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BANQUE AFRICAINE DE DEVELOPPEMENT

ETUDES ET RECHERCHES ECONOMIQUES

NO 67

Gouvernance en Afrique :
Etat des lieux

par

Tchabouré Aimé GOGUE


FASEG Université de
Lomé

Les vues et interprétation contenues dans ce document sont celles de l’auteur et


non nécessairement celles de la Banque africaine de développement
ETUDES ET RECHERCHES

ECONOMIQUES NO 67

Gouvernance en Afrique :
Etat des lieux

par

Tchabouré Aimé GOGUE


FASEG Université de
Lomé

Droits de auteur © 2001


La Banque africaine de développement
01 B.P. 1387
Abidjan 01
Côte d’Ivoire
Résumé
Prétextant que les régimes autocratiques étaient les mieux placés pour mobiliser et
organiser les ressources en vue d’assurer le développement et l’unité nationale, la
classe politique a généralisé la pratique de cette forme de gouvernement dans les pays
africains à partir de la seconde moitié des années soixante. Malheureusement, ces
régimes n’ont pas permis d’avoir les résultats escomptés, l’Afrique subsaharienne étant
caractérisée à la fin des années quatre- vingts par une détérioration des conditions de vie
des populations et une instabilité de l’environnement politique. Ces régimes ont ainsi
perdu leur crédibilité et leur légitimité aussi bien sur le plan interne qu’externe.

Les mouvements pour la libéralisation de la vie politique qui se sont alors accélérés
dans la plupart de ces pays, ont permis d’obtenir des résultats qui varient selon les pays
:
- les pays en guerre connaissent soit une dictature implacable ou un blocage du
processus démocratique : l’Angola ou la République Démocratique du Congo
illustrerait ce groupe ;
- les pays où le chef de l’exécutif est omniprésent et omnipotent, avec des
violations fréquentes des droits de l’homme, sont qualifiés de démocrature
démocratisante : il s’agit par exemple ici de la Libye, du Togo ou du Zimbabwe
;
- les pays où l’alternance au pouvoir exécutif est une réalité mais où la situation
politique paraît instable : ce sont les pays de démocratie molle. La Côte d’Ivoire
ou le Burkina Faso pourront bien servir d’exemple ;
- dans les pays en voie de démocratisation, comme le Bénin, le Ghana ou le Mali,
la volonté d’appliquer les principes démocratiques semble réelle ;
- les pays vivant véritablement la démocratie comme le Botswana ou l’Ile Maurice.

En même temps que les africains recherchent plus de démocratie, ils visaient
également l’amélioration de leurs conditions de vie. S’il paraît difficile d’établir a
priori une relation entre type de régime politique et performances économiques, il est
cependant prouvé que la consolidation de la démocratie exige de bonnes performances
économiques. Plus que la nature du régime ce serait plutôt la pratique de la
gouvernance du pays qui expliquerait la différence dans les performances
économiques. La bonne gouvernance serait de nature à garantir de meilleures
performances économiques. La bonne gouvernance suppose l’existence de capacités
institutionnelles, humaines et matérielles adéquates ainsi que des acteurs
(l’administration publique, les pouvoirs exécutif, législatif et, judiciaire ainsi que la
société civile) forts et qui s’équilibrent. Or actuellement, ces conditions sont loin d’être
remplies dans beaucoup de pays d’Afrique subsaharienne. Dans ces conditions, la
consolidation de la pratique de la bonne gouvernance dans les pays africains exige le
renforcement des capacités institutionnelles et humaines des différents acteurs
(notamment administration publique, pouvoir judiciaire et société civile).
Abstract
Advancing the argument that autocratic regimes were best placed to mobilise and organise
resources to ensure development and national unity, politicians generalised the practice of
this form of government in African countries starting in the second half of the 60s.
Unfortunately, these regimes did not permit the anticipated results to be obtained, Sub-Saharan
Africa was characterised, at the end of the 80s, by the population’s deteriorating living
conditions and unstable political environment. These regimes therefore lost their credibility
and their legitimacy internally as well as externally.

Movements to liberalise political life, which in most countries have accelerated their
activities, made it possible to obtain results that varied from one country to another:
- Countries at war have either an unremitting dictator or an impediment to the
democratic process; this group is illustrated by Angola or the Democratic Republic of
Congo;
- Countries where the chief of the executive branch is ever present and all powerful,
with frequent human rights violations, is considered a “democratorship becoming
more democratic”: this is the case, for example, of Libya, Togo or Zimbabwe;
- Countries where the alternation of executive power is a reality but the political
situation seems unstable: these countries have soft democracies. Côte d’Ivoire or
Burkina Faso could be considered as examples;
- In countries in the process of democratisation, such as Benin, Ghana or Mali, the
determination to apply democratic principles seems real;
- The truly democratic countries are Botswana or Mauritius.

While Africans seek enhanced democracy, they also are aiming at improving their living
conditions. If, a priori, it seems difficult to establish a link between the type of political regime
and economic performances, it has been proven that the consolidation of democracy requires
sound economic performances. More than the type of regime, it would be the country’s
practice of governance that would explain the difference in economic performances. Good
governance could guarantee better economic performances. Good governance implies the
existence of appropriate institutional, human and material capacities as well as strong actors
(public administration, executive, legislative and judicial powers and civil society). Currently,
these conditions are far from being met in many Sub-Saharan African countries. Under these
circumstances, consolidation of the practice of good governance in African countries requires
strengthening the institutional and human capacities of the various actors (namely public
administration, judicial power and civil society).
Gouvernance en Afrique :
Etat des Lieux

par

Tchabouré Aimé GOGUE*

I - INTRODUCTION

Entre 1885 et 1990 le continent africain, a connu des mutations importantes. D’abord, la
Conférence de Berlin de 1885 a marqué la triste consécration du partage de l’Afrique par les
puissances coloniales. Ensuite, l’une des conséquences majeures des deux guerres mondiales
du 20ème siècle est l’émancipation des peuples colonisés et l’affirmation de leur volonté à
mette un terme aux relations d’asservissement qui les liaient aux puissances coloniales. C’est
ainsi que les années soixante se sont illustrées par la décolonisation formelle de la majorité
des pays africains, le plus souvent sans violence remarquable. Malheureusement, pour la vaste
majorité des populations, cette accession à l’indépendance n’a mis fin à l’arbitraire des
gouvernants que pendant une courte période. Déjà au cours des années soixante, des leaders
nationaux autocratiques se sont vite substitués aux dirigeants coloniaux. Enfin, il a fallu
attendre un second sursaut national pour être témoin de la réaffirmation des aspirations
profondes des populations à plus de liberté et à plus de démocratie. Ainsi, les mouvements de
démocratisation qui se sont généralisés et cristallisés surtout au début des années quatre-vingt-
dix marquent une renaissance de ces pays.

Ce renouveau démocratique répond aux échecs des régimes autocratiques à atteindre les
objectifs de construction de l’unité nationale et de développement économique qu’ils étaient
sensés mieux adaptés à réaliser. Au cours des années soixante et soixante-dix, l’Afrique s’est
illustrée par le triste record des réfugiés politiques et un nombre de plus en plus considérable
de guerres civiles et de marginalisation d’une partie de plus en plus grande de la population.
Sur le plan économique, après des performances relativement bonnes au cours des années
soixante, les pays africains en général ont connu une chute du PIB par habitant au cours des
années soixante-dix et ont traversé des crises économiques profondes durant les années
quatre-vingts. Si les chocs externes et des variables liées à la géographie ont été avancés
pour expliquer la détérioration des conditions économiques des années quatre-vingts, de plus
en plus de voix ont plutôt pensé que la manière de gérer, a certainement été très déterminante
(Sachs, J. and Warner (1997), Ndulu B.J. et S.A. O’Connor (1999), Collier et Gunnings
(1999), etc.) La mauvaise gouvernance en pratique dans ces pays, serait ainsi la raison
principale de l’incapacité à, d’une part, éviter les tensions et crises sociales ainsi que les
violences politiques et d’autre part, formuler et mettre en œuvre les réformes de politiques
économiques comprises dans les programmes de stabilisation financière et d’ajustement structurel
avec le soutien du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale.

* Professeur à la Faculté des Sciences Economiques et Sciences de Gestion (FASEG), Université de Lomé, B.P. 1515 Lomé - Togo.
Email : [email protected]
6 Tchabouré Aimé GOGUE

La bonne gouvernance est ainsi perçue aussi bien par les populations que les partenaires des
pays africains comme indispensable pour la promotion du développement. On a ainsi assisté
à des oppositions le plus souvent violentes entre, d’une part, les tenants du pouvoir et, d’autre
part, les populations aspirant à plus de liberté, à plus de respects des droits de l’homme, à une
meilleure distribution des richesses du pays et à une meilleure façon de diriger et de gérer le
pays. Les bailleurs de fonds les plus importants du continent, les Institutions de Bretton
Woods et l’Union européenne notamment, font de la bonne gouvernance un des critères
d’attribution de d’aide publique au développement. Le Groupe de la Banque africaine de
développement a également ressenti l’importance de la pratique de la bonne gouvernance pour
l’amélioration de l’efficacité des politiques de développement en général et des performances
de ses activités dans ses pays membres en particulier.

La présente étude a pour objet de procéder à une évaluation de la gouvernance en Afrique.

Dans la section II, nous présenterons les raisons qui ont poussé la quasi-totalité des pays à
adopter les régimes autocratiques et les conséquences de ces pratiques aussi bien sur la
construction de l’unité nationale que sur les performances économiques.

Dans la section III, après avoir exposé les différents types de revendication pour une plus
grande libéralisation de la vie politique et économique, qui se sont manifestées surtout au
cours de la première moitié des années quatre-vingt-dix, nous présenterons les différentes
formes de régimes politiques en Afrique et ferons ressortir la nécessité de la pratique de la
bonne gouvernance pour pouvoir retrouver le chemin d’une croissance durable.

La section IV fera l’objet d’un exposé des capacités de gestion des pays et des autres acteurs
de la gouvernance en Afrique.

Il ressort de l’étude que, plus que le type de régimes politique, ce sera la manière de gérer et
les capacités institutionnelles, humaines du pays et l’efficacité des autres acteurs de la
gouvernance, qui seront déterminantes pour assurer une croissance économique soutenue dans
les pays.

Il est important de noter au préalable que l’Afrique loin d’être une entité homogène, présente
une très grande diversité tant en matière de pratique politique que de politiques économiques.
Dans ces conditions, une étude comme celle ci ne peut être que générale et ignorer des
particularités propres à certains pays.

II – LES ERREMENTS AUTOCRATIQUES EN AFRIQUE ET LA NECESSITE DE


LA BONNE GOUVERNANCE

Des régimes démocratiques aux régimes autocratiques

Les démocraties aux lendemains des indépendances

La génération des leaders africains après la guerre, a réussi à mobiliser les populations dans
un combat nationaliste, multipartite et multiethnique pour acquérir l’indépendance de leur pays.
Dans le cas des colonies de peuplement comme l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Kenya, la
Namibie, le
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 7

Zimbabwe ou des colonies portugaises, les indépendances ont été obtenues à la suite de guerre
de libération. Par contre, l’indépendance a été «octroyée» à la plupart des autres pays sans
grande violence notoire. Il y a cependant lieu de mentionner que des agents des puissances
coloniales ont, dans la quasi-totalité des cas, usé de répressions policières et de stratégies
pour atténuer les demandes des leaders africains et s’assurer, surtout dans le cas des
anciennes colonies françaises, que ce soient les leaders acquis à leurs intérêts qui accèdent au
pouvoir.

Dans tous les cas, ces victoires sur les puissances coloniales ont conféré à ces leaders une
grande popularité. Une fois l’indépendance acquise, il fallait penser au développement
économique pour l’amélioration des conditions de vie des populations. L’euphorie quasi
générale qui a marqué l’accession à l’indépendance faisait miroiter des lendemains meilleurs.
En fait, l’indépendance des pays n’était pas perçue comme une fin en soit mais plutôt
comme un instrument pour l’épanouissement culturel et social et pour le développement
économique.

A l’indépendance, toutes les dispositions fondamentales pour la démocratie et le respect des


droits de l’homme étaient prises : multipartisme, liberté d’expression, de la presse, etc.
Cependant le système démocratique ainsi hérité, était minimaliste et a été très vite balayé pour
faire place à l’autoritarisme.

Dans la quasi-totalité des cas, les puissances coloniales n’avaient pas laissé leurs anciennes
colonies dans des conditions économiques, sociales et politiques pouvant permettre la
consolidation des états et la création des nations. Les colonies avaient été constituées avec
des frontières qui ne tenaient pas compte de la répartition géographique des ethnies ou des
groupes religieux ou de l’homogénéité des régions. Cette situation a été exacerbée par la
pratique coloniale qui consistait à diviser pour régner. Le pluralisme des sociétés africaines
(ethnies, régions, religion, etc.) exigeait donc qu’une priorité soit accordée à la construction de
la nation. Pour arriver à cette fin, il fallait la paix sociale et politique. C’est pour éviter des
luttes interminables, qui risquaient de mettre en cause l’existence même de ces jeunes pays,
que l’OUA avait adopté dans sa charte, le principe de l’inviolabilité des frontières héritées de
la colonisation.

Les justifications de la nécessité des régimes forts en Afrique

Une des causes de la chute de la démocratie aux lendemains des indépendances a été sa
prétendue incapacité et inefficacité à construire l’unité nationale et à donner des résultats
probants sur le plan économique.

Pour ses détracteurs, la démocratie impliquerait des disputes interminables et de conflits


inutiles constituant ainsi une perte de temps. Selon les thèses dominantes en cette période, la
démocratie ne pouvait qu’exacerber et stimuler les divisions et raviver les divergences. Même
au plus fort des luttes des années quatre-vingt-dix pour plus de démocratie, des tenants des
régimes autocratiques continuaient à prétendre que la démocratie était un luxe pour les pays
africains. Ainsi, la démocratie constituerait un danger réel pour la construction de l’unité
nationale. Pour les protagonistes de ces thèses, avec les divisions ethniques, régionales,
religieuses, etc., qui caractérisaient les pays africains, un degré d’autoritarisme était donc
nécessaire pour contenir toute velléité de séparatisme qui risquait de diviser le pays. Ils
pensent être réconfortés dans leur pensée par le fait que, historiquement, la construction de
8 Tchabouré Aimé GOGUE

la nation a précédé la démocratie et a été réalisée de manière


Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 9

violente. En effet, selon Lewis Namier, “les Etats ne sont pas créés ou détruits, et les
frontières des Etats ne sont pas tracées ou effacées suite à des discussions de salon et des
votes majoritaires entre gens de bonne compagnie. Les nations sont libérées, unifiées ou
détruites par le sang, à l’aide des armes et non par l’application de principes démocratiques
et de liberté.” 1 Pour eux, seuls les régimes autoritaires, en maintenant l’intégrité territoriale, la
tranquillité interne et la paix sociale, étaient en mesure de contribuer à la construction
nationale.

Sur le plan économique, les ressources qui devraient être utilisées pour atténuer les tensions et
lutter contre les conflits inter ethniques, pouvaient ainsi servir au financement des projets de
développement économique. En outre, les régimes totalitaires sont supposés pouvoir :
- faire respecter les lois et réglementation en vigueur et permettre ainsi un fonctionnement
normal de l’Etat ;
- accélérer le processus de prise de décision ;
- mobiliser les ressources pour les investissements dans les infrastructures publiques
notamment ; et
- moderniser l’administration et les structures économiques pour favoriser la promotion
du développement économique (Touraine, p. 222.)

Les conséquences du choix des régimes autocratiques ne se sont pas fait attendre. Ainsi,
toute argumentation devait cesser et on ne devait parler que d’une seule voix et ne regarder
que dans la même direction. La participation des populations à la vie sociale, économique et
politique, a cessé ou du moins s’est limitée exclusivement à la participation militante aux
organes encadrés et contrôlés par le pouvoir en place. Des lois interdisant la création d’autres
partis politiques sur des bases régionalistes, religieuses ou ethniques, etc. sont adoptées. On
s’écartait alors de la constitution qui favorisait la décentralisation en centralisant ; on crée des
partis uniques (de fait) et des centrales syndicales uniques. Les parlements furent dissous
ou sont relégués au rôle de caisse d’enregistrement. Les pouvoirs en place suppriment les
partis politiques, rendent illégales les grèves, ferment les journaux indépendants, musèlent la
presse ou poussent à l’autocensure des journalistes et intellectuels.

Le prestige acquis par les leaders lors des luttes de libération nationale a facilité la
personnalisation du pouvoir, le culte de personnalité (père de la nation, guide suprême de la
révolution, timonier national, Osagifo, etc.) De tels systèmes ont vite favorisé le clientélisme,
le refus de délégation du pouvoir et l’absence de partage de pouvoir.

