Mario Beauregard - Un Saut Quantique de La Conscience

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UN SAUT

QUANTIQUE
DELA
CONSCIENCE
Du même auteur

Les Pouvoirs de la conscience, Inter Editions, 2013.


Du cerveau à Dieu, avec Denyse O'Leary, Guy Trédaniel éditeur, 2015.

© Guy Trédaniel éditeur, 2018.


ISBN : 978-2-8132-1635-9

Tous droits de reproduction, traduction ou adaptation réservés pour tous pays.

www.editions-tredaniel.com
[email protected]
www.facebook.com/editions.tredaniel
DR MARIO BEAUREGARD
PRÉFACE DE ""'EAN STALINE

UN SAUT
QUANTIQUE
DELA
CONSCIENCE
POUR SE LIBÉRER
ENFIN DE L'IDÉOLOGIE
MATÉRIALISTE

GuyTrédaniel éditeur
19, rue Saint-Séverin
75005 Paris
SOMMAIRE

Préface 7
Introduction
L'effondrement du matérialisme scientifique 15
Chapitre 1
Des pensées qui transforment le corps 29

Chapitre2
Des perceptions par-delà l'espace et le temps 53
Chapitre 3
Quand l'esprit influe sur la matière 69

Chapitre4
Le pouvoir non local de l'intention sur le vivant 89

Chapitre5
Une conscience délocalisée 109

Chapitre 6
Le mystère ultime 131
Chapitre 7
Vies antérieures ou fabulation? 151
Chapitre 8
Voyages vers la Source 171

Conclusion
L'émergence du paradigme postmatérialiste 191
Remerciements 203

5
PRÉFACE
par Jean Staune

Qui sommes-nous? Quelle est notre véritable nature?


C'est la question la plus importante qui puisse exister pour
chacun d'entre nous, car notre avenir en dépend directement ainsi
que, comme nous allons le voir, celui de toute l'humanité.
Pour toutes les religions et les traditions, nous sommes soit une
âme éternelle créée par Dieu et destinée à poursuivre notre exis-
tence dans un autre monde après la mort de notre corps physique,
soit une petite goutte d'une conscience universelle que nous rejoin-
drons. Dans tous les cas, notre existence se prolonge dans d'autres
dimensions. Mais dès le début de la philosophie, il n'a pas manqué
de philosophes athées, tels Démocrite ou Lucrèce, pour dénoncer
cet espoir de survie comme étant une illusion. Ces voix, qui furent
pendant des siècles isolées dans un monde où 99 % des gens étaient
religieux, ont reçu au cours des trois derniers siècles et surtout au
cours du xxe de puissants soutiens.
Avec le xvmesiècle et le développement de la modernité,
l'athéisme va devenir beaucoup plus« politiquement correct». La
Mettrie publie L'Homme-machine en 1748 qui, comme l'indique
son titre, postule que nous ne sommes que des machines biolo-
giques. Le médecin et chirurgien Pierre Cabanis fut le premier à
prononcer la fameuse phrase: «Je n'ai pas trouvé l'âme au bout
de mon scalpel», mais surtout à faire ce célèbre parallèle entre le
cerveau et le foie: «Le cerveau sécrète la pensée comme le foie
sécrète la bile. »
Dans ce domaine comme dans d'autres, les progrès scienti-
fiques vont ridiculiser bien des croyances populaires, ouvrant la
voie à une progression sans précédent du matérialisme.

7
Les progrès de l'analyse des mécanismes cérébraux font les
grands titres des revues scientifiques de vulgarisation, autour de
thèmes tels que «on a vu penser le cerveau », poussant encore et
toujours le grand public à adopter, en - à peine - plus subtil, le
modèle du «cerveau créateur de la conscience».
Aujourd'hui la situation s'est totalement inversée: même si
la croyance en la vie après la mort est majoritairement répandue,
seule une infime minorité de scientifiques serait prête à défendre
cette hypothèse dans le domaine des neurosciences. Il y a certes
beaucoup de scientifiques croyants, mais en physique, en astro-
physique ou en mathématiques, bref dans des domaines qui ne
concernent pas directement l'étude de la conscience.
Or, comme nous l'avons dit en commençant, cette question
n'est pas seulement vitale pour chacun d'entre nous, elle l'est aussi
pour toute l'humanité. En effet, depuis quelques années, les progrès
du « deep learning» ont enfin réussi à faire décoller l'intelligence
artificielle en décuplant les possibilités des ordinateurs, qui peuvent
désormais apprendre par eux-mêmes, voire créer des codes pour
communiquer entre eux, codes qu'aucun humain ni aucun autre
ordinateur ne peut déchiffrer!' Au moment où j'écris cette préface,
Google DeepMind vient d'annoncer l'existence d'AlphaGo Zero
dans la revue scientifique Nature2 •
Ce logiciel succède au logiciel AlphaGo qui avait battu le cham-
pion du monde de jeu de go l'année dernière, une performance que
peu de spécialistes croyaient possible pour un ordinateur.
Mais AlphaGo Zero, contrairement à son prédécesseur qui
avait été «nourri» de toutes les parties de go jouées par les plus
grands champions humains, n'a jamais vu une seule partie de go
jouée par les humains! Et en trois jours seulement, en jouant contre

1. Voir le site : http://blogs.lexp ress.fr/attali / 2016/1 1/ 07 /m ais-que-disent-elles/ ; la


publication originale est disponible sur https://arxiv.org/ abs/ 1610.06918.
2. Po u r ce que représente cette avan cée, voir le sit e: https://www.contrepoints.
o rg/20 17/ 10/ 21/301430- intelligence-artific ielle- n ouvelle-performa nce-dalphago-
din gue; po ur la pu blicatio n o ri ginale, vo ir : htt ps://www.n ature.com/ arti cles/
na ture24270 .epdf?au th or_access_token = VJXbVjaS HxF octQQ4p2k4tRgNOjAjWel9j nR3
Zo TvOPVW4gB86EEpGqT RDtp lz- 2rmo8-KG06gq Vob USNSCFeHILHc VFUeMsbvwS-
lxjqQGg98faovwjxeTUgZAUMnRQ.

8 UN SAUT QUANTIQUE DE l_A CONSCIENCE


lui-même, il est devenu capable de battre par 100 à 0 le logiciel qui
avait battu le champion du monde!
Les ordinateurs vont forcément passer le test de Turing, c'est-
à-dire qu'ils simuleront si bien la parole humaine que, lors d'une
conversation, il ne sera plus possible de savoir si l'on parle à un
ordinateur ou à un être humain3• Nous allons vivre au xxresiècle
entourés de robots qui auront l'air d'être conscients, mais seront-ils
conscients ou le simuleront-ils seulement?
De la réponse à cette question dépend notre avenir. Si une
intelligence artificielle peut vraiment être consciente comme nous
le sommes, alors l'Humanité ne dépassera pas le xxresiècle comme
l'affirment déjà un certain nombre de penseurs et de prospecti-
vistes4 - certains s'en réjouissant, et nous promettant un avenir
éternel grâce à la fusion avec les machines (ce sont les tenants
du transhumanisme), d'autres, parmi les plus grands esprits de
la planète, comme Bill Gates, Elon Musk ou Stephen Hawking
demandant un moratoire immédiat sur toute recherche en intel-
ligence artificielle, car il s'agit pour eux du risque le plus important
que court l'espèce humaine5.
On voit donc tout l'enjeu que cache cette simple question :
quelle est la nature de notre conscience?

Mario Beauregard fait partie de cette très petite minorité de


spécialistes du cerveau qui affirme avec force que la conscience
est« extraneuronale », selon l'expression diffusée en France par le
docteur Jean-Jacques Charbonier6 , un de nos meilleurs spécialistes
de l'étude des expériences d'approche de la mort.
Mario Beauregard a effectué des études au retentissement
mondial, comme celle où des religieuses devaient se remémorer
leurs expériences mystiques dans un scanner (imagerie par

3. Voir ici un des robots le plus proche de passer ce test: https: / /www.youtube.com/
watch?v=dMrX08PxUNY.
4. Paul Jorion, Le dernier qui s'en va éteint la lumière, Fayard, 2016.
5. http://www.lemonde.fr/ pixels/ article/2015/01 / 13/ des-scientifiques-americains-s-
inquietent-de-1-evolution-de-l-in telligence-artificielle_4554856_4408996.html.
6. Jean-Jacques Charbonier, La Conscience intuitive extraneuronale, Guy Trédaniel éditeur,
2017.

PRÉFACE 9
résonance magnétique fonctionnelle ou IRMf), qui ont montré
certaines limites du paradigme réductionniste dans lequel la
conscience (ou l'expérience mystique) est localisée dans des zones
bien particulières du cerveau, mais il va ici beaucoup plus loin.

Après un premier chapitre dans lequel il reprend un certain


nombre d'études montrant que la conscience peut agir sur notre
corps, nos gènes, notre système immunitaire, en fonction de nos
pensées et de notre état d'esprit et que, donc, il est difficile d'af-
firmer qu'elle n'est qu'une simple production de ce corps, il aborde,
dans une synthèse saisissante, toutes les données qui peuvent nous
permettre de penser que la conscience est indépendante de notre
cerveau.
Certes, elle a besoin du cerveau pour s'exprimer dans ce monde,
mais cela ne prouve en aucune façon l'hypothèse selon laquelle le
cerveau est le créateur de cette conscience, comme le montre sa
métaphore du poste de télévision: si vous cassez quelques compo-
sants de votre téléviseur, vous n'aurez plus d'images, cela ne veut
pas dire que l'image et le son ont été créés par votre téléviseur! Le
même raisonnement peut être opposé à tous ceux qui prétendent
que la conscience est altérée quand un sujet est victime de lésions
au cerveau. Il est possible qu'elle soit intacte mais ne puisse simple-
ment plus s'exprimer.

Mario Beauregard nous fait parcourir les résultats d'expé-


riences où les perceptions peuvent se produire par-delà l'espace
(vision à distance), mais aussi le temps (les prémonitions), où la
conscience peut déplacer des objets (la télékinésie), modifier des
générateurs aléatoires, mais aussi agir sur des plantes et des bacté-
ries, guérir des humains, y compris à distance .. .
Et nous rappelle les principaux cas concernant les sorties du
corps, qu'elles soient involontaires, lors des expériences d'approche
de la mort, ou volontaires, en ce qui concerne les sorties du corps
faites par certains sujets particulièrement «doués» pour cela.
Mais il va encore beaucoup plus loin, il se rend dans des contrées
que bien peu de scientifiques osent explorer, puisqu'il nous offre
une synthèse des travaux portant sur les communications sollicitées

10 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


avec les morts (ce qu'on appelle la « transcommunication ») et qui
ont pour objectif de recevoir des informations directement de l'au-
delà (il existe aussi des cas intéressants de communications non
sollicitées). Bien entendu, il n'oublie pas non plus de mentionner
la possibilité de recevoir ces informations via les médiums et décrit
des expériences faites pour confirmer leurs affirmations. Il se tourne
ensuite vers la réincarnation et vers des travaux comme ceux d'Ian
Stevenson et de son équipe, et les fascinantes études portant sur les
«marques de naissance» - les cas où un enfant affirme se souvenir
avoir été une autre personne dans une vie antérieure et donne des
précisions exactes sur la vie de cette personne, mais porte égale-
ment une marque à l'endroit où cette personne a reçu en mourant
une balle de fusil ou un coup de couteau par exemple!
Une des découvertes que j'ai faites en lisant cet ouvrage, c'est
l'étude sur les «vies entre les vies» qui est rapportée au chapitre 7,
car, bien évidemment, s'il y a réincarnation, il y a aussi un «temps
de latence » où l'âme se situe dans un autre niveau de réalité. Mais
cela a été rarement étudié autrement que par les «témoignages»
rapportés par des médiums. D'où l'intérêt des régressions sous
hypnose, effectuées par un scientifique au départ athée, décrites
dans ce chapitre.
Enfin, il aborde des expériences spirituelles qui ont le pouvoir
de transformer la vie des gens telles que l'ouverture de la Kundalini,
mais aussi les expériences chamaniques qui s'accompagnent de
prises de produits psychotropes (tout en soulignant bien évidem-
ment que ces expériences ne sont pas sans danger et ne doivent
pas être tentées par n'importe qui).
Ces expériences sont pour lui, d'une certaine façon, des
modèles de la manière dont notre conscience individuelle pourrait
«revenir à la Source», à une conscience cosmique unifiée rejointe
après notre passage dans ce monde.

La force de cet ouvrage réside dans la synthèse qu'il propose. Il


ne s'agit ni d'un ouvrage sur le souvenir des vies antérieures ni d'un
ouvrage sur les expériences d'approche de la mort et les sorties du
corps, sur les différentes formes de parapsychologie, ou encore sur
les médiums, mais de tout cela à la fois!

PRÉFACE 11
Et c'est l'effet de masse qui s'en dégage qui est important. Si la
conscience est capable de voir à distance, y compris dans le futur,
si elle peut sortir de nos corps, agir sur des objets à distance et sur
d'autres êtres vivants, survivre à la mort et se réincarner dans un
nouveau corps, alors il ne reste rien du matérialisme!
Alors, c'est que la conscience est bien, comme le croit Mario
Beauregard, une constituante fondamentale de l'Univers, au même
titre que la matière, l'énergie, le temps ou l'espace, et qu'elle ne
peut donc pas être altérée par la mort de notre corps physique.

Certes, les fameux sceptiques, dont Mario Beauregard nous


dit qu'ils ne sont que des «pseudo-sceptiques» - car au lieu de
regarder sans a priori toutes les pièces du dossier, ils ont décidé à
l'avance de la conclusion de leurs études et de l'inexistence de tous
les phénomènes rapportés ici -, ne manqueront pas de pointer la
faiblesse de telle ou telle étude, de tel ou tel résultat. C'est le prix à
payer quand on mentionne des« domaines orphelins», c'est-à-dire
des domaines que la science «officielle», celle qui est financée par
les états et grands organismes de recherche nationaux et interna-
tionaux, refuse d'investiguer à cause des a priori conceptuels qui
existent sur la nature de la réalité dans les milieux en question.
Pour pouvoir continuer à affirmer qu'un phénomène n'existe
pas, la méthode la plus sûre n'est-elle pas de refuser de l'étudier
sérieusement?

L'ouvrage de Mario Beauregard est donc d'une très grande


importance, car cet effet de masse qu'il produit, en rassemblant
toutes ces informations, peut pousser le grand public à réclamer
que ces phénomènes soient investigués sérieusement, de la même
façon qu'en Suisse, grâce à l'existence du référendum d'initiative
populaire, tous les CHU ont désormais l'obligation d'avoir un
centre de recherche sur les médecines alternatives7, chose malheu-
reusement encore impensable en France.

7. https:/ /www .swissinfo.ch /fre/la-suisse-a-voté/7403472.

12 UN SAUT QUA NTIQUE DE LA CO NSCIENCE


Même si cela peut constituer un risque hélas très important
pour leur carrière, cela peut aussi encourager de jeunes scienti-
fiques à s'impliquer dans les recherches en neurosciences pour
faire progresser les domaines mentionnés ici, et non simplement
confirmer les a priori qui règnent dans ce domaine. Ils pour-
ront néanmoins y être encouragés par le « manifeste pour une
science postmatérialiste » qui a été élaboré à l'instigation de Mario
Beauregard et qui a recueilli plus de 200 signatures8, ce qui montre
que si cette mouvance est minoritaire, elle n'est pas marginale.

Mais je prédis que l'ouvrage de Mario Beauregard sera encore


plus important demain.
Quand nous serons entourés de robots humanoïdes ayant l'air
conscient, quand les progrès de l'intelligence artificielle feront
douter les croyants les plus endurcis de l'existence de l'âme, il
faudra lire et relire ce livre pour se convaincre que, jusqu'à preuve
du contraire, une machine peut simuler la conscience mais qu'elle
ne peut pas être consciente, ce qui nous assurerait que, si Mario
Beauregard et les chercheurs qui l'accompagnent ont raison, l'hu-
manité a encore un avenir à titre collectif, comme nous en avons
un après la mort, à titre personnel.

8. Pour le texte en frança is voi r : https://www.inrees.com/articles/Manifeste-science-


Beauregard/ . La liste des signataires se t rouve ici : h tt p://ope nsciences.org/ about/
manifesto-for-a-post-materialist-science.

PRÉFACE 13
INTRODUCTION

L'EFFONDREMENT
DU MATÉRIALISME
SCIENTIFIQUE
«On ne peut rendre compte de la conscience
en termes de physique. Car la conscience
est absolument fondamentale. On ne peut en rendre compte
en termes de quoi que ce soit d'autre. »
ERWIN SCHRODINGER

D'OÙ JE VIENS ET LA GENÈSE


DE MON PROGRAMME DE RECHERCHE

Des membres du grand public, de même que des journa-


listes, me demandent parfois pourquoi je fais des recherches
sur la conscience, les expériences transcendantes et les rapports
entre l'esprit et le cerveau 1• Jusqu'à présent, je suis demeuré
volontairement vague à ce sujet, car j'étais désireux de protéger
ma réputation. Mais, comme cela ne m'importe plus, j'ai décidé

1. Il existe plusieurs définitions de la conscience et de l'esprit. Dans cet ouvrage, la


«conscience » est la faculté mentale qui permet d'appréhender de façon subjective les
phénomènes extérieurs (par exemple, une voiture qui approche dans la rue) et intérieurs
(par exemple, nos pensées et émotions; cela inclut la conscience de notre propre existence,
que l'on appelle la« conscience de soi»). Pour ce qui est de 1'« esprit», ce concept réfère ici
aux processus et événements mentaux conscients et inconscients (par exemple, perceptions,
pensées, mémoires, volonté et imagination). Dans ce contexte, l'esprit n'est pas une substance
(une entité), mais plutôt une pluralité de fonctions mentales reliées entre elles, comme
l'attention, la pensée, la raison, la mémoire et les émotions.

15
d'expliquer franchement dans ce livre pourquoi j'ai choisi de
conduire un tel programme de recherche.
En tant que scientifique, les évidences empiriques en rapport
avec mes thématiques de recherche ont bien sûr joué un rôle central
dans l'élaboration de ce programme. Ces évidences, qui reposent
sur l'observation ou sur l'expérimentation, sont examinées au fil
des chapitres de cet ouvrage. Toutefois, pour être honnête, je dois
avouer que mes travaux de recherche ont été guidés, d'abord et
avant tout, par des expériences spirituelles marquantes que j'ai
vécues à divers moments de ma vie.
Comme je ne veux pas jouer au gourou ou me marginaliser, je
ne mettrai pas l'emphase sur ces expériences en les décrivant de
manière exhaustive. Je dois cependant vous parler brièvement de
quelques-unes d'entre elles. Cela vous aidera à mieux comprendre
qui je suis et d'où je viens. La première de ces expériences se
produisit alors que je n'avais que 8 ans.
La ferme de mes parents était située à proximité d'une forêt.
De temps à autre, je me baladais dans cette forêt qui me semblait
tellement vibrante et remplie de mystère! En 1970, par une magni-
fique journée d'été, je rn'aventurai dans la forêt mystérieuse. Il
faisait chaud et, après avoir marché pendant un bon moment, je
réalisai que j'étais fatigué. Je décidai donc de m'asseoir sur une
grosse roche grise. J'observais les beaux arbres qui m'entouraient
tandis que j'étais assis sur cette roche imposante. Au bout de
quelques minutes, je commençai à ressentir une forte connexion
avec les arbres et la roche, que je percevais maintenant comme
vivante. Il m'apparut alors que la roche, les arbres et moi-même
faisions partie d'un Tout beaucoup plus grand que mon «petit
moi». Suite à cette expérience cruciale, le but de ma vie devint
extrêmement clair: je deviendrais un jour un «savant» qui contri-
buerait à démontrer que l'essence humaine n'est pas produite par
le cerveau.
Près d'une douzaine d'années plus tard, un nouveau cycle de
vie débuta pour moi. Ce cycle nouveau fut ponctué par d'autres
expériences spirituelles décisives. Je parle d'un cycle de vie nouveau
parce que, jusque-là, j'avais eu le bonheur de bénéficier d'une santé
parfaite, que je perdis brusquement.

16 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Un matin du mois de janvier 1982, alors que je m'éveillais, je
constatai que mon corps ne fonctionnait plus du tout de la même
façon que la veille, et que ma perception visuelle avait changé
dramatiquement. Plus précisément, j'étais épuisé et je ressentais
de la douleur dans l'estomac, dans le dos ainsi que dans plusieurs
articulations. De plus, j'étais étourdi et j'avais la nausée de même
que de la difficulté à respirer. J'expérimentais également une sorte
de brouillard mental et ma perception visuelle du monde exté-
rieur n'était plus du tout la même que celle que j'avais toujours eu
l'habitude d'avoir: en fait, j'avais l'impression que tous les objets
dans mon champ visuel oscillaient de manière continue.
Évidemment, je me sentais beaucoup trop malade et bizarre
pour pouvoir suivre mes cours à l'université. Je ne comprenais
pas ce qui m'arrivait mais je me dis que quelque chose de grave
était en train de se passer. Au cours de la soirée qui suivit, j'appelai
mes parents pour leur faire part de ce que je vivais. Ceux-ci me
demandèrent de retourner à la maison familiale le plus rapidement
possible. Ce que je réussis à faire le lendemain, par pure force de
volonté, mais avec peine et misère.
Je demeurai couché dans un lit pendant près d'une année.
Comme je n'avais plus de force et que je ne pouvais presque pas
manger, je fus contraint d'abandonner temporairement mes études
universitaires.
Bien entendu, mes parents étaient au désespoir, et ils se
sentaient terriblement impuissants. Comme moi, ils se disaient
qu'il fallait absolument découvrir la raison de mon état car cela
permettrait peut-être de me sortir de cette terrible situation.
Ma mère m'amena voir plusieurs médecins spécialistes, dont
un neurologue, un psychiatre, un ophtalmologiste, un gastro-
entérologue ainsi qu'un interniste. Assumant que je devais être
hypocondriaque, quelques-uns de ces médecins décidèrent de
ne pas pousser l'investigation. Un autre médecin affirma que
je montrais les signes d'une schizophrénie, et il me prescrivit
un antipsychotique que je m'empressai de jeter à la poubelle.
Les autres médecins spécialistes, qui étaient perplexes devant
l'amoncellement mystérieux de mes symptômes, me firent subir
divers examens qui s'avérèrent tous négatifs.

INTRODUCTION -» L'EFFONDREMENT DU MATERIALISME SCIENTIFIQUE 17


Je me sentais mourir lentement et je ne pouvais pas récon-
cilier ce que je vivais avec l'expérience qui avait marqué mon
enfance. Cela ne semblait avoir aucun sens et me rendait amer:
en effet, jamais dans un état aussi lamentable je ne pourrais réussir
à accomplir ma mission de vie. Je me retrouvais dans un endroit
très sombre, et des pensées suicidaires commençaient à traverser
le champ de ma conscience car je ne pouvais plus vivre ainsi.
Un soir, désespéré, je poussai mentalement un cri vers le ciel. Il
faut croire que ma supplique fut entendue, car, quelques jours plus
tard, au beau milieu de la nuit, j'eus soudainement l'impression
qu'on me sortait de mon corps physique par la région du cœur. Je
perçus alors un Être de Lumière qui irradiait un amour immense
et inconditionnel. Cet Être me rassura en me disant télépathique-
ment que ce que je vivais n'était pas vraiment une maladie mais
plutôt un processus de transmutation. Il me dit aussi que je n'étais
pas seul et que je me devais de m'accrocher. Par ailleurs, pour me
donner confiance, cet Être de Lumière me parla d'événements qui
se produiraient sous peu, et il mentionna aussi que l'ampleur de
mes symptômes diminuerait progressivement au cours des mois
à venir. Tout ce que l'Être de Lumière prédit se réalisa. Beaucoup
d'autres choses se passèrent durant cette expérience déterminante,
cependant je m'arrêterai ici, car l'objectif premier de ce livre n'est
pas de vous parler de mes expériences personnelles.
Par la suite, je retrouvai suffisamment de force pour pouvoir
reprendre mes études universitaires, et mes symptômes se mirent
à régresser lentement mais sûrement, tel que l'Être de Lumière
l'avait prédit. Malgré cela, la pente fut difficile à remonter.
Sept ans après le début de mes problèmes de santé, un ami
m'introduisit auprès d'un médecin et microbiologiste réputé de
l'hôpital Hôtel-Dieu de Montréal. Ce dernier me fit faire une
batterie approfondie de tests médicaux. Il identifia dans mon orga-
nisme la présence d'agents viraux, dont le virus d'Epstein-Barr, le
cytomégalovirus et le Coxsackie. Ensemble, ces virus pouvaient
expliquer la plupart de mes symptômes. J'appris aussi que j'avais
fait une vasculite cérébrale, c'est-à-dire une inflammation des
vaisseaux sanguins du cerveau. Compte tenu de la gravité des infec-
tions virales détectées, ce médecin microbiologiste se demanda

18 UN SAUT Q UA NTIQUE DE LA CONSCIENCE


comment j'avais réussi à tenir debout et à poursuivre mes études
à l'université.
Au total, il fallut douze longues années avant que je retrouve
une santé parfaite. Durant ce cycle de vie, mes facultés psychiques
se développèrent de façon remarquable et, depuis la fin de ce long
épisode, je suis demeuré en contact étroit avec le monde spirituel.
Je revis le médecin microbiologiste une dernière fois lorsque
tout fut terminé. Celui-ci me dit qu'il n'y avait pas d'explication
pour ma rémission, qui était tout simplement« miraculeuse» d'un
point de vue médical.

LA SCIENCE N'EST PAS SYNONYME


DE MATÉRIALISME

Cela peut paraître étonnant à plusieurs lecteurs mais la plupart


des hommes et femmes de science actuels ignorent que ce qui
a été appelé la «vision du monde scientifique moderne» repose
en grande partie sur des postulats métaphysiques, c'est-à-dire
des hypothèses au sujet de la nature de la réalité2• Ces hypothèses
furent d'abord mises en avant par des philosophes de la Grèce
antique qui ont précédé Socrate. Ces philosophes, dits « présocra-
tiques», proposèrent plusieurs idées et théories intéressantes qui
nous sont parvenues.
À première vue, cette ignorance crasse, qui caractérisait aussi
plusieurs scientifiques des générations précédentes, peut ne pas
sembler si importante. Mais ce n'est pas du tout le cas, car une telle
ignorance a eu un effet négatif considérable. Effectivement, cette
ignorance est en grande partie responsable du retard qu'a pris la
science dans les domaines de recherche liés à l'intériorité humaine.
Cela devient évident si l'on prend comme point de comparaison les
champs d'application des sciences orientées vers le développement
technologique. Qui plus est, c'est cette ignorance qui a permis
de rendre la majorité des scientifiques prisonniers d'une transe
idéologique qui a duré pendant quelques siècles. Cela n'est guère

2. Burtt, E.A., The M etaphysical Foundations ofModern Science, Londres, Routledge, 1949.

INTRODUCTION oi> L'EFFONDREMENT DU MATÉRIALISME SCIENTIFIQUE 19


surprenant puisque c'est la connaissance, surtout lorsqu'elle est
désintéressée, qui constitue le meilleur antidote contre l'idéologie.
Plusieurs siècles après les présocratiques, les postulats philoso-
phiques, qui formèrent la vision du monde scientifique moderne,
furent associés avec la physique classique. Ces postulats incluent le
matérialisme - l'idée que la matière est la seule réalité et que tout
dans l'univers est composé d'ensembles de particules matérielles et
de champs physiques - ainsi que le réductionnisme, la notion selon
laquelle les choses complexes ne peuvent être comprises qu'en
les réduisant à l'interaction de leurs parties ou à des choses plus
simples ou fondamentales, telles que des particules matérielles.
D'autres postulats incluent le déterminisme - l'idée que les états
futurs de systèmes physiques ou biologiques peuvent être prédits
en se basant sur leurs états présents - et le mécanisme, la notion
qui veut que le monde fonctionne comme une énorme machine
déterminée par des lois physiques immuables.
Pour les pères fondateurs de la physique classique - tels que
Galilée, Descartes et Newton - ces postulats philosophiques
constituaient des hypothèses utiles pouvant les guider dans leur
exploration du monde matériel. Cependant, ces pionniers de la
science moderne, qui étaient aussi des hommes spirituels, ne
croyaient pas que le monde pouvait se réduire uniquement à sa
dimension matérielle. Mais cette nuance capitale finit par être
oubliée par leurs successeurs et, au cours du x1xe siècle, les postu-
lats en question se changèrent en dogmes et s'unirent pour former
un système de croyances qui devint connu sous le nom de «maté-
rialisme scientifique » 3•
Ce système de croyances implique que notre conscience et tout
ce que nous expérimentons subjectivement - par exemple, nos
perceptions, nos pensées, nos émotions, nos souvenirs, notre libre
arbitre, notre sens de l'identité personnelle et nos illuminations
spirituelles - sont identiques ou peuvent être réduits aux processus

3. Dans ce livre, les termes « matériel » et « physique», ainsi que « matérialisme» et


«physicalisme», sont utilisés de manière interchangeable. Le physicalisme est la doctrine
selon laquelle tout ce qui existe est de nature physique, c'est-à-dire qu'il n'y a rien en dehors
des choses dites physiques.

20 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


électriques et chimiques se déroulant dans notre cerveau. De
surcroît, pour le matérialisme scientifique, nos pensées ne peuvent
avoir aucun effet sur notre cerveau ni notre corps, sur nos actions
et sur le monde physique. En d'autres termes, nous, êtres humains,
ne sommes que des machines biophysiques complexes et, par
conséquent, notre personnalité et notre conscience retournent
au néant lorsque nous mourons.
L'idéologie matérialiste devint extrêmement dominante dans
le milieu académique au cours du xxe siècle. Tellement dominante,
en fait, qu'une majorité de scientifiques se mirent à croire que
cette idéologie reposait sur des évidences empiriques et qu'elle
représentait la seule conception rationnelle possible du monde. Les
scientifiques comprirent aussi tacitement qu'ils pouvaient mettre
en danger leur carrière s'ils osaient remettre en question cette
idéologie dogmatique et intolérante.
Force est d'avouer que les méthodes scientifiques basées sur
la philosophie matérialiste se sont avérées hautement fructueuses,
car elles ont permis une meilleure compréhension de la nature,
ainsi qu'un plus grand contrôle et une liberté accrue par le biais
des avancées technologiques. Toutefois, il faut aussi reconnaître
que la dominance quasi absolue du matérialisme dans le milieu
académique a grandement étouffé les sciences et entravé le déve-
loppement de l'étude scientifique de l'esprit, de la conscience et
de la spiritualité. La foi en cette idéologie, comme cadre explicatif
exclusif de la réalité, a amené les scientifiques à négliger la dimen-
sion subjective de l'expérience humaine. Cela a conduit à une
conception fortement déformée et appauvrie de nous-mêmes et
de notre place dans la nature.

La science est d'abord et avant tout une méthode non dogma-


tique et ouverte d'acquisition de connaissances au sujet de la
nature. Cette méthode est basée sur l'observation, l'investigation
expérimentale et l'explication théorique de phénomènes. En ce
sens, la science n'est pas synonyme de matérialisme et ne doit être
influencée par aucune croyance, dogme ou idéologie.

INTRODUCTION * L'EFFONDREMENT DU MATÉRIALISME SCIENTIFIQUE 21


LA «DÉMATÉRIALISATION» DU MONDE

En avril 1900, le physicien britannique Sir William Thomson,


aussi connu sous le nom de Lord Kelvin, affirma avec assurance,
lors d'une conférence qu'il donna à la Société royale de Londres,
qu'il n'y avait pratiquement plus rien à découvrir en physique. Lord
Kelvin reconnut toutefois que deux «petits nuages» assombris-
saient le ciel serein de sa discipline: le problème de l'éther et celui
du rayonnement du corps noir4. Il prétendit aussi que ces problèmes
mineurs, qui constituaient des anomalies pour la physique clas-
sique, seraient bientôt résolus en affinant les théories existantes.
Lord Kelvin n'aurait pu se tromper davantage car ces deux petits
nuages entraînèrent un bouleversement radical de la physique: le
problème de l'éther fut éventuellement solutionné par la théorie
de la relativité tandis que celui du rayonnement du corps noir fut
dénoué par Max Planck. Pour ce faire, ce dernier proposa une hypo-
thèse audacieuse qui mena bientôt à la naissance de la mécanique
quantique (MQ), une branche révolutionnaire de la physique.
La nouvelle physique invalida les postulats métaphysiques
sous-tendant le matérialisme scientifique en démontrant que
les atomes et les particules subatomiques ne sont pas réellement
des objets solides - ils n'existent pas de manière certaine en des
endroits et des temps définis: effectivement, dans le domaine
quantique, les atomes et les particules subatomiques montrent
des «tendances à exister5 », formant ainsi un monde de poten-
tialités ou de possibilités plutôt que de choses ou de faits. La MQ
a ainsi «dématérialisé» le monde en montrant qu'il n'est pas du
tout composé de petits grains de matière comparables à de minus-
cules boules de billard.
La MQ a également démontré la nécessité d'introduire l'esprit
dans sa structure conceptuelle de base puisqu'il a été découvert
que les particules observées et l'observateur - le physicien et la
méthode utilisée pour l'observation - sont liés: c'est ce qui a été
nommé l'«effet de l'observateur». Ce phénomène révèle que le

4. Voir https://fr.wikipedia.org/wiki/ Fin_de_la_science.


5. Heisenberg Werner, Physics and Philosophy : The Revolution in Modern Science, New
York, Harper and Row, 1976.

22 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


monde physique n'est pas la composante unique ou primaire de
la réalité, et qu'il ne peut être pleinement compris sans faire réfé-
rence à l'esprit. En d'autres termes, comme le disait Wolfgang
Pauli, l'un des fondateurs de la MQ, notre réalité est constituée
de deux aspects complémentaires mais distincts: le physique et le
psychologique, physis et psyché.
L'effet de l'observateur a conduit certains des pionniers de la
MQ - par exemple, Max Planck, Erwin Schrôdinger, John von
Neumann et Eugene Wigner - à proposer que la conscience de
l'observateur était vitale pour l'existence des événements physiques
mesurés, et que les événements mentaux pouvaient influencer le
monde physique. Les résultats d'études récentes étayent cette
interprétation (nous reviendrons plus loin sur ce sujet).
La non-localité (ou non-séparabilité) est une autre découverte
importante de la MQ. Ce principe repose sur l'intrication (ou
enchevêtrement), qui réfère aux connexions instantanées persis-
tant entre les particules (par exemple, des photons ou des électrons)
ayant interagi ensemble avant d'être séparées. Étonnamment,
ces connexions persistent même si les particules en question
sont séparées par des distances gigantesques (par exemple, des
milliards d'années-lumière). Cet aspect contre-intuitif de la
nature, qui était décrit par Albert Einstein comme une «action
surnaturelle à distance», a été confirmé expérimentalement dans
plusieurs laboratoires depuis les années 1970. La non-localité et
l'intrication suggèrent que l'univers est un tout indivisible. Comme
je le démontrerai dans cet ouvrage, le principe de non-localité ne
semble pas être confiné au domaine microphysique puisqu'il existe
aussi dans le monde de la psyché.

Il est navrant de constater que, même si la MQ a invalidé les


postulats métaphysiques du matérialisme, certains scientifiques et
philosophes, par ignorance ou par mauvaise foi, s'accrochent encore
à cette superstition. Certains d'entre eux, les « fondamatérialistes6 »,
se comportent d'ailleurs comme de véritables fanatiques religieux
afin de défendre ce système de croyances erroné et obsolète.

6. Ce terme savoureux nous vient du philosophe américain Neal Grossman.

INTRODUCTION tt L"EFFONDREMENT DU MATÉRIALISME SCIENTIFIQUE 23


UN ÉVÉNEMENT CHARNIÈRE

De concert avec les chercheurs en psychologie Gary Schwartz,


de l'université de l'Arizona, et Lisa Miller, de l'université Columbia,
j'ai participé il y a quelques années à l'organisation du Sommet
international sur la science postmatérialiste, la spiritualité et
la société. Le but de cette rencontre, qui s'est tenue à Tucson en
février 2014, était d'abord d'examiner les divers types d'évidences
empiriques supportant une science postmatérialiste. Une discus-
sion a aussi eu lieu au sujet de l'évolution et de la reconnaissance
d'un paradigme postmatérialiste, ainsi que de son impact potentiel
sur la spiritualité et la société. Des scientifiques reconnus interna-
tionalement et œuvrant dans divers champs d'expertise - dont la
biologie, les neurosciences, la psychologie, la médecine et la para-
psychologie - ont participé à cet événement charnière.
Les conclusions du sommet furent publiées, quelques mois
plus tard, sous la forme d'un document intitulé le Manifeste pour
une science postmatérialiste. Ce manifeste a été publié dans la revue
scientifique Explore: The Journal of Science and Healing. Depuis
sa publication, plus de 200 scientifiques et philosophes du monde
entier, dont certains très prestigieux, ont signé ce document.
D'aucuns ont critiqué ce manifeste en disant que mes collè-
gues et moi sommes des scientifiques non conformistes, et que
notre point de vue ne représente pas la position dominante. Mais,
comme l'a noté dans un article fort élogieux à notre égard Dave
Pruett7 - un ancien chercheur de la NASA qui est professeur
émérite de mathématiques à l'université James Madison: «Il ne
faut pas oublier que ni Copernic, ni Galilée, ni Kepler, ni Einstein
ne représentaient la position scientifique courante et dominante.
Ces grands esprits remirent en question le statu quo scientifique,
et on finit éventuellement par leur donner raison et accepter leurs
théories.»

7. http: //ww w.huffingtonpo st.co m / dave-p ruet t/ toward -a-postmaterialistic-


science_b_5842730.html.

24 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Notre sommet sur la science postmatérialiste a également
mené à la Campagne pour une science ouverte (en anglais
Campaignfor Open Science) ainsi qu'à la création d'un site Web
du même nom 8. Ce site est un portail faisant la promotion de
travaux de recherche qui s'inscrivent au-delà des dogmes qui
influencent encore beaucoup trop la science d'aujourd'hui. Les
principaux domaines de recherche couverts incluent les études sur
la conscience, la médecine intégrative et la guérison, les approches
scientifiques postmatérialistes, ainsi que les nouveaux aspects de
la cosmologie, de la physique, de la chimie et de la biologie. Le
site Web fait référence à des livres et permet aussi l'accès à des
vidéos, des articles, ainsi qu'à des liens vers les sites de chercheurs
et d'organisations reconnus pour leur ouverture d'esprit.
Plus récemment, j'ai été impliqué dans l'édition - en colla-
boration avec Gary Schwartz et Natalie Trent, une jeune
neuroscientifique de l'université Harvard - d'une anthologie inti-
tulée Expanding Science : Visions of a Post-Materialist Paradigm.
Plusieurs chercheurs visionnaires et novateurs œuvrant dans
diverses disciplines (par exemple, Amit Goswami, Rupert
Sheldrake, Larry Dossey, Pim van Lommel et Dean Radin) et
quelques philosophes ont participé à ce recueil. Celui-ci vise
principalement à examiner les évidences empiriques remettant en
question la position matérialiste. L'anthologie vise aussi à discuter,
à partir de nombreux points de vue, du paradigme postmatérialiste
émergeant et de ses implications, ainsi que de l'élargissement du
cadre conceptuel de la science. Cet ouvrage important s'adresse
à un public non spécialisé.
Dernièrement, j'ai participé à une autre réunion importante,
qui s'est également tenue à Tucson, en Arizona. Cette réunion
a marqué la création de l'Académie pour l'avancement des sciences
postmatérialistes. L'un des objectifs de cette organisation sera de
promouvoir un changement culturel en lien avec notre compré-
hension de l'expérience humaine et de la réalité. Pour ce faire,
cette académie encouragera, de diverses manières, les scientifiques

8. http://opensciences.org.

INTRODUCTIO N -» L'EFFONDREMENT DU MATÉRIALISME SCIENTIFIQUE 25


à aller au-delà des limites imposées par une approche exclusive-
ment matérialiste et réductionniste de la science.

POURQUOI CE LIVRE?

Même si la MQ est apparue il y a presque un siècle de cela, la


plupart des gens - et même les scientifiques qui ne sont pas physi-
ciens - demeurent malheureusement trop peu familiers avec ses
implications à la fois fascinantes et profondes. Ils ignorent donc
que cette branche de la physique démontre que les postulats philo-
sophiques du matérialisme scientifique ne tiennent absolument
pas la route. C'est ce qui fait qu'une frange significative de la société
demeure toujours sous l'influence d'une conception mécaniste,
matérialiste et réductionniste du monde. Par exemple, différentes
sphères de l'activité humaine - comme la politique, l'économie,
l'éducation, la santé et les médias - sont encore guidées en partie
par cette conception dépassée dont il est grand temps de nous
défaire.
Cette situation fait l'affaire de certains matérialistes qui
sont également des athées militants, tels que les scientifiques
Richard Dawkins, Lawrence Krauss, Richard C. Lewontin et Paul
Zachary Myers, ainsi que les philosophes Daniel Dennett, Patricia
Churchland et André Comte-Sponville. Ces défenseurs du rationa-
lisme sont activement impliqués dans une guerre culturelle contre
la religion, et ils ont la prétention de représenter l'autorité cognitive
ultime. Ils professent la croyance naïve et présomptueuse que, tôt
ou tard, les neurosciences finiront par être capables de réduire
complètement l'esprit et la conscience à ce qui se passe dans le
cerveau. Ce qu'il faut savoir à ce propos, c'est que cette croyance
prophétique, appelée par le philosophe des sciences Karl Popper le
«matérialisme de promesse», était déjà professée par des tenants
d'un matérialisme athée au xvme siècle.

Les théories matérialistes échouent lamentablement à expli-


quer comment le cerveau pourrait produire les fonctions mentales
et la conscience. Ces théories sont aussi incapables d'expliquer ce

26 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


que le philosophe David Chalmers appelle le «problème difficile»
de la conscience: pourquoi et comment les aspects expérientiels
de nos vies mentales (que les philosophes appellent les qualia),
auxquels nous accédons par l'introspection, résultent-ils de
l'activité d'un groupe de neurones dans le cerveau? Pourquoi des
états physiques particuliers du cerveau font que la lavande nous
apparaît violette ou bien qu'il est douloureux de se faire piquer
par une guêpe ?
Pour arriver à une meilleure compréhension des rapports
esprit-cerveau, il faut sortir du cadre étouffant et limitatif du
matérialisme scientifique, et considérer l'ensemble des recherches
sur la conscience. Celles-ci mettent en évidence toute une pano-
plie d'évidences empiriques qui, comme les découvertes de la
MQ, sont totalement incompatibles avec le vieux paradigme
matérialiste. Ces évidences empiriques sont examinées méticuleu-
sement dans le présent ouvrage. Elles incluent la capacité mentale
d'influencer l'activité du cerveau, du réseau psychosomatique et
des gènes; les phénomènes psi tels que la télépathie, la vision à
distance, la précognition, l'influence mentale sur des systèmes
physiques et des organismes vivants; les phénomènes associés à la
mort comme les expériences de mort imminente, les expériences
de mort partagées et les visions de lit de mort; la réincarnation;
et les expériences transcendantes. Dans la dernière section de cet
ouvrage, je présente ma vision des principaux éléments compo-
sant le paradigme postmatérialiste. Plusieurs de mes collègues et
moi-même sommes convaincus que ce paradigme nous mènera
à la prochaine grande révolution scientifique. Les implications
de ce nouveau paradigme sont donc énormes, tant pour la vie
quotidienne sur le plan individuel que pour l'évolution future de
notre espèce.

Puisse ce livre transformer votre vie en vous libérant définiti-


vement de la camisole de force matérialiste.

INTRODUCTIO N -1> L'EFFONDREMENT DU MATÉRIA LISME SCIENTIFIQUE 27


CHAPITRE 1

DES PENSÉES QUI


TRANSFORMENT LE CORPS
«Votre pire ennemi ne peut pas vous blesser autant
que vos pensées. Mais une fois maîtrisées, personne
ne vous aidera autant que vos pensées. »
LE BOUDDHA

QUELQUES DOGMES CENTRAUX EN NEUROSCIENCES

Tous les êtres humains ont besoin de croire, peu importe qu'il
s'agisse de personnes religieuses, de scientifiques ou d'athées. Dans
les cas des athées, ceux-ci croient au «néant» après la mort même
s'ils n'ont aucune preuve de cela. Ils croient aussi que Dieu - ou un
principe transcendant à l'origine du monde - n'existe pas. En ce qui
a trait aux scientifiques et à la science, comme cette dernière est
un produit de l'activité humaine, elle n'est pas immunisée contre
les préjugés et les croyances dogmatiques. Cela est particulière-
ment évident lorsqu'une majorité de scientifiques, œuvrant dans
un domaine spécifique de recherche, adhère massivement à un
dogme. Le statut de vérité inexpugnable du darwinisme en biologie
démontre à quel point l'impact de ce phénomène peut être grand.
Aucune science n'échappe aux dogmes et aux «vérités», qui
changent avec le temps. Ainsi, pendant plus d'un siècle, les cher-
cheurs en neurosciences crurent dur comme fer que de nouveaux
neurones ne pouvaient pas se développer dans le cerveau humain
adulte: on venait au monde avec une quantité maximale de
neurones, et celle-ci ne faisait que diminuer tout au long de la

29
vie. Les neuroscientifiques croyaient aussi que le cerveau adulte
était une machine statique qui n'avait pas la capacité de changer.
Mais, au cours des dernières décennies, ce dogme a été aban-
donné, car plusieurs études ont montré de manière convaincante
que certaines parties du cerveau de l'être humain, et de plusieurs
espèces animales, conservent la capacité de produire de nouveaux
neurones durant toute la vie adulte. Ces études indiquent que,
contrairement à ce que l'on croyait, le cerveau humain adulte
est très plastique. Effectivement, il change continuellement sa
structure et sa fonction en créant de nouveaux neurones et de
nouvelles connexions synaptiques entre les neurones. De plus,
dans le cerveau mature, les réseaux neuronaux existants sont
constamment réorganisés et de nouveaux réseaux sont élaborés.
Cette neuroplasticité fait en sorte que nous ne sommes pas du tout
prisonniers du cerveau hérité à notre naissance.
Tel que mentionné dans l'introduction, un autre dogme
central des neurosciences, celui-là toujours influent, est l'idée que
tous les événements mentaux, la conscience et le soi se réduisent
simplement aux processus physiques et biologiques du cerveau.
À ce sujet, différentes théories matérialistes ont été proposées afin
d'expliquer comment le cerveau produit l'esprit. L'une d'entre
elles est appelée la «théorie de l'identité psychophysique». Selon
cette dernière, nous appréhendons nos processus mentaux et
notre conscience («Je me sens joyeuse») à la première personne,
c'est-à-dire de l'intérieur et de façon subjective; tandis qu'à l'aide
des techniques des neurosciences, notre activité cérébrale est
mesurée à la troisième personne, c'est-à-dire de l'extérieur et de
façon objective («Mon cerveau libère plus de sérotonine lorsque
je suis heureuse»). En d'autres termes, les événements mentaux
et les événements cérébraux sont parfaitement parallèles, comme
les deux faces d'une même pièce. Toutefois, ce sont les états céré-
braux, les impulsions électriques et les réactions chimiques dans
notre cerveau qui créent les états mentaux, et non l'inverse. Cette
conception est défendue par une majorité de neuroscientifiques
contemporains, dont Gerald Edelman et Jean-Pierre Changeux.
L'éliminativisme est une autre théorie matérialiste bien connue
à propos des rapports entre l'esprit et le cerveau. Les philosophes

30 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Paul et Patricia Churchland, ainsi que Daniel Dennett, sont
d'éminents partisans de cette théorie radicale qui nie l'existence
des événements mentaux: notre monde mental est illusoire, et
nous ne faisons qu'imaginer avoir des sensations, des souvenirs,
des émotions et des pensées. L'éliminativisme ne reconnaît que
les processus biophysiques du cerveau. Selon cette perspective,
l' «esprit», la «conscience», le «soi» et le «libre arbitre» sont des
concepts préscientifiques qui relèvent d'idées naïves et simplistes
appartenant à la «psychologie populaire». Les partisans de cette
théorie espèrent que ces concepts seront bientôt éliminés grâce
aux progrès des neurosciences. Quant aux qualia, c'est-à-dire à la
façon dont les choses nous apparaissent individuellement, Daniel
Dennett clame haut et fort que ces aspects expérientiels de nos
vies mentales ne sont aussi que de simples illusions.
Les défenseurs des théories matérialistes affirment souvent,
à tort, que les méthodes en neurosciences - comme, par exemple,
les techniques d'imagerie cérébrale - permettent de mesurer les
événements mentaux. Cela ne peut être plus faux, car ces événe-
ments ne sont pas physiques. En effet, une pensée ne possède
pas de forme, de masse ou de volume. Il n'est pas rare non plus
d'entendre des matérialistes prétendre que les études réalisées
à l'aide de ces méthodes démontrent que le cerveau génère l'esprit
et la conscience. Le fait que les fonctions mentales sont affectées
lorsque le cerveau est endommagé amène de l'eau au moulin de
cette conception, disent ces matérialistes.
Cette conclusion n'est pas juste, car les méthodes en neuro-
sciences ne permettent que de mesurer des corréla-
tions - c'est-à-dire des rapports réciproques - entre les états
cérébraux et les événements mentaux. Ainsi, quand l'état du
cerveau change, l'activité mentale se modifie également; et lorsque
l'activité mentale se modifie, l'état du cerveau se modifie aussi.
Cependant, les corrélations entre l'activité mentale et l'activité
cérébrale n'impliquent pas de causalité et d'identité. Par exemple,
des chercheurs peuvent enregistrer l'activité électrique du cerveau
en utilisant l'électroencéphalographie (ou EEG). Pour ce faire,
des électrodes sont appliquées sur le cuir chevelu d'individus
pendant que ceux-ci vivent une émotion induite par des images

CHAPITRE 1 * DES PENSÉES OUI TRANSFORMENT LE CORPS 31


chargées émotionnellement. Mais les ondes cérébrales enregistrées
par l'EEG sont complètement différentes des émotions qui sont
vécues par les individus. Par ailleurs, la corrélation entre l'activité
électrique du cerveau et la variation de l'état émotionnel de ces
derniers ne signifie pas que les variations dans l'EEG sont la cause
des changements rapportés dans l'état émotionnel.
La croyance erronée sur l'identité des événements mentaux
et de leurs corrélats neuronaux conduit à ce qui a été appelé le
«sophisme méréologique »: l'attribution erronée de propriétés
mentales à des parties du cerveau ou au cerveau lui-même 1• Les
matérialistes qui commettent cette erreur élèvent le cerveau au
niveau d'une entité physique omnipotente, dont les propriétés
permettent d'expliquer tous les phénomènes mentaux. Ces maté-
rialistes ne semblent pas réaliser que c'est la personne - et non
son cerveau - qui est consciente, qui pense, qui décide et qui croit.

