Chap24 (Espaces Préhilbertiens Réels)

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Chapitre 24 :

Espaces préhilbertiens réels

Dans tout ce chapitre, E désigne un R−espace vectoriel.

I. Produit scalaire

A) Définition et exemples principaux

Définition 1
On appelle produit scalaire sur E toute application φ : E × E → R vérifiant :
(i) φ est bilinéaire, c’est-à-dire pour tout (x, y, z) ∈ E 3 et tout (λ, µ) ∈ R2 :
(
φ(λx + µy, z) = λφ(x, z) + µφ(y, z)
φ(x, λy + µz) = λφ(x, y) + µφ(x, z)

(ii) φ est symétrique, c’est-à-dire : pour tout (x, y) ∈ E 2 , φ(x, y) = φ(y, x)


(iii) φ est positive, c’est-à-dire : pour tout x ∈ E, φ(x, x) ⩾ 0
(iv) φ est définie, c’est-à-dire : φ(x, x) = 0 =⇒ x = 0.
On dit qu’un produit scalaire est une forme bilinéaire, symétrique, définie positive.

Remarque 1. Comment montrer que φ est bilinéaire ?


1. Pour la bilinéarité, on peut enlever le µ,
2. Dans la pratique, pour montrer que φ est bilinéaire et symétrique, on se contente de montrer que
φ est symétrique, et on montre la linéarité par rapport à une variable uniquement. En effet, si on
a montré que φ est symétrique et que φ(λx + y, z) = λφ(x, z) + φ(y, z) pour tout (x, y, z) ∈ E 3
et tout λ ∈ R, alors on aura
φ(x, λy + z) = φ(λy + z, x)
par symétrie, et donc
φ(x, λy + z) = λφ(y, x) + φ(z, x)
par linéarité par rapport à la première variable, et ainsi φ(x, λy + z) = λφ(x, y) + φ(x, z) en
utilisant à nouveau la symétrie.

Exemples :
n
X
1. Soit E = Rn . Pour x = (x1 , · · · , xn ) ∈ Rn et y = (y1 , · · · , yn ) ∈ Rn , on pose f (x, y) = xk yk .
k=1
Montrons que f définit un produit scalaire sur Rn . On remarque que f (x, y) ∈ R pour tout
(x, y) ∈ E 2 .
n
X n
X
♦ Montrons que f est symétrique. Soit (x, y) ∈ E2. Alors, f (y, x) = yk xk = xk yk =
k=1 k=1
f (x, y) donc f est bien symétrique.

1
♦ Montrons que f est bilinéaire. Soit (x, y, z) ∈ E 3 . Soit λ ∈ R. Notons u = λy + z. On a
n
X
f (x, λy + z) = f (x, u) = xk uk ,
k=1

or uk = λyk + zk pour tout k ∈ J1, nK. D’où


n
X n
X
f (x, λy + z) = f (x, u) = λ xk yk + xk zk = λf (x, y) + f (x, z)
k=1 k=1

donc f est linéaire par rapport à sa première variable. De plus, f est symétrique, donc f
est bilinéaire.
n
X
♦ Montrons que f est définie positive. Soit x ∈ E. On a f (x, x) = (xk )2 ⩾ 0 donc f est
k=1
bien positive. De plus, f (x, x) = 0 si et seulement si xk = 0 pour tout k ∈ J1, nK, c’est-à-dire
f (x, x) = 0 si et seulement si x = 0.
Bilan : f est une forme bilinéaire symétrique définie positive. C’est donc un produit scalaire. Ce
produit scalaire est le produit scalaire usuel de Rn .
2. Soit E = C considéré comme R-espace vectoriel. Pour z, z ′ ∈ C, on pose f (z, z ′ ) = Re(zz ′ ).
Montrer que f est un produit scalaire. On remarque que f (z, z ′ ) ∈ R pour tout (z, z ′ ) ∈ E 2 .
♦ Montrons que f est symétrique. Soit (z, z ′ ) ∈ E 2 . On a f (z ′ , z) = Re(z ′ z). Or un nombre
complexe et son conjugué ont même partie réelle, donc
 
f (z ′ , z) = Re z ′ z = Re(z ′ z) = Re(zz ′ ) = f (z, z ′ )

donc f est bien symétrique.


