonnée par unité de surface et de lon-
gueur d’onde (en W. m-2.m-1) est donnée à partir de la loi de
Planck par :
Le rayonnement THz cohérent fait référence soit à un
rayonnement monochromatique de grande pureté spectrale,
soit à une impulsion THz dont les différentes composantes (1)
spectrales ont une relation de phase bien déterminée qui
conditionne la forme temporelle de l’impulsion. C’est cette avec h constante de Planck,
dénomination que l’on utilise généralement, par opposition
au rayonnement incohérent d’une source telle que le corps λ longueur d’onde,
noir. kB constante de Boltzmann,
c célérité de la lumière dans le vide,
Nous nous proposons ici de faire un point sur l’état de T température.
l’art de différentes techniques qui interviennent dans la
spectroscopie THz. Nous abordons dans une première partie Ce rayonnement est très large bande. En particulier, une
les différentes sources et détecteurs THz ainsi que leurs quantité non négligeable couvre la partie THz du spectre élec-
paramètres et caractéristiques pertinents en spectroscopie. tromagnétique. C’est principalement le rayonnement de corps
Nous détaillons ensuite quelques spectromètres THz ainsi noir qui a imposé et impose encore de contraintes sur la détec-
que des méthodes ou des techniques de spectroscopie à tion du rayonnement THz par des méthodes bolométriques ; il
l’équilibre. Dans une dernière partie, nous présentons les faut notamment refroidir le capteur à des températures cryogé-
méthodes de spectroscopie hors équilibre du type pompe niques afin de ne détecter que l’énergie du rayonnement THz à
optique – sonde THz. étudier.
98
Référence Internet
RE144
RECHERCHE
2
champ électrique local plus élevé en raison de la distance plus
provoque l’émission d’impulsions radiofréquences (RF). Le faible qui existe entre les électrodes. Suivant le matériau et la
champ électromagnétique de l’onde peut, après propagation durée des impulsions lasers employées ainsi qu’en fonction de
dans l’espace libre, induire un courant dans un circuit de l’implantation des éléments (lentilles, éclairement par la face
réception. avant/arrière, …), les photocommutateurs peuvent générer des
Les antennes THz fonctionnent sur un principe analo- fréquences considérables de plusieurs dizaines de THz avoisinant
gue. L’étincelle est remplacée par un transitoire de cou- même la centaine de THz. Néanmoins ce genre de performances
rant dans un semi-conducteur photoexcité ; le taux de restent exceptionnelles et de manière plus conventionnelle les
répétition est celui du laser tandis que la fréquence antennes THz opèrent entre 0,1 à 10 THz.
caractéristique de l’impulsion est donnée par la durée
de vie de cette « étincelle » de courant. Au niveau du Dans un montage typique, la source optique utilisée est
récepteur, l’impulsion THz induit également un courant. un laser femtoseconde titane-saphir. En sortie du laser, une
Néanmoins pour pouvoir mesurer la forme temporelle lame séparatrice divise le faisceau en deux parties, le faisceau
du signal, il faut réaliser un échantillonnage optique de génération et le faisceau d’échantillonnage (parfois très
(étapes a) à e) de la figure 1) car, contrairement aux improprement appelés « pompe » et « sonde » respective-
ondes RF, aucun détecteur n’est suffisamment rapide ment). Les deux faisceaux obtenus délivrent des impulsions
pour détecter un transitoire THz dont la durée est sub- lasers synchrones qui permettent la génération et la détection
picoseconde. résolue en temps du signal THz à l’échelle subpicoseconde. Un
substrat de GaAs épitaxié à basse température sur lequel sont
L’impulsion laser de sonde déclenche la mesure en déposées des lignes coplanaires munies d’un gap sont utilisées
créant des paires électron-trou. La résistivité de l’antenne
respectivement en émetteur et détecteur. Habituellement,
mesurable avec un ohmmètre voit sa valeur fortement
lorsqu’on fait croître des couches cristallines de GaAs, la tem-
diminuer. Le champ térahertz incident entraîne les por-
pérature du substrat est de l’ordre de 600 ° C. Les matériaux
teurs photocréés ; ceux-ci induisent un courant Jd que l’on
obtenus peuvent être semi-isolants et comportent des impure-
mesure.
tés résiduelles responsables de la création d’un niveau
Principe de détection c)
nAmp b) d)
Courant induit
dans le récepteur a) e)
RX d)
c) e)
a)
RX b)
IOpt J ETHz
BC ETHz ⬃ dJ/dt
n
TX J⬃n
hν
TX Radio
p Thz
10 V DC BV
HT RF Mécanisme d’émission
Photocommutateur
Figure 1 – Analogie entre l’expérience de Hertz et les premières expériences THz à base de photocommutateurs. Les principes d’émission
et de détection sont détaillés dans les inserts
99
Référence Internet
RE144
RECHERCHE
accepteur proche de la bande de valence. À cause de la rayonné. Comme nous le verrons ultérieurement, la généra-
recombinaison entre les électrons et les trous dans le niveau tion THz en continu avec un photomélangeur est particulière-
accepteur, le matériau est quasi isolant à température ment bien adaptée aux mesures de spectroscopie de très
ambiante. Pour des températures de croissance abaissée de haute résolution. En effet, la résolution spectrale est directe-
l’ordre de 200 à 300 ° C, le GaAs cristallisé est dit GaAs basse ment pilotée par la largeur spectrale des lasers utilisés pour le
température (GaAs-BT) en anglais Low-Temperature Grown battement.
GaAs. La stœchiométrie du GaAs-BT diffère de celle du GaAs
standard, néanmoins il est considéré comme un cristal de 2.2.1.2 Émission par effets de surface
100
Référence Internet
P2145
Avancées technologiques
des sources et capteurs térahertz
Vers le transfert industriel
2
par Patrick MOUNAIX
Directeur de recherche, CNRS
IMS UMR CNRS 5218, Bât. A31, 351 cours de la Libération, Talence Cedex, France
ionisant donc sans danger pour l’opérateur, un diagnostic sans contact donc
101
Référence Internet
P2145
2
ment des briques technologiques et la baisse des coûts de fabrication de leurs
composants. La technologie térahertz est applicable à différents secteurs de
l’industrie tels que le bâtiment, les transports ou encore l’agroalimentaire.
CMOS Complementary Metal Oxide Semiconductor RFIC Radio Frequency Integrated Circuit
(technologie silicium complémentaire) (microprocesseurs numériques et des circuits
radiofréquences)
CS Compressive Sensing (compression d’images)
RTD Resonant tuneling diode (diode à tunnel résonant)
DR Dynamic Range (plage dynamique)
SBMIR Single-Beam Multiple-Intensity Reconstruction
FFT Fast Fourier Transform (transformée de Fourier) (reconstruction d’un hologramme)
FPA Focal Plane array (réseau plan focal) SiGe Silicium Germanium
FMCW Frequency Modulated Continuous Wave (radar SLM Spatial Light Modulator (modulateur spatial de
modulé en fréquence) lumière)
IL Injection locked (verrouillé par injection) VAR Varactor (SVAR si symétrique, ASVAR si
asymétrique)
IMPATT IMPact ionization Avalanche Transit-Time diode
(temps de transit à avalanche à ionisation par xn Multiplicateur par n
impact)
102
Référence Internet
P2145
de capteurs THz FPA (Focal Plane Array) ont été rapportés dans la
littérature [2] [3]. Cependant, une telle intégration est accomplie au
Attentes
2
Récemment, de par le marché des microprocesseurs numé-
riques et des circuits radiofréquences (RFIC), la technologie CMOS
1 Déclencheur 3 Creux de (Complementary Metal Oxide Semiconductor) voit ses dimensions
d’innovation désillusion de la largeur de grille se réduire, ce qui augmente simultanément
vitesse intrinsèque des MOSFET (Metal Oxide Semiconductor Field
Temps Effect Transistor). Mais la détérioration liée à la mise à l’échelle de
la grille et des résistances a atténué les attentes. En 2008, une
Les quatre phases principales sont le déclencheur de l’innovation 1 ,
source THz CMOS à 410 GHz ouvre la voie à des développements
puis un sommet 2 dans les attentes suivi d’un creux de désillusion 3
et enfin une phase d’éclaircissement 4 qui mène au plateau de produc-
remarquables [4]. Des composants types HBT en SiGe atteignent
tivité 5 dorénavant des fréquences maximales d’oscillation vers 500 à
700 GHz [5] en laboratoire.
Figure 1 – Cycle de Gartner : évolution dans le temps des nouvelles Le tableau 1 [1] résume la multitude d’innovations développées
technologies dans les deux filières technologiques pour disposer des sources
capables de fonctionner au-delà des 500 GHz. Les circuits sont réfé-
rencés selon que l’oscillateur est déverrouillé ou verrouillé avec des
(2) La publicité précoce produit un certain nombre d’histoires de chaines de multiplication de fréquence (unlocked oscillator versus
réussite – souvent accompagnées de dizaines d’échecs. Puis locked oscillator and multipliers). Côté détecteur, on observe les
viennent la confrontation à la réalité industrielle et la désillusion. mêmes tendances. Toutefois, les détecteurs au silicium offrent une
(3) L’intérêt diminue à mesure que les expériences et les implé- capacité d’intégration nettement plus élevée comparée aux techno-
mentations faillissent. Les producteurs de la technologie sont logies de détection THz à température ambiante, telles que les
ébranlés ou vacillent. Les investissements ne se poursuivent que si diodes barrières Schottky sur InP, les amplificateurs à faible bruit
les fournisseurs survivants améliorent leurs produits à la satisfac- HEMT (High-Electron-Mobility Transistor), les cellules de Golay [6],
tion des premiers utilisateurs. Puis survient la croissance. les microbolomètres [7] et autres détecteurs pyroélectriques. En rai-
son du manque de pré-amplification à faible bruit dans la bande
(4) De plus en plus d’exemples illustrent comment la technologie THz, les détecteurs de puissance au silicium sont mis en œuvre sous
peut profiter à l’entreprise. Cette nouvelle technique va être mieux forme de système de détection directement couplé à une antenne.