La généralisation des régimes autocratiques en Afrique

Ces mouvements ont été si généralisés à partir de la seconde moitié des années soixante, qu’à
la fin des années quatre-vingts, les pays africains étaient surtout dominés par des régimes
autocratiques. La baisse de la démocratie atteint son apogée avec l’arrivée au pouvoir des
militaires qui gouvernent invariablement par ordonnances et décrets, abolissent les parlements et
suspendent les constitutions. De 16 en 1975, les régimes militaires sont passés à 23 pendant la
période 1983-19892 .

La communauté internationale a joué un rôle déterminant dans l’accès, la consolidation et le


maintien au pouvoir de la plupart des régimes autocratiques. Sous la guerre froide, des grandes
puissances aidèrent des régimes (surtout leurs leaders) afin qu’ils maintiennent leur pays dans
leur camp et
10 Tchabouré Aimé GOGUE

sous leur influence. Beaucoup de dictatures (militaires) ont accédé au pouvoir et y ont été
maintenues en Afrique à cause de soutien de certains pays donateurs : apartheid en Afrique du
Sud, Mobutu, Togo, etc. L’aide a été également utilisée pour la promotion de la légitimité de
l’Etat.

En outre, l’aide étant un don par le bailleur de fonds, elle peut être perçue comme un signe
d’approbation ou d’amitié de la part du donateur vis à vis du bénéficiaire. Tout
accroissement (diminution) du volume d’aide est donc perçu comme une amélioration
(détérioration) de cette amitié ou approbation. Ce symbole s’applique surtout pour le cas des
donateurs importants qu’ils soient bilatéraux ou multilatéraux (FMI et Banque Mondiale ;
France pour les ex colonies française.) Ce signal peut avoir un effet pervers sur le développement
si l’aide est accordée à un pays corrompu. Elle peut renforcer leur légitimité et surtout les
encourager dans leur mauvaise pratique de gouvernance. Pour Lancaster (1999)3 , si
l’environnement économique et politique est mauvais, l’aide n’aura probablement pas
d’impact positif ; au mieux les ressources ainsi obtenues seront gaspillées. Au pire, à travers
ses effets politiques et économiques pervers, elle pourra retarder le développement du pays.
Or selon une étude de Alesina et al. (1999), où il utilise plusieurs mesures alternatives de
l’indice de corruption, une conclusion sans équivoque apparaît dans l’analyse de la
distribution de l’aide publique au développement : il y a une corrélation positive entre le
volume d’aide reçu par un pays et le niveau de corruption de ce pays ; plus le pays est
corrompu, plus il bénéficiera de l’aide ! Ils trouvent en outre qu’il n’y a pas de preuve que
l’aide permet de réduire le niveau de corruption dans le pays.

Malheureusement, d’une manière générale, tous ces pays ont connu un double échec tant sur
le plan de la construction nationale que du développement économique.

Les échecs des régimes totalitaires en Afrique

De l’échec de la construction de l’unité nationale

A l’expérience, on a constaté que les régimes totalitaires contiennent en eux-mêmes les


germes de division du pays. En effet, la quasi-totalité des pays de l’ASS a montré que les
dictatures ont été rapidement rongées par le clientélisme, la corruption et les dissensions
internes. Les tenants du pouvoir utilisent les ressources publiques (aide publique au
développement incluse) soit pour la répression (défense, police et/ou transférer une partie à
l’opposition), soit pour financer ses partisans ou corrompre des opposants.

Les théories expliquant les crises sociales par les diversités ethniques, religieuses ou
régionales, sont maintenant contestées. Il n’est pas prouvé que l’homogénéité culturelle,
ethnique ou religieuse est une garantie de la cohésion sociale et de la stabilité politique. La
Somalie est un des rares pays africains marqués par l’homogénéité culturelle, religieuse ou
ethnique. Cependant depuis la chute du régime du dictateur Siad Barre en 1990, le pays est
déchiré par des luttes claniques ayant entraîné la disparition de l’Etat. Le pays vient d’avoir
son premier gouvernement depuis plus de dix ans ! Le Burundi et le Rwanda avec un nombre
d’ethnies limitées parlant la même langue, habitant les mêmes régions du pays sont parmi
ceux qui ont connu les pires crises sociales en Afrique subsaharienne.
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 11

Ensuite, les protagonistes de la thèse favorable aux régimes autocratiques pour la construction
de l’unité nationale ont souvent très vite oublié que les pays ont été libérés dans beaucoup de
cas à la suite de lutte multiéthniques.

Enfin, pour Claude Aké (1990), le pluralisme social africain exige plutôt plus de démocratie
que le contraire car la démocratie exige la négociation, les réconciliations et un consensus. La
démocratie entraîne des négociations continuelles et une recherche perpétuelle d’équilibre
entre les différents groupes ethniques, régionaux, religieux d’intérêt, privé ou public.

S’il n’y a pas d’accord, il y a possibilité de scission. L’option de scission est généralement
très rare car les ethnies qui veulent se séparer sont rares ; avant les mouvements des années
quatre- vingt-dix, seuls les Ibos du Nigéria, à la fin des années soixante et au début des années
soixante- dix, avaient tenté une sécession. Exemple, malgré la guerre civile, l’opposition au
Sud Soudan ne revendique pas la scission mais plutôt la constitution d’un état fédéral qui
devrait tenir compte de la diversité culturelle et religieuse du pays.

Pour Aké (1990), en Afrique, tout implique participation, rien n’est privé : la naissance, le
mariage, et même la mort. Or la démocratie donne plus de chance pour la participation de
toutes les parties à négocier. Ainsi, l’intégration entre les différentes ethnies et composantes
du pays sera le résultat des négociations sur des bases volontaires et acceptées par tous.

De l’échec économique

La thèse selon laquelle il fallait un «Etat volontariste pour provoquer le démarrage et en


particulier la rupture des anciennes oligarchies» et «qu’au moment du décollage, la dictature
est nécessaire et que c’est seulement une fois la vitesse de croisière atteinte que le contrôle
politique du changement social peut se défendre et la démocratie s’introduire avant de
devenir une condition de développement» (Touraine, p. 222), n’a pas donné les résultats
anticipés.

C’est ainsi que selon le Rapport Mondial sur le Développement Humain 2000, le taux de
croissance annuel moyen du PNB par habitant est passé de –0,9% en 1970-1990 à –0,4% en
1990-1998 en Afrique subsaharienne. Par contre il a augmenté de 1,73% en 1970-1990 à
3,3% en 1990-1998 pour l’ensemble des pays en développement. Malgré l’accumulation des
arriérés de paiements des salaires des fonctionnaires, le déficit des finances publiques s’est
creusé, passant de 6,4% du PIB au cours des années soixant-dix à 7,5% au cours des années
quatre-vingts. Le stock de la dette extérieure en pourcentage du PIB est passé de 30,6% en
1980 à 78,4% en 1994.

Ces performances ont eu pour conséquence de faibles indicateurs de développement humain


pour les Africains. L’Indice de Développement Humain était de 0,464 en 1998 en ASS contre
0,642 pour l’ensemble des pays en développement ; l’espérance de vie à la naissance a
augmenté de 9% entre 1970-75 et 1995-2000 (de 45 ans à 48,9 ans) contre une progression
de 17% pour l’ensemble des pays en développement au cours de la même période (44,2 à 51,6
ans.). En 1998, le taux d’alphabétisation des adultes se situait à 58,5 % en ASS contre 72,3%
dans les pays en développement.
12 Tchabouré Aimé GOGUE

La remise en cause de la nécessité d’une certaine dose d’autocratie pour favoriser le


développement des pays africains, a été explicitement exprimée par la Banque Mondiale en
19894 . Pour la Banque Mondiale, la manière de gérer, la non transparence dans la gestion des
ressources publiques et la corruption généralisée seraient, notamment, les principales causes
des mauvaises performances des économies africaines.

En plus de «voter» avec leurs pieds en fuyant leur pays, des populations ont également «voté»
avec leurs pieds en quittant les secteurs formels des économies.

Ce phénomène a eu des effets contradictoires sur l’importance des Etats en Afrique.

D’un côté, compte tenu des difficultés pour son imposition et son contrôle, le secteur informel
réduit les ressources de l’Etat et diminue en conséquence la capacité d’intervention des
détenteurs du pouvoir et de l’administration. Ainsi, le développement du secteur informel
affaiblit donc l’Etat et peut précipiter sa chute. En effet, pour Szelenyi (1992) «la véritable
source du pouvoir compensatoire, sa source ultime, c’est le travail à son compte, la
production à petite échelle.»5

D’un autre côté, le secteur informel se substitue à l’Etat pour offrir des services de base à la
population : c’est le cas par exemple du développement de la médecine traditionnelle qui a
pris de l’ampleur par rapport à la médecine curative moderne compte tenu de l’incapacité du
gouvernement à répondre aux besoins sanitaires de la population. Pour Janet Rae Mondlane
(1992), lorsque le gouvernement est incapable de répondre aux besoins des populations, celles
ci se sont enfermées sur elles-mêmes : ce qui a renforcé l’esprit d’appartenance à un clan, à
une ethnie ; il y a donc un rejet de l’identité nationale. L’ethnicité gagne du terrain car les
groupes ethniques semblent répondre aux préoccupations des populations à la place du
gouvernement inefficace.

En prenant ainsi à son compte la satisfaction de besoins qui devraient s’adresser à l’Etat, le
secteur informel peut permettre à ce dernier d’éviter une crise de légitimité politique6 .

Ce double échec sur le plan politique et socio-économique des pays africains qui a mis en
cause la légitimité des Etats africains, a promu la lutte contre les régimes autocratiques et des
aspirations des peuples, à plus de démocratie et à plus de libéralisation de la vie politique et
économique. C’est ainsi que, soutenue parfois par la communauté internationale, la société civile
et les intellectuels vont exprimer de manière le plus souvent violente, surtout depuis le début
des années quatre- vingt-dix, leur opposition aux régimes autocratiques et leurs aspirations
pour une meilleure gouvernance. L’Etat ayant été incapable de répondre aux aspirations des
populations, de fournir les services de base (éducation, santé, sécurité etc.), et de corriger les
inégalités et disparités, etc., perd de sa crédibilité et légitimité auprès de la population.

III – REGIMES POLITIQUES EN AFRIQUE

Les revendications et les acquis politiques des mouvements de contestation

Face à la détérioration inexorable des conditions économiques, politiques et sociales des


populations et aux risques de plus en plus grands de la désintégration de l’Etat, les
mouvements pour une libéralisation de la vie politique économique et sociale se sont
accélérés et sont devenus plus
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 13

contraignants pour les régimes en place.

Les revendications prenaient deux formes :

Il y a d’abord la forme corporatiste de revendication qui demande le maintien et/ou le


réaménagement des réseaux clientélistes et de la redistribution des ressources. Ici, on peut
retenir deux types de contestations. Les nouvelles élites (économiques ou/et intellectuelles)
frustrées dans leur accès au pouvoir, remettent en cause le régime, réclament les changements
le multipartisme. Dans ce groupe on peut distinguer d’une part, ceux qui appartiennent à la
classe dirigeante actuelle : il s’agit des cadres de l’administration notamment et, d’autre part,
ceux qui attendent accéder à la classe dirigeante dans le futur : ce sont les jeunes et les
étudiants notamment7 . Le deuxième type de cette forme de contestation ne met pas en cause
directement les fondements du régime ; les contestataires ici ne veulent pas accepter les
mesures imposées par les PAS (salariés, du secteur public, entreprises à privatisées : ce sont
les «conjoncturés».) Dans cette première forme de contestation, les revendications sont
d’abord plutôt matérielles ; les inégalités, la corruption, le népotisme et les violations des
droits de l’homme, etc. sont dénoncés par la suite. Présentant des revendications négociables,
ce premier groupe représente moins de danger pour le pouvoir en place.

La deuxième forme de revendication vient des marginalisés, des exclus (groupes ethniques,
régionaux ou religieux, les marginaux, les déscolarisés, etc.) qui n’ont rien à perdre ; ils sont
prêts à tout casser8 .

En plus de ces deux groupes, il y a lieu de mentionner les actions des églises qui ont plutôt
mis l’accent sur les inégalités et les violations des droits de l’homme notamment.

Sur le plan chronologique, d’une manière générale, ce sera le premier groupe de contestataires
qui initiera les mouvements. Dans une deuxième phase, l’intervention des marginaux et des
exclus aura tendance à radicaliser les revendications et à ébranler sérieusement les régimes.

Quel bilan faire après près de dix ans de mouvements pour la démocratisation de la vie
politique en Afrique ?

La libéralisation de la vie politique en Afrique

Partout en Afrique, il y a une reconnaissance formelle au moins des principes de base de la


démocratie. Les libertés de presse et d’expression ont fait des progrès dans la majorité des
pays. Dans la quasi-totalité des cas, il y a eu reformulation de la constitution avec suppression
du système de parti unique et l’instauration du multipartisme. Ceci déboucha à une floraison de
partis politiques : 230 au Zaïre, 42 au Cameroun, 34 au Bénin, etc. Des élections multipartites
furent organisées.

Entre 1990 et 1994, 38 pays africains ont organisé des élections compétitives contre
seulement 9, cinq années auparavant. Dans 35 de ces cas, l’opposition a gagné des sièges et la
part de l’opposition à l’Assemblée Nationale, a triplé entre 1989 et 1994. Dans 29 de ces 38
cas, les élections peuvent être qualifiées de justes9 . Ces gains par l’opposition ont été réalisés
malgré les manipulations des consultations par le pouvoir en place. C’est ainsi que dans les
premières vagues de consultations,
14 Tchabouré Aimé GOGUE

l’alternance au pouvoir ne s’était réalisée qu’en Zambie (1990) et au Bénin (1993.) Depuis
1999, il y a eu alternance politique pacifique au Sénégal. C’est le cas également de la Côte
d’Ivoire où les élections ont cependant été suivies par une violence extrême. Il y a également
lieu de mentionner les gains importants de sièges réalisés par l’opposition au Zimbabwe
malgré la violence faite à l’encontre de ses partisans.

Les régimes politiques en Afrique

Si des élections multipartites ont été accomplies dans des pays, il faut tout de même noter
que l’évolution du niveau de démocratisation a varié d’un pays à l’autre. Dans certains
pays, des manipulations électorales qui se sont manifestées le plus souvent lors des
consultations électorales notamment au cours de l’établissement des listes électorales, de
l’accomplissement de l’acte de vote, du décomptage et des proclamations des résultats
électoraux, ont empêché à l’opposition d’être mieux représentée (voire d’accéder au
pouvoir) dans les structures du pouvoir. Dans beaucoup d’autres, des efforts restent encore à
faire pour ce qui concerne le respect des droits de l’homme.

La classification selon le type de régime politique n’est pas nécessairement apte à rendre
compte véritablement des diversités des expériences du processus démocratique en Afrique.
Les constitutions de la quasi-totalité des pays africains, prévoient des régimes parlementaires.
Cependant, dans la majorité d’entre elle, nous sommes en présence d’un régime
présidentialiste ; ici tout se ramène non pas uniquement au pouvoir exécutif mais à la
personne du président de la république. A quelques nuances près, c’est le cas du Burkina
Faso, du Togo, du Libéria, du Kenya, du Zimbabwe, du Gabon, de l’Egypte, de la Namibie,
du Mozambique, de l’Ouganda, de la Tunisie, du Bénin, de la Gambie, de la Mauritanie, de
l’Ethiopie, de la RCA, du Tchad, du Cameroun, du Rwanda, etc.

Comme on le voit, cette classification ne rend pas bien compte de la diversité des progrès
réalisés dans le processus de démocratisation dans les différents pays ! Il en est de même de la
distinction entre pays autocratiques et pays démocratiques.

C’est pour cette raison que la classification selon un indicateur de démocratisation serait plus
adaptée dans une étude sur la gouvernance.

L’indicateur utilisé ici s’inspire de l’indice de Démocratie Politique (POLDEM) proposé par
Bollen (1980.) Il part du principe que la démocratie suppose l’existence de :
- la souveraineté de la population (X1) ;
- libertés individuelles, de la presse et respect des droits de l’homme et du citoyen (X2) ;
- la séparation de pouvoir entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire (X3) ; et
- libertés politiques (X4).

(X1) sera mesuré par le pourcentage d’élus par rapport aux gens désignés par l’exécutif dans
l’assemblée et la deuxième chambre s’il y en a et des responsables des collectivités locales
(préfets, maires, etc.) ; la transparence des élections (indépendance de l’institution
responsable de l’organisation des élections, et le respect des résultats des urnes) de l’exécutif
et des membres du pouvoir législatif ;
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 15

(X2) sera reflété par la liberté de presse, les tracasseries que supportent les organes de presses,
l’accès de la presse par les partis d’opposition et la facilité de distribution et d’accès de la
presse d’opposition et privée par la population (distribution géographique.) Le respect des
droits de l’homme sera mesuré par les violations des droits de l’homme enregistré par Amnesty
International ;

(X3) sera mesuré par :


- la nature de l’Assemblée Nationale (pourcentage d’élus du parti au pouvoir par rapport à
ceux de l’opposition), nature de l’assemblée nationale (caisse enregistreuse ou contrôle des
actions gouvernementales) : délai entre date d’obtention du projet de loi des finances et celle de
l’adoption de cette loi par exemple ;
- la nature du pouvoir judiciaire (son indépendance par rapport à l’exécutif) : rejet pour
inconstitutionnalité des lois par exemple ; application du principe de l’inamovibilité des
magistrats.