♦ Montrons que f est bilinéaire. Soit (z1 , z2 , z3 ) ∈ E 3 . Soit λ ∈ R. On a

f (z1 , λz2 + z3 ) = Re(z1 (λz2 + z3 )) = Re(λz1 z2 + z1 z3 )

or la partie réelle de la somme de deux complexes et la somme des parties réelles, donc

f (z1 , λz2 + z3 ) = Re(λz1 z2 ) + Re(z1 z3 )

mais λ est réel, donc

f (z1 , λz2 + z3 ) = λRe(z1 z2 ) + Re(z1 z3 ) = λf (z1 , z2 ) + f (z1 , z3 )

f est linéaire par rapport à sa première variable. De plus, f est symétrique, donc f est
bilinéaire.
♦ Montrons que f est définie positive. Soit z ∈ E. On a f (z, z) = Re(zz). Ainsi, f (z, z) = Re(|z|2 )
donc f (z, z) = |z|2 ⩾ 0 c’est-à-dire f est bien positive. De plus, f (z, z) = 0 si et seulement
si |z|2 = 0 c’est-à-dire si et seulement si z = 0.

Exercice 1
Z b
Considérons E = C 0 ([a, b], R) (avec a < b). Pour (f, g) ∈ E2, on pose φ(f, g) = f (t)g(t) dt.
a
Montrer que φ est un produit scalaire sur E.

2
Exercice 2
Considérons E = Mn,p (R). Pour (A, B) ∈ E 2 , on pose f (A, B) = tr(AT B).
Montrer que f est un produit scalaire sur E.

Remarque 2. Notations
➤ Les notations (. | .) ou < ., . > ou x.y désignent toutes un produit scalaire.
➤ Le produit scalaire usuel de Rn s’écrit également sous forme matricielle.
En effet, soient x = (x1 , · · · , xn ) et y = (y1 , · · · , yn ) deux vecteurs de Rn .
Notons C la base canonique de Rn et X = MatC (x) et Y = MatC (y). Alors :

(x | y) = X T Y

Définition 2
On appelle espace préhilbertien tout R-espace vectoriel muni d’un produit scalaire.
Lorsqu’un espace préhilbertien est de dimension finie, on le qualifie plutôt d’espace euclidien.

Exemples :
E = C 0 ([a, b], R) muni du produit scalaire de l’exercice 1 est un espace préhilbertien.
E = Rn muni du produit scalaire usuel est un espace euclidien.

B) Normes dans les espaces préhilbertiens

Définition 3
On qualifie de normep euclidienne toute norme associée à un produit scalaire, c’est-à-dire définie
ainsi : ||.|| : x 7→ (x | x).

A retenir
Le caractère défini du produit scalaire donne l’équivalence fondamentale suivante :

||x|| = 0R ⇐⇒ x = 0E

Pour montrer qu’un vecteur est nul, on pourra donc montrer que sa norme est nulle.
De même, pour montrer que x = y, on pourra montrer que ||x − y|| = 0.

Propriété 1. Identités remarquables


Pour tout x et y dans E, alors :
1. ||x + y||2 = ||x||2 + 2(x | y) + ||y||2 (c’est la formule d’Al-Kashi pour E = R2 )
2. (x + y | x − y) = ||x||2 − ||y||2

Démonstration (Propriété 1)

3
Exercice 3
Démontrer les deux identités suivantes :
1. Identité du parallélogramme :

∀(x, y) ∈ E 2 , ||x + y||2 + ||x − y||2 = 2(||x||2 + ||y||2 )

2. Identité de polarisation :

∀(x, y) ∈ E 2 , ||x + y||2 − ||x − y||2 = 4(x | y)

Propriété 2. Inégalité de Cauchy-Schwarz

∀(x, y) ∈ E 2 , |(x | y)| ⩽ ||x|| × ||y||

De plus, il y a égalité si, et seulement si x et y sont liés.