comprise et diffusée. Les produits de deuxième et troisième généra- Par conséquent, les méthodes principalement exploitées pour la
tions proviennent de fournisseurs plus aguerris de technologie détection directe THz sont soit un auto-mélange non quasi-statique
robuste et déployée « à façon » pour des objectifs spécifiques. Plus dans les canaux MOSFET froids [8] ou la rectification dans la jonc-
d’entreprises financent des projets pilotes ; et les entreprises conser- tion base-émetteur d’un HBT ultrarapide [9].
vatrices restent prudentes. Puis un plateau de productivité survient.
En conclusion partielle, il a été constaté que les circuits intégrés
(5) L’adoption grand public commence à décoller critères d’éva- THz à base de silicium augmentent le potentiel en imagerie et
luation de la viabilité des prestataires sont plus clairement définis. détection THz en particulier avec la compacité des systèmes. La
La large applicabilité et la pertinence de la technologie sur le mar- conception est récemment devenue un domaine de recherche avec
ché sont clairement payantes. la réalisation de percées dans l’applicatif et avec de potentielle
C’est explicitement ce type de « succes story » que suivent les intégration des composants THz. Les frontières technologiques qui
systèmes et la technologie « térahertz ». Cette lente évolution a été constituent le goulot d’étranglement pour l’adoption et la commer-
décrite dans de nombreux articles scientifiques. cialisation de la technologie THz s’amenuisent de jour en jour. En
particulier, la recherche démontre que les circuits intégrés THz ont
Parmi toutes les techniques ayant démontré la capacité à générer
permis la réalisation d’applications THz, telles que l’imagerie,
ou détecter un tel rayonnement, l’intégration de circuits en tech-
l’imagerie multi-spectrale, l’imagerie radar haute résolution, l’ima-
nologie silicium a toujours été attrayante pour les systèmes d’ima-
gerie en champ proche [10]. Les réflexions identifient deux forces
gerie THz car elle offre des avantages indéniables, y compris les
motrices pressantes majeures : premièrement, la capacité à géné-
économies d’échelle, l’intégration de systèmes monolithiques, la
rer de la puissance avec des circuits intégrés THz est étroitement
portabilité et la faible consommation d’énergie pour un système
liée aux progrès de la technologie du silicium. La technologie SiGe
complet intégré. Dans [1], qui fait un état de l’art récent sur les
HBT de niveau fonderie est sur le point de s’approprier la partie
sources intégrées, une puissance typique de rayonnement de 0 dBm
inférieure du spectre THz, et elle continue de montrer un grand
(1 mW) a été signalée pour un réseau de sources d’éclairage SiGe
potentiel de développement avec des f max prédits au-delà de
HBT (Hetero Junction Bipolar Transistor) à environ 0,5 THz.
1 THz [11]. Par conséquent, la technologie SiGe BiCMOS peut
Aujourd’hui également, les composants en Silicium peuvent désor-
apparaître comme la plate-forme technologique unique pour les
mais offrir un maximum de 150 dB de plage dynamique DR (Dyna-
composants THz à faible coût. Deuxièmement, les progrès de la
mic Range) pour l’imagerie THz. Cependant, une telle performance
technologie THz sur la base de composants III-V sont dus à l’inven-
ne peut être réalisée que lorsque toute la puissance de la source est
tion de nouvelles architectures de circuits et de systèmes qui
concentrée en un seul point qui est déplacé mécaniquement à tra-
exploitent la conception de la technologie silicium.
vers la section transversale de l’objet pour former une image ; un
détecteur hétérodyne capture alors l’information de chaque pixel. Les concepteurs de circuits intégrés THz sont confrontés à un
Pour améliorer la vitesse d’imagerie, la détection peut être paralléli- ensemble de défis interdisciplinaires, comme la conception élec-
sée à l’aide de plusieurs capteurs et de nombreux réseaux matriciels tromagnétique, les niveaux de vieillissement, la gestion de l’éner-
103
Référence Internet
P2145
Puissance
Puissance
Fréquence en régime
Technologie Architecture du circuit Antenne émise Référence
(GHz) continu
(dBm)
(mW)
4 osc verrouillés
65 nm CMOS 247 à 272 antenne fentes + lentille Si 0,5 800 [54]
+ 8 × 4 osc push
2
45 nm CMOS 276 à 285 osc + x2 + H2 extraction 16 radiateurs actifs distribués – 7,2 820 [35]
2 osc verrouillés + 3 osc push
65 nm CMOS 283 à 288 anneau + lentille Si – 4,1 275 [55]
en anneau
65 nm CMOS 284 à 301 osc + H3 extraction anneau – 2,7 19,2 [56]
130 nm SiGe HBT 305 à 375 2 osc push + PA + x2 patch 0 1 700 [57]
65 nm CMOS 312 à 315 osc demi quadrature 4IL + x4 4 fentes + céramique 0,8 298 [58]
4 osc à ondes stationnaires
130 nm SiGe HBT 332 à 352 4 patchs (plaques) – 10,5 425 [38]
+ 4 osc push
65 nm CMOS 337 à 339 16 osc verrouillés + 4 osc push 16 patchs (plaques) – 0,9 1 540 [36]
antenne à fente
130 nm SiGe HBT 426 à 437 osc Colpitts + x2 – 6,3 165 [52]
circulaire + lentille Si
antenne à fente
130 nm SiGe HBT 490 3 osc push Colpitts – 14,2 45 [59]
circulaire + lentille Si
130 nm SiGe HBT 519 à 536 osc colpitts push verrouillés anneau + lentille Si – 12 156 [53]
28 nm CMOS 524 à 555 osc couplage transversal + x3 anneau + lentille diélectrique – 22 19 [60]
65 nm CMOS 609 à 624 osc + H5 extraction anneau – 23 17 [61]
1 010 à
130 nm SiGe HBT 42 osc couplés + H4 extraction 42 slots + lentille Si – 10,9 1 100 [39]
1 016
1 300 à
65 nm CMOS x5 + SVAR + x2 + ASVAr 2 patchs – 22,7 – [68]
1 460
104
Référence Internet
P2145
gie et de la thermique. Par conséquent, les circuits intégrés THz ne tance thermique Rth par sa capacité thermique Cth. Pour favoriser
doivent pas seulement être considérés comme des composants une détection rapide, il faut donc privilégier des structures de
compacts, peu coûteux et alternatifs à l’équipement THz tradition- transducteurs présentant le produit RthCth le plus faible possible.
nel, mais en tant que sources de nouvelles modalités d’imagerie, Un compromis est à trouver avec la résistance thermique qui
ouvrant de nouvelles applications et des marchés à créer. Donc, la inversement doit être la plus élevée possible pour assurer la meil-
science autour de la génération et de la détection s’est également leure sensibilité.
améliorée en tirant profit des avancées technologiques (se référer Les détecteurs électroniques basés sur des recombinaisons
aux articles Sources et détecteurs aux fréquences térahertz [RE 73], électron-trou dans des bandes électroniques du semi-conducteur
Lasers à cascade quantique d’imagerie THz [E 6 470]). Outre l’inté- sont plus rapides que les capteurs thermiques où les phénomènes
gration de circuit en technologie silicium, une deuxième avancée de relaxation sont plus longs. En revanche ces derniers présentent
majeure pour les applications : le déploiement de systèmes de des spectres d’absorption sur une bande de fréquence beaucoup
capteurs intégrés fonctionnant à cadence vidéo, c’est-à-dire les plus large que les détecteurs électroniques. Un moyen possible de
systèmes caméras THz temps réel. réduire le NEP d’un détecteur est de le refroidir à des températures
cryogéniques pour limiter le bruit thermique. Cependant, le coût
élevé et les contraintes techniques relatives à la réfrigération sont
un frein au déploiement de cette approche pour des applications
2
2. Caméras THz hors des laboratoires même si des progrès significatifs ont été
démontrés récemment.