(X4) sera mesuré par les libertés des activités des partis politiques d’opposition, de la société
civile et support (ou entraves) reçu par cette société civile pour ses activités, niveau de
développement de la société civile.

Chacun des (Xi) se verra attribuer 25 points ce qui fera un total de 100.

- Les pays qui auront obtenu entre 0 et 20 points seront qualifiés de dictature ou de
blocage du processus démocratique. C’est le Groupe A ;
- ceux dont le score se situera entre 21 et 40 points seront qualifiés de démocrature
démocratisante : ce sont des pays qui malgré un langage démocratique, traînent des
pratiques dictatoriales. C’est le Groupe B ;
- entre 41 et 60 points seront situés les pays qui seront qualifiés de démocratie molle : ce
sont des pays qui sont dans une situation fragile qui pourront basculer rapidement dans la
catégorie des démocratures démocratisantes. Ici l’exécutif est fort. C’est le Groupe C ;
- de 61 à 81 points, on parlera de pays en voie de démocratisation. Ici la volonté
d’appliquer les principes de la démocratie est réelle ; les ratés s’expliqueraient
probablement par la jeunesse du processus démocratique. C’est le Groupe D ;
- enfin les pays qui réaliseront des scores entre 81 et 100 points seront ceux qui sont
véritablement de véritables démocraties. C’est le Groupe E.

Une classification significative exige une recherche approfondie pour la mesure des différents
indicateurs. Ainsi, la répartition suivante dans les différents groupes est à titre indicatif.

A priori, tous les pays en guerre seront classés dans la catégorie A. Il s’agit de l’Angola, du
Burundi, la République Démocratique du Congo, du Rwanda, de la Sierra Leone, la Somalie
et du Soudan, notamment. L’Algérie, le Congo et le Liberia se situeraient à la marge.

Dans le Groupe B on retiendrait les pays comme le Cameroun, Erytrée, l’Ethiopie, la Gambie,
le Kenya, la Libye, le Maroc, la Mauritanie, le Gabon, l’Ouganda, la RCA, le Swaziland, le
Tchad, le Togo, la Tunisie, le Zimbabwe. L’omnipotence du chef de l’exécutif dans ces pays
est notoire, où les violations des droits de l’homme sont fréquentes, le parlement demeure le
plus souvent une caisse enregistreuse, l’indépendance du pouvoir judiciaire est un leurre alors
que les journalistes sont souvent soumis à des exactions fréquentes. Au Togo, à la suite du
boycott des élections
16 Tchabouré Aimé GOGUE

législatives par les partis d’opposition, l’Assemblée Nationale est monocolore10 . Le


gouvernement pose souvent des entraves aux activités de partis politiques d’opposition.
L’exemple le plus récent a été la dissolution du parti politique d’opposition le plus important en
Mauritanie. Les pays comme la Tunisie et le Maroc se situeraient à la marge plus proche des
pays de la catégorie C. La transition démocratique qui a marqué les deux premières années de
l’avènement du Président Ben Ali au pouvoir (1987 et 1988) (1987 et 1988) (1987 et 1988),
est bloqué depuis avec de graves violations des droits de l’homme et notamment des entraves
sérieuses à la liberté de presse. Au Maroc, le règne du Roi Hassan II a été marqué par de
graves violations des droits de l’homme et de difficultés pour la presse. La vie politique n’était
pas également libéralisée. Le Roi a cependant accepté un assouplissement dans la manière de
régner et une alternance au pouvoir. Le retour dans le Royaume d’exilés politiques suggère une
amélioration de la libéralisation de la vie politique au Maroc avec l’avènement du Roi
Mohamed VI. Mais les espoirs placés dans le nouveau Roi Mohamed VI pour une
accélération du processus démocratique ont été quelque peu déçus par des entraves
renouvelées à la liberté de presse.

Le Groupe C serait constitué notamment des pays comme la Côte d’Ivoire, le Niger, le
Burkina Faso, l’Egypte, la Tanzanie, le Malawi, la Zambie, la Namibie. Si l’alternance au
pouvoir est un fait en Côte d’Ivoire, le principe de l’ivoirité risque de faire basculer le pays
dans des troubles sociaux voire probablement une guerre civile. La crise socio-politique née
de l’assassinat du journaliste Norbert Zongo en 1998 suggère une démocratie encore fragile
au pays des hommes intègres, le Burkina Faso. En Egypte, le Parti National Démocratique
(PND) parti au pouvoir, qui avait obtenu 97% des sièges aux législatives de 1997, n’aura 85%
des sièges à l’issue des dernières consultations électorales d’octobre/novembre 2000, que
grâce à une coalition avec les indépendantistes. Les irrégularités des élections générales
d’octobre 2000 sur l’Ile de Zanzibar est un indicateur des efforts qui restent à faire pour la
consolidation de la démocratie en Tanzanie. Le retour des civils au pouvoir au Niger est
relativement récent pour que l’on puisse se prononcer de manière définitive sur l’état de la
démocratie dans ce pays. Cependant, la libération des journalistes, poursuivis pour
diffamation contre le Premier Ministre, suggérerait une relative indépendance du pouvoir
judiciaire ; par contre l’arrestation des journalistes pour diffusion de fausses nouvelles est un
dérapage rare dans de systèmes démocratiques réels.

Le Groupe D comprendrait des pays comme le Mali, le Bénin, le Nigéria, le Ghana, l’Afrique
du Sud, le Cap Vert. Dans ces pays, les élections sont relativement ouvertes à la compétition
et transparentes et le pouvoir judiciaire semble relativement indépendant du pouvoir exécutif.
Au Mali, la Cour Constitutionnelle a rejeté la réforme du code électoral proposée par le
Gouvernement alors qu’au Bénin elle prend souvent le Gouvernement à contre pied.
L’Assemblée Nationale est caractérisée par la représentation de plusieurs partis politiques.
C’est le cas du Bénin, où l’Assemblée de 83 membres compte des députés de 16 partis
politiques différents. La Renaissance du Bénin, avec ces 23 élus est le parti avec le plus grand
nombre de députés ! Le parti au pouvoir dans beaucoup de cas est obligé d’avoir recours à des
coalitions à l’Assemblée Nationale pour y avoir la majorité.

Dans le Groupe E, on retiendrait l’Ile Maurice, le Botswana, le Sénégal. Dans ces pays, les
violations des droits de l’homme sont plutôt rares. La consolidation de la démocratie au
Sénégal et en Ile Maurice s’est manifestée en 2000 avec l’alternance pacifique au pouvoir. Au
Botswana, les élections ont lieu tous les cinq ans sur une base multipartite depuis
l’indépendance en 1966 et
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 17

de manière pacifique. La liberté de la presse semble réelle. Les libertés civiles dans ce pays
sont énoncées dans la constitution et un organe judiciaire indépendant interprète et gère les
lois. Les juges sont nommés par le Président sur recommandation d’une commission judiciaire
indépendante.

Régimes politiques et performances économiques : la nécessité de la bonne


gouvernance

Malgré le recours à la répression des régimes des pays des groupes A et B et probablement
certains de la catégorie C, et leur résistance à une plus grande ouverture démocratique
véritable, la lutte des populations, appuyées dans beaucoup de cas par les forces externes pour
les obliger à plus de démocratie, s’intensifie. Même si cette recherche à une plus grande
libéralisation de la vie politique peut être motivée par d’autres raisons autres
qu’économiques, il est cependant important de noter que la réussite du processus de
démocratisation et la consolidation de la démocratie exigent des progrès sur le plan
économique pour pouvoir garantir l’amélioration des conditions de vie des populations et
s’assurer de la stabilité de leur adhésion au processus de démocratisation.

Le processus de démocratisation a commencé en Afrique alors que les pays africains


traversaient une crise économique profonde et un environnement économique instable. La
stabilité et la qualité des politiques économiques et le comportement des gouvernants
dépendront de l’horizon temporel qu’ils ont de leur pouvoir. Lorsque les pouvoirs sont forts
avec une faible menace de renversement, ils pourront avoir des horizons temporels longs. Ils
sont en mesure de mette en œuvre des politiques pro développement. Par contre, dans les
régimes (autocratiques faibles) où la succession n’est pas assurée, il y a incertitude quant à
l’avenir du pays. En effet, si le responsable de l’exécutif pense que son règne ne durera pas et
que sa succession n’est pas assurée, son horizon temporel est raccourci, son taux d’escompte
sera très élevé. Il sera en conséquence inciter à favoriser des actions pour de courte période et
sera moins préoccupé par la bonne gestion de l’économie que par sa propre survie ce qui
constitue un handicap pour des investissements et le développement à long terme. Il prendra
alors des mesures populistes afin de reconstituer des alliances pour son maintien au pouvoir.
Lorsqu’ils deviennent faibles et ont un avenir incertain, ces régimes deviennent simplement plus
démagogiques pour pouvoir se maintenir au pouvoir puisqu’ils n’envisagent aucune autre
alternative. Ils sont alors prêts à toutes concessions pour consolider leur base clientéliste et
pouvoir ainsi se maintenir au pouvoir. C’est le cas du régime de Eyadema par exemple, qui
pour se maintenir au pouvoir en 1991 a fait des concessions démagogiques aux syndicats.
Lorsque cette stratégie ne donne pas les résultats escomptés, les dictateurs affaiblis auront
tendance à piller leur pays avant de partir. Toutes choses égales par ailleurs, les dictateurs
renversés laisseront à leur successeur des pays ruinés.

En outre, dans la mesure où la crise que les pays africains ont connue au cours des années
quatre- vingts, n’est pas nécessairement conjoncturelle mais structurelle, elle exige des
mesures de transformation de l’économie pour pouvoir rendre cette dernière plus efficiente
et capable de générer la croissance et ce afin de favoriser un développement économique
durable. La stabilisation du cadre macroéconomique et de l’environnement politique et
l’amélioration du cadre réglementaire, institutionnel et incitatif, sont nécessaires et exigent la
poursuite des réformes économiques. Mais en même temps qu’ils sont confrontés à ces
problèmes économiques, les gouvernements issus de la lutte pour plus de démocratie, doivent
s’assurer de leur survie et doivent garantir la survie et la
18 Tchabouré Aimé GOGUE

consolidation de cette démocratie encore fragile. Or, pour Bienen et al (1989), la probabilité
de survie d’un régime est faible au début de l’accession de ce régime au pouvoir. En effet, la
mise en œuvre des réformes conduisant nécessairement à court terme à une chute du niveau de
consommation privée et réduit le soutien potentiel au nouveau régime. Pour conforter sa base,
il faudra donc au nouveau régime convaincre la majorité de la population que ces réformes
conduiraient plus tard à une croissance économique avec une distribution plus équitable des
revenus.

La question est de savoir si les régimes autoritaires ou démocratiques sont les mieux adaptés à
mettre en œuvre des politiques économiques appropriées ?

Pour certains, la démocratisation introduira des biais dans les politiques économiques, une
plus grande instabilité politique et des politiques macro-économiques à cause de l’influence plus
grande des pressions des groupes d’intérêt. La satisfaction des demandes de ces différents
groupes de pressions conduira à une augmentation de la taille du secteur public et donc à un
approfondissement du déficit des finances publiques plutôt qu’à un accroissement/amélioration
des capacités productives du pays. En outre compte tenu de la nécessité d’obtenir un
consensus avant les décisions, un régime démocratique ne pourra pas réagir vite aux chocs
externes. C’est ainsi que des études ont montré que parmi les pays qui ont eu les plus forts
taux de croissance économique au cours de la période 1960-1974, il n’y a que trois pays
démocratiques dont un pays en développement, quatre pays autocratiques asiatiques (Hong
Kong, République de Corée, Singapour et Taiwan) et quatre pays socialistes qui étaient loin
d’être qualifiés de démocratiques (Jonathan Isham et al. 1997.)

Une étude sur des projets gouvernementaux financés par la Banque Mondiale, amènent Isham
et al. (1997) à conclure que les projets dans les pays avec de bons records dans le respect
des libertés civiles avaient des taux de rendement économique de 8 à 22% plus élevés que
ceux des pays avec peu de respect des libertés individuelles. L’Ile Maurice et le Botswana,
avec des régimes démocratiques, ont connu des taux de croissance élevés alors que le
Sénégal, également démocratique, n’a pas pu éviter la détérioration des conditions de vie des
populations.

En outre, à partir de l’étude de cas des programmes de stabilisation de pays d’Amérique


Latine, Remmer (1986) a montré que, contrairement aux thèses en vogue en cette période,
les gouvernements autoritaires de cette région du monde, n’ont pas été en mesure ni d’initier,
ni de mettre en œuvre, de manière durable, des programmes de stabilisation. L’étude montre
également que les déséquilibres macroéconomiques ont été plus l’œuvre des gouvernements
autoritaires que des gouvernements démocratiques. La thèse, selon laquelle des régimes
démocratiques ne seraient pas en mesure d’adopter des politiques de stabilisation macro-
économique, ne serait donc pas justifiée.

Pour ce qui concerne les pays autocratiques, l’absence de système formel d’alternance au
pouvoir, entraînerait souvent des changements violents au niveau de l’exécutif ce qui introduit
une forte instabilité dans le fonctionnement de l’économie. Or des pays de l’Asie du Sud ont
connu des taux de croissance élevée et soutenue avec des régimes autoritaires, ce qui n’a
pas été le cas de la quasi-totalité des pays africains.

Il paraît donc difficile a priori d’établir une relation entre type de régime et performances
économiques du pays11 : selon Alesina et Perotti (1994), beaucoup de dictatures, notamment
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 19
en
20 Tchabouré Aimé GOGUE

Asie du Sud Est, ont connu des taux de croissance élevés, d’autres (Afrique et Amérique
Latine) ont eu des performances économiques plutôt faibles ; par contre les pays
démocratiques ont généralement eu des performances économiques meilleures que les pires
dictatures ; cependant, les performances des pays démocratiques sont moins bonnes que les
dictatures les plus performantes.

Plus que la nature du régime, ce serait plutôt la pratique de gouvernance du pays qui ferait la
différence.

En définissant la gouvernance comme étant «l’exercice du pouvoir politique dans la gestion


des affaires d’une nation», la Banque Mondiale (1989), pense que les pays africains ne
pourront retrouver la voie d’une croissance durable sans que les dirigeants politiques ne
renoncent à leurs manières de gérer les ressources publiques. On comprend dès lors pourquoi
les bailleurs de fonds, les institutions de Bretton Woods et l’Union européenne notamment
font de la bonne gouvernance une des conditionnalités de leur politique d’aide. Préoccupé
par la détérioration continue des conditions de vie des populations africaines, le Groupe de la
Banque africaine de développement notamment, accorde une importance grandissante aux
problèmes de gouvernance en Afrique.

Pour Assogba (1996), la gouvernance revêt trois principes fondamentaux dont : i) le principe
de la démocratisation formelle et ii) le principe de la bonne et saine gestion des affaires
publiques.

En ce qui concerne la démocratie, elle appelle aux respects de principes tels que :
- l’organisation d’élections compétitives, libres et transparentes ;
- le respect des droits civils, politiques et sociaux (droit de vote, et de compétition,
liberté d’expression et de la presse, droit de réunion e d’association à des fins politiques,
etc.)

Pour la Banque mondiale, le principe de bonne et saine gestion des affaires publiques, revêt
trois dimensions : i) la nature du régime politique, ii) les pratiques de l’autorité dans la
gestion des ressources économiques, financières et sociales du pays et iii) l’aptitude de l’Etat
ainsi que de ses appareils à définir, à mettre en œuvre non seulement des politiques mais
également à bien assumer leurs fonctions.

La nature des régimes politiques en Afrique a déjà fait l’objet de la section III, il reste à
examiner les deux autres dimensions de la bonne gouvernance. Ces deux dimensions seront
étroitement liées aux capacités de gestion à la disposition de l’Etat et des autres acteurs de la
gouvernance en présence.

IV – LES CAPACITES DE GESTION EN AFRIQUE

La crédibilité des gouvernements africains

On peut d’abord se demander avec Tanzi (1994), pour quelles raisons des Gouvernements
qui ont été responsables des problèmes macroéconomiques passés des pays seraient-ils bien
placés pour résoudre ces problèmes ; ou pour quelles raisons les nouveaux gouvernements
sont-ils mieux aptes à faire face aux problèmes socioéconomiques du pays? Deux points de
vue s’affrontent : d’une part la thèse optimiste et, d’autre part la thèse pessimiste.
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 21

Selon la thèse optimiste, les responsables des politiques économiques apprennent vite de leurs
erreurs ou des erreurs des gouvernements passés et sont suffisamment flexibles pour changer
leurs idées et leurs politiques.