Démonstration (Propriété 2)

Propriété 3. Inégalités de Cauchy-Schwarz spécifiques


➤ Pour les vecteurs de Rn Soient (x1 , · · · , xn ) ∈ Rn et (y1 , · · · , yn ) ∈ Rn :
n
!2 n
! n
!
X X X
x i yi ⩽ x2i yi2
i=1 i=1 i=1

➤ Pour les intégrales Soient (f, g) ∈ C([a, b], R) :


Z b !2 Z b ! Z b !
f (x)g(x) dx ⩽ f (x)2 dx × g(x)2 dx
a a a

Démonstration (Propriété 3)

Exercice 4
Les deux questions sont indépendantes.
1. Soit (a, b, c, d) ∈ R4 .
Établissez que (a + b + c + d)2 ⩽ 4(a2 + b2 + c2 + d2 ) et étudiez le cas d’égalité.
2. Soient a > 0 et g ∈ C 1 ([0, a], R) telle que g(0) = 0.
Z a
Montrez que g(a)2 ⩽ a g ′ (t)2 dt et étudiez le cas d’égalité.
0

Propriété 4. Inégalité triangulaire


Pour tout x et y dans E, alors :

||x + y|| ⩽ ||x|| + ||y|| et | ||x|| − ||y|| | ⩽ ||x − y||

Avec égalité si, et seulement si, les vecteurs x et y sont liés par un coefficients positif.

4
Démonstration (Propriété 4)

Définition 4 Définition topologique de la norme


Soit E un K−ev muni d’une application N : E → R+ .
On dit que N est une norme de l’espace E lorsqu’elle possède les trois propriétés suivantes :
(i) Homogénéité ∀(λ, x) ∈ K × E, N (λx) = |λ| × N (x)
(ii) Séparation ∀ x ∈ E, N (x) = 0K ⇐⇒ x = 0E
(iii) Inégalité triangulaire ∀(x, y) ∈ E 2 , N (x + y) ⩽ N (x) + N (y)

Exercice 5
Démontrer que M : (x, y) 7→ max(|x|, |y|) est une norme sur R2 .

Propriété 5. Norme associée à un produit scalaire p


Soit (E, (. | .)) un espace préhilbertien. L’application ||.|| : x 7→ (x | x) est une norme sur E au
sens de la définition précédente.

Démonstration (Propriété 5)

Exemples :
— la norme euclidienne associée au produit scalaire de R2 ou R3 donné dans le premierq exemple est
2
la norme usuelle, c’est-à-dire si x = (x1 , x2 ) ∈ R alors sa norme usuelle est ||x|| = x21 + x22 .
qR
b
— Dans E = C 0 ([a, b], R) muni du produit scalaire de l’exercice 1, ||f || = 2
a f (t) dt est une
norme euclidienne.

5
II. Orthogonalité

A) Famille orthogonales, orthonormées

Définition 5
On dit que deux vecteurs x et y sont orthogonaux lorsque (x | y) = 0.
On note alors x ⊥ y.

Remarque 3. Le vecteur nul est orthogonal à tout vecteur x de E.

Définition 6
On dit qu’une famille (x1 , · · · , xn ) de vecteurs de E est orthogonale lorsque :

∀(i, j) ∈ J1, nK2 , i ̸= j =⇒ (xi | xj ) = 0

Exemples :
La base canonique de R3 est orthogonale pour le produit scalaire usuel. Z 1
La base canonique de R3 [X] n’est pas orthogonale pour le produit scalaire (P | Q) = P (t)Q(t) dt.
0

Propriété 6. Formule de Pythagore


Soit n ∈ N∗ . Soit (e1 , · · · , en ) une famille de vecteurs orthogonaux de E. Alors :

||e1 + · · · + en ||2 = ||e1 ||2 + · · · + ||en ||2 .

Démonstration (Propriété 6)

Remarque 4. Lien avec le théorème de Pythagore


Notez qu’il n’y a équivalence entre l’orthogonalité de la famille et l’égalité de Pythagore que pour
n = 2. C’est la formule d’Al-Kashi.

Propriété 7. Liberté famille orthogonale


Toute famille orthogonale de vecteurs non nuls est libre.

Démonstration (Propriété 7)

Exercice 6
Soient n ∈ N∗ et ∀ k ∈ J1, nK, fk : [0, 2π], x 7→ sin(kx). Montrer que la famille (fk )k∈J1,nK est libre.

Définition 7
On dit qu’un vecteur est normé ou unitaire lorsque ||x|| = 1.

6
Définition 8
Soit (e1 , · · · , en ) une famille de vecteurs de E. On dit que la famille est orthonormée ou ortho-
normale lorsqu’elle est orthogonale et constituée de vecteurs normés.