LE PUISSANT EFFET PLACEBO

David Kallmes est un neuroradiologue affilié à la fameuse


clinique Mayo, dont le siège est situé à Rochester, dans le
Minnesota. Durant les deux dernières décennies, Kallmes a réalisé
de nombreuses vertébroplasties. Réalisée sous contrôle radiogra-
phique continu, cette technique chirurgicale permet de restaurer
une fracture vertébrale par l'injection d'un type particulier de
«ciment» osseux. Le ciment est entièrement dur après quelques
heures, et, une douzaine d'heures plus tard, le patient peut se
tenir debout.
La vertébroplastie produit des résultats impressionnants,
même lorsque la mauvaise vertèbre est remplie accidentellement
avec le ciment. Intrigué par cette bizarrerie, et suspectant que
d'autres facteurs étaient responsables de l'efficacité de cette procé-
dure médicale, David Kallmes décida de réaliser une étude afin de
déterminer si la vertébroplastie était plus efficace qu'un placebo,

1. Bennett M. R., Hacker P. M. S., Philosophical Foundations of Neuroscience, New York,


Blackwell Publishing, 2003.

32 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


c'est-à-dire un traitement qui ne possède aucune action biologique
mais qui peut être efficace lorsque la personne qui reçoit le placebo
pense recevoir un traitement actif2.
Les médecins sont très conscients du fait que les croyances
et les attentes de leurs patients, concernant des traitements qu'ils
reçoivent, peuvent affecter les résultats de ces traitements. Lors
des essais cliniques, les chercheurs dans le domaine médical consi-
dèrent l'effet placebo comme une nuisance puisque ce phénomène
empêche de déterminer si les nouveaux traitements expérimen-
taux sont réellement efficaces. Afin de contourner ce problème, les
participants aux essais cliniques sont assignés aléatoirement soit
au groupe recevant le vrai traitement (actif), soit à celui recevant
le faux traitement (placebo; par exemple, une pilule sucrée). Ni
les chercheurs ni les participants n'ont accès à cette information
avant la fin des essais. C'est ce qu'on appelle le «protocole d'essai
clinique randomisé en double aveugle», avec un contrôle pour
l'effet placebo. Lorsque l'essai clinique est terminé, les chercheurs
soustraient l'effet du placebo de celui du vrai traitement.
Dans le cas qui nous occupe ici, le Dr Kallmes et ses collègues
élaborèrent un essai clinique au cours duquel certains patients
recevraient la véritable vertébroplastie tandis que d'autres patients
recevraient une intervention chirurgicale placebo. Afin de s'assurer
que les 130 patients participant à l'essai clinique ne pouvaient savoir
s'ils recevaient le traitement actif ou le faux traitement, ceux-ci
furent préparés pour leur« opération» de la même façon : ils furent
amenés dans la salle d'opération puis on leur injecta un agent anes-
thésique dans le dos. Ensuite un programme informatique décida
de manière aléatoire quels patients recevraient la vertébroplastie
ou bien le placebo. Pour les deux types d'intervention, les médecins
ouvrirent le contenant renfermant le ciment osseux, qui dégage
une odeur forte ressemblant à un dissolvant pour vernis à ongles.
Une moitié des patients reçut la vertébroplastie, alors que
l'autre moitié des patients reçut la fausse intervention chirurgicale.

2. Kallmes D. F., Comstock B. A., Heagerty P.)., Turner). A., Wilson D. )., Diamond T. H.
et al. , «A randomized controlled trial of vertebroplasty for osteoporotic spinal fractures»,
The New England Journal ofMedicine 361, 2009, p. 569-579.

CHA PITRE 1 .w, DES PENSEES OUI TRANSFO RMENT LE CORPS 33


Pour les patients du groupe placebo, les médecins suivirent le
scénario suivant: ils appuyèrent sur le dos des patients puis ils
leur dirent: «Le ciment pénètre maintenant, tout va bien, encore
quelques minutes, et tout sera terminé3. »
Bonnie Anderson est l'une des patientes recrutées pour cet
essai clinique. Elle s'était brisé une vertèbre après être tombée
dans sa cuisine. Éprouvant une forte douleur, elle pouvait à peine
bouger. Suite à sa chute, elle devait se tenir à quelque chose afin
d'effectuer des déplacements debout. Toutefois, une semaine
après l'intervention, cette femme de 76 ans pouvait à nouveau
jouer au golf. Ce qui est remarquable dans son cas est que Bonnie
a reçu la fausse intervention chirurgicale. La procédure placebo
s'est également avérée efficace pour plusieurs autres patients
ayant participé à cet essai clinique. Si efficace qu'il n'y avait pas
de différence statistique significative en termes de diminution de
la douleur et d'amélioration fonctionnelle entre les patients des
deux groupes4 •
Les résultats des recherches montrent que l'effet placebo est
impliqué dans tous les types de traitements médicaux et psycholo-
giques. Ainsi, les méta-analyses - qui sont des analyses statistiques
combinant les résultats de plusieurs études afin d'évaluer de manière
plus exacte la magnitude véritable du phénomène étudié (ou «taille
d'effet») - indiquent que l'effet placebo joue un rôle crucial dans
les essais cliniques pour les médicaments ciblant des troubles de
l'humeur comme la dépression majeure. À ce propos, les cher-
cheurs et psychologues cliniciens Irving Kirsch et Guy Sapirstein
ont examiné les résultats de plus de 19 essais cliniques regroupant
plus de 2 000 patients. Ces chercheurs ont découvert que 75 % des
résultats thérapeutiques sont attribuables à l'effet placebo5.

3. Kirsch l., Sapirstein G., « Listening to prozac but hearing placebo: a meta-analysis of
antidepressant medication » , Prevention & Treatment lD: 2a, 1998. Document en ligne:
www.apa org/prevention.
4. Siegel B., L'A m our, la Médecine et les Miracles, Paris, J'ai Lu, 2004.
5. Kirsch l., Sapirstein G., « Listening to prozac but hearing placebo : a meta-analysis of
antidepressant medication », Prevention & Treatm ent l D : 2a, 1998. Document en ligne :
www.apa.org.

34 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Les recherches sur l'effet placebo révèlent également que
plus on croit à un traitement donné et qu'on fait confiance à un
thérapeute - peu importe qu'il s'agisse d'un médecin pratiquant la
médecine occidentale, d'un homéopathe ou d'un chaman -, plus
il est probable que le traitement sera efficace et mobilisera nos
puissants mécanismes innés d'autoguérison. L'espoir, les émotions
positives, la motivation, l'anticipation d'une amélioration de son
état et une attitude chaleureuse et attentionnée de la part du théra-
peute contribuent aussi à induire une forte réponse placebo.
L'administration d'un placebo ne déclenche pas toujours les
mécanismes d'autoguérison souhaités. Effectivement, cela peut
parfois mener à des symptômes indésirables et déplaisants tels que
la somnolence, la nausée, la fatigue et l'insomnie. Ce phénomène,
qui est appelé l'effet nocebo, représente le côté obscur de l'effet
placebo. Il peut survenir lorsque nos attentes à propos d'un traite-
ment sont négatives plutôt que positives. Si l'administration d'un
traitement est accompagnée d'avertissements en rapport avec des
effets secondaires potentiels, ces effets négatifs sont plus suscep-
tibles de se manifester. Dans le livre intitulé L'Amour, la Médecine
et les Miracles, le Dr Bernie Siegel, un chirurgien pédiatre mainte-
nant retiré, cite une étude dont le but était de tester une nouvelle
drogue de chimiothérapie. Les patients assignés de façon aléatoire
au groupe placebo furent informés qu'ils pouvaient recevoir cette
nouvelle drogue, et que celle-ci pouvait entraîner des effets secon-
daires négatifs. Même si ces patients ne reçurent qu'une injection
d'eau salée, 30 % d'entre eux perdirent leurs cheveux6 •
L'effet nocebo est aussi observé lorsque les gens prennent
des médicaments véritables. Par exemple, lors d'un essai clinique,
le finastéride fut donné à des hommes qui souffraient d'un élar-
gissement de la prostate. La moitié des participants à cet essai
clinique fut avertie que ce médicament pouvait produire une
dysfonction érectile, tandis que l'autre moitié des participants
ne fut pas informée de cet effet secondaire potentiel. Dans le
groupe des informés, 44 % des participants rapportèrent qu'ils

6. Siegel B., L'Amour, la M édecine et les Miracles, Paris, J'ai Lu, 2004.

CHAPITRE 1 * DES PENSÉES O UI TRANSFO RMENT LE CORPS 35


expérimentaient une dysfonction érectile, tandis que cet effet
secondaire ne fut rapporté que par 15 % des participants dans le
groupe des non-informés7 •
La réponse nocebo ne se manifeste pas uniquement durant
les essais cliniques. Ainsi, après l'attaque au gaz sarin qui eut lieu
dans le métro de Tokyo en 1995, les hôpitaux de cette mégalopole
japonaise furent débordés par des cas d'individus qui croyaient
avoir été exposés à cette substance neurotoxique mortelle. Ces
individus souffraient de symptômes qui avaient été hautement
médiatisés, tels que la nausée et les étourdissements. Il s'avéra que
ces individus n'avaient pas été réellement exposés au sarin. Ce type
de réaction est fréquent lorsque l'agent n'est pas visible, comme
les radiations et certaines substances chimiques8 •
Les différents types de réactions placebo sont associés à divers
changements dans l'activité du cerveau. Ce phénomène est bien
illustré par la réponse cérébrale de patients souffrant de la maladie
de Parkinson, un trouble neurologique dégénératif caractérisé par
des tremblements, un ralentissement de la mobilité et une rigidité
musculaire. Dans cette maladie neurologique, on note un déclin
marqué dans la quantité de dopamine, un messager chimique, se
trouvant dans les ganglions de la base (aussi appelés les« noyaux
gris centraux»). Lors d'une étude réalisée à l'aide de la tomographie
par émission de positons (TEP), des chercheurs scannèrent les
cerveaux de patients parkinsoniens afin de comparer les réponses
cérébrales à l'apomorphine - un médicament qui active la dopa-
mine - et à l'eau salée - le traitement placebo. Les deux traitements
furent administrés en suivant un protocole en double aveugle. Le
traitement placebo fut présenté comme stimulant la mobilité.
Comparativement à ceux qui n'avaient reçu aucun traitement,
les patients ayant reçu le placebo montrèrent une augmentation
spectaculaire de l'activité dopaminergique dans les ganglions de la

7. http: //www.nytimes.com /201 2/08/ 12/ opinio n/ su nday /beware-the-nocebo-effect.


html?_r=O.
8. http://www.newyorker.com/online/blogs/ elements/2013/04/the-nocebo-effect-how-we-
worry-ourselves-sick.html.

36 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


base. Cette augmentation était comparable à celle observée avec la
dose thérapeutique d'apomorphine donnée aux autres patients9 •
La réponse nocebo est aussi accompagnée de modifications
importantes de l'activité cérébrale. Pour des raisons éthiques
évidentes, très peu d'études de neuro-imagerie ont été menées
pour examiner la réponse du cerveau aux attentes négatives. Les
quelques études qui ont été conduites à cet égard portent principa-
lement sur la douleur. Ces études révèlent que les attentes négatives
entraînent une amplification de la douleur: plus le degré de douleur
anticipée augmente, plus les régions cérébrales impliquées dans la
perception de la douleur s'activent. À l'inverse, les attentes relatives
à une diminution de la douleur réduisent l'activation des régions
du cerveau reliées au traitement de l'information douloureuse 10•

LA GESTION DES ÉMOTIONS

Les émotions sont des modifications physiologiques


- c'est-à-dire des changements en termes de rythme cardiaque,
pression sanguine, tension musculaire, température de la
peau, etc. - en réponse à des événements survenant soit dans
l'environnement externe (par exemple, apercevoir en une frac-
tion de seconde un animal sauvage tout près de nous tandis qu'on
se balade en forêt), soit dans l'environnement interne, celui de
la psyché (par exemple, se remémorer un souvenir qui nous est
cher). Ces réactions multidimensionnelles impliquent également
une analyse cognitive de ce qui se déroule dans l'environnement
(interne ou externe), des expressions comportementales (par
exemple, se défendre en réponse à une menace), de même que
des changements dans l'expérience subjective: c'est cet aspect des
émotions qui est appelé le «sentiment » (en anglais le feeling; par
exemple: avoir peur).

9. De la Fuente- Fernandez R., Ruth T. ]., Sossi V., Schulzer M., Caine D. B., Stoessl A . ].,
« Expectation and dopamine release : mechanism of the placebo effect in Parkinson's
disease »,Science 293, 2001, p. 1164-1166.
10. Enck P., Benedetti F., Schedlowski M.,« New insights into the placebo and nocebo
responses», Neuron 59, 2008, p. 195-206.

CHAPITRE 1 ~ DES PEN SÉES OUI TRANSFO RMENT LE CORPS 37


Nos émotions jouent un rôle fondamental dans nos vies: elles
nous aident à faire des choix au sujet des gens, des événements
et des situations que nous rencontrons au cours de notre exis-
tence. Toutefois, lorsque nos émotions sont négatives et qu'elles se
répètent, elles peuvent nous occasionner beaucoup de problèmes
et d'énormes souffrances.

Les aspects physiologiques des émotions sont étroitement liés


à des régions cérébrales qui font partie de ce qu'on appelle commu-
nément le «cerveau émotionnel» (dans le jargon des neurosciences,
le« système limbique»). Ces régions sont anciennes, d'un point de
vue phylogénétique, et se retrouvent chez tous les mammifères.

Par chance, la plupart des membres de notre espèce possèdent


la capacité d'apprendre à maîtriser leurs émotions. Autrement,
nous serions complètement à la merci des moindres impul-
sions prenant origine dans notre cerveau émotionnel archaïque.
Cette capacité tellement primordiale pour l'avenir de l'humanité
est médiatisée par quelques subdivisions appartenant au lobe
préfrontal, la structure cérébrale la plus récente sur le plan de notre
évolution biologique. Comparativement aux autres mammifères, le
lobe préfrontal est beaucoup plus développé et volumineux au sein
de notre espèce. Cette structure, que l'on appelle parfois « organe
de la civilisation», est considérée comme la région clé permettant
l'implémentation de l'aspect rationnel de l'esprit.

Il existe des connexions anatomiques importantes entre les


diverses régions appartenant au lobe préfrontal et celles faisant
partie du cerveau émotionnel. Les connexions partant du lobe
préfrontal en direction du cerveau émotionnel transmettent une
information inhibitrice, qui permet le contrôle volontaire des
émotions et des sentiments accompagnant l'activité des structures
limbiques. Cette capacité représente l'une des principales compo-
santes de l'intelligence émotionnelle 11 •

11. Enck P., Benedetti F., Schedlowski M., « New insights into the placebo and nocebo
responses», Neuron 59, 2008, p. 195-206.

38 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Au début du nouveau millénaire, j'ai été le premier neuro-
scientifique à entreprendre un programme de recherche visant
à étudier ce qui se passe dans le cerveau lorsque des individus sains
tentent de prendre volontairement le contrôle de leurs émotions.
Dans l'étude initiale de ce programme de recherche, mes collè-
gues et moi avons demandé à de jeunes hommes de regarder des
extraits de films érotiques. Les participants étaient scannés avec
l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) - une
méthode permettant de mesurer les changements d'oxygénation
du sang selon l'activité neuronale - durant une condition contrôle
et une condition expérimentale. Dans la condition contrôle, les
participants ne faisaient que regarder les extraits de films et ils
devaient réagir normalement. Dans la condition expérimentale, les
participants devaient faire de la distanciation cognitive, c'est-à-dire
qu'ils devaient regarder d'autres extraits de films similaires d'une
manière dépassionnée, sans chercher à les évaluer ou à les juger. Un
questionnaire était utilisé afin de mesurer l'intensité des réponses
émotionnelles dans les deux conditions. Ce questionnaire révéla
que tous les participants avaient été sexuellement excités par les
extraits de films érotiques. Sans surprise, dans la condition contrôle,
l'excitation sexuelle fut corrélée à l'activation de diverses struc-
tures cérébrales faisant partie du cerveau émotionnel (par exemple,
l'amygdale et !'hypothalamus). Ce qui est remarquable dans cette
étude est que, même si les participants n'avaient été entraînés à la
distanciation cognitive que pendant quelques minutes avant le
début de l'expérimentation, ils furent tous capables de réduire
subjectivement leur excitation durant la condition expérimentale;
qui plus est, aucune activation ne fut détectée dans les régions
appartenant au cerveau émotionnel. Par ailleurs, conformément
à la notion que le lobe préfrontal agit comme un centre régulateur
des émotions, une activation fut enregistrée dans quelques subdi-
visions de cette structure cérébrale 12 •

12. Beauregard M., Lévesque )., Bourgouin P., « Neural correlates of conscious self-regulation
of emotion », Journal of Neuroscience 21, 2001, RC 165, p. 1-6.

CHAPITRE 1 <i> DES PENSÉES OUI TRA NSFORMENT LE CORPS 39


Lors de la seconde étape de notre programme de recherche,
nous avons mené une autre étude d'IRMf en utilisant une approche
similaire13. Dans cette deuxième étude, on mesura l'activité céré-
brale de jeunes femmes qui tentaient de maîtriser une réponse
temporaire de tristesse, qui était aussi évoquée par des extraits
de films. Ceux-ci montraient la mort d'une personne aimée. Les
résultats furent semblables à ceux de la première étude, c'est-à-dire
que l'activité diminua de manière significative dans le cerveau
émotionnel lors de la condition expérimentale, tandis qu'on nota
une hausse d'activité dans quelques régions du lobe préfrontal.

Ces résultats montrent qu'une personne adulte en bonne


santé mentale n'est pas qu'un simple automate biologique qui ne
fait que réagir à diverses stimulations: en effet, cette personne est
équipée neurobiologiquement afin d'être en mesure de maîtriser
ses réactions et celles de son cerveau face à des événements chargés
émotionnellement. Cela étant dit, il est important de spécifier ici
que, même si l'équipement neurobiologique en question se trouve
dans le lobe préfrontal, cette structure cruciale du cerveau doit être
dirigée consciemment et volontairement par la personne.

Dans le cadre de ce programme de recherche, j'ai cherché


à déterminer si des individus mentalement et neurobiologique-
ment sains sont également capables d'influencer l'activité des
messagers chimiques jouant un rôle majeur dans la vie émotion-
nelle. Pour ce faire, mes collègues et moi avons utilisé la TEP afin
d'évaluer la production de sérotonine durant des changements
rapides et soutenus d'un état émotionnel1 4 • Ce messager chimique
est connu pour son rôle central dans le contrôle des émotions et
les fluctuations de l'humeur.

13. Lévesque )., Joanette Y., Paquette V ., M ensour B., Beaudoin G ., Leroux ).-M.,
Bourgouin P., Beauregard M., « Neural circuitry underlying voluntary self- regulation of
sadness », Biological Psychiatry 53, 2003, p. 502-510.
14. Perreau-Linck E., Beauregard M., Grave] P., Paquette Y., Soucy J. -P., Diksic M .,
Benkelfa t C., « In vivo measurements of brain t rapping of ll C-labelled a -methyl-L-
tryptophan during acute in changes in mood states »,Journal ofPsychiatry and Neuroscience
32,2007, p. 430-434.

40 UN SAUT QUANTI QUE DE LA CONSCIENCE


Nous avons demandé aux participants à cette étude de vivre
des états temporaires de joie et de tristesse au moyen d'une auto-
induction. Pour ce faire, on leur suggéra de revivre des émotions
intenses associées à des souvenirs autobiographiques précis. Tous
les participants indiquèrent avoir vécu les deux émotions ciblées.
Les résultats de la TEP reflétèrent ces perceptions subjectives
puisque le niveau de tristesse ressenti fut corrélé avec une réduc-
tion de la production de sérotonine dans les régions émotionnelles
du cerveau, tandis que, à l'inverse, le niveau de joie ressenti fut
corrélé avec une augmentation de la production de sérotonine
dans les régions du cerveau émotionnel. Ces résultats concordent
avec les études démontrant une réduction de l'activité séroto-
ninergique dans ces régions chez les individus souffrant d'une
dépression majeure.

TRANSFORMER SON CERVEAU PAR LA MÉDITATION

Le concept de méditation fait référence à une vaste gamme de


techniques d'entraînement mental qui ont été développées afin
de favoriser les capacités cognitives, l'équilibre émotionnel et le
bien-être 15 • Plusieurs études réalisées durant la dernière décennie
indiquent que l'entraînement volontaire de l'attention à travers les
pratiques méditatives peut effectivement entraîner d'importants
changements plastiques dans le cerveau. Ces pratiques sont géné-
ralement classées en deux catégories: la concentration et la pleine
conscience.

Les pratiques de concentration impliquent une attention foca-


lisée sur certaines sensations corporelles spécifiques (par exemple,
la respiration) et des aspects de l'activité mentale (par exemple,
une image visualisée mentalement ou un son répété).

15. Davidson R. )., Lutz, A.,« Buddha's brain : neuroplasticity and meditation »,IEEE Signal
Processing Magazine 25, 2008, p. 176-174.

CHAPITRE 1 ~ DES PENSÉES OUI TRANSFORMENT LE CORPS 41


Quant aux pratiques de pleine conscience, elles impliquent
de laisser toutes les pensées, émotions et sensations émerger
d'instant en instant, tout en maintenant, sans jugement ni analyse,
une conscience attentive bien que détachée. Ces deux catégo-
ries de techniques méditatives conduisent à un ralentissement
du monologue mental interne, une sensation profonde de tran-
quillité apaisante ainsi qu'une expérience élargie de soi qui n'est
plus centrée sur les pensées du méditant et les représentations
de son corps 16•

La méthode de «Réduction du stress basée sur la pleine


conscience» (Mindfulness-Based Stress Reduction ou MBSR)
est un programme en groupe de huit semaines qui repose sur la
pratique de la méditation de pleine conscience. Des milliers de
personnes ont participé à ce programme, et les études démontrent
son efficacité pour diminuer le stress, l'anxiété et la dépression, et
accroître le bien-être, la compassion et la spiritualité 17 •

Les recherches menées avec l'EEG révèlent un accroissement


de l'activité alpha et thêta durant des pratiques de méditation de
pleine conscience, telles que le zen et le vipassana. Les ondes alpha
(de 8 à 12 Hz [cycles par seconde]) sont généralement associées
à la relaxation, alors que les ondes thêta (de 4 à 8 Hz) sont plus
spécifiquement associées aux états méditatifs. Il semble que la
magnitude de l'augmentation des ondes thêta, durant les états
méditatifs, reflète le niveau d'expertise des méditants 18 • D'autres
études EEG indiquent que l'augmentation de l'activité bêta 2 (de
20 Hz à 30 Hz) et de l'activité gamma (de 40 Hz à 100 Hz) repré-
sente une caractéristique des états de méditation concentrative.
L'activité bêta 2 est souvent observée lors de tâches impliquant une
focalisation de l'attention. En ce qui concerne l'activité gamma, on

16. Wallace B. A., « The Buddhist tradition of Samatha : methods for refining and examining
consciousness », Journal of Consciousness Studies 6, 1999, p. 175-187.
17. Fjorback L. O.,« Mindfulness and bodily distress», Danish Medical Journal 59, 2012,
84547.
18. Cahn B. R.. Polich )., « Meditation states and traits: EEG, ERP, and neuroimaging
studies », Psychological Bulletin 132, 2006, p. 180-211.

42 UN SAUT QUANTIQ UE DE LA CONSCIENCE


suppose qu'elle est liée au contenu de nos expériences mentales
et à la conscience 19• Des ondes gamma ont été enregistrées chez
des moines tibétains bouddhistes très expérimentés tandis que
ceux-ci étaient engagés dans une forme de méditation appelée
«compassion non référentielle » 20• Durant ce type d'état méditatif,
les méditants se focalisent sur une compassion sans limite et une
bonté affectueuse pour tous les êtres vivants. Des augmentations
remarquables d'ondes gamma furent mesurées durant l'état de
compassion non référentielle, par rapport à un état de repos. En
outre, plus les moines se sont entraînés longtemps à cette forme de
méditation, et plus leur activité gamma est élevée et durable. Par
ailleurs, cette activité gamma élevée persiste chez les moines bien
qu'ils aient cessé de méditer. Ces résultats suggèrent que, même
en dehors d'un état méditatif, l'entraînement à la méditation peut
produire des changements à long terme dans l'activité du cerveau21•

Collectivement, les études EEG de la méditation réalisées


jusqu'à présent supportent l'idée que des signatures neuro-
électriques différentes accompagnent les divers types de pratiques
méditatives. Cela n'est pas surprenant si l'on considère que ces
pratiques diffèrent par les expériences subjectives et les processus
mentaux qu'elles impliquent.

L'IRMf a aussi été employée dans plusieurs études afin de


cerner les changements neuroplastiques induits par la pratique
de techniques méditatives. Quelques-unes de ces études ont
été réalisées par mon équipe de recherche. Dans l'une d'entre
elles, nous avons examiné les effets de la méditation de pleine

19. Travis F., Shear )., « Focused attention, open monitoring and automatic self-transcending :
categories to o rganize m editatio ns fro m Vedic, Buddhist and Chinese t raditions»,
Consciousness and Cognition 19, 2010, p. 1110-1118.
20. Lutz A., Greischar L. L., Rawlings N.B., Ricard M., Davidson R. )., « Long-term meditato rs
self-ind uce high-amplitude gamma synchrony during m ental practice», Proceedings of the
National Academy ofSciences ofthe United States ofAmerica, 101, 2004, p. 16369-16373.
21. Jbid.

CHAPITRE 1 '& DES PENSÉES O UI TRANSFORMENT LE CORPS 43


conscience sur les réponses cérébrales à des images émotion-
nelles22. Nous avons aussi exploré, dans cette étude, l'impact de
la durée de l'entraînement à la méditation de pleine conscience
sur les réponses du cerveau émotionnel à de telles images. Des
méditants expérimentés, adeptes de la méditation zen, ont été
comparés à des méditants novices. Ceux-ci pratiquèrent la médi-
tation de pleine conscience durant vingt minutes par jour pendant
la semaine qui précéda l'expérimentation. Les deux groupes de
participants furent scannés pendant qu'ils regardaient les images
dans un état de pleine conscience ou dans un état sans pleine
conscience. Du point de vue expérientiel, les participants dans
les deux groupes perçurent les images vues dans un état de pleine
conscience comme moins intenses que celles vues dans un état
sans pleine conscience. De surcroît, chez les méditants expéri-
mentés, la pleine conscience s'accompagna d'une réduction de
l'activité dans les régions du cerveau émotionnel. Ces résultats
suggèrent que l'entraînement à la méditation de pleine conscience
amène une réduction de l'activité cérébrale qui s'accompagne d'un
apaisement de l'état mental.

D'autres études d'IRMf ont montré que la pratique de la


méditation mène à des modifications dans le fonctionnement des
régions cérébrales impliquées dans l'attention et la concentration,
ainsi que l'empathie.

Il est maintenant bien établi que la structure d'un cerveau


adulte peut changer suite à une pratique répétée. Par exemple, on
note une augmentation dans l'épaisseur des zones associées à la
musique dans le cerveau de musiciens, et des zones visuelles et
motrices dans le cerveau de jongleurs. Dans ce contexte, certains
chercheurs se sont demandé si la pratique de la méditation pouvait
également entraîner des changements structurels dans le cerveau.
Afin de répondre à cette question, ces chercheurs ont utilisé une

22. Taylor V., Grant J., Daneault V., Scavone G., Breton E., Roffe-Vidal S., Courtemanche J.,
Lavarenne A., Beauregard M., « Impact of mindfulness on the neural responses to emotional
pictures in experienced and beginner meditators », Neurolmage 57, 2011, p. 1524-1533.

44 UN SAUT QUANTIQ UE DE LA CONSCIENCE


technique appelée« IRM anatomique». Les résultats de ces études
ont révélé que l'entraînement à la méditation de pleine conscience
amène une augmentation de la densité de matière grise - qui
contient les corps cellulaires des neurones - dans les régions du
cerveau impliquées dans l'apprentissage et la mémoire, l'empathie
et la gestion des émotions23 • La pratique de la méditation peut aussi
changer la matière blanche, qui est responsable de la commu-
nication entre les différentes régions du cerveau, dans des aires
cérébrales jouant un rôle important dans l'attention et la gestion
des émotions24•

IMPACTER NOTRE RÉSEAU PSYCHOSOMATIQUE

Les chercheurs en immunologie ont longtemps entre-


tenu l'idée que le système immunitaire et le système nerveux
étaient totalement séparés. Mais, il y a une trentaine d'années,
des recherches montrèrent que le système immunitaire n'était
pas véritablement un système de défense «isolé» puisque des
messagers chimiques produits par les cellules immunitaires
informaient le cerveau, et que le cerveau envoyait également des
messages chimiques au système immunitaire. Depuis, on a aussi
découvert que le système nerveux et le système immunitaire
interagissent avec le système endocrinien. Ces découvertes ont
mené à l'émergence de la psycho-neuro-immunologie (ou PNI),
l'étude des interactions entre les processus mentaux et ces trois
systèmes physiologiques. Ces derniers, qui ensemble constituent
ce qui a été appelé le «réseau psychosomatique», communiquent
tous entre eux de manière bidirectionnelle, à travers un langage
biochimique commun qui implique le partage de récepteurs ainsi
que de neurotransmetteurs, de cytokines (des molécules produites

23. Holzel B. K., Carmody J., Vangel M., Congleton C., Yerramsetti S. M ., Gard T.,
Lazar S. W., « Mindfulness practice leads to increases in regional brain gray matter density »,
Psychiatry Research 191, 2011, p. 36-43.
24. Tang Y. Y., Lu Q., Geng X., Stein E. A., Yang Y., Posner M.!., «Short-term meditation
induces white matter changes in the anterior cingulate », Proceedings of the National
A cademy ofSciences USA 107, 2010, p. 15649-15652.

CHAPITRE 1 * DES PENSÉES OUI TRANSFORMENT LE CORPS 45


par les cellules du système immunitaire) et d'hormones. Ceux-ci
agissent comme des« substances informationnelles25 » . C'est via
ce vaste réseau multidirectionnel que nos pensées, émotions et
expériences subjectives sont traduites chimiquement, et qu'elles
influencent notre santé et notre bien-être. Les études de PNI
indiquent que c'est par l'interaction entre, d'une part, des facteurs
psychologiques et, d'autre part, des modifications biochimiques
qui affectent le réseau psychosomatique que sont déterminés les
causes, le développement et les résultats d'une maladie.
Considérons un instant le cas du stress. Lorsque nous stres-
sons, nos glandes surrénales sécrètent du cortisol, et notre cerveau
libère des messagers chimiques tels que l'adrénaline et la nora-
drénaline. Un peu de stress peut nous aider à mobiliser toutes
nos ressources afin d'atteindre nos objectifs. Toutefois, trop de
stress peut affecter de manière pernicieuse l'immunité. Ainsi
des stress aigus ou chroniques peuvent accroître la durée et la
gravité des maladies infectieuses, réactiver des virus latents et
prolonger la cicatrisation des plaies. Cela est bien illustré par le
fait que lorsque des étudiants en médecine reçoivent un vaccin
contre l'hépatite B durant une période d'examen final très stres-
sante, ils ne développent pas une protection complète contre cette
infection virale potentiellement mortelle 26 • Les situations et les
événements qui sont perçus comme incontrôlables, comme le
chômage et les désastres naturels, peuvent également affaiblir les
réactions immunitaires27 • De plus, les états émotionnels négatifs
chroniques, comme ceux notés dans la dépression majeure, sont
associés à une mortalité accrue28 • Une augmentation du risque de

25. Zachariae R., « Psychoneuroimmunologia: a bio-psycho-social approach to health and


disease », Scandinavian Journal of Psychology 50, 2009, p. 645-651.
26. Vitetta L., Anton B., Cortizo F., Sali A., « Mind-body medicine: stress and its impact
on overall health and longevity », Annals of the New York Academy of Sciences 1057, 2005,
p. 492-505.
27. Ray O., «The revolutionary health science of psychoendoneuroimmunology », Annals
of the New York Academy ofSciences, 1032, 2004, p. 35-51.
28. Cuijpers P., Smit F., « Excess mortality in depression: a meta-analysis of community
studies », Journal ofAffective Disorders 72, 2002, p. 227-236.

46 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


décès et un affaiblissement de l'immunité sont également observés
chez des conjoints endeuillés durant les premières années après le
décès de leur partenaire29 •

À l'opposé des émotions négatives, les états émotionnels


positifs peuvent améliorer la santé de manière spectaculaire. Par
exemple, dans une autre étude de PNI, des chercheurs ont admi-
nistré le virus de la grippe aux participants. Ceux-ci furent placés en
quarantaine, et les réactions au virus furent analysées en fonction
de l'état émotionnel des participants. Les résultats démontrèrent
que les participants dont l'état émotionnel était positif avaient un
risque réduit de développer la grippe30 • Un état émotionnel positif
est aussi associé à une diminution de la mortalité31 •

La plupart du temps, nous influençons notre réseau psycho-


somatique et notre santé de manière inconsciente et involontaire.
Cependant, certaines recherches suggèrent qu'il est aussi possible
d'exercer un impact conscient et volontaire sur l'activité de notre
réseau psychosomatique. À ce sujet, plusieurs études indiquent,
chez des personnes atteintes d'un cancer, que la combinaison de
la relaxation et de l'imagerie mentale - cette capacité à former des
images mentales d'objets ou d'événements qui ne sont pas dans
le champ sensoriel - réduit l'anxiété et la dépression, diminue les
nausées et les vomissements provoqués par la chimiothérapie, et
accroît l'activité du système immunitaire et la qualité de vie32•

29. Everson S. A., Goldberg D. E., Kaplan G. A., Cohen R. D., Pukkala E., T uomilehto ).,
Salonen ). T. « Hopelesness and risk of mortality and incidence of myocardial infarction
and cancer.» Psychosomatic Medicine 58, 1996, p. 113-121.
30. Cohen S., Alper C. M., Doyle W.)., Treanor ). }., Turner R. B., « Positive emotional style
predicts resistance to illness after experimental exposure to rhinovirus or influenza A virus»,
Psychosomatic Medicine 68, 2006, p. 809-815.
31. Chida Y., Steptoe A., « Positive psychological well-being and mortality: a quantitative
review of prospective observational studies », Psychosomatic Medicine 70, 2008, p.741-756.
32. Gordon J. S.,« Mind-body medicine and cancer », Hematology/Oncology Clinics ofNorth
America 22, 2008, p. 683-708.

CHA PITRE 1 <M> DES PEN SEES OUI TRANSFORMENT LE CORPS 47


L'histoire de David Seidler révèle à quel point l'imagerie
mentale peut parfois s'avérer efficace afin de lutter contre des
maladies graves. Ce dramaturge et scénariste anglo-américain est
surtout connu pour avoir écrit le scénario du film Le Discours
d'un roi, pour lequel il fut récompensé, en 2011, par l'Oscar du
meilleur scénario original. En 2005, alors qu'il avait près de 70 ans,
Seidler apprit qu'il souffrait d'un cancer de la vessie. Après avoir
consulté son urologue, le Dr Dino DeConcini, Seidler décida de ne
pas recevoir de chimiothérapie ou de subir l'ablation de la vessie.
À la place, il prit des suppléments afin de dynamiser son système
immunitaire. Il opta aussi pour qu'on lui retire par chirurgie les
tumeurs cancéreuses se trouvant dans sa vessie.
Quelques mois passèrent, et David Seidler apprit que son
cancer était revenu. Il prit alors rendez-vous avec le Dr DeConcini
afin que celui-ci lui retire de nouveau les tumeurs cancéreuses.
Ce rendez-vous fut fixé quelques semaines plus tard. Son épouse
de l'époque lui suggéra alors d'essayer de visualiser son cancer en
train de disparaître. Au premier abord, Seidler pensa que cette
suggestion était la chose la plus ridicule qu'il eût jamais entendue.
Toutefois, après une réflexion plus approfondie, il se dit qu'il
n'avait rien à perdre.
Pendant deux semaines, il visualisa durant des heures une
vessie en parfait état. Puis il alla rencontrer le Dr DeConcini pour
sa seconde intervention chirurgicale. Sidéré, l'urologue dit à Seidler
que le cancer avait totalement disparu. Ce cancer n'est jamais
revenu depuis. David Seidler est convaincu qu'il a survécu à son
cancer de vessie parce qu'il a cessé de s'apitoyer sur lui-même, et
qu'il a mis en œuvre la même imagination vivide qu'il utilise afin
d'écrire des scénarios de films 33 •

33. http://www.cnn.com/2011/HEAL TH/03/03/ep.seidler.cancer.mind.body.

48 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


NOUS SOMMES DES INGÉNIEURS ÉPIGÉNÉTIQUES

Il existe de plus en plus d'évidences montrant que les gènes


peuvent être influencés par l'esprit. Dans cette optique, je pense
qu'il serait maintenant indiqué d'intégrer les gènes à notre repré-
sentation du réseau psychosomatique.
Au cours du xxe siècle, plusieurs biologistes influents ont
défendu le déterminisme génétique, c'est-à-dire l'idée que les
processus physiologiques du corps - de même que les traits de
personnalité, les capacités mentales et les comportements - sont
en grande partie contrôlés par les gènes. Cette conception implique
que, puisque nous ne pouvons pas changer nos gènes, notre vie est
prédéterminée. En d'autres termes, nous sommes des victimes de
notre hérédité et nous avons très peu de contrôle sur notre santé34.
Dans les médias, cette vieille croyance est encore propagée par
certains journalistes scientifiques qui dépeignent les gènes comme
de puissantes entités qui ont le pouvoir de définir l'identité person-
nelle, de déterminer le cours des affaires humaines et d'expliquer
les problèmes sociaux35 •
Heureusement l'épigénétique a fait voler en éclats cette
croyance erronée. Cette discipline scientifique relativement
nouvelle étudie les signaux de l'environnement qui modulent
l'expression et l'activité des gènes. Ceux-ci sont soit actifs soit inac-
tifs36. Les signaux qui modulent l'expression des gènes proviennent
del'environnement interne (les événements mentaux, par exemple,
les pensées et les émotions) ou de l'environnement externe (par
exemple, la diète, l'exercice et l'exposition à la lumière du soleil).
Les découvertes de l'épigénétique révèlent que nous ne sommes
pas contrôlés par notre constitution génétique. En réalité, à tout
moment, nos pensées, nos émotions et nos croyances influencent
activement l'expression de nos gènes. Comment cela est-il possible?
Le biologiste Bruce Lipton propose que ce soit la biochimie de notre
corps qui détermine la nature de notre environnement au niveau

34. Lipton B., The Biology ofBelief. Mountain of Love, Santa Rosa (CA), Elite Books, 2005.
35. Church D., The Genie in Your Genes, Santa Rosa (CA), Energy Psychology Press, 2009.
36. Des synonymes sont «ouverts» ou «fermés», ainsi qu' «exprimés» ou «réprimés».

CHAPITRE 1 * DES PENSÉES O UI TRA NSFO RMENT LE CORPS 49


cellulaire. Nous savons que la biochimie de notre sang est gran-
dement influencée par les messagers chimiques qui sont produits
dans le cerveau, et que notre chimie cérébrale est directement liée
au contenu de notre activité mentale. C'est ainsi, affirme Lipton,
que nos pensées, nos émotions et nos croyances peuvent affecter
l'activité de nos gènes37 • En ce sens, nous pouvons tous être consi-
dérés comme des «ingénieurs épigénétiques ».
Il semble que nous disposions d'une capacité importante
d'influencer la façon dont nos gènes sont exprimés. Par exemple, il
nous est possible de choisir consciemment de générer des pensées
réconfortantes, d'entretenir des croyances émancipantes et
d'expérimenter des émotions positives. Afin d'atteindre ces objec-
tifs, on peut apprendre à méditer. À ce propos, certaines études
démontrent que, lorsque nous méditons, nos gènes s'expriment
d'une manière qui est bénéfique pour notre santé. L'une de ces
études a été dirigée par Herbert Benson, un cardiologue améri-
cain qui a fondé l'Institut Corps-Esprit du General Hospital, dans
le Massachusetts, à Boston. Benson et ses collègues ont comparé
l'expression génétique d'hommes et de femmes en bonne santé
(les membres du groupe contrôle) avec celle d'experts de pratiques
corps-esprit. En moyenne, les participants experts avaient pratiqué
le yoga ou la méditation pendant neuf ans. On préleva un échan-
tillon sanguin chez tous les participants à l'étude, et le matériel
génétique fut extrait du sang. Ce matériel fut ensuite analysé afin
de déterminer les différences entre les deux groupes de parti-
cipants en termes d'activité des gènes. Au total, les chercheurs
découvrirent que 2 209 gènes s'exprimaient différemment chez
les deux groupes. Ces gènes - qui jouent un rôle important dans
le stress, l'inflammation et le vieillissement - sont aussi connus
pour être associés à une bonne santé. Cela signifie que les mêmes
gènes, qui ont un effet bénéfique sur la santé si on pratique une
technique corps-esprit, peuvent avoir un effet délétère sur notre
santé si on ne pratique pas une telle technique38 •

37. Lipton B., The Biology ofBelief, Mountain of Love, Santa Rosa (CA), Elite Books, 2005.
38. Dusek ). A., Otu H. H., Wohlhueter A. L., Bhasi n M ., Zerbini L. F., Joseph M. G.,
Benson H., Libermann T. A., « Genomic counter-stress changes induced by the relaxation
response», PLoS One 3, 2008, e2576.

50 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Benson et ses collègues ont réalisé une autre étude afin de
déterminer si l'expression des gènes des membres du groupe
contrôle pouvait être transformée par une approche corps-esprit.
Ces participants suivirent un programme de huit semaines impli-
quant la relaxation, la visualisation et la respiration abdominale
profonde. À la fin du programme, un nouvel échantillon sanguin
fut prélevé chez les membres du groupe contrôle afin d'évaluer
comment l'expression des gènes s'était modifiée chez ces parti-
cipants. Ce qu'on découvrit est remarquable: 1561 gènes avaient
changé leur expression, et 433 «signatures» génétiques étaient
maintenant comparables à celles retrouvées chez les experts de
pratiques corps-esprit39 •

D'autres études épigénétiques révèlent que les émotions


positives modulent à la hausse l'expression des gènes associés
à l'activité des cellules NK («tueurs naturels ») qui jouent un
rôle clé au niveau immunitaire. Par ailleurs, il a été récemment
démontré que trois mois de pratique intensive de méditation
induisent une élévation de 30 % de la télomérase, une enzyme qui
répare et rallonge les télomères, qui sont les séquences d'ADN au
bout des chromosomes. Ces télomères jouent un rôle important
dans la division cellulaire, et leur longueur est une indication de la
longévité des cellules. Cette découverte suggère que la méditation
pourrait ralentir le vieillissement de nos cellules40 •

39. http://www.bm edreport.com /archives/21586.


40. )acobs T. L., Epel E. S., Lin)., Blackburn E. H., Wolkowitz O. M., Bridwell D. A., Zanesco
A. P., Aichele S. R., Sahdra B. K., MacLean K. A., King B. G., Shaver P. R., Rosenberg E. L.,
Ferrer E., Wallace B. A., Saron C. D., « Intensive meditation training, immune cell telomerase
activity, and psychological media tors», Psychoneuroendocrinology 36, 2011, p. 664-681.

CHAPITRE 1 * DES PENSÉES OUI TRANSFORMENT LE CORPS 51


CHAPITRE 2

DES PERCEPTIONS
PAR-DELÀ L'ESPACE
ET LE TEMPS
« Le plus grand mystère de la science demeure
la nature de la conscience. »
NICK HERBERT

VOIR À DISTANCE

En pleine guerre froide, au milieu des années 1970, la hiérarchie


militaire américaine cherche des moyens de rivaliser avec l'URSS.
L'armée ainsi que des agences gouvernementales comme la Central
Intelligence Agency (CIA) et la Defense Intelligence Agency (DIA)
décident alors de créer le projet Stargate. L'objectif de ce projet top
secret est de vérifier si la «vision à distance» (en anglais, remote
viewing) - une forme de perception extrasensorielle (PES) permet-
tant à un voyant (aussi appelé «récepteur» ou «intuitif») de donner
des détails sur une cible éloignée dans l'espace (un lieu, une chose
ou une personne) inaccessible aux sens normaux - constitue un
moyen efficace d'obtenir des renseignements sensibles. Le projet
Stargate, qui durera une vingtaine d'années, sera subventionné
à hauteur de 20 millions de dollars. Plusieurs des expériences
menées dans le cadre de ce projet seront réalisées au Stanford
Research Institute (SRI), sous la supervision des physiciens Russell
Target Harold Puthoff.

53
Un type d'expérience sur la vision à distance qui fut développé
au SRI consiste à envoyer un «émetteur» à un endroit inconnu,
puis à demander au récepteur de décrire le lieu où se trouve
l'émetteur. La description est faite sous forme verbale et/ ou de
dessin: les informations généralement recueillies consistent en
une impression de savoir ainsi que des impressions sensorielles
(images, sons, odeurs). Ensuite, un groupe de juges évalue dans
quelle mesure les descriptions correspondent au lieu. Une réussite
est obtenue lorsque la description du récepteur concorde avec
le lieu où s'est rendu l'émetteur. Dans un autre type de proto-
cole, l'émetteur ne se déplace pas: il ne fait que choisir une image
à partir d'une banque de photographies du National Geographic1.
Au fil du temps, les protocoles testés par l'équipe de recherche
du SRI s'affinèrent et furent conduits en double-aveugle, c'est-à-dire
que ni les expérimentateurs ni les participants ne connaissaient
la cible.
Le Projet Stargate a permis d'obtenir des informations reliées
à des sites ou armements stratégiques ennemis, des leaders
politiques, des groupes terroristes ou encore des opérations de
narcotrafic.
Le chercheur, auteur et producteur de documentaires Stephan
Schwartz est un autre pionnier de la vision à distance. Il est connu
pour son utilisation de cette capacité mentale dans la localisation
et la reconstruction de sites archéologiques. Schwartz a participé
à de nombreuses expéditions d'archéologie intuitive, en particulier
sur les rives de Grand Bahama, où il a retrouvé le Brig Leander,
et sur la St. Anne's Bay, en Jamaïque, où furent retrouvés deux
bateaux de Christophe Colomb. De 1978à1979, il dirigea le projet
Alexandrie. L'objectif de ce projet était de mesurer l'efficacité et
la pertinence d'utiliser la vision à distance comme outil d'aide
à l'exploration archéologique. Quatre cibles furent sélectionnées:
la cité antique de Marea, le tombeau d'Alexandre le Grand, la
Grande Bibliothèque et un emplacement nommé dans l'Antiquité
la« Colline des Nombreux Passages».

1. Mumford M. D., Rose, A. H., Goshin, D. A., An Evaluation ofRemote Viewing: Research
and Applications, American Institutes for Research, 1995.

54 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


La première phase du projet débuta aux États-Unis à l'été 1978.
Onze intuitifs furent choisis pour participer au projet. Un ques-
tionnaire leur fut envoyé, de même qu'une carte standard qui avait
été allégée des couleurs et des noms afin d'éviter toute perturba-
tion visuelle. Toutes les données furent envoyées à un huissier
à Los Angeles pour y être analysées. Le croisement de l'ensemble
des réponses des 11 intuitifs permit de circonscrire trois zones de
recherches privilégiées: l'une autour de la mosquée Nabi Daniel,
une autre loin vers l'est, à côté d'une sorte de parc, et la dernière sur
la péninsule principale séparant le port occidental du port oriental.

La seconde phase du projet pouvait maintenant commencer.


En mars 1979, Stephan Schwartz et certains membres de son
équipe, de même que deux des intuitifs de l'équipe de départ,
Hella Hamid et Georges McMullen, se rendirent à Alexandrie.
Avec l'aide des deux intuitifs, les zones privilégiées furent explo-
rées à partir des données recueillies aux États-Unis. Les résultats
furent spectaculaires puisque les données intuitives permirent de
localiser et de décrire plusieurs sites. Ces résultats incluent les
découvertes du palais de Marc Antoine, le palais ptolémaïque de
Cléopâtre, des ruines du phare ainsi que la ville de Marea. Par
ailleurs, les données des intuitifs permirent d'établir la première
cartographie moderne du port oriental. Selon Schwartz, l'intérêt
des données obtenues intuitivement réside dans la rapidité de la
vérification puisqu'il suffit de faire descendre les plongeurs dans
les zones indiquées afin de procéder à une observation directe2 •
Pour en revenir au projet Stargate, disons que des centaines
d'expériences sur la vision à distance furent conduites au SRI.
Lorsque ce programme de recherche fut terminé, la CIA demanda
qu'un rapport soit produit. Ce rapport visait à déterminer si les
résultats de ces expériences étayaient l'idée que la vision à distance
peut être utile afin de recueillir des informations sensibles. On
confia à Jessica Utts, professeure de statistiques à l'université Irvine
de Californie et Ray Hyman, professeur émérite de psychologie
à l'université de l'Orégon et sceptique notoire, la tâche d'évaluer

2. Schwartz S. A .. Le Projet A lexandrie, Paris, Sand, 1985.

CHAPITRE 2 * DES PERCEPTIONS PAR-DELÀ L'ESPACE ET LE TEMPS 55


ce programme de recherche. La conclusion du rapport fut mitigée:
Utts affirma catégoriquement que la preuve de la vision à distance
n'était plus à faire, tandis que, sans surprise, Hyman déclara
n'être pas d'accord avec cette conclusion. Cependant, ce dernier
reconnut que les résultats des expériences menées dans le cadre
du projet Stargate n'étaient pas dus à des erreurs statistiques ou
des problèmes méthodologiques3 •
D'autres chercheurs ont reproduit les résultats de ce programme
dans des conditions strictement contrôlées. Par exemple, Robert
Jahn, Brenda Dunne et leurs collègues du Laboratoire PEAR
(Princeton Engineering Anomalies Research) de l'université de
Princeton ont réalisé 653 essais entre 1976 et 1999, impliquant
72 participants. Plusieurs de ces essais ont été conduits de manière
précognitive, c'est-à-dire que la cible future était choisie de façon
aléatoire après que le voyant eut noté ses impressions. L'analyse
statistique de ces 653 essais révéla que la probabilité pour que les
résultats de ces essais soient dus au hasard était de 1 chance sur
33 millions4 •

DES CONNEXIONS MENTALES PAR-DELÀ L'ESPACE

Joseph Banks Rhine était un botaniste qui avait également


étudié la psychologie. Intéressé par la PES (il inventa d'ailleurs le
terme) - qui inclut la télépathie, la clairvoyance, la clairaudience
et la précognition -, il décide dans les années 1930 de développer
une approche statistique afin de pouvoir l'étudier scientifique-
ment. Pour ce faire, il collabore avec son collègue Karl Zener,
à l'université Duke. Celui-ci est alors directeur du département
de psychologie. Ensemble, ils créent ce qui sera appelé les «cartes
Zener ». Ces cartes comportent cinq types de symboles: une étoile,

3. Mumford M. D., Rose, A. H., Goshin, D. A., An Evaluation ofRemote Viewing: Research
and Applications, American Institutes for Research, 1995.
4. )ahn R., Dunne G., Bradish Y., Dobyns A., Lettieri A., Nelson R., Mischo )., Bolier E.,
Bosch H., Vaitl D., Houtkooper )., Walter B., «Minci/ m achine interaction consortium :
PortREG replication experiments », Journal ofScientific Exploration 14, 2000, p. 499-555.