Pour ceux qui croient à la thèse pessimiste, les gouvernements n’apprennent pas vite de leurs
erreurs et des erreurs des autres et ne sont pas flexibles. S’il y a asymétrie d’information entre
lui et le reste de la société, le gouvernement peut prétendre que les politiques passées étaient
correctes mais que les crises économiques et sociales sont les conséquences des chocs
externes et aussi de l’environnement (sécheresse, troubles sociaux, etc.) Le gouvernement a
un avantage comparatif par rapport aux partis d’opposition car dispose de sources
d’informations statistiques et autres, ainsi qu’une expertise pour les interpréter 12 . Ainsi,
alors qu’il a accédé au pouvoir en 1967, Eyadema, continuait à justifier ces échecs
économiques, en 1990, par les trois années de pouvoir (1960-1963) du premier président du
pays (Olympio), et en 2000, par la grève générale menée par l’opposition en 1992/1993. Ce
comportement peut également caractériser les Gouvernements qui ont accédé au pouvoir à la
suite des luttes pour une plus grande libéralisation de la vie politique et économique. En effet,
en expliquant les échecs passés uniquement par le clientélisme et la corruption notamment,
et en ne s’interrogeant pas sur la cohérence et la qualité des politiques suivies et mises en
œuvre par les autorités antérieures, il n’est pas certain que ces Gouvernements seraient en
mesure de percevoir les erreurs dans les politiques économiques.

En supposant la validité de la thèse optimiste, surtout dans le cas de nouveau gouvernement


qui bénéficie généralement d’un état de grâce, la crédibilité des réformes et leur cohérence
avec un développement durable seront déterminantes pour la pérennité de la démocratie. Les
gouvernements ne peuvent acquérir une certaine crédibilité que s’ils sont en mesure
d’expliquer clairement :
- les raisons de ces changements ;
- s’ils sont perçus comme sincères ;
- s’ils sont perçus comme compétents et capables de formuler et de mette en œuvre les
bonnes politiques.

Le problème de crédibilité peut toujours demeurer même si les explications sont données. En
effet, comment croire un gouvernement qui n’a pas été sincère dans le passé sur l’évolution
économique ? En ce qui concerne un gouvernement qui vient d’accéder pour la première fois
au pouvoir, sa compétence sera mise en cause s’il prend du temps avant de réagir à la crise
qui prévaut : et ce même si l’on sait qu’il a besoin de ce temps pour acquérir une certaine
expérience et connaître mieux les dossiers. Le problème est aggravé par la pratique de la
rétention des informations et/ou l’optimisme qui caractérise souvent les prévisions
économiques effectuées par les agences gouvernementales ; les responsables politiques
peuvent alors minimiser l’ampleur de la crise socio-économique du pays. En outre, l’euphorie
qui marque la prise de pouvoir, fait que l’on surestime les capacités techniques de ses
militants. Des gouvernements n’arrivent pas à appliquer des politiques d’une manière
soutenable car ils arrivent au pouvoir avec peu d’expérience et des engagements irréalistes ;
ceci entraîne soit de mauvaises politiques ou des délais avant de prendre des actions. Or,
d’une manière générale, l’état de grâce d’un gouvernement diminue avec le temps. Si la
population doute de la capacité et de la volonté du gouvernement d’entreprendre des
réformes, ce dernier peut changer cette perception en prenant rapidement des actions que
seul un gouvernement souhaitant faire des réformes prendrait. Une bonne réputation ne fait
pas la crédibilité.
22 Tchabouré Aimé GOGUE

Capacités institutionnelles et humaines

Supposons soit que le problème de crédibilité est réglé ou que le Gouvernement bénéficie
d’un état de grâce prolongé. Une question qui se pose est de savoir s’il dispose de capacités
institutionnelles et humaines en mesure de concevoir, formuler et mettre en œuvre de
bonnes politiques ?

En effet, en plus d’une bonne appréciation de la situation et des prévisions non biaisées, la
conception, la formulation et la mise en œuvre de bonnes politiques exigent des ressources
humaines compétentes, honnêtes et prêtes à accepter les erreurs et à appliquer les politiques
nécessaires. Elles exigent également des méthodes, procédures et instruments de travail
adéquats. Elles nécessitent enfin des hommes politiques prêts à accepter les erreurs et à
expliquer clairement ce qui n’a pas marché et dire les efforts à faire et la répartition des
bénéfices et surtout des coûts de ces politiques.

Quelles sont les capacités d’analyse économique notamment des pays africains ?

L’administration publique est le bras opérationnel du pouvoir exécutif. Elle a pour


responsabilité de permettre à l’Etat de remplir la mission que lui a confiée la société. Après
l’accession à l’indépendance, les pays africains ont voulu faire de l’Etat (administration :
services publics et secteur public) le moteur du développement économique et social. Cette
orientation, basée sur les thèses développementalistes de l’époque qui conféraient à l’Etat un
rôle moteur dans l’activité économique, a conduit à une expansion de la taille de la fonction
publique ; l’administration s’est vue confiée un rôle polyvalent. Cependant, les échecs
économiques et la tendance à la généralisation de l’économie de marché dans le monde, ont
conduit au retrait progressif des gouvernements des activités commerciales et de production.

La capacité de l’Etat à accomplir de manière efficace ses différents rôles exigent l’existence
de capacités institutionnelles et humaines de l’administration performantes.

A l’indépendance, l’administration publique des pays africains ne disposait pas d’un nombre
suffisant de cadres qualifiés. Même si cette insuffisance fut supplée par un personnel expatrié
de la fonction publique coloniale, les leaders des pays nouvellement indépendants, optèrent pour
une africanisation rapide des systèmes administratifs. Cette politique s’est traduite par le
recrutement quasi automatique de tous les diplômés des institutions de formation universitaire
notamment. Par contre, au Botswana et à un degré moindre en Côte d’Ivoire, le
Gouvernement a décidé de retarder la nationalisation des postes et de garder le personnel
expatrié. Les Commissions chargées d’examiner la nationalisation des postes analysa tous les
postes occupés par les expatriés avant de se prononcer sur l’opportunité de la nationalisation.
Lorsqu’un national promu à un poste où son expertise n’était pas éprouvée, son département
était autorisé à recruter un conseiller expatrié qui devait former le national, son homologue.
Ainsi, même si l’importance relative des postes occupés par les expatriés a baissé de plus de
50% entre 1977 et 1987, leur nombre absolu est demeuré stable au cours de la période.

Si au cours des années soixante et soixante-dix, les performances des pays ont été
relativement bonnes, les chocs externes à partir du premier choc pétrolier de la seconde
moitié des années soixante-dix a montré la fragilité des institutions étatiques.
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 23

Tableau n°1 : Fonction publique et personnel expatrié, 1977 et 1987 (y compris les
enseignants et les responsables des conseils locaux)

1977 Sep. 1987

Postes (permanents et carrière permanente) de la fonction publique 11 388 25 967

Postes occupés par les expatriés 1 356 1 303

Pourcentage des postes occupés par les expatriés 11,9% 5%

Ce tableau ne tient pas compte des travailleurs de la catégorie ouvrière qui est entièrement composée de nationaux

Source : Mogolori Modisi, Réforme de la Fonction Publique au Botswana depuis les années 80 : Leçons d’Expériences
in Adamolekun, L. et al (ed.), 1997, Réforme de la Fonction Publique en Afrique Francophone, p. 69.

Suite à ce constat, à partir des années quatre-vingts, des efforts ont été accomplis pour le
renforcement des capacités institutionnelles de l’administration publique des pays africains.
Ainsi, les capacités de l’Etat se sont nettement améliorées : des pays qui fonctionnaient sans
budget de l’Etat, sans connaître le nombre des fonctionnaires, et l’ampleur et la structure de la
dette extérieure, etc. ont maintenant des informations relativement bonnes sur ces agrégats
qu’ils peuvent suivre de manière plus pertinente. Des études sectorielles ont été entreprises et
des pays disposent de modèles sectoriels et/ou macroéconomiques. Les efforts accomplis dans
le domaine de l’éducation et de la formation ont permis aux pays africains de disposer d’un
nombre plus élevé de ressources humaines compétentes.

Dans le cadre des programmes d’ajustement structurel, la quasi-totalité des pays africains a
bénéficié de projet de renforcement de capacité. Dans la très large majorité de ces pays, les
structures en charge des collectes des données ont été renforcées ; les systèmes de formation
pour le personnel de ces services sont disponibles au niveau de différentes régions africaines ; le
matériel informatique est également disponible.

Les cadres de l’administration publique ont bénéficié de programmes de formation qui ont
permis une nette amélioration de leurs compétences. La Banque mondiale avec l’Institut de
développement économique, le Fonds monétaire International avec son Institut, ont largement
contribué à une meilleure maîtrise des techniques monétaires, financières et du commerce
international notamment, des ressources humaines des administrations africaines. Le
Programme de troisième cycle interuniversitaire (PTCI Economie) de la Conférence des
institutions d’enseignement et de recherche économique et de gestion en Afrique (CIEREA) et
à Ouagadougou et Collabrative Master Programme de l’African Economic Research
Consortium (AERC) à Nairobi ont pour objectif la formation de cadres supérieurs économiques
pour les pays de l’Afrique francophone et anglophone respectivement. L’African Capacity
Building Foundation (ACBF) dont le siège est à Harare a été créé en vue du renforcement des
capacités des pays africains. C’est ainsi que dans sa première phase, elle a créé des unités
d’analyse économique dans plusieurs pays africains. Ces unités, ont pour objectif de réaliser
des études économiques et de faire des propositions de politiques économiques à l’intention
des gouvernements.
24 Tchabouré Aimé GOGUE

La quasi-totalité des pays d’Afrique francophone dispose de spécialistes bien compétents en


techniques statistiques formés dans des institutions régionales (Abidjan et Kigali notamment.)
Dans certains cas leur rémunération peut être considérée de compétitive. Les structures en
charge des collectes des données sont renforcées (Services de statistiques agricoles, du
commerce international, et du marché monétaire et financier notamment) et disposent le plus
souvent de matériel informatique.

Malgré ces progrès qui ont été dans bien de cas significatifs, les administrations des pays
africains continuent de souffrir de faiblesses d’image, de capacités institutionnelles et
humaines.

D’abord, pour des raisons multiples, l’administration n’a pas réussi à offrir des services de
qualité au public.

Des personnes interrogées lors d’une enquête effectuée en Zambie, Dia Mamadou (1996), sur la
perception que les populations ont de la fonction publique :
- 55% ont des difficultés à localiser le fonctionnaire ou le service en mesure de répondre à
leurs préoccupations ;
- 63% pensent que les fonctionnaires cultivent l’esprit de secret ;
- 65% des personnes interrogées trouvent que les fonctionnaires ne sont pas réceptifs à
leur demande ;
- 77% trouvent les fonctionnaires injustes ;
- 86% ne sont pas satisfaits des services gouvernementaux.

Les ressources humaines

Les pays sont engagés dans des réformes macroéconomiques et sectorielles (finances
publiques, marché financier, commerce international, agriculture, infrastructures économiques,
secteurs sociaux etc.) Pour ce faire, l’administration a besoin de personnel compétent. Elle doit
entrer en compétition avec le secteur privé. Or, la libéralisation de l’économie a favorisé
l’expansion du secteur privé, ce qui a conduit nécessairement à une hausse des revenus dans
ce secteur privé. Pour répondre à ce que la société attend d’elle, l’administration aurait dû
être en mesure d’offrir des salaires compétitifs. Ceci a loin souvent été le cas : à titre
d’exemple, une enquête effectuée au Ghana en février 1998 révélait que le salaire moyen dans
la fonction publique se situait entre 28% et 40% de celui du secteur privé !

Malheureusement, le poids de la fonction publique sur le budget de l’Etat a contraint la quasi-


totalité des pays à des réformes de la fonction publique qui se sont traduites dans bien des cas
aussi bien par la réduction du nombre de fonctionnaires que de la baisse des salaires.

Le Togo a réduit de 11% l’effectif de la fonction publique entre 1981 et 1988. Les fonctions
publiques de l’Ouganda (1992-1994), du Ghana (1987-1992), du Kenya (1994-1997), de la
Sierra Leone (1992-1997) et du Bénin (1991-1994) ont été réduites 91 339, 73 810, 30 800,
27
452 et 10 061 employés respectivement13 . Entre 1985 et 1989, le nombre de fonctionnaires
pour 1000 habitants a été baissé de 15 à 8 en Guinée Conakry.
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 25

Si ces réformes ont permis dans des cas une réduction des dépenses salariales de l’Eat, elles
ont eu des effets pervers sur les performances de certaines administrations. En effet, dans
certains cas de départ volontaire à la retraite, ce sont généralement les fonctionnaires les plus
compétents, et aptes à s’insérer plus rapidement dans l’activité économique, qui sont les
premiers à quitter la fonction publique. Ces départs entraînent une réduction de la
productivité de la fonction publique.

Pour la maîtrise des déficits des finances publiques, la réduction des effectifs de la fonction
publique a été doublée d’une baisse des salaires. C’est ainsi qu’au Ghana, entre 1975 et 1983,
le salaire réel moyen du secteur public a baissé de plus de 10% par an contre une chute de
4,8% pour le PIB par habitant. En novembre 1993, les salaires dans la fonction publique du
Cameroun ont baissé de 55-60%.

La coopération avec les bailleurs de fonds a également ajouté aux contraintes en ressources
humaines. Les pays, avec des ressources humaines limitées sont obligés de se plier aux
procédures de chacun des bailleurs de fonds. C’est ainsi qu’au début des années quatre-vingt-
dix, le secteur de santé tanzanien bénéficiait de 15 projets financés par différents bailleurs de
fonds. La situation est d’autant plus grave que, soucieux de leur indépendance et de
l’impératif de la visibilité de leurs actions, les bailleurs de fonds se plient très difficilement à
l’exercice de coordination de l’aide.

Pour contourner les insuffisances de l’administration nationale qu’ils jugent incompétentes ou


corrompues, les donateurs doublent celle-ci de structures parallèles d’exécution ou de gestion.
Dans certains cas, les bailleurs de fonds ont recours aux ONG (le plus souvent internationaux)
pour pallier les faiblesses des administrations. Plus flexibles et bénéficiant de concours
financier régulier des bailleurs de fonds, ces structures attirent de cadres plus compétents du
pays à qui ils offrent de meilleurs salaires et conditions de travail ce qui les rendent
nécessairement plus performantes. On s’engage ainsi dans un cercle vicieux avec la
prolifération de ces structures et agences de gestion dont la survie après le retrait des bailleurs
de fonds n’est pas garantie.

En plus du fait que les pays manquent de compétences humaines, l’utilisation de ces
ressources n’est pas nécessairement adéquate. Sous les régimes autocratiques, le clientélisme
a marqué le recrutement et la promotion des fonctionnaires. Cette pratique a été dans
beaucoup de cas, renforcée dans le multipartisme avec des coûts plus importants. Dans un
système de parti unique, même s’il y avait clientélisme, la base de recrutement des
fonctionnaires était la nation. Comme on l’a d’ailleurs vu, c’est lorsque l’Etat n’a plus
suffisamment de moyens et que le gâteau à partager s’amenuise que les fonctionnaires
s’engagent également dans la contestation. La faible implication des élites de l’Etat dans les
mouvements de contestations du début des années quatre-vingt-dix illustre bien ce
phénomène. Dans le système multipartite favorisé par le processus de démocratisation,
suivant le comportement partisan14 , les détenteurs du pouvoir auront tendance à favoriser
leurs militants. Or chaque parti politique dispose en principe d’un nombre relativement limité
de cadres.

Il faut singulariser ici le cas du Botswana, où la fonction publique est à l’abri des ingérences
politiques grâce à la protection que lui assurent la Constitution et la Loi de la Fonction
publique de 1973.
26 Tchabouré Aimé GOGUE

En Afrique, la gestion des effectifs de la fonction publique continue de souffrir de lacunes graves :
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 27

- absence de plan de carrière et de programme de formation et de recyclage ;


- manque de définition de profil ;
- absence de motivation ;
- non responsabilisation des cadres ;
- utilisation partisane et sentimentale du personnel ;
- absence de politique rigoureuse d’évaluation du personnel ;
- complaisance dans la promotion du personnel ;
- la grande mobilité du personnel ;
- absence de politique de sanction efficace ; et
- etc.

Le manque de qualification est accentué par le manque de conscience que nécessite la rigueur
professionnelle. Le laxisme est encouragé par le manque de contrôle rigoureux associé à des
sanctions effectives.