Exemple :
Dans R3 muni du produit scalaire usuel, la base canonique est orthonormée.

Définition 9
1
Normer un vecteur x non nul, c’est le remplacer par ||x|| x.

Exemple :
On se place dans R3 muni du produit scalaire usuel.
Considérons e1 = (1, 1, 1), e2 = (−1, 0, 1) et e3 = (1, −2, 1). Montrer que cette famille est orthogonale
et en déduire la famille orthonormée associée.
On a (e1 | e2 ) = −1 + 0 + 1 = 0, de plus (e1 | e3 ) = 1 − 2 + 1 = 0 et enfin (e2 | e3 ) = −1 + 0 + 1 = 0
donc la famille est orthogonale. De plus ||e1 ||2 = 3, ||e2 ||2 = 2 et ||e3 ||2 = 6, donc finalement la famille
orthonormée associée est (ε1 , ε2 , ε3 ) où ε1 = √13 (1, 1, 1), ε2 = √12 (−1, 0, 1) et ε3 = √16 (1, −2, 1).

B) Orthonormalisation de Gram-Schmidt

Propriété 8. Procédé d’orthonormalisation de Gram-Schmidt


Soit n ∈ N∗ . Soit (e1 , . . . , en ) une famille de vecteurs libres de E. Il existe une famille orthonormée
de vecteurs (v1 , · · · , vn ) de E telle que pour tout k ∈ J1, nK,

Vect (v1 , · · · , vk ) = Vect (e1 , . . . , ek )

Démonstration (Propriété 8)

Algorithme d’orthonormalisation
En pratique, on effectue la démarche suivante :
1. On pose v1 = e1 .
2. Lorsque v1 , · · · , vp sont crées, on crée vp+1 en posant :

vp+1 = ep+1 + λ1 v1 + · · · λp vp

On utilise la condition (vp+1 | vi ) = 0 pour tout i ∈ J1, pK pour calculer λi :

λi ||vi ||2 = −(ep+1 | vi )

3. On normalise chaque vecteur.

Exemple
On se place dans R3 muni du produit scalaire usuel. Considérons la famille (e1 , e2 , e3 ) où e1 = (2, 1, 1),
e2 = (1, 1, 1), e3 = (1, −1, 1).
1. Montrer 3
que cette famille est une base de R .
2 1 1

On a 1 1 −1 = 2 + 1 − 1 − 1 + 2 − 1 = 2 ̸= 0, donc la famille est une base de R3 .


1 1 1

7
2. Déterminer une base orthonormale construite à partir de celle-ci avec Gram-Schmidt.
On va dans un premier temps construire une famille orthogonale.
— On pose v1 = (2, 1, 1).
2 |v1 )
— On cherche v2 sous la forme : v2 = e2 +λ1 v1 . On veut que (v1 | v2 ) = 0 donc λ1 = − (e
||v1 ||2
=
− 46 = − 23 . On obtient :

2 1
v2 = (1, 1, 1) − (2, 1, 1) = (−1, 1, 1).
3 3
Posons v2′ = (−1, 1, 1). Comme (v1 , v2 ) = 0 alors (v1 , v2′ ) = 0, c’est-à-dire (v1 , v2′ ) orthogo-
nale. Notons v2 au lieu de v2′ pour alléger la notation.
— On cherche v3 sous la forme v3 = e3 + λ1 v1 + λ2 v2 . Comme (v1 | v3 ) = 0 alors λ1 =
3 |v1 ) 3 |v2 )
− (e
||v1 ||2
= − 26 = − 31 , et (v2 | v3 ) = 0 donne λ2 = − (e
||v2 ||2
= 31 . On obtient ainsi :

1 1
v3 = (1, −1, 1) − (2, 1, 1) + (−1, 1, 1) = (0, −1, 1).
3 3

La famille (v1 , v2 , v3 ) que l’on a construite est bien une famille orthogonale par construction.
Pour 1 ⩽ i ⩽ 3, on pose wi = ||vvii || :

1 1 1
w1 = √ (2, 1, 1), w2 = √ (−1, 1, 1), w3 = √ (0, −1, 1)
6 3 2

La famille (w1 , w2 , w3 ) est une famille orthonormale de R3 , donc elle est libre. Or card(w1 , w2 , w3 ) =
3 =dim(R3 ) donc c’est une base de R3 .