56 UN SAUT Q UA NTIQ UE DE LA CONSCIENCE


trois lignes ondulantes, un signe plus, un cercle et un carré. Au
total, le paquet de cartes Zener renferme 25 cartes, et consiste en
une répétition de cinq cartes par symbole. De manière purement
aléatoire, les participants aux expériences de Rhine ont donc une
chance sur cinq (ou 20%) de deviner les symboles qui sont sélec-
tionnés. Des résultats supérieurs à 20 % sont considérés comme
suggérant l'existence de la PES.
Pendant des décennies, Rhine et ses collaborateurs utilisent
ces cartes afin de tester les divers aspects de la PES. Des centaines
d'expériences impliquant plusieurs milliers d'essais sont menées.
Dans une catégorie de ces expériences, visant à étudier la télé-
pathie, le paquet de cartes est minutieusement brassé. Puis, l'un
des deux participants, l'émetteur, choisit une carte et essaie de
transmettre mentalement le symbole apparaissant sur la carte à un
autre participant, le récepteur, qui se trouve à distance. La tâche de
ce dernier est d'identifier correctement l' «information» mentale
transmise par l'émetteur.
Les résultats obtenus dans ces centaines d'expériences
suggèrent clairement l'existence des diverses catégories de PES.
Toutefois, bien que les compétences en statistique et l'intégrité
personnelle de J. B. Rhine ne soient pas mises en doute, plusieurs
scientifiques demeurent sceptiques à propos des résultats obtenus
par ce pionnier de la recherche sur les phénomènes psi.
Au cours de ses travaux avec les cartes Zener, Rhine découvre
que la performance psi des participants décline lorsque les expé-
riences sont répétées plusieurs fois. Cela n'est guère étonnant
puisque essayer de deviner pendant des centaines, voire des milliers
d'essais, quels sont les symboles qui ont été choisis est extrême-
ment monotone. C'est ainsi qu'à la suite de Rhine les chercheurs en
parapsychologie entreprennent de concevoir de nouveaux proto-
coles expérimentaux afin de contourner ce problème5•
Dans les années 1970, le psychologue William Braud de
l'université de Houston, le parapsychologue Charles Honorton
du Maimonides Medical Center de New York et le psychologue

5. Radin D., The Conscious Universe: The Scientific Tru th ofPsychic Phenomena, New York,
HarperEdge, 1997.

CHA PITRE 2 <M> DES PERCEPTIONS PAR-DELÀ L'ESPACE ET LE TEMPS 57


Adrian Parker de l'université d'Édimbourg émettent séparé-
ment l'hypothèse qu'une diminution de la stimulation sensorielle
doit favoriser la survenue de la PES. Cette hypothèse repose sur
l'observation que la réduction du «bruit» mental - le bavardage
constant et involontaire de l'esprit - est associée à une plus grande
manifestation des phénomènes psi. Cette observation nous vient
à l'origine des Védas, les textes religieux de l'Inde ancienne. Braud,
Honorton et Parker postulent que le psi constitue un signal faible
qui est généralement dissimulé par des signaux plus intenses
provenant de nos sens ordinaires et nous bombardant constam-
ment. Indépendamment l'un de l'autre, ces chercheurs élaborent
un test de la télépathie qui est basé sur une technique de privation
sensorielle appelée« condition ganzfeld ».Cette technique, qui fut
initialement développée pour étudier l'imagerie mentale visuelle,
entraîne rapidement un état de conscience agréable ressemblant
à la rêverie. Selon les trois chercheurs, le blocage de la stimulation
sensorielle ordinaire via la procédure ganzfeld devrait accroître la
capacité de percevoir des impressions subtiles6 •

Les expérimentations conçues pour tester la télépathie,


et reposant sur cette procédure, sont réalisées en trois phases:
préparation, envoi et jugement. Durant la phase de préparation,
le récepteur - qui se trouve dans la salle ganzfeld - est assis dans
un fauteuil inclinable confortable. On met des écouteurs sur ses
oreilles et des demi-sphères translucides (généralement des balles
de ping-pong coupées en deux) sur ses yeux. Il écoute un bruit
blanc constant à travers les écouteurs tandis qu'une lumière rouge
est diffusée sur son visage. Puis l'expérimentateur demande à un
assistant de recherche de sélectionner de manière aléatoire un
«lot de cibles» provenant d'une base de données qui comporte
plusieurs lots. Chaque lot renferme quatre images, et toutes les
images sont cachées dans des enveloppes opaques.

6. Ibid.

58 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Lors de la phase d'envoi, l'expérimentateur donne à l'émetteur
l'image cible. L'émetteur doit alors tenter d'envoyer mentalement
l'image au récepteur, qui se trouve dans une autre pièce. Pour ce
faire, on recommande à l'émetteur de «s'immerger» dans l'image
cible et de transmettre tout ce que cette image évoque subjective-
ment pour lui. Enfin, durant la phase de jugement, l'émetteur et
le récepteur sont informés que la phase d'envoi est terminée. Le
bruit blanc et la lampe rouge sont éteints, et on retire les demi-
balles de ping-pong recouvrant les yeux du récepteur. Ensuite,
l'expérimentateur présente au récepteur des copies des quatre
images faisant partie du lot sélectionné et lui demande de les
classer de 1 à 4 suivant la manière dont elles concordent avec ses
impressions subjectives ressenties lors de la phase d'envoi. Un
«succès» n'est obtenu que si le récepteur attribue la première
place à la cible, autrement l'essai est considéré comme un
«échec». Sur un plan statistique, le taux de succès attendu est de
25%, c'est-à-dire qu'en répondant au hasard on devrait obtenir
un succès tous les quatre essais.

Au début de la décennie 1980, Charles Honorton raffine


la qualité méthodologique des expérimentations ganzfeld en
mettant au point un protocole totalement automatisé qu'il appelle
l' « autoganzfeld ». Dans cette procédure, les cibles sont composées
de courts clips audio-vidéo. Le lot avec les leurres et le clip servant
de cible est formé aléatoirement par un programme informatique,
et un système vidéo en circuit fermé présente la cible au récepteur
sur un écran. D'autre part, les interactions entre l'expérimentateur,
le récepteur et l'émetteur sont totalement automatisées et, à la fin
de l'expérimentation, un ordinateur présente de façon aléatoire la
cible et les trois leurres sur un écran situé dans la salle du récepteur7.

Le programme autoganzfeld d'Honorton et ses collaborateurs


dura plusieurs années. Au total, 240 personnes participèrent à

7. Ibid.

CHAPITRE 2 4' DES PERCEPTIONS PAR-DELÀ L'ESPACE ET LE TEMPS 59


354 sessions en tant que récepteurs, et le taux de succès fut de 37 %.
La probabilité pour que ces résultats soient dus au hasard était de
1 chance sur 450008 • À la suite des travaux de Charles Honorton,
des études de réplication indépendantes furent conduites avec
succès par un certain nombre de chercheurs, dont Adrian Parker
(qui est maintenant à l'université de Goteborg en Suède), Dick
Bierman (université d'Amsterdam), Daryl Bern (université Cornell)
et Dean Radin (Institut des sciences noétiques, en Californie). Une
méta-analyse des études de réplication menées par ces chercheurs
a révélé un taux de succès global de 33,2 % avec une probabilité
associée supérieure à un million de milliards de chances contre
une9 • Jusqu'à aujourd'hui, une cinquantaine de chercheurs prove-
nant de plusieurs pays ont réussi à reproduire ces résultats, et
d'autres méta-analyses ont confirmé l'existence de la télépathie
lorsqu'elle est étudiée à l'aide du protocole autoganzfeld 10•

Certains pourraient argumenter qu'un taux de succès de 33 %


(soit huit points au-dessus de la chance) n'est pas tellement impres-
sionnant. Mais il faut se rappeler qu'en règle générale tous les effets
psi sont relativement faibles lorsque les données sont obtenues
chez des participants ne possédant pas de capacités particulières.
Cependant, lorsque des populations spéciales sont testées, des taux
de succès plus grands sont mesurés. Par exemple, un taux de succès
de 47 % a été rapporté lorsque le protocole autoganzfeld est testé

8. Honorton C., Schecter E. l., « Ganzfeld target retrieval with an automated testing system :
a model for initial ganzfeld success», dans Research in parapsychology, éd. Weiner D. B. et
Nelson R.B., Metuchen {NJ), Scarecrow Press, 1986, (p. 36-39).
9. Williams B. J., « Revisiting the Ganzfeld ESP debate: A basic review and assessment »,
Journal ofScientific Exploration, 25, 2011, p. 639-661.
10. Storm L., Tressoldi P. E., Di Risio L., « Meta-analysis of free-response studies, 1992-2008:
Assessing the noise reduction model in parapsychology», Psychological Bulletin 136, 2010,
p. 471 -485. Utts J., Norris M., Suess E., Johnson W., «The strength of evidence versus the
power of belief: are we ail bayesians? », dans Data and Context in Statistics Education:
Towards an Evidence-Based Society, Voorburg, The Netherlands International Statistical
lnstitute, éd. C. Reading, 2010.

60 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


chez des artistes 11 • Par ailleurs, les chercheurs ont découvert que
plus l'émetteur est captivé par les clips vidéo, plus le récepteur
est en mesure de capter la cible. Cela n'est pas le cas des images
statiques, qui produisent des scores inférieurs.

LE FUTUR AU PRÉSENT

Les recherches sur la vision à distance et la télépathie


démontrent qu'il est possible d'acquérir mentalement, sans
l'utilisation des sens ordinaires, de l'information indépendamment
de l'espace. D'autres recherches psi menées à propos des pressen-
timents - des impressions vagues que quelque chose va arriver,
mais sans avoir conscience de ce que ce pourrait être - indiquent
qu'il est également possible de percevoir des informations au sujet
d'événements n'ayant pas encore eu lieu.

Il existe plusieurs anecdotes célèbres sur les pressentiments.


Certaines d'entre elles concernent Winston Churchill, qui fut
Premier ministre du Royaume-Uni de 1940 à 1945. Un soir,
pendant la Seconde Guerre mondiale, Churchill invite à dîner,
au 10 Downing Street, trois ministres de son gouvernement. Au
cours du repas, un raid allemand débute sur Londres. Comme
ils sont habitués aux sirènes, Churchill et les trois ministres
continuent calmement de manger. Puis, subitement, le Premier
ministre se lève de table et se rend à la cuisine, où deux de ses
employés de maison s'affairent près d'une fenêtre. Churchill leur
ordonne alors de descendre dans l'abri. Quelques minutes plus
tard, une bombe s'écrase sur la résidence du Premier ministre et
détruit complètement la cuisine.

11. Holt N. )., «Are artistic populations psi-conducive? Testing the relationship between
creativity and psi with an experience-sampling protocol » , dans Proceedings of the SOth
Annual Convention ofthe Parapsychological Association, Petaluma (CA) : Parapsychological
Association, 2007, p. 31-47.

CHA PITRE 2 <W- DES PERCEPTIO NS PAR-DELÀ L'ESPACE ET LE TE MPS 61


Durant la Seconde Guerre mondiale, Winston Churchill avait
développé l'habitude de visiter les batteries antiaériennes qui
défendaient la capitale britannique contre les bombardiers alle-
mands. Une nuit, après avoir échangé avec les soldats, il s'apprête
à les quitter et se dirige vers son véhicule. Comme à l'habitude,
la porte de droite, à l'arrière, est ouverte, car Churchill s'assied
toujours à cet endroit. Mais, cette fois-là, il fait une exception et
va s'asseoir du côté opposé. L'instant d'après, une bombe explose
du côté droit du véhicule. Le Premier ministre s'en tire indemne.
Plus tard, il confiera à son épouse qu'une sorte de voix intérieure
lui a murmuré de ne pas s'asseoir à sa place habituelle 12 •

Tandis que le pressentiment est une impression vague, la


prémonition est une conviction que quelque chose va arriver dans
l'avenir. Dans certains cas, la prémonition se manifeste à travers les
rêves: on parle alors de rêves prémonitoires. Un exemple fameux
de ce type de rêve a été rapporté par l'Américain David Booth, un
employé de bureau de Cincinnati, dans l'Ohio. Pendant 10 nuits,
durant le mois de mai 1979, Booth fait le même cauchemar: il
voit un avion de type DC-10 de la compagnie American Airlines
hésiter à prendre son vol, et il entend le bruit des énormes moteurs
en perte de vitesse; puis il voit l'avion se cabrer et retomber en
s'écrasant au sol. Le feu prend sur-le-champ: des flammes lumi-
neuses immenses sont suivies d'une épaisse fumée noire. David
Booth se réveille toujours à ce moment-là ... Le 22 mai, il téléphone
à American Airlines, ainsi qu'à l'administration de l'aviation fédé-
rale, à l'aéroport international de Cincinnati. Quatre jours plus
tard, un DC-10 de l'American Airlines s'écrase sur l'aéroport inter-
national de Chicago. Près de 300 personnes sont tuées. Jusqu'à ce
jour, il s'agit de l'une des pires catastrophes aériennes de l'histoire
des États-Unis13.

12. http://www.histoires-paranormales.fr/Jegendes-urbaines/ churchill-premonition.


13. http://mystere-et-insolite.lo.gs/la-premonition-a28 l 5 l 992.

62 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Le Dr Larry Dossey, qui est à l'origine de l'expression «esprit
non local», a avancé que le pressentiment, dont le ressenti semble
parfois irrationnel, repose sur des sensations physiques - angoisse
sans cause apparente, impressions désagréables - et constitue un
système d'alerte visant à nous protéger d'un danger. À cet égard,
Dossey cite les travaux de William Cox. Dans les années 1950, ce
chercheur et homme d'affaires se pencha sur la fréquentation des
trains accidentés. Il découvrit que ces derniers avaient générale-
ment moins de passagers à leur bord que les trains qui atteignaient
leur destination sans aucun problème. Ainsi, le 15 juin 1952, jour
de son accident, le Georgian de la Chicago and Eastern Illinois
Railroad ne comptait que 9 voyageurs, alors qu'il transportait une
moyenne de 62 personnes à peine quelques jours plus tôt 14•

Les études expérimentales de la précognition - la connaissance


d'informations concernant des événements futurs - sont menées
depuis plus de quatre-vingts ans. Lors des premières expériences,
les participants devaient deviner laquelle des cibles potentielles
(par exemple, des faces d'un dé, une ampoule colorée parmi
plusieurs ou des symboles sur les cartes Zener) allait par la suite
être choisie de façon aléatoire. Une méta-analyse incluant plus de
300 études (publiées entre 1935 et 1987) de la précognition ayant
eu recours à de telles cibles a produit une probabilité pour que les
résultats de ces études soient dus au hasard d'une chance sur 1025
(10 millions de milliards) 15 . Il semble donc légitime d'exclure le
hasard afin d'expliquer ces résultats.

Dean Radin a conçu, il y a quelques décennies, un proto-


cole expérimental afin d'étudier les pressentiments. Sa question
de départ était la suivante : des états émotionnels futurs (ou des
sensations futures) sont-ils détectables dans l'activité actuelle du
système nerveux? Dans ce protocole, les participants s'assoient sur

14. https:/ /www .inrees.com/ articles/pressentimen t-futur-present.


Dossey L., La Science des prém onitions, Paris, Robert Laffont, 2011.
15. Honorton C., Ferrari D. C., «Future telling : a meta-analysis of forced-choice precognition
experiments », 1935-1987,fournal ofParapsychology 53, 1989, p. 281-308.

CHAPITRE 2 * DES PERCEPTIONS PA R- DELÀ L'ESPACE ET LE TEMPS 63


une chaise placée en face d'un écran d'ordinateur. Une électrode
est attachée au majeur de leur main gauche afin de mesurer leur
fréquence cardiaque et le volume sanguin au bout de ce doigt. En
outre, un capteur est attaché au pouce ou à l'index de leur main
gauche. Ce capteur enregistre les fluctuations de la conductance
de leur peau, qui sont un indice de la réactivité émotionnelle.
Les participants tiennent une souris d'ordinateur dans leur main
droite et appuient sur le bouton de la souris lorsqu'ils sont prêts
à débuter. Illico, l'ordinateur sélectionne aléatoirement une photo
cible appartenant à une banque comprenant 120 images. L'écran
d'ordinateur demeure blanc. Puis, après cinq secondes, la photo
choisie est affichée sur l'écran pendant trois secondes. Ensuite,
l'écran redevient blanc (durant cinq à dix secondes). Cette étape
est suivie par une période de repos de cinq secondes. Après cette
période de repos, les participants doivent presser à nouveau le
bouton de la souris lorsqu'ils sont prêts pour un nouvel essai.

Lors d'une session, 40 images étaient présentées aux parti-


cipants. L'une des catégories d'images (par exemple, des images
érotiques ou d'autopsies) provoquait des réactions émotionnelles
fortes, tandis que l'autre catégorie d'images (comme des images
plaisantes de paysages et de scènes naturelles) visait à susciter un
état de calme. Les trois types de mesures physiologiques étaient
moyennés pour tous les essais «émotionnels» et «calmes».

Conformément à ce que les recherches en psychophysiologie


des émotions ont démontré, la vision des images émotionnelles
entraînait une décélération de la fréquence cardiaque, une dimi-
nution du volume sanguin ainsi qu'une augmentation de la
conductance de la peau. Toutefois, ce qui est fascinant est que
les réponses psychophysiologiques des participants aux images
émotionnelles débutaient avant même que ces images ne soient
présentées à l'écran, c'est-à-dire aussitôt que le bouton de la souris
était pressé. À la fin del' expérimentation, on demandait aux parti-
cipants s'ils avaient été conscients des images qui allaient être
présentées. La plupart s'en disaient incapables. Pour Dean Radin,
cela indique que le pressentiment et nos réactions sont en grande

64 UN SAUT Q UANTIQU E DE LA CONSCIENCE


partie un processus inconscient. Le caractère inconscient de nos
réactions les rend possiblement plus efficaces, selon Radin, car cela
permet de contourner les défenses psychologiques susceptibles de
bloquer les perceptions psi.

Au total, Dean Radin et ses collaborateurs ont réalisé quatre


expérimentations sur le pressentiment. La probabilité pour que
les résultats de ces expérimentations soient dus au hasard était
de 1 chance sur 125 000 16 • Les résultats de Radin ont été repro-
duits par le chercheur en psychologie Dick Bierman. Dans cette
étude de réplication, des participants étaient scannés à l'aide
d'un appareil d'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle
(IRMf) tandis qu'ils focalisaient leur attention sur des images
projetées par un ordinateur. Ces images étaient choisies de façon
aléatoire. Les résultats montrèrent que des régions précises du
cerveau impliquées dans les émotions étaient activées avant que
les images émotionnelles apparaissent 17 • Ces résultats indiquent
que les cerveaux des participants à cette étude réagissaient à des
événements qui n'étaient pas encore actualisés.

De nombreuses études conduites dans plusieurs laboratoires


différents ont permis de reproduire les résultats obtenus par Radin
et Bierman. Ces études incluaient des mesures physiologiques
telles que l'électroencéphalographie (EEG), le signal dépen-
dant du niveau cérébral d'oxygène sanguin (IRMf), la fréquence
cardiaque, la dilatation pupillaire et la conductance cutanée. Une
méta-analyse de ces études a confirmé que nous pouvons parfois
percevoir inconsciemment notre futur 18 •

En 2011, Daryl Bern, un professeur émérite et un chercheur


en psychologie reconnu de l'université Cornell, a publié dans le

16. Radin D., The Conscious Universe : The Scientific Truth of Psychic Phenomena, New
York, HarperEdge, 1997.
17. Bierman D. )., Scholte H. S.,« Anomalous anticipatory brain activation preceding exposure
of emotional and neutral pictures », Toward a Science of Consciousness, T ucson IV, 2002.
18. Mossbridge )., Tressoldi P. E., Utts )., « Predictive physiological anticipation preceding
seemingly unpredictable stimuli: a meta-analysis », Frontiers in Psychology 3, 2012, p. 390,

CHA PITRE 2 * DES PERCEPTIONS PAR-DELÀ L"ESPACE ET LE TEMPS 65


Journal ofPersonality and Social Psychology (JPSP) une étude qui
comprenait neuf protocoles différents visant à tester la préco-
gnition 19. En tout, mille étudiants universitaires participèrent
à l'étude. Dans l'un des protocoles, les instructions suivantes
furent présentées aux participants:
«Il s'agit d'une expérimentation qui vise à tester la PES. Elle prend
environ 20 minutes et son déroulement est géré entièrement par
l'ordinateur. D'abord, vous devrez répondre à quelques questions. Puis,
pour chaque essai, deux rideaux vont apparaître sur l'écran, l'un à côté de
l'autre. L'un d'entre eux cache une image, l'autre dissimule un mur vide.
Votre tâche est de cliquer sur le rideau qui vous semble cacher l'image.
Celui-ci va s'ouvrir pour vous permettre de voir si vous avez sélectionné
le bon rideau. Il y aura en tout 36 essais. Plusieurs des images ont des
contenus explicitement érotiques (par exemple, des couples ayant des
rapports sexuels consentis et non violents) .»

Ces instructions avaient pour but de faire croire aux partici-


pants qu'ils prenaient part à une expérience sur la clairvoyance.
Mais, dans les faits, les images et leur position (à droite ou à gauche)
étaient déterminées aléatoirement par l'ordinateur après le choix
des participants. Comme l'emplacement des images était arrêté de
manière aléatoire, les participants avaient en théorie une chance
sur deux de localiser chaque image érotique. Cependant, les parti-
cipants réussirent à localiser les images érotiques 53,l % du temps
(au lieu de 50%). Ces résultats étaient statistiquement significatifs.
Quant aux images émotionnellement neutres, le taux de succès ne
dévia pas de ce que l'on pouvait attendre du hasard.

Les résultats des études examinées dans cette section du


chapitre 2 confirment qu'il est parfois possible d'avoir accès,
consciemment ou non, aux informations en provenance du futur.
Ces résultats, qui nous amènent à nous interroger sur la notion
de temps, suggèrent que certaines zones de la psyché humaine
peuvent «voyager» le long du continuum temporel. À propos de
notre conception du temps, Einstein affirmait que «le temps ne

19. Bern D., «Feeling the future: experimental evidence for anomalous retroactive influences
on cognition and affect»,fournal ofPersonality and Social Psychology 100, 2011 , p. 407-425.

66 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


s'écoule pas dans une seule direction» et que «la distinction entre
passé, présent et futur est une illusion20 ». Peut-être le physicien
Philippe Guillemant, chercheur au CNRS, a-t-il raison lorsqu'il
avance que notre futur serait déjà réalisé selon de multiples
versions coexistant simultanément, mais à l'état de potentiels non
encore vécus21•

20. https:/ /www.lesechos.fr/26/08/2016/LesEchosW eekEnd/00042-032-ECWE_et-si-vous-


ecoutiez-votre-intuition-.htm#Azt8Q7BwUO WlegaV.99.
21. Guillemant P., La Route du temps, Paris, Le Temps Présent, 2014.

CHAPITRE 2 * DES PERCEPTIONS PAR - DELÀ L'ESPACE ET LE TEMPS 67


CHAPITRE 3

QUAND l!ESPRIT INFLUE


SUR LA MATIÈRE

«Non seulement l'Univers est plus étrange


que nous ne l'imaginons, mais il est plus étrange
que nous ne pouvons l'imaginer. »
ARTHUR EDDINGTON

Nous venons de voir, dans les chapitres précédents, que nous


pouvons avoir accès à des informations, par-delà l'espace et le
temps, sans employer nos sens ordinaires. Peut-on aussi influencer
mentalement le monde physique en utilisant ce que les para-
psychologues appellent la psychokinèse (PK) ?

Les chercheurs dans le domaine du psi se penchent sur cette


fascinante question depuis déjà de nombreuses décennies. Ces
chercheurs établissent une distinction entre la macropsycho-
kinèse (ou macro-PK) et la micropsychokinèse (ou micro-PK).
La macro-PK est une psychokinèse macrophysique, c'est-à-dire
qu'elle s'exerce sur des objets ou systèmes suffisamment gros pour
être observés directement. Quant à la micro-PK, celle-ci réfère
surtout à une psychokinèse qui est effectuée sur des systèmes
microphysiques aléatoires (par exemple, du bruit électronique).

La macro-PK peut se manifester par la lévitation et le dépla-


cement de petits objets (on parle alors de télékinésie), la torsion
de cuillères, le pliage et les changements de tiges métalliques ainsi
que la psychophotographie (l'impression mentale d'une pellicule

69
photographique). Comme les investigations expérimentales de la
macro-PK n'ont pas toujours été menées de manière rigoureuse et
systématique, que les résultats sont ambigus et que certains sujets
d'expérimentation ont été pris en flagrant délit de fraude, je me
concentrerai principalement dans ce chapitre sur la micro-PK.

Le Dr Joseph Banks Rhine fut le premier scientifique à utiliser


des méthodes statistiques afin d'étudier la micro-PK. Dans
les années 1930, alors qu'il était professeur à l'université Duke,
à Durham, en Caroline du Nord, J. B. Rhine reçut un jour la visite
d'un joueur. Ce dernier dit à Rhine qu'il croyait être parfois capable
d'influencer mentalement les résultats aux jeux de lancer de dés.
La croyance en une telle influence sur les dés était quelque chose
de répandu et d'ancien. J. B. Rhine comprit qu'il serait facile et
peu dispendieux de tester cette croyance. Comme les résultats
préliminaires avec le joueur en question s'avérèrent prometteurs,
Rhine décida d'effectuer des recherches plus poussées 1•
Ce programme de recherche dura pendant plusieurs années.
J. B. Rhine tenta d'éliminer systématiquement les biais qui
pouvaient résulter de dés non équilibrés. Pour ce faire, les dés
furent d'abord placés dans des gobelets spéciaux pour éviter que les
participants puissent truquer leur lancer. Par la suite, les dés furent
placés dans des cages qui tournaient grâce à une alimentation élec-
trique. Lors des expériences, on demandait aux participants de
«diriger» mentalement la chute des dés afin de faire apparaître
la face qui avait été présélectionnée. Plusieurs lancers étaient
exécutés en succession avant qu'une nouvelle face soit choisie.
Au début de la décennie 1990, les chercheurs en parapsychologie
Dean Radin et Diane Ferrari firent une méta-analyse de 73 études
de micro-PK basées sur le protocole élaboré par Rhine2. Ces études,
qui avaient été réalisées principalement dans les années 1940
et 1950, avaient été menées par 52 chercheurs différents. La

1. http: //www.metapsychique.org/La-psychokinese.html.
2. Radin D. !., Ferrari D. C., « Effects of consciousness on the fall of <lice : a meta-analysis »,
Journal ofScientific Exploration 5, 1991, p. 61-84.

70 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCI ENCE


méta-analyse engloba 148 expériences au cours desquelles
2,6 millions de lancers de dés furent effectués. Ces expériences
produisirent un effet relativement petit mais fortement significatif
(probabilité de 1 milliard contre 1). Pour ce qui est de la condi-
tion contrôle, durant laquelle il n'y avait pas d'intention appliquée
envers la chute des dés, aucun effet ne fut mesuré.

MICROPSYCHOKINÈSE ET GÉNÉRATEURS
DE NOMBRES ALÉATOIRES

Helmut Schmidt, un physicien travaillant au laboratoire de


Boeing à Seattle, créa vers la fin des années 1950 des générateurs de
nombres aléatoires (GNA) afin d'étudier la possibilité que l'esprit
humain puisse interagir directement avec la matière. Reposant sur
des processus quantiques, un GNA est un circuit qui produit de
façon aléatoire des pics d'activité électronique des centaines, voire
des milliers de fois par seconde. L'activité électronique générée
par le GNA est convertie en séquences aléatoires de bits, des 0 et
des 1. Dans une expérience typique, les participants doivent essayer
d'influencer mentalement les résultats du GNA de façon que ce
dispositif génère davantage de 0 que de 1 (ou l'inverse). Durant la
condition contrôle, les participants n'exercent aucune influence
mentale sur l'activité du GNA.
Généralement, les participants effectuent des centaines de
séries d'essais, et ces derniers peuvent recevoir un feedback sur la
distribution des événements aléatoires sous la forme de sons ou
de graphiques. Les GNA contemporains sont de petits dispositifs
branchés à un ordinateur via un port USB. Tous les aspects des
expériences GNA - incluant la présentation des instructions, le
feedback fourni sur une base d'essai à essai ainsi que l'enregistrement
et l'analyse des données - sont maintenant automatisés.
Au cours des cinquante dernières années, plusieurs centaines
d'études GNA ont été conduites. En 1989, Dean Radin et le cher-
cheur en psychologie Roger Nelson, de l'université de Princeton,
firent une méta-analyse d'études menées entre 1959et1987. Cette

CHAPITRE 3 -» QUAND L'ESPRIT INFLUE SUR LA MATIÈRE 71


analyse statistique engloba 597 études qui avaient été réalisées par
68 chercheurs différents. La méta-analyse effectuée par Radin et
Nelson révéla que la probabilité pour que les résultats de ces études
soient dus au hasard était de 1 chance sur plus de 1 milliard3•

Plus récemment, l'ingénieur Robert G. Jahn et ses collè-


gues du Laboratoire PEAR publièrent une méta-analyse portant
sur douze années d'expérimentations GNA réalisées par leur
groupe de recherche4. Ces expérimentations impliquèrent plus
d'une centaine de participants, qui avaient été instruits de tenter
d'influencer intentionnellement les données produites par un
GNA en les faisant soit grimper au-dessus de la courbe du hasard
(la condition «haute»), soit passer en dessous de la courbe du
hasard (la condition «basse»). Les résultats démontrèrent que les
données du GNA montaient plus lorsque les participants souhai-
taient des scores élevés, tandis que ces données chutaient plus
lorsque les participants souhaitaient des scores bas. Même si les
effets enregistrés n'étaient pas très marqués, la totalité des résultats
produisit une probabilité de 35 milliards contre 1. Fait à noter, dans
certaines des expérimentations menées par le PEAR, les partici-
pants étaient à des milliers de kilomètres du GNA. Néanmoins,
aucun effet de déclin lié à la distance n'a été mesuré.
Robert Jahn et ses collègues du Laboratoire PEAR ont égale-
ment mené des études de « placements » par macro-PK. Ces études
visaient à déterminer si l'intention humaine peut affecter le mouve-
ment d'objets macroscopiques. Pour ce faire, ces chercheurs ont
utilisé un mécanisme de cascade aléatoire. Il s'agissait en fait d'un
dispositif expérimental haut de 3 mètres permettant à 9 000 balles
de polystyrène de tomber à travers une matrice de 330 chevilles.
Les balles étaient réparties dans 19 boîtes. Ces balles étaient
comptées, grâce à un procédé photoélectrique, au fur et à mesure

3. Radin D. l., Nelson R. D., « Evidence fo r consciousness-related anomalies in random


physical systems », Foundations ofPhysics 19, 1989, p. 1499-1514.
4. )ahn R.. Dunne G., Bradisj Y., Dobyns A .. Lettieri A .. Nelson R., Mischo )., Bolier E.,
Bosch H., Vaitl D., Houtkooper )., Walter B., « Minci/ machine interaction consortium :
PortREG replication experiments ».Journal ofScientific Exploration 14, 2000, p. 499-555.

72 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CON SCIENCE


qu'elles entraient dans les boîtes. On demandait aux participants
de se concentrer et d'essayer de faire déplacer mentalement la
distribution des balles vers la droite ou la gauche, relativement
à une distribution contrôle normale. Dans l'ensemble, plus de 300
sessions expérimentales ont été réalisées avec une vingtaine de
participants différents, et des résultats légèrement significatifs ont
été obtenus5 •

EFFETS DE CONSCIENCE DE GROUPE

Les études portant sur la micro-PK indiquent que lorsqu'un


individu dirige son attention et une intention vers des processus
physiques aléatoires, tels que la chute d'un dé ou le « compor-
tement» d'un GNA, ces processus n'opèrent plus totalement de
manière aléatoire. Dans ce contexte, il est légitime de se poser la
question suivante: qu'en est-il del'effet micro-PK lorsque plusieurs
individus sont impliqués?
Au milieu des années 1990, alors qu'il était encore affilié au
PEAR, Roger Nelson décida d'explorer cette question importante
en utilisant des GNA. Ses travaux, et les études de réplication réali-
sées subséquemment par d'autres chercheurs en parapsychologie,
suggèrent l'existence d'un« effet de conscience de groupe». Un tel
effet pourrait être lié à la création de «champs de conscience » (ces
champs sont conçus de manière similaire au concept classique de
champ en physique).
Un champ de conscience cosmique imprégnerait l'espace et le
temps. Il s'agit d'une idée fort ancienne qui a d'abord été proposée
par les sages (rishis) Védiques de l'Inde antique. Ceux-ci ensei-
gnèrent qu'il existe un champ de conscience pure ou Soi universel,
qu'ils appelèrent « Brahman ».Ce champ de conscience cosmique
engloberait toutes les consciences humaines individuelles.

5. Jahn R. G .. Dunne B. J., Margins of Reality, New York, Jovanovich, 1987.

CHAPITRE 3 * Q UA ND L"ESPRIT INFLU E SUR LA MATIÈRE 73


Comme le souligne Dean Radin 6 , la notion de champ de
conscience est reliée à l'impression subjective que des pensées
individuelles, qui sont alignées et cohérentes, semblent fusionner
pour former une pensée de groupe. Cela surviendrait lorsque les
individus d'un groupe se trouvent sur la même« longueur d'onde»,
par exemple lors de rituels religieux ou de la visite de lieux sacrés.
Un champ de conscience pourrait aussi se créer lorsqu'un groupe
de personnes chante en chœur ou assiste à un discours émouvant.
Dans de pareils moments, c'est comme si l'attention normalement
dispersée des membres du groupe se focalisait et qu'une cohérence
mentale collective s'installait. Durant de tels moments, il semble
que des changements microphysiques dans l'environnement local
peuvent être détectés.

Jusqu'à présent, plus d'une centaine d'études d'effets de


conscience de groupe ont été conduites à l'aide de GNA. Dans
ces études, l'activité des GNA est mesurée de manière continue,
pendant que des groupes d'individus sont impliqués dans des acti-
vités stimulantes. Il est à noter que le protocole expérimental de ces
études n'implique pas que les participants doivent spécifiquement
focaliser leur intention, ou diriger leur attention, vers le GNA. En
ce qui a trait à l'analyse des données, les scientifiques recherchent
des déviations significatives par rapport aux séquences de nombres
normalement générés de manière aléatoire. Ainsi, dans une série
de 1 000 bits successifs qui sont générés de manière purement
aléatoire, sans que le GNA ne soit influencé d'aucune façon, on
s'attend à obtenir 5000 et 5001 (dans la mesure où le GNA est
parfaitement calibré). Si un effet de conscience de groupe se mani-
feste, alors il devrait y avoir plus de 0 ou plus de 1 que ce qui est
attendu par la seule action du hasard.

La probabilité pour que les résultats de cette centaine d'études


soient dus au hasard est d'une chance sur plus d'un million : l'effet
de conscience de groupe semble donc bel et bien exister. Toutefois,

6. Radin D. Supernormal: Science, Yoga, and the Evidencefor Extraordinary Psychic Abilities,
New York, Deepak Chopra Books, 2013.

74 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


les résultats de ces études varient beaucoup. Cela est vraisembla-
blement dû aux différences dans la composition des groupes, les
activités effectuées par les membres de ces groupes et les contextes
environnementaux7 . Dean Radin a proposé que cette variabilité
inter-études puisse aussi être liée à la difficulté de déterminer
exactement quand la cohérence mentale collective apparaît. Afin
d'examiner cette possibilité, celui-ci a collaboré avec Skip Atwater,
ancien directeur de la recherche à l'Institut Monroe en Virginie.
Spécifiquement, Radin et Atwater ont cherché à vérifier si les sons
binauraux de la méthode Hemi-Sync, qui a été développée par cet
institut privé, peuvent favoriser un effet de conscience de groupe8 •

Lorsqu'on écoute avec des écouteurs stéréo deux sons de


fréquences légèrement différentes, par exemple 500 Hz dans
l'oreille droite et 495 Hz dans l'oreille gauche, les neurones du
système auditif traitent ces sons de façon à ce que l'individu
qui porte les écouteurs perçoive un troisième son, qui résulte
de la différence entre les deux fréquences, soit 5 Hz. C'est cette
fréquence différentielle qui constitue ce qu'on appelle un «son
binaural». Les recherches effectuées à l'Institut Monroe indiquent
que les sons binauraux permettent d'induire une synchronisation
des ondes cérébrales des deux hémisphères. La méthode Hemi-
Sync favorise, entre autres, la relaxation et la réduction du stress9•

La recherche de Dean Radin et Skip Atwater a été menée


durant le« Passage» (en anglais, Gateway Voyage), un programme
intensif d'une durée de six jours qui se déroule à l'Institut Monroe.
Le but de ce programme est de permettre aux participants
d'explorer et de développer différents niveaux de conscience. Au
cours de ce stage, durant plusieurs heures quotidiennement, les

7. Jbid.
8. Radin O., Atwater F. H., « Exploratory evidence for correlations between entrained
mental coherence and random physieal systems», Journal ofScientific Exploration 23, 2009,
p. 263- 272.
9. Wahbeh H., Calabrese C., Zwickey H., «Binaural beat technology in humans : a pilot study
to assess psychologie and physiologie effects », Journal ofAlternative and Complementary
Medicine 13, 2007, p. 25- 32.

CHAPITRE 3 <i> QUAND L'ESPRIT INFLUE SUR LA MATIÈR E 75


participants - généralement une vingtaine - écoutent séparé-
ment, chacun dans leur chambre, divers sons binauraux associés
à la méthode Hemi-Sync. Après l'écoute individuelle de ces sons
(avec des écouteurs stéréo), les participants se réunissent pendant
45 minutes afin de discuter de leurs expériences. Le cycle écoute
de sons-discussion est répété plusieurs fois par jour durant toute
la durée du stage.

Radin et Atwater spéculèrent que l'écoute des sons binau-


raux devrait entraîner, chez chaque participant, le même type de
rythmes cérébraux, et que cela pourrait produire une cohérence
mentale collective. Assumant que l'effet de conscience de groupe
existe réellement, Radin et Atwater firent également l'hypothèse
qu'un tel effet devrait être plus manifeste durant les séances
d'écoute des sons binauraux que durant les repas ou lorsque les
participants dorment. Afin de tester cette idée, ces chercheurs
effectuèrent des analyses de corrélation des données GNA recueil-
lies au cours de 14 week-ends. La plupart des participants aux
stages ignoraient la présence de GNA durant la recherche. Pour
la condition contrôle, des données GNA furent collectées durant
8 week-ends, alors qu'il n'y avait pas de stage à l'Institut Monroe.

En tout, 108 milliards de bits aléatoires furent produits et


stockés. Les analyses corrélationnelles confirmèrent l'hypothèse
des deux chercheurs, c'est-à-dire qu'un effet statistiquement
significatif fut mesuré durant les stages (probabilité pour que les
résultats soient dus au hasard: 1 chance sur 500), tandis qu'aucun
effet significatif ne fut noté durant la condition contrôle. Par
ailleurs, les données produites par un GNA situé à distance de
l'endroit où les stages se déroulaient ne montrèrent aucun effet 10 •

Les études menées par Nelson, Radin et d'autres chercheurs


dans le domaine du psi suggèrent que quelques facteurs influencent

10. Radin D., Atwater F. H., « Exploratory evidence fo r correlations between entrained
mental coherence and random physical systems», Journal ofScientific Exploration 23, 2009,
p. 263- 272.

76 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


la magnitude des effets de conscience de groupe. D'abord, la
conscience de groupe et la cohérence mentale collective seraient
plus grandes lorsque l'attention des membres du groupe est
focalisée sur le même objet ou événement. Ensuite, le nombre
d'individus dans le groupe serait un autre facteur influençant la
magnitude de tels effets 11 •

MASARU EMOTO ET LA SENSIBILITÉ DE L'EAU

Décédé en 2014, Masaru Emoto était un auteur japonais et


un chercheur indépendant connu dans le monde entier pour sa
théorie sur les effets de la pensée et des émotions sur l'eau. Après
avoir fait des études en relations internationales, Emoto devint
titulaire d'un doctorat de l'université de Yokohama en méde-
cine alternative. Fasciné par l'eau, Masaru Emoto fut également
président du Project ofLove and Thanks to Water.

Emoto a mis au point, avec l'aide de quelques collaborateurs,


une méthode d'observation des cristaux d'eau gelés par la photogra-
phie. Dans cette méthode, la cristallisation est obtenue en congelant
des échantillons d'eau dans des boîtes de Petri durant trois heures.
Des gouttelettes de glace se forment par la suite à la surface, et les
cristaux d'eau apparaissent sous une projection de lumière. C'est
alors qu'une photographie des cristaux est prise à vitesse rapide.
Avec cette méthode, Emoto a découvert que la structure des cris-
taux varie beaucoup selon la provenance de l'eau. Ainsi, les eaux
pures et vives forment des cristaux beaux et harmonieux, tandis que
les eaux stagnantes ou usées ne forment pas de cristaux ou encore
forment des cristaux incomplets et disharmonieux.
En se servant de cette méthode, Masaru Emoto a testé la sensi-
bilité de l'eau à l' «énergie » émise par la pensée et les émotions,
la parole, l'image et la musique. Ses travaux ont révélé que les
cristaux réagissent par des changements de structure à différentes

11. Radin D., The Conscious Universe : The Scientific Truth of Psychic Phenomena, New
York, HarperEdge, 1997.

CHA PITRE 3 -1> QUAND L'ESPRIT INFLUE SUR LA MATIÈ RE 77


influences. Ainsi, même de simples mots écrits sur un papier (par
exemple, «haine» et «amour») présentés à de l'eau changent de
manière spécifique la forme des cristaux. De manière générale, les
tests conduits par Emoto et ses collègues révélèrent que la belle
musique (par exemple, celle de Jean-Sébastien Bach), ainsi que les
pensées, les émotions et les mots positifs mènent à la formation
de beaux cristaux. À l'opposé, les pensées, les émotions et les mots
négatifs, de même que le hard rock, conduisent à la formation de
cristaux difformes et peu attirants sur le plan esthétique.
Les résultats des travaux d'Emoto et de son équipe ont été
publiés dans quelques ouvrages montrant des clichés de divers
cristaux d'eau dans une panoplie de situations 12• Emoto et ses
ouvrages sont devenus célèbres après que ses expériences sur les
molécules d'eau ont été présentées dans le film intitulé Que sait-on
vraiment de la réalité?
Comme Masaru Emoto n'avait pas une formation scienti-
fique traditionnelle, certains sceptiques n'hésitèrent pas à qualifier
sa découverte d'imposture. Afin de leur river leur clou, Emoto
entama une collaboration avec le très respectable et respecté
chercheur Dean Radin. Ce dernier s'assura d'éliminer les princi-
pales faiblesses méthodologiques qui caractérisaient les travaux
préliminaires d'Emoto. Ainsi, les effets d'attente possibles de
la part du photographe, des juges et de l'analyste des données
furent contrôlés en ayant recours à une procédure en aveugle.
Dans une première étude 13 , on demanda à un groupe d'environ
2000 personnes à Tokyo de se concentrer avec l'idée d'avoir des
intentions positives à l'égard d'échantillons d'eau se trouvant dans
une salle blindée électromagnétiquement à l'Institut des sciences
noétiques, à Petaluma, en Californie. Les participants ignoraient
qu'il y avait des échantillons d'eau identiques qui avaient été placés
ailleurs dans cet institut.

12. Emoto M., les Messages cachés de l'eau, Paris, Guy Trédaniel éditeur, 2004.
13. Radin D., Hayssen G., Emoto M., Kizu T., « Double-blind test of the effects of distant
intention on water crystal formation », Explore: The Journal ofScience and Healing 2, 2006,
p. 408-411.

78 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Les cristaux de glace formés à partir des deux séries
d'échantillons d'eau furent photographiés à l'aveugle. En outre,
les images obtenues furent évaluées à l'aveugle pour l'aspect esthé-
tique par 100 juges indépendants. Les cristaux de glace formés
à partir de l'eau «traitée» furent jugés significativement plus
beaux par les juges.

Dans une étude de réplication réalisée subséquemment par


Radin, Emoto et leurs collègues 14 , 1 900 personnes en Autriche et
en Allemagne envoyèrent leur intention à deux bouteilles d'eau se
trouvant dans la salle blindée électromagnétiquement à l'Institut
des sciences noétiques. Comme dans l'étude précédente, deux
bouteilles contrôle avaient été placées ailleurs à l'institut. Après
que l'eau fut gelée, cristallisée, et que les photos furent prises,
2 500 juges indépendants évaluèrent à l'aveugle la beauté des cris-
taux. Un résultat similaire fut trouvé, c'est-à-dire que les cristaux
d'eau traitée furent jugés plus beaux - symétriques, bien formés
et attrayants - que les cristaux formés à partir de l'eau contrôle.
Étant donné que le corps humain est composé à 70 % d'eau, on
comprend aisément pourquoi les implications de ces études pour
notre santé peuvent être importantes.

L'EFFET DE L'OBSERVATEUR
DANS LE MONDE QUANTIQUE

Les études de micro-PK conduites avec les GNA suggèrent qu'il


est possible d'influencer mentalement des processus se déroulant
dans le monde microphysique. L'une des plus grandes étrangetés
de ce monde est le fait qu'un objet quantique se comporte comme
une onde indéfiniment jusqu'à ce qu'il soit observé. Comme si
l'objet quantique en question savait qu'il est observé. Cette bizar-
rerie est démontrée par un interféromètre à double fente. Il s'agit
d'un appareil qui permet d'envoyer des particules de lumière (ou

14. Radin D., Lund N., Emoto M ., Kizu T., « Etfects of distant intention on water crystal
formation: A triple-blind replication »,Journal ofScientific Exploration 22, 2008, p. 481-493.

CHA PITRE 3 -» Q UA ND L'ESPRIT INFLU E SUR LA MATI ERE 79


photons; mais cela est aussi vrai des électrons et des particules
élémentaires) à travers une paroi percée de deux petites fentes
parallèles, et d'enregistrer les patrons de lumière qui apparaissent
sur un écran situé derrière les fentes. Dans la mesure où les photons
se comportent comme d'infimes billes séparées, les patrons de
lumière devraient toujours être deux bandes lumineuses. C'est ce
qui est effectivement enregistré si l'on suit chaque photon tandis
qu'ils passent à travers les fentes. Toutefois, si l'on ne suit pas
le trajet des photons, on observe un motif de diffraction, qui est
une zone où s' alternent des franges sombres et illuminées (dites
«franges d'interférence»). Un tel motif illustre le caractère ondu-
latoire de la lumière. Celle-ci possède donc une double nature:
elle est à la fois onde et corpuscule. Et sa façon de se manifester
dépend de la manière dont on cherche à l'appréhender. Ce phéno-
mène mystérieux est appelé par les physiciens le «problème de la
mesure »15 •

Il existe d'autres concepts de la MQ qui sont étroitement


associés à ce phénomène. La «réduction du paquet d'ondes» (ou
«effondrement de la fonction d'onde») est l'un de ces concepts.
Selon la MQ, un système physique possède de multiples états
possibles mais physiquement non manifestés - on dit de ces
états qu'ils sont superposés - quand ce système n'est pas observé
et mesuré, c'est-à-dire perturbé par une observation/mesure.
Lorsqu'une observation/mesure est faite, les états superposés
doivent s'effondrer en une seule et unique possibilité. Autrement
dit, l'observation ne fait pas que perturber ce qui est mesuré, elle
produit aussi l'effet 16•

Le problème de la mesure s'oppose au bon sens puisqu'il remet


en question le postulat selon lequel il existe une réalité objective
totalement indépendante des observateurs. Ce problème a profon-
dément ébranlé ce que les physiciens croyaient à propos du monde

15. Radin D., Supernormal: Science, Yoga, and the Evidence for Extraordinary Psychic
Abilities, New York, Deepak Chopra Books, 2013.
16. http:/ /philosophiedessciences.blogspot.ca/2014/06/linterpretation-de-la-mecanique.html.

80 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


physique. Afin d'illustrer le caractère étrange et problématique
de ce phénomène, Erwin Schrodinger, l'un des pères de la MQ,
a imaginé en 1935 une expérience de pensée célèbre. On appelle
cette expérience de pensée le «chat de Schrodinger ». Dans cette
fameuse expérience, on imagine un chat qui est enfermé dans une
boîte contenant un dispositif mortel. Ce dispositif consiste à libérer
du cyanure si un détecteur de radioactivité détecte la désintégra-
tion d'un atome radioactif. Étant donné qu'un atome a une chance
sur deux de se désintégrer sur une période d'une minute, les équa-
tions probabilistes de la MQ décrivent l'état du chat en disant
qu'il est 50 % vivant et 50 % mort. Ces équations illustrent donc
une superposition de deux états. Si un observateur ouvre la boîte,
il réduit son ignorance au sujet de l'état de santé du chat - ce qui
correspond à l'effondrement de la fonction d'onde - et découvre
que ce dernier est 100 % vivant ou 100 % mort17.
Le problème de la mesure et l'effet del'observateur ont amené
plusieurs physiciens réputés - tels que Bohr, Pauli, Schrodinger et
von Neumann - à penser que la conscience joue un rôle important
dans le modelage du monde physique. La plupart des physiciens
rejettent cette idée et préfèrent d'autres avenues théoriques afin
d'expliquer le problème de la mesure. Cependant, certains physi-
ciens théoriciens sont allés encore plus loin que les pères de la
MQ. Ainsi, John Wheeler a proposé le «principe participatif
anthropique». D'après ce principe, la présence d'observateurs
est nécessaire pour que l'Univers existe. En d'autres termes, la
conscience doit avoir existé avant l'apparition du monde physique18•
Afin d'en apprendre plus sur le rôle de la conscience dans
l'effondrement de la fonction d'onde en MQ, Dean Radin et ses
collaborateurs ont utilisé, il y a quelques années, un système
optique de double fente 19 • Ces chercheurs ont fait l'hypothèse
que l'intensité de la figure d'interférence produite par ce système

17. http://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/physique-chat-schrodinger-fois-
mort-vivant-deux-boites-62990.
18. http://www.internetactu.net/2015/05/18/letre-humain-une-force-cosmique.
19. Radin D. !., Michel L., Galdamez K., W endland P., Rickenbach R., Delorme A.,
« Consciousness and the double-slit interference pattern: six experiments », Physics Essays 25,
2012, p. 157- 171.

CHAPITRE 3 * QUAND L'ESPRIT INFLUE SUR LA MATIERE 81


optique diminuerait quand les participants à l'étude focaliseraient
leur attention sur la double fente. Au total, 137 volontaires parti-
cipèrent à cette étude et 250 sessions d'essais furent réalisées.
Chaque session comprenait 40 essais (d'une durée variant entre
15 et 30 secondes). Pour chacun de ces essais, on demandait aux
participants de porter leur attention soit vers la double fente (la
condition expérimentale), soit au loin de la double fente (la condi-
tion contrôle). Les données recueillies ont révélé qu'en moyenne
l'intensité de la figure d'interférence diminuait significativement
dans la direction escomptée (probabilité de 184000 contre 1).
De plus, les chercheurs ont effectué 250 sessions de contrôle
en l'absence de tout observateur. Ces séances visaient à tester la
présence d'artefacts potentiels (liés, par exemple, au matériel et aux
méthodes d'analyse). Aucun effet n'a été mesuré. Ces résultats, qui
ont été publiés dans la revue Physics Essays en 2012, vont dans le
sens de l'interprétation de la MQ selon laquelle la conscience est
liée au problème de la mesure. Par ailleurs, Radin et ses collègues
ont découvert que des facteurs comme l'expérience de la médita-
tion, le degré de focalisation de l'attention et l'ouverture d'esprit
étaient corrélés dans une direction prédictible avec les perturba-
tions d'intensité de la figure d'interférence.