105
Référence Internet
P2145
Rayonnement térahertz
Absorbeur
Coefficient d’absorption optique η(λ)
Température Tabs
V R – ∆R
Thermistance
I + ∆I Température Tth
Capacité thermique Cth
Coefficient thermique de résistance électrique (TCR) γ
Dans les trois cas, l’échauffement d’un matériau absorbant le L’absorbeur et le thermomètre sont isolés thermiquement du
rayonnement térahertz est mesuré par des techniques optiques et/ substrat – ou puits thermique – sur lequel les pixels sont réalisés.
ou électroniques. Cette isolation est réalisée au moyen d’une structure micropont
qui maintient la membrane où sont situés l’absorbeur et le thermo-
■ La cellule de Golay fonctionne sur le principe de l’expansion mètre. Cette isolation se caractérise par une résistance thermique
d’un gaz placé dans une cavité, dont une des parois est une Rth exprimée K/W (ou une conductance thermique Gth). La capacité
membrane flexible ou un diaphragme. Lorsque le rayonnement thermique Cth et la résistance thermique Rth dépendent des maté-
térahertz est absorbé, le gaz est chauffé causant son expansion. riaux utilisés et de la géométrie. La montée en température du
Cette expansion provoque une pression qui déforme la membrane bolomètre peut être modélisée par un circuit de type filtre RC ;
et cette déformation est ensuite mesurée par un système optique. cette évolution a la forme d’une exponentielle qui tend vers une
Le phénomène pneumatique mis en œuvre dans une cellule de valeur maximale avec un temps caractéristique :
Golay fait qu’un tel capteur se distingue par une sensibilité élevée
et une réponse constante sur une large gamme fréquentielle. Cela
explique pourquoi ce détecteur est généralement utilisé pour
mesurer la puissance d’une source et comme moyen de calibration Le circuit de lecture est souvent établi sur la lecture de la varia-
des autres détecteurs térahertz. Le temps de réponse est d’environ tion de courant qui traverse la résistance électrique du pixel pola-
10 ms. Elle peut-être aussi utilisée comme détecteur ponctuel pour risé à une tension constante Vbias.
l’imagerie [20] [21]. En revanche, la taille du détecteur ne permet Historiquement, cette technologie de microbolomètres a été
pas son intégration en un capteur matriciel. développée pour l’imagerie infrarouge (IR) thermique [26] [27].
Pour adapter cette technologie à la gamme THz, il a fallu prioritai-
■ Un capteur pyroélectrique fonctionne sur le principe d’une rement optimiser l’absorption du rayonnement optique THz (avec
variation temporaire de la polarisation électrique induite par le des longueurs d’onde largement supérieures à celles de l’IR), ainsi
changement de température du matériau. Comme ce phénomène que des impédances différentes. Les équipes de recherche japo-
est transitoire, un tel détecteur requiert la modulation du signal naises (NEC) ont initialement optimisé les pixels bolométriques
optique soit par voie optique (par exemple avec un hacheur), soit sans changer leur architecture mais en modifiant l’impédance de la
par voie électronique. En appliquant par une modulation de la couche absorbante [7]. Au CEA-Leti, une approche plus en rupture
source à environ de 10 Hz, le NEP d’un capteur pyroélectrique peut a été adoptée, basée sur le principe de dissocier physiquement les
atteindre environ sur une large gamme de fréquence, deux éléments clés d’un pixel bolométrique, l’absorbeur et le ther-
du THz jusqu’à l’infrarouge (0,3 à 300 THz). Des images à 0,52 et momètre. Le couplage des ondes THz est assuré par des antennes
0,71 THz révélant l’intérieur d’objets opaques à la lumière ont été chargées. Les charges sont échauffées par les courants induits par
réalisées avec ce type de détecteur [22]. D’autres images d’objets le rayonnement optique capté. Cette chaleur est alors transmise à
centimétriques obtenues grâce à un capteur matriciel à base de la couche thermorésistive placée sur la membrane suspendue du
détecteurs pyroélectriques et un laser à gaz émettant 10 mW à pixel. La variation de température induite s’accompagne d’une
2,52 THz ont été obtenues en moins de 30 s [23]. modification de la résistance électrique de cette couche qui est
alors lue par un circuit électronique situé sous le micropont dans le
■ Les bolomètres résistifs, représentés sur la figure 2, sont basés substrat, ce substrat servant aussi de puits thermique [28] [29]. De
sur la mesure électrique de la variation d’un matériau thermo- plus, dans cette architecture, l’absorption du rayonnement par le
résistif lorsque celui-ci est chauffé par un autre matériau absorbant pixel est optimisée par l’introduction d’une cavité diélectrique
le rayonnement THz incident. Ces deux fonctions, absorption et optique quart d’onde λ/4 entre la membrane et un réflecteur placé
thermomètre, peuvent être assurées par un même dispositif, mais sous cette structure suspendue sur le substrat.
actuellement les matrices micro-bolométriques développées pour Pour optimiser la sensibilité des microbolomètres, les matériaux
des caméras infrarouges et THz [24] [25] intègrent toutes un dispo- thermo-résistifs doivent présenter de forts TCR, typiquement entre
sitif absorbant (couche de TiN, par exemple), différent de la couche – 2 et – 3 %/K à 300 K. Ils doivent aussi être conçus avec des
thermorésistive. Cette dernière est constituée d’un matériau semi- membranes suspendues par des bras de conductivité thermique
conducteur, comme l’oxyde de vanadium VOX ou le silicium Gth très faible et encapsulés sous vide – typiquement à une pres-
amorphe a-Si, qui présente la propriété d’avoir un coefficient ther- sion de 10–3 mbar – pour limiter les pertes par conduction dans
mique de résistance électrique TCR (Temperature Coefficient of l’atmosphère environnante [30]. Avec une capacité thermique de
Resistance) négatif. l’ordre de 1 × 10–10 J/K et une conductance thermique 1 × 10–8 W/K,
106
Référence Internet
AF3254
et
Professeur
IMEP-LAHC, CNRS UMR 5130, Université Savoie Mont Blanc, Chambéry, France
Jean-Louis COUTAZ
2
Professeur émérite
IMEP-LAHC, CNRS UMR 5130, Université Savoie Mont Blanc, Chambéry, France
107
Référence Internet
AF3254
2
électroniques des atomes, et même plus faible que l’énergie ther-
1. Physique des ondes mique à température ambiante (kBT ≈ 27 meV). L’interaction entre
térahertz les ondes térahertz et la matière, par exemple l’absorption du
rayonnement térahertz, ne mettra donc en jeu que des phéno-
mènes peu énergétiques. En particulier, et ce sont les avantages
mis en avant pour l’imagerie térahertz, beaucoup de matériaux
1.1 Ondes électromagnétiques térahertz opaques dans le visible sont ainsi transparents à ce rayonnement,
qui de plus n’est pas ionisant.
Il est maintenant accepté, par l’ensemble de la communauté scien-
tifique, que le domaine des ondes électromagnétiques térahertz
s’étend typiquement entre les fréquences 0,1 et 10 THz. Rappelons 1.2.1 Signatures spectrales des molécules
les définitions de l’énergie E d’un photon et les relations résul-
tantes entre fréquence ν et longueur d’onde λ : Pour un atome ou une molécule, l’absorption d’un photon inci-
dent de fréquence ν se produit par le passage d’un niveau d’éner-
gie E1 à un autre plus élevé E2, tel que E2 – E1 = hν. Pour les
(1)
atomes individuels, sauf pour les atomes de Rydberg, curiosités
où h ≈ 6,6 × 10–34 J · s (constante dePlanck), c ≈ 3 × 108 m/s (célérité de laboratoire, la différence d’énergie est trop grande pour que les
de la lumière dans le vide) et ω est la pulsation de l’onde (encore ondes térahertz entraînent un changement d’état électronique. En
nommée fréquence angulaire). On peut caractériser le rayonnement revanche, dans les molécules, les atomes peuvent vibrer ou tour-
en termes de température équivalente T, puisque l’énergie ther- ner les uns par rapport aux autres, et de manière plus globale,
mique est égale à kBT, où kB ≈ 1,38 × 10–23 J/K est la constante de tout le squelette de la molécule peut se déformer de manière
Boltzmann. La figure 1 résume la position du domaine térahertz oscillante aux fréquences térahertz.
dans le spectre électromagnétique suivant les différentes unités La figure 2 résume de manière schématique les mouvements
employées (le nombre d’onde, souvent employé en spectroscopie, des atomes au sein d’une molécule et la gamme fréquentielle des
est simplement l’inverse de la longueur d’onde exprimée en cm ; oscillations associées. Alors que la spectroscopie dans l’infra-
l’électronvolt (eV) est l’énergie d’un électron accéléré par une diffé- rouge permet d’étudier les liaisons chimiques entre deux atomes
rence de potentiel d’un volt, c’est-à-dire 1,6 × 10–19 J). Le domaine (fréquences supérieures à 21 THz), la spectroscopie térahertz ren-
térahertz est donc compris entre l’optique (infrarouge lointain) et les seigne sur les déformations globales de la molécule. Ces déforma-
hyperfréquences (ondes millimétriques). tions et le spectre associé sont propres à chaque molécule, et
ainsi on pourra déterminer quelle molécule est à l’origine du
spectre enregistré. Il s’agit d’une spécificité très intéressante de la
1.2 Interaction ondes térahertz - matière spectroscopie térahertz, utilisée par exemple pour l’observation
de l’atmosphère ou en radioastronomie pour déterminer la com-
La figure 1 nous indique que l’énergie des photons térahertz est position moléculaire de gaz intergalactiques. Notons aussi que
de l’ordre du milliélectronvolt. C’est une énergie très faible, envi- spectroscopies infrarouge et térahertz apportent des informations
ron 1 000 fois plus petite que celle des transitions entre niveaux très complémentaires sur la matière étudiée.