Capacités institutionnelles

Des études sur les capacités institutionnelles de la Côte d’Ivoire, du Sénégal, du Cameroun et
de la République centrafricaine, dégagent des conclusions qui peuvent être facilement
généralisées dans beaucoup de pays africains francophones notamment.

Les administrations africaines sont marquées par des procédures lourdes et qui ne sont pas le
plus souvent codifiées. Les circuits administratifs sont lents et complexes favorisant les
conflits de compétences entre les institutions. Cette situation est renforcée par l’absence de
coordination des activités des différents départements ministériels, jaloux de leur
indépendance. En plus des remaniements ministériels fréquents, les pays africains demeurent
toujours caractérisés par un changement fréquent de dénomination des ministères entraînant
ainsi des changements fréquents des tutelles des services centraux de l’administration et de
leur organigramme. Les prérogatives et les compétences des structures administratives, elles-
mêmes cloisonnées, sont mal définies et ne sont pas toujours bien respectées. La circulation
des informations entre les différentes structures est nettement insuffisante donnant lieu à des
productions d’informations contradictoires. La cohérence entre les objectifs et les
compétences des différentes structures administratives n’est pas évidente. Le processus de
prise de décision est morcelé avec des interventions de plusieurs départements ministériels et
directions.

Pour être performant, les fonctionnaires ont besoin d’équipement et matériel par exemple. Les
services des douanes ne peuvent être performants sans moyens de déplacement ; les centres de
santé sont inefficaces s’il n’y a que du personnel sans équipement ni médicament. Dans les
pays africains, plus de 80% du budget d’éducation sont consacrés aux salaires ; au Ghana par
exemple, en 1995, 94% des ressources publiques d’éducation étaient destinés à payer les
salaires, 6% étaient donc consacrés à l’achat du matériel didactique et pédagogique, les
équipements et la maintenance. La situation était plus grave en Ethiopie où, en 1991,
98.9% du budget de l’enseignement primaire servaient à payer les salaires ! Cette répartition
ne garantit pas un taux de rendement interne élevé du système éducatif. En 1997, on notait en
Côte d’Ivoire une insuffisance du matériel de bureau, une insuffisance de la standardisation du
matériel informatique et une absence totale de politiques globales d’entretien et d’acquisition
d’équipements.
28 Tchabouré Aimé GOGUE

Instruments de politiques économiques

Les PAS et les politiques de stabilisation financière des institutions de Bretton Woods
notamment ont privilégié les politiques économiques à court terme. Malgré l’appui apporté
par le PNUD dans le cadre du projet Long Term Perspective Studies, Le processus
d’élaboration des politiques économiques et sociales à moyen et long terme demeure faible15 .
Les capacités de formulation et de pilotage des politiques régionales et locales sont
insuffisantes. Dans beaucoup de pays, il n’y a pas de structure de mise en cohérence des
politiques et de modèle de prévision alors que les politiques monétaires (pas de la Zone Franc
notamment) sont surtout orientées vers la reconstitution des avoirs extérieurs.

L’impact négatif de l’absence d’objectifs de développement à long terme sur la qualité des
choix stratégiques se trouve aggravé par l’inexistence d’un document de stratégie régionale ou
sectorielle et nationale qui serait le résultat d’un travail de coordination intersectorielle et
interrégionale.

Rares sont les pays disposant de méthodologie de planification régionale, d’indicateurs


statistiques régionaux, de monographies et de documents de diagnostic/bilan régionaux.
Lorsque les plans régionaux existent, il n’y a pas de méthodologie reliant la planification
régionale à la planification nationale. Les documents de politiques économiques, le plus
souvent préparés avec une forte participation de l’expertise internationale, ne sont pas
suffisamment «internalisés» par les cadres nationaux, ce qui limite en conséquence le suivi
des politiques.

La méthodologie élaborée pour les projections macro-financières semble faible ; les


indicateurs de conjoncture sont partiels et sont publiés irrégulièrement.

L’appréciation des capacités du pays à formuler et à mettre en œuvre des politiques sera
examinée en prenant pour illustration la capacité de gestion économique et financière.

Dans la plupart des pays africains, il existe, au niveau du Ministère de l’économie et des
finances, un problème réel de maîtrise des mécanismes de régulation des crédits en cours et
surtout en fin d’exercice.

Les prévisions budgétaires se font le plus souvent sur la base des données antérieures sans
référence au niveau de l’activité économique et aux objectifs macroéconomiques et parfois sans
tenir compte des effets de nouvelles mesures introduites. Les pays ne disposent donc pas de
budget économique alors que le budget de l’Etat n’intègre ni toutes les dépenses ni toutes les
recettes. En République Centrafricaine par exemple, le Budget d’investissement qui fait
partie du Budget de l’Etat est établi selon des procédures particulières (hors budget), par le
Ministère du Plan. Le fait qu’au début des années quatre-vingt-dix, l’écart moyen entre les
allocations budgétaires et les dépenses des programmes prioritaires en Ouganda, dépasse
90%, variant de 70% pour l’éducation à 590% dans le cas du ministère de la justice, indique la
qualité des prévisions du budget et de son exécution en tant qu’instrument de politique
économique !16

En principe, le contrôle financier devrait se faire à partir de toutes les données concernant les
dépenses dans le cadre de Tableaux de Bord. Dans beaucoup de pays, le manque
d’informatisation des services de contrôle financier, n’autorise pas un contrôle effectif et de
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 29
tirer des situations
30 Tchabouré Aimé GOGUE

fiables. Cette grave lacune d’information, alliée à une situation de manque de confiance en
la signature de l’Etat a favorisé incontestablement un laxisme quasi permanent dans la gestion
des deniers publics ; des décaissements sont faits sans engagement préalable et/ou même sans
crédit inscrit ou disponible.

La gestion des caisses d’avances renouvelables ne respecte pas le principe de l’annualité. On


assiste ainsi à des engagements pluriannuels, ce qui constitue une autre entorse aux règles de
la comptabilité publique. Le suivi de l’exécution du Budget d’investissement financé sur
concours extérieur ne s’effectue ni dans le cadre de la comptabilité publique, ni en toute
transparence, les paiements n’étant connus que dans la mesure où le bailleur de fonds
transmet l’information. Le contrôle a posteriori n’existe que d’une manière partielle.

Des lacunes subsistent également au niveau de la programmation des investissements publics.


Il n’existe pas de mécanisme de coordination intersectorielle permettant d’évaluer les projets
et de prendre les décisions qui s’imposent en cas de problème dans leur exécution. La prise en
compte des charges récurrentes pose des difficultés à deux niveaux. La notion de charges
récurrentes est mal comprise des ministères techniques. Le Ministère des finances ne reçoit
pas régulièrement et en général n’est pas suffisamment impliqué dans le processus
d’élaboration du budget d’investissement pour se convaincre de la nécessité de la prise en
compte de ces dépenses dans le budget de fonctionnement. C’est pour ces raisons que la
maintenance et l’entretien des réalisations de certains projets ne sont pas souvent budgétisés.

Les projets ne découlent pas de politiques et stratégies régionales ou sectorielles qui ne sont
pas mises à jour, voire n’existent tout simplement pas. Dans ces conditions, les travaux de
sélection et d’arbitrage sont réduits à leur plus simple expression. La sélection sur la base de
critères macroéconomiques et des effets induits n’est pas réalisée. Le système de
programmation est davantage fondé sur la recherche de financement, la programmation
financière et le suivi de décaissements de projets que sur la conception, l’évaluation et le
suivi des actions et de politiques compatibles avec une stratégie globale et durable du
développement. Le programme d’investissement est beaucoup plus une agrégation de
projets et/ou d’idées de projets sans liens précis avec les grandes priorités nationales du
développement. L’insuffisance de la coordination avec les bailleurs de fonds et la non maîtrise
de leurs procédures amènent souvent les partenaires au développement à intervenir selon leurs
propres critères et non dans le cadre précis des plans de développement nationaux qui font
d’ailleurs défaut.

Le suivi des projets laisse à désirer tant au niveau des ministères techniques qu’à celui du
Ministère du Plan. Le suivi des projets sur le terrain pose de multiples problèmes dus à
l’insuffisance de moyens au niveau des ministères techniques de tutelle, mais également à la
faiblesse des structures de gestion de nombreux projets qui ne permet pas un suivi rigoureux de
leurs activités, l’information comptable de base n’étant pas souvent saisie. Pour certains
projets, les décaissements ne sont connus qu’à la représentation du bailleur de fonds dans la
capitale du pays. Les fiches de projets ne sont pas souvent mises à jour et les renseignements
qui y figurent ne sont pas toujours complets ni exacts.

Au niveau des données, on note une absence de services spécialisés pour l’harmonisation et
l’interprétation des données. L’allocation discontinue des ressources pour la collecte des
données
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 31

de base, des retards considérables dans la production des informations, l’absence des normes
et de mise en cohérences de publications des données et la pratique courante de la rétention
des informations, constituent un handicap sérieux dans l’exactitude des données pour
l’analyse. Le dernier recensement général de la population du Togo date de 1981, par exemple
!

Le Processus de prise de décision

Les obstacles au niveau de l’exécutif et du législatif

En dehors des moyens matériels et technique et des capacités humaines et institutionnelles, les
pays africains sont confrontés à d’autres types d’obstacles pour la conception et formulation
des politiques optimales.

Supposons que le Ministère des finances dispose de compétences qui arrivent à déterminer la
combinaison optimale de taxes directes et indirectes permettant d’obtenir le déficit budgétaire
compatible avec les objectifs macroéconomiques pour une croissance économique durable. La
première question est de savoir si le Ministre responsable du département comprend la
nécessité d’entreprendre une telle réforme et s’il est convaincu de la pertinence et efficacité de
la réforme proposée. Pour que les réponses à ces interrogations soient affirmatives il faut que
le ministre soit spécialiste ou qu’il ait confiance en ses cadres !

Une fois cette étape franchit, le ministre doit faire passer le projet de réforme en Conseil des
Ministres. Ces collègues ont d’autres préoccupations, des intérêts à défendre, chacun
cherchera à tirer le drap de son côté et à perdre le moins possible à la suite de la réforme.
S’il n’a pas un soutien fort de ses supérieurs la réforme ne passera pas. Le chef du
gouvernement et/ou le Président de la République ont leur mot à dire, eux qui ont des
préoccupations à court terme : le maintien au pouvoir, alors qu’à court terme les effets de la
réforme peuvent être contradictoires.

Une fois passée l’étape du Conseil des Ministres, le projet doit être soumis à l’Assemblée
nationale. Généralement les textes qui seront adoptés seront des compromis, parfois loin des
préoccupations et des propositions premières.

Supposons que la loi est votée avec ses imperfections. Il faut maintenant la mette en œuvre. Il
faut s’assurer que les textes d’applications sont rédigés de façon intelligible pour les agents
subalternes chargés de les exécuter. En outre, il faut être certain que ceux chargés de
l’application ont la volonté de l’appliquer. Dans des pays des groupes A, B et probablement
C, la nomination à des postes de responsabilité dans l’administration dépendant surtout du
bon vouloir de chef de l’exécutif, des dysfonctionnements peuvent apparaître. Dans de tels
régimes, le directeur des impôts par exemple, nommé par décret, et bénéficiant de la
«protection» du Président de la république, peut s’opposer aux ordres du ministre des
finances. En outre, il y a le cas des agents subalternes, des bureaucrates qui par leur
comportement peuvent entraîner le succès ou l’échec des mesures. L’inexistence ou la non-
effectivité des textes réprimant la corruption et les détournements, la tendance à la
disparition du sens du bien public et la mauvaise utilisation des biens publics ainsi que
l’impunité des citoyens coupable de crimes économiques ou autres et l’insuffisance de
transparence dans la gestion de la chose publique et l’attribution des marchés publics ne sont
pas de nature à favoriser l’application rigoureuse de la loi des finances par exemple.
32 Tchabouré Aimé GOGUE

En supposant que les fonctionnaires sont compétents et honnêtes on peut se demander s’ils
sont en mesure de pouvoir pour faire respecter les règles par les imposables qui parfois ont
des accointances politiques très solides ?

Les motivations des actions gouvernementales

Des recherches récentes en sciences politiques et, notamment, en sciences économiques


reconnaissent de plus en plus le rôle des groupes de pression ou d’intérêt dans la gestion des
ressources économiques et sociales des pays.

Selon Alesina (1994), les détenteurs du pouvoir prendraient des mesures qui maximisent la
probabilité qu’ils demeurent au pouvoir (comportement opportuniste) ou pour récompenser
les groupes de pression qui les ont soutenus et ont favorisé leur accès au pouvoir (modèles
partisans), ce qui aussi contribuerait à leur maintien au pouvoir. Dans le cas où ils ne seraient
pas encore au pouvoir, ils feraient des promesses de prendre des mesures pour récompenser
leurs supporters. Même les dictatures fortes, où la répression brutale permet au dictateur de se
maintenir au pouvoir, ont besoin de s’assurer de la fidélité de ceux qui exercent cette
violence17 .

Dans le cas d’un comportement opportuniste (Nordhaus, 1975), on constaterait des relations
significatives entre, d’une part, les cycles des élections et, d’autre part, l’évolution des
variables macroéconomiques. Les électeurs ne se rappellent pas que l’accroissement des
offres des biens publics aujourd’hui s’accompagnera irrémédiablement d’un accroissement
futur des taxes pour le financement des dépenses. En dehors d’une frange de la population qui
vote suivant son idéologie, les électeurs, qui en plus agissent dans un monde d’informations
incomplètes et d’incertitudes, choisiront les candidats en mesure de répondre à leurs besoins.
Aussi, pour survivre, les gouvernements adopteront des comportements opportunistes en
faisant des promesses électorales et en accroissant les dépenses publiques avant les élections.
La stabilisation fiscale et les hausses de taxes n’interviendront qu’après les élections. Block
(1999) a trouvé que durant les années électorales, le déficit gouvernemental, les dépenses
publiques, la consommation publique et le crédit net au gouvernement augmentent. Après les
élections, les valeurs de ces variables baissent sauf le crédit net au gouvernement. Dans le
cas des pays africains, avant élection, le taux de croissance de la masse monétaire (m) est
élevé, le taux d’intérêt (i) faible et le taux d’inflation (p) faible. Après l’élection, m et i
regagnent leur niveau antérieur. Le taux d’inflation et le seigneuriage
augmentent l’année après l’élection. Ces évolutions s’expliquent par le fait que le
gouvernement cherche ainsi à financer ses promesses électorales.

Pour les protagonistes de la thèse d’un comportement partisan des politiciens, les électeurs
n’ont pas les mêmes perceptions des performances des Gouvernements. Pour les électeurs,
ce qui compte, ce sera la capacité des politiciens à répondre à leurs besoins. Dans ces
conditions, des candidats à des postes politiques peuvent être (ré)élus sans être
nécessairement performants. Pour se faire, il leur suffira d’accorder des avantages à leur
base, partisans, sympathisants ou supporters. Dans le cas de comportement partisan, le
gouvernement cherchera beaucoup plus à cibler les bénéficiaires de ses actions. Il adoptera
ainsi des mesures devant favoriser les groupes qui l’ont aidé à accéder ou à se maintenir au
pouvoir. Dans une telle éventualité, les politiques économiques comporteront un biais
partisan. Les électeurs conscients de ce fait, voteront pour ceux qui sont proches d’eux et qui
seront en mesure de leur accorder des faveurs. Les pratiques
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 33

du clientélisme, de tribalisme, de régionalisme et de népotisme dont sont taxés les régimes


africains, seraient une illustration du comportement partisan des gouvernements africains.

Il faut noter que si le vote des électeurs est lié au bénéfice net qu’ils retirent d’une politique
donnée, la base supportant le gouvernement dépendra alors (du sens du biais) des politiques
que ce Gouvernement applique. Si les électeurs réagissent ainsi, le gouvernement peut
maintenir la même base ou changer ses supporters en changeant les groupes ciblés pour les
bénéfices de ses actions18 . Des changements de base électorale suggérant des changements de
politiques, signifient également une instabilité de politique économique. Par contre, les
électeurs qui supportent des coûts, à la suite d’une politique donnée, auront tendance à se
détourner du gouvernement.

Pour toute action gouvernementale, les coûts et bénéfices ne sont pas équitablement répartis
entre les différents électeurs. D’une manière générale, tous les bénéficiaires potentiels des
actions gouvernementales ne sont pas en mesure de s’identifier comme bénéficiaires à forte
raison d’évaluer l’importance de leurs gains. Ce serait (un délai plus ou moins long) seulement
après la mise en œuvre de la politique qu’ils pourront être en mesure de réaliser que les
politiques leur sont favorables. Entre temps, le Gouvernement doit survivre aux pressions des
groupes défavorisés par ces politiques. En effet, les perdants peuvent s’identifier rapidement et
peuvent avoir une idée de l’ampleur de leur perte. C’est ce qui a expliqué le comportement
d’indifférence du monde paysan exportateur de produits agricoles ou d’élevage à la suite des
PAS sensé supprimer la commercialisation de leurs produits19 et de la dévaluation du FCFA en
1994. Par contre les importateurs et citadins, consommateurs de produits importés ont
constitué des groupes de pression pour protester contre ces politiques qui a entraîné notamment
la hausse du prix au consommateur. C’est ainsi que Andrei Sheleifer et al., a montré comment
les politiques des Gouvernements ghanéens depuis l’indépendance notamment, ont été
largement influencées par les intérêts des supporters des gouvernements successifs.