Plus récemment, Radin et quelques collaborateurs ont conduit


une autre étude en utilisant un système optique à double fente
et un protocole expérimental similaires20 • L'objectif de cette
nouvelle étude était de déterminer si l'interaction de nature «non
physique» proposée par certains physiciens est mieux interprétée
comme une influence active de la conscience ou comme une forme
passive d'observation. Cette fois, l'expérimentation a été menée
sur Internet en envoyant les données du système à double fente
aux navigateurs Web des participants. En tout, 1479 personnes en
provenance de 77 pays ont participé à 2 985 sessions expérimen-
tales. Ces participants devaient focaliser ou non leur attention sur
un signal qui représentait en temps réel le niveau d'interférence

20. Radin D., Michel L., Delorme A., « Psychophysical modulation of fringe visibility in
a distant double-slit optical system », Physics Essays 29, 2016, p. 14-22.

82 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


produit par le système optique. Les résultats furent semblables
à ceux de l'étude précédente. Remarquablement, ces résultats
ont aussi montré que la direction de l'effet, qui était conforme
à l'intention des observateurs, n'était pas affectée par la distance
entre les participants et le système à double fente (cette distance
allait de 1kmà18000 km). D'autre part, aucun effet ne fut observé
lors de plus de 5000 sessions de contrôle enregistrées par un ordi-
nateur simulant un participant humain.

LE CERVEAU EST-IL UN SYSTÈME QUANTIQUE?

Dans les années 1930, John von Neumann, le mathématicien et


physicien américano-hongrois, fut le premier à avancer qu'en MQ,
l'observateur d'une mesure n'est pas seulement l'instrument qui
est utilisé mais aussi la conscience du physicien qui constate cette
mesure. Cette idée fut reprise des décennies plus tard, d'abord par
Eugene Wigner, puis par Henry Stapp. Ce dernier est un physi-
cien théoricien œuvrant à l'université de Californie à Berkeley.
Il a élaboré un modèle selon lequel il y aurait des effets quan-
tiques au niveau des canaux ioniques des neurones. Lorsque ces
canaux s'ouvrent, les neurotransmetteurs sont libérés dans la fente
synaptique. Comme les synapses permettent la création des assem-
blées neuronales, et que ces structures sont étroitement liées aux
processus mentaux, Stapp pense que ceux-ci peuvent déclencher
des effets quantiques dans les canaux ioniques. Puisque le diamètre
de ces canaux est de 1 nanomètre (soit 10-9 mètre), Henry Stapp
postule que ceux-ci appartiennent au monde microphysique, et
que leur activité est régie par les règles de la MQ. En outre, Stapp
soutient qu'un effort d'attention dirigé vers un but précis permet
de moduler directement la réduction du paquet d'ondes associée
à l'activité des canaux ioniques. C'est de cette façon que serait
implémenté le libre arbitre dans le cerveau21 •

21. Stapp H., Mindful Universe : Quantum Mechanics and the Participating Observer,
Heidelberg, Springer, 2011.

CHAPITRE 3 * QUAND L'ESPRIT IN FLUE SUR LA MATIÈRE 83


Il existe d'autres modèles des interactions esprit-cerveau
qui reposent sur la MQ. Par exemple, le neuroscientifique John
Eccles et le physicien Friedrich Beck ont suggéré que la probabi-
lité de relâchement de messagers chimiques à partir des vésicules
présynaptiques - les petites vésicules membranaires à la jonc-
tion synaptique des neurones qui contiennent les messagers
chimiques - est régulée par des processus quantiques. Cette
hypothèse s'appuie sur le fait que la taille extrêmement petite des
vésicules synaptiques est comparable à celle d'autres structures et
phénomènes étudiés par la MQ. Par ailleurs, Eccles a avancé que
les dendrites - les extensions en forme de branche d'un neurone
qui conduisent les impulsions électriques des neurones adjacents
vers le corps cellulaire - agissent en tant qu'unités réceptrices de
base du cortex cérébral (le manteau de matière grise recouvrant la
surface des hémisphères cérébraux). Les ensembles de dendrites
(ou « dendrons ») seraient liés à des unités d'expériences mentales
(ou« psychons »). Lors d'intentions et de pensées volontaires, les
psychons agiraient sur les dendrons en augmentant temporaire-
ment la probabilité de libération des neurotransmetteurs via les
vésicules présynaptiques22 •
Ni Stapp, ni Eccles, ni Beck n'ambitionnent d'expliquer l'esprit
et la conscience en termes quantiques, à l'opposé du physicien
et mathématicien anglais Roger Penrose et de l'anesthésiologiste
américain Stuart Hameroff. Penrose ne croit pas au concept
d'effondrement de la fonction d'onde. Il propose de remplacer
ce concept de la MQ par celui de «réduction objective». Cette
dernière serait de nature gravitationnelle et non locale, c'est-à-dire
qu'elle reposerait sur des effets à distance et permettrait d'instaurer
une cohérence quantique entre des choses éloignées spatialement.
Dans le cerveau, selon Penrose et Hameroff, la réduction objective
interviendrait au niveau des microtubules. Ceux-ci sont de minus-
cules tubes (d'environ 25 nanomètres de diamètre) faits d'une
protéine (appelée « tubuline ») enroulée en spirale. Les microtu-
bules servent de support structural aux neurones ainsi qu'à toutes

22. Beck F., Eccles J. C., «Quantum aspects of brain activity and the role of consciousness »,
Proceedings of the N ational Academy USA 89, 1992, p. 11357-11361.

84 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCI ENCE


les cellules de l'organisme. Les molécules de tubuline peuvent être
soit dans un état allongé, soit dans un état contracté. Pour Penrose
et Hameroff, une superposition d'états quantiques expliquerait ce
phénomène. D'autre part, la très petite taille des microtubules, leur
structure protéinique en spirale et le fait que ces organites soient
relativement isolés del'environnement extérieur fournissent toutes
les conditions essentielles pour favoriser la cohérence quantique23 •
Selon Penrose et Hameroff, leur modèle permettrait d'expliquer
l'unité de la conscience et l'origine du libre arbitre. Les philosophes
Rick Grush et Patricia Churchland ne sont pas du tout d'accord,
et ils ont soulevé plusieurs objections difficilement contournables.
D'abord, les microtubules ne se retrouvent pas uniquement dans le
cerveau humain, mais aussi dans toutes les cellules animales et végé-
tales. Ensuite, plusieurs substances anesthésiantes agissent sans que
ces organites ne soient affectés, et la destruction des microtubules
n'entraîne pas d'effets majeurs sur la conscience. Enfin, il n'y a pas
d'évidence que ces organites soient impliqués dans les changements
centraux d'états de conscience comme le cycle éveil-sommeil24 •
]'ajouterais à cela que le modèle Penrose-Hameroff est une autre
tentative de réduire l'esprit à des processus physiques. Une tentative
qui échoue. Au lieu de l'activité électrochimique dans les neurones
ou les assemblées neuronales, ce sont de présumés processus quan-
tiques dans les microtubules qui seraient à l'origine de l'activité
mentale. Il s'agit donc d'un modèle encore plus réductionniste
que la plupart des théories matérialistes, celles-ci se contentant de
réduire l'esprit à des niveaux cellulaires ou moléculaires.

23. Penrose R., Hameroff S., « Consciousness in the Universe: Neuroscience, Quantum
Space-Time Geometry and Orch OR Theory »,Journal of Cosmology 14, 2011 - http://
journalofcosmology.com/Consciousnessl60.html.
24. Grush R., Churchland P.,« Gaps in Penrose's toiling»,/ournal ofConsciousness Studies 2,
1995, p. 10-29.

CHAPITRE 3 -i- QUAND L..:ESPRIT INFLUE SUR LA MATIÈRE 85


UN DISPOSITIF PORTEUR D'INTENTION?

William Tiller est un professeur émérite du département des


sciences des matériaux et de génie de l'université Stanford. Il
a d'ailleurs occupé le poste de directeur de ce département. Au
cours de sa longue carrière scientifique, qui a porté principalement
sur les mécanismes de cristallisation, Tiller a publié quelques livres
académiques et plus de 200 articles.

Ce scientifique n'était pas parfaitement comblé par son travail


officiel à l'université, car il avait l'impression que ses travaux ne
touchaient qu'à une portion très étroite de la réalité. En paral-
lèle à ses recherches formelles, William Tiller a décidé, dans les
années 1970, d'entreprendre un programme de recherche au
sujet des effets de la pensée sur le monde matériel. Pour ce faire,
il a mis au point un dispositif qui permet, dit-il, d'enregistrer et
d'implémenter les intentions. Il s'agit d'un petit appareil électro-
nique qui se branche dans une prise électrique, et qui est placé
à proximité de la cible matérielle que l'on désire influencer. Dans
un premier temps, il faut «charger » le dispositif avec une inten-
tion spécifique. Tiller a découvert que ce processus était efficace
lorsqu'un petit groupe de personnes entrait dans un état méditatif
et se concentrait durant une quinzaine de minutes sur l'intention
en question.

En utilisant un tel protocole expérimental, William Tiller


a réalisé quelques séries d'expériences qui visaient à changer le
niveau de pH de l'eau. Le pH permet d'estimer la concentration
des ions hydrogène dans une solution aqueuse, et de mesurer le
caractère acide ou basique de cette solution. Plus la solution est
acide, plus la valeur du pH est faible et vice versa. Le but de la
première expérience était de faire augmenter le pH de 1. Quelques
mois après avoir mis en marche le dispositif porteur d'intention,
Tiller observa que le pH de l'eau avait monté de 1. Pour la seconde
expérience, l'objectif était de faire diminuer le pH de l'eau de 1.
Cet objectif fut également atteint. Les résultats de ces expériences

86 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


furent publiés. Par la suite, ces résultats furent reproduits par des
groupes de recherche à Londres, à Milan et à l'université de Floride.

Les physiciens sont familiers avec les atomes, les protons,


les électrons, et les quatre forces fondamentales présentes
dans la nature: la gravitation, l'interaction électromagnétique,
l'interaction nucléaire forte et l'interaction nucléaire faible. Mais,
pour comprendre les résultats de ses expériences avec le dispositif
porteur d'intention, William Tiller croit qu'il faut aller au-delà de
la MQ, des forces fondamentales et du monde physique connu
aujourd'hui, en postulant l'existence d'énergies subtiles et de forces
dont la science n'a pas encore connaissance25 •

25. Tiller W. A., Dibble W . E., Kohane M. J., Conscious Acts of Creation : The Emergence of
a New Physics, Walnut Creek (CA), Pavior Publishing, 2001.

CHAPITRE 3 * QUAND L'ESPRIT INFLUE SUR LA MATIÈRE 87


CHAPITRE 4

LE POUVOIR NON
LOCAL DE L'INTENTION
SUR LE VIVANT
«Il n y a que deux façons de vivre sa vie: l'une en faisant
comme si rien n'était un miracle, l'autre en faisant
comme si tout était un miracle. »
ALBERT EINSTEIN

Les études présentées dans le chapitre 3 démontrent que nous


possédons la capacité d'influencer de manière non locale le monde
microphysique. D'autres études, que nous examinerons dans ce
chapitre, indiquent que l'esprit humain est aussi capable de bio-
psychokinèse (bio-PK), c'est-à-dire d'une action non locale sur la
matière organique et les êtres vivants.
L'investigation scientifique de la bio-PK a débuté dans les
années 1960. L'un des pionniers de ce domaine de recherche,
Cleve Backster, n'était pas un chercheur mais un spécialiste du
détecteur de mensonges (ou polygraphe) travaillant pour la CIA.
Un matin de février en 1966, lors d'une pause-café, cet ancien
membre du service de contre-espionnage de l'armée américaine
décida d'arroser les plantes dans son bureau. Parmi celles-ci se
trouvait un dragonnier, qui est une plante pourvue d'une très
longue tige. Curieux de nature, Backster se demanda, tandis qu'il
emplissait l'arrosoir, combien de temps il faudrait à l'eau pour se
rendre des racines jusqu'aux feuilles du dragonnier. Pour en avoir
le cœur net, il enchâssa l'une des feuilles de cette plante entre les

89
deux électrodes d'un polygraphe, puis il ceintura le tout avec un
élastique. Lorsque l'eau aurait rejoint le point de la feuille se trou-
vant entre les électrodes, l'humidité augmenterait, ce qui amènerait
une diminution dans la résistance électrique de la feuille. Cette
diminution se traduirait par un mouvement de hausse dans le tracé
s'imprimant sur le papier déroulant du polygraphe.
Contrairement à ce que Backster attendait après avoir versé
l'eau, le tracé se dirigea vers le bas, comme lorsqu'un individu
éprouve la peur d'être démasqué dans son mensonge. Le polygra-
phiste de la CIA se demanda à ce moment-là si une plante pouvait
réagir émotionnellement. Il se dit que, si tel était le cas, menacer
le bien-être de la plante permettrait probablement d'intensifier la
réaction dans le tracé obtenu. Backster pensa alors à se servir d'une
allumette afin de brûler la feuille équipée d'électrodes. Au même
moment, le crayon traceur du papier déroulant du polygraphe
s'élança vers le haut. Comme si la plante avait manifesté une très
grande peur après avoir perçu la pensée menaçante de Backster.
Le polygraphiste se rendit ensuite au bureau de sa secrétaire afin
d'y prendre des allumettes. Le polygraphe montrait toujours la
réponse d'alarme de la plante lorsque Backster retourna dans son
bureau. Il alluma alors une allumette et l'approcha de la feuille:
le crayon traceur continuait à montrer la réponse d'alarme. Le
polygraphiste ramena par la suite les allumettes à sa secrétaire, et
le tracé se normalisa peu à peu.
Pour Cleve Backster, le phénomène extraordinaire qu'il
venait d'observer indiquait que les plantes possèdent une sorte de
perception psi. Il baptisa celle-ci « perception primaire». Grâce à
ce type de perception, les plantes seraient réceptives aux pensées
et intentions des êtres humains. Au cours des décennies suivantes,
Backster réalisa un grand nombre d'expériences qui confirmèrent
l'existence de cette perception primaire chez les plantes 1•
À peu près au même moment que Cleve Backster fit sa
découverte, un chimiste du nom de Robert Miller réalisa une
expérience qui suggéra que l'intention humaine pouvait affecter

1. Backster C., L 1ntelligence émotionnelle des plantes, Paris, Guy Trédaniel éditeur, 2014.

90 UN SAUT Q UANTIQU E DE LA CONSCIENCE


les plantes, pas seulement dans leur environnement immédiat,
mais également à distance. Miller effectuait des recherches afin
de déterminer dans quelle mesure les variations d'éclairage
affectent le taux de croissance du seigle. Pour ces recherches, il
utilisait un appareil permettant de mesurer le taux de croissance
de cette plante avec une précision au millième de centimètre par
heure. Lorsque l'éclairage, la température et l'irrigation étaient
maintenus constants, le taux de croissance du seigle était relative-
ment stable (0,0152 cm par heure). En 1967, Miller demanda à la
guérisseuse Olga Worrall et à son mari Ambrose - qui traitaient
leurs patients à distance, par la prière - de tenter d'influencer
mentalement la croissance d'une seule pousse de seigle, depuis
leur domicile. Ce dernier était situé à 800 kilomètres du labora-
toire de Robert Miller. Une date fut choisie. Lors de la journée
sélectionnée, à 9 heures du soir, le couple visualisa la pousse de
seigle en train de croître vigoureusement, entourée d'une lumière
blanche. Le lendemain, Miller découvrit qu'avant que les Worrall
ne commencent à «prier» pour la plante, le tracé produit par
l'appareil accusait une pente légère qui représentait un taux de
croissance normal. Cependant, ce tracé commençait à dévier vers
le haut à 9 heures exactement la soirée précédente et vers 8 heures
le lendemain matin, le taux de croissance était de 0,1334 cm par
heure, soit une augmentation de plus de 800%2 •
Suite à sa découverte fortuite, Cleve Backster conduisit de
nombreuses expériences démontrant que les feuilles coupées ou
écrasées, ainsi que différents matériaux organiques - par exemple,
les œufs, le yoghourt et les frottis du palais de la bouche - réagissent
aux intentions et aux émotions humaines. Certaines de ces expé-
riences indiquèrent que des leucocytes buccaux (des globules
blancs provenant de la bouche d'une personne) placés dans une
éprouvette réagissent électrochimiquement aux états émotionnels
du donneur, même si ce dernier se trouve dans une pièce éloignée,
un autre édifice, voire un autre pays3•

2. Miller R., «The Positive Effect of Prayer on Plants», Psychic, 1972.


3. Backster C., op. cit.

CHAPITRE 4 * LE POUVO IR NO N LOCAL DE LJNTENTION SUR LE V IVANT 91


Dans la même veine, le physicien William Tiller et ses collègues
utilisèrent le dispositif permettant d'enregistrer et d'implémenter les
intentions ainsi que le protocole décrit dans le chapitre précédent,
afin d'affecter de manière non locale divers processus biologiques.
L'une des expériences cibla l'activité des enzymes, ces protéines qui
catalysent les réactions chimiques dans les cellules. Des enzymes de
foie humain furent récoltés. Les résultats montrèrent une augmen-
tation de 30% dans le niveau d'activité de ces enzymes. Le but d'une
autre expérience fut de mesurer l'impact non local de l'intention
sur le rythme de développement et de maturation des asticots
de mouches. Dans cette expérience, les pensées des méditants
visaient à faire augmenter la quantité d'adénosine triphosphate (ou
ATP) - la principale source d'énergie au niveau cellulaire - dans
les cellules d'asticots. Tiller et ses collaborateurs mesurèrent une
augmentation de 15% du niveau d'ATP dans ces cellules. Cette
augmentation était associée à un raccourcissement du temps de
développement des asticots de près de 25 %4 •

Jean Barry, médecin français de Bordeaux qui fut aussi


président de l'Institut métapsychique international, est un autre
des pionniers de la recherche sur la bio-PK. Le Dr Barry essaya
de déterminer s'il est possible pour des êtres humains d'inhiber
mentalement la croissance d'un fungus (un champignon) pouvant
provoquer une maladie infectieuse. Dans cette expérience, on
s'assura de contrôler la pureté génétique du fungus, qui était cultivé
dans des boîtes de Petri (un incubateur de laboratoire). Les condi-
tions d'environnement (température, humidité, éclairage) étaient
identiques pour les boîtes choisies au hasard pour être influencées
et pour les boîtes du groupe contrôle. Dix individus participèrent
à l'expérience. Lors de chaque session, cinq boîtes expérimentales
et cinq boîtes contrôle furent assignées à chacun des participants:
ceux-ci étaient assis à 1,50 m de ces boîtes. On leur demandait de
focaliser uniquement leur attention et leur intention sur les cinq
boîtes expérimentales pendant quinze minutes. À la fin de chaque

4. Tiller W . A., Dibble W. E., Kohane M. )., Conscious Acts of Creation: The Emergence of
a New Physics, Walnut Creek (CA), Pavior Publishing, 2001.

92 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


session, les boîtes étaient pesées et comparées. Si les boîtes expé-
rimentales étaient plus légères que les boîtes contrôle, un succès
était enregistré; si elles étaient plus lourdes, un échec était noté.
Pour 151 des 195 sessions réalisées dans le cadre de cette expéri-
mentation, la croissance du fungus dans les boîtes expérimentales
fut significativement inférieure à celle des boîtes contrôle5 •

Une autre étude intéressante de bio-PK fut menée par le


psychologue William Braud alors qu'il travaillait à la Mind Science
Foundation à San Antonio, au Texas6 • Dans cette étude, pour
toutes les sessions, Braud demanda aux participants d'utiliser la
visualisation afin de faire ralentir le taux d'hémolyse (de destruc-
tion) de globules rouges provenant de sang humain, et contenus
dans des tubes de test se trouvant dans une pièce éloignée. Neuf
participants sur 32 réussirent à abaisser de façon significative le
taux d'hémolyse des globules rouges contenus dans les tubes. De
plus, les résultats révélèrent que cet effet était plus marqué lorsqu'il
s'agissait de leur propre sang.

D'autres études ont testé la capacité d'individus à modifier


l'activité physiologique d'un animal. Par exemple, des chercheurs
de l'Institute for Parapsychology (en Caroline du Nord) ont
exploré la bio-PK en évaluant le temps dont avaient besoin des
souris anesthésiées pour se réveiller7. Des paires de souris furent
d'abord constituées. Les deux membres d'une même paire étaient
de même sexe, de même mère, et ils avaient une taille similaire.
L'une des souris était sélectionnée pour faire partie du groupe
expérimental, tandis que l'autre appartenait au groupe contrôle.
Les souris des deux groupes étaient anesthésiées à l'éther, et les
participants à l'étude ne devaient se concentrer que sur les souris
du groupe expérimental. Deux séries d'essais furent réalisées. Dans

5. http://www.metapsychique.org/La-Bio-PK-ou-l-influence-de-1.html.
6. Braud W., « Distant mental influence of rate of hemolysis of human red blood cells » ,
Journal of the American Society fo r Psychical Research 84, p. 1-24, 1990.
7. Watkins G.K., Watkins A., « Possible PK influence on the resuscitation of anesthetized
mice »,journal ofParapsychology 3, p. 257-272, 1971.

CHAPITRE 4 '& LE POUVO IR NO N LOCAL DE L'INTENTION SUR LE V IVANT 93


la première série, les participants se trouvaient près des souris mais
ne pouvaient les toucher. Lors de la seconde série, les participants se
trouvaient dans une autre pièce et observaient les souris du groupe
expérimental à travers un miroir sans tain. Les résultats s'avérèrent
significatifs pour les deux séries d'essais: les souris traitées se réveil-
laient plus rapidement que les souris du groupe contrôle.

L'EFFET NON LOCAL DE L'INTENTION SUR AUTRUI

D'autres études ont cherché à évaluer l'effet non local de


l'intention de l'émetteur sur l'activité physiologique d'une personne
(le récepteur) située à distance: ce devis expérimental est appelé
«protocole émetteur-récepteur». Dans ces études, le récepteur,
à qui on demande de demeurer calme et détendu, ignore la durée
des périodes pendant lesquelles l'émetteur «envoie» une inten-
tion, et quand ces périodes ont lieu. Charles Tart, un chercheur
en psychologie de l'université de Californie à Davis, est l'un des
pionniers de ce genre d'études. Au début des années 1960, Tart
utilisa un tel protocole et agit en tant qu'émetteur afin de vérifier
si des récepteurs situés à distance pouvaient aussi réagir aux chocs
électriques aléatoires qu'il recevait. La conductance cutanée, la
fréquence cardiaque et le volume sanguin des récepteurs furent
mesurés. Ces mesures physiologiques révélèrent que les récepteurs
réagissaient significativement aux chocs reçus par Tart. Cependant,
ces récepteurs n'étaient pas du tout conscients de ces événements.
Suite à l'étude de Charles Tart, Jean Barry (en France), l'ingénieur
Douglas Dean (au Newark College of Engineering dans le New
Jersey) et le psychologue Erlendur Haraldsson (en Islande) enregis-
trèrent séparément des changements significatifs dans le volume
sanguin mesuré au niveau du doigt de récepteurs au moment où
les émetteurs, situés dans certains cas à des milliers de kilomètres,
dirigeaient mentalement leurs états émotionnels vers eux8•
Le chercheur en psychologie William Braud a réalisé plusieurs
études dans le domaine de la bio-PK, et il a fait preuve d'innovation

8. Radin D, La Conscience invisible. Le paranormal al'épreuve de la science, Paris, Presses


du Châtelet, 2000.

94 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCI ENCE


en développant une procédure expérimentale qu'il appela «allo-
biofeedback »(du grec altos, qui veut dire «autre»). L'approche
traditionnelle du biofeedback consiste à fournir à l'individu qui
s'entraîne de l'information au sujet d'une mesure physiologique
spécifique, par exemple son rythme cardiaque. Dans les expériences
impliquant l'allobiofeedback, l'information est fournie à l'émetteur
afin de lui permettre de déterminer dans quelle mesure il réussit
mentalement à influencer la physiologie du récepteur, qui se trouve
à distance (dans une autre salle). Dans plusieurs des expériences
conduites par Braud et ses collègues, la cible physiologique sélec-
tionnée était la conductance cutanée (ou réponse électrodermale),
qui reflète l'activité du système nerveux sympathique. Une réponse
électrodermale élevée signale l'anxiété ou le stress. Dans ces expé-
riences, l'émetteur observait sur un polygraphe les fluctuations de
cette réponse chez le récepteur, et il tentait de faire augmenter
ou diminuer cette activité physiologique. La durée des périodes
d'influence était typiquement de trente secondes. L'activité physio-
logique cible dans ces périodes était comparée à celle mesurée lors
de périodes contrôle sans influence. L'ordre des périodes d'influence
et des périodes contrôle était déterminé aléatoirement, et les émet-
teurs recevaient les instructions via un casque d'écoute.
Les nombreuses expérimentations réalisées par Braud et ses
collaborateurs, à l'aide de cette approche expérimentale - plus de
300 sessions impliquant 62 agents et 270 récepteurs - ont démontré
une influence mentale à distance sur la conductance cutanée lors
des périodes d'influence. Dans l'une de ces expérimentations,
un premier groupe de récepteurs avait un niveau de conduc-
tance cutanée normal, tandis qu'un second groupe de récepteurs
montrait un niveau de conductance cutané anormalement élevé.
Le but de l'expérimentation était de faire diminuer cette activité
physiologique chez les deux groupes de récepteurs. Les résultats
montrèrent une réduction plus marquée de la conductance cutanée
chez les récepteurs appartenant au second groupe9 •
Dans d'autres expérimentations menées par Braud et son
équipe de recherche, l'allobiofeedback n'était pas utilisé. On

9. Braud W., Schlitz M., « Psychokinetic influence on electrodermal activity », Journal of


Parapsychology, 1983, 47, p. 95-119.

CHAPITRE 4 * LE POUVOIR NON LOCAL DE LINTENTION SUR LE VIVANT 95


demandait plutôt aux émetteurs de s'imprégner d'images chargées
émotionnellement, ainsi que de l'intention d'atteindre le récep-
teur; ou encore, d'imaginer que le récepteur se trouvait dans un
état correspondant à l'intention émise. Cette approche différente
a également produit des résultats significatifs.
William Braud et sa collaboratrice de longue date,
l'anthropologue Marilyn Schlitz, ont réalisé une méta-analyse
englobant les 37 expérimentations qu'ils ont menées jusqu'au début
des années 1990 à propos de la bio-PK. Ces expérimentations, qui
ont impliqué la mesure de différentes réactions physiologiques,
comprenaient 655 sessions avec 153 personnes ayant joué le rôle
d'émetteurs et 449 personnes (ou animaux) ayant agi comme
récepteurs. Les résultats combinés de ces diverses expérimenta-
tions générèrent une probabilité de 100 milliards contre 110•

Les chercheurs Deborah Delanoy et Sunita Sah de l'université


d'Édimbourg ont conduit une variante de l'expérience popularisée
par Braud. Le but de leur étude était de vérifier si le récepteur
peut réagir physiologiquement à un état émotionnel vécu par
l'émetteur. Dans un premier temps, les émetteurs devaient iden-
tifier des souvenirs personnels capables d'induire chez eux un
état positif et heureux. Les émetteurs devaient également choisir
quatre objets qui étaient pour eux neutres sur le plan émotionnel.
Pendant l'expérience, un processus aléatoire prévenait les émet-
teurs des périodes d'envoi, et leur assignait comme cible soit un
état «positif», soit un état« neutre». Pour chaque période d'envoi,
les récepteurs - qui se trouvaient dans une pièce située à 25 mètres
de celle où étaient les émetteurs - devaient essayer de deviner l'état
émotionnel de ces derniers (positif ou neutre). La conductance
cutanée des récepteurs était aussi mesurée. L'analyse des résultats
des 32 paires d'émetteurs/récepteurs révéla que les récepteurs ne
montraient aucune capacité particulière à discerner consciemment
les états émotionnels des émetteurs. Toutefois, la conductance
cutanée chez les récepteurs était beaucoup plus marquée durant

10. Braud W.G., Schlitz M .J.. « Consciousness interactions with remote biological systems:
Anomalous intentionality effects » , Subtle Energies, 1991, 2, p. 1-46.

96 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


les périodes positives. Cette augmentation pourrait bien être un
index, selon Delanoy et Sah, de réception psi inconsciente 11 •
Quant à elle, la psychologue transpersonnelle Jeanne
Achterberg, une pionnière de l'utilisation de la visualisation dans
le processus de guérison, a conduit une étude d'imagerie par réso-
nance magnétique fonctionnelle (IRMf) afin de mesurer ce qui
se passe dans le cerveau de récepteurs lorsque des guérisseurs
émettent des intentions bénéfiques à leur endroit. Onze guérisseurs
habitant à Hawaï furent couplés à 11 récepteurs. Ces guérisseurs
se réclamaient de diverses approches thérapeutiques et se trou-
vaient à distance lorsque la scanographie fut réalisée. Comme pour
les études examinées ci-dessus, les guérisseurs devaient émettre
une intention de connexion seulement lors de certaines périodes.
Durant les périodes contrôle, ils n'émettaient aucune intention.
Les résultats de l'étude montrèrent des différences significatives
entre les deux conditions. Ainsi, durant l'envoi de l'intention,
une augmentation significative du niveau d'oxygénation du sang
reliée à l'activité neuronale a été notée dans différentes régions
du cerveau des récepteurs. Cela suggère qu'il est effectivement
possible pour les guérisseurs de se connecter avec des personnes
éloignées, et d'influencer leur activité cérébrale 12•

L'INTENTION PEUT-ELLE MODIFIER L'ADN?

Lorsqu'on vit des émotions négatives ou qu'on est confronté


à des situations stressantes, les battements du cœur deviennent irré-
guliers. Les chercheurs de l'Institut HeartMath, en Californie, ont
montré que, dans de telles situations, lorsqu'on apprend à respirer

11. Delanoy D. L., Sah S., «Cognitive and physiological psi responses to remote positive
and neutral emotional states », dans Dick Bierman (dir.), Proceedings of Presented Papers,
American Para psychological Association, 37th Annual Conventio n, University of
Amsterdam, 1994.
12. 11. Achterberg j., Cooke K., Richards T., Standish L. j., Kozak L.. Lake j., «Evidence for
correlations between distant intentionality and brain fu nction in recipients : a functional
magnetic resonance imaging analysis »,Journal ofComplementary & A lternative Medicine,
2005, 1 L p. 965-971.

CHAPITRE 4 * LE POUVOIR NO N LOCA L DE LINTENTION SUR LE V IVANT 97


calmement, les variations de la fréquence cardiaque diminuent ainsi
que le niveau de stress. On expérimente alors ce qui est appelé la
«cohérence cardiaque». Cet état physiologique, qui procure un
profond bien-être, est associé à une résonance entre le rythme du
cœur et celui de la respiration 13• Glen Rein est un biochimiste qui
fut pendant longtemps affilié à l'Institut HeartMath. Alors qu'il y
travaillait, Rein se demanda si des individus parvenant à atteindre
une haute cohérence cardiaque seraient en mesure de modifier par
leur intention la structure de l'ADN.
Cette macromolécule biologique est composée de quatre
molécules de base: l'adénine (A), la thymine (T), la guanine (G)
et la cytosine (C). L'enchaînement de ces molécules, qui fonc-
tionnent par paires (A-T et C-G), est ce qui porte le code de la
vie. Récemment, une équipe de chercheurs américains œuvrant
à l'Institut Scripps, à La Jolla, a réussi à implanter une troisième
paire de molécules artificielles (différentes de A-Tet C-G) dans
l'ADN d'une bactérie, Escherichia coti. Ce qui est encore plus
remarquable, c'est que cette bactérie a pu répliquer l'ADN semi-
synthétique. Cette découverte majeure pourrait éventuellement
permettre des avancées énormes. Floyd Romesberg, le directeur de
cette équipe de recherche, a mentionné à ce sujet : « Si vous lisez
un livre écrit avec quatre lettres, vous n'allez pas être en mesure de
raconter des histoires très intéressantes. Si on vous donne davan-
tage de lettres, vous pouvez inventer de nouveaux mots [... ] et vous
pourrez probablement raconter des histoires plus intéressantes14 • »
Cela suggère que les organismes vivants sur terre auraient pu
évoluer de manière bien différente avec un ADN comprenant plus
de quatre lettres. Dans ce contexte, la découverte de Romesberg
et ses collègues laisse entrevoir la possibilité d'améliorer l'espèce
humaine, par exemple en la rendant plus résistante et en accrois-
sant sa longévité.

13. McCraty R., Shatfer F., « Heart rate variability: new perspectives on physiological
mechanisms, assessment of self-regulatory capacity, and health risk », Global Advances in
Health and Medicine, 2015, 4, p. % -61.
14. http://www.francetvinfo.fr/ sante/biologie-genetique/l-adn-a-deux-nouvelles-lettres-
qu-est-ce-que-ca-change_S95171.html.

98 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CO NSCIENCE


Romesberg et son équipe ont utilisé des techniques sophis-
tiquées de génie génétique afin de complexifier l'ADN d'une
bactérie. Mais est-il possible de modifier la structure hélicoïdale
de cette macromolécule en n'ayant recours, comme seuls outils,
qu'à la conscience et à l'intention?
Afin de répondre à cette question à la fois passionnante et
osée, Glen Rein préleva des échantillons d'ADN qui furent placés
dans un bécher devant les participants à l'étude. Ceux-ci tentaient
mentalement de faire changer la structure des hélices. Rein décou-
vrit que plus le degré de cohérence cardiaque était élevé chez les
participants, plus les changements structurels de l'ADN (tordre et
détordre ses hélices) étaient importants. Pour atteindre un degré
élevé de cohérence cardiaque, plusieurs des participants généraient
un sentiment d'amour inconditionnel de manière soutenue15.
Glen Rein a aussi effectué une étude en collaboration avec
Leonard Laskow, un médecin qui travaille également comme
guérisseur. Dans son travail de guérisseur, Laskow combine
l'amour inconditionnel, l'intention dirigée et l'imagerie mentale.
Avec cette approche, Leonard Laskow a démontré qu'il est capable
de ralentir la croissance de bactéries, ou de protéger des bactéries
qui sont soumises à des doses d'antibiotiques.
Dans cette étude, Rein prépara cinq boîtes de Petri, conte-
nant chacune un nombre identique de cellules cancéreuses, et il
demanda à Laskow d'émettre une intention différente pour chacune
de ces boîtes, alors qu'il les tenait en main. La tâche de Leonard
Laskow était d'inhiber la croissance des cellules cancéreuses en
ayant recours à des intentions et des stratégies différentes. Le taux
de croissance des cellules malignes était mesuré en évaluant la
quantité de thymidine radioactive que celles-ci absorbaient.

Le médecin guérisseur débuta l'expérimentation par une


méditation afin d'entrer dans un état d'amour inconditionnel qui
favoriserait la connexion avec les cellules cancéreuses. Les cinq
intentions et stratégies différentes qu'il utilisa furent les suivantes:

15. Rein G., McCraty R., « Structural changes in water and DNA associated with new
physiologically measurable states », Journal ofScientific Exploration, 1995, 8, p. 438-439.

CHAPITRE 4 * LE POUVOIR NO N LOCAL DE L'INTENTION SU R LE V IVANT 99


1. permettre un retour à l'harmonie et au rythme normal de
croissance des cellules tel qu'il était avant que celles-ci ne
deviennent cancéreuses;
2. visualiser qu'une fois le traitement terminé seulement trois des
cellules cancéreuses demeurent dans la boîte de Petri;
3. aucune intention n'est formulée, Laskow laisse la volonté de
Dieu opérer à travers ses mains;
4. offrir un amour inconditionnel aux cellules cancéreuses, sans
intention spécifique;
5. visualiser la dématérialisation de ces cellules.

L'intention/stratégie la plus efficace (39 % d'inhibition) a été


de permettre aux cellules de retrouver leur ordre normal de crois-
sance. Laisser agir la volonté de Dieu a permis une inhibition de
21 %. Visualiser qu'il ne restait que trois cellules dans la boîte de
Petri a amené une inhibition de 18 %. L'amour inconditionnel sans
intention spécifique n'a produit aucun effet. Lors de tests subsé-
quents avec Laskow, Rein découvrit que la combinaison d'une
intention d'un retour à l'ordre naturel des choses, avec la visuali-
sation que seulement trois cellules demeuraient vivantes dans la
boîte, faisait augmenter le taux d'inhibition de la croissance cellu-
laire à 40 %. L'association d'images mentales à l'intention semble
donc générer de meilleurs résultats 16 •
Pour le dernier test, Glen Rein demanda à Leonard Laskow de
se concentrer sur chacune des cinq intentions/stratégies décrites
ci-dessus tout en tenant successivement dans ses mains cinq fioles
d'eau. Ces fioles servirent ensuite pour préparer le milieu de culture
de tissus nécessaire à la croissance des cellules cancéreuses. De
nouveau, l'eau traitée avec l'intention d'un retour à l'ordre naturel
donna les meilleurs résultats, permettant une inhibition de 28 % de
la croissance cellulaire. Comme si l'eau avait« stocké» les inten-
tions émises et les avait communiquées au milieu de culture ainsi
qu'aux cellules cancéreuses.

16. Rein G., « Effect of conscious intention on human DNA », Proceeds ofthe International
Forum on New Science, Denver, Colorado, October 1996.

100 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


L'IMPRESSION D'ÊTRE OBSERVÉ

Certains chercheurs, dont le biologiste anglais Rupert


Sheldrake, ont conduit des expériences afin d'étudier l'impression
de sentir lorsque l'on est regardé 17• Il s'agit d'un phénomène
commun qui se produit fréquemment dans des endroits publics
avec des inconnus. Cette impression amène souvent les gens à se
retourner et à constater qu'ils étaient bel et bien observés.

L'un des protocoles de recherche qui fut utilisé par Sheldrake est
l'observation directe. Lors des tests, les participants doivent deviner
rapidement, en moins de 10 secondes, si on les observe ou non.
Leurs réponses, qui sont justes ou fausses, sont enregistrées immé-
diatement; une session dure moins de 10 minutes et consiste en
20 essais. Ces tests d'observation directe, qui sont faciles à réaliser,
ont été effectués avec des milliers de participants. Bon nombre de
ces tests ont été conduits dans des écoles et universités. Les résul-
tats sont très constants, et montrent approximativement 55 % de
réponses justes par opposition aux 50 % attribuables au hasard. Il
s'agit d'un résultat qui devient extrêmement significatif lorsqu'il est
répété au cours de plusieurs milliers d'essais. Dans certaines des
expériences d'observation directe, les participants étaient testés de
manière répétitive, et on leur révélait les résultats au fur et à mesure
après chaque essai. Cette approche impliquant un entraînement
a permis d'améliorer de manière marquée les résultats 18.

L'autre protocole expérimental qui fut utilisé par Sheldrake et


d'autres chercheurs implique de séparer l'observateur et l'observé;
ceux-ci se trouvent dans des pièces différentes qui sont reliées par
un système de télévision en circuit fermé. L'utilisation de ce proto-
cole débuta dans les années 1980. Dans ces tests, on ne demande
pas aux participants de deviner s'ils sont observés ou non, mais

17. Sheldrake R., « Experiments on the sense of being stared at : the elimination of possible
artefacts», Journal of the Society for Psychical Research, 2001, 65, p. 122-137.
18. Colwell J.. Schrôder S., Staden D .. « The ability to detect unseen staring : A literature
review and empirical tests », British Journal ofPsychology, 2000, 91, p. 71-85.

CHA PITRE 4 -1> LE POUVOIR NO N LOCAL DE L'INTENTION SUR LE V IVANT 101


on enregistre plutôt leur conductance cutanée. Ces tests sont
composés de séries aléatoires d'essais, au cours desquels les obser-
vateurs soit regardent l'image du participant observé sur l'écran
TV, soit détournent le regard en pensant à autre chose.

Sur le plan statistique, bon nombre des études réalisées à l'aide


de ce protocole de recherche ont produit des résultats significa-
tifs. Ces résultats montrent que la conductance cutanée change
lorsque les observateurs regardent les observés, et cela même si
les participants observés n'en sont pas conscients19•

Dean Radin a mis au point une variante de ce protocole expéri-


mental pour étudier l'impression d'être observé. Dans ce protocole,
on utilise un électrogastrogramme (ou EGG) afin de vérifier si
l'activité contractile de la région gastro-intestinale de !'observé, une
zone particulièrement sensible aux émotions, peut être influencée
par les émotions de l'observateur. Celui-ci se trouve dans une pièce
différente, située à distance, et regarde un écran TV. L'activité EGG
est mesurée chez un individu qui est en train de se relaxer. Pendant
ce temps, dans l'autre pièce, l'autre participant jouant le rôle de
l'observateur regarde l'écran TV. Sur celui-ci apparaît l'image de
la personne observée de même que, périodiquement, des images
vidéo émotionnellement positives, négatives, neutres ou calmantes.

Les résultats ont montré que les réponses EGG étaient signi-
ficativement plus marquées lorsque l'observateur expérimentait
les états positif et négatif, comparativement à l'état émotionnel-
lement neutre. En d'autres termes, la région gastro-intestinale de
l'individu observé répondait aux émotions de l'observateur, même
si les paires de participants (l'observateur et l' observé) étaient
physiquement séparées et ne pouvaient communiquer entre elles
via les canaux sensoriels normaux20 •

19. Schmidt S.. Schneider R., Utts J., Walach H., « Distant intentionality and the feeling of
being stared at: two meta-analyses »,British Journal ofPsychology, 2004, 95, p. 235-247.
20. Radin D., Schlitz M. J., « Gut feelings, intuition, and emotions : an exploratory study »,
Journal of Alternative & Complem entary Medicine, 2005, 11, p. 85-91.

102 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Le chercheur en psychologie Stefan Schmidt, qui dirige la
section d'évaluation des recherches en médecines complémentaires
à la clinique universitaire de Fribourg-en-Brisgau, en Allemagne,
a effectué une méta-analyse d'une trentaine d'études portant sur
l'effet non local de l'intention sur la conductance cutanée de récep-
teurs humains éloignés ou sur l'impression d'être observé. Cette
analyse statistique a confirmé l'existence de ces phénomènes21 •
La méta-analyse a aussi révélé que la magnitude de ceux-ci était
corrélée à la qualité des études: plus le niveau de qualité des études
était grand et plus la magnitude de ces phénomènes était élevée.

LA GUÉRISON À DISTANCE

En 1975, une stagiaire anglaise en médecine générale tomba


soudainement malade. Elle présentait des symptômes évoquant une
septicémie et une méningite. Moribonde, elle fut admise à l'hôpital.
Les médecins découvrirent alors qu'elle souffrait du syndrome de
Waterhouse-Friderichsen. Il s'agit d'une inflammation des glandes
surrénales provoquant une insuffisance surrénalienne aiguë.
Celle-ci est causée par une infection bactérienne sévère qui est
associée à plusieurs facteurs de risque. Une antibiothérapie doit
être instaurée au plus tôt, accompagnée de perfusions en intravei-
neuse. Si ce syndrome n'est pas traité le plus vite possible, il évolue
très rapidement vers un coma puis le décès du patient.

La soirée suivant l'hospitalisation de la jeune femme, des


individus se réunirent et prièrent pour que celle-ci guérisse tota-
lement sans invalidité résiduelle. Ce soir-là, au même moment,
la condition de la stagiaire s'améliora subitement. Les médecins
notèrent alors que la pneumonie qui infectait le lobe moyen de
son poumon gauche avait maintenant disparu. Cela leur sembla
totalement inexplicable.

21. Schmidt S., Schneider R., Vtts J.. Walach H., «Distant intentionality and the feeling of
being stared at: two meta-analyses »,British Journal ofPsychology, 2004, 95, p. 235-247.

CHAPITRE 4 * LE POUVOIR NON LOCAL DE L'INTENTION SUR LE VIVANT 103


La patiente sortit du coma quatre jours plus tard. Lors de son
arrivée à l'hôpital, un ophtalmologiste avait découvert qu'il y avait
eu une hémorragie dans son œil gauche, qui entraînerait une
cécité permanente de cet œil. Remarquablement, la jeune femme
recouvra une vision impeccable du côté gauche, de même qu'une
santé parfaite22•

Cette anecdote médicale nous amène à nous poser la question


suivante: la prière pour autrui peut-elle vraiment guérir?

La psychiatre et chercheuse Elisabeth Targ était intéressée


par les phénomènes psi, de même que par le rôle de la spiritualité
dans la guérison et la santé et l'effet thérapeutique de la prière.
En 1995, alors que le sida faisait encore beaucoup de victimes,
celle-ci et ses collaborateurs du centre médical de l'université de
Californie à San Francisco (UCSF) menèrent une étude pilote
en double aveugle impliquant 20 patients atteints du sida à un
stade avancé. Tous les patients reçurent des soins convention-
nels, et des guérisseurs spirituels prièrent pour 10 d'entre eux.
Ces guérisseurs habitaient en moyenne à 2 400 km des patients.
Ces derniers ignoraient à quel groupe ils avaient été affectés (de
manière aléatoire). Ils ne savaient donc pas si quelqu'un priait
pour eux. L'étude dura six mois. Quatre patients décédèrent, ce
qui représentait un taux de mortalité typique. Lorsque les résultats
furent dévoilés, les chercheurs apprirent que les quatre patients
décédés appartenaient au groupe contrôle: en d'autres termes,
les 10 membres du groupe expérimental, qui avaient fait l'objet
de prières, étaient toujours vivants.

Encouragée par ces résultats, Elisabeth Targ décida de


conduire, l'année suivante, une étude de confirmation. Quarante
patients furent recrutés. Ceux-ci savaient qu'en acceptant de parti-
ciper à l'étude, ils avaient une chance sur deux de bénéficier des
prières de guérisseurs spirituels. Des photos des 40 participants

22. Gardner R., «Miracles of healing in Anglo-Celtic Northumbria as recorded by the


Venerable Bede and his contemporaries : a reappraisal in the light of twentieth century
experience», British Medicalfournal, 1983, 287, p. 1927-1933.

104 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


furent prises. Les participants furent répartis dans les deux groupes
(expérimental et contrôle) de façon aléatoire, en fonction de l'âge,
du niveau d'activité du système immunitaire et du nombre de
complications liées au sida. Les photos des membres du groupe
expérimental furent envoyées à 40 guérisseurs (par exemple,
rabbins, chamans et praticiens en soins énergétiques), tandis que
les photos des membres du groupe contrôle furent conservées dans
un tiroir fermé à clé. Les guérisseurs, qui se trouvaient à distance
des patients appartenant à ce groupe, exerçaient leurs rituels une
heure par jour pendant six journées consécutives. Chaque semaine
pendant dix semaines, les guérisseurs permutaient les patients afin
que chaque membre du groupe expérimental puisse tirer bénéfice
de leurs prières.
Le secret sur la répartition des patients fut levé six mois après le
début de l'étude. Les résultats révélèrent que les patients du groupe
expérimental avaient passé 600 % de jours en moins à l'hôpital, et
avaient contracté 300 % en moins de maladies liées au sida (par
exemple, l'ulcère et l'encéphalite), comparativement aux patients
du groupe contrôle. Ces différences entre les deux groupes étaient
significatives. Par ailleurs, l'effet placebo ne joua pas un grand rôle
puisqu'environ 55 % des patients des deux groupes crurent que les
guérisseurs priaient pour eux, et ils ne se portèrent pas mieux que
les autres patients23 •
Les résultats des deux études réalisées par Elisabeth Target
ses collaborateurs ont le mérite d'être clairs. Mais ce n'est pas
le cas de toutes les études portant sur les effets thérapeutiques
de la prière. Effectivement, certaines d'entre elles souffrent de
lacunes importantes sur le plan méthodologique, et d'autres études
produisent des résultats qui ne sont pas consistants. Selon toute
vraisemblance, cela est dû au fait que de nombreux facteurs sont
impliqués dans la prière pour la guérison d'autrui, et qu'il est diffi-
cile de contrôler toutes ces variables. Par exemple, la capacité des
participants à générer une intention non locale de façon efficace
peut varier considérablement d'une étude à l'autre.

23. Sicher F., Targ E. Moore D., Smith H .. « A randomized double-blind study of the effect
of distant healing in a population with advanced AIDS. Report of a small scale study », The
Western Journal ofMedicine, 1998, 169(6), p. 356-363.

CHAPITRE 4 .W. LE POUVOIR NO N LOCAL DE L'INTENTION SUR LE VIVANT 105


À ce propos, Dean Radin et ses collègues se sont demandé dans
quelle mesure un entraînement à la méditation peut moduler les
effets de l'intention compatissante de guérison à distance24• Dans
leur étude en double aveugle (qu'ils ont appelée la «Love Study » ),
ils ont recruté des couples. Pour chaque couple, l'un des membres
était en parfaite santé tandis que l'autre membre recevait un traite-
ment contre le cancer. Le partenaire en bonne santé jouait le rôle de
l'émetteur, alors que le patient était le récepteur. Dans le groupe des
entraînés, les émetteurs étaient invités à cultiver une intention de
compassion, qui est un acte d'amour désintéressé envers une autre
personne visant à la soulager de sa souffrance et à accroître son bien-
être. Quant au programme d'entraînement à la méditation, celui-ci
consistait en un atelier d'une journée. Pendant une période de trois
mois, les participants choisis pour être les émetteurs devaient prati-
quer la méditation durant trente minutes chaque jour.
En plus du groupe des entraînés, il y avait un groupe témoin
en liste d'attente. Les membres de ce groupe étaient les mêmes
couples mais testés avant que les partenaires en bonne santé suivent
le programme d'entraînement. Un troisième groupe, le groupe
contrôle, était composé de couples en bonne santé n'ayant pas reçu
d'entraînement. Lorsqu'un couple arrivait au laboratoire, des élec-
trodes étaient installées chez les deux conjoints afin de mettre sous
monitoring la conductance cutanée, le rythme cardiaque et la respi-
ration. On demandait alors aux deux conjoints de maintenir, pendant
toute la durée de l'expérience, un sentiment de connexion les unis-
sant. Dans le groupe contrôle, on demandait aux membres du couple
de déterminer lequel des deux conjoints était la personne la plus
réceptive. C'est à cette personne que revenait le rôle du récepteur.
Dans les deux autres groupes (entraînés et témoins en liste d'attente),
les récepteurs étaient toujours les patients souffrant de cancer.

Les récepteurs s'asseyaient dans un fauteuil inclinable se trou-


vant dans une pièce blindée contre les ondes électromagnétiques
et isolée au niveau acoustique. Ils étaient informés qu'ils seraient

24. Radin D., Stone )., Levine E., Eskandarnejad S., Schlitz M., Kozak L., Mandel D.,
Hayssen G., « Compassionate intention as a therapeutic intervention by partners of cancer
patients : effects of distant intention on the patients' autonomie nervous system », Explore,
2008,4,p. 235-243.