Fréquence [THz]
0,1 1 10 100
Figure 1 – Région térahertz au sein du spectre électromagnétique, suivant différentes échelles d’unités
108
Référence Internet
AF3254
6–27 THz
2
Figure 2 – Mouvements moléculaires et leur domaine fréquentiel
(2)
109
Référence Internet
AF3254
spectre d’absorption fait apparaître des pics très larges, qui sont
1P
relative) ε de cette matière vaut ε = 1 + . Cette formule est bien décrits par un modèle de Lorentz :
ε0 E
(3)
valable pour les matériaux isotropes, pour lesquels E et P sont
parallèles. Généralement, on tient compte de la contribution des
réponses non dipolaires de la matière en remplaçant le « 1 » de νi est une fréquence de résonance et αi un coefficient proportion-
nel à la force d’oscillation de la transition électronique considérée.
l’expression précédente par , tel que . Pour les À la réponse dipolaire des atomes et molécules dans le domaine
térahertz, s’ajoutent des effets collectifs dus à la périodicité de
matériaux anisotropes, la formule est tensorielle. L’indice de la matière à l’échelle microscopique, ou plus généralement au
réfraction d’un matériau n est défini comme étant le rapport entre couplage électromagnétique entre entités voisines. Les phonons
la célérité de la lumière dans le vide et celle dans le matériau. On correspondent à la quantification des ondes de vibration méca-
2
montre en électromagnétisme que , où μ est la perméabi- nique des atomes pouvant se propager dans un cristal. On dis-
lité magnétique relative. Pour un milieu non magnétique, μ = 1, tingue des vibrations longitudinales ou transverses par rapport à la
direction de propagation de l’onde, ainsi que des branches d’éner-
donc . Lorsqu’une partie de l’énergie électromagnétique
gie phononique « optique » et « acoustique ». Seuls les phonons
incidente est absorbée et transformée en chaleur, ε et donc n
transverses optiques peuvent être directement excités par une
prennent une valeur complexe. Le coefficient d’absorption α de
onde électromagnétique. Examinons quels sont les ordres de gran-
l’énergie électromagnétique est égal à , où κ est la partie deur mis en jeu. Grâce à la périodicité de la matière, on peut limi-
imaginaire de l’indice de réfraction. Dans le domaine de hyper- ter l’étude des phonons dans l’espace des vecteurs d’onde k à la
fréquences et plus précisément lorsqu’il s’agit de circuits, on uti- première zone de Brillouin dont les limites sont , a étant
lise souvent la tangente de pertes, , avec ε = εr + jεi . la distance entre 2 atomes voisins. Dans cette zone, les bandes
d’énergie des différents phonons (courbes de l’énergie en fonction
du vecteur d’onde) sont continues. Sous l’effet du champ électro-
Lorsque la fréquence de l’onde térahertz incidente ne corres- magnétique, les noyaux des atomes se déplacent par rapport à
pond pas à l’excitation de résonances électromagnétiques au sein leur position d’équilibre (typiquement de moins de 0,1 Å). La quan-
du matériau, l’interaction entre l’onde et le milieu est faible. La tité de mouvement associée au phonon et donc le vecteur d’onde
constante diélectrique est alors pratiquement égale à celle mesu- de ces derniers sont en général très grands par rapport à celui d’un
rée en électrostatique. L’indice de réfraction reste petit (typique-
ment 1 < n < 2) mais néanmoins plus élevé que dans le domaine photon (rappelons qu’en mécanique quantique mv = ℏk , m étant
visible, et le milieu absorbe peu les ondes térahertz (figure 4). Les la masse des atomes et v leur vitesse), car ils mettent en jeu les
matériaux ferroélectriques, dans lesquels il existe une polarisation masses des atomes. L’interaction photon-phonon se produit donc
même en l’absence de champ électromagnétique excitateur, pré-
au voisinage de k = 0 , donc pour une fréquence unique. Le
sentent des indices très forts dans le domaine térahertz et sont tableau 1 donne la valeur de la fréquence du premier phonon dans
anisotropes (par exemple no = 6,7 (indice ordinaire) et ne = 5,2 différents matériaux (le DAST est un cristal organique de la famille
(indice extraordinaire) pour LiNbO3). Malheureusement, ces maté- des tosylates, dont les coefficients non linéaires sont très forts).
riaux sont aussi assez absorbants.
Les spectres d’absorption térahertz de ces cristaux montrent donc
La réponse résonante des molécules, comme décrite dans le para- des pics relativement élevés (plusieurs dizaines de cm–1) aux fré-
graphe 1.2.1, s’additionne à la réponse non résonante du matériau. quences des phonons. Ces pics sont souvent très élargis par la pré-
À cause de degrés de liberté moindres au sein de la matière solide sence de défauts stœchiométriques ou structuraux. Lorsque le
et de possibles variations locales de l’environnement moléculaire, le premier pic de phonon est situé en dehors de la bande fréquentielle
Absorption [cm–1]
La tangente de perte (tan δ) est définie comme étant le rapport des parties imaginaire et réelle de la permittivité ε. La figure de gauche
présente les matériaux sur une carte indice/absorption, la figure de droite donne la tangente de perte de plusieurs materiaux communs.
Figure 4 – Principaux matériaux transparents dans le domaine térahertz (valeurs données pour 1 THz)
110
Référence Internet
AF3254
Cristal DAST CdTe NaCl InSb ZnTe GaSe ZnSe GaAs InP GaP ZnO
fphonon[THz] 1,13 4,20 4,92 5,21 5,31 6,33 6,45 8,00 9,12 10,96 12,41
explorée lors d’une mesure, le spectre d’absorption enregistré aug- aluminium) constitue un miroir térahertz de très bonne qualité. Les
mente de manière monotone avec la fréquence : il s’agit en fait du objets métalliques sont donc de très bons réflecteurs, et en contre-
pied du pic d’absorption, le pic lui-même ne pouvant être observé. partie ils sont opaques aux ondes térahertz. Les semi-conducteurs
Dans les matériaux amorphes ou polycristallins, les ondes méca- seront plus ou moins transparents suivant leur niveau de dopage.
niques ne se propagent plus sur de longues distances à cause du Par exemple, à 400 GHz, le coefficient d’absorption α (en cm–1) du
désordre structural : cela conduit à des courbes d’absorption variant
comme ν 2. De plus, par exemple dans les verres, on observe une
bosse d’absorption additionnelle qui semble trouver son origine
silicium dopé n varie comme α = Ndop / (1, 39 × 1014 ) , où Ndop est la
densité de dopage par cm3.