A retenir
Vous pouvez dans un premier temps, trouver une famille orthogonale puis normer les vecteurs à
la fin (comme dans l’exemple précédent). C’est bien plus simple au niveau des calculs.

Exercice 7
Soit R3 muni du produit scalaire usuel. Soient e1 = (0, 1, 1), e2 = (1, 0, 1) et e3 = (1, 1, 0). On
admet que (e1 , e2 , e3 ) est une base de R3 . Déterminer une base orthonormale construite à partir
de celle-ci avec Gram-Schmidt.

Remarque 5. Gram-Schmidt n’est pas réservé à R3 : il faut savoir faire dans n’importe quel espace
vectoriel préhilbertien... L’exemple qui suit est avec les polynômes.

Exercice 8
On se place dans R2 [X] muni du produit scalaire suivant

(P | Q) = P (0)Q(0) + P (1)Q(1) + P (2)Q(2)

On admet ici que c’est un produit scalaire.


Déterminer une base orthonormée obtenue par le procédé de Gram-Schmidt à partir de la base
canonique.

8
III. Bases orthonormées d’un espace euclidien

Définition 10
On appelle base orthonormée (ou orthonormale) d’un espace vectoriel euclidien E toute base de
E constituée de vecteurs unitaires deux à deux orthogonaux.

Propriété 9. Tout espace euclidien E possède une base orthonormale.

Démonstration (Propriété 9)

Remarque 6. De même, tout sous-espace vectoriel de dimension finie d’un espace préhilbertien
possède une base orthonormée.

Propriété 10. Expression des coordonnées d’un vecteur dans une base orthonormale
Soit E un espace vectoriel euclidien dont une base orthonormale est (e1 , . . . , en ). Alors :
n
X
∀ x ∈ E, x= (x | ei )ei
i=1

Ainsi, les coordonnées de x dans la base (e1 , · · · , en ) sont ((x | e1 ); · · · ; (x | en )).

Démonstration (Propriété 10)

Propriété 11.
Soit E un espace vectoriel euclidien. Soit B une base orthonormée de E. Si x et y sont de vecteurs
de E de coordonnées respectives x1 , · · · , xn et y1 , · · · , yn dans B alors :
q
(x | y) = x1 y1 + · · · + xn yn et ||x|| = x21 + · · · + x2n

Cela signifie donc que :


v
n
X
u n
uX
(x | y) = (x | ei )(y | ei ) et ||x|| = t (x | ei )2
i=1 i=1

Démonstration (Propriété 11)

Remarque 7. Si X et Y sont les vecteurs-colonnes de x et y dans une base orthonormale, alors :



(x | y) = X T Y et ||x|| = X T X

9
IV. Projections orthogonales sur un sous-ev de dimension finie

A) Supplémentaire orthogonal

Définition 11
Soit F un sous-espace vectoriel de E. On appelle orthogonal de F , noté F ⊥ , l’ensemble constitué
des vecteurs orthogonaux à tout vecteur de F c’est-à-dire :

F ⊥ = {x ∈ E | ∀ a ∈ F, (a | x) = 0}

Exemples :
{0}⊥ = E puisque 0E est orthogonal à tout vecteur de E. Donc E ⊂ {0}⊥ . L’autre inclusion est
triviale par définition.
De même, E ⊥ = {0} car si x ∈ E ⊥ , alors (x | x) = 0 (en prenant a = x), donc x = 0, l’autre inclusion
est évidente.

Propriété 12. L’orthogonal d’un ensemble est un sev


Soit F ⊂ E. Alors F ⊥ est un sous-espace vectoriel de E.

Démonstration (Propriété 12)

Définition 12
On dit que deux sev F et G sont orthogonaux, noté F ⊥G, lorsque :

∀(x, y) ∈ F × G, (x | y) = 0

Propriété 13. F et F ⊥ sont orthogonaux.

Démonstration (Propriété 13)

Exercice 9
Soit f ∈ L(Rn ) canoniquement associé à une matrice A ∈ Mn (R).
1. Démontrer que :

∀(x, y) ∈ (Rn )2 , (f (x) | y) = (x | f (y)) ⇐⇒ A ∈ Sn (R)

2. En déduire que Ker(f ) = Im(f )⊥ lorsque f satisfait la condition précédente.

Propriété 14.
Soient F et G deux sous-espaces vectoriels de E. Si F et G sont orthogonaux alors F ∩ G = {0}.