106 UN SAUT QUANTIQ UE DE LA CONSCIENCE


vus à des périodes de temps déterminées aléatoirement, via un
moniteur vidéo, par les émetteurs, qui se trouvaient dans une
pièce éloignée (les deux pièces étaient séparées par une distance
de 20 mètres). Durant ces périodes, l'émetteur devait faire un effort
mental pour se connecter avec le récepteur. À d'autres moments,
l'image vidéo disparaissait et l'émetteur devait alors se relaxer et
ne pas envoyer d'intention de compassion. Les récepteurs igno-
raient la longueur des périodes d'intention compatissante ou de
relaxation. Les périodes d'intention duraient en fait dix secondes,
alors que la durée des périodes de relaxation variait entre cinq et
quarante-cinq secondes. Cette durée était déterminée de manière
aléatoire par un programme informatique.

En tout, 36 couples participèrent à l'étude. L'analyse de la


conductance cutanée chez tous les émetteurs des différents
groupes révéla une augmentation marquée après que les images
des récepteurs furent apparues sur le moniteur vidéo. Cela indi-
quait une activation du système nerveux sympathique résultant de
l'effort mental associé avec l'intention de compassion et les pensées
de guérison. Environ deux secondes après que l'image vidéo
apparaissait, la conductance cutanée des émetteurs commençait
à augmenter, pour atteindre son paroxysme approximativement
trois secondes plus tard. Radin et ses collaborateurs comparèrent
également la conductance cutanée des récepteurs dans les trois
groupes. Tous les récepteurs répondaient rapidement, après le
début de la période d'envoi. Dans le groupe contrôle, la conduc-
tance cutanée disparaissait après quatre secondes, alors que cette
réponse s'évanouissait au bout de cinq secondes dans le groupe
témoin. Pour ce qui est du groupe des entraînés, la conductance
cutanée des récepteurs augmentait progressivement pendant huit
secondes. C'est dans ce groupe que furent mesurés les accroisse-
ments les plus élevés. Ces résultats suggèrent qu'un entraînement
à la méditation peut accroître les effets de l'intention compatis-
sante de guérison à distance25 •

25. Ibid.

CHA PITRE 4 * LE POUVOIR NO N LOCA L DE LINTENTION SUR LE V IVANT 107


CHAPITRE 5

UNE CONSCIENCE
DÉLOCALISÉE
«Ce jour, que vous redoutez comme le dernier
de votre vie, est celui de votre naissance pour l'éternité.»
SÉNÈQUE

L'EMI ET SES DIFFÉRENTES COMPOSANTES

Qu'arrive-t-il après la mort de notre corps physique? Notre


esprit et notre personnalité survivent-ils? Qu'en est-il de notre
conscience? Se dissout-elle totalement dans le néant? Si la vie se
poursuit après la mort, continue-t-on d'exister en tant qu'entité
individuelle ou plutôt au sein d'un Esprit universel? Ces profondes
questions existentielles ont probablement hanté les êtres humains
depuis l'apparition d'Homo sapiens sapiens.

Il existe différentes façons d'aborder ces grandes questions.


On peut, par exemple, tout simplement accepter les enseigne-
ments proposés à ce sujet par les religions, les philosophies ou bien
encore les traditions ésotériques. Mais il est également possible
de considérer ce que la science a découvert à propos de ce qui
touche à la mort.

Au cours des quarante dernières années, plusieurs chercheurs


se sont penchés sur les expériences mentales vivaces d'individus se
trouvant physiologiquement ou psychologiquement proches de la
mort. Celles-ci ont été appelées «expériences de mort imminente»

109
(EMI, en anglais near-death experience [NDE]), et les individus qui
rapportent ces expériences sont désignés par le terme « expérien-
ceurs ».Les EMI peuvent se produire suite à un arrêt cardiaque, un
accident, une maladie, ou bien des complications associées à une
opération chirurgicale ou à une hémorragie sévère. Ces expériences
peuvent également survenir durant ou après un accouchement de
même que suite à un coma, une intoxication ou une électrocution.

Des études statistiques indiquent qu'en Occident environ 4% de


la population a vécu une EML D'autres études révèlent que durant
les cinquante dernières années, plus de 25 millions d'individus dans
le monde entier auraient vécu une EMI1. Cela est déjà considérable,
mais le développement des défibrillateurs automatiques et l'accès
à cette technologie devraient permettre d'accroître significative-
ment le nombre d'expérienceurs dans le futur.

Les EMI ne semblent pas être influencées par des facteurs


tels que le genre, la race, le statut socio-économique, le niveau
d'éducation et les systèmes de croyances. Ainsi, les EMI se
produisent aussi fréquemment chez les athées et les agnostiques
que chez les personnes religieuses2 •

Même s'il n'y pas deux EMI identiques, et que les expérien-
ceurs ne vivent pratiquement jamais tous les aspects typiques de
cette expérience, la recherche démontre que l'EMI se caractérise
par certains éléments de base3 • L'un des éléments les plus fréquents
est l'expérience hors du corps (EHC), qui est l'impression de sortir
de son corps et de voir les événements se dérouler depuis un point
de vue extérieur ou un lieu spatialement éloigné. Durant les EHC,
les expérienceurs réalisent non seulement qu'ils conservent leurs
facultés mentales (par exemple, la conscience, la perception,

1. Van Lommel P., Consciousness Beyond Life: The Science of the Near-Death Experience,
New York, HarperO ne, 2010.
2. Kellehear A., «Culture, biology and the near-death experience. A reappraisal »,Journal
ofNervous and Mental Disease, 1993, 181, p. 148-156.
3. Ring K., Elsaesser-Valarino E., Lessons from the Light: What We Can Learn from the N ear-
Death Experience, New Yord and London, Insight Books, Plenum, 1998.

llO UN SAUT QUANTIQU E DE LA CONSCI ENCE


la pensée, la mémoire, l'identité personnelle, la volonté et les
émotions), mais que ces facultés sont renforcées. Ainsi, l'audition
est fine, la vision peut être étendue à 360° et la pensée est vive. Les
expérienceurs affirment aussi fréquemment qu'en l'absence de leur
corps physique ils sont capables de se projeter où ils le souhaitent
(par exemple, traverser les murs) et de lire les pensées.

D'un point de vue scientifique, l'EHC est extrêmement impor-


tante car elle est la plus objective des composantes des EMI, et la
seule pouvant être corroborée de manière indépendante. Toutes
les autres composantes des EMI reposent essentiellement sur
des rapports subjectifs. Des sentiments de paix et de joie, et le
passage à travers une région d'obscurité ou un tunnel sombre qui
est souvent suivi par l'apparition d'une lumière d'une brillance
inhabituelle, constituent d'autres aspects typiques des EMI. Par
ailleurs, il n'est pas rare d'entendre les expérienceurs faire allu-
sion à un autre monde d'une beauté magnifique dans lequel on
peut apercevoir des cités fantastiques et de fabuleux jardins, ainsi
qu'entendre des musiques éthérées extraordinaires. Les expérien-
ceurs rapportent aussi souvent des rencontres avec des membres
de leur famille ou des amis décédés; ceux-ci apparaissent plus
jeunes et en meilleure santé que dans leur souvenir.

En outre, les expérienceurs affirment couramment avoir


rencontré un «Être de Lumière» qui peut communiquer télépa-
thiquement. Celui-ci rayonne une acceptation totale et un amour
inconditionnel. Certaines études transculturelles indiquent que les
croyances religieuses personnelles et les perspectives culturelles
influencent la manière dont l'EMI est interprétée4 • Par exemple,
un chrétien pourra croire que l' «Être de Lumière» rencontré était
Jésus, tandis qu'un bouddhiste pourra penser qu'il s'agissait de
Bouddha. En présence d'un tel être, les expérienceurs font parfois
l'expérience d'une revue de la vie. Durant cette revue, ils peuvent
voir leur vie entière défiler très rapidement devant eux, et revivre

4. Kellehear A., «Culture, biology and the near-death experience », Journal ofNervous and
Mental Disease, 1993, 181, p. 148-156.

CHAPITRE 5 <f UNE CONSCIENCE DÉLOCALI SÉE lll


des événements majeurs ou mineurs de cette vie, quelquefois en
adoptant la perspective des autres individus impliqués. Cet élément
de l'EMI permet aux expérienceurs de tirer des conclusions sur
leur vie et sur les changements dont elle pourrait faire l'objet.

Lors de la phase ultérieure de l'EMI, les expérienceurs peuvent


rencontrer une barrière, se présentant sous la forme d'un mur,
d'un pont ou d'une rivière. À cet endroit, ils comprennent qu'ils ne
seront plus en mesure de revenir dans leur corps et de reprendre
leur vie s'ils traversent cette frontière. L' «Être de Lumière» ou les
proches défunts expliquent alors aux expérienceurs qu'ils doivent
retourner dans leur corps, car les objectifs de leur vie physique
n'ont pas été encore tous atteints. En général, c'est à ce moment-là
que les expérienceurs sont forcés de retourner dans leur corps5.

UNE EXPÉRIENCE QUI TRANSFORME LA VIE

Les recherches conduites au sujet des répercussions des EMI


révèlent que ces expériences transforment positivement et de façon
marquée la majorité des expérienceurs. Ces derniers partagent un
profil psychologique comparable après une EMI, quelles que soient
les différences dans leur personnalité d'avant cette expérience: cela
se reflète au niveau de leurs croyances et valeurs, de leurs attitudes
et comportements, de même que de leur vision du monde. Ces
changements psychologiques et spirituels, qui deviennent plus
apparents au fil du temps, ne correspondent pas du tout au genre
de changements auxquels on s'attendrait si on considère l'EMI
simplement comme une hallucination6 •

Examinons brièvement les divers types de changements


fréquemment rapportés par les expérienceurs. D'abord ceux-ci
reviennent avec une vision de soi différente: ils ont une meilleure

5. Ring K., Elsaesser-Valarino E., Lessonsfrom the Light: What We Can Learnfrom the N ear-
Death Experience, New York and London, Insight Books, Plenum, 1998.
6. Ibid.

112 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


estime d'eux-mêmes et une confiance en eux accrue, ce qui fait
qu'ils deviennent moins dépendants de l'approbation d'autrui. Ils
comprennent aussi que le but principal de leur existence est de
découvrir et d'accomplir leur mission sur terre. Les expérienceurs
s'émerveillent et sont remplis de gratitude pour la vie, qui a plus
de sens et d'intérêt et pour laquelle ils éprouvent maintenant un
sentiment de révérence. Par conséquent, leurs préoccupations
s'étendent désormais à toutes les formes de vie, et ils deviennent
plus sensibles à la santé de la biosphère. En outre, moins critiques
et plus tolérants, les expérienceurs deviennent également plus
altruistes et compatissants, ce qui les amène souvent à faire des
dons pour des œuvres de charité ou à se consacrer à des causes
humanitaires. Ils passent aussi plus de temps avec leurs proches
et leurs amis, et ils perçoivent dorénavant comme futile et vide la
quête du pouvoir, de la célébrité et des succès sur le plan matériel.

Par ailleurs, souvent, les expérienceurs notent un déclin de


leurs affiliations religieuses, qui est accompagné par un accrois-
sement de leur spiritualité et un intérêt plus marqué pour les
pratiques contemplatives telles que la méditation et les retraites.
De plus, peu importe ce à quoi ils croyaient auparavant, les expé-
rienceurs ont désormais la certitude que la vie continue après la
mort du corps physique et que Dieu (ou un principe transcen-
dant) existe. Les expérienceurs reviennent aussi souvent de leur
expérience avec diverses capacités psi (par exemple, clairvoyance,
télépathie et précognition), et ils essaient parfois de retrouver des
connaissances acquises durant l'EMI et perdues lors de la « réin-
tégration» dans le corps physique7 •

Même si les EMI sont de puissantes expériences transforma-


tives, elles n'ont pas que des conséquences positives car la plupart
des expérienceurs en ressortent bouleversés, et ils peinent à les
accepter et les intégrer. Ce processus est encore plus difficile
lorsque leurs expériences sont perçues négativement ou suscitent
le scepticisme des soignants, de leur famille et de leurs amis. Il n'est

7. Ibid.

CHAPITRES oi> UNE CONSCIENCE DÉLOCALISÉE 113


pas inhabituel pour les expérienceurs d'éprouver des sentiments de
dépression, de solitude et de nostalgie durant les premières années
après leur expérience8 •

Dans une faible proportion de cas, les EMI relatées sont désa-
gréables ou carrément effrayantes. Elles peuvent, par exemple,
s'accompagner d'angoisse évoquée par l'expérience d'une perte
de contrôle durant le passage à travers le tunnel ou bien du
«vide absolu». Les quelques études disponibles au sujet des EMI
négatives suggèrent que les personnes égocentriques et celles qui
ont peur de mourir, qui ressentent de la colère ou de la culpabilité,
ou qui croient qu'elles vont aller en enfer à leur mort sont davan-
tage susceptibles de vivre une EMI négative9•

À ce propos, voici un extrait du témoignage d'un individu


rapporté par mon bon ami le Dr Jean-Jacques Charbonier,
un médecin anesthésiste-réanimateur français qui mène des
recherches sur les EMI depuis plusieurs années 10• L'expérience
négative relatée a été vécue pendant un arrêt cardiaque:
« Il y avait beaucoup de monde autour de moi pour essayer de me
réanimer. Je suis ensuite entré dans une sorte de cône très obscur qui
tournait en spirale et un courant très fort m'emporta vers l'extrémité de
cet entonnoir. Au passage, je croisai des visages ridés et grimaçants qui
semblaient appartenir à des gens qui souffraient terriblement. Plus je
m'enfonçais dans ce cylindre, qui devenait de plus en plus étroit, plus les
gens souffraient. Ils criaient, mais aucun son ne sortait de leur bouche.
C'était terrible. Moi aussi je pouvais ressentir leurs souffrances [... ]
Quand je suis enfin arrivé devant cette flamme immense, j'ai d'abord
pensé que j'étais en enfer et que j'allais être brûlé tout de suite. Mais la
flamme s'est mise à danser d'une drôle de façon et elle m'a enveloppé
pour me demander comment j'avais aidé les autres. Je n'ai su quoi lui
répondre. C'est à ce moment-là que j'ai pris conscience que ma vie passée
n'avait été qu'une suite de petits larcins et d'escroqueries minables.»

8. Van Lommel P., Consciousness Beyond Life: The Science of the Near-Death Experience,
New York, HarperOne, 2010.
9. Greyson B., Bush N.E., « Distressing near-death experiences », Psychiatry 55, 1992,
p. 95-110.
10. Charbonier, ).-)., Les 7 bonnes raisons de croire al'au-de/a, Paris, Guy Trédaniel éditeur,
2012.

114 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


La plupart des EMI négatives contiennent également des
éléments positifs; ceux-ci constituent d'ailleurs souvent la majeure
partie de l'expérience. Ce type d'EMI peut aussi avoir des consé-
quences positives puisque la plupart des expérienceurs ayant vécu
une EMI négative n'ont plus peur de mourir, et ils retrouvent la
foi en Dieu. De surcroît, ils interprètent leur expérience négative
comme étant une opportunité de changer radicalement leur vie 11 •

DES PERCEPTIONS CONFIRMÉES


DURANT L'ÉTAT DE MORT CLINIQUE

Il y a une quinzaine d'années, le neurologue Olaf Blanke et


ses collaborateurs ont rapporté dans la revue scientifique Nature
l'expérience étrange d'une femme épileptique 12• Comme les crises
de cette patiente ne pouvaient pas être contrôlées seulement par
les médicaments, on conseilla à cette dernière d'avoir recours à la
neurochirurgie. Afin d'obtenir des informations sur la localisa-
tion et l'étendue de la zone épileptogène (la zone du cerveau qui
cause les crises) dont on devait faire l'ablation lors de l'opération,
les médecins chercheurs implantèrent des électrodes dans son
lobe temporal droit. D'autres électrodes furent implantées afin
d'identifier et de localiser, par le biais de la stimulation électrique,
les régions du cerveau qui, si elles étaient retirées, provoqueraient
une paralysie ou un déficit dans les capacités sensorielles ou linguis-
tiques. Une telle approche permet de préserver l'intégrité des aires
cérébrales importantes qui sont adjacentes à la zone épileptogène.

Lorsque les chercheurs stimulèrent le gyrus angulaire - une


structure du cerveau située aux alentours de la jonction temporo-
pariétale, qui semble être impliquée dans la perception de notre
corps dans l'espace -, la patiente se décrivit comme «flottant»
près du plafond. Elle affirma aussi voir ses jambes «en train de
rapetisser». Dans un autre article publié quelques années plus tard,

11. Ibid.
12. Blanke O., Ortigue S., Lan dis T., Seeck M., « Stimulating illusory own-body perceptions »,
Nature 419, 2002, p. 269-270.

CHAPITRE 5 * UNE CONSCIENCE DÉLOCALISÉE 115


Blanke et ses collègues décrivirent l'EHC comme étant le produit
d'un dysfonctionnement temporaire du gyrus angulaire 13•

Cette interprétation n'est pas cohérente, car l'expérience


rapportée par cette patiente épileptique représente une illusion
impliquant une appréhension fausse de la réalité. Alors qu'à
l'inverse les EHC typiques associées aux EMI impliquent souvent
des perceptions vérifiables des événements liés à la réanimation
ou à l'accident, ainsi qu'aux environs. À ce sujet, certains récits
d' expérienceurs ont été corroborés indépendamment par des
témoins. L'un des cas les plus célèbres de perceptions véridiques
corroborées lors d'EMI - des perceptions dont on peut attester
qu'elles ont coïncidé avec la réalité - est celui rapporté par le
cardiologue Pim van Lommel et ses collègues aux Pays-Bas. Dans
ce cas précis, la perception véridique a été corroborée par un infir-
mier en unité de soins intensifs de cardiologie durant la phase
pilote d'une étude conduite par van Lommel et ses collaborateurs14•
Voici le témoignage de cet infirmier:
«Durant une garde de nuit, une ambulance amena un homme de 44 ans,
cyanosé et dans le coma, à l'unité de soins coronariens. Il avait été
retrouvé environ une heure plus tôt dans un pré par des passants. Après
l'admission, on lui fit une respiration artificielle sans intubation, tandis
qu'on pratiquait un massage cardiaque et une défibrillation. Quand on
voulut intuber le patient, on dut lui enlever le dentier qu'il avait dans la
bouchè. Je retirai ces prothèses dentaires supérieures que je déposai sur
le «chariot d'urgence». Pendant ce temps, on poursuivait la tentative
de réanimation cardiaque. Après environ une heure et demie, le patient
avait un rythme cardiaque et une pression sanguine suffisants, mais il
était toujours comateux, ventilé et intubé. Il fut transféré dans l'unité de
soins intensifs pour que la respiration artificielle puisse se poursuivre. Ce
n'est qu'après plus d'une semaine que je rencontrai à nouveau le patient,
qui était maintenant de retour dans le service de cardiologie. Tandis que
je distribuais les médicaments, il m 'interpella :
- Oh! cet infirmier sait où est mon dentier.

13. Blanke O., Landis T., Spinelli L., Seeck M.,« Out-of-body experience and autoscopy of
neurological origin »,Brain 127, 2004, p. 243-258.
14. Van Lommel P.. van Wees R.. Meyers V., Elfferic.h !., « Near-death experience in survivors
of cardiac arrest : a prospective study in the Netherlands » , Lancet 358, 2001, p. 2039-2045.

116 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Je fus très surpris. Puis il m'expliqua:
- Oui, vous étiez là quand j'ai été amené à l'hôpital et vous avez pris mon
dentier pour le mettre sur ce chariot où il y avait toutes ces bouteilles, et
ce tiroir coulissant en dessous où vous l'avez mis.
J'étais particulièrement étonné parce que je me suis souvenu que cette
scène s'était déroulée alors que cet homme était dans le coma et en
train d'être réanimé. Je lui demandai de m'en dire plus. L'homme me
répondit qu'il s'était vu lui-même allongé sur le lit à partir d'une position
surélevée, avec toute l'équipe médicale affairée autour de son corps. Il fut
également en mesure de décrire correctement et en détail la petite pièce
dans laquelle il avait été réanimé ainsi que l'apparence de ceux qui étaient
avec moi. Au moment où il avait observé la situation, il avait ressenti
de la peur à l'idée que l'on arrête le protocole de réanimation et qu'on
le laisse mourir. Et c'est vrai que nous avions en tête un pronostic très
négatif pour ce patient du fait de l'état dans lequel il était arrivé. Le patient
me dit aussi qu'il avait essayé désespérément, mais sans succès, de nous
faire prendre conscience à tous qu'il était toujours vivant et que nous
devions continuer la réanimation. Il fut profondément impressionné par
son expérience et dit qu'il n'avait plus peur de la mort. Quatre semaines
plus tard, il quitta l'hôpital en parfaite santé. »

Un autre cas intéressant de perception confirmée a été rapporté


par le cardiologue anglais Richard Mansfield. Ce dernier confia ce
qui suit au Dr Sam Parnia 15 • Durant son quart de nuit, Mansfield fut
appelé d'urgence pour un arrêt cardiaque. En compagnie des autres
membres del'équipe médicale, il se précipita vers le patient, un jeune
homme de 32 ans qui n'avait plus de pouls, qui ne respirait plus et
dont l'électrocardiogramme (ECG) était plat. Le Dr Mansfield et
ses collègues tentèrent alors de ressusciter cet homme, même si les
chances de le sauver semblaient très minces. Le patient fut intubé et
on lui administra de l'oxygène, de l'adrénaline ainsi qu'un massage
cardiaque. En dépit de cette intervention, l'ECG demeura plat et
le pouls absent. Les membres de l'équipe médicale continuèrent
leurs efforts pendant plus d'une demi-heure, en vain, puis Mansfield
leur dit de tout arrêter: c'était terrible, mais il fallait accepter le fait
que le jeune homme était décédé. Tout juste avant de cesser les

15. Parnia S., What Happens When We Die. A Groundbreaking Study Into the Nature of
Life and Death, Carlsbad, CA, Hay House, 2007.

CHAPITRE 5 * UNE CONSCIENCE DÉLOCALISÉE 117


manœuvres de réanimation cardio-pulmonaires, Richard Mansfield
regarda le moniteur, les électrodes et les fils reliés aux électrodes
afin de s'assurer que tout fonctionnait parfaitement.

Mansfield quitta la chambre et se rendit au poste des infir-


mières afin d'inscrire des notes dans le dossier médical du patient
qui venait de décéder. Tandis qu'il s'acquittait de sa tâche, le
Dr Mansfield réalisa qu'il ne se souvenait pas exactement du
nombre d'ampoules d'adrénaline qu'on avait administrées au
patient décédé. Environ quinze minutes plus tard, il retourna à la
chambre afin de vérifier ce détail.
Dans la chambre, Mansfield regarda le jeune homme et
constata que ses lèvres et sa peau n'étaient plus aussi bleu-violet
que lorsque les manœuvres de réanimation avaient été arrê-
tées. Suspectant que quelque chose d'étrange se passait, Richard
Mansfield s'approcha du patient pour vérifier s'il pouvait percevoir
un pouls au niveau de l'aine. Stupéfait, le cardiologue découvrit
que le patient émettait bel et bien un pouls. Les autres membres
de l'équipe médicale furent appelés sur-le-champ et on reprit les
manœuvres de réanimation cardio-pulmonaires. Cette fois, les
manœuvres réussirent. Lorsque le patient fut stabilisé, on le trans-
féra dans une chambre se trouvant à l'unité des soins intensifs.
Environ une semaine plus tard, Mansfield vint voir le patient.
À la grande surprise du cardiologue, non seulement le jeune
homme avait complètement récupéré, mais, en plus, il ne souffrait
d'aucune atteinte cérébrale. Le patient dit alors au cardiologue
qu'il avait été témoin de tout ce que Mansfield avait fait (véri-
fier son pouls; arrêter les manœuvres de réanimation et quitter la
chambre; revenir plus tard et reprendre son pouls; et puis recom-
mencer les manœuvres de réanimation).
Richard Mansfield confia à Sam Parnia qu'il était déconcerté
par ce cas, car il s'agissait d'une impossibilité sur le plan médical1 6 •

16. Ibid.

118 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


De tels cas revêtent une grande importance car, durant un
arrêt cardiaque, le flux de sang dans le cerveau est interrompu
et la respiration s'arrête. Lorsque cela arrive, l'activité électrique
du cerveau (telle que mesurée par l'EEG) disparaît après dix à
vingt secondes, et la victime de l'arrêt cardiaque est alors considérée
en état de mort clinique17 • Dans ces conditions, le Dr Jean-Jacques
Charbonier propose d'utiliser le terme d' «expérience de mort
provisoire» puisque la victime de l'arrêt cardiaque n'est plus en
«état de mort imminente»: effectivement, elle est parfois morte
cliniquement depuis plusieurs minutes 18 •

Parce que les régions cérébrales médiatisant les fonctions


mentales ne sont plus fonctionnelles, on ne s'attend pas à ce que
les victimes d'arrêt cardiaque aient des expériences conscientes
claires dont elles pourraient se rappeler. Cependant, des études
conduites aux Pays-Bas19 , en Belgique20, au Royaume-Uni2 1 et aux
États-Unis22 ont révélé qu'environ 15 % des survivants à des arrêts
cardiaques relatent des souvenirs de la période durant laquelle ils
étaient cliniquement morts. Ces études, qui ont mis en évidence
plus d'une centaine d'EMI, démontrent que la conscience, les
perceptions, les pensées et les émotions peuvent être expérimen-
tées durant une période où l'activité cérébrale n'est plus détectée
par un EEG.

17. Clute H. L., Levy W.)., « Electroencephalographic changes during brief cardiac arrest
in humans»,Anesthesiology73, 1990, p. 821-825.
18. Charbonier ).-).,Les 7 bonnes raisons de croire à l'au-delà, Paris, Guy Trédaniel éditeur,
2012.
19. Van Lommel P., van Wees R., Meyers V., Elfferich !., « Near-death experience in survivors
of cardiac arrest: a prospective study in the Netherlands », Lancet 358, 2001, p. 2039-2045.
20. Lallier F., Velly G., Leon A., « Near-death experiences in survivors of cardiac arrest :
a study about demographic, medical. pharmacological and psychological context », Critical
Care 19 (Suppl. 1), 2015, p. 421.
21. Parnia S., Waller D. G., Yeates R., Fenwick P., «A qualitative and quantitative study of
the incidence, features and aetiology of near-death experiences in cardiac arrest survivors »,
Resuscitation 48, 2001, p. 149-156.
22. Schwaninger )., Eisenberg P.R., Schechtman K.B., Weiss, A.N., «A prospective analysis of
near-death experiences in cardiac arrest patients ».Journal ofNear-Death Studies 20, 2002,
p. 215-232. Greyson B., «Incidence and correlates of near-death experiences in a cardiac
care unit», General Hospital Psychiatry 25, 2003, p. 269-276.

CHAPITRE 5 <M> UNE CONSCIENCE DÉLOCALISÉE 119


Les partisans des théories matérialistes de l'esprit soutiennent
que, même si le tracé EEG est plat suite à un arrêt cardiaque,
il pourrait y avoir une activité cérébrale résiduelle au niveau
des structures profondes du cerveau, qui ne serait pas détectée
à cause des limitations de cette technique d'enregistrement de
l'activité neuroélectrique. Cet argument est valide puisque l'EEG
de surface - mesurée à l'aide d'électrodes appliquées sur le
scalp - n'enregistre principalement que l'activité des populations
corticales de neurones23 • Toutefois, l'activité cérébrale reconnue
par les neuroscientifiques comme étant la condition nécessaire de
l'activité consciente et des fonctions mentales - qui est parfaite-
ment mesurée par l'EEG de surface - est clairement abolie durant
un arrêt cardiaque24•

DES TENTATIVES D 'EXPLICATION


BIOLOGIQUE QUI ÉCHOUENT

Des scientifiques matérialistes ont proposé des explications


biologiques afin d'expliquer les différents aspects des EMI. Selon
moi, ces tentatives d'explication échouent toutes à rendre compte
de la richesse et du caractère multidimensionnel de ces expé-
riences, de même que de leurs répercussions.

L'une de ces hypothèses, qui a été proposée par la psycho-


logue Susan Blackmore, est celle du « cerveau mourant25 » :un
manque d'oxygène (ou anoxie) durant le processus de la mort
pourrait produire une excitation anormale des neurones dans
les aires cérébrales associées à la vision, et une telle excitation
anormale entraînerait l'illusion de voir une lumière brillante au
bout d'un tunnel sombre. Cette hypothèse souffre de plusieurs
problèmes. D'abord, les observations de tunnel sont absentes de

23. Le cortex cérébral désigne la couche superficielle du cerveau, qui est composée de
substance grise.
24. Greyson B., « Cosmological im plications of near-death experiences », Journal of
Cosmology 14, 20 11, p. 4684-4696.
25. Blackmore S. ). , Troscianko T. S., « The physiology of the tunnel ».Journal ofNear-Death
Studies 8, 1989, p. 15-28.

120 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


plusieurs récits d'expérienceurs. Ensuite, si !'anoxie jouait un rôle
important dans la production des EMI, la plupart des individus
expérimentant un arrêt cardiaque devraient rapporter une EMI,
mais ce n'est pas du tout le cas26• Par ailleurs, lorsque leur niveau
d'oxygène diminue considérablement, les personnes dont le cœur
ou les poumons fonctionnent mal expérimentent un «état confu-
sionnel aigu», dont ils se rappellent peu ou pas du tout et au cours
duquel ils sont très agités et confus. Le contraste est frappant avec
les EMI, qui sont vécues avec une conscience lucide, un raisonne-
ment clair et des processus de pensée bien structurés. De plus, les
expérienceurs gardent un souvenir précis, complet et indélébile de
l'EMI. Si l'hypothèse de Blackmore était juste, l'illusion de voir un
tunnel et une lumière devrait être plus forte au fur et à mesure que
le niveau d'oxygène dans le sang chute. Cependant, les individus
avec un niveau bas d'oxygène ne témoignent pas d'observations
de tunnel ou de lumière, ou d'autres aspects typiques des EMI, et,
dans certains cas, des expérienceurs vivent une EMI alors qu'ils
ne sont pas en fin de vie et que les niveaux d'oxygène dans leur
cerveau sont normaux27 •

Une autre voie de recherche indique que l'hypothèse de


!'anoxie n'est pas valide. Celle-ci concerne les travaux effectués
durant les années 1990 par le Dr James Whinnery, de West
Texas A & M. Ce dernier réalisa des études simulant les condi-
tions extrêmes qui se produisent lors de manœuvres de combats
aériens. Durant ces études, Whinnery soumettait des pilotes de
chasse à d'importantes forces gravitationnelles dans une centri-
fugeuse géante. L'accélération rapide réduisait considérablement
le flux sanguin et l'acheminement de l'oxygène au cerveau. Cela
amenait les pilotes à avoir de courtes périodes d'inconscience, que
Whinnery appela «dreamlets». Les principales caractéristiques de
ces dreamlets étaient de la confusion, une atteinte de la mémoire
pour les événements juste avant la perte de conscience et une

26. Van Lommel P., Consciousness Beyond Life : The Science of the Near-Death Experience,
New York, HarperOne, 2010.
27. Parnia S., What Happens When We Die: A Ground-Breaking Study into the Nature of
Life and Death, .London, Hay House, 2007.

CHAPITRES * UNE CONSCIENCE DÉLOCALISÉE 121


désorientation au réveil. Ces symptômes n'accompagnent pas typi-
quement les EMI, et aucune transformation psychospirituelle n'a
été relatée à la suite de dreamlets 28 •

Il a aussi été proposé que les EMI ne se produisent pas durant


la période de l'atteinte cérébrale mais tout juste avant ou après,
tandis que le cerveau est plus ou moins fonctionnel2 9 • La faiblesse
de cette interprétation réside dans le fait que l'état d'inconscience
induit par l'arrêt du cœur laisse les individus amnésiques et confus
quant aux événements s'étant déroulés immédiatement avant ou
après l'arrêt cardiaque30• De plus, la confusion accompagnant la
perte ou le regain de conscience ne transforme absolument pas la
vie, contrairement aux EMI. D'autre part, dans certains cas, ces
expériences contiennent des marqueurs temporels qui prennent
la forme de rapports véridiques d'événements s'étant produits au
moment précis de l'atteinte cérébrale3 1•
D'autres chercheurs ont spéculé que l'hypercapnie, un niveau
accru de gaz carbonique (ou dioxyde de carbone) dans le sang,
pourrait être impliquée dans les EMI. 26 Toutefois, les différents
aspects des EMI sont rarement présents dans l'hypercapnie, et ces
expériences peuvent survenir alors que le niveau de gaz carbonique
dans le sang demeure normal. 12
Si l'anoxie et l'hypercapnie ne peuvent être tenues pour
responsable des EMI, est-ce que ces expériences pourraient être
des hallucinations qui résulteraient tout simplement d'un dérègle-
ment chimique du cerveau?

28. Whinnery ). E.. « Psychophysiologie correlates of unconsciousness and near-death


experiences », 1997,Journal ofN ear-Death Studies 5, p. 232-258.
29. Saavedra-Aguilar ). C .. G6mez-)eria ). S.. « A neurobiological mode! for near-death
experiences »,Journal ofNear-Death Studies 7, 1989, p. 205-222 + Woerlee G. M .. « Cardiac
arrest and near-death experiences »,Journal ofNear-Death Studies 22, 2004, p. 235-249.
30. Van Lommel P .. van Wees R.. Meyers V., Elfferich I.. « Near-death experience in
survivors of cardiac arrest : a prospective study in the Netherlands », Lancet 358, 2001,
p. 2039-2045. Aminoff M. )., Scheinman M. M., Griffin ). C .. Herre ). M .. « Electrocerebral
accompaniments of syncope associated with malignant ventricular arrhythmias », A nnals
ofInternai Medicine 108,1988, p. 791- 796. Parnia S., Fenwick P., « Near death experiences
in cardiac arrest », Resuscitation 5, p. 5-11.
31. Greyson B.. «Implications of near-death experiences for a postmaterialist psychology»,
Psychology of Religion and Spirituality 2, 2010, p. 37-45.

122 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CO NSCI ENCE


Il est bien connu que l'ingestion de kétamine, un agent anes-
thésiant qui est parfois utilisé de façon récréationnelle, peut
générer des hallucinations. À petites doses, la kétamine peut
aussi induire des sensations de sortie du corps. Cette drogue agit
principalement en bloquant les récepteurs de l'acide N-méthyl-
D-aspartique (NMDA). Ces récepteurs s'ouvrent normalement
en réponse à une liaison avec du glutamate, le messager chimique
excitateur le plus abondant dans le cerveau humain. Le psychiatre
Karl Jansen a proposé l'hypothèse que l'inhibition des récepteurs
NMDA pouvait entraîner une EMl32 • Toutefois, les expériences
sous kétamine produisent des images bizarres et sont souvent
effrayantes. En outre, la majorité des utilisateurs de kétamine
savent que les expériences produites avec cette drogue sont illu-
soires. À l'opposé, les expérienceurs sont absolument convaincus
d'avoir vécu quelque chose de réel. De surcroît, la plupart des
composantes centrales des EMI ne sont pas rapportées par les
utilisateurs de kétamine.

Certains ont spéculé que l'épilepsie du lobe temporal pouvait


induire tous les aspects typiques des EMI33 • Mais une revue
exhaustive de la littérature médicale relative à cette probléma-
tique neurologique révèle que les principales caractéristiques des
EMI n'accompagnent pas les crises épileptiques, localisées dans
les lobes temporaux. En effet, les symptômes associés à ce type
de crises incluent des hallucinations, de la confusion mentale et
des états émotionnels négatifs34• Et, même si le neuroscientifique
Michael Persinger a affirmé qu'il pouvait produire des EMI
à l'aide de la stimulation magnétique transcrânienne des lobes

32. Jansen K., « Near death experience and the NMDA receptor », British Medical journal
298, 1989, p. 976.
33. Saavedra-Aguilar J. C., G6m ez-Jeria J. S.,« A neurobiological m ode! for nea r-death
experiences», / ournal ofNear-Death Studies 7, p. 205-222.
34. Rodin E., « Comments on "a neurobiological mode! for near-death experiences" »,Journal
ofN ear-Death Studies 7, 1989, p. 255-259.

CHA PITRE S '* UNE CONSCIENCE DÉLOCALI SÉE 123


temporaux35, les expériences rapportées par les participants à ses
études ressemblent très peu aux éléments caractéristiques des EMI.

LES EXPÉRIENCES VÉCUES AU SEUIL DE LA MORT

Les expériences vécues au seuil de la mort constituent un


autre phénomène qui suggère que la vie ne s'arrête pas lorsque le
corps physique cesse de fonctionner. La plupart des membres du
personnel médical qui travaillent dans les unités de soins palliatifs
sont familiers avec ces expériences. Celles-ci se manifestent dans
les jours, les heures, voire les minutes qui précèdent la mort. Ces
expériences ont été rapportées de tout temps au sein de diffé-
rentes cultures36•
Durant les expériences vécues au seuil de la mort, les expérien-
ceurs se trouvent dans un état de conscience élargie - comme si
le voile séparant la vie de la mort se levait - et voient des proches
décédés précédemment qu'ils connaissent ou des êtres spirituels
qui leur sont inconnus. Parfois, les mourants tendent les bras vers
ces «personnages» de leurs visions, qu'ils perçoivent comme des
messagers venant les assister dans leur transition vers l'au-delà.
Quelquefois, les mourants parlent directement à ces personnages,
ou bien ils rapportent aux médecins et infirmières s'occupant
d'eux ce que ces personnages leur disent 37 • Dans certains cas,
les mourants entendent des musiques merveilleuses ou bien ils
décrivent des lieux de très grande beauté appartenant à un autre
monde. À ce propos, tout juste avant de rendre son dernier souffle,
le grand inventeur Thomas Edison dit: «C'est très beau ici. » Quant
à Steve Jobs, le fondateur et P-DG d'Apple, s'exclama: «Oh wow!
Oh wow! Oh wow!»

35. Persinger M. A., « Near-death experiences and ecstasy : a product of the organization
of the human brain ? » , dans S. Della Sala (dir.), 1999 Mind Myths : Exploring Popular
Assumptions A bout the Mind and Brain (p. 85-99), Chichester, UK, John Wiley.
36. Fenwick P., Lovelace H., Brayne S., «Comfort for the dying : five year retrospective
and one year prospective studies of end of life experiences », A rchives of Gerontology and
Geriatry 51, 2010, p. 173-179.
37. Lawrence M., Repede E., «The incidence of deathbed communications and their impact
on the dying process », A merican Journal ofHospice & Palliative Care M edicine 30, 2013,
p. 632-639.

124 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Ces expériences réduisent la détresse physique et émotionnelle
des mourants, et elles leur apportent réconfort, quiétude et séré-
nité. En fin de vie, environ 90 % des individus se trouvent dans des
stades de coma trop profonds pour pouvoir communiquer. Mais,
sur les 10% d'individus qui demeurent conscients avant leur mort,
plus de la moitié d'entre eux rapportent de telles expériences38•
Plusieurs médecins croient que les expériences vécues au seuil
de la mort ne sont que des hallucinations dues aux médicaments ou
à des vœux pieux. Cela peut parfois être vrai. Toutefois, il existe des
cas où l'hypothèse de l'hallucination n'est pas valide car le mourant
reconnaît avec surprise une personne qu'il croyait vivante mais
qui est effectivement décédée depuis peu. Le Dr Bruce Greyson,
psychiatre et chercheur à l'université de Virginie, a compilé
plusieurs de ces cas dans une étude publiée en 201039 • À ce sujet,
Greyson a écrit: «Des cas de ce genre fournissent quelques-unes
des preuves les plus convaincantes au sujet de la survie de la
conscience après la mort du corps physique. »

Voici quelques-uns de ces cas.

Lors d'un accident de voiture, une femme voit son père


qui est décédé une heure plus tôt.
Une femme indienne est mourante suite à un accident de
voiture. Un étranger s'arrête pour lui offrir son aide. Elle lui dit: «Si
vous passez près de la réserve, s'il vous plaît, dites à ma mère que
j'étais bien. Pas seulement bien, mais aussi très heureuse parce que
je suis déjà avec mon père.» L'étranger trouve sa mère et lui donne
le message. La mère lui fait savoir qu' environ une heure avant
l'accident, le père de sa fille est décédé d'une attaque cardiaque.

Un garçon voit l'amour de jeunesse de sa mère.


Un jeune garçon de 7 ans atteint de leucémie et mourant dit
à sa mère qu'il est allé au paradis. Le garçon lui dit aussi qu'il y a

38. Wills-Brandon C., One Last Hug before l Go: The Mystery and Meaning of Deathbed
Visions, Deerfield Beach, Floride, Health Communications !ne, 2000.
39. Greyson B., « Seeing dead people not known to have <lied : "Peak in Darien" experiences »,
Anthropology and Humanism 35, p. 159-171, 2010.

CHAPITRE 5 * UNE CONSCIENCE DÉLOCALISÉE 125


rencontré un homme qui s'est présenté comme l'ancien amour de
jeunesse de sa mère. Suite à un accident de voiture, cet homme
était handicapé. La mère est convaincue qu'elle n'a jamais parlé
à son fils de cet ancien copain. Elle découvre par la suite que cet
homme est décédé le jour où son fils a eu la vision.

Les expériences de mort partagée


Le Dr Raymond Moody est le médecin amencain qui
a attiré l'attention du grand public sur les EMI au milieu des
années 1970. Ses recherches subséquentes l'ont amené à décou-
vrir un phénomène connexe, l' «expérience de mort partagée»
(ou EMP - le Dr Jean-Jacques Charbonier utilise l'expression
«perceptions mortuaires » pour y référer40). Ce phénomène est
documenté dans son livre intitulé Témoins de la vie après la vie
- Enquête sur les expériences de mort partagée41• Moody s'est
entretenu avec des centaines de personnes qui ont vécu une
EMP. Cette expérience est rapportée par un individu en bonne
santé qui possède une connexion émotionnelle avec un autre
individu expérimentant la transition de la vie à la mort. Une
EMP semble reposer sur un partage empathique de l'expérience
de la personne mourante.
En se basant sur ses propres travaux, Moody propose dans ce
livre le récit modèle d'une telle expérience:
« Une femme appelée Jane est assise auprès de son mari, en phase termi-
nale d'un cancer, après trente ans de vie commune. Il a perdu conscience
et, d'après le médecin qui le soigne, sa mort est imminente. [... ] Tandis
qu'elle le regarde, une brume blanche s'élève et se dissipe dans l'air
au-dessus de lui. [... ] Soudain, la chambre s'éclaire et s'emplit d'une
lumière blanche dans laquelle dansent des particules. Jane, qui se sent
un peu étourdie, comprend tout à coup qu'elle a quitté son corps et
qu'elle flotte non loin du plafond de la chambre. Elle se voit en bas,
assise auprès du cadavre de son mari, ce qui lui paraît bizarre, car elle le
sent en même temps non loin d'elle. Elle tourne la tête et le voit qui lui

40. Charbonier J.-J., Les 7 bonnes raisons de croire à l'au-delà, Paris, Guy Trédaniel éditeur,
2012.
41. Moody R.. Perry P., Témoins de la vie après la vie - Enquête sur les expériences de mort
partagée, Paris, Robert Laffont, 2010.

126 UN SAUT QUANTIQ UE DE LA CONSCIENCE


sourit[ ... ]. Le couple continue à planer tandis que des scènes de leur vie
surgissent autour d'eux. Ils voyagent dans leur passé en voyant défiler
ces fragments dont certains se présentent de façon panoramique [.. . ].
Parmi ces scènes, se trouvent des séquences dont Jane ne fait pas partie,
des scènes de la vie de son mari. [... ]Ensemble, ils se déplacent vers un
coin de la chambre qui n'est plus à angle droit. Toute la pièce a changé
de forme et semble continuer à se transformer [... ]. C'est peut-être
dû à cette ouverture, à ce tube qui semble se dilater près du plafond,
comme une porte vers un ailleurs. Jane et son mari y pénètrent[ ... ] [et]
débouchent dans un paysage édénique. Autour d'eux, tout n'est que
beauté. [... ] Jane et son mari marchent sur un sentier qui descend vers
un cours d'eau. Comme ils s'en approchent, Jane se rend compte qu'elle
ne peut pas aller plus loin. [.. .] Elle est heureuse pour son mari qui ne
souffre plus et n'a plus de corps mortel. Elle prend congé de lui et, en
un éclair, se retrouve dans son corps de chair et d'os, assise auprès de
celui, inerte, de son mari[ ... ].»

Les travaux de Raymond Moody indiquent que plusieurs


éléments caractérisent les EMP:
Perception d'entités spirituelles entrant dans la chambre.
Les expérienceurs voient ces apparitions, qui semblent être
les proches décédés de la personne mourante, entrer dans la
chambre au moment du décès.
Vision de l'essence spirituelle du mourant qui quitte son corps
physique. Les expérienceurs rapportent, dans certains cas,
apercevoir une brume (blanchâtre ou grisâtre) qui s'échappe
du corps défunt et constitue parfois une réplique transparente
de la personne qui vient de mourir.
Perception d'une lumière brillante et mystique. Cette lumière
surnaturelle, qui éclaire la chambre, est perçue par les expé-
rienceurs comme étant une source de pureté, d'amour, de paix
et de réconfort.
Participation à la revue de vie du défunt. Les expérienceurs
peuvent voir des scènes de la vie de la personne défunte. Ces
scènes forment parfois un hologramme qui entoure le lit de
l'individu décédé.
Impression de changement dans la structure de la chambre.
Les expérienceurs rapportent parfois que, lorsque l'autre

CHAPITRE 5 * UNE CONSCIENCE DÉLOCALISÉE 127


personne décède, ils semblent pénétrer dans un autre plan
de réalité qui ne se conforme pas aux règles de la géométrie
tridimensionnelle. Par exemple, la chambre d'hôpital cubique
semble «se muer» en quelque chose d'autre, elle peut prendre
l'apparence d'un entonnoir; et les expérienceurs peuvent avoir
l'impression de se retrouver à l'extérieur de leur corps physique
et de percevoir la chambre à partir d'un angle qu'il est impos-
sible de décrire avec les mots du langage ordinaire.
- Découverte d'un paysage irréel et édénique. L' expérienceur
découvre un paysage où tout n'est que beauté. Il peut aussi
entendre une musique éthérée tellement sublime qu'il est
impossible de la décrire avec des mots.
- Accompagnement de la personne décédée vers la Lumière.
Certains expérienceurs affirment avoir quitté leur corps
physique, au moment où l'individu qu'ils accompagnaient est
mort, et avoir réintégré leur «enveloppe corporelle» alors que
la personne décédée entrait dans la Lumière.

Comme les EMI, les EMP peuvent avoir un impact profond


sur ceux qui vivent ces expériences. Ainsi, elles apaisent la douleur
du deuil et renforcent la croyance d'une vie après la mort. De
plus, les expérienceurs notent une augmentation de leur capacité
d'empathie, et ils vivent une remise en question de leurs priorités
qui les amène à apporter des changements dans leur mode de vie.
Ressentant qu'ils ont soudainement mûri et que leur vie gagne
en profondeur, les expérienceurs se mettent aussi à réfléchir sur
des problèmes philosophiques, et ils n'agissent plus sous le coup
d'impulsions. Après leur EMP, ils deviennent également conscients
de posséder un esprit, de même que de l'importance de l'amour
du prochain et de la recherche de la connaissance. Enfin, les expé-
rienceurs produisent souvent un effet calmant sur les gens.

Ainsi que le note le Dr Jean-Jacques Charbonier42, les EMP


ne peuvent être secondaires à des phénomènes hallucinatoires

42. Charbonier ).-).,Les 7 bonnes raisons de croire à l'au-delà, Paris, Guy Trédaniel éditeur,
2012.

128 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


découlant de l'anoxie ou de diverses atteintes cérébrales puisque les
individus qui vivent ces expériences sont sains de corps et d'esprit.

LA LUMIÈRE PEUT-ELLE AVOIR


UN POUVOIR GUÉRISSEUR?

Vers la fin août 2014, Germaine Challut, qui est âgée de 79 ans,
éprouve de très fortes douleurs abdominales. Quelques années plus
tôt, on avait dû lui poser un anus artificiel en raison d'un cancer
du rectum. Elle est amenée aux urgences d'un hôpital. Là, on lui
apprend qu'elle souffre d'une péritonite avec rupture de l'intestin.
La situation est dramatique, car les selles se sont répandues dans
son abdomen, et son organisme est infecté de manière généralisée.
Plusieurs de ses organes sont atteints. Comme son état se dégrade
très rapidement, un médecin décide de plonger Germaine dans
un coma artificiel, avec l'accord de sa fille Isabelle, infirmière et
accompagnante à la naissance.
Lorsque le médecin décide d'arrêter le coma artificiel,
Germaine ne se réveille pas. Au bout d'une semaine, Isabelle prend
la décision de «débrancher» sa mère de l'assistance médicale, car
des discussions avec cette dernière lui avaient révélé que Germaine
n'était pas en faveur de l'acharnement thérapeutique. Sa famille
vient à l'hôpital pour lui dire adieu. Un prêtre est aussi présent.
Le lendemain matin, à son grand étonnement, Isabelle Challut
trouve sa mère assise dans son lit, débordante de vie et affamée!
Germaine raconte à sa fille qu'elle a traversé un tunnel et qu'elle
est allée vers la Lumière. La vieille dame ne souffre plus du tout,
elle n'a plus de fièvre, et un scanner indique que son infection
abdominale s'est en partie résorbée. Germaine accepte de prendre
des antibiotiques par intraveineuse, pendant une semaine, et elle
est autorisée à retourner chez elle.
Sa personnalité semble avoir changé, car, tandis qu'elle présen-
tait un tempérament anxieux, Germaine est maintenant très calme
et ne se préoccupe nullement de son état physique. De retour à la
maison, elle avale des bouillons et passe du temps à se connecter
à la Lumière qu'elle a contactée lors de son EMI. Six semaines

CHAPITRE S * UNE CONSCIENCE DÉLOCALISÉE 129


après le «retour à la vie» de Germaine, son infection a totalement
disparu et elle se porte très bien43 •
Le cas de Germaine Challut n'est pas unique, car d'autres
guérisons, en apparence «miraculeuses», ont été documentées
suite à une EMI. L'un des cas les plus célèbres est celui d'Anita
Moorjani, une indienne vivant à Hong Kong. En 2006, cette femme,
atteinte d'un cancer lymphatique au stade terminal, est tombée
dans le coma, et elle a vécu une EMI. Suite à cette expérience,
son cancer a disparu totalement. Comme pour Germaine, cela
est complètement inexplicable sur le plan médical. À l'évidence,
de tels cas suggèrent que les expérienceurs ont contacté, durant
leurs expériences, un Pouvoir supérieur qui transcende infiniment
la physis et le monde du vivant.

43. http://www.inrees.com/articles/ retour-vie-emi-guerison-spontanee/.

130 UN SAUT QUANTIQ UE DE LA CONSCIENCE


CHAPITRE 6

LE MYSTÈRE ULTIME
« La beauté de la mort, c'est la présence.
Présences inexprimables des âmes aimées,
souriant à nos yeux en larmes. »
VICTOR HUGO

DES COMMUNICATIONS AVEC LES DÉFUNTS

Comme nous l'avons vu dans le chapitre précédent, l'étude


scientifique des EMI indique que la conscience n'est pas anni-
hilée lors des premières minutes après la mort. Toutefois, les
EMI ne durent généralement que quelques minutes. Elles ne
nous renseignent donc pas sur ce qui se passe dans les heures,
les jours, les mois ou les années qui suivent le décès de nos chers
disparus. Pour beaucoup d'humains, c'est cette question fonda-
mentale qui représente le mystère ultime. Afin d'y répondre, il
faudrait pouvoir entrer en communication avec les défunts. Mais
cela est-il possible?