2
dans la modification de la densité d’états vibrationnels, ou bien dans
la localisation des oscillations mécaniques : c’est le « pic boson »,
car il évolue en fonction de la température comme le facteur de 1.2.3 Matériaux artificiels
Bose-Einstein. Lorsque la taille des défauts ou hétérogénéités dans
les matériaux est plus grande, la lumière térahertz est alors diffusée La grande longueur d’onde (submillimétrique) des faisceaux
par le matériau. Pour les matériaux diélectriques, la diffusion peut térahertz est un avantage dont on profite pour fabriquer des dispo-
être traitée à l’aide du modèle de Mie : chaque élément diffusant est sitifs constitués de motifs réguliers de dimensions et d’espace-
décrit comme étant une sphère d’indice de réfraction différent de ments bien inférieurs à la longueur d’onde, c’est-à-dire plus petits
celui de la matrice d’accueil. On est alors à même de calculer analy- que la centaine de microns. L’onde térahertz traverse alors ce
tiquement les modes électromagnétiques d’une sphère et d’en matériau artificiel comme s’il était homogène, puisqu’elle ne subit
déduire son efficacité de diffraction. L’intensité diffusée par le maté- pas de diffraction sur chacun des motifs élémentaires. Ces maté-
riau est la somme des intensités diffusées par chaque sphère (on riaux, appelés méta-matériaux, sont assez faciles à fabriquer avec
néglige les phénomènes de diffusions multiples). Lorsque la taille les technologies modernes et peuvent être conçus de manière à
des sphères est faible devant la longueur d’onde, les formules présenter une réponse électromagnétique étonnante. De plus, en
peuvent être simplifiées et montrent une dépendance de l’intensité changeant la densité des motifs, on peut créer des gradients
diffusée en ν4 (diffusion Rayleigh). Dans le domaine térahertz, cette d’indice. La manière la plus facile de concevoir des méta-maté-
diffusion apparaît dans les matériaux présentant des inhomogénéi- riaux efficaces est sans doute d’employer des motifs métalliques
tés de taille supérieure à 1 ~ 10 μm (Rayleigh) et à 100 ~ 500 μm déposés sur des films diélectriques, et le cas échéant d’empiler ces
(Mie). C’est par exemple le cas des matériaux pulvérulents ou des couches pour former un matériau tridimensionnel. L’interaction
textiles tissés, ces derniers diffractant les faisceaux térahertz si leur entre les structures métalliques et l’onde térahertz incidente est en
tissage est régulier. effet très forte. Lorsque le motif a une forme allongée, l’onde pola-
rise le métal, c’est-à-dire déplace alternativement des charges
1.2.2.2 Matériaux conducteurs négatives et positives aux extrémités du motif, qui se comporte
comme une micro-antenne, c’est-à-dire comme un dipôle micro-
La réponse électromagnétique des matériaux conducteurs est scopique oscillant à la fréquence térahertz. On reproduit ainsi le
principalement dictée par les électrons liés et par les électrons moment dipolaire des atomes qui est à l’origine de la polarisation
libres (les trous, de masse effective généralement plus élevée que des matériaux naturels. En choisissant de manière adéquate la
celle des électrons, contribuent peu à cette réponse). Comme dimension du motif, l’excitation dipolaire peut être résonante, et
nous venons de le voir, la contribution des électrons liés est rela- donc la dispersion de la susceptibilité du méta-matériau est aussi
tivement faible et peut être considérée comme constante dans le elle-même résonante, à la manière d’une résonance de type
domaine térahertz. Par contre, les électrons libres, très mobiles, Lorentz dans un matériau diélectrique naturel. Dans un matériau
oscillent de manière pratiquement synchrone avec le champ élec- optimisé, l’effet de résonance peut être beaucoup plus grand que
tromagnétique, lorsque la fréquence de ce dernier est plus faible dans un cristal naturel. Une seule couche métallique est alors suf-
que la fréquence plasma des charges libres. Pour les métaux ou fisante pour observer des effets macroscopiques, par exemple de
les semi-conducteurs fortement dopés, la constante diélectrique filtrage spectral de l’onde térahertz : on parle de surface sélective
est alors bien décrite par le modèle de Drude : en fréquence (Frequency Selective Surface – FSS). De la même
manière, on conçoit des surfaces parfaitement réfléchissantes, ou
parfaitement absorbantes. De plus, en fabriquant des boucles
(4) métalliques, le champ magnétique du faisceau térahertz incident
crée des courants induits dans ces boucles, qui se comportent
ε∞ représente la contribution des électrons liés ou de tout autre alors comme des dipôles magnétiques. Comme dans le cas des
phénomène ne dépendant pas des charges libres. ωp est la fré- dipôles électriques, le motif géométrique peut être dessiné pour
exhiber une résonance de la perméabilité magnétique μ. Il est alors
quence plasma du matériau qui est définie par . N est la possible de combiner les deux résonances, par exemple en inter-
rompant localement la boucle (motif communément appelé
densité volumique de charges libres, e ≈ 1,6 × 10–19 C
est la charge SRR, split ring resonator). Cette coupure se comporte comme un
de l’électron et me est sa charge effective. Γ est la pulsation de col- dipôle électrique. Les effets de résonance peuvent être tellement
lision des charges libres et ε0 = (36π × 109)–1 F · m est la constante forts que la susceptibilité électrique et la perméabilité magnétique
peuvent être négatives au voisinage de la fréquence de résonance.
diélectrique du vide. Pour les métaux, la fréquence plasma est Pour une onde plane se propageant dans un tel matériau, les vec-
située dans le domaine UV, donc cette fréquence plasma se situe
bien au-dessus des fréquences térahertz, ωp >> ω. Il en découle que teurs , et forment un trièdre indirect (comme pouce, index et
les parties réelle et imaginaire de ε sont très grandes et négatives majeur de la main gauche) au lieu de direct (main droite) dans les
(–104 ~ –105). Les métaux ont pratiquement un comportement matériaux classiques. L’indice de réfraction du matériau
métallique parfait, si bien qu’une simple plaque métallique (cuivre, doit alors être choisi négatif. Outre l’effet de réfraction négative,
111
Référence Internet
AF3254
cela conduit à des phénomènes surprenants comme des lentilles produit un rayonnement appelé rayonnement thermique qui est
convergentes constituées d’une lame plane de matériau main incohérent. Les corps les plus absorbants sont en fait ceux qui
gauche, la focalisation sous la limite de diffraction, l’absorption émettent le plus de lumière thermique (loi de Kirchhoff). On défi-
parfaite de rayonnements incidents, l’invisibilité (« cloaking »), et nit alors un corps idéal de référence qui absorbe complètement la
même la simulation des trous noirs. Tous ces effets ont été lumière incidente (corps noir) et dont le pouvoir de rayonnement
démontrés dans le domaine térahertz. On sait maintenant profiter thermique est maximum. La luminance d’un tel corps a été établie
de la très haute valeur du champ térahertz au niveau de la coupure par Planck :
du SRR pour générer des effets non linéaires térahertz, pour réali-
ser des capteurs très sensibles ou même des modulateurs de
lumière térahertz. Parmi les nombreuses structures étudiées, cer- (5)
taines sont très simples comme un tamis de trous dans une feuille
métallique (méta-matériau « fishnet »), qui profite aussi de l’effet
de super-transmission lorsque la taille du trou est plus faible que C’est la puissance émise par unité de fréquence et par unité de
2 la longueur d’onde térahertz. surface du corps dans un angle solide centré dans la direction
normale au corps noir. Pour des corps noirs portés au moins à
À retenir température ambiante et pour le domaine térahertz, la loi de
Planck peut être approximée par la loi de Rayleigh-Jeans :
– Le domaine électromagnétique térahertz correspond à des
fréquences comprises entre 100 GHz et 10 THz, soit des lon- (6)
gueurs d’onde submillimétriques (30 μm < λ < 3 mm) ou
encore des énergies des photons en-dessous du milliélectron
Ainsi un corps noir de 1 cm2 à température ambiante rayonne dans
volt (0,4-41 meV).
la bande térahertz (0,1 ~ 10 THz) une puissance d’environ 1 nW. Les
– La faible énergie des photons térahertz permet d’exciter
corps noirs utilisés dans les laboratoires sont généralement des
les vibrations moléculaires, comme celles de la molécule
« globars» (cylindres en SiC portés à haute température, pour
d’eau, les phonons dans les cristaux, et les charges libres dans
des fréquences supérieures à 3 THz) ou le plus souvent des lampes à
les conducteurs.
vapeur de mercure. Le rayonnement est émis par la décharge dans la
– Hors résonance, l’interaction onde térahertz - matière est
vapeur de mercure (T ~ 104 K) mais aussi par la cellule en quartz
faible, et beaucoup de matériaux opaques dans le visible sont
(T ~ 103 K). Typiquement, une lampe à mercure de 75 ~ 100 W émet
transparents aux térahertz.
un spectre très large (0,1 ~ 20 THz) avec une densité spectrale de
quelques dizaines de microwatts par térahertz.
Figure 5 – Courbe courant-tension I (V ) de composants à résistance différentielle négative et circuit oscillateur incluant un tel composant
112
Référence Internet
AF3254
électrocinétique conduit à l’expression du courant circulant dans d’une série suivant les puissances de ejωt. La diode génère donc
ce circuit : des harmoniques mω, m entier, dont la puissance décroît typique-
ment d’un ordre de grandeur lorsque m augmente d’une unité.