10
Démonstration (Propriété 14)

Propriété 15.
Si F est un sous-espace vectoriel de E de dimension finie, alors F ⊥ est un supplémentaire de
F . On note :
E = F ⊕⊥ F ⊥
F ⊥ est alors appelé supplémentaire orthogonal de F . De plus F = (F ⊥ )⊥ .

Démonstration (Propriété 15)

Remarque 8.
La notation E = F ⊕⊥ G signifie que F et G sont supplémentaires dans E et que F et G sont
orthogonaux.

Propriété 16.
Soit E un espace vectoriel euclidien. Alors dim F ⊥ = dim E − dim F .

Démonstration (Propriété 16)

Remarque 9.
Si H est un hyperplan, alors H ⊥ est une droite vectorielle. Ainsi, tout vecteur non nul de cette
droite est appelé vecteur normal à H.

Exemple :
Dans R3 muni du produit scalaire usuel, le plan de vecteur normal (1, −1, 2) a pour équation x−y+2z =
0. En effet, soit H ce plan. On a (x, y, z) ∈ H si et seulement si ((x, y, z) | (1, −1, 2)) = 0 c’est-à-dire
si et seulement si x − y + 2z = 0.

B) Projection orthogonale

Définition 13
Soit E un espace euclidien et F un sous-espace vectoriel de E. On appelle projection orthogonale
sur F la projection sur F parallèlement à F ⊥ .

Propriété 17.
Soit E un espace euclidien et F un sous-espace vectoriel de E de base orthonormale (e1 , . . . , ep ).
Soit pF la projection orthogonale sur F . Alors :
p
X
∀ x ∈ E, pF (x) = (x|ei )ei
i=1

11
Démonstration (Propriété 17)

Remarque 10. L’endomorphisme id −pF est la projection orthogonale sur F ⊥ parallèlement à F .

Exemple :
On considère R3 muni du produit scalaire usuel. Soit P le plan vectoriel d’équation −x + y + z = 0.
1. Déterminer une base de P .
On a P = (x, y, z) ∈ R3 | −x + y + z = 0 = (y + z, y, z) | (y, z) ∈ R2 . Ainsi,
 

P = Vect((1, 1, 0), (1, 0, 1))

Notons ε1 = (1, 1, 0) et ε2 = (1, 0, 1). Montrons que (ε1 , ε2 ) est libre. Soit (λ1 , λ2 ) ∈ R2 tel que
λ1 ε1 + λ2 ε2 = 0. Alors on a 
 λ1 + λ2 = 0

λ1 = 0

 λ
2 = 0
Donc (ε1 , ε2 ) est libre, c’est donc une base de P .
2. Déterminer un vecteur normal à P .
On prend a = (−1, 1, 1). Soit (x, y, z) ∈ P . Alors (a | (x, y, z)) = −x + y + z = 0 car (x, y, z) ∈ P .
3. En déduire P ⊥ .
On a a ∈ P ⊥ . Or dim(P ⊥ ) = 3 − dim(P ) = 1. Donc P ⊥ = Vect(a).
4. Déterminer la matrice A de p, projection orthogonal sur P dans la base adaptée à la supplémen-
tarité de P et de P ⊥ .  
1 0 0
Notons ε3 = a. Dans B = (ε1 , ε2 , ε3 ), la matrice de p est MatB (p) = A =  0 1 0 
 
0 0 0
5. En déduire la matrice A′ de p, projection orthogonale sur P dans la base canonique de R3 .
Notons C la base canonique de R3 . Alors A′ = PC,B APB,C . Or
 
1 1 −1
PC,B = 1 0 1 
 
0 1 1

De plus : 
1
 e1 = 3 (ε1 + ε2 − ε3 )

e2 = ε1 − e1 = 13 (2ε1 − ε2 + ε3 )
 e = ε − e = 1 (−ε + 2ε + ε )

3 2 1 3 1 2 3

alors  
1 2 −1
1
PB,C =  1 −1 2 

3
−1 1 1
 
2 1 1
On trouve finalement : A = 31  1 2 −1 
 
1 −1 2

Remarque 11. Il existe de nombreuses façons de trouver A. On pouvait par exemple trouver la
matrice de la projection orthogonale sur P ⊥ pour en déduire celle de P ; Ou encore, trouver une base
orthonormée de P et en déduire la matrice de la projection orthogonale sur P .