Les groupes de pressions

A quelques exceptions près, sous les régimes autocratiques, les gouvernements africains se
sont appuyés sur les citadins. Avec les mouvements de démocratisation, l’importance relative des
groupes de pression a changé compte tenu notamment de l’apport de ces groupes au
processus de démocratisation20 .

Le rôle des syndicats des employés du secteur moderne dans le processus de démocratisation
a été déterminant dans des pays comme le Bénin, le Congo, le Ghana, le Mali, la Tanzanie ou
la Zambie notamment. Ce comportement s’explique par le fait que la majorité de ces pays
avait un secteur para public relativement important et peu performant et dont les employés ont
été touchés de plein fouet par les PAS.

Compte tenu des perspectives économiques qui n’étaient pas brillantes, de l’importance
grandissante du chômage des jeunes diplômés et enfin du rôle de leader que jouent les étudiants
pour la jeunesse qui représente plus de 50% de la population, les mouvements des étudiants, ont
également constitué un groupe de pression déterminant dans la lutte pour la démocratie dans
plusieurs pays africains.
34 Tchabouré Aimé GOGUE

Rôle des forces sociales dans les déclenchements du processus de démocratisation 21


(Novembre 1989 - novembre 1991)

Etudiants Fonctionnaires Syndicats/associations Eglises/Religion Elite étatique Partis Politiques


professionnelles*

Ghana F Ghana F F Ghana


M F Zambi Zambi Zambie M
F F eF e F Algérie
M F F Algérie F Cameroun
M F M M F Tchad
F F Tanzanie F M F
Zimbabwe M Zimbabwe M
F F

F
Bénin Bénin Bénin M Bénin Bénin
Côte d’Ivoire M M F Côte d’Ivoire
M M Congo F Congo F
Kenya F F M F Kenya
Togo Togo Togo Kenya F Togo
Zaïre M F M M Zaïre
Madagascar F Madagascar Zaïre F
F F
M Gabon M M F Gabon
Mali M Mali M M
Niger M Niger F Niger
F Centrafrique F F F Centrafrique
Sierra Leone F Sierra Leone F M Sierra Leone
Burkina Faso F Burkina Faso M Burkina Faso
F
F F

Le nom du pays indique un rôle majeur sous la rubrique où il est situé ; M = modéré ; F = faible
• En ce qui concerne les associations professionnelles, il faut retour le rôle prépondérant joué par les avocats soit
individuellement soit par l’intermédiaire du barreau.
• Il y a lieu de noter que dans des pays où le régionalisme ou le tribalisme est un critère de gouvernement, des groupes
de pression ont été constitués des bases régionales ou ethniques.
Source : d’Almeida, modifié, p. 273.

Dans des pays qui ont acquis leur indépendance à la suite de guerres de libération, il faudra
ajouter les combattants pour la libération dans les pays qui ont fait des guerres
d’indépendance : le FLN en Algérie ; les anciens combattants du Zimbabwe ; les partis
politiques au pouvoir au Mozambique et en Namibie, notamment, sont dominés ou influencés
par les anciens combattants des armées de libérations.

Même si les luttes pour l’indépendance ont été menées d’une manière générale par l’ensemble
de la population, dans beaucoup de pays, comme au Burundi, en Centrafrique, au Congo, en
Guinée Conakry, au Kenya, au Rwanda, en Sierra Leone et au Togo, par exemple, les leaders
se sont de plus en plus appuyés sur leur groupe ethnique ou sur leur région d’origine (clivage
Nord-sud ou Est-ouest en est la conséquence.) La base ethnique des partis politiques créés après
la libéralisation de la vie politique dans presque tous les pays illustre également l’importance
que prend le critère ethnique ou régionaliste dans la vie politique des pays africains.

En outre, si les militaires ont «regagné» les casernes, le simple fait qu’ils sont en mesure de
balayer les gouvernements civils et de revenir au pouvoir par coup d’état (exemple du Niger,
de la Côte d’Ivoire) leur confère un poids «potentiel» très important dans la vie politique des
pays africains. Dans des pays comme le Togo, l’Algérie ou le Congo le retour des militaires
dans les casernes demeure beaucoup plus une vue de l’esprit qu’une réalité.
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 35

Même s’ils ont perdu le pouvoir, les tenants des régimes autocratiques passés ont un pouvoir
de nuisance non négligeable (cf. cas du Togo sous la transition) grâce aux ressources
financières qu’ils ont pu acquérir au cours de l’exercice sans partage du pouvoir et des
rapports qu’ils peuvent entretenir au sein des forces armées.

Enfin, lorsque le pouvoir du Gouvernement a des bases ethniques, régionales ou militaires sa


marge de manœuvre est faible dans la mesure où il lui est difficile de leur trouver de parfaits
substituts.

Le Gouvernement, quel que soit le Groupe de régime auquel il appartient, doit faire fasse au
jeu des groupes de pressions internes sans oublier les pressions de la «communauté
internationale.» Les aptitudes des gouvernements démocratiques africains à adopter et à
mettre en œuvre des politiques permettant de faire face aux difficultés socio-économiques des
pays, dépendront donc de leur capacité à changer de politiques pour tenir compte des
performances passées et de leur capacité de maintenir ses supporters ou de changer de base
électorale pour pouvoir conserver le pouvoir.

Dans beaucoup de cas, la volonté de satisfaire la demande de groupes de pression se soldera


par des actions dont les conséquences seront beaucoup plus l’accroissement de la taille du
secteur public, l’accroissement des déficits des finances publiques et des politiques
économiques biaisées. C’est ce qui expliquerait la poursuite de l’attribution de marchés
publics sur des bases partisanes et de manière peu transparente et la poursuite et la tendance à
la généralisation de la corruption. Rarement on assistera à un accroissement/amélioration des
capacités productives du pays. C’est pour atténuer ces effets pervers de la démocratie que
d’autres acteurs de la gouvernance permettent d’une part de contrôler les actions
gouvernementales ou de favoriser la participation de la population à la vie du pays et à atténuer
les abus du pouvoir exécutif.

V – LES AUTRES ACTEURS DE LA GOUVERNANCE

Les structures de contrôle des actions gouvernementales

Le pouvoir législatif

Dans un système démocratique véritable, il revient au pouvoir législatif de contrôler le


pouvoir exécutif. Cette mission ne peut être efficacement réalisée que s’il y a une véritable
séparation de pouvoir entre l’exécutif et le législatif. D’une manière générale, le contrôle
des actions gouvernementales par les députés est également limité par la jeune expérience
de la pratique démocratique dans les pays africains et les traditions africaines caractérisées par
un pouvoir exécutif fort. En outre, lorsque le chef de l’exécutif est issu du même parti que
celui de la majorité au parlement, quel que soit le régime du pays, les critiques des actions
gouvernementales par les députés sont mitigées.

Cependant on peut noter quelque différence selon la catégorie de régime d’appartenance du pays.

Dans le cas des pays de la catégorie A (dictature ou pays où il y a blocage du processus


démocratique), l’Assemblée nationale n’existe pas dans bien des cas. Dans le cas où elle
existe, le
36 Tchabouré Aimé GOGUE

régime d’exception dans lequel se trouve le pays (état de guerre civile), la réduit à un rôle de
figurant.

La situation n’est pas tellement différente dans le cas des pays de la catégorie B (les
démocratures démocratisantes) où le parlement tire son existence et sa composition du
Président de la République. Nous sommes ici dans le cas d’assemblée monocolore ou de parti
unique de fait. Le parti du Président de la République a la majorité requise pour faire passer
les textes désirés par le chef de l’exécutif ou pouvoir changer la constitution. L’Assemblée
nationale joue ici le rôle de
«caisse enregistreuse.»

Dans les pays du groupe C (Démocratie molle), l’Assemblée nationale dispose de plus de
marge de manœuvre que dans les pays de la catégorie B. Cependant, l’Assemblée nationale
étant toujours dominée par le parti au pouvoir, le jeu des alliances facilité par le recours à la
corruption des députés pourra permettre à l’exécutif de se soustraire au contrôle du pouvoir
législatif.

Dans les pays en voie de démocratisation (Groupe D), le pouvoir législatif a un contrôle
relatif sur les actions gouvernementales.

Enfin, dans les pays de la catégorie E (pays démocratiques) le législatif a un contrôle


relativement plus important. Au Botswana par exemple, les ministres sont fréquemment
interpellés sur les actions de leur département au parlement où le nombre des députés de
l’opposition a augmenté, passant de 26% en 1989 à 37% en 1994. Le Comité de la
Comptabilité publique du Parlement peut avoir accès aux rapports du Contrôleur général.

En conclusion, dans la majorité des cas des pays africains, le contrôle des actions
gouvernementales par le pouvoir législatif serait plus une vue d’esprit en Afrique qu’une
réalité.

Les autres structures de contrôle

En dehors de l’Assemblée Nationale, l’Administration dispose d’institutions chargées du


suivi, de l’audit, du contrôle, etc. de la gestion des ressources publiques : il s’agit notamment
de la Cour des Comptes, de l’inspection (Générale) d’Etat, de l’Inspection des finances.

Dans certains pays, ces institutions sont fonctionnelles et disposent de larges pouvoirs, sont
indépendants et sont protégés par la constitution. C’est le cas d Kenya, de l’Ouganda et de la
Tanzanie par exemple.

L’indépendance du Bureau du contrôleur et du Vérificateur général du Kenya est à retenir.

Pour luter contre la corruption, le gouvernement ougandais a renforcé le pouvoir de


l’Inspecteur général d’Etat (IGE), nommé par et responsable directement devant le Président
de la République. La mission de l’inspection Générale d’Etat «est de protéger et de promouvoir
les droits de l’homme et l’état de droit en Ouganda, de contribuer à l’élimination de la
corruption et de l’utilisation abusive des ressources publiques». La dépendance de
l’Inspecteur Général d’Etat du Président de la République constitue cependant, un facteur
limitatif de son pouvoir.
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 37

En Tanzanie, des mesures énergiques ont été prises pour lutter contre la corruption et
améliorer l’éthique dans l’administration. En 1971, la Loi pour la Prévention de la Corruption
précise les sanctions encourues par tout fonctionnaire coupable d’un acte de corruption. Une
Commission Permanente d’Enquête a été mise en place depuis 1966 pour protéger le citoyen
des abus et des décisions de l’administration. L’Agence de la Prévention de la Corruption
mise en lace depuis 1975 a pour mission de prendre toute mesure en vue de prévenir la
corruption, mener des enquêtes sur les allégations de corruption, et conseiller le
gouvernement et ses démembrements sur les voies et moyens pour combattre la corruption. Le
Contrôleur et Vérificateur général a pour mission de superviser et de faire rapport sur la gestion
financière et le l’éthique de l’administration. Ces institutions sont protégées par la constitution
du pays.

Il faut cependant noter que dans ces pays, la pratique de la confidentialité des rapports de ces
institutions, limite l’efficacité de leurs actions.

Dans beaucoup d’autres pays, la Cour des Comptes n’est pas opérationnelle. L’Inspection
(générale) d’Etat et l’Inspection des finances sont généralement dotées de ressources
humaines qualifiées. Cependant, elles manquent souvent de matériel et sont dotées de
budget de fonctionnement ne leur permettant pas de réaliser efficacement leurs missions. Si
ces services ont, dans beaucoup de cas, procédé à des audits de bonne qualité, les rapports
de ces missions ne sont pas systématiquement rendus publics, et les conclusions transmises
au Ministre des finances ou au Chef de l’Exécutif, sont souvent utilisées sur des bases
politiques par l’exécutif. En fait, ce sont les rapports concernant le personnel proche de
l’opposition qui sont susceptibles d’être publiés.

Les autres acteurs de la gouvernance

La bonne gouvernance suppose notamment, le respect de l’état de droit, des droits de


l’homme, de la transparence dans la gestion de la chose publique et l’obligation de rendre
compte. La pratique de la bonne gouvernance impose à tous ceux qui sont investis d’un
mandat public l’obligation de rendre compte de l’affectation, de l’utilisation et des ressources
publiques qu’ils ont eues à gérer et de l’exercice de leur mandat. La mauvaise gestion, les
détournements des ressources publiques à des fins personnelles et la corruption avérées
devraient être sanctionnés. Pour que ces conditions soient remplies, il est nécessaire que le
pays dispose :
- d’un système judiciaire efficace et indépendant pour pouvoir sanctionner les
gouvernants notamment et faire respecter l’Etat de droit ;
- d’une société civile mobilisée pour pouvoir dénoncer les abus des gouvernants, traduire
et défendre les aspirations des différentes composantes de la société et favoriser la
cohésion sociale ; et
- un secteur privé efficace pour la création des richesses et des emplois.

Le pouvoir judiciaire, la société civile et le secteur privé constituent les autres acteurs de la
Gouvernance dont le dynamisme et l’efficacité permettront d’améliorer la gestion des
ressources publiques du pays.
38 Tchabouré Aimé GOGUE

Le pouvoir judiciaire

Rôle du système judiciaire

Le système judiciaire est l’ensemble des règles et mécanismes juridiques dont l’objectif est de
dire le droit. La cour constitutionnelle incarne le pouvoir judiciaire car elle veille à la régularité
des consultations électorales, à la légalité et constitutionnalité des actes administratifs, des
lois et règlements, à la séparation du pouvoir entre l’exécutif, le législatif, le judiciaire et juge
de l’excès de pouvoir. La transparence et la régularité dans la gestion de la chose publique (état
et collectivité) sont de la responsabilité de la Chambre des comptes (Cour des comptes dans les
pays francophones ou Bureau du Vérificateur général dans les pays anglophones.) En effet,
c’est elle qui veille à la régularité des opérations financières exécutées par les ordonnateurs et
comptables publics. Le système pénal, sanctionne les infractions à l’ordre public et veille à la
régulation des conflits entre justiciables au respect et à l’exécution des contrats.

En participant à la sauvegarde de la sécurité, de l’ordre public et la protection de la propriété


privée, la justice a un rôle économique important. La sécurité et l’ordre public permettent la
protection et la sauvegarde des biens des personnes. Selon Rihard A. Posner (1998),
l’existence d’un cadre légal favorise le développement. Si ce cadre n’existe pas, la possibilité
de recours à la violence pour le règlement des contrats est fort probable. En plus de ce qui
peut avoir être détruit par la violence, cette méthode d’exécution des contrats accroît le
risque et les incertitudes. En effet dans la mesure où la violence peut conduire à la
destruction et à l’appropriation sans compensation appropriée par les détenteurs de la force
de ce que l’on produira, elle est une forte incitation à ne pas investir et à produire.

Efficacité de l’exécution des contrats et performances économiques

En outre, le respect de la propriété privée est nécessaire pour la promotion pour


l’accumulation du capital dans la mesure où les investisseurs ne craignent pas quant au
devenir de leurs biens. Un système juridique crédible, prévisible et performant, favorise la
signature de contrats à long terme concourant ainsi à la promotion des transactions
économiques et des investissements à long terme. C’est pour cette raison que Maria Dakolias
(1999) trouve que des pays qui entreprennent des réformes économiques timides dans leur
système judiciaire, perdent 5% du taux de croissance alors que l’inefficacité du système
judiciaire du Brésil a fait baisser les investissements de 10% et l’emploi de 9%.

Des travaux sont de plus en plus unanimes établissent que la capacité à faire respecter les
contrats affecte positivement les coûts de transaction des entreprises. Des études sur
l’environnement des affaires au Burundi, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Ghana, au
Kenya, en Zambie et au Zimbabwe notamment, ont montré que le respect des engagements
n’était pas la norme en Afrique. En effet, le risque de longs délais (voire de non-paiement)
pour le paiement des dettes, le non- respect des délais de livraison de la part des fournisseurs
des intrants, le non-respect des spécifications sur lesquelles les contractants se sont engagés,
sont des pratiques courantes dans le monde des affaires en Afrique. Cette attitude influe, à son
tour, sur les performances des entreprises qui ne seront pas alors en mesure de respecter leurs
engagements (livraison des biens selon le calendrier et la qualité, paiement des crédits dans
les délais contractés, etc.) Ces comportements
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 39

ont pour effet d’accroître les coûts de transactions et de rendre les entreprises moins
compétitives. L’existence des lettres de crédits et de crédits documentaires dans le
commerce international réduit cependant ces risques dans le commerce international.