Pour atteindre des fréquences térahertz, la diode doit montrer un
(7)
temps de réaction très court. Dans les diodes p-n, ce temps est
limité par le transit des charges dans la zone de déplétion et par la
Si 4L/C > R2, le terme sous la racine est négatif, et donc la racine est capacité. Il est préférable d’employer des diodes Schottky, formées
imaginaire et l’exponentielle est complexe, traduisant un caractère d’un contact métal/semi-conducteur. La surface de ce contact peut
sinusoïdal au cours du temps. Le courant oscille alors à la pulsa- être submicronique, réduisant ainsi la capacité de la diode. Les
capacités parasites, ainsi que les résistances séries, sont forte-
tion . Néanmoins, il décroît comme exp (– tR/2L), sauf ment minimisées par des astuces liées aux technologies planaires
employées, comme des connections électriques à « pont d’air »
si R est négative, auquel cas le courant est amplifié. Donc si les deux
(« air-bridge »). L’efficacité de conversion de tels doubleurs de fré-
conditions sont remplies, le circuit se comporte
comme un oscillateur. Les composants NDR sont principalement :
1) Les diodes à effet tunnel résonant (RTD). Le courant passe par
quence est de l’ordre de 5 ~ 10 % à 100 GHz, mais chute à 3 ~ 5 %
au-dessus de 500 GHz. Les tripleurs de fréquence sont environ 2 à
3 fois moins efficaces. Typiquement, des sources basées sur
2
effet tunnel entre deux puits quantiques séparés par une barrière l’emploi de ces diodes délivrent quelques centaines de milliwatts
isolante, le composant étant fabriqué en technologie microélectro- à 100 GHz, et de l’ordre de 0,1 ~ 1 mW à 1 THz. Malheureusement,
nique. En variant la tension de polarisation, le courant passe facile- elles sont inopérantes au-dessus de ~ 2 THz. La bande passante
ment lorsqu’un niveau énergétique d’un puits est égal à un niveau de telles sources est de l’ordre de la centaine de gigahertz.
de l’autre puits. Lorsque l’on augmente encore la tension, ces
Quelques entreprises se partagent le marché, Lytid en France,
niveaux se décalent et le courant chute ;
RPG en Allemagne et Virginia Diode Inc. (VDI) et TeraSense aux
2) Les diodes à effet Gunn. Dans des semi-conducteurs comme États-Unis. Par exemple, Lytid commercialise une source délivrant
GaAs ou InP, la bande de conduction présente deux vallées. Dans plus de 300 mW à 75 GHz, et qui peut être multipliée jusqu’à
la seconde vallée, par exemple notée X, les électrons libres ont 600 GHz (~2,5 mW).
une mobilité plus faible que dans la première vallée Γ. Lorsque
l’on applique une tension élevée à un échantillon de ces semi- conduc-
teurs, les électrons grimpent dans la vallée Γ, puisqu’ils acquièrent 2.1.2 Détecteurs : bolomètres, pyromètres,
une quantité de mouvement sous l’effet du champ cellules de Golay, etc.
électrique E. Ils atteignent ainsi le niveau de la seconde vallée, vers
laquelle ils migrent par effet tunnel. Leur mobilité chute alors forte- 2.1.2.1 Sensibilité, dynamique et bruit d’un détecteur
ment. La vitesse des électrons, et donc la conductance du maté-
riau, présentent un maximum en fonction de la tension de Les détecteurs dont nous parlons ici délivrent un signal électrique
polarisation. Lorsqu’un surplus de tension électrique, par rapport à (tension ou courant) lorsqu’ils sont éclairés par un faisceau
la tension moyenne, qui généralement trouve son origine dans des térahertz, signal proportionnel à la valeur moyenne de la puissance
fluctuations thermiques, se propage entre cathode et anode, les ou de l’énergie du faisceau. On définit la sensibilité SV (V/W) à ten-
charges en début de pulse subissent un champ intense (dérivée du sion V constante ou SI (A/W) à courant I constant par :
pic de tension) et donc se déplacent plus lentement que les
charges en fin de pulse. La durée du pulse diminue lors de sa pro-
(8)
pagation, tandis que son amplitude augmente. Cette forte ampli-
tude écrante le champ appliqué, interdisant l’apparition d’un autre
pulse avant que le premier n’atteigne l’anode. La fréquence de ces SV et SI dépendent souvent de la fréquence ν du signal incident.
pulses successifs est donc déterminée par le temps de transit des Dans ce cas, on écrit SV (ν) et SI (ν), et PTHz est la puissance dans un
pulses entre cathode et anode. Pour une vitesse typique dans intervalle Δν autour de la fréquence ν. Notons que les rela-
GaAs de 1,5 × 107 cm/s sous 5 kV/cm, la fréquence est égale à tions (8) supposent que le détecteur travaille dans un régime linéaire,
30 GHz pour une épaisseur de GaAs de 5 μm. donc non saturé.
Ces diodes RTD ou à effet Gunn se déclinent en différentes ver- Le signal délivré par le détecteur est affecté par du bruit. Celui-ci
sions (IMPATT, BARITT, DOVETT, TUNETT...) lorsque des phéno- provient tout d’abord du faisceau térahertz incident : nature cor-
mènes additionnels, comme un effet d’avalanche, sont mis en jeu. pusculaire des photons térahertz dont l’arrivée sur le détecteur est
Typiquement, ces diodes atteignent pratiquement 2 THz, mais la aléatoire (bruit de grenaille ou « shot noise »), mais aussi fluctua-
puissance délivrée chute rapidement avec la fréquence. Ainsi à tions de la source. Ensuite, le photocourant est lui-même composé
300 ~ 400 GHz, on obtient environ 1 mW. Les meilleurs oscilla- de charges discrètes, les électrons, dont le mouvement chaotique
teurs à diodes RTD délivrent 25 μW à 1 THz, et seulement 0,4 μW dans le circuit électronique de lecture donne naissance au bruit
à 2 THz. D’autres composants, comme les nanotransistors à effet Johnson ou bruit thermique. Dans un bolomètre où l’on mesure
plasma, semblent prometteurs, mais demandent encore un gros l’élévation de température d’un absorbeur, il faut aussi tenir
effort de développement et d’optimisation. compte de bruit des phonons photocréés. Enfin, le circuit électro-
nique peut être lui-même source de bruits additionnels (bruit
Les systèmes à multiplication de fréquence comprennent une d’amplification, bruit en 1/f – bruit de scintillation...). Le signal
source hyperfréquence très stable et assez puissante, dont le pourra être lu s’il est plus grand que le bruit. On définit le rapport
signal « basse fréquence », typiquement entre 10 et 20 GHz, est signal-à-bruit (SNR en anglais) :
multiplié par étages successifs pour atteindre plusieurs centaines
de gigahertz ou même le térahertz. Le composant électronique
non linéaire nécessaire à la multiplication en fréquence est une (9)
diode. En effet, la courbe courant-tension I (V) d’une diode pré-
sente un comportement fortement non linéaire au voisinage du
coude que forme cette courbe vers V ≈ 0. Dans le cas d’une diode où x est soit la tension V, soit le courant I. La valeur moyenne d’une
grandeur est notée en surlignant d’un trait celle-ci : ici, il s’agira de
de type p-n idéale, , où IS est le courant valeurs moyennées par rapport au temps (grandeur dis-
de fuite, et e est la charge de l’électron. Si la tension V est alterna- crète : , grandeur continue : ). Notons que
tive de pulsation ω, il est possible d’écrire I (V) sous la forme
113
2
114
Référence Internet
AF3255
115
Référence Internet
AF3255
2
peut imaginer qu’à terme, nombre de niches seront occupées par la technologie
térahertz qui viendra en complément de techniques déjà bien répandues,
comme la spectroscopie infrarouge et visible, ou bien la diffraction des rayons X,
etc. Le paragraphe suivant décrit l’application de l’imagerie térahertz à l’examen
d’œuvres du patrimoine artistique, qui met en jeu des procédures très proches
de celles des applications industrielles. Le développement d’instrumentations et
techniques térahertz pour la médecine et la biologie est ensuite présenté. Souvent
décrite comme technique d’investigation d’avenir pour la médecine, l’imagerie
térahertz a néanmoins du mal à s’imposer définitivement. Pour la biologie, les
applications semblent plus faciles à mettre en place. En environnement, grâce
à leur spécificité spectrale, les ondes térahertz apportent des informations
complémentaires des techniques traditionnelles, comme le lidar, ou même
des informations uniques, certaines molécules ne présentant une signature
spectrale originale que dans le domaine térahertz. Enfin, la montée en fréquence
des télécommunications les rapproche régulièrement de la région térahertz.
D’une part, les flux de données, au niveau de tests en laboratoire, dépassent les
100 Gbits/s, d’autre part on met aussi au point des systèmes de transmission en
espace libre, principalement pour l’intérieur des immeubles, employant une
onde térahertz comme porteuse du signal. L’article se termine par une conclu-
sion où les auteurs font part de leur réflexion sur l’avenir de la science et de la
technologie térahertz. Cette conclusion est suivie d’une liste la plus complète
possible des entreprises proposant des composants, des dispositifs et des
systèmes térahertz, ainsi que la liste des principaux livres publiés sur cette
thématique.