Cette grande question taraude les chercheurs visionnaires


et ouverts d'esprit depuis des lustres. À ce propos, dans les
années 1880, presque un siècle avant que ne débutent les études sur
les EMI, Frederic Myers, Frank Podmore et Edmund Gurney- trois
pionniers de la recherche psychique qui avaient participé à la
création de la Society for Psychical Research - recueillirent,
plusieurs milliers de témoignages afin d'étudier empiriquement

131
les communications avec les défunts (ou CAD). 1 On parle de CAD
lorsque les défunts se manifestent spontanément auprès d'un de
leurs proches par un signe visuel, olfactif, auditif ou tactile, sans
aucune aide ou sollicitation extérieure de la part d'un médium
ou de tout autre intermédiaire. L'intuition ou la sensation de
présence d'un défunt fait aussi partie des CAD. Souvent, au cours
de ces expériences, les êtres chers décédés donnent l'assurance
aux endeuillés qu'ils mènent maintenant une vie heureuse dans
un autre plan d'existence.

Les CAD sont un phénomène assez largement répandu puisque


des études réalisées dans quelques pays occidentaux ont révélé
qu'environ 30 % des individus questionnés affirmaient avoir eu des
contacts avec un défunt 2• Ces expériences réduisent l'intensité
du chagrin des endeuillés et leur procurent du réconfort. Les CAD
transforment aussi les croyances des endeuillés, au sujet du sens
de la vie et de la mort, et les aident considérablement à s'adapter
à la perte et à faire leur deuil.

On ne peut assumer de façon naïve et simpliste, comme le


font les pseudosceptiques3, que toutes les CAD sont seulement des
illusions ou des hallucinations, car elles sont parfois associées à des
phénomènes objectifs, tels que le mouvement ou le bris d'objets, et
des sons qui peuvent être enregistrés. Quelquefois, des apparitions
de défunts peuvent produire une ombre ou bien être réfléchies par
un miroir. Par ailleurs, dans certains cas, plus d'une personne peut
percevoir la présence du défunt et, dans d'autres cas, les défunts
communiquent des informations aux endeuillés que ces derniers
ne connaissent pas mais qu'ils peuvent par la suite vérifier.

1. G urney E., Myers F., Podmore F., Phantasms ofthe Living, Londres, Society for Psychical
Research, 1886.
2. Greeley A., The Sociology ofthe Paranormal: A Reconnaissance, Beverly Hills (CA), Sage,
1975 + Haraldsson E., Gudmundsdottir A., Ragnarsson A., Loftsson, J, Jonsson, S., « National
survey of psychical experiences and attitudes towards the paranormal in lceland », 1977,
dans J. D. Morris, W . G. Roll, R. L. Morris (dir.), Research in parapsychology, Metuchen, N),
Scarecrow Press, 1976, p. 182-186 .
3. Les véritables sceptiques adoptent une attitude de réserve et de doute devant un prétendu
fait ou une proposition quelconque, mais conservent un esprit ouvert. Les pseudo-sceptiques,
eux, adoptent une attitude négative de dénégation, plutôt qu'une position agnostique, en
continuant à se qualifier de « sceptiques».

132 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCI ENCE


L'affaire du testament de James Chaffin constitue un tel cas.
Arthur Berger, un avocat de Miami, a enquêté sur cette affaire en
19954 • Chaffin était un fermier de Caroline du Nord qui mourut
en 1921. Seize ans plus tôt, il avait rédigé un testament par lequel
il léguait sa ferme à son fils aîné, et rien à sa femme ni à ses trois
autres fils. En 1919, James Chaffin décida d'écrire un nouveau
testament, qu'il rangea entre les pages d'une bible, sans en dire mot
à personne. Quand ce fermier mourut, c'est le premier testament
qui fut validé. Une nuit, après son décès, l'un de ses fils écartés de
l'héritage le vit apparaître au pied de son lit. L'apparition lui révéla
que le nouveau testament se trouvait dans la poche de son vieux
manteau. Suite à cette apparition, le fils trouva le manteau ainsi
qu'un mot de la main de son père cousu à l'intérieur de la poche.
Sur ce papier, Chaffin avait indiqué la référence de la Bible où son
fils trouverait le dernier testament. Ce document fut amené au
notaire de James Chaffin. Bien que celui-ci trouvât cette histoire
pour le moins extraordinaire, il ne put mettre en doute la véracité
du récit, et le second testament fut à son tour validé.

Voici quelques partages de CAD récentes qui ont été réper-


toriées par l' After Death Communication Research Foundation
(ADCRF), un organisme fondé par le Dr Jeffrey Long, un médecin
reconnu internationalement pour ses recherches sur les EMI, et
son épouse Jody Long:
«Soudain, je me suis réveillée assise à la droite du lit et j'ai vu mon frère
comme assis sur le panneau de bois qui servait de pied de lit (une tête
et un pied de lit). Il était comme je le connaissais, jean, blouson de cuir,
ses cheveux noirs et ondulés, et ses grands yeux noirs aussi brillaient.
Je ne me souviens pas du tout avoir été surprise, ce qui se passait était
normal. En même temps, j'ai vu mon mari qui dormait à ma gauche,
des cartons contenant des vêtements non encore rangés ainsi que notre
armoire démontée. Mon jeune frère alors m'a parlé. Il m'a expliqué qu'il
n'était pas vraiment parti, qu'il allait très bien, qu'il était heureux et qu'il
fallait que je cesse de tant pleurer.»

Babette B. 5

4. Dossey L., La Médecine réinventée. L'artdeguérirdu Ill' millénaire, Éd. Vivez Soleil, 2002.
5. http://www.adcrf.org/French/calm_stories.htm.

CHAPITRE 6 -1> LE MYSTÈRE ULTIME 133


«Une nuit, je dormais et je sais que ceci n'était pas un rêve. J'ai senti
quelque chose, quelqu'un se mettre tout contre moi et me serrer très
fort. J'ai réalisé à ce moment que c'était lui, c'était sa façon de me tenir
la nuit, il était là tout contre moi. Je me souviens avoir pris sa main,
je la sentais vraiment, et l'avoir serrée très fort contre ma poitrine.
J'ai senti son souffle dans mon cou et son odeur particulière. Il était
là, j'en suis sûre. Depuis je me sens bien, même si j'ai toujours mon
chagrin et mes crises de larmes, mais il était venu me rassurer. Je sais
qu'il est bien. Depuis, j'ai l'impression qu'il est toujours là avec moi et
qu'il m'accompagne et me protège jour et nuit. Je le sens encore la nuit
près de moi. Il n'est pas mort, il est bien vivant, sous une autre forme. »
Marie M.6

LA COMMUNICATION POST-PORTEM INDUITE

Les CAD se produisent apparemment de manière spontanée,


du moins dans la perspective des endeuillés. Mais un psychologue
américain du nom d' Allan Botkin affirme avoir mis au point une
technique thérapeutique permettant aux endeuillés d'entrer inten-
tionnellement en contact avec leurs proches décédés7 •

Dans les années 1970-1980, Botkin essaie tant bien que mal de
soigner des vétérans de guerre souffrant de stress post-traumatique
en utilisant la thérapie dite «de confrontation». Cette thérapie
classique, qui est dominante à l'époque, consiste à confronter le
patient, de façon répétitive, à ses souvenirs d'expériences trau-
matisantes afin d'affaiblir peu à peu ses réactions émotionnelles.
Allan Botkin est frustré par l'inefficacité de cette approche, qui
peut prendre des années avant de donner quelques résultats. En
1990, il découvre l'EMDR (Eye Movement Desensitization and
Reprocessing; en français, Désensibilisation et retraitement par
les mouvements oculaires), une autre technique psychothérapeu-
tique visant le traitement des traumatismes psychiques. Botkin
réalise que l'EMDR lui permet d'obtenir de meilleurs résultats

6. http://www.adcrf.org/French/ calm_stories.htm.
7. http://www.infos-paranormal.net/Communication-Post-Mortem-Induite.pdf.

134 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


beaucoup plus rapidement car il observe des changements impor-
tants parfois dès la première séance.

Lors d'une séance d'EMDR, on demande au patient de faire


le vide dans sa tête et de se concentrer sur une pensée ou une
image négative en lien avec un événement affligeant. En parallèle,
le patient doit suivre des yeux les doigts du thérapeute que celui-ci
déplace latéralement dans le champ de vision du patient pendant
20 ou 30 secondes. Ensuite, le patient est invité à se concentrer sur
une croyance positive, préalablement définie en début de séance,
puis de focaliser son attention à nouveau sur le souvenir doulou-
reux. Après plusieurs cycles de mouvements oculaires rapides, la
croyance positive du patient est ancrée et son trouble émotionnel
disparaît.

Cinq ans après être devenu familier avec l'EMDR, Botkin


rencontre un patient appelé Sam. Ce dernier a combattu au
Vietnam où il s'est lié avec Le, une jeune orpheline qu'il s'est
promis d'adopter et de ramener chez lui. Un jour, alors que Sam et
d'autres soldats américains aident un groupe d'orphelins, dont Le
fait partie, à monter dans un camion pour les conduire à un orphe-
linat, ils sont bombardés. Par la suite, Sam découvre le cadavre
de Le gisant dans la boue. Bouleversé, le chagrin ne le quitte plus
jusqu'à sa rencontre avec Allan Botkin. Lors de sa séance d'EMDR,
Sam aperçoit Le, qui est maintenant devenue une belle femme
aux longs cheveux noirs. Il sent aussi ses bras autour de lui. Le le
remercie de s'être occupé d'elle avant sa mort. Sam exulte car il
est convaincu d'avoir vécu un contact authentique avec Le. Pour
sa part, Botkin demeure sceptique et croit que Sam a confondu
le réel et l'imaginaire. Néanmoins, plusieurs patients manifestent
des réactions similaires à celle de Sam, et ces «contacts» semblent
leur apporter beaucoup d'apaisement et de réconfort, ainsi qu'une
meilleure acceptation de la mort. Botkin décide donc d'explorer
plus avant cette piste8 •

8. http://www.infos-paranormal.net/Communication-Post-Mortem-Indu ite.pdf.

CHAPITRE 6 '& LE MYSTÈRE ULTIME 135


La première séance de communication induite avec les défunts
(en anglais, InducedAfter-Death Communication ou IADC) menée
par Allan Botkin se déroule avec un certain Gary, dont la fille
Julie est décédée à l'âge de 11 ans. Les capacités mentales de Julie
n'ont jamais dépassé le stade d'un bébé de 6 mois, en raison d'une
grave carence en oxygène survenue à sa naissance. À la suite d'une
crise cardiaque, Julie est morte dans les bras de Gary. Bien que
non croyant, ce dernier accepte d'essayer la nouvelle méthode de
Botkin. Dans cette méthode, le thérapeute demande au patient de
se focaliser sur le chagrin. Après le balayage oculaire, et une fois
que ce sentiment a diminué, le thérapeute demande au patient de
conserver les yeux fermés. Cela permet au patient d'entrer dans
un état de réceptivité propice à la réception de toute information
pouvant provenir du défunt.

Quand il rouvre les yeux, à la fin de la séance, Gary a l'air


complètement éberlué. Il dit alors à Botkin: «J'ai vu ma fille! Elle
jouait joyeusement dans un jardin aux couleurs riches et bril-
lantes. Elle semblait en parfaite santé, sans les problèmes physiques
qu'elle avait connus durant sa vie. Elle m'a regardé, et j'ai perçu son
amour.» Julie dit aussi à Gary qu'elle sera toujours avec lui. Celui-ci
sort heureux de la séance, car il a l'impression de s'être recon-
necté avec sa fille. Une année plus tard, il confie à Allan Botkin
qu'il se sent toujours en contact avec Julie. Sa séance d'IADC lui
aura appris que «les gens ne meurent pas vraiment, ils changent
simplement d'état et vivent dans un milieu différent, un très bel
environnement9 ».

Subséquemment, Botkin conduit plusieurs milliers de séances


d'IADC. Les résultats sont impressionnants puisque la méthode
fonctionne dans 70 %des cas, et ce avec des gens de toutes croyances,
y compris les athées et les sceptiques. Dans l'état de conscience
induit par cette technique, le patient reçoit des informations sous
forme de visions et de voix entendues télépathiquement, et il peut

9. Ibid.

136 LIN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


aussi ressentir un contact physique. Fréquemment, les personnes
décédées sont remplies d'amour pour les vivants, qu'ils rassurent et
encouragent à se consoler. Dans certains cas, les défunts précisent
aux vivants qu'ils leur ont pardonné pour certaines choses ou bien
qu'ils leur demandent pardon pour des actions posées lors de leur
passage sur terre qu'ils regrettent à présent. De plus, parfois le
défunt communique au patient des informations jusque-là igno-
rées (par exemple, un avertissement sur une situation à venir
comme un problème de santé10).

Bien que Botkin refuse de spéculer sur la nature véritable


des communications induites par sa méthode, afin de laisser le
patient libre d'interpréter ses expériences sans être influencé par
les croyances du thérapeute, il réfute cependant les objections
selon lesquelles les IADC seraient des hallucinations: «La preuve
contestable en est que les consultants les décrivent comme complè-
tement différentes de toute autre expérience. Techniquement,
les perceptions hallucinatoires sont indépendantes de percep-
tions sensorielles, autrement dit, elles sont toutes dans la tête
du sujet, sans lien avec la réalité extérieure. Les hallucinations
mettent souvent en scène des émotions négatives très différentes
d'une personne à l'autre, et relèvent de désordres psychologiques
importants. Alors que l'IADC implique le plus souvent un contenu
positif, semblable d'une personne à l'autre, très bienfaisant
psychologiquement 11 • »

Selon le Dr Olivier Chambon - un médecin psychiatre et


psychothérapeute français qui emploie la méthode Botkin -,
cette approche est révolutionnaire, car elle change radicalement
la façon d'envisager la thérapie du deuil, qu'elle accélère énormé-
ment. Comme Allan Botkin, le Dr Chambon ne pense pas que
les IADC peuvent être réduites à des hallucinations, des méca-
nismes de défense ou des désirs inconscients, car, quelquefois,
les messages des défunts peuvent aller à l'encontre de ce que

1O. http://www.inrees.com/ articles/Communiquer-avec-un-defunt-deuil-EMD R/.


II. Ibid.

CHAPITRE 6 * LE MYSTÈRE ULTIME 137


les patients attendent. Olivier Chambon affirme aussi que les
spécialistes contemporains de la thérapie du deuil reconnaissent
maintenant que les anciennes recommandations visant à oublier
le défunt - comme ne pas entretenir de conversations intérieures
et ne pas conserver d'objets lui appartenant - «étaient inadaptées
et potentiellement dommageables. Au contraire, il faut entretenir
la relation qui a finalement changé de niveau: cette relation est
devenue plus subtile, mais les liens d'amour peuvent être cultivés
plus profondément». Grâce à la méthode Botkin, «la relation est
maintenue, elle n'est pas finie, elle est juste d'une autre nature, elle
reste dynamique, interactive, et les gens s'aperçoivent que leurs
défunts n'ont pas souffert». Le rapport des consultants à la mort
se transforme automatiquement: «Quand ils ont un contact avec
un défunt, les patients savent qu'ils le retrouveront. Ils ont moins
peur de la mort et de leur propre mort 12 • »

QUAND LA SCIENCE S'INTÉRESSE AUX MÉDIUMS

Les médiums sont des individus réputés être capables de


communiquer avec les défunts et recevoir des informations
à propos des conditions de vie dans l'au-delà. Quant à elle, la
médiumnité réfère à l'ensemble des facultés qui sont propres aux
médiums.

Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, la médium-


nité devint très populaire, et des pionniers de la recherche
psychique - tels William James, Edmund Gurney, Frederic Myers
et Charles Richet - la virent comme un phénomène important sur
lequel la psychologie devait se pencher. Pour ces chercheurs - qui
ne pensaient pas que la médiumnité pouvait être expliquée simple-
ment par le hasard, la suggestion, l'hallucination ou la fraude - , il
était impératif d'étudier empiriquement la possibilité que les
médiums puissent délivrer des messages authentiques de la part

12. Ibid.

138 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


d'individus défunts sans passer par le biais des canaux senso-
riels normaux; car ces chercheurs croyaient fermement que ce
type d'étude pouvait potentiellement démontrer la survie de la
conscience et de la personnalité après la mort.

Les investigations des «soi-disant» médiums, durant cette


période, révélèrent de nombreuses fraudes, et la pratique de la
médiumnité perdit rapidement de sa crédibilité. En particulier,
l'illusionniste Harry Houdini (de son vrai nom Ehrich Weisz), qui
était fasciné par la question de la survie après la mort, fut l'un de
ceux qui menèrent une chasse acharnée aux charlatans et impos-
teurs de tout poil qu'étaient les faux médiums. Le démasquage de
ces imposteurs, qui utilisaient des techniques de prestidigitation,
fit que la majorité des scientifiques de cette époque décidèrent de
prendre leurs distances par rapport à l'étude de la médiumnité.

Il fallut attendre près d'un siècle avant que des scientifiques


sérieux osent étudier de manière rigoureuse et systématique ce
phénomène. Deux de ces scientifiques sont Julie Beischel, cofon-
datrice du Windbridge Institute 13, et mon collègue et ami Gary
Schwartz, directeur du Laboratory for Advances in Consciousness
and Health à l'université de l'Arizona.

Lorsqu'un médium rencontre pour la première fois un client


qu'il ne connaît pas, ce médium peut être en mesure de livrer
au client un certain nombre d'informations factuelles qu'il dit
obtenir de personnes défuntes. La question essentielle qui se pose
à ce moment-là est évidemment: «D'où proviennent ces infor-
mations?» Alors qu'elle effectuait un stage postdoctoral dans le
laboratoire de Gary Schwartz, Julie Beischel se pencha sur cette
question. En collaboration avec son directeur de recherche, Beischel
élabora un protocole rigoureusement contrôlé qui permettrait en
principe de vérifier la nature des informations pouvant être reçues

13. http://www.windbridge.org.

CHAPITRE 6 -1' LE MYSTÈRE ULTIME 139


par des médiums lorsque les possibilités «conventionnelles»
d'obtenir ces informations sont éliminées14 •

Il existe différentes façons «conventionnelles» d'obtenir des


informations sur une personne que l'on ne connaît pas. Il y a d'abord
la fraude ou la supercherie: une personne qui n'est pas médium
peut faire au préalable des recherches (par exemple, sur Internet)
sur le client, ou la personne décédée, afin de rapporter des infor-
mations exactes. Le protocole développé par Beischel et Schwartz
élimine cette possibilité puisque le médium n'a que le prénom de la
personne décédée durant toute la durée de l'expérimentation. Une
autre explication conventionnelle est la «lecture à froid». Cette
expression fait référence à un ensemble de techniques psycho-
logiques utilisées par les faux médiums afin d'analyser les indices
visuels ou auditifs qu'ils perçoivent chez les clients. Ces techniques
permettent au faux médium d'élaborer une lecture correcte et
complète simplement en observant les réactions du client aux infor-
mations qui lui sont présentées. Dans les expériences menées par
Julie Beischel, la personne qui joue le rôle du client (le sujet) n'est
pas physiquement présente dans la même pièce que le médium.
De plus, la personne qui conduit l'expérience (l'expérimentateur)
ignore également tout du sujet et ne possède aucune information
sur le défunt. L'expérimentateur ne peut donc pas transmettre des
signaux subtils ou inconscients au médium. Enfin, une autre expli-
cation conventionnelle possible est que les déclarations faites par le
médium sont si générales qu'elles pourraient s'appliquer à presque
tout le monde. Pour éliminer cette dernière possibilité, dans le
protocole de Beischel et Schwartz, l'expérimentateur demande au
médium de répondre à quatre questions spécifiques à propos de la
personne décédée: description physique, personnalité, passe-temps
ou activités et circonstances de la mort.

Dans les expériences conduites par Beischel, chaque médium


faisait une lecture sur deux personnes décédées dont il n'avait

14. Beischel J., Schwartz G. E., « Anomalous information reception by research mediums
demonstrated using a nove! triple-blind protocol »,Exp lore: The Journal of Science &
Healing 3, 2007, p. 23-27.

140 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


que les prénoms. Pendant la lecture, l'expérimentateur leur posait
les quatre questions spécifiques sur chaque défunt. Les lectures
étaient effectuées par téléphone, et l'expérimentateur n'était au
courant de rien, à l'exception du prénom des individus décédés.
Le médium et l'expérimentateur n'étaient pas dans la même ville,
et souvent même pas dans le même État. Lorsque les deux lectures
étaient terminées, elles étaient ensuite retranscrites. Puis toute
référence à un nom était ôtée de ces documents, qui étaient par
la suite donnés à lire aux personnes dont le proche était l'un des
deux défunts, sans qu'elles sachent laquelle des deux lectures leur
correspondait. Ces personnes devaient évaluer la concordance de
chacune des lectures avec les défunts en leur attribuant une note.
Cette façon de faire permettait d'éliminer la possibilité de subjec-
tivité de !'évaluateur.

Les nombreuses expériences réalisées par Julie Beischel et


Gary Schwartz démontrent que les médiums peuvent rece-
voir de manière inexpliquée des informations précises et justes
sur des personnes décédées dont ils ignorent tout. Comment
cela est-il possible? Beischel et Schwartz ont proposé que deux
hypothèses puissent rendre compte de leurs résultats: soit les
médiums communiquent véritablement avec des défunts, soit
les médiums peuvent «lire» dans l'esprit des clients qui viennent
les consulter par le biais de la clairvoyance ou de la télépathie.
La seconde hypothèse implique que les médiums obtiendraient
des informations sans vraiment communiquer avec les individus
décédés. Cependant, étant donné que les informations livrées
par le médium étaient parfois inconnues de la personne qui se
prêtait à l'expérience en tant que client, mais que leur véracité était
confirmée plus tard, Beischel et Schwartz pensent que leurs résul-
tats étayent l'idée de la survie de la conscience. Selon eux, un aspect
de notre personnalité continuerait à exister après la mort physique
sous une forme capable de communiquer avec un médium 15•

15. Beischel J., Schwartz G. E., « Anomalous information receptio n by research mediums
demo nstrated using a nove! triple-blind protocol », Explore: The Journal of Science &
Healing3, 2007, p. 23-27.

CHAPITRE 6 * LE MYSTÈRE ULTIM E 141


LA TRANSCOMMUNICATION INSTRUMENTALE

La« transcommunication instrumentale» (ou TCI) est une


expression qui fut initialement proposée par le physicien allemand
Ernst Senkowski. Celui-ci, qui est à présent décédé, fut pendant
longtemps professeur en génie électrique à l'École polytechnique
de Rhénanie-Palatinat. La TCI réfère à une forme de communi-
cation avec le «monde invisible» qui repose sur l'utilisation de la
technologie (par exemple, la radio ou la télévision), pour la récep-
tion des messages, plutôt que sur un médium. Cette approche, qui
s'est passablement affinée au cours des dernières décennies, est
donc complémentaire à la médiumnité. Comme cette dernière,
la TCI sert à consoler les individus se trouvant dans une situation
de détresse psychologique à la suite de la perte d'un être aimé.
Un autre objectif de la TCI est de démontrer qu'il existe une vie
après la mort.
Dans sa version actuelle, la TCI est généralement soit auditive,
soit vidéo. La TCI auditive consiste habituellement en un enre-
gistrement audio auquel un bruit de fond est ajouté afin d'aider
les défunts à le modifier. En ce qui a trait à la TCI vidéo, de la
« neige » sur un écran de télévision est filmée avec une caméra,
puis l'enregistrement est analysé afin de détecter des images qui
paraissent «anormales »16 •

L'idée d'utiliser la technologie afin de pouvoir entrer en


communication avec les défunts est loin d'être nouvelle car,
dès les années 1870, l'inventeur et industriel américain Thomas
Edison - qui a déposé plus de mille brevets au cours de sa longue
carrière, et à qui on doit plusieurs inventions, dont la pile alca-
line, l'ampoule électrique et le phonographe - voulut offrir la
preuve grâce aux avancées techniques de la survie de la person-
nalité. Edison était convaincu qu'il devait être possible de mettre
au point un « nécrophone », un appareil capable de capter des voix
de l'au-delà. Thomas Edison n'était pas le seul à penser ainsi car
la plupart des pionniers de la radio et de la télévision - tels Oliver

16. http://www.mondenouveau.fr/la-transcommunication-instrumentale-1-la-tci-audio.

142 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CO NSCIENCE


Lodge, William Crookes, John Logie Baird, Édouard Branly et
Guglielmo Marconi - croyaient que ce n'était qu'une question de
temps avant que le développement technologique puisse permettre
de communiquer avec les défunts17•

Le projet de nécrophone d'Edison n'aboutit pas. Mais des


développements importants, en rapport avec la TCI auditive, se
produisirent quelques décennies après la mort du célèbre inven-
teur. Ainsi, au début des années 1950, deux prêtres catholiques
italiens, le père Ernetti et le père Gemelli, collaboraient à un projet
de recherche sur la musique. Ernetti était un physicien reconnu
internationalement, alors que Gemelli, qui était médecin et
psychologue, occupait le poste de président de l'Académie ponti-
ficale des sciences. En 1952, alors qu'Ernetti et Gemelli essayaient
d'enregistrer un chant grégorien, un fil sur le magnétophone utilisé
n'arrêtait pas de se briser. Exaspéré, le père Gemelli leva alors les
yeux au ciel et demanda l'aide de son père défunt. Peu après, les
deux hommes, stupéfaits, entendirent la voix du père de Gemelli,
qui avait été enregistrée avec le magnétophone. Cette voix disait:
«Bien sûr que je vais t'aider. Je suis toujours avec toi.» Gemelli et
Ernetti décidèrent de répéter l'expérience. Cette fois, une voix très
claire et pleine d'humour dit: «Mais Zucchini [... ]ne sais-tu pas
que c'est moi?» Le père Gemelli regarda le ruban du magnéto-
phone. Personne ne connaissait ce surnom avec lequel son père
le taquinait lorsqu'il n'était encore qu'un jeune garçon. Gemelli
se dit à ce moment que c'était bien son père qui lui parlait par
l'intermédiaire du magnétophone 18 • Plus tard, les deux prêtres
allèrent rendre visite au pape Pie XII afin de lui faire part de ce
qui s'était passé. Bien que Pie XII ne fût pas surpris outre mesure
par ce que les pères Gemelli et Ernetti lui rapportèrent, on décida
au Vatican de ne pas ébruiter l'affaire.

Quelques années plus tard, soit en 1959, le peintre et cinéaste


suédois Friedrich Jürgenson réalisa lui aussi, de manière accidentelle,

17. http://www.slate.fr/story/ 100889/edison-voix-des-morts.


18. http://www.worlditc.org.

CHAPITRE 6 * LE MYSTÈRE ULTIME 143


qu'on pouvait enregistrer les voix des défunts. Jürgenson effectua
sa découverte fortuite de la façon suivante: pour la bande-son de
l'un de ses films, il décida d'aller enregistrer avec un magnéto-
phone des chants d'oiseaux aux environs de Stockholm. De retour
chez lui, pendant qu'il écoutait l'enregistrement, Jürgenson crut
entendre, superposée aux chants d'oiseaux, une faible voix qui
l'interpellait. Il supposa alors qu'il s'agissait d'une interférence
radiophonique, cependant il n'y avait pas d'émetteur à l'endroit
où l'enregistrement avait été réalisé. Intrigué, Jürgenson continua
de mener des essais chez lui, et il réussit à capter d'autres voix et
de courts messages, en provenance de sa mère ou d'amis défunts 19•
Friedrich Jürgenson en fut si impressionné qu'il consacra le restant
de sa vie à enregistrer des voix.

Après avoir rencontré Jürgenson, qui avait publié un livre


au sujet des nombreux messages qu'il avait reçus, Konstantin
Raudive - un psychologue et homme de lettres letton ensei-
gnant la psychologie à l'université d'Uppsala - prit le relais du
cinéaste suédois. Dans les années qui suivirent, Raudive réalisa
plus de 70 000 enregistrements en utilisant le bruit statique
d'une radio 20• En 1971, des ingénieurs du son travaillant pour Pye
Records, un label très connu de musique britannique, invitèrent
Konstantin Raudive à participer à une expérimentation contrôlée.
Raudive accepta, et l'expérience fut réalisée dans une pièce isolée
acoustiquement et bloquant les ondes radioélectriques. Durant
l'expérience, Rau dive ne put toucher au magnétophone utilisé: on
ne lui permit que de parler dans un microphone. L'enregistrement
dura dix-huit minutes, et les ingénieurs du son n'entendirent
aucun autre son que la voix de Raudive. Lorsque l'enregistrement
fut terminé, les ingénieurs firent reculer le ruban pour pouvoir
l'écouter. Ahuris, ils purent distinguer plus de 200 voix différentes21 •

Les travaux à grande échelle de Konstantin Raudive lui


permirent de distinguer quatre caractéristiques des voix

19. Ibid.
20. Ibid.
21. http://itcvoices.org/konstantin-raudive-and-his-itc-evp-breakthrough.

144 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


électroniques: rythme différent du langage ordinaire, extrême
brièveté du message (habituellement un seul mot ou une phrase
très courte), non-respect de la syntaxe et parfois mélange de diffé-
rentes langues.

Marcello Bacci est un autre chercheur dans le domaine de


la TCI auditive qui obtient beaucoup de succès. Depuis près de
soixante ans, Bacci met bénévolement sa méthode de TCI au
service d'individus en deuil. Cet homme, qui ne tire aucun profit
de ce service et qui ne recherche aucune publicité, se sert d'un
vieux poste de radio à tubes - qui est réglé sur un bruit blanc dans
la bande des ondes courtes - afin d'aider les endeuillés à entrer en
contact avec des personnes décédées qui leur sont chères. Pour
mener à bien ses expériences de TCI, Bacci utilise la méthode radio
avec voix directe, c'est-à-dire qu'il cherche à obtenir des commu-
nications directement à travers le poste de radio. Les résultats qu'il
obtient sont spectaculaires, car des voix s'adressent fréquemment
aux auditeurs par leur nom, et répondent à leurs questions en
fournissant moult détails pertinents. Au fil du temps, de nombreux
journalistes et scientifiques ont participé à ces expériences, et ont
pu apparemment dialoguer avec des défunts, sans qu'aucune
supercherie ne soit mise en évidence22 •

Sarah Estep, qui est une autre pionnière de la TCI auditive,


a fondé en 1982 l'Association américaine du phénomène des voix
électroniques23• S'inspirant de l'approche publicisée par Jürgenson
puis Raudive, Estep a reçu plusieurs milliers de messages en utili-
sant un simple magnétophone. Elle a divisé l'ensemble de ces
messages en trois catégories :
1. classe C: c'est à cette catégorie qu'appartiennent la plupart
des messages. Souvent difficiles à interpréter, ceux-ci sont
constitués de faibles murmures et ils ne peuvent être entendus
qu'avec des écouteurs;

22. http://www.worlditc.org.
23. http://www.worlditc.org/h_22_estep.htm.

CHAPITRE 6 -M> LE MYSTÈRE ULTIME 145


2. classe B: ces messages sont plus forts et plus nets, et ils peuvent
être fréquemment perçus sans écouteurs;
3. classe A: ces messages sont forts et distincts, et ils ne néces-
sitent pas d'écouteurs.

En rapport avec l'après-vie, je présente ci-dessous un résumé


des informations contenues dans les messages les plus clairs reçus
par Sarah Estep :
Les relations familiales peuvent se poursuivre, si cela est
souhaité. Pour ce faire, des enseignants instruisent ceux qui
veulent communiquer avec la terre. Cependant, les appels
fréquents de ceux demeurés sur terre fatiguent les défunts.
Dans l'au-delà, les défunts mènent des vies actives et produc-
tives, et ils peuvent poursuivre les mêmes activités que sur
terre (sciences, arts, etc.). Leur fonction est celle qui convient
le mieux à leurs aptitudes et à leur caractère.
Les défunts ont la possibilité de visiter plusieurs endroits,
dans l'au-delà, avant de choisir l'un d'eux. Ils vivent dans des
maisons.
Des médecins et des infirmières y aident ceux qui en ont
besoin.
Certains défunts continuent à adorer Dieu et peuvent appar-
tenir à une «Église »24 •

Au milieu des années 1980, quelques chercheurs en TCI


se mirent à recevoir, sur des écrans de téléviseurs, des images
d'individus décédés. L'Allemand Klaus Schreiber, qui a collaboré
avec le professeur Ernst Senkowski, fut le premier de ces cher-
cheurs. Sa technique consistait à pointer une caméra vidéo en
direction d'un téléviseur, et à acheminer le signal de la caméra vers
le téléviseur afin de créer une boucle de rétroaction « optoélectro-
nique». Le résultat était une sorte de «brouillard», sur l'écran du
téléviseur, duquel émergeaient lentement des visages de défunts ou
des images d'endroits présumés se trouver dans l'au-delà. À l'aide

24. Estep W. S., Voices ofEternity, New York, Fawcett, 1988.

146 UN SAUT QUANTIQ UE DE LA CONSCIENCE


de cette méthode, Klaus Schreiber enregistra clairement les visages
de ses deux épouses décédées, celui de sa fille Karin, de même que
ceux du physicien Albert Einstein et de l'actrice de cinéma Romy
Schneider. En 1988, soit à peine quelques années après le début de
son expérimentation en TCI vidéo, Schreiber décéda d'une crise
cardiaque. Quelques mois plus tard, il semble que Klaus Schreiber
se soit mis à faire parvenir à ses anciens amis et collègues demeurés
sur terre des images de lui-même et de la maison qu'il habiterait
apparemment dans l'au-delà avec d'autres membres défunts de
sa famille 25 •

Klaus Schreiber n'est pas le seul chercheur en TCI à se


manifester à ses collègues toujours (physiquement) vivants.
Effectivement, Friedrich Jürgenson, Konstantin Raudive et d'autres
pionniers décédés sont entrés assez souvent en communication
avec des chercheurs en TCI en utilisant différents moyens. Par
exemple, l'américain Mark Macy, qui a participé à la création du
Réseau international pour la transcommunication instrumentale
(International Networkfor Instrumental Transcommunication en
anglais26), a affirmé avoir reçu pas moins de sept appels télépho-
niques de la part de Konstantin Raudive (qui est mort en 1974). Pour
l'un de ces appels, la conversation dura près de quinze minutes.
Lors d'une autre communication, celle-là réalisée via une radio,
Raudive révéla à Macy ainsi qu'à d'autres collègues que, depuis
son décès, il continuait de travailler activement au développement
de systèmes de TCI depuis l'autre côté du voile. Il leur dit aussi
ce qui suit: la TCI fonctionne uniquement si les «vibrations» de
ceux qui assistent aux séances sont en parfaite harmonie et si leurs
intentions sont pures27 •

Gary Schwartz, mon collègue à l'université de l'Arizona dont


nous avons parlé dans la section précédente, a mené des recherches
sur la médiumnité pendant de nombreuses années. Ses recherches

25. http://www.worlditc.org.
26. Ibid.
27. Jbid.

CHAPITRE 6 * LE MYSTÈRE ULTIME 147


lui ont appris que, même si certains médiums peuvent parfois être
très précis, ils ne sont cependant pas infaillibles. Pour cette raison,
il a entrepris de développer un système de communication avec le
«monde invisible» qui serait moins susceptible d'être influencé par
la subjectivité humaine. Dans ce contexte, il y a quelques années,
ce chercheur en psychologie a testé en laboratoire la faisabilité
d'utiliser un photomultiplicateur ultra-moderne en silicium afin
de détecter et comptabiliser de faibles niveaux de photons poten-
tiellement associés à la présence d'individus décédés. Pour ce faire,
Schwartz a réalisé quelques expériences de validation de prin-
cipe. Ces expériences étaient divisées en blocs de cinq minutes,
durant lesquels des défunts étaient invités à se manifester dans une
chambre noire. Ces blocs étaient comparés à des blocs contrôle
de même durée durant lesquels l'expérimentateur (Schwartz
lui-même) ne lançait aucune invitation. D'autres blocs servaient
à mesurer l'impact de l'intention de l'expérimentateur. Durant
tous les blocs, le photomultiplicateur comptabilisait le nombre de
photons détectés dans la chambre noire. Les résultats montrèrent
que la somme de photons détectés, lorsque des défunts étaient
invités, était significativement plus élevée que lors des deux autres
types de blocs. Ces résultats suggèrent qu'un photomultiplicateur
en silicium peut être suffisamment sensible pour développer un
autre type de système de TCl28•

Pour les pseudo-sceptiques, les voix et les images obtenues en


TCI ne peuvent être que des canulars, ou des interprétations aber-
rantes de phénomènes naturels, comme, par exemple, des artéfacts
reliés à l'équipement technologique utilisé. De telles interprétations
irrationnelles pourraient également résulter de l'apophénie - une
altération de la perception, qui amène un individu à attribuer un
sens particulier à ce qui n'est en réalité que du bruit statistique - ou
de la paréidolie, une sorte d'illusion d'optique qui consiste à asso-
cier un stimulus visuel informe et ambigu à un élément clair et
identifiable. Cela se peut lorsque les voix ou les images obtenues

28. Schwartz G. E., «Possible application of silicon photomultiplier technology to detect the
presence of spirit and intention : three proof-of-concept experiments »,Journal ofScientific
Exploration 6, 2010, p. 166-171.

148 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


ne sont pas claires du tout. Mais qu'en est-il lorsque les voix ou
les images reçues sont nettes et sans équivoque? Dans ces cas, ce
sont les interprétations des pseudo-sceptiques qui ratent la cible.
D'autre part, comme le note le Dr Jean-Jacques Charbonier29,
plusieurs experts en électroacoustique ont méticuleusement
analysé les voix enregistrées en laboratoire par les moyens les
plus sophistiqués. Ces experts reconnaissent que le phénomène
des voix électroniques ne peut être expliqué dans l'état actuel
des connaissances scientifiques. Les analyses que ces experts ont
menées ont permis de déterminer que les voix obtenues en TCI
peuvent dépasser 1400 hertz. De telles fréquences ne peuvent être
atteintes avec des cordes vocales humaines, qui permettent de
produire des voix oscillant entre 80 hertz pour les fréquences les
plus graves et 400 hertz pour les fréquences les plus aiguës30·

Selon moi, l'explication de la TCI la plus plausible et respec-


tueuse du principe du rasoir d'Occam 3 1 est que la conscience et
la personnalité des défunts continuent après la mort du corps
physique. Cela ne veut pas dire que les images obtenues en TCI
constituent des répliques exactes d'individus décédés ou d'édifices
se trouvant dans un quelconque plan d'existence. Je pense plutôt
que les voix et les images reçues sont le produit d'une trans-
duction d'informations 32 , qui sont acheminées par l'énergie
associée à l'activité mentale des défunts. Si cela est exact, les voix
ou les images enregistrées constitueraient le dernier relais dans
ce processus de transduction informationnelle. Dans le dernier
chapitre de ce livre, je reviendrai sur ce processus et la question
de l'énergie associée à l'activité de la psyché.

29. Charbonier ).-).,Les 7 bonnes raisons de croire a l'au-dela. Paris, Guy Trédaniel éditeur,
2012.
30. Ibid.
31. Il s'agit d'un principe de raisonnement philosophique qui est aussi appelé « principe
de simplicité», « principe d'économie » ou « principe de parcimonie». Son nom vient
du philosophe franciscain Guillaume d'Occam (x1v• siècle). Une formulation moderne de
ce principe est que « les hypothèses suffisantes les plus simples sont les plus vraisemblables».
32. La transduction est la conversion d'une forme d'information/énergie en une autre forme
d'information/énergie.

CHAPITRE 6 * LE MYSTÈRE ULTIME 149


CHAPITRE 7

VIES ANTÉRIEURES
OU FABULATION?
«Même les rencontres de hasard sont dues
à des liens noués dans des vies antérieures. »
HARUKI MURAKAMI

Jürgen Keil est un psychologue faisant des recherches sur la


réincarnation, le processus de survivance après la mort par lequel
un principe immatériel et individuel (par exemple, l' «âme»)
accomplirait des passages de vies successives dans différents corps
physiques. En 1997, il s'est penché sur le cas d'un jeune Turc de
6 ans nommé Kemal Atasoy. Ce dernier prétendait se rappeler
très bien d'une vie antérieure. Avec ses parents, qui avaient reçu
une bonne éducation, Kemal vivait dans une confortable maison
située dans un quartier de la classe moyenne supérieure. Depuis
l'âge de 2 ans, il affirmait avoir vécu à Istanbul, à 800 km de la
maison familiale. Selon Kemal, dans cette vie antérieure, son nom
de famille était Karakas, et il avait été un riche chrétien arménien
ayant vécu dans une grande maison à trois étages, qui se trouvait au
bord de l'eau. Il y avait des bateaux amarrés et une église derrière
la résidence. Celle-ci se trouvait à côté de la demeure d'une femme
dénommée « Aysegul ». Karakas n'habitait dans cette résidence
qu'une partie de l'année. Il portait souvent sur lui un grand sac en
cuir, et son épouse avait un prénom grec.
Les parents de Kemal ne connaissaient aucun Arménien, et
personne à Istanbul. De plus, ils ne semblaient pas convaincus par

151
les dires de Kemal. Malgré cela, le Dr Keil décida de vérifier si les
affirmations de l'enfant pouvaient être corroborées.
En compagnie de son interprète, Jürgen Keil se rendit donc
à Istanbul. À cet endroit, il découvrit la maison d'Aysegul. Près de
cette demeure se trouvait une résidence vide, à trois étages, qui
correspondait parfaitement à la description fournie par Kemal.
Cette résidence se trouvait près de l'eau, et il y avait bel et bien des
bateaux amarrés et une église derrière. Keil conversa aussi avec
un vieil homme du quartier, qui lui raconta qu'un Arménien avait
effectivement vécu dans cette résidence. L'année suivante, Jürgen
Keil retourna à Istanbul et s'entretint avec un historien local très
respecté. L'historien confirma qu'un riche chrétien arménien avait
vécu dans cette maison. Son nom de famille était « Karakas ». Il
faisait le commerce de marchandises et portait souvent un grand
sac en cuir. En outre, son épouse était grecque orthodoxe, et ce
commerçant ne vivait dans la maison que durant les étés. Il était
mort au début des années 1940.
Comment Kemal Atasoy, qui habitait dans une petite ville située
à 800 km d'Istanbul, pouvait-il connaître autant de choses sur la
vie d'un homme qui était décédé une cinquantaine d'années avant
qu'il ne vienne au monde? Pour ce petit garçon, l'explication était
tout bonnement qu'il avait été Karakas dans une vie antérieure 1•

LES RECHERCHES SUR LA RÉINCARNATION

À travers les âges, de nombreux peuples tels que les Grecs


antiques, les Africains occidentaux, et de nombreux Amérindiens
du nord-ouest de l'Amérique du Nord, de même que des adeptes
de religions, tels les hindous, les bouddhistes et certains groupes
de chrétiens, ont entretenu la croyance en la réincarnation. Cette
croyance est toujours présente puisque des sondages révèlent
que près de 25 % des Américains et des Européens croient en la
réincarnation.

1. Keil H. H. )., Tucker ). B., «Children who daim to remember previous lives : cases with
written records made before the previous personality was identified », Journal of Scientific
Exploration 19, 2005, p. 91-101.

152 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Le pionnier de la recherche dans ce domaine est le Dr Ian
Stevenson, un psychiatre qui fut pendant un temps directeur du
département de psychiatrie de l'université de Virginie. Stevenson
débuta ses travaux dans les années 1960. Durant sa carrière de
chercheur, il s'est focalisé sur des cas en provenance de l'Inde,
du Sri Lanka, de la Thaïlande, du Myanmar, de la Birmanie, du
Liban, de la Turquie, du Nigéria, du Brésil et des États-Unis. Au
cours des décennies suivantes, d'autres chercheurs - tels que
Erlendur Haraldsson, psychologue à l'université d'Islande, et Jim
B. Tucker, psychiatre à l'université de Virginie - se sont mis à faire
des recherches sur la réincarnation.
Le Dr Stevenson a fondé en 1967 la division sur les études de
la personnalité à l'université de Virginie. Jim Tucker est mainte-
nant le directeur de ce groupe de recherche. Durant les cinquante
dernières années, les chercheurs affiliés à ce groupe ont répertorié
plus de 2 500 cas d'enfants affirmant se souvenir d'événements
s'étant déroulés dans des vies antérieures.
Les chercheurs effectuant des recherches dans ce domaine ont
plus de facilité à trouver des cas dans les pays où la croyance en la
réincarnation est répandue. Pour trouver de tels cas, ils utilisent
principalement des articles de journaux et le bouche-à-oreille. En
général, les chercheurs se rendent sur place une fois que l'enfant
a donné assez de détails au sujet de la vie antérieure pour permettre
à sa famille actuelle de contacter sa famille précédente.
L'enquête débute par un entretien avec la famille actuelle
de l'enfant. Les parents de ce dernier fournissent d'abord des
informations aux chercheurs à propos des déclarations et du
comportement de l'enfant. Par la suite, les chercheurs vérifient
la correspondance entre les affirmations de l'enfant et la vie de
l'individu défunt (la personne antérieure). Lorsqu'un enfant a une
tache de naissance qui semble concorder avec une blessure sur le
corps du défunt, les chercheurs essayent de déterminer le degré
de correspondance à l'aide du rapport d'autopsie, s'il s'agit d'une
blessure mortelle, ou du dossier médical.
Les affirmations des enfants constituent la matière principale
des cas examinés par les chercheurs. Les enfants font des affir-
mations très jeunes. La plupart des enfants font ces affirmations
alors qu'ils ont entre 2 et 4 ans, et ils cessent habituellement de

CHAPITRE 7 «- VIES ANTÉRIEURES OU FABULATION ? 153


parler de leur vie antérieure vers l'âge de 6 ou 7 ans. Bon nombre
de ces enfants ont des comportements et émotions qui semblent
associés aux mémoires des vies antérieures qu'ils rapportent. Par
exemple, parfois les enfants pleurent et supplient leurs parents de
les conduire auprès de leur ancienne famille. Nombreux sont les
enfants qui développent des phobies semblant directement reliées
à la manière dont la personne antérieure est décédée. De plus,
certains enfants rejouent constamment la scène du décès de la
personne antérieure, et, lorsque cet individu a été assassiné, les
enfants peuvent ressentir beaucoup de colère envers les meur-
triers. Par ailleurs, il y a des enfants qui aiment particulièrement
les aliments préférés de la personne antérieure, ainsi que le tabac
ou l'alcool. En outre, il arrive fréquemment que lorsque la famille
del'enfant le conduit là où habitait la personne antérieure, celui-ci
semble reconnaître des membres de la famille du défunt de même
que des endroits associés à sa vie antérieure. D'autre part, plusieurs
des cas étudiés par Stevenson et Tucker sont venus au monde
avec des taches de naissance ou des anomalies congénitales corres-
pondant aux blessures, généralement mortelles, se trouvant sur le
corps de la personne antérieure2•
Dans certains cas, les enfants affirment être demeurés près
du corps de la personne antérieure et de la famille, et avoir assisté
aux funérailles. Ainsi, alors qu'elle était âgée de 2 ans, Ratana
Wongsombat, qui est née à Bangkok en 1964, a expliqué à son
père qu'elle avait été une Chinoise dans sa vie précédente. Celle-ci
portait le nom de Kim Lan. Ratana dit aussi à son père que les
cendres de Kim Lan avaient été dispersées sous l'arbre de Bodhi
du temple, au lieu d'être enterrées, comme elle l'avait désiré. La
fille de Kim Lan, Mae Chan, confirma cette affirmation de Ratana
W ongsombat en expliquant que lorsqu'elle avait essayé d'honorer
le souhait de sa mère, les racines de l'arbre s'étaient avérées telle-
ment abondantes qu'elle avait fini par disperser les cendres de sa
mère au lieu de les enterrer.
Dans d'autres cas, les enfants rapportent des expériences
survenant lors de l'intervalle entre la mort et la réincarnation.

2. Tucker J. B. Une vie avant la vie - 40 ans d'études scientifiques sur des cas de réincarnation
d'enfants, Paris, éd. Dervy, 2016.

154 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Par exemple, un garçon du nom de Lee s'est souvenu qu'il avait
décidé de renaître à un moment donné. Il a aussi affirmé avoir
été assisté par d'autres êtres dans sa décision de se réincarner sur
terre. De même, Patrick Christenson, un petit garçon qui avait trois
anomalies congénitales correspondant à son frère défunt Kevin,
a rapporté avoir parlé au «Ciel» avec un parent du nom de «Billy
le pirate». Celui-ci lui avait raconté qu'il avait été tué par balle, et
qu'il était mort dans les montagnes. La mère de Patrick a dit n'avoir
jamais entendu parler d'un membre de la famille portant ce nom,
mais, lorsqu'elle a appelé sa propre mère pour se renseigner, elle
a découvert qu'un cousin qui portait le surnom de« Billy le pirate»
était effectivement mort dans ces circonstances3•

TACHES DE NAISSANCE
ET ANOMALIES CONGÉNITALES

Patrick Christenson, dont nous venons de parler, est né en


1991 dans le Michigan. Lorsqu'à l'hôpital les infirmières l'ont
amené à sa mère, celle-ci a tout de suite ressenti qu'il était relié
à son premier fils Kevin. Ce dernier était mort d'un cancer à l'âge
de 2 ans, douze années auparavant. La mère de Patrick remarqua
que celui-ci avait trois anomalies congénitales qui correspondaient
à trois marques présentes sur le corps de Kevin. Ce dernier avait
commencé à boitiller vers l'âge de 1 an et demi. Un jour, il tomba
et se cassa la jambe gauche. Les médecins lui firent alors faire un
bilan de santé qui comprenait une biopsie d'un nodule localisé sur
le cuir chevelu, au-dessus de son oreille droite. Une scintigraphie
osseuse révéla un cancer accompagné de nombreuses métastases.
De plus, son œil gauche ressortait et était contusionné à cause
d'une tumeur.
Kevin reçut une chimiothérapie, par le biais d'un cathéter
inséré dans une veine à droite de son cou. Après ce traitement,
il put rentrer chez lui. Toutefois, cinq mois plus tard, Kevin fut
à nouveau hospitalisé. À ce moment-là, il était presque aveugle
de l'œil gauche. Il fut traité avec des antibiotiques, car il avait de

3. Jbid.

CHAPITRE 7 * VIES ANTÉRIEURES OU FABULATIO N ? 155


la fièvre. Il décéda deux jours plus tard, soit trois semaines après
son deuxième anniversaire.
Peu avant son décès, ses parents se séparèrent. Plus tard, la
mère de Kevin se remaria, et elle donna naissance à une petite fille
et à un petit garçon. Puis, elle mit au monde Patrick. À l'endroit
où le cathéter avait été implanté sous la peau de Kevin, Patrick
avait une tache de naissance inclinée qui s'apparentait à une légère
coupure. De surcroît, Patrick avait un nodule sur son cuir chevelu,
qui était situé au même endroit que celui qu'avait eu Kevin. Patrick
avait également une opacité de l'œil gauche qui le rendait presque
aveugle de cet œil. Ce problème était dû à une leucémie de la cornée.
Aux environs de 4 ans et demi, Patrick commença à faire
des affirmations qui semblaient être reliées à la vie de Kevin. Par
exemple, il dit à sa mère qu'il voulait retourner dans leur ancienne
maison, et qu'il l'avait laissée là-bas. Il affirma aussi que cette
maison était orange et marron, ce qui était exact. Patrick demanda
à sa mère si elle se rappelait l'opération qu'il avait subie. Lorsqu'elle
lui répondit qu'il n'en avait pas eu, il lui montra l'endroit au-dessus
de son oreille droite où Kevin avait eu une biopsie de son nodule.
Une autre fois, Patrick vit une des photographies de Kevin, qui en
temps normal n'étaient pas exposées dans la maison familiale, et
il prétendit qu'il s'agissait d'une photo de lui.
La mère de Patrick entendit parler des travaux de Ian Stevenson
et de Jim Tucker, et les contacta. Ceux-ci allèrent voir la famille,
alors que Patrick avait 5 ans. Ils se procurèrent le dossier médical
de Kevin, de même que des copies des examens oculaires qu'avait
effectués Patrick. Stevenson et Tucker constatèrent l'opacité dans
l'œil gauche de Patrick. Ils photographièrent également la tache de
naissance apparaissant sur son cou. Cette tache, qui était une ligne
sombre et inclinée de 4 millimètres située sur la partie inférieure
du côté droit du cou de Patrick, ressemblait à une coupure guérie.
Par ailleurs, le nodule sur sa tête était difficile à apercevoir, mais
facilement palpable.
L'histoire de Patrick Christenson représente l'un des cas de
taches de naissance et d'anomalies congénitales présentés par Ian
Stevenson dans l'ouvrage intitulé Réincarnation et biologie4.