Le non-respect des contrats sont de plusieurs sources. D’abord, le système juridique africain
est marqué par la coexistence de deux systèmes qui se côtoient en s’ignorant : d’une part le
système moderne est calqué sur le système français (dans les anciennes colonies françaises)
ou le common law (dans les anciennes colonies britanniques) et, d’autre part, le système de droit
local ou coutumier est issu des coutumes. Avant la colonisation, c’est le système juridique
coutumier qui était la pratique. La justice était rendue par le chef coutumier (ou conseil de
notables) qui avait le pouvoir de commander et de juger. La puissance coloniale n’a pas réussi
à faire disparaître ce système. Cependant, la justice de droit local est contrôlée par
fonctionnaires de l’Etat assisté d’assesseurs coutumiers. Dans le la justice du droit local,
généralement, une grande partie des contrats ne sont pas écris mais oraux. Cette pratique est
la conséquence de l’oralité de la civilisation, du taux d’analphabétisme élevé mais aussi et
surtout de la culture renforcée par les difficultés d’accès au système juridique moderne. Dans
un tel système, l’exécution des contrats est basée sur la confiance mutuelle entre les
contractants, les mythes, les us et les coutumes. Cependant, l’effritement des traditions et la
coexistence des deux systèmes juridiques permettent à des contractants de trouver des
échappatoires pour le non-respect de leurs engagements. En effet, en principe, l’enfreinte aux
règles traditionnelles fait l’objet de sanctions morales ou psychologiques inorganisées et
souvent diffuses : maladies, troubles mentaux, mort. L’effritement des croyances
traditionnelles et la diminution de la peur des sanctions mystiques, constituent une forte
incitation pour le non-respect des engagements. Ce comportement est d’autant plus réconforté
qu’il y a parfois des contradictions entre les dispositions de deux systèmes juridiques.

Dans le cas de contrats écrits du système juridique moderne, les contractants peuvent avoir
recours à des formes «informelles» de règlements des conflits avant de s’adresser à la justice :
l’arbitrage avec ou sans soutien légal ; la violence, les liens d’amitié qui permettent de gérer
les problèmes. Le recours à ces systèmes «informels» de règlement de conflit, peut se justifier
par :
- le fait que les Etats modernes soient relativement récents ce qui fait que le recours à la
justice moderne n’est pas une tradition bien établie ;
- le coût élevé de la justice ; et
- la perception par le justiciable de la non efficacité de la justice

Les insuffisances du système judiciaire

En Afrique francophone notamment, le système judiciaire se caractérise par :

i) L’insuffisance de ressources humaines en quantité et en qualité, ainsi que de moyens


matériels de fonctionnement

Au Burkina Faso, il y avait en 1995, 157 magistrats ou juges professionnels dont une
vingtaine étaient en détachement ou en disponibilité, une quinzaine affectée à des tâches
administratives et une vingtaine en poste à la Cour Suprême. En 1992, l’effectif du personnel
judiciaire était de 582 magistrats au Cameroun, 345 à Madagascar, 240 au Gabon, 207 en
Côte d’Ivoire, 200 au Mali, 160 au Bénin et 53 au Togo. En 1996, 200 magistrats au Sénégal
(Yonaba, 1997).
40 Tchabouré Aimé GOGUE

Le même constat quant à l’insuffisance du personnel, peut être fait pour les auxiliaires de
justice (greffiers, personnel administratif et de service, garde de sécurité pénitentiaire) et
des collaborateurs privilégiés des magistrats (huissiers de justice, avocats, notaires etc.) Les
greffiers ne reçoivent pas de formation idoine.

Le nombre limité de personnel entraîne une faible couverture géographique du pays. Pour
lutter contre la concentration judiciaire dans les grandes villes des pays, le système judiciaire a
mis en place les audiences foraines (déplacement de l’instance judiciaire compétente sur le
lieu de commission de l’infraction.) Ce système, sensé approché la justice du justiciable, est
handicapé par la pénurie des moyens de déplacement. En outre le système de juge unique,
adopté pour faire face à la pénurie de magistrats, ne garantit pas l’intégrité de la justice
compte tenu des préjugés défavorables que les citoyens ont vis à vis des juges. En effet,
décrivant le système judiciaire du Burkina Faso, Yonaba (1997) pense que «beaucoup de
justiciables sont convaincus que, sur les causes qui sont soumises aux juridictions, celles-ci
tranchent soit selon l’appartenance politique, soit en faveur du riche contre le pauvre, de
l’habitant de la ville contre celui de la campagne, du lettré contre l’analphabète, de l’homme
contre la femme.»

En dehors du déficit en personnel, l’administration judiciaire souffre d’un sous équipement.


C’est ainsi que les fournitures courantes de bureau font défaut. Le matériel informatique est
rare. Les archives sont épisodiquement constituées et conservées. Les locaux sont inadaptés et
vétustes car souvent construits sous l’époque coloniale. Les véhicules de fonction, lorsqu’ils
sont disponibles, sont rarement en état de marche et manquent de carburant. La documentation
juridique est une denrée rare.

La faible décentralisation de l’appareil judiciaire et l’insuffisance notoire de la couverture


judiciaire de l’ensemble du pays a pour conséquence d’éloigner la justice du justiciable.
Cette distance géographique se trouve renforcée par une distance psychologique qui résulte
de l’ignorance en matière juridique et d’analphabétisme élevé de la population. La justice a
alors recours à des interprètes. La fidélité de la traduction n’étant pas assurée, cette pratique a
un impact négatif sur la fiabilité des informations sur lesquelles sont basées les jugements
rendus.

ii) Les règles et procédures, complexes et peu appropriées ;

La procédure mise en œuvre en matière civile et commerciale est très incertaine. Elle résulte
non seulement de textes épars du droit colonial, mais aussi incomplets à tel point qu’il faut
faire appel à d’autres textes non en vigueur mais qu’on recommande d’appliquer «à titre de
raison écrite» ;

iii) l’absence de spécialisation des magistrats ;

Cette situation est le résultat de la formation qui met l’accent sur la justice judiciaire (droit
pénal et droit civil.) Le contenu de la formation est identique pour tous les magistrats qui
peuvent recevoir après cette formation, n’importe quelle affectation. Cependant des voyages
d’études, des séminaires, des journées de réflexions ou d’études, etc. leur donnent parfois
l’occasion, lorsqu’ils peuvent en bénéficier, de compléter et/ou mettre à jour leurs
connaissances Les magistrats siègent indifféremment dans toutes les formations ;
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 41

iv) l’existence dans l’organisation judiciaire d’une juridiction de droit commun, le


Tribunal régional, qui est compétent en toutes matières sauf celles expressément dévolues
à d’autres juridictions ;

Dans les pays d’Afrique francophone notamment, ce Tribunal, qui siège de surcroît à juge
unique (sauf en matière de travail), est aujourd’hui compétent en matière pénale, civile, sociale,
commerciale et administrative tout en étant juge d’appel en matière coutumière ;

v) l’absence de tribunaux de commerce indépendants des Tribunaux de droit commun ;

Les règlements des conflits commerciaux sont concentrés le plus souvent dans la capitale du
pays. La procédure d’injonction de payer se heurte à de nombreuses difficultés d’application
relatives aux traditions, au plafond de la créance, à la notification de l’ordonnance
d’injonction et à la procédure sur contredit.

Le fait, que la cassation en matière de droit des affaires est assurée par la Cour de Justice et
d’Arbitrage de l’OHADA dont le siège est à Abidjan (RCI), pose un problème d’accès à la
Justice pour les PME et MPE.

Pour le justiciable, la justice est lente, chère et éloignée. Les délais (un à deux mois en
moyenne au Burkina Faso par exemple) entre la date du prononcé d’un jugement et celle de la
délivrance dudit jugement aux parties concernées sont longs. Les tribunaux sont débordés
de travail : la cour d’appel de Ouagadougou par exemple a connu en 1994, 2206 dossiers ;
le tribunal de grande instance de Ouagadougou 1303 dossiers ; le tribunal correctionnel 1938
dossiers (Yonaba, 1997.)

vi) coût élevé d’accès à la justice

Le coût de la justice comprend les frais liés au fonctionnement de l’appareil judiciaire (fixes
et frais proportionnels) et rémunération des honoraires des auxiliaires de justices (avocat,
huissiers, notaires, experts, etc.) ; au Burkina Faso, il n’y a pas d’indication pour cette seconde
catégorie de frais, ce qui peut être source d’abus.

Le respect des contrats exige en outre l’indépendance de la justice et la crédibilité du personnel.

Indépendance de la justice

Plus que la réalité, c’est la perception que la population se fait du système et du corps
judiciaire qui est ici important.

L’indépendance de la justice, inscrite dans toutes les constituions, est beaucoup plus formelle
que réelle.

Les violations de cette indépendance sont constantes. Le Chef de l’Etat est le président du
Conseil supérieur de la magistrature, ceci dans le but de garantir l’indépendance de la
Justice. La prééminence du chef de l’exécutif dans les pays africains ne permet pas de
garantir cette indépendance.
42 Tchabouré Aimé GOGUE

Des magistrats, après avoir exercé des fonctions politiques (ministres, conseillers par
exemple) reprennent leur robe. Des juges ont des affinités politiques bien connues22 .

La proclamation des résultats des élections législatives ou présidentielles à la faveur de


partis politiques au pouvoir quelles que soient les preuves de fraudes et les irrégularités dans le
processus électoral ne sont pas de nature à prouver aux citoyens que les chambres
constitutionnelles ne sont pas à la merci du pouvoir exécutif et des partis au pouvoir. La
reconnaissance, par la Cour constitutionnelle du Togo de la victoire aux élections
présidentielles de juin 1998 de EYADEMA, malgré des irrégularités graves dans le décompte
des voix et des protestations d’observateurs internationaux, enlève toute crédibilité à cet
organe censé garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire. La détermination de la liste des
candidats aux élections présidentielles d’octobre 2000 par la Cour constitutionnelle de Côte
d’Ivoire, suggère également l’emprise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire. Ici, le
pouvoir politique et exécutif n’a pas besoin de donner des ordres ; l’autocensure des juges
peut permettre d’obtenir les résultats escomptés. En 2000, le pouvoir exécutif du Zimbabwe
a refusé l’arrêt de la justice l’enjoignant de faire évacuer les terres des fermiers blancs
illégalement occupés par les anciens combattants du ZANU PF, parti au pouvoir. En
novembre 2000, ce gouvernement a décidé la poursuite de la réforme agraire, concernant la
redistribution des terres, qu’il a entreprise malgré que la cour suprême de ce pays ait déclaré
cette politique anticonstitutionnelle.

La distinction entre magistrats de siège et magistrats du parquet soumis à des régimes


différents crée des conditions objectives d’un contrôle étroit de la justice par le pouvoir
politique. Le statut des magistrats prévoie que «les magistrats du parquet sont placés sous la
direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du ministre chargé de la
Justice.» L’évolution de la carrière des magistrats dépend étroitement de son supérieur
hiérarchique !

Cependant, des actes posés par la Cour Constitutionnelle dans certains pays illustrent une
tendance aux changements. Pour illustration,
- les décisions de la Cour Constitutionnelle du Bénin en matière électorale et l’annulation
des décrets d’affectation de magistrats du siège pris en violation du principe de leur
inamovibilité ; et
- l’annulation de la loi, portant sur le code électoral, proposée par le Gouvernement au
Mali peuvent être citées.

Intégrité et crédibilité de l’institution judiciaire

- Des magistrats

En dehors de leur appartenance à des partis politiques, des magistrats entretiennent des liens
parfois coupables avec des hommes d’affaires. L’action disciplinaire qui devrait les remettre
en droit chemin ne fonctionne pas souvent.

- Des collaborateurs des magistrats

Les collaborateurs des magistrats que sont les huissiers de justice, les notaires et les avocats
ont parfois une faible considération de la déontologie de la profession. Le justiciable
reproche à
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 43

beaucoup d’entre eux de rechercher frénétiquement l’argent. Des citoyens pensent que les
avocats sont des hommes d’affaires et qu’ils retiennent par dévers les clients, des sommes
d’argents ; des prévenus ne reçoivent pas la visite de leurs avocats ; des clients sont obligés
de préparer les mémoires pour leurs avocats.

La Société civile

Pour Mondlane (1997), au cours des années soixante et soixante-dix les Gouvernements et les
partenaires au développement des pays africains considéraient les peuples africains comme
des agents au nom desquels on pouvait agir et sur lesquels on devait agir sans demander leur
opinion. Les politiques et programmes de développement étaient conçus, formulés et mis en
œuvre sans participation des populations. Cette pratique s’expliquait par la croyance que la
consultation et la concertation de la population entraîneraient des blocages voire la non prise
de décision. Pour Haggar et Webb (1994, p. 31), «la répartition des coûts et bénéfices entre
les différentes composantes de la population des réformes est le résultat des négociations
entre ces différentes composantes. Dans certaines circonstances, ces négociations sont
inefficaces et peuvent aboutir à des résultats économiques sub-optimaux ce qui est une forte
incitation à limiter le recours au processus démocratique dans l’élaboration et la mise en
œuvre des politiques économiques. Cependant, en plus du fait qu’aucun gouvernement n’a le
droit de supprimer ou de marginaliser indéfiniment une partie de la population, l’histoire des
réformes économiques des années soixante- dix et quatre-vingts suggère que l’autoritarisme
n’ait pas donné des résultats probants». Ainsi, l’absence de participation est de plus en plus
perçue comme un handicap à la conception, à la formulation et à la mise en œuvre de
politiques favorables à une croissance économique durable.

La participation de la population à la vie de la cité est une des conditions de la bonne


gouvernance. Pour qu’elle puisse être efficace, la participation exige l’existence d’une société
civile dynamique, efficace et structurés pour permettre l’intégration des préoccupations des
différents groupes composants du pays. Plus proche de la population, la société civile est plus
en mesure de contribuer à une synthèse des aspirations des différentes composantes de la
société. Elle veillera également à l’information de la population et à surveiller les actions
gouvernementales dans l’intérêt de la population. L’apport de la Société civile pour une
meilleure participation de la population est d’autant plus important que d’une part, la
décentralisation peine à s’implanter dans beaucoup de pays et que d’autre part, le taux élevé
d’analphabétisme dans la majorité des pays surtout en milieu rural, constitue un véritable
handicap à l’information des populations23 .

La Société civile se compose des associations, des ONG, des groupements villageois, des
syndicats et des organisations professionnelles, de la presse, des chefferies traditionnelles, des
mouvements religieux. Des institutions à caractère consultatif et de régulation quoique de
nature étatique constituent des supports et des lieux d’expression de la société civile.
Certains jouent un rôle important dans processus de démocratisation : Association de
promotion des droits humains ou de la démocratie ; associations syndicales ; les associations
ou ONG de développement ; les associations de femmes, de jeunes, d’élèves et d’étudiants ; les
autorités religieuses et coutumières ; la presse et les médias.

La capacité de la société civile à jouer un rôle efficace, exige d’elle qu’elle fonctionne aussi
selon les règles démocratiques (transparence, imputabilité, impartialité, légalité, etc.),
nécessite qu’elle
44 Tchabouré Aimé GOGUE

ait des moyens de sa politique et qu’elle se comporte en professionnel. Les centrales


syndicales, qui dépendent financièrement de leurs homologues du Nord sont souvent marquées
par une gestion peu orthodoxe des ressources, et des pratiques peu transparentes et on
démocratiques de la désignation des responsables syndicaux.

S’il faut saluer le courage de la presse privée dans la lutte pour une libéralisation de la vie
politique, il y a lieu de noter qu’elle est marquée par une pénurie de ressources financières et
humaines. Ainsi pour pouvoir survivre, elle est souvent contrainte à devenir une presse
d’opinions ayant tendance à diffuser des informations à sensations. Ces difficultés sont
aggravées par les entraves créées par l’administration à la liberté de presse. Les multiples
saisies de la presse, les amendes lourdes imposées contre les presses privées, les arrestations,
voire les emprisonnements des journalistes, limitent les capacités du quatrième pouvoir à
informer la population et à dénoncer les abus et les errements du pouvoir. Dans ces
conditions, La monopolisation de la presse et des médias d’Etat par le Gouvernement, le droit à
l’information du citoyen est renié. Si à cela on ajoute la généralisation de la pratique de la
confidentialité des administrations africaines, les citoyens n’ont pas également droit à l’accès
aux documents administratifs.