116
Référence Internet
AF3255
2
Déplacement du miroir mobile [mm] Fréquence [THz]
Figure 1 – Interférogrammes de référence (trait pointillé) et en présence d’un échantillon de PEHD de 4,96 mm d’épaisseur (trait continu), et
transmittance de l’échantillon de PEHD (données aimablement fournies par le CEA LETI)
réfraction est déterminé avec l’aide de la relation (1). Notons que et non en intensité comme présentée précédemment. La transfor-
la loi de Beer-Lambert n’est valable que si l’échantillon est homo- mée de Fourier inverse de l’interférogramme mesuré est ainsi pro-
gène (pas de diffraction ou diffusion du faisceau térahertz). Si les portionnelle au complexe conjugué du coefficient de réflexion ou
réflexions en surface d’échantillon ne sont pas négligeables, il de transmission complexe (dans le cas d’échantillons opaques, on
faut employer deux échantillons du même matériau et d’épais- remplace le miroir fixe de l’interféromètre par l’échantillon). Il
seurs différentes mais pas trop ! En effet, il ne faut pas trop modi- devient possible de remonter à la partie réelle n et imaginaire κ de
fier le terme Fabry-Pérot qui dépend de l’épaisseur. Le rapport des l’indice de réfraction du matériau constituant l’échantillon. Cette
spectres transmis permet alors de s’affranchir des effets de sur- technique, appelée spectroscopie FTIR asymétrique, est très
face. Bien que peu précise car soumise à trop d’hypothèses sim- proche dans le principe de celle présentée par la suite (THz-TDS).
plificatrices, cette méthode est souvent employée car très simple. Toutefois, elle est rarement utilisée du fait de problèmes d’aligne-
Dans le cas de mélanges de poudres compactés, où l’une des ment très critiques.
poudres est le matériau à tester et l’autre poudre est la matrice
d’accueil, si possible transparente, on fabrique deux échantillons
identiques (épaisseur, densité, etc.), mais en changeant légère- 1.1.2 Spectroscopie dans le domaine temporel
ment la proportion du matériau à tester. Seule l’absorption du (THz-TDS)
faisceau térahertz transmis varie un peu, et les coefficients de
Fresnel ou les effets Fabry-Pérot restent pratiquement inchangés. La spectroscopie térahertz dans le domaine temporel (THz-TDS)
La comparaison des mesures des deux échantillons permet alors utilise la possibilité précédemment décrite (voir § 2.4.2 de [AF 3 254])
d’extraire le spectre d’absorption du matériau à tester. d’obtenir une mesure temporelle d’un champ électrique impul-
sionnel qui possède un spectre très large. Pour caractériser un
Dans le cas d’une mesure en réflexion (le faisceau térahertz en matériau, deux mesures de l’impulsion térahertz sont effectuées :
sortie du spectromètre FTIR est réfléchi par l’échantillon avant la première, Sdst(t), en présence de l’échantillon du matériau à
d’atteindre le détecteur), intéressante dans le cas de matériaux caractériser, positionné dans une zone où le faisceau térahertz est
absorbants, on peut déterminer l’indice de réfraction du matériau parallèle (qui peut être le point de focalisation du faisceau
de la manière suivante. Grâce au spectromètre, on mesure le térahertz à condition que la longueur de Rayleigh du faisceau soit
module carré R(ω) du coefficient de réflexion complexe (en bien plus grande que l’épaisseur de l’échantillon) et la seconde,
champ) , tel que où φr(ω) est sa phase. Les Sref(t), sans échantillon (figure 2). Le coefficient de transmission
relations de Kramers-Kronig permettent de déterminer cette complexe (module et phase) de l’échantillon est alors obtenu en
phase : effectuant le rapport des spectres des deux mesures temporelles :
Tmes(ω) = Sdst(ω)/Sref(ω). Si les deux mesures temporelles ont été
enregistrées avec la même origine des temps (même position de
(2) départ de la ligne à retard), le module de Tmes(ω) correspond au
coefficient de transmission de l’échantillon (en champ, et non en
La détermination de l’indice de réfraction et de l’absorption sera intensité comme classiquement en FTIR) alors que sa phase
effectuée comme expliqué dans le paragraphe suivant dédié à la donne le déphasage induit par l’échantillon. Cette double informa-
spectroscopie THz-TDS. tion permet de remonter directement aux paramètres optiques du
matériau (indice de réfraction et absorption) sans avoir à utiliser
Il est aussi possible de placer l’échantillon dans l’un des bras de les relations de Kramers-Kronig reliant indice de réfraction et
l’interféromètre (spectroscopie asymétrique) : on obtient alors une absorption.
information non seulement sur l’amplitude du signal transmis
mais aussi sur le déphasage induit par l’échantillon. Dans ce cas, Dans le cas d’un échantillon homogène, plan et à face parallèle,
cela revient à effectuer une mesure de spectroscopie en amplitude isotrope, non magnétique et sans charge de surface, qui de plus
117
Référence Internet
AF3255
2
Temps [ps]
Figure 2 – Impulsions térahertz transmises par un échantillon lors d’une caractérisation par spectroscopie THz-TDS et signaux temporels de
référence et mesuré en présence d’un échantillon de verre BK7 de 1,6 mm d’épaisseur (les flèches pointent les positions des deux premiers
échos de l’impulsion térahertz induits par l’échantillon)
(3)
avec
(4)
118
Référence Internet
AF3255
Absorption [cm–1]
l’ordre de grandeur de celui recherché, ce qui dégrade fortement la
précision de la mesure ;
– sensibilité et précision moindres, du fait d’une interaction
onde-matériau limitée au niveau de l’interface (en transmission,
l’interaction a lieu sur la totalité de l’épaisseur de l’échantillon) ;
– sensibilité plus grande à la qualité (planéité par exemple) et à
l’orientation de la surface de l’échantillon. 2
1.2 Application à la spectroscopie
de matériaux Fréquence [GHz]
1.2.1 Mesures THz-TDS Figure 4 – Indice et absorption térahertz d’un échantillon composé
d’un mélange d’acide bromo-cinnamique et de PEHD
La technique de THz-TDS décrite au paragraphe précédent per-
met de caractériser avec précision un grand panel de matériaux
modes de vibration de la molécule et donc de son spectre de raies
qu’ils soient en phase liquide, solide ou gazeuse, au sens où il est
(figure 5a). La position du radical va par ailleurs aussi modifier
non seulement possible de mesurer la transmittance d’un échan-
« le centre de gravité » de la molécule et de ce fait modifier ses
tillon, mais aussi d’extraire les paramètres (indice de réfraction et
modes de vibration comme illustré sur la figure 5b. Sur ces figures
coefficient d’absorption) du milieu qui le constitue. Les échantil-
et à des fins de clarté, seules les courbes d’absorption des molé-
lons sont en général caractérisés en transmission du fait d’une
cules ont été représentées.
précision meilleure qu’en réflexion. La figure 4 montre les résul-
tats obtenus avec un échantillon composé d’un mélange compressé La figure 6 montre l’indice de réfraction et l’absorption du silicium
de poudres d’acide bromo-cinnamique et de PEHD. Comme précisé déterminés pour des échantillons présentant des types (donneur = N
précédemment, le PEHD sert à des fins de dilution. En utilisant la et accepteur = P) et des niveaux de dopage différents ; les points
méthode décrite au paragraphe 1.1.2, l’indice de réfraction mais correspondent aux résultats expérimentaux alors que les traits
aussi l’absorption du matériau constituant l’échantillon sont obte- continus représentent un ajustement par le modèle de Drude, qui
nus. On remarque sur la figure 4 la position fréquentielle des raies est le modèle classique de conductivité ohmique des métaux et
d’absorption de l’acide bromo-cinnamique, non seulement sur la semi-conducteurs dopés. Cette figure 6 illustre de façon non équi-
courbe de l’absorption mais aussi sur celle de l’indice de réfrac- voque l’importance des porteurs libres dans le comportement des
tion, ces deux paramètres étant liés par les relations de Kramers- paramètres matériaux des semi-conducteurs dans le domaine
Kronig. Les modes de rotation-vibration responsables de ces pics térahertz : en fonction du dopage, un semi-conducteur pourra ainsi
d’absorption dépendent fortement du poids atomique des atomes être transparent (comportement diélectrique) ou opaque (comporte-
constituants la molécule. Ainsi, en changeant le radical brome par ment métallique). Par ailleurs, les fréquences de résonance plasma
un radical fluor ou chlore, on constate une modification des dans les semi-conducteurs dopés se situent dans le domaine des
Absorption [cm–1]
Absorption [cm–1]
Figure 5 – Absorption térahertz de différentes molécules proches et de différents isomères de l’acide bromo-cinnamique
119
2
120
Référence Internet
J8015
et François-Xavier FELPIN
Professeur à l’Université de Nantes, Membre junior de l’Institut Universitaire de France
Université de Nantes, Laboratoire CEISAM, UMR CNRS 6230, Nantes, France
121
Référence Internet
J8015
SPECTROMÈTRES RMN DE PAILLASSE POUR L’ANALYSE EN LIGNE DE RÉACTIONS EN FLUX CONTINU ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
122
Référence Internet
J8015
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– SPECTROMÈTRES RMN DE PAILLASSE POUR L’ANALYSE EN LIGNE DE RÉACTIONS EN FLUX CONTINU
est définie comme le produit de la concentration de la solution en difficultés, il est possible d’immobiliser un réactif solide au sein
produit par le débit du fluide circulant. Il est possible d’exprimer la d’une cartouche [8] ou de plonger le réacteur dans un bain à ultra-
productivité en la rapportant à une unité de volume en prenant en sons [9] pour éviter la formation de particules solides. Dans tous
compte le volume du réacteur. Cette expression de la productivité les cas, une étude préalable doit être menée pour chaque transfor-
est communément appelée space-time-yield par les Anglo-Saxons. mation afin de s’affranchir ou de limiter les phénomènes de bou-
chage par des particules insolubles.