12
Exercice 10
Soit P le plan de R3 d’équation x + y + z = 0.
1. Déterminer une base orthonormale de P .
2. Soit p la projection orthogonale sur P . Déterminer la matrice de p dans la base canonique.

Exercice 11
Soit R3 muni du produit scalaire usuel. Soit p ∈ L(R3 ) canoniquement associée à A où
 
5 −2 1
1
A =  −2 2 2 

6
1 2 5

Montrer que p est une projection orthogonale sur un plan dont on précisera une équation.

Propriété 18. Inégalité de Bessel


Soit E un espace préhilbertien et F un sev de E de dimension finie. Alors :

||pF (x)||2 ⩽ ||x||2

Démonstration (Propriété 18)

Remarque 12. On peut également définir la symétrie orthogonale, s = 2p − id.

C) Distance d’un vecteur à un sous-espace vectoriel

Remarque 13. Soient a un vecteur de E et F un sous-espace vectoriel. L’ensemble {||a − x|| | x ∈ F }


est une partie de R non vide (car F ne l’est pas) et minorée par 0, donc il admet une borne inférieure.

Définition 14
La distance du vecteur a au sous-espace F est le réel positif défini par :

d(a, F ) = inf{||a − x|| | x ∈ F }

Propriété 19. Lien entre distance et projection orthogonale


Soit p la projection orthogonale sur F . Alors :

d(a, F ) = ||a − p(a)|| et ∀ x ∈ F, ||a − x|| = d(a, F ) ⇐⇒ x = p(a)

Démonstration (Propriété 19)

13
Exemple :
On considère dans R3 muni du produit scalaire usuel, le plan vectoriel F = (x, y, z) ∈ R3 | x + 2y − 3z = 0 .


Soit a = (1, 2, 3). Calculer d(a, F ).


On remarque que u = (1, 2, −3) est un vecteur normal à F , car (u | (x, y, z)) = 0 pour tout (x, y, z)
dans F . Comme dim (F ) = 2, on obtient dim(F ⊥ ) = 1, donc F ⊥ = Vect(u). Normons le vecteur u.
Posons u′ = √u14 . On a F ⊥ = Vect(u′ ) et pF ⊥ (a) = (a | u′ )u′ . Ainsi, pF ⊥ (a) = − √414 u′ , donc

4
||a − pF (a)|| = ||pF ⊥ (a)|| = √
14

Exercice 12
On considère dans R3 muni du produit scalaire usuel, la droite D = Vect((1, 0, 1)).
Soit a = (1, 2, 3). Calculer d(a, D).

Exercice 13
Z 1 
2 2 2
Calculer m = inf (t − (at + b)) dt | (a, b) ∈ R .
0

Exercice 14
Déterminer les réels x, y et z vérifiant l’équation 2x + y + z = 0 et qui rendent minimale la
quantité q(x, y, z) = (x − 1)2 + (y − 1)2 + (z − 1). Que vaut ce minimum ?

Propriété 20. Interprétation géométrique du déterminant


➤ Soit B la base canonique de R2 . Soient u et v deux vecteurs de R2 . L’aire du parallélogramme
construit sur u et v vaut | detB (u, v)|.
➤ Soit B la base canonique de R3 . Soient u, v et w trois vecteurs de R3 . Le volume du parallélé-
pipède construit sur u, v et w vaut | detB (u, v, w)|. De plus :

det(u, v, w) = (u ∧ v).w
B

Démonstration (Propriété 20)

Exemple :
Soit le parallélogramme ABCD où A(−1, 2), B(1, 4), C(7, −2) et D(5, −4). Déterminer l’aire de ce pa-
→ →
u =AB et v =AD. On a u = (2, 2) et v(6, −6). Ainsi l’aire du parallélogramme
rallélogramme. On note
2 6
est A = 24 car = −24.

2 −6

Exercice 15
1. Calculer l’aire du parallélogramme construit sur les vecteurs u(2, 3) et v(1, 4).
2. Calculer le volume du parallélépipède construit sur les vecteurs u(1, 2, 0), v(0, 1, 3) et
w(1, 1, 1).

14

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