En ce qui concerne les ONG et les associations, elles manquent de ressources et vivent le
plus souvent de subventions de partenaires extérieurs ce qui réduit leur marge de manœuvre.
En outre, une enquête effectuée par Kouassi (1996) permet de saisir l’ampleur des difficultés
auxquelles ont à faire face les ONG en Côte d’Ivoire par exemple. Sur les ONG interrogées,
28% n’avaient même pas de secrétaire pour réceptionner les messages. Soixante quatre pour
cent n’ont pas de moyens logistiques, de communication et financier pour pouvoir
s’acquitter des tâches administratives minimales. Le besoin de renforcement de leurs capacités
institutionnelles et humaines est donc évident. Leur contribution à la pratique de la bonne
gouvernance est également réduite par le fait que certaines d’entre elles ont des effets ambigus
par leur attitude ou comportement (associations créées pour des objectifs politiques,
ethniques etc. défendent des intérêts particularistes.)24

Si la contribution de la société civile dans la lutte pour la libéralisation de la vie politique a été
remarquable dans beaucoup de pays, il faut cependant regretter q’une fois le changement
démocratique formel obtenu, la société civile a perdu de sa cohésion voire a plus ou moins
éclaté.
« Les forces centripètes ont pris le dessus sur l’intérêt général, chaque groupe s’étant cantonné
dans des revendications catégorielles25 .

Les structures consultatives étatiques (Conseil économique et social, Chambre des


représentants, médiateur, etc.) ont des effets mitigés sur la pratique de la gouvernance dans la
mesure où elles sont souvent de création récente et que l’exécutif n’a pas une longue
expérience dans l’utilisation des conseils surtout lorsque ceux-ci contredisent ses pratiques.

Le Secteur privé

Le secteur privé peut également jouer un contre poids au gouvernement. Il est créateur de
richesse et d’emploi. En recherchant ses intérêts il peut promouvoir la réduction des entraves
imposées par le gouvernement sur les initiatives individuelles et privées.
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 45

Malgré les réformes économiques depuis environ deux décennies, caractérisées par une plus
grande libéralisation et un désengagement progressif de l’Etat des activités de production et
de commercialisation, le secteur privé dans la majorité des pays africains est toujours peu
développé.

Les difficultés de développement du secteur privé s’expliquent en partie par un


environnement administratif, juridique et fiscal caractérisé par des contraintes des plus
diverses. D’abord, l’instabilité du cadre macroéconomique, illustré par des
déséquilibres des agrégats macroéconomiques, la faiblesse de la demande intérieure
fortement déprimée ces dernières années par une chute des investissements publics notamment,
et des coûts de production élevés dus aux coûts des matières premières importées, constituent
des contraintes objectives à l’expansion du secteur privé.

En plus de ces contraintes, il y a lieu de mentionner l’environnement administratif,


réglementaire, fiscal et juridique peu incitatif à la conduite des affaires dans beaucoup de
pays. A titre illustratif, on peut mentionner :

Sur le plan réglementaire :


- L’insuffisance de textes d’application tant au niveau législatif que réglementaire pour
permettre l’exercice du droit fondamental que constitue la liberté du commerce et de
l’industrie ;
- l’incompatibilité entre les prescriptions légales et réglementaires d’une part, et les
politiques et stratégies gouvernementales telles qu’elles sont formulées dans les
programmes et les déclarations de politique. Les textes réglementaires en vigueur
privilégient le contrôle a priori au détriment de l’option libérale du Gouvernement. Les
pratiques dirigistes (autorisations préalables) sont nombreuses ;
- l’insuffisance du cadre légal et réglementaire dans certains domaines (concurrence,
normalisation, formation professionnelle par exemple) et certaines professions ;
- le chevauchement et l’incompatibilité entre les textes d’origine externe (pour les pays de
l’UEMOA par exemple, pour les pays de l’UEMOA par exemple, OHADA, OMC,
CEDAO, UEMOA, OIT, etc.) et les textes d’origine interne ;
- l’insuffisance de vulgarisation des textes ;
- un code de passation des marchés publics caractérisé par une absence d’un code
d’éthique, un recours trop fréquent à la consultation restreinte, un manque de clarté dans
les procédures d’évaluation des offres, la présence de pressions politiques. Le non-respect
des règles permet l’attribution de marché à des entreprises du secteur informel ;
- les tracasseries administratives et policières ;
- la production de pièces ou d’informations non pertinentes réclamées aux promoteurs ;
- le caractère dissuasif de certaines formalités légales ou réglementaires qui pousse à la
clandestinité ou à l’informatisation ;
- pour un même investissement, le promoteur est contraint de subir plusieurs procédures,
chacune comportant son propre dossier ; les procédures sont marquées par le nombre
élevé des structures intervenant dans le processus, la complexité des formalités ainsi que le
caractère aléatoire de la durée du traitement des dossiers. Ceci favorise la corruption ;
- l’absence de limitation des délais de réponse et d’instruction des dossiers dans certains
cas, ce qui étend le champ du pouvoir discrétionnaire des administrations et favorise la
corruption
;
- le dysfonctionnement des commissions et comités techniques chargés de donner des avis ou
46 Tchabouré Aimé GOGUE

d’effectuer des vérifications à l’occasion de l’instruction des demandes d’autorisation ou


d’agrément ;

Sur le plan judiciaire :


- l’insuffisance de ressources humaines en quantité et en qualité, ainsi que de moyens
matériels de fonctionnement ;
- les règles de procédure, complexes et peu appropriées ;
- l’absence de spécialisation des magistrats ; ces derniers siègent indifféremment dans
toutes les formations ;
- l’existence dans l’organisation judiciaire d’une juridiction de droit commun, qui est
compétent en toutes matières sauf celles expressément dévolues à d’autres juridictions.
Ce Tribunal, qui siège de surcroît à juge unique (sauf en matière de travail), est
aujourd’hui compétent en matière pénale, civile, sociale, commerciale et administrative
tout en étant juge d’appel en matière coutumière ;
- l’absence de tribunaux de commerce indépendants des Tribunaux de droit commun ;

Sur le plan fiscal :


- la réglementation relative à cette fiscalité est contraignante et en général inadaptée ;
- le système de taxation ne tient pas compte du processus de l’économie d’entreprise ;
- l’application de la réglementation fiscale se fait dans un climat de suspicion avec un
esprit répressif.

Enfin, des faiblesses sont à noter au niveau des entreprises elles-mêmes :


- la faiblesse des fonds propres qui caractérise les PME et PMI nigériennes ;
- les difficultés d’accès au financement bancaire dû à l’absence de garanties suffisantes et
le niveau élevé des frais financiers ;
- l’insuffisance du savoir-faire managérial et de professionnalisme ;
- l’existence des conditions et facteurs multiples qui augmentent les risques que
constitue l’investissement productif dont le bénéfice ne peut être tiré immédiatement
contrairement aux activités commerciales ;
- la faiblesse des infrastructures physiques, institutionnelles, financières ou encore des
infrastructures de développement et des ressources humaines ;
- l’insuffisance dans les capacités organisationnelles des entreprises.

Pour le secteur privé égyptien, les contraintes les plus sévères sont constituées par la
complexité de l’administration fiscale, l’inefficacité des règlements des conflits nés de
l’exécution contrats, la faible productivité de la main d’œuvre, l’instabilité des politiques
économiques et l’inefficacité des services d’appui26 . Cependant, les réformes entreprises
depuis 1994 ont permis de constater une réduction du poids négatif des procédures
administratives, des incertitudes des politiques économiques, de l’accès au crédit et des
tracasseries bureaucratiques. Malheureusement, les problèmes des règlements des conflits,
la qualité de la main d’œuvre, la faiblesse des services d’appui continuent à constituer des
contraintes majeures pour la promotion du secteur privé. En ce qui concerne particulièrement
l’industrie de la construction, la corruption est considérée comme la contrainte principale ; ce
constat serait certainement dû à la plus grande implication de cette industrie dans les marchés
publics27 .
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 47

Suivant les résultats d’une enquête effectuée en 1996 auprès de 179 entreprises nationales
tunisiennes, 76% des entrepreneurs nationaux pensent que la contrainte la plus importante au
développement du secteur privé est le coût excessif des facteurs de production28 .

Pour 40% des 124 investisseurs étrangers potentiel, pour que la Tunisie soit une destination
intéressante pour les investissements étrangers, parmi les cinq mesures les plus importantes il
y a la réduction de la corruption et des tracasseries administratives. Pour 20% d’entre eux les
mesures de libéralisation du commerce et la dérégulation sont les deux contraintes les plus
importantes ; Seuls 8% d’entre eux trouvent que la corruption constitue l’obstacle le plus
important à la promotion des investissements directs en Tunisie.

VI - CONCLUSION

Le processus de démocratisation qui s’est engagé surtout depuis le début des années quatre-
vingt-dix, a permis à un certain nombre de citoyens de pays africains de gagner une plus
grande libéralisation de la vie politique. Même si un nombre encore important de pays
résistent aux changements politiques, le mouvement de démocratisation semble irréversible.

Si la démocratie est recherchée par elle-même, il est cependant important de noter que sa
consolidation nécessite une amélioration des conditions de vie de la population. Cette
condition ne peut être remplie que si les gouvernants arrivent à améliorer les performances
économiques de leur pays ; ce qui à son tour exige la pratique de la bonne gouvernance. Il
ressort de l’analyse que malgré les réformes de la fonction publique, des progrès dans le
système éducatif et des programmes de renforcement institutionnel mis en place dans beaucoup
de pays, les capacités institutionnelles et humaines actuelles des pays africains et l’efficacité de
l’administration publique demeurent encore faibles. Les autres acteurs de la gouvernance qui
doivent servir de contre poids au pouvoir exécutif ne sont pas en mesure dans bien des cas à
jouer efficacement leur rôle. Dans ces conditions, les politiques partisanes des leaders, sans
contre pouvoir, peuvent limiter les chances d’une croissance durable qui exigent pour se faire
la pratique de la bonne gouvernance. Le renforcement des capacités institutionnelles et
humaines des différents acteurs de la gouvernance constitue une priorité pour garantir la
consolidation de la pratique de la bonne gouvernance dans les pays africains.

Si la communauté internationale a aidé par le passé, les autocrates à accéder et à consolider


leur pouvoir, il serait souhaitable qu’elle contribue également au renforcement des
capacités des administrations, de la société civile et du secteur privé dans les pays africains.
48 Tchabouré Aimé GOGUE

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4. Pour Pagden, les notions de gouvernance ont leur origine dans les conflits qui avaient surgi entre les Etats
d’Europe avec la création au XVIè siècle de vastes empires d’outre-mer.
5. Szelenyi et al. cité par Janet Gaffey, Initiative de la base : l’autre cheminement social du Zaïre et la
Restructuration Economique in Hyden et Bratton
6. Ali Mali Tripp Organisations locales et participation face à l’Etat, dans les villes de Tanzanie in Hyden et
Bratton. 1992.
7. Il faut noter que les étudiants et les jeunes seront plus proches des acteurs de la deuxième forme de
contestations dans des pays en crise économique ; au lieu d’être des membres de la classe dirigeante
future, ils deviennent dans ces circonstances des marginalisés futurs de la société. L’ampleur de la crise
économique et sociale en Afrique à la fin des années quatre-vingts expliquerait la présence des étudiants
dans la quasi-totalité des mouvements de contestation.
8. L’accroissement du chômage des jeunes diplômés et les mauvaises perspectives économiques conduisent
les jeunes et notamment les étudiants à faire partie de cette deuxième catégorie de protestataires. C’est ce
qui explique le fait que dans la majorité des cas, les étudiants font partie des contestataires les plus
intransigeants.
9. Block Steven. 1999. Political Business Cycles, Democratization and Economic Reform: The Case of
Africa, Mimeo, Fletcher School pf Law and Diplomacy Tufs University, Medford, M.A.
10. Ce boycott est la conséquence de la fraude de la sensibilité présidentielle à la suite des élections
présidentielles de juin 1998. Après la dissolution de la Commission nationale électorale, le Gouvernement
a fait publié les résultats par le Ministère de l’intérieur, sans que le dépouillement de toutes les urnes n’ait
été complété.
11. Il faut cependant noter que l’une des caractéristiques du régime démocratique est de permettre l’alternance
au pouvoir. Si la population juge un gouvernement incompétent, elle a la possibilité dans ce type de
régime de le changer. Ce type de régime peut donc permettre au pays d’améliorer ses chances de
croissance.
12. Avec le multipartisme, les partis d’opposition peuvent avoir des militants dans les services techniques de
l’administration. Compte tenu du faible respect de la déontologie, ceux-ci seront en mesure de remettre
des informations pertinentes à leur parti politique.
13. Les années en parenthèses indiquent les périodes des réformes
14. Voir section 4.3.2 p. 29 pour la description du comportement partisan d’un pouvoir exécutif.
15. ‘absence de vision à long terme du pays et le privilège accordé à la gestion à court terme et parfois à
moyen terme, ne favorise pas la réalisation d’actions s’inscrivant dans le long terme et privilégie des actions
ponctuelles qui n’ont pas nécessairement une cohérence pour le développement à long terme du pays.
16. Banque Mondiale, 2000, Manuel de Gestion des Dépenses Publiques, Banque Mondiale.
17. La différence résultera seulement du fait que dans le cas des dictatures fortes, le nombre de personnes ou
groupes dont il faut assurer le soutien peut être plus réduit.
18. Ceci peut ne pas être le cas des gouvernements « militaires » dont la base ultime est l’armée.
19. 19 Voir Samba Ka et Nicolas van de Walle, Senegal: Stalled Reform in a Dominant Party System. In
Haggar Stephan and Steven B. Webb. 1994. Voting For Reform : Democracy, Political Liberalization and
Economic Adjustment, World Bank, Washington. Haggar Stephan and Steven B. Webb. 1994. Voting For
Reform : Democracy, Political Liberalization and Economic Adjustment, World Bank, Washington.
20. Même si la presse n’est pas explicitement mentionnée dans le tableau suivant, comme acteur dans le
processus de democratization, il faut également noter qu’elle (presse privée) a égalemet joué un rôle très
important dans les pays lorsque la liberté de presse a été reconnue ne serait ce que de manière formelle.
Gouvernance en Afrique : Etat des lieux 55

21. Dans certains pays où la loi n’autorisaient pas encore les parties d’opposition, ces derniers ont utilisé, soit
des syndicats, soit des associations d’étudiants pour des revendications politiques.
22. Ceci n’est cependant pas propre à l’Afrique.
23. Les collectivités locales, lorsqu’elles existent, sont démunies de moyens matériels et humains.
24. Il en est de même pour les chefs traditionnels dans certains pays, où ils sont inféodés au pouvoir en place.
25. Gogué, A.T., G. Kester et O. Sidibé (1997) Pour une Démocratie Participative », in Kester, G. et O. O.
Sidibé, Syndicats à Vous Maintenant ! Pour une Démocratie Durable, L’Harmattan, p. 109.
26. Il faut en moyenne 4,5 ans pour résoudre un cas à la cour.
27. Fawzy, Smiha. 1999. The Busineess Environment in Egypt, in Fawzy, Smiha and Ahmed Galal (ed). 1999.
Partners for development: New Role for Government and Private Sector in the Middle East and North
Africa, Mediterranean Development Forum, World Bank Institute.
28. El Hédi, Lahouel, Mohamed. 1999. The Business Environment in Tunisia, in Fawzy, Smiha and Ahmed
Galal, ed. 1999. Partners for development: New Role for Government and Private Sector in the Middle
East and North Africa, Mediterranean Development Forum, World Bank Institute.
56 Tchabouré Aimé GOGUE

ANNEXE 1 : Les coups d’Etat réussis en Afrique (1963-1991)

Premier coup d’état Pays Coups d’état ultérieurs

13-01-1963 Togo 13-01-1967


28-10-1963 Bénin (Dahomey) 22-12-1965 ; 17-12-1967 ; 10-12-1969 ;
26-10-1972
18-02-1964 Gabon
19-06-1965 Algérie
25-11-1965 Zaïre (RDC)
01-01-1966 Centrafique 20/21-09-1979 ; 01-09-1981
04-01-1966 Burkina Faso (Haute Volta) 08-02-1974 ; 25-10-1980 ; 07-11-1982 ;
04-08-1983 ; 15-10-1987
15-01-1966 Nigeria 01-08-1966 ; 29-07-1975 ; 31-12-1983 ;
08-1985
24-02-1966 Ghana 13-01-1972 ; 05-07-1978 ;
04-06-1979 ; 31-12-1981
28-11-1966 Burundi 01-11-1976 ; 02- 09-1987
23-03-1967 Sierra Leone 13-04-1968
04-08-1968 Congo
18-11-1968 Mali 26-03-1991
25-05-1969 Soudan 06-04-1985 ; 30-06-1989
21-10-1968 Somalie
25-01-1971 Ouganda 29-07-1985 ; 29-01-1986
18-05-1972 Madagascar
18-07-1973 Rwanda
15-04-1974 Niger
12-09-1974 Ethiopie
06-04-1975 Tchad 01-12-1990
10-07-1978 Mauritanie 04-01-1980 ; 12-12-1984
03-08-1979 Guinée Equatoriale
11-04-1980 Liberia 10-09-1990
14-11-1980 Guinée-Bissau
03-04-1984 Guinée
20-01-1986 Lesotho 21-02-1990 ; 30-04-199
02-1986 Swaziland
27-01-1991 Somalie

Source : Hélène d’Almeida-Topor, p. 234

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