4. Stevenson !., Réincarnation et biologie - La croisée des chemins, Paris, éd. Dervy, 2002.

156 UN SAUT Q UA NTIQUE DE LA CONSCIENCE


Dans son livre Children Who Have Lived Before: Reincarnation
Today («Les enfants qui ont vécu auparavant: aujourd'hui la
Réincarnation», NDLR), !'écrivain allemand Trutz Hardo raconte
l'histoire d'un petit garçon de 3 ans venant de la région du plateau
du Golan, près de la frontière entre la Syrie et Israël. C'est le Dr Eli
Lasch, qui joua un rôle important dans le développement du
système médical de Gaza, qui rapporta cette histoire fascinante
à Hardo. Le garçon en question appartenait au groupe des Druzes.
Cette communauté religieuse croit en la réincarnation des âmes.
Le jeune garçon était né avec une longue marque de naissance
rouge sur la tête. Quand il fut suffisamment âgé pour pouvoir
parler, il raconta à sa famille qu'un homme l'avait tué d'un coup
de hache sur la tête. Puisqu'il connaissait le village d'où il venait,
ses parents l'y conduisirent.
Le garçon se rappelait également le nom de la personne anté-
rieure. Un villageois dit à la famille que cette personne avait disparu
quatre années plus tôt. L'enfant révéla alors le nom complet de
son assassin, et il put retrouver son ancienne maison. Tandis qu'il
marchait avec sa famille, le garçon reconnut ledit assassin et l'appela
par son nom. Puis il affronta cet homme en lui disant: «J'étais ton
voisin. Nous nous sommes battus, et tu m'as tué avec une hache.»
L'homme pâlit, mais il n'avoua pas le crime. Le garçon dit ensuite
aux anciens du village où le corps de la personne antérieure était
enterré. À cet endroit précis, ils trouvèrent le squelette. Celui-ci
révélait une blessure à la tête concordant avec la marque de nais-
sance du garçon. Ils trouvèrent aussi la hache. Face à ces preuves,
l'assassin admit avoir commis le crime5 •

UN AUTRE CAS FORT INTÉRESSANT

Un autre cas spectaculaire rapporté par Ian Stevenson est celui


de Sujith Jayaratne. Ce petit garçon originaire de Colombo, la capi-
tale du Sri Lanka, se mit à manifester, alors qu'il n'était âgé que de
8 mois, une peur marquée des camions. Lorsqu'il fut capable de

5. Haraldsson E., « Psychological comparison between ordinary children and those who daim
previous-life memories »,Journal of Scientific Exploration 11, 1997, p. 323-335.

CHA PITRE 7 <i- VIES ANTÉRIEURES OU FABULATIO N ? 157


parler, il déclara avoir vécu à Gorakana, un village situé à 10 km
de Colombo, et être mort après avoir été heurté par un camion.
Sujith fit de nombreuses affirmations sur cette vie antérieure. Son
grand-oncle, qui était moine dans un temple pas loin de ce village,
entendit certaines des affirmations de Sujith et en parla à un autre
moine du temple. Intéressé par cette histoire, ce dernier rencontra
Sujith, qui avait alors un peu plus de 2 ans et demi, afin de discuter
de ses souvenirs. Au cours de ses conversations avec Sujith, le
moine prit des notes avec l'intention de vérifier ultérieurement
les propos de l'enfant. Selon ces notes, Sujith dit au moine venir
de Gorakana, et avoir vécu dans le quartier de Gorakawatte. Son
père s'appelait Jamis et avait des problèmes à l'œil droit. Sujith
déclara aussi avoir fréquenté une école délabrée, et y avoir eu un
professeur du nom de Francis. De plus, Sujith affirma avoir donné
de l'argent à une femme dont le nom était Kusuma. Celle-ci lui
préparait parfois des nouilles de riz. Sujith déclara également que
sa maison avait été blanchie à la chaux, que les toilettes se trou-
vaient à côté d'une clôture, et qu'il se baignait dans de l'eau fraîche.
Il dit aussi qu'il donnait de l'argent au temple de la forêt, et ajouta
qu'à cet endroit il y avait deux moines, dont l'un s'appelait Amitha.
Sujith donna à sa mère et à sa grand-mère d'autres détails sur
cette vie antérieure. Il leur dit qu'il se prénommait Sammy et que,
parfois, il portait le surnom de « Gorakana Sammy». Sa femme
s'appelait Maggie et leur fille Nandanie. Quant à Kusuma, celle-ci
était la fille de sa petite sœur. Elle avait de longs cheveux épais, et
vivait aussi à Gorakana. En outre, Sujith raconta qu'il avait travaillé
pour les chemins de fer, et qu'il avait fait l'ascension du pic d'Adam,
une montagne élevée se trouvant au centre du Sri Lanka. Il avait
également transporté de l'arack, une liqueur dont le commerce
était interdit. Un jour, son bateau avait chaviré, et il avait perdu
toute sa cargaison. La journée de son décès, il s'était disputé avec
Maggie. Son épouse était par la suite sortie, et il avait alors décidé
de se rendre dans une boutique. Tandis qu'il traversait une rue,
un camion le percuta et il mourut.
Le moine qui avait pris des notes de ses conversations avec
Sujith se rendit à Gorakana afin d'essayer de trouver une famille
dans laquelle il y avait un défunt dont la vie concordait avec ses

158 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


affirmations. Au bout d'un certain temps, le moine découvrit qu'un
homme de 50 ans dont le nom était Sammy Fernando - et qui se
faisait parfois appeler « Gorakana Sammy» - était décédé après
avoir été renversé par un camion. Celas'était passé six mois avant la
naissance de Sujith. Toutes les affirmations de l'enfant s'avérèrent
justes, à l'exception du fait qu'il n'était pas décédé immédiate-
ment après avoir été percuté par le camion. Effectivement, Sammy
Fernando était mort quelques heures après avoir été amené
à l'hôpital. Plus tard, Sujith réussit à identifier correctement
plusieurs individus dans l'entourage de Sammy Fernando, ainsi
que des changements qui avaient été apportés à sa maison.
Au cours de son enquête, qui fut réalisée un an après
l'identification de la personne antérieure, Ian Stevenson conversa
avec 35 personnes, dont Sujith qui parlait toujours de cette vie
antérieure à 3 ans et demi. Stevenson identifia deux habitants du
quartier de Sujith qui avaient été liés à Sammy Fernando. L'un
d'entre eux avait été son compagnon de boisson, et l'autre était
sa petite sœur.
En plus de sa phobie des camions, Sujith avait d'autres
comportements qui semblaient correspondre à la vie de Sammy
Fernando. Par exemple, il faisait semblant de boire de l'arack et
jouait à l'ivrogne. Il tentait aussi d'obtenir de cette liqueur auprès
de ses voisins, et il essayait de fumer des cigarettes. Dans la famille
de Sujith, personne ne buvait d'arack ni ne fumait de cigarettes. En
revanche, Sammy Fernando avait manifestement abusé de cette
liqueur et des cigarettes. Sujith réclamait également des aliments
épicés dont Sammy raffolait et qu'il consommait régulièrement,
alors que la famille de Sujith n'en mangeait que rarement et n'aurait
pas pensé en donner à un enfant. Par ailleurs, Sujith avait tendance
à dire des gros mots et à faire preuve d'agressivité physique, ce qui
était aussi le cas de Sammy Fernando lorsqu'il était ivre6.

6. Tucker ). B. Une vie avant la vie - 40 ans d'études scientifiques sur des cas de réincarnation
d'enfants, Paris, éd. Dervy, 2016.

CHAPITRE 7 <i> VIES ANTÉRIEURES OU FABULATION ? 159


CRITIQUES ET HYPOTHÈSES À PROPOS
DE LA RÉINCARNATION

Dans son livre intitulé Une vie avant la vie, le chercheur Jim
Tucker examine les diverses objections et explications possibles au
sujet de la réincarnation. L'une des objections est l'argument maté-
rialiste suivant: on ne devrait même pas envisager la possibilité de
la réincarnation car nous ignorons tout des mécanismes pouvant
l'expliquer. Ainsi, nous ne savons pas comment la conscience
pourrait survivre sans corps physique, ou comment elle pourrait
influencer un fœtus en développement. Nous n'avons qu'à consi-
dérer l'histoire de la médecine pour voir toute la faiblesse de cet
argument: en effet, les médecins ont commencé à utiliser certains
traitements bien avant que les mécanismes les sous-tendant ne
soient découverts.
Une autre objection fréquente est que la croissance démogra-
phique rend la réincarnation impossible. En d'autres termes, étant
donné que la population actuelle est bien plus importante que par
le passé, tous les individus qui vivent présentement sur la planète
Terre n'auraient pas pu se réincarner à plusieurs reprises par le
passé. Cependant, certaines personnes présentement vivantes
pourraient avoir eu des vies antérieures, alors que d'autres en
seraient à leur première vie. En outre, de nouveaux êtres pour-
raient être créés. Une autre possibilité est que certains pourraient
renaître parce qu'ils ont des choses à apprendre ou à régler, tandis
que d'autres pourraient choisir de ne pas renaître.
Dans les démences telles que la maladie d'Alzheimer, la dégé-
nérescence cérébrale qui accompagne ce syndrome est associée
à des pertes de mémoire et des altérations de la personnalité. Pour
les scientifiques matérialistes, cela indique qu'un cerveau intact est
nécessaire pour qu'il y ait conscience et que, par conséquent, les
souvenirs et les traits de personnalité ne peuvent survivre à la mort.
Comme le souligne avec justesse Jim Tucker, cela ne signifie pas
pour autant que c'est le cerveau qui est à l'origine de la conscience,
des souvenirs et de la personnalité. En fait, au lieu de les produire,
le cerveau pourrait seulement permettre leur manifestation.
Quand les affirmations des enfants ne sont pas très précises,
l'imagination et les coïncidences peuvent servir d'explications.

160 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Cependant, les recherches montrent que les enfants fournissant
des détails sur des vies antérieures n'ont pas plus tendance à fabuler
que les autres enfants7 • De plus, quand les enfants investigués
mentionnent des détails très spécifiques, ou exhibent des compor-
tements (par exemple, les phobies) ou des taches de naissance, la
thèse de la réincarnation devient la plus plausible.
Il n'y a pas encore de théorie permettant de comprendre tous
les aspects associés à la réincarnation. Cependant, l'hypothèse
la plus parcimonieuse afin d'expliquer les découvertes des cher-
cheurs dans ce domaine est que l'esprit et la conscience ne sont
pas confinés au cerveau; ils existeraient avant notre naissance
et se prolongeraient après notre mort. De surcroît, l'esprit et la
conscience pourraient s'attacher successivement à divers véhicules
(corps) physiques, et apporter des mémoires, des émotions, voire
dans certains cas des traumas. Selon cette perspective, l'enfant
s'identifierait à la personne antérieure car, auparavant, ils ne
faisaient qu'un; comme pour les mémoires, les comportements,
goûts et préférences, attachements et dépendances, et même des
blessures physiques seraient transmis par la conscience ayant
survécu au décès à l'être débutant une vie nouvelle.
Certains préfèrent l'hypothèse du super-psi pour expliquer les
découvertes des chercheurs dans le domaine de la réincarnation.
D'après cette hypothèse, les enfants étudiés par ces chercheurs
peuvent savoir tout ce qu'il est possible de savoir grâce à des
perceptions extrasensorielles (PES). Toutefois, cette hypothèse
n'explique pas les taches de naissance, ni pourquoi ces enfants
ressentent si fortement qu'ils ont été quelqu'un d'autre. D'autre
part, l'hypothèse du super-psi est difficilement réconciliable avec
le fait qu'en général ces enfants ne manifestent pas de capacités
psi particulières8 •

7. Haraldsson E., « Psychological comparison between ordinary children and those who daim
previous-life memories »,Journal ofScientific Exploration 11, 1997, p. 323-335. Haraldsson,
E., « Children who speak of past-life experiences : is there a psychological explanation ? » ,
Psychology and Psychotherapy: Theory Research and Practice, 76, 2003, p. 55-67.
8. Tucker J. B. Une vie avant la vie - 40 ans d'études scientifiques sur des cas de réincarnation
d'enfants, Paris, éd. Dervy, 2016.

CHA PITRE 7 <i> VIES ANTÉRIEURES OU FABULATIO N ? 161


HYPNOSE ET VIES ANTÉRIEURES

Les hypnothérapeutes, qui cherchent la source des problèmes


de leurs patients, investiguent leur passé à l'aide de la régression
en âge. Cette approche vise à identifier les événements anciens qui
sont à l'origine des problématiques (par exemple, phobies parti-
culières, dépendances, symptômes psychosomatiques) vécues par
les patients. Parfois, l'inconscient des patients produit des images
et évoque des réactions émotionnelles qui semblent référer à des
événements n'appartenant pas à la vie actuelle de ces patients.
Les thérapeutes utilisant l'hypnose ne peuvent évidemment pas
déterminer avec certitude si les contenus qui émergent alors à la
conscience des patients constituent une expression symbolique de la
psyché (comme un rêve ou une rêverie éveillée) ou bien représentent
des épisodes reliés à une ou des vies antérieures. Effectivement, il
n'est pas possible de distinguer entre ce qui provient des traces
mnésiques réelles ou des capacités de l'esprit à reconstituer notre
mémoire autobiographique - la mémoire des événements vécus
avec leur contexte - et la capacité mentale à générer de fausses
mémoires et des contenus purement imaginaires. C'est pourquoi
bon nombre de psychothérapeutes se méfient de l'hypnose. Quoi
qu'il en soit, l'hypnose de régression amène souvent la résolution
des problématiques des patients, et ce de manière rapide et effi-
cace. Par ailleurs, dans certains cas, l'exploration des vies passées
permet de retrouver des détails précis et de remonter à des person-
nages possédant une réalité historique. L'hypnothérapeute Tatjana
Radovanovic Küchler rapporte un tel cas:
«Annabelle était simplement intéressée de faire l'expérience d'une
régression dans une vie antérieure. En état de relaxation, elles'est vue en
femme mariée qui attendait le retour de son mari dans les années 1940.
Or, durant cette attente, un officier est venu lui annoncer la mort tant
redoutée de son mari, survenue dans un accident de sous-marin ou de
bateau, semble+il.
Après la séance, Annabelle a fait des recherches sur le nom de famille
qu'elle avait dans la vie antérieure et la date de l'accident, lesquelles
ont abouti à une personne qui a réellement vécu au Canada dans les

162 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


années 1940 et dont la description correspondait à ce qu'elle avait vu dans
sa régression. De cette expérience troublante, elle a acquis la conviction
qu'elle était véritablement une âme éternelle. Elle a aussi acquis la certi-
tude que son frère, dont elle se sent très proche, n'était autre que son
mari décédé par accident dans la vie antérieure9• »

Ce cas, et d'autres semblables, ne constituent pas des preuves


irréfutables de la réincarnation. Toutefois, comme je vais le montrer
dans la section suivante, l'hypnose spirituelle représente une autre
source d'évidences supportant la thèse réincarnationniste.
D'autre part, en utilisant l'hypnose, le Dr David Cheek, un
obstétricien, a permis à des individus de retrouver des souvenirs
intra-utérins qui furent ultérieurement confirmés. L'une de ces
personnes, une petite fille, s'est rappelé que sa mère portait une robe
écossaise vert foncé et qu'elle disait: «Il faut que ce soit une fille!»
La mère de la fillette a confirmé ces informations. David Cheek
pense que l'expérience du fœtus dépend en partie de perceptions
extrasensorielles reliées à la mère et à son environnement tout au
long de la grossesse. Les travaux de ce médecin vont à l'encontre
de l'idée selon laquelle les bébés, au moment de la naissance ou
même avant, ne peuvent stocker des informations en mémoire10 •
Dans la même veine, Wendy Anne McCarty, une pionnière de
la psychologie prénatale et périnatale, propose que les capacités du
bébé à développer une conscience de soi et un sentiment d'identité
impliquent non seulement le développement du cerveau, mais
aussi un Moi transcendantal qui n'est pas produit par le monde
physique. Non local, ce Moi transcendantal ferait en sorte que
l'entité qui s'incarne possède déjà un sentiment d'identité. En
outre, ce Moi percevrait le corps du bébé qui se développe comme
un véhicule, qu'il utiliserait durant l'incarnation. Le moi humain,

9. http://www.reincarnation.ch/regression-en-age/utilite.html.
10. Cheek D. B., « Prenatal and perinatal imprints : apparent prenatal consciousness as
revealed by hypnosis »,Pre- and Perinatal Psychology Journal lL 1996, p. 97-110.

CHAPITRE 7 * VIES ANTÉRIEURES OU FABULATIO N ? 163


quant à lui, serait ancré dans les processus neurobiologiques. La
combinaison des deux moi constituerait un Moi intégré 11 •

LA VIE ENTRE LES VIES

L'un des pionniers de l'hypnose spirituelle est Michael


Newton 12 • Vers la fin des années 1940, ce psychologue clini-
cien commence à se servir de l'hypnose afin d'aider ses patients
à résoudre les problématiques qui les amènent à le consulter. Il
arrive assez fréquemment que ses patients se retrouvent dans ce
qui apparaît comme des vies passées. Ayant reçu une formation
scientifique et étant athée, Michael Newton ne croit nullement
aux vies antérieures, qu'il conçoit comme des constructions imagi-
naires de l'inconscient, et il ne tient pas à accompagner ses patients
dans lesdites vies passées. Il constate cependant qu'il obtient des
résultats cliniques positifs lorsque ses patients comprennent les
liens entre leurs problématiques et des événements survenus lors
de supposées vies antérieures.
Un jour, lors d'une session d'hypnose, l'une des patientes dit
à Newton qu'elle pense se trouver dans un lieu et un moment
situés entre deux de ses incarnations terrestres. Bientôt, d'autres
patients rapportent des expériences similaires. Certains patients
racontent ce qui s'est passé au moment de leur décès, d'autres
parlent de ce qu'ils ont vécu lorsqu'ils ont retrouvé leur «famille
d'âmes», ou bien des préparations pour une nouvelle incarnation
sur terre. Sa curiosité étant piquée, Michael Newton décide de faire
systématiquement régresser tous les patients venant le consulter
dans cet espace de vie entre les vies. Pour ce faire, il amène ses
patients dans un état de surconscience approprié, qui permet de

11. McCarty W. A., Welcoming Consciousness: Supporting Babies Wholeness from the
Beginning ofLife, A n Integrated Madel ofEarly Development, Santa Barbara (CA), Wondrous
Beginnings Publishing, 2012.
12. Le Dr Michael Newton est décédé en 2016.

164 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


débloquer les mémoires associées à la dimension spirituelle, et
utilise un questionnaire 13•
Michael Newton devient ainsi un « régressioniste spirituel»,
c'est-à-dire un hypnothérapeute spécialisé dans la vie après la mort.
À l'aide du protocole qu'il a mis au point, il va collecter des données
auprès de milliers de patients pendant plus de quarante ans. Ce
travail va lui permettre de dresser un tableau de ce qui se passe de
«l'autre côté» entre deux incarnations. Les données qu'il recueille
démontrent que les témoignages des patients sont constants, peu
importe qu'il s'agisse d'individus athées, religieux ou agnostiques.
Pour Newton, les témoignages colligés suggèrent qu'il est plus utile
pour ses patients de retrouver l'état de vie entre les vies que leurs
vies antérieures car, dans cet espace-temps, ils peuvent recontacter
leur essence profonde, leur âme, de même que leur sagesse et
toutes les informations qui les concernent.
À travers les données qu'il a recueillies pendant plusieurs décen-
nies, Michael Newton a fini par se convaincre d'avoir retracé les
différentes étapes du voyage des« âmes» dans l'au-delà. Ce voyage
commence par la mort physique et se termine par la réincarnation
lors du retour sur terre. Je présente ici un résumé de ce que Newton
a découvert à propos des diverses étapes de ce voyage 14 •
Au moment de la mort, l'âme de la personne qui vient de
décéder découvre qu'elle flotte autour de son corps physique. Elle
se sent alors détendue et curieuse, plutôt que craintive, et elle
ressent liberté, joie et euphorie. Parfois, elle éprouve de la frustra-
tion lorsqu'elle comprend qu'elle ne peut pas communiquer avec
les vivants, qui semblent l'ignorer. Certaines âmes choisissent de
demeurer à proximité de leur corps, après leur mort physique,
jusqu'à leurs funérailles. La raison est qu'elles désirent réconforter
les personnes aimées avant de poursuivre leur voyage. Elles ne sont
pas affligées car elles savent qu'elles reverront les êtres chers dans
l'au-delà, ainsi que dans des vies futures.

13. Newton M., Souvenirs de l'au-delà. Paris, éd. Le Jardin des Livres, 2007.
14. Ibid.

CHA PITRE 7 * V IES ANTÉRIEU RES OU FABULATIO N ? 165


L'âme de la personne décédée voit au loin une lumière d'une
blancheur éclatante. Cette lumière se trouve derrière une zone
obscure vers laquelle elle se sent aspirée. Cette zone obscure,
qui constitue la porte de l'au-delà, a l'apparence d'un tunnel. La
perception de vibrations musicales peut accompagner la traversée
de ce tunnel. Cette musique accroît les sensations de bien-être
et de calme éprouvées par l'âme. Au bout du tunnel, l'âme de la
personne décédée retrouve des êtres chers (âmes sœurs, parents,
amis, guides spirituels) et remplis d'amour, qui l'accueillent dans
un endroit fabuleux. Elle réalise alors qu'elle a laissé derrière elle
un corps physique lourd et encombrant, et qu'elle doit maintenant
accepter son nouvel état.
À ce moment, l'âme de la personne qui est morte a l'impression
de retourner à la maison. Les retrouvailles avec ses guides spirituels
et ses âmes sœurs ayant déjà quitté la terre, et avec qui elle avait
le plus d'affinités, lui procurent un grand bonheur. Les guides et
les âmes sœurs, qui nous attendent près de la porte d'entrée dans
l'au-delà, sont présents pour rassurer l'âme nouvellement arrivée
et l'aider à s'adapter à son nouvel état. Ceux-ci peuvent se mani-
fester comme une masse d'énergie. Ils peuvent aussi adopter des
traits humains, et choisir d'apparaître sous un aspect identique
à celui qu'ils avaient lors de vies passées avec l'âme qui est de
retour dans le monde spirituel. Comme l'âme est androgyne, ils
peuvent apparaître sous une forme féminine ou masculine, selon
leur préférence.
Les retrouvailles sont suivies par une étape de transition au
cours de laquelle l'âme reçoit un «bain de guérison» afin de se
remettre des maladies et traumatismes de la vie terrestre qu'elle
vient de laisser, ainsi que du choc d'avoir quitté ses proches et cette
vie. Durant l'étape suivante, qui est une étape d'orientation, l'âme
est conviée par l'un de ses guides à faire un bilan de la vie qu'elle
vient de terminer. Tous les souvenirs sont alors accessibles, et
l'âme analyse tout ce qu'elle a réalisé en fonction d'un programme
qu'elle avait choisi avant de s'incarner.
Par la suite, l'âme va rejoindre son groupe d'âmes, qui est en fait
sa famille véritable. Les groupes d'âmes (de 3 à 25) sont composés
d'entités à peu près au même niveau spirituel, qui ne se quittent

166 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


pas. Il existe également des rassemblements de groupes primaires,
qui comptent habituellement plus de 1000 âmes. Toutes ces âmes
participent à des moments d'échanges ou de partage.
Les guides spirituels sont impliqués activement dans la réali-
sation de notre destinée. Ils demeurent près de nous pendant nos
nombreuses incarnations, afin de nous aider à demeurer alignés
avec notre plan de vie. Les guides sont de différents niveaux. La
qualité du guide qui est affecté à l'âme est déterminée par le niveau
de cette dernière. On compte un guide par groupe. Certains guides
très évolués collaborent avec des groupes d'âmes se trouvant à la
fois sur terre et dans le monde spirituel. Ces guides avancés sont
assistés par des guides débutants.
Après avoir fait le point sur ses expériences passées et s'être
suffisamment ressourcée dans l'au-delà - car les vies physiques
peuvent parfois être fort éprouvantes - , il est maintenant temps
pour l'âme de choisir une nouvelle vie. Ce choix, qui est effectué
en collaboration avec les guides spirituels et le groupe d'âmes, se
fait en fonction de ce que l'âme peut apprendre de nouveau du
point de vue de son évolution. Trois questions se posent à l'âme
afin de préparer cette vie nouvelle:
1. Suis-je vraiment prête à affronter une nouvelle vie physique?
2. Quelles leçons dois-je en tirer pour accroître mes connais-
sances et évoluer?
3. Quel environnement et quelle identité me permettraient, au
cours de ma prochaine vie, de travailler au maximum à la réali-
sation de mes objectifs?

Le projet de l'âme est soumis à un groupe conseil constitué


d'entités évoluées se trouvant dans le lieu de sélection de vies. Les
membres de ce conseil, dont le rôle n'est pas de juger mais plutôt
d'aider, fournissent des informations aux âmes désireuses de se
réincarner afin d'aider celles-ci à corriger des attitudes négatives
dans la prochaine incarnation. Le lieu où se déroule le choix de la
vie physique suivante ressemble à une salle de cinéma: en effet, les
âmes peuvent y voir se dérouler des segments de scènes de leurs
vies futures potentielles. Mais il ne leur est pas possible de tout

CHAPITRE 7 * VIES ANTÉRIEURES OU FABULATION ? 167


voir et connaître. Ce qui fait que les âmes reviennent sur terre, ou
s'incarnent sur une autre planète, avec une sorte de carte globale,
ou plan de vie, reposant sur ce qu'elles ont choisi.
Le choix d'un corps est aussi un élément central. Les patients
de Michael Newton ont rapporté que ce choix est influencé en
partie par le karma, ce principe de causalité selon lequel toutes
nos pensées, paroles et actions sont des causes, et toutes nos
expériences leurs effets. Les patients de Newton ont également
révélé que le fait de sélectionner des vies difficiles et des corps
physiques moins que parfaits (par exemple, avec des handicaps)
permet de progresser plus vite sur le plan spirituel. Un autre aspect
important du choix d'une nouvelle incarnation est la sélection
des traits psychologiques du personnage dans lequel l'âme choisit
de s'incarner. Ces traits doivent permettre à l'âme d'atteindre ses
objectifs de vie.
La sélection des parents et de la famille représente bien évidem-
ment un autre élément essentiel de la nouvelle vie. Certaines
personnes éprouvent énormément de difficultés à accepter cette
idée, car elles sont convaincues d'être des victimes innocentes ayant
eu la malchance d'être la progéniture de mauvais parents. Mais,
comme les âmes possèdent le libre arbitre, elles ne sont jamais
des victimes dépourvues des qualités et outils leur permettant de
surmonter les épreuves et de réaliser pleinement leurs programmes
de vie.
L'âme qui désire s'incarner doit aussi se« synchroniser» avec
les autres proches - par exemple, les frères et sœurs, les amis et
les conjoints - qui vont participer à son scénario de vie. Cette
synchronisation est réciproque dans la mesure où cette âme joue
un rôle crucial dans la vie de tous ses proches en leur permettant
également de réaliser leurs propres plans de vie. Dans ce contexte,
il est impératif pour l'âme qui s'incarne de pouvoir reconnaître
les membres de son groupe d'âmes avec lesquels elle doit inte-
ragir dans sa vie future. Pour ce faire, elle se rend dans le lieu de
reconnaissance. À cet endroit, des signes sont encodés dans sa
mémoire. Ces signes, qui sont associés aux cinq sens (par exemple,
une façon particulière de rire d'une personne ou un bijou porté par
une autre personne), vont créer des souvenirs qui vont permettre

168 UN SAUT Q UA NTIQUE DE LA CONSCIENCE


la reconnaissance de ces membres à des moments clés de la vie de
l'âme incarnée. En ce qui a trait aux rencontres avec une âme sœur,
qui deviendra éventuellement un compagnon ou une compagne,
un moment intense et «magique» permet la reconnaissance.
Lorsque l'âme est finalement prête pour se réincarner sur terre
(ou ailleurs), elle salue ses amis et est escortée par ses guides spiri-
tuels dans une salle d'embarquement servant au voyage de retour.
Puis elle emprunte un tunnel, et vient intégrer le corps d'un enfant
en gestation dans le ventre de sa mère. Certaines âmes viennent
habiter le corps de l'embryon très tôt après la conception, mais,
généralement, elles rejoignent l'hôte auquel elles sont affectées
durant le quatrième ou le cinquième mois de grossesse. Dans l'état
fœtal, elles s'habituent au cerveau de leur hôte tout en demeurant
conscientes d'être des âmes immortelles. Après la naissance, une
amnésie s'instaure, et les âmes combinent leurs caractères immor-
tels à l'esprit humain temporaire de l'hôte. C'est cette combinaison
de traits qui crée une nouvelle personnalité 15•

15. Ibid.

CHAPITRE 7 -1> V IES ANTÉRIEURES OU FABULATION ? 169


CHAPITRE 8

VOYAGES VERS
LA SOURCE
«Le nombre total des esprits se ramène à un. ..
En vérité, il n'y a qu'un seul esprit.»
ERWIN SCHRÔDINGER

D'AUTRES EXPÉRIENCES TRANSFORMATRICES

Comme les expériences de mort imminente (EMI) et les


phénomènes examinés dans les chapitres précédents, les expé-
riences spirituelles (ES) représentent une autre catégorie de
manifestations en contradiction avec l'idéologie scientifique maté-
rialiste. Ces expériences sont généralement vécues lors d'un état
élargi de conscience. Au cours d'une ES, l'expérienceur accède
à une réalité plus «vaste», qui transcende le monde matériel, et il
peut également entrer en contact avec des entités non physiques.

Les ES sont plus fréquentes qu'on ne le croit. Par exemple,


un sondage réalisé en 2004 par le National Opinion Research
Center (NORC) a révélé que 50 % des Américains ont vécu des
ES qui ont eu un impact significatif sur leur vie 1• Ces expériences
surviennent fréquemment lors de la prière ou la méditation,
ou durant la contemplation de la nature. Les ES peuvent aussi

1. Clark N .. Divine Moments, Fairfield (IA), lstWorld Publishing, 2012.

171
accompagner des problèmes de santé physique ou mentale,
y compris la dépression2 •

Ces expériences peuvent transformer de manière dramatique


les individus qui les vivent. Ainsi, suite aux ES intenses, la vision
du monde s'élargit, et la vie acquiert une signification nouvelle;
les croyances, les valeurs, les attitudes, les comportements et le
sentiment d'identité (le sens de soi) se transforment; la bonté,
la compassion, l'amour inconditionnel et le service à autrui
deviennent importants; les expérienceurs réalisent qu'ils sont des
êtres spirituels continuant d'exister au-delà du plan physique; ils
ont un sentiment plus profond d'interconnexion avec la Nature;
l'existence d'un principe transcendant (que plusieurs appellent
«Dieu») devient une réalité, ce qui aide les expérienceurs
à affronter les épreuves avec plus de sérénité; les expérienceurs
accèdent habituellement à une toute nouvelle perspective sur leurs
problèmes, et ils ne se sentent plus les victimes des épreuves du
quotidien; parfois, les ES sont suivies par des guérisons sur le plan
physique ou émotionneP.

Voici le récit d'une ES marquante qui m'a été communiqué


par un homme habitant aux États-Unis:
«Au cours d'une soirée, en 1977, je me trouvais dans mon automo-
bile, prêt à retourner chez moi, lorsque soudainement, plus vite qu'une
pensée peut devenir une pensée, je me retrouvai dans un monde de
Lumière dans lequel aucune trace de réalité matérielle ne subsistait[ ... ].
Je me retrouvai en face d'un Être de Lumière Glorieux qui portait une
robe de Lumière blanche. Je portais aussi une robe similaire. Nous nous
regardâmes dans les yeux et je contemplai l'éternité. Je sus à l'instant que
ce monde était éternel, ainsi que cet être, moi-même et tous les êtres
conscients. L'Être de Lumière disparut et, subitement, je vis toutes mes

2. Hardy A., The Spiritual Nature ofMan, Clarendon, Oxford, 1979.


3. Clark N., Divine Moments, Fairfield (IA), l stWorld Publishing, 2012. Waldron ). L., «The
life impact of transcendent experiences with a pronounced quality of noesis » , The Journal
of Transpersonal Psychology 30, 1998, p. 103-134. Underhill E., Mysticism: A Study in the
Nature and Development of Man's Spiritual Consciousness, New York, New American
Library, 1974.

172 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


incarnations sur un écran cosmique. Je compris alors l'illusion qui nous
emprisonne à propos de la vie matérielle. Je ne peux pas dire que je revins
changé parce qu'en vérité, je ne revins pas du tout de cette expérience,
sauf pour ce qui est de quelques cendres d'une ancienne vie. Je brisai
les liens avec tous ceux que je connaissais et avec la vie que je menais.
Je ne vécus plus comme je le faisais avant cette expérience, alors que
ma seule préoccupation était moi-même. Après mon expérience, je me
souciais de tous, car je savais dorénavant que mon essence était la même
en tous[ .. .]. J'ai l'impression que mon cerveau a été transformé lors de
cette expérience car, depuis, mon esprit est toujours dans le présent,
pas dans le passé ni dans le futur. »
Vincent R.

Il existe divers types d'ES. L'un d'eux est l'expérience mystique


(EM). Les EM sont à l'origine de la plupart des grandes religions.
Ces expériences, qui permettent à l'expérienceur de prendre
conscience de réalités cosmiques qui ne peuvent être saisies au
cours d'états ordinaires de conscience, ont donc grandement
influencé l'histoire de l'humanité. Les EM possèdent les caractéris-
tiques suivantes: perte du sens de soi; hors du temps et de l'espace;
impression d'avoir atteint le fondement ultime de la réalité ; senti-
ments de paix, de félicité et de joie. L'EM, qui ne peut être exprimée
en langage conventionnel, est aussi une source de connaissance
non rationnelle et intuitive4.

Lors de certaines EM, il y a une union temporaire, voire


une identité, avec la Réalité ultime, qui sera identifiée sous diffé-
rents noms (l'Un, le Tout, l'Absolu, le Fondement de l'Être, la
Source, le Soi universel, Dieu, le Brahman, le Tao, Allah, etc.).
L'individuation disparaît alors et est remplacée par la perception
de ne faire qu'un avec toutes les choses de l'univers. L'expérienceur
entre à ce moment-là dans un état qui est appelé dans certaines
traditions (par exemple, l' Advaita Vedanta) la «non-dualité». Cet
état s'accompagne de l'intuition que le Fondement de l'Être est

4. Stace W. T ., Mysticism and Philosophy, New York, Macmillan, 1960. Hood Ralph W.,
Dimensions ofMystical Experiences: Empirical Studies and Psychologi.cal Links, Rodopi, 2001.

CHAPITRE 8 * VOYAGES VERS LA SOURCE 173


à l'origine de toute vie et qu'il s'exprime à travers une infinité de
formes distinctes. Le psychiatre Richard Maurice Bucke a proposé
le terme« conscience cosmique» pour désigner ce sous-type d'EM 5•
À travers pratiquement toutes les grandes traditions spirituelles
et toutes les époques, des personnages historiques ont atteint l'état
de conscience cosmique, soit temporairement, soit de façon perma-
nente. Toutefois, ce qui est remarquable est que l'expérience de
conscience cosmique peut aussi arriver soudainement à des indi-
vidus qui, jusque-là, n'avaient manifesté aucun intérêt pour les
choses d'ordre spirituel6 • Le récit qui suit illustre cette possibilité.
Il m'a été envoyé par une femme prénommée Sheila:
«En tant qu'athée convaincue, je ne portais que très peu attention à tout
ce qui semblait relié à la religion. Mais mon scepticisme à l'égard de la
religion ne put empêcher mon éveil spirituel[ ... ]. Le 14 février 1997, tout
d'un coup, ma vision du monde bascula. Abruptement et sans avertisse-
ment, un élément de ma conscience, mon âme, s'échappa des confins de
mon corps et s'éleva au-dessus du lit sur lequel mon corps reposait. Peu
après, le plan matériel autour de moi sembla se désintégrer dans une mer
de particules puis dans un éther brumeux. Ensuite, je passai à travers
une sorte de seuil séparant le monde matériel du monde métaphysique
pour aller flotter dans un univers océanique [... ].Je remarquai alors
que ma respiration était en phase avec le son que faisait une respira-
tion résonnant à travers l'Univers. Cette respiration cosmique semblait
provenir de l'éther qui m'entourait, et circulait dans mon corps qui se
trouvait dans la chambre. C'est à ce moment-là que je devins inten-
sément attentive à la présence d'une entité vivante et consciente qui
imprégnait la totalité du cosmos. Suivant cette découverte, mon sens de
soi s'évanouit afin de contenir cette Conscience cosmique[ ... ]. Durant
cette expérience unitive avec Dieu (le Créateur), le voile qui obscurcissait
ma pensée se leva[ ... ] jusqu'à ce que mon âme quitte précipitamment
le plan métaphysique afin de réintégrer mon corps [... ]. Découvrir les
dimensions spirituelles de ma condition humaine pour la première fois
était comme mettre une nouvelle paire de lunettes. Abruptement ma
perspective changea[ ... ]. Je fus transformée en une nouvelle créature:
une mystique. Je vois maintenant le monde avec des yeux différents. Il
y a eu une transformation profonde dans ma pensée[ ... ]. Mon sentiment
d'identité n'est plus enchaîné au contenu de mon activité mentale. Je ne
me définis plus en termes de ma culture, mon genre, mes croyances et la

5. Bucke R. M., Cosmic Consciousness, New York, Dutton, 1969 (publication originale: 1901).
6. http://www.issnoe.ch.

174 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


couleur de ma peau[ .. .]. Je me perçois à présent comme une étincelle de
Conscience cosmique incarnée dans un membre de l'espèce humaine.»

Que certains individus en quête d' Absolu - et ayant passé une


grande partie de leur existence à prier, méditer et s'adonner à la
contemplation - aient pu atteindre l'état de conscience cosmique,
au cours de la grande aventure de l'humanité, peut se concevoir.
Mais que des personnes qui n'ont aucun intérêt pour le spirituel
puissent aussi atteindre un tel état est beaucoup plus difficile
à comprendre et à expliquer. Dans ces cas, qui semblent assez
rares, il est possible que l'expérience de conscience cosmique soit
donnée par l'essence spirituelle de l'expérienceur - la partie la plus
profonde de son être - afin de transformer sa vie et de le guider
vers la réalisation de son potentiel le plus élevé en tant qu'humain.
Cela ferait partie d'un processus d'évolution de la conscience.

LA MONTÉE DE KUNDALINI

Un autre type d'EM est associé à la kulf<;ialini, un


terme sanskrit lié au yoga qui désigne une énergie puissante
lovée dans la base de la colonne vertébrale au niveau du sacrum.
Représentée comme un serpent enroulé sur lui-même, la kUif<;ialini
est désignée comme «énergie cosmique», «énergie créatrice»
ou «énergie divine», selon les diverses traditions qui utilisent ce
concept. Une faible partie seulement de cette énergie circulerait
dans le corps de la plupart des individus. Pour certaines écoles de
yoga, le but des différentes pratiques spirituelles (par exemple:
méditation, respiration, postures) serait d'éveiller cette énergie.
Une fois éveillée, la kul!<;ialini serait ressentie comme remontant
le long de la colonne vertébrale, traversant et activant, l'un après
l'autre, les centres énergétiques (ou « chakras ») du corps humain.
Lorsque cette énergie atteint le sommet du crâne au niveau de la
fontanelle, il s'ensuivrait un état d'expansion de conscience menant
à l'impression de faire «un » avec le Tout7.

7. http://www.issnoe.ch.

CHA PITRE 8 * VOYAGES V ERS LA SOURCE 175


Le concept de kury.çlalini ne se retrouve pas que dans
l'hindouisme, puisqu'il apparaît sous d'autres appellations dans
le bouddhisme, le taoïsme et la tradition kabbalistique. Certains
théologiens chrétiens ont aussi établi un parallèle entre la kury.çlalini
et le Saint-Esprit.
La« montée» de la kury.çlalini s'accompagne fréquemment de
manifestations perceptuelles (par exemple: flashes de lumière,
sons bourdonnants, sensations de chaleur, picotements et vibra-
tions). Des sentiments de plénitude et de béatitude accompagnent
souvent le réveil de cette énergie, qui peut être ressentie comme
un processus de purification intérieure. Toutefois, le réveil de la
kury.çlalini peut réactiver des peurs profondes et des traumatismes
anciens. De plus, si l'intensité du réveil de cette énergie est trop
grande, les symptômes peuvent devenir désagréables et l'expérience
de la kury.çlalini peut conduire à des dérèglements psychologiques8•

Voici le résumé d'une expérience de la kury.çlalini que j'ai moi-


même vécue il y a de cela quelques années:
«Je prends ma douche vers 11h45. Pendant la douche, je sens un
bouillonnement au niveau du plexus solaire accompagné de nausée.
Je sors de la douche. J'ai l'impression étrange de perdre mon identité
(étant neuroscientifique, je me dis qu'il s'agit peut-être de symptômes
reliés à une tumeur). Curieusement, je ne m'en fais pas. Je suis dans un
état altéré de conscience (comme si j'étais drogué). Machinalement, je
me rhabille. Puis je vais me coucher vers midi. De puissantes vagues
d'énergie déferlent alors à travers mon corps, du plexus solaire à la
région du cœur puis à celle de la tête. Mon cœur bat rapidement, ma
respiration est superficielle et saccadée. À nouveau, je me demande si
ce qui m'arrive est pathologique ou dangereux. J'entends une voix qui
me dit:
- N'aie pas peur, il n'y a pas de danger, abandonne-toi.
Je réussis ensuite à m'abandonner totalement. Les vagues d'énergie
deviennent extatiques et m'enveloppent d'un amour absolu et incondi-
tionnel. Les yeux fermés, je perçois une Lumière blanche dorée brillante
et aimante. Je repose dans cette Lumière. Je fusionne avec la Lumière et
mon identité disparaît[ ... ]. Je comprends que je peux faire le saut dans
!'Absolu et m'abandonner à la Source de tout ce qui est, que tout est

8. http://www.issnoe.ch.

176 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


parfait, qu'il ne faut jamais s'inquiéter de rien. Durant cette fusion avec
la Lumière, je perçois que tout ce dont j'ai de besoin afin d'accomplir ma
mission de vie me sera fourni, que je serai (suis) constamment guidé. Je
recevrai l'information nécessaire à la réalisation de mes projets futurs
[... ]. Au cœur de l'expérience, je perçois encore mon corps, mais je me
sens en même temps très éloigné de la terre. Je pourrais mourir physi-
quement, et cela ne me dérangerait pas du tout. Progressivement, la force
des vagues d'énergie diminue et le rythme de ma respiration se stabilise.
Doucement, je me sens réintégrer mon corps. J'ouvre les yeux puis je
regarde ma montre: il est 12h30. »

LES EXPÉRIENCES CHAMANIQUES


ET LES ENTHÉOGÈNES

Le chamanisme désigne les pratiques et les rituels millé-


naires que l'on retrouve toujours au sein de plusieurs cultures
(par exemple, en Sibérie, en Mongolie, au Népal, en Afrique,
en Australie et chez les Amérindiens d'Amérique du Nord et
d'Amérique latine). Dans les cultures chamaniques, les initiés ou
«chamans» ont recours à diverses techniques entraînant une alté-
ration de leur état de conscience. Ces techniques - qui incluent
le jeûne, la tente à sudation, le tambourinage, l'hyperventilation
rythmique, l'approche méditative et la prise d'enthéogènes (des
substances psychotropes induisant un état élargi de conscience
utilisées à des fins spirituelles ou chamaniques) - amalgament
musiques, danses et chants. Les états de transe ainsi induits sont
censés permettre aux chamans d'entrer en contact avec les défunts,
les déités ou les esprits de la nature (animaux et végétaux). Cette
forme de contact permettrait aux chamans de vivre des états
de conscience mystiques, ou d'accéder à des informations leur
donnant la capacité de guérir des maladies ou de prédire l'avenir9•

Dans les pays occidentaux, de plus en plus de personnes en


quête spirituelle se sentent attirées par les pratiques chamaniques
et se rendent dans des pays lointains afin de pouvoir rencontrer

9. http://www.issnoe.ch.

CHAPITRE 8 * VOYAGES VE RS LA SOURCE 177


des chamans et participer à des rituels initiatiques. Étonnamment,
des individus qui ne connaissent pas le chamanisme ou qui ne s'y
intéressent pas rapportent parfois vivre des expériences «à conso-
nance chamanique». Lors de telles expériences, ces individus
peuvent avoir la sensation d'intégrer le corps d'un animal. Dans le
chamanisme, ce phénomène est appelé la« fusion chamanique10 ».
Le récit qui suit illustre bien une expérience de ce type:
«J'ai connu ma première fusion il y a maintenant plus de 10 ans et, malgré
cela, elle reste présente dans mes souvenirs comme si elle venait de se
produire. J'en garde aussi le souvenir comme d'une des plus belles expé-
riences qu'il m'ait été donné de vivre. Le déclenchement en fut cependant
purement accidentel. À l'époque, j'ignorais pour ainsi dire quasiment
tout des fusions et mon but n'était pas d'y parvenir. J'avais l'habitude
de fréquenter une librairie éso de la région liégeoise. La mienne avait la
particularité de diffuser toute une panoplie de musiques New Age ou
relaxantes. Bien évidemment la musique était variée, et, un beau jour
Rudy, le vendeur, a eu la bonne idée d'insérer un CD de Phil Thornton
intitulé Initiation. Comme nous n'étions que nous deux dans le magasin,
la musique était nettement audible, qui plus est Rudy en avait augmenté
le volume.
Je me revois devant le comptoir, écoutant tout simplement jusqu'à ce
qu'un flash blanc me propulsât dans ce désert de sable rouge orange
parsemé de broussailles. Un court instant, j'ai songé: « Comment suis-je
arrivé là?», l'instant suivant je n'en avais plus rien à faire. J'ai senti ce vent
chaud sur mon visage, senti qu'à ce moment ma place était là. Je me suis
lentement retourné et j'ai aperçu cette montagne perdue au milieu de
nulle part. On aurait dit qu'un géant en avait arraché le sommet, et je
savais que c'était vers elle qu'il me fallait marcher. J'ai fini par atteindre
le pied de cet immense monolithe de couleur rouge, j'étais aussi heureux
que si j'étais rentré chez moi après un trop long voyage ou une trop
longue absence. Durant de nombreuses minutes, j'ai fixé la roche, je
regardais ces veines et les fissures parcourant la pierre, je trouvais cela
merveilleux ... Puis j'ai entendu la voix, je me suis retourné dans sa direc-
tion. Le paysage a changé, les plaines sont devenues dunes et, sur l'une
d'elles se tenait un cougar. Je ne doute pas une seule seconde que, dans
la réalité, j'aurais pris mes jambes à mon cou. Mais le cougar, ce cougar,
il n'y a pas de mots pour le décrire. J'ai marché vers lui, je l'ai rejoint sur
la dune et j'ai regardé dans les yeux de cet animal qui se tenait là devant
moi, et je ne pense pas un jour pouvoir trouver les mots pour décrire ce

10. Jbid.

178 UN SAUT O UA NTIOUE DE LA CONSCI ENCE


que j'y ai vu. La voix s'est à nouveau adressée à moi et, intuitivement, je
savais qu'elle venait du cougar, ces mots furent:
- Te voilà enfin, petit frère de la terre.
Je me souviens avoir fait la réflexion: «C'est impossible, les animaux ne
parlent pas», et la voix me répondit:
- En effet, je ne te parle pas avec les mots. Pourquoi parler avec des mots
alors qu'il est plus beau de parler avec !'esprit?
- Avec l'esprit? répondis-je. Sa réponse fut :
- Bientôt tu comprendras.
Je ne savais plus que penser, je me suis dit que je devais rêver. J'ai posé
ma main sur lui et il n'en avait l'air que plus réel. Je lui ai demandé:
- Pourquoi suis-je ici?
Et je connaissais déjà la réponse qu'il me donna.
- Pour apprendre, petit frère. Pour vivre, petit frère.
Les questions se bousculaient dans ma tête.
- Pourquoi m'appelles-tu petit frère?
Il me répondit:
- Sous cette peau se trouve de la chair et sous cette chair du sang, tout
comme sous ta peau. Dans ma poitrine bat un cœur, tout comme dans
ta poitrine. Si tu transperces cette chair, comme toi je connais la douleur.
Le sang qui en coulera ne sera pas moins rouge que ton sang. Brise ce
cœur et, comme toi, petit frère, je connaîtrai la peine. Viens, marchons!
Nous avons marché un certain temps et sommes retournés vers les
plaines car j'éprouvais quelques difficultés à suivre le cougar dans le sable.
Nous avons marché en silence, dans la beauté du silence. De retour dans
la plaine, le cougar me dit:
- Viens petit frère, courons! Laisse le vent glisser sur toi, écoute-le
chanter. ..
Nous avons commencé à courir, et je fus rapidement distancé. Le cougar
s'arrêta pour m'attendre; une fois que je l'eus rejoint, il me demanda de
l'excuser de cette course plus rapide que la mienne.
- Tu n'as pas les capacités d'un cougar à la course, tu es encore jeune
dans ton apprentissage, j'aurais dû en tenir compte. Tu ne peux pas courir
comme le cougar, alors tu dois devenir le cougar. .. , me dit-il.
Je me sentis devenir léger, comme brumeux.
Quelques instants après, j'étais dans le cougar, j'avais fusionné avec
lui, j'étais en lui, je voyais au travers de ses yeux comme un spectateur.
]'entendais toujours ses pensées, il m'expliqua qu'il avait provoqué une
fusion de nos deux êtres et qu'en temps voulu il m'enseignerait les
méthodes pour y parvenir moi aussi. Le cougar a repris sa course, et nous

CHAPITRE 8 * VOYAGES VERS LA SOURCE 179


avons couru longtemps sur la plaine, bien que je ne fusse qu'un specta-
teur dans ce corps qui n'était pas le mien, je pouvais sentir des muscles
(que je ne possédais pas) travailler, se gorger de sang, se contracter et
s'assouplir au fur et à mesure que la chaleur se répandait en eux. Je trou-
vais la sensation merveilleuse.
Nous avons entendu un cri, le cougar s'est arrêté et a levé les yeux. Haut
dans le ciel planait un aigle, le cougar m'expliqua qu'il s'agissait d'un autre
de mes frères, d'un oiseau de pouvoir comme lui-même était un allié, un
animal de pouvoir. Je songeais qu'il devait être aussi merveilleux de planer
dans l'immensité du ciel que de courir dans les plaines. Comme s'il lisait
toujours ouvertement dans mes pensées, le cougar me dit alors, amusé:
- Découvre-le par toi-même!
Je sentis que je quittais le corps de cougar et que mon esprit s'élevait
vers l'aigle, et je finis par fusionner avec l'aigle comme je l'avais fait avec
le cougar. Ma vision se modifia à nouveau, et je pouvais voir mon ami
félin courir dans la plaine. Je sentais le vent glisser sur les plumes, je finis
même par ressentir les courants ascendants et descendants .. . Je volais!
L'aigle me demanda si j'aimais ces sensations, j'étais tellement grisé par
la vitesse et les nombreuses impressions nouvelles que je ressentais que
je ne savais quoi lui répondre.
À regret, nous avons fini par nous poser non loin du cougar.
- Nous allons malheureusement devoir nous séparer petit frère.
J'étais horriblement triste d'entendre cela, et il devait ressentir cette tris-
tesse, car il ajouta:
- Ne sois pas triste, ce n'est pas une fin, ni un adieu. C'est un commen-
cement, la route est longue, nous n'avons fait qu'un pas sur les milliers
de pas qu'il nous reste encore à faire. Je lui demandai:
- Quand pourrai-je te revoir?
Sa réponse fut :
- Je suis toujours à tes côtés, que tu puisses ou non me voir, à bientôt.
Avant que j'aie le temps d'ajouter quoi que ce fût, je me retrouvai
à nouveau devant le comptoir face à mon ami Rudy. Il avait compris
qu'il s'était passé quelque chose et m'expliqua que, durant de longues
minutes, je n'avais plus eu l'air d'être présent. Il m'expliqua qu'il avait eu
la sensation d'être face à une enveloppe vide, face à un corps sans âme, il
avait même eu peur que je fasse une sorte de malaise. J'étais sous le coup
d'une certaine émotion, et j'ai commencé à pleurer de joie, bafouillant
dans l'empressement de ce que j'avais à lui raconter. .. Mais lui raconter
quoi? Un rêve? Une vision? Qu'avais-je vécu au juste ?11 »

11. Ibid.

180 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Les expériences spirituelles et chamaniques peuvent aussi
résulter de la prise d'enthéogènes (ce terme signifie «générant le
divin à l'intérieur»). Je peux personnellement témoigner du fait
que, sur le plan subjectif, les enthéogènes - qui sont aussi appelés
«psychédéliques» - permettent d'induire des expériences spiri-
tuelles semblables aux états mystiques associés aux pratiques
spirituelles ou survenant de manière apparemment spontanée.
Pour Stanislav Grof, un psychiatre ayant travaillé avec ces subs-
tances et l'un des pères de la psychologie transpersonnelle, les
enthéogènes (par exemple, la mescaline, la psilocybine, l'ayahuasca
et le LSD) semblent agir comme des catalyseurs/amplificateurs
permettant aux niveaux les plus profonds de la psyché de se
manifester 12•

Les enthéogènes peuvent induire des expériences au cours


desquelles le petit moi (que certains courants philosophiques et
spirituels appellent l' «ego») de l' expérienceur est transcendé,
et celui-ci fusionne avec une Conscience infiniment plus large
qui est aussi Sagesse et Amour. Ces expériences ineffables, qui
apparaissent plus «réelles que le réel », sont fréquemment accom-
pagnées de sentiments de paix et de bonheur intenses. À plus
long terme, les expériences enthéogéniques peuvent réduire les
motivations égocentriques (par exemple, les désirs de pouvoir et
de renommée) et favoriser une transformation personnelle qui
comprend une conscientisation sur les plans social et écologique 13•

L'un des enthéogènes présentement les plus en vogue est


l'ayahuasca. Ce breuvage à base de lianes - qui contient du DMT,
un psychotrope puissant - est utilisé depuis fort longtemps par
les chamans des tribus indiennes d'Amazonie. Généralement, la
consommation d'ayahuasca est dépeinte par ses utilisateurs comme
une expérience intense et positive permettant une compréhen-
sion nouvelle de la vie, du monde et de soi. L'utilisation de cet

12. Grof S., Le Jeu cosmique, Monaco, Éditions du Rocher, 1998.


13. Psychoactive Sacramentals: Essays on Entheogens and Religions, San Francisco, Council
on Spiritual Practices, éd. TB Roberts, 2001.