Agitation – Mélange – Transfert de matière. L’agitation d’un réac-
teur fermé est une problématique complexe. En laboratoire de recher-
che, l’agitation est souvent réalisée à l’aide d’un barreau magnétique
recouvert de téflon, de taille et forme adaptées au réacteur utilisé.
L’agitation est souvent une des sources majeures (souvent sous-esti- 2. Spectromètres RMN
mée) de non-reproductibilité d’une transformation. Le régime turbu-
lent de ce type d’agitation conduit à des gradients de concentration de paillasse
(et de chaleur) au sein de l’enceinte réactionnelle. Le transfert de
2
matière en flux peut-être bien plus efficace grâce à l’emploi de mélan-
geurs ou de réacteurs au design varié [IN 94].
La nature non invasive de la détection RMN est un atout considé-
Transfert de chaleur. Dans le cas d’une convection électrique tra- rable pour le suivi de réactions en ligne en comparaison de la chro-
ditionnelle, le transfert de chaleur au milieu réactionnel est assuré matographie liquide ou gazeuse, notamment pour la détection de
par les parois du réacteur. Un réacteur en flux possède un ratio composés hautement réactifs susceptibles de réagir avec la phase
entre la surface de contact et le volume bien plus élevé qu’un réac- immobilisée des colonnes chromatographiques. La spectroscopie
teur en batch à taille équivalente. Pour s’en convaincre, il suffit de RMN est utilisée depuis de nombreuses années pour le suivi en
comparer la surface de contact entre un ballon en verre communé- ligne de réactions chimiques, grâce à sa capacité à fournir de pré-
ment utilisé dans les laboratoires de recherche pour les réactions cieuses informations structurales ainsi que des données quantitati-
en batch avec un simple réacteur tubulaire du même volume. ves justes et précises. La RMN à haut champ (HC) a longtemps
L’amélioration du transfert de chaleur en flux se traduit bien sou- constitué l’outil privilégié, via l’utilisation de sondes RMN dédiées
vent par des cinétiques réactionnelles (lorsque celles-ci sont dépen- à l’analyse en flux [10] ou plus récemment grâce au développement
dantes d’une activation thermique) considérablement améliorée. de tubes en flux compatibles avec une configuration RMN de rou-
Inversement, les réactions exothermiques sont mieux contrôlées tine [11]. Attention, il s’agit ici de l’analyse qui est en flux et non la
car la dissipation de la chaleur par les parois du réacteur en flux réaction, par prélèvement du milieu réactionnel agité en cuve fer-
est favorisée par rapport à un réacteur en batch. mée. Bien que la RMN HC bénéficie d’une sensibilité et d’une réso-
lution relativement élevées, les spectromètres HC sont difficilement
Exemple compatibles avec la chimie en flux. En effet, ces équipements lourds
Il est possible de comparer la surface de contact entre un réacteur et coûteux sont généralement installés dans des laboratoires dédiés
fermé et un réacteur tubulaire en flux contenant le même volume de et pilotés par un personnel spécialisé. À l’inverse, la RMN à bas
solvant. La surface de contact d’un réacteur fermé en verre de forme champ (BC), basée sur l’utilisation de petits aimants permanents,
cylindrique de rayon r rempli à moitié de solvant équivaut à S = 2pr 2. permet de contourner ces inconvénients grâce à une taille réduite
Pour ce qui est d’un réacteur en flux tubulaire, la surface de contact qui rend les instruments de mesure compatibles avec un environne-
correspond à l’aire de la surface courbe de rayon r et de longueur L ment de synthèse organique (utilisation sous hotte standard).
exprimée par S = 2prL. Dans le cas d’un volume utile de 2,5 mL, le Pendant plusieurs dizaines d’années, la RMN à bas champ a été
réacteur cylindrique possède des cotes standardisées avec un rayon limitée à la relaxométrie, utilisant des aimants permanents à bas
d’environ r = 1,6 cm. La surface de la demi-sphère est donc de champ (0,5 T) dont l’homogénéité n’est pas suffisante pour acqué-
16 cm2. Pour ce qui est d’un réacteur tubulaire, la surface dépend du rir des spectres RMN avec une résolution acceptable. Dans le cas
diamètre interne. Afin de calculer une surface moyenne, un rayon de de la relaxométrie, l’information pertinente consiste en une distri-
0,25 mm est utilisé pour le calcul. Dans ce cas, la longueur du tube est bution des temps de relaxation obtenue par déconvolution du
de L = 13,5 m pour obtenir un volume de 2,5 mL. La surface calculée signal de précession libre FID (Free Induction Decay). Bien que
est donc dans ce cas de 212 cm2, c’est-à-dire 13 fois supérieure à la cette approche ait été utilisée pour le suivi de réactions chimiques
surface calculée pour le ballon en verre. Ce calcul n’est qu’une gros- en temps quasi-réel [12] [13], elle apparaı̂t limitée à certaines clas-
sière approximation car dans le cas d’un mélange réactionnel de ses de réactions où les réactifs et les produits sont caractérisés par
250 mL par exemple, la taille du réacteur fermé est de l’ordre de des régimes de relaxation significativement différents.
500 mL alors que le même réacteur tubulaire de 2,5 mL peut tout à
fait être utilisé dans un procédé en flux continu. Dans ce cas, la sur- Plus récemment (dans les années 2010), une nouvelle génération
face de surface de contact du réacteur en flux pour 250 mL de volume de spectromètres RMN à bas champ est apparue comme une alter-
réactionnel est 130 fois supérieure à celle du réacteur fermé. native prometteuse. Ces spectromètres RMN dits « de paillasse »
(benchtop) sont également basés sur des aimants permanents,
mais dont l’homogénéité est devenue suffisante pour réaliser
Pression. Lorsque l’écoulement au sein d’un réacteur micro- et l’acquisition de spectres RMN classiques avec une résolution
milli-fluidique est assuré par des pompes issues ou dérivées de acceptable [14]. Depuis 2015, les spectromètres RMN de paillasse
systèmes HPLC, il est possible de travailler à des pressions allant ont ouvert de nouveaux marchés pour la RMN, rendant cette der-
jusqu’à plusieurs centaines de bar en toute sécurité grâce à l’utili- nière accessible à des environnements exigeants comme les sites
sation d’un régulateur de pression. De telles pressions ne sont de production ou les laboratoires de synthèse organique. Ces équi-
atteignables en batch qu’à l’aide d’autoclaves dans des conditions pements compacts, disponibles commercialement auprès de plu-
d’utilisation et de sécurité bien plus complexes. La possibilité de sieurs fournisseurs, ont l’avantage d’un coût raisonnable (de 50 à
pouvoir travailler sous hautes pressions et hautes températures 100 k€, contre plusieurs millions d’euros pour les spectromètres à
dans des conditions de sécurité optimales, a permis de développer très haut champ) et d’un coût de fonctionnement quasi négligeable.
des procédés en conditions supercritiques [1] [2] [3] [4] [5] [6] [7]. Les spectromètres de paillasse ne nécessitent pas de fluides cryo-
Dans ces conditions, les propriétés des solvants et des réactifs géniques, étant construits à partir d’aimants permanents constitués
sont profondément modifiés. d’alliages de terres rares. Les équipements commerciaux actuels
Réaction avec des solides. L’une des limitations des réacteurs en utilisent des champs magnétiques entre 1 et 2 T, correspondant à
flux concerne l’utilisation de réactifs solides ou la formation de sels une fréquence de résonance 1H entre 40 et 80 MHz.
ou de précipités au cours de la réaction qui peuvent boucher les Les spectromètres RMN de paillasse ont ouvert la voie à de nou-
canaux de faibles diamètres internes. Pour remédier à ces velles applications de la RMN dans les domaines du suivi
123
Gagnez du temps et sécurisez vos projets
en utilisant une source actualisée et fiable
RÉDIGÉE ET VALIDÉE MISE À JOUR 100 % COMPATIBLE SERVICES INCLUS
PAR DES EXPERTS PERMANENTE SUR TOUS SUPPORTS DANS CHAQUE OFFRE
NUMÉRIQUES
Questions aux experts* Articles Découverte Dictionnaire technique multilingue Archives Info parution
Les meilleurs experts techniques La possibilité de consulter 45 000 termes en français, anglais, Technologies anciennes et versions Recevez par email toutes les nouveautés
et scientifiques vous répondent des articles en dehors de votre offre espagnol et allemand antérieures des articles de vos ressources documentaires
*Questions aux experts est un service réservé aux entreprises, non proposé dans les offres écoles, universités ou pour tout autre organisme de formation.
www.techniques-ingenieur.fr
CONTACT : Tél. : + 33 (0)1 53 35 20 20 - Fax : +33 (0)1 53 26 79 18 - E-mail : [email protected]
Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)