CHA PITRE 8 * VOYAGES V ERS LA SOURCE 181


enthéogène permet également d'améliorer les relations interper-
sonnelles, et favorise un changement au niveau des valeurs de
même qu'un rapport nouveau avec la nature. La prise d'ayahuasca
favorise aussi le développement spirituel1 4 •

Le récit suivant est celui d'une Occidentale, Marie-Claude, qui


s'est rendue en Amazonie pour faire l'expérience de cet enthéogène
sous la supervision d'un chaman nommé Ricardo:
«Envolées les craintes lorsque je croisai Ricardo, homme de sagesse et
de joie; la confiance était établie. Son visage rayonnant m'apparaissait
rempli de certitudes, alors à quoi bon lutter, je savais que rien ne pouvait
m'arriver si ce n'est un merveilleux voyage dont je suis toujours impré-
gnée tant les racines qui se sont greffées en moi sont profondes. La
cérémonie sacrée pouvait commencer, je lui avais remis toute ma
confiance et je savais que ma seule raison était de vivre cet instant
précieux dans l'abandon de moi-même.
Figure d'un autre temps, peinte par le sceau de son regard appuyé sur
moi, je commençais déjà à me centrer en moi. Un moment de sentiment
de bien-être dans le partage du cercle. Le rituel pouvait commencer, je
savais qu'une autre réalité s'offrirait à mon âme[ .. .]. Le tour de la plante
(l'ayahuasca) arriva. Sa saveur amère descendit en moi et, là, je me mis
à parler en elle, lui demandant d'être douce avec moi et de me conduire
à ma réalité et qu'ainsi, je la suivrais. En fait, je voulais qu'elle me montre
le chemin, et c'est ce qu'elle fit, voilà comment. Mêlée à la douce mélodie
de la voix de Ricardo[ ... ], je ne tardai pas à partir[ ... ], c'était elle qui me
dirigeait, et je le sentis tout de suite au travers de mon corps. Elle passait
avec une extrême rapidité le long de ma colonne vertébrale, me faisant
sentir chaque vibration, chaque os; la vie vibrait en moi. Tout résonnait
en moi. Mes organes je les sentais, chaque passage libérait une tension
accumulée, j'avais la sensation d'être libérée du poids des contraintes, je
me sentais légère, mon corps ne m'appartenait plus ou, du moins, je ne
le contrôlais plus, la plante m'avait littéralement ficelée, j'étais sa prison-
nière, je ne pouvais plus bouger. Je lui ai dit OK, c'est cela que tu veux,
alors je te laisse maître de mon âme, je serai ton élève, apprends-moi. Là,
tout à coup, la vitesse s'accéléra, un champ lumineux s'offrit à moi [... ].
Les lumières[ ... ] me remplissaient la tête, explosaient en moi[ ... ].

14. Kavenska V., Simonova H .. Ayahuasca Tourism: « Participants in shamanic rituais and
their personality styles, motivation, benefits and risks »,Journal of Psychoactive Drugs 47,
2015, p. 351-359.

182 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Je vous passe mes états de vomissement (tant de choses à extirper de mon
corps), les doutes, les peurs colmatées dans mon inconscient: ce puits
précieux, il fallait qu'il crache son mal. Pas trop le temps de m'attarder
sur mes manques, car je voulais savoir, connaître et explorer. Vite fait
bien fait, à peine demandé, on m'exauçait et, devant moi, ce fut la révé-
lation. Un ballet d'étoiles d'une luminosité intense que j'absorbais, c'est
comme si elles venaient s'éteindre en moi, et tout à coup surgissait, dans
un angle de ma vision, une colonne de mains jointes liées entre elles en
arc de cercle[ ... ]. Puis, sur ce fond brumeux, se dressait une croix d'une
extrême luminosité au point de ne plus pouvoir détacher mon regard
d'elle. Sur cette croix s'enroulait un cobra. Autour de cette croix, de
longues plantes se déroulaient en tiges extrêmement fines pour éclore en
fins filaments argentés. Ces filaments m'engageaient à regarder toujours
plus loin comme si l'infini m'appartenait, comme si moi seule mettais les
limites de mes possibilités.
À un moment, j'entendis la voix de Ricardo chanter, je sais que je connais-
sais quelques mots de ce chant, car je me rappelle les avoir prononcés en
même temps que lui, comme si sa connaissance ne m'était pas étrangère.
Repartie dans ma quête, une femme âgée à la peau sombre et fripée, aux
yeux noirs extrêmement puissants, à la bouche large, aux dents écar-
tées, se mit à me sourire et à me parler. Elle me fit signe de venir et de
la suivre; à ce moment précis, j'eus la sensation de quitter mon corps.
Je suis partie en voyage avec elle pour survoler un espace nébuleux,
opaque, et tout à coup m'est apparu un cercle centré dans un immense
rectangle, ce cercle tournait en formes d'arabesques. Il représentait le
centre de l'Univers. Je plongeai dans son centre et, là, je découvris une
colline verdoyante où des triangles lumineux (trois en haut et deux en bas
en quinconce) m'indiquaient le chemin. Leur lumière traçait une flèche
comme l'indication d'une route à suivre, ce que je fis, et, là, à nouveau,
cette femme me montra une énorme serrure, très vieille, et me dit:
«Ouvre, c'est toi qui as la clé.» C'est ce que je fis, la porte était lourde,
mais de l'autre côté la lumière était aveuglante. Là, de nombreuses entités
rayonnantes de lumière me souriaient de bonheur et de joie, tout était
calme, reposant, la nature luxuriante était extrêmement colorée.
Tout à coup, j'eus la sensation de réintégrer mon corps par une secousse
et d'entendre à nouveau le cercle. Je sais qu'à un moment je me suis mise
à dialoguer avec certains de mes voisins, bien sûr en télépathie. Ricardo,
depuis longtemps, officiait dans le cercle, je sais que je ne pouvais pas le
regarder, tant son champ vibratoire rayonnait, il m'aveuglait. D'autres
que moi restituaient leurs maux, cette double sensation d'être à la fois
très présente et absente, mais de partager une communion, de sentir la
chaleur de ce cercle. Merveilleux moment lorsque Ricardo s'approcha

CHAPITRE 8 * VOYAGES VERS LA SOURCE 183


de moi pour le soin, je ressentis, sur ma fontanelle, sa force extrême
et sa douceur, mes yeux s'embuèrent et des sanglots m'envahirent. La
sensation d'être protégée, bercée, même si tout cela était agrémenté de
vomissements, mais, là aussi, je savais que c'était nécessaire, sa main
me purifiait. Du reste après, je pus goûter sans retenue à mes visions.
Je repartis accompagnée par une foule d'animaux, tous me regardaient,
leurs yeux brillaient. L'un d'eux, un loup, vint se tapir devant moi. La
nature s'offrait sans retenue, je la découvrais, un infini bavardage des
arbres venait remplir mon oreille gauche, c'était très énervant pour moi,
car je ne saisissais pas leur langage, mais je peux vous dire qu'il était
incessant, de véritables commères. Sur la droite, je conversais avec les
entités. Tout à coup, je fus projetée avec une vitesse époustouflante vers
les sommets, une ascension vertigineuse. Je fus arrêtée par un immense
filet, aux mailles très larges, argentées. À la fois, je pouvais passer au
travers et à la fois pas, comme si une frontière m'interdisait l'accès.
Je redescendis et, là, la sensation d'être dans une ville futuriste par la
grandeur de ses habitations. Plusieurs fois, j'ai vu un appartement avec
une grande terrasse en retrait, en haut d'un immeuble qui faisait l'angle
d'une rue. À un moment, j'ai pénétré dans une demeure ancienne. Le
hall d'entrée était vaste, comme celui d'un château, l'escalier était en
pierre, les murs gris-vert. Au fur et à mesure que je montais, je regardais
une galerie de portraits de famille, puis, arrivée sur le palier, ceux-ci
s'effacèrent de ma vue pour laisser la place à une petite porte au fond de
la galerie. Alors je me suis mise à crier non. Par deux fois, je suis revenue
à cette scène. J'étais tétanisée. Une chose importante aussi, ce besoin
d'inhaler, de respirer, de remplir mes poumons d'un air venu d'ailleurs,
mais je ne sais pas comment traduire cela, car pour moi j'avais la sensa-
tion que c'était vital. Prendre, prendre à tout prix cet air nouveau, m'en
remplir. Du reste, pour tout vous dire, j'ai mis six jours à retrouver utile de
me nourrir. Pourtant, j'aime manger, mais là aucune utilité, la sensation
d'être déjà nourrie. D'autres visions sont venues remplir mon âme, mais
les plus vivaces sont celles que j'exprime ici. Mon corps et mon esprit
ont longtemps bénéficié des effets de la plante, un bien-être salutaire15• »

Même sil'expérience de Marie-Claude rapportée ici s'est avérée


globalement fort positive, je ne voudrais pas donner l'impression
au lecteur que l'utilisation des enthéogènes est sans danger. En
effet, la prise de ces substances peut entraîner des réactions de peur
ou de panique (un« mauvais voyage», bad trip en anglais) pendant

15. http://arutam.free.fr/Wakan.htrnl.

184 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


toute leur durée d'action. L'utilisation d'enthéogènes peut aussi
provoquer, sur le plan perceptuel, des perturbations de longue
durée, ainsi que précipiter ou exacerber des symptômes associés
à des troubles mentaux 16 •

SPIRITUALITÉ ET SANTÉ

Sans surprise, des neurologues et des neuroscientifiques


d'orientation matérialiste n'hésitent pas à « pathologiser » la
spiritualité et les ES. Certains d'entre eux ont affirmé que des
perturbations électriques des lobes temporaux du cerveau - qui
sont situés de part et d'autre du crâne, juste au-dessus des
oreilles - jouaient un rôle clé dans les ES. Selon cette hypothèse, le
lobe temporal agirait comme le «module» des ES dans le cerveau,
et des crises épileptiques localisées dans cette structure pour-
raient induire ce type d'expérience 17• Cette hypothèse souffre de
quelques faiblesses majeures: d'une part, des sondages conduits
dans plusieurs pays révèlent que les ES sont fréquemment rappor-
tées par des individus qui ne souffrent pas d'une anomalie telle que
l'épilepsie du lobe temporal (ELT); d'autre part, il est extrême-
ment rare que des personnes souffrant d'ELT rapportent des ES.
Si l'ELT provoquait réellement des ES, tous ceux qui souffrent de
ce désordre neurologique vivraient de telles expériences.

Cela ne veut pas dire pour autant que le lobe temporal n'est
pas impliqué dans la médiatisation cérébrale des expériences
spirituelles et mystiques. À ce propos, quelques études de
neuro-imagerie menées dans mon laboratoire suggèrent que le
lobe temporal joue effectivement un rôle dans la perception d'un
contact avec une dimension spirituelle. Les résultats de ces études
indiquent toutefois que d'autres régions cérébrales - impliquées

16. Johnson M. W ., Richards W . A., Griffit hs R. R., « Human hallucinogen research :


guidelines for safety »,Journal ofPsychopharmacology 22, 2008, p. 603-620.
17. Saver J. L.. Rabin J., « T he neural subst rates of religious experience» , Journal of
N europsychiatry and Clinicat Neuroscience 9, 1997, p. 498-510.

CHA PITRE 8 tJ> VOYAGES VERS LA SOURCE 185


dans la perception, les émotions positives, la représentation du
corps dans l'espace et la conscience de soi - sont également corré-
lées aux ES. Il n'existe donc pas un unique «point de Dieu» (ou
module de la spiritualité) dans le lobe temporal1 8•

Il n'y a pas que les neurologues et les neuroscientifiques qui


ont tenté de pathologiser les ES. Durant la seconde moitié du
XIXe siècle et une grande partie du xxe siècle, certains psychiatres
et psychanalystes essayèrent de faire de même en disant que les
ES étaient des symptômes associés à des troubles mentaux résul-
tant, par exemple, de défenses psychologiques anormales ou d'une
personnalité immature 19 • Cependant, contrairement à ce que ces
psychiatres et psychanalystes croyaient, un volume croissant de
données scientifiques démontrent que les ES et la spiritualité ont
plusieurs effets bénéfiques. Effectivement, ces données indiquent
qu'un niveau plus élevé de spiritualité est associé à une meilleure
santé mentale, un bien-être plus grand, une meilleure qualité de
vie, une meilleure estime de soi, plus d'optimisme ainsi qu'une
plus grande longévité. De surcroît, un niveau plus élevé de spiri-
tualité est associé à des taux plus faibles de stress et d'anxiété, de
dépression, d'alcoolisme et de toxicomanie, ainsi que de suicide20•

LA CONNEXION INTÉRIEURE

Les travaux que j'ai réalisés au sujet des corrélats neurobio-


logiques des expériences spirituelles et mystiques ont reçu une
couverture médiatique internationale. Dans ce contexte, des jour-
nalistes m'ont souvent demandé en quoi l'identification, chez des
contemplatifs, des régions cérébrales associées à de telles expé-
riences pouvait être utile à Monsieur et Madame Tout-le-monde.

18. Beauregard M .. O'Leary D., Du cerveau à Dieu, Paris, Guy Trédaniel éditeur, 2008.
19. Moreira-Almeida A., « Implications of spiritual experiences to the understanding of
mind - brain relationship », Asian Journal ofPsychiatry 6, 2013, p. 585-589.
20. W eber S. R., « Pargament Ki, The role of religion and spirituality in mental health »,
Current Opinion in Psychiatry 27, 2014, p. 358-363. Koenig H. C., « Religion, spirituality,
and health: a review and update » , Advances in Mind Body Medicine 29, 2015, p. 19-26.

186 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Après m'être fait poser cette question fort légitime à quelques
reprises, je me suis mis à réfléchir à une façon de permettre
à des personnes qui ne sont pas des experts de la contemplation
d'atteindre un état de conscience les mettant en contact avec leur
essence spirituelle.

Au cours de ma réflexion, il m'est apparu que l'entraînement


des ondes cérébrales pouvait représenter une piste intéressante. Ce
concept réfère au fait que la fréquence des ondes cérébrales peut se
synchroniser, par le biais d'un effet de résonance, avec la fréquence
d'un stimulus externe, par exemple un son 21• Afin de changer
la fréquence des ondes cérébrales, on peut se servir de ce qu'on
appelle des sons «isochrones». Ces sons constituent des batte-
ments réguliers d'un simple ton. Autrement dit, un son isochrone
est un ton qui s'efface et réapparaît rapidement à des intervalles
réguliers. Cela crée des pulsations sonores distinctes et définies
précisément, qui sont semblables au battement d'un tambour. Ces
sons isochrones peuvent être utilisés pour accélérer ou ralentir la
fréquence des ondes cérébrales.

Lorsque l'on change la fréquence des ondes du cerveau, on


amène automatiquement une modification de l'état de conscience
et un changement momentané du sentiment d'identité. En me
basant sur ce principe et sur quelques études pilotes réalisées dans
mon laboratoire, j'ai décidé, il y a quelques années, de faire imbri-
quer des sons isochrones de fréquences spécifiques dans certaines
trames musicales conçues pour la relaxation et la méditation22 • Ces
études préliminaires ont montré que les ES et les contacts avec
les plans spirituels sont associés à un ralentissement marqué de
la fréquence de l'activité neuroélectrique, relativement à l'état
de veille normal23 • Ces études ont également révélé que des

21. Smith). C., Marsh ). T., Brown W . S.,« Far-field recorded frequency-following responses:
evidence for the locus of brainstem sources», Electroencephalography and Clinicat
N europhysiology 39, 1975, p. 465-472.
22. Beauregard M., Paquette V., « Neural correlates of a mystical experience in Carmelite
nuns », Neuroscience Letters, 2006, p. 186-190.
23. /bid.

CHA PITRE 8 * VOYAGES V ERS LA SOURCE 187


infrasons - c'est-à-dire des sons dont la fréquence est inférieure à
15 à 20 Hz, qui ne sont pas perceptibles consciemment - peuvent
moduler la fréquence des ondes cérébrales.

À l'aide de cette technique d'imbrication de sons isochrones


dans des trames musicales, j'ai créé une approche psychospirituelle
intitulée« La Connexion Intérieure: Une Re/Création Consciente».
Lors de la phase initiale du développement de cette approche, je
me suis servi de cette technique afin d'aider, individuellement ou
en petits groupes (sous forme d'ateliers), des personnes intéressées
par la croissance personnelle et spirituelle à entrer en état élargi de
conscience. Pour ce faire, des sons isochrones, dont les fréquences
correspondent en grande partie à celles des ondes lentes (thêta et
delta), ont été utilisés24• Les résultats de ce travail ont montré qu'au
niveau du sentiment d'identité, cet état élargi de conscience permet
un passage du «petit moi» (aussi appelé l' «ego» ou le «moi super-
ficiel») à un «Grand Moi» (également nommé «Moi supérieur»
ou «Soi»). Dans l'état du Grand Moi, qui correspond à la partie
spirituelle de la psyché (ou supraconscient), il devient plus facile
de se libérer de croyances limitatives, de schémas émotionnels
négatifs et de blessures intérieures. L'état du Grand Moi permet
aussi de recevoir sous forme intuitive de l'information qui peut être
reliée, par exemple, au plan de vie ou à ce qui semble être des «vies
antérieures». Cet état permet également d'expérimenter l'amour
spirituel et de générer de nouvelles expériences et réalités.

Fréquemment, les individus dans cet état réalisent que tout


est correct - même ce qui apparaît à leur petit moi comme étant
des problèmes sérieux (par exemple, une maladie potentiellement
mortelle comme le cancer)-, et qu'il faut faire confiance à la vie,
lâcher prise et s'abandonner à son essence spirituelle. Il y a aussi
une prise de conscience que le petit moi est transitoire et malléable.

24. https://hypnodio.com/language/fr/mario-beauregard.

188 UN SAUT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Sur le plan émotionnel, l'état du Grand Moi est associé à un
bien-être, à la paix, à la légèreté et à la joie. Au niveau énergé-
tique, les individus dans cet état ressentent souvent de l'énergie
subtile pénétrer dans la région du cœur et/ ou par le « chakra de
la couronne». Ils peuvent aussi percevoir des vagues d'énergie
circuler dans le corps physique, ce qui peut amener une réaction
extatique. En outre, les individus dans cet état disent parfois rencon-
trer des guides spirituels; dans d'autres cas, ils ont l'impression de
fusionner avec leur Grand Moi.

CHA PITRE 8 ._, VOYAGES VE RS LA SOURCE 189


CONCLUSION

LÉMERGENCE
DU PARADGIME
POSTMATÉRIALISTE
«L'architecture de l'univers est consistante avec l'hypothèse
que l'esprit joue un rôle essentiel dans son fonctionnement. »
fREEMAN DYSON

CE QUE NOUS AVONS APPRIS DANS CE LIVRE

J'ai essayé, dans cet ouvrage, de considérer l'ensemble des


recherches qui nous renseignent à propos de la conscience et
des relations esprit-cerveau. Comme le lecteur l'aura constaté,
les données empiriques mises en évidence dans ces recherches
révèlent indubitablement que le vieux paradigme matérialiste a fait
son temps.

Dans le premier chapitre, nous avons vu que les intentions,


croyances et émotions influencent considérablement l'activité du
cerveau, de même que celle des gènes et des systèmes physiolo-
giques (endocrinien, immunitaire, cardiovasculaire, etc.) connectés
au système nerveux. L'activité mentale joue donc un rôle central
dans notre santé et notre bien-être. Tout cela démontre que nous
ne sommes pas des machines biologiques (des« marionnettes faites
de viande ») totalement déterminées par nos cerveaux, nos gènes
et notre environnement.

191
Nos capacités mentales ne sont pas limitées aux confins de
notre corps puisque, comme je l'ai montré dans le chapitre 2, nous
pouvons capter des informations sans employer nos sens ordi-
naires, par des moyens qui transcendent les contraintes habituelles
de l'espace et du temps. Les études examinées dans le chapitre
suivant indiquent que l'intention peut affecter, même à distance,
la fonction d'onde en mécanique quantique (MQ), l'activité des
générateurs de nombres aléatoires et d'autres dispositifs élec-
troniques, ainsi que la structure de cristaux de molécules d'eau.
Dans le chapitre 4, nous avons vu que l'esprit humain peut aussi
influencer intentionnellement à distance des systèmes biologiques,
par exemple des plantes, des enzymes, ainsi que l'activité physio-
logique d'autrui.
Par ailleurs, j'ai démontré que des individus peuvent avoir des
perceptions véridiques - corroborées par des témoins indépen-
dants - durant un état de mort clinique déclenché par un arrêt
cardiaque. Ces individus peuvent également vivre de profondes
expériences transcendantes alors qu'ils sont cliniquement morts.
Ces données suggèrent fortement la continuité de la conscience et
de la personnalité après la mort, ainsi que l'existence de plans de
réalité non physiques. Les évidences présentées dans le chapitre 6
concernant la communication avec les défunts, la communication
post-mortem induite, les études scientifiques sur les médiums et la
transcommunication instrumentale renforcent la notion de survie
de la conscience après la mort. Les recherches scientifiques sur la
réincarnation et les travaux de Michael Newton au sujet de la vie
entre les vies (présentés dans le chapitre suivant) vont aussi dans
le même sens.

Enfin, dans le chapitre 8, j'ai discuté des élargissements du


champ d'expérience consciente qui sont associés aux expériences
transcendantes. Tel que je l'ai montré, ces expériences peuvent
survenir de façon spontanée. Elles peuvent aussi se produire suite
à une «montée» de kw:i<;i.alini, dans un contexte chamanique ou en
conjonction avec la prise d'enthéogènes. Quel que soit le déclen-
cheur, ces expériences corroborent l'idée que nous sommes bien
plus que nos corps physiques.

192 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


Les pseudo-sceptiques, qui essaient de se faire passer auprès du
grand public pour de véritables sceptiques, diront que les évidences
empiriques présentées dans ce livre peuvent être expliquées par
des mécanismes physiques, et qu'elles ne remettent donc pas en
question la vision du monde matérialiste. Ce qu'il est essentiel de
dire ici est que ces pseudo-sceptiques n'ont absolument rien en
commun avec les véritables sceptiques. Sans préjugés, ces derniers
mènent des enquêtes et conduisent des recherches avec un esprit
ouvert et objectif, car ils sont motivés par un désir de compréhen-
sion et de connaissance, ainsi que la recherche de la vérité. Les
vrais sceptiques tiennent aussi compte de toutes les évidences.
Faisant preuve de pensée critique et d'analyse rationnelle, ils ques-
tionnent les faits et leurs interprétations. Cognitivement souples,
ils ne sautent pas à des conclusions hâtives et sont prêts à remettre
en question leurs propres croyances, ainsi qu'à ajuster leurs hypo-
thèses en fonction des découvertes nouvelles.

Quant à eux, les pseudo-sceptiques sont des fondamentalistes


engagés dans une croisade pour défendre à tout prix la doctrine
matérialiste. Ainsi, ces « fondamatérialistes » se sont regroupés
afin de mener une guérilla sur Wikipédia : ils se sont organisés
pour infiltrer cette encyclopédie en ligne. Travaillant en équipe et
utilisant des pseudonymes, ils s'assurent que cette encyclopédie en
ligne présente la recherche sur les phénomènes psi, de même que
certains aspects des recherches sur les médecines alternatives et
complémentaires, comme étant de la pseudoscience. Ces fonda-
matérialistes manipulent également les pages biographiques des
chercheurs impliqués dans ces recherches 1•
Les pseudo-sceptiques se présentent comme les défenseurs de
la pensée critique, de la logique et de la raison. Ayant l'esprit fermé,
ils ne s'intéressent pas aux faits et à la vérité. Aussi ne cherchent-ils
pas à examiner les preuves ou à conduire des expérimentations.
De plus, ils nient toutes les évidences qui ne sont pas compatibles
avec la doctrine matérialiste ou ils essayent de convaincre que, tôt

1. Pour en savoir plus sur les pseudo-sceptiques: http://www.skepticalaboutskeptics.org.

CONCLUSION * L'ÉMERGENCE DU PARADIGME POSTMATÉRIA LI STE 193


ou tard, des explications physiques permettront de démystifier
toutes les données empiriques. Malhonnêtes intellectuellement,
ils n'hésitent pas à mentir et à faire de la désinformation, ainsi qu'à
s'attaquer aux scientifiques dont les travaux démontrent le carac-
tère erroné de leur sacro-sainte doctrine. Ces pseudo-sceptiques
souffrent d'un syndrome que j'appelle le «rétrécissement du
champ d'expérience consciente» (ou RCEC). Le plus pathétique,
c'est qu'en dépit de ce syndrome dont ils sont affligés les pseudo-
sceptiques prétendent savoir ce qui est vrai et ce qui est faux, ce qui
est possible et ce qui ne l'est pas. Ultimement, ceux-ci cherchent
le contrôle mental de la population.

LA STRUCTURE DES RÉVOLUTIONS SCIENTIFIQUES

L'historien et philosophe des sciences Thomas Kuhn publia en


1962 un livre intitulé La Structure des révolutions scientifiques2, qui
devint fort influent dans le monde académique et certains milieux
populaires. Dans cet ouvrage, Kuhn indique que les paradigmes - les
cadres théoriques des disciplines scientifiques à l'intérieur desquels
les théories sont formulées, et les expériences menées - peuvent
et doivent changer car, tôt ou tard, ils ne seront plus en mesure
d'expliquer les phénomènes qui sont observés. Kuhn démontre
également que les scientifiques sont généralement incapables de
reconnaître l'existence de phénomènes qui ne sont pas permis par
le paradigme auquel ils adhèrent. À ce propos, il cite l'exemple
suivant: il fallut attendre que Copernic propose un paradigme astro-
nomique nouveau pour que les astronomes du monde occidental
puissent voir que les cieux n'étaient pas immuables. Alors que les
astronomes chinois, dont les croyances cosmologiques n'excluaient
pas les changements célestes, avaient noté l'apparition de nouvelles
étoiles dans les cieux bien longtemps auparavant.

Selon Thomas Kuhn, lorsque s'accumulent des anomalies - des


observations expérimentales ou d'autres évidences empiriques qui

2. Kuhn T . S., The Structure ofScientific Revolutions, Chicago, University of Chicago Press,
1962.

194 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


violent le cadre théorique largement accepté -, et que les efforts
persistants de chercheurs à élucider ces anomalies échouent, la
communauté scientifique commence à perdre confiance dans ce
paradigme, et une période de crise s'ensuit: un nouveau paradigme,
qui fait compétition à l'ancien paradigme dominant, peut mainte-
nant être considéré. Ce paradigme nouveau, qui n'est pas du tout
une extension de l'ancien paradigme, représente une vision du
monde totalement différente.

Typiquement, ce sont des scientifiques audacieux et vision-


naires qui défendent le nouveau paradigme, et qui prennent d'assaut
les bastions de l'ancien cadre théorique. Sans surprise, comme des
scientifiques conservateurs croient que les anomalies seront bientôt
résolues par l'ancien paradigme, ceux-ci luttent afin de sauver le
vieux cadre théorique. Toutefois, si le nouveau paradigme est
suffisamment prometteur, c'est-à-dire s'il est mieux en mesure
d'expliquer les anomalies en question, alors un nombre significatif
de scientifiques s'éloignent de l'ancien paradigme, et un change-
ment de paradigme (ou une révolution scientifique) se produit.
Suivant ce changement paradigmatique, les chercheurs retournent
à une période de science normale, et ils tentent de résoudre des
problèmes en demeurant à l'intérieur du nouveau cadre théorique.

La révolution copernicienne - un renversement radical de


la représentation du monde - constitue un très bon exemple de
changement de paradigme majeur: au modèle géocentrique en
vigueur de Ptolémée succède un modèle héliocentrique défendu
par Nicolas Copernic. Ce modèle sera ensuite perfectionné par
Kepler, Galilée et Newton. Remarquablement, Aristarque de
Samos, un mathématicien et astronome grec du troisième siècle
avant J.-C., avait émis l'hypothèse que la Terre tourne sur elle-
même et se déplace en suivant un cercle centré sur le Soleil. Mais,
comme la grande majorité des astronomes adhéraient au géocen-
trisme, il fallut attendre dix-huit siècles avant que Copernic ne
propose son modèle révolutionnaire.

Un autre exemple de changement de paradigme majeur en


science est le développement de la MQ, entre 1900 et 1930. Cette

CONCLUSION * L'ÉMERGENCE DU PA RADIGME POSTMATÉRIALISTE 195


nouvelle physique émergea en tant qu'explication mathéma-
tique de certaines anomalies, au niveau atomique, qui n'étaient
pas compatibles avec les théories prédominantes de la physique
classique.

Les scientifiques actuels faisant de la recherche en lien avec


la conscience et les rapports esprit-cerveau se trouvent dans
une situation semblable à celle des physiciens au tout début du
xxe siècle. Ils sont confrontés à une quantité sans cesse grandis-
sante d'anomalies qui ne peuvent être élucidées dans le cadre des
théories matérialistes.

LE PARADIGME POSTMATÉRIALISTE

Les données empiriques examinées tout au long de cet ouvrage


nous indiquent qu'il est maintenant temps de nous défaire du
carcan matérialiste, et d'élargir notre conception de la réalité.
Même si nous n'avons pas encore toutes les réponses à nos
questions en ce qui concerne la conscience et les relations esprit-
cerveau, nous pouvons tout de même déjà présenter quelques
éléments clés du paradigme postmatérialiste.
L'un de ces éléments clés est le suivant: l'esprit est irréductible,
et son statut ontologique est tout aussi primordial que celui de
la matière, de l'énergie et de l'espace-temps. Cela veut dire que
l'esprit ne provient pas de la matière, et qu'il ne peut être réduit
à quelque chose de plus fondamental. À ce propos, le philosophe
David Chalmers3 et le physicien et cosmologiste Andrei Linde4
ont postulé que la conscience, l'une des principales fonctions de
l'esprit, constitue une composante fondamentale de l'univers.
Cet élément du paradigme postmatérialiste repose sur le fait
indéniable que la conscience est un prérequis pour la réalité. En

3. Chalmers D. j., The Conscious Mind : In Search of a Fundamental Theory, New York,
Oxford University Press, 1996.
4. Linde A., Particle Physics and Inflationary Cosmology, Chur, Switzerland, Harwood
Academic Publishers, 1990.

196 UN SA UT Q UANTIQUE DE LA CONSCIENCE


effet, les aspects physiques et mentaux de la réalité sont expé-
rimentés subjectivement à travers la conscience. Sans elle, il ne
nous serait pas possible d'apprécier le génie musical de Mozart
ou le goût exquis d'un champagne Dom Pérignon, et il n'y aurait
ni sentiment d'identité ni appréhension du monde. Par ailleurs, il
devient de plus en plus évident que le concept d'esprit est abso-
lument nécessaire afin d'arriver à une compréhension plus juste
de l'univers, que ce soit au niveau microphysique (par exemple,
l'effet de l'observateur en MQ) ou à un niveau plus macroscopique
(par exemple, l'influence mentale sur l'activité cérébrale et le
comportement).
Si l'esprit est primordial, alors il est concevable que les
processus et événements mentaux, incluant l'intériorité subjective,
existent aux divers niveaux d'organisation dans l'univers et qu'ils
ne requièrent pas absolument un système nerveux pour opérer.
À cet égard, le physicien théoricien et mathématicien Freeman
Dyson a avancé que puisque les atomes se comportent en labo-
ratoire comme des agents actifs plutôt que comme de la matière
inanimée, ceux-ci doivent posséder la capacité de faire des choix5 •
Au niveau moléculaire, il existe des évidences suggérant
que des molécules composées de seulement quelques protéines
simples sont capables d'interaction complexe, comme si elles
disposaient d'un appareil psychique6 • La prise de conscience de
l'environnement et l'intentionnalité semblent être également
présentes au sein d'espèces primitives unicellulaires et multicel-
lulaires7. Ainsi, l'amibe vit en tant qu'être unicellulaire une grande
partie de sa vie. Lorsqu'elle a besoin de nourriture, cependant,
elle transmet des signaux à d'autres amibes se trouvant à proxi-
mité. Des milliers d'amibes individuelles se réunissent alors et
se transforment en une entité beaucoup plus grande qui possède
des capacités nouvelles, par exemple la faculté de se déplacer sur
le plancher de la forêt. Les membres de cette entité plus grande

5. Dyson F., Jn.finite in Ail Directions, New York, Harper & Row, 1988.
6. Cohen P., « Can Protein Spring into Life?», New Scientist 26, avril 1997.
7. Baluska F., Mancuso S.,« Deep evolutionary origins of neurobiology», Communicative
& lntegrative Biology 2, 2009, p. 1-6.

CONCLUSION * L:ÉMERGENCE DU PARADIGME POSTMATÉRIA LISTE 197


libèrent des spores à partir desquels de nouvelles amibes sont
formées lorsqu'elles rejoignent une meilleure aire d'alimentation8•
Comme l'a suggéré l'auteur Duane Elgin9 , il pourrait donc
y avoir un spectre de conscience qui engloberait plusieurs éche-
lons, par exemple les niveaux atomique, cellulaire et humain.
Tous les niveaux montreraient un certain degré de conscience et
d'intentionalité. Ces capacités permettraient de percevoir mais
aussi de manipuler l'environnement. Les processus mentaux et les
qualia seraient plus raffinés chez des êtres plus complexes.
Un autre aspect central du paradigme postmatérialiste est
l'interconnexion profonde qui existe entre le monde mental (psyché)
et le monde physique (physis). Notre perception habituelle de la
réalité nous donne l'impression que psyché et physis sont séparés,
mais les phénomènes psi démontrent qu'ils sont intimement
connectés. Comme Carl Gustav Jung et Wolfgang Pauli, qui ont
évoqué l'unus mundus (le «Monde un»), j'ai la ferme conviction
que psyché et physis sont étroitement reliés parce qu'ils tirent leur
origine d'un principe commun: en effet, ils constituent des aspects
et manifestations complémentaires d'un tout indivisible que nous
pouvons appeler la «réalité». Pour moi, ce principe premier est une
Conscience transcendantale qui est aussi immanente, c'est-à-dire
omniprésente dans la nature. Transcendant l'énergie, la matière,
l'espace-temps et le monde de la psyché, cette Conscience guide le
déploiement des mondes physique et non physiques.
C'est cette indivisibilité de la psyché et du physis qui permet
à l'esprit d'influencer les phénomènes physiques et biologiques.
L'interaction mentale à distance avec des systèmes physiques
ou des organismes vivants suggère que la partie inconsciente de
l'esprit communique - échange de l'information mentale capable
de déclencher une action - avec le monde physique. D'autre part,
les expériences de télépathie indiquent qu'il existe des connexions
mentales, généralement non conscientes, entre les êtres humains.
L'interconnexion profonde entre psyché et physis ne semble pas
reposer sur l'intrication quantique. En effet, les connexions non

8. Cohen P., «Can protein spring into life? »,New Scientist 26, avril 1997.
9. Elgin D., The Living Universe, San Francisco, Berrett-Koehler, 2009.

198 UN SAUT QUANTIQUE DE LA CONSCIENCE


locales entre particules intriquées n'impliquent pas de transfert
d'information10, tandis que les interactions mentales entre humains,
ou l'influence mentale à distance sur les systèmes physiques et les
organismes vivants, semblent impliquer un échange d'information
impliquant des phénomènes mentaux dont on ne tient pas compte
enMQ.
En plus de nous permettre d'expérimenter subjectivement
notre environnement interne (psychique) et notre environnement
externe (situé à l'extérieur de notre corps physique), l'esprit agit
comme une force, c'est-à-dire qu'il possède la capacité d'affecter
l'état du monde physique. Cette constatation représente un autre
élément clé du paradigme postmatérialiste. Comme nous l'avons
vu, l'esprit influence l'activité du cerveau et des systèmes physio-
logiques connectés au système nerveux, de même que l'activité
des gènes. J'ai émis l'hypothèse que cette influence psychosoma-
tique était implémentée neurobiologiquement par un processus
de transduction psychoneurale: dans ce contexte, une transduc-
tion est une transformation d'une forme d'information en une
autre 11 • Selon cette hypothèse, les processus mentaux (conscients
et inconscients) sont traduits en processus neuronaux, aux divers
niveaux de l'organisation cérébrale (par exemple, moléculaire,
chimique et électrique). De manière métaphorique, nous pouvons
dire que le men talais (le langage del'esprit) est traduit en neuronois
(le langage du cerveau). Ainsi, des pensées négatives accroissent
la sécrétion de cortisol alors que des pensées agréables élèvent la
sécrétion d'endorphines. Les processus neuronaux qui en résultent
sont ensuite traduits en processus/événements dans d'autres
systèmes physiologiques, comme le système immunitaire ou le
système endocrinien.

10. Kafatos M., Nadeau R., The Conscious Universe: Parts and Who/es in Physical Reality ,
New York, Springer, 1999.
11. Beauregard M., « Mind does really matter : evidence from neuroimaging studies of
emotional self-regulation, psychotherapy, and placebo effect », Progress in N eurobiology
81, 2007, p. 218-236.

CONCLUSIO N <i> L:ÉMERGENCE DU PA RADIGME POSTMATÉRIALISTE 199


Tel que je l'ai démontré dans ce livre, outre son influence
psychosomatique, l'esprit exerce également un effet non local,
au-delà des limites du corps. Dans les deux cas (action psychoso-
matique et influence non locale), l'information, qui ne dépend ni du
temps ni de l'espace, et la transduction informationnelle, semblent
jouer un rôle essentiel. En rapport avec cette question, le physicien
David Bohm a postulé qu'il existe un type d'information active
dans la nature qui permet de faire le lien entre le monde mental et
le monde physique. Le physicien américain John Wheeler croyait
d'ailleurs que l'univers a été créé par l'information.

Dans le cadre de la Théorie de la psychélémentarité, que j'ai


proposée il y a quelques années 12, j'ai postulé que la capacité de
l'esprit à agir comme une force, que ce soit de manière somatique
ou exosomatique (non locale), diffère entre les individus. Afin de
pouvoir exercer une force plus grande, l'esprit doit être focalisé
comme un rayon laser, plutôt que comme une lumière diffuse. Un
entraînement mental rigoureux permet d'accroître cette faculté.
Ainsi, certaines techniques de méditation visent à développer la
concentration soutenue exercée intentionnellement à l'égard d'un
objet spécifique. Selon la Théorie de la psychélémentarité, un tel
entraînement permet à l'esprit de produire une force mentale
plus grande.

Si l'esprit est primordial et qu'il ne peut être réduit à la


matière, alors quel est le rôle du cerveau? Selon le paradigme
postmatérialiste, cet organe agit comme un filtre et une interface
pour l'esprit. L'hypothèse que le cerveau agit comme un filtre
(ou une «valve de réduction») n'est pas récente, car elle a été
proposée, il y a plus d'un siècle, par les philosophes Henri Bergson
et Ferdinand Schiller, et les chercheurs en psychologie William
James et Frederic Myers 13 • Cette hypothèse a ensuite été reprise
par !'écrivain Aldous Huxley. D'après celle-ci, le cerveau limiterait

12. Beauregard M., « The primordial psyche », fournal ofConsciousness Studies 21, 2014,
p. 132-157.
13. Beauregard M., Brain Wars, New York, Harper Collins, 2012.

200 UN SAUT QUA NTIQUE DE LA CONSCIENCE


en temps normal l'accès des états de conscience élargis et, d'un
point de vue évolutif, cette fonction favoriserait la survie biolo-
gique. Lors d'expériences transcendantes, cette fonction filtre
serait désactivée à divers degrés. Sur un plan subjectif, une telle
désactivation permettrait de faire l'expérience de plans de réalité
qui ne sont pas physiques.

Les matérialistes affirment que le fait que les fonctions


mentales soient affectées lorsque le cerveau est atteint prouve
que cet organe produit l'esprit. Cela est inexact, car, comme l'a
justement noté William James, l'hypothèse que le cerveau agirait
comme un «transmetteur» de l'esprit est aussi compatible avec
ce fait. Les expériences mentales riches ainsi que les perceptions
confirmées survenant lors d'un état de mort clinique supportent
fortement cette hypothèse.

Afin de bien saisir la nature des relations esprit-cerveau,


nous pouvons faire une analogie avec la télévision. Le récepteur
télé reçoit des signaux électromagnétiques, en provenance d'une
station de télévision: ces signaux constituent le programme. Ces
signaux électromagnétiques sont convertis par le récepteur télé en
images et en sons. Lorsqu'une composante électronique se trouvant
à l'intérieur du récepteur se brise, cela peut entraîner une distorsion,
voire la perte totale de l'image ou du son parce que la capacité du
récepteur à recevoir ou à décoder les signaux électromagnétiques
est perturbée. Cela veut-il dire que le programme est créé par le
récepteur télé? Absolument pas. De la même façon, on ne peut
réduire les fonctions mentales à l'activité des régions et circuits du
cerveau.

Dans le contexte de la notion du cerveau comme filtre et de


l'analogie du téléviseur, on pourrait comparer les expériences
transcendantes à la captation temporaire de fréquences plus
élevées. Notre champ de perception et d'expérience s'élargit
alors: l'invisible devient visible, et de nouveaux pans de la réalité
se dévoilent à nous.

CONCLUSION 4'f L'ÉMERGENCE DU PARADIGME POSTMATÉR IA LISTE 201


LA PROCHAINE GRANDE RÉVOLUTION SCIENTIFIQUE

Les implications du paradigme postmatérialiste sont


nombreuses et capitales. Ainsi, ce nouveau cadre théorique change
de façon fondamentale la vision que nous avons de nous-mêmes,
et il nous redonne dignité et pouvoir en tant qu'êtres humains en
nous invitant à développer les diverses facettes de notre potentiel.
Le paradigme postmatérialiste encourage également des valeurs
positives telles que le respect, la compassion, la coopération et
la paix. De plus, en mettant l'emphase sur la connexion intime
qui existe entre nous-mêmes et la nature, ce paradigme encou-
rage la conscience environnementale et la préservation de notre
biosphère.
L'histoire des sciences a été ponctuée de quelques moments
spéciaux qui ont mené à des changements majeurs de paradigme.
Ne pensons, par exemple, qu'au passage de la théorie de la Terre
plate à la conception de la Terre sphérique. Ou encore à celui
du géocentrisme à l'héliocentrisme14• Il semble que nous appro-
chions maintenant d'un autre changement crucial de paradigme,
à savoir la transition d'une science matérialiste à une science
postmatérialiste.
Loin de moi l'idée de jouer au prophète. Toutefois, j'ai l'intime
conviction que cette transition nous conduira à la prochaine grande
révolution scientifique, et que celle-ci sera encore plus vitale pour
l'évolution de la civilisation humaine que ne le fut la révolution
copernicienne. Cette révolution, qui concernera notre compré-
hension scientifique de l'esprit et de ses capacités, entraînera une
profonde transformation de tous les aspects de la vie sur Gaia,
notre magnifique planète, perle bleue flottant dans l'immensité
de l'espace.

14. Schwartz G. E., «Consciousness, spirituality, and postmaterialist science: an empirical


and experiential approach », dans L. J. Miller (Ed.), The Oxford Handbook ofPsychology and
Spirituality, New York, Oxford University Press, 2012, p. 584-597.

202 UN SAUT QUANTIQ UE DE LA CONSCIENCE


REMERCIEMENTS

Je remercie Guy Trédaniel et Sophie Gillot, du groupe


Trédaniel, pour avoir cru en ce projet. Je voudrais également
remercier mon bon ami, le Dr Jean-Jacques Charbonier, pour avoir
joué le rôle d'intermédiaire auprès de M. Trédaniel, ainsi que Jean
Staune pour avoir accepté de préfacer cet ouvrage. Par ailleurs,
même si la plupart nous ont quittés, je ne peux m'empêcher d'avoir
aussi une pensée pour tous ces chercheurs visionnaires qui ont
contribué à nous amener au seuil de la prochaine grande révolu-
tion scientifique.

203
Composition : Soft Office
Achevé d'imprimer en janvier 2018
sur les presses de la Nouvelle Imprimerie Laballery
58500 Clamecy
Dépôt légal : janvier 2018
N° d'impression : 711475

Imprimé en France

La Nouvelle Imprimerie Laballery est titulaire de la marque lmprim'Vert•


Selon l'approche matérialiste de notre monde qui imprègne notre mode
de pensée depuis déjà plusieurs siècles, notre esprit et tout ce que nous
expérimentons de manière subjective ne relèveraient que d'activités physiques
et chimiques de notre cerveau. Ainsi, nos pensées, notre personnalité et même
notre conscience n'auraient dexistence que dans lëtroit périmètre de notre boîte
crânienne, notre conscience ne survivrait pas à notre mort physique, et nos
émotions n'auraient aucune influence, ni sur la chimie de notre cerveau, ni sur
notre santé.

Le Dr Mario Beauregard, neuroscientifique canadien de renommée


internationale, démontre dans cet ouvrage que cette doctrine matérialiste
est erronée, et qu'il est maintenant temps de nous en libérer pour profiter
pleinement des pouvoirs de notre conscience. En s'appuyant sur les dernières
recherches scientifiques concernant les expériences de mort imminente, la
médiumnité, la communication avec les défunts, la réincarnation ou encore
les états élargis de conscience, il nous révèle les capacités insoupçonnées qui
sommeillent en nous. En effet, nos pensées, nos croyances et nos émotions,
en influençant directement nos gènes et notre cerveau, exercent un véritable
pouvoir sur notre bien-être et notre santé. Il est tout aussi stupéfiant de constater
que dans la réalité quantique, notre esprit peut agir au-delà des limites de notre
corps, sans contrainte despace ni de temps.

Le Dr Beauregard propose un nouveau modèle de la réalité,


le paradigme post-matérialiste qui devrait nous amener
à la prochaine grande révolution scientifique.

Le DR MARIO BEAUREGARD est chercheur en neurosciences,


affilié au département de psychologie de l'université de l'Arizona. Auteur de plus d'une
centaine de publications en neurosciences, psychologie et psychiatrie, ses travaux ont
reçu une couverture médiatique internationale et lui ont valu detre nommé par le groupe
World Media Net comme l'un des « cent pionniers du xx1< siècle ». Il a précédemment
publié deux ouvrages de vulgarisation scientifique, Du cerveau à Dieu et Les Pouvoirs
de la conscience, le roman Expérientia et les milliards de visages de l'infini, et coécrit le
«Manifeste pour une science post-matérialiste ».

978-2-8132-1635-9 18 €

www.editions-tredaniel.com
1~1111111111111111111111111
9 782813 216